L Initiation Traditionnelle 2022 Numero 3
L Initiation Traditionnelle 2022 Numero 3
L Initiation Traditionnelle 2022 Numero 3
Numéro 3 de 2022
Revue éditée par le GERME (Groupe d’Études et de Réflexion sur le Martinisme et l’Ésotérisme) et fidèle
à l'esprit de la revue L'Initiation fondée en 1888 par Papus et réveillée en 1953 par Philippe Encausse
Courriel :
[email protected]
Sites Web :
https://linitiation.eu (site officiel)
https://germe.eu (blog) Sommaire du numéro 3 de 2022
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ISSN : 2267-4136
Éditorial, par Bruno Le Chaux 1
Directeur : Michel Thiolat
Rédacteur en chef :
Réinterprétation de la Gnose : la matière est-elle mauvaise en
Bruno Le Chaux
soi ? , par Tau Lazarus 2
Une très belle étude sur Caritas, l’acclamation utilisée au sein de l’Ordre
Martinste, nous est proposée par Gilles Cervo.
Axel Buchroun, féru de Kabbale, nous offre ici la première partie de son Précis
de Kabbale martinézienne qui vise à rendre accessible à tous l’enseignement
du fondateur de l’Ordre des Elus Coëns, agrémenté de quelques-unes des
idées personnelles de l’auteur.
LA GNOSE :
LA MATIERE EST-ELLE
MAUVAISE EN SOI ?
par Tau Lazarus
« DE LA NOBLESSE ET
SUPERIORITE DU SEXE
FEMININ »
DÉCLAMATION SUR LA
NOBLESSE ET SUPÉRIORITÉ
DU SEXE FÉMININ
par Henri-Corneille Agrippa
« LETTRES A CHARROT »
Arrivé près de l’arche, il passait ses mains sous les ailes d’or des
chérubins qui l’empêchaient de voir comment il plaçait le Rational : Il le
tournait rapidement quatre fois en prononçant tout bas les quatre lettres
jod, hé, vau, hé, puis il le déposait sur la table d’or dans le cercle de la
couronne.
Considérez maintenant la vingt et unième carte hiéroglyphique du
tarot : vous y voyez la fortune, qui tourne sur elle-même, tenant de chaque
main une baguette. Elle tourne au milieu d’une couronne de feuillages
divisée en quatre compartiments par quatre nœuds ou quatre fleurs. Aux
quatre coins de la carte, comme aux quatre coins de l’arche on voit les
têtes des quatre chérubins.
La tête de taureau est analogue à la lettre jod et aux hiéroglyphes du
bâton.
L’enfant qui est le signe du verseau est analogue à la coupe qui
représente aussi l’amour et la femme.
Tout à vous en la Sø Sø
Eliphas Lévi
Sur la lame d’or du propitiatoire était une couronne elliptique. Or, dans
une ellipse on peut figurer trois cercles.
PRESENTATION
Il y a des milliards d’années, une étincelle et un univers vient de
naître.
Puis tout s’organise. Les pierres sont là, attendant patiemment que
la Lumière et le Temps fassent leurs œuvres.
Fiat lux.
LE PECTORAL D’AARON ET
LA JERUSALEM CELESTE
LE PECTORAL D'AARON
Exode 28 16-21
1
Un empan : environ 22 cm.
Le pectoral est donc bien plus qu'un ornement sacerdotal. Il est aussi
appelé le Pectoral du Jugement.
Deux autres pierres lui étaient associées. Leur nature exacte nous est
inconnue ainsi que leur mode de fonctionnement. Nous ne pouvons
émettre que des suppositions : selon Rachi, savant rabbin du Comte de
Champagne, "le nom ineffable de Dieu, celui qui ne se prononce pas, était
inscrit sur un parchemin dans les replis du pectoral. Puis on s'adressait
aux Ourim et Thoummim comme la loi mosaïque le précise. Les lettres
gravées sur les pierres s'éclairaient, formant les mots de la réponse divine
que l'on pouvait ainsi lire."
Selon Paolo Coelho dans l'Alchimiste "il s'agirait d'une pierre noire et
d'une pierre blanche. Ourim la blanche signifiant non, Thoummim la noire
signifiant oui"
Mais quelle que soit la réponse, elle était de toute façon la volonté de
Dieu. Par ces deux pierres "Lumières et Perfections" le Grand Prêtre est
ainsi conduit à donner une réponse divine car Dieu veut aider son peuple.
