La stylistique expliquée: La littérature et ses enjeux
Par Michel Théron
3.5/5
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À propos de ce livre électronique
D'abord manuel d'étude stylistique, destiné aux professeurs et étudiants littéraires, ce livre n'est pas un ouvrage de linguistique mais un livre d'esthétique générale et comparée, qui à ce titre pourra intéresser tous les curieux du monde de l'expression.
Michel Théron
Michel Théron est agrégé de lettres, docteur en littérature française, professeur honoraire de Première supérieure et de Lettres supérieures au Lycée Joffre de Montpellier, écrivain, chroniqueur, conférencier, photographe et vidéaste. On peut le retrouver sur ses deux blogs personnels : www.michel-theron.fr (généraliste), et www.michel-theron.eu (artistique).
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Aperçu du livre
La stylistique expliquée - Michel Théron
« La Littérature est, et ne peut être autre chose qu’une sorte d’extension
et d’application de certaines propriétés du Langage. »
(Paul Valéry,
« De l’enseignement de la poétique au Collège de France »,
1937)
Avant-propos
Ce livre est une recension et une description des différents procédés de style qu’on peut relever dans les textes littéraires, mais qui sont aussi présents dans le langage courant, ainsi qu’une réflexion sur leurs enjeux.
Ils sont classés selon trois catégories : ceux qui relèvent des matériaux mêmes du langage, ou du vocabulaire (questions 1 à 68) ; ceux qui relèvent de l’agencement de ces matériaux, de l’organisation, ou de la syntaxe (questions 69 à 88) ; et ceux qui relèvent de la perspective, ou du point de vue sous lequel l’esprit considère le contenu de l’expression et le langage qu’il emploie (questions 89 à 99).
Par exemple, selon le plan adopté, une métaphore relève du vocabulaire ; un zeugme, de la syntaxe ; une antiphrase ou une mise en abyme, de la perspective. Cette répartition, qui va du plus simple au plus complexe, est utile pédagogiquement pour la présentation des procédés de style, même si, évidemment, toutes les figures et tous les procédés sont mêlés dans un même texte, et si aussi plusieurs figures peuvent se fondre entre elles, par concaténation (voir question 25).
On peut donc, bien sûr, feuilleter le livre au hasard et le consulter ponctuellement. Mais il faut savoir qu’il y a un plan et une progression déterminés dans le classement des figures.
Comme ces dernières ne me semblent pas être des ornements du discours logique, mais véritablement des catégories vivantes de la perception (voir question 26), j’ai fait des rapprochements entre elles et le monde de la représentation visuelle (photographie, peinture), qui les fait bien voir et sentir.
Dans cette perspective, le présent ouvrage n’est pas une simple description formelle des procédés et figures. Il s’occupe d’en analyser chaque fois l’esprit, les implications et les enjeux, esthétiques mais aussi souvent philosophiques et civilisationnels, culturels au sens large. Il se situe donc dans une dimension délibérément interdisciplinaire. Ce n’est pas une morphologie, mais une anthropologie du style.
Les références aux livres dont je me suis inspiré figurent dans le texte entre crochets : [ ]. Cet indice permet à chacun de se faire une petite bibliographie de la question traitée.
Pour une consultation plus sélective de ce livre, on pourra, pour voir la liste des questions elles-mêmes, se reporter au sommaire, ou bien, pour voir les notions traitées, s’aider de l’index général des thèmes et procédés étudiés, tout cela au début de l’ouvrage.
Remarque : La première édition de ce livre est parue en 1993 aux éditions du CNDP/CRDP de Montpellier, sous le titre : 99 réponses sur les procédés de style. La deuxième version est parue chez BoD en 2017. Par rapport à cette version, le texte de la présente édition a été considérablement remanié et enrichi, et la présentation, améliorée.
Sommaire
1/ MATÉRIAUX
1.Y a-t-il un lien entre le signe verbal et la chose qu’il désigne ?
