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Comprendre les équations de diffusion et de

réaction/diffusion

Laure Navarro
May 2018

Introduction
Au cours de cette troisième et dernière année de licence de mathématiques
au sein du Cycle Pluridisciplinaire, je présente dans ce mémoire les recherches
effectuées dans le cadre du cours d’introduction à la recherche que nous avons
reçu. Ce papier synthétise la connaissance acquise par l’entreprise de recherche,
à la fois autonome et supervisée par un enseignant chercheur. Le de stage que j’ai
choisi fut encadré par Emeric Bouin, chercheur en mathématiques dont le travail
se penche sur l’étude d’équations différentielles partielles et leur application à
la modélisation en physique et biologie.
La question biologique étudiée porte sur la propagation d’un trait phéno-
typique que l’on peut quantifier et qui évolue dans le temps et dans l’espace.
Nous verrons en effet l’étude d’EDP décrivant une invasion en milieu stable
notamment l’équation de la chaleur et l’équation de Fisher KPP.
La première, connue en physique sous le nom d’équation de diffusion, fut
introduite par Joseph Fourier pour décrire des phénomènes de propagation de
chaleur et d’évolution de la température. Joseph Fourier cherchait alors à déter-
miner la valeur de la température dans un milieu homogène, à partir d’une dis-
tribution initiale donnée sur la température dans le temps et l’espace. Les lois
de thermodynamique établies à l’époque l’amènent à postuler l’EDP suivante :

∂t u = α∆u
(1)
u(0, x, y, z) = u0 (x, y, z)

Avec ∆ = ∂xx2 2
u + ∂yy 2
u + ∂zz u opérateur Laplacien, u0 condition initiale donnée,
et α appelé coefficient de diffusion thermique.A l’aide de sa théorie des séries et
transformations, Fourier apporte une solution exacte à ce problème. Par la suite
cette équation permettra de modéliser la dispersion d’une certaine quantité de
matière de soluté dans une solution.
La deuxième équation est l’équation de Fisher-KPP (pour Kolmogorov-
Petrovski-Piskunov). Elle fut introduite en 1937 par le biologiste Fisher pour
décrire la propagation de gènes favorables dans une population ([1]). Les math-
ématiciens Kolmogorov, Petrovski et Piscounov ([2]) s’y intéressèrent aussi la

1
même année pour étudier la vitesse des flammes dans des problèmes de combus-
tion. Cette équation présente un terme de source/saturation, à la différence de
la précédente, où la quantité de matière est constante et se déplace par diffusion.
L’équation de Fisher-KPP, elle, se présente comme une éxtension non-homogène
de l’équation de la chaleur :

∂t v = α∆v + f (v)
(2)
v(0, x, y, z) = v0 (x, y, z)
où f est ici une fonction dite de Fisher, constituant le terme non-homogène.
Elle possède donc les propriétés mathématiques nécessaires à sa fonction de
source/saturation.

L’étude que j’ai menée durant ce stage de recherche a donc porté sur deux
équations, proches de l’équation de transport classique et de l’équation d’onde.
Chacune de ces équations induit un changement dans le temps et l’espace de
notre quantité d’intérêt. Il est ainsi possible de définir un "mouvement", et de là,
M. Bouin m’a orienté vers l’étude de la détermination de la vitesse de propaga-
tion de solutions progressives de l’équation de Fisher-KPP. Pour soulever cette
question il fallut d’abord comprendre les différents termes présents. Ensuite il
fallut voir comment obtenir des solutions présentant un front de propagation,
solutions pertinentes dans l’étude des systèmes biologiques.

La synthèse apportée par ce mémoire se décomposera en trois parties. Une


première partie présentera une méthode de détermination de solutions de l’équation
de la chaleur. Par la suite, nous verrons une manière approchée de montrer
l’existence de solutions à front de propagation, et nous verrons un moyen de
définir la vitesse de propagation limite de ces solutions. Afin de déterminer
la vitesse limite des solutions, nous verrons une méthode d’encadrement de la
solution par deux solutions dont la vitesse est proche d’une valeur de la vitesse
conjecturée.

