DNB Série Collège Juin Metropole
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5
FRANÇAIS
Série COLLÈGE
10 Coefficient : 2
15
REPÈRE J1
20
Première partie : 1 h 30
30
Deuxième partie : 1 h 30
35
40
L’usage de la calculatrice et de tout document est interdit.
Pour la deuxième partie (rédaction), l’usage d’un dictionnaire de langue française est autorisé.
Un beau matin d’hiver – une matinée de brume, quand la lumière du jour naissant se confond
5 encore avec les halos des réverbères – un homme marchait le long d’un canal. C’était un homme
non pas très âgé, mais usé par la vie, pour avoir dormi dehors et avoir bu trop de vin. Cet homme-là
(mettons qu’il s’appelait Ali) n’avait pas de domicile, et pas vraiment de métier. Quand les gens le
voyaient, ils disaient : « Tiens ! L’estrassier. » C’est comme cela que les gens du Sud appellent les
chiffonniers qui vont de poubelle en poubelle et ramassent tout ce qui peut se revendre, les cartons,
10 les vieux habits, les pots de verre, même les piles de radio qu’on recharge très bien en les laissant
au soleil.
Pour ramasser tout cela, il avait une poussette-landau du temps jadis, avec une belle capote
noire et des roues à rayons, dont une était légèrement voilée. Pour les objets volumineux, il avait
une charrette à bras.
15 Ali se dirigeait vers le pont. C’est là qu’il habitait, et qu’il gardait tous les trésors qu’il avait
ramassés durant la nuit.
Ce matin-là, Ali était fatigué. Il pensait à la bonne lampée de vin qu’il allait boire avant de se
coucher sur son lit de cartons, sous sa couverture militaire qui l’abritait du froid comme une tente.
Il pensait aussi au chat gris qui devait être endormi sous la couverture, en rond et ronronnant. Ali
20 aimait bien son chat. Il l’avait appelé Cendrillon, à cause de sa couleur.
Quand Ali s’est approché de la tente, il a vu quelque chose d’inattendu : à la place du chat, il y
avait un carton entrouvert, que quelqu’un avait déposé là. Tout de suite Ali a compris que ce carton
n’était pas à lui. L’estrassier resta un moment à regarder, plein de méfiance. Qui avait mis ce carton
là, sur son lit ? Peut-être qu’un autre gars de la chiffe avait décidé de s’installer ici, sous le pont ? Il
25 avait laissé ce carton pour dire : « Maintenant sous le pont, c’est chez moi ».
Ali sentit la colère le prendre. Tout à coup il se souvint qu’il avait été soldat, autrefois, dans sa
jeunesse, et qu’il était monté à l’assaut au milieu du bruit des balles. C’était il y avait bien
longtemps, mais il se souvenait des battements de son cœur de ce temps-là, de la chaleur du sang
dans ses joues.
30 Il s’approcha du carton, résolu à le jeter loin sur les quais, quand il entendit quelque chose.
Quelque chose d’incroyable, d’impossible. Une voix qui appelait, dans le carton, une voix d’enfant,
une voix de bébé nouveau-né. C’était tellement inattendu qu’Ali s’arrêta, et regarda autour de lui,
pour voir d’où venait cette voix. Mais sous le pont tout était désert, il n’y avait que l’eau froide du
canal, et la route qui passait au-dessus, où les autos avaient commencé à rouler.
35 Alors du carton sortit à nouveau la voix, claire, avec comme une note d’impatience. Elle
appelait à petits cris répétés, et comme Ali tardait encore, les bras ballants, la voix se mit à pleurer.
En même temps, Ali vit que le carton remuait, s’agitait sous les coups donnés à l’intérieur.
« Des chats ! » dit Ali à haute voix. Mais en même temps il savait bien que les petits chats
qu’on a oubliés au bord d’un canal n’ont pas cette voix-là.
40 Il s’approcha encore, écarta les bords du carton avec ses mains noircies et gercées, et avec
d’infinies précautions il en sortit un bébé, une petite fille pas plus grande qu’une poupée, si petite
qu’Ali devait serrer ses mains pour qu’elle ne glisse pas, si légère qu’il avait l’impression de ne
tenir qu’une poignée de feuilles.
