Le Rite Ecossais Ancien Et Accepte

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LE RITE ECOSSAIS ANCIEN ET ACCEPTE

Il serait prétentieux d'aborder en quelques pages un Rite aussi complexe que le


R.E.A.A. ,aussi tenterons nous de résumer son histoire et la spécificité qu'il incarne
au sein de la Franc-Maçonnerie traditionnelle.

DEFINITION
1) Le mot Ecossais est difficile à définir, et il évoque un système concurrent
du système anglais,né en Ecosse au XVI ème siècle qui est apparu en France
dans le milieu des Stuartistes réfugiés à St Germain en Laye, à la fin du 17 ème
siècle, d'où ont essaimé de nombreuses Loges à Paris , telle le Louis d'Argent,
avant l'apparition d'une autre Maçonnerie d'origine anglaise. Le terme écossais a
été relié secondairement au système de Hauts Grades, l'Ecossisme, apparu aux
environs de 1740, sans référence géographique.
2) Le terme Ancien se rapporte à la Grande Loge des Anciens, fondée par
Laurence DERMOTT, mais après la Grande Loge moderne de Londres. Les
rapports très complexes entre Modernes et Anciens rendent difficile toute
distinction nette. Cependant, on peut reconnaître aux Anciens une spécificité
traditionnelle, éprise de rigueur.
3) L'épithète Accepté , se réfère à l'acceptation dans les Loges symboliques,
de membres extérieurs au Métier, dirigeants politiques, aristocrates,... ce qui a
certainement favorisé l'essor des Hauts Grades de l'Ecossisme.

HISTOIRE DU RITE
1 ) L'écossisme naît donc en France dans la deuxième moitié du 18ème siècle, et
dans une Europe en plein bouleversement politique et social, alors que se répand la
Maçonnerie anglaise sur le continent. Les partisans des Stuart créent des Loges, qui
seront à l'origine de la G.L. Provinciale de France en 1736.

2) Le Chevalier Ramsay, d'origine écossaise, qui s'installe en France, se convertit


au catholicisme, devient disciple de Fénelon, va donner une impulsion nouvelle à la
F.M. Dans un discours retentissant prononcé en 1737, il se propose de donner à la
F.M. une dimension universelle, une philosophie et une spiritualité associées à la
fraternité, qui transcenderaient les patries pour « réunir les esprits et les coeurs ».
Cependant, la paternité de Ramsay dans l'histoire du processus fondateur de
l'Ecossisme reste très discutable, même s'il a ouvert un nouvel espace spirituel pour
une maçonnerie spéculative, d'inspiration chevaleresque, autre que celle du Métier,
et une règle de réflexion et d'action.

3) Le Rite de Perfection.
La naissance du Rite aux environs de 1740 est l'oeuvre du Comte de Clermont, qui
crée un grade supérieur au 3ème degré, celui de Maître écossais, puis d'autres degrés
liés aux conséquences de la cérémonie du troisième degré..
C'est ainsi que naît le Rite de Perfection en 25 degrés qui réunit de 1740 à 1760 des
degrés apparus en divers lieux de France, mais très semblables. En 1780 le Rite de
Perfection du Chapitre de Clermont devient le Conseil des Empereurs d'Orient et
d'Occident.
L'organisation du Rite est un système aristocratique et hiérarchique. La Loge n'est
plus la propriété de son Vénérable.La Loge écossaise désigne un président pour une
année et tire sa légitimité de la possession de constitutions issues d'une Loge mère
qui transmet les rituels qu'elle utilise.
L'Ecossisme reçoit tous les apports de la Tradition immémoriale, et la démarche
écossaise propose une véritable progression structurée vers la Connaissance.
Il s'agit, au-delà de la construction du Temple, de s'élever vers le Divin, « parce que
Dieu est en l'Homme,et que cette immanence est le reflet de sa transcendance »
rappelle Paul NAUDON.

4) La naissance du Suprême Conseil de Charleston.


