Essai de Grammaire Wallonne

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Harvard College Library.


FROM THE

MARY OSGOOD LEGACY .

" To purchase such books as shall be most


B needed for the College Library, so as
best to promote the objects
of the College."
Received
fAugust, 1896.
s
d
Taranto
PENSIF
BI
ESSAI DE GRAMMAIRE WALLONNE.

LE VERBE WALLON

DEVISE Voluntas !
(Extrait du Bulletin de la Société liégeoise de littérature wallonne, t . XIX.)
:
Q

Julien DELAITE.

ESSAI

DE

GRAMMAIRE WALLONNE

B.L. I.

LE VERBE WALLON

DEVISE Voluntas !

MÉDAILLE DE VERMEIL.
..........

LIEGE
IMPRIMERIE H. VAILLANT- CARMANNE
8, Rue St-Adalbert, 8.

1892
6226.72

D COL
VAR LEG
HAR E

AUG 175-4096

LIBRARY

Mary Asgood Paind

1
'n
PRÉFACE .

Le dialecte wallon a pris une extension considérable.


Il est étudié scientifiquement, son histoire littéraire est
brillante, et de très nombreux écrivains ne cessent de le
cultiver avec beaucoup de succès .
Ce florissement, cet épanouissement remarquable permettent
de lui octroyer le nom de langue.
Ce n'est plus un dialecte, en effet, au sens restreint du mot.
Une fois sa grammaire établie sur de solides fondements , une
fois son orthographe uniformisée , plus rien ne s'opposera à lui
donner ce nom de langue qu'il mérite actuellement déjà
par le nombre et l'excellence des productions qu'il provoque.
La Société liégeoise de littérature wallonne, qui s'est, depuis
sa fondation, proposé de doter le wallon d'une grammaire et
d'une orthographe, a mis au concours une question propre
à répondre au premier de ces désiderata.
La question est ainsi posée : " Tableau et théorie de la
conjugaison wallonne. ,, Le verbe est une des parties fonda
mentales de la grammaire. Pour répondre à cette question,
l'auteur a d'abord exposé, dans le présent travail, quelques
notions générales sur la conjugaison wallonne, et sur les phé
nomènes de simplification et d'analogie auxquels les langages
parlés ont surtout donné lieu.
Il s'est attaché à faire ressortir les traits analogiques ou
6

différentiels du wallon et du français, par la comparaison


raisonnée de ces deux langues.
Il a réparti les verbes wallons en quatre conjugaisons , dont
la quatrième, proposée par lui, et bien qu'artificielle, semble
devoir rendre quelques services.
Il a ensuite repris séparément chaque temps de la conju
gaison et il en a expliqué étymologiquement toutes les formes
flexionnelles caractéristiques .
On verra par ce travail que la grammaire wallonne n'est pas
si compliquée que l'on se plairait à le croire ; et que la
réalisation pratique d'une telle grammaire est dans les choses
possibles.
Dans les dialectes parlés, des règles phonétiques constantes
ont présidé à la formation des mots, et des règles générales de
classification ont pu se dessiner.
Si le dédale est un peu plus compliqué que dans une langue
écrite, il est cependant possible, avec un peu d'attention et de
bonne volonté, d'y retrouver un fil conducteur.
L'auteur espère que cet essai de grammaire sera de quelque
utilité aux nombreux écrivains wallons .
Il espère aussi que les professeurs et instituteurs pourront
y glaner quelques notes utiles à leurs élèves.
Enfin il ose croire que son travail viendra en aide aux
savants qui s'occupent d'études de philologie comparée.
Mais contribuât-il seulement à prouver que le wallon est
digne de l'immense intérêt dont ses adeptes l'honorent, que
l'auteur se considérerait déjà très heureux du résultat .

N.-B. Le présent travail a été légèrement remanié d'après les


observations du jury.
OUVRAGES CONSULTÉS

BAILLEUX et DEJARDIN. Choix de chansons et poésies wal


lonnes , etc.
Bulletins et Annuaires de la Société
liégeoise de littérature wallonne , coll .
complète.
G.-F. BURGUY. Grammaire de la langue d'Oil. 3 vol.
1856.
H. CHAVÉE. Français- Wallon , parallèle linguistique.
J. DELBŒUF et L. ROERSCH. Éléments de grammaire française. 1889 .
F. DIEZ Grammaire des langues romanes , trad .
Marcel Fatis et G. Paris.
GRANDGAGNAGE et SCHELLER . Dictionnaire wallon et autres diction
naires wallons .
HORNIG . Ostfranzösische Studien.
Littérature wallonne ancienne et mo
derne.
L. MICHEELS . Grammaire élémentaire liégeoise. 1863 .
RENARD (L'abbé). Lès avinteûre dè Jean d' Nivelle, èl fils dè
s' pére.
Revue des patois gallo-romains , par J.
Gillieron et l'abbé Rousselot .
A. SCHELLER . Dictionnaire d'étymologic française.
-8

A. SCHELLER . Exposé des lois qui régissent la transfor


mation française des mots latins. 1875.
A. SCHELLER . Mémoire sur la conjugaison française.
Extrait des mémoires couronnés et
autres mémoires , t. XIX .
J.-J. STURZINGER . Remarks on the Conjugation of the
wallonian Dialect. Extrait de Tran
sactions of the Modern Language
association America. 1884-85 , vol . I ,
p. 204.
Aug. VIERSET. Les poètes Namurois.
Germain wallon , essai linguistique .
M. WILMOTTE. Etude de dialectologie wallonne. Extrait
de Romania, t. XVII , p . 542 .
AVANT- PROPOS .

ORTHOGRAPHE .

Nous avons adopté, pour l'explication des formes verbales


l'orthographe phonétique , qui nous paraît très commode et très
claire , quand il s'agit d'un patois sans règles , ni documents
écrits suffisants . Nous donnons ci - après cette orthographe
dont les signes sont empruntés en grande partie à l'excellente
Revue des patois Gallo-Romains de J. Gillieron et l'abbé Rous
selot . Nous avons supprimé certains caractères , inutiles en
wallon, et nous en avons proposé d'autres .
Nous emploierons cette orthographe partout où la compré
hension du texte l'exigera . Dans les autres cas, nous nous
servirons de l'orthographe analogique .

Cette orthographe , proposée par nous à l'habile imprimeur


M. Vaillant-Carmanne, a été adoptée dans les Mélanges wallons,
travail très important et très intéressant publié par une réunion
de chercheurs .
ORTHOGRAPHE PHONÉTIQUE WALLONNE .

VOYELLES .

1. PURES.
2818

a dans wall . papa , dans franç. papa.


ā =â > diâle (diable), châle.
ĕ è » vète, D verte.
è = ê (ai) » taid ( laid), même .
10 10 12 12

୪ = é lét (lit), » thé.


é é >> mére (mère), >> chantée .
- mi (moi), fourmi.
>> \\pîd (pied) , >>> lire.
ŏ pot, D pot.
ò ou å = â (dial. liég . ) âbe (arbre), mort.
ŏ = au >>> ~sau (soûl) , >>> chaud .
Ó = Ô >>> sort (sorte), clore.
જૅ > bu, bu.
π sûr, sûr.
ŭ -ou piou, pou .
9

ū = οὐ joû, D jour.
œ = (eu) » -leune (lune), >> le.
4848

œ(¹) eu D meur (mur), heure.


= eû feu.
feû,
= eû -meûr , ?
2. NASALES .
18
18

ã = an tant, tant .
ã an manche, manche.
ë in matin, D matin .
& - în (ê) » -même, D pingre.
ŏ = on D pont, pont.
ŏ on songue (sang), oncle.
œ - un -jeun, Ꭰ jeun .
8
:

(1) N'existe pas à Liége , mais bien dans certains villages à déterminer.
12

= un » li tunque (le tiens, ra punch (?)


8
:

rement employė) >

CONSONNES .

Wallon liégeois. Français.


Labiales , b, p bo, pã bon , pain .
Linguo
Explosives.
dentales, d, t di, to dent, tout .
Gutturales, k, g (') kwặt, got quatre, goutte.
Labiales, m mo mot.
Linguo
Nasales. dentales, n not note.
Palatales , n kāpǎn campagne .
Velère , D dintě(sonner) ding (di ding) .
Linguale, 1, 1 lo, gòlotě lot , paille .
Liquides. (orner). (l mouillé)
Velère , r ră rat.
Labiales, w, f, v pwě, fò, vò poids , faux ,
val.
riproe, jep reproche, jar
e,j (herbe) din .
Linguales,
te (2) , (3) teãtě (chanter) italien : civi
Fricatives. Jey (noix) tate, giorno .
Dentales , S, % so, zŭwòf sot, zouave .
Palatales, y mey (mille) pied (ou bien en
core ill complè
tement mouillé) .
Laryngales, hh, (*) hòy, dìhă (dit)

(¹ ) g est toujours guttural .


(2) te = ci, e italien . Il se prononce à peu près comme
tch français , adouci et fondu en une seule émission .
(³) j& = g + e, i italien . Il se prononce à peu près comme
dj, mais adouci et fondu en une seule émission .
(4) h est très fortement aspiré. Je propose de prendre le
signe f (y retourné) pour l'aspiration moins forte de dis hid,
(franç . hache, etc. )
CHAPITRE PREMIER.

Modes de SIMPLIFICATION DE LA CONJUGAISON WALLONNE

On sait que le français est la langue romane qui a le moins


étymologiquement emprunté de ses formes à la conjugaison
latine . Les temps latins disparus sont le plus que parfait de
l'indicatif, les deux futurs , l'imparfait et le parfait du subjonctif,
le passé de l'infinitif, le futur du participe (le supin) ( ' ) . Soit
huit temps sur les dix- sept du latin .
Le wallon est exactement dans le même cas.
En français , la simplification de la conjugaison porte sur
trois groupes de phénomènes bien tranchés :
1º Les terminaisons personnelles sont uniformisées , du moins
quant à la prononciation ; je chante, tu chantes, il chante, que
je chante, etc.; je chantais , tu chantais, il chantait, se pro
noncent respectivement de la même façon .
2º Les trois conjugaisons tendent à se réduire à une seule .
Ex.: je chant-ais , je vend - ais , je finiss -ais , nous chant -ons,
nous vend-ons, nous finiss -ons, etc.
3° La flexion forte se restreint au fur et à mesure du
développement de la langue . Diez (2) signale , en effet , quatre
vingt verbes forts environ en ancien français , tandis qu'il n'en
donne que quarante pour le français moderne.
J. Stürzinger (3) a rappelé ces trois modes de simplification
dans ses remarques sur la conjugaison du dialecte wallon.

( ¹ ) V. SCHELLER, etc. Mémoire sur la conjugaison française, p . 13.


(2) Graminaire de la langue romane.
(5) Loc. cit.
2
- 14 -

Mais cette simplification est plus caractéristique et plus


accusée encore dans ce dernier dialecte.
Il doit en être nécessairement ainsi . Car ce dialecte n'a pas
eu, comme le français, de codes grammaticaux , immobilisant
pour ainsi dire certaines formes pour un laps de temps plus ou
moins long . Abandonné à lui - même , sans règles écrites et fixes ,
le wallon a évolué plus rapidement , et , dans ses avatars
successifs et libres de toute contrainte , il a été un terrain plus
favorable à cette tendance de simplification observée dans
toutes les langues .
Nous avons dressé un tableau de conjugaison , permettant de
saisir d'un simple coup d'œil les progrès de la simplification
dans le wallon comparativement aux progrès de la simpli
fication française . Nous avons naturellement employé la
notation phonétique , la seule capable de bien rendre notre
pensée .
Conjugaison.

Wallonne . Française . Wallonne . Française .

INDICATIF .

PRÉSENT . IMPARFAIT .
ISSI
11120901

ef, if
Deal

| |

ã yo
|

ī
| |

ye

FUTUR. PARFAIT .
4090

rě re é
|
|
8

rã rõ ām im
rě rě āt īt
ུ་
སྦེ

rõ èr īr

|།
- 15

SUBJONCTIF .

PRÉSENT . IMPARFAIT .
ǎh ǎs is

ā ī
ãs yo ǎhi ǎsyõ ìsyo
és yě ǎsyě isyě
ès

CONDITIONNEL . IMPÉRATIF .

PRÉSENT . PRÉSENT .
ro rè
ã
ě, ī
rī ryo INFINITIF .
ryě
ě, i, i é, ir, r

PARTICIPE .

PASSÉ . PRÉSENT .
Masc. ě, t, u, ĭ ě, ĭ, ŭ ã ã
Fém . èy, ey, ow | é, ī, ū

Remarques sur ce tableau.

Nous y comptons 43 désinences flexionnelles françaises et


33 wallonnes seulement ; soit donc 10 désinences de moins en
wallon.
Mais si nous examinons de plus près, nous voyons , qu'en
mettant de côté le parfait de l'indicatif, nous arrivons au
chiffre de 34 désinences françaises , et de 32 wallonnes .
D'où ce fait intéressant que la grande simplification de la
conjugaison wallonne consiste dans la réduction à une des
six formes flexionnelles du parfait de l'indicatif, en d'autres
termes dans la disparition progressive de ce temps . En effet,
16 -

les trois personnes du pluriel ont déjà disparu . Elles se con


fondent avec les mêmes formes de l'imparfait de l'indicatif.
En outre (et cette tendance se retrouve en français égale
ment) , le passé défini trouve un emploi plus fréquent dans la
bouche des Wallons, que le parfait de l'indicatif. C'est ainsi
que j'a stu s'emploiera mieux que ji fouri ou j'èsta ; j'a magnî
que ji magna; j'a rescontré que ji rèscontra, etc. , etc. ( En
français j'ai été, au lieu de je fus ; j'ai mangé au lieu de
je mangeai ; j'ai rencontré, au lieu de je rencontrai, etc.)
Il ne faut pas oublier qu'il s'agit surtout ici de la langue
parlée ; avec un peu d'attention , le fait s'observe facilement .
On peut aussi ramener à cette disparition du parfait l'ab
sence des verbes forts en wallon , absence qué Stürzinger (')
signale comme un mode de simplification (voir plus haut) .
En effet , il ne faut pas oublier que le parfait est, pour ainsi
dire , le seul temps qui permette de différencier les verbes
forts des verbes faibles (voir plus loin , chap . II ) .
Quant à la disparition des terminaisons personnelles , ce
tableau en montre également la tendance . Ex. au pluriel de
l'imparfait, les 3 pers . sing , et les 3 pers . plur . du subj . imp . ,
le plur . du conditionnel , le sing . du futur, etc.
Par contre, cette disparition est contrebalancée par la pré
sence de terminaisons spéciales là où le français a uniformisé .
Ex. plur . de l'indic. présent , plur . du futur , plur. du subj .
présent .
Ici pourra s'élever une objection : Que fait - on dans ce sys
tème des e muets et des consonnes terminales (s , t) de la flexion
française ?
La réponse à cette objection expliquera en même temps
pourquoi l'orthographe phonétique nous était indispensable .
C'est que, nous occupant scientifiquement d'un dialecte
sans règles fixes et sans orthographe établie , nous devons

(1) Loc. cit.


- 17 -

nécessairement travailler sur la langue parlée . Nous ne tablons


sur la langue écrite que lorsque la langue parlée nous fait défaut ,
par exemple lors des citations de vieilles formes recueillies
dans les anciens textes (chartres, etc. ) . Et encore, le grand
soin de la science philologique moderne est- il d'attribuer à ces
graphies anciennes la valeur phonétique qu'elle les suppose
avoir possédée et qui , dans bien des cas , est très difficile à
déterminer.
Or, en langage parlé , ni l'e muet, ni les consonnes finales
(s, t) ne se prononcent ; aussi la graphie phonétique omet - elle
ces lettres .
Pour nous résumer , nous admettrons donc que le fait de la
plus grande simplification de la conjugaison wallonne consiste
presqu'exclusivement dans l'immense résorption du parfait de
l'indicatif.
Cette résorption a eu pour contre- coup : 1º la disparition
des verbes dits forts , et 2° l'unification des trois conjugaisons.
Quant à la disparition des terminaisons personnelles , elle
est beaucoup moins forte que Stürzinger veut bien l'admettre ;
nous croyons même qu'elle n'existe pas .
En effet, nous devons écarter de notre statistique : 1° le
parfait, puisque c'est sur lui que se base notre mode de simpli
fication ; car, la résorption du parfait étant admise, comme
mode de simplification , la disparition de ses désinences person
nelles ne peut plus entrer en ligne de compte ;
2º l'imparfait du subjonctif, dont la simplification a suivi
celle du parfait .
En écartant ces deux temps , et en faisant le compte des
autres temps à flexion , nous avons 19 désinences personnelles
wallonnes et 16 françaises seulement . D'où l'on voit que les
désinences sont restées plus nombreuses en wallon , et que , par
conséquent, il n'y a pas à proprement parler , quant à elles , de
tendance à simplification plus accusée en wallon qu'en fran
çais .
:
CHAPITRE II .

DIVISION EN CONJUGAISONS .

En wallon , il n'est pas possible , comme dans les autres


langues romanes, de diviser les verbes en deux flexions, c'est
à-dire en flexion forte et en flexion faible .
On sait, en effet, que ce qui différencie ces deux flexions ,
c'est l'accent tonique qui tombe, au parfait de l'indicatif, sur la
terminaison (je chantai) dans la flexion faible , et sur le radical
(je pris) dans la forte.
Or, le wallon , comme on vient de le voir et comme on le verra
mieux encore plus loin , a simplifié le parfait au point de ne
lui laisser qu'une désinence personnelle, la même pour toutes
I
les conjugaisons .
Nous n'avons plus un seul parfait fort , même pour les verbes
auxiliaires aveûr et èsse, qui , à côté des formes ji fous (je fus)
et j'eus (j'eus) très rares , possèdent j'èsta et j'ava qui sont des
formes faibles .
Nous divisons les verbes wallons en quatre conjugaisons ,
différentes des conjugaisons françaises .
La première comprend deux classes : 1° les verbes en er
et 2° les verbes en î long. Les modèles sont chanter et magnî.
La seconde renferme les verbes en e muet . Nous la divisons
en deux classes également, suivant que les verbes ont ou n'ont
pas e muet à l'indicatif présent . Modèles : vinde (sans e) et batte
(avec e).
La troisième comprend les verbes en i bref. Nous y comptons
deux classes 1º La 3° conjugaison simple qui comprend elle
20 -

même deux subdivisions : a) les verbes qui ont un e muet au


présent de l'indicatif, modèle doirmi ; b) les verbes qui n'en ont
pas au même temps, modèle sinti . 2º La 3º conjugaison mixte
qui intercale ih entre le radical et la terminaison , modèle fini.
La quatrième conjugaison renferme les verbes dont l'infinitif
se termine par r ou re , terminaisons qui se prononcent de
même en wallon . Modèle : beûre.
1 Conjugaison . La première conjugaison wallonne com
prend les verbes qui proviennent de la première conjugaison
latine (en are).
Elle se subdivise , comme nous l'avons dit , en deux classes,
suivant que l'infinitif présent se terinine en er (ě) ou en î (ĩ) .
Ces deux classes , qui paraissent si tranchées , possèdent
cependant des affinités intimes provenant d'une identité d'ori
gine.
Remarquons d'abord que le phonème i wallon correspond
au phoneme ier français (cf. anc . franç . mangier, wallon magnî;
anc . franç . aidier, wall . aidi ; franç . mod . pommier, wall .
poumi; franç . mod . premier , wall . prumi, etc.) .
L'ancien français possédait même les deux formes à côté
l'une de l'autre eir ou er coexistent , pour le même mot , avec
ier. Le français moderne a perdu ier. Le wallon l'a conservé
sous forme de î.
Le vieux wallon possède des formes de transition . Ex . aidir,
à côté de aidier , laisir à côté des formes ordinaires guarder,
demandeir, demander ( ') . Je trouve même les formes intéres
santes, où la transition est des mieux marquées dans la moralité
de 1623 (*) : aydyî, spargnyî, waagnyî, louquyî.
Le phénomène dans son ensemble a été interprété par
Bartsch et Mussafia , qui ont formulé la loi suivante , connue
sous le nom de loi de Bartsch :

( ) M. WILMOTTE. Chartres liégeoises. Romania, t . XVII , p . 568. Chartre de 1236 .


(*) Bull. de la Soc. Liég. de Litt. wall. T. II .
- 21 -

aier (î wallon) se produit : 1° après c, ch, g, de même


qu'après l et n mouillées ; 2º après d , t, n , r, s , ss en tant que
la syllabe précédente contient un i ou une diphtongue formée
au moyen de cette voyelle . »
L. Micheels , dans sa grammaire wallonne , n'a pas su consta
ter l'identité de conjugaison des verbes en er et des verbes en î
long . Il a rattaché ceux - ci à la seconde conjugaison qu'il avait
établie d'après le français , et les a réunis aux verbes en i bref,
qui possèdent une tout autre origine .
Deuxième conjugaison . La deuxième conjugaison , en e
muet, correspond à la deuxième française en re (et à la 3º latine
en ĕre. ). On sait , en effet , qu'une règle générale en wallon veut
que a lorsqu'un mot se termine par e muet , précédé d'une ou
de plusieurs consonnes , la première seule se prononce ( ' ) . »
La syncope de l'r provient d'une paresse de prononciation , tout
simplement ; cette lettre réapparaît au futur (ji vindrè) qui
n'est, comme on sait, qu'un temps composé de l'infinitif et de
l'indicatif présent de l'auxiliaire avoir.
L'r terminal de l'infinitif, à la première conjugaison , ne se
prononce pas non plus . Le phénomène étant différent, nous.
en reparlerons au chapitre de l'infinitif.
Nous avons admis , pour cette conjugaison , une division
grammaticale en deux classes , suivant que les verbes qui lui
appartiennent ont ou n'ont pas d'e muet à l'indicatif présent .
--
Troisième conjugaison . La troisième conjugaison wal
lonne comprend les verbes en i bref. Ces verbes correspondent
à la seconde conjugaison française en ir, et proviennent de la
quatrième conjugaison latine en ire.
On la divise en deux classes .
Dans la première classe , troisième conjugaison simple , la
flexion s'ajoute directement au radical du verbe . (Ex .: doirmi,
ji doirm-éve.)

(' , J. DELBOEUF . Notes sur le Maye neur d'à Colas. Bull. Soc . Wall. 10e année
p. 63.
22

Nous l'avons subdivisée en deux , suivant qu'elle a ou non un


e muet à l'indicatif présent .
Dans la seconde classe , troisième conjugaison mixte , la
flexion se lie au radical au moyen de la syllabe intercalaire ih.
(Ex .: fini, ji fin-ih-éve.)
Cette syllabe représente la syllabe inchoative isc latine , d'où
elle provient . En français , isc latin a donné iss (je finissais) .
En wallon, h aspiré provient soit de s spirante (ss + pala
tale , ex. cantassem : chantahe) , soit de sc + voyelle (ex . sco
pare hover, scutella : hièle).
Dans le chapitre suivant, nous proposons une quatrième
conjugaison wallonne.
CHAPITRE III .

QUATRIÈME CONJUGAISON WALLONNE .

Répartition des verbes forts .

Parmi les verbes forts , pris surtout dans l'ancienne langue ,


où ils sont plus nombreux , quatre sont passés dans la première
conjugaison . Ce sont :
Fer (facere), affligî (affligere) , mouwer (movere) et viquer
(vivere , anc. franç. , vesqui et vescu au parfait ; franç . moderne
vécus).
Sont passés dans la seconde conjugaison directement du
latin , et en suivent toutes les règles :
Jonde (jungere) , mètte (mittere), ponde (pingere) , plainde
(plangere), prinde (prendere) , rèsponde (respondere) , distinde
(exstinguere), strinde (stringere) , crainde (tremere) , crèhe
(crescere) , kinohe ( cognoscere), parètte (parere) , ripahe (pas
cere) et toide (torquere) .
Déjà, d'ailleurs , en français moderne , sept de ces verbes
étaient devenus faibles ; ce sont :
Joindre, peindre, plaindre , répondre , éteindre , étreindre et
craindre .
D'autres verbes des secondes et troisièmes conjugaisons
latines étaient forts dans l'ancienne langue ; ils sont devenus
faibles en wallon . Mais au lieu de perdre l'r à l'infinitif, comme
les autres verbes wallons provenant de ces conjugaisons latines,
ils sont caractérisés par le fait de la persistance de cet r
à l'infinitif; chez eux , c'est la consonne finale du radical verbal
qui est tombée . Je reparlerai de ces verbes un peu plus
loin . Ce sont :
24 -

Clore (claudere) , dire (dicere) , dûre (ducere) ( ' ), rire


(ridere) , scrire (scribere) , distrûre (distruere ), beûre (bibere),
creûre (credere), lére (legere), plaire (placere), taire (tacere).
Le français moderne avait rendu faibles ... duire, écrire et
détruire.
Sont passés dans la 3 conjugaison faible les verbes suivants :
Tini(tenere), vini (venire ) , dimani ( manere) , qwèri (querere) ,
cori (currere), mori ( moriri) .
Restent les verbes qui composent la troisième conjugaison
en oir du français moderne , conjugaison admise dans l'ensei
gnement de la langue.
Nous avons dit plus haut que le français range ses verbes
en deux flexions , la flexion forte et la flexion faible .
Or, il se fait que les verbes en oir appartiennent tous à la
flexion forte.
Mais d'un autre côté , en wallon , la flexion forte a complè
tement disparu . Et les verbes wallons , correspondant aux
verbes français en oir , ne peuvent rentrer dans aucune des trois
conjugaisons signalées plus haut . Aussi nous proposons d'ad
mettre, en wallon , une quatrième conjugaison , faible néces
sairement, dans laquelle se rangeraient les verbes en eûr,
îr, ûr, oûr (franç oir) .
Nous proposons en outre de faire rentrer dans cette conju
gaison , les verbes en re, que nous avons signalés plus haut .
La quatrième conjugaison wallonne comprendrait donc les
verbes veûr (videre), assîr (sedere), chêr (chîr) (cadere), riçur
(... capere), diveûr (debere), aveur (habere), plour (pluere),
poleur (polere, posse ) , saveûr ou sèpeur (sapere) , soleur
(solere), valeur (valere), voleur (volere , velle) .
Ainsi que les verbes cités ci - dessus : clôre (clau lere) , dire
(dicere) , dûre (ducere), rire ( ridere) , scrire (scribere), distrûre
(distruere), beûre (bibere), creûre (credere) , lére (legere),
plaire (placere) , taire (tacere) .

(1) Exception (reproducere qui fait riprodui 3e conjugaison).


25 ―

Le wallon ne fait d'ailleurs pas de différence entre ces verbes


et les premiers . Il en a été de même en français , car c'est
plutôt une habitude graphique contractée très tôt , il est vrai ,
et non une différenciation consciente qui fait écrire à côté de
croire (vieux normand crere et aussi creer) , voir qui s'est
écrit d'ailleurs et qui s'écrit encore voire.
Cette quatrième conjugaison nous paraît donc devoir rendre
quelque service . Elle permet de rassembler des verbes qu'il
serait bien difficile de classer sans elle .
CHAPITRE IV .

TABLEAU DE LA CONJUGAISON . FORMATION DES TEMPS .


RÈGLES DE FLEXION . FORME INTERROGATIVE .

Conjugaison de l'auxiliaire aveur (avoir) .

INDICATIF .

PRÉSENT . PASSÉ INDÉFINI .

J'a. J'a aou (¹) .


T'a. T'a aou.
Il a. Il a aou .
Nos avans . Nos avans aou .
Vos avez . Vos avez
Is ont ou is avèt . Is ont

IMPARFAIT . PLUS -QUE- PARFAIT.

J'aveûs . J'aveus aou .


T'aveûs . T'aveus
Il aveût. Il aveut
Nos avis . Nos avis
Vos avîz . Vos avîz
Is avît ou avint . Il avît

PASSÉ DÉFINI . PASSÉ ANTÉRIEUR .

J'ava , j'eus (2) , j'euris . J'ava (3) aou .


T'ava, t'eus, t'euris . T'ava
Il ava , il eut , il eurit . Il ava
nos eurîs . Nos eurîs
vos eurîz . Vos eurîz
is eurît. Is eurît

(1 ) Le liégeois emploie presque toujours un st ou un intercalaire euphonique,


j'a-st-aou, j'aveus-st-aou↓ . Nous l'omettons partout pour ne pas embrouiller.
(2) Prononcer .
(3) Ou j'eus, j'euris.
―― 28 -

FUTUR. FUTUR ANTÉRIEUR .

J'ârè. J'ârè aou .


T'ârè. T'ârè
Il ârè . Il ârè -
Nos ârans . Nos ârans aou .
Vos ârez. Vos ârez -
Is âront. Il âront

SUBJONCTIF .

PRÉSENT . PARFAIT .

J'âye . J'âye aou .


Tâye . Taye
Il âye . Il âye -
Nos âyanse ou avanse . Nos âyanse ou avanse aou .
Vos âyésse ou avésse . Vos âyésse ou avésse
Is âyèsse ou avèsse. Il âyèsse ou avèsse

IMPARFAIT . PLUS -QUE- PARFAIT .

J'avahe , eurihe , avasse , ou J'avahe, etc. aou .


euhe.
T'avahe, eurihe, avasse, ou J'avahe, etc. aou .
euhe .
Il avahe , eurihe , avasse , ou Il avahe , etc. aou . aou .
euhe.
Nos avahîs , eurihîs , ou euhîs . Nos avahîs , etc. aou ...
Vos avahîz , eurihîz , ou euhiz . Vos avahîz , etc. aou .
Is avahît , eurihît , ou euhît . Is avahît, etc. aou .

CONDITIONNEL.

PRÉSENT . PASSÉ .

J'âreûs . J'âreûs aou .


T'âreûs . T'âreûs
Il âreût . Il âreût
Nos âris . Nos ârîs
Vos ârîz . Vos ârîz ---
Is ârît. Is ârît ―
29 -

IMPÉRATIF . INFINITIF . PARTICIPE.

PRÉSENT . PRÉSENT .
Aveur. Avant ou ayant.
Âye.
A
Ayans . PASSÉ . PASSÉ.
A
Ayîz. Aveur aou . Awou , avu , avou
ou oyou .

Conjugaison du verbe èsse (être).

INDICATIF .

PRÉSENT . PASSÉ INDÉFINI .

Ji sos. J'a slu.


T'ès . T'a
Il èst. (¹) Il a
Nos èstans . Nos avons stu .
Vos èstez : Vos avez
Is sont. Is ont -

IMPARFAIT . PLUS-QUE - PARFAIT .


