Etude Du Roman Il Etait Une Fois - RADDAOUI Younes

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Par Mr RADDAOUI Younes

Il tait une fois un vieux couple heureux:


tude
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Notes sur la vie de l'auteur

Mohammed Khair-Eddine est l'un des grands crivains de la littrature francophone


marocaine.

image:
http://www.jesuismort.com/biographie_celebrite_photo/biographie_photo_celebrite/10287_ph
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Il est n en 1941 Tafraout, petite ville de la rgion du Souss au Sud du Maroc, 180 km au
sud d'Agadir.

Trs marqu par le sisme de 1960, il sinstalle Agadir en 1961 et y vit jusquen 1963. Il est
charg par la Scurit sociale d'enquter auprs de la population. Jeune crivain, il frquente
ensuite le cercle des Amitis littraires et artistique de Casablanca. En 1964, il fonde, avec
Mostafa Nissaboury, le Mouvement "Posie Toute".

Il s'exile volontairement en France en 1965, et devient, pour subsister, ouvrier dans la


banlieue parisienne. A partir de 1966, il publie dans la revue "Encres vives" et collabore en
mme temps aux "Lettres nouvelles" et "Prsence africaine". En 1967, c'est la rvlation de
son roman "Agadir", salu par le prix "Enfants terribles", qu'avait fond Jean Cocteau.

En 1979, il s'installe nouveau au Maroc. Il meurt Rabat le 18 novembre 1995, jour de la


fte de l'Indpendance du Maroc.

uvre

Ses uvres ont t publies, pour la plupart, aux ditions du Seuil :

* Agadir (1967)
* Corps ngatif (1968)
* Histoire d'un Bon Dieu(1968)
* Soleil arachnide (1969)
* Moi l'aigre (1970)
* Le Dterreur (1973)
* Ce Maroc ! (1975)
* Une odeur de mantque (1976)
* Une vie, un rve, un peuple, toujours errants (1978)
* Rsurrection des fleurs sauvages (ditions Stouky et Sedki, Rabat, 1981).
* Lgende et vie d'Agoun'chich (1984)
* Il tait une fois un vieux couple heureux
* Faune dtriore (1997)
* Le Temps des refus, entretiens 1966-1995

Rsum de l'oeuvre
Il tait une fois un couple heureux qui vivait dans une valle au rythme des saisons ,
Bouchaib, au pass agit rencontre une carrire militaire pour travailler la terre de ses
anctres et vivre auprs de sa femme dont la suisine le rgale et la prsence l'inspire et le
rassure. En effet , Bouchaib calligraphie en langue Tifinagh un longue pome la gloire d'un
Saint mconnu tout en buvant du th chinois reu de France. L'Imam de la Medersa du village
trouva le moyen de faire diter le pome qui est mis aussi en musique , chant par des rass ,
diffus la radio et cout par tous . Mme Redwane ,l'ami de Bouchaib , qui vit en France
depuis trente ans , prend connaissance du pome de Bouchaib ce qui le dcide lui rendre
visite . Malgr l'isolement du village , la modernit commence s'y faire sentir . Les plus
rfractaires finissent par abdiquer par commodit la facilit . Bouchaib et sa femme garants
des traditions, adoptent la podernit dans les limites du raisonnable ce qui n'est pas le cas des
parvenus . Ces derniers sont mpriss par le Vieux qui voit en eux des corrompus qui
trompent le peuple et flouent l'Etat

