CSR Reporting by Moroccanbanks :an Exploratorystudybased On The Global Reporting Initiative
CSR Reporting by Moroccanbanks :an Exploratorystudybased On The Global Reporting Initiative
CSR Reporting by Moroccanbanks :an Exploratorystudybased On The Global Reporting Initiative
11(06), 309-323
Article DOI:10.21474/IJAR01/17075
DOI URL: http://dx.doi.org/10.21474/IJAR01/17075
RESEARCH ARTICLE
REPORTING RSE DES BANQUES MAROCAINES :UNE ETUDE EXPLORATOIRE A L’AUNE DU
GLOBAL REPORTING INITIATIVE
M. Hicham Elhafdi
Université Mohammed V, Faculté des Sciences de l’éducation, Rabat, Maroc.
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Manuscript Info Abstract
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Manuscript History This research analyzes the extra-financial reporting of Moroccan banks,
Received: 11 April 2023 in order to explore whether they integrate CSR issues as defined by the
Final Accepted: 14 May 2023 GRI guidelines, as well as the issues specific to the financial sector
Published: June 2023 listed by its sector supplement. Mobilizing content analysis techniques,
we have built an analysis scenario under Tropes grouping the indicators
Key words:
CSR, Extra, Financial Reporting, GRI, of the above-mentioned standards. Overall, the results reveal that the
Moroccan Banks, CSR Performance quality of extra-financial disclosure is dependent on the reporting
framework. They also recognize the predominance of social
disclosures, and the weakness of those of an environmental nature.
Finally, they suggest that improving the maturity of reporting requires
greater involvement of stakeholders, and work on the reliability of non-
financial information by having recourse to its external verification.
Le concept « a très clairement des origines américaines » (Pasquero, 2005), mais s’est largement diffusé à travers le
monde, apportant une nouvelle approche pour situer l’entreprise dans son environnement, répondre aux
questionnements sur la légitimité du capitalisme, et promouvoir l’engagement des entreprises pour adresser les
problématiques liées au développement durable, dont on peut dire qu’il constitue le pendant entrepreneurial
(Commission européenne, 2002).
Le reporting est un dispositif incontournable des politiques RSE. En tant qu’artefact de l’entreprise, il construit une
représentation de ses pratiques et des impacts de ses activités sur la société et l’environnement et constitue une
matérialisation de son engagement. D’ailleurs, la « redevabilité » et la « reddition de compte » sont les deux
premiers principes de la norme ISO 26000 sur la RSE.
Le reporting RSE suscite un véritable engouement, vérifiable au rythme de sa diffusion au sein des grandes
entreprises et celles cotées en bourse. Sa pratique pose cependant son lot de difficultés et d’interrogations, puisque
son format et son contenu ne font pas consensus, malgré l’apparition de cadres normatifs, voire même législatifs
pour certains pays européens. L’avènement du Global Reporting Initiative (GRI) a permis de faire de grands pas
vers cet objectif, en déterminant ce qui peut constituer le contenu d’un rapport, et en exhortant les entreprises à
publier de façon volontaire des rapports sur les enjeux RSE relatifs à leurs activités.
Ce papier ambitionne d’étudier le reporting RSE des banques marocaines afin d’explorer si elles intègrent les
enjeux du développement durable tels que définis par le GRI, ainsi que les enjeux spécifiques au secteur
financier, répertoriés par son supplément sectoriel.
Le choix du secteur bancaire s’explique d’abord par le nombre limité des recherches sur le reporting RSE dans ce
secteur (Ben Rhouma et Boyer, 2012). De plus, son rôle de catalyseur est de nature à favoriser le changement des
comportements organisationnels des autres secteurs de l’économie et contrôler les impacts de leurs activités sur
l’environnement, la société et l’économie (Douglas et al., 2004).
Pour répondre à notre question de recherche, nous allons tracer le cadre théorique et conceptuel en questionnant
successivement les concepts de performance et de reporting extra-financier, avant de conclure en présentant les
résultats de notre étude.
Avec l’essor de la RSE, la performance se complexifie davantage pour devenir globale. Désormais, elle est « la
synthèse des dimensions économique, sociale, sociétale et environnementale de l’activité des organisations » (Uzan,
2018). Quairel (2006) parle d’une « contribution de l’entreprise aux enjeux du développement durable, dans le
cadre d’une démarche RSE ». La définition de la performance globale fait plutôt consensus, mais c’est loin d’être le
cas des aspects relatifs à son évaluation et son pilotage.