2.Quels sont les procédés musicaux permettant de compenser un peu l’arbitraire du signe verbal, et pour ainsi dire de réchauffer le langage ?
3.La musique des mots dans un texte peut-elle être le tout du texte ?
4.Quels sont les procédés visuels permettant de lutter contre l’arbitraire du signe verbal ?
5.Quels sont les procédés permettant d’augmenter la caractérisation lexicale d’un texte ?
6.Nommer et caractériser sont-ils toujours faciles à distinguer ?
7.Que gagne-t-on à caractériser un objet ?
8.La caractérisation est-elle toujours un avantage ?
9.Quel est l’inconvénient ordinaire de la caractérisation ?
10.Quelle figure de style traditionnelle incarne le pôle de la caractérisation ?
11.Quelle est l’énigme artistique majeure de la caractérisation ?
12.Quel est le paradoxe essentiel de la caractérisation littéraire ?
13.Quel est le destin historique de la caractérisation en littérature ?
14.La caractérisation dans le texte est-elle plus fournie que dans l’image ?
15.Qu’est-ce qu’une caractérisation fictive ?
16.Qu’est-ce que la caractérisation intellectuelle dans un texte, par rapport à la caractérisation lexicale ?
17.Qu’est-ce qu’une caractérisation négative ?
18.La caractérisation intellectuelle est-elle réaliste ?
19.Qu’est-ce que la présentation comportementaliste, ou behaviouriste, dans le récit ?
20.Y a-t-il un lien entre la caractérisation et l’empire de la rhétorique ?
21.Quel est l’équivalent dans les arts plastiques du refus de la caractérisation dans le texte, et quel en est le danger ?
22.Quels sont les dangers du refus de l’analyse, dans le texte ?
23.L’homogénéité des tons est-elle une règle dans le texte ?
24.L’expression s’oppose-t-elle, pour l’essentiel, au langage parlé ?
25.Comment peut-on classer les figures de style, dans le texte, et ce classement est-il utile ?
26.Les figures sont-elles un ornement du discours logique ?
27.Le nom des figures de style est-il rigoureux ?
28.Quels sont les deux choix principaux du style, en matière de vocabulaire ?
29.Le brouillage des signes dans le texte est-il toujours réel ?
30.Quelle est la figure principale du brouillage des signes lexicaux ?
31.Qu’est-ce qu’une périphrase ?
32.Quel est un des buts courants de la périphrase ?
33.Quels sont les enjeux culturels de la périphrase ?
34.Que signifie anthropologiquement la périphrase ?
35.Que risque-t-il de se passer, quand la complexité des filtres et des signes brouillés disparaît du langage ?
36.Qu’est-ce que la figure appelée abstraction, dans le texte ?
37.Qu’est-ce qu’une synecdoque ?
38.Que traduit la synecdoque dans le texte ?
39.La synecdoque augmente-t-elle la caractérisation ?
40.Qu’est-ce qu’une métonymie ?
41.Qu’est-ce qu’une métalepse ?
42.Qu’est-ce qu’une métaphore ?
43.Comment peut-on classer les métaphores ?
44.Comment le partage du sens est-il assuré dans la métaphore ?
45.Qu’est-ce qu’une métaphore visuelle ?
46.Toutes les métaphores du texte sont-elles visualisables ?
47.Qu’est-ce qu’une allégorie ?
48.Le sens d’une figure ou d’un procédé stylistique est-il toujours sûr ?
49.Comment voit-on aujourd’hui la métaphore et l’allégorie ?
50.Que perd-on, et que gagne-t-on, à métaphoriser ou allégoriser les textes ?
51.Qu’est-ce qu’une hypallage grammaticale ?
52.Que sont, en poésie, les synesthésies et les correspondances ?
53.Que manifeste l’hypallage, d’un point de vue anthropologique ?
54.Qu’est-ce qu’une hypallage perceptive ?
55.Comment peut-on réaliser des hypallages visuelles ?
56.Qu’est-ce qu’un oxymore ?
57.Que signifie l’oxymore, philosophiquement ?
