I-Une Construction Analogue À Celle Du Régime Juridique Du Fonds de Commerce
I-Une Construction Analogue À Celle Du Régime Juridique Du Fonds de Commerce
I-Une Construction Analogue À Celle Du Régime Juridique Du Fonds de Commerce
caractérisant le fonds d'exercice libéral. La clientèle, le matériel et les locaux sont les composantes
du fonds, le tout formant une universalité de fait.
Au risque d'une mercantilisation des professions libérales diront certains, les juges du droit ont
progressivement exaucé les vœux d‟un courant doctrinal majoritaire exigeant la reconnaissance d'un
tel fonds.
Il convient donc de s‟interroger sur la notion même de fonds libéral, et plus particulièrement sur son
régime juridique ainsi que sur les conséquences pratiques que la création d‟un tel fonds emporte.
C‟est pourquoi, nous verrons en premier lieu le régime juridique applicable au fonds libéral (I) puis
les conséquences pratiques qu'une telle création implique pour les praticiens concernés (II).
Parce que trop calqué sur le régime du fonds de commerce, le fonds libéral ne jouit pas d‟une
singularité extraordinaire. Il serait néanmoins réducteur de dire que son régime juridique n'est que
l'extension de celui du fonds de commerce (A). En outre, il est nécessaire de rappeler que la
clientèle civile n‟est qu‟un élément du fonds, certes prééminent et nécessaire, mais non suffisant à
l‟existence d‟un tel fonds (B).
Des éléments qui composent le fonds, c'est la clientèle qui retient le plus l'attention. En effet, c'est
elle qui est l'objet de valorisation du fonds.
La jurisprudence antérieure avait admis que la clientèle civile constituait une valeur patrimoniale
tant au regard des régimes matrimoniaux qu'au plan successoral. Mais l'arrêt du 7 novembre 2000
délaisse la conception de la clientèle civile constitutive du fonds libéral pour considérer le fonds en
tant que tel, pour considérer le fonds "in globo".
La clientèle est dorénavant assimilé à un élément, susceptible d'appréhension et d'intégration
patrimoniale, servant uniquement de lien à l'ensemble qu'est le fonds libéral. Mais la "réification"
de la clientèle, c'est-à-dire l‟envisager comme un bien, avait déjà commencé dès lors que la cour de
cassation avait admis sa valeur patrimoniale. (cf infra).
Depuis l'arrêt de 2000, et du fait de la patrimonialisation du fonds qu'il induit, il faut envisager
l'intégration du fonds libéral, universalité de fait, et non plus la seule inclusion de la clientèle, qui
n'est désormais qu'un des éléments de cet ensemble.
La consécration du fonds libéral ne reste pas que théorique. En effet, elle induit des impacts en
pratique et ce, qu'il y ait dissolution du régime matrimonial (A') ou ouverture de la succession du
praticien décédé (B'). Nous allons donc voir quelle place occupe le fonds libéral au sein du
patrimoine des époux ou de celui du de cujus.
Quant aux éléments du fonds libéral, la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un
arrêt du 2 mai 2001, parachève le mouvement entrepris en caractérisant le fonds libéral. La
clientèle, le matériel et les locaux sont les composantes du fonds, le tout formant une universalité de
fait.
Bien évidemment, le fonds libéral est en revanche un BP s‟il a été acquis ou créé avant le mariage
ou acquis à titre gratuit pendant le mariage (article 1405)
Depuis la loi du 23 décembre 1985, chaque époux jouit d'une totale liberté
professionnelle : liberté dans le choix de travailler ou non, liberté de choisir sa profession, liberté
dans l'exercice de l'activité professionnelle (art. 223 Code civil).
Si le fonds libéral est un bien commun, en régime légal, l'article 1421 alinéa 2 du Code civil énonce
que "l'époux qui exerce une profession séparée a seul le pouvoir d'accomplir des actes
d'administration et de disposition nécessaires à celle-ci".
Les actes de gestion inhérents à l'activité professionnelle sont ainsi placés sous le signe d'une
autonomie véritable pour l'époux exerçant la profession séparée.
Mais finalement, ce n'est pas tant l'indépendance de l'époux dans l'exercice de sa profession qui
pose problème, mais plus la liberté de l'époux praticien au regard du pouvoir de disposer du fonds
libéral lui-même.
Avec l'arrêt de 2000, il faut essayer de rattacher le fonds libéral aux dispositions relatives au régime
légal déjà existantes et non modifiées depuis la création de cette notion.
Ainsi, on doit logiquement rattacher le fonds à l' "exploitation" dont parle l'article 1424. Celui-ci ne
pourrait donc pas être aliéné ou grevé de droits réels lorsqu'il dépend de la communauté. La
cogestion s'appliquerait donc, le consentement du conjoint serait exigé lorsque le praticien voudra
effectuer des actes de disposition.
Même si nous ne disposons pas d‟un arrêt de la cour de cassation qui l‟affirme c‟est la solution qui
s‟impose depuis l‟arrêt de 2000
A l'inverse et classiquement, si le fonds est propre à l'époux exploitant (article 1405), alors il le
pourra le céder en toute indépendance conformément à l'article 1428 du
Code civil.
Certes un jugement du 19 novembre 1987 rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris
inclinait en faveur du caractère personnel de latitularité des offices ministériels dans le but d'exclure
la co-gestion en cas de cession de l'office ("La validité de la promesse de cession de l'étude d'un
notaire n'est pas subordonnée au consentement de l'épouse du notaire cédant").
Mais cette décision a été remise en cause par la jurisprudence de 1994 et de 2000
Au niveau des pouvoirs en régime de communauté, le régime du fonds libéral doit logiquement se
calquer sur celui du fons de commerce .
Heureusement les notaires comme les avocats évitent ce problème (en adoptant un régime de
séparation de biens par exemple)
>> Concernant la liquidation et le partage de la communauté, le fonds libéral sera bien entendu
placé dans le lots de celui qui exerce cette profession libéral :
Dans le cadre d‟un divorce l‟article 267 prévoit que « à défaut d‟un règlement conventionnel par
les époux, le juge, en prononçant le divorce, ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts
patrimoniaux,
« Il statue sur les demandes …d‟attribution préférentielle » ,
Le fonds libéral comme tous les autres biens sera donc évalué le plus souvent à une date choisie par
les parties elles-mêmes : cf article 267 et 262-1 sur la date des effets patrimoniaux d‟un divorce
dans les rapports entre époux (par ex Civ. 1ère 30/06/1998)
B'- Sur un plan successoral
Considérer le fonds libéral en tant que bien suppose qu'il puisse faire l'objet d'une attribution dans le
cadre du partage de l'indivision post-successoral.
Ainsi, lorsque, comme dans de nombreuses hypothèses, le fonds est commun pour avoir été crée ou
acquis durant le mariage,
Il faut appliquer ici l‟article 831 du code civil, modifié en 2006, qui permet au conjoint survivant de
demander l‟attribution préférentielle …notamment d‟une entreprise libérale. Voir aussi l‟article
831-2
Quant à l'évaluation du fonds, on se réfère à ce qui est déjà établi en matière de fonds de commerce,
comme pour tous les autres biens, à savoir qu'il sera évalué au jour du partage (Civ. 1ère
07/04/1998),
En l'absence de décisions à ce propos sur le fonds libéral, on raisonne naturellement par analogie et
l'on calque les décisions déjà admises en matière de fonds de commerce sur cette nouvelle notion
qu'est le fonds libéral.
Les clientèles civiles ont pendant longtemps été exclues des successions. Or, que se passe-t-il
lorsqu'un praticien, décédé brutalement, n'a pu exercer son droit de présentation de son vivant ?
Jusqu'à un arrêt du 9 mai 1961 rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation, les
héritiers du praticien ne pouvaient pas exercer le droit de présentation tant les professions libérales
étaient caractérisées par un fort intuitu personae.
En outre, on considérait qu'ils étaient inaptes sur le plan de la présentation dans la mesure où ceux-
ci n'avaient pas les même aptitudes et qualifications que le défunt praticien.
Avec le revirement de jurisprudence de 1961, il est devenu désormais possible pour les héritiers de
conclure des conventions de présentation. Cf aussi arrêt de 1994 à propos d‟une clientèle civile dont
la valeur est prise en compte dans la succession.
Depuis les arrêts de 2000 et 2001, il ne faut plus raisonner en terme de clientèle civile mais en terme
de fonds libéral.
Or, comme tout bien commun, le fonds va tomber en indivision au décès du praticien et un contrat
de cession du fonds sera possible quand bien même les héritiers n'auraient pas l'aptitude
professionnel adéquate.
Exemple pratique :
Prenons le cas d'un fils de Notaire, collaborateur de son défunt père. A la mort du praticien, le fonds
tombe en indivision et pourra lui être attribué d'autant qu'il dispose des qualifications nécessaires, à
charge néanmoins d'indemnisation des co-héritiers.
L'indemnisation aura lieu essentiellement à égard de l'élément clientèle, c'est à dire à un élément
incorporel car c'est lui qui procure un avantage considérable.
La terminologie de "fonds libéral" est donc une clarification qui évite de continuer à utiliser le
moyen détourné, et hypocrite du « droit de présentation » alors qu‟il s‟agit bien sûr d‟une cession ou
d‟une transmission à titre gratuit d‟un bien = le fonds libéral
Au final, cela entraîne également d‟importants changements en matière de régimes matrimoniaux
(cf plus haut)..
Pour conclure, on peut donc dire que ces arrêts fondateurs auront permis une
extension partielle de la théorie du fonds de commerce aux activités libérales, avec cependant des
différences (pb des procédures collectives par ex et la législation commerciale sur les fonds de
commerce n‟a pas vocation à s‟appliquer au fonds libéral . . .
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Clientèle : bien commun ou bien propre, peut-elle être vendue sans le consentement de l‟autre ?
Bien qui a une valeur importante, sert la famille, pas obligé de se marié, et aurait pu faire un contrat.
Evolution des mentalités difficiles (survalorisation de la profession libérale par rapport à la
profession commerciale : discrimination).
1424 date de 85, le fonds libéral a été reconnu en 2000, mais la notion « d‟exploitation dépendant
de la communauté » est très large et pourrait inclure le fonds libéral.
=> 1424 s‟applique au fonds de commerce
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Exposé : L’assurance vie en droit patrimonial de la famille
On prête à l'assurance-vie une place de premier choix dans l'ordre des placements financiers. En
effet, l‟assurance-vie est un produit très bien perçu par les ménages français car il figure dans le
patrimoine de près de 50% d'entre eux, soit 20 millions de français. On estime que 38% du
patrimoine financier des ménages sont investis dans les contrats d'assurance-vie. Ce placement
s‟est fortement diffusé ces vingt dernières années et s‟est réorienté aujourd‟hui vers de nouveaux
besoins. En effet, les ménages évoquent comme raisons principales du fait de posséder un contrat
d‟assurance-vie, la préparation de la retraite (27%) et la volonté d‟en faire bénéficier un proche
(28%).
Ce que l'on appelle « assurance-vie mixte» est par conséquent un contrat d'assurance en cas de décès
et en cas de vie sur une durée unique, reconductible ou non selon les contrats. Les articles L 131-1 et
suivants de Code des assurances régissent ce type de contrat.
Le souscripteur bénéficie d'une grande liberté : il peut choisir un ou plusieurs bénéficiaires, les
révoquer comme il le souhaite (sauf en cas de bénéficiaire acceptant cf infra) ; arbitrer les primes
investies entre plusieurs supports ; disposer à tout moment de son capital en fonction de ses projets
de vie ; stopper, augmenter ou diminuer les versements réguliers sur le contrat ; bénéficier de la
fiscalité avantageuse de l'assurance en cas de retrait et de décès de l'assuré.....
Mais, en pratique, cette grande liberté peut être source de différends juridiques importants.
Comment pallier ces difficultés au maximum ? Le recours à un notaire peut alors s‟avérer
nécessaire. En effet, outre les modalités fiscales de ce placement que nous n‟envisagerons pas dans
cet exposé, le notaire peut conseiller ses clients tant pendant la durée de vie du contrat (I) que sur
les risques existants en pratique au moment du dénouement de l‟assurance-vie (II)
I. LE ROLE DU NOTAIRE PENDANT LA VIE DU CONTRAT D’ASSURANCE VIE
La vie du contrat d‟assurance vie est axée autour de deux principaux personnages que sont le
souscripteur et le bénéficiaire. En effet, nous allons voir que la formation et les effets du contrat
varient selon que le souscripteur est ou non marié par exemple ou encore que le bénéficiaire est ou
non désigné. Pour illustrer cela, nous parlerons du rôle du notaire dans la phase de souscription du
contrat d‟assurance vie (A) puis en matière de désignation du bénéficiaire (B).
S‟agissant du rôle du notaire lors de la formation du contrat tout d‟abord : lors de la souscription du
contrat d‟assurance vie le notaire doit s‟interroger sur la capacité de souscrire le contrat mais aussi
sur la manière de concilier le mode de souscription avec le régime matrimonial du souscripteur.
Rappelons que le souscripteur est la personne qui s‟engage au versement des primes prévues par le
contrat d‟assurance. Ainsi, ce peut être une personne morale ou une personne physique mais dans
les deux cas, le souscripteur doit remplir deux conditions cumulatives : il doit avoir la capacité
juridique de conclure le contrat d‟assurance vie et il doit avoir le pouvoir de verser les fonds. C'est
cette dernière condition qui nous intéresse lorsque la souscription du contrat d’assurance vie est
faite par un époux commun en biens (la question de la capacité étant laissée de côté puisque les
époux ont tous deux la capacité de conclure un contrat) :
- Si les primes versées à l‟assureur sont des fonds propres de l‟époux, comme par exemple
de l‟argent reçu d‟une succession, celui-ci pourra agir seul car en vertu de l‟article 1428 du code
civil, chaque époux a l‟administration et la jouissance de ses propres et peut en disposer librement.
Toutefois il conviendra d‟attirer l‟attention de cet époux sur la nécessité de faire une
déclaration de remploi conformément aux articles 1434 et suivants du code civil. En faisant cette
déclaration la valeur de la police sera propre et échappera à la qualification d‟acquêt quand bien
même il ait été conclu pendant le mariage. A défaut de cette déclaration de remploi, la valeur du
contrat d‟assurance vie souscrit avec des fonds propres sera commune (jurisprudence Praslika :
Civ. 31 mars 1992.
- Si en revanche, et c'est ce qui est le plus courant (+ cf jeu de 1402), les primes versées sur
le contrat proviennent de la communauté, la question est de savoir si, par le biais d‟une assurance
vie, l‟un des époux peut vider la communauté en transformant des biens communs en biens propres.
En soi le paiement des primes avec des biens communs ne pose pas de problème :
> Si les primes sont payés avec des salaires c'est possible sur le fondement de l‟article 223 du code
civil, texte du régime primaire impératif qui pose que chacun des époux peut disposer librement de
ses gains et salaire après s‟être acquitté des charges du mariage.
> Si ce sont d‟autres revenus ou capitaux communs c'est tout aussi possible en application de
l‟article 1421 du code civil qui permet aux époux de disposer des biens communs sous réserve de
répondre de ses fautes de gestion ou de son intention frauduleuse.
> On a pu se demander si cette possibilité de payer les primes avec des biens communs était remise
en cause lorsque cette assurance vie est constitutive d‟une libéralité (donation indirecte) et que le
bénéficiaire est un tiers autre que le conjoint : l‟article 1422 du code civil imposant la cogestion
pour les actes entre vifs à titre gratuit et l‟article 1427 du code civil sanctionnant par la nullité de
l‟acte doivent ils s‟appliquer ?
Cette question a été tranchée par la jurisprudence Pelletier du 12 décembre 1986 : un époux commun en
biens avait souscrit un contrat d’assurance vie mixte (c'est à dire que le capital lui revient s’il est vivant et
va au bénéficiaire s’il est mort) et avait désigné sa femme comme bénéficiaire. Les primes ont été payées
avec des gains et salaires économisés (cf juris du 29 février 1984). Le mari a décidé de modifier le
bénéficiaire et a désigné ses neveux. Un mois après le changement de bénéficiaire le souscripteur décède
et l’assureur verse le capital aux neveux. La femme demande l’attribution du capital au motif que l’argent
versé constitue une créance de la communauté dont le mari n’aurait pas pu disposer seul en vertu de 1422.
La Cour de Cassation rejette le pourvoi au motif que compte tenu de l’article 132-12 du code des
assurances (Le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou
à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l'assuré. Le bénéficiaire, quelles que soient la forme et
la date de sa désignation, est réputé y avoir eu seul droit à partir du jour du contrat, même si son
acceptation est postérieure à la mort de l'assuré) du code des assurances, le capital a toujours appartenu au
bénéficiaire désigné en dernier lieu. En vertu du mécanisme de la stipulation pour autrui, le capital n’a
jamais transité par la communauté car dès le début il appartenait au bénéficiaire. Il s’en suit que l’époux
souscripteur n’avait jamais disposé à titre gratuit d’une créance dont la communauté était titulaire. L’article
1422 du code civil n’a donc pas lieu de s’appliquer à l’assurance vie et le changement de bénéficiaire est un
acte qui relève du seul pouvoir du souscripteur (tant que le changement de bénéficiaire est encore
possible).
Adapter son contrat d‟assurance vie à son régime matrimonial doit être le premier réflexe du
souscripteur.
Les époux mariés sous le régime de la communauté peuvent choisir de souscrire un contrat en co-
adhésion, appelée également co-souscription. Une option existe : le capital peut être payable au
premier ou au deuxième décès.
Si le contrat comporte deux souscripteurs mais un seul assuré il n‟y a pas de difficultés : le contrat
se dénoue en cas de décès ou de survie de l‟assuré.
S‟il y a deux souscripteurs et deux assurés, il faut préciser quel est le décès qui va entraîner le
dénouement du contrat.
L'absence de désignation de bénéficiaire est parfois volontaire (« choix » des droits de succession
lorsqu'ils sont moins élevés que le prélèvement de 20 %) mais elle résulte le plus fréquemment
d'un oubli ou d'un concours de circonstances défavorables. Ceci pourrait être le cas, par exemple,
lorsque le souscripteur précise que le bénéficiaire sera la personne désignée dans son testament et
que le souscripteur décède avant d'avoir rédigé ledit testament. Il pourrait en être ainsi également
en cas de désignation d'un bénéficiaire unique, qui décède avant l'assuré.
Afin d'éviter de se trouver dans ces situations, il est conseillé, dans tous les cas, d'indiquer le nom
d'autres bénéficiaires à défaut des bénéficiaires que l'on souhaite prioritairement avantager et de
s'entourer des conseils d'un professionnel du droit de la famille, au premier rang desquels figurent
les notaires, pour rédiger la clause bénéficiaire.
Tout ceci se concrétise par la rédaction d‟un testament que le notaire va enregistrer au fichier
central des dernières volontés. Au décès de l‟assuré, on aura la certitude de trouver le contrat et ses
bénéficiaires, ce qui est important car il est fréquent que le bénéfice des assurances-vie ne soit pas
réclamé. On notera également un renvoi au testament dans l‟encart du contrat d‟assurance-vie
réservé à la rédaction des bénéficiaires.
Le contrat d‟assurance vie se dénoue lorsque le risque garanti par l‟assureur est réalisé : ainsi le
contrat peut se dénouer par l‟arrivée du terme prévu dans le contrat si c'est un contrat d‟assurance
vie, ou il peut se dénouer par la mort de l‟assuré si c'est un contrat d‟assurance décès. Nous avons
vu que le contrat d‟assurance vie mixte combine les deux formules : dans les deux cas, la
compagnie d‟assurance doit verser le montant du capital (= les primes – les frais + les intérêts) au
bénéficiaire désigné dans le contrat en cas de décès du souscripteur assuré et à ce dernier s‟il est
vivant à l‟arrivée du terme.
A ce stade, des difficultés peuvent survenir compte tenu du régime matrimonial du souscripteur (A)
mais aussi de l‟ouverture et du règlement de la succession (B).
Nous allons donc commencer par analyser les effets du versement du capital sur la communauté :
pour cela il convient de distinguer selon que le contrat est dénoué pendant ou après la communauté.
- hypothèse du contrat dénoué par l’arrivée du terme en cas de vie : Certains contrats
offrent la possibilité d‟être reconduits tacitement ou non à leur terme et en cas de vie de l‟assuré.
Dans le cas contraire, le contrat se dénoue au profit du souscripteur. Il y a alors lieu de faire
prévaloir le droit patrimonial de la famille. Si le contrat a été souscrit au moyen de fonds communs,
le souscripteur qui se désigne comme bénéficiaire n‟en reçoit pas le bénéfice en vertu d‟une
stipulation pour autrui mais en qualité de cocontractant car on ne peut pas être en même temps tiers
et partie à un contrat. La personne qui stipule n‟est pas un vrai bénéficiaire au sens strict. Si cette
personne souscrit un contrat au moyen de fonds commun, le capital attribué est un acquêt. Si les
fonds placés sont des propres du souscripteur, le capital attribué restera propre, sous réserve des
intérêts perçus qui tombent en communauté (article 1401 et 1403 + juris Authier Civ 1ère, 31 mars
1932). Le droit commun des régimes matrimoniaux s‟applique.
Deux cas de figure peuvent alors se rencontrer : le bénéficiaire peut être, ou non, le conjoint.
> Le bénéficiaire est le conjoint survivant : la réponse est donnée par la loi : l’article 132-16 du code des
assurances pose le principe que « Le bénéfice de l'assurance contractée par un époux commun en biens
en faveur de son conjoint, constitue un propre pour celui-ci. Aucune récompense n'est due à la
communauté en raison des primes payées par elle, sauf dans les cas spécifiés dans l'article L 132-13,
deuxième alinéa du code des assurances (c'est à dire en cas de primes manifestement excessives) ».
Il en résulte que le capital versé est un propre (ou plus exactement un bien personnel) du conjoint
bénéficiaire et que la communauté n’a pas droit, en principe, à récompense pour les primes qu’elle a
payées.
Concernant la nature propre du bénéfice, on peut l’expliquer par divers arguments :
- l’attribution du capital s’apparente à une libéralité : le conjoint survivant apparait ici comme un
donataire du coup, le capital lui est propre comme le sont toutes les libéralités qu'il a reçues au titre de
l'article 1405 du Code civil.
- le capital est un bien propre par nature (thèse criticable : confusion faite par certains auteurs
entre la titularité (le bénéficiaire a un droit personnel à se voir verser ce capital) et la propriété.
- en réalité, il est sans doute inutile de chercher à justifier cette nature propre du capital car elle
découle de la volonté du législateur (article L 132-16) = faveur légale faite au conjoint survivant qui à
l’époque avait très peu de droits successoraux. Aujourd'hui, après réforme de 2001, on pourrait se
demander si cette faveur a encore lieu d’être.
Concernant l’absence de récompense en principe, elle peut s’expliquer aussi par la faveur légale au profit
du conjoint, pour encourager cet acte de prévoyance familiale. Inutile de se référer à l’article 1409 puisque
la solution est donnée explicitement par le code des assurances.
Quelle que soit la thèse retenue la solution légale est claire : aucune récompense n’est due à la
communauté qui a payé les primes (toujours sous réserve du caractère non manifestement excessif des
primes versées), et le capital versé au conjoint survivant lui est propre (=personnel).
Toutefois il faut noter que la jurisprudence rappelle régulièrement les conditions restrictives
d‟application de l‟article L 132-16 du code des assurances et par voie de conséquence de
l‟exonération de récompense qu‟elle prévoit ; ainsi doit-il s‟agir d‟un contrat d‟assurance décès
souscrit par un époux avec des deniers communs (sans que les primes soient considérées comme
manifestement exagérées) au profit de son conjoint qui en a accepté le bénéfice. Ainsi par exemple,
la Cour de Cassation (Civ. 1re 22 mai 2007, Bull. I n°194) a reconnu le droit à récompense de la
communauté car l‟application de l‟article 132-16 du code des assurances devait être écartée dans un
cas où le capital a finalement été versé à un enfant du défunt et non au conjoint survivant, ce dernier
étant lui-même décédé sans avoir accepté le bénéfice de l‟assurance.
> Le bénéficiaire est un tiers : Lorsque le bénéficiaire du contrat n'est pas le conjoint, aucune
disposition du Code des assurances ne prévoit pas de solution particulière.
On est en dehors du domaine de l‟article L 132-16 du code des assurances et la règle qui régit cette
situation est l‟article 1437 du code civil. Cette règle a été posée par l’arrêt « Daignan » rendu le
10 juillet 1996 par la première chambre civile de la Cour de cassation.
Un souscripteur avait pris une assurance temporaire-décès au profit de son épouse puis lui avait
substitué un tiers. Le contrat ne contenait pas de valeur de rachat, et les primes n‟étaient pas
excessives. Cependant les primes prélevées sur la communauté ont permis d‟attribuer à titre gratuit
un capital à un tiers.
La Cour de cassation approuve l‟attribution d‟une récompense à la communauté à hauteur des
primes, notant que si en vertu de l‟art. L. 132-12 du Code des assurances, le bénéficiaire désigné en
dernier lieu est réputé avoir droit aux sommes stipulées au contrat à partir du jour de la souscription,
en vertu de l’article 1437 du code civil, « le mari était redevable envers la communauté des
deniers communs ayant servi à acquitter une charge contractée dans son intérêt personnel ». Il
s‟en suit que lorsque le bénéficiaire est un tiers, le bénéficiaire est redevable envers la communauté
d‟une récompense. Calcul de la récompense : application de l‟article 1469 alinéa 1 = la plus faible
des deux sommes ; mais en ce cas DF=PS donc elle est égale à la dépense faite et donc au montant
des primes versées par la communauté.
Si la nullité de la donation indirecte était admise, il n‟y aurait évidemment pas de récompense
possible mais nous avons vu qu‟en vertu de la jurisprudence Pelletier le conjoint survivant ne peut
faire annuler la désignation du tiers puisque l‟application des articles 1422 et 1427 du code civil
n‟est pas possible.
Pour répondre à ces questions il convient de se référer à la jurisprudence Praslicka du 31 mars 1992 : En
l'espèce, l'époux avait souscrit un contrat d'assurance vie mixte : Le souscripteur en était le bénéficiaire en
cas de vie lors du terme fixé et avait désigné son épouse bénéficiaire en cas de décès. Le contrat avait été
alimenté régulièrement au moyen de primes modestes prélevées sur des deniers communs. Etant en vie au
terme du contrat, l'époux en avait naturellement appréhendé le capital au jour de son dénouement mais
cela est intervenu après la date de dissolution de la communauté (à l’époque = date de l’assignation en
divorce). L'épouse a alors sollicité l'incorporation à l'actif de la communauté du contrat d'assurance vie.
La cour d’appel décida que le capital qui a été versé au mari (en vertu de son droit propre en tant que
bénéficiaire) n’est pas tombé en communauté et que la communauté n’avait pas droit à récompense parce
que les primes n’étaient pas manifestement excessives. Le pourvoi ne critiquait pas le droit propre à se voir
payer le capital mais le refus d’un droit à récompense en violation par refus d’application de l’art 1437 du
code civil en faisant valoir que le mari avait tiré profit personnel de la communauté.
On aurait pu penser que cette critique soit admise purement et simplement mais la Cour de Cassation casse
l’arrêt pour une autre raison : ce n’est pas pour la violation de l’article 1437 du code civil mais pour
violation des articles 1401 du code civil et L 132-13 du code des assurances
Au visa des articles 1401 du Code civil et de l'article L 132-13 du Code des assurances, la Cour décide que
« les primes de cette assurance en cas de vie du souscripteur avaient été payées avec des fonds communs
jusqu'à la dissolution de la communauté, si bien que la valeur de la police faisait partie de l'actif de celle-
ci (…), de sorte qu'il devait être tenu compte dans les opérations de partage de la valeur du contrat au
jour de la dissolution de la communauté ».
La valeur de la police en cours au jour du divorce doit donc figurer à l'actif commun : le souscripteur est le
seul à pouvoir se voir verser le capital (en tant que bénéficiaire en cas de vie au terme prévu par le contrat),
mais la valeur du contrat au jour de la dissolution de la communauté (cf. date dissolution dans les rapports
entre époux) doit figurer à l’actif de la communauté. La somme est ensuite à réévaluer dans les valeurs jour
partage.
Cette solution prend tout son sens en présence de contrats d'assurance vie à vocation capitalistique et
d'épargne. La solution inverse tirée d'une lecture extensive de l'article L 132-16 du Code des assurances
aurait conduit à la situation inique suivante : deux époux mobilisent les flux communs du ménage pour
réaliser chacun, à hauteur de 1 500 euros par an, une opération d'épargne (un bien commun). Le mari
souscrit un contrat d'assurance vie, l'épouse un plan d'épargne en actions. Quelques années plus tard, ils
divorcent alors que chacun des modes de détention d'épargne est valorisé 20 000 euros. Si la jurisprudence
Praslicka n'était pas appliquée en considérant comme certains auteurs (cf Bigot) que le droit propre du
mari lui permet de revendiquer ce capital en tant que bien propre, l'époux aurait utilisé le contrat
d'assurance vie pour se constituer un bien propre à hauteur de 20 000 euros, tandis que l’épouse aurait
développé des acquêts à hauteur du même montant. A supposer que la communauté ne comprenne aucun
autre actif, les droits des parties au sortir des opérations de partage auraient été de 30 000 euros pour
l'époux et 10 000 euros pour l'épouse.
La Cour de Cassation ne remet pas en cause le droit propre (exclusif) du mari à percevoir le capital, mais
pour rétablir l’équilibre dans le partage de communauté elle se fonde sur l’existence d’une créance
commune représentant la valeur du contrat au jour de la dissolution de la communauté (les primes payées
par le mari après la dissolution de la communauté étant payées par des biens personnels du mari). Lorsque
cette créance est attribuée à un époux (celui qui touchera le capital) il est logique d’imputer sur son lot
dans le partage des biens communs la valeur qu’elle représente.
Il n’y a pas lieu en ce cas de reconnaître un droit à récompense au profit de la communauté. La question est
réglée lors du partage de l’actif commun : la créance commune (valeur de la police au jour de la dissolution,
avec réévaluation au jour du partage) est attribuée en moins prenant à l'époux souscripteur.
Notons que le contrat d’assurance est un acte neutre qui peut constituer une donation indirecte ou
être un contrat à titre onéreux (cf. Arrêt Noguer : assurances croisées)
Quand il s‟agit d‟une donation, elle est néanmoins soumise à un régime spécifique, s‟il s‟agit bien
d‟une assurance, parce que la loi le prévoit : pour inciter à la conclusion de ces contrats le
législateur a en effet décidé que le capital serait transmis hors succession sans rapport et sans
réduction.
En matière de succession, l'article L 132-12 du Code des assurances prescrit qu'au cas d'assurance-décès le
capital ne fait pas partie de la succession de l'assuré, le bénéficiaire ayant acquis son droit dès le jour de la
conclusion du contrat.
Et l'article L 132-13 du Code des assurances ajoute que ni le capital, ni les primes versées - sauf, pour celles-
ci, exagération manifeste - ne sont à prendre en compte pour la liquidation de la succession de l'assuré :
même si la transmission du capital constitue une donation indirecte, elle n’est soumise ni au rapport
(quand le bénéficiaire est un héritier), ni à la réduction pour atteinte à la réserve. Ainsi, suivant le premier
de ces textes, le capital ne fait pas partie des biens que le souscripteur a laissés à sa mort : il ne figure pas
parmi les biens existant au décès. Et, suivant le second, il n'est pas susceptible d'être réintégré dans la
succession par la voie du rapport (article 843 du code civil) ou de la réduction (article 920 du code civil),
comme le sont les biens donnés.
Seuls les contrats d’assurance, ce qui suppose un aléa. Ce n’est pas le cas a priori des contrats
d’assurance vie mixte qui sont des contrats de pure capitalisation. La compagnie d‟assurance ne
court aucun risque car elle sait qu‟elle doit verser un capital même si elle ne sait pas à qui
(souscripteur ou bénéficiaire), capital qui sera le même quel que soit le bénéficiaire (primes +
intérêts – frais). La cour de cassation avait donc décidé de ne pas appliquer les textes du code des
assurances précités aux contrats de pure capitalisation (Arrêt Leroux Civ. 1re 18 juillet 2000).
Mais, dans ses quatre arrêts en date du 23 novembre 2004, une Chambre mixte de la Cour de cassation a
posé le principe selon lequel « le contrat d’assurance dont les effets dépendent de la durée de la vie
humaine comporte un aléa au sens des articles 1964 du Code civil, L. 310-1, 1°, et R. 321-1, 20, du Code des
assurances et constitue un contrat d’assurance sur la vie », de telle sorte qu’un tel contrat relève de l’article
L. 132-13 du Code des assurances lui garantissant une franchise successorale, sauf si les primes ont été
manifestement exagérées eu égard aux facultés du souscripteur (Cass. ch. mixte, 23 nov. 2004, 4 arrêts,
nos 01-13.592, 02-11.352, 02-17.507 et 03-13.673, Bull. civ. ch. mixte, n° 4 ; v. Ph. Delmas Saint-Hilaire, Dr.
& patr. 2006, n° 148, rubrique « Assurance-vie », p. 111 et les références citées ; v. en dernier lieu, F. Terré
et Y. Lequette, Les grands arrêts de la jurisprudence civile, t. 1, Dalloz, 12e éd., 2007, n° 132).
Les Hauts magistrats garantissent ainsi aux assurances dites de « placement » ou de « capitalisation » la
qualification d’assurance-vie ouvrant droit au bénéfice du statut successoral de faveur édicté par le Code
des assurances, mettant fin ainsi à la jurisprudence de la cour de cassation qui excluait de cette faveur les
contrats de pure capitalisation (arrêt Leroux)
Depuis ces arrêts, la qualification de contrat d‟assurance, censé être un contrat aléatoire au sens de
l‟article 1964 du code civil, suppose la réunion de deux conditions :
- que le risque dépende de la durée de la vie humaine,
- et l‟ignorance lors de la souscription du destinataire final.
Selon la Cour de cassation, l‟aléa joue dans des relations autres que celles des parties au contrat. Or
l‟aléa devrait jouer dans les relations souscripteur/compagnie. Ici, l‟aléa joue dans les relations
souscripteur/bénéficiaire c‟est-à-dire donateur/donataire.
La première chambre civile de la Cour de cassation, notamment dans un arrêt du 17 mars 2005, a confirmé
cette jurisprudence en reprenant le même attendu que dans les arrêts de principe du 23 novembre 2004
en rappelant que « le contrat d'assurance dont les effets dépendent de la durée de la vie humaine,
comporte un aléa au sens des textes susvisés et constitue un contrat d'assurance sur la vie ». Idem pour la
deuxième chambre civile de la Cour de cassation : arrêt du 14 juin 2006. La Deuxième chambre civile de la
Cour de cassation dans un arrêt du 22 octobre 2009 a dû se prononcer quant à une qualification de
donation indirecte et à une absence d'aléa dénaturant l'opération d'assurance : extraits : La Cour énonce
que :
des constatations et énonciations visées plus haut, la cour d'appel a pu déduire l'existence
d'un aléa lors de la désignation du bénéficiaire par la seconde épouse et l'absence de
volonté actuelle et irrévocable de se dépouiller.
« le contrat d'assurance dont les effets dépendent de la durée de la vie humaine comportent
un aléa au sens de l'article 1964 du code civil, et constitue un contrat d'assurance sur la
vie ; que l'arrêt retient que chaque contrat prévoyait la possibilité d'un rachat et d'un
versement au bénéficiaire en cas de décès, que la date du versement par l'assureur était
incertaine et que le montant de ce qu'il devait était inconnu à l'origine et pouvait bénéficier
soit au souscripteur soit au bénéficiaire ; Que de ces constatations et énonciations la cour
d'appel a pu déduire l'existence d'un aléa lié à la durée de la vie humaine. »
A titre préliminaire, il convient de rappeler que s‟il n‟existe pas de bénéficiaire désigné en cas de
décès, le contrat est disqualifié et réintégré dans la succession du souscripteur.
C‟est l‟article L 132-13, alinéa 2 du Code des assurances qui précise que la franchise successorale
pour l‟assurance est supprimée s‟il s‟avère que les primes versées étaient manifestement exagérées
eu égard aux facultés du souscripteur.
Le législateur n‟ayant pas précisé la définition des primes manifestement exagérées, c‟est la
jurisprudence qui s‟en est chargée.
En premier lieu la jurisprudence a précisé le moment où il faut se placer pour apprécier l‟excès. La
date à laquelle le caractère manifestement exagéré des primes doit être établi est celle de leur
versement, et non celle du décès de l'assuré (en ce sens, notamment, Cass. ch. mixte 23-11-2004 n°
224 P et 226 P : RJDA 2/05 n° 89 ; Cass. 2e civ. 4-12-2008 n° 07-20.544).
La charge de la preuve incombe à celui qui invoque le caractère manifestement exagéré des primes.
Dans leurs très nombreux arrêts, attestant d‟un important contentieux en la matière, les Hauts
magistrats reprennent invariablement la même formule afin de qualifier l‟excès des primes versées :
Ainsi, l‟excès doit être apprécié « au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et
familiale du souscripteur et de l'utilité du contrat pour ce dernier » (en ce sens, notamment, Cass. 2 e
civ. 7-2-2008 n° 06-16.373 ; Cass. 2e civ. 10-7-2008 n° 07-14.098 ; Cass. 2e civ. 4-12-2008 n° 07-
20.544). Ces critères sont le plus souvent associés selon la méthode du faisceau d'indices.
Les juges du fond apprécient souverainement l'existence de l'excès, mais ils ne peuvent pas fonder
leur décision sur des critères autres que l'âge, la situation du souscripteur et l'utilité pour lui du
contrat. Ils n'ont par exemple pas à se référer au montant de la quotité disponible (Cass. 2 e civ. 4-7-
2007 n° 06-11.659) ou à l'intention du souscripteur d'échapper aux règles du droit successoral
(Cass. 2e civ. 23-10-2008 n° 07-19.550).
Bien entendu et pour apprécier l‟excès, les juges utilisent un critère quantitatif, c‟est-à-dire
l‟importance des primes par rapport au patrimoine possédé au jour du versement des primes.
Soit le critère économique des « facultés » du souscripteur pour savoir si les primes sont
manifestement exagérées (article L 132-13 du code des assurances). Il faut prendre en considération
le revenu ou le capital (patrimoine) global du souscripteur et procéder à une comparaison entre le
capital et les revenus. Parfois est pris en considération le revenu, parfois le capital, parfois les deux.
La jurisprudence paraît assez aléatoire et l‟appréciation du niveau de revenus est celui du
souscripteur au moment du versement des primes. Pour l‟évaluation du capital ou patrimoine global
du souscripteur : Il y a exagération manifeste lorsque le total des primes versées a eu pour effet de
vider le patrimoine du souscripteur. La Cour de cassation n‟ayant jamais fixé de quantum, les juges
du fond se réservent le choix d‟apprécier le patrimoine du souscripteur.
À cet égard, le fait de verser sur un contrat d‟assurance-vie une somme provenant de la vente d‟un
bien n‟est pas en soi suffisant pour constituer une prime manifestement exagérée (Cass. 2 e civ.,
4 juill. 2007, n° 06-14.048).
De plus, il est pris en compte, le plus souvent pour démontrer l‟excès, un critère qualitatif : l‟utilité
du contrat pour le souscripteur.
Afin d'apprécier l'utilité de la souscription du contrat pour le souscripteur et le caractère exagéré des
primes, la Cour de cassation se prononce désormais en référence à l'état de santé (existence ou non
d'une maladie), l'âge et la situation patrimoniale et familiale du souscripteur (présence ou non
d'héritiers) au moment des versements.
La Deuxième chambre civile de la Cour de cassation a jugé que les critères d'absence d'utilité et de
disproportion doivent être tous deux appréciés pour conclure à des primes manifestement exagérées
(arrêts du 10 juillet 2008 et du 23 octobre 2008).
Un arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 17 septembre 2009 confirme la
nécessité du cumul des critères d'utilité et de disproportion.
Lorsque la prime est exagérée, que faut-il prendre en compte pour la liquidation successorale ?
Selon la jurisprudence dominante, c'est l'intégralité de la prime qui doit être prise en compte pour
les opérations de rapport et de réduction (voir notamment Cass. 1e civ. 1-7-1997 n° 1245 P : Bull.
civ. I n° 217 ; CA Paris 30-5-2000 : Juris-Data n° 2000-118505).
Lorsque le bénéficiaire n'est pas soumis au rapport (parce que n'étant pas un héritier du
souscripteur, par exemple), la prime « excessive » ne sera pas rapportable. Elle sera le cas échéant
réductible pour la fraction excédant la quotité disponible dans les conditions fixées par les articles
920 et suivants du Code civil.
En toute hypothèse, le notaire reste le pivot autour duquel le quantum d'excès ou non des primes
versées peut être approché. Il lui faut donc impérativement être destinataire de la plus large
information de la part des compagnies d'assurance auprès desquelles le défunt avait souscrit des
contrats d'assurance vie.
En l'état actuel, il lui appartient donc de diagnostiquer cet éventuel excès, d'en instruire les héritiers
tout en leur indiquant les éventuelles conséquences patrimoniales. A défaut d'accord amiable entre
les parties, la décision de réduction sera soumise au contrôle du juge. Le notaire interviendra ensuite
pour procéder au partage des biens après la prise en compte de l'éventuelle indemnité de réduction.
L‟administration doit démontrer que l‟opération est fictive ou qu‟elle avait pour but exclusif
d‟éluder l‟impôt (article L 64 du livre des procédures fiscal). C‟est sur le terrain de la fraude à la loi
que l‟administration se place (car le contrat d‟assurance est bien réel et non fictif).
Cette solution n‟est mise en œuvre que lorsque les primes sont importantes et que donc l‟actif
taxable restant au regard des droits de successions est dérisoire. Mais l‟administration fiscale se
refuse à fournir des seuils (RM GOFAIN, 11 janvier 1993). A priori aucune règle forfaitaire ne peut
être établie.
- Complicité du bénéficiaire
A ces critères s‟ajoute la complicité du bénéficiaire, critère implicite non retenu directement par
l‟administration fiscale. Dans les affaires où l‟abus de droit est retenu, le bénéficiaire avait participé
au montage soit comme curateur soit comme tuteur.
Mais cette qualification est assez peu retenue car les juges civils qui doivent trancher n‟admettent
qu‟avec difficulté le but exclusivement fiscal de l‟opération et la preuve de l‟abus de droit est
difficile à faire.
La preuve de l‟abus de droit est difficile à faire mais il existe un autre terrain pour écarter la
qualification d‟assurance vie.
Les avantages fiscaux de l‟assurance-vie peuvent également être remis en cause lorsque le
souscripteur y a recours alors que son décès est déjà prévisible (et qu‟il n‟y a donc pas d‟aléa).
M. G, avait souscrit, en 1994 et 1995, deux contrats d‟assurance-vie dont le montant des primes
représentait environ 82 % de son patrimoine. En 1996, trois jours avant son décès d‟un cancer dont
il se savait atteint depuis 1993, il désigne comme seule bénéficiaire Mme X, sa concubine, qu‟il
avait instituée, depuis peu, légataire universelle.
Au cours du contrôle de la déclaration de succession de M. G, l‟administration fiscale a notifié un
redressement à Mme X en considérant que les versements effectués au titre des contrats
d‟assurance-vie constituaient une donation indirecte. Donnant raison à l‟administration, la Cour
d‟appel relève à la fois l‟importance des primes versées au regard du patrimoine ainsi que l‟état de
santé de l‟assuré, pour caractériser l‟intention libérale de M. G et sa volonté de se dépouiller de
manière irrévocable.
Dans son pourvoi, Mme X conteste que M. G se soit dépouillé irrévocablement puisqu‟il disposait,
à défaut d‟acceptation du bénéficiaire, de la faculté de racheter ses contrats à tout moment. Ce qui
démontre, selon elle, que la souscription du contrat d‟assurance-vie ne peut être constitutive d‟une
donation indirecte.
Mais, la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 21 décembre 2007, relève, pour débouter
Mme X « qu’un contrat d’assurance-vie peut être requalifié en donation si les circonstances dans
lesquelles son bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de
manière irrévocable ».
Selon la Haute juridiction, les juges du fond ont ainsi pu déduire « en l'absence d'aléa dans les
dispositions prises, le caractère illusoire de la faculté de rachat et l'existence chez l'intéressé d'une
volonté actuelle et irrévocable de se dépouiller ».
La Cour de cassation estime donc que la Cour d‟appel a pu exactement en déduire que le
bénéficiaire d‟un contrat d‟assurance-vie pouvait être assujetti aux droits de mutation à titre gratuit.
La solution s‟explique car il ne s‟agit pas d‟assurance faute d‟aléa.
On observe en effet que la Cour de cassation évoque ici, eu égard aux circonstances de désignation
du bénéficiaire, une absence d’aléa. Ce qui est en cause ici, ce n‟est pas la qualification de
donation mais bien celle d‟assurance-vie qui suppose nécessairement un aléa. À cet égard, loin de
contredire les décisions de 2004, le présent arrêt est susceptible de les pondérer. Si un contrat
d‟assurance dont les effets dépendent de la durée de la vie humaine comporte en principe un aléa,
lui permettant d‟accéder à son statut successoral dérogatoire, il n‟en reste pas moins vrai que s‟il
s‟avère que les circonstances attestent d‟une absence d‟aléa, alors c‟est la qualification même
d‟assurance-vie qui pourrait être discutée et par voie de conséquence son statut dérogatoire
notamment au plan fiscal. C‟est le raisonnement tenu par la Cour de cassation en 2007 lorsqu‟elle
vise les circonstances dans lesquelles le bénéficiaire a été changé, c‟est-à-dire en réalité une
modification de la clause bénéficiaire quelques jours avant le décès du souscripteur. En revanche,
cette circonstance est indifférente à la qualification de donation, acquise dès le départ dès lors que la
souscription était animée d‟une intention libérale, et ce quelles que soient les modalités de
l‟opération.