Ainsi, la littérature sur la RSE ne définit pas spécifiquement la Corporate Social Performance (Caroll, 1979 ; Wood,
1991). La performance globale y est assimilée à un exercice de responsabilité vis-à-vis des impacts des activités de
l’entreprise auprès des stakeholders internes, externes et globalement au niveau sociétal, mais son évaluation n’est
pas abordée.
La performance n’existe qu’en rapport à une référence ou un objectif (Bourguignon, 1997), mais dans un contexte
de RSE, les dispositifs d’évaluation de la performance globale reflètent des attentes potentiellement conflictuelles de
divers stakeholders. A cette difficulté première, il faut ajouter la diversité des domaines à évaluer et la prégnance des
objectifs économiques pour mieux comprendre la difficulté de voir émerger un modèle d’évaluation cohérent de la
performance globale au sein des entreprises. C’est pourquoi les dispositifs d’évaluation actuels sont souvent l’œuvre
d’agents extérieurs à l’entreprise (agences de notation, ONG, etc.), et traduisent les systèmes de valeur de leurs
concepteurs.
Ces référentiels de reporting proposent un ensemble d’indicateurs juxtaposés, relatifs aux différents domaines,
laissant à l’utilisateur l’invention du modèle de lecture d’une performance globale. La nécessité d’élaborer des
indicateurs intégrés est reconnue de tous, mais ceux-ci restent encore à définir.
Cette difficulté à mesurer la performance globale amène certains chercheurs à adresser séparément la performance
environnementale et sociale. La logique de ces travaux est la recherche d’une expression monétaire des deux
dimensions pour les inclure dans le champ de la comptabilité qui devrait être élargi à cet effet. Mais ces travaux,
encore trop épars, nécessitent d’affiner et de standardiser leurs méthodologies d’évaluation.
Concernant le pilotage de la performance globale, des outils de type tableau de bord se sont développés, permettant
d’inclure des éléments autres que financiers dans l’analyse (Kaplan et Norton, 1992), c’est une approche dite
d’intégration, dont le BalancedScoreCard demeure l’exemple le plus représentatif. Une autre approche, dite de
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découplage, consiste à élaborer des tableaux de bord RSE spécifiques sans lien avec les tableaux de bord existants,
auxquels ils sont juxtaposés.
Ces différents outils demeurent limités au niveau opérationnel, car ils peinent à définir des indicateurs de
performance globale pertinents et restent déconnectés de la stratégie d’entreprise (Biecker, 2002). Or, «les
indicateurs sociétaux ne peuvent prendre sens que s’ils sont étroitement reliés à la stratégie de l’entreprise à l’instar
de tout indicateur de contrôle» (Bollecker et al., 2006).
Toutes ces difficultés techniques et conceptuelles pour élaborer des indicateurs globaux pertinents situent la mesure
de performance globale sur le terrain symbolique, en vue d’une recherche de légitimité, plutôt que sur le terrain de la
recherche d’efficacité.
La mise en place d’un système de performance globale dépend donc de la confrontation entre les intérêts des
stakeholders et les stratégies de conformité, d’évitement ou de manipulation des dirigeants de l’entreprise (Oliver,
1991). La cohérence entre la vision de performance globale exprimée dans les discours et les décisions sur le terrain
est difficile. Le découplage des structures devient le moyen de tenir des discours adaptés à chaque groupe de
pression. Le moyen le plus couramment utilisé est de dissocier les différents champs de la performance (Brignall et
Modell, 2000).
L’intégration pourrait exacerber les conflits entre les acteurs et déconstruire le message qui octroie la même
importance aux objectifs économiques, sociaux et environnementaux. Dissocier les mesures de performance
entretient l’idée d’un équilibre entre les trois dimensions du développement durable, et d’une conciliation entre les
intérêts divergents des stakeholders.
L’analyse des pratiques des entreprises instaure la dissociation comme une réponse rationnelle aux attentes
conflictuelles des stakeholders, notamment entre les mesures de performances monétaires et non monétaires
(Abernethy et Chua, 1996).
Ainsi, nous actons la coexistence de plusieurs systèmes d’information et de reporting internes, portés par différents
acteurs qui constituent les prolongements en interne des divers stakeholders : reporting financier, reporting social,
reporting environnemental, reporting HQSE, etc.Dans cette configuration, les directions fonctionnelles alimentent
leurs systèmes d’information grâce aux responsables opérationnels, et tiennent à sauvegarder cette dissociation qui
préserve leurs domaines de contrôles respectifs.
