Integration Didactique Des TIC Dans Lens PDF
Integration Didactique Des TIC Dans Lens PDF
Integration Didactique Des TIC Dans Lens PDF
Par
Jacques ETOUNDI ATEBA
1
Dédicace :
2
Remerciements
A l’immense chaîne des ouvriers du savoir - éducateurs et chercheurs - opérant en
tous domaines, époques et niveaux.
Tout contextuellement, à Monsieur le Professeur Pierre Martinez, directeur de cette
thèse, dont la science et la conscience m’inspireront inexorablement les attitudes
professionnelle et humaine futures. Que l’homme de science, l’homme tout court,
trouve ici un hymne à son ouverture épistémologique et à son inusable humanisme
qu’il a manifestés tout au long de notre bien trop courte collaboration.
A tous les autres enseignants de l’Université Paris 8 et d’ailleurs, pour leur influence
directe ou indirecte dans le façonnement de mon esprit scientifique. De manière non
exhaustive et dans un ordre aléatoire, je pense aux Professeurs émérites Robert
Vivès, Daniel Coste, Louis Porcher, Monique Linard, Louise Dabène; au Professeur
ordinaire émérite J.M. De Ketele; au Directeur de recherche émérite Edgar Morin; au
Directeur de recherche Dominique Wolton, aux Professeurs Louis-Jean Calvet, Rémy
Porquier, M. Barra-Jover, Jean-Louis Chiss, Jean-Pierre Cuq, Philippe Meirieu, Thierry
Lancien, François Mangenot, Thierry Karsenti, à l’Ingénieur de recherche Françoise
Demaizière.
A tous les membres du laboratoire DILTEC (Paris 3 Sorbonne Nouvelle) dont la
collaboration et la compagnie auront été d’un apport considérable dans ce travail. Je
pense entre autres à Valérie Spaëth, Danièle Moore, Jean Charconnet, Stéphanie
Galligani, Muriel Molinié, Kamila Sefta, tous Maîtres de Conférences.
Aux camarades, amis et parents dont la compagnie physique, téléphonique ou
électronique a su influencer bien des aspects de cette recherche aux plans esthétique,
matériel, psychologique et/ou scientifique. Parmi eux, mention spéciale à Laurence et
Michel Combes, François Favre, Stéphane Grobost, Honoré Abraham, Béate et Guy
Alcalay, Emmanuel Beti, Jean-Claude Bondol, Jamila Sebbar, Hines Mabika, Martine
Blot, Catherine et Joséphine Tabi, Francis Ekandé, Monsieur et Madame Atchigue,
Marcel Logmo, Sylvie Bisso, William Moukagni, Paul Maleval, Nicolas Lombardelli,
Jean-Marc et Marielle Tournié.
Rien de ce que je prétends être n’aurait été possible sans le dévouement de mes
instituteurs du primaire, à commencer par mes propres parents qui en étaient ; de mes
enseignants du secondaire ensuite ; d'où le «culte» que je leur vouerai toujours.
Aux personnels des bibliothèques de Paris 8, Paris 10, Georges Pompidou, Sainte
Geneviève, Cujas, pour leur disponibilité et leur savoir-faire.
Enfin, à tous les anonymes qui ont partagé mon quotidien, et avec lesquels je n’ai pas
pu/su faire connaissance, mais qui ont impersonnellement apporté leur pierre à cet
édifice collectif, dont finalement je ne suis que l’interface.
3
Exergue
François Rabelais2
1
Peut être traduit par « malveillante », mais aussi par «mal préparé, mal éduqué».
2
Rabelais, F., (1997), (réed. Texte publié à Lyon en 1542), Pantagruel, Paris, Honoré
Champion,
P. 110.
4
Tables des matières
DÉDICACE : ........................................................................................................................................................ 2
REMERCIEMENTS ............................................................................................................................................. 3
EXERGUE ........................................................................................................................................................... 4
AVANT PROPOS ................................................................................................................................................ 8
5
DEUXIEME PARTIE : ETUDE DE CAS................................................................................. …84
1. : Introduction…………………………………………………………………84
2. : Les différents corpus………………………………………………………84
3. : La cueillette des données…………………………………………………85
3.1 : Composition des corpus………………………………………………………………...89
3.2 : Les corpus………………………………………………………………………………..90
3.3 : Mise au point sur les corpus sélectionnés……………………………………………112
MODULE A : LA SOCIOLINGUISTIQUE ............................................................................................................ 113
A.1. : Généralités…………………………………………………………… 113
A.2 : Le Cameroun, présentation générale………………………………...119
A.3 : L’histoire du Cameroun………………………………………………..123
A.4 : Les politiques linguistiques camerounaises………………………...128
A.4.1 : La période précoloniale……………………………………………………………...129
A.4.2 : La période coloniale………………………………………………………………….130
A.4.3 : La première loi linguistique…………………………………………………………..131
A.4.4 : La conférence de Berlin du 7 avril 1914…………………………………………...131
A.4.5 : La politique linguistique sous la période franco-anglaise…………………………131
A.4.5 : La politique linguistique postcoloniale……………………………………………….133
A.4.5.1 : Le bilinguisme institutionnel……………………………………134
A.4.5.2 : Le multilinguisme camerounais………………………………..138
A.4.5.3 : Langues additionnelles…………………………………………139
A.5 : Le statut du français au Cameroun…………………………………………………….143
A.5.1 : Le monopole français……………………………………………..143
A.5.2 : Le français camerounais, langue seconde/maternelle/étrangère?.144
MODULE B : LA QUESTION CURRICULAIRE .................................................................................................. 159
B.2. : Définition du curriculum……………………………………………….159
B.3 : Une vision systémique du curriculum………………………………...161
B.3.1 : L’élaboration des curricula…………………………………………………………..164
B.3.2 : La notion de dispositif………………………………………………………………..165
B.4 : L’enseignement/apprentissage du français au Cameroun…………167
B.4.1 : L’élaboration des programmes de français………………………………………..167
B.4.2 : La didactique du français au Cameroun…………………………………………..169
MODULE C : LES TECHNOLOGIES .................................................................................................................. 176
C.1 : L'intégration……………………………………………………………..177
C.1.1 : Définition générale:………………………………………………………………….177
C.1.2 : Le modèle UNESCO………………………………………………………………...184
C.1.3 : Commentaire du document UNESCO……………………………………………..203
C.2 : Les TIC dans le système éducatif camerounais…………………….203
C.2.1 : Le dispositif camerounais………………………………………………………….. 203
C.2.2 : La réalité didactique………………………………………………………………….210
C.2.2.1 : Représentation des enseignants sur les TICE……………..210
C.2.2.2 : Lieu de la formation……………………………………………211
C.2.2.3 : Attente vis-à-vis des TICE…………………………………….212
C.2.2.4 : Perspectives de formation…………………………………….213
C.2.2.5 : Profil des formateurs…………………………………………..214
6
6. : Confrontation avec la réalité camerounaise…………………………..227
7. : Les TICE, et après ?..........................................................................228
8. : Les ressources dispositives……………………………………………..229
9. : Une approche systémique du dispositif………………………………..231
9.1. :Rappel du contexte curriculaire global…………………………………………………233
9.2 : MODELE SYSTEMIQUE D’INTEGRATION DES TICE……………………………..236
9.3 : Commentaire du modèle………………………………………………………………..237
9.3.1 : Contextualisation du modèle…………………………………….238
9.3.2 : Décontextualisation……………………………………………….243
9.3.3 : Quelle responsabilité pour l’enseignant ?..............................263
9.3.4 : Une éducation de/par l’âme est-elle actuellement possible ?..............................270
7
AVANT PROPOS
Ce livre est une adaptation éditoriale d’une thèse de doctorat.
Rédiger et soutenir un tel travail universitaire peut en effet être vécu comme
une contrainte académique et représenter une souffrance inénarrable.
Ce moment peut aussi, à l’opposé, être une chance pour celui qui s’y soumet
positivement de sortir de sa routine physique, matérielle, psychologique et
intellectuelle. Inutile de nous positionner dans cette alternative, même s’il serait
commode de choisir la deuxième hypothèse. Nous pouvons simplement dire
que ce travail de recherche nous aura permis de vivre une expérience
introspectivement enrichissante, et intellectuellement exaltante.
Nous avons, en effet, dû repousser les limites de nos ressources psychiques et
cognitives, pour tenir le pari de cette passionnante aventure. Humainement,
nous en ressortons transformé, ayant appris à relativiser nos convictions et
impressions.
La qualité des lectures et la quantité des approches disponibles sur notre
thématique nous ont paru ahurissantes, et nous si nous n’avions pas dû faire
des sélections, arbitraires parfois, nous aurions produit un document de plus de
mille pages. Aussi demanderons-nous à ceux qui se donneront la peine de
nous lire et que nous remercions par avance, de faire preuve de
compréhension si certaines questions leur sembleront superficiellement
traitées.
Nous les avons par exemple dispensés de toute la littérature habituelle sur les
enquêtes, qui expose et définit des termes comme les hypothèses, la
population d’enquête, l’échantillonnage ; de même ne s’y trouve-t-il pas le
discours habituel sur la typologie des questions et leur dépouillement, qu’on
peut récupérer dans tout ouvrage sur la méthodologie de recherche. En lisant
les ouvrages de ceux qui s’y sont consacrés, comme M. Beaud, P. Blanchard &
8
T. Ribemont, P. Blanchet, F. Dépelteau, R. Ghiglione & A. Blanchet, M. Grawitz,
ou même M. Guidère3, etc., les chercheurs peuvent effectivement avoir les
renseignements les plus exhaustifs sur le sujet.
De même, nous avons été le plus synthétique possible dans la présentation du
Cameroun qui est notre pays de référence (population d’étude au sens macro)
et sur sa situation linguistique que d’autres ouvrages4 présentent mieux.
Nous avons fait le choix de nous focaliser sur l’approche qui nous a paru
novatrice, la systémique, et de la mettre en œuvre le plus fidèlement possible,
compte tenu de la diversité des aspects notions et concepts inhérents à notre
thématique.
Nous devons également dire que nous avons souvent préféré citer un ouvrage
ou un personnage pour éviter de nous étendre, en le plagiant, sur sa pensée.
Chaque fois que nous avons été obligé de reformuler certains énoncés, nous
avions le sentiment de manquer d’authenticité. Nous avons donc cité toutes les
fois que cela nous a paru nécessaire, non par manque d’idées ou par
incompétence stylistique, mais par solidarité, par honnêteté intellectuelle et par
humilité.
A titre d’exemple, comment pourrions-nous restituer, sans l’altérer, une pensée
comme la suivante5, à laquelle nous adhérons parfaitement ?
3
Voir bibliographie
4
BILOA, E., (2003) et TABI-MANGA, J., (2000), voir bibliographie.
5
CHAMBAT-HOUILLON, M.-F., WALL, A., (2004, 28) 5.
9
ce texte, en supprimant certains schémas trop académiques et certaines
formulations parfois trop austères, sans toutefois altérer la quintessence du
message porté par ces travaux.
10
INTRODUCTION GENERALE
La grande mutation technologique mondiale vécue depuis la fin du vingtième
siècle rend triviale au quotidien l’utilisation de ce qu’il est convenu d’appeler les
Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC
pour le reste du texte), ou même (TIC) tout court, pour dire combien elles ne
sont plus Nouvelles, au vu de leur vulgarisation. Tous les aspects de la vie
humaine semblent concernés par la nouvelle ère numérique, qui aura été plus
prévisible dans son avènement que dans son étendue et sa prégnance. Dans
les milieux éducatifs, théoriciens et praticiens s’accordent pour prédire une
révolution didactique à nulle autre pareille, et certains faits militent en faveur du
triomphalisme ambiant, si compte est tenu de la place que tiennent
actuellement les Nouvelles Technologies dans les discours politiques,
administratifs, académiques ou scolaires. Cette adhésion collective, certes
compréhensible, un peu facile aussi, pourrait cependant, faute de science, de
méthode et de conscience, déboucher sur une impasse didactique. D’où
l’importance de prendre en compte divers paramètres épistémologiques,
sociologiques et technologiques.
1. Environnement épistémologique
Par environnement épistémologique, nous entendons le cadre dans lequel se
situe la recherche qu’on choisit de mener, qui intègre l’orientation générale des
chercheurs qui appartiennent au même champ d’investigation ou qui en sont
proches. L’épistémologie a certes un sens plus complexe - elle illuminera
d’ailleurs tout ce travail - que cette définition, opératoire, qui vise juste à
introduire cette problématique.
2. Importance de la problématique
Elle apparaît déterminante dans toute investigation scientifique puisqu’elle
exerce une influence capitale sur le reste de la recherche, et cette influence
dépend du paramétrage notionnel et méthodologique. Selon Guidère (2004,
11
19)6
La problématique dépend du sujet traité et de l’optique choisie
pour le traiter. Chaque domaine d’étude possède un ensemble
de problématiques récurrentes et quasiment incontournables
dont le chercheur doit tenir compte lorsqu’il aborde un point
particulier du domaine.
Quant à savoir où situer cette partie essentielle, le même auteur renseigne (op.
cit.):
La problématique doit apparaître clairement dans l’introduction
du travail. Elle correspond à une reformulation interrogative de
l’intitulé initial du sujet. Cette reformulation est généralement
articulée autour de trois questions essentielles en heuristique
académique : QUOI (définition de l’objet)? COMMENT
(explication du processus)? POURQUOI (exposé de la finalité)?
3. Inscription disciplinaire
Pour répondre à cette exigence méthodologique, nous devons préciser que la
présente recherche s’inscrit dans le champ disciplinaire de la didactique des
langues, qui lui-même fait partie des sciences du langage comme domaine de
connaissance. Il nous semble par conséquent important de nous imprégner en
prologue de l’actualité épistémologique de ce champ d’investigation et d’action
(nous le ferons ici assez brièvement pour y revenir amplement plus loin).
La didactique est une discipline d’évocation ancienne - depuis Comenius au
6
GUIDERE, M., (2004), Méthodologie de la recherche, guide du jeune chercheur en
lettres, langues, sciences humaines et sociales, mémoire, master, doctorat, Paris,
Ellipses.
12
XVIIe siècle qui a utilisé ce vocable pour désigner l’art d’enseigner, qui se serait
lui-même inspiré d'un néologisme de Radtke7 - mais à la notoriété militante, au
sens où sa légitimité aux côtés de disciplines plus anciennes, à l’instar de la
pédagogie, se négocie depuis quelques dizaines d’années.
A titre d’exemple : M. Pothier (2003)8 consacre plus du tiers d’un livre de moins
de 140 pages à dégager la spécificité de cette discipline émergente, alors
même que le mot n’en figure pas en titre, et que l’hypothèse de lecture, au vu
de la couverture, aurait plutôt laissé présumer une dissertation exclusive sur les
nouveaux dispositifs d’apprentissage. C’est dire combien semble encore
problématique la place épistémologique de la didactique, au moment où son
existence en tant que discipline académique se discute pourtant de moins en
moins.
Retour sera fait sur cet ouvrage, pour nous en inspirer dans la partie consacrée
aux concepts technologiques (modules B et C), tant la démarche adoptée par
l’auteur semble édifiante sur notre propos.
Pour Rosier (2002, 104)9,
Le domaine de la didactique circonscrit un champ de recherche
qui tend à clarifier et à cerner les difficultés de l’apprentissage
disciplinaire, et cet objectif suppose une centration sur
l’appropriation, les contenus et les méthodes y afférant, sans
oublier une réflexion plus large sur les finalités de
l’enseignement. Les conditions de validité de la recherche en
didactique relèvent de la faisabilité, laquelle ne donne pas
légitimité dans le champ théorique, mais suppose l’accord tacite
7
Lire à ce sujet l’insertion de BESSE, H. (1998), «Contribution à l'histoire du mot
didactique», in, BILLIEZ, J., (coord.), De la didactique des langues à la didactique du
plurilinguisme, Hommage à Louise Dabène. Grenoble, Cdl-Lidilem, p.17-30.
8
POTHIER, M., (2003), Multimédias, dispositifs d’apprentissage et acquisition des
langues, Paris, Ophrys.
9
ROSIER, J.- M.,(2002), La didactique du français, Paris, Puf.
13
des enseignants sans qui il n’y a pas d’élaboration du possible.
Dans le même ordre d’idées, CUQ et GRUCA (2003, 44)10 pensent que :
L’objet de la didactique ne saurait être de produire un ensemble
de règles ordonnées de prescriptions, valable partout et tout le
temps. Il ne lui est pas non plus nécessaire de disposer d’un
arsenal de symboles abstraits pour la description des faits
didactiques, dont le « fonctionnement aveugle » assurerait « la
10
CUQ, J.-P., GRUCA, I., (2004), cours de didactique du français langue étrangère et
seconde, Grenoble, PUG.
14
reproductibilité des démonstrations ». Cette restriction seule
semble interdire tout projet d’universalité, et par conséquent
tout espoir de définition «scientifique» de la discipline.
12
MOUNIN, G., (3e éd. 2000), Dictionnaire de la linguistique, Paris, Quadrige/PUF.
15
scientifique cette impression de clair-obscur, peu compréhensible,
qu'entretiennent les didacticiens au plan notionnel. A la fois soucieux de se
faire reconnaître dans les milieux universitaires - ce qui est plutôt réussi en
Europe - comme des spécialistes avérés d’une toute nouvelle, fort ambitieuse
et légitime discipline académique, ils ambitionnent aussi de figurer dans les
rangs des praticiens du champ pédagogique, même si certains enseignants leur
reprochent souvent un académisme décalé de leur univers qui se veut, lui, plus
pragmatique.
Cette ambiguïté pourrait précisément, si elle est bien assumée, fonder la
spécificité de la didactique : voie mitoyenne, elle se chargerait alors de
réconcilier, dans une approche synthétique et intégrative, théoriciens et
praticiens. Le didacticien pourrait, dans cette optique, opérer la démarche
alternative qui lui permettrait d’accompagner le théoricien dans ses élans
épistémologiques en lui opposant la réalité du terrain; mais il pourrait aussi
soutenir, en l’éclairant, l’action du praticien, souvent menacée de cristallisation.
13
Selon le petit Larousse 2004, l’atrium désignait dans l’antiquité romaine une pièce
principale qui commandait la distribution de la maison, et dans l’architecture
contemporaine il renvoie à un grand espace intérieur vitré commandant les autres
locaux.
16
faites sur l’éducation une espèce de modération - à la fois animation et veille -
pour canaliser énergies, inspirations et conquêtes des chercheurs exerçant
dans les divers champs disciplinaires périphériques.
Par ailleurs, on a souvent observé que l’école faisait l’objet d’une remise en
cause de sa légitimité et de sa capacité à intégrer les attentes des partenaires
privilégiés de l’éducation que sont les parents d’élèves, dont les associations ne
suffisent pas toujours à défendre les intérêts, faute de disponibilité ou de
lucidité didactique ; ou simplement à cause de la rigidité des institutions
scolaires. De même, il a été ironiquement reproché aux théoriciens de
l’éducation d’être déconnectés de l’environnement classe, et malgré tout de
prétendre professer sur la meilleure manière de faire acquérir des
connaissances aux élèves. Les attitudes des uns et des autres sur les contenus
à faire acquérir sont, elles aussi, polémiques. Les États, quant à eux, financent
l’éducation et en garantissent le fonctionnement, tout en assignant aux acteurs
scolaires des missions précises qui exercent sur eux une constante pression.
Pour accompagner l’acquisition des connaissances, il existe un autre groupe
d’acteurs, composé des opérateurs économiques qui proposent des supports
«sur mesure» : livres, carnets, outils, gadgets, didacticiels, logiciels, Cd Roms
et autres gadgets, dont il serait difficile de dire - sauf si on veut se faire ultra
protectionniste - que les intérêts soient exclusivement commerçants.
17
symphonie scientifique et humaine.
6. L’éclectisme didactique
Cette orientation fonctionnelle se démarquera d’emblée de celles admises
depuis J.F. Halté (1992,3)14 où la didactique en était à simplement «indexer le
pôle des contenus» quand la pédagogie existerait pour «désigner celui des
moyens». En voulant marquer le territoire de la didactique, ce qui était légitime
à cette époque de fondation, cet auteur le confina dans une portion si congrue
qu’elle servirait bien mal les intérêts militants actuels de cette discipline.
14
HALTE, J.-F., (1992), La didactique du français, Paris, PUF.
18
quand les sciences de l’éducation se chargeraient, en toute exclusivité, de
l’opérationnalisation des moyens. On peut légitimement se demander ce qu’il
resterait alors à la didactique, sauf à se faire phagocyter de facto par les
sciences de l’éducation, pour ne participer qu’à «fonder institutionnellement les
moyens» de l’enseignement?
Les chemins de l’évolution intellectuelle sont ainsi faits qu’il faille souvent dans
son parcours, pour accéder à un confort plus grand, renoncer implacablement à
certaines théories qui nous ont jusque-là édifié et dont nous nous sommes fait
les hérauts. Aujourd’hui que nous sommes enclin à délaisser la binarité
conceptuelle de J.-F. Halté, notre sympathie va à la ternarité proposée par J.-
P., Cuq et I., Gruca (2003, 72)15:
15
CUQ, J.-P., GRUCA, I., Op.cit
19
production de concepts propres ont pour objet de produire un
système conceptuel cohérent, qui détermine la méthodologie
de l’enseignement.)
- Le niveau méthodologique
La méthodologie de l’enseignement a un objet double :
- d’une part, elle a pour objet le paramétrage théorique
optimum de l’action d’enseigner, et, en ce sens le niveau
méthodologique est la partie praxéologique de la didactique;
- d’autre part, la méthodologie de l’enseignement a pour objet
de produire une série organisée de principes d’action. En ce
sens, le niveau méthodologique est la partie prescriptive de la
didactique.
- Le niveau technique
- La méthodologie dégage une praxis, c’est-à-dire un
ensemble de techniques (de pratiques) à mettre dans des
situations préalablement objectivées en vue d’obtenir un certain
résultat.
C’est à ce niveau qu’elle utilise les technologies disponibles.
16
MARTINEZ, P., (1998), La didactique des langues étrangères, Paris, Puf.
20
- enfin le troisième, celui de la pratique et des praticiens
(enseignants, mais aussi conseillers, administratifs, voire
hommes politiques) concerne directement la méthodologie
(contenus et objectifs, stratégies, ressources, évaluation des
résultats) et l’organisation (planification et administration dans
tous types et à tous degrés de formation.
17
Nous entendons au sens le plus fort cette conception globale, intégrée plus loin
comme l’approche holistique ou systémique et qui va fonder la méthodologie de cette
recherche.
21
actualité et de sa pertinence.
A cette fin, nous examinerons successivement :
- les questions de recherche ;
- les objectifs d’étude ;
- l’intérêt de cette problématique ;
- sa délimitation ;
- et l’architecture globale de la thèse.
22
l’affiliation et l’ancrage disciplinaires, il nous a parallèlement fallu nous
familiariser avec des problématiques relevant de domaines aussi variés que les
sciences du langage et de l’éducation, celles d’organisation et de formation...
23
écologique et plus éthique.
9. Intérêt de la recherche
Le fait que ce sujet nécessite pour sa compréhension plusieurs disciplines de
référence peut se mesurer à son impact, c’est-à-dire à la diversité du public qu’il
est susceptible d’intéresser.
24
ont menées sur le langage et les langues. Revendication légitime par ailleurs,
tant nous savons leur devoir le cadre de réflexion et la formation initiale reçue
dans la description et l’acquisition des langues. Seulement, nous nous
empressons de relever que la didactique telle qu’elle se conçoit de nos jours -
fût-elle des langues - reconnaît la linguistique comme ancêtre, cependant non
exclusif, aux côtés d’autres disciplines comme les sciences de la
communication, de l’éducation, de l’administration et d’organisation, ainsi que
beaucoup d’autres sciences sociales et humaines. Nous militons d’ailleurs en
faveur de la dissipation des points de tension, potentiels ou réels, entre cette
discipline et toutes les autres.
Les sciences du langage sont essentielles, mais prétendre traiter de la question
de l’intégration des TIC dans l’enseignement/apprentissage du français langue
seconde/étrangère à la seule aune linguistique ou même didactique, dans leurs
cadres disciplinaires actuels, peut sembler éminemment réducteur. En cela
nous rejoignons Cuq et Gruca (op.cit., 72)
25
c’est bien souvent lorsque les apprenants ou les responsables administratifs
nous ont le plus témoigné leur satisfaction qu’une espèce d’angoisse nous a
étreint, une soif inextinguible d’en faire plus, et partant d’en savoir plus. Nous
sommes de ce fait devenu une sorte de juif errant didactique : à la recherche
d’un confort intellectuel et professionnel que nous n’avons retrouvé nulle part.
Nous avons été placé devant la dramatique situation où malgré le fait qu’élèves,
parents et chefs hiérarchiques ne tarissaient pas d’éloges sur nos compétences
et performances - au point de gravir très rapidement certains échelons
pédagogiques et administratifs, et d’être promu à des responsabilités précoces
- notre autocensure s’est montré impitoyable, nous renvoyant l’image d’un
simple ouvrier didactique, d’un vulgaire applicationniste. Voilà pourquoi un
grand désarroi a toujours succédé à chacune de nos réussites pédagogiques,
comme s’il subsistait un je ne sais quoi d’inauthentique dans notre art.
26
pratique qui se veut réflexive. C’est ce dont semble témoigner Martine Beauvais
(2003, 11)18 :
Quand quelqu’un commence à se poser des questions d’ordre
éthique, c’est le plus souvent, parce que sa propre conception
du bien et du mal s’est trouvée ébranlée. Ainsi, si nous nous
préoccupons de la question de la légitimité des «savoirs-
enseignés», ce n’est pas dans un quelconque souci de
normalisation des savoirs et de leurs enseignements mais bien
parce que l’idée première que nous nous faisions de leur(s)
légitimité(s) a été mise à rude épreuve.
Le détour interne qui vient d’être fait n’aura eu pour économie que de justifier la
contiguïté perçue entre les divers aspects intradisciplinaires et ceux plus
extradisciplinaires incarnés par les acteurs et penseurs de différents domaines
d’action et de réflexion. Nous préférons célébrer, parce que nous la percevons
comme telle, la solidarité qui se profile, consciemment ou non, sous les
recherches les plus diverses, dans la tentative effrénée et séculaire entreprise
par l’homme pour maîtriser son environnement et développer les conditions
sociétales nécessaires à son épanouissement et à l’accomplissement de sa
mission terrestre.
Au delà de toute appartenance à des écoles de pensée ou à des domaines de
recherche, il y aurait, selon nous, en chacun de ceux qui cherchent, le besoin
irrépressible de participer à la résolution des multiples questions existentielles ;
et ce malgré l’atomisation des connaissances qu’on peut comprendre, mais
qu’on peut également déplorer.
Lequel d’entre nous n’a jamais envié aux Anciens Sages que furent Platon,
Pythagore et plus près de nous à Leibniz, Comenius, Descartes, leur sapience,
18
BEAUVAIS, M., (2003), « Savoirs-enseignés » question(s) de légitimité(s), Paris,
L’harmattan.
27
qui les rendait aptes à développer, en les appliquant, les schèmes réflexifs
globaux les plus originaux? Quel chercheur se réjouirait en effet du triomphe
épisodique et anecdotique de ce qu’il est convenu d’appeler de nos jours son
champ disciplinaire à l’exclusion des autres? Les modèles humains, parmi
beaucoup d’autres, que nous venons de citer étaient en effet capables de
discourir et d’agir sur chacun des champs de recherche, sans perdre de vue le
fil d’Ariane de la science et de la conscience selon le mot de Rabelais selon
lequel,
« science sans conscience n’est que ruine de l’âme »19.
De manière plus immédiate, et pour répondre aux attentes sociales de la
recherche universitaire, souvent exprimées non sans ironie, nous avons voulu
renseigner sur l’applicabilité des travaux que nous avons initiés dès 2002 dans
le cadre du DEA soutenu à Paris 8, dont le rapport annexe adressé au ministre
de l’éducation nationale du Cameroun a fait l’objet d’une exploitation
conséquente. Il est certes précoce, et c’est bien dommage en ce qu’il nous
oblige à remettre à plus tard une recherche-action envisageable sur le sujet, de
prétendre évaluer l’impact des propositions dont certaines portant sur le court
terme ont été intégrées dans la stratégie globale des TICE au Cameroun ;
tandis que d’autres, requérant plus de ressources humaines et matérielles font
encore l’objet de débats et de négociations entre les responsables du ministère
camerounais et leurs divers partenaires. Mais déjà, nous voulons dégager la
spécificité du présent travail par rapport à celui du DEA.
19
RABELAIS, F. , (op.cit.)
28
Partant de l’ambition initiale de proposer un référentiel de formation des
instituteurs, le mémoire se préoccupait d’identifier les fondements linguistiques,
technologiques et pratiques d’une telle entreprise. Un questionnaire a été
soumis aux maîtres des Écoles Annexes (qui servent de laboratoire de
recherche et d’application) de Yaoundé, et aux élèves-maîtres de l’École
Normale des Instituteurs de l’Enseignement Général (ENIEG) de Mfou, sis dans
un environnement rural proche de la ville de Yaoundé. Le dépouillement du
questionnaire à ces deux types de publics, l’un urbain et l’autre rural avait
conduit à des résultats quasiment identiques : il avait permis de mettre en
évidence les carences technologiques et linguistiques des instituteurs
interrogés. Il s'était également avéré que la majorité d'entre eux avaient une
connaissance insignifiante en TIC, et que le potentiel d’applications de ces
Nouvelles Technologies dans le contexte éducatif leur était bien mal connu.
Dans l'air du temps, l’interprétation des résultats avait préconisé une démarche
managériale qui s’alignait sur les théories recommandant d’élaborer les besoins
des apprenants et ceux du contexte, avant toute formation, mais aussi tout le
long et après ladite formation ; à court, à moyen et à long termes.
Pour mieux restituer les travaux faits en DEA, la synthèse suivante peut être
faite, réalisée grâce à deux tableaux qui y figuraient déjà, dont le premier
présentait la technique de montage du questionnaire, et le second les réponses
et l’interprétation subséquente.
29
TABLEAU I : MONTAGE DU QUESTIONNAIRE
- Programme de langue
Pensez-vous que les programmes de
français dans les ENIEG soient
adaptés à l’enseignement de cette
discipline dans les écoles primaires
camerounaises ?
- Projet (désir de formation)
Quelles parties de la langue devrait-
on privilégier dans la formation des
enseignants ?
en FLS
-
A quelle période de l’année et
- Période idéale de formation pendant combien de temps pensez-
vous qu’on puisse le mieux former les
enseignants ?
Les réponses recueillies, dont le résumé est visible ci-dessous, ont fait l’objet
d’un traitement manuel facilité par le fait qu’elles étaient essentiellement
fermées et semi-ouvertes.
30
TABLEAU II : Synopsis des données et interprétation
THÈMES ET
ACTEURS MAÎTRES ELÈVES- TENDANCE OPTIONS DE
GÉNÉRALE FORMATION
MAÎTRES
31
créées, des formations aux TICE sont déjà dispensées aux enseignants
camerounais, malheureusement sur la base de programmes préétablis par des
formateurs dont le profil reste souvent aléatoire, qui se soucient peu d’évaluer
les besoins réels des professeurs qu’ils prétendent former ou, pour rester
offensivement proche de notre domaine de réflexion, qu’ils «formatent» pour
ainsi dire, au sens informatique du terme. Les apprenants, pourtant enseignants
confirmés, sont ainsi considérés comme de simples bandes magnétiques dont
on organise les pistes et secteurs en vue d’opérations d’enregistrement et de
restitution d’informations pré-qualifiées.
On peut imaginer ce qui s’en suit : une exploitation minimaliste des TICE qui
confine à un usage caricatural consistant en une recherche d’informations à
travers Internet pour élaborer des cours qu’ils donnent magistraux ; ou au
mieux en des gloires facilement claironnées d’exercices effectués en ligne ou
sur des supports logiciels importés et forcément décalés de leur réalité. Nous
sommes bien loin du compte, si nous voulons considérer les potentialités des
TIC applicables au contexte éducatif comme nous le verrons plus loin dans la
deuxième grande partie de cette recherche.
La présente étude qui s’inscrit dans le sillage que nous venons d’évoquer
voudra s’en démarquer en allant plus avant l’exploration technologique de la
possibilité d’une intégration des TICE dans les curricula de formation des
formateurs. Il sera également question des possibilités d’association des TICE
comme moyen didactique durant et après la formation, avec des démarches et
des outils assortis à chaque situation. C’est une triple approche didactique, à la
fois sociolinguistique, technologique et épistémologique qui fonde l’originalité de
ce projet par rapport au premier évoqué. Il y a par ailleurs été associé une
dimension « humaniste » pour échapper au contingent et à la simple
monographie, en vue de rester fidèle aux missions cardinales de l’éducation, et
ce malgré le modernisme de la problématique.
De plus, la population de l’enquête sera composée d’enseignants de divers
niveaux d’enseignement : primaire, secondaire, supérieur et normal,
32
contrairement à la première recherche qui ne s’était adressée qu’aux maîtres ;
la population est également élargie aux responsables pédagogiques et
administratifs des établissements de formation d’enseignants. De même, il a été
fait appel à des experts en Intégration des TIC dans l’enseignement pour
apporter leur éclairage scientifique.
L’ordre d’apparition de ces divers paramètres ne sera cependant pas conforme
à cette disposition, et il vaut mieux, plus stratégiquement, exposer brièvement
l’architecture de ce travail.
33
C’est en tout cas l’indication méthodologique de Berbaum (1982 :9)20:
Pour arriver à opérer cette alchimie structurelle, une architecture ternaire sera
adoptée:
20
BERBAUM, J., (1982), Étude systémique des actions de formation, Paris, Puf.
34
formation linguistique des enseignants camerounais.
- Dans un troisième temps, il sera question de l’intégration
technologique dans la formation des enseignants camerounais.
21
QUEVAL Sylvie in, http://www.cahiers-pedagogiques.com/article.php3?id_article=2028
(06/02/06). A propos de Anne-Marie Drouin-Hans, (2005), La philosophie saisie par l’éducation,
Scérén-CRDP de Bourgogne.
35
d’exécutif de l’enseignement, ayant ainsi abandonné la déterminante sélection
des finalités de l’éducation aux philosophes, politiques et autres spécialistes
des sciences de l’éducation. Sans militantisme aveugle, sans corporatisme non
plus, nous pouvons penser qu’une activation du pôle métadidactique conduirait
nécessairement à poser des questions autres que celles relatives à la
technologie ou même à la mécanique éducatives.
Ce rôle réflexif se doit en outre d’être investi dans la mesure où en dehors de
quelques figures exceptionnelles comme J.A. Comenius, R. Steiner, J.
Krishnamurti, l’histoire de l’éducation et des éducateurs ne présente pas des
philosophes de l’éducation au sens spécialisé du terme, mais des philosophes,
des littéraires, des politiques qui se sont intéressés à l’éducation
accessoirement.
La pédagogie s’est quant à elle trop préoccupée de l’éducation des enfants
pour prétendre de nos jours être capable d’incarner cette réflexivité. Nous en
venons naturellement à légitimer la didactique – en conformité avec le projet
originel du créateur (plus exactement promoteur) de ce néologisme, Comenius
– comme discipline d’élection de la réflexion sur l’éducation des enfants, des
adultes et de la société tout entière. Le moindre des mérites de cette thèse sera
donc d’être audacieuse, sans avoir forcément vocation à déranger, pour
susciter une posture réflexive avant, pendant et après l’action didactique prise
au sens restreint du terme.
36
PREMIERE PARTIE :
CADRE THEORIQUE ET
METHODOLOGIQUE GENERAL
anda
dont s’inspirent les approches systémiciennes.
In, http://www.mcxapc.org/static.php?file=florilege.htm&menuID=florilege
37
38
PREMIERE PARTIE
CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE GENERAL
1. Introduction
Projeter d’intégrer les TIC dans l’enseignement/apprentissage du français au
Cameroun requiert un savoir et un savoir-faire tellement divers qu’une
considération linéaire des variables ne pourrait y suffire. C’est pour opérer une
prise en compte globale des composants d’un tel projet que l’approche
systémique a été adoptée. Pour en préciser les contours, et de manière
successive,
- nous ferons quelques mises au point préliminaires sur les
concepts centraux de cette partie, à savoir : théories, méthodes et complexité;
- puis nous réfléchirons sur le rapport entre le chercheur, l’objet, les
théories et méthodes ;
- un tour d’horizon synthétique sur les théories et méthodes récurrentes
en science nous permettra ensuite de situer l’originalité de l’approche que nous
avons choisie ;
- et d’être enfin capable d’esquisser le protocole systémique qui servira
de toile de fond méthodologique à cette recherche.
Évidemment, vu l’approche choisie et ses corollaires épistémologiques
transdisciplinaires, les notions seront abordées de manière emphatique, c’est-à-
dire en s’y attardant pour limiter, autant que faire se peut, certaines méprises
liées à un malheureux transfert des concepts d’un domaine de recherche à un
autre.
2. Prolégomènes épistémologiques
En guise de définition de l'épistémologie, au sujet de laquelle existe une
abondante littérature, les propos de Develay (2005,12)22 sont édifiants:
22
DEVELAY, M., (dir), (1995), Savoirs scolaires et didactiques des disciplines, une
encyclopédie pour aujourd’hui, Paris, Esf.
39
en apprécier les principes constitutifs, la ou les méthodes qui
en permettent la construction, la portée et l’éthique. Une
définition : l’épistémologie correspond au regard critique sur les
principes, les méthodes et les conclusions d’une science [...]
Le regard épistémologique est réflexif; il permet de se fléchir
sur le savoir produit et correspond sans doute à ce savoir de
«haut niveau» qu’une formation devrait enseigner, par-delà (ou
mieux, à travers) la multiplicité des contenus qu’elle a en
charge.
40
manière logique de principes, de règles, d’étapes permettant de parvenir à un
résultat. »
Dans un sens comme dans l’autre, il transparaît la nécessité d’une construction,
d’une trajectoire. Bien plus, une grande place est réservée ici et là à la
dimension cognitive, avec la rationalité comme pierre de touche. D’où les mots
«rationnelle», «démonstration» dans le premier sens ; et «ordonné», «logique»
dans le second.
M. Guidère (2004, 4)23 en propose une définition fonctionnelle, qui se voudrait
plus proche de notre projet :
23
GUIDERE, M., Op. cit.
41
Qu’est-ce que la complexité ? C’est le lien entre différents
phénomènes, les uns psychologiques et économiques, les
autres sociologiques, etc. Mais la complexité signifie aussi qu’il
ne suffit pas d’avoir une connaissance scientifique pour
résoudre un problème...Qu’est-ce que la scientificité ? C’est
l’objectivité, c’est d’essayer d’avoir des procédures de
vérification sérieuses et sévères pour les données que l’on
contrôle, c’est aussi avoir beaucoup de prudence hypothétique.
Il ne suffit donc pas d’avoir la scientificité, il faut aussi avoir de
la réflexivité, c’est-à-dire réfléchir, pas seulement réfléchir à,
mais réfléchir sur ce qu’on fait soi-même. Bien entendu, ce qui
est terrible dans notre histoire, c’est que science et philosophie
ont divergé l’une de l’autre.
E. Morin (2002, 117)24
Pour nous donc, la méthode matérialise les voies (chemin, posture et outils)
empruntées par le chercheur, pour tenter de sonder les réalités sociales ou
individuelles; imaginer le possible; explorer le transcendantal au sens
philosophique du terme ; et chemin faisant grâce à son pouvoir réflexif, se
connaître lui-même.
24
MORIN, E., (2002), Dialogue sur la connaissance, entretiens avec des lycéens, (suivi
de), Reliances, Paris, L'Aube.
42
sienne propre; parfois aussi une nette démarcation sans complaisance ni
couardise, voire des infidélités à des autorités établies.
Les deux citations suivantes placées par Fortin (2000)25, en épigraphe de son
livre sont édifiantes dans ce rapport à la novation et à la créativité:
25
FORTIN, R., (2000), Comprendre la complexité. Introduction à la méthode d’Edgar
Morin, Paris, l’Harmattan.
26
VAN DER MAREN, J.-M., (1995), Méthodes de recherche pour l’éducation, Bruxelles, De
Boeck Université ; P.U. M.
43
politiciens, des chefs syndicaux, des philosophes, des
professeurs, des gourous, des médecins, des philosophes, des
savants, d’autres chercheurs, et toutes les personnes qui
prétendent détenir la vérité et nous l’imposer.
27
KUHN Thomas Samuel est le promoteur du concept de « paradigme» : modèle
théorique de pensée qui oriente la réflexion et la recherche scientifique à un moment
donné.
44
chaque chercheur est un peu habité par le rêve de trouver LA théorie T
universelle. Le classement fait ici revêt pourtant une très grande importance, au
sens où le plus méritoire n’y est pas les résultats obtenus, mais la tentative faite
par les uns et les autres, de régler les problèmes qui se posent à l’homme dans
son parcours terrestre. Ils ont tous et chacun participé à la légende des temps,
et c’est ce qui compte, car l’aventure humaine ne prendra pas fin demain, les
innombrables questions restées sans réponse ne trouveront pas non plus de
solution au terme d’une seule recherche. Malgré les qualités du chercheur, des
outils et méthodes, le résultat n’est presque jamais à la hauteur des attentes. La
recherche, c’est «le bonheur de Sisyphe», pour pasticher Albert Camus ; les
meilleurs moments sont ceux où l’on est occupé à chercher, où l’espoir
enflamme le cœur et le corps, alors même qu’aucune assurance sur la
reconnaissance du travail n’est donnée. Les théories exposées ne sont pas
mises en procès, comme pour distribuer les «bons et les mauvais points», mais
d’abord pour mieux s’articuler aux prédécesseurs, aux contemporains et pour
anticiper la place des successeurs dans la recherche. Par cette mise au point,
nous entendons rendre compte de l’humilité qui nous habite dans notre
entreprise. Notre recherche se veut donc plus solidaire que solitaire.
45
problèmes. C’est l’attitude synthétique, qui est minorée dans les études
scientifiques à tendance expérimentale et s’oppose classiquement à la
première évoquée.
- Il émerge une troisième voie, celle adoptée ici : l’attitude systémique qui
fera l’objet d’un développement infra.
46
[de nous confiner] dans l’absurde illusion que nous sommes
créateurs de toute réalité ou, du moins, dans le vain constat
qu’aucune réalité indépendante ne saurait être affirmée
correspondre à nos sensations.
47
classique de Bacon, Locke, Berkeley, Hume et Stuart Mill et le
rationalisme ou intellectualisme classique de Descartes,
Spinoza et Leibniz. Dans cette controverse, en effet, l’école
anglaise soutenait que le fondement ultime de toute
connaissance, c’est l’observation, tandis que l’école
continentale affirmait que c’est la vision intellectualiste des
idées claires et distinctes.
La thèse empiriste prendra paradoxalement le pas sur l’innéiste, et son
influence s’exercera chez bon nombre de scientifiques, qui dans leurs
approches, accorderont à la toute puissance humaine le primat sur une
prétendue prédestination des créatures, que suggéraient les thèses innéistes.
C’est également le point de vue de K. Popper (op.cit., 16) quand il affirme :
La plupart des questions débattues dans cette controverse
demeurent tout à fait actuelles. Non seulement l’empirisme, qui
continue d’être la philosophie dominante en Angleterre, a
conquis les États-Unis, mais même dans le reste de l’Europe
c’est désormais cette doctrine que l’on tient le plus souvent
pour la vraie connaissance scientifique. L’intellectualisme
cartésien n’a malheureusement été que trop souvent déformé
pour devenir l’une ou l’autre des variantes modernes de
l’irrationalisme.
