(Friedrich Nietzsche) Oeuvres Complètes - Tome XI
(Friedrich Nietzsche) Oeuvres Complètes - Tome XI
(Friedrich Nietzsche) Oeuvres Complètes - Tome XI
COMPLETES
FRIEDRICH NIETZSCHE
Fragments
posthumes
Automne 1885 - automne 1887
TEXTES ÉTABLIS
ET ANNOTÉS PAR
GIORGIO COLLI ET MAZZINO MONTINARI
TRADUITS DE L'ALLEMAND
PAR JULIEN HERVIE
ock A 6.76-P.)
GALLIMARD
Titre original :
NACHGELASSENE FRAGMENTE HERBST 1885-HERBST 1887
Edition critique des Œuvres complètes de Friedrich Nietzsche
établie d'après les manuscrits originaux de l'auteur et
comprenant une part de textes inédits.
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation
réservés pour tous les pays,
à Editions Gallimard, pour la langue française;
Walter de Gruyter & C =6 , Berlin, pour la langue allemande;
Adelphi Edizioni, Milan, pour la langue italienne ;
Hakusuisha Publishing company, Tokyo,
pour la langue frponaise.
© Walter de Gruyter & C ie , Berlin, 1974, pour la langue allemande
© Adelphi Edizioni, Milan, 1975, pour la langue italienne.
© Editions Gallimard, 1978, pour la traduction française.
Le texte des variantes a pu être établi grâce â l'obligeance
de M. Helmul Hollzhauer, directeur des Nationa'e Forschungs-
und Gedenkstiitten der klassischen deutschen Literalur, de
M. Karl-Heinz Hahn, directeur des Archives Goethe-Schiller
de Weimar, et avec l'aide de M me Anneliese Clauss, des
Archives Goethe-Schiller.
L'édition française est placée sous la responsabilité de
Gilles Deleuze et Maurice de Gandillac.
NOTE DES 1 DITEURS
Tous les écrits de Nietzsche ont été distribués par nous en huit
grandes sections. Ce sont les suivantes :
I. Écrits de jeunesse et études philologiques de 1864 à 1868.
II. Cours universitaires et études philologiques de 1868 à 1878.
III. Naissance de la Tragédie, Considérations inactuelles I,
Il et III, Écrits et fragments posthumes de 1869 à 1874.
IV. Considération inactuelle IV, Humain, trop humain I et II
et fragments posthumes de 1875 à 1878.
V. Aurore, Le Gai Savoir et fragments posthumes de 1879
à 1882.
VI. Ainsi parlait Zarathoustra, Par-delà bien et mal, La Généa-
logie de la morale, Le Cas Wagner, Le Crépuscule des Idoles,
L'Antéchrist, Ecce Homo, Nietzsche contre Wagner, Les
Dithyrambes de Dionysos, Poésies.
VII. Fragments posthumes de 1882 à 1885.
VIII. Fragments posthumes de 1885 à 1888.
Tous les écrits de Nietzsche seront donc publiés intégralement
et selon cette division, dans l'édition des Œuvres complètes actuel-
Noie des éditeurs 9
lement en cours à Berlin. Le lecteur remarquera que cette division,
dictée par les nécessités du travail philologique accompli à Weimar,
et que l'on trouve utilisée comme référence interne dans les Notes
et Variantes, ne correspond pas à la tomaison de la présente édition
française. En effet, les écrits de jeunesse, les études philologiques
et les cours universitaires antérieurs à l'époque de la Naissance
de la Tragédie, et auxquels ont été réservées les sections I et II,
sortent du cadre de la présente édition française des Œuvres
philosophiques complètes qui contient donc les sections III à VIII
exclusivement, et feront l'objet d'une publication à part. Il nous
a semblé néanmoins nécessaire de conserver le système de réfé-
rence utilisé dans l'édition allemande définitive des OEuvres com-
plètes. Ainsi le lecteur désireux de se reporter aux textes originaux
pourra-t-il passer de l'édition française à l'édition allemande sans
se trouver désorienté.
La section VI ne contient que les oeuvres publiées par Nietzsche
lui-même de 1882 â 1888, accompagnées de leurs variantes, à
l'exclusion des fragments posthumes qui leur sont contemporains.
A partir de 1882 et d'Ainsi parlait Zarathoustra, il n'était plus
possible en effet, sans arbitraire, de rattacher un ensemble de
fragments posthumes à telle ou telle oeuvre prise en particulier.
C'est pourquoi les deux dernières sections (VII et VIII) ont été
réservées à ces posthumes des six dernières années de la vie active
de Nietzsche.
Les précisions suivantes sur l'établissement du texte des pos-
thumes sont indispensables à une bonne compréhension de l'édi-
tion française des Œuvres philosophiques complètes.
A l'intérieur de chacune de ces cinq sections regroupant les
posthumes, chaque manuscrit a été numéroté par nous. Cette
numérotation correspond à l'ordre chronologique des différents
manuscrits ou des différentes couches d'un même manuscrit : il
arrive en effet que Nietzsche ait travaillé sur un manuscrit à deux
reprises, parfois à de longs intervalles de temps. Dans ce cas, les
deux couches du manuscrit porteront un numéro différent et
pourront même se trouver dans deux sections différentes. Le
manuscrit M III 4, par exemple, fut rédigé par Nietzsche d'abord
à l'époque du Gai Savoir (automne 1881), puis à l'époque de la
seconde partie de Zarathoustra (été 1883). On en trouvera donc
une partie dans la section V (c'est le cahier de fragments pos-
thumes n° 15 du Gai Savoir dans la présente édition française),
et une autre dans la section VII. Dans d'autres cas, bien entendu,
plusieurs couches d'un même manuscrit se trouveront dans la
même section. Dans la section IV par exemple, le manuscrit U II 5
a été rédigé pendant l'été 1876, puis en octobre-décembre 1876;
les deux couches, très nettement distinctes, sont respectivement
numérotées 17 et 19, et, entre elles, s'insère un manuscrit complet,
M II, écrit en septembre 1876 et qui porte le numéro 18. Dans le
même manuscrit U II 5, on trouve d'ailleurs une couche antérieure
elle-même aux couches IV 17 et 19; nous l'avons donc placée
dans la section III, au numéro 32. Nous mettons en évidence
10 F r a gments posthumes
l'existence de ces différentes couches d'un même manuscrit en
ajoutant au signe conventionnel qui le désigne une lettre de l'alpha-
bet (a, b, c, etc.) ; ainsi U II 5 apparaît trois fois dans notre édition :
U Il 5 a : section III n° 32; U II 5 b : section IV no 17 ; U II 5 c :
section IV no 19 (ces deux dernières couches constituant les cahiers
de fragments posthumes n° 17 et no 19 de Humain, trop humain I
dans la présente édition).
A l'intérieur de chaque manuscrit, dans notre édition, chaque
fragment posthume est lui-même numéroté selon sa place chro-
nologique, qui ne correspond presque jamais à la pagination des
Archives. Le numéro d'ordre du manuscrit (ou de la couche d'un
manuscrit) est donc suivi d'un second numéro d'ordre, placé
entre crochets, qui indique la place du fragment à l'intérieur du
manuscrit (ou de la couche). Par exemple : 17 [25] désigne le vingt-
cinquième fragment du manuscrit (ou de la couche) qui porte,
dans sa section, le numéro d'ordre 17. Dans les Notes, quand nous
renvoyons à un fragment posthume qui se trouve dans la même
section que l'oeuvre commentée, nous donnons le numéro d'ordre
du fragment et celui du manuscrit qui le contient, mais non celui
de la section à laquelle ils appartiennent. Ainsi, lorsque, dans
une note d'Aurore (relative à l'aphorisme 235), nous renvoyons
au fragment posthume 4 [24], cela veut dire que l'on trouvera
ce fragment, sous ce numéro, dans la même section que le texte
d'Aurore lui-même, c'est-à-dire la section V. Si au contraire nous
renvoyons à des fragments qui se trouvent dans d'autres sections
(ce qui est toujours le cas dans les volumes qui ne contiennent pas
de posthumes), alors le numéro du fragment sera précédé du
chiffre romain qui désigne la section : par exemple IV 5 [22].
Abréviations
[ ] Mot illisible.
[ + + +1 Lacune indéterminée.
< > Complément de l'éditeur.
- - - Phrase inachevée.
NOTE DU TRADUCTEUR
1 [2]
Le Miroir 1 .
1 [4]
1 [5]
1 [6]
1 [7]
1 [8]
1 [9]
1 [i2]
1 [13]
1 [14]
1 [15]
1 [17]
1 [19]
1 [20]
1 [21 ]
1 [22]
1 [23]
1 [24]
1 [25]
- « Les gens bons sont tous faibles : ils sont bons parce
qu'ils ne sont pas assez forts pour être méchants », disait
le chef Latuka Comorro â Baker 1
1 [26]
2
gin est arabe et signifie Spiritus (= g'inn)
1 [27]
1 [28]
1 [29]
1 [30]
1 [31]
1 [32]
1 [33]
1 [34]
1 [35]
La Volonté de Puissance.
Tentative d'une nouvelle interprétation de tout
ce qui arrive.
Par
Friedrich Nietzsche 1 .
1 [36]
1 [37]
-- les mouvements ne sont pas « provoqués » par une
« cause » : ce serait de nouveau le vieux concept d'âme !
ils sont la volonté elle-même, mais non pleine et entière!
1 = N VII 2b. Aul. 1885-print. 1886 1[33-42] 29
1 [38]
1 [39]
1 [40]
2) pas de récompense
3) pas de servilité
4) pas de pia fraus
1 [4i]
1 [42]
1 [4s]
1 [44]
1 [45]
Sapientia victrix 1 .
2
Prélude à une philosophie de l'avenir .
1 [4s]
Les religions vivent le plus long de leur âge sans s'encom-
brer de morale : libres de morale. Considérez ce que veut
en fait toute religion — on peut encore aujourd'hui le
toucher du doigt : on attend d'elle non seulement déli-
vrance de la détresse, mais surtout délivrance de la peur
de la détresse. Toute détresse passe pour résulter de l'acti-
vité d'esprits méchants et hostiles : toute détresse qui
frappe un homme est certes « imméritée », mais elle sou-
lève la question de savoir par quoi un esprit peut être
-r' oU E
a` r
^ff^
^.^s .^
^
..•i ^-f^
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: ti„r^^`., l• ,
1 = N VII 2b. Aut. 1885-print. 1886 1[43-49] 31
irrité contre nous ; l'homme tremble devant des monstres
errants et inconnus qu'il voudrait se concilier. A cette
occasion, il scrute sa conduite : et s'il y a vraiment moyen
de gagner l'amitié de certains esprits qu'il connaît, il se
demande s'il a réellement fait tout son possible pour
y parvenir. De même qu'un courtisan scrute sa conduite
envers le prince lorsqu'il a remarqué chez celui-ci une
nuance de défaveur : il cherche une négligence etc. A
l'origine, le « péché » est ce qui pourrait offenser violem-
ment un esprit quelconque, c'est une négligence quelconque,
un : il y a là quelque faute à réparer. C'est
seulement dans la mesure où un esprit, une divinité a en
outre assigné expressément certains commandements
moraux comme moyen de lui plaire et de le servir que
l'appréciation de valeur morale intervient dans le « péché n :
ou plutôt : c'est alors seulement qu'un manquement envers
un commandement moral peut être ressenti comme péché,
comme une chose qui sépare de Dieu, l'offense et provoque
en outre de sa part danger et détresse.
1 [47J
1 [4s]
1 [49]
1 [50]
1 [51]
1 [52]
1 [53]
1 [54]
1 [55]
1 [56]
1 [57]
Représenter les transformations de la volonté de puis-
sance, ses phases, ses spécialisations parallèlement à
l'évolution morphologique!
1 [58]
A partir de chacun de nos instincts fondamentaux, il
existe une appréciation selon une perspective différente
de tout événement et de tout vécu. Chacun de ces instincts
se sent, par rapport à chacun des autres, soit entravé, soit
encouragé et flatté, chacun a sa propre loi d'évolution
(ses hauts et ses bas, son rythme etc.) -- et l'un dépérit
tandis que l'autre croit.
L'homme en tant que multiplicité de « volontés de puis-
sance » : chacune avec une multiplicité de moyens d'expres-
sion et de formes. Les prétendues « passions » isolées (par
ex. l'homme est cruel) ne sont que des unités fictives dans
la mesure où la part des différents instincts fondamentaux
qui parvient â la conscience avec une apparence de simi-
litude est recomposée synthétiquement de façon illusoire en
un « être » ou une « aptitude », en une passion. Tout comme
l' « âme » elle-même est une expression pour tous les phé-
nomènes de conscience : mais nous l'interprétons comme
cause de tous ces phénomènes (la « conscience de soi » est
fictive!)
1 = N VII 2b. Aut. 1885-print. 1886 1[56-61] 35
1 [59]
1 [61]
1 [62]
1 [63]
1 [s4]
Amour du prochain.
Justice.
Cruauté.
Récompense et punition, tout a déjà eu son pour et
Rationalité son contre
Hiérarchie.
Esclavage (abandon)
toute louange et tout blâme est vu dans la perspective
d'une volonté de puissance.
« idées innées »
l'âme, la chose faux. De même « l'esprit »
1 [65]
1 [66]
1 [67]
1 [68]
1 [s9]
1 [70]
- combien l'homme fait l'important avec ses religions,
même s'il se roule ensuite aux pieds de Dieu, comme
saint Augustin! Quelle importunité! Ce principe paternel
ou grand-paternel à l'arrière-plan 1 !
1 [71]
1 [72]
1 [73]
1 [74]
Si même il y avait un « en soi », que serait donc l' « en
soi » d'une pensée?
1 [75]
1 [76]
Celui qui mesure la valeur d'une action à l'intention
qui l'a occasionnée entend par là l'intention consciente:
mais il y a, dans tout agir, beaucoup d'intentionnalité
inconsciente; et ce qui vient au premier plan comme
« volonté » et « but » relève d'interprétations multiples
et n'est en soi qu'un symptôme. « Une intention exprimée,
exprimable » est une explication, une interprétation
qui peut être fausse; en outre une simplification et fal-
sification délibérée etc.
1 [77]
1 [7s]
En même temps que la connaissance de l'homme, la morale
s'est affinée
a) au lieu du péché comme manquement envers Dieu
« l'injustice envers moi-même »
b) au lieu de la prière et de l'aspiration à une aide
miraculeuse
c) au lieu de l'interprétation du vécu comme récompense
et punition
d) au lieu de l'hostilité envers toute espèce de détresse
et d'inquiétude et de conflit
e) au lieu de l'amour importun et niveleur du chrétien
pour son prochain
1 [79]
La plus grande sincérité et conviction de la valeur
de sa propre oeuvre n'a aucun effet : de même, la dépré-
40 Fragments posthumes
ciation sceptique ne peut en amoindrir la valeur. Il en
va ainsi de toutes les actions : aussi moral que je puisse
m'apparaître par mon intention, en soi cela ne tranche
<rien > quant â la valeur de l'intention, et moins encore
quant â la valeur de l'action. Il faudrait connaître l'origine
totale d'une action, et pas seulement le petit morceau qui
tombe dans la conscience (la prétendue intention) Mais ce
serait précisément exiger la connaissance absolue
1 [8o]
1 [82]
Tentative
d'un dépassement de la morale.
par
Friedrich Nietzsche 2.
1 = N VII 2b. Au!. 1885- print. 1886 479-81'] 41
1 [83]
1 [s4]
Le dépassement de la morale'.
1 [85]
1 [s7]
1 [89]
^ [90]
1 [91]
1 [92]
1 [93]
1 [94]
par
Friedrich Nietzsche.
1 [95]
1 [96]
3
Morale-de- moralistes .
1 [97]
1 [s8] _
1 [99]
1 [100]
1 [102]
1
Dans la source la plus pure, Une goutte de boue suffit,
1 [103]
1 [104]
1 [105]
1 [106]
1 [107]
1 [108]
1 [109]
Le miroir.
Philosophie du savoir défendu.
par
Friedrich Nietzsche I.
1 [112]
LE TENTATEUR.
Par
Friedrich Nietzsche.
1 [1i9]
1 [120]
1 [121]
GAI SABER 2 .
PRÉLUDE D'UNE PHILOSOPHIE DE L'AVENIR
1 [123]
1 [124]
1 [125]
50 Fragments posthumes
1 [12s]
1 [127]
1 [128]
1 [129]
les saints en tant que les plus forts des hommes (par
la maltrise de soi et la liberté, la fidélité etc. 1
1 [130]
2
La volonté de puissance .
1 [132]
1 [133]
1 [134]
1 [135]
1 [136]
1 [137]
1 [138]
1
Dissensions et dialogues
1 [139]
1 [140]
1 [142]
1 [143]
1 [144]
La dernière vertu.
2
Une morale pour moralistes
1 [145]
1 [146]
1 [147]
1 [148]
1 [149]
1 [150]
1 [152]
Nouveaux dangers
et nouvelles sécurités
Un livre pour esprits robustes.
1 = N VII 2b. Aul. 1885-print. 1886 1[147-157] 55
1 [153]
1 [155]
1 [156]
1 [157]
1 [158]
comme l'honnête médiocrité allemande se sent aujour-
d'hui à l'aise, c'est-à-dire en famille, dans la musique de
son Brahms : comme les lévriers graciles et incertains
de l'esprit parisien reniflent aujourd'hui avec des agace-
ries voluptueuses autour de leur Renan
1 [159]
1 [160]
Comme tous les partis sont perfides! ils mettent en
lumière des aspects de leurs chefs que ceux-ci avaient
peut-être placés sous le boisseau avec beaucoup d'art
1 [161]
Peut-être chacun a-t-il son critère pour juger de ce qui
lui semble « superficiel » : soit, j'ai le mien un critère
grossier et simpliste pour mon usage domestique, adapté
à ma main libre â d'autres d'avoir droit à des instru-
ments conçus pour des palais plus chatouilleux!
Celui qui ressent la souffrance comme un argument
contre la vie me semble superficiel, y compris nos pessi-
mistes; de même celui qui voit dans le bien-être un but.
1 [1s2]
L'âme orgiaque.
Je l'ai vu : ses yeux du moins ce sont des yeux de
miel, tantôt profonds et calmes, tantôt verts et lascifs
son sourire alcyonien,
le ciel regardait, sanglant et cruel
l'âme orgiaque de la femme
je l'ai vu, son sourire alcyonien, ses yeux de miel, tantôt
profonds et voilés, tantôt verts et lascifs, tremblante
surface,
1 = N VII 2b. Aul. 1885-print. 1886 1[158-168] 57
1 [163]
1 [164]
1 [165]
1 [166]
1 [167]
1 [168]
1 [169]
[170]*
1 [172]
1 [173]
1 [174]
pas encore une heure parmi mes égaux, dans tous mes
faits et gestes le ver rongeur : « tu as autre chose à faire »,
martyrisé par des enfants, des oies et des nains, cauchemar
-- il n'y a autour de lui que gens auxquels il ne peut ni
infliger de représailles ni dispenser d'enseignement -- 4
1 [175]
consciences amollies
1 [176]
la petite dolence
1 [177]
1 [178]
1 [179]
1 [180]
1 [181]
Inspiration.
1 [182]
1 [183]
Ah, voici la mer : et c'est ici que cet oiseau doit bâtir
son nid?
1
Par ces jours où la mer calmit et
* En français dans le texte.
1 = 1`' VII 2b. A ul. 1885-print. 1886 1[179-187] 61
1 [184]
1 [185]
La discipline de l'esprit.
Pensées
sur la conscience intellectuelle.
1 [186]
Le savant.
Qu'est-ce que la vérité.
Du dérèglement de l'esprit.
Le démagogique dans nos arts.
Morale des maîtres et morale des esclaves.
Morale et physiologie.
Piété.
Pour l'histoire de l'esprit libre.
Nous, les immoralistes.
L'âme noble.
Le masque 2 .
1 [187]
1 [188]
Premier chapitre:
notre courage
Deuxième chapitre:
notre pitié
Troisième chapitre:
notre vision
Quatrième chapitre:
notre solitude 2
1 [189]
1. Morale el connaissance.
2. Morale el religion.
3. Morale el art.
4. « Nous, les Européens. »
5. Qu'est-ce que l'aristocratie?
Inspiration 3
1 [190]
1 [192]
1 [193]
1 [194]
1 [195]
1 [196]
1 [197]
1 [198J
Buatschleli batscheli
bim bim bim
Buatscheli batschleli
bim 1 !
1 [199]
1 [200]
1 [201]
1 [202]
1 [203]
1 [204]
1 [205]
1 [206]
1 [207]
1 [208]
1 [209]
1 [?12]
1 [213]
1 [214]
1 [215]
1 [21s]
1 [217]
1 [21s]
1 [219]
1 [220]
1 [221 ]
1 [222]
La liberté de conscience n'est utile et possible que sous
un grand despotisme symptôme d'atomisation
1 [22s]
NB. L'ultime vertu.
Nous sommes les dilapidateurs des vertus que nos ancê-
tres ont amassées et, grâce â eux, compte tenu de leur
longue austérité et économie, nous pouvons nous permettre
encore assez longtemps d' <avoir un comportement >
d'héritiers riches et arrogants 2 .
1 [224]
sombre ou turbulent, un esprit qui dans tout ce qu'il
imagine tire vengeance de quelque chose qu'il a fait (ou de
ce qu'il n'a pas fait quelque chose) qui ne comprend pas
le bonheur sans cruauté
* En français dans le texte.
70 Fragments posthumes
1 [225]
1 [22s]
1 [227]
1 [228]
1 [229]
3
Chants alcyoniens .
1 [231]
Ariane.
1[232]
Le problème de la hiérarchie.
Pensées provisoires et
tirets *
par
4
Friedrich Nietzsche .
1 [233]
1 [235]
Il est très intéressant de voir une fois des hommes que
rien ne bride ni ne limite : presque tous les hommes supé-
rieurs (comme les artistes) retombent dans une servilité
quelconque, que ce soit le christianisme ou le chauvinisme.
1 [236]
Même si ce siècle n'est pas un siècle de décadence et de
déclin fort mélancolique de la force vitale, il est pour le
moins un siècle de tentatives irréfléchies et arbitraires :
et il est probable que, de sa surabondance d'expériences
ratées, naîtra l'impression générale d'une sorte de déca-
dence : et peut-être la chose même, la décadence.
1 [237]
Le problème de la hiérarchie.
Le problème de la discipline et du dressage.
La discipline de la volonté.
La discipline de l'obéissance.
NB. La discipline du commandement.
La finesse du discernement. 1
La culture, qui exclut la spécialisation .
1 [239]
Toute morale qui, d'une façon quelconque, a imposé sa
loi, consista toujours â dresser et discipliner un certain
type d'homme, en présumant que ce type d'homme était
le but essentiel et même exclusif : bref, en présumant tou-
jours un type. Toute morale croit que, par l'intention et la
contrainte, on peut changer (« améliorer ») beaucoup de
choses en l'homme : elle considère toujours l'assimila-
tion au type de référence comme une « amélioration »
(elle n'en conçoit d'ailleurs pas d'autre —).
1 [240]
Sur la naïveté. La réflexion peut être encore un signe de
n <aïveté >.
« Égoïsme naïf 2 .
1 [241]
le bien du « prochain » mérite en soi d'être plus recher-
ché 1) si le bien mérite d'être recherché 2) si l'on a déter-
miné quelle sorte de bien, puisqu'il y en a qui se contre-
disent et se gênent en tant que buts, 3) si l'on a déjà déter-
miné une valeur des personnes et s'il est clair que « le
prochain » a une valeur supérieure à la mienne. Les
agréables et enthousiastes sentiments * d'abandon etc.
doivent être critiqués impitoyablement; en soi, grâce à
cette goutte d'agrément et d'enthousiasme qui est en eux,
ils ne contiennent pas d'argument pour, mais seulement
une séduction A.
1 [242]
Connaissance des hommes : tout dépend de ce que
chacun saisit, ressent comme « expérience vécue » : la plu-
part ont besoin d'un déroulement lourdement exhaustif
de l'événement et de répétitions par centaines, et il faut â
certains des coups de matraque pour trouver le secret
d'une expérience et mobiliser leur attention
1 [243]
1 [244]
1 [245 ]
Iti vuttakam
1
(Ainsi parlait (le saint)
1 [246]
ne pas tromper
pas de compromis
mépriser un manque de clarté tel que Bismarck et
W <agner>.
1 [247]
2 [2]
2 [3]
2 [4]
Digressions alcyoniennes.
2 [5]
2 [6 ]
2 [7]
L'esprit que nous concevons 2 , nous ne lui ressem-
blons pas : nous lui sommes supérieurs!
2 [s]
Ce qui est encore jeune et mal assuré sur ses jambes
crie toujours le plus fort : car il tombe encore trop souvent
à la renverse. Par exemple le « patriotisme » dans l'Europe
d'aujourd'hui, « l'amour de la patrie », qui `n'est qu'un
enfant : il ne faut pas trop prendre au sérieux le petit
braillard 3!
80 Fragments posthumes
2 [9]
A mes amis 1 .
Ce livre qui a su trouver ses lecteurs dans un vaste
cercle de pays et de peuples et qui ne doit pas manquer
d'un certain art de séduire même des oreilles prudes et
récalcitrantes : ce livre, justement, est demeuré le plus
incompréhensible à mes amis très proches : il constitua
pour eux, à sa parution, un objet d'effroi et un point d'in-
terrogation, et il entraîna un long éloignement entre eux
et moi. En fait, l'état dont il jaillit était en soi assez chargé
d'énigmes et de contradictions : à cette époque, j'étais à
la fois très heureux et très souffrant Grâce à une grande
victoire que j'avais remportée sur moi-même, une de ces
dangereuses victoires dont on sort d'ordinaire anéanti.
Un jour c'était en été 1876 un mépris soudain m'en-
vahit comme une révélation : dès lors je poursuivis sans
pitié ma route par-dessus toutes les belles choses désirables
auxquelles ma jeunesse avait donné son coeur.
2 [10]
Le délire des nationalités et la balourdise patriotique
n'ont pour moi aucun charme : « L'Allemagne, l'Allemagne
au-dessus de tout; », cela sonne douloureusement à' mes
oreilles parce qu'au fond je veux et je désire des Allemands
plus que -. Leur premier homme d'Etat,dans la
tête duquel un honnête fond de royalisme; et de - christia-
nisme fait bon ménage avec une politique à court terme
dénuée de tout scrupule, aussi dépourvu de contact avec
la philosophie qu'un paysan ou un étudiant de corpora-
tion, m'inspire une curiosité ironique. Il me parait même
utile qu'il y ait quelques Allemands qui soient restés
indifférents à l'E <mpire> a <llemand > : pas même en
spectateurs, mais en hommes qui détournent le regard.