Outre la direction qui les demande, ces reportings internes sont utilisés pour la publication d’un rapport de
développement durable ou RSE, c’est-à-dire à une diffusion d’informations auprès des stakeholders et notamment
des investisseurs et des agences de notation qui produisent des notes séparées relatives à chaque domaine.
2. Du reporting extra-financier
Le concept de redevabilité est consubstantiel à la RSE. Il implique que les entreprises sont comptables des
conséquences de leurs décisions envers les stakeholders et qu’elles doivent en rendre compte. C’est pourquoi le
reporting est un dispositif incontournable des politiques RSE.
Plusieurs études notent un accroissement important des pratiques de reporting, favorisé par les demandes accrues de
transparence et le renforcement des législations. Aussi, de plus en plus de dirigeants pensent que le reporting extra-
financier contribue au succès à long terme de leurs entreprises (PWC, 2010). Mais cet engouement ne doit pas
occulter la faible qualité des informations diffusées (KPMG, 2008), reléguant les rapports au rang de simples outils
de communication.
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Cette faiblesse de contenu s’explique par le fait que l’information non-financière ne fait pas l’objet d’un effort de
régulation significatif, contrairement à l’information financière, régie par un ensemble de règles
universelles.Certains chrcheurs la désignent comme toute information ne figurant pas dans les états financiers
(Upton, 2001), d’autres la définissent comme une « information non-comptable » (Amir et Lev, 1996). Néanmoins,
le concept demeure assez vague et dénué d’ancragethéorique propre pour satisfaire précisément les demandes
d’information des stakeholders ousuggérer des indicateurs pertinents de performance globale.
Le reporting extra-financier implique « la diffusion régulière, par les entreprises, d’informations sur les impacts
environnementaux et sociaux de leurs activités et sur les politiques déployées pour les prévenir » (Quairel, 2006). Il
comprend aussi le monitoring de l’avancée et de la performance des engagements sociétaux et environnementaux de
l’entreprise (Dutrieux, 2015). Standardisé, il permet la comparaison des performances.
Au-delà des aspects liés à la communication interne et externe et au pilotage de l’activité, son objectif majeur est de
favoriser le processus de légitimation de l’entreprise, et de contrôler les dirigeants en leur demandant de publier une
information fiable et utile aux stakeholders (Capron et Quairel, 2010). La demande d’information oblige les
dirigeants à rendre compte sur les engagements pris et les pratiques développées, en déployant des mécanismes de
justification. Le document produit suit une logique Triple Bottom Line, mais tout élément pouvant améliorer la
mesure de la performance globale peut y être inclus.
Le reporting RSE permet d’instaurer une relation de confiance avec les stakeholders en leur démontrant
l’engagement de la firme pour le développement durable, de la même façon qu’un reporting financier relate la santé
financière de la firme pour rassurer actionnaires et investisseurs. Mais la complexité du développement durable et
les difficultés liées aux concepts de performance et de mesure rendent difficile la mise sur pied d’un système
d’indicateurs permettant de rendre compte fidèlement de la performance globale des entreprises de tous les secteurs.
En effet, contrairement aux indicateurs financiers, nombre d’indicateurs extra-financiers sont qualitatifs, difficiles à
objectiver et à mettre en place (De Rongé et Cerrada, 2012). Aussi, la mise en place d’un système d’évaluation de la
performance globale est souvent entravée par un manque de capacités, ou encore par un phénomène de rétention
d’information. C’est à ce niveau que les propositions de normalisation du contenu des rapports RSE prennent tout
leur sens.
Ces efforts de normalisation sont induits par le rapprochement entre la divulgation financière et non-financière,
traduisant la volonté de s’appuyer sur la légitimité de la première pour renforcer la deuxième. La force des
informations financières tient au fait que leur production s’appuie sur une double contrainte : l’obligation légale de
publier et la normalisation du processus d’élaboration et de vérification de l’information.
La normalisation de l’information diffusée limite la latitude dans sa production et permet des comparaisons et des
interprétations. Elle constitue une condition incontournable pour une diffusion d’informations vérifiables par des
tiers et interprétables par les utilisateurs.
La normalisation des rapports RSE suscite de nombreuses initiatives en vue de constituer un standard international.