58.Que peut traduire l’oxymore, dans le texte ?
59.L’oxymore est-il visualisable ?
60.Quelle est la pathologie ordinaire affectant les matériaux du langage ?
61.Quel est le destin ordinaire de la périphrase et de l’expression détournée ?
62.Quel est le rythme périodique général et alternant, en littérature ?
63.En quoi la rhétorique peut-elle devenir ridicule ?
64.En quoi la rhétorique peut-elle devenir dangereuse, ou inadmissible ?
65.À quel type d’expression mènerait le refus total de la rhétorique et du besoin humain de sens ?
66.Quelle figure de rhétorique pourrait incarner, contre la tautologie, le besoin humain de sens ?
67.Comment l’expression, en période même de rhétorique, peut-elle se prémunir contre la possibilité de ses propres excès ?
68.Qu’est-ce qu’une figure étymologique ?
2/ ORGANISATION
69.Quels sont les deux grands types d’organisation syntaxique dans le texte ?
70.Qu’est-ce qu’une ellipse dans le discours ?
71.Quels sont les avantages de la parataxe ?
72.Qu’est-ce qu’une anacoluthe ?
73.Quelles sont les deux orientations fondamentales du style, relativement à l’organisation ?
74.Quels sont les risques bien visibles aujourd’hui de la parataxe pour l’esprit ?
75.Quels sont les enjeux de la ponctuation ?
76.Quel est le paradoxe essentiel de la symétrie ?
77.Qu’est-ce qu’une prolepse ?
78.Quels sont les deux types de syllepse ?
79.Qu’est-ce qu’une hyperbate ?
80.Qu’est-ce qu’un hendiadyin ?
81.Quels sont les deux types de zeugme ?
82.Quelle est la signification poétique et philosophique du zeugme ?
83.Qu’est-ce qu’une synchyse, et quel en est le risque ?
84.Quel pourrait être un équivalent visuel de la synchyse verbale ?
85.Qu’est-ce qu’une anastrophe, et quel effet produit cette figure ?
86.Qu’est-ce que la concordance des temps ?
87.Que peut traduire le mélange systématique des pronoms dans le texte ?
88.Quelle figure rhétorique traditionnelle pourrait résumer la confusion de l’organisation, généralisée à l’époque moderne ?
3/ PERSPECTIVE
89.Qu’est-ce qu’une hyperbole ?
90.Qu’est-ce qu’une litote ?
91.Qu’est-ce qu’une prétérition ?
92.Qu’est-ce qu’une antiphrase ?
93.Peut-on réaliser des antiphrases visuelles ?
94.En quoi l’antiphrase, figure stylistique, permet-elle de comprendre un aspect fondamental du discours littéraire ?
95.Comment le texte narratif répartit-il sa matière ?
96.Qu’est-ce que le point de vue porté sur le langage ?
97.Qu’est-ce qu’une mise en abyme ?
98.Que perd-on et que gagne-t-on à déconstruire la représentation ?
99.Que signifie l’intertextualité ?
