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VIOL D’ANGES
Pédophilie :
Un magistrat contre la loi du silence
Calmann-Lévy
Sommaire
Couverture
Présentation
Page de titre
Dédicace
LE VASE BRISÉ
1 - ENVOI
Le juste milieu
Un arbre
Dire le droit
Ma quête
Justice et émotion
Être ou avoir
Les astres
La négation de tout
4 - LA PÉDOPHILIE
La pédophilie
Cet esprit bien français
Du viol
Du déni au non-dit
De l’individu, de la société
6 - ICI ET MAINTENANT
Le Minitel
L’irruption du sida
La rue et la misère
La mort rôde...
La drogue
Du tourisme sexuel
Fugueurs en danger
Une criminalité et des sectes au fait de la modernité
Des hommes
Des femmes
Des enfants
Du silence et de ses détours
9 - PORTRAIT DU PÉDOPHILE
Le débile
La brute
M. ou Mme Tout-le-Monde
Femmes et pédophiles
Un bon vendeur
Le viol de l’ange
Identités niées
Violés et reviolés
Déshumaniser la victime
Révéler
Imploser
Quand l’abusé devient abuseur
Asexués
11 - VICTIMES ET BOURREAUX
Tirer le rideau
Le procès de la victime
Un jeu de miroirs
12 - DES REMÈDES
La conférence internationale de Stockholm
Un crime contre l’humain
Prévenir et punir
Le danger de la récidive
Ne plus déléguer
La parole de l’enfant
13 - CITOYENNE DU MONDE
Hermès
Un monde plus libre, plus solidaire, plus fraternel
Aide ou assistance ?
ÉPILOGUE
Sauvetage
REMERCIEMENTS
À propos de l’auteur
Notes
Copyright d’origine
Achevé de numériser
Je dédie ce livre à celle dont l’anagramme est contenu
dans le titre de cet ouvrage ;
celle à qui je dois tant, celle sans qui je n’aurais pu
avoir tant de joie ;
celle que je remercie d’Être :
à AGNÈS.
ENVOI
Une réalité biaisée
Depuis vingt ans, je suis magistrat ; et depuis vingt ans, je suis choquée
de voir mes contemporains utiliser des enfants comme objets sexuels. Je
considère aujourd’hui que la pédophilie est une terrible maladie sociale, et
donc une cause nationale. Ni plus ni moins.
J’ai participé à de nombreux colloques sur la maltraitance des enfants et
j’ai pu constater l’évolution de ces séminaires, qui, au fil des années, ont
évoqué la maltraitance globale et subsidiairement sexuelle, puis l’inceste et,
enfin, la pédophilie. A chaque fois, malgré le scandale provoqué,
l’évolution devenait irréversible.
Les blocages rencontrés me donnaient de plus en plus envie d’en parler.
C’est ainsi qu’avec mes complices de toujours — un psychiatre, un avocat,
un éducateur, un juge — nous avons un jour décidé de percer le mur du
silence et de publier un livre qui se voulait informatif et didactique. Le
temps, hélas, ne nous en a pas laissé le loisir. Mais l’idée semée ne m’a dès
lors plus lâchée. Peu à peu, mon point de vue a évolué et je me suis aperçue
que j’avais mûri un autre livre. J’avais vraiment besoin d’écrire sur la
pédophilie.
Mon propos est bien davantage de dire à cet homme ou à cette femme, à
cet accusé : « Réagissez, vous êtes un être humain, retrouvez votre dignité
d’être humain. » Pour l’exprimer autrement, dans l’exercice de mon métier,
je prends l’exemple de l’arbre, avec ses racines et ses branches, et
j’explique au délinquant que, s’il coupe les unes ou les autres, il n’est plus
rien. Il deviendra un poteau, un zombie, mais pas un homme.
En cette fin de siècle assez déprimante — en tout cas déprimée — , les
êtres humains sont comme des poteaux, des zombies, ils ont oublié leurs
racines et leurs branches. Ils tiennent tant bien que mal debout, mais ils ne
peuvent plus s’abriter de la pluie, ni du vent. Ils sont complètement
ballottés de tous côtés, subissent leur vie au lieu de la prendre en main, pour
pouvoir dire, comme Auguste, dans Cinna : « Je suis maître de moi comme
de l’univers. »
La maîtrise de soi implique la maîtrise par le bas, par le haut et par le
milieu. Si ces trois éléments ne sont pas réunis en nous, nous n’arrivons à
rien. J’écris avec ces trois éléments. C’est la seule façon de contribuer, bien
que je ne sois pas prédicatrice ni moraliste, ni polémiste, à une entreprise
plus vaste : faire reprendre conscience aux gens de leur vraie place dans ce
monde. Tant qu’ils n’auront pas retrouvé la leur, ils ne pourront pas
redonner leur place aux autres. Chacun est à la fois Dr Jekyll et Mr Hyde,
chacun est capable du pire comme du meilleur, nous devons l’accepter.
Il faut donc que tout un chacun puise, dans les trois
domaines — spirituel, intellectuel et matériel — , les forces de se maîtriser
et l’équilibre suffisant pour avancer. Un homme qui se trouve face à un
tribunal est par définition en déséquilibre.
Un magistrat se doit donc d’être un relais, une espèce de passerelle entre
deux mondes, celui des gens dits « normaux » et celui des gens dits
« délinquants ». Il doit rééquilibrer les forces en présence. La balance,
emblème de la justice, porte bien en elle cette signification.
Qui s’intéresse à l’enfant ?
Le passage au XXIe siècle ne nous permet pas de dire quelles sont les
nouvelles valeurs de l’humanité. Celle-ci traverse une phase de confusion
absolue, comme dans toutes les périodes de transformation en profondeur.
L’« an mil » avait déstabilisé l’humanité qui croyait en la fin du monde
mais gardait un repère religieux. Le changement que nous vivons
aujourd’hui me paraît beaucoup plus déstabilisant encore — car en même
temps que nous changeons de millénaire, nous changeons aussi d’ère
symbolique : nous entrons dans l’ère du Verseau.
2
Pendant un an, j’ai été substitut des mineurs, période au cours de laquelle
je n’ai eu de cesse de faire changer cet état de fait. C’est contre mon gré que
j’ai exercé ces fonctions : je voulais m’occuper d’adultes.
Dans ma vie privée, en revanche, je m’occupe de nombreux enfants.
Mais je n’ai jamais voulu mêler ma vie familiale et ma profession. Je
voulais m’occuper de criminels, voilà ma voie de départ. Je menais une
quête : comment l’être humain peut-il parvenir à une telle déchéance ?
Si tout ce qui concerne l’enfant me touche, c’est parce qu’il représente,
d’après moi, sur un plan éthique, l’avenir de l’homme.
Mon combat consiste à dire qu’un enfant n’est pas une marchandise.
Nous avons le devoir sacré, je dis bien sacré, de le considérer, d’abord et
avant tout, comme un être humain dès sa naissance et même avant. On se
doit de le respecter en tant que tel, d’accepter qu’il ne soit pas le
polytechnicien qu’on voulait le voir devenir. De tolérer qu’il soit paresseux,
maladroit, bègue... De faire en sorte qu’il transforme ses défauts en qualités,
et qu’il devienne un être humain à part entière, dès dix-huit ans. Jusqu’à cet
âge, il est, pour moi, sacré. Voilà pourquoi je suis concernée par la
pédophilie. C’est un problème d’actualité particulièrement sensible, auquel
je suis très fréquemment confrontée, problème nié par tout le monde. Il faut
absolument en parler. J’en parle. Si on veut changer quelque chose aux
mentalités, il faut s’y mettre dès aujourd’hui. Pour ma part, je tente de
distiller cette idée fondatrice de la supériorité de l’être sur l’avoir. C’est
mon combat journalier.
3
Les calculs des savants font apparaître un grand cycle universel subdivisé
en douze temps d’à peu près vingt et un siècles. Ils appellent ces temps des
ères. Et tous les vingt et un siècles environ, une ère nouvelle apparaît, et
avec elle toute une symbolique liée aux constellations, aux signes du
zodiaque mais se déclinant en sens inverse de la roue zodiacale. Il n’est pas
possible de connaître la pertinence des symboles qui ont régi le monde
antérieurement aux trois dernières ères. Mais il est significatif que ces trois
ères, Taureau, Bélier, Poisson, aient été marquées par un symbolisme reflété
dans toutes les religions vieilles de quatre mille ans avant Jésus-Christ.
L’ère du Taureau a fait naître des dieux ou des êtres à l’image de la bête :
Apis et Mithra, le veau d’or, l’enlèvement d’Europe par Zeus qui a donné le
Minotaure.
L’ère du Bélier, près de deux mille ans plus tard, a vu fleurir le symbole
de l’agneau (sacrifice d’Abraham), le dieu Râ, la Toison d’or, l’agneau
pascal qui s’est superposé au veau d’or. La nouvelle ère n’apparaît pas du
jour au lendemain mais des phénomènes d’avancées et de retraits sont
soulignés dans toutes les religions.
La Chrétienté a eu le poisson pour emblème et Jésus est né sous cette
symbolique. Il était pêcheur d’hommes et multipliait poissons, pains et le
volume du vin. Il a, lui aussi, sacrifié l’agneau. Devrons-nous sacrifier
l’enfant-Dieu pour effectuer le passage à l’ère du Verseau : l’ère de
l’homme ?
Le Verseau est d’ordinaire représenté par un ange qui porte sur le bras ou
l’épaule une amphore inclinée, d’où de l’eau se déverse. Il représente la
condition humaine parvenue à une certaine évolution (l’androgyne ?) quasi
immatérielle, fluide. Il verse la connaissance aérienne, parle à l’âme, fait
appel à l’amour universel. Curieusement, il représente aussi la circulation
du sang...