Aujourd’hui, le GRI apparaît comme le plus avancé et le plus incontournable. Il a certes permis d’établir un
consensus sur les principes de contenu et de qualité de l’information, mais la nature et le nombre d’indicateurs
restent en débat. Aussi, les questions de la vérification par une tierce partie des informations publiées demeurent
irrésolues, ainsi que l’objet de l’assurance à donner aux lecteurs du rapport : s’agit-il de la fiabilité de l’information
produite ou plutôt de sa pertinence par rapport aux enjeux de la RSE ?
Les référentiels de normalisation comme GRI s’inspirent largement du cadre conceptuel du reporting financier. La
question est même posée, avec l’initiative IIRC (International Integrated ReportingCommittee), de normaliser la
production d’un rapport financier et RSE intégré, ciblé sur l’information des investisseurs.
Concernant la publication obligatoire d’informations extra-financières , les pressions les plus fortes viennent des
investisseurs et des agences de notations pour lesquels le rapport constitue une source d’information de base. Cette
demande de transparence néglige cependant les attentes des autres stakeholders. Globalement, les entreprises restent
opposées à l’obligation de publier, préférant l’autorégulation et les démarches volontaires. Or, les rapports publiés
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sur une base volontaire sont insuffisants en nombre et en qualité pour répondre au droit à l’information des
stakeholders (Gray, 2006).
En définitive, l’obligation de publier l’information extra-financière sous un format normalisé s’avère indispensable
pour en améliorer la qualité, la fiabilité et l’exhaustivité. Certains pays européens, pionniers en la matière,
constituent autant d’exemples inspirants.
Le paysage bancaire marocain est composé de 24 établissements dont 19 banques conventionnelles et 5 banques
participatives (Bank Al-Maghrib, 2020). Notre échantillon d’étude est constitué des banques pratiquant le reporting
extra financier de manière formalisée. Elles sont au nombre de cinq : Attijariwafa Bank (AWB), BMCE Bank of
Africa (BMCE), Banque Marocaine du Commerce et de l’Industrie (BMCI), Crédit du Maroc (CM) et le Groupe
Banque Populaire (GBP). L’échantillon ainsi constitué, nous avons pu recueillir les rapports extra-financiers desdits
établissements.
Il ressort des documents collectés que la BMCE est la banque pionnière puisqu’elle publie son premier rapport en
2013 en souscrivant d’emblée aux lignes directrices du GRI, au moment où les autres banques n’avaient pas encore
de politique RSE formalisée. AWB et GBP lui emboitent le pas en 2015, et produisent des rapports conformes au
GRI dès cette date. La BMCI intègre cette dynamique en 2016 et adopte le GRI à partir de 2018. Enfin, CM publie
son premier rapport RSE en 2017 sans souscrire au référentiel GRI.
De prime abord, nous relevons une différence en terme de volume de production de rapports. La banque la plus
prolifique en est à son septième exercice, alors que celles qui s’initient à cette pratique n’en sont qu’au deuxième. A
moins de vouloir faire une étude longitudinale du reporting d’une banque en particulier, prendre en considération la
totalité des rapports publiés serait de nature à biaiser la comparaison entre les banques. Nous avons donc fait le
choix de nous aligner sur les banques les moins prolifiques pour équilibrer notre échantillon. Cela revient à retenir
les deux derniers rapports publiés par chaque banque, en dépit du décalage dû au non respect de la périodicité de
publication.
Aussi, pour mettre en exergue l’évolution du reporting, les rapports retenus sont subdivisés en deux lots : le premier
comprenant les avant-dernières publications, et le deuxième regroupant les derniers rapports en date, au moment de
l’écriture de ces lignes.
La méthode de recherche s’inscrit dans un cadre qualitatif, mobilisant l’analyse de contenu pour chercher à percer
l’ossature linguistique des rapports étudiés, à dessein de mettre à jour les systèmes de représentation qui y sont
véhiculés (Blanchet et Gotman, 2001). L’analyse de contenu des rapports a été largement mobilisée dans la
littérature pour identifier les caractéristiques de la divulgation environnementale et sociale. Cette méthode d’analyse
est définie comme « une technique de collecte de données qui consiste à codifier des informations qualitatives sous
forme littéraire en catégories » (Abbott et Monsen, 1979).