En réalité, plus qu’un débat purement philosophique, cette opposition se
répercutera dans les différentes démarches (méthodes) de recherche, dont la
plus expressive sera la concurrence entre les méthodes déductives et celles
inductives. Il convient de remarquer au passage le clin d’œil à visée
réhabilitatrice à l'égard de Descartes28.
28
Nous partageons cette vision positive dans la mesure où nous pensons qu'il est fait à
cet auteur un très mauvais procès. Tous les discours qui militent en faveur de
l'approche qualitative et de la systémique semblent prendre pour cible les théories
cartésiennes. Une meilleure lecture du Discours de la méthode ne permet pas
forcément d'en arriver à cette interprétation négative du discours cartésien. Nous
pensons même que Descartes est plus croyant qu'on ne veut le présenter. Plus
ponctuellement, nous ne pensons pas qu'il ait voulu livrer une formule universelle
comprise comme une manière exclusive de rechercher la vérité. Il n'y a qu'à le relire
avec plus d'impartialité, dans la première partie de son livre (éd. Poche, 2000, page
48
3.4. La déduction versus l’induction
Selon Besnier (op.cit. : 36), les philosophies de la connaissance font état d’une
dichotomie logique présente même dans les raisonnements les plus
élémentaires : entre la déduction qui subordonne la vérité à l’enchaînement de
propositions à partir de prémisses présumées indiscutables; et l’induction qui
s’attache à prospecter le terrain de l’expérience pour établir par généralisation
les lois recherchées. Ou, dit plus simplement, dans la déduction on part du
général au particulier, tandis que dans l’induction on part du particulier au
général. Ce contraste peut s’illustrer par des exemples tout aussi simples :
- J’observe que tous mes parents, amis, ennemis, riches, pauvres, etc.
meurent ; j’induis de cette observation que tous les hommes sont
mortels ;
- Partant ensuite de cette vérité qui s’est généralisée, j’en déduis que moi
aussi, étant constitué de manière quasi identique à ces connaissances
qui sont décédées, je suis mortel.
Selon Blanchet, les chercheurs - y compris les linguistes pour lesquels il décrit
70), il dit pourtant: «Ainsi mon dessein n'est pas d'enseigner ici la méthode que chacun
doit suivre pour conduire sa raison; mais seulement de faire voir en quelle sorte j'ai
tâché de conduire la mienne.» Il est donc aberrant que les théoriciens actuels n'en
tiennent pas suffisamment compte. Descartes lui-même ne présente pourtant son
oeuvre que comme une «histoire, ou si vous l'aimez mieux que comme une fable, en
laquelle, parmi quelques exemples qu'on peut imiter, on en trouvera peut-être aussi
plusieurs autres qu'on aura raison de ne pas suivre [...]». L'arrogance scientifique que
même le sens commun lui prête est donc surfaite et ce philosophe malmené nous
apparaît dans tout son humanisme. Par conséquent, qualifier une approche de
cartésienne ne voudra pas signifier une attitude calculatrice toute de froideur. Il en est
ainsi des adjectifs dévoyés comme « manichéen » qui est censé signifier
« dichotomique », mais que la lecture des écrits de/ou sur Mani ne confirme pas.
29
BLANCHET, P., (2000), La linguistique de terrain, méthode et théorie, une approche
ethno-sociologique, Rennes, Presses Universitaires de Rennes.
49
le modèle de recherche - qui optent pour un travail de «terrain» adoptent en
même temps une attitude épistémologique particulière entre l’approche
empirico-inductive et celle hypothético-déductive.
50
3.6. L’approche empirico-inductive
51
des données non filtrées et donc non tronquées par des concepts a priori, des
définitions opérationnelles ou des échelles de mesure et de niveau;
9) tous les sujets sont dignes d’étude mais restent uniques;
10) la recherche qualitative exige, plus que l’utilisation de techniques, un
savoir-faire : elle n’est pas standardisée comme une approche quantitative et
les manières d’y parvenir sont souples; le chercheur crée lui- même sa propre
méthodologie en fonction de son terrain d’observation.
Par conséquent, d’une certaine façon, les données priment sur la
construction intellectuelle, tant en terme de déroulement du travail que,
surtout, de méthode d’enquête et de traitement de ces données, puisque
l’interprétation produite est toujours relative aux données, dont elle
émerge.
Il est cardinalement reproché à ces méthodes :
- leur manque de rigueur analytique (problème de la causalité et des
classifications);
- leur subjectivité (problème de la distance et de la neutralité du
chercheur) ;
- la multiplicité des conclusions possibles qui peuvent être
contradictoires, à partir de données identiques, en fonction des chercheurs.
Malgré ses limites et son caractère relativement innovant face aux méthodes
hypothético-déductives quantitatives de la science classique et positiviste, la
démarche qualitative a acquis ses lettres de noblesse, car elle permet d’étudier
des problèmes trop complexes pour une approche classique, c’est-à-dire
hypothético-déductive.
52
hypothèses méthodologiques et théoriques sur d’autres cas, surtout lorsqu’il
continue à travailler sur un même champ et sur des cas comparables. Il est de
mise de ne plus opposer de façon aussi frontale et dogmatique les méthodes
déductives/quantitatives qui «expliquent» d’une part, et inductives/qualitatives
qui «comprennent» de l’autre, pour intégrer l’ensemble dans une problématique
méthodologique générale.
La mise en garde de Van Den Maren (op.cit , 81) n’en prend que plus de sens:
4. L’approche systémique
En dehors des deux voies évoquées au début de cette partie épistémologique,
à savoir la voie analytique et celle synthétique, Il en émerge une troisième,
depuis le début du siècle, qui semble réconcilier les deux attitudes
antagonistes : l’approche systémique. Elle se veut dynamique et globale en
53
prenant en compte l’ensemble du système auquel appartiennent l’individu,
l’élément ou le problème, appréhendés d’après les interrelations que chacune
de ces unités peuvent entretenir avec les autres et avec leur environnement. Le
paradigme systémique considère en effet les différentes parties d’un
ensemble comme étant indissociables entre eux et avec l’environnement qui les
génère.
Pour J. De Rosnay (1975, 101)32, qui avertit pourtant qu’aucune définition n’est
capable d’enfermer ce concept :
30
BERTALANFFY, L., Von, (1973), Théorie générale des systèmes, Paris, Dunod.
31
YATCHINOVSKY, A., (2005) 4e éd., l’approche systémique. Pour gérer l’incertitude
et la complexité, Paris, Esf.
A ce sujet, elle affirme que l’approche systémique est née de la rencontre de plusieurs
chercheurs et des résultats des recherches qu’ils ont menées dans différents
domaines : Norbert Wiener professeur de mathématique et spécialiste de la
cybernétique ; Warren MAC CULLOCH, neurophysiologiste fondateur de la bionique ;
Joy Forrester, électronicien professeur de management, et du biologiste Ludwig VON
BERTALANFFY.
32
DE ROSNAY, J., (1975). Le macroscope: vers une vision globale, Paris, Seuil.
33
http://www.unine.ch/autogenesis/glossair.htm (22/08/2006)
54
en interaction. Cette définition générale fait ressortir les trois
catégories primordiales nécessaires pour envisager un système
générique: le monde des objets (composants), le monde des
relations (interactions) et le monde de la totalité (entité
existante).
D. Durand (1998, 8)34 quant à lui définit le système comme reposant sur quatre
concepts principaux :
A B ; au lieu de, A B
34
DURAND, D., (1998), La systématique, Paris, Puf.
55
1999)35.
C - L’organisation, dont Durand, entre autres, pense qu’elle est le
concept central de la systémique. Cet auteur la présente comme un
agencement de relations entre composants ou individus qui produit une
nouvelle unité possédant des qualités que n’ont pas nécessairement ses
composants. L’organisation revêt selon lui deux aspects : un aspect structurel
et un autre fonctionnel ; le premier étant généralement représenté sous la forme
d’un organigramme, tandis que le second est décrit dans un programme. Selon
l’objectif recherché, la systémique mettra l’accent sur l’un ou l’autre de ces
aspects, sans occulter leur complémentarité.
D - La complexité sera revue plus loin, et ne doit pas être confondue à
la «complication», qui n’est que la caractéristique d’un objet ou d’un système
qui ne demande que beaucoup de temps pour être compris, tandis que le
complexe requiert à la fois temps, méthode et intelligence pour son
assimilation.
Il est important d'ajouter ici que les systèmes n'existent pas dans la réalité
(Autogenesis, op.cit)36. Ils sont davantage des «construits» théoriques, des
hypothèses, une façon parmi d'autres de concevoir les ensembles. La nature
elle-même constitue une immense totalité (système) englobant des sous-
ensembles (sous-systèmes) comme l'homme qui, lui-même, est formé de sous-
sous-ensembles qu’on peut diviser jusqu’à des degrés cellulaires, et même
subatomiques.
Cependant, la science des systèmes s'occupe particulièrement d'une catégorie
plus restreinte de systèmes, caractérisée par:
1. le fait d'exister comme des structures non-isolées, c'est-à-
dire d'échanger de l'énergie, de la matière et de
l'information avec leur environnement et entre leurs
composants ("ouverture" matérielle, systèmes
35
CABIN, P., (coord.) (1999), Les organisations, état des savoirs, Auxerre-Paris,
Sciences Humaines.
36
http://www.unine.ch/autogenesis/sem06.html (22/08/2006)
56
dynamiques, systèmes plus ou moins éloignés de
l'équilibre thermodynamique (caractérisé par le maximum
de l'entropie));
2. le fait de correspondre à une organisation circulaire, c'est-
à-dire d'avoir un réseau logique possédant une ou
plusieurs des six boucles fermées suivantes: auto-
organisation (rétroaction positive, morphogenèse), auto-
régulation (rétroaction négative, homéostasie), recyclage
matériel (cycles écologiques), auto-production
(autopoïèse), auto-référence et auto-construction
(autogenèse);
3. le fait d'être un tout cohérent ayant des attributs
holistiques émergents, c'est-à-dire liés à l'entité comme
totalité et non manifestes dans les composants séparés
(ex: identité, téléonomie, vie, sens, conscience).
37
Selon cette encyclopédie virtuelle, La weltanschauung est un regard sur le monde (ou une
conception du monde), d'un point de vue métaphysique, notamment dans l'Allemagne
romantique ou moderne. C'est initialement une conception du monde datant du Moyen-Âge. De
l'allemand « Welt », le monde, et « Anschauung », l'idée, la vue, l'opinion. Terme désignant la
conception du monde de chacun selon sa sensibilité particulière.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Weltanschauung (22/08/2006)
38
http://www.unine.ch/autogenesis/sem06.html (22/08/2006) groupe universitaire de
recherche animé par Eric SCHWARZ.
57
paraître modérée :
Il s’agit pourtant d’une «nouvelle grille de lecture», d’une attitude différente face
à la vie et face à la recherche scientifique :
39
DONNADIEU, G., Systémique et science des systèmes. Quelques repères
58
donne de la systémique une définition qui nous semble essentielle :
Nouvelle discipline qui regroupe les démarches théoriques,
pratiques et méthodologiques, relatives à l'étude de ce qui est
reconnu comme trop complexe pour pouvoir être abordé de
façon réductionniste, et qui pose des problèmes de frontières,
de relations internes et externes, de structure, de lois ou de
propriétés émergentes caractérisant le système comme tel, ou
des problèmes de mode d'observation, de représentation, de
modélisation ou de simulation d'une totalité complexe.
59
Elle présente deux conceptions différentes, illustrées par deux tableaux
comparatifs des approches analytique et systémique, élaborés par J. de
Rosnay (1975) et F. Kourilsky de Belliard (1996) :
La validation des faits se réalise par la La validation des faits se réalise par
preuve expérimentale dans le cadre d’une comparaison du modèle avec la réalité.
théorie.
Modèles insuffisamment rigoureux pour
Modèles précis et détaillés mais servir de base aux connaissances, mais
difficilement utilisables dans l’action. utilisable dans la décision et l’action.
Approche efficace lorsque les interactions Approche efficace lorsque les interactions
sont linéaires et faibles. sont non linéaires et fortes.
Conduit à un enseignement
Conduit à un enseignement par discipline. pluridisciplinaire.
Conduit à une action programmée dans Conduit à une action par objectifs.
son détail.
Connaissance des buts, détails flous.
Connaissance des détails, buts mal définis.
60
Il ressort d’une lecture rapide de ces tableaux que les deux approches sont
assez distinctes l’une de l’autre, avec notamment l’idée que l’approche
analytique appartiendrait au passé, quand l’approche systémique serait plus
adaptée au contexte moderne.
Seulement, il faut dire que, dans la comparaison, les deux auteurs partent de
deux attitudes différentes: le premier s’intéresse plus aux relations entre les
paramètres; le deuxième se focalisant sur la trajectoire, mieux sur les finalités
et objectifs. Cela s’observe déjà dans les entêtes des tableaux. De Rosnay
parle d’«approche», et Kourilsky de «démarche» et à notre sens ces deux
tableaux sont complémentaires, en ce sens que les deux auteurs semblent
s’accorder sur le fait que les systèmes sociaux sont devenus complexes. Et
cette conscience de la complexité légitimerait de manière générique la
démarche systémique.
40
MORIN, E., (2000), Les sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur, Paris, Seuil.
61
le sociologique, le psychologique, l’affectif, le mythologique) et
qu’il y a tissu interdépendant, interactif et inter-rétroactif entre
l’objet de connaissance et son contexte, les parties entre elles.
La complexité, c’est, de ce fait, le lien entre l’unité et la
multiplicité.
41
BENKIRANE, R., (2006), La complexité, vertiges et promesses, 18 histoires de
sciences, Paris, Le Pommier. Les dix-huit histoires sont en fait des entretiens que
l’auteur a eus avec des auteurs notoires comme E. Morin, I.Prigogine, N.Gershenfeld,
...M.Serres.
62
déclin d’une ère scientifique qui a certes apporté une
formidable moisson de grandes découvertes mais qui a aussi
imposé, au fil du temps, une spécialisation croissante, jusqu’à
l’aberration, de l’enseignement et de la recherche scientifiques.
42
JEUNIER, B, LONG, J.-S., BRANDIBAS, G., (2000) : «L’approche systémique en
63
renseignent :
sciences humaines : et les données dans tout ça ?» in, CLANET, C., (coord.),
Approches systémiques et recherche en sciences de l’éducation, n° 3, Toulouse,
Presses Universitaires du Mirail (P 143-159).
43
MANGENOT, F., (2000), « L’intégration des TIC dans une perspective
systémique », in, Les nouveaux dispositifs d’apprentissage des langues vivantes,
Revue les langues modernes, n° 3, Paris, Association des Professeurs de Langues
Vivantes (P 38-44).
64
bien concevoir ou évaluer l'intégration des TIC dans
l’apprentissage des langues. La perspective systémique
s'intéresse moins à l'étude isolée de telle ou telle variable (les
logiciels, les enseignants, les apprenants, l'institution) qu'aux
relations entre ces variables.
Il va sans dire que cette perspective est proche de celle formulée plus haut en
introduction, qui vient trouver par ces propos sa légitimation disciplinaire. La
notoriété de cet auteur n’étant plus à faire dans les milieux français, européen
et nord-américain des TICE.
Celle de J.-P. Narcy-Combes n'est pas non plus surfaite, d’autant mieux qu’il
présente les objets de recherche en didactique comme n'étant jamais des
«items isolés et/ou isolables» puisque selon lui44:
Il est bien dommage que cet auteur, après avoir glosé sur l'intérêt qu'il y aurait à
adopter un regard systémique, se rebiffe cependant au paragraphe suivant, en
arguant de la difficulté de son introduction dans le champ disciplinaire de ce
qu'il appelle la didactique de L2, (c'est-à-dire, pour lui, seconde langue acquise
par l'individu):
44
NARCY-COMBES, J.-P., (2005), Didactique des langues et Tic, vers une recherche-
action responsable, Paris, Ophrys.
65
courageuses soient faites dans le champ disciplinaire de la didactique, pour
promouvoir la prise en compte globale de tous les phénomènes centraux,
périphériques et accessoires, qui ont chacun son influence, incidente ou
immanente; visible ou invisible. Le complexe des situations éducatives appelle
une perspective systémique et le rapport est vite fait entre ces deux concepts.
- la complexité
- la globalité
- l'interaction
- le système
45
http://www.unine.ch/autogenesis/sem06.html (22/08/2006)
66
Il paraît à présent opportun de s’intéresser à la nature des outils ; ce qui
pourrait permettre de préciser la démarche systémique sous un angle plus
pratique.
4.3.2 : La modélisation
La modélisation est un outil essentiel des démarches systémiques, et ses
usages se sont généralisés dans divers domaines lorsqu’il faut réfléchir ou agir.
67
représenter, dans un but de connaissance et d’action, un objet ou une situation,
ou un événement. La modélisation est aussi un art par lequel le modélisateur
exprime sa vision de la réalité. En ce sens, c'est une démarche
constructiviste46. La même réalité, perçue par deux modélisateurs différents ne
débouchera pas nécessairement sur le même modèle. Les techniques de
modélisation poursuivent trois catégories d’objectifs :
Durand explique ensuite que les modèles sont généralement classés en quatre
grandes catégories selon le type de fonction qui leur est affecté :
46
Le MOIGNE, J.-L., (2001), Le constructivisme, T.1, les enracinements, Paris,
l’Harmattan.
L’auteur y démontre la parenté qui existe entre les courants anciens, représentés par
des auteurs classiques comme Pythagore, et ceux nouveaux, où Piaget a servi de
relais, de «taupe». L’auteur justifie cette «pragmatique intelligible des actions
humaines», par la possibilité de construire un pont cognitif entre les ressources du moi
et la réalité des objets à observer. Piaget estimait déjà que l’acte de connaître un objet
est inséparable de l’acte de se connaître. La réalité n’est jamais donnée, elle se
construit.
68
invariants essentiels.
47
SAUVANT, D., « Principes généraux de modélisation systémique », disponible en
ligne www.inapg.fr/spip/IMG/pdf/dsa_nal_systemique.pdf (23/07/2006)
69
- une phase de validation et ce qui en découle, c’est-à-dire la décision qui
est à prendre suite à l’échec de la validation externe. Ces trois étapes
dessinent les trois clés typologiques des modèles qui vont suivre.
70
Tableau 3 : Recommandations de Durand.
Recommandations « négatives »
- ne pas réduire la variété en vue de la simplifier
- n’éliminer ni l’incertain, ni l’aléatoire, ni le flou ou l’ambigu
- ne pas ignorer les contraintes (internes et externes)
- ne pas couper les boucles de rétroaction
- ne pas viser une connaissance exhaustive
- ne pas rejeter l’analogie parce qu’incertaine
Recommandations à objectif heuristique
- préférer un schéma révélateur à une explication détaillée
- commencer par un examen synchronique, continuer par un examen
diachronique
- penser alternativement fonction puis structure
- mettre en évidence le ou les systèmes(s) de régulation
- s’intéresser au qualitatif à côté du quantifiable
- observer le système alternativement de l’intérieur et de l’extérieur
Recommandations pour l’action
- fixer des objectifs plutôt qu’établir une programmation détaillée
- laisser suffisamment d’autonomie plutôt qu’établir une programmation détaillée
- utiliser l’information de préférence à l’énergie
- tenir compte des temps de réponse (eux-mêmes différents)
- réserver des marges d’adaptation
- accepter les conflits et rechercher le compromis
- se consacrer autant à l’observation de l’environnement qu’au fonctionnement du
système.
Un ou des rédacteur (s) anonyme (s) propose (nt), sur un site, le très consulté
« Wikipédia » en l'occurrence, qui a cessé d’être vulgaire48, une déontologie
différente en recommandant au chercheur de:
• «Admettre qu'il ne peut tout connaître» et accepter de se jeter à l'eau
("Le chemin se construit en marchant." selon le poète espagnol Antonio
48
Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Approche_syst%C3%A9mique#_note-14
(01/08/2006). Il faut signaler pour des raisons polémiques deux autres références
relatives à la fiabilité de cette encyclopédie numérique qui selon ses créateurs n’est
qu’un projet d’encyclopédie :
- http://www.linuxfrench.net/breve.php3?id_breve=439 et
- http://citron-vert.info/article.php3?id_article=435
71
Machado) ;
• Préciser au départ le but qu'il vise et les limites qu'il se fixe (en moyens,
en durée) pour éviter de se disperser ou de dépasser les délais;
• Détecter les signaux faibles, qui renseignent parfois davantage sur les
tendances d'évolution du système que les changements massifs;
Le chemin semble tout tracé pour celui qui veut s’y lancer - ou plutôt les
chemins - parce qu’il y en plus d’un. Bien plus, même si l’approche systémique
semble fédérer l’avis de nombreux théoriciens et praticiens, Autogenesis (op.
cit.) avertit qu'il n'est pas possible de modéliser dans tous les détails les
situations concrètes complexes, donc qu'il est impossible de prévoir l'avenir
avec précision : le principe de précaution remplace la prétention de prévoir.
Le paradigme systémique concerne moins le quantitatif (la grandeur) que le
qualitatif (le sens). On peut comprendre la mise au point de G. Donnadieu (op.
Cit.)
Tous les phénomènes, en particulier ceux rencontrés dans les
sciences de la vie et surtout dans les sciences sociales, ne se
72
prêtent pas aisément à la quantification. Quantifier à tout prix,
afin d’obtenir un modèle opérable, risque même d’être
réducteur de la complexité et de faire passer à côté de
l’essentiel du phénomène. De cette prise de conscience résulte
la distinction qui va alors être faite entre systémiques de
première et de seconde générations. La systémique de
première génération, que certains qualifient de «dure», est en
filiation directe de la cybernétique ; l’approche de J. Forrester
en est une bonne illustration. La systémique de seconde
génération, que d’aucuns qualifient de «douce» ou même de
«molle», accepte de faire le deuil de la prévisibilité (souvent
impossible ou illusoire) au profit de l’intelligibilité. Son but est de
concevoir des modèles qualitatifs, de nature topologique par
exemple, qui permettent d’entrer dans l’intelligence du
phénomène et d’orienter éventuellement l’action.
49
DAMIAND, G., (2001), Définition et étude d'un modèle topologique minimal de
représentation d'images 2d et 3d, Thèse doctorat, Montpellier, n° D2001_684
73
parvenir ?
5 : Options méthodologiques
La méthode choisie sera par conséquent intégrale et englobante, dans la
mesure où nous allons à la fois :
- Les compétences de cet outil qui date du VIIe siècle : il servait de manière
très empirique à mesurer le temps. Cette approximation mathématique nous
74
paraît conforme à notre modèle qui ne prétend nullement, en harmonie
avec les prescriptions systémiciennes, à l’exhaustivité.
- Le temps pris pour faire descendre le sable nous paraît caractériser celui
nécessaire à l’observation des phénomènes éducatifs qui ne s’écoulent que
bien lentement. Il faut parfois des années, des décennies pour arriver à
dégager des tendances assez stables qui devront être réévalués plus tard.
- Le sablier est composé de deux cônes dont chacun repose sur un cercle, et
cette circularité qui existe au départ et à l'arrivée est très proche de l'idée de
globalité. Les deux cercles représentent aussi le départ d’un point de vue
universaliste, vers un autre point de vue universaliste, en passant par des
considérations locales particulières.
75
Schéma figuratif de la méthodologie suivie :
Éthique
Sociologie
Technologie
Technologies
Sociolinguistique
Épistémologie
76
5.2 : Le sablier fonctionnel
Comme annoncé plus haut, nous partons d’une vision globale sur la
connaissance et les méthodologies - en d’autres termes l’épistémologie - pour
une meilleure compréhension des enjeux de la thématique, mais également
pour le positionnement méthodologique. Conscient d’avoir adopté une
trajectoire inhabituelle qui demandait à être comprise, nous avons dû nous
étendre sur cette première grande partie qui va bientôt connaître son terme.
C’est la base plus large du cône inférieur du sablier, sur lequel reposent la
démarche et le choix des corpus, qui suivront dans la deuxième grande partie.
Nous partons d’un plan général à une étude de cas, qui vient comme pour
valider la présomption de complexité dont était crédité le sujet de cette thèse.
Cette complexité ayant été constatée, il reviendra après exposition de ces faits
d’en établir les interconnexions et l'ouverture.
Ensuite, comme on procédait jadis avec le sablier, on pourra «renverser le
tablier et son contenu» en repartant de la dimension contextuelle à celle qui se
voudrait beaucoup plus généralisante : la dimension éthique décontextualisée.
50
(G. DONNADIEU, D. DURAND, D. NEEL, E. NUNEZ, L. SAINT-PAUL)
http://www.afscet.asso.fr/SystemicApproach.pdf#search=%22syst%C3%A9micien%22
(02/09/2006) «L'Approche systémique : de quoi s'agit-il ?» Synthèse des travaux du
Groupe AFSCET " Diffusion de la pensée systémique"
77
- L'aspect historique (ou génétique ou dynamique) est lié à la nature
évolutive du système, doté d'une mémoire et d'un projet, capable d'auto-
organisation. Seule, l'histoire du système permettra bien souvent de rendre
compte de certains des aspects de son fonctionnement. Pour les systèmes
sociaux, c'est même par elle qu'il convient de démarrer l'observation.
D’ailleurs, selon la nécessité téléologique qui est aussi l’un des principes de la
systémique, nous relierons chaque élément abordé aux autres grâce à cette
fonctionnalité à la fois contextuelle (la formation des enseignants camerounais)
et globale (l’éducation des hommes). Ainsi chaque paramètre observé sera
examiné au crible de sa finalité interne (sa propre cohérence) et externe (son
intégration dans le système).
Quant aux corpus, ils feront aussi l’objet d’une exploitation globale, c’est-à-dire
que malgré le fait qu’elles apparaissent dans des études de cas qui auraient dû
les isoler, les données seront exploitées synthétiquement, et non de manière
78
exclusive ou simplement linéaire. Ils aideront dans cette optique à jeter le pont
entre les paramètres considérés, à les cimenter grâce à cette mise en musique.
Il n’y aura pas dans le module linguistique une «analyse de discours»
canonique à la D. Maingueneau, R. Ghiglione ou même P. Blanchet51, dont les
œuvres font référence; de même, dans la dimension technologique, il sera
difficile d’atteindre les standards habituels observables dans les études
consacrées à la formation (Perrenoux) aux curricula (Depover), ou aux TICE
(Demaizière, Karsenti, Mangenot et al)52.
Nous avons également parlé d’éthique, mais nous devrons nous passer de
certains grands noms de l’éthique, comme Spinoza, Wittgenstein, et plus près
de nous, J.F. Malherbe, spécialisé dans l’éthique appliquée. L’éthique dont il
sera question ici aura un rapport étroit avec l’éducation, et référera plus par
conséquent à des éducateurs comme Comenius, R. Barbier, Krishnamurti, R.
Steiner et J. Miller.
Les modules ne seront pas traités à la manière des chapitres habituels, étant
donné la démarche systémique choisie. Aussi chaque élément ne sera-t-il
abordé qu’en vertu de sa pertinence et de son intégration immédiate ou future
au système, au microsystème modulaire et au macrosystème intermédiaire qui
sera le système éducatif camerounais, qui devra lui-même être considéré
comme un microcosme dans le macrocosme général qu’est l’univers.
La difficulté de cette approche est réelle, mais sa fécondité l’est tout aussi. Il
faut en effet une attention soutenue et des qualités réelles de synthèse et de
reliance pour prendre en compte la diversité des notions, données et
paramètres. Le lecteur de ce travail sera introduit à la complexité, qui est loin
d’être artificielle, puisqu’elle préexiste à la présente étude.
51
Voir bibliographie.
52
Voir bibliographie et sitographie.
79
- Le premier module A portera sur la sociolinguistique
80
81
DEUXIÈME PARTIE :
ÉTUDE DE CAS
82
83
DEUXIÈME PARTIE : ÉTUDE DE CAS
1. Introduction
Le choix existait entre procéder à une exposition des corpus dans chacun des
trois cas identifiés et exposer tous les corpus ensemble. Pour ne pas produire
un effet de parcellisation et de systématisation, la deuxième option a été
retenue, avant de passer à un découpage contextuel.
Dans l’optique d’avertir d’emblée de la spécificité de l’exploitation systémique
des données, les membres vulgarisateurs de la systémique française AFSCET
(op.cit) montrent la voie:
Le risque est énorme que les spécialistes des différents champs traversés par
cette approche expriment leur déception quant au traitement des données.
Aussi convient-il de préciser que la taille même des corpus - une dizaine - ne
permet pas leur exploitation canonique en fonction de chaque discipline. Les
liens et les enjeux suffiront à donner une intelligence aux observables recueillis.
84
intervient dans un environnement dont les introducteurs doivent tenir compte,
soit pour le dénoncer, soit pour l’aider à évoluer. L’inverse est également vrai :
l’environnement peut repousser les TIC comme étant inadaptées à ses finalités.
C’est le droit démocratique des sociétés. Et ce dernier aspect est rarement mis
en avant, parce que l’humanité serait actuellement appelée à s’arrimer à la
Toile. L’environnement peut également aider les TIC à évoluer, à s’améliorer
grâce à une appropriation responsable. Voilà pourquoi le choix s’est porté sur le
recueil de plusieurs paramètres:
- des observables linguistiques (plurilinguisme et statut du français
au Cameroun)
- des observables curriculaires (programmes de français dans les
divers niveaux d’enseignement)
- des observables technologiques (ingénierie de la formation ;
intégration des nouvelles technologies).
85
obligé de nous plier devant la force de certaines thèses ou hypothèses que
nous n’aurions jamais admises, sans le parcours, finalement initiatique, réalisé
dans le cadre de ce travail de recherche.
Nous devons également dire toute la jouissance provoquée par certains
moments privilégiés que nous avons pu passer dans le silence conventionnel
des bibliothèques universitaires et municipales, à détortiller des questions dont
la clé n’était souvent délivrée qu’après bien des détours. Toujours est-il que
l’aide à la compréhension venait, sous la forme d’un éclairage intérieur sans
doute favorisé par l’environnement de lecture: le silence, la serviabilité des
personnels, un je ne sais quoi dans l’atmosphère spéciale de ces lieux dédiés à
la recherche. L’aide pouvait aussi venir sous la forme d’un document trouvé «au
hasard» de la fréquentation d’une librairie, d’une bibliothèque ; ou même lors
d’une indication fortuite faite par un conférencier, ou par un individu
quelconque, qui semblait informé de votre problème particulier et auquel il
apportait une opportune réponse. Ne dit-on pas souvent que les beaux esprits
se rencontrent ?
Nous avons encore en mémoire la stupéfaction de l’agent d’accueil de la
bibliothèque Cujas, à Paris, lorsque nous y avions sollicité une inscription.
Sachant que cette bibliothèque était spécialisée en sciences politiques,
juridiques et économiques, la Dame de l’accueil ne comprenait pas qu’un
doctorant en sciences du langage veuille en prendre la carte. C’est pourtant
dans cette bibliothèque que nous avons trouvé l’essentiel des ouvrages clés sur
l’approche systémique ; nous devons également une bonne partie de nos
intuitions, à cette bibliothèque, ainsi qu’à celle voisine (Sainte Geneviève où
nous avons trouvé disponibles les œuvres les plus récentes, encore en
traitement dans certaines autres bibliothèques, donc non disponibles à la
consultation). Dans ces lieux, faut-il le dire, nous avons tutoyé l’esprit des plus
grands penseurs. Nous les avons rencontrés intellectuellement et presque
magnétiquement; nous avons eu le sentiment de bénéficier de leur compagnie
invisible; la sensation qu’ils nous tenaient la main, nous questionnaient, nous
mettant au défi de les imiter, pour prolonger la chaîne de la recherche, et
participer à repousser les ténèbres de l’ignorance. Peut-être n’était-ce qu’une
86
illusion…
Nous envisagions une cueillette de données tout à fait dans le prolongement de
celle que nous avons faite en DEA, dont nous avons rendu compte dans la
problématique, avec pour articulation principale un questionnaire sur les TICE.
A l’aide de cet instrument de collecte à proposer aux formateurs de l’ENS, nous
aurions pu faire un travail académiquement respectable. Nous aurions ainsi pu,
par ce truchement, obtenir des renseignements précieux sur les représentations
des enseignants et des futurs enseignants sur leurs usages actuel et potentiel
des TICE. Seulement, cet outil que nous avons quand même monté et proposé
céans, nous a paru insuffisant pour cerner notre problématique. Il restait à
questionner d’autres acteurs, partenaires ou personnes-ressources : c’est le
fondement des deux entretiens que nous avons eus avec A. Belibi et F. N.
Bikoï, tous deux anciens inspecteurs, formateurs des formateurs et
responsables à des degrés divers de l’enseignement supérieur au Cameroun.
Les élèves ne pouvaient pas être en reste, puisque la question de la formation
des enseignants les concerne de biais, ou plutôt inductivement. Si les
enseignants doivent être bien formés, c’est sans doute pour mieux enseigner
plus tard. Cela ne relève de l’évidence qu’en théorie. Les programmes sont
souvent définis, et les enseignants formés, sans intégrer les besoins des jeunes
qui leur seront confiés. Nous avons ainsi sollicité leur perception de la
sociolinguistique camerounaise, parce que nous pensons que leur point de vue
devrait souvent être décisoire dans l’élaboration des politiques linguistiques et
dans la didactique subséquente.
Nous avons pu nous appuyer, dans l’administration des questionnaires, sur
deux enseignants camerounais rompus aux techniques de collecte de données,
que nous ne remercierons jamais assez.
Nous avons enrichi le projet de prise en compte de la réalité sociolinguistique
par une chanson populaire au Cameroun : «si tu vois ma go» de Koppo ; le
succès de telles chansons interpelle suffisamment décideurs et didacticiens. Le
fait qu’elle soit écrite en camfranglais peut en effet nous interroger sur la
prégnance de ce parler argotique. Les Camerounais marqueraient-ils par cette
adhésion une espèce de proximité avec ce mode d’expression ? Quelle
87
conduite didactique en découlerait ?
Aurions-nous eu l’outrecuidante initiative de prétendre débattre de
l’enseignement/apprentissage du français et de l’intégration des TICE au
Cameroun sans regarder aux dispositions législatives et programmatiques en
vigueur dans le pays? La tentation était grande, il n’y aurait eu qu’un pas - avec
pour facile excuse l’aspect académique de notre recherche - que nous nous
sommes gardé de franchir. Aussi avons-nous ressenti la nécessité d’associer
dans notre réflexion, qui se veut globale, les lois d’orientation de l’éducation et
de l’enseignement supérieur, et d’autres textes essentiels sur les TIC.
Même sans faire l’objet d’une réelle exploitation dans le corps de la thèse, nous
avons par exemple mis en annexe le texte la profession de foi d’une association
qui mène des recherches sur la transdisciplinarité, dénommée le CIRET, dont
nous ne faisons pourtant pas (encore) partie.
En réalité, pour examiner académiquement la question cruciale de l’intégration
des TICE, nous avons obtenu des données qui ne sont pas seulement celles
que nous avions anticipées. C’est aussi l’occasion de dénoncer la vision
matérialiste dominante sur les données. Dans «données», il y a pourtant la
notion de don, qui peut entre autres signifier offrande. Pour nous, cette offrande
est polymorphe, et l’actuelle recherche nous a conforté dans cette réalité. En
demeurant attentif à notre environnement, nous avons pu «voir arriver» des
offrandes que nous n’avons pourtant pas consciemment quêtées : le chemin
s’ouvrait soudain devant nous, grâce à la clé qui était apportée par les voies les
plus inattendues. Nous pourrions donc légitimement affirmer que les données
sont composées des éléments récoltés par les instruments que nous avons
prévues dans l’enquête, mais aussi par ceux qui nous parviennent par les voies
indéfinissables du destin. Combien de fois avons-nous été étonné et
reconnaissant de trouver dans un rayon de bibliothèque, un meilleur ouvrage
que celui que nous allions y chercher, qui semblait avoir été mis là,
(fortuitement ?), par des mains complices ? Combien de fois la lecture d’un
journal, d’une revue ne nous a-telle pas mis sur une piste importante de notre
recherche ? Et pour parler d’Internet, à plusieurs reprises, nous avons risqué de
nous perdre dans le labyrinthe virtuel, quand partant d’un mot-clé, et en cliquant
88
de lien en lien, nous nous sommes embarqué dans des aventures
intellectuelles foisonnantes, en positif et en négatif.
Pour rester dans une logique universitaire, nous avons donc pu recueillir des
données linguistiques, curriculaires et technologiques.
Modules
Sociolinguistique + + + + + ±
Curriculum ± + + - + +
Formation des - + ± - + +
enseignants
Intégration des - + - - + +
TICE
89
L’économie a été faite de certains observables qui ne seront exposés que
partiellement. Par exemple les programmes qui ne peuvent pas présenter en
entier, dont nous n’extrairons que l’aspect utile dans leur mise en relation avec
les autres données : l’énoncé des finalités et des objectifs.
Par contre, il a semblé nécessaire de transcrire intégralement les corpus plus
courts et des entretiens, pour des raisons de responsabilité ou d’autorité : un
texte de loi par exemple ne se tronque pas ; et quand nous le pouvions, nous
avons préféré scanner ceux qui étaient en notre possession.
Pour certains autres, seule une présentation synthétique des résultats sera
faite, reléguant l'outil qui a servi à leur cueillette à la partie Annexes. Une
dernière catégorie est composée de textes à valeur documentaire ou
informative. Ils pourraient inspirer des études ultérieures monographiques ou
comparatives.
Il reste bien entendu que l’exploitation de ces données se fera «en hélice»,
c’est-à-dire en revenant sur chaque donnée autant de fois que nécessaire pour
étayer un point de vue, éclairer une zone d’ombre ou simplement établir un
parallèle.
Nous ne pouvions exploiter la totalité de ces corpus de manière exhaustive,
nous risquions de nous retrouver avec un document final de plusieurs centaines
de pages au-dessus de son actuelle configuration.
90
Corpus 1 : Entretien BIKOÏ 53
Bonsoir Monsieur le Doyen, je voudrais m’entretenir avec vous aujourd’hui sur trois
sujets majeurs :
- l’enseignement/apprentissage du français au Cameroun, plus précisément la
formation des enseignants de français ;
- le statut du français au Cameroun, la sociolinguistique ;
- la question de l’élaboration des curricula.
2ème Question : Et par qui ont été élaborés les programmes actuels ?
Réponse : Les programmes actuels ont été faits par les anciens coopérants PASECA
[Projet d’Appui au Système Éducatif Camerounais]. Il y avait des inspecteurs français
chargés spécifiquement d’élaborer des programmes.
3ème Question : Pensez-vous que ces programmes répondent aux besoins réels des
Camerounais?
Réponse : Mon avis est cependant que ce ne sont pas des programmes qui répondent
aux besoins ; aux préoccupations des camerounais...
53
Monsieur Félix Nicodème Bikoï, après avoir été Inspecteur National de français, a
été enseignant à l’Ecole Normale Supérieure de Yaoundé. Auteur de nombreux
manuels scolaires, il est parallèlement président de l’Association des Professeurs de
Français pour l’Afrique et l’Océan Indien. Jusqu’à la date de rédaction de cette thèse,
Monsieur Bikoï était doyen de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de
l’Université de Douala au Cameroun.
91
Pour moi les vrais programmes camerounais ont été réalisés par l’IPAR [Institut
Pédagogique Africain et ] entre 1970 et 1975, en fonction de la ruralisation, qui collait à
la réalité camerounaise.
Au niveau du secondaire il y a eu un vaste projet d’harmonisation de l’enseignement
francophone et anglophone, projet typiquement camerounais... Tout a été détruit.
En fait le débat a été très politisé : Les Anglophones ne voulant pas entendre parler
d’une harmonisation des programmes. Il y a également des enjeux financiers très
importants qui empêchent la révision des programmes, entre 70 et 80 milliards,
impliquant toutes les maisons d’édition française. Ils ont pesé de toute leur force et les
nouveaux programmes n’ont jamais été mis en place.
Pour ce qui est des langues nationales, la constitution de 1996 a prévu l’introduction
des langues nationales dans le système éducatif camerounais. La question des
programmes au Cameroun est très difficile à gérer. Par exemple, pendant plus ou
moins 10 ans, les inspecteurs français ont imposé la méthode globale de lecture, mais
certains pédagogues nationaux ont maintenu la méthode semi-globale, comme «la
canne et le coussinet»; chez les catholiques, en toute indépendance, ils ont maintenu
la méthode syllabique. Dans chaque programme, la portée des intérêts est à la fois
économique, politique et didactique, et c’est le politique qui l’emporte toujours.
4ème Question : Que pensez-vous de la pratique d’un programme unique pour toutes
les écoles francophones du Cameroun?
Réponse : L’enfant qui se trouve au fin fond de la brousse ne parle le français qu’à
l’école. Il est fondamentalement différent de celui des métropoles où quel que soit le
statut des parents, il a quand même l’occasion d’entendre et de parler le français dans
le langage quotidien.
L’expérience montre que jusqu’à une certaine époque, les établissements de la ville
recevaient des élèves provenant de collège ruraux, il faudrait aller jusqu’à calculer le
taux d’échec qui a paru assez élevé.
92
soient dans la mesure où elles favorisent la communication. Mais, pour les
didacticiens, il faut enseigner la langue standard, au risque de créer des ghettos
linguistiques entre plusieurs aires. Il n’est pas question de valider les normes. Pour
l’Etat, c’est le français standard, c’est la norme standard qu’il faut enseigner à l’école.
Pour moi, c’est un débat d’intellectuels; tous les sociolinguistes comme Biloa,
Essono...disent qu’il faut intégrer toutes les formes d’expression. Mon point de vue est
plus circonspect parce que j’estime qu’on ne peut arriver à
l’enseignement/apprentissage d’une telle langue que si elle est codifiée. Or, on en est
très loin.
Le vrai problème au Cameroun, c’est le problème des langues nationales. A Libreville,
les 16 ministres présents ont signé le document sur l’introduction des langues
nationales dans les programmes. Les gens sentent le danger d’une intégration
irraisonnée, telle qu’elle a pu se faire en Guinée : en 1964, Sékou Touré, le président
guinéen, généralise l’enseignement des langues nationales ; Quatorze ans plus tard,
c’est la catastrophe...
8ème Question : Pensez-vous qu’il soit réellement utile de recourir à l’introduction des
langues nationales et à quoi servirait cette entreprise ?
Réponse : J’étais à un congrès au Japon en 1996 où j’ai rencontré un collègue qui m’a
demandé en quelle langue se faisaient les apprentissages au Cameroun. Je lui ai
répondu « en français » et il m’a dit : «je comprends pourquoi vous ne serez jamais
93
développés, regardez le Japon. » En fait après la guerre, le Japon avait décidé de
devenir une puissance ; entre autres, ils ont entrepris de traduire tous les livres
disponibles en langues étrangères dans leur propre langue.
Par contre, le Sénégal a eu presque trois cents ans de colonisation, le premier cours
de français y a été donné en 1816 par Jean Dard, le résultat actuel est qu’il y a 25% de
Sénégalais qui parlent le français. Il n’y a pas un seul pays qui se soit développé en
utilisant la langue étrangère comme instrument de développement. C’est pour cela que
l’accent est mis aujourd’hui sur l’introduction des langues dans les programmes
scolaires. Le français ne nous a pas permis de nous développer, le taux de déperdition
est très grand ; la langue française en Afrique repose sur un savoir historique ; ici [en
France] c’est un savoir virtuel.
54
Le café La Fontaine Saint Michel, adossé à la fameuse fontaine, dans le 6eme
94
Corpus 2 : chanson Koppo (en camfranglais Si tu vois ma go55
Si tu vois ma go, dis-lui que je go
Je go chez les watt nous falla les do
La galère du camer toi-même tu no
Tu bolo, tu bolo, mais où sont les do?
