Bien que né en Angleterre, Julian Bailey a grandi en Espagne. Jeune et très doué, il est victime à 18 ans d'un accident assez grave qui le tiendra éloigné des circuits pendant de longs mois, faisant même craindre la fin de sa carrière. Mais motivé et téméraire, Julian refait surface et se présente en tant que sérieux prétendant au titre de champion de Formule Ford 1600 de Grande-Bretagne en 1982. Pendant toute l'année, il va lutter avec tout son talent et ne devra s'incliner devant Mauricio Gugelmin que pour quelques points.
Néanmoins, en cette fin de saison, il se console en remportant avec brio le Formule Ford Festival, gage inestimable de sa valeur.
Dès 1983, il saute dans le baquet d'une Formule 3. Mais là, ce fut un triste tournant dans sa carrière. Accumulant les mauvais résultats, les voitures indignes de son talent et de la malchance, il fallut attendre 1987 pour le voir franchir le cap l'emmenant jusqu'en F3000. Là encore la première partie de la saison fut bien difficile, mais finalement, dans la seconde moitié de l'année, il refait son retard et signe une très belle victoire à Brands Hatch. Fort de quelques autres bons résultats, il marque 13 points et se classe septième du Championnat.
Cette bonne période vaut à Julian de se voir offrir un baquet de F1 pour 1988. C'est Ken Tyrrell, grand découvreur de talents, qui lui offre cette chance. Enfin, ce que Julian prit pour une chance... En effet, la saison 88 n'est pas la plus glorieuse de l'écurie de l'oncle Ken et les deux pilotes (Jonathan Palmer était le premier pilote) doivent s'arracher pour se qualifier ou pour ne pas se retrouver en fin fond de grille. Malheureusement, accumulant encore une fois la malchance (son premier tour officiel de F1 se soldera par la perte de ses deux rétroviseurs, une crevaison et un problème moteur !), Julian ne parvient à se qualifier qu'à six reprises, accumulant deux non-qualifications. Durant ses six Grand Prix, il parvient à rallier l'arrivée quatre fois avec une neuvième place comme meilleur résultat (à Détroit). Mais au final le bilan est lourd, et la F1 n'a guère l'habitude de pardonner...
Faute de volant, Julian accepte l'offre de courir en Sports Prototypes en 1989. C'est Nissan qui lui donne cette opportunité. Il saura s'y montrer à son avantage en quelques occasions. Il n'est pas devenu un pilote de haute voltige, mais il prouve qu'il a suffisamment de talent pour que quelques généreux sponsors se penchent sur son cas et lui offrent une seconde chance en F1.
C'est finalement chez Lotus que Julian atterrit pour disputer la saison 1991. Enfin, tout du moins, une partie de la saison. En effet, il devra laisser son volant en cours de saison à Johnny Herbert (qui dispute alors le championnat japonais de F3000) et le remplacer de nouveau en cas d'absence. Julian fait équipe en début de saison avec le jeune débutant directement issu de la F3, un certain Mika Häkkinen. Il loupe sa qualification pour les deux premiers Grands Prix.
Au cours du troisième Grand Prix de l'année, à Imola, il se qualifie enfin et effectue une course en tout point remarquable. Parti en 26e position, il se retrouve en 6e position au 14e tour. S'il avait pu maintenir son rythme, Julian aurait sans doute pu finir en quatrième ou troisième position. Mais comme la malchance avait semblé le quitter ce jour-là, il fallait bien qu'elle revienne lui dire bonjour. Alors que Julian maintient un rythme de course de haute volée, malgré le temps pourri qui règne ce jour là en Italie, le moteur Judd de sa Lotus décide de faire des siennes et de cafouiller pendant une bonne moitié de la course. Après trois arrêts pour tenter d'identifier le problème, les mécaniciens parviennent à remettre la voiture de Julian dans le sens de la marche. Mais il est trop tard et Julian ne devra qu'à l'abandon tardif de Van de Poele de rentrer dans les points avec une belle sixième place.
Quinze jours plus tard, à Monaco, Julian est de nouveau non qualifié. Lotus préfère appeler Herbert en renfort, et les intérims qu'il devait assurer pendant la saison n'auront pas lieu, puisque Lotus préfèrera aligner le jeune Michael Bartels.
A même pas trente ans, Julian se rend compte que la F1 n'est pas faite pour lui (ou inversement) et préfère se tourner vers d'autres disciplines dans lesquelles il a plus de chances de réussir. C'est ainsi qu'on le verra dans le championnat britannique de Touring Cars de 1992 à 1996 avec Nissan puis Toyota.
En 1997, il rejoint Lister, une marque artisanale pleine de promesses dans le championnat GT. Il confirmera durant ces années qu'il était tout de même un bon pilote en remportant le championnat FIA GT en 2000, sans doute pas taillé pour la F1 mais suffisamment doué pour exprimer son talent dans de nombreuses disciplines. Julian court ensuite pour le plaisir jusqu'en 2013 sans regarder derrière lui ses déceptions en monoplace.
Alex Mondin