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MIMAP-Bénin

PAUVRETE ET SOURCES DE FINANCEMENT


DANS LE SECTEUR INFORMEL URBAIN AU BENIN

Par : Djima M. MOUSTAPHA 1

Cotonou, mars 2003

1
Statisticien-Economiste, Chargé de cours à l’Ecole Nationale d’Economie Appliquée et de Management (ex INE) de
l’Université d’Abomey-Calavi et Directeur des Statistiques Sociales à l’Institut National de la Statistique et de
l’Analyse Economique (INSAE)
E-mail : [email protected]
INTRODUCTION

La problématique du financement des unités économiques du secteur informel se trouve


aujourd’hui au cœur des débats sur le développement. Si le recours au secteur bancaire
est une solution pour les entreprises du secteur moderne, il n’en va pas de même pour
celles du secteur informel qui sont, en permanence, confrontées aux difficultés d’accès à
cette source de financement. Elles se trouvent obligées de développer leur propre
système de financement basé sur l’entraide et les mutuelles, mais ces systèmes ont des
ressources limitées et n’arrivent pas à assurer le niveau optimal de financement
recherché. Depuis déjà plusieurs années, et même avant le Sommet Mondial sur le micro-
crédit de 1977 qui s’est fixé comme objectif d’atteindre 100 millions de pauvres avant l’an
2005, le financement des micro et petites entreprises a été considéré comme un moyen
puissant de lutte contre la pauvreté. La présomption générale attribue une large part à ce
mode de financement dans la lutte contre la pauvreté par les revenus générés et les
emplois créés ou rémunérés.

Le financement des activités d’une entreprise est un élément essentiel qui conditionne son
niveau d’activité et son développement. C’est le premier souci de tout entrepreneur, qu’il
soit dans le secteur traditionnel ou dans le secteur moderne. Il se pose dès le départ avec
la constitution de l’entreprise, il intervient ensuite dans le cadre de son fonctionnement
courant et devient crucial dans la réalisation de nouveaux investissements destinés au
développement de l’entreprise.

L’efficacité du secteur financier informel a été pendant longtemps mise en cause. Fondée
sur des relations de proximité, la finance informelle se pratique en circuit fermé, entre les
personnes qui se connaissent et qui se rencontrent régulièrement. L’argent ne peut
circuler qu’au sein de groupes relativement restreints. L’allocation des ressources n’est
donc pas optimale. Il y a peu d’accumulation car les créances et les dettes s’éteignent
rapidement. L’argent prêté l’est toujours à court terme, la durée n’est jamais au cœur de
ces opérations qui sont dénouées rapidement. Dans ces conditions, la finance informelle
contribue certes au financement de l’activité économique, mais elle n’y contribue que
faiblement, pour des montants limités et pour des durées courtes.

Le Bénin n'échappe pas à cette situation où le financement des actifs constitue l’un des
principaux obstacles au développement des activités du secteur informel. Malgré ces
difficultés dues à l'accès difficile aux ressources financières, un capital d'investissement
permet au petit producteur de monter sa propre unité et d'assurer outre son emploi, celui
d'éventuels travailleurs. Mais que savons-nous réellement des circuits généralement
empruntés par les acteurs du secteur informel ? L’adaptabilité des diverses formes de
financement aux activités informelles, leur impact sur les résultats économiques de l'activité
ainsi que leur évolution sont peu connus.

Le présent papier s'attache donc à établir la corrélation entre les différentes sources de
financement et les résultats économiques de l'activité informelle ainsi que la pauvreté dont
l’incidence au sein des acteurs du secteur informel urbain au Bénin sera évaluée à l’aide
des indices FGT. Ce travail est structuré en quatre parties:
- l'approche méthodologique;
- quelques résultats économiques des activités informelles urbaines au Bénin
- les sources de financement dans le secteur informel urbain au Bénin
- l’analyse diagnostique des sources de financement.

2
I – APPROCHE METHODOLOGIQUE

1.1. Concepts et définitions


Le terme "secteur informel" a fait sa première apparition de façon officielle dans le rapport
d'une mission sur l'emploi au Kenya entreprise par le BIT en 1972.
Aussi a-t-on caractérisé le secteur informel par :
- une facilité d'entrée,
- une technologie rudimentaire,
- une activité à petite échelle,
- un emploi quasi-non salarial,
- une stratégie de survie et non de profit.,

Depuis 1993, la 15ème Conférence Internationale des Statisticiens du Travail (CIST)


organisée par le BIT a permis de stabiliser une vingtaine d'années de tâtonnement. En effet
la réflexion a finalement débouché sur une recommandation internationale pour une
définition statistique du secteur informel.

Cette définition adoptée par la 15ème CIST a été liée au cadre conceptuel du Système de
Comptabilité Nationale (SCN) dans le but entre autres :
- de mesurer le secteur informel en tant que partie intégrante de l'économie
nationale,
- d'utiliser la même définition du secteur informel dans les statistiques du travail
et dans les comptes nationaux.

Au Bénin le secteur informel comprend l’ensemble des entreprises (quelle que soit leur taille)
privées qui présentent des caractéristiques socio-économiques (effectif de salariés
permanents, effectif de l’ensemble des apprentis et des aides familiaux) et juridico-
institutionnelles (tenue d’une comparabilité suivant un plan comptable, appartenance à une
personne physique ou à une association de personnes, non-affiliation à la sécurité sociale)
différentes des entreprises modernes. Ce sont des activités à petite échelle, où le salariat est
limité, le capital investi est faible mais où il y a néanmoins circulation monétaire et production
de biens et services onéreux avec des techniques à haute intensité de main-d’œuvre. Les
qualifications sont acquises le plus souvent en dehors du système scolaire et le marché
échappant à tout règlement est ouvert à une concurrence cruelle.