Vers où regardent-ils? Il est des choses plus importantes,
au prix desquelles ces questions ne sont que questions de
façade : par ex. la montée croissante de l'homme démo-
cratique et ce qu'elle entraîne : la crétinisation de l'Europe
et l'amoindrissement de l'homme européen 2.
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2[9-13] 81
2 [11]
La conscience intellectuelle.
Tentative de critique des hommes les plus intellectuels.
Le philosophe. L'esprit libre. L'artiste. L'homme reli-
gieux. Le savant. L'homme distingué. Dionysos 1 .
2 [12]
2 [13]
Tel est mon soupçon qui toujours revient, mon souci qui
jamais ne s'endort, ma question que personne n'entend
ni ne veut entendre, mon sphinx près duquel il y a plus
d'Un abyme : -- je crois que nous nous trompons aujour-
d'hui sur les choses que nous aimons le plus, nous autres
Européens, et qu'un Kobold cruel (ou pas même cruel,
tout juste indifférent et puéril) joue avec notre coeur et
son enthousiasme comme il a peut-être déjà joué avec tout
ce qui a jamais vécu et aimé : je crois que tout ce que
nous sommes aujourd'hui habitués en Europe d vénérer
82 Fragments posthumes
comme « humanitarisme », « moralité », « humanité »,
« compassion », justice, peut bien avoir une valeur de
façade en tant que cela affaiblit et adoucit certains ins-
tincts fondamentaux dangereux et puissants, mais que ce
n'est malgré tout rien d'autre, à la longue, que l'amoin-
drissement du type « homme » en son entier sa médio-
crisation définitive si, dans un cas désespéré, on veut bien
me passer un terme désespéré ; je crois que la commedia
umana, pour un dieu-spectateur épicurien, doit consister
en ceci que les hommes, grâce à leur moralité croissante,
s'imaginent en toute innocence et vanité qu'ils s'élèvent
depuis l'animal jusqu'au rang des « dieux » et à des desti-
nées supraterrestres, alors qu'en vérité ils sombrent,
c'est-à-dire qu'en cultivant toutes les vertus grâce aux-
quelles un troupeau prospère, et en réprimant ces autres
vertus opposées qui donnent naissance à un nouveau type
dominateur, plus haut et plus fort, ils ne font justement
que développer en l'homme l'animal du troupeau et déter-
minent peut-être ainsi l'animal « homme » car jusqu'ici
l'homme était l' « animal non déterminé » —; je crois que
le grand mouvement démocratique de l'Europe qui va
irrésistiblement de l'avant ce qui se nomme « Progrès »
—, de même que déjà son précurseur et son annonciateur
moral, le christianisme ne signifie au fond rien d'autre
que le complot général, monstrueux et instinctif, du trou-
peau contre tout ce qui est berger, carnassier, ermite et
César, au bénéfice de la conservation et de l'épanouisse-
ment de tous ceux qui sont faibles, opprimés, mal partagés,
médiocres, semi-ratés, comme une interminable révolte
d'esclaves, d'abord secrète, puis toujours plus sûre d'elle-
même, contre toute espèce de maître, et finalement contre
le concept même de maître, une guerre à mort, contre
toute morale née dans le sein et la conscience d'un type
humain dominateur, comme je le disais, plus haut et plus
fort, ---r un type qui, comme fondement et comme condi-
tion, nécessite un esclavage, quels qu'en soient la forme
et le nom; je crois enfin que toute élévation du type homme
a été jusqu'ici l'oeuvre de sociétés aristocratiques qui
croyaient en une longue échelle de hiérarchies et de diffé-
rences de valeur d'un homme à l'autre, et qui avaient
besoin de l'esclavage : je crois même que sans le pathos
de la distance, engendré par le sens congénital de la diffé-
rence des classes, par le regard circulaire et méprisant que
la caste dominante jette constamment sur ses sujets et
instruments, et par son entraînement tout aussi constant
2 W 18. Automne 1885-automne 1886 2[13-15] 83
à commander et à maintenir en état d'infériorité et de
distance, il serait impossible qu'apparaisse cet autre
pathos encore plus mystérieux, cette aspiration à un accrois-
sement toujours renouvelé des distances à l'intérieur de
l'âme même, et la formation d'états toujours plus élevés,
plus rares, plus lointains, plus étendus, plus amples, bref,
e « surpassement de l'homme par lui-même », pour employer
une formule morale en un sens supramoral. Une question
se repose toujours à moi, une question tentatrice et mau-
vaise, peut-être : soufflons-la à l'oreille de ceux qui ont
droit à ce genre de questions qui méritent questionnement,
aux plus fortes âmes d'aujourd'hui, celles aussi qui se
maîtrisent le mieux : ne serait-il pas grand temps, plus on
développe actuellement en Europe le type « animal du
troupeau », de tenter d'instaurer un dressage systématique,
artificiel et conscient afin de produire le type opposé et ses
vertus? Et ne serait-ce pas enfin une espèce de but, de
rédemption et de justification pour le mouvement démo-
cratique lui-même s'il survenait quelqu'un qui se servit
de lui -- en ceci qu'A la forme nouvelle et sublime d'escla-
vage — que représentera un jour l'accomplissement de la
démocratie européenne se surimposerait cette sorte
supérieure d'esprits dominateurs et césariens pour qui ce
nouvel esclavage serait aussi ----- un besoin? En vue de nou-
veaux objectifs jusqu'ici inaccessibles, en vue de ses objec-
tifs? de ses tâches 1 ?
2 [14]
2 [15]
2 [16]
2 [17]
Les écrits cités, soigneusement et longuement interrogés,
pourraient être utilisés comme moyens d'ouvrir, peut-
être, l'accès â la compréhension d'un type encore plus
élevé et plus difficile que ne l'est même <le > type de
l'esprit libre : aucun autre chemin ne conduit à la com-
préhension de ---^ --
***
2 [18]
2 [19]
2 [20]
2 [21]
2 [22]
2
[23]
Longtemps réfléchi sur ce foyer originel de la génialité
religieuse et aussi, par conséquent, du « besoin métaphy-
sique », la « névrose religieuse »; me souvenant malgré
moi de cette expression célèbre en France et même passée
en proverbe, qui en dit tant sur la « santé » de l'esprit
français : « le génie est une neurose » * 3. -----
2 [24]
2 [25]
2 [26]
Prélude
d'une philosophie de l'avenir.
Par
Friedrich Nietzsche e
2 [27]
2 [28]
2 [29]
2 [30]
Nos vertus'.
2 [31]
Nos vertus 1 .
2 [32]
2
Les philosophes de l'avenir .
Discours.
1.
Une telle grandeur est-elle possible aujourd'hui?
2.
Mais peut-être demain, peut-être après-demain. -- Je
vois surgir de nouveaux ph <ilosophes> etc.
2 [33]
2 [34]
J'ai aimé et vénéré Richard Wagner plus que quiconque ;
et s'il n'avait pas eu à la fin le mauvais goût ou la triste
obligation de faire cause commune avec une qualité
90 Fragments posthumes
d' « esprits » qui m'est insupportable, avec ses partisans
les wagnériens, je n'aurais eu aucune raison de lui dire
adieu déjà de son vivant : à lui, le plus profond et le plus
audacieux, le plus méconnu aussi de ces hommes difficiles
à connaître d'aujourd'hui, à lui dont la rencontre m'a
permis d'avancer dans la connaissance plus qu'aucune
autre rencontre. Ayant mis en tête ce qui est en tête,
à savoir que son cas et mon cas n'avaient pas à être
confondus et qu'il fallut une bonne dose d'autodépassement
avant que j'apprisse à séparer ainsi le « sien » et le « mien »
selon la juste partition. Que j'aie pris conscience du pro-
blème exceptionnel du comédien problème qui m'est
peut-être plus étranger qu'aucun autre, pour une raison
difficile à formuler , que j'aie découvert et reconnu
le comédien au fond de tout artiste, l'élément typique
de l'artiste, tout cela exigeait le contact avec cet
<homme > et il me semble que j'ai plus haute et
plus piètre opinion de l'un et de l'autre que les philosophes
antérieurs. L'amélioration du théâtre m'importe peu,
sa « cléricalisation » encore moins; la véritable musique
wagnérienne ne fait pas assez partie de moi je pourrais
m'en passer, pour mon bonheur et pour ma bonne santé
(quod erat demonstrandum et demonsiratum) 1 . Ce qui
m'était le plus étranger en lui, le chauvinisme teuton et
le semi-cléricalisme de ses dernières années
2 [35]
2 [36]
Du détachement.
De l'endurcissement.
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2[34-41] 91
Du masque.
De la hiérarchie.
Européen et supra-européen.
2 [37]
2 [38]
2 [39]
Masque et communication.
2 [40]
2 [41]
2 [42]
Prélude
d'une philosophie de l'avenir.
Avec un appendice :
Chansons et flèches du prince Hors-la-loi.
Par 2
Friedrich Nietzsche .
2 [43]
2 [44]
Avant-propos.
1. Qu'était le philosophe?
2. Pour l'histoire naturelle de l'esprit libre.
3. Monologue d'un psychologue.
4. La femme en soi.
5. Le génie religieux.
6. Nous, les savants.
7. Nous, les vertueux.
8. Qu'est-ce que l'aristocratie?
9. Peuples et patries.
10. Les masques.
11. Les tentateurs. Dionysos
,
Appendice: ---
Table des matières.
2 [45]
2 [46]
2 [47]
Monologues
d'un
Psychologue.
Avec un appendice :
Chansons et flèches du prince Hors-la-loi.
04 Fragments pos t humes
Par
Friedrich Nietzsche.
Appendice:
Chansons et flèches
du
prince Hors-la-loi.
1. Au Mistral.
2. A Goethe.
3. A certains panégyristes.
4. Sils-Maria.
5. Le midi de l'ermite.
6. Vers les mers nouvelles.
7. « Les pigeons de San Marco
8. Au-dessus de la porte.
9. Le véritable Allemand.
10. La musique de Pars i f al.
11. A Spinoza.
12. Rimus remedium 1 .
13. Un fou au désespoir.
14. Épode 2 .
2 [48]
2 [49]
Dans la plupart des amours il y en a un qui joue et un
qui se laisse jouer : Amor est avant tout un petit metteur
en scène.
2 [50]
Con t enu :
Avant-propos.
1. Sur les préjugés des philosophes.
2. L'esprit libre.
3. Le génie religieux. L'être religieux.
4. La femme en soi. Sentences et intermèdes.
5. Pour l'histoire naturelle de la morale.
2 = W 18. Automne 1855-automne 1886 2[47-53] 95
6. Nous, les savants. « Carcasse, tu trembles? Tu
7. Nos vertus. tremblerais bien davantage,
8. Peuples et patries. si tu savais où je te mène *.»
9. Masques. Turenne.
10. Qu'est-ce que l'aristocratie?
Appendice : Chansons et flèches du prince Hors-la-loi 1 .
2 [51]
Monologues
2
d'un psychologue .
Par
Friedrich Nietzsche.
Pour l'histoire naturelle de l'homme supérieur 3 .
Qu'est-ce que l'aristocratie 4 ?
2 [52]
b
Sentences et monologues .
2 [53]
Prélude
d'une philosophie de l'avenir.
Introduction.
Premier livre : sur les préjugés des philosophes.
Deuxième livre : indications pour une psychologie de la
morale.
Troisième livre : nous, les Européens. Une occasion de se
regarder dans un miroir.
2 [54]
Par-delà bien et mal 1 .
Par
Friedrich Nietzsche.
2 [55]
Avant-dernier chapitre
Alcuin l'Anglo-saxon, qui définissait ainsi la profession
royale du philosophe :
prava corrigere, et recta corroborare, et scinda sublimare 2
.
2 [56]
Corruption de l'homme naturel robuste dans l'étau des
villes civilisées (— échoue parmi les éléments lépreux, y
apprend la mauvaise conscience).
2 [57]
Il y aura dorénavant des conditions initiales favorables
à la formation d'organismes de domination plus vastes,
tels qu'il n'y en eut encore jamais de semblables. Et ce
n'est pas encore le plus important; il est devenu possible
qu'apparaissent des associations eugéniques internatio-
nales, qui se donneraient pour tâche d'élever une race de
maîtres, les futurs « maîtres de la terre D; une nouvelle
et prodigieuse aristocratie, fondée sur la plus dure auto-
législation, dans laquelle il sera donné à la volonté des
violents dotés de sens philosophique et des artistes-tyrans
une durée qui s'étendra sur des millénaires un type
d'hommes supérieurs qui, grâce à la prépondérance de
leur volonté, de leur savoir, de leur richesse et de leur
influence se serviraient de l'Europe démocratique comme
de leur instrument le plus docile et le plus souple pour
prendre en`ç'main` les - <'destins de la terre, pour travailler
en artistes à former l' « homme » lui-même.
Il suffit, le temps vient où l'on apprendra du nouveau
sur le politique.
2 = W 1 8. Automne 1885 - automne 1886 2[54-62] 97
2 [58]
2 [59]
Pour I
Mais en fin de compte : pourquoi faudrait-il dire si fort
et avec une telle rage ce qui va venir! Considérons-le
avec plus de froideur, de distance, d'intelligence, de hau-
teur, disons-le comme il peut être dit entre nous, si discrè-
tement que • tout le monde l'ignore, que tout le monde
nous ignore... Nommons cela une suite 1 .
2 [60]
2 [si]
L'évolution du mode de pensée mécaniste-atomistique
n'est toujours pas consciente, aujourd'hui encore, de son
but inéluctable; telle est mon impression, après avoir
lu assez longtemps dans le jeu de ses partisans. Elle finira
par créer un système de signes : elle renoncera â expliquer,
elle abandonnera le concept « cause et effet ».
2 [62]
2 [63]
2 [64]
2 [65]
In media vita 2 .
Par
Friedrich Nietzsche.
2 [66]
2 [s7]
2 [68]
2 [69]
2 [7o]
2 [71]
Pour Zarathoustra 2 .
Calina : brun rouge, tout trop net à proximité. Suprême
soleil. Fantomatique.
3
Sipo Matador .
I Le moment décisif
La hiérarchie. 1) Brisez les bons et les justes !
2)
L'éternel retour.
Midi et éternité.
Livre du devin.
2 [72]
Midi et éternité 1 .
Par
F. N.
I La fête des morts. Zarathoustra découvre une fête
monstrueuse :
II La nouvelle hiérarchie.
III Sur les maîtres de la terre.
IV Sur l'anneau du retour.
2 [73]
tentative d'une
nouvelle interprétation du monde.
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2[71-74] 103
Les artistes.
Arrière-pensées d'un psychologue.
Par
Friedrich Nietzsche.
Midi et éternité 1 .
Par
Friedrich Nietzsche
2
Par-delà bien et mal .
Gai saber.
3
Chansons du prince Hors-la --loi .
Par
Friedrich Nietzsche.
2 [74]
5
La volonté de puissance .
1. Physiologie de la hiérarchie.
2. Le grand midi.
3. Dressage et discipline.
4. L'éteranel retour.
104 Fragments posthumes
2 [75]
L'éternel retour
Danses et voeux sacrés.
Midi et éternité.
Danses sacrées de ceux de l'éternel retour 1.
2 [76] 2
( 28 )
De la hiérarchie :
Pour I. Pour la physiologie de ta puissance.
L'aristocratie dans le corps, la multiplicité des éléments
dominants {combat des tissus?
L'esclavage et la division du travail : le type supérieur,
uniquement possible grâce à la réduction contraignante
d'un type inférieur à une seule fonction.
Plaisir et douleur, pas d'opposition. Le sentiment de
puissance.
L'alimentation, simple conséquence de l'assimilation
insatiable, de la volonté de puissance.
La procréation, la désagrégation intervenant en cas
d'impuissance des cellules dominantes à organiser les
éléments assimilés.
C'est la force formatrice qui veut toujours avoir de
nouvelles provisions de « substance » (encore plus de force).
Le coup de maître de la construction d'un organisme à
partir de l'oeuf.
« Conception mécaniste » : n'admet que des quantités :
mais la force réside dans la qualité : le Mécanisme peut
donc seulement décrire des phénomènes, non les expliquer.
Le « but ». Partir de la « sagacité » des plantes.
Concept de l' « accomplissement » : pas seulement une
plus grande complexité, mais aussi une plus grande force
(—. n'exige pas seulement d'être une plus grande masse }.
Conclusion pour l'évolution de l'humanité : l'accomplis-
sement consiste dans la production des individus les plus
puissants, pour lesquels on transforme la grande majorité
en instrument (mais l'instrument le plus intelligent et le
plus mobile qui soit)
2 W 18. Automne 1885-automne 1886 2{75-771 105
Les artistes en tant que petits formateurs. En revanche,
le pédantisme des « éducateurs »
La punition : maintien d'un type supérieur.
L'isolation.
Faux enseignements tirés de l'histoire. Ce n'est pas parce
que quelque chose d'élevé a abouti à l'échec ou l'abus
(comme l'aristocratie) que cela est réfuté!
2 [77]
2 [7s]
Themala 1 .
2 [79]
2 [so]
Pour l'introduction.
La sombre solitude et l'abandon de la carnpagna Romana,
la patience dans l'incertain.
Chaque livre comme une conquête, attaque - l tempo
lento , noué dramatiquement jusqu'au terme, à la
fin catastrophe et soudaine délivrance I.
2 [81]
(15) 2
C'est une simple question de force : présenter tous les
traits morbides du siècle, mais les compenser par une
force surabondante, plastique, rénovatrice. L'homme fort :
description
2 [82]
2 [83]
(7) 1
L'homme se pense comme cause, comme acteur
tout ce qui arrive se comporte prédicativement par
rapport à un sujet quelconque
Tout jugement recèle la croyance profonde, pleine et
entière dans le sujet et le prédicat, ou dans la cause et
l'effet; et cette dernière croyance (à savoir l'affirmation
que tout effet est une activité et que toute activité présup-
pose un acteur) est même un cas particulier de la première,
si bien qu'il subsiste comme croyance fondamentale cette
croyance : il y a des sujets.
Je remarque quelque chose et j'en cherche la raison:
cela signifie à l'origine : j'y cherche une intention, et surtout
quelqu'un qui a une intention, un sujet, un acteur
autrefois, on voyait dans tout événement des intentions,
tout événement était un agir. C'est notre plus ancienne
habitude. L'animal l'a-t-il aussi? N'est-il pas lui aussi,
en tant qu'être vivant, orienté vers l'interprétation d'après
soi? La question « pourquoi? » est toujours la question
de la causa finalis, la question du « Pour quoi? » Le sens de
la causa efficiens, nous en sommes totalement dépourvus :
sur ce point Hume a raison, l'habitude (et pas seulement
celle de l'individu!) nous fait attendre qu'un certain phé-
nomène souvent observé en suive un autre : rien de plus!
Ce qui entraîne l'extraordinaire solidité de notre croyance
en la causalité, ce n'est pas la grande habitude de la
succession des phénomènes, mais bien notre incapacité à
interpréter un événement autrement que comme événe-
ment intentionnel. C'est la croyance au vivant et au pen-
sant comme unique agissant à la volonté, l'intention ,
la croyance que tout événement est un agir, que tout agir
présuppose un acteur, c'est la croyance au « sujet ». Cette
croyance au concept de sujet et de prédicat ne serait-elle
pas une grosse <sottise>?
Question : l'intention est-elle cause d'un événement?
Ou est-ce aussi une illusion? N'est-ce pas l'événement
lui-même?
2 [84 ]
(30) 2
Le juger est notre croyance la plus ancienne, notre façon
la plus habituelle de tenir-pour-vrai ou pour-faux
Dans le jugement réside notre croyance la plus ancienne,
dans tout juger il y a un tenir-pour-vrai ou tenir-pour-
faux, un affirmer ou un nier, une certitude qu'une chose
est telle et pas autrement, une croyance qu'on a ici véri-
tablement « connu » qu' est-ce qui est cru vrai dans tous
les jugements?
Que sont les prédicats? Nous n'avons pas appréhendé
comme telles des modifications de nous-mêmes, mais au
contraire comme un « en-soi » qui nous est étranger, que
nous ne faisons que « percevoir » : et nous ne les avons pas
posées comme un événement (Geschehen) mais comme un
être, comme « propriété » et nous y avons surimposé
une entité à quoi elles sont attachées, c . -A- D . que nous
avons posé l'action comme agissant et l'agissant comme
étant. Mais même dans cette formulation, le concept
d' « action » reste arbitraire : car de ces modifications qui
nous affectent et dont nous croyons avec assurance que
nous ne sommes pas nous-mêmes les causes, nous déduisons
seulement qu'elles doivent être des actions : selon la conclu-
sion : « â toute modification correspond un auteur ».
Mais cette conclusion est déjà mythologie : elle sépare
l'agissant et l'agir. Quand je dis « l'éclair luit », j'ai posé le
luire une fois comme activité et une seconde fois comme
sujet : j'ai donc subsumé sous l'événement un être qui ne
se confond pas avec l'événement mais, bien plutôt, demeure,
est, et ne « devient » pas. --- Poser l'événement comme agir:
et l'action comme être: telle est la double erreur, ou inter-
prétation, dont nous nous rendons coupables. Ainsi par
ex. « l'éclair luit » : « luire » est un état qui nous affecte,
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2[83-87] 111
mais nous ne l'appréhendons pas comme action sur nous,
et nous disons : « quelque chose de luisant », comme un1
« En-soi », et nous lui cherchons un auteur, l'« éclair » .
2 [85]
(32) 2
Les propriétés d'une chose sont des actions sur d'autres
« choses » : si l'on élimine par la pensée les autres « choses »,
une chose n'a plus aucune propriété, c.-à-d. qu'il n'y a pas
de chose sans d'autres choses, c.-à-d. qu'il n'y a pas de
« chose en soi ».
2 [86]
3
(30)
Que peut seulement être la connaissance? « interpré-
tation », non « explication ».
2 [s7]
(32) 4
Toute unité n' est unité qu' en tant qu'organisation
et ,feu d'ensemble : tout comme une communauté humaine
est une unité, et pas autrement : donc le contraire de
l'anarchie atomiste ; et donc une formation de domination,
qui signifie l' Un, mais n'est pas une.
2 [88]
(33) 1
Une force que nous ne pouvons pas nous représenter
(comme la prétendue force purement mécanique d'attrac-
tion et de répulsion) est un mot vide et ne doit pas avoir
droit de cité dans la science : qui veut nous rendre le monde
représentable, rien d'autre!
Tout événement intentionnel est réductible à l'inten-
tion d'un accroissement de force.
2 [89]
2 [90]
(31) 2
Égalité et ressemblance. 1) un organe plus grossier voit
beaucoup d'égalité apparente
2) l'esprit veut l'égalité, c.-à-d.
subsumer une impression sensible dans une
série préexistante : de même que le corps s'assi-
mile l'inorganique.
Pour la compréhension de la logique : : : la volonté
d'égalité est la volonté de puissance.
la croyance que quelque chose est tel et tel,
l'essence du jugement est la conséquence d'une
volonté, cela doit être aussi égal que possible.
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2{87-93] 113
2 [91]
(30) 1
Si notre « moi » est pour nous le seul être selon quoi nous
façonnons ou comprenons tout être : parfait! le doute est
alors très légitime : ne s'agit-il pas ici d'une illusion de
perspective l'unité apparente où tout se rejoint comme
en une ligne d'horizon? Avec le corps pour fil conducteur,
une prodigieuse diversité se révèle ; il est méthodologique-
ment permis d'utiliser un phénomène plus riche et plus
facile à étudier comme fil conducteur pour comprendre
un phénomène plus pauvre. En fin de compte : même en
supposant que tout soit devenir, la connaissance n'est
possible que sur la base d'une foi dans l'être.
2 [92]
2 [93]
(34) 2
Dans quelle mesure la dialectique et la foi dans la raison
reposent encore sur des préjugés moraux. Chez Platon, nous
sommes encore dépositaires, en tant qu'anciens habitants
d'un monde intelligible du Bien, d'un héritage de cette
époque : la divine dialectique, en tant qu'elle est issue du
Bien, conduit à tout Bien et donc, pour ainsi dire, « en
arrière » —) Descartes aussi avait l'idée que, dans un
mode de pensée fondamentalement christiano-moral qui
croit en un Dieu bon, créateur des choses, la véracité de
Dieu nous garantit seule les jugements de nos sens. En
dehors d'une sanction et d'une garantie religieuses de nos
114 Fragments posthumes
sens et de notre rationalité d'où tirerions-nous le droit
de faire confiance à l'existence! Que la pensée soit la mesure
du réel, ce qui ne peut pas être pensé n'est pas, voila
le non plus ultra balourd d'une confiance béate et mora-
lisante (en un principe de vérité essentiel au fond des
choses), en soi une affirmation délirante que notre expé-
rience contredit à chaque instant. Nous ne pouvons juste-
ment rien penser dans la mesure où il est ...
2 [94]
2 [95]
2 [96]
2 [97]
2 [98]
( 35 ) 1
Pauvreté, humilité et chasteté idéaux dangereux et
calomnieux, mais, comme les poisons, remèdes utiles dans
certaines maladies, par ex. à l'époque impériale romaine.
Tous les idéaux sont dangereux parce qu'ils abaissent
et stigmatisent le factuel, tous sont des poisons, mais
indispensables en tant que remèdes temporaires
2 [99]
2 [100]
LA VOLONTÉ DE PUISSANCE 2 .
Tentative
d'un renversement* de toutes les valeurs.
En quatre livres.
Premier livre : le danger des dangers (description du nihi-
lisme) (en tant que conséquence nécessaire des
appréciations de valeur antérieures)
* n Umwerthung aller Werle » : la traduction qui conviendrait sans doute
le mieux serait « révolution de toutes les valeurs «, si les connotations du
terme • révolution » ne risquaient d'entratner des contresens.
116 Fragments posthumes
Deuxième livre : critique des valeurs (de la logique etc.
Troisième livre : le problème du législateur (incluant l'his-
toire de la solitude) Comment doivent être cons-
titués les hommes qui portent des jugements de
valeur inversés? Les hommes qui possèdent tous
les caractères de l'âme moderne, mais sont assez
forts pour les métamorphoser en santé pure.
Quatrième livre : le marteau
leurs moyens pour leur tâche
Sils-Maria, été 1886
Des forces monstrueuses sont déchaînées; mais contradic-
toires
les forces déchaînées s'anéantissant mutuellement
attacher de nouveau les forces déchaînées
afin qu'elles ne s'anéantissent pas mutuellement
et
ouvrir les yeux au réel accroissement de force!
Montrer partout la dysharmonie, entre l'idéal et ses
conditions particulières (par ex. la loyauté chez les chré-
tiens qui sont constamment contraints au mensonge)
Pour le livre 2.
Dans la communauté démocratique où chacun est spé-
cialiste, il manque le Pour quoi? pour Qui? l'état où tout
l'abaissement multiforme de tous les individus (au rang
de fonctions) revêt un sens.
