Synthese Carso
Synthese Carso
Synthese Carso
11 mars 2010
Lille La faim justifie les moyens ! 11 mars 2010
Sommaire
Ateliers :
Atelier 1 - La faim : l’exemple de l’Afrique ........................................................................... 7
Atelier 2 - Comment nourrir 9 milliards d’habitants en 2050 ?.............................................. 9
Atelier 3 - La faim en France ................................................................................................ 11
Atelier 4 : Alimentation et Ethique : Existe-t-il une éthique ? .............................................. 14
Atelier 5 : Eau et assainissement : un enjeu majeur dans la lutte contre la faim................. 17
Atelier 6 : La malnutrition .................................................................................................... 20
Le concours .................................................................................................................................. 25
Le mot du Président
Denis Metzger
Président
Les organisateurs
L’Ecole des Mines de Douai a été créée il y a plus d’un siècle et elle forme
chaque année près de 200 ingénieurs généralistes. Son engagement constant
auprès de l’industrie et des entreprises, tant en matière de formation que de
recherche, lui a permis de développer sa notoriété pour la placer aujourd’hui
dans le peloton de tête des Grandes Ecoles françaises.
L’Ecole fait partie de la CRGE (Conférence Régionale des Grandes Ecoles) et du GEM (Groupe
des Ecoles des Mines), aux côtés de 6 écoles en France dont l’Ecole des Mines de Paris.
En 2007, l’Ecole a rejoint l’association Alliances, dont l’objectif est d’accompagner les
entreprises de la région Nord-Pas-de-Calais (telles que La Redoute, Auchan...) afin qu’elles
améliorent leurs performances en respectant l’homme et l’environnement.
En 2004, un groupe d’élèves de l’école des Mines de Douai a pris l’initiative d’organiser le
premier « Carrefour de la Solidarité Etudiante », afin de promouvoir l’engagement des étudiants dans
l’humanitaire et le social. Cet évènement a connu un tel succès qu’il a été renouvelé à deux reprises,
réunissant des personnalités telles que SŒUR EMMANUELLE, Bernard KOUCHNER, Philippe RYFMAN
ou encore Jacques HINTZY.
Par le biais de ce 4ème Carrefour, nous désirions favoriser la création de liens entre des
associations et des étudiants de la région Nord-Pas-de-Calais en organisant un forum ; mais également
confronter les étudiants, lors des ateliers, aux problèmes que peuvent rencontrer des associations à but
humanitaire. Enfin une conférence-débat sur la faim dans le monde est venue clore cette journée.
Rétrospective sur la réussite des trois derniers carrefours, animés par Bernard de la
VILLARDIERE :
Résumé de la journée
Six ateliers-débat ont été animés par des spécialistes des sujets proposés. Les
étudiants ont pris part à une réflexion sur divers thèmes tels que « La
malnutrition en France », « L’assainissement et la faim » ou encore
« Comment nourrir 9 milliards d’habitants en 2050».
L’Afrique compte un milliard d'habitants, dont 260 millions souffrent de la faim. Ce sont en général des pays à
forte natalité, où le problème ne fait que s'aggraver. En outre, les crises successives ont multiplié le prix des
matières premières par trois et le taux de chômage est très important. Enfin, on estime que 40% de la part du PIB
est donné par des migrants vivant dans les pays riches.
Quelles sont les véritables raisons de la faim en Afrique ?
Quelles sont les solutions pour résoudre ce problème grandissant ?
Quelles sont les difficultés de mise en place de ces solutions ?
Intervenants :
Béatrice BOUQUET, Présidente de l’association Loos N’Gourma
Pascal CODRON, Directeur de l’ISA
Christophe WAGNER, Chargé de programme d’Elevage sans frontières
Pauline CASALEGNO, Coordonatrice de l’antenne GRDR Nord Pas-de-Calais.
Modérateur :
Charles BASSIL, Elève-ingénieur des Mines de Douai
Rapporteur :
Jean-Luc WOJKIEWICZ, Enseignant-chercheur à l’Ecole des Mines de Douai
Ecoles participantes :
Arts et Métiers ParisTech, Ecole des Mines de Douai, ESJ, IESEG, ISA, Polytech’Lille, Université Lille 1 & 2,
Université d’Artois
Pauline Casalegno explique l’importance de la formation au développement rural des populations locales.
Elle aborde également les enjeux sociaux et fonciers en évoquant la répartition des terres et les conflits qui en
découlent.
Pascal Codron va dans le même sens en mettant en avant la formation des habitants locaux. Ils peuvent
ensuite à leur tour transmettre ce savoir, pour acquérir leur autonomie. Il parle de ses actions au Congo, dont la
production de pommes de terre, l’élevage d’animaux et le maintien de l’agriculture pour alimenter des villes en
pleine expansion.
Christophe Wagner présente l’association Elevages sans frontières, qui aide des familles rurales dans les pays
en développement à acquérir une autonomie durable, alimentaire et économique, grâce aux microcrédits. Cette
association aide des projets gérés par des habitants locaux, qui connaissent bien le terrain, notamment au
Sénégal, au Maroc, au Togo ou au Bénin.
Pourquoi les Africains, qui ont tant de ressources naturelles, n’arrivent-ils pas à se nourrir ?
Cela s’explique par une mauvaise exploitation et répartition des richesses naturelles en Afrique.
L’exploitation minière, par exemple, est essentiellement menée par des industries étrangères. De plus, les routes
et les voies de chemin de fer ont été conçues par les européens pour exporter les richesses exploitées de l’Afrique
à l’Europe, ainsi les pays africains n’ont pas de réelles infrastructures pour un commerce intérieur. L’exploitation
minière profite très peu à l’ensemble de la population. Enfin, les matières premières sont vendues à des coûts
très bas sur le marché mondial. Des pays africains vont même jusqu’à se faire concurrence sur les matières
premières qu’ils produisent, ce qui accentue la baisse des prix.
En conclusion, la situation est très préoccupante. Les pays du nord pourraient aider au développement de
l’agriculture africaine. Certains pays d'Afrique sont riches (uranium, nickel, diamants...), cette richesse doit
profiter aux africains. Il y a, de plus, un sérieux problème de formation des élites et des élus qui ne sont pas à
l’écoute de leur population. Enfin, la gestion de l'économie globale et locale ainsi que l'organisation des échanges
interafricains doivent être réformées pour que les pays d’Afrique améliorent leur situation économique et sociale.