La typologie utilisée pour classer les différents types d’activités est celle des Nations Unies, à
savoir la CITI rév.2 (Classification Internationale Type par Industrie, révision 2)

1.2. Méthode d’évaluation des agrégats

La production a été évaluée par le biais d’une variable « proxy », le chiffre d’affaire, sauf
pour le secteur du commerce. Cette estimation est certainement au-dessous des valeurs
réelles puisqu’elle ne prend pas en compte les variations des stocks de produits finis.
L’enquête comprenait une question sur les produits vendus, les prix unitaires de vente, les
quantités fabriquées et vendues ainsi que le montant des recettes encaissées par
l’entrepreneur pendant la période de référence. La production brute de biens et services
comprend :

- la valeur des biens et services destinés à la vente ou au transfert à d’autres agents,


- la production pour compte propre destinée à l’auto-consommation et à la formation
brute de capital fixe,

3
- l’accroissement net des produits en cours de fabrication (évalués à leur coût) et des
stocks de produits finis (évalués au prix à la production),
- les loyers perçus au titre des bâtiments, des machines et des équipements.

Afin d’évaluer la production du commerce, les enquêteurs ont utilisé les marges, à savoir
la différence entre le montant des ventes et celui du coût d’achat des marchandises
vendues. Le taux de marge moyen calculé est de 33%.

La production est définie ici comme le résultat de l’activité économique, qui consiste à
créer des biens et des services au cours d’une période donnée à partir des facteurs de
production s’échangeant sur le marché. La valeur ajoutée c’est l’excédent de la valeur des
biens ou services produits sur la valeur des biens et services consommés pour les
produire. Elle représente la valeur nouvelle ou richesse additionnelle créée au cours du
processus de production. La valeur ajoutée comprend les impôts sur production nets de
subvention, la rémunération des salariés et l’excédent brut d’exploitation qui représente le
solde du compte d’exploitation et montre ce qui reste de la valeur nouvelle créée.

L’appréciation de la pauvreté a été faite à partir de l'Excédent Brut d'Exploitation (EBE),


assimilé au revenu du chef d'unité a été choisi comme indicateur de niveau de vie. En
première approximation, c'est le revenu de l'entreprise ou de l’activité informelle. Dans le
secteur informel, les subventions d'exploitation sont quasiment nulles.

A partir de l'EBE un seuil S qui représente les deux tiers (2/3) de la médiane de l'EBE de
l'ensemble des unités de productions informelles enquêtées a été considéré;
L’approche de la médiane est une approche très utilisée par les institutions
internationales. Cette approche est fondée sur le concept de seuil relatif qui part du
principe que la pauvreté est avant tout un phénomène relatif entre catégories socio-
économiques d'une même société. On distingue deux catégories de mesures relatives: les
mesures purement relatives et les mesures quasi-relatives. Une mesure purement relative
consiste à considérer comme pauvres tous les individus dont le revenu ou la dépense se
situe, par exemple, dans le quintile inférieur de la distribution des revenus ou des
dépenses. Une mesure quasi-relative consiste à considérer comme pauvres tous ceux
dont le revenu ou la dépense est inférieur, par exemple, à 75% du revenu médian ou
moyen (dépense médiane ou moyenne). La notion de pauvreté relative ne définie pas un
seuil de pauvreté en tant que tel; elle suppose qu'il y a toujours des pauvres et s'attache
plutôt à mesurer comment les revenus ou les dépenses de ceux-ci évoluent par rapport
aux non pauvres [A. ADEGBIDI, 2001]. Le choix de cette approche se justifie par le fait que
le secteur informel constitue un groupe socio-économique plus homogène que l'ensemble
des ménages.

Trois indices de pauvreté sont calculés pour appréhender le niveau de pauvreté 2,.
1) P0 : incidence de pauvreté qui indique la proportion des pauvres au sein de la
population ;
2) P1 : indicateur de la profondeur ou du fossé de pauvreté ; il permet d’apprécier
l’intensité du déficit d'exploitation ou du phénomène de pauvreté ;

2
Ces indicateurs sont basés sur la méthodologie proposée par Foster, Greer et Thorbecke (1984) "A Class of
Decomposable Poverty Measures" Econometrica et utilisés par exemple dans les profils de pauvreté réalisés en
Côte d'Ivoire au Ghana par Boateng, Ewusi, Kabour et McKay (1992) Un profil de pauvreté au Ghana Document
de travail n° 5, Projet Dimensions Sociales de l'Ajustement, Banque mondiale, Washington, D.C. il a été également
utilisé au Bénin dans l'Etude sur les Conditions de Vie en milieu Rurale ECVR2

4
3) P2 : indicateur de sévérité de la pauvreté ; il permet d’apprécier l’ampleur de la
disparité du déficit parmi les pauvres.

Encadré 2 : Indice de Pauvreté de la Classe de Foster et al. (1984)

Soit P la classe des indices décomposables de pauvreté. Si X est un indicateur du niveau de vie (dépense ou revenu par
équivalent adulte par exemple), alors P s’écrit pour une ligne de pauvreté z
1 n
Pα = ∑
n i =1
(1 − xi / z )α 1( xi < z )

où α s’interprète comme le coefficient d’aversion à la pauvreté.

Si, α =0, P0 est l’incidence de pauvreté ; c’est-à-dire la proportion des pauvres ;


Si α =1, alors P1=P0* I, P1 est la profondeur de la pauvreté, où I désigne l’intensité;
Si α =2, P2 est l’indice de sévérité de la pauvreté ; il sert à mesurer l’inégalité parmi les pauvres.
1 n
Dans le cadre de cette étude on a: Pα = ∑ (1 − EBEi / Iebe)α 1( EBEi < Iebe)
n i =1
n étant évidemment le nombre d'observations

Deux groupes de chefs d'unités de production informelle (UPI) sont définis suivant leur
catégorie socio-économique :

• la première catégorie, les Non pauvres, regroupe les chefs d'UPI qui ont enregistré
des EBE supérieurs à 100% du seuil de pauvreté considéré;
• la seconde catégorie, les Pauvres, regroupe les chefs d'UPI dont l'EBE est en
dessous du seuil de pauvreté.

