Langues Et TICE Méthodologie de Conception Multimédia
Langues Et TICE Méthodologie de Conception Multimédia
Langues Et TICE Méthodologie de Conception Multimédia
Nicolas Guichon
( )*
Je remercie Françoise Demaizière, Maguy Pothier, Michelle Catroux, Annick
Rivens-Mompean, Frédérique Gallo et Elisabeth Brodin pour leurs relectures et leurs
précieux conseils. Ma gratitude va également à Erick Ghaumez dont la créativité et le
sens de l'écoute ont permis la conception de Virtual Cabinet. Merci enfin à Ciro
Arturo Jaén Paniza pour son soutien.
Introduction ................................................................................................................................. 7
5
Introduction
Bien qu'il se veuille pratique et qu'il fournisse des pistes pour la conception de
dispositifs d'apprentissage médiatisé, cet ouvrage vise également à travailler des
notions théoriques émanant de la didactique des langues étrangères tout en
7
Introduction
8
Introduction
Les trois chapitres suivants proposent des éléments clés pour concevoir un
dispositif d'apprentissage médiatisé. Dans le chapitre 3 sont abordées les notions de
scénario, de macro-tâches, de choix de l'apport langagier fourni aux apprenants
(input) et des productions langagières attendues des apprenants (output), c'est-à-dire
tous les éléments qui interviennent lors de l'étape cruciale de la scénarisation. Le
chapitre 4 pousse plus avant la granularité en proposant la notion de micro-tâches et
il emprunte au champ théorique de l'ergonomie pour conceptualiser l'activité
cognitive des apprenants et déterminer les formats les plus efficaces pour médiatiser
ces micro-tâches. Le chapitre 5 poursuit cette approche ergonomique et se penche sur
les questions d'utilisabilité, c'est-à-dire tout ce qui concerne la prise en compte des
utilisateurs finaux dans le processus de conception pour que l'activité d'apprentissage
soit aussi profitable que possible.
9
Chapitre 1
+,
C'était sans doute aussi la condition pour que les technologies et leur
potentialités, réelles ou supposées, servent de levier pour reposer des questions liées
à l'apprentissage des langues : le diaporama, par exemple, devait permettre de capter
l'attention des apprenants ; les TICE allaient accroître la motivation, individualiser
les apprentissages, respecter les profils cognitifs, rendre l'apprentissage plus ludique,
plus attrayant, plus interactif. Ces affirmations portaient en elles la croyance que
l'introduction des technologies dans les pratiques pédagogiques allait faciliter
l'apprentissage de manière quasi automatique.
11
Chapitre 1
12
Chapitre 1
(3) Les ressources multimédias ont été utilisées comme une récompense à la fin
d'un cours ou pour occuper un demi groupe pendant que l'autre travaillait avec
l'enseignant. En dépit du fait qu'elles constituaient un "apport déconnecté" à la
formation (Pothier, 2003 : 5), ces ressources ne connaissaient pas de rejet, mais pas
non plus d'appropriation significative de la part des apprenants et des enseignants-
tuteurs2. Du fait de leur nouveauté et de leur coût, une attention particulière leur était
accordée tandis que leur impact sur la motivation devenait un argument pédagogique
qui a cependant perdu de son acuité au fur et à mesure que les TICE se sont
banalisées. A cause des limites inhérentes aux ressources pédagogiques conçues pour
le plus grand nombre par les maisons d'édition, des contraintes matérielles auxquelles
furent confrontés les enseignants, et de leur déconnection du reste de l'apprentissage,
les ressources ont joué le rôle d'un complément et ont été principalement utilisées
pour leurs possibilités de pratique répétitive, de jeu ou d'appoint linguistique.
1
En didactique des langues, le béhaviorisme a connu l'apogée de son influence avec la méthode
audio-orale, qui envisageait le langage comme un comportement comme un autre. Apprendre une
langue devait donc relever de la mise en place d'habitudes et d'automatismes. (Cuq, 2003 : 33)
2
Le vocable "enseignant-tuteur" est employé dans cet ouvrage pour désigner les enseignants dont la
pratique pédagogique combine l'enseignement traditionnel et le tutorat comme cela est le cas dans les
centres de langues ou centres de ressources en langues.
13
Chapitre 1
14
Chapitre 1
15
Chapitre 1
primordiale pour un apprentissage des langues qui s'appuie sur des documents
authentiques et sur une approche culturelle de la langue (cf. 1.2.2). La seconde
dimension de la médiatisation vient du fait qu'elle introduit un décalage
communicationnel dans la médiation pédagogique. Pour reprendre les mots de
Mœglin (2005 : 77), "rompant l'unité de temps et de lieu propre à l'enseignement oral,
la médiatisation est une médiation transformée, porteuse d'un autre régime
communicationnel". En effet, tant que les technologies (magnétophones,
magnétoscopes, vidéo-projecteurs…) ont été manipulées par l'enseignant de langues,
il n'a pas été nécessaire de leur accorder une autre signification que celle d'un accès à
la seconde langue (désormais L2) par le biais d'outils plus ou moins sophistiqués.
Dès lors que les technologies ont été mises à la disposition des apprenants et ont
dépassé leur condition de moyens en fournissant un contenu, en impliquant des
changements dans l'organisation et en réaménageant l'espace, le temps et les
interactions, la nécessité est apparue de dégager non seulement un mode de
fonctionnement mais un discours d'accompagnement. Ce nouveau régime
communicationnel implique de repenser le déroulement de l'apprentissage en
introduisant une scénarisation (cf. chapitre 3) et un renouvellement des modes de
régulation pédagogique (cf. chapitre 5). Le caractère mixte du dispositif
d'apprentissage médiatisé a ceci d'intéressant qu'il comporte certains atouts du
cédérom comme, par exemple, la possibilité de réaliser des activités autocorrectives
(cf. chapitre 4) tout en inscrivant l'autoformation dans un cadre pédagogique
contractuel entre les enseignants et les apprenants (cf. chapitre 6). En effet, nous
souscrivons au positionnement de Linard (1996 : 116) selon lequel "la qualité de la
médiatisation technique de l'apprentissage ne vaut que ce que vaut la médiation des
hommes qui l'interprètent et la font vivre sur le terrain".
Legros et Crinon (2002 : 29) soulignent le retour au premier plan des théories
constructivistes qui semblent, selon eux, "constituer le paradigme de référence pour
développer les environnements conçus à l'aide des TIC et favoriser leur intégration
16
Chapitre 1
dans les classes". Déjà en 1996, Linard (p. 163) relevait que le constructivisme
illustrait "la version humaniste de l'ordinateur, celle de l'outil intellectuel conçu
exprès 'pour penser avec' qui met la machine au service de l'auto-exploration
cognitive et de la construction spontanée d'objets par l'apprenant". La définition du
constructivisme s'articule autour de trois actions : transformer, construire, et
mobiliser des intentions.
17
Chapitre 1
savoir est une 'chose' que l'on s'invente pour expliquer – c'est-à-dire donner du sens à
- une situation".
18
Chapitre 1
forme car la langue est d'abord un vecteur culturel. Comprendre une langue étrangère,
c'est aussi comprendre une culture au plus près de ses subtilités.
19
Chapitre 1
20
Chapitre 1
3
Des cellules TICE sont apparues dans certaines académies pour accompagner des projets
d'établissement dans le secondaire. Brodin (2002) a également repéré le montage d'équipes
pluridisciplinaires au sein d'établissements scolaires.
4
Nous définirons plus précisément le rôle du médiatiseur dans le chapitre 2.
21
Chapitre 1
de concentrer l'attention des concepteurs sur l'apprentissage médiatisé et non sur les
outils techniques5.
Sans doute la différence notable entre les trois approches vient de la place
accordée à la théorie didactique. Invisible dans les produits industriels, souvent
implicite dans le cas de productions artisanales, la théorie est le point de départ et
d'arrivée de l'objet conçu quand la démarche est expérimentale. La didactique, parce
qu'elle se nourrit des apports scientifiques des sciences de l'éducation, de la
psychologie, de la linguistique et de des neurosciences (Narcy, 1990 : 18), fournit un
cadre théorique suffisamment ample pour guider la conception de manière raisonnée
et, chemin faisant, pour produire de nouvelles connaissances dans le domaine des
TICE.
5
C'est d'ailleurs le parti pris assumé de cet ouvrage de ne pas parler de logiciels dédiés à la conception
qui seront obsolètes dans quelques mois.
22
Chapitre 1
Place de la Marginale : la théorie est Faible : il sera fait référence Forte : elle est le point de
théorie souvent réduite à un à la théorie quand elle est en départ de la recherche et
argument de vente adéquation avec le ressenti une ressource constante
du terrain
Toutefois, les praticiens ne peuvent se contenter de produire des hypothèses car leur
professionnalité exige qu'ils aboutissent à un résultat qui pourra être utilisé par des
apprenants réels dans un contexte réel. L'ambition de cet ouvrage est bien de
proposer un certain nombre de concepts didactiques aux enseignants qui souhaitent
s'engager dans un projet de conception. Mais, pas plus qu'il n'existe de manuels pour
concevoir de bout en bout un dispositif d'apprentissage médiatisé, il n'existe de
théorie didactique prête à penser. Tout praticien engagé dans un projet de conception
entame également un processus de recherche.
23
Chapitre 1
Equipe Equipe de
FOURNISSEURS DE pédagogique médiatisation SOUTIENS
CONTENU LOGISTIQUES &
MATÉRIELS
auteurs techniciens
USAGERS
natifs administrateur
étudiants
enseignants
-tuteurs
La figure 1.1 illustre de quelle façon un réseau s'est constitué autour du projet
Virtual Cabinet. Dans le cadre d'une coopération entre deux services transversaux et
dans la perspective de la mise en place du Certificat de compétences en Langues de
24
Chapitre 1
Comme cela apparaît, les protagonistes d'un projet de conception sont nombreux
et leurs compétences professionnelles variées, ce qui entraîne une répartition des
tâches. Pour simplifier notre propos, nous utiliserons deux termes hyperonymes,
didacticien et médiatiseur, pour désigner les deux entités principales. A l'origine du
projet, le didacticien assure un "leadership pédagogique" (Depover et al., 2000) tout
au long de la conception et garantit que l'outil demeure au service de l'apprentissage,
et non le contraire.
L'objectif visé par cet ouvrage n'est donc pas de fournir une méthodologie figée
pour produire une ressource médiatisée mais de proposer un cadre théorique et des
méthodologies pour qu'un praticien soit à même de transférer des compétences
25
Chapitre 1
1.4. Conclusion
La conception d'un dispositif d'apprentissage médiatisé conduit les enseignants à
réfléchir à leur métier d'une nouvelle façon et à déplacer leurs objets de réflexion
aussi bien en amont de la situation d'apprentissage (définition des besoins, choix de
l'input, scénarisation) qu'en aval (accompagnement, rétroaction et évaluation). De
plus, la technologie introduit un corps étranger qu'il faut conceptualiser pour que les
enseignants le mettent à profit afin d'en exploiter le potentiel et de le mettre au
service de l'apprentissage. Enfin, du fait que la conception de dispositifs
d'apprentissage nécessite une équipe, cela implique que le futur enseignant soit à
même de sortir d'une pratique individuelle de son métier pour envisager sa pratique
professionnelle comme une contribution à un réseau de compétences.
26
Chapitre 2
-,
27
Chapitre 2
Dans cette étape de définition, l'entretien plus ou moins construit sera un outil
particulièrement utile pour cerner ce qu'attendent les futurs utilisateurs, qu'ils soient
enseignants ou apprenants. Il sera particulièrement utile pour connaître le bagage
représentationnel constitué par tout apprenant, à savoir l'ensemble de valeurs, de
croyances que le sujet s'est construit d'une manière plus ou moins ordonnée, plus ou
moins scientifique, et qui lui donne son identité d'apprenant. Ces entretiens
6
En cela, le dispositif d'apprentissage médiatisé suit une logique différente de la ressource produite
par une maison d'édition qui cible le public le plus large possible. L'approche micro est certes modeste
mais elle correspond parfaitement à une démarche didactique.
7
Nous ne décrirons pas la technique de l'entretien ici mais nous contentons de renvoyer à la lecture de
l'ouvrage de Blanchet et Gotman (2001).
28
Chapitre 2
29
Chapitre 2
30
Chapitre 2
Ainsi, des référentiels détaillent les capacités opératoires (Narcy, 1990 : 31)
requises pour maîtriser une langue étrangère. Quelquefois désignées par le syntagme
de sous-compétences en référence à l'anglais subskills ou "opérations de bas niveau"
(Gaonac'h, 1991 : 203), les capacités opératoires correspondent à toutes les
opérations secondaires qui participent à une compétence donnée. Rost (2002 : 119)
propose, par exemple, un référentiel de capacités opératoires qui énumère les
différents savoir-faire (capacité à…) attachés à la compréhension de l'oral. Une
première possibilité consiste à définir un modèle de l'apprenant pour déterminer ce
que devraient pouvoir faire les futurs utilisateurs.
