Jagot Paul-Clement - L Influence A Distance

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Paul-Clément Jagot

L’influence à distance

Cours pratique de télépsychie, de transmission de pensée et de suggestion mentale

Editions Dangles
18, rue Lavoisier
45800 ST-JEAN-DE-BRAYE

Introduction
Il existe un moyen sûr d’influer sur autrui, de loin comme à proximité , un moyen assez subtil pour
demeurer inaperçu, si pro- fondement qu’on subisse son invisible action, à laquelle, d’ailleurs, nul
n’est inaccessible.
Ce moyen n’est autre que la propriété communicative, dominatrice et attractive de toute pensée
émise intensément.
Certains l’utilisent qui l’ignorent ou le contestent, sans se rendre compte qu’ils doivent entièrement
à l’activité puissamment
irradiante d’une vigoureuse organisation psychique l’ascendant de leur personnalité.
D’autres voudraient apprendre à user délibérément de cette influence. C’est surtout à l’intention de
ces derniers que j’écris ce livre dans la rédaction duquel prédomine, par conséquent, le souci de la
clarté, de la précision et de la simplicité.
La première partie expose les notions théoriques et pratiques dont la connaissance parfaite est
indispensable à qui veut tenter, soit d’obtenir les phénomènes télépsychiques, soit d’appliquer
l’influence mentale à l’une des possibilités auxquelles sont consacrés les chapitres suivants.
Comme pour toute chose, chacun vient au monde plus ou moins qualifié pour l’action à distance,
mais le présent ouvrage s’est précisément fIXé le but de permettre à ceux qui sont peu doués de
tirer de leurs aptitudes actuelles le maximum d’effets et de les fortifier par l’entraÎnement.
J’affirme qu’avec un peu d’attention et de bonne volonté, la plupart d’entre nous peuvent mettre
largement à profit l’enseigne- ment qui suit.

Paul-C. JAGOT .

PREMIERE PARTIE
Théorie
Et procédés

CHAPITRE I

Le pouvoir de la pensée
1. La communication et l’imposition de la pensée

La réalité des divers phénomènes d’influence directe d’un esprit sur un autre esprit a été
surabondamment vérifiée .Plusieurs enquêtes, simultanément conduites en Europe et aux Etats-
Unis par des personnalités ou des groupements scientifiques, ont permis de dégager d’une
importante masse d’observations la certitude que la pensée se communique parfois spontanément,
d’une personne à une autre, à travers la distance. Nombre de chercheurs ont tenté, d’autre part, avec
succès, la transmission concentrée d’images à un collaborateur éloigné. L’exécution d’ordres,
mentalement intimés à un sujet d’expériences, a été également obtenue. On a, enfin, réussi à
provoquer l’hypnose, à l’improviste, hors de la présence de l’hypnotisé.
Vous trouverez, au paragraphe 4 : « Travaux antérieurs ». les références documentaires à ces quatre
genres de manifestations télépsychiques.
A priori. tout cela ne semble pas impliquer la possibilité, en général, d’influer sur quelqu’un par des
suggestions intérieurement
formulées;
encore que nombreux, ceux qui se sont révélés émissifs ou percipients d’irradiations mentales ne
constituent Qu’une minorité. Faut-il donc considérer la communication et l’imposition de la pensée
comme exceptionnelles, et la majorité d’entre nous comme inapte à opérer ou à subir l’action télé
psychique ? C’est l’opinion de certaines compétences. D’autres, non moins avérées, professent, au
contraire, que toute pensée s’extériorise et tend à affecter, conformément à ce qu’elle exprime,
l’individu à qui l’on pense. L’expérience pratique m’a rangé, sans réserves, à ce dernier avis.
La répercussion instantanée et intégrale d’une image, d’un état affectif, sur l’écran intellectuel ou la
sensibilité d’un tiers proche ou lointain reste exceptionnelle. De tous les faits recueillis, il résulte
que semblable manifestation paraît nécessiter, de la part
de l’émetteur, une qualité et une vigueur d’émotion singulières.
Certes, une suggestion ne saurait envahir d’emblée la conscience de qui n’offre pas à semblable
irruption la plus extrême réceptivité. Ce que j’affirme, ce que j’ai vérifié et que d’autres ont vérifié,
c’est que si l’on réitère longuement, ardemment, la suggestion, tout se passe comme si l’on projetait
sur le sujet une effluve imprégnant qui éveille graduellement et fait bientôt
prédominer en lui les dispositions suggérées.
Si étranger soit-il à une notion, même imprécise, de cette loi, tout individu volontaire et tenace
impose inconsciemment ses exigences. Et comme la goutte d’eau dont la chute répétée entame peu
à peu une dure margelle, l’action mentale du plus faible peut, à la longue, marquer son empreinte
sur de robustes résolutions.

2. L’activité affective et cérébrale

Nous sommes tous impressionnés à notre insu par d’innombrables projections psychiques, de
même que nous affectons, sans le savoir, non seulement les gens faisant l’objet de nos pensées,
mais aussi ceux parfois inconnus qu’elles évoquent. Cet incessant phénomène demeure obscur,
imperçu, car nous ne saurions discerner qu’une faible partie des éléments dont la confluence
donne naissance à nos impressions, à nos sentiments, à nos convictions. S’il en est qui nous
viennent du dehors, ils échappent donc nécessairement à la conscience.
Ainsi, l’irradiation télépsychique, conséquence inévitable de l’activité affective et cérébrale, doit
être considérée comme une
propriété normale de l’esprit humain. Si elle n’engendre que rare- ment ces communications
instantanées qui l’ ont rendue
évidente, elle n’en joue pas moins un rôle perpétuel et considérable dans la vie quotidienne. Mais
les orages n’ont-ils pas tonné
des siècles avant qu’on s’aperçût de la présence et de l’activité universelle de l’agent dont ils
étaient la seule manifestation
frappante ?
Je me propose de vous expliquer comment utiliser délibérément cette propriété de la pensée que
chacun émet inconsciemment, et souvent dans un sens contraire à son bien. Pour en user avec
profit, il convient d’en gouverner l’émission et d’en proportionner l’énergie, la durée, la fréquence,
aux résistances qu’opposent à son influx les caractéristiques morales du destinataire.
D’ailleurs, si précisément et si longuement exprimée qu’elle soit, une incitation mentale ne possède
par elle-même qu’une faible vigueur propulsive, d’ où l’insuffisance d’une froide et systématique
expérimentation de laboratoire à rendre
intégralement compte du pouvoir de la pensée. Ce sont, en effet, les émotions intenses, les
sentiments exaltés, les avidités ardentes qui irradient le plus efficacement notre invisible influence.

3. L’action délibérée

Encore faut-il savoir condenser, pour l’émettre ensuite à haute tension, le dynamisme cérébral que
les dispositions précédentes engendrent à profusion mais qu’elles éparpillent volontiers si l’on n’en
contient pas les multiples poussées.
En se conformant aux indications de ce livre, chacun peut réaliser les conditions indispensables
pour vérifier par lui-même la
réalité des actions à distance. La technique opératoire exposée plus loin déjà professée verbalement
à la grande satisfaction de quelques-uns -résulte entièrement de mes recherches.
A diverses reprises, j’ai déjà traité de la question et indiqué chaque fois des procédés différents.
C’est que, d’année en année, de
1909 où parut mon premier travail, à 1918 date d’édition primitive de mon livre: Méthode pratique
de magnétisme,
hypnotisme, suggestion -puis à ce jour, ma conception a sans cesse évolué par les leçons de
l’expérience.

4. Les travaux antérieurs

Afin de ne rien imprimer qui ait déjà été publié ailleurs, je m’abstiens de toute citation
documentaire. Mais, tant à l’appui de mes affirmations que pour obliger les lecteurs désireux de
puiser à d ‘ autres sources -à l’ officielle notamment -je tiens à indiquer les principaux classiques de
la question. Les voici, par ordre alphabétique.
Je fais précéder d’un a) les livres relatifs aux faits de télépathie, télesthésie, télévision, téléaudition
spontanées; d’un b) ceux où l’on traite de transmission concertée d’images; d’un c) les documents
publiés sur la suggestion mentale imposée à des sujets éveillés ou hypnotisés ,. d’un d) les
contributions à l’étude de l’hypnose provoquée à l’improviste par intention concentrée ,. enfin d’un
e) les ouvrages d’application pratique.
c) Atkinson : La Force-Pensée. Son action et son rôle dans /a vie (Paris, 1904). e) Annie Besant: Le
Pouvoir de /a pensée, sa maîtrise, sa culture (Paris, 1905). d) Boirac : La Psychologie inconnue
(Paris, 1913).
d) Boirac : L’A venir des sciences psychiques (Paris, 1914).
c) Bourru et Burot : La Suggestion mentale et /es variations de /a personnalité (Rochefort, 1895).
c) Durville, Hector: Télépathie, télépsychie (Paris, 1915).
a) et b) Camille Flammarion: L’Inconnu et /es problèmes psychiques (Paris, 1915). a) et b)
Camille Flammarion: La Mort et son mystère (Paris, 1920).
c) et e) Stanislas de Guaïta : La clef de /a Magie noire (Paris, 1897).
a) Gurney, Myers et Podmore : Les Hallucinations télépathiques (Paris, 1891).
e) Richard Ingalèse : Le Pouvoir de l’Esprit (Éditions Dangles, Saint-Jean-de-Braye, 1938).
Traduction du docteur
P. Oudinot.
c) Docteur Joire : Les Phénomènes psychiques supernormaùX (Paris, 1912).
c) Leadbeater : La Pensée, sa puissance, son emploi (Paris, 1910). d) Marillier : Les Actions
mentales à distance
(Revue philosophique, avril 1897).
a) Maxwell : Les Phénomènes psychiques (Paris, 1914). e) Mulford : Vos forces (Paris, 1895). b)
et c) Ochorowicz : De la suggestion mentale (Paris, 1889).
a) b) et c) : Docteur Perronet: Force psychique et suggestion mentale (Lons-le-Saunier, 1886).
b) et c) Charles Richet: La Suggestion mentale et le calcul des probabilités (Revue
philosophique, décembre 1884).
d) Charles Richet: Le Somnambulisme à distance à l’insu du sujet (Revue philosophique, avril
1888). c) Charles Richet: Traité de Métapsychique (Paris, 1922).
c) A. de Rochas: L’Extériorisation de la motricité (Paris, 1896). e) Victor Segno : La Loi du
mentalisme (Dangles,
1954). Épuisé. a) et c) : Docteur de Sermyn : Contributions à l’étude des facultés
cérébrales méconnues (Paris et Genève, 1911).
e) Société des recherches psychiques de Chicago: La Lecture ou la transmission de la pensée
(Paris, sans date).
e) Turnbull : Magnétisme personnel (Paris, 1904). c) Warcollier : La Télépathie (Paris,
1921).
On consulterait aussi avec profit la collection des Annales des Sciences psychiques.
Note de l’éditeur: En raison de leurs dates de parution anciennes, il est bien évident que la majorité
de ces ouvrages sont actuellement épuisés. Néanmoins, on peut les consulter à la Bibliothèque
nationale (Paris).
CHAPITRE II
Notions de base avant l’expérimentation
1. L’accord mental

Les hypothèses provisoirement admises pour expliquer la téléphonie sans ru eussent semblé
aberrantes il y a un siècle. Quand, aujourd’hui, avec un récepteur radio, on écoute dans un
local clos un concert lointain dont l’émission traverse l’espace et la matière dense, on admet
volontiers que les ondes radiophoniques se transmettent par ondulation, au sein d’un agent
assez subtil
pour interpénétrer tous les corps. Qu’on le nomme éther ou qu’on le définisse autrement,
l’existence d’un véhicule susceptible d’imprégner toute chose à l’infini et de conduire les
ondes radioélectriques s’affirme.
C’est d’une manière probablement analogue sinon identique qu’on expliquera un jour ou
l’autre les phénomènes de télépsychie, ce qui corroborera, d’ailleurs, une théorie professée
dès l’Antiquité par les disciples de la science occulte.
Tout se passe, en effet, comme si, baignées et imprégnées d’un invisible océan fluidique sans
limites, nos âmes se trouvaient en constante communication.
Un enfant pourvu du populaire « transistor » sait bientôt en régler les boutons pour rendre
l’appareil sensible à telle ou telle longueur d’ondes. Il l’accorde, ainsi, au ton des vibrations
trans- mises par le poste émetteur qu’il désire entendre et, de fait, une fois l’accord établi, le
récepteur reproduit toutes les communications émises syntoniquement à cet accord.
Il se passe souvent quelque chose d’analogue entre deux individus que leur intimité, leurs
similitudes, leur mutuelle dilection ont accordés mentalement. Les pensées de l’un
impressionnent le cerveau de l’autre en lui communiquant leur ton de mouvement qui tend à
éveiller en lui des pensées analogues. Ce phénomène s’accomplit parfois avec une telle
instantanéité, une telle vigueur , une telle précision, que la pensée de l’un se réfléchit
intégralement dans l’esprit de l’autre, à la minute même où elle est émise. En lisant le récit
des milliers d’observations recueillies depuis cinquante ans, on constate, précisément, que les
communications télépsychiques les plus remarquables ont eu lieu entre intimes.
2. Le syntonisme et la réceptivité spontanée

Supposons maintenant qu’ on veuille agir sur un individu non plus isotonique (I), mais
indifférent ou hétéro tonique (2). Faute de cette réceptivité d’emblée qui, seule, permet la
communication proprement dite de la pensée (3), il suffira de réaliser soi- même un ton de
mouvement psychique supérieur en force à celui du sujet. Ce ton de mouvement entraînera
peu à peu le sien propre. Il s’imposera à lui. L’émission devra donc s’effectuer avec une
énergie particulière et une longue insistance. Une seule séance suffit rarement à imprégner
quelqu’un au point d’influer péremptoire- ment sur ses dispositions. Il faudra donc, dans
presque tous les cas, réitérer l’action journellement, durant une période plus ou moins
étendue. Enfin, il va sans dire que si l’on s’adresse à un terrain psychologique peu compatible
avec l’objet des suggestions,
(1). Iso : égal.
(2.) Hétéro : différent.
(3.) Entre deux expérimentateurs désireux, l’un de transmettre, l’autre de percevoir des images
mentales, un accord peut être artificiellement réalisé (voir chap. IV).
celles-ci ne sauraient le modifier que graduellement, au prix d’efforts énergiques et inlassablement
renouvelés.
Il y a, paraît-il, en Inde, des adeptes du yoga dont l’emprise sur une ou plusieurs personnes s’établit
en quelques minutes. Ces expérimentateurs réussissent, sans présenter l’apparence d’un pénible
effort, à halluciner toute une foule. On croit assister à une scène terrifiante, alors qu’en réalité il ne
se passe rien. Le même mirage abuse chacun des spectateurs. Les latitudes orientales favoriseraient-
elles ce genre de phénomènes ? Les yogis bénéficient-ils de facultés psychiques développées, de
génération en génération, par un exercice ininterrompu ? A répéter continuelle- ment les mêmes
expériences, y acquièrent-ils une virtuosité parti- culière ? Je l’ignore mais, en Occident, les
annales du psychisme n’ont pas enregistré jusqu’ici de répercussions psychiques aussi instantanées.
3. L’imprégnation graduelle

Voici probablement ce qui se passe quand on agit : Une première vague ondulatoire arrive au
sujet et réagit insensiblement sur les éléments de son moral auxquels l’opérateur cherche à
substituer d’autres éléments. A la faible imprégnation réalisée par cette vague s’ajouteront les
effets successifs de vingt, trente, cent nouvelles émissions. En se combinant aux pensées
propres
du sujet, l’élément suggéré qui lui arrive ainsi les modifie, d’abord d’une manière
insignifiante, puis suscite, des profondeurs inconscientes de son psychisme inférieur (4), des
considérations diverses, jusque-là étrangères à l’activité habituelle de ce dernier . Ces
considérations, sans cesse développées sous l’impulsion périodique des irradiations de
l’opérateur, évoluent peu à
peu et présentent une conformité chaque jour plus précise avec l’objet final des suggestions.
En résumé, l’influence extérieure après avoir effleuré, affecté puis imprégné de plus en plus
appréciablement l’esprit, finit par prédominer. ,
Définissons maintenant les conditions d’efficience de l’action télépsychique.
(4.) L’élaboration de l’énoncé des lois qui suivent sont mon oeuvre. Je les formule sous ma
responsabilité, et je défie qu’on puisse leur opposer le moindre fait. Elles seront certainement
complétées et précisées par de nouvelles, mais l’expérience les vérifiera sans aucun doute.
4. Lois de la télépsychie

LOI N° I. -C’est principalement en images -et non pas seulement d’une manière littérale
-qu’il convient d’exprimer ce que l’on veut suggérer. Il faut donc imaginer ce que l’on
voudrait qui ait lieu.
LOI N° 2. -La conformité de l’effet à l’intention s’opère en proportion directe de la précision
des images irradiées. LOI N° 3. -La vigueur propulsive d’une émission télépsychique est
proportionnelle à l’avidité qu’on éprouve pour la
réalisation cherchée ou, plus généralement, au désir que l’on a d’affecter le sujet.,
LOI N° 4. -Une seule émission journalière d’une durée de
x est d’une efficacité supérieure à celle de deux émissions d’une durée respective de x/2.
LOI N° 5. -Chaque émission correcte modifie toujours, plus ou moins sensiblement, les
dispositions morales du sujet conformément aux intentions de j’opérateur.
LOI N° 6.- La modification du sujet s’affirme à mesure que les émissions se poursuivent.
5. La netteté des images suggérées