Les personnages de L'oeuvre


Bouchab : Le Vieux hros du roman .Il avait beaucoup voyag dans le Nord et dans une
partie d'Europe la recherche d'une fortune qu'il n'a pas trouve . Il tait un fin lettr et un
croyent exemplaire
Talaquouit : La vieille voisine du couple , C'est une Saint aime et respecte par le voisinage .
Elle sait lire et crire couramment l'arabe classique et le berbre. Elle tait capable d'engager
une soute avec n'importe quel alim . Cette vieille pouvait aussi soignait les anciens car elle
matrisait la pharmacope de l'poque
Les Touaregs : ce sont des nomades qui possdent d'immenses troupeaux mais qui ne mangent
pratiquement pas la viande . Ils vivent de lait de chamelle et de dattes. Leurs femmes sont
lettres . Elles lisent et crivent le Tifinagh et elles composent des pomes et des chansons
Lalla Tiizza Tasemlait : Saint et savante dont on disait tort qu'elle fut la matresse attitre de
Sidi Hmad Ou Moussan'Zzaouit , le saint au mille et un miracles et prodiges
Le Mokaddem : Il a fait la prison pour trafic du kif . Ces trafics ne l'ont pas enrichi . Il est
revenu avec sa femme arabe qu'il a totalement berbris
Le guide touristique attitr : c'est un polyglotte n au village .Il habite le chef-lieu ou' se
trouve l'administration du Souk. Il a une femme et des enfants au village, une autre femme et
enfants Tiznit et une troisime pouse au Souk , Le Vieux parle de lui en terme de baroudeur
et d'aventurier
Le pre du guide : IL tait un baroudeur , une dorte de bandit mais pas un tueur . Il aimait
faire le coup d feu
Le jeune noir Salem : Le fils du ferblantier qui fabriquait aussi des sandales semelles de
caoutcouc
Le circonciseur : Vtu comme un Imam , il portait une longue barbe blanche de patriarche
biblique et un impecable turban rayures dores de lunettes de vue
L'adjudant : Un homme honnte et travailleur . Il a invit le Vieux la circoncision de ses
deux fils
Haj Lahcne : Bienfaiteur d'Amzil
Amzil : Interlocuteur du Vieux , homme dans la force de l'ge , maigre et grand , qui vivait t
dans son temps l'unique marchal-ferrant du village
La doyenne du village : Personne ne l'a jamais vu . Elle se souvenait de l'poque hoque des
harkas et parlais sans cesse des tre invisibles qu'elle seule pouvait distinguer
L'Anctre : Il est venu du Sahara , Il est venu s'installer au village la tte d'un immense
troupeau il y'a plusieurs sicles de cela
Imoussak : Un Saint qui avait son tombeau prs de la Medersa . Il avait peut-tre t un chef
de Zaoua d'ou' l'existence mme de l'cole de thologie
Haj Belad : Un chanteur qui avait toute la consideration de Bouchaib car ses textes taient
longuement mris
Oumouh: C'est un vieux remari avec une jeune de 18 ans . Il est l'ami des parvenus, leur
homme tout faire et leur guide de chasse . Il a t ddommag par ces messieurs suite
l'incendie de son verger
Radwane : C'est l'ami de Bouchaib , Un immigr qui est devenu un investisseur
Khoubbane : Un homme du clan qui reprsentait le dernier chanon de sa ligne et qui avait
offert le porte-plume Bouchaib . Il lui apportait aussi des cahiers , des crayons de couleur et
des biscuits quand il venait au village . Il tait strile et il est mort Safi devant sa boutique .
Sa veuve s'est remerie et a eu des enfants

Etude

Mohammed Khar Eddine est connu par son criture pamphltaire et difficile. Par ses pomes
et ses romans qui montrent que cet homme a la cration dans le sang. Ses origines nont pas
empchs cette personne de devenir lun des crivains maghrbins les plus importants ; il est
mme nomm : Lenfant terrible de la littrature maghrbine. Dans cette intervention, je vais
essayer de vous faire dcouvrir Mohammed Khar-Eddine le sociologue travers son uvre :
Il tait une fois un vieux couple heureux. Jai choisi cette uvre car, elle est programme et
les lves ainsi auront loccasion de discuter et dapprocher autrement un roman qui ont dj
lu. Je tiens vous dire quil sagit dune analyse personnelle o jai essay de mettre laccent
sur les talents de Khar- Eddine le sociologue. Ce travail a t fait la dernire minute pour
pallier le vide d labsence dun spcialiste de Khar-Eddine quil devait nous parler de ce
monsieur et de ses crations.

Les thmes

Ce roman est une uvre posthume apparue aux ditions du Seuil en 2002. Il raconte la vie
dun couple heureux o le vieux passe ses journes crire des pomes en berbre et
savourer les repas faits par la vielle, sa femme. Le rcit sera dvelopp en fonction du pass
agit du vieux et ses penses. Le progrs vient provoquer un vritable changement au village
paisible. Les pomes du vieux seront diffuss la radio et mis en chansons.

Je vais essayer, comme je vous lavais signal, de vous faire dcouvrir Mohammed Khar-
Eddine le sociologue travers ltude de certains cas prsents au sein de son uvre : Il tait
une fois un vieux couple heureux.