1.3. Source de données

Les données servant de base à la présente communication sont issues de l'enquête sur
les unités économiques informelles de 1999.
Le champ de l'enquête englobe deux aspects :
i) le champ économique qui couvre les activités économiques à savoir la production, le
commerce et les services.

ii) du point de vue géographique, l'enquête a couvert les six grandes villes du Bénin à
savoir Cotonou, Porto-Novo, Abomey, Bohicon, Parakou et Djougou. Ces villes ont été
choisies suivant deux critères : leur poids économique et l'importance des micro-
entreprises qui y opèrent.

2- LES SOURCES DE FINANCEMENT DANS LE SECTEUR INFORMEL URBAIN AU


BENIN

Les fonds nécessaires aussi bien à la mise en place d'une unité économique qu'au
renforcement ultérieur de l'équipement proviennent le plus souvent des circuits financiers non
formels. Il ressort de l'enquête de 1999 que la majorité des investissements est réalisée en
dehors du circuit bancaire.

5
Graphique 1 : Distribution des UPI selon la source de
financement

Programme
Tontine d'aide
Prêt d'amis Autofinanceme
Héritage et don nt

Prêt de famille
Banque et IMF

Autofinancement Banque et IMF Prêt de famille


Héritage et don Prêt d'amis Tontine
Programme d'aide

Tableau2: Evolution de la structure des sources de financement en 1992 et 1999

SOURCE DE FINANCEMENT 1992 1999


Autofinancement 69,8 45,2
Prêt de famille 6,9 15,8
Tontine 8,5 15,1
Banques et IMF 1,0 14,4
Prêt d'ami 1,9 9,1
Programme d'aide 0,4 0,4
Don et héritage 3,4 0,4
Autres sources 7,7 -

Le recours quasi exclusif au circuit informel au détriment du système moderne procède des
contraintes imposées par ce dernier et qui sont impossibles à surmonter pour tout individu
dont le statut socio-économique n'est pas parfaitement défini 3.

Les résultats économiques obtenus dans l'exercice de l'activité informelle sont-ils


influencés par le type de source de financement? L'examen de la corrélation entre les
indicateurs tels que le chiffre d'affaires, la valeur ajoutée, l'excédent brut d'exploitation et
le niveau des salaires distribués permettront de donner une réponse à ce
questionnement.

3 J.P. LACHAUD: les activités informelles de production et l'emploi au Bénin: Analyse et stratégie de développement, Programme Mondial de l'emploi, OIT, Genève, Avril 1986
.

6
3- L’ANALYSE DIAGNOSTIQUE DES SOURCES DE FINANCEMENT DANS LE
SECTEUR INFOEMEL URBAIN AU BENIN

L’analyse de quelques indicateurs de résultats au regard des différentes sources de


financement permettra de nous rendre compte des sources de financement les plus
adaptées aux activités du secteur informel urbain. Les indicateurs retenus sont les
recettes, la valeur ajoutée, les salaires distribués et l'excédent brut d'exploitation. Ces
indicateurs seront étudiés au regard des différentes sources de financement prises
isolement ou en combinaison.

3.1 – L'analyse selon le nombre de sources de financement.


Tableau 3 : Indicateurs de gestion selon le nombre de sources de financement.
Nombre de source Un Deux Trois Quatre
Soldes moyens

Chiffre d’affaires 549.530 232.037 112.046 391.000


Valeur Ajoutée 204.522 150.925 93.833 258.550
Salaires distribués 66.859 39.326 27.236 60.000
Excédent brut d’exploitation 137.663 111.598 66.597 198.550

3.2 –Les sources de financement prises isolement.

Il s'agit des sources de financement telles les tontines, les micro-financements et les
programmes d'aide. De façon exclusive, les tontines sont apparues comme la principale
source de financement des activités économiques des micro-entreprises du secteur
informel. 5,9% parmi elles ont eu recours aux tontines uniquement pour financer les
activités productives alors que 1,43% d’entre elles ont été financées grâce aux crédits
bancaires.

a) – Les tontines
Les entreprises qui ont eu recours exclusivement aux tontines pour financer leurs activités
ont enregistré un chiffre d’affaires qui varie entre 4.800 FCFA et 8.400.000 FCFA soit une
valeur moyenne de 2.032.709 FCFA et le salaire moyen de ces entreprises est de 44.011
FCFA en 1999. Les niveaux moyens de la valeur ajoutée et de l’excédent brut
d’exploitation sont respectivement de 534.790 FCFA et 490.770 FCFA.

b) – Programmes d’aide.
Très peu d’entrepreneurs du secteur informel ont recours exclusivement aux programmes
d’aide pour financer leurs activités. En examinant les soldes caractéristiques des
entreprises, on note que le salaire moyen distribué est d’environ 15.800 F.CFA et les
ventes moyennes réalisées par elles est de 84.000 F.CFA alors que la valeur ajoutée

7
dégagée par chacune d’entre elles est de 76.478 F.CFA pour un excédent brut
d’exploitation moyen de 60.678 F.CFA.

En observant les soldes caractéristiques par sources de financement, on s’aperçoit que le


chiffre d’affaire moyen des entreprises dont les sources de financement sont les tontines sont
très élevés en comparaison aux autres sources de financement. On note la même tendance
au niveau des salaires distribués et les autres variables (Excédent brut d’exploitation, valeur
ajoutée etc.). Cependant le salaire moyen distribué par les entreprises ayant pour source de
financement les tontines paraît relativement faible en comparaison aux chiffres d’affaires
moyens enregistrés.

Il faut noter que les tontines étant de l’épargne individuelle, leur mobilisation est aisée
contrairement aux crédits bancaires, aux micro-finances et aux programmes d’aides qui
requièrent des fois des garanties ou des avaliseurs. Elles constituent une entraide sociale et
par simple esprit de solidarité, un demandeur arrive à mobiliser d’importantes ressources au
démarrage, l’extension ou pour le renouvellement d’une activité économique.

