Analyse de Risques Dans Le Domaine de La Prevention
Analyse de Risques Dans Le Domaine de La Prevention
ANALYSE DE RISQUES
3
4
REMERCIEMENTS
Nous tenons à exprimer toute notre gratitude à l’ensemble des personnes qui, par leurs
conseils avisés et leur amicale bienveillance, ont contribué à la réalisation de ce
mémoire.
Et
qui ont bien voulu nous donner des pistes de travail dans nos recherches.
5
6
SOMMAIRE
RESUME 9
SUJET 11
INTRODUCTION 12
2. DECRYPTAGE DE LA METHODE 22
2.1. Les méthodes à l’étranger 22
2.1.1. La couverture des risques 22
2.1.2. La réglementation anglo-saxonne 23
2.1.3. Les acteurs de la prévention 23
2.1.4. Les autorisations de construire 23
2.1.5. Le contrôle des ERP 23
2.1.6. L’analyse de risques 24
2.1.7. La part des études et retour d’expérience dans la prévention 24
2.1.8. Conclusion 24
2.2. Les démarches scientifiques existantes 24
2.2.1. Dans le domaine industriel 24
2.2.2. La Méthodologie d’Analyse des Dysfonctionnements dans les Systèmes
et la Méthode Organisée et Systémique d’Analyse des Risques (MADS-MOSAR) 27
2.3. La méthode descriptive réglementaire : le CLICDVECRM 28
2.3.1. But 28
2.3.2. Principe 28
2.3.3. Adéquation à la problématique 29
2.4. Une démarche « novatrice » : la « M.A.R.I.P. » 29
2.4.1. But 29
2.4.2. Principe 29
2.4.3. Application de la méthode 30
2.4.4. Evaluation de la MARIP et conclusion 31
7
3. METHODE PROPOSEE 31
3.1. Propositions opérationnelles 31
3.1.1. Des faisceaux de convergences entre les méthodes… 31
3.1.2. …conduisant à la détermination d’une méthode d’analyse de risques
appliquée à la prévention 32
3.1.3. Description de la méthode : une analyse systémique en 8 étapes 33
3.1.4. Détermination des barrières 34
3.1.5. Confrontation risques / barrières 36
3.2. Propositions organisationnelles – des simplifications nécessaires pour le
travail quotidien des commissions 36
3.3. L’intégration de l’Ingénierie de la Sécurité Incendie 37
3.4. L’intégration du retour d’expérience (Retex) et la Recherche des Causes
d’Incendie (RCI) 38
3.4.1. Le retour d’expérience 38
3.4.2. La recherche de causes d’incendie 38
3.5. Vers une doctrine nationale ? 39
CONCLUSION 41
GLOSSAIRE 42
BIBLIOGRAPHIE 45
ANNEXES 46
8
RESUME
Si la notion d’analyse de risques n’est pas explicitée dans les textes réglementaires
relatifs aux établissements recevant du public, mais suggérée et abordée dans certaines
normes ou circulaires, elle constitue un outil indispensable pour le préventionniste pour
aborder les visites ou études à quelque niveau que ce soit.
La définition d’une méthode, intégrant une part scientifique, apparait comme un moyen
propre à réduire la part de subjectivité de l’analyse et une clé d’harmonisation des
pratiques des préventionnistes.
La méthode présentée est fondée sur une méthode scientifique utilisée dans le domaine
industriel – MADS-MOSAR - puis sur la déclinaison du règlement de sécurité (connu de
tous les préventionnistes) en barrières de prévention, protections ou mitigations propres
à réduire la dangerosité des évènements redoutés dans les ERP. Elle constitue un outil
d’aide à la décision pour le préventionniste, pratique et compréhensible pour l’ensemble
des membres de la commission de sécurité, par sa traduction schématique du système
« source – flux – cible » et le positionnement des barrières.
Cette méthode s’est voulue à destination des préventionnistes, adaptable à tous les cas
d’espèce (études, projets hors normes, mise en sécurité, visites), graduée par la
possibilité de prise en compte de sous-systèmes (service) ou du système (bâtiment) et
évolutive par l’intégration des données de retour d’expérience, de recherche des causes
d’incendie et d’ingénierie de la sécurité incendie.
9
10
SUJET
L’analyse de risque reste pour le préventionniste un atout décisif pour le distinguer dans
sa capacité à appréhender le risque incendie face à la montée en puissance d’autres
acteurs de la sécurité civile tels les bureaux d’études recourant à d’autres méthodes.
Reposant pour partie sur le retour d’expérience opérationnel, elle semble plus
particulièrement adaptée pour répondre à la problématique de mise en sécurité la plus
appropriée. Après avoir démontré son utilité et défini ses buts, vous définirez une
méthode globale originale intégrant tant la démarche scientifique que le retour
d’expérience.
Cette méthode globale peut-elle devenir une doctrine nationale afin d’harmoniser
l’appréciation des uns et des autres en matière d’acceptabilité du risque ?
11
INTRODUCTION
Or, cette analyse, qui conduit à émettre un avis binaire (favorable ou défavorable) relatif
à la poursuite de l’activité d’un établissement, est actuellement empreinte d’une certaine
subjectivité pour les membres de cette commission.
Sur ces différentes bases, nous proposerons une méthode pragmatique, appliquée à la
prévention incendie, basée sur des concepts scientifiques, intégrant le retour
d’expérience et compatible avec les objectifs actuels des commissions de sécurité.
1
DOSNE R. 2009 « Dramatique feu de lingerie à l’hôpital » in Face au risque n°449 – St-Marcel – CNPP Entreprise SARL
2
MARIP Méthode d’Analyse de Risque en Prévention présentée au congrès national des Sapeurs Pompiers de l’année 2009.
12
1. L’ANALYSE DE RISQUES ET LA PREVENTION
1.1.1.1. Analyse
1.1.1.2. Risque3
Courbe de Farmer
3
Etymologiquement, le mot « risque » viendrait de l’italien risco ou de l’espagnol riesgo, dérivés du latin resecum (« ce qui
coupe »), pour désigner d’abord l’écueil qui menace les navires, puis plus généralement tout danger encouru par les marchandises en
mer. L’autre origine possible, le roman rixicare (« se quereller » qui a donné « rixe ») évoque aussi le danger. Toutefois, le risque n’est
pas simplement synonyme de danger. La première étymologie l’associe à une volonté d’entreprendre tout en maîtrisant les coups du
sort, objectif des assurances maritimes.
Peretti-Watel P. 2001, La société du risque, Paris, Editions La Découverte – Collection Repères
13
1.1.1.3. Analyse de risques
C’est l’objet des méthodes qui cherchent à établir une prévision sur la probabilité
de survenance d’un événement potentiellement dommageable. L’analyse des
risques consiste en une analyse des faits ou des situations qui prépare à
l’évaluation des risques.