A l’occasion de chaque mutation, de chaque passage d’une ère à la
suivante, il y a eu sacrifice : du veau d’or, de l’agneau, de l’animal en tant
qu’animal. Le sacrifice du petit de l’homme a-t-il la même signification ?
Sacrifions-nous aujourd’hui le Dieu fait homme pour devenir l’ange,
l’homme-Dieu ? Sacrifions-nous nos racines pour mieux les retrouver ?
Doit-on toucher le fond de ce qui est en bas pour atteindre, à nouveau, ce
qui est en haut ?
N’est-ce pas jouer à l’apprenti sorcier ? L’avenir ne pourra pas nous le
dire si nous sacrifions l’enfant, l’écartelons, l’anéantissons.
Les astres
Les ères ne sont pas les seules à réagir sur les individus, si on en croit la
tradition : les planètes ont une action sur les générations quand elles ont une
révolution lente. Et plus elles sont lentes, plus leur action a d’effet. Pluton
est ainsi la plus lente des planètes du système solaire et la plus éloignée de
la Terre. Son action sera invisible, subtile, du domaine de l’inconscient.
Hadès-Pluton est le dieu des Enfers qui a enlevé Proserpine, dieu boiteux
et forgeron, riche, puissant transformant la matière. Un amas de planètes
s’est formé dans le signe du Scorpion. Pluton a la maîtrise de ce signe. Cela
explique le symbole de la révélation actuelle de tout ce qui était caché, du
mystère, de l’intime, de l’enfer, de la mort.
La récente mise au jour des scandales financiers et sexuels relève
symboliquement du domaine de cette conjonction destinée à transformer, à
détruire pour reconstruire, à mourir pour renaître.
Pour les affaires qui nous occupent, avec la révélation de l’agression, la
plaie enfouie, qui minait de l’intérieur, va pouvoir cicatriser, la parole va
empêcher l’acte et l’aveu deviendra le premier pas vers la guérison. Avec la
parole, la honte change de camp, l’inversion et la confusion s’effacent, la
victime reprend sa place et l’auteur voit poser mots et sanction sur ses actes.
Saturne ou Chronos, dieu du Temps, dieu qui dévore ses enfants, frère du
précédent, symbolise la souffrance, la restriction, la discipline, les moyens
d’accomplissement de soi, d’éveil et de progrès, de sagesse, de contrôle et
de maîtrise de soi, acquis seulement avec le temps. L’alchimie de la
complétude de l’Être ne peut se réaliser qu’au prix de grands efforts. En
d’autres termes, un enfant détruit ne deviendra jamais de l’Or, sauf s’il doit
passer par l’Œuvre au noir, pour me référer à Marguerite Yourcenar...
Saturne était la planète la plus lente que connaissaient les Chaldéens, qui
n’avaient pas encore découvert Uranus, Neptune et Pluton. Septième
planète de notre système solaire, elle fait sa révolution en vingt-huit ans et
demi environ. Saturne réglait la vie de l’individu en formant des angles
avec elle-même lors de ses différents passages, de sept ans en sept ans.
C’est ainsi qu’elle revêt une importance primordiale dans les étapes de
l’évolution de l’enfant : de zéro à sept ans, de sept à quatorze ans, de vingt
et un ans à la trentaine...
Les étapes initiatiques
Remarquons que ces âges ont toujours été retenus comme étant des âges
clés, des âges de passage. Le droit canon nous en a laissé une trace
incontestable avec ce qu’il était convenu d’appeler l’âge de raison. Les
sociétés antiques, spartiates notamment, laissaient les bébés mâles aux
mains des femmes jusqu’à cet âge ; le garçon ne passait qu’ensuite aux
mains des hommes qui préparaient pendant sept autres années le passage
suivant, l’initiation de l’adolescence (ce sera la pédérastie. Pour d’autres
sociétés, ce sera la communion, la circoncision...).
Sept ans, c’est également l’âge biologique de la fermeture de la
fontanelle, porte laissée ouverte à la naissance, arc-en-ciel entre le divin et
la matière, septième chakra 3 en communication avec le cosmos.
L’infans 4 rit aux anges, il est en prise directe, passive, réceptive, avec
l’au-delà. Il est de sensibilité féminine, yin selon les Orientaux.
Au fur et à mesure que la fontanelle se ferme, il apprend à vivre dans son
corps, dans un monde plus restreint, à quitter le divin, le dialogue avec
l’ange et la chaleur de sa mère pour accéder à la sociabilisation par l’entrée
à l’école. Il n’a conscience ni de la raison, ni des concepts de bien et de mal,
ni de son corps ni de son sexe. Dans le même temps, les testicules du petit
garçon descendent et atteignent, à sept ans environ, la première des portes :
le chakra racine. La porte sacrée du Ciel étant fermée, les testicules vont
remonter, les portes du bas s’ouvrir et culminer à quatorze ans. Entre sept et
quatorze ans, l’enfant, qui n’avait conjugué que le verbe être, va apprendre
à conjuguer les verbes avoir et posséder. Il va devoir appréhender le
principe actif, la prise de pouvoir sur le monde, l’action et la réflexion, le
yang. En ouvrant son intellect, sa raison, il referme sa prescience, sa
connaissance et acquiert le savoir.
L’adage selon lequel « la vérité sort de la bouche des enfants » est une
réminiscence de l’état de communication de l’enfant avec les forces
inconscientes qui, dès l’âge de raison, font place aux forces de la
conscience. Chacune des portes va s’ouvrir et se refermer, l’enfant va
apprendre à se servir de ses sens, de la parole — Freud dirait qu’« il passe
du stade anal au stade oral » — et quand son rythme biologique sera
accompli, les testicules redescendus, l’inconscient et le conscient maîtrisés,
les conjugaisons des auxiliaires apprises, les pôles positif et négatif
alternativement déclinés, l’enfant sera alors capable de reproduire,
d’appréhender la réalité dans sa totalité, de faire des choix en toute
connaissance de cause. A ce moment-là, et à ce moment-là seulement, il
pourra librement choisir son chemin, sa vie, ses buts et ses moyens.
Dans le même temps, il aura complètement « incorporé » sa sexualité et
pourra faire le choix d’un partenaire. Il trouvera la vibration à l’unisson du
cosmos avec cette moitié qu’il aura transcendée, sublimée. Il pourra alors
mourir de la « petite mort » et parvenir à l’extase.
Pendant la période de développement de l’enfant, toute tentative
d’interruption de sa croissance, de trahison de ses valeurs, est un crime
contre l’Être originel qu’il est en passe de retrouver. Certaines valeurs
pourraient ne pas s’imprimer dans son développement, des portes
pourraient ne pas se fermer ou ne jamais s’ouvrir. Les connexions
harmoniques pourraient ne jamais se rejoindre et l’enfant pourrait ne jamais
retrouver son entière identité.
Toute agression devient dès lors une condamnation sans appel de
l’homme en devenir. Un enfant dont on ne respecte pas les rythmes de
développement, de passage, devient un immature affectif. Il demeure dans
le mental et ne rétablit pas sa dimension sacrée. Il ne fait plus la différence
entre savoir et connaissance. S’il en est ainsi, il sera toujours à la recherche
en lui du manque, et consommera de la puissance ou de la chair pour pallier
cette carence. Devenu adulte, il se réappropriera l’enfant pour se
réapproprier la jeunesse qu’il n’a pas eue, la pureté, l’innocence,
l’inconscience dont il a été dépossédé. Le déséquilibre crée un ancrage dans
la matière qui appelle son complément divin. L’homme, pour retrouver ce
divin, se prendra pour un dieu. Il deviendra Narcisse, qui n’aime plus que
lui, que son plaisir, que la quête du monde entier pour lui seul.
Cet homme-là est boiteux, il recherche sa condition initiale, son état
antérieur d’ange ou d’androgyne ; et d’opprimé qu’il fut, il devient
oppresseur ou demeure une éternelle victime... Son interrogation
métaphysique reste souvent très proche de la fascination de la mort, du
retour aux origines. Il ne peut dépouiller le vieil homme qu’on ne lui a pas
permis d’être, alors il ne lui reste plus qu’à stagner ou à dépouiller l’ange.
L’acte du pédophile devient dès lors une tentative déviée, déviante,
régressive, abusive, de recherche d’une spiritualité dans un but
d’appropriation.
La négation de tout
LA PÉDOPHILIE
On l’a vu, sans bien encore en saisir toute la portée : dans le Code pénal,
les mots d’inceste et de pédophilie n’apparaissent nulle part. C’est donc que
« ça » n’existe pas ! De même, dans les mentalités, c’est inconcevable, donc
ça n’existe pas. Beaucoup d’individus rêvent d’abuser d’enfants, et certains
le font, mais personne n’imagine que quelqu’un d’autre est capable de le
faire. Et pourtant... Il suffirait de citer quelques chiffres pour prendre une
première mesure du phénomène : en dix ans, les infractions aux mœurs ont
augmenté de 40 p. 100. Aujourd’hui, sur 4 600 violeurs emprisonnés, 2 850
sont des violeurs d’enfants. Et ce n’est que la partie émergée d’un iceberg
dont on commence seulement à percevoir l’ampleur. Il y a quelques mois,
on a découvert que « ça » existait en Belgique : c’est l’« affaire Dutroux »,
un vrai séisme ! Dans l’Hexagone, la première réaction a été de dire que la
Belgique n’était pas la France. Même des magistrats et des policiers ont
réagi en ces termes : en France, ça ne peut pas exister.
Alors même, encore une fois, que fin juillet-début août, deux autres
affaires analogues ont éclaté, l’une en Italie, l’autre en Espagne, à Séville, et
que personne n’en a parlé, même pas les journaux. Pourtant, des magistrats,
des hauts fonctionnaires, des politiciens, des éducateurs, des policiers et
même des juges pour enfants étaient impliqués dans ces réseaux.