1 Equation de diffusion : méthode de résolution


L’équation de la chaleur est une équation aux dérivées partielles sur une fonction
scalaire u : Rd × R → R se présentant sous cette forme :

∂t u = α∆u
u(0, x, y, z) = u0 (x, y, z)
Le coefficient α, nécessaire en physique pour des raisons d’homogénéité, ne
sera pas mentionné dans les prochains calculs. u0 est une condition initiale
fonctionnelle sur l’espace, qui nous donne une distribution du scalaire u au
temps 0. Nous verrons que cette condition initiale est très déterminante quant
au comportement des solutions.
Grâce à des calculs de transformées de Fourier, nous verrons que l’équation
peut se réécrire sous la forme d’une équation différentielle sur le temps, linéaire

2
du premier ordre à coefficients constants, ce qui simplifie grandement sa résolu-
tion. Nous verrons ensuite, après avoir justifié son utilisation, que nous pouvons
procéder à la transformée de Fourier inverse de la solution obtenue, pour en
déduire une solution de l’équation de la chaleur. Nous justifierons également
l’unicité d’une telle solution à la fin de cette partie.

1.1 Transformée de Fourier de l’équation


Une telle équation peut se résoudre différemment selon si elle est étudiée en 1D,
en régime stationnaire (où l’on cherche une solution de la forme u(t, x, y, z) =
f (t)g(x, y, z)) ou instationnaire. La méthode que nous nous proposons de donner
ici ne fait pas de supposition sur la stationnarité de la solution. En revanche elle
nécessite que la fonction recherchée, à temps t quelconque, u(t, .), que l’on notera
ut , soit dans L1 (R) ce qui nous assure immédiatement que sa transformée de
Fourier existe. Nous supposons également que u0t , u00t , ∂t u, et ubt , sa transformée
de Fourier, sont dans L1 (R), et faisons l’hypothèse de continuité de u0 . Pour
simplifier les calculs, nous nous placerons en 1D.
Cette partie consistera à montrer que si u est une solution de l’équation (1),
elle vérifie :
 d
b(t, ω) + |ω|2 u
dt u b(t, ω) = 0
(3)
u
b(0, ω) = uc0 (ω)
Tout d’abord, nous allons montrer un premier résultat :
Proposition 1 1.1 Soit f : R → R intégrable, deux fois dérivable, et de dérivées
premières et secondes dans L1 (R). On a l’égalité :

fc00 = −ω 2 fb (4)

Preuve : Tout d’abord, l’appartenance à L1 garantit l’existence des transformées


de Fourier.
Ensuite, soient M1 , M2 deux réels. Par intégrations par partie successives :
Z M2 Z M2
−ixω 00 −ixω 0
e f (x) dx = [e f (x)]M2
M1 + iω e−ixω f 0 (x) dx
M1 M1

Z M2
= [e−ixω f 0 (x)]M
M1 + iω[e
2 −ixω
f (x)]M
M1 + (iω)
2 2
e−ixω f (x) dx
M1

Les fonctions f’ et f étant dérivables, sont continues, et sont intégrables.


Ainsi, leur limite aux infinis est nulle. Donc par passage à la limite lorsque
M1 → −∞, M2 → +∞, et par multiplication par √12π on obtient (3).

En remarquant que pour tout réel x, t, on a ω, |e−ixω ∂t u(t, x) dx| ≤ |∂t u(t, x)|
avec u partout dérivable en t, et mesurable en x car L1 , voit que (si de plus on a

3
une domination sur la dérivée en t)Rl’on peut utiliser le théorème de dérivation
sous le signe intégrale et ainsi, t 7→ R e−2iπxω u(t, x) dx est dérivable sur R et
Z Z
∂ ∂
∀ω ∈ R, ∀t ∈ R e−ixω u(t, x) dx = e−ixω u(t, x) dx (5)
∂t R R ∂t
autrement dit que la TF de la dérivée par rapport à t de u correspond a la
dérivée de la TF de u.

Passons à la transformée de l’équation 1. Par linéarité, on obtient :

∂u
c 2u
∂d
(t, ω) = (t, ω)
∂t ∂x2
En utilisant pour le premier membre le résultat (4), et pour le deuxième mem-
bre le résultat (3), on obtient bien l’équation (2), dont les conditions initiales se
trouvent trivialement.

On se ramène ainsi à une équation différentielle sur le temps, dont la solution


est exactement : 2
u c0 (ω)e−ω t .
b(t, ω) = u (6)
Comme annoncé dans l’introduction, on voit que la transformée de Fourier de
la distribution spatiale initiale u0 apparaît.