Une comparaison très simple va nous aider à bien comprendre les plus essentiels de ces six
principes: le deuxième et le troisième.
Voici une lanterne magique disposée devant un écran. Allumons la lampe et glissons une
plaque à projections derrière l’objectif. L’image va se projeter sur l’écran. Elle s’y inscrira,
parfaitement visible dans tous ses détails, à deux conditions : a) Que ses contours soient
nettement accusés.
b) Que l’éclairage ait :suffisamment d’intensité.
D’une plaque défectueuse, le plus puissant fanal ne saurait tirer qu’une projection confuse.
Inversement, la perfection du cliché apparaîtrait malaisément sous les rayons d’une lumière faible
et vacillante.
En télépsychie, l’élan intérieur est la lumière projetante ; l’image mentale est la plaque génératrice.
Il convient donc d’apporter le plus grand soin à l’édification des images que l’on désire
communiquer et surtout de celles dont on voudrait imposer la prédominance suggestive parmi les
pensées habituelles de quelqu’un.
Faute de visualiser très précisément les phases successives d’une modification morale, on
n’obtiendrait que des dispositions plus ou moins divergentes de celles qui satisferaient entièrement,
et, s’il s’agissait d’une suggestion d’acte, l’impulsion
intentionnelle ne serait pas fidèlement suivie.
6. La vigueur propulsive

Mais les représentations mentales les plus minutieusement définies n’entraînent, par elles-
mêmes, que des ébauches d’effets. Pour les propulser énergiquement, il faut l’irrésistible élan
d’une impérieuse volonté, d’une vive émotion ou d’une convoitise ardente. Le désir pur et
simple influe davantage, s’il est vif et précis, que la concentration de pensées purement cérébrale
telle qu’on l’enseigne dans certains manuels.
Et j’ai observé ce qui précède, pour la première fois, il y a plus de quinze ans, à propos de
l’expérience bien connue qui consiste à obliger quelqu’un à se retourner au moyen de la fIxation
du regard à la nuque et du commandement mental. Depuis des années, il m’était arrivé comme à
tous ceux qui ont tenté cette expérience de fixer mes yeux et mon attention dix ou quinze
minutes sans aucun résultat. La lumière se fit un soir, où, tandis qu’ils erraient distraitement,
mes regards furent captés,
pendant certain entracte, par la nuque et les épaules d’une spectatrice dont le visage m’inspira,
sur-le-champ, la plus vive curiosité. Tandis que je supputais les traits, imaginant et désirant
l’impression suave qu’ils devaient dispenser, l’objet de ma contemplation manifesta bientôt une
évidente agitation. Des frémissements agitèrent la région visée. Une main sembla vouloir effacer
de la peau quelque irritant contact. Enfin la tête se tourna brusquement. Et je crois qu’une
certaine intuition de la cause du trouble ne fut pas étrangère au regard incisif qui rencontra le
mien.
Dans son apparente insignifiance, ce fait recelait toute la substance de l’enseignement énoncé
plus haut: la vigueur propulsive des émissions télépsychiques est proportionnelle à l’avidité
qu’on éprouve de leur effet. Leur principale condition d’efficacité n’est autre que l’aspiration
impérieuse au résultat cherché. Ainsi l’exaltation du centre émotionnel se communique au centre
cérébral qui vibre activement et irradie des vibrations avec force.
7. La périodicité de l’état efficient

La difficulté consiste à déterminer périodiquement, au moment opportun, cet état véhément, à


l’entretenir tout le temps nécessaire, puis à l’annuler jusqu’à la séance suivante car sa
persistance épuiserait rapidement. Les adeptes de cet hermétisme dévoyé qu’on nomme « goétie
» l’ont compris, il y a des siècles, puisque leurs plus antiques formulaires abondaient en recettes
d’électuaires et philtres à base d’excitants psychiques, effectifs mais dangereux. Eliphas Lévi
nous dit, dans son Dogme et
rituel de Haute Magie. que pour accomplir des prodiges, il faut être hors des conditions
ordinaires de l’humanité, abstrait par la sagesse ou exalté par la folie. Insuffisamment évolués
pour atteindre de sitôt l’abstraite sérénité, mais du moins soucieux d’éviter les toxiques qui
déséquilibrent, il nous faut user de moyens compatibles avec nos possibilités. Ces moyens
consistent à
observer les conditions d’une abondante élaboration d’énergie psychique et à retenir en soi-
même, à accumuler, à condenser
cette énergie au fur et à mesure qu’elle s’élabore, en ralentissant considérablement son débit. On
crée ainsi une forte tension
d’extériorisation qui porte à son paroxysme l’intensité du vouloir, du désir, des sentiments,
aspirations, appétences et avidités
(5).
Qu’il s’agisse de transmettre un message mental à un collaborateur capable d’une volontaire
passivité réceptive, de
suggestionner par la pensée un sujet éveillé ou en état second, de provoquer le somnambulisme
artificiel à distance ou d’influer
sur les dispositions morales d’un tiers, l’imagination méthodique et précise du résultat et
l’avidité de l’obtenir constituent les deux plus importants facteurs du succès.
Afin de disposer de la réserve énergétique indispensable à l’objectivation aisée des images et à
la vigueur propulsive de leur émission, il y a lieu d’observer, au cours de la vie quotidienne,
certaines règles que je vais définir. Elles exigent un effort attentif d’empire sur soi-même.
Accomplir cet effort, c’est conquérir la prérogative de mouvoir délibérément l’agent subtil par
lequel la majorité des êtres sont mus: la pensée.
Diriger ses pensées et régir leurs effets au lieu de subir les unes et les autres, telle est la
possibilité qu’ouvre la connaissance
des lois psychiques. Après avoir songé à ce qu’elle implique, nul n’hésitera.
5). Ce dernier vocable s’entend généralement dans une acception péjorative ; je l’utilise ici dans
un sens beaucoup plus large. Il est des avidités légitimes qu’il convient de ressentir et de
manifester avec une vigueur mentale concentrée si l’on tient, au milieu de la compétition
générale, à obtenir son dû. Il faut que le travail, le mérite et la valeur intrinsèque
s’accompagnent d’une avidité équitable mais résolue s’ils veulent déterminer leur juste
rétribution.
I. Considérations préliminaires CHAPITRE III Pour influencer quelqu’un à son insu
La circonspection, la suite dans les idées et la précision de la pensée semblent peu
fréquentes parmi les caractères vibrants, impétueux et volontaires. Inversement, les esprits
circonspects, judicieux, précis, s’accompagnent rarement d’une nature ardente. Quant aux
rarissimes individus qui unissent la vigueur persistante du vouloir à la définition
minutieuse de ce qu’ils veulent, aucune pratique spéciale ne leur est nécessaire pour
influer à distance. Ils le font inconsciemment parce que, grâce à leurs heureuses
dispositions innées, ils se trouvent spontanément dans les conditions voulues pour cela. La
plupart des hommes ne peuvent que réaliser momentanément, par un effort méthodique,
ces conditions indispensables pour communiquer et surtout pour imposer, sa pensée.
Essentiellement, cet effort vise, d’une part, à l’édification réfléchie d’images exactement
expressives de ce que l’on voudrait suggérer et, d’autre part, à la disponibilité d’un
potentiel d’énergie psychique suffisant pour donner lieu à des émissions efficaces.

2. Premières dispositions à prendre

Quand on a décidé d’user d’action à distance, il faut se tracer un plan de travail détaillé
et réunir toutes les indications susceptibles de quelque utilité.
En ce qui concerne les tentatives de communications concertées, de suggestion mentale
sur des sujets d’expériences, ou d’obtention de l’hypnose par concentration d’esprit, on
se reportera aux chapitres suivants où toutes les dispositions à prendre pour chacune de
ces tentatives sont exposées.
Lorsqu’il s’agit d’affecter quelqu’un à son insu, les préparatifs doivent être considérés
comme la base du succès et accomplis avec le plus grand soin. Voici en quoi ils
consistent :
I) Examiner de combien de temps on peut disposer chaque jour, et à quel moment de la
journée, pour travailler à l’action que l’on projette. Moins d’une heure serait peu.
Deux heures constituent la bonne mesure. Choisir de préférence celles qui précèdent
le coucher .
Ce premier point arrêté, commencer dans l’ordre donné ci- après à satisfaire les suivants :
2) Analyser attentivement la psychologie de l’individualité sur laquelle on veut agir.
Nous verrons tout à l’heure qu’à chaque émission il faut se représenter mentalement
l’image du sujet afin d’établir le rapport. Par image, entendez non seulement les
contours extérieurs, l’expression du visage, l’attitude, le geste, mais aussi la vivante
notion de la personnalité morale.
Si l’on a plus ou moins vécu dans son ambiance, on fera appel, pour inventorier ses
caractéristiques, aux observations aux- quelles il aura donné lieu. On pourra aussi
soumettre son écriture à un graphologue, mais ce serait aborder une grosse difficulté
que de chercher à influencer quelqu’un en se l’imaginant autrement qu’il est, surtout
si ce que l’on voulait obtenir de lui nécessitait une modification considérable de ses
dispositions.
3) Définir très précisément le but de l’action entreprise, avec toutes ses conséquences.
Se rendre compte des dispositions
morales dans lesquelles il faudrait Que le sujet soit pour penser et agir comme on le
désire. Est-il loin de celles-ci ? Quelles
sont les impressions, les émotions, les pensées qui, s’il les éprouvait, le modifieraient
dans le sens cherché.
4) Ayant apprécié l’écart entre les dispositions actuelles du sujet et celles dans
lesquelles il faudrait qu’il soit pour penser et agir comme on le désire, envisager une
évolution graduelle des unes aux autres.
5) Matérialiser en images cinq ou dix étapes de cette évolution. Exemple: de
l’animosité à la sympathie. a) Atténuation légère de l’animosité; b) atténuation
presque totale; c) indifférence ; d) velléités de sympathie; e) sympathie.
6) Concentrer son attention sur la première étape. Chercher à se figurer le sujet tel qu’il
serait s’il l’avait parcourue. Chercher toutes les considérations susceptibles, une fois
à lui transmises télépsychiquement, de transformer ses dispositions présentes
conformément à celles qui caractérisent la fin de la première étape.
7) Procéder de même pour les autres étapes.
8) Affecter, sur son plan de travail, une, deux, dix séances à l’émission des suggestions
nécessaires pour l’accomplissement de la première étape, une, deux, dix séances
pour la seconde, etc. Cette évaluation, toute provisoire d’ailleurs, nécessite une
certaine pratique et un peu de sagacité. Sa principale utilité est de construire une
représentation complète de la réalisation qu’on va chercher à obtenir .
ce travail demande réflexion. Loin d’occasionner un retard, le temps passé à la
méditation calme et recueillie d’un plan constitue un commencement d’action, une
première et formelle notification mentale, une orientation de toutes les aptitudes
qu’on possède vers une intention délibérée et clairement formulée. C’est pourquoi il
est préférable d’effectuer sans aide cette préparation. Un conseil éclairé peut aider
considérablement le débutant à ordonner ses efforts, mais il ne saurait l’exempter,
sans inconvénients, de l’inaugurale concentration de ses moyens psychiques.
Nous sommes certainement en rapport télépathique continuel avec tous ceux que
nous connaissons, mais ce rapport s’affirme envers chacun dès que l’on songe
longuement et attentivement à lui. La préparation qui précède importe à ce point de
vue. Tandis qu’on s’y applique, la mutuelle réceptivité de l’opérateur et du sujet se
précise. Aussi le premier perçoit-il presque
toujours, durant le travail, des vibrations provenant de l’activité mentale du second
dont l’intimité psychique lui devient alors
sensible. C’est ainsi qu’une mère peut percevoir à distance les émotions, les
tourments. les souffrances de l’enfant vers leQuel
s’oriente son esprit.
3. Édification des images

Quatre sortes d’images sont principalement nécessaires pour toute action


télépsychique : celle du sujet, celle de l’accomplisse- ment de ce qu’on désire, celle des
effets successifs que l’action doit déclencher, enfin celle du sujet éprouvant les
impressions, émotions, idées, expressives de ces effets. Après le travail préliminaire
défini au paragraphe précédent, on consacrera donc un certain nombre de séances à
l’édification d’images aussi précises, aussi vivantes que possible.
Pour bien comprendre en quoi consiste une image satisfaisante, il suffit de se rappeler
nos familières incursions dans le domaine halluciné du rêve. Lorsqu’en songe vous
voyez un ami, cette imaginaire rencontre présente un tel cachet de réalité qu’elle vous
produit la même impression qu’une entrevue matérielle. Or, les images nécessaires dans
la pratique de la télépsychie doivent, quoique volontairement formées, posséder le
même cachet de réa- lité et de persistance que celles des rêves. Quand vous voulez agir
sur quelqu’un, il faut d’abord vous le représenter. Ensuite, il faut vous l’imaginer
accomplissant ce que vous désirez. La première image s’utilise depuis le début de
chaque émission jusqu’à la fin ; la seconde se superpose à la première après l’ évocation
successive de toutes les images intermédiaires envisagées au paragraphe précédent.
Cette visualisation cérébrale ne s’improvise pas toujours aisé- ment à l’instant même de
l’émission. De plus on a tendance à la laisser dévier en multiples incidentes. D’où la
nécessité de s’exercer soigneusement à l’avance à composer toute la série des images
expressives du sujet, de ses modifications progressives, des idées ou impressions qu’on
juge de nature à l’affecter , enfin de la phase finale, de la réalisation de ce que l’on
désire.
Au début l’édification est laborieuse. Les formes évoquées se dessinent mal, manquent
d’ensemble, de cohésion, de netteté et s’évanouissent sitôt esquissées. Mais si l’on
persiste attentivement et qu’on réitère fréquemment les essais, un progrès ne tarde pas à
se manifester et la facilité survient, plus grande de jour en jour . On peut d’ailleurs
s’exercer, à titre d’entraînement :
• A se représenter, avec la plus précise conformité possible à leur modèle, des objets
d’abord très simples, puis d’autres plus complexes.
• A prolonger la durée de chaque représentation.

4. Élaboration et condensation de l’énergie psychique

Le sang constitue, pour ainsi dire, la matière première d’où un mécanisme encore
obscur élabore le dynamisme nerveux, moteur de toutes les fonctions, notamment de la
cérébrale. Quand un sang riche et pur irrigue le cerveau, on pense activement et
fortement. C’est dire l’importance, au point de vue qui nous occupe, de l’alimentation,
de la respiration et de la circulation. La diététique rationnelle, l’hygiène respiratoire et
vasculaire s’imposent à tous les expérimentateurs. Considérant l’organisme comme le
générateur de la force qui s’irradie au cours des émissions mentales, l’équilibre
physiologique apparaît la condition primordiale d’une élaboration énergétique
suffisante.
Une chose est d’élaborer, une autre est de condenser, d’accumuler—pour en disposer
aux moments opportuns—le dynamisme nerveux. Rappelons, tout d’abord, que la
recharge de nos accumulateurs internes (les plexus) s’effectue au cours du sommeil
chaque nuit .Quand le sommeil est normal, le réveil s’accompagne d’une sensation de
parfait bien-être et d’un besoin d’activité, car les accumulateurs physiologiques s’étant
fortement rechargés tendent à extérioriser l’énergie qu’ils recèlent et cette tension
pousse l’individu à se dépenser -utilement ou désordonnément. Donc, dormir
convenablement (2) avant tout, mais aussi, durant la veille, s’interdire toute dépense
inutile: non seulement se garder de l’agitation et du surmenage, mais s’attacher à
réduire au minimum le débit d’énergie nerveuse exigé par la vie. Pour cela, se sur-
veiller sans relâche, agir uniquement en mode réfléchi, en réprimant toute spontanéité,
toute expansivité. Pensées, paroles, gestes, occupations quotidiennes, tout doit subir le
critère cons- tant d’une surveillance étroite qui en élaguera le superflu et en réprimera le
désordre.
Toute impulsion à une manifestation extérieure, tout appel intérieur à une satisfaction
sensorielle, émotive ou cérébrale traduit une poussée du dynamisme nerveux qui
cherche à s’extérioriser. Céder à l’impulsion ou satisfaire le désir, c’est gaspiller sans
profit cette énergie qu’il s’agit, au contraire, de condenser. Chaque fois que l’on cède
par étourderie au laisser-aller, les réserves nerveuses diminuent. Chaque fois que l’on
réprime une spontanéité, on retient en soi une unité d’énergie qui s’ajoute à la réserve
déjà existante. L’observation de cette notion élémentaire d’éducation psychique (3)
importe fondamentalement à ceux qui veulent pratiquer avec succès l’action à distance.
C’est, d’ailleurs, le remède par excellence à toute atonie physique ou morale.
2.Voir, de Pierre Fluchaire : Bien dormir pour mieux vivre (Éditions Dangles)
3. L’éducation psychique a pour objet :
• De placer la sensibilité, l’impressionnabilité, l’imagination, les impulsions et les
instincts sous le contrôle de la pensée délibérée.
• De développer l’attention, le discernement, la mémoire et l’énergie volitive.
• D’instaurer et d’affermir cette assurance conceptuelle et réalisatrice qui constitue la
confiance en soi-même.
• De tayloriser l’élaboration et la gestion du dynamisme cérébral, de manière à réaliser
en qualité et en quantité le maximum de rendement des aptitu- des et facultés.
Consulter, à ce sujet, l’ouvrage: Le Pouvoir de /a volonté (Éditions Dangles).