Les données qualitatives collectées peuvent faire l’objet d’un traitement manuel ou automatisé, c’est-à-dire en
utilisant un logiciel adapté. Nous avons opté pour une hybridation des deux méthodes à travers une approche
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itérative (Miles et Huberman, 2005) plutôt que linéaire. Cette pratique implique des allers et retours entre les
différentes étapes de l’analyse qualitative, alternant les séances de collecte de données et celles de leur analyse, de
manière à affiner la recherche et améliorer le paramétrage du logiciel pour obtenir des résultats plus précis, autant de
préalables indispensables à l’émergence de sens.
Nous avons fait le choix d’opter pour un logiciel ADT (Analyse de Données Textuelles), en l’occurrence Tropes.
Certes, l’analyse textuelle automatisée renforce l’objectivité des traitements appliqués aux données (Gavard-Perret
et al., 2012) et facilite certaines opérations (comptage, calculs statistiques, etc.), mais elle ne dispense nullement le
chercheur d’une excellente connaissance du corpus étudié, et encore moins de son analyse manuelle. L’objectif est
de briser la structure apparente du langage (Chaniac, 1980), afin de focaliser l’analyse sur le lexique. La
déstructuration du corpus permet de l’appréhender différemment en arrimant l’analyse à des indicateurs statistiques,
permettant un accès rapide au contenu du corpus.
Pour notre démarche d’étude, nous avons suivi les « pôles chronologiques » définis par Bardin (2003), à savoir :
1. Préparation de l’analyse : après lecture du corpus, le chercheur effectue le découpage et la catégorisation. Ce
qui se traduit concrètement par la constitution de blocs textuels thématiques pertinents et homogènes.
2. Exploitation du corpus : les modalités du codage sont appliquées aux entités textuelles constituées. Autrement
dit, les éléments du corpus sont affectés aux catégories de la grille de codage. Après cela, l’opération de
comptage peut être effectuée.
3. Traitement des résultats, inférence et interprétation : un traitement statistique est appliqué au contenu codé et
compté, afin de faire ressortir les inférences et d’élaborer des interprétations. Les données ainsi obtenues seront
présentées sous une forme susceptible de faciliter le travail d’analyse et de faire émerger des conclusions
pertinentes.
Précisons, concernant la deuxième phase de l’étude, que le codage est assimilé à un «étiquetage» qui doit traduire
une unité de sens, destiné à faciliter le traitement du corpus, souvent volumineux et hétérogène (Dumez, 2013). Il
repose sur un constat simple : « les nombreux mots du texte sont classés dans un nombre beaucoup plus petit de
catégories » (Weber, 1990).
Nous avons opté pour un codage a priori, c’est-à-dire que la grille de codage est construite préalablement à l’étude
du corpus, notre objectif étant de confronter et d’affecter les unités de sens du corpus aux catégories définies par le
référentiel GRI.
Ainsi, pour chacun des enjeux identifiés par cette norme, nous pourrons analyser le traitement réservé par les
banques marocaines. Cette grille sera ensuite transposée sous le logiciel Tropes, pour constituer ce qu’on appelle
dans son jargon : un scénario d’analyse.
Ce logiciel mis au point par un groupe de chercheurs sur la parole, connaît aujourd’hui une large diffusion dans la
communauté académique et auprès des praticiens. Il permet d’analyser un ensemble de textes écrits ou oraux avec
comme premier objectif la limitation des biais analytiques de la part du chercheur (Cassière et Paché, 2011). Ainsi,
les résultats obtenus reflètent, autant que possible, le sens des verbatims originaux.
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Pour notre part, nous considérons le nombre de phrases associées à chaque élément thématique de la grille de codage
comme unité de mesure du reporting RSE. Ce choix nous paraît le plus pertinent pour quantifier la divulgation dans
chaque rubrique de notre scénario d’analyse sous Tropes. La fréquence est mesurée par le nombre de fois qu’un
thème de reporting est évoqué quantitativement ou qualitativement, renvoyant à la place qui lui est allouée dans le
reporting en terme de volume. Le nombre de mots peut induire en erreur, parce qu’il ne suffit pas qu’un mot soit cité
pour qu’une thématique particulière soit adressée, de même que le nombre de pages ou leur proportion ne signifie
pas que la thématique traitée l’a été de façon satisfaisante et continue tout au long des pages identifiées. A notre
avis, seule la phrase, en tant qu’unité de sens, permet un degré de précision satisfaisant pour se prononcer sur le
traitement d’une catégorie de reporting donnée.