De nombreux contrats d‟assurance vie sont utilisés pour réaliser une donation indirecte mais le droit
des libéralités ne s‟applique, s‟agissant d‟assurance, que dans les limites fixées par le code des
assurances ; mais s‟il ne s‟agit plus d‟assurance, faute d‟aléa, le droit des libéralités s‟applique alors
pleinement.
AJOUT :
Cet exposé n‟abordait pas la question de la révocation de la désignation du conjoint en tant que
bénéficiaire : cette question a été vue à propos de la remise en cause des donations entre époux. Cf
le jeu de l‟article 1096 du code civil et l‟incidence de la réforme de ce texte.
Ce point sera revu lors de la correction du cas pratique n°2 d‟entraînement.
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Commentaires prof :
La force du lobby des compagnies d‟assurance a conduit la cour de cassation a changé la notion
d‟aléas.
Important de se méfier des clauses de style, il faut savoir ce que le souscripteur veut vraiment.
223 civil ne concerne que les salaires non économisés, 1421 joue pour les actes d‟administration
comme pour les actes dispositions. La distinction entre gestion concurrente et cogestion est plus
juste que la distinction acte de disposition / actes d‟administration : le principe c‟est la gestion
concurrente, le versement des primes n‟est pas soumis à la cogestion.
Le versement de prime n‟est pas une donation de bien commun, Pelletier ass pl 12 décembre 1986.
1422 impose la cogestion en matière de donation de biens communs.
Quand le capital est versé à un tiers, la communauté a droit à récompense, parce que 1422 ne joue
pas.
La valeur de la police (≠ de la valeur de rachat) : primes versées + intérêts – frais, sera mis dans le
lot du mari, puisqu‟il a un droit exclusif de perception du capital, mais il faudra mettre dans le lot de
la femme l‟équivalence en biens communs.
L 132-16 : versement du capital au conjoint du souscripteur suite à son décès est un bien propre du
conjoint. C‟est une faveur fiscale, qui s‟expliquait au moment de son adoption en raison de la
faiblesse des droits du CS. Depuis la loi de 2001 cette faveur est plus discutable.
La jurisprudence de 2004 énonce que tous ces contrats sont des contrats sont aléatoire, l‟aléa
découle de la vie humaine.
Par cette solution la cour de cassation modifie la notion d‟aléa connue depuis le droit romain,
contrat dans lequel on ne sait pas à l‟avance qui va gager ou perdre. Si dès le départ le contrat est
équilibré l‟assureur ne supporte aucun risque et le souscripteur n‟aura aucun gain.
Dans le contrat d‟assurance vie mixte il n‟y a pas d‟aléa, quelque soit la date du décès l‟assureur
versera la même chose : primes versé + intérêt – frais.
Sur le plan pratique cette solution conforte la situation des personnes ayant conclu un contrat
d‟assurance vie, le dénouement de ce contrat correspondra à leur attente.
L‟arrêt de la chambre mixte 21 décembre 2007 tend à limiter la portée de la solution de 2004 en
requalifiant un contrat d‟assurance vie de donation indirecte, et par la réintroduit le droit des
successions.
Les arrêts de 2004 remettent en cause certains arrêts, mais ne remet pas en cause la jurisprudence
Pelletier, ni Praslicka, ni Degnian 10 juillet 1996, ni Nogert 13 mai 1998 (sur les assurances
croisées qui n‟ont pas d‟aléas).
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Exposé : Fruits et revenus, accroissement de biens propres
Dans une première partie, nous allons examiner si les fruits et revenus des biens propres
accroissent la masse propre ou la masse commune, puis dans une seconde partie nous envisagerons
les techniques créées par le législateur en faveur de l‟accroissement du patrimoine propre.
Dans un premier temps, la question s‟est posée de savoir si les fruits et revenus de biens propres
accroissaient la masse commune ou la masse propre.
Cette question a donné lieu à un débat important quant à la nature des fruits et revenus de biens
propres
Avant la loi du 13 juillet 1965, la question ne se posait pas puisque le régime légal était celui
de la communauté de meubles et acquêts : les fruits et revenus de biens propres étant des meubles,
ils étaient communs.
En effet, le législateur a introduit l‟article 1401 du Code civil en vertu duquel les acquêts
réalisés avec les économies faites sur les fruits et revenus de propres sont communs. Ce texte a
soulève une interrogation en raison du terme « économie » qui est employé, ce qui a donné lieu à
trois thèses doctrinales :
- les fruits et revenus de biens propres st-ils communs dès leur perception
- ou uniquement lorsqu‟ils sont économisés
- ou encore à partir du moment où ils sont transformés en acquêts ?
Or, l‟article 1403 alinéa 2 issu de la même loi prévoit que la communauté n‟a droit qu‟aux fruits
perçus et non consommés des propres. Ce texte peut laisser entendre deux choses
- soit les fruits et revenus de propres ne sont communs qu‟une fois économisés
- soit ils sont communs dès leur perception tant qu‟ils n‟ont pas été consommés.
L‟enjeu d‟une telle qualification ne peut être réellement appréhendé qu‟en considération du
contexte de l‟époque. Or la loi de 1965 a retiré à la communauté la jouissance des biens propres (art
10). C‟est pourquoi un époux peut vendre un bien propre seul puisqu‟il n‟existe plus de
démembrement de la propriété comme auparavant.
Article 10 de la loi du 13 juillet 1965
« Si les époux s'étaient mariés sans faire de contrat de mariage avant l'entrée en vigueur de la présente loi,
ils continueront d'avoir pour régime matrimonial la communauté de meubles et d'acquêts telle que la
définissaient les dispositions antérieures de la première partie du chapitre II, au titre cinquième du livre III
du code civil.
Néanmoins, à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans préjudicier aux droits qui auraient pu
être acquis par des tiers, les époux reprendront la jouissance de leurs propres et supporteront les charges
usufructuaires correspondantes, ainsi que les intérêts et arrérages de leurs dettes personnelles.
Pareillement, ils seront désormais soumis au droit nouveau en tout ce qui concerne l'administration des
biens communs, des biens réservés et des biens propres. »
tout en reconnaissant à chaque époux, et en particulier à la femme, le pouvoir de gérer seul ses biens
propres (art 1428) et d‟en percevoir les fruits. Cependant, le mari conservait l‟administration de la
communauté. Considérer que la femme gérait seule ses propres mais que les fruits et revenus de ces
biens-là tombaient dans la communauté, revenait à ne pas modifier la situation antérieure. En
d‟autres termes, la femme pouvait percevoir les fruits et revenus de propres mais elle devait les
remettre à son mari, qui avait seul le pouvoir de les utiliser.
La loi du 23 décembre 1985 n‟a pas modifié les articles en cause. Cependant, elle a opéré un
changement essentiel en accordant des pouvoirs concurrents à chaque époux sur la masse commune.
Par conséquent, la qualification des fruits et revenus de propres n‟a plus le même enjeu puisque
désormais même s‟ils sont communs, la femme pourra les gérer.
Néanmoins le débat a persisté, d‟où la nécessité d‟une intervention jurisprudentielle en la matière.
Le premier arrêt marquant concernant la nature des fruits et revenus des biens propres est
l‟arrêt Authier de la cour de cassation du 31 mars 1992. En l‟espèce madame se pourvoit en
cassation (après un arrêt qui confirme le précédent jugement) pour obtenir une récompense
dans la mesure où elle estime que des fonds propres en l‟occurrence les fruits et revenus de
ses biens propres ont servi à financer l‟acquisition d‟un immeuble commun.
La cour de cassation rejette le pourvoi en énonçant l‟attendu de principe suivant : « la communauté,
à laquelle sont affectés les fruits et revenus des biens propres doit supporter les dettes qui sont la
charge de la jouissance de ces biens ».
Dans cet attendu de principe il n‟y pas réellement la notion d‟appartenance des fruits et des revenus
de biens propres à la communauté en effet l‟arrêt parle d‟affectation de ceux-ci à la communauté.
Cependant il semblerait que les fruits et revenus de biens propres soient communs, même si la
Première chambre civile ne le dit pas expressément, en raison du visa de l‟article 1401 du code civil
relatif aux biens communs. La référence à l‟affectation des fruits et revenus de biens propres à la
communauté a été troublante et a donné lieu à des interprétations différentes même si la majorité de
la doctrine s‟est accordée pour dire qu‟ici la cour de cassation a rendu un arrêt de principe
concernant la nature commune des fruits et revenus des biens propres.
En effet, concernant la récompense l‟arrêt est plus clair et implique la qualification des fruits et
revenus des propres en tant que biens communs. L‟arrêt énonce qu‟il ne peut y avoir de récompense
dans le sens où se sont des fonds communs qui ont financé un bien commun. Dans la mesure où
cette affirmation se trouve après la notion d‟affectation des fruits et revenus de biens propres à la
communauté cela tend à la confirmation du caractère commun des fruits et revenus de biens
propres.
En pratique cet arrêt est essentiel car il affirme que la communauté a la charge de la jouissance des
propres et que par conséquent elle doit en supporter définitivement les charges telles que les intérêts
d‟emprunt. En l‟espèce la récompense ne sera due à la communauté qu‟en ce qui concerne le capital
remboursé par la communauté.
Il convient tout de même de préciser qu‟une contradiction apparait entre l‟arrêt et les les textes :
Affirmer que les charges de la jouissance des biens propres sont supportées par la communauté qui
a la jouissance des biens propres semble vouloir dire que la communauté a l‟usufruit des biens
propres, or nous avons vu plus haut que celui-ci a été retiré à la communauté par la loi de 1965
Les articles 1428 et 1403 alinéa 1 prévoient respectivement que « chaque époux à la jouissance de
ses propres » et que « chaque époux conserve la pleine propriété de ses propres » or ici au travers
de l‟arrêt on comprend que la communauté doit supporter les dettes relatives à la charge de
jouissance ce qui suppose que celle-ci à la jouissance des biens propres d‟un époux.
Concernant la récompense la cour casse l‟arrêt de la cour d‟appel au motif que madame devait une
récompense à la communauté pour avoir utilisé des biens communs soit les fruits et revenus des
propres pour acquérir un bien propre. A postériori on peut donc admettre au regard de l‟identité de
solution concernant les récompenses retenue par les deux arrêts que l‟arrêt authier consacrait bien la
nature commune des fruits et revenus de bien propre.
Désormais, la question de la nature des fruits et revenus de propres est clairement tranchée et ne
pose plus de problème.
En vertu de l‟arrêt de 1992, la communauté doit supporter les charges de la jouissance des fruits et
revenus de propres. Cette affirmation fait naître une difficulté : quelles sont ces charges ?
Par exemple, un époux paye la taxe foncière d‟un immeuble lui appartenant en propre avec les fruits
et revenus provenant de ce bien. Ces derniers étant communs, un droit à récompense existe-t-il ? En
d‟autres termes, la taxe foncière est-elle une charge de la jouissance des fruits et revenus de propres
incombant à la communauté ? Est-ce une dette définitivement commune ou définitivement
personnelle ? Pourtant, il semblerait que l‟on doive prendre en considération les revenus nets des
biens propres c‟est-à-dire les fruits et revenus de biens propres auxquels on soustrait les charges
relatives à ces biens propres.
Cette difficulté est élucidée en ce qui concerne la taxe d‟habitation ou les intérêts d‟un emprunt
affecté à l‟amélioration d‟un propre, dont il est certain que ce sont des charges de la jouissance.
En revanche, il n‟est pas certain que la réfection de la toiture ou le ravalement de la façade d‟un
bien propre soient une charge de la jouissance. La question peut également se poser par rapport aux
frais de copropriété d‟un immeuble propre. Faut-il tenir compte des revenus nets de ce bien : loyers
– frais de copropriété ou faut-il faire le tri entre les charges de copropriété d‟entretien du bien
supportées par la communauté et les autres supportées par le propriétaire du bien ?
La révision ou l‟assurance obligatoire d‟un véhicule automobile appartenant en propre à un époux et
qui sert à la famille constituent-elles des charges de la jouissance ?
On peut citer de nombreuses dettes qui soulèvent la question dès lors qu‟est en jeu un propre.
Il n‟existe aucune réponse tranchée dans les textes ou par la jurisprudence de manière générale,
autrement dit il faut opérer une analyse casuistique des dépenses relatives à un bien propre pour
déterminer s‟il s‟agit des charges de la jouissance incombant à la communauté ou de dettes à la
charge définitive du propriétaire. Un raisonnement par analogie pourra parfois être suivi.
Une autre question se pose en raison de l‟arrêt de 1992 : la communauté doit-elle toujours supporter
les dettes qui sont la charge de la jouissance des biens propres ou uniquement si elle profite
effectivement du bien (car la famille y réside ou que la communauté s‟enrichit des loyers perçus par
le propriétaire de ce bien propre) ?
Exemple : si un époux est propriétaire en propre d‟une maison secondaire dont il est le seul
utilisateur, la communauté doit-elle assumer définitivement les charges de la jouissance de ce bien ?
En réalité, il n‟y a pas lieu de distinguer car la communauté a vocation à percevoir les fruits et
revenus de biens propres qu‟ils rapportent ou non des revenus. En conséquence, elle doit supporter
définitivement les dettes qui sont la charge de la jouissance de ces biens.
On peut dire que la communauté légale manifeste une certaine force d‟attraction qui fait que les
fruits et revenus de biens propres sont communs ce qui résout le problème des récompenses.
Cependant, le législateur a créé diverses techniques permettant d‟accroître les masses propres de
chaque époux.
Un premier exemple se trouve dans l‟article 1406 alinéa premier du Code civil.
A - Distinction des fruits et revenus de biens propres par rapport à l’accroissement de valeurs
mobilières propres
Une fois que l‟on admet que les fruits et revenus de biens propres sont communs, il est
nécessaire de les distinguer des valeurs nouvelles et autres accroissements se rattachant à des
valeurs mobilières propres désignées par l‟article 1406 al 1 er. En effet, en vertu de cet article, les
accroissements de biens propres st propres, sauf récompense.
Cette disposition a fait l‟objet de très peu de contentieux. On peut tout de même citer un
arrêt essentiel rendu par la Cour de cassation le 12 décembre 2006.
Les époux x ont divorcé, et, lors de la liquidation du régime, Mme x a réclamé la propriété
de la moitié des parts sociales distribuées pendant le mariage. Le litige a été porté devant les juges.
La Cour d‟appel a rejeté cette prétention. Mme x a donc formé un pourvoi en cassation. Elle
alléguait « qu'en cas d'augmentation de capital d'une [société] par incorporation des réserves, les
parts gratuites distribuées aux associés mariés sous un régime de communauté constituent des
acquêts quand bien même les parts détenues initialement seraient des biens propres ».
Et pour le cas où ces nouvelles parts seraient propres, Mme x invoquait qu‟elles provenaient des
« économies réalisées sur les revenus de biens propres », ce qui ouvrait droit à récompense au profit
de la communauté.
La Cour de cassation n‟a pas retenu cette argumentation. Elle a affirmé que les bénéfices
réalisés par une société ne devenaient des fruits ou revenus de biens propres uniquement en cas de
distribution sous forme de dividendes. Ce qui n‟était pas le cas en l‟espèce puisque les bénéfices
distribuables avaient permis une augmentation de capital, "sans nouveaux apports et donc à titre
gratuit". La Cour affirme alors que l‟attribution gratuite des parts nouvellement créées constituaient
des accroissements se rattachant à des valeurs mobilières propres ayant elles-mêmes, en vertu de
l‟article 1406 al 1er, la nature de biens propres. Ce à quoi elle ajoute que la communauté n‟a pas
financé l‟acquisition des nouvelles parts et donc il n‟y a pas lieu à récompense à son profit.
L‟article 1406 al 1er concerne également l‟hypothèse d‟une augmentation de capital à titre
onéreux. Dans ce cas, les associés bénéficient d‟un droit préférentiel de souscription, qui leur
permet d‟acquérir à titre préférentiel les nouvelles actions. Dès lors qu‟un époux détient des actions
qui lui sont propres et qu‟il décide d‟exercer son droit préférentiel de souscription, les nouvelles
actions prendront la nature des actions d‟origines même si elles ont été acquises avec de l‟argent
commun.
L‟arrêt de 2006 est critiquable en ce qu‟il ne cesse de parler d‟attribution gratuite des parts
sociales or juridiquement il ne s‟agit pas d‟une libéralité. En réalité, il faut mettre l‟accent sur la
différence comptable pour la communauté selon le mode de distribution. En effet, il existe deux
manières pour une société de distribuer les bénéfices qu‟elle a réalisés. Ces deux techniques vont
avoir une incidence essentielle quant à la nature des biens distribués, ce qui peut paraître
discutable :
- soit elle les distribue sous forme de dividendes auxquels cas ces derniers constitueront des
fruits et revenus de biens propres qui, selon la Cour de cassation (civ. 1992 et Civ. 2007),
constituent des biens communs
- soit elle les distribue sous forme de droits sociaux supplémentaires au travers d‟une
augmentation de capital social et dans cette hypothèse, les valeurs mobilières distribuées
seront propres conformément à l‟article 1406 alinéa premier.
Par conséquent, l‟époux propriétaire des parts sociales va profiter des bénéfices de la société d‟une
manière ou d‟une autre mais dans un cas, il sera propriétaire en propres des biens distribués alors
que dans un autre, les sommes distribuées reviendront à la communauté.
Pour illustrer la portée de la distinction, il est intéressant de faire une comparaison avec la
technique de l‟accession telle qu‟énoncée à l‟article 1406 du Code civil.
L'accession ne constitue pas un accroissement de biens propres au sens du sujet que nous traitons.
Nous allons prendre deux exemples, l‟un relatif à des fruits et revenus juridiques et l‟autre à des
fruits naturels.
Lorsqu‟une maison est construite pendant le mariage sur un terrain propre, la règle de
l‟accession issue de l‟article 1406 prévoit que ce nouveau bien est propre. Cependant, les loyers qui
pourront être tirés de sa location sont des fruits et revenus qui sont communs, en application des
règles développées dans la première partie.
Par ailleurs, si une graine fruitière est plantée pendant le mariage sur le terrain ci-dessus,
l‟arbre qui va en résulter sera propre par accession, conformément à l‟article 1406. En revanche, les
fruits qu‟il va produire seront des biens communs.
Lorsque l‟article 1406 dispose que les valeurs nouvelles et autres accroissements se
rattachant à des valeurs mobilières propres forment des propres, il énonce une exception à la règle
selon laquelle les fruits et revenus de biens propres sont communs, que nous venons d‟illustrer. En
effet, en l‟absence de cette exception légale, les accroissements relatifs à des valeurs mobilières
devraient être communs.
Cette disposition concernant les valeurs mobilières énonce une solution spécifique voire
étonnante car les fruits et revenus de biens propres sont en principe communs…sauf, en application
de ce texte, quand ces revenus se traduisent par une distribution d‟actions.
Pour conclure il convient de préciser que les époux peuvent, au travers d‟un régime
conventionnel, se soustraire aux règles étudiées ci-dessus.
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Seul l‟époux a le droit de percevoir les revenus des propres, mais ce sont des biens communs dès
leur perception.
L‟arrêt de 2007, clarifie mais n‟apporte rien par rapport de 92 qui n‟énonçait pas de récompense.
La notion de jouissance reste en contradiction avec l‟article 10 de la loi de 1965 qui dit que la
communauté n‟a plus l‟usufruit des propres
Revenu nets ou bruts : bien propre époux paye la taxe foncière avec les revenus que produit ce
bien : droit à récompense pour la communauté ou pas ? La taxe d‟habitation est une charge de
jouissance, pas la taxe foncière (charge du propriétaire). On pourrait penser que ce sont les revenus
nets qui sont communs. Inversement si elle est payée avec des biens propres l‟époux a-t-il droit à
récompense ?
Si elle est payée par les revenus et qu‟elle n‟a pas droit à récompense c‟est une charge de
jouissance, sinon elle devra être payé par le propriétaire.
Il faut définir qu’elles sont les charges de la jouissance, charges communes qui doivent être
payés par la communauté.
Acquisition d‟un bien propre fait avec un emprunt (ex acheté juste avant de se marier) intérêts sont
une charges communes, le capital est une dette définitivement personnelle => la communauté n‟a
pas droit à récompense pour les intérêts de l‟emprunt.
La communauté ne doit supporter les dettes de jouissance que lorsqu‟elle en profite (maison
d‟habitation, location revenue perçu par la communauté) ou dans tous les cas (si seul le propriétaire
profite du bien). Il ne faut pas distinguer, la cour de cassation s‟exprime en terme généraux => dans
tous les cas la communauté supporte les charges de jouissance, la communauté à vocation à
percevoir les revenus, elle doit supporter les dettes de jouissance, même si la perception est
théorique.
Acquisition d‟action quand on a un portefeuille de valeur mobilière c‟est plus un acte de gestion
qu‟un acte de disposition (on achète on revend etc…) à défaut il n‟y aurait plus de valeur propres.
Universalité de fait du portefeuille les différentes cessions et acquisitions sont des actes de gestions
du portefeuille, la gestion du portefeuille consiste à acheter et revendre, mais on reste dans le même
volume d‟action, pas besoin de formalité de remploi (trop lourd). La plus ou moins value du
portefeuille reste propre, le portefeuille a pu générer des revenus, s‟ils sont distribués sous la forme
de dividende ce sont des revenus de propres => commun (1403), si le profit est distribuer sous
forme d‟actions nouvelle elles sont propres (Civ1 12 décembre 2006).
=> Difficile cohérence de l‟arrêt de 2006
Par contre en cas d‟acquisition sans revente des actions, ce n‟est plus un acte de gestion, c‟est un
simple acquêt, il est commun.
Si c‟est un droit préférentiel de souscription, c‟est un accroissement => bien propre soumis à
récompense (1406 al 1)
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Exposé : Les stocks options
Sous le vocable « stocks options » (qui sont régies par les articles L.225-177 et suivant du Code de
commerce), il faut entendre options de souscription d‟actions ou d‟achat d‟actions. Plus
précisément, il s‟agit d‟un droit attribué à un salarié de pouvoir acheter des actions de son entreprise
à un prix fixé à l'avance (appelé prix d'exercice), avec une décote par rapport au cours de Bourse
du moment de l'attribution et dans un délai déterminé. Si le salarié décide de lever son option, il
achète les actions au prix d'exercice et réalise une plus-value, lorsqu'il les revend. Il n'y a pas de
risque de perte dans la mesure où si le cours de l'action est plus bas que le prix d'exercice, le
salarié n'exerce pas son option.
La plus-value dégagée est le différentiel entre le prix de vente de l‟option et son prix d‟exercice.
Celle-ci fait de l‟option de souscription un mode de rémunération, mais elle dépend du cours
boursier au jour de la revente, lequel est une donnée imprévisible. Il s‟agit ainsi d‟une sorte de
salaire différé.
Ce mécanisme inspiré de la pratique américaine, a été introduit en droit français par une loi du 31
décembre 1970. Le régime des stock-options a subi depuis de très nombreuses modifications. La loi
relative aux Nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001, a modifié le régime des options
acquises après le 27 avril 2000 : leur octroi est beaucoup plus encadré dans un souci de transparence
et leur fiscalité modifiée.
Les stocks options ne peuvent être acquises que par les propres salariés de la société. Elles étaient
habituellement réservées aux cadres dirigeants, toutefois, elles sont devenues en quelques années un
mode de rémunération ordinaire des cadres de la nouvelle économie, et ne sont plus réservées aux
catégories à hauts revenus, lesquelles optent le plus souvent pour un régime de séparation de biens.
Cependant aucune loi n‟est encore intervenue pour préciser le sort des stocks options dans le cadre
du droit patrimonial de la famille. La jurisprudence étant pour l’instant peu abondante en la
matière, la doctrine alimente le débat.
En effet, en pratique, les notaires sont de plus en plus interrogés sur le sort concret qu‟il convient de
réserver aux « stock-options » dans le patrimoine de leur titulaire, à l‟occasion d‟étapes essentielles
telles qu‟un divorce, la transmission à titre gratuit entre vifs ou le décès du bénéficiaire.
Dans une réponse ministérielle du 18 juin 2001, le Ministère de l‟Economie, des Finances et de
l‟Industrie est venu préciser le régime de stocks options en cas de divorce. Même si les réponses
ministérielles n‟ont aucune autorité juridique, elles peuvent influencer les praticiens.
D‟autres réponses ministérielles concernent la question de la fiscalité.
Ces réponses ministérielles ont le mérite de poser quelques principes mais contiennent des
imprécisions notables et reposent sur une analyse discutable de la nature des stock-options.
La problématique ici est de définir la qualification juridique la plus adéquate pour les stock-options
dans le cadre du régime légal de communauté. Une autre question se pose en pratique au jour de la
dissolution et de la liquidation de la communauté : quelle est l‟évaluation qui doit être faite des
stock-options, dans la seule hypothèse où l‟option bénéficiant au salarié n‟est pas levée.
Nous analyserons dans un premier temps la qualification qui peut être donnée aux stock-options (I),
avant de tenter d‟élucider la principale difficulté qui se pose aux praticiens (II).
Lorsque l‟époux à qui des stocks-options ont été attribuées pendant le mariage n‟a pas encore levé
l’option au jour de la dissolution de la communauté : trois qualifications contradictoires doivent
être examinées :
- celle de bien propre, auquel cas le conjoint n‟aurait droit à rien ;
- celle de bien commun, auquel cas le droit de lever les options serait inclus dans la
communauté ;
- et celle consistant à distinguer l‟exercice de l‟option et la valeur patrimoniale
L‟article 1404 du Code civil dispose que « forment des propres par nature, quand même ils
auraient été acquis pendant le mariage,…les créances et pensions incessibles et plus généralement,
tous les biens qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement attachés à la
personne ».
En s‟appuyant sur cette disposition, certains auteurs affirment que les stock-options sont
effectivement des droits personnels, « exclusivement attachés à la personne », puisqu‟il appartient à
l‟organe de gestion de déterminer les personnes bénéficiaires des options. Seuls les salariés de
l‟entreprise sont habilités à exercer l‟option, ce droit n‟étant aucunement transmissible à leur
conjoint, ou à quiconque.
Ainsi, pour certains auteurs comme le professeur Couret, les options de souscription d‟achat
d‟actions sont des biens propres par nature dans la mesure où elles ne confèrent à leur bénéficiaire
qu‟un « avantage financier virtuel et incertain ».
D‟autres aboutissent au même constat en arguant que le bénéficiaire d‟une option est investi d‟un
droit conditionnel strictement personnel et incessible pour lequel toute liberté lui est laissée pour
l‟exercice ou non de l‟option.
Cette incessibilité tiendrait à l‟article L.225-183 du C.com, aux termes duquel « les droits résultant
des options consenties sont incessibles jusqu’à ce que l’option ait été exercée ». Or, selon l‟article
1404 du Code civil,.les créances incessibles forment des propres par nature, quand bien même elles
auraient été acquises pendant le mariage.
La possibilité de souscrire l‟option ayant un caractère purement personnel et incessible, seul l‟époux
titulaire serait propriétaire. Personne ne peut se substituer dans son exercice. De plus à défaut
d‟exercice des options dans le délai prévu ou à défaut de correspondre aux conditions prévues dans
le plan, les options sont perdues, sans compensation possible.
La solution est totalement différente si les stock-options sont considérées comme appartenant à la
masse commune.
2) Les stock-options comme actifs de communauté
En réponse à la précédente argumentation, on peut observer que le caractère incessible des stock-
options est loin d‟être décisif pour leur qualification juridique
De nombreux auteurs certains auteurs estiment que c‟est tout simplement l‟article 1401 du Code
civil qu‟il faut appliquer. Ce texte précise que « la communauté se compose activement des acquêts
faits par les époux ensemble ou séparément durant le mariage, et provenant tant de leur industrie
personnelle que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs biens propre ». Il est
classiquement admis que les acquêts « de source » sont avant tout les « gains et salaires ». En
application de ce texte, la doctrine majoritaire considère que les options en tant qu‟acquêts
provenant de l‟industrie personnelle des époux, sont des gains et salaires et tombent par conséquent
en communauté. La notion de gains et salaires en droit des régimes matrimoniaux semble
s‟appliquer à tous les revenus professionnels des époux.
C‟est en effet par son industrie personnelle que le salarié ou le dirigeant deviendrait bénéficiaire des
options.
La qualification de bien commun semble avoir les faveurs de la réponse ministérielle qui assimile
les options de souscription à des acquêts provenant de l‟industrie personnelle des époux au sens de
l’article 1401 du Code civil.
Par ailleurs, l‟option est un droit de créance, or ce droit de créance a été acquis pendant le mariage :
peu importe que la créance soit effectivement payée après la dissolution, ce qui compte ici, est le
fait générateur de la créance qui est né pendant le mariage.
En outre, la reconnaissance d‟un caractère personnel et incessible au droit d‟option n‟est pas en soit
décisive ; elle n‟empêche pas de considérer la valeur patrimoniale des stock-options comme
commune : par comparaison ne pas oublier qu‟en application de l‟article 223 du code civil seul
l‟époux salarié peut percevoir ses salaires et que seul l‟époux retraité peut percevoir sa retraite qui
est une créance incessible : pour autant les salaires et les arrérages de la pension de retraite sont des
biens communs si ces créances sont nées pendant la communauté ;
Ces solutions sont logiques mais peuvent-elles être transposées sans hésitation aux stock-options ?
- Certains en doutent car avant l‟exercice de l‟option, la communauté ne finance en aucune manière
l‟acquisition d‟un bien puisque ce n‟est qu‟au moment de la levée de l‟option que le titulaire des
stock-options sera amené à payer le prix des titres. Mais est-ce le problème ? On peut considérer
que l‟acquisition pour revendre et réaliser une plus value correspond à l‟étape du paiement du
salaire mais un salaire est commun dès lors que la créance de salaire est née pendant le mariage.
- Certains hésitent car dans la logique de cette qualification, les stock-options devraient être
soumises aux règles de pouvoir concernant les biens communs, à savoir le principe de gestion
concurrente. Mais c‟est oublier que s‟agissant de gains et salaires c‟est l‟article 223 sur la libre
perception et la libre disposition qui doit jouer !
En réalité, les règles régissant les pouvoirs des époux et celles gouvernant la composition des
masses sont deux choses différentes.
Compte tenu de la complexité des stock-options, une qualification symétrique paraît inadaptée.
Aussi un régime mixte a-t-il pu être proposé comme intermédiaire (A), de même qu‟un régime
successif (B).
Il n‟y a pas de « bien mixte » entre bien commun et bien propre. C‟est l‟un ou l‟autre !
Pourtant certains auteurs, mais aussi la réponse ministérielle de 2001, voire la Cour de cassation,
font encore la distinction entre le titre qui serait propre et la finance qui serait commune ce qui peut
conduire à parler de biens « mixtes ». Mais le titre n‟est pas un bien (hors du commerce) et cela n‟a
donc pas de sens. En outre cela ne facilite pas le règlement de cette difficulté liquidative.
En revanche il serait sans doute plus cohérent de distinguer entre titularité et propriété.
La réponse ministérielle de 2001 introduit à ce point de la réflexion, une nuance, relayant ainsi
l‟opinion émise par le CRIDON : cette dernière propose de porter à l‟actif de la communauté la
valeur des options proposées à un époux bénéficiaire qui ne les aurait pas encore exercées, estimant
que les options proviennent de l‟industrie personnelle de l‟époux.
Au contraire, « sous réserve de l‟interprétation souveraine des juridictions » leur exercice resterait
personnel puisque seul le bénéficiaire a la faculté de lever l‟option. Cette qualification dissocie ainsi
le droit de souscription et la valeur des actions.
Au regard de cette distinction, la valeur patrimoniale des options tombe dans la communauté, mais
seul l‟époux salarié a la qualité de bénéficiaire.
Cette distinction a été reprise dans l‟arrêt de la cour d‟Appel du 7 mai 2004. Le droit d‟exercice de
l‟option est un droit strictement personnel à son titulaire mais la valeur patrimoniale est commune :
« Considérant, que si le droit d‟exercice de l‟option est un droit strictement personnel à M.T, la
valeur patrimoniale des options (…) entre en communauté ».
La CA de Paris (7 mai 2004) a eu à se prononcer sur cette difficulté liquidative d‟une communauté
où l‟un des époux était titulaire des stock-options.
En l‟espèce, Les juges de 1ère instance décident que les droits acquis par le bénéficiaire sur les 800
stock-options seront intégrés dans la masse à partager.
Pour s‟opposer à l‟inclusion des stock-options dans l‟actif de la communauté, le mari soutient
devant la cour qu‟elles constituaient d‟une part des droits personnels étroitement liés à sa qualité de
salarié, d‟autre part des créances incessibles et insista enfin sur le fait que l‟option n‟avait pas été
levée à la date de l‟assignation en divorce.
La Cour d‟appel de Paris infirme le jugement de 1ère instance au motif que « si le droit d’exercice
de l’option est un droit strictement personnel au bénéficiaire (M.T), la valeur patrimoniale des
options correspondant au différentiel entre le prix d’exercice de l’option et la valeur du titre au
jour de son acquisition, entre en communauté, dès lors que lesdites options avaient été attribuées
au mari avant l’assignation en divorce et à condition que l’option en ait été effectivement levée par
ce dernier ».
La Cour considère ainsi que le droit d‟option est une prérogative appartenant au seul titulaire, mais
que sa valeur tombe en communauté à deux conditions : que les options aient été attribuées pendant
la communauté (avant la dissolution) et que l‟option ait été effectivement levée .
Toutefois, là encore l‟analyse ne convainc pas. Affirmer que le droit d‟exercice de l‟option est
« personnel » ou « appartient » à son titulaire crée une ambiguïté.
La référence à la distinction entre le titre et la finance, invoquée dans les réponses ministérielles
aurait pu être évitée. Il serait préférable de distinguer entre la qualité pour lever l‟option, dont seul
le bénéficiaire est titulaire, et le bien lui-même, c'est-à-dire le droit d‟option qui fait partie
pleinement, et pas seulement en valeur, de la communauté.
Pour le professeur Alain Couret, l‟analyse transpose aux options une démarche inadaptée dans la
mesure où les options sont incessibles alors que la jurisprudence qui établit la distinction entre le
titre et la finance s‟applique à des droits cessibles. La tendance à la dépersonnalisation de l‟option
ne tiendrait donc pas du point de vue du raisonnement juridique.
D‟autres auteurs, tel que le professeur Vareille, estiment que la distinction entre le titre et la finance
n‟est pas nécessaire et ne vaut que comme comparaison, car les stocks options doivent être rattachés
« sans hésitations à la masse commune par la philosophie même du régime de communauté ».
Monsieur Grosclaude souligne que tant que l‟option n‟est pas exercée, la communauté ne finance
aucunement l‟acquisition d‟un bien, puisque ce n‟est qu‟au moment de la levée de l‟option que le
bénéficiaire des stock-options sera amené à payer le prix.
En revanche pour certains auteurs dont Jérôme Casey et Jean-Philippe Mabru cette distinction
apparait obsolète dans la mesure où il est impossible de déterminer la valeur d‟un droit incessible.
Dès lors il faudrait considérer que les options de souscriptions ou d‟achat d‟actions forment des
biens propres par nature tant que le bénéficiaire à la faculté de les exercer sans récompense pour la
communauté qui ne subit aucun appauvrissement. Toutefois une fois les actions souscrites ou
acquises celles ci constituent des biens communs.
La jurisprudence du 7 mai 2004 souligne que les options n‟étant pas levées avant la date de la
dissolution de la communauté ne pouvaient constituer un actif à partager. La cour soumet donc
l‟entrée en communauté de la valeur des stocks options, à la date de la levée de l‟option.
Une partie de la doctrine estime que la qualification de bien mixte ne tient ni en droit, ni en équité.
Mais quand l‟option n‟a pas été levée, le caractère incertain de la levée de l‟option ne permet pas
une évaluation de la plus-value d‟acquisition au moment de la dissolution de la communauté.
Ainsi, la qualification des stocks options n‟étant ni mixte ni unique, certains auteurs soutiennent
qu‟elle s‟échelonnerait dans le temps. Les options formeraient alors des biens personnels par nature
au sens de l‟article 1404 alinéa 1 du code civil tant qu‟elles ne sont pas exercées.
-Si la communauté est dissoute avant même l‟exercice des options, elle n‟a subi aucun
appauvrissement puisque les titres ne sont payés qu‟au moment de leur exercice. Il est donc inutile
de lui octroyer une compensation.
- Au contraire, si les options ont été exercées avant la dissolution de la communauté, il convient de
les inscrire dans la masse commune. En application de l‟article 1401, les stock-options tomberaient
dans la communauté.
Cependant, seule une petite partie de la doctrine adhère à la position du régime successif des stock-
options, tout en concluant à la difficulté de l‟évaluation des options et de leur plus-value.
Dès lors que la valeur des stock-options est intégrée à l‟actif de la communauté et que la
communauté est dissoute, les notaires devront procéder au partage de cette valeur entre les époux.
Le moment de la valorisation des stock-options (A) et l‟évaluation des stock-options (B) méritent
ainsi d‟être précisées.
A. Le moment de la valorisation
Les options de souscription ou d‟achat d‟actions ont-elle une valeur au jour de leur attribution (2)
ou se réduisent-elles au simple droit de lever l‟option (2) ?
La doctrine est divisée sur la question. La Cour d‟appel de Paris a, quant à elle, pris le parti de leur
extra-patrimonialité.
1. La thèse de l’extra-patrimonialité
Pour la Cour d‟appel de Paris (arrêt du 7 mai 2004), la valeur des stock-options correspond à « la
plus value d‟acquisition », c'est-à-dire à la différence entre le prix des actions tel qu‟il a été fixé par
la société émettrice au moment de l‟attribution des stock-options et le cours des actions lors de
l‟exercice de l‟option c'est-à-dire au moment de leur acquisition. Or, comme il ne peut exister de
plus-value d‟acquisition avant l‟acquisition des titres, l‟arrêt de la Cour d‟appel sous-entend
qu’avant la levée de l’option, aucune valeur patrimoniale n’est reconnue aux stock-options.
Tant qu‟elle n‟est pas exercée, la valeur de l‟option est nulle.
En d‟autres termes, les options de souscription ou d‟achat d‟actions se réduisent au droit strictement
personnel d‟exercer l‟option. Or, le droit d‟option n‟a pas en lui-même une valeur patrimoniale. Il
confère une potentialité d‟acquisitions d‟un nombre déterminé de titres à un prix établi lors de la
promesse.
La Cour d‟appel refuse donc de prendre en compte cette plus-value qui n‟est qu‟hypothétique,
puisque tributaire non seulement de l‟évolution du coût des titres proposés, mais aussi et surtout de
la décision de l‟époux attributaire qui dispose du pouvoir discrétionnaire de lever l‟option.
C‟est la raison pour laquelle la Cour d‟appel infirme le jugement déféré en ce qu‟il a intégré d‟ores
et déjà les droits acquis par le mari sur les stock-options dans la masse à partager, sans se
préoccuper de savoir si l‟option avait été effectivement levée.
En cas de dissolution de la communauté avant la levée de l‟option, la solution de la Cour d‟appel est
impitoyable pour le conjoint de l‟attributaire qui ne prendra aucune part à la plus-value
d‟acquisition.
A suivre la réponse de la Cour d‟appel de Paris, le moment de la levée de l‟option (avant ou après la
dissolution) change la donne. Or, en cas de divorce, la date de dissolution est à géométrie variable.
L‟époux titulaire des stock-options peut donc avoir tout intérêt à demander le report de la date de
dissolution sur le fondement de l‟article 262-1 du Code civil, s‟il a levé l‟option entre la séparation
de fait et l‟ordonnance de non conciliation (ONC).
En principe, la date de la dissolution est l‟ONC, donc l‟époux a, a priori, levé l‟option pendant le
mariage. La plus-value d‟acquisition entrera alors en communauté et sera partagée entre les époux.
Cependant, si l‟époux titulaire du droit d‟option obtient le report de la dissolution de la communauté
à la date de séparation de fait, il aura alors levé l‟option après la dissolution. Au moment de la
dissolution de la communauté, l‟option n‟était pas exercée et n‟avait donc aucune valeur
patrimoniale. Ainsi, le conjoint de l‟attributaire ne prendra aucune part à la plus-value d‟acquisition.
De façon plus générale, considérer l‟option comme le fait générateur de la plus-value d‟acquisition
revient, dans certaines circonstances, à faire dépendre de la seule volonté de l‟attributaire la portée
de son régime matrimonial.
Selon cette seconde thèse (soutenue notamment par Mr François Sauvage), la naissance de la
créance ne serait pas conditionnée par l‟option. La qualification de bien commun n‟est pas
subordonnée à la levée effective de l‟option par l‟époux bénéficiaire. L‟option ne serait que la mise
en œuvre personnelle d‟une créance commune préexistante.
Le droit de bénéficier d‟un prix fixe ou la possibilité de réaliser une plus-value entrerait en
communauté dès l‟attribution des stock-options, sans préjudice du caractère personnel ou
discrétionnaire de la décision d‟achat ou de souscription des actions.
Or dès l‟instant où l‟on considère que l‟attributaire n‟a été gratifié que du droit d‟opter pour le
compte de la communauté, on ne peut le laisser empocher pour son compte, la plus value
d‟acquisition au motif de son divorce, comme le fait pourtant la Cour d‟appel de Paris.
S‟il est clair que ce droit d‟option n‟équivaut pas à la propriété actuelle des actions, il n‟est pas juste
d‟affirmer qu‟il n‟a aucune valeur patrimoniale. Il faut s‟efforcer de ne pas léser l‟époux
bénéficiaire qui, au jour de la dissolution de la communauté n‟a pas encore levé l‟option, en le
considérant d‟ores et déjà propriétaire d‟actions qui n‟existent pas encore, mais il ne faut pas non
plus léser son conjoint en voyant, par principe, une non-valeur dans ce droit d‟option qui est une
source potentielle de richesses.
Il n‟en reste pas moins que la créance de la communauté demeure conditionnelle. En effet, la chute
du cours de l‟action anéantira la perspective d‟une plus value d‟acquisition. Mais ce n‟est pas parce
qu‟une créance porte sur un droit conditionnel qu‟elle ne vaut rien.
Se pose alors la question de leur évaluation. En effet, cette valeur ne peut se calculer que par
référence à la cotation des titres au jour de l‟exercice de l‟option. Or l‟intervalle de temps entre
l‟attribution de l‟option et la possibilité de revendre les actions souscrites peut être considérable Il
est donc totalement divinatoire de chercher à déterminer une valeur de l‟option.
Le principal problème si l‟on considère que la valeur des stock-options doit être intégrée à l‟actif de
la communauté est celui de l‟évaluation.
Il est en effet difficile de déterminer la valeur des stock-options au jour de la dissolution de la
communauté, alors que l‟option n‟a pas encore été levée à cette date ou tout au moins au moment
où la communauté est liquidée.
Comment évaluer un espoir de gain ? Il se peut tout d‟abord que l‟époux titulaire des stock-options
ne lève pas l‟option. En effet, si le prix d‟exercice de l‟option est toujours supérieur au prix réel de
l‟action, il ne lèvera jamais l‟option. Et à supposer qu‟il lève l‟option, comment savoir quelle sera la
plus value d‟acquisition qu‟il réalisera ?
Plutôt que de tenter de faire une évaluation incertaine, certains auteurs (tels que Mr François
Sauvage) ont alors proposé de porter pour mémoire à l‟actif de la communauté les options en valeur
et compléter la liquidation le jour où l‟option sera levée.
La valeur précédemment inscrite pourra, à la levée de l‟option, être réévaluée en tenant compte de
la plus-value d‟acquisition ; c'est-à-dire de la différence entre le prix de souscription ou d‟achat des
actions fixé par le conseil d‟administration ou le directoire de la société et leur valeur au jour de la
levée effective de l‟option
Cette solution consiste à reconnaître aux stock-options une valeur de principe et d‟attendre la levée
de l‟option pour évaluer la part due par l‟attributaire à son ex-conjoint.
Telle est d‟ailleurs la position du CRIDON de Paris en 1998, qui suggère aux notaires confrontés à
la question de porter pour mémoire à l‟actif de la communauté, l‟existence des options et d‟établir,
au moment de la levée de l‟option, un acte liquidatif complémentaire.
Dans un premier temps, la valeur des options portée pour mémoire à l‟actif de la communauté sera
de 20 euros (soit 40-20). Ainsi lors du partage par moitié chaque époux recevra 10 euros.
Cependant, cette valeur sera réévaluée lors de la levée effective de l‟option en tenant compte de la
plus value d‟acquisition qui s‟élève en l‟espèce à 40 euros (60 -20).
La valeur des options portée à l‟acte liquidatif complémentaire, sera alors de 20 euros (valeur
portée pour mémoire – plus value d‟acquisition). Après partage par moitié, il sera rajouté 10 euros
dans la part de chacun des époux.
Cette solution ne donne pas entière satisfaction car elle laisse les ex-époux dans une expectative
lorsque les options n‟ont pas été exercées avant la dissolution.
Cependant, cette solution n‟est pas retenue pas les réponses ministérielles de 2001.
Le ministre n‟avait pas donné d‟explication quant au mode de calcul de la valeur de l‟option,
en soulignant uniquement que les options doivent être portées à l‟actif de la communauté « pour une
certaine valeur ».