En même temps qu'il se développe en France, l'Ecossisme franchit l'Océan et
essaime en Amérique, grâce à Etienne MORIN, initié probablement à Bordeaux, qui
effectue de nombreux voyages aux Antilles et fonde à St Domingue une Loge
écossaise et symbolique . Après avoir participé aux Constitutions de Bordeaux, il
présente à St Domingue le Rite de Perfection en 25 degrés. Son député FRANCKEN
part en Amérique du Nord en 1767, et il patente une Loge de Perfection et un Grand
Chapitre de Sublimes Princes du Royal Secret.
C'est de lui que part le R.E.A.A. puisque FRANCKEN patente, à son tour, les « onze
gentlemen de Charleston ». John MITCHELL et Frédéric DALCHO constituent en
1801 le premier Suprême Conseil (S.C. ) dont est membre le Comte Auguste DE
GRASSE-TILLY, arrivé à St Domingue en1789 pour régler un héritage, et gendre de
DELAHOGUE

5) Auguste DE GRASSE-TILLY, va fonder,en 1802, un S.C. des Indes Occidentales


françaises ,(S.C. des Iles Françaises d'Amérique du vent et sous le vent) . Il revient
en France pour fonder le Suprême Conseil pour la France, en 1804, et essaime
plusieurs S.C. en Europe.
Rappelons que GRASSE-TILLY avait été initié à Paris dans une Loge où il fréquenta
notamment LA FAYETTE.
En 1806, il laisse la place à CAMBACERES. Le Suprême Conseil sera dirigé
ensuite par le Duc DECAZES , qui redonne vigueur au Rite, et par d'autres
Souverains Grands Commandeurs, dont VIENNET, qui auront à lutter contre
diverses tentatives de mainmise.
En 1894, le S.C. délègue ses pouvoirs sur les trois premiers degrés à la Grande
Loge de France ( G.L.F.), mais en 1965, devant le refus de la G.L.F. de rompre ses
relations avec le Grand Orient (G.O.), un millier de Frères quittent la G.L.F. et
rejoignent la Grande Loge Nationale Française (G.L.N.F.)
Le S.C. de la G.L.F. est déclaré irrégulier par les S.C. américains, canadien, et
hollandais. Le Suprême Conseil pour la France est alors organisé par le Souverain
Grand Commandeur Charles RIANDEY, et souché sur la G.L.N.F.

6) Les fondements constitutionnels des Suprêmes Conseils du R.E.A.A.


Ils reposent sur les Constitutions de 1762 et les Grandes Constitutions de 1786,
qui confèrent, exclusivement, leurs caractéristiques et leur entité aux Suprêmes
Conseils.
-Les Constitutions de 1762 ( Bordeaux) créent et organisent ce qui doit être une
société d'initiés, le Rite qui est divisé en 25 degrés, et en 7 classes, avec une
répartition des pouvoirs visant à créer un Centre relié à la Tradition, et dont dépend
tout le Rite.
-Mais à la suite de conflits et de rivalités, une nouvelle organisation, dirigée par
Frédéric ii de Prusse ,crée, à Berlin, les Grandes Constitutions de 1786, seules lois
fondamentales de l'Ordre, qui ordonnent la hiérarchie en 33 degrés, affirment les
valeurs essentielles du Rite, et représentent le ciment de tous les S.C. du R.E.A.A.
unis sous la même devise : « Ordo ab Chao, Deus Meumque Jus ».
SPECIFICITE DU R.E.A.A.

1) Sources du Rite .
De nombreux courants initiatiques ont participé à la structure du Rite, et on peut
affirmer que l'Ecossisme a reçu des apports de nombreuses Traditions:
Egyptienne avec son rameau hermétique
Grecque, orphique et pythagoricienne
Hébraïque avec sa branche Cabbalistique
Chrétienne avec l'Alchimie
Et surtout Chevaleresque à travers les influences teutoniques et templières.
Le R.E.A.A. réalise, en fait, une rigoureuse unité totalité, et se définit comme un
Ordre initiatique, traditionnel, maçonnique, chevaleresque, international, et
universaliste.