Il est important de signaler qu’en 1999 aucune UPI n’a eu recours aux micro-finances de
façon exclusive pour financer ses activités.

Graphique 2 : Indicateurs de gestion par source de financement.

2010000

1810000

1610000

1410000

1210000
Tontine
1010000
Crédits bancaires
810000 Programmes d'aide

610000

410000

210000

10000
Chiffre d'affaires Valeur ajoutée Salaire Excédent brut
d'exploitation

Les sources de financement pris individuellement semblent avoir un impact sur les
résultats de l'activité informelle. Qu'en est-il de leur combinaison ?

3.3- La combinaison des sources de financement

L'intérêt de l’analyse de la combinaison des sources de financement réside dans le fait


que ces différentes sources n'ont pas les mêmes mécanismes et que les interférences
peuvent être aussi bien bénéfiques que néfastes.

8
a) – Les tontines et micro-finances
Très peu d’unités économiques du secteur informel ont eu à combiner les tontines et les
micro-finances pour les financements de leurs activités. Mais celles qui ont combiné ces
deux sources de financement ont enregistré des chiffres d’affaires moyens non
négligeables (600.000 F.CFA) et une valeur ajoutée moyenne relativement élevée
(546.000 F.CFA), dans le même temps elles ont distribué 76.478 F.CFA comme salaires
aux employés.

Tableau 4 : Indicateurs de gestion par association de sources de financement

Soldes moyens Association « Tontines et


micro-finances »
Chiffre d’affaires 600000
Valeur Ajoutée 546833
Salaire distribués 72000
Excédent brut d’exploitation 474833

Il faut observer que la combinaison tontines et micro-finances est la seule combinaison,


entre les trois principales sources de financement, adoptée en 1999 par les entrepreneurs
du secteur informel.
En dehors des trois sources de financement retenues, telles que les micro-finances, les
tontines et les programmes d'aide, plusieurs d'autres sources non moins importantes sont
utilisées par les acteurs du secteur informel. Il s'agit des crédits bancaires, des prêts de
famille, des prêts d'amis, les prêts d'association ainsi que des crédits de petits prêteurs ou
usuriers et enfin les dons et héritages. Ces autres sources de financement sont parfois
combinées avec les micro-finances (0,2%) et les tontines (3,4%).

b) – Micro-finances et autres sources de financement


Les unités économiques dont les sources de financement sont les micro-finances et les
autres sources de financement ont enregistré un chiffre d’affaires moyen de 256.424
F.CFA et distribué un salaire moyen de 79.600 F.CFA en 1999. Dans le même temps on a
noté que l’excédent brut d’exploitation et la valeur ajoutée moyens sont respectivement
de 136.000 francs CFA et 215.600 francs CFA.

c) - Tontines et autres sources de financement


Les soldes caractéristiques de gestion des entreprises utilisant en plus des tontines
d’autres sources de financement montrent que pendant que chaque unité distribue en
moyenne 35.700 francs CFA comme rémunération aux employés, le chiffre d’affaire
moyen est estimé à 240.480 francs CFA pour une valeur ajoutée moyenne de 144.850
francs CFA et un excédent d’exploitation de 109.130 francs CFA.
La combinaison micro-finances et autres sources financement apparaît la plus adaptée car
les résultats économiques sont relativement meilleurs par rapport à la combinaison
tontines-autres sources financement. En effet les entreprises ayant recours à la fois aux

9
micro-finances et autres sources distribuent relativement plus de salaires. De même, elles
font relativement plus de chiffre d’affaires et conséquemment dégagent plus de valeur
ajoutée. Il faut cependant noter que ces différences relatives ne sont pas très
significatives.

Graphique 3 : Indicateurs de gestion et association de sources de financement

300000

250000

200000

150000 Micro-finances et autres


Tontines et autres
100000

50000

0
Chiffre d'affaires Valeur ajoutée Salaire Excédent brut
d'exploitation

3.4 – L'analyse selon le genre


Le secteur informel est caractérisé par la prédominance des femmes. Ainsi, plus de 3
chefs d’entreprises sur 5 (61,7%) sont des femmes. Elles interviennent surtout dans le
commerce et les services (bar, restaurant, hôtellerie etc.)
En examinant les quatre indicateurs de gestion retenus, on note que les entreprises dont
les chefs sont des femmes ont enregistré plus de chiffre d’affaires que celles dirigées par
les hommes. Ainsi, en 1999, les entreprises des femmes ont fait un chiffre d’affaire moyen
de 621.045 F.CFA et distribué en moyenne 69.572 F.CFA comme salaire aux travailleurs.
Au niveau des unités économiques dirigées par les hommes, il se dégage qu’en moyenne
le chiffre d’affaires est de 326.096 F.CFA alors que le salaire moyen distribué est estimé à
56.385 F.CFA.
Tableau 5 : Indicateurs de gestion selon le sexe du chef d’entreprise.

Masculin Féminin
Soldes moyens

Chiffre d’affaires 326.096 621.044


Valeur Ajoutée 183.841 205.676
Salaires distribués 56.385 69.571
Excédent brut d’exploitation 127.456 136.104

10
Graphique 4 : Indicateurs de gestion des unités économiques du secteur informel par
sexe

700000

600000

500000

400000

Masculin
300000 Féminin
Ensemble

200000

100000

0
Chiffre d'affaires Valeur ajoutée Salaire Excédent brut
d'exploitation

La propension des chefs d’entreprises à aller vers telles ou telles autres sources de
financement est-elle influencée par le sexe ? Dans ce paragraphe on procèdera à
l’analyse des indicateurs de gestion selon le sexe du premier responsable de l’entreprise.