J'èsteûs . J'aveûs stu .
T'èsteûs . T'aveûs
Il ésteût . Il aveût
Nos éstîs . Nos avis stu .
Vos èstîz . Vos avîz
Is èstît . Is avît -

PASSÉ DÉFINI . PASSÉ ANTÉRIEUR .

Ji fouris, fourus , fous ou èsta . J'euris stu .


Ti fouris , fourus , fous ou èsta . T'euris
I fourit, fourut, fout ou èsta . Il eurit
Nos fouris. Nos eurîs stu .
Vos fourîz . Vos eurîz
Is fourit (rarement fourivèt). Is eurît

( ' ) Nous écrivons : Il èst-è jardin, la prononciation du st euphonique étant suffisam


ment indiquée par le trait d'union.
3
- 30-

FUTUR. FUTUR ANTÉRIEUR .

Ji sèrè . J'ârè stu .


Ti sèrè . T'ârè
I sèrè . Il ârè -
Nos sèrans . Nos ârans stu .
Vos sèrez . Vos ârez
Is sèront . Is âront

SUBJONCTIF .

PRÉSENT. PASSÉ .

Ji seûye. J'âye situ .


Ti seûye. Taye
I seûye . Il âye
Nos sèyanse. Nos âyanse situ .
Vos sèyîsse . Vos âyîsse
Is sèyèsse. Is âyèsse ―

IMPARFAIT . PLUS -QUE - PARFAIT .

Ji fourihe, fouhe , sèyahe , J'avahe , etc. situ .


sèyasse, èstahe , éstasse .
Ti fourihe, fouhe , sèyahe , T'avahe , etc.
sèyasse , èstahe, éstasse .
I fourihe , fouhe , sèyahe , Il avahe , etc. -
sèyasse, èstahe , éstasse .
Nos fourihis , fouhîs , sèyahîs , Nos avahîs , etc. stu .
èstahîs , sèyisse.
Vos fourihiz , fouhîz , sèyahîz , Vos avahîz , etc.
èstahîz, sèyîsse .
Is fourihît , fouhît, sèyahît , Is avahît, etc. -
èstahît.

IMPÉRATIF .

Seûye . Sèyans. Sèyiz.


INFINITIF.

Esse.

PARTICIPE.

Stu ou situ (i intercalaire) .


Table
de
conju
la
. au
gaiso n
INDIC
. ATIF
TEMPS
SIMP LES

.
TEMPS CONJUGAISON
.1re CONJUGAISON
.2de CONJUGAISON
.3me CONJ
.4me

chante
.Ji Ji
magn
. e vind
.Ji batte
.Ji sint
.Ji .Ji
doime fin
ih
e.-Ji beûs
.Ji
chante
.Ti Ti
mag
. ne vind
.Ti batte
.Ti .
sint
Ti doime
.Ti fin
ih
-e.Ti Ti
.
beûs
c.Ihante mI. agne .Ivind .Ibatte .1sint d.I oime -e.iIfin
h I.beût
chantans
.Nos Nos
mag
. nans Nos
.vindans battans
.Nos sintans
Nos Nos
doirmans
. fin
i.-uNos
hns buvans
.Nos
.
chantez
Vos Vos
mag
. niz Vos
vindez
. Vos
battez
. sintez
.Vos doirmez
.Vos fin
hz
.-eiVos Vos
buvez
.

PRÉSENT.
chantèt
.Is mag
Is
. net Is
.
vindėt .
battét
Is Is
.
sintèt Is
.
doirmèt fin
.-èIs
ith buvèt
.Is
Ji
.
chant're Ji
.magn'rė .
vindre
Ji .Ji
battre sint'rè
.Ji doim'rè
Ji
. i. hè
fin
-rJi .Ji
beûré T
.
chant'rè
Ti .Ti
magn're Ti
.
vindre battre
.Ti Ti
sint're
. .
doim❜rè
Ti fin
i.-rTi
he beûré
.Ti 31
.Ichant're m.I agn'rè .Ivindre .Ibattre s.Iint'rè .Idoim❜rè .-riIfin he .Ibeûré
.
chant'rans
Nos .Nos
magn'rans vindrans
.Nos Nos
battrans
. Nos
sint'rans doim'ran

TEMPS PRINCIPAUX .
. .Nos s ihans
fin
r.-Nos .
beûrans
Nos I
chant'rez
.Vos mag
Vos
. n❜rez vindrez
Vos
. battrez
.Vos Vos
sint❜rez
. Vos
doim❜rez
. i. hez
fin
-rVos .
beûrez
Vos

FUTUR.
chant'ront
Is
. mag
.Is n'ront .
vindront
Is battront
.Is sint'ront
.Is doim'ron
.Is t fin
ihont
r.-Is .
beùront
Is

chantéve
.Ji magnive
Ji
. vindéve
.Ji battéve
.Ji sintére
.Ji doirméve
.Ji t. hve
fin
-éJi buvéve
.Ji
chantéve
.Ti Ti
.magnive vindéve
.Ti battéve
.Ti sintéve
Ti
. doirméve
.Ti thve
fin
.-éTi .
buvéve
Ti
c.I hantéve mI. agnive v.Iindéve b.Iattéve s.Iintéve d.I oirméve hve
.-éiIfin .Ibuvéve
.
chantis
Nos Nos
.magnis .
vindis
Nos battis
Nos Nos
sintis
. .
doirmis
Nos fin
.-iNos sh Nos
buvis
chantiz
.Vos Vos
magniz
. Vos
.
vindîz .
battiz
Vos .
sintiz
Vos doirmiz
.Vos Vos
.-ifin
zh buviz
.Vos

IMPARFAIT.
chantit
.Is magnit
Is
. .
vindit
Is .
battit
Is Is
.
sintit doirmit
.Is fin
.-iIs th Is
.
buvît
chanta
.Ji magna
Ji
. da
.Ji batta
.Ji sinta
Ji
. doirma
.Ji fin
ih
.-Ji
a buva
Ji
.
.
chanta
Ti Ti
.magna vinda
.Ti batta
.Ti Ti
.sinta doirma
.Ti fin
-a.iTi
h Ti
buva
.

TEMPS SECONDAIRES .
.Ichanta mI. agna .Ivinda b.Iatta sinta
. d.I oirma h
I-a.-ifin .Ibuva

PASSÉ DÉFINI.
Pluriel
,voir
.imparfait
TEMPS
COMPOSÉS
.

t'a
,eJ'a
tc. t'a
,eJ'a
tc. 'a
,ttc.
eJ'a t'a
,eJ'a
tc. t'a
,eJ'a
tc. e,J'a
ttc.
'a ,eJ'a
t'atc. 'a
et,J'a
tc.
chanté
. .magni .vindou battou
. .sintou .doirmou fini
. .
bu
,etc.
J'årè ,etc.
J'ârè ,etc.
J'årè J'ârè
,etc. J'àrè
,etc. ,eJ'àrè
tc. eJ'àrè
, tc. ,etc.
J'ârè
chanté
. magni
. vindou
. battou
. .sintou .
doirmou .
fini .
bu

FUTUR PASSÉ
eJ'aveûs
, tc. ,etc.
J'aveûs eJ'aveûs
, tc. ,etc.
J'aveûs ,etc.
J'aveûs ,etc.
J'aveûs ,etc.
J'aveûs J'aveus
,etc.
chanté
. .
magni vindou
. battou
. .sintou .doirmou fini
. .
bu
, tc.
eJ'ava ,etc.
J'ava J'ava
,etc. ,etc.
J'ava , tc.
eJ'ava , tc.
eJ'ava ,etc.
J'ava J'ava
,etc.
chanté
. magni
. .vindou .baltou sintou
. doirmou
. fini
. bu
.

PASSÉ PLUS

TEMPS SECONDres . TEMPS PRINCIPAUX


ANTER. QUE-PARF. ANTER. INDÉFINI.
.
SUBJONCTIF
TEMPS
SIMPLES
.
-32

.Ji
chante Ji
ma
. gne .
vinse
Ji batte
.Ji sinse
.Ji doime
.Ji fin
-ih
e.Ji .Ji
beûsse
Ti
.
chante ma
.Ti gne .
vinse
Ti .
batte
Ti sinse
.Ti doime
.Ti fin
-e.Ti
ih beûsse
Ti
.
c.Ihante m
I. agne v
.
Iinse Ib. atte I.sinse .Idoime e.-iIfin h .Ibeûsse
Nos
.
chantanse .Nos
magnanse .
vindanse
Nos .
battanse
Nos Nos
sintanse
. adoirmanse
iNNos
.-finhnse
os buvanse
.Nos
Vos
.
chantésse Vos
mag
. nisse Vos
.
vindésse .
battésse
Vos sintésse
.Vos .
doirmésse
Vos ihsse
fin
.-éVos .
buvésse
Vos

PRÉSENT .
.
chantèsse
Is mag
Is
. nèsse vindèsse
Is
. .
battèsse
Is Is
.
sintesse .
doirmèsse
Is isse
fin
h
è.-Is buvèsse
Is
.

TEMPS PRINCIPAL.
.Ji
chantahe magnahe
.Ji vindahe
.Ji .
battahe
Ji sintahe
.Ji doirmah
.Ji
.-afin
iJihhe e buvahe
.Ji
.
chantahe
Ti magnahe
Ti
. vindahe
.Ti battahe
Ti
. .
sintahe
Ti Ti
iTdoirmah
.-afin hihe e buvahe
.Ti
c.I hantahe mI. agnahe I.vindahe .Ibattahe sI. intahe d.-aiIfin hoirmahe
he b.I uvahe
Nos
.
chantahis .Nos
magnahis .
vindahis
Nos Nos
.
battahis .
sintahis
Nos doirmahi
iNNos
a.-fin his
hos s .
buvahis
Nos
Vos
.
chantahiz .Vos
magnahiz .
vlndahîz
Vos battahiz
Vos
. .
sintahiz
Vos doirmah
iVVos
.-afin
hhiz
os iz .
buvahiz
Vos
.
chantahit
Is .Is
magnahit vindahît
.Is Is
.
battahit .
sintahit
Is Is
.Idoirmahi
-afin
ishhit t buvahit
.Is

IMPARFAIT.
TOPICSS ST057900

TEMPS SECONDAIRE.
TEMPS
.
COMPOSÉS

, tc.
eJ'âye e, tc.
J'àye ,etc. e
J'ây , tc.
eJ'àye e, tc.
J'àye ,etc.
J'âye , tc.
eJ'àye ,etc.
J'âye
.
chanté magni
. vind
. ou battou
. .sintou .
doirmou .
fini .
bu

TEMPS
e,J'avahe
tc. J'avahe
e, tc. J'avahe
e, tc. J'avahe
,etc. ,etc.
J'avahe ,etc.
J'avahe ,etc.
J'avahe ,etc.
J'avahe
chanté
. magni
. vindou
. battou
. .sintou .
doirmou .
fini .
bu

TEMPS
SECOND . PRINCIPAL
P-Q-PARF. PARFAIT.
.
CONDITIONNEL

.Ji
chant'reús .
Ji
magn❜reus vindreus
.Ji battreùs
.Ji .Ji
sint'reus doim'reu
Ji
. s fin
-rJi
i. heus beûreus
.Ji
Ti
.
beûrens
33 -

.
chant'reús
Ti .
magn❜reus
Ti vindreûs
.Ti Ti
.
battreús sint'reus
.Ti .
reûs
doim
Ti fin
.-rTi
iheûs
.Ichant'reût m.I agn'reût v.Iindreût .Ibattreût .Isint'reût d.I oim'reût heût
I.-rifin I.beûreût
Nos
.
chant'ris .
magn'ris
Nos .
Nos
vindris .
battris
Nos .
sint'ris
Nos .
doim'ris
Nos Nos
-fin
i.rhis .
beùris
Nos
.
chant'riz
Vos magn'riz
.Vos .
vindriz
Vos .
Vos
battriz .
sint'riz
Vos Vos
.
doim'riz Vos
.-rfin
iiz h Vos
.
beûrîz

SIMPLE .
Is
.
beûrit

PRÉSENT.
.
chant'rit
Is magn'rit
.Is .
vindrit
Is Is
.
battrit sint'rêt
.Is Is
.
doim'rêt Is
.-rfin
iit h

CONDITIONNEL
,etc.
J'âreûs eJ'àreûs
, tc. J'àreûs
,etc. ,etc.
J'àreûs J'àreûs
e, tc. eJ'àreûs
, tc. ,etc.
J'àreûs ,etc.
J'âreûs
chanté
. magni
. vindou
. battou
. sintou
. doirmou
. fini
. .
bu

PASSÉ.

COMPOSÉ.
IMPÉRATIF
.

Chante
. Magne
. .Vind Batte
. .
Sint .Doime .Finihe .Beûs
.
PRÉSENT Chantan
. s Magnans
. Vindans
. Battans
. Sintans
. Doirmans
. Finihans
. Buvans
.
Chantez
. Magniz
. Vindez
. .
Battez Sintez
. .
Doirmez Finihez
. Buvez
.

e, tc.
Aye , tc.
eAye , tc.
eAye , tc.
eAye e, tc.
Aye ,etc.
Aye ,etc.
Aye ,etc.
Aye
.
PASSÉ chant é magnî ou .battou sint doirmou
. .fini .bu
. . .
vind . ou

INFINITIF
.

Chant
. er Magni
. Vind
. e .
Batte .
Sinti Doirmi
. Fini
. .Beûre
.
PRÉSENT ).(Cantare atuere
entire
S).(bBattere ).(Dormire ().Finire ).(Bibere
M(). anducare ().Vendere
- 34

.
PASSÉ .
chanté
Aveûr Aveûr
magni .
vindou
Aveûr . veûr
sintou
battou
AAveûr veûr
fini
.Adoirmou
Aveûr Aveûr
.
bu

PARTICIPE
.

PRÉSENT
. Chant
. ant Magnant
. .
Vindant Battant
. Sintant
. Doirmant
. Finihant
. Buvant
.

,
chanté
Ayant Ayant
,
magni ,
vindou
Ayant ,
battou
Ayant ,
sintou
Ayant Ayant
Ayant
,doirmou
fini .
bu
Ayant
PASSÉ
. êye .èye bèvowe
(?)
èye
. . .
owe owe
. owe
. owe
.
- 35 --

Formation des temps .

A. LE PRÉSENT DE L'INDICATIF forme :


1° L'IMPÉRATIF , en retranchant le pronom . La première per
sonne du présent donne le singulier de l'impératif, et les deux
1res personnes du pluriel du présent, le pluriel de l'impératif.
Ji chante, chante ; ji sint, sint ; nos vindans , vindans ; vos
buvez, buvez.
2º Le FUTUR SIMPLE, en ajoutant les terminaisons de ce
temps (rè, rans , rez, ront) au singulier du présent privé de sa
terminaison . Ji chant(e), ji chant'rè ; ti vind, ti vindrè; il
ach'têy(e) forme spéciale , il ach'têyrè ; ji finih(e), ji finihrè ; ti
beûs, ti beurè, etc.
3 Le CONDITIONNEL PRÉSENT de la même façon que le futur ,
mais en ajoutant les terminaisons reûs , reût, rîs, rîz, rît.
B. Au singulier du PASSÉ DÉFINI on ajoute les suffixes he, hîs,
hiz, hit, pour former L'IMPARFAIT DU SUBJONCTIF .
C. Le PARTICIPE PRÉSENT forme :
1º Les TROIS PERSONNES DU PLURIEL DE L'INDICATIF PRÉ
SENT, en changeant ant en ans, ez, èt.
Ex. chantant, nos chantans ; finihant, vos finihez, etc.
2 L'IMPARFAIT DE L'INDICATIF en changeant ant en éve ou
ive, etc. Ex . chantant, chantéve : magnant, magnîve.
3º Le PASSÉ DÉFINI en changeant ant en a . Ex . vindant, ji
vinda ; finihant, ji finiha , etc.
D. Le PARTICIPE PASSÉ forme les temps composés.

Règles de flexion .

SINGULIER.

Les trois personnes du singulier sont identiques à tous les


temps et à toutes les conjugaisons , sauf au conditionnel des 4
- 36 -

conjugaisons où les deux premières personnes se terminent


par une s et la 3ª par un t , et à l'indicatif et à l'impératif pré
sents de la 4º conjugaison où elles suivent les règles de l'ortho
graphe analogique (') .
PLURIEL.

1re et 2e personne . Se terminent en ans, ez ( ou î% , 1re con


jugaison) à l'indicatif présent et futur et à l'impératif ; en is et
îz, à l'imparfait de l'indicatif et du subjonctif, et au conditionnel
présent ; en anse, ésse (ou îsse) au subjonctif présent .
3° personne. Se termine en èt au présent de l'indicatif, en
ont au futur ; en ît, à l'imparfait de l'indicatif et du subjonctif,
et au conditionnel ; en èsse au subjonctif présent .

Forme interrogative .

Le wallon, comme le français , interroge en plaçant le pro


nom personnel après le verbe .
Nous ne nous occuperons pas ici des changements de forme
de ce pronom , nous proposant d'y revenir dans un travail
spécial .
Le t intercalaire d'analogie existe à toutes les conjugaisons
aux troisièmes personnes du singulier et du pluriel qui ne se
terminent pas par cette ccnsonne et à toutes les conjugaisons ,
comme en français . Ex. chante- t-i, magne-t-i, vind- t-i,
chantèt-is, buvèt-is, etc.
La seconde personne du singulier offre une particularité
remarquable pour les formes qui ne sont pas terminées par e
muet. Ces formes, en effet , intercalent une s qui nous paraît
être directement étymologique , et provenir de l's générale à la
seconde personne du singulier des verbes latins . L'interroga

(¹ ) Nous rétablissons le t étymologique au singulier de l'indicatif et de l'impératif


présent de sinti : Ji sint, sint.
37

tion latine la plus commune étant faite avec ne, l's , consonne
sifflante bien caractéristique (cf. I's du subjonctif) s'est trans
mise en wallon .
Nous trouvons , en wallon , les formes :
Prinse? (prendis - ne ?) prends- tu ? Beûsse ? (bibisne ?) bois -tu ?
Sinse? (sentis-ne ?) sens- tu ? Sicrisse ? (scribis - ne ? ) écris -tu ?
Sésse? (sapis- ne ?) sais - tu ? Asse? (habes - ne ? ) as-tu ? Vasse?
(vadis - ne ?) vas- tu ? Vousse ? (vis- ne ?) veux- tu ? Esse? (Es-ne ?)
Aim'rèsse? (amare-habes- ne?) aimeras-tu ? Aimasse? (amas
ti-ne?) aimas - tu ? etc. etc.
CHAPITRE V.

PRÉSENT DE L'INDICATIF.

Le présent de l'indicatif est certainement le temps le plus


intéressant en wallon : c'est , en tous cas , celui qui présente le
plus de particularités remarquables , celui , en un mot , qui s'est
le moins simplifié .
Le fait, d'ailleurs , n'a rien qui doive étonner , si l'on songe
que ce temps est le plus employé dans la conversation . Les
formes s'en présentent souvent à l'esprit et gardent donc ,
mieux que d'autres , le caractère étymologique qui leur est
propre .
A la première conjugaison , aux trois personnes du singulier ,
nous rencontrons, outre la forme ordinaire en e muet (ji
chante), une autre forme en êye (èy). Ex . : j'arrèstêye , j'arrête ;
j'ach'têye, j'achète , etc.
Disons tout d'abord que cette forme ne doit pas être confon
due avec une forme analogue , mais en è bref (ji prèye, je prie ,
de priyî, par ex . ) . La différenciation est facile à faire puisqu'il
ne s'agit pas dans le dernier cas d'une terminaison , mais d'une
modification du radical . Nous avons cependant cru devoir la
signaler, parce que souvent la forme êye (terminaison) se
prononce parfois très bref (ey) même à Liége , et que la pronon
ciation de èye (radical) tend parfois aussi à se rapprocher de
celle de êye (èy) , terminaison .
Nous ne pouvons accepter l'explication trop générale , mais
vraie en partie, de L. Micheels (1) disant que cette forme

(1) Grammaire liégeoise . Liége, 1863.


- 40 -

provient de la difficulté qu'ont les Wallons de prononcer deux


consonnes de suite . On dirait j'abot'nêye, pour ne pas dire
j'abotne; j'ach'têye, pour ne pas dire j'achte. Mais rien n'em
pêcherait les Wallons de dire j’abotène, ou j'achète ; puisqu'ils
disent bien j'advène, je devine , et il ajètte, il jette de mon côté .
L'explication de Micheels n'est donc pas suffisante .
Remarquons aussi qu'il existe une grande liberté dans
l'emploi de cette terminaison êye en wallon .
Son emploi ou son rejet sont pour ainsi dire de l'ordre de
la diversité des dialectes et dépendent même des individus
qui les parlent .
Il est une foule de verbes qui , à côté de la forme en êye,
possèdent la forme ordinaire en e muet . Ex .: ènonder (j'ènonde
et j'ènondêye) ; rimeûbler (ji r'meûbèle et ji r’meublêye); prus
ter (prusse et prustêye) ; masquer (masse et masquèye) , etc. , etc.
Cette forme en êye me paraît tout simplement être une
particularité dialectologique , permettant d'éviter certaines
cacophonies ou duretés de prononciation , et provenant , pour
un grand nombre de verbes qui ne peuvent invoquer cette
raison d'esthétique , de la grande loi d'analogie si puissante
en wallon.
En outre, elle constitue encore un mode particulier de sim
plification, en ce sens qu'elle permet de conserver à un grand
nombre de verbes, leur physionomie générale au cours de leur
flexion . Si elle n'était pas en usage , il faudrait soit modifier la
voyelle du radical verbal , comme dans ji m'acalène (de
s'acaliner) , soit réintercaler une voyelle disparue , comme dans
achète (de ach'ter), soit réintroduire une voyelle qui a disparu
dans l'évolution romane rimeûbèle (de r'meûbler) ou qui n'a
même pas existé en latin , comme dans soffèle (de soffler, suf
flare) (¹ ) , soit enfin remanier la texture d'un mot comme dans

(1) Le wallon n'est cependant pas rebelle à cette dernière introduction. Voir
plus loin les verbes en ler.
- 41 -

l'expression (Nord de Liége-Visé) ji cheweure (chewer) = je


laboure , de (chèrwer), cherwě, carrucare) .
L'analogie a même fait s'introduire dans la 3º conju
gaison , en i bref, cette forme en eye, appartenant à la 1º . Nous
citerons les verbes pârti (partiri , partager ) qui possède les
deux formes ji pârtihe et ji pârtêye ; pâstri (faire la pâte) , ji
pâstrêye et ji pâstrihe , etc.
Cela dit, voici le tableau de l'indicatif présent des quatre
conjugaisons, tableau qui sera suivi de quelques remarques .
Nous employons l'orthographe phonétique . Voir p . 163 le
tableau complet de la conjugaison en orthographe analogique .
Nous avons choisi les mêmes exemples que dans ce tableau :
ro
1гo conj . teate, (cantare ) , măṇī (manducare) , ǎtetě (accaptare).
2 conj . vd (vendere) et băt (batuere- battere) .
3º conj . fini (finire) , sīti (sentire) , dwěrmi (dormire) .
4 conj . bær (bibere) .
Présent
l'indicatif
.de

PREMI
CONJU
. GAISO
ÈRE N 2de
CONJ
. UG TROISI
CONJU
. GAISO 4º
ÈME NCONJ
.

t
. eut
pers
1гo măn -ey
ǎtet vi băt fin
-i h dwěm boe
St
2e
teat
» män ǎtet
-ey vi băt finh
-isĩ dwěm boe

220
3e >> teat măn ǎtet
-e y vi băt finh
-isĩ dwěm boe

Singulier .
m
-ã pers
1re
. eat
(')t ăn -ã
ǎtet -ã
vid bắt
-ã tfin
-s
a hĩ dwěrm
b
-auv
ã
teất
\m
)(2-ë ăn
42

2º >> -ě
ǎtet vid
-ě bắt fin
siit
-ěh -ě
dwěrm buv

1
teất
)
(-è ăn

Puriel.
3º > -2m ě
-
ǎtet bắt
ĕ
-
vid fin
siit
e
-ĕh dwěrm

-buv

teate măni ǎtetě vid bat fini siti dwěrmi boer


INFIN
. ITIF
cantare acca ucar
mandptar ee
vend vendere
battere
finire sentire
dormire bibere

Nivelles
à
ons
.tcãto
↑ Ardenne
(2)à
et
Meãto
.t almedy
l
à
N
(nu
t amur
eatnu
.) 'Ouest
- 43 ―

Remarques sur ce tableau .

Nous observons tout d'abord que les trois personnes du sin


gulier sont identiques ; ce fait s'applique aux quatre conjugai
sons.
Les trois personnes du pluriel se terminent respectivement
en ã, ě (¹) et ě (ans, ez- oz , èt) . La seule exception est la se
conde personne des verbes en i de la première conjugaison
qui ont ī (îz) à la seconde personne du pluriel . Le phénomène
yě = est général en wallon . (Voir plus haut . )
Dans sa grammaire des langues romanes , Diez fait observer
que le Wallon n'a pas laissé s'introduire , à la première per
sonne du pluriel l'o , dominant en vieux français et en français
moderne (omes, om , ons) . Cette observation est trop générale .
Le fait est vrai en dialecte liégeois . Mais d'autres dialectes , le
nivellois , entre autres , possèdent l'o . Ex . no sto (stons) , etc.
Nous le rencontrons encore dans la Pasquêye de Piron et
Pentecosse (*) ( 1617) . Ex . Nos prindrons, nos vorons, etc.
Remarquons encore , comme tendance à simplification , que
ans existe partout, dans les quatre conjugaisons , malgré l'éty
mologie latine différente amus , imus, emus.
La troisième personne du pluriel possède une terminaison
ouverte, à l'encontre de ce qui existe en français . Ex. i teate
(is chantèt), ils chantent.
Le fait se retrouve en Provençal qui a ã (an ) et õ (on) .
A l'ouest wallon ( Namur) , le phénomène s'accentue encore .
La troisième personne du pluriel se termine en nu . Ex .: ĭ
tātnŭ, ì măņnă, etc.
Dans l'ancien français aussi , d'ailleurs , la terminaison
ent, sourde dans le français moderne , s'est prononcée , car elle
a formé, pendant un certains temps , une rime masculine en
poésie .

(') o à Malmedy et en Ardenne, tcuto (oie franç .) .


(2) Bull. Soc. wall .
- 44 -

Signalons encore une tendance à la simplification par ana


logie observée dans les formes but (batte) et dwěm (doime) des
deuxième et troisième conjugaisons . Le français a bats et dors .
Il est évident que l'e muet des formes wallonnes simplifie la
flexion de ces verbes et de leurs analogues , puisqu'ils les
rapprochent des verbes de la 1re conjugaison .

Verbes irréguliers .

Nous diviserons les verbes irréguliers wallons , au présent


de l'indicatif, en quatre classes :
1 Verbes qui éprouvent certains changements du radical de
l'infinitif lorsque l'accent tonique tombe sur leur pénultième
(aux trois personnes du singulier) .
2º Verbes qui , suivant une règle générale du wallon , modifie
le groupement de deux consonnes , lorsque ce groupement , dans
la flexion , précède immédiatement e muet .
3º Verbes irréguliers de la quatrième conjugaison , qui in
tercalent dans leur flexion une consonne étymologique ou
parasite.
4° Verbes anomaux proprement dits.

PREMIÈRE CLASSE .

1º a bref (ă) s'allonge en â long (ã et ò à Liège) .


Ex .: payî, payer , ji pâye ; sayî, essayer, ji sâye.
2º è ouvert bref (è) s'allonge tantôt en eû long (œ) : comme
dans pèser, peser, ji peûse.
Tantôt en î long (7), comme dans quèri, chercher, ji qwîre;
lèver , lever, ji lîve ; crèver, crever , ji crîve (¹) .
Tantôt en é fermé et long (é) , comme dans hèrer, pousser ,
ji hére ; serrer, serrer , ji sérre ; ètèrrer, enterrer , j'ètérre ;
rèser, raser, ji rése.

(') Comparer l'ancien français : je lief, je crief (e bref latin recevant l'accent se
diphtongue en ie).
45 -

3º i bref (i ) se transforme tantôt en è bref comme dans clignî,


fermer les yeux , ji clègne ; rilignî, dégeler, i r'lègne ; hiner,
jeter, ji hène ; priyî, prier, ji prèye ; si fiyî, se fier , ji m'fèye ;
adviner, deviper , j'advène, etc.
Tantôt en o (0) comme dans dinner, donner , ji donne (¹) .
Tantôt en ô long (ố) qui se nasalise parfois comme dans
miner , mener , ji mône, (mon ou môn ).
Constatons encore un changement de l'i en eu (œ) dans limer,
limer, ji leume.
4° 0 ouvert bref ( o) s'allonge tantôt en ô fermé long ( ố)
comme dans s'annoyî , s'ennuyer , ji m’annôye ; loyî, lier,ji lôye ;
èvoyî, envoyer, j'èvôye ; coyî, cueillir, ji côye , et tous les
infinitifs en oyi. Citons encore dorer, dorer , ji dore ; forer,
forer, ji fôre (2) et quelques autres .
Tantôt il se transforme en eû long , ( ) comme dans cover,
couver, ji keûve ; dimorer , demeurer, ji d'meûre ; hover,
balayer, ji heûve ; plorer, pleurer, ji pleûre.
Tantôt il se transforme en oû long ( u) comme dans prover,

prouver , ji prouve ; trover, trouver , ji trouve ; mori , mourir , ji


moûr ; cori, courir, ji coûr.
5º D'autres fois , au contraire, le son ou (u) se transforme en
o bref (0) , comme dans bouwer , lessiver, ji bowe ; louwer, louer,
ji lowe, et d'autres verbes en ouwer ; toumer, tomber , ji tome,
foumer, fumer, ji fome et d'autres verbes en oumer; babouyî,
balbutier, ji baboye ; mouyî , mouiller , ji moye ; cafougnî,
chiffonner, ji cafogne, et d'autres verbes en ouyî et ougnî.
6º u bref (u) se transforme tantôt en eu bref (a) comme dans
juner, jeuner, jijeune ; sitrumer , étrenner, ji streume ; lumer,
(pour limer, limer, ji leume (3).
Tantôt en eû long ( ), devant r, comme dans hurer, écurer,

(1) Remarquons toutefois ici que cet o peut être étymologique (donare, dare) .
(2) Ne pas confondre avec fôrer ( donner à manger au bétail) qui a főre également.
( ) Voir la dernière remarque du 3º où la forme en eu de limer s'explique par la
forme lumer de ci-dessus.
-46

ji heûre ; durer, durer, ji deûre ; mèsurer ou mès'rer, ji


mèseûre.
DEUXIÈME CLASSE.