Le développement de la sensualité
de la cruauté
de la vengeance aboutissant à une
de la folie
de la cupidité somme de culture.
de l'ambition
etc.
Sur
Le danger dans tous les idéaux antérieurs
Critique du mode de pensée indou et chinois, ainsi que du
mode chrétien (comme préliminaires d'un mode nihi-
liste —)
Le danger des dangers : rien n'a de sens.
(2)
Le marteau : une doctrine qui, grâce au déchaînement du
2 = W 1 8. Automne 1885-automne 1886 2[100-101] 117
pessimisme le plus morbide, provoque une sélection des
plus aptes à vivre
2 [101]
2 [102]
2 [103]
2 [104]
2 [105]
2 [106]
2 [107]
2 [108]
2 [109]
2 [110]
1
Pour « La naissance de la tragédie » .
L' « être » comme invention de celui qui souffre du deve-
nir.
Un livre construit uniquement sur des expériences de
plaisir ou de déplaisir esthétique, avec une métaphysique
d'artiste à l'arrière-plan. Simultanément, une confession
romantique, et pour finir une oeuvre juvénile, remplie de
courage juvénile et de mélancolie. Celui qui souffre le plus
a la plus profonde exigence de beauté il l'engendre.
Expériences psychologiques fondamentales : le nom
d' « apollinien » désigne l'immobilisation ravie devant un
monde inventé et rêvé, devant le monde de la belle appa-
rence, en tant qu'il libère du devenir : du nom de Dionysos
est baptisé, d'autre part, le devenir conçu activement,
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2[108-110] 121
ressenti subjectivement, en tant que volupté furieuse du
créateur qui connaît simultanément la rage du destruc-
teur. Antagonisme de ces deux expériences et des désirs
qui en constituent le fondement : le premier veut éterniser
l'apparence, devant elle l'homme devient calme, sans
désirs, semblable à une mer d'huile, guéri, en accord avec
soi et avec toute l'existence : le second désir aspire au
devenir, à la volupté du faire-devenir, c.-à-d. du créer et
du détruire. Le devenir, ressenti et interprété de l'intérieur,
serait le continuel créer d'un insatisfait, d'un super-riche,
d'un infiniment tendu et oppressé, d'un Dieu qui ne sur-
monterait le tourment de l'être que par la métamorphose
et le changement permanents : l'apparence comme sa
provisoire solution, atteinte à chaque instant ; le monde
comme succession dans l'apparence de visions et rédemp-
tions divines. Cette métaphysique d'artiste s'oppose à
la vision partielle de Schopenhauer, qui ne sait pas hono-
rer l'art d'un point de vue d'artiste, mais seulement de
consommateur : parce qu'il apporte libération et rédemp-
tion dans la jouissance du non-réel, par opposition à la
réalité (expérience d'un homme qui souffre et désespère
de lui-même et de sa réalité) Rédemption dans la forme
et son éternité (comme peut l'avoir aussi vécu Platon :
à cette différence près que celui-ci savourait déjà dans le
concept même la victoire remportée sur sa sensibilité par
trop irritable et souffrante) On lui oppose le second fait,
l'art vu à partir de l'expérience de l'artiste, et surtout du
musicien : la torture du devoir-créer, en tant qu'instinct
dionysiaque.
L'art tragique, riche de ces deux expériences, est défini
comme réconciliation d'Apollon et de Dionysos : à l'appa-
rence, Dionysos confère la plus profonde signification :
et cette apparence est pourtant niée, et niée avec volupté.
Ceci est dirigé, comme vision tragique du monde, contre la
doctrine schopenhauerienne de la résignation.
Contre la théorie wagnérienne selon laquelle la musique
est moyen et le drame fin.
Une exigence de mythe tragique (de « religion » et même
d'une religion pessimiste) (en tant que cloche protectrice
oit prospère ce qui croit)
Méfiance envers la science : bien que son actuel opti-
misme lénifiant soit ressenti fortement. Gaieté de l'homme
de la théorie.
Aversion profonde envers le christianisme : pourquoi?
La dégénérescence de l'être allemand lui est imputée.
122 Fragments posthumes
Il n'y a de justification du monde qu'esthétique. Sus-
picion fondamentale envers la morale (elle fait partie du
monde de l'apparence).
Le bonheur pris à l'existence n'est possible que comme
bonheur pris à l'apparence.
Le bonheur pris au devenir n'est possible que dans la
destruction du réel de l' « existence », de la belle apparence,
dans la destruction pessimiste de l'illusion.
dans la destruction de l'apparence, même la plus belle,
culmine le bonheur dionysiaque.
2 [111]
Le problème du sens de l'art : pour quoi l'art?
Quelle était l'attitude des hommes les plus débordants de
vie et les plus accomplis, les Grecs, vis-à-vis de l'art?
Fait : la tragédie appartient à leur époque la plus riche
de force pourquoi?
Deuxième fait : le besoin de beauté, comme le besoin de
logiciser le monde, appartient à leur décadence *
Interprétation des deux faits
Application erronée au présent : j'interprétais le pessimisme
comme conséquence d'une force et plénitude de vie supé-
rieure, qui peut s'offrir le luxe du tragique. De même,
j'interprétais la musique allemande comme expression
d'une surabondance originelle dionysiaque, c.-à-d.
1) je surestimais l'être allemand
2) je ne comprenais pas la source de l'assombrissement
moderne
3) la compréhension historico-culturelle de l'origine de
la musique moderne et de son romantisme essentiel
me faisait défaut.
Abstraction faite de cette application erronée, le pro-
blème subsiste : que serait une musique qui n'aurait pas
une origine romantique mais au contraire dionysiaque?
2 [112]
un romantique est un artiste que son grand méconten-
tement de soi rend créateur qui détourne le regard de
soi et du monde qui l'entoure, qui regarde en arrière
* En français dans le texte.
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2[110-114] 123
2 [113]
Je commençai par une hypothèse métaphysique sur le
sens de la musique : mais au fond, il y avait une expérience
psychologique à laquelle je ne savais pas encore attribuer
une explication historique suffisante. Le transfert de la
musique dans le métaphysique était un acte de vénération
et de reconnaissance; au fond, tous les êtres religieux en
ont usé de même, jusqu'ici, avec leur expérience. Puis
ce fut le revers de la médaille : l'action indiscutablement
nuisible et destructrice qu'exerçait sur moi cette musique
vénérée et du même coup la fin de ma vénération reli-
gieuse. Du même coup, mes yeux se dessillèrent sur le
besoin moderne de musique (qui apparaît dans l'histoire
en même temps que le besoin croissant de narcotiques)
Même l' « (Euvre d'art de l'avenir » m'apparut comme un
raffinement * du besoin d'excitation et d'étourdissement,
où tous les sens à la fois veulent trouver leur compte, y
compris le contresens idéaliste, religieux, hypermoraliste
comme une excitation * globale de toute la machinerie
nerveuse. L'essence du romantisme se révéla à moi : le
manque, chez un type d'homme fécond, est devenu ici
créateur. En même temps, le cabotinage dans les moyens,
l'inauthenticité et le plagiat propres à tous les éléments
particuliers, le manque de probité de la formation artis-
tique, la fausseté abyssale de cet art le plus moderne : qui
voudrait être essentiellement art du théâtre. L'impossibi-
lité psychologique de ces prétendues âmes de héros et de
dieux, qui sont à la fois nerveuses, brutales et raffinées
comme les plus modernes d'entre les peintres et poètes
parisiens. Il suffit, je les rangeai eux aussi dans la
« barbarie » moderne. Avec tout cela, Rien n'est dit
sur le dionysiaque. A l'époque de la plus grande plénitude
et santé, la tragédie apparaît, mais aussi à l'époque de
l'exacerbation et de l'épuisement nerveux. Interprétation
opposée. Il est caractéristique de Wagner qu'il ait
déjà donné à l'anneau des Niebelung une conclusion nihi-
liste (avide de repos et de fin) 1 .
2 [114]
L'oeuvre d'art, quand elle apparaît sans artiste, par ex.
comme corps, comme organisation (corps des officiers prus-
* En français dans le texte.
124 Fragments posthumes
siens, ordre des jésuites). Dans quelle mesure l'artiste
n'est qu'une étape préliminaire. Que signifie le « sujet » ?
Le monde comme oeuvre d'art s'engendrant elle-même
L'art est-il la conséquence d'une insatisfaction devant le
réel? Ou une expression de reconnaissance pour le bonheur
dont on a joui? Dans le premier cas, romantisme, dans le
second, auréole et dithyrambe (bref, art d'apothéose) :
Raphaël en fait aussi partie, il avait seulement la duplicité
de diviniser l'apparence de l'interprétation chrétienne du
monde. Il était reconnaissant pour l'existence, ce en quoi
il ne se montrait pas spécifiquement chrétien.
Avec l'interprétation morale, le monde est insupportable.
Le christianisme fut la tentative de surmonter ainsi le
monde : c'est-à-dire de le nier. En pratique, un tel attentat
de la démence d'une démente surestimation de l'homme
par lui-même face au monde aboutissait <à > l'assom-
brissement, rapetissement, appauvrissement de l'homme :
seule la catégorie la plus médiocre et la plus inoffensive,
la catégorie de l'homme du troupeau y trouvait son compte,
son avantage, si l'on veut...
Homère comme artiste d'apothéose; Rubens également.
La musique n'en a pas encore eu.
L'idéalisation du grand criminel (le sens de sa grandeur)
est grecque ; l'abaissement, la diffamation, le dénigre-
ment du pécheur est judéo-chrétien 1 .
2 [115]
2 [116]
2 [117]
2 [118]
2 [119]
2 [120]
2 [12X]
(38)
1
Le cabotinage
Le bariolage de l'homme moderne et son attrait. Essen-
tiellement, dissimulation et dégoût.
Le littérateur.
Le politicien (dans le « charlatanisme national »)
Le cabotinage dans les arts
manque de probité de la formation et de l'apprentis-
sage (Fromentin)
les romantiques (manque de philosophie et de science
et excès de littérature)
les auteurs de romans (Walter Scott, mais aussi les
monstres-Nibelung, avec la musique la plus énervée)
les poètes lyriques
La « scientificité »
Virtuoses (Juifs)
les idéaux populaires en tant que dépassés, mais pas
encore aux yeux du peuple:
le saint, le sage, le prophète
2 [122]
(37)
2
Pour l'histoire de l'assombrissement moderne .
2 [124]
2 [125]
Pour l'histoire du pessimisme.
L'assombrissement moderne.
Le cabotinage 2 .
2 [126]
Pour 2) Critique des valeurs suprêmes S.
Pour l'histoire de la calomnie.
Comment on fabrique des idéaux.
Culture (et « humanisation » : antagonistes)
Morale comme instinct de honte, comme déguisement,
masque, interprétation foncièrement bienveillante
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2[124-127] 129
(37)
Intercaler des jugements sur les pessimistes !
Les Hindous
Le pessimisme (comme instinct) et la volonté de pessi-
misme : contraste majeur
Le pessimiste de l'intellect l'un sur la trace
Le pessimiste de la sensi- de l'illogique, l'autre du
bilité douloureux.
tous ces critères ne sont tels que pour des raisons
morales
ou, comme Platon, crainte également de l'-80%,-;) 1-
en tant que renverseuse de valeurs et séductrice
A. Qu'est-ce que la vérité?
B. Justice.
C. Pour l'histoire des sentiments de sympathie.
D. L' « homme bon ».
E. L' « homme supérieur ».
F. L'artiste.
(36)
Qu'es!-ce que la vérité? (inertia, l'hypothèse d'où l'on tire
satisfaction, moindre consommation de force intel-
lectuelle etc.)
2 [127]
(2) 2
Le nihilisme est devant la porte : d'où nous vient ce plus
inquiétant de tous les hôtes?
I. 1. Point de départ : c'est une erreur de renvoyer à des
« états sociaux de détresse » ou à des « dégénérescences
physiologiques » ou même à une corruption comme
cause du nihilisme. Tout cela admet toujours des
interprétations totalement différentes. C'est au
contraire dans une interprétation très déterminée, dans
l'interprétation christiano-morale que se tapit le
nihilisme. C'est l'époque la plus honnête, la plus
compatissante. La détresse, la détresse spirituelle,
physique, intellectuelle est en soi totalement inca-
pable de produire le nihilisme, c.-4-d. le refus
radical d'une valeur, d'un sens, d'un désirable
2. Le déclin du christianisme victime de sa morale
(qui en est indissociable —) qui se tourne contre le
Dieu chrétien (le sens de la véracité, hautement
130 Fragments posthumes
développé par le christianisme, est pris de dégoût
devant la fausseté et la duplicité de toute interpré-
tation chrétienne du monde et de l'histoire. Passage
par contrecoup de « Dieu est la vérité » à la croyance
fanatique « Tout est faux ». Bouddhisme de l'acte...
3. Le scepticisme à l'égard de la morale constitue
l'élément décisif. Le déclin de l'interprétation morale
du monde, qui n'a plus de sanction, après qu'elle ait
tenté de se réfugier dans un au-delà : finit dans le
nihilisme « Rien n'a de sens » (le caractère inutilisable
d'Une interprétation du monde à laquelle on a consa-
cré une force énorme éveille le soupçon que toutes
les interprétations du monde pourraient être
fausses — -j} Trait bouddhique, nostalgie du néant.
(Le bouddhisme indou n'a pas derrière lui une évolu-
tion foncièrement morale, c'est pourquoi il n'y a chez
lui, dans son nihilisme, qu'une morale non surmon-
tée : existence comme punition, existence comme
erreur, combinées, et par conséquent l'erreur comme
punition appréciation de valeur morale) Les
tentatives philosophiques pour dépasser le « Dieu
moral » (Hegel, Panthéisme) Dépassement des idéaux
populaires : le sage. Le saint. Le poète. Antagonisme
de (( vrai » et de « beau » et « bon » --
4. Contre 1' « absurdité » d'une part, contre les jugements
de valeur moraux d'autre part : dans quelle mesure
toute science et toute philosophie dépendait jusqu'ici
de jugements moraux? et ne reçoit-on pas en prime,
dans ce marché, l'hostilité de la science? Ou l'anti-
scientificité? Critique du spinozisme. Les jugements
de valeur chrétiens résiduels, partout dans les sys-
tèmes socialistes et positivistes. Il manque une cri-
tique de la morale chrétienne.
5. Les conséquences nihilistes de l'actuelle science de la
nature (à côté de ses tentatives pour s'échapper dans
l'au-delà). De son activité résulte finalement une auto-
dissolution, une orientation contre soi, une anti-
scientificité. Depuis Copernic, l'homme roule du
centre vers X
6. Les conséquences nihilistes du mode de pensée
politique et économico-politique où tous les principes
relèvent progressivement du cabotinage : le souffle
de médiocrité, de bassesse, d'insincérité etc. Le natio-
nalisme, l'anarchisme etc. Punition. Il manque la
classe et l'homme salvateurs, les justificateurs
2 = W I 8. Automne 1885-automne 1886 2[127-129] 131
7. Les conséquences nihilistes de l'histoire et des « his-
toriens pratiques », c.-à-d. des romantiques. La posi-
tion de l'art : absence absolue d'originalité de sa
position dans le monde moderne. Son assombrisse-
ment. Le prétendu olympianisme de Goethe.
8. L'art et la préparation du nihilisme. Romantisme
(fin des Nibelungen de Wagner)
2 [128]
2 [129]
L'ÉTERNEL RETOUR.
Danses et cortèges de
Zarathoustra.
Première partie : Fêle funèbre de Dieu.
par
Friedrich Nietzsche.
I.
La ville de la peste. On le met en garde, il n'a pas peur et
entre, masqué. Tous les genres de pessimisme défilent. Le
devin interprète chaque passage. La rage de l'Autrement,
la rage du Non, enfin la rage du Néant se succèdent.
A la fin, Zarathoustra donne l'explication: Dieu est
mort, voilà la cause du plus grand danger : quoi? elle
pourrait être aussi la cause du plus grand courage!
II.
L'apparition des amis.
La jouissance ressentie par les êtres du déclin devant
l'être accompli : êtres du départ.
La justification des amis.
Cortèges de fête. L'instant décisif, le grand midi.
Le grand sacrifice de louange et de mort offert au Dieu
mort.
III.
La nouvelle tâche. La mort de Dieu, pour le
Le moyen de cette tâche. devin l'événement le plus
Ses amis le quittent. terrible, est le plus heureux,
le plus riche d'espoir pour
Zarathoustra.
Zarathoustra meurt.
IV. Nous, les faiseurs de voeux
2 [130]
2 [131]
2 132]
[
(36) 2
La supposition que tout se passe si moralement au fond des
choses que la raison humaine l'emporte, est une naïveté,
une supposition de braves gens, l'écho de la foi en la véracité
divine -- Dieu conçu comme créateur des choses. Les
concepts, un héritage issu d'une existence antérieure
Un outil ne peut pas critiquer ses propres aptitudes :
l'intellect ne peut pas déterminer lui-même ses limites,
ni s'il est réussi ou raté.
« Connaître », c'est un rapporter à : par essence, un regres-
136 Fragments posthumes
sus in in finitum 1 . Ce qui fait halte (auprès d'une prétendue
causa prima, d'un absolu etc.), c'est la paresse, la lassi-
tude
Si bien qu'on puisse avoir compris les conditions dans
lesquelles une chose naît, on ne la comprend pas elle-même
pour autant : ceci en confidence pour Messieurs les
Historiens.
2 [133]
(39) 2
Contre la volonté de conciliation et l'humeur pacifique.
Toute tentative de monisme en relève aussi.
2 [134]
2 [135]
3
- Error verilate sirnplicior
2 [136]
2 [137]
Aux logiciens.
Contre les idéalistes.
Contre ceux qui croient à la réalité.
De la musique.
Révélations sur le génie.
D'entre les secrets de la solitude.
Qu'est-ce qui est grec?
2 [138]
Prélude
d'une philosophie de l'avenir.
Par
Friedrich Nietzsche
Nouvelle édition plus compréhensible.
Deuxième volume.
Avec un supplément : poteau indicateur pour les pensées 3.
2 [139]
7
( )
A propos du « causalisme ».
Il saute aux yeux que les choses en soi ne peuvent entre-
tenir entre elles un rapport de cause à effet, pas plus qu'un
phénomène avec un phénomène : d'où il résulte que le
concept « cause et effet » est inutilisable à l'intérieur d'une
philosophie qui croit à des choses en soi et à des phéno-
mènes. Les erreurs de Kant ... En fait, contrôlé par la
psychologie, le concept « cause et effet » ne peut provenir
que d'un mode de pensée qui croit que toujours et partout
138 Fragments posthumes
une volonté agit sur une volonté qui ne croit qu'à du
vivant et au fond qu'A des « âmes » (et non à des choses)
A l'intérieur de la vision mécaniste du monde (qui est
la logique et son application à l'espace et au temps) ce
concept se réduit à la formule mathématique grâce à
laquelle, il faudra toujours le souligner, une chose n'est
jamais comprise, mais seulement notée et cataloguée.
La succession immuable de certains phénomènes ne
démontre pas une « loi », mais un rapport de puissance
entre 2 ou plusieurs forces. Dire « mais justement, ce rap-
port reste égal à lui-même! » ne signifie rien d'autre que :
« une seule et même force ne peut pas être aussi une autre
force ». --- Il ne s'agit pas d'une succession, mais d'une
inclusion, un processus dans lequel les éléments isolés
qui se succèdent ne se déterminent pas comme causes et
effets...
La distinction de l' « agir » et de l' « agissant », de ce qui
arrive et d'un <quelque chose> qui fait arriver, du pro-
cessus et d'un quelque chose qui n'est pas processus mais
qui est durable, substance, chose, corps, âme etc. la
tentative pour concevoir ce qui arrive comme une espèce
de décalage et de changement de place de l' « étant », du
stable : cette vieille mythologie a fixé la croyance dans la
« cause et l'effet », après avoir trouvé une forme fixe dans
les fonctions gi•ammat <icales > du lang <age >.
2 [140]
(30) 1
Contre les deux affirmations : l'identique ne peut être
connu que par l'identique » et : « l'identique ne peut être
connu que par le non-identique » autour desquelles,
dès l'Antiquité, on s'est battu durant des siècles il est
possible d'objecter aujourd'hui, à partir d'un concept
rigoureux et circonspect de la connaissance : on ne peut pas
connaître du tout et ceci, justement, parce que l'identique
ne peut pas connaltre l'identique, pas plus que l'identique
ne peut être connu par le non-identique.
2 [141]
2 [142]
(30)
La « régularité » de la succession n'est qu'une expression
imagée, comme si l'on suivait ici une règle : ce n'est pas un
état de fait. De même la « légalité ». Nous trouvons une
formule pour exprimer un type de succession qui se répète
constamment : par là nous n'avons découvert aucune loi,
encore moins une force qui serait la cause de ces successions
répétées. Le fait que quelque chose se passe toujours de
telle et <telle > façon est ici interprété comme si un être,
par obéissance à une loi ou à un législateur, agissait tou-
jours de telle et telle façon : alors qu'abstraction faite de
la loi, il aurait liberté d'agir autrement. Mais ce « de telle
façon et pas autrement » pourrait précisément provenir de
l'être lui-même, qui ne se comporterait pas de telle et telle
façon seulement en fonction d'une loi, mais parce qu'il
serait constitué de telle et telle façon. Cela signifie simple-
ment : quelque chose ne peut pas être en même temps
quelque chose d'autre, ne peut pas faire tantôt ceci, tantôt
cela, n'est ni libre ni non libre, mais est justement tel et tel.
L'erreur réside dans la projection imaginaire d'un sujet
2 [ 143]
2 [144]
(40)
A supposer même qu'une contre-preuve de la foi chré-
tienne ne puisse être administrée, et eu égard à la terrible
possibilité qu'elle fût pourtant vraie, Pascal tenait pour
habile, au sens le plus élevé du terme, d'être chrétien. On
140 Fragments posthumes
rencontre aujourd'hui, et cela montre à quel point le chris-
tianisme a perdu de son caractère terrible, cette autre
tentative de justification selon laquelle, même s'il s'agissait
d'une erreur, on tirerait toute sa vie de cette erreur énormé-
ment d'avantage et de plaisir : il semble donc qu'il faille
sauvegarder cette foi précisément à cause de ses effets
apaisants, donc, non par crainte d'une possibilité
menaçante, bien plutôt par crainte d'une vie qui perdrait
l'un de ses charmes. Ce tournant hédoniste, la preuve par
le plaisir est un symptôme de décadence, elle remplace la
preuve par la force, par ce qui, dans l'idée chrétienne, est
bouleversant, par la crainte. En fait, dans ce renversement
d'interprétation, le christianisme approche de l'épuisement :
on se contente d'un christianisme opiacé parce qu'on n'a ni
la force de chercher, de combattre, d'oser et de vouloir
être seul, ni la force nécessaire au Pascalisme, à ce mépris
de soi ratiocineur, à la croyance en l'indignité humaine, à
l'angoisse du « Peut-être condamné ». Mais un christia-
nisme qui doit surtout apaiser des nerfs malades n'a absolu-
ment pas besoin de cette terrible solution d'un « Dieu en
croix » : c'est pourquoi, en silence, le bouddhisme progresse
partout en Europe.
2 [145]
2 [146]
2 [147]
(30)
(non comme état
« Fin et moyen » comme interprétation de fait) toutes
« Cause et effet » comme interprétation dans le sens
« Sujet et objet » comme interprétation d'une volonté de
puissance
« Agir et souffrir »
(« Chose en soi et phénomène ») comme interprétation
et dans quelle mesure, peut-être, interprétations néces-
saires? (en tant que « conservatoires »)
2 [148]
2 [i49]
2 [150]
2 [151]
2 [i52]
2 [153]
2 [154]
(36)
Contre le préjugé scientifique.
La fabulation majeure est celle de la connaissance.
On voudrait savoir comment sont constituées les choses
en soi : mais voilà, il n'y a pas de choses en soi! A supposer
même qu'il y ait un en-soi, un absolu, de ce fait il ne pour-
rait justement pas être connu! Quelque chose d'absolu
ne peut pas être connu : sinon il ne serait justement pas
absolu! Connaître, c'est toujours « entrer-en-relation-
conditionnelle-avec-une-chose-quelconque » -; un tel
« connaissant » veut que ce qu'il veut connaître ne le
concerne pas; et que ce même quelque chose ne concerne
absolument personne : ce qui implique contradiction,
premièrement entre le vouloir-connaître et l'exigence
que cela ne puisse le concerner (à quoi bon connaître
alors!) et deuxièmement parce que quelque chose qui ne
concerne personne n'est pas, et ne peut donc pas non plus
être connu. Connaître signifie : « entrer en relation
conditionnelle avec quelque chose » : se sentir conditionné
par quelque chose et entre nous cela consiste donc
en tout état de cause à déterminer, définir, rendre conscientes
des conditions (N o N à sonder des essences, des choses, des
« en-soi »)
144 Fragments posthumes
2 [155]
Profonde répugnance à trouver le repos une fois pour
toutes dans une quelconque vision globale du monde;
charme de la manière de penser opposée; ne pas se laisser
enlever le stimulant du caractère énigmatique'.
2 [156]
2 [157]
2 [158]
Histoire psychologique du concept de « sujet ». Le corps,
la chose, la « totalité » construite par l'oeil suscite la dis-
tinction d'un agir et d'un agissant; l'agissant, la cause
de l'agir, conçu avec une subtilité toujours accrue, a
finalement laissé un reste : le « sujet ».
2 [159]
A-t-on jamais constaté l'existence d'une force? Non,
seulement des effets, traduits en une langue totalement
2 = W 18. Automne 1885-automne 1886 2[155-161] 145
2 [160]
2 [161]
1
(41)
Pour l'avant-propos.
Profondément méfiant envers les dogmes de la théorie
de la connaissance, <j' >aimais regarder tantôt par cette
fenêtre-ci, tantôt par celle-là, je me gardais de <m' >y
installer définitivement, je les tenais pour nuisibles
et en fin de compte : est-il vraisemblable qu'un instrument
puisse critiquer sa propre efficacité?? Ce à quoi je
prêtais attention, c'était plutôt au fait que jamais un
scepticisme ou un dogmatisme appliqué à la théorie de
la connaissance n'est né sans arrière-pensée, au fait
qu'ils ont une valeur de second rang dés que l'on considère
ce qui, fondamentalement, contraignit à prendre cette
position : même la volonté de certitude, si elle n'est pas
la volonté « je veux d'abord vivre » -- Idée fondamen-
tale : aussi bien Kant que Hegel et que Schopenhauer
aussi bien la position sceptique-épochale * que la position
historisante et la position pessimiste sont d'origine morale.