31
Chapitre 2
8
Cité par Linard (1996 : 32-33).
32
Chapitre 2
Une première approche consiste à appréhender les cheminements suivis par les
apprenants pour réaliser une tâche. Si l'on souhaite mettre à disposition des
apprenants des moyens permettant à des utilisateurs compétents de réaliser des tâches,
on considérera à l'invite de Rabardel (1995 : 48) "les compétences des sujets à la
construction et à l'utilisation des outils [comme] des ressources pour atteindre un but".
33
Chapitre 2
9
Pour une présentation plus détaillée, nous renvoyons à l'ouvrage de Seliger et Shohamy (1989).
34
Chapitre 2
étape est prospective car elle va fournir des idées pour la suite du projet et réactive
car l'analyse de l'existant développe le sens critique.
Dans un premier temps, il s'agit donc de faire l'état des connaissances sur une
compétence langagière donnée et de choisir un modèle théorique adapté à la situation
choisie et au public visé. Par exemple, l'équipe de conception projette de mettre au
point une tâche de prise de notes pendant l'écoute d'un document vidéo. Une revue de
la littérature conduit à considérer les questions de surcharge cognitive, de
multicanalité, de pression temporelle.
35
Chapitre 2
Analyse fine
A cette étape, un tableau énumérant les caractéristiques principales du corpus
échantillonné peut s'avérer utile. Il permettra également de faire apparaître un
continuum concernant les performances. A partir de là, un travail de comparaison est
réalisé et on peut commencer à faire un certain nombre d'inférences au sujet des
stratégies diverses qui ont été déployées par les apprenants.
2.2.6. Synthèse
Le tableau suivant reprend trois modalités de définition des besoins. Celles-ci
peuvent se combiner afin que les concepteurs possèdent une représentation à la fois
globale (au niveau macro du contexte) et fine (au niveau micro des futurs utilisateurs
apprenants et prescripteurs). Cette approche complexe et multifactorielle vise à
prendre en compte des contraintes multiples qui, comme le préconise Ripoll (1998 :
413) seront "traitées en parallèle et donc conjointement, chacune exerçant une
pression en faveur d'un type particulier de solution ou d'interprétation du problème".
36
Chapitre 2
(1) Trois étudiants décident de mettre en place un site pour favoriser les échanges
culturels et linguistiques. Ils prennent contact avec une université américaine, l'idée étant
que les étudiants américains et français vont échanger des opinions sur des sujets
d'actualité. La réalisation achoppe sur le manque de réactivité des partenaires qui ne
donnent pas suite aux propositions. Le projet est abandonné.
(3) Un groupe souhaite concevoir un site destiné aux étudiants se préparant à une
poursuite d'étude en Allemagne. Par manque de scénario original, l'équipe envisage une
série d'activités linguistiques peu contextualisées. En trouvant une entrée forte (le festival
10
Ces étudiants proviennent de la promotion 2004-2005 du master "Didactique des langues et TICE".
37
Chapitre 2
de cinéma de Berlin) et en s'appuyant sur une analyse fine et personnelle d'un film récent,
l'équipe parvient à créer un site d'apprentissage motivant pour le public visé.
Contrairement à une situation de formation telle que celle d'un master, d'où
émanent ces trois cas, une situation éducative authentique offre un nombre important
de problèmes sans qu'il soit besoin d'en créer d'artificiels. Toutefois, ces cas réels
permettent d'évoquer trois questions qui doivent trouver réponse avant qu'une équipe
se lance dans le processus de conception.
11
ALSIC, Asp, les Cahiers de l'APLIUT, le Français dans le Monde…
12
ACEDLE, RANACLES, ASDIFLE, APLIUT, GERAS, APLV… (cf. liste des sigles p. 169)
38
Chapitre 2
recherches en didactique des langues. Cette notion d'état de l'art est importante car il
ne s'agit pas de redonner une actualité à des théories dépassées, ni de recommencer
des processus de conception déjà commencés ailleurs en répétant par mégarde
d'autres projets existants et en courant le risque de réinventer la roue (McDonough et
McDonough, 2004 : 69).
Check-list
Une solution équivalente ou plus aboutie existe-t-elle déjà ?
Le projet répond-il à un besoin identifié ?
Le projet correspond-il à des attentes institutionnelles ?
Le projet peut-il avoir un impact positif sur le contexte ?
La médiatisation apporte-t-elle une valeur ajoutée à l'apprentissage ?
Pour mener à bien le projet, les moyens financiers nécessaires sont-ils
disponibles ?
39
Chapitre 2
Le schéma ci-dessous (fig. 2.1) rassemble les objets intermédiaires qui émaillent
un projet de conception, de l'avant-projet ou prototype zéro (P0) au prototype final
(PF), ainsi que les différents moyens pour réaliser ces représentations successives.
40
Chapitre 2
Les prototypes sont des objets intermédiaires qui vont représenter les différentes
évolutions du projet et qui vont constituer une représentation partagée entre les
membres de l'équipe et, plus précisément, entre l'équipe de conception et l'équipe de
médiatisation. Ce sont ces objets intermédiaires qui vont servir de fil rouge pour
suivre le processus de résolution.
41
Chapitre 2
2.3.2. Le prototypage
Le prototypage correspond à un processus de représentation d'un produit à
différents moments de son développement. Du simple synopsis au diagramme, de
l'arborescence au storyboard, de la première maquette médiatisée au produit final, les
différents prototypes élaborés jalonnent la conception et assurent deux fonctions : la
première est de figer momentanément une proposition pour s'assurer que tous les
protagonistes impliqués dans la conception s'entendent autour d'elle et, au besoin, la
modifient en l'enrichissant ou en l'amendant. Le prototypage correspond donc à un
processus d'appropriation et de raffinage par les membres de l'équipe de conception.
42
Chapitre 2
pour s'assurer de leur utilisabilité (cf. chapitre 5). Le prototypage constitue alors une
procédure de validation.
43
Chapitre 2
unique pour faire une recherche lexicale. Une structure linéaire impose un parcours à
l'utilisateur et semble pertinente lorsque l'apprentissage gagne à suivre un certain
nombre d'étapes organisées selon un ordre précis. Une présentation en étoile
distribue l'accès à l'information sur plusieurs points du même niveau. La structure
pyramidale, enfin, correspond à une organisation complexe qui se déploie en
ramifications et en intrications. C'est parce qu'elle rappelle la forme d'un arbre que la
métaphore de l'arborescence a été adoptée pour désigner cette structuration des
cheminements possibles. La structure arborescente est la plus commune dans le
multimédia car une telle organisation de l'accès à l'information facilite la
hiérarchisation en plusieurs niveaux tout en préservant la possibilité de naviguer d'un
niveau à un autre ou à l'intérieur d'un même niveau.
(1) La première page de Virtual Cabinet permet de situer l'identité du site (la
Grande-Bretagne, le parlement) et amène l'utilisateur à s'identifier (identifiant et mot
de passe). Elle constitue un accès centralisé à l'information. (2) Les deux écrans
suivants sont organisés de façon linéaire et permettent de présenter le scénario
(conseiller un ministre du gouvernement) et de découvrir les lieux (le parlement
britannique). Ces deux écrans fonctionnent comme une mise en situation, une sorte
de sas vers l'intérieur du site d'apprentissage. (3) La page suivante fonctionne sur le
principe de l'arborescence avec cinq ministères possibles qui renvoient chacun à
deux ou trois projets de loi qui constituent les questions que les étudiants sont invités
à traiter. (4) L'écran du niveau 4 présente une structure en étoile, c'est-à-dire que cinq
objets sont mis en parallèle et permettent d'accéder à des documents portant sur le
thème choisi (un reportage, une conversation et un entretien) ou sur les supports de
travail, à savoir un calepin électronique qui permet de prendre des notes au fur et à
mesure du travail de compréhension et le forum sur lequel les étudiants peuvent
44
Chapitre 2
échanger sur le projet de loi et voter. (5) Il est prévu, enfin, que l'utilisateur passe par
un test de positionnement (structure linéaire), puis il peut choisir dans un menu
d'activités (micro-tâches). Il peut accéder à chaque instant à son calepin pour
augmenter ses notes et, le moment venu, envoyer sa note de synthèse au tuteur.
%
"
! ! !
45
Chapitre 2
Dans une étape plus avancée, une version médiatisée simplifiée (à l'aide par
exemple de PowerPoint) de l'interface peut être réalisée. Ce prototype moyenne
définition permet de vérifier les enchaînements et les agencements de couleurs, de
graphies ainsi que l'organisation de chaque écran. Séguy (1999 : 61) préconise de
travailler la charte graphique sur écran car les maquettes sur papier ne donnent
qu'une faible idée des choix chromatiques ou de la lisibilité des polices de caractères.
Ce document peut servir d'objet de négociation avec les futurs utilisateurs
(enseignants et/ou apprenants).
46
Chapitre 2
directrice. Parce que c'est un document de travail, il doit être fonctionnel et lisible par
les personnes qui sont associées à la conception (collègues, auteurs, techniciens,
informaticiens…). Les aspects théoriques seront donc traduits en moyens d'action.
Le cahier des charges est ce que Flichy (2003 : 134) appelle un "objet frontière",
c'est-à-dire un objet négocié par les différents protagonistes du projet de
développement et qui établit les bases de leur coopération en les liant sur une base
contractuelle. Le cahier des charges doit donc "donner à voir" l'objet final pour
associer les membres de l'équipe à une communauté de projet. Donner un titre au
projet et s'obliger à le résumer en quelques phrases peut se révéler utile. Le cahier
des charges est aussi un objet politique dont la clarté des objectifs et la définition de
l'impact attendu pour l'institution peuvent contribuer à convaincre les financeurs et
les décideurs d'apporter leur soutien.
Dans un premier temps, le cahier des charges se contente d'énoncer les grandes
lignes du projet, les objectifs ainsi que l'impact attendu. Il mentionne quelques
éléments importants relatifs au contexte et s'attache à clarifier sa mission éducative.
Il décrit également le public visé (attentes et besoins) ainsi que les conditions de mise
en place de la réalisation. Il fait mention des modalités de formation envisagées
(autoformation guidée, parcours personnalisés, activités synchrones ou asynchrones).
Enfin, un échéancier est établi pour que les acteurs du projet aient des indications
temporelles et organisationnelles.
Le cahier des charges va peu à peu s'épaissir après chaque réunion et une
personne sera particulièrement chargée de suivre les changements progressivement
apportés au projet. Chaque décision sera consignée et, au fur et à mesure des
affinements didactiques et technologiques, l'incertitude évoquée en introduction de
ce chapitre disparaîtra ne laissant la place qu'à des choix irréversibles.
Dès lors que le "jeu" disparaît, le cahier des charges devient une référence pour
l'équipe. C'est à partir de cette référence que le produit va être réalisé et tout
aménagement devra être inscrit pour garder la mémoire des évolutions. Il est parfois
raisonnable de penser le processus de conception en phases successives, la première
phase devant satisfaire un certain nombre de critères dont le premier est celui de
47
Chapitre 2
48
Chapitre 2
2.4. Conclusion
Réflexions
Actions
1. Définition des • Il est souhaitable d'associer dès cette étape les futurs utilisateurs
besoins de de la réalisation (enseignants et apprenants). Une enquête par
formation et entretiens ou par questionnaires peut être mise en place.
des données
du dispositif • Une expérimentation permettant de recueillir de l'information sur
la performance des sujets pour telle tâche ou dans telle
compétence permet d'affiner la représentation des concepteurs.
Recherche
49
Chapitre 2
et d'autre.
fini
11. Observations • Ce sont des temps d'observation avec des sujets cibles pour
cliniques valider ou invalider les hypothèses. Un retour à la littérature peut
s'avérer utile à cette étape.
13. Retour sur le • A cette étape, "le jeu" qui existait au départ doit disparaître autant
cahier des que possible. Le cahier des charges ne peut évoluer qu'à la marge.
charges Il constitue désormais une référence pour l'équipe de conception.
50
Chapitre 2
15. Relecture et • Deux types de relectures doivent être mises en place : l'une au
finalisation sujet de la qualité linguistique, l'autre concernant les
fonctionnalités. Il va sans dire que ces deux relectures constituent
un gage de qualité pour les futurs utilisateurs.
17. Tests in situ • Outre le fait que ces tests ont fonction de répétition générale, ils
permettent de révéler des problèmes pratiques (accès, horaires,
taille des écrans…) qui sont des contraintes du dispositif. Ils
permettent également de mesurer l'accompagnement qu'il va
falloir mettre en place.
18. Elaboration
d'un guide objectifs en termes pédagogiques : mise en œuvre, évaluations,
pédagogique explication de la logique.
19. Formation des • Pour que l'appropriation ait lieu, il convient d'amener les
enseignants enseignants à découvrir le produit par eux-mêmes. Ils ont besoin
de se forger une représentation et un discours et de mesurer les
potentialités et les limites du produit. Cela peut également être
l'occasion de dédramatiser la situation d'apprentissage médiatisée.