Lorsqu'un groupement de deux consonnes vient, dans la


flexion , à précéder immédiatement e muet, le wallon
1º Syncope la première consonne, lorsque celle-ci est un r .
Ex.: chèrgî, charger, ji chège ; doirmi , dormir; ji doime ( ') ;
boirder, border , ji boide ; wârder, garder, ji wâde ; bourder,
mentir, ji boûde, etc.
Exception sôrti, sortir, ji sôrte (peu employé).
2º Il syncope la seconde consonne , lorsque le mot ainsi
obtenu ne peut donner lieu à équivoque et sonne bien à l'oreille .
(Sinon il emploie le suffixe eye , èy. (Voir p . 43. )
Ex. Goster, goûter , ji gosse, plus souvent ji gostêye ; coster,
coûter, ji cosse ou ji costêye ; accepter, accepter, j'accèpe
ou j'accèptêye ; ajuster, ajuster ,j’ajusse ou j'ajustêye; etc , etc.
3º I intercale un son voyelle entre les deux consonnes,
lorsque la seconde est our . Ce son intercalé est è ( è) ou
eû (œ) (²) . Ex. : infler, enfler, j'infèle ; gonfler, gonfler , ji
gonfèle ; sât'ler, sautiller , sauter , sâtèle ; si mâv'ler se fàcher ,
ji m'mâvèle ; tripler, écraser avec le pied , ji tripèle ; intrer,
entrer, j'inteûre ; mostrer, montrer, ji mosteûre ; ovrer, tra
vailler, ouvrer, j'ouveûre.
Exception dovri, ouvrir , qui fait ji doûve et covri, couvrir,
qui fait ji coûve. Certains dialectes ont cependant ji douveûre.
Dans parler, parler, ji parole, l'o est plutôt une persistance
(cf. l'ancien franç . parole).

TROISIÈME CLASSE .

La quatrième conjugaison est, nous le répétons , la conju

(') Bien que rangé parmi nos exceptions, nous avons dû prendre ce verbe faute
d'autres comme paradigme. L'exception n'a d'ailleurs rapport qu'au radical.
(*) Ou bien eu bref ouvert (a) suivant les prononciations
locales.
-- 47

gaison des formes irrégulières , une sorte d'adoucissement de


la conjugaison forte, si nous osons nous exprimer ainsi .
Nous diviserons ses verbes en quatre catégories :
1º la catégorie, qui au pluriel de l'indicatif présent et
d'autres temps (imparfait, parfait , etc.) possède un hétymo
logique . Cet h est peut -être un peu moins aspiré que l'h initial
de certains mots . Il correspond à s + voyelle ou à voyelle
ce, i ( ¹ ) . Ce dernier traitement est surtout appliqué aux
verbes qui vont suivre.
Ces verbes sont : dîre, dire , nos d'hans (di( c)imus) ; dûre,
plaire à , anc . franç . duire, nos dûhans ( du( c)imus) ; distrûre,
détruire, nos distrûhans (struimus stru (x)i , stu (c)tum) ; lére,
lire, nos léhans , (le(g)imus) ; plaire, plaire , nos plaihans,
(pla(c)emus) ; taire, taire, nos taihans (ta(c)emus) ; cûre, cuire ,
nos cûhans (co(qu)imus) ; lûre, luire, nos lûhans (lu(c)emus) .
On voit que cet h wallon correspond au français s (%).
2º La catégorie qui possède , dans le même cas, un v étymo
logique, lettre qui peut avoir disparu dans la contraction du
radical , mais qui se retrouve parfois dans l'ancienne langue et
dans la nouvelle . Ce sont beûre (boire, anc. franc . boivre),
nos buvans (bibimus) ; riçûr (recevoir , on trouve rechoivre) ,
nos r'çûvans (recipimus) ; plour, pleuvoir, pluere (plui ou
pluvi cf. pluvia) , part . prés . plovant (pleuvant ; sûre, suivre ,
nos sûvans, on trouve en anc . franç. sevre, suivre ; dans la 3º
chartre, citée par M. Wilmotte (2) on a aussi porsiwre .
Les trois verbes diveûr ( devoir) , aveûr (avoir) et´saveûr
(savoir) n'ont pas contracté à l'infinitif, mais bien au sing . du
présent ; voir plus loin aux verbes anomaux .
3º La catégorie des verbes qui ont conservé l'l étymologique ,
boûr , bouillir = nos bolans (bullimus) ; moûre (moudre, vieux
français moldre , molre ) nos molans (molimus) .
Voir plus loin poleûr (pouvoir) , valeûr (vouloir) et voleur
(vouloir) , qui contractent au singulier .

(¹) Ou bien voy. g + e, i ou q(u) +


' e, i.
(2) Loc. cit.
- 48 -

4° La catégorie des verbes qui , d'après une caractéristique


du wallon , ont intercalé y entre deux sons voyelles pour éviter
l'hiatus . Ce sont clore, clore, nos cloyans ; scrire , écrire, nos
scriyans ; creûre, croire , nos crèyans ; veûr, voir , nos vèyans ;
s'assûr, asseoir, nos nos assyans ; hére, haïr, nos hèyans ; heûr,
secouer, nos hoyans ; keûre, être content de ce qui arrive à
un autre, nos kèyans ; braire, crier, braire , nos brèyans ; ôr,
ouir, écouter , nos oyans.
Voir plus loin rire, rire et chir.

QUATRIÈME CLASSE.

Verbes anomaux proprement dits.

Ce sont fer, faire . Ce verbe a conservé au singulier du


présent, la forme contractée de la conjugaison forte , (fa(c)ere,
ital. fare) ; ji fais, je fais ; au pluriel régulièrement fans, fez,
fèt, et quelquefois par analogie française font.
Les verbes oyî, vèyî, entendre , voir , qui donnent j’ôs, ji veûs,
ne sont pas anomaux en ce sens que leur forme infinitive nor
male est or (au(d)ire) et veûr (vi (d)ere) , qui existent dans le
wallon actuel , et les rangent dans notre 4 conjugaison . (Voir 3°
classe des verbes irréguliers . )
Lèyî (anc. franç . laier ) laisser , donne ji lais aux 3 pers. du
sing. Cette forme vient d'un infinitif d'analogie laire. Le plur .
est régulier (v . au chapitre Infinitif la remarque à ce propos) .
Aller, aller, emprunte, comme le français, une partie de ses
temps à vadere, une autre à ambulare et à ire . Nous parlerons
plus loin de la part contributive de chacun de ces verbes
à la conjugaison entière de aller . Au singulier, les trois
personnes ont va ( cf. franç . vais, vas , va) . Au pluriel allans,
allez, allèt (et aussi par analogie française vont) .
A côté de ces formes, s'en trouvent deux autres, que nous
sommes tentés de rapporter à ire ; d'abord le jans, wallon qui
s'emploie dans une foule de cas dans le même sens que allons !
- 49

français Cette même forme se retrouve , surtout en Ardenne et


dans le pays de Namur, accompagnée du pronom personnel :
nos n'jans mâye ( nous n'allons jamais) . Citons encore jez ! que
les enfants emploient très souvent dans le sens du français
vulgaire v'lan. Ne serait- ce pas la seconde personne du pluriel ?
Nous n'avons en tous cas pas de matériaux suffisants pour
nous prononcer ,
Nous avons rencontré depuis lors à Moirtrou , près de Dalhem ,
la forme jont, 3° pers . plur . is jont bin, ils vont bien . Nous ne
croyons pas qu'il faille , avec Grangagnage , rapporter notre
jans ! au flamand gaen .
Esse (être) . Singulier régulièrement étymologique ji sos ,
t'ès, il èst. Le pluriel emprunte déjà deux de ses formes à
stare = èstans , èstez, sont ( Cf. l'anc . franç . ester, bourguignon
asteir) .
Cet exemple de l'e prosthétique dans èstans est à remarquer
en wallon . Elle n'est d'ailleurs pas générale (nos stons, ‫سا‬
à Nivelles) .
Aveûr (avoir). Au singulier a aux trois personnes ; au pluriel ,
avans, avez, ont ( parfois avèt) .
Parmi les autres verbes vraiment anormaux de la 4 conj .
nous citerons diveûr (devoir) : deûs , deûs , deût au sing. ;
divans, divez, divèt au plur.;
saveûr (savoir), sés , sés, sét au sing .; savans , savez, savèt
au plur.;
rire (rire) sing . , rèye ; plur . , riyans , riyez, riyèt ;
chir (cadere (?) ) , sing. chêye ; plur. chiyans, etc .;
poleûr (pouvoir) , sing . pous, pous, pout ; plur . polans, etc ;
valeûr (valoir) sing . vâs , vâs , vât, plur . valans , etc.;
voleûr (vouloir), sing. vous , vous, vout, plur . volans,
volez, volèt.
CHAPITRE VI .

IMPARFAIT DE L'INDICATIF.

L'imparfait wallon a conservé le v (ou f) primitif ( b latin ,


abam) ; éve (ěv ou ef) et ive (īv ou if) sont les terminaisons
caractéristiques de ce temps au singulier des quatre conju
gaisons . Le v s'est même parfois transmis à la 3º pers . du
plur. dans certains dialectes.
Le wallon n'est pas le seul dialecte qui ait conservé le b (f, v)
à l'imparfait. Cette lettre se présente 1° dans l'ancien bour
guignon , qui a eve, eves, evet, 3° pers . plur . event ; 2º dans
l'italien ava, etc ; 3° dans l'espagnol qui possède la consonne
ß pure =aba, etc.; 4º dans le portugais , ava , etc ; et 5° dans le
provençal ava .
Il est toutefois à remarquer que ces différentes langues ne
possèdent en général le v qu'à la première conjugaison , alors
que le wallon a étendu son usage aux quatre conjugaisons ..
Nouvelle preuve , s'il le fallait , de la simplification wallonne .
Ci-après le tableau de ce temps .
.
Imp arfait

PREMIÈRE
.
CONJUGAISON CONJUG
.2de CONJUG
TROISIÈME
.4
CONJUGAISON

v 7
-0 -ěv
vid -e
ih
finv sit
-ev buv
-ěv
t
.-ěeat
pers
1re măn

ě
-v
teat 7 0
-măn ě
-v
vid i v
-ěh
fin ě v
-sit buv
-ěv
>>

220
2
-0
măn ě
-v
vid i
-ěh
fivn sit
-ev e
-v
buv
3e » e
-v
teat
-

Singulier.
-
52


t eat măn -ī
vid -ih
fin i
-sit -ī
bŭv
-

.pers
1re

-ī тӑп
-|і ī
-vid -ī
ih
fin -i
sit buv

2º >> teat

măn -ī
vid ī
-ih
fin -ī
sit -ī
bŭv
3e -ī
teat

Pluriel .
>> iv


īvě
bie
ou n ivě
ou īv
ouě ouě

ĕ
- t
tea măṇī vid fini siti bær
INFIN
. ITIF
manducare vendere finire sentire bibere
cantare
53

Remarques sur ce tableau.

Tout d'abord , nous devons remarquer que les formes év et


īv permutent très souvent suivant les dialectes wallons . On a
aussi bien chantive (à Roclenge sur Geer, notamment) , que
magnéve (à Malmedy) .
L'observation de Stürzinger ( ' ) , qui s'étonne de ne pas ren
contrer la forme en iv dans les verbes en ī = ier tombe par là
même.
Dans les anciennes chartres , on trouve cet éve, à côté de la
forme en oit prédominante (avenoit , estoit, pooit , etc. ).
Au pluriel , la forme primitive n'est pas îs (7). Mains (7) ins
(dans les chartres iens et iemes) . Cette forme ins s'est conservée
jusqu'à la fin du siècle dernier à Liége . Elle se retrouve encore
de temps à autre à Liége au commencement de ce siècle
et elle existe encore actuellement en Hesbaye et dans le Con
droz . Toutefois les deux formes se sont confondues , car nous
remarquons dans l'ode de 1620 ( 2) sçâris ; dans le sonnet
liégeois au ministre ( 1622) frî et euxhî ; dans la moralité de
1623, voirrin et voris ; dans la Désolation des pauvres paysans
liégeois (1635) , happin . En admettant qu'il ne s'agisse pas là de
fautes de copiste , on pourrait en conclure que l'emploi des
formes is et ins en wallon dépend de la diversité même des
dialectes . Mais il nous semble prouvé que , pour Liége au moins ,
la forme en (ins) a prévalu jusqu'au commencement de
ce siècle .
Le phénomène iez = îs (7) est connu .
La forme en ivèt (īvě) employée dans certains dialectes ,
correspond à celle de l'ancien bourguignon : event. dont l'ent a
dû se prononcer (v. plus haut à propos du présent de
l'indicatif). La forme en ît (7) 3° pers . plur . est analogique .

(1) Loc. cit., p. 208.


(2) Bull. Soe. wall.
- 54 --

VERBES IRRÉGULIERS .

La quatrième conjugaison présente les mêmes particularités


à l'imparfait qu'au pluriel du présent. Nous distinguerons donc
également ici les verbes qui ont h, v, et l étymologiques ou l'y
de liaison .

Fer donne régulièrement féve ; signalons la forme ji f'zéve,


copiée sur le français je faisais.
Aller donne alléve.
Èsse (être) emprunte son imparfait à ester ( stare) , mais sa
terminaison est particulière . La forme du singulier est èsteûs
(ěsto). La terminaison eûs , eût correspond au vieux normand
eie et au vieux picard et vieux bourguignon oie ( plus tard ais) .
Et cela d'après une règle phonétique qui veut que e long latin
ou roman hors de position donne ois, ais, en français actuel
et eûs (œ) en wallon . Ex .: tres = trois, treûs (træ) ; seta = soie ,
seûye (say) ; debere = devoir, diveûr (divær) ; volere vouloir,
voleûr (volær), etc.
Aveûr, avoir, fait également exception ; il possède aveûs ,
aveûs, aveût, au sing . et avîs, avis, avît, au pluriel . Cet eû a la
même origine que le eûs de esteûs (habebam , anc . franç .
avoie et aveie) .
CHAPITRE VII .

PARFAIT DE L'INDICATIF .

Le parfait est remarquable en wallon . Comme nous l'avons


dit plus haut, sa disparition progressive et son uniformité dans
les quatre conjugaisons rendent compte de la simplification de
la conjugaison wallonne .
La disparition du pluriel de ce temps , ou du moins la confu
sion de ce pluriel avec le pluriel de l'imparfait , est un phéno
mène plus ancien qu'on ne le croit .
Déjà au XVIIIe siècle , comme le fait remarquer M. Wil
motte (') , on rencontre une forme de conjugaison très intéres
sante , i (e) ns pour imes ( fesins , presiens , oiens , duiens , etc. ) ,
qui , d'après le texte , doit se rapporter au parfait . Or , nous
savons que l'imparfait possède aussi cet ins et iens . Il devait
donc , déjà à cet époque , y avoir une certaine confusion entre
le parfait et l'imparfait, temps très voisin syntaxiquement
parlant . Cette confusion s'est accentuée et est devenue générale
dans notre dialecte actuel .
Au singulier , la terminaison à s'est étendue à toutes les con
jugaisons . Elle s'ajoute directement au radical .
Nous croyons inutile de donner le tableau de ce temps . Nous
nous contenterons d'en citer les formes : tcată, mănă, vīdă,
finihă, sîtă et bŭvă .

VERBES IRRÉGULIERS .

Les quatre catégories de la quatrième conjugaison , v . p . 179 .

(1 ) Loc. cit.
56 -

persistant encore ici : ji léha (je lus) , ji buva (je bus), i plova
(il plut), ji brèya (je criai) .
Le verbe dire (dicere) possède, outre la forme d'ha , une
forme particulière dèri (děri ) que l'on peut expliquer d'après
la loi d'analogie, comme nous le faisons ci - après pour les verbes
èsse et aveûr. Cette forme aurait été produite par la 3° pers .
du pluriel du parfait dicerunt.
Parmi les verbes anomaux , fer redevient régulier = ji fa;
aller aussi = j'alla . Signalons la forme f'za , copiée , comme

l'imparfait f'zéve , sur le français fesais .


Esse (être). Ce verbe dont la conjugaison est très variable ,
suivant les dialectes , possède de nombreuses formes, dont nous
allons passer quelques - unes en revue .
On trouve d'abord une forme absolument régulière : èsta,
empruntée à ester (stare). Pour l'e prosthétique , voir la forme
estans (p . 181) . Puis une forme analogue à la forme française .
Peut-être est-elle étymologique, peut-être analogique , c'est :
=
fous fui), (u franç . ou (u) wallon : nudus , nu = nou , etc. ) .
Puis la forme fouri ou bien fouru que Stürzinger , ne l'ap
pliquant qu'au pluriel , explique par fuerunt ( furent). Par
analogie , la forme se serait étendue aux deux autres personnes .
Nous ajouterons qu'elle aurait ensuite gagné le singulier.
Le fait est assez probable , surtout si l'on remarque que ce
verbe, avec le verbe avoir, sont les deux seuls où le pluriel du
parfait est bien différencié . Il est tellement bien caractérisé
que certains dialectes ont fourivèt (fürīvě) à la 3° pers . plur .
Nous signalerons sans autre commentaire , la forme furet du
vieux franç . que l'on a rapporté au plus- que - parfait de
l'indicatif.
Aveûr (avoir), de même que être , présente plusieurs formes .
L'une régulière j'ava . Une autre j'eus (a) relativement peu
employée à Liège . A Malmedy elle serait unique , d'après
Sturzinger, sous la forme ou (ŭ) , (habui).
La forme j'euri (œri) (ouri ŭrì à Malmedy) , procède de même
que ji fouri.
CHAPITRE VIII .

FUTUR ET CONDITIONNEL.

A. Futur.

On sait que le futur est un véritable temps composé de l'in


finitif et de la flexion de l'auxiliaire avoir (chanter-ai , partir
ai, etc.) Le wallon n'a pas échappé à la règle générale ; toute
fois les lois phonétiques ont agi sur la flexion de l'auxiliaire
aveûr.
Les trois personnes du singulier se terminent en è (e) tandis
que aveûr donne ă . On sait , en effet , que a tonique latin , hors
de position , se déprime en e ouvert ou fermé . (Ex . : sal = sel,
se; aratrum = ère; talis = tel, tě, faba = féve, fev, etc.)
Le pluriel du futur possède rans ( rã) rez , (rẻ) et ront (rõ) ;
cette dernière forme reproduit exactement la 3° pers . plur .
du prés . de l'ind . de avoir (ont = õ).
Nous donnons ci - après le tableau de ce temps.
Futur
.

PREMIÈRE
CONJUGAISO
. N 2º
CONJ
. TROISIÈME 4º
.CONJUGAISON CONJ
.

r
-t e
eat
.pers
1re r
-ẻ
min ee
ǎtet
-r y -re
vid sit
fin
i
-r
ībe
-rre
h
e
dwěm
e
atetre
ou r e
sit
-ou

-re
teat -rằ
mn ǎtet
ey
-r e -re
vid r e
-ih
fin e
dwěm
rre
-i
sit r ě
-bo
>>

220
teat
-r e rằ n
mù r
-ătet
eyằ vid
-re fin
i-r
-r re
sit
dwem
hee
ba

Singulier.
|

33
58
-r
t
1reã
. eat
pers r

măn ǎtet
èy
-r ã -ra
vid ī -r
sit
-r
ibo
fin a

dwem
ha 1
ǎtetra
ou r a
-sit
ou

2º teat
-r>>e r
-e
man ătet
èyẻ
-r -re
vid i
sit
e
h
-rre
fin dwem
-re

Pluriel.
3e -rõ
tất rõ
mùn ătet
è
-rõy -rõ
vid -i
sit ro
oo
rdwem
-rh
fin ba
-rõ
>>>

teate mǎnī ǎtetě vid fini siti dwěrmi boer

cantare manducare
accaptare vendere finire dormire
sentire bibere
59 -

Remarques sur ce tableau. 7

Remarquons tout d'abord que la voyelle de la terminaison


infinitive a disparu presque complètement . Si elle n'a pas
totalement disparu à la 3º conjugaison des verbes en ĭ, seconde
forme ( siti) , elle tend néanmoins à le faire, car on dit aussi
bien sître (sintrè) que sîtīre (sintîrè) et la première de ces
formes est même la seule que je connaisse pour certains verbes ,
minti (mīti) mentir, par exemple : mître.
Le fait provient du phénomène bien connu de l'amuissement
des syllabes atones : d'ner pour diner (je donne), j' fais pour
ji fais (je fais) , etc.
De même, notons la persistance de la forme inchoative ih,
ji finihrě.
Nous devons ensuite observer la persistance, dans certains
cas, de la terminaison ey (èy) signalée à l'indicatif, à côté de sa
disparition dans d'autres formes, comme dans j'ach'tre, tout
aussi employées que les premières . Nous reviendrons plus loin
sur ce point en parlant des verbes irréguliers, au nombre
desquels , d'ailleurs, (ach'tèyrè) ǎchtěyre et (doim're) dwěmre
devraient logiquement être rangés .
Si nous en avons agi autrement , c'est tout simplement dans
le but de rendre ce tableau plus complet , en y inscrivant des
exemples généraux de cas particuliers . Ces deux exemples sont
là, en effet, pour rappeler que les formes signalées à propos
de l'indicatif présent se retrouvent au futur. Nous allons reve
nir sur ce point à propos des verbes irréguliers.

VERBES IRRÉGULIERS .

Il est ici nécessaire de comparer les remarques qui vont


suivre à celles émises au sujet des verbes irréguliers du présent
de l'indicatif.
1) a (a) bref devient à (0 ) long dans payî, payer, sayî,
essayer , etc.ji pây rè, ji sây rè.
- 60

2) è (e) dans pèser, peser, etc , devient eû (á) : ji peûs'rè.


Dans lèver, lever, etc. , il devient î (7) : ji lîv'rè , etc.
Dans hèrrer, pousser , sèrrer, serrer, etc. , il devient é long
(é) : ji hérr’rè, ji sérr’rè, etc.
3) i ( ) bref reste dans clignî, cligner , hiner, jeter, etc. , (cf.
l'ind . prés . ) ji clign’rè, ji hin’rè.
Il devient o bref (o) qui se nasalise même en on long (I) dans
dinner, donner, miner, mener : ji donrè ou ji donn'rè, ji monrè
ou min❜rè.
Remarquons cependant que l'o de donrè est peut- être étymo
logique . En tous cas, l'ancien français assimilait et disait dorrai
merrai.

4) o bref (0) s'allonge en ô long (ố), dans loyî, lier, etc. , ji


lông rè .
Il devient eû ( ) long . dans hover, balayer, dimorer , demeu
rer, etc. , ji heûvrè, ji d' meûr'rè, etc.
Il devient où (u) long, dans cori , courir, trover, trouver : ji
cour❜rè, ji trouv’rè .
5) Contrairement à l'ind . prés . ou bref se conserve et ne se
transforme pas en o bref, toumer , tomber, ji toum'rè, etc.
6) u (u) bref se conserve également, (cf. ind . prés . ) juner,
V
jeuner, ji jun'rè, strumer, étrenner, ji strum'rè.
7) La syncope de l'r + consonne a également lieu au futur .
Ex.: chèrgi, charger, ji chèg'rè ; wârder, garder, ji wâdrè.
Dans le cas de consonnes + r du futur : 1° la syncope n'a pas
lieu . Ex . , goster , goûter, ji gostrè ; 2º Le wallon prend la pre
mière personne du présent de l'indicatif (voir ce temps) et y
ajoute la terminaison du futur . Ex . ji gostêy'rè, je goûterai ;
j'infèl'rè, j'enflerai ; j'inteûr'rè j'entrerai , ji doûveûr'rè, ou ji
douv'rè, j'ouvrirai , etc.
8) Les verbes de la quatrième conjugaison son réguliers . Il
est à noter que l'r ne se redouble pas , beûre , boire , ji beûrè,
etc., sûre, suivre , ji sûrè , veûr, voir, ji veurè, etc.
- 61 -

VERBES ANOMAUX PROPREMENT DITS .

Fer (faire) est régulier, ji f'rè .


Aller tient son futur de ire : j'irè.
Èsse (être) a comme futur sèrè aux trois personnes (franç .
serai , seras, sera ; en vieux bourguignon serai , serais , serait) .
Cette forme nous reporte à l'infinitif primitif esser (essere) . On
trouve en vieux français la forme complète esserai .
Aveûr (avoir) fait ârè (aurai , auras, aura ; en vieux bourgui
gnon aurai ou arai , aurais ou arais , aurait ou arait) . Cette
forme est contractée de a(v)erai (habere - habeo).
Diveûr (devoir) donne deûrè et divrè ou d'vrè , avec prédo
minance de ces dernières formes non contractées .
Saveûr (savoir) fait sârè (cf. ârè de aveûr) . 1
Rire (rire) fait riy'rè, rarement rèyrè d'après la remarque c
des verbes irréguliers du futur (v . p . 192) .
Poleûr (pouvoir) fait pôrrè ( po(t)ere - habeo) ou même porrè.
Valeûr (valoir) fait vârè (va( l) ere - habeo) .
Voleûr (vouloir) fait vôrè et vorè (vo(l)ere-habeo).
Remarquons ici l'absence du d intercalaire français (voudrai , |
vaudrai) .
Un fait curieux à ce propos , c'est que le Wallon ignorant ,
voulant parler français , dira je poudrè (je pourrai) avec d inter
calaire, alors que ce d n'existe plus ni en wallon , ni en français .
Toujours cette grande loi d'analogie si forte dans toute langue
sans règles fixes .
B. - Conditionnel présent .
Ce temps est de même formation que le futur . Ses formes
sont composées de l'infinitif du verbe et de la flexion de l'im
parfait de aveûr (avoir) ; la terminaison est reûs, reût (ræ), aux
trois personnes du singulier et ris, rit, (rī) aux trois per
sonnes du pluriel .
Les différentes remarques que nous avons formulées à pro
pos du futur s'appliquant à ce temps, nous n'y reviendrons
pas.
5
1
Subjonctif
présent
.

PREMIÈRE
T
CONJUGAISO
C
CONJ ONJ
° ºROISIÈME
.24 N

t
. eat
pers
1re măn -ey
ǎtet băt i h
-fin dwem boes

2º teat măn ǎtet


e
-y băt fin
-i h dwěm bies
D

3e teat măn ǎ| tet


-e y > băt i
-h
fin dwěm bos

Singulier .
Voici le tableau de ce temps :

a
-|ă
ā măn
t sất
. tet
pers
1re bhit
|

fin
-us dwěrm
-ãs
buv

2º atet
teat
i
man
-és> fin
ébat
-ish dwěrm
-és
buv
CHAPITRE IX .

PRÉSENT DU SUBJONCTIF .

3º teat
man
-e
ǎtet
s băt
e
fin
i
-ěsh buv

dwěrm
es

Pluriel.
>>

siti possède outre sît qui se


forme irrég.; v . plus loin .
conjugue comme dwěm, une

vīd est irrégulier, v . plus loin .


teat
-e
mǎtet
ănī ě băt fini bár
dwěrmi
―― 64 -

Remarques sur ce tableau.

Les formes du singulier se rapprochent, pour beaucoup de


verbes, des forrnes du même nombre au présent de l'indicatif.
Toutes les formes de la première conjugaison sont dans ce cas ,
ainsi que celle en e muet du présent de l'indicatif de la
seconde et troisième conjugaison.
Pour les autres formes (vinde, sinti et beûre) qui , au pré
sent de l'indicatif, ont respectivement vind , sint et beûs ,
nous voyons s'introduire une s, caractéristique du subjonctif ;
elles deviennent vinse, sinse et beûsse .
Cette s, que l'on trouve dans quelques formes du singulier ,
devient générale au pluriel , où toutes les conjugaisons la
possèdent dans les terminaisons anse, ésse ou îsse , èsse. D'où
vient cette sifflante si caractéristique ?
Nous croyons devoir l'expliquer ainsi :
Des quatre temps du subjonctif latin , deux seulement se sont
transmis au français , étymologiquement parlant . L'imparfait
et le parfait ont disparu .
Des deux autres temps , l'un , le présent , a donné des formes
qui se sont peu à peu confondues avec les formes correspon
dantes du présent de l'indicatif. Et, comme le fait remarquer
Burguy (1) , cette confusion s'est surtout faite dans la vieille
langue . L'établissement des règles fixes du français actuel a
permis , par après , de mieux différencier les deux temps .
L'autre, le plus- que -parfait , est donc devenu , de par la dis
parition du présent comme temps du subjonctif, caractéristique
de ce mode . Ce phénomène a été singulièrement facilité par le
fait que le plus - que- parfait du subjonctif latin possédait un
trait propre, bien saisissable à première audition , trait qui
se retrouve dans les quatre conjugaisons ; je veux parler de la
sifflante ss.

니 (1) Grammaire de la langue d'oil, I, p. 237 .


- 65 -

La preuve de la force de ce trait , c'est qu'il s'est transmis


intact dans toutes les langues d'origine romane, à l'imparfait
du subjonctif (Ital . cantassi , Esp . cantase, Portug. cantasse,
Prov. chantés (seconde pers . chantesse), Valaque cuntasem
(pl. q . p . ind . ) Franc . chantasse.
Or ce trait, qui , sous l'influence de règles fixes , s'est peu à
peu localisé dans l'imparfait du subjonctif de ces différentes
langues , a peu à peu envahi , en wallon , le présent du subjonctif
et lui a, si je puis m'exprimer ainsi , imprimé la marque carac
téristique du mode en cause .
La sifflante a permis d'éviter une confusion , dont la tendance
est très marquée en wallon , entre l'indicatif et le subjonctif.
En effet, des verbes comme batte (seconde conjugaison) et
doirmi (troisième), ainsi que les verbes de la troisième à
forme inchoative ih (isc) confondent les deux modes , ce qui n'a
pas lieu en français . Nous remarquons en outre qu'au pluriel,
l'i caractéristique du subjonctif en ancien et en nouveau fran
çais fait complètement défaut en wallon : qui nos chantanse,
que nous chant(i )ons ; de là une confusion certaine , inévitable .
Poussant toujours , par analogie, les choses à l'extrême , le
wallon a appliqué cette caractéristique à des verbes comme
vinde, sinti et beûre, etc. , qui eussent pu , sans inconvénient ,
donner qui ji vinde, qui ji sinte, et qui ji beûve, formes que
les deux premiers verbes possèdent aussi d'ailleurs . Mais les
formes habituelles de ces verbes sont : qui ji vinse, quiji sinse
et qui ji beûsse.
A côté de la forme en isse (is) (2° pers . plur.) des verbes en
î (7) (ier) de la première conjugaison du wallon liégeois , se
rencontre une forme en ésse (és) fréquente dans d'autres dia
lectes : qui vos magnésse (que vous mangiez).
Remarquons aussi la forme en èsse (es) de la 3e pers . plur.
qui est très caractéristique du temps .
Ce qui me confirme encore dans l'opinion émise ci - dessus ,
c'est que certains dialectes (Malmedy entre autres) possèdent ,
- 66 -

au lieu de la sifflante , un h aspiré , provenant , comme on sait ,


de ss voy . (cf. ahe de l'imparfait du subj . V. plus loin) .