La situation de la femme

La figure fminine la plus dominante est la vieille. La femme de Bouchab. Une femme qui
passe son temps fabriquer des tajines pour son vieux poux et qui doit sous-estimer
heureuse dans toutes les situations et toutes les conditions : le bonheur est un apprentissage,
un mode de vie et non un sentiment. Une obligation et non un choix. La femme lpoque
nexistait que dans lombre et devait accepter son sort dpouse fidle et heureuse :

-Je dois tapprendre une chose, femme, dit le vieux. Une chose trs importante. On est
heureux ensemble, nest ce pas ?

-Oui, mais sans enfants

-Bah ! Cest mieux ainsi. Dieu la voulu, la ligne est finie. Mme des rois ont subi ce sort.
(p.37)

Dans ce passage, la strilit dun homme nest pas discutable. La femme ici, doit confirmer
son bonheur mme si elle ne pourra jamais tre mre ou grand-mre. Pourtant, la strilit
dune femme est une honte, une chose inexcusable. En effet, la socit ne pardonne jamais
une femme infconde, qui doit remarier son mari et lui trouver une autre femme. Dieu dans ce
sens aura dautres choses dire. Mohammed Khair-Eddine traite ici un problme
socioculturel dune manire drisoire et met ainsi le bonheur de ce couple entre parenthses.
Ce qui nous pousse en tant que lecteurs rels, poser la question : Y a- t- il vraiment un
vieux couple heureux ? Noublions pas que lauteur na pas avanc le non de la vieille, qui
sombre dans lanonymat. Dailleurs, Mohammed Khar Eddine dans un style dtour
semble bien rpondre cette question

Largent devient la rgle du jeu

Dans son roman : Il tait une fois un vieux couple heureux, Mohammed Khar
Eddine signale le changement que la socit a subi cause de lintervention europenne et
amricaine. Les gens sont devenus avides dargent. Les principes et les valeurs humaines
deviennent une mode archaque sans importance. Cela veut dire, que Mohammed Khar
-Eddine a remarqu cette volution matrielle, qui pntrait nos foyers et bouleversait nos
convictions. La foi des anciens na plus de place dans un monde o :

On va bientt renier pre et mre pour de lor (p.45)

Les gens ne sont plus eux-mmes. Ils ne respectent plus que largent. Largent et encore
largent ! Ils vendraient tout pour de largent (p.45) Certes. Comme je lai toujours dit,
nous sommes les garants de la tradition. Mais vieille bien sr ces pices dargent. Il y a des
trafiquants dobjets rares partout. Tout quitte le pays, sen va ailleurs on ne sait comment
mme les anciens coffres de bois. Il faut se mfier des camelots qui passent (p.44)

Vendre sa culture, son histoire, son patrimoine pour largent. Aujourdhui les jeunes cherchent
se vendre pour largent, pour se trouver lautre ct du rive. Le talent du sociologue qui
cherche analyser les causes et les effets se voient dans les conversations interactionnelles
entre le vieux et sa vieille, qui essayent dapprocher les phnomnes socioculturels, qui les
inquitaient et qui ncessitaient une tude urgente. Quoique ces conversations semblent
ordinaires elles sont lourdes au niveau smantique, surtout lorsquelles traitent les maux et les
soucis Historiques ou lorsquelles sexpriment sur le conflit des gnrations, la crise de
lidentit ou autres.

Le conflit des gnrations

Un phnomne socioculturel vident qui distingue chaque poque et que Mohammed


Khar -Eddine prend le temps dexposer et danalyser dans son roman : Il tait une fois un
vieux couple heureux, est celui du conflit des gnrations. Dabord, il met laccent sur la
solidarit qui nexiste plus mme entre les membres de la mme famille. Cette tendance de
lindividualit gocentrique qui caractrise dsormais la socit marocaine. Cette envie de
voler avec ses propres ailes, de partir, de vivre ailleurs, de senrichir loin du pouvoir paternel,
dimiter les europens, de trouver dautres manires dexister :

Seuls les jeunes cervels, voulaient imiter tout prix leurs ans, allaient se perdre
ailleurs, abandonnant la fraiche les terres qui les avaient nourris et vu grandir (p.58)
Pour les anciens, les jeunes sont des ingrats. Pour les jeunes, ils ont le droit de changer leur
situation au lieu de rester coller la terre qui ncessite un travail fou et rgulier. Les villageois
trouvent que les jeunes ns en Europe sont encore pires :