20. Formation • Il semble profitable que cette étape soit menée par l'enseignant-
découverte tuteur pour que les apprenants se représentent le lien entre leurs
des cours ou tutorats et le travail qu'ils vont effectuer en travail
apprenants individuel. Des indications devront être fournies en termes
d'utilisation optimale, d'évaluation, de liens avec le cours.
22. Evaluation(s) • Trois types d'évaluation sont possibles une fois qu'un cycle
du dispositif complet de formation a eu lieu :
Evaluations
51
Chapitre 2
52
Chapitre 3
., /
Dans le chapitre 2, nous avons décrit de quelle façon les concepteurs définissent
les besoins en prenant en compte la complexité d'un contexte, ses protagonistes et ses
objectifs institutionnels. Le présent chapitre va maintenant aborder ce qui constitue le
cœur du processus de conception, à savoir l'écriture du scénario d'apprentissage.
Cette étape est délicate car elle suppose de trouver une situation propice pour servir
d'écrin à une tâche d'apprentissage. La notion de scénario indique que le dispositif
d'apprentissage médiatisé tel que nous le concevons ne se contente pas de fournir un
accès à des ressources authentiques classées par thématiques (les repas en
Angleterre), par catégories notionelles-fonctionnelles (préparer une présentation
orale) ou par des catégories grammaticales (les pronoms relatifs) mais il propose un
cadre narratif dans lequel va s'inscrire l'apprentissage de la L2. Cette perspective est
héritée du courant de la cognition située qui a réactualisé le lien entre la connaissance
et l'action en rappelant à l'instar de La Borderie et al. (2000 : 30) que toute
"opération" cognitive est à considérer fondamentalement comme une action […] qui
se déroule dans le cadre d'une situation et qui rencontre des déterminations sociales.
Toute cognition est située.
3.1. La macro-tâche
53
Chapitre 3
- Une tâche implique que la priorité soit donnée au sens. Elle cherche à
conduire les apprenants à une utilisation de la langue qui soit
pragmatique plutôt que gratuite. C'est pourquoi elle induit une lacune
initiale (une information, une opinion ou un morceau du raisonnement)
qui constitue son enjeu. Une tâche contient toujours un problème à
résoudre.
13
Nous consacrons le chapitre 4 à la notion de micro-tâche.
54
Chapitre 3
Swain avance tout d'abord que lorsqu'une tâche de compréhension débouche sur
une production, le traitement de l'information est moins superficiel. Selon Kintsch
(1998 : 291), si l'apprenant se contente de mémoriser un texte, et si la preuve de sa
compréhension se mesure à la capacité de reproduire le texte en le résumant ou en le
paraphrasant, le traitement de l'information et l'apprentissage subséquent vont être
superficiels. En revanche, quand le sujet est capable d'utiliser l'information acquise
lors de la compréhension dans un contexte nouveau, l'apprentissage est plus profond.
Ceci confirme que tous les traitements ne sont pas équivalents en terme de rétention.
Une tâche de mémorisation est d'autant plus efficace qu'elle fait intervenir un
traitement et pas seulement une intention de retenir (La Borderie et al., 2000 : 115).
55
Chapitre 3
comme moyen et objet d'une négociation permanente entre les partenaires de travail
sur l'élaboration des connaissances" (Crinon, Mangenot et Georget, 2002 : 82).
Certains chercheurs (Brodin, 2002) ont remarqué que malgré des apports
importants (individualisation du rythme, gestion du stress…), la médiatisation de
l'apprentissage s'était soldée par un retour au béhaviorisme (mise en place
d'automatismes) non pas du fait du seul bégaiement de l'histoire, mais en raison du
fonctionnement algorithmique des outils informatiques.
56
Chapitre 3
Depuis une dizaine d'années, les enseignants profitent de plus en plus d'Internet
pour proposer des tâches de compréhension à partir de contenus en ligne. Suivant le
niveau de compétence et l'âge des apprenants, des tâches plus ou moins guidées sont
proposées. Nous allons donner le détail de trois types de tâches qui proposent de
traiter de l'information en L2 : les simulations médiatisées, les cyberquêtes et les
situations problèmes.
57
Chapitre 3
14
58
Chapitre 3
Il semble que la tâche ne soit signifiante qu'à partir du moment où elle est située
(cf. supra) et ceci implique de la part du concepteur de réfléchir à la situation qu'il va
proposer pour structurer l'apprentissage. Plutôt que de tenter de mimer le réel, il nous
semble plus fécond de suivre les traces de Rey (2000 : 125) qui préconise "une
pratique jouée, stylisée, dont les phases principales sont soulignées, répétées […] et
qui ne vise finalement que la fabrication d'une connivence, c'est-à-dire d'un sens
partagé". Construire le sens, le partager et le confronter avec le reste d'une
communauté, voilà ce qui nous paraît constituer un enjeu authentique de
communication, non pas ponctuel, ni seulement fonctionnel, mais réaliste. Les
échanges observables entre les étudiants américains et les étudiants français sur la
plateforme de Cultura (Furstenberg, Levet et Maillet : 2001) montrent que la
connivence peut par exemple s'installer autour d'échanges interculturels. La
construction de la connivence nécessite une situation adéquate pour s'épanouir. Ceci
nous amène naturellement aux notions de scénario et de simulation.
59
Chapitre 3
60
Chapitre 3
Barbot et Camatarri (1999 : 68) vont même jusqu'à parler "du plaisir à
apprendre" procuré par des "machines cognitives" adaptées à l'homme, semblable à
celui procuré par les jeux multimédias qui stimulent la réflexion et présentent des
situations-problèmes (à la différence des jeux qui stimulent des réflexes ou des
réactions). La simulation a quelquefois été assimilée à l'immersion. Ainsi, les effets
d'enveloppement du jeu vidéo ont été mis en avant selon l'idée que plus
l'environnement numérique favorise une implication semblable à celle des jeux vidéo,
plus la motivation serait grande. Pour séduisante qu'elle paraisse au premier abord,
cette conception relève à notre avis du mythe de l'apprentissage incident et dénué
d'effort. Peut-il y avoir apprentissage sans que la chose apprise soit mise à distance ?
Comme Bruner (2000 : 154), nous pensons que "l'essentiel du processus de
l'éducation consiste à pouvoir prendre des distances avec ce que l'on sait en étant
capable de réfléchir sur son propre savoir". Bien sûr, on peut supposer des
apprentissages par incidence selon la théorie de l'input compréhensible développé par
Krashen, voire des apprentissages fonctionnels. Pour autant, la question des traces
mnésiques se pose car l'implication forte dans la tâche peut se faire au détriment de
la mémorisation et de l'apprentissage. Il semblerait que si une simulation gagne à être
enveloppante dans un premier temps, il faille ménager des pauses à l'apprenant, des
"temps de latence" (Cazade : 1998), pour lui permettre de décontextualiser son
apprentissage et le rendre plus durable.
L'approche culturelle implique qu'un certain degré de réalisme soit respecté par
la situation. Il s'agit alors de déterminer une métaphore qui va permettre de donner
cohérence à la situation d'apprentissage, de créer une unité conceptuelle propice à la
61
Chapitre 3
" #
Pour ces auteurs, la métaphore peut avoir plusieurs fonctions : installer une
ambiance, créer une analogie avec le connu, ou recréer les conditions de mise en
place de compétences spécifiques à un contexte donné. Comme le dit Damasio
(1999 : 33), "les bonnes actions ont besoin de la compagnie des bonnes images."
Pour lui, les images possèdent deux fonctions principales : elles servent de repères en
fournissant un choix entre des répertoires de schèmes d'actions existant dans la
mémoire à long terme, ce qui permet d'optimiser la mise en œuvre de l'action choisie.
Elles servent également de références en donnant la possibilité d'inventer
l'application de nouvelles actions à des situations nouvelles et de construire les plans
de futures actions, facilitant ainsi la créativité.
Les cognitivistes préfèrent le terme de script qui peut être défini comme
"l'organisation temporelle et causale d'informations liées à des actions d'événements
stéréotypés dont le sujet a l'expérience et qui donc sont devenues familières" (Cordier,
1994 : 90). Nous retrouvons dans cette définition la notion de stylisation qui permet
de simplifier la situation et de créer immédiatement un réseau de références
implicites. Le script devient scénario en ingénierie.
Dans les dispositifs existants, nous pouvons repérer plusieurs types de scénario
allant de l'aventure, l'enquête, la résolution d'une énigme à la visite d'un lieu connu.
Tous ces types de scénarios correspondent aux simulations d'actions telles que nous
62
Chapitre 3
les avons définies et fournissent un cadre narratif pour l'apprentissage. Celui-ci est
structuré autour de l'acquisition de connaissances ou de compétences en vue de
réaliser un certain nombre d'actions ou de parvenir à un résultat.
63
Chapitre 3
- La langue orale contient davantage de reformulations du thème principal que l'anglais écrit.
- Le discours oral contient une proportion plus élevée de mots grammaticaux (articles) que de
mots porteurs de sens (verbes, noms, adjectifs).
- Le discours oral comporte des unités grammaticales incomplètes, des faux départs, des
structures laissées en suspens.
- Les locuteurs utilisent fréquemment des ellipses : des éléments grammaticaux ou des thèmes
demeurent implicites.
- Les locuteurs utilisent fréquemment des déictiques pour faire des références exophoriques
(hors du discours, le référent est situé dans la situation extralinguistique) et se servent de
gestes et de signaux non verbaux pour faire passer le message.
- Le débit, l'accent, les gestes et autres traits paralinguistiques (caractères individuels de la voix
et moyens de communication non linguistiques comme les mimiques) varient d'un locuteur à un
autre.
64
Chapitre 3
différences avec la langue écrite. Le tableau 3.1, qui présente cette liste, résume bien
les caractéristiques du code oral de l'anglais et peut être étendue à d'autres langues.
Selon Brown (1995), il est plus facile de comprendre n'importe quel texte s'il
présente les caractéristiques suivantes.
- Un nombre limité de personnes et d'objets.
- Des personnes ou des objets clairement distincts.
- Des relations spatiales simples.
- Le respect de l'ordre chronologique des événements.
- Un lien entre les différents énoncés (par exemple, les relations de cause à
effet).
- La possibilité de relier facilement la nouvelle information aux connaissances
antérieures.
D'autre part, certains auteurs comme James (1986, cité par Cornaire, 1998 : 125-
126) ont montré que la longueur du texte constitue une source de complexité plus
grande que le type de texte lui-même. Il semble qu'une longueur de trois minutes
représente un seuil au-delà duquel un apprenant rencontre des difficultés pour
maintenir son attention. Il convient donc de moduler la longueur du document selon
le niveau de développement de l'apprenant.
Le débit est un autre facteur lié au temps, ou plus précisément à la vitesse. Par
débit, nous entendons le nombre de mots prononcés pendant un laps de temps donné.
Il est difficile de moduler le débit d'un discours authentique sans affecter la qualité de
65
Chapitre 3
66
Chapitre 3
variée constitue un des objectifs pédagogiques. Ainsi, il est possible de repérer trois
registres :
- le registre familier qui donne à entendre une langue riche des caractéristiques
propres à la langue orale telles que décrites dans le tableau 3.1.
S'il semble souhaitable que les apprenants soient exposés autant que possible à
tous ces registres, le registre familier est souvent absent du matériel pédagogique.
Cette absence pourrait s'expliquer par la difficulté de capter cette langue par nature
fortement contextualisée. Elle pourrait également venir d'une représentation
normative de la langue en situation scolaire. Pourtant, cette langue familière, avec ce
qu'elle comporte de traits caractéristiques, pourrait préparer les apprenants à
comprendre les interactions d'une grande majorité de locuteurs de la L2.
67
Chapitre 3
Nous ne détaillerons pas ici les bénéfices de la vidéo. Cornaire (1998 : 129) cite
une recherche menée par Batlova qui a montré que l'usage de la vidéo présentait des
avantages indéniables en rendant l'attention plus soutenue, en particulier, grâce à sa
charge affective. La vidéo constitue surtout, pour nous, un moyen puissant de
contextualiser le discours, d'apporter des indices extralinguistiques, de permettre aux
apprenants de se construire un répertoire de vignettes culturelles associées à des
situations d'énonciation précises. En bref, c'est une opportunité de situer la langue et
de la donner à voir.
68
Chapitre 3
3.4. Illustrations
69
Chapitre 3
Le discours politique élaboré par les apprenants devrait traduire ce lien entre
leurs valeurs propres et celles des autres. C'est en cela que la décision politique
correspond à la psychologie populaire chère à Bruner car elle prend en compte
croyances, désirs, valeurs, intentions, et obligations ; elle est l'occasion de toutes les
70
Chapitre 3
subjectivités et peut, pour cette raison, encourager les apprenants à prendre la parole.
Car le discours politique est un genre et, à ce titre, il va induire des positionnements,
un engagement feint ou sincère, et accroître la motivation à s'exprimer (cf. chapitre
6).