Intervenants :
Frédéric BAUDOUIN, Adjoint du chef de service Risques à la DREAL Nord-Pas-de-Calais et auteur de « La
faim dans le monde : Crises d’aujourd’hui et défis de demain »
Jean-Paul CHARVET, Professeur émérite à l'Université de Paris Ouest – Nanterre, auteur de
« L'alimentation dans le monde : Mieux nourrir la planète »
Jean-Louis RASTOIN Ingénieur agronome, Professeur à Montpellier SupAgro, auteur de « Nourrir 9
milliards d’homme en 2050 »
Philippe RYFMAN, Professeur et Chercheur associé au Département de Science Politique et au Centre
Européen de Sociologie et Science Politique (CESSP-Sorbonne), Université Paris I, Panthéon, Sorbonne.
Auteur de « Une histoire de l’humanitaire » et « Les ONG »
Faustine WAWAK, Directrice de Cap Solidarité
Ecoles participantes : CNAM Lille, Ecole Centrale de Lille, Ecole des Mines de Douai, EDHEC, HEI, IEP Lille, IESEG,
ISA, Polytech’Lille
Antoine de Ravignan commence par donner quelques chiffres et ordres de grandeur : après 2050, la
population mondiale se stabilisera autour de 9
milliards d’habitants. Si le monde entier adoptait
une alimentation à l’indienne (plutôt végétarienne)
nous pourrions être 10 milliards à nous nourrir,
tandis qu’avec le modèle américain nous serions
seulement 2,5 milliards et 5 milliards avec le modèle
italien. A l’heure actuelle, 40% des terres sont
cultivées, mais l’urbanisation, les forêts et la mauvaise qualité de certaines terres réduisent les 60% d’espaces
cultivables restant.
Après un rapide tour de table afin que chacun se présente, les intervenants prennent la parole.
Selon Frédéric Baudoin, 150 millions de personnes vivent en dessous du nombre de calories nécessaires
par jour. Pourtant les besoins humains sont de 2200 kcal/j/personne et la production mondiale est de
2800kcal/j/personne selon la FAO. Il y a donc un problème de développement économique et d’accès à la
nourriture, produire plus ne suffit pas. Il faudrait quelque chose d’équivalent au plan Marshall. La réduction du
gaspillage n’est pas non plus une solution viable à long terme pour réduire la faim dans le monde (40% de la
nourriture américaine part à la poubelle, 30% en France).
Il faut développer l’agriculture et les infrastructures là où il y a des problèmes. Jean-Louis Rastoin partage
partiellement cette analyse et rappelle le principe du droit à l’alimentation des Nations Unies : tout citoyen a le
droit de se nourrir en qualité et quantité suffisante selon ses coutumes.
Pour Jean-Paul Charvet, une des mauvaises solutions est la libéralisation des marchés comme le fait
l’OMC ; en effet pour qu’un marché fonctionne il faut que les clients soient solvables (contre exemple : Haïti). Il
avance également que l’agriculture biologique est incapable de nourrir tout le monde.
Selon Philippe Ryfman, les liaisons politiques sont une cause forte du
problème de la faim dans le monde. L’urbanisation importante exerce une pression
sur les politiques. Il y a également un problème de gouvernance mondiale : la FAO
fonctionne mal car elle ne permet pas d’assurer la sécurité alimentaire mondiale. En
prenant l’exemple de la France on se rend compte qu’il y a un problème de
coordination administrative: les ministères de la santé, agriculture et développement durable sont gérés par 3
personnes différentes.
Selon Faustine Wawak, les émeutes de la faim sont un problème social et politique, les hommes n’avaient
pas les moyens d’acheter et d’accéder à de la nourriture. Les pays du Nord subventionnent leurs productions, qui
se retrouvent moins chères que les productions du Sud. Une des solutions pour les pays du Sud serait de favoriser
prioritairement un développement local de leur production. Le local doit se battre contre le global. Jean-Louis
Rastoin affirme que le capitalisme financier gère notre alimentation et qu’il nous faut une gouvernance agricole et
non financière. Un exemple : de nombreux fonds d’investissement achètent ou louent des terres cultivables dans
les pays de l’Est qui ont ainsi dépassé les Etats-Unis dans l’exportation de blé.
Si on ne change rien aujourd’hui nous allons vers une dégradation encore plus importante de
l’environnement, 500 000 agriculteurs n’auront plus de travail et la nourriture produite sera de plus en plus de
mauvaise qualité.
Jean-Louis Rastoin souligne également qu’au Nord on ne fait plus attention à son alimentation (qui
représente actuellement 10% du budget alors que c’était 40% après-guerre). Il faut une éducation et une
formation à l’alimentation.
Il faut 2 milliards d’hectares de terres pour nourrir tout le monde soit 500 000 exploitations. Il faudrait 30
milliards de dollars pour moderniser l’agriculture du sud et pour former les paysans. C’est une somme négligeable
par rapport au budget d’armement annuel dans le monde estimé à 900 milliards de dollars. Il faut une aide
durable pour les pays en développement, les actes de solidarité ne sont que des solutions à court terme. Une des
solutions envisagées est le scénario Agrimonde 1. C’est un scénario possible d'agriculture et d'alimentation
durables qui propose notamment l’effondrement du marché de la viande : diviser par 3 la consommation de
viande au Nord, diviser par 2 en Chine et au Brésil. C’est très peu probable. Ce scénario est parti du constat qu’il
faut 10cal de céréales pour produire 1cal de viande. 70% de la production bovine en France provient des
pâturages. Réduire la consommation de viande permettrait de libérer des terres pour les cultures.
Les OGM sont une solution très controversée en Europe où la
priorité est donnée au principe de précaution. Il y a actuellement dans le
monde 130 millions d’hectares de terres cultivées d’OGM. Ils permettent
de réduire l’utilisation d’engrais (9% de moins que pour l’agriculture
« classique ») et la consommation d’eau. Il n’y a pour l’instant aucun
problème avéré sur la santé humaine (les Etats-Unis consomment des OGM
depuis 20 ans). Les principales craintes sont environnementales : il y a le
problème de la dissémination et le risque du franchissement des barrières des espèces. Dans les petits pays les
OGM tuent la biodiversité. Les OGM sont donc craints au niveau du consommateur car il y a des problèmes de
transparence de l’information et de monopole (exemple de Monsanto) mais au niveau de l’agriculture ils sont
reconnus comme fiables et rentables.