Histoire de Jacob
Lorsque Jacob naquit, il était le plus jeune des jumeaux d'Isaac et de
Rebecca. Jacob veut dire "usurpateur". Il vola par deux fois le titre d'aîné
à son frère (gn 27- 36). Jacob connut une grande prospérité mais il ne
pouvait changer de nom car il était toujours dominé par sa nature fourbe
et rusée.
2
Les 12 tribus d’Israël ont été classées selon leur ordre de naissance (ex-28-10). Le classement des
pierres sur le pectoral varie selon les traductions et les commentaires des grands rabbins. L’hébreu se
lisant de droite à gauche j’ai suivi cet ordre.
Lévi troisième fils de Jacob et de Léa "celui qui est attaché ou lié". Il
est de la tribu des sacrificateurs, la tribu de l'union entre Dieu et les
pêcheurs.
Juda est le quatrième fils de Jacob et de Léa "que Dieu soit loué"
C'est l'escarboucle qui lui correspond. Elle est une pierre de passion
et sa couleur rouge annonce le sacrifice suprême. C'est une pierre de sang
qui est le fluide de la vie. Mais par sa force et sa détermination elle agit sur
le cœur et rend l'homme invincible. C'est la légendaire escarboucle des
chevaliers du Moyen-âge.
Dans leur état les hommes ont oublié que Dieu est la lumière du
Monde et que nous devons marcher vers cette lumière, vers le pays de
Dieu qui désire vivre en parfaite intimité avec nous. Sa demeure est
l'infinité du ciel.
Hé est cet homme de religion qui puise sa force dans cet amour divin.
Jacob s'est racheté. Benjamin est né. Il restera près de son père et de
son frère Joseph en Egypte. Il est la preuve vivante du changement de
Jacob.
Le jaspe annonce par sa couleur verte et rouge des temps nouveaux.
Elle prépare la venue du Rédempteur, du Réparateur (Louis-Claude de
Saint-Martin) de celui qui va permettre le passage vers la Jérusalem
Céleste.
Ap 21 3-4
"Voici la demeure de Dieu avec les hommes. Il aura sa demeure avec
eux ; ils seront son peuple, et lui, Dieu avec eux, sera leur Dieu."
Ap 21 18-20
"Ce rempart est construit en jaspe, et la ville est de l'or pur, comme
du cristal bien pur. Les assisses de son rempart sont rehaussées de
pierreries de toute sorte : la première assisse est de jaspe, la deuxième de
saphir, la troisième de calcédoine, la quatrième d'émeraude, la cinquième
de sardoine, la sixième de cornaline, la septième de chrysolithe, la
huitième de béryl, la neuvième de topaze, la dixième de chrysoprase, la
onzième d'hyacinthe, la douzième d'améthyste."
Sur elle la Cité sera bâtie. Elle est connectée à la Terre, c'est
l'incarnation du Verbe, la formation du Royaume.
Les saints vont aider sur terre les hommes : leur vie, leurs actes vont
les instruire et ainsi fortifier leur Foi.
L'amour de Dieu pour les hommes est tel qu'il se pare de toutes les
beautés de la création pour lui plaire.
Tout est prêt pour célébrer les Noces. L'invitation a été lancée.
Yeshoua est venu. Il nous donne le pain et le vin nécessaires à la route.
Pour redevenir celui que nous devons-être, celui que nous sommes
de toute éternité, nous savons que nos forces naturelles sont bien
insuffisantes. Nous ne pouvons entreprendre notre marche vers la
réintégration qu’avec l’aide de forces surnaturelles, avec l’aide de Dieu.
C’est ce que nous proclamons par notre puissante acclamation :
« CARITAS »
MARTINEZIENNE
Première partie
par Axel Buchroun
1) Introduction : Manducation,
Évolution, Élection, Communication
Incomplétude de la Genèse
La Genèse fait le récit de la création de l’Univers mais ne dit rien du
pourquoi de cette création, de ce qu’il y a eu avant.
Vous êtes-vous déjà demandé :
- Pourquoi l’Univers a-t-il été créé (galaxies, étoiles, planètes, etc.) ?