Le choix des thèmes. Après s'être identifié, l'étudiant se trouve devant une
galerie de portraits représentant cinq ministres du gouvernement britannique (cf.
figure 3.2). En raison de la diversité du public visé, à savoir des étudiants de sciences
humaines, il était difficile de déterminer un domaine spécifique et de se positionner
dans une logique d'anglais de spécialité. Cependant, le découpage thématique suivant
cinq ministères permet suffisamment de souplesse pour aborder des problématiques
susceptibles d'intéresser des étudiants non spécialistes. Chaque sujet est actuel et
pose une question plausible liée à un projet de loi et constitue un problème "culturel"
à résoudre en utilisant la langue comme outil. Les projets de loi soumis à la
compréhension des apprenants sont choisis pour leur actualité mais permettent aussi
une comparaison avec la culture de la L1.
Une fois la question choisie, l'étudiant entre dans son bureau (cf. figure
3.3). Sont à sa disposition trois supports (vidéo, entretien et conversation) portant sur
le même thème et les outils (dictionnaire unilingue et calepin) pour construire une
note de synthèse destinée au ministre qui l'a chargé d'un rapport sur la question.
71
Chapitre 3
Parmi les trois sources d'input, on distingue les trois éléments suivants.
72
Chapitre 3
L'apprenant sera également amené à confronter son opinion sur le projet de loi
dans le cadre d'un forum avec les autres membres de son groupe classe et, en fin de
compte, il aura la possibilité de voter. La note de synthèse soumise à évaluation et le
forum devraient garantir que la compréhension des documents ne soit pas une fin,
mais un obstacle cognitif à dépasser. Virtual Cabinet fonctionne donc comme une
base de données organisée, offerte à la consultation des étudiants qui dirigent à leur
rythme et selon leurs besoins le processus de résolution de problème.
73
Chapitre 3
74
Chapitre 3
75
Chapitre 3
3.5. Conclusion
Le scénario est unifié par une métaphore qui fournit "une structure familière",
un "modèle mental" et établit des associations entre des informations anciennes et
nouvelles (Poyet, 2002 : 20). Cette métaphore va servir de cadre narratif, de scénario,
et constituer un univers de référence pour la réalisation de la tâche.
Le scénario ménage plusieurs entrées : soit par la tâche principale (le problème à
résoudre et son scénario) soit, selon les besoins des apprenants, par les tâches
secondaires qui correspondent à la construction de compétences nécessaires pour
pouvoir mener à bien la macro-tâche, mais qui doivent être perçues comme un
moyen et non une fin.
76
Chapitre 3
77
Chapitre 4
0, 1 2 3
Dans cette section, nous allons définir plus précisément la notion de micro-tâche,
que nous allons coupler à celle de capacité opératoire. Cela nous amènera à proposer
un certain nombre de pistes pour la conception de micro-tâches. Nous verrons enfin
ce que l'ergonomie cognitive peut nous apporter comme outils conceptuels et
méthodologiques pour organiser les micro-tâches dans un environnement multimédia
et assurer une collaboration efficace entre didactique et médiatisation.
79
Chapitre 4
4.1.2. L'attention
Krashen (1985) a constamment défendu l'idée selon laquelle l'acquisition est un
processus subconscient, c'est-à-dire que les apprenants ne sont pas conscients de ce
sur quoi ils portent leur attention dans le message et sont, par conséquent,
inconscients de ce qu'ils acquièrent. Cette théorie a maintes fois été remise en cause.
Schmidt (2001 : 11), par exemple, a montré que l'attention portée à l'input est
consciente. L'attention constitue même, pour cet auteur, le point de rencontre entre
les facteurs intrinsèques à chaque apprenant (aptitude, motivation, niveau en L2 et
capacité de traitement) et les facteurs extrinsèques tels que la complexité de l'input,
le contexte discursif et interactionnel, le traitement des consignes et les
caractéristiques des tâches. Doughty (2001), pour sa part, avance que le traitement du
80
Chapitre 4
discours fournit des opportunités pour attirer l'attention des apprenants qui sont en
train de planifier leurs énoncés. De même, pour Rost (2002 : 12), l'attention est
déterminante car elle constitue "le début de l'implication, ce qui signale la différence
essentielle entre audition et écoute". Depuis William James, il y a plus d'un siècle, la
psychologie s'est attachée à définir les caractéristiques de l'attention.
(1) Elle est limitée et, par conséquent, elle est sélective. A ce sujet, Buser (1998 :
156) a employé l'image du "phare attentionnel" qui resserre son faisceau sur un
aspect précis et laisse dans l'obscurité tout ce qui n'est pas pertinent.
(2) Elle dépend en partie d'un contrôle volontaire qui donne accès à la
conscience : la plupart des théoriciens s'accordent à voir dans l'attention à l'input le
résultat d'une opération active liée à une commande "descendante". "Dans cette
hypothèse, c'est l'individu qui décide activement qu'il prendra en compte tel signal
plutôt que tel autre" (Buser, 1998 : 152). Buser identifie deux sous-ensembles, l'un,
celui de l'attention consciente, qui est actif et contient des données effectivement
sélectionnées et retenues au niveau conscient, l'autre, passif, qui abrite un ensemble
beaucoup plus vaste d'informations captées, pertinentes ou non, mais pouvant rester à
l'état de "stock inconscient" (pp. 152-153).
81
Chapitre 4
82
Chapitre 4
Selon certains chercheurs comme Skehan (1998), c'est en s'appuyant sur des
exemples déjà constitués en mémoire, donc rapidement et facilement accessibles, que
des sujets sont capables de parler et de comprendre efficacement. Mais cela suppose
que les apprenants aient au préalable élaboré un vaste répertoire représentationnel
composé d'assemblages (formulaic chunks). Ainsi, pour Logan (1988), la fluidité ne
reposerait pas sur l'application rapide de règles de fonctionnement de la langue, mais
sur la récupération de formules toutes faites (exemplars) qui nécessitent une capacité
de traitement moindre parce qu'elles constituent déjà des ensembles. Les fondements
théoriques de Logan sont repris par N. Ellis (2002) pour qui les connaissances
permettant l'utilisation fluide de la langue ne reposent pas sur la grammaire, dans le
sens de règles abstraites ou de structures, mais sur une vaste collection de souvenirs
d'énoncés passés. Les exemples mémorisés sont liés avec d'autres du même type, ce
qui fait qu'ils semblent former des catégories linguistiques abstraites, des schèmes et
des prototypes. La langue pourrait donc être vue comme un système fonctionnant à
partir d'exemples, au moins en partie, sans quoi comprendre ou parler en temps réel
seraient impossibles.
83
Chapitre 4
Skehan (1998 : 91) souligne, quant à lui, que l'automatisation des règles doit se
faire par alternance dans le long processus d'apprentissage de la langue :
84
Chapitre 4
De son côté, Field (1998) suggère de faire pratiquer chaque capacité opératoire à
tour de rôle. Les capacités opératoires choisies pour une micro-tâche, seules ou en
combinaison, devraient naturellement être adaptées au type d'input. Dissocier les
capacités opératoires semble en effet constituer une façon réaliste de fournir un
référentiel pour établir un diagnostic et ménager une marge de progression. Cela peut
permettre de rendre les étudiants conscients des processus en jeu et, éventuellement,
les aider à mettre en place des stratégies compensatoires pour mener ces opérations à
terme.
85
Chapitre 4
A partir du travail effectué par Rost, nous proposons dans le tableau 4.1 une
taxonomie des capacités opératoires liées à la compréhension de l'oral. Nous n'avons
pas repris tous les items proposés par le didacticien américain, mais seulement ceux
qui peuvent être perceptibles par l'apprenant. Ces capacités opératoires formant des
"blocs d'action" (Leplat, 1987 : 153), il serait en effet peu pertinent d'aller trop loin
dans la granularité.
Pour gagner en clarté, nous avons regroupé les capacités opératoires en fonction
du type principal d'opération. Pour l'enseignement et l'évaluation, les taxonomies les
plus utiles sont celles qui posent des critères progressifs.
86
Chapitre 4
Buck et al. (1997, cités par Rost, 2002 : 120) ont identifié une taxonomie des
compétences d'écoute selon un schéma progressif qui évalue la capacité à :
Bien que nous pensions que l'apprentissage d'une langue se fasse principalement
grâce à un travail de construction du sens (et donc à travers une macro-tâche),
certaines micro-tâches médiatisées peuvent cependant contribuer à apporter des
solutions appropriées pour attirer l'attention sur des aspects formels de la L2 et créer
des conditions appropriées pour rendre la performance des apprenants plus fluide et
leur permettre de gagner en compétence.
87
Chapitre 4
La figure 4.1 permet d'illustrer ce qui se joue dans la confrontation entre la tâche
prescrite (3) et la tâche à réaliser (4). Entre les deux se glisse la notion d'intention qui
va conduire l'apprenant à se représenter l'action, à planifier et à déclencher le
processus de résolution.
De plus, ce schéma montre qu'une même tâche diffère selon le point de vue et
selon le moment du traitement. La tâche, "définie comme un but à atteindre dans des
conditions déterminées" (Leplat, 1997 : 17) va subir divers traitements de la part de
l'apprenant : ce dernier va l'apprécier selon son utilité supposée, la faire rentrer dans
ses schémas cognitifs (5), lui donner une forme permettant le traitement, par exemple
en la décomposant ou en déterminant des procédures intermédiaires (6), l'effectuer
selon ses aptitudes et sa motivation (7). D'évidence, il y aura un écart plus ou moins
important entre ce que l'apprenant est en mesure de dire de son activité, de ses
stratégies et de ses difficultés (8), et ce qu'un observateur percevra dans l'activité (et
dans le discours sur l'activité) de l'apprenant (9).
88
Chapitre 4
89
Chapitre 4
DIFFICULTE COMPLEXITE
ACTIVITE
DE
L’APPRENANT
Robinson (2001 : 294) a résumé les différences qui existent selon lui entre
complexité, difficulté de la tâche et conditions. Le tableau 4.3 pourrait fournir des
critères pour l'organisation des micro-tâches et pour évaluer le niveau de complexité
de chacune d'entre elles. La difficulté des tâches est en rapport avec les perceptions
d'exigence que les apprenants ont vis-à-vis de la tâche, et celles-ci sont déterminées
par des variables affectives, telles que la motivation à mener les tâches à leur terme,
et des facteurs de compétence tels que l'aptitude.
90
Chapitre 4
ayant un impact sur les variables liées aux participants : variables liées aux capacités,
ressources cognitives : + ou le sexe, la familiarité avec le c'est-à-dire à l'aptitude, au
– de planification, une tâche format. niveau et à l'intelligence.
+ ou – complexe, nécessitant
+ ou – de connaissances
préalables.
Tableau 4.3 - Complexité de la tâche, conditions et facteurs de difficulté (d'après Robinson, 2001)
Dans le paragraphe 4.2.2., nous avons, d'une part, isolé des capacités opératoires
qu'il nous paraît utile de faire pratiquer en vue d'améliorer la compréhension de l'oral
et, d'autre part, nous avons identifié des actions pédagogiques susceptibles
d'améliorer ces mêmes capacités. Le croisement des deux soulève un certain nombre
de questions au sujet de la conception de micro-tâches, particulièrement en ce qui
concerne les notions de difficulté et de complexité, celle de transparence, de guidage,
et celle enfin de rétroaction.
91
Chapitre 4
5. Appariement Deux (ou plusieurs) listes de mots, énoncés, sons, images, sont
présentés à l'apprenant qui doit les apparier.
6. Choix multiple Un choix doit être opéré parmi une liste d'items.
7. Questions L'apprenant est amené à taper un chiffre qui correspond à une réponse
numériques exacte.
8. Exercice de Des solutions doivent être ordonnées selon les préférences de
classification l'apprenant.
9. Vrai/Faux L'apprenant décide de la véracité d'une proposition.
Tableau 4.4 - Taxonomie de formats de tâches fermées
(adaptée de Beatty, 2003 : 213-4)
Certains logiciels comme Hot Potatoes proposent des matrices qui permettent de
générer des activités assez simplement. Cela présente l'avantage d'amener les
apprenants à travailler sur des aspects spécifiques dans des formats qui leur sont
familiers. Deux réserves méritent cependant d'être émises. La première concerne la
rigidité de ces formats d'activité : leur fonctionnement interdit créativité et émotion,
et rappelle les modèles béhavioristes de l'apprentissage. La seconde réserve, dans le
prolongement de la précédente, vient de ce que les activités ainsi conçues sont
parfois présentées comme la panacée de la formation en ligne, accréditant l'idée
auprès des apprenants qu'une langue s'apprend avec force QCM et appariements.