Intervenants :
Véronique COLUCCI, Administratrice aux Restos du Cœur
Jean-Louis CALLENS, Directeur général de la Fédération Nord du Secours Populaire
Didier PIARD, Directeur de l’Action Sociale à la Croix Rouge Française
Modérateur : Benoit THIRION, Ancien élève de l’Ecole des Mines de Douai, Cadre à la direction nationale du FRET
de la SNCF.
Représentant de la CRGE : Etienne CRAYE, Président de la Conférence Régionale des Grandes Ecoles, Directeur de
l’Ecole Centrale de Lille
Ecoles participantes : CNAM Lille, CUEEP Lille 1, Ecole des Mines de Douai, EDHEC, ESC Lille, IAE, Université
Catholique de Lille, Université Lille 2, Université Lille 3.
Après un rapide tour de table afin que chacun se présente, les intervenants prennent la parole pour
présenter les associations au sein desquelles ils travaillent. Suite à cela, le débat s’instaure entre étudiants et
intervenants.
Madame Colucci insiste sur le fait que nous sommes face à une situation grave qui ne s’arrange pas. 322 000
personnes profitant de l’aide des Restos sont sans emploi, la crise du logement et l’augmentation du coût de la
vie ont des conséquences désastreuses. Les personnes recherchent donc de l’aide matérielle mais elles ont aussi
un besoin vital de lien social, qu’elle nomme justement « l’appétit vital ».
Le tabou étant levé, est-ce que les jeunes osent maintenant recourir aux aides ?
Monsieur Callens répond que ceux qui n’ont jamais franchi le pas viennent effectivement avec une grande
inquiétude. En effet, on peut se retrouver rapidement dans cette situation alors que rien ne la laissait présager.
Après le début de la crise financière par exemple, 70 000 emplois ont été supprimés dans le Nord, parmi ces
familles où les 2 conjoints travaillaient, beaucoup avaient des enfants étudiants. Le temps de faire une demande
de bourse et de valider le changement de situation nécessite un certain délai et c’est précisément durant ce délai
où les familles peuvent se retrouver dans des situations très difficiles.
Monsieur Piard souligne aussi que beaucoup des jeunes bénéficiaires sont des jeunes en rupture sociale
et familiale que ce soit à cause de conflits ou parce qu’ils sont migrants. De même Madame Colucci précise qu’il
existe une spirale infernale : fils, petits fils… Ces jeunes sont englués dans la pauvreté depuis plusieurs
générations, ont vu leur père, grand père bénéficier des aides et ce cycle se reproduit indéniablement…
Tous s’accordent à dire que presque un français sur 6 est touché et que cela dénote bien un problème
dans un pays qu’on dit « riche ». De plus en plus se posent la question « Quel est l’espoir de la vie ? »
Tous précisent bien que ces barrières ne sont pas mises en place par plaisir, et que l’un des pires rôles est
celui de l’inscripteur, car parfois des personnes peuvent-être refusées à quelques euros près. Ces barrières sont
cependant nécessaires bien que laissées souples dans certains cas.
Pourquoi y a-t-il autant d’argent alloué à des choses beaucoup moins importantes que nourrir les
hommes ?
Monsieur Piard signale que les questions de solidarité sont importantes mais que ce sont des thèmes et des
problématiques peu portées politiquement, des choses qui ne sont pas investies. Madame Colucci rajoute que le
quinquennat laisse peu de marge. De plus, paradoxalement, certaines personnes font des dons mais ne voudront
jamais entendre parler des questions de solidarité et seront totalement réticentes à l’installation d’une antenne
des Restos près de chez eux.
N’y a-t-il pas un paradoxe entre le fait que les français soient généreux et la faiblesse venant du manque
de lien social ?
Les associations telles que les Restos du Cœur, la Croix Rouge Française ou le Secours Populaire créent du
lien social. Monsieur Piard nuance en ajoutant que parfois elles contribuent aussi à faire que les gens démunis
fassent partie du paysage… Madame Colucci présente un livre réalisé par Thierry Marx, « Les recettes des Restos,
65 plats pour tous les jours », destinés à réapprendre aux personnes à se nourrir avec des recettes simples et
abordables. Ce livre est également accessible aux illettrés. Le but de ce livre est de permettre le lien social par la
cuisine, de réapprendre l’équilibre alimentaire même quand on a peu…
Monsieur Callens affirme qu’il est formidable que des jeunes viennent pour s’investir, notamment des
étudiants des grandes écoles du Nord, en organisant de nombreux petits projets de solidarité (financement des
bus pour les maraudes, etc.). Ces jeunes en sont ensuite transformés.
Les 3 intervenants témoignent avec force et passion et délivrent un message très riche. Madame Colucci
conclue en partageant son sentiment : ce ne sont jamais que quelques heures de données, et elles ne pèsent pas.
Même si parfois on peut ressentir le blues ou même la colère, on retire beaucoup de satisfaction à voir les gens
s’en sortir, et un immense plaisir.
Intervenants :
• Dominique BOUNIE, Maître de conférences Département Ingénierie Agroalimentaire de Polytech’Lille,
travaux en collaboration avec le PAM.
• Laurent CHEREAU, Responsable Administration et Communication à la SIDI (Solidarité Internationale
pour le Développement et l’Investissement)
• Denis BOLLENGIER, Vice Président de la FDSEA (Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants
Agricoles) et Membre du bureau de la Chambre d’Agriculture.
• Christian TRANNOY, Directeur de l’Agence Crédit Coopératif d’Arras
Ecoles participantes : CNAM, Edhec Business School, Ecole Centrale de Lille, Ecole des Mines de Douai, IEP de
Lille, IESEG, ESPEME, ISA, Université Lille 1, Université Lille 2.
Après une présentation rapide du thème de l’atelier et de ses problématiques, chacun des participants est
invité à se présenter, et à expliquer les raisons qui l’ont poussé à venir participer à cet atelier.
Les étudiants présents ont montré une motivation très diverse, de part leurs profils différents. On peut citer
la réalisation d’une thèse sur la gouvernance mondiale de l’agriculture, des projets étudiants solidaires ou encore
la simple envie de s’informer par soi-même et de pouvoir comparer à l’information diffusée par les médias.
