Les Splendeurs de La Foi (Tome 5)
Les Splendeurs de La Foi (Tome 5)
Les Splendeurs de La Foi (Tome 5)
SPLENDEURS
D E L A F O I
ACCORD PARFAIT DE LA RVLATION ET DE LA SCIENCE DE LA FOI ET DE LA RAISON Par M. l'abb MOIGNO
CHANOINE D E
SAINT-DENIS
Fondateur-Directeur du Journal
KOSMOS-LES-MONDES
PARIS
BLRIOT ET GAUTIER,
55, QUAI DES
LIBRAIRES - DITEURS
55
GRANDS- AUGUSTINS,
1882
Tout droit reservo.
LES
SPLENDEURS
D E LA. F O I
APPROBATION
P a r suite de la sollicitude paternelle de son Eminence le Cardinal. P i t r a , devenu mon plus insigne bienfaiteur, j ' a i t amen demaa der Rome, par l'organe d u R. P . Torquato Armellini, u n des consulteurs de la sacre Congrgation des Rites, l'examen de mon volume sans prcdent, de m a Prface qui touche des questions dsir.
J ' A I P A H C O U U U LE
trs dlicates, et voici que j ' a i reu Yimprinutlur De mon volume le savant consultera: dit :
CINQUIME
tend spontanment
montre l'amour de la vrit dont est anime la sainte glise, et qu'elle ne craint pas la vrit. J'aurais aim trouver h. la fin le j u gement de quelque mdecin Franais minenL ; mais j e n e vois rien qui s'oppose sa publication tel
QU'IL E S T .
17 juillet 1882.
De m a Prface : * J E M E rjouis de cur avec vous de votre belle Prface qui rpond parfaitement m o n dsir. Si je l'avais eue sou? les y e u x , avant de vous crire mon sentiment je n'aurais rien ajout en dehors de mes plus cordiales congratulations. L'admirable Saintque vous avez si bien glorifi vous viendra en aide sans faute par sa puissanto intercession. 23 avril 1882.
PRFACE
Dans ma pense les SPLENDEURS de la Foi ont toujours form G volumes : La Foi, 1 vol., la Rvlation et la Science, 2 vol., la Raison et la Foi, 1 vol., le Miracle et la Science, 2 vol. Ce plan m'tait impos par les libres penseurs du dix-neuvime sicle, qui opposent si brutalement la raison la FOI, la science ait MIRACLE, quand cependant rien n'est plus raisonnable, ou mme rien n'est parfaite m e n t raisonnable que la Foi ; quand rien n'est plus scien tifique ou plus savamment dmontr que le miracle. Dans ma pense aussi, vieille dplus de quarante ans, le premier des deux volumes, le MIRACLE ET LA SCIENCE, devait tre la reproduction exacte et aussi complte que possible des Procs de Batification et de Canonisation d'un grand serviteur de Dieu, Ces procs, en effet, ne sont pas autre chose que la comparutioa du miracle au tribunal de la science (la science mdicale donl il ressort, et les sciences accessoires, la physique, la chimie, l'anato'mie, la physio logie, la pathologie, la mdecine, la chirurgie), comparu tion aboutissant un jugement solennel, irrcusable, qui approuve ou confirme, et comme fait clatant certai nement accompli, et 'comme miracle, la gurison instan tane, parfaite, sans rcidive, de maladies dclares incu rables parles forces de la nature et les ressources de l'art.
VIII
Le tribunal appel prononcer ce jugement solennel, la SACRE CONGRGATION DES RITES, est le tribunal le plus auguste que l'on puisse imaginer. On ne rencontrera chez aucun peuple civilis, ni cour d'Appel, de Cassation, d'Assises, de Hautejustice, ele, ni Aropage, ni Snat, etc., qui prsente autantdcgarantiesdemoralit,de science,d'in dpendance, de dsintressement, etc., etc. Ses membres, ou juges du premier ordre, sont tous des cardinaux, la gloire la plus pure et la plus grande de la sainte glise Ca tholique, Apostolique, Romaine.Aujourd'hui au nombre de vingt-six, ces juges ont leur tte un Prfet ou Prsident perptuel; et, dans chaque procs particulier, le Souverain Pontife nomme lui-mme l'un d'eux l'office de Patron et deRapporleur de la cause. A ces Juges de premier ordre se joignent -vingt-sept consulteurs,iou j u g e s du second o r d r e , choisis ordinairement parmi les gloires du clerg o u des .congrgations religieuses renommes par leur science, les dominicains, les mineurs, .les barnabil.es, les servtes, les jsuites, etc. ; et.chaque consulleur a IQ droit de se faire assister par deux Thologiens ou Ganonistes. En-outre de ses Gonslteurs, ou Juges de premier et de second ordre, la congrgation des Rites .a ses Officiers ou son.ministre public. C'est d'abord le Promoteur .de la foi, qui fait fonction de procureur ou d'avocat gnral, qui formule les .difficults, ou observations critiques, qui sou lve les objections, ,et ne s'arrte, qprs une, deux, et quelquefois trois luttes acharnes, q u e q u a u d les derniers nuages .sont dissips,,.et qu' bout d'arguments, ihse voit forc de se dclarer vaincu \ou satisfait. Alors, .et alors ;seulem.eut,,il dpose sa verge de Censem;, et conclut.ou yole en faveur de .la cause. .Api:s le .promoteur viennent le vice-promoteur, .qui ,1e remplace,an-besoin,.le secrtaire,, qui.dresse tQu$.les,procs-verbaux, le notaire, qui minute tous les actes, :le&