a) – Les tontines
On observe que les femmes plus que les hommes ont plus recours aux tontines. En effet,
59,4% des chefs finançant leurs activités économiques avec les tontines sont des
femmes.
L’examen des soldes caractéristiques de gestion relatifs aux tontines comme sources de
financement, fait ressortir que chaque unité économique dirigée par une femme réalise en
moyenne 3.048.292 F.CFA de chiffre d’affaires et distribue un salaire moyen de 34.586
F.CFA alors que la valeur ajoutée moyenne est de 768.081 F.CFA, le niveau moyen de
l’excédent brut d’exploitation est de 733.494 F.CFA.
Au niveau des entreprises dirigées par les hommes, il faut observer que les ventes
moyennes sont estimées en 1999 à 544.386 F.CFA et le salaire moyen payé aux
travailleurs est de 57.823 F.CFA dégageant ainsi une valeur ajoutée moyenne de 192.907
F.CFA et un excédent brut d’exploitation moyen de 135.084 F.CFA.
Ainsi la valeur ajoutée dégagée par une unité économique dont le responsable est une
femme semble relativement plus élevée que celles ayant pour chef un homme. Il est ainsi
apparu que malgré que le chiffre d’affaires des entreprises de femmes est plus élevé,

11
elles contribuent très faiblement à la réduction de la pauvreté de part le faible niveau des
salaires payés aux travailleurs du secteur.
On pourrait justifier cette situation par le type d’activité. En effet, comme nous l’avons
souligné plus haut le commerce, domaine de prédilection des femmes utilise des mains-
d’œuvre très peu qualifiées et surtout infantiles donc très faiblement rémunérées. Mieux
cette activité n’utilise pas de consommations intermédiaires diminuant ainsi certaines
charges (fixes ou variables). Alors que pour les unités économiques des hommes, on a
souvent besoin de main-d’œuvre qualifiée (cas des BTP et de la sidérurgie) et des
consommation intermédiaires (cas de la menuiserie, de la fonderie et de la sidérurgie).

Graphique 5 : Indicateurs de gestion selon le sexe de l’entrepreneur et la source financement


«tontines »

3500000

3000000

2500000

2000000
Masculin
1500000 Féminin

1000000

500000

0
Chiffre d'affaires Valeur ajoutée Salaire Excédent brut
d'exploitation

b) – Les programmes d’aide


Toutes les personnes ayant fait appel exclusivement aux programmes d’aide sont des
femmes. Tandis que les micro-crédits et les crédits bancaires pris exclusivement semblent
rebuter les femmes. Cette propension de femmes à aller vers les programmes d’aides
résulterait de l’orientation des structures de gestion qui, considérant que les femmes
constituent l’essentiel de la couche défavorisée les privilégient par rapport aux hommes.
De l’observation des soldes caractéristiques des unités économiques ayant pour sources
de financement les programmes d’aides, on pourra noter que le salaire moyen distribué
est de 15.800 F.CFA alors que le chiffre d’affaire de chacune d’elles est de 84.000 F.CFA.
On note aussi que la valeur ajoutée moyenne est de 76.480 F.CFA et que l’excédent brut
d’exploitation en de 60.670 F.CFA en moyenne.

c) La combinaison Tontine et micro-finance


Seules les femmes ont utilisé la combinaison tontines et micro-finances pour financer leurs
activités de production.

12
L'observation des soldes caractéristiques de gestion, permet de s’apercevoir que le chiffre
d’affaires moyen est de 600.000 F.CFA alors que la valeur ajoutée de chacune des unités
économiques est d’environ 546.800 F.CFA. Cependant, le salaire moyen distribué paraît
relativement élevé (72.000 F.CFA).
Notons qu'au niveau des trois sources, la combinaison de sources de financement ne
concernent que les tontines et micro-crédits.

d) Combinaison Micro-finance et autres sources de financement


Au total, 0,16% des chefs d’entreprise ont fait appel en plus des micro-finances à d’autres
sources de financement en majorité les hommes (54,3%).
L’analyse par sexe fait ressortir que les recettes de ventes des entreprises dirigées par les
hommes sont estimées en moyenne à 426.860 F.CFA alors qu’au niveau des femmes on
a noté que chaque entreprise a enregistré en moyenne 50.000 F.CFA. Il est aussi apparu
que la valeur ajoutée des entreprises des hommes est très élevée en comparaison au
résultat obtenu par les unités dirigées par les femmes (362.460 F.CFA contre 37.740
F.CFA) et distribuant respectivement 124.440 F.CFA et 25.280 F.CFA.
En résumé, on observe que les entreprises dirigées par les hommes et ayant recours à la
fois aux micro-finances et autres sources de financement semblent avoirs des activités
économiques plus florissantes que celles de leurs homologues femmes.

e) Combinaison Tontine et autres sources de financement


L’examen des soldes caractéristiques de gestion montre que si les entreprises ayant pour
chef les hommes ont réalisé un chiffre d’affaires moyen de 219.400 F.CFA, les entreprises
des femmes ont vendu en moyenne 265.750 F.CFA dans la même période. Mais au
niveau de la distribution de salaire, on constate que le salaire payé par les entreprises
dont les chefs sont des hommes paraît plus élevé (39.900 F.CFA contre 30.645 F.CFA
pour les entreprises dirigées par les femmes). Il faut aussi noter que les valeurs ajoutées
moyennes des unités dont les responsables sont les hommes ainsi que leur excédent brut
d’exploitation sont relativement plus élevés que ceux observés au niveau des unités
dirigées par les femmes.