Christian TRANNOY participe justement au développement de l’épargne solidaire en France. Via l’agence du
Crédit Coopératif d’Arras qu’il dirige, il collecte des fonds destinés à être utilisés pour financer des projets de ses
partenaires solidaires.
Dominique BOUNIE, maître de conférences, se présente plus comme un technologue et un formateur.
Convaincu qu’il y a de la place pour l’éthique dans les formations, notamment dans la recherche de nouvelles
solutions économiques. Il souligne le piège de l’aide alimentaire qui ne résout aucun problème mais traite juste
les symptômes.
Les denrées alimentaires répondent d’abord à des besoins de base qui sont partagés par l’ensemble de la
planète. C’est pour cette raison que ce marché est très important, et qu’il est un enjeu stratégique majeur pour
les Etats et certaines entreprises.
M. Bollengier intervient sur un exemple : la PAC en Europe, et plus globalement les subventions agricoles
dans les pays riches. Celles-ci permettent en effet de créer la sécurité alimentaire. Néanmoins, cela induit certains
effets pervers. On peut noter que, pour le Nord-Pas-de-Calais, la somme des subventions est égale à la somme
des revenus des agriculteurs. Autrement dit, sans subvention, impossible de maintenir son activité.
Un exemple de la disproportion est que l’agriculture représente 40% du budget de l’UE, mais uniquement
3% du PIB des Vingt-Sept. M. Trannoy ajoute une différence majeure : il ne faut pas confondre les subventions
nécessaires à l’autosuffisance, et celles au-delà qui conduisent à des excédents et donc à l’exportation.
Actuellement, les prix des matières premières sont fixés par la loi de « Répondre à la faim,
l’offre et de la demande. La bourse de Chicago, spécialisée dans cette
matière, est le théâtre de nombreuses opérations spéculatives visant à faire ce n’est pas que
un maximum de profit. Une solution envisageable serait de faire contrôler le combattre la faim. »
niveau des prix par un organisme international, afin d’éviter les abus.
Le critère de la volatilité des prix reste néanmoins très dépendant de l’état des récoltes au niveau mondial.
Les pays du Nord possèdent des réserves stratégiques pouvant être utilisées en cas de hausse des prix, au
contraire des pays du Sud ne possédant pas d’agriculture développée. Ils sont alors obligés de s’endetter afin de
répondre à leurs besoins.
Au final, l’impact des biocarburants sur les prix n’est que très peu élevé, car ils ne représentent qu’une infime
part de la demande mondiale, du moins pour l’instant.
La consommation de produits locaux n’a jamais été développée, que ce soit au Nord ou au Sud. Tous les
achats alimentaires passent par de nombreux intermédiaires pour aboutir dans les rayons de la Distribution, en
ayant énormément augmenté au passage. On retrouve ceci dans les forts profits réalisés par la distribution. Le
développement des achats de producteurs à particuliers permettrait sûrement une meilleure rationalisation des
prix au détail.
Le développement du commerce équitable est une bonne chose : il apporte l’idée de développement
durable, apporte une source de profit à la collectivité… Mais il reste très en marge du commerce réel, et n’est pas
une démarche réaliste à long terme. Seul un basculement complet du commerce des aliments vers le « Fair
Trade » serait vraiment viable.
La présence de nombreux intermédiaires dans les marchés occidentaux a un très fort impact. L’idéal serait de
mettre en place de plus en plus des ventes locales, réduisant ainsi drastiquement le nombre d’intermédiaires.
Ceci apporterait une garantie au producteur et au consommateur. Une sorte de commerce équitable Nord-Nord.
La micro-finance a été développée dans l’objectif d’aider les personnes ne disposant pas des institutions
nécessaires à leur survie financière. Les banquiers trouvent aussi leur compte dans ces micro-prêts grâce à la
garantie de caution solidaire. Pourtant, ce modèle n’est que peu satisfaisant à long terme car les taux sont
généralement bas, ce qui ne joue pas en la faveur de ces prêts.
Cette méthode est surtout pratiquée en Asie, il est très difficile de la mettre en place en Afrique.
Cette solution doit être couplée à d’autres, car c’est uniquement l’ensemble qui permettra l’établissement
d’un cercle vertueux. On peut citer le développement par regroupement, la création d’infrastructures permettant
l’export, le développement ou l’apport de technologies, la fin des instabilités politiques, etc.
De réelles améliorations sont possibles, via l’affirmation de stratégies de développement claires et précises :
valorisation des ressources locales, stratégie de développement à long terme, émergence des projets durables…
Le levier clairement établit est celui du financement, qui permet de faire perdurer toutes les actions menées
et permettent ainsi un développement efficace. Ses effets sont difficilement mesurables, mais on s’aperçoit que
globalement les villages aidés voient leur activité augmenter.
Le commerce Equitable et la Finance solidaire via les épargnes solidaires permettent à la société civile un
certain pouvoir de choix du changement de l’éthique de l’économie.
Au final, ce problème reste globalement politique, car il dépend des choix et des valeurs que les pouvoirs
publics sont prêts à appliquer au niveau mondial afin de tendre vers une économie moralisée.
Atelier 5
Eau et assainissement : un enjeu majeur dans la lutte contre la faim
« Parmi tout ce que j’ai appris en tant que dirigeant politique, il y a le rôle central de l’eau dans les domaines
sociaux, politiques et économiques de notre pays, de ce continent et du monde »
(N. Mandela, Ouverture du Sommet Mondial pour le développement durable de Johannesburg, 28 Août 2002)
L’eau et la faim sont liées par de nombreux éléments plus ou moins directs : boisson, agriculture irriguée,
pêche, cuisine, hygiène, production d’électricité… Pourtant, environ 1,2 milliards d’hommes n’ont pas accès à
l’eau potable, c’est à dire qu’ils ne disposent pas de 25L/pers./jour et à moins de 200m du lieu d’habitation.
Le problème de l’eau sur notre planète n’est pas lié à la quantité globale disponible mais à son inégale répartition
géographique et sociale.
Comment lutter contre la faim en traitant le problème de l’eau ?
Quelles sont les méthodes et solutions que l’ont peut mettre en place aujourd’hui ?
Qui sont les acteurs influents au cœur de ces enjeux mondiaux ?
Quel va être le rôle de notre génération ?