Je n'ai vu personne qui ait risqué une critique des senti-
ments de valeur moraux : et je tournai vite le dos aux maigres
tentatives pour parvenir à une histoire de la naissance
de ces sentiments (comme chez les Darwinistes anglais
et allemands). --- Comment la position de Spinoza s'expli-
que-t-elle, sa négation et son refus des jugements de valeur
moraux? (C'était une conséquence d'une théodicée?)
2 [162]
2 [1s3]
2 [164]
2 [1s5]
(41)
Pour l'Avant-propos d' « Aurore » 2.
Tentative pour réfléchir sur la morale sans tomber sous
son charme, méfiant devant le piège de ses belles attitudes
et de ses oeillades.
Un monde que nous pouvons vénérer, conforme à notre
besoin d'adoration un monde qui se prouve constam-
ment par dérivation du singulier et de l'universel •
telle est la conception chrétienne dont nous sommes
tous issus.
Par suite d'un accroissement de rigueur, de méfiance,
de scientificité (par suite aussi d'un instinct de véracité
qui vise plus haut, et donc encore sous influence chrétienne),
cette interprétation nous est devenue de moins en moins
permise.
La plus subtile échappatoire : le criticisme kantien.
L'intellect se conteste lui-même le droit d'interpréter en
un sens donné aussi bien que de refuser une interprétation
en ce sens. On se contente de combler le vide à l'aide d'un
accroissement de la confiance et de la foi, d'un renoncement
à toute possibilité de prouver sa foi, d'un « idéal » incom-
préhensible et supérieur (Dieu).
L'échappatoire hégélienne, en annexe de Platon, beau
2 = 1V 1 8. Automne 1885-automne 1886 2[ 164-165] 149
morceau de romantisme et de réaction, et en même temps
symptôme du sens historique, d'une nouvelle force:
l'« esprit » lui-même est l'idéal se dévoilant et se réalisant;
dans le « processus », dans le « devenir » se révèle toujours
plus de cet idéal auquel nous croyons , donc l'idéal
se réalise, la foi s'oriente vers l'avenir où elle trouve matière
à adoration, selon sa noble exigence. Bref,
1) Dieu est pour nous inconnaissable et indémontrable
arrière-sens du mouvement de théorie de la connais-
sance
2) Dieu est démontrable, mais comme quelque chose
qui devient , et nous en faisons partie, précisé-
ment par notre aspiration à l'idéal arrière-sens
du mouvement historisant
Mais ce même sens historique, passant dans la nature,
a
On le voit : la critique ne s'est jamais attaquée à l'idéal
lui-même, mais seulement au problème de savoir d'où
vient la contradiction avec lui, pourquoi il n'est pas encore
atteint ou pourquoi il n'est pas démontrable, en particulier
et en général.
L'idéal du sage, dans quelle mesure foncièrement moral
jusqu'ici?
Cela fait la plus grande différence : si c'est par passion,
par besoin qu'on ressent cette détresse comme détresse,
ou si on l'atteint, réduite à un simple problème, par une
pensée de pointe et une certaine force d'imagination
historique...
En dehors du point de vue philosophico-religieux,
nous trouvons le même phénomène : l'utilitarisme (le
socialisme, le démocratisme) critique l'origine des appré-
ciations de valeur morales, mais il y croit, tout comme le
chrétien (naïveté, comme si la morale subsistait lorsque
le Dieu qui sanctionne fait défaut. L'« au-delà », absolu-
ment nécessaire si la foi en la morale doit être sauvegardée.)
Problème fondamental : d'où vient cette toute-puissance
de la /oi? De la foi en la morale?
(— qui se trahit également par le fait que même les
conditions fondamentales de la vie sont interprétées de
travers, au bénéfice de la morale : malgré la connaissance
du monde animal et du monde végétal.
l'« instinct de conservation » : perspective darwinienne
pour la réconciliation des principes altruistes et égoïstes.
(Critique de l'égoïsme, par ex. Larochefoucauld)
Ma tentative po.ir comprendre les jugements moraux
150 Fragments posthumes
comme des symptômes et des langages figurés oû se tra-
hissent des processus de réussite ou d'échec physiologique,
ainsi que la conscience des conditions de survie et de
croissance : un genre d'interprétation de même valeur
que l'astrologie. Des préjugés, soufflés par des instincts
(de race, de communauté, à différents stades, comme
la jeunesse ou le flétrissement etc.)
Application à la morale spécifiquement christiano-
européenne : nos jugements moraux sont des indices de
décadence, d'absence de foi en la vie, une préparation au
pessimisme.
Que signifie le fait que nous ayons introduit, par nos
interprétations, une contradiction dans l'existence?
D'importance décisive : derrière toutes les autres appré-
ciations de valeur, ces appréciations de valeur morales
sont au commandement. A supposer qu'elles s'effondrent,
selon quel critère mesurons-nous désormais? et quelle
valeur ont désormais la connaissance etc. etc. ???
Mon principe majeur : il n'y a pas de phénomènes moraux,
mais seulement une interprétation morale de ces phénomènes.
Celle interprétation elle-même est d'origine extra-morale.
2 [166]
1
Avant-propos pour « le Gai savoir »
Une fête avant une grande entreprise, pour laquelle
on sent enfin la force revenir en soi : de même que Bouddha
s'adonna 10 jours aux plaisirs mond <ains > après avoir
trouvé son principe majeur.
Moquerie générale pour tout le moralisme actuel. Pré-
paration à la position naïve-ironique de Zarathoustra â
l'égard de toutes les choses sacrées (forme naïve de supé-
riorité : le JEU avec le sacré)
(42) 2
Sur la méconnaissance de la « gaieté ». Délivrance momen-
tanée d'une longue tension, pétulance d'un esprit qui se
voue et se prépare à de longues et terribles décisions.
Le « fou » sous la forme du « savoir ».
A ce livre, il ne faut peut-être pas seulement Un avant-
propos : à son « gai savoir », on n'a rien compris du tout.
Même sur le titre - --
A ce « gai savoir », on n'a Rien compris du tout : pas
2 = W 1 8. Automne 1885-automne 1886 2[165-166] 151
même le titre, dont le sens provençal a fait oublier à de
nombreux savants — — --
L'état triomphaliste dont est sorti ce livre est difficile
â comprendre j'étais pourtant moi-même sorti d'un
état
la conscience de l'aversion à l'égard de tout ce qui se trou-
vait derrière moi, lié â une sublime volonté de gratitude,
même envers ce « derrière moi », volonté qui n'était pas fort
éloignée du sentiment d'un droit à une longue vengeance
un bloc de décrépitude grise et glacée, inséré à l'endroit
le plus injuste de la vie, la tyrannie de la douleur surclassée
par la tyrannie de l'orgueil qui refuse les déductions de la
douleur, la solitude comme légitime défense contre un
mépris de l'homme morbide et visionnaire, aimée et goûtée
en plus pour cette raison comme une délivrance, d'autre
part un besoin de ce qu'il y a de plus amer, de plus âpre,
de plus douloureux dans la connaissance
Je mets au rang des choses que je n'oublierai pas le fait
qu'on ne m'a félicité pour aucun livre aussi sincèrement que
pour celui-ci, on me donna même à entendre combien une
telle façon de penser était saine
Rien n'offense si profondément que de laisser paraître ta
grandeur et la sévérité de ses propres exigences envers soi.
Rien n'offense si profondément, rien ne sépare si fonda-
mentalement que de laisser paraître quelque chose de la
sévérité avec laquelle on se traite soi-même : oh, comme
tout le monde se montre prévenant et affectueux envers
nous dés que nous faisons comme tout le monde et nous
« laissons aller » comme tout le monde 1 !
Je mets au rang des choses que je n'oublierai pas le fait
qu'on m'a envoyé pour ce livre du « gai saber » plus de
félicitations que pour tous les autres réunis : on était
soudain réconcilié, on se montrait de nouveau prévenant
et affectueux, tout le monde y voyait une guérison, un
retour, un retour au bercail, un retour dans le rang
parce que c'était un retour à « tout le monde ».
A l'exception de quelques savants dont la vanité achoppa
sur le terme « savoir » * (— ils me donnèrent à entendre
W issenscha f t (« Science »).
152 Fragments posthumes
que tout ceci était peut-être « gai » mais sûrement pas
« savoir » ), tout le monde prit ce livre comme un retour
à « tout le monde » et se montra grâce à lui prévenant
et affectueux envers moi : et je devinai après coup combien
rien n'offense plus profondément et ne plus
fondamentalement envers nous -
2 [1s7]
2 [168]
2 [169]
(34) 2
On pourrait croire que j'ai éludé la question de la certi-
tude. C'est tout le contraire : mais en m'interrogeant sur
le critère de la certitude, j'ai constaté quels étaient les
poids dont on s'était généralement servi jusqu'ici pour
peser et que la question de la certitude constituait
déjà elle-même une question dérivée, une question de
second rang.
2 [170]
(44) 2
Il nous manque la connaissance et la conscience
(Bewufilsein) des retournements qu'a déjà opérés le juge-
ment moral, du nombre exact de fois où, de la façon la plus
radicale, le « Mal » a déjà été rebaptisé « Bien ». Sur l'un de
ces déplacements, j'ai à l'aide de l'opposition
« moralité des moeurs » et
La conscience (Gewissen) aussi a changé de sphère : il
y avait un remords du troupeau
Dans quelle mesure notre conscience, avec son apparente
responsabilité personnelle, est pourtant restée conscience
du troupeau.
2 [171]
(43) 3
Le remords, absent comme tous les ressentiments *
dans le cas d'une grande
4 plénitude de puissance (Mirabeau,
B. Cellini, Cardanus ).
2 [172]
L' « être » nous n'en avons pas d'autre représentation
que « vivre ». Comment quelque chose de mort peut-il
donc « être »?
* En français dans le texte.
154 F ragments posthumes
2 [173]
2 [174]
2 [175]
3
( 45 )
NB. Contre la théorie de l'influence du milieu 4 et des causes
extérieures : la force interne est infiniment supérieure; beau-
coup de choses qui semblent être des influences extérieures
ne sont qu'adaptation interne. Des milieux * exactement
identiques peuvent être interprétés et utilisés de façon dia-
métralement opposée : il n'y a pas de faits. -- Un génie n'est
pas expliqué par ce genre de conditions d'apparition
2 [176]
2 [177]
(46) 4
Idéaux populaires, par ex. saint François d'Assise : néga-
tion de la hiérarchie des âmes, toutes égales devant Dieu.
* En français dans le texte.
2 = W 18. Automne 1885-aulomne 1886 2[173-1791 155
2 [178]
2 [179]
1
Avant-propos
A partir d'une représentation de la vie (qui n'est pas un
vouloir-subsister mais un vouloir-croilre), j'ai donné un
aperçu des instincts fondamentaux de notre mouvement
politique, intellectuel et social en Europe.
2 [180]
2 [181]
(42) 2
L'ironie de Platon, qui permet à une excessive délica-
tesse du sentiment et des sens, à une vulnérabilité du coeur
de se protéger ou du moins de se dissimuler, la nature
olympienne de Goethe, qui faisait des vers sur ses souf-
frances pour s'en délivrer, de même Stendhal, Mérimée
2 = 11 ' I 8. A utomne 1885-automne 1886 2[179-183]
• 157
2 [182]
(10) '
2 [183]
Pour l'Introduction.
Pour tout homme qui a vécu dans la familiarité d'une
grande interrogation comme avec son destin, et dont les
jours et les nuits se sont entièrement consumés en dialo-
gues et en décisions solitaires, les opinions étrangères sur
ce même problème constituent une espèce de tapage auquel
il résiste et ferme ses oreilles : en outre, pour ainsi dire,
quelque chose d'importun, d'illicite et d'effronté de la part
de gens qui, à son idée, n'ont aucun droit sur un tel pro-
blème : parce qu'ils ne l'ont pas trouvé. C'est aux heures
de défiance envers soi, de défiance envers ses propres droits
et passe-droits que l'ermite amoureux car c'est cela, un
philosophe aspire à entendre tout ce qu'on dit et ne dit
pas sur son problème; peut-être devine-t-il alors que le
monde est rempli d'amoureux jaloux semblables à lui
et que tout ce qu'il y a de bruyant, de tapageur, de public,
toute cette façade de politique, de quotidien, de foire et
d' u époque » ne semble avoir été inventée qu'afin que puis-
sent se cacher derrière elle tous ceux qui sont aujourd'hui
158 Fragments posthumes
nos ermites et nos philosophes comme au sein de leur
solitude la plus propre; tous préoccupés d'un seul point,
amoureux d'un seul, jaloux d'un seul précisément de
son problème. « On ne pense aujourd'hui rien d'autre,
là où l'on pense vraiment » -- se dit-il en fin de compte;
« tout tourne précisément autour de cette interrogation;
ce qui me semblait réservé, toute l'époque le poursuit;
il ne se passe au fond rien d'autre ; moi-même mais
qu'importe de moi! »
2 [184]
(47) 2
Je prends tardivement conscience de l'ampleur du
scepticisme moral : à quoi puis-je me reconnaître?
le déterminisme : nous ne sommes pas responsables de
notre être
le phénoménalisme : nous ne savons rien d'une « chose en
soi »
Mon problème : quel dommage l'humanité a-t-elle jus-
qu'ici reçu de sa morale ainsi que de sa moralité? Dommage
causé à l'esprit etc.
mon dégoût du sage en tant que spectateur
mon concept supérieur de « l'artiste »
2 [185]
3
(47)
« Nous, les immoralistes »
critique réelle de l'idéal moral
- de l'homme bon, du saint, du sage
- de la calomnie des qualités prétendument
mauvaises
- quel sens les différentes interprétations morales
possèdent-elles?
- quel est le danger de l'interprétation actuelle-
ment dominante en Europe?
- quel est le critère d'après lequel on peut mesurer?
(« volonté de puissance »)
2 = W 18. Automne 1885 - automne 1886 2[183 -187] 159
2 [186]
2 [187]
2 [188]
2 [189]
2 [190]
(47) 2
que valent nos appréciations de valeur et nos tables de
la loi morales elles-mêmes? Qu'est-ce qui ressort de leur
domination? Pour qui? Par rapport à quoi? Réponse :
pour la vie. Mais qu'est-ce que la vie? Il faut donc ici une
nouvelle version plus précise du concept de « vie » : sur ce
point, ma formule s'énonce : la vie est volonté de puissance.
que signifie en soi l'acte de porter des appréciations de
valeur? renvoie-t-il, en arrière ou en dessous de lui, à un
autre monde métaphysique? Comme Kant le croyait
encore (en homme d'avant le grand mouvement historique)
Bref : où est-ce « apparu »? Ou bien n'est-ce pas « apparu »?
Réponse : l'appréciation de valeur morale est une inter-
prétation, une façon d'interpréter. L'interprétation elle-
même est un symptôme de certains états physiologiques
ainsi que d'un certain niveau intellectuel des jugements
dominants. Qui interprète? nos affections.
2 = W I 8. Automne 1885 - automne 1886 2[188-193] 161
2 [191]
2 [192]
2 [193]
(7) 1
2 [194]
(23) 1
Stendhal : « Combien de lieues ne ferais-je pas a pied, et
à combien de jours de prison ne me soumettrais-je pas pour
entendre Don Juan ou le Matrimonio segreto ; et je ne sais
pour quelle autre chose je ferais cet effort *. » Il avait alors
56 ans 2 .
2 [195]
(41) 3
Hegel : son côté populaire, la théorie de la guerre et des
grands hommes. Le droit est avec le vainqueur : celui-ci
représente le progrès de l'humanité.
Tentative pour prouver la domination de la morale à
partir de l'histoire
Kant : hors de notre portée, invisible, réel, un royaume
de valeurs morales
Hegel : une évolution démontrable, une révélation pro-
gressivement visible du royaume moral
Nous ne voulons nous laisser tromper ni à la manière
kantienne, ni à la manière hégélienne : nous ne croyons
plus, comme eux, à la morale, et n'avons par conséquent
nul besoin de fonder des philosophies pour que la morale
garde ses droits. Ce n'est pas en cela que le criticisme,
comme l'historicisme, a pour nous son charme : à pro-
pos, quer charme a-t-il donc?
2 [196]
2 [197]
2 [198]
2 [199]
2 [200]
2 [201]
2 [202]
2 [203]
2-[204]
2
Cinquième livre : nous, hommes du renversement .
2 [205]
2 [206]
(48) 2
Quel sentiment de liberté on trouve à ressentir comme
nous le ressentons, nous autres esprits libérés, que nous ne
sommes pas empêtrés dans un système de « fins »I De
même, que les concepts de « récompense » et de « punition »
n'ont pas leur siège dans l'essence de l'être! De même, que
la bonne et la mauvaise action ne doivent pas être nom-
2 [207]
Début
Conclusion.
Dans quelle mesure cette autodestruction de la morale
reste un élément de sa propre force. Nous autres Euro-
péens, nous avons dans nos veines le sang d'hommes qui
sont morts pour leur foi; nous avons pris la morale au
tragique et au sérieux, et il n'est rien que, d'une manière
ou d'une autre, nous ne lui ayons sacrifié 1 . D'autre part :
notre subtilité intellectuelle a été atteinte pour l'essentiel
grâce à la vivisection de la conscience. Nous ignorons
encore vers quoi nous sommes poussés depuis que nous
nous sommes ainsi coupés de notre sol ancestral. Mais ce
sol même nous a inculqué la force qui nous pousse mainte-
nant au loin, à l'aventure, <et qui nous > jette dans
l'absence de rivage, dans l'inconnu et dans l'inexploré,
nous n'avons plus le choix, nous devons être des conqué-
rants, puisque nous n'avons plus de pays où nous soyons
chez nous, où nous souhaitions « maintenir une pérennité ».
Non, vous le savez fort bien, mes amis! Le « Oui » secret
est plus fort en vous que tout « Non » et tout « Peut-être »,
ces maux dont vous souffrez et dépérissez avec votre épo-
que; et s'il vous faut prendre la mer, ô migrants, c'est une
foi qui vous y force 2 ...
2 [208]
2 [209]
C'est une question d'honneur pour mes amis de défendre
mon nom, ma réputation et ma sécurité matérielle et de
m'édifier un fort où je sois â l'abri de la méconnaissance
grossière : moi-même, je ne bougerai plus le petit doigt
pour cela
2 [210]
la parfaite sûreté-fonctionnelle des instincts régulateurs
[3 == WI 7b. WI 3b, Mp XVI 2b. MP XVI lb.
D É BUT 1886 -- PRINTEMPS 1886]
3 [1]
3 [2]
Pour
l'histoire naturelle de l'esprit libre.
Pensées et tirets
par
Friedrich Nietzsche.
3 [s]
Dédicace et épode.
« A celui qui rend tout ciel lumineux
Et toutes mers retentissantes »2
3 [4]
s
La volonté de puissance .
Signe annonciateur
d'une philosophie de l'avenir.
Par
Friedrich Nietzsche.
Tiret, en allemand : Gedankenstrich.
172 Fragments posthumes
3 [5]
3 [6]
3 [7]
« Bête jusqu'à la sainteté », dit-on e n Russie.
3 [8]
2
Vers des mers nouvelles .
Par
Friedrich Nietzsche.
3 [9]
3 [10]
Nos vertus'.
Par
Friedrich Nietzsche.
3 [11]
3 [12]
3
Tiré de l'histoire naturelle de l'esprit libre .
La philosophie de l'avenir.
Travailleurs scientifiques.
Artistes.
Sur la philosophie de l'homme supérieur.
Sur l'assombrissement de l'Europe 4 .
3 [13]
3 [14]
Le monde n'a pas la valeur que nous lui avions prêtée :
on l'a percé à jour. Le pessimiste nous donne même à
entendre que le reste de valeur qu'il conserve pour nous
tient justement au fait que nous puissions le percer à jour
et qu'il n'ait pas la valeur que nous lui avions prêtée.
Le monde serait en ce sens un moyen de se dégoûter du
monde, de se « détacher soi-même du monde » le mieux
possible ; absurdité que l'on commence enfin à comprendre
après de désastreux errements, comédie des malentendus
plutôt languissante qui se perd honteusement dans le
néant
3 [15]
Il reste suffisamment à objecter contre les longues mala-
dies ; je ne voudrais surtout pas concéder aux moralistes
chrétiens qu'elles améliorent 1' <homme >, particulière-
ment lorsqu'il est en proie aux douleurs chroniques que
l'on <considère > avec un total sang-froid ni cette
façon orientale, muette et sourde de s'éteindre et de s'aban-
donner, ni cette hypertension de la force de volonté et du
courage qui la fierté et le sarcasme à un ennemi
tel que la douleur
Au milieu d'un long tourment, brûlé en quelque sorte
sur du bois vert et sans le bienfait que la fièvre, les évanouis-
sements
3 [16]
Manzoni
Stifter
(G. Keller)
3 ^ W I 7b. W I 3b. Mp XV 1 2b. 3[ 13-Y9] 175
3 [17]
« Maledetto colui
the contrista un spirlo immortal ! »
Manzoni (2e acte du Conte di Carmagnola ) 1
3 [18 .1
gangasrotogati, « s'écoulant, comme le
fleuve du Gange » presto
kurmagati, « à l'allure de la tortue » lento
2
mandeikagati, « à l'allure de la grenouille staccato
3 [19]
4 [2]
4 [3]
4 [4]
4 [5]
4 [6]
4 [7]
4 [s]
Que la simple force d'une foi ne suffise absolument pas à
en garantir la vérité et soit même capable de transformer
lentement, lentement la chose la plus raisonnable en une
grosse sottise : c'est proprement notre conviction d'Euro-
péens, s'il est un point sur lequel nous avons acquis
expérience parfois cuisante astuce et sagesse, au prix
de multiples dommages à ce qu'il semble, c'est bien celui-
là... « La foi rend heureux » : bon! Au moins de temps à
autre! Mais la foi rend stupide de toute façon, même dans
le cas particulièrement rare où elle ne l'est pas, où elle est
au départ une foi intelligente. Toute foi prolongée devient
finalement stupide, ce qui signifie, exprimé avec la clarté
propre à nos modernes psychologues, que ses raisons
sombrent « dans l'inconscient », qu'elles y disparaissent,
désormais elle ne repose plus sur des raisons mais sur des
affections (c'est-à-dire que, dans le cas où elle a besoin
d'aide, elle envoie les affections combattre pour elle et non
plus les raisons). En admettant qu'on puisse déterminer
quelle est la foi la plus fiable, la plus ancienne, la moins
discutée, la plus honnête qui soit parmi les hommes, on
pourrait conjecturer avec un haut degré de vraisemblance
qu'elle est en même temps la plus profonde, la plus bête,
la plus « inconsciente », la mieux retranchée contre les
raisons, la plus anciennement abandonnée par les raisons.
Accordé ; mais quelle est cette foi? Petits curieux!
Mais puisque je me suis laissé aller à proposer des devi-
nettes, je vais faire preuve d'humanité et donner vite la
réponse et la solution, on ne les trouvera pas aisément
avant moi.
L'homme est avant tout un animal qui porte des juge-
ments; mais dans le jugement se cache notre foi la plus
ancienne et la plus permanente, à la base de tout juge-
ment il y a un tenir-pour-vrai et une affirmation, une certi-
tude que telle chose est ainsi et pas autrement, qu'ici
l'homme a réellement « reconnu » : qu'est-ce donc qui, en
tout jugement, est inconsciemment cru vrai? -- Que nous
ayons le droit de distinguer entre sujet et prédicat, entre
cause et effet -- c'est notre foi la plus forte; et même, au
184 Fragments posthumes
fond, la croyance à la cause et à l'effet, à la condilio et au
conditionalum 1 n'est elle-même qu'un cas particulier de
la foi initiale et universelle, de notre foi originelle dans le
sujet et le prédicat (très précisément comme affirmation
que tout effet est une activité et que tout conditionné
suppose un conditionnant, toute activité un acteur, bref,
un sujet) Cette foi dans le concept de sujet et de prédicat
ne serait-elle pas <une grosse sottise? >
4 [9]
Postlude.
Mais ici vous m'interrompez, ô libres esprits. « Assez!
Assez! vous entends-je crier en riant, nous ne pouvons
plus le supporter! Haro sur ce sinistre tentateur, ce tru-
blion de la conscience ! Veux-tu donc ternir notre réputation
dans le monde entier? Souiller notre bonne renommée?
Nous affubler de surnoms qui rongent plus profond que la
peau? -- Et pourquoi produire au grand jour clair ces
sombres fantômes, ces borborygmes moraux, toute cette
musique tragique, noire comme le corbeau 2 ! Même si tu
dis des vérités : sur de telles vérités, il n'est pied qui puisse
danser, elles sont donc loin d'être 3 des vérités pour nous 1
Ecce nostrum veritalis sigillum 1 Et voici du gazon et un
sol élastique : y a-t-il mieux à faire que chasser vite tes
chimères et, après ta nuit, nous en donner à coeur jour?
Il serait enfin temps qu'un arc-en-ciel se déployât de nou-
veau sur ce pays et que quelqu'un nous donnât chansons
douces-folles à entendre et lait à boire : nous avons tous
à nouveau soif d'une façon de penser pieuse, cordialement
niaise et, laiteuse 4 . » --- Mes amis, je le vois, vous perdez...
ma patience, et qui vous dit que ce n'est pas justement
cela que j'attends depuis longtemps? Mais je suis votre
serviteur; et j'ai aussi ce qu'il vous faut. Ne voyez-vous
pas bondir là-bas mes troupeaux, tous les agneaux et les
béliers de ma pensée, doux, soleilleux, sans bourrasque?
Et voici déjà pour vous un plein seau de lait; dès que vous
aurez bu car vous avez tous soif de vertu, je le vois
il ne manquera pas de chansons telles que vous les souhai-
tez! Et d'abord un air à danser, pour les jambes et les
coeurs les plus allègres : et en vérité, qui les chante fait
honneur à un homme qui mérite cet honneur, à l'un des
plus libres d'entre les esprits libres, qui rend à nouveau
tout ciel lumineux et toutes mers retentissantes 6.
[5 = N VII 3. ÉTÉ 1886 - AUTOMNE 1887]
5 [11
5 [2]
Aurore
et
gai savoir
5 [3]
5 [4]
5 [5]
5 [6]
5 [7]
wagnériens à cornes
5 = N VII 3. Été 1886- automne 1887 5[4-10] 189
5 [8]
5 [9]
Exotérique ésotérique
1, tout est volonté contre volonté
2 Il n'y a pas du tout de volonté
1 Causalisme
2 Il n'y a rien de tel que la cause et l'effet.
1.
Toute causalité renvoie psychologiquement à la foi
en des intentions :
L'effet d'une intention est justement indémontrable.