C’est la BMCE qui en a généré le plus d’occurrences avec 30%, tout en étant première pour les citations sociales, et
deuxième pour les autres catégories d’items. En outre, son périmètre de reporting est plus étendu que les autres
banques, puisqu’elle a globalement couvert plus d’items.
Le GBP la talonne de près avec 25% des citations, et la première place pour les items environnementaux et ceux du
supplément sectoriel. Vient ensuite AWB avec 22% des citations et une avance certaine concernant les items
économiques. La BMCI et CM ferment la marche avec respectivement 14% et 9% des occurrences.
Par catégorie, les indicateurs sociaux ont généré le plus de citations avec 32,47%. Le volet économique est
deuxième avec 29% des occurrences, suivi des items sectoriels qui totalisent 24% du volume de citations, tandis que
les items environnementaux sont les moins cités, totalisant à peine 14,49%.
AWB
200
150
100
GBP BMCE Indicateurs économiques
50
Indicateurs environnementaux
0
Indicateurs sociaux
Indicateurs supplément Finance
CM BMCI
Figure 1:- Occurrences des items extra-financiers dans le premier lot de rapports des banques marocaines.
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Indicateurs économiques
600
450
300
150
Indicateurs spécifiques Indicateurs
0
Finance environnementaux
Indicateurs sociaux
Figure 2:- Scores de reporting par catégorie d'indicateurs GRI dans le premier lot de rapports.
Comme pour le premier rapport, le GBP se place en dauphin avec un score de 592 points, tout en continuant à
dominer la catégorie des indicateurs sectoriels.
Pas très loin derrière, AWB pointe en troisième position, générant le deuxième pourcentage d’occurrences avec
24%. Elle se maintient aussi en tête de la catégorie économique avec une avance confortable.
S’il est vrai que BMCE continue à devancer ses pairs sur les indicateurs sociaux, elle se fait néanmoins rattraper et
distancer sur les autres catégories, enregistrant un net recul des citations comptabilisées comparativement avec le
premier rapport étudié.
Enfin, comme pour le premier lot de rapports, le CM ferme le ban avec un score de 222 qui représente 10% des
citations enregistrées. Il est aussi lanterne rouge dans trois catégories de reporting.
Dans un autre registre, nous notons que les items sociaux continuent à générer le plus de citations avec un peu plus
de 35%, alors que les indicateurs environnementaux demeurent les moins cités. Par contre, les indicateurs sectoriels
se placent en deuxième marche du podium, enregistrant 132 occurrences de plus que les indicateurs économiques.
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AWB
300
225
150
GBP BMCE
75
Indicateurs économiques
0 Indicateurs environnementaux
Indicateurs sociaux
Indicateurs supplément Finance
CM BMCI
Figure 3:- Occurrences des items extra-financiers dans le deuxième lot de rapports des banques marocaines.
Indicateurs économiques
900
675
450
225
Indicateurs sociaux
Figure 4:- Scores de reporting par catégorie d'indicateurs GRI dans le deuxième lot de rapports.
Le deuxième score est réalisé par AWB avec 914 points. La banque génère aussi le deuxième volume d’occurrences
consolidées avec 23% et domine le volet économique avec une belle avance.
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BMCE et BMCI sont au coude à coude pour la troisième marche du podium. Les deux banques sont à parfaite
égalité pour le volume global des items comptabilisés avec 21%. Mais la BMCI s’en tire mieux pour la divulgation
environnementale où elle signe le meilleur score consolidé. Elle se hisse aussi à la deuxième place des occurrences
sociales et sectorielles. Pour sa part, la BMCE est leader sur les items sociaux, et se place dans le top 3 des
indicateurs économiques et environnementaux.
Le CM ferme la marche avec un score consolidé de 371. Cette performance ne doit pas occulter le bond
considérable du score de la banque entre les deux exercices, à hauteur de 49%.
Globalement, nous notons une évolution positive du nombre d’occurrences chiffrée à 41,71% entre le premier et le
deuxième exercice. Toutes la catégories d’indicateurs sont concernées par cette embellie, qui est plus prononcée
pour les items sectoriels, sociaux et environnementaux.
En terme de volume, les items sociaux sont les plus cités avec 34,15%, suivis par les indicateurs sectoriels et
économiques qui génèrent presque 25% chacun. En queue de ce classement, le volet environnemental comptabilise
15% des citations extra-financières.
AWB
400
300
200
GBP BMCE
100 Indicateurs économiques
0 Indicateurs environnementaux
Indicateurs sociaux
Indicateurs supplément Finance
CM BMCI
Figure 5:- Occurrences consolidées des items extra-financiers des banques marocaines.