Intervenants :
• Etienne BASHIZI, Retraité des Nations Unies et ancien représentant de l’UNICEF
• Christelle JACQUART, Chargée de mission eau et assainissement d’Action Contre la Faim, ancienne
employée de SAFEGE
• Hugues LACOQUELLE, Responsable client logistique et chargé de mission d’Action Contre la Faim
• Lionel ROBAUX, Directeur Général adjoint à l’Office International de l’Eau
• Jean VERGNES, Docteur Es-Sciences. Consultant UNESCO et MAE. Chargé du développement durable à
l'UISF et au RMEI.
Représentant de la CRGE : Eric DUMETZ, Directeur des Arts et Métiers ParisTech, centre de Lille
Ecoles participantes : CNAM Lille, HEI, IESEG, ISA, Ecole des Mines de Douai, ENSIAME, Polytech’Lille, Université
catholique de Lille
Comment résoudre le problème d’accès à l’eau potable sachant qu’il y a des zones sans nappes
phréatiques ?
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, les nappes phréatiques sont réparties dans le monde entier. Mais
elles ne sont pas forcément accessibles. La plus grosse nappe se trouve sous le Sahara, mais se situe entre 250 et
300m de profondeur, et les technologies permettant son exploitation sont très chères et donc inaccessibles pour
plusieurs pays. L’Algérie par exemple, relativement riche, peut y accéder, alors que ces voisins le Niger et le Mali
ne peuvent pas l’extraire. Cela pourrait bien provoquer un conflit. Au Bengladesh en revanche, on peut trouver
des nappes à 1m de profondeur, mais elles sont dons plus sensibles à la pollution. Il y a notamment des
problèmes de contamination des eaux à l’Arsenic. En France enfin, plusieurs nappes sont exploitées, mais
certaines connaissent des problèmes de pollution - en Bretagne et dans la région parisienne -.
Concernant les eaux transfrontalières, on peut par ailleurs citer le cas du Mexique qui dénonce la
surexploitation du Colorado par son voisin. Avec 10 grands barrages et d’importants canaux de dérivation, le
fleuve ne déverse qu’un mince filet d’eau à son embouchure.
Qui décide des lieux où l’assainissement doit être réalisé ? Qui le met en place ?
Cela dépend du contexte local. Il n’y a pas d’intervention unilatérale : la communauté et les acteurs ont tous
un rôle important à jouer. La demande directe des communautés ou des ONG est la plus efficace. Les plans
gouvernementaux sont plus délicats à gérer, car ceux-ci imposent un nombre de latrines posées dans tout le pays,
qui n’est pas nécessairement adapté aux besoins.
Il y a parfois un manque de coordination entre les ONG et les Nations Unies, ou entre les Nations Unies.
Comment gérer la présence de plusieurs ONG sur une même zone ? Que reste-t-il après le départ des
ONG ?
Les tâches sont réparties avec une certaine coordination par un interlocuteur des Nations-Unies. Après
identification des besoins, les programmes sont montés, et il faut rechercher des bailleurs de fond (validation ou
non), qui suivent l’évolution du projet. MSF est bailleur de fond privé donc plus autonome.
La démarche par programme est plus rentable que la démarche par projet, car elle permet de réduire les
coûts de la gestion du financement.
Le but des ONG est de transférer la connaissance pour que les populations soient autosuffisantes. Les
résultats sont variables et proportionnels à la qualité des intervenants. Quand les
communautés prennent le problème en main, le relais passe rapidement et
efficacement. Il est important de ne pas utiliser des machines trop
perfectionnées, et de former les populations locales afin qu’elles acquièrent leur
indépendance, et que les aides ne restent pas de l’assistanat.
Dans les cas d’urgence, seules des ONG stabilisées sont sollicitées. Des
stocks de première urgence sont positionnés près des aéroports (Kits d’urgence).
Quels sont les critères de recrutement des expatriés ? Peut-on intégrer une ONG pour un stage ?
Toutes les organisations ont des DRH qui favorisent par exemple les connaissances techniques et la capacité
d’intégration. Le recrutement se fait beaucoup sur le profil et la disponibilité puisque le besoin d’aller sur le
terrain à l’étranger peut arriver à tout moment. Il existe des formations aux métiers humanitaires comme
BioForce.
Il est possible d’intégrer une ONG pour stage, mais également le siège de l’UNESCO ou autre. Les étudiants
sont entièrement pris en charge, au même titre qu’un stage en entreprise. Il existe des missions de 2 semaines
(Volontaire de Solidarité Internationale) à 1 an. Les étudiants peuvent aider dans le domaine technique. En
revanche, la compréhension et l’adaptation aux valeurs locales est parfois plus difficile.
Après les études universitaires, il y a également la possibilité d’obtenir un financement du gouvernement
français. Dans le cadre des Volontaires des Nations-Unies ou des Volontaires du Progrès en France, le
gouvernement français propose un financement, ainsi qu’une indemnité de la part du pays d’accueil.
En conclusion, s’il fallait retenir quelques mots, voici le message principal de chaque intervenant :
Etienne Bashizi rappelle que l’UNICEF est très expérimenté, et implanté à Lille. Toute solidarité commence
par le comportement individuel (économies d’eau…). Il ne faut pas se limiter à l’urgence émotive de l’instant mais
il faut poursuivre et instaurer des aides durables.
Christelle Jacquart explique que les ONG sont l’émanation de la société civile qui porte des valeurs. Elles
veulent éviter d’être contrôlées car elles souhaitent garder leur liberté d’action. Son conseil : rester humble et
rester à l’écoute.
Jean Vergnes souligne que la solidarité, c’est aussi penser au développement durable et aux campus
durables.
Hugues Lacoquelle insiste sur le fait qu’il faut identifier les besoins des populations locales, identifier les
causes qui nécessitent d’intervenir, et ne pas foncer sans connaître ces informations.
Eric Dumetz va dans le même sens et précise qu’iil faut prendre contact avec des experts de terrain. Avant de
lancer des projets, il faut aller sur le terrain pour s’imprégner du contexte local et donner du sens à son projet.
Atelier 6 : La malnutrition
Plus d’un milliard de personnes et 1/3 des enfants de moins de 5 ans des pays en développement souffrent de
malnutrition. Des solutions sont connues, mais ne sont pas mises en place.
Comment pousser les États des pays en voie de développement à faire de la lutte contre la malnutrition
une priorité ?