13
Graphique 6: Indicateurs de gestion par combinaison de sources de financement selon le
sexe

450000

400000

350000

300000

250000 Chiffre d'affaires


Valeur ajoutée
200000
Salaire
150000 Excédent brut d'exploitation

100000

50000

0
Masculin Féminin Masculin Féminin

Micro-finances et autres Tontines et autres

L’inadaptabilité de ces différentes sources de financement aux activités économiques


informelles est mise en exergue ici du fait d’une institutionalisation mal définie. Le micro-
crédit est facile à définir parce qu’il prend en compte le débiteur. La micro-finance soulève
plus de difficultés parce qu’elle prend en compte le créancier et parce que le créancier est
souvent une institution. La finance informelle recouvre plutôt un ensemble de pratiques
mettant en présence plusieurs personnes. La finance informelle recouvre plutôt des
pratiques d’épargne ; les tontines par exemple sont considérées davantage comme une
incitation efficace à épargner que comme un moyen d’obtenir du crédit. Du point de vue
conceptuelle, le micro-crédit caractérisé par la petitesse des montants octroyés et par le
durée limitée des échéances de remboursement. C’est un crédit qui s’adresse aux clients
« abandonnés » par les banques agricoles en faillite [P. Ortoli, 1997]. Le terme micro-
finance est utilisé pour désigner les services de financement offerts aux petites et micro
entreprises [Robinson, 1996].

Mais les institutions financières autres que les banques sont nombreuses dans la plupart
des pays, elles ne font pas toutes de la micro-finance et celles qui en font n’en font pas
toutes de la même façon. En Afrique de l’Ouest, la loi sur les mutuelles n’est pas vraiment
adaptée à la micro-finance. Elle est une loi « excluante » ou « habilitante », en ce sens
qu’elle interdit toute activité d’épargne et de crédit à une institution non agréée, ou non
reconnue. Par ailleurs, la finance informelle n’était pas institutionnalisée, elle n’a
commencé à l’être que depuis peu. Les banques devaient donc être en contact avec les
agents eux-mêmes, les paysans, les femmes, les artisans [M. Lelart, 2001].

14
4- ANALYSE DE LA PAUVRETE SELON LA SOURCE DE FINANCEMENT

Des études ont révélé une forte incidence de la pauvreté au niveau des ménages aussi
bien en milieu urbain qu'en milieu rural. On dénombre de plus en plus de pauvres qui
trouvent pour "refuge" le secteur informel. L’incidence de la pauvreté dans le secteur
informel urbain au Bénin est de 40,2%. L'indicateur de la profondeur de la pauvreté révèle
que l'écart moyen entre l'EBE moyen des chefs d'UPI pauvres et le seuil de pauvreté est
de 38%. La sévérité de la pauvreté au niveau des chefs d'unité de production du secteur
informel se situe aux environ de 19% [D. M. MOUSTAPHA, 2002 4].
Selon la source de financement, on note que la pauvreté est moins accentuée dans les
rang des acteurs qui ont eu recours aux tontines que ceux qui ont utilisé les services
bancaires et les services des institutions de micro-finances.
Tableau 6: Les indices de pauvreté selon les sources de financement
S1=12.122 FCFA S2=24.245 FCFA 5
Source de P0 P1 P2 P0 P1 P2
financement
Autofinancement
0,249 0,138 0,099 0,384 0,231 0,169
0,014 0,009 0,007 0,016 0,010 0,009
Micro-finance
0,362 0,247 0,195 0,478 0,330 0,270
0,058 0,040 0,039 0,034 0,050 0,04
Tontines
0,230 0,120 0,090 0,397 0,220 0,154
0,040 0,024 0,019 0,040 0,030 0,020
Autofinancement
0,288 0,182 0,146 0,440 0,280 0,216
&Prêt famille
0,059 0,044 0,040 0,060 0,050 0,040
Autofinancement
0,440 0,160 0,090 0,550 0,330 0,220
& tontines
0,070 0,037 0,028 0,070 0,050 0,040
Autofinancement 0,379 0,233 0,162 0,414 0,310 0,250
& héritage-don
0,090 0,060 0,060 0,090 0,070 0,060
Prêt de famille & 0,250 0,130 0,080 0,350 0,198 0,150
Tontines
0,096 0,060 0,050 0,110 0,070 0,060

Ensemble 0,272 0,155 0,110 0,402 0,249 0,186


0,011 0,006 0,006 0,02 0,009 0,013
6
N.B.les écarts-types se trouvent sur les lignes en dessous des indices

4
Cf . « Pauvreté et secteur informel urbain au Bénin » dans le cadre des travaux du MIMAP-Bénin en 2002
5
Sous cette forme, on constate que ce seuil de pauvreté S2 correspond, à peu près, à la norme de 1$/jour admis par les
Nations Unies. Ce seuil peut donc servir valablement d'échelle de valeur. Cf : D. M. MOUSTAPHA (2002): Pauvreté et
secteur informel en milieu urbain au Bénin
Pα − P22α
6
Les écart-types se calculent comme suit : σα = avec N la taille de l'échantillon, Pα les indicateurs de
N
pauvreté avec α =0,1 et 2.
15
4.1- Incidence de la pauvreté
L’incidence de la pauvreté est la proportion des chefs d'unités dont le niveau de leur
quasi-revenu autrement dit ceux dont le niveau de l’EBE est inférieur au seuil déterminé.
Au seuil S2, l'incidence de pauvreté est de 40,2%. En effet pour 40,2% des chefs d’unité
de production informelle, leur activité informelle ne leur permet pas de subvenir aux
besoins vitaux. Cette incidence est relativement plus élevée dans les rangs des chefs
d’UPI qui financent leurs activités en combinant l’autofinancement et la tontine (0,55).
Cette incidence est moindre au niveau des chefs d’UPI utilisant les prêts de famille et la
tontine (0,35) pour financer leurs activités. Il est important de noter que prise de façon
isolée, l’autofinancement (0,38) de même que la tontine (0,40) constituent des sources de
financement pour lesquelles l’incidence de la pauvreté est moindre par rapport à la
moyenne nationale dans le secteur informel urbain (0,402). De même les combinaisons
autofinancement-prêt de famille (0,44) et autofinancement-héritage et don (0,41).
En considérant le seuil S1 symbolisant l'extrême pauvreté, on trouve qu’un peu plus d'un
chef d'UPI sur 4 est extrêmement pauvre dans le secteur informel urbain. La combinaison
autofinancement-tontine et l’autofinancement pris isolement gardent les mêmes positions
par rapport à la pauvreté. Les positions des autres sources de financement ont différé
légèrement. Ainsi la tontine devient la source de financement ayant l’incidence la plus
faible (0,23).