Mon frère, je te jure, je suis fatigué
J’ai tout fait, j’ai tout do pour chasser les ngué
J’ai wash les voitures, il n’y avait pas moyo
J’ai toum les chaussures, il n’y avait pas moyo
Le poisson, les chenilles, est-ce qu’il y avait moyo
Alors j’ai tchat que c’est trop, il faut que je go
Si tu vois ma go dis-lui que je go
Je go chez le watt nous falla le mouz
95
Libre traduction :
Chœur :
Si tu vois ma petite amie, dis-lui que je pars (2x)
Si tu vois ma petite amie, dis-lui que je pars (2X)
Chœur ...
Chœur...
96
Corpus 3 : Jeunes et langues
Nombre
17 3 9 1 30
d’élèves
Situation matrimoniale des parents
Le père ou la mère
Le père ou la mère
Les deux parents et autre conjoint (e) ou Autre
Seul (e)
concubin (e)
Durée dans
≤5 ≤ 10 ≥10 ≤ 10 ≥10 ≤5 ≤ 10 ≥10 ≤5 ≤ 10 ≥10
la maison ≤ 5 ans
actuelle ans ans ans ans ans ans ans ans ans ans ans
Nombre de
répondants 2 4 11 2 2 0 2 1 1 3 0 2
97
Exposition à la langue
français français français français + camfranglais langue anglais
anglais camerounaise
Langue parlée 5 0 19 0 0 6 0
à la maison
Langue parlée 17 1 2 6 4 0 0
avec les amis
et camarades
Langue de 10 18 0 0 0 0 2
scolarisation
TOTAL 32 19 21 6 4 6 2
Motifs scolaires 12 0 0
Motifs de
communication 6 1 0
Courante
Motifs de
communication 4 0 0
internationale
Amour de cette
langue 4 0 0
Raisons identitaires 0 0 2
Sans justification 1 0 0
TOTAL 27 1 2
98
Introduction des langues nationales
oui non Ne sait pas TOTAL
Difficultés 3 3
d’apprentissage
Interdiction 3 3
institutionnelle
Incompétence initiale 4 4
Amour de la langue 6 6
et/ou
du pays
Inutilité 1 1
Curiosité 1 1
Sans justification 3 7 2 12
Conditions d’obtention des corpus : questionnaire administré par l’entremise de deux enseignants
camerounais en poste en Yaoundé, qui l’ont eux-mêmes reçu par la voie électronique.
99
compte dans l'établissement des cibles nationales, compte tenu des circonstances
propres à chaque pays.
En ce qui concerne le secteur de l'éducation qui est celui qui nous préoccupe, nous en
avons relevé deux:
1- Réaliser la connectivité des universités, des collèges, des établissements de
l'enseignement secondaire et des écoles primaires au moyen des TIC;
2- Adapter tous les programmes des écoles primaires et secondaires en
introduisant les enseignements en TIC, afin de relever les défis de la société de
l'information.
En outre, la déclaration de Genève insiste sur le nécessaire renforcement des
56
ressources humaines , et le fait que chacun devrait avoir les compétences
nécessaires pour tirer pleinement partie de la société de l'information. Il est donc
essentiel de développer les capacités et d'assurer la familiarisation avec les TIC.
De son côté, le gouvernement camerounais est signataire de plusieurs conventions
internationales visant l'amélioration de l'éducation, il a par ailleurs mis en place un plan
d'action national pour l'éducation pour tous (EPT) et une stratégie sectorielle pour
l'éducation. La plate-forme gouvernementale sus mentionnée accorde une place
importante à l'introduction des TIC dans l'éducation.
En effet, les technologies de l'information et de la communication sont reconnues pour
leur rôle moteur dans le développement des économies. Elles facilitent les échanges et
créent de nouvelles opportunités dans les affaires.
Cependant malgré les efforts louables du gouvernement, il y a lieu de reconnaître que
beaucoup reste à faire, car l'utilisation de ces technologies comme moyens de
développement dépend de l'aptitude d'un pays à assurer son développement par les
technologies, ce qui nécessite la prise en compte de la prédisposition électronique57
(E-Readiness), qui peut être définie comme le degré de préparation d'une
communauté à participer l'économie numérique au niveau mondial.
Il est évident que les efforts développés au ministère de l'éducation nationale sont
conformes aux recommandations du sommet mondial sur la société de l'information.
Ceci s'explique par une série de mesures ayant déjà été prises en matière de
développement des TIC.
56
En gras dans le texte original
57
En gras dans le texte original
100
L'introduction des TIC dans l'éducation
Elle vise à promouvoir le développement des technologies de l'information et de la
communication (TIC) et leur utilisation comme outil d'amélioration de la qualité de
l'enseignement. Elle s'inscrit dans le cadre de la stratégie sectorielle de l'éducation,
mise en oeuvre par le ministère de l'éducation nationale depuis trois ans.
101
− Lycée Bilingue de Deido
− Lycée Bilingue de Bamenda
− Lycée Classique Moderne de Garoua
− Lycée Technique de Garoua
2- Centres en cours d'implantation
− Lycée Scientifique de Bertoua
− Lycée Classique de Sangmelima
− Lycée Classique de Mvomeka
− Lycée de Dimako
3- Extension à court terme
Bafoussam, Buéa, Maroua, Ngaoundéré, Ebolowa, etc.
102
les domaines les plus sensibles de technologies de l'information et de la
communication; cinq principaux domaines permettant de définir complètement ce
concept:
1. l'accès au réseau traite de la disponibilité, les coûts et la qualité des réseaux, des
services et des équipements en TIC
− Rapidité et qualité du réseau
− Hardware et software
− Service et soutien
− Infrastructures de l'information
− Disponibilité de l'Internet
− Coût de l'Internet
2. L'apprentissage en réseau cherche à savoir comment le système éducatif intègre
les TICs. Existe-t-il des programmes de formation pour préparer une main d’œuvre en
TICs? L'apprentissage en réseau peut se mesurer comme:
3. La société de réseau examine le niveau d'utilisation des TIC par les individus aussi
au travail que dans la vie privée, et s'il existe des opportunités significatives pour ceux
qui ont des aptitudes en TIC. Pour mesurer ce statut, on examine:
− les gens et les organisations en réseau;
− les contenus ayant une pertinence locale;
− la place des TIC dans la vie de tous les jours;
− la place des TIC au travail.
4. L'économie de réseau évalue comment les affaires et les gouvernements utilisent
les TIC pour interagir les uns envers les autres:
− Opportunités d'emploi en TIC
− E-commerce B2C
− E-commerce B2B
− E-gouvernement
5- Les politiques de réseaux cherchent à savoir à quel niveau l'environnement
politique promeut ou empêche le développement, l'adoption et l'utilisation des
TIC. Les domaines d'action sont:
− La régulation des télécommunications;
− La politique commerciale des TIC
En définitive, il apparaît clairement une volonté politique de la part des autorités
camerounaises, de faire de l'introduction des TIC à l'éducation une priorité. Cependant
il faut reconnaître que le manque d'infrastructures de télécommunication, en un mot la
103
faible connectivité à l'internet d'une manière générale, ne permettant pas encore de
généraliser l'enseignement des TIC dans les écoles, et les initiatives engagées
connaissent d'énormes difficultés. C'est le lieu de se tourner vers la communauté
internationale pour qu'elle aide l'Afrique en général et le Cameroun en particulier à
réduire le fossé numérique qui à terme pourrait pousser l'Afrique à la marginalisation et
compromettre par le fait même son développement.
104
Corpus 5: Questionnaire Belibi
Monsieur Alexis Belibi,
Professeur de didactique du français à l'École Normale Supérieure (ENS) de Yaoundé;
Ancien Inspecteur Pédagogique National (IPN) de français à l'Éducation Nationale
105
langues locales dans la perspective sus-évoquée.
Question 6 : Quelle serait la formation idéale et quel serait le profil adéquat des
formateurs?
Réponse 6: Les formateurs devraient avoir au moins le niveau du master dans ce
domaine précis,
la formation idéale portant sur l’enseignement à distance : comment dispenser des
cours à distance car cela démultiplierait les moyens, les possibilités de formation à
destination du plus grand nombre. Les tic se conjuguent, se déclinent en termes de
démocratisation de l’apprentissage
106
Question 7: Il est quand même surprenant que la question des langues nationales
rythme les générations successives, sans qu'on observe une réelle
implication en faveur de leur intégration.
Réponse 7: Les langues nationales sont l’ennemi de la France. Les gens en place,
partout, sont de fidèles agents de la France L’Afrique noire dite
francophone est en guerre civile. Toutes les forces de la vieille
métropole sont mobilisées en une sainte croisade contre ses langues et
la tête de pont de cette croisade est la notion fallacieuse de
francophonie, sans oublier les élites criminalisées d’Afrique qui tirent
une rente de situation de leur maîtrise du français à l’exclusion des
forces vives.
Tout est fait pour que les langues du cru soient condamnées à mort.
- Merci de tout coeur, cher professeur.
- C’est moi qui vous remercie.
Conditions d’obtention du corpus 5 : Échange réalisé par voie électronique au
mois d’octobre 2006, après le premier contact que nous avons eu avec cet
enseignant de l’ENS quelques semaines auparavant. Le premier commerce
avec lui portait sur le questionnaire qu’il a bénévolement administré auprès de
ses collègues et élèves.
Dans ce cas précis, nous pouvons dire que les données sont à la fois les
éléments recueillis grâce à ces outils d’enquêtes, mais aussi la disponibilité de
cet enseignant qui nous permet d’avoir une vision positive de l’univers de la
recherche et de ses acteurs. En effet, ce que nous avons recueilli de notre
enquête n’est pas seulement constitué de chiffres et des paroles d’acteurs ou
observateurs, mais aussi une image positive d’une «personne-ressource» (au
sens humain). Comment ne donc pas penser que la notion de données,
entendu par nous comme le produit de ce qui est donné (à voir, à éprouver ou à
ressentir), peut être matérielle, virtuelle ou humaine : tous ces aspects ne
participent-ils pas à la résolution du problème ? Les notions d’input et d’output
de la cybernétique peuvent-elles véritablement s’appliquer à des études sur
l’homme ?
Même en considérant que notre intermédiaire n’ait été qu’un adjuvant, encore
faut-il que ces personnes que nous rencontrons pendant l’enquête, et qui nous
107
facilitent l’obtention des données, soient admises comme faisant partie de
l’enquête. Leur statut mérite, pour ainsi dire, une intégration conséquente dans
la méthodologie d’enquête.
Malheureusement, les conceptions économiques et scientifiques issues des
«sciences dures» ont entraîné tous les chercheurs, y compris ceux des
sciences «molles» ou sciences de l’humain, dans leur sillage matérialiste. Les
sciences humaines - encore moins la recherche en éducation - n’ont pourtant
pas à s’aligner sur une dispensation qui s’adapte souvent peu à leur
problématique. L’humain sur lequel elles prétendent enquêter est complexe, et
donc peu quantifiable ; ce qui le caractérise tient à des paramètres (données)
eux-mêmes complexes, et requérant une attention patiente, une sensibilité
particulière et une empathie, permettant plus de le ressentir, de le comprendre,
plutôt que de penser à le mesurer à l’aide des seuls instruments matériels.
La méthodologie de recherche en sciences humaines gagnerait à développer
des protocoles qui prennent en charge la complexité de cet «observable» qu’est
l’homme, peu observable avec les instruments propres aux problématiques
économiques, mathématiques, physiques, géologiques ou biologiques.
L’homme est un océan de mystère, c’est-à-dire un complexe parmi les
complexes et les questions relatives à cette énigme ne peuvent se résoudre
mathématiquement.
VILLES
BAMENDA 3 3 18 24
BERTOUA 6 21 3 30
BUEA 6 3 18 27
DOUALA 24 12 1 37
GAROUA 6 21 1 28
MBANGA 3 24 3 30
NGAOUNDERE 9 21 1 31
NGOG MAPUBI 6 24 0 30
NGOMEDZAP 12 18 0 30
YAOUNDE 24 12 1 37
YOKADOUMA 3 21 0 24
TOTAL 102 180 46 328
108
STATUT GLOBAL DU FRANÇAIS²²²²²²²²²²²²²²²²²²²²²²²²
STATUT
FLM FLS FLE
DU FRANÇAIS
Répondants 15 21 3
Répondants 10 2 3 2 1 10 10
Répondants 3 25 2
0 12 15 3
Répondants
interférences 0 12
Approches et
5 0
méthodes
Contenu et
7 0
méthodes
autre 0 1
109
LIEUX DE LA FORMATION
CONTEXTE Initiative Initiative
personnelle personnelle Institutionnelle
DE LA spécialisée non spécialisée
FORMATION TICE TICE
Répondants 1 5 1
UTILISATION EFFECTIVE
A QUOI Mise en
Production Ne
UTILISENT- Pratique pratique
Internet d’outils sait
ILS LES de classe de
pédagogiques pas
TIC ? savoirs
Répondants 3 2 1 1 1
BESOINS TICE
ADÉQUATION Conformité Ne
Adaptation à Pratique
DE LA à Production
la discipline de classe
sait
FORMATION l’évolution d’outils pas
Répondants 1 6 4 4 15
PERSPECTIVE DE FORMATION
Formation
CADRE DE Ne se
Formation Formation personnelle
LA institutionnelle personnelle puis
prononce
FORMATION pas
institutionnelle
Répondants 12 16 1 1
FORMATEURS IDEAUX
Organisme
PROFILS DES Informaticien Professeurs
prive de Experts TICE
FORMATEURS s volontaires
formation
Répondants 0 0 1 29
FRANÇAIS
15 5 8 0
ANGLAIS
0 0 0 5
110
UTILITE DU FRANÇAIS
UTILITE DU Insertion Éducation Ouverture Négative Sans
FRANÇAIS sociale aux autres contrôle
Répondants 14 3 12 3 2
ET SI C’ÉTAIT À REFAIRE
Professeur
SI C’ETAIT A Professeur de Professeur autre
langue
RECOMMENCER français langue internationale
nationale
Répondants 21 7 2
CONTENUS PROSPECTIFS
Répondants 8 7 12 8 2
PARTENARIAT DE FORMATION
Protocoles
NATURE DE LA Associer les Intégrer les communs
COLLABORATION utilisateurs données du terrain formateurs/
employeurs
Répondants 7 13 8
BESOINS EN TICE
Préparation/
ATTENTES sensibilisation Ancrage aux Rendre
TICE des programmes obligatoire
apprenants
Répondants 4 12 16
111
INTÉGRATION DES LANGUES NATIONALES
INTÉGRATION Pédagogie
Nombre de
DES Intégration convergente Rendre Sans
langues
LANGUES initiale langues nationales - obligatoire opinion
défavorable
NATIONALES français
Répondants 10 5 2 8 5
Ces corpus ne forment pas la totalité des observables, il faut encore prendre en
compte tous les autres qui ne figurent qu’en annexe. Pour ne pas alourdir la
rédaction, parce qu’ils sont plus longs et moins exploitables sous la forme d’un
tableau. Nous avons préféré les y mettre, mais ils auraient tout aussi pu figurer
à côté des autres avec lesquels ils partagent quasiment la fonction. De plus,
nous ne pourrons pas les intégrer de manière exhaustive, comme avec tous les
autres corpus, compte tenu de l’approche adoptée, qui ne procède pas
systématiquement. De ces corpus part une étude modulaire, qui isole
temporairement les paramètres disciplinaires, sans cependant les étudier
comme tous des entités autonomes. Cette démarche modulaire intègre
finalement tous les paramètres dans un corps de réflexion intégrale, globale,
avec une orientation et une destination précises.
112
Module A : La sociolinguistique
A.1. : Généralités
La sociolinguistique dérive de la discipline mère qu’est la linguistique, et à ce
titre, il semble nécessaire de valoriser cette filiation épistémologique dans la
présentation de la sociolinguistique. le Cameroun sera ainsi présenté, à la fois
dans son environnement diachronique et synchronique; avec un gros plan sur
les successives politiques et méthodes éducatives.
A.1.1. : La linguistique
Il faut dire d’entrée de jeu que notre perspective n’est pas historique, c’est-à-
dire que nous n’ambitionnons pas de décrire diachroniquement cette science58.
Il suffira d’établir le lien qu’elle entretient avec la sociolinguistique, qui, elle, sera
intéressante dans l’observation du français camerounais.
La linguistique se définit comme l’étude scientifique du langage humain, de
manière globale, et des langues, de manière particulière. C’est ce que
confirment Baylon et Fabre (2005 :17)59:
58
Pour une perspective historique, lire entre autres:
- FILIPPI, P.-, M., (1995), Initiation à la linguistique et aux sciences du langage, Paris,
Ellipses.
- ESSONO, J.-M., (1998), Précis de linguistique, Paris, l’Harmattan.
59
BAYLON, C., FABRE, P. (2005), Initiation à la linguistique, Paris, Armand Colin.
113
Dans le premier cas, une langue est perçue comme un système de signes
linguistiques.
En tant que système de signes, elle s’appuie sur des oppositions, et l’ensemble
de ces oppositions constitue dans chaque langue des sous-systèmes
phonologique, syntaxique et lexical.
Pour preuve, sous le terme générique de philologie, ont été regroupées des
études portant sur la langue dans ses manifestations phonologiques,
grammaticales, sémantiques et philosophiques. Mais surtout on désigne par ce
vocable de philologie, les délicats travaux portant sur la traduction, la
conservation et l’interprétation des documents écrits. Etude des langues dans
leur rapport avec les textes littéraires, la philologie est née en Allemagne avec
F. A. Wolf dans les années 1800. Elle se distingue de la linguistique en ce que
seule la langue écrite fait l’objet de son intérêt, à l’exclusion des données
orales. On peut ainsi déduire qu’elle n’est pas de la linguistique historique,
même si ses résultats servent beaucoup aux historiens, anthropologues et
comparatistes dans l’approche diachronique des langues.
L’autre grand moment de l’étude des produits de la langue a pris corps dans la
grammaire historique et comparée. La grammaire comparative se préoccupait
de comparer entre elles les langues pour cerner certaines parentés, filiations, et
60
SAUSSURE, F., de, (1972), Cours de linguistique générale, Paris, Payot.
114
éventuellement retrouver la langue-mère d’où seraient sorties toutes les autres.
Parmi les fondateurs de cette grammaire, qui se distinguait de celle de Port-
Royal dont la visée philosophique a été remarquable, on peut citer F., Bopp,
W., Von Humboldt.
Du courant de la grammaire historique et comparée (1810-1875), d’où naît le
concept de linguistique, émergent des revendications scientifiques : désormais
on collecte des faits, on accumule des observations et on exige du linguiste
une plus grande neutralité dans l’étude des phénomènes du langage.
115
outre se garder d’être prescriptive, mais descriptive.
A.1.2 : La sociolinguistique
C’est d’ailleurs cette inscription culturelle et sociale du langage que va participer
à fonder W. Labov dans les années 60. Ses sujets de prédilection sont les
variations syntactiques et lexicales selon les groupes sociaux, les règles
sociales du dialogue et les situations de contact entre les langues. Parmi les
pionniers de ce courant, on cite souvent en dehors de W. Labov, John J.
116
Gumperz et D. Hymes.
Labov a recherché les corrélations entre les variations linguistiques et la
position sociale ou la situation de communication des locuteurs. Ainsi établit-il
deux niveaux de variation :
- le niveau social, selon lequel différents locuteurs d’une communauté
linguistique considérée parlent différemment en fonction de leurs classes
sociales ;
- le niveau stylistique d’après lequel un même locuteur utilisera différents
registres de langage (familier, courant, soutenu...) selon la situation
d’énonciation.
61
GADET, F., (2001) «Le français tel qu’on le parle» in DORTIER, J.F., (coord.), Le
langage. Nature, histoire et usage, Auxerre, Sciences Humaines, p 91-98.
62
MOUNIN, G. (2000), (3e éd.), Dictionnaire de la linguistique, Paris, Quadrige/Puf.
117
la sociolinguistique. Point de vue que nous ne partageons pas, pour la simple
raison que le langage est peut-être une réalité sociale, mais il est d’abord une
faculté naturelle que la vie sociale promeut, et nous ne pouvons par conséquent
pas dire que les travaux sur les facultés langagières (behaviorisme, innéisme et
cognitivisme) relèvent forcément de la sociolinguistique.
La sociolinguistique obéit, selon la compréhension que nous en avons, à une
logique écologique. Dans cette vision, il est par exemple devenu nécessaire
pour parler des langues au Cameroun, de tenir compte de la réalité
sociologique, du jeu interactif entre la société camerounaise et ses langues.
C’est la raison pour laquelle une présentation, quoique sommaire, sera faite de
ce pays : son histoire, sa géographie, ses populations et ses langues.
118
Source de l’image : http://www.izf.net/izf/Documentation/Cartes/Pays/supercartes/Cameroun.htm (15/08/2006)
119
et le 13° parallèles NORD, au carrefour des parties Nord /Est /Ouest/ Sud du
continent africain.
Le pays est composé de régions si diverses et de populations tellement
différentes qu’on en parle comme de l’Afrique en miniature.
63
CALVET, L.-J., (2002 b) 1ère éd. 1974, Linguistique et colonialisme, Paris, Payot et Rivages.
120
Guerre Mondiale en 1918.
- Le Tchad au Nord
- Le Nigeria à l’Ouest
121
Le pays dispose aussi d’une frontière maritime qui lui donne une ouverture sur
l’Océan Atlantique.
Les grands foyers de peuplement sont les hautes terres de l’Ouest, la région
côtière et les monts Mandara tandis que les régions presque vides d’hommes
sont le plateau de l’Adamaoua et le Sud-Est du Cameroun. Cette différence de
densité s’explique par l’inégale richesse naturelle et le niveau de
développement ; ceci est à l’origine de nouveaux mouvements de migrations.
Au point de vue ethnique, les principaux groupes sont les Fang (19,6 %) ; les
Bamiléké et les Bamoun (18,5 %) ; les Douala, les Loumdou et les Bassa (14,7
%) ; les Peul (9,6 %) ; les Tikar (7,4 %) ; les Mandara (5,7 %) ; les Maka (4,9
%) ; les Chamba (2,4 %) ; les Mbum (1,3 %) et les Haoussa (1,2 %). Les
Pygmées sont les premiers occupants du sud forestier. Chez les Bantou, on
distingue: les Douala (originaires du bassin du Congo) ; les Banen (au nord du
pays Bassa, venus de la vallée du Noun) ; les Bafia et les Yambassa (sont du
pays Babimbi) ; les Fang Béti (viendraient du sud de l’Adamaoua) ; les
Ngoumba et les Mabea (sur la côte).
122
les monts Mandara sous la poussée de nouveaux arrivants. Les Néo Soudanais
(Massa, Kotoko) se sont installés dans la vallée du Logone. Les Dourou,
Koutine, Laka-Mbéré qui vivent sur le plateau de l’Adamaoua. Les Toupouri qui
forment un noyau important dans la plaine de Diamaré. Les Arabes choa venus
probablement du Darfour au Soudan se sont installés autour du Lac Tchad. Les
Foulbé et les Bororo dans le reste du Nord.
Le Sud est le pays des ethnies bantou (les Douala, les Béti, les Eton, les
Bassa, les Bafia, les Boulou, etc.), mais les régions forestières du Sud-Est
n'abritent guère que quelques communautés de pygmées.
Dans l'Ouest, on trouve surtout les Bamoun et les Bamiléké. Ces peuples sont
majoritairement convertis aux religions chrétiennes, mais les Bamoun sont en
partie islamisés. La région de l'Ouest se caractérise aussi par un héritage
colonial qui en a fait une région partiellement anglophone (les provinces du
Nord-Ouest et du Sud-Ouest) au sein d'un État majoritairement francophone.
64
MVENG, E., (1963), Histoire du Cameroun, Paris, Présence Africaine.
123
Mais la raison décisive de notre reddition repose sur l’inopportunité d’une telle
entreprise par rapport à notre problématique.
124
jusqu’au Lac Tchad puis la Bénoué et poursuivit vers l’Ouest jusqu’à Yola. Si
les premiers explorateurs et surtout le gouvernement de leurs pays d’origine
s’intéressaient beaucoup au développement du commerce, la seconde vague
d’explorateurs qui déferla à partir de1884, s’intéressait surtout à mettre le
territoire sous le contrôle de l’Allemagne.
Quant aux Anglais, leur objectif était de développer leur commerce et de mettre
un terme à l’esclavage en accentuant leur influence au Sud du Nigeria. La
chose déplut aux chefs Douala, qui écrivirent à la reine Victoria, pour lui
demander de leur accorder la protection du gouvernement britannique. A la
même époque, les Français et les Allemands redoublèrent d’activités au
Cameroun et le gouvernement allemand envoya l’ancien explorateur Gustav
Nachtigal qui signa deux traités avec les rois locaux à Douala. Le 14 Juillet
1884, il hissait le drapeau allemand à Douala et dès ce jour le territoire devint
une colonie allemande sous le nom de Kamerun.
125
qu’employèrent les Anglais pour administrer le Cameroun et le Nigeria.
65
SECK, P. I., (1993), La stratégie culturelle de la France en Afrique, Paris,
l’Harmattan.
126
Les colonies doivent profiter à la métropole, non pas, bien
entendu, par le paiement d’un tribut – c’est une doctrine
condamnée – mais par l’accroissement de la puissance
politique et économique du pays (…). Gouverneurs, magistrats
et fonctionnaires de tous ordres, officiers de terre et de mer, ne
sont que des moyens : le commerçant seul est force (s.p.n.).
C’est pour lui que l’administration doit être faite (…). C’est donc
pour faciliter son œuvre, pour faciliter la mission du
commerçant que l’organisation de nos colonies doit être conçue
dans un bref délai.
127
A.3.9 : La République Fédérale
Les dirigeants des deux Cameroun se mirent d’accord. Ahmadou Ahidjo fut le
premier président et John Ngu Foncha le vice-président. L’association des deux
Cameroun forma la «République Fédérale du Cameroun» et sa capitale
Yaoundé. Le drapeau de la république du Cameroun fut conservé pour la
république fédérale mais avec deux étoiles pour montrer qu’il symbolisait deux
états fédérés. Le français et l’anglais furent reconnus comme les deux langues
officielles. Dès avril 1962, le franc CFA devint la monnaie officielle de
l’ensemble du Cameroun. Tous les partis du Cameroun fédéral furent
rassemblés en un seul parti, l’Union Camerounaise (UC).
128
linguistique pour souci majeur.
Le Cameroun est souvent considéré comme un microcosme de l'Afrique, eu
égard à divers paramètres : écologique, sociologique, etc.
66
BILOA, E., (2003), La langue française au Cameroun, Bern, Peter Lang.
67
http://www.tlfq.ulaval.ca /axl/afrique (18/07/2006)
129
du français et du portugais, langue précisément «structurellement constituée
sur la base du paradigme de la langue anglaise» (Tabi Manga, op.cit),
connaissait une expansion concurrentielle, qui en fit l’outil de communication
essentiel des négociations et des transactions. Cette langue contestait si bien
l’autorité véhiculaire du duala que plus tard, les négociations ultérieures entre
les chefs duala et le gouvernement allemand, au sujet d’un projet de
protectorat, furent entreprises en pidgin.
Cette option n’est pourtant pas allée sans conflits, dont le plus particulier avait
été l’antipathie propre des jeunes Camerounais, qui auraient voulu
acquérir les compétences linguistiques du colonisateur, porteuses à leurs
yeux d’une promotion administrative et sociale potentielle. On y ajoute
l’arrivée des missionnaires catholiques, les Pères Pallotins qui, eux,
privilégiaient d’autres langues locales tels que l’ewondo, le bassa comme
langue d’évangélisation, au détriment du duala qui avait la préférence des
précédents missionnaires.
130
A.4.3 : La première loi linguistique
Définir une politique linguistique cohérente dans ce contexte n’était pas aisé.
On peut comprendre pourquoi l’Arrêté du 25 avril 1910 du Gouverneur Seitz,
faisant de l’allemand la langue exclusive de l’enseignement, se solda par un
échec dans son application. Nécessité en fut éprouvée pour une option estimée
plus consensuelle, qui réunit à Berlin les divers acteurs de la politique et de
l’éducation au Cameroun.
68
http://www.inst.at/trans/11Nr/kody11.htm (13/06/2005)
131
C’est à lire Tabi-Manga, page 29, que nous avons les termes exacts de l’arrêté
du Gouverneur Général de l’AEF (Afrique Equatoriale Française), signé le 28
décembre 1920 à Brazzaville, qu’il rappelle:
En somme, et pour l’emprunter à Tabi Manga, (page 66), il peut être dit :
132
A.4.5 : La politique linguistique postcoloniale
La question linguistique demeure l’une des «phobies» politiques au Cameroun,
sur laquelle aucun homme politique n'a trop osé se prononcer, sinon en se
retranchant subrepticement derrière l'écran bilingue officiel.
133
profit.
Dans les faits, le français parlé par les Camerounais est grandement influencé
par des emprunts aux langues locales comme le béti, le douala, mais aussi par
l'anglais et le pidgin-english. De plus, les Camerounais ont créé de nombreux
néologismes français propres au Cameroun: accélérateur («aphrodisiaque»),
adversaire («maîtresse»), balafon («xylophone»), bordelle («putain»), bourrer
(«mentir»), cadeauter («offrir un cadeau»), enceinter («rendre enceinte»),
grever («faire la grève»), ivoirien («personne qui n'y voit rien»), joueur
(«personne qui joue le rôle principal dans un film»), nordiste (habitant le Nord»),
69
Lire l’article en ligne :
http://www.monde-diplomatique.fr/2002/12/ENDONG_MANASSE/17281 (15/12/2005)
134
palabrer («se plaindre»), planton («garçon de bureau»), promotionnaire
(«camarade de promotion»), radio-trottoir («rumeur publique»), sucrerie
(«boisson sucrée»), taxi-man («chauffeur de taxi»), washman («blanchisseur»),
etc.
70
ESSONO, J.-M., (2001), «Le Cameroun et ses langues», in, (sans auteur),
Cameroun 2001, Politique, langues, économie et santé, Paris, l’Harmattan.
135
assez équitable de plages horaires allouées aux deux langues. L’auteur
reconnaît cependant qu’il existe une réelle dominance du français sur l’anglais ;
Il faut attendre 1996, pour que les langues nationales soient intégrées dans les
préoccupations étatiques énoncées par la constitution de la même année,
après les propositions des Etats Généraux de l’Education tenus en 1995, qui
ont largement plaidé en faveur de leur revalorisation institutionnelle.
Cette bonne disposition est répercutée par la loi 98/004 du 14 avril 1998
136
d’Orientation de l’Education au Cameroun71, dont la mise en place devrait
déboucher sur l’instauration des enseignements des langues nationales.
D'ailleurs, malgré les orientations exprimées ici et là, à titre paradoxal, on peut
découvrir à l’article n° 2 de l’Instruction Générale du 4 juin 1998 relative à
l’organisation du travail gouvernemental, Leclerc (op.cit., 12) :
71
Voir corpus 7
137
Le ton est sans équivoque, le contenu ne souffre ambiguïté aucune : c’est la
suprématie de nos deux langues étrangères qui est ici consacrée, malgré les
bonnes intentions des colloques et autres travaux à caractère plus ou moins
international.
Qu’en est-il alors des langues nationales, et pour commencer, quelles sont-
elles ? Le Cameroun présente en effet un multilinguisme très complexe.
1 0 14 Eteintes
2 1000 72 résiduelles
138
A.4.5.3 : Langues additionnelles
En marge de ce multilinguisme/bilinguisme, le pidgin-english, est défini par
Leclerc (op.cit :5) comme une sorte de créole comparable à ceux utilisés aux
Antilles, mais il est surtout pratiqué au Cameroun dans les zones à forte
diversité linguistique (pays bamiléké et Grassfields), ainsi qu’à Douala, où le
cosmopolitisme de la ville a imposé cette langue véhiculaire dans les
transactions commerciales. L'auteur va plus loin:
139
langue maternelle. Le pidgin-english est grandement utilisé comme langue
véhiculaire dans les deux provinces anglophones (Nord-Ouest et Sud-Ouest)
du Cameroun ainsi que dans les provinces françaises limitrophes (Ouest et
Littoral). On estime que 80 % des Camerounais anglophones peuvent utiliser le
pidgin-english, alors que 40 % des Camerounais francophones y auraient
également recours. Lorsque, par exemple, deux Camerounais ne s'expriment
pas dans la même langue officielle, ils ont recours au pidgin-english. Par
ailleurs, le pidgin-english parlé par les anglophones, et celui parlée par les
francophones, ne sont pas identiques. Il existe des différences phonétiques et
lexicales, ce qui complique l'intercompréhension. Selon certains, le pidgin-
english parlé par les anglophones peut apparaître comme une sorte de dialecte
par rapport à l'anglais (un «anglais de brousse»), car il demeure dans une
continuité interlinguistique. Par contre, le pidgin-english parlé par les
francophones est dans un rapport de discontinuité interlinguistique avec le
français. Ce sont des pidgins relativement autonomes.
Pour achever de présenter la mosaïque linguistique camerounaise, nous avons
relevé un mélange hétéroclite d’autres mots provenant d’horizons les plus
divers, certains apparentés au verlan, pratiqué en milieu jeune en France ;
certains autres bien moins identifiables, inclassables par nous.
Le corpus 2 (chanson de Koppo traduite par nos soins) est révélateur de cette
richesse : des mots et expressions comme « foumban-foumbot » sont
quasiment intraduisibles : Foumban et Foumbot sont certes deux villes de
l’Ouest Cameroun, mais comment leur donner une signification rationnelle que
nous ignorons? Pourtant les jeunes Camerounais comprennent que cette
expression réfère à un engagement radical qui signifierait, comme nous avons
pris la liberté de le traduire, «coûte que coûte», «vaille que vaille» ou encore
«quel qu’en soit le prix».
La chanson de Koppo, écrite en camfranglais, illustre par endroits la description
que fait Tabi-Manga (op.cit : 134) de cette langue : « l’ensemble ne permet pas de
dégager une architecture systématique et cohérente », même s’il lui reconnaît
quelques caractéristiques liées à la construction des verbes, à la syntaxe du
nom et à l’emploi des temps et modes, par exemple :
140
a)- approche simplifiée de la notion de transitivité grammaticale, avec
suppression du complément d’objet indirect. Exemple, vers 5 de la chanson :
c)- usage d’un complémentateur universel «que» pour toutes les formes
d’articulation ou de lien syntaxique ;
a- Les verbes :
72
JONANG, C., (1993), «Influence du camfranglais dans les performances des élèves
des lycées et collèges en français, le cas de Douala et Yaoundé», Mémoire DIPES II,
ENS, Yaoundé I.
141
b- les noms :
Vers 12, strophe 1 :
Je go chez le watt nous falla le mouz
Le watt n’est, en réalité, qu’une graphie locale du mot white qui signifie
blanc, le white désignant alors le Blanc.
a- les verbes :
b- les noms :
vers 4, strophe 3 :
N’importe quel bolo qui peut me gi les do
a- les verbes :
vers 8, première strophe :
J’ai toum les chaussures, il n’y avait pas moyo
Ou encore :
b- les noms
vers 1, deuxième strophe :
Si tu vois ma nga, dis-lui que je pars
Notre intention à travers cette analyse, tout ce qu’il y a de sommaire, est juste
d’illustrer la description des deux auteurs ci-dessus évoqués, et par ce fait
présenter la complexité du «parler jeune» au Cameroun.
142
Ce constat donne indubitablement raison à V. Spaëth (2005 :184)73 lorsqu’elle
affirme, parlant des pays africains subsahariens qui ont le français pour langue
officielle:
Il convient cependant d’ajouter que le cas camerounais est bien plus complexe
que ne le suggère l’analyse de V. Spaëth, qui n’a certes pas voulu faire une
étude exclusive du cas camerounais, et dont le regard embrasse un ensemble
de pays subsahariens. Nous avons vu qu’aux langues maternelles, paternelles
dont parle cet auteur, et qui sont déjà pléthoriques au Cameroun, il s’ajoute
l’anglais en langue co-officielle, et le camfranglais comme «langue
d'amalgame» ou «langue de synthèse».
73
SPAËTH, V. (2005), «Le français langue seconde et sa fonction d’enseignement en
Afrique francophone, problèmes et perspectives», in Beacco, J.C., Chiss, J.L.,
Véronique, D., Les cultures éducatives et linguistiques dans l’enseignement des
langues, Paris, PUF, ( p. 183-203)
143
autres langues, puisqu'elle est en situation de majorité, ou même de monopole,
institutionnellement, et ce malgré l'option bilingue décrétée, voire multilingue
revendiquée et prônée. Cette langue, selon Tabi (op.cit: 134), est en effet
investie de quatre fonctions:
Cet état des choses est l'émanation des politiques linguistiques qui ont été
successivement menées par les autorités coloniales et postcoloniales. Mais il
est surtout le fait des orientations prises par le biais de l'éducation. A ce titre,
nous devons rentrer dans l'épistémologie sociolinguistique, pour savoir si dans
un tel contexte, le statut conféré au français comme langue seconde (FLS) se
justifie.
74
VOISIN, J.-P., (2000), «Notes sur l’harmonisation et la contextualisation des
programmes d’enseignement du français en Afrique Noire Francophone.», in Revue de
l’APFA-OI, numéro spécial, juillet.(p.14-20)
144
techniques modernes», etc. ont été l’objet de controverses
multiples, longues, stériles et finalement sans effet.
Notre neutralité optionnelle nous amène à considérer tous les avis, pour n’être
ni subjugué par la doxa, ni compté parmi ses pourfendeurs. Ce débat ne nous
semble intéressant qu’en ce qu’il confirme la complexité présumée sur la
situation sociolinguistique du Cameroun.
Il existe plusieurs définitions du français langue seconde ; elles ont pour point
commun de dispenser qu’il s’agit de la langue de la scolarité. J.-P., Cuq dont
l'ouvrage fait référence75, affirme qu'il est difficile de dater l'origine de
l'expression FLS, qu'il définit néanmoins comme le français parlé à l’étranger
avec un statut particulier. Il s’agit principalement de l’usage du français dans les
anciennes colonies ou dans les anciens protectorats français. Le français n’y
serait pas la langue maternelle, ni même une simple langue étrangère comme
le français l’est aux États-Unis par exemple. Le français langue seconde serait
utilisé comme langue d’enseignement à partir d’un certain niveau et permet
l’accession à un niveau social plus élevé.
75
CUQ, J.-.P., (1991), Le français langue seconde, origine d'une notion et implications
didactiques, Paris, Hachette.
76
VERDELHAN-BOURGADE, M., (2002), le français de scolarisation, pour une
didactique réaliste, Paris, Puf.
77
GALISSON, R., COSTE, D. (1976), Dictionnaire de didactique des langues, Paris,
Hachette.
145
notion comme acquise. Verdelhan-Bourgade va pourtant jusqu'à subodorer que
cette notion soit née d'un mouvement de pensée antérieur à la naissance de la
notion FLS, selon lequel le français en Afrique relevait d'une réalité autre que
celle française, qu'on a identifiée dans un premier temps comme du FLE. Cette
logique, qui en plus fait du FLS un sous-ensemble du FLE, en vient à être
contestée par elle. H. Besse (1987) ne trouve pas plus de grâce à ses yeux,
quand il classe la langue seconde comme une langue étrangère, avec pour
seules différences les conditions sociolinguistiques ou sociopolitiques
particulières qui peuvent justifier la discrimination. Plus que tout, le point sur
lequel M. Verdelhan se fait plus réticente et offensive, c'est quand il est soutenu
que souvent la scolarisation a commencé dans la langue maternelle, et que
l'apprentissage de la langue 2 vient ensuite. Or, dit-elle (page 11), ce n'est pas
le cas la plupart du temps en langue seconde.
Pour confirmer cette réticence, dans le cas du Cameroun, il faut bien dire que la
situation en termes de langue 1 et 2 n'est pas toujours évidente. A considérer le
corpus 6, on constate en effet que de nombreux jeunes parlent les deux
langues à la maison, et ce, avant toute scolarisation. Ils continuent d'ailleurs de
parler les deux ou trois langues assez naturellement. Pourtant, le discours
officiel a tranché, et d'après le corpus 7, relatif aux objectifs généraux de
l'enseignement/apprentissage du français au Cameroun Francophone78, il
n'existe aucune équivoque:
78
Cameroun francophone au sens linguistique et non politico-historique où cette
expression désignait une entité administrative séparée du Cameroun anglophone, soit
avant 1972.
146
l’enseignement de la langue seconde 1 de scolarisation.
79
CUQ, J.-P., (dir) (2003), Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et
seconde, Paris, Clé International-Asdifle.
147
plus forte densité des apprentissages.
Au Cameroun, le choix se veut pourtant plus clair que ce flou artistique décrit,
selon les nouveaux programmes de français, du corpus 10, on peut
effectivement extraire:
La méthode sera essentiellement communicative et s’inspirera
de situations familières à l’enfant pour lui faciliter la
compréhension et lui permettre de mieux s’enraciner dans son
milieu.
Le milieu dont il est question est bel et bien francophone avec une forte
présence de la langue française; situation qui fait le lit des revendications
classificatoires de certains linguistes et littéraires camerounais dont nous
exposerons le point de vue dans la sous-section infra réservée au français
langue étrangère.
Quant à la communication avec leurs pairs, elle est entièrement dominée par le
français, puisque 17/30 l'affirment, que nous pouvons rapprocher des 6/30 qui
parlent le camfranglais; contre 2/30 qui revendiquent la langue camerounaise
148
prédominance de français.
Nous en déduisons que l’exposition à la langue française est très forte, et que
la classification exclusive du français camerounais dans la catégorie
linguistique de FLS repose sur une volonté arbitraire de systématiser, de
catégoriser à tout prix. Quant à nous, nous reconnaissons la diversité des
statuts du français au Cameroun. Nous reconnaissons que le FLS, au sens
francophone, (francophonique? si nous pouvons nous permettre ce
néologisme) est présent au Cameroun. Ailleurs, nous ne serions pas admis à
l’appeler ainsi. En commençant par la France métropolitaine elle-même où cet
acronyme signifie institutionnellement autre chose.
Dans les deux définitions, le FLS est pratiqué par des étrangers dont la langue
maternelle n’est pas le français mais auxquels le français doit permettre, non
seulement de communiquer avec autrui, mais aussi de suivre des cours. Le
FLS en France est considéré comme un « domaine pédagogique de
transition ». La différence entre cette conception et celle africaine est qu’en
France, l’élève nouvellement arrivé reste le plus souvent dans le pays et
devient français, ce qui donne une finalité autre au FLS : celle d’être une langue
transitoire, une espèce d'interlangue institutionnalisée.
Nous n’avons pas enquêté dessus, mais nous pouvons conjecturer que cette
80
Ministère de l'éducation nationale, Direction de l'enseignement scolaire, (2000), Le français
langue seconde, Paris, Cndp.
149
acception de FLS soit aussi présente au Cameroun. Dans l’affirmative, elle ne
serait tout de même pas en situation majoritaire. La conception canadienne,
quant à elle, pourrait également s’illustrer au Cameroun.
A.5.2.1.2 : LE FLS au Canada
Au Canada, la situation est assez différente et la volonté de démêlement
amène les théoriciens canadiens à considérer, contrairement au modèle
africain ou français que nous venons d'évoquer, qu'un locuteur de français
langue seconde est une personne ayant appris le français après la puberté. Ce
bilinguisme successif s’oppose donc au bilinguisme simultané (deux langues
apprises en même temps) et permet d’expliquer en quoi les caractéristiques
sont différentes. En effet, l’appropriation d’une langue seconde se fondant sur
un acquis linguistique initial, la langue première y est toujours langue de
référence. Une personne ayant commencé à apprendre le français à l'école
maternelle, par exemple, n'est donc pas un locuteur de français langue
seconde, le français faisant partie de ses langues premières. Une langue
seconde sera, selon cette hypothèse, une langue apprise après la puberté. Par
le fait même, une langue première est une langue apprise avant la puberté.