Du déni au non-dit
En réalité, l’affaire Dutroux, telle qu’on l’a présentée dans la presse, n’est
pas essentiellement une affaire de pédophilie. Les faits se résument, en
l’état, à la mort de quatre enfants, à la découverte de deux autres, séquestrés
dans un lieu aménagé à cet effet.
L’opinion publique en a retenu le décès abominable de deux petites
filles — mortes de faim dans des conditions atroces — , et la disparition de
deux autres, alors même que tout le monde espérait les revoir encore en vie.
Les prénoms de ces quatre enfants sont sur toutes les lèvres. Leurs
visages sont connus ; elles sont stigmatisées, reconnues comme « les
victimes du monstre ».
Deux autres enfants ont été abusées et séquestrées par Dutroux. Les
médias les ont reconnues comme victimes d’une séquestration. Leurs noms
ont à peine été évoqués. Les abus sexuels ont été mentionnés du bout des
lèvres. Nous n’en entendons plus parler. Le silence s’est abattu sur elles. Il
ne reste plus de leur histoire que l’étiquette de pédophile attribuée à
Dutroux. Chaque fois qu’un journaliste parle de cet homme, il le qualifie de
pédophile.
C’est devenu pour lui un attribut dans le sens fort du terme, même si
celui-ci ne recouvre que très partiellement la réalité des faits commis. Pour
moi, s’il devait être reconnu coupable des actes dont on l’accuse, Dutroux
ne serait qu’accessoirement un pédophile, car il est avant tout un pervers,
un escroc, un trafiquant, un assassin. Il devrait, à ce moment-là, être classé
dans la catégorie des monstres tels que chaque époque peut en identifier.
Deux mois après les révélations de l’affaire belge, les médias relataient
l’arrestation de neuf personnes qui, à Calais, avaient abusé, semble-t-il, de
leurs enfants. Nous n’en savons pas plus, ni le nombre d’enfants concernés,
ni leur prénom, ni leur âge. Le problème a été évacué par la seule précision
donnée, à savoir leur origine sociale : le quart-monde. Ce n’était pas des
bourgeois de Calais.
La multiplicité des auteurs et des victimes autant que le retentissement
récent de l’affaire Dutroux ont permis de dénoncer cette affaire. Mais en
règle générale, le secret n’est pas levé.
Dans ce cas, comme on l’a vu, ce sont tous les scandales sous-tendus par
l’affaire Dutroux qui ont sensibilisé tout un pays. Là, le phénomène a été
indéniable, et « ça » a dû sortir. Mais en règle générale, c’est un secret,
« ça » ne doit pas sortir de la famille. Ou alors, et c’est pis : c’est encore
une « affaire de fesses », aucun intérêt. Voilà le genre de réactions qu’on
peut entendre sur le sujet.
Nous sommes donc à un moment charnière où la pédophilie, hier encore
complètement taboue, commence à être mise au jour. Cette mutation a
commencé par le viol, autre tabou. Aujourd’hui, on en parle un peu plus
facilement, et le législateur a beaucoup progressé sur ce point. Mais
l’inceste reste un sujet très difficile à aborder. Quant aux pédophiles, on se
bornait encore à considérer que ce sont ceux qui partaient faire du
« tourisme sexuel » aux Philippines ou ailleurs. Tout d’un coup, avec
l’affaire Dutroux, cet aveuglement est devenu intenable.
Quand je dis que les gens « pensent » que la pédophilie n’existe pas, je
veux dire que cela n’existe pas non plus pour ceux dont c’est pourtant le
métier de rester à l’écoute de ces problèmes. Quand un éducateur entend, de
la bouche même d’un enfant, des révélations d’abus sexuels, quand un
médecin, quand un instituteur l’entend, quand un juge l’entend, bien
souvent, en réalité, il ne l’entend pas. Plus exactement, son inconscient
coupe l’écoute, pour ne pas l’entendre. C’est une sorte de censure
inconsciente. Parce que c’est quelque chose qui gêne beaucoup trop. C’est
un sujet dont personne n’a envie de parler, jamais. Que personne n’a envie
d’entendre, jamais.
Pourquoi ? Peut-être chacun se dit-il, en pareils moments, qu’à lui aussi,
un jour, cela pourrait arriver... Dans tout être humain, existe une part de
fantasme. Le cas de figure où l’on supporte le mieux de l’entendre, c’est
quand le violeur est extérieur à la famille. Tout le monde l’entend alors plus
vite et crie haro, parce que nous ne sommes plus dans le cadre familial,
normal, intérieur, dans l’intimité. Où ces « choses-là » ne se font pas.
Quand on était petit, on a rêvé de, on s’est dit que... Peut-être a-t-on été
amoureux, et on ne veut pas s’en souvenir, c’est resté dans le non-dit,
enfoui dans l’inconscient. C’est des histoires de gosses...
Si on jette à la figure d’un individu que cela existe, on le renvoie à ses
propres fantasmes, ses propres tabous, ses doutes les plus profonds...
Il y a tout de même des personnes qu’on entend mieux que d’autres. Tout
dépend de qui elles sont et de ce qu’elles dénoncent. Tout au moins
maintenant, car jusqu’à des temps récents, une mère dénonçant un abus
sexuel intrafamilial n’était pas écoutée. Elle était considérée comme trop
protectrice de l’enfant, assimilée à l’enfant, et donc devenait sans intérêt et
peu crédible. Aujourd’hui, on commence à entendre une mère qui dénonce
son compagnon ou son mari, à la condition expresse qu’elle n’en soit pas
séparée (auquel cas, elle est de facto suspecte de vouloir lui nuire). Il serait
souhaitable d’accentuer encore le crédit qu’on accorde à sa parole.
Ce qui se passe dans l’intimité du foyer, à huis clos, n’en sort pas
facilement. Tant que personne ne l’apprend, ou tant que la mère, les frères
et les sœurs font semblant de ne pas le savoir, le silence règne. Quand on
voit un enfant aller, de façon répétitive, avec son père dans une chambre
retirée, on sait bien ce qui s’y passe, inconsciemment. Mais consciemment,
non. Et au bout du compte, tout le monde ferme les yeux, chacun s’arrange
pour organiser les choses de façon à ce que « ça » se fasse sans que jamais
« ça » se sache.
On peut voir ici une étroite ressemblance d’attitude avec la femme qui
sait parfaitement que son mari a une maîtresse et qui, dans le même temps,
ne veut pas le savoir. De la même façon, on se doute que le père — plus
souvent lui, mais parfois aussi la mère — abuse de son enfant, mais
personne ne veut s’en assurer. Et si un jour on le « découvre », on le dira
peut-être, mais pas nécessairement.
Il est difficile d’admettre, et même de comprendre, de tels
comportements. De toutes ces affaires, on peut néanmoins dégager une
constante : les enfants ne semblent pas exister en tant qu’enfants, ils « font
partie des meubles ». Dans le discours, ou dans le silence, des uns et des
autres, tout se passe comme si, tant qu’on utilise l’enfant, rien de
répréhensible ne se produit.
La faute rejaillira sur celui qui révélera, celui par qui le scandale
arrivera : le dénonciateur, et non l’auteur ; et aussi sur l’enfant : « Tous des
vicieux, tous des menteurs ».
Ce que disent les textes
En théorie, introduire une verge dans le conduit auditif n’est donc pas
considéré comme sexuel. C’est ainsi ! On se fonde ici sur une symbolique :
un sexe qui en pénètre un autre, c’est dans la norme habituelle de tout
individu, et même de tout animal, cela ne pose pas de problème particulier.
Un sexe dans l’anus en pose déjà beaucoup plus. L’anus n’est pas fait pour
cela, ce n’est pas un organe sexuel. Siège de tous les déchets de l’organisme
de l’être humain, c’est-à-dire de tout ce qu’il y a de mauvais en lui, il n’est
pas destiné à recevoir mais à déverser, à délivrer. Et pénétrer quelqu’un
anale-ment — quand l’acte n’est pas librement consenti, quand il s’agit de
violence — est un geste qui a toujours une résonance extrêmement
humiliante. D’autant que cela suggère une position assez particulière, qui
rappelle la position animale, et que l’anus reste le symbole de la déjection.
C’est d’ailleurs ce qui permet aux gens de ne pas s’en occuper. Ils
évacuent le problème, si l’on peut s’exprimer ainsi, en disant : « C’est des
histoires de fesses. » Toujours ! C’est très frappant. Ce ne sont jamais des
histoires de vagin, ou de verge, mais de fesses.
Par la bouche, le viol s’avère plus humiliant encore que par l’anus. La
bouche est pourtant porteuse d’une symbolique presque inverse. Mais
précisément, mettre un organe de déjection dans un organe de réception, un
organe sacré et non sexuel, est le comble de la désacralisation de l’individu.
Là encore, il faut aussi prendre en compte la position de l’abusé : pour
que la bouche enferme le sexe, il faut se pencher, s’agenouiller, s’humilier,
s’abaisser. De plus, cet organe par lequel s’exprime la volonté de chacun est
précisément réduit au silence par ce sexe qui, en quelque sorte, le bâillonne.
J’ai d’ailleurs appris à reconnaître les enfants qui sont abusés de cette
façon : pour nous faire comprendre qu’ils ont dû mettre un sexe dans leur
bouche, ils vomissent. L’organe de réception est devenu organe de
déjection. Là encore, la désacralisation complète de l’organe est le résultat
le plus manifeste de ces viols, aujourd’hui caractérisés.