Indicateurs économiques
1400
1050
700
350
Indicateurs sociaux
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Cet situation est de nature à jeter le discrédit sur l’engagement RSE mis en avant par les banques, et ne peut
s’expliquer que par la centralité accordée aux aspects économiques et financiers de l’activité bancaire, au détriment
de la performance RSE qui occupe un rang secondaire alors que, faut-il le rappeler, elle n’est pas une négation de la
performance économique, mais plutôt une approche globale de la performance.
Enfin, le reporting étant d’abord un support de communication à l’adresse des stakeholders dans leur grande
diversité, le non respect de la périodicité revient à négliger le dialogue avec les parties prenantes, aspect central de
toute démarche RSE.
Nous pouvons donc dire que, malgré la mise en avant du dialogue avec les parties prenantes dans le discours
managérial des banques marocaines, et la formalisation de ce dialogue à travers des canaux permanents, lorsqu’il est
question d’enjeux décisifs pouvant avoir des conséquences en terme de reddition de compte, ce dialogue est relégué
au second plan.
Ainsi, 30 % des rapports étudiés mentionnent clairement l’engagement de parties prenantes, mais sans s’aventurer à
expliciter le niveau et les modalités de cet engagement, ou encore le traitement réservé aux commentaires formulés.
Nous sommes en droit de nous demander si les contributions des stakeholders sont intégrées dans la stratégie RSE
des banques.
Nous notons aussi que la production d’informations extra-financières est de loin plus importante chez les banques
ayant réalisé des études de matérialité. Mais l’effectivité de ce lien nécessite d’être confirmée par une étude
spécifique.
Les informations économiques produites par les banques marocaines dans leur reporting extra-financier se
concentrent essentiellement dans le volet relatif aux impacts économiques indirects, faisant la part belle aux actions
de mécénat et de partenariats divers.
Il est vrai que le mécénat souligne le volontarisme de l’organisation qui le pratique, mais le volume d’information
impressionnant qui lui est consacré suggère une mise en scène de l’action des banques dans ce registre. Comment
expliquer sinon l’absence d’autres informations qu’on imagine pourtant disponibles, tel que les aides publiques
reçues, le salaire d’entrée de base ou encore la part des dépenses réalisées avec des fournisseurs locaux ? Assistons-
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L’information diffusée dans cette catégorie est clairement orientée dans un sens favorable aux banques, mettant en
avant l’action caritative et partenariale, et occultant - volontairement ? - d’autres informations économiques
pertinentes pour les stakeholders. En tout cas, le reporting de la catégorie « Economie » gagnerait en crédibilité à
être plus équilibré.
S’agissant d’une information technique et pointue, l’information environnementale est sans doute la plus exigeante
parmi toutes celles du reporting extra-financier. Les autres catégories d’informations sont susceptibles d’être
collectées, consolidées et diffusées sans occasionner des bouleversements notables au niveau de l’organisation de la
banque. On peut même dire que, dans le cadre de son fonctionnement normal, la banque dispose déjà d’une bonne
partie des informations économiques et sociales exigées par le reporting RSE.
Par contre, l’information environnementale nécessite un investissement, soit pour faire appel à un tiers expert qui se
chargera de la collecter, soit pour implémenter en interne un système de management environnemental qui fera
remonter ces informations. Ce n’est pas un hasard si la seule banque marocaine à disposer d’une certification
environnementale (ISO 14001) est aussi celle qui fournit le bilan carbone le plus exhaustif, en l’occurrence la
BMCE.
Nous pensons que l’amélioration de la divulgation environnementale des banques marocaines passe nécessairement
par des certifications dédiées offrant l’outillage adéquat pour fournir une information environnementale fiable et
complète, tout en capitalisant sur les acquis en matière de réduction de la consommation énergétique.
Nous constatons aussi que les aspects du reporting tournés vers les parties prenantes externes sont moins bien traités,
notamment les questions liées aux Droits de l’Homme et la responsabilité liée aux produits, même si, il est vrai, des
efforts sont consentis pour communiquer sur la lutte contre la corruption et la lutte contre les discriminations.
Peut-on alors dire que le reporting social des banques marocaines est tourné d’abord vers les attentes des parties
prenantes internes ? Le questionnement est d’autant plus légitime que des indicateurs clés comme l’étiquetage des
produits et services et la communication marketing sont soigneusement éludés, alors qu’il s’agit de questions
centrales pour la clientèle.