Index général
Les chiffres renvoient aux numéros des questions
A
Abstraction, en art →, →, →, →, →
Abstraction, figure du texte 36, →
Acronyme →
Acrostiche →
Actualisation du sens 50
Adynaton 60, →, →
Allégorie →
Allégorisation des textes →, →-50, →
Alliance de mots →
Allusion →, →-→
Amnésie et hypermnésie en art →
Amphibologie →
Anacoluthe 72, →, →
Anagramme →
Analepse →
Anaphore →
Anastrophe →, →, →, →
Animisme →, →, →
Antanaclase 48, →
Antilogie →
Antiphrase →-→, →, →-→
Antiphrase plastique ou visuelle →
Antithèse →-→
Antonomase 6, 40, 48
Aphérèse →
Apocope →
Apologue →
Apophatisme →
Aposiopèse →
Aptonyme 6
Archaïsme →, →
Asyndète →, →
Aura de l’œuvre →, →, →, →
Autoréférentialité du langage 3, →, →
Autonomie de l’art et de l’expression →, →
B
Barbarisme 72
Baroque 2
Besoin de sens →-→, →
Biographie et style →
Blasphème 1
Brouillage chronologique 86
Brouillage lexical →-→, →, →, →-→, →
Brouillage pronominal →
Brouillage syntaxique →, →
Burlesque →
C
Calligramme →
Caractérisation →-22, →, →
Caractérisation fictive →
Caractérisation humoristique →
Caractérisation négative 8, →, →
Caractérisation intellectuelle (par analyse) →
Caractérisation par qualification →
Cartésianisme →
Casuistes 50
Catachrèse →, →, →
Chassé-croisé →
Chiasme →
Citation →
Classement général des figures →
Classicisme 2, 3
Cliché →, →, 60, →
Comparaison →
Comportementalisme →
Concaténation des figures →, →, 36, →, →, →
Conceptuel (art -) →
Concordance des temps 86
Conscience de l’écriture →-→, 96-→
Consonance ou dissonance (du texte avec l’idéologie sociale) →-→, →
Construction concrète 36
Contrepèterie →
Correspondance →
Cryptographie →
Cubisme →, →, →-88
Culture générale, indispensable pour comprendre l’expression →
Cyniques →
D
Déconstruction artistique →, 96-98
Déconstruction des cultures 98-→
Déconstruction narrative 98
Déconstruction philosophique →
Déconstruction psychique →
Déculturation 3, →, →
Degrés du langage →, →-→
Démonique →
Dénégation →
Dénudation 96-98
Diaphore →
Didactisme du langage →, →
Discours intenable →, →, →
Dislocation syntaxique →, →
Dissonance ou consonance (du texte avec l’idéologie sociale) →-→, →
Distance, dans la vision →, →, →, →
Distance, distanciation, dans le texte →, →-98
E
Écriture, différente de style 36
Einfühlung →, →-→,→, →, →, →
Ellipse →-→, →-→
Emphase →, →
Énallage →, →
Énallage de temps, de pronom, de nom 88
Énallage perceptive 88
Épopée et roman →
Étymologisation des mots →
Euphémie, euphémisme →, →, →-→
Extension de sens, par synecdoque-métonymie, ou par métaphore →
Extension et compréhension, en logique du concept →
F
Fable →
Fait de langue et fait de style →, →, 86
Faute →, 72, →, →
Flash back et flash forward →
Fiducia littéraire →
Figure à double fonction, sémantique et musicale →, →
Figure, catégorie de la perception →, →, →, →-→, →, →, →, →
Figure créée par le lecteur →-50, →, →
Figure culturelle →-→
Figure de contenu sensible, et - de contenu intellectuel →, →-→, →
Figure étymologique →
Figure sclérosée, substitution intellectuelle à la réalité sentie →
Focalisation →, →
Focalisation, modes de la - →
Folie →-→, →, →, →
Forme non représentative, et - représentative, de tous les arts 2-→
G
Glossolalie 3
Grammaire normative 72
Guidage des métaphores →-→
H
Haïku →-→, →
Harmonie imitative 2-3
Hendiadyin →, 36, →
Héroï-comique (style) →
Hésitation feinte →
Homonymie 60
Holisme (et symbiose) →
Humour →
Humour noir →
Hypallage →, →-→
Hypallage de perception →, →
Hypallage de qualification →
Hyperbate →, →, →
Hyperbole →-→, →, →
Hyperréalisme →, →, →, →
Hyponymes et hyperonymes →, →
Hypotaxe et parataxe →, →, →-→, →
Hypotypose →
I
Idolâtrie et iconoclasme →, →
Illusion référentielle 1, 3-→, →, →, 96-98
Impressionnisme →, →-22, →, →