5. Disponibilité
On connaît l’effet stimulant du thé, du café et de l’alcool pris à dose raisonnable. Ces substances
sont comparables à des chèques que l’on tire sur son propre dépôt d’énergie nerveuse: elles
soustraient des plexus une partie de la force qui s’y trouve emmagasinée.
Le dynamisme, ainsi libéré, revigore aussitôt l’économie. En particulier, il augmente
momentanément l’activité cérébrale.
Si l’usage habituel des excitants contrarie la condensation, leur usage exceptionnel, immédiatement
avant une émission, est indiqué car , alors, il s’agit non plus d’accumuler de l’énergie, mais de
disposer du potentiel tenu en réserve, de le faire passer de la statique à la dynamique, de le laisser
affluer au cerveau qui s’en sus- tentera pour vibrer intensément. C’est le moment de déclencher les
plus puissantes poussées centrifuges, d’émettre vigoureusement.
Aussitôt après avoir absorbé l’excitant choisi, il faut commencer à orienter sa pensée sur l’objet de
l’émission, en se
remémorant tous les motifs de l’intérêt que l’on porte au résultat de l’action à distance entreprise,
en évoquant toutes les images
expressives de ces motifs. En particulier, lorsqu’on tient tel ou tel manifeste, telle ou telle
disposition; on sent qu’on y tient à
deux occasions principales :
A. Quand l’idée, l’image d’une des satisfactions qu’on éprouverait si le désir qu’on a
s’accomplissait, vous vient à l’esprit. B. Quand l’imagination évoque quelqu’une des conséquences
désagréables du non-accomplissement de ce désir .
Dans le premier cas, on sent ardemment à quel point on tient à ce qu’on désire. Dans le second,
c’est de crainte, d’irritation, de révolte qu’on vibre.
Ces mouvements intérieurs, ordinairement spontanés, on doit les susciter volontairement par rappel
au début de chaque séance afin de porter à son paroxysme la tension volitive. Si l’ on craint de
trouver à ce moment sa mémoire rebelle ou incomplète, on fera bien, au cours des heures
précédentes, de noter à tout moment où les images surgissent. On se mettra ainsi à même de les
reconstituer à l’heure de l’émission à l’aide des notes qu’on aura prises. Chaque rappel
d’impression ainsi obtenu contribuera à exalter l’esprit, à déclencher des replis les plus profonds de
la conscience de puissantes impulsions volitives et dominatrices. Au cours du travail préliminaire
on aurait donc intérêt à rechercher et à noter toutes les considérations susceptibles de donner lieu à
des images du type A et du type B. Cette recherche nécessite une série de méditations spéciales
qu’on oriente en se retraçant l’exposé du cas, puis en supputant successivement toutes les tournures
que peuvent prendre les événements.
6. Le rapport
Les diverses pratiques qui précèdent contribuent à établir entre l’opérateur et le sujet un rapport
psychique particulier. Selon moi, ce rapport devient intégral dès que l’ expérimentateur a formé
l’image mentale du sujet. A chaque séance, aussitôt la disponibilité accomplie, il y a lieu de
préciser cette image, d’évoquer toutes les impressions dispensées par la présence réelle du sujet, de
se le représenter d’une manière vivante et agissante. L’état d’ardeur cérébrale où l’on est
préalablement placé facilite la formation des images et leur prête ~n relief, un coloris, une
animation qu’il faut avoir vécus pour s’en faire une idée. L’obscurité et le silence favorisent ce
travail. Certains ont recommandé, pour s’y livrer, les heures où l’on sait que le sujet dort. Sans être
bien convaincu de l’importance de ce moment, je suis d’avis qu’il ne faut rien négliger et que le
sommeil peut augmenter la réceptivité. L’action mentale me paraît cependant affecter le
subconscient, réceptif durant la veille comme au cours du sommeil puis, par le truchement de celui-
ci, réagir sur la conscience. Si mon hypothèse est exacte, on peut aussi bien suggestionner
mentalement quelqu’un à un moment qu’à un autre. Ce dont je suis expérimentalement certain c’est
que, quelle que soit l’heure, dès l’instant où l’image précise d’un être apparaît sur l’écran de votre
imagination, tout ce que vous penserez durant cette comparution l’influera très appréciablement.
J’emploie le verbe comparaître à dessein car, en formant l’image abductrice, on convoque
réellement un substrat invisible du sujet qui vient s’exposer dans le champ d’action de l’évocateur
(voir chapitre X)
On lit, dans de vieilles gloses, que pour influencer quelqu’un il suffit de fixer sa photographie en le
suggestionnant. Cela se pratique encore. Une photo ne crée cependant aucun rapport ; tout au plus
peut-elle aider la mémoire au cours de la formation des images. Seul un négatif à la gélatine,
impressionné par pose, et conservé dans un paquet clos pourrait constituer une base secondaire de
connexions à cause de l’imprégnation magnétique de l’enduit. De même, tous les objets saturés de
l’influx nerveux d’un individu, sont autant de foyers d’irradiation, fluidiquement reliés à leur
source primitive. D’où la statuette des envoûteurs et mille autres recettes, beaucoup moins ineptes
qu’elles en ont l’air, dont les recueils goétiques sont pleins.
Pratiquement je conseille, pour tirer parti de tout, de réunir divers objets provenant du sujet (lettres,
notamment) et d’en répartir l’ensemble en deux paquets, l’un de dimensions réduites que l’on
pourra conserver sur soi, l’autre que l’on prendra en main au moment de chaque émission.
Il est malaisé d’apprécier la mesure dans laquelle ce procédé est efficace mais, vu sa simplicité,
mieux vaut l’utiliser .
7. L’émission
Les deux phases précédentes (disponibilisation et rapport) s’enchaînent et concourent à engendrer
un état de véhémence volitive à la faveur duquel chaque mouvement psychique évertue une intense
irradiation. L’image primitive (celle du rapport) doit être alors diversifiée selon ce qu’on désire. On
se représente le sujet accomplissant ce qu’on cherche à lui suggérer, éprouvant les impressions et
admettant les idées susceptibles de l’incliner à cet accomplissement. Jamais la contrainte ne sera
envisagée, mais toujours l’acquiescement délibéré. C’est à la représentation du sujet éprouvant
spontanément le désir de se conformer à ce qu’on veut qu’il faut avoir recours. Supposez ce qui se
passerait s’il ressentait une irrésistible impulsion personnelle à vous satisfaire et veuillez que cela
ait lieu.
Ainsi que j’ai essayé de le faire comprendre au cours des chapitres précédents, les images ainsi
créées précisent les intentions de l’opérateur mais leur transfert et, une fois transférées, leur
puissance élaboratrice des dispositions qu’elles requièrent, dépendent d’un vigoureux élan intérieur
qu’on pourrait exprimer par: « Je veux qu’il en soit ainsi. »
N’oublions pas que le plan de chaque séance doit être réglé à l’avance afin d’éviter la dispersion et
les incidentes. N’oublions pas non plus qu’il y a lieu, dans les cas subjectifs, d’envisager de
graduelles modifications et non un aboutissement instantané (5). Au début de chaque émission,
après évocation de l’image rapport, on peut fixer quelques minutes son attention sur la
représentation de la solution finale en pensant: « Voilà ce que je veux ! voilà ce qui aura lieu! voilà
ce que je suis en train d’imposer! », mais il faut revenir promptement au présent, imaginer les
dispositions actuelles du sujet et leur suggérer de légères divergences, qu’on accusera ensuite de
plus en plus.
Tout praticien de l’hypnotisme sensoriel et verbal accoutumé à provoquer le somnambulisme et à
manier la suggestion tirera utilement parti de ses connaissances en agissant, par représentation des
procédés d’hypnotisation, sur l’image rapport. Se figurant être en présence du sujet, ille verra, assis
en face de lui, subir les impressions qui mènent à l’hypnose. Arrivé à l’image de cet état, on donne
des suggestions littérales comme dans la réalité, en prêtant au sujet l’attitude qu’il aurait s’il les
enregistrait passivement. Ceux à qui les procédés hypnotiques ne sont pas familiers, se borneront à
évoquer l’image du sujet, assis et attentif, puis à lui adresser mentalement toutes les paroles
susceptibles de l’émouvoir, de le convaincre, sans omettre de le voir comprendre et acquiescer.
5. Voir: Méthode pratique de magnétisme, hypnotisme, suggestion (Éditions Dangles).
8. Durée et fréquence des émissions
En principe on a avantage à prolonger chaque émission jusqu’au moment où, par épuisement des
disponibilités énergétiques, l’exaltation fléchit et tombe. La durée d’une séance devrait se mesurer
en raison inverse de la vigueur émissive dont on est capable.
Quand on se propose de vaincre une difficulté considérable, le maximum compatible avec un
psychisme moyen est une séance
journalière de deux heures.
9. Récupération; détente cérébrale
Aussitôt l’émission terminée, deux prescriptions s’imposent à l’expérimentateur. D’abord, cesser
complètement de penser au sujet et aux préoccupations qui se rattachent à lui. Cette application du
changement volontaire d’orientation psychique (dont j’ai parlé dans le Pouvoir de la volonté) est
indispensable pour éviter l’obsession. Ensuite, chercher une détente parfaite des nerfs et du cerveau
en s’adonnant à quelque délassement sain. Le meilleur serait de dormir profondément et
longuement. C’est pourquoi j’ai conseillé le choix des deux heures précédant le coucher .
Comme l’activité cérébrale déployée durant chaque séance donne lieu à une combustion énorme de
cellules, il est utile de faciliter leur élimination en usant, avant de se livrer au sommeil, et à petites
doses répétées, d’une eau diurétique.
DEUXIEME PARTIE
EXPERIENCES SUR SUJETS
CHAPITRE IV Les communications concertées

I. Conditions d’expérimentation
a) L’émetteur
Les phénomènes psychiques à processus lent tels que l’imposition de la pensée dont nous avons
exposé la technique au chapitre III, dépendent surtout des qualités de l’émission. Si le sujet est
aisément influençable, l’ opérateur arrive à ses fins en un petit nombre de séances; dans le cas
contraire, celles-ci doivent être plus longuement réitérées mais, à la longue, un suggesteur habile,
énergique et subtil parviendrait inévitablement à influer sur n’importe qui.
Dans la recherche des phénomènes instantanés, le succès des expériences dépend principalement de
la sensibilité du percipient (I). A l’émetteur, il suffit d’un effort d’attention à peu près analogue à
celui qu’on accomplit chaque fois qu’on tâche de comprendre quelque chose d’embarrassant -et
d’un peu de méthode. L ‘habitude de fixer sa pensée en images précises et soutenues, le désir de la
communiquer facilitent toujours la tâche du transmetteur, mais la virtuosité et l’ardeur de ce dernier
ne suppléeraient pas à l’insuffisance des dispositions réceptives du sujet. Un percipient sensible
entraîné saisit, détecte, au contraire, de très faibles émissions.
1. Parmi les spécialistes, aucun ne paraît, jusqu’ici, s’être rendu compte de cette distinction entre
les phénomènes progressifs et les phénomènes instantanés; c’est sans doute pourquoi certains
déclarent que seuls les sujets (entendez les prédisposés) sont accessibles à la suggestion mentale.

b) Le percipient
Les gens actifs, volontaires, réalisateurs, sont mieux qualifiés pour émettre que pour recevoir. Entre
deux individus désireux d’expérimenter, c’est au plus contemplatif que devrait échoir le rôle de
percipient. On tiendra compte, d’autre part, de ce que la sympathie, l’analogie de la culture, et
l’équivalence d’acuité intellectuelle favorisent les communications de pensées.
Ce qui prépare le mieux à la réception des ondes télépsychiques, c’est la pratique de l’exercice
nommé « isolement » qu’on indique dans la plupart des manuels d’éducation de la volonté (2), car
il est essentiel pour s’habituer à diriger sa pensée. Cet exercice consiste à raréfier puis à suspendre
l’activité intellectuelle. Or, la percipience nécessite l’aptitude à un profond recueillement
expectatif, aptitude que l’exercice en question développe rapidement.
2. Voir l’ouvrage: Le Pouvoir de la volonté (Éditions Dangles) ; il constitue, pour ainsi dire,
l’enseignement élémentaire de la question dont nous traitons ici le degré supérieur. On y trouvera
une méthode détaillée pour l’accroisse- ment des énergies psychiques et l’affermissement du
vouloir .
2. Le rapport
Les deux intéressés (3) conviendront des jours et heures aux- quels devront avoir lieu les essais et
situeront ceux-ci à des \ moments où l’un et l’autre ont tout le temps de s’isoler dans le silence, sans
risque d’interruption. L’objet de chaque essai sera laissé à l’initiative de l’émetteur qui spécifiera
néanmoins l’ espèce des images à transmettre : visuelles, auditives, etc. Un quart d’heure doit être
réservé, au début de toute séance, pour établir le rapport télépsychique. Selon la durée de la séance,
on essaiera une, deux, trois transmissions à raison d’une par quart d ‘heure.
Au moment de se mettre en télécontact, les deux intéressés auront l’un et l’autre intérêt à chercher
une position confortable où le bien-être organique confine à l’incorporéité. Chacun conservera
seulement une faible lumière placée derrière soi.
Durant à peu près cinq minutes, songer uniquement à réaliser une détente musculaire et une
passivité nerveuse complètes.
Puis l’émetteur évoquera mentalement l’image du percipient. De son côté, ce dernier se recueillera,
cessera de penser active- ment, suspendra toute spontanéité imaginative afin de demeurer dans
l’expectative psychique la plus complète. On a nommé cet
état le vide mental. A titre d’indication complémentaire, je crois devoir dire ici que certains
expérimentateurs ont préconisé, pour établir le rapport, l’emploi d’une formule convenue que les
deux intéressés devaient l’un et l’autre réciter intérieurement à l’heure prévue pour les essais, ou
d’une figure qu’ils contempleraient quelques instants; c’est à essayer. Personnellement, je m’en
tiens à l’évocation de l’image qui m’a toujours donné d’excellents résultats. D’ailleurs, quand
l’émetteur se sent très animé intellectuellement, son intention pure et simple suffit à contacter le
sujet.
3. Il peut y avoir plusieurs percipients dont chacun s’efforce de saisir la pensée de l’opérateur. Je
déconseille cette méthode car le rapport simultané avec différents sujets s’établit malaisément et
défectueusement.
3. Les images à transmettre
Les couleurs et les formes se communiquent assez facilement, ensuite viennent: les sons (4), les
odeurs, les saveurs, les sensations tactiles, les impressions musculaires, les états émotifs (5) et les
formules générales. Voici les directives à observer pour chaque groupe.
4. Deux opérateurs auditifs réussiront aisément la téléaudition, et deux visuels la « télévision ».
5. Entendez les états émotifs improvisés; les émotions réelles se transmettent plus vite et mieux que
n’importe quoi.
a) Couleurs et formes
Progression: une tache colorée à contours flous sur fond blanc; une figure simple, grassement
tracée en noir sur fond clair (triangle, cercle, hexagone, cœur, lettre capitale, etc.) ; une figure
simple colorée (cœur rouge, triangle vert, etc.) ; une figure complexe colorée (carte à jouer, mot
écrit en lettres grasses de couleur , objet usuel avec ses tons).
Émetteur: il contemplera attentivement un modèle matériel (préparé à l’avance) de ce
qu’il veut transmettre, puis, fermant les yeux, il en construira l’image mentale. Il
imaginera, enfin, le sujet voyant apparaître cette image. La durée convenable
pour chacune de ces trois opérations est de trois à cinq minutes.

Percipient : il aura devant les yeux un écran blanc, légèrement teinté, uniformément éclairé par la
demi-lumière, et il laissera son regard errer paisiblement, indifféremment, sur cet écran. Si
plusieurs impressions lui viennent, il les notera passivement en observant si l’une ou l’autre lui
paraît plus intense. De temps à autre, il fermera lentement les yeux et les rouvrira, toujours lente-
ment, au bout de quelques secondes.
b) Sons
Progression: un son rythmé et continu (exemple : sonnerie de réveille-matin) ; une série de bruits
violents (détonations, coups de gong) ; un arpège; un contour mélodique bref et précis (exemple:
leitmotiv de l’épée) ; une injonction brusque (levez-vous !
• attention) ; une phrase courte et expressive.
Émetteur: l’audition réelle de ce qu’il veut transmettre l’aiderait considérablement, surtout
au début. Il visualisera le percipient,
en imaginant que ce dernier est présent et qu’il paraît entendre. Faute d’audition
réelle, les seules ressources auto-
hallucinatoires peuvent suffire.

Percipient : pour la réception des sons, l’obscurité est préférable. Le silence s’impose, bien entendu.
Le percipient, assis ou étendu, pourra se laisser aller à une légère somnolence.
c) Olfactions et saveurs
Procéder d’une manière analogue à la précédente. Plus une odeur ou une saveur est puissante, plus
aisément elle se transmet. L’émetteur sera toujours aidé par la mise en jeu réelle de ses sens.
Comme précédemment, l’image du sujet et le fait de se figurer qu’il perçoit l’émission sont
indispensables.
d) Sensations tactiles
Progression: piqûre d’épingle, contact glacé, léger courant d’air, application des mains, impression
d’être tiré en arrière par les épaules.
Émetteur: il usera, à son gré, de l’un ou de l’autre des deux procédés que voici :
• Se soumettre lui-même à la cause réelle de la sensation à transmettre en se figurant
voir le sujet, la ressentir en même temps que lui.
• Imaginer le sujet présent et agir sur ce phantasme.

Percipient : toujours passif, il veillera à écarter de lui toute source d’impression réelle susceptible
de l’induire en erreur .
e) Impulsions musculaires
Progression (le sujet est toujours assis au début de la séance) : mouvements simples (se lever, lever
un bras, déplacer une jambe, etc. ), ambulation (se lever et avancer, aller à droite ou à gauche,
tourner, en un mot décrire une trajectoire définie), actes simples (saisir un objet, le déplacer, le
laisser choir), actes complexes (fumer, écrire, jouer d’un instrument de musique, etc.).
Émetteur: le seul commandement resterait sans effet dans 90 % des cas. C’est en
images qu’il y a lieu de formuler les suggestions. Voyez (en imagination) le
sujet se lever et suivez le décomposé des mouvements suggérés. Ainsi, pour
communiquer l’impulsion de marcher, il faut, par la pensée, animer alternative-
ment les jambes du percipient. Chaque geste doit être visualisé lentement,
dans toute son étendue, quatre à vingt fois de suite.