( Causa e f ciens est une tautologie avec finalis) considéré
psychologiquement
â [10]
5 [12]
Question fondamentale : est-ce que la vision en pers-
pective fait partie de l' É T R E (wE5EN)? N'est-elle pas une
simple forme de considération, une relation entre des
êtres (Wesen) différents? Les diverses forces sont-elles
en relation, de telle sorte que cette relation soit liée à
une optique perceptive? Ce serait possible si tout être
(Sein) était ESSENTIELLEMENT quelque chose de percevant.
5 [13]
Que la similitude de forme indique une parenté, une
origine provenant d'une forme commune, que la simi-
litude du son des mots indique une parenté des mots :
ce type de déduction est soufflé par l'inertia : comme s'il
était plus vraisemblable qu'une forme soit apparue une
fois plutôt que plusieurs...
La succession de phénomènes, si précisément qu'elle
soit décrite, ne peut rendre l'essence du processus — car la
5-= N VII 3. Été 1886-automne 1887 5[10-15] 191
constance du medium déformant (notre « je » —) est au
minimum là. C'est comme lorsque les rimes disparaissent
dans une traduction d'une langue à l'autre : mais que la
croyance s'éveille que c'était un poème rimé dans la langue
originale. Ainsi la conséquence, la succession suscite la
croyance en une sorte de « corrélation » par-delà le change-
ment que nous percevons.
5 [14]
5 [15]
5 [16]
5 [17j
5 [is]
5 [19]
v [20]
5 [z1]
5 [22]
Solution fondamentale
nous croyons à la raison : mais celle-ci est la philosophie
des concepts en grisaille, la langue est construite sur les
préjugés les plus naïfs
5 = N VII 3. Été 1886- automne 1887 5[19-25] 195
5 [23]
volontairement à l'écart, détendu, affable envers choses
et hasards, reconnaissant pour les plus petits rayons de
soleil de santé, acceptant la douleur comme une règle,
comme une condition, comme quelque chose que nous
avons voulu, et l'utilisant, la questionnant pour nos
desseins avec une contrainte pleine de ruse
5 [24]
5 [25]
non seulement la morale comme préjugé, mais vivant
par-dessus le type le plus vénéré de la moralité antérieure
rester avec une omniscience ironique au-dessus de
toute la vita contemplativa antérieure
Rester attaché avec une très mauvaise volonté à l'un
des anciens angles-de-vision-du-monde, malgré la pro-
fondeur de la curiosité qui m'a déjà entraîné un jour
dans chacun d'eux : avec une volonté d'autant plus rigou-
reuse de vivre moi-même un jour l'état dont <a surgi>
chacune de ces perspectives-prises-d'un-angle-du-monde
que l'on nomme philosophie ou e religion »
196 Fragmen t s pos t humes
5 [26]
5 [27]
Pour comprendre ce livre, il faut m'accorder quelques
présupposés
5 [28]
5 [29]
5 [30]
5 [31]
5 [32 ]
5 [33]
5 [341
5 [35]
5 [36]
5 [37]
5 [3g]
5 [39]
5 [40]
LA GÉNÉALOGIE
DE LA MORALE 2 .
Première dissertation
de
Friedrich Nietzsche.
2. l'idéal ascétique
3. responsabilité.
4. « moi » et « lui ».
200 Fragments posthumes
5 [41]
5 [42]
5 [43]
5 [44]
5 [45]
5 [46]
Nous autres Hyperboréens.
5 [47]
Comment pourraient-ils constituer notre véritable audi-
toire, ces moralistes qui, avec une honteuse importunité,
n'écoutent que ce qui s'en dégage pour eux et, en général,
que pour savoir s'il s'en dégage quelque chose pour eux.
Pour l'avant-propos.
« Qu'est-ce que j'y gagne?
Comment est-ce que je m'en tire?
« Qu'est-ce que j'en tire? »
les esprits illicites.
5 [48]
NB « Jeunes gens allemands » et autres bêtes à cornes
rêveuses coeurs de lait à la moiteur d'étable 3
5 [49]
5 [50]
5 [51]
Hiérarchie
Représailles.
Vérité et véracité.
Droit, punition etc.
Compassion
5 [52]
5 [53]
5 [54J
5 [55]
5 [5s]
5 [57]
5 [58]
5 [59]
5 [60]
5 [61]
5 [62]
5 [63]
5 [64]
5 [65]
5 [66]
5 [67]
5 [68]
5 [69]
5 [7o]
1. Philosophie de l'histoire.
2. Psychologie.
3. Culture des Grecs.
4. Philosophie de la morale.
5. Histoire de la philosophie grecque.
5 [71]
Le nihilisme européen.
Lenzer Heide le 10 juin 1887
1•
Quels avantages offrait l'hypothèse morale chrétienne?
1) elle conférait à l'homme une valeur absolue, à l'opposé
de sa petitesse et de sa nature fortuite dans le fleuve
du devenir et du disparaître
2) elle servait aux avocats de Dieu, dans la mesure où
elle laissait au monde, malgré la souffrance et le mal,
212 Fragments posthumes
un caractère de perfection, y compris cette « liberté »
- -- le mal paraissait plein de sens.
3) elle pose chez l'homme un savoir portant sur des
valeurs absolues et lui procure ainsi une connaissance
adéquate de ce qui, précisément, est le plus important
elle empêchait que l'homme ne se méprisât en tant
qu'homme, qu'il prit parti contre la vie, qu'il désespérât
de la connaissance : elle était un moyen de survie; au
total : la morale était le grand remède contre le nihilisme
pratique et théorique.
2.
Mais parmi les forces que la morale a développées, il y
avait la véracité : celle-ci se retourne finalement contre la
morale, découvre sa téléologie, sa perspective intéressée
et voici que la prise en vue de cette tendance invétérée au
mensonge dont on désespère de se débarrasser agit jus-
tement comme un stimulant. Au nihilisme. Nous cons-
tatons maintenant la présence en nous de besoins implantés
par la longue interprétation morale, et qui nous apparais-
sent maintenant comme besoins du non-vrai : d'autre
part c'est à eux que semble reliée la valeur grâce à laquelle
nous supportons de vivre. Cet antagonisme ne pas
estimer ce que nous connaissons, ne plus avoir le droit
d'estimer les mensonges dont nous aimerions nous bercer
déclenche un processus de dissolution.
3.
En fait, nous n'avons plus tellement besoin d'un remède
contre le premier nihilisme : la vie n'est plus à ce point
incertaine, hasardeuse, absurde dans notre Europe. Une
si monstrueuse surestimation de la valeur de l'homme,
de la valeur du mal etc. n'est plus tellement nécessaire
aujourd'hui, nous supportons une réduction considérable
de cette valeur, nous pouvons admettre beaucoup d'absur-
dité et de hasard : la puissance atteinte par l'homme permet
aujourd'hui une dépréciation des moyens disciplinaires
dont l'interprétation morale était le plus fort. « Dieu u
est une hypothèse bien trop extrême.
4.
Mais les positions extrêmes ne sont pas relayées par des
positions modérées mais par de nouvelles positions
extrêmes, mais inverses. C'est ainsi qu'on croit à l'immo-
ralité absolue de la nature, à l'absence de but et de sens
5 = 2V VII 3. Été 1886-automne 1887 5[71 ] 213
des affections psychologiquement nécessaires, dès que la
croyance en Dieu et en un ordre essentiellement moral
n'est plus tenable. Le nihilisme apparaît aujourd'hui
non parce que le dégoût de l'existence serait plus grand
qu'autrefois, mais parce qu'on est devenu méfiant en géné-
ral à l'égard d'un « sens » du mal, ou même de l'existence.
Une interprétation s'est effondrée ; mais du fait qu'elle
passait pour « l' Interprétation », il semble qu'il n'y ait
plus aucun sens dans l'existence, que tout soit en vain.
J•
Que cet « en vain ! » soit la caractéristique de notre nihi-
lisme actuel, cela reste à démontrer. La méfiance envers
nos appréciations de valeur antérieures culmine dans la
question :. « toutes les " valeurs " ne sont-elles pas des
appeaux grâce auxquels la comédie traîne en longueur
sans pour autant se rapprocher d'un dénouement? »
La durée, avec un « en vain », sans but ni fin, constitue
la pensée la plus paralysante, surtout si l'on comprend
que l'on est floué, et pourtant impuissant à ne pas se
laisser flouer.
6.
Pensons cette pensée sous sa plus terrible forme : l'exis-
tence, telle qu'elle est, privée de sens et de but mais se répé-
tant inéluctablement, sans final dans le néant : « l'éternel
retour ».
C'est la forme la plus extrême du nihilisme : le néant
(1' « absence de sens ») éternel!
Forme européenne du bouddhisme : l'énergie du savoir
et de la force impose une telle croyance. C'est la plus
scientifique de toutes les hypothèses possibles. Nous nions
les buts derniers : si l'existence en avait un, il devrait
être atteint.
7.
Dès lors on comprend que l'on aspire ici au contraire du
panthéisme : car « Tout parfait, divin, éternel » impose
aussi une croyance au « retour éternel ». Question : cette
position panthéiste du « oui » à toutes choses est-elle rendue
impossible en même temps que la morale? Au fond, seul
le Dieu moral est dépassé. Y a-t-il un sens à se représenter
un Dieu « par-delà bien et mal »? Un panthéisme serait-il
possible en ce sens? Excluons-nous du processus la repré-
sentation du but tout en disant malgré tout « oui » au pro-
214 Fragments posthumes
cessus? Ce serait le cas si à l'intérieur de ce processus
et à chacun de ses moments, quelque chose était atteint
et toujours la même chose
Spinoza était parvenu à une telle position de « oui »,
dans la mesure où chaque moment possède une nécessité
logique : et, avec son instinct fondamentalement logicien,
il triomphait d'un monde ainsi conformé.
8.
Mais son cas n'est qu'un cas isolé. fout trait de caractère
fondamental qui se retrouve au fond de tout événement,
qui s'exprime dans tout événement, devrait, s'il est ressenti
par un individu comme son propre trait de caractère
fondamental, entraîner cet individu à approuver triom-
phalement chaque instant de l'existence universelle. Il
s'agirait seulement de ressentir chez soi ce trait de carac-
tère fondamental comme bon, précieux, générateur de
plaisir.
9.
Mais la morale a protégé la vie du désespoir et du saut
dans le néant, chez les hommes et les classes sociales que
violentaient et opprimaient d'autres hommes : car c'est
l'impuissance envers les hommes, non l'impuissance envers
la nature qui engendre l'amertume la plus désespérée
envers l'existence. La morale a traité les tenants de la
puissance, les tenants de la violence, les « maîtres » en géné-
ral comme les ennemis contre lesquels l' <homme >
ordinaire doit être protégé, c.-à-d. d'abord encouragé
et conforté. La morale a par conséquent enseigné à hair
et à mépriser le plus profondément ce qui constitue le
trait de caractère fondamental des dominateurs : leur
volonté de puissance. Éliminer, nier, mettre en pièces
cette morale : ce serait conférer à l'instinct le plus haï
une qualité affective et une valorisation inverses. Si l'homme
souffrant, l'opprimé perdait la conviction qu'il a droit
de mépriser la volonté de puissance, il serait acculé au
stade d'un désespoir sans recours. Ce serait le cas si ce
trait était essentiel à la vie, s'il se révélait que même
dans cette « volonté de morale » il n'y a que « volonté de
puissance » déguisée, que même cette haine et ce mépris
restent une volonté de puissance. L'opprimé se rendrait
compte qu'il est sur le même plan que l'oppresseur et qu'il
n'a sur lui aucun privilège, aucune préséance.
5 = Ar VII 3. Été 1886- automne 1887 5[71] 215
10 •
C'est plutôt l'inverse ! Il n'est rien dans la vie qui ait
de la valeur, sinon le degré de puissance à supposer
justement que la vie elle-même soit volonté de puissance.
La morale protégeait du nihilisme les ratés en conférant
à chacun une valeur infinie, une valeur métaphysique,
et en l'insérant dans un ordre qui ne concorde pas avec
celui de la puissance et de la hiérarchie mondaines : elle
enseignait le dévouement, l'humilité etc. A supposer
que la foi dans cette morale soit anéantie, les ratés per-
draient leur consolation et seraient anéantis.
11.
Cet anéantissement se présente comme un auto-
anéantissement, comme un choix instinctif de ce qui
doit détruire. Symptômes de cette autodestruction des
ratés : l'autovivisection, l'empoisonnement, l'ivresse, le
romantisme, surtout la nécessité instinctive de commettre
des actions par lesquelles on fait des puissants ses ennemis
mortels (formant soi-même, pour ainsi dire, ses propres
bourreaux), la volonté de destruction comme volonté d'un
instinct plus profond encore, l'instinct d'autodestruction,
la volonté de néant.
12.
Le nihilisme comme symptôme de ce que les ratés n'ont
plus de consolation : de ce qu'ils détruisent pour être
détruits, de ce que, détachés de la morale, ils n'ont plus
de raison de « se sacrifier » de ce qu'ils se placent sur
le terrain du principe contraire et veulent aussi de leur
côté la puissance, en obligeant les puissants à être leurs
bourreaux. C'est la forme européenne du bouddhisme,
le faire-négatif, une fois que toute existence a perdu son
« sens ».
13.
Ce n'est pas que la « détresse » se soit accrue : au
contraire! « Dieu, morale, sacrifice » étaient des remèdes,
à des niveaux terriblement bas de dénuement : le nihilisme
actif apparaît dans des circonstances relativement bien plus
favorables. Le simple fait que la morale soit ressentie
comme dépassée présuppose un degré appréciable de
culture intellectuelle ; et celle-ci, à son tour, un relatif
216 Fragments posthumes
bien-être. Une certaine lassitude intellectuelle, que le
long combat entre opinions philosophiques a conduite
à un scepticisme désespéré envers la philosophie, carac-
térise également l'état de ces nihilistes, qui n'a rien d'infé-
rieur. Pensons à la situation où apparut Bouddha. La doc-
trine de l'éternel retour aurait des présupposés savants
(comme en avait la doctrine de Bouddha, par ex. le concept
de causalité etc.).
14.
Que signifie aujourd'hui « raté »? C'est avant tout physio-
logique: plus politique. Le type d'homme le moins sain
en Europe (dans toutes les classes) constitue le terrain de
ce nihilisme : il ressentira la croyance à l'éternel retour
comme une malédiction, telle que, une fois qu'elle vous
a frappé, on ne recule plus devant aucune action : ne pas
s'éteindre passivement, mais faire s'éteindre ce qui est
à ce point privé de sens et de but : bien qu'il n'y ait que
crispation et fureur aveugle dans la révélation que tout
existait depuis des éternités y compris ce moment de
nihilisme et de plaisir à détruire. --- La VALEUR d'une
telle crise est qu'elle purifie, qu'elle concentre les éléments
apparentés et les fait se corrompre mutuellement, qu'elle
assigne aux hommes de mentalités opposées des tâches
communes mettant aussi en lumière les plus faibles, les
plus incertains d'entre eux, si bien qu'elle donne ainsi le
branle, du point de vue de la santé, â une hiérarchie des
forces : reconnaissant comme tels ceux qui commandent,
comme tels ceux qui obéissent. Naturellement, en dehors
de toutes les structures sociales existantes.
15.
Quels hommes se révéleront alors comme les plus forts?
Les plus mesurés, ceux qui n'ont pas besoin d'articles de
foi extrêmes, ceux qui non seulement admettent une
bonne dose de hasard et d'absurdité mais la chérissent,
ceux qui peuvent penser l'homme avec une considérable
réduction de sa valeur, sans devenir pour autant petits
ou faibles : les plus riches de santé, qui sont de taille à
affronter la plupart des malheurs et donc ne redoutent
pas tellement les malheurs des hommes qui sont sûrs
de leur puissance et qui représentent avec une fierté
consciente la force atteinte par l'homme.
5 N VII 3. Été 1886-automne 1887 5[ 71-75] 217
16.
Comment un tel homme penserait-il à l'éternel retour?
5 [72]
Auto-abolition de la morale
la loyauté
justice, punition, compassion etc.
5 [73]
5 [74]
Pour la
3
Généalogie de la morale
Écrit de combat
Par
Friedrich Nietzsche.
Insouciants, moqueurs, violents
tels nous veut la sagesse : c'est
une femme, elle n'aime jamais que
les guerriers.
Ainsi parlait Zarathoustra.
Leipzig,
Éditions C.G. Naumann.
5 [75]
La volonté de puissance 4 .
Tentative de renversement de toutes les valeurs.
1.
De la valeur de la vérité.
218 Fragments posthumes
2.
Ce qui en résulte.
3.
Pour l'histoire du nihilisme européen.
4.
L'éternel retour.
5 [76]
5 [77]
Maximes et fruits i.
par
Friedrich Nietzsche.
5 [78]
Maximes
2
d'un immoraliste .
5 [79]
5 [8U ]
8.
Finalement, il faut que je signale au moins d'Un mot
un état de fait monstrueux et encore totalement inaperçu
qui ne s'est instauré que lentement, lentement : il n'y
avait jusqu'ici pas de problèmes plus fondamentaux que
les problèmes moraux, c'est dans leur force motrice qu'ont
pris origine toutes les grandes conceptions dans le domaine
des valeurs antérieures par exemple tout ce qu'on
appelle communément « philosophie »; et ceci jusqu'aux
derniers présupposés de la théorie de la connaissance).
Mais il y a des problèmes encore plus fondamentaux que
les problèmes moraux : on ne les prend en vue que lorsqu'on
a le préjugé moral derrière soi...
5 [s1]
a) Le grand style
Le nu: purification psychologique du goût
b) les hommes synthétiques ne peuvent pas provenir
du monde des « fourmis D.
Notre société - représente seulement la culture
l' « homme cultivé » fait défaut.
c) le suicide Har <ak >iri du Japon
220 Fragments posthumes
d) reconquérir le droit aux affections pour l' homme de
connaissance
5 [s2]
5 [83]
5 [84]
5 [85]
1
Chaque année 5 chapitres
5 [86]
5 [87]
5 [88]
5 [s9]
5 [90]
5 [91 ]
.
5 [92]
De l'homme supérieur.
ou
la tentation de Zarathoustra.
par
Friedrich Nietzsche.
5 [93]
Dionysos philosophos.
Une
1
Satura Menippea
Par
Friedrich Nietzsche.
5 [y4]
5 [95]
5 [96]
5 [97]
1. Le nihilisme européen.
2. La morale antérieure en tant qu'hostile à la vie.
3. La morale antérieure elle-même « immorale »
5 [98]
1.
Celui qui réfléchit aux moyens de porter le type homme
à sa splendeur et à sa puissance les plus grandes comprendra
tout de suite qu'il doit se placer en dehors de la morale :
car la morale était pour l'essentiel en quête du contraire,
tendait à bloquer ou anéantir cette splendide évolution
lorsqu'elle était en marche. Car de fait, une telle évolu-
tion consume à son service une si monstrueuse quan-
tité d'hommes qu'un mouvement inverse n'est que trop
naturel : les existences plus faibles, plus tendres, plus
médiocres ont besoin de prendre parti contre cette gloire
de vie et de force, et pour cela elles doivent revêtir à leurs
propres yeux une nouvelle valeur grâce à laquelle elles
puissent condamner et si possible détruire la vie dans
5= N VII 3. cté 1886-automne 1887 5[95-99] 225
cette suprême plénitude. Une tendance hostile à la vie
est donc propre à la morale, dans la mesure où elle veut
subjuguer les types de vie les plus forts 1 .
5 [99]
NB
1) Tentative pour rapprocher, par élimination du
« moi », l'esthétique de l'éthique non égoïste (comme prépa-
ration à cette dernière)
2) Tentative pour la rapprocher de la connaissance
(pur sujet, « pur miroir de l'objet »)
-- argument contre : l'objet, dans la contemplation
esthétique, est totalement falsifié
« pur sujet de la connaissance, sans volonté, sans dou-
leur, sans temporalité »
- absolument pas « connaissance »!
- la volonté qui souligne (en éliminant le reste) tout
ce qui, dans un objet, lui sert à atteindre le contentement
de soi, l'harmonie avec soi
l'invention et l'arrangement d'un monde où nous nous
approuvons nous-mêmes dans nos exigences les plus
intimes
Couleurs, sons, formes, mouvements, activité de la
mémoire inconsciente, où sont sauvegardées les propriétés
utiles de ces qualités (ou associations)
un arrangement des choses intéressé au plus haut degré,
intéressé sans aucun scrupule
une falsification essentielle, une exclusion, précisément,
du sens objectif qui se borne à constater et à connaître.
la simplification, la mise en évidence du typique
jouissance de domination par projection d'un sens
l'élimination par la pensée de tous les facteurs nuisibles
et hostiles de ce que l'on contemple (par ex. un paysage, un
orage)
le spectateur esthétique accepte une domination et adopte
l'attitude inverse de son attitude habituelle envers ce qui
vient de l'extérieur - il suspend sa méfiance, aucune
défensive un état d'exception: la réceptivité confiante,
emplie de respect et d'amour
la volonté
? intérêt pour les causes et le typique (dominant)
226 Fragments posthumes
5 [100]
5 [1011
5 [102]
5 [103]
5 [104]
5 [105]
5 [106]
5 [107]
5 [108]
5 [109]
5 [110]
6 [2]
Par-delà bon et mauvais 2 ?
un
écrit philosophique de combat.
(Pour compléter et éclairer le dernier livre publié, « Par-delà
bien et mal »)
Par
Friedrich Nietzsche.
6 [3]
Sept Préfaces 3
Avec un appendice :
Chansons du Prince Hors-la -loi.
« J'habite ma propre maison,
Je n'ai jamais imité personne en rien,
Et — je me ris de tout maître
Qui n'a su rire de lui-même 4 »
232 Fragments posthumes
Par
Friedrich Nietzsche.
Leipzig.
Editions E. W. Fritzsch.
6 [4 ]
Préfaces et postfaces 1 .
Mes écrits ne parlent que des expériences que j'ai vécues
personnellement heureusement, j'ai beaucoup vécu •
j'y suis corps et âme à quoi bon le dissimuler?, ego
ipsissimus et, dans les meilleurs moments, ego ipsissi-
mum 2 Mais chez moi il a toujours fallu quelques années de
.
6 [5]
Barbey d'Aurevilly
Œuvres et hommes
Sensations d'histoire * * * * * 2
6 [6]
Questions de principe.
Aux logiciens.
Pour la théorie du sentiment de puissance.
Contre les idéalistes.
• Titre donné en français dans le texte.
* * Nom de l'auteur souligné par Nietzsche.
* * * En français dans le texte.
* * * * Traduction du titre donné en allemand par Nietzsche. Le nom de
l'auteur est souligné par lui.
*• * * * En français dans le texte; Nietzsche a souligné lui-même CEuvres
et hommes.
6 . Mp XIV Y. Mp XVII 3a. 6[4-9] 235
Contre ceux qui croient à la réalité.
Révélations sur le génie
L'élément équivoque des vertus.
En l'honneur du mal.
Le problème de l'artiste.
Polilika.
Femme et amour.
Peuples et « peuple ».
Musique et musiciens (Musikanlen)
Pour la critique des religions.
Les hommes intellectuels.
Solitude 1 .
6 [7]
6 [8]
6 [9]
s [10]
6 [ 12]
6 [13]
s [i4]
6[15]
6 [is]
6 [ 171
s [19]
Phénoméno-manie.
6 [20]
6 [2i]
6 [22]
6 [23]
Il m'importe peu que l'un dise aujourd'hui avec l'humilité
du scepticisme philosophique ou avec l'abandon religieux :
« l'essence des choses m'est inconnue », tandis que l'autre,
plus courageux mais insuffisamment entraîné à la critique et
240 Fragments posthumes
à la méfiance, affirme : « l'essence des choses m'est pour une
bonne part inconnue ». Je maintiens contre eux deux que,
de toute façon, ils prétendent ou s'imaginent encore en
savoir beaucoup trop, comme si, en effet, la distinction
qu'ils présupposent tous deux était fondée, cette distinc-
tion d'une 0 essence des choses » et d'un monde phénoménal.
Pour qu'une telle distinction soit possible, il faudrait
s'i maginer notre intellect pourvu d'un caractère contra-
dictoire : d'une part adapté à la vue en perspective néces-
saire pour que des êtres de notre sorte puissent justement
se maintenir en vie, et d'autre part dotés simultanément
d'une aptitude à concevoir précisément comme telle cette
vision en perspective, à concevoir le phénomène comme
phénomène. Ce qui veut dire : pourvus d'une foi en la
« réalité », comme si celle-ci était unique, et par surcroît
d'une capacité à percer cette foi à jour, à voir qu'elle n'est
qu'une limitation due à la perspective, par rapport à une
vraie réalité. Mais une foi ainsi percée à jour n'est plus une
foi, elle disparaît en tant que foi. Bref, nous n'avons pas
le droit de nous représenter notre intellect d'une façon
si contradictoire qu'il serait simultanément une foi et une
connaissance de cette foi en tant que foi. Éliminons la
« chose en soi » et, du même coup, l'un des concepts les plus
obscurs, celui de « phénomène »! Toute cette opposition,
comme celle, plus ancienne, de la « matière et de l'esprit »,
s'est révélée inutilisable
6 [24]
Désormais, une fatalité pèse sur l'Europe : que ses fils les
plus forts, précisément, atteignent tard et rarement leur
printemps , que la plupart périssent jeunes, dégoûtés,
hivernaux, assombris, justement parce qu'ils ont bu, qu'ils
ont vidé avec toute la passion de leur force la coupe de
désillusion qu'est aujourd'hui la coupe de la connais-
sance : et ce ne serait pas les plus forts s'ils n'avaient été
aussi les plus déçus ! Car telle est l'épreuve de leur force :
ce n'est qu'en échappant à toute cette maladie de l'époque
qu'ils doivent parvenir à leur santé. Le printemps tardif
est leur signe distinctif ; ajoutons-y aussi : la folie tardive,
la bouffonnerie tardive, l'espièglerie tardive ! Notre jeu-
nesse arrive lorsqu'on ne l'attend plus, nous décalons les
saisons de la vie. Puisse nous comprendre en cela celui qui,
comme nous, s'est surtout étonné de soi. Car tel est aujour-
6 = Mp X I V 1. Mp X V II 3a. 6[23-25] 241
d'hui le danger : tout ce que nous avons aimé lorsque nous
étions jeunes nous a trompé; notre ultime amour celui
qui suscite cet aveu notre amour de la vérité prenons
garde que même cet amour ne nous trompe encore!
6 [25]
Critique du pessimisme antérieur
Résistance aux points de vue eudémonistes, en tant
qu'ultime réduction à la question : quel sens cela a-t-il?
