Freinage AAR FR

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Quelques notions sur le frein pneumatique AAR

Les pages dédiées au frein pneumatique ont été essentiellement consacrées au frein pneumatique UIC, car
les chemins de fer européens - et les chemins de fer français en particulier - utilisent les standards UIC : c'est
donc ce type de frein qui équipe la totalité (ou presque) des trains circulant sur les Réseaux grandes lignes et
banlieue de notre vieux Continent.
Cependant, il est intéressant d'appréhender les quelques différences qui peuvent exister avec le deuxième
grand groupe de standards de frein qu'est l'AAR (Association of American Railroads), car il est probable qu'il y
ait dans le monde plus de véhicules équipés suivant ces standards que suivant ceux de l'UIC : la plupart des
pays du continent américain (Amérique du Nord, centrale et du Sud) utilisent ces standards, de même que
plusieurs pays africains du sud du continent, ainsi que l'Australie, la Nouvelle-Zélande et certains pays
asiatiques.
Les différences existant entre les deux grands standards proviennent essentiellement de l'histoire des
chemins de fer des deux côtés de l'Atlantique. En effet, si en Europe le chemin de fer est toujours resté
principalement un moyen de transport de masse des voyageurs (malgré le développement de l'automobile et
celui, récent, du transport aérien) en raison des modestes distances à parcourir dans des états aux faibles
dimensions géographiques, en revanche le chemin de fer a été, en Amérique du Nord, très vite relégué au
seul transport de fret, le transport aérien se révélant dès le milieu du 20ème siècle comme le mieux adapté aux
transport des voyageurs dans un pays aux dimensions d'un continent. Par ailleurs, l’automobile a, bien plus tôt
que partout ailleurs dans le monde, conquis ses lettres de noblesse et séduit une part toujours plus importante
de la population, symbole de liberté et d’émancipation.
C'est pourquoi l'examen des spécificités du frein pneumatique AAR montre clairement qu'il est conçu
essentiellement pour l'équipement de trains longs à très longs, destinés au transport du fret, donc utilisant des
équipements simples et robustes, standardisés au maximum et évoluant peu au fil des années, ce dans le but
de garantir un investissement initial le plus faible possible et un retour sur investissement rapide en minimisant
les coûts d'exploitation.

Principes de fonctionnement du frein pneumatique AAR


Le frein pneumatique AAR fonctionne exactement de la même manière que le frein UIC : ceci provient du fait
qu'ils ont été développés sur les mêmes bases, à savoir l'invention de George W ESTINGHOUSE (voir la page
consacrée à l'histoire du frein ferroviaire).
Ainsi, la commande du freinage repose, comme pour l'UIC, sur les variations de pression dans une Conduite
Générale de frein (CG). Ces variations sont commandées depuis la cabine de conduite en service par le biais
d'un robinet de mécanicien.

Principales différences entre les freins pneumatiques UIC et AAR


Les principales différences que l'on peut noter sont les suivantes :
• Le frein AAR n'est pas modérable au desserrage : toute remontée de pression de plus de 0,10 à
0,15 bar dans la CG provoque un desserrage complet des freins au niveau de chaque véhicule, ce
même si la pression dans la CG n'a pas retrouvé sa valeur de régime. On retrouve là un
fonctionnement analogue à celui que l'on constatait autrefois avec les triple-valves, ancêtres des
distributeurs de frein pour l'UIC.
• En freinage d'urgence, la pression dans les cylindres de frein doit être de 15 à 20% supérieure à la
pression correspondant au serrage maximal en freinage de service. Ceci implique l'installation d'un
réservoir auxiliaire dédié au freinage d'urgence (parfois, le véhicule est équipé d'un seul réservoir,
séparé en deux). Ceci implique également que les distributeurs de frein AAR soient un peu plus
complexes, puisqu'ils intègrent deux circuits principaux – un pour le freinage de service, un pour le
freinage d’urgence - pour gérer ces deux niveaux de pression.
• Les distributeurs de frein AAR sont obligatoirement équipés d'accélérateurs de vidange de la CG. Ces
dispositifs sont, dans leur objectif, analogues à la poche accélératrice du distributeur UIC (accélérer la
propagation de la variation de pression dans la CG et éviter son atténuation au long du train), mais leur
efficacité est nettement supérieure. Chaque distributeur en intègre deux : un pour le freinage de
service, et un pour le freinage d'urgence. Ainsi, le temps de serrage au cylindre de frein mesuré au
dernier wagon au banc pour un équivalent train de 150 wagons (soit 2286 mètres) doit être de
75 secondes au maximum : pour l'UIC sur un train de 750 mètres, ce temps peut atteindre une
cinquantaine de secondes... A noter qu'en desserrage, le temps maximal mesuré au 150ème wagon est
de 16 à 17 secondes !
• La pression au cylindre de frein ne dépend pas de l'équilibre entre cette pression au cylindre de frein et
les pression dans la CG et dans le réservoir de commande du distributeur, mais entre la pression au
cylindre de frein et la pression dans le réservoir auxiliaire : la pression au cylindre de frein peut donc
varier d'un véhicule à l'autre, pour une même pression dans la CG, suivant les volumes respectifs du
cylindre de frein et du réservoir auxiliaire (alors qu'elle est fixe et définie à 3,8 bar pour l'UIC, quels que
soient ces volumes). L'AAR définit donc des caractéristiques pour un volume de cylindre de frein
donné.

