Discours D'investiture R.WAMYTAN 28 Juillet 2021

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Discours d’investiture de Monsieur Roch Wamytan

Elu président du Congrès, le 28 juillet 2021

Mr le Haut-commissaire
Mr le président du Gouvernement
Mr le président du Sénat coutumier
Madame et Messieurs les présidents de province
Messieurs les parlementaires et maires de la NC
Aux autorités militaires, judiciaires et administratives
Aux autorités religieuses et coutumières
Mes chers collègues
Mesdames et messieurs

Permettez-moi tout d’abord d’adresser mes sincères remerciements à l’ensemble des


élus qui viennent de me renouveler leur confiance, pour la troisième fois consécutive
en me portant à la Présidence du Congrès pour la mandature 2021-2022.
Merci aux vice-présidentes du congrès Caroline Machoro-Reignier, Nadine Jalabert
Veylma Falaéo et Annie Qaeze de m’avoir si souvent représenté et suppléé en de
nombreuses occasions, au cours de ce mandat qui vient de s’achever.
Je voudrais de même saluer l’ensemble des membres du bureau, les présidents des
groupes politiques et l’ensemble des conseillers de cette assemblée ainsi que leurs
collaborateurs pour leur engagement au service de notre de notre institution et de nos
concitoyens.
Mes remerciements vont aussi aux secrétaires généraux et à l’administration du
Congrès, qui œuvrent sans relâche pour offrir un service public de qualité et pour que
l’activité institutionnelle se déroule de manière fluide et efficace.
Enfin, à toutes celles et à ceux qui depuis 2019, m’accompagnent dans ma fonction,
et dans mes actions, je vous exprime toute ma gratitude.

Pour la 3nde fois depuis le début de cette cinquième et dernière mandature de l’Accord
de Nouméa, ce sont les 26 voix des élus indépendantistes et celles de l’Eveil
Océanien, qui me permettent d’accéder à la présidence du Congrès.
Je mesure le courage de poser cet acte politique fort de la part d’un jeune parti, Eveil
Océanien, et je salue l’audace dont il fait preuve depuis son entrée sur l’échiquier
politique calédonien. Aujourd’hui, et c’est l’enseignement qu’il faut en tirer, les
formations politiques si petites ou si nouvelles soient telles, ne peuvent plus être
ignorées, elles contribuent de toutes leurs forces, à peser dans les décisions les plus
importantes pour notre pays qui a besoin de tous ses enfants pour construire son
avenir par la voie démocratique

Pour la première fois depuis l’Accord de Nouméa signé en 1998, se dessine une
conjoncture institutionnelle inédite : deux indépendantistes sont présidents des deux
principales institutions de la Nouvelle Calédonie, le Congrès et le Gouvernement.
C’est un grand moment apprécié par certains, et qui laisse d’autres interrogateurs sur
l’avenir. Mais c’est un immense défi qu’il faudra de toute façon relever impérativement
et collectivement, car nous sommes des insulaires tous embarqués sur la même
pirogue, relever ce défi, en toute humilité avec sincérité, force et courage. En gardant
à l’esprit que l’Accord de Nouméa a créé un système institutionnel dans lequel le
congrès est au centre. Il est l’assemblée parlementaire du pays et un lieu ouvert
d’échanges et d’expression libre de toutes les sensibilités politiques calédoniennes.

Les maîtres mots qui doivent désormais guider notre projet pour la Nouvelle-Calédonie
à partir du moment où nos deux institutions sont en ordre de marche, sont Confiance
et responsabilité
Confiance car nous devons avoir foi en nos capacités de conduire les affaires du Pays,
même si la donne a changé, même si le monde et la société calédonienne ont évolué.
Responsabilité car il est de notre devoir de consolider les fondations de notre avenir
commun.
Il nous appartient désormais de donner de la cohérence à toutes les actions que nous
allons mettre en œuvre dans les mois à venir, que ce soit au sein des institutions
comme dans d’autres espaces.
Être un conseiller de la Nouvelle-Calédonie, c’est faire vivre la démocratie, incarner le
pays avec ses tripes, c’est être au service des citoyens avec cœur et un minimum de
compassion. Et nous pouvons tous, avec nos sensibilités et nos différences, nous
retrouver autour de ces principes.