VERBES IRRÉGULIERS .

Nous diviserons les verbes irrégu liers, comme au présent de


l'indicatif, en
1º Verbes éprouvant certains changements de la pénultième
lorsqu'elle devient accentuée.
2º Verbes anomaux proprement dits .
1° Nous admettons , au subjonctif présent, toutes les caté
gories proposées au présent l'indicatif (V. p . 176) .
1 ) a (ă) = â (ā ou д) .
2) è (ě) eû (œ) î (7), ou é (é) .
3) i (i) = è (è ) et o (on) [ à (6) ]
4) 0 (0) = ô (ő), eû (œ), où (u) .
=
ou (u) 。 (0) .
5) u (u) = eu (œ) et eû (a) .
6) Cas de deux consonnes .
1º Dans r + cons . - syncope de l'r.
2° Syncope de la seconde consonne .
3º On intercale entre les deux consonnes è, & ou Ŏ . (On suit
aussi la règle de èy final ) .
Dans la seconde conjugaison , nous trouvons la catégorie des
verbes qui intercalent une s au singulier . Ce sont les verbes pro
venant d'un radical latin en ndre ou ngere (prendere , scandere,
plangere , stringere, etc ) qui font ndre en français, et (id) inde
en wallon , l'n nasalisant la voyelle précédente.
Ces verbes sont : prinde (prendere ) , dishinde ( discendere),
disfinde (disfendere ) , pinde ( pendere) , distinde (de exstinguere) ,
finde (findere), vinde (vendere) , plainde ( plangere) , rinde
(rendere), strinde (stringere) et tinde (tendere) ; en outre ,
crainde (tremere) .
A ces verbes, nous en ajouterons trois de la 3° conjugaison ,
ce sont tini (tenere) , vini ( venire) et sinti (sentire) , qui ont
également tinse, vinse, sinse (ou sinte) .
67 -

VERBES ANOMAUX PROPREMENT DITS .

Fer (faire) , intercale l's caractéristique et donne faisse aux


3 pers . sing. et est régulier au pluriel , fanse, fésse, fèsse.
Aller (aller) emprunte le singulier de son subjonctif présent f
à vadere et donne vasse, le pluriel à ambulare : allanse,
allésse, allèsse . Le français moderne, lui , emprunte toutes ses
formes à ambulare .
La forme vasse correspond à l'ancien français voise (voisse),
que l'on rencontre en même temps que aille, ale et même
alge et auge.
A côté de cette forme wallonne , s'en rencontre une autre :
vâye (vòy), va(d)am .
Esse (être) . Sa flexion est : seûye (say) au sing. et sèyanse
(seyãs), sèyésse (sèyěs), sèyèsse (sèyès), au pluriel (franç . soie ,
soyons) . Cet eû (œ) wallon correspond au français oi ( pois
= meûs , froid - freûd, avoir = aveûr , etc. )
= wall . peûs , mois
Aveûr (avoir), fait âye (òy), âyanse (òyãs), âyésse (òyës) et
âyîsse (òyīs), âyèsse (òyès), avec l'y euphonique . On trouve
aussi avanse (ăvās), avésse (ávěs), et surtout avèsse (ăvěs)
à la 3° pers. plur .
Les verbes de la quatrième conjugaison intercalent régulière
ment une s devant l'e muet . On pourrait dire qu'ils remplacent
I'r terminal de l'infinitif par cette s . Le pluriel observe la règle
des consonnes étymologiques (v . p . 178) Ex .: beûre, qui ji
beûsse ; qui nos buvanse , etc. Dire (dire) fait dèye (anc . franç .
die) .
Les verbes diveûr et saveûr gardent la contraction du
présent de l'indicatif au singulier et font deûsse et sésse .
Rire (rire) fait rèye.
Poleûr (pouvoir) , valeûr ( valoir ) , voleûr (vouloir) ont , comme
quelques-uns des verbes précédents, un subjonctif suffisam
ment caractérisé par l'y euphonique ou de liaison et par les
changements que ce son a apportés à la voyelle radicale .
Ils ont pôye (puisse) , vâye et vâsse (vaille) et vôye (veuille) .
CHAPITRE X.

IMPARFAIT DU SUBJONCTIF .

L'imparfait du subjonctif et le parfait de l'indicatif sont deux


temps corrélatifs . Ils se sont extraordinairement simplifiés
en wallon ; chacun d'eux ne possède plus qu'une terminaison
commune aux quatre conjugaisons , terminaison empruntée à
la première conjugaison .
La terminaison est ahe (ǎh) . (¹) . Je signalerai ihe, à Esneux ,
dans prinde (prendre) prindihe.
On pourrait dire , grammaticalement parlant , que l'imparfait
du subjonctif dérive du parfait de l'indicatif en ajoutant à ce
temps le suffixe he.
Mais , concurremment avec cette forme ahe, en harmonie avec
les règles phonétiques , il existe une seconde forme en asse (ăs),
qui n'est pas étymologique, d'après moi , mais qui paraît plutôt
être d'introduction française.
Le pluriel est en ahîs , ahît (ǎhi) (assions, assiez , assent) ; il
n'admet pas la forme en assis . L'îs correspond à ions, iez
(cf. anc . franç . le présent mang(i)ez, magnîz, et l'imparfait et le
conditionnel où l'7 a la même valeur).
Je signalerai encore la terminaison îhe, au lieu de ahîs , dans
certains sous - dialectes ; Ex .: I fâreût qu'vos magnîhe. Je la
considère comme une corruption .
Nous ne tracerons pas le tableau de ce temps , vu sa
simplicité. Les quatre conjugaisons font régulièrement :
teth , mănăh, ǎtetǎh.
Vidah, bătăh, finihah.
Sitǎh, dwěrmăh, bŭvăh.

(¹) Cet h est conforme à la règle phonétique spirante + voyelle =h (ou mieux
ss + palatale = h).
- 70 -

Remarquons , avant d'aborder les verbes irréguliers , que le


wallon n'a pas confondu , comme l'a fait le français , le subjonctif
présent et le subjonctif imparfait des verbes à forme inchoative
de la troisième conjugaison . En effet, le français a la forme
que je finisse pour ces deux temps . MM . Delboeuf et Roersch ,
dans leurs éléments de grammaire de la langue française,
semblent admettre que la particule intercalaire inchoative a
disparu au futur et au subjonctif imparfait . Ils écrivent , en effet ,
finirai comme sentirai, en soulignant irai, tandis qu'ils
écrivent fin-iss-ais ; puis fin- iss-e au subjonctif présent et
finisse au subjonctif imparfait . On pourrait conclure , de la
conjugaison wallonne, que cette particule ne disparaît nulle
f
part et que l'i dans finirai et dans finisse lui appartient en
propre, puisqu'en wallon on a fin -ih-rè, fin-ih-ahe (') .
En est-il de même en français pour finisse (subj . imparfait .) ,
par ex .; en d'autres termes l'i appartient - il à la particule isc
ou à la terminaison isse ? La contraction est si forte que je n'ose
répondre à pareille question .

VERBES IRRÉGULIERS .

Je renvoie, pour ces verbes , aux remarques faites à propos du


parfait de l'indicatif.
Èsse (être) donne fouhe, fourihe, èstahe, et aussi sèyahe.
Aveûr (avoir) donne euhe (parfois eûye), eurihe, avahe.
Remarquons , ici comme plus haut, que h peut être remplacé
par ss dans les formes précédentes .
Stürzinger signale encore une forme en ahîhe, ex . : věyăhîh,
qui se trouverait à Malmedy . Je crois qu'elle est assez spéciale
et ne se trouve que là .

(¹) Cette interprétation contrarierait un peu la théorie de la formation composée


du futur. (Infinitif + flexion de avoir). Aussi verrais-je avec plaisir dans fin-ih-rè
un idiotisme phonétique wallon.
CHAPITRE XI .

IMPÉRATIF .

L'impératif emprunte toutes ses formes au présent de l'indi


catif. Pour les quatres conjugaisons , le singulier est le même
que celui de ce temps .
thất, mặn , ăt tèy, vĩ , bắt, finžh , sĩ , đằm , et b .
Le pluriel également :
chãtã, chatě, mănã, măṇī, etc.

VERBES IRRÉGULIERS .

Parmi les verbes irréguliers , toutes les remarques appli


cables au présent de l'indicatif le sont à l'impératif.
Exceptions. -- Aller possède à l'impératif singulier la même
forme qu'au présent du subjonctif ; il a vasse à côté de la
forme normale va . Ce vas est à rapprocher de l'ancienne forme
en oi du sud - ouest de l'Ile de France , forme en oi que l'on
écrivait presque toujours avec une s pour la distinguer du
présent de l'ind . Ex . : vois (du verbe voir) . La forme wallonne
semble nous indiquer que cette s, dans vois , était prononcée
alors pour établir la distinction entre subjonctif et indicatif
dans la conversation .
Ne faudrait- il pas plutôt voir dans la forme wallonne la
forme interrogative vasse ? ( vas - tu ?) introduite par analogie à
l'impératif.
Le pluriel fait régulièrement allans, allez.
Signalons encore ici les formes jans et jez ( eamus , eatis ?)
- 72 -

(voir jont, p . 181 ) que nous rapprochons de ire et qui rendent


les mots français allons ! allez ! employés comme interjection .
(Le mot herbe se prononce en wallon yeb et jěb).
Grandgagnage rapporte la forme jans au flamand gaen .
Èsse (être) et aveûr (avoir) ont aussi à l'impératif la même
forme qu'au subjonctif présent .
Singulier seûye et âye.
Pluriel sèyans et âyans .
Le français n'agit d'ailleurs pas autrement (sois , aie , soyons ,
ayez).
CHAPITRE XII .

PARTICIPES .

A) Participe présent.

Le participe présent , en wallon comme en français, a pour


terminaison ant (a) , représentant tout ensemble le ans et le
andum (gerondif) latin . Le sens de ce dernier temps n'est guère
resté que dans la forme tot chantant, traduction du français
en chantant.
Les formes en ens et endum latines ont complètement dis
paru en wallon comme en français .
Dans les quatre conjugaisons , cette terminaison ant du par
ticipe s'ajoute directement au radical (à l'exception de la forme
inchoative de la troisième conjugaison , en ih) . On a donc :
chantant, magnant, ach'tant, vindant, battant, finihant, sin
tant, doirmant, buvant.
Dans la quatrième conjugaison , nous retrouvons les quatre
catégories de verbes établies au présent de l'indicatif (v . p . 179) .
Ce sont les verbes qui intercalent : 1° h (cûhant, cuisant) ;
2º v (buvant, buvant) ; 3º l (molant, moulant) et 4º y (riyant,
riant) .
Fer (faire) et aller (aller) ont régulièrement fant et allant.
Èsse fait èstant (essere , êstre, avec le t intercalaire).
Signalons la forme gérondive (?) d'èstant, employée comme
locution prépositive . Ex . : d'èstant so l' soû, de sur le seuil ,
d'èstant chal, d'ici .
Aveûr possède deux formes avant et âyant (òya) (franc . ,
ayant) . La première est la forme régularisée (cf. la forme ava
du parfait de l'indicatif) .
74 ―

Pour les quelques autres verbes anomaux proprement dits ,


cf. le pluriel de ces verbes au présent de l'indicatif. Ex .: di
vant, polant, savant, etc.

B) Participe passé.

Les participes passés latins en atus et itus sont passés en


wallon et ont donné é (ě) , féminin êy (èy) et i (ì) , féminin èye
(ey) ; etus n'est pas plus passé en wallon qu'en français ; uitus,
par contraction ūtus l'a remplacé de bonne heure et a donné le
français u , ue et le wallon ou (u), féminin owe (ow) .
Cette dernière forme , par suite sans doute de sa consonnance
plus caractéristique, s'est infiltrée dans la troisième conju
gaison wallonne où l'on aurait crû trouver i (ì), (itus) . C'est
ainsi que le wallon a doirmou (dormi) et sintou ( senti) , alors
qu'en français l'i étymologique s'est conservé. En français, on a

aussi des exemples fréquents de l'u . Exemple : courir = couru, *
anc. franç . querir = queru (qwèrou , en wallon) .
.
Il ne reste plus , en wallon , que la flexion mixte de la troisième
conjugaison , avec sa particule inchoative intercalaire ih, qui

1 conserve encore l'i ( ) au participe passé . Il me paraît évident


que c'est la particule inchoative elle- même qui a décidé du
sort de cet i . Ex . : fini, bati, etc.
Les formes du participe passé sont donc :

PREMIÈRE CONJUGAISON .

Masc . tất, mǎnī, ǎteté.


Fém . teatey, măney (ou è̟y) , ǎtetèy.

DEUXIÈME CONJUGAISON.

Masc . vidă , bătă.


Fém . vidow, bătŏw .
i
75*

TROISIÈME CONJUGAISON .

Masc . fini, sītǎ, dwěrmů.


Fém . finey, sitow , (e)dwěrmow .

QUATRIÈME CONJUGAISON .

й et ow ; mais le plus souvent un participe fort, reste de


l'ancienne flexion forte (pris, bu, lé) . Nous en reparlerons plus
loin, à propos des verbes irréguliers .

REMARQUES SUR CE TABLEAU .

La longueur ou la brièveté de l'è ouvert des participes


féminins est variable et dépend de la diversité des dialectes .
En général ( pour le patois de Liége , notamment) , é (ě) donne
êye (èy) long, î (7) long ou i (i) bref donne èye (ey) bref.
L'i (i) bref donnant èy (ey) se comprend facilement . Il cor
respond au français i , féminin ie, (cf. Marie = Marèye, fille =
fèye, etc.) Mais dans l'î (7) long (= ié) donnant èye (ey) bref,
doit-on voir une analogie avec la première forme ?
L'î (7) long dans magni s'explique par le trait ié = î (yě — î)
(anc. franç . mangié, wall . magni) dont nous avons parlé anté
rieurement . Nous devons cependant remarquer que certains
dialectes (Roclenge- sur- Geer, notamment) ne connaissent pas
ce phénomène et ont é (é) (magné), au lieu de î.
Signalons encore une confusion entre les infinitifs en 7 long
et i bref, confusion qui a certainement donné lieu à des par
ticipes en ou (u), correspondant à des verbes en ī de la pre
mière conjugaison . Ex .: ăbăhĩ, ăbăhă, etc.
Les verbes pinser (penser) et vesser (vesser), ont par attrac
tion pinsou et vessou. Le premier possède aussi la forme
pinsé, plus usitée.
- 76 -

L'y de èye est l'y euphonique ou de liaison , de même que le


w , intercalaire de owe que l'on rencontre dans nombre de mots
" (rowe = rue, crowe = crue, etc. ) . De là la prononciation
française défectueuse, si souvent signalée chez les Wallons , de
mari(y)e, aimé(y)e, ru(w)e, ému (w)e, etc.

VERBES IRRÉGULIERS .

En premier lieu viennent les verbes ayant une forme que l'on
pourrait appeler forte, à côté d'une autre forme régulière que
possèdent la plupart d'entre eux.
Parmi ces verbes , nous rencontrons fer, de la première
conjugaison , dont le participe passé est fait.
Dans la seconde conjugaison , nous ne trouvons plus que
prinde, qui a pris à côté de prindou.
La troisième conjugaison possède :
Mori qui donne morou et moirt.
Dovri (ouvrir) = dovrou et doviért ou droviért (deopertus) .
J'ai rencontré en outre la forme corrompue doviè.
Covri (couvrir) = covrou et coviért (coopertus) .
Quant à la quatrième conjugaison , nous l'avons déjà dit, c'est
la conjugaison des exceptions.
Nous y voyons :

dire = dit, fém. dite. dire.


dûre = dût et dûhou, f. dûhowe. plaire à .
distrûre = distrût et distrûhou , f. owe. détruire .
lére = lé et léhou, f. léhowe. lire .
plaire = plaire.
plait et plaihou .
taire == tait et taihou. taire .
cûre = cût, f. cûte (parfois cuhou) . cuire .
lûre = lût. luir.
beûre = bu et bèvou, f. owe . boire .
- riçu recevoir.
riçûr et riçuvou .
plour = ploû et plovou (?) pleuvoir .
--- 77 -

sûre = sût et sûvou. suivre.


bour = bolou, f. owe.
- bouillir.
moure = moû, et molou. moudre.
clre = clôs et cloyou. clire .
scrire = scrit, f. scrite (parfois scrise) . écrire.
creure = croire .
crèyou .
veûr = vèyou. voir.
assîr = assis et assiou. asseoir.
hére = hèyou (parfois hayou) . haïr.
heûre = hoyou. secouer.
keûre = kèyou, voir d'un bon œil ce
qui arrive à quelqu'un .
braire = braît. crier (braire).
ôr = oyou. entendre (ouïr) .

Le féminin de tous ces participes est très rarement employé


(sauf pour quelques verbes), le wallon n'aimant en général pas
la forme passive . Je ne connais pas de féminin à braît, à oyou ,
à kèyou, à vèyou, à bu, etc. , qui sont pourtant des verbes
transitifs . Le wallon tourne toujours sa phrase à l'actif, de façon
à éviter les féminins .
Parmi les verbes anomaux proprement dits , fer a été traité
plus haut ; aller fait régulièrement allé et allêye.
Esse a comme participe passé stu (ou situ avec l'intercalaire ,
lorsque le mot précédent se termine par un e muet ou par une
consonne sonnante) . Remarquons l'absence de l'e prosthétique
(stare). L'u (ŭ) et ou (u) dans certains dialectes est copié de
l'ou (u) du participe des autres conjugaisons . Cet u est néan
moins remarquable , la forme régulière devant être sté (stě)
(status) , qui existe dans certains dialectes . Le Namurois a sti
(sti).
Aveûr possède plusieurs formes : avu, d'un radica hab(u)itus
et avou ; puis awou, par syncope du v et intercalation du w
bien connu ; puis oyou . Nous expliquons cette dernière forme
6
-78 -

par la syncope de v et par l'intercalation d'un y euphonique ,


fait connu .
Les autres verbes anomaux donnent :
diveur = divou (d'vou). devoir.
saveûr = savu, savou, sa(w)ou. savoir.
rire = ri (dans qq . dial . ( Visé) riyé provenant d'un
infinitif riyer. rire .
poleûr = polou. pouvoir.
valeûr = valou. valoir.
voleur = volou. vouloir.
oiseûr = oisou . oser.
CHAPITRE XIII .

INFINITIF .

Nous avons déjà déterminé , au commencement de ce travail ,


les différentes terminaisons de l'infinitif présent et nous en
avons déduit la répartition des verbes wallons en quatre con
jugaisons.
La conjugaison en are latine a donné er (e) (ancien wallon
eir et er), ou bien i (7) long correspondant à l'ancienne langue
ier ou même ir, comme dans aidir, laisir, et répondant à la loi
de Bartsch-Mussafia.
La conjugaison en ere latine a donné en wallon e muet ,
(re franç .) et re ou r, caractéristique de notre quatrième
conjugaison (' ) .
Celle en ire a donné i ( ) . Nous avons signalé ( p . 155) , à
propos de la répartition des verbes forts dans les quatre conju
gaisons , des exemples de transgression des règles précédentes .

(') A ce propos , il est intéressant de constater l'hésitation de


l'ancienne langue française entre oir et re d'un côté et entre
oir et ir de l'autre , et par suite entre ir et re. Cette hésitation
est d'ailleurs bien permise si l'on songe aux fortes contractions
auxquelle sont été soumises les terminaisons infinitives latines :
1° pour permettre , par exemple, à certains verbes de changer
de conjugaison ; 2° pour donner des terminaisons vocaliques
seules , comme er (e) en français et er ( e) et î (7) en wallon, Ir
latin ayant disparu , et même pour disparaître complètement
(2º conj . wallonne) ; 3° pour donner par exemple , d'un côté voir
(videre), de l'autre rire (ridere), plaire et plaisir (placere),
courre et courir (curerre), etc.
Nous allons revenir sur ces cas à propos des infinitifs
doubles de certains verbes wallons .
――― 80

Un cas intéressant est celui de facere donnant le wallon fer.


La syncope du c latin est très fréquente dans ces sortes de
verbes (comme celle du d, vi(d)ere, pla(c)ere) . Lors de la
formation romane , a-t - on songé à un primitif latin fare ou bien
à un autre, fari ( dire) ( 1) ? En tous cas, le français a quelque
chose d'analogue au wallon , puisque le futur de faire est ferai
qui semble admettre un infinitif fer.
Il est un certain nombre de verbes wallons qui possèdent
plusieurs formes infinitives . La plupart en ont deux , dont l'une
appartient à ce que nous avons appelé la quatrième conjugaison
wallonne, qui se termine par r ou re.
Ces deux formes d'un même verbe ( qui se retrouvent presque
toujours dans l'ancienne langue avec d'autres formes inconnues
au wallon) , ces deux formes, dis-je, prouvent l'hésitation de la
romane en formation entre les différentes conjugaisons latines .
Nous observons plusieurs catégories de verbes à deux infi
nitifs .
1re CATÉGORIE .

1º Les verbes pour lesquels l'hésitation de la langue en


formation est bien marquée ; on retrouve, en effet , pour presque
tous ces verbes , deux ou plusieurs formes dans les anciens
textes . Nous diviserons cette 1" catégorie en deux .
a) Verbes qui ont adopté la première (en î) et la 4º conjugai
son wallonne.
Videre (franç. voir) ; ancien français voir et veir, wall . veûr
et vèyî.
La première forme wallonne dérive directement de vi (d)ere
(cf. pi(s) um, pois , fi (d)es, foi , etc. ) On voit que la seconde
forme, qui s'est prononcée vè- ir , a intercalé en wallon un y
euphonique et a syncopė I'r d'après la règle générale ; vè -y-î(r)

(¹) Faire dans les anciens textes a aussi le sens de dire , mais Burguy attribue ce
sens à facere verba.
— 81 -

(cf. aidir-aidier des anciennes chartres wallonnes citées par


Wilmotte (loc . cit. ) , donnant aidi en wallon moderne) . On
trouve encore , pour videre , deux autres formes vèye, par
syncope phonétique très facile de l'î, et veûye (vœy) par idio
tisme phonétique .
Audire (ouïr), ancien français oir, ouïr , donne en wallon
oyî et ôr d'après les mêmes règles que videre . Il n'y a pas loin ,
phonétiquement parlant, entre oïr et or.
Laxare (laisser) , anc . franç . laier , laisier (chartres wall .
laisir) en wallon lèyi et laire. L'r de er infinitif français s'étant
anciennement prononcée , on passe facilement de franç , laier à
wall. laire. Lèyi s'explique comme vèyî.
b) Verbes qui ont adopté la troisième et la quatrième con
jugaisons wallonne .
Currere (courir) , anc . franç . et franç . mod . courir et courre,
donne également en wallon corri et courre. ( Ex . : Vasse courre
arègî, litt. vas courre enrager.)
Querere (querir, chercher) anc . franç . querre, quire, querer,
en wallon queri et qwire . ( Ex . : Vasse m'èl qwire, vas- t- en me
le chercher) .
Moriri (mourir) anc . franç . morir, wallon mori ; je ne suis
pas absolument sûr que la forme moure existe.

2me CATÉGORIE .

Les verbes suivants ont aussi deux formes qu'ils doivent à


l'attraction et à l'analogie . Certains d'entre eux pourraient peut
être rentrer dans la première catégorie . L'étude attentive des
vieux textes wallons élucidera le point.
Nous subdivisons aussi cette seconde catégorie en deux :
a) Verbes qui ont adopté les 1º et 4° conjugaisons wallonnes .
Desviduare (dévider) anc . franç . desvuidier , wallon divôdî
et divôr.
82

Audere-ausare (oser) , anc . franç . oser, wallon oiser et oiseûr.


Ridere (rire) , wallon riyer (Visé) et rire .
Ponere (pondre) , anc . franç . pondre, wallon pouner et ponre.
Minare (mener) , anc . franç . mener, wallon miner et monre .
(L'attraction est évidente ici . )
b) Verbes qui ont adopté les 3º et 4° conjugaisons wallonnes .
Tenere (tenir) , anc. franç tenir, wallon tini et tinre.
Venire (venir), anc . franç . venir , wall . vini et vinre (¹) .

3me CATÉGORIE .

Nous devons ajouter à cette liste deux verbes à étymologie


germanique, ce sont : haïr, en wallon hayi et hér , ainsi que
attendre , en walion rawârder et rawâde (c'est - à - dire regarder
si quelqu'un ne vient pas ; ce double sens est bien connu) .
Nous avons encore en wallon une série d'autres infinitifs
que l'analogie seule , ou mieux la confusion des formes verbales ,
explique .
Ce sont les verbes remarquables où le participe passé sert
d'infinitif.
Deoperire et cooperire (ouvrir, couvrir) wallon dovri, covri
ou bien doviért (droviért) et coviért. J'ai aussi trouvé la forme
abrégée doviè.
Habere (avoir) = aveûr et avu .
Sapere (savoir) donne en wallon saveûr et savu , et aussi
deux autres formes probablement plus primitives : sèpeûr et
sèpi.

(') Remarquons que ces deux verbes n'intercalent pas de d au futur comme ils
le font en français : ji vinrė (je viendrai) et ji tinrẻ (je tiendrai).
TABLE DES MATIÈRES .

Pages.
Préface . 5
Ouvrages consultés. 7
Avant- propos. — Orthographe. · 9
Orthographe phonétique wallonne. • 11
CHAP. I. Modes de simplification de la conjugaison wal
lonne 13
CHAP . II. Division en conjugaison 19
CHAP. III. Quatrième conjugaison wallonne. - Répartition

223
des verbes forts
CHAP . IV . Tableau de la conjugaison wallonne. - Forma
tion des temps. - Règles de flexion. - Forme
interrogative • 27
CHAP. V. Présent de l'indicatif 39
CHAP. VI. Imparfait de l'indicatif 51
CHAP. VII. Parfait de l'indicatif 55
CHAP. VIII. Futur et conditionnel · • 57
CHAP. IX . Présent du subjonctif . 63
CHAP. X. Imparfait du subjonctif 69
CHAP . XI. Impératif • • 71
CHAP. XII . Participes • • 73
CHAP. XIII . Infinif • 79
ESSAI

DE

GRAMMAIRE WALLONNE
I

"
Julien DELAITE

ESSAI

DE

GRAMMAIRE WALLONNE

DEUXIÈME PARTIE

ARTICLES , SUBSTANTIFS , ADJECTIFS ,

PRONOMS & PARTICULES DE LA LANGUE WALLONNE

LIÈGE

IMPRIMERIE H. VAILLANT- CARMANNE


8, rue St-Adalbert , 8 .

1895
DAŽĀ
PRÉFACE .

Les mots de la langue wallonne autres que les substantifs ,


les adjectifs et les verbes sont nombreux et variés.

A ce point de vue, le wallon ne le cède en rien à sa langue

sœur, la langue française.

Le vocabulaire général wallon n'est certainement pas aussi


étendu que le vocabulaire français ; mais il est à remarquer que

celui-ci l'emporte surtout par l'ensemble de ses substantifs , de

ses adjectifs qualificatifs et de ses verbes, qui ont souvent une

origine savante, et non par ce que l'on pourrait appeler les


petits mots de la langue (pronoms, articles, particules, etc.) .

Les idées scientifiques et philosophiques élevées n'ont pas

d'expressions pour les rendre dans les dialectes populaires.


D'autre part, les mots qui constituent pour ainsi dire le ciment

de la phrase peuvent avoir en partie disparu , par corruption

et par confusion , dans certains patois ; mais notre wallon, qui

est une langue, les a conservés très nombreux .


- 6 ――

Il a même multiplié les formes de ces petits mots et

a rendu par le fait cette langue d'une souplesse remarquable.

Des élisions adroites et l'emploi de lettres intercalaires


donnent à la phrase et surtout au vers de la légèreté et une

élégante facilité , en faisant se souder les mots entre eux.

Cette accumulation des petits mots constitue précisément la

richesse du wallon et le dédommage, jusqu'à un certain point,


de sa pauvreté en vocables abstraits ou savants.

Le wallon est assez riche et de mots et de tours pour consti

tuer une langue littéraire, c'est- à- dire vouée à la littérature ,

douée d'une grande originalité et capable d'atteindre aux

sphères artistiques les plus élevées .


OUVRAGES CONSULTÉS .

BULLETINS et ANNUAIRES de la Société liégeoise de littérature


wallonne, coll . complète.
G.-F. BURGUY. Grammaire de la langue d'Oil. 3 vol
1856.
J. DELBŒUF et L. ROERSCH . Éléments de grammaire française.
I. DORY . Wallonismes.
F. DIEZ . Grammaire des langues romanes, trad .
Marcel Fatis et G. Paris.
GRANDGAGNAGE et SCHELLER. Dictionnaire wallon et autres diction
naires wallons .
LITTÉRATURE WALLONNE ancienne et moderne, liégeoise , namuroise,
verviétoise , etc.
L. MICHEELS . Grammaire élémentaire liégeoise, 1863.
M. WILMOTTE. Etude de dialectologie wallonne. Roma
nia, t. XVII , p . 452 .
ID. Extrait des études romanes, dédiées
à Gaston Paris , 1891 , p. 239.
Etc.
AVANT- PROPOS .