Dans quelles mesures les organisations telles que l’OMC ou la FAO sont-elles impliquées et comment
peuvent-elles lutter contre la malnutrition ?
Comment soutenir efficacement les agriculteurs locaux afin qu’ils augmentent leur rendements et
deviennent compétitifs ?
Comment sont élaborées les pâtes nutritives, encore appelées Aliments Thérapeutiques Prêts à l’Emploi
(RUTF), et comment agissent-elles ?
Intervenants :
Erice DALLE, Dermatologue et Administrateur de l’association Virlanie
Paul DEROUBAIX, Président Fondateur du SOC International (Sciences Outils Culture)
Léonce DESPREZ, Député honoraire du Pas de Calais
Stéphane DOYON, Responsable de la campagne nutrition et chargé de mission MSF
Denis Metzger, Président d’Action Contre la Faim
Simone MONTAGNE, Secrétaire Générale de l’UNICEF Nord
Bertrand SALVIGNOL, Expert du PAM
Modérateur : Alexandre CASTEL, Ancien Élève de l’École des Mines de Douai, Étudiant en Master 2
développement durable à HEC.
Représentant de la CRGE : Marc BONPAIN, Directeur de la communication de l’Ecole des Mines de Douai
Écoles participantes : CNAM Lille, Ecole des Mines de Douai, ENSAIT, IESEG, ISA, Polytech’Lille, Université Lille 1,
Université Lille 2.
Définissons la malnutrition
Le modérateur donne tout d’abord la parole à Denis Metzger pour définir plus précisément ce qu’est la
malnutrition. Celui-ci la définit comme la faim moderne, qui arrive par la pauvreté.
Paul Deroubaix propose à son tour sa définition en la décomposant en trois termes : la sous-alimentation
chronique, la famine qui est une crise aigue et la malnutrition qui est le besoin de palier aux carences profondes.
Stéphane Doyon explique que la malnutrition est une mauvaise nutrition par carence ou excès. Par carence,
on parle de dénutrition. Il y en a différents types :
- la malnutrition aigue, calculée par un rapport poids-taille, lorsque le poids est inférieur de 20% à la taille.
On parle de malnutrition aigue sévère, si le poids est inférieur de 30% à la taille, avec l’apparition d’œdèmes. Elle
concerne 65 à 70 millions d’enfants ;
- la malnutrition aigue chronique avec un retard de
croissance sans déformation du corps concerne 200
millions d’enfants sur 700 millions ;
- la malnutrition invisible due à une carence de
micronutriments.
Pourquoi, alors que les causes ont été identifiées, les politiques ne trouvent pas de solutions concrètes ?
Léonce Desprez affirme que la question est évoquée depuis 40 ans dans les assemblées politiques mais qu’il
y a un problème de transfert des dépenses : il y a plus d'investissements dans l’armement que dans la nutrition.
Cela est dû, d'après lui, à l'absence de gouvernance mondiale et au manque de volonté populaire pour pousser les
politiques. Avec la Politique Agricole Commune (PAC), l'Europe évolue trop lentement car les pouvoirs nationaux
ne veulent pas déléguer leur pouvoir à l'Europe.
L’importance de l’éducation
Simone Montagne affirme qu'il est essentiel de former les filles à l'hygiène alimentaire, aux soins aux enfants
et remarque que celles ayant été à l'école sont plus réceptives. En effet, ce sont elles qui nourrissent, élèvent et
éduquent les enfants ; elles sont donc les premières à devoir être informées des dangers d'une mauvaise
nutrition. L'UNICEF aussi met en place différents moyens de lutte contre la malnutrition des enfants. Des centres
de santé itinérants permettent le dépistage de la malnutrition, la distribution de pâte nutritive et la vaccination
des enfants malnutris, qui sont plus vulnérables aux maladies infectieuses. Des usines de fabrication locale de
pâte nutritive à partir de produits locaux permettent d'embaucher de la main-d’œuvre et contribue au transfert
de savoir.
Conclusion
Stéphane Doyon confirme qu'il n'existe pas de solution magique mais bien plusieurs solutions qui doivent
être combinées. Il rappelle que ce ne sont pas les ONG qui élimineront la famine, mais que c'est aux
gouvernements, aux peuples d'agir. M. Desprez insiste sur l'importance de l'implication des étudiants qui peuvent
et doivent influencer l'avenir. Denis Metzger conclut en rappelant que la démographie est la conséquence de la
pauvreté et non la cause et qu'il faut faire attention à ne pas se préoccuper plus des plantes que des hommes.
24 stands étaient présents au forum, qui s’est tenu tout l’après-midi au Nouveau Siècle, mélangeant étudiants,
bénévoles et professionnels.
• CCFD
Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement
www.ccfd.asso.fr
• CRDTM
Centre régionale de documentation et d'information pour le développement et la solidarité internationale
http://crdtm.canalblog.com/
• La Croix-Rouge
www.croix-rouge.fr
• Essor
ONG qui travaille à la réalisation de projets de développement en
pays lusophones et francophones
www.cyo.com/essor
• Étudiants et Développement
Réseau d’associations étudiantes de solidarité internationale
www.etudiantsetdeveloppement.org
• Furet du Nord
www.furet.com
• GRDR
Groupe de recherche et de réalisations pour le développement rural
www.grdr.org
• La Guilde
• Lions club
www.lions-france.org
• Loos N’Gourma
http://www.fondation-nicolas-hulot.org/engagement/soutien-projets/actions-internationales/loos-n-gourma-
avapas
• SCI
Association proposant des actions de volontariat de court terme et long terme
www.sci-france.org
• UNICEF
Agence de l'ONU ayant pour vocation d'assurer à chaque enfant santé, éducation, égalité et protection
www.unicef.fr
• Virlanie
Fondation basée aux Philippines ayant pour vocation de protéger et de réinsérer les enfants des rues.
www.virlanie.org
• World Forum
Colloque annuel pour le développement d’une gestion des entreprises responsable
www.worldforum-lille.org
Concours
En parallèle du 4ème Carrefour de la Solidarité Étudiante a été organisé un concours ouvert à tous les
Étudiants de France (en Écoles ou Universités). Il avait pour thème « Nourrir la planète : un défi humanitaire,
pourquoi pas le vôtre ? », avec un premier prix de 2 000 € pour aider à la réalisation d’un projet innovant, grâce à
notre entreprise partenaire du concours : SODEXO
Les projets ont été jugés sur plusieurs critères avec un accent particulier mis sur la cohérence avec le
thème et le caractère innovant du projet.