Mais il a ensuite précisé que les éventuelles plus-values dégagées après la dissolution de la
communauté n‟ont pas à être partagées par les époux.
La solution préconisée est de faire comme si l‟option était levée au jour de la dissolution de la
communauté. Ainsi, la valeur à intégrer dans l‟actif de communauté est une plus-value d‟acquisition
fictive déterminée en faisant la différence entre le prix d‟exercice des stock-options et l‟estimation
de la valeur réelle de l‟action au jour de la dissolution de la communauté.
Cette méthode est critiquable parce qu‟elle ne tient pas compte du fait que les stock-options ne
représentent qu‟un gain probable. Il se peut que le titulaire ne lève pas l‟option ou que le gain soit
plus important.
En effet, si l‟estimation de la valeur est moindre que la valeur réelle au moment de la revente, l‟ex-
époux ne pourrait revendiquer aucun droit sur les plus-values dans la mesure où l‟exercice de
l‟option est strictement personnel au bénéficiaire. Les éventuelles plus-values de cession n‟auraient
pas à être partagées.
Il est également précisé dans cette réponse ministérielle de juin 2001 qu‟une fois la valeur
déterminée, cette valeur sera imputée sur la part de communauté du conjoint titulaire des stock-
options.
La valeur des stock-options sera mise dans le lot de l‟époux titulaire, pour le tout. Lorsqu‟il lèvera
l‟option les actions et les plus values constitueront des biens propres. Mais s‟il ne lève pas l‟option,
du fait de la technique d‟évaluation préconisée, il aura tout perdu : les stock-options et le patrimoine
équivalent à leur valeur dans la liquidation de la communauté.
La réponse ministérielle n‟étant pas très explicite quant au calcul de la valeur des stock-options au
moment de la dissolution, la Cour d‟appel de Paris, dans son arrêt du 7 mai 2004 (2ème chambre B),
a souhaité préciser cette valeur. La Cour d‟appel a établi que la valeur patrimoniale des options
correspond au différentiel entre le prix d‟exercice de l‟option et la valeur du titre au jour de son
acquisition.
Toutefois cette solution laisse intacte la question de l‟évaluation des stock-options. En effet, la Cour
d‟appel ne fixe pas les modalités d‟évaluation du prix d‟exercice de l‟option. Elle se contente de
définir la plus-value dégagée lors de la levée de l‟option, qui est directement liée au caractère
aléatoire du prix d‟exercice selon l‟évaluation qui en sera faite.
A titre d‟exemple, supposons que le prix de souscription de l‟option est de 20 euros et qu‟au jour de
la dissolution de la communauté, les actions valent 40 euros, la valeur définitive intégrée dans
l‟actif de communauté sera de 20 euros (soit 40-20). Peu importe que les actions valent 60 euros au
jour de la levée de l‟option.
Concernant la dissolution de la communauté par décès du titulaire des stock-options, il semble que
le problème de l‟évaluation de la valeur de celles-ci se pose à nouveau.
Toutefois, en cas de dissolution de la communauté par décès du titulaire des stocks options,
l‟évaluation sera en principe plus aisée pour le liquidateur. En effet, l‟article L.225-183 du Code de
commerce prévoit que, les héritiers du titulaire des stocks options disposent d‟un délai de 6 mois à
compter du décès pour lever l‟option.
Ce texte est d‟application délicate puisqu‟en principe l‟assemblée générale de la société émettrice
fixe elle-même la période pendant laquelle l‟option pourra être exercée. Il semble donc que la règle
posée par le Code de commerce déroge à ce principe : l‟option pourrait être exercée pendant une
période de six mois après le décès même si la date d‟exercice de l‟option prévue par l‟assemblée
générale est postérieure.
Or, le notaire liquide la succession généralement plus de six mois après le décès. Il a donc ici la
possibilité en principe de connaître la vraie plus value de l‟acquisition pour la porter à l‟actif de la
communauté.
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Commentaire prof
Pas de réponse :
- Réponse ministérielle n‟est pas une source de droit
- Pas d‟arrêt de la cour de cassation, seulement des CA
- Le code de commerce ne prend pas en compte le droit patrimonial de la famille.
Ce n‟est pas le caractère insaissible d‟une créance qui permet de déterminer sa nature (ex : pension
de retraite, même insaissible et un substitut de salaire => bien commun).
Les stocks option sont un ajout de rémunération => substitut de salaire. La propriété ne découle pas
de la titularité de l‟option. Le salarié à un droit propre à se faire verser son salaire il est seul titulaire
de ce droit, pourtant les salaires sont communs.
Pas de solution => il faut réaliser par analogie avec des choses qu‟on connaît.
Quand l‟époux titulaire de stocks options lève l‟option pendant le mariage, c‟est un bien commun.
Deux problèmes :
- Problème de la nature juridique : commune si la créance est nés pendant la
communauté (≠ de la levée de l‟option)
- Problème de l‟évaluation lorsque l‟option est levée après la dissolution de la
communauté, ou lorsqu‟il ne lève pas l‟option en cas de moins value, il ne subit pas de perte, il n‟a
pas profité d‟une éventuelle plus value. Peut mettre une condition suspensive.
Si le mari lève l‟option en douce après la liquidation il y a recel.
Le notaire pourra faire un deuxième partage une fois que l‟option aura été levée.
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B/ Le passif
Le mécanisme des récompenses est un procédé destiné à rétablir, sous le régime de la communauté
légale, l‟équilibre entre les masses propres des époux et la masse commune. Ce dernier permet
d‟éviter qu‟au moment du partage une masse ne se trouve diminuée ou augmentée au profit ou au
détriment d‟une autre masse.
On appelle « récompense », les indemnités destinées à corriger les transferts de valeur qui ont pu se
produire au cours du régime matrimonial entre les masses propres des époux et la masse commune.
En effet, sous un régime de communauté, il arrive souvent par exemple, que des deniers communs
financent le paiement d‟une dette définitivement personnelle à l‟un des époux. A l‟inverse, des
deniers propres peuvent permettre d‟acquérir des biens communs.
Les récompenses peuvent aussi bien découler d‟une avance de sommes d‟argent que d‟un
appauvrissement en nature. Ce dernier consiste en la mise à disposition d‟un bien en nature. Il nous
a semblé plus intéressant d‟approfondir la première hypothèse qui est la plus fréquente en pratique.
Les récompenses ne s‟appliquant qu‟aux rapports entre une masse propre et la communauté, les
créances entre époux sont exclues. La communauté doit nécessairement être impliquée.
On peut constater que la preuve du droit à récompense ainsi que son calcul suscitent un abondant
contentieux. C‟est pourquoi, nous analyserons ce sujet.
Le compte des récompenses étant établi après la dissolution du régime matrimonial, les problèmes
liés à la preuve de ces créances sont d‟autant plus fréquents. En effet, la liquidation intervenant la
plupart du temps plusieurs années après que les mouvements de fonds se soient opérés, il est
difficile si les époux n‟ont pas songé à tenir entre eux une comptabilité détaillée, d‟établir une telle
preuve. Le risque étant alors que la preuve devienne impossible à faire compte tenu du temps écoulé
et de la probable confusion des patrimoines.
Cependant, les règles relatives aux récompenses n‟étant pas d‟ordre public, les époux peuvent
convenir d‟un règlement amiable et donc de se dispenser d‟établir une telle preuve. En outre,
conformément au droit commun de la preuve, la preuve n‟est nécessaire qu‟en cas de contestation.
Néanmoins, les règles de droit prenant toute leur importance en cas de conflit, il ne sera exposé que
les hypothèses de contestation.
Les causes de récompenses sont prévues aux articles 1433 et 1437 du Code civil. D‟une part, la
communauté devra une récompense toutes les fois qu‟elle aura tiré profit des biens propres. D‟autre
part, une récompense sera due à la communauté toutes les fois qu‟un époux aura tiré un profit
personnel des biens de la communauté. C‟est pourquoi, il parait important d‟étudier séparément les
différents régimes de preuve des récompenses concernant tout d‟abord celles dues par la
communauté à un époux (I) puis celles dues par un époux à la communauté (II).
La preuve des récompenses dues par la communauté a connu une importante évolution
jurisprudentielle : la Cour de cassation est passée d‟une position restrictive (A) à une position plus
modérée (B).
De plus, la notion d‟encaissement n‟étant pas définie par le législateur, on pouvait s‟interroger sur
sa réelle signification. Selon la définition usuelle, il s‟agit du versement de fonds sur une caisse. En
conséquence, on pouvait penser que l‟encaissement signifiait le dépôt de deniers propres sur un
compte commun.
Cependant, la Cour de cassation, dans un arrêt du 11 février 1992, est revenue sur sa position en
interprétant de façon restrictive l‟article 1433 du Code civil.
Dans le premier arrêt, l‟épouse demandait une récompense à la charge de la communauté car elle
s‟était acquittée avec des deniers propres des impositions communes et du découvert d‟un compte
joint. La Cour de cassation a rappelé le principe de la nécessité de prouver le profit tiré par la
communauté. Mais elle précise ensuite que ce profit peut résulter notamment de l‟encaissement de
deniers propres par la communauté.
Dans le second arrêt, l‟épouse demandait une récompense à la charge de la communauté pour une
somme d‟argent provenant de la vente d‟un bien propre qu‟elle avait déposée sur un compte joint.
La Cour de cassation a réitéré sa position en estimant que l‟encaissement de deniers propres sur un
compte joint permet l‟obtention d‟un droit à récompense.
On peut constater que la Cour de cassation adopte une solution qui tient à nouveau compte de
l‟alinéa 2 de l‟article 1433 ce qui fut approuvé par la doctrine mais aussi par la pratique notariale.
Quelques mois suivant ces deux arrêts, la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un
arrêt du 8 novembre 2005, a refusé de considérer que des fonds propres avaient été encaissés par la
communauté aux motifs que ces fonds avaient été déposés sur un compte ouvert au seul nom de
l‟époux propriétaire des fonds propres.
Il en résulte que, selon la Cour de cassation, seul l‟encaissement de deniers propres sur un compte
joint, ouvert au nom des deux époux, permet de considérer que ces fonds propres ont été encaissés
par la communauté.
Ceci peut sembler assez critiquable puisque la titularité du compte importe peu pour déterminer la
nature juridique des sommes qui y sont déposées. La présomption de communauté joue alors même
qu‟un seul époux est titulaire d‟un compte. Ce sont les opérations passées sur le compte qui sont
importantes pour déterminer si ces fonds sont utilisés dans l‟intérêt personnel de cet époux. En
pratique, il est courant de voir un époux payer des dépenses communes avec des fonds propres
provenant d‟un compte dont il est seul titulaire. En application de cette jurisprudence, ces deniers,
qui ont pourtant permis à la communauté de retirer un profit, ne pourront pas bénéficier de la
présomption de profit du fait de leur encaissement sur ce compte.
Est-il pour autant souhaitable d‟étendre la notion d‟encaissement par la communauté au versement
de deniers propres sur un compte dont seul l‟époux propriétaire de ces fonds est titulaire ? On peut
en douter car, étant seul titulaire du compte, il garde la possibilité de dépenser ces sommes comme
il l‟entend et interdit à son conjoint de les utiliser.
Au vu de l‟actuelle jurisprudence on comprend en tout cas qu‟il faut réviser le conseil souvent
donné d‟ouvrir un compte dont on est seul titulaire pour y percevoir des capitaux propres dans un
contexte conflictuel entre époux : ce conseil peut se retourner contre le client qui ne bénéficiera pas,
lors de la dissolution de la communauté, de la présomption de profit pour la communauté si ces
sommes ont été dépensées.
Toutefois, il ne s‟agit que d‟une présomption simple qui supporte la preuve contraire. Dorénavant,
c‟est à l‟époux qui conteste la récompense d‟établir la preuve négative, l‟absence de profit de la
communauté ou de démontrer que les fonds encaissés ont profité à la masse propre. En
conséquence, le renversement de la charge de la preuve, opéré par ces arrêts, semble plus favorable
à l‟époux demandeur.
Contrairement à l‟époux créancier d‟une récompense qui semble être favorisé par cette nouvelle
présomption de profit, la communauté peut en pâtir.
b/ L’absence de preuve réelle du profit, solution peu favorable à la communauté
En effet, un problème pourrait se poser lorsque les fonds propres versés par un époux sur un compte
joint sont utilisés pour des dépenses personnelles. La communauté ne tirera aucun profit de ces
dépenses. Cependant, une récompense sera quand même due par elle du seul fait de l‟encaissement
de ces deniers sur un compte commun. Ceci pourrait donc conduire un époux à verser des fonds
propres sur un compte joint en les dépensant par la suite dans un intérêt purement personnel. Par
exemple, l‟époux pourrait acheter un bien propre ou payer une dette définitivement personnelle
(telle qu‟une amende) avec ces fonds. Même si la qualification des fonds propres déposés sur un
compte joint ne change pas, il sera souvent difficile et même quasiment impossible pour l‟époux qui
conteste la récompense de faire la preuve de l‟absence de profit à cause de la fongibilité des
sommes. En conséquence, on peut penser que la communauté sera plus souvent débitrice d‟une
récompense qu‟elle ne l‟aurait été avec la solution antérieure de la jurisprudence.
Il semble que cette nouvelle position de la Cour de cassation remet en cause le principe même de la
communauté : la mise en commun des deniers.
Contrairement à la preuve d‟une récompense due par la communauté qui a connu une évolution
importante, la démonstration d‟une récompense due à la communauté semble avoir été de tout
temps plus facile.
1/ La présomption de communauté
La présomption de communauté, résultant de l‟article 1402 du Code civil, permet à l‟époux qui
prétend qu‟une récompense est due par son conjoint à la communauté d‟être dispensé de prouver
l‟origine des fonds faisant l‟objet de la contestation. En effet, au cours de l‟union, les dépenses
effectuées par la communauté sont présumées avoir été faites avec des deniers communs. En
conséquence, c‟est au conjoint, présumé débiteur de la récompense, d‟établir par tous les moyens
que les fonds utilisés étaient en réalité propres.
En pratique, il arrive souvent qu‟une récompense soit due à la communauté du simple fait que
l‟origine propre des deniers utilisés ne puisse pas être prouvée. C‟est pourquoi, il semble que la
communauté soit plus souvent créancière d‟une récompense que débitrice puisque l‟essentiel des
ressources financières du ménage proviennent du patrimoine commun.
La présomption de communauté à une telle force qu‟apporter la preuve contraire est souvent
difficile. L‟époux qui réclame une récompense au profit de la communauté est dispensé de faire la
preuve de l‟origine commune des deniers utilisés. Toutefois, cette présomption, n‟étant qu‟une
présomption simple pourra être renversée. Cela oblige l‟époux contestant cette récompense à
établir le caractère propre des deniers utilisés. Cette preuve est souvent difficile à faire. C‟est
pourquoi, il est conseillé de se préconstituer une preuve pour pouvoir écarter la présomption de
communauté.
Lors de la liquidation du régime matrimonial d‟époux séparés de corps (c‟était le cas en l‟espèce
dans cet arrêt mais la solution de la cour de cassation doit pourvoir être étendue à d‟autres
hypothèses), un contentieux apparaît concernant des sommes prélevées par l‟époux peu de temps
avant leur séparation. L‟épouse réclame que ces sommes soient réintégrées dans l‟actif de la
communauté. La cour d‟appel ne fait pas droit à sa demande. Cependant, la Cour de cassation
admet la réintégration de ces sommes.
La notion de « réintégration », utilisée dans cet arrêt, laisse penser qu‟il s‟agit en réalité d‟une
récompense due par l‟époux à la communauté.
En l‟espèce, la réintégration du bien a été admise suite aux preuves établies par l‟épouse. Il semble
donc que la présomption de communauté n‟ait pas joué en sa faveur. En conséquence, on peut
penser que la Cour de cassation, dans cet arrêt, a souhaité renverser la charge de la preuve.
Néanmoins, cette solution ne semble possible qu‟en présence de sommes importantes prélevées
dans une période proche de la séparation. Ce renversement de la charge de la preuve, admis par la
Haute Juridiction, semble être limité à une période bien précise ce qui peut rappeler la « période
suspecte » existant déjà en procédures collectives.
2/ La pré-constitution de preuves
La pré-constitution d‟une preuve, notamment grâce à la déclaration d‟origine des deniers (a) et à
l‟acte déclaratif (b), permet à un époux, dans certains cas, d‟écarter la présomption de communauté
mais aussi, dans d‟autres hypothèses, d‟établir la preuve d‟une récompense en sa faveur.
a/ La déclaration d’origine de deniers
Tout d‟abord, la déclaration d‟origine des deniers permet de « contrer » le principe légal de la
présomption de communauté en prouvant le financement propre du bien acquis et corrélativement
sa propriété propre
Selon l‟article 1434 du Code civil, cette déclaration peut être insérée au sein de l‟acte d‟acquisition
d‟un bien. La validité de cette dernière suppose, selon la jurisprudence, une double déclaration
d‟origine et d‟intention : l‟époux devra, d‟une part, mentionner que l‟acquisition est faite grâce à
des deniers propres ou provenant de la vente d‟un bien propre et d‟autre part, indiquer son intention
d‟employer ou de remployer les fonds propres dans l‟acquisition du nouveau bien.
Cette déclaration peut être rédigée dans l‟acte réalisant l‟investissement (comme un acte
d‟acquisition) mais aussi dans un acte indépendant fait a posteriori au cours du régime matrimonial.
L‟accord des deux époux sera nécessaire dans ce dernier ca et cette déclaration n'aura d‟effet
qu'entre les époux et vis-à-vis de leurs héritiers. Cependant, il faut noter que la pratique notariale se
montre plus soupçonneuse face à une déclaration faite à posteriori, dans la crainte d‟une éventuelle
fraude.
En l‟absence de principe général contraignant les époux à indiquer systématiquement dans un acte
d‟acquisition l‟origine des deniers, au moment de la liquidation du régime matrimonial, la preuve de
l‟origine des fonds sera souvent nécessaire et la présomption de communauté retrouvera tous ses
effets.
La déclaration d‟origine des deniers, en matière de preuve des récompenses, présente un fort intérêt
dans l‟hypothèse d‟une double contribution : lorsque le bien acquis, objet de la déclaration, a été
financé au moyen d‟une part, de fonds propres et d‟autre part, de fonds communs, du seul jeu de la
présomption de communauté, ce bien sera considéré comme commun. La preuve d‟un droit à
récompense, à l‟égard de l‟époux ayant participé à l‟acquisition, sera facilitée par la rédaction d‟une
telle déclaration.
Lorsqu‟un bien est financé en totalité par des fonds propres, aucune récompense ne sera due a priori
puisque ce bien sera un propre. La déclaration d‟origine des deniers ne présentera dans ce cas aucun
intérêt en matière de preuve des récompenses mais il ne faut pas oublier que les formalités de
remploi sont indispensables pour que ce bien soit effectivement un bien propre.
b/ L’acte déclaratif
Les époux peuvent également recourir à l‟acte déclaratif qui permet de constater la réalisation de
diverses opérations patrimoniales pendant la durée du régime matrimonial.
L‟objet de l‟acte déclaratif est de faire le point des opérations réalisées par les époux depuis le
mariage. En effet, le plus souvent, les documents susceptibles d‟établir la réalité des choses ne se
retrouvent plus. Un tel acte peut donc s‟avérer nécessaire. Il doit néanmoins répondre à une certaine
rigueur quant à la précision suffisante des allégations d‟où l‟exigence de rapports d‟experts, de
documents bancaires ou de factures.
Mais cet acte ne doit comporter que la constatation des faits intervenus sans indication des droits
des intéressés sauf si leur détermination est appuyée sur des éléments indiscutables. En effet, il ne
faut pas que les époux liquident de façon anticipée leur régime matrimonial car ceci est prohibé. Le
contenu de cet acte n‟a donc comme unique objet que de faciliter l‟application ultérieure des règles
de calcul des récompenses et non pas de les modifier pour favoriser un époux au détriment de la
communauté par exemple.
Une fois que le droit à récompense a été démontré, il faut évaluer cette récompense.
B/ L’évaluation de la récompense
Selon l‟article 1469 du Code civil, l‟estimation des récompenses se fonde sur un principe et deux
exceptions. La solution générale que l‟on peut appeler la règle du « double maximum » correspond
à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant. Cette
règle ne pose généralement aucun problème. En revanche il faut s‟intéresser à la notion
particulièrement discutée de « nécessité » de la dépense (1) ainsi qu‟aux problèmes résultant
de l‟absence de profit subsistant (2).
Un problème peut alors se poser lorsqu‟aucun profit subsistant identifiable ne se retrouve dans la
masse bénéficiaire au jour de la liquidation du régime matrimonial. Ce sont les hypothèses où la
somme n‟a pas été investie dans un bien. Il peut s‟agir, par exemple, du paiement par la
communauté d‟amendes ou de réparations liées à des délits ou des quasi-délits, ou d‟une libéralité
faites par un époux à un tiers.
On peut penser que estimer la récompense égale à zéro en application de la règle du double
maximum de l‟alinéa 1 de l‟article 1469 du Code civil. Ce résultat qui peut paraitre choquant est
celui qui s‟impose a priori à la lecture stricte de cet alinéa 1.
C‟est pourquoi, la majorité de la doctrine s‟accorde à considérer que la récompense due sera égale
au montant nominal de la dépense faite. Pour justifier cette solution plusieurs raisonnements
peuvent être avancés :
Certains soutiennent que la somme étant consommée par la communauté, on peut en déduire qu‟elle
en avait besoin. Par conséquent, l‟alinéa 2 de l‟article 1469 du Code civil pourrait s‟appliquer.
Ainsi, l‟estimation de la récompense serait égale au montant de la dépense faite. Mais ce
raisonnement ne tient pas plus dans le cas d‟une libéralité faite à un tiers (peut on soutenir que le
don fait par le mari à sa maîtresse est « nécessaire » ?) que dans le cas de l‟article 1417 (amendes,
…etc). Même dans ce dernier cas le fait que le paiement soit obligatoire ne veut pas dire qu‟il s‟agit
d‟une dépense nécessaire : ce n‟est pas du tout la position de la jurisprudence.
D‟autres considèrent que l‟article 1469 n‟est applicable que lorsqu‟un profit subsistant est
envisageable : à défaut la récompense serait égale à la dépense faite
L‟inconvénient de cette thèse est d‟écarter l‟article 1469 alors que c‟est le seul texte qui règle la
question du calcul des récompenses.
Enfin, la doctrine majoritaire considère que dans les cas qui relèvent de l‟alinéa 1 il existe un profit
subsistant qui est égale à la dépense faite. Il s‟agirait de l‟économie faite par la masse propre de ne
pas avoir payé une dépense qui pourtant est définitivement personnelle.
Au final, ces raisonnements aboutissent à une solution identique : le montant de la récompense qui
sera due par l‟époux sera égal au montant de la dépense faite par la communauté. Cette solution
apparaît être en effet la plus logique et la plus juste.
Bibliographie
Ouvrages :
AYNES Laurent, MALAURIE Philippe, Les régimes matrimoniaux, 2ème édition, Répertoire
Defrénois, 2007
CABRILLAC Rémy, Droit civil Les régimes matrimoniaux, 6ème édition, Montchrétien, 2007
CHAMPENOIS Gérard, FLOUR Jacques, Les régimes matrimoniaux, 2ème édition, Armand
Colin, 2001,
GRIMALDI Michel, Droit patrimonial de la famille, 3ème édition, Dalloz Action 2008-2009
MATHIEU Michel, Juris-Classeur Liquidation-Partage, fascicule n°570, « Preuve des
récompenses », Septembre 2005.
Articles :
BEIGNIER Bernard, Preuve du droit à récompense due par la communauté pour des biens
provenant du patrimoine propre d‟un époux, Droit de la famille, n° 4, avril 2005, p. 24-25
CHAMPENOIS Gérard, Répertoire du notariat Defrénois, n°19, 2005, p. 1506-1511
CHARLIN Jacques, La preuve des récompenses, La semaine juridique Edition Notariale, n°26, juin
2003, p. 1004-1007
HILT Patrice, Actualité Juridique Famille, n°4, avril 2005, P. 149 -151
NAUDIN Estelle, Encaissement de deniers propres et droit à récompense, Droit de la famille, n°3,
mars 2006, étude 16
PILLEBOUT Jean-François, L‟encaissement du prix de vente d‟un bien propre fait présumer le
profit de la communauté, La semaine juridique Edition Notariale, n° 29, 1351, p. 1324-1325
VAUVILLE Frédéric, Récompense : la Cour de cassation précise son interprétation de l‟article
1433 du Code civil, Revue juridique Personnes & Famille, n° 4, avril 2003, p. 14-15
VAUVILLE Frédéric, Revirement : l‟encaissement de deniers propres par la communauté suffit,
sauf preuve contraire, à établir un droit à récompense, Revue juridique Personnes & Famille, n°5,
mai 2005, p. 14-15
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Commentaire profs :
Peut de texte sur les récompenses dues par la communauté à un époux : 1433, alors que beaucoup
de textes prévoient l‟hypothèse interne.
Article 1433 et évolution sur ce point avec les arrêts de février 2005. Il faut parler de masse
propres et de masses communes, et pas de patrimoine commun et propre, seules une personne
peut avoir un patrimoine, la communauté n‟a pas de personnalité morale.
L‟arrêt de 2003 n‟a pas d‟importance, pas d‟assouplissement, il ne change rien. Il y a eut un débat,
mais il est clos par l‟arrêt de 2005. Quand il y a un revirement souhaité par certain, les auteurs
profite d‟arrêt pour lui faire dire d‟autre chose que ce qu‟il dit pour inciter un revirement.
Pas de revirement : fait démonstration de la notion d‟encaissement et que cette somme avait été
utilisé au profit de la communauté => pas de revirement. Un arrêt postérieur affirme que
l‟encaissement ne suffit pas.
Le revirement n‟intervient qu‟en 2005, pas de période transitoire entre 2003 et 2005. 2005 est un
revirement pur. Ce qui compte c‟est les conditions posées par l‟arrêt de 2005.
Un compte ne peut pas être commun, c‟est les sommes déposées qui sont communes, la
jurisprudence parle de compte joint, on n‟est pas sur la nature des fonds on peut verser une somme
propre sur un compte joint, la nature des sommes ne change pas.
Si les sommes sont encaissées sur un compte ouvert au nom d‟un seul époux, il n‟est pas prouvé
que la communauté les a encaissé, même si les sommes sont utilisé pour la communauté, la preuve
sera plus difficile a prouvé que si les sommes avaient été déposé sur un compte joint, l‟époux aurait
bénéficié de la jurisprudence de 2005 : l‟encaissement par la communauté d‟un fonds propres suffit
à prouver le droit à récompense.
L‟arrêt de 92 n‟est pas un revirement de jurisprudence, c‟est la position de la cour de cassation, elle
rappelé la règle de 1433 : il faut deux conditions pour prouvé la récompense : encaissement et profit
retiré par la communauté.
Les notaires s‟appuyaient sur l‟alinéa 3 de l‟article 1433 : si contestation la preuve peut se faire par
tout moyen. Ils disaient : pas de contestation => pas besoin de faire la preuve contraire.
Maintenant ils peuvent s‟appuyer sur la jurisprudence de 2005.
Présomption de communauté : présomption que des fonds communs sont utilisés dans l‟intérêt de la
communauté, la jurisprudence de 2005 pose la présomption que les sommes propres ont été utilisées
dans l‟intérêt de la communauté quand ils ont été encaissés par elle.
Seconde partie :
Pré constitution de preuve et article 1434. 1434 a une double fonction :
- si la double formalité à été effectuée on quitte le terrain de la preuve, le bien est
propre, ce n‟est pas une fonction qui intervient dans le cadre de la pré constitution de preuve.
- dans l‟hypothèse ou les fonds propres sont inférieurs à la moitié du bien, la fonction
de cette déclaration est strictement sur le terrain probatoire.
Pour éviter litige il faut faire intervenir les deux époux à la déclaration de remploi.
Dans la deuxième partie sur des récompenses due par un époux à la communauté, compte tenu du
principe de cogestion des biens commun et de la présomption de communauté, lorsque des fonds
communs sont utilisés par un époux ils sont présumés avoir été utilisés dans l‟intérêt de la
communauté. Une exception a été posé par la jurisprudence 6 décembre 2005 : « il doit cependant
lors de la liquidation, informer son conjoint de l‟affectation des sommes prélevées sur la
communauté dès lors qu‟elles sont importantes »
Réintégration par l‟époux qui ne pourra pas faire la preuve de l‟utilisation de fonds communs si ces
sommes sont importantes. Cas de récompense due à la communauté si l‟époux n‟a pas pu prouver
l‟utilisation des fonds => renversement de la charge de la preuve. Suspicion qu‟il a essayé de vider
les comptes dans son propre intérêt => il devra prouver qu‟il n‟a pas a versé récompense, ce n‟est
plus a la communauté de prouver qu‟elle a droit a récompense. Idée de période suspecte.
Le mot réintégration est mal utilisé sauf il n‟y a réintégration que si la donation est annulée, les
sommes donnée réintègre automatiquement la communauté.
Preuve du caractère nécessaire, doctrine majoritaire : pouvoir souverain des juges du fonds, même
si certaines décisions montre que la cour de cassation a pu contrôler la notion de dépense
nécessaire.
Notion qui a été élargie par la jurisprudence : l‟achat de matériel nécessaire à la profession d‟un
époux. Instrument de travail se dévalorise => si récompense = PS risque d‟être faible => intérêt de
plaider que la dépense est nécessaire. Arrêt du 14 novembre 2007 fonds est propres => matériel
aussi, payé à l‟aide de bien commun => récompense à la communauté. Le mari ok pour récompense
mais = au PS, la cour de cassation approuve les juges d‟avoir retenu que le matériel est nécessaire à
la profession, et nécessaire au sens de l‟article 1469 => la récompense = DF.
Pourtant la communauté à profité du matériel, puisque le mari en a dégagé des revenus qui sont
communs.
(L‟arrêt du 14 novembre 2007 : affirme aussi revenu des propres bruts sont communs).
Exposé : Le compte d’indivision
Quant au cas de dissolution pour cause de décès d‟un des époux, les conflits familiaux vont
souvent retarder le partage et en présence d‟un conjoint survivant il sera souvent retardé jusqu‟au
décès de ce dernier, car il est plus simple pour tout le monde de partager tout en une seule fois,
communauté et successions.
Dés lors, il convient de se demander à quel régime juridique obéissent les biens qui
composaient la masse commune, au cours de cette longue période.
Dans l‟Ancien Droit, on faisait continuer à s‟appliquer les règles de la communauté légale,
malgré sa dissolution, et ce jusqu‟au partage. Si cette solution a le mérite de la simplicité, elle n‟est
cependant guère adaptée au cas de dissolution pour cause de divorce. Elle suppose en effet que
chacun des époux continue, par delà le prononcé du divorce, à alimenter la masse commune – et
donc à enrichir indirectement son ex-conjoint – ce qui, a priori, n‟est pas dans ses intentions.
Le Code civil a donc proscrit cette solution dans son article 1442 al. 1 : « il ne peut y avoir
lieu à la continuation de la communauté, malgré toutes conventions contraires ». Il a opté, par un
renvoi au droit des successions opéré à l‟article 1476, pour le régime de l‟indivision.
Ceci nous invite à nous demander ce qui distingue la communauté de l‟indivision. Certes, il
y a dans les deux cas un ensemble de biens soumis à une propriété collective. Cependant le
rapprochement s‟arrête là. Communauté et indivision reposent sur des fondements opposés.
En communauté, le principe est que les biens acquis par les époux au cours de l‟existence de
la communauté sont communs. Or, en indivision, c‟est la règle contraire qui s‟applique : tous les
biens acquis par les indivisaires au cours de l‟existence de l‟indivision sont personnels.
A ces règles, il y a des exceptions. En communauté, il s‟agit par exemple des biens acquis en
emploi ou en remploi de fonds propres, qui restent propres. En indivision, les deux exceptions
majeures au principe sont les suivantes :
- Les fruits et les revenus des biens indivis sont des biens indivis,
- Les biens acquis, avec le consentement de l'ensemble des indivisaires, en emploi ou remploi des
biens indivis sont des biens indivis.
Là encore, l‟opposition entre indivision et communauté se révèle : tandis qu‟en
communauté, il faut faire une déclaration de remploi pour qu‟un bien soit propre, en indivision, il
faut en faire une (du moins, il faut obtenir le consentement de tous les indivisaires) pour qu‟un bien
soit indivis.
Par ailleurs, du point de vue des pouvoirs, l‟indivision apparaît plutôt individualiste là où la
communauté semble au contraire un peu communiste ².
Ainsi, en indivision, le principe est l‟unanimité. Ceci octroie à chaque indivisaire un droit de
veto et lui permet de faire primer ses intérêts personnels sur les intérêts de la majorité. Au contraire,
en communauté, force règles permettent à un époux de saisir le juge afin de passer outre la volonté
de son conjoint au cas où celle-ci nuirait à l‟intérêt commun.
Cette différence doit aujourd‟hui être tempérée. La loi du 31 décembre 1976, qui a organisé le statut légal de
l‟indivision, a apporté un certain nombre de règles (d‟ailleurs souvent empruntées au droit des régimes matrimoniaux)
destinées à davantage protéger l‟intérêt commun. Ainsi l‟article 815-5 qui prévoit qu‟un indivisaire peut être autorisé
par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci
met en péril l'intérêt commun. On se rend bien compte que cet article est, mutatis mutandis, la copie conforme de
l‟article 217 (qui énonce en substance qu‟ « un époux peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le
concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire, si le refus de celui-ci n'est pas justifié par l'intérêt de la
famille. »).
De plus, en indivision, chacun est libre de partir de son côté puisque le principe est que « nul
ne peut être contraint de demeurer dans l‟indivision » (article 815-1). Tandis qu‟on ne sort pas
comme on veut d‟une communauté. L‟article 1441 énonce en effet six causes limitatives de
dissolution.
Ces différences entre indivision et communauté impliquent des différences à propos des
règlements de compte entre les protagonistes. On sait que lors de la liquidation communautaire, les
époux doivent rendre des comptes à la communauté ou inversement. Des récompenses sont en effet
souvent dues. De même, en indivision, les indivisaires peuvent se révéler créanciers ou débiteurs de
la masse indivise.
Ainsi à propos de l‟exigibilité des dettes et des créances, par exemple. Au cours de la
communauté, celles-ci ne sont pas exigibles. Un époux ne peut pas demander à la communauté
paiement de sa récompense avant que cette communauté ne soit dissoute.
Réciproquement, un tiers créancier d‟un époux et titulaire du droit de gage normal (2284,
1413, etc.) ne peut pas demander au conjoint de son débiteur, dans l‟hypothèse où celui-ci serait lui-
même débiteur d‟une récompense envers la communauté, qu‟il paye dès maintenant cette
récompense, de manière à voir augmenter d‟autant son droit de gage.
Qu‟en est-il au cours de l‟indivision ? Les dettes et les créances qu‟un indivisaire peut avoir
envers l‟indivision sont-elles exigibles dès leur naissance ou seulement lors de la clôture du compte,
comme c‟est le cas en communauté ?
L‟enjeu est important car il a des conséquences sur la prescription de ces obligations. En
effet, la prescription extinctive d‟une obligation ne commence en principe à courir qu‟à compter de
l‟exigibilité de cette obligation. C‟est pourquoi en matière de récompenses, un époux dont la
créance envers la communauté est née au tout début du mariage ne pourra pas se voir répondre par
son conjoint, trente ans après, au moment du divorce et de la liquidation : « elle est prescrite, ta
créance, depuis le temps» (puisque tout le long du mariage, cette créance n‟était pas exigible).
Les solutions ne sont pas toujours identiques en matière de compte d‟indivision, ce qui
interdit de transposer purement et simplement les règles du compte de récompenses à son sujet.
L‟originalité du compte d‟indivision s‟illustrera par l‟examen des dettes (II) et des créances (I)
susceptibles de l‟émailler.
Comme en communauté, le principe est que tous les acquêts sont communs, il y a plus
souvent des récompenses dues à la communauté que par la communauté. Les chances sont plus
nombreuses en effet, car il y a généralement moins de biens propres que de biens communs, que des
biens communs soient utilisés au profit d‟un époux. Inversement en indivision, comme le principe
est que tous les acquêts sont indivis, il est plus fréquent que les indivisaires se retrouvent créanciers
de la masse indivise. Ils peuvent notamment prétendre à une rémunération pour avoir géré
l‟indivision (A) et à une indemnité pour avoir utilement dépensé de l‟argent dans son intérêt (B).
L‟hypothèse est la suivante : admettons qu‟un pharmacien par exemple se soit marié sous le
régime légal puis ait acquis à titre onéreux une officine. En vertu de l‟article 1401, celle-ci est
commune et les revenus qu‟il en tire aussi. Supposons maintenant qu‟il divorce. Nous entrons dans
l‟indivision. Quel sort réserver aux revenus de la pharmacie perçus au cours de l‟indivision ?
- Le principe en vertu duquel tous les biens acquis au cours de l‟indivision sont personnels conduit à
qualifier de biens personnels les gains et salaires perçus par les indivisaires, et par extrapolation
tous les produits de leur travail, ce qui semble inclure tous les revenus du pharmacien.
- Toutefois l‟exception selon laquelle les fruits et les revenus des biens indivis sont indivis autorise
également à penser que les revenus du pharmacien, qui ne sont jamais que les revenus de la
pharmacie (bien indivis), doivent être indivis.
Comment sortir de ce dilemme ? La loi de 1976 a trouvé une solution plutôt équilibrée. En
son article 815-12, elle dispose en effet que l‟indivisaire qui gère un ou plusieurs biens indivis « est
redevable des produits nets de sa gestion » (ce dont on peut déduire que les revenus du pharmacien
sont indivis) mais il a droit « à la rémunération de son activité, dans les conditions fixées à
l‟amiable ou à défaut, par décision de justice ».
En tout cas il ne faut pas confondre, comme le fait pourtant parfois la Cour de cassation4,
l‟indemnité due au titre de la rémunération de l‟indivisaire gérant, fondée sur l‟idée de travail
fourni, et l‟indemnité due au titre de l‟amélioration ou de la conservation par un indivisaire d‟un
bien indivis, fondée sur l‟idée de dépense faite.
Il s‟agit d‟une indemnité proche d‟une récompense que nous connaissons bien, la
récompense due à ou par la communauté lorsque des fonds communs ont permis l‟acquisition ou la
conservation d‟un bien propre ou vice-versa, lorsque des fonds propres ont permis l‟acquisition ou
la conservation d‟un bien commun. Dans notre cas en effet, un indivisaire a financé avec ses deniers
personnels l‟acquisition ou la conservation d‟un bien indivis.
Les hypothèses se ressemblent si bien que l‟article 815-13 a comme l‟article 1469 opté pour
le valorisme : il faut tenir compte de la dépense faite par l‟indivisaire mais « eu égard à ce dont la
valeur du bien [financé par l‟indivisaire] se trouve augmentée au temps du partage. » C‟est dire en
somme que l‟indemnité est égale au profit subsistant. Mais qu‟en est-il cependant s‟il n‟y a pas de
profit subsistant et que la dépense faite était cependant nécessaire ? L‟article 815-13 s‟est là encore
sagement inspiré du vénérable article 1469 en énonçant que lorsqu‟un indivisaire a fait, moyennant
ses deniers personnels, des impenses nécessaires pour la conservation de biens indivis, il doit être
tenu compte de ces impenses, « encore qu‟elles n‟aient point amélioré » les dits biens. C‟est dire
que l‟indemnité est alors égale à la dépense faite.
Pour autant, l‟article 815-13 n‟a pas suivi 1469 sur toute la ligne. Il ne prévoit en effet pas le
cas inverse où ce sont des fonds indivis qui ont servi l‟amélioration ou la conservation d‟un bien
propre. Or, comme le valorisme est l‟exception et que les exceptions doivent s‟interpréter de façon
stricte, il faut dans ce cas revenir au principe du nominalisme. Cette absence de symétrie est un peu
regrettable mais il est vrai que le cas où des fonds indivis financent l‟acquisition d‟un bien propre
est plus rare, en pratique. Cela dit peut-être qu‟un jour, la Cour de cassation « bilatéralisera » cet
article.
Le problème de l‟incertitude qui résulte de cette contradiction, c‟est qu‟elle empêche non
seulement de savoir si l‟indivisaire pourra obtenir immédiatement ou seulement à la clôture du
compte le paiement mais aussi de savoir s‟il pourra obtenir paiement tout court.
En effet, on a vu que le principe est que la prescription d‟une obligation commence à courir
à partir du jour où elle est exigible. Dès lors, si l‟on décide que la créance est exigible au moment
où la dépense a été faite et que l‟indivisaire créancier, ne le sachant pas, attend benoîtement le jour
du partage, il pourra se retrouver, ce jour venu, avec entre les mains une créance éteinte par
prescription. C‟était vrai quand le délai de droit commun de prescription était de trente ans, ça l‟est
d‟autant plus depuis qu‟il l‟est de cinq !
Certes le nouvel article 2224 prévoit que le délai de prescription court à compter du jour où
le titulaire du droit « a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l‟exercer », mais nul
n‟est censé ignorer la loi (et donc les délais de prescription) et l‟indivisaire créancier ne pourra pas
prétendre ne pas savoir qu‟il a financé cette amélioration. Il lui appartient donc de demander en
temps utile à l‟indivision qu‟elle le paye.
La dette la plus importante, surtout dans le cadre des indivisions post communautaires, qui
nous intéressent plus particulièrement ici, est celle que peut contracter un indivisaire pour avoir usé
ou joui privativement d‟un bien indivis (A). Nous reviendrons ensuite sur le cas de l‟indivisaire
gérant, attendu sa position particulière de « créancier-débiteur » de l‟indivision (voir supra) (B).
A) L’indemnité d’occupation
L‟hypothèse est simple : un indivisaire vit seul dans un bien qui pourtant appartient à tous
les indivisaires. Il est normal qu‟il doive alors une indemnité à l‟indivision. En effet, nous avons vu
que l‟indivision avait droit aux fruits et revenus des biens indivis. Or, en occupant le bien,
l‟indivisaire empêche qu‟on le loue, autrement dit qu‟on en tire des fruits et revenus. Et c‟est
pourquoi fort logiquement, cette indemnité sera égale à la valeur locative du bien occupé.
Cependant, les problèmes rencontrés plus haut surgissent ici aussi : l‟indivision peut-elle
réclamer immédiatement paiement de cette indemnité ou lui faut-il attendre le jour du partage ? Si
l‟on s‟en tient aux textes, la première option semble ici être la bonne. L‟article 815-11 dispose en
effet que tout indivisaire peut demander « sa part annuelle dans les bénéfices ». C‟est dire qu‟un
indivisaire peut chaque année prélever dans l‟indivision la part de bénéfices qui lui revient et en
faire ce qu‟il veut. Or, la Cour de cassation a clairement décidé que l‟indemnité d‟occupation, en
tant qu‟elle s‟assimile à un revenu accroissant à l‟indivision, entre dans le champ de ces bénéfices5.
De plus, l‟article 815-10 énonce en son alinéa 3 qu‟aucune recherche relative aux fruits et
revenus ne sera recevable « plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu
l‟être ». Si la prescription court à compter de la perception des fruits, il s‟ensuit que l‟exigibilité de
la créance naît également à cette date, puisque la prescription d‟une obligation court en principe à
compter de son exigibilité. Or, la Cour de cassation a expressément considéré que cette prescription
quinquennale s‟appliquait à l‟indemnité d‟occupation6. Ceci vient donc corroborer l‟idée selon
laquelle l‟indivision (c‟est-à-dire l‟ensemble des indivisaires) peut immédiatement demander
paiement à l‟indivisaire occupant.
Pourquoi le texte a-t-il opté pour une prescription quinquennale ? Certes, aujourd‟hui il
s‟agit du droit commun. Mais l‟article 815-10 a été rédigé bien avant la réforme de la prescription.
A l‟époque, cette courte durée était exceptionnelle et avait une raison : les dettes périodiques
comme les dettes de loyer, si elles sont impayées, à la fin s‟accumulent et représentent parfois une
somme colossale. Le législateur ne voulait pas qu‟un créancier puisse un jour demander à son
débiteur de lui payer les trente ans de loyers qu‟il n‟avait toujours pas touchés, et ce sans oublier le
cas échéant les intérêts de retard. Ainsi un tel créancier ne pourra demander à son débiteur que cinq
ans de loyers, ce qui peut déjà au demeurant représenter une certaine somme.
Actuellement la solution est similaire : cf l‟article 1442 al.2 mais également l‟article 262-1 sur la
date de la dissolution dans les rapports entre époux en ce qui concerne leurs biens:
Dans les divorces par consentement mutuel, la communauté sera dissoute, à la date de
l‟homologation de la convention réglant l‟ensemble des conséquences du divorce, à moins que
celle-ci n‟en dispose autrement ; eu pratique les époux choisissent eux-même cette date dans leur
convention et il s‟agit le plus souvent de la date de leur séparation de fait.
- Dans les divorces contentieux, la communauté est dissoute à la date de l‟ONC mais un
époux peut demander un report de la date de la dissolution du mariage (et donc de la
communauté au jour où les époux ont cessé de cohabiter et de collaborer (cf juris sur cette
notion sous article 262-1). L‟indivision s‟en trouvera donc anticipée d‟autant et l‟indemnité
d‟occupation sera due à partir de cette date, sous réserve bien entendu de la prescription
quinquennale.