Mais de tous les viols, c’est celui qu’on a mis le plus longtemps à
reconnaître. On accepte en effet que la fellation soit considérée comme un
viol seulement depuis 1989 ! Auparavant, pour qu’il y ait viol, il fallait qu’il
y ait eu pénétration d’un sexe par un autre. La sodomie et la fellation étaient
qualifiées d’attentats à la pudeur, ce qui permettait d’échapper aux assises.
D’une certaine manière, pourtant, rien n’a changé. L’année dernière, dans la
même affaire, où un garçon et une fille étaient victimes du même pédophile,
il y a eu deux procès : les assises pour le viol de la fille, mais la
correctionnelle pour le viol du garçon. Parce que, dans l’esprit des hommes,
un acte de sodomie n’est pas un viol outre que, dans nos mentalités, le viol
de l’homme est inconcevable.
Il faut rappeler que tout cela relevait il y a encore peu d’années de
l’impensable, de l’indicible. « Ça » ne se disait pas, « ça » se faisait sans se
dire. Tout ce qui concerne les rapports privés, intimes, restait tu. Et la
sodomie était un « acte contre nature » selon les termes mêmes de la loi.
Il n’y a pas si longtemps que l’on se permet de parler librement de viol,
ne serait-ce que dans un livre. Les juges ne s’intéressaient que très rarement
aux affaires de ce genre. L’opinion se taisait, le silence régnait. Seule la
pression des associations de victimes a permis de mieux faire comprendre la
gravité de ces actes et de leurs conséquences, dans les mentalités comme
dans les tribunaux. Mais, comme trop souvent, chacun s’est borné des
années durant à ne voir de viol que dans la pénétration d’un sexe par un
autre, et surtout pas d’une autre façon.
La jurisprudence est seulement en train d’accepter que toute pénétration
violente de l’anus soit jugée comme un acte de viol. Jusqu’alors, on ne
concevait le viol que comme la prise de possession de la virginité — ce qui
nous renvoie une nouvelle fois à la notion de possession. Dans un certain
nombre de civilisations, notamment méditerranéennes, c’est assez connu, de
nombreuses femmes ne se donnent que par l’anus parce qu’elles doivent
impérativement arriver vierges au mariage, et respecter la cérémonie du
drap taché. Certains violeurs respectent scrupuleusement ce genre de rite, et
forcent leur victime sans la déflorer. D’autres recousent ou font recoudre
l’hymen. Ce qui permet de présenter plusieurs fois la jeune fille comme
vierge.
De la minorité, de la majorité
Si elle ne peut plus repérer les petits comme les enfants et les grands
comme les parents, notre société fondée sur la famille renonce à ses valeurs
et se déstructure. La liberté individuelle s’arrête là où commence la liberté
publique. Les enfants de douze ans n’ont pas leur place dans un couple. Ils
n’ont ni les forces, ni les moyens, ni l’indépendance d’esprit suffisants pour
donner un consentement libre. Et il est hors de question, dans un pays
comme la France, de laisser des personnes non libres décider de leur vie. La
société se doit de les protéger, fût-ce contre eux-mêmes.
Notre devoir absolu est d’agir ainsi. Les enfants ne se rendent pas compte
des conséquences d’une vie sexuelle trop précoce avec un adulte : les
risques de psychoses sont très grands, et les symptômes liés à la
dévalorisation complète d’eux-mêmes, gravissimes : suicides, violences
meurtrières, etc.
Les conséquences dramatiques de ces relations trop précoces obligent la
société à demeurer vigilante. Certains microcosmes défient les valeurs
communes et, sciemment, déstructurent les individus pour mieux les
anéantir et les réduire en esclavage. Les sectes en sont une illustration
saisissante.
Elles se fondent sur la toute-puissance du gourou, du mage, ou de toute
autre prétendue divinité, qui manipule, au gré de sa fantaisie, tous ses
« sujets » en leur faisant croire que c’est pour eux un grand honneur d’avoir
été choisis (l’expression même « être choisi » implique une dépendance et
une soumission incompatible avec le libre consentement). La liberté des
enfants conduits de force, par leurs parents, aux croyances de la secte et au
sacrifice, ne peut être sérieusement soutenue. Le stade de la confusion des
générations est dépassé : ici, le concept même de génération a perdu tout
son sens. L’individu n’existe même plus en tant que tel. Sa déstructuration
est totale, quasi irréversible. La logique des sectes est à ce point mortifère
qu’elle pousse parfois la collectivité entière au suicide.
Les sectes sataniques mettent en œuvre, de leur côté, une logique
différente : l’enfant, souvent extérieur à la secte, est sacrifié au nom du
bien-être de la collectivité...
Au nom de la liberté de pensée, la société reste désarmée devant le
problème que lui pose une secte disposant ainsi de ses propres membres,
sauf quand les viols d’enfants sont portés à sa connaissance. Elle se défend
plus rapidement quand les sectes font du prosélytisme ou kidnappent des
enfants extérieurs à leur communauté.
La société civile se trouve souvent confrontée aux idéologies politiques
ou religieuses et aux pratiques qui en découlent (excision, mariages
précoces, rites initiatiques de passage...). Elle essaie de s’adapter à cette
évolution, ce qui l’amène parfois à des contradictions manifestes.
Par exemple, en France, la majorité civile est passée de vingt et un à dix-
huit ans, s’alignant ainsi sur les législations européennes. L’enfant acquiert
donc davantage de responsabilités et plus tôt. Dans le même temps, la
législation devient plus protectrice à son égard, et dans les domaines de
l’emploi et de la sanction, prolonge en quelque sorte son adolescence,
rejoignant en cela l’évolution contemporaine, qui voit s’accroître la durée
de la possibilité de procréer comme l’âge de la puberté...
Nous sommes entrés dans une véritable mutation, qui a déjà des
conséquences sur tous les plans : naturel, culturel, moral, social,
économique, matériel, politique. Tous les repères de la société ancienne
s’entrechoquent, se fluidifient, se diluent, et, quelle que soit sa réaction,
celle-ci risque bien d’être inadaptée. On peut assister à de graves dérives
d’interprétation. Et quelle que soit la bonne volonté de la société, de
l’individu, toute tentative de réaction à une situation alarmante peut revenir
en boomerang. Il faut donc, à mon sens, savoir définir l’essentiel, le
nommer, et dès lors le préserver et en faire la priorité absolue.
Pour moi, la priorité absolue est l’enfant, le devenir de l’humanité. Parce
qu’il représente la seule valeur constante dans cette société en mutation,
aucun être humain n’a le droit d’abuser d’un enfant.
6
ICI ET MAINTENANT
Le silence qui a pesé comme une chape de plomb sur la pédophilie a bien
évidemment des causes multiples. On en a vu certaines. Mais si ce mur du
silence commence tout juste aujourd’hui à se lézarder, c’est également en
raison de facteurs divers et convergents. Avant d’en venir aux hypothèses
expliquant cette amorce de changement dans les mentalités, je voudrais
dans ce chapitre me cantonner à certains faits nouveaux, qu’on pourrait
qualifier d’objectifs, et qui modifient considérablement les données du
problème.
Ah ! les Temps Modernes
La pire des misères est celle qui déshumanise. À partir de là, si une mère
est obligée de vendre son enfant pour faire survivre le reste de la famille,
c’est tellement pathétique qu’on ne peut rien dire. Mais que des gens se
prêtent en conscience à ce jeu et achètent les enfants... c’est encore plus
immonde. Les enfants plongés dans une telle misère sont prêts à tout et
n’importe quoi, à risquer leur vie, à voler, à tuer, pour pouvoir manger. En
pareil cas, le rapport pédophilique s’approche d’un flirt avec la mort.
La pédophilie conduit, inéluctablement, à la mort. D’abord à la mort
psychique, interne, à la fin du respect de soi, mais aussi à la mort
physique — je pense au sida et aux mauvais traitements. Les enfants savent
bien qu’ils flirtent avec la mort. De toute façon, à côté d’eux, tous les jours,
un autre enfant ne se relève pas. Alors, ça ou autre chose... Ils sont
complètement kamikaze. Ils souffrent de syphilis, de tuberculose, ils se
droguent à outrance, et risquent à chaque instant la prison où, du reste, ils se
font encore violer. En réalité, ils veulent en finir.
Les plus solides vivent au jour le jour, et même à la minute la minute. Ils
savent que plus l’étranger va payer, plus ils risquent leur vie. Ils ne pensent
pas toujours que c’est jusqu’à la mort. Mais ils pensent qu’ils vont flirter
avec elle, surtout quand ils participent à des tournages vidéo. Parfois, eux-
mêmes sont chargés de donner la mort. Parce que, pour les besoins de la
« production », ils sont à la fois acteurs et spectateurs. Alors ils savent bien
que, la prochaine fois, ce sera leur tour.
A mes yeux, la relation d’un homme et d’un enfant est, même
inconsciemment, une relation suicidaire dans la mesure où, quelle que soit
la façon dont le pédophile réussit à obtenir le consentement d’un enfant, il
sait qu’à un moment ou à un autre il devra rendre des comptes. Quand on
viole une femme, on peut, d’une façon plus ou moins consciente ou réelle,
se « tromper » sur son consentement. Mais quand on prend un enfant, on
sait, quoi qu’il arrive, qu’on a violé l’interdit le plus total de toutes les
civilisations. Si l’on ne le savait pas, on n’aurait pas besoin de payer (et par
là, d’apporter une compensation). Si le pédophile paie, et cher, c’est qu’il le
sait bien. Et plus la prestation est extraordinaire, plus il va payer. La
virginité d’une petite fille, par exemple, se paie très cher, pas seulement
parce que c’est la première fois, mais aussi parce que c’est formellement
interdit. Et qui dit virginité, sous-entend enfant prépubère.