- Pourquoi l’Homme a-t-il été émané et quel est son rôle dans
l’Univers ?
Si ces questions ne vous ont jamais effleuré l’esprit, continuiez à vivre en
paix. Si ces questions vous taraudent, voudriez-vous connaître leurs
réponses ? Ces réponses, Martines de Pasqually nous les donne dans son
enseignement.
Le culte primitif
Après la chute d’Adam, le culte primitif fût donné à l’Humanité afin de lui
permettre de se racheter. Ainsi, malgré le chaos indescriptible où se trouve
l’Humanité, une voie de rachat, de salut est possible. Tout ce qui rapproche
l’homme du culte primitif est du domaine du bien, tout ce qui l’en éloigne
est du domaine du mal. Il faut toujours avoir cette grille de lecture en tête.
De plus, pratiquer le culte primitif n’est pas un choix en soi, c’est une
injonction. C’est la seule voie vers la réconciliation individuelle et la
réintégration collective.
Pire encore, l’homme est soumis aux horribles lois qui régissent le règne
animal où les espèces se dévorent entre-elles, les unes les autres. Cette
contrainte du corps oblige l’homme à se nourrir et à dévorer des minéraux,
des végétaux et aussi des animaux. Ces mêmes animaux sur lesquels Adam
avait rôle de gardien, qu’il dirigeait et qu’il pouvait nommer, ces mêmes
animaux dont les corps accueillent les esprits des démons, des esprits
prévaricateurs et déchus afin de les obliger à la repentance par la privation
(frustration, souffrance psychique) et la molestation (douleur, souffrance
physique). L’Homme est tombé bien bas puisqu’il partage désormais leur
sort et est contraint de naître, manger, boire, se reproduire et mourir à
l’image d’un animal.
C’est la raison pour laquelle l’offrande d’Abel, sacrifice animal, a été agréée
par Dieu et celle de Caïn, sacrifice végétal, a été rejetée. Caïn n’a pas
participé au culte de rédemption et de sacrifice sanglant qui veut que les
espèces animales s’entredévorent afin que les esprits rebelles et déchus,
enfermés dans ces corps d’animaux, évoluent et se repentent.
Et cette lente évolution se fera toujours sous les attaques continuelles des
démons. Car l’homme ne pense plus, sa pensée n’est plus émise par lui et
connue immédiatement de Dieu. L’homme est devenu pensif depuis sa
chute, des pensées, bonnes ou mauvaises, lui sont présentées par des
esprits bons ou mauvais et l’homme doit faire le tri dans ce magma d’idées
confuses.
C’est de là qui vient l’épisode de Caïn et Abel tel qu’il est raconté dans la
Genèse. Caïn et Abel sont fils d’Adam (deux groupes humains), l’un cultive
les végétaux et l’autre chasse et pratique l’élevage animal. L’offrande
sacrificielle de Caïn est refusée par Dieu alors que celle de son frère Abel
est agréée. Car celle d’Abel est conforme au culte primitif et remplit le rôle
que l’homme conserve toujours de participer à l’évolution des espèces en
vue de la réconciliation et de la réintégration, d’obliger les démons,
Caïn, furieux et ne comprenant pas pourquoi son offrande est rejetée, tue
Abel de rage. Les hommes de Cro-Magnon tuent les Néanderthaliens. Caïn
est condamné à errer sur terre, dans l’ignorance. Fort heureusement,
quelques mélanges ont été réalisés entre hommes de Cro-Magnon et
Néanderthaliens, et Seth, l’humanité fruit de ces mélanges est en capacité
de restaurer le culte primitif.
La marque de Caïn
Quelle est donc cette marque, ce signe de Caïn évoquée dans la Genèse,
4.15 ?
Noé et le Déluge
A chaque fois que l’humanité s’éloigne de la pratique du culte primitif, Dieu
l’avertit et la remet dans le droit chemin. Ainsi les populations trop
éloignées du culte sont-elles détruites et n’en subsistent que les individus
en capacité de restaurer le culte.
Dieu envoie des élus pour remettre l’humanité dans le droit chemin.