Réduction de l'assombrissement. Noire pessimisme :
le monde n'a pas la valeur que nous avions crue, notre
croyance elle-même a développé à tel point nos instincts
de connaissance qu'il nous faut le dire aujourd'hui. D'abord
il parait, de ce fait, avoir perdu de sa valeur : on le ressent
d'abord ainsi c'est en ce sens seulement que nous sommes
des pessimistes, à savoir dans notre volonté de nous avouer
sans réserve ce renversement des valeurs et de ne pas
ressasser de vieilles rengaines, de vieux mensonges... Grâce
à cela, précisément, nous trouvons le pathos qui peut-être
nous pousse à chercher de nouvelles valeurs. In summa :
le monde pourrait bien avoir beaucoup plus de valeur que
nous ne l'avons cru, nous devons dépasser la naïveté de
nos idéaux et découvrir que, malgré notre conviction de lui
donner la plus haute interprétation, nous n'avons peut-
être même pas donné à notre existence humaine sa juste
valeur moyenne.
qu'est-ce qu'on a divinisé? les instincts de valeur internes
à la communauté (ce qui permettait sa durée) ;
qu'est-ce qu'on a calomnié? ce qui séparait les hommes
supérieurs des inférieurs, les instincts qui creusaient des
fossés.
Critique du causalisme.
C'est une interprétation, pas même, juste une formulation,
description ; « la succession » attend toujours son explica-
tion.
6 [26]
Psychologie de l'erreur
Nous avons de toute antiquité placé la valeur d'une
action, d'un caractère, d'une existence dans l'intention,
dans la fin pour laquelle on a agi, oeuvré, vécu : cette
idiosyncrasie immémoriale du goût finit par prendre un
tour dangereux, A supposer en effet que l'absence d'inten-
tion et de fin de ce qui arrive s'impose de plus en plus au
premier plan de la conscience. Cela semble préparer une
dévalorisation universelle : « rien n'a de sens » cette
sentence mélancolique signifie : « tout sens réside dans
l'intention, et si l'intention fait totalement défaut, le sens
aussi fait totalement défaut ». On avait été contraint, en
fonction de cette appréciation, de reporter la valeur de la
vie dans une « vie après la mort »; ou dans le développe-
ment progressif des idées, ou de l'humanité, ou du peuple,
ou dans un développement passant par-dessus l'homme;
mais du coup on était entré dans un processus in in fini-
turn 2 de la fin, on avait finalement besoin de se ménager
une place dans le « procès du monde » (peut-être dans la
perspective dysdémonique qu'il s'agissait d'un procès
vers le néant).
A l'encontre de cela, la « fin » exige une critique plus
sévère : il faut voir que jamais une action n'est provoquée
par une fin; que la fin et les moyens sont des interprétations
dans lesquelles on souligne et met en valeur certains traits
d'un événement aux dépens d'autres traits, qui sont les
plus nombreux; que chaque fois que quelque chose est
fait en vue d'une fin, il se passe quelque chose de fondamen-
248 Fragments posthumes
talement distinct et différent; qu'il en va de toute action
orientée vers une fin comme de la prétendue finalité de la
chaleur répandue par le rayonnement du soleil : la majeure
partie est dissipée en vain; seule une partie presque insi-
gnifiante possède une « fin », un « sens » —; qu'une « fin »
avec ses « moyens » constitue une figure d'une incertitude
indescriptible qui peut à la rigueur commander en tant
que précepte, que « volonté », mais qui présuppose un sys-
tème d'instruments obéissants et adaptés qui, au lieu de
l'incertain, posent uniquement des grandeurs fixes (c.-à-d.
que nous imaginons un système d'intellects plus malins
mais plus bornés qui posent des fins et des moyens, afin de
pouvoir conférer à la seule « fin » que nous connaissions le
rôle de « cause d'une action » : ce dont nous n'avons en fait
pas le droit (cela reviendrait, pour résoudre un problème,
à placer la solution de ce problème dans un domaine
inaccessible à notre observation —) En dernier lieu :
pourquoi « une fin » ne pourrait-elle pas être un épiphé-
nomène dans la série des modifications des forces agissantes
qui provoquent l'action conforme à une fin une pâle
esquisse préexistant dans la conscience, utile pour nous
orienter dans l'événement, comme un symptôme même
et non comme la cause de l'événement? Mais nous venons
de critiquer la volonté elle-même : n'est-ce pas une illusion
que de prendre pour une cause ce qui émerge dans la cons-
cience comme acte de volonté? Tous les phénomènes de
conscience ne sont-ils pas des phénomènes terminaux, les
derniers anneaux d'une chaîne, mais qui, en apparence, se
conditionnent dans leur succession à l'intérieur d'un plan
de conscience? Ceci pourrait être une illusion.
La volonté de vérité
Les « agnostiques », les adorateurs de l'inconnu et du
mystérieux en soi, d'où prennent-ils le droit d'adorer
comme un dieu un point d'interrogation? Un dieu qui se
dissimule ainsi dans le secret mérite peut-être la crainte,
mais sûrement pas l'adoration! Et pourquoi l'inconnu ne
serait-il pas le Diable? Mais « il faut adorer » l'instinct
des convenances l'ordonne ainsi : ceci est anglais.
Les transcendantalisles qui trouvent qu'aucune connais-
sance humaine ne satisfait les désirs de leur coeur, que bien
plutôt ces connaissances les contredisent et suscitent
l'effroi ils posent innocemment un monde situé je ne sais
où, mais qui correspond à leurs désirs et qui, justement, est
inaccessible à notre connaissance : ce monde, pensent-ils,
serait le monde vrai, par rapport auquel notre monde
connaissable n'est qu'illusion. Ainsi Kant, ainsi déjà la
philosophie du Védanta, ainsi beaucoup d'Américains.
« Vrai » signifie pour eux : qui correspond au désir de notre
coeur. Autrefois, vrai signifiait : qui correspond à la raison.
Les métaphysiciens
est-il possible?
la connaissance est-elle même un fait?
qu'est-ce que la connaissance? Si nous ne savons pas ce
qu'est la connaissance, il nous est impossible de répondre
à la question : « y a-t-il connaissance? » Très bien! Mais
si je ne « sais » pas déjà s'il y a, s'il peut y avoir connaissance,
je ne peux pas poser de façon rationnelle la question
« qu'est-ce que la connaissance? » Kant croit au fait de la
connaissance : ce qu'il veut est une naïveté : la connais-
sance de la connaissance !
« La connaissance est jugement! » Mais le jugement est
une croyance que quelque chose est tel et tel! Et non une
connaissance!
« toute connaissance consiste en des jugements synthé-
tiques » liaison nécessaire et universelle de différentes
représentations
avec un caractère d'universalité (la chose se comporte
dans tous les cas de telle façon et pas autrement)
avec un caractère de nécessité (le contraire de l'affir-
mation ne peut jamais se produire)
La légitimité de la foi en la connaissance est toujours
présupposée : de même qu'est présupposée la légitimité
du sentiment d'un jugement porté en conscience. L'onto-
logie morale est ici le préjugé dominant.
Le raisonnement est donc le suivant : 1) il y a des affir-
mations que nous tenons pour universelles et nécessaires
2) le caractère de nécessité et d'universalité ne peut
provenir de l'expérience
262 Fragments posthumes
3) par conséquent il doit, en dehors de l'expérience, se
fonder ailleurs et disposer d'une autre source de connais-
sance!
Kant raisonne : 1) il y a des affirmations qui ne sont
valables que sous certaines conditions
2) cette condition est que cela ne provienne pas de
l'expérience, que cela provienne de la raison pure
Donc : la question est de savoir d'où notre croyance à la
vérité de telles affirmations tire ses raisons. Non, d'où elle
prend ses jugements! Mais l'apparition d'une croyance,
d'une conviction forte est un problème psychologique :
et une expérience très limitée et étroite suscite souvent ce
genre de croyance!
Elle présuppose déjà qu'il n'y a pas seulement des « data
a posteriori », mais aussi des data a priori 1 , « avant l'expé-
rience ». La nécessité et l'universalité ne peuvent jamais
être fournies par l'expérience : comment est-il donc évident
qu'elles existent vraiment en dehors de l'expérience?
Il n'y a pas de jugements isolés!
Un jugement isolé n'est jamais « vrai », n'est jamais
connaissance, c'est seulement dans un contexte, dans la
relation entre de nombreux jugements qu'une garantie
apparaît.
Qu'est--ce qui distingue la vraie et la fausse croyance?
Qu'est-ce que la connaissance? Il le « sait », voilà qui est
divin !
La nécessité et l'universalité ne peuvent jamais être
fournies par l'expérience. Donc, indépendantes de l'expé-
rience, avant toute expérience!
Cette vision qui a lieu a priori et donc, indépendamment
de toute expérience, à partir de la simple raison, « une
connaissance pure ».
Les principes fondamentaux de la logique, le principe
d'identité et de contradiction sont des connaissances pures
parce qu'ils précèdent toute expérience. Mais ce ne sont
pas du tout des connaissances! Mais des articles de foi
régulati fs !
Pour fonder l'apriorité (la pure rationalité) des jugements
mathématiques, l'espace doit être conçu comme une forme
de la raison pure.
Hume avait déclaré : « il n'y a pas de jugements synthé-
tiques a priori ». Kant dit : si! les jugements mathéma-
tiques! Et donc, s'il y a de tels jugements, il y a peut-être
aussi une métaphysique, une connaissance des choses
par la raison pure! Quaeritur.
7 = Mp X V II 3b. Fin 1886-printemps 1887 7[4] 263
La mathématique est possible à des conditions auxquelles
la métaphysique n'est jamais possible.
toute connaissance humaine est soit expérience, soit
mathématique
Un jugement est synthétique : c.-à-d. qu'il combine
différentes représentations
il est a priori : c.-à-d. que cette combinaison est univer-
selle et nécessaire, et qu'elle ne peut jamais être donnée
par la perception sensible mais seulement par la raison
pure.
S'il doit y avoir des jugements synthétiques a priori, il
faut que la raison soit capable de combiner : la combinaison
est une forme. La raison doit posséder une capacité infor-
matrice.
Espace et temps comme condition de l'expérience
Kant caractérise la Révolution française comme le pas-
sage du type d'État mécanique au type organique 1 !
Les esprits inventifs qui ouvrent des voies nouvelles en
science, ceux qu'on appelle les « grands cerveaux », sont,
juge Kant, spécifiquement différents du génie; ce qu'ils
ont découvert et inventé aurait également pu être appris,
et a été effectivement compris et appris dans sa totalité.
Dans l'ouvre de Newton, il n'est rien qu'on ne puisse
apprendre ; Homère n'est pas aussi compréhensible que
Newton ! « En matière de science par conséquent il n'y a
entre le plus grand inventeur et l'imitateur ou l'apprenti
le plus laborieux qu'une différence de degré 2 ». Idiotie psycho-
logique !
« la musique présente un certain manque d'urbanité »,
« elle s'impose en quelque sorte », « elle porte atteinte à la
liberté 3 »
La musique et l'art des couleurs forment une catégorie
spéciale sous le nom de « beau jeu des sensations 4 »
La peinture et l'art des jardins associés l'un à l'autre J .
La question de savoir si l'humanité possède une tendance
au bien est préparée par la question de savoir s'il existe un
événement qui ne puisse être expliqué autrement que par
cette disposition morale de l'humanité. Cet événement,
c'est la Révolution. « Un tel phénomène dans l'histoire de
l'humanité ne s'oublie plus, parce qu'il a révélé dans la
nature humaine une disposition et une faculté pour le
264 Fragments posthumes
mieux telle qu'aucun politique n'aurait pu avec toute
sa subtilité la dégager de la marche des événements jus-
qu'à aujourd'hui »
tout Schopenhauer.
homines religiosi
LA RÉFORME : UNE DES ÉRUPTIONS LES PLUS
HYPOCRITES DES INSTINCTS GROSSIERS
Un bon nombre d'instincts forts, dégagés de leurs freins
et foncièrement grossiers veulent parvenir au grand jour :
il ne faut que des prétextes, c'est-à-dire qu'il faut trouver
de grands mots sous couvert desquels on puisse déchaîner
ces bêtes fauves.
Luther, le type psychologique : un paysan inculte et
inauthentique qui, grâce à la « liberté évangélique », donne
libre cours â tous les besoins de violence accumulés.
on veut une bonne fois redevenir le maître, piller, écraser,
maudire, sans oublier les sens qui veulent y trouver leur
compte : mais surtout, on louche cupidement vers les
énormes richesses de l'Église.
Les bons
droiture brutale
(9) 2
La victoire d'un idéal moral est remportée à l'aide des
mêmes moyens « immoraux » que toute autre victoire :
violence, mensonge, calomnie, injustice
Les bons
POUR LA CRITIQUE DES VERTUS DU TROUPEAU
L'INERTIA est à l'oeuvre
1) Dans la confiance, car la méfiance nécessite tension,
observation, réflexion
2) dans la vénéra Lion, quand l'écart de puissance est
important et la soumission nécessaire : afin de ne pas avoir
peur, on essaye d'aimer, d'estimer et d'interpréter la diffé-
rence de puissance comme différence de valeur : en sorte
que la relation ne soit plus révoltante.
3) dans le sens de la vérité. Oû est le vrai? Là oû est
donnée une explication qui exige de nous le minimum
d'effort intellectuel. Au surplus, le mensonge exige beaucoup
d'effort.
(21)
4) dans la sympathie. Sc mettre à égalité, tenter de
ressentir de la même façon, adopter un sentiment préexis-
tant, c'est un soulagement : c'est quelque chose de passif,
comparé à l'élément actif qui défend ses droits les plus
personnels à porter des jugements de valeur et en fait
constamment usage. Ce dernier choix ne laisse aucun repos.
5) dans l'impartialité et la froideur du jugement : on
craint l'effort de l'émotion et l'on préfère se mettre à l'écart,
« objectivement »
(18) 2
6) dans la droiture : on préfère obéir à une loi préexis-
tante plutôt que de se créer sa loi, de commander à soi et
aux autres. La peur de commander Plutôt se soumettre
que réagir.
7) dans la tolérance : la peur devant l'exercice du droit,
du jugement
les formes MASQUÉES de la volonté de puissance
270 Fragments posthumes
1) aspiration à la liberté, l'indépendance, ainsi qu'à
l'équilibre, la paix, la coordination; ainsi l'ermite, la
« liberté d'esprit »; sous sa forme la plus basse :volonté
d'exister en général, « instinct de conservation »
Morale progressivement
en contradiction avec elle-même.
Représailles.
Véracité, doute, epoche 1 , juger.
« Immoralité » de la foi en la morale.
Les étapes :
1) domination absolue de la morale
tous les phénomènes biologiques mesurés et jugés
d'après elle
2) tentative d'identification de la vie et de la morale
(symptôme d'un scepticisme qui s'éveille : la morale
ne doit plus être ressentie comme contraire), plu-
sieurs moyens, même une voie transcendante
3) opposition de la vie et de la morale : la morale jugée
et condamnée dans l'optique de la vie.
7 = Mp X VII 3b. Fin 1866-printemps 1887 7[6] 271
Dans quelle mesure la morale était nuisible à la vie
a) à la jouissance de la vie, à la reconnaissance envers
la vie etc.
b) à l'embellissement, l'anoblissement de la vie
c) à la connaissance de la vie
d) au déploiement de la vie, dans la mesure où elle
tentait de couper d'avec elles-mêmes ses manifes-
tations les plus hautes
Contrepartie : son utilité pour la vie.
la morale comme principe de conservation d'ensembles
plus importants, comme limitation de leurs mem-
bres : « l'instrument »
la morale comme principe de conservation, par rapport
aux menaces internes que ses passions font peser
sur l'homme : « le médiocre »
la morale comme principe de conservation contre les
répercussions fatales à la vie de la détresse et du
dépérissement profonds : « l'homme souffrant »
la morale comme principe opposé à la terrible explo-
sion des puissants : l' « humble »
Orgueil borné de certains philosophes, en tant que pure-
men t-con formes-à-la-raison
contre le sentiment en général dans la morale (Kant)
contre la pitié
contre les affections
Les bons
Dangers de la modestie. S'adapter trop vite à un
milieu *,à des tâches, à une société, à une organisation
du quotidien et du travail dans lesquels nous jette le
hasard, à une époque où ni notre force, ni notre but n'ont
pris valeur impérative dans notre conscience : la sécurité
trop précoce de la bonne conscience, le réconfort et la
communauté que l'on obtient ainsi, cette humilité pré-
maturée qui s'insinue dans le sentiment sous prétexte
de le libérer de l'inquiétude intérieure et extérieure, qui
gâte et brime l'homme de la plus dangereuse manière ;
l'entraînement à estimer de la même façon que « ses sem-
blables », comme si nous n'avions en nous-mêmes ni critère
ni droit pour fixer des valeurs, l'effort pour juger comme
autrui, en contradiction avec la voix intime du goût, qui
est aussi conscience (Gewissen), tout cela engendre un
esclavage terrible et subtil : si une explosion ne finit pas
* En français dans le texte.
272 Fragments posthumes
par se produire, pulvérisant d'un seul coup tous les liens
de l'amour et de la morale, ce genre d'esprit s'étiole, s'ame-
nuise, s'effémine, se banalise. L'inverse est déjà passa-
blement mauvais mais vaut quand même mieux : souffrir
de son entourage, de ses éloges comme de sa réprobation,
en être blessé et rongé sans le laisser paraître; se défendre
contre son amour avec une méfiance involontaire, appren-
dre le mutisme en le masquant à l'occasion par des dis-
cours, se ménager des recoins et des solitudes insoupçon-
nables pour les instants de répit, de larmes, de sublime
consolation jusqu'à ce que l'on soit finalement assez
fort pour déclarer : « qu'ai-je à voir avec vous ? 1 » et
que l'on aille son propre chemin.
Les bons.
Seule une faible minorité est capable de voir un problème
dans ce qui constitue le milieu oû nous vivons, ce à quoi
nous sommes habitués depuis toujours, l'oeil n'y est juste-
ment pas adapté : en ce qui concerne notre morale, il me
semble que cela n'a pas encore eu lieu.
Le problème « tout homme en tant qu'objet, pour les
autres » entraîne à décerner les plus hauts honneurs; pour
soi-même non!
Le problème « tu dois » : un penchant, incapable de se
fonder en raison, semblable à l'instinct sexuel, ne doit pas
tomber sous le coup de la condamnation portée sur les
instincts; à l'inverse, il doit être leur critère de valeur et
leur juge!
7 = Mp X V II 3b. Fin 1886-printemps 1887 7[6] 273
Le problème de l'égalité, alors que nous avons tous soif
de nous distinguer : ici, précisément, nous devons à l'inverse
nous imposer exactement les mêmes exigences qu'aux autres.
C'est unet elle fadaise, folie manifeste : mais on le ressent
comme sacré, d'un ordre supérieur, on perçoit à peine la
contradiction avec la raison.
Le dévouement et le désintéressement comme sources
de distinction, l'obéissance absolue à la morale, et la
conviction d'être devant elle l'égal de chacun.
L'abandon et le sacrifice du bien et de la vie comme
sources de distinction, le renoncement total à sa propre
échelle de valeurs, l'exigence stricte que chacun y renonce
aussi. « La valeur des actions est définie : tout individu est
soumis à cette évaluation ».
Nous voyons : une autorité parle qui parle? On
peut excuser l'orgueil humain d'avoir cherché cette auto-
rité le plus haut possible pour se sentir le moins possible
humilié sous elle. Donc Dieu parle!
On avait besoin de Dieu comme d'une sanction absolue,
sans aucune instance au-dessus d'elle, comme d'un « impé-
ratif catégorique » : ou, dans la mesure où l'on croyait
à l'autorité de la raison, on éprouvait la nécessité d'une
métaphysique unitaire, grâce à laquelle cela devenait
logique
A supposer maintenant que la foi en Dieu ait disparu :
la question se pose de nouveau : <c qui parle ?» Ma réponse,
tirée non de la métaphysique mais de la physiologie ani-
male : l'instinct du troupeau parle. Il veut être maître :
d'où son « tu dois! » il ne veut accorder d'importance à
l'individu que dans le sens du tout, dans l'intérêt du
tout, il hait ceux qui s'en détachent il tourne contre
eux la haine de tous les individus
Mon idée : les buts font défaut, et ces buis doivent être
des individus !
Physiologie de l'art
Beethoven un pauvre grand homme, sourd, amoureux,
méconnu et philosophe, dont la musique est pleine de rêves
gigantesques ou douloureux *.
philosophique d'Allemagne *
l'âme complémentaire de Victor Hugo *
le goût de la Renaissance
un ameublement en ce lieu, éclatant et sombre, d'un
style tourmenté et magnifique
cet âge de force et d'effort, d'audace inventive, de plaisirs
effrénés et de labeur terrible, de sensualité et d'héroïsme * *
Nihilisme
Pour l'avant-propos.
J'ai subi jusqu'ici une torture : toutes les lois qui servent
de base au développement de la vie me semblaient être en
contradiction avec les valeurs en fonction desquelles les
gens comme nous supportent de vivre. Il ne semble pas que
ce soit la situation dont beaucoup souffrent consciemment :
malgré tout, je veux rassembler les symptômes d'oû j'induis
qu'il s'agit du caractère fondamental, du problème propre-
ment tragique de notre monde moderne et, en tant que
détresse secrète, de la cause ou de l'explication de toutes
nos détresses. Ce problème est devenu conscient en moi.
Nihilisme
A.
Partir d'un hommage plein et chaleureux à notre <huma-
nité> d'aujourd'hui :
ne pas se laisser tromper par l'apparence (cette huma-
nité fait moins d' « effet », mais elle donne de tout autres
garanties de durée, son tempo est plus lent mais le rythme
lui-même est beaucoup plus riche
la santé progresse, on reconnaît et l'on crée petit à petit
les véritables conditions de la force corporelle, l' « ascé-
tisme », ironice
l'horreur des extrêmes, une certaine confiance dans le
« droit chemin », pas de vague à l'âme ; une façon tempo-
284 Fragments posthumes
raire d'insérer sa vie dans des valeurs plus restreintes
(comme « la patrie »), comme « la science » etc.
pourtant, toute cette image resterait encore équivoque :
- ce pourrait être un mouvement ascendant
- mais aussi un mouvement descendant de la vie.
E•
La foi dans le « progrès » dans la sphère inférieure de
l'intelligence, elle apparaît comme vie ascendante : mais
c'est de l'auto-aveuglement;
dans la sphère supérieure de l'intelligence, comme vie
descendante
Description des symptômes.
Unité de point de vue : incertitude en ce qui concerne
les critères de valeur.
Peur d'un « en vain » universel
Nihilisme.
y
C.
`
N ihilisme.
Principe de la vie
Erreurs fondamentales des biologistes jusqu'à nos jours :
il ne s'agit pas de l'espèce, mais de faire ressortir plus vigou-
reusement les individus (le grand nombre n'est qu'un moyen)
la vie n'est pas adaptation des conditions internes aux
conditions externes, mais volonté de puissance qui, de
l'intérieur, se soumet et s'incorpore toujours plus d' « exté-
rieur »
7 = Mp X V II 3b. Fin 1886-printemps 1887 7[9] 287
ces biologistes prolongent les appréciations de valeur
morales (la valeur supérieure en soi de l'altruisme, l'hosti-
lité à l'esprit de domination, à la guerre, à l'inutilité, aux
hiérarchies de rang et de castes).
Principe de la vie
La conscience, débutant de façon tout extérieure, en tant
que coordination et passage au conscient des « impres-
sions » initialement à la plus grande distance du centre
biologique de l'individu ; mais un processus qui s'appro-
fondit, s'intériorise, se rapproche constamment de ce
centre.
Sur la naissance de la logique. La tendance fondamentale
à poser comme égal, voir comme égal est modifiée, tenue en
bride par l'avantage et le préjudice, par le succès; une
adaptation se produit, un degré atténué où elle peut se
satisfaire sans nier du même coup la vie et la mettre en
danger. Ce processus correspond tout à fait au processus
extérieur et mécanique (qui en est le symbole) selon lequel
le plasma assimile et absorbe continuellement dans ses
formes et ses séries ce qu'il s'approprie.
Principe de la vie
Les puissances de l'histoire sont faciles â identifier si on
les dégage de toute téléologie morale et religieuse. Ce sont
forcément les puissances qui sont également actives dans
le phénomène d'ensemble de l'existence organique. Les
témoignages les plus clairs, dans le règne végétal.
Les grandes victoires sur l'animal: l'animal comme
esclave
ou comme ennemi.
de l'homme sur la femme : la femme
A côté des grandes oscillations, par ex, entre les bien-
portants et les malades.
Où a été placée la dignité de l'homme :
avoir dominé l'animal
en l'homme idéal
avoir dominé la femme grec
en l'homme
à l'opposé, la dignité chrétienne:
avoir dominé l'orgueil en l'homme
avoir
Principe de la vie
la complexité plus grande, la séparation tranchée,
la coexistence d'organes et de fonctions élaborés, avec
élimination des échelons intermédiaires si c'est cela
la perfection, il en résulte une volonté de puissance dans
le processus organique, grâce à laquelle ses forces domi-
natrices, informatrices, ordonnatrices augmentent sans cesse
le champ de leur puissance et, à l'intérieur de lui, simpli-
fient sans cesse : l'impératif croissant.
7 [11]
N'est-ce pas de l'apparence du vide et du plein, du solide
et du labile, du paisible et de l'agité, de l'égal et de
l'inégal que sont issus l'apparence la plus ancienne
n'a-t-elle pas été érigée en métaphysique?
Toute cette philosophie européenne des siècles derniers
qui, avec une dignité bonhomme
qu'est-ce que connaître? Puis-je connaître?
7 [12]
7 [13]
7 [14]
7 [15]
7 [16]
7 [17]
7 [18]
7 [19]
7 [20]
La morale des philosophes, depuis Socrate un donqui-
chottisme
une bonne dose de cabotinage
une erreur d'interprétation sur soi
qu'est-elle exactement?
idiosyncrétique : l'enthousiasme pour la dialectique,
optimiste — la sensualité exacerbée et par conséquent la
peur
la plus grande de toutes les escroqueries et tromperies
de soi, poser une identité entre bon, vrai et beau, et repré-
senter cette unité
le combat contre les sophistes est difficile à saisir psycho-
logiquement : il faut une séparation pour ne pas être
confondu avec eux (ce à quoi tout invitait, car ils se sentaient
en fait parents). Rivalité pour conquérir les jeunes gens
Vertu et ironie et perspicacité chez Socrate chez
Platon l'amoureux (pédéraste), l'artiste (?), l'oligarque
Déclaration d'indépendance, émigration hors de la polis,
détachement de l'origine
Critique de la culture du point de vue de la « morale »
et de la dialectique!!!
manque absolu de « sens historique »
Symptôme de DÉCADENCE
tous les mouvements spécifiquement moraux n'étaient-
pas jusqu'ici symptômes de décadence *?
7 [21]
Perspectivisme du désirable (de l'idéal)
7 [22]
L'un critique : son tempérament y dit oui
souvent l'absence d'esprit nous fait du bien
7 [23]
NB. Du point de vue psychologique, j'ai deux sens :
d'abord : le sens du NU
ensuite : la volonté de GRAND STYLE (peu de phrases
principales, et celles-ci dans la plus rigoureuse
connexion; pas d'esprit *, pas de rhétorique).