La drogue
Revenons à ces petits réseaux bien de chez nous. On commence donc par
faire circuler des cassettes. Les gens qui les voient ont envie de participer
au prochain « tournage ». Ils viennent y assister. Non seulement ils achètent
la cassette, ce qui rapporte de l’argent, mais en plus ils consomment sur
place. Pendant leurs ébats, on filme avec les nouveaux participants, et on a
alors une cassette bien plus « intéressante », parce que l’enfant n’a plus un
sexe dans l’anus et un autre dans la bouche, mais il peut en avoir deux,
trois. Il peut prendre des positions plus « excitantes », assouvir des
fantasmes plus ignobles. Dans de tels milieux, la multiplicité des
partenaires est source d’originalité (encore que, une fois qu’un enfant est
pénétré par les trois orifices...).
Le résultat est qu’on peut alors autoalimenter à la fois ses propres
fantasmes et ses finances : c’est tout bénéfice. Puis arrive un troisième
personnage, un quatrième, un cinquième, et peu à peu on en vient à couvrir
une région, ou une partie du pays. Naturellement, comme les risques sont
tout de même grands et que les gens qui pratiquent ce genre de choses
veulent partager — comme pour la drogue, il existe un véritable
prosélytisme de la pédophilie, ne serait-ce que pour inciter à acheter la
cassette — , on peut toujours tomber sur quelqu’un qui n’apprécie pas. Ou
bien le petit craque, parce qu’on lui en demande trop : il ne peut plus suivre
à l’école, sa mère lui demande des comptes. Ou parce que ça finit par lui
rapporter de l’argent, car on lui donne presque toujours, pour se
déculpabiliser, un petit cadeau. Mais le jeune devient de plus en plus
exigeant : la première fois, il a eu un chewing-gum, la deuxième, il veut une
montre. Il obtient la montre, et c’est ainsi que les choses se découvrent. Ou
parce que, par prosélytisme, la victime vient demander au copain de
participer. Et le copain, c’est beaucoup moins facile, parce qu’il est
davantage surveillé par ses parents, ou qu’il est moins fragile. On recrute un
gamin qui vient par curiosité, pour « rigoler », il ne reviendra plus, mais
entre-temps, il en aura parlé à tout le monde. C’est aussi de cette manière
qu’on apprend que ce genre de réseau se multiplie sensiblement.
Si l’on s’en tient aux seuls faits, ces dernières années ont vu la révélation
sur la place publique d’un certain nombre de scandales. De façon manifeste,
les pratiques pédophiliques s’accélèrent, s’emballent. On remarque aussi
qu’un nombre croissant de personnes impliquées dans ces affaires vivent
toute la journée aux côtés des enfants. Forcément, si quelqu’un est
pédophile, il va travailler dans un milieu où il pourra facilement approcher
les enfants. Donc moniteurs, professeurs de sport, animateurs d’associations
sportives ou de foyers d’aide sociale, éducateurs spécialisés, médecins,
magistrats, responsables d’orphelinats, répétiteurs de chorales, instituteurs,
professeurs en tout genre, prêtres... tous ceux qui gravitent autour des
enfants sont touchés. Tous les métiers liés à l’enfance, absolument tous !
La recrudescence du tourisme sexuel a pris dans le même temps des
dimensions extraordinaires : il ne s’agit plus de visiter Bangkok, mais bien
d’aller « se faire » des gamins. L’industrie mercantile du sexe s’est
diversifiée. On a multiplié les possibilités. Et naturellement, toutes les
personnes qui avaient les moyens financiers y sont allées. Mais les prix ont
chuté. Un billet d’avion pour le Sud-Est asiatique est désormais à la portée
de la grande majorité de nos compatriotes, et voilà peut-être le plus
intéressant : tant que ce tourisme sexuel demeurait réservé aux plus riches,
on ne disait rien. Aujourd’hui, le phénomène s’amplifie avec des gens qui
ne sont pas intouchables. Du coup, on a bien été obligés de parler du
problème. Et qu’a-t-on découvert ? Que le pédophile était M. Tout-le-
Monde !
Il ne s’agit plus de ballets bleus, où des personnes fortunées peuvent
s’offrir n’importe quoi et n’importe qui, des individus dont on sait
parfaitement que, quoi qu’ils fassent, ils seront toujours couverts par une
extraordinaire chape de silence dans la mesure où ils vont payer, transiger,
acheter. Finalement, ceux-là ont tous les moyens. À la limite, ils achètent
les enfants à l’autre bout du monde, les ramènent chez eux et les enferment
dans leur bunker personnel. On ne sait pas ce qu’ils font. Personne ne le
saura jamais, car personne ne veut le savoir.
C’est ainsi que, dans l’affaire Dutroux, on a bien vu qu’il y avait une
cage spéciale en sous-sol, que les gendarmes ont frôlée plusieurs fois mais
qu’ils n’ont pas vue, parce qu’elle se trouvait dans un cul de basse fosse.
Des enfants y passaient régulièrement. Aujourd’hui, on ne peut plus le nier.
On peut donc imaginer n’importe quoi de la part des gens intouchables, les
pires abominations. Mais l’inadmissible est atteint lorsque n’importe quel
concitoyen peut se livrer à ce genre de débauche. Là, le scandale peut
éclater. Parce que, si ça touche le voisin, il est facile de s’y identifier.
Tant que les choses se passaient en Asie, en Afrique, en Amérique de
Sud, tout le monde s’en moquait. Mais aujourd’hui, et notamment grâce à
l’affaire Dutroux et au séisme moral qu’elle a provoqué en Belgique, à deux
pas de chez nous, chacun a compris que des horreurs comparables se
déroulaient à l’intérieur de nos frontières, dans nos maisons.
Et voilà l’intolérable : la pédophilie est désormais mise au jour parce
qu’elle s’est prolétarisée... Toutes les classes sociales sont touchées. De
l’homme le plus religieux au plus athée, du plus pauvre au plus riche, du
plus intelligent au plus stupide, tout le monde est touché. Le pédophile peut
être n’importe qui : un frère, un oncle, le voisin, l’instituteur, le meilleur
copain...
Le parallèle avec les drogues est très instructif. Hier encore, de
nombreuses personnalités, fort connues, du show-biz ou de la politique,
étaient stigmatisées comme consommateurs ; tout le monde le savait mais
personne ne poursuivait jamais... Dès lors que l’usage des stupéfiants a
commencé à se démocratiser, à se populariser, il a fallu réagir.
On ne pouvait plus cacher un phénomène de cette ampleur. On a donc
réagi. De la même façon, la pédophilie, hier perversion réservée à une élite,
s’est démocratisée : on est donc obligé de la dévoiler.
Dans cette affaire Dutroux, qui est un moment clé, qui est en prison ?
L’homme de main. Des autres, excepté un inspecteur de police qui tient lieu
de lampiste, on parle certes un peu, on dit qu’ils sont là, qu’ils existent,
mais ils n’ont toujours pas de nom.
Il semble désormais trop tard pour qu’on arrive à refermer le couvercle
de la marmite, les choses sont allées trop loin. Après le congrès de
Stockholm qui a suivi cette affaire, la conscience de l’ampleur du
phénomène était trop vive pour que « ça » ne sorte pas quand même.
Stockholm, qui devait être un petit congrès mondial, comme celui de Pékin,
dont on mentionnait le nom parce que ça faisait bien, a été un fabuleux
succès : cent vingt-six pays se sont réunis pour parler de la pédophilie !
C’est un événement considérable, car à la prolétarisation des pédophiles
répond la mondialisation du phénomène. Des délégués gouvernementaux et
des responsables d’associations, donc des personnes privées et publiques,
ont pu échanger pour la première fois leurs informations sur les pédophiles
et la pédophilie, la mondialisation via Internet, le tourisme sexuel, et les
rapporter dans leurs pays.
Pendant trois mois, c’est vrai, tout le monde a vraiment multiplié les
efforts pour se pencher sur le problème. Mais je crains que le soufflé ne
retombe et qu’on passe rapidement à autre chose. Pourquoi ? Il n’y a qu’à
lire les journaux, ou même simplement les parcourir. Depuis Stockholm, on
voit sortir une affaire par jour, ou presque. Les bourgeois de Calais, certes,
mais aussi des prolétaires, des prêtres, des médecins, des enseignants, le
professeur de foot, etc., sont désormais en cause. Et ces affaires ne
concernent pas une victime, mais onze, quinze, vingt ou trente enfants
abusés... Les journaux y ont d’abord consacré une pleine page, puis une
demi-page. J’estime qu’on peut mesurer grosso modo l’impact de la
pédophilie au nombre de pages qu’elle occupe dans les journaux : on en est
à la demi-page. On va bientôt passer à l’encadré, puis à la brève, et enfin,
on parlera d’autre chose.
Il faut chaque fois reprendre le problème, et crier sans relâche : « C’est
intolérable, ce n’est même pas pensable ! L’enfant est sacré. Il est un être
humain. C’est de l’esclavagisme, et ce n’est pas admissible. »
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Il faut sans doute dire à ces femmes et à ces hommes des choses simples
pour être entendu : « Réveillez-vous, reprenez une place satisfaisante, ne
laissez pas vos enfants dans la rue et occupez-vous-en, retrouvez votre
dignité d’être humain. Chacun à sa place, et la société sera restructurée. »
Si la société ne change pas, l’avenir de ces anges déchus deviendra
l’enfer sur Terre. Ces enfants sont totalement fermés, ils n’ont plus aucune
ouverture au monde. C’est bien pour cette raison qu’ils cassent tout : ils se
cognent aux murs. Ils sont précisément dans le même état que ceux qui ont
été possédés par les pédophiles, et deviennent, comme disait Bruno
Bettelheim, des forteresses vides. Ils vivent comme des zombies, des
robots, cassés de l’intérieur. Ce sont pourtant les hommes et les femmes de
demain. Et il y a fort à parier que, si rien ne change, ils vont reproduire à
l’infini des zombies.