Je propose de rédiger ainsi les deux paragraphes ci-dessus :
En effet, dans les divorces par consentement mutuel, la communauté sera dissoute à la date
de l‟homologation de la convention réglant l‟ensemble des conséquences du divorce, à moins que
celle-ci n‟en dispose autrement ; en pratique, les époux choisissent eux-mêmes cette date dans leur
convention et il s‟agit le plus souvent de la date de leur séparation de fait. C‟est donc à partir de la
séparation de fait que commenceront à s‟appliquer les règles de l‟indivision. Or, la séparation de
fait implique souvent que l‟un des époux reste jusqu‟au divorce seul ou avec les enfants dans un
bien commun devenu indivis. Il devra donc une indemnité d‟occupation à son conjoint pour avoir
joui privativement de ce bien.
Par ailleurs, dans les divorces contentieux, la communauté est dissoute à la date de l‟ONC
(ou de l‟assignation avant 2004) mais un époux peut demander un report de la date de la dissolution
du mariage (et donc de la communauté) au jour où les époux ont cessé de cohabiter et de collaborer
(cf juris sur cette notion sous article 262-1). L‟indivision s‟en trouve donc anticipée d‟autant et
l‟indemnité d‟occupation est due à partir de cette date, sous réserve bien entendu de la prescription
quinquennale.
On sait que dans le cas d‟un divorce contentieux, l‟indivision commence, « en ce qui
concerne les biens des époux », à la date de l‟ONC voire à la date de la séparation de fait. Est-ce à
dire cependant que toutes les règles patrimoniales du mariage cessent de s‟appliquer à compter de
cette date ? Une telle solution n‟a jamais été admise. Il existe en effet des règles patrimoniales telles
que le devoir de secours voire celui de contribuer aux charges du mariage qui incombent aux époux
jusqu‟au jour du prononcé du divorce et qui ne peuvent pas rétroactivement disparaître.
Imaginons par exemple un mari qui déserte le logement familial pour aller vivre avec sa
maîtresse et laisse seule sa femme avec les enfants dans ce logement, qui supposons-le, est un bien
commun. Quelques années plus tard, les époux entament une procédure de divorce et en vertu de
l‟article 1442 al.2 et 262-1, ils font rétroagir la dissolution de la communauté au jour de la
séparation de fait. Le logement familial devient rétroactivement un bien indivis occupé
privativement par un indivisaire, l‟épouse. En vertu du droit de l‟indivision, l‟épouse serait donc
redevable d‟une indemnité d‟occupation, au maximum égale à cinq ans de loyers. Mais en vertu des
lois sacrées du mariage, l‟époux est tenu de contribuer aux charges du mariage.
(Notons que le fait que cette femme ait sacrifié sa carrière professionnelle pour élever les enfants
peut être compensé par une prestation compensatoire = c‟est un autre pb à ne pas confondre avec
l‟objet de cet exposé. )
B) La dette née de la perception, par l’indivisaire gérant, des fruits du bien géré
On a vu que de jure, chacun des indivisaires peut prétendre aux bénéfices provenant des
biens indivis mais que de facto, c‟est l‟indivisaire gérant qui perçoit exclusivement les bénéfices du
bien qu‟il gère. Quoique créancier d‟une rémunération pour son travail, il est donc aussi débiteur de
l‟indivision à hauteur de ces bénéfices.
La plupart du temps, cet indivisaire ne sera pas à la fois créancier et débiteur de l‟indivision.
En effet, de deux choses l‟une :
Ou l‟indivisaire gérant ne maîtrise pas exclusivement les bénéfices du bien géré parce qu‟il les
place dans le « pot commun », afin que chaque indivisaire puisse en profiter, conformément à
l‟article 815-10 dernier alinéa (ou à l‟article 815-11 premier alinéa), auquel cas cet indivisaire est
seulement créancier de sa rémunération. On ne peut en effet pas lui demander de rendre compte des
bénéfices, puisqu‟il s‟en est dessaisi loyalement.
Ou l‟indivisaire gérant garde par-devers lui les bénéfices, ce qui le rend débiteur de l‟indivision. Il
ne sera dans ce cas pas créancier de la rémunération puisque sa rémunération, il se l‟est
régulièrement payée sur les bénéfices qu‟il a touchés. Au moment des comptes, il ne sera pas
débiteur de tous les bénéfices perçus mais seulement des bénéfices moins la rémunération (notion
de bénéfice net).
Dès lors, les questions de prescription reviennent : on sait qu‟aucune recherche relative aux
fruits et revenus (c‟est-à-dire notamment aux bénéfices) des biens indivis n‟est recevable plus de
cinq ans après la date à laquelle ces fruits et revenus ont été perçus ou auraient pu l‟être. Cette
prescription implique très certainement que les fruits et revenus sont exigibles dès leur perception et
non pas à la clôture du compte.
Imaginons alors que l‟indivision ne réclame pas avant le partage ces fruits et revenus à
l‟indivisaire gérant. Si la période en indivision dure quinze ans, il y aura dix ans de fruits et revenus
qui auront bénéficié au seul indivisaire gérant, puisque celui-ci n‟est comptable que des bénéfices
des cinq dernières années.
Cette solution serait un peu fâcheuse. Comme le soulignait Michel Grimaldi, « il serait
singulier [que l‟indivisaire gérant] pût conserver tous les fruits vieux de plus de cinq ans et réclamer
en outre une rémunération pour sa gestion antérieure à ces cinq années » 8.
Il est évident que puisqu‟il peut se voir réclamer chaque mois les revenus de ce bien indivis, il est
en droit d‟en déduire chaque mois sa rémunération.
Imaginons par exemple une indivision entre A et B. La masse indivise vaut 200 000. B n‟a
ni dette ni créance mais A obtient de son compte un solde positif de 100 000. L‟indivision est donc
débitrice de 100 000.
En principe, les dettes dont est tenue une indivision sont divisibles : les créanciers doivent
poursuivre chaque indivisaire pour la fraction de la dette qui lui échoit. Ceci pour protéger les
indivisaires. Mais quand les créanciers sont eux-mêmes indivisaires, cette justification ne tient plus.
Aussi réglera-t-on ainsi cette dette de 100 000 :
A va prélever 100 000 sur les biens existants, dont la valeur passera donc de 200 000 à
100 000. Ensuite, on partage ces 100 000 restants entre A et B. B aura donc 50 000 et A 150 000.
Si on avait divisé la dette, celle-ci aurait échu pour 50 000 à A et pour 50 000 à B. En ce qui
concerne A, elle se serait éteinte par confusion (A aurait été à la fois créancier et débiteur). Quant à
B, il serait devenu personnellement débiteur envers A de 50 000.
La masse indivise n‟aurait pas été touchée : elle eût toujours été de 200 000. Par conséquent,
100 000 seraient revenus à chacun. Mais s‟il s‟était avéré que B était par ailleurs criblé de dettes, A
n‟aurait pas été sûr d‟être un jour payé de ses 50 000. Il n‟aurait finalement eu que 100 000 et non
les 150 000 qui lui revenaient de droit et qu‟il obtient sans difficulté si l‟on utilise la première
méthode.
1
Article 262-1 ancien et nouveau
2
Ceci bien que jusqu‟à une certaine époque, ce fût les indivisaires que l‟on qualifiait juridiquement
de « communistes » (cf. Cornu, Vocabulaire juridique, à l‟entrée Communiste)
3
Civ. 1ère, 28 février 1984 (cf. sous l‟art. 815-12 du Code civil)
4
Civ. 1ère, 13 mars 2007, pour le cas d‟une indivision entre concubins
5
Civ. 1ère, 5 février 1991 (cf. sous l‟article 815-11)
6
Arrêt rendu le même jour (cf. sous l‟article 815-10, note 5)
7
Sauf pour les divorces par consentement mutuel, qui prennent effet, relativement aux biens, à la
date d‟homologation de la convention réglant les conséquences du divorce sauf si les époux en
décident autrement (262-1)
8
Répertoire du notariat Defrénois, 30 mars 1996 n° 6, p. 406
********************************************************************************
Divorce n‟est opposable au tiers qu‟à compter de la publication du divorce, l‟indivision commence
à cette date pour les créanciers.
Pour les époux :
Article 262-1 : date de l‟homologation ou choix des époux, le plus souvent choisis la date de la
séparation de fait.
Dans le cadre d‟un divorce contentieux divorce à la date de l‟ordonnance de non conciliation,
peuvent demander qu‟il rétroagisse au jour de la séparation.
Article 815-10 al 2 : les revenus d‟un bien indivis accroisse l‟indivision
Article 815-12 : un indivisaire qui gère l‟indivision doit les fruites et revenu mais a droit à un
revenu pour son activité, revenu fixé à la amiable ou par décision de justice.
Sur les revenus il va imputer les charges, c‟est le revenu net qui va accroitre l‟indivision, déduction
faite de son salaire
Article 815-11 : les indivisaires ont droit annuellement à leur part dans les bénéfices de l‟indivision.
Le compte d‟indivision peut porter sur des sommes importantes. Il faut déterminer la nature des
biens, calculer les récompense et le compte d‟indivision.
I – Actif
II – Passif
III – Compte des récompenses
IV – Compte d‟indivision
Dans la phrase d‟introduction partiel : marié => régime primaire, régime légale et citer 815 pour
l‟indivision. Dans le partielle toujours un décès pas de partage => liquidation de la communauté, de
la succession le partage n‟est pas encore fait => compte de récompense.
C/ Le choix d’un régime matrimonial :
Le droit des régimes matrimoniaux a pendant longtemps été gouverné par le principe de
l‟immutabilité des conventions matrimoniales qui interdisait aux époux de modifier leur régime
matrimonial par le seul effet de leur volonté.
Toutefois, la séparation de biens judiciaire constituait une exception à ce principe : les articles 1443
et suivants du Code civil permettaient en effet à un époux, lorsque le maintien de la communauté
mettait en péril ses intérêts, de demander en justice la séparation de biens.
Ce contrôle du juge a cependant vite été jugé trop contraignant en particulier par le notariat
s‟étonnant lors de son 75e congrès national à la Baule en 1978, après l‟entrée en vigueur de la
réforme du divorce en 1975, qu‟il fût « plus difficile de changer de régime matrimonial que de
divorcer par consentement mutuel ».
Une partie de la doctrine lui a rapidement emboité le pas sans que pour autant le législateur de 1985
juge bon de déjudiciariser la matière.
Les auteurs, pour critiquer le système en vigueur, faisaient remarquer qu‟il introduisait une inégalité
entre les couples candidats au changement de régime matrimonial.
En effet, la convention de la Haye du 14 mars 1978, entrée en vigueur en France le 1 er septembre
1992, autorise, sous certaines conditions, les époux concernés par un élément d‟extranéité à changer
de loi applicable à leur régime matrimonial (art 6) à tout moment sans homologation et par simple
déclaration notariée de désignation d‟une nouvelle loi applicable.
Le droit français créait ainsi un changement de régime à deux vitesses, l‟un souple et rapide pour les
couples présentant un élément d‟extranéité et l‟autre plus strictement encadré pour les couples
franco-français.
De manière inattendue, cette question a été réglée à l‟occasion de la loi portant réforme des
successions et libéralités.
Par voie d‟amendement et sans grands débats, la loi du 23 juin 2006 a modifié les articles 1396
alinéa 3 et 1397 du Code civil et a introduit dans ses « dispositions diverses et transitoires » un
dispositif de déjudiciarisation partielle qui rend subsidiaire l‟intervention du juge mais qui
corrélativement accentue largement le rôle du notaire.
La suppression du caractère général et absolu de l‟homologation par le tribunal fut donc le grand
changement opéré en 2006.
Désormais, le juge n‟intervient qu‟à titre exceptionnel lorsque les enfants du couple sont mineurs ou
lorsque leurs enfants majeurs, les parties à la convention modifiée ou les créanciers des époux
s‟opposent au changement de régime matrimonial.
Il convient de préciser que l‟article 1397 a par la suite été corrigé par la loi du 5 mars 2007 portant
réforme des majeurs protégés (soit deux mois après son entrée en vigueur), et a été complété par un
décret, un arrêté, une instruction et une circulaire ministérielle.
On peut regretter qu‟il n‟y ait pas eu une réforme spécifique relative au changement de régime
matrimonial.
Dans la mesure où il a été réformé de façon accessoire dans une loi concernant les successions, puis
modifié par une loi concernant les incapables, l‟article 1397 comporte en effet beaucoup de lacunes
et d‟imprécisions ce qui en pratique pose des difficultés aux praticiens chargés de mettre en œuvre
ce changement et notamment au notaire qui désormais est au cœur de la procédure.
Nous ne nous intéresserons qu‟au changement de régime matrimonial conventionnel et allons tenter
de mettre en avant le rôle du notaire et les difficultés pratiques, nées des lacunes des textes,
auxquelles il est confronté lors de la procédure de changement de régime matrimonial.
Dans cette perspective, c‟est tout particulièrement le rôle de conseil et d‟information du notaire que
l‟on va s‟efforcer de mettre en lumière, tout d‟abord lors de l‟élaboration de l‟acte portant
changement de régime matrimonial (I) puis après la signature de celui-ci par les parties (II).
La loi du 23 juin 2006 a renforcé les formalités informatives liées au changement de régime
matrimonial.
Bien que la loi ne précise pas qui sera chargé de procéder à l‟information on se doute bien que c‟est
le notaire qui s‟en chargera dans la mesure où il est désormais l‟intervenant unique.
A.L‟information initiale
Cette information suscite diverses interrogations que nous allons tenter de résoudre dès maintenant.
Illustration : exemple de lettre que le notaire a envoyé dans le cadre du changement de régime
matrimonial présenté
La première question est de savoir à qui le notaire doit adresser l‟information du changement de
régime matrimonial.
On peut trouver la réponse à cette question aux alinéas 2 et 3 de l‟article 1397 du Code civil qui
prévoient une double information : d‟une part il revient au notaire d‟informer personnellement les
enfants majeurs et les parties au contrat (c‟est-à-dire les parents ou les tiers ayant consenti une
donation aux époux ou l‟un d‟eux dans leur contrat de mariage) et d‟autre part d‟informer de façon
plus générale les créanciers des époux.
Il faut noter que cette obligation d‟information systématique en faveur des enfants majeurs est une
innovation de la loi du 23 juin 2006. En effet, jusqu‟à présent leur consultation n‟était qu‟une
faculté laissée à l‟appréciation du juge (Cass. Civ. 1ère 24 novembre 1993 par exemple : Bull.civ I.
n°342 ; Defrénois 1994, art 35856 n° 94 obs. G.Champenois ; RTD Civ 1995, 675, Obs Vareille).
La circulaire du garde des sceaux de présentation de la réforme des successions et des libéralités du
29 mai 2007 précise toutefois que si le couple a à la fois des enfants majeurs ET mineurs, « la
formalité d‟information personnelle prévue par le deuxième alinéa de l‟article 1397 n‟est pas
requise ». En effet, l‟information des enfants majeurs parait superflue puisque ces derniers n‟auront
pas à s‟opposer au changement dans la mesure où la simple présence des enfants mineurs suffit à
déclencher la procédure d‟homologation et donc le contrôle du juge.
Une difficulté peut se poser en pratique lorsque l‟enfant majeur est soumis à une mesure de
protection.
(Pour plus de précisions à ce sujet cf article de J.Hauser et JM.Plazy « Changement de régime
matrimonial et enfant majeur hors d‟état de manifester sa volonté » Defrénois 30 mai 2007 n°10
p733)
La question est d‟autant plus difficile à résoudre que l‟article 1397 reste silencieux sur ce point ce
qui peut d‟ailleurs paraitre étonnant dans la mesure où la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la
protection juridique des majeurs est venue le modifier concernant la situation où l‟un des époux fait
l‟objet d‟une mesure de protection.
Le problème est alors de savoir comment satisfaire à l‟obligation d‟information des enfants majeurs
si ces derniers sont hors d‟état de recevoir une telle information.
Certains auteurs ont suggéré de recourir à l‟homologation judiciaire par assimilation à la situation
des enfants mineurs des époux. Mais ce raisonnement ne correspond pas à la philosophie de la loi
du 23 juin 2006 qui énumère limitativement à l‟article 1397 les cas où l‟homologation judiciaire est
encore admise.
La circulaire du 29 mai 2007 n‟a d‟ailleurs pas retenu cette solution et précise qu‟il faut dans cette
situation appliquer les règles de droit commun concernant les mesures de protection.
Ainsi selon les cas, l‟information sera délivrée soit au tuteur, soit conjointement au majeur protégé
et à son curateur ou à son mandataire ad hoc si le curateur est l‟un de ses parents.
b) Le but de l‟information
Comme le précise l‟article 1397, son but est de permettre aux destinataires de s‟opposer à la
modification du régime matrimonial, dans le délai de 3 mois, lorsqu‟ils estiment que le changement
envisagé est contraire à leurs intérêts personnels.
L‟opposition est notifiée au notaire rédacteur de l‟acte qui doit en informer les époux (art 1300-1
CPC).
En pratique, il doit convoquer les parties pour leur expliquer ce qui va se passer et leur faire
comprendre qu‟en cas d‟opposition il leur appartient de saisir le juge afin de soumettre la
convention modificative à son homologation. C‟est en effet aux époux et non au notaire de déposer
une requête devant le TGI de la résidence de la famille (art 1300-4 CPC) accompagnée d‟une copie
authentique de l‟acte notarié.
Si à la suite d‟une opposition les époux ne saisissent pas le juge pour obtenir l‟homologation
nécessaire, l‟acte devient caduc.
Il faut souligner que l‟opposition des enfants donnera lieu à un débat sur l‟intérêt de la famille et
rapproche ainsi la procédure d‟homologation d‟une procédure contentieuse. Mais comme l‟affirme
expressément l‟article 1301 CPC et comme l‟a rappelé la Cour de cassation (Civ 1 ère 19 mars 2008
n°05-21924) l‟opposition des enfants relève de la matière gracieuse.
c) La forme de l‟information
Pour y répondre il convient de distinguer d‟une part l‟information des créanciers et d„autre part
celle des autres destinataires.
S‟agissant ensuite des autres destinataires, le nouvel article 1300 CPC énonce que l‟information
prévue au 2e alinéa de l‟article 1397 est « notifiée » aux enfants majeurs et aux parties au contrat.
Une difficulté pourra se présenter en pratique: il arrive que les parents qui sont en mésentente avec
leur enfant ignorent son adresse : dans ce cas il convient d‟appliquer le droit commun c‟est-à-dire
qu‟il faut envoyer la lettre au dernier domicile connu de l‟enfant.
La prudence recommande toutefois au notaire de procéder par voie de signification, l‟huissier
instrumentaire étant tenu alors d‟effectuer certaines vérifications (art 651 CPC).
(Cf Rép.min.n°48031.JOAN.Q.11 août 2009 p 7951)
d) Le moment de l‟information
Heureusement, l‟arrêté du 23 décembre 2006 fixant le modèle de l‟information délivrée aux enfants
et aux tiers est venu résoudre cette difficulté textuelle en précisant que l‟information porte sur « la
modification opérée » ce qui implique qu‟elle a déjà eu lieu et que l‟acte a été signé par les parties.
Cette solution semble logique car s‟il existe un intérêt à informer les enfants ou les créanciers c‟est
en leur donnant tous les éléments nécessaires à leur information puisqu‟il leur est reconnu un droit à
s‟opposer au changement.
S‟opposer n‟a de sens que si l‟on s‟oppose à un acte et non à un simple projet.
On retiendra donc que l‟information doit être délivrée APRES la signature de l‟acte par les époux.
e) Le contenu de l‟information
L‟information apparait ainsi minimale dans la mesure où il découle de l‟arrêté que les enfants et les
créanciers ne sont destinataires ni d‟une copie intégrale de l‟acte ni de la liquidation du régime.
Il faut souligner que le notaire étant tenu à une obligation de secret professionnel à l‟égard de ses
clients, il lui est interdit de notifier, de son propre chef, toute information non prévue par l‟arrêté.
Il peut en revanche inviter les enfants à solliciter des informations complémentaires auprès de leurs
parents, afin notamment d‟avoir accès à la liquidation du régime. Une telle autorisation des parents
est à encourager car transmettre la liquidation aux enfants est la garantie d‟une opposition efficace
et rationnelle de leur part.
L‟étendue de l‟information dévoilée aux enfants dépend ainsi bien plus de la qualité des relations
familiales que des textes, l‟arrêté du 23 décembre 2006 n‟imposant qu‟un minimum d‟éléments.
(Rép.min.n°28466.JOAN.Q.26 mai 2009 p 5148 : « le projet d’état liquidatif n’est pas communiqué
aux enfants majeurs par le notaire qui est tenu au secret professionnel envers les époux. Seuls les
conjoints peuvent eux-mêmes procéder à cette communication. En cas de refus des parents de
communiquer l’état liquidatif à leurs enfants ces derniers ont la possibilité s’ils le souhaitent de
faire opposition à l’acte »).
Enfin, une dernière question se pose quant à la sanction encourue lorsque le notaire ne délivre pas
ces informations.
On peut souligner que le législateur reste silencieux sur ce point alors que cette omission a des
conséquences fâcheuses dans la mesure où les destinataires de l‟information sont empêchés de faire
opposition.
On se doute bien que la responsabilité du notaire pourra certainement être engagée mais il faut se
demander par quels moyens pourra être réparé le préjudice causé aux destinataires de l‟information?
Certes cette lacune textuelle a moins d‟importance concernant les créanciers car s‟ils n‟ont pas fait
opposition ils pourront toujours, s‟il a été fait fraude à leurs droits, intenter une action paulienne
tendant à l‟inopposabilité du changement de régime matrimonial (art 1397).
Mais cet oubli est plus délicat concernant l‟enfant majeur qui n‟a pas été informé du changement.
On pourrait envisager d‟ouvrir aux enfants la faculté d‟opposition plusieurs années après que le
changement soit devenu effectif. Mais une telle solution pourrait conduire à une annulation du
changement de régime en cas de non homologation et cela serait contraire à la sécurité juridique.
Faut-il alors considérer que le changement de régime est inopposable à l‟enfant majeur non
informé ? Si tel était le cas, les enfants opposeraient à leurs parents leur ancien régime pour le
temps où ils n‟avaient pas eu connaissance du changement du régime intervenu mais cette
proposition n‟est pas tenable car cela créerait une inégalité entre les enfants informés et les enfants
non informés.
En conclusion il est très difficile de proposer un remède adéquat à la violation de l‟exigence
d‟information des enfants majeurs et il est grand temps que le législateur intervienne à nouveau
pour résoudre la question.
Une fois l‟information initiale délivrée par le notaire, la tâche de celui-ci n‟est pas encore achevée.
En effet, une fois passé le délai d‟opposition, il incombe au notaire de procéder à diverses
formalités de publicité.
Mais avant d‟accomplir sa mission, il lui revient de délivrer aux parties un certificat constatant qu‟il
n‟y a aucune opposition et que l‟acte prend donc pleinement effet dès sa signature.
Ce certificat de non opposition sera requis lors des différentes formalités de publicité que le notaire
doit accomplir comme nous allons le voir maintenant.
Tout d‟abord la loi impose au notaire de procéder aux formalités de publicité suivantes :
D‟une part, conformément à l‟article 1300-2 CPC, il lui appartient de faire porter en marge de l‟acte
de mariage la mention du changement de régime matrimonial.
Pour cela, il doit adresser à l‟officier d‟état civil un courrier, accompagné d‟une expédition de l‟acte
contenant le changement de régime matrimonial et le certificat de non opposition, lui demandant
d‟inscrire cette mention.
D‟autre part, conformément à l‟article 1397 dans l‟hypothèse où les époux avaient conclu un contrat
de mariage, le changement de régime matrimonial doit être mentionné sur la minute de l‟acte
modificatif. Cette mention incombe au notaire rédacteur du contrat de mariage modifié qui est
informé par courrier par le notaire qui a reçu le changement de régime matrimonial une fois que
celui-ci est devenu définitif.
Cette publicité a son importance car elle a pour effet de faire courir le délai de 3 mois rendant le
changement opposable aux tiers (art 1397).
b) La suppression de la mention au RCS
La loi du 23 juin 2006 prévoyait une formalité supplémentaire : le notaire rédacteur de l‟acte devait,
lorsque l‟un des époux était commerçant, informer le greffe du tribunal de commerce du
changement de régime matrimonial une fois que celui-ci était devenu définitif.
Le souci était que l‟obligation de mentionner le régime matrimonial au RCS avait été supprimée par
l‟ordonnance n°2005-428 du 6 mai 2005 ce qui avait manifestement échappé aux rédacteurs de la
réforme de 2006 !!
La loi du 5 mars 2007 est venue résoudre cette incohérence législative en supprimant cette
exigence.
c) La publicité foncière
Enfin, lorsque l‟acte portant changement de régime matrimonial emporte transmission de droits
réels immobiliers ou partage (ex : apport de bien propre à la communauté) le notaire doit procéder
aux formalités de publicité foncière.
Une instruction administrative du 6 septembre 2007 est venue préciser l‟incidence des nouvelles
dispositions en matière de publicité foncière (BOI 10-D-3-07).
S‟agissant des actes non soumis à homologation, et c‟est là l‟innovation, conformément à l‟article
1300-3 CPC, la publication ne peut intervenir qu‟une fois écoulé le délai de 3 mois dont disposent
les parties au contrat modifié, les enfants majeurs et les créanciers des époux pour former
opposition.
Formellement, la publication est requise sur le dépôt d‟une seule expédition (art 34 du décret n°55-
22 du 4 janvier 1955) de l‟acte constatant le changement de régime matrimonial, du certificat de
non opposition et s‟il y a lieu d‟un acte complémentaire comprenant les précisions exigées par la
publicité foncière en ce qui concerne les personnes et les immeubles.
Il est très important de ne pas oublier le certificat de non opposition en pratique car un acte portant
changement de régime matrimonial qui n‟est pas accompagné de ce certificat ne pourra pas être
publié puisqu‟il ne formera pas l‟instrument complet de la convention qu‟il porte !!
S‟agissant, pour finir, des perceptions exigibles lors de la publication des actes au fichier
immobilier, il n‟est apporté aucune modification.
Il faut toutefois préciser qu‟en ce qui concerne les actes qui entrainent la substitution d‟un régime
de communauté à un régime séparatiste, depuis le 1er janvier 2004, la loi supprime la taxe de
publicité foncière. Seul reste du le salaire du conservateur (0,10%).
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Cf documents envoyés
Commentaires profs :
Si le curateur est un membre de la famille du majeur protégé il y a une opposition d‟intérêt, surtout
lorsque le curateur est le parent du majeur => il faut demander au juge des tutelle de nommer un
mandataire ad hoc.
Exposé discussion : Le PACS
INTRODUCTION :
-notion du PACS :
Le PACS a été réformé par la loi du 23 juin 2006 entrée en vigueur le 1er janvier 2007.
Les nouvelles règles issues de cette loi tendent à rapprocher le PACS du mariage. En effet, la réforme
édulcore la teneur contractuelle du PACS et renforce son caractère institutionnel.
Dès la loi de 1999, les partenaires pacsés, qui s‟engagent dans une communauté de vie, sont tenus à des
obligations mutuelles et à une certaine solidarité. Ces droits et devoirs des partenaires sont visés à l‟article
515-4 du code civil (cf texte ancien).
Le législateur de 99 avait imposé aux partenaires liés par un PACS une « aide mutuelle et
matérielle » dont les modalités résultaient de la convention de PACS elle-même. Le conseil constitutionnel
dans sa décision du 9 novembre 1999 est venu apporter une précision : « si la libre volonté des partenaires
peut s’exprimer dans la détermination de cette aide, serait nulle toute clause méconnaissant le caractère
obligatoire de ladite aide ». Le conseil constitutionnel reconnait ainsi le caractère d‟ordre public de cette
aide, comme en ce qui concerne l‟article 214 dans les rapports entre époux. Il faut rappeler que pour que le
Pacs reste bien distinct du mariage, le législateur de 1999 avait pris soin d‟utiliser une terminologie
différente.
La loi nouvelle du 23 juin 2006 formule désormais l‟obligation d‟une « assistance réciproque » tout
en maintenant l‟exigence d‟ « aide matérielle ».
L‟assistance réciproque a avant tout une dimension personnelle (comme dans l‟article 212) même si elle peut
se traduire matériellement par la prise en charge des soins à apporter au partenaire, la collaboration au travail
de l‟autre ou encore le partage du poids de la vie commune.
L‟aide matérielle réciproque permet, quant à elle, de faire face aux besoins de la vie du couple. La loi du 23
juin 2006 précise que si les partenaires n‟en disposent pas autrement, cette aide est proportionnelle à leurs
facultés respectives, comme dans l‟article 214 du cciv.
En ce qui concerne non plus la contribution à la dette mais le droit de poursuite des créanciers, l‟ancien
article 515-4 précisait que « les partenaires sont tenus solidairement, à l’égard des tiers, des dettes
contractées par l’un d’eux pour les besoins de la vie courante et pour les dépenses relatives au logement
commun ».
La doctrine a fait observer qu‟il n‟était pas logique que cette solidarité soit plus lourde que celle prévue pour
les époux ; ces derniers n‟étant pas tenus par les dépenses manifestement excessives, les achats à
tempérament ou encore les emprunts contractés sans le consentement de l‟autre (article 220 du cciv).
Le nouvel article 515-4 issu de la loi du 23 juin 2006 ne fait plus référence aux dépenses relatives au
logement commun. En outre, l‟article précise que la solidarité est exclue pour les dépenses manifestement
excessives, reprenant ici l‟une des limites prévues par l‟article 220 du cciv.
Concernant le régime fiscal, la loi de finances de 2005 a permis d'importantes améliorations. En effet, les
pacsés peuvent désormais bénéficier d'une imposition commune dès la conclusion du pacte (et non plus
attendre trois ans). Ainsi, une seule déclaration de revenus doit être établie ce qui rapproche le PACS du
mariage.
En outre, la loi TEPA a étendu aux partenaires les avantages fiscaux accordés aux époux. Ils bénéficient
donc de l‟abattement prévu à l‟article 790 E et F du CGI : 79 222 €.
Bien que le partenaire n‟ait pas une vocation successorale ab intestat, celui-ci peut tout à fait récolter toute
ou partie de la succession du de cujus lorsque celui-ci en a disposé ainsi par testament. Dans ce cas précis, le
partenaire, depuis la loi TEPA du 21 août 2007 bénéficie d‟une exonération totale des droits de succession
qui s‟applique aux successions ouvertes après le 22 août 2007
-actualité du PACS :
Le nouveau « régime légal » des partenaires qui prévoit un principe de séparation des biens ne s’applique
qu’aux pacs conclus après l’entrée en vigueur de la loi du 23 juin 2006 à savoir le 1 er janvier 2007. Les
anciens pacsés sont donc en principe soumis à l‟ancien régime à moins qu‟ils n‟aient opté, par convention,
pour les dispositions nouvelles. Il convient donc de faire un rappel sur la situation antérieure à la loi de 2006
2) -fonctionnement de l’indivision :
Prenons l‟exemple d‟un couple pacsé au 1er janvier 2004, sans convention, composé d‟un partenaire fortuné :
M.X et d‟un partenaire qui l‟est nettement moins : M.Y.
Le 1er janvier 2005, M.X achète avec ses propres deniers une table et des chaises pour une valeur de 2 000
euros.
Le 30 mars 2005, M.X et M.Y décident d‟acquérir un appartement à Paris pour une valeur de 400 000 euros.
M.X finance à hauteur de 300 000 euros.
Les partenaires décident de mettre fin au PACS le 10 janvier 2006.
Les partenaires se sont pacsés sous l‟empire de la loi du 15 novembre 1999, il en résulte que la table et les
chaises sont réputés indivises par moitié.
Ainsi, à la dissolution du pacte, M.X et M.Y auront 1 000 euros chacun alors que seul M.X a financé
l‟opération.
Pour l‟immeuble, également réputé indivis, chacun des partenaires aura droit à 200 000 euros alors que M.X
avait bien plus contribué que M.Y.
Est-ce que M.X pourrait obtenir le remboursement partiel des deniers qui avaient enrichi l‟indivision ?
En régime de communauté, le mécanisme des récompenses et des créances entre époux tend à rétablir un
certain équilibre. Mais rien de tel ne s‟appliquait au PACS.
Une autre critique résulte du fait qu‟en principe, les biens acquis à titre gratuit ou onéreux avant la
conclusion du PACS et les biens acquis à titre gratuit pendant le PACS restaient hors indivision. Or, le
partenaire qui invoquait l’indivision n’avait pas à faire la preuve (en raison des présomptions légales)
que ces biens sont indivis : à son partenaire d‟établir leur date d‟acquisition antérieure au mariage ou leur
mode d‟acquisition à titre gratuit, ou encore que ces présomptions légales d‟indivision avaient été écartées
par une clause du Pacs (pour les meubles meublants) ou de l‟acte d‟acquisition (pour les autres biens)..
En outre, le système de l‟unanimité des indivisaires quant à la gestion des biens était plus lourd que les
règles de gestion s‟appliquant aux époux : en régime de communauté, le principe de gestion concurrente
s‟applique et, pour tous les régimes, les présomptions de pouvoir posées par le régime primaire facilitent
l‟action de chacun des conjoints.
Notons que la réforme de l‟indivision qui permet de prendre un certain nombre de décisions avec une
majorité des 2/3 des indivisaires (cf article 815-3 nouveau) ne vient pas améliorer la situation des partenaires
qui ne sont que 2.
Il fallait donc trouver une autre solution pour répondre aux nombreuses critiques de la doctrine (cf articles de
cette époque).
Le nouveau régime légal est un régime de séparation de biens (cf. nouvel article 525-5).
Cet article transpose au PACS les règles du régime de séparation de biens prévues aux articles 1536 et
suivants du code civil.
Cela simplifie clairement les choses pendant le Pacs comme à sa dissolution.
1) Pendant le PACS,
-actif :
En ce qui concerne l‟actif, chaque partenaire conserve la propriété personnelle des biens dont il était
propriétaire au jour de l‟enregistrement du PACS.
Il est seul propriétaire des biens acquis par lui en son nom pendant la durée du pacs.
La difficulté réside en ce que les partenaires doivent prouver le caractère personnel d‟un bien si le partenaire
le conteste : en effet, en vertu de l‟article 515-5 al. 2, la charge de la preuve pèse sur celui qui invoque que
tel bien est personnel et la preuve peut se faire par tous moyens.
Les biens pour lesquels les partenaires ne peuvent pas prouver qu‟ils leur appartiennent sont en effet réputés
appartenir indivisément aux partenaires à chacun pour moitié. Mais ici, il s‟agit d‟une présomption simple (à
la différence des présomptions légales posées par la loi de 1999).
- gestion des biens par les partenaires : mise en place d’une autonomie :
- En ce qui concerne la gestion des biens personnels des partenaires, l‟article 515-5al1 s‟applique. Ainsi,
« chacun des partenaires conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens
personnels ».
Les partenaires ne sont vraiment libres que s‟ils parviennent à établir, s‟il est contesté, le caractère personnel
du bien.
- Concernant les biens indivis, comme sous l‟empire de la loi de 99, chaque partenaire peut prendre les
mesures nécessaires à la conservation de tels biens : article 815-2 du cciv. Pour les actes d‟administration et
de disposition, le principe de l‟unanimité demeure malgré la réforme de l‟article 815-3 et la règle de la
majorité des 2/3 car les indivisaires pacsés ne sont que 2.
- En outre, le législateur a inséré une présomption de pouvoir (comme celle prévue à l‟article 222 pour les
époux) : un partenaire a le pouvoir de faire seul sur les biens qu‟il détient individuellement, sans avoir à
prouver qu‟il en est le propriétaire, tout acte d‟administration, de jouissance ou de disposition.
En principe, il appartient aux partenaires, en vertu de l‟article 515-7 al 11, de procéder eux mêmes à la
liquidation des droits et obligations résultant du pacte.
Chacun d‟eux doit prouver, par tous moyens, qu‟il a la propriété exclusive de tel ou tel bien. A défaut, les
biens sont réputés indivis et il y aura lieu à partage, qui se fera en principe par moitié.
En l‟absence d‟accord amiable entre les partenaires, le TI ou le TGI, en fonction du montant du litige, devra
statuer.
Ainsi, le PACS, dans sa nouvelle version, semble beaucoup plus attrayant pour les partenaires.
Mais la difficulté réside en ce qu‟il ne s‟applique qu‟aux partenariats conclus au 1er janvier 2007.
Ainsi, les partenaires pacsés avant cette date sont soumis au régime légal de la loi du 15 novembre 1999 à
savoir la double présomption d‟indivision.
Le notaire pourrait leur conseiller de rompre le PACS et d‟en conclure un autre afin qu‟ils se voient
appliquer les nouvelles dispositions, mais cela supposera de liquider et partager l‟indivision de ce premier
pacs..
Plusieurs régimes dits d‟indivision sont proposés aux partenaires. D‟une part l‟indivision d‟acquêt prévu à
l‟article 515-5-1 qui est le statut auquel les partenaires aspirant à un régime plus proche du régime de
communauté légale des époux peuvent souscrire. Et l‟indivision conventionnelle d‟autre part, qui concerne
uniquement le mode de gestion de tout ou partie des biens des partenaires, qu‟ils soient séparés de biens ou
non.
A- L'indivision d'acquêt
C‟est le statut d‟indivision d‟acquêt qui, selon certains, pourrait faire parler de « quasi-mariage ».
Ce régime est posé en alternative aux partenaires qui ne seraient pas satisfaits par le régime supplétif de la
séparation de biens. Il a pour but d‟unir davantage les intérêts patrimoniaux des partenaires. L‟indivision
concernera alors, en principe, les biens acquis par les partenaires pendant le Pacs dès lors qu‟ils souscrivent à
ce statut. Ils peuvent également y souscrire au cours du PACS (mais cf. liquidation du premier Pacs)..
Toutefois ce régime diffère du régime de communauté légale.
-Biens exclus de l’indivision :
Dans le cadre de ce régime d‟indivision des acquêts, le code crée au sein des biens des partenaires une
catégorie à part, qu‟on pourrait appeler « propres » tout comme pour les époux soumis au régime légal.
On pourrait saluer cette initiative de la loi de 2006. Pourtant l‟article 515-5-2 qui en établit la liste exhaustive
n‟est pas clair, certaines interrogations subsistent après sa lecture. Certes certains biens ne posent pas de
difficultés comme par exemple les gains et salaires, non employés qui « demeurent la propriété exclusive de
chaque partenaire ». Pour comprendre ces dispositions on se réfère presque automatiquement au régime légal
des époux pour signaler les similitudes ou, au contraire les différences.
Au regard du recul apporté par le fonctionnement du régime légal de communauté, on peut estimer que ce
texte n‟est pas toujours clairement rédigé. Ainsi, que déduire du 5° : « les biens et portions de biens acquis au
moyen de deniers reçus par donation ou succession ». On comprend que les biens acquis avec ces deniers
sont personnels, même s‟il faut aller jusqu‟à la fin du texte pour comprendre que c‟est à condition qu‟il y ait
eu remploi. Mais à aucun moment dans cet article on parle du sort des deniers en eux-mêmes, ou encore des
biens reçus à titre gratuit. C‟est par un raisonnement a fortiori qu‟on aboutit à la solution analogue à celle
prévue expressément dans le régime légal des époux : les deniers reçus par donation ou succession sont donc
personnels, eux aussi.
Enfin une dernière difficulté résulte de l‟emplacement de cet article qui prévoit l‟impossibilité pour les biens
cités d‟être indivis. Il se situe juste après l‟article 515-5-1 aménageant la possibilité pour les partenaires
d‟opter pour un statut d‟indivision. L‟article 515-5-2 s‟applique-t-il donc seulement à l‟indivision d‟acquêt
prévue par l‟article 515-5-1, ou bien s‟applique-t-il aussi à l‟indivision conventionnelle (article 515-5-3) que
peuvent choisir les partenaires soumis au statut légal comme ceux qui ont opté pour l‟indivision d‟acquêt ?
Pour l‟heure aucune jurisprudence ne peut aider à répondre à cette interrogation. On peut penser que cet
article qui porte une dérogation à l‟indivision ne déroge qu‟à l‟article auquel il fait suite, c'est-à-dire à
l‟indivision d‟acquêt. En tous cas le 4° le laisse penser puisqu‟il fait référence à la convention permettant
d‟être soumis à l‟indivision d‟acquêt.
En outre, l‟indivision conventionnelle prévue par l‟article 515-5-3 ne concerne que les règles de gestion des
biens et non leur nature juridique.
Il est certain que l‟article 515-5-2 ne peut concerner les partenaires soumis au « régime légal » concernant la
nature juridique des biens, et ne s‟applique donc qu‟à ceux qui, toujours concernant la nature juridique des
biens, ont opté pour le régime conventionnel d‟indivision d‟acquêts de l‟article 515-5-1.
Et en ce cas, pour la doctrine une chose semble certaine, c‟est qu‟aucune liberté n‟est laissée aux partenaires
quant à la possibilité d‟élargir ou réduire la liste de l‟article 515-5-2, sa rédaction étant fortement teintée
d‟impérativité, même si cette impérativité dénote avec le régime de liberté qu‟institue le PACS.
Le régime d‟indivision des acquêts s‟applique uniquement aux biens acquis par les partenaires après
l‟enregistrement de leur convention. L‟acquisition peut être faite par un seul ou par les deux partenaires : le
bien sera réputé indivis pour moitié entre les partenaires et ce quel que soit le financement. L‟un des
partenaires pourra acquérir un bien seul, le financer seul : il appartiendra tout de même à l‟autre pour moitié,
alors propriétaire d‟une moitié indivise. Peu importe en effet qu‟un seul partenaire acquiert le bien, et que
l‟autre ne soit pas d‟accord sur la chose et sur le prix, ou encore qu‟il ne soit pas au courant de l‟acquisition :
le bien sera tout de même indivis.
On est face à un transfert de propriété qui est de la même nature que celui qui s‟opère entre les époux mariés
sous le régime légal et par conséquent cela donnera lieu, en cas de dissolution, à un partage égalitaire.
Pour ce qui est de la nature des biens pouvant être des acquêts, la loi ne précise pas, n‟effectue aucune
distinction. On peut donc en déduire qu‟il peut tout à fait s‟agir de biens immeubles comme des meubles,
corporels ou incorporels.
Dans le cadre de l‟indivision d‟acquêt lorsque rien n‟est prévu dans la convention de PACS, et comme le
précise l‟alinéa premier de l‟article 515-5-3 du code civil : chaque partenaire est gérant de l‟indivision et
peut exercer les pouvoirs reconnus par les articles 1873-6 à 1873-8, autrement dit par les articles relatifs au
droit commun des conventions d‟indivision. Les pouvoirs dont bénéficient les partenaires sur leurs acquêts
sont donc dits « concurrents », tout comme ceux des époux sur les biens communs.
On verra qu‟il y a peut-être un intérêt pour les partenaires de prévoir un mode de gestion différent que celui
appliqué d‟office, possibilité ouverte par l‟alinéa 2 de l‟article 515-5-3 qui renvoie aux règles de l‟indivision
conventionnelle (articles 1873-1 à 1873-15).
Le principe est une grande liberté laissée aux partenaires quant au partage des acquêts.
Certes il faut sans doute distinguer entre les différents modes de dissolution du PACS énoncés à l‟article
515-7 al 1er du code civil, selon que la rupture est ou non conflictuelle.
On envisagera en premier lieu les conséquences propres à la dissolution de l‟indivision d‟acquêt. Celles qui
sont communes aux deux statuts seront envisagées en conclusion.
En tout état de cause, une fois les biens personnels repris par les partenaires bénéficiant à cet égard de tout
moyen de preuve, il faut bien décider du sort des biens indivis lors de la dissolution. Le problème se posera
surtout en cas de rupture unilatérale par un des partenaires ou bien son mariage avec un tiers.
Les biens indivis ont vocation à être partagés également puisque l‟indivision d‟acquêt dans son principe fait
des partenaires des propriétaires pour moitié des biens acquis pendant la durée du PACS, et ce sans qu‟aucun
recours ultérieur ne soit possible entre les partenaires pour une éventuelle contribution inégale.
Cependant le code civil reste très lacunaire quant au sort des biens suite à la dissolution, aussi bien dans le
cadre du statut légal que de l‟indivision d‟acquêt. Etant donnée la nature contractuelle du PACS, on peut
présumer que ce silence est voulu afin de respecter le principe de liberté qui a toujours caractérisé la
dissolution du PACS. Il s‟agira alors pour les partenaires de mettre fin eux-mêmes à l‟indivision, et régler
amiablement les conséquences de la dissolution. Parfois, en cas de litige le juge peut être amené à intervenir.
Depuis le 1er janvier 2010, c‟est le JAF qui est compétent, ce qui rapproche encore le PACS du mariage
puisque auparavant la compétence revenait au TI et au TGI en fonction du montant du litige.
L‟indivision conventionnelle peut être choisie par tous les partenaires au cours de la durée du PACS, pour
assurer la gestion de leurs biens indivis, qu‟ils soient sous le régime de la séparation de biens ou sous celui
de l‟indivision d‟acquêts.
Néanmoins le régime de cette indivision conventionnelle, pourtant régie par les mêmes articles (1873-1 à 15)
dans les deux cas ne sera pas tout à fait le même selon qu‟on se trouve sous le régime de la séparation de
biens ou celui de l‟indivision d‟acquêts.
Cette convention d‟indivision peut avoir été choisie afin de régir tout ou partie des biens indivis des
partenaires. Elle leur offre la possibilité d‟acquérir certains biens indivisément (comme peuvent le faire des
époux mariés sous le régime de la séparation de biens). Il s‟agira en quelque sorte d‟une indivision
ponctuelle, qui s‟appliquera à certains biens uniquement. Il ne faut pas confondre cette hypothèse
d‟acquisition d‟un ou quelques biens en indivis avec le jeu de la présomption d‟indivision (faute de preuve
contraire) dans le régime séparatiste.