7 [z4]
Tous les instincts et puissances qui sont loués par la
morale m'apparaissent en fin de compte essentiellement
semblables à ceux qu'elle calomnie et récuse, par ex. la
justice comme volonté de puissance, la volonté de vérité
comme moyen de la volonté de puissance
7 [25]
Contre le darwinisme.
- l'utilité d'un organe n'explique pas son apparition,
au contraire!
- pendant la plus longue période durant laquelle se
forme une propriété, elle n'assure pas le maintien de
l'individu et ne lui est pas utile, surtout dans la lutte contre
des circonstances et des ennemis extérieurs
- qu'est-ce qui est finalement « utile »? Il faut deman-
der » utile à quoi? » Par ex., ce qui est utile à la durée de
l'individu pourrait être défavorable â sa force et â sa
splendeur; ce qui assure le maintien de l'individu pourrait
en même temps l'immobiliser et le figer dans son évolu-
tion. Par ailleurs, un manque, une dégénérescence peut
être d'une extrême utilité, pour autant qu'elle fonctionne
comme stimulans d'autres organes. De même une situa-
tion désespérée peut être une condition d'existence, pour
7 [26]
7 [27]
Concept plus plein de la vie
Les sortes d'ivresse
Le cabotinage moderne (par ex. « patrie »: dans quelle
mesure cela choque notre conscience d'être patriotes)
Toute la fausseté européenne.
La faille
296 Fragments posthumes
7 [28]
7 [29]
7 [30]
7 [31]
7 [32]
7 [33]
7 [34]
7 [35]
7 [36]
7 [37]
1
Vis est vita, vides, quae nos facere omnia cogit
Lucilius
xaaarar. 8'1g. f3q io(gE-rati 2 .
7 [38]
7 [391
7 [ 40 :1
7 [41]
7 [42]
7 [43]
7 [44]
7 [45]
1.
Critiques des valeurs, mesurées par référence à la vie.
2.
L'origine des valeurs
3.
La vie comme volonté de puissance
4.
Les hommes du renversement
leur marteau, « la doctrine du retour » 1 .
7 [46]
7 [47]
Critique du chauvinisme: celui qui sent au-dessus de lui
des valeurs qu'il juge cent fois plus hautes que le bien de
7 = Mp X V Il 3b. Fin 1886-print. 1887 7[45-50] 301
la « patrie », de la société, de la parenté du sang et de la race,
des valeurs situées par-delà les patries et les races, et
donc des valeurs internationales, celui-là serait hypo-
crite de vouloir jouer au cc patriote ». C'est un bas-fond de
l'homme et de l'âme qui supporte chez soi la haine natio-
nale (ou même l'admire et la glorifie) : les familles dynas-
tiques exploitent ce type d'hommes en outre il y a
suffisamment de classes du négoce et de la société (y
compris naturellement ces polichinelles vénaux, les artistes)
qui reçoivent de l'avancement quand ces vitriols nationaux
reviennent au pouvoir. De fait, une espèce plus basse a
obtenu la prépondérance -- --
7 [48]
7 [4y]
7 [50]
Le problème de la mesure.
Le problème de la hiérarchie.
7 [51]
L'offense
fense provoque soit la réaction, soit la soumission
7 [52]
7 [53]
7 [54j
7 [55]
7 [56j
Contre l'atome physique. Pour comprendre le monde,
il nous faut pouvoir le calculer; pour pouvoir le calculer,
il nous faut avoir des causes constantes; comme nous ne
trouvons pas dans la réalité ce genre de causes constantes,
nous en inventons quelques-unes les atomes. Telle est
nous
l'origine de l'atomistique.
La possibilité de calculer le monde, d'exprimer tout ce
qui arrive par des formules est-ce vraiment un « com-
prendre »? Qu'aurait-on au juste compris â une musique
après avoir calculé tout ce qui en elle est calculable et peut
s'abréger en formules? Et puis les « causes constantes »,
choses, substances, quelque chose d' « absolu », donc;
inventé qu'a-t-on atteint?
7 [57]
7 [5s]
7 [59]
7 [so]
7 [s1]
Intitulés provisoires de chapitres'.
Antagonisme entre « amélioration » et « accroissement »
de l'homme (respectivement domestication et renfor-
cement)
Critique de l'idéal chrétien (humilité, chasteté, pauvreté,
simplicité)
Critique de l'idéal stoïcien (y compris le « fakir »)
Critique de l'idéal épicurien (y compris l' « olympien
également les « contemplatifs »)
Les métamorphoses de l'esclavage.
Artiste et conquérant. Que veut la beauté?
Justice, faute, punition, responsabilité le législateur.
Critique de l'idéal romantique, ainsi que de l'idéal qui
donne au pessimiste la force de haïr et de mépriser
Le caractère interprétatif de la vie (que signifie le nihi-
lisme?)
« absence de but »
Le prochain siècle et ses précurseurs.
Critique de l'action (cause et effet, agir, but)
Hiérarchie
306 Fragments posthumes
7 [62]
7 [63]
Toute philosophie ne doit-elle pas tirer finalement au
grand jour les présupposés sur lesquels repose le mouvement
de la raison? Notre croyance au moi comme à une substance,
comme à l'unique réalité d'après laquelle nous puissions
accorder en général de la réalité aux choses? Le plus
antique « réalisme » vient enfin au grand jour : en même
temps que toute l'histoire religieuse de l'humanité se
reconnaît comme histoire de la superstition-des-âmes. Il
y a ici une barrière: notre pensée elle-même englobe cette
croyance (avec ses distinctions de substance-accident,
acte, acteur etc.), l'abandonner signifie ne-plus-pouvoir-
penser.
Qu'une croyance, si nécessaire soit-elle à la survie d'un
être, n'ait rien à voir avec la vérité, on le reconnaît même
au fait, par ex., que nous devons croire au temps, à
l'espace et au mouvement, sans nous sentir obligés de
( + + -I-) ici d'absolus (-f- + +)
7 [64]
Livre deuxième.
Critique des valeurs suprêmes.
Livre troisième.
Principe d'une nouvelle détermination des valeurs.
Livre quatrième.
Discipline et dressage.
7 [65]
4.
L'égoïsme et son problème! L'assombrissement chrétien
chez Larochefoucauld qui le détectait partout et croyait
que la valeur des choses et des vertus en était diminuée!
En réaction contre lui, je cherchai d'abord à prouver qu'il
ne pouvait y avoir rien d'autre qu'égoïsme, que chez les
hommes dont l'ego devient faible et grêle, la force du grand
amour devient également faible, que les êtres les plus
aimants le sont surtout par la force de leur ego, que
l'amour est une expression d'égoïsme etc. La fausse appré-
ciation de valeur a en vérité pour but l'intérêt 1) de ceux
qui en reçoivent profit et aide, à savoir du troupeau 2)
<elle > recèle une méfiance pessimiste envers le fondement
de la vie 3) <elle > voudrait nier les hommes les plus
splendides et les mieux réussis ; peur 4) <elle > veut assurer
les droits des vaincus contre les vainqueurs 5) <elle>
entraîne une malhonnêteté universelle, particulièrement
chez les hommes de la plus grande valeur.
7 = Mp XV I I 3b. F in 1886-print. 1887 7[64-66] 309
5.
La musique et ses dangers, sa griserie, son art de
susciter des états chrétiens et surtout ce mélange de sen-
sualité transposée et de frénésie de prière (Franç<ois>
d'Assise) va la main dans la main avec l'impureté de
l'intellect et l'exaltation du coeur : brise la volonté, surexcite
la sensibilité, les musiciens sont lubriques.
NB. Causes (états internes) où l'art prend racine : et,
très différent de cela, les effets.
7 [G6]
7 [671
7 [68]
NB!!
de sorte qu'on trouve chez les athées moins de largeur
d'idées sur les sujets moraux que chez les pieux et les
croyants (par ex. Pascal est plus libre et plus large d'idées
que Schopenhauer sur les questions morales)
7 [69]
7 [70]
Il y a, au-dessus des émanations et de la fange des bas-
fonds humains une humanité plus haute et plus claire, qui
sera très petite par le nombre car tout ce qui émerge
est, par essence, rare : on en fait partie non parce qu'on
serait plus doué ou plus vertueux ou plus héroïque ou plus
aimant que les hommes d'en-bas, mais parce qu'on est
plus froid, plus clair, plus large de vues, plus solitaire, parce
qu'on supporte, préfère, exige la solitude comme bonheur,
comme privilège, même comme condition d'existence,
parce qu'on vit parmi les nuées et les éclairs comme parmi
ses semblables, mais aussi sous les rayons du soleil, les
7 =Itlp X V Il 3b. Fin 1886-prinl. 1887 7[66-70j 311
gouttes de rosée, les flocons de neige et tout ce qui vient
nécessairement d'en-haut et qui, lorsqu'il bouge, ne bouge
éternellement que dans la direction du haul vers le bas.
Les aspirations vers les hauteurs ne sont pas les nôtres.
Les héros, les martyrs, les génies et les enthousiastes
ne sont pas assez calmes, patients, fins, froids et lents pour
n ou s.
[8 = Mp XVII 3c. ÉTÉ 1887]
8 [1]
Le problème de la vérité.
Le BESOIN DE FOI est la plus grande ENTRAVE à la
véracité.
La volonté de vérité
LA FAUSSETÉ. La fausseté inconsciente.
Tout instinct souverain fait des autres ses instruments,
ses courtisans, ses flatteurs : il ne tolère jamais qu'on lui
donne son vilain nom : et il ne supporte pas d'autres paroles
de louange que celles qui rejaillissent indirectement sur lui.
Autour de chaque instinct souverain, toute espèce de
louange ou de blâme se cristallise pour constituer un ordre
et une étiquette fixes.
C'est l'Une des causes de la fausseté.
Tout instinct qui aspire à la domination mais se trouve
sous un joug a besoin pour lui-même, pour étayer le senti-
ment de son importance, pour se renforcer, de tous les
beaux noms et les valeurs reconnues : si bien qu'il se ris-
que GÉNÉRALEMENT â relever la tête sous le nom du
« maitre » qu'il combat, dont il veut se débarrasser. (Par
ex., sous la domination des valeurs chrétiennes, le désir
charnel ou le désir de puissance)
C'est l'autre cause de la fausseté.
Dans les deux cas règne une parfaite naiveté : la fausseté
ne parvient pas à la conscience. C'est un signe que l'ins-
tinct est brisé, si l'homme voit séparés l'élément moteur et
son (( expression » (« le masque ») un signe de contradic-
tion avec soi-même, et beaucoup moins victorieux. L'inno-
316 Fragments posthumes
cence absolue dans les gestes, dans les paroles, dans les
affections, la « bonne conscience » dans la fausseté, la
sûreté avec laquelle on cherche à s'emparer des paroles
et des attitudes les plus grandes et les plus splendides
tout cela, nécessaire à la victoire.
Dans l'AUTRE cas : si l'on a une lucidité extrême, il
faut, pour vaincre, le génie du c o Ni É DIE N et une énorme
discipline dans la maîtrise de soi. C'est pourquoi les prêtres
les plus habiles hypocrites conscients : puis les princes à qui
leur rang et leur origine inculquent une sorte de cabotinage.
Troisièmement les hommes du monde, les diplomates.
Quatrièmement les femmes.
Pensée fondamentale : la fausseté apparaît si profonde, si
universelle, la volonté est à ce point orientée contre la
connaissance directe de soi, la capacité d'appeler les cho-
ses par leur nom que la supposition suivante est fort vrai-
semblable : la vérité, la volonté de vérité serait en fait quelque
chose de tout autre et même un simple DÉGUISEMENT.
La sensualité dans ses déguisements
en tant qu'idéalisme (« Platon »), propre à la jeunesse,
créant le même genre de reflet dans un miroir défor-
mant que la bien-aimée qui apparaît dans sa parti-
cularité ; une incrustation un agrandissement une trans-
figuration, entourant chaque chose d'infini
dans la religion de l'amour : « un beau jeune homme, une
belle femme », divin en quelque façon, un fiancé, une
fiancée de l'âme
dans l'art, comme force « ornementale » : de même que
l'homme voit la femme en lui faisant pour ainsi dire
présent de toutes les supériorités possibles, la sensua-
lité de l'artiste place en Un objet ce qu'il honore et
estime par ailleurs c'est ainsi qu'il parfait un objet
(1' « idéalise »)
La femme, consciente de ce que l'homme ressent vis-à-
vis de la femme, va au-devant de son effort d'idéalisation,
en se parant, en soignant sa démarche, en dansant, en
exprimant des pensées délicates : de même elle manifeste
de la pudeur, de la réserve, de la distance -- avec l'instinct
que cela accroit la faculté idéalisante de l'homme. ( Étant
donné la monstrueuse subtilité de l'instinct féminin, la
pudeur n'en reste aucunement à l'hypocrisie consciente :
elle devine que c'est précisément la pudeur réelle et naive
qui séduit le mieux l'homme et le pousse à surestimer.
Voilà pourquoi la femme est naïve par la subtilité d'un
8 = Mp X VII 3c. .blé 1887 8[1] 317
instinct qui lui conseille l'utilité de l'innocence. Un fermer-
les-yeux-sur soi-même volontaire...
Partout où la dissimulation agit plus fortement quand
elle est inconsciente, elle devient inconsciente.
pour la genèse de l'art. Ce rendre-parfait, voir-parfait
propre au système cérébral surchargé de forces sexuelles
(la soirée passée avec la bien-aimée, les plus petits inci-
dents transfigurés, la vie comme succession de choses
sublimes, « le malheur de l'amant malheureux plus précieux
que n'importe quelle chose ») : d'autre part, toute chose
parfaite et belle agit comme réminiscence inconsciente de
cet état amoureux et de sa façon de voir toute perfec-
tion, toute la beauté des choses suscite de nouveau par
contiguity la béatitude d'Aphrodite. Physiologiquement :
l'instinct créateur de l'artiste et la répartition du semen 1
dans le sang... L'aspiration à l'art et à la beauté est une
aspiration indirecte aux extases de l'instinct sexuel qui
les transmet au cerebrum 2 . Le inonde devenu parfait, par
« amour »...
L' « instinct du troupeau » dans son déguisement
L'instinct de mensonge et de dissimulation jaillissant
chez l'artiste
L'instinct contemplatif dans son déguisement.
La cruauté dans son déguisement
Maladie et dégénérescence dans leurs déguisements.
8 [6]
8 [7]
8 [s]
Zarathoustra
Dans cette oeuvre, chaque mot doit avoir d'abord affligé
et blessé chacun, puis l'avoir profondément ravi ce
qu'on n'a pas compris ainsi, on ne l'a pas compris du tout.
Dates et événements
DATES ET EVENEMENTS
DE LA VIE DE NIETZSCIIE
DE L'AUTOMNE 1885 A L'AUTOMNE 1887
dans celte oeuvre des notes rédigées plus tôt en majeure partie :
certaines remontent même à l'époque de composition du Gai Savoir
(automne
( 1881)) et de la première
P partie
P de Z (automne
^
1882) 3 Parallèlement, on trouve dans les manuscrits de Nietzsche
.
3. La composition de PBM avait été précédée en été 1885 par une ambi-
tieuse tentative pour refondre HTM.
4. Cf. dans ce volume le fragment 1[35]; un texte semblable se trouve dans
le fragment 2[73], daté par Nietzsche du G printemps 1886 n.
344 Fragments posthumes
expressément daté celle esquisse « Sils-Maria, été 1886 » 1 ), mais
il annonçait en outre un ouvrage portant ce litre sur la quatrième
page de couverture de Par-delà bien et mal. C'est seulement à
partir de celle date que l'on est en droit de parler d'un «chef-d'oeuvre»
destiné à comporter quatre livres et que Nietzsche voulait publier
sous ce litre 2 .
Entre-temps, Nietzsche se mit à composer des avant-propos
pour les nouvelles éditions de ses oeuvres précédentes, à partir
de la Naissance de la Tragédie. Simultanément, il ajouta au
Gai Savoir un cinquième livre et les Chansons du prince Hors-
la-loi. Ces travaux l'absorbèrent de l'été 1886 au printemps 1887
(l'impression de la nouvelle édition du Gai Savoir fut terminée
juste après la mi-juin 1887). Au printemps 1887, Nietzsche
rédigea une liste de 53 articles numérotés pour ne pas oublier ses
fragments encore inexploités. Celle lisle n'est cependant ni un plan,
ni un projet, mais un simple catalogue de notes éventuellement
utilisables 3 . L'important fragment Sur le nihilisme européen
fut composé à celle époque. Nietzsche le data de la « Lenzer Heide,
10 juin 1887 » 4 . Tout de suite après, il rédigea son pamphlet
La Généalogie de la morale dont l'impression l'occupa jusqu'en
octobre 1887 b. Pour celte oeuvre, il ne nous reste qu'un nombre
étonnamment réduit de notes de travail.
Nietzsche détacha lui-même de nombreux feuillets des carnets
qui contenaient les premiers étals du cinquième livre du Gai Savoir,
et de la Généalogie 6 . Il regroupa ces feuillets avec d'autres, détachés
de carnets antérieurs. Manifestement, il désirait classer ainsi les
éléments encore utilisables à part de ceux dont il s'était déjà servi
(el qu'il détruisit peut-être à celle occasion). Ce choix fut établi
en vue de La Volonté de puissance, qu'il avail annoncée depuis
un an et expressément mentionnée dans le texte de La Généalogie 7 .
Les feuilles volantes demeurèrent provisoirement sans numéro-
tation ni classement identifiable. Ce n'est qu'un an plus tard, en
été 1888, que Nietzsche entreprit une amorce de classement: il
pourvut la plus grande part des feuillets rassemblés de litres corres-
1. Cf. KGW VIII /3, p. 337 s.q Pour aider à mieux comprendre les frag-
ments des groupes 7 et 8, nous donnons également dans les notes du présent
volume l'intégralité de ce plan et les références à lui, fragment par fragment.
Notes
1 = N VII 2b
P. 19.
1. Cf. la lettre d'octobre 1885 a Overbeck (datée de Leipzig)
et celle de décembre 1885 (datée de Nice).
2. Cf. Au Mistral (chanson â danser), in GS, Œuvres
philosophiques complètes, p. 292.
P. 20.
1. Le titre Le Miroir apparaît à de nombreuses reprises dans
les manuscrits de 1885 : dans ce même volume, cf. 1 [109],
1 [121], 3 [11].
2. La glèbe.
P. 22.
1. Cf. 1 [10], PBM 257, GM I, 2, III, 14.
2. Sur le remaniement projeté de 1-ITH, ef. « Dates et évé-
nements ».
P. 23.
1. Cf. 1 [7].
P. 24.
1. éditeur], Ernst Schmeitzner.
2. « intuition intellectuelle »], concept de la philosophie post-
kantienne, en particulier de Schelling, contre lequel Schopen-
hauer mena une vigoureuse polémique.
3. pia /Taus], « pieux mensonge »; cf. Ovide, Métamorphoses,
IX, 711.
P. 26 •
1. Peter Gast avait joint â sa lettre Nietzsche du 26 août
1881 la traduction donnée par Gersdorff d'un dialogue entre
350 Fragments posthumes
Sir Samuel White Baker et le chef de la tribu des Latuka,
Comorro. Les Latukas habitent la région des sources du Nil;
le dialogue se trouve dans le livre de Baker, The Albert Nyanza,
great basin of the Nile, and explorations of the Nile sources, Lon-
dres, 1866.
2. Cf. J. Wellhausen.
P. 28.
1. Ce premier titre de La Volonté de puissance se trouve déjà
dans les cahiers W I 7a et N VII 2a, été 1885. Dans le présent
volume, on trouve d'autres titres pour VP : ci. 1 [131], 2 [73],
2 [74], 2 [ 100], 3 [4], 5 [ 75], 7 [64].
P. 29.
1. tout comprendre, c'est tout pardonner], cette maxime souvent
citée par Nietzsche est d'origine incertaine : peut-être remonte-
t-elle à la phrase « tout comprendre rend très indulgent » qui se
trouve dans le livre de Mme de Staël, Corinne, ou l'Italie 1807
livre XVIII, chap. v.
P. 30.
1. Sapienlia victrix], la sagesse victorieuse (N.d.T.).
2. Le sous-titre Prélude d'une philosophie de l'avenir revient
fréquemment dans les notes de Nietzsche ; il en a fait finalement
le sous-titre de PBM ; cf. aussi 1 [94].
P. 36.
1. Probablement pour VP, plan 1 [35].
P. 38.
1. Nietzsche avait lu au printemps 1885 les Confessions de
saint Augustin. Il écrivit à ce sujet le 31 mars 1885 à Overbeck :
« D'ailleurs on voit, dans ce livre, ce que le christianisme a
dans le ventre : j'assiste à cela avec la curiosité d'un médecin
et physiologue radical. »
P. 40.
1. experimenlum crues], épreuve de la croix (ou expérience
cruciale) (N.d.T.).
2. Cf. 1 [95. 121], 2 [26. 27. 38. 42. 47. 53. 54. 70. 73], 3 [9].
P. 41.
1. Cf. le sous-titre de 1 [82].
P. 43.
1. Le titre Le nouvel âge des Lumières date de l'année 1884;
pour le sous-titre, cf. 1 [45].
2. Cf. 1 [3] et la note.
3. Cf. 1 [144]; Nietzsche projetait en été 1883 une « morale
pour moralistes ».
No t es 351
P. 44.
1. Cf. 1 [167].
P. 46.
1. Cf. 1 [3] et la note.
2. Cf. la fin de 1 [4].
P. 47.
1. « Tout comprendre »], cf. 1 [42].
2. Pour VP, plan 1 [35].
P. 48.
1. Pour VP, plan 1 [35].
2. Le titre Gai Saber revient très fréquemment en 1884-
1885 ; pour les titres de chapitres de ce plan, cf. 1 [35], 1 [82],
1 [3]. Pour le sous-titre cf. 1 [45]. Cf. également 2 [73].
P. 49.
1. Lazzaroni], on sait que ce terme désigne la plus basse classe
du peuple napolitain. Nietzsche met par erreur l'article au
singulier et le nom au pluriel. Nous avons choisi de les mettre
l'un et l'autre au pluriel (N.d.T.).
2. herrnhuler], dits encore hernutes ou frères moraves, secte
renommée pour la pureté de ses moeurs, fondée par le
comte Zinzendorf (1700-1760) (N.d. T.).
3. Cf. 1 [35], 1 [ 129], 1 [151].
P. 50.
1. Cf. 1 126].
2. Cf. 1 [35] et note.
P. 52.
1. Conçu vraisemblablement comme titre.
P. 53.
1. Cf. Nietzsche d Overbeck : « ... lorsque l'après-midi, pres-
que tous les jours, je m'assieds ou m'étends au bord de la mer
sur mon rocher écarté, que je me repose au soleil comme les
lézards et m'embarque avec mes pensées dans des aventures de
l'esprit... » (8 janvier 1881, Gênes) ; cf. 1 [229].
2. Cf. 1 [961, 1 [223].
3. Cf. 1 [22 3] et V 6 [457. 459. 461].
P. 54.
1. Cf. 1 [126].
P. 55.
1. Cf. 7 67].
2. Cf. 1 232. 237], 2 [16]; et VII 35 [76] ainsi que le titre
du neuvième chapitre de PBM.
352 Fragments posthumes
P. 57.
1. Fragment de poème?
2. Titres de poèmes? Cf. entre autres VIII 11 [52]; 1 [229];
ainsi que les plans pour des recueils de poésies de l'automne
1884.
3. Cf. VII 35 [79] ; le Blocksberg, selon la légende, est le
lieu oû les sorcières tiennent leur sabbat (N.d.T.).
4. Cf. 1 102].
5. Cf. 2 185], PBM 226.
P. 58.
1. Raphaël sans mains], cf. PBM 274; cette formule est tirée
de la pièce de Lessing, Emilia Galotti, acte I, sc. Iv : « Ou pensez-
vous, Prince, que Raphael n'aurait pas été le plus grand génie
de la peinture si par malheur il était venu au monde sans mains? »
2. « Le moins d'Étal possible »], cf. A 179.
3. le bonheur de trouver...], cf. 1 [240], ainsi qu'une lettre
du début de 1883 à Malwida von Meysenbug sur Lou von Salomé :
« En fait je n'avais encore jamais rencontré un tel égoïsme
spontané, actif jusque dans les petites choses et que la conscience
n'avait pas brisé, un tel égoïsme animal : c'est pourquoi j'ai
parlé de " naïveté ". »
4. la nouvelle Mélusine], cf. Goethe, Les Années de voyage
de Wilhelm Meisler, livre III, chap. vi.
P. 59.
1. « Pardonnez-leur »], cf. Luc, XXIII, 34.
2. « tout comprendre »], cf. 1 [42].
3. Cf. PBM.
4. Cf. 1 204], 2 [ 12].
5. Cf. 1 153].
P. 60.
1. Fragment d'un poème?
P. 61.
1. Cf. 2 [11].
2. Plan pour la mise en ordre des fragments composés depuis
l'été 1885 ; cf. aussi 1 [ 187. 188. 189].
P. 62.
1. Cf. 1 [186 .1.
2. Cf. 1 186.
3. Cf. 1 186].
P. 64.
1. Cf. Fichte, Discours à la nation allemande, 1808 (N.d.T.) ;
Nietzsche s'en prend ici également à Paul de Lagarde.
Notes 353
P. 65.
1. Cf. la lettre écrite par Nietzsche peu de temps avant
Noël 1885 à Elisabeth et Bernhard Forster : « Et voilà votre vieille
bête qui boit trois grands verres pleins d'un vin sucré du pays
et qui se trouve du coup presque un peu (a bilzeli, forme dialec-
tale pour ein Bisschen) ivre ; du moins disais-je ensuite aux
vagues, quand elles venaient écumer trop violemment, comme
on dit aux poules : ((Butsch! Butsch! Butsch! »
2. fatum: destin (N.d.T.).
P. 66.
1. Cf. 1 [174], 2 [12].
2. Cf. VIII 18 [9].
P. 67.
1. Se rapporte à Z.
2. Se rapporte vraisemblablement à la mise au propre de
PBM, exécutée en hiver 1885-1886.
P. 68.
1. maleria peccans : matière coupable (N.d.T.).
2. Sur Sainte-Beuve, cf. VIII 11 [9], CI, « Divagations d'un
« inactuel », 3.
P. 69.
1. modo celer... ingressus : avançant tantôt vite, tantôt
lentement (N.d.T.).
