Le Management Dit Scientifique Et Le Réformisme Actuel - de Herbert Simon À Henry Mintzbert

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Le management dit scientifique et le réformisme actuel ; de

Herbert Simon à Henry Mintzbert

A - Herbert SIMON et l’école de la prise de décision

Son ouvrage le plus célèbre est " administrative behavior " (1947). Ainsi " l'homme
administratif " de SIMON se distingue de " l'homo economicus ", car il ne maximise pas,
économiquement, son utilité, il ne connaît pas tous les paramètres indispensables à la prise de
position rationnelle, et il n'a pas une fonction de préférence stable et durable. Le but de la
théorie dite " de la rationalité limité " est donc de mettre en lumière les limites pratiques de la
rationalité humaine et de s'efforcer trouver les moyens (entraînement, formation, adhésion à
de nouvelles valeurs) de repousser ces limites.

Ainsi, le décideur navigue souvent dans le brouillard car :


- Les informations dont il dispose ne sont pas complètes
- Ses capacités d'abstraction, de synthèse ou d'analyse sont limitées
- Il est influencé par des émotions et des événements extérieurs (professionnels ou privés),
étrangers à la décision qu'il doit prendre rationnellement.

Ainsi SIMON oppose à la rationalité absolue, la rationalité " procédurale " qui va
consister à une succession de décisions itératives, qui cherchent, en fonction des erreurs
passées, à s'approcher de la moins mauvaise solution possible.

B- HENRY MINTZBERG ou l’ère du réformisme pragmatique


Professeur et chercheur à la faculté d’administration de l’université de Mc Gill de
Montréal. Henry Mintzbert publia en 1973 le premier livre qui allait le faire connaitre a
travers le monde The Nature of Management Work.

1) Principes

Mintzberg, comme ceux qui l’ont précédé, rejette l’idée qu’il existe une « bonne »
organisation. Il affirme qu’il existe des organisations mieux adaptées que d’autres à
l’ensemble des contraintes et construit une typologie associant efficacité à cohérence interne.
Celle-ci vient de mécanismes de cohésion particuliers à chaque entreprise et dépendant des
objectifs des dirigeants. Ce lien est sûrement l’apport le plus original de Mintzberg. Il dit aux
managers : « Pensez conjointement vos objectifs et votre organisation ». La structure dépend
donc de l’ajustement à l’environnement, qui se fait par l’organisation. Voyons pour l’instant
en quoi consiste le contenu de ses travaux.
Le fonctionnement de l’organisation

a) Les éléments de base de l’organisation

Les organisations sont composées de cinq éléments :

• le centre opérationnel : Il rassemble les membres de l’organisation (opérateurs) dont le


travail est directement lié à la production des biens et des services (produisent eux-mêmes
les biens et services ou en soutiennent directement la production) – les opérationnels. Le
centre opérationnel procure les entrées nécessaires à la production, fabrique et distribue
les produits, assure la maintenance. C’est le cœur de l’organisation, la partie qui permet à
l’ensemble de survivre.
• le sommet stratégique : Sa fonction est de faire en sorte que l’organisation remplisse sa
mission de façon efficace et qu’elle serve les besoins de ceux qui la contrôlent ou qui ont
sur elle du pouvoir (propriétaires, administrations, etc...). Il exerce des fonctions de
supervision directe : allocation des ressources, règlement des conflits, contrôle, diffusion
de l’information, leadership. Il est également chargé de la gestion des conditions de
frontière de l’organisation et de ses relations avec l’environnement (contacts à haut
niveau, négociation, etc.). Enfin, il doit développer la stratégie de l’organisation.
• la ligne hiérarchique : C’est la ligne d’autorité, composée de cadres, contremaîtres, etc.,
qui joint le sommet stratégique au centre opérationnel. Chaque membre de la chaîne
hiérarchique accomplit, à son niveau, le travail du sommet hiérarchique.
• la technostructure : Elle est composée d’analystes, chargés de la conception et de
l’adaptation de la structure, qui agissent sur le flux de travail par le biais de la
standardisation :
Situés en dehors de la structure d’autorité formelle, ces analystes sont les moteurs de la
standardisation dans l’organisation. Les hommes des méthodes standardisent le travail.
Les hommes de la planification et du contrôle standardisent les résultats. Les hommes du
personnel standardisent les qualifications.
• les unités fonctionnelles logistiques : Il est composé de tous les services qui fournissent
un soutien indirect au reste de l’organisation. Il s’agit des unités spécialisées qui ont une
fonction particulière à remplir : recherche, contentieux, relations publiques, etc. Elles
interviennent indirectement dans le flux du travail.