Si les partenaires séparés de biens n‟avaient pas conclus de convention d‟indivision antérieurement à une
acquisition, et que cette acquisition est dite conjointe : l‟indivision de droit commun leur aurait été appliquée.
Ce qui signifie les articles 815 et suivants du code civil (= textes également applicables pour les biens
présumés indivis des partenaires pacsés sous le régime légal de la loi de 1999, à défaut d‟avoir décidé dans la
convention de Pacs pour les meubles meublants ou dans l‟acte d‟acquisition pour les autres biens,
d‟appliquer le régime conventionnel d‟indivision prévu par les articles 1873-1 et s. cf décision du Conseil
constitutionnel 9 nov. 1999 sous l‟article 515-5 ancien).
Si l‟on considère que l‟article 515-5-3 ne concerne que les partenaires qui ont choisi le régime de l‟indivision
d‟acquêts de l‟article 515-5-1, il faut ici appliquer l‟article 1873-3 concernant la durée d‟une convention
d‟indivision concernant des biens acquis en indivis par des partenaires séparés de biens. Mais on peut aussi
considérer que l‟article 515-5-3 s‟applique à toutes les conventions pour l‟administration de biens indivis
entre partenaires quelque soit le cadre de cette indivision.
Chaque partenaire devra conserver la preuve du caractère indivis du bien acquis ainsi que la quote-part qu‟il
a réellement financée. En effet, l‟intérêt de conclure une convention d‟indivision est d‟échapper à
l‟indivision légale s‟appliquant à une acquisition conjointe et faisant présumer que le bien a été acquis à 50-
50.
Des recours peuvent être exercés par un partenaire contre l‟autre du chef d‟une contribution inégale qui
n‟aurait pas été mentionnée dans l‟acte. Ce qui n‟aurait pas été possible sans convention d‟indivision.
L‟intérêt principal pour les partenaires ayant déjà opté pour l‟indivision d‟acquêt de conclure une convention
d‟indivision est de pouvoir moduler les quote-part d‟indivision à proportion de leur participation financière
lors de l‟acquisition. Et surtout de le faire sur les biens de leur choix. La liberté est accrue.
Le dernier alinéa de l‟article 515-5-3 prévoit que, par dérogation à l‟article 1873-3, la convention
d‟indivision est réputée conclue pour la durée du Pacs, mais, lors de la dissolution du Pacs, les partenaires
peuvent décider qu‟elle continue de produire ses effets.
CONCLUSION :
Les effets communs de la dissolution du PACS, pour les partenaires séparés de biens comme pour ceux ayant
opté pour l‟indivision d‟acquêt.
Pendant le PACS il se peut qu‟il y ait eu des mouvements de fonds. En effet, tout comme pour les
acquisitions effectuées par les époux, certains biens indivis peuvent avoir été financés par des deniers
personnels d‟un partenaire, et certains biens personnels peuvent avoir été acquis avec des deniers indivis. Ces
mouvements de fonds peuvent donner lieu à des créances entre partenaires. On voit bien ici l‟analogie avec
les récompenses entre époux, analogie d‟autant plus forte que le mode d‟évaluation de ces créances est celui
de l‟article 1469 comme en dispose le dernier alinéa de l‟article 515-7 du code civil.
On peut les régler isolément mais il se peut qu‟elles se compensent avec le fait qu‟un des deux partenaires
n‟ait pas participé à hauteur de ses facultés durant le PACS aux dettes contractées pour les besoins de la vie
courante. Dans ce dernier cas, elles feront donc partie d‟un compte global.
Lorsque l‟un des partenaires décède, le PACS est automatiquement dissout. L‟article 515-6 du code civil
règle les effets de la dissolution vis-à-vis du partenaire survivant. Effets rappelant ostensiblement ceux qui
surviennent au décès d‟un époux. Le partenaire survivant aura tout d‟abord le droit à une attribution
préférentielle, le code se contentant d‟effectuer un renvoi aux articles concernant les époux. Mais dans le cas
particulier du logement familial, l‟article 515-6 al 2 fait une distinction : l‟attribution préférentielle n‟est pas
de droit mais doit avoir été prévue par le de cujus dans un testament.
Néanmoins le partenaire survivant a un droit temporaire au logement. Le même que l‟on retrouve à l‟article
763 du code civil pour les époux. Le code civil permet donc au partenaire de rester dans les locaux assurant
le logement familial pendant l‟année qui suit le décès. Cependant l‟article ne renvoie qu‟aux deux premiers
alinéas de 763, ce qui signifie que dans le cas du PACS ce n‟est pas d‟ordre public.
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Commentaires profs :
Ce n‟est pas un quasi mariage, dans le domaine patrimonial ok, mais pas d‟accès au caractère
symbolique du mariage et pas de possibilité de l‟adoption.
Caractère techniquement très compliqué de l‟ancien régime du pacs, on ne savait pas comment faire
pour liquider en cas de litige.
Depuis la loi de 2006 le pacs peut être conclu par acte authentique.
II – Le partage successoral
La réforme du droit des successions
« L’option successorale »
Dans le code civil de 1804 était déjà affirmé le caractère facultatif de la transmission d‟une
succession, caractère qui se reflète dans l‟existence d‟une option successorale au profit des
successibles. En effet, l‟article 775 ancien du code civil énonçait le principe selon lequel « nul n‟est
tenu d‟accepter une succession qui lui est échue » et trois choix étaient déjà offerts : acceptation
pure et simple, renonciation, ou acceptation sous bénéfice d‟inventaire. La loi de 2006 est venue
depuis remanier les textes en matière d‟option successorale, mais a maintenu la possibilité d‟choix
pour le successible parmi trois partis (cf. art. 768 nouveau), ce qui laisse toujours ce dernier libre ou
non d‟accepter la transmission de la succession. Il dispose d‟un délai pour opter mais, s‟il accepte,
la transmission des droits du de cujus à son successeur est censée s‟opérer rétroactivement dès le
décès de ce dernier car en droit français il ne peut exister de droits sans titulaire. Et dans
l‟hypothèse où le successible renoncerait à ses droits, c‟est l‟héritier subséquent, s‟il accepte, qui
sera censé être devenu propriétaire à la date du décès.
Selon l‟article 768 nouveau du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 23 juin 2006 entrée en
vigueur le 1er janvier 2007, le successible peut opter entre trois partis : accepter purement et
simplement la succession, renoncer à celle-ci ou bien l‟accepter à concurrence de l‟actif net. Cette
dernière faculté qui remplace, en la simplifiant pour la rendre plus accessible, l‟acceptation sous
bénéfice d‟inventaire, tend à sécuriser les héritiers acceptants.
Par ailleurs, la loi obéit à deux autres objectifs principaux qui sont de faciliter le règlement des
successions, notamment au travers de délais plus courts, et de protéger les créanciers successoraux.
Ce sont non seulement les héritiers successibles en rang utile qui doivent prendre parti en matière
d‟option successorale, mais également les légataires quelque soit leur vocation, c‟est-à-dire qu‟elle
soit universelle, à titre universel ou à titre particulier. Cependant, s‟ils sont tous titulaires d‟une
l‟option, l‟éventail du choix ne sera pas le même pour les légataires à titre particulier puisque,
n‟étant pas tenus du passif, ils ne pourront choisir qu‟entre l‟acceptation pure et simple et la
renonciation à leur legs.
En matière d‟option successorale, quels sont les choix que peut opérer le successible et quelles en
sont les modalités ? En fonction de l‟option ainsi exercée, quelles seront les conséquences pour le
successible et les créanciers ?
Après avoir mis en évidence les termes de l‟option, à travers la forme prise par celle-ci et les
modalités d‟acceptation, nous étudierons les effets qui vont survenir quant à la situation de l‟héritier
et celle des créanciers.
La renonciation est l‟hypothèse inverse : l‟héritier abdique dans ce cas ses droits successoraux. Il
s‟agit d‟une attitude plutôt surprenante mais qui se conçoit dans plusieurs hypothèses :
- lorsque le patrimoine successoral est effectivement obéré ;
- par générosité au profit des successibles de la génération suivante, la renonciation
constituant alors une donation indirecte ;
- enfin, il peut s‟agir d‟une attitude manifestement intéressée si l‟héritier a reçu une
libéralité importante. En effet, si l‟héritier renonce à la succession il pourra conserver la donation,
après avoir éventuellement subi la réduction de la donation pour atteinte à la réserve, mais ne sera
plus tenu du rapport. Il peut alors être plus intéressant pour l‟héritier de renoncer à la succession
afin de conserver la donation antérieure (en subissant éventuellement une réduction), que d‟accepter
la succession, ce qui le contraindrait au rapport (cf. art. 843).
Lorsque l‟héritier renonce, il est « censé n‟avoir jamais été héritier » (cf. article 785 ancien et article
805 alinéa 1). Mais, innovation importante, depuis 2006, la représentation d‟un héritier qui renonce
est possible, en ligne directe ou en ligne collatérale. A défaut, en vertu de l‟article 805 alinéa 2 du
code civil, ses droits viennent alors accroître la part de ses cohéritiers ou d‟un éventuel légataire
universel.
Une autre modification importante issue de la réforme du 23 juin 2006 a été le remplacement de
l‟ancienne acceptation sous bénéfice d‟inventaire par l‟acceptation à concurrence de l‟actif net.
Cette option apparaît comme une solution intermédiaire entre l‟acceptation pure et simple et la
renonciation, qui peuvent présenter toutes les deux des inconvénients pour les héritiers. En effet,
l‟acceptation pure et simple présente le risque de les ruiner si la succession s‟avère grevée d‟un
lourd passif tandis que la renonciation ne leur permet pas de profiter des biens successoraux.
L‟acceptation à concurrence de l‟actif net oblige l‟héritier de faire un état des lieux (inventaire) du
patrimoine successoral, qui lui évitera d‟être tenu des dettes sur ses biens personnels.
Ce type d‟acceptation est encadré par un formalisme strict, précisé par la réforme de 2006, qui
s‟impose à l‟héritier :
- Ce dernier doit faire une déclaration au greffe du tribunal de grande instance du lieu d‟ouverture
de la succession, suivie d‟une publicité.
Le but de cette publicité est de permettre aux créanciers de se faire connaître. En effet, ces derniers
ont quinze mois à compter de la publicité pour déclarer leur créance, sous peine d‟extinction de
celle-ci.
- Par ailleurs, dans un délai beaucoup plus court puisqu‟il est de seulement deux mois à compter de
cette prise de position, doit être dressé l‟inventaire des éléments d‟actif et de passif de la succession,
par un notaire, un huissier ou un commissaire-priseur.
Grâce à ce type d‟acceptation, l‟acceptant à concurrence de l‟actif net n‟est alors tenu du paiement
des dettes que dans la limite de la valeur des biens qu‟il recueille.
- Délais d’option et prescription
Il existe deux délais importants en matière d‟option successorale : celui dans lequel le successible
peut être sommé d‟opter et celui par lequel se prescrit la faculté d‟option.
- Le délai de réflexion : l‟exercice de l‟option suppose tout d‟abord que soit accordé au
successible un délai afin que celui-ci puisse prendre sa décision en toute connaissance de cause.
L‟article 771 alinéa 1er du code civil prévoit ainsi que l‟héritier ne peut être contraint à opter avant
l‟expiration d‟un délai de quatre mois à compter de l‟ouverture de la succession. (comparer avec
l‟article 795 ancien : délai de 3 mois pour faire inventaire puis 40 jours pour délibérer). Avant la
réforme de 2006, ce délai jouait uniquement en présence d‟un créancier : tant qu‟il n‟était pas
poursuivi par un créancier de la succession, le successible restait libre d‟opter quand il le veut. S‟il
était poursuivi, ce délai constituait pour l‟héritier une exception dilatoire (art 797 ancien).
L‟expiration du délai ne le rendait pas automatiquement acceptant pur et simple mais à défaut de
choix, (ou si ayant opté pour le bénéfice d‟inventaire il ne fait pas procéder à cet inventaire), la
jurisprudence était venue préciser qu‟il devait être condamné comme acceptant pur et simple à
l‟égard du créancier de la succession qui l‟a poursuivi.
Innovation importante depuis la réforme de 2006, si l‟héritier n‟a toujours pas opté à l‟issue de ce
délai de 4 mois, il pourra alors être sommé de prendre parti non seulement par les créanciers mais
par tout cohéritier voire même l‟Etat (art. 771 alinéa 2). L‟héritier disposera alors d‟un délai de
deux mois pour opter (art. 772). A défaut, il sera réputé avoir accepté purement et simplement la
succession.
Si l‟héritier n‟a pas pris sa décision à l‟issue du délai de quatre mois et s‟il n‟a reçu aucune
sommation, il conserve sa faculté d‟option mais il devra alors prendre garde au deuxième délai
prévu par les textes en matière d‟option, celui concernant la prescription.
- La révocation de l’option
La situation la plus normale est celle de l‟acceptation pure et simple de la succession par les
héritiers. C‟est d‟ailleurs ce type d‟acceptation que le législateur souhaite privilégier, comme le
prouvent les dispositions en matière de révocabilité de l‟option successorale. Le législateur a ainsi
décidé que celui qui accepte purement et simplement une succession ne peut revenir en arrière : ce
type d‟option est irrévocable.
Pour les acceptants à concurrence de l‟actif net, il est possible, tant que la prescription n‟est pas
acquise, de révoquer cette acceptation à concurrence de l‟actif net en acceptant purement et
simplement, mais il n‟est plus possible pour eux de renoncer à la succession : cf. art. 801.
Toujours dans le même esprit, en ce qui concerne la renonciation, elle ne supporte aucune
irrévocabilité. Le renonçant peut, tant que le délai de prescription n‟est pas écoulé, et à condition
qu‟aucun héritier subséquent, devenu en rang utile du fait de cette renonciation, n‟ait accepté la
succession et, s‟il s‟agit de l‟Etat qu‟il n‟ait pas été envoyé en possession, accepter la succession.
Un héritier peut devenir acceptant pur et simple ou acceptant à concurrence de l‟actif net sans
l‟avoir expressément décidé.
- Acceptation pure et simple tacite ou forcée
L’acceptation tacite
L‟article 782 du code civil dispose que « l‟acceptation pure et simple peut être expresse ou tacite ».
L‟acceptation expresse s‟entend alors d‟une déclaration formelle, par écrit, qui peut être authentique
ou sous seing privé. La suite de l‟article 782 traite de l‟acceptation tacite et indique que
« l‟acceptation est tacite quand le successible saisi fait un acte qui suppose nécessairement son
intention d‟accepter et qu‟il n‟aurait droit de faire qu‟en qualité d‟héritier acceptant ». Or la
jurisprudence avait, avant l‟intervention de la loi de 2006, apporté une grande extension quant aux
faits valant acceptation tacite, en se fondant plus sur la nature objective des actes accomplis par
l‟héritier que sur l‟intention réelle de ce dernier, ce qui était peu sécurisant pour lui. La loi de 2006
est intervenue afin de diminuer les risques d‟acceptation tacite pour les héritiers et a dressé la liste
des actes valant acceptation tacite à l‟article 783 du code civil et celle des actes n‟entraînant pas
acceptation tacite de la succession à l‟article suivant. Ainsi, les actes d‟administration provisoire
accomplis par un successible n‟emportent pas acceptation tacite de la succession, à condition que
l‟auteur des actes n‟y ait pas pris le titre ou la qualité d‟héritier ; il en est de même pour les actes
conservatoires et de surveillance.
Par ailleurs, si un héritier souhaite accomplir un acte important sur la succession sans que ce dernier
entraîne acceptation tacite de la succession, il lui est possible de se faire autoriser par le président du
tribunal de grande instance (article 784 alinéa 2).
L’acceptation forcée
Il existe encore deux hypothèses où l‟acceptation pure et simple s‟impose à l‟héritier comme une
punition en raison de son comportement.
- En cas de recel :
En vertu de l‟article 778 du code civil, lorsqu‟un héritier a recelé des biens ou des droits d‟une
succession ou encore dissimulé l‟existence d‟un cohéritier, il est réputé accepter purement et
simplement la succession. L‟héritier a, dans cette hypothèse, voulu rompre frauduleusement
l‟égalité du partage Le recel suppose alors l‟existence de plusieurs ayants-droits à la succession.
Le recel, tel que défini à l‟article 778 du code civil, ne peut être commis que par un successible
prenant effectivement part à la succession et ayant intérêt à rompre l‟égalité dans le partage à son
profit c‟est-à-dire un héritier à titre universel. Au contraire, ceux qui n‟ont contre la succession que
des droits à titre particulier, ne pourront commettre un tel recel.
L‟élément matériel du recel consiste soit dans l‟appréhension matérielle par un héritier d‟un bien
successoral soit par la dissimulation par exemple d‟une libéralité sans dispense de rapport. De plus,
la loi du 23 juin 2006 a élargi le champ d‟application du recel successoral à la dissimulation d‟un
cohéritier. Ainsi, en cas d‟omission intentionnelle d‟un héritier, il y a application des sanctions du
recel successoral.
Par ailleurs, il est nécessaire que soit caractérisée l‟intention frauduleuse de l‟héritier de rompre
l‟égalité dans le partage. Cela explique ainsi que le recel ne peut avoir été commis qu‟au détriment
d‟un cohéritier, et qu‟il n‟est pas admis lorsque des éléments de l‟actif successoral ont été
dissimulés en vue d‟une fraude fiscale.
En ce qui concerne la sanction du recel, celle-ci s‟analyse en une peine privée qui est double :
- D‟une part, par l‟effet de la loi, le receleur sera réputé avoir accepté purement et simplement la
succession toutes les conséquences qui en découlent. Toutefois cette sanction n‟a de réelle
conséquence que si la succession est insolvable.
- C‟est alors le deuxième volet de la sanction qui sera redoutable pour le receleur puisqu‟il va avoir
pour conséquence qu‟une succession solvable pourra ne plus l‟être à son égard. Le receleur sera
privé de tout droit sur les biens recelés qui seront entièrement attribués aux autres héritiers de la
succession, tout en étant tenu de sa contribution normale au passif de la succession. On observe que
les cohéritiers du receleur ont intérêt à le dénoncer car ils vont voir leurs droits dans la succession
accrus.
Dans certains cas l‟héritier n‟a pas le choix et se voit imposer, s‟il accepte, une acceptation à
concurrence de l‟actif net.
- D‟une part, l‟acceptation à concurrence de l‟actif net comporte une particularité prévue par
l‟article 792-2 du code civil. La règle posée par cet article est que l‟acceptation à concurrence de
l‟actif net par un seul des cohéritiers entraîne celle de tous. Ainsi, si les autres héritiers avaient
accepté purement et simplement, il suffit qu‟un seul héritier ait accepté à concurrence de l‟actif net
pour que les règles de ce dernier type d‟acceptation s‟imposent à tous.
- D‟autre part l‟article 507-1 prévoit que « Par dérogation à l‟article 768, le tuteur ne peut accepter
une succession échue à la personne protégée qu‟à concurrence de l‟actif net… » cf la suite du texte
plus la jurisprudence citée.
Il convient de distinguer les effets qui vont survenir quant à la situation de l‟héritier et ceux qui vont
concerner les créanciers personnels de l‟héritier ou successoraux.
A. La situation de l’héritier
Il existe des particularités en cas d‟acceptation à concurrence de l‟actif net. En effet, si les droits de
l‟héritier sur l‟actif sont consolidés par l‟acceptation, le fait que l‟obligation au passif dont il est
tenu soit limitée à la valeur de l‟actif successoral va avoir pour corollaire une limitation des droits
de l‟héritier sur l‟actif : l‟héritier étant le propriétaire de l‟actif successoral, il en a en principe la
libre gestion, mais le législateur a néanmoins institué des limites quant à la liberté dont dispose
l‟héritier dans son administration. Même si la réforme de 2006 a assoupli certaines règles, en
permettant notamment à l‟héritier d‟aliéner les biens qu‟il n‟entend pas conserver, il doit déclarer
cette décision au tribunal du lieu d‟ouverture de la succession. L‟héritier doit également rendre
compte de son administration aux créanciers successoraux. Par ailleurs, l‟article 814-1 nouveau
permet désormais à l‟héritier de demander au juge de lui substituer dans les charges
d‟administration et de liquidation de la succession une « personne qualifiée en qualité de mandataire
judiciaire », confirmant ainsi la jurisprudence antérieure qui avait organisé, en l‟absence de texte,
l‟administration judiciaire de la succession.
L‟acceptation à concurrence de l‟actif net, comme l‟indique son nom, va avoir pour conséquence
que l‟héritier ne sera tenu au paiement des dettes de la succession qu‟à concurrence de l‟actif. Il sera
tenu du paiement de tout type de dettes, mais uniquement dans la limite de l‟actif héréditaire. C‟est
alors l‟héritier lui-même qui va régler le passif de la succession.
Quant aux legs de sommes d‟argent, ils ne seront, comme en matière d‟acceptation pure et simple,
délivrés qu‟à concurrence de l‟actif net des dettes de la succession, et uniquement après paiement
des créanciers.
Le renonçant perd quant à lui tous ses droits à caractère patrimonial sur la succession et n‟a
donc aucun pouvoir sur les biens composant celle-ci. En revanche, il conserve ses droits à caractère
extrapatrimonial (tel le droit de défendre le nom).
L‟héritier renonçant perd ainsi tout droit sur l‟actif et est corrélativement libéré de toute obligation
au passif. Le renonçant n‟est tenu ni du paiement des dettes et ni de celui des charges de la
succession avec une exception prévue à l‟article 806 du code civil concernant les frais funéraires du
défunt.
La réforme du 23 juin 2006 a introduit deux grandes nouveautés quant à l‟obligation au passif de
l‟héritier acceptant purement et simplement, qui ont pour effet de sécuriser la situation de l‟héritier :
tout d‟abord, ce dernier n‟est plus tenu indéfiniment des legs de sommes d‟argent sur son
patrimoine personnel ; ensuite, a été introduite la possibilité de modérer les effets de l‟acceptation
pure et simple en cas de découverte d‟un passif important.
Sur le premier point, la Cour de cassation avait auparavant admis que l‟héritier acceptant était
obligé d‟acquitter personnellement, non seulement les dettes mais également les legs, y compris les
legs de sommes d‟argent. Or cela paraissait excessif dans la mesure où cela permettait alors au
défunt de réaliser des libéralités sur les deniers de ses héritiers. La loi de 2006 a donc remédié à
cette situation : l‟article 785 alinéa 2 nouveau dispose que « l‟héritier n‟est tenu des legs de sommes
d‟argent qu‟à concurrence de l‟actif net de dettes ».
Sur le second point, la loi de 2006 permet à l‟héritier de demander au juge « à être déchargé de tout
ou partie de son obligation à une dette successorale qu‟il avait des motifs légitimes d‟ignorer au
moment de l‟acceptation, lorsque l‟acquittement de cette dette aurait pour effet d‟obérer gravement
son patrimoine personnel ». Le but du législateur ici est de protéger l‟héritier du risque d‟être ruiné
par la découverte tardive d‟une dette successorale suite à l‟acceptation sans réserve d‟une
succession. Toutefois, trois conditions doivent être remplies pour pouvoir demander une telle
décharge car elle va nuire aux créanciers : l‟héritier doit avoir des motifs légitimes de ne pas avoir
eu connaissance de la dette successorale lors de l‟acceptation, l‟acquittement de la dette aurait pour
effet d‟obérer gravement son patrimoine personnel et l‟action doit être introduite dans un délai de
cinq mois à partir du jour où l‟héritier a eu connaissance de l‟existence et de l‟importance de la
dette en question.
B. La situation des créanciers de la succession
Il faut envisager, lorsque l‟on traite de la situation de l‟héritier acceptant, l‟éventuelle confusion de
patrimoines que peut engendrer la prise de position du successible.
Qu‟en est-il en matière d‟acceptation à concurrence de l‟actif net ? L‟article 791 1° du code civil
indique clairement que le fait d‟accepter à concurrence de l‟actif net a pour effet d‟éviter la
confusion entre le patrimoine personnel de l‟héritier et celui de la succession. Cette séparation des
patrimoines est logique dans la mesure où ce type d‟acceptation résulte de ce qu‟il y a un doute sur
la solvabilité de la succession, et de ce qu‟il est nécessaire de protéger l‟héritier du risque d‟être
ainsi ruiné.
- L’action oblique
Le droit d‟option obéit à certains principes généraux parmi lesquels le principe selon lequel nul ne
peut opter avant qu‟une succession ne soit ouverte, car sinon on serait en présence d‟une forme de
votum mortis. Cette liberté discrétionnaire dont bénéficie le successible trouve toutefois une limite
dans le cas d‟une renonciation ayant pour effet de causer un préjudice aux droits des créanciers
personnels du renonçant. En effet, l‟article 779 du code civil permet en ce cas aux créanciers
personnels de l‟héritier de demander au juge de les autoriser à accepter la succession en lieu et place
de leur débiteur. Cette acceptation n‟a lieu qu‟en faveur de ces créanciers et jusqu‟à concurrence de
leurs créances seulement. Cette action ouverte au profit des créanciers n‟a donc aucune autre
conséquence quant à l‟héritier qui demeure renonçant ; la renonciation est simplement inopposable
aux créanciers qui ne prennent en aucun cas la qualité d‟héritier.
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Commentaires profs :
Un acte de conservation ne peut pas induire l‟acceptation tacite de l‟héritier.
La réforme n‟a pas changé grand-chose sur l‟acceptation tacite
Sur les vices du consentement : sur le terrain de l‟erreur concernant la consistance du patrimoine.
L‟erreur sur la valeur n‟est pas admise en droit français, contrairement à l‟erreur sur la substance.
Erreur sur la valeur des biens ou erreur sur la consistance du patrimoine (sur la substance d‟un bien
faisant parti de la succession). L‟erreur sur la valeur revient à la lésion qui n‟est admise que dans
des cas très réduit, lorsqu‟il y a un texte spécial.
Disposition spécifique lorsqu‟une dette était méconnue légitimement par les héritiers.
Problème sur la rédaction de 783. Renonciation au profit de tous les héritiers n‟est pas regardée
comme une acceptation tacite. Renonciation à titre onéreux (2°) au profit de tous vaut acceptation
pure et simple. En cas de renonciation gratuite mais au profit d‟un ou de plusieurs, mais pas au
profit de tous, vaut acceptation pure et simple.
Avant 2006 dans ce cas les héritiers que l‟on pensait avantager ne l‟était pas forcément, ils ne
l‟étaient que s‟ils pouvaient venir de leur propre chef, en présence de plusieurs enfants, les enfants
du renonçant ne sont pas en rang utile et ne pouvaient venir par représentation.
Code de procédure civil a été modifié en matière de formalité sur la renonciation (décret de
décembre 2009).
Sur le legs de somme d‟argent : legs à titre particulier => pas tenu du passif. Et considéré comme un
créancier de la succession, alors que nul ne peut faire de libéralité avec ce qu‟il n‟a pas.
A/ La remise en cause des libéralités
En vertu de l‟article 893 du code civil, « La libéralité est l‟acte par lequel une personne dispose à
titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d‟une autre personne.
Il ne peut être fait de libéralité que par donation entre vif ou par testament ».
Cependant la liberté de disposition du défunt n‟est pas totale, en effet l‟article 912 du code civil
rend indisponible une partie de son patrimoine au profit des héritiers réservataires. Avant la réforme
des successions du 23 juin 2006, les ascendants bénéficiaient de cette qualité lorsqu‟ils n‟étaient pas
en concours avec des descendants, mais leur réserve a été supprimée au profit du conjoint, qui
depuis la loi de 2001 était réservataire à défaut de descendant et d‟ascendant.. Dorénavant les
héritiers réservataires sont les descendants et à défaut le conjoint.
La réserve est définie à l‟article 912 alinéa 1 du code civil, c‟est « la part des biens et droits
successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires,
s‟ils sont appelés à la succession et s‟ils l‟acceptent ». ». Plus simplement, la réserve est une
fraction des biens dont une personne ne peut pas priver ses héritiers les plus proches.
La réserve héréditaire poursuit plusieurs objectifs, tels qu‟assurer une égalité minimale entre les
héritiers réservataires et surtout assurer que ces héritiers ne soient pas dépouillés au profit de tiers.
Le défunt ne pourra alors disposer à titre gratuit de ses biens que dans la limite du disponible.
L‟article 912 alinéa 2 du code civil, donne une définition de la quotité disponible, c‟est « la part des
biens et droits successoraux qui n‟est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer
librement par des libéralités ». Elle se définit donc par opposition à la réserve et son étendue varie
en fonction de la qualité et du nombre des héritiers réservataires.
Pour mesurer un éventuel excès de disposition à titre gratuit du défunt, il faudra déterminer la
quote-part du disponible et celle de la réserve héréditaire, comme le préconise l‟article 913 du code
civil, puis appliquer ces quotes-parts à la masse de calcul déterminée par l‟article 922 du code civil
dans les valeurs jour décès.
Ensuite il faudra procéder aux imputations des libéralités faites par le de cujus. Ce mécanisme
consiste à vérifier s‟il y a ou non atteinte à la réserve. Si la libéralité n‟épuise pas la quotité
disponible elle ne sera pas réductible et dans le cas contraire elle devra être réduite, si les
réservataires le demandent. En cas de dépassement de la quotité disponible, les héritiers
réservataires disposent en effet d‟une action en réduction prévue à l‟article 920 du code civil.
L‟imputation des libéralités obéit à deux règles, elle doit se faire selon un ordre et un secteur
déterminé. Ces deux points appellent plusieurs développements que nous allons successivement
exposer.
Pour déterminer l‟ordre d‟imputation des libéralités, il faut distinguer les legs des donations, en
vertu de l‟article 923 qui énonce : « Il n‟y aura jamais lieu à réduire les donations entre vifs
qu‟après avoir épuisé la valeur de tous les biens compris dans les dispositions testamentaires ; et
lorsqu‟il y aura lieu à cette réduction, elle se fera en commençant par la dernière donation, et ainsi
de suite en remontant des dernières aux plus anciennes ».
Il découle de cet article, a contrario, deux règles :
* l‟imputation prioritaire des donations, c'est-à-dire que les legs ne seront imputés que dans la
mesure où la quotité disponible, sur laquelle ils ont vocation à s‟imputer, n‟a pas été entièrement
épuisée par les dites donations.
* l‟imputation des donations des plus anciennes aux plus récentes, sans considération de leur
bénéficiaire, de leur objet ou de leur forme (principe souvent rappelé par la jurisprudence : Civ 1 16
mars 1971 Bull. civ. 1971, I ; n°88, Civ 1 24 novembre 1993).
Cet ordre se fonde sur le principe de l‟irrévocabilité des donations, tandis qu‟un legs est toujours
révocable par un testament postérieur.
Cependant l‟application de cet ordre peut en pratique poser des difficultés car toutes les donations
n‟ont pas date certaine et parfois leur nature même de donation est incertaine
La donation est un contrat soumis à la règle de l‟article 1134 du code civil, selon laquelle les
conventions légalement formées ne peuvent être révoquées que du consentement mutuel des parties
ou pour les causes que la loi autorise. Cependant plusieurs textes soumettent la donation à une
irrévocabilité plus grande que l‟article 1134, notamment l‟article 894, qui fait de l‟irrévocabilité une
condition de la donation.
En vertu de la règle donner et retenir ne vaut la donation est irrévocable en ce sens qu‟il est interdit
au donateur de se réserver, par une clause de l‟acte, le droit ou le moyen, direct ou indirect,
d‟anéantir la donation.
Cette irrévocabilité ne s‟applique pas à toutes les libéralités, elle est spécifique aux donations : en
effet les legs sont librement révocables et c‟est ce qui justifie qu‟ils doivent être réduits avant les
donations comme l‟énonce l‟article 923 du code civil. C‟est pourquoi il faudra toujours imputer les
donations avant les legs.
Les donations s‟imputent donc avant les legs et doivent être imputées de la plus ancienne à la plus
récente, et ce en vertu du principe de l‟irrévocabilité des donations. En effet une donation consentie
postérieurement à une autre ne peut la remettre en cause. Cependant des difficultés peuvent survenir
quant à l‟imputation :
- lorsque les donations n‟ont pas date certaine, tel que les dons manuels,
- ou encore lorsque plusieurs donations ont été consenties le même jour : dans quel ordre
s‟effectue l‟imputation en ce cas ?
L‟ordre d‟imputation qu‟établit la loi suppose que la date des différentes donations puisse être
établie avec certitude. Une telle certitude est automatiquement acquise lorsque la donation a été
passée par acte notarié car l‟acte authentique fait pleine foi de sa date jusqu‟à inscription de faux
comme l‟énonce l‟article 1319 du code civil
Mais il n‟en va pas de même lorsque la donation a pu être régulièrement consentie sans
l‟intervention d‟un notaire, comme par exemple le don manuel. Il convient alors d‟en revenir à la
règle de l‟article 1328 du code civil selon laquelle seuls trois événements sont susceptibles de
donner à un acte sous seing privé date certain à l‟égard des tiers. A savoir, son enregistrement, la
mort de l‟une des parties, ou la constatation de l‟engagement dans un acte authentique.
Par conséquent, en droit une donation n‟ayant pas date certaine ne peut être opposée à un
bénéficiaire dont la donation a été enregistrée ou constatée par acte authentique, peu important la
date effective de la première donation.
Dans la mesure où seul le décès du disposant a donné date certaine à une donation, cette donation
doit être imputée comme si elle avait été faite juste avant le décès et donc après toutes les autres
donations. Cependant le défaut de date certaine d‟un don manuel n‟autorise pas à l‟imputer
concurremment avec un legs, en effet la première chambre civile de la cour de cassation dans un
arrêt du 12 novembre 1998 à énoncé : « attendu qu‟il résulte de ces textes (894 et 923) qu‟un legs
qui ne prend effet qu‟au décès du testateur, doit être réduit avant une donation qui, même dépourvue
de date certaine, a dessaisi le disposant de son vivant ».
Par conséquent une donation n‟ayant pas date certaine s‟imputera après toutes donations
enregistrées ou constatées dans un acte authentique, mais avant les legs.
En pratique un autre problème concernant l‟imputation peut subvenir, lorsque plusieurs donations
ont été consenties le même jour.
Lorsque plusieurs donations ont été consenties le même jour, mais par actes séparés, il est possible
de déterminer leur ordre d‟imputation. En revanche lorsque les donations sont constatées dans un
même acte, comme par exemple la donation partage, la logique du système conduit alors à retenir
que ces différentes donations doivent être imputées en même temps, et réduites proportionnellement
à leur valeur, lorsque la succession est insuffisante pour les accueillir toutes intégralement.
Il convient alors de procéder à l‟imputation simultanée des donations, et à leur réduction au marc
l‟euro, comme on le fait pour les legs lorsque la quotité disponible est insuffisante pour les recevoir.
On peut prolonger la comparaison : de même que le testateur, en vertu des articles 926 et 927, peut
choisir l‟ordre d‟imputation des legs, le donateur peut, lorsque plusieurs donations sont faites
simultanément prévoir un ordre de priorité pour leur imputation, comme l‟a énoncé la Cour de
cassation dans un arrêt du 20 avril 1915.
Une fois ces difficultés pratiques résolues, il faut encore s‟interroger sur certaines libéralités qui
présentent une nature hybride : elles ne sont pas envisagées par les articles 923 et 926, qui ne
prennent en compte que les legs et les donations de biens présents.
B/ Difficultés pratiques
La question qui se pose ici est de savoir selon quel ordre on doit imputer les libéralités entre
époux ?
Il existe différents types de libéralités que les époux peuvent se consentir entre eux. Leur ordre
d'imputation va être déterminé en fonction du caractère révocable ou irrévocable desdites libéralités.
En effet une libéralité irrévocable ne peut plus être remise en cause par le disposant et doit alors
s‟imputer au jour où elle a été consentie. En revanche une libéralité révocable laisse une plus grande
marge de manœuvre au disposant.
Les époux peuvent se consentir des libéralités tout au long de leur vie maritale et ce même en amont
de la célébration de leur union, notamment par le biais de leur contrat de mariage. Cette institution
contractuelle consentie par contrat de mariage a une nature hybride. En effet elle porte sur des biens
à venir comme un legs mais est irrévocable comme une donation. Ce principe d'irrévocabilité
conduit alors à retenir que les institutions par contrat de mariage doivent être imputées à leur date.
Poursuivant leur vie de couple, les époux peuvent se consentir une donation de bien présent qui
prendra effet au cours du mariage. Jusqu‟à la loi du 26 mai 2004, ces donations étaient révocables
ad nutum, et devaient être soustraites à l‟impérativité de l‟article 923 du code civil. Mais étant des
donations de biens présents tout de même, elles devaient être imputées en principe à leur date et
donc imputées avant les legs. Par conséquent elles ne pouvaient être réduites proportionnellement
avec eux. Cette règle a été énoncée par un arrêt de la cour d‟appel de Paris du 20 octobre 1926.
Mais justement du fait de leur révocabilité, le disposant pouvait modifier l‟ordre d‟imputation et
prévoir que celle-ci ne s‟imputeraient qu‟en dernier lieu, voir concurremment avec les dispositions à
cause de mort.
Depuis l‟entrée en vigueur de la loi du 26 mai 2004, ces donations sont devenues irrévocables. De
ce fait elles doivent être imputées à la date à laquelle elles ont été consenties, et le disposant a ainsi
perdu toute possibilité d'en modifier l'ordre d‟imputation.
Plutôt que de consentir une donation de bien présent prenant effet au cours du mariage, un époux
préférera peut être opter pour une donation de bien futur, appelée aussi institution contractuelle
consentie pendant le mariage. À la différence de l'institution par contrat de mariage, cette institution
entre époux, que le notariat pratique à très grande échelle et que l'usage qualifie de donation au
dernier vivant, a toujours été librement révocable par l'instituant. Cette libre révocabilité subsiste
naturellement après la loi du 26 mai 2004 sur le divorce, comme l'énonce l'article 1096 alinéa1 du
code civil. . En raison de ce caractère révocable et parce qu'elle porte sur des biens à venir,
l'institution contractuelle est réduite comme un legs. Elle s'impute donc sur la quotité disponible
après toutes les donations et simultanément avec les legs.
Les époux peuvent également se consentir des donations de biens présents ne prenant pas effet au
cours du mariage, et qui sont qualifiées désormais de donation de biens présents à terme par la cour
de cassation, depuis un arrêt rendu par la 1ère chambre civile le 21 octobre 1997
Il en est ainsi de la clause de réversibilité d‟usufruit dès lors qu‟elle présente un caractère libéral. En
raison de cette qualification, les donations de biens présents qui ne prennent pas effet au cours du
mariage sont toujours révocables ad nutum. Il faut cependant retenir que contrairement aux
donations de biens à venir, le disposant se dépouille immédiatement du bien, il convient donc de les
imputer à leur date, mais le disposant a toujours la possibilité de modifier l‟ordre.
Voyons maintenant le cas particulier des libéralités véhiculées par un contrat d'assurance vie.
Quand le contrat d‟assurance vie véhicule une libéralité en faveur du bénéficiaire, en vertu de
l‟article L 132-13 du code des assurances, le capital reçu par le bénéficiaire n‟est pas soumis au
rapport ni à réduction.
Cependant il est des hypothèses où ce régime de faveur ne s‟applique pas :
- C‟est le cas lorsque les primes versées par le souscripteur sont « manifestement
excessives eut égard à ses facultés » (article L 132-13 al 2)
- C‟est le cas aussi en cas de disqualification du contrat, c'est-à-dire si le juge estime qu‟il
ne s‟agit plus d‟un contrat d‟assurance (le code des assurances n‟est donc plus
applicable) en raison du défaut d‟aléa : les arrêts de la chambre mixte de 2004 ont élargi
la notion de contrat aléatoire mais le défaut d‟aléa peut toutefois être constaté dans des
cas très particuliers, comme l‟a énoncé la chambre mixte dans son arrêt du 21 décembre
2007
Le contrat véhicule une libéralité dans la mesure où l‟intention libérale du souscripteur est établie.
Cette libéralité, si le régime de faveur est écarté, est soumise notamment aux règles de la réduction :
il faut donc l‟imputer comme toute libéralité pour évaluer une éventuelle atteinte à la réserve. Ce
qui nécessite de déterminer son rang d‟imputation,
La jurisprudence comme la doctrine qualifient cette libéralité de donation indirecte.
- Pour une partie de la doctrine, elle doit être imputée au jour de l‟acceptation du contrat par son
bénéficiaire, dans la mesure où c‟est cette acceptation qui la rend irrévocable, en vertu de l‟article L
132-9 du code des assurances. Mais, si l‟on retient cette thèse, comment imputer alors la libéralité
résultant d‟un contrat d‟assurance vie qui n‟a pas été acceptée à la mort du souscripteur, et qui était
donc librement révocable ? Faut-il l‟imputer comme une disposition à cause de mort ou comme une
donation dépourvue de date certaine ?
- L‟article L 132-12 du code des assurances énonce que « le bénéficiaire, quelles que soient la
forme et la date de sa désignation, est réputé y avoir eu seul droit à partir du jour du contrat, même
si son acceptation est postérieure à la mort de l‟assuré ». En raison de cette rétroactivité, certains
auteurs préconisent d‟imputer la donation véhiculée par un contrat d‟assurance vie au jour de la date
du contrat, qu‟il ait ou non été accepté.
En toute hypothèse quelque que soit la date retenue celle-ci ne sera effective que si elle est certaine
au regard de l‟article 1328, il faudra donc que le contrat ou l‟acceptation soit passé par acte
authentique ou qu‟il soit enregistré ; à défaut, la libéralité ne prenant date certaine qu‟à la mort du
souscripteur, s‟imputera après toutes les donations, et avant les dispositions à cause de mort.
Une fois l‟ordre d‟imputation défini, il faut déterminer sur quel secteur les libéralités doivent
s‟imputer.
Le secteur d‟imputation de certaines libéralités ne pose pas de problème majeur : ce point sera
envisagé dans le A. Mais concernant l‟imputation de la libéralité en avancement de part
successorale adressée à un héritier réservataire renonçant, cette question, abordée dans le B,
nécessite de plus amples développements.
Le secteur d‟imputation est régi aux articles 919 à 919-2 du code civil : il varie en fonction de la
nature de la donation et de la personne du bénéficiaire.
* Les donations ou legs faits à un tiers s‟imputent forcément sur la quotité disponible.
* La libéralité faite « hors part successorale » à un héritier réservataire, en vertu de l‟article 919-2
(cf. aussi article 865 ancien), s‟impute sur la quotité disponible.
Si elle excède la quotité disponible, elle est soumise à réduction ; il n‟y a pas d‟imputation
subsidiaire sur la réserve.
Notons cependant que si elle est réductible, « le paiement de l‟indemnité par l‟héritier réservataire
se fait en moins prenant et en priorité par voie d‟imputation sur ses droits dans la réserve » en vertu
de l‟article 924 alinéa 2.
* En vertu de l‟article 919-1 alinéa 1 (et article 864 ancien alinéas 1 et 2), la donation faite en
avancement de part successorale (cf. présomption de l‟article 843) à un héritier réservataire
s‟impute sur sa part de réserve et, subsidairement, sur la quotité disponible, si le donateur n‟en a pas
disposé autrement. L‟excédent est sujet à réduction.
Il est possible de prévoir une imputation subsidiaire sur la réserve globale de l‟ensemble des
héritiers réservataires, ce qui permet au donateur de laisser libre la quotité disponible pour les
libéralités hors part ultérieures. Cette imputation subsidiaire a été beaucoup pratiquée il y a plus
d‟une trentaine d‟année, non parce que c‟était la volonté du donateur mais car les notaires
intégraient dans leurs actes de donation les dispositions de la loi ancienne, qui sous entendaient
cette possibilité d‟imputation sur la réserve globale, et qui ont été interprétées comme la volonté du
défunt à la mort de celui-ci. Aujourd‟hui cette pratique n‟a plus cours et l‟imputation subsidiaire sur
la réserve globale tend à disparaître.
* en présence de descendants, réservataires en vertu de l‟article 913, s‟imputent sur la QDS prévue
par l‟article 1094-1 :
- si la libéralité est en pleine propriété, elle s‟impute prioritairement sur la quotité disponible
ordinaire et subsidiairement sur ce que le disponible spécial ajoute au disponible ordinaire, c'est-à-
dire sur l‟usufruit de la réserve des descendants.
- si la libéralité est en usufruit elle s‟impute d‟abord sur le disponible spécial c‟est à dire sur
l‟usufruit de la réserve. Pour plus amples explications sur la question nous vous renvoyons à
l‟exposé sur les libéralités entre époux.
* en présence d‟ascendants, réservataires en vertu de l‟article 914 si décès avant le 1er janvier 2007,
s‟imputent sur une autre QDS prévue par l‟article 1094 tel que rédigé avant la loi de 2006, c'est-à-
dire sur la QDO + la nue propriété de la réserve des ascendants.
a – le rapport
En vertu de l‟article 845 le disposant peut « expressément exiger le rapport en cas de renonciation »,
ce qui peut sembler curieux au regard de l‟article 843 qui n‟impose le rapport qu‟aux héritiers
venant à la succession.
Concernant l‟imputation des libéralités pour vérifier si elles sont réductibles, le renonçant qui doit le
rapport sera traité comme un héritier réservataire acceptant (919-1 alinéa 2). Il sera donc compté
pour le calcul de la réserve, on lui attribuera fictivement la part de réserve qu‟il aurait eu en
acceptant, et la libéralité stipulée rapportable qui lui a été faite s‟imputera sur cette part, et
subsidiairement sur la quotité disponible pour vérifier si elle est réductible (article 919-1 al. 2 in
fine).