Ces enfants ns en Europe sont les pires qui soient, dit le vieux Bouchab. Ils ne respectent
mme pas les morts. Jen ai vu une bande qui profanait les tombes. Ils ne parlent mme pas
notre langue ? (p.59)

En effet, il y a un grand problme de communication entre les gnrations. Les jeunes sont
mal copris et mal vus par les anciens qui narrivent pas saisir leur pense, leurs
transformations subites, leurs tentatives de se trouver dans un monde sans frontires o tout se
complique et se croise. Mohammed Khar Eddine a bien indiqu ces mutations que les
jeunes subissent sans arrt et qui modifient leur faon dagir et de voir les choses. Il anticipe
dj sur le rle de la technologie et la place quelle va occuper dans la socit

La crise de lidentit

Mohammed Khar Eddine voque dans son uvre : Il tait une fois un vieux couple heureux,
la crise de lidentit des jeunes marocains ns en Europe. Il semble que ces derniers sont
perdus dans un monde qui leur est compltement tranger mais dont-il appartient par
naissance. Draills, perdus, gars entre deux pays, deux origines, deux cultures, ils sont
devenus des dlinquants, des voleurs, des trafiquants :

Ils taient passes du tiers monde au quart monde sans mme sen rendre compte.
Condamns subir leur chance en Europe, ils ne pouvaient plus revenir au pays do ils
staient exils. Leurs enfants, incultes comme eux, rditrent le mme topo en lamplifiant.
Ils constituaient dsormais lessentiel de la population dlinquante et carcrale des pays
dEurope, car le trafic de stupfiants et le vol taient le seul mtier o ils excellaient. Un
mtier la porte des exclus de la socit industrielle, qui rejetait ces indsirables en des
banlieues surpeuples, dangereuses et sinistres. (p.59)

Une description loin de toutes imaginations fictives, qui montre la ralit des jeunes
immigrs qui nont pas de place dans une socit de comptences, de savoir, de civilisation et
de chances. Ces jeunes franais-marocains doivent supporter la consquence de leur double
identit, de leur couleur et leurs traits qui les relguent au second plan. Un rcit qui met les
points sur les i , qui montre la ralit dune gnration qui souffre pour trouver un sens
son existence, pour tracer les piliers dun futur sombre et sans issue. Un peuple errant qui a le
mal de vivre et de sadapter une patrie inaccessible.

Lisolement du milieu rural

Mohammed KharEddine noublie pas de dvoiler la ralit du milieu rural. Derrire


le village paisible et beau se cachent dautres ralits atroces. La vie difficile des villageois
qui doivent subir seuls les malheurs des annes de scheresse. La pauvret attaque le village
autrefois fascinant et prodigieux. Un milieu isol sans cole, sans route :

Mme les vagabonds de jadis avaient dsert la rgion. (p.150)


Pour Mohammed Khar Eddine : LEtat doit procder des fourrages coteux. Mais lEtat
est bien loin dici. Il ne nous entend pas et nous voit encore moins. (p.151)

Pour Mohammed KharEddine, les villageois nont pas davenir en ville. Seuls quelques
malins y parviennent (p.151). Pour lui, il y aura srement une explosion sociale relative
cette immigration illogique et collective des villageois vers les villes.

Il trouve que ce phnomne nest quune bombe retardement. (p.152)

Vers la fin de son uvre : Il tait une fois un vieux couple heureux, Mohammed
Khar- Eddine, nous incite travailler. Ce qui nous rappelle Le jardin mythique de Voltaire.
Le travail de la terre infconde, travailler pour vivre mme dans le dsert le plus aride est
lunique solution car, selon lui le plus heureux est celui qui attend, qui reste tranquille et
travaille pour vivre l o il se trouve. (p152-153)

ESQUISSE DANALYSE DUN ROMAN MAGHREBIN

1. Le Titre : Il tait une fois un vieux couple heureux

Le titre nous met dans une situation de confusion et de rves. Nous avons limpression
quil sagit dun conte magique, ou plutt que le livre fera lobjet dun conte qui
prendra en charge la narration dune histoire fabuleuse dont un couple ft heureux
malgr sa vieillesse. Un titre qui fait lobjet de plusieurs hypothses de lecture : Sagit-
il dun rcit magique o on raconte laventure dun hros la recherche de sa bien
aime? Y a-t-il des vnements fantastiques, des adjuvants, des opposants qui donnent
au rcit ce got du danger suspensif ? De quel couple sagit-il ? De quel bonheur ?
Quand et comment ce couple vieux ft-il heureux ? Le titre crit en jaune, en
Majuscules sur un fond sombre semble insinuer ce malheur dguis en bonheur
souhait ou perdu