« L’analyse des risques est un processus systématique d’utilisation et
d’organisation d’informations disponibles sur les dangers et les vulnérabilités afin
d’estimer les risques consécutifs pouvant contrarier le déroulement et les objectifs
d’une activité4 ».
L’analyse des risques constitue une des premières étapes de la maîtrise des
risques.
1.1.1.4. Prévention
Le code général des collectivités territoriales (CGCT) fixe les missions des SDIS par
son article L 1424-2 : « Les services d'incendie et de secours sont chargés de la
prévention, de la protection et de la lutte contre les incendies. »
Et l’article L 1424-3 du CGCT précise que : « (…) Pour assurer les missions de
prévention qui leur incombent, notamment en ce qui concerne la réglementation
applicable aux risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant
du public, le maire ou le préfet dispose des moyens relevant des services
d'incendie et de secours (…) ».
4
Lcl Andurand Ph - cours ENSOSP
5
Article R 123-1 du CCH
6
Article R 123-3 du CCH modifié par le décret n°78-1296 du 21 décembre 1978
7
Article R 123-4 ; R 123-7 ; R 123-8 et R 123-11 du CCH
8
Depuis le décret n°2009-1119 du 16 septembre 2009
9
Article R 123-9 et R 123-10 du CCH
10
Article R 123-5 et R 123-6 du CCH
14
garantir le bon fonctionnement des installations et des équipements
techniques particuliers à certains types d’établissements11 ;
disposer de moyens de secours contre l’incendie appropriés aux risques12 ;
permettre l’accès et la mise en service des moyens de secours et de lutte
contre l’incendie13.
Ces objectifs sont aussi repris dans certains articles premiers14 des chapitres du
règlement de sécurité.
11
Article R 123-10 du CCH
12
Article R 123-11 du CCH
13
Article R 123-4 du CCH
14
Les articles CO 1 ; AM 1 ; DF 1 ; CH 1 ; EL 1 ; EC 1 et MS 1reprennent en partie (en fonction des domaines traités) ces
objectifs.
15
Polach A. 2004 « De l’approche globale à la gestion des risques » in Face au risque n° 400 – St-Marcel – CNPP Entreprise SARL
16
Dont le Dr F.R. Farmer, directeur de la sûreté de l’UK-Atomic Energy Authority, qui délivre en 1967 à l’AEIA de Vienne, un
papier qui devient célèbre : « Siting criteria – a new approach ». Dans le domaine du nucléaire, il ouvre une voie radicalement
différente, celle de la méthode d’évaluation probabiliste qui se substitue à l’approche américaine basée sur le concept de l’accident
maximum plausible.
17
La loi du 19 juillet 1976 dite « loi SEVESO » et son décret d’application n° 77-1133 du 21 septembre 1977
18
Entre dans la composition des dossiers de demande d’autorisation d’exploiter, « une étude exposant les danger que peut
présenter l’installation en cas d’accident et justifiant les mesures propres à en réduire la probabilité et les effets […] » mais la prise en
compte de la probabilité est très générique.
19
Arrêté du 10 mai 2000 relatif à la prévention des accidents majeurs impliquant des substances ou préparations dangereuses
présentes dans certaines catégories d’ICPE soumises à autorisation.
15
1.2 Aspects réglementaires
Il apparaît ainsi que les grands incendies, par l’émoi qu’ils suscitent dans l’opinion
publique, jouent le rôle de « catalyseurs ». Ils amènent le législateur à faire
évoluer la réglementation de la prévention des incendies dans les ERP.
20
Dans l’histoire ancienne nous pourrions trouver trace de textes. Ceux-ci imposent toutefois plus une certaine forme
d’organisation de la lutte contre l’incendie que de véritables mesures de prévention.
21
Circulaire du 12 mai 1926 relative aux « mesures destinées à combattre et éteindre les incendies dans les grands magasins,
salles de spectacle, etc… ». Les « autorités locales » de l’époque, « chargées d’en assurer l’exécution » (article 287) ne s’en saisissent
pas vraiment.
22
Le 28 octobre 1938, l’incendie se propage très rapidement à l’ensemble du bâtiment, puis au quartier faisant 75 morts. Aussi,
suivent en 1938 et 1939, des décrets qui réorganisent les secours et portent création des marins-pompiers de Marseille.
23
Ce décret s’inspire fortement de la circulaire de 1926 qui était sans force juridique. Il pose les bases de la réglementation
incendie actuelle. Il consacre le rôle du maire au sein de la prévention incendie et instaure des commissions de sécurité afin de donner
des avis techniques aux autorités.
24
Décret n° 54-856 relatif à « la protection contre les risques d’incendie et de panique dans les ERP »
25
Le décret n° 73-1007 du 31 octobre 1973 abroge le décret du 13 août 1954. Il renforce les contrôles et insiste sur les
responsabilités et les obligations des constructeurs, propriétaires et exploitants. En outre, il créé les établissements de 5ème catégorie.
Abrogé, il est actuellement codifié sous les numéros R 123-1 à R 123-55 du CCH.
26
Au sens des articles R 123-3 ; R 123-14 et R 123-18 à R 123-21 du CCH
16
1.2.2 L’analyse de risques - une incitation « en filigrane » dans les textes…
L’article R.123-13 stipule que « des mesures spéciales destinées à compenser les
atténuations aux règles de sécurité auxquelles il aura été dérogé peuvent être
imposées ». L’article R.123-21 du CCH stipule que « le groupement
d’établissement doit faire l’objet d’un examen spécial de la commission de sécurité
compétente qui, […] détermine les dangers que présente pour le public l’ensemble
de l’établissement ». Enfin, l’article R.123-48 incite la commission à « étudier dans
chaque cas d’espèce les mesures d’adaptation qu’il y a lieu d’apporter aux
établissements existants »
Sans être nommée, l’analyse de risques est également « sous-jacente » dans les
articles GN 4, GN 6, GN 10 et GE 1 du règlement de sécurité.
27
Section II du chapitre unique du livre premier du règlement
28
Article GN 4
29
Article GN 6
30
Article GN 10
17
Au titre même du décret, répondent les dispositions de son article 2 qui stipule
que : « la commission est l’organisme compétent, […] pour donner des avis à
l’autorité investie du pouvoir de police ».31 La commission doit « éclairer » les
décisions de l’autorité.