1.2 Retour à la variable d’état


Nous avons alors obtenu une solution spectrale de notre inconnue fonctionnelle
et désirons à présent en déduire par le calcul le signal exact dont elle provient.
Des propriétés de la transformation de Fourier inverse vont nous être utiles
dans ce paragraphe. Pour cela nous allons émettre plusieurs hypothèses sur les
propriétés d’intégrabilité de la distribution initiale.
Tout d’abord, analysons l’expression (5). Nous voyons que la solution obtenue
est le produit d’une transformée de Fourier et d’une exponentielle gaussienne.
En nous rappelant que les fonctions gaussiennes restent gaussiennes par trans-
formée de Fourier, nous obtenons donc un produit de transformée de Fourier,
qui, selon certaines conditions, se trouve être la transformée d’un produit de
convolution.

Proposition 2 1.1 :
2
1) Pour α réel strictement positif, en notant Gα la gaussienne e−αx , on a :

cα = √1 G 1
G (7)
2α 4α

2) Si f est une fonction C1 (R) et L2 (R), alors

f ∗ Gα = F −1 (fb.G
cα ) pp. (8)

4
où l’opérateur ∗ : L2 ×L2 → L∞ est le produit de convolution, et F −1 : L2 → L2
la bijection réciproque de l’automorphisme transformée de Fourier F : L2 → L2
définie par le théorème de Parseval-Plancherel.

En revenant à notre solution (5), et en supposant de plus que u0 est de carré


intégrable, on peut alors appliquer la proposition précédente avec α = 4t1
et

f = 2α u0 , ce qui nous donne :
2
∀x ∈ R, u(t, x) = F −1 (c
u0 .ω 7→ e−ω t )(x)
\u0 d
= F −1 ( √ G 1 )(x)
4πt 4t
1
= √ u0 ∗ G 4t1 (x)
4πt

1.3 Noyau de la chaleur et solutions


Il n’est pas immédiat de voir que cette fonction est bien une solution. Pour le
voir il faut oraniser autrement les termes en jeu, et raisonner sur les fonctions
qui composent cette nouvelle forme. Ainsi, nous pouvons voir que la fonction
trouvée et exprimée ci-dessus peut aussi s’écrire :

∀x ∈ R, u(t, x) = u0 ∗ ht (x) (9)


1 − x2
∀(t, x) ∈ R+ × R, ht (x) = √ e 4t
4πt
ht est une fonction importante, car elle constitue le noyau de cette équation,
c’est-à-dire que pour une distribution initiale des plus simples, par exemple une
indicatrice d’intervalle réel fini, la solution sera en ht . Nous ne mentionnerons
pas les propriétés nécessaires pour montrer que la fonction précédente est bien
solution de l’équation de la chaleur.
Il est cependant important de noter, bien que la preuve n’en sera pas faite,
que pour une fonction u0 donnée, la solution est unique.

Dans ce qui précède nous avons fait des hypothèses sur l’intégrabilité des
fonctions en jeu de sorte à pouvoir manipuler leur transformée de Fourier, et
autre. Ces hypothèses, n’étant nécessaire que pour la preuve de la forme de
la solution, peuvent se contourner. Prenons u0 (x) = 1x60 , fonction que l’on
retrouvera dans la prochain paragraphe. Notons que cette fonction n’est pas
L1 . En revanche, u0 ∗ ht (t, x) est bien défini, car u0 est dans L∞ . Il est possible
de montrer que u(t, x) = u0 ∗ ht (t, x) est bien une solution de la chaleur malgré
les hypothèses d’intégrabilité manquantes sur u0 . Ainsi nous aurons que l’unique
solution à l’équation de condition initiale u0 (x) = 1x60 est :
y 2
√1 e− 4t
R
u(t, x) = 4πt
1
R x−y60
dy
R ∞ − y2
= √1 e 4t dy
4πt x

5
Notons que dès lors que t > 0, la fonction est non-nulle partout, bien qu’à
condition initiale elle soit nulle sur une moitié de l’espace. Ainsi une solution
de l’équation de la chaleur implique dès le premier temps à se répandre partout
dans l’espace. Cette dernière observation nous sera utile pour la suite.

