La Désirade: Outre-mer et Outre-tombe

Introduction

Après une belle pluie tropicale cette nuit, le soleil se lève sur la Désirade… il fait tellement bon !

C’est le moment béni du petit déjeuner, avec le sourire de Christine, face à la mer des Caraïbes, à deux pas, qui scintille de mille reflets.

Les petites grenouilles s’en donnent à cœur joie, un vrai concert. De jolis papillons jaunes, des petits canaris effrontés qui viennent picorer sur la table de la terrasse et le gros héron, le crabier qui me connaît bien et vient patauger sans vergogne dans le bassin au milieu des nénuphars bleus et jaunes. Dans le flamboyant, un gros iguane mâle hoche de la tête comme ils savent le faire, accompagné d’un petit jeune encore tout vert. Les Hibiscus rouge, rose, jaune d’or explosent de fleurs et le parfum du tiaré et du citron vert au pied de l’escalier remonte jusqu’à nous.

Mes Petits-fils, je pense si fort à vous et pour être à vos côtés malgré notre éloignement, j’ai décidé de vous écrire cet ouvrage, à l’image des longues conversations que j’aime tant avoir avec vous. Je souhaite bien sûr vous transmettre ce que j’ai vécu et appris de l’existence, ce que j’eusse aimé savoir plus tôt avant de commencer ma vie… et vous de commencer la vôtre.

Qui suis-je ? D’où venons-nous ? Pourquoi le monde se donne-t-il la peine d’exister ?

Ces questions existentielles, tout le monde se les pose… du moins, durant l’enfance qui est encore dans l’enthousiasme de la découverte et dans l’étonnement... mais par la suite la majorité d’entre nous crée son petit univers autour de sa gamelle, s’habitue au monde et ne porte plus attention à ces questions… jusqu’à la fin de sa vie où elles réapparaissent brutalement !

La philosophie et l’enfance ont de nombreux points communs, il suffit pour cela de se rappeler les questions d’enfants que doivent subir les parents lors des voyages en voiture avec toutes leurs questions pourquoi ? Pourquoi le ciel est bleu… où est ce qu’il est Papy dans le ciel ? Pourquoi il est mort ? Et les parents que nous avons été, que nous sommes ou serons, d’éluder la question le plus généreusement possible… mais finir par clore l’histoire en disant « parce que c’est comme ça ! »

Cet étonnement de l’enfant et du philosophe est la preuve qu’ils ne sont pas encore indifférents.

Contraignez-vous mes Petits-fils à rester toujours étonné, ne pas devenir des adultes indifférents ou mous. Restez les yeux grands ouverts et ayez le courage des philosophes qui font la périlleuse aventure des hauts sommets, aux confins des frontières extrêmes du langage et de l’existence.

Cet ouvrage que je vous dédie voudrait donc être une transmission de Connaissances d’une génération à l’autre. De connaissances scientifiques, philosophiques et aussi affectives. Des connaissances qui permettent de ne pas seulement avoir le nez dans la gamelle du quotidien mais de le lever, la tête dans les étoiles.

Ce bouquin est le résultat d’environ un an d’écriture mais surtout de sept ans d’une retraite intense avec la lecture assidue et passionnée des grands Aînés de la philosophie, depuis 3 000 ans ; des Pré-socratiques... à Heidegger !

Vous devinez qu’il est bien impossible de résumer ainsi la pensée humaine et bien sûr je ne peux vous transmettre que ce qui m’a marqué.

L’un de mes souhaits étant d’essayer de vous séduire et vous inviter à aller lire et voir par vous-même !

Jusqu’au XVe siècle, les hommes ont très bien vécu en pensant, comme le bon sens nous y invite, que le soleil tournait autour de la terre… est-ce que les découvertes de Copernic et Galilée ont changé quelque chose dans leur vie ?

À première vue non… et pourtant, ça change tout dans notre conscience d’Être au monde… savoir que l’univers est en expansion et que cela s’accélère également.

Acquérir les connaissances confirmées par les aînés augmente donc de beaucoup nos points de vue et notre compréhension du monde, c’est un cadeau irremplaçable, sans cela on est condamné à vivre dans l’instant et le subir et répéter sans cesse les mêmes erreurs.