Ainsi, si une personne peut avoir appris plus d'une langue avant la puberté,
comme c'est le cas au Cameroun, en référence au corpus 6, on en dirait qu'elle
a plus d'une langue première. L'avantage d'une telle présentation est d'être plus
simple à repérer, de permettre une lisibilité des différents types d'apprenants.
Cette vision, si elle a son explication dans son contexte, nous éloigne de plus
150
en plus de ce que nous commencions à percevoir du concept. En effet, il s'y
mêle des considérations dépréciatives de son utilisation, quand nous en avions,
que ce soit dans le cas des contextes africains, canadiens ou français, une
vision moins marquée sociologiquement. La configuration belge est difficile à
détecter au Cameroun, étant donné le caractère égalitaire de l’orientation
éducative.
151
Vue synoptique des conceptions de la notion FLS
Concepts
Interactions
sociales
Enseignement
Enseignement
Afrique noire Oui
et/ou
communication
Maghreb spontanée Non
Sections Non
françaises à
l’étranger …
152
trancher en faveur d'un classement ou d'un autre, puisqu'il s'agit ici de jeter un
regard, le plus panoramique possible, sur le concept FLS. Nous pourrons
revenir plus loin, dans la troisième grande partie de ces travaux, sur le contexte
camerounais et sur la difficulté qu'il y aurait à classer les apprenants de cette
école et à planifier «équitablement».
- celui des jeunes, qui nous semble dénué de toutes visées politiciennes.
81
MATATEYOU, E., (2000), « L’actualité du français dans le contexte multilingue au
Cameroun : intégration et dialogue. », in, Revue de l’APFA-OI, numéro spécial, juillet
2000, ( p. 12-13)
153
acquiert le français dans ce contexte comme premier outil de
communication dans sa vie, il serait erroné de le considérer
comme une langue seconde ou étrangère.
82
CASTELLOTTI, V., (2001), Pour une perspective plurilingue sur l’apprentissage et
l’enseignement des langues, in Castellotti, (dir.), D’une langue à l’autre : pratiques et
représentations, Rouen, Presses de l’Université de Rouen.
154
particulièrement, le lien ou le recours à la langue première, occupent, selon elle,
une place de choix.
Dans le cas du Cameroun, le corpus révèle que pour 27/30 des jeunes
interrogés, la langue française est très importante; seuls 2/30 pensent qu’elle
ne l’est pas, alors qu’un d’entre eux la trouve assez importante, on pourrait dire,
sans enthousiasme débordant.
Parmi les 27 qui la trouvent très importante, près de la moitié, 12 précisément,
mettent en avant les motifs scolaires ; 6 l’apprennent pour des besoins de
communication courante ; 4 pensent à la communication internationale, 4
également disent apprendre cette langue par amour pour elle.
Comme métropoles : Yaoundé et Douala, qui sont par ailleurs les capitales
politique et économique du pays, chefs-lieux de province, avec, une population
de près de deux millions d’habitants chacune, si les périphéries sont
considérées.
Nous avons choisi deux principales villes du Cameroun «anglophone» :
Bamenda et Buéa, qui ont une population de près de 500.000 habitants
chacune.
D’autres agglomérations de moyenne importance ont également été prises en
compte : Garoua, Yokadouma, Ngaoundéré, Bertoua.
Nous n’avons pas oublié d’intégrer des villes de moindre importance, comme
Ngomedzap, Ngog Mapubi, toutes situées en zone historiquement francophone.
Mbanga a un statut un peu particulier parce qu’il se situe entre les villes de
155
Douala, francophone, et Buéa, anglophone, de même qu’il est une étape
charnière vers les villes du Mungo et de l’Ouest que sont Nkongsamba, et
Bangangté.
Pour ces enseignants, les thèses qui postulent le statut de FLS sont véridiques.
Cependant on peut observer que le FLM se porte très bien dans les deux
principales villes du Cameroun : Yaoundé et Douala. Tant et si bien que cette
«exclusivité française» en finit par concurrencer localement son «colistier»83. Le
FLE n’est pas du tout absent puisque sa couleur apparaît prédominante dans
les villes anglophones du Cameroun que sont Bamenda et Buéa, plutôt
secondaires, du point de vue démographique.
Nul doute que nous sommes là en face d’un kaléidoscope linguistique, avec
une intrication de couleurs et de tons qui commande la plus grande prudence
dans la gestion sociolinguistique, et partant didactique.
Bien plus renforçant cette interrogation, nous avons demandé aux mêmes
enseignants de faire un classement grossièrement global, et nous en avons
obtenu le résultat suivant :
Les enseignants camerounais pensent qu’ils se trouvent parallèlement en FLS,
majoritaire, et en FLM. Tout cela confirme les travaux de Bitjaa Kody Z. Denis
(op. cit.) qui avait montré, dans une enquête quantitative sur la dynamique des
langues à Yaoundé, que l'usage des langues nationales est en voie de
disparition jusqu'au sein des ménages endogamiques, bastions présumés de
leur usage. À travers cette étude, les adultes francophones déclaraient qu'en
famille ils utilisaient la langue maternelle dans 52% des situations, contre 42%
de temps d'utilisation du français. Les jeunes de 10 à 17 ans interrogés dans
les mêmes ménages déclaraient qu'ils utilisaient le français à 70% dans les
mêmes situations de communication familiale contre 25% de temps d'utilisation
des langues familiales potentielles. D'autre part, 32% des jeunes de 10 à 17
ans interrogés dans la ville de Yaoundé affirmaient ne parler aucune langue
camerounaise et n’avoir que le français comme langue de communication.
83
Colistier au sens paradigmatique qui distingue le FLM du FLS et du FLE
156
Notre expérience propre nous a mis dans une situation analogue. Fils d’un
couple d’instituteurs, nous sommes né et avons grandi dans un «camp» réservé
aux familles d’enseignants de l’école primaire publique de la ville de
Ngomedzap. Nous avons dû cohabiter, communiquer, jouer, collaborer avec les
jeunes d’autres familles dans les langues les plus diverses. Nous nous
rappelons que nous communiquions invariablement en ewondo, bassa, bulu,
bafia, même si la première langue citée était plus courante, puisque nous
séjournions dans son aire. Beaucoup de jeunes issus de cette sorte de «cité»
ont acquis un plurilinguisme presque maternel. En faisant un bilan rapide de
cette situation sociolinguistique originale :
- nous avions le français et l’anglais comme langues co-officielles ;
- nous avions chacun sa langue «maternelle» ;
- nous acquérions assez naturellement d’autres langues camerounaises,
par nécessité sociologique, et par solidarité à nos camarades de jeux;
- plus tard au collège, dès la classe de sixième, au séminaire Saint-Paul
de la ville de Mbalmayo, nous avons dû apprendre en plus de l’anglais et du
français, l’allemand, le latin, le grec ;
- de plus, l’apprentissage en/de la langue ewondo était imposé à tous les
séminaristes qui devaient suivre leurs cours en ewondo, mais aussi prendre
part à l’office religieux quotidien célébré en cette langue.
Il nous vient une anecdote sur les essais de scolarisation en langue ewondo
faits par un enseignant de mathématiques volontariste, qui expliquait son cours
en des phrases comme :
Nyo fois nyo égale nyo.
Une adaptation linguistique locale de la multiplication, qui serait en français, par
exemple :
Deux fois deux égalent quatre.
La traduction littérale donnerait plutôt :
157
pas de nos jours - traduites en langues camerounaises.
Nous ne l’évoquons pas par simple projet de dérision, mais pour témoigner de
la difficulté à formaliser les acclimatations linguistiques des vocabulaires
scientifique, technologique et philosophique, pourtant réclamées par beaucoup
d’intellectuels camerounais ; et recommandées par les orientations
internationales.
84
L-J Calvet 2002 quant à lui récuse cette doxa PLC (Politico-Linguistiquement
Correct) dont seraient victimes les planificateurs linguistiques et autres
décideurs.
Le cas du FLE ne sera pas approfondi ici, parce que nous avons choisi de
traiter du FLS, et de la partie francophone du système éducatif. Nous devons
tout de même remarquer que le FLE est signalé, par les enquêtés, dans les
zones habituellement reconnues comme relevant du FLS. L’explication, si nous
pouvons en risquer, est l’extrême mobilité des populations camerounaises, dont
les fonctionnaires sont susceptibles d’être mutés en toutes villes et localités,
sans préavis ni consultation. L’exode rural - qui voit les jeunes déserter les
villages pour des agglomérations plus importantes où ils pourraient
éventuellement trouver un emploi ou s’épanouir dans un environnement rêvé -
est un autre motif de mobilité et de brassage linguistique. Quant à savoir si pour
autant les populations FLE migrantes n’en deviennent pas FLS, il ne nous est
pas aisé de répondre de manière catégorique.
S’il nous fallait conclure sur cette partie modulaire, nous dirions que le statut du
français au Cameroun relève d’une très grande complexité, et il serait
intéressant de voir comment les curricula s’y rapportant sont élaborés et
opérationnalisés. Peuvent-ils tenir compte de la diversité des usages ? Seront -
ils de nature à favoriser l’intégration des TICE ?
84
CALVET, L.-J., (2002), Le marché aux langues, les effets linguistiques de la
mondialisation, Paris, Plon.
158
Module B : La question curriculaire
159
acquis des élèves. L’approche classique du curriculum est descendante :
partant du sommet vers la base et se déclinant en :
- fins/finalités défini(e)s par les autorités politiques internationales,
nationales ou régionales ;
- objectifs généraux qui sont prescrits au niveau administratif
gouvernemental ou scolaire d’après les finalités ;
- objectifs pédagogiques dont se chargent les pyramidaux superviseurs
pédagogiques85 (corps d’inspecteurs, chefs d’établissement et coordonnateurs
pédagogiques ou disciplinaires) ;
- objectifs pédagogiques opérationnels (les fameux O.P.O.) que chaque
enseignant est censé formuler dans la préparation de son cours.
85
La supervision pédagogique doit être comprise au sens large qui intègre à la fois
l’inspection que nous connaissons dans les milieux éducatifs francophones, mais aussi
la « supervision » anglo-saxonne, où il est attendu du supervisor qu’il concilie à la fois
des compétences de contrôleur, celles d’évaluateur, celles d’auditeur surtout, entendu
dans ce dernier cas comme un adjuvant éducatif de l’enseignant, qui lui permet
résoudre qui se posent à lui. Ces problèmes qui peuvent être administratifs,
psychologiques ou didactiques. En ce sens, l’intervention du supervisor est plutôt
attendue que redoutée par le praticien, qui en espère une opportunité de résoudre ses
difficultés conjoncturelles, pédagogiques ou relationnelles.
160
les programmes, mais aussi à ce qui ne l’est pas formellement ; à ce qui
influence l’apprentissage et même bien souvent aussi l’enseignement.
- Le formel étant représenté par les institutions (structures, ressources et
contenus d’enseignement) consacrées à l’éducation ;
- le non-formel s’incarnant dans celles dont la fonction première est autre
que l’éducation, mais qui l’influencent de manière notable, sans
forcément en avoir la légitimité ou la qualification ;
- l’informel quant à lui évoquant toutes les influences incidentes qui
émanent des fréquentations (physiques ou virtuelles) d’un apprenant et
qui peuvent se situer en dehors de tout contexte institutionnel.
86
PERRENOUD, P. (2002), «Les conceptions changeantes du curriculum prescrit, hypothèses», in
Educateur, Numéro spécial : Un siècle d'éducation en Suisse romande , n° 1, (p. 48-52).
87
BOURDIEU, P., PASSERON, J.-C., (1970), La reproduction, éléments pour une
théorie du système d’enseignement, Paris, éd. de Minuit.
88
PERRENOUD, P., (1995), La fabrication de l’excellence scolaire, du curriculum aux
pratiques d’évaluations, Genève, Droz.
161
«développement du curriculum» qu’évoque D. Lehmann (1995, 19)89, traduisant
Robert K. Johnson, qui «inclut toutes les démarches adéquates de prise de décision
par tous les participants». Il précise aussi que les «participants» dont il est
question ici ne sont pas seulement l’enseignant et les apprenants, mais tous les
responsables qui gravitent autour de l’école, qu’ils soient ou non membres de la
corporation. Ce qui rappelle le concept de «communauté éducative» qu’on
retrouve dans les textes de loi camerounais sur l’éducation. La thèse
fondamentale de cette vision est que fatalement, les contenus d’enseignement
échappent largement aux prises des seuls pédagogues ou didacticiens, parce
que c’est la société qui façonne ses écoles. Ce qui amène C. Springer (1995,
125)90 à ne pas confondre les synonymes sus évoqués au concept curriculum.
Selon lui, même quand la «programmation didactique» s’appuierait sur une
analyse des besoins, pour aboutir à la proposition d’un programme ou d’un
dispositif de formation, elle n’en atteindrait pas le standard curriculaire, dont
l’intérêt est de trois ordres :
89
LEHMANN, D., (1995), «Langue, société et apprentissage dans le contenu des
méthodes de langue . De l’élaboration des syllabus au développement des
curriculums.», in, COSTE, D., LEHMANN, D., (coord.), (1995), Langues et curriculum ,
contenus, programmes et parcours, E.L.A., n° 98, Avril–juin, Paris, Didier Erudition. (P.
8-22).
90
SPRINGER, C., (1995), « curriculum en langues et formation continue des adultes »,
in COSTE, D., LEHMANN, D., (op.cit.), (P. 119-127).
162
didactique des langues.
Cette orientation centrée sur les valeurs est partagée par C. Depover, et B.
Noël (2005, 8),91 qui soutiennent que :
91
DEPOVER, C., NOËL, B., (2005), Le curriculum et ses logiques, une approche
contextualisée pour analyser les réformes et les politiques éducatives, Paris, l’Harmattan.
163
B.3.1 : L’élaboration des curricula
Il est généralement admis que la mise en place d’une élaboration des curricula
implique une «contextualisation»; cette prise en compte du contexte signifie, au
plan micro, l’adaptation du curriculum aux données précises de la classe et des
apprenants; mais au plan collectif et macrostructurel, elle se conçoit à plusieurs
dimensions :
En pratique, l’élaboration des curricula varie selon les cas et selon les traditions
en vigueur dans tel ou tel pays ; telle ou telle région. Dans tous les cas,
l’élaborateur réfère soit à un profil abstrait de l’élève, soit à «un profil
nostalgique» (c’est-à-dire la manière dont l’élaborateur ou le groupe
d’élaborateurs ont été eux-mêmes formés), soit encore à la logique interne et à
l’épistémologie de la science correspondant à la discipline en question. D’autres
voies, plus pédocentriques, ambitionnent de prendre en compte les besoins de
l’apprenant, ceux de son environnement, ses expériences ainsi que ses
représentations.
164
X. Roegiers92 distingue à ce sujet une logique de l’expertise et une logique
de projet et de participation. Dans le premier cas, le travail est confié à un ou
des expert(s) réel(s) ou supposé(s) ; dans le second, on fait appel à des
partenaires ayant des profils estimés complémentaires : des enseignants, des
inspecteurs, des experts, des directeurs d’écoles, des parents d’élèves, des
représentants d’instances éducatives. L’idéal serait d’associer les apprenants
eux-mêmes, de partir de leurs préoccupations et de leurs représentations.
Quelle que soit la logique adoptée, même si c’est la participative qui nous
séduit le plus, il n’en demeure pas moins que l’essentiel demeure dans la mise
en œuvre de ce que D. Coste (1995, 82)93 appelle les «dispositifs modulaires»,
qu’il définit lui-même comme:
Cette définition contient deux mots qui sont eux-mêmes difficiles à cerner : les
moyens et le plan, qui n’en rendent pas la compréhension facile.
92
ROEGIERS, X., (1997), Analyser une action d’éducation ou de formation, analyser
les programmes, les plans et les projets d’éducation ou de formation pour mieux les
élaborer, les réaliser et les évaluer, Bruxelles, De Boeck Université.
93
COSTE, D., (1995), « curriculum et pluralité », in, COSTE, D., LEHMANN, D.,
(Op.cit.), (P. 67-84.)
165
C. Montandon (2002, 1) signale l’usage de plus en plus récurrent du terme
dispositif, soit dans les textes officiels, soit dans la littérature éducative.
Dénonçant le discours ambigu sur ce mot, qui sert à désigner en France, tantôt
les TPE (travaux pédagogiques encadrés), soit les parcours diversifiés, soit
simplement des séquences et cours, mais aussi, dans le meilleur des cas, les
plates-formes de formation des enseignants, elle en vient à déplorer qu’il
signifie rarement dispositifs d’apprentissage. D’après elle, il conviendrait d’avoir
une approche globale qu’elle fait découler de la complexité, un dispositif
devenant, (page 35) :
94
DEPOVER, C., NOËL, B., (2005), Le curriculum et ses logiques, une approche
contextualisée pour analyser les réformes et les politiques éducatives, Paris, l’Harmattan.
166
B.4 : L’enseignement/apprentissage du français au Cameroun
Vu le contexte particulier dans lequel le français est entré au Cameroun, on
peut légitiment se demander comment cette discipline, devenue depuis lors
instrumentale, puisque servant de support linguistique aux autres, a survécu
aux élans d’indépendance et de reconquête des identités. En dehors de la
nécessité de promotion sociale qu’expriment peu ou prou les apprenants
camerounais, dont fait état Tabi-Manga (2000, op.cit.), on peut s’interroger sur
la qualité de la langue française qui aura été enseignée au Cameroun, et
d’après quels référents, d’après quelles «valeurs». Pour être plus concret, qui
aura élaboré les programmes de français au Cameroun ? La question des
programmes de formation des enseignants de français elle-même dépend
étroitement de l’élucidation de cette première énigme.
167
renseigne sur la mainmise des inspecteurs français sur la définition des
programmes :
Quant à savoir par qui étaient et:/ou sont élaborés les programmes de français,
nous avons une réponse en deux temps :
168
harmoniser les programmes entre les deux systèmes éducatifs, Monsieur Bikoï
informe que le débat peut en être politisé et rendu par ce fait même impossible.
Les propos de notre interlocuteur semblent plutôt relayer ceux de J.M.P., Tedga
(1988, 9)95 :
95
TEDGA, J., M., P., (1988), Enseignement supérieur en Afrique noire francophone, La
catastrophe?, Paris, l’Harmattan.
96
TABI-MANGA, J., (1983), «Méthode d’enseignement du français au Cameroun :état
de la question. » in Recherches ouvertes, Revue du département de français de l’Ecole
Normale Supérieure de Yaoundé, N°6, Janvier 1983, (P. 128-134)
169
approche :
C’est donc cette année que d’autres méthodes vont voir le jour, inspirées des
procédures du CLAD97 au bonheur également controversé. La première d’entre
elles a été réalisée par des universitaires de Yaoundé : «pour bien parler le
français», Il lui était notamment reproché d ‘être trop proche du contexte
sénégalais et pas assez de celui camerounais.
Cette méthode sera remplacée par une autre élaborée par l’IPAR98 qui
privilégiera l’adaptation à l’environnement camerounais et se souciera d’éviter
97
Centre de Linguistique Appliquée de Dakar
98
Institut de Pédagogie Appliquée à vocation Rurale de Yaoundé
170
le psittacisme colonial. Mais il lui sera reproché de manquer de rigueur
scientifique.
99
ESSONO, J.-M., (2003), «La faute de français», in MENDO ZE, G, (dir.), «Quel français
parlons-nous ?», Langues et communication, Revue de l’université de Yaoundé I, n°
03, octobre 2003,
(p. 217-235)
171
l’Indépendance, réalisée, à quelques absences près, par les plus grands
spécialistes de la question au Cameroun. La revue, au titre évocateur, «quel
français parlons-nous»100 qui sert de support à cette réflexion, traite à la fois de
la didactique et des usages. La double problématique est donc à la fois de
savoir quel français est parlé par les locuteurs camerounais; et quel français
mérite d’être enseigné. Véritable casse-tête pour les professeurs de français
camerounais.
Pourtant, pour F.N. Bikoï, corpus 1, le problème relève d’une autre complexité :
100
MENDO ZE, G., (op.cit.)
172
noire dite francophone est en guerre civile. Toutes les forces de
la vieille métropole sont mobilisées en une sainte croisade
contre ses langues et la tête de pont de cette croisade est la
notion fallacieuse de francophonie, sans oublier les élites
criminalisées d’Afrique qui tirent une rente de situation de leur
maîtrise du français à l’exclusion des forces vives. Tout est fait
pour que les langues du cru soient condamnées à mort.
101
CAPELLE, J., (1990), L’éducation en Afrique noire à la veille des indépendances,
Paris, Karthala.
173
mémoires on disait : on ne peut pas accepter, intégrer ce parler
dans l’enseignement. Aujourd’hui il faudrait voir, est ce que la
situation a évolué ? Comme le pidgin-english parlé, est-ce
qu’on a évolué vers un lexique ?
Le problème n’est pas simple avec le français tout seul, sans la nécessité de
l’introduction des langues, qui d’une manière ou d’une autre, invitées ou non, se
retrouvent dans la «salle des noces» didactique, sous la forme d’écarts de
toutes sortes, dont E. Biloa (2003)102 détient l’art de la description. Il nous est
difficile de faire mieux que cet auteur qui dresse sans complaisance l’état du
français au Cameroun.
102
BILOA, E., (2003), La langue française au Cameroun, Bern, Peter Lang.
174
l’emporte toujours.
175
Module C : Les Technologies
Par technologies, nous entendons tous discours et démarches, impliqués dans
la mise en oeuvre des finalités éducatives à savoir :
- ceux administratifs
176
commencer. Pour maîtriser le «technè» et partant, conserver la mainmise sur
ce «logos» dont il a de moins en moins l'exclusivité, tant son autorité s'est
diffusée. Le pôle énonciatif aujourd'hui est déjà présent sous la forme d'une
toile mondiale: le Web, Internet, le «dieu planétaire». Le défi auquel devront
faire face les enseignants en ce XXIe siècle se situe là : accepteront-ils d'être
submergés comme tout le reste de l'humanité, ou alors pensent-ils pouvoir
dompter la «bête», en en faisant un adjuvant? L'intégration des TIC ne relève
pas seulement de la technique, ni même de la technologie. Elle interroge au
contraire l'institution éducative dans son cœur : sa philosophie, sa structure,
ses dispositifs.
C.1 : L'intégration
Très souvent compris comme l’introduction, et interprété dans les faits par un
équipement tous azimuts, ce mot s’en distingue pourtant, que ce soit au sens
général, ou dans celui des TICE.
177
dans un but précis, en particulier pour produire du sens.
Mais il soutient que qu’en dehors de l’intégration des acquis, il existe d’autres
formes d’intégration :
178
s’auto-évaluer, communiquer, …) dans les disciplines différentes en vue de
garantir une maîtrise plus large et plus profonde de ces capacités
(transdisciplinarité, ou transversalité, c’est-à-dire intégration de contextes).
Roegiers, (page 24), tient cependant à préciser (et il le met en gras dans son
texte) que c’est l’apprenant qui est l’acteur de l’intégration des acquis, un
enseignant ne pouvant intégrer à sa place, ni un autre élève. Cette compétence
relève d’une démarche rigoureusement personnelle.
Si nous devions projeter cette disposition théorique sur les TICE qui nous
intéresse particulièrement, nous comprendrions que l’approche que nous avons
adoptée entretient une bonne proximité avec la vision de Roegiers, qui réclame
la mobilisation des connaissances interdisciplinaires, en vue d’une
transdisciplinarité intégrative. Dès lors, c'est bel et bien le didactique qui prime
le technologique, et en ce sens, les TIC apparaissent comme un soutien,
comme un outil susceptible de favoriser l'apprentissage et l'enseignement, ou
alors de leur nuire. C'est d'ailleurs l'objet de cette sous-partie qui voudrait
s'attacher à voir la part du réel et celle de l'imaginaire; la part du possible et
celle du fantasme dans l'exploitation didactique des TIC.
Mais déjà on peut savoir grâce à la mise au point suivante que :
Il y a deux filiations aux technologies à l'école. Celles qui
permettent d'accéder à des contenus, ou construire des
contenus et relèvent de l'information médiatisée, des savoirs
médiatisés, des machines à apprendre. Celles qui relèvent de
la programmation pour apprendre. Cette perspective est
importante car résolument différente de la première; On la doit
à Seymour Papert [Papert, 83]. Il est sans conteste le père de
l'utilisation originale de l'informatique à des fins pédagogiques,
en opposition aux théories mécanistes [Skinner, 69].
A. Jaillet (2004: 13)103
103
JAILLET, A., (2004), L'école à l'ère du numérique, des Espaces Numériques pour
l'Education à l'Enseignement à Distance, Paris, Budapest, Turin, l'Harmattan.
179
programmation adapté aux enfants, le Logo. De sa collaboration avec Piaget, il
mobilise les technologies pour que les enfants tout en investissant leur pouvoir
de création, de curiosité, cheminent dans la construction de leur intelligence.
Par la suite, il devient très difficile de faire l'historique des TICE, simplement
parce que tout est en chantier, les expérimentations se poursuivent ici et là
dans le monde, et comme le reconnaissait R. Guir104 (2002: 8)
104
GUIR, R., (dir.) (2002), Pratiquer les TICE, former les enseignants et les formateurs
à de nouveaux usages, Bruxelles, De Boeck Université.
180
marginalise et avec lequel elles entrent rapidement en
contradiction, ce qui accélère encore la déperdition.
Linard (1996: 112)105
Il est vrai que le contenu de cet ouvrage dont il a assuré la co-direction avec F.
Larose est de très bonne facture. Karsenti y déclare être conscient du fait que
les savoirs professionnels à la base de l’enseignement sont variés et qu’ils font
appel à la fois à des savoirs cognitifs, à des connaissances théoriques et
105
LINARD, M. (1996), Des machines et des hommes. Apprendre avec les nouvelles
technologies, Paris, l'Harmattan.
106
KARSENTI, T., LAROSE, F., (dir.) (2005), L'intégration pédagogique des TIC dans
le travail enseignant, Québec, Presses de l'Université du Québec.
181
disciplinaires, mais aussi à des compétences pratiques, à des «savoirs
d’action», ainsi qu’à des «habiletés et des compétences particulières» à la
profession enseignante. Aussi convient-il, au vu de cette «variété de savoirs
professionnels» de :
107
Lire à ce sujet l’excellente note de synthèse faite par ALBERO, B., (2004),
« Technologies et formation : travaux, interrogations, pistes de réflexion dans un
champ de recherche éclaté.», in, Savoirs, Revue, Université Paris X, 2004-5, Paris,
l’Harmattan, P.( 11-69).
108
PERAYA, D., VIENS, J., (2005), « Relire les projets « TIC et innovation
pédagogique » Y a-t-il un pilote à bord, après Dieu bien sûr… ? » in KARSENTI, T.,
LAROSE, F., (dir.), L’intégration pédagogique des TIC dans le travail enseignant,
Québec, Presses de l’Université du Québec (P.15-60)
182
Par ailleurs ces technologies sont souvent présentées comme
la meilleure occasion de repenser la pédagogie et les pratiques
des enseignants aux niveaux supérieur et universitaire.
Innovations technologique et pédagogique semblent donc unies
pour le meilleur et pour le pire.109
Le point sur lequel nous les rejoignons le plus, que nous avons formulé dans la
problématique initiale de cette thèse - où nous avons utilisé les termes
possibilité et pertinence - est dans leur démystification suivante que nous
citons entièrement :
109
PERAYA, D., VIENS, J., (op.cit. : 17)
110
PERAYA, D., VIENS, J., (op.cit. : 21)
183
La mystification est en effet très grande, et il existe de plus en plus de vendeurs
de formation «clés en main» et de logiciels «magiques», offertes comme
solution miracle à la dérive éducative de notre époque, et qui pourraient même,
selon certains «charlatans didactiques» dans un avenir certain remplacer les
enseignants.
Au terme de cette relecture, nous comprenons que l’intégration des TICE est
bien plus complexe que la simple adhésion technologique ou administrative.
Nous partirons, pour ce faire, du modèle proposé par l'Unesco, pour ensuite
évaluer la situation camerounaise et dans la troisième partie systémique,
proposer une autre démarche, sans pour autant prétendre «donner des leçons»
à quelque autorité que ce soit.
184
a été coordonnée par E. Khvilon, et M. Patru111.
Pourquoi avoir choisi de partir d’un modèle?
La preuve immédiate est que nous les citerons d’office pour justifier le choix du
modèle que nous avons fait. A la page 15, il est effectivement écrit que:
111
http://unesdoc.unesco.org/images/0012/001295/129538f.pdf (12/09/2006)
185
contextuelle certes, mais également en vue d’une critique qui interviendra dans
la troisième grande partie systémique. Les auteurs de cet impressionnant
référentiel avertissent d’ailleurs du danger qu’il y aurait à faire du «copier-
coller», à la page 10:
A la page 3, ils avaient déjà présenté leur document comme une contribution de
l'UNESCO en vue d'aider les États Membres à intégrer au mieux les Nouvelles
Technologies, comme le multimédia, le e-apprentissage et l'enseignement à
distance, dans leur système éducatif. le premier objectif étant de définir un
programme scolaire relatif aux TIC pour l'enseignement secondaire, qui
corresponde aux tendances prévalant actuellement au niveau international. Le
second étant de tracer les grandes lignes d'une formation professionnelle
permettant aux enseignants de réussir la mise en œuvre d'un tel programme.
Le second modèle décrit les différentes étapes du chemin emprunté par les
enseignants et les élèves, acteurs les plus impliqués dans les usages scolaires des
TIC, pour découvrir les usages de ces outils, apprendre à leur sujet, les comprendre et
se spécialiser dans le domaine. Ce second modèle s’intitule : les étapes de
186
l’enseignement et de l’apprentissage des TIC.
Modèle décrivant un continuum d’approches pour le développement des TIC dans les
établissements scolaires
L’approche “émergence”
Les établissements scolaires entamant le processus de développement des TIC
illustrent l’approche émergence. Ces établissements commencent par acheter, ou ont
reçu, quelques équipements matériels et des logiciels. En cette phase initiale, les
personnels de l’administration et les enseignants commencent seulement à explorer
les apports possibles et les effets de l’usage des TIC pour la gestion de leur
établissement et pour l’enseignement.
Les pratiques pédagogiques traditionnelles, centrées sur l’enseignant, sont encore la
norme dans les établissements qui en sont à cette phase. Les programmes
d’enseignement comportent uniquement le renforcement de quelques pratiques
élémentaires de ces technologies, mais il y a une sensibilisation progressive aux
usages des TIC. Le programme proposé ici aide, si on le souhaite, à évoluer vers
l’approche suivante.
L’approche “application”
Les établissements scolaires dans lesquels s’est développée une nouvelle
compréhension des apports possibles des TIC à l’apprentissage illustrent l’approche
application.
Dans cette deuxième phase, les personnels de l’administration et les enseignants
mettent ces technologies au service de tâches déjà couramment accomplies dans les
domaines de la gestion et de l’enseignement.
Les enseignants dominent ici largement l’environnement éducatif. DU PPEMEN
187
Dans les établissements scolaires se trouvant à cette phase, les programmes
d’enseignement sont adaptés afin de faire une plus large place à l’emploi des TIC dans
les différentes disciplines, à l’aide d’outils et de logiciels spécifiques. Cette adaptation
des programmes facilite, si on le souhaite, la progression vers l’approche suivante.
L’approche “intégration”
L’approche “transformation”
Les établissements qui utilisent les TIC pour repenser et renouveler l’organisation
scolaire de façon créative en sont à l’approche transformation.
Ces technologies deviennent partie intégrante, bien que non visible, des travaux
personnels quotidiens et des pratiques professionnelles. Les programmes scolaires
sont maintenant centrés sur l’élève et touchent à des domaines appartenant au monde
extérieur à l’école. Les TIC sont enseignées dans les secteurs techniques comme une
discipline à part entière et sont intégrées dans tous les domaines de l’enseignement
professionnel. Les établissements scolaires sont devenus des centres d’études pour
leur communauté.
188
Le Modèle UNESCO en tableaux.
Tableau page 30 :
Indicateurs pour définir le stade de développement des établissements scolaires dans le processus
d’intégration des TIC en fonction des quatre approches pour le développement des TIC et de huit
caractéristiques des établissements
189
Tableau page 31 (suite du tableau de la page précédente)
190
Tableau page 46 : Description et justification des neuf unités d’alphabétisation aux TIC
dans un programme de formation des enseignants
191
Tableau page 47 : (suite du tableau de la page précédente)
192
IMPORTANCE DE LA FORMATION DES ENSEIGNANTS
Selon les auteurs du référentiel, les études réalisées dans le monde sur l’innovation en
éducation montrent qu’un grand nombre d’innovations dans ce domaine échouent
finalement en raison de l’insuffisance des efforts et des ressources consentis pour la
préparation des enseignants à l’innovation.
Ce chapitre met tout d’abord en relation la formation des enseignants avec les quatre
approches pour le développement des TIC à l’école, identifiées dans le chapitre II.
Ensuite il développe un programme de préparation des enseignants, suivant point par
point le programme scolaire pour les élèves décrit dans le chapitre précédent.
Ces quatre approches fournissent une structure pour la formation des enseignants.
Émergence
Dans cette approche, l’accent est mis sur les fonctions techniques et les usages des
outils issus des TIC, ainsi que sur le besoin de mieux connaître l’impact de l’ensemble
des TIC. Cette approche implique souvent pour les enseignants l’usage personnel
d’outils : pratique du traitement de texte pour la préparation de documents de travail,
recherche de ressources éducatives sur des cédéroms ou Internet, communication par
courrier électronique avec famille ou amis.
Application
Dans cette approche, les professeurs utilisent les TIC à des fins professionnelles, se
centrant sur le perfectionnement de l’enseignement de leur discipline, afin d’enrichir
leur pédagogie d’une panoplie d’applications des TIC. Cette approche implique donc
souvent qu’ils utilisent ces outils pour enseigner connaissances et savoir-faire propres
à leur discipline, commencent à modifier leurs méthodes d’enseignement et se servent
des TIC pour faciliter leur formation personnelle et professionnelle.
Intégration
Dans cette approche, les professeurs intègrent les TIC dans tous les aspects de leur
vie professionnelle afin d’améliorer l’apprentissage des élèves et leur gestion de celui-
193
ci. Les TIC les aident à devenir plus actifs, plus créatifs, plus à même de stimuler et de
diriger l’apprentissage des élèves, à prendre en compte une variété de styles
d’apprentissage et d’activités pour atteindre leurs objectifs éducatifs. Pour les
professeurs, l’approche intégration implique souvent l’association de savoirs et savoir-
faire de différentes disciplines dans le cadre d’un enseignement basé sur la réalisation
de projets. Ils utilisent eux-mêmes les multimédias ou les mettent à la disposition des
élèves pour qu’ils présentent leurs travaux. Les enseignants peuvent choisir de
participer à des groupes de formation professionnelle présents sur le Web, afin
d’améliorer leurs pratiques ou pour expérimenter différentes méthodes optimisant
l’impact des TIC sur l’apprentissage des élèves et la gestion de celui-ci.
Transformation
Les professeurs et les autres membres du personnel de l’établissement doivent être
convaincus de la valeur des TIC dans leur vie personnelle et professionnelle. Bien que
les approches précédentes ne doivent pas être nécessairement hiérarchisées, elles
illustrent les étapes, menant à un accroissement de l’assurance et des compétences,
par lesquelles passent de nombreux professeurs avant d’être à même de transformer
leurs pratiques d’enseignement et l’apprentissage de leurs élèves.
Lorsque l’approche intégration mène à l’approche transformation, professeurs et
élèves s’attendent à ce que les méthodes changent constamment pour s’adapter à
leurs objectifs personnels d’apprentissage. Les professeurs espèrent également
recevoir de l’aide pour élaborer de nouvelles méthodes d’enseignement. Les TIC ne
sont plus un problème pour les enseignants, leur principale préoccupation étant
désormais de mieux comprendre les processus d’apprentissage.
L’alphabétisation aux TIC n’est pas vraiment différente pour les enseignants et pour les
élèves : les concepts de base de la compréhension et des usages sont, pour
l’essentiel, composés des mêmes éléments. Pour le niveau élémentaire de
l’alphabétisation, les unités du programme pour les élèves présentées au chapitre IV
194
conviennent donc parfaitement aux enseignants. Comme il a déjà été dit, les unités
relatives à l’alphabétisation correspondent au Passeport de compétences TIC
international et européen. Bien sûr, les usages concrets des TIC seront différents pour
les enseignants et les élèves. Le tableau 5.1 présente une courte description de
chacune des 9 unités Alphabétisation aux TIC, assortie d’un bref commentaire
expliquant la raison de leur inclusion dans un programme de formation d’enseignant.
Pour être considéré comme alphabétisé aux TIC, un enseignant devrait s’être
familiarisé avec les 9 unités de ce module.
195
complémentaires sont à prendre en compte :
• Au tout début, des facteurs d’ordre psychologique ou affectif peuvent jouer un rôle
critique. L’un des objectifs majeurs est de diminuer l’appréhension des enseignants
devant les ordinateurs et de montrer aux novices qu’ils sont capables de les utiliser.
L’assurance est aussi importante que les compétences.
• Les enseignants passent la majeure partie de leur vie professionnelle chez eux.
Nombre des aptitudes de bases qui doivent être acquises à ce stade initial sont utiles
dans la vie personnelle. Assurance et compétence peuvent être acquises en réalisant
de façon autonome un travail à l’aide de matériels d’apprentissage soigneusement
préparés et, si possible, d’interactions à distance par l’intermédiaire d’outils appropriés
de communication.
• Les enseignants, comme tous les autres apprenants, doivent avoir l’occasion de faire
des erreurs. Le mieux est à cet égard d’organiser des formations par petits groupes
d’enseignants de même niveau.
• Lors des premiers contacts avec les TIC, beaucoup d’enseignants rencontrent de
sérieuses difficultés motrices. Les aptitudes les plus basiques (pointer, cliquer avec la
souris, la déplacer) doivent être bien maîtrisées avant de poursuivre la formation : la
maîtrise est une question de confiance et d’estime de soi.
• Les débutants doivent non seulement être capables d’utiliser outils et environnement
issus des TIC, mais doivent aussi comprendre les principes de base relatifs à
l’architecture des systèmes, la gestion de fichiers et la transmission du courrier
électronique. Il est donc important de leur faire acquérir des représentations exactes
des systèmes informatiques et des outils issus des TIC qu’ils auront à utiliser dans leur
école et non de faire des exposés théoriques sur ce qui pourrait se produire.
Après avoir acquis savoirs et savoir-faire de base relatifs aux TIC, les professeurs
peuvent utiliser avec assurance nombre d’outils génériques et spécialisés susceptibles
d’être mis au service de l’enseignement de leur discipline. Ce sont souvent les
conditions matérielles et l’insuffisance des ressources qui limitent les possibilités
d’usage dans leur enseignement, l’intégration n’est encore que partielle.
196
les enseignants gagnent en assurance et en capacités techniques et cherchent des
façons d’améliorer leur enseignement. SEIGNANTS
Parmi ces compétences générales, on trouve les suivantes :
► Aptitude à décider pourquoi, quand, où et comment les outils issus des TIC
contribueront aux objectifs d’enseignement et à choisir, dans une panoplie d’outils, les
plus appropriés pour stimuler l’apprentissage des élèves, c’est-à-dire :
• choisir les applications des TIC et une pédagogie parmi celles qui sont
recommandées pour une discipline spécifique ;
• expliquer les raisons de ces choix ;
• mettre en valeur le contenu des productions des élèves ;
• planifier une séquence d’enseignement en ayant décidé au préalable quand et
comment les TIC seront utilisées au mieux.
► Capacité à gérer un contexte d’apprentissage centré sur la classe en recourant au
travail en équipe pour atteindre les objectifs d’enseignement, c’est-à-dire :
• être capable de décrire des difficultés susceptibles d’être rencontrées lors d’usages
des TIC pour atteindre les objectifs planifiés d’une leçon ;
• comprendre les différences entre les élèves du point de vue de leurs compétences en
TIC ;
• avoir prévu des stratégies pour faire face à ces différences au cours de la séquence
d’enseignement ;
► Capacité à décider quand des présentations multimédias seront utiles pour la classe
entière ou pour un groupe, c’est-à-dire ;
• diversifier les types de présentation ou les matériels de cours en fonction des
objectifs et des méthodes d’enseignement ;
• analyser une présentation afin de vérifier sa lisibilité, sa structure, sa cohérence avec
les objectifs et de voir si elle est adaptée aux élèves.
► Capacité à analyser des multimédias éducatifs propres à une discipline particulière,
c’est-à-dire :
• évaluer cédéroms, sites Web, bandes audio et vidéo, supports de cours ;C
• évaluer les activités proposées aux apprenants et leur contribution à la réalisation des
objectifs du cours ;
• analyser la contribution spécifique des outils TIC à l’apprentissage individuel.
Capacité à aider les élèves à trouver, comparer et analyser les informations issues
d’Internet ou d’autres sources spécifiques à une discipline, c’est-à-dire :
• apprendre aux élèves à effectuer des recherches simples ;
197
• aider les élèves à organiser, critiquer, synthétiser et présenter des informations à
l’aide d’outils technologiques.
► Capacité à choisir et à mettre en oeuvre les outils appropriés pour communiquer
avec des enseignants ou des élèves, en fonction de ses objectifs propres, c’est-à-dire :
• évaluer des outils de communication facilitant la collaboration dans des situations
pédagogiques.
► Capacité à utiliser les TIC de façon de plus en plus efficace en choisissant des
actions de formation adaptées et en participant aux nouveaux développements afin
d’augmenter ses compétences professionnelles, c’est-à-dire :
• participer activement à des groupes travaillant sur l’usage des TIC ;
• utiliser des outils issus des TIC (forum, téléconférences, tableaux d’affichage
électronique – babillard –, courrier électronique) pour collaborer à l’amélioration de
l’enseignement, de l’apprentissage et de la gestion des processus d’apprentissage.
Être capable d’utiliser les TIC dans son enseignement et de mettre au service de sa
discipline les compétences évoquées ci-dessus exige une formation spécialement
adaptée. La façon dont cette formation va être organisée dépend largement du style
d’apprentissage des enseignants concernés, ainsi que de leur discipline et des
applications prévues. Il existe deux possibilités :
1- Des séquences de formation, séminaires et ateliers portant sur les applications
utilisées dans une discipline particulière. Il est parfois recommandé d’inclure ces
ateliers TIC dans des conférences organisées par la communauté disciplinaire afin
d’accroître les possibilités d’y participer.
2- Constitution de groupes d’enseignants en vue de la réalisation d’un but précis.
Dans ce cas, quelques enseignants (d’écoles différentes mais de la même discipline, le
nombre optimal paraissant être entre 6 et 12) peuvent décider de travailler ensemble
(éventuellement sous la conduite du coordinateur TIC) sur l’intégration d’un aspect
particulier des TIC dans leur discipline. Ils peuvent communiquer par courrier
électronique, mais il apparaît important d’organiser également des rencontres en face
à face. L’intérêt de ces réseaux d’enseignants est prouvé, mais il est nécessaire d’être
attentif à certaines conditions:
• pas trop de différences entre les participants au départ,
• désir égal de participer de la part de tous,
• esprit d’ouverture au partage d’expériences,
198
• investissement de tous les membres du groupe,
• travail orienté sur la tâche,
• partage des responsabilités, mais une personne doit se charger de l’organisation.
A ce stade, la formation des enseignants se fixe des objectifs plus précis et des
priorités un peu différentes de celles du stade précédent. Les aspects
complémentaires à prendre ici en considération sont les suivants :
• L’accent est mis sur l’usage d’outils génériques ou spécialisés pour améliorer
l’enseignement dans une discipline particulière.