In praesentia et in absentia, modalités de la métaphore →-→
Intériorisation du sens 48, 50, →
Intertextualité →, →
Introversion et extraversion →
Ironie →, →, →-→
J
Jeu de mots →, →, →
K
Kitsch →, →, 22, →, →-→, →, →, →
Kitsch aigre, et - doux →
Kitsch, déconstruction du - →-→
Kitsch et camp →
Koan →, →-→
L
Langage expressif, et - idiomatique →, →, →
Legato et staccato →
Lettrisme 3
Lexicalisation →, →, →
Lexicométrie informatisée 48, →-→
Linéaire et pictural, en peinture →
Litote →, →-→
Littéralisme 50, 60, →
Littérarité →
Logolâtrie et misologie →
M
Maniérisme →, →
Métalepse →
Métalinguistique (fonction – du langage) →, →, 96
Métaphore →, →, →, →, 40, →-→, 48-→
Métaphore conventionnelle 60, →
Métaphore disproportionnée →
Métaphore filée →
Métaphorisation des textes →-50, →, →
Métonymie 6, →, →, →-→, 48
Midrash →
Mise en abyme →, →-98
Montage cinématographique →
Musique du texte 2-3, →, →
Mythe →
N
Naturalisme →, →
Nature et culture →-→
Néologisme 72
Niveau de langue →
Nom propre et nom commun 6
Nom variable des figures →, →
Nominalisme 96
Non-dualité →- →
O
OEuvre en gestation 98
Onomatopée 2-3
Oxymore →-→, →
P
Pacte narratif →
Palimpseste →
Palindrome →
Parabole →
Parataxe classique, et - moderne →, →
Parataxe et hypotaxe →, →, →-→, →
Paronomase 2-3
Paronymie 60
Pastiche, et style 36
Patronyme 6
Perception et ellipse →
Perception et projection, en psychologie →, →
Perception, pathologie de la - →, →
Pérégrinisme 36
Performatif, pouvoir - du langage →, →
Période 72
Périphrase →-→, 48
Périphrase conventionnelle →
Périphrase humoristique →
Perspective de l’énonciation →, →, →, →
Perspective mentale →, →, →, 86-88, →
Perspective visuelle →, →, →, →
Perspectivisme du sens →, →
Phébus →
Phénoménisme →
Phrase nominale 72
Phraséologie 72
Pittoresque →
Pléonasme →
Point de vue, dans le texte →, →, →
Point de vue porté sur le langage 96-98
Polytonalité de l’œuvre →
Ponctuation →, →, →
Pop art →, →
Précarité du sens 48-→
Préciosité 2, →, →-36, →, →
Prétérition →
Procédé, et style 36, →, →, →
Processus de civilisation →, →
Prolepse →, →, →
Pronoms, mélange des - →
Prosopopée →
Pseudo-brouillage →
Pseudo-tautologie →
Psychanalyse →, →
Psychologie de la forme →
R
Raisonnement →
Rap 3
Réalisme esthétique →, →-→, →
Réalisme linguistique 96
Rébus →
Réception créatrice →-50, →, 98-→
Représentation et présence →-→, 98
Représentation et reproduction 1, 3-→, →, 96-→
Restauration lexicale →, →
Restauration syntaxique →, →
Réticence →
Rhétorique acceptée ou refusée, en littérature →, →
Rhétorique dangereuse →-→
Rhétorique positive →, 60
Rhétorique ridicule 60-→, →
Romantisme 3, →
S
Sacré →
Schématisation →
Sigle →
Slam 3
Slogan 3
Solécisme 72, →
Sophistes →
Style indirect →
Sublimation et désublimation, en psychologie →-→
Subordination, types de - 86
Surréalisme →, →
Syllepse de sens →, →, →, →
Syllepse grammaticale →
Syllepse visuelle →, →
Syllogisme →
Symbole, symbolisation 40, →, →-50, →
Symétrie et dissymétrie →
Synchyse →, →-→, →
Synchyse graphique ou visuelle →, 88
Synecdoque 6, →-→, →-40, →, →, 48
Synecdoque-métonymie →, →, →
Synesthésie →
Syntaxe →
Syntaxe visuelle →
T
Tautologie 48, →-→
Thème et phore, dans la métaphore →-→, →
Tmèse →
Trajet (intellectuel, nécessaire à la communication de l’œuvre) : →, →, →
Transparence ou opacité des signes 96-98
Type psychologique, du lecteur ou du récepteur →, →
U
Unidimensionnalité psychologique →, 88
V
Valeur sémantique 6, →, →,→, 48-→, →, →, →
Vanité, en peinture →
Verlan →
Visible et verbal →, →, →-→, →, →-→, →, →
Voix de l’auteur →, →, →
X
Xénisme 36
Z
Zen →
Zeugme →, →, →
Zeugme, poétique du - →
Zeugme grammatical, et - sémantique →-→
Zoom →
I / Matériaux
1. QUESTION : Y a-t-il un lien entre le signe verbal et la chose qu’il
désigne ?