Transformez-vous en éponge pour absorber le plus de connaissances possibles et le plus vite durant votre jeunesse pour avoir rapidement des jugements bien étayés et ne pas vous égarer dans n’importe quoi.

Je commencerai, dans un premier chapitre, par des connaissances scientifiques de base, enfin pour votre époque, parce que dans mon enfance peu de ces choses étaient connues.

Que sait-on actuellement de l’histoire de l’univers, de l’histoire de la terre, de l’apparition de la vie, de l’évolution des espèces, comment les hominidés apparaissent en Afrique, les différentes espèces du genre Homo, l’apparition de notre genre Homo Sapiens il y a 100 à 300 000 ans, la sortie d’Afrique il y a 70 000 ans, la rencontre de Sapiens et Neandertal, les 2 à 4 % de gènes Neandertal retrouvés dans notre génome Sapiens. Puis on arrive au néolithique et la sédentarisation humaine entre le Tigre et l’Euphrate…

Deuxième chapitre ensuite : je voudrais vous transmettre surtout des connaissances philosophiques de bases. Celles que j’aurais aimé posséder avant 20 ans, parce qu’elles façonnent profondément ta manière de vivre et de comprendre ce qui t’arrive.

Quelle a été l’évolution de la pensée humaine, au moins pour nous occidentaux, depuis les premiers Grecs il y a deux mille huit cents ans ?

Vous commencez à deviner qu’il va vous falloir aimer grimper sur les sommets, avoir l’esprit d’un aventurier, parce que vous vous doutez bien qu’il y a beaucoup de choses à dire.

Je vous transmets de manière chronologique les œuvres que j’ai lues et qui m’ont marqué et c’est un long parcours que je me réjouis de faire avec vous… un jour ou l’autre, car c’est le bonheur des écrits qui restent.

Les titres seront :

Les Mythologies, lesdits Pré-socratiques, Socrate-Platon-Aristote, l’hellénisme, le Christianisme, le Moyen-Âge, la renaissance et la Réforme, le baroque, puis les maîtres du XVIIe siècle avec Descartes – Hobbes – Spinoza – Leibnitz, les Empiristes anglais avec Locke et Hume, puis le siècle des Lumières avec Kant, le romantisme, puis Hegel, les Utilitaristes anglais et de manière tout à fait arbitraire et incomplète je m’arrêterai avec Nietzsche dont je ne peux faire l’économie.

Troisième Chapitre : des connaissances affectives sont maintenant nécessaires car elles sont déterminantes dans la qualité et l’intensité des émotions, des amours que vous allez vivre. Bien sûr, on peut se contenter de peu mais on a le pouvoir de jouir beaucoup plus ! et ça m’étonnerait que vous vous contentiez de peu ! Et cela c’est le plaisir irremplaçable de la Littérature, c’est là que vous trouverez toutes les subtilités, les joies divines et les douleurs de l’amour. Je me souviens à dix ans, comme toi mon cher Gabin, que j’étais déjà secrètement amoureux d’une jolie petite blonde qui elle, ne me regardait même pas !

Alors, ayez sous la main, quand vous serez intéressés, les romans de l’amour-passion ; Premier amour de Tourgueniev, Madame de Clèves, Les souffrances du jeune Werther de Goethe le premier romantique, Manon Lescaut, Paul et Virginie. Puis, jetez-vous sur Stendhal, La chartreuse de Parme, Le Rouge et le Noir, surtout ne faites pas l’impasse de Flaubert, L’éducation sentimentale est un chef-d’œuvre, et puis dès que vous aurez pris goût aux moments de solitude et de silence qui sont en vérité pur délice, lancez-vous dans Proust… cet homme vous décrit avec une précision inégalée tout ce que vous allez ressentir en tombant amoureux de votre future Gilberte à vous… et tant d’autres choses jusqu’au bal des têtes blanches lorsqu’ils seront devenus vieux.

Mais les vraies connaissances affectives ne peuvent être que celles que l’on a vécues dans sa chair, aussi je dois vous parler de ma vie, de ce qui s’est passé en moi durant ces sept décennies passées. Pour que ce ne soit pas une hagiographie vite insupportable, je vous proposerai trois thèmes :

La jeunesse et l’amour/l’aventure/la maturité et la mort.