Des enfants
PORTRAIT DU PÉDOPHILE
Le débile
J’ai déjà abordé le sujet de la pédophilie féminine, qui est de plus en plus
révélée. Mais il faut aller un peu plus loin.
Jadis, les femmes pouvaient faire ce qu’elles voulaient de leurs enfants,
ce n’était pas le problème des hommes. Elles incarnaient en quelque sorte la
loi du foyer. Si la loi était défaillante, personne ne le savait. La femme ne
sortait pas de sa famille : la pédophilie extérieure n’existait donc quasiment
pas. Elle ne pouvait qu’être inscrite dans le cercle familial, auquel cas elle
restait dans l’absolu non-dit, dans le secret de famille, sans possibilité
d’ouverture. On pouvait soupçonner, sentir, ressentir, se poser des
questions, mais on n’avait jamais aucune certitude. Personne, il y a trente
ans encore, aucun garçon ni aucune fille, ne se serait aventuré à aller se
plaindre des mauvais traitements sexuels de sa mère.
La pédophilie croît en fonction des droits que chacun peut exercer sur les
autres. Les femmes n’avaient pas de droit, elles n’exerçaient donc pas leur
puissance sur l’enfant. Maintenant qu’elles ont une certaine surface sociale,
qu’elles commencent à avoir des droits, qu’elles sont les égales des
hommes, elles peuvent s’autoriser à les singer. Mais si celle qui était la
lumière du foyer, sa loi, sa protection, devient complètement défaillante, il
n’y a plus aucun repère, tout tombe en déliquescence complète.
Quand les femmes sont criminelles, elles le sont jusqu’au bout, elles ne
font pas, comme les hommes, les choses à moitié. Elles sont pires. Elles
sont les égéries. Dans un autre ordre d’idées, on peut également se
demander pourquoi, dans un certain nombre de civilisations, la femme se
tient toujours à trois pas derrière l’homme. Est-ce de l’esclavagisme ? Pas
du tout ! Au départ, c’est simplement parce que, pour faire avancer
l’homme, il est plus efficient d’avoir une femme derrière lui que devant.
Car l’énergie de l’initiatrice pousse celle de l’homme.
Dans la délinquance aussi la femme pousse l’homme à agir. Ce sont bien
les femmes qui commandent dans un foyer, il faut tout de même en être
conscient. Et les hommes politiques le savent très bien, qui, dans leur
grande majorité, ont acquis du pouvoir grâce à leurs épouses qui nourrissent
pour eux des ambitions extraordinaires.
C’est pour elles qu’on agit, ce sont elles qui poussent l’homme à l’action.
De par leur configuration physique, elles ne sont pas l’abuseur type, elles ne
possèdent pas les organes nécessaires — bien qu’elles puissent se servir de
substituts, comme le doigt ou tous les instruments de torture qu’on peut
imaginer — , mais elles n’ont pas physiquement les attributs naturels de
pénétration. Alors elles pénètrent d’une autre façon : par l’œil, par la
caméra, par les nouveaux moyens audiovisuels, via l’écran.
Pour le dire autrement, si l’homme est ce qu’il est, c’est bien parce que la
femme l’a fait tel, et l’a voulu tel. C’est toujours une question de volonté de
la femme : c’est elle qui l’élève, elle qui l’entraîne, elle qui le pousse. Dans
neuf cas d’inceste sur dix, la femme, consciemment ou non, activement ou
non, y participe d’une manière ou d’une autre.
De plus en plus fréquemment, on voit apparaître ces femmes dans les
dossiers. Les charges retenues contre elles les mettent « en avant », mais
tout se passe comme si on les remettait « en arrière ». Je reprends l’exemple
de l’affaire des « monstres » du Sussex, où l’homme s’est suicidé, alors que
son épouse est toujours en prison. Mais on ne parle pas de cette dame. En
réalité, c’est toujours pour elle qu’il a agi, qu’il a tué ses enfants, violé et
massacré un certain nombre de personnes, parce que sa femme était
fondamentalement perverse.
La femme perverse a cette séduction quasi naturelle, hypnotique, qui fait
que l’homme a l’air d’agir pour le compte de ses pulsions alors même qu’il
agit pour le compte des pulsions de la femme. C’est la même relation qui
s’établit dans le couple pédophile-enfant. Le pédophile fait croire à l’enfant
que c’est lui qui agit, lui qui est demandeur. C’est pour cette raison que
l’enfant, se sentant coupable, ayant honte, craignant de trahir les siens, se
tait. Il ne parle pas, ou il parle très tard, quand il finit par se rendre compte,
au bout de dix ou quinze ans, qu’il s’est fait abuser.
Il faut enfin noter que, quand un homme parle de pédophilie, ceux qui
l’écoutent lui prêtent bien souvent les pires arrière-pensées. Quand une
femme en parle, elle n’a pas à se disculper d’une telle suspicion, en tout cas
pas encore. Mais c’est mal connaître la société actuelle, parce qu’il y a de
plus en plus de femmes qui donnent dans la pédophilie. Et tout ce qu’on a
dit précédemment des hommes, d’une certaine façon, je crois qu’on peut le
dire aussi des femmes, sauf évidemment quand il s’agit de la virilité,
puisque par définition elles n’en ont pas.
Les processus de fantasmes de toute-puissance fonctionnent chez les
deux sexes. Un pédophile est un oppresseur, par définition. Il profite de la
faiblesse de l’autre, de sa vulnérabilité. Mais il peut être homme ou femme :
il n’y a plus cette dichotomie qui existait encore il y a dix ans.
Quand je parle de femmes pédophiles, je ne pense pas à celles qui se
contentent de livrer leurs enfants à des « consommateurs », mais à celles
qui en profitent elles-mêmes directement. On voit de plus en plus de
membres de mini-réseaux ou d’échangistes qui utilisent leurs propres
enfants, ou ceux des voisins, ou qui organisent des échanges d’enfants. Au
cours de ces orgies, les femmes consomment de la même façon que les
hommes. Sans parler de ce qui a toujours existé : les entremetteuses, les
femmes qui oppriment d’autres femmes. Dès lors, pourquoi n’y aurait-il pas
des femmes qui oppriment les enfants, qui les utilisent dans des buts
uniquement lucratifs ?
On en revient toujours à des questions de possession et de pouvoir,
d’avoir et de profit. Mais il s’agit d’une possession qui va beaucoup plus
loin, une espèce de descente aux enfers. Parce que l’évolution récente des
affaires de pédophilie a d’abord permis de découvrir que des femmes,
chaque jour plus nombreuses, sont impliquées. Mais aussi que les victimes
de ces abus sont de plus en plus jeunes. On voit maintenant de vrais bébés,
âgés de six mois, de trois mois, d’une semaine... C’est effarant ! De telles
déviances étaient extrêmement rares il y a dix ou vingt ans. C’est désormais
beaucoup plus fréquent.
Un bon vendeur
On ne dira pas pour autant qu’un enfant qui agit de la sorte est un
pervers. Je ne connais pas d’enfant pervers. Je ne connais que des enfants
qui ont été pervertis par d’autres, principalement par des adultes. C’est
l’histoire atroce, mais hélas très classique, d’une fille qui, après avoir été
violée par son oncle, vient voir son père en pleurs et lui confie : « Ton frère
m’a violée. » Son père l’interroge et il lui suggère : « Ah oui ! Montre-moi
comment... » Et à son tour il viole sa fille !
Ce genre de choses arrive bien plus souvent qu’on l’imagine. Il en va de
même chez les adultes. On voit souvent le cas d’une femme qui vient d’être
violée arrêter la première voiture qui arrive à sa hauteur et se faire violer à
nouveau par celui qui était censé l’emmener au commissariat. Tout se passe
comme si, du moment qu’elle est déjà souillée, on peut en profiter.
Ce genre d’attitude me semble particulièrement immonde : la victime,
fille ou garçon, qui vient d’être violée, réclame une protection, et on en
profite pour abuser d’elle à nouveau...
Certaines victimes sont donc quasiment programmées par le premier
acte, depuis leur plus tendre enfance, et même leur naissance, pour devenir
des objets sexuels : elles n’ont jamais été autre chose et, sans le vouloir,
sans le savoir, de façon tout à fait inconsciente, elles réagissent de telle
manière qu’elles sont à nouveau victimes des personnes qu’elles
rencontrent. Tout cela parce qu’elles ont des comportements d’appel sexués,
inconscients ou devenus inconscients.
Me reviennent en mémoire des exemples précis d’enfants qui se font
violer à répétition par toutes les personnes à qui ils demandent de l’aide :
les éducateurs, les enseignants, les thérapeutes... Ils leur racontent leur
histoire et immédiatement se font revioler. C’est bien entendu difficile à
admettre, mais encore plus à comprendre. D’abord, on a l’impression que,
de toute façon, le premier à l’avoir sali est l’autre. Ensuite, je pense que
l’enfant produit effectivement des comportements d’appel, qui font réagir
ceux qui y sont sensibles. Ces derniers se disent alors que, au point où il en
est, c’est moins grave. De la même façon que, dans l’inconscience du
Français moyen, il est beaucoup moins grave d’aller violer un petit
Philippin qu’un petit Français de l’école d’à côté. Ces gosses-là, n’est-ce
pas, sont des prostitués, ils sont faits pour ça, ils aiment ça... D’ailleurs, ils
le demandent d’eux-mêmes, et s’ils se sont fait violer plusieurs fois, c’est
quand même qu’ils le voulaient bien... La bonne conscience s’installe, ou
peut-être existe-t-il une dynamique de la souillure. Mais voir une personne
abusée se faire violer à nouveau, y compris dans le commissariat où elle a
cherché de l’aide, ou chez le thérapeute à qui elle le révèle, c’est quand
même un comble !... Peut-être le violeur éprouve-t-il à ce moment-là une
impression de sécurité.