• Les enseignants ont besoin d’être capables d’évaluer l’apport des outils issus des TIC
pour l’acquisition des savoirs et savoir-faire disciplinaires.
• Les enseignants ont besoin de repenser leur pédagogie aussi bien que d’acquérir
davantage d’assurance et de compétence dans le maniement des outils issus des TIC.
• Les enseignants ont besoin de repenser leur pédagogie aussi bien que d’acquérir
davantage d’assurance et de compétence dans le maniement des outils issus des TIC.
• Les enseignants de la même discipline peuvent travailler ensemble dans leur école,
pour mettre en commun idées et ressources d’apprentissage.
A ce stade, les enseignants intègrent pleinement les TIC dans tous les aspects de
leurs pratiques professionnelles, pour améliorer leur propre apprentissage et celui de
leurs élèves. Ils utilisent les TIC pour gérer ces apprentissages. Ils les utilisent
également pour permettre à leurs élèves, qui travaillent sur des projets personnels,
d’évaluer leurs acquis. Les enseignants partagent leurs expériences pour résoudre les
problèmes rencontrés, il leur est devenu naturel de collaborer. Les TIC deviennent un
stimulant pour trouver de nouveaux modes d’enseignement.
Il existe des compétences et des aptitudes communes à toutes les approches visant à
intégrer les TIC dans l’apprentissage et la gestion de celui-ci. La formation s’efforcera
d’accroître l’assurance et les compétences des enseignants et s’appuiera sur les
connaissances antérieurement acquises en matière d’usage des TIC pour
l’enseignement.
A ce stade, les professeurs seront incités à collaborer pour développer l’enseignement
199
de leur discipline et rechercher des méthodes innovantes d’enseignement.
Enseignants et élèves seront encouragés à faire des expériences en vue d’identifier
des styles et des parcours d’apprentissages différenciés.
L’intégration transversale des TIC, pour améliorer l’apprentissage et sa gestion,
conduit les professeurs à mieux comprendre comment transformer leurs pratiques
d’enseignement et les apprentissages de leurs élèves. Les compétences générales
requises à cette phase sont les mêmes que celles nécessaires lors de la phase
application, mais sont ici renforcées.
Parmi ces compétences générales, on trouve les suivantes :
► Aptitude à comprendre pourquoi, quand, où et comment les outils issus des TIC
contribueront à la réalisation des objectifs d’apprentissage ; choix, dans une large
gamme de ces outils, des plus appropriés pour stimuler l’apprentissage des élèves :
• choix d’outils issus des TIC et de méthodes pédagogiques intégrant les TIC dans
l’ensemble de l’enseignement ;
• choix et recommandations d’outils issus des TIC et de méthodes d’enseignement
appropriés aux objectifs d’apprentissage individuels des élèves ;
• accent mis sur la qualité des productions des élèves et sur la contribution aux
objectifs individuels d’apprentissage et au niveau des résultats ;
• élaboration d’un programme d’enseignement prévoyant divers supports TIC et
diverses méthodes d’enseignement, à mettre en oeuvre selon les besoins et au
moment opportun ;
• choix d’outils et de méthodes d’enseignement permettant à l’enseignant comme à
l’élève de gérer son propre apprentissage.
► Gestion de l’ensemble de l’école, d’une classe, de groupes d’élèves en vue de la
réalisation d’objectifs d’apprentissage :
• gestion d’environnements d’apprentissage favorisant l’usage de différents outils issus
des TIC et de différentes méthodes d’apprentissage ;
• compréhension des différences entre élèves selon leur degré de compétence dans
l’utilisation des TIC et préparation de différentes stratégies pour gérer ces différences à
mesure que les élèves progressent ;
• gestion des difficultés pouvant survenir lors de l’usage des TIC, de manière à
minimiser leurs conséquences sur les objectifs prévus de la leçon ;
• création de situations permettant à l’élève de gérer son propre apprentissage ;
• introduction dans les programmes d’enseignement de médias basés sur les
technologies ou non (livres, vidéo) ;
200
• évaluation du niveau de chacun des élèves, lors des travaux menés en collaboration.
► Intégration de présentations multimédias dans des séquences d’enseignement
s’adressant à la classe entière, à des groupes d’élèves ou à des élèves
individuellement, et apprentissage des façons d’accroître l’accès aux programmes
éducatifs :
• contrôle du fait que les programmes éducatifs mettent en oeuvre les médias les plus
appropriés, que les élèves peuvent apprendre quelles que soient leurs capacités, leurs
besoins spécifiques ou leur style préféré d’apprentissage ;
• diversification des types de présentation, de documents et d’autres médias en
fonction des principaux objectifs et des méthodes d’enseignement choisies ;
• analyse d’une présentation pour vérifier qu’elle est lisible, structurée, cohérente avec
les objectifs d’enseignement et adaptée aux élèves ;
► Analyse d’environnements d’apprentissage multimédias :
• utilisation d’espaces et d’environnement d’apprentissage basés sur le web ;
• intégration des cédéroms, des sites web, des bandes vidéo et audio, des logiciels
d’apprentissage, des supports pédagogiques ;
• évaluation de l’apport des différentes activités pour les élèves et pour les objectifs du
cours;
• analyse de la contribution spécifique des outils issus des TIC à l’apprentissage
individuel des élèves.
► Assistance aux élèves pour la recherche d’information sur Internet et dans les
environnements d’apprentissage de l’école, ainsi que pour l’analyse et la synthèse des
informations recueillies :
• assistance aux élèves, seuls ou en groupes, pour la réalisation de recherches
complexes sur Internet ;
• assistance aux élèves pour la gestion, la critique, la synthèse et la présentation de
leurs processus d’apprentissage et des productions réalisées avec des outils issus des
TIC.
► Utilisation de différents outils de communication pour coopérer avec des collègues,
des élèves et des communautés éducatives extérieures à l’école.
►Usage des TIC de façon plus experte, participation régulière aux actions de
formation, implication dans des actions de recherche et développement :
• participation et contributions aux groupes de discussion sur l’usage des TIC ;
• usages des outils de communication (forum, téléconférences, tableaux d’affichage
électronique -babillard-, courrier électronique) pour contribuer à l’amélioration de
201
l’enseignement, de l’apprentissage et de la gestion des processus d’apprentissage.
Les types d’activités décrits dans cette section consacrée à la formation des
enseignants ne peuvent être menés à bien dans le cadre de sessions de formation,
séminaires ou ateliers de courte durée. De telles rencontres peuvent être organisées
pour attirer les enseignants à des séances d’information sur l’intégration des TIC dans
l’ensemble des activités éducatives, mais ne sont pas suffisantes pour leur permettre
d’acquérir toutes les compétences attendues. Le travail en équipe, dans l’école même,
avec une direction pédagogique interne est beaucoup plus approprié pour le type de
formation proposé ici.
Un bon point de départ pour la formation des enseignants est la réunion d’un groupe
de personnes enthousiastes de l’école. Plus tard, ce groupe pourra s’élargir à d’autres
groupes d’enseignants de différentes écoles et même de différents districts, provinces
ou pays.
Lorsque des réseaux d’enseignants de différents établissements peuvent être
constitués, comme cela a été évoqué plus haut dans le cadre de l’approche
application, ces réseaux devraient impliquer, dans chaque école concernée, des
enseignants de différentes disciplines. En effet, travailler de façon intégrée est une
grande nouveauté pour la plupart des enseignants et il est donc particulièrement
important qu’ils puissent partager leurs expériences, se mettent d’accord sur des
objectifs et des travaux communs, s’investissent et participent pareillement et enfin
qu’ils puissent se soutenir et s’entraider quand les choses ne vont pas comme elles
devraient. Il est souvent profitable d’impliquer les élèves dans le travail d’une
communauté éducative. Ils peuvent souvent prendre la responsabilité d’activités et
possèdent fréquemment l’expertise en TIC nécessaire pour des projets particuliers.
202
enseignants doit être organisée non pour des individus mais pour des équipes, locales
ou élargies, et en tenant compte du co-apprentissage.
203
C.2.1.1 : Le discours officiel
A lire les propos de P. Lolo, ancien IGP112 de l’éducation nationale, du temps où
ce ministère intégrait encore la partie secondaire et celle primaire113, les TIC
sont en très bonne voie d’introduction au Cameroun. Cette introduction «s'inscrit
dans le cadre de la stratégie sectorielle de l'éducation, mise en oeuvre par le ministère
de l'éducation nationale depuis trois ans.»
A côté de ces initiatives, des Centres de ressources Multimédia ont été créés,
que Monsieur l’IGP Lolo définit et justifie comme:
L'objectif à terme est d'en installer dans les 127 lycées d'ici
2007. Les centres ainsi créés permettront aux élèves et aux
professeurs:
− d'accéder à l'Internet, et de partager des ressources
pédagogiques placées dans les plates-formes;
− d'accéder à des logiciels éducatifs, dans les matières de base;
− de créer et de mettre en ligne des ressources pédagogiques;
112
Inspecteur Général de Pédagogie
113
Les deux composantes appartiennent depuis 2004 à deux ministères distincts : le
ministère de l’éducation de base (MINEDUB) et celui des enseignements secondaires
(MINESEC), et M. Lolo appartient désormais au ministère des enseignements
secondaires.
204
− de participer à des forums et d'organiser des programmes
d'enseignement à distance.
En somme, tout est presque bien dans le meilleur des mondes, surtout si nous
savons que ce discours est censé mettre en exergue l’implication personnelle
du chef de l’État. Le côté positif de ce projet national est la volonté
gouvernementale de faire des TIC, et conséquemment des TICE, un défi
majeur à relever par les acteurs camerounais du développement.
114
http://spip.cm.refer.org/cnf/ (30/07/2006)
205
auprès des populations camerounaises, et des enseignants.
206
Centre Africain de Recherche en Éducation (ROCARE)115 a conduit des
recherches dans plusieurs écoles pionnières des pays d'Afrique occidentale et
centrale (Bénin, Cameroun, Ghana, Mali et Sénégal). L'enquête a porté en tout
sur plus de quarante mille élèves et environ trois mille enseignants. Des parents
ont également été approchés. Huit établissements secondaires camerounais
étaient concernés. L'enquête conduite localement a montré que des efforts ont
été consentis par les pouvoirs publics (mise à disposition d'ordinateurs,
connexions à Internet ). Les chercheurs ont également découvert que les
élèves utilisaient bel et bien l'outil informatique, mais que des progrès devaient
être faits pour ce qui est de la formation des enseignants eux-mêmes. Dans la
majorité des cas, les professeurs n'arrivent pas encore à dispenser leur matière
via les TIC. Résultat, les élèves apprennent plus Word, Excel, etc. que la
géographie ou les mathématiques à l'aide des ordinateurs. C’est pour cette
raison qu’après évaluation, une deuxième phase du projet s'attellera à corriger
les lacunes constatées, et donc à amener les enseignants à enseigner au
moyen des TIC.
Pour notre part, ce résultat n’est pas malheureusement très surprenant. A nos
côtés, nous avons M. Pothier (op.cit, 80) qui avertit :
115
Source : Cameroon Tribune ( journal officiel camerounais) dont l’extrait figure sur le
site de l’APC : http://afrique (08/10/2006)
207
dispositif sont de répondre au mieux à des demandes variées
et d’individualiser le travail grâce à la flexibilité du système ainsi
qu’à la variété des supports (utilisation des TICE) et des
modalités travail personnel, tutorat, séances en groupe).
Nous remarquons tout de suite les termes de ces dispositions textuelles dont la
lucidité et la générosité sont remarquables. L’enseignement supérieur se voit
ainsi confier une responsabilité dans le «développement de la Nation» et dans
le «progrès de l’humanité».
De plus, l’impératif éthique est présent dans le texte, même si nous pouvons en
dire qu’il est souvent compris comme un ensemble de normes de conduite,
alors que l’enseignement supérieur aurait les ressources pour mieux
comprendre ce concept, le mettre en œuvre intellectuellement et surtout le
réaliser. On est donc en droit d’attendre des personnels de l’enseignement
supérieur qu’ils prennent la hauteur épistémologique nécessaire, pour piloter
208
une intégration technologique et écologique des TIC dans le système
universitaire, qui rejaillirait sur le pays et l’humanité.
116
Voir en Annexe, la Loi d’orientation de l’enseignement supérieur ; accessoirement la
loi d’orientation de l’éducation nationale…
209
Cameroun se pose en des termes socioéconomique et socioculturel. Il faudra
effectivement que les animateurs de cette structure se sentent valorisés
financièrement et qu’ils aient les coudées franches pour réaliser la révolution
nécessaire. Le mot «soutien», quant à lui, orienterait vers une double valence :
pouvant se comprendre comme un soutien à apporter en vue de l’atteinte de
missions prédéfinies ; mais aussi comme aptitude à se mettre à la hauteur des
défis technologiques, qui sont parallèlement des défis humains.
117
Ce texte démontre tout au moins que la réalité n’est pas encore conforme aux
standards internationaux, ni même à ceux du Cameroun, et vient donc à point pour
recadrer l’action administrative et académique.
210
à la distance, que nous ne confondons pas, mais que nous pouvons assimiler à
cette préoccupation d’autonomie.
Les enseignants pensent ensuite que la fixation des notions est facilitée par les
TICE ; de même que pour un certain nombre d’entre eux, minoritaire
cependant, il est question de souscrire à une orientation générale. Cette
dernière attitude pose un réel problème de motivation, étant donné que
l’appropriation se veut distincte du simple suivisme. Il est également évoqué la
possibilité d’accéder à plusieurs approches.
Il nous est ensuite venu l’idée de savoir où ceux qui se déclaraient aptes à
intégrer les TIC avaient été formés, et nous en avons eu les résultats suivants,
à propos desquels il faut distinguer :
- ceux, majoritaires qui, par initiative personnelle, ont appris dans le
tas, ou qui ont reçu une formation TIC ordinaire, comme tout individu vivant en
notre siècle devra le faire. Ce type de formation relève, dirions-nous, de
l’«alphabétisation» aux technologies ;
- ceux, par initiative personnelle, qui ont pu recevoir une formation
aux TICE sont moins nombreux ;
- de même que ceux qui ont été institutionnellement formés.
Les enseignants révèlent pour 72% qu’ils prennent des initiatives personnelles
qui ne sont d’ailleurs pas orientées vers un usage
d’enseignement/apprentissage.
14% seulement d’entre eux affirment que ces initiatives aient une portée
didactique.
Les initiatives institutionnelles ne représentent que 14% des réponses.
En nous basant sur le modèle UNESCO que nous venons de présenter, il serait
trop tôt de parler d’intégration dans le cas du Cameroun. Nous nous souvenons
que l’intégration au sens dudit référentiel intervient au troisième niveau dont le
pays est encore loin. Le système éducatif camerounais, pris dans sa globalité,
211
et à l’exception de quelques initiatives isolées, se trouve encore dans le
meilleur des cas à la phase «émergence».
La réponse la plus évidente est que les enseignants interrogés ne savent pas
quelle devrait être cette formation. Cet aveu trahit un manque d’informations sur
l’utilité des TIC dans la didactique des disciplines ;
Beaucoup moins nombreux sont, parmi les enseignants enquêtés, ceux qui
pensent à la pratique de classe, comme utilité possible;
Les plus exigeants, encore moins nombreux sont ceux qui veulent que la
formation s’adapte aux contraintes disciplinaires ;
212
R. Guir (2002, 10)118, comme A. Belibi précédemment, dit le plus grand bien
des TIC dans la formation des enseignants :
Dans ce cas, nous nous sommes demandé quelles étaient les perspectives de
formation des enseignants? A cette question, les enquêtés ont répondu qu’ils
envisageaient des formations selon la distribution suivante:
Nous y lisons une forte motivation de la part des enseignants dont 54%
118
GUIR, R., (dir.) (2002), Pratiquer les TICE, former les enseignants et les formateurs
à de nouveaux usages, Bruxelles, De Boeck Université.
213
envisagent d’aller en formation à titre personnel ; quand d’autres, plus de 40%,
espèrent une formation institutionnelle, une minorité ne se prononçant pas.
L’enquête dénote que pour 97% des enquêtés, il revient aux experts en TIC
d’assurer la formation des enseignants, tout au moins selon la vision que les
répondants en ont, sur laquelle nous reviendrons plus loin. Pour A. Belibi, qui a
déjà suivi des formations en TICE, et à qui nous avons, demandé, au vu de sa
pratique, quel profil était idéal dans la formation des enseignants:
119 PREMIERE REUNION DES COORDONNATEURS NATIONAUX DE L’INITIATIVE DE L’UNESCO POUR LA FORMATION DES
ENSEIGNANTS EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE (TTISSA) (BREDA, Dakar, 7-9 mars 2006) Rapport final , Point 4: Formation des enseignants
et nouvelles technologies, réalités et Attentes.
214
infrastructures disponibles. La réunion a relevé les exigences
pour la mise en place d’une formation basée sur les TIC, à
savoir: un contexte global favorable, l’intégration des TICE dans
les nouveaux programmes de formation y compris les
approches pédagogiques, et la formation des ressources
humaines. La réunion a enregistré quelques expériences
relatives à l’utilisation des TICE dans les différents pays.
L’attention a été attirée sur le fait que l’utilisation des TICE ne
permet pas de résoudre les problèmes structurels des
systèmes éducatifs.
La dernière phrase de cette évaluation nous oriente vers une piste essentielle :
celle des systèmes, qui fera l’objet de notre troisième grande partie qui portera
sur la conception systémique, et véritablement didactique, d’une formation des
enseignants.
215
216
TROISIEME PARTIE
LA FORMATION AUX TICE :
UNE APPROCHE SYSTEMIQUE
217
218
TROISIEME PARTIE
LA FORMATION AUX TICE :
UNE APPROCHE SYSTEMIQUE
1. Introduction
Le modèle UNESCO aurait pu convenir comme démarche applicable dans
l’intégration des TICE dans la formation des enseignants camerounais, si nous
n’avions pas choisi d’aborder cette question du point de vue de la systémique.
C’est sur la base des exigences de cette approche que nous allons récuser ce
modèle, arguant de sa linéarité et de sa directivité. Nous allons adopter
l’approche que nous avions déjà annoncée depuis la problématique, sur
laquelle nous nous sommes étendu dans la première partie systémique :
l’approche systémique, qui se veut globale, et surtout qui se préoccupe du
sens, la téléologie dont nous avons déjà parlé, qui vise à intégrer l’action dans
une visée significative globale. Après la synthèse technologique qui nous
permettra de proposer un modèle d’intégration, qui se voudra contextuel, nous
poursuivrons notre propos, réflexivement, en examinant la portée éthique d’une
telle entreprise.
Pour l’Africain, qui est loin d’avoir une vision fragmentaire, encore moins
fractionniste, de l’univers, les problèmes qui se posent à lui bénéficient toujours
d’une vision globale qui peut s’étendre à des considérations métaphysiques. Et
120
Les travaux des savants de la période faste gréco-latine comme Platon et
Pythaghore ; et même des auteurs comme J. Boëhme, ou Comenius, vont dans le
même sens de la globalité.
219
pour citer l’une des références africaines :
Pour n’avoir pas compris qu’il fallait adopter une approche intégrative
globalisante, divers élaborateurs de programmes scolaires seront peut-être
passés à côté d’une piste importante. Malheureusement, nous ne pouvons pas
en dire plus dans le cadre de cette étude, et ce sujet devrait faire l’objet d’une
réflexion plus approfondie (recherche-action éventuellement). Seulement, nous
pouvons relever que les pédagogies convergentes dont A. Belibi, (corpus 5),
rappelle la nécessité et la notion de «partenariat linguistique» qu’évoque R.
Chaudenson (2001)122 semblent nous orienter vers une telle démarche plurielle.
Nous pouvons aussi regarder comme un signal important de notre hypothèse,
l’aveu de J. Capelle, (op.cit, 301), au sujet de la politique linguistique à adopter
dans les colonies :
Avant d’aller en Afrique, j’avais partagé le vœu exprimé dans
les milieux de l’Unesco par mainte personnalité soucieuse du
respect de l’homme et demandant que l’enseignement soit
organisé, pour l’Afrique noire en langue vernaculaire. Cela
paraissait évidemment juste ! Certaines personnes voyaient
même dans la diffusion de l’anglais ou du français une action
colonialiste, c’est-à-dire attentatoire à la personnalité culturelle.
Le contact avec la réalité, le problème des moyens de
121
CAPELLE, J., (1990), L’éducation en Afrique noire à la veille des indépendances,
Paris, Karthala.
122
CHAUDENSON, R., CALVET, L.-J., (2001), Les langues dans l’espace
francophone, de la coexistence au partenariat, Paris, Institut de la Francophonie,
l’Harmattan.
220
communication indispensables au développement de l’Afrique
et les réactions des intéressés eux-mêmes, m’ont révélé la
faiblesse des positions de principe tenues pour évidentes, dans
la solitude d’une méditation lointaine.
Comme pour indiquer que les problèmes africains se règlent au contact de leur
réalité, et non in vitro. Toute théorisation qui ne prendrait pas en compte la
spécificité des populations africaines devrait un jour ou l’autre faire l’aveu de sa
méprise, ou des limites de son applicabilité.
Autre exemple : qui aurait pu prévoir qu’à proposer aux Africains d’adapter leurs
programmes aux réalités locales en traduisant les textes occidentaux, on
pourrait rencontrer des résistances comme la suivante relatée par J. Chapelle
(op. cit, 304)123 :
123
Citant Ndaw Alassane, professeur de philosophie, étude publiée en 1956 dans le
journal Paris-Dakar, cité par CAPELLE, page 304.
221
élèves provenant de collèges ruraux, il faudrait aller jusqu’à
calculer le taux d’échec qui nous a paru assez élevé.
222
Avec toute technologie sophistiquée, le problème crucial de la
formation des personnels devient un butoir de plus en plus
formidable.
Une fois cela dit, commencent les véritables difficultés de mise en place d’une
telle formation. Habituellement, le politique en charge de l’éducation se
décharge la conscience en mettant à la disposition des enseignants des
équipements plus ou moins performants ; dans l’implicite attente d’une
amélioration subséquente du rendement scolaire. C’est plutôt l’échec des
innovations qui vient à surprendre et la cause ne peut s’expliquer que par des
recherches qui révèlent, selon Linard (op. cit), que :
Pour cet auteur, et pour nous aussi, la plupart des projets se contentent
d'accompagner l'équipement des établissements en matériel de formations
superficielles à court-terme, sans aucune prévision de suivi ni de soutien sur le
terrain. Traités en simples exécutants, les enseignants deviennent les
«consommateurs» ou les «spectateurs» muets et supposés dociles,
d'innovations conçues et organisés sans eux.
Pour ne pas reproduire ce schéma, dans lequel on reconnaît la situation
camerounaise, nous allons préconiser une attitude différente, plus moderne :
4. L’ingénierie de la formation
Le mot ingénierie connote un univers technique, et beaucoup d’enseignants, à
223
sa seule évocation, se détourneraient, pensant qu’il interpelle des compétences
exclusives d’experts et de professionnels techniciens. Ce n’est pas la vision
qu’expose Pothier (op.cit, 80) :
124
Capturer signifierait dans ce sens : enregistrer une image, une scène, et par
extension ici, faire un état des lieux.
125
LE BOTERF, G., (1999), L’ingénierie des compétences, Paris, éd. d’organisation.
224
simplement d’être capable de faire un geste, une opération, mais d’un
agencement de savoir-faire qui sont complémentaires. La
professionnalisation qui en découle permet, selon cet auteur (page 78), de
mieux répondre aux sollicitations aléatoires de l’environnement :
Agir avec compétence au sens de cette nouvelle vision, est une résultante de la
formation, de l’entraînement, des boucles d’apprentissage, des situations
professionnalisantes, relevant du savoir agir d’une part, mais aussi du contexte
incitatif, de la reconnaissance, de la confiance, induisant le vouloir agir, qu’on
associerait à un contexte facilitateur, à un réseau de ressources, à une
organisation du travail qui produiraient le pouvoir agir d’autre part.
Appliquant sa vision au champ éducatif, Le Boterf dessine les champs des
compétences attendues des enseignants :
- La maîtrise des savoirs à enseigner ;
225
- L’adaptation à l’évolution des métiers ;
- L’éthique professionnelle.
Nous avons ensuite été édifié par ce théoricien de la formation sur les difficultés
qui procèdent d’une approche d’experts. En effet, quand la dimension sociétale
n’est pas prise en compte dans les projets, on s’expose à cette situation bien
connue des pays du Tiers Monde :
226
l’éducation nationale, aurait tout intérêt à s’arrimer au modèle de Le Boterf
(page 252) qui se décline ainsi :
126
DUMONT, P., (1981) Le français langue africaine, Paris, l’Harmattan.
127
CHAUDENSON, in, CHAUDENSON, R, CALVET, L.-J., (op.cit)
227
l’émergence (Unesco, op. cit.), et dans le cadre strict de la formation des
enseignants, ceux-ci n’y ont même pas accès dans leur école de formation.
Selon A. Belibi (corpus 5), «Tout est encore à faire» matériellement et
didactiquement. Parler donc d’intégration dans ce cas serait exagérément
futuriste.
Nous n’en avons pas pour autant baissé les bras, attendant opportunément les
jours fastes où, enfin, les futurs enseignants seront admis à disposer de
moyens informatiques au sein de leur institution. Nous pensons que le fait qu’il
n y ait encore rien de fait ne soit pas forcément négatif. Nous pouvons en cela
convertir un manque en atout. Et, dans cette compréhension, un travail
universitaire de notre genre peut n’en avoir que plus d’efficacité. En effet,
lorsqu’un processus est déjà enclenché, il devient plus difficile de convaincre
les différents acteurs de renoncer à leurs «acquis» ; et surtout il n’est pas
besoin de solliciter un supplément d’investissement aux autorités dont les
réticences sont prévisibles, devant l’absence de résultats initiaux tangibles.
128
PEETERS, H., CHARLIER, P., (1999), «Contributions à une théorie du dispositif»,
in WOLTON, D., (dir), Le dispositif, entre usage et concept, paris, CNRS éditions.
228
ces deux auteurs (page 18), qui disent rendre compte des lectures qu’ils ont
faites et dont ils préviennent ne pas nécessairement partager les vues :
Nous sommes là dans une logique autonomisante, avec une centration sur
l’individu «porteur d’une intentionnalité propre» et qui apparaît comme «figure
centrale du dispositif». On n’aurait plus besoin d’orienter l’individu, qui s’en
chargerait lui-même dans un dispositif chargé de le soutenir, de l’encadrer, de
baliser son parcours en quelque sorte. Ce qui amène nos auteurs à résumer
leurs lectures en ces termes (op.cit, 19) :
Pour marquer leur lucidité face à cette vision du dispositif, ils dénoncent par le
dispositif une vision du monde, qui participe à la conception d’un modèle, d’un
idéal de société ; et de ce fait présente, soutiennent-ils, un caractère normatif.
Nous ne partageons pas la méfiance de ces deux auteurs sur les dispositifs,
parce qu’à ce que nous y comprenons, ils représentent surtout la mise à
disposition des ressources. Et celles-ci doivent être dûment identifiées.
229
21)129, et l’ensemble des rédacteurs de ce numéro de NEQ (Notions En
Questions) consacré à ce sujet.
Partant du sens général dont elle signale l’étymologie délicate sous la forme
d’un doublet populaire de «resurgir avec l’idée de se rétablir, se renouveler, de
ressusciter et de secourir» en ancien et moyen français, l’auteur - qui reconnaît
s’inspirer pour la cause du Dictionnaire historique de la langue française de Robert
(1994) - signale que le sens moderne s’est déplacé sur les moyens employés,
et qui signifierait : «Moyens de faire face à une situation et/ou capacités inhérentes à
cette personne.» Elle ajoute que ces moyens peuvent être de nature pécuniaire
(argent), de nature psychique (possibilités d’action) ou être constitués de
moyens matériels (hommes et réserves d’énergie comme le pétrole).
129
POTHIER, M., (2004), «Approche de la notion de ressources», in DELEVOTTE, C.,
POTHIER, M., La notion de ressources à l’heure du numérique, revue Notions En
Questions, N°8, juin 2004, ENS éditions, (p. 15-21).
230
l’apprentissage qui est nouveau et redouté, autant des
formateurs que des apprenants, pour que les ressources
prennent toute leur place dans l’apprentissage et la formation.
Nous avions compris jusqu’à présent que le dispositif était la construction d’un
environnement, ou en nous permettant la répétition, la mise à disposition de
certaines ressources. Seulement, nous comprenons aussi que cela ne suffit
pas, et qu’il faut se mettre d’accord sur l’idée de ressource. Nous en tenant à
l’approche sous-jacente à cette recherche, nous aurons une vision plus
globalisante de cette notion.
130
DEVELOTTE, C., (2004), Plurilinguisme et multiplicité des ressources, in,
DEVELOTTE, C., POTHIER, M. (op. cit.), (pp 9-14)
231
bien que du non-dit. Le dispositif lui-même, c’est le réseau
qu’on peut établir entre ces éléments.
Pour nous, quitte à nous reprendre, l’intégration n’est pas seulement une étape
de l’introduction des TIC dans l’enseignement/apprentissage, comme l’indiquent
le modèle UNESCO et bien d’autres auteurs dans Karsenti, T. et Larose, F.,
(2005). Intégrer systémiquement et didactiquement les TIC, c’est révolutionner
la conception et la gestion des curricula. En ce sens, il ne suffit donc pas
d’apporter de petits aménagements techniques ou de prendre des décisions
131
DEMAIZIERE, F., (2004), «Ressources et guidages : Définition d’une co-
construction.», in DEVELOTTE, C., POTHIER, M., (op.cit.), (pp 81-103).
232
administratives, de former quelques enseignants/agents d’appui aux TIC,
comme c’est le cas au Cameroun actuellement ; encore faut-il, pour retrouver le
standard défini par Foucault, que le «réseau soit tissé», que des liens existent
entre les différents éléments du système. Cette idée rejoint d’ailleurs ce que F.
Demaizière (op. cit., 94) appelle le principe de cohérence, que nous élargissons
au contexte curriculaire global.
Nous sommes donc bel et bien en présence d’un double niveau de complexité :
celui des TICE et celui de la formation qui requièrent tous les deux une
refondation curriculaire.
132
PERRENOUD, P. (1994), La formation des enseignants entre théorie et pratique,
Paris, l’Harmattan.
133
L’expression est de lui-même.
233
Une goutte d’eau d’approche par les ressources et le guidage
dans un océan d’enseignements frontaux et prescriptifs.
Demaizière (op.cit., 99)
Par contre, une telle aptitude ne s’acquiert pas du jour au lendemain et il est
dommage que les théoriciens des TICE ne situent l’autonomie que comme
résultat. A l’instar de Linard elle-même (1998) et de Demaizière (2004). Nous
avons pourtant une compréhension différente du concept de l’autonomie. Nous
pensons que la didactique n’a pas eu besoin d’attendre les TIC pour poser
l’exigence de l’autonomie, qui pour nous s’élabore à travers un processus
continu, sur lequel nous reviendrons supra.
A ce niveau, nous voulons présenter notre vision de l’intégration systémique
des TICE. Nous devons a priori préciser que ce modèle ne donne qu’une image
relativement linéaire de l’idée que nous en avons, qui est plus dynamique, plus
interactive pour épouser le langage technologique. Il y aurait, si nous devions
représenter la nature des échanges à réaliser, un tissu d’interactions sous la
forme d’une immense toile. Il nous suffit par conséquent de présenter les
relations de manière successive, tout en étant conscient par avance que la
faiblesse de ce modèle tient à sa linéarité iconographique. Seule la notion de
134
LINARD, M., (1998, op.cit)
234
feed-back, introduite en fin de parcours, permet d’entrevoir les rétroactions
ultérieures qui sont pourtant essentielles pour réguler le système entier depuis
la phase initiale jusqu’à celles successives.
235
9.2 : MODELE SYSTEMIQUE D’INTEGRATION DES TICE
236
9.3 : Commentaire du modèle
Parfaitement conscient des ambiguïtés et limites de ce modèle, qui n’a aucune
prétention d’exhaustivité, nous devons au lecteur de ce travail des explications,
susceptibles de l’aider à mieux comprendre l’intention sous-jacente à cette
maquette.
Les différentes entrées verticales :
- Par instances d’intégration, nous confirmons l’option selon laquelle
l’intégration des TIC est différente de leur simple insertion, parce qu’elle
réclame une prise en compte globale des paramètres, qui s’inscrit dès le début
de la conception curriculaire. L’instance se comprend ici comme la nature de
l’intégration ;
- Les théories sollicitées doivent être comprises comme des notions qui
sont souvent étudiées par différentes disciplines et théories, et qui peuvent
éclairer la phase d’intégration concernée;
- Nous parlons ensuite de correspondance éthique dans la mesure où
nous savons que l’éthique, si elle est comprise comme une réalité
transcendantale, peut ensuite se décliner sous plusieurs formes. On parle
d’éthique appliquée, en rapport avec des domaines et métiers précis ;
- Les institutions et acteurs désignent les responsables et les
principaux acteurs, sans que toute autre possibilité soit exclue ;
- Quant aux actions à mener, non seulement elles ne sont pas
exclusives, linéaires, mais elles peuvent être répétitives en fonction des
environnements.
Il faut dire que la philosophie générale de ce dispositif s’inspire de tout ce
que nous avons vu sur le développement des curricula, associé à la notion
centrale de dispositifs-ressources, et à celle d’ingénierie. Pour résumer cette
orientation, nous reconnaissons avec Peraya et Viens (op.cit., 54) :
237
maîtriser l’intégration pédagogique d’un outil ou la médiatisation
dans ses formes primaires, réduite à la production d’artefacts
pédagogiques, ne correspond pas à maîtriser la médiatisation
d’un système d’apprentissage dans ses formes plus complexes,
à savoir un système qui, d’une part, intègre notamment les
médiations sémio-cognitives et humaines et, d’autre part, prend
en compte de nombreux facteurs humains et contextuels.
238
personnage charismatique de l’œuvre de Cheikh Hamidou Kane (1961, 47)135:
135
KANE, C., H., (1961), L’aventure ambiguë, Paris, Julliard.
239
dynamique existentielle aléatoire. Ils ne sont d’ailleurs pas les seuls à faire le
constat de cette frénésie technologique. J. P. Voisin (op. cit, 15) en rend
compte en des termes frondeurs :
Du côté de l’Afrique, les populations africaines ont tout attendu de cette «école
étrangère»; elles ont cru au développement par l’éducation occidentale, mais
près d’un demi-siècle après les indépendances, le bilan reste douteux : la
misère semble avoir définitivement choisi son territoire et ses victimes.
Embarqués de force dans l’aventure occidentale, essentiellement déroutante,
c’est avec beaucoup de scepticisme que les enseignants africains,
240
camerounais en particulier, accueillent désormais les errances scolaires
proposées par l’école occidentale. Notamment, du fait des méthodes et
supports technologiques qui leur sont proposés tel jour comme des
«panacées», et dont l’efficacité se trouve démentie quelque temps après, alors
que le processus n’en était encore qu’à l’expérimentation dans beaucoup de
cas. Mais il existe un autre drame plus incisif que celui socioéconomique, c’est
le drame socioculturel.
136
MINYONO-NKODO, M., F., (2003), «Quel enseignant pour quel français dans
l’Afrique francophone ? Quelques propositions pour la formation des formateurs à
l’école normale supérieure», in, MENDO ZE, (dir.), Quel français parlons-nous?
(op.cit.), (P. 37-55).
241
aussi traduire la demande pressante des apprenants camerounais vis-à-vis de
l’institution scolaire. Et ceux qui incarnent le mieux cette institution, parce qu’ils
ont toujours été considérés par leurs élèves comme des modèles de probité
morale et comme des messagers de cette civilisation occidentale, qui leur
paraît si lointaine à la fois spatialement et temporellement, c’est les professeurs
de français. Ainsi donc enseigner le français au Cameroun a toujours été
considéré comme devoir se mettre dans la peau de l’honnête homme classique.
Le français au Cameroun n’est donc pas seulement une affaire de statut
sociolinguistique, c’est également un enjeu éthique majeur vers un meilleur
confort existentiel.
242
Les résultats font apparaître les valeurs au premier rang des motivations des
enseignants camerounais et, de ce fait, semblent confirmer l’ouverture que
nous faisons dans ce travail vers cette donnée qualitative essentielle de
l’éducation. Autant le dire, nos interlocuteurs considéreraient leur métier comme
un devoir, mieux comme une mission. Peut-on penser pour autant qu’ils soient
marginaux ? Nous ne le pourrions pas, et ce d’autant que si nous considérons
le point de vue d’autres auteurs qui tablent sur l’éthique comme enjeu
d’éducation, la transmission des valeurs apparaît comme un impératif universel.
9.3.2 : Décontextualisation
137
PATURET, J., B., (2003), De la responsabilité en éducation, Ramonville Saint-
Agne, Erès.
243
Pour lever toute équivoque au sujet des valeurs, dont il peut facilement être dit
qu’elles soient sujettes à polémique, il vaut mieux préciser qu’en éducation,
elles représentent d’abord toute disposition psychique et morale à agir
conformément aux valeurs universelles, que l’on attribuait à la culture des
«humanités»138 qui, elles-mêmes, se déclinent en des termes connus des
éducateurs du monde: le bien, le beau et le vrai. Nous le disons expressément
pour faire contrepoids aux valeurs sociétales actuelles qui retiennent
prisonnières les consciences de la jeunesse et, malheureusement aussi, de
certains acteurs éducatifs notables. La question de la professionnalisation des
enseignements, qu’analyse F.N. Bikoï, (2003),139 est de plus en plus présente
dans les débats. Krishnamurti (op. cit., 3), qui reste le pédagogue favori de R.
Barbier140, prend position pour introduire comme valeur suprême l’exigence de
la quête du sens de la vie :
Or, quel est le sens de la vie ? Quels sont les mobiles qui nous
font vivre et lutter ? Si nous n’avons été élevés que pour obtenir
des honneurs, occuper de bons emplois, être efficients,
dominer le plus possible, nos vies sont creuses et vides. Si
nous n’avons été instruits que pour être des hommes de
science, des universitaires plongés dans des volumes, ou des
spécialistes de diverses connaissances, nous contribuons à la
destruction et à la misère du monde.
138
Pour dire que la question n’est pas banale, il est notable que l’Université de Paris X
Nanterre ait ouvert cette année 2006-2007 une filière Humanités.
139
BIKOÏ, F., N., (2003), « Problématique de l’adaptation de l’enseignement du français
aux exigences de la société moderne. », in, MENDO ZE, (dir.), op.cit., (p 73-82)
140
voir le cours le cours qu’il en donne à Paris 8 :
http://educ.univ-paris8.fr/LIC_MAIT/weblearn2002/KenligneP8/Kindex.html
(14/09/2006)
141
MORIN, E, (1999 b), Le défi du XXIe siècle, relier les connaissances, Paris, Seuil.
244
humaine, pour en atténuer la polysémie.
142
Lire BARBEY, G., (1971), L’enseignement assisté par ordinateur, Paris, Casterman.
143
Nous avons publié un article correspondant : «Comment peut-on être
enseignant ?» Education 2000, Revue camerounaise d’éducation, N°001, décembre
1998. Dans cet article, nous avions adressé aux autorités de l’éducation
camerounaise, à l’occasion de la Journée des enseignants, qui était célébrée au
Cameroun pour la première fois, la requête utopique suivante : «S’il vous plaît, chères
autorités en charge de l’éducation nationale, suscitez-nous une nouvelle génération
d’enseignants voyants, de véritables prophètes, «guides éclairés» ayant reçu eux-
mêmes la lumière de la connaissance, pour être capables de la transmettre».
245
montrer la voie aux hommes, de veiller sur leur conscience avec toute la
bienveillance dont il peut se rendre capable. De plus, en tant que chercheur
émergent, nous avons un devoir d’amélioration des connaissances. De toutes
ces compétences, les deux dernières sont de loin les moins évidentes à
assumer. Et pour cause :
Prétendre veiller sur les consciences humaines relève d’une impossibilité
ontologique, tant chaque être se sent libre de disposer de la sienne ; pourtant
éduquer signifie bien «conduire» rappelle R. Barbier (2002)144, professeur de
sciences de l’éducation à l’Université Paris 8:
144
BARBIER, R., (2002), «le futur de l’éducation», in,
http://www.barbier-rd.nom.fr/futureducCourt2times.PDF (22/10/2006)
246
Après le défi qu’il reconnaît à l’éducateur que nous sommes, le troisième défi
est celui de la recherche dont D. Wolton dit (2000, 15)145 :
Le ton est donné, et cette vision nous repositionne dans l’annonce que nous
avons faite dans la problématique, lorsque nous disions que la thèse serait
audacieuse. Toute légitimité scientifique et académique revêtue, nous allons à
présent entrer dans ce qui va constituer l’apport décisif de ce travail de
recherche. Nous nous appuierons sur des données du terrain, nous
cheminerons avec des auteurs et théoriciens, mais nous nous retournerons
vers notre intérieur, espérant y trouver quelque ressource pour apporter notre
modeste contribution.
Partant de l’expérience vécue auprès des jeunes depuis 14 ans que nous
enseignons, mais plus directement en évoquant notre expérience en TICE,
nous nous posons quelques questions troublantes pour considérer la relation
entre ces technologies et l’éthique. Professeur de lettres modernes
vacataire/contractuel en lycées et collèges au rectorat de Créteil depuis février
2002, nous avons souvent travaillé avec des élèves des tranches d’âge allant
de 10 à 18 ans. Compte tenu de l’orientation générale de l’éducation nationale
145
WOLTON, D., (2000), Internet, et après ? Une théorie critique des nouveaux
médias, Paris, Flammarion.
247
française, arrimée à la «mondialisation éducative»146, et de la recherche que
nous avons entreprise depuis le DEA en 2001, nous avons intégré les TIC à
nos enseignements. De ce fait, nous avons initié un certain nombre de projets
avec nos élèves, qui malheureusement, ne pouvaient se tenir sur des
fréquences annuelles comme nous l’aurions souhaité. Notre statut de vacataire
ou de contractuel nous soumet en effet à une précarité didactique préjudiciable
à la continuité d’un bon nombre de ces projets. Au-delà des atteintes
technologiques - assez remarquables par ailleurs au vu de l’engouement de la
majorité des élèves - nous voulons nous arrêter sur deux principales
observations, qui seraient d’ailleurs d’excellents points de départ de recherches
sur les TICE, si nous avions eu à travailler sur le système éducatif français:
- Nous avons remarqué qu’il existait une catégorie d’élèves, surtout des
plus jeunes, allergiques à l’écran des moniteurs. Ayant un jour remarqué une
élève qui s’était mise en marge du groupe, nous sommes allé vers elle, dans
l’intention de lui faire part de notre désappointement, quand elle nous a fait part
de la gêne éprouvée lorsqu’elle devait travailler pendant plus d’une quinzaine
de minutes devant un écran d’ordinateur. Elle n’a pas été la seule à nous
signaler cette intolérance.
- Nous avons également remarqué qu’il y avait un fort décalage, dans la
motivation, mais aussi dans les performances, entre le travail des élèves réalisé
sur l’ordinateur et celui réalisé sur papier ou dans un livre . Tel qui réalisait un
sans faute dans un exercice de conjugaison numérisé, n’arrivait pas à
reproduire les mêmes performances sur papier quelques jours après. Cette
expérience a également été vérifiée auprès des élèves auxquels nous donnions
des cours particuliers. A telle enseigne que bon nombre de familles de ces
élèves, enchantées par les prouesses initiales de leurs enfants, en sont venus à
nous demander, après des déconvenues scolaires de ne plus utiliser les TICE
avec eux. Nous avons une fois de plus dû revenir aux méthodes traditionnelles
d’enseignement, malgré l’enthousiasme des jeunes et le nôtre. Ne pouvant
146
L’expression est de nous et pointe le nouvel ordre éducatif mondial qui fait le
consensus sur le recours aux TICE.