Ainsi en est-il de Noé, qui avec sa femme, ses 3 fils et leurs épouses
respectives, fut sauvé du déluge ainsi que les animaux qu’il embarqua avec
lui sur son Arche. Cette allégorie d’un peuple sauvé du déluge avec des
animaux pendant que d’autres hommes mourraient marque bien le salut
En fait, ce qui caractérise ces 10 grands élus, c’est leur rapport au culte
primitif. Ils ont ramené l’humanité égarée dans le droit chemin du vrai
culte en le rétablissant et en bâtissant le vrai temple, physique (arche de
Noé, arche d’alliance de Moïse, temple de Salomon, temple de Zorobabel)
ou spirituel (temple de Jésus).
D’aucuns diront : « David et Salomon n’étaient que de petits rois d’un petit
royaume qui a peu d’importance au niveau de la terre entière. Comment
comparer le royaume de Judée avec l’empire chinois, etc. ? ». C’est une
erreur que de penser cela. L’important n’étant pas la taille du royaume
mais la conservation de la vraie religion pour qu’elle serve à terme à toute
l’humanité. Et cette vraie religion est l’antique religion égyptienne qui est
devenue le judaïsme et ensuite le christianisme primitif.
FRANC-MAÇONNERIE
PREMIERE PARTIE
par Teder
— « J'aurais pu, nous a dit privément Teder, aller fort loin dans
cette voie des ressemblances parfaites. Par exemple, pour prouver que
les anciennes Instructions maçonniques, en exigeant la fidélité à la
Sainte Eglise et au Roi, étaient en accord absolu, non pas seulement
avec les vieilles conceptions égyptiennes ou hébraïques mais encore
avec la raison d'être du catholicisme romain, quoi de plus simple et de
plus frappant que de rappeler ce passage initiatique de la Constitution
Unam Sanctam de Boniface VIII : « Jésus-Christ, près de sa passion,
demande à ses disciples deux épées ; or, ces deux épées sont
manifestement les deux puissances par lesquelles le monde est
gouverné — le Sacerdoce et l'Empire... Dieu, au commencement du
monde, créa deux Luminaires : le grand Luminaire est le Sacerdoce
qui, comme le soleil, éclaire par sa propre lumière ; le moindre
Luminaire est l' Empire, qui, comme la Lune, n'a qu'une lumière
d'emprunt »...
1
L'évêque Jean de Salisbury a dit la même chose. Voir Policrat., V, 3.
2
Mehmet II le Conquérant ou Mehmed II « Fatih » (en turc : Fatih Sultan Mehmet Han) fut le septième
sultan de l'Empire ottoman. (Note de la Rédaction, septembre 2022)
Eh bien, ce qui s'est passé dans ces derniers siècles au sujet des
contrées « ignorantes et grossières » qu'on est allé « civiliser » sans les
rendre moins pressurables qu'auparavant, est, à peu de chose près, ce
qui a eu lieu quand les Barbares, ayant reçu le glaive de la main de l'Église,
se partagèrent l'Europe, à une époque où les Maçons constructeurs de
monastères et de basiliques, c'est-à-dire les moines que saint Épiphane
Mais il n'y a pas que Montesquieu qui a observé cela ; une foule
d'auteurs classiques ont vu la même chose. Par exemple, le fr∴ Alfred
Rambaud, qui fut ministre après avoir été professeur à la Faculté des
Lettres de Paris, s'exprime ainsi, quand il parle de la romanisation de
notre propre pays : « Un mot d'ordre court dans toute la Gaule ; une main
invisible prend par la main Clovis le Païen et devant ses pas aplanit tous
les obstacles. Les évêques, chefs des populations catholiques, préparent
l'avènement de cette horde de pillards qui deviendra la très chrétienne
nation des Francs 4 . »
Il y eut donc, dès que les évêques romains, déviant de la voie tracée
par le Christ, eurent mêlé la politique à la religion, une sorte de contrat
maçonnique passé entre eux et les usurpateurs d'États : ceux-là faisant
préparer les peuples, exploités à la façon païenne, à souffrir d'être «
libérés » par des Barbares ayant reçu de Rome le pouvoir d'usurper, et
ceux-ci promettant une dîme sur toute entreprise suivie de succès.
Arracher, détruire, disperser, reconstruire, comme a dit un pape, fut le
plan qu'on suivit.
3
Défense de l'Esprit des Lois, chap. V, note 5.