92
Chapitre 4
Il est donc de première importance que le concepteur ne prête pas à ces activités
des vertus éducatives qu'elles ne possèdent pas : toute activité n'est qu'une réponse
fragmentaire à un besoin de formation et ne prend réellement de sens qu'à la
condition d'être articulée à une tâche signifiante. Notons également que la rigidité
des formats informatiques peut être perçue comme un moteur pour l'action
pédagogique. La connaissance des outils peut permettre de détourner les contraintes
techniques et stimuler l'inventivité des concepteurs. Enfin, les caractéristiques de
l'input (types de discours, registres, modes de diffusion) constituent une base de
départ pour concevoir des micro-tâches qui fournissent des unités de pratique aux
apprenants afin qu'ils développent leurs capacités opératoires. Entre la rigidité
informatique et la rigueur didactique, il existe un espace de créativité pour les
concepteurs d'activités médiatisées.
Toutes les micro-tâches conçues pour Virtual Cabinet sont présentées dans le
tableau 4.5 afin de procurer une vision d'ensemble. Bien que les catégories ne soient
pas étanches, nous avons séparé les types d'apprentissage (lexical, grammatical,
pragmatique et sémantique) et nous avons indiqué le fonctionnement informatique
prévu (choix multiple, appariement, saisie au clavier, glisser-déposer et activité
lacunaire). Les formats de présentation et leur variété ont été conditionnés par :
- les exigences de la tâche ; par exemple, un travail sur la morphosyntaxe est
plus pertinent avec une saisie au clavier, alors que l'appariement convient
davantage à l'apprentissage lexical à partir de synonymes ou de définitions ;
- la nécessité d'introduire une certaine variété des formats pour maintenir
l'intérêt pour la réalisation des micro-tâches ;
- la nécessité d'introduire une diversité des approches qui puisse correspondre
aux différents styles d'apprentissage des apprenants et à leurs besoins.
- la nature de l'input ; le travail sur les intentions langagières semble plus
93
Chapitre 4
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94
Chapitre 4
Pour mener à bien cette micro-tâche, les étudiants doivent reconnaître le sens de
chacune des propositions, mettre la proposition reconnue à l'endroit approprié, par
rapport à ce dont ils se souviennent de la vidéo ou de leur analyse au moment de la
tâche et identifier les locuteurs, leurs fonctions, leurs opinions. Cette micro-tâche
permet de repérer la macrostructure du document et, avec cette approche globale,
devrait leur fournir des éléments clés pour leur synthèse.
Légende “Posters make the “Laboratory mice are “Ethics has to be taken
sonore public sensitive to used for the progress of into account by the
animal torture” science” world of finance.”
95
Chapitre 4
En guise de synthèse, trois remarques vont être formulées. Tout d'abord, la liste
de micro-tâches présentée dans ce chapitre ne constitue évidemment pas une
représentation exhaustive de ce qui pourrait se faire dans un environnement
multimédia. Les micro-tâches de Virtual Cabinet ont été conçues avec une attention
particulière au format du discours des documents (imagé pour la vidéo, factuel pour
l'entretien, pragmatique pour la conversation…) et à leur utilité pour étayer la
construction du sens, construction qui demeure l'objectif prioritaire de la macro-tâche.
Le principe de pertinence a donc guidé leur conception. En effet, comme le note
DeKeyser (2001 : 143), l'un des fondements de l'enseignement centré sur la tâche,
c'est qu'au lieu d'enseigner les formes dans une séquence organisée selon un
programme de structures, la forme est enseignée quand cela est pertinent, utile,
nécessaire, en raison des exigences des activités d'apprentissage déterminées par des
tâches.
96
Chapitre 4
- Variété et stabilité : les micro-tâches doivent être variées pour ne pas lasser
l'apprenant, mais leur format doit être suffisamment reconnaissable pour ne
pas être déroutant.
97
Chapitre 4
98
Chapitre 5
4,
15
Nous préférerons ce terme à celui plus englobant d' "ergonomie".
16
Cité par Guillevic (2002 : 138).
99
Chapitre 5
100
Chapitre 5
Une autre méthode consiste à filmer une situation d'apprentissage qui possède
des points communs avec le dispositif en cours de conception. Contrairement à
l'observation ethnographique, la captation vidéo risque de perturber le déroulement
pédagogique habituel, mais elle permet d'isoler finement certains gestes, certaines
intonations, certaines attitudes de l'enseignant et d'en garder une trace pour une
modélisation ultérieure.
! !
Si chaque professeur déploie plus ou moins les mêmes régulations que ses
confrères, leur identification par les apprenants dépend d'une connivence installée
lors des interactions pédagogiques. Ainsi, s'il est possible de modéliser la plupart des
régulations, certaines échappent à une médiatisation réellement satisfaisante.
101
Chapitre 5
de ces catégories en précisant quels objectifs sont visés, quelles opérations sont mises
en place et comment ces régulations peuvent se transposer dans la logique
multimédia.
Objectifs Opérations Transposition multimédia
- définir la prescription - formuler la consigne aussi
- définir le format clairement que possible et
déterminer le format optimal
Consignes
un fait
performance (par exemple
linguistique ou
entre deux productions orales)
sur une
et faire recommencer
compétence
langagière - hausser ou baisser la voix
pour accentuer quelque chose,
pour insister
- évaluer la performance - choisir un type d'évaluation :
- encourager (sourire, mots de code couleur, pourcentage,
Rétroactions
102
Chapitre 5
(2) Le deuxième type de régulation concerne les explications qui sont fournies à
l'apprenant pour rendre le matériau langagier propre à l'apprentissage. Cela peut aller
de la simple répétition au renvoi sur des informations complémentaires (dictionnaire,
grammaire…), en passant par la modification de l'input (traduction, simplification,
reformulation) ou sa présentation dans une autre modalité (ajout du script pour un
document oral par exemple). Lors des interactions pédagogiques, l'enseignant évalue
les difficultés rencontrées par les apprenants de diverses manières (explicite : nombre
de demandes de parole, demandes d'éclaircissements ou implicite : tensions des
visages…) et met en place une régulation appropriée. Il maintient un équilibre entre
l'offre et la demande, une explication prématurée sur un mot inconnu pouvant par
exemple saper le travail d'inférence, de la même façon qu'un aspect négligé peut
empêcher une séquence potentielle d'acquisition. En l'absence d'interactions
humaines, le concepteur va déterminer quels types d'aides il va proposer
(dictionnaire monolingue ou bilingue, grammaire énonciative ou descriptive,
103
Chapitre 5
possibilité d'avoir une même information dans différentes modalités, choix des liens
hypertextuels…). La multiplication des ces aides peut sembler satisfaisante de prime
abord mais elle pose la question de la charge cognitive induite pour un apprenant. Un
trop grand nombre de fonctionnalités peut encombrer l'interface et brouiller l'offre.
Ainsi, Shneiderman et Plaisant (2005 : 69) expliquent le succès du Palm Pilot
(agenda numérique de poche) sur des produits concurrents par le fait que les
concepteurs ont réduit les fonctionnalités au strict nécessaire (calendrier, contacts,
pense-bête et calepin) pour assurer la simplicité maximale. Il est envisageable de
proposer toutes les aides lors d'observations cliniques et de supprimer celles qui sont
disqualifiées par le plus grand nombre d'usagers pour privilégier les fonctionnalités
réellement utiles pour l'apprentissage. La technique de l'évocation présentée par
Baccino et al. (2005 : 206-211), permet de recueillir des informations sur les aides
apportées aux utilisateurs de la manière suivante : immédiatement après qu'ils ont été
confrontés à un prototype du site en construction, on sollicite quelques sujets pour en
dessiner les aides (boutons, icônes) ou les éléments destinés à la navigation. Les
représentations ainsi obtenues fourniront des indications quant à l'efficacité des aides
proposées et signaleront leur défaut formel (icônes peu reconnaissables) ou
fonctionnel (aide peu utile). Les aides peuvent être oubliées par les sujets (efficacité
nulle), réinterprétées (efficacité douteuse), réévaluées (une taille plus ou moins
grande indiquant l'importance accordée à telle ou telle) ou correctement rappelées
(efficacité validée). Comme le notent Baccino et al. (p. 211), "cette technique permet
de recueillir des données à 'haute valeur' cognitive. Elle permet de 'voir ce que les
utilisateurs voient', chose qui est difficile à faire autrement qu'à travers le dessin, et
qui permet parfois de comprendre certaines problématiques d'utilisabilité de façon
plus directe et plus complète qu'une description verbale".
104
Chapitre 5
Lorsque la réponse attendue ne peut être gérée par les outils disponibles, on
atteint une des limites des TICE. Comment évaluer la réponse à des questions
ouvertes ? Comment traiter les erreurs en permettant le développement de
l'interlangue ? Comment obtenir une granularité dans les réponses proposées et
échapper aux rétroactions standardisées ? Malgré des avancées certaines (cf.
Antoniadis et al., 2005), le traitement automatique des langues (TAL) ne semble pas
105
Chapitre 5
Liens vers des Fournir des aides jugées comme Nécessitent de s'assurer de l'utilité
aides internes secondaires, mais éventuellement de ces liens
au système utiles pour mener à bien la tâche
106
Chapitre 5
aides proposées et la navigation. Les éléments seront ensuite hiérarchisés par ordre
d'importance pour guider leur distribution dans l'arborescence. Telle aide à la
rédaction pourra, par exemple, être proposée à l'endroit de l'arborescence où
l'apprenant est amené à écrire mais pourra être omise ailleurs. On essaiera ensuite de
déterminer le niveau de transparence de chacun des items pour déterminer si
l'information sera fournie sous forme écrite, orale, iconique ou bien grâce à une
combinaison. Un premier prototype papier (cf. chapitre 2) permettra de s'assurer que
tous les besoins de régulation ont été couverts et sera soumis à une évaluation
critique.
5.1.4. Application
L'écriture multimédia semble connaître une stabilisation des codes utilisés en ce
qui concerne les régulations. La capture d'écran de l'espace de travail de Virtual
Cabinet (fig. 5.2) propose une illustration pour organiser la tâche de l'apprenant.
107
Chapitre 5
que le projet de loi en discussion. Dans la partie gauche de la page écran, se trouvent
des outils secondaires pour réaliser la tâche : un lien permet de retourner vers le
bureau où sont distribués tous les médias (2), un autre permet de retourner au menu
des micro-tâches (3), un espace de prise d'information prend la forme d'un lecteur
audio ou vidéo (4) auquel l'apprenant peut accéder à loisir ; un dictionnaire
monolingue en ligne fournit des aides lexicales par le biais d'une fenêtre pop-up (5).
La majeure partie de la page écran est consacrée à l'espace de prise de notes (6)
destiné à se remplir au fur et à mesure de la prise d'information et de son traitement.
Le texte en construction gagne ainsi en lisibilité. Cet espace étant visible dans son
entier, l'apprenant a accès à une représentation globale de son travail et cela lui évite
le recours au défilement (scrolling) au moment de la relecture. Pour guider la
rédaction et créer des repères structurels, des indications (introduction, corps de
l'argumentation, conclusion) sont fournies sur la partie gauche du calepin (7).
L'utilisateur a la possibilité de réaliser les actions suivantes sur cet espace de
rédaction grâce à deux boutons : envoyer une trace de sa production sur sa boîte
électronique (8) et envoyer la note de synthèse sur la boîte électronique de son tuteur
(9). Un système d'adressage permet à ce dernier de renvoyer le travail à son auteur
une fois qu'il est évalué.
Comme cela peut être constaté, cette page est riche en informations et en actions
potentielles. Tout a été agencé pour que l'apprenant puisse se consacrer à sa tâche
d'écriture en lui donnant le contrôle de la situation d'apprentissage.
108
Chapitre 5
5.2.1. L'interface
Dans le cas d'un dispositif multimédia, l'interface graphique est la représentation
partagée entre le concepteur et l'utilisateur. En effet, le concepteur fait une offre de
significations et propose un scénario qui appelle un certain nombre d'actions de la
part de l'apprenant. Pour que l'apprentissage puisse avoir lieu, il est nécessaire qu'il y
ait une coordination entre "deux processus intelligents" (Rabardel, 1995 : 68), l'un, le
système cognitif du sujet qui attribue une signification à l'autre, le système
sémiotique du programme, qui offre une "représentation fonctionnelle" (p. 147) de la
situation d'apprentissage. La représentation est dite fonctionnelle car l'offre de sens
est principalement tournée vers l'action potentielle du sujet. Si l'on prend l'exemple
d'un trajet expliqué à un touriste, l'informateur élude tout ce qui n'apporte rien à
l'orientation (toutes les fioritures narratives ou esthétiques) pour ne garder que les
directions principales. Il en va de même pour une interface qui ne donne à voir que
les traits pertinents pour l'action selon un principe d'économie évitant ainsi de
surcharger l'attention du sujet. En accédant à son environnement d'apprentissage,
l'utilisateur doit donc pouvoir trouver une réponse à ces deux questions : Que me
demande-t-on de faire ? Comment dois-je m'y prendre pour réaliser la tâche ? En
somme, une bonne interface informe l'utilisateur sur les objectifs et les moyens
rapidement et simplement.