RÉPONSE : Non ; mais l’effort de l’expression essaie toujours de le rétablir
Un mot est un signe à trois visages ou aspects : un son (sonore), sensible à l’oreille ; une image, vue sur la page (si le mot est écrit) ; et un sens, ou une signification, dans l’esprit.
Y a-t-il un lien direct entre ces trois visages du mot, et la chose qu’il désigne ? On le croit ordinairement. Et pourtant...
Soit le mot en tant que son. Par exemple, je dis le mot : « fleur ». Je peux penser qu’il y a un lien naturel entre ce mot fleur, et la fleur que j’ai sous les yeux. Mais aussitôt je réfléchis que cette pensée est naïve, qu’en d’autres langues « fleur » se dit différemment : anthos en grec, par exemple. Je vois donc ce que les linguistes appellent l’arbitraire du signe verbal, et que la Bible matérialise par l’épisode de Babel, ou de la confusion des langues. Comme toutes les langues sont différentes, les signes-sons qui désignent les choses sont différents. Monde du langage et monde tout court sont hétérogènes, étrangers l’un à l’autre. C’est un divorce tragique, irrémédiable. Tout écrivain, ou quiconque parle même, doit l’affronter.
Pour ce qui est de la graphie du mot, dans les langues alphabétiques, le signe est tout aussi coupé de la chose qu’il désigne. Les langues encore enracinées dans le dessin (idéographiques), sont peut-être plus proches des choses...
Cependant, là encore un peu de réflexion me montre que l’image même d’une chose n’est pas cette chose, mais seulement une représentation (arbitraire, d’autres étant possibles), de cette chose. L’illusion référentielle existe tout autant dans le monde du dessin ou de la peinture, que dans le monde des mots. Les signes ne sont pas les choses. Il y a un fossé ou un abîme entre la chose elle-même et sa représentation par le signe (aussi bien verbal que visible). Ni l’image d’un chien, ni le mot « chien » ne mordent.
On voit par exemple la naïveté de ceux qui croient dans le domaine religieux à l’idée de blasphème dont seraient responsables les mots ou les images enfreignant les interdits de la représentation. Ni les premiers ni les secondes en effet ne sont la chose. C’est là une illusion pré-babélienne. On pourrait aussi parler de « cratylisme », par référence au dialogue de Platon, dont le héros éponyme défend la théorie d’une relation motivée entre les mots et les choses. Il est partisan d’une adhérence magique de la chose au signe, comme si le second faisait venir ou rendrait présente automatiquement la première. Illusion très répandue néanmoins : par exemple « image » est l’anagramme de « magie ». Mais ce n’est qu’une illusion, en regard de l’idée d’arbitraire du signe, bien mise en évidence par exemple par Ferdinand de Saussure.
En ce qui concerne enfin la représentation mentale éveillée dans mon esprit par « fleur » (que ce soit le son que j’entends, ou le signe écrit que je lis sur la page), elle est générale, universelle, donc abstraite et coupée de ce que je vois de mes yeux : cette fleur particulière. Ainsi la représentation mentale générale remplace la chose concrète. C’est l’idée ou le concept de fleur que le mot recèle, et non la réalité concrète de la fleur.
