L’attente
La lune cogne si fort, elle y croit à peine. Il fait presque jour en pleine nuit. Du haut de son promontoire de granit ocre incrusté à la naissance de la montagne, derrière la petite église du village, sous ses yeux, dans les arbres, de la lumière laiteuse déversée à grosses louches. Envoyée par en dessous, comme si tous les flics de la ville étaient venus faire une ronde monumentale et définitive dans le maquis, avant de coffrer tout le monde. Leur île entre la mer et la montagne, si proches l’une de l’autre, ce bijou placé sous leur protection ainsi que celle de la Vierge Marie, une fois pour toutes, débarrassée de ses hyènes parasites qui salissent tout.
Dans la poche de son micro-bomber rose, ses doigts jouent avec le film plastique de son paquet de longues mentholées piqué à sa cousine l’autre nuit. Ça envoie vraiment ce cadre, elle s’en fumerait bien une. Et puis, faut dire que ça ne lui arrive jamais d’être seule, tous ces gens présents en permanence, leurs drames et leurs vacarmes assis sur elle, la petite, la silencieuse, la souriante. Elle renonce. Si ses frères sortent plus vite que prévu de l’église et qu’ils la voient tirer sur une cigarette, même fine, ça va les achever.
La messe était interminable. Le père Octave, ensuqué par la fatigue ou la crise de foie de l’année, avait marmonné un sermon sans gloire. Sa mère avait cru bon de chanter l’ soutenue par oncle Mario à l’orgue, défoncé au point de te demander comment