Il se dit : « Si c’est un enfant qui a l’habitude, il ne me dénoncera pas,
donc je peux y aller... », alors même que l’enfant est en train de dénoncer un
premier viol ! Ou peut-être la souillure initiale ayant déjà ôté son caractère
sacré à l’enfant, le violeur a-t-il l’impression de ne plus violer l’ange...
Déshumaniser la victime
Qui sont ces enfants abusés ? Au bout du compte, ce sont des enfants
asexués. Par définition, ils n’ont pas de sexe. Voilà l’ambiguïté majeure de
la pédophilie : on essaie de sexualiser un objet de plaisir qui n’est pas
sexualisé et qui, par définition, ne peut pas l’être avant la puberté.
Finalement, il n’y a pas eu beaucoup — et j’ai vraiment cherché — de gens
qui se sont penchés sur ce problème en ces termes, parce que c’est un
problème trop neuf — trop vieux, mais qu’on ne voulait jamais voir, donc
trop neuf, c’est-à-dire arrivé à maturité de façon trop récente. On ne
comprend rien à la pédophilie tant qu’on se borne à la considérer comme
une déviance sexuelle. Il s’agit davantage d’une négation de l’humanité,
dans ce qu’elle a de plus sacré.
Je me suis souvent demandé si l’apparition de la pédophilie n’était pas
liée à cette sorte de déséquilibre entre les sexes qui s’est développé après la
Seconde Guerre mondiale, ainsi qu’au nouveau rôle social des femmes, déjà
évoqué plus haut. Aujourd’hui, les femmes sont suffisamment
indépendantes pour pouvoir choisir leurs partenaires. Or, ce que l’homme
ne supporte pas, c’est de se voir dévalorisé par l’autre, de se voir rejeté.
Pour ne pas courir ce risque, l’homme prend celui dont il est sûr qu’il ne
le rejettera pas, ne serait-ce que parce qu’il n’en a pas les moyens. Ce
faisant, il se dévalorise à ses yeux — et c’est ce qu’il y a de plus ambigu
dans ce comportement humain. Car pour obtenir le respect, le pédophile,
qui décidément ne comprend rien à rien, va chercher le plus faible parmi
tous ceux qui l’entourent, il va chercher l’enfant, alors même que c’est ce
dernier qu’il faut respecter. Et c’est en le respectant que l’un et l’autre
deviennent des êtres humains.
Nous avons une gêne étrange face à la parole de l’enfant, à ses mots si
fragiles. Et des attitudes de plus en plus irrationnelles. Récemment, on a
procédé à une expérience avec les élèves d’une classe qui ont rédigé un
projet de loi, repris par l’Assemblée nationale et voté, lequel demande
simplement qu’on ne sépare pas les fratries. Est-ce que les adultes auraient
jamais songé qu’il ne fallait pas séparer les fratries ?
Mais c’est le monde à l’envers ! Les hommes marchent sur la tête. Il faut
aujourd’hui que des enfants légifèrent pour réclamer un droit élémentaire :
ne pas être séparés de leurs frères et sœurs. Quand on dit que la famille est
en déliquescence complète, il faut quand même dire aussi comment nos
services publics procèdent chaque jour : quand l’enfant n’est pas cru, il
disparaît de la maison. L’auteur, lui, y reste, et on punit l’enfant en
l’envoyant dans une institution. Et s’il y a deux enfants, on les met dans
deux endroits différents.
Ces aberrations ne sont pas seulement des mystères de l’Administration.
Elles reflètent la paresse de tous ceux qui y participent.
Tel lieu d’accueil prend les enfants de tel à tel âge. Quand ils ont atteint
l’âge limite, on les sépare, sans autre façon. Peu d’institutions acceptent de
faire de l’accueil vertical. Parce que les gens ne veulent pas se compliquer
la vie et se font des problèmes de tout. Si on revenait à un peu plus de
simplicité, on ferait moins de mal autour de soi.
Il a donc fallu qu’une classe vienne dire à la représentation nationale :
« Stop, arrêtez de casser ce qu’il reste de certaines familles ! » En un sens,
c’est un beau geste. Mais je vois aussi les choses autrement : il me semble
absolument aberrant que des enfants soient obligés de demander une telle
mesure, que la loi ne l’ait pas prévue, que les députés ne l’aient pas
proposée spontanément. Ne pas séparer les fratries participe de ces lois non
écrites qu’on n’a pas le droit de transgresser. Cette parole d’enfant aurait dû
être une parole d’adulte. On ne l’a écoutée que parce que les enfants
s’étaient mis à la place des adultes. C’est de nouveau une confusion
complète des genres.
11
VICTIMES ET BOURREAUX
Tirer le rideau
DES REMÈDES
La conférence internationale de Stockholm
Il faudrait enfin alerter les gens sur le fait que la société ne tolérera plus
ces abus. Faire preuve d’imagination dans la répression et moduler les
actions : de même que menacer un homme de lui retirer son permis peut
éventuellement l’empêcher de conduire en état d’ivresse, de même faut-il
faire savoir que tout acte de pédophilie entraînera systématiquement pour le
coupable la perte de son emploi, dès lors qu’il s’agit d’un travail qui le met
en contact avec des jeunes. Les pédophiles ont pour la plupart un instinct
extrêmement sûr. Ils ne se trompent jamais de métier, choisissant toujours
ceux où l’on se trouve en contact avec des enfants. Voilà une sanction qui
peut les amener à réfléchir. On ne se contenterait plus de mutations plus ou
moins camouflées, mais on leur interdirait d’aller aux alentours des écoles,
d’être animateurs, de fonder une association sportive, de travailler pour des
patronages...
Je n’ai sans doute pas assez affirmé à quel point les pédophiles
récidivent, encore et toujours. C’est comme une drogue dure : quand on
passe à l’acte une première fois, la récidive est probable. C’est une autre
forme de déviation, de jeu avec la mort, de suicide. Arrive un moment où il
faut faire un choix de société : il faut choisir l’enfant, et non le sacrifier
systématiquement sur l’autel de l’adulte en proie à ses pulsions.
En vérité, tous ces problèmes sont très difficiles à manier car on les
connaît très mal. Personne n’a pris le temps d’y réfléchir comme la situation
le requiert, parce que tout est allé trop vite. Quelques personnes se sont
penchées sur le problème, mais peu d’entre elles sont aptes pour l’instant à
proposer de véritables solutions. Il faut prendre le recul suffisant. Il faut se
former, demander aux autres ce qu’ils ont vécu, entendre des pédophiles,
des victimes, des professionnels, comprendre et mesurer les dégâts
occasionnés. Il faut aussi mesurer la difficulté d’évaluer quelqu’un qui est
un manipulateur-né, un pervers, et qui peut faire tomber dans son piège
entourage, policiers, magistrats, experts, comme il l’a fait pour l’enfant.
Il est difficile de savoir s’il adhère par opportunité, par compréhension,
ou par repentir. Il faudra donc impérativement prévoir policiers, magistrats,
experts sensibilisés et formés à reconnaître cette possible manipulation.
D’autre part, imposer une thérapie, cinq à dix ans après les faits, si on
demeure dans le déni, serait d’une totale absurdité et d’une inutilité
complète. On ne soigne pas quelqu’un qui affirme ne souffrir de rien. Seuls
5 p. 100 des détenus pour faits de pédophilie demandent un suivi
psychologique...
Si on explicite au délinquant la démarche que l’on va lui imposer,
démarche de suivi médico-social, peut-être pourra-t-on le convaincre de la
nécessité de réagir. La négation de l’acte peut se transformer
progressivement en une prise de conscience qui empêchera l’agresseur de
se retrancher derrière la suprême excuse pour lui : « Ce n’est pas de ma
faute, je suis malade. »
Rien n’empêche de faire comprendre au mis en cause que, quelle que soit
sa position, dès lors qu’il a été déclaré coupable, qu’il doit se soumettre aux
obligations légales et subir une peine, contrainte sociale, médicale, destinée
à prévenir tout autre acte de même nature.
Le projet de loi aujourd’hui discuté prévoit pour ce faire une camisole
chimique qui entrave sa liberté — comme toute peine — mais place
l’enfant à l’abri de sa déviance. Ainsi n’est-il plus nécessaire d’envisager
des moyens plus dégradants et irréversibles, tels que la peine de mort, qui
ne fait que reproduire ce que l’on reproche au pédophile : abuser de son
pouvoir sur les êtres humains, se prendre pour Dieu. À aucun moment, la
peine de mort n’est didactique, au contraire elle nie la valeur de la vie.
Et la justice se doit avant tout de reposer les mots, de recaler les repères,
de restructurer l’individu, de lui redonner sa place dans la société, donc de
remettre chacun et chaque acte dans l’ordre. Ce faisant, elle évite la
récidive.
Si le pédophile choisit de poursuivre ses activités, on ne peut rien faire
d’autre que de le condamner à des peines de sûreté. Mais probablement
faudrait-il aussi prononcer contre lui une sorte d’excommunication laïque,
en lui interdisant un certain type d’emploi et la fréquentation des
établissements accueillant des enfants. On pourrait le contraindre aussi à ne
pas revenir sur les lieux où ses victimes sont susceptibles de le rencontrer,
car il est inutile de raviver un traumatisme.
Il faut comprendre qu’à l’heure actuelle, quand un pédophile a purgé sa
peine de prison — un an, trois ans, dix ans — , il rentre chez lui
tranquillement. Lorsqu’il s’agit d’un voisin de la victime, celle-ci ouvre un
beau matin ses volets sur le spectacle de l’homme qui a abusé d’elle
pendant des années. Cela n’est pas tolérable. La réparation doit également
comprendre l’oubli, la mise à l’écart. Il faut que le pédophile le sache. La
mise au ban de la société est toujours une arme efficace.
