Application multilinéaire

application à plusieurs variables vectorielles qui est linéaire en chacune de ses variables
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 9 avril 2014 à 03:13 et modifiée en dernier par 86.218.116.165 (discuter). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

En algèbre linéaire, une application multilinéaire est une application à plusieurs variables vectorielles et à valeurs vectorielles qui est linéaire en chaque variable. Une application multilinéaire à valeurs scalaires est appelée forme multilinéaire. Une application multilinéaire à deux variables vectorielles est dite bilinéaire.

Quelques exemples classiques :

L'étude systématique des applications multilinéaires permet d'obtenir une définition générale du déterminant, du produit extérieur et de nombreux autres outils ayant un contenu géométrique. La branche de l'algèbre correspondante est l'algèbre multilinéaire. Mais il y a également de très nombreuses applications dans le cadre des variétés, en topologie différentielle.

Définition

Soient un entier   et des espaces vectoriels   sur un même corps  . Une application

 

est dite multilinéaire (ou plus précisément :  -linéaire) si elle est linéaire en chaque variable, c'est-à-dire si, pour des vecteurs   et des scalaires   et  ,

 

De façon informelle, on peut se représenter une application  -linéaire comme une application produit de   termes, avec une propriété de type distributivité.

L'ensemble des applications  -linéaires de   dans   est un sous-espace vectoriel de l'espace FE1×…×En de toutes les applications de E1×…×En dans F. C'est donc un espace vectoriel, que l'on note  , ou plus simplement   lorsque  . L'espace   des formes  -linéaires sur   est noté  .

Si  , on retrouve l'espace   des applications linéaires de   dans  . En revanche si  , il ne faut pas confondre l'espace d'applications multilinéaires   avec l'espace   des applications linéaires sur l'espace vectoriel produit  . Par exemple, de K×K dans K, la multiplication   est bilinéaire mais pas linéaire, tandis que la projection   est linéaire mais pas bilinéaire.

Écriture en composantes

Si   (finies ou pas) sont des bases respectives des espaces  , l'application (linéaire) de restriction

 

est bijective (donc est un isomorphisme d'espaces vectoriels), c'est-à-dire qu'une application  -linéaire est entièrement déterminée par ses valeurs sur les  -uplets de vecteurs des bases, et que ces valeurs peuvent être des vecteurs quelconques de  .

Plus concrètement, et en supposant pour simplifier les notations que

 

on peut décomposer chaque vecteur

 

Alors l'expression d'une forme  -linéaire sur le  -uplet   devient

 

La connaissance des   valeurs   détermine entièrement l'application  -linéaire  .

En particulier, l'espace   des formes  -linéaires sur un espace vectoriel   de dimension   a pour dimension  .

Symétrie et antisymétrie

Une application   est dite

  • symétrique si l'échange de deux vecteurs ne modifie pas le résultat :
  ;
  • antisymétrique si l'échange de deux vecteurs a pour effet de changer le résultat obtenu en son opposé :
 .

On peut effectuer plusieurs échanges de vecteurs successifs. On réalise ainsi une permutation des vecteurs, obtenue comme une succession de transpositions. À chaque étape, le résultat est non modifié si   est symétrique, et changé en son opposé si   est antisymétrique. Finalement, l'effet d'une permutation générale des vecteurs est de ne pas modifier le résultat si   est symétrique, et de multiplier par la signature de la permutation si   est antisymétrique. En résumé :

  • si   est symétrique alors :
  ;
  • si   est antisymétrique alors :
 

Les sous-ensembles correspondants de  , notés respectivement   et  , sont des sous-espaces vectoriels. Si la caractéristique du corps   est égale à 2, ils sont égaux.

Application alternée

Une application   est dite alternée si elle s'annule à chaque fois qu'on l'évalue sur un  -uplet contenant deux vecteurs identiques :

 

De façon équivalente, une application k-linéaire sur   est alternée si elle s'annule sur tous les k-uplets liés. En particulier, si k est strictement supérieur à la dimension de  , alors la seule application k-linéaire alternée de   dans   est l'application nulle.

Toute application  -linéaire alternée est antisymétrique.

Si la caractéristique du corps   est différente de 2, la réciproque est vérifiée : toute application  -linéaire antisymétrique est alternée.

Application n-linéaire alternée en dimension n

Dans cette section on suppose que l'espace   est de dimension finie   et on étudie le cas particulier  . Pour  , cette étude permet de construire le déterminant.

Si   est muni d'une base  , on peut décomposer chaque vecteur

 

Alors l'expression d'une forme  -linéaire alternée sur le  -uplet   se simplifie. Après suppression des termes où figure deux fois le même vecteur, il vient

 

  est l'ensemble des  -uplets   avec chaque   dans [|1,n|] et les   tous distincts.

Mais alors   sont les entiers de 1 à   rangés dans un certain ordre. En d'autres termes, ils forment une permutation des entiers de 1 à  . On retrouve une et une seule fois chacune des permutations de   entiers dans la somme précédente. Ceci permet de réindexer

 

Enfin par antisymétrie

 

Ainsi la connaissance du seul vecteur   suffit pour déterminer complètement la fonction  .

Théorème — Si   est de dimension  , alors l'espace   des applications  -linéaires alternées de   dans   est isomorphe à  .

On appelle notamment application déterminant relativement à la base   l'unique forme  -linéaire alternée telle que  . Ses propriétés sont étudiées dans l'article « Déterminant (mathématiques) ».

Application k-linéaire alternée en dimension n>k

Reprenant le cas d'une application  -linéaire alternée en dimension  , on suppose cette fois que n>k (rappelons que si n<k, toute application  -linéaire alternée est nulle). Une partie seulement des résultats précédents peut être étendue. Il est toujours possible de supprimer les termes où figure deux fois le même vecteur, il vient

 

  est l'ensemble des  -uplets   avec chaque   dans [|1,n|] et les   tous distincts. De plus par antisymétrie, il est possible de réordonner les termes dans   de façon à ne conserver qu'une combinaison de termes de la forme

 

Le nombre de tels  -uplets réordonnés est le coefficient binomial  . Par une démonstration analogue à celle du paragraphe précédent, une forme  -linéaire alternée est caractérisée par la donnée de la valeur de   sur ces  -uplets. En définitive, le théorème précédent se généralise en :

Théorème — Si   est de dimension  , alors l'espace   des applications  -linéaires alternées de   dans   est isomorphe à

 

Plus précisément, la formule de décomposition peut être écrite en utilisant la notion de déterminant : chaque coefficient est un mineur de la matrice représentative de la famille des vecteurs   dans la base des  .

 

Référence

Roger Godement, Cours d'algèbre


Voir aussi

Sur les autres projets Wikimedia :

Articles connexes