4
Histoire de la civilisation française, Alfred RAMBAUD, 1888, vol. I, p. 74-75.
Or, à cette époque dont nous nous occupons, à cette époque où les
peuples ne font que changer de maîtres inhumains, où ceux-ci ne font
que perpétuer sous un autre nom l'égoïsme odieux reproché aux païens,
il est déjà très clair que la charité universelle prêchée par Jésus n'est plus
qu'un vain mot dans certaines bouches, que le « but moral et religieux »
poursuivi en répandant le sang des hommes n'est qu'un prétexte destiné
à cacher l'amour de la dîme, que l'Unité dans la Diversité n'est plus
comprise, que l'éclectisme essénien est absolument oublié.
Parmi les Papes auxquels le fr∴ Clavel fait allusion, citons Boniface
IV qui, dans la dernière année de sa vie, en 614, accorda des diplômes
spéciaux aux Maçons.
Le fr∴ Rebold, lui, constate qu'au temps dont nous parlons ces
Corporations étaient « exclusivement occupées par les Ordres religieux,
dirigés par eux, et par cela même attachées aux monastères ». Il dit
encore :
N'oubliez pas, je vous prie, que les souverains qui, dans ces siècles
aujourd'hui oubliés, naissent en même temps qu'émerge cette Maçonnerie
papale, sont des créatures des évêques universels de Rome. Si alors il y a
un « Art Royal », on peut être assuré qu'il est modelé sur la vieille
architecture égyptienne ou hébraïque. En effet, l'Ordre des prêtres, en
Égypte ou chez les Hébreux, gouvernait sous le masque des Rois, et quand
ceux-ci étaient pris dans la caste militaire, on les initiait aux mystères
ignorés des peuples ; mais les rois ne devaient établir aucun Ordre secret
particulier, sous peine d'être frappés d'anathème. Les Papes — on vient de
le voir par ce que nous révèle le fr∴ Clavel — prennent exemple sur cette
politique : la Maçonnerie est catholique, c'est-à-dire universelle, mais
uniquement romaine, et ne doit relever que du Saint-Siège, lequel, si nous
nous en rapportons seulement au cardinal Baronius, dont la vertu et la
probité littéraire ne peuvent être mises en doute, est alors occupé, et
depuis longtemps déjà, par des hommes pour qui la vie de Jésus ne sert
qu'à tromper les masses — d'ailleurs surveillées miroitement par une
milice ouvrière dont la direction est le partage de prêtres, de moines et
d'anciens pillards devenus seigneurs et chevaliers.
7
CLAVEL, pp. 83-84.
8
Histoire générale de la Franc-Maçonnerie, par le fr∴ E. Rebold, p. 102, 1851.
9
REBOLD, Histoire générale de la Franc-Maçonnerie. p. 96
Observons que ce n'est pas en 557, mais en 596, que saint Augustin,
auquel furent adjoints quarante bénédictins du monastère de Saint-André-
de-Rome, fut envoyé en Angleterre par Grégoire 1er, surnommé le Grand.
C'est en 597, qu'eut lieu la conversion d'Ethelbert, conversion d'autant
plus aisée à mener à bonne fin que ce prince était marié à la fille du roi de
France Caribert, laquelle était chrétienne. Étant passé en France pour y
conduire des chantres romains et s'y faire consacrer évêque, Augustin
revint en Angleterre, où il établit des évêchés dont il devint le
métropolitain avec l'usage du péplum. Alors sur l'ordre du Pape, au lieu
d'abattre les temples anglais, il les changea en églises.
10
Il y avait donc des Maçons en France à cette époque ?
Cette Charte, qu'on n'a connu que très tard, et dont l'authenticité a
été niée par des Maçons célèbres, aurait porté ce qui suit :
11
Illustrations of Masonry, Preston, 1781, pp. 169, 170, 171.
12
Auparavant, la dîme n'était payée que par les habitants du Westsex et du Sussex. Elle avait été établie
par Ina, roi saxon, qui mourut moine. La dîme ne cessa pas, depuis lors, d'être payée jusqu'à la rupture
de Henri VIII.
13
Manuel du Franc-Maçon et Guide des Officiers de Loge, vol. 1, p. 64.
14
Notons qu'Edwin fut accusé d'avoir tramé une conspiration contre Athelstan, et que celui-ci provoqua
la mort de son frère par suicide.