2 La réaction/diffusion : Equation de Fisher-KPP


L’équation de la chaleur ne supposait qu’un terme de diffusion. Dans les mod-
élisations nombreuses qui sont faites pour une condition initiale en dirac, nous
observons le fait qu’aucune quantité n’est ajoutée à la quantité initiale, seule la
concentration de matière change localement. En revanche, l’équation de Fisher
comprend un terme supplémentaire de variation de la quantité de matière. Rap-
pelons de nouveau la forme de l’équation en 1 dimension sur l’espace :
 2
 ∂t v = ∂xx v + f (v)
v(0, x) = v0 (x) (10)
f f onction de F isher − KP P

La fonction f , dite de Fisher-KPP est une fonction et dérivable sur R possédant


les propriétés suivantes :

 f (0) = f (1) = 0
f 0 (1) < 0 < f 0 (0) (11)
0 < f (v) < f 0 (v)u, 0 < v < 1

Pour plus de simplification nous pouvons supposer que f 0 (1) = −1, f 0 (0) = 1.
On voit ainsi que proche des endroits où v(t, x) est nul, la fonction f (v(t, x))
croît, dépassant strictement 0 et induisant immédiatement une contribution à
la croissance de v dans le temps, donc un apport en quantité de matière. On
appelle alors ce phénomène une "source": la matière, provenant d’un point où
la dérivée par rapport au temps est plus grande qu’ailleurs, y est créée comme
par une source.
Cette matière se propage ensuite de proche en proche par le phénomène de
diffusion.
Aux endroits où v(t, x) se rapprochera de 1 dans le temps et l’espace, l’effet
sera inverse par diminution du terme f (v) au voisinage de 1. La croissance de
v(t, x) ralentira ce qui crée ainsi une saturation : plus la quantité de matière
s’agglutine en un x fixé, se rapprochant quantitativement de 1, moins la source
y transmettra de la matière.
Ainsi nous pouvons d’emblée prévoir qu’aux endroits où matière est absente
(v = 0) la source contribuera à en apporter, et aux endroits où la matière se
concentre de trop (v proche de 1), elle ne s’y ajoutera pas davantage. Ceci
nous garantit pour la suite que [0, 1] est stable par l’équation : toute fonction
dont la condition initiale prend ses valeurs dans [0, 1] prendra à l’avenir toutes
ses valeurs dans cette intervalle. Je n’ai présenté ici qu’une heuristique du
phénomène, mais ce résultat est bien connu dans la littérature. Aussi pouvons
nous le trouver sous le nom de principe du maximum ([5], [7], [8], [10]).

6
Nous disposons donc de résultats analytiques quant au comportement de la
fonction. Cependant, le terme non-homogène rend plus difficile l’étude de cette
équation. Il n’existe donc pas de méthode appropriée pour trouver des solutions
générales. En revanche, en équation différentielle, il est possible de postuler
l’existence de certaines formes de solutions de sortes à modifier l’équation et re-
tomber sur une équation différentielle ordinaire. Nous verrons ainsi dans cette
partie comment montrer l’existence de solutions progressives à front de propa-
gation selon certaines conditions sur la vitesse. Nous verrons alors une approche
de la linéarisation en EDP.
Nous nous intéresserons au calcul de la vitesse limite. Pour ce faire nous
verrons une méthode d’encadrement intéressante, car pouvant faire écho à des
éléments importants vus en cours d’EDO de licence, et pouvant être élargi au
domaine des EDP.

2.1 Existence de solutions progressives non-oscillantes de


type front de propagation
Nous cherchons donc des solutions progressives à front de propagation. Il s’agit
de solutions positives décroissantes, donc ne présentant pas d’oscillation, et
vérifiant : 

 v(t, x) = w(x − ct), c > 0, (t, x) ∈ R+ × R
 w(y) → 1, y → −∞


w(y) → 0, y → +∞ (12)
w(y) ∈ [0, 1] , y ∈


 R
 0

w (y) < 0, y ∈ R
Nous voyons que l’argument en x−ct correspond bien à une propagation. En
effet, pour une valeur w(a) prise par w, nous voyons que sur la droite x = a + ct,
v(t, x) = w(a). Ainsi lorsque le temps croît sur cette droite, la valeur w(a) se
déplace vers les x croissants, ce qui correspond donc bien à une propagation car
valable pour n’importe quelle valeur prise par w.
Par ailleurs, par les hypothèses, nous cherchons alors des fonctions qui sat-
urent à 1, décroissantes selon x à t fixé, croissantes selon t à x fixé. Notons que
la fonction f modélise bien le rôle d’une invasion : si y = x − ct, on a bien qu’au
temps long la quantité v atteint saturation presque partout (voir Fig.1 Annexe)

Afin de trouver une solution progressive, c’est-à-dire ayant pour argument


y = x − ct, procédons au changement de variable en supposant que la solution
v(t, x) de l’équation (10) satisfait v(t, x) = w(x − ct). On obtient alors :