Il est également précisé que « le préfet peut consulter la commission sur les
mesures prévues pour la sécurité du public lors de grands rassemblements »32. La
« mission générale de réflexion »33 qui incombe à la commission porte ainsi
principalement sur une question de sécurité civile34. Une lecture large du texte
pourrait trouver là un appel à la réalisation d’une analyse de risques.
Enfin, la circulaire du 23 avril 200335 précise les conduites à tenir dans trois cas où
la commission peut être amenée à statuer en l’absence des rapports de
vérifications techniques. Le troisième cas, celui « d’une visite en cours de
fonctionnement d’un établissement ne disposant pas d’ouverture », stipule que le
procès-verbal doit rendre compte non seulement de la situation administrative de
l’établissement mais aussi du niveau de sécurité présenté pour le public. Et en
situation de « danger avéré mis en évidence par la visite »36, il convient de
« consigner les faits observés dans le procès-verbal en s’appuyant sur une analyse
de risques pour conclure à la dangerosité de la poursuite de l’exploitation et
émettre un avis défavorable. La gravité de la situation doit être mentionnée
explicitement et motivée, ainsi que l’urgence à la faire cesser. »
De nombreux petits hôtels connaissent des incendies dramatiques dans les années
1970 à 1980. Aussi, sont-ils appelés à un respect de certaines règles de sécurité
minimales par l’arrêté du 4 novembre 1976 et surtout par l’arrêté du 22 juin
199037.
Un travail d’analyse est donc nécessaire pour leur « mise en sécurité » qui diffère
bien d’une « mise en conformité », non prévue par le législateur.
31
Article 2 du Décret n°95-260 du 8 mars 1995 modifié
32
Article 3 du décret n°95-260 du 8 mars 1995 modifié par le décret n°2006-665 du 7 juin 2006
33
Circulaire du 22 juin 1995 (au point 1.2.)
34
Le domaine de cette consultation relève cependant plus des services « prévision » que « prévention » des SDIS. Par ailleurs, il
est précisé que cette compétence générale trouve notamment ses limites dans l’existence d’autres instances, telles que la
« commission pour l’analyse des risques et l’information préventive ». Voir également la Circulaire du 13 décembre 1993 portant
création d’une « cellule d’analyse des risques et de l’information de la population » remplacée depuis 2004 par le « conseil
départemental de sécurité civile ».
35
Circulaire du 23 avril 2003 relative aux rapports de vérification technique et aux visites de sécurité
36
« la mise en évidence par la visite de non-conformités suffisamment graves pour mettre en danger le public accueilli créé les
conditions objectives du constat, par la commission de sécurité, qu’il s’agit d’un établissement avéré dangereux. »
37
Arrêté du 22 juin 1990 portant approbation du règlement de sécurité contre les risques d’incendie et de panique dans les petits
établissements
38
Circulaire du 4 mai 2005 relative au contrôle des ERP de 5ème catégorie comportant des locaux à sommeil
39
Arrêté NOR INTE 0600640A du 24 juillet 2006 portant approbation de diverses dispositions complétant et modifiant le
règlement de sécurité contre les risques d’incendie et de panique dans les établissements recevant du public (petits hôtels)
18
Le terme : « analyse de risques » n’est textuellement mentionné ni dans le
règlement de sécurité, ni dans le décret de 1995. Il apparaît uniquement dans les
circulaires du 23 avril 2003 et du 1er février 2007 dont les portées sont relatives.
L’incitation réglementaire à recourir à l’analyse de risques est certes présente,
mais bien « en filigrane ».
Son enseignement démontre, si besoin était, qu’elle constitue un des outils que le
préventionniste sera immanquablement amené à utiliser dans ses activités
professionnelles.
La circulaire de 1995 stipule que l’avis rendu par la commission doit être conclusif :
soit favorable, soit défavorable. L’avis défavorable doit être « motivé par la
référence aux principaux articles du règlement non respectés ». Par ailleurs, pour
une levée de l’avis défavorable, « il appartient au maître d’ouvrage de proposer
des solutions pour rétablir le niveau de sécurité satisfaisant ».
Rien cependant n’explicite ce qu’est un « niveau de sécurité satisfaisant » ! Une
lecture critique des dispositions de la circulaire amène (par logique contradictoire)
à penser que ce niveau serait recouvré par un retour au respect des articles du
règlement qui s’applique. Les relations « conforme = risque acceptable = avis
favorable » et « non conforme = risque inacceptable = défavorable » semblent
bien sous-jacentes !
Ces égalités trop simplistes doivent être modulées par l’analyse de risques. Seule
cette analyse permet une détermination des risques éventuels et peut ainsi en
complément de l’analyse réglementaire venir éclairer l’avis des membres de la
commission.
Dans des projets particuliers (Grand Palais par exemple) ou hors classification par
rapport à la réglementation existante (Aérogares par exemple), l’analyse de risques
permet de se prononcer sur les mesures à mettre en œuvre pour atteindre les
objectifs dégagés par la réglementation.
Face à ce type de cas, une norme41 traite des « lignes directrices pour l’évaluation
du risque incendie ». Elle détaille des circonstances dans lesquelles l’évaluation du
risque incendie est « utile »42 et d’autres dans lesquelles elle est « essentielle »43.
40
Exercice sous la forme d’une étude de dossier et d’un avis à motiver devant les membres de la commission de sécurité.
41
AFNOR NF X ISO /TS 1732 - norme expérimentale « lignes directrices pour l’évaluation du risque incendie » - mai 2008
19
Confronté à des projets audacieux ou novateurs pour lesquels le règlement de
sécurité semble inadapté, ou du moins montrer ses limites, le préventionniste
trouve dans l’analyse de risques une réponse incontournable.
Il importe donc bien que « les motivations des avis rendus par la commission de
sécurité soient exprimées en fait (défauts constatés) et en droit (obligation
réglementaire). »47 Leur rédaction claire et compréhensible pour un non praticien
doit exprimer le danger qui ressort d’une analyse des risques de l’établissement.
C’est au vu de cet avis éclairé et motivé que l’autorité de police sera à même de
prendre une décision proportionnée et appropriée au cas d’espèce.
42
Elle est utile, dans les circonstances où il est important de prendre en considération des scénarios de faible probabilité, mais de
forts effets tels que : un grand nombre de personnes vulnérables, les départs de feux avec des taux d’augmentation du débit
calorifique très élevés et une densité de matériaux combustibles dans des zones vulnérables telles les voies de dégagement.
Elle est également utile dans les circonstances où les dimensions de l’incendie, généralement utilisées dans les estimations
déterministes de danger sont insuffisantes en tant que mesures de sévérité de l’événement.
43
Elle est essentielle lorsque l’ingénierie de la sécurité incendie déterministe ne peut pas correctement traiter les scénarios
d’incendie considérés.