Commençons donc mon petit Charles, joli petit dragon de sept ans qui crache du feu, plein d’une belle volonté de puissance qu’il te faut apprendre à maîtriser ; et toi mon Gabin, bel Apollon de dix ans manifestement doué pour le monde des idées et le risque d’avoir la tête dans le ciel ; pars essayer de savoir d’où nous venons, qui étaient nos aïeux qui nous ont amenés à vivre ici et maintenant.

Vous avez déjà remarqué à quel point nous sommes pauvres en informations familiales, déjà sur notre arrière grand -père… et au-delà, c’est la nuit complète. Ce serait pourtant passionnant pour chacun de savoir qui étaient nos ancêtres, leur caractère et leur pensée… seule l’aristocratie avait l’intelligence et les moyens de conserver la mémoire voire le culte des Ancêtres.

Comme beaucoup, en devenant vieux mon père avait fait des recherches généalogiques à défaut d’héraldiques.

Je sais qu’il remonte jusqu’en 1740 par les registres d’Évêchés avec les baptêmes, mariages et décès, avant la révolution et le Code Civil.

Ce que l’on constate de manière flagrante c’est que durant deux siècles ces Clévy étaient au bas de l’échelle des différentes sociétés qui se sont succédé.

C’était des familles nombreuses de la campagne qui ne sortaient pas de leurs conditions de Journalier et une fille de journalier n’épousait pas un garçon de cultivateur propriétaire. Cantonné dans sa caste durant des siècles probablement.

En outre, vous connaissez ce petit village de Clévy, en pente sur la commune de Saint-Romain, à l’ouest de Lyon. On a bien connu avec Patricia et Romain des amis qui habitaient le château de Clévy où on a fait des fêtes, ils sont morts il y a longtemps. Il y a une jolie (du moins à l’intérieur) Chapelle de Clévy qui appartenait au XIVe siècle à l’Abbaye de Savigny dans le Nord et sur les cartulaires (cadastres) de l’abbaye on trouve une explication de l’origine de notre nom. En 857, on voit qu’un moine a traduit du latin en vieux français, le mot Clivus, l’endroit où se trouve la chapelle, par Clévy… et donné ce nom au hameau.

Le clivus pour les Romains était un chemin en pente, le plus célèbre était le Clivus Capitolinus, pavé en pente qui relie le Forum en bas au Capitole en haut dans la Rome éternelle. Ovide, dans la vie des douze Cesar, raconte que Cesar lors de son trophée, sur son char dédié à Jupiter, vit à mi-parcours du Capitole son char s’effondrer par rupture d’un essieu ! Pour essayer de conjurer ce que tout le monde ne manquait pas d’interpréter comme un mauvais présage, il finit le chemin à genoux…

L’an 857 ; imaginez ces époques qu’ont vécues probablement nos aïeux. Charlemagne est mort en 814 à Aix-la-Chapelle, puis il y eut son fils Louis le Pieux qui eut trois crétins de fils qui s’entredéchirèrent dilapidant l’héritage carolingien ; Charles le chauve à l’Ouest, Lothaire l’aîné impérial au Centre et Louis le Germanique à l’Est… C’est aussi grâce à eux que la France existe…

Eh bien, il est fort probable durant ces plus de mille ans, c’est-à-dire environ trente-cinq générations, que nos ancêtres fussent de vrais pauvres !

Et ce n’est qu’à partir de la République et de l’École que le père de mon arrière-grand-père nous a sortis de la misère, en faisant moins d’enfants et en faisant des études… Gardez cela dans un coin de votre tête !

Chapitre I

Des connaissances scientifiques pour mieux comprendre qui suis-je ? Et d’où venons-nous ?

Dans mon enfance, on était loin de disposer de ces connaissances scientifiques, c’est un bonheur pour nous maintenant de savoir. Laissez-moi vous présenter quelques données de base dans le but de vous voir aller fouiller sur le net ce qui vous intéresse et c’est très riche.

L’objectif de la science est de comprendre « comment » le monde se donne la peine d’exister, elle ne prétend pas répondre à la question du « pourquoi il y a quelque chose plutôt que rien ».