 ∂t v(t, x) = −cw0 (x − ct)


∂ 2 v(t, x) = w00 (x − ct) (13)


 xx
w00 (x − ct) + cw(x − ct) + f (w(x − ct)) = 0

On retombe ici sur une équation différentielle ordinaire d’ordre 2, non-


linéaire, que nous ne savons pas résoudre immédiatement. Néanmoins, nous
connaissons des théorèmes importants quant à l’unicité des solutions d’EDO

7
d’ordre n, et les propriétés concernant les équations autonomes. Il est est donc
possible ici de parler d’équilibre de la même manière que dans l’étude d’une
EDO autonome, et ainsi, les points d’annulation du terme non-linéaire que nous
avons ici constitue des points d’équilibre, c’est-à-dire des points tels que si l’on
y place notre fonction à l’instant initiale, celle-ci y reste aux temps suivants.
Nous savons que le terme non-linéaire s’annule en w = 0 et w = 1. Notre
équation possède donc deux équilibres à ces points-ci. Nous pouvons alors
procéder à la linéarisation de l’équation autour de ces points. Par les condi-
tions imposées sur f en (11), nous avons les développement de Taylor de à
l’ordre 1 respectivement autour de 0 et 1 :

f (u) = u + o(u)
f (u) = −u + o(u)

Ainsi l’équation, autour de w = 0 et w = 1, respectivement s’écrit:


 00
w + cw0 + w = 0
w00 + cw0 − w = 0

Nous cherchons ici des solutions non-oscillantes, réelles, décroissantes, pos-


itives, ce qui dans les équations caractéristiques des équations linéarisés corre-
spond à un determinant prositif ou nul. Ces deux équations s’écrivent respec-
tivement :
 2
λ + cλ + 1 = 0
λ2 + cλ − 1 = 0
La deuxième équation caractéristique possède un déterminant toujours posi-
tif, pour c réel (Voir Fig. 2 et 3 Annexe). Par conséquent celle-ci indiquera
toujours des solutions réelles et non-oscillantes à l’équation différentielle dont
elle provient. En revanche, dans le cas de la première équation, nous voyons que
les solutions n’oscillent pas uniquement dans le cas où c2 − 4 > 0 autrement dit,
si c > 2.

En effet, si c < 2, les solutions à l’équation caractéristique linéarisée autour


de 0 seront complexes conjuguées λ12 = − 2c (1 ± i 1 − ( 2c )2 ) = λR ± iλR . la
p

solution approchée serait de la forme :


∼ R
w(y) = eλ y
(A cos(λI y + C)

La solution ne serait donc plus décroissante et ne représenterait plus une


fonction à front de propagation telle que nous l’avons définie plus haut, en (12).
Dans le cas où c > 2, l’équation p caractéristique au point w = 0 possèdera
deux racines réelles λ012 = − 2c (1 ± ( 2c )2 − 1). Au point w = 1 ces deux racines
sont λ112 = − 2c (1 ± ( 2c )2 + 1).
p

0 0
Ainsi, en w = 0 les solutions seront de la forme A0 er1 y + B0 er2 y , avec r12
0

toutes deux négatives. En choisissant proprement les valeurs de A0 et B0 nous

8
pouvons obtenir des solutions décroissantes comprises entre 0 et 1, et satisfaisant
aux conditions limites-. Le procédé est à peu près le même pour w = 1.
De cette étude nous pouvons conclure qu’une condition nécessaire pour
obtenir une solution de la forme souhaitée est que sa vitesse c soit supérieure à
2.
Pour que cette solution soit infirmée comme suffisante, nous pouvons nous
en remettre à l’étude des plans de phase, expliquée dans l’article original de Kol-
mogorov, Petrovksi et Piskunov ([2]). Ceux-ci, après un changement de variable
dans l’espace des phases, raisonnent sur la stabilité ou l’instabilité des points
d’équilibre, et montrent que la solution précédente est une preuve de l’existence
de solution non-oscillante pour une vitesse c > 2. Dans les paragraphes suivants
nous construirons la preuve d’un résultat sur la vitesse de la solution de con-
dition initiale 1x60 par encadrement. Nous aurons besoin, pour simplifier les
calculs, d’imposer une forme à f fonction de Fisher-KPP et lui avons donné sa
forme la plus simple : f (u) = u(1 − u). Nous pouvons vérifier que f vérifie bien
toutes les propriétés d’une fonction de Fisher-KPP données en (11), et pouvons
donc à présent passer à la preuve de la conjecture.