1
ORTHOGRAPHE .

Nous avons adopté, quand le besoin s'en fesait sentir,


l'orthographe phonétique , qui nous paraît très commode et
très claire , lorsqu'il s'agit d'une langue parlée , dépour
vue de documents écrits suffisants sur lesquels on puisse
tabler scientifiquement. Nous donnons ci-après cette ortho
graphe dont les signes sont empruntés en grande partie à la
Revue des patois Gallo-Romains de J. Gillieron et l'abbé
Rousselot, aujourd'hui disparue . Nous avons supprimé certains
caractères , inutiles en wallon , et nous en avons proposé
d'autres .
Nous emploierons cette orthographe partout où la compré
hension du texte l'exigera . Dans les autres cas , nous nous
servirons de l'orthographe analogique française .

La première partie de cet ouvrage, traitant du Verbe wallon,


a paru en 1892 , dans le tome XIX , p . 135 , des Bulletins de la
Société liégeoise de littérature wallonne et en tirés à part de 82
pages , sortant des presses de M. Vaillant- Carmanne .
Nous remercions notre vaillant imprimeur de l'obligeance
qu'il a eue de faire fondre des caractères nouveaux expressé
ment pour cet ouvrage et du soin qu'il a, comme d'habitude ,
apporté à son impression .
ORTHOGRAPHE PHONÉTIQUE WALLONNE .

VOYELLES .

1. PURES .
ǎ = a dans wall . papa , dans franç . papa .
ā = â diâle (diable), D châle.
ĕ = è > vète, >>> verte .
è = ê (ai ) » laid ( laid), » même.
= lét (lit), D thé .
é = D mére ( mère), chantée .
i mi (moi), fourmi.
ī î > pid (pied ) , lire .
ŏ - 0 » D pot.
pot,
ò ou à ――― â (dial . liég . ) âbe (arbre) , >>>> mort.
ö au D sau (soûl ) , chaud .
f Ô sort (sorte), >> clòre.
=

ŭ D bu, >> bu.


ū û D sûr, >> sûr.
=
<

ช้ ou » piou, >> pou .


น - ой D > jour.
joû,
& eu D leune ( lune), » le.
8486

œ (¹) - eu D D heure .
meur (mur),
о eu D feu, >> feu .
―――― eû > meûr (mur) , » eû long.
2. NASALES.
1818
40
+8
110
10

- an D tant, » tant.
ã = an >> manche , >> manche.
in matin, D matin .
= în (ê) » même, > pingre .
= on >>> pont, >> pont .
on > songue (sang) , >> oncle .
= un >>> jeun , » jeun .

(1) N'existe pas à Liége, mais bien dans certains villages à déterminer.
ADDENDA ET CORRIGENDA .

P. 10, ligne 13, ajoutez å est le son intermédiaire entre


ā et d
P. 10 , ligne 14 , avant au , ajoutez ô, et au lieu de sau,
lisez số.
P. 10 , ligne 23, au lieu de eû long, lisez rugueuse.
P. 11 , ligne 1 , au lieu de un long, lisez défunte.
P. 11 , lignes 13 et 15 , au lieu de velère, lisez vélaire.
P. 11 , ligne 17 , ajoutez , comme exemples wallons : chèrvante,
servante, et le namurois maujonne, maison .
P. 11 , avant- dernière ligne, au lieu de pour l'aspiration
moins forte de dishîd, lisez pour la spirante contenue dans
le mot dishint (descendre) .
P. 32 , avant dernière ligne , au lieu de mure, lisez mûr.
P. 35, ligne 21 , après coi, ajoutez tranquille.
P. 55 , en haut , ajoutez en note : M. Wilmotte , dans Litteratur
blatt. f. german. u. roman . Philolog . 1893 , col . 11 , rapproche
ces formes de l'anc . franç . as- te sur le modèle de qui elles
auraient été copiées.
P. 55 , ligne 22, ajoutez cette suppression a toujours lieu ,
lorsque le verbe est précédé de l'adverbe pronominal ènne.
Ex. Ennè prind. Il en prend .
Enne a. Il en a.
P. 72 , ligne 11 , ajoutez voir la remarque de la p . 55 ,
ligne 22 .
P. 73 , ligne 16, après teune, ajoutez et par tunque (rare) .
P. 77, avant- dernière ligne , au lieu de va, lisez vas.
P. 80 , ligne 17 , au lieu de d'â- d dizeûr , lisez d'â- d'dizeûr.
P. 87 , ligne 6 d'en bas , au lieu de to les ami , lisez : tos les
ami...
11

- un »
8+

li tunque (le tiens, un long .


rarement employé)

CONSONNES.
Wallon liégeois. Français.
Labiales, b, p bổ , pã bon , pain .
Linguo - den
Explosives.
tales, d, t di, to dent , tout .
Gutturales, k, g (') kwat, got quatre, goutte.
Labiale , m mỡ mot.
Linguo den
Nasales. tale, n not note .
Palatale, n kapǎn campagne .
Velère, 12 dintě (sonner) ding (di ding) .
Linguale , Į, Į lo, gòlotě lot, paille.
Liquides. (orner) (l mouillé) ,
Velère , I' ră rat.
Labiales , w, f, v pwě, fò, vò poids , faux ,
val
€, j riproe, jep reproche , jar
(herbe) din .
Linguales ,
te (²), dj (³) teãtě (chanter) italien : civi
Fricatives. dey (noix) tate , giorno .
Dentales , 8, ༧ so, zŭwòf sot, zouave .
Palatale , Y mey (mille) pied (ou bien en
core ill complè
tement mouillé).
Laryngales , h, h, (*) hồy , dìhă (dit)

(1) g est toujours guttural .


(2) te - ci, e italien . Il se prononce à peu près comme
tch français , adouci et fondu en une seule émission .
(5) G = ge, i italien . Il se prononce à peu près comme
dj, mais adouci et fondu en une seule émission .
(*) h est très fortement aspiré . Nous proposons de prendre le
signe fi (y retourné) pour l'aspiration moins forte de dis hid,
(franç. hache, etc. ) .
I

1
CHAPITRE PREMIER.

ARTICLE .

1. Article défini .

SINGULIER.

Wallon . Français .

SUJET et RÉGIME DIRECT .

li, l' 1 le , la , l'

RÉGIME INDIRECT .

Masc . dè du
de l'
di l', d' l', (di li, d'li) | de la }
Fém . de l'

Masc . â, au
à l', (à li) à l'
1 à la
Fém . à l'

PLURIEL .

Pour les deux genres .

SUJET et RÉGIME DIRECT .

les, l's les

RÉGIME INDIRECT .

des des

(di les, d' les, di l's)


Iâs aux

(à les, à l's).
14

SINGULIER .

Li . Cette forme est la forme primitive de l'article (XII et


XIII siècles) constatée dans les dialectes bourguignons , nor
mands et picards . Ce dernier dialecte ne distingue pas , quant
à la forme, le masculin du féminin de l'article . On remarquera
qu'il en est de même en wallon , où li sert pour les deux genres .
Ex.: Li coq . Le coq . Li poye . La poule.
L'. L'élision de l'i se fait toujours devant une voyelle et très
souvent, par euphonie , devant une consonne , quand l'article
commence la phrase ou lorsqu'il est immédiatement précédé
d'un son voyelle .

Ex.: L'amour di m ' feumme. L'amour de ma femme.


J'a vèyou l'pére di m ' feumme. J'ai vu le père de ma
femme .
L' maladèye di mi-èfant. La maladie de mon
enfant.

Remarque. - C'est d'ailleurs ce qui a lieu dans la conversation


familière française où l'e muet de l'article s'élide souvent devant une
consonne.
Dè. C'est la contraction de di li, en français du (de le) . Elle
s'emploie devant les substantifs masculins commençant par
une consonne .
Ex. Li fleûr de cot'hai. La fleur du jardin .

Dè l'. Ces mots s'emploient devant les substantifs féminins


commençant par une consonne .
Ex. Li soû dè l'mohonne. Le seuil de la maison .

Di li et d'li . Ces mots s'emploient devant les substantifs


féminins commençant par une consonne . Ils sont très rares
en dialecte liégeois , plus communs en dialecte verviétois .
Ex.: Li cour di li scole. La cour de l'école.
Les bancs d'li scole (ou bien dè l' sicole v . plus haut).
Les bancs de l'école .
- 15

Di l' et d' l ' . Ces mots s'emploient devant les substantifs


masculins ou féminins commençant par une voyelle ou h
non aspirée .

Ex .: Les foyes di l'âbe. Les feuilles de l'arbre.


Li riya d' l'èfant. Le rire de l'enfant.
A est la forme contractée pour à li, (en français au) ; elle
s'emploie devant les substantifs masculins commençant par
une consonne .

Ex .: Ach'ter â marchand. Acheter au marchand .

A l'. Ces mots s'emploient devant les substantifs féminins


commençant par une consonne , par une voyelle ou h non
aspirée et devant les substantifs masculins commençant par
une voyelle ou h non aspirée .

Ex.: Dimander à l' feumme. Demander à la femme.


Aller à l'aiwe. Aller puiser de l'eau.
A l'ouhai. A l'oiseau .

A li. Ces mots s'emploient rarement en dialecte liégeois ,


surtout au masculin , plus communément en verviétois . (V.di li).
Remarque. - L'ancienne langue écrivait de préférence del et al en
un mot.

A signaler un ancien usage, l'emploi de la préposition à pour de, qui


existait déjà au XIIIe et au XIVe siècle . Ex. : li fèye à Colas, la fille
de Colas ; li châr â cinsî, le char du fermier, etc. (Cet usage existe
d'ailleurs encore dans le français populaire) . Cette tournure devient
très rare en wallon moderne ; celui-ci conserve , il est vrai , la prépo
sition à, mais l'accole à la préposition de pour former une locution
préposition de la forme d'à.
Ex.: Li fèye d'à Colas , li châr d'à sincî, les oûs d'à l' feumme, les
œufs de la femme, etc.
PLURIEL .

Les est la forme ordinaire du pluriel pour les deux genres .


Elle se transforme parfois en l's devant une voyelle , quand un
16 ―

son voyelle la précède immédiatement au cours de la propo


sition ou lorsqu'elle commence la phrase . L's se prononce
toujours douce.
Ex. Les èfants. Les enfants.
C'est l's èfants.
Ce sont les enfants .
ou C'est les èfants .
Des. La forme française est identique . Pour di les (de les) .

Ex.: Li joye des parints. La joie des parents .


Remarque. -- Signalons la forme d's dans pont d's âches, pont des
arches, un des ponts de Liège.

Di les , d' les , di l's . Ces mots s'emploient très rarement


en dialecte liégeois , plus communément en verviétois et en
namurois.
Ex. Lu linwe du les fammes. La langue des femmes .
(Verviers ) .
90
As ( ') est la forme contractée correspondant au français aux.
On pourrait tirer de ce fait que la voyelle est longue en wallon
moderne (âs = ò en liégeois) , cette conclusion qu'elle l'était
aussi en ancien wallon et que as devait s'écrire âs et se pro
noncer a.
Ex.: Fer sogne âs èfants. Faire peur aux enfants .

A les , à l's . Même observation que pour di les (v . plus haut) .

Remarque. - A Verviers l'article défini est lu, et à Nivelles : èl .


Au régime indirect , à Namur nous trouvons do et à Nivelles du.

2. Article indéfini .

ARTICLE INDÉFINI INdividuel .

Sing. On, ine, ' ne. Un , une


Pluriel Des. Des

(1) Nous avons cru devoir adopter dans ce mémoire une des premières règles
admises par la Société de réforme orthographique française, à savoir la suppression
de tous les x terminaux et leur remplacement par des s.
17

On . Cette forme s'emploie devant les substantifs masculins


commençant par une consonne .
Ex.: On pèhon. Un poisson.

Ine. Cette forme s'emploie devant tous les substantifs fémi


nins et devant les substantifs masculins commençant par une
voyelle ou h non aspirée .
Ex.: Ine poye . Une poule.
Ine âbe . Un arbre .
Remarque. -- Nous ferons observer que cet article qui, en phoné
tique, s'écrit in , devrait peut-être avoir une orthographe analogique
double suivant qu'il détermine un substantif masculin ou un sub
stantif féminin. En effet, le français populaire prononce souvent
u-n-homme, pour un homme . Le wallon pourrait par exemple écrire
in-homme, le trait d'union indiquant conventionnellement la pronon
ciation. Nous croyons cependant , par raison de facilité , devoir adopter
l'orthographe uniforme ine devant les substantifs désignés plus haut.
Au lieu de ine, Verviers et Namur possèdent one, et Nivelles ène.
Nivelles possède en outre in au lieu de on.

'Ne. L'i de ine disparaît quand une voyelle le précède im


médiatement au cours de la proposition.
Ex. : J'a ' ne saquoi. J'ai quelque chose.
Des . La forme wallonne est identique à la forme française .
Ex.: Des preunes . Des prunes .

Il est à remarquer que le wallon ne possède pas la forme


partitive de employée en français au lieu de l'article indéfini
des .
Ex.: Des bonnès preunes. De bonnes prunes .

L'emploi de cette forme tend d'ailleurs à se perdre en français


même .

ARTICLE INDÉFINI PARTITIF .

Dè, dè l' , di l' et d' l'. Du , de la, de l' .


2
- 18 -4

Dè. Cette forme s'emploie devant les substantifs masculins


commençant par une consonne .
Ex.: Dè pan. Du pain.

Dè l' . Ces mots s'emploient devant les substantifs féminins


commençant par une consonņe .
Ex. : Dè l' poussire. De la poussière
Di l' . Ces mots s'emploient devant les substantifs masculins
ou féminins commençant par une voyelle ou h non aspirée ,
quand ils commencent la phrase ou quand , au cours de la pro
position, le mot précédent se termine oralement par une
consonne sonnante (e muet) .
Ex. : Di l'aiwe. De l'eau .
Beûre di l'aiwe. Boire de l'eau .

D' l' . Ces mots s'emploient devant les mêmes substantifs


que di l' , quand , au cours de la proposition , le mot précédent
se termine par un son voyelle .
Ex.: Ji beus d'l'aiwe. Je bois de l'eau .
CHAPITRE II .

SUBSTANTIF .

1. Nombre.

ORTHOGRAPHE .

On forme le pluriel des substantifs wallons en ajoutant une


s au singulier , sauf aux mots déjà terminés par sou z. Cette s
ne se prononce jamais .
Tous les terminaux sont remplacés par des s , d'après la
première règle de la Société de réforme orthographique fran
çaise , règle que nous croyons utile d'introduire en wallon .

Ex.: L'èfant. L'enfant . Les èfants . Les enfants .


Li ch'vâ. Le cheval. Les ch'vâs . Les chevaux .

Remarque. - La Société liégeoise de littérature wallonne, en


se basant sur un travail publié jadis par F. Bailleux ( ¹ ) , n'admet pas
l's au pluriel des substantifs.
Bailleux invoque deux arguments principaux à l'appui de sa thèse :
1º l'usage ; 2º une hypothèse d'ordre scientifique. Examinons d'abord
cette hypothèse. Le wallon , lors de la disparition des deux cas
romans (XIV -XVe siècles), aurait conservé , à l'encontre du français,
la forme du régime au singulier, ct pris la forme du sujet au pluriel.
En effet, lors de la formation des langues romanes, les nouvelles
langues avaient conservé deux des six cas latins, le cas sujet (nomi
natif) et le cas régime (accusatif).
Littré dans le complément à la préface de son dictionnaire, donne
le tableau suivant qui indique les formes existant à cette époque :

(1 ) Bull. Soc. wall. Se année 1863. 3e liv. , p . 51 .


-20

SINGULIER.
CAS SUJET. CAS RÉGIME.
Li chevals (caballus) . Le cheval (caballum).
PLURIEL .
Li cheval (caballi). Les chevals (caballos) .
Le français aurait gardé les deux régimes et le wallon, d'après
Bailleux , le cas régime au singulier et le cas sujet au pluriel.
Cette dernière supposition de Bailleux n'est, d'après son auteur
lui-même, qu'une hypothèse.
1
Il est excessivement peu probable que le wallon ait fait le chassé
croisé dont on l'accuse. Il semble plutôt qu'il ait confondu tous les cas ,
les exemples d'une telle confusion ne manquant certes pas dans les
dialectes populaires.
Revenons au premier argument de Bailleux. L'usage , dit cet auteur,
s'oppose à l'emploi de l's du pluriel : 10 dans les pièces anciennes ;
20 dans les pièces modernes ; 30 dans la prononciation .
10 Pièces anciennes. Faisons d'abord observer que ces pièces ne sont
ni suffisamment nombreuses, ni suffisamment caractérisées quant
à leurs auteurs , ni suffisamment anciennes (la plus vieille pièce en
dialecte wallon proprement dit ne datant que de 1620) , pour permettre
d'en tirer des conclusions sérieuses quant à l'orthographe. En outre,
ce sont là des sources très sujettes à caution, les manuscrits ayant
été recopiés on ne sait par qui, ni comment.
Leur orthographe est d'ailleurs très phonétique, en ce sens qu'elle
supprime une foule de lettres qui ne se prononcent pas. Tel a très
vraisemblablement été le cas pour l's du pluriel .
Enfin, raison principale, et malgré ce qu'en dit Bailleux, l's du
pluriel existe bel et bien dans les pièces qu'il signale et dans d'autres ,
spécialement dans la Pasquêye critique et calotène, dans celle de
Qwarème et Chârnêye, dans celle des Aiwes di Tongues, dans la Com
plainte de 1623, dans la Chanson contre les prédicans (1650), etc.
Dans ces pièces, l'emploi ou le rejet de l's paraît dépendre de la
fantaisie du scribe.
2º Pièces nouvelles. Les auteurs de l'époque de Bailleux écrivaient
le wallon comme ils le trouvaient bon, d'après des systèmes person
nels et variables ; et , parmi ces auteurs , il s'en trouvait employant l's
du pluriel , comme Bailleux lui-même avant la publication de sa note.
- 21 ―

30 Prononciation. L'argument tiré de la prononciation actuelle


semble plus sérieux. En effet , dans aucun cas, dit Bailleux , l's du
pluriel n'apparaît dans la conversation .
Dans aucun cas, sauf un : c'est quand l'adjectif qualificatif précède
immédiatement un substantif commençant par une voyelle .
Ex.: Des bais èfants. De beaux enfants.
nort
L's du pluriel existe donc en wallon . Dans le cas cité , l's n'est pas
une lettre euphonique, puisque l'hiatus est permis au singulier.
Ex.: On bai èfant. Un bel enfant.
Si l's du pluriel ne se prononce pas , ce n'est pas à dire qu'il n'existe
pas, mais c'est qu'il obéit à une règle très générale à savoir :
les consonnes finales sont presque toujours muettes en wallon , sauf les
liquides let r. Nous écrivons timps, rind, gonfler, trovez, sont, peus, et
cependant ni ps, ni d, ni r, ni z, ni t, ni s ne se prononcent .
Il est inutile de supprimer une lettre de l'importance de l's du
pluriel , quand on n'a pas de bonnes raisons pour cela.
CHANGEMENT DE NOMBRE .

Cerlains substantifs ne s'emploient qu'au singulier en


français et au pluriel en wallon .
Ex.: Fer les carnavals. Faire le carnaval.
Dire les absoutes . Dire l'absoute.
Avu les gottes. Avoir la goutte
Avu les rhômatisses. Être atteint de rhumatisme.
Avu les fives, etc. Avoir la fièvre .
D'autres substantifs ne s'emploient qu'au singulier en wallon ,
tandis qu'ils sont du pluriel en français .
Ex.: Ine cisette. Des ciseaux (¹) .
L'èknèye. Les pincettes. ( Radi
caux différents , litt.
les tenailles) .
Dinner on gage à ' ne sièrvante. Donner des gages à
une servante .
Li commodité. Les commodités .

( ¹ ) Le français emploie parfois dans ce sens la forme du singulier , le ciseau .


22 ―

2. Genre.

Le genre des substantifs wallons est en général le même que


celui des substantifs français .
Mais cette règle a ses exceptions ; on en trouvera ci - dessous
un certain nombre ( ' ) .
Avant tout, il est intéressant de se demander d'où viennent
ces différences de genre en wallon et en français .
L'étymologie semble d'abord avoir joué un certain rôle dans
le phénomène . Les influences linguistiques qui ont déterminé
le genre des substantifs wallons et français n'ont pas été les
mêmes et c'est encore une preuve , s'il en était besoin , que
le wallon et le français sont deux langues bien distinctes ,
quoique isues en grande partie d'une souche commune.
En second lieu et surtout , la consonnance terminale des
substantifs a dû considérablement influer sur leur genre .
Ensuite vient la confusion créée par l'identité de forme au
masculin et au féminin de l'article défini li et même de l'article
indéfini ine, qui s'emploie devant tous les substantifs féminins
et devant les substantifs masculins commençant par une
voyelle .
L'influence française plus récente aidant , cette identité a dû
brouiller la notion du genre de certains mots dans l'esprit des
Wallons .
Parmi ces mots se trouvent armâ , armoire ; age, âge ;
botique, boutique ; air , air ; lèçon , leçon ; lègume , légume ;
orège, orage ; récoulisse , réglisse , etc. , que certains auteurs
font masculins , d'autres féminins .

Mais dans la comparaison du genre des substantifs français


et wallons , il faut , bien entendu , considérer des mots ayant

( ' ) M. Isidore Dory, professeur honoraire à l'Athénée , en a recueilli plus de


200 ; il a eu l'obligeance d'en communiquer quelques-unes à l'auteur de ce mémoire.
- 23 -

exactement la même étymologie, et ne pas , comme Micheels


dans sa grammaire liégeoise de 1863 , comparer par ex. narène
à nez , quand narine existe en français ; jusêye à jus (de
réglisse) , quand jusée existe en français ; rahia à crécelle ,
deux mots absolument différents .
De même, on ne peut comparer fawe , fém , à hêtre , masc . ,
ni mèlêye, fém . , à pommier, masc .
Si l'on s'en tient même aux mots qui ont un radical analogue
en wallon et en français , il faut encore faire une distinction
entre ceux qui ont pour origine une forme étymologique
identique et ceux pour la constitution desquels la forme étymo
logique d'origine est modifiée , plus ou moins profondément
d'ailleurs , suivant qu'elle donne le substantif wallon ou le
substantif français .

C'est ainsi que le wallon bèyole, fém . et le français bouleau,


masc. n'ont pas une origine identique .
De même rûle, masc . et règle, fém . (rēgula ) dépendent d'une
accentuation différente du mot latin , ce qui n'explique pas
d'ailleurs leur différence de genre . Celle - ci provient peut - être
d'une influence française , rûle étant devenu synonyme de
mètre, masculin .
De même les mots suivants : armâ, masc
armâ, masc . , armoire ,
fém ; cui ou kili, masc . , cuiller , fém ; stâ, masc . , étable ,
fém .; ongue, fém , ongle mase .; chârnale, fém. , charine , ~
masc . ( les noms d'arbres sont féminins en latin ) ; sogne, fém . ,
soin , masc (cf. français besogne , fém . ) ; pihâte-è- lét , fém. ,
pissenlit, masc . , n'ont pas deux à deux la même forme étymo
logique ; le genre est déterminé chez eux par la consonnance
terminale .
Sâ, fém (v . fr . saux ) et saule , masc , n'ont pas non plus des
radicaux identiques . Le premier de ces mots est féminin par
étymologie (nom d'arbre ) .

La racine des mots suivants est évidemment la même en


wallen et en français .
24 -

Sont masculins en wallon et féminins en français , les sub


stantifs suivants : on récoulisse, dans le sens de bâton de jus de
réglisse ; on lavasse, une lavasse ; on pièle, une perle ; on dint,
une dent ( par étymologie , dens , masc .) ; on botique, une bou
tique ; on bombanse, une bombance ; on leçon, une leçon
(d'après E. Remouchamps dans Tâtî 'l pèrriqui) ; on foule,
une foule; on lotte, une lotte .
Beaucoup d'auteurs wallons font cependant ces quatre
derniers mots féminins. Remarque analogue pour ine vâ, un
val , dont le genre est variable.
Les mots suivants, féminins en wallon , et masculins en fran
çais , ont surtout subi l'influence de leur terminaison qui les a
rendus féminins ; cette influence s'est accentuée et maintenue
à cause de l'identité de forme des articles définis et indéfinis au
masculin et au féminin et , pour certains d'entre eux , à cause
de leur étymologie.
Les principaux de ces substantifs se trouvent dans les
exemples suivants :

Ine grande aigue. Un grand aigle.


Ine belle age. Un bel âge .
Ine foite âgne. Un åne fort.
Ine joyeuse air. (') Un air joyeux .
Ine pitite ârmanak. Un petit almanach .
Ine vèye calande (cande). Un vieux chaland (client) .
Ine bonne cange. Un bon échange.
Ine douce caramelle. Caramel au sens de bonbon , ber
lingot .
Ine bleuve carroche. Un carrosse bleu .
Ine neure coine. Un coin noir.
Ine cense et d'mêye. Un cent (2) et demi .
Dè l' mâssèye ècinse. De l'encens sale .

(') Parfois masculin . Ex : L'air ligeois.


(") Nom hollandais de la pièce de deux centimes.
- 25 -

Ine ronde èplâsse. Un emplâtre rond .


Ine vète lègume. ( ¹) Un légume vert .
Dè l' mastic. Du mastic .
Ine coriante oisîr. Un osier flexible.
Ine clapante orège. ( ') Un fameux orage .
Dè l' plâsse . Du plâtre.
Dè l'pétrole. Du pétrole.
Ine quolibètte. Un quolibet.
Ine sâbe. Un sabre .
Fer ' ne quine. Faire un quine.
Ine haute sipaite. Un épeautre élevé .
Dè l' sirope. Du sirop (extrait mou de pommes
ou de poires).
Dè l' fène toubak. Du tabac fin .
Ine qwahante ustèye. Un outil tranchant.

(') Rendu masculin par certains auteurs .


CHAPITRE III .

ADJECTIF QUALIFICATIF .

1. Syntaxe .

L'adjectif qualificatif wallon se place toujours devant le


substantif.

Ex. On deûr visège. Un visage dur.


(On ne pourrait dire : On visège deur .)
On r'lûhant viér. Un ver luisant , etc.

Cette règle est générale. On la constate également dans les


langues germaniques ; il y a là un rapprochement, car notre
wallon a, plus que les autres dialectes romans , subi l'influence
germanique .

Elle n'est guère transgressée que dans trois cas.

1° Lorsque l'adjectif joue le rôle d'un véritable attribut


pouvant être facilement précédé du verbe èsse, être , ou lorsque
cet adjectif est ou peut être assimilé à un participe passé
devant lequel on rétablirait facilement le verbe auxiliaire sans
changer le sens de l'expression .
Ex .: Ine homme sûti , (qu'est sûti). Un homme avisé.
On pére mâvas (qu'est mâvas). Un père fâché ,
qu'il ne faut pas confondre avec on mâvas pére, un
mauvais père .
Ine jambe cassêye. Une jambe cassée .
- 28

Mais on dira cependant : dè l'cûte aiwe , de l'eau cuite , des


casséyès botèyes, des bouteilles cassées , parce que ces parti
cipes passés fonctionnent ici comme adjectifs qualificatifs .
2. Lorsque l'adjectif indique la nationalité.
Ex.: Ine air ligeois. Un air liégeois.
On piote hollandais. Un fantassin hollandais .
On baron russe. Un baron russe .

Mais, pour indiquer la provenance , le wallon préfère em·


ployer le nom du pays précédé de la préposition :
Ex. On sôdard di Prûsse. Un soldat prussien .
Dè vinaigue di France. Du vinaigre français .

3º Enfin, lorsque le wallon accepte telles quelles et intro


duit dans l'usage certaines locutions françaises :
Ex.: Consèye communâl. Conseil communal,
Conseiller provincial. Conseiller provincial.

2 Féminin des adjectifs qualificatifs .

La formation du féminin des adjectifs qualificatifs wallons


est compliquée . Nous rangerons ces adjectifs en plusieurs
catégories formant leur féminin d'une façon caractéristique et
dont la dernière contiendra les cas les plus difficiles .

I. - Adjectifs à terminaisons de participe passé.

Cette catégorie comprend tous les participes passés employés


adjectivement et les adjectifs qualificatifs dont la terminaison
est la même que celle des participes passés.
Le féminin de ces adjectifs est analogue au féminin des
participes correspondants ( ¹ ) .

( ) Voir la première partie de notre essai de grammaire wallonne : le Verbe wallon,


p. 73.
29

a) Appartiennent à la première conjugaison les participes


passés terminés par é et par ê, féminin eye.
Les adjectifs suivants en é et en i forment leur féminin de
pareille façon :
Abaumé Enterré, creux en parlant Abaumêye
de la voix .
Binamé Gentil. Binamêye
Bodé Courtaud . Bodêye
Bouzé Bouffi. Bouzêye
Crajolé (¹) Bigarré. Crajolêye
Crawé Rabougri. Crawêye
Ecèpé Embarrassé . Ecèpêye
Ecoid lé Gêné dans ses mouvements . Ècoid'lêye
Èmaîné Guindé. Èmaînêye
Fayé Fripé, en mauvais état . Fayêye
Forsólé (*) Repu , joyeux à l'excès . Forsôlêye
Frézé Grelé. Frèzêye
Halé Boiteux . Haleye
Houlé 鞋
Courbe, bancal . Houleye
Mâheulé Mal élevé . Mâheulêye
Nozé Mignon . Nozêye
Souwé Rusé . Souwêye
Mèsbrugi, etc. Éclopé . Mèsbrugêye

b) Appartiennent à la 2º et à la 3° conjugaison , les participes


passés terminés par ou, féminin owe.
Les adjectifs suivants en ou forment leur féminin de pareille
façon :
Arvolou Brutal. Arvolowe
Bèchou Interdit. Bèchowe

(¹ ) Le féminin de cet adjectif se termine parfois par èye bref, probablement à


cause du simple jolèye, tachetée, en parlant de la vache, employé par les auteurs
modernes comme féminin et avec le sens de joli qui n'existe pas en wallon.
(*) Il faut se garder d'écrire foirt-sôlé en deux mots. Le préfixe for est une parti
cule inséparable, signifiant hors, au delà .
30
1

Chaipiou Chétif. Chaipiowe


Crèspou Crépu . Crèspowe
Nou Nu. Nowe
Pans'lou Ventru . Pans'lowe
Tâdrou Tardif. Tâdrowe
Timprou, etc Précoce, malinal . Timprowe

c) Appartiennent à la 3 conjugaison , les participes passés


terminés par i, féminin èye.
Les adjectifs suivants en i forment leur féminin de pareille
façon :
Ginti Laborieux . Gintèye
Súti, etc. Sagace , avisé . Sûtèye
Haîtî, sain , fait , par attraction , haîtèye.
Nahi, fatigué, se prononce parfois incorrectement nâhi ,
avec i bref, forme qui a entraîné le féminin nâhèye avec è bref.
Jolèye, tâchetée, en parlant des vaches , n'a pas de masculin .