Tableau 7: Position relative des différentes sources de financement par rapport à


l’incidence de la pauvreté
Rang
Source de financement
Pauvreté extrême Pauvreté moyenne
Autofinancement 6ème 6ème
ème
Micro-finance 3 2ème
Tontines 7ème 5ème
ème
Autofinancement & Prêt famille 4 3ème
ère
Autofinancement & tontines 1 1ère
Autofinancement & héritage-don 2ème 4ème
ème
Prêt de famille & Tontines 5 7ème

4.2- Profondeur de la pauvreté

La profondeur de la pauvreté P1 mesure l'écart par rapport à la ligne de pauvreté


identifiée par le seuil.
Selon le seuil S2, l’indicateur de la profondeur de la pauvreté dans le secteur informel est
de 0,249. Au regard des sources de financement des activités informelles, la pauvreté est
relativement plus profonde (0,33) au niveau des chefs d’UPI qui financent leurs activités
par la micro-finance et la combinaison autofinancement-tontine. Par contre la combinaison
prêt de famille et tontine constitue la source de financement utilisée par le groupe
d’acteurs du secteur informel dont la profondeur de la pauvreté est relativement la plus
faible (0,198). Il convient de remarquer que les sources de financement tontine et
autofinancement pris isolement, présentent une profondeur de la pauvreté moindre par
rapport à la moyenne nationale (0,249). Le seuil S1 qui indique l'extrême pauvreté révèle
la micro-finance et la tontine. La première ayant une profondeur relativement élevée
(0,247) et la seconde donnant une profondeur moindre (0,12). La micro-finance se révèle

16
comme une source de financement non adaptée. Hormis la combinaison autofinancement-
tontine, les positions relatives des autres sources de financement ont différé légèrement.

Tableau 8: Position relative des différentes sources de financement par rapport à la


profondeur de la pauvreté
Source de financement Rang
Pauvreté extrême Pauvreté moyenne
Autofinancement 5ème 5ème
ère
Micro-finance 1 1ère
Tontines 7ème 6ème
ème
Autofinancement & Prêt famille 3 4ème
Autofinancement & tontines 4ème 1ère
ème
Autofinancement & héritage-don 2 3ème
Prêt de famille & Tontines 6ème 7ème

4.3- Sévérité de la pauvreté

La pauvreté au niveau des chefs d'unité de production du secteur informel est plus sévère
dans les rangs de ceux qui utilisent les micro-finances (0,27) que ceux d’entre les chefs
d’UPI qui utilisent la combinaison ‘prêts de famille et tontines’ (0,15). Nonobstant quelques
légères modifications de positions, le même constat est fait en ce qui concerne la situation
d’extrême pauvreté, ainsi que le montre le tableau ci -après. Il faut noter que les tontines
utilisées exclusivement occupent une bonne position (0,15).

Tableau 9 : Position relative des différentes sources de financement par rapport à la


sévérité de la pauvreté
Rang
Source de financement
Pauvreté extrême Pauvreté moyenne
ème
Autofinancement 4 5ème
Micro-finance 1ère 1ère
ème
Tontines 5 6ème
Autofinancement & Prêt famille 3ème 4ème
ème
Autofinancement & tontines 6 3ème
Autofinancement & héritage-don 2ème 2ème
ème
Prêt de famille & Tontines 7 7ème

Contrairement à se que l’on pensait, Il faut noter que le développement de la micro-


finance n’a pas permis aux acteurs du secteur informel d’accroître leur productivité pour
faire face à la pauvreté. Les indicateurs FGT révèlent une certaine inadaptabilité de la
micro-finance à l’exercice des activités économiques du secteur informel. C’est dans le
groupe des acteurs du secteur informel utilisant en exclusivité cette source de financement
que la pauvreté est plus perceptible, plus profonde et plus sévère. D’ailleurs d’une façon
générale c’est dans les rangs des ménages ayant eu accès aux ressources financières
des coopératives d’épargne et de crédit (COPEC oui COFI) que la pauvreté a été plus
manifeste [C. SINZOGAN, mars 2003]. Cette situation est plus liée au contexte socio-
culturel particulier des acteurs du secteur informel dont les comportements ne sont pas
identiques à ceux des entrepreneurs du secteur moderne assimilables aux comportements
des IMF.

17
La micro-finance soulève plus de difficultés parce qu’elle prend en compte le créancier et
parce que le créancier est souvent une institution. Les tontines assimilées à la finance
informelle recouvre plutôt des pratiques d’épargne et sont considérées davantage comme
une incitation efficace à épargner que comme un moyen d’obtenir du crédit. On peut
certes trouver un intérêt à un programme de libéralisation financière, mais on voit mal
comment des taux d’intérêt plus élevés suffiraient pour amener l’épargne informelle – qui
est informelle depuis toujours – dans les banques qui sont parfois des filiales de banques
étrangères. Or on a suffisamment opposé les comportements dans ces deux secteurs.
D’ailleurs les acteurs du secteur informel constituent un groupe socio-économique
particulier pour lequel il faut un filet de protection sociale permanent. Car très souvent
lorsque survient un choc entraînant un ralentissement de l’activité économique, c’est sur le
secteur informel que se reporte la pression. Par exemple, une crise financière peut
contribuer à une baisse de la rémunération des salariés du fait de suppressions d’emplois
dans le secteur formel, de la baisse de la demande de services rendus par le secteur
informel et d’une diminution des heures de travail et des salaires réels. Lorsque les
salariés du secteur formel ayant perdu leur emploi arrivent dans le secteur informel, ils
exercent une pression supplémentaire sur les marchés de travail informel 7.