2.2 Théorème de comparaison en et équation de Fisher-


KPP
Après avoir pu déduire l’existence de solutions d’argument x − ct à front se
propageant à vitesse c > 2, d’argument nous voulons maintenant montrer que la
valeur de la vitesse d’une solution, à condition initiale à support compact, est de
2. Ce résultat était au départ une conjecture, puis fut étudiée dans la littérature
scientifique et plusieurs fois montrée. Nous en proposons ici une preuve par le
principe de comparaison dans le cas d’une EDP, qui nous sera très utile pour
montrer la conjecture précédente, ce qui sera fait dans le prochain paragraphe.
Nous pouvons retrouver ce théorème [7], [8], et une forme légèrement différente
dans l’article de Aronson et Weinberger [3].

Théorème 2 2.1 (Principe de comparaison)


Soit f de Fisher-KPP.
Soit v et v deux fonctions (R2 → [0, 1], C21 (R)2 , c’est à dire C 1 par rapport à la
première variable et C 2 par rapport à la deuxième, telle que :
 2
 ∂t v > ∂xx v + f (v)
2
∂t v < ∂xx v + f (v)
v(0, x) 6 v(0, x), ∀x ∈ R

Alors, ∀t > 0, v(t, x) 6 v(t, x). En particulier, si v est solution du problème


(10), et que v(0, x) 6 v0 (x) 6 v(0, x) ∀x ∈ R+ , alors

v(t, x) 6 v(t, x) 6 v(t, x), ∀(t, x) ∈ R+ × R

9
Preuve : Nous donnerons ici une preuve très intuitive de ce principe de com-
paraison.
Supposons par absurde qu’il existe t0 = inf{t > 0, ∃x / v(t, x) = v(t, x)}. Notons
x0 = inf{x, v(t0 , x) = v(t0 , x)}. (t0 , x0 ) est dont le premier point non-nul tel
que les deux fonctions se touchent. Par le fait que v et v soient C 1 par rapport
à t, comme v(0, x0 ) 6 v(0, x0 ), il existe un voisinage à droite de t0 tel que sur
ce voisinage, (v − v)(., x0 ) diminue. Ainsi sur ce voisinage, ∂t (v − v)(., x0 ) < 0.
De ceci, et des hypothèses, nous en déduisons :
2 2
∂xx v(t0 , x0 ) + f (v(t0 , x0 )) < ∂xx v(t0 , x0 ) + f (v(t0 , x0 ))
Puis par égalité de f (v(t0 , x0 )) et f (v(t0 , x0 )) nous obtenons :
2
∂xx (v − v)(x0 , t0 ) < 0
Le reste de la preuve consiste à montrer que cette dernière inégalité est
absurde, en montrant le fait que (v − v)(t0 , .) atteint un minimum en x = x0 :
Avant x0 , la fonction est nécessairement strictement positive car autrement
(t0 , x0 ) ne serait pas le "premier point" de l’espace-temps pour lequel les deux
fonctions se touchent.
La fonction est nulle pour x = x0 .
Maintenant nous pouvons affirmer qu’elle sera de nouveau strictement pos-
itive après x0 , car en effet, si elle ne l’était pas, alors il existerait un x1 > x0
tel que (v − v)(t0 , x1 ) < 0. Or comme (v − v)(0, x1 ) > 0, par le théorème des
valeurs intermédiaires, il existerait un t1 < t0 tel que (v − v)(t1 , x1 ) = 0, ce qui
est absurde par hypothèse. Ainsi après x0 , la différence des deux fonctions à t0
fixé est nécessairement positive à nouveau.
On a donc que x0 est un minimum local de la fonction ((v − v)(t0 , .), et que
par conséquent, nous avons ∂xx 2
(v − v)(x0 , t0 ) > 0, ce qui contredit l’inégalité
précédente, et contredit enfin l’existence de t0