L'interface est aussi une surface, une couche sémiotique, qui "recouvre" tout le
fonctionnement informatique pour n'en présenter qu'un modèle simplifié et
rapidement assimilable. Depuis que les ingénieurs de Macintosh ont dissimulé les
lignes de code pour les remplacer par des dossiers et des corbeilles, la relation entre
les utilisateurs et les ordinateurs s'en est trouvée profondément modifiée (cf.
Després-Lonnet et al., 2003). Le recours à la métaphore du bureau constitue même,
pour ces auteurs, le début de la démocratisation de l'informatique. Ainsi, la qualité de
l'interface serait, en grande partie, constituée par ce que Rabardel (p. 189) a appelé la
"transparence opérative", c'est-à-dire que les actions sont perceptibles et intelligibles
par l'opérateur. Il s'agit, dès lors, pour les concepteurs de trouver les métaphores
appropriées pour déclencher les actions attendues et rendre perceptibles les résultats
de l'action selon le principe du WYSIWYG (What You See Is What You Get ), ce qui
apparaît à l'écran correspond exactement à ce que l'utilisateur obtient en lançant, par
exemple, une impression.
109
Chapitre 5
L'apprentissage est une activité qui nécessite l'attention la plus soutenue possible
de la part du sujet. La forme gagnera à être au service de l'apprentissage en
maintenant le principe de cohérence garant de la concentration du sujet et en prenant
garde de ne pas multiplier les stimuli visuels ou sonores. En ce qui concerne les
choix esthétiques, Lavigne (2002 : 137) énonce un certain nombre de
recommandations qu'il regroupe sous trois dimensions : la sobriété, principe dont
l'application bannit tout effet gratuit s'il n'est pas au service du sens général,
l'homogénéité ("chaque élément doit décliner l'expression d'un tout"), et enfin ce qu'il
appelle l'utilité, mais que nous préférons appeler la sémiotisation, c'est-à-dire tous les
éléments qui contribuent à porter du sens dans l'interface.
Dans le chapitre 3, nous avons avancé que la métaphore choisie pour la macro-
tâche fournit un cadre narratif approprié pour situer l'apprentissage. Celle-ci peut
également contribuer à la sémiotisation de l'apprentissage. En effet, il est possible de
recourir à une métaphore non seulement pour ses propriétés narratives, mais aussi
parce qu'elle apporte des solutions adéquates pour concevoir l'interface graphique et
ajouter ainsi à la cohérence et l'homogénéité du site. Ainsi, l'univers du conte de fées
choisi pour un site à destination d'élèves du cycle 3, Mes aventures magiques en
français, transparaîtra non seulement dans la façon de présenter et de traiter
l'information, mais pourra également avoir un impact sur la conception des icônes
(baguette magique, boule de cristal…) ou de la présentation graphique.
110
Chapitre 5
5.2.3. La navigation
Nogier (2002 : 58) définit la navigation comme "une métaphore pour désigner le
cheminement de l'utilisateur au sein des différents menus et fenêtres de l'interface
homme-machine". La navigation est possible grâce à la mise en place de liens qui, à
la commande de l'utilisateur, déclenchent une action ou conduisent à un autre point
de l'arborescence. La stabilité de la navigation gagne à être maintenue pour ne pas
dérouter l'utilisateur. Cette stabilité peut être assurée par une barre de navigation qui
présente les icônes à des endroits identiques. L'infographie a retenu le terme
générique d'icônes pour désigner les signes utilisés pour symboliser les différents
types d'action. On distingue généralement trois types de signes (Delbecque, 2002 : 15)
du moins arbitraire au plus arbitraire : les indices, les icônes, les symboles. Un indice
est un signe qui renvoie (flèche indiquant une direction), une icône est un signe qui
représente et qui possède un certain degré de ressemblance avec la réalité. Un
symbole, enfin, est un signe purement conventionnel (mots du langage naturel,
panneau triangulaire pour désigner un danger, bleu pour froid, rouge pour chaud…).
111
Chapitre 5
112
Chapitre 5
De la même façon, les icônes peuvent être disposées pour guider implicitement
un ordre de découverte ou une progression dans les actions. Estimant que les
apprenants gagnaient à découvrir le projet de loi en commençant par le reportage de
la BBC dans le scénario de Virtual Cabinet, les icônes désignant les différents
médias ont été placés de gauche à droite. Cet ordre implicite a été suivi dans la
majorité des cas lors des observations cliniques. Des études menées par des
ergonomes (Nogier, 2002 : 19-20) fournissent de précieuses indications pour la
répartition de l'information en proposant de veiller à des critères de visibilité et
d'accessibilité par le biais de la souris.
Si l'on veut guider l'attention de l'utilisateur sur tel contenu ou sur telle action, il
convient de créer rapidement un certain nombre de repères visuels en divisant la page
écran en différentes zones (accès à l'input, espace de travail, information
secondaire…) qui seront répétées ainsi tout au long de l'arborescence (cf. figure 5.5).
De la même façon, une charte graphique sera définie pour que l'ensemble des
éléments concernant la typographie, les couleurs et les formes géométriques
(flèches…) soient standardisés afin d'assurer une homogénéité maximale.
113
Chapitre 5
La charte graphique, une fois qu'elle sera validée par tous, trouvera sa place
dans le cahier des charges afin de constituer une référence pour les personnes
impliquées dans la conception. Enfin, la charte graphique peut être complétée par
une charte sonore qui reprend les différents messages vocaux, musicaux ou sonores
utilisés dans le dispositif. En effet, certaines actions (sélection de certains items,
déplacements, suppressions, envois…) peuvent être accompagnées d'un léger signal
sonore qui apporte la confirmation de leur réalisation.
114
Chapitre 5
115
Chapitre 5
De son côté, Hoc souligne que "la pertinence de ces verbalisations pour l'analyse
de l'activité dépend grandement de l'attitude de l'opérateur vis-à-vis de l'observateur,
plus précisément de la représentation dont le premier dispose des intérêts de l'autre"
(1996 : 23) et cet auteur note également que cette technique gagne en intérêt si elle
est effectuée entre pairs qui ont l'habitude de travailler ensemble (p. 26).
116
Chapitre 5
Quel genre d'étudiant êtes-vous ? Indiquez sur l'échelle ce qui vous correspond le mieux.
Vous préférez voir ce que vous apprenez Il vous suffit d'entendre pour
comprendre
Vous avez besoin d'entrer dans les détails Vous préférez avoir une vue générale
des données
Vous avez besoin de l'aide de l'enseignant Vous aimez bien travailler par vous-
même
Vous n'aimez pas trop vous lancer en Vous êtes à l'aise en anglais
anglais
Vous aimez faire un travail parfait Vous acceptez vos faiblesses
117
Chapitre 5
D'emblée, la situation a été expliquée aux sujets. Les assistants ont été munis
d'une fiche d'observation sur laquelle ils notent toutes les indications pertinentes ainsi
que le recommande Hoc (1996 : 25) qui définit l'observation comme "le recueil
systématique de données au cours du déroulement de l'activité (…), avec une
prédominance des comportements spontanés". Avant de commencer l'observation, il
a également été précisé aux sujets qu'ils devaient décrire le plus précisément possible
ce qu'ils faisaient, comment ils le faisaient et les assistants sont tenus de leur poser
des questions de temps en temps pour relancer le processus de verbalisation. Hoc
(1996 : 23) insiste sur l'importance qu'il y a d'associer l'opérateur pour qu'il soit
partie prenante de l'observation et "faire de ce dernier un acteur à part entière de la
recherche".
118
Chapitre 5
119
Chapitre 5
120
Chapitre 5
(4) Quelles stratégies sont mises en jeu ? Plusieurs types de stratégies peuvent
être utilisés pour exécuter une tâche identique, mais toutes ne sont pas également
pertinentes ou coûteuses. La stratégie attendue correspond toujours à une hypothèse
des concepteurs. L'observation peut donner des indications quant aux stratégies
effectivement déployées lors de l'exécution et valider ou non les hypothèses initiales.
Il peut être intéressant d'étudier l'activité d'un sujet sur le même type de tâche
(analyse synchronique), son activité sur une période donnée (analyse diachronique),
ou par rapport à d'autres sujets (analyse différentielle). L'identification des stratégies
mises en jeu est essentielle pour la conception des aides.
(6) La correction est-elle pertinente ? La correction dans une tâche fermée est
primordiale. Plusieurs questions doivent trouver réponse lors des observations
concernant le nombre d'essais possibles, le type de validation (code couleur, suivi,
nombre d'essais, temps nécessaire pour réaliser la tâche), le type de rétroaction et les
incitations à prendre des notes. Trop de données pouvant brouiller le message de
correction, il s'agit de choisir ce qui semblera le plus approprié aux apprenants.
121
Chapitre 5
Comme cela transparaît dans cette liste de questions, il s'agit de faire un certain
nombre de vérifications quant aux hypothèses de travail qui ont présidé à la mise en
place de choix didactiques et de solutions techniques afin de parvenir à un diagnostic
et procéder à d'éventuels ajustements ou changements. Ces observations peuvent
également conduire à l'élaboration d'aides au travail et à l'adaptation de l'interface.
5.4.1. Redéfinitions
L'étude ergonomique de l'activité (cf. figure 4.1) démontre qu'une tâche
imaginée par un prescripteur peut ne pas coïncider avec ce qui est réellement effectué
par un opérateur. Trois raisons peuvent expliquer cet écart : soit l'opérateur a un
comportement atypique, soit le prescripteur a commis une erreur de jugement qui a
provoqué l'écart, soit enfin les conditions de la tâche concourent à générer un
comportement inattendu. Pour s'assurer que l'écart ne provient pas d'un sujet "hors
norme" et écarter la première supposition, il est nécessaire de recourir à plusieurs
observations.
Nous allons montrer comment une micro-tâche proposée dans Virtual Cabinet a
évolué entre sa première et sa seconde version médiatisée grâce aux enseignements
tirés des observations. Pour illustrer la démarche, nous allons prendre l'exemple de
sujets confrontés à une tâche lacunaire. Sans doute parce qu'elle constitue une
activité classique de recherche lexicale, l'équipe de conception n'avait pas anticipé les
difficultés liées à cette micro-tâche. La version prototype prévoyait que le sujet
écoute seize mots enregistrés sous la forme de fichiers son et les place aux quinze
endroits appropriés (un pseudo-mot avait été rajouté).
122
Chapitre 5
L'étudiant écoute chacun des mots et réécoute plusieurs fois ceux qui lui posent
problème (lends par exemple) puis lit le texte. Ensuite, il visionne de nouveau la vidéo
pour s'aider en repérant des morceaux de phrases du document. Il ne place aucun des
mots dans la corbeille (je pense qu'il ne l'a pas remarquée). Il n'a pas vu tout de suite
qu'il y avait un pseudo-mot.
Ensuite il valide, puis essaie de repositionner certains éléments. Il ne relit pas les
phrases reconstituées. Il émet le souhait d'avoir accès à la traduction. Il pense que le
pseudo-mot pose une difficulté supplémentaire dans un exercice qui est déjà
suffisamment difficile. L'étudiant a trouvé l'activité trop longue et a dit que cela ne lui
permettait pas d'en apprendre plus sur le document (il a fini par détacher l'activité de
son contexte).
Je pense qu'il faudrait peut-être signaler dans les instructions qu'il y a un piège, et
aussi faire apparaître dans le texte les mots correspondants qu'il a placés dans le
tableau.
123
Chapitre 5
Le fait que les consignes (1) soient présentées sous la forme d'un fichier son
amenait certains étudiants à les négliger et, partant, à commencer la micro-tâche sans
savoir exactement ce qui était requis. Il a donc été décidé de mettre les boutons
consignes davantage en valeur pour qu'ils ne puissent échapper à l'attention des
utilisateurs. D'autre part, les consignes avaient été formulées en termes "techniques".
Aussi la verbalisation s'est-elle révélée très utile pour faire décrire par les opérateurs
le fonctionnement de chaque activité, ce qui nous a permis de reformuler les
consignes en étant plus proche des perceptions et du vocabulaire des apprenants.
124
Chapitre 5
Les observations ont enfin permis de voir que les stratégies (3) de certains
apprenants pouvaient être parfois peu efficaces. Par exemple, un étudiant
commençait à rédiger sa note de synthèse seulement après avoir effectué toutes les
micro-tâches. D'autres omettaient totalement le dictionnaire. Comme nous l'avons
souligné plus haut, l'enseignant régule les comportements lors de la conduite de
classe mais, en son absence, il importe de trouver un moyen pour guider l'activité
d'apprentissage. Aussi a-t-il semblé pertinent de rajouter une aide contextuelle pour
suggérer des conseils pendant la résolution. Le personnage de Ms Shelley, qui servait
jusqu'alors de guide pour la découverte de la situation, a été recyclé en secrétaire
légèrement interventionniste qui distille ses conseils et guide l'activité
d'apprentissage.