Percipient : il devra s’asseoir au début de la séance. Demi- lumière, afin d’éviter les heurts.
f) États émotifs
Ainsi que je crois avoir réussi à le faire comprendre, l’émotion constitue la clef des actions à
distance. Spontanée, elle se communique d’elle-même et entraîne parfois à l’improviste un
phénomène de percipience intégrale. Nous avons vu, au chapitre précédent, pourquoi et comment il
y a lieu de déclencher en soi- même des poussées émotives lorsqu’on veut imposer sa pensée. Ici, il
s’agit de communiquer des états qu’on imagine mais qu’on n’éprouve pas nécessairement. Les
praticiens entraînés de l’autosuggestion (6), qui ont appris à faire réagir sur eux-mêmes leur
imagination, sauront tirer parti de cet acquis et se placer, en l’ évoquant, dans tel ou tel état
d’émotion. Deux méthodes s’offrent à l’expérimentateur :
• Imaginer que l’on ressent une émotion quelconque et que le percipient en a conscience.
• Imaginer que le percipient ressent cette émotion et tâcher de s’émouvoir soi-même de
cette représentation.
Il n’y a pas à considérer de progression. Tout état affectif, nettement représenté, peut se
communiquer aussi bien qu’un
autre. L’émetteur appréciera lui-même, d’après sa propre psychologie et celle du percipient, Quels
états conviennent le mieux.
6. Voir. du même auteur: Méthode pratique de magnétisme, hypnotisme, suggestion (Éditions
Dangles).
g) Transmissions littérales
Transmettre une phrase ou un ordre, littéralement, sans l’aide d’un élan émotif, nécessite une
concentration attentive exemplaire et, d’autre part, une percipience aiguë. Il y a des exceptions à
cette règle, du moins des exceptions apparentes. J’ai constaté chez quelques rares individus, une
étrange facilité de suggestion littérale même sur des personnes non prévenues. Ainsi, l’un de mes
élèves qui, sans enthousiasme, avait à la veille d’une entre- vue, suggéré à un ami -et à l’insu de
celui-ci de lui adresser une proposition déterminée, s’entendit effectivement proposer ce qu’il
désirait et cela dans les termes mêmes où il l’avait suggéré.
Le procédé le plus rationnel consiste à écrire la formule à communiquer, d’une écriture ferme,
claire, résolue, sur un papier clair, à exposer ce papier sous les rayons d’une forte lampe et à en
répéter les termes, en les suivant du regard, en les énonçant mentalement, en imaginant leur
assonance, en les exprimant ensuite sous forme imagée mais avec l’idée persistante que le sujet
comprend et acquiesce. Il faut voir ce dernier donner des marques d’acquiesce- ment, se le figurer
présent et attentif, comprenant d’emblée.
Le percipient utilisera un écran clair, comme pour la réception des images. Si le sens de la phrase
est émouvant, ce sera un élément de succès très appréciable.

CHAPITRE V
La suggestion mentale sur des sujets éveillés ou préalablement hypnotisés
I. Entraînement des sujets à l’état de veille
Quand on opère chez soi sur des sujets présents et que l’on peut renouveler les essais, il est possible
d’entraîner ces sujets, de développer leur percipience, soit à l’état de veille par un procédé que je
vais décrire, soit à l’état d’hypnose, au moyen de suggestions verbales réitérées.
a) Le cumberlandisme
Ce procédé repose sur les inévitables manifestations musculaires de la pensée. Tenez le poignet
d’une personne qui pensera fortement à vous faire exécuter un mouvement quelconque: vous
percevrez, avec un peu d’ attention, une impulsion que son bras reçoit de son cerveau et transmet à
votre main. Certains expérimentateurs, virtuoses de cette lecture musculaire, arrivent à simuler avec
son aide la lecture de pensées. Ils vous prient de leur commander mentalement un acte, vous
saisissent le poignet et interprètent assez habilement ses tressaillements pour exécuter , guidés par
vous même, l’acte requis. Pour réussir cela, il faut savoir dérober son attention aux impressions
extérieures, aux enchaînements d’idées qui tendent à se poursuivre dans l’esprit, aux supputations
que l’imagination enfante si volontiers, en un mot, il faut se placer dans une condition de
disponibilité totale, réaliser ce que les écoles psychiques orientales nomment la « nuit mentale ».
Le cumberlandisme permet donc d’ exercer un sujet à se rendre passif, à interrompre son activité
intellectuelle, ce qui aiguise considérablement sa percipience relative aux suggestions mentales
sans contact. Voici pourquoi j’utilise et conseille ce pro (connu sous le nom de son inventeur) dont
voici la techl1 détaillée :
1) Choisir, dans le local où l’on opère, un endroit où l’on viendra se placer avec le sujet à chaque
essai. Ce sera le point départ de toutes les trajectoires qu’ on lui suggérera ultérieurement.
2) Imaginez un acte à accomplir par le sujet. Au début, sera quelque chose de simple, par exemple:
aller dans la pièce voisine, y saisir un objet et le déposer sur une chaise.
3) Décomposez cet acte en autant de mouvements parti qu’il en faut pour l’accomplir. Exemple:
marcher vers la porte, tourner vers la porte, lever le bras, l’avancer vers le bouton porte, saisir
celui-ci, le tourner, tirer (ou pousser), entrer dans pièce où se trouve l’objet à prendre, avancer
jusqu’à cet endroit( s’arrêter, lever le bras, saisir l’objet, retirer le bras, se tourner v la chaise,
marcher vers la chaise, y déposer l’objet.
4) Demandez au sujet de vous tenir le poignet droit avec main gauche, assez fermement.
5) Concentrez votre attention sur le premier des mouvement à suggérer (marcher). Imaginez-vous
voir le sujet avancer tune jambe, puis l’autre. Insistez sur cette représentation jusqu’à qu’il parte.
Continuez à le pousser, par la pensée, en le suivant doit vous conduire, marcher devant vous, ce
qui, en présence profanes, crée tout à fait l’illusion d’une lecture de pensée Lorsqu’il arrive au
terme de l’exécution du premier commandement, donnez-lui le second, toujours sous forme
d’image accompagnée d’un ordre mental énergique.
6) S’il se trompe, voyez-le interrompre le mouvement erroné, en commandant: « Arrêtez! ». Quand
il s’est interrompu, reprenez la suggestion au point où vous l’avez laissée.
7) En poursuivant la série de vos suggestions partielles vous assurerez l’exécution intégrale de
l’acte désiré.
Avec l’habitude, on parvient à obtenir l’accomplissement des actes les plus complexes avec une
rapidité surprenante. Cela pour- rait servir de jeu de société ou même d’attraction pour salle de
spectacles. Au point de vue où nous nous plaçons ici, le procédé de Cumberland prédispose le sujet
et l’opérateur à la suggestion mentale sans contact, car s’il développe la percipience du premier, il
entraîne, en même temps, le second à la concentration de pensées.
b) La suggestion mentale sans contact
Il est bon de choisir un sujet auquel la méthode de Cumberland soit familière et un moment où ce
sujet paraisse bien disposé. L’objet des tentatives reste à peu près indifférent, mais je conseille de
toujours commencer par l’une ou l’autre des deux expériences ci-dessous :
I) Disposez sur deux ou trois tables dix, vingt, trente objets. Procédez d’abord avec contact jusqu’à
ce que le sujet arrive devant celle des tables où se trouve l’objet que vous spécifiez mentalement.
Là, cessez le contact et poursuivez votre effort suggestif. Le percipient ne devra pas se hâter, mais
attendre une impulsion assez nette. Faut-il dire que, dans cette expérience comme dans les
précédentes, l’émetteur exprimera ses suggestions en images ? S’il veut bien, la veille, ou même
plusieurs jours à l’avance, consacrer un peu de temps à étudier l’objet afin d’en construire une
image bien précise, l’expérience n’en marchera
que mieux.
2) Bandez les yeux du sujet et, vous plaçant derrière lui, efforcez-vous d’en obtenir quelques
mouvements sur place: lever un bras, tourner la tête, etc. Ensuite faites décrire une trajectoire bien
déterminée.
Tous les essais du chapitre IV (communication concentrée) peuvent naturellement être pratiqués
avec un sujet entraîné comme
on vient de le voir .
2. Expérimentation sur des sujets sous hypnose
J’étonnerai sans doute plus d’un lecteur (en particulier parmi ceux, très nombreux, qui ont obtenu et
étudié les phénomènes décrits dans ma Méthode pratique de magnétisme, hypnotisme, suggestion)
si je leur dis que la réalité des états d’hypnose est mise en doute, voire niée, par des hommes que
leurs titres intronisent comme d’ultimes compétences. Ces sagaces ont discerné le caractère
simpliste des théories de Braid, l’excessive rigidité de celles de Charcot, l’imprécision des
doctrines de Liébeault et les imaginations trop abondamment mêlées au système des magnétistes.
Ils ont ensuite, gravement, « jeté l’enfant avec le bain
». Jugeant inopportune la longue dépense de temps et d’efforts indispensable à qui veut se livrer à
de fréquents essais
d’obtention des état.! psychiques particuliers jadis étiquetés « hypnose » (I), les doctes négateurs en
question ne sauraient se
targuer d’un critère expérimental suffisant. A ce dernier seul devront recourir ceux qui tiendront à
savoir .
Essayez les manœuvres hypnotiques sur cent individus quel-
conques. Vous n’observerez peut-être pas sur un seul d’entre eux les fameux états classiques (2)
(catalepsie, somnambulisme et léthargie) -produits de la conjonction d’un terrain nerveux spécial,
d’un procédé singulier et de l’influence doctrinale de la Salpetrière mais à coup sûr d’étranges
modifications momentanées de la condition psychique normale des sujets. Parmi ces modifications
figureront dans 20 % environ des cas, l’inconscience et le degré de suggestibilité qui permet’
d’éteindre la sensibilité et d’impressionner le système nerveux au point d’activer ou de ralentir
instantanément toute fonction.
Vous constaterez non pas un état riXe, toujours semblable- ment conditionné, mais autant
d’hypnoses différentes que de sujets affectés.
Cette diversité, bien faite pour dérouter quiconque n’a pas mis à l’épreuve un grand nombre de
sujets, cette inconsistance qui égare le jugement de quelques illustres neurologues et psychiatres,
elles n’ont échappé à aucun de ceux qui, ayant fait de l’hypnotisme la principale affaire de leur vie,
l’ont assidûment pratiqué et en demeurent les véritables maîtres. Donato (3) signalait, dans un
ouvrage paru en 1882 (4), la fugacité des caractères classiques de l’hypnose. Alexandre Lapôtre (5)
l’analyse dans un de ses ouvrages (6). Je l’indiquais moi-même dans mon premier travail, un
modeste opuscule, publié en 1909 (7).
La digression qui précède m’a semblé un utile préambule à l’exposé des procédés que je conseille
pour provoquer l’hypnose, car elle commente la directive essentielle à toute tentative hypnotique:
ne pas s’attendre à une sorte de déclenchement après lequel le sujet se trouve réduit à l’état
d’automate passif et inconscient, mais chercher une altération plus ou moins accentuée
de l’activité psychique consciente survenant parallèlement à une extension de l’activité psychique
subconsciente. Cette dernière extension comporte celle de la percipience des suggestions mentales.
D’où l’intérêt de l ‘hypnose au point de vue des phénomènes dont traite ce livre.
I. Quoique ces états présentent rarement avec le sommeil l’analogie impliquée par le choix du
vocable hupnos.
2. Dont les manuels préparatoires au doctorat en médecine décrivent encore le détail, quoique les
théories hypnotiques de Charcot soient aujourd’hui officiellement désavouées.
3. Alfred, baron d’Hont, dit Donato, décédé à Paris en 1900 et dont le nom est devenu la commune
étiquette d’un certain nombre d’imitateurs.
4. La Fascination magnétique, par Calvailhon, préface de Donato (Paris, 1882, Dantu éditeur).
5. Célèbre vulgarisateur qui a bien mérité son titre de « Plus grand hypnotiseur de France » en
donnant, durant 25 années à peu près chaque soir, des démonstrations d’hypnotisme
rigoureusement loyales.
6. Méthode pratique d’hypnotisme (Paris, 1924, Le Soudier éditeur). 7. Hypnotisme et suggestion
(Paris, 1909, Eichler éditeur).
7.Hypnotisme et suggestion (PARIS , 1909 , Eichler éditeur)
3. Procédé d’hypnotisation
Ne vous souciez ni de l’âge, ni du sexe, ni du degré de vigueur physique (8), ni des qualifications
intellectuelles du sujet. L’aptitude aux états seconds dépend d’un ou plusieurs éléments mal définis
qu’aucune caractéristique appréciable n’exclut(9). Faites asseoir votre collaborateur éventuel en
face de vous et de l’éclairage, auquel vous tournerez le dos.
I) Pressez dans vos mains les pouces du sujet. Invitez-le à vous regarder. Dirigez et
maintenez votre regard au point équidistant des bords internes de ses yeux. Pensez
attentivement qu’il va donner des signes de fatigue oculaire. Continuez jusqu’à ce que
le réflexe palpébral s’accélère notablement. Si cela ne se produit pas au bout de cinq
minutes, passez tout de même à la seconde manœuvre.

2) Présentez devant les yeux du sujet, à dix centimètres environ, une tige de bois ou de
métal terminée en boule, ou du moins en saillie. Invitez le sujet à fixer la convexité
et à suivre ses mouvements. Faites décrire au point qu’il fixe, très lentement, une
cycloïde descendante, déplaçant le point de centre d’environ un millimètre à chaque
tour. En même temps, dite d’une voix claire, posée, assez basse: « V os paupières
deviennent pesantes, elles s’alourdissent. Vous sentez comme un picotement dans les
yeux, une lourdeur de plus en plus nette dans les paupières. Vous voyez comme un
brouillard, comme un voile. Votre tête s’engourdit. Votre vue devient confuse. Vos
yeux se ferment. ..» Réitérez ces suggestions jusqu’à ce que l’occlusion des yeux soit
obtenue.
3) Passez derrière lui. Appliquez vos mains latéralement contre sa face, à hauteur d
‘yeux, vos médius légèrement appuyés contre les globes oculaires. Suggérez
l’alourdissement de la tête : « votre tête devient pesante, lourde, plus lourde, de plus
en plus pesante. Elle pèse lourdement, comme du plomb. ..» Insistez jusqu’à ce que
la tête s’incline vers la poitrine.
4) Revenez devant le sujet. Placez vos mains à plat sur sa tête, les pouces réunis au
milieu de la ligne d’implantation des cheveux. Décrivez sans arrêt, d’un rythme
constant, des frictions en demi-cercle, tangentiellement aux sourcils, avec l’extrémité
de vos pouces, sur le front. Affirmez la venue du sommeil (10) :

« Maintenant vous avez sommeil. Vous sentez que vous allez vous endormir. Vous
éprouvez un besoin irrésistible de sommeil. Le sommeil vous gagne, vous envahit.
Vous sentez comme un engourdissement général. Vous vous endormez. Vous vous
endormez de plus en plus profondément. Tout devient noir, chacune de mes paroles
vous endort plus profondément. Sommeil... sommeil... profond sommeil... Vous êtes
endormi, si bien endormi... que quand je dirai sept vous tomberez dans un plus
profond sommeil. » Comptez lentement jusqu’à sept.
5) Pressez assez fermement la racine du nez et le vertex du sujet et dites, en articulant
très distinctement: « Dormez, dormez, vous dormez. A chaque seconde vous
dormirez plus profondément. Rien ne peut vous éveiller avant que je le veuille. De
plus en plus profond sommeil. Endormi. Dormez! »

Baissez votre éclairage. Soulevez délicatement une des paupières du sujet. Si le


globe de l’œil est révulsé, ou si la pupille se trouve soit dilatée, soit rétrécie
notablement, la condition psychique du sujet s’est modifiée. Vous pouvez essayer les
diverses épreuves usitées pour apprécier le degré de l’hypnose: anesthésie suggérée,
contractures synergiques, indifférence à l’olfaction de l’ammoniaque, etc. (11). En
donnant au sujet deux ou trois ordres verbaux, vous jugerez de sa passivité. Quoi
qu’il en soit, donnez lui plusieurs fois les suggestions suivantes: « Vous ne pensez à
rien. Vous cessez de penser. Vous ne pouvez penser que ce que je vous suggérerai
verbalement ou mentalement. Je vais concentrer ma volonté sur diverses images, sur
différentes idées qui se communiqueront à votre esprit et s’imposeront à votre
attention. »
Cela accompli, les essais de communication de pensée ou de suggestion mentale
pourront commencer, soit d’après les données du chapitre IV, soit d’après celles du
présent chapitre en ce qui concerne l’expérimentation à l’état de veille.
Gardez-vous de douter de votre aptitude ou de croire extraordinaire d’obtenir ces
manifestations. Les débutants ont d’ailleurs souvent la bonne fortune de rencontrer,
dès leur premier essai, des sujets très doués, très sensibles. Je dirai même que
beaucoup ont réussi, du premier coup, sous mes yeux, à obtenir des manifestations
précises et instantanées.
Trois à cinq minutes d’action sont généralement nécessaires pour que le phénomène
se produise. Mais il arrive que l’émission mentale de l’opérateur agisse dès la
première seconde.
Un dernier mot: évitez d’opérer avec plus de .deux ou trois assistants, surtout au
début ou avec un nouveau sujet, et obtenez des personnes présentes un silence
recueilli.
8. Mieux vaut exclure les épileptiques, les hystériques
9.Pour les signes révélateurs des sujets faciles à hypnotiser, consulter mon livre : Méthode
pratique de magnétisme, hypnotique, suggestion (édition Dangles).
10. C’est seulement après avoir obtenu: a) la fatigue oculaire, b) l’occlusion des yeux, c)
l’alourdissement de la tête, que l’on doit se permettre de suggérer le sommeil. La plupart des
personnes éprouvent l’appréhension de perdre conscience et réagissent inconsciemment contre
les effets hypnotiques au seul mot de « sommeil » ; elles réagiront beaucoup moins.
11. Voir , à ce sujet: Méthode pratique de magnétisme, hypnotisme, suggestion ainsi que:
Théorie et pratique de l’hypnotisme (Éditions Dangles) ; on y trouvera d’autres
procédés d’hypnotisation
CHAPITRE VI Hypnose par action mentale
I. Sujet ayant déjà été plusieurs fois hypnotisé