b) Les configurations structurelles

À partir de l’analyse de l’impact des facteurs de contingence sur les paramètres de


conception, H. Mintzberg déduit que les divers éléments analysés (mécanismes de
coordination, paramètres de conception et facteurs de contingence) tendent naturellement vers
cinq types ou configurations structurelles. Celles-ci constituent les cinq formes existantes
parmi lesquelles on peut classer toutes les organisations :
• la structure simple ; Caractéristiques : supervision directe, domination du sommet
stratégique, centralisation horizontale et verticale.
• la bureaucratie mécaniste : Caractéristiques : standardisation des procédés, domination
de la technostructure, décentralisation horizontale et verticale (limitée).
• la bureaucratie professionnelle : Caractéristiques : standardisation des qualifications,
domination du centre opérationnel, décentralisation horizontale et verticale.
• la forme divisionnelle : Caractéristiques : standardisation des produits, domination de la
ligne hiérarchique, décentralisation verticale (limitée).
• l’adhocratie : Caractéristiques : ajustement mutuel, domination des fonctions de support
logistique, décentralisation sélective.
H. Mintzberg explique l’existence de ces cinq formes par la prédominance de l’un ou
l’autre des éléments de base de l’organisation :
• le sommet stratégique pousse à la centralisation qui lui permet de conserver le contrôle
sur les décisions,
• la technostructure pousse à la standardisation −notamment celle des procédés de travail,
qui est la forme la plus puissante de standardisation− parce que la conception des
standards est sa raison d’être,
• les membres du centre opérationnel cherchent à minimiser l’influence de l’encadrement et
des analystes sur leur travail ; ils poussent donc à la décentralisation horizontale et
verticale.
Les opérateurs exercent une pression en faveur du professionnalisme (recours à la
formation) pour améliorer leurs compétences −les cadres opérationnels recherchent
également l’autonomie ; une décentralisation verticale limitée leur permet d’augmenter leur
pouvoir aux dépends du sommet stratégique. Ils poussent à la division de l’organisation en
petites unités (balkanisation) dans lesquelles ils peuvent exercer un contrôle sur leurs propres
décisions.
• les fonctionnels du support logistique acquièrent de l’influence lorsque l’organisation a
besoin de leur collaboration, ce qui arrive lorsque l’organisation est structurée en
constellations de travaux qui coordonnent leurs activités par ajustement mutuel.
Les organisations peuvent évoluer d’une configuration pure vers une autre. Au cours
de ce processus, elles deviennent hybrides. Parfois le processus s’interrompt. Il s’agit alors
d’un mélange de deux configurations. Celle qui prédomine est qualifiée de configuration
principale ; l’autre composante de l’hybride est appelée configuration secondaire.