Quoi qu'il en soit, on peut voir, dans ces simples citations, que le
service de la « fille aînée de l'Église » n'était pas absolument désintéressé.
De plus, le choix de Guillaume le Bâtard ne fut pas heureux pour le peuple
anglais. Cet homme fut, disent les historiens profanes, un tyran capricieux,
gouvernant avec l'épée plutôt qu'avec le sceptre, et d'une dureté peu
commune. Le jésuite Longueval dit de lui qu'il sut tout maîtriser, hormis
ses passions, mais qu'il honora et protégea toujours l'Église.
15
Histoire de la civilisation française, Alfred RAMBAUD, 1888, vol. I, p. 181.
Mais voici le fr∴ Bazot qui, parlant de la même époque, nous dit à
son tour :
Je vais suivre cet auteur ligne par ligne, mais en le complétant au moyen
des documents maçonniques anglais, des travaux du fr∴ Preston et autres
16
Manuel du Franc-Maçon, etc., vol. I, p. 63. — A la p. 64, Bayot déclare — ce qui est exact — que des
documents historiques confirment ce qu'il avance.
17
Précis hist. de la Franc-Maç., DÉSUCHET, 1829, I, pp. 17-18.
Édouard III, mis sur le trône par des seigneurs en rébellion contre son
père, est ce souverain qui, après avoir fait emprisonner sa mère, laquelle
mourut après vingt-huit ans de tortures sans nom, crut un beau matin se
réveiller roi de France et fit la guerre aux Français et aux Écossais, sans
tenir compte d'un traité par lequel il avait reconnu l'indépendance de ces
derniers. Un évêque de Winchester gouverne alors la Maçonnerie anglaise,
et, en 1334, les privilèges accordés aux maçons sous le règne précédent
par le pape Nicolas III, sont renouvelés par le pape Benoit XII. Seize ans
après, en 1350, le roi Édouard III renouvelle ou révise les anciens statuts
maçonniques. Eh bien, il existe au British Museum un manuscrit
maçonnique en vers, datant de cette époque, et qui, outre la légende
relative à la Maçonnerie, nous révèle 15 articles relatifs aux maîtres et
15 points concernant les maçons. N'en détachons que les paragraphes
suivants, les seuls qui nous intéressent :
21
Manuel du Franc-Maç. et Guide des officiers de Loge, BAZOT, Vol. I, p. 65.
Richard II et Henri IV ne sont pas cités par le fr∴ Bazot : c'est que cet
auteur n'a pas suivi complètement le fr∴ Preston qui, d'accord avec les
documents maçonniques anglais, nous certifie que ces deux rois furent de
zélés maçons.
Septembre 1907
22
Robert de Barnham fut aussi grand-maître en 1375.
23
Manuel du Franc-Maçon, etc. , BAZOT, 1845, vol. I, p . 65.
24
Hist. abrégés de l'Egl. de J.-C. E. Guers, 1820, p. 382.
25
Documents anglais. Voir aussi Clavel, p. 92, et les autres auteurs maçonniques.
26
Ces deux papes étaient Martin V et Clément VII (Gilles de Mugnos).
Les deux fils de Henri VI étant également assassinés par les frères
d'Edouard IV, celui-ci — que le fr∴ Bazot a oublié de mentionner — monte
sur le trône, fait construire une nouvelle chapelle à Windsor et devient le
Protecteur de l'Ordre maçonnique, à la tête duquel il place, comme
Grand-Maître, le fr∴ Richard de Beauchamp, évêque de Sarum, qui
appartenait à la famille des comtes de Warwick, et ensuite l'évêque Bray.
Deux autres rois, Edouard V et Richard III, qui régnèrent entre 1483
et 1485, ne sont pas cités par le fr∴ Bazot. Sous le premier et sous le
27
Hist. abrégée de l’Eglise de Jésus-Christ, par E. GUERS 1850, p. 388.
28
The New Book of Rings, by J. Morrisson Davidson, Barrister-et-Law, p. 38.