On sait qu’il existe quatre facteurs d’hypnotisation : les excitations sensorielles, la suggestion
verbale, la radioactivité physiologique ou magnétisme animal et l’action psychique proprement dite
(I).
Lorsqu’on cherche à déterminer des phénomènes hypnotiques sur un sujet présent, il est judicieux
d’utiliser ensemble les quatre éléments d’influence. Outre l’avantage quantitatif de leur totalisation,
on a, ainsi, la certitude d’affecter celui des modes de
sensibilité qui prédomine chez le sujet. Certains individus sont, en effet, plus sensibles à un facteur
qu’à un autre.
Quand on désire réaliser la possibilité de provoquer l’hypnose à l’improviste et à une distance plus
ou moins étendue, l’action psychique restera le seul facteur utilisable; le succès sera plus facile
avec un sujet qui y soit plus sensible qu’aux trois premiers,
ce dont on peut aisément s’assurer en soumettant chacun des sujets dont on dispose à quatre séries
de créations respectivement
sensorielles, verbales, magnétiques et psychiques. Faute de choix, on peut essayer sur un
quelconque hypnotisable. Après avoir entraîné le sujet à percevoir les suggestions mentales, suivant
les instructions données au précédent chapitre, il devient possible de l’endormir et de l’éveiller par
un simple effort de volonté.
Quand ce dernier résultat devient coutumier, qu’il ne demande plus guère d’effort, on l’obtient à
grande distance aussi bien qu’à quelques mètres. Un compte rendu extrêmement intéressant d’une
expérience de ce genre, plusieurs fois répétée, par UI1 comité de savants et de médecins
(notamment P. Janet, Myers, Gibert, Marinier et Ochorowicz) a été donné par M. Ochorowicz,
agrégé de l’Université de Lemberg, dans son livre intitulé la Suggestion mentale (Doin éditeur,
Paris, 1887). On
en trouver2 d’autres dans celui de Boirac, recteur de l’Académie de Dijon, IG Psvchologie
inconnue (A1can. éditeur. 1913)

1. Voir mon livre: Méthode pratique de magnétisme, hypnotisme, suggestion (Éditions Dangles).
2. Sujet n’ayant jamais été hypnotisé

Le lecteur attentif des trois premiers chapitres de ce livre Sait que les avis sont partagés quant à
la possibilité d’un tel phénomène; il connaît les bases de l’opinion affirmative; il conclure que
seule l’expérience (personnellement réalisée) peut, en l’occurrence, donner à chacun une
certitude.
J’ai montré au chapitre III comment influer à distance, SUI quiconque, à son insu. Quel que soit
le résultat cherché, l’hypnose
en particulier, la technique préparatoire et opératoire reste celle dl chapitre en question. C’est
dire que, dans la presque totalité
de: cas, il serait vain d’attendre un état second, bien caractérisé, d’unI seule séance
d’action mentale. Comme pour tout autre effet conforme à une image précise,
la répétition de l’effort émissif es indispensable.
D’ailleurs, une essentielle condition s’impose, en conformité des principes exposés
au chapitre III, à quiconque veut tente d’obtenir l’hypnose à distance sur des
sujets non « travaillés » c’est d’être rompu à l’expérimentation hypnotique
ordinaire, celle qu’on pratique à l’aide du regard et de la parole sur des
personnes présentes. Seul un expérimentateur à qui la production de
l’hypnose est devenue familière peut en imaginer, en suggérer précisément la
venue. Je crois avoir, par ailleurs, suffisamment insisté sur le rôle important
des images mentales en télépsychie.
Les diverses représentations à utiliser pour l’essai d’obtention de l’hypnotisme à
distance sont les suivantes :

I) Image du sujet, présent, assis face à l’opérateur comme pour l’hypnotisation verbale.
2) Image de l’exécution de la première manœuvre et des effets qu’elle détermine.
3) Images successives des manœuvres qui suivent la précédente et de leurs effets respectifs.
4) Image du sujet en état intégral d’hypnose.

L’élan volitif dont on sait l’indispensable ardeur sera, ici, caractérisé par une intention résolue de
provoquer le sommeil hypnotique. Cette intention, à elle seule, suffirait à affecter le sujet, pourvu
qu’on l’émette longuement et qu’on la réitère cha- que jour pendant quelques semaines. Mais, sans
représentation bien nette de l’état qu’on désire, on influerait dans une forme imprécise et le sujet
éprouverait une sorte mal définie d’engourdissement.
Il va sans dire qu’une fois l’hypnose obtenue, la suggestion devient possible. De même qu’un sujet
que vous endormez par le regard et la parole atteint son degré maximum de suggestibilité, celui
qu’on hypnotise par action à distance devient suggestible mentalement, tant qu’il est maintenu dans
l’hypnose.
Le réveil ne présente pas de difficulté. Il s’effectue dès qu’on le suggère, comme dans
l’expérimentation ordinaire.
2.Voir mon livre: Méthode pratique de magnétisme, hypnotisme, suggestion (Éditions Dangles).

TROISIEME PARTIE
APPLICATIONS DIVERSES
CHAPITRE VII
La communication télépsychique des sentiments

I.Considérations générales

Dans un précédent ouvrage consacré aux doctrines hermétiques, j’ai évoqué l’occulte puissance
d’attract, inséparable de toute véhémence intérieure. Je vais, ici, dépouiller cet arcane de ces voiles
hiératiques, en profiler nettement le lumineux relief, afin qu’il dispense aux meurtris sa clarté
bienfaisante. Ma tâche se trouve, d’ailleurs, largement ébauchée. L’attentif lecteur des trois
premiers chapitres de ce livre a déjà compris que, dès l’instant où une âme s’émeut intensément
d’amour, d’affection, d’amitié, elle dispose spontanément d’une possibilité d’influence psychique
proportionnelle à l’ardeur du sentiment qu’eUe éprouve. Disons -pour prévenir une inévitable
objection -que l’insuffisance de cette conditionnelle ardeur explique l’inopérance de multiples
sincérités et que, seule, sa gestion réfléchie assure son efficace retentissement. De cela, par ailleurs,
notons le corollaire : quand la vanité, l’ambition, la vénalité suscitent le désir d’inspirer l’amour, de
le perpétuer ou de le faire renaître, peu de recours leur sont offerts par l’action télépsychique, car
on ne communique pas un état si on ne l’éprouve; qu’on le puisse imposer, c’est quelque- fois vrai,
mais la fermeté dominatrice, l’impérieuse exaltation.
indispensables pour cela, supposent soit d’exceptionnelles positions, exclues des caractères
vulgaires, soit des prérogatives acquises au prix d’une ascèse dispensatrice de singulier
détachement.
Aux seules tendresses véritables, aux seules passions spécifiquement amoureuses, s’adresse donc
ce qui va suivre. Quoique égoïstes tant qu’ elles se soucient de recevoir et non uniquement de
donner, elles sont certainement utiles à l’ évolution de beaucoup et toujours préférables aux
tiédeurs mornes de l’inertie.
2. Le dynamisme passionnel

Dès qu’une passion s’éveille, toutes les ressources intérieures semblent s’accroître. Une
impulsivité inaccoutumée anime à fois l’organisme, l’imagination et la volonté. On a
l’impression sortir d’une longue torpeur et de commencer seulement à vivre avec plénitude. En
particulier, la pensée est considérablement plus active qu’à l’habitude. C’est que la vigueur
amimique s’élabore abondamment. On voit d’emblée l’importance de cet afflux: condition
première d’une irradiation puissamment influente, l’élaboration abondante des énergies
psychiques suffit a entraîner la communication des dispositions qui la génèrent, à affecter objet
et à éveiller en lui des dispositions réciproques.
Malheureusement, la réceptivité de ce dernier peut se trouver perturbée par une ou plusieurs
causes: dissonances fonctionne entre les deux caractères, inclinaison ressentie pour quelque
autre rivalité, lassitude, préoccupation dérivative. Alors l’influx spontanée de la pensée ne suffit
pas; il faut user de son influx condensée et réfléchie, de manière à doubler, à tripler, à décupler
sa puissance. Nous avons vu, au chapitre III, comment procéder en général pour cela. Nous
allons maintenant préciser, en l’adaptant au cas particulier de difficulté sentimentale. Retenons,
cavant tout, ceci: du moment où il y a passion, sentiment, désir, pourvu que l’ardeur en soit vive,
on dispose d’une puissance suffi! pour influer sur qui suscita cet élan. Mais
si l’élaboration de l’énergétique psychique est alors assurée, sa condensation exigé un arrêt
immédiat de l’émission discontinue, à laquelle sont enclins les cœurs malheureux. Cette
dispersion constitue un écueil des plus graves. S’il l’on ne sait, préalablement à toute tentative
d’action à distance, dominer l’agitation qui éparpille, sans utilité, l’énergie psychique, l’espoir
d’aboutir renonce à son seul appui.
3.L’arrêt de la dispersion du dynamisme
Les déconvenues ,les meurtrissures, les chagrins sentimentaux deviennent volontiers obsédants.
L’idée fixes implante, agite sans cesse l’esprit, entraîne l’imagination aux vagabondages les plus
délirants et retient si despotiquement l’attention que le sommeil même devient malaisé. Pour
certains, s’arracher un moment à l’évocation des mille et une songeries expressives de leur état,
cesser l’espèce de possession fictive par quoi ils trompent leur douleur, semble un vrai supplice.
Cette perpétuelle tension ,impossible pour tout autre objet, apparaît spontanément dans la
passion contrariée en raison même de l’afflux énergétique inséparable de tout état affectif
intense, ardent, violent. Elle engendre une émission psychique continuelle et disperse
inévitablement en mille pensées, paroles, impulsions, le dynamisme qu’elle suscite. Il en résulte
que l’intéressé ne dispose à aucun moment d’un potentiel suffisamment condensé pour agir avec
force. C’est pourquoi ceux qui prétendent que
«si la télépsychie existait, ils auraient beaucoup d’influence, puisqu’ils pensent toute la journée à
l’objet de leur préoccupation»se fourvoient.
Supposez que d’une fenêtre, au quatrième étage, vous vouliez abattre un obstacle situé dans la
rue et que, pour cela, vous disposiez d’un stock journalier de 50000 feuilles de papier. Si, de
l’aube au couchant, vous en jetiez, vers l’obstacle, une par seconde, cela n’aurait aucun effet.
Mais si ,réservant votre stock pour un moment déterminé, disons de cinq à six heures, vous le
répartissiez en paquets d’un ou deux milliers de feuilles et qu’à « l’heure prévue vous
bombardiez l’obstacle avec ces masses compactes, vous l’ébranleriez peu à peu pour le voir
bientôt s’écrouler . Comparaison simpliste, puérile, soit, mais à coup sûr point inutile à faire
comprendre. I » l’inanité d’escompter un effet quelconque d’une idée fixe inlassablement
ressassée et, 2° la nécessité de suspendre durant des heures son débit d’énergie mentale quand on
veut s’en constituer une réserve susceptible d’être efficacement projetée.
La première règle à observer pour tenter de communiquer un sentiment consiste à s’interdire
durant vingt-deux ou vingt-trois heures sur vingt-quatre, d’y penser, du moins constamment. Il
faut, de propos délibéré, détourner son attention du sujet et de ce qui se rapporte à lui, fixer cette
attention sur des ordres d’idées, des besognes, des dérivatifs prévus. Ceux qui ne sont pas
pratique- ment familiers avec les principes élémentaires de l’éducation psychique, en particulier
avec le changement volontaire de pensée, trouveront terriblement difficile de résister à
l’impulsion passionneIle qui tend à accaparer leur mental et de l’endiguer jusqu’au moment
journalier choisi pour la projection méthodique du potentiel ainsi accumulé.
Il faut aussi s’imposer l’effort de contenir les paroles et les impulsions diverses qu’on se sent
porté à extérioriser sous la pression du dynamisme émotionnel; ne pas céder à la tentation de
parler, de se confier, de s’épancher, en un mot retenir en soi la force chaque fois que sous une
forme plus ou moins insidieuse elle cherche à se libérer .
Ce n’est, certes, pas agréable, mais n’y a-t-il pas une compensation énorme à songer qu’ainsi on
s’arme pour combattre la difficulté ? Pour obtenir ce à quoi on tient par-dessus tout ?
4. La gestion intérieure

L’adepte bien pénétré de ce qu’il constitue un générateur d’énergie cette énergie qu’il s’agit
d’utiliser en l’émettant méthodiquement -observera, outre les règles précédentes, les principes
les plus idoines à l’élaboration maximum et à la condensation soigneuse de ses forces
psychiques. Pour le moral, ce sera un emploi du temps précis, ne laissant nulle lacune à la faveur
de quoi les spontanéités imaginatives ou extérieures puissent reprendre leurs cours; pour le
physique, une hygiène générale (I) minutieuse. A ce sujet, relire le chapitre III.
L’isolement (2) favorise la condensation. Il se recommande. à ce point de vue. Il facilite,
d’ailleurs, la surveillance de soi- même, laquelle vise à maintenir ses pensées, ses paroles, ses
actes en mode constamment réfléchi.
La concentration en soi-même du dynamisme émotionnel tend à déterminer un attract, une sorte
d’aimantation psychique constamment agissante sur le sujet. Aussi convient-il de s’interdire tout
empressement à son égard, de ne chercher ni à le voir ni à l’éviter et de conserver, en sa
présence éventuelle, l’attitude de la plus courtoise indifférence. Sous l’empire de l’attirance qu’il
ne tarde pas alors à ressentir, le sujet éprouve un désir de plus en plus obsédant d’approcher de
qui influe ainsi sur lui, de le rechercher , d’obtenir son attention, de demeurer dans son
ambiance. N’allez pas vers lui, attirez-le à vous: telle est la règle d’or .
5. Le plan; les notes de disponibilité

J’ai expliqué au chapitre III qu’un plan d’ensemble devait être médité et arrêté dès qu’on
projette d’user d’action à distance. Il s’agit de bien supputer le processus graduel des
modifications que l’on veut apporter aux dispositions morales du sujet. Envisager un
changement radical instantané serait téméraire (3). Il faut se donner un mois, deux mois, six
mois, davantage au besoin, pour affecter graduellement le sujet en lui communiquant d’abord
des pensées compatibles avec ses dispositions actuelles, puis de nouvelles considérations qui le
modifieront plus appréciablement et ainsi de suite. Pour chaque jour, on doit prévoir une séance
d’émission d’une à deux heures tout en s’efforçant, au cours de la journée, d’endiguer , comme
il a été dit, l’afflux de pensées qui surgissent, relativement à ce que l’on désire, il faut noter
celles qui, particulièrement émouvantes, devront être volontairement évoquées immédiatement
avant l’émission journalière.
1. A ce sujet, voir l’ouvrage du docteur André Passebecq : Votre santé par la diététique et
l’alimentation saine (Éditions Dangles).
2. Etre seul ou parmi la foule anonyme, c’est être isolé.
3. J’ai cependant vu obtenir des revirements incroyablement rapides, mais cela reste
exceptionnel.
6. Le rapport

Les indications du chap. III, § 6, pourront être utilisées, mais ici le rapport ne nécessite aucun
travail spécial, car il existe nécessairement. De même que, du moment où il y a passion,
inclinaison, sentiment, il y a dynamisme, il y a aussi rapport. Cela explique comment l’un se
trouve parfois plus ou ‘moins affecté, à l’instant, par les pensées, les émotions ou les souffrances
de l’autre.
7. L’émission journalière

Deux séances de trois quarts d’heure à une heure, ou une séance d’une à deux heures sont
généralement nécessaires. L’isole- ment, le silence et l’obscurité favorisent toujours l’émission
télépsychique. Mais tout cela n’a rien d’impératif. L’essentiel, c’est d’atteindre un état
d’exaltation où ce que l’on veut soit ressenti intensément et accapare entièrement le champ de la
conscience. Il ne suffit pas de constater son désir en une sorte de colloque intérieur. Tout l’être
doit vibrer ardemment, se sentir résolu à affecter la personnalité convoitée. Adjurer ou implorer
le sujet, dans un mode plaintif, de sympathiser avec soi serait peu efficace. Seules conviennent
les suggestions positives, affirmatives, et l’image du sujet témoignant qu’il se sent gagné par
leur influence.
Pour déterminer en soi-même l’état irradiant, l’usage d’un stimulant nervoso-psychique a son
utilité, car, ainsi qu’on l’a vu au chapitre III, l’absorption des excitants tire des plexus la force
nerveuse qui s’y trouve emmagasinée et la jette dans le torrent circulatoire, d’où le cerveau
l’attire et s’en sustente. Mais la considération successive de tous les motifs pour lesquels on tient
à obtenir ce que l’on veut, de toutes les satisfactions qui découleront du succès, puis de toutes les
conséquences douloureuses de l’insuccès, suscite plus sûrement encore la véhémence volitive.
Se représenter tout cela en tableaux bien nets, vivants, y
assister par la pensée, goûter, en imagination, les joies et souffrir les douleurs, tel est le secret de
l’animation indispensable à une efficace télépsychie.
Dès qu’on se sent en pression, il est judicieux de commencer l’émission proprement dite par
l’évocation de l’image du sujet. Je répète ici ce que j’ai déjà dit: « Quelle que soit l’heure, du
moment où l’image de quelqu’un comparaît sur l’écran de votre imagination, tout ce que vous
penserez durant la comparution influera appréciablement sur lui. »
Secondement, je recommande de suggérer au sujet l’obsession du visage de l’expérimentateur
.Pour cela, il suffit de se représenter le sujet voyant lui apparaître cette image, penser à qui elle
représente, laissant capter son attention par ce personnage. On imaginera que le sujet éprouve à
cela un vif agrément et qu’il s’abandonne au charme. De là, par des transitions logiques, on peut
faire évoluer la représentation mentale du sujet dans un sens conforme aux caractéristiques du
cas. Par exemple, lui suggérer le besoin de vous voir ou de vous écrire. Vouloir fortement qu’il
éprouve cela et se figurer qu’il y donne une suite effective.
Si l’expérimentateur sait que le sujet apprécie ou apprécia de lui telles ou telles manifestations
intellectives, sentimentales ou sensorielles, il suggérera de cela un rappel prolongé, suivi d’un
regret puis d’un désir de réitération.
Une autre forme d’action mentale, très efficace, consiste à imaginer la présence du sujet et à lui
parler à haute voix ou intérieurement en le voyant témoigner qu’il comprend, qu’il est touché,
troublé, qu’il acquiesce.
Quoiqu’il ne soit guère possible de donner des instructions détaillées pour tous les cas, les
directives précédentes ont tenté d’enclore ce qui, pour chacun, constitue l’essentiel.
Il existe des recueils de sortilèges qui laissent espérer de l’accomplissement matériel d’un
certain nombre de pratiques bizarres l’immanquable obtention de l’amour. On y trouve, en
particulier, la recette de philtres -tout bonnement aphrodisiaques et celle de l’envoûtement. Cette
dernière, compliquée, étrange, impressionnante, paraît combinée à dessein d’exercer à la fois
l’imagination, l’initiative et la volonté, de provoquer ainsi l’exaltation la plus frénétique et,
partant, l’émission télépsychique la
plus vigoureuse. Là comme ailleurs, une dépense considérable d’énergie se trouve nécessitée.
L’élan émotionnel de l’opérateur
, suscité et longuement soutenu par la succession des rites, fait tous les frais de l’expérience. Que
des agents occultes,
invisibles, coopèrent à l’action de l’expérimentateur, loin d’y contredire, j’en ai la certitude
expérimentale, en ajoutant que la
méthode indiquée ici les conjure tout aussi bien, sans formules cabalistiques.