2) Critiques de l’approche de H. Mintzberg

L’approche proposée par H. Mintzberg se veut globale, pour cela il exclut


complètement l’individu, dans ces jeux de pouvoir, d’interactions sociales et sa rationalité
limitée, pour n’étudier que les masses en les divisant par grandes fonctions ; l’acteur est donc
absent de ses analyses. On ne voit qu’une lutte entre les 5 fonctions.
La dimension politique de l’organisation est également absente. En effet,
l’organisation est ici étudiée dans sa composante interne, ses interactions dans le tissu
économique, politique et social ne sont pas abordées. De ce fait, il est très difficile de
déterminer ce que le choix d’une ou l’autre Une des principales limites des théories de la
contingence, est que le comportement stratégique des acteurs, leur autonomie, y est délaissé
au profit d'une analyse orientée vers le groupe. En d'autres termes, elles ne permettent pas de
comprendre comment les acteurs peuvent être à la fois ceux qui construisent le système, lui
assurent une certaine permanence, et lui permettent d'évoluer. D'autre part, le postulat de
l'adaptabilité du système ne rend pas bien compte du caractère construit de l'organisation, il
n'explique pas l'émergence de formes structurées, et leur survivance, autrement que par le
recours implicite à des hypothèses d'adaptabilité proche d'un certain darwinisme social
L’apport de Mintzberg réside dans sa tentative de lier l’environnement à
l’organisation, en soulignant qu’il doit y avoir cohérence entre les deux. Si sa classification en
configurations est discutable (pourquoi cinq ou six, pourquoi pas plus ?), l’idée du lien et de
la cohérence ne l’est guère. Une société qui change de produit, donc de type de production et
d’environnement, doit réfléchir à la nouvelle organisation à mettre en place. La recherche de
la cohérence entre objectifs, produits et structures est un chantier auquel les entreprises
doivent consacrer une réflexion permanente.
L’émergence des configurations reste un fait que l’auteur n’explique pas vraiment pour
lui-même, la liaison avec l’environnement semblant être quasi naturelle. Le raisonnement de
l’auteur laisse entendre, sans qu’il le dise explicitement, que si l’entreprise ne fait pas liaison,
elle ne peut réussir. Ce type de pseudo-évidence, caractéristique des théories de la
contingence, est négateur de la marge de liberté des acteurs qui existe dans les organisations.
Ces théories de la contingence ne permettent pas de montrer comment les acteurs
peuvent être à la fois ceux qui construisent le système, lui assurent une certaine permanence,
et lui permettent d’évoluer.
Le modèle de la bureaucratie professionnelle d’Henry Mintzberg a jusqu’à présent été
largement utilisé pour décrire de nombreux services étatiques, tels que les hôpitaux, l’école et
les services sociaux. Quelques remises en cause apparaissent depuis peu.
Ainsi, la bureaucratie professionnelle ne serait plus l’unique configuration
organisationnelle à partir de laquelle s’exerce l’activité hospitalière. Le mouvement qualité
fortement présent dans le champ médical semble pousser à la rationalisation et au contrôle.
Ainsi la technostructure quasi absente dans la bureaucratie professionnelle fait une entrée
remarquée dans l’exercice de la médecine par le biais des guidelines internationales.
Celles-ci n’opèrent plus le simple rôle d’ajustement entre pairs mais joue un rôle de
prescriptions quasi impérative. En effet, le pouvoir judiciaire s’appuie sur ces normes
internationales en cas de procès. D’autre part, la hiérarchie dans la description de la
bureaucratie professionnelle est très faible et laisse ainsi une grande autonomie aux différents
acteurs de terrain. Aujourd’hui cette hiérarchie commence à s’imposer, plus particulièrement
au niveau économique : les directives de rationalisation, voire de rationnement, sont de plus
en plus fortes et contraignantes. L’exemple de l’opposition vaine des médecins face à la
fermeture de certains hôpitaux est symptomatique d’une nouvelle relation entre le médecin et
le malade. En effet, la hiérarchie a tendance à le rappeler : le « client » ne doit pas être la seule
préoccupation du médecin. La hiérarchie a donc parfois tendance à assurer une lignée
générale par quelques directives au corps médical. Ce dernier n’est pourtant pas dédouané de
ce souci, loin s’en faut. Se forment donc quelques changements importants par rapport à
l’idéal-type de la bureaucratie professionnelle. Bien que nous ne puissions pas conclure à une
sortie radicale du modèle, il convient d’être attentif aux changements esquissés ci-dessus
redistribuant les questions d’autonomie, de responsabilité et de pouvoir aux différents acteurs
de la fonction publique.

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