« C’est elle, c’est l’enfant de sous le pont », pensa-t-il. […]
45 De sa vie, Ali n’avait jamais rien vu de plus joli, ni rien de plus délicat et léger que cette petite
fille, cette poupée vivante. Il la tenait dans ses bras, sans oser approcher d’elle son visage à la barbe
hirsute. L’air froid qui s’engouffrait sous le pont envoya voltiger des papiers et bouscula le carton
vide, et Ali tout à coup s’aperçut que le bébé était tout nu, et que sa peau était rougie par le froid,
hérissée de milliers de petites boules à cause de la chair de poule.
50
2. Lignes 2 – 3 :
« C’était un homme non pas très âgé, mais usé par la vie, pour avoir dormi dehors et avoir bu trop
15 de vin. »
a) Quel rapport logique exprime le groupe en italique ? (0,5 point)
b) Remplacez ce groupe par une proposition subordonnée exprimant le même rapport logique.
(0,5 point)
20
3. Lignes 23 – 24 :
« Tout à coup il se souvint qu’il avait été soldat, autrefois, dans sa jeunesse, et qu’il était monté à
l’assaut au milieu du bruit des balles. »
a) Quel est le champ lexical dominant dans cette phrase ? Justifiez votre réponse. (1 point)
25
4. Ligne 38 :
« avec d’infinies précautions »
30 a) Donnez la fonction grammaticale de cette expression. (0,5 point)
b) Indiquez quel trait de caractère d’Ali est ainsi mis en valeur. (0,5 point)
c) Relevez dans la suite du texte un indice qui conforte votre réponse. (0,5 point)
35
2. Lignes 27 à 36 :
À travers quels sens la découverte s’effectue-t-elle ? Justifiez votre réponse. (1 point)
50
3. Donnez la classe grammaticale de « quelque chose » (ligne 27) (0,5 point)
4. Lignes 28 – 29 :
« Une voix qui appelait, dans le carton, une voix d’enfant, une voix de bébé nouveau-né. »
55 a) Relevez les expansions du mot « voix » et donnez leur classe grammaticale. (1 point)
b) Quelles précisions apportent-elles sur la découverte d’Ali ? (0,5 point)
60
3. Lignes 44 à 46 :
15 Expliquez pourquoi le bébé est en danger. Appuyez vous sur le texte pour justifier votre réponse.
(1 point)
4. Que représente le bébé pour Ali ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur votre lecture du texte.
(1,5 point)
20
RÉÉCRITURE (4 points)
25Réécrivez la phrase suivante : « Ce matin là, Ali était fatigué. Il pensait à la bonne lampée de vin qu’il allait
boire avant de se coucher […] sous sa couverture militaire qui l’abritait du froid comme une tente. »
Vous remplacerez Ali par Ali et Marcel en effectuant toutes les modifications nécessaires.
30
RÉDACTION
(15 points)
10
20
25Critères de réussite :
35
10
Dans les villages, on ne lui donnait guère : on le connaissait trop ; on était fatigué de lui
depuis quarante ans qu’on le voyait promener de masure en masure son corps loqueteux et
difforme sur ses deux pattes de bois. Il ne voulait point s’en aller cependant, parce qu’il ne
connaissait pas autre chose sur la terre que ce coin de pays, ces trois ou quatre hameaux où il
15avait traîné sa vie misérable. Il avait mis des frontières à sa mendicité.
Maupassant.
Contes du jour et de la nuit. Folio
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Consignes :
ATTENTION : les erreurs que vous commettrez en copiant le texte seront sanctionnées.
promener
15de lui depuis quarante ans qu’on le voyait promené de masure en masure son
promenait
ce
aller cependant, parce qu’il ne connaissait pas autre chose sur la terre que se coin de pays,
ceux
25
ces traîner mit
c’est trois ou quatre hameaux où il avait traîné sa vie misérable. Il avait mie des
ses traînés mis
30 mandicité
frontières à sa mendicité.
mendicitée
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Maupassant.
Contes du jour et de la nuit. Folio