1 Leffet de rel dans lincipit de luvre

Ancrage spatiotemporel : *La valle un endroit important qui contient les dcombres
des anciens et les nouveaux btiments modernes des riches. Lespace ici est un espace
double, qui met en valeur les ruines oublies en le comparant aux difices modernes.
Le temps reste imprcis dans la mesure o nous navons pas de dates
exactes : Depuis son retour au pays

*Le souk hebdomadaire tous les mercredis

Prsentation du personnage essentiel :

o : un homme qui a sillonn le Nord et une partie de lEurope. Littr et crivain.

La femme : sa femme dont-on ignore normment de choses, est soumise, cite en


mme temps que lne et le chat de la maison.
Lintervention du narrateur : Le narrateur intervient, pour commenter et prciser
quelques caractristiques relatives Bouchab. Cette intervention donne lincipit cet
effet de rel, car nous avons limpression que le narrateur connaissait Bouchab et sa
vie comme il est capable daffirmer ou de nier certains faits : Rien de tout cela
ntait tout--fait juste ; seul le vieux Bouchab dtenait le secret de sa jeunesse
enfuie. (p.7)

Lincipit commence par une question qui le diffrencie dun conte. Il sagit dun rcit
qui raconte une histoire ordinaire dun vieux couple, et non dun rcit merveilleux o
le fantastique et limaginaire font la rgle.

1 La fonction de lincipit

Lincipit de luvre identifie lnonc comme une narration romanesque : loin du


conte et ses particularits. Ainsi, lincipit dtermine la nature du texte lire, car il
sagit bel et bien dun roman maghrbin. Lincipit ancre le rcit dans le temps et dans
lespace en prsentant son personnage essentiel Bouchab qui fait lobjet des
discussions des villageois, qui leur inspirent respect et admiration. Lincipit met ainsi
le rcit en marche et alimente ses premiers fils narratifsIl joue une fonction
dramatique et prsentative. Nous avons limpression quil sagit dune vritable
histoire car le narrateur dcrit avec prcision et authenticit la valle et ses mutations
comme il introduit ses actants avec justesse en intervenant dans le rcit, pour
commenter leur parcours narratif.

1 Lorganisation du rcit

Le Roman Il tait une fois un vieux couple heureux, revient souvent sur la relation
paisible des vieux. Un couple rsign et heureux sans enfants. Cependant, il y a ce
retour en arrire pour raconter le pass de Bouchab et ses aventures. Le rcit se mle
aussi dautres mini-rcits enchsss comme celui de chats, de la prostitution, de
tremblement de terre dAgadir

Nous constatons que le chat occupe une place importante dans la vie des vieux qui
remplacent souvent un chat par un autre si le premier est mort. Le chat est lenfant que
le couple na pas pu avoir. Il est ador et vnr par les vieux. Lors du tremblement de
terre dAgadir, le chat a tmalade, car il a senti ce danger. Ces rcits alimentent la
narration et donnent au roman sautres dimensionsEn effet le couple est relgu au
second plan. La vie de Bouchab se trace titre individuel sans accorder la veille un
statut ou une prsence narrative

1 La part de la tradition et de la culture dans : Il tait une fois un vieux couple


heureux

La part de la tradition est dominant dans le roman Il tait une fois un vieux couple
heureux. Le titre qui revient dans le texte : Il tait une fois de plus sur la terrasse.
Lt tirait presque sa fin les moissons avaient tait bonnes Cela est expliqu
par la tradition et la croyance des gens : Dieu est entrain de lapider le Diable.
Cela veut dire que tout va bien, car les treshumains sont tolrants et bons ce qui
loigne le Diable. Mais, lorsque le tremblement de terre a dtruit la ville dAgadir
dautres explications surgissent. Cette fois-ci, elles sont associes la prsence des
trangers ; qui ne respectent personnes et qui profitent de tout le monde en exploitant
leur besoin : Chleuhs aussi, ne sont plus comme avant, ils ont perdu leur dignit
devant largent : Ils ont succomb largent, qui est le vritable instrument dIblis
quil soit mille fois mille fois maudit ! Aucune explication scientifique nest
prsente; tout sexplique par la tradition et la religion. Agadir est corrompue par les
touristes : Le touriste europen ny venait que pour satisfaire ses perversions
sexuelles. (p.51) do le tremblement de la ville.