Quant aux modalités du « rapport », en vertu de l‟article 845 alinéa 2 le réservataire renonçant devra
indemniser les héritiers acceptants lorsque la valeur du bien reçu excède la part qu‟il aurait du avoir
dans le partage s‟il y avait participé.
Ce n‟est donc pas un véritable rapport de la donation reçue, mais une indemnisation en valeur des
réservataires acceptants et seulement à hauteur du montant de l‟excédent par rapport à la part de
succession qu‟il aurait eu en acceptant la succession.
Par ce mécanisme les prévisions du de cujus ne sont pas remises en cause, et le renonçant n‟est pas
favorisé par rapport aux héritiers réservataires acceptants.
b- la représentation du renonçant
Depuis la loi du 23 juin 2006 il est désormais possible de représenter un héritier renonçant comme
l‟énonce l‟article 754 alinéa 1 du code civil.
On peut juste souligner qu‟il parait étrange de pouvoir représenter le renonçant alors qu‟il n‟est
« censé n‟avait jamais été héritier » comme l‟énonce l‟article 805 alinéa 1 du code civil (cf. déjà
article 785 ancien). Les représentants du renonçant sont donc appelés à des droits que le représenté
est censé n‟avoir jamais obtenus.
Comment s‟impute alors la libéralité faite en avancement de part à l‟héritier renonçant représenté ?
En vertu de l‟article 754 alinéa 3 en cas de représentation d‟un renonçant, les donations faites à ce
dernier s‟imputent sur la part réserve qui aurait du lui revenir s‟il n‟avait pas renoncé, sauf volonté
contraire du disposant.
Reste une dernière question à soulever, concernant la représentation d‟un héritier renonçant en
présence d‟une seule souche.
********************************************************************************
Exposé discussion : Les droits du réservataire
INTRODUCTION
La réserve héréditaire est une institution classique du Code Civil, dont la naissance remonte au droit
romain. Dès l‟origine, elle avait pour but la protection des proches du DC, auxquels une quote-part
de la succession doit de ce fait nécessairement revenir, ce qui explique qu‟elle constitue l‟un des
aspects de ce que l‟on appelle l‟ordre public successoral.
Le code civil ne définissait pas expressément ce qu‟est la réserve. La jurisprudence a ébauché cette
définition et l‟article 912 du Code civil, introduit par la loi du 23 juin 2006, en donne une
définition : « La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la
dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s'ils sont appelés à la succession et
s'ils l'acceptent. ». Mais pour connaître le taux de la réserve ou ses grands principes, il faut opérer
une interprétation a contrario des articles 913 à 917 du Code civil, qui traitent de la quotité
disponible, l‟autre partie de la succession, celle dont le défunt peut disposer librement. Ainsi, par
une interprétation à contrario de l‟art 913, la portion indisponible de la succession est de ½ en
présence d‟un enfant, de 2/3 en présence de deux enfants et de ¾ en présence de trois enfants ou
plus.
Cette conception historique de la réserve, fondée sur la parenté par le sang, a subi de nombreuses
atteintes avec les deux réformes du droit des successions, que sont les lois du 3 décembre 2001 et
du 23 juin 2006.
En premier lieu, le législateur a souhaité mettre fin à la précarité du conjoint survivant qui, pour
avoir des droits en pleine propriété dans la succession de son époux défunt, devait obligatoirement
bénéficier d‟une libéralité de celui-ci (donation entre époux ou testament).
La loi du 3 décembre 2001 a donc accordé des droits légaux au conjoint et lui a même conféré la
qualité d‟héritier réservataire à hauteur de ¼ de la succession (article 914-1) en l‟absence de tout
autre réservataire en rang utile, c'est-à-dire si le défunt ne laisse ni descendant, ni ses père et mère.
(les autres ascendants étant primés par le conjoint).
Supprimant la réserve des ascendants, la réforme de 2006 améliore la position du conjoint survivant
qui bénéficie désormais de sa réserve dès que le défunt ne laisse aucun descendant.
La qualité de conjoint survivant, inchangée en 2001 par rapport à 1972 (comparer l‟article 732
version loi de 2001 avec l‟ancien article 765 écartant, outre le conjoint divorcé, celui contre qui
existe un jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée), a été élargie par la
réforme de 2006 : désormais, est conjoint successible, selon l‟article 732, le conjoint non divorcé.
En cas de séparation de corps par consentement mutuel, il faut toutefois tenir compte de l‟article
301 actuel in fine.
Note : sur la contradiction entre l‟article 732 (avant le 1er janvier 2007) et l‟article 301 du code civil
(modifié par loi 2004 à compter du 1er janvier 2005) cf réponse ministérielle n° 77812 du 27 juin
2006.
La réforme de 2006 a eu des répercutions majeures sur les héritiers réservataires classiques. Comme
on l‟a vu, elle a supprimé une catégorie de réservataires, les ascendants (cf. ancien article 914).
Mais elle a surtout porté atteinte au caractère intangible de la réserve héréditaire, puisque désormais
le disponible n‟est plus invariable. Pendant longtemps, la renonciation d‟un réservataire n‟avait pas
d‟impact sur le montant global de la réserve, tant que restait au moins un réservataire du même
ordre acceptant la succession, la règle étant l‟invariabilité de celle-ci. Cette solution se justifiait par
le caractère collectif de la réserve, qui est attribuée à une catégorie d‟héritier et non pas
individuellement à chaque réservataire. La réforme de 2006 a condamné cette interprétation en
introduisant un alinéa 2 à l‟article 913, qui énonce que « l‟enfant qui renonce à la succession n‟est
pas compris dans le calcul du disponible sauf s‟il est représenté ou doit le rapport ». Ce nouveau
principe de variabilité restreint le domaine de la réserve et traduit la volonté du législateur de 2006
d‟élargir la liberté de disposer accordée au DC.
Le calcul du taux de la réserve doit donc s‟effectuer en tenant compte des enfants acceptants et de
ceux qui ont renoncé mais sont représentés ou qui doivent le rapport d‟une libéralité.
Le calcul du nombre d‟enfants correspond en fait à la prise en compte du nombre de souches et non
pas du nombre de descendants héritiers, ce qui maintient l‟ordre naturel des décès et l‟égalité entre
les souches (art 913-1).
Toujours dans l‟optique d‟accroître la liberté du disposant, le législateur de 2006 a diminué la force
de la réserve, en modifiant certains principes d‟ordre public, ce que nous étudierons plus en détail
au travers de cet exposé.
Il s‟agira tout d‟abord de voir comment la nature et la force de la réserve ont été altérées par les
deux réformes du droit des successions, puis d‟expliciter les moyens juridiques mis à disposition du
DC pour contrôler la transmission de sa succession au-delà de sa mort.
Une des atteintes portées par la réforme de 2006 à la conception classique de la réserve est la
possibilité de renoncer par anticipation à l‟action en réduction. En principe, tout pacte portant sur la
succession d‟une personne vivante, même si cette personne y consent, est interdit. C‟est ce
qu‟énonçait l‟ancien article 1130 al 2 du code civil prohibant les pactes sur successions futures.
Cependant, la loi a autorisé à titre exceptionnel, quelques pactes sur succession future
limitativement énumérés et la RAAR en fait partie. Cette RAAR a été introduite par la loi du 23
juin 2006 dans le code civil aux articles 929 et suivants. Elle autorise tout héritier réservataire
présomptif à renoncer à l‟avance à exercer une action en réduction pour le cas où une libéralité faite
à un gratifié dépasserait la QD. Il a toujours été possible pour le réservataire de décider de ne pas
agir en réduction, mais la loi admet pour la première fois que l‟on puisse, avant même l‟ouverture
d‟une succession, s‟engager à ne pas demander la réduction, dérogeant ainsi aux règles protectrices
de la réserve. En effet la volonté du législateur a été de donner une plus grande liberté de disposer à
titre gratuit au DC et d‟assurer une plus grande sécurité juridique au gratifié au prix d‟un recul de la
réserve.
En raison de sa gravité, la conclusion d‟un tel pacte est très encadrée par le législateur. Cette
renonciation est soumise à des conditions de fond et de forme très strictes et quant aux effets,
plusieurs interprétations ont été proposées en doctrine.
1) Conditions et fonctionnement
Mais afin que le renonçant prenne pleinement conscience des conséquences de son acte, le
législateur à prévu deux dispositions protectrices :
- deux notaires doivent intervenir à l‟acte (le second notaire étant désigné par le Président de la
chambre des notaires), cela dans le but d‟éviter que l‟héritier renonçant ne se trouve sous l‟emprise
du notaire choisi par le DC.
- Ensuite la renonciation doit être établie par un acte authentique spécifique prenant la forme d‟un
acte solennel. Cela veut dire que la renonciation ne peut être incluse dans l‟acte contenant la
donation à propos de laquelle l‟héritier renonce à exercer son action en réduction. Certes l‟article
930 al 3 prévoit qu‟un même acte puisse contenir la renonciation de plusieurs héritiers réservataires,
mais il doit cependant être signé séparément par chacune des parties en présence des seuls notaires.
Cet acte doit mentionner les conséquences juridiques futures pour le ou les renonçant (s).
Il va de soi que s‟il n‟a pas été porté atteinte à la réserve héréditaire, la renonciation anticipée à
l‟action en réduction ne produira aucun effet.
Mais s‟il y a atteinte à la réserve héréditaire d‟un ou de plusieurs héritiers réservataires, la doctrine
s‟est posée la question de savoir : quel moment doit-on retenir pour faire produire à la renonciation
ses effets ?
Sur ce point la doctrine est divisée. M. Sauvage et M. Vareille estiment que cette renonciation ne
doit être prise en compte qu‟au moment du partage. D‟autres comme LEVILLAIN ou FORGEARD
estiment au contraire que la renonciation doit être prise en compte au moment de l‟imputation des
libéralités et ainsi, l‟héritier renonce non pas à demander sa part dans l‟indemnité de réduction mais
plutôt à invoquer une atteinte à sa part de réserve.
Je vais vous présenter deux exemples pour bien comprendre cette opposition doctrinale :
La conséquence est qu‟en présence de plusieurs héritiers réservataires, le renonçant pourra quand
même recevoir une partie des biens qui lui sont réservés et la libéralité pourra quand même être
réduite.
Une réponse ministérielle du 12 août 2008 vient préciser qu‟il faut retenir l‟interprétation défendue
par Sauvage et Vareille, celle qui veut que la RAAR ne peut avoir d‟autre portée pour l‟héritier
réservataire renonçant que celle d‟une renonciation à sa part dans le fruit de l‟action en réduction.
Cependant même si cette réponse offre aux praticiens un support un peu plus sûr et confortable
qu‟une controverse doctrinale pour recevoir ces actes, d‟une part cette réponse ministérielle n‟a pas
de valeur juridique à proprement parler et d‟autre part, en optant pour cette thése, la réponse
ministérielle peut sembler aller à l‟encontre de la volonté du législateur qui est d‟assouplir
l‟institution de la réserve. Néanmoins la lettre du texte « renonciation à l’action en réduction » est
en cohérence avec cette interprétation.
B) La réduction en valeur
La troisième atteinte portée par la réforme de 2006 aux principes traditionnels de la réserve, concerne
les modalités de réduction du dépassement de la quotité disponible.
Le Code Civil de 1804 envisageait la réduction en nature. Puis au XXème siècle, la réduction en valeur
est progressivement apparue, jusqu‟à être consacrée dans une loi du 3 juillet 1971 qui a opéré une
distinction entre les différents types d‟héritiers : pour la réduction d‟une libéralité excessive faite à un
tiers non successible, la réduction demeurait en nature, tandis que face à un cohéritier, le principe
devenait la réduction en valeur.
La loi du 23 juin 2006 a achevé cette évolution en posant de façon générale à l‟article 924 alinéa 1 le
principe d‟une réduction en valeur pour toutes les libéralités.
La réduction devient donc une créance des héritiers réservataires contre le gratifié concerné, mais cette
créance ne donnera pas toujours lieu au paiement d‟une indemnité de réduction.
En effet, si le gratifié dont la libéralité excède la QD est un tiers, la réduction ne pourra être qu‟une
indemnité monétaire. Mais si le gratifié est lui-même réservataire, la réduction s‟opérera « en moins
prenant et en priorité par voie d‟imputation sur ses droits dans la réserve » (article 924 alinéa 2) : sa part
dans la succession sera donc diminuée de l‟indemnité qu‟il doit aux réservataires (ses cohéritiers) pour
reconstituer leur réserve.
La loi de 2006 a, certes, fait de la réduction en valeur la règle générale, mais elle n‟a pas pour autant
supprimé la réduction en nature, qui reste possible dans deux hypothèses.
- La première hypothèse est énoncée à l‟article 924-1, qui prévoit que « Le gratifié peut exécuter la
réduction en nature, par dérogation à l‟article 924, lorsque le bien donné ou légué lui appartient encore
et qu‟il est libre de toute occupation et de toute charge dont il n‟aurait pas déjà été grevé à l‟époque de
la libéralité, ainsi que de toute occupation dont il n‟aurait pas déjà fait l‟objet à cette même date ».
Le gratifié dispose de trois mois à compter de la date à laquelle le réservataire l‟a mis en demeure de
prendre parti, pour faire ce choix d‟une réduction en nature.
- La deuxième hypothèse vise l‟insolvabilité caractérisée du gratifié. Ainsi, l‟article 924-4 alinéa 1
énonce « que les héritiers réservataires pourront exercer l‟action en réduction ou en revendication contre
les tiers détenteurs des immeubles faisant partie des libéralités et aliénés par le gratifié ».
La sécurité des tiers acquéreurs n‟est donc pas assurée, sauf si, au jour de la donation ou
postérieurement, le donateur et tous les héritiers réservataires présomptifs, ont consenti à l‟aliénation du
bien donné. Ce pacte sur succession future, prévu par l‟article 924-4 alinéa 2, est une façon de faire
renoncer les héritiers réservataires à leur action en réduction en nature sur le bien donné et par là, de
renoncer définitivement au bien lui-même.
Les hypothèses d‟application de la réduction en nature sont donc marginales et c‟est bien la réduction en
valeur qui s‟imposera désormais majoritairement.
La consistance de la réserve en tant qu‟ensemble de biens du DC, s‟en trouve par là altérée.
C) L’assurance vie
Le contrat d‟assurance vie mixte (assurance en cas de vie ou de décès) peut être dangereux pour les
héritiers réservataires, car si les seules économies de la famille sont mises dans un tel contrat et que
le bénéficiaire est un tiers non successible, ces sommes échapperont complètement à la succession
du défunt. En principe, les primes versées par le souscripteur constituent une libéralité faite
indirectement au tiers bénéficiaire du capital. Elles devraient donc logiquement obéir au régime
juridique des donations et subir la réduction. Mais les articles L132-12 et L132-13 du code des
assurances font échapper tant le capital que les primes versées aux règles du rapport des libéralités
ainsi qu‟à celles de la réduction pour atteinte à la réserve, dans la mesure où elles ne sont pas
manifestement exagérées. Il s‟agit donc d‟une véritable dérogation au droit commun des
successions.
Mais encore faut-il que ce contrat soit qualifié de contrat d‟assurance vie (pour les critères d‟un
contrat d‟assurance vie, cf. l‟exposé qui a été fait sur ce sujet). Si ce n‟est pas le cas, ces somme
seront intégrées dans la réunion fictive de l‟article 922 puis imputées comme toute donation, et
pourront alors être éventuellement soumises à la réduction. Aujourd‟hui, cette hypothèse semble
marginale étant donnée la récente jurisprudence de la Cour de cassation sur le sujet.
II) La modification par le disposant des pouvoirs des réservataires sur la réserve
Ainsi que nous venons de le voir, le disposant a une plus grande liberté d‟action sur la réserve
héréditaire. Le législateur lui a permis de grever la réserve héréditaire et de ne plus la transmettre
libre de toute charge avec la promotion du conjoint dès la réforme de 2001 (A), puis grâce au
mandat à effet posthume (B) et aux libéralités graduelles et résiduelles (C) depuis 2006.
A) L’usufruit du conjoint
La loi du 3 décembre 2001 permet de porter atteinte à la réserve des descendants communs avec
la promotion du conjoint survivant dont les droits successoraux légaux sont augmentés, notamment en
présence de descendants.
L‟article 757 offre en effet au CS une option entre ¼ PP et un usufruit universel sur les biens existants
lorsqu‟il est en concours avec des descendants communs, c‟est-à-dire issus de son union avec le défunt.
- S‟agissant du ¼ en pleine propriété, en plus de faire sortir les biens de la famille, ce choix peut créer
une indivision avec les réservataires, situation parfois délicate, mais il ne porte pas atteinte à leur réserve
(cf la masse d‟exercice des droits en pleine propriété du CS).
- En revanche le choix de tout l‟usufruit, quant à lui, a la particularité essentielle de s‟exercer au
détriment des réservataires, qui voient leur part de réserve réduite à sa valeur en nue-propriété. De plus,
si le CS est âgé ou peu expérimenté, le risque est celui d‟une mauvaise gestion des biens démembrés.
Jean Carbonnier évoquait à ce sujet « l‟immense foule des vieilles dames usufruitières aux mains débiles
et inexpertes ».
Les inconvénients de l‟usufruit expliquent qu‟en présence d‟enfants non communs, le législateur a
cantonné la vocation du CS au 1/4 en pleine propriété (article 757).
Notons qu‟avant la réforme de 2001, le CS pouvait déjà et peut encore retrouver une option
entre droits en pleine propriété et droits en usufruit, si son époux défunt lui a fait donation de la quotité
disponible spéciale entre époux. Cette libéralité prévue à l‟article 1094-1, permet au CS en présence de
descendants communs ou non, de recevoir soit la quotité disponible ordinaire, soit ¼ en pleine propriété
et ¾ en usufruit, soit l‟usufruit universel. Ce choix peut être fait par le disposant ou laissé au CS.
La volonté du défunt permet donc aussi de porter atteinte à la réserve puisque, sauf si la QDO est
choisie, la réserve des descendants ne porte que sur la NP ?
Le mandat à effet posthume est l‟une des innovations les plus remarquées et aussi l‟une des plus
controversées de la réforme de 2006. En principe, une fois le décès intervenu, les héritiers du défunt
deviennent propriétaires et possesseurs de leur part dans la succession et ils peuvent donc
l‟administrer eux-mêmes, en tout cas s‟agissant de leur part de réserve dont ils ne peuvent en
principe pas être privés . Or le mandat à effet posthume prévu aux articles 812-1 et suivants du code
civil vient infléchir fortement ce principe.
Comme son nom l‟indique, ce mandat ne prend effet qu‟au décès du mandant et donne la possibilité
à toute personne de donner à une ou plusieurs autres personnes, physiques ou morales, mandat
d‟administrer ou de gérer, sous réserve des pouvoirs confiés à l‟exécuteur testamentaire, tout ou
partie de sa succession pour le compte et dans l‟intérêt d‟un ou de plusieurs héritiers identifiés.
Avant même de s‟interroger sur les conséquences de ce mandat sur les droits des héritiers
réservataires, il nous faut tout d‟abord expliquer les conditions de ce mandat.
1) Les conditions
Ce mandat réunit deux personnes, le mandant qui est le DC et un ou plusieurs mandataires désignés.
Le DC peut nommer un mandataire pour un ou plusieurs de ses héritiers et ils devront donc être
désignés à l‟acte. Il le peut même pour un héritier incapable, qu‟il soit mineur ou majeur protégé.
En effet dans ce dernier cas, le mandataire se substitue alors à l‟administrateur légal, tuteur ou
curateur comme le prévoit l‟article 812-1 du code civil).
Le mandataire, doit, pour pouvoir remplir sa mission, jouir de la pleine capacité civile et ne pas être
frappé d‟une interdiction de gérer lorsque des biens professionnels sont compris dans le patrimoine
successoral.
S‟agissant des biens, le mandataire peut gérer tout ou partie de la succession. Ce qui veut dire qu‟en
présence de descendants, il peut gérer même les biens qui constituent la réserve. Il s‟agit d‟un
renversement d‟une solution jurisprudentielle classique selon laquelle le de cujus ne pouvait confier
à un tiers la gestion des biens composant la réserve, celle-ci devant parvenir à son titulaire exempte
de toute charge limitant la liberté d‟en disposer (Civ 1ère, 17 décembre 1968).
Quant à sa durée, elle est de 2 ans maximum et peut être portée à 5 ans en raison de l‟inaptitude, de
l‟âge du ou des héritiers ou de la nécessité de gérer des biens prof. Ces durées peuvent être
prorogées une ou plusieurs fois.
Ce mandat prend fin dans des conditions prévues par l‟article 812-4 du code civil notamment
l‟arrivée du terme, la renonciation du mandataire ou la révocation judiciaire.
- Du mandat de droit commun des articles1984 et suivants du code civil car le mandant est celui de
qui le mandataire tient son pouvoir et pour le compte de qui il agit alors que dans le mandat à effet
posthume, c‟est bien le mandant qui lui donne pouvoir mais le mandataire agit pour le compte de
l‟héritier.
Le droit de jouissance et de disposition de la réserve peut aussi être retiré aux héritiers réservataires,
grâce au mécanisme des libéralités successives ou fidéicommissaires. Elles se définissent comme
celles par lesquelles un donateur donne un bien à plusieurs personnes successivement, le second
bénéficiaire étant appelé à le recueillir à la mort du premier. Courantes sous l‟Ancien régime, elles
ont été frappées d‟une nullité d‟ordre public à la Révolution, puis autorisées très restrictivement
dans le Code Civil de 1804, avant d‟être réformées par le législateur de 2006.
Le principe, énoncé à l‟article 896 du code civil, reste malgré tout la nullité des dispositions par
lesquelles une personne est chargée de conserver et de rendre à un tiers, sauf les cas où elles sont
autorisées par la loi.
- La première disposition autorisée par la loi concerne les libéralités graduelles, qui imposent au
premier gratifié de conserver les biens et droits qui en sont l‟objet et de les transmettre à son décès,
à un second gratifié désigné dans l‟acte (articles 1048 à 1056 du Code Civil).
Cette libéralité ne joue qu‟une fois et peut désormais être réalisée par donation ou par testament.
Elle peut être faite à toute personne physique, sans obligation que le donateur et les deux gratifiés
aient un lien de parenté.
Cependant, les libéralités successives sont majoritairement utilisées entre parents proches. Ainsi, le
premier gratifié ou « grevé » sera le plus souvent un héritier réservataire du disposant. La loi de
2006 n‟a pas oublié de protéger le caractère d‟ordre public de la réserve dans cette hypothèse, en
posant à l‟art. 1054 du Code Civil que la charge ne pourra être imposée que sur la quotité
disponible. Cependant, cette réforme ayant pour but d‟augmenter la liberté du disposant, le
législateur a également prévu des exceptions à ce principe. Le donataire pourra ainsi accepter que la
charge grève tout ou partie de sa réserve (article 1054 alinéa 2) et le légataire a un an pour agir en
cantonnement de la charge pesant sur sa réserve et à défaut, il devra exécuter la libéralité sur celle-
ci (art. 1054 alinéa 3).
- La seconde libéralité successive autorisée par la loi vise les libéralités résiduelles. Le grevé garde
ici plus de liberté, puisqu‟il n‟a pas l‟obligation de conserver et de transmettre l‟ensemble des biens
reçus, mais seulement les biens subsistants (Art. 1057 et 1058 alinéa 1).
En effet, s‟il n‟a pas la possibilité de léguer les biens objets de la libéralité résiduelle, il conserve la
liberté d‟en disposer entre vifs (sauf volonté contraire du disposant) ou d‟en disposer à titre
onéreux, privant ainsi le second gratifié de tout droit sur ces biens. Là encore, le législateur a prévu
un aménagement pour les héritiers réservataires grevés. L‟article 1059 alinéa 3 énonce qu‟ils
conservent la possibilité de disposer à cause de mort, des biens donnés en avancement de part
successorale.
Dans ces deux mécanismes, le législateur n‟a pas manqué d‟assurer la transmission d‟une
réserve libre de toute charge, mais il a par ailleurs prévu de nombreuses manières de s‟y soustraire.
La simple volonté du disposant peut, ici encore, faire échec à l‟intégrité de la réserve.
CONCLUSION
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Commentaire prof :
Avant 2001 le CS a des droit en usufruit, il n‟est pas réservataire, on peut l‟exhéréder.
La loi de 2006 porte de plus en plus atteinte à la réserve.
Mandat à effet posthume (812) laisse place à des abus.
INTRODUCTION
« Donner et retenir ne vaut », cet adage de Loysel, ne s‟appliquait pas aux donations de
biens présents faites entre époux, jusqu'à la loi du 26 mai 2004.
En effet, le droit romain et l‟ancien droit interdisaient les donations entre époux, jugées trop
dangereuses, car pouvant être faites dans un élan passionnel. Le Code Civil de 1804, rompt
avec cette tradition, mais cette autorisation s‟est longtemps accompagnée d‟une réelle
défiance du législateur qui craignait la passion débordante pouvant inciter un époux à se
dépouiller. Cette logique s‟est traduite par le principe de révocabilité ad nutum des donations
de biens présents faites entre époux pendant le mariage (article 1096 ancien). Elle ne pouvait
perdurer, car le droit commun plaçait de ce fait les tiers donataires (par exemple les concubins,
les maîtresses et amants) dans une plus grande sécurité juridique que l‟époux donataire! De
plus, en passant de la prédominance de la famille par le sang à celle de la famille par le cœur,
la nécessité de conservation des biens dans la famille (par le sang) n‟est plus prioritaire.
La notion de libéralité est définie depuis la loi du 23 juin 2006 à l‟article 893 al 1 du C.Civ .
Ainsi, « la libéralité est l’acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou
partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une personne ». L‟acte suppose en plus de
l‟élément matériel, qui est l‟avantage effectif procuré au bénéficiaire, un élément
psychologique, qui est l‟intention libérale.
Lorsqu‟elle est effectuée entre vifs, la libéralité est une donation, qu‟elle soit conforme à
l‟article 931 ou qu‟il s‟agisse d‟un don manuel, d‟une donation déguisée ou indirecte.
Lorsqu‟elle est effectuée à cause de mort, la libéralité est un legs ou une institution
contractuelle.
Cette définition exclut les donations rémunératoires qui, comme leur nom ne l‟indique qu‟à
moitié, ne sont pas des donations mais des rémunérations. Leur invocation était plus pertinente
lorsque le principe de la révocabilité ad nutum était en vigueur : l‟époux bénéficiaire d‟une
donation pouvait, afin de faire échec à sa révocation, invoquer le fait qu‟il ne s‟agissait pas
d‟une donation mais d‟une rémunération pour avoir contribué plus que de devoir aux charges
du mariage, ou pour avoir collaboré à l‟activité professionnelle de son conjoint donateur.
Aujourd‟hui la donation rémunératoire, sera invoquée pour faire échec à une éventuelle
réduction si la libéralité est excessive.
Il convient également d‟écarter de notre sujet les présents d‟usages. Ces derniers, bien
qu‟étant de réelles libéralités échappent, si le cadeau correspond bien à un usage et si sa valeur
reste raisonnable, aux règles des donations de biens présents et sont donc irrévocables (sauf
exceptions : bijoux et souvenirs de famille).
Il serait intéressant d‟analyser l‟évolution des droits du conjoint dans la société sous le
spectre du droit des libéralités entre époux. Ainsi le droit dérogatoire des libéralités entre
époux tend vers une uniformisation avec le droit commun des libéralités ( I ). Ce
rapprochement n‟est pas une assimilation, car une conservation de règles spécifiques aux
libéralités entre époux est observée. ( II )
La remise en cause de deux grands principes du droit spécial des libéralités entre époux par la loi du 26 mai 2004 ( I ) fut une étape
importante vers le chemin de l‟uniformisation du droit spécial avec le droit commun des libéralités. Cependant, des précisions sur
l‟irrévocabilité des donations de biens présents ( II ) durent être apportées par la loi du 23 juin 2006 afin que la réforme soit cohérente.
Une donation est dite déguisée lorsqu‟un époux vend un bien à son conjoint sans que ce
dernier n‟ait à lui payer le prix.
Une donation est faite par personne interposée lorsqu‟un époux fait une donation aux
enfants, ou à l‟un des enfants de son conjoint.
De plus, ces nullités sanctionnaient l‟intention frauduleuse des époux de contourner la règle,
d‟ordre public, de la libre révocation des donations de biens présents. En effet, ces donations
étaient nulles pour le tout, même si la quotité disponible n‟avait pas été dépassée.
La règle était posée à l‟ancien article 1099 alinéa 2 du Code Civil qui prévoyait que « Toute
donation, ou déguisée, ou faite à personnes interposées, sera nulle. »
Cet article visant à la protection de l‟ordre public il s‟agissait d‟une nullité absolue (Civ.10
mars 1970).
Cependant, il convient de noter que la portée de ce texte avait déjà été limitée par la
jurisprudence qui définissait limitativement la notion de donation déguisée (cf Civ 1re 8
novembre 1988 sous l‟article 1099) et limitait le domaine d‟application de l‟article 1100 qui
posait une présomption d‟interposition de personne avant que la loi de 2002 n‟abroge ce
dernier texte.
En abrogeant l‟article 1099 alinéa 2 du Code Civil, la loi du 26 mai 2004 supprime la nullité
de ces donations ( déguisées et faites par personne interposée), qui sont donc désormais
valables.
Par exemple, si un pacte tontinier, qui est normalement un contrat aléatoire à titre onéreux, est
qualifié de contrat à titre gratuit (par exemple si le prix fut payé par un seul des époux et que
cet époux, plus âgé ou malade décède en premier) et donc de donation déguisée sous forme de
tontine, il ne pourra plus être remis en cause sur ce fondement.
Cette réforme aboutit à appliquer aux époux les solutions du droit commun qui valide les
donations entre époux ou faites à personne interposée, sauf dans le cas particulier prévu par
l‟article 911 du Code Civil.
Quid cependant de la validité de telles donations consenties avant le 1ier janvier 2005 ?
On ne trouvera pas trace dans la loi de 2006 de dispositions sur l'application dans le temps de
l‟abrogation de l'ancien alinéa 2 de l'article 1099 du code civil. Toutefois, la solution peut être
trouvée à la lecture des travaux préparatoires. Il a été affirmé, par le rapporteur de la
commission des lois de l'Assemblée nationale, que, « compte tenu de la disparition de ce texte,
l'action en annulation des donations déguisées entre époux intervenue avant le 1er janvier
2005 ne devrait plus pouvoir être engagée, en vertu du principe « pas de nullité sans texte »,
sans qu'il soit besoin de le préciser ». Ainsi, les donations déguisées entre époux ou
consenties par personne interposée faites avant ou après le 1er janvier 2005 ne seraient plus
annulables sur ce fondement depuis le 1er janvier 2005. Il y aurait donc application immédiate
– voire rétroactive - de l'abrogation de l'article 1099, alinéa 2, du code civil. Afin d‟éviter
toute polémique, il aurait sans doute été plus judicieux de formuler explicitement cette règle
transitoire, qui aboutit à appliquer la réforme même aux contrats de donations conclus avant
cette réforme.
Mais la cour de cassation a récemment tranché cette question dans un sens inverse :
Cf. Civ 1re 9 décembre 2009 en doc joint : l‟abrogation ne s‟applique qu‟aux contrats conclus
après le 1er janvier 2005. Une solution simple même si elle peut ne pas convaincre.
La loi du 26 mai 2004 ne se contenta pas de cette évolution, elle réforma surtout le fameux
principe de la révocabilité ad nutum des donations de biens présents entre époux.
Depuis la loi de 2004 , pour connaître du caractère révocable ou non d‟une donation entre
époux, il faut savoir si la libéralité faite au conjoint est une donation de biens présents ou de
biens à venir.
Les donations de biens à venir étaient révocables et le restent. C'est le maintien de la
révocabilité discrétionnaire des donations de biens à venir. L‟explication principale est que la
libre disposition des biens à cause de mort n'est entière que si l'époux donateur ne se lie pas
définitivement. Si la donation de biens à venir était irrévocable, elle priverait le disposant de
sa faculté de tester, qui est d'ordre public
Les donations de biens présents faites pendant le mariage étaient révocables ; elles sont
devenues irrévocables : cette loi de 2004 a ainsi permis un alignement du régime des
donations de biens présent entre époux sur le droit commun des libéralités en supprimant le
principe de révocabilité ad nutum de l‟art 1096 CC. Dès lors, les donations de biens présents
entre époux ne peuvent plus être révoquées que pour cause d‟inexécution des conditions ou
pour cause d‟ingratitude.
L‟esprit de la loi 2004 avait un objectif de protection du conjoint donataire qui ne pouvait
plus voir sa donation de biens présents révoquée de façon discrétionnaire par le donateur.
Mais désormais, l‟époux donateur doit prendre conscience de la gravité de son acte sur lequel
il ne pourra revenir.
Néanmoins, après la loi de 2004 des difficultés de qualifications sont apparues d‟où
l‟intervention du législateur avec la loi du 23 juin 2006.
La loi du 23 juin 2006 est venue mettre fin à une question fort débattue sur l'application
dans le temps de la loi du 26 mai 2004. Son article 47 III énonce que les donations de biens
présents faites entre époux avant le 1er janvier 2005 restent soumises à l‟article 1096 CC dans
sa rédaction antérieure à cette date. Ce même texte précise que ces dispositions présentent un
caractère interprétatif des dispositions de la loi 2004. Donc les donations consenties avant le
1er janvier 2005 restent révocables. La Cour de cassation applique cette règle ainsi clarifiée
dans un arrêt de la Première chambre civile en date du 16 avril 2008.
2- Emergence d‟une typologie nouvelle des donations de biens présents entre époux
Pendant longtemps, la catégorie des donations de biens présents fut envisagée sans
considération précise de la date de prise d‟effet. Cependant cette analyse ne permettait pas de
rendre compte du mécanisme des donations de biens présents à effet différé qui sont des
donations dont la prise d‟effet a lieu postérieurement, à la dissolution du mariage.
La loi de 2006 est venue corriger certaines solutions consacrées par la loi de 2004. Elle
modifie à son tour l‟art 1096 CC en imposant désormais une distinction parmi les donations
de biens présents : il faut différencier celles qui prennent effet au cours du mariage
(irrévocables) de celles dont l‟effet est différé à la dissolution du mariage (révocables d‟après
une lecture a contrario de l‟art 1096 CC).
Cette rectification de l‟art 1096 CC répond aux demandes pressantes du Notariat
s‟inquiétant de l‟irrévocabilité de certaines donations. En effet, le législateur de 2004 avait
oublié qu‟il existait des cas particuliers de donations de biens présents qui ne prennent effet
qu‟au décès comme la donation d‟usufruit successif et les clauses bénéficiaires de contrat
d‟assurance vie mixte.
b) L’assurance-vie :
L‟assurance vie : c'est le cas où un époux a contracté une assurance vie mixte qui joue en cas
de décès en faveur de son conjoint. Cette clause bénéficiaire peut, s‟il y a intention libérale,
s‟analyser comme une donation indirecte. Mais est-ce une donation de biens présents ou de
biens à venir ?
Précisons d‟abord que la donation indirecte véhiculée par le contrat d‟assurance-vie ne se
forme pas à la date du contrat d‟assurance mais à la date de l‟acceptation par le bénéficiaire,
car une donation ne se forme que si le donataire l‟a acceptée.
Nous savons, ensuite, que l‟article L 132-9 du Code des assurances, prévoit qu‟une fois que le
bénéficiaire de l‟assurance-vie a accepté, il n‟est plus possible pour l‟assuré de révoquer ce
bénéficiaire. Cette règle est conforme au droit commun des donations qui, une fois acceptées,
sont irrévocables.
La jurisprudence, avant la réforme de l‟article 1096, a adopté une solution différente quand
le bénéficiaire de la donation indirecte est l‟époux : en ce cas, en vertu de l‟article 1096
ancien, les donations de biens présents entre époux étant révocables, l‟époux bénéficiaire peut
être révoqué même s‟il avait accepté s‟il s‟agissait d‟une donation.
cf Arrêt Noguer 1998: assurances croisées : révocation impossible car à titre onéreux.
En revanche, s‟il s‟agit d‟une donation indirecte, cf Civ 2ème 2 juin 2005 : la stipulation par le
souscripteur d‟une assurance-vie désignant son conjoint comme bénéficiaire demeure
révocable au sens de l‟art 1096 CC et ce malgré l‟acceptation émise par ce dernier.
Doit-on estimer que la réforme de l‟article 1096 qui rend les donations de biens présents
prenant effet pendant le mariage irrévocables conduit à modifier cette solution ? On peut en
douter car ce type d‟assurance vie mixte ne permet au conjoint bénéficiaire d‟encaisser le
capital qu‟au décès du souscripteur assuré : pour certains auteurs, ce contrat semble donc
relever de la qualification de donation de biens présents prenant effet après le mariage et
demeure alors librement révocable.
Donc la solution est la même, bien que le texte ait été modifié, que l‟assurance-vie ait été
souscrite avant ou après 2005.
Toutefois les libéralités entre époux conservent certaines règles qui leur sont spécifiques
On peut voir la spécificité des libéralités entre époux en cas de divorce mais aussi en cas de
décès du donateur.
1-Applications distributives des règles propres aux « anciens » et aux « nouveaux » divorces.
La loi du 11 juillet 1975 posait une solution complexe : la perte ou la révocation des
donations dépendait de la forme de divorce adoptée et de la situation de « coupable » ou de
« victime » de l‟époux qui entendait s‟en prévaloir.
D‟après les anciens articles 267 et 269 CC, l‟époux aux torts exclusifs de qui le divorce pour
faute avait été prononcé ou qui avait pris l‟initiative du divorce pour rupture de la vie
commune perdait de plein droit les donations et avantages que son conjoint lui avait
consentis. En revanche, l‟époux « innocent » ou qui supportait la rupture conservait les siens.
Néanmoins, ce maintien de la libéralité au profit du conjoint dit innocent n‟était qu‟un leurre
dans la mesure où le principe de révocabilité ad nutum demeurait. En effet, la deuxième
Chambre civile dans un arrêt du 4 février 1992 (Bulletin 1992 I N° 40 p. 30) a précisé que
dans le cas d‟un divorce prononcé aux torts exclusifs d‟un époux, les donations faites pendant
le mariage à l‟époux innocent demeurent révocables en vertu de l‟ancien article 1096 du Code
civil.
Pour les autres cas de divorce contentieux, il s‟agissait d‟une simple faculté de révocation
pour chacun des époux (art. 267-1 et 268-1)
Quant au divorce sur demande conjointe, les époux décident eux-mêmes du sort des libéralités
dans la convention de divorce homologuée. « s‟ils n‟ont rien décidé à cet égard, ils sont censés
les avoir maintenues » art. 268.
Si les époux déclarent expressément maintenir les libéralités sans préciser les conditions de ce
maintien lesdites libéralités sont réputées être devenues irrévocables (Civ 1er, 6 février 2008).
Si les époux restent silencieux sur le sort des libéralités, d‟après deux arrêts rendus à la
même date Civ. 28 février 2006, il faut distinguer :
- Les libéralités de biens à venir consenties pendant le mariage sont réputées maintenues avec
un caractère révocable : 1er arrêt pourvoi n ° 03 -20150.- Mais dans le deuxième arrêt (pourvoi
n° 03 – 10245), la Cour de cassation déclare que les dons manuels consenties pendant le
mariage sont réputés maintenus avec un caractère irrévocable car ils participent du règlement
global des effets du divorce. Cette décision peut être étendue à toutes les libéralités de biens
présents qui après le divorce deviennent irrévocables sauf clause contraire. Cependant, on peut
exclure celles qui prennent effet après le mariage, comme la réversion d‟usufruit, qui ne
jouent pas un véritable rôle dans le règlement du divorce et doivent donc garder un caractère
révocable.
Cependant, l‟art 265 CC est-il d‟ordre public ? Autrement dit les époux peuvent-il échapper à
l‟irrévocabilité d‟une donation de biens présents prenant effet pendant le mariage faite à son
conjoint en insérant une clause de non-divorce ?
Les spécificités des libéralités faites au conjoint restent importantes. Elles ont une incidence
sur la remise en cause des libéralités par les tiers ou par l‟époux gratifié.
Lorsqu‟un héritier autre que le conjoint ou un tiers est gratifié en présence d‟un héritier réservataire, cette libéralité ne doit pas dépasser la
quotité disponible. A défaut, elle risque d‟être réduite.
- En présence de descendants, ce montant est au maximum égal à la réserve personnelle du gratifié s‟il est un héritier réservataire majoré de la
QDO ou de ce qu‟il en reste ( selon l‟ordre des imputations). Et seulement de la QDO ou de ce qu‟il en reste pour un tiers ou un héritier non
réservataire.
Cette QDO estcalculé en fonction de la composition familiale : l‟article 913 Code Civil prévoit que la QDO est égale à :
- Lorsqu‟il n‟existe pas de descendants, le conjoint est héritier réservataire et peut être gratifié
de toute la succession en propriété ( sauf les différents droits de retour).
2- La remise en cause des libéralités faites au conjoint par un héritier réservataire ou par l‟un
des époux
* La remise en cause peut essentiellement être faite par les réservataires (action en réduction ,
action en retranchement) .
L‟action en réduction : Lorsque la libéralité faite au conjoint excède la taux de la QDS et qu‟il
y a donc atteinte à la réserve, les héritiers réservataires pourront engager une action en
réduction de cette libéralité.( 918 Cciv)
Les héritiers réservataires peuvent toujours renoncer, après le décès, à agir en réduction ou en
retranchement. Ils peuvent aussi y renoncer de façon anticipée : cf articles 929 à 930-5 et
article 1527 al 3 du Code Civil. Cette renonciation anticipée doit respecter un certain
formalisme ( art. 930 ) et, concernant l‟action en retranchement, le réservataire bénéficie alors
de garanties (cf. article 1527 al 3 in fine.
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Sur les remises en cause des libéralités entre époux, sur les remises en causes propres à ces
libéralités.
Spécificité en cas d‟assurance vie au bénéfice du conjoint : même accepté le contrat est librement
révocable (arrêt de la cour de cassation). Donation entre époux est révocable, donation de bien
présente, malgré acceptation la donation est révocable (avant la réforme)
La donation est un contrat, on peut faire une donation indirecte par le biais d‟une assurance vie,
quand le bénéficiaire n‟accepte le contrat qu‟après le décès ?
Détermination de la date du contrat d‟assurance vie : à la date de l‟acceptation ou à la date du
contrat.
Enjeux après 2005 : donation de bien présent => pas révocable. Mais le contrat d‟assurance vie
n‟opère pas une simple donation de bien présent, elle ne prend effet qu‟à la dissolution du mariage,
elle reste révocable même si elle est faite après le 1 janvier 2005. => Pas d‟enjeux sur la
détermination de la date (acceptation ou date du contrat).
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Le droit de retour conventionnel prévu aux articles 951 et 952 résulte quant à lui d’une
clause de la donation prévoyant sa résolution en cas de prédécès du donataire seul ou
avec ses descendants. Si cette circonstance se produit, le bien donné fait retour dans le
patrimoine du donateur de façon automatique ce qui l’exclut de la succession ordinaire et
de la masse de calcul de la quotité disponible. Il ne s’agit pas ici d’un droit successoral.
Mais nous allons voir que les droits de retour légaux sont source d’incertitudes (I) ce qui
explique le recours fréquent au droit de retour conventionnel (II).
Après cette présentation des droits de retour légaux, nous allons voir les incertitudes
quant à leur mise en œuvre.
Pour compenser la primauté du conjoint survivant sur les collatéraux privilégiés depuis la
loi de 2001, le législateur a institué à leur profit un droit sur les biens que le défunt avait
reçus de leur auteur commun par donation ou succession. Ce droit de retour présente la
particularité d’être limité à la moitié seulement des biens d’origine familiale. Cependant,
plusieurs incertitudes apparaissent lors d’une étude approfondie de ces droits.
De façon moins radicale, il se peut que le bien familial, quoique se retrouvant en nature
dans la succession, ait subi des modifications du chef du gratifié. Cette situation est
génératrice d’incertitudes. Peut-on encore dire que le bien se retrouve « en nature » dans
la succession ? On peut se demander à partir de quel degré de transformation il y aura
dénaturation du bien le rendant impropre à figurer dans la succession anomale. Et si ce
degré n’est pas atteint, qui profitera ou pâtira des plus ou moins values advenues sur le
bien entre le moment de son acquisition à titre gratuit et le décès du gratifié ? Des
matériaux incorporés dans une construction cessent d’exister en tant que choses
indépendantes et dans la succession on retrouvera une construction et non des matériaux.
Mais un terrain nu, reçu dans cet état, sur lequel le de cujus a fait édifier une construction
se retrouve t-il en nature dans la succession ? Reconnaît-on un terrain nu là où il existe
désormais un terrain bâti ? On fera sans doute appel à la théorie de l’accession pour
soutenir que l’ensemble bâti n’est qu’une évolution du terrain nu reçu qui se retrouve en
nature dans la succession. Mais il pourrait être soutenu que si le sol se retrouve en nature,
il se distingue de la construction qui y est édifiée, laquelle est un bien nouveau.
Les incertitudes concernant les biens en nature seront les mêmes s’agissant du droit de
retour en présence d’un adopté simple. Nous renvoyons donc pour cette question aux
propos développés ci-dessus.
L’hypothèse des modifications apportées du chef du défunt fait naître une autre
incertitude. En effet, si le conjoint mérite de recevoir tout l’enrichissement réalisé par le
défunt au cours de leur vie commune, il n’est rien prévu dans l’acquisition des biens
provenant de la famille. Ce droit de retour peut produire des résultats assez différents. Les
biens à partager entre le conjoint et les collatéraux privilégiés sont ceux qui se retrouvent
en nature dans l’état où ils se trouvent à l’ouverture de la succession sans aucun correctif.