248
prétendre apporter des réponses aux observations faites, il nous vient au
contraire des interrogations :
147
BRUNET, P., J., TIEMTORE, O., VETTRAINO-SOULARD, M., C., (2002) Les
enjeux éthiques d’Internet en Afrique de l’Ouest, vers un modèle éthique d’intégration,
Paris, l’Harmattan.
249
Si déjà ces populations enquêtées, au sujet d’un usage ordinaire d’Internet qui
semble faire l’unanimité, sont conscientes de la nécessité de la prise en compte
de la dimension éthique, nous pouvons soutenir qu’il en faudrait bien plus dans
le domaine éducatif. Mais d’où vient-il que ces questions écologiques ne soient
pas considérées par les autorités de l’éducation ? Pourquoi le consensus est-il
réalisé entre ces autorités et les opérateurs économiques, et si facilement, sur
des produits délicats comme les TIC (hardware et software confondus) ? Pour
des raisons qui ont été traitées par certains auteurs.
Pour D. Wolton (op.cit., 32), qui vogue à contre courant de cette orientation,
c’est :
Tout simplement parce que l’idée centrale est qu’il s’agit là d’un
progrès. L’idéal, pour ne pas dire l’idéologie, du progrès tient
lieu de réflexion évitant que ne soit posée la question simple :
toutes ces techniques de communication, pour quoi faire ?
Ceux qui le dirigent sont aussi sots ; mais au lieu d’obéir à des
hommes, ils obéissent à des principes, lesquels ne peuvent
être que niais, stériles et faux, par cela même qu’ils sont des
principes, c’est-à-dire des idées réputées certaines et
immuables, en ce monde où l’on n’est sûr de rien, puisque la
lumière est une illusion, puisque le bruit est une illusion.
148
MAUPASSANT (DE), GUY, Le horla, disponible en ligne à l’adresse électronique
suivante :
http://books.google.fr/books?id=RKtSHN_N4Q4C&pg=PA135&lpg=PP2&ots=dX0T6uQ
l8_&dq=le+horla&psp=1&sig=buVyMwDfk5eb5YvITXXp2t3Xb3k (13/07/2006)
250
Et l’illusion nouvelle risque d’avoir pour nom, en nous autorisant la répétition,
les Nouvelles Technologies, ou plus commodément dit «la société globale de
l’information», concept que dénonce l’une des voix les plus autorisées149,
professeur à Paris 8, A. Mattelart (2006, 46)150 comme :
Le corollaire de cette vision technocratique est qu’il est suscité une espèce
d’hypnose collective face aux machines, un effet d’«accoutumance» qui fait
obstacle à la réflexion. Aussi dénonce-t-elle, page 45 :
149
L’intéressé est professeur de sciences de l’information et de la communication à
Paris 8 et président de l’Observatoire français des médias.
150
MATTELART, A., (2006), «Le web permet la démocratisation» in Le Monde de
l’éducation (op.cit.), (p. 44-47)
251
l’avenir soit des plus sombres. L’humain dispose-t-il de ressources suffisantes
pour s’en tirer face à ce qui ressemble à un «Frankenstein» moderne? Y a-t-il
un pilote à bord ? Pour reprendre l’expression de Peraya et Viens (op. cit.). Où
pouvons-nous trouver le supplément d’âme nécessaire ?
Notre monde a tellement basculé dans ce que Houssaye (1999, op.cit.) appelle
la «sécularisation», pour désigner la laïcisation, que la notion d’âme, pourtant
centrale dans les discours éducatifs antiques, semble avoir disparu des
préoccupations didactiques modernes. E. During (1997, 9)151le constate pour le
déplorer :
151
DURING, E., (1997), L’Âme, Paris, Flammarion.
152
BOSSI, L. (2003), Histoire naturelle de l’âme, Paris, Puf.
252
corpse). Les philosophes semblent croire qu’il s’agit là d’un
sujet passé à l’histoire, juste bon pour les anthologies. Les
psychanalystes, quant à eux, n’osent plus même nommer
l’objet de leurs études [...]
- la substantialité ;
- l’immatérialité ;
- l’indestructibilité ;
- l’immortalité.
Passant ensuite en revue diverses théories sur l’âme qui transitent par Aristote,
Saint Augustin, Descartes, Leibniz et sa monadologie, le critique nous livre des
extraits d’auteurs plus récents, dont Souriau (pages 59-68) qui soutient, à la
page 63 :
Car avoir une âme, posséder une âme, c’est posséder des
richesses que l’on n’a pas ; c’est vivre positivement certaines
vies irréelles ; c’est être plus grand que soi, plus beau et plus
riche ; c’est constituer un univers substantiel et être soi-même
cet univers […]
253
Ces mots nous remettent en conscience ceux de Coménius, éducateur sur
lequel nous revenons infra, qui recommande aux éducateurs d’«éveiller chez les
élèves la source cachée de l’intelligence» (Chap. XVIII, fondement V) afin qu’ils
soient capables de penser par eux-mêmes, de «tout tirer de leurs propres
ressources.»153
Nous pouvons jeter le pont entre les deux pensées pour comprendre qu’en
l’homme, il y aurait une ressource intérieure qui est l’âme, qui rendrait les
apprenants autonomes et créatifs.
Souriau (op.cit., 63), quant à lui, va jusqu’à réfuter l’idée que des considérations
sur l’âme puissent être considérées comme des thématiques au-delà de
l’ordinaire :
153
COMENIUS, rééd.,(1992), La grande didactique, ou l’art universel de tout enseigner
à tous, Paris, Klincksieck, traduction de Bosquet-Frigout, M., F., Saget, S., Jolibert, B.,
page 149.
254
souhaite une connaissance pouvant se hausser jusqu’à celle du
singulier.
Pourtant, selon Descartes, qu’explique During (op. cit., 208)155, il existe une
partie du cerveau où l’âme «exerce ses fonctions plus particulièrement», qu’il
désigne : la pinéale, considérée comme le «siège de l’âme» qui reçoit les
mouvements des esprits, des animaux et les lui transmet.
154
Les thèses de Bossi peuvent être mieux comprises en lisant son interview au
journal
Le point (disponible en ligne) : http://www.lepoint.fr/edito/document.html?did=138866
(28/10/2006).
155
Une fois de plus, il convient d’appeler à une grande réserve au sujet de Descartes,
à qui les critiques ne pardonnent pas d’avoir situé l’âme dans la pinéale. Bossi le lui
reproche également dans l’article du point ci-dessus référé. Pour mieux comprendre la
pensée de Descartes, il vaut mieux tenir compte du dualisme qui l’imprègne, et qu’on
peut retrouver dans d’autres courants de pensée gnostique, dont il a fait partie, qui
distinguent plusieurs âmes en l’homme : l’âme naturelle qui donne son animation au
corps physique et dont le siège se situe dans l’hypophyse ; et l’âme divine qui aurait
effectivement son siège dans la pinéale. Classer Descartes comme le précurseur d’un
courant matérialiste est donc loin de rendre compte de la complexité de sa pensée.
255
juridique - nous pouvons, par transfert, nous interroger sur le silence de
l’institution scolaire, et des milieux pédagogiques sur des questions aussi
«vitales».
Tout l’intérêt des courants cognitivistes actuels nous oriente complètement vers
la dimension physique de l’homme. Il ne s’agit plus que de neurones et de
ressources connexionnistes. Le cognitivisme psychologique en est associé à un
physicalisme fonctionnaliste qui établit une séparation entre le matériel
biologique constituant le système nerveux (le «hardware» de l'ordinateur) et les
opérations mentales qui sont exécutés (les «programmes» ou «software»).
L’humain n’est plus assimilé qu’à une vulgaire machine.
256
Ci-dessous,
dessous, nous avons reproduit, aux fins d’illustration de la nécessité
d’associer plusieurs disciplines un schéma intitulé : l’
l’Hexagramme
cognitiviste, proposé
posé par Karim Ndiaye, d’après Keyser, S.J., Miller, G.A., and
Walker, E., Cognitive Science (1978).
L’auteur en fait la description suivante :
tir de Wikipédia156.
Schéma et commentaires tirés
156
http://fr.wikipedia.org/wiki/Sciences_cognitives (28/10/2006)
257
est capable de recevoir, de stocker, de traiter et de transmettre l’information.
Quoiqu’on puisse en dire, les hommes sont plus que de simples machines à
traiter des informations.
En linguistique, nous pouvons comprendre le combat mené par des innéistes
comme Chomsky, dont nous nous sentons souvent proche, pour démontrer que
les hommes ne réagissent pas mécaniquement à des impulsions, comme le
postulaient les comportementalistes (behavioristes), sous l’inspiration de
Skinner. De là qu’on en soit rendu aujourd’hui à considérer, a contrario, que les
hommes posséderaient (J. Fodor, 1983)157 des «modules» qui fonctionneraient
automatiquement, inconsciemment, très rapidement, en parallèle et
indépendamment les uns des autres, s'opposant en cela au système central
conscient, contrôlé mais aussi lent et séquentiel. Le fonctionnement de ces
modules serait tout à fait inné, tout au plus influencé par quelques paramètres,
mais ne résulterait pas d'un apprentissage.
Nous partageons une certaine affinité avec Chomsky lorsqu’il postule l’innéisme
des potentialités linguistiques, mais nous pouvons nous en écarter pour nous
orienter vers le concept de l’âme et non des «modules», qui, à proprement
parler, ne figurent pas explicitement dans son œuvre, mais dans celle de J.
Fodor (op.cit) qui prétend en rendre compte.
9.3.2.5 : La transdisciplinarité
Parce que l’homme n’est pas réductible à une machine, des voix, plutôt
scientifiquement autorisées, s’élèvent de plus en plus, pour réclamer une
ouverture épistémologique et une mise en relation des différentes
connaissances disciplinaires. S’élevant bien au-dessus de la pluridisciplinarité
et de l’interdisciplinarité158, la transdisciplinarité rejoint philosophiquement la
systémique.
157
FODOR, J., (1983), La Modularité de l'esprit : essai sur la psychologie des facultés,
Les Éditions de Minuit, Paris.
158
La pluridisciplinarité selon B. NICOLESCU, http://nicol.club.fr/ciret/vision.htm
(14/07/2006), concerne l'étude d'un objet d'une seule et même discipline par plusieurs
disciplines à la fois ; L'interdisciplinarité a une ambition différente de celle de la
pluridisciplinarité. Elle concerne le transfert des méthodes d'une discipline à l'autre.
258
Selon son promoteur, Nicolescu, B. qui a fondé le CIRET,159dont le texte
fondateur figure en annexe :
159
A ce titre, nous ne sommes pas surpris de retrouver comme membres de ce Centre
International de Recherche et Études Transdisciplinaires, visible en ligne :
http://nicol.club.fr/ciret/assoc.htm (05/11/2006), des grands noms, plutôt familiers,
intellectuellement parlant, comme René Barbier, Michel Cazenave, René Berger, et
Edgar Morin.
259
transdisciplinaire réévalue le rôle de l'intuition, de l'imaginaire,
de la sensibilité et du corps dans la transmission des
connaissances.
Tout en étant utilisateur des TIC, en nous préoccupant de les associer à nos
enseignements, nous nous montrons cependant très sensible à l’écologie et
finalement à l’humanisme de cette profession de foi, rédigée sous la férule d’un
physicien. Nous ne pouvons qu’y adhérer, parce que nous sommes d’abord
éducateur ; par tempérament ensuite et par observation du réel. Il est vrai que
ce que nous avons dit de l’âme plus haut aurait pu passer pour une diversion,
mais le jeu valait peut-être la chandelle si nous considérons ce qui vient d’être
dit, qui est encore plus modéré que ce qui va suivre, qui pourra l’éclairer.
Pour expliciter la pensée de Steiner dont il se veut le disciple, cet auteur affirme
qu’il n’y a pas de machine inanimée, «pure machine», et il en donne la raison :
160
EMBERSON, P. E., (1991), De Jundi Shapur à Silicon Valley, Chatou, Les trois
arches.
260
Jusque-là, les TIC ne sont pas directement indexées. Mais à la page 144,
Emberson soutient, à notre connaissance, la thèse la plus virulente qui soit
contre l’informatique :
Une des erreurs les plus tragiques que l’on pourrait faire
consisterait à dire : «les ordinateurs sont de simples machines.
Aussi intelligents qu’ils paraissent, ils peuvent uniquement faire
ce que nous leur disons de faire. Ils ne peuvent que redonner
ce que nous avons introduit en eux». Car alors, on oublierait
que les ordinateurs sont des êtres, tous interconnectés au sein
de la gigantesque entité-ordinateur, semblable à une araignée,
de l’intelligence artificielle. Aucun être humain n’a une vue
d’ensemble de ce que nous leur demandons de faire
(programmes) ou de ce que nous introduisons en eux entrée de
données). Seuls les démons ahrimaniens161, qui s’incarnent
eux-mêmes dans cette entité-araignée, sont capables de
comprendre, avec leur intelligence surhumaine, ce qui se
passe. Et ils peuvent amener les êtres humains à produire les
résultats qu’ils souhaitent.
161
L’auteur soutient que les esprits ahrimaniens travaillent à mettre illicitement les
âmes captives des morts en relation avec des machines ; ces esprits créent des
machines qui permettent d’établir une relation avec les êtres humains sur terre, et
d’offrir une ouverture aux hommes sur le monde des morts.
162
George Orwell est un auteur britannique qui avait créé un personnage fictif nommé Big
Brother dans son roman 1984 publié en 1949. B. B. est la figure emblématique du «Parti»
(unique), dont il est le supposé créateur, auquel les citoyens de «l'Océania» vouent un culte de
la personnalité. Dans toutes les rues, il est représenté sur des affiches par un visage masculin,
fixant l'observateur dans les yeux. Son omniprésence dans l'univers de 1984, tant sur les
affiches que sur les «télécrans» des domiciles privés ou lors des réunions de masse, désigne
par analogie, le contrôle et la fascination que les médias semblent exercer sur les individus.
261
est précisément celui de savoir réaliser le «grand écart» entre des conceptions,
en intégrant les plus radicales possibles et celles plus modérées, pour réaliser
une offre d’enseignement convenant aux apprenants, tout en sauvegardant des
intérêts éthiques.
163
Thomas Anderson, un jeune informaticien connu dans le monde du piratage sous le
pseudonyme Neo, est contacté via son ordinateur par ce qu’il pense être un groupe de pirates
informatiques. Ils lui font découvrir que le monde dans lequel il vit n’est qu’un monde virtuel, un
logiciel appelé « la matrice », et que tout ce qui est autour de lui n’est pas réel, ce n’est qu’une
simulation neuro-interactive créée par les machines. En fait, une guerre a eu lieu dans le
monde réel entre les machines et les hommes. Grâce à une technologie très avancée et
l'utilisation de l’Intelligence artificielle, les machines ont gagné. Dans un dernier geste
désespéré, les humains ont obscurci le ciel pour empêcher les machines d'utiliser l’énergie
solaire. Ayant découvert que les corps humains fournissent assez d’énergie pour leur permettre
de fonctionner, elles ont alors créé «la matrice» et y ont connecté tous les humains. Depuis,
alors que ceux-ci pensent vivre dans le monde tel que nous le connaissons, ils sont en fait
cultivés par ces machines qui se nourrissent de leur énergie telle une pile. Morpheus, le chef
des pirates qui contactent Néo, pense que celui-ci est l’Élu qui peut libérer les hommes et
prendre le contrôle de la matrice.
262
fantastiques sur le combat entre les chevaliers du bien et ceux du mal, dans
une vision fortement occulte. Nous dirons que la tâche n’est pas aisée pour les
enseignants de lettres modernes, d’arts plastiques et d’histoire dans les
établissements scolaires français, parce qu’ils doivent faire face aux
interrogations de plus en plus troublantes de la part des élèves.
Personnellement, nous avons déjà dû gérer - tant bien que mal - des questions
aussi pertinentes que celles-ci, qui sont loin d’être exhaustives :
- Monsieur, est-ce que le Graal165 a existé, et s’il a existé, est-ce qu’il
était matériel ? Est-ce qu’on peut le retrouver de nos jours ? (une élève de 4e
au Collège Jean-Jaurès de Montreuil en 2004) ;
- «Est-ce que Jésus a réellement vécu ? Notre professeur d’histoire nous
a dit que sa naissance n’était pas un fait historique» (un élève de seconde au
Lycée Jean- Jaurès de Montreuil la même année)
- «Est-ce que Jésus et Mahomet se connaissaient ?» (Un élève de 6e au
Collège Louise Michel de Champigny sur Marne en 2005)
- La plus embarrassante étant la question d’une élève de 5e (au Collège
Jean de Beaumont de Villemomble en 2002): « Monsieur, pourquoi on nous dit
qu’il est interdit de parler de Dieu à l’école ?».
A notre sens, ces questions interrogent les dispositions actuelles de laïcité
scolaire en France. Ce n’est pas notre propos, mais nous les signalons pour
signifier que le besoin de compréhension de la vie autrement que par les voies
scolaires actuelles se pose, et ce sont les enseignants de lettres et d’histoire
qui doivent assumer cette pression dans leurs classes.
263
dont le souvenir rend caduques beaucoup de lectures contemporaines. Sans
renier aux théoriciens actuels une certaine vision, somme toute légitime, la
grandeur des «Anciens» est tout de même remarquable. Parmi ceux-ci, nous
voulons revenir sur l’un d’entre eux pour éclairer notre lanterne d’éducateur et
de chercheur.
166
Nous utilisons cet adverbe parce que précisément l’idéal coménien était ce qu’il
avait nommé la panglottie, une espèce de langue universelle, qui servirait de support à
la pansophie, qui aurait été, elle-même, une connaissance universelle des réalités
terrestres et divines.
264
9.3.3.1.1 : La didactique originelle
Ce qui amène Jolibert, B., qui introduit cette édition, à poser d’entrée (page 7)
que «La doctrine éducative de Coménius (Jean Amos Komensky), 1592-1670, est
l’objet de malentendus constants», il est inquiétant de voir combien cette doctrine
a subi une désacralisation systématique qui amène ce traducteur à dénoncer
les critiques qui, comme Michelet, Compayré et Piobetta, ne veulent pas
«comprendre la doctrine éducative à partir de la métaphysique sur laquelle elle
repose.» (Page 8).
Bien plus, Jolibert s’en prend à Piobetta, autre traducteur de Coménius, qui
aurait intentionnellement amputé le texte original de tous les passages qui font
référence à la dimension théologique de la pensée coménienne. Il lui en veut,
dit-il, parce que sa traduction ne laisse pas lecteur découvrir la substance de la
Grande Didactique (désormais G D) qu’il synthétise ainsi, (page 8):
265
l’autre. Il existe des lois universelles auxquelles les divers
ordres de la nature obéissent : pour découvrir comment
instruire, observons la nature et l’art, tirons les règles et
appliquons-les à l’enfant. Ni analyse ni synthèse, la syncrise,
pour reprendre le terme le terme même de Comenius, est un
jugement comparatif qui permet de tirer la loi de composition
interne identique de choses dissemblables en apparence.
Même Piaget, l’un des plus grands admirateurs de Comenius167, n’échappe pas
à la critique de ce traducteur, coupable à ses yeux de n’avoir vu en cet auteur
génial que le fondateur des sciences modernes de l’éducation, et le père de la
démocratisation de l’école. Sans référence à son côté essentiel. Était-ce
vraiment le projet, tout académique et politique, de Comenius ? Nous
répondons immédiatement par la négative en nous référant à La G. D.( Chap.
XI, page 91) :
J’appelle école répondant parfaitement à sa destination celle
qui fabrique vraiment des hommes, c’est-à-dire celle où l’esprit
des élèves baigne dans la lumière de la science, où il pénètre
rapidement les choses manifestes, où l’âme et ses affections
sont conduites à réaliser l’harmonie universelle des vertus, où
le cœur s’enflamme d’un amour divin.
La systémique ne serait donc pas une création du XXè siècle, comme nous
167
Piaget lui rendra hommage dans un texte (disponible en ligne à l’adresse) :
http://agora.qc.ca/reftext.nsf/Documents/Comenius
( 30/09/2006), où il affirme notamment :
« le génie de Comenius est d'avoir compris que l'éducation est l'un des aspects des
mécanismes formateurs de la nature, et d'avoir ainsi intégré le processus éducatif dans
un système tel que ce processus en constitue l'axe fondamental même. »
266
nous étions mis à le penser, et tel que ses théoriciens nous l’ont présentée
dans la première grande partie de cette recherche. Elle ne serait pas née en
réaction à la «dérive rationaliste» de Descartes. Elle ne serait qu’une
résurgence d’une sagesse ancienne. La différence se situerait peut-être dans la
finalité que les théories de la systémique ne situent pas dans une perspective
métaphysique comme Coménius. Pour cet auteur, le système se construit
autour de la seule nécessité de permettre à l’homme de réintégrer la patrie
perdue, le paradis, dont il dit qu’il «était la plus agréable partie du monde» (op.cit.,
page 34).
Nous avons avec ces paroles la clé d’une véritable autonomie, concept
central, enjeu essentiel de l’éducation et sujet de prédilection des cognitivistes
267
comme M.-J. Barbot et G. Camatarri (1999),168 dont ils présentent l’importance
dans tous les discours administratifs et pédagogiques. La difficulté de
l’appréhension du processus d’autonomie amène plusieurs théoriciens et
acteurs à la situer à la fin d’un processus. A notre sens, nous ne voyons pas à
quoi servirait une autonomie finaliste. De l’autonomie, il est même question
dans les théories éducatives les plus reculées dans le temps ; depuis Rousseau
pour la mouvance moderne, qui n’a su en réalité que remettre au goût du jour la
maïeutique socratique.
Les TIC requièrent l’autonomie pour leur maîtrise, partant du principe qu’il
n’existe aucune formation qui donne à son apprenti ou apprenant toutes les
subtilités de l’art informatique. Mais les théoriciens des TICE veulent bien situer
cette compétence de base à la fin du processus qui ne viendra probablement
jamais, parce que le processus est sans limite.
Dans cette toile technologique inextricable dans laquelle nous sommes entrés
comme dans un véritable labyrinthe, on peut légitiment se demander à quel
moment on pourra estimer qu’un individu est déjà autonome. A ce titre,
l’autonomie, en tant que finalité promise grâce aux TICE, nous semble
inaccessible. Nous postulons une autonomie qui soit à la fois au départ,
pendant et à la fin de l’apprentissage. L’autonomie des TICE ne peut référer
qu’à une compétence technologique, proche de ce que l’IGP chargé de
l’informatique, dans le corpus 4, appelle le E-Readiness, la prédisposition
électronique, qui peut en même temps être un mirage didactique.
Nous préférons adhérer à l’offre coménienne qui indique l’aptitude à «provoquer
168
BARBOT, M.-J., CAMATARRI, G., (1999), Autonomie et apprentissage, l’innovation
dans la formation, Paris, Puf.
268
l’étincelle». Il restera à rechercher cette étincelle pour rendre autonome le
«microcosme» éveillé à sa correspondance «macrocosmique».
En droite ligne de l’intitulé de B., Nicolescu (2002) : Nous, la particule et le
monde, dont l’analogie rappelle en fait de vieilles sagesses auxquelles les
initiations antiques donnaient droit169.
169
La table d’émeraude , texte alchimique présente effectivement cette analogie des
quatre éléments essentiels (eau, feu , air, terre) :
Il est vrai, sans mensonge, certain et très véritable : Ce qui est en bas est comme ce
qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ; par ces choses se
font les miracles d'une seule chose. Et comme toutes les choses sont et proviennent
d'un, par la méditation d'un, ainsi toutes les choses sont nées de cette chose unique
par adaptation. Le Soleil en est le père, et la Lune la mère. Le vent l'a porté dans son
ventre. La terre est sa nourrice et son réceptacle. Le Père de tout, le Thélème du
monde universel est ici. Sa force ou puissance est entière si elle est convertie en terre.
Tu sépareras la terre du feu, le subtil de l'épais, doucement avec grande industrie. Il
monte de la terre et descend du ciel, et reçoit la force des choses supérieures et des
choses inférieures. Tu auras par ce moyen la gloire du monde, et toute obscurité
s'enfuira de toi. C'est la force, forte de toute force, car elle vaincra toute chose subtile
et pénétrera toute chose solide. Ainsi, le monde a été créé. De cela sortiront
d'admirables adaptations, desquelles le moyen est ici donné. C'est pourquoi j'ai été
appelé Hermès Trismégiste, ayant les trois parties de la philosophie universelle. Ce
que j'ai dit de l’œuvre solaire est complet.
Traduction visible en ligne :
http://www.esonews.com/Alchimie/table_emeraude/index.asp (07/11/2006)
269
Coménius, et n’en exploite que le côté curriculaire et politique.
Nous pensons que cet enseignement pourra également répondre aux attentes
de Minyono-Nkodo (op.cit.) en ce qu’elle serait capable de se substituer si elle
était bien comprise à «l’initiation» des enseignants camerounais, sur la base de
l’éducation de l’âme. Ces enseignants arriveraient ainsi à l’idéal de
l’«aristocratie de l’esprit», qui serait l’autonomie véritable.
Mais H. Besse (1998, 28)170 dénonce la fêlure qui, selon lui, s’est réalisée dans
l’histoire de la didactique :
170
BESSE, H., (1998), «Contribution à l`histoire du mot didactique », in BILLIEZ, J.
(coord.)(1998), De la didactique des langues a la didactique du plurilinguisme, hommage à
Louise Dabène, Grenoble, CDL-LIDILEM, (p. 17-30)
270
(op.cit.) ; Steiner (op. cit.) et évidemment avant eux Platon, Coménius,
Descartes, Montaigne…
Cette conception de l’éducation n’est pas seulement historique, et n’est pas
complètement absente des théories et pratiques didactiques actuelles. Nous
allons citer à titre d’exemple les écoles Steiner Waldorf171, implantées en
France et qui ont eu l’occasion de présenter leur conception pédagogique
pendant une semaine à l’Unesco au mois d’août 2006. Il en existe d’autres
moins répandues que celles-là, par exemple les écoles Krishnamurti en Inde et
les écoles Jan Van Rijckenborgh en Hollande, qui s’appuient sur une
préservation de l’âme infantile à des fins spirituelles ultérieures.
Nous pouvons aussi signaler le numéro de Juillet-Août du Monde de
l’éducation,172 qui recèle d’articles, extraits et entretiens avec des auteurs
anciens et modernes, comme Coménius, Nietzsche, Jules Ferry, Jan Patocka…
, qui cogitent sur les «savoirs du XXIe siècle». Nous choisissant de nous arrêter
sur ce dernier dont l’extrait figure, page 16, sur «Comenius et l’âme ouverte»,
dans lequel on peut lire en chapeau :
171
Les écoles Steiner-Waldorf, qui entendent pérenniser les préceptes pédagogiques
de R. Steiner, accueillent dans le monde 180 000 élèves dans près de 900 écoles et
plus de 1 600 jardins d'enfants, selon les chiffres publiés par ces écoles qui sont
regroupées en une fédération.
En France, ce sont 2 300 élèves qui sont scolarisés dans 21 écoles et jardins
d'enfants.
Document disponible en ligne : http://www.steiner-waldorf.org/ (07/11/2006).
172
Le Monde de l’éducation, n° 349, Juillet-Août 2006
271
conférence organisée par ces écoles, au siège de l’Unesco173 le 23 août 2006,
que ses collègues le considéraient tout au plus comme un poète - en France,
cette mouvance est très minoritaire, probablement à cause de l’orientation
politique laïque.
Ce n’est pas le cas dans les pays anglo-saxons où on observe une offensive
métaphysique en éducation, des enseignants comme John, P. Miller174,
professeur à l’Ontario Institute for Studies in education, n’hésitent d’ailleurs pas
à donner des cours institutionnels sur le rapport entre l’éducation et la
spiritualité. Cet auteur entend mettre en lumière l’importance de la spiritualité
dans les programmes scolaires et dans les pratiques pédagogiques. Il en a
d’autant plus les coudées franches qu’il est au Canada le Coordonnateur de
l’une des six sections du Curriculum Program, soit l’Éducation esthétique et
holistique.
Pour l’auteur, l’âme, cette «énergie profonde et vitale qui donne une signification et
un objectif à notre vie » (p. 9), constitue le concept central, le pivot de l’analyse
des programmes et des propositions pédagogiques. Explorant l’âme sans
référence à une religion particulière, il explique sa place privilégiée dans
l’éducation et dans toute expérience humaine, particulièrement en ce qui
concerne l’amour et le travail. Après avoir passé en revue quelques
conceptions d’auteurs anciens et contemporains, Miller élabore son propre
concept de l’âme comme le lien intime entre le divin «Spirit» et l’ego socialisé.
L’école peut, selon lui, assurer le soutien et l’éducation de l’âme : par un
curriculum axé sur la vie intérieure, par un accent sur les arts, par des moyens
d’enseignement et d’apprentissage favorisant la créativité, par la prise en
compte de la dimension environnementale.
173
http://www.steiner-waldorf.org/actualite/kolisko2.html (07/11/2006)
174
MILLER, John P., (2000), Education and the soul, toward a spiritual curriculum, New
York, Albany State University of New York Press.
272
9.3.4.1 : Rôle des enseignants selon J. P. Miller
À cet effet, les enseignants tiennent un rôle de premier plan : ils seront
évidemment eux-mêmes «animés», c’est-à-dire qu’ils auront eux-mêmes éveillé
l’âme en eux, grâce à la méditation et aux autres techniques d’intériorisation,
telle la contemplation, l’imagerie mentale, le jeu de rôle, le journal personnel ;
l’auteur fournit de nombreux exemples et des explications détaillées, à partir de
son expérience ou encore en se reportant à des associations éducatives. Enfin,
cette préoccupation de l’âme se révèle un puissant facteur de compréhension
des problèmes éducatifs et de participation au changement qui interpelle l’école
dans sa mission comme dans ses réalisations quotidiennes.
Enseigner une langue ne revient pas seulement à enseigner une matière ; une
responsabilité ontologique est associée à cette fonction, parce que la langue se
veut différente de tout autre langage : elle est porteuse de pouvoir : le fameux
Logos.
Il découle de ce fait que lorsque l’enseignant s’engage dans l’enseignement de
la langue française aux apprenants camerounais, il est loin de s’agir seulement
de l’atteinte d’objectifs intrascolaires ou politiques nationales et internationales.
Par cet acte, il doit prendre la mesure exacte de sa responsabilité. Et elle est
grande. Une langue est une voie d’accès à l’univers, et la représentation que
l’individu s’en fait est souvent fonction de la manière dont la langue lui est
enseignée. Le didacticien de langue n’est pas seulement un facilitateur
273
d’apprentissages corollaires, mais il incarne l’outil par lequel l’univers s’invite
dans l’homme, dans ce qu’il a de plus substantiel : sa pensée. Celle-ci, dont la
capacité énergétique est bien démontrée par Lupasco (1986)175. Ainsi, selon la
conception éthique du langage, le problème n’est pas tant la réussite
disciplinaire, scolaire ou sociale, qui ne sont pas négligeables parce que
l’individu est un tout, mais la vision du monde générée par l’acquisition de la
langue. Ce dont les enseignants prennent moins conscience, c’est la notion de
pouvoir qui est en jeu dans l’enseignement/apprentissage de la langue : le
pouvoir de la connaissance. G. Hottois (2004, 169)176 semble partager cette
vision dans ce qu’il nomme l’anthropologie philosophique:
Mais il faut s’empresser de dire que le langage est employé ici dans le sens de
la langue. Selon nous, en harmonie avec l’énoncé qui précède, enseigner une
langue, c’est transmettre un pouvoir, dont il faut être conscient. Ce pouvoir se
veut irremplaçable par une quelconque machine. Au début de la révolution
informatique, la vision que les promoteurs en avaient était celle du
remplacement de l’enseignant par des outils qui feraient mieux que lui ce qu’il
faisait jusque-là très mal. Avec la force de la caricature, nous dénonçons
comme cette vision comme antididactique (néologisme) parce qu’éthiquement
175
LUPASCO, S., (1986), L’homme et ses trois éthiques, Monaco, éd. du Rocher.
176
HOTTOIS, G., (2004), Philosophies des sciences, philosophies des sciences, Paris,
Odile Jacob.
274
cela n’est ni souhaitable, ni possible.
Il n’est pas souhaitable que les TIC, pour y revenir en les nommant, remplacent
les enseignants, en tout cas pas dans l’enseignement/apprentissage des
langues. En ce sens, les apprenants feront toujours l’expérience que le meilleur
dispositif matériel vient en appui d’un enseignement humain. Une langue
apprise à l’aide exclusif de machines, quelles qu’elles soient, ne remplacera
pas le fameux bain linguistique, qui permet des échanges conscients et d’autres
inconscients qui relèvent du linguistique, du sociologique, mais aussi du
psychologique (de psychè) au sens fondamental (c’est-à-dire dans un discours
d’une âme à une autre). Chaque langue véhicule une culture, c’est-à-dire un
ensemble de valeurs, et par son apprentissage on postule à l’acquisition des
valeurs auxquelles ouvre cette langue.
275
- En reprenant à notre compte la question appréhensive de La Grande
Royale dans l’Aventure Ambiguë (op.cit.) :
En allant à l’école occidentale, ce que les Africains ont gagné vaut-il ce qu’ils
auront perdu ? Peut-on dire que la rencontre de l’Occident fut un fait positif ou
négatif, au-delà des visions historiques au demeurant assez caricaturales.
Se pose avec gravité la question des valeurs de l’école occidentale, à laquelle,
dans le cas du Cameroun, le français ouvre.
Nous ne pensons pas qu’il y ait un tort, ou une quelconque honte à témoigner
276
d’un moment de vie particulier qu’on aura vécu en compagnie des auteurs qui
semblaient nourrir notre âme d’une richesse que nous n’avions pas connu dans
un autre contexte.
Faut-il ne pas témoigner de l’extase à laquelle nous ouvrit le commerce, guidé,
puis personnel, des textes de Voltaire d’abord, de Montaigne, de Racine et
Corneille, de Rabelais, de Beaumarchais, de Montesquieu, de Hugo, de
Rimbaud, de Camus, de Saint-Exupéry177 et de Beckett pour ne citer que ceux-
là ? Cet héritage doit être transmis parce que nous croyons à la dynamique
ontologique, esthétique et éthique qu’il véhicule.
Depuis lors, nous avons lu beaucoup d’autres auteurs, par d’autres canaux et
supports, y compris par Internet, mais il reste que les œuvres que nous avons
étudiées en classe, dans la posture dialogique traditionnelle, entre un
enseignant passionné et nous, seront à jamais gravées dans notre conscience
et nous influencent considérablement. A telle enseigne que l’essentiel de ce
que nous pouvons incarner comme attitude éthique nous provient de ce
substrat scolaire. Nous ne pouvons pas garantir que les TIC puissent agir avec
la même profondeur.
De tels témoignages paradoxaux méritent aussi d’être donnés, pour faire
contrepoids à la doxa historique propre à inculquer la haine et le ressentiment
dans l’esprit des jeunes Africains vis-à-vis des anciens colons. A notre avis, il
est plus avantageux de voir le côté positif de l’histoire, qui dans le rapport
mondial actuel de mondialisation, peut s’inscrire comme un fait positif.
177
Nous pensons d’ailleurs qu’il est dommage qu’on ait retiré du programme officiel
des œuvres comme Terre des hommes, qui fut l’un des grands moments de notre vie
d’élève. Les programmes camerounais imposent en effet des œuvres communes,
nationales, au professeur et à l’élève dans chaque cycle et à chaque niveau. Nous
voulons citer de cœur quelques passages de cette œuvre qui nous sont restés dans la
tête et dans la conscience :
- Pour saisir le monde aujourd’hui, nous usons d’un langage qui fut établi pour le
monde d’hier. Et la vie du passé nous semble mieux répondre à notre nature, pour la
seule raison qu’elle répond mieux à notre langage.
- L’empire de l’homme est intérieur.
- Prendre conscience d’un but qui nous relie les uns aux autres, c’est le chercher là où
il nous unit tous
- Seul l’Esprit, s’il souffle sur la glaise, peut créer l’Homme
277
La francophonie peut en ce sens incarner une valeur d’interface culturelle,
politique et économique des anciennes colonies françaises. Et nous le disons
sans intention de récupération par d’éventuels «francophoniphiles»178
(néologisme) dont nous ne sommes évidemment pas. Finalement entre le
français, (langue seconde ?), les (Nouvelles) Technologies et les Africains, il
reste à construire un système culturel humaniste qui ressuscite en chacun des
acteurs le rêve / le règne de l’universel.
178
Héraut forcené et moutonnier de la francophonie
278
CONCLUSION GÉNÉRALE
279
280
CONCLUSION GÉNÉRALE
Arrivés au terme de notre parcours, qui ne clôt rien, nous devrons faire une
rétrospection pour nous représenter l’intention initiale, la démarche choisie, les
outils mis en œuvre et les résultats atteints.
1. Rappel de la problématique
Nous sommes parti du projet d’examiner la pertinence et la possibilité d’une
intégration didactique des TIC dans la formation de enseignants camerounais
de français. Nous avons dû étudier, pour ce faire, des aspects aussi divers les
uns que les autres ayant trait aux questions suivantes :
- Le statut du français au Cameroun (fonctions et usages) ;
- La didactique du français au Cameroun (diachronie et synchronie);
- Le dispositif des TIC/TICE au Cameroun (Projets et représentations) ;
- Les attentes des enseignants, qui sont à la fois considérés comme
apprenants et futurs enseignants ;
- Les orientations internationales en TICE et en français ;
Pour y parvenir, nous avons associé à ce découpage déclaratif un autre
plus interrogatif :
- Pourquoi la didactique entretient-elle un clair-obscur conceptuel ?
- Quelle langue les Camerounais parlent-ils, et quelle didactique des
langues ont-ils souvent appliquée ?
- Quel regard peut-on porter sur la médiatisation du système éducatif
camerounais actuel ?
- Quel dispositif peut-on mettre en place dans la formation des
enseignants camerounais, compte tenu des contraintes et orientations
nationales (dispositif national) et internationales (modèle Unesco) ?
- De quelle nature peuvent-être les ressources systémiques ?
- Les modèles sont-ils utiles ?
- Le modèle technologique suffit-il ?
- Quelle est la nature et la qualité d’une ressource didactique ?
281
Tous ces paramètres devaient nous permettre de nous positionner dans le
débat technologique actuel, dont l’impact est perceptible tant au plan national,
continental que planétaire ; non parce que le Cameroun serait particulièrement
important, mais parce que la méthode adoptée dans la collecte et le traitement
des données instruit cette conscience globale. Cette méthode entend prendre
en compte la complexité de chaque problème. Il revient à comprendre par
complexité, la spécificité de chaque cas étudié, mais aussi paradoxalement
l’identité que ses éléments constitutifs partagent entre eux et avec les réalités
d’autres environnements. En quelque sorte, il s’agit de réconcilier les études
monographiques et celles plus généralistes.
2. La systémique
Parce que les éléments à considérer nous ont paru divers et ne pouvant être
étudiés dans une seule trame analytique, nous avons convoqué la systémique
comme approche, pour la relation qu’elle permet d’effectuer entre plusieurs
facteurs qui, à première vue ne se recoupent pas. C’est cette capacité de
reliance qui nous a convaincu de la pertinence de la démarche, au-delà de ce
qui peut ressembler à un effet de mode scientifique. Il faut le dire, pour ne pas
donner l’impression de jeter l’anathème sur des siècles de méthode analytique
qui ont produit des hommes et des découvertes scientifiques et techniques
remarquables.
Notre dilemme était grand entre une logique de formation, qui comme son nom
l’indique, est une forme d’intervention à l’égard de l’environnement, et une autre
purement pédagogique avec pour souci d’atteindre des objectifs institutionnels.
La formation se veut unique, car le contexte dans lequel elle se produit est en
lui-même unique. Nous savons que dans ce cas, il est difficile de penser à la
reproductibilité ou la généralisation des atteintes, parce que la connaissance
que l’on retire de l’examen de l’action reste liée aux circonstances particulières
qui ont donné naissance à cette action.
L’intervention pédagogique, quant à elle, entend s’appuyer sur une
connaissance séculaire du «comportement zéro» de l’élève ou de l’apprenant,
pour lui faire acquérir des «objets d’étude» préalablement identifiés sous le nom
282
de programmes.
La nature de la formation des formateurs institutionnels souffre de cette énorme
ambiguïté structurelle : faut-il la considérer comme un
enseignement/apprentissage normal ou alors comme une formation au sens
moderne du terme. Le premier cas est bien connu, le deuxième est plus récent
et nous en retenons avec Le Boterf (op. cit.) qu’il repose sur une évaluation des
besoins dont l’analyse va déterminer le contenu et les techniques
d’apprentissage.
Une formation aux TICE/avec des TICE ne peut s’adapter ni à un mode, ni à
l’autre, compte tenu de ses exigences spécifiques qui relèvent de paradigmes
aussi différents que le linguistique, le technologique certes, mais avant tout
l’épistémologique et l’éthique.
3. Les données
L’approche systémique, qui prétend relier les éléments les plus divers,
puisqu’ils s’influencent mutuellement, met en avant la nécessité de la prise en
compte globale des facteurs dans la résolution des problèmes. Elle s’écarte de
facto de l’approche «classique» qui se veut analytique et linéaire. Si cette
dernière considère la situation à étudier de manière parcellaire, il revient au
systémicien d’aller au-devant des données qui ne lui sont pas acquises et qu’il
doit presque construire. Son originalité consiste en la valorisation d’éléments
habituellement minorées et leur mise en relation.
Son approche est donc fatalement transdisciplinaire selon le sens qu’en donne
B. Nicolescu (1988, 134)179 :
179
NICOLESCU, B., (1988), La science, le sens et l’évolution, Paris, Ed. du Félin.
283
une autre, permettant l’émergence de l’unité dans la diversité et
de la diversité par l’unité.
À la page 54, après avoir reconnu que l’ «inachèvement» n’est pas le propre
des étudiants qui rédigent des thèses, ils ajoutent :
En ce qui nous concerne, nous pensons avoir pu, grâce à cette recherche,
entrer dans une représentation différente de la connaissance et de l’univers de
180
MORIN, E., CIURANA, E.-R., (2003), Éduquer pour l’ère planétaire, Paris, Balland.
284
la recherche. Nous avions jusque-là une opinion assez négative du monde de
la recherche, du fait des combats interdisciplinaires que nous observions de
l’extérieur, sans toutefois arriver à nous les expliquer. Avec la découverte des
théories de la complexité, l’approche systémique et la transdisciplinarité, nous
avons découvert une avancée considérable, mue par un esprit de tolérance et
de solidarité entre les chercheurs. Nous ne parlons pas des rapports
interpersonnels que nous ignorons, mais de la nouvelle orientation qui est
insufflée aux recherches.
En outre, nous avions souvent entendu parler de la transdisciplinarité, à côté de
l’interdisciplinarité, de la pluridisciplinarité et autres concepts dont le vocabulaire
scientifique foisonne, et qui tendent souvent à délayer les principes les plus
authentiques. Il a cependant fallu que nous soyons face à la complexité de
notre projet de recherche, pour que la quête de la méthode ad hoc s’impose à
nous. Faisant face à la complexité naturelle, nous avons rencontré la
complexité conceptuelle, avec ses corollaires la systémique et la
transdisciplinarité.
285
(2000, 71)181 :
181
IMBERT, F., (2000 b), La question de l’éthique dans le champ éducatif, Vigneux, éd.
Matrice.