1 Le conflit des gnrations : un phnomne socioculturel

Le conflit des gnrations se manifeste clairement dans cet extrait. Ce contraste entre
les pres et les fils, ce changement des ides, de la pense et de la faon de voir les
choses. Ce lien avec la terre nest plus le mme. Les jeunes prfrent quitter le village
pour aller ailleurs la recherche de la vie facile et de nouveaux principes. En effet, la
solitude et le labour de la terre ne sont que des mots anciens sans
valeur : Lancienne solidarit nexistait plus depuis lindpendance. Ils (les
jeunes) devaient se dbrouiller tous seuls pour trouver un emploi. (p.58)

Les jeunes ne croient plus la terre, lthique, aux principes de la


citoyennet, parce quils prfrent quitter le pays pour senrichir ou trouver un travail
plus confortable dans les grandes villes du royaume ou ailleurs: Ils devenaient
garons de caf, chasseurs dhtel. Dautres russissent quitter le pays pour La
France, La Belgique ou la Hollande.(p.58)

Les vieux commencrent se plaindre des jeunes qui ne respectent plus rien, qui
veulent se librer de leurs origines, de leurs coutumes, de leurs traditions et de leur
terre do le conflit entre ceux qui prfrent rester leur pays et ceux qui esprent
partir pour amliorer leur vie. Il y a ceux qui russissent et il y a ceux qui chouent, ce
qui les poussent vivre en Europe dans une misre dguise. Les enfants ns en
Europe sont encore pires car ils se perdent dans un autre monde qui nest pas le leur.
Ils sont rejets dans des lieux indsirables : Ils constituaient dsormais lessentiel
de la population dlinquante et carcrale des pays dEurope. Lauteur soulve ici,
un problme socioculturel des immigrs ordinaires qui vivaient la marge de la
socit franaise avec leurs dchances et leurs souffrances. Leur prsence au sein
dun monde qui leur est tranger, les pousse entrer en conflit avec les gnrations
venir, qui sont galement des victimes double identit incarnant le choc des cultures
et de lexclusion.

1 Le choc des cultures et ses manifestations dans le roman

Les enfants du village sont des enfants ns en Europe. Ils ne respectent personne. Ils
parlent une langue trangre. Ils sont des petits voyous, des diablotins. Ces adjectifs
dont Bouchab qualifie ces enfants montrent le choc des cultures, parce que les
villageois ne comprennent plus cette nouvelle gnration qui leur semble bizarre. Des
enfants qui nont pas peur de la mort, qui profanait les tombes : Ils nont mme pas
peur de la mort, et encore moins de ses symboles ! Ils se conduisent tout- -fait
comme des charognards. Je me demande ce quon leur apprend l bas dans les
coles. (p.60)

Les vieux narrivent plus concevoir les attitudes des jeunes et leurs manires de
sexprimer. Cette anarchie dans leurs expressions les met dans un tat de colre. Ils
refusent dadmettre que le monde change, que les cultures sentremlent et donnent
dautres modes de vie, de pense et dautres formes dexistence.

Les enfants viennent avec leur double identit, leur double culture. Ils sont le rsultat
dun choc culturel qui narrivent mme pas en saisir les composantes. Les jeunes ici
sont dvaloriss, relgus au second plan. En effet, toujours les vieux essayent de se
distinguer par leur sagesse et trouvent du plaisir dvaloriser et sous-estimer les
jeunes.

1 Le rquisitoire dans le roman

Lauteur fait un rquisitoire si fort o il accuse, quoique dune manire indirecte, les
riches qui ne donnent de limportance qu leur confort et leur richesse sans se soucier
des pauvres et leur misre.

Le vieux est contre ce changement technologique qui met lcart la civilisation, les
principes et les traditions des villageois : Adieu la lampe huile, les bougies !
Adieu le Kanoun ! Llectricit a tout chang.(p.86)

Dans une argumentation simple, le vieux dbute travailler son rquisitoire


implicite : Les riches ne regardent que les chanes trangres : amricaines et
europennes, turques, gyptiennes Jamais la tlvision nationale, quils trouvent
sinistrement pauvre ! Pauvre comme les pauvres quils mprisent ! (p.86)

Les riches mprisent les pauvres, leurs chanes et leurs maisons. Ils ne veulent pas
ressembler eux. Ils veulent se distinguer par leurs biens, leurs proprits et leurs
voitures. Les villageois pauvres nont pas de place dans le monde des riches.