CHAPITRE VIII
Le traitement mental des maladies
1. La base émotionnelle de tout traitement mental

L’efficacité d’un traitement par action mentale nécessite, avant tout, de la part du ou des
expérimentateurs, un vif sentiment de compassion envers le malade et envers ceux qui pâtissent
de son état. Je sais des exemples d’enfants chétifs que l’amour d’une mère, matériellement fort
limitée, a peu à peu fortifiés jusqu’à la robustesse. J’ai vu des mourants rappelés à la vie et
même des corps inertes ressuscités par l’irradiation animique d’un des leurs, initié aux méthodes
de ce livre. Certes, l’amour ne remporte pas toujours sur la mort, si ardent soit-il, une victoire
décisive; il est de fatales lésions, d’irréparables usures, d’incoercibles insuffisances. L’action
mentale transfuse à l’organisme en péril des énergies sustentatrices de ses autoréactions
curatives, mais si ce dernier manque des ultimes ressources indispensables pour réagir
avantageusement, la guérison ne s’effectue pas. Nombreux restent, en définitive, ceux qu’on
pourrait sauver. Des autres, du moins, on soutiendra le moral, on atténuera les souffrances, on
prolongera la vie.
Ce devrait toujours être un proche qui entreprenne la cure, un parent, un ami intime,
intégralement sympathique au malade et animé du plus vif désir de le soulager. Tout en laissant
à une personnalité ainsi qualifiée l’initiative directrice de l’intervention, plusieurs personnes
choisi ès. parmi les plus affectionnées au patient peuvent unir leurs efforts à ceux du principal
opérateur . Une chaîne de volontés accomplit parfois de véritables miracles, surtout composée
d’autant d’hommes que de femmes, le conducteur non compris, afin d’observer la loi polaire des
concours fluidiques. Cette chaîne, l’occultisme préconise de la prolonger dans l’invisible en
évoquant le souvenir des disparus de qui le malade fut chéri, ce qui aimante leur influence, et
même en appelant à l’aide les Êtres supérieurs tels qu’on les conçoit.
2. Directives générales

L’officiant et ses aides éventuels choisiront pour chaque jour un moment où ils puissent se
réunir, du moins où chacun, isolé- ment, sache disposer, là où il se trouve, du temps de s’unir à
l’intention des autres. Ils concentreront leurs pensées sur l’image du malade et, laissant leurs
bons sentiments à son égard s’épandre largement, ils déploreront ses souffrances, et exalteront
en eux-mêmes le désir de les atténuer, de les annuler, d’irradier vers lui leur propre vitalisme
pour l’en conforter et le guérir. L’attention de chacun devrait être successivement fixée, durant
dix à quinze minutes, sur les diverses pensées qui précèdent. Aussi l’officiant sera-t-il judicieux
en traçant une sorte de programme comportant un certain nombre de formules. Chaque
collaborateur
penserait ainsi en parfait synchronisme avec tous les autres. Il ne s’agit pas, bien entendu, de
répéter des mots, mais de vivre intérieurement, de sentir leur signification, d’animer des images,
de vibrer émotionnellement.
Après les ordres d’idées énumérés ci-avant, voici ce Qu’il convient d’envisager parmi les
suggestions curatives. D’abord, le sommeil, car c’est principalement à la faveur de cet état que
l’activité organique se joue, thérapeutiquement (3). Suggérer au
patient qu’il dorme longuement, calmement, profondément. Se le représenter dormant avec une
expression physionomique détendue, sereine. Le voir s’éveiller dans une impression de mieux-
être, d’allégement. Ensuite, songer à ses dispositions morales, lui communiquer l’espoir, la
sérénité, la conviction qu’on s’occupe utile- ment de lui, la certitude que le faisceau des volontés
concentrées pour le guérir dispose d’une force bien supérieure à l’action des agents adverses.
Tâcher, aussi, de se représenter avec une précision anatomique l’état actuel des organes malades.
Suivre paf la pensée l’accomplissement des fonctions perturbées, les stimuler, les régulariser
d’intention. Enfin, visualiser la guérison, la convalescence, le retour à l’activité normale. Cette
dernière représentation est d’une grande importance.
Comme pour toute autre intervention télépsychique, deux séances journalières de 45 à 60
minutes sont nécessaires. Il va sans dire, d’autre part, que le traitement mental ne proscrit
nullement la médication ordinaire.
3. Les maladies chroniques

Dans les maladies chroniques, on pensera, avant tout, à suggérer à l’intéressé de se conformer à
toutes les règles d’hygiène alimentaire et générale requises par son cas. On aurait plus vite
comblé le tonneau des Danaïdes que guéri un patient adonné à des excès ou même à l’usage
modéré de quoi que ce soit d’antiphysiologique.
On peut traiter et guérir par l’action mentale les habitudes néfastes, les toxicomanies, les
perversions, les monomanies, la propension au suicide. Pour cela, bien loin d’user de
suggestions impératives prohibitives, il faut affirmer à l’intéressé que l’obsession, la tendance, la
crainte dont il souffre lui deviennent de plus en plus indifférentes, qu’elles ne l’émeuvent pas,
qu’elles le trou- vent inerte, qu’elles lui laissent sa pleine sincérité. En un mot, on doit imaginer
que l’impressionnabilité du sujet diminue quant à l’agent morbide. Parallèlement, on cherchera à
lui communiquer toute sorte de pensées, de sentiments, de désirs antagonistes de ceux qu’il
s’agit de supprimer. On éveillera toutes les bonnes dis- positions susceptibles d’exclure
l’emprise du mal.
3. Aux temps de la médecine dans les Temples, le Somnus medicus était l’ultime remède dispensé
à tous les maux. Plus près de nous, la neurhypnologie du docteur Braid remit en évidence le rôle
thérapeutique du sommeil.

4. L’environnement moral du patient

L’entourage d’un psychopathe, à moins d’être initié, fait presque toujours inconsciemment
obstacle à sa guérison. Plu- sieurs personnes s’affectent, depuis des mois ou des ans, en mode
appréhensif, angoissé, désespéré, autour du malade. Leurs influences mentales additionnées
constituent une puissance fâcheusement orientée. Ne pensent-elles pas qu’il ne saura s’arrêter,
s’amender, que son mal, héréditaire ou acquis, est incurable, qu’il domine le malade et finira par
le briser ? Autant de suggestions qui incitent le malheureux à continuer. Voir par avance une
aggravation et la croire inévitable, même si on la déplore ardemment, c’est la conditionner, à
moins qu’une violente révolte intérieure ne suive ces pensées craintives. Ainsi, l’influence
psychique peut tuer aussi sûrement qu’elle peut guérir, tout comme la haine, l’avidité d’un
héritage, la désolation passive peuvent creuser une tombe anticipée.
L’antique usage des malédictions et imprécations, dans lequel on ne voit communément qu’une
attitude oratoire, savait la puissance formidable des intentions profondément ressenties,
délibérément condensées et nettement exprimées. Caré, Dathan et Abiron foudroyés au geste de
Moïse, Ananias frappé à mort par Pierre, Laubardemont assigné par Grandier à comparaître dans
un mois au tribunal de l’Invisible; plus près de nous Stanislas de Guaïta et Boullan (4), l’étrange
cas de la gitane du docteur de Sermyn, et nombre de faits moins connus manifestent du pouvoir
meurtrier de la pensée.
Sans même être visé par quiconque, ceux qui s’entretiennent habituellement dans des
dispositions haineusés, malveillantes, sont en syntonisme cérébral avec les myriades de
vibrations psychiques, analogues aux leurs, qui s’entrecroisent dans l’atmosphère. Ils subissent
l’effet destructeur de ces vibrations et en souffrent. D’où la nécessité, dans tout traitement,
d’avoir égard au moral du malade, de l’inciter à l’oubli des inimitiés et des injures, à la
bienveillance, à la bonté.
4. Ces deux expérimentateurs se portèrent simultanément, par la voie hyperphysique, des coups
dont ils moururent l’un et l’autre.

CHAPITRE IX

Applications dans les rapports aux autres

1. Pour combattre les mauvaises influences


a) L’influence malveillante d’autrui

Tous les neurologues, psychiatres, psychanalystes reçoivent les doléances d’un certain
nombre de personnes atteintes de
troubles sensoriels ou cérébraux qu’elles imputent à l’influence délibérée d’autrui. Elles
attribuent souvent aussi à cette influence leurs déboires et leur insuccès.
C’est, presque toujours, un cas de fausse imputation, de mythomanie, explicable par un
processus physiologique. S’il est vrai, d’ailleurs, que nous avons, presque tous, des envieux,
des ennemis, des compétiteurs que notre défaite avantagerait ou que notre affliction
comblerait de joie, nul sans doute n’est capable de haine assez vibrante et assez soutenue pour
engendrer
un véritable envoûtement. Qu’une pluralité de mauvais vouloirs puisse nous affecter
péniblement, je le crois, mais pas avec la précision et l’intensité admises par certains. Il
faudrait pour cela, outre une ardeur, une assiduité bien peu communes, des connaissances et
une habileté télépsychiques étrangères à presque tous.
On a vu ce qu’il faut de méthode, de vigueur et d’insistance pour faire éprouver à quelqu’un
un effet télépathique précis. Cela ne s’improvise pas. Supposons que X en veuille à mort à Z,
et y pense activement, sans relâche durant des mois. Qu’arrivera-t-il ? Z sera troublé en son
point le plus faible. Si, par exemple, il est inattentif, ou très impressionnable, il le deviendra
davantage et ses réflexes, soudain décoordonnés à l’occasion d’une traversée de rue parmi
trop de voitures, pourront le trahir. Il se fera renverser. Si X souhaitait non la mort, mais la
ruine de Z, ce serait dans le domaine financier que les facultés de ce dernier fléchiraient.
Généralisons. Étant donné l’incessante compétition des avidités, tous ceux qui manquent de
caractère subissent nécessairement des influences asservissantes, désavantageuses ou
destructrices. Voilà l’aspect exact de la question.
b) Comment se défendre et défendre autrui ?

Pour soi-même, c’est l’éducation psychique élémentaire qui permet de s’isoler, de se rendre
hétérotonique aux vibrations psychiques indésirables. Dans un précédent ouvrage, le Pouvoir
de la Volonté, j’ai exposé en quoi consiste l’éducation psychique; je n’y reviendrai pas ici. En
se livrant chaque soir à un examen serré des pensées, des incitations, des résolutions de la
journée, chacun peut se rendre compte si, dans une mesure quelconque, il n’a pas été
influencé. En décidant chaque matin, conformément à une direction délibérément conçue, de
ce que l’on fera des heures suivantes, on dispose par avance de soi-même, on s’entraîne à
gouverner sa pensée, à en rester l’unique générateur. Bien mieux, en appelant à soi les
influences, les concours adducteurs de santé, de succès, de progrès, on les attire très
réellement. Ces circonstances, si fortuites qu’elles paraissent, répondent toujours à un appel, à
une tendance intérieure.
Par-dessus tout, bannissons toute animosité, si justifiée qu’elle soit, oublions les
malveillances, refusons d’y songer. Ce serait d’abord de l’énergie mentale gaspillée. En
outre, cela nous syntoniserait avec toute une série de vibrations préjudiciables.
Pour améliorer l’état d’un persécuté, la première règle à observer consiste à ne pas traiter son
mal d’imaginaire, le serait- il manifestement. La seconde sera de lui assurer les plus parfaites
conditions d’hygiène mentale et physique. L’engager, l’inciter ensuite à pratiquer l’éducation
psychique, au besoin le lui suggérer par la méthode exposée dans ce livre. Enfin, user de la
technique indiquée au chapitre précédent.
2. Pour prévenir ou modifier une décision fâcheuse

a) Méditation préalable

Quelqu’un de votre entourage, de vos amis, va prendre ou vient de prendre une décision
fâcheuse. Vous avez en vain dépensé vos ressources dialectiques pour l’engager à réfléchir.
C’est un des multiples cas où l’action télépsychique agit plus sûrement et plus vite que la
parole.
Cessez toute intervention verbale. Isolez-vous dans une pièce silencieuse. Paisiblement,
méditez avec attention sur ce que vous voudriez empêcher. Cette décision, étudiez-la en la
genèse, représentez-vous son exécution, dégagez-en toutes les
conséquences et, pour finir, précisez tous les avantages que retirerait l’intéressé en changeant
d’avis.
S’il peut y avoir un ou plusieurs compromis entre les mobiles qui incitent le sujet à se
déterminer dans le sens regrettable
en question et ce que conseille la raison, imaginez-les.
Tout le détail de cette méditation devrait être noté rapidement.
Quand la lassitude survient, détournez votre esprit de l’ordre d’idées sur quoi vous venez de
l’exercer et occupez-le à autre chose. L’afflux des inspirations ou de subséquences continuera
cependant et de nouvelles pensées surgiront que vous devrez noter à la suite des précédentes.
De ces notes, il faudra tirer un extrait composé de toutes les représentations qui suscitent en
vous une vive opposition. Ainsi toutes les conséquences désastreuses des actes que vous vous
préparez à prévenir, celles qui vous émeuvent, qui vous révoltent, qui font jaillir de vous un «
non » énergique, formel, retenez-les.
b) L’émission

Après une courte préparation basée sur les indications du chapitre III, en vue de condenser
vos énergies, faites une ou plu-
sieurs séances d’émission, préférablement à des moments où, toute l’affaire vous revenant en
mémoire, vous vous sentez vio- lemment animé du désir d’annuler la cause de votre
préoccupation.
Relisez vos notes, exaltez-vous à l’évocation des tableaux qu’elles engendrent et terminez par
celles qui composent l’extrait prescrit plus haut. Ces dernières, si vous les visualisez
d’une manière très vivante, vous arracheront des mouvements de révolte intérieure
extrêmement violents. Ceux-ci donneront lieu à autant de projections psychiques qui
ébranleront les dispositions du sujet.
Imaginant alors que ce dernier est là, déconcerté, moins résolu, raisonnez-le mentalement
avec véhémence, énoncez-lui votre propre conviction, figurez-vous qu’il comprend, qu’il voit
où son égarement pourrait le mener, qu’il éprouve subitement la joie du péril évité, qu’il vous
exprime sa gratitude.
Si de très puissants mobiles concourent à la décision qu’il s’agit d’inhiber, plusieurs séances
sont nécessaires. Mais que de décisions regrettables dépendent d’un simple caprice, de
rêveries abusées, de maladroites influences celles-là, on peut souvent les arrêter ou en
suspendre l’exécution par le seul effort d’une heure bien employée.
c) Applications diverses

Par un procédé analogue, agissez sur ceux qui vous mécontentent subalternes ou employeurs,
collègues ou confrères, clients ou fournisseurs, amis ou parents. Concentrez en vous-même le
sujet de votre mécontentement. N’extériorisez pas en représentations verbales, en doléances
ou confidences les vibrations émotionnelles désagréables qui vous agitent. Attendez l’instant
où, en récapitulant intérieurement vos griefs, vous vous sentirez irrité. Cette disposition est,
télépsychiquement, excellente.
Profitez-en pour suggestionner énergiquement celui ou ceux qu’elle concerne. Vous ne
tarderez pas à constater que l’influence de la pensée, quoique Insoupçonnée de la plupart
et froidement niée par des gens fort savants, opère des effets impressionnants par leur
précise évidence.
Un dernier mot si difficile, si lointain que vous paraisse un résultat, si dubitatif ou si débile
que vous vous sentiez devant la difficulté, ne désespérez jamais d’aboutir, à l’aide de vos
forces psychiques. Vivre, c’est générer de l’énergie ; se dominer, c’est l’accumuler ; penser,
c’est l’irradier ; s’émouvoir, c’est l’évertuer ; renouveler l’effort, c’est accentuer les pesées
précédentes. Le moyen d’action que je révèle dans ce livre vous arme donc au même titre que
quiconque et, si vous vous exercez à l’utiliser, vos possibilités s’accroîtront de jour en jour.

3. Pour préserver ou protéger quelqu’un

a) L’intention rendue agissante

En procédant à peu près comme pour guérir, on peut accompagner d une influence protectrice
un proche, un ami éloigné, soit pour le préserver d’un péril, soit pour conforter ses facultés,
soit pour le favoriser en toute circonstance Isolément ou à l’aide d’une chaîne, on pratique
chaque jour l’évocation de l’image, et, cette dernière précisée, on concentre longuement sa
pensée selon le besoin. Comme pour toute autre action télépsychique, un certain nombre de
séances sont indispensables à l’obtention d’un résultat bien caractérisé.
S’il s’agit de sécurité et qu’on redoute pour le sujet un danger particulier, tout en laissant une
large place, au cours de chaque séance, à la spécification de ce danger, ne pas oublier ceux
qu’on n’appréhende pas et qui sont souvent les plus à craindre. S’imaginer l’intéressé dans
son intégrité physique, avec l’aspect extérieur le plus rassurant et insister, en maintenant cette
image sur l’écran imaginatif, sur l’affirmation (1) « Il demeure ainsi. Je veux, j’exige qu’il
demeure ainsi. » Lorsque le sujet doit nécessairement courir un risque, ne pas spécifier
comment il en réchappera, mais affirmer qu’il passera, indemne, au travers de tout. On peut
songer aussi à stimuler chez lui l’attention, la circonspection, la prudence et autres facultés
défensives, à soutenir sa confiance en lui, son calme et son sang-froid.
Le fait de connaître intimement quelqu’un et celui d’apprécier subtilement sa psychologie
aident considérablement à influer sur lui, car le rapport se trouve alors établi d’avance et,
d’autre part, on a une représentation claire et précise de ce que peut éprouver le sujet. Les
bons sentiments qu’on ressent à son égard, l’intensité du désir de le protéger restent d’ailleurs
les éléments les plus essentiels d’efficacité.
b) Applications diverses

A l’occasion d’un examen, d’une démarche, d’un effort spécial, l’influence télépsychique
peut contribuer notablement au succès. Mais il faut s’y prendre à l’avance et ne pas
attendre la veille de l’événement pour intervenir. Le minimum approximatif est de trente à
quarante jours.
Lors d’un examen, par exemple, l’action à distance n’accroîtra évidemment pas les
connaissances du candidat, mais elle le placera dans un état de parfaite lucidité mentale,
stimulera sa mémoire, son assurance, sa présence d’esprit. Elle le rendra aussi sympathique
qu’il peut l’être. Elle agira aussi — quelque étrange que cela paraisse — sur les examinateurs.
Faut-il ajouter qu’au cours des études on peut aussi bien suggérer le goût du travail, l’intérêt
pour les matières à étudier, la compréhension aisée, l’application, l’équilibre physique et la
vigueur intellectuelle ? Souvenons-nous que subir avec succès un examen ou obtenir un
diplôme n’assure nullement une carrière satisfaisante à qui ne possède pas les aptitudes, les
connaissances et la combativité nécessaires pour cela.
Les directives précédentes s’adaptent d’elles-mêmes à nombre de cas démarches,
sollicitations, début au théâtre ou ailleurs.
1. Des paroles dites du bout des lèvres, avec apathie, tiédeur, hésitation et pusillanimité n’ont pas
d’effet. Un élan émotionnel profond, violent et impérieux est indispensable.