182
LINARD, M., cite SIMONDON, G., Du mode d'existence des objets techniques, Paris,
Aubier, 1969, (p.102)
286
4.1. Le français camerounais : FLS/FLM/FLE
La réalité sociolinguistique camerounaise représente le premier niveau de
complexité de la situation camerounaise. Le français y dépend des villes et des
situations particulièrement hétérogènes. A moins de vouloir «faire vite», il est
difficile de se prononcer sur le statut de cette langue protéiforme au Cameroun.
Même le camfranglais, que certains enseignants perçoivent comme une
menace au «bon français», peut en fait n’être qu’une domestication de la
langue française, qui de plus ne ferait que refléter le parcours anthropologique
et linguistique de ces populations. Il serait présomptueux de conclure à une
désaffection pour la langue de Vaugelas.
Au contraire, les enseignants, qui aiment cette langue pour les valeurs qu’elle
communique, et les élèves qui en ont une vision ascensionnelle, peuvent
témoigner de l’intérêt que cette langue suscite en eux. Seulement, la question
des valeurs n’est pas réglée, et si des linguistes/enseignants nationalistes, en
accord avec les orientations intergouvernementales sur l’éducation, pensent à
l’introduction des langues nationales, les jeunes n’en ont pas la même attente.
Le premier chantier consistera à justifier cette entreprise, afin de motiver les
jeunes Camerounais. De peur que cette mesure, économiquement lourde ne
soit qu’une adhésion fantaisiste à ce que Calvet (2002, 91)183appelle le discours
PLC (politico-linguistiquement correct) :
183
Calvet, L.-J., (2002 a), Le marché aux langues, les effets linguistiques de la
mondialisation, Paris, Plon.
287
langues doivent être écrites...). Ce discours s'est solidifié autour
de propositions maintes fois assenées et qu'il est aujourd'hui
malaisé de mettre en question.
En ce qui nous concerne, si nous étions invité à donner notre point de vue sur
la question, nous manifesterions une très grande réserve, parce que nous
pensons qu’il est devenu banal, avant d’agir sur/pour certaines populations, de
demander leur avis. Cette mesure a la vertu de les motiver et leur faire
supporter d’éventuels échecs, qui ont leur prix. En lisant Calvet, (2002 a, 107)
nous découvrons par exemple les coûts suivants :
La Foundation for Endangered Languages, qu’il cite, estime qu'il faut 35000
livres sterling (environ 53360 euros) pour donner à une langue non décrite un
dictionnaire et une grammaire de base. Dixon (1997) évalue pour sa part ce
travail à 200000 dollars US (environ 213 400 euros)...
288
à elle seule amène celui qui veut bien s’y prêter à revoir son discours sur ce
continent, sur les bonnes intentions continûment imposées de l’extérieur par les
«bien-pensants» «dispensateurs» de développement.
La même réflexion vaut pour les TIC, dont l’utilité relèverait du discours PTC et
qui serait, dans le contexte africain, par un transfert que nous nous permettons,
le Politico-Technologiquement Correct.
184
Lire à ce sujet l’article de DEPOVER, C., qui pose le problème, même s’il le résout
en faveur du discours PTC: «Les TIC ont-elles leur place en milieu scolaire africain ?»
se demande-t-il en titre, précisant pour l’évacuer la spécificité du contexte africain :
«Lorsque qu’on examine la situation actuelle des systèmes éducatifs africains, il
pourrait paraître raisonnable de répondre par la négative à cette question en
considérant que les besoins à satisfaire sont tellement énormes que d’autres choix
devraient être privilégiés.» pour des raisons que la doxa dispense : «En matière de
technologie, plus que dans tout autre domaine, le retard consenti à un certain moment
est difficile à rattraper. Si on ajoute à cela les résistances au changement qui
caractérisent le milieu scolaire, on peut penser que les pays qui n’auront pas pris à
temps le virage informatique se verront pénalisés dans leurs perspectives de
développement pour de longues années.»
http://www.revue-tice.info/document.php?id=522 (12/09/2006)
185
Nous vivons le drame de savoir que plus de la moitié des instituteurs que nous
avons formés à l’ENIEG de Ngoumou (Ecole Normale des Instituteurs de
l’enseignement Général ; structure étatique ) de 1995 à 2000, quoique ayant été pour
certains recrutés dans la fonction publique, et travaillant dans des zones
particulièrement enclavées, se retrouvent souvent sans salaire ; et quand ils peuvent
l’avoir, il ne leur permet pas de subvenir aux besoins les plus élémentaires. Faut-il
ajouter, et ce n’est pas une information, que les élèves qu’ils doivent enseigner sont
parfois plus de 150 par classe, pour un instituteur, tous niveaux confondus.
289
la facture numérique que celle sociale ? Ces technologies sont-elles si
importantes qu’on en oublie le risque d’exacerbation des inégalités sociales,
pourtant évident avec cette formule expérimentale où il est créé des écoles
pilotes dans certaines agglomérations alors que le gros des effectifs demeure
ignorant et démuni? Si donc, adhérant au discours PTC, en admettant que
«hors les TICE point de salut», qu’y aura-t-il de commun entre un élève du
Lycée Bilingue de Yaoundé (établissement pilote) et celui du Lycée de
Nguelemendouka, tous deux apprenants camerounais ?
Notre propos est loin d’être matérialiste, mais il nous semble important de
réaliser certaines conditions préalables avant de penser à explorer des horizons
plus prestigieux. Dans le cas de l’Afrique en général et du Cameroun en
particulier, intégrer les TIC en éducation revient à préparer leur
avènement, à définir l’objet et les modalités de leur usage ; satisfaire aux
plus élémentaires conditions vitales et scolaires, recruter et rémunérer
honorablement les enseignants, former des didacticiens, et non seulement des
tuteurs. C’est pour la même raison que nous avons estimé que des protocoles
comme celui proposé par l’UNESCO, à la valeur référentielle pourtant
indéniable, n’étaient pas très adaptés au niveau socio-économique et
socioculturel des Camerounais.
Notre thèse définitive par rapport aux TICE s’inscrit dans le même sillage de
circonspection stratégique que Linard (op. cit, 16).
290
mondial sur les TICE et sur l’éducation de manière générale, nous
recommandons, à la lumière de l’éclairage de Jakob Boehme, que présente
Nicolescu, (op.cit, 151), une grande vigilance (veille) technologique, car :
Nous pourrions aussi dire avec Emberson qu’elles sont diaboliques. Cela serait
aussi inviter à une marginalisation assez irresponsable.
186
MVESSO, A., (2006), « Les TIC dans l’éducation : un enjeu pédagogique, une
dynamique de formation : le cas du projet sur l’intégration pédagogique des tic de
l’IIRCA et de l’école normale supérieure de Yaoundé », disponible en ligne :
http://www.revue-tice.info/document.php?id=679 (23/10/2006). Cet auteur, directeur de
l’ENS au moment où la thèse est rédigée reconnaît effectivement que «La maîtrise de
cette technologie est aujourd’hui une nécessité, et la fracture numérique qui est à la
fois culturelle, technologique et générationnelle doit être comblée notamment par les
enseignants. Car l’on peut à juste titre et sans exagération parler par analogie d’une
fracture pédagogique qui séparera ceux des enseignants qui n’auront pas réussi à
dompter la nouvelle sirène et ceux qui, l’ayant domptée, continueront de jouer leur
noble rôle d’indicateur du vrai, du bien et du beau, pour parler comme Gusdorf.»
291
l’intériorisation que les vrais philosophes de tous temps ont enseignée, même
s’ils ne l’ont pas toujours pratiquée. Afin que l’extérieur et l’intérieur collaborent,
ou interagissent, pour adopter le langage moderne proche des TIC.
Nous pensons que le chantier du futur est le retour à une didactique éthique
et humaniste, et que la plus grande compétence dont devra se rendre capable
l’enseignant, c’est de pouvoir conjuguer les connaissances traditionnelles et
celles modernes, de savoir réconcilier les aptitudes didactico-éthiques et celles
technologiques. L’idéal, pour faire face aux interpellations du futur qui seront de
plus en plus nombreuses, réside en une saine et harmonieuse intégration de
toutes les ressources intérieures et environnementales, réelles et virtuelles.
Plus que jamais, les jeunes auront besoin de leurs éducateurs ; ce qui dément
évidemment l’idée que les TIC remplacent un jour les enseignants. Apprenants
et éducateurs sont ainsi appelés à prolonger leur partenariat en se servant de
tous les outils, linguistiques, technologiques et éthiques disponibles, en vue de
la même finalité, identique depuis le début de l’œuvre d’éducation : ceux qui
187
CAZENAVE, M., (dir.), (2005), De la science à la philosophie, y a-t-il une unité de la
connaissance ?, Paris, Albin Michel.
292
savent doivent montrer le chemin - en les précédant, et non en le désignant
seulement, comme les TIC les y confineraient - à ceux qui leur sont confiés,
pour une meilleure compréhension écologique et transécologique188d’eux-
mêmes, des autres et de l’univers.
188
le transécologique (néologisme) intègrerait la dimension poétique et le Monde des
Idées dont parla Platon, dans son mythe de la caverne.
293
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313
ANNEXES
Question 1 : Avec qui vis-tu à la maison ? (choisis une réponse en cochant une case)
Mes deux parents
Mon père et sa femme
Ma mère et son mari
Mon père
Ma mère
Autre cas : (à préciser toi-
même)...................................................................................
Question 2: Depuis quand vis-tu dans cette maison ? (donne un
chiffre).............................
Question 3 : Quelle est la langue que tu parles souvent à la maison avec tes parents
et frères?
le français
l’anglais
notre langue maternelle
une autre langue
Question 4 : Quelle est la langue que tu parles souvent avec tes amis et camarades?
le français
l’anglais
une langue camerounaise
un mélange de plusieurs langues (camfranglais)
314
Question 5 : Quelle est la langue que tes enseignants utilisent en classe?
le français
l’anglais
Question 6 : Est-ce que la langue française est importante pour toi ?
Très importante
Un peu importante
pas très importante
Question 7:
Pourquoi ?..........................................................................................................
Question 9 : Aimerais-tu apprendre une langue nationale comme l’ewondo, comme le
douala ou le bamiléké à l’école ?
oui
non
je ne sais pas
Question 10 :
Pourquoi ?........................................................................................................
315
QUESTIONNAIRE ENSEIGNANTS
Cher professeur/ inspecteur/ élève professeur, dans le cadre d’une recherche académique que
nous menons sur l’intégration des Technologies de l’Information et de la communication dans le
système éducatif camerounais, nous vous prions de bien vouloir répondre à ce questionnaire
qui nous aidera après dépouillement à déterminer les besoins des enseignants et formateurs
camerounais, et à formuler des recommandations conséquentes.
Nous vous prions de classer les élèves des villes camerounaises suivantes en reportant le nom
de la ville dans les cases correspondant à leur situation d’apprentissage : YAOUNDE,
DOUALA, NGOMEDZAP, BUEA, BAMENDA, GAROUA, NGAOUNDERE, BERTOUA, NGOG
MAPUBI, YOKADOUMA, MBANGA.
STATUTS DU Villes camerounaises Commentaires, s’il y a lieu.
FRANÇAIS
Définition FLM
Définition FLS
316
QUESTIONNAIRE ADRESSE AUX PROFESSEURS DE FRANÇAIS
I- IDENTIFICATION
- Institution d’attache :……………………………………………….
- Poste occupé……………………………………………………….
- Ancienneté dans la formation et/ou l’inspection…………………
- Ancienneté dans l’inspection et/ou l’administration……………………
2- En rapport avec le statut que vous avez choisi, quel commentaire vous suggère
l’enseignement et l’apprentissage de cette langue au Cameroun?
........................................................................... ………………………………………
…………………………………………………………..
III- L’ELABORATION DES PROGRAMMES DE FORMATION
3- Comment et par qui sont élaborés les programmes de formation des professeurs
de français?
.......................................................................................................................
.....................................................................................................................................
..........................................................................................................
317
………………………………………………………………
V- TICE
- En quoi pensez-vous que les Nouvelles Technologies (TIC) puissent améliorer
l’enseignement/apprentissage du français ?
.....................................................................................................................................
..........
- Est-ce que personnellement vous utilisez déjà ces outils dans votre
enseignement ?
- - Si oui, comment y êtes-vous parvenu ? (cochez une case)
J’ai reçu une formation institutionnelle
J’ai été formé de ma propre initiative dans un centre de formation privé
J’ai été formé dans le tas
- si oui, quel est le profil de ceux qui vous ont formé ? (cochez une case,
éventuellement deux)
Des informaticiens sans qualification en technologies éducatives
Des informaticiens qualifiés en technologies éducatives
Des volontaires sans qualification particulière
Des collègues bienveillants
318
institution.
Vous vous formerez tout seul.
Vous n’en attendez rien de particulier
- Qui selon vous pourrait le mieux vous y former ? (cochez une case)
des informaticiens
des professeurs volontaires
un organisme privé de formation
des experts en TICE (Technologies appliquées à l’éducation)
VII- PROSPECTIVE
Pour finir, quel serait votre idéal de formation des futurs enseignants de français :
(bien vouloir répondre à toutes les questions)
Au niveau du contenu des programmes et des méthodes de
formation ?…………………………………………………………………….....
..................
Au niveau de la collaboration entre formateurs et futurs
319
employeurs ?………………………………………………………………….....
..........................
Au niveau de la formation aux TIC ?
………………….............................................................................
....................................................................................................
Au niveau de l’éventuelle intégration des langues nationales dans les
apprentissages ?………………………………………….....
.................................................................................................... ......
320
Corpus 7 : Loi d’orientation de l’éducation au Cameroun
Article premier : (1) La présente loi fixe le cadre juridique général de l'éducation au Cameroun.
(2) Elle s'applique aux enseignements maternel, primaire, secondaire général et technique,
ainsi qu'à l'enseignement normal.
Article 2 : (1) L'éducation est une grande priorité nationale.
(2) Elle est assurée par l'Etat.
(3) Des partenaires privés concourent à l'offre d'éducation.
Article 3 : L'Etat consacre le bilinguisme à tous les niveaux d'enseignement comme facteur
d'unité et d'intégration nationales.
Article 4 : L'éducation a pour mission générale la formation de l'enfant en vue de son
épanouissement intellectuel, physique, civique et moral et de son insertion harmonieuse dans la
société, en prenant en compte les facteurs économiques, socio-culturels, politiques et moraux.
Article 5 : Au titre de la mission générale définie à l'article 4 ci-dessus, l'éducation a pour
objectifs :
1. la formation de citoyens enracinés dans leur culture, mais ouverts au monde et
respectueux de l'intérêt général et du bien commun;
2. la formation aux grandes valeurs éthiques universelles que sont la dignité et l'honneur,
l'honnêteté et l'intégrité ainsi que le sens de la discipline;
3. l'éducation à la vie familiale;
4. la promotion des langues nationales;
5. l'initiation à la culture et à la pratique de la démocratie, au respect des droits de
l'homme et des libertés, de la justice et de la tolérance, au combat contre toutes formes
de discrimination, à l'amour de la paix et du dialogue, à la responsabilité civique et à la
promotion de l'intégration régionale et sous-régionale;
6. la culture de l'amour de l'effort et du travail bien fait, de la quête de l'excellence et de
l'esprit de partenariat;
7. le développement de la créativité, du sens de l'initiative et de l'esprit d'entreprise;
8. la formation physique, sportive, artistique et culturelle de l'enfant;
9. la promotion de l'hygiène et de l'éducation à la santé.
Article 6 : L'Etat assure à l'enfant le droit à l'éducation.
Article 7 : L'Etat garantit à tous l'égalité de chances d'accès à l'éducation sans discrimination
de sexe, d'opinions politique, philosophique et religieuse, d'origine sociale, culturelle,
linguistique ou géographique.
321
Article 8 : L'enseignement est apolitique.
Article 9 : L'enseignement primaire est obligatoire.
Article 10 : L'école publique est laïque. Sa neutralité et son indépendance vis-à-vis de toutes
les religions sont garanties.
322
Article 15 : (1) Le système éducatif est organisé en deux sous-systèmes, l'un anglophone,
l'autre francophone, par lesquels est réaffirmée l'option nationale du biculturalisme.
(2) Les sous-systèmes éducatifs susévoqués coexistent en conservant chacun sa spécificité
dans les méthodes d'évaluation et les certifications.
Article 16 : (1) Le sous-système anglophone est organisé en cycles et filières ainsi qu'il suit :
l'enseignement maternel d'une durée de deux (2) ans; l'enseignement primaire d'une durée de
six (6) ans; l'enseignement secondaire d'une durée de sept (7) ans; l'enseignement post-
primaire d'une durée de deux (2) ans; l'enseignement normal d'une durée de deux (2) à trois (3)
ans.
(2) L'enseignement secondaire comprend : un premier cycle de cinq (5) ans ayant un sous-
cycle d'observation en tronc commun de deux (2) ans et un sous-cycle d'orientation de trois (3)
ans d'enseignement général et technique; un second cycle de deux (2) ans d'enseignement
général ou d'enseignement technique.
(3) En plus de l'enseignement général, une formation pratique est offerte aux élèves dans les
collèges et lycées professionnels, selon leur orientation.
Article 17 : (1) Le sous-système francophone est organisé en cycles et filières ainsi qu'il suit :
l'enseignement maternel d'une durée de deux (2) ans; l'enseignement primaire d'une durée de
six (6) ans; l'enseignement secondaire d'une durée de sept (7) ans; l'enseignement post-
primaire d'une durée de deux (2) ans; l'enseignement normal d'une durée de deux (2) à trois (3)
ans.
(2) L'enseignement secondaire comprend : un premier cycle de cinq (5) ans ayant un sous-
cycle d'observation en tronc commun de deux (2) ans et un sous-cycle d'orientation de trois (3)
ans d'enseignement général ou d'enseignement technique.
(3) En plus de l'enseignement général, une formation pratique est offerte aux élèves dans les
collèges et lycées professionnels, selon leur orientation.
Article 18 : (1) Les diplômes sont délivrés dans chaque sous-système ainsi qu'il suit : à la fin du
cycle d'enseignement primaire; à la fin du premier cycle d'enseignement secondaire; à la fin du
second cycle d'enseignement secondaire; à la fin de la formation post-primaire; à la fin de la
formation d'enseignement normal.
(2) Le passage au second cycle d'enseignement secondaire est conditionné par l'obtention du
diplôme de fin de premier cycle.
(3) Un décret du Président de la République détermine les certifications du système éducatif.
Article 19 : Les enseignements en cycles et filières, ainsi que les modalités de choix et de
changement desdites filières sont fixés par voie réglementaire.
Article 20 : (1) Les milieux professionnels sont, en tant que de besoin, associés à l'élaboration
et à la mise en oeuvre de la politique de formation par alternance, des contenus et moyens de
la formation ainsi qu'à l'évaluation et à la validation des résultats de cette formation.
(2) Un décret du Président de la République fixe, en tant que de besoin, l'organisation et le
323
fonctionnement du système de formation par alternance.
Article 21 : Les objectifs et les orientations générales des programmes nationaux
d'enseignement et de formation ainsi que le calendrier scolaire national sont fixés par voie
réglementaire.
Article 22 : (1) L'année scolaire comporte au moins trente-six semaines de cours effectifs.
(2) Le rythme d'enseignement comprend des périodes d'études et des périodes de vacances.
Article 23 : (1) L'enseignement est dispensé dans les établissements scolaires ci-après : les
écoles maternelles; les écoles primaires; les collèges et les lycées d'enseignement général; les
collèges et les lycées d'enseignement technique ou professionnel; les écoles post-primaires; les
écoles normales d'instituteurs de l'enseignement général et technique.
(2) Il peut également être assuré par un système d'enseignement à distance.
Article 24 : (1) Les établissements privés d'enseignement concourent aux missions de
l'éducation.
(2) Ils peuvent être libres ou sous contrat.
(3) Le régime de l'enseignement privé est fixé par une loi particulière.
Article 25 : L'enseignement dans les établissements scolaires prend en compte l'évolution des
sciences et des technologies et, dans ses contenus et ses méthodes, est adapté aux évolutions
économiques, scientifiques, technologiques, sociales et culturelles du pays et de
l'environnement international.
Article 26 : Toute implantation d'un établissement public et privé sur le territoire national doit se
faire conformément à des orientations et aux critères définis par voie réglementaire.
Article 27 : (1) L'enceinte d'un établissement d'enseignement est inviolable.
(2) Les chefs d'établissement scolaire sont responsables du maintien de l'ordre dans leur
établissement.
(3) L'intervention des forces de l'ordre ne peut y avoir lieu que sur réquisition expresse du chef
d'établissement.
(4) En cas de défaillance dans l'accomplissement de leur mission de maintien de l'ordre, les
chefs d'établissement sont suppléés de plein droit par les autorités hiérarchiques ou de tutelle.
Article 28 : (1) Toute implantation de salles de jeux, de débits de boissons, de salles de
cinéma, de commerce de tabac et toutes autres nuisances est interdite sans l'enceinte ou la
périphérie des établissements scolaires.
(2) Toutefois, la vente des boissons hygiéniques peut être autorisée au sein des établissements
scolaires.
Article 29 : Les activités d'orientation et de psychologie scolaire s'effectuent au cours de la
scolarité de l'enfant à tous les niveaux d'enseignement.
Chapitre II : De l'évaluation du système éducatif et de la recherche en éducation
Article 30 : L'Etat procède à l'évaluation régulière du système éducatif.
Article 31 : (1) L'Etat encourage et soutient les activités de recherche en éducation.
324
(2) Les activités de recherche en éducation sont conduites par les organes dont la création,
l'organisation et le fonctionnement sont fixés par voie réglementaire.
325
de conscience et d'opinion des élèves.
Article 39 : (1) L'enseignant est soumis à l'obligation d'enseignement, d'éducation,
d'encadrement pédagogique, de promotion scientifique, d'évaluation et de rectitude morale.
(2) Il est, en outre, soumis au respect des textes en vigueur, notamment le règlement intérieur
de l'établissement où il exerce les fonctions d'enseignant.
Article 40 : Le système éducatif régi par la présente loi sera progressivement mis en place par
des textes d'application.
Article 41 : Le système éducatif en vigueur demeure et continue de fonctionner jusqu'à
l'intervention des textes d'application prévus à l'article 40 ci-dessus.
Article 42 : La présente loi sera enregistrée, publiée suivant la procédure d'urgence, puis
insérée au journal officiel en français et en anglais.
(é) Le ministre Charles ETOUNDI
189
Sources : Education 2000
189
Education 2000, revue camerounaise d’éducation, J. Etoundi Ateba (dir.) n°
001, décembre 1998
326
Corpus 8 : LOI PORTANT ORIENTATION
DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
TITRE I : DES DISPOSITIONS GENERALES
Article 1 : (1) La présente loi fixe le cadre juridique général et les orientations fondamentales
de l'Enseignement Supérieur au Cameroun.
(2) L'Enseignement Supérieur est constitué de l'ensemble des enseignements
et des formations post secondaires assurés par des Institutions publiques d’Enseignement
Supérieur et par les institutions privées agréées comme Etablissements d’enseignement
supérieur par l’Etat.
Article 2 : L’Etat assigne à l’Enseignement Supérieur une mission fondamentale de production,
d’organisation et de diffusion des connaissances scientifiques, culturelles, professionnelles et
éthiques pour le développement de la Nation et le progrès de l’Humanité.
Article 3 : (1) L’Etat accorde à l’Enseignement Supérieur un caractère de priorité nationale.
(2) Il organise et contrôle l’Enseignement Supérieur.
Article 4 : Des partenaires privés concourent à l’offre de formation de niveau supérieur.
Article 5 : L’Etat consacre le bilinguisme au niveau de l’Enseignement Supérieur comme
facteur d’unité et d’intégration nationales.
327
l’organisation des études, les débouchés et les passerelles d’une formation à
une autre ;
- garantit la formation initiale et continue des étudiants et autres apprenants dans
les domaines intellectuel, physique et moral ;
- organise la formation des formateurs et des chercheurs ;
- forme des cadres moyens et supérieurs opérationnels dans les domaines
scientifiques et techniques répondant aux besoins de la Nation ;
- favorise l’innovation, la création individuelle et collective dans le domaine des
arts, des lettres, des sciences et des techniques ;
- œuvre à la promotion du bilinguisme, des cultures et des langues nationales ;
- contribue au renforcement de la conscience nationale ;
- concourt à la promotion de l’Etat de droit par la diffusion d’une culture de
respect de la justice, des droits de l’homme et des libertés ;
- participe à l’éradication de toute forme de discrimination et encourage la
promotion de la paix et du dialogue ;
- contribue au sein de la communauté scientifique et culturelle nationale et
internationale, au débat d’idées, au progrès de la recherche et à la rencontre
des cultures ;
- concourt au brassage des populations et à l’intégration nationale ;
- participe au développement et au renforcement de l’égalité des genres ;
- concourt à l’émergence de la culture démocratique, de la culture de la paix, du
développement et de la tolérance.
328
d’enseignement supérieur en tenant compte des spécificités de chacune
d’elles ;
- il assure la programmation de la carte universitaire, à travers le Plan de
développement de l’Enseignement Supérieur, en relation avec les collectivités
territoriales décentralisées et les partenaires socio-économiques ;
- il veille à la pertinence, à la qualité et à l’adaptation continue de l’Enseignement
Supérieur ;
- il définit, en relation avec les partenaires socio-économiques, le cahier des
charges des institutions universitaires publiques et privées ;
- il assure une large information du public sur les formations universitaires et
l’évolution de celles-ci, et sur les besoins en qualification dans les différents
secteurs de la vie nationale ;
- il favorise le développement et l’utilisation des technologies de progrès ;
- il arrête les règles communes à l'élaboration des programmes de formation, à
l'obtention, à la reconnaissance et à l'équivalence des diplômes ;
- il approuve les programmes d’enseignement et les règles communes à
l’obtention des diplômes délivrés par les Institutions privées d’enseignement
supérieur ;
- il arrête les programmes des enseignements dispensés en vue de la
préparation des diplômes nationaux ;
- il exerce un contrôle permanent sur les activités académiques et pédagogiques
des Institutions d’enseignement supérieur.
Article 9 : (1) Le Conseil de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique et
Technique assiste l’État dans l’élaboration et la mise en œuvre de la politique de
l’enseignement supérieur.
(2) L’organisation et le fonctionnement du Conseil de l’Enseignement supérieur et de la
Recherche Scientifique et Technique sont fixés par voie réglementaire.
Section 3 : Du suivi de la politique de l’Enseignement Supérieur
Article 10 : (1) L’Etat exerce un contrôle permanent sur le respect des normes fixées dans tous
les domaines de l’Enseignement Supérieur et sur les activités académiques et pédagogiques
de l’ensemble des Institutions d’enseignement supérieur.
(2) Il exerce un pouvoir de sanction administrative sur les responsables administratifs,
les autorités académiques, les étudiants, les personnels enseignants et les autres personnels
des Institutions d’enseignement supérieur, selon les conditions et les modalités fixées par voie
réglementaire.
(3) Le suivi de la politique de l’Enseignement Supérieur et le contrôle de sa mise en
œuvre sont assurés par l’Autorité de tutelle désignée à cet effet par voie réglementaire.
329
CHAPITRE III DE L’ACCES A L’ENSEIGNEMENT SUPERIEURET DE L’ORGANISATION DES ETUDES
Section 1 : De l’accès à l’Enseignement Supérieur
Article 11 : (1) L’Etat garantit l’égalité d’accès à l’Enseignement Supérieur aux personnes de
nationalité camerounaise, remplissant les conditions académiques et/ou professionnelles
requises et en fonction de la capacité d’accueil de chaque Institution.
(2) A ce titre :
a) l’Etat protège contre toute discrimination tout postulant à l’Enseignement
Supérieur, en raison de la race, du genre, de l’âge, de la religion, de l’origine
linguistique et géographique ;
b) l’Etat encourage les Institutions universitaires à prendre des dispositions ou des
initiatives appropriées facilitant notamment l’accès des personnes handicapées à
l’Enseignement Supérieur.
(3) Chaque Institution d’enseignement supérieur peut déterminer d’autres
conditions d’accès qui lui soient propres, dans le respect des dispositions de l’alinéa 1 ci-
dessus et des lois et règlements en vigueur.
(4) L’enseignement à distance est reconnu et encouragé comme un mode
alternatif de développement de l’Enseignement Supérieur. Son organisation, son
fonctionnement et son contrôle sont régis par des textes particuliers.
(5) Des personnes de nationalité étrangère, remplissant les conditions
académiques prévues à l’alinéa (1) ci-dessus, peuvent également être admises dans les
Institutions d’enseignement supérieur du Cameroun, conformément aux usages internationaux
et/ou aux conditions et accords signés entre le Cameroun et les pays d’origine des postulants.
330
sous le contrôle de l’autorité de tutelle.
Article 13 : (1) Le premier cycle est ouvert aux titulaires du Baccalauréat, du General
Certificate of Education (Advanced Level), d’un diplôme ou titre reconnu équivalent, selon les
modalités fixées par voie réglementaire.
(2) Il a pour finalités :
- de permettre à l’étudiant ou à l’élève d’acquérir, d’approfondir et de diversifier
ses connaissances dans des disciplines fondamentales ouvrant sur un grand
secteur d’activités, d’acquérir des méthodes de travail et de sensibiliser à la
recherche ;
- de permettre l’orientation de l’étudiant ou de l’élève dans le respect de sa liberté
de choix, en le préparant soit aux formations qu’il se propose de suivre dans le
deuxième cycle, soit à l’entrée dans la vie active après l’acquisition d’une
qualification sanctionnée par un titre ou un diplôme.
Article 14 : (1) Le deuxième cycle regroupe des formations comprenant, à des degrés divers,
une formation générale et une formation professionnelle. Ces formations, organisées
notamment en vue de la préparation à une profession ou à un ensemble de professions,
permettent aux étudiants de compléter leurs connaissances, d’approfondir leur culture et les
initient à la recherche scientifique.
(2) L’admission dans les formations du deuxième cycle est ouverte à tous les
titulaires des diplômes ou titres sanctionnant les études de premier cycle, dans la limite des
capacités d’accueil des institutions concernées, ainsi qu’à ceux qui peuvent bénéficier des
dérogations prévues par les textes réglementaires.
(3) L’accès dans ces institutions peut être subordonné à un concours sur
épreuve ou sur étude de dossier du candidat, selon les modalités fixées par voie réglementaire.
(4) La mise en place des formations de deuxième cycle prend en compte
l’évolution prévisible des qualifications et des besoins, qui font l’objet d’une évaluation régionale
ou nationale par les services et organismes compétents.
Article 15: (1) Le troisième cycle est un niveau de formation à la recherche et par la recherche,
qui comporte la réalisation individuelle ou collective de travaux scientifiques originaux. Il
comprend des formations professionnelles de haut niveau intégrant en permanence les
innovations scientifiques et techniques.
(2) Les conditions d’accès et les modalités de délivrance des titres sanctionnant
le cycle de Doctorat sont fixées par voie réglementaire.
(3) Les activités de formation et les travaux de recherche relevant du cycle de
Doctorat peuvent être assurés ou co-dirigés par des enseignants appartenant à des Universités
différentes et ouvrir droit à une co-diplômation, dans des conditions fixées par voie
réglementaire.
331
Article 16 : Les milieux socioprofessionnels ainsi que les collectivités territoriales
décentralisées peuvent concourir à la définition des programmes de formation, à l’évaluation
des connaissances des apprenants, ainsi qu’au financement des différentes filières de
formation, selon les modalités fixées par voie réglementaire ou contractuelle.
Article 19 : (1) Au sens de la présente loi, les Universités d’Etat sont des établissements
publics à caractère scientifiques, technique, professionnel et culturel, dérogeant à la législation
sur le statut général des établissements publics administratifs.
(2) Les ressources des Universités d’Etat sont des deniers publics.
Elles proviennent :
- des subventions de l’Etat et des collectivités territoriales décentralisées ;
- des droits universitaires payés par les étudiants ;
- des activités de production des biens et des prestations de services ;
- des dons et legs ;
- des concours divers provenant de la coopération bilatérale, multilatérale
ou internationale ;
- éventuellement des emprunts.
(3) La gestion et le contrôle des ressources financières des Universités d’Etat
sont fixés par des textes particuliers.
Article 20 : La création et l’organisation des Universités d’Etat sont fixées par voie
réglementaire.
Article 21 : (1) Au sens de la présente loi, les établissements publics d’Enseignement
Supérieur à statut particulier sont des institutions de formation post-secondaire autres que les
332
Universités d’Etat et qui relèvent, soit de la tutelle du Ministère chargé de l’Enseignement
Supérieur, soit de la tutelle conjointe d’un autre département ministériel et du Ministère chargé
de l’Enseignement Supérieur.
(2) Les établissements publics d’Enseignement Supérieur à statut particulier
visés à l’alinéa 1 ci-dessus, sont créés et organisés par voie réglementaire.
Article 22 : (1) Les Institutions privées d’enseignement supérieur sont créées à l’initiative des
personnes physiques ou morales privées ou par des organisations internationales dans les
conditions fixées par des textes particuliers.
Article 23 : (1) Les Institutions privées d’enseignement supérieur sont des structures à but
non lucratif.
(2) Les Institutions privées d’enseignement supérieur comprennent :
- les établissements privés d’enseignement supérieur, laïcs ou confessionnels ;
- les Universités privées.
(3) Les règles générales d'organisation et de fonctionnement des Institutions
Privées d'enseignement supérieur sont fixées par des textes réglementaires et/ou par des
Conventions internationales.
Article 24 : Chaque institution privée d’enseignement supérieur détermine le niveau des
ressources nécessaires à l ‘accomplissement de ses missions, les voies et moyens de leur
financement, dans le strict respect des lois et règlements en vigueur.
Article 25 : Les conditions de diplôme pour l’accès à une institution privée d’enseignement
333
supérieur sont les mêmes que celles prévues pour les institutions publiques d’enseignement
supérieur dispensant la même formation.
Article 26 : Les personnels enseignants permanents des institutions privées d’enseignement
supérieur doivent avoir les mêmes qualifications académiques minimales que celles requises
pour ceux des Institutions publiques pour les mêmes filières et niveaux de formation.
Article 27: Les personnels administratifs, financiers et techniques des Institutions privées
d’enseignement Supérieur sont régis par le Code du Travail du Cameroun.
334
(3) Un diplôme national confère les mêmes droits à tous ses titulaires.
(4) Les règles communes pour la délivrance des titres et diplômes nationaux, les
conditions d’obtention de ces titres et diplômes, le contrôle de ces conditions et les modalités
de protection des titres qu’ils confèrent, sont définis par voie réglementaire.
(5) Les Institutions privées d’enseignement supérieur peuvent délivrer des diplômes et
des titres nationaux sur la base d’une homologation préalablement conférée selon les
conditions fixées par voie réglementaire.
(6) Dans le cadre de la formation continue, les institutions universitaires publiques et les
institutions universitaires privées agréées ou homologuées peuvent délivrer des certificats et
des titres d’établissement sur la base d’une habilitation préalablement octroyée par l’autorité de
tutelle selon les conditions et modalités fixées par voir réglementaire.
Section 2 : De la coopération entre les Institutions d’enseignement Supérieur
Article 31 :
(1)Les Institutions d’enseignement supérieur entretiennent et promeuvent des relations
de coopération entre elles et avec les Institutions ou Organismes nationaux et étrangers
similaires.
(2) Les modalités de cette coopération sont définies par des textes particuliers.
335
techniques et financiers ;
- les étudiants ou élèves des écoles de formation, selon les cas.
(3) Les membres de la Communauté Universitaire disposent de la liberté
d’information et d’expression qu’ils exercent dans les conditions qui ne portent pas atteinte aux
activités d’enseignement et de recherche et qui ne troublent pas l’ordre public.
CHAPITRE I : DES AUTORITES ACADEMIQUES
Article 35 : Les autorités académiques de chaque Institution publique d’enseignement
supérieur sont responsables de l’exécution des missions générales et spécifiques dévolues à
celle-ci. Elles assurent à cette fin la direction, l’animation et le contrôle de l’ensemble des
services internes et des structures opérationnelles relevant de ladite Institution d’enseignement
supérieur.
Article 36 : (1) L’enseignant est le principal garant de la qualité des enseignements et des
formations assurés dans les Institutions d’enseignement supérieur. A ce titre, il a droit, dans la
limite des moyens disponibles, à des conditions de travail et de vie convenables, ainsi qu’à une
formation initiale et continue appropriée.
(2) L’Etat assure la protection de l’enseignant et garantit sa dignité.
Article 37 : (1) L’Enseignant est soumis à l’obligation d’enseignement, d’éducation,
d’encadrement pédagogique, de production scientifique, d’évaluation et de rectitude morale.
(2) Il est en outre soumis au respect des textes en vigueur dans son domaine
d’activité.
Article 38 : (1) Les qualifications requises pour l’exercice de la profession d’enseignant des
Institutions d’Enseignement Supérieur sont fixées par voie réglementaire.
(2) Les Personnels enseignants exercent notamment dans les domaines suivants :
a) l’enseignement, incluant la formation initiale et continue, la formation à distance,
le tutorat, l’orientation, le conseil et le contrôle des connaissances ;
b) la recherche ;
c) la diffusion des connaissances et la liaison avec l’environnement économique,
social et culturel ;
d) la coopération inter-universitaire nationale et internationale ;
e) les activités d’appui au développement ;
f) l’administration et la gestion.
Article 39 : (1) Le statut des enseignants des Institutions universitaires publiques est fixé
par voie réglementaire.
(2) Les conditions de travail des enseignants des Institutions Privées
336
d’Enseignement Supérieur sont déterminées par chaque Institution, dans le respect des lois et
règlements en vigueur.
Article 40 : Les personnels enseignants des Institutions d’enseignement supérieur bénéficient
des franchises et libertés universitaires conformément aux textes en vigueur et aux usages
académiques.
337
Article 50 : (1) La Communauté universitaire constitue une entité solidaire.
Article 53 : Les modalités d’application de la présente loi seront fixées, en tant que de
338
besoin, par voie réglementaire.
Article 54 : La présente loi sera enregistrée, publiée selon la procédure d’urgence, puis
insérée au Journal Officiel en français et en anglais.
Yaoundé, le 16 avril 2001
LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,
Paul BIYA
190
http://www.minesup.gov.cm/fra/Sommaire/page_du_Ministere.htm (04/09/2006)
339
Corpus 9: Centre CITI enseignement supérieur
340
341
342
343
344
345
346
Corpus 10: Programmes officiels de l’enseignement primaire (niveau I)
347
FRANÇAIS – LANGUE SECONDE I
OBJECTIFS GENERAUX ET ORIENTATIONS METHODOLOGIQUES
L’enseignement du français à l’école primaire a pour but de faire acquérir une
maîtrise élémentaire de la langue, c’est-à-dire l’aptitude à comprendre des messages
oraux et écrits et à s’exprimer oralement et par écrit.
Pour l’élève camerounais francophone, le français, qui est une des langues de
scolarisation, est considéré comme langue seconde 1 et doit être enseigné comme tel.
Une bonne maîtrise de la langue de scolarisation est l’une des conditions de réussite à
l’école primaire : la langue de scolarisation est en effet le support des autres
apprentissages et, plus tard, devient l’outil de préparation à la vie professionnelle. Pour
ces raisons, l’enseignant doit accorder une attention particulière à l’enseignement de la
langue seconde 1 de scolarisation.
Dans cet enseignement, on distingue plusieurs types d’activités : le langage,
l’élocution, la lecture, l’écriture, le vocabulaire, l’orthographe, la technique de langue, la
grammaire, la conjugaison, la production d’écrits. Cependant, il importe de souligner
qu’il n’existe aucune cloison étanche entre ces activités qui doivent toutes s’intégrer en
vue de l’acquisition globale de la langue.
Langage (Expression orale)
L’apprentissage du langage c’est aussi l’apprentissage de l’Expression Orale. Il
intègre simultanément celui du vocabulaire de la grammaire, de l’orthographe et de la
conjugaison, dont l’appropriation permettra d’obtenir rapidement une véritable
compétence de communication orale en langue seconde.
OBJECTIFS GENERAUX
L’enseignement du langage vise à développer les capacités de communication
et d’expression orale de l’enfant, tout en le préparant au monde de l’écrit et à la
production écrite. Il aide l’enfant à :
- Etablir les relations entre les mots et les choses à partir d’une situation
fonctionnelle ou de désigner les notions ou les objets en contexte ;
- Prendre conscience des relations que les mots peuvent avoir entre eux en
contexte ;
- Utiliser les mots selon les circonstances et les situations de communication.
OBJECTIFS SPECIFIQUES
L’enseignement du langage au niveau I vise à :
- Communiquer oralement de manière compréhensible en français ;
- S’exprimer correctement en français simple ;
- Produire oralement des textes ;
- Réinvestir ses acquisitions dans les diverses activités de la classe.
348
METHODOLOGIE
La méthode sera essentiellement communicative et s’inspirera de situations
familières à l’enfant pour lui faciliter la compréhension et lui permettre de mieux
s’enraciner dans son milieu.
Au cours de toutes les activités de classe, le maître s’efforcera de susciter les
échanges entre les élèves et privilégiera le travail en groupes. S’appuyant sur une
pédagogie active, il variera les situations d’apprentissage afin de développer chez
l’élève le goût d’apprendre, l’envie de lire et d’écrire, la maîtrise de la pratique de cette
langue.
OBJECTIFS GENERAUX
L’enseignement du vocabulaire au niveau I s’appuie sur les textes de lecture et les
activités de langage. Il consiste à permettre à l’enfant de :
- Nommer/désigner des objets des actions, dans des situations de la vie
courante ;
- Utiliser les mots outils pour exprimer sa pensée ;
- Exprimer des sentiments ( joie, colère, déception, etc. )
OBJECTIFS SPECIFIQUES
Au fur et à mesure des acquisitions, l’élève sera capable de :
- Remplacer le terme général par un terme plus précis (EX : faire par préparer,
construire etc.)
- Grouper des mots de même famille en se limitant aux cas simples(EX : école,
écolier, écolage)
- Distinguer quelques homophones (EX : verre/ vert /vers ; cour/court/cours )
- Nommer quelques antonymes (EX : gentil/méchant ; bien/mal ; bon/mauvais
METHODOLOGIE
Le vocabulaire s’acquiert dans toutes les situations de communication : langage,
lecture, pratique des autres disciplines et au cours des situations courantes de la vie
dans la classe et hors de la classe.
Le maître s’appuiera sur des textes de lecture, des écrits fournis par les élèves, des
documents mis à leur disposition, des émissions radiophoniques ou télévisuelles, des
conversations, etc.
Le maître partira toujours de ce que les enfants savent. Par une observation dirigée du
connu vers l’inconnu, il amènera les élèves à dégager de certaines données concrètes
les notions qu’ils doivent comprendre, assimiler puis utiliser.
GRAMMAIRE
OBJECTIFS GENERAUX
L’enseignement de la grammaire consiste à :
349
- Faire acquérir les mécanismes élémentaires fondamentaux de la langue
française
- Faire acquérir la notion de texte, de paragraphe, de phrase, de mot :
- Faire acquérir les règles de bon usage de la langue ;
OBJECTIFS SPECIFIQUES
L’ apprentissage de la grammaire aidera l’élève à :
- Employer correctement et spontanément la relation sujet-verbe ;
- Employer correctement et spontanément les relations dans le groupe nominal
et le groupe verbal ;
- Utiliser correctement par écrit et oralement les mécanismes fondamentaux de
la langue.
METHODOLOGIE
Les textes d’initiation à la lecture tirés du manuel ou extraits d’autres supports
comprendront des phrases aux formes affirmatives, négatives et interrogatives, des
pronoms personnels, interrogatifs, possessifs et démonstratifs, des noms au
masculin/féminin et au singulier/pluriel, des formes verbales simples.