Les pauvres toujours les mmes colls leur terre misrable, leurs maisons
archaques. Le village est dsormais fait par les riches et pour les riches, quoiquils y
habitent un mois par an.

1 La critique sociale et ses manifestations dans le roman

Le rquisitoire cache une critique sociale trs intressante, qui se manifeste dans le
grand cart qui spare les pauvres et les riches. Le narrateur et pour une socit
quilibre qui donne aux pauvres les moyens de senrichir et dexister leur tour. Le
pnible est que les riches accaparent les moyens de production et dans des clans, ils
continuent senrichir en exploitant les pauvres. Les riches ont tout pour vivre et pour
profiter pleinement de la vie. Les pauvres eux sont incapables de subvenir leurs
simples besoins, personne ne pense leur avenir ou celui de leurs enfants. Toujours
dvors par la misre et le mpris

Le narrateur voque galement un phnomne social trs important, celui de


lmigration vers les villes surtout durant les saisons de scheresse. Le narrateur est
contre lvacuation des villages. Il en souffre profondment : Le vieux, qui avait vu
cette dsolation, se demandait si son propre village allait connatre le mme sort
(p.150) Il ne veut pas que les gens abandonnent leurs terres, leurs maisons pour
peupler les villes en vivant dans la misre. Il veut que lEtat prenne en charge ce genre
de villages en lui procurant laide ncessaire, afin que les villageois puissent rester
dans leurs villages : Il faudrait que lEtat nous vienne en aide, en procdant par
exemple, des forages coteux. Mais lEtat est bien loin dici. (p.151) Un Etat qui
ne met pas en considration le villageois et son tat critique. LEtat ne met pas dans
ses plans ou ses projets une stratgie pour sauver la situation et aider les villageois
dpasser leur crise.

Le vieux trouve que lmigration aux villes est un vritable danger une bombe qui ne
tardera pas exploser, quil ne faut nullement quitter ses terres et ses maisons pour
affronter un avenir sombre et bizarre o seuls les malins peuvent russir : La ville ?
Une future et toujours possible explosion sociale, une bombe retardement. Un
volcan endormi qui peut se rveiller nimporte quand et tout mettre en pices.
(p.152) Le narrateur refuse cette vacuation des villages qui trouve insense. Il faut
selon lui, saccrocher au travail, la vie mme dans le dsert le plus aride.

1 La vise ou la porte du roman

Mohammed Khar-Eddine dans son uvre : Il tait une fois un vieux couple heureux a
essay depuis lincipit de son roman mettre en relief la situation des villageois et
leurs problmes. Il voulait que LEtat commence penser cette classe socialesouvent
marginalise, isole, voire relgue au second plan.

La situation des femmes qui narrivent pas spanouir dans un monde fait par les
hommes et pour les hommes. Des femmes qui travaillent la terre, font des enfants et
prparent des tajines qui sombrent dans lanonymat et loubli.

Les villageois sont sduits par limmigration en Europe, par largent et la vie facile. Ils
ne pensent plus travailler la terre qui leur semble infconde et ingrate. Soit ils partent
pour lEtranger en quittant jamais leur pays pour faire fortune ailleurs. Soitils
vacuent les villages pour atterrir aux grandes villes la recherche de la vie facile qui
peut tourner en drame.

Les immigrs pour le narrateur, sont des ingrats puisquils ne comprennent pas la vie
et ses valeurs au srieux. En Europe, leurs petits sont bouleverss par deux pays
opposs. Ici, ils participent consolider la crise sociale et la pauvret une fois chous
raliser leurs rves dans les grandes villes marocaines.

Le narrateur veut que lEtat intervienne pour sauver la civilisation traditionnelle, le


village ancien et ses ruines, pour empcher la mort des terres et des maisons
archaques. Il veut que les villageois puissent leur tour travailler leurs terres sans
avoir peur de la faim. Il cherche protger la beaut naturelle, la beaut de cultiver
son pain et de pouvoir manger ce que sa main a pu faonner, voire travailler avec soin
et avec dignit.

De l, le bonheur dans Il tait une fois un vieux couple heureux, na pas de place car le
titre ne relate nullement le contenu du livre ou la situation du couple, qui souffre le
martyre sans enfants, et qui subit le changement dun monde dont-il est exclu et
marginalis.

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