Une présélection, effectuée par trois membres du groupe projet ; Benoit Thirion (Organisateur du 2ème
Carrefour) et Marc Bonpain (Responsable de la communication de l’École des Mines de Douai), a désigné
les trois meilleurs projets « finalistes » le 22 février 2010 :
Les trois dossiers finalistes ont ensuite été transmis au jury final, constitué de :
Chacun nous a ensuite renvoyé leur évaluation que nous avons transmise à M. Bellon, Président du Jury.
Celui-ci a alors annoncé le vainqueur en ouverture de conférence : l’association EPH de l’ESSEC. Leur projet
consiste à mettre en place des champs scolaires ou des jardins à proximité d’écoles au Burkina Faso, afin de
nourrir ou de fournir un complément alimentaire aux élèves, avec des légumes ou des céréales.
Les 3 finalistes ont eu la possibilité d’exposer leur travail au forum des associations, afin de donner un
côté plus visuel de leur projet, mais également de montrer comment agir concrètement aux étudiants. Au début
de la conférence, le vainqueur s’est vu remettre un chèque de 2000€ de la part de SODEXO pour soutenir son
projet.
Organisé pour la deuxième fois en 2010, le concours a de nouveau connu un grand succès qui laisse
espérer une nouvelle édition en 2012.
Animateur :
Christian TROUBE, Rédacteur en
chef de l’hebdomadaire « La Vie »
et Vice-président d’Action Contre
la Faim
Intervenants :
Marie-Pierre ALLIE, Présidente de Médecins Sans Frontières
Pierre BELLON, Président-Fondateur de Sodexo
Olivier BERTHE, Président des Restos du Cœur
Emmanuel MARCHANT, Directeur Général Délégué de Danone Communities
Jean-François MATTEI, Président de la Croix-Rouge Française
Edgard PISANI, Ancien Ministre de l’Agriculture
Patrick POIVRE D’ARVOR, Ambassadeur de l’UNICEF
Bertrand SALVIGNOL, Expert du Programme Alimentaire Mondial (PAM)
A la suite de la remise du prix aux gagnants du concours, Patrick Poivre d’Arvor a pris la parole pour rendre
un hommage à Sœur Emmanuelle, personnage emblématique de la Solidarité et marraine du premier Carrefour de
la Solidarité en 2004. Il raconte quelques moments partagés avec Sœur Emmanuelle, dont on oubliera jamais la
générosité et la simplicité : « L’humanitaire c’est d’entrer en relation avec l’humain, et la première relation avec
l’autre, c’est de le regarder et de lui sourire, après vas-y ! »
Christian Troubé a ensuite ouvert le débat avec une première question à l’intention d’Olivier Berthe :
on constate une forte augmentation du nombre de repas servis par jour par les Resto du Cœur, or cette solution,
proposée par Coluche, ne devait être qu’un soutient provisoire... Qu’en est t-il ?
Y a-t-il un épuisement des bénévoles ? Et qu’en est-il des rapports avec la politique, l’Etat ?
Cette situation est compliquée. Une étude de la Cours des Comptes montre que quand les fonds engagés
par l’Etat sont de 1 cela crée un effet de 5, il y a un effet levier. Cela couterait 5 fois plus cher si l’Etat organisait
tout. Mais si l’Etat est garant de l’alimentation, ce problème est l’affaire de tous. Il faut construire une chaine de
solidarité. L’Europe doit donner aux associations le cadre et les moyens d’agir.
Les pauvres forment le plus grand pays de l’Europe : ils sont aujourd’hui 80 millions.
PPDA, les médias jouent-ils le bon rôle en ce moment ? Ce rôle d’alerte ? De recoudre ce lien social ?
Les médias jouent un rôle de médiateurs, et diffusent souvent de tels sujets. Par exemple, pour Coluche,
tout avait commencé sur Europe 1. Mais ils peuvent encore en faire plus. Par exemple lors des émeutes de la
faim, nous avions lancé une édition spéciale et ce journal a été très regardé ! Cela montre que les gens se sentent
solidaires, ils ne sont pas juste amateurs de frivolités. Lors du tsunami en 2005 il a été facile de toucher les gens
car il y avait des victimes occidentales et cela est survenu le 26 décembre.
Il est beaucoup plus difficile de toucher les gens quand il s’agit des pauvres qu’on ne voit pas. Car pour
des millions de français cela se joue à quelques euros, quelques dizaines d’euros. Les médias doivent être là pour
continuer à témoigner. Le tissu social existe encore dans des sociétés traditionnelles comme en Afrique. Il faut
bien se dire que cela commence dès ses voisins. J’ai personnellement un très grand regret : qu’on n’ait pas
remplacé la suppression du service militaire par l’instauration du service civil. Car on est tous de la même
planète : celle du cœur dont parlait Sœur Emmanuelle.
Question du public sur la nocivité des OGM : une menace pour l’agriculture ? Réponse de J.F Mattei
Toute position extrême sur le sujet est déraisonnable. Il n’est pas exclu que les OGM sauvent la planète
de la famine, tout comme il n’est pas exclu qu’ils soient à l’origine de grandes difficultés environnementales. Le
débat en est là car il a mal été lancé ! Les grands producteurs d’OGM ont déclaré qu’ils allaient sauver la planète
avec des OGM, mais plutôt que de prendre des terres au Sahel pour prouver leurs dires ils ont fabriqué des fraises
qui résistent au gel, des pommes de terre qui se conservent plus longtemps. Réaction logique de la population :
« les OGM on n’en a pas besoin ». Deuxième erreur, on globalise en parlant « des » OGM alors que chaque espèce
est à prendre à part. Comme dans les études médicamenteuses chaque OGM doit faire l’objet d’études autorisant
sa mise sur le marché quand son innocuité aura été prouvée, en poursuivant une vigilance comme pour les
pharmacovigilances.
Denis Metzger, nous fêtons cette année les 30 ans d’Action Contre la Faim, mais il y a 30 ans il y avait moins de
500 millions de personnes souffrant de malnutrition. Elles sont aujourd’hui 1 milliard selon la FAO, n’est-ce pas
désespérant ?