2. Cf. 1 [144.145].
P. 70.
1. Fragment de poème?
2. Se rapporte probablement à l'autobiographie d'Euen
Diihrin : Sachen, Leben und Feinde (Choses, vie et ennemis),
Karlsruhe et Leipzig 1882, BN. Cf. la lettre du 24 novembre
1887 de Nietzsche à Peter Gast.
P. 71.
1. olium : oisiveté; désigne aussi en latin le loisir studieux
(N.d.T.).
2. Pour un recueil de poésies? Cf. 1 [ 163] et note, 1 [143. 174.
182].
3. Cf. 2 4].
4. Cf. 1 154. 237], 2 [161.
P. 72.
1. Cf. 1 [154. 232], 2 [16].
P. 73.
1. Cf. HTH, avant-propos, § 7.
2. Cf. 1 [ 172].
354 Fragments posthumes
P. 74.
1. Cf. Ernst Windisch; il s'agit du titre d'une section du
canon bouddhique qui fait partie du « KhuddakaNikàyo »,
dans le recueil « Sutta brefs » du canon TheravAda.
2 = W I 8
P. 78.
1. Cf. 2 10].
2. Cf. 1 230].
P. 79.
1. ce même siècle], le contexte exclut qu'il s'agisse du
XIXe siècle, comme l'implique la construction grammaticale :
il faut donc considérer l'allusion au xxxe siècle comme une
incise, Nietzsche renvoyant par l'expression « ce même siècle »
au XVIIIe et même au XVIIC siècle, conjointement nommés au
début de ce paragraphe (N.d.T.).
2. Cf. Goethe, premier Faust, vers 513 (N.d.T.).
3. Cf. 3 [6].
P. 80.
1. Se rapporte à HTH (comme avant-propos).
2. Cf. 2 [3. 51.
P. 81.
1. Cf. 1 [185].
2. Inter pares : parmi ses pairs (N.d.T.).
3. Cf. 1 [ 174. 204].
P. 83.
1. Cf. PBM, 242, 257.
P. 84.
1. Gaieté], cf. 2 [31. 33. 166].
2. Cf. 1 154. 232. 237].
3. Cf. VII 25 [3].
P. 85.
1. Cf. VII 25 [4], saga d'Olof Haraldsson.
2. aut libers, aut libri : « soit des enfants, soit des livres »
(N.d.T.).
3. « le génie est une neurose »], cf. le Journal des Goncourt.
P. 86.
1. Cf. HTH 40.
2. Cf. 4 [4].
Noies 355
3. Cf. 1 [82] et note.
4. Cf. 1 [82] et note.
P. 87.
1. Cf. 2 [31]; se trouve comme titre de chapitre dans 2 [40.
66], 3 [9] ; cf. aussi 3 [ 10].
P. 88.
1. Cf. 2 [30] et note.
2. Cf. 2 [40], titre de chapitre.
P. 80.
1. Nietzsche a rayé ici sur son manuscrit la phrase suivante :
Notre gaieté n'est-elle pas une fuite devant quelque incurable
certitude?
P. 90.
1. quod crut dernonstrandurn et demonstratum : « ce qu'il fallait
démontrer et qui a été démontré » (N.d.T.).
P. 91.
1. Cf. 1 [82] et note.
2. homo religiosus : l'homme religieux (N.d.T.).
P. 92.
1. Cf. 2 [43. 44. 46] ; 2 [51], titre de chapitre, et GS.
2. Cf. 1 [82] et note.
3. Cf. 2 [41. 44. 46] ; 2 [51], titre de chapitre.
P. 93.
1. Cf. 2 [41. 43. 44] ; 2 [51], titre de chapitre.
2. Cf. 1 [82] et note.
P. 94.
1. Rimus remedium : « la poésie est remède » (N.d.T.).
2. On trouve dans GS, Chansons du prince Hors-la-loi, un
certain nombre de poèmes correspondant A ces titres : Au Mistral,
A Goethe, A certains panégyristes (intitulé Ces âmes incertaines),
Sils-Maria, Le midi de l'ermite (intitulé Dans le midi), Vers
les mers nouvelles, Les pigeons de San Marco (intitulé Ma chance),
Rimus remedium et Un fou au désespoir. Le titre Au-dessus
de la porte pourrait correspondre A l'épigraphe placée en tête
de GS. (N.d.T.).
P. 95.
1. Plan pour PBM ; la citation de Turenne fut ensuite employée
par Nietzsche en épigraphe au cinquième livre de GS.
2. Cf. sous-titres de 2 [47. 65].
3. Cf. 2 [41. 43. 44. 46] .
4. Cf. 1 [154] et note.
356 Fragments posthumes
5. Cf. 2 [51j.
6. Cf. 1 [82j et note.
P. 96.
1. Cf. 1 [82] et note.
2. prava... sancta sublimare : « corriger les choses mauvaises,
renforcer les justes et sublimer les saintes » (N.d.T.).
P. 97.
1. suite], lecture incertaine.
2. Cf. GS, cinquième livre, 368 (N.d.T.).
P. 98.
1. Cf. Sophocle et la lettre de Nietzsche à Heinrich von
Stein du 18 septembre 1884 et la réponse de Stein du 1er décembre
1884.
2. Cf. VIII 24 [2], titre projeté pour EH (« au milieu de ma
vie » : N.d.T.).
P. 100.
1. magister... hilaritalum : « maître des arts libéraux et des
joies » (N.d.T.).
2. Cf. la lettre de Nietzsche à Peter Gast : « J'ai l'impression
d'avoir saisi quelque chose " par les cornes " : ce n'est certaine-
ment pas un ` taureau " » (21 avril 1886, après l'achèvement du
travail sur PBM) ; cf. aussi NT, Tentative d'autocritique, 2,
début. Dans GA, (WM et tome XIV), ce fragment est scindé
en plusieurs morceaux. Est-ce un plan pour une suite de PBM?
P. 101 •
1. Cf. 1 [82] et la note; pour une suite de PBM?
2. Plan pour une oeuvre tournant autour de Zarathoustra,
cf. 2 [ 72. 73. 75. 129].
3. Mi po Satador : cf. PBM, 258, où sipo matador est décrite
comme une plante de Java, parasite du chêne, au-dessus duquel
elle élève ensuite ses frondaisons : ce passage est à rapprocher
du dialogue avec Heinrich von Stein rapporté dans « Dates et
événements », p. 329 (N.d.T.).
P. 102.
1. Cf. 2 71 et note.
2. Cf. 5 [961.
3. Cf. 1 [35] et note.
P. 103.
1. Cf. 2 [71] et note.
2. Cf. 1 [82 .1 et note.
3. Cf. 1 [121] et note.
4. Cf. 2 [ 122] et 2 [ 125] ainsi que 3 [ 12], comme titre de
chapitre.
Notes 357
5. Cf. 1 [35] et note.
P. 104.
1. Cf. 2 [71 ] et note.
2. Pour le plan 2 [741; le chiffre (28) se rapporte au fragment
5 [50]. Le fragment est scindé en plusieurs morceaux in GA.
P. 105.
1. simplex reniias : « la vérité est simple »; allusion â la devise
(le Schopenhauer : « simplex sigillum Ueri » : « la simplicité est
la marque du vrai » (N.d.T.).
2. Pour le plan 2 [74] ; le fragment est scindé en plusieurs
morceaux in GA.
P. 106.
1. Themala, se rapportent au projet de Volonté de puissance;
le fragment est scindé dans GA.
P. 107.
1. Pour La Volonté de puissance.
2. Le chiffre (15) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 108.
1. Plan pour une suite de PBM ; cf. 2 [138] et 6 [2].
P. 109.
1. Le chiffre (7) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 110.
1. TÉA'fj : fins, buts (N.d.T.).
2. Le chiffre (30) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 111.
1. Cf. GM, première dissertation, 13 (N.d.7'. ).
2. Le chiffre (32) se rapporte au fragment 5 501.
3. Le chiffre (30) se rapporte au fragment 5 50].
4. Le chiffre (32) se rapporte au fragment 5 L 50].
P. 112.
1. Le chiffre (33) se rapporte au fragment 5 [50].
2. Le chiffre (31) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 113.
1. Le chiffre (30) se rapporte au fragment 5 [50].
2. Le chiffre (34) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 115.
1. Le chiffre (35) se rapporte au fragment 5[50].
2. Plan pour La Volonté de puissance, avec de nouveaux
sous-titres qui resteront valables jusqu'en 1888. Cet important
fragment, est, scindé en plusieurs morceaux in GA.
358 Fragments posthumes
P. 120
1: Projet pour un nouvel avant-propos de NT (Tentative
d'autocritique); cf. 2 [113].
P. 123.
1. Cf. 2 [110] et note.
P. 124.
1. Cf. 2 [110] et note.
P. 126.
1. Cf. 2 [125], titre de chapitre ; le chiffre (38) se rapporte
au fragment 5 [50].
2. Cf. 2 [73. 125] ; le chiffre (37) se rapporte au fragment
5 [501.
P. 127.
1. deus abscondilus : « dieu caché »; Isaïe, xLV, 15; expression
très souvent citée par Pascal (par ex. Lafuma 781; Brunschvicg
242) (N.d.T.).
P. 128.
1. Plan d'ensemble pour les nouveaux avant-propos des
oeuvres précédentes; cf. 6 [3].
2. Cf. 2 [73. 121. 122], 3 [12]. r
3. Plan pour le deuxième livre, dans 2 [200] ; les chiffres (37)
et (36) se rapportent au fragment 5 [50]. Ce texte est fragmenté
in GA.
P. 129.
1. t8ovi) : plaisir (N.d.T.).
2. Projet pour le livre I de 2 [200]; le chiffre (2) se rapporte
au fragment 5 [50].
P. 131.
1. Cf. la quadripartition dans 2 [200].
P. 132.
1. Annoncé sur la couverture de PBM. Esquisse; cf. aussi
2[71. 75].
2. net% nccgcav : « l'enfant jouant » : Cf. Héraclite, fragment
52 de l'édition Diels-Kranz; cf. aussi GM, troisième dissertation,
16 (N.d.T.).
P. 134.
1. « deus sine nalura » : « dieu, c'est-à-dire la nature » (N.d.T.).
P. 135.
1. Plan pour les quatre livres de 2 [ 100].
2. Le chiffre (36) se rapporte au fragment 5 [50].
Noies 359
P. 136.
1. regressus in in. finilum : «régression à l'infini ». (N.d. T.).
2. Le chiffre (39) se rapporte au fragment 5 [50].
3. Error verilale simplictor : « l'erreur, plus simple que la
vérité » (N.d.T.) : Nietzsche continue à polémiquer contre la
devise de Schopenhauer, « simplex sigillum yeri »; cf. 2 [77].
4. disciplina inlelleclus: « discipline de l'intellect » (N.d.T.).
P. 137.
1. Cf. 6 6].
2. Cf. 2 [82], 6 [2].
3. Cf. 2 [137].
P. 138.
1. Le chiffre (30) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 139.
1. Le chiffre (30) se rapporte au fragment 5 [50].
2. Le chiffre (40) se rapporte au fragment 5 [50 1.
P. 141.
1. Le chiffre (30) se rapporte au fragment 5 [501.
P. 143.
1. Le chiffre (3G) se rapporte au fragment 5 [50 .]
P. 144.
1. Cf. 2 [ 162].
P. 145.
1. Pour Aurore? cf. 2 [ 1651; le chiffre (41) se rapporte au
fragment 5 [50].
P. 146.
1. Cf. 2 [1551.
P. 19 7.
.
P. 160.
1. pudenda origo : honteuse origine (N.d.T.).
2. Le chiffre (47) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 161.
1. Le chiffre (7) se rapporte au fragment 5 [50]
boles 361
P. 162.
1. Le chiffre (23) se rapporte au fragment 5 [50].
2. Cf. 7 [7].
3. Le chiffre (41) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 165.
1. Cf. avant-propos d'A, § 3.
2. Plan pour un cinquième livre de GS.
P. 166.
1. Cf. 2 [33. 166].
2. Le chiffre (48) se rapporte au fragment 5 [50].
P. 167.
1. Cf. GS, cinquième livre, 377, fin (N.d.T.).
2. Cf. GS 377.
P. 171.
1. Cf. 3 2 , 3 [12], titre de chapitre.
2. Cf.6 11.
3. Cf. 1 35] et note.
P. 172.
1. Cf. 2 [8].
2. Cf. le poème du même titre dans GS (Chansons du prince
Hors-la -loi).
3. Cf. 1 [82] et note.
P. 173.
1. Cf. 2 [30. 31 J, 2 [40], titre de chapitre, 3 [9], titre de chapitre.
2. Pour le « miroir », cf. 1 [3] et note.
3. Cf. 3[1.
4. Cf. 2 [73] et note.
P. 175.
1. « Maledelto... Carmagnola) : « Maudit celui
qu'afflige une âme immortelle » ( Manzoni, Ile acte du
Comte de Carmagnola) (N.d.T.).
2. Cf. PBM 27.
P. 180.
1. Cf. 2 [25].
362 Fragments posthumes
P. 181.
1. Quaeri l ur : «la question se pose » (N.d.T.).
P. 182.
1. le dernier mot de la sagesse], cf. Goethe, second Faust,
vers 11574.
2. Cf. Luc, ii , 14.
P. 184.
1. conditio... conlidionalum: « condition... conditionné »
(N.d.T.).
2. Cf. GS, cinquième livre, 383 (N.d.T.).
3. Ecce... sigillum: «telle est pour nous la marque de la vérité »;
cf. in 2 [77. 135] la référence a la devise de Schopenhauer (N.d.T.),
4. « façon de penser... laiteuse »], cf. Schiller, Guillaume Tell,
IV, ii : « le lait de la façon de penser pieuse ; cf. aussi GM, troi-
sième dissertation, 5 (N.d.T.).
5. Cf. 3 [3]; VII 40 [59].
5= N VII 3.
P. 188.
1. Cf. Paul Rée, L'Origine des sentiments moraux, Chemnitz,
1887, BN ; Nietzsche a cité l'oeuvre de son ami dans HTI 137.
Cf. GM, avant-propos, § 4-7.
P. 192.
1. « incerti amici » : « amis de l'incertain » (N.d.T.).
P. 194.
1. Fragments de poèmes? Pour la dernière phrase, cf. DD,
« le fanal », OPC p. 47.
P. 198.
1. Cf. 6 8].
2. Primitive: primitivement (N.d.T.).
3. radicaliler: radicalement (N.d.T.).
P. 199.
1. Ce fragment a été transformé frauduleusement en lettre à
Elisabeth Forster-Nietzsche.
2. Cf. 5 [74].
P. 200.
1. Ce fragment a été transformé frauduleusement en lettre
Elisabeth Forster-Nietzsche.
Notes 363
P. 201.
1. Cf. la lettre de Nietzsche à Overbeck du 23 février
1887.
2. Cf. 7 [67] et note.
P. 202.
1. Pindare: dixième Pythique, 29-30.
2. Cf. AC 1.
3. Cf. 5 [7. 44] ; VIII 11 [40].
P. 205.
1. Cette liste est celle des fragments restés inutilisés après
la composition de PBM, des avant-propos de 1886-1887 et du
cinquième livre de GS.
2. Cf. 7 [67] et note.
P. 210.
1. Allusion probable à l'ouvrage de Lessing, L'Éducation du
genre humain (1780) (N.d.T.).
P. 217.
1. Cet important fragment est morcelé dans VP 2 (dans
l'ordre 4. 5. 114. 55). VP 1 le publie dans son intégralité, mais
sans date.
2. Cf. 2182. 138], 6 [2].
3. Cf. 5140j.
4. Cf. 1 [35] et note.
P. 218.
1. Titre donné par la suite à un chapitre de CI.
2. Variante de 5 [77].
P. 221.
1. Probablement à propos de La Volonté de puissance.
P. 222.
1. Probablement suscité par la lecture de l'ouvrage de J. Well-
hausen, cf. VIII 11 [337].
2. Citation tirée de l'article de Taine « Napoléon Bonaparte »,
dans La Revue des Deux Mondes du 15 février 1887, p. 752
(Cf. 5 [91]) (N.d.T.).
P. 223.
1. Les satires ménippées sont l'oeuvre de l'écrivain latin Varron
(116-27 av. J.-C.) : fragments ironiques dénommés d'après
le philosophe cynique Ménippe de Gadara (vers 250 av. J.-C.) ; en
France, le titre de Satire Ménippée a été également donné en 1594
à un pamphlet collectif dirigé contre la Ligue (N.d.T.).
364 Fragments po:sihr.tmes
P. 224.
1. Cf. 2 [73].
P. 225.
P. 231.
1. Cf. 33.
2. Cf. 5 7 ] et note.
3. Cf. 2 124].
4. Épigraphe de la seconde édition de C8.
P. 232.
1. Préface pour une suite projetée de PBM, utilisée plus tard
pour la préface de HTH II.
2. « ego ipsissimus... ego ipsissimum »: sans aucun égard pour
la correction grammaticale (le mot latin ego est féminin),
Nietzsche accorde une première fois le superlatif du démonstratif
ipse au masculin, et la seconde au neutre : on pourrait comprendre
dans lep remier cas « mon moi le plus lui-même. », dans le
second « le moi lelus lui-même » (en ( personne,
P ^tel qu'il
q ' est) )
(N.d. T.).
3. Quod demonstralum est: « ce qui a été démontré » (N.d.T.).
P. 233.
1. fada : des faits ; f ata : des fatalités (N.d.T.).
2. vestigia terrent : « (ses) traces suscitent la terreur »
(N.d.T.).
P. 234.
1. Épigraphe de la seconde édition de GS.
2. Cf. Jules Barbe d'Aurevilly, Les Œuvres et les hommes,
volume VIII, Sensations d'histoire, Paris, 1886 (Slatkine Reprints,
Genève, 1968). A ce propos, Nietzsche écrit le 4 mai 1887, de
Zurich, à Overbeck : « ... Le même jour, j'ai lu un Français
Notes 365
mécontent, un indépendant (car il y a aujourd'hui plus d'indé-
pendance dans son catholicisme que dans la libre pensée)...
Lis-le
, ^ j'en prends
P la responsabilité...
P (En
( tant que
q romancier,
il m'est insupportable).
i »
P. 235.
1. Cf. 2[137].
2. in abstraclis : « dans les choses abstraites » (N.d.T.).
3. Dans les Upanishads, syllabe mystique identique à Vishnu.
La concentration sur la syllabe OM, dans la pratique du Yoga,
permet d'arriver à la délivrance et à la vision du Brahman
(N.d.T.).
4. Cf. 5 [36].
P. 236.
1. Cf. GM, première dissertation, 2 (N.d.T.).
7 .= Mp XVII 3 b.
P. 247.
1. Toute une pari des fragments des sections 7 et 8 a été classée
par Nietzsche conformément au dernier plan de La Volonté de
puissance, VIII 18 [17], que l'on trouvera dans le tome X I V de
l'édition française. Pour éviter des reports constants à ce volume
nous donnons ici le double de ce plan, dont les grandes rubriques
seront également indiquées en note, en tête de tous les fragments de
7 et 8 qui s'y rapportent :
Ébauche du
plan de :
la volonté de puissance.
Essai
d'un renversement de toutes les valeurs.
Sils Maria
le dernier dimanche du
mois d'août 1888
DÉLASSEMENT DU PSYCHOLOGUE.
P. 262.
1. data a posteriori, data a priori : « données a posteriori,
données a priori » (N.d.T.).
P. 263.
1. Cf. Kant, Der Streit der Fakulldlen, zweiter Abschnitt :
Der Sireil der philosophischen Fakultdl mit der juristischen,
Akademie-Textausgabe, Berlin, 1968, vol. VII, p. 91. (Le Conflit
des facultés, traduction Gibelin, Vrin, 1955).
2. Résumé de la Critique du jugement de Kant, § 47 (Akaderie-
Textausgabe ^V 308-310, citation de la page 309) ; cf., dans la
,
8 = Mp XVII 3c.
P. 315.
1. Ce fragment correspond, dans le plan ci-dessus, au livre I,
chapitre III.
372 Fragments posthumes
P. 317.
1. semen: semence (N.d.T.).
2. cerebrum: cerveau (N.d.T.).
3. vis inerliae: force d'inertie (N.d.T.).
P. 318.
1. Ce fragment correspond, dans le plan ci-dessus, au livre II,
chapitre Ier.
P. 320.
1. Ce fragment correspond, dans le plan ci-dessus, au livre II,
chapitre n
P. 323.
1. Ce fragment correspond, dans le plan ci-dessus, au livre II,
chapitre iii.
P. 327.
1. a p.cpop& : « rencontre malheureuse, accident » (N.d.T.).
2. Nitimur in velitum: « nous nous efforçons d'atteindre le
défendu », Ovide, A mores, Livre III, 4, vers 17; cf. GM, troisième
dissertation, 9 (N.d.T.).
Table de concordance
1,es concordances doivent permettre une comparaison
du texte établi dans le présent volume avec celui des
éditions antérieures, lesquelles ont tout d'abord publié
et fait connaître les posthumes de Nietzsche datant de ce
qu'il est convenu de désigner comme la « période de la
transvaluation D.
La première colonne porte la numérotation des frag-
ments dans le présent volume.
VP 1 Dans la deuxième colonne sont relevés les numéros
correspondants des aphorismes de la première édition
de La Volonté de puissance (Der taille zur Macht). Elle
parut en tant que volume XV de la « Gross-Oktav-Aus-
gabe »: Friedrich Nietzsche, Der Wille zur Macht, Ver-
such einer Umwerthung aller Werthe (Studien und Frag-
mente), Leipzig, C. G. Naumann, 1901. Signèrent en tant
qu'éditeurs : Peter Gast, Ernst et August HornelIer.
Cette première compilation embrassait 483 textes pos-
thumes numérotés dont 12 se trouvent nouvellement
réédités dans le présent volume.
VP 2 Dans la troisième colonne se trouvent relevés les numé-
ros correspondants des aphorismes de La Volonté de
puissance dans sa version définitive, aujourd'hui encore
universellement connue. Elle fut fixée dans les volumesXV
(p. 129-489) et XVI (p. 1-402), lesquels, édités en 1911
par Otto Weiss, furent recueillis à la place de VP 1,
dans la grande édition in-octavo (reprise dans l'intervalle
chez A. Kreener à Leipzig). Ce texte, « canonique » pour
toutes les éditions ultérieures, correspondait, hormis
quelques modifications et compléments sans nulle
importance, à celui que Peter Gast et Elisabeth FÔrster-
Nietzsche avaient publié en 1906 dans la prétendue
« édition de poche » (vol. 9-10). La compilation embras-
sait désormais 1 067 textes posthumes numérotés : dont
221 nouvellement édités dans le présent volume.
376 Fragmen ts poslhunaes
486
2[88] 621
663
2 89] 628
2 90] 511
2 91 518
2 92^ 500
2 93j 436
2^94 XIV 14, 19
}i •
2 95 ^^(
96] 219
2 97] 1013
2 98] 223
2 99] 691
2 1001 905( !) XV1 416 (11 1)(!) Podnch, Blick 89
X I V 339, 190
XVI 448 (2)
2 101] XIV 162, 312(1)
2 102] 491(1)
2 103] XI I I 64, 160
2 104] 431(1)
2 105] 622
2 106] 416
1049
2[107] 151
2 109] 599
2108] 616
2 110] X I V 364, 235 (1)
2 112] 841
2 113] X 1 V 367, 237
2(114] 796
845
2(117] 600 (1)
1 118] Podach, Blick 90(1)
119] X I V 366, 236
121 78
2[1221 59 Podach, Buick 84
2(124] XIV 348, 204(1) Podach, Blick 91
XIV 219, 445
2[126] 537 XVI 451 (37)
XIV 219, 445(1)
2[127] 1
2[128] 13.1
2[129] XII 419(1) Podach, Blic.k 92(1)
2(130] 797
2{ 131] 1'(1) 69 XVI 417 (II 2)
391 XIV 341, 194( I)
85G
1054
2[ 132] 471 X I V 3, 2
575
2[ 133] 601
2[134] XVI 451 (39)
2[ 137] Podach, Buick 99
2 138] Podach, Buick 98(1)
2^ 139] 554
631
2(140] XIV 49, 91(1)
XVI 410, 1076
2 [ 141] XIV 27, 48
2[142] 632
382 Fragments posihumes
VP' VP , GA Autres
2 143 638
2 144 240 XIV 218, 442(1)
2 145` 546
2 1 4 6' XIII 58, 140
2 147) 589
2 148 643
2 149 556
2 150 556
2 151 556
`Z 152] 556
2 153] 1036
2[154j 555
21 155] 470
2[ 157 564
2[ 158 547
'2 159 620
2 160] X1V 397, 268( t)
2 161 j 410( t)
2 162] XIV 354, 218
[
X1V 401, 278( !)
2 165^ 253( I)
258 1)
2 166] 991^ 1)
2 168] 345
2 169] 587
2 170] 265(1)
2 171 ] XV I 452 (43)
2 172] 582
'2 174] 606(1)
2 175 70
2 177 XVI 452 (46)
2 178 267
2 179 - XIV 410, 287(1)
2{iso ^ XIV 400, 275
X I V 358, 223
2 181 XVI 452 (42)
2 182 730
2 183] XIV 402, 279(1)
2 184 301(1)
2 185 Podach, Buick 100(I)
2 186 1048(!) XIV 360, 226(1)
2 188 366
2f 189 254
2 190 254
2'191 399(1)
2' 193 548
2194] XVI 450(23)
2 195] 415
1196
197).
1 XIV 414, 295
146(1)
198 XIII 350, 870(1)
2 199 XIV 374, 254
2 200 XIII 318, 777
2 201 XIV 373, 249
2 204 475(1) Podach, Blick 100(1)
1205] 369 ( 1)
206
789(1)
207] 405(1)
Podach, Buick 53
3[3^ Podach, Buick 45
Table de concordance 383
VP' VP' GA Autres
1
4 X I V 409, 286 ( I)
7 XIII 26, 57
8 XIII 78, 199
6[9] XIII 78, 197
6[11] 513
6^12] XIV 90, 183
6[13] XIII 47, 117
6[14] 565( !)
6[18] XIII 130, 195
6[22] XIV 174, 338
6[23] XIII 48, 120
6 24] XIV 231, 472
6[2 3] 32
7(1] 666
472
665
XIII 61, 151
7[2] 678
661(1)
572
7[3] XIV 15, 23
4 18
677(1)
803
7[4] 412
261
XIV 9, 9
X I I I 299, 733
XIV 436 (Note de 9)
XIV 11, 9
XIV 8, 9(1)
530(1)
XIV 441
( Note du no 452)
XIV 143, 297
X I V 139, 284
XIV 441
( Note du no 452)
X I V 223, 452
XIV 220, 446
368
Table de concordance 385
VP' VP' GA Autres
FRAGMENTS POSTHUMES
Imprimé en France
Dépôt légal : 4e trimestre 1979
N° d'édition : 25593 -- N° d'impression : 2995
25593