29
Teder indiquait Henri IV mais il s’agit d’une erreur, il s’agit bien d’Edouard IV (Note de la Rédaction
septembre 2022)
Le fr∴ Bazot glisse encore sur le règne de Henri VIII qui, cependant,
fut un haut Protecteur maçonnique. En 1509, le Grand-Maître de l'Ordre
est le cardinal Wolsey, archevêque d'York et légat du pape. Après avoir fait
brûler solennellement à Londres les écrits de Luther, après l'avoir
royalement insulté dans des lettres rendues publiques, Henri VIII, aidé par
les cardinaux Wolsey et Etienne Gardiner, ainsi que par les évêques
Thomas Morus et Fischer, écrivit une Défense des sept sacrements
contre Luther, où il dit : « Je me jetterai au-devant de l'Église pour la
sauver ; je recevrai dans mon sein les traits empoisonnés de l'ennemi
qui l'assaille. L'état présent des choses m'y appelle. Il faut que tout
serviteur de Jésus-Christ, quels que soient son âge, son sexe et son
rang, se lève contre l'ennemi commun de la chrétienté. Armons-nous
d'une double armure, d'une armure céleste pour vaincre par les armes
de la vérité celui qui combat avec celles de l'erreur ; mais aussi d'une
armure terrestre, afin que, s'il se montre obstiné dans sa malice, la main
du bourreau le contraigne à se taire, et qu'une fois du moins il soit utile
au monde par l'exemple terrible de sa mort ». Ce langage, dont la
30
Manuel du Franc-Maçon, etc., t. 1, p. 65.
31
Voir le Statut de 1539. Henri VIII va même jusqu'à interdire la lecture de la Bible en langue vulgaire,
renouvelant ainsi l'Édit de Henri V, l'ennemi acharné des partisans de la Réforme de Wickleff.
Elle prit, ajoute le fr∴ Bazot, les Maçons sous sa protection spéciale
et abrogea l'Édit de 1425 35 — lequel n'avait jamais été appliqué 36.
Retenez bien ce nom d'Inigo Jones — car vous verrez un fr∴ Inigo
Jones apparaître un jour, aux heures des vengeances dynastiques, quand
il s'agira, en France, de placer le fr∴ Charles-Edouard Stuart à la tête des
34
Illustrations et Masonry, W. Preston, 1781, p. 203.
35
BAZOT, p. 65 ; CLAVEL, p. 92 ; REOLD, p. 123 ; etc., etc.
36
Goubd et Preston sont d'accord sur ce point.
Le premier porte :
37
Le prince Charles-Edouard refusa l'offre qui lui fut faite à ce sujet par le gouvernement français.
38
Manuscrit de Dowland, publié dans le Gentleman's Magazin du 31 mai 1815.
39
Harleïan Manuscript, n° 1949, British Museum.
Je n'insiste pas sur ce point, car les faits parlent et parleront d'eux-
mêmes.
*
* *
40
Masonic Memorabilia, The British, Irish and Colonial Masonic Calendar, 1866, p. 233.
41
Cette place fut fermée par ordre du Pape Alexandre VI, en 1497, et rouverte un peu plus tard. Les
exercices de la contemplation y étaient en usage.
Henri II, qui n'était pas Jésus, fut au pape ; et la conquête, organisée
par les Templiers gouvernant alors l'Ordre maçonnique anglais,
commença en même temps que, dans les endroits envahis, la
construction des monastères s'étendit davantage. En 1166, le Prieuré de
All-Saints est bâti par Dermot Mac Murrogh, lequel sera un des premiers
à se soumettre aux envahisseurs, et, en 1168, la confrérie construit le
château de Tuam. En 1169, elle construit aussi, sous la direction
d'O'Brien, l'Église de Sainte-Croix, à Tipperary. En 1171, le fr∴ Henri II
pénètre en personne en Irlande, où il est naturellement accueilli comme
un « libérateur » par les archevêques, les évêques, les moines, les
populations dont ils disposent, et ceux des seigneurs indigènes qui
42
Masonic Memorabilia, The British, Irish and Colonial Masonic Calendar, 1866, p. 233.
43
Anglia-sacra.