Les frères et sœurs peuvent profiter d’investissements du de cujus qui ne sont pas du fait
de la famille. La conservation des biens dans la famille se mue en enrichissement de la
famille au détriment du conjoint survivant (différence entre des époux mariés sous le
régime légal ou sous celui de la séparation de biens).
Les frères et sœurs issus de lits différents sont traités de manières différentes. Seuls sont
admis au bénéfice de cette dévolution particulière ceux qui sont descendants du ou des
ascendants prédécédés à l’origine de la transmission du bien qui se retrouve en nature. La
loi tient compte des branches maternelle et paternelle. Ainsi, seuls les frères et sœurs
consanguins et germains peuvent prétendre à la moitié des biens reçus du père et non les
frères et sœurs utérins. Si la loi de 2001 a supprimé la fente (division par branches) entre
les collatéraux privilègiés issus de lits différents dans la succession ordinaire, elle en
reprend le principe pour cette succession anomale, ce qui témoigne d’une volonté de
conserver le bien familial dans la famille. Mais cela ne reste qu’un vœu si l’on examine la
suite du texte.
A notre avis, le législateur n’est pas allé jusqu’au bout du système de la vocation
successorale en nature. La solution aurait été d’attribuer l’intégralité des biens de famille
aux frères et sœurs sauf à corriger par des indemnités les transformations apportées à
l’état originaire du bien.
On peut aussi penser que le législateur n’a pas été au bout de sa logique qui est de
considérer que le conjoint prime les collatéraux privilégiés. Les exceptions apportées sont
une atteinte à cette logique.
La loi du 23 juin 2006 a supprimé la réserve héréditaire des ascendants pour promouvoir
encore un peu plus les droits du conjoint survivant. Mais, là encore, le législateur ne va
pas au bout de ce choix puisque, parallèlement, il instaure un droit de retour au profit des
père et mère pour compenser en quelque sorte la perte de leur réserve. Ce nouveau droit
de retour est source d’interrogations. Nous allons tout d’abord voir qu’il s’agit d’un droit
d’ordre public
La question s’est posée de savoir si ce droit de retour jouait en présence d’un conjoint
survivant. En effet, un doute pouvait naître du fait que cet article est situé dans une section
intitulée « des droits des parents en l’absence de conjoint successible ». Mais, d’autres
articles de cette section s’appliquent en présence d’un conjoint survivant comme la
représentation par exemple. De plus, l’article 738-2 n’exclut pas explicitement le droit de
retour en présence d’un conjoint comme le fait l’article 368-1 en cas de décès de l’adopté
simple. Enfin, étant donné que l’article 738-2 énonce un droit d’ordre public on peut
considérer qu’il joue en présence d’un conjoint survivant.
Mais alors une autre question peut se poser : comment articuler le droit de retour des père
et mère avec le droit viager au logement du conjoint ? L’hypothèse est la suivante : les
époux ont pour résidence habituelle au moment du décès un immeuble donné au de cujus
par ses parents. Faut-il alors raisonner par analogie avec le droit de retour des collatéraux
privilégiés qui est primé par le droit viager au logement du conjoint ? Pas nécessairement.
En effet, à la différence du droit de retour des collatéraux, celui des père et mère peut
s’exercer en valeur. On pourrait alors estimer que l’existence de ce droit viager caractérise
l’impossibilité d’exécution en nature et justifie le recours à une exécution en valeur. C’est
l’analyse qui a été retenue par certains auteurs comme M. Blanchard.
Enfin, un autre problème peut être soulevé. Il s’agit du cas où les articles 368-1 et 738-2
ont vocation à s’appliquer en même temps. L’hypothèse est celle d’un adopté simple
décédé sans postérité ni conjoint survivant et ayant reçu par donation d’un des ses
parents adoptifs ou biologiques un bien qui se retrouve en nature dans la succession.
Quel droit de retour doit alors primer ? A priori étant donné que le spécial prime le général,
l’article 368-1 spécifique à l’hypothèse d’un adopté simple devrait primer. Mais si le bien a
été aliéné, le parent de l’adopté peut-il alors invoquer l’article 738-2 afin de bénéficier tout
de même d’un droit de retour ? On pourrait répondre par l’affirmative, à notre sens, étant
donné que cet article est d’ordre public.
Les interrogations les plus importantes soulevées par ce droit de retour concernent son
assiette et son imputation.
2) assiette et imputation
L’article 738-2 alinéa 1er énonce que les père et mère « peuvent (…) exercer un droit de
retour à concurrence des quotes-parts fixées au premier alinéa de l’article 738 sur les
biens » reçus d’eux par donation. La question s’est alors posée de savoir si l’article
plafonne le retour à ¼ de la succession ou à ¼ du bien donné. En effet, on peut se dire
que comme ce droit de retour vise à compenser la perte de leur réserve héréditaire qui
était d’1/4 de la succession pour chacun il serait logique de considérer que le droit de
retour porte sur ¼ de la succession pour chaque parent donateur (c’est l’opinion
notamment de M. Leprovaux). Cela signifierait que ce retour n’aurait plus aucun lien avec
le bien donné qui peut avoir une valeur inférieure ou supérieure à ¼ de la succession
selon les cas.
Pour contrer cette analyse on peut avancer le fait que l’article 738-2 dans son alinéa 2
parle de « la valeur de la portion des biens soumise au droit de retour » ce qui milite en
faveur d’un retour limité à ¼ du bien donné (c’est l’opinion notamment de Mme Levillain).
Les parents recueilleront donc chacun ¼ du bien ou ¼ de sa valeur. La conservation du
bien dans la famille n’est, ici encore, plus assurée.
Cette question de l’assiette n’est toujours pas tranchée ce qui incite à la stipulation d’un
droit de retour conventionnel permettant le retour du bien dans son entier.
En raison des incertitudes pour le notaire dans la mise en œuvre de ces droits de retour
légaux, il est préférable de recourir au droit de retour conventionnel.
La donation est un acte par lequel le donateur traduit sa préférence pour le donataire lui-
même. Or, il n’est pas certain, en cas de décès du donataire, que cette préférence
subsiste en faveur des héritiers de ce dernier. Le droit de retour conventionnel permet de
répondre à cette inquiétude en offrant au donateur la possibilité de consentir une libéralité
tout en prévoyant que le bien ne passera pas en des mains étrangères. Cette faculté est
offerte par les articles 951 et 952 du Code Civil. Ainsi, cette clause ne contrevient pas au
principe de l’irrévocabilité des donations prescrit par l’article 894. Après avoir vu le
mécanisme de ce droit de retour conventionnel, nous aborderons les questions soulevées
par sa mise en œuvre.
1) conditions de validité
- Tout d’abord, ce droit ne pourra être stipulé qu’au profit du donateur seul (art 951al2). En
effet, le retour stipulé au profit des héritiers de celui-ci ou de tiers entraîne la nullité de la
clause. Si le retour est stipulé au profit du donateur et d’un tiers, on constate que la
stipulation n’est valable qu’au regard du donateur et est nulle concernant le tiers. Cette
nullité laisse subsister la libéralité.
- Quant à son objet, le donateur pourra stipuler le droit de retour des objets donnés mais
en limiter à son gré les effets (il peut limiter le retour à la nue-propriété du bien par
exemple).
- Quant à la forme, la clause de retour ne se présume pas, il faut que l’acte révèle
l’intention des parties sans pour autant que l’expression « droit de retour » y soit
nécessairement employée. La clause de retour conventionnel pourra être stipulée soit
pour le prédécès du donataire seul, soit à la double condition du prédécès du donataire et
de ses descendants.
Le droit de retour conventionnel s’analysant comme une condition résolutoire tant que
cette condition n’est pas réalisée, la donation produit ses effets. Tout se passe comme si
la donation était pure et simple, le donataire peut librement disposer du bien. Dans ces
conditions, alors même que juridiquement le donataire dispose de tous les attributs du
propriétaire, le bien se trouve soumis à une indisponibilité de fait car les actes accomplis
par le donataire seront affectés de la condition résolutoire. Ainsi, il est de bonne mesure
pour les notaires de stipuler au côté de cette clause de retour, une clause d’inaliénabilité
par laquelle l’indisponibilité sera de droit. Cette dernière clause facilite la mise en œuvre
du droit de retour conventionnel, en évitant qu’au jour de l’ouverture de la succession, le
bien ne se trouve en des mains étrangères. Il convient de relever deux arrêts de la
première chambre civile en date du 4 juillet 2006. Dans ces deux affaires, une donation
avait été faite avec stipulation d’une clause de retour conventionnel et d’une clause
d’inaliénabilité. Le donataire s’est retrouvé en liquidation judiciaire. Le liquidateur demande
alors la main levée de la clause d’inaliénabilité afin de pouvoir vendre les immeubles
donnés. Les juges du fond ont fait droit à sa demande considérant notamment que le
règlement de la dette du donataire constituait un intérêt plus important que celui justifiant
la clause d’inaliénabilité. La Cour de Cassation casse l’arrêt de la cour d’appel pour
violation de l’article 900-1 du code civil. On peut donc en déduire que l’inaliénabilité du
bien résiste à un procédure collective et donc que pour la Cour de Cassation, semble t-il,
le droit de retour (intérêt justifiant la clause d’inaliénabilité) prime le droit des créanciers.
Lors de la réalisation de la condition, cette dernière opère la résolution de la donation (Art
1183). Le donateur reprend son bien comme s’il n’avait jamais cessé d’en être
propriétaire. Les biens donnés doivent être restitués en entier au donateur. A défaut de
restitution volontaire, ce dernier dispose d’une action personnelle fondée sur le contrat
mais aussi d’une action en revendication. Le donateur ne peut reprendre que ce qu’il a
donné.
Si le bien a péri par faute du donataire, ces héritiers en doivent la valeur. En effet, même
s’il n’a jamais été propriétaire, par l’effet de la résolution, le donataire n’en avait pas moins
l’obligation de veiller à sa conservation en sa qualité de détenteur dans les termes de
l’article 1137. Si le bien a péri par cas fortuit ou force majeure, les héritiers ne sont tenus à
aucune restitution car les risques pèsent sur le propriétaire. Les fruits perçus, lorsque la
condition est pendante, ne sont sujets à aucune restitution.
La rétroactivité de la résolution entraîne l’anéantissement de tous les actes de disposition
qui ont pu être accomplis par le donataire (art 952). Seuls les actes d’administration et de
conservation seront maintenus. Ces biens doivent revenir au donateur libres de toutes
charges et hypothèques. Les tiers détenteurs verront leur titre privé d’effet sous réserve de
l’article 2276 pour les meubles (« la possession vaut titre ») et à défaut de publication du
droit de retour avec la donation pour les immeubles. L’article 952 du Code civil apporte
une exception qui concerne l’hypothèque légale entre époux.
1) la renonciation à ce droit
Le droit de retour conventionnel ne confère pas au donateur un droit de nature
successorale. Par conséquent, la renonciation ne tombe pas sous le coup de la prohibition
des pactes sur succession future. En effet, ce droit résulte de la liberté contractuelle.
On s’est alors demandé si la renonciation pouvait intervenir à tout moment.
Il est clair que le donateur peut renoncer à son droit de retour conventionnel avant la
réalisation de la condition résolutoire du prédécès. Cette renonciation peut être faite dans
un acte spécialement dressé à cet effet ou n’être que l’accessoire d’un acte tel la vente
par le donataire du bien donné.
Moins nette est la réponse à la question de savoir si la renonciation peut intervenir après
la réalisation de la condition du prédécès. Tout d’abord, la 1 ère chambre civile dans son
arrêt du 18 février 1975 énonce que la renonciation à la succession du donataire
n’emporte pas de la part du donateur renonciation à l’exercice de son droit de retour. La
Cour de cassation poursuit en expliquant qu’il ne résultait pas des circonstances de la
cause que le donateur avait renoncé. On peut retirer deux apports de cet arrêt : la
renonciation au droit de retour conventionnel peut intervenir après la réalisation de la
condition du prédécès du donataire mais cette renonciation doit être expresse. Mais ce
n’est qu’une simple interprétation de l’arrêt. Des difficultés ont été pointées du doigt par les
auteurs qui se sont fondés sur le mécanisme de la condition résolutoire tel que prévu à
l’article 1183 du code civil. M. Grimaldi explique que par l’effet rétroactif de la condition
résolutoire, le bien donné a, de plein droit, réintégré le patrimoine du donateur. Il serait
donc trop tard pour renoncer à un retour qui s’est déjà produit. Messieurs Terré et
Lequette vont encore plus loin dans ce raisonnement et estiment qu’étant donné que par
le décès le bien donné a immédiatement fait retour dans le patrimoine du donateur, la
renonciation constituerait alors une nouvelle libéralité. Cette question reste ouverte.
Le rapport de dons
Le rapport de dons est une opération qui se situe dans la deuxième partie du schéma liquidatif, c‟est-à-
dire celle du calcul de la masse à partager. Cette masse, qui va être répartie entre les héritiers venant à la
succession du défunt, doit être déterminée dans sa consistance et dans sa valeur. Une des opérations pour
évaluer l‟actif à partager est le rapport de dons.
Il existe deux sortes de libéralités faites à des héritiers. Les unes sont en avancement de part
successorale, on dit qu‟elles sont rapportables : la libéralité constitue un allotissement anticipé qui s‟imputera
sur la part héréditaire du gratifié. Les autres sont hors part successorale, on dit qu‟elles sont dispensées de
rapport : le donateur a voulu augmenter la part du gratifié.
Le rapport de dons désigne l'opération préalable au partage consistant dans l‟ajout à la masse
partageable de la valeur jour partage des biens rapportables dont les copartageants avaient été gratifiés par le
défunt. Ils ne restituent pas matériellement ces biens : il s‟agit au départ avant tout d‟une opération
comptable car le rapport effectif s‟effectuera le plus souvent « en moins prenant ».
Le rapport des libéralités a pour finalité de garantir l'égalité entre les cohéritiers. C'est pourquoi, il est parfois
appelé "rapport à fin d'égalité". En effet, lorsque le défunt a consenti des libéralités à certains de ses
successibles, ceux-ci se trouvent avantagés au détriment de leurs cohéritiers. Le partage conduit alors, en
l'absence de rapport, à attribuer au gratifié sa part successorale tout en le laissant conserver sa libéralité. Les
successibles non bénéficiaires de libéralités ne peuvent prétendre, quant à eux, qu'à leur part successorale.
Afin d'empêcher pareille rupture d'égalité, le Code civil impose aux héritiers gratifiés, en principe (cf. art.
843), d'effectuer le rapport à la masse successorale des donations reçues du défunt. Chaque cohéritier aura
finalement alors une part égale.
Le rapport des libéralités doit être distingué de l'action en réduction des libéralités excessives qui appartient
aux seuls héritiers réservataires, lorsque les libéralités faites par le de cujus excèdent la quotité disponible. La
réduction des libéralités se situe en amont du rapport de dons dans le schéma liquidatif.
Le rapport de dons est une institution ancienne qui puise ses racines dans le droit romain et l‟Ancien droit.
Cette institution a été reprise par les rédacteurs du Code civil. Elle a, depuis, subi des modifications, la plus
récente résultant de la loi du 23 juin 2006 qui a introduit dans le Code civil une section « du rapport des
libéralités ». Se côtoient en la matière les consécrations et les innovations législatives que nous aborderons
tout au long de l‟exposé.
Toutefois, les règles légales revêtent un caractère supplétif. Il est, en effet, indispensable de garder à
l‟esprit que la volonté du défunt est déterminante pour faire jouer le rapport. Il peut décider de dispenser ou
non du rapport une libéralité. La volonté du défunt a une place majeure en matière de rapport de dons.Nous
verrons dans une première partie le domaine du rapport tandis que la seconde partie sera consacrée à
l‟exercice du rapport.
Toute personne et toute libéralité n‟entrent pas dans le domaine du rapport. Ce domaine est restreint. Il
convient de déterminer les personnes concernées par le rapport ainsi que les libéralités soumises au rapport.
Les bénéficiaires du rapport sont les cohéritiers, le rapport successoral étant placé sous le signe de la
réciprocité (art.850 et art.857). Sont ainsi exclus du bénéfice du rapport l'héritier indigne ainsi que l'héritier
renonçant. L'article 857 exclut également du bénéfice du rapport les créanciers de la succession. Ces derniers
ne peuvent ni demander le rapport ni en bénéficier lorsqu'il a été réclamé par un cohéritier.
À présent, il convient d‟envisager les personnes débitrices du rapport puis de s‟arrêter sur le cas
particulier de la représentation.
Il résulte des articles 843 et 846 du Code civil, tels que modifiés par la loi du 23 juin 2006, que seuls sont
tenus au rapport des libéralités les gratifiés, héritiers ab intestat venant à la succession du donateur et étant
personnellement bénéficiaires d'une libéralité ou d'un avantage indirect.
Ne sont pas, selon la doctrine classique, soumis au rapport les légataires universels ou à titre universel même
s'ils cumulent cette qualité avec celle de successible lors de la donation et de l'ouverture de la succession .
Cette opinion s‟appuie sur un arrêt de 1894 qui énonce que leur vocation testamentaire, en vertu de laquelle
ils succèdent, prime leur vocation ab intestat qu'ils n'invoquent pas. Mais cette affaire concernait un héritier
non réservataire.
On peut penser qu‟une solution différente s‟impose lorsque c‟est un héritier réservataire (en présence d‟un
cohéritier réservataire) qui est gratifié d‟un don et qui est par ailleurs désigné comme légataire universel. En
ce cas, s‟il n‟a pas renoncé à sa part de réserve, il n‟est pas logique de le dispenser du rapport du don (sauf
stipulation en ce sens). La question reste en tout cas pour le moins discutable et la solution doit donc être
nuancée sur ce point.
Le légataire particulier est soumis au rapport des donations antérieurement reçues du de cujus, s'il cumule
cette qualité avec celle d'héritier ab intestat (Cass. 1re civ., 28 nov. 2006). En dehors de ce cas, le rapport ne
concernant que les héritiers ab intestat, le légataire à titre particulier n'en est pas tenu.
L'article 847, al. 1er écarte du rapport les donations faites au fils du successible, en décidant que “les dons et
legs faits au fils de celui qui se trouve successible à l'époque de l'ouverture de la succession sont toujours
réputés avec dispense de rapport. Le père venant à la succession du donateur n'est pas tenu de les rapporter
même s‟il a pu en profiter.
L'article 849 comporte une disposition similaire s'agissant des donations faites au conjoint du successible. Le
conjoint n'est pas tenu de rapporter les libéralités reçues du défunt par son époux, quand bien même il en
aurait tiré profit par le jeu des conventions matrimoniales.
Le conjoint successible n'a pas non plus à rapporter la moitié donnée à son époux qui n'a pas la qualité
d'héritier du donateur en cas de dons et legs faits conjointement à deux époux (art.849 al 2).
Autre qualité à avoir pour être tenu au rapport, il faut être héritier acceptant. Se pose alors la question de la
représentation.
Par exception, l‟héritier peut être tenu de rapporter les dons faits à une autre personne, s‟il vient à la
succession par représentation de cette personne = rapport pour autrui.
représentation d’un héritier prédécédé ou indigne
L‟article 848, in fine, précise que le fils qui vient à la succession de son grand-père par représentation de son
père doit rapporter les libéralités faites à son père prédécédé, quand bien même ce fils avait renoncé à la
succession de son père.
Parfois, double rapport par le fils : des dons faits au père (représenté) alors qu‟il était héritier présomptif +
des dons faits au fils (représentant) s‟il était devenu héritier présomptif lorsqu‟il a été gratifié (combinaison
art.848 et 846).
Exemple : Le défunt avait deux enfants A et B. Il avait fait une donation à son fils A. A a une fille F qui a
aussi bénéficié d‟une donation du défunt.
A est prédécédé. F est successible. Elle vient à la succession par représentation de A. Elle doit rapporter la
donation faite à A. Est-elle soumise au double rapport ? Si A est décédé après que F ait été gratifiée, celle-ci
ne doit le rapport que de la donation faite à A. Si A est décédé avant que la donation ait été faite à F, F (=
représentant) est tenue du double rapport puisqu‟elle avait la qualité d‟héritier présomptif au jour de la
donation.
Ce qui est sûr, c‟est que le représentant n‟est pas tenu au double rapport puisque la renonciation ne peut
intervenir qu‟à l‟ouverture de la succession et donc l‟héritier représentant, au jour de la donation qui lui est
faite, n‟a pas la qualité d‟héritier présomptif.
La règle selon laquelle les donations sont présumées rapportables s‟applique quelque soit la forme de la
donation. De même, selon l‟article 853, a contrario, tous les avantages indirects sont sujets à rapport. Le
principe a une portée très générale.
Sont ainsi soumises au rapport toutes les donations faites à un successible, qu'elles soient authentiques ou
qu'il s'agisse de dons manuels, de donations indirectes ou encore de donations déguisées.
Concernant ces dernières, l'article 918 apporte la limite suivante: lorsque le de cujus a aliéné, au profit de l'un
de ses successibles en ligne directe, un bien à charge de rente viagère, à fonds perdus ou avec réserve
d'usufruit, cet article présume, de manière irréfragable, que l'aliénation dissimule une donation déguisée qui
doit être imputée sur la QD : elle est donc traitée comme une donation effectuée hors part successorale.
L‟excédent est sujet à réduction. Comparez avec l‟article 918 ancien qui prévoyait « le rapport » de
l‟excédent : il est plus logique de parler ici de « réduction » comme le fait le nouveau texte.
Notons que le texte ajoute in fine que seuls les cohéritiers qui n‟ont pas consenti à ces aliénations peuvent
demander cette imputation et une éventuelle réduction. Cette disposition autorise donc une renonciation
anticipée à l‟action en réduction, renonciation anticipée qui était déjà prévue dans l‟article 918 ancien.
Il faut enfin préciser que les donations de fruits et revenus ont suscité de vives controverses. Longtemps on a
considéré qu‟étaient dispensées de rapport les donations de fruits ou de revenus, censées ne concerner que
des sommes négligeables. Cette solution était critiquée en doctrine car contraire à la présomption posée par
l‟article 843. Au visa de l'article 843, par un arrêt de la Première chambre civile de la Cour de cassation du
14 janvier 1997 (cf code sous article 894), la Haute juridiction abandonne la solution ancienne en énonçant
que l‟article 843 du Code civil “n'opère aucune distinction selon que le défunt a donné un bien ou seulement
les fruits de celui-ci”. Cette solution jurisprudentielle est désormais consacrée à l‟article 851 al 2 (loi de
2006).
Certains actes, bien que constituant un avantage pour l‟héritier, sont dispensés de rapport. Cette dispense
a deux sources : légale ou volontaire. Nous nous attacherons aux dispenses légales.
La dispense joue pour les présents d'usage et frais divers engagés par le de cujus pour le successible,
dispense énoncée à l‟article 852 du Code civil. Un présent d‟usage peut être qualifié de don manuel, mais il
échappera au rapport puisque ce sont des cadeaux motivés par l‟usage et d‟une valeur modeste au vu du
patrimoine du donateur. La modicité du présent s'apprécie à l'époque à laquelle il a été effectué. L‟article 852
énonce le caractère supplétif de cette dispense : c‟est en raison de l‟absence de volonté contraire exprimée
par le défunt que la dispense de rapport joue (consécration d‟une solution jsp de 1921).
Sont de même dispensés de rapport les fruits et intérêts des donations rapportables. L‟article 856 ne fait jouer
la dispense de rapport que dans un premier temps. En effet, l'interprétation a contrario de l'article 856 conduit
à dispenser le gratifié de rapporter les fruits qu'il a retirés du bien donné, avant l'ouverture de la succession.
À compter du jour de l‟ouverture de la succession, les fruits des choses sujettes à rapport deviennent
rapportables.
L‟alinéa 2 de ce même article envisage une règle similaire en matière d‟intérêts. Sont désignés les intérêts
produits par l‟indemnité de rapport. Cette solution consiste à faire courir les intérêts de l'indemnité de rapport
à compter du jour de sa liquidation.
Il convient aussi de s‟attarder sur une forme de donation qui échappe à la présomption posée par l‟article
843 et n‟est jamais soumise au rapport : la donation-partage. En effet, une donation-partage ne sera jamais
rapportable après le décès puisqu'elle procède au partage anticipé des biens du donateur, du vivant de ce
dernier (1ère Civ, 16 juillet 1997).
La loi du 23 juin 2006 a créé une nouvelle variété de donation-partage, intitulée “Des donations-partages
faites à des descendants de degrés différents”. Cette variété de partage anticipé autorise le disposant à
procéder à un saut de génération, en conviant à la libéralité non seulement ses descendants, héritiers
présomptifs, mais aussi ses héritiers d'un rang subséquent ou ces derniers seulement (art.1075-1 du Code
civil). La donation-partage transgénérationnelle implique que l'héritier de premier rang accepte que ses
propres descendants y soient allotis en ses lieu et place et renonce ainsi en leur faveur à tout ou partie de ses
droits successoraux (art.1078-4 Code civil). L'article 1078-6, alinéa 1er précise que “lorsque des descendants
de degrés différents concourent à la donation-partage, le partage s'opère par souche”.
Les biens reçus, dans le cadre de la donation-partage transgénérationnelle, par la souche de l'héritier
présomptif ne sont pas soumis au rapport dans le cadre de la succession de l'ascendant donateur.
Mais l'obligation au rapport ressurgit à la charge de l'héritier de second rang à l'heure de la liquidation
de la succession de l'héritier présomptif du donateur. Dans le souci d'assurer l'égalité au sein de la souche de
cet héritier, les biens dont ses propres descendants ont été allotis par l'ascendant donateur en ses lieu et place
sont traités comme si ces derniers les tenaient de leur auteur direct par donation entre vifs. Par suite, ces
biens sont soumis aux règles gouvernant celle-ci pour le rapport (art. 1078-9 al 2).
Ce même article prévoit une exception à la résurgence du rapport à son alinéa 3 : lorsque tous les
héritiers de second rang ont reçu et accepté un lot dans la donation-partage transgénérationnelle et qu'il n'a
pas été prévu d'usufruit portant sur une somme d'argent, les biens dont ils ont été allotis sont traités comme
s'ils les avaient reçus de leur auteur par donation-partage. Ils sont alors exemptés du rapport à la succession
de celui-ci (retour au principe).
Il en est de même lorsque l'héritier renonçant incorpore, comme la loi l'y autorise, la donation-partage
transgénérationnelle à une donation-partage qu'il consent à ses propres descendants. En pareil cas, la valeur
des biens reçus par ces derniers, dans le cadre de la donation-partage transgénérationnelle, n'est pas
rapportable à la succession de leur auteur direct (art. 1078-10 Code civil).
Le rapport d‟une libéralité peut se faire de deux façons : en principe il se fait en valeur c'est-à-dire en
pratique en moins prenant (A), par exception le rapport d‟une donation peut se faire en nature (B).
A. Le rapport en valeur
En principe, le bien sujet au rapport doit être évalué au jour du partage en considérant son état au jour de
la donation (art.860). Se distinguent deux situations :
- si les plus ou moins values du bien sont imputables à l‟activité du donataire, on ne va pas tenir compte
des améliorations ou détériorations du fait du donataire. Par exemple, si le donataire a effectué des travaux,
on va prendre la valeur du bien sans les travaux.
Ne sont pas rapportables les fruits que les dépenses d‟amélioration ont permis de percevoir. Par exemple, si
des travaux ont été entrepris pour permettre de louer une maison qui n‟aurait pu l‟être dans son état au jour
de la donation, les loyers perçus ne sont pas rapportables.
- si les plus ou moins values sont dues à une cause extérieure, elles seront prises en compte pour
l‟évaluation du rapport. Il s‟agit de considérer le sort qu‟aurait eu le bien s‟il n‟était pas sorti du patrimoine
du défunt. Pour exemple, un terrain agricole devenu constructible après la donation a augmenté de valeur ; la
valeur rapportable est celle du terrain constructible.
aménagements :
a) - En cas d‟aliénation du bien : l‟article 860 al 2 aménage la règle de l‟évaluation du bien en cas
d‟aliénation. Trois hypothèses doivent être envisagés :
- Première hypothèse : à défaut de remploi du prix, le rapport est dû de la valeur du bien au jour de
l‟aliénation. La valeur correspond en principe au prix de vente. Si le bien a été bradé, les héritiers devront le
démontrer et pourront alors réclamer le rapport de la valeur réelle au jour de la vente.
- Deuxième hypothèse : en cas de subrogation réelle c‟est-à-dire de remploi du prix avec
l‟acquisition d‟un nouveau bien, la valeur prise en compte sera la valeur de ce nouveau bien à l‟époque du
partage. Il faudra, toutefois, tenir compte de la proportion dans laquelle le prix de vente a permis
l‟acquisition de ce nouveau bien et de son état lors de l‟acquisition.
Exemple : donation faite à un héritier d‟un bien qui vaut 400. Ce bien est vendu pour 500. Avec cette
somme, l‟héritier fait l‟acquisition d‟un immeuble qui vaut 1000. Lors du partage, l‟immeuble vaut 1400
mais ne vaudrait que 1200 si le donataire n‟avait pas réalisé de travaux.
Indemnité de rapport = Valeur du bien donné au jour de l‟aliénation x valeur du nouveau bien au jour du partage
Coût global de l‟acquisition du nouveau bien dans son état au jour de l‟acquisition
(jour achat)
b) en cas de don de somme d‟argent, l‟aménagement est prévu à l‟article 860-1 du Code civil. L‟héritier
doit rapporter le montant nominal de la somme donnée. En vertu du principe du nominalisme monétaire, il
n‟y a pas de réévaluation. Mais si la somme a servi à acquérir un bien, le rapport est dû de la valeur de ce
bien dans les conditions de l‟article 860 du Code civil sauf s‟il s‟agit d‟un bien dont la dépréciation est
inéluctable (vu précédemment).
L‟héritier qui doit un rapport en valeur est débiteur d‟une indemnité de rapport, donc d‟une somme
d‟argent. Cependant, l‟héritier ne verse pas cette somme à la succession, il la règle en moins prenant
(art.858), en tout cas tant que le rapport dû reste inférieur ou égal à sa part dans la succession.
Le rapport en moins prenant peut se réaliser de deux façons :
- soit par prélèvements : les cohéritiers créanciers du rapport vont faire des prélèvements sur la masse
pour une valeur égale au montant du rapport dû (méthode peu utilisée),
- soit par imputation : la pratique notariale utilise le procédé de l‟imputation. Cette méthode consiste à
ajouter (comptablement) à la masse partageable l‟indemnité de rapport, puis à placer cette indemnité
dans le lot du débiteur du rapport, par imputation sur sa part.
Exemple : 2 frères héritiers A et B. A avait reçu une donation de 60. La valeur des biens existants est égale à
600. Le montant du rapport est de 60, la masse partageable est de 660. Chacun devrait recevoir 330. On
impute sur le lot de A les 60 qu‟il a déjà reçu (330-60 = 270). B prend 330. Le rapport fait bien respecter
l‟égalité entre les frères chacun ayant au final la même part successorale.
Quelque soit le procédé utilisé, le gratifié conserve effectivement en nature le bien donné.
stipulation contractuelle
Une stipulation de la donation peut imposer le rapport en nature (art.858 al 2). Il est également admis qu‟une
telle disposition puisse être adoptée dans un accord postérieur à la donation, accord passé par acte
authentique ou sous seing privé.
volonté du donataire
Le donataire peut choisir lui-même de rapporter les biens donnés en nature (art.859). Cette possibilité lui est
offerte à la condition que le bien lui appartienne encore et qu‟il soit libre de toute charge. Cette faculté doit
être exercée avant le partage. Le donataire ne peut rapporter une partie du bien en nature, une autre en
valeur : l‟option est indivisible.
2° L‟exécution du rapport en nature
Le rapport en nature emporte anéantissement rétroactif de la donation puisque le bien donné est réuni à
la masse partageable et pourra donc être attribué à un autre héritier que le donataire lors du partage. Le
rapport en nature joue comme une condition résolutoire. Cet anéantissement a des conséquences importantes
sur les droits des tiers puisqu‟il emporte extinction des aliénations et constitutions de droits réels consenties
par le donataire. Pour préserver les droits des tiers, le plus sûr est de faire intervenir le donateur à l‟acte,
puisque la loi prévoit que les aliénations et constitutions de droits réels sont valables dès lors que le donateur
y a consenti (art.858 al 2).
Le rapport en nature n‟est pas dû si le bien a péri par cas fortuit et sans faute du donataire (art.855). Le
rapport porte toutefois sur l‟indemnité de remplacement par le jeu de la subrogation réelle (art.855 al 2).
L‟héritier doit rapporter le bien dans l‟état où il se trouvait au jour de la donation. Dès lors l‟héritier aura
droit à une indemnité pour les dépenses d‟amélioration qu‟il aura effectuées, à la charge de la succession
(art.861). À l‟inverse, les détériorations et dégradations dues au donataire devront être compensées par une
indemnité correspondant à la diminution de valeur du bien donné.
********************************************************************************
845 : renonçant doit le rapport si le disposant le soumet. Pas véritable rapport, plus indemnisation
en valeur, il devra indemniser les héritiers pour ce qui excède ce qu‟il aurait reçu en acceptant la
succession
Le rapport de dettes
LE « RAPPORT » DE DETTES
INTRODUCTION
Une dette est l‟obligation en vertu de laquelle une personne nommée débiteur est tenue
envers une autre nommée créancier, d‟accomplir une prestation. Ici la « dette » sera entendue dans
le sens plus strict de dette de somme d‟argent.
Le « rapport » de dettes est une technique de règlement des dettes d‟un indivisaire envers
l‟indivision. Il consiste à attribuer lors du partage au copartageant débiteur la créance de l‟indivision
à son encontre, de sorte que l‟allotissement provoque l‟extinction de sa dette par confusion avec la
créance qui lui est attribuée. La dette est ainsi réglée hors de tout transport monétaire.
Avant la réforme de 2006, l‟article 829 ancien du Code civil prévoyait que « chaque
cohéritier fait rapport à la masse, suivant les règles qui seront ci-après établies, des dons qui lui
ont été faits, et des sommes dont il est débiteur ». En 1989, un revirement de jurisprudence a
provoqué de vives réactions : en s‟appuyant sur le mot « rapport » un arrêt de la 1ère chambre civile
de la Cour de cassation en date du 18 janvier 1989 a assimilé le rapport de dettes au rapport de dons
pour en déduire que le valorisme devait jouer en matière de rapport de dettes. La cour, dans cet
arrêt, indique en effet que « l’article 869 du Code civil, rédigé en des termes généraux, ne distingue
pas suivant que les sommes rapportables par un successible ont fait l’objet d’un don ou d’un prêt.
Il a dès lors vocation, sauf stipulation contraire, à s’appliquer à l’un comme à l’autre ». Cette
terminologie identique a donc conduit la cour de cassation à appliquer le régime du rapport de dons
à ce qui n‟était qu‟un mode simplifié de règlement d‟une dette. L‟argument selon lequel la dette non
remboursée avant le décès cache peut être un don ne peut justifier une telle solution. S‟il est prouvé
que le prêt fait à un héritier dont le remboursement n‟est pas réclamé consitue en réalité un don (ce
qui suppose la preuve de l‟intention libérale), il faut requalifier le prêt en don et appliquer les règles
du rapport de don. Sinon, il n‟y a aucune raison de demander au débiteur de rembourser plus que ce
qu‟il doit. La cour de cassation a vite admis son erreur (confusion provoquée par l‟emploi du terme
« rapport ») : par un arrêt du 29 juin 1994 de la même chambre, elle vient finalement corriger cela
en précisant que « le rapport de dettes prévu par l‟article 829 du Code civil n‟est qu‟une technique
de règlement qui n‟obéit pas aux règles de l‟article 869, lequel concerne uniquement le rapport de
dons ». En conséquence, il y a lieu d‟appliquer le principe du nominalisme monétaire. Cet arrêt
réalise ainsi un retour au droit antérieur.
Elle rétablit ici une distinction nécessaire entre technique de règlement de la dette d‟un
copartageant et rapport de don.
Cette distinction est consacrée par la loi du 23 juin 2006 qui opère quelques ajustements.
Désormais, le législateur n‟emploie plus cette terminologie (« rapport ») source de confusions, et
traite des « dettes des copartageants ».
Cette question des dettes des copartageants se trouve dotée d‟un régime légal venu, pour
l‟essentiel, consacrer les décisions jurisprudentielles antérieures. La codification se trouve
désormais réunie en quatre articles, 864 à 867, formant le paragraphe 1 des dettes des
copartageants d‟une section 3 consacrée au paiement des dettes, d‟un chapitre consacré au partage.
Cette réforme garantit l‟autonomie et l‟originalité de cette technique. En effet, la technique de
règlement des dettes des copartageants et le rapport de dons n‟ont rien en commun. Alors que le
rapport des libéralités est une opération préalable au partage, dont l‟objectif est de reconstituer la
masse à partager, la technique de règlement d‟une dette d‟un copartageant commande la
composition des lots en attribuant au copartageant débiteur la créance correspondante dont
l‟existence dans la masse partageable est acquise. L‟abrogation de l‟article 829 ancien, qui traitait à
la fois du rapport de don et du rapport de dette, clarifie l‟autonomie de ces deux notions.
Force est de constater que le Code civil préfère se passer de la terminologie de « rapport de dettes »,
sans doute peu adéquate. Littéralement, le rapport est un apport en sens contraire, et suppose donc
un mouvement d‟aller-retour. Au contraire, dans le « rapport » de dettes, les fonds empruntés au de
cujus par le copartageant débiteur ne lui sont nullement restitués ; si l‟obligation de restituer
s‟éteint, ce n‟est que par l‟effet d‟une nouvelle attribution, celle de la créance dans le partage.
C‟est notamment pour cette raison que l‟arrêt du 29 juin 1994 précité préfère la terminologie de
« technique de règlement ». Cependant, l‟exposé utilisera le terme de « rapport » de dette,
expression à utiliser entre guillemets puisque cette terminologie est écartée depuis 2006 pour éviter
les confusions passées (cf toutefois l‟article 866 qui se réfère aux « sommes rapportables »).
Le « rapport » de dette peut faire penser à la compensation. Cependant, cette notion n‟existe
qu‟entre créances réciproques. Or le droit de l‟héritier dans la succession n‟est pas un droit de
créance : c‟est un droit réel de copropriété. L‟article 1290 ne peut donc pas jouer. La cour de
cassation l‟a rappelé par un arrêt de la première chambre civile en date du 14 décembre 1983.
On peut s‟interroger pour savoir dans quelle situation joue le « rapport » de dette, et quel est son
fonctionnement.
Ce que l‟on appelait « rapport de dettes » a toujours été un mode de règlement de droit commun des
dettes des copartageants à l‟égard de l‟indivision. On examinera successivement les conditions du
« rapport » de dettes, puis sa mise en œuvre.
I. CONDITIONS DU « RAPPORT » DES DETTES
Le législateur de 2006, qui admet la représentation d‟un renonçant, s‟est attaché à préciser un
certain nombre de conséquences : en cas de survenance d‟un nouvel enfant, quand le renonçant était
réservataire, et quand il avait reçu une libéralité rapportable. Si rien n‟est spécifié concernant le cas
où le renonçant est débiteur de la masse indivise, il est sans doute plus sûr de s‟en tenir à la
définition du domaine de cette technique de règlement prévue à l‟article 864.
2° Les dettes concernées
A. Montant du « rapport »
Conclusion :
Les deux techniques de rapport abordées aujourd’hui entretiennent des liens étroits. Toutes
les deux concourent à l’égalité des héritiers lors du partage de l’indivision successorale. Le
rapport des libéralités est une opération préalable au partage qui vient garantir l’égalité des
vocations successorales et donc des droits des copartageants. Le rapport de dettes, dans un
second temps, est une opération de partage qui assure l’égalité concrète des lots. Ainsi quand
le rapport des libéralités s’exerce par principe en moins prenant dans la succession, son
exécution n’est autre que celle d’un rapport de dettes. L’indemnité de rapport due par
l’héritier gratifié entre dans la composition de son lot lors du partage. C’est à dire que le
rapport de libéralités se prolonge en rapport de dettes.
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Arrêt de 89, avant personne ne faisait jouer le valorisme, le rapport est une technique de règlement
en moins prenant.
La jurisprudence en 89 créer la confusion en faisant jouer le valorisme, faire peur =>
remboursement anticipé.
Arrêt de 94 renvient à une solution plus logique : le nominalisme monétaire
Rapport de don : valorisme, si l‟argent donné à servit à acquérir un bien qui a pris de la valeur, prise
en compte de la plus value.
C/ Le partage :
* Depuis la loi du 5 janvier 1988, une « autre personne » que les descendants peut être appelée à
une donation partage à condition que figure parmi les biens attribués une entreprise commerciale,
industrielle, artisanale ou libérale et que ne soit attribué à ce tiers que « la propriété de tout ou partie
des biens affectés à l‟entreprise ou leur jouissance » (cf. ancien art. 1075). La loi ne visait que la
transmission d‟une entreprise individuelle, de sorte que le dispositif était exclu chaque fois que
l‟entreprise était exploitée sous forme sociétaire.
L‟article 1075-2 dispose désormais que inclure un tiers dans la donation partage est possible même
si l‟entreprise est exploitée sous la forme d‟une société. L‟allotissement du tiers ne pourra
comprendre que tout ou partie des droits sociaux de cette société, ou s‟agissant d‟une entreprise
individuelle, tout ou partie des biens corporels ou incorporels affectés à l‟exploitation.
* De plus, avant la loi de 2006, inclure un tiers dans cette donation partage supposait
nécessairement une pluralité de descendants sans laquelle le principe même de donation partage
n‟était pas envisageable.
Désormais, cette exigence disparaît d‟une part en raison de l‟élargissement du domaine
d‟application de la donation partage au profit de tous les héritiers présomptifs (article 1075). De ce
fait, la donation partage pourra être faite dans la fratrie, le donateur sans descendant répartissant ses
biens entre ses frères et sœurs, héritiers présomptifs, ou encore neveux et nièces par représentation.
Ainsi le recours à ce dispositif est ouvert à tout entrepreneur même à celui n‟ayant pas de
descendants.
D‟autre part, ce dispositif est désormais ouvert à l‟entrepreneur qui n‟a qu‟un seul enfant si ce
dernier a lui-même des descendants. En effet, l‟article 1075-1 prévoit que « Toute personne peut
également faire la distribution et le partage de ses biens et de ses droits entre des descendants de
degrés différents, qu‟ils soient ou non ses héritiers présomptifs ». Cette possibilité de donation
partage transgénérationnelle est régie par les articles 1078-4 et suivants, et l‟article 1078-5 prévoit
le cas où l‟ascendant n‟aurait qu‟un seul enfant, la donation partage devenant possible si le partage
est organisé entre cet enfant et ses descendants ou entre ses descendants seulement.
Notons que cette donation partage transgénérationnelle qui permet de réaliser la distribution et le
partage de biens, entre des descendants de degrés différents, qu‟ils soient ou non ses héritiers
présomptifs est subordonnée à une seule condition : que l‟enfant du donateur accepte de céder sa
place pour que la transmission anticipée bénéficie à ses propres enfants. Elle permet donc de
réaliser un saut de génération, le donateur donnant à ses petits-enfants au lieu et place de son enfant.
Cette donation a donc le même effet qu‟une renonciation anticipée à l‟action en réduction mais sans
le formalisme imposé dans le cadre dans ce dernier mécanisme. La donation partage ne renvoie pas
aux textes de la RAAR mais si elle a pour effet une telle renonciation. Impossible cependant
d‟échapper au formalisme de la RAAR en organisant une donation partage si l‟ascendant n‟a qu‟un
seul enfant et que ce dernier n‟a pas de descendant.
Ce mécanisme vient ainsi encore élargir le champ des bénéficiaires potentiels d‟une transmission
anticipée de l‟entreprise. En effet, elle permet d‟appeler à la donation, des descendants de degrés
différents et, ce même s‟il s‟agit des descendants d‟un enfant unique (article 1078-5). Un tiers
pourra donc participer à la distribution, même si l‟entrepreneur disposant n‟a qu‟un enfant unique, à
condition que ce dernier ait lui même un enfant.
Ces assouplissements peuvent d‟ailleurs rendre inutiles l‟association d‟un tiers à la donation partage
faite par un entrepreneur car l‟élargissement des donataires potentiels fait que l‟entrepreneur pourra
trouver plus facilement parmi ses héritiers présomptifs ou descendants de degrés différents, une
personne qui lui semble capable de reprendre l‟entreprise. De même, ces assouplissements sont de
nature à donner un intérêt nouveau à la transmission d‟entreprise par voie de partage anticipé.
Mais, ce dispositif spécifique à la transmission d‟entreprise aurait pu être évité si la donation
partage avait connu une ouverture plus large au tiers. En effet, il existe d‟autres cas dans lesquels la
possibilité d‟appeler, à la donation partage une personne n‟ayant pas la qualité d‟héritier présomptif
du disposant aurait été une avancée appréciable. C‟est le cas notamment des familles recomposées.
Mais pour celles ci, le législateur a préféré une adaptation plus spécifique et plus modeste du régime
de la donation partage.
B- Une adaptation à un nouveau modèle familial limitée.
Admise depuis longtemps en pratique et implicitement consacrée par la loi du 3 juillet 1971, la
donation partage conjonctive permet aux époux donateurs de confondre tout ou partie de leurs biens
respectifs en une masse unique pour les partager entre leurs présomptifs héritiers.
Mais s‟est posée la question de savoir si deux époux qui font une donation partage conjonctive de
leurs biens peuvent y inviter, aux côtés de leurs enfants communs, leurs enfants non communs.