125
Chapitre 5
rédaction dès que possible, relire la note de synthèse avant de l'envoyer au tuteur) et
avons programmé les interventions aux moments opportuns. Ce guidage en ligne est
une tentative d'apporter des aides méthodologiques et répond à la nécessité d'attirer
l'attention de l'apprenant sur des stratégies appropriées et de transposer, de manière
forcément imparfaite, l'étayage traditionnellement fourni par l'enseignant à
l'environnement multimédia. De plus, les dernières observations conduites auprès des
utilisateurs indiquent que les interventions de la secrétaire virtuelle peuvent
rapidement devenir intempestives et, dans sa version actuelle, cette fonction peut être
désactivée.
Une attention particulière a été portée à la navigation dans le site qui, à la fois à
travers l'observation des comportements et les commentaires générés par les sujets,
semble avoir atteint un niveau satisfaisant d'intuitivité. Les utilisateurs savent se
repérer facilement et comprennent assez rapidement le fonctionnement général du
site.
En ce qui concerne les micro-tâches, elles sont effectuées en peu de temps pour
ce qui concerne l'apprentissage lexical et grammatical (environ cinq à sept minutes)
et ne dépassent pas une durée raisonnable pour les tâches de construction de sens
(entre dix et douze minutes). Dans les deux cas où une surcharge cognitive inutile est
apparue, nous avons simplifié la tâche en diminuant le nombre d'items. L'observation
fait également apparaître le besoin de rappeler aux étudiants, lors de la présentation,
que les micro-tâches ne sont là que pour l'étayage.
126
Chapitre 5
5.5. Conclusion
127
Chapitre 6
5, # /
La mise au rebut rapide de tel logiciel coûteux qui promettait pourtant des
progrès sensibles montre, s'il en était besoin, la portée limitée des "discours
incantatoires" (Annoot, 1996) auprès des apprenants et des enseignants. Le fait qu'un
dispositif d'apprentissage médiatisé soit utilisé ou non, dépend de la qualité de son
contenu (sa valeur intrinsèque), mais aussi du potentiel pédagogique qu'il représente
(sa valeur extrinsèque). L'adoption du dispositif suppose également qu'un réseau de
sens soit tissé autour de celui-ci par les apprenants et les enseignants-tuteurs à
l'intérieur du contexte d'apprentissage. Nous suivons Rabardel et Pastré (2005 : 5)
dans leur proposition de poursuivre la conception dans les usages que construisent
les utilisateurs afin de repérer "les genèses multiples aux plans opératifs et
identitaires".
129
Chapitre 6
130
Chapitre 6
ont dû redéfinir la leur dans les années 1980 quand l'avènement de la bureautique a
bouleversé leur domaine de compétence (Singéry, 1994).
Les enseignants désemparés (1) mettent en place des stratégies d'évitement vis-
à-vis du dispositif car ils craignent de ne pas maîtriser la situation. Cet effacement
s'explique davantage par un malaise face à la technologie que du fait d'un rejet du
dispositif lui-même qui est en quelque sorte englouti par la machine. En faisant écran,
la technologie déstabilise trop fortement les représentations et remet en cause
l'expertise professionnelle, ce qui explique que ces enseignants vont saisir le premier
dysfonctionnement technique pour décrédibiliser le dispositif et éviter de l'utiliser.
Dans le cas des suivistes (2), ce n'est pas la technique qui fait obstacle à
l'appropriation, mais plutôt la représentation de ce type d'outils pour l'apprentissage
des langues en terme d'efficacité, de pertinence et d'adaptation aux besoins ou aux
intérêts des apprenants. Les enseignants-tuteurs de cette catégorie sont
majoritairement des vacataires en situation professionnelle précaire, et, s'ils
n'investissent pas le programme, ils se conforment aux prescriptions de départ. Ils
assurent un accompagnement limité car ils perçoivent le dispositif d'apprentissage
médiatisé comme un gadget ou comme un outil trop élaboré pour le public visé.
Bien qu'exprimant des réticences ou même une certaine méfiance par rapport
aux TICE, les volontaristes (3) se saisissent du dispositif et le mettent en projet, c'est-
à-dire qu'ils imposent un certain nombre d'exigences (dates butoirs, thèmes…),
proposent des activités complémentaires pour contextualiser le travail des apprenants
et créent des passerelles avec leurs cours. Ce cadrage pourrait correspondre à une
131
Chapitre 6
Les experts (4) enfin ont pris le temps d'analyser le site avec soin et de voir
comment ils allaient l'intégrer à leur pédagogie. Leur connaissance de l'apprentissage
et des TICE leur permet d'avoir des attentes raisonnables par rapport au dispositif
qu'ils savent ne jamais être une réponse suffisante à un besoin de formation. Ils
améliorent le dispositif en s'affranchissant des prescriptions et en investissant leurs
fonctions de guidage et d'accompagnement. Ils sont surtout intéressés par les TICE
dès lors que celles-ci peuvent apporter une valeur ajoutée à l'apprentissage. Leur
attitude positive peut également jouer un rôle d'entraînement au sein d'une équipe et
provoquer l'adoption d'un outil.
Enfin, nous choisissons de placer les experts à l'extrémité du continuum car les
membres de cette dernière catégorie semblent avoir engagé un travail de
distanciation par rapport à la technologie et à ses effets supposés. Leurs discours ne
révèlent ni crainte, ni résignation, ni cynisme, ni enthousiasme, mais une réflexion
construite dans l'action. Ce recul a permis aux enseignants d'incorporer la
déstabilisation entraînée par l'utilisation des TICE afin de mettre en place des outils
d'analyse, des "modèles mentaux", leur permettant de modifier leurs conceptions
initiales (Narcy, 2001). Les experts ont transformé leurs pratiques professionnelles
en une recherche-action constante et sont, pour cette raison, des alliés précieux pour
introduire une innovation dans une institution.
132
Chapitre 6
133
Chapitre 6
D'autre part, la segmentation des identités sociales des usagers dans leur rapport
au changement peut permettre de déterminer quels outils méthodologiques (initiation,
guide d'accompagnement) fournir pour que les enseignants-tuteurs puissent
s'approprier l'innovation au mieux et, éventuellement, sur quels profils d'usagers il
est envisageable de s'appuyer pour accompagner le changement au sein d'une équipe.
134
Chapitre 6
A partir du moment où les apprenants savent de quelle façon ils seront évalués
et selon quels critères, le travail qu'ils effectuent à l'aide du dispositif ne peut que
gagner en efficacité. Il convient alors de poser le contrat en terme de compétences
qui peuvent s'acquérir lors du travail en autoformation. Dès lors que le dispositif n'est
pas introduit comme une innovation radicale, un gadget ou comme une contrainte, il
peut être repéré comme le moyen de développer des compétences à l'intérieur d'un
projet d'apprentissage signifiant et en étant assuré de bénéficier d'un
accompagnement pédagogique. La qualité de ce dernier dépend de la mise en projet
des enseignants-tuteurs et différencie la ressource du dispositif d'apprentissage
médiatisé (cf. chapitre 1, § 1.1.2.).
135
Chapitre 6
ses moindres détails ? Le concepteur n'est sans doute pas la meilleure personne pour
évaluer sa propre création. Cros (2001 : 34-35) remarque le style épique qui parcourt
les récits faits par des innovateurs et elle explique le ton apologétique généralement
employé par le fait que
Selon Skehan (1996 : 23), la justesse désigne la qualité de la langue produite par
rapport aux normes de la langue cible. Pour mesurer la justesse, il est par exemple
possible de déterminer le nombre d'erreurs formelles pour cent mots (Mehnert, 1998).
Les erreurs sont alors étiquetées selon qu'elles sont d'ordre lexical, syntaxique ou
136
Chapitre 6
morphologique puis elles sont rapportées au nombre total de mots contenus dans
chacune des productions.
137
Chapitre 6
la possibilité d'analyser les productions avec les critères listés ci-dessus, mais aussi
de comparer le résultat du travail des apprenants dans le temps afin d'étudier les
effets de progression et de fossilisation. Le tableau suivant résume les différents
paramètres, suivant une gradation dans le temps, qu'il serait possible de prendre en
compte et propose un certain nombre de pistes pour guider une telle évaluation.
Analyse de + en + fine
Ellis (2003) se montre très prudent sur ce que les tâches favorisant la
construction du sens pourraient apporter en termes d'acquisition. Il énonce certaines
avancées dans les connaissances, mais montre de manière implacable que les
recherches sur le sujet de l'acquisition demeurent contradictoires. C'est pour cette
raison qu'il insiste sur la différence entre les potentialités prêtées aux tâches et des
propriétés qui n'ont pas encore été démontrées. Se demandant si des potentialités
sont suffisantes pour des praticiens, il conclut par ce qui pourrait apparaître comme
une pirouette : "la nature même de l'enseignement d'une langue rend à la fois
inévitable, voire souhaitable, que les décisions soient basées sur des potentialités et
des probabilités, plutôt que sur des certitudes" (Ellis, 2003 : 101). Même s'il est
intéressant de garder la prudence d'Ellis à l'esprit, les concepteurs ne peuvent
cependant pas esquiver la question du potentiel effectif du dispositif pour
l'apprentissage d'une langue étrangère.
138
Chapitre 6
6.2.2. Illustration
Le scénario de Virtual Cabinet donne l'opportunité aux apprenants de
développer des connaissances concernant le système politique britannique (culture),
mais aussi le lexique approprié pour aborder une question donnée (linguistique) ou
encore le registre de langue approprié pour s'adresser à un ministre (pragmatique). Ils
ont également besoin de savoir-faire pour étayer leur argumentation avec pertinence.
Cela correspond bien à l'approche par la macro-tâche qui envisage la compétence
comme une "habileté langagière située" (Chapelle, 2003 : 149).
139
Chapitre 6
140
Chapitre 6
Avant de repérer quels usages sont construits par les apprenants en interaction
avec un nouveau dispositif d'apprentissage médiatisé, il convient d'attendre que le
recours à une technologie donnée soit stabilisé, que la banalisation ait remplacé
l'enthousiasme ou le rejet, en bref que la nouveauté se soit institutionnalisée. Un
certain nombre de questions sensibles pour l'appropriation concernent le temps
consacré à l'apprentissage en ligne et le lieu de cet apprentissage. D'autre part, il
convient d'apprécier les jugements des apprenants concernant les éléments du
dispositif comme les thèmes proposés et l'accompagnement pédagogique. Il importe
donc de prendre en compte toutes les données pertinentes concernant les utilisations
afin de pouvoir ultérieurement apporter des améliorations au dispositif. Pour ce faire,
une enquête par questionnaire peut être mise au point et administrée à un large
échantillon d'utilisateurs afin de pouvoir faire apparaître des régularités statistiques.
Pour illustrer ce qu'un tel questionnaire peut apporter aux concepteurs, nous
proposons de présenter les résultats obtenus auprès de 99 apprenants (53 de sciences
du langage et 46 de sociologie et d'anthropologie) à la fin du premier semestre
d'utilisation de Virtual Cabinet. Cette enquête avait pour objectif d'évaluer la façon
dont le dispositif d'apprentissage médiatisé a été approprié par les apprenants. A la
suite d'une réunion pédagogique avec les enseignants-tuteurs souhaitant faire partie
de la mise en place expérimentale du dispositif, l'organisation prévoyait un stage
d'initiation, trois notes de synthèses à rendre au cours du semestre, le
réinvestissement en TD (rétroactions, corrections, débats…) et une évaluation finale
sur le même format que celui des synthèses. Il avait été précisé que cette prescription
initiale pouvait être enrichie ou détournée par les huit enseignants-tuteurs impliqués
dans l'expérimentation.
141
Chapitre 6
items proposés ont par conséquent été résumés par un adjectif : "Vous adorez
travailler comme cela ; cela vous donne plus de liberté" (enthousiaste) ; "vous
travaillez volontiers avec la technologie quand cela vous semble
adapté" (pragmatique) ; "la technologie, ce n'est pas forcément votre truc mais il faut
bien s'y mettre" (suiviste) ; "vous pensez que la technologie est un frein à
l'apprentissage" (objecteur).
Objecteur 1% 1,9% -
Autre 1% - 2,2%
Sexe F = 85 / H = 14 F = 53 / H = 0 F = 32 / H = 14
Les apprenants questionnés s'avèrent être en grande majorité (76,7%) séduits par
l'utilisation des technologies pour l'apprentissage. Ce taux est d'autant plus
intéressant que les répondants sont dans leur deuxième année d'autoformation au
Centre de langues et qu'un sentiment de rejet ou de lassitude aurait pu être exprimé
de leur part. Il convient de noter que les étudiantes inscrites en sciences du langage
se montrent davantage conquises par les TICE car quasiment une sur cinq déclare
"adorer" travailler ainsi et deux sur trois avouent travailler "volontiers" de cette façon.
En revanche, davantage d'étudiants de sociologie et d'anthropologie semblent
réservés vis-à-vis de l'apprentissage médiatisé. Ces résultats signalent cependant que
l'apprentissage médiatisé est en voie d'institutionnalisation et que les attentes des
utilisateurs vis-à-vis des TICE sont mesurées.