2.3 Encadrement de la solution et déduction de la vitesse


limite égale à 2 pour une expression typique de f
Fisher-KPP
Nous souhaitons maintenant encadrer une solution à condition initiale 1x60 et
avec f (u) = u(1 − u), à l’aide de ce théorème, pour montrer que la valeur de sa
vitesse vaut 2. Tout d’abord, il nous faut donner une définition de vitesse limite
d’une fonction:
Définition (vitesse limite de propagation) 1 On dit que u(t,x) se propage
faiblement à vitesse c∗ si et seulement si :

inf u(t, x) → 1, c < c∗




 x6ct
 t→∞


 → 0, c > c∗
 sup u(t, x) t→∞
x>ct

10
Nous allons maintenant construire une sous-solution et une sur-solution au
problème (10) de condition initiale v0 (x) = 1x60 , ayant toutes deux une vitesse
limite arbitrairement proche de 2. Trivialement, par la définition précédente et
l’encadrement de la solution par les deux fonctions précédentes, nous aurons que
la vitesse limite de front de la solution au problème (10) ayant pour condition
initiale v0 (x) = 1x60 sera située autour de 2 à ε > 0 près, ε étant arbitrairem-
lent petit. Ceci concluera la preuve de notre conjecture ! Pour la suite, notons
v(t, x) solution du problème (10) ayant pour condition initiale v0 (x) = 1x60

Construction d’une sur-solution :

Prenons u(t, x) une solution de l’équation de la chaleur (1), avec pour con-
dition initiale u0 (x) = 1x60 . Posons v(t, x) = u(t, x)et . v possède les mêmes
propriétés de régularité que u, et ∀t > 0:
2
∂t v(x, t) − ∂xx v(x, t) = et u(t, x) + et (∂xx
2
u(t, x) − ∂t u(t, x))
t
= e u(t, x)
= v(t, x)
> f (v(t, x))
Le passage à la dernière ligne se justifie par les propriétés de f énoncées
en (11). On voit que v est donc sur-solution du problème (10), avec ∀x ∈ R,
v(0, x) > v0 (x). On peut donc appliquer le théorème de comparaison précédent,
et en conclure que
∀(t, x) ∈ R2+ , v(t, x) > v(t, x) (14)
Il est possible de montrer que v(t, x) satisfait la définition de vitesse limite
de front précédente pour une vitesse c∗ = 2, ce qui ne sera pas fait ici. Une telle
démonstration peut se trouver en [7], [8].

Construction d’une sous-solution :

Soit ε > 0. La construction de la sous-solution se fera à l’aide des formes


oscillantes déduites en 2.1. En effet, nous allons construire une sous-solution de
vitesse limite c∗ = 2 − ε à l’aide d’une solution au problème (10) avec = 2 − ε.
Nous savons que pour un tel c, la solution ne présente pas de front mais présente
des solutions oscillantes près du points d’équilibre 0. L’idée est de prendre une
telle solution du problème linéarisé autour de 0, de la tronquer à sa première
annulation et de la réduire de sorte à ce qu’elle corresponde à une sous-solution.
Nous disposerons alors d’une fonction en forme de cloche, se déplaçant à vitesse
2 − ε, toujours en dessous de notre solution v (Voir schéma de construction Fig.
4 Annexe).
Notons alors cε = 2 − ε. Alors l’équation caractéristique du système linéarisé
au point d’équilibre 0 possède p des solutions complexes :
r12,ε = − c2ε (1±i 1 − ( c2ε )2 ) = −(1− 2ε )(1±i 1 − (1 − 2ε )2 ) = rR ±irI . Les so-
p
R
lutions sont alors oscillantes, et on peut les écrire s(y) = Aer y+C cos(rI y + C),
avec y = x − cε t. Dans le cas qui nous intéresse, n’ayant pas encore fixé de

11
I
condition initiale, C = π+r 2 . De la sorte, on tronque la fonction à pour obtenir
une fonction v ε (t, x) = s(x − cε t) telle que à t = 0 :

s(x) ∀x ∈ −( 12 + π), − 21
  
v ε (0, x) =
0 else
Nous obtenons bien une fonction cloche se déplaçant à vitesse arbitrairement
proche de 2. Par ailleurs, en choisissant bien A dans R tel que s(y) < 1, la
fonction précédente vérifie à l’instant initial :

v ε (0, x) < 1x60 , ∀x ∈ R

Dans cette partie, il nous reste à montrer que cette fonction satisfait bien
l’inégalité propre à une sous-solution du problème (10). Précisément, il faut
montrer que ∂xx2
v ε − ∂t v ε − v ε − v 2ε < 0. Il esth possible d’obtenir
i ce résultat en
R I
écrivant d’abord s sous la forme s(y) = ARe ey(r +ir )+C . Puis, nous calcu-
lons les dérivées partielles successives. Après quelques manipulations de calcul
([7], [8]) nous tombons alors sur une équation du second degré qui nous donne
le signe voulu de ∂xx
2
v ε − ∂t v ε − v ε − v 2ε .