Cette année fut dense, et extrêmement difficile pour l’ensemble des calédoniens.
Faut-il rappeler la crise sanitaire du fait de ce coronavirus, la Covid_19 qui nous
impacte depuis 17 mois, avec toutes les conséquences sur le plan économique et
social, creusant encore plus les inégalités sociales. Cette crise nous rappelle tous les
jours les limites de notre insularité et nous oblige à repenser nos interdépendances et
à imaginer des voies nouvelles. Cette crise invite chacun de nous à revisiter nos
relations avec la nature avec beaucoup d’humilité et de discipline si nous voulons
trouver les voies et les moyens tout simplement survivre dans un environnement global
abimé par l’action de l’homme.
Faut-il évoquer les conflits liés à la cession de l’usine du Sud, qui ont fait rejaillir des
relents d’une période meurtrie de notre passé ? Cette crise sociale a miné le moral
des citoyens calédoniens, et a encore aggravé la crise de confiance envers leurs
représentants politiques. Mais, il faut le reconnaitre cela a permis au pays de sauver
des milliers d’emploi, de sortir de l’économie de comptoir et de se doter d’un nouveau
modèle économique en valorisant au mieux sa ressource minière. Cet évènement a
conduit le congrès à endosser le rôle de médiateur, pour faciliter les discussions entre
les opposants sur ce dossier, afin de maintenir la cohésion sociale et la paix.
Sur un plan institutionnel, la non-adoption du budget de la Nouvelle-Calédonie dans
les délais, par notre assemblée et la démission du 16ème gouvernement nous ont aussi
discrédité auprès de nos concitoyens. Il aura fallu cinq longs mois pour mettre en place
un gouvernement de plein exercice, et cela nous devrons l’assumer avec
détermination, par le travail, l’innovation et les réformes.

Ces évènements, que je viens d’’énoncer, c’était du jamais vu ou presque, il nous faut
donc nous atteler à la tâche, pour qu’en lien avec le gouvernement, le congrès ait un
rôle dynamique, constamment en mouvement et non un rôle statique.
C’est le rôle d’un président d’y veiller et de mettre en musique des actions concrètes
dans ce sens. Il ne doit pas se contenter de distribuer la parole dans l’hémicycle,
comme le disait une personnalité récemment.
Non ! un président du congrès n’a pas que cette fonction, il n’est pas à ce siège en
attendant mieux. Il est élu à ce poste pour porter l’institution au cœur de la démocratie
calédonienne, pour la positionner au rang de première institution du Pays, afin de
reconstruire ou renforcer le lien de proximité avec le citoyen en vue de restaurer la
confiance et rebâtir un pays quelque peu miné dans sa cohésion.
Il doit faire en sorte que dans un double mouvement de catabase et d’anabase, l’esprit
de cette institution effectue en permanence cette liaison dynamique de descente vers
les citoyens et d’ascension vers le haut pour porter les aspirations profondes du peuple
calédonien.
Et à ce niveau-là, le président se doit de faire en sorte d’améliorer la fabrique de la loi,
renforcer la mission de contrôle du gouvernement, poursuivre la modernisation de
l’institution et préparer l’avenir institutionnel, autant de chantiers auxquels s’y atteler
collectivement
Pendant mes précédentes mandatures et plus particulièrement depuis 2019, j’ai ainsi
souhaité que notre parlement évolue et qu’il se développe ; qu’il soit plus autonome
tout en restant ancré dans l’indispensable dialogue interinstitutionnel avec le
gouvernement, le Sénat coutumier, les autorités coutumières, le CESE et les
communes.
Ce chemin sera poursuivi en tenant compte du retour de l’expérience réussie de
concertation entre les institutions et de gestion efficace de la crise sanitaire en 2020-
2021 à laquelle le congrès a contribué. Le congrès, grâce aux efforts de ses élus et de
l’administration, a continué à fonctionner malgré la crise sanitaire, à adopter des textes
sans aucune interruption du débat démocratique ; il a continué à jouer pleinement son
rôle alors que dans plusieurs pays du monde, les exécutifs ont pris le dessus allant
même pour quelques cas mettre en sourdine ou en parenthèse les parlements.