Performances comparées

Le frein pneumatique UIC reste toujours plus performant que le frein AAR pour les trains courts ou de
longueur moyenne (jusqu'à 750 à 800 mètres). Pour les trains longs, le frein AAR se révèle vite plus
performant, en termes de temps de réponse essentiellement. Le temps de serrage sur train très long peut être
ainsi réduit de moitié grâce au frein AAR avec accélérateurs de vidange en service. Au desserrage, il en est
de même : le temps de desserrage en queue d'un train de 1300 mètres est environ 7 fois plus court avec le
frein AAR.
Le principal désavantage du frein AAR reste son absence de modérabilité au desserrage : ceci devient vite
rédhibitoire pour des trains opérés sur des profils accidentés à très accidentés, dans lesquels la modérabilité
au desserrage présente une plus grande sécurité et un gain en terme de temps de parcours (cela évite de
"casser" trop souvent la vitesse du train dans les pentes, puisque cette absence de modérabilité au
desserrage impose de ralentir le train fortement, puis de desserrer totalement pour le laisser reprendre de la
vitesse avant de refreiner brusquement une fois la vitesse limite atteinte). Cet inconvénient a été pallié dans
plusieurs pays par l'utilisation du frein type UIC pour les trains de voyageurs (ce qui implique des engins
moteurs dédiés...).

Introduction au frein électronique


La très grande longueur des trains de fret opérés sous régime AAR, essentiellement en Amérique du Nord, en
Afrique du Sud et en Australie, est un obstacle à l'accélération de leur vitesse commerciale : les temps de
réponse intrinsèques du frein pneumatique imposent des anticipations plus importantes des freinages, ainsi
que des distances d'arrêt plus longues et un profil de vitesse plus « haché ».
C'est pourquoi l'AAR et les opérateurs américains ont supporté il y a quelques années le développement du
frein électronique pour les trains de fret (baptisé ECP Brake, pour Electronically Controlled Pneumatic brake).
Le principe consiste à doubler la CG d'une commande électrique qui vient, au niveau de chaque wagon,
délivrer les ordres de freinage à une électronique qui se charge ensuite de piloter la pression au cylindre de
frein. Le frein pneumatique traditionnel subsiste pour assurer la sécurité, ainsi que comme secours en cas de
panne ou lorsque certains wagons du train ne sont pas encore équipés du frein électronique.
Deux technologies ont été investiguées :
• Commande par un bus informatique parcourant tout le train, et issu de la locomotive de tête ; l'énergie
est apportée aux électroniques de chaque wagon par une seconde ligne électrique, fournissant la
puissance depuis la locomotive.
• Commande par radio : chaque électronique est équipée d'un récepteur/ré-émetteur radio, et les ordres
de freinage issus de la locomotive sont propagés de wagon en wagon tout au long du train ; cette
technique permet aisément d' "isoler" un wagon dont le dispositif est défaillant, la puissance de
réception/ré-émission d'un wagon permettant de couvrir plusieurs wagons en amont et en aval ; la
puissance électrique est ici fournie par des batteries locales à chaque wagon, rechargées par une
génératrice entraînée par l'un des essieux.
Seule la technologie filaire basée sur un bus informatique a été conservée et a fait l’objet d’un développement
complet. L'AAR a commencé à rédiger des standards liés à cette technologie, qui a révélé de nombreux
avantages :
• Gain très net en performances : les distances d'arrêt sont réduites de 30 à 50%.
• Gain en consommation énergétique : les ralentissements sont mieux dosés, et les reprises de traction
plus économiques, ce qui permet de gagner sur l'énergie consommée par les engins de traction (de
l'ordre de 5%).
• Gain en usure des semelles de frein et des roues : du fait d'une utilisation plus rationnelle du freinage
lors de la marche du train, le frein est globalement moins sollicité et les usures s'en trouvent réduites :
la réduction d’usure des semelles de frein et des roues a été estimée à environ 20%.
C'est ainsi que plusieurs opérateurs nord-américains, sud-africains et australiens exploitent depuis 1999/2000
des trains complets équipés du frein électronique. L'UIC s'y est intéressée de très près, et un essai en vrai
grandeur était prévu sur la base d'un développement commun ALSTOM/SAB WABCO (baptisé FEBIS) à partir
d'un cahier des charges SNCF/DBAG : il s'agissait d'adapter les principes de cette technologie aux spécificités
de l'UIC et des modes opératoires européens. Malheureusement, ce projet a été stoppé avant cet essai,
notamment du fait de l'absence de marché pour des trains de fret longs en Europe, et surtout la nécessité
d'adapter les infrastructures (longueur des garages en ligne et des triages)...

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