44
Le législateur a autorisé en 2004 un recours à l’ISI et à la modélisation des incendies. Ce recours est toutefois strictement
limité aux domaines du désenfumage et de la résistance au feu des matériaux (Arrêtés du 22 mars 2004).
45
CAA de Nantes - requête n°04NT00685 – arrêt du 29 décembre 2005 ;
TA de Nice – requête n°0600466 - ordonnance du 21 février 2006 ;
TA de Montpellier – requête n°0605178 et suiv – décision du 4 novembre 2008.
46
Loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre
l’administration et le public
47
Lcl Genovese M, Eléments de cours « la prévention et le droit » - ENSOSP
20
1.4 Aspects sociologiques - l’acceptabilité du risque
Comme évoqué précédemment, les risques sont l’objet d’outils scientifiques, techniques,
réglementaires et normatifs48 destinés à leur analyse et à leur management.
Cependant la définition des seuils d’acceptabilité est discutable et appelle des réserves.
Les sciences humaines notamment se sont attachées à montrer, dans le domaine de la
gestion des risques, les limites des sciences exactes qui se heurtent souvent à la notion
de facteur humain.
« Par ailleurs, la peur, moins liée à l’objectivité qu’à l’imaginaire induit, met en lumière la
notion de perception des risques. Les sociologues avancent que l’individu ne perçoit pas
passivement le risque, il se l’approprie pour en construire une représentation qui ait du
sens dans son univers » 49. Aussi, existe-t-il un décalage entre la réalité technique du
risque et la perception que l’individu en a, reposant parfois sur l’émotionnel voire
l’irrationnel. Ainsi, notre société moderne, « société du risque »50, se caractérise par une
hypersensibilité aux risques bien que l’existence humaine n’ait jamais parue aussi sûre.
Pour F. Walter51, professeur à l’université de Genève, « les seuils de sensibilité changent
et l’on a plus les mêmes tolérances à l’insécurité […] ils se déplacent en fonction des
conjonctures. Aujourd’hui on constate une « surnégativisation » croissante dans la
perception des risques ».
D’un point de vue sociologique, l’acceptation du risque est donc bien une construction
subjective et sociale (voire aussi culturelle et historique pour certains), qui dépend de la
position et des critères pris en compte par la personne ou le groupe considéré.
Autres réserves à l’acceptabilité du risque, celles formulées par les tenants de l’approche
déterministe qui opposent à l’approche probabiliste sa capacité à admettre
l’inadmissible : celui d’un risque majeur peu probable.
Mais la probabilité d’occurrence des risques est une réalité : tant pour les assureurs que
pour les industriels. Et, comme précédemment évoqué, la réglementation applicable aux
risques industriels en précise déjà les conditions d’évaluation52.
Le sapeur-pompier préventionniste doit prendre en compte dans l’analyse qu’il peut faire
d’un établissement, cet aspect sociologique du risque que constitue son acceptabilité.
Quand bien même, en définir les contours semble une gageure !
48
Dans la norme expérimentale citée ci-avant, l’acceptation du risque est « une décision d’accepter un niveau de risque estimé,
fondée soit sur la conformité aux critères d’acceptation, soit sur une décision explicite de modifier ces critères ».
49
Lcl Domeneghetti B. 2007, “Risques et Probabilités”, in Le sapeur-pompier magazine n°996, Paris, Les éditions des pompiers de
France
50
Titre d’un ouvrage du sociologue allemand Ulrich Beck, auquel on attribue la paternité de la « sociologie du risque », nouvelle
spécialité de la sociologie générale.
51
Walter F. 2009, « le grand entretien : le risque dans l’histoire » in Préventique Sécurité n° 103, Bordeaux, Groupe Préventique
52
Arrêté du 29 septembre 2005 relatif à l’évaluation et à la prise en compte de a probabilité d’occurrence, de la cinétique, de
l’intensité des effets et de la gravité des conséquences des accidents potentiels dans les études de dangers des installations classées
soumises à autorisation.
21
Les textes réglementaires concernant la prévention des risques d’incendie et de panique
ont été modifiés ou précisés à la suite de sinistres souvent dramatiques. Ils ont permis
de diminuer significativement le nombre de décès dans ces incendies.
Toutefois, le recours exclusif à l’analyse réglementaire semble parfois ne pas apporter
de réponses satisfaisantes. L’analyse de risques peut alors apporter au préventionniste
une autre perception de la situation à laquelle il est confronté. Fort de cette analyse, ses
avis seront d’autant plus éclairés et compréhensibles pour les autorités qu’il se doit de
conseiller.
Deux circulaires récentes incitent même « textuellement » à recourir à une analyse de
risques sans pour autant fixer de méthode à appliquer.
Il reste donc à définir et à préciser cette méthode globale d’analyse de risques auquel le
préventionniste peut faire appel.
2. DECRYPTAGE DE LA METHODE
Avant de définir une méthode d’analyse de risques, nous allons parcourir les méthodes
existantes.
53
La thèse de doctorat en sciences et gestion du Colonel (e.r.) de Sapeurs Pompiers Jean-François SCHMAUCH développe la
méthode d’analyse et de couverture des risques notamment au Royaume Uni et en Allemagne : « Identification et description des trois
principales écoles d’organisation des Services ayant en charge de répondre aux situations d’urgence. Analyse et comparaison de la
rationalité, de l’efficacité et de la rentabilité de ces Services à partir de la résolution d’équations simples s’écrivant sous la forme
générale f(Risques, Moyens opérationnels, Délais d’intervention) ».
54
Les critères considérés sont : la densité de construction, le type de construction, le nombre d’étages, le taux d’occupation.
55
L’obligation de moyens se traduit en terme de délais et de matériel.
22
De ces deux méthodes ressort l’obligation de moyens mais aussi la performance
économique des services de secours comparée à la valeur des biens et/ou des
personnes sauvegardés.
Il est également à noter que le régime déclaratif de l’effectif n’existe pas et que ce
dernier est défini par le préventionniste.
56
En Suisse, la « police du feu » est chargée de la prévention batimentaires.
57
En France, le pouvoir de police spéciale est détenu par le Maire ou le Préfet.
58
L’étude de permis de construire est payante au prorata de la surface à construire.
23
2.1.6. L’analyse de risques
2.1.8. Conclusion
2.2.1.1. But
L’objectif est de présenter à partir d’une étude de danger, les mesures de maîtrise
et de réduction des risques.
2.2.1.2. Principe
59
En France, dans le cadre du projet Flumilog, des essais grandeur nature sont réalisés pour établi une méthode harmonisée de
calcul de flux thermique émis lors d’un incendie d’entrepôt.