En tout cas, l’amélioration de la qualité du reporting social des banques marocaines passe obligatoirement par un
rééquilibrage entre ses dimensions internes et externes.
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Une lecture rapide des indicateurs du supplément sectoriel permet de mieux comprendre cette diffusion rapide.
Concrètement, ces indicateurs font partie du cœur de métier des banques, à la seule différence près qu’on y a intégré
des aspects environnementaux et sociaux. Les banques avaient accumulé donc une certaine pratique dans ce
domaine, même sans formaliser la prise en compte de ce supplément dans leur reporting.
A titre d’exemple, le GBP n’a officiellement adopté le supplément sectoriel dans son reportingqu’en 2018. Pourtant,
dès 2011, avec l’implémentation de son « Système de Gestion Sociale et Environnementale », il prend en compte
des aspects traités par le supplément, surtout concernant les procédures d’évaluation et d’identification des risques
environnementaux et sociaux dans les secteurs d’activités, ainsi que la mise en place de produits et services conçus
en vue de générer un bénéfice social ou environnemental. En outre, toutes les banques ont développé une certaine
pratique de l’inclusion et l’éducation financière, thèmes parmi les plus repris dans le reporting. Il s’agit donc
globalement de thèmes « familiers ».
Néanmoins, les questions relatives à l’actionnariat actif sont le grand absent du reporting des banques marocaines
dans cette catégorie. Il s’agit d’indicateurs qui traitent de la diffusion des politiques sociales et environnementales au
sein des entreprises détenues dans le porte-feuille d’actions, et de l’évaluation de ces actifs sous le prisme de la RSE.
Si nous prenons comme référence l’étude publiée par l’ONG américaineCeres en 2018, qui identifie les phases de
maturité du reporting extra-financier, nous pouvons dire que le secteur bancaire marocain est dans une situation
hybride.
En effet, à part CM, les banques étudiées ont toutes atteint le premier niveau de maturité qui consiste à adopter un
cadre normé permettant la comparabilité des performances. Par contre, le deuxième niveau, celui de l’intégration, est
partiellement atteint par les banques ayant effectué une étude de matérialité (BMCI, BMCE et GBP). Il leur reste à
concrétiser l’harmonisation de la performance économique et des politiques RSE à travers un engagement concret
des parties prenante, et la mise en place d’un organe de pilotage de la performance globale.
Enfin, pour le dernier niveau de maturité, celui de la fiabilité, nous pouvons dire que la BMCI s’en rapproche vu
qu’elle a soumis sa divulgation extra-financière à une vérification externe. Mais comme elle n’a pas encore
amplement satisfait aux exigences du deuxième niveau de maturité, elle reste, à notre avis, à un niveau intermédiaire
entre les deux.
Conclusion:-
Mobilisant une méthodologie de recherche qualitative basée sur l’analyse de contenu, nous avons soumis le
reporting RSE des banques marocaines à l’évaluation du GRI et de son supplément financier, au regard de la
reconnaissance internationale dont jouissent ces référentiels. Ce travail a permis de faire ressortir plusieurs
conclusions intéressantes.
Sur le plan pratique, cette recherche met en éclairage la manière dont les groupes bancaires marocains appliquent la
norme GRI dans leur reporting RSE. L’information extra-financière est diffusée dans un document spécifique qui y
est consacré, sans toutefois respecter la périodicité de publication et sans assurer un engagement systématique des
parties prenantes à la démarche.
Sur le plan méthodologique, cette recherche utilise un scénario d’analyse novateur comparativement aux grilles
utilisées dans la littérature antérieure, construit sur la base des indicateurs du GRI et de son supplément sectoriel des
services financiers.
Sur le plan théorique, les résultats de la recherche confirment l’importance du cadre de reddition dans la pratique du
reporting RSE. En effet, la banque ayant les scores les plus faibles est celle qui produit un rapport non conforme au
GRI. Nous pensons qu’un reporting obligatoire selon un cadre de référence commun permet de mieux répondre aux
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attentes des stakeholders en matière de transparence et de qualité de l’information, tout en facilitant la comparabilité.
Enfin, notre étude étant basée exclusivement sur une analyse de fond documentaire, elle pourrait être pertinemment
complétée par une enquête interrogeant les pratiques internes d’évaluation des performances RSE et la méthodologie
du reporting extra-financier des banques marocaines.
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