Je suis forcé d'abréger ; mais je puis dire avec conviction qu'à partir
du moment où le pape Adrien IV eut donné l'Irlande à Henri II, la
Maçonnerie irlandaise, au moins celle inféodée à l'Église et à la Maçonnerie
d'Angleterre, n'a pas plus cessé d'exister que ne cessèrent de travailler les
missionnaires, les prêtres et les moines préparant les voies de la
conquête. Cependant, des éléments écossais ont dû être introduits en
Irlande par Robert Bruce vers 1306, principalement parmi les barons
désireux de reconquérir ou de garder leur indépendance. Il me paraît
aussi certain que les Templiers réfugiés en Écosse en 1312, ou qui y
existaient auparavant, eurent des rapports avec ceux d'Irlande et
continuèrent avec cette contrée des relations secrètes avant comme
après l'expédition d'Édouard Bruce, laquelle ne réussit pas et se
termina en 1318, par le triomphe définitif du roi d'Angleterre sur
l'Irlande.
Octobre 1907
44
The British and Colonial masonic Calendar, 1866, p. 192.
45
Liste des Loges. The B.,!. and C. Calendar, 1866, p. 192.
46
Hist. gén. de la Franc-maç., p. 103.
47
Hist. pittoresque de la Franc-Maç., 1844, p. 93.
Vaincu par Edouard Ier, Robert Bruce passe en Irlande, où il trouve des
appuis et d'où il revient bientôt pour soulever de nouveau l'Écosse. Sur ces
entrefaites, Edouard II succède à son père qui vient de mourir, et, rebelle à ses
dernières volontés, ne poursuit pas, conseillé en cela par un favori français
appelé Gaveston, la guerre contre Robert Bruce. A ce moment, en 1307, on
commence en France à donner la chasse aux Templiers, coupables — ayant
perdu beaucoup d'argent dans des opérations frauduleuses du roi sur les
monnaies — d'avoir favorisé des émeutes dans Paris. Quelques-uns, sous la
conduite d'Antoine Perrent et d'un neveu de Jacques Molay, quittent la France
et se réfugient en Angleterre, où des commanderies existent à Bristol, à Bath, à
York et dans d'autres endroits ; à Hampton-Court, à quelques milles de Londres,
plusieurs réfugiés sont reçus par le Commandeur Georges Harris.
Le Pape, lui, le 2 mai, lance une Bulle qui casse, supprime et annule
l'Ordre religieux et militaire des Templiers ; quant à Edouard II, il ordonne
en 1313, un nouvel envahissement de l'Écosse. Mais il est trop tard :
Robert Bruce, tenant la plus grande partie du pays et ayant pour lui tous
les chevaliers, prêtres, moines et seigneurs d'Écosse, est, le jour de la
Saint-Jean en 1314, définitivement vainqueur à Bannock-burn, grâce à la
foi ardente de ses troupes, car, avant la bataille, et devant l'armée
écossaise prosternée, l'abbé d'Inchaffray avait agité le crucifix et ensuite
promené une relique précieuse : le bras de saint Fillan, patron favori du
nouveau roi 51.
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On sait qu'à partir de 1155, l'Ordre des Templiers avait gouverné l'Ordre des Maçons en Angleterre.
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History of Scotland.
Les historiens profanes disent de lui qu'il fut chéri du peuple et qu'il
ne fit jamais la guerre que pour le tirer de l'oppression et le rendre
heureux. Quand il mourut, en 1329, il conjura Jacques Douglas, un de ses
amis, de porter son cœur dans la Terre-Sainte. Il eut deux enfants, David
II, qui lui succéda au trône et à la Grande-Maîtrise maçonnique, et une fille
qui porta le sceptre d'Écosse dans la maison des Stuarts.
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Historical Land mark by Bro∴ Dr Oliver, vol. Il, p. 12 ; A Lexicon of Freema.sonry, by Bro∴
Mackey, 1855, p. 238 ; Hist. gén. de la Franc-Maçonnerie, Rebold, 1851, p. 116 ; Acta
Latomorum, Thory, 1815, p. 6, 131 et 164; Etudes hist. et phil., etc., J.-S. Boubée, 1854, p. 68
; History of Freemasonry, by Laurie, 1804 ; etc., etc. — Beaucoup d'écrivains maçonniques
n'ont voulu voir qu'une légende dans tout ce qui se rattache à Ordre Royal d'Ecosse ; mais
cette légende, si légende il y a , est plus admissible que celle qui repose sur la fausse Charte
fabriquée à Charlestown, en 1802, et attribuée à Frédéric II.
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History of Scotland.
Novembre 1907
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