60
Le retour d’expérience critique analyse les causes et décrit ce qui aurait pu se passer dans d’autres circonstances.
61
La revue britannique « Fire House » a consacré un article sur l’art et la manière de fermer une salle de spectacle (théâtre) en
pleine représentation et de l’expliquer aux spectateurs.
24
installations industrielles et d’autre part, une présentation de l’environnement
immédiat du site afin d’identifier les cibles potentielles.
Elle est suivie par une Analyse Prévisionnelle des Risques (APR) mise en œuvre
dans le but d’identifier les causes et la nature des accidents potentiels, à partir :
d’un recensement des potentiels de dangers et identification des
évènements redoutés basés notamment sur le retour d’expérience ;
d’une identification et caractérisation des phénomènes dangereux
avec la prise en compte de leur cinétique ;
d’une évaluation des risques.
Il s’ensuit une Analyse des Modes de Défaillance, de leurs Effets et de leur Criticité
(A.M.D.E.C.).
L’analyse se poursuit par l’application d’une Matrice de Maîtrise des Risques (dite
démarche MMR).
Les deux échelles de probabilité et de gravité sont évaluées puis réutilisées pour
constituer un tableau à double entrée appelé couramment "matrice de criticité".
Les accidents potentiels (ER) définis par leur couple probabilité/gravité sont placés
dans cette matrice où le couple probabilité/gravité est jugé acceptable,
62
Cf Annexe n°2
63
Au niveau national, le ministère chargé de l’Environnement a décidé de mettre en place en 1992, au sein de la Direction de la
Prévention des Pollutions et des Risques (DPPR) une structure spécifiquement chargée du retour d’expérience : le Bureau d’Analyse
des Risques et Pollutions Industrielles (BARPI).
64
Cf annexe n° 1
25
inacceptable (NON) ou faisant l'objet d'une démarche d'amélioration continue
(MMR) selon un rang allant de 1 à 2.
Probabilité
E D C B A
Désastreux MMR rang 2 NON rang 1 NON rang 2 NON rang 3 NON rang 4
Catastrophique MMR rang 1 MMR rang 2 NON rang 1 NON rang 2 NON rang 3
Gravité
Important MMR rang 1 MMR rang 1 MMR rang 2 NON rang 1 NON rang 2
Risque élevé : pour une nouvelle autorisation : le risque est présumé trop important
pour pouvoir autoriser l'installation en l'état : il convient de demander à l'exploitant de
modifier son projet de façon à réduire le risque à un niveau plus faible
Risque intermédiaire – MMR (mesures de maîtrise des risques) : démarche
d'amélioration continue nécessaire pour réduire le niveau de risque (priorité d'action
au rang le plus élevé)
Risque moindre : pas d'obligation de réduction complémentaire du niveau de risque
Tableau n°2 : tableau MMR
Cette grille représente alors un outil d'aide à la décision visant à examiner les axes
de solutions envisageables destinées à réduire la criticité de l'événement redouté.
2.2.1.3. Intérêt
65
Barrières techniques ou organisationnelles.
66
Barrière de sécurité active : tout élément matériel ou organisationnel, permettant de prévenir ou de réduire la probabilité
d’occurrence d’un évènement redouté ou d’en limiter les conséquences dont l’action demande une énergie.
Barrière de sécurité passive : ne nécessite pas l’apport d’une source d’énergie extérieure et l’intervention d’un système
mécanique pour que la barrière joue son rôle (cuvette de rétention, arrête flamme,…).
67
Les éléments importants pour la sécurité comprennent des paramètres, équipements, procédures opératoires, instructions et
formations des personnels.
68
Les scenarii majeurs au sens de la réglementation sont les scénarii qui potentiellement peuvent causer un décès à l’extérieur de
l’établissement. Ils sont positionnés à partir de la gravité 4 sur la grille de criticité (sans prise en compte des moyens de protection et
de prévention).
26
2.2.2. La Méthodologie d’Analyse des Dysfonctionnements dans les Systèmes et
la Méthode Organisée et Systémique d’Analyse des Risques (MADS-MOSAR)69
2.2.2.1. But
Elle s’applique aussi bien dès la conception d’une installation nouvelle qu’au
diagnostic d’une installation existante dans toutes ses phases de vie :
conception ;
mise en route ;
régime de croisière ;
maintenance ;
démantèlement.
2.2.2.2. Principe
Après avoir mis en exergue des scénarios d’accident, les avoir hiérarchisés et
discuté de leur acceptabilité par application de grille gravité-probabilité-
acceptabilité, elle définit et qualifie les barrières principales.
On trouve 2 types de barrières :
de type technologique (automatismes de protection) ;
d’utilisation (consignes).
Par ailleurs, en fonction de leur position dans le scénario, les barrières sont de
types suivants :
de prévention (barrières du système source, de l’événement principal
et des effets induits pour réduire la probabilité d’occurrence de l’ENS ;
de protection (Barrières du système cible pour diminuer la gravité des
dommages) ;
de mitigation (barrières ultimes atténuant et limitant les
conséquences en cas d’accident).
69
Conçue par le CEA et l’IUT de Bordeaux
27
2.3. La méthode descriptive réglementaire : le CLICDVECRM
2.3.1. But
2.3.2. Principe
Chaque item fait l’objet d’un classement dans une catégorie qui le soumet à une
réglementation afférente, sorte de règles de l’art appliquées à la prévention des
risques d’incendie et de panique dans ces bâtiments.
28
2.3.3. Adéquation à la problématique
La méthode décrite ci-dessus est une liste itérative à mettre en relation avec des
règles qui doivent s’appliquer en fonction d’un classement en type et catégorie,
constituant des risques échelonnés en « strates ». Cela permet de prédéfinir les
modes de défaillance-type et de leur trouver une parade stéréotypée.
L’avantage de cette méthode est d’être rapide et déterministe. Elle constitue une
« boîte à outils » pour la mise en place de barrières réductives. Toutefois, elle ne
prend pas en compte les sources initiales de danger comme en MOSAR.
Le SDIS du Lot et Garonne (47) a inscrit dans sa doctrine départementale une méthode
d’analyse de risques appelée MARIP Méthode d’Analyse de RIsques en Prévention.
2.4.1. But
2.4.2. Principe
29
2.4.3. Application de la méthode
30
La phase 6 : Maîtrise des risques
Avantages Inconvénients
3. METHODE PROPOSEE
Des nombreuses méthodes qui ont été étudiées dans la partie 2, on peut déduire
que chacune d’entre elles apporte une partie de la solution au problème du
préventionniste. Toutefois on ne trouve pas dans ces méthodes existantes, tant
déductives qu’inductives ou tant probabilistes que déterministes, un cheminement
70
Formation initiale ou de maintien d’acquis.