CHAPITRE X

Le dédoublement
1. Les faits

Se dédoubler, en d’autres termes être vu ou entendu à une distance considérable de son corps,
voir et entendre ce qui se passe au loin, constitue la plus extrême des manifestations
télépsychiques. L’histoire témoigne de nombreux exemples de dédoublement. De nos jours, les
observations abondent. Il suffit pour se convaincre de lire les procès-verbaux de la Société des
recherches psychiques de Londres ou les ouvrages de Gurney, Meyers, Podmore, Maxwell et
Boirac indiqués au chapitre I. On y trouvera la relation d’une foule de phénomènes spontanés.
Ici, nous allons voir comment tirer délibérément parti de cette possibilité. Une prédisposition
spéciale permet seule de parvenir au dédoublement intégral mais, si l’intention soutenue
d’influer sur la pensée d’autrui suffit à beaucoup pour que leur activité mentale s’irradie
efficacement, une concentration d’esprit analogue détermine presque toujours partiellement la
projection bilocatoire.
2. Les théories

a) Le double

Si la science moderne commence à peine à effleurer et avec quelle circonspection l’étude du


phénomène en question, des textes se sont transmis, à travers les âges, qui affirment, en
d’autres temps, la parfaite connaissance, le maniement aisé des lois du dédoublement.
L’occultisme — vestige du savoir des Anciens — nous montre l’homme constitué non
seulement d’une âme et d’un corps, mais aussi d’un troisième élément intermédiaire entre
l’une et l’autre. C’est le double ou Ka des prêtres égyptiens, le Kama rupa des hindous, le
Nephesch des cabalistes, le médiateur plastique des hermétistes, plus connu de nos jours sous
le nom de corps astral. Exactement informé sur le modèle de l’apparence matérielle, le corps
astral, fait d’une substance plus subtile encore que l’état éthérique des physiciens,
interpénètre l’organisme tangible dont il est d’ailleurs l’édificateur, le conservateur et
l’animateur. A la faveur de ces léthargies semblables à la mort que savent provoquer sur eux-
mêmes les praticiens de la magie et que peuvent obtenir de leurs sujets les
magnétiseurs, l’âme (la conscience psychologique) s’extériorise, véhiculée par le corps
astral et, laissant là le corps physique, auquel un lien fluidique extensible le tient relié, elle
trouve l’espace aboli.
Outre cet ultime aspect, mille autres sont possibles et même fréquents. Telles sont les
diverses formes de la métagnomie nom créé par Boirac, le défunt recteur de l’Université de
Dijon — pour désigner la perception de choses et d’êtres situés hors de
portée des sens dans le temps et l’espace une somnambule lucide, un clairvoyant, une
personne douée de double vue vous décrivent à Paris un ami résidant à Marseille ou un
événement avenir (1). Cela leur est possible par un dédoublement partiel.
Un homme frappé à mort ou venant de mourir apparaît, outre océan, à sa mère dédoublement
provoqué par l’émotion (2). Sous l’effet du chloroforme, un patient s’extériorise et assiste à
son opération (3) même phénomène. Au cours du sommeil naturel, le dormeur rêve qu’il
visite la maison de son père et voit le feu s’y déclarer. Le lendemain, il apprend le sinistre
effectif de
l’immeuble. Il s’est donc biloqué (*) et il a vu.
• Bilocation terme ésotérique signifiant se trouver en deux (bi) lieux (location) à la fois,
c’est-à-dire « esprit » et « enveloppe corporelle »
séparés.
1. Voir l’ouvrage de J. Maxwell: Les Phénomènes psychiques (épuisé). On y trouvera
l’exposé des phénomènes de ce genre constatés par des personnalités éminentes.
2. Voir l’ouvrage de Camille Flammarion La Mort et son mystère (épuisé).
3. Un cas de ce genre a été publié en 1913 par Occult review.

Maisons hantées, raps, et bon nombre de phénomènes spirites s’expliquent aussi par
l’extériorisation du double. Mais il faut lire, de Gurney, Myers et Podmore, les
Hallucinations télépathiques pour concevoir la familière fréquence du dédoublement.
Dans la plupart des cas sérieusement constatés, le dédoublé n’a pas conscience de l’être —
et cela ne doit pas nous surpren- dre — car il s’agit presque toujours d’une projection du
double seul, durant laquelle l’âme, l’élément psychique, la conscience, demeure auprès du
corps physique.
Quand, assis, les muscles relâchés, à l’abandon, nous songeons très exclusivement, très
profondément à un tiers, nous pro- jetons inconsciemment notre double vers lui.
L’intéressé perçoit rarement cette présence invisible, du moins en tant qu’image de flous-
même. Et cependant, notre double agit sur le sien et lui transmet son mouvement
ondulatoire, lui communique le ton
de vibrations dont il se trouve animé, ce qui suscite en lui des pensées nous concernant.
N’avez-vous jamais eu, tandis qu’enfoncé dans vos pensées, vous vous étiez, pour ainsi
dire, échappé du monde extérieur,
l’impression de revenir de très loin, au moment où quelque appel brusque vous restituait à
la notion du réel ?
Ainsi, là comme ailleurs, il y a des degrés et si la bilocation totale et consciente
paraît nécessiter de singulières qualifications, chacun se dédouble spontanément plus ou
moins et chacun peut, en cherchant à le faire délibérément, tirer parti
de cette possibilité.
b) Les formes-pensées

Tout se passe, ai-je dit au chapitre 11, comme si, baignées d’un invisible océan fluidique, nos
âmes se trouvaient constamment en mutuelle communication. Cet océan, l’occultisme le
définit «plan astral» et lui prête un rôle cosmologique des plus importants sur lequel je ne
m’étendrai pas ici. Ce qui nous intéresse plus immédiatement, c’est la propriété, attribuée par
les occultistes, à la substance du plan astral, de se mouler en formes sous l’effet de notre
activité psychique. Les images mentales
y sculptent des corps à leur ressemblance. Le retentissement de nos impressions, de nos
émotions, de nos sentiments y engendre des agrégats aux contours et aux couleurs variés (4).
Toutes ces créations sont douées de mouvement et même d’une demi conscience. Elles
agissent en auxiliaires de l’intelligence d’où elles émanent. Vouloir agir sur un tiers, en se
transportant par la pensée là où il est, c’est donc projeter une sorte de fantôme, de double,
d’aller ego qui travaillera l’inconscient du sujet selon nos intentions. De même, les images
mentales formées et transmises suivant la technique qu’on sait, constituent des corps astraux
réels, qui demeurent dans l’ambiance du sujet et s’y manifestent, parfois, jusqu’à l’obsession.
On voit combien
la théorie des formes pensées est suggestive et quelles utiles inspirations on peut en tirer.
4. Voir les ouvrages Leadbeater L ‘Homme visible et invisible; Leadbeater Les Formes pensées;
Annie Besant Les Aides invisibles.

3. L’expérimentation

Parmi les spécialistes qui ont écrit sur le dédoublement, certains ont indiqué, pour obtenir ce
phénomène, l’usage de substan- ces pernicieuses par elles-mêmes et dont l’effet reste, d’ailleurs,
incomplet. En vérité, l’opium, l’éther, la cocaïne, la morphine, le haschich provoquent le
dédoublement, mais retirent à l’expérimentateur toute influence directrice du phénomène, c’est
dire qu’il ne saurait l’utiliser. D’autres ont préconisé une méthode moins immédiatement
dangereuse, qui met à profit l’extériorisa- tion inséparable du sommeil naturel. L’inconvénient
de cette méthode est évident le candidat n’y ayant pas un contrôle conti- nuel de lui-même,
puisque la bilocation s’effectue en pleine inconscience, il se met ainsi dans les meilleures
conditions pour subir les influences ambiantes les plus restrictives de sa propre volonté. De fait,
j’en ai vu quelques-uns complètement déséquilibrés par leurs essais. Ce dédoublement ne
constitue rien moins qu’une porte ouverte sur un au-delà mystérieux. Franchir cette porte, ligoté
et annihilé psychiquement, quelle singulière témérité.
Le procédé que je vais exposer diffère essentiellement des précédents, d’abord par sa complète
inoffensivité, ensuite parce qu’il conduit à une extériorisation graduelle durant toutes les phases
de laquelle l’expérimentateur garde l’intégralité de sa conscience et de sa volonté.
1) On cherche avant tout à imposer au corps physique une passivité complète. Pour cela, la station
étendue convient mieux que toute autre. L’attention doit parcourir, une à une, chaque fibre,
afin de relâcher, de détendre parfaitement l’ensemble du système musculaire. On parvient ainsi
à l’immobilité la plus absolue.
2) L’inertie locomotrice prédispose à un ralentissement de l’activité intellectuelle, chose dont on se
rend très bien compte et qui dégénère tout simplement en sommeil naturel profond chez ceux
dont les énergies psychiques sont insuffisamment condensées. Aussi, faute d’avoir opéré selon
nos précédentes indications cette condensation, l’expérience s’interrompt d’elle-
même.
3) L’expérimentateur, encore manœuvré par son automatisme, observe la continuation de son
agitation cérébrale et c’est alors à
la régularisation de celle-ci qu’il convient de s’attacher. L’intention maintenue, sans aucune
tension volitive, de raréfier
l’élaboration des pensées, constitue la clé de l’exercice. Cette intention ne saurait aboutir
d’emblée, ni même en un petit
nombre de séances, à la suspension complète de la pensée. Progressivement, le calme succède à
l’agitation et, là encore, le sommeil guette les essayistes bénévoles. Mais après quelques
semaines de tentatives journalières, des moments de plus en plus prolongés marquent un premier
progrès. Puis, cet arrêt se prolonge encore et subsiste bientôt, à peine troublé par quelque vague
réaction. Enfin on l’obtient, uniforme. C’est l’isolement. Dans cet état, l’acuité sensorielle se
trouve considérablement atténuée. Les bruits du dehors deviennent indifférents, de même que les
sensations visuelles, olfactives ou tactiles. On se trouve dans une disposition analogue à celle
d’un individu tellement absorbé qu’il n’entend pas qui lui parle. Et l’extériorisation s’esquisse.
4) On a nettement l’impression de n’être plus étroitement intégré dans les limites du corps
physique. On se sent comme élevé, parallèlement à lui, ou à quelque distance. La moindre
intention volontaire rétablirait l’état normal. Aussi, nulle appré-
hension, mais un bien-être quasi nirvanique.
5) Parvenu à ces résultats et capable de s’isoler ainsi en quelques minutes, à l’intention primitive de
stase intellectuelle
on substituera celle de s’extérioriser de plus en plus et l’on poursuivra l’expérience sans hâte, en
y consacrant à peu près une heure par jour. Suivant le cas, l’évolution des possibilités
bilocatoires prendra un cours adéquat aux prédispositions de chacun. Ainsi, les uns
commenceront à percevoir le milieu astral sous forme d’une lumière ou d’une ombre diffuse où
des formes, des
silhouettes, des images s’esquisseront peu à peu (a) ; pour d’autres, l’espace hyperphysique sera
aisément parcouru et les doubles des vivants seront perceptibles (b) avant le plan astral lui-même
(5).
6) Les expérimentateurs qui observeront (a) obtiendraient de plus rapides résultats en s’orientant
vers la métagnomie. Ce
sont des percipients plutôt que des irradiants. Ceux qui observeront (b) sauront qu’ils sont mieux
doués pour agir, pour se manifester, que pour percevoir les vibrations émises par d’autres
centres. Ce sera donc dans l’action à distance qu’ils excelleront le plus facilement.
Comme on l’a vu, si l’on aborde ces pratiques sans posséder les réserves énergétiques qui en
assurent à la fois le succès et l’inoffensivité, on ne court aucun autre risque que de goûter un
sommeil réparateur. Mais l’exercice lui-même entraîne peu à peu le praticien et développe
considérablement ses aptitudes. Avec des essais renouvelés assidûment, chacun arriverait donc
au but.
Si l’on procède, dans l’action télépsychique à distance, à un dédoublement préalable, il suffira
d’évoquer l’image du sujet et de bien préciser l’intention de le joindre pour qu’un résultat
conforme s’ensuive. Et alors l’action sera plus puissante, plus
rapide, tout en exigeant beaucoup moins d’effort que la suggestion mentale ordinaire.
CHAPITRE XI

La télépsychie dans la vie individuelle et collective

1. Le facteur télépsychique dans la trame du destin

Ainsi que je l’ai déclaré au début de ce livre, l’influence télépsychique est une conséquence
inévitable de l’activité affective et cérébrale. Dès qu’on s’émeut, dès qu’on désire, dès qu’on
pense, on irradie des vibrations qui, renouvelées durant des jours, des mois ou des années,
contribuent appréciablement à déterminer maintes circonstances. Celles du passé
retentissent sur le présent celles du présent retentiront sur l’avenir. Quelques considérations vont
le préciser.
Un collectif s’agite et s’évertue. Chacun des individus qui y tient place convoite avec plus ou
moins d’âpreté et d’aptitudes ce que ses prédispositions le portent à considérer comme
suprêmement désirable. Du savant en quête de la découverte qui fera de lui une sommité
mondiale au financier à l’affût de profitables rafles, du politicien impatient d’occuper le premier
plan du règne au fonctionnaire qui dispute un poste mieux payé, du soupirant qu’irritent ses
rivaux à l’écrivain en espoir de lauriers, la compétition est générale. Ce que poursuit quiconque,
d’autres le veulent aussi. Or, si les qualifications, l’activité, les appuis de chaque compétiteur
sont autant d’atouts dans son jeu, son ardeur convoi- tante en est un autre, et qui compte. Le
pouvoir de celle-ci explique maints succès et maintes défaites incompréhensibles sans lui.
A équivalence de savoir, d’habileté, de travail et de protections, ce sera, dans tous les cas, la
personnalité aux plus vigoureuses appétences qui obtiendra le plus. Cette vigueur de désir
supplée même toujours, dans une large mesure, aux insuffisances de la valeur intrinsèque,
pourvu qu’on sache endiguer ses poussées excessives. En fait, c’est la même et frénétique
convoitise qui meut les plus habiles abducteurs d’or et les plus audacieux pirates. Des uns, le
jugement sagace dirige l’effort au travers des écueils ; des autres, le causalisme déficient s’égare
aux folles suggestions du bouillonnement intérieur. Mais la même espèce d’énergie pousse les
uns et les autres à entreprendre. Ceux qui la régissent et l’émettent en images bien conçues
identifient ses effets à leurs intentions ; ceux qui la subissent, imaginent fâcheusement et leurs
résultats, toujours précaires, se mixtionnent d’insécurité.
Mieux vaut, certes, manquer tout à fait d’élan-moteur si le gouvernail, fragile, faussé, doit
nécessairement donner dans les récifs, mais, ici-bas, il n’en reste pas moins vrai que l’avidité,
bien plus que le mérite, s’approprie et obtient.
Outre leur effet stimulant, la conviction de pouvoir, celle d’avoir droit, celle d’être qualifié,
influent sur toute la série des gens de qui dépend ce à quoi l’on aspire. Inversement, toutes les
restrictions qu’on ressent, qu’on admet, sur sa propre valeur
se répercutent en l’âme d’autrui. Voilà pourquoi les modestes, les soucieux de juste mesure, les
raisonnables avant tout, ne reçoivent pas le quart de ce qu’ils se verraient dispenser, pour
d’identiques capacités, s’ils sentaient plus passionnément — j
‘allais dire aveuglément — le désir de ce que l’inéquité des hommes leur refuse.
Cette élite cultivée, laborieuse, obscure, dont l’intellect se dépense aux minutieux travaux d’où
sort l’avancement des
sciences, reçoit de ses peines un bien faible prix. On peut dire aussi qu’au budget national la
compétence émarge moins que
l’adresse. C’est qu’il s’agit d’hommes dont l’énergie psychique fut absorbêe par une longue
culture et dont les préoccupations idéales dérivent la volonté d’obtention.
Certains diront que j‘attribue à l’action télépsychique l’effet d’un excès ou d’un manque
d’initiative revendicatrice. A quoi je
réponds que les plus justes revendications aboutissent faiblement quand l’avidité de leurs
promoteurs n’est pas intense.