Non, on ne peut pas désespérer quand on voit les visages de ceux qui souffrent. Rien n’est plus motivant
que de les voir. Nous sommes certes dans une situation qui nous interpelle, qui pourrait nous désespérer, mais
nous vivons ce combat au quotidien, avec 4000 membres d’ACF constamment sur le terrain pour développer des
solutions, des micros solutions adaptées à chaque problème. Et de plus en plus de personnes nous rejoignent car
c’est un travail fascinant, le plus beau des combats.
Marie Pierre Allie, MSF est spécialisé sur le médical, y-a-t-il eu des progrès dans le domaine du traitement de la
malnutrition sévère ?
Ces techniques inventées par des humanitaires sur le terrain sont ensuite produites par des industriels. Emmanuel
Marchant, expliquez-nous le rôle de Danone Communities…
Danone Communities est née d’une rencontre entre le professeur Yunus (Prix Nobel 2006) et Franck
Riboud (PDG de Danone). La mission de Danone est : la santé par l’alimentation pour le plus grand nombre. Or on
constatait à l’époque que cela était loin d’être le cas : Danone était de plus en plus présent dans les pays sous
développés mais ne servait que les riches de ces pays.
De ce constat est née l’idée de faire des produits pour
les pauvres plutôt que pour les riches, comme pour les
micros crédits (banque pour les pauvres plutôt que pour
les riches). L’opération a donc été lancée au Bangladesh
où la malnutrition touche une grande partie de la
population (carence en vitamines, fer, zinc, iode).
En 2007 une usine a été ouverte, avec pour
objectif de vendre des produits ayant une influence
positive sur la santé suffisamment bon marché pour que
cela perdure. L’opération est une réussite mais pourtant
25% du Bangladesh reste non touché par cette
production. Nous prévoyons l’ouverture d’usines dans
une dizaine de nouveaux pays.
Denis Metzger, il n’y a encore que quelques année il y avait une « guerre de tranchées » entre le monde de
l’humanitaire (tout gratuit) et le monde des « méchants entrepreneurs » à la recherche de parts de marché dans le
« bas de la pyramide ». Existe-t-il une complémentarité entre ces deux mondes ?
Il existe en tout cas au moins un dialogue, car nos parcours sont parallèles et qu’on retrouve des
personnes de bonne volonté dans ces entreprises. Mais attention à ne pas aller trop vite en besogne et qualifier
Danone de grande ONG.
Le but du PAM est de lutter contre la faim en travaillant prioritairement avec les producteurs locaux,
c’est-à-dire avec les ressources mêmes du pays. Il faut savoir que sur les 2.8 millions de tonnes de nourriture
achetées chaque année dans le monde par le PAM, les deux tiers le sont dans les pays du Sud. Pour cela nous
effectuons d’abord un zonage du pays pour situer les zones de surproduction et celles de déficit en terme
alimentaire, puis nous achetons les surplus pour les redistribuer ensuite où
cela est nécessaire.
Nous cherchons aussi à aider les agriculteurs locaux afin qu’ils
produisent plus car ils rencontrent deux principaux problèmes : la qualité et la
logistique (à quoi bon produire plus si personne ne m’achète ma
marchandise ? si je ne peux me rendre à la capitale pour la vendre ?). Nous
avons donc globalement pour mission de mettre en relation les différents
acteurs au sein d’un même pays. Nous sommes aussi en collaboration avec les
ONG, et leur aide nous est nécessaire : elles constituent souvent en grande
partie le réseau de distribution sur le terrain.
Sodexo, c’est 380 000 employés, 34 000 sites pris en charge (hôpitaux, écoles…), 50 millions de repas
servis par jour dans 80 pays. J’ai défini une double vocation il y a 42 ans : améliorer la qualité de vie au quotidien
de nos clients, de nos consommateurs, de notre personnel et contribuer au développement économique et social
des villes, des régions et des pays où nous sommes implantés (et nous avons ajouté à cela le développement
environnemental il y a quelques années). Nous avons deux priorités : une meilleure nutrition qui favorise et
privilégie le bien-être et une aide des communautés locales. Par exemple nos clients des pays pauvres nous
demandent d’avoir les mêmes exigences en termes de sécurité alimentaire que dans les pays riches : Sodexo
demande à ses fournisseurs locaux de progresser dans ce domaine, et donne des cours dans ce but. Les résultats
sont au rendez vous car certaines entreprises locales se développent ainsi très rapidement.
Stop Hunger est un programme qui a été créé aux Etats-Unis en 1997 pour garder les cantines des écoles
ouvertes l’été car les enfants pauvres en étaient réduits à faire les poubelles pour se nourrir durant cette période.
Ce programme est aujourd’hui mis en œuvre dans 29 pays (en 2020 objectif 80 pays), et consiste en la
mobilisation des volontaires du personnel de Sodexo, du personnel des clients, du personnel des fournisseurs et
des consommateurs afin de récolter des denrées alimentaires. Sodexo est aussi en partenariat avec 237 ONG
souvent locales.
Question du public : existe-t-il des solutions pour l’Afrique ? Réponse de Denis Metzger :
La solution est de sortir de l’égoïsme, car notre monde est aujourd’hui complètement injuste : comment
expliquer qu’un riche californien consomme en un plein de son 4x4 les 200 kg de céréales nécessaires à un paysan
africain pour faire vivre sa famille pendant un an ? Comment expliquer des subventions de 1 milliard par jour pour
l’agriculture occidentale, alors que le besoin pour combattre efficacement la faim est de 3 milliards par an ?
Comment expliquer que des banquiers de Goldman Sachs se distribuent un certain jour de janvier 2010 16
milliards de dollars ? Nous sommes dans un mode soit aveugle, soit égoïste, et nous avons besoin que la nouvelle
génération s’empare de ce problème aux niveaux politiques, moraux, humains et qu’il y ait un peu de révolte !
CONTACTS
Le 4ème Carrefour de la Solidarité a été organisé par une équipe de 8 élèves-ingénieurs de
l’Ecole des Mines de Douai.
Marc RYCKEBUSCH
ECOLE DES MINES DE DOUAI
59508 DOUAI Cedex
Tél. : 03.27.71.21.68 / 06.78.49.26.21
Mail : [email protected]
4ème Carrefour de la Solidarité Etudiante Page | 32
Lille La faim justifie les moyens ! 11 mars 2010
www.ensm-douai.fr