2) Le but.
Le but final du R.E.A.A. est , comme le précisent les Grandes Constitutions de 1786,
« l'union, le bonheur, le progrès, et le bien être de la famille humaine, en général, et
de chaque homme individuellement ».
La démarche initiatique du Rite se fait à la Gloire de Grand Architecte de l'Univers,
dont l'interprétation est du seul ressort de chacun, avec la présence en Loge du
Volume de la Loi sacrée, la Bible, ouvert sur l'Autel des serments.
L'initié entame une quête spirituelle, à travers la recherche de la Parole perdue, qui
transcende progressivement son individualité, et l'élève au niveau de l'absolu, en
réconciliant la matière et l'esprit, vers cette intelligence que l'on désigne comme le
Principe, vers ce que l'on peut définir comme l'état du Saint-Empire, dont le mythe
peut être considéré comme le fondement de l'Ecossisme.
Quelle que soit la complexité d'une telle approche, le Saint-Empire ,qui implique une
certaine idée de la Tradition et le sens de la réalisation spirituelle sur le plan
ésotérique, ne peut être dissocié d'une réalité historique qui a voulu réunir l'autorité
spirituelle et le pouvoir temporel.
Les débuts, l'histoire et la décadence du Saint Empire romain germanique,
s'inscrivent essentiellement entre l'aventure de Frédéric II de Hohenstaufen, au
treizième siècle, qui rêve la dimension spirituelle d'un Saint- Empire ,synthèse des
modèles perse, romain , byzantin et de l'islam, dont l'Empereur est le médiateur entre
le Ciel et la Terre, et Frédéric II de Prusse ,qui signe les Grandes Constitutions..
Comme le rappelait le T.ILL.F. Bernard Guillemain : « Deux traditions ,l'une politique,
l'autre spirituelle du Saint-Empire ont coexisté. Les Grandes Constitutions de 1786
formulent une version de la tradition spirituelle ».
C'est dire combien le concept d'imperium inspire progressivement les degrés de
l'Ecossisme, jusqu'à devenir le mythe du Saint-Empire, alors que s'éloigne le mythe
d'Hiram, et comme tout mythe, il nous invite à découvrir sa somme ésotérique, à
nous donner accès à une dimension autre, et à révéler l'immanence du Principe. Cet
empire chacun doit d'abord le construire individuellement, par la possession des
fonctions royale et sacerdotale, dans une tension permanente vers l'Absolu, mais
cette réalisation personnelle doit déboucher sur une action collective, créant une
fraternité à travers une vision sacrée du monde, vers l'unité des peuples et de la
société. Aussi bien sur le plan temporel que spirituel, l'Empire est un monde organisé
autour d'un centre.

3) La méthodologie.
La méthode écossaise est basée sur une conception traditionnelle de l'homme :
corps, âme, et esprit, et sur des voies de réalisation spirituelle correspondantes,
voies de connaissance, d'amour, et d'action, hiérarchisées mais en fait étroitement
mêlées.
La démarche initiatique écossaise, propose une progression lente et structurée vers
la Connaissance en trente trois degrés, qui sont autant d'états à réaliser, pour créer
dans l'être un certain degré de plénitude.
Ces états sont à l'image des voyages décrits par Dante, dans la Divine Comédie, et
ils amènent l'initié à des purifications successives, après des étapes de dégradation
puis de perfectionnement vers sa source, l'immanence divine reflet de la
transcendance. Cette progression passe par un développement harmonieux, et une
éthique élargie, bien au -delà d'une simple morale. Elle n'est nullement dogmatique,
et il appartient à chacun de chercher sa propre vie spirituelle en toute liberté, nul ne
pouvant se substituer à l'autre.
Le R.E.A.A., placé sous l'égide du G.A.D.L.U., a d'abord pour but de faire
comprendre l'ésotérisme des trois premiers degrés symboliques, qui demeurent des
degrés essentiels , et les Hauts Grades qui leur succèdent permettent d'approcher
progressivement l'ésotérisme des degrés symboliques, notamment à travers les
problèmes posés par la cérémonie du troisième degré.
La hiérarchie des trente trois degrés , pyramide avec base et sommet, se décompose
ainsi :
Les Loges de Perfection, ou degrés Salomoniens, ateliers du 4ème au 14 ème degré.
Les Chapitres, ateliers du 15ème au 18ème degré.
Les Aréopages , ateliers du 19 ème au 30 ème degré .
Les Tribunaux, atelier du 31ème degré.
Les Consistoires, atelier du 32ème .
Le Conseil suprême, atelier du 33 ème .
Cette hiérarchie est couronnée, par le Suprême Conseil qui détient, sous la direction
du Très Puissant Souverain Grand Commandeur, la responsabilité exclusive de la
conservation de la doctrine, et du gouvernement de l'Ordre , à l'intérieur comme à
l'extérieur de la Juridiction.
Un Atelier ne peut qu'examiner une demande ou une proposition, et formuler un avis.
Seul le Suprême Conseil a pouvoir de décision , et exerce une souveraineté
aristocratique.
Quant à ses rapports avec le monde profane, l'Ecossisme ne s'autorise pas une
intervention directe dans le monde. Tout le travail en Loge est basé sur un
perfectionnement constant de l'initié, et aucune discussion politique, confessionnelle,
ou autre n'est autorisée. Ce n'est pas pour autant que le maçon écossais doit
rechercher une vie érémitique, bien au contraire. Son travail de distanciation d'avec
l'événement, lui permet l'éthique et le recul nécessaire avant de s'impliquer
personnellement, et peut, en actualisant la voie intérieure, l'aider à devenir un
modèle.
Deux cents ans après sa création, le R.E.A.A. nous confirme aujourd'hui encore sa
fonction de gardien de la Tradition, et sa vocation à l'universel.
Henri Lustman Mai 2004

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