2. Les aptitudes sans avidité et l’avidité sans aptitudes

Dans la bataille des affaires, qui voit affluer les offres et les demandes avantageuses ? Qui
trouve les concours les plus satisfaisants? Les occasions favorables ? Est-ce le plus actif? Est-ce
le mieux doué, professionnellement parlant? Pas du tout. C’est le plus ardemment, le plus
assidûment évocateur de richesse ou de suprématie. Il lui vient, à celui-là, des idées que les
autres n’auront pas, mais cela pourrait s’expliquer par les ressources intérieures de son
psychisme. Il lui vient aussi des collaborateurs financiers, des techniciens adroits, des
fournisseurs sérieux, des clients considérables. Qu’on en reporte le mérite à sa gestion, cela peut
encore se soutenir, bien que parmi ses concurrents il y en ait d’aussi intelligents et actifs qui
échouent. Mais toutes ces fortuités heureuses qui font dire de quelqu’un «Il a de la chance », «Il
réussit comme par magie » ne suffiraient-elles pas à justifier ma thèse ? On m’opposera peut-
être que tout le monde désire réussir, mais pas avec la même ardeur, pas avec la même fixité
psychique. Tout le monde a faim mais, entre l’intermittente esquisse d’appétit du dyspeptique et
le vigoureux besoin d’un solide gaillard, quelle différence (1)
Certes, il ne manque pas, en pays latin — ni ailleurs —d’&res si délicieusement doués pour
apprécier toutes les possibilités de l’opulence qu’on peut se demander comment leurs vibra-fions
psychiques n’aimantent pas ce qui satisferait leurs goûts.
1. Et la comparaison n’est pas du tout forcée. Combien de « bonnes bru-tas » à la pensée
rudimentaire mais compacte, forte et bien orientée, stupéfient certains subtils par leurs succès ?
Une organisation psychique judicieuse mais
non sans vigueur influe nécessairement moins qu’un tempérament robuste et simple.
Mais dilection et ardeur soutenue du désir sont deux états d’âme très différents. Nous désirons
volontiers, idéologiquement, toute chose agréable. Nous n’en ressentons pas forcément cet
impétueux, ce véhément, ce continuel besoin qui attire, conquiert, saisit. Et si l’on pense au
nombre formidable des humains lancés àl’assaut du peu que la terre peut fournir, on se rend
compte de l’athlétisme animique nécessaire aux grandes victoires.
Posséder n’est d’ailleurs pas conserver. L’héritier que ses contingences ont gratifié de biens
considérables devient le centre d’une incessante conspiration où figurent les multiples
convoitises qui, par état social, investissent la fortune. Elles n’agissent pas seulement par les
voies matérielles. Elles suggèrent invisiblement l’imprudence, l’erreur, l’excès, le vice. Et leur
action mentale se grossit des envies, des jalousies, des animosités que soulève toute opulence.
Quelle redoutable chaîne ! Et quelle circonspecte et robuste défensive il faut au riche. S’il n’a
pas reçu, avec le reste, une organisation psychique à la mesure de son importance possédante, il
sera bientôt dépouillé. L’aristocratie russe, qui comptait moins de psychismes ardents que
d’abdomens repus, dormait plus qu’elle n’agissait et consommait plus d’alcools que d’idées, a
subi la loi d’une douzaine d’intellectuels passionnés. A notre monarchie, l’initiative fut
soustraite dès qu’elle s’arrêta de penser et de vouloir. Et si la classe actuellement détentrice des
privilèges subsiste encore, malgré ses imprudences électorales, c’est qu’elle totalise plus d’actifs
psychismes que n’en réunissent ses antagonistes.

3. L’ordre social

Le sort du prolétaire s’améliore lentement depuis qu’il a cessé de considérer comme socialement
indispensables les abus sur lui perpétrés. Tout irait plus vite s’il songeait à ses droits avec plus
d’ardeur et de coordination. A cause de leurs insuffisances psychiques, les démocraties vivent
encore sous un joug quasi dictatorial. Incapables de concevoir l’ordre désirable en images
précises, elleç se laissent inlassablement prendre à la duperie des suggestion~ qu’on leur
prodigue à chaque campagne électorale. Elles croient désigner des obédiences organisatrices
d’équité et voient invariablement sortir de l’urne la tyrannie et la spoliation. Tout changerait si
les travailleurs ne se laissaient aller entre deux guerres, entre deux sessions législatives, entre
deux meetings à une excessive résignation surtout faite d’indolence et d’apathie.
Tout changerait si chacun formulait intérieurement mais inflexiblement trois suggestions bien
concrètes possibilité de consommation justement proportionnelle à l’importance de production ;
organisation militaire des peuples soustraite aux arbi- traires nationaux et confiée, pour chaque
continent, à un collège international ; exigence d’un acquiescement direct des électeurs pour
toute destination des deniers publics (2). Cette concentration d’esprit agirait sans le moindre
désordre, car l’effervescence psychique impressionne nécessairement ceux qui en sont l’objet.
L’irritation silencieuse influe profondément
et décisivement ; elle est d’ailleurs incoercible. Inversement, les vociférations et les révoltes
tumultueuses n’aboutissent jamais qu’à des réformes superficielles et transitoires.
4. Heurts collectifs des volontés

Les mécontentements, les rancunes et les haines inavoués mais vivaces — qu’ils soient collectifs
ou individuels — opèrent de véritables envoûtements. Leur paroxysme, la colère, fulgure, tonne
et frappe comme la foudre. Quand elle a été fortement condensée, c’est-à-dire longuement
contenue, la violence désorgaaise, stupéfie et tue.
Nul ne peut se targuer d’immunité contre l’immanente répercussion des rivalités et des
antagonismes probables. Pour s’en défendre, il ne faut ni les ignorer ni les défier, mais densifier
ses résistances.
2. Il faudrait pour cela, dit-on, une capacité d’appréciation que les peuples ne possèdent pas et que
l’on se garde bien de leur donner! Où exige- t-on du dépoté, voire du ministre, un brevet de
savoir et d’aptitudes économiques, techniques et politiques?

N’a-t-on pas dit que quiconque se flatte de son bonheur ne voit pas à sa porte le malheur
imminent ? En vérité, l’optimisme n’ est protecteur que toujours expectatif d’adversité et prêt à
réagir. Si cet optimisme-là présente parfois l’apparence d’une insoucieuse suffisance, c’est
qu’on ne voit pas combien il se double de circonspecte combativité. Comme aucune existence
n’est exempte de risques et que plus clairement on prévoit, mieux on sait éviter, parer ou
combattre, la vigilance reste judicieuse en dehors même de toute considération télépsychique
mais, pour l’adepte de nos doctrines, elle a la signification d’un palladium, par lui-même
efficace, car envisager et craindre suscitent et stimulent les pensées défensives, la volonté de
repousser le péril.
Si donc il est fâcheux de se croire voué à l’insuccès ou à quelque malheur, il convient de
conserver la notion de leur possibilité et de conjurer inlassablement celle-ci par une interdiction
formelle. Appréhender quelque chose avec le sentiment
qu’on ne saurait s’y dérober équivaut à l’accepter et souvent à l’appeler, mais l’appréhension
suscitative d’une volonté impérieuse d’en écarter l’objet devient au contraire une défense
sérieuse. La peur, qui paralyse certains, donne à d’autres des ailes.

5. L’emprise des forts caractères

On sait que les gens volontaires, dont la pensée ordinairement despotique engendre
d’elle-même la soumission, réussissent impressionner, dès l’abord, la plupart de ceux qu’ils
approchent. On peut remarquer aussi que ces natures de satrapes attirent les plus étonnantes
servilités. Une mentalité de seigneur féodal improvise toujours des serfs. Une mentalité serve
aimante toujours son licol. Aussi voit-on de très beaux dévouements se dépenser en faveur
d’individus parfaitement implacables — parce qu’ils le sont.
Ce qui caractérise les forts psychismes — non pas les subtils, ni les équitables — c’est qu’ils
sont pleins d’eux-mêmes et surtout de leur point de vue. Ils vous découragent de discuter le
vôtre parce que vous sentez très bien l’inégalité de la lutte. On dit :« Voilà un homme ou une
femme de caractère» et on s’efface, bien que l’on ait raison. J’appelle ce phénomène une
emprise télépsychique et je remarque qu’il s’opère même si les relations sont lointaines et si les
deux intéressés ne se sont jamais vus. Ces puissants égotistes se perdent souvent par leur facilité
volitive même qui les incite davantage à exiger qu’à réfléchir. La vigueur propulsive de leurs
pensées est admirable, mais leurs images mentales sont insuffisamment délibérées, donc
imprécises. Ils obtiennent beaucoup, mais jamais ce qui leur eût exactement convenu.
Par ailleurs, une allure extérieure impressionnante, un verbe net, un entourage imposant perdent
vite leur prestige si, derrière la façade gîte un moral débonnaire, apathique ou craintif.
Selon les règles religieuses, œuvrer c’est, paraît-il, prier, quand la besogne s’accomplit
conformément à un idéal
spirituel. Du point de vue qui nous occupe, si le travail donne lieu à une émission psychique
concentrée, celle-ci concourt puissamment à assurer au travailleur ce qu’il espère de son
industrie. Il arrive qu’on suppute d’une entreprise un bénéfice qu’elle ne donnera pas, mais dont
l’équivalent échoit par une voie imprévue et d’apparence fortuite.
6. Amour et télépsychie

Intimement mêlée à tous les rapports humains, l’influence télépsychique se manifeste


puissamment dans l’amour. Les très ardents, fussent-ils fort distincts d’Antinoüs, d’Apollon ou
d’Hercule, triomphent aisément des amoureux transis, même beaux de cette beauté qui, nous dit
un poète, éclipse ses rivaux comme le soleil disperse les nuées. Sous les anesthésiantes effluves
du désir mâle, les résistances féminines fléchissent et s’abandonnent, souvent sans grande
dilection, voire en dépit de précises répugnances.
Le degré d’attirance de chaque femme dépend manifestement d’ailleurs de facteurs
impondérables qu’on distingue d’autant mieux qu’ils excluent souvent la beauté, la grâce et la
distinction.
Les affinités amoureuses échappent pour la plupart à l’analyse purement psychologique parce
que leur explication tient tout
entière dans l’exact complémentarisme de deux émissions et de deux percipiences psychiques,
de même que leur tiédissement
et leur fin procèdent d’une réciproque et fatale saturation. Tant que dure l’idylle, les transports
télépathiques spontanés, les lucides intuitions, les prémonitions clairvoyantes témoignent
fréquemment du rapport des deux intéressés. Et quand surviennent de l’un les premiers écarts,
imaginatifs ou vécus, ce retrait tire invisiblement des fibres de l’autre une douloureuse
dissonance annonciatrice des brisures prochaines.
7. Passions et sentiments

Si la passion se dissocie d’elle-même sous l’action corrosive du temps, les sentiments gagnent
au contraire en influence par la durée. Il est tératologiquement exceptionnel que l’indifférence
résiste longtemps à l’affection et que l’antipathie ne cède pas, quelque jour, à la bonté. En tout
cas, la bienveillance indulgente et l’inoffensivité, en harmonisant le psychisme individuel aux
vibrations de même nature, constituent des états précieusement abducteurs. Mais il faut tenir
compte de ce que désir, avidité ou passion se satisfont de leurs complémentaires, toujours
caractérisés par une passivité morale quelconque. Ainsi, la faiblesse suggère tous les abus tandis
que la fermeté les inhibe. C’est pourquoi l’ingratitude est assurée aux âmes trop exclusivement
bénévoles.
De ce qui précède, nous pouvons dégager quelques directives pratiques dont l’observance
équivaut à utiliser constamment et sans émissions spéciales la propriété téléinfluente de la
pensée.
Si toutes nos activités psychiques ont un retentissement extérieur, il est évident que pour
recueillir de celui-ci des effets désirables, il faut apprendre à gouverner ses impressions, ses
émotions, ses sentiments et son imagination. Gouverner s’entend ici dans une double acception
quantitative et qualitative et aussi bien dans le sens d’exalter que dans celui de modérer. On
parvient à se rendre maître de son psychisme par un effort soutenu portant sur toute une série de
règles que j’ai définies dans un précédent volume (3) et sur lesquelles je ne reviendrai pas.
3.Le Pouvoir de la volonté (Éditions Dangles).
Ces règles, que plusieurs spécialistes ont vulgarisées avant moi, on n’en comprend généralement
pas toute l’importante finalité. Conduire sa pensée implique cependant la possibilité d’un
maximum d’action sur tout ce qui nous concerne. Sans parler de cette sérénité intérieure
qu’assure seule la possession de soi, l’individu le plus ordinaire, dès qu’il a acquis l’habitude de
libérer l’orientation de ses pensées et d’en maintenir la convergence, extériorise une somme
considérable de vibrations auxiliaires de sa volonté qui affectent utilement tous ceux qui ont un
rapport quelconque avec ce qu’il veut. Il devient capable de préciser en images soigneusement
élaborées l’ensemble et le détail de ses projets. Son énergie psychique, condensée par l’effet des
règles en question, s’émet d’elle-même puissamment au travers des images qu’il forme. Il opère
ainsi une action télépsychiqUe généralisée d’où s’ensuit cette aimantation connue sous le nom
de « magnétisme personnel ». Certains — àqui tout réussit — la possèdent inconsciemment
grâce à d’heureuses dispositions naturelles, mais les plus déshérités à cet égard peuvent l’établir
en eux-mêmes par plan et par mesure.
CHAPITRE XII

Indications complémentaires

1. Contre-indications, écueils, avis

Si l’on ne possède pas un minimum de vigueur fonctionnelle, la fatigue qui résulte des émissions
télépsychiques tend volontiers à la dépression, entraînant plus d’une désorganisation.

* *

Les diathésiques rénaux, et généralement tous ceux qui éliminent mal, seraient prudents de
s’abstenir. Toute dépense cérébrale inusitée nécessite, en effet, un effort supplémentaire du rein et
de ses concours.

* *

La pléthore des intoxiqués florides alourdit suffisamment leur psychisme pour les dissuader de
l’action à distance. Mais si, d’aventure, l’un d’eux s’y efforçait trop ardemment, ce serait un
sérieux risque de congestion.

* *
Les agités, les obsédés, les déprimés, ceux dont la pensée délibérée n’a aucune prise sur
l’impulsivité émotionnelle et imaginative aggravent généralement leur état sans profit en
pratiquant l’action télépsychique. Ils devraient, avant tout, travailler à acquérir cet empire sur eux-
mêmes qui leur fait défaut et sans lequel il n’y a ni élaboration, ni condensation, ni émission
efficaces.

* *

Faute de savoir, après chaque séance, se ressaisir, fixer sa pensée sur un sujet reposant et, en tout
cas, étranger aux préoccupations pour lesquelles on vient de travailler ; on peut fort bien voir s
installer l’idée fixe, mère de la démence. On récupère, d’ailleurs, insuffisamment ses forces et la
lassitude s’ensuit.

* *
Il n’est pas rare qu au jour où quelque chose ne va pas comme on le voudrait, et bien qu’on ait été
jusque-là profondé- ment indifférent aux questions psychiques, on songe à se procurer un traité
d’hypnotisme avec la conviction d’y trouver le moyen de résoudre, sur l’heure, n’importe quelle
difficulté. Cependant, qui prétendrait sténographier un discours aussitôt après l’achat d’un traité de
sténographie ? On ne s’improvise pas expérimentateur du jour au lendemain, par le simple fait
qu’on aurait besoin de l’être. Il faut travailler à comprendre, puis à appliquer.

* *

Si un chimiste prétendait, sous prétexte qu’il en a immédiatement besoin, composer un produit en


moins de temps qu’il n’en faut pour son élaboration, on le considérerait avec inquiétude.
Cependant, nombreux sont les logiciens qui, parce qu’ils sont pressés, demandent à la télépsychie
des résultats beaucoup plus rapides que le cas ne le permet.

* *
Etre pressé ne confère pas d’aptitudes spéciales. Il n’y a pas de résultats à la fois importants et
immédiats en télépsychie. C’est la répétition qui fait la force de la suggestion et l’assiduité qui
confère la facilité toujours relative, d’ailleurs.

* *

Beaucoup se croient incapables d’influence. Beaucoup se croient capables, sans effort appréciable,
d’effets instantanés et considérables. Quelques-uns comprennent la difficulté, l’abordent
résolument, et l’investissent peu à peu avec une inébranlable constance. Ces derniers
recueillent le succès.

* *

Avant toute action à distance, on ne saurait trop supputer les conséquences qu’aurait l’obtention de
ce qu’on désire. Certaines sont inévitables et il est bon d’examiner si elles ne feront pas payer trop
cher la satisfaction dont elles découlent ; d’autres peuvent être évitées à condition d’en spécifier
l’intention dans le plan général (1) qu’on sait.

* *

Nous élaborons presque tous assez d’énergie psychique pour obtenir, au moyen des procédés
exposés dans ce livre, des résultats décisifs de tout le reste de l’existence. Mais plus l’élaboration
est abondante, plus la tension d’extériorisation est forte. Cette tension détermine des impulsions
auxquelles on ne songe même pas àrésister. Pourtant, tous les ouvrages analogues au mien
indiquent prolixement que céder à l’impulsion, c’est laisser de l’énergie psychique s’évaporer.

* *
1. Voir chap. III.

Il est heureux que les gens emportés dépensent, en manifestations extérieures généralement
inoffensives, le formidable dynamisme issu de leurs collègues. S’ils savaient s’abstenir de
vacarme verbal, de coups de poing sur la table et de bris d’objets, ils pourraient perpétrer de plus
fâcheux dégâts. Vigueur propulsive de la pensee, ardeur passionnelle, violences de l’âme
constituent de véritables sceptres à condition de prendre l’initiative de leur maniement.

* *

Maîtriser la spontanéité, c’est maîtriser le destin. Ceux qui gouvernent le monde sont des gens qui
ont su se rendre
maîtres d’une formidable impulsivité native et l’ont ainsi changée en puissance dominatrice et
réalisatrice. Qu’on ne me fasse pas dire qu’il suffit de se dominer pour gouverner le monde.
J’indique au contraire que la première condition pour devenir un homme éminent est une animation
innée exceptionnelle. Mais sur l’individu rigoureusement capable de se gouverner, au triple point
de vue sensoriel, émotionnel et imaginatif, le destin a beaucoup moins de prise que sur les autres.
L’homme qui parvient à conduire sa pensée se libère à peu près de toute influence, même
collective. C’est par l’instauration d’une solide archie intérieure, inverse des enseignements
libertaires, que chacun peut conquérir sa liberté.

* *

Si nous ne pouvons changer radicalement les éléments psychiques et psychologiques dont


l’hérédité nous a doté, nous pouvons, avec la méthode, en tirer un maximum de bons services.
Ainsi, en s’exerçant correctement selon ses forces, on les accroît et on les ductilise.

* *

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