Pour essayer de savoir qui nous sommes et d’où venons-nous, il vous faut apprendre ce que l’on connaît actuellement de l’Univers, de la Terre et de l’apparition de la vie et de l’histoire de l’Homme jusqu’à nous aujourd’hui.

L’Univers

La communauté scientifique actuelle pense que l’univers est apparu il y a 13,8 milliards d’années. Ce qu’il y avait, un milliardième de seconde avant le Big Bang, nul ne le sait… mais ce qui s’est passé ensuite s’est éclairci nettement depuis mon enfance.

Lorsque que l’on remonte le temps à l’origine de l’univers, on tombe sur le « mur ou ère de Planck » situé à 10 puissance-43 secondes après le big bang, moment singulier où les quatre interactions fondamentales de la matière ; Gravitation, Forces inter nucléaires fortes et faibles et électromagnétisme, étaient unifiées, ce qui empêche de les décrire avec la relativité générale et la physique quantique, qui sont on le sait incomplètes, car la gravitation et les effets quantiques ne peuvent être étudiés que séparément.

À ce stade, les températures sont inimaginables, des milliards de milliards de degrés, le temps et l’espace n’existent pas ; et puis d’un coup, en une fraction de seconde, ce bébé univers va subir une expansion impensable. Cette entité matière, énergie, espace et temps vont fixer les règles et les forces. La première à s’exprimer est la gravitation, responsable de l’attraction de la matière ; c’est une force qui déforme l’espace autour de la matière en le courbant, et plus la courbe est prononcée, plus le temps s’écoule lentement.

3 min après le big bang, l’univers est suffisamment froid pour que la nucléosynthèse primordiale commence avec la constitution d’atomes d’hydrogène et hélium… et 20 min après le commencement, au-dessous de 350 millions de degrés, l’univers est fait de 75 % d’hydrogène et 25 % d’Hélium. L’univers est encore opaque car nul rayonnement ne parvient à sortir de cette soupe primitive tellement chaude… et 380 000 ans après le big bang, soudain, un flash lumineux inimaginable va se rependre dans l’univers que l’expansion va créer. Cette lumière visible va s’étirer en même temps que l’espace, quittant le domaine du visible (par l’humain qui n’existait bien sûr pas)… pour laisser un rayonnement fossile à 3 K, découvert en 1965 par Penzias et Wilson. C’est le fameux fond diffus cosmologique (CMB en anglais pour Cosmic Microwave Background) que l’on retrouve dans toutes les directions de l’espace et qui semble bien être le résidu du big bang. Cette carte du fond diffus cosmologique acquise grâce à plusieurs satellites de la NASA montre que cette image fossile présente une anisotropie avec des grumeaux de matière qui sont le stade premier de la matière et des galaxies avant expansion.

Il faut retenir qu’au début de son expansion l’univers ne contient que de l’Hydrogène avec un proton et pas de neutron et de l’Hélium 3 et 4 avec deux protons et un ou deux neutrons… le reste des atomes plus lourds du tableau des éléments atomiques de Mendeleïev, essentiels à la vie, n’apparaîtront que progressivement durant les milliards d’années suivantes au rythme des explosions des Super-Nova. Nous sommes, au sens propre, de la poussière d’étoiles.

Ces sujets sont passionnants et vous trouverez sur le net tellement de belles documentations…

La Terre et la vie

Notre étoile, le soleil est apparu il y a 5 milliards d’années et la terre est née il y a 4,5 milliards d’années, troisième planète du système solaire. Vous les connaissez par cœur ; Mercure, Vénus, la Terre, Mars, puis au-delà se trouve la ceinture d’astéroïdes faite de petits rochers. Ensuite, les grosses planètes gazeuses, Jupiter, Saturne et ses anneaux puis les planètes de glace, Uranus puis Neptune et au-delà, trois petites planètes solides, Pluton, Makémaké et Haumea dans la ceinture de Kuiper faite de petits astéroïdes métalliques et de gaz comme le méthane, gelés et probable origine des comètes. Les vents solaires s’épuisent à ce niveau mais l’influence gravitationnelle du soleil s’étend sur encore 2 années-lumière !

Il y a 4,5 Milliards la Terre n’était pas accueillante, pas de vie, pas d’oxygène dans l’air et