Il est inévitable qu’il est soit ainsi : sans cette abstraction du langage, nous ne pourrions sans doute pas même penser, c’est-à-dire tailler dans le tissu de tout ce que nous percevons (« supputer » et « amputer » ont la même racine latine : putare, émonder, tailler), donc réduire les aspects toujours changeants du monde à quelques idées-notions qui les résument [voir là-dessus « Funes ou la mémoire », dans Fictions de Borges]. Mais il est dangereux aussi qu’il en soit ainsi. Le monde nous échappe dans sa concrétude, sa particularité.
... Heureusement alors qu’il y a, au service du langage et en particulier de l’écriture, ce qu’on appelle les procédés stylistiques ...
A quoi servent-ils ? La plupart du temps, à rapprocher un peu le signe de la chose, à établir un nouveau contact, un lien perdu, entre le signe et la chose.
Par exemple je peux suggérer l’émotion que m’inspire la fleur que je vois en jouant sur la sonorité même du mot, avec tous les échos musicaux et sémantiques susceptibles alors d’être appelés (et non plus comme dans l’activité banale et routinière de l’esprit, rappelés), par ce jeu : « fleur », appelle « flore », et « Florence », femme et ville à la fois... Pour mieux voir physiquement la fleur, je peux en faire un calligramme. Pour rendre plus concrète la représentation mentale de la fleur, je peux la caractériser en la précisant par un nouveau nom plus particulier (rose, œillet, etc.), ou en la qualifiant (belle fleur, grande fleur, etc.), ou aussi en brouillant ses qualifications ordinaires, au bénéfice de nouvelles qualifications plus originales (hypallage, oxymore, etc.) : « la beauté parfumée de la fleur », son « éloquent silence », etc. Je peux enfin brouiller le signe lui-même en lui en mêlant d’autres. C’est le jeu sans fin des métaphores : « la robe de la fleur », « la jeune fille en fleur », etc.
L’activité de l’esprit ému de façon désintéressée devant une fleur est sans frein, elle se joue de la logique. Si le texte lui aussi dans ses opérations est sans frein, alors il rend compte de la présence de la fleur, non parce qu’il la reproduit (effectivement) devant les yeux, mais parce qu’il la représente à l’esprit, et parce que, ce faisant, il fait exactement, dans le monde du langage, ce que fait l’esprit en présence de la fleur elle-même : créer ses propres visions ou perspectives, sans aucune borne. Au fond, ce ne sont pas les choses elles-mêmes qu’on imite, mais ce que fait l’esprit quand il les perçoit profondément. C’est le maximum qu’on puisse faire, et c’est déjà bien assez.
Si le monde est « dense », le langage doit l’être lui aussi, rivaliser avec lui pour ce qui est de la densité. En élargissant, on comprend mieux ce qu’il faut entendre par l’expression connue, selon laquelle « L’art imite la nature ». Il ne la copie pas dans ses résultats, il l’imite dans son opération, il fait simplement ce qu’elle fait. Elle crée, donc il crée lui aussi.
2. QUESTION : Quels sont les procédés musicaux permettant de
compenser un peu l’arbitraire du signe verbal, et pour ainsi dire de
réchauffer le langage ?
RÉPONSE : Onomatopée, harmonie imitative, allitération, paronomase
Peut-être y a-t-il eu, à l’origine, un lien entre les mots et les choses. Mais aujourd’hui, il n’y en a plus. On peut s’amuser à chercher des oppositions évidentes entre le son et le sens des mots : elles sont plus fréquentes que les ressemblances ou les correspondances. Par exemple, « compendieusement », en français, veut dire : « bref ». « Jour » est obscur par le son, et « nuit » est clair. Inversement, des mots qui se ressemblent phonétiquement n’ont rien à voir l’un avec l’autre sémantiquement. Ainsi, « citadelle » fait rêver, mais « mortadelle » fait rire...
Face à cette malédiction, le langage dispose de procédés pour se réchauffer en quelque sorte, pour réaliser à nouveau un rapprochement des mots et des choses, pour