- Avant la loi du 23 juin 2006 ; tout comme la pratique notariale, la doctrine majoritaire admettait la
validité de ces donations partages conjonctives en présence d‟enfants issus de lits différents à
condition que l‟enfant ne fût gratifié que du chef de son auteur et qu‟il ne le soit qu‟en biens propres
de celui ci ou en biens communs, à l‟exclusion de tout bien propre du conjoint.
Cependant, le seul arrêt rendu par la Cour de cassation relatif à cette question restait ambigu. En
effet, le 14 octobre 1981, la 1ère chambre civile de la cour de cassation casse un arrêt de la Cour
d‟Appel qui rejetait une demande en nullité d‟une donation partage. Cette donation était faite par
des époux au profit de leurs deux enfants communs et de deux autres enfants issus d‟un précédent
mariage du père. Selon la cour « la mère, disposante n‟étant pas l‟ascendante des deux enfants du
second lit, ne pouvait inclure ces derniers parmi les bénéficiaires d‟une donation partage, fût elle
conjonctive portant indistinctement sur les biens des deux époux ».
Cet arrêt a été diversement interprété. Certains, tel que le professeur MALAURIE, y voyaient une
condamnation de la donation partage en présence d‟enfant de lits différents, faute de pouvoir allotir
les descendants non communs à l‟aide des biens communs.
Pour d‟autres, elle serait valable pourvu que l‟on respecte les conditions que l‟on vient d‟énoncer,
soit un allotissement du seul chef de son auteur et seulement en biens propres de celui ci ou en biens
communs, à l‟exclusion de tout bien propre du conjoint.
Le nombre de familles recomposées n‟ayant cessé d‟augmenter au cours du temps, ces incertitudes
ont été dissipées par la loi de 2006 qui intègre cette réalité sociologique et permet aux époux
d‟organiser par anticipation la transmission de leur patrimoine à leurs enfants, tant communs que
non communs ; comme le prévoit l‟article 1076-1 du code civil.
Cet article, qui vient entériner la seconde interprétation de l‟arrêt précité, n‟envisage que le cas qui
était celui de cet arrêt : des époux mariés sous le régime de la communauté. Il serait sans aucun
doute dommage d‟en déduire que cette donation leur est réservée. Il convient alors de se demander
si cet article est applicable aux parents séparés de biens, déjà divorcés, voire non mariés.
L‟ancien article 1075 en évoquant les « père et mère » ne semblait pas faire une telle distinction. En
outre, l‟ordonnance du 4 juillet 2005 ayant supprimé la distinction entre les enfants légitimes et les
enfants naturels, il paraîtrait normal d‟ouvrir cette donation aux couples non mariés, tandis que la
pratique semble n‟utiliser cet article qu‟aux profit des époux, voire uniquement aux époux
communs en biens.
Le nombre de mariages tendant à diminuer, et 52% des enfants étant nés hors mariage en 2009, il
paraît regrettable que le législateur n‟ait pas été au bout de sa logique et soit resté trop frileux dans
la rédaction de cet article.
II. La sécurité juridique résultant des conséquences liquidatives de la donation partage.
A présent, nous envisagerons la sécurité juridique résultant de la liquidation impliquant une
donation partage ; au travers, des principes de la distribution des biens à partager (A), puis du risque
réduit d‟une atteinte à la réserve (B)
A- Les principes de la distribution des biens à partager.
Le partage des biens entre les donataires est indispensable, puisque c‟est avant tout ce partage qui
distingue la donation partage, d‟une donation ordinaire.
Cependant, le disposant est libre de composer les lots comme il l‟entend ; il est libre de donner tout
ou partie des biens constituant son patrimoine, sachant que les biens donnés et partagés peuvent être
de natures différentes.
Le donateur est également libre de rompre l‟égalité entre les gratifiés. Sachant que le partage ne
peut pas être attaqué pour cause de lésion (comme le prévoit l‟article 1075-3), la seule limite à la
liberté de procéder à des allotissements inégaux réside dans la protection de la réserve héréditaire
(que nous verrons par la suite). Le plus souvent, la donation partage jouera donc pleinement,
d‟autant plus qu‟elle n‟est jamais rapportable. L‟arrêt de la 1ère chambre civile du 16 juillet 1997
rappelle que le rapport n‟est qu‟une opération préliminaire au partage en ce qu‟il tend à reconstituer
la masse partageable. Cette solution qui fait l‟unanimité en doctrine avait déjà été énoncée par un
arrêt du 7 mars 1876.
Mais, si la donation partage n‟a pas à être égalitaire, le donateur souhaitera le plus souvent
maintenir l‟égalité entre les donataires. Celle ci pourra être obtenue par le versement de soultes. Le
paiement de la soulte mise à la charge de l‟héritier peut être différé ou comptant. Lorsqu‟elle est
payable à terme, il existe une règle de revalorisation. Lorsqu‟à la date du paiement de la soulte, la
valeur du bien mis dans le lot de son débiteur a augmenté ou diminué de plus de ¼ de sa valeur, la
soulte due augmente ou diminue dans les mêmes proportions en vertu de l‟article 1075-4 qui
renvoie aux dispositions de l‟article 828 du code civil, mais en excluant ici toute possibilité de
convention contraire.
Concernant les donations partages transgénérationnelles, une précision doit être apportée compte
tenu de la spécificité du mécanisme. L‟ouverture de la donation partage à des descendants de degrés
différents a obligé le législateur à préciser le régime de la répartition des biens. La donation partage
transgénérationnelle oblige à dépasser la notion de génération pour recourir à celle de souche. Le
partage se fera alors par souche ainsi qu‟en dispose l‟article 1078-6 du code civil. Le disposant peut
prévoir des attributions au profit de certaines souches seulement, de même qu‟il n‟est pas obligé de
gratifier tous les petits enfants d‟une souche.
Ici encore, la liberté du disposant n‟a d‟autres limites que la part de réserve revenant à chaque
souche.
B- Une atteinte à la réserve peu fréquente.
La question de l‟atteinte à la réserve ne se pose qu‟en présence d‟héritiers réservataires
(descendants ou à défaut le conjoint survivant). En l‟absence d‟héritier ayant cette qualité, il n‟y a
aucun risque de réduction, la liberté du disposant est donc totale.
En application de l‟article 1077-1 du code civil ; l‟action en réduction pour atteinte à la réserve
n‟est ouverte qu‟aux héritiers réservataires, qui n‟ont pas été allotis ou qui l‟ont été insuffisamment
et quand la masse des biens existants restant au décès est insuffisante pour allotir le demandeur (en
réduction) de sa réserve. En effet l‟objet de l‟action en réduction est uniquement de remplir l‟enfant
de ses droits de réserve, donc s‟il a reçu sa part de réserve, il ne peut pas demander davantage.
Cependant, le risque de réduction en présence d‟une donation partage est limité ;
-- En pratique, compte tenu des règles d‟évaluation des biens qui sont l‟objet de la donation partage,
les risques de réduction sont faibles.
En effet, en principe, pour vérifier s‟il y a lieu a réduction il convient d‟appliquer les règles de
l‟article 922 du code civil et donc de prendre en compte la valeur du bien donné au jour du décès.
Mais l‟article 1078 du même code prévoit en matière de donation partage, que la valeur prise en
compte pour l‟imputation et le calcul de la réserve est celle du bien au jour de la donation partage.
Cependant, trois conditions doivent être remplies pour que cet article soit applicable (et qu‟on
retienne ainsi la valeur au jour de l‟acte) ;
- Tous les enfants doivent avoir reçu et accepté expressément un lot ;
- Il ne doit pas avoir été prévu de réserve d‟usufruit sur une somme d‟argent ou sur une créance de
somme d‟argent ;
- Et il ne doit pas non plus, avoir été prévu une évaluation différente dans l‟acte.
En utilisant cette méthode d‟évaluation, la plus value du bien bénéficie seulement au donataire et
n‟est pas une cause de réduction ; en effet plus le bien prend de la valeur, plus l‟atteinte à la réserve
donc la réduction est envisageable. Cette règle spécifique de la donation partage fournit le meilleur
moyen de prévenir le risque d‟une action en réduction à l‟encontre d‟une telle donation.
Il faut ici rappeler qu‟il est possible d‟incorporer à une donation partage, une donation antérieure en
application de l‟article 1078-1 du code civil. L‟alinéa 2 de cet article prévoit que la valeur des
donations antérieures restera figée au jour de la donation partage. L‟inconvénient est qu‟une fois
incorporée, la donation antérieure prend rang à la date de la donation partage et perd le bénéfice de
l‟antériorité.
Ce mécanisme a, comme précédemment, l‟intérêt de faire bénéficier seulement le donataire, de la
plus value du bien et aussi de limiter l‟action en réduction d‟un héritier réservataire. En effet, à
défaut d‟incorporation, les donations antérieures risquent d‟être surévaluées par rapport aux biens
compris dans la donation partage, d‟où un risque de réduction. De plus, l‟incorporation permet
d‟équilibrer les lots ; même si l‟égalité des lots n‟est pas obligatoire, elle est souhaitable pour
prévenir tout risque de réduction ultérieure.
-- Attention, il convient tout de même de préciser que, dans l‟hypothèse où un héritier réservataire
n‟a pas du tout été alloti, les conditions de l‟article 1078 ne sont pas remplies. De ce fait, pour le
calcul de la réserve et pour les imputations, les biens donnés, y compris ceux qui ont fait l‟objet
d‟une donation partage, sont évalués d‟après leur état au jour de la donation et pour leur valeur au
jour de l‟ouverture de la succession donc en tenant compte, s‟il y a lieu, des aliénations et
subrogations.
Cependant, même en ce cas, il n‟y aura pas systématiquement lieu à réduction.
En effet, même si une donation partage n‟est jamais rapportable (cf. plus haut), elle est, le plus
souvent, faite en avancement de part. Dans l‟hypothèse où elle est faite en avancement de part à un
héritier réservataire, l‟atteinte à la réserve est minimisée par le fait que cette donation s‟imputera
prioritairement sur la réserve et pour l‟excédent seulement sur la quotité disponible (article 864
ancien et 919-1 nouveau). Il faudra donc avoir épuisé le disponible pour qu‟une réduction s‟opère.
Si le disponible suffit à remplir de ses droits l‟héritier qui n‟avait pas été alloti, il n‟y a pas lieu à
réduction.
-- Une précision doit être apportée concernant les donations partages transgénérationnelles. Dans la
succession du donateur, les biens reçus par les enfants ou leurs descendants ont vocation à
composer la part de réserve afférente à leur souche. Par conséquent, afin de respecter la réserve, on
impute ensemble toutes les donations faite aux membres d‟une souche, quel que soit leur degré de
parenté avec le défunt. Il est donc indispensable de distinguer deux étapes : le décès du disposant et
le décès de son enfant.
* Au décès du disposant : l‟article 1078-8 du code civil dispose que les biens reçus par les enfants
ou leurs descendants s‟imputent ensemble, sur la part de réserve revenant à leur souche et
subsidiairement sur la quotité disponible.
A ce stade, les biens sont évalués au jour de la donation partage selon les règles prévues à l‟article
1078 du code civil.
* Au décès de l‟enfant du disposant :
Le principe est posé à l‟article 1078-9 alinéa 1 et 2 du code civil qui dispose que les biens reçus par
les descendants sont traités comme s‟ils les tenaient de leur auteur direct. Ainsi ces biens seront
soumis aux règles des donations ordinaires concernant la réunion fictive, l‟imputation, le rapport et
la réduction s‟il y a lieu.
Cependant, par dérogation à ces règles l‟alinéa 3 du même article prévoit que lorsque tous les
descendants ont reçu et accepté un lot dans le partage anticipé et qu‟il n‟a pas été prévu de réserve
d‟usufruit, les biens dont ils ont été allotis sont traités comme s‟ils les avaient reçus par donation
partage de leur auteur et donc sont soumis aux règles de cette donation (à savoir, évalués au jour de
l‟acte).
C‟est seulement sur la 1ère étape du raisonnement que l‟atteinte à la réserve est limitée, et donc que
l‟action en réduction est peu pratiquée ; car c‟est au décès du disposant que les règles particulières
de la donation partage sont appliquées. Au décès de son enfant, on applique les règles du droit
commun des donations. .
CONCLUSION
En conclusion, on peut dire que la loi du 23 juin 2006 a fait de la donation partage un instrument
juridique perfectionné susceptible de s‟adapter à la diversité des patrimoines et des situations
familiales. Cependant une transmission anticipée du patrimoine doit être envisagée avec prudence,
notamment lorsqu‟elle concerne plusieurs générations. L‟obligation de conseil du notaire en ressort
donc renforcée.
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Point sur la RARE : il faut deux notaires, formalisme plus important, on peut aboutir au même
résultat avec la donation partage ? la donation partage n‟est pas possible lorsque le disposant n‟a
qu‟un seul héritiers (la donation partage suppose un partage => plusieurs héritiers).
Pacte sur succession future autorisé par la loi du 23 juin 2006. C‟est la renonciation par un héritier
réservataire présomptif à mettre en œuvre son droit sur la réserve. Il renonce à l‟avance à une
éventuelle réduction pour atteinte à la réserve, l‟héritier présomptif laisse le champ libre à son
auteur pour disposer plus largement à titre gratuit au profit d‟autrui.
Intention du législateur :
- transmettre assez de bien à un héritier présomptif handicapé pour lui assurer des moyens
d‟existence après le décès de ses parents
- aménagement de la transmission d‟ une entreprise.
Conditions de fond :
- La renonciation à agir en réduction doit être acceptée par l‟auteur du renonçant, à défaut c‟est une
déclaration d‟intention révocable.
- La renonciation doit être faite au profit d‟une ou de plusieurs personne déterminée.
- C‟est un acte désintéressé, on ne peut imposer d‟obligation à celui qui est l‟auteur du renonçant.
Mais ce n‟est pas une libéralité, le gratifié tient les biens du disposant et pas du renonçant.
- Condition de fond classique : consentement libre et éclairé, non vicié (vice de consentement =
nullité), capacité de donner (un mineur émancipé ne peut renoncer par anticipation à son action en
réduction)
Conditions de forme :
Acte authentique établi par deux notaires. S‟il y a plusieurs renonçant chacun signe séparément en
présence des deux seuls notaires.
Porté :
C‟est l‟acte de renonciation qui détermine son étendue (atteinte à la totalité de la réserve ou à une
fraction seulement.
Si le renonçant est représenté, sa renonciation à agir en réduction leur est opposable.
Fonctionnement :
Première conception : M. Claude Brenner, M. Gilles Goubeaux
Tous ce passe normalement => imputation des libéralités. Mais si la libéralité est réductible le
renonçant ne peut exiger l‟indemnité correspondante. (=> le renonçant ne reçoit pas la part
d‟indemnité qui lui aurait été du en l‟absence de renonciation)
Autre conception : Mme Nathalie Levillain, Mme Marie-Cécile Forgeard, M. Richard Crône et
M. Bertrand Gelot
le renonçant abandonne sa part de réserve dans les limites qu‟il fixe
Lorsque la libéralité dépasse la quotité disponible, l‟excédant s‟impute sur la part de
réserve du renonçant (ou la fraction prévue) et n‟encourt la réduction qu‟au-delà.
Alors que le législateur a récemment proclamé un droit opposable au logement dans la loi du 5 mars
2007, l‟attribution du logement familial est une question centrale du droit patrimonial de la famille.
La notion de logement familial n‟est pas définie juridiquement, c‟est une notion de fait. L‟article
215, concernant les couples mariés, précise que la résidence de la famille est au lieu que les époux
« choisissent d‟un commun accord ». Mais, en cas de désaccord, c‟est aux juges du fond de décider
souverainement du lieu qui constitue le logement de la famille. C‟est le lieu de concrétisation de la
communauté de vie, le lieu de rassemblement du couple et de ses enfants, c'est l'endroit où la
famille vit effectivement. Il s‟agit d‟un bien crucial car il a, pour les époux, à la fois une valeur
affective et une valeur patrimoniale.
Il convient de préciser que cette valeur spécifique n‟existe pas seulement pour les familles
traditionnelles, c‟est-à-dire les couples mariés mais également pour les partenaires liés par un PACS
et pour les concubins. Cependant, on ne traitera pas de ces deux dernières catégories dans l‟exposé.
Le logement familial est souvent le seul bien important que possède le couple mais il peut s‟agir
aussi d‟un bien loué à un tiers : dans tous les cas la question de son attribution tant lors de la
séparation du couple que lors du décès est primordiale. L‟attribution du logement familial à un des
membres de la famille va conférer à celui-ci un droit sur le logement. Le notaire sera amené à se
poser la question de l‟attribution du logement lors de la dissolution du mariage, par divorce ou
décès. En effet, c‟est à lui de liquider le régime matrimonial des époux et dans le cas du décès la
succession du défunt et de partager les biens entre les parties. Il compose alors les différents lots qui
reviendront aux membres de la famille dissoute. Lors de cette procédure, il doit se préoccuper
d‟attribuer le logement dans l‟un de ces lots. Le partage est généralement amiable lorsque tous les
indivisaires sont présents, capables et d‟accord entre eux mais il devient judiciaire lorsqu‟il y a
désaccord entre les indivisaires.
Le législateur s‟est très tôt intéressé à la question du logement de la famille et celle-ci a souvent été
au cœur de nombreuses évolutions législatives. Le législateur tente, en cas de divorce, de résoudre
la concurrence des prétentions des époux à se voir attribuer le logement et, en cas de décès, de
maintenir le cadre de vie du conjoint survivant déjà perturbé par la perte de son conjoint. De
nouvelles règles ont été édictées pour faciliter l‟attribution du logement familial tant en cas de
divorce qu‟en cas de décès et pour régler les éventuelles mésententes des membres de la famille.
En vertu de l‟article 255 4°du code civil le juge peut attribuer la jouissance du logement et du
mobilier du ménage à l‟un des époux ou partager entre eux cette jouissance. Cette décision est une
mesure provisoire qui intervient lorsque le juge rend l‟ordonnance de non conciliation (cf article
252-3).
Lorsque le logement fait l‟objet d‟un droit au bail, l‟époux se verra attribuer le bail d‟habitation par
le juge. Pour éviter tous conflits entre les époux, le juge devra préciser lequel sera le débiteur du
paiement des loyers et des charges.
Mais cette précision ne concerne que les rapports entre époux : le divorce n‟étant pas encore
prononcé, la solidarité relative au paiement des loyers conformément à l‟article 220 du Code civil
est maintenue et le sera jusqu‟à ce que le divorce soit opposable aux tiers (cf article 262 du code
civil). Le bailleur impayé peut donc toujours demander le paiement à l‟autre époux et saisir ses
biens.
Concernant le caractère onéreux ou gratuit de l‟attribution, celui-ci doit être fixé par le juge que le
logement fasse l‟objet d‟un droit de propriété ou d‟un droit au bail. Il s‟agit d‟une nouveauté
instaurée par la loi de 2004. Avant cette loi, les juges ne précisaient pas toujours si l‟époux
bénéficiaire était redevable d‟une indemnité d‟occupation, ce silence plaçait le notaire dans une
situation complexe. Par exemple, le notaire se retrouvait face à des ordonnances de non conciliation
qui énonçaient simplement « attribuons à Madame (ou Monsieur) la jouissance du logement
familial ». Certes, la Cour de cassation estimait que la jouissance avait été concédée forcément à
titre onéreux dès lors que « les termes de l‟ordonnance de non conciliation ne permettent pas de
retenir qu‟elle a été attribuée à titre gratuit » (Civ 1, 25 juin 2002). Mais, cette solution a été
critiquée par la doctrine car le maintien du devoir de secours pendant la procédure est un argument
fort pour admettre la jouissance gratuite. De plus, la longueur de la procédure faisait que le
bénéficiaire de l‟attribution devait des sommes très importantes à son ex conjoint lors des
opérations de liquidations et de partage.
Depuis la loi de 2004, la tâche du notaire liquidateur se trouve simplifiée et il n‟aura plus à
interpréter les dispositions de l‟ordonnance de non conciliation pour déterminer le caractère gratuit
ou non de l‟attribution.
Lors du prononcé du divorce, le sort du logement diffère selon qu‟il fasse l‟objet d‟un bail ou d‟un
droit de propriété.
Lorsque le logement est loué, le juge peut, en vertu de l‟article 1751 du Code civil et à défaut
d‟accord des époux, attribuer le droit au bail à l‟un d‟eux « en considération des intérêts sociaux et
familiaux en cause ». Ces intérêts sont laissés à l‟appréciation souveraine des juges du fond. Le
contrat de bail se poursuit avec un seul époux sans que le bailleur ne puisse s‟y opposer. Ainsi, le
bailleur peut être placé de ce fait dans une situation moins favorable car, lorsque le divorce lui
deviendra opposable (cf article 262), il ne pourra plus invoquer la solidarité des dettes ménagères
(article 220) alors que la solvabilité du locataire restant peut être altérée.
Quant au logement faisant l‟objet d‟un droit de propriété, le juge peut l‟attribuer de plusieurs
manières.
- Tout d‟abord, le juge peut concéder à bail à un époux le logement de la famille qui appartient en
propre ou personnellement à l‟autre époux selon l‟article 285-1 du code civil.
L‟article 285-1 du code civil qui prévoit cette possibilité énonce les conditions de ce bail forcé.
L‟époux intéressé doit former une demande en justice pendant l‟instance en divorce.
Le logement doit être un bien propre ou personnel à l‟un des époux et les juges du fond rappellent
constamment et avec fermeté que le bail forcé ne peut pas s‟appliquer lorsque le logement
appartient en commun ou en indivision aux deux époux.
Mais surtout, le bail forcé n‟est possible qu‟en faveur du conjoint qui exerce seul ou en commun
l‟autorité parentale sur un ou plusieurs de leurs enfants lorsque ceux-ci résident habituellement dans
ce logement et que leur intérêt le commande.
Le législateur a voulu que le bail forcé soit une modalité d‟attribution du logement seulement
lorsqu‟il y a des enfants mineurs comme le montre la référence à l‟autorité parentale. Par l‟emploi
des mots « leurs enfants », la doctrine penche vers une interprétation extensive du texte qui
permettrait de prendre en considération les familles recomposées qui augmentent de plus en plus.
Ainsi, le souci d‟assurer la permanence du lieu de vie des enfants semble primer sur le droit de
propriété d‟un époux qui se voit contraint d‟accorder un bail à son ex conjoint. En effet, cette
disposition apparaît comme une protection pour les enfants qui bénéficient par le biais de leur
représentant légal d‟un maintien dans le logement. Cependant, ce bail forcé est peu utilisé par les
juges et certains auteurs ont proposé de le supprimer. En effet, celui-ci présente l‟inconvénient de
mettre les ex conjoints dans un lien financier qui prend la forme de versements périodiques alors
que l‟objectif est de limiter le contentieux de l‟après divorce.
- Par ailleurs, la présence d‟enfant peut également avoir une incidence sur l‟attribution du logement
lorsque celui-ci appartient à l‟époux débiteur d‟une pension alimentaire en faveur de cet enfant. En
effet, selon l‟article 373-2-2 dernier alinéa du code civil cette pension alimentaire peut être
acquittée sous la forme d‟un droit d‟usage et d‟habitation qui peut être accordé par le juge sur ce
logement.
- L‟attribution du logement familial peut être également obtenu en tant que prestation
compensatoire. En effet, en vertu de l‟article 274 du code civil, le juge peut attribuer des biens en
propriété, ou un droit temporaire ou viager d‟usage et d‟habitation, ou d‟usufruit. Mais ici, l‟objectif
de cette attribution sera de compenser les disparités nées de la rupture du mariage.
Le jugement va opérer cession forcée de la pleine propriété et va s‟imposer au débiteur sous la seule
réserve des biens qu‟il avait reçus par succession ou donation. En effet, dans ce dernier cas, l‟accord
du débiteur sera exigé.
Lorsque la prestation compensatoire est consentie par l‟abandon de l‟usufruit du logement familial
ou prend la forme d‟un droit d‟usage et d‟habitation, celui-ci peut être limité dans le temps. Mais,
en l‟absence de précision quant à la durée, celui-ci est nécessairement fixé pour la durée de vie de
l‟attributaire (notamment Civ 1, 12 novembre 1998).
1. L’attribution préférentielle
L‟attribution préférentielle est la mesure par laquelle la loi soustrait un bien indivis aux aléas du
partage pour l‟attribuer à un indivisaire en raison de l‟importance particulière que ce bien présente
pour lui. Cette mesure s‟applique tant en cas de décès que lors d‟un divorce.
L‟attribution préférentielle du logement en cas de décès est prévue à article 831-2 alinéa 1 du code
civil qui énonce que le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut demander l'attribution
préférentielle du logement familial et du mobilier le garnissant. Il faut entendre par logement
familial, ici et tout au long de l‟exposé, le logement qu‟occupait effectivement le conjoint survivant
à titre d‟habitation principale. Ainsi, on ne s‟attachera qu‟à l‟hypothèse où le logement effectif du
conjoint coïncide avec le logement familial.
Que faut-il entendre par conjoint survivant? Le conjoint survivant est le conjoint successible défini
à l‟article 732 du code civil, c‟est-à-dire, le conjoint non divorcé du défunt : pour lui, l‟attribution
préférentielle est de droit selon l‟article 831-3 du code civil. Le juge, suite à un désaccord entre les
copartageants ou à une pluralité de demandes, doit donc donner préférence au conjoint survivant. Il
n‟a pas le pouvoir d‟apprécier l‟opportunité de l‟attribution. Il a cependant un rôle dans la mesure
où il va contrôler que celui-ci remplisse bien les conditions légales nécessaires.
L‟attribution préférentielle n‟est cependant pas réservée au conjoint survivant, elle s‟applique aussi
« à tout héritier appelé à succéder en vertu de la loi, qu‟il soit copropriétaire en pleine propritété ou
en nue-propriété. » et « à l‟héritier ayant une vocation universelle ou à titre universel à la succession
en vertu d‟un testament ou d‟une institution contractuelle » : cf. article 833 du code civil et la
jurisprudence citée sous ce texte.
La jurisprudence a admis que l‟attribution préférentielle peut être demandée dans le partage
d‟indivisions de nature familiale, même si cette indivision a pris naissance entre les époux par une
convention antérieure au mariage (Civ. 7 juin 1988) et même si elle est partagée pendant le mariage
(Civ. 1re 9 octobre 1990).
Mais la notion d‟indivision de nature familiale reste entendue restrictivement. L‟attribution
préférentielle ne peut pas jouer dans le cadre du partage de n‟importe quelle indivision
conventionnelle. Ainsi, l‟attribution préférentielle ne peut être demandée par un concubin (Civ. 1re 9
décembre 2003). La loi du 23 juin 2006 a toutefois élargi le domaine de l‟attribution préférentielle
en l‟ouvrant au partenaire d‟un Pacs. Cf. article 515-6 alinéa 1 qui prévoit que « Les dispositions
des articles 831, 831-2, 831-3 et 831-4 sont applicables entre partenaires d‟un pacte de solidarité en
cas de dissolution de celui-ci. Mais l‟alinéa 2 précise concernant le renvoi au premier alinéa de
l‟article 831-3 (qui prévoit l‟attribution préférentielle « de droit » au profit du conjoint survivant),
que ces dispositions ne sont applicables au partenaire survivant que si « le défunt l‟a expressément
prévu par testament ».
En cas de décès, d‟autres héritiers peuvent en bénéficier. A l‟origine, la loi réservait le bénéfice de
celle-ci au successeur légal par souci de conserver les biens dans la famille. Aujourd‟hui, tout
héritier ainsi que le gratifié ayant une vocation universelle à la succession ou à titre universel peut
aussi en bénéficier.
Pour ces héritiers et pour le conjoint divorcé, l‟attribution préférentielle n‟est jamais de droit. Elle
est facultative et c‟est au juge, au regard des intérêts en présence de statuer sur la demande.
Le demandeur doit dans tous les cas remplir les conditions légales nécessaires pour se voir attribuer
le logement.
Tout d‟abord, il doit être titulaire de droits en propriété ou en nue-propriété sur le logement et non
en usufruit.
L‟attribution préférentielle, lorsqu‟elle n‟est pas de droit, suppose que le bien soit utile pour le
demandeur. Sur cette question, un contentieux est plusieurs fois apparu. Il s‟agissait de savoir si
l‟attribution préférentielle pouvait être écartée ou réduite au motif que l‟immeuble convoité excédait
les besoins de l‟héritier. Dans un arrêt du 9 juillet 1980, la première chambre civile de la Cour de
cassation n‟a pas fait droit à une telle demande au motif que l‟ancien article 832 du code civil
n‟exige pas «que le local corresponde aux besoins normaux du logement du demandeur en
attribution». Dans un arrêt du 24 mars 1993, la première chambre civile a rappelé cette règle tout en
précisant que cet article n‟autorise pas pour autant l‟attribution de locaux distincts de ceux qu‟habite
le demandeur.
L‟attribution préférentielle peut avoir pour objet la propriété ou le droit au bail du local
d‟habitation.
Si le logement est assuré par un droit de propriété, une demande d‟attribution préférentielle est
toujours possible dans les conditions légales. Jusqu‟au partage définitif, le bien demeure cependant
indivis entre les cohéritiers.
L‟attribution préférentielle ne doit pas rompre l‟égalité en valeur dans le partage. Si la valeur du
logement familial est supérieure à ce que l‟attributaire reçoit, une soulte est due aux cohéritiers.
Selon l‟article 832-4 du code civil, sauf accord amiable entre les copartageants, la soulte est payable
comptant. Toutefois, l‟article précise que le conjoint survivant peut exiger des délais de paiement ne
pouvant excéder dix ans, à concurrence de la moitié de la soulte. En cas de vente de la totalité des
biens, la fraction de la soulte restant due devient immédiatement exigible. En cas de vente partielle,
le produit de ces ventes est versé aux copartageants et imputé sur la fraction de la soulte encore
due.
Une autre possibilité est offerte au conjoint, celle du maintien judiciaire du logement familial dans
l‟indivision.
Cette mesure est prévue aux articles 821-1 et suivants du code civil. Elle permet à tout indivisaire
que le partage exposerait au risque de devoir déménager et qui ne dispose pas des fonds nécessaires
au paiement de la soulte à laquelle l‟obligerait une attribution préférentielle, de demander au juge de
différer ce partage en ordonnant le maintien du local dans l‟indivision.
Il s‟agit d‟une mesure grave en ce qu‟elle conduit à un blocage du partage mais elle n‟est que
provisoire. En effet, celle-ci ne peut être prononcée que pour 5 ans maximum. Elle peut cependant
être renouvelée jusqu‟au décès du conjoint ou jusqu‟à la majorité du plus jeune des enfants selon
l‟article 823 du code civil.
Le maintien dans l'indivision ne s'applique qu'aux seules indivisions ayant une origine successorale.
Il n‟est jamais de droit et c‟est au juge, en fonction des intérêts en présence, de le prononcer à la
demande d‟un des indivisaires.
L‟indivisaire qui va occuper le logement familial pendant le maintien dans l‟indivision devra à
l‟indivision une indemnité d‟occupation.
Si le défunt laisse un ou plusieurs descendants mineurs, le maintien dans l'indivision peut être
demandé, soit par le conjoint survivant, soit par tout héritier, soit par le représentant légal des
mineurs selon l‟article 822 du code civil.
À défaut de descendants mineurs, le maintien de l'indivision ne peut être demandé que par le
conjoint survivant et à la condition qu'il ait été avant le décès ou soit devenu du fait du décès,
copropriétaire du local d'habitation. De plus, le conjoint doit avoir résidé dans les lieux à l'époque
du décès.
Le maintien judiciaire dans l‟indivision n‟est qu‟une mesure provisoire et l‟attribution préférentielle
du logement familial est une mesure coûteuse en terme de soulte. L‟attribution du logement familial
ne passe pas nécessairement par une accession à la propriété, en effet, le conjoint bénéficie
aujourd‟hui par l‟effet de la loi, de droits légaux sur le logement familial.
Depuis la loi du 3 décembre 2001, le conjoint survivant a vu ses droits successoraux se renforcer. Il
dispose notamment de deux nouveaux droits destinés à lui assurer la jouissance du logement. Il
bénéficie d‟un droit temporaire d‟un an d‟occupation gratuite (1) et d‟un droit viager d‟usage et
d‟habitation du logement (2). Ces deux droits, bien que portant tous deux sur le logement du
conjoint et le mobilier, compris dans la succesion, le garnissant, sont très différents. Il faut souligner
qu‟il ne s‟agit pas forcément du logement familial car le législateur protège ici le logement
qu‟occupait effectivement le conjoint survivant à titre d‟habitation principale au moment du décès
et que ces droits ne recouvrent pas l‟hypothèse où le logement familial est détenu au travers de parts
de SCI.
Un droit de jouissance gratuite d‟un an raire du logement est prévu pour le conjoint survivant à
l‟article 763 du code civil.
Le bénéficiaire de ce droit est le conjoint successible. Il n‟y a pas lieu de rechercher si le conjoint a
ou non la qualité d'héritier, la qualité d'époux étant suffisante. Il ne peut donc pas en bénéficier si le
divorce avait été prononcé mais, en revanche, peu importe si les époux étaient séparés de fait. Le
conjoint en bénéficie de plein droit et n‟a donc pas à en demander le bénéfice. Encore faut-il qu‟il
en soit informé et il appartient au notaire d‟y veiller.
Cet article distingue le logement qui était la propriété des époux ou qui dépendait totalement de la
succession, et le logement assuré au moyen d‟un bail à loyer ou celui appartenant pour partie
indivise au défunt (cf. ajout loi de 2006).
Sont concernés les logements qui ont la qualité de bien propre ou bien personnel au défunt, ainsi
que les biens communs et les bien indivis à condition que les époux soient les deux seuls
indivisaires. Le conjoint pourra y demeurer sans avoir à payer d‟indemnité d‟occupation.
- Si le logement était loué, ou s‟il appartenait pour partie indivise au défunt, le conjoint
survivant peut rester gratuitement dans les lieux. Le législateur a prévu le remboursement par la
succession des loyers ou de l‟indemnité d‟occupation acquittés par le conjoint. L'alinéa 2 de l'article
763 n'énonce que la prise en charge des loyers ou de l‟indemnité d‟occupation, par conséquent on
peut penser que les charges locatives, la taxe d‟habitation ainsi que toutes les charges résultant de
l‟occupation sont exclues.
En tant que charge successorale, ce n'est pas un droit dans la succession mais un droit contre la
succession. Le conjoint survivant a donc la qualité de créancier et jouit des mêmes prérogatives que
les autres créanciers successoraux. Ce droit est inscrit au passif successoral.
L'alinéa 3 de l'article 763 précise en outre, que ces droits "sont réputés effets directs du mariage et
non droits successoraux". Ils n'entrent donc pas dans la vocation successorale du conjoint survivant
et ne peuvent, par conséquent, pas faire l'objet d'une action en réduction pour atteinte à la réserve.
Le droit temporaire au logement a une durée limitée à un an à compter du décès. Le dernier alinéa
précise que ce texte est d‟ordre public. Le conjoint survivant ne peut donc en être privé par
testament ou par une convention. En revanche, le conjoint survivant est libre de renoncer à exercer
son droit après le décès en quittant les lieux ou en résiliant le bail.
A la fin de cette période de douze mois, le conjoint survivant peut bénéficier, s‟il remplit les
conditions prévues par la loi, d‟un droit viager d‟usage et d‟habitation sur ce même logement.
Le droit viager d‟usage et d‟habitation est prévu aux articles 764 et suivants du code civil. Il vient
comme un prolongement du droit temporaire au logement.
Le droit d‟usage (des meubles) et d'habitation (du logement) est un droit réel (diminutif de
l‟usufruit) et non un simple droit de jouissance. Il est régi par les articles 625 et suivants du Code
civil. Son titulaire ne peut ni céder ni louer son droit à un autre.
Selon l‟article 765-2, lorsque son logement faisait l'objet d'un bail à loyer, le conjoint survivant
bénéficie alors seulement du droit d'usage sur le mobilier, compris dans la succession, garnissant ce
logement.
Pour en bénéficier, le conjoint doit manifester sa volonté de façon expresse ou tacite dans un délai
d'un an à compter du décès. La demande du conjoint emporte ainsi acceptation de la succession.
Mais à l‟inverse l'acceptation de la succession n‟est pas considérée comme une demande tacite à
bénéficier des droits d'habitation et d'usage, la loi exigeant une demande spécifique.
S‟il en fait la demande, le conjoint survivant va donc pouvoir se maintenir gratuitement dans les
lieux en vertu de ce droit réel que lui accorde l‟article 767.
En principe (cf. article 631 du cide civil) le bénéficiaire d‟un droit d‟usage et d‟habitation ne peut
pas louer le logement à un tiers. Mais ici le législateur apporte une exception lorsque, en raison de
sa situation (maladie, vieillesse), ce logement n'est plus adapté à ses besoins (article 764 alinéa 5) et
que cela lui permettrait de dégager les ressources nécessaires à de nouvelles conditions
d'hébergement (maison médicalisée ou maison de retraite).
Afin de protéger les droits des héritiers, le législateur ne lui permet cependant pas de recourir à
n'importe quel type de bail. Le bail commercial et le bail rural sont exclus, en raison des contraintes
qu'ils imposent, sauf disposition contraire du de cujus. Seul un bail d'habitation peut être conclu.
Ce droit d‟usage et d‟habitation du logement familial est viager. Cela signifie qu‟en principe le
conjoint survivant peut l‟exercer jusqu‟à sa mort.
Mais, ces droits peuvent prendre fin autrement. En effet, Ils s'éteignent par consolidation (le
conjoint acquiert le bien qu'il occupe ou se le voit attribuer aux termes du partage successoral) ainsi
qu'en cas de perte totale du bien grevé de ces droits. L‟abus de jouissance pour défaut d'entretien est
également une cause de déchéance. Enfin, le conjoint peut renoncer à ses droits, mais cette
renonciation doit être expresse. Le non-usage personnel d'un droit d'usage et d'habitation n'entraîne
en effet pas une renonciation à ce droit.
Le plus souvent les héritiers propriétaires du logement grevé de ce droit d‟habitation vont devoir
attendre le décès du conjoint pour pourvoir récupérer la jouissance du logement.
L‟article 766 du code civil prévoit cependant la faculté pour les héritiers ou pour le conjoint de
demander la conversion du droit viager au logement en rente viagère ou en capital. Cette demande
doit être amiable. En présence d'un mineur ou d'un majeur protégé, l'alinéa 2 de l'article 766 exige
que la convention soit autorisée par le juge des tutelles.
Les droits d'usage et d'habitation sont recueillis dans le cadre de la succession et leur valeur
s'impute sur la valeur des droits successoraux recueillis par le conjoint. Si la valeur de ces droits est
inférieure à celle de la quote-part en propriété qu‟il reçoit, le conjoint a la possibilité de réclamer le
complément sur les biens existants.
Le législateur a prévu que la valeur des droits d'habitation et d'usage est de 60 % de la valeur de
l'usufruit déterminée conformément au I de l‟article 669 du CGI".
- En revanche, le droit viager n‟est pas d‟ordre public selon l‟aliéna 1er de l‟article 764
du code civil. Un testament authentique établi par le défunt peut priver le conjoint survivant de ce
droit. La présence de deux notaires ou d‟un notaire et de deux témoins est requise et permet au
testateur d‟apprécier la gravité de son acte. Le contenu du testament authentique dépend des droits
du conjoint survivant dans la succession et de la volonté du testateur.
- Si le conjoint survivant a vocation à recevoir l'usufruit des biens existants, ses droits sont absorbés
par l'usufruit universel. Pour le priver de tout droit sur ce logement, le testateur doit d'une part le
priver de son droit viager, d'autre part aménager son usufruit de façon à ce qu'il ne porte pas sur cet
immeuble.
- Si le conjoint a vocation à recevoir la propriété du tout, ses droits sont absorbés par la propriété du
tout, ce qui rend inefficace, là aussi, une simple stipulation privative de ce droit viager.
Mais est ce que l‟époux peut demander l‟attribution préférentielle qui lui permettra ainsi de
contourner cette privation ? Autrement dit, est ce que la reconnaissance de l‟attribution
préférentielle de droit prévaut sur les dispositions testamentaires ? Certains auteurs s‟attachent à la
volonté du législateur d‟assurer la sécurité successorale du conjoint sur le logement pour affirmer
que la privation du droit viager n‟est pas un obstacle à l‟attribution préférentielle du logement au
conjoint. Ainsi, ici l‟attribution préférentielle de droit peut être un moyen pour le conjoint de se voir
attribuer le logement alors même que le défunt en a disposé autrement.
Que se passe-t-il lorsque le défunt a légué à un tiers le logement familial ?
- D‟abord, concernant le droit temporaire, étant un droit d‟ordre public, le legs est insuffisant pour
écarter ce droit.
- Ensuite, s‟agissant du droit viager, il semble que le legs ne soit pas suffisant car la loi prévoit que
la privation de ce droit nécessite une exclusion expresse dans un acte authentique. Mais le legs fait à
un tiers, même s‟il résulte d‟un testament olographe, reste valable. Le conjoint ne pourra pas être
privé de son droit viager par ce testament et le tiers devra attendre le décès du conjoint survivant
pour récupérer le bien. Mais, il peut arriver que le tiers bénéficiaire du legs meure avant le conjoint
et cette situation peut poser plusieurs questions en pratique. Il est exclu que le conjoint puisse lui-
même léguer ce bien car il n‟en est pas propriétaire. Son droit réel s‟éteindra à son décès et ce sont
les héritiers du légataire qui, logiquement, retrouveront la pleine propriété du bien (jusque là grevé
de ce droit réel) qui appartenait au légataire.
S‟agissant du droit de retour des frères et sœurs, une réponse ministérielle du 14 novembre
2006 a estimé que ce droit n‟était pas d‟ordre public et que le droit de retour ne fait pas obstacle à
l‟exercice des droits qu‟a le conjoint sur le logement. Les collatéraux privilégiés ne peuvent
s‟opposer à ce que le conjoint exerce ces droits sur la totalité du logement.
Concernant le droit de retour des ascendants, celui-ci peut il faire échec aux droits légaux du
conjoint ? Le conjoint peut toujours bénéficier du droit temporaire, celui-ci étant d‟ordre public.
Quant au droit viager du conjoint, selon certains auteurs, il caractérise l‟impossibilité pour
l‟ascendant bénéficiaire d‟un droit de retour de l‟exercer en nature si ce bien fait partie de ceux
(logement ou meubles) sur lesquels le conjoint exerce son droit viager, mais ce droit de retour peut
s‟exercer en valeur. Cependant, l‟article 765 du code civil prévoit que le conjoint n'est pas tenu de
récompenser la succession à raison de l'excédent, lorsque la valeur de son droit viager est supérieure
à sa vocation successorale. Il semble donc que le droit de retour en valeur sera ineffectif. Sur le plan
pratique, ceci risque d'être source de contentieux.
Que se passe t il lorsque un droit de retour conventionnel porte sur un bien (logement ou
meubles) sur lequel le conjoint veut exercer son droit viager ?
Dans ce cas, par l‟effet de la clause du droit de retour, le logement de la famille va sortir du
patrimoine du défunt et ne figurera pas dans la succession. Ainsi, le conjoint ne pourra pas exercer
ses droits légaux sur ce bien.
L'article 215 alinéa 3 du code civil a prévu que les époux ne pouvaient disposer l'un sans l'autre des
droits par lesquels est assuré le logement familial. Mais cette indisponibilité n‟équivaut pas à une
insaisissabilité.
Cette saisie du logement peut intervenir avant le décès. Dans ce cas, le logement ne figure pas dans
les biens existants et ainsi les droits légaux du conjoint ne peuvent pas s‟exercer sur ce logement
saisi.
Que se passe t il lorsque les créanciers ont des droits sur le logement de la famille et qu‟ils se
manifestent après le décès ?
- S‟agissant du droit temporaire, le caractère d‟ordre public de ce droit devrait bloquer pendant
douze mois l‟action des créanciers saisissants.
- De même, le droit d‟usage et d‟habitation est selon les articles 631 et 634 du code civil, un droit
qui ne peut pas être cédé. Or, ceci emporte leur insaisissabilité. Ce caractère rend le droit viager du
conjoint opposable aux créanciers tant chirographaires qu'hypothécaires qui prétendraient saisir le
logement. Ainsi, le logement familial se trouve mieux défendu par l'article 764 après le décès qu'il
ne l'était pendant le mariage par l'article 215 alinéa 3.
Enfin, que se passe t il lorsque l‟attribution préférentielle du logement a été prononcée en faveur
d‟un héritier autre que le conjoint survivant, ce qui peut être le cas lorsque le conjoint ne sollicite
pas l‟attribution du bien ou s‟il ne rempli pas les conditions légales ? Le conjoint peut il toujours
exercer ses droits légaux sur le logement ?
L‟article 831-3 alinéa 2 du code civil prévoit que les « droits résultant de l‟attribution préférentielle
ne préjudicient pas aux droits viagers d‟habitation et d‟usage que le conjoint peut exercer en vertu
de l‟article 764 du code civil ». Ainsi, l‟attribution préférentielle du logement à un autre héritier
n‟est pas une limite au droit viager du conjoint.
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Droit d‟usage sur les meubles et droit d‟habitation du logement, ce n‟est pas un usufruit, c‟est un
diminutif de l‟usufruit. Le bénéficiaire de ce droit n‟a pas le droit de le mettre en location, sauf cas
exceptionnel ou le logement ne correspond plus à ses besoins, les loyers lui permettant de financer
son nouveau logement (dans l‟idée du législateur : maison de retraite)