L’enseignement de la grammaire se fera autour des éléments ci-dessus mais ne sera
pas systématique comme au niveau II et au niveau III.
CONJUGAISON
OBJECTIFS GENERAUX
Au niveau I, il s’agit de :
- D’étudier les formes des verbes les plus usités ;
- De sensibiliser les élèves à la notion de temps et aux conséquences qui en
découlent à l’oral et à l’écrit ;
- De faciliter l’expression des élèves dans toutes les situations de
communication orale et de production écrite.
OBJECTIFS SPECIFIQUES
L’utilisation des verbes faisant partie du langage, l’élève du niveau I devra :
- Utiliser des verbes simples, aux temps usités dans des phrases simples en
rapport avec des situations orales et écrites.
METHODOLOGIE
On aura bien en mémoire qu’apprendre la conjugaison ne signifie pas seulement
réciter de nombreux verbes à toutes les personnes comme des automates. Il s’agit de
partir des situations orales concrètes (parfois se trouvant dans les textes de lecture)
pour aboutir à l’écrit, en se limitant à l’étude des verbes les plus couramment employés
et aux temps les plus usuels dans des situations de communication.
350
ORTHOGRAPHE
OBJECTIFS GENERAUX
L’objectif de l’orthographe au niveau I est de préparer les enfants à la rencontre avec le
code écrit.
OBJECTIFS SPECIFIQUES
Au terme du niveau I, l’élève devra être capable de :
- Copier sans faute des mots usuels, de courtes phrases simples ;
- Se relire pour déceler les erreurs qu’on a pu faire ;
- Reproduire sans faute, sous la dictée ou de mémoire, des mots et de courtes
phrases étudiés et copiés ;
- Appliquer des accords simples : le ‘s’ du pluriel des noms et des adjectifs, le ‘e’
du féminin.
METHODOLOGIE
Il s’agit d’une simple initiation orthographique. Le maître ne donnera ni explications
théoriques, ni règles grammaticales.
L’apprentissage est intimement lié à ceux de la lecture et de l’écriture et ne peut en
être dissocié. Le maître aidera les élèves à mémoriser les graphies des sons en
partant des plus courantes, en établissant et complétant des tableaux - affichages -
cahiers collectifs de référence, sur lesquels les mots sont placés au fur et à mesure
que l’on avance dans l’apprentissage de la lecture.
La pédagogie de l’orthographe au niveau I recommande d’associer toutes les formes
de mémoire (visuelle, auditive, kinesthésique) afin d’accroître les possibilités de
s’approprier la graphie correcte des mots étudiés.
OBJECTIFS D’APPRENTISSAGE-CP
LECTURE
OBJECTIFS GENERAUX
Lire c’est :
-Comprendre un message écrit
- Entrer en contact avec un texte inconnu.
- Etablir des correspondances entre les graphèmes et les sons et inversement
- Construire du sens sur un écrit.
OBJECTIFS SPECIFIQUES
En lecture, au niveau I, on amènera l’élève à :
- Prendre conscience du fait que ce qui se dit peut se lire et s’écrire.
- Mettre en place des stratégies qui lui permettent de donner du sens à l’écrit,
351
c’est-à-dire :
·- Identifier le type de texte ;
·- Trouver des repères dans le texte(mots connus, signes de
ponctuation, mots de liaison )
·- Etablir des liens entre chaîne parlée, graphie et sens ;
·- Identifier automatiquement les mots usuels de la langue.
·- Déchiffrer aisément un court message écrit et le comprendre.
·- Lire silencieusement et à haute voix des petits textes relatifs à la
vie quotidienne.
METHODOLOGIE générale
L’acte de lire sera toujours intégré dans une situation de communication.
A travers le questionnement de l’écrit, le maître amènera les élèves à :
- Reconnaître un texte,
- Repérer des indices,
- Se placer en situation de recherche : organiser ces indices afin de formuler
des hypothèses(les infirmer ou confirmer)
Le maître veillera à favoriser les échanges ente élèves.
Le maître proposera des supports variés et fonctionnels.
La compétence de lecteur ne peut en aucun cas se réduire à la maîtrise de la
combinatoire et/ou de l’oralisation.
L’évaluation, tant formative que sommative, portera sur tous les types de textes et
d’exercices.
METHODOLOGIE à la SIL
La méthodologie est à point de départ global. Elle comprendra une phase de
préparation à la lecture et une phase d’apprentissage proprement dite.
Pendant la phase préparatoire (2 mois environ), tout l’horaire de français est consacré
au langage pour permettre l’acquisition des premiers éléments de l’expression.
L’apprentissage proprement dit de la lecture se déroule en deux phases :
A - Phase analytique :
7 Présentation du texte de lecture composé, soit à partir des leçons du langage, soit
à partir d’un événement de la vie de la classe :
- reconnaissance globale du texte, analyse en phrase ;
- reconstitution du texte, analyse des phrases : recherche des indices (mots
connus, mots liens, ponctuation)
8 Présentation d’une phrase extraite du texte, découpage de cette phrase en mots
contenant le phonème à étudier.
9 Classement des mots découpage des mots en syllabes, isolement de celle
352
contenant le phonème à étudier.
10 Isolement du phonème à étudier, identification et écriture de la ou des lettres
correspondantes.
B- Phase synthétique :
11 association de ce phonème à des phonèmes déjà connus pour former des
syllabes, des mots, des phrases.
12 Lecture de mots et phrases.
13 Lecture expressive de petits textes.
Ce canevas général s’accompagne d’exercices de prononciation de phonèmes, de
discrimination auditive, de réinvestissement des acquis des élèves dans la lecture de
textes nouveaux.
Les textes de lecture comprendront les lettres, phonèmes, diagrammes, diphtongues et
syllabes contenus dans le programme de lecture ci-dessous.
C- SUPPORTS METHODOLOGIQUES
L’acte de lire sera toujours intégré dans une situation de communication. Le maître
veillera à favoriser les échanges entre élèves. Il proposera des supports variés et
fonctionnels.
353
Contenus et Objectifs d ’ Apprentissage – SIL
CONTENUS D’APPRENTISSAGE OBJECTIFS D’APPRENTISSAGE
Préparation à la Lecture (8 semaines) - décoder les images des panneaux de langage pour
produire des textes ou des phrases simples, en utilisant
- Actes de paroles (textes, phrases, expressions, un vocabulaire déjà acquis au cours des leçons
mots) en relation avec les thèmes de langage
d’expression orale.
dont les situations sont illustrées dans des
panneaux. -repérer et identifier les situations typographiques et
éléments d’un texte permettant d’en découvrir le sens
- Prise de conscience par les élèves des notions (titre, majuscules, point, tirets de dialogue, etc )
de texte, de phrase et de mot. - résumer oralement un texte lu par le maître ;
- identifier les personnages, les objets et les actions d’un
récit ;
- donner des renseignements d’un texte lu par le maître ;
- agir en suivant des consignes écrites ;
- établir des correspondances entre la chaîne orale et
le message écrit
(la phrase commence par, et se termine par )
- découper une phrase en mots.
Les voyelles -associer les mots étudiés aux réalités auxquelles ils
- Les graphèmes A a, O o, I i, U u, E e ; renvoient
- Les phonèmes[a],[o],[i],[y],[ø]dans un texte -identifier les mots qui contiennent les voyelles ou
cohérent basé sur un thème de langage et phonèmes à étudier
ayant des mots contenant ces lettres. -identifier les voyelles dans les mots ;
- Les graphèmes é, è, ê, ou. -lire et écrire les voyelles ;
- Les phonèmes -lire un mot, un texte contenant la (les) voyelle(s)
étudiée(s)
Les digrammes an, en, em, eu, oeu, eur -identifier et lire un texte ou une phrase contenant le son
à étudier ;
-identifier et lire le(s) mot(s) contenant le phonème a à
étudier ;
-lire et écrire les graphèmes correspondant aux
phonèmes étudiés ;
-lire des mots ou un texte contenant les graphèmes du ou
des phonème(s) étudié(s)
Les consonnes -associer les mots étudiés au réalités auxquelles il
renvoient ;
-identifier et prononcer les mots qui contiennent les
consonnes à étudier ;
-identifier les consonnes dans des mots ;
-écrire et lire les consonnes c, k et q ;
-lire le son[k] écrit sous les formes graphiques c, k, et q ;
-associer les consonnes c, k , q, aux voyelles pour
obtenir des syllabes ;
-former de nouveaux mots en utilisant ces consonnes ou
ces syllabes ;
-identifier et prononcer les mots qui contiennent ces
consonnes ;
-associer ces nouveaux mots ainsi élaborés aux réalités ;
354
Objectifs et Contenus d ’Apprentissage – CP
Contenus d’Apprentissage Objectifs d’apprentissage
- Lecture de textes(histoires, lettres, journaux, Au CP, tout en poursuivant les objectifs de la SIL,
bandes dessinées, livres, affiches, etc.) l’élève, à partir d’un court texte écrit, devra être capable
de :
- lire attentivement un texte, une information, un mode
d’emploi et répondre aux questions qui s’y rapportent ;
- Lecture de phrases ; - identifier les personnages, les actions d’un court récit ;
- donner des renseignements ;
- résumer oralement un texte lu ;
- agir en suivant des consignes écrites ;
- reconnaître la ou les graphie(s) d’un phonème ;
- Lecture des mots et des syllabes - différencier dans un mot les lettres qui transcrivent les
sons de celles qui sont des marques grammaticales
« e » du féminin, « s » du pluriel des noms et des
adjectifs, « s », « t », « ent », « é » des verbes
conjugués et des liaisons ;
- articuler correctement en respectant la ponctuation ;
- employer l’intonation qui convient pour une lecture
expressive à haute voix ;
Les voyelles - associer les mots étudiés aux réalités auxquelles ils
renvoient ;
- identifier et prononcer les mots qui contiennent les voyelles
ou sons à étudier;
- identifier les voyelles dans les mots ;
- lire et écrire ces voyelles ;
- lire et écrire les mots contenant ces voyelles ;
Diagrammes et graphèmes complexes - identifier et lire un texte ou une phrase contenant le phonème
à étudier ;
- identifier et lire le(s) mot(s) contenant le phonème à étudier ;
lire et écrire les graphèmes correspondant aux phonèmes
étudiés ;
- lire des mots ou un texte contenant les graphèmes du ou des
phénomène(s) étudié(s).
- associer les mots étudiés aux réalités auxquelles ils
Les consonnes renvoient ;
- identifier et lire les mots qui contiennent les consonnes à
étudier
- identifier les consonnes dans des mots ;
- associer les consonnes aux voyelles pour obtenir des
syllabes ;
- écrire et lire les consonnes et les syllabes ;
- donner de nouveaux mots en utilisant ces consonnes et ces
syllabes ;
- associer ces nouveaux mots aux réalités auxquelles ils
renvoient ;
- lire des mots, des phrases ou de courts textes contenant les
consoles ou les syllabes étudiées.
Production d’écrits
OBJECTIFS GENERAUX
Écrire et acquérir des pouvoirs, les pouvoirs de :
- Communiquer directement ;
- Etre autonome ;
- Participer activement à la vie de la communauté (socialisation) ;
355
- Infirmer/confirmer ;
- Sensibiliser (campagne de presse) ;
- Faire rire (théâtre, poème, romans) ;
- Mémoriser et converser ;
OBJECTIFS SPECIFIQUES
L’apprentissage de la production d’écrit permet de :
- Produire des textes diversifiés et adaptés à des situations réelles ;
- Accéder au monde de l’écrit ;
- Acquérir une plus grande maîtrise de la langue ;
- Développer la créativité.
METHODOLOGIE
Technique d’assistance à l’élève
La production d’écrit sera toujours menée en étroite relation avec la lecture de textes
fonctionnels divers.
Le maître fera prendre conscience à l’élève que l’écrit n’est pas une simple transcription orale,
qu’il a des contraintes particulières.
Le maître veillera à assister l’élève tout au long des activités de production d’écrits.
La démarche pour assister l’élève suit les étapes suivantes :
- Analyse de la situation de communication et choix d ’ un type de texte adéquat ; : qui
écrit ? A qui ? Dans quel but ? quel type d’écrit choisir ?
- Choix du support sur lequel on va écrire(sur une feuille de cahier ? sur une grande
feuille blanche ?sur un carton ?etc.)
- Détermination du type de texte choisi :
1) Observation de textes de référence (de même type que celui à produire :récit,
lettre, affiche) ;
2) Recherche puis définition des caractéristiques des textes de référence ;
3) Mise en évidence de la « silhouette » du texte (sa disposition sur la feuille) et
de sa structure(nombre de parties, rôle de chacune d’elles, éléments, etc )
4) Recherche des connaissances linguistiques à mettre en œuvre
(vocabulaire ;grammaire)
5) Écriture - individuelle ou par petits groupes - d’un ‘’premier jet’’ où chaque
élève essaie de tenir compte de ce qui a été dit au cours des étapes préparatoires ;
6) Évaluation par classe de quelques productions d’élèves (ou de petits
groupes) portées ou lues au tableau :
·Comparaison avec les textes - supports.
·Mise en évidence des critères de réussite.
On commence à élaborer une grille de critères de réussite pour ce type de texte ;on le
356
complétera tout au long du travail et, ultérieurement, à l’occasion de lectures ou d’autres
productions d’écrits du même type.
7) relecture par chaque élève (ou groupe d’élèves) de son texte et réécriture en
tenant compte des critères de lecture dégagés ;
8) activités de systématisation, au cours de la réécriture, à propos de quelques
points qui font difficultés pour plusieurs élèves.
9) production finale :l’élève copie son texte avec soin en surveillant l’orthographe
dont on ne tient guère compte dans les premières étapes de la démarche.
10) évaluation à différents niveaux :
·- auto-évaluation à l’aide de la grille de critères de réussite ;
·- évaluation par d’autres élèves (si possible), par le maître à l’aide de la même
grille ;
·- évaluation éventuellement par le destinataire de l’écrit, notamment s’il s’agit
d’une lettre réellement expédiée ;
·- ultérieurement, réinvestissement des acquis dans la production d’autres écrits
de même type.
A la fin du CP, les élèves commenceront à produire des textes courts de deux à trois phrases
(récits, lettres, recettes, règles de jeu ). Dans ce cas la méthodologie sera celle du CE.
357
PROGRAMME AU NIVEAU I SIL ET CP
- s’excuser ;
- correspondre avec d’autres élèves ; de la même école
ou d’autres écoles ;
- rédiger une carte postale ;
- rédiger une carte d’anniversaire .
Descriptions - faire un portrait à partir d’une liste de mots ;
- décrire un dessin, une photo, une carte postale ,
- faire le portrait d’un homme ;
- introduire une description avec des phrases ;
358
Corpus 11 : Programme du secondaire
JANVIER 1995
PRESENTATION
359
leurs observations, ils se sentent démunis puisque ne possédant pas les instruments
qui leur permettent d’analyser le texte et d’en donner le(s) sens.
Les nouveaux programmes au plan des contenus introduisent de nouveaux exercices
en classe de français : l’exploitation de l’image, l’étude de la langue au second cycle,
l’étude de l’œuvre intégrale, le groupement de textes. Même les exercices canoniques
(dissertation, commentaire composé, contraction de texte) sur le plan méthodologique
seront enseignés dans la perspective de la lecture méthodique.
Consciente donc des difficultés que tous ces bouleversements didactiques devaient
provoquer, la sous-section de français et lettres classiques a pris des dispositions pour
faciliter la maîtrise de ces nouveaux programmes en en rédigeant les commentaires.
Ceux-ci s’articulent généralement autour des points suivants : la définition de
l’exercice, ses objectifs, la démarche didactique, les comportements attendus de l ’
élève, les attitudes du professeur, les principes d’évaluation.
Le premier volet que vous recevez maintenant a trait au commentaire composé, à la
dissertation, à l’étude de la langue, à l’élaboration d’une progression, à la lecture
méthodique, au groupement de textes.
Le deuxième volet, relatif à la contraction de texte et à l’exploitation de l’image, vous
parviendra ultérieurement.
Outre ces commentaires, d’autres actions sont envisagées pour vous permettre de
parfaire la maîtrise de ces programmes. Nous pensons aux stages, aux journées
pédagogiques et aux séminaires.
En retour, nous attendons de vous – à travers les rapports des conseils
d’enseignement et des actions de formation – toutes les réactions susceptibles de
nous permettre de vous venir en aide.
Quant à leur utilisation, nous pensons que ces programmes ne doivent pas porter
atteinte à l’esprit d’initiative du professeur. Ils n’ont pour ambition que de servir de
pistes de travail. A vous d’en faire bon usage, c’est à dire de les exploiter sans en être
l’esclave.
C’est à ce prix - là que ces commentaires de programmes auront pleinement atteint
leurs objectifs.
Daniel OBAMA NKODO
INSPECTEUR NATIONAL
Chef de la sous-section de Français
Et de Lettres Classiques.
360
[ ] EXTRAITS DE PROGRAMME
361
classiques ?
II- LES OBJECTIFS :
Les objectifs assignés à l’enseignement de la littérature ne sont donc pas d’arriver à
une étude exhaustive des œuvres ni à une théorie ou à une histoire des genres
littéraires :
Cela relève uniquement de l’enseignement supérieur. Il s’agit avant tout de d’amener
les élèves à lire chaque année un certain nombre d’œuvres, diverses dans leur
contenu, leur date, leur nature, pour qu’ils possèdent à la fin de leurs études
secondaires une assez large expérience littéraire.
Les objectifs suivants sont, à partir de cette expérience,
1° de développer chez les élèves le goût et le plaisir de la lecture, l’aptitude à la
lecture critique, à la lecture à plusieurs niveaux ;
2° de leur donner les méthodes et les concepts qui leur permettront, dans le cadre
d’une autonomie retrouvée, d’analyser et de comprendre les textes, de les situer et de
se situer par rapport à eux, de porter des jugements réfléchis, de choisir ainsi leur
culture.
En d’autres termes, le professeur aura à cœur d’associer dans sa démarche le souci
d’atteindre des objectifs de connaissance (élaboration d’une culture) et des objectifs
de méthode (acquisition de méthodes et de concepts. La réalisation des objectifs de
méthodes, désormais intégrée dans l’enseignement de la littérature, devra permettre à
l’élève d’acquérir une réelle autonomie de lecture, c’est à dire les moyens d’accès à la
culture authentique.
[ ]
LE GROUPEMENT DE TEXTES
I – DEFINITION
Le groupement de textes n’est pas une simple collection ou un quelconque
rassemblement de textes.
En didactique du français au second cycle, on appellera groupement de texte un
ensemble –constitué de 4 à 6 textes- centré sur un problème ou un thème littéraire, sur
un genre, une modalité d’écriture ou l’œuvre d’un écrivain, et proposé aux élèves
comme base d’étude et de réflexion.
Le groupement de textes n’est ni une juxtaposition gratuite d’extraits d’auteurs, ni un
recueil de texte groupés par centre d’intérêt, et associant de façon disparate les
écrivains, les genres et les époques.
Il ne se définit pas non plus comme une illustration, par les textes, des grands thèmes
généraux, universels et temporels ou de leur histoire. Il ne saurait enfin s’assimiler à un
362
cours d’histoire littéraire.
Le groupement de textes proposé à l‘exploitation des élèves obéit à des exigences
précises. Il consiste en une série de textes littéraires et / ou paralittéraires
pertinemment réunis qu’une lecture critique et méthodique permet de confronter.
Organisé en général selon les principes d’homogénéité générique, de cohérence
thématique ou problématique et d’unité diachronique, il s’articule en priorité autour d’un
problème littéraire.
Le groupement de textes est une forme nouvelle d’étude d’extraits. Il tient désormais
une place essentielle dans l’enseignement de la littérature aux côtés de l’étude des
œuvres intégrales.
Il ne s’agit pas toutefois de revenir simplement à l’anthologie ou au florilège que leurs
inconvénients patents ont fait rejeter il y a quelques années : l’étude exclusivement
centrée sur l’histoire littéraire donnait, par l’explication des morceaux choisis, une vue
excessivement atomisée des grandes œuvres, construisait un simple kaléidoscope des
auteurs consacrés par la tradition scolaire. Les mêmes extraits étaient toujours choisis
dans les mêmes œuvres des mêmes grands auteurs. L’histoire littéraire, la biographie,
le psychologisme, le moralisme, et « le bon goût » régnaient à l’excès.
L’extrait en tant que tel a mauvaise presse auprès des plus conscients pour d’autres
raisons : l’œuvre est un tout, construite comme un tout - d’un modeste poème de René
Philombe à l‘ample recherche du temps perdu - c’est dire que le morcellement, i.e. la
mutilation, est une sorte de barbarie, torture
A vrai dire, seules des nécessités pédagogiques ou didactiques pourraient justifier
cette pratique –toujours contestée, toujours renaissante- : manque de temps, nécessité
de s’exercer sur des parties avant de se plonger dans la totalité, obligation d’une
progression construite, etc.
Reprenant le principe d’étudier des extraits, le groupement de textes s’inscrit de ce fait
dans une très longue tradition ; il illustre cependant l’idée qu’il ne doit pas y avoir
d’étude de textes isolée. L ’ élucidation du/ des sens ne peut se faire que par
comparaison avec d’autres textes : textes de la même œuvre, du même auteur, certes,
mais aussi textes de la même forme, du même genre, de la même écriture, de même
fonction, centrés sur le même thème ou relevant de la même problématique. Autant
que le contextuel, l’intertextuel est désormais sollicité.
Il n’est donc pas question, avec l’introduction du groupement de textes, de retomber
dans les travers bien connus ci – dessus évoqués : il s’agit de donner une vue plus
large des phénomènes littéraires, de préciser, enrichir ou dépasser certains des points
363
que l’étude de l’œuvre intégrale ne permet d’aborder que trop brièvement.
L’étude de l’œuvre intégrale et le groupement de textes constituent désormais les deux
volets complémentaires de l’enseignement de la littérature au second cycle.
II- OBJECTIFS
Il en découle que le groupement de textes n’est pas une fin en soi mais qu’il offre
l’occasion :
- d’assurer la mise en place d’instruments d’analyse textuelle ;
- de fixer la réflexion sur une question d’ordre littéraire ; modalités d’écriture, types
de textes, lois d’un genre ou d’une forme, évolution d’un auteur, approche d’un
mouvement esthétique ;
- d’exercer l’élève, par le biais de la lecture méthodique ou de toute autre forme
d’étude, à la confrontation des textes.
- de favoriser l’entrée dans une œuvre intégrale ou de compléter son étude
- et dans une certaine mesure, de construire des savoir- faire et des savoirs
d’ordre culturel transférables.
364
œuvre, ou bien à en relativiser le contenu. De la sorte, l’élève ne sera plus réduit à
reproduire des points de vue tout faits ; il pourra construire lui-même ses propres
références culturelles il pourra se construire une culture littéraire authentique, fondée
sur l’observation et la confrontation des textes plutôt que sur la récitation des cours.
365
LE PROJET MORAL DU CIRET
(1987)
1 Nous sommes témoins d'une révolution sans précédent engendrée par la science
fondamentale et tout particulièrement par la physique et la biologie. Cette
révolution bouleverse la logique, l'épistémologie et la vie de tous les jours à
travers les applications technologiques. Il est essentiel de reconnaître l'existence
d'un important décalage entre la nouvelle vision du monde qui émerge de l'étude
des systèmes naturels et les valeurs qui prédominent encore en philosophie, dans
les sciences de l'homme et dans la vie de la société moderne, valeurs fondées
dans une large mesure sur le déterminisme mécaniste, le positivisme ou le
nihilisme. Ce décalage est fortement nuisible et porteur de menaces de
destruction de notre espèce. Il convient de rechercher ses causes profondes, de
réfléchir aux éventuels remèdes et d'agir en conséquence.
2 Une des causes évidentes de ce décalage est la fragmentation des
connaissances. La spécialisation à outrance est certainement un "mal"
nécessaire, car elle favorise l'accélération du progrès de la connaissance, mais
elle mène en même temps à l'obscurcissement du sens. D'une part, cette
fragmentation conduit l'homme à se sentir comme un étranger dans un monde
envahi par une complexité incompréhensible. D'autre part, elle détermine une
rupture entre les foyers de réflexion et de décision de la vie sociale. Les portes de
l'absurdité, du non-sens, de la violence et d'une dynamique implacable
d'autodestruction sont ainsi largement ouvertes.
Face à cette situation, il convient d'encourager par tous les moyens possibles
l'activité de recherche dans une nouvelle approche scientifique et culturelle - la
transdisciplinarité - dans sa tentative de reconstituer une image cohérente du
monde.
3 Il est important de distinguer avec soin la transdisciplinarité d'autres activités
apparemment très proches, sinon identiques, comme la pluridisciplinarité, la
multidisciplinarité ou l'interdisciplinarité, mais qui sont en fait, quant à leurs
moyens et à leurs finalités, radicalement différentes de la transdisciplinarité.
La transdisciplinarité n'est pas concernée par le simple transfert d'un modèle
d'une branche de la connaissance à une autre, mais par l'étude des
isomorphismes entre les différents domaines de la connaissance. Autrement dit,
la transdisciplinarité prend en compte les conséquences d'un flux d'informations
circulant d'une branche de la connaissance à une autre, permettant l'émergence
366
de l'unité dans la diversité et de la diversité par l'unité. Son objectif est de mettre à
nu la nature et les caractéristiques de ce flux d'information et sa tâche prioritaire
consiste en l'élaboration d'un nouveau langage, d'une nouvelle logique, de
nouveaux concepts pour permettre l'émergence d'un véritable dialogue entre les
spécialistes des différentes branches de la connaissance.
4 De par sa propre nature, la transdisciplinarité refuse tout projet globalisant, tout
système fermé de pensée, toute utopie, tout asservissement à une idéologie, à
une religion, à un système philosophique quels qu'ils soient. Sa finalité n'est pas
l'unification de toutes les branches de la connaissance, but qui serait absurde et
illusoire. Plus modestement, la transdisciplinarité essayera de mieux nous
rapprocher du réel, par l'étude conjointe de la nature et de l'imaginaire, de
l'univers et de l'homme pour nous permettre de mieux faire face aux différents
défis de notre époque.
5 Le besoin de la transdisciplinarité se fait ressentir de plus en plus. La preuve en
est la multiplication des clubs de réflexion, des colloques ou des livres qui
touchent, de près ou de loin, au sujet de la transdisciplinarité. Mais ces initiatives
fort nécessaires ne peuvent nullement remplacer une véritable activité de
recherche, de longue haleine, réunissant les meilleures compétences des
différentes branches de la connaissance et les plus qualifiées parmi celles qui ont
réfléchi à cette approche.
Il nous semble donc hautement souhaitable de créer un véritable centre de
recherche transdisciplinaire, qui pourrait devenir le lieu privilégié de rencontre
entre les spécialistes des différentes sciences et ceux des autres domaines
d'activité, en particulier les artistes, les industriels et les spécialistes de
l'éducation. Un tel centre de recherche n'existe nulle part, ni en France, ni en
Europe, ni dans le monde. De caractère inévitablement international, ce centre
aurait, de par sa localisation et sa structure initiale, une réalité tout d'abord
européenne.
Outre l'activité de recherche proprement dite, matérialisée par des publications et
des colloques, nous envisagerions l'organisation d'une Conférence Internationale
Annuelle, l'organisation régulière d'actions médiatiques et la constitution d'une
banque de données informatique.
Il est bien évident que le fonctionnement de ce Centre International de Recherche
et Études Transdisciplinaires demande certains moyens d'ordre matériel et un
minimum de structures (même si, pour être fidèle à son orientation, il doit miser
367
sur son auto-organisation).
6 La connaissance scientifique, de par son propre mouvement interne, est arrivée
aux confins où elle doit reprendre un dialogue actif et fructueux avec d'autres
formes de connaissance. Fondé sur l'esprit de rigueur scientifique, l'activité du
Centre International de Recherche et Études Transdisciplinaires permettra
l'avènement d'un échange dynamique entre les sciences exactes, les sciences
humaines, l'art et la tradition.
Tout en reconnaissant comme axe principal de son activité la recherche
fondamentale, le Centre International de Recherche et Études Transdisciplinaires
sera largement ouvert vers la vie sociale. Une attention particulière sera
consacrée à la recherche de nouvelles méthodes d'éducation afin de surmonter la
rupture entre la science contemporaine et les visions dépassées du monde. A
long terme, la création d'une université transdisciplinaire serait envisageable.
7 Les avancées de la science moderne laissent présager la naissance d'une
nouvelle rationalité, infiniment plus riche que celle qui nous a été léguée par
l'espérance scientiste du XIXe siècle. La création d'un Centre International de
Recherche et Études Transdisciplinaires pourrait apporter une contribution
importante à l'avènement de cette nouvelle rationalité.
368
INDEX DES NOTIONS ET CONCEPTS
A
Âme, 28, 252, 253, 254, 255, 256, 257, 258, 260, 266, 270, 272, 273, 275, 297, 298, 299, 300, 309
Approche, 9, 16, 21, 22, 29, 32, 33, 39, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 58, 59, 61, 63, 64, 72, 73, 74, 75, 77, 79, 84, 85, 86, 104, 105,
112, 114, 130, 141, 160, 163, 166, 170, 179, 186, 187, 188, 193, 194, 202, 219, 220, 222, 226, 231, 234, 238, 240, 255, 273,
282, 283, 285, 292, 296, 299, 300, 303, 307, 311, 316, 364, 366, 367
Autonomie, 14, 29, 43, 57, 71, 167, 211, 224, 230, 234, 236, 267, 268, 270, 309
B
besoin, 19, 27, 193, 199, 228, 229, 234, 241, 252, 263, 267, 275, 292, 323, 339, 357, 367
C
Cameroun, 22, 23, 28, 34, 39, 85, 87, 88, 91, 92, 93, 96, 99, 104, 105, 106, 113, 118, 119, 120, 121, 122, 123, 124, 125, 126,
127, 128, 129, 131, 132, 133, 134, 135, 136, 137, 139, 140, 142, 143, 146, 148, 149, 150, 151, 153, 155, 156, 158, 167, 168,
169, 171, 172, 174, 181, 204, 207, 210, 211, 221, 226, 227, 233, 238, 241, 242, 245, 269, 276, 281, 282, 285, 287, 289, 290,
297, 301, 306, 310, 311, 313, 321, 327, 330, 334
Colonisation, 94, 124, 125
Communication, 24, 25, 33, 64, 93, 98, 100, 101, 103, 113, 117, 130, 133, 135, 144, 148, 149, 152, 153, 154, 155, 156, 171,
172, 184, 193, 196, 198, 201, 221, 250, 251, 268, 276, 286, 306, 311, 312, 313, 316, 348, 349, 350, 352, 353, 356, 357
Compétence, 18, 30, 147, 163, 169, 179, 196, 199, 200, 224, 225, 256, 264, 268, 292, 300, 334, 348, 352
Complexité, 16, 22, 33, 34, 39, 41, 42, 43, 50, 54, 56, 57, 59, 61, 62, 63, 65, 66, 73, 77, 79, 142, 158, 166, 172, 174, 225, 233,
255, 282, 284, 285, 287, 296, 301, 306, 311, 366
Conscience, 3, 8, 11, 12, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 25, 27, 28, 29, 30, 31, 41, 57, 61, 62, 63, 73, 85, 131, 223, 246,
254, 274, 275, 276, 277, 282, 284, 306, 325, 326, 327, 328, 337, 348, 351, 354, 356
Contexte, 20, 23, 29, 32, 34, 41, 43, 47, 51, 54, 61, 62, 63, 64, 69, 90, 105, 111, 131, 144, 147, 150, 153, 154, 161, 164, 167,
169, 170, 176, 181, 186, 197, 215, 219, 221, 225, 232, 233, 238, 282, 288, 289, 290, 296, 306, 348
Curriculum, 89, 159, 160, 161, 162, 163, 164, 165, 166, 272, 299, 301, 302, 304, 305, 306, 308, 310, 312
D
Didactique, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 22, 24, 25, 26, 32, 33, 35, 36, 44, 63, 64, 65, 66, 73, 87, 92, 102, 105, 145,
147, 156, 159, 162, 163, 169, 170, 172, 174, 178, 179, 210, 212, 227, 231, 234, 248, 254, 263, 264, 265, 269, 270, 281, 284,
285, 297, 298, 299, 301, 302, 304, 305, 306, 309, 311, 312
Discipline, 12, 13, 15, 16, 18, 19, 21, 25, 30, 36, 59, 60, 84, 113, 117, 154, 164, 167, 176, 188, 193, 196, 197, 198, 199, 200,
242, 258, 259, 298, 316, 321, 347
Dispositif, 14, 159, 162, 165, 166, 203, 207, 208, 222, 224, 228, 229, 231, 232, 237, 275, 281, 296, 311
Données, 31, 33, 42, 46, 47, 50, 51, 52, 53, 62, 64, 75, 78, 84, 85, 87, 88, 89, 90, 106, 107, 108, 111, 114, 123, 164, 167, 171,
212, 222, 224, 227, 228, 236, 245, 247, 254, 261, 282, 283, 284, 303, 306, 349, 359, 367
E
École, 16, 17, 41, 47, 91, 92, 93, 124, 132, 146, 149, 150, 153, 157, 161, 162, 172, 179, 186, 188, 193, 195, 196, 199, 200, 201,
202, 221, 228, 238, 239, 240, 241, 243, 257, 263, 265, 266, 272, 273, 276, 289, 291, 295, 297, 299, 300, 302, 303, 306, 308,
313, 315, 319, 322, 347, 348, 349, 358
Educateur, 25, 161, 246, 247, 254, 260, 264, 267
Éducation, 16, 17, 18, 19, 20, 23, 24, 25, 28, 32, 35, 36, 43, 44, 61, 63, 64, 74, 78, 88, 99, 100, 101, 102, 103, 105, 121, 126,
129, 131, 132, 134, 163, 137, 144, 147, 149, 159, 160, 161, 162, 163, 165, 173, 179, 181, 183, 184, 185, 193, 203, 204, 207,
209, 220, 223, 227, 228, 236, 243, 244, 245, 246, 247, 250, 254, 259, 260, 265, 266, 270, 271, 272, 284, 287, 290, 291, 296,
297, 298, 299, 300, 301, 302, 303, 304, 306, 307, 308, 309, 310, 311, 321, 322, 324, 325, 331, 326, 336, 347, 367, 368
Épistémologie, 11, 23, 39, 40, 67, 77, 144, 164, 284, 301, 310, 366
Éthique, 3, 8, 11, 12, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 40, 74, 77, 219, 226, 236, 237, 239,
241, 243, 245, 247, 249, 250, 252, 269, 274, 276, 277, 283, 286, 287, 291, 297, 301, 306, 307, 308, 327, 338
F
FLE, 23, 24, 108, 109, 145, 149, 155, 156, 158, 287, 309
FLM, 23, 108, 109, 149, 155, 156, 287
FLS, 23, 24, 28, 30, 33, 108, 109, 144, 145, 149, 150, 152, 153, 155, 156, 158, 160, 285, 287
Formation, 14, 21, 23, 24, 25, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 40, 68, 75, 78, 79, 80, 85, 87, 89, 91, 94, 103, 105, 106, 111, 135,
136, 161, 162, 163, 165, 166, 167, 176, 178, 180, 182, 184, 186, 191, 193, 194, 195, 196, 198, 199, 201, 202, 203, 206, 207,
210, 211, 212, 213, 214, 215, 219, 222, 223, 224, 225, 226, 227, 228, 229, 231, 233, 236, 241, 249, 254, 268, 269, 273, 281,
282, 283, 284, 291, 295, 296, 298, 301, 305, 307, 308, 309, 310, 311, 312, 313, 317, 318, 319, 320, 321, 322, 323, 324, 325,
327, 328, 329, 330, 331, 332, 333, 334, 335, 336, 337, 360
369
Français, 13, 14, 18, 22, 23, 24, 25, 28, 30, 31, 34, 39, 65, 73, 85, 88, 89, 91, 92, 93, 94, 98, 105, 106, 107, 108, 109, 111, 112,
113, 117, 120, 121, 124, 125, 126, 127, 128, 130, 132, 133, 134, 135, 136, 137, 140, 143, 144, 145, 146, 147, 148, 149, 150,
151, 153, 154, 155, 156, 157, 158, 167, 168, 169, 170, 171, 172, 173, 174, 176, 181, 184, 203, 220, 221, 222, 227, 230, 241,
242, 244, 248, 263, 276, 281, 285, 286, 287, 295, 297, 298, 299, 300, 301, 302, 303, 304, 305, 306, 309, 310, 311, 313, 326,
339, 348, 352
G
Global, 45, 51, 63, 72, 156, 178, 181, 184, 206, 215, 233, 234, 352
H
Hypothèse, 8, 13, 50, 59, 115, 150, 167, 220
I
Ingénierie, 85, 223, 224, 228, 237, 305, 307, 312
Intégration, 23, 24, 25, 31, 32, 33, 34, 35, 64, 65, 78, 79, 85, 88, 89, 93, 105, 106, 107, 111, 112, 132, 136, 153, 172, 176, 177,
178, 179, 181, 182, 184, 185, 187, 188, 189, 193, 194, 196, 198, 199, 200, 201, 202, 210, 211, 213, 215, 219, 222, 228, 231,
232, 234, 236, 237, 245, 249, 254, 261, 276, 281, 285, 286, 303, 305, 306, 309, 310, 321, 327, 328
L
Linguistique, 9, 15, 18, 20, 23, 25, 31, 35, 49, 79, 80, 105, 113, 114, 115, 116, 117, 120, 129, 131, 132, 133, 136, 137, 139, 140,
143, 146, 149, 150, 156, 157, 158, 171, 220, 258, 275, 283, 284, 287, 295, 296, 299, 301, 303, 305, 307, 309, 321, 330
M
Machine, 256, 258, 260, 274, 285, 306
Modèle, 44, 50, 51, 60, 67, 68, 69, 73, 74, 75, 150, 162, 164, 166, 178, 184, 185, 186, 187, 203, 211, 219, 226, 227, 229, 232,
234, 237, 238, 239, 241, 249, 264, 272, 281, 283, 366
Modélisation, 34, 59, 67, 68, 69, 70, 72, 238, 305
P
Paradigme, 34, 44, 54, 57, 58, 59, 66, 72, 130, 230
Philosophique, 23, 35, 40, 42, 44, 46, 47, 48, 58, 67, 115, 158, 178, 236, 274, 285, 307, 321, 367
Plurilinguisme, 13, 85, 135, 136, 157, 174, 297, 231, 299, 311
Politique, 35, 61, 92, 103, 105, 121, 122, 126, 127, 130, 131, 132, 133, 134, 165, 136, 137, 155, 174, 181, 185, 209, 220, 223,
232, 247, 249, 266, 270, 272, 278, 301, 321, 322, 323, 328, 329, 334, 335
Programme, 30, 56, 91, 92, 160, 162, 163, 164, 168, 174, 184, 185, 186, 187, 191, 193, 194, 195, 200, 243, 347, 353
R
Recherche, 3, 8, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 18, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 32, 33, 34, 35, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 48, 50,
51, 52, 53, 54, 57, 58, 59, 63, 64, 65, 73, 85, 86, 88, 89, 106, 107, 108, 115, 154, 170, 180, 181, 182, 183, 184, 193, 201, 208,
212, 219, 220, 222, 227, 231, 236, 237, 247, 248, 249, 284, 285, 295, 299, 301, 302, 303, 304, 305, 307, 311, 316, 324, 327,
328, 331, 334, 335, 336, 352, 363, 366, 367, 368
S
Sociolinguistique, 20, 23, 32, 33, 34, 80, 87, 89, 91, 113, 116, 117, 129, 143, 144, 154, 155, 156, 157, 174, 227, 242, 287, 296,
297, 300, 301
Statut, 23, 34, 85, 91, 92, 103, 108, 143, 144, 145, 153, 154, 155, 156, 158, 221, 242, 248, 255, 281, 287, 317, 318, 325, 332,
333, 336, 337
Système, 20, 24, 26, 34, 51, 54, 55, 56, 59, 60, 61, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 77, 78, 79, 84, 91, 92, 103, 106, 114, 116, 121,
125, 137, 158, 159, 166, 174, 177, 181, 184, 185, 186, 203, 208, 211, 225, 230, 232, 234, 238, 241, 248, 256, 257, 258, 266,
281, 305, 309, 322, 323, 324, 325, 326, 335, 367
Systémique, 9, 21, 33, 34, 35, 39, 46, 48, 53, 54, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 63, 64, 65, 66, 67, 69, 70, 72, 73, 74, 77, 78, 79, 84, 85,
86, 159, 161, 162, 163, 183, 184, 186, 203, 215, 219, 222, 227, 231, 234, 238, 258, 265, 270, 282, 283, 285, 296, 303, 305,
311
T
Technologie, 21, 36, 64, 75, 89, 94, 176, 177, 182, 223, 232, 237, 251, 262, 267, 289, 291, 292
Technologies de l’Information et de la Communication, 11, 28
TIC, 11, 23, 25, 29, 32, 33, 39, 64, 65, 88, 99, 100, 101, 102, 103, 105, 106, 176, 179, 181, 182, 183, 185, 186, 187, 188, 189,
191, 193, 194, 195, 196, 197, 198, 199, 200, 201, 202, 203, 204, 205, 207, 209, 210, 211, 212, 213, 214, 222, 228, 231, 232,
234, 236, 237, 245, 247, 248, 250, 254, 260, 261, 268, 275, 277, 281, 284, 285, 289, 290, 291, 298, 303, 305, 307, 312, 313
TICE, 23, 24, 28, 30, 31, 32, 33, 65, 79, 87, 88, 89, 99, 106, 111, 179, 180, 181, 182, 184, 203, 205, 208, 210, 211, 212, 213,
214, 215, 217, 219, 222, 226, 227, 228, 233, 234, 236, 247, 248, 249, 268, 281, 283, 285, 286, 290, 291, 302, 308, 312, 313
370
INDEX DES AUTEURS
B
Barbier, 246, 259, 271, 312
Berbaum, 34, 296
Bikoï, 87, 91, 167, 169, 172, 173, 174, 221, 244, 288
Biloa, 93, 129, 174, 297
Bitjaa, 131, 156, 313
C
Calvet, 3, 120, 132, 158, 220, 227, 287, 288, 297, 298, 299, 300, 311, 312
Chiss, 3, 143, 296, 298, 310
Comenius, 12, 27, 36, 219, 264, 266, 270, 296, 300, 303
Cuq, 3, 19, 24, 25, 145, 147, 160, 163, 299
D
De Rosnay, 54, 60, 61, 74
Demaizière, 3, 79, 232, 233, 234, 299, 312
Depover, 79, 163, 166, 299, 313
Descartes, 27, 47, 48, 253, 255, 271, 300
Dumont, 227, 297, 300
Durand, 55, 56, 67, 68, 69, 70, 71
E
Essono, 93, 113, 135, 136, 139, 171, 301, 312
K
Karsenti, 3, 181, 232, 303
Krishnamurti, 36, 243, 244, 270, 303
L
Linard, 3, 180, 181, 222, 223, 234, 254, 286, 290, 304
M
Martinez, 3, 20, 304, 305, 311
Meirieu, 3, 306
Mendo Ze, 241, 244, 306
Minyono-Nkodo, 241, 270
Morin, 3, 41, 42, 43, 61, 62, 63, 65, 244, 259, 284, 301, 306, 307
N
Nicolescu, 258, 259, 269, 283, 291, 292, 307
P
Peraya, 182, 236, 237
Piaget, 180, 264, 266, 307
Platon, 27, 35, 46, 219, 253, 271
T
Tabi-Manga, 132, 140, 167, 169, 170, 171, 310
V
Van den Maren, 43
Viens, 182, 236, 237
W
Wolton, 3, 247, 250, 268, 276, 311
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