142
Chapitre 6
+ de 3 h 1% 15% 26%
143
Chapitre 6
La vidéosurveillance 12,7%
144
Chapitre 6
Développement de la motivation à
apprendre
Sciences du Langage Sociologie et Anthropologie TOTAL
Le site semble avoir été identifié par les répondants comme approprié pour le
développement de la compréhension de l'oral (7,5/10) ; le taux de satisfaction est un
peu moins satisfaisant en ce qui concerne la production écrite (6/10) et, plus
préoccupant pour la découverte culturelle de la Grande-Bretagne (5,5/10). Si les
utilisateurs apprécient l'ergonomie du site (6,8/10) et la clarté des objectifs visés
145
Chapitre 6
(6,5/10), les résultats sont plus mesurés pour les conditions matérielles proposées
(6,1/10) ce qui peut s'expliquer par certains problèmes techniques rencontrés lors de
la mise en place (disparition aléatoire de la note de synthèse entre deux séances et
problèmes au moment de l'envoi). Le résultat le plus regrettable concerne la qualité
du feedback et des outils de rédaction (5,2/10). Ce manque est-il à interpréter
comme propre au site ou bien comme une carence concernant l'accompagnement
fourni par les enseignants-tuteurs ? Cet aspect a en tout cas contribué à attirer
l'attention de l'équipe pédagogique sur une lacune probable au niveau de
l'accompagnement. L'indice de satisfaction concernant le développement de la
motivation grâce à un tel outil (5,7/10) nous indique que le dispositif n'est pas rejeté
comme tel, mais qu'il demeure un moyen d'apprentissage parmi d'autres. Enfin,
l'appréciation du site est globalement moins positive de la part des étudiants de
sociologie et d'anthropologie que de celles de sciences du langage.
Une telle enquête sur l'utilisation des apprenants fournit des données précieuses
pour faire évoluer le dispositif. Certains auteurs (Grégori, 2002 : 24 ; Jouet, 2000)
préconisent une observation plus fine des comportements selon les préceptes de
l'ethnométhodologie afin de voir comment les apprenants construisent du sens, en
situation, en même temps qu'ils agissent. Ceci pourrait, par exemple, permettre de
déterminer des méthodologies de travail plus ou moins adéquates et nourrir le
discours d'accompagnement des enseignants-tuteurs. Quoi qu'il en soit, nous pouvons
avancer avec Le Boterf (2001 : 474) que les résultats obtenus par cette enquête sont
"à considérer davantage comme des indices que comme des indicateurs". Il serait
cependant souhaitable de poser ces questions à intervalles réguliers auprès de la
population d'apprenants afin d'évaluer le dispositif dans le temps et de visualiser son
appréciation, ceci afin de redresser les manques et de pérenniser les améliorations.
146
Chapitre 6
Perriault a montré dans son ouvrage de 1989 qu'un usage dominant finissait par
imposer sa logique sur le long terme parmi un éventail de possibilités. Cette logique
consacre-t-elle une certaine inertie en prescrivant une utilisation a minima, la réalité
pédagogique et son lot de lenteur, de résistance et de cynisme rattrapant le
volontarisme ? De la même façon, n'y a-t-il pas la tentation de façonner un usager
moyen à la mesure duquel un dispositif sera évalué comme étant ou non
satisfaisant, permettant par la même occasion de justifier des investissements ? La
question de l'usage ne peut pas être posée en termes quantitatifs et la perpétuation
d'un dispositif soulève d'autres interrogations dépassant la seule question de la survie
sociale d'une innovation.
Les usages n'apparaissent pas ex nihilo mais suite à une série d'ajustements qui
ne doivent que peu à l'accommodation des utilisateurs à la technique, mais dépendent
en grande partie du sens qui est accordé à l'apprentissage et de la mise en projet qui
en découle. Certes, tant que les usages concernant l'apprentissage médiatisé ne se
seront pas stabilisés, tant que la technologie nimbera l'apprentissage d'une aura
techniciste, suffisante pour en cautionner à elle seule l'efficacité, il est à craindre que
les TICE continueront à produire illusions et incantations. Pour éviter ces deux
écueils, la technologie gagnerait à être désenchantée comme le préconisent Perriault
(1989) et Jouet (2000), et ceci ne semble pouvoir se faire qu'à la faveur de son
appropriation. Pour l'enseignant-tuteur, cette appropriation se fait peu à peu, à
mesure que les outils sont investis de significations et qu'une maîtrise technique et
professionnelle se développe. Il en va de même pour l'apprenant : l'appropriation du
dispositif ne se fait qu'à la condition qu'elle ait du sens.
L'analyse des usages des enseignants semble constituer une piste prometteuse au
moment de faire évoluer un dispositif d'apprentissage médiatisé. Comme le
soulignent Paquelin et Choplin (2003 : 173), "la pertinence de celui-ci doit être
constamment maintenue afin que son efficience perdure". Il ne s'agit cependant pas
147
Chapitre 6
6.5. Conclusion
148
Chapitre 6
proposé à des groupes d'apprenants différents du public visé à l'origine et ceci devrait
renseigner les concepteurs sur la validité des choix pédagogiques. Une seconde
décontextualisation est d'ordre sémiotique. Ainsi, une équipe s'est constituée au sein
du Centre de langues de Lyon 2 pour concevoir une version espagnole de Virtual
Cabinet. Il s'agit de recourir au même cahier des charges et à une architecture
technologique identique, mais de varier la situation. Avec Cibergaceta hispánica,
l'équipe hispanophone a choisi de transposer le scénario original dans un journal
madrilène. En plus des ajustements sémiotiques nécessaires, il sera possible de voir
comment des langues et des situations différentes influent sur la production
langagière des apprenants. Cette transposition du scénario signale une appropriation
culturelle particulièrement intéressante.
149
Conclusion générale
Dans cet ouvrage, nous avons proposé des concepts et une méthodologie pour
concevoir un dispositif d'apprentissage médiatisé pour les langues en suivant cinq
étapes : de la définition des besoins, en passant par l'écriture du scénario, la
conception des micro-tâches et le développement d'une interface, pour finir par
l'intégration du dispositif dans le contexte d'apprentissage.
Utilité, validité et utilisabilité, tels sont les trois objectifs vers lesquels tend une
démarche de conception itérative : en partant d'hypothèses et de la connaissance du
problème initial, la recherche-développement opère par rapprochements successifs
jusqu'à ce que se comble l'écart entre la prescription (apprendre une langue étrangère)
et la réalité sociale, cognitive, pédagogique et technologique. L'expertise didactique
se construit dans cet ajustement qui s'incarne dans le dialogue collaboratif entre
enseignants et médiatiseurs. En étant à l'interface entre la médiation pédagogique et
la médiatisation, la didactique des langues joue un rôle d'intermédiaire qui permet
151
Conclusion générale
152
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Références
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Références
160
Références
161
Références
Ascher, 19 Costermans, 43
Baccino et al, 42, 46, 104, 110, 112, Crinon et al, 115
118 Cros, 136
Bachelard, 25 Cuq, 13, 59
Bachman, 33 Cyrulnik, 60
Barbier, 7, 25, 76, 101, 134, 142 Damasio, 62
Barbot & Camatarri, 21, 61 Davallon & Le Marec, 133
Beatty, 92 De Montmollin, 88
Bertin, 104 De Terssac, 41
Bialystok, 83, 137 DeKeyser, 81, 82, 84, 96
Bonami & Garant, 130 Delbecque, 111
Bourgeois & Nizet, 17 Delouis, 59
Brodin, 21, 56, 82 Demaizière & Achard-Bayle, 13
Brown, 65 Depover et al, 25, 42, 62
Bruner, 19, 61, 77 Després-Lonnet et al, 109
Buck, 87 Develay, 151
Buser, 81, 104 Doly, 57, 58
Catroux, 57 Doughty, 80
Cazade, 61 Duquette, 115
Chanier, 57
Index des notions
Ellis, 18, 54, 55, 67, 68, 80, 81, 82, 97, Legros & Crinon, 11, 16, 148
136, 138
Leplat, 82, 84, 86, 88, 89, 97, 120
Ellis & Barkhuizen, 137
Linard, 13, 14, 16, 17, 32, 73, 106
Ellis N., 63, 83
Logan, 82, 83
Falzon, 116
Mangenot, 54
Fichez, 130
Mangiante & Parpette, 31
Field, 85
Mc Laughlin & Heredia, 82
Flichy, 47
McDonough & McDonough, 39
Foray, 12
Mehnert, 136
Forest, Mallein & Panisset, 141
Mœglin, 16, 26
Fourez, 17
Narcy, 22, 31, 117, 132, 136
Furstenberg, Levet, & Maillet, 15, 59
Neveu, 18
Gaonac’h & Passerault, 67
Nogier, 111, 113, 114
Gaonac'h, 31
Nunan, 54
Giordan, 17
Nwosu, 139
Grégori, 146
O’Malley & Chamot, 85
Guillevic, 99, 112
Paquelin, 43, 44
Hoc, 116, 117, 118
Paquelin & Choplin, 147
Jeannerod, 60
Perrenoud, 27, 152
Jonnaert & Vander Borght, 17, 31
Perriault, 132, 147
Jouet, 130, 133, 146, 147
Piaget, 99
Kintsch, 55, 67
Porquier & Py, 140
Krashen, 17, 61, 80
Pothier, 13, 14, 115
La Borderie et al, 53, 55
Poyet, 76
Lancien, 15, 39
Puren, 19
Lavigne, 43, 45, 110, 112
Quivy &Van Campenhoudt, 8
Le Boterf, 46, 145, 146
Rabardel, 33, 109
LeDoux, 68
Rabardel & Pastré, 129
163
Index des notions
Rouet, 33 Tardif, 63
Séguy, 46 Vinck, 40
Shneiderman & Plaisant, 97, 104, 112 Zaki & Ellis, 137
164
Index des notions
accompagnement, 13, 14, 74, 131, 135, didactique des langues, 7, 11, 20, 25,
140, 146 39, 53, 136, 151
appropriation, 52, 132, 134, 141, 147, émotions, 68, 72, 73, 92, 118, 139
149 ergonomie, 88, 115, 127
artefact, 32, 33, 146 fluidité, 82, 83, 84, 87, 103, 136, 137,
attention, 55, 65, 80, 81, 83, 96, 139 138, 140
automatisation, 81, 82, 84 innovation, 24, 29, 130, 132, 135, 136,
147, 148
besoins, 28, 29, 30, 31, 32, 36, 42, 49,
55, 63, 73, 74, 93, 107, 148, 149 input, 9, 20, 35, 36, 61, 63, 64, 65, 66,
74, 80, 81, 83, 84, 89, 93, 103
cahier des charges, 26, 34, 37, 40, 41,
46, 47, 48, 49, 50, 52, 114 justesse, 84, 136, 140
consignes, 13, 80, 90, 96, 100, 101, métaphore, 44, 61, 62, 76, 109, 110,
102, 103, 121, 124 111
construction du sens, 18, 20, 53, 54, micro-tâche, 45, 54, 79, 80, 81, 84, 85,
57, 87, 96, 138 87, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98,
108, 120, 122, 126
constructivisme, 11, 16, 17, 18, 21, 58,
77 modélisation, 101
créativité, 25, 27, 43, 48, 62, 92, 93, multimodalité, 11, 12, 39
135 navigation, 104, 106, 107, 108, 111,
culture, 18, 19, 20, 76, 77 115, 124, 126
dialogue collaboratif, 21, 41, 48, 114, observations cliniques, 103, 112, 113,
151 115, 122, 127
Index des notions
production langagière (output), 9, 53, surcharge cognitive, 45, 65, 115, 120,
54, 55, 56, 73, 149 123, 126
prototype/prototypage, 40, 42, 46, 50, technologie, 11, 12, 15, 21, 22, 25, 26,
104, 107, 112, 122, 129 27, 39, 43, 73, 88, 129, 130, 131, 132,
133, 147, 148, 149, 152
psycholinguistique, 8, 33, 34, 39, 65,
80 usage, 74, 132, 147
storyboard, 46
166
Liste des figures
167
Liste des tableaux
! 6
Tableau 1.1 - Trois niveaux de formation.................................................................. 15
Tableau 3.1 - Caractéristiques de l'anglais oral (adapté de Rost, 2002 : 31) ............. 64
Tableau 5.4 - Le profil des apprenants (adapté de Narcy : 1990) ............................ 117
168
Liste des sigles
TD : Travaux Dirigés
169
Table des matières
! '
Introduction ................................................................................................................................. 7
1.4. Conclusion....................................................................................................................... 26
170
Table des matières
2.4. Conclusion....................................................................................................................... 49
3.1. La macro-tâche................................................................................................................ 53
3.1.1. Définition de la tâche............................................................................................... 53
3.1.2. De l'input à l'output.................................................................................................. 55
3.1.3. Macro-tâches et apprentissage médiatisé................................................................. 56
3.5. Conclusion....................................................................................................................... 76
171
Table des matières
172
Table des matières
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