II. -- Adjectifs à terminaisons de participe présent.

Ces adjectifs se terminent par ant ( a) et forment leur


féminin en ajoutant e muet à cette terminaison , le tétymo
logique reparaissant dans la prononciation .

Afahant Affamé . Afahante.


Coq'sant Guilleret. Coq'sante.
Magnifique. •
Forfant Forfante.
Mâlignant Tracassier. Mâlignante.
Mèchant Méchant. Mèchante.
Plaihant, etc. Agréable . Plaihante.

III. - Adjectifs terminés oralement par une voyelle.

Les adjectifs appartenant aux deux classes précédentes ne


rentrent naturellement pas dans cette catégorie.
- 31 ―

Dans ces adjectifs , la consonne étymologique, qui ne se pro


nonce pas, réapparaît au féminin où elle se prononce toujours
dure .
Chaud Chaud. Chaude (¹)
Parfond Profond . Parfonde.
Rond Rond. Ronde.
Plat Plat. Plate.
Ricût Taciturne, sournois . Ricûte.
S'fait Pareil. S'faite.
Stout Grossier, altier. Stoute.
Streut Etroit. Streûte.
Glot Friand. Glote.
Sot Sot. Sotte.
Net Propre. Nètte.
Bas Bas. Basse.
Crâs Gras . Crâsse. 1V
Fás Faux . Fâsse.
Gros Gros . Grosse.
Spès Épais . Spèsse.
Crabouyeus (*) Raboteux . Crabouyeûşe.
Croufieus Bossu . Croufieûse.
Grandiveus Vaniteux . Grandiveûse
Hisdeus Hideux . Hisdeûse.
Hoûpieus Qui se tient ramassé Hoûpieûse.
par suite du froid .
Houreus Froid et humide en Houreûse.
parlant du temps ,
froidureux .
(') Les consonnes finales sonnantes (celles qui précèdent e
muet) se prononcent toujours dures en wallon , sauf quand
elles se trouvent devant un mot commençant par une con
sonne douce .
Exemple :
Ine abe se prononce : in op.
L'âbe de jardin se prononce : l'òb de Gorde.
() L'e terminal est remplacé par s , d'après la première règle
de la Société de réforme orthographique .
32 -

Hureus Heureux . Hureûse .


Grigneus Morose, triste. Grigneûse.
Mâhonteus Impudent. Mâhonteûse.
Málhureus Malheureux . Mâlhureûse.
Ouheus Oisif. Ouheûse.
Pèneus Piteux , penaud . Pèneûse.
Vig❜reus, etc. Alerte, vif. Vig'reûse.

IV . -
Adjectifs terminés oralement par une consonne
autre que les liquides l et r.

Ces adjectifs se terminent graphiquement par e muet ; la


forme féminine est par conséquent identique à la masculine .
Voici quelques uns de ces adjectifs :

Acontrâve, Etrange . Loigne, Imbécile .


Adrète , Adroit. Macasse, Etourdi par la bois
Agète, Agile son , stupéfait.
Amistâve, Aimable . Maigue, Maigre.
Binâhe , Content. Malâde, Malade.
Brave, Honnête . Mate , Rusé .

Cagnièsse , Hargneux . Midonne, Généreux .


Cónièsse, Coriace . Minâve , Misérable .
Doûcrèsse, Douceâtre . Moflèsse, Mollasse .
Doûmièsse , Soumis. Nawe, Paresseux .
Flâwe , Faible. Noyètte, Gris (ivre) .
Fócaque, Blet. Nonpouhe , Indolent .
Frèhe, Humide . Pètoye, Ivre .
Gâye, Bien habillé . Parèye, Pareil.
Hâbièsse, Susceptible . Qwahe, Sensible à la dou
Hâdièsse, Brusque . leur .
Hayète , Mure. Randahe, Crâne.
Hayâve, Insupportable . Rècoquèsse , Gaillard .
- 33 -

Haique, Roge, Rouge.


Fluet.
Hinque, Sèche, Sec.
Halcrosse , Malingre. Strègne, Récalcitrant .
Hape , Sauf. Tène, Mince.
Hate, Étriqué. Virlihe, Allègre .
Honnièsse, Poli. Vraîye, Vrai.
Jène, Jaune . Wâgue, Vague, inculte.
Jine , Jeune. Wape, etc. Fade , aigre .

V. - Adjectifs terminés oralement par les liquidès l et r .

Ces adjectifs forment leur féminin par l'addition d'un e


muet à la forme masculine . Voici quelques uns de ces adjectifs .
Clér . Clair. Clére.
Ewal. Égal. Èwale.
Fèl. Vaillant. Fèle.
Fir. Fier . Fire.
Hal , hol . Meuble. Hale, hole.
Lègîr. Léger. Lègîre.
Maweûr. Mûr. Maweûre.
Neûr. Noir. Neûre.
Ringuel. Raide . Ringuèle.
Seûr. Sûr. Seûre.
Stal. Stable . Stale.
Sûr. Sûr. Sûre.
Wal. etc. Meuble. Wale.

Les trois adjectifs aveûle, aveugle , pâhûle, paisible et veûle,


veule ont une forme identique au masculin et au féminin .

Observation.

On sait que les consonnes finales, moins généralement les


liquides let r, ont une tendance à disparaître en wallon . Les
liquides ont disparu au masculin des adjectifs prumî, premier,
seû, seul , số, soûl et mô, mou ; (cf. amou = amour , soû =
3
- 34 -

soûr, etc. ). Il en est d'ailleurs de même dans la prononciation


française de premier et de soûl. L'ancien français avait mou ,
et mol , comme fou et fol . Le wallon a mô devant les consonnes
et mol devant les voyelles . Ex .: on mol âbe, un arbre mou .
On voit en wallon comme en français réapparaître la lettre
étymologique de prumi et de seû devant un substantif masculin
commençant par une voyelle . Ex . : mi prumîr èfant, mi seûl
amour. Dans les quatre adjectifs cités , on voit réapparaître
cette consonne au féminin : prumire, seûle, sôle et molle.

VI . - Cas particuliers.

a) Adjectifs terminés oralement par une voyelle nasale .


Cette voyelle est conservée intacte au féminin des adjectifs
suivants :
Èmètrain , Moyen. Èmètraîne.
Hâtain, Hautain . Hâtaîne.
Subitain , Emporté . Subitaîne.
Longeain, Lent. Longeaîne.

Par analogie, contint, content , fait contine et ènnocint, inno


cent fait ennocîne.
L'adjectif saint, saint , fait sainte au féminin , comme en
J
français . D'un autre côté , l'adjectif plein , plein (plenus) , fait
pleinte au féminin , par analogie

Remarque. Les auteurs wallons ont une tendance à introduire,


en croyant les walloniser, un certain nombre de mots français
(
forteune, nateûre, etc.) , qui seraient plus facilement usités sous leur
forme française (fortune , nature) . Ex .: Il a ' ne belle fortune. Cette
tendance fait accepter à certains d'entre eux les adjectifs terminés
en français en ent qu'ils traduisent par des adjectifs en int, fém.
inte Ex. :Intelligint.
Cette tendance n'est pas à encourager.
35 ―

La voyelle nasalisée des adjectifs suivants se résout en


voyelle pure au féminin .
Bon, Bon. Bonne.
Brun, Brun . Breune.
Calin, Coquin . Calène.
Fin , Fin . Fène.
Loupin, Dissimulé . Loupène.
Malin , Malin. Malène.

b) L'r du masculin disparaît au féminin des adjectifs suivants ,


d'après une règle wallonne qui empêche de prononcer deux
consonnes de suite devant e muet.
Court, Court. Coûte.
Foirt (fwér), Fort. Foite (fwět).
Moirt (mwér), Mort . Moite (mwět).
Vért, Vert. Vète .

c) Les adjectifs suivants forment leur féminin d'une façon


spéciale .
Blanc, Blanc . Blanque.
Franc, Franc . Franque.
Long, Long. Longue.
Etai, Content. Ètaite.
Keû, Coi. Keûte.
Jalos, Jaloux . Jalote.
Doûs , Doux . Doûce.
Bai, Beau. Belle.
Novai, Nouveau . Novelle.
Mouwai, Muet. Mouwalle.
Rossaî, Roux . Rossette.
Bleu , Bleu . Bleûve.
Noû , Neuf. Noûve.

L'adjectif massi, sale, donne mûssèye et parfois mâssîte au


féminin ; l'adjectif vîs , vieux , donne vèye et vîle ; l'adjectif
mâvas, fâché, mauvais, a pour féminin mâle.
-- 36

VII. - Adjectifs composés.

Le premier adjectif reste invariable ; le second prend la


terminaison féminine .

Ex.: Ine feumme blanc - moite. Une femme livide (litt.


blanc- morte).
Ine rôbe gris-bleûve. Une robe gris- bleu .
Inejône fèye chaud-mousseye. Une jeune fille chaude
ment habillée .

3. Féminin des noms de personnes et d'animaux .

En général, la forme féminine est différente en wallon de la


masculine .
Les noms en eu et en eûr changent ces terminaisons au
féminin , tantôt en eûse ex . : Danseu, danseûse ; chanteu, chan
teûse ; voleûr, voleûse ; tailleûr, tailleûse, etc. Tantôt en rèsse,
ex.: feu , frèsse, faiseur ; chafteu, chaftrèsse, babillard ; vindeu ,
vindresse, ou vindeûse, vendeur ; côpeu , côprèsse et côpeûse,
coupeur ; qwèreu, qwirrèsse, chercheur, etc.
Les noms en aî (franc. eau) donnent tantôt ette, ex .: rossaî,
rossette, roux ; tantôt alle, ex .: maqu'raî, maqu'ralle, sorcier ;
mouwaî, mouwalle, muet .
Les noms en â (o) (en français ard) donnent âde . Ex .: brèyâ ,
brèyâde, braillard ; gueûyâ, gueûyâde, criard , etc.
Les noms en i font leur féminin tantôt en rèsse . Ex .: cinsî,
cinsrèsse , fermier ; bol'gi , bol'gîrèsse , boulanger ; botî ,
botrèsse, hotteur ; hièrdi, hièdrèsse, berger ; vîwarî, viwa
rèsse, fripiér ; mounî, mounrèsse , meunier ; bièrgî, bièg'rèsse,
berger ; etc. Tantôt en îre. Ex .: ovrî, ovrîre, ouvrier ; coturî,
costire, couturier ; couh'nî, couh nire, cuisinier ; etc.
Le féminin se rapproche du masculin dans les mots
suivants : fi, fèye fils ; roye, reîne ou royène, roi ; dîdon ,
dîne ; sèrviteûr, sièrvante ; prince, princèsse ; duc, duchèsse ;
paysan, paysante ; cusin , cuseune ; voisin , voisène ; J'han ,
- 37 ----

J'henne, Jean ; chèt, catte, chat ; canard, cane; mangon,


manguinrèsse, boucher.
Les formes des deux genres diffèrent dans les mots
suivants dont l'un n'est pas à proprement parler le féminin de
l'autre fré, soûr, frère ; mononke, matante, oncle ; pére ,
mére ; maisse, dame, maître ; toraî , vache, taureau ; pourçaî,
trôye, pourceau ; coq, poye ; valèt, bâcèlle, garçon ; homme,
feumme ; etc.

4. Pluriel des adjectifs qualificatifs .

Le pluriel des adjectifs qualificatifs se forme en ajoutant


une s au singulier partout où cette s (1 ) n'existe pas déjà . Cette
s ne se prononce que devant les mots commençant par une
voyelle .
Ex.: On bon pére. Un bon père.
Des bons péres. De bons pères .
On bai èfant. Un bel enfant.
Des bais èfants. De beaux enfants .

Lorsqu'un ou plusieurs adjectifs du féminin pluriel pré


cèdent immédiatement le substantif, ce qui est le cas général ,
ils prennent la terminaison sonnante ès (è ou èz) , quel que soit
leur nombre .

Ex.: Des bèllès grossès rogès pommes . De belles grosses


pommes rouges .
Des clapantès ouves. Des œuvres remar
quables .

5. Degrés de comparaison .

Ils s'expriment en wallon comme en français .

Ex .: Ine homme pus bai qu'ine Un homme plus beau qu'un


aute. autre .
Li pus bai des hommes. Le plus beau des hommes .

(1) Remarquons que les x terminaux sont remplacés par des s.


38 -

Observations.

1º Le wallon évite de se servir de l'adverbe mons , moins .


Il dira plus difficilement : Il est mons riche qui s' voisin , il est
moins riche que son voisin , que : I n'est nin si riche qui
s' voisin, il n'est pas aussi riche que son voisin .
Remarquons en outre que dans cette comparaison d'égalité ,
à tournure négative , le wallon se sert de l'adverbe si , si , au
même titre que de l'adverbe ossi , aussi .
Ex. I n'est nin si (ou ossi) grand Il n'est pas aussi grand
qu' lu. que lui.
Par contre, il ne dira que :
Ex .: Il est-ossi grand qu' lu. Il est aussi grand que lui .

2º L'adjectif bon possède une forme spéciale au comparatif :


mèyeu, français meilleur.
Les bons auteurs font mèyeu invariable .
Ex. : Elle est mèyeu qu' lu. Elle est meilleure que lui .
Les mèyeu des feummes. Les meilleures des femmes.

3º L'adjectif mâvas , mauvais , possède une forme spéciale au


comparatif, qui est pèyeu , pire , invariable et peu usitée actuel
lement.
Ex. Elle est pèyeu qui s ' soûr. Elle est pire que sa sœur.

Cette forme est remplacée par pés , pis , considéré comme


adjectif invariable .
Ex .: Elle est pés qu'on diale. Elle est pire qu'un diable .
Accolé à l'adverbe ossi, aussi , pés, pire ou pis, prend la
valeur de mâvas , mauvais.
Ex . : Elle est-ossi pés qu' lu . Elle est aussi ( pis , méchante)
mauvaise que lui.
CHAPITRE IV .

ADJECTIFS PRONOMINAUX .

1. Adjectifs possessifs .

SINGULIER . PLURIEL .

mes.
‫ܪ‬

1re pers. sing. mi, m' , ( mon , ma)


2€ >> >> ti, t' , (ton , ta) tes.
3º >> D si, s' , (son , sa) ses.
1 re » plur. nosse, noste, (notru) , ( notre) nos.
2€ >>> >> vosse, voste, (votre) vos.
3e D D leû , (leur) . leûs , ( leurs ),

SINGULIER .

Mi s'emploie devant tous les substantifs masculins et fémi


nins commençant par une consonne ou par une voyelle ; mais ,
dans ce dernier cas, l'i se palatalise et devient la semi - voyelle y.
Ex .: Mi papa. Mon (papa) père .
Mi mame. Ma (maman) mère .
Mi-èfant (my efa). Mon enfant.
Cette palatalisation s'indique par un trait d'union .

Ti , si . La méme règle s'applique à la 2. et à la 3° personne


du singulier de l'adjectif.
― 40

M' , t' , s' . L'élision de l'i se fait devant une consonne lorsque
l'adjectif est immédiatement précédé d'un son voyelle , et quel
quefois devant une consonne lorsque l'adjectif commence la
phrase ; mais l'élision ne se fait jamais devant une voyelle .
Ex. C'est m' papa. C'est mon ( papa) père .
S' papa ou si papa a v'nou. Son père est venu (hier) .
On ne dira pas m ' èfant, mon enfant . On doit considérer
comme corruptions les cas, très rares d'ailleurs, où l'i semi
voyelle est supprimé .
Ex. : C'est m' affaire. C'est mon affaire .
J'a m'idèye. J'ai mon idée .

Mon, ma ne s'emploient que dans des locutions toutes faites.


Ex .: Mon Diu ! Mon Dieu !
Ma frique! Ma foi !
Remarque . - Le wallon a formé ses noms de parenté en accolant
le pronom au substantif et en disant monfré , frère ; masæûr , sœur (à côté
de fré et soûr) ; mononke , oncle ; matante , tante. Il dira donc mi
mononke , mon oncle, mi matante, ma tante, mi masseûr, ma sœur, etc.
On remarquera que dans la composition de ces sortes de noms, c'est
la forme française de l'adjectif possessif qui a prévalu (mon, ma) .
Observons aussi que le mot tante lui-même est déjà formé, d'après
Littré, de la contraction de ta ante, et cet auteur fait remarquer que
le wallon possède le mot simple antin , signifiant grand'tante ; de sorte
que dans mi matante, il y a trois adjectifs possessifs qui se suivent .
Mes , tes , ses . L's finale se prononce douce devant une
voyelle et h non aspirée .
Ex. Mes ustèyes. Mes outils .

PLURIEL .

Nosse et vosse s'emploient devant les substantifs com


mençant par une consonne .
Ex . Nosse mohonne. Notre maison .
Vosse pays. Votre pays .
-- 41 --

Noste et voste s'emploient devant les substantifs commen


çant par une voyelle ou h non aspirée .
Ex.: Noste âgne. Notre âne .
Voste homme. Votre homme.

Notru est une forme rare , employée dans quelques locu


tions toutes faites . Elle paraît être d'origine française :
Ex. Notru-dame. Notre-dame.
Notru-pére. Notre père . (Commencement
du Pater).
Remarque. - On dira ine notru-dame, une notre-dame, et on
notru-pére, une patenôtre.
Leû. Devant une voyelle ou h non aspirée, le wallon inter
cale un euphonique .
Ex . : Leâ mârtai. Leur marteau .
Leu -x -age. Leur âge .

Nos , vos , leûs L's se prononce douce devant une voyelle


et h muette.
Ex. Nos chins. Nos chiens .
Vos âmayes. Vos génisses.
Leûs èfants . Leurs enfants .

Remarque. - Le wallon emploie l'adjectif possessif dans certains


cas où le français se sert de l'article défini.
Ex.: J'a mâ mes pîds. J'ai mal aux pieds .
Il a freud ses mains. Il a froid aux mains .
I n'a rin so s' coirps. Il n'a rien sur le corps .
Des solers d'vins ses pids. Des souliers aux pieds.
Ine cotte è s' cou. Une jupe sur le derrière .

2. Adjectifs démonstratifs.

MASCULIN . Ci, c' , ciste, c'ste. Ce , cet .


FÉMININ . Cisse, c' , ciste, c'ste . Cette .

PLURIEL .
Ces . Ces .
- 42

Les noms que ces adjectifs déterminent sont ordinairement


suivis des adverbes cial ou chal, français ci , et là , français là .
Mais cette règle n'est pas toujours appliquée .

Ex.: Ciste èfant cial est bai . Cet enfant ou cet enfant
ci est beau .
Ci pére-là est deûr. Ce père ou ce père - là
est dur.
Ci s'emploie devant les substantifs masculins commençant
par une consonne .

Ex .: Ci pan-là. Ce pain- (là).

C' s'emploie devant les substantifs masculins et féminins.


commençant par une consonne , quand un son voyelle le pré
cède immédiatement au cours de la proposition et parfois
quand il commence la phrase .
Ex. Ci ou c' malin là. Ce malin- (là).
Ji vous c' pan-cial. Je veux ce pain-( ci ) .
Ji veus c' mohonne-là. Je vois cette maison- (là).

Cisse s'emploie devant les substantifs féminins commençant


par une consonne.
Ex. Cisse mohonne-là. Cette maison- (là) .

Ciste et c'ste s'emploient devant les substantifs masculins


ou féminins commençant par une voyelle ou h muette . La syn
cope de l'i se fait parfois quand la forme est immédiatement
précédée d'un son voyelle ou lorsqu'elle commence la phrase.
Ex.: Ciste èfant cial. Cet enfant- (ci ) .
Cste èfant- là . Cet enfant- (là) .
Ji veus c'ste ou ciste èfant-là . Je vois cet enfant- (là) .
Ces est la forme du pluriel . L's sonne douce devant une
voyelle ou h muette .
Ex. : Ces abes-là. Ces arbres- (là) .
Remarque. - A Verviers , cial est remplacé par ci, ou voci; et là
très souvent par volà. L'i de ci, etc. , se transforme en u (cf. l'article )
et le c prend une cédille : çu .
- 43 ―――――

Observations .

1º Le wallon possède aussi l'adjectif démonstratif même (mềm)


s'employant devant et après le substantif ou après le pronom .
Ex. : Li même homme, Le même homme.
Mi- même, Moi- même .

Après le substantif, l'adjectif même ne s'emploie pas bien


seul , en wallon ; il est généralement accompagné du pronom
personnel.
Ex. : L'homme lu- même, L'homme même.
Li feumme lèye-même, La femme même.

Remarque. Dans la comparaison d'égalité faite au moyen


de l'adjectif même, le wallon remplace souvent la conjonction
qui par la préposition avou ( avec) .
Ex.: Il a l' même sièrvante qui ou avou mi. Il a la même
servante que moi .
Il est dè même age avou m' fré ou qui m' fré. Il a le
même âge que mon frère .

2º Le wallon n'emploiera pas le mot té, tel , comme adjectif


démonstratif.
Il ne dira pas on té calin (un tel coquin) , mais il dira on s'fait
calin (un coquin ainsi fait, pareil) , on calin comme lu ou on calin
comme coula, un coquin comme lui , un coquin comme cela .
A la rigueur sifait, féminin sifaite (par syncope de l'i s'fait,
pareil, s'faite, pareille) , pourrait passer en wallon pour adjectif
démonstratif.
3. Adjectifs relatifs .

Ces adjectifs sont très rares en wallon , comme en français


d'ailleurs .
Ex. J'a vèyou ine homme, lisquél homme... J'ai vu un
homme, lequel homme...
Il est même douteux que cette tournure soit essentiellement
wallonne . Elle est probablement d'importation française .
--- 44 ---

4. Adjectifs indéfinis .

Les adjectifs indéfinis sont relativement peu nombreux en


wallon . Comme se rapportant à la qualité, le wallon possède
aute (autre) .
Comme se rapportant au nombre , quéques ( quelques )
ou quéquès ; nou, nol (devant une voyelle ) , féminin nolle
(nul, nulle) ; plusieûrs ou pusieûrs ( plusieurs , quelques) ( plus
souvent remplacé par saqwants, féminin , saqwantes ou
saqwantès ; tot, tote, tos , totes et totès (tout, toute, lous,
toutes) ; chaque (prononcez e et non te) .

5. Adjectifs interrogatifs et exclamatifs .

Le wallon possède le mot qué, quel, dont les différentes


formes sont :

SINGULIER . PLURIEL .
• Qués.
Masc. qué, quél.
Fém . quélle. Quéllès

Ce mot est souvent remplacé par son composé lisqué, lequel .


Ses formes sont :

Masc . lisqué, lisquél . Lèsqués .


Fém lisquélle . Lèsquéllès.

Remarque. L's médiale se prononce toujours dans ces mots . Cer


tains wallons prononcent quéne pour quél et quélle.
Qué et lisqué s'emploient devant les substantifs masculins
commençant par une consonne.

Ex.: Qué ou lisqué visège ! Quel visage !

Ils s'emploient parfois devant les substantifs commençant


par une voyelle ou h non aspirée . Ex .: Qué ou lisqué homme?
Quel homme ?
- 45 -

Quél et lisquél s'emploient devant les substantifs mascu -


lins commençant par une voyelle ou h non aspirée .
Ex.: Quél ou lisquél ârgint ? Quel argent ?

Quélle et lisquélle s'emploient devant les substantifs


féminins .

Ex .: Quélle ou lisquélle bâcèlle ! Quelle fille !

Qués et lèsqués sont les formes du masculin pluriel . L's


se prononce douce devant une voyelle .

Ex.: Qués ou lèsqués âbes ! Quels arbres !

Quéllès et lèsquéllès sont les formes du féminin pluriel .


Pour ès final , cf. la forme du féminin pluriel de l'adjectif
qualificatif.
Ex .: Quéllès ou lèsquéllès feummes ! Quelles femmes !

Observation .

Le wallon possède encore l'adjectif interrogatif qwantes ,


combien de, très usité en langue d'Oil du XIII° siècle . Devant
les substantifs du féminin pluriel la forme est qwantès .

Ex.: Qwantes sódârds èstît- is ? Combien de soldats étaient- ils?


Qwantès jônès fèyes? Combien de jeunes filles ?

6. Adjectifs numéraux cardinaux.

En voici l'énumération :
1 onque, eune, 2 deûs , 3 treûs , 4 qwate, 5 cinq, 6 sîhe,
7 sèpt, 8 hût, 9 noûf, 10 dîhe , 11 onze , 12 doze, 13 traze,
14 quatwaze, 15 qwinze , 16 saze, 17 dix-sèpt, 18 dîhe-hût,
19 dîhe-noûf, 20 vingt, 21 vingt- eune ou vingt-onque, 22
vingt- deûs, 23 vingt- treûs , etc.
30 trinte, 40 quarante, 50 cinquante, 60 soixante,
70 septante, 80 quatre- vingt ou hûtante, 81 hûtante -onque,
90 nonante, 100 cint, 101 cint èt onque ou cint èt eune, 102
- 46

cint èt deûs, etc. 110 cint èt dihe, etc. 200 deûs cints, 201 deûs
cint èt onque, etc. 1000 mèye, 1100 onze cints , 1101 onze cint
èt onque, 1200 doze cints , etc. , 2000 deûs mèye, etc. ,
on million.
Voici notée phonétiquement la prononciation exacte de ces
différents nombres :
õk, ăn, dæ, træ ou děz et træz (devant une voyelle), kwǎt,
sek, sĩh ou sĩ, sět, ūt ou ū , nūf, dĩh ou dī, õs ou oz (devant une
voyelle) , dos ou doz, träs ou trăz, kătwäs ou z, kwès ou z, săs
ou %, dīsět, dīhūt, dīhnūf, vet ou ve (devant une consonne) ,
trềt, kărāt, sẽkāt, swěsãt, sèptāt, kătrève (avec z devant
une voyelle) ou utāt, nonut, set ou se (devant une consonne) ,
mey, ō milo.

Onque, eune . Ces deux formes , l'une masculine , l'autre


féminine , s'emploient absolument et ne peuvent servir d'adjec
tifs numéraux . On ne dira pas onque pan , un pain , ou bien eune
peûre , une poire , mais bien absolument j'ènne a onque, eune,
j'en ai un , une .
En wallon comme en français, la confusion a été complète
entre l'adjectif numéral cardinal et l'article indéfini qui pos
sèdent la même forme : on , féminin ine.

Ex.: On plope, Un peuplier.


Ine homme, Un homme.
Ine poye , Une poule.

Qwate. L'influence française fait parfois apparaître un r


après le t , surtout dans des locutions dont l'oreille wallonne
est constamment frappée, comme quatre hommes , quatre
hommes. Mais ce cas est très rare . On dira : qwate èfants,
quatre enfants , etc. sans 7 .

Cinq , sèpt , noûf. La consonne finale se prononce toujours


devant les voyelles et les consonnes . Elle se prononce forcé
ment douce devant les consonnes douces .
--- 47 -

Sfhe . Devant les mots commençant par une consonne , cette


forme devient sis.

Ex. Sihe èfants. Six enfants .


Sis feummes. Six femmes.

Hût. Le t final ne se fait sentir que devant les voyelles


où à la fin des phrases.

Dîhe . Celte forme , comme sihe, se transforme en une autre,


dîs , devant les mots commençant par une consonne .

Ex.: Dîhe èfants. Dix enfants .


Dis feummes. Dix femmes .

Vingt et cint. Le t final, comme celui de hût , ne se fait


sentir que devant les voyelles ou à la fin des phrases .

7. Adjectifs numéraux ordinaux.

Les voici :
Prumî, fém. prumîre (premier) , deusême, treûsême, qwa
trême, cinquême, etc. , nouvême, vingtême, vingt- inême,
sèptante-treûsême, deux cint èt qwatrême, etc.
Après cint on emploie la conjonction èt .
Ême se prononce è m .
Certains auteurs rendent prumi invariable quant au genre
et disent li prumî fèye, la première fois , au lieu de
li prumîre fèye .
Le wallon possède les formes : li cinquême, le cinquième ;
li dihême, le dixième , employées pour li cinquême pârtèye,
la cinquième partie , li dihême pârtèye, etc.
Il a en outre li moitèye, la moitié , ou li d'mèye, le demi ,
li tîce, le tiers , ( la tierce) et li qwârt, le quart.

8. Adjectifs numéraux multiplicatifs .

Le wallon possède :
Simpe, simple ; dobe, double ; tripe, triple , cette dernière
― 48 -

forme rare à cause de l'amphibologie ; mais il n'a pas de


formes correspondant à quadruple , quintuple , etc. Au lieu de
ces formes , il se sert des locutions : Qwale fèyes pus, cinq
fèyes pus, quatre fois plus, cinq fois plus , etc.
Par contre, il a plus de noms de nombre collectifs que le
français . Car s'il emploie les formes paire, hûtaîne, dîhaîne,
dozaîne, quinzaîne, vingtaîne, trintaîne, cintaîne , etc. , ana
logues aux formes françaises correspondantes , il peut encore
ajouter le suffixe aîne (qui se prononce en ) à tous les adjectifs
numéraux cardinaux .
Ex .: Sîhaîne, sèptaîne, nouvaîne, trazaîne, etc
Un millier se traduit par on mèye, et une centaine le plus
souvent par on cint.
CHAPITRE V.

PRONOM PERSONNEL .

1. Tableau des formes du pronom personnel.

Ce pronom possède des formes nombreuses et intéressantes


en wallon .
Le fait n'a rien en soi qui doive étonner , si l'on considère
que le pronom est la forme grammaticale la plus usitée .
Il constitue , en effet , avec les particules , les articles et les
adjectifs pronominaux le ciment de la phrase , et par là con
tribue pour beaucoup à donner à la langue son cachet d'ori
ginalité.
Le pronom personnel , aussi bien en wallon qu'en français ,
emprunte ses formes au latin (ego , tu , ille , nos , vos ) .
Voici le tableau complet de ce pronom :
4
50 -

PRONOM PERSONNEL .

SINGULIER . PLURIEL

SUJET .

1re pers . ji, j', ju je, j' . nos , n's, n', gn ' -- nous.
2º Dti, t', tu - tu . vos, v's, v' ― vous .
3º » i, il, 'l —- il. is, il, 'lils.
4° eile, ille, ' lle ·-- elle . elles, elle, illes
elles .
ille, ' lles , 'lle

COMPLÉMENT DIRECT .