5- IMPLICATIONS EN TERME DE STRATEGIES DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETE

Le développement des structures de micro-finance se trouve au cœur de la stratégie de


réduction de la pauvreté et l’intervention auprès de l’entreprise informelle est devenue un
outil de développement mais l’on doit veiller à ne pas casser les dynamiques internes au
secteur informel en facilitant l’accès à des moyens formels d’émancipation tel que le
crédit. Dans ce cadre, plusieurs défis restent à relever :
une plus grande mobilisation des ressources financières : très souvent, on note un faible
niveau des ressources financières, une insuffisance de recyclage des ressources
mobilisées et une insuffisance de financement des emplois longs. Un accent particulier
peut être mis sur la mobilisation de l’épargne des pauvres car ils épargnent.
Privilégier le financement des branches d’activités productives au dépend du commerce
qui semble être l’activité la plus florissante aujourd’hui dans le secteur informel urbain. La
diversification des produits sera un atout important. Toutefois un ciblage sera néfaste.
Promouvoir la formation spécialisée en micro-finance. De nos jours la création d’IMF se
fait pêle-mêle sans aucune adéquation avec la formation reçue.
Un rôle important des gouvernants et des bailleurs sera d’encourager la constitution de
vraies institutions et non de projet et de permettre aussi aux IMF d’animer un marché inter-
IMFs et d’accéder au marché financier de la zone UEMOA.
L’approche doit être participative. Pour une meilleure efficacité, il faut encourager voire
promouvoir les actions à caractère plutôt collectif et s’assurer de la collaboration et de
l’implication réelle des acteurs car de leur dynamisme et leur autonomie, ils ont un pouvoir
certain d’intervention sur leur milieu et sur leur propre avenir. Ce qui constitue un facteur
certain de lutte contre la pauvreté.
Il faut intégrer aux politiques d’appui les logiques de comportement des acteurs du
secteur informel, par exemple la minimisation des risques et la forte préférence pour la
liquidité et le poids du très court terme.

7
E. BALDACCI, L. De MELLO et G. INCHAUSTE : Crises financières, pauvreté et répartition du revenu, in
FINANCES ET DEVELOPPEMENT n°2 Volume 39, Juin 2002, pp. 22-27

18
CONCLUSION

Le secteur informel est très pourvoyeur d'emplois dans un processus plus extensif
qu'intensif. Mais sa contribution à la formation du PIB reste encore faible.

Le financement des activités est assuré par diverses sources de financement dont les plus
important sont les tontines, les micro-finances et les programmes d'aides. L'analyse des
indicateurs de gestion fait apparaître l'existence d'une corrélation entre les sources de
financement et les résultats économiques de l'entreprise informelle. Il apparaît que les
meilleurs résultats sont observés avec les tontines prises isolement tandis qu'en
combinaison ce sont les micro-finances qui jouent le même rôle. Mais l’étude de la
pauvreté par le biais des indicateurs FTG a révélé l’inadaptabilité de la micro-finance aux
activités du secteur informel. La pauvreté est plus manifeste au niveau des chefs d’UPI
utilisant les ressources de la micro-finance par rapport aux autres sources de financement.
Il apparaît au regard de tous ces constats, la nécessité d’une innovation financière pour
assurer la promotion des activités économiques du secteur informel L’adaptabilité de la
micro-finance dépend d'un certain nombre de paramètres parmi lesquels l'on peut citer :

- l'environnement aussi bien macro-économique qu'institutionnel ;

- les caractéristiques conceptuelles qui s'articulent le plus souvent autour des


caractéristiques des produits (montant des prêts, maturité des produits, garanties
nécessaires, taux d'intérêt, plan d'exécution, services d'épargne et de crédits etc…) ;

- des processus technologiques dont l'objectif est double: apporter une aide sociale
croissante et pertinente au niveau de la population cible et assurer la durabilité financière.

19
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1- T. ABDELKHALEK (2003) : Tests d’efficacité du financement des micro et petites


entreprises dans la lutte contre la pauvreté : une approche statistique, COFI, Rabat

2- A. AGNIKPE (1998) : Micro-finance au Bénin : étude sectorielle approfondie,


PNUD, Cotonou

3- A. S. BELLO (2002) : Impact de la micro-finance sur les activités du secteur


informel : cas du programme crédit-épargne ID, Mémoire, Niveau I , INE, Cotonou.

4- K. GBADAMASSI (2000) : Impact du micro-crédit sur le développement de


l’économie informelle : cas de 2M de Cotonou, Mémoire, Niveau I , INE, Cotonou.

5- M. LELART (2002) : L’évolution de la finance informelle et ses conséquence sur


l’évolution des systèmes financiers. Réseau Entrepreuriat-AUF, Cotonou.

6- L. WEBSTER et P. FIDLER (1995) (eds) :Le secteur informel et les institutions de


micro-financement en Afrique de l’Ouest. Banque Mondiale, Washington.

7- J-M SERVET (sous la direction de) (1999) :Exclusion et liens financiers : Rapport
du Centre Walras 1999-2000, Economica, Paris.

8- C. SINZOGAN (2003) : Micro-crédit, pauvreté et inégalités intra-menages au


Bénin : une analyse selon le genre. CAPE-COFI, Cotonou.

9- J-M SERVET (sous la direction de) (1999) :Exclusion et liens financiers : Rapport
du Centre Walras 1999-2000, Economica, Paris.

10- D. M. MOUSTAPHA : Capital et investissement dans le secteur informel urbain au


Bénin in M. LELART (sous la direction de :) (2000) : Finance informelle et
financement du développement. Universités francophones, FMA /AUPELF-
UREF.Beyrouth.

11- D. M. MOUSTAPHA (1996) : Les femmes et le secteur informel urbain au Bénin.


Travail Final Diplôme post -universitaire en Population et Développement. INSEA-
FNUAP, Rabat.

12- C. MALDONADO, C. H. CASSEHOUIN et D. M. MOUSTAPHA (1996) : Analyse


des résultats de l’enquête sur les unités économiques du secteur informel urbain au
Bénin. PEESI, BIT-PNUD-INSAE, Genève.

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