31
intellectuel simple et pragmatique aboutissant à une analyse de risques
exhaustive.
L’étude du sens logique de ces méthodes montre que certaines abordent les
problèmes sous l’angle des risques (danger x probabilités) telles que l’APR et la
MOSAR alors que d’autres recherchent des barrières-type face à des risques
catégorisés (CLICDVCRM), en laissant une ouverture vers une méthode
d’évaluation de réponses plus ajustées (ISI).
Identification
Domaine Quantification Identification
Méthode des scénarios
d’emploi des risques de barrières
de risques
Scénarios types Risques Barrières types
CLICDVCRM ERP
non connus catégorisés réglementaires
Approche basée
sur le RETEX et Evaluation par Barrières évaluée
APR IC
sur l’expertise ingénierie par ingénierie
scientifique
Approche basée
sur le RETEX et Evaluation par Barrières évaluée
MOSAR IC
sur l’expertise ingénierie par ingénierie
scientifique
Approche basée Pondération Barrières types
MARIP ERP
sur le RETEX arbitraire réglementaires
Approche basée
sur le RETEX et Evaluation par Barrières évaluée
ISI ERP issu IC
sur l’expertise ingénierie par ingénierie
scientifique
Tableau n°5 : Tableau comparatif des méthodes
Nous proposons donc de mettre en place une méthode d’analyse croisant l’esprit
de la MOSAR (pour l’analyse des risques) avec l’esprit du CLICDVCRM (pour les
barrières types).
34
Barrière niveau I Barrière niveau II Barrière niveau III
(Source) (Flux) (Cibles)
Type d’exploitation en
fonction :
- de la nature,
- de l’effectif et du type
Classement
de public reçu
(personnes âgées,
PMR, handicaps,
enfants etc. )
Desserte et accès des
Implantation Isolement par rapport services de secours
et isolement aux tiers Nombre de façades
accessibles
Cloisonnement et Mode de réalisation,
Construction aménagements hauteur et résistance
intérieurs au feu du gros œuvre
Nombre de sorties,
escaliers ou espaces
d’attente sécurisé
Dégagements Largeurs et position
des issues
Sens d’ouverture
Praticité et signalisation
Renouvellement d’air
Désenfumage des
circulations horizontales
Ventilation et et verticales
désenfumage Emplacement des
commandes
d’ouverture, gaines et
clapets
Présence d’éclairage de
Electricité – Mise en conformité des Dispositifs d’arrêt
sécurité : évacuation et
Eclairage installations électriques d’urgence
ambiance
Conformité des Différents conduits,
Chauffage – générateurs gaines et clapets
Climatisation Type de combustible et Organes de coupure et
son stockage dispositifs de sécurité
Isolement par rapport
Risques Liste des locaux à
aux dégagements et
particuliers risques
autres locaux
Système de sécurité
Incendie avec :
Système de détection
automatique d’incendie
Système de mise en
sécurité
Implantation et Système d’alarme
Moyens de dimensionnement des Formation du personnel
secours moyens d’extinction ou service de sécurité
Affichage des plans et
consigne
Système d’alerte
Moyens facilitant
l’intervention des
services de secours
Délais d’intervention
Tableau n°6 : Tableau de correspondance barrières/réglementation
35
3.1.5. Confrontation risques / barrières
La plus value apportée par le préventionniste consistera à simplifier ce travail par le filtre
de son expérience opérationnelle en ne retenant que les scénarios pour lesquels les
barrières sont manquantes, c'est-à-dire les établissements qui ne sont pas en sécurité.
L’avantage de cette méthode est de pouvoir ensuite rédiger une motivation de l’avis
rendu. Cette rédaction pourrait être bâtie sur la base de la phraséologie type enseignée
au PRV2 (Annexe 4).
36
Nous pouvons en créer une pour exemple à partir du scénario ci-dessus :
« Dans l’hypothèse d’un départ de feu, hypothèse renforcée par le constat d’absence de
contrôle technique sur les installations électriques, la propagation interne horizontale
pourra être favorisée par le mauvais isolement intérieur des locaux à risques particuliers.
L’évacuation du public sera difficile et un phénomène de panique n’est pas à exclure car
l’alarme ne sera pas immédiate. Les raisons qui précèdent sont de nature à mettre en
péril le public fréquentant l’établissement. En conséquence, le rapporteur émet un avis
défavorable à la poursuite de l’exploitation. »
Depuis 2004, il existe un nouvel outil, une science émergente, à disposition des acteurs
de la prévention : l’Ingénierie en Sécurité Incendie. Utilisée pour différents critères
d’évaluation71 dans le milieu industriel, et notamment pour alimenter les études de
danger, elle n’est utilisée au profit des ERP que pour des études concernant le
désenfumage72 et la résistance au feu des structures. Elle constitue un moyen
scientifique permettant de définir des solutions adaptées, ajustées même, dans le
respect des objectifs fixés par la réglementation. Elle est utilisée pour les projets
particuliers et novateurs en termes d’architecture73 mais aussi pour les bâtiments
existants74 lorsque la réglementation prescriptive est inapplicable.
La norme NF XP ISO/TS 16732 précise notamment le cadre et les conditions dans
lesquelles une analyse de risques peut être menée (il est à noter que la notion d’analyse
de risque y est explicitée et définie). L’ISI recherche l’enchaînement des évènements
susceptibles de conduire à une situation d’atteinte pour les personnes et les biens et
quantifie la marge de sécurité offerte par les ouvrages par l’évaluation d’une criticité
(probabilité / gravité).
Elle fait l’objet d’un projet national de recherche, le PN – ISI75, en cohérence avec
l’approche européenne de la maîtrise de risques. Ce dernier tend à mettre en place une
réglementation s’appuyant sur les évaluations de performances des mesures de sécurité
incendie.
La méthode présentée pourra intégrer les résultats de cette science pour disposer de
données intangibles sur l’efficacité des barrières (et donc de leur perméabilité).
71
Dans le milieu industriel, les modélisations portent sur le désenfumage, le comportement au feu des structures et matériaux,
l’évacuation des personnes, l’opacité des fumées, la toxicité du milieu.
72
L’arrêté du 22 novembre 2004 a modifié l’article DF 4 de l’arrêté du 25 juin 1980 modifié qui dans son paragraphe 2 autorise et
précise les obligations d’application.
73
Aérogare, terminal satellite 3 « Roissy Charles de Gaulle ».
74
le Grand palais, gare de Strasbourg.
75
Plan National – Ingénierie de Sécurité Incendie.