1re pers. mi, m', mu - me, m '. nos nous .


2€ D ti, t', tu - te, t'. vis, v's, v' -- VOUS.
3º Dli, èl, l', lule , la. les lès, elsè, èlsè (èlèsè) , l's - les.

COMPLÉMENT INDIRECT .

1re pers. mi, m', mu me, m '. nos nous .


20 » ti, t', tute , t ' . vis , v's , v' ―― vous .
3e >> lî, (î) - lui . lèsi, èlsi, èlèsi, l'sî - leur.

ATTRIBUT , COMPLÉMENT D'UNE PRÉPOSITION I

OU EMPLOYÉ ISOLÉMENT .
Sudo

1re pers . mi ――― moi . nos (autes),


― nous .
Qe >> ti, toi --- toi . vos (autes), tes autes -- vous .
lu - lui . zèl ―― eux .
3 »
lèye - elle . zelles- elles { leus autes.
51

PRONOM PERSONNEL .

Notation phonétique.

SINGULIER. PLURIEL .

SUJET .

1 pers. i, j, gu. no(z) , n(z) , n .


20 » ti, t, tu. vo(z), v(z), v ou f.
( i, il, l. ( ť (2), 21, 1.
зе >>
| ěl, il, l . { èl(x) , il(x) , l(z).

COMPLÉMENT DIRECT .

re
1 pers . mi, m, mũ. no (z).
20 » t ti,, tt,, tu. vi(z), vz, vou f
3 D li, ěl, l, lú .
Tě(z), ělz, ělzě, lězě, ělězě, lz.

COMPLÉMENT INDIRECT .

1 ' pers . mi, m, mũ. no (z).


20 D ti , t, tù . vi( 3 ), U , V ou f .
3º » lī, ī. lězī, ělzī, ělězī, lzī.

ATTRIBUT, COMPLÉMENT D'UNE PRÉPOSITION OU EMPLOYÉ


ISOLÉMENT .

1re pers . mi. noz út.


2€ » ti, twě. vòz őt.
lu.
3e >>
ley. } zël.
―― 52 ―

2. Syntaxe .

Les règles syntaxiques applicables au pronom personnel sont


généralement les mêmes en français et en wallon .
Elles différent cependant sur plusieurs points que nous allons
examiner .

1. Lorsque deux pronoms personnels dont l'un est à la 1re ou


à la 2° personne et l'autre à la 3º , et dont l'un est au régime
indirect , l'autre au régime direct, dépendent d'un verbe à
l'impératif, le pronom au régime indirect précède le pronom au
régime direct, contrairement à la tournure française .
Ex .: Dinnez-m'èl . Donnez le moi.
Prustêye-nos l' . Prête-le nous (prête nous le) .

2º Le wallon ne connaît pas l'emploi de deux pronoms de la


3 personne, l'un au régime direct, l'autre au régime indirect
dépendant du même verbe .
Ex. Ji li donne , rend le français je lui donne et je le ou je
la lui donne ; ji lèsî donne, rend le français je leur donne ou je
le, je la, je les leur donne .

3. Dans l'interrogation verbale , 3° personne du singulier , le


pronom personnel semble assimilé ; il modifie la forme du verbe.
Ex .: Ti beus, tu bois ; beûsse ? bois- tu ? T'as, tu as ; asse ?
as-tu ? Ti prinds , tu prends ; Prinse ? prends - tu ?
(Voyez page 54, en bas) .

4° Lorsqu'un ou deux pronoms personnels dépendent d'un


verbe qui est lui - même subordonné à un ou à deux autres
verbes, le ou les pronoms se placent devant le premier de ces
verbes.

Ex.: J'èl vous vèyî. Je veux le voir.


Ji li pous pruster. Je peux lui prêter .
Nos v' li allans fer rinde. Nous allons vous le faire rendre.
Rappelons que les écrivains français du siècle de Louis XIV
employaient indifféremment les deux tournures : il faut le rece
- 53 -

voir, il le faut recevoir, et que la dernière est encore à présent


du domaine de la poésie française .

5º Le pronom réfléchi si et les adverbes pronominaux ènnè


et y suivent la règle énoncéc an 4º .
Ex.: I n'm'ènnè vout nin rinde. Il ne veut pas m'en rendre .
Ji m'y va-st-aller. Je (me) vais y aller.
I s'a volou batte. Il a voulu se battre.

6" Voir page 70 , quelques remarques intéressantes sur


l'adverbe pronominal .

3. Cas sujet.

SINGULIER . PLURIEL .

1re pers . ji, j', ju -- je nos, n's, n', gn' ――― nous.
2 > ti, l' , tu - tu vos , v's, v' - vous.
3º >> i, il, 'lil is, il, 'l - ils .
4€ >> elle, ille, ' lle - elle elles , elle , illes
elles.
ille, 'lles, 'lle

SINGULIER .

Ji. L'i n'existe pas à la 1re personne du cas sujet au XII •


et au XIII° siècle , d'après Burguy, si ce n'est dans la forme gie
(Ile de France, Bourgogne, Lorraine , Poitou) .
A comparer l'i de l'article lile , de la préposition di = de ,
de la conjonction qui = que , etc.
Ex .: Ji tûse. Je pense.

Ju . Ce pronom ne s'emploie que dans la forme interrogative


lorsque le verbe se termine par une consonne sonnante
(e muet).
Ex.: Aime-ju. Aimé-je .
Remarque. -- La formeju est ancienne (cf. Bourguignon ju, Picard
jou au XIIIe siècle et même au XIVe siècle) . Elle a persisté parce
qu'elle recevait une accentuation forte dans l'interrogation verbale.
54 -

Si, dans la forme interrogative , le verbe se termine par une I


voyelle , il se produit parfois une espèce de redoublement du
pronom . Mais dans ce cas, le wallon emploie aussi le pronom
j' tout seul ; (voir l'article suivant ) .
Ex.: A-j' ju ou a-j' ine saquoi. Ai - je quelque chose .
Vous-j' ju ou vous-j' fer coula. Veux-je faire cela .

J' s'emploie toujours devant les mots commençant par une


voyelle ; parfois devant ceux commençant par une consonne
lorsqu'un son voyelle précède immédiatement le pronom , et
parfois devant ces derniers lorsque le pronom commence la
phrase .
Ex.: J'aime. J'aime.
Ah ! j' veus ou ji veus 'ne Ah ! je vois quelque chose .
saquoi.
J'magn'reus ouji magn'reus Je mangerais bien un mor
bin on boquet. ceau .

La forme s'emploie aussi dans l'interrogation verbale , au lieu


de ju, lorsque le verbe est terminé par une voyelle . (Voir ju.)
Ex.: A-j' ine saquoi ? Ai -je quelque chose.

Ti. La forme s'emploie devant les consonnes .


Ex.: Ti magnes. Tu manges .

T' s'emploie de la même façon que j' .


Ex .: T'as. Tu as.
Hai! t' magn'reus tot. Eh ! tu mangerais tout.
Mais l'élision est plus rare que pour j' parce qu'elle est plus
dure .

Tu ne sert qu'à l'interrogation lorsque le verbe se termine


par une cousonne sonnante (e muet) .
Ex.: Magnes-tu ? Manges -tu ?

La forme de l'interrogation verbale , à la 2° personne du singu


lier, est remarquable, lorsque le verbe est terminé par une
- 55

voyelle le pronom personnel semble s'assimiler et l'on a des


formes comme asse ? As - tu ? Beûsse ? Bois - tu , etc.
Le pronom disparaît complètement , l'interrogation étant
suffisamment indiquée par la sifflante s , une persistance de l's
latin dans bibis ne, habes- ne , etc. , ( ' ) .

I s'emploie devant les mots commençant par une consonne .


Ex .: I m' jâse. Il me parle.

Remarque. -1 L'apocope de existe également dans le français


populaire moderne. I m'parle.

Il s'emploie devant les mots commençant par une voyelle .


Ex.: Il aîme. Il aime .

' L. La syncope de l'i se fait , mais pas toujours , quand un


son voyelle précède immédiatement le pronom il au cours de
la proposition et parfois aussi lorsque le pronom commence la
phrase.
Ex Bin ! 'l est ou il est bon. Eh bien il est bon .
'L aveut ou il aveut sûr Il avait certainement
ine saquoi. quelque chose .

Remarque. - Le wallon supprime parfois le pronon i ou il


au commencement de la proposition .
Ex.: Aveut bin freud. Il avait bien froid .
Magnive tot seu. Il mangeait tout seul.

Elle s'emploie devant les consonnes et les voyelles .


Ex. : Elle rote. Elle marche .
Elle ach'têye. Elle achète .

Ille s'emploie , mais très rarement de nos jours , au lieu de


elle.
Ex. Ille ni voreut nin. Elle ne voudrait pas .

( 1 ) Voir la première partie de cet essai de grammaire : Le verbe wallon.


-- 56 -

Remarque. ――― La forme est très ancienne . Burguy la signale dans


le dialecte picard du XIIe et du XIIIe siècle et M. Wilmotte dans le
wallon (fin du XIIIe siècle) sous la forme ilh . (Etudes romanes
dédiées à Gaston Paris. Extrait. Paris, 1891 , p . 243) .

'Lle. Même observation que pour 'l . Mais la syncope ne se


fait pas bien quand le pronom commence la phrase .
Ex. : Ah ! ' lle vint ou elle vint. Ah ! elle vient .

PLURIEL .

M_M_P
Nos s'emploie devant les consonnes et les voyelles , s sonnant
douce devant celles - ci .
Ex .: Nos avans. Nous avons .
Nos poirtans. Nous portons .

N's . Devant les voyelles , on observe souvent la syncope


de l'o , quand le pronom commence la phrase ou lorsqu'il est
immédiatement précédé d'un son voyelle .
Ex.: Awè, n's avans ou nos avans. Oui , nous avons .

N' . Très souvent , le wallon simplifie encore la forme .


devant les consonnes exclusivement , quand une voyelle précède
le pronom, ou quand celui - ci commence la phrase .
Ex.: Awè, n' polans ou nos polans Oui, nous pouvons
bin fer coula. bien faire cela .

Gn'. Dans l'interrogation verbale , l'n se palatalise en gn ' .


Ex . Allans-gn' ? Allons -nous ?

Nous ne pouvons voir, dans ce gn ' , la première personne


du singulier analogue à je dans le français rustique , j'allons .
On serait tenté de le croire parce que l'interrogation verbale
possède une autre forme du pronom à la 1re personne du
pluriel , forme qui est ch' (te).
Ex .: Avans- ch' ou mieux avans j' , j' se prononçant dur
à la fin d'un mot. Cette dernière forme avans-j' est bien la
57 ―

correspondante du français rustique j'avons , j'ons , etc. , ne


s'employant plus , en wallon , que dans l'interrogation
verbale .
Mais le gn' semble bien la palatalisation de n' = nos , permet
tant une émission plus douce .
La langue possède encore les locutions : n'allans - gn ’-ju nin,
litt. n'allans nous-je pas ; avans-gn'-ju , litt . avons-nous-je,
à côté d'autres avans -jju , n' allans-j'ju, comparables aux
exemples cités à propos de la forme ju.

Vos , v's , v', voir nos , n's , n ' . Dans l'interrogation verbale ,
v'est assimilée aux consonnes finales et se prononce toujours
f
' , sauf devant une consonne douce .
Ex Vos èstez. Vous êtes .
V's èstez. Vous êtes .
Vos corez. Vous courez .

V' m'allez fer creûre. Vous allez me faire croire .


Tossez-v' ? Toussez -vous ?
Tossez v' baicôp? Toussez-vous beaucoup ?

Is s'emploie dans tous les cas ; s sonne douce devant les


voyelles.
Ex .: Is ont. Ils ont .

Is payèt, payèt-is. Ils paient , paient - ils .

Il , ' 1. Ces formes s'emploient aussi , au lieu de is , devant les


voyelles ; la syncope de l'i se fait parfois quand le pronom com
mence la phrase ou quand il est immédiatement précédé d'un
son voyelle .
Ex . : Il ont ' ne saquoi . Ils ont quelque chose .
Ah ! 'l ont ou il ont
Ah ! ils ont beaucoup d'argent.
baicôp des cense.

Remarque. ――――――― Cette forme du pluriel sans s pourrait bien être pri
mitive . Fallot, en effet, cité par Burguy, rapporte que l's dans ils
apparaît pour la première fois en 1305.
58 --

Elles , Elle, Illes , Ille. Au feminin pluriel , à côté de


elles et illes (cf. le singulier) , nous trouvons elle, et ille sans s.
Ex . Elles aîmèt .
Illes aîmèt.
Elles aiment .
Elle aîmèt.
Ille aîmèt.

'Lles , ' lle . La syncope de l'i ou de l'e se fait parfois quand


une voyelle précède immédiatement le pronom.
Ex.: Bin, ' lles vis ou elles aîmèt. Eh bien , elles vous aiment .

Remarque.-Les formes en i et sans s sont rares en wallon moderne.

4. Régime direct.

SINGULIER . PLURIEL .

1re pers. mi, m', mu -- me , m'nos --- nous .


2€ » ti, t', tu - te, t' vis, v's, v' ――― Vous

ตั๋ว

3º >> li, èl, l' , lule , la. les, èls, elsè, lèsè(èlèsè) , l's - les .

SINGULIER .

Mi est la forme primitive du pronom , en Picardie surtout ,


où elle s'employait dans tous les cas (régime direct et indirect
et complément d'une préposition) comme en wallon du reste ,
où la forme correspondant au français moi n'existe pas .
Ex. Elle mi houque. Elle m'appelle .

M'. L'élision de l'i se fait toujours devant une voyelle et h


non aspirée et aussi devant une consonne , lorsqu'une voyelle
précède immédiatement le pronom ; cette forme sert de complé
ment direct à un impératif terminé par un son voyelle ( cf. mu) .
Ex. : I m'aime. Il m'aime .
I m' bouhe. Il me frappe .
Battez-m '. Battez moi.
- 59 ---

Mu s'emploie comme complément direct d'un impératif


terminé par une consonne sonnante (e muet) .
Ex. Houque-mu. Appelle- moi .

Cette forme est à rapprocher de la forme ju de l'interrogation


verbale (voir plus haut, p . 53) .

Ti , t' , tu . Les mêmes règles que pour mi , m', mu,


s'appliquent à ces formes .
Ex. Elle ti louque. Elle te regarde .
Ji t'ârè. Je t'aurai .
It' touw'reut. Il te tuerait.
Boge-tu. Ote -toi de là . Litt Bouge - toi .

Signalons un redoublement remarquable du pronom . Le


wallon dira :
Assîds - t' ou assîds - t' tu. Assieds-toi.

Li. Cette forme s'emploie devant les mols commençant par


une consonne . Elle ne doit surtout pas être confondue avec la
forme du régime indirect li, avec î long ( voir plus loin , p . 64) .
Ex. Elle li prind . Elle le prend .

L' s'emploie toujours devant les voyelles et h non aspirée ;


en outre devant les consonnes , quand une voyelle précède
immédiatement le pronom.
La forme s'emploie aussi comme complément d'un impératif
terminé par un son voyelle (cf. lu) .
Ex : Jila. Je l'ai .
Mi papa l' veut. Mon père le voit.
Hapans- l' . Volons le.

El . Cette forme s'emploie , de même que li , devant les mots


commençant par une consonne .
Ex.: J'èl veus. Je le vois.
El vousse ? Le veux- tu ?
C'est mi qu'èl vout. C'est moi qui le veux .
60

C'est la seule forme du pronom de la 3e personne du régime


direct qui s'emploie avec un autre pronom du régime indirect .
Ex .: Ji t'èl dis et non ji t' li dis. Je te le dis .
Donne m'èl et non donne mi li . Donne le moi .

Excepté si ce dernier pronom est nos.


Ex.: Prustez-nos l' , prêtez - le nous ou prêtez nous le .
A signaler un redoublement remarquable .
Elle vis èl l'a dit pour elle vis l'a dit . Elle vous l'a dit.
Ji t'èl l'a dit pour ji t' l'a dit. Je te l'ai dit.

Remarque. - Cette forme est remarquable en wallon parce


qu'elle n'est pas signalée , au singulier du moins , dans l'ancienne
langue , à moins qu'on ne veuille voir dans certaines contractions
romanes le germe de cette inversion , comme dans cette phrase par
1
exemple :
Diex nel veut mie.

On aurait pris nel, sans le savoir peut-être, pour la contraction de


n'èl, et on aurait continué à se servir de la forme èl dans tous les
1
autres cas : j'èl, m'èl, etc.
Mais n'est-ce pas plutôt une forme d'analogie empruntée au pluriel
èls qui existe, lui , dans l'ancienne langue et dans le wallon moderne ?
Comme on disait j'èls a , je les ai , on a dit j'èl veût, je le vois et la
forme s'est peu à peu imposée.
Une autre explication vient encore à l'esprit. L'è de èl proviendrait
simplement de la difficulté qu'ont les Wallons à prononcer deux
consonnes de suite ; cet è serait alors analogue à cet autre que l'on
intercale au présent de l'indicatif de certains verbes , soffler. par ex. :
ji soffèle. Mais, l'on ne voit pas bien la nécessité de cette lettre eupho
nique , le wallon pouvant tout aussi bien dire : ji l'veûs , que j'èl veûs ;
en outre, si c'est une lettre euphonique, pourquoi ne s'est-elle pas intro
duite à la 1re et à la 2e personne du pronom pour donner èm et èt ?

Lu. Cette forme s'emploie , de même que mu et tu, comme


complément d'un impératiť terminé par une consonne sonnante
(e muet) cf. l'.
1
Ex. Donne-lu . Donne- le ou donne-la ..
61

Remarque. ―――― La forme lu existe au XIIe et au XIIIe siècle . En


walllon, il y a identité de forme entre le masculin et le féminin de la
3e personne du pronom personnel complément direct . Cette identité
existait dans l'ancien picard . En wallon, j'èl vous signifiera je le
veux, et je la veux .
Nous verrons plus loin que cette identité existe aussi pour la 3º per
sonne du régime indirect, mais non pas pour la 3e personne du
complément des prépositions .

PLURIEL.

Nos n'admet pas de forme plus simple .


Ex. Li chin nos hagne. Le chien nous mord.
Li chin nos a hagnî . Le chien nous a mordu .

Vis . Cette forme s'emploie devant les consonnes et les


voyelles lorsque le pronom commence la phrase , ou lorsqu'il
est immédiatement précédé d'une consonne sonnar.te (e muet)
au cours de la proposition.
Ex.: Vis hér ! Vous hair !
Vis aîmer ! Vous aimer !
Elle vis aîme. Elle vous aime .
Elle vis tint. Elle vous tient.

V's. La syncope de l'i a parfois lieu devant une voyelle ou h


muette lorsque le pronom commence la phrase .
La forme v's est obligatoire lorsque le pronom est immédiate
ment précédé et immédiatement suivi d'une voyelle au cours
de la proposition .
Ex.: V's aîmer ! ou vis aîmer ! Vous aimer !
Po v's aimer, Pour vous aimer.
Mi fi v's aime. Mon fils vous aime .

V'. Cette forme s'emploie parfois devant les consonnes


lorsque le pronom commence la phrase . Elle est obligatoire
devant une consonne lorsqu'une voyelle la précède immé
- 62 -

diatement au cours de la proposition . Elle est aussi la seule


employée comme complément d'un impératif.
Ex.: V magni ! ou vis magni ! Vous manger !
Po v' magni . Pour vous manger.
Bogîz-v'. (Bougez-vous). Otez -vous
(de là) .

Les . Cette forme identique à la forme française s'emploie


devant les consonnes et les voyelles. 1
Ex : Ji les veus . Je les vois .
Aime- les. Aime- les . I

Els Els et les s'emploient indifféremment l'un pour l'autre


devant les mots commençant par une voyelle . Cependant èls ne
peut pas être complément d'un impératif; s se prononce tou
jours douce .
le wallon permet l'hiatus entre è de èls et une voyelle
précédente .
Ex .: J'èls a ou ji les a. Je les ai.
Li veûl ti èls a ou les a. Le vitrier les a.
Mi pére èls a ou les a. Mon père les a.

Remarque. Els est la forme picarde primitive du complément


des prépositions. (Els, ill(o) s est devenu eux) . Déjà au XIIe et au XIIIe
siècle, cette forme a servi de régime direct , usage qui s'est conservé
dans le wallon moderne.

Elsè. L'è final est ici euphonique . Il est à comparer à l'è


final des adjectifs du féminin pluriel précèdant les substantifs
(v . p . 37).

Else remplace parfois les devant les verbes commençant


par une consonne . L'hiatus avec l'è initial est permis .
Ex.: J'èlsè veûs ou ji les veûs. Je les vois .
Mi papa èlsè prind ou les prind. Mon père les prend.
Mi pére èlsè veut ou les veut. Mon père les voit.

Lèsè. C'est une autre forme de les avec un è euphonique .


63

Elle s'emploie parfois devant les consonnes , mais elle est


rare .
Ex .: Ji lèsè veus . Je les vois .

Elèsè. C'est une combinaison des formes précédentes .


Ce pronom , est , en tous cas , excessivement rare . L'è initial
provient peut- être d'une prononciation défectueuse d'un i pré
cédant le pronom : J'èlèsè pour ji lèsè.
Cf. èlèsî du régime indirect .

L's s'emploie parfois entre deux voyelles au cours de la pro


position . Cette forme donne de la rapidité à la phrase.
Ex.: Mi papa l's a ou les a. Mon père les a.

5. Régime indirect .

SINGULIER. PLURIEL .

1re pers . mi, m ', mume, m '. nos - nous .


2º » ti, t' tute , t'. vis, v's, v' vous.
30 >> lî, (i) - lui . lèsi, èlsi, èlèsi, l'sî ― leur.
Voir les formes identiques du complément direct pour les
deux premières personnes du présent cas .
Ex. Elle mi donne. Elle me donne .
I m' donne. Il me donne .
I m'ahâye. Il me convient .
Dinnez-m'. Donnez-moi .
Donne-mu. Donne-moi.
Elle ti dit. Elle te dit.
Elle t'ahâye . Elle te convient .
It' dit. Il te dit .
Donne-tu. Donne-toi .
I nos donne. Il nous donne .
Elle nos ahâye. Elle nous convient.
Prustez-nos. Prêtez - nous .
64 ―――

Elle vis ahâye. Elle vous convient.


I v's ahâye. Il vous convient.
Ji v' donne. Je vous donne.
Dihez-v'. Dites-vous.

Li. Cette forme est primitive et générale ; c'est la seule qui


existe dans la langue d'oïl du XIIe et du XIIIe siècle . Et il est
à remarquer qu'alors , non plus que dans le wallon moderne ,
elle ne se différenciait au féminin . Donne-li signifie donne- lui
(à lui ou à elle) . Il en est d'ailleurs de même en français (lui) .
Cette forme a dû sa persistance à la quantité longue (latine
également illi ) de l'î qui entre dans sa composition .
Fx. Ji li donne. Je lui donne .
Vos li ach'tez. Vous lui achetez .
Ach'tez li. Achetez lui .

(f). Cette forme n'existe pas seule, à proprement parler.


Mais cet long est la caractéristique du cas indirect en langue
d'oïl et plus particulièrement en wallon ; en cette qualité , il
s'emploie au lieu du pronom lui-même avec l'adverbe prono
minal ènnè (en ) .
Ex .: J'ènne î donne. Je lui en donne .

Lèsî, èlsî, èlèsî , l'sf Cet î caractéristique sert à former la


3me personne du pluriel du pronom personnel au cas indirect, en
s'ajoutant tout simplement à la 3me personne du pluriel du cas
= lès-î,
direct. C'est ainsi que sont constituées les formes lèsî —
èlsi - èls-î, èlèsí èlèsè-î, l'sî = l's-î.
Lèsî, èlsî et èlèsî (rare) s'emploient indifféremment l'un pour
l'autre . L'sî est toujours immédiatement précédé d'un son
voyelle au cours de la proposition . S se prononce toujours douce.
Ex.: Ji lèsi donne. Je leur donne.
Jèlsî ach'têye . Je leur achète .
J'èlèsi vind (rare) Je leur vend .
Mi papa l'si vind. Mon père leur vend .
Remarque . - Dans ces formes , on a bien à faire à la combinaison
du cas direct du pluriel et de l'î caractéristique du cas indirect .
65

En effet, l's de ces pronoms sonne douce, comme les s finales des
articles, des adjectifs pronominaux et des pronoms devant une
voyelle, ce qui prouve que î a été simplement ajouté à èls ou à les dont
l's sonne également douce devant les voyelles .
Mais comment cette combinaison s'est-elle produite ?
En français, on trouve les lui (je les lui ai donnés) , les leur
(je les leur ai donnés) et le leur (je le leur ai donné) qui appartiennent
au langage relevé. Le wallon , parler populaire par excellence,
traduit toutes ces formes par èlsî ou lèsî (j'èlsî a d'nné) , qui repré
sentent la combinaison du cas direct du pluriel, et de l'î caracté
ristique du cas indirect.
Petit à petit, la confusion s'est établie entre je les ou je le leur ai
donné , et je leur ai donné , de sorte que èlsî a purement et simplement
été considéré comme l'analogue du français leur.
Cette forme est particulière au dialecte wallon . Elle peut jusqu'à un
certain point servir à délimiter topographiquement le dialecte wallon
en dehors des constatations phonétiques pures . C'est ainsi qu'en se
basant sur les différentes versions de la parabole de l'enfant prodigue,
publiées dans les Bulletins de la Société liégeoise de littérature wallonne
(Bull . t. VII , 1re sér. 2e livr .) , on trouve que les localités suivantes
ont la forme èlsî ou l'sî. Dinant , Beauraing, Heures, Rochefort,
Ciney, Hotton, (Famenne), Marche, St-Hubert, Neufchâteau, Virton ,
Houffalize, Bastogne, (Condroz ) , Huy , Spa , Aubel , Stavelot, Malmedy,
Weismer, Sourbrodt, Liége, Montegnée, Waremme, Hannut, Verviers,
en un mot toute la partie wallonne proprement dite.
Les autres localités (loc . cit. ) ont leu provenant de la forme
leu(r) par apocope de l'r :
Ces localités sont : Lille, Douai, Tournai , Frasnes , Antoing , Leuze,
Peruwelz, Ath, Lessines , Quevaucamps , Pâturages, Dour, Bassilly,
Enghien , Mons, Soignies, Beaumont, Gosselies, Nivelles, Wavre ,
Walcourt, Gembloux, Fosse , Namur ( ?) , Spontin , Havelange, Bouillon,
Florenville, en un mot à peu près toute la région picarde.
Certains auteurs rapprochent de notre forme wallonne , cette autre
du français populaire leur-z -y, dans certains dialectes leu-z-y ; mais
c'est plutôt une corruption .
5
66

6. Attribut, complément d'une préposition


ou employé isolément .

SINGULIER . PLURIEL . 1

1r pers . mi —- moi . - nous .


nos (autes)
2º Dti, toi - toi . vos (autes) tès autes, Vous
lu — lui. Szèl
- eux .
3e >> leûs autes.
{ lèye - elle . | zèlles , elles .

Mi et ti sont les formes primitives seules employées en


Picardie dans tous les cas, jusqu'à la fin du XIIIe siècle ,
époque à laquelle les formes moi et toi commencèrent à
paraître.
Ex .: C'est mi. C'est moi.
Por ti. Pour toi.

Toi (twě) est la forme palliée de ti. Ti se trouvant souvent


dans la bouche du peuple, a passé pour grossier auprès des
personnes délicates , qui l'ont remplacé par toi , emprunté au
français , dans tous les cas où est requis le tutoiement ; celui- ci
est d'ailleurs très rare dans la classe bourgeoise , mème entre
parents .

Lu . Cette forme est , en wallon , différente de celle du régime


indirect li contrairement à ce qui se passe en français où la
forme lui est identique dans les deux cas .
Ex. C'est lu. C'est lui.
Por lu. Pour lui .

Remarque. La distinction de plus haut entre régime indirect et


régime des prépositions existe en ancienne langue où nous trouvons
li pour le régime indirect et lui pour le régime des prépositions . Mais
la confusion s'est rapidement établie, de sorte que, vers la fin du
XIIIe siècle, on se servit couramment de l'une des formes pour l'autre.

Lèye. En wallon , le masculin du pronom se différencie


- 67 -

nettement du féminin ; pour faire cette différenciation , le fran


çais a été obligé de prendre la forme elle du cas sujet comme
féminin du pronom régime des prépositions .
Ex. C'est lèye. C'est elle.
Por lèye . Pour elle.

Remarque. D'après Burguy, la forme lei , qui existait au XIIe


siècle, n'eut pas longue faveur. On la remplaça par lie, qui , bientôt se
confondit complètement avec li, régime indirect des verbes, ce qui
prouve bien, entre parenthèses, que l'ê de ce régime était long.

Nos et vos sont rarement employés seuls , en wallon .


On les fait presque toujours suivre de l'adjectif autes .
Ex.: Po nos autes. Pour nous (autres) .
C'est vos autes. C'est vous (autres) .
Nos autes. Nous (autres).
Excepté quand vos est mis pour ti, toi .
Ex .: C'est por vos. C'est pour vous (toi).

Tès autes . C'est une locution populacière , parfois employée


au lieu de vos autes et suivie alors de la 2 personne du
singulier du verbe .
Ex.: Tès autes, ti freus çoula ! Vous, vous feriez cela !

Zèl. Cette forme est remarquable.


Le régime de la préposition dans l'ancienne langue est èls ,
français moderne eux. Mais cette forme èls , on l'a vu p . 62 ,
a été prise comme régime direct des verbes . Le wallon a donc
imaginé une autre forme pour le régime des prépositions ;
il a fait usage d'un z euphonique qu'il a considéré comme
faisant partie intégrante du pronom ; l'apocope de l's est facile
ment explicable par la règle des deux consonnes finales dont la
première seule se prononce . (Voir J. Delbœuf. Notes sur
Li mâye neûr d'à Colas .)

Zelles . Cette forme que l'on peut expliquer par la forme


primitive eles du roman wallon , régime du féminin pluriel des
68 -

prépositions , précédée d'un z euphonique , a peut-être influé


sur l'adoption de la forme zèl au masculin .
Ex .: Por zèl. Pour eux .
C'est zèlles. Ce sont elles ?
Qui, zèl ? Zèlles ? Qui, eux ? Elles ?
Leus autes. C'est une locution assez rare remplaçant zèl
et zèlles.
Ex. C'est leus autes litt . leurs autres, français vulgaire : eux
autres .
OBSERVATIONS .