Ainsi, nous montrons que v ε est une sous-solution de l’équation, et que par
conséquent :
∀(t, x) ∈ R2+ , v ε (t, x) 6 v(t, x). (15)

Par ailleurs, étant une fonction progressive pouvant se mettre sous la forme
v ε (t, x) = ωε (x − cε t), alors la vitesse limite de front de cette fonction est de
cε = 2 − ε.

Par les encadrements (14) et (15), nous disposons maintenant d’un en-
cadrement de la vitesse limite de front c∗ de v telle que : 2 − ε 6 c∗ 6 2 pour
ε arbitrairement petit. Ceci nous garantit alors que la vitesse asymtotique ou
vitesse limite de la solution au problème (10) à condition initiale u0 (x) = 1x60
est bien de 2.

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Conclusions
A l’issue de cette étude, nous pouvons conclure plusieurs choses. D’une part, que
l’étude de l’équation de la chaleur sollicite une analyse par transformation de
Fourier, et donc impose des hypothèses sur l’intégrabilité ou non des hypothèses.
A la suite du cours de Topologie dispensé en L3 mathématiques, comprenant
une étude des espace Lp , il était donc intéressant de revenir dessus et d’en voir
une application directe.

D’autre part, j’ai pu voir que la manipulation d’équations différentielles


partielles nécessite plus de "précautions" que pour une équation différentielle
ordinaire car nous ne disposons pas de toute l’information sur l’évolution de
la fonction (notamment sur les différentielles du second ordre croisées). Pour
l’étude d’une EDP il faut donc s’assurer que les théorèmes d’étude classiques
s’appliquent. Il était intéressant ici de revenir sur le théorème de comparaison,
vu en cours, et de l’appliquer dans le cas de l’EDP de Fisher-KPP.

Considérant la difficulté de compréhension de certains objets, et de certaines


preuves, il était intéressant pour un étudiant de L3 de pouvoir néanmoins présen-
ter une méthode de résolution d’un problème, bien que celle-ci ne possède pas la
rigueure attendue d’un papier de recherche de qualité sur le sujet. J’ai ainsi pu
voir comment résoudre une forme non-homogène de l’équation de diffusion, et
observer que des questionnements, apparus en physique au XIXeme siècle puis
par la suite en chimie, pouvaient tout à fait convenir à une étude biologique sur
la sélection.

Il peut être important de mentionner que ce travail aurait pu être complété


par une éstimation numérique des solutions. Il existe en effet plusieurs manière
de modéliser les solutions, notamment par méthodes des différences finies. Ceci
aurait pu notamment nous fournir une estimation de la vitesse calculée au deux-
ième paragraphe.

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Bibliographie et références
Articles
[1] R. A. Fisher, The Wave of Advance of Advantageous Genes, Annals of Eu-
genics, v. 7: 355-369, 1937.
[2] A. Kolmogorov, I. Petrovski, N. Piscounov, Etudes de l’Equation de Diffu-
sion avec Croissance de la Quantité de Matière, Bulletin de l’Université d’Etat
à Moscou, 1937.
[3] D.G. Aronson, H.F. Weinberger, Multidimensional Nonlinear Diffusion Aris-
ing in Population Genetics, Advances in Mathematics, v.30: 33-76, 1978.
[4] M.G. Crandall, H. Ishii, P.L. Lions, User’s Guide to Viscosity Solutions of
Second Order Partial Differential Equations, Bulletin of the American Mathe-
matical Society, v.27 :1-67, 1992.
[5] A. Sánchez-Valdés, B. Hernández-Bermejo, New Travelling Waves Solutions
for the Fisher-KPP Equation with General Exponents, Applied Mathematics
Letters, vol. 18 : 1281-1285, 2005.

Thèses et Mémoires
[7] E. Bouin, Propagation de Fronts Structurés en Biologie : Modélisation et
Analyse Mathématique, thèse doctorale, Université de Lyon, déc. 2014.
[8] G. Peltier, Front d’Invasion dans un Système d’équation réaction/diffusion,
mémoire de Master 1, Ecole Normale Supérieure de Cachan, 2016.

Livres et cours
[9] G. Allaire, F. Golse, Transport et Diffusion, cours de l’Ecole Polytechnique,
ed. n°5, 2012.
[10] L.C. Evans, Partial Differential Equations, American Mathematical Society,
1998.

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