Il ne s’agit pas de copier les États-Unis, en placardant sur tous les murs
de l’immeuble et chez tous les voisins — c’est une obligation — des
affichettes : « Attention, cet homme a été condamné pour pédophilie, garez
vos enfants ! » Ce n’est pas dans l’esprit français.
Ne plus déléguer
CITOYENNE DU MONDE
1978. J’ai trente ans, Saturne passe sur lui-même et bouleverse ma vie.
C’est l’année de mon premier poste de magistrat instructeur, l’année de
mon premier accident, l’année de mon premier enfant.
Emmanuelle, Dieu avec nous, est entrée dans ma vie. Dimitri, Mathieu,
Marie, Kim suivront. La dynamique est en marche...
Hermès naîtra quinze ans après (Saturne est face à lui-même).
Hermès
Notre réflexion nous amenait à considérer que les enfants auraient dû être
accueillis dans un rayon de cent kilomètres autour de Paris, pour qu’ils ne
soient pas coupés de leurs racines, de leurs juges, de leurs éducateurs. Nous
avons été amenés à accueillir dans un premier temps, et à titre provisoire,
trois enfants en très grande difficulté sociale. Cette expérience, qui s’est
soldée par un échec, nous a appris que la générosité ne suffisait pas. Il faut
un lieu adapté avec une équipe éducative spécifique et un environnement
consentant. Les problèmes administratifs déjà évoqués ne nous ont pas
permis de persévérer dans le choix d’enfants délinquants.
Le hasard (existe-t-il ?) nous a mis en présence d’un enfant non
francophone, transfuge d’un atelier clandestin. Les services éducatifs ont eu
à traiter une situation nouvelle. Nous nous sommes proposés. Peu à peu, la
situation est devenue habituelle, la réponse aussi. Nous nous sommes
bientôt retrouvés à la tête d’une grande famille : de grands enfants, souvent
non francophones, toujours victimes et exploités, toujours désireux de
retrouver leur dignité, cheminent désormais à côté des nôtres.
Certains choisissent de devenir des Bouillon par l’adoption. Il n’y a pas
de différence entre les uns et les autres, ils ont simplement besoin d’une
nouvelle identité, ou de davantage de sécurité, ou ont établi un lien affectif
plus fort avec nous.
Hermès est devenu un lieu d’accueil permanent pour les uns, provisoire
pour d’autres. Ils peuvent rester une journée, faire un séjour de rupture, une
parenthèse dans la vie familiale ou sociale, retourner dans leurs pays, dans
leurs familles, et pour ceux qui n’en ont pas, rester.
Ceux qui demeurent à l’association continuent de bénéficier d’un
accompagnement lorsqu’ils prennent leur envol. C’est ainsi que les week-
ends, nous avons cessé de compter leur nombre... Nous avons déjà des
petits-enfants.
Il ne faudrait pas en conclure que notre démarche se résume à l’adoption.
Celle-ci n’était qu’une première étape de cette lente maturation qui nous a
amenés à élargir nos horizons. La solution offerte à chaque enfant est
singulière. Certains devront à terme retourner dans leurs pays. Nous
œuvrons pour leur donner la force d’accepter ce retour et nous les préparons
pour qu’il s’effectue dans les meilleures conditions possibles. D’autres
pourront rester plus longtemps sur le territoire français. Notre devoir est de
leur donner un maximum d’outils pour qu’ils soient en mesure d’affronter
les contradictions du choc des civilisations. D’autres encore ne pourront
jamais rentrer chez eux. Il faut donc les aider à devenir des citoyens
français. Cette problématique nous a beaucoup préoccupés et m’a renvoyée
à mon choix d’adoption.
Comme Saint-Exupéry, nous « utilisons » les différences des uns et des
autres pour un enrichissement mutuel. C’est peut-être le germe d’un monde
plus libre, plus solidaire et plus fraternel. S’ils ne sont pas citoyens chez
eux, qu’ils soient comme moi citoyens du monde.
Aide ou assistance ?
Avant d’en arriver à la citoyenneté, ces enfants qui, dans leur grande
majorité, sont des mineurs réfugiés non accompagnés, ont été des esclaves
honteusement exploités. La première notion que nous devons leur donner
est celle de la liberté. Ils vivaient dans la clandestinité la plus totale, sans
identité. Ils étaient donc tout, sauf libres. La notion de choix restait vide de
sens dans ces conditions, la passivité était leur lot. Il semblait dès lors
difficile de les aider sans les assister. Difficile de leur expliquer quels sont
les attributs d’un homme libre. Les mots maturité, responsabilité, ne
résonnaient pas en eux. Passer de l’assistance à l’aide est un de nos
objectifs fondamentaux, mais cela ne peut se faire que très progressivement.
Nous avions d’ailleurs sur la question un certain nombre de points de vue
très fermes : pour nous, l’enfant n’était accueilli à l’association que s’il était
volontaire. Mais avec les non-francophones, pour des raisons évidentes, la
question ne pouvait guère être posée. De par leur spécificité, ces enfants
devaient être sollicités et non freinés. Avant tout projet éducatif, il fallait,
d’abord, les rendre acteurs d’eux-mêmes. Pour aider un enfant, ou tout être
humain d’ailleurs, la générosité ne suffit pas, il faut que l’autre soit
demandeur. S’il ne l’est pas, personne ne peut rien pour lui. Nous pouvons
nous échiner des années, faire tout ce que nous voulons, il ne nous a rien
demandé.
Respecter l’autre, ce n’est sûrement pas vouloir faire son bonheur, et
décider à sa place.
C’est ma philosophie : si tout le monde était acteur de sa vie, le monde
tournerait mieux. Si, au lieu de subir son existence, ses pulsions, son destin,
on arrivait à les gérer, on serait un être humain véritable. On serait dans
l’être. C’est ce qu’essaie de faire l’association Hermès.
Le plus surprenant, c’est la solidarité spontanée que les enfants
développent à la maison, mais librement (ils ont appris...) à l’extérieur, chez
les anciens de l’association, y compris ceux qui n’avaient pas l’air de
s’entendre durant leur séjour commun. Peut-être, comme dit Emmanuelle,
assisterons-nous à une génération spontanée de petits Bouillon, qui
peupleront chacun des continents.
Les membres de l’association
Quoi qu’il en soit, nous aurons semé, ce sera aux enfants de récolter.
Quand on a un champ, un champ d’investigation par exemple, si on ne
sème rien, on ne récoltera jamais rien. Alors nous semons beaucoup, dans
l’espoir que parmi toutes les graines semées, le plus grand nombre germera.
Trismégiste
Le nom d’Hermès n’a pas été choisi par hasard. Helléniste passionnée,
née sous la maîtrise de ce dieu, je ne recule devant aucun clin d’œil : ce
nom symbolise à divers titres ma vie, ma philosophie et mon action.
Hermès est avant tout le signe de l’esprit, de l’intellect. Dieu ailé, il est
par essence subtil et aérien. Original, voire malicieux, il est le messager des
dieux, c’est-à-dire du passage, de la transformation, de la transmutation
entre les trois plans : le corps, l’esprit, l’âme.
Maître de l’occultisme, alchimiste, il transcende la matière, il œuvre au
noir pour redonner à l’homme ses dimensions spirituelle et cosmique.
Il ouvre les portes et avec lui tout est possible. Il protège les voyageurs,
les commerçants, les voleurs, les chercheurs, les inventeurs, les magiciens.
Médecin de l’âme, il détourne du chemin de l’homme les mauvaises
rencontres et les fantômes. Il va chercher des âmes en enfer et les ramène à
Dieu.
Il a pour emblème la lyre, faite avec la carapace d’une tortue, symbole de
la justice, et le caducée, représentation de l’infini, de l’universel.
Il est quelque peu « parquetier » (membre du parquet), puisque lui aussi
est l’exécuteur des lois... de Zeus.
Il fait des miracles par la magie de sa volonté.
Le trois fois grand est libre, il n’a aucune frontière.
ÉPILOGUE
Sauvetage
1
Fédération de quarante-cinq associations luttant pour la protection des
enfants.
2
Abuser signifie : « user au-delà de ce qui est permis ». Doit-on en conclure
qu’il est permis d’en user ?...
3
Chakra : centre vital d’énergie utilisé en médecine orientale. Les chakras
sont au nombre de sept.
4
L’infans est le tout petit enfant qui n’a pas l’usage de la parole. Par
extension, en droit romain, celui qui n’a pas droit à la parole...
5
En correctionnelle, le comparant s’appelle « prévenu » ; aux assises, c’est-
à-dire pour les crimes, il s’appelle « accusé », chez le juge d’instruction, il
s’appelle « mis en examen », nouvelle version de l’« inculpé ».
6
End Child Prostitution and Trafficking.
7
« Bas les masques » : L’enfance violée.
ISBN 2-7021-2733-9
© Calmann-Lévy, 1997
Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles
d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant
jusqu’alors uniquement sur un support imprimé, conformément à la loi n° 2012-287
du 1er mars 2012 relative à l’exploitation des Livres Indisponibles du XXe siècle.
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conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment
au titre du dépôt légal. Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des
éléments propres à l’exemplaire qui a servi à la numérisation.
Cette édition numérique a été initialement fabriquée par la société FeniXX au format
ePub (ISBN 9782702173619) le 29 juin 2015.
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Programme de génération ‒ Louis Eveillard
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*
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original, qui dispose d’une licence exclusive confiée par la Sofia ‒ Société Française
des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒ dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars
2012.