1º La conjonction qui est , comme en français , assimilée aux


prépositions .
Ex.: Ji n' veus qu' lu , qu' lèye. Je ne vois que lui , qu'elle .
2º La locution prépositive d'à , contractée des prépositions
de et à (voir l'article , p . 15) , est ordinairement suivie du pro
nom possessif, au lieu de l'être du pronom personnel .
Ex .: C'est d'à meune. C'est à moi .

Toutefois, à la 3m personne , on emploie indifféremment les


deux pronoms
Ex .: C'est d'à lu. C'est à lui .
C'est d'à sonque. C'est à lui . litt C'est d'à sien .
C'est le sien .
3º Les prépositions voci ou vocial, vochal (voici) et volà
(voilà) se trouvent scindées par le pronom personnel et donnent
avec lui les locutions suivantes .
Ex . : Vo -m ’- là . Me voilà .
Vo-t'-cial. Te voici .
Vo- l'-ci. Le voici.
Vo-l'sè-chal, vo - les-cial. Les voici , etc.
Il en était de même en ancienne langue . Ex . : voi-là-ci.
On trouve encore :
Vo-m '-rila. Me revoilà .
Vo-m '-ricial. Me revoici .
CHAPITRE VI .

AUTRES PRONOMS .

1. Pronom réfléchi .

Les formes de ce pronom sont si et s ' , français se et s ' .

Si Cette forme s'emploie devant les consonnes quand le


pronom commence la phrase et quand il est immédiatement
précédé, au cours de la proposition , d'une consonne sonnante
(e muet) .
Ex . Si batte. Se battre .
Elle si batte. Elle se bat.

S'. Cette forme s'emploie toujours devant les voyelles , tou


jours aussi devant les consonnes quand elle est immédiatement
précédée d'un son voyelle au cours de la proposition et parfois
devant les consonnes , quand le pronom commence la phrase .
Ex . Elle s'amuse. Elle s'amuse.
Is' towe. Il se tue .
S' touwer ou si touwer po rin. Se tuer pour rien .
Ces formes du pronom réfléchi servent de régime direct
et indirect .

Remarque. Le wallon n'a pas de forine pour le pronom réfléchi


régime d'une préposition (français soi) . Il emploie le pronom per
sonnel dans ce cas.
Ex.: Ijâse di lu. Il parle de soi .
70

2. Adverbes pronominaux.

(FRANÇAIS en , y . )

L'adverbe en a pris en wallon plusieurs formes . Ce sont :


ènne, è, ènnè.
'nne, 'nnè.
La forme première serait ènne (ènn) . Inde a donné end, ent
et en, dont l'n , se prononçant devant une voyelle , s'est
redoublée (cf. le redoublement de l'l dans elle, anc . franç . ele).
Certains Wallons ne font d'ailleurs pas sentir le redoub'ement
ou le font très peu sentir .
L'e muet termine ce mot comme la plupart des mots
terminés oralement par une consonne sonnante.
Devant une consonne , ènne est devenu ènnè, deux consonnes
de suite se prononçant difficilement en wallon d'après une règle
déjà vue. L'è ajouté est analogue à l'è du féminin pluriel des
adjectifs qualificatifs précédant leurs substantifs , v . p . 37 .
La forme è est plus rare que les deux autres et elle paraît
directement traduire le français en.
Quant à ' nnè et ' nne, ce sont des formes abrégées qui s'em
ploient parfois ( car l'hiatus est permis ) par raison d'élégance
lorsqu'une voyelle les précède immédiatement au cours de la
proposition .
Ex.: Mi papa ' nne a ou ènne a. Mon père en a.
Mi papa 'nnè vind ou ènnè vind. Mon père en vend.
J'è vinds (rare). J'en vends .

OBSERVATIONS .

1° La construction du verbe aller avec cet adverbe prono


minal est intéressante . S'en aller se traduit par ènne aller .
La conjugaison est :
Ji m'è vas, j'ènnè vas ou ji m’ènnè vas . Je m'en vais .
T'ènnè vas. Tu t'en vas .
Ennè va. Il s'en va .
71
1
Elle ènnè va. Elle s'en va.
Nos ' nne allans. Nous nous en allons .
Vos 'nne allez. Vous vous en allez .
Ennè vont. Ils s'en vont.
Elle ènnè vont. Elles s'en vont .
Va z-è. Va-t- en .

Signalons la tournure corrompue va-r-z-en , litt . reva-t-en,


retourne chez toi , pour va-r -z -è̟ , même sens .
2º Les constructions suivantes sont remarquables :
Ji m'ènne ènne î va tant dire. Je (m'en) vais tant lui en dire .
J'ènne ènne î a jâsé à côté de j'ènne î a jâsé. Je lui en
ai parlé.
La répétition semble donner plus de force à l'expression .

3 Les prépositions vocial et volà sont scindées par l'adverbe


pronominal ènne, comme par le pronom.
Ex Vo-'nnè-là. En voilà .
Vo-'nnè-cial. En voici .

A còté de ces locutions en existent deux autres vo -z-è - là et


vo -z-è-cial, en voilà , en voici , et par syncope de l'o, v-z- è-là,
v-z-è-cial.

Remarque. ― La préposition vola a d'ailleurs un sort curieux. On a


déjà vu deux particularités qui la distinguent. En voici une troisième :
L'a de ce mot a été pris pour une forme du verbe avoir dans
la phrase : vola deus ans. Voilà (il y a) deux ans. Si bien que cet a
se conjugue et devient vol' aveut. il y avait , et vol' ârè, il y aura.

4° L'adverbe de la négation verbale, en wallon , est ni ou


n '...nin .
Ex. Elle ni vout nin. Elle ne veut pas .
Ji n'a nin. Je n'ai pas .

Lorsque l'adverbe pronominal ènne l'accompagne dans une


phrase, la première partie de l'adverbe : ni , disparaît.
Ex.: Elle ènnè vout nin. Elle n'en veut pas .
J'ènne a nin Je n'en ai pas .
72 -

Lorsque la phrase s'applique à des objets que l'on peut


compter, la particule ni persiste, mais la particule nin dispa
raît et est remplacée par l'adjectif nouque, féminin nolle,
(aucun) .
Ex.: Avez-v' dès èfants ? Ji n'a nouque.
Avez -vous des enfants ? Je n'en ai pas (aucun ) .

Celte tournure est à rapprocher de la tournure allemande :


Ich habe kein . Souvent cependant , par superfétation , le wallon
se sert quand même de l'adverbe ènne et forme sa phrase 1
ainsi qu'il suit :
J’ènne a nouque . Litt. J'en ai aucun .

|
y.

Le second adverbe pronominal est y qui a les mêmes usages


qu'en français :
Ex .: Vos y èstez. Vous y êtes.

Cependant le wallon emploiera de préférence l'adverbe là ,


dans certains cas où le français emploie l'adverbe y.
Ex.: Louquiz on pau è l'ovreû si les ovrîs sont là.
Voyez dans l'atelier si les ouvriers y sont .
Li maisse est-i là ? Le patron y est- il ?

Signalons la tournure ji m'y vas, j'y vais , alternant avec j'y


vas , plus rare .
Le wallon fait un emploi abusif de y dans la phrase :
Li jardin wisse qu'on y plante des jottes . Le jardin où on
plante des choux .

3. Pronoms possessifs .

SINGULIER .

Li meune . Le mien , la mienne.


Li tonque. Le tien , la tienne .
- 73

Li sonque. Le sien, la sienne .


Li nosse. Le nôtre, la nôtre .
Li vosse. Le vôtre , la vôtre .
Li ci d'à zèl (zelles). Le leur, la leur .

PLURIEL .

Les meunes. Les miens, les miennes .


Les tonques. Les tiens , les tiennes.
Les sonques. Les siens , les siennes .
Les nosses. Les nôtres .
Les vosses . Les vôtres .
Les cis d'à zel (zelles). Les leurs .
ou Leus zèl (zelles).

Remarques. - Meune est parfois , mais rarement , remplacé


par mène, mêne (mễn) ou minque ( d'origine flamande probable
ment) .

Tonque l'est parfois par teune et sonque par seune.


On voit que la 3e personne du pluriel n'est pas analogue aux
autres, mais qu'elle est constituée par une périphrase .
Celle ci peut également faire l'objet d'un tableau complet ,
ainsi qu'il suit :

SINGULIER . PLURIEL .

Li ci d'à meune. Litt . celui à moi . Les cis d'à meune, etc.
Li ci d'à tonque.
Li ci d'à sonque ou d'à lu.
Li ci d'à nosse (ou d'à nos autes).
Li ci d'à vosse (ou d'à vos autes).
Li ci d'à zèl (zelles) (ou d'à leus autes).
Mais ces périphrases sont bien moins employées que les
pronoms eux -mêmes , sauf aux 3 personnes du pluriel .
74

4. Pronoms démonstratifs .

SINGULIER. PLURIEL .

ci-cial (chal), celui -ci . ces-cial, ceux ci .


MASCULIN .
ci-là, celui - là. ces-là, ceux-là .
cisse-cial, celle- ci . cèsse-cial, celles ci .
FÉMININ . cisse-là, cisse-lal, cèsse-là ou cèsse-lal,
celle-là . celles- là .
ci, c', ce, c'.
NEUTRE . çouci, çoucial, çoulà, ceci , cela .
ça , ça.

Le wallon a , comme le français , adopté les adverbes ci et là


comme suffixes . Cette adoption en français est postérieure au
XIIIe siècle .
Mais il a complètement confondu l'emploi primitif et parti
culier de ces pronoms démonstratifs en oubliant, ce qui n'a
d'ailleurs rien d'étonnant, leur étymologie .
Il a , en effet, adopté comme masculine la forme qui , primi
tivement , désignait la personne rapprochée , à savoir ci(l) (ecce
ille) et comme féminine la forme qui désignait la personne
éloignée, à savoir cisse (ecce iste).
Dans le premier cas, il a supprimé l'l étymologique . Mais ,
il l'a réajouté à l'adverbe ci de façon à le transformer en cial.
Il ajoute parfois cette à l'adverbe là (cisse- lal) , mais au
féminin seulement, la forme lui paraissant plus féminine ainsi .
La forme cèsse du féminin pluriel est copiée sur celle du
singulier cisse.
Pour le neutre , ci (franç ce) est à comparer quant à la
forme à li (franç . le ) , mi (franç me) .
Ça est une contraction de coula (cela) , qui se retrouve dans
le français vulgaire .
Ex.: Ci-cial èl vât bin. Celui- ci le vaut bien .
Ci-là n ’ vật rin . Celui -là ne vaut rien.
- 75 ―

Cisse-cial est trop chire. Celle - ci est trop chère .


Cisse-là ou cisse-lal ossu. Celle- là aussi .
Ci n'est rin. Ce n'est rien .
C'est bon. C'est bon.
Quoi-y-est-c' couci , çou- Qu'est ceci , cela ?
cial, coulà.
Ça n' fait rin. Cela (ça) ne fait rien .

Il existe encore d'autres pronoms démonstratifs wallons


s'employant, comme les pronoms français celui , celle, ceux,
celles, ce, quand ils sont déterminés par une proposition ou
bien suivis de la préposition di.
Ces pronoms sont :

SINGULIER PLURIEL .

MASCULIN. Li ci, celui. Les cis , ceux .


FÉMININ . Li cisse, celle . Les cisses, celles .
NEUTRE . Cou, ce .

L'emploi de l'article devant le pronom démonstratif n'était


pas rare en langue d'oïl .
Ex : Li ci di m' fré. Celui de mon frère .
Li cisse qui jâse. Celle qui parle .
Les cis d'à Jacques. Ceux de Jacques .
Les cisses di mon Piérre. Litt . celles de chez Pierre .
Les personnes habitant la
maison de Pierre .
Çou qu'j'a. Ce que j'ai .

La forme neutre cou (pronom isolé de son ad verbe , çou . ci,


çou ...la, çou..cial) ne s'emploie jamais que suivie de la con
jonction qui.
Ex.: Çou qui j' veus. Ce que je vois .

Cette forme se retrouve au XII et au XIII siècle en Bour


gogne . La Picardie a chou.
76 -

5. Pronoms indéfinis .

Ine saqui, quelqu'un ; ine saquoi quelque - chose .


Quéque-onques ou quéques-onques , quelques- uns ; fém .
quéque-eunes ou quéques-eunes , quelques - unes .
Chasconque ou chaskeune, parfois chaques-onques, chacun ,
chacune .
Onque, l'un ; fém . eune , l'une ; plur . les onques, les eunes ,
les uns , les unes ; l'aute , l'autre ; plur . les autes , les autres .
Qui qui, qui que . Ex .: Quî qu' vos sèyîsse, qui que vous
soyez; quoi qui, quoi que.
On , on.
Personne, nolu , personne .
Rin , rien.
Tot plus fréquemment tot à fait, turtos, turtotes, (cf. français
vulgaire tèrtous) , tout , tous , toutes.
Plusieurs , pusieûrs , saqwants , fém . saqwantes plusieurs .
Nouque (aucun) fém . nolle, aucune .

6. Pronoms interrogatifs .

Quî ? qui ?; qui ? que ?; lisqué ? fém . lisquélle ? ou


lisquéne ? plur . lesqués ? lèsquélles ? lequel ? etc .; d'à qui ? ou
di quê ? duquel ?; à quê ? auquel ?: parfois , mais très rare
ment , on trouve au lieu de ces trois dernières formes dèsqué,
di lisqué? duquel ? et âsqué ? auquel ? dont l'emploi n'est pas à
conseiller.
La tournure qui est- c' qui, qui est- ce qui , remplace plus
fréquemment le pronom interrogatif en wallon qu'en français ,
aussi bien au masculin et au féminin qu'au neutre . L'inter
rogation par qui seul est très peu usitée .
Ex. Qui est-ce qui a fait çoula ? Qui a fait cela ?

7. Pronom relatif

Le pronom relatif wallon est qui (franç . qui , que) par élision
qu ' , et c'est le seul que le wallon possède .
77

Le pronom relatif ne transmet au verbe que le genre et le


nombre de son antécédent . Il ne lui transmet pas la personne .

Ex.: Mi, qu'est- on brave valèt . Moi , qui suis un honnête


garçon .
Vos autes (en parlant de femmes) qui sont si bonnes . Vous,
qui êtes si bonnes.

Observations .

1º Le wallon ne connaît pas l'emploi de lequel , laquelle


(lisqué) en tant que pronom relatif précédé ou non d'une pré
position . Il ne dira pas : Li tâve so lisquélle j'a pochî. La table
sur laquelle j'ai sauté , mais bien : Li tâve qui j'a pochî d'ssus,
litt. : la table que j'ai sauté dessus .
(Cf. la tournure anglaise identique . )

2º Le wallon n'a pas l'analogue de l'adverbe dont français .


Il se contente d'employer le simple relatif.

Ex.: Li mohonne qui ji v'jâse . La maison dont je vous parle .

3° L'adverbe où , employé en français comme pronom relatif,


n'existe pas comme tel en wallon , où il est toujours suivi de
la conjonction .
Ex.: Li mohonne wisse qui j'va . La maison où je vais .
Cf. le français vulgaire ousque.
CHAPITRE VII .

PARTICULES .

1. Adverbes.

I. ADVERBES DE LIEU .

Wisse ? w'? Où ?
Vès wisse? De quel còté ?
Por-wisse? po wisse ? Par où?
Di wisse. D'où .
Y, gn ', n' Y.
Ènne, ènnè, è , ' nnè, nne En .
Cial, chal. Ici.
Ci . Ci .
Là. Là .
Di cial, d'cial. D'ici.
Di là , đ là De là.
Vers cial, por cial, tot cial , Par ici .
Vers là , por là , tot là . Par là.
Jisqui-chal, jisqu'à chal. Jusqu'ici .
Jisqui-là, jisqu'à là. Jusque - là .
Divins, d'vins. Dedans .
Là d'vins. Là dedans .
A d'vins. En dedans , au dedans .
D'â d'vins. De dedans .
Fou . Dehors .
- 80 -

A d foù. En dehors , au dehors .


Dá d'foû . De dehors.
Là fou. Là dehors .
Divant, d'vant. Devant.
A-d' divant. Au-devant .
Po-drî, â-drî. Derrière .
Po po-dri. Par derrière .
Lon. Loin .
Près , tot près . Près , tout près .
Cial tot près, chal jondant. Ici près.
Dissus, d'ssus. Dessus, par-dessus .
Dizeûr, d zeûr. Dessus , en haut (à l'étage
supérieur) .
Là d'ssus. Là - dessus .
Là -dzeur. Là-dessus , là en haut .
A-d'dizeûr. Au - dessus .
Cial-dizeûr. Par -dessus , ici en haut.
D'â-d dizeûr. De dessus .
Dizos , dzos. Dessous, en dessous, au
dessous .
Là -dzos. Là -dessous .
Cial-dizos Ci dessous.
Po-d'zos. Par-dessous .
Di d'zos. De dessous .
Haut. Haut.
E haut. En haut (marquant une direc
tion) .
Là-haut. Là-haut (à l'étage supérieur).
Bas. Bas.
En bas. A bas.
E bas. En bas (marquant une direc
tion).
Lâvá.. En bas (au rez de chaussée
ou à l'étage inférieur) .
81

A l'valleye. A bas .
Aute på. Autre part, ailleurs .
Nolle på Nulle part.
Quéque part, ine sawisse . Quelque part.
Tos costés. Partout .
A dreûte. A droite.
A gauche. A gauche .
Håre et hotte; hinque et plinque; A hue et à dià ; par ci , par là .
d'on ci, don là ; avâr- ci
avân - là
Èn avant. En avant.
En èrri. En arrière .
Po li drî. (¹) Par- derrière .
Po li d'vant. Par-devant.
Po l'â d'foû. Par en dehors .
Po l'â d'vins . Par en dedans .
Po li d'zeûr. Par en haut .
Po li d'zos . Etc. Par en bas .

II . ADVERBES DE TEMPS .

Qwand? Quand ?
A c'ste heûre. Maintenant, à présent.
Hoûye. Aujourd'hui .
Divins l' timps, d'vins l' timps . Anciennement, autrefois ,
jadis .
Nawère. Naguère, récemment .
Hir. Hier.
A d'vant-z-hir, d'vant-z-hîr, Avant-hier.
Dimain, d'main. Demain .
Après d'main . Après - demain .
Tot- rate Tantôt .

(¹) Les locutions suivantes ne sont pas à proprement parler des locutions adver
biales, mais elles traduisent les adverbes français mis en regard .
6
82 -

Bin-vite. Bientôt.
Tot-à-c'ste heûre. Tout- à- l'heure.
So I cập . Sur le champ .
Tot d' suite, tote di suite, tot dreut,
tot fi dreut, à coûse. Tout de suite, immédiatement.
Longtimps. Longtemps .
Todis, todis mâye, tot-fér. Toujours .
Mâye, jamâye,jamais, joûrmâge. Jamais .
Râr'mint. Rarement .
Télle fèye. Parfois .
Quéqu'fèye . Quelquefois .
Ine fèye, etc. Une fois , etc.
A fèye. De temps en temps .
Sovint . Souvent.
D'habitude. D'habitude, d'ordinaire .
D'avance, à l'avance. D'avance , auparavant.
Portant. Pourtant , cependant .
D'abord. D'abord .
Adonc. Ensuite.
Et puis . Puis .
Divant, avant. Avant, auparavant .
Après. Après .
Enfin. Enfin .
Déjà. Déjà .
Tot-d'on cop. Tout- à-coup , soudain .
Târd. Tard .
Timpe . Etc. Tôt, de bonne heure.

III . ADVERBE DE MANIÈRE .

Kimmint? Comment?
Ainsi. Ainsi .
De même. De même .
Tot l' même. Tout de même .
83 -

Bin . Bien.
Mis . Mieux .
Mâ. Mal .
Pés. Pis.
Clér. Clair.
Vite, reûde à balle, habèymint,
à l' vole. Vite .
Di foice. De force.

Di bon coûr. De bon gré .
A pône, à hipe. A peine.
A conte- coûr. A contre -cœur.
A toirt. A tort.
En èrri, tot riscoulant. A reculons .
A l' vir, à l' vasse. A l'aventure .
A l'chame. A l'improviste .
A l'advinant, parèye, tot fî
parèye. Pareillement .
Tot d’on plein côp . Tout d'un coup.

A gn'nos . A genoux .
Di costé. De côté.
A vûde. A vide .
A l vûde. Inutilement.
A cabasse. Bras dessous , bras dessous.
A cavaye . A califourchons .
Adrame ou adrème. A propos.
D'adreut. Convenablement .
A flahe. En abondance .
Al' hope. A la hâte .
A l'avire. Au hasard .
A l' ricope gueûye, à l'kitèye. En détail .
A make. A déborder.
A résse. Au repos.
A stoc. Contre .
È coisse. De côté, de travers .
--- 84 -

A crâs vai. Sur le dos.


Dème dè dème. Doucement .
A l' dibane. A la débandade .
È rote, ènè rote. A la file .
È vique Vivant , en vie .
Èvisse. Malgré soi.
A gogne. En respect.
È joncour. A jeûn .
È hape. En chemise.
Hinque et plinque. Clopin, clopant .
A houte. A l'abri.
A l'abri. A découvert .
A mâle vá. Mal à propos .
E peur, è purette. Nu bras.
A pihe. En ruisseau .
Plique, ploque. Par ci , par là.
Tili et tali. En gros .
Vizon, vizu . Etc. Vis à vis.

La plupart des adverbes en mint (ment) .


Les adverbes en mint sont beaucoup plus rares en wallon
qu'en français . Ils se forment en ajoutant ce sufflixe au féminin
des adjectifs . L'e muet est remplacé par une apostrophe.
Ex .: Douce. Douc'mint.
Habèye. Habey'mint.
Franque Franqu'mint.
Sotte. Sott'mint.

Remarque. Vraîye (vrai) (veûr , à Verviers notamment) fait


vraîy'mint, et plus souvent vormint .
Drole, drôle, fait drol'dimint.
Brave, honnête , fait brav'mint (beaucoup) ou brâm'mint.
Crâne, crane, fait , crân'mint (beaucoup) et crân'dimint.
Jusse, juste , fait justumint.
Rude, rude, fait rud'dimint (beaucoup) et rud’mint.
- 85

IV . ADVERBES DE QUANTITÉ ET D'INTENSITÉ .

Qui! Que !
Comme ! Comme !
Kimmint qui! Comme !
Kibin? Combien?
Si. Si .
Ossi, ossu, si. Aussi .
Tant. Tant .
Ottant Autant .
Pus , pusse Plus .
Pau . pauc . Peu .
Beaucoup .
Baicóp , tot plein .
Assex. Assez .
Mons. Moins.
Trop. trope, par qui trop ou Trop .
trope.
Wêre. Guère .
Tot oute Outre .
Quâsi. Quasi, presque .
A pau près. A peu près .
Foirt. Fort , très .
Bin. Bien .
Tot à fait . Tout- à-fait.
A maque. Entièrement , abondamment,
complètement .
D'abîme, d'arège, qu'arège. Extrêmement .
Ewarêy'mint. Etonnamment .

V. ADVERBES DE MODALITÉ .

Vormint. Vraiment, réellement, vérita


blement.
Pór. En effet , décidément .
86

Assuré. Assurément .
Mutoi. Probablement , vraisembla
blement , peut - être .
Sûr mint, sûr. Probablement, sans doute.
Dai. Da.
Awè Oui.
Awè- dai. Oui- da.
Nènni, nonna Non .
Nènni-dai Non - da .
Awè ciètes. Oui certes .
Awè vormint. Oui vraiment .
Nènni cietes . Non certes .
Nenni vormint. Non vraiment .
Sia. Si .
Non fait. Non .
Ni, n '... nin. Ne... pas , point .
Ni, n'... pus. Ne... plus .
Edone ? N'est - ce pas ?
Apreume . Etc. Seulement, à peine.

2. Prépositions .

E, en (ènè) . En .
Divins, d'vins. Dans .
Inte. Entre.
Inte di. Parmi .
Dizos, d'zos. Sous .
So, sor. Sur.
Vès, vèrs, divès , divèrs . Vers .
Po, par. Par.
A. A.
Di, d', dè. De.
D'à. De .
Amon. Chez .
87

Adlé, dilé, tot près di . Près de .


Foû di. Hors de .
Dispôye. Depuis .
Jisqui, disqui. Jusque .
Tot l' long di, tot l' timps di. Durant , pendant .
Divant, d'vant. Avant , devant .
Avou , ato. Avec.
Sins. Sans.
Sâf. Sauf.
Po, por. Pour.
D'après . D'après .
Suvant, sorlon. Selon .
Conte, disconte, conte di, dis Contre.
conte di.
A d'vins di. Au dedans de.
A d'divant di. Au devant de.
Drî, â -drî di. Derrière .
Lon di. Loin de.
A d'dizeûr di. Au dessus de.
Erri di. En arrière de , loin de.
A résse di. A partir de.
Oute di. Outre .
Mâgré. Malgré .
A câse di. A cause de.
Jisqu'à, disqu'à . Jusqu'à .
A l'appétit di. A cause de.
A l' valleye di. En bas de.
Amâ ou mâ. Avant .
A mi. Après , au bout de.
To les ami. Environ tous les...
Atou di. Près de , environ .
A pusse qui. Sauf, hormis.
Avâ, avâr. Parmi .
È d'vêrs. En comparaison de.
Parmi. Etc. Moyennant .
88 -

3. Conjonctions .

I. CONJONCTIONS DE COORDINATION.

Et. Et .
Ni, n'. Ni.
Ou bin. Ou
Seûye-t-i... seûye-t- i. Soit... soit.
Mains, mais. Mais.
Portant. Pourtant, cependant .
Télle fèye. Toutefois, néanmoins .
Ca. Car.
Donc. Donc.
Si. Vieux franç .: Si , et .
Adai , adonc, adonpuis Etc. Alors .

II. CONJONCTIONS DE SUBORDINATION .

Qui, qu'. Que.


Si, s'. Si .
Qwand Quand, lorsque .
Comme. Comme .
Si vite qui. Sitôt que .
So l'timps qui. Pendant que , tandis que .
Dispôye qui. Depuis que .
Disqu'à cè qui. Jusqu'à ce que.
Divant qui. Avant que.

Après qui. Après que .


Pace qui, là qui. Parce que.
Pusqui . Puisque .
Dismèttant qui . En attendant que .
Mettez qui. En cas que , supposé que .
Bin qui. Quoique , bien que .
Téll'mint qui. Tellement .
89

Di manêre qui. De sorte que , de manière que .


Si bin qui. Si bie que .
Tant qui. Tant que.
Po qui. Pour que.

Afisse qui. Afin que.


A mâ qui. Avant que.

Po l'amou qui, à rèspèct qui . Parce que .


Labelle qui C'est pour cela que .
Faite à faite ou à faite qui. Etc. Au fur et à mesure que.

4. Interjections .

Ah! ha! hai! oh! ho! hein? pa ! (bah ! ) waye ! ouf! bon!
corège ! à diew ! allons ! jans ! (allons) haî là ! tot doûs ! Hane
dès pîds ! (litt . halte des pieds) keû ! (tranquille) chit ! ( chut ! )
bravo! haut les bras ! salut ! bonjoû ! eh bin ! bonne nute !
(bonsoir) santé ! sanctus ! Diè wâde ! (litt . Dieu (vous ) garde)
à catte! à hote! (hue) dième, qui j'arawe ou qui j'arège (litt .
que j'enrage) hop ! tâche ! etc. , ainsi que tous les jurons .
Le wallon possède un grand nombre de mots employés
comme interjections d'harmonie imitative , comme crac ! frich!
pich ! pach ! zink ! pigne ! chac ! pouf! pif! etc.

7
TABLE DES MATIÈRES .

Pages.
Préface 5
Ouvrages consultés • 7
Avant-propos . Orthographe 9
Orthographe phonétique wallonne 10
CHAPITRE I. -- Article.
1. Article défini . • 13
2. Article indéfini . 16
CHAPITRE II. ――――――― Substantif.

3383
1. Nombre des substantifs 19
2. Genre des substantifs . 22
CHAPITRE III. — Adjectif qualificatif.
1. Syntaxe . 27
I. Adjectifs à terminaison de
participes passés . 28
II. Adjectifs à terminaison de
participes présents 30
III. Adjectifs terminés orale
ment par une voyelle . 30
2. Féminin des adjectifs
IV. Adjectifs terminés orale
qualificatifs.
ment par une consonne autre
que les liquides l et r · 32
V. Adjectifs terminés oralement
par les liquides let r • 33
VI. Cas particuliers . 34
VII. Adjectifs composés 36
3. Féminin des noms de personnes et d'animaux 36
4. Pluriel des adjectifs qualificatifs • 37
5. Degrés de comparaison . 37
CHAPITRE IV. ――――――――― Adjectifs pronominaux.
1. Adjectifs possessifs . 39
2. Adjectifs démonstratifs 41
- 92

Pages.
3. Adjectifs relatifs. 43
4. Adjectifs indéfinis
5. Adjectifs interrogatifs et exclamatifs
6. Adjectifs numéraux cardinaux . 45
7. Adjectifs numéraux ordinaux . 47
8. Adjectifs numéraux multiplicatifs . 47

CHAPITRE V. - Pronom personnel.


1. Tableaux des formes du pronom personnel . 49
2. Syntaxe. 52
3. Cas sujet . 53
4. Régime direct. 58
5. Régime indirect . 63
6. Attribut , complément d'une préposition ou employé
isolément . . 66

699
CHAPITRE VI. - Autres pronoms.
1. Pronom réfléchi .
2. Adverbes pronominaux ènnè et y 70
3. Pronoms possessifs . 72
4. Pronoms démonstratifs 74
5. Pronoms indéfinis . . 76
6. Pronoms interrogatifs . 76
7. Pronom relatif . 76

CHAPITRE VII. Particules.


I. Adverbes de lieu . 79
II. Adverbes de temps . 81
III . Adverbes de manière. 82
1. Adverbes .
IV. Adverbes de quantité et
d'intensité . . 85
V. Adverbes de modalité . • 85
2. Prépositions 86
I. Conjonctions de coordiation. 88
3. Conjonctions. II. Conjonctions de subordination 88
4. Interjections . 89
1
1
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·
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Essai de grammaire wallonne.
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