37
3.4. L’intégration du retour d’expérience (Retex) et la Recherche des
Causes d’Incendie (RCI)
38
L’ENSOSP78 et la Fédération Nationale des Sapeurs-Pompiers de France
encouragent cette démarche pour son intérêt opérationnel, gage d’une plus
grande adhésion.
Dans le cadre de notre étude, nous pensons que la RCI peut contribuer à l’analyse
de risques en permettant notamment de79 :
créer une base de données nationale de référence ;
utiliser les enseignements issus des retours d’expérience ;
améliorer les pratiques opérationnelles ;
adopter des mesures raisonnées de prévention et prévision.
Nous l’avons vu, l’acceptabilité du risque reste une valeur très subjective largement
influencée par les expériences et l’irrationnel propres à chacun.
78
L’ENSOSP a formé un groupe de travail, les travaux sont en cours.
79
Objet de l’article pour la revue des avocats, intitulé « les Services d’Incendie et de Secours doivent-ils conduire des expertises »
écrit par le colonel (E.R.) Jean François Schmauch, ingénieur du CNAM & Docteur en sciences de gestion, expert « incendies &
explosions » auprès de la cour d’appel de Rennes.
80
Un module de connaissance du feu est intégré dans les formations initiales dispensées par le département du Val d’Oise et se
déroule au fort de Domont.
81
Portail National de Ressources et de savoir en cours de mise en place et développement par l’ENSOSP.
39
Nous avons choisi de ne pas proposer de quantifications pondérées, empiriques et
arbitraires qui peinent à refléter une réalité du risque. En ce sens, l’ISI apporte un début
de solution chiffré, reproductible toute chose égale par ailleurs. Mais elle nécessite une
étude au cas par cas.
Si l’esprit de la présente méthode devait être retenu, on pourra rechercher une écriture
plus exhaustive de la méthode en partenariat avec les différents acteurs de la prévention
(Préventionnistes, ENSOSP, ministères concernés, préventeurs industriels, université,...).
40
CONCLUSION
Si l’analyse de risques n’est pas explicitée dans les textes relatifs aux commissions
consultatives départementales de sécurité et d’accessibilité, elle constitue un outil
complémentaire à usage quotidien du préventionniste pour formuler son avis. Elle
devient l’atout majeur de la profession lorsqu’il s’agit d’instruire des projets hors normes
ou des mises en sécurité dans des établissements existants.
Des méthodes scientifiques issues du monde industriel, la plus adaptée pour l’application
au domaine de la prévention des risques d’incendie et de panique nous a semblé être la
MADS - MOSAR. La MARIP développée par le SDIS du Lot-et-Garonne est précurseur
d’une telle application.
41
GLOSSAIRE
Accident
Evènement qui rompt la marche régulière des choses. Par extension, le mot a pris le sens
d’événement fâcheux ou dommageable. Par la suite, il qualifie les actions soudaines par
opposition aux actions lentes (maladie) ou chronique (maladie, pollution). L’accident vise
généralement un événement d’une certaine gravité, par opposition à l’incident.
Le mot caractérise également un événement non intentionnel, dû à l’imprudence, la
négligence ou encore l’aléa ou le hasard. Il s’impose, dès lors, aux événements intentionnels
relevant de la malveillance et du terrorisme par exemple. Mais quoi de plus proche d’un
accident qu’un dommage programmé ? En ce sens, nombre d’événements sont qualifiés
d’accidents alors qu’ils n’en ont pas les caractères.
Aléa
Vient du latin, où il évoquait le jeu de dés (la formule « alea jacta est », attribuée à César,
signifie « le sort en est jeté »). D’où son extension au XIXème siècle : chance/malchance,
hasard, risque. Aujourd’hui, comme notion du droit de la responsabilité civile et de
l’assurance, évoque un événement probable capable de produire des effets dommageables.
Analyse
Consiste dans l’action intellectuelle de décomposition d’un tout en différentes parties afin de
l’étudier, de l’examiner.
C’est une méthode, un procédé de raisonnement qui permet d’aller du complexe au simple,
des conséquences aux principes, des faits aux causes et/ou aux lois. En ce sens, l’analyse
précède la synthèse et l’évaluation.
Barrière
C’est ce qui clôt, fait obstacle. Le terme a été utilisé dans les activités nucléaires pour qualifier
l’ensemble des actions ou mesures de prévention qui permettent de confiner les activités
radioactives. Les barrières de confinement ont pour objet d’empêcher :
le phénomène dangereux de quitter son enceinte ;
les personnes d’accéder à l’espace dans lequel le danger est confiné.
Deux types de barrières existent :
les barrières matérielles (un équipement technique),
les barrières organisationnelles (une procédure ou une consigne).
Aujourd’hui, le terme appartient plus largement au vocabulaire de la sûreté de
fonctionnement. Son utilisation tendant à s’étendre, il évoque plus généralement tout obstacle
technique, humain et organisationnel qui est opposé au développement d’une source de
danger. Certaines applications, selon nous maladroites, évoquent les moyens qui visent la
limitation des effets dommageables.
Causalité directe
Notion du droit pénal concernant les infractions involontaires. Une simple faute d’imprudence,
de négligence ou d’inobservation des règlements suffit à établir la responsabilité pénale de
l’auteur des faits infractionnels.
42
Causalité indirecte
Notion du droit pénal concernant les infractions involontaires, apparue avec la loi du 10 juillet
2000. Lorsqu’une personne physique n’est pas considérée comme étant l’auteur direct de
l’infraction, sa responsabilité pénale suppose que l’une des deux conditions suivantes soit
établie :
violation de façon manifestement délibérée d’une obligation particulière de
sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement ;
faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité
qu’elle ne pouvait ignorer.
Cause
C’est un événement qui produit un ou des effets. La recherche des causes est un des enjeux
des retours d’expérience. Les « préventeurs », les comités d’hygiène et sécurité et des
conditions de travail analysent les causes des accidents du travail selon la méthode de l’arbre
des causes.
Cindynique(s)
Mot construit à partir du grec kindunos à la fin du siècle dernier par des ingénieurs français
pour qualifier les sciences du danger. Le mot est plutôt employé au pluriel, car il évoque des
démarches systémiques ou globales faisant appel à des compétences diverses.
Danger
Le danger est une potentialité factuelle d’un résultat préjudiciable. C’est une situation
susceptible de donner naissance à une situation factuelle qui peut être qualifiée de dommage.
La situation dangereuse doit être envisagée comme une configuration de données techniques,
humaines et organisationnelles. Ainsi, dans le cas d’une usine installée en milieu urbain, deux
types de données principales sont à prendre en considération, les données industrielles et les
données urbaines. Le danger relève de l’ordre des causes ou des sources.