Les activités internationales du congrès auxquelles il convient d’attacher une attention


particulière apportent beaucoup, depuis toujours, à l’institution et à ses élus. La
coopération interparlementaire doit se développer avec l’Assemblée nationale et le
Sénat français mais aussi avec les parlements des pays voisins de la région, de Fidji,
du Vanuatu, d’Australie, de Nouvelle-Zélande, jusqu’aux pays et région d’Europe tels
que la Belgique, la Catalogne ou la Corse. Cela permet de partager de bonnes
pratiques mais aussi d’associer nos élus calédoniens aux discussions internationales
de l’Union interparlementaire, auxquelles le congrès est invité, ou de l’Assemblée
Parlementaire de la Francophonie (APF) dont le congrès est membre de plein droit
depuis 1998 ; et ceci y compris en période de crise sanitaire planétaire grâce aux outils
numériques dont nous disposons.
A l’issue du 3ième référendum, et dès le 13 décembre 2021, comme il avait été décidé
à Paris en juin dernier, vont s’ouvrir les discussions sur l’avenir institutionnel de la
Nouvelle Calédonie sur une période transitoire de 18 mois avant l’organisation du
référendum de projet en juin 2023. Les sujets de discussion sont nombreux et ont été
évoqués dans la déclaration du ministre des Outre-mer Sébastien LECORNU le 2 juin
dernier à Paris, puis complétés à partir du document de l’Etat retraçant les
conséquences du « oui » et du « non ».
Le Congrès en tant que tel n’a pratiquement pas été évoqué lors des discussions de
1998, nous avions tous les yeux rivés sur le gouvernement, dernier né du mille-feuille
institutionnel calédonien. Il conviendra donc de débattre de son développement et de
son avenir, dans les mois qui viennent.
Le maintien et le renforcement d’une assemblée parlementaire en Nouvelle-Calédonie
est plus que nécessaire, c’est indispensable en tant que gage de démocratie
permettant le juste équilibre entre l’exécutif et le législatif.
C’est la raison pour laquelle début 2020, un projet d’évaluation de l’institution a été mis
en place par une Commission Internationale d’Experts Indépendants (CIEI), de très
haut niveau, guidé par un ancien premier ministre et constituée d’anciens ministres et
parlementaires, universitaires et d’un ancien Vice-Secrétaire Général des Nations
Unies. Les travaux de cette Commission ont eu lieu dernièrement, en raison de la crise
sanitaire, par visioconférence mais ils ont permis d’identifier 4 axes sur lesquels les
élus de notre assemblée pourraient poursuivre la réflexion, le fonctionnement de
l’institution et son optimisation, le développement des relations avec les citoyens et
leur association via des formes appropriées de démocratie participative, le
renforcement de l’autonomie de l’institution et les modalités de contrôle de l’exécutif.
Il serait ainsi utile et nécessaire qu’un groupe de travail ad hoc ou une mission de
réflexion et de perspective sur l’avenir du congrès puisse se constituer au sein de notre
institution et devenir l’interlocuteur privilégié du groupe d’experts internationaux avant
la remise du rapport final.

Pour conclure, je m’engage à assumer pleinement mes responsabilités en


sanctuarisant notre institution qui ne peut être instrumentalisée en permanence et plus
particulièrement en cette période particulière précédant la 3 ième consultation du 12
décembre prochain.
Je considère que la campagne référendaire doit se passer à l’extérieur de l’hémicycle
et je ferai en sorte que les débats internes puissent conserver la sérénité nécessaire
au cours de cette période de 4 mois.
Je veillerai que nos débats soient emprunts de respect mutuel et de sagesse à la
hauteur des responsabilités qui sont les nôtres face à la population calédonienne et
aux enjeux pays.
Toutes les sensibilités politiques seront respectées afin de permettre au congrès
d’assurer son rôle institutionnel au cœur de la démocratie calédonienne.

Je vous remercie

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