Ingénierie
Dans son premier sens, le mot évoque l’approche globale d’un projet relevant des sciences de
l’ingénieur. Progressivement, son sens s’est étendu à toutes les activités faisant appel à un
travail de synthèse et à la coordination de plusieurs équipes de spécialistes. On parle
notamment désormais d’Ingénierie des risques et d’ingénierie forensique pour les activités en
rapport avec la construction et le génie civil.
Méthode
Du grec meta-hodos (« la direction qui mène au but »). Programme réglant d’avance une
suite d’opérations à accomplir et signalant certains errements à éviter en vue d’atteindre un
résultat déterminé.
Le terme a subi l’influence déterminante de Descartes (Discours sur la méthode, 1637) qui
insiste sur la manière de faire, sur les moyens. En ce sens, le mot est souvent et abusivement
confondu avec outil (les méthodes et outils).
43
Descartes propose un raisonnement en deux temps permettant d’aller du complexe au
simple :
analytique, de décomposition des données,
synthétique, de recomposition.
Nous retiendrons de la méthode qu’elle est un moyen de connaître et de parvenir à la fin qui
est la connaissance du système. Mais nous soulignerons le danger qu’elle ne soit elle-même
une fin, c’est-à-dire du primat des formes sur le contenu. « La façon de donner vaut mieux
que ce qu’on donne » (Corneille, Le Menteur).
Prévention
Parmi les nombreux sens du mot, on retiendra celui d’aller au devant d’une chose pour y faire
obstacle. Il s’agit des causes ou des sources des dommages potentiels, c’est-à-dire du danger.
Les actions de prévention ont un caractère offensif.
Au plan du management, la prévention s’attache à maîtriser les risques évalués. Elle est un
des principes fondamentaux d’un système de management.
Probabilité(s)
Le terme est issu de « probable », qui évoque ce qui est vraisemblable, qui a de fortes
chances de se produire. Il est utilisé en mathématiques, depuis Fermat et Pascal, pour
qualifier le calcul des possibilités de survenance d’un événement aléatoire.
SDACR
Le schéma départemental et d’analyse et de couverture des risques est une notion du droit de
la sécurité civile. Arrêté par le préfet, il organise et planifie la prévention et les interventions
de limitation.
Sécurité
Désigne d’abord l’état d’esprit confiant et tranquille d’une personne qui se croit à l’abri du
danger. Il désigne aussi l’état d’une situation appréciée comme telle à un moment donné. Le
mot a des applications administratives (sécurité publique, sécurité civile, sécurité sociale, etc.)
et techniques (sécurité désignant « un dispositif de… »). Il a aussi le sens d’activité de
prévention.
Le mot, qui est proche de sûreté qualifie l’aspiration la plus profonde de l’humanité avec la
liberté. On peut raisonnablement considérer qu’il constitue le fondement majeur d’une société
et la légitimité de l’Etat. Celui-ci a donc pour mission régalienne de garantir la sécurité sur son
territoire.
Aujourd’hui, le mot a une acception très large. Il est couramment utilisé dans les champs
sanitaires, environnementaux, économiques et sociaux où il évoque à la fois les enjeux et les
dispositifs.
44
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages et articles
Genovèse M. 2005, Droit appliqué aux services d’incendie et de secours, Paris, Trèfle
Communications
Dosne R. 2009, « Dramatique feu de lingerie à l’hôpital » in Face au risque n°449 – St-Marcel
– CNPP Entreprise SARL
Polach A. 2004, « De l’approche globale à la gestion des risques » in Face au risque n° 400 –
St-Marcel – CNPP Entreprise SARL
45
ANNEXES
46
ANNEXE 1 - AMDEC : le nœud papillon
EI 1
ET EI ER EM
EI 2
OU EI ER
EI 3
OU EI
ER
EI 4
OU ER
EI 5
ET EI ER
EC 6
OU EI ER
EI 7
OU EI EM
ER
EC 8
EM
Barrières de défense
47
Arbre de défaillances Arbre d'événements
ANNEXE 2 – Méthode d’analyse de risques du milieu industriel
Classes de probabilité
Classe de
E D C B A
probabilité
Type
d'appréciation
Semi-quantitative Cette échelle est intermédiaire entre les échelles qualitative et quantitative, et permet de tenir compte des
mesures de maîtrise des risques mises en place, conformément à l'article 4 du présent arrêté.
48
Niveaux de gravité potentielle des accidents
Désastreux
Plus de 10 personnes exposées (1) Plus de 100 personnes exposées Plus de 1000 personnes exposées
Sérieux
Aucune personne exposée Au plus 1 personne exposée Moins de 10 personnes exposées
(1) Personne exposée : en tenant compte le cas échéant des mesures constructives visant à protéger les personnes contre certains effets et la
possibilité de mise à l'abri des personnes en cas d'occurrence d'un phénomène dangereux si la cinétique de ce dernier et de la propagation de ses
effets le permettent.
49
50
ANNEXE 3 - LA MADS-MOSAR
Construction des processus de dangers, ligne par ligne, en recherchant toutes déclinaisons par
source de danger
Evénements Evénements
Indice Source de Evénement Evénements
N° Phase initiateurs initiateurs Flux Effets
de Grille danger initial terminaux
internes externe
51
ANNEXE 4 – Phraséologie type pour rédiger les motivations des avis
5/ Cette propagation sera accentuée par …(volume important, nature des matériaux,
aménagement des locaux, apport d’air).
52
8/ L’évacuation du public sera difficile et un phénomène de panique n’est pas à exclure
car :
L’alarme ne sera pas immédiate
En l’absence (ou vu l’insuffisance) du désenfumage, le principal danger réside
dans une propagation rapide et inconnue des fumées. Cette accumulation de
fumées produira une forte gêne respiratoire en raison de la toxicité de ces
dernières et une diminution de la visibilité pour rejoindre les issues de secours
faisant courir un risque mortel aux personnes présentes .
La toxicité des fumées sera accrue du fait de la présence de nombreux réactifs
chimiques et substances diverses.
Les nombreux dépôts et stockages situés…..réduisent les dégagements et
gênent considérablement l’évacuation.
Les dégagements seront engorgés vu leur nombre insuffisant (et/ou leur
mauvaise répartition)
Les distances sont trop importantes pour atteindre une sortie directement sur
l’extérieur ou un dégagement protégé.
La stabilité au feu de l’ensemble des structures est trop faible et n’est pas
compatible avec la cinétique d’une évacuation totale du public.
9/ Les raisons qui précèdent sont de nature à mettre en péril le public fréquentant
l’établissement. En conséquence, le rapporteur émet un avis défavorable à la poursuite de
l’exploitation.
53