PRFACE
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procureurs et avoeats consistoriaux, les Experts elles interprtes, des mdecins, des physiciens, des mathmati ciens mme, dans les circonstances qui l'exigent. Tous ces officiers sans exception sont pris parmi les membres les plus distingus des. corporations auxquelles ils appartien nent, -et ils ont toujours choisis par couples de deux, chargs'Uun de dfendre, l'autre d'attaquer. E n outre, toutes les plaidoiries, pour ou contre, sont crites: tout est plaid sur mmoires dposs;.rien n'est laiss-au hazard de l'improvisation ou la surprise d'une parole habile, loquente, insidieuse. Chaque juge a sous les yeux ces plaidoiries imprimes, et peut les relire aussi souvent qu'il lui plat. Quelle diffrence encore avec les cours de justice humaine, quelle incontestable s u p riorit I Il ne.s'agit pas, non plus, d'arrts rendus aprs une ou deux audiences de quelques heures chacune. Les procs de batification et de canonisation durent des annes, de lon gues aimes,"un demi-sicle, en gnral, et supposent des centaineSjdes milliers de sances particulires ou gnrales. 11 ne s'agit pas, enfin, de l'audition, une fuis pour.toutes, d'un petit-nombre de tmoins plus ou moins clairs, plus ou moins dsintresss, plus ou moins indpendants. Il s'agit d'enqutes nombreuses, publiques, presqu'universelles, ouvertes dans un lieu sacr, de tmoins appels par une autorit sainte et souveraine etc., etc. Pour mieux faire connatre ce que sont ces enqutes, ces interrogatoires et ces tmoins,,nous dirons, dans un rcit rapide, ce qu'ils ont t dans les procs de Batifica tion et.de Canonisation de .notre hcros,.saintBenQt-Jos.eph Labre. Benoit Joseph.tait untranger, un inconnu, un pauvre dnu de tout, mais jamais le suffrage populaire ne s'tait
exprim d'une manire plus imposante, jamais la voix des miracles ne s'tait mieux unie l'hrosme des vertus; aussi le Recteur de l'glise Notre-Dame-dcs-Monts,lepcrc Gatan Palma, n'hsita pas prendre,contrairement aux usages, ou mme aux rgies de la sainte glise romaine,rinitialivedela demande d'ouverture du procs de sa batification, un mois aprs sa mort. Le cardinal Vicaire, Marc-Antoine Golonna, accueillit favorablement sa demande, et le nomma postulateur de la cause. Son premier acte fut de rclamer la cons titution du tribunal appel recueillir les informations relatives la cause.Mgr Jrme Volpi, archevque deNocsare, fut nomm juge, et Dom Coselli Promoteur. SOIXANTE QUINZE tmoins pour furent cits par le Postulateur, le Promoteur en appela VINGT-SIX contre. On distribua chacun une srie de questions crites, au nombre de CENT TRENTE-DEUX, auxquelles tous avaient rpondre en cons cience. Aux questions crites succdrent les interroga toires, qui prirent QUATRE C E N T - D E U X SANCES, et durrent plus de DEUX A N S . Commence le 6 juin 1783, cette longue investigation setermina,le22 septembre 1785.Les volumes qui les recueillirent comptent T R O I S - M I L L E - T R O I S - C E N T S P A G E S ; le sommaire imprim par ordre de la Congrgation des rites compte lui seul CINQ CENTS P A E S grand in-4. En mme temps,et ds le 16 mai 1783, une Commission piscopale avait charg le cur et le vicaire d'Amettes de procder une enqute sur les circonstances de la. j e u nesse de Benot Joseph ; de trs nombreux tmoins, parmi lesquels son pre, sa mre, ses matres, etc., furent e n tendus. Le 28 juin de la mme anne, le Postulatour pressa l'vque de Boulogne, le savant et pieux Mgr de Prossy, de commencer, dans son diocse, la double information r clame par les dcrets d'Urbain VIII, pour constater la r e nomme publique des vertus et des miracles du serviteur
PRKFACK.
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de Dieu, et, en mme temps; qu'il ne lui" a t rendu aucun culte public. Monseigneur Fvque de Boulogne institua, le 28 janvier 1784, le tribunal devantlequl devaient s'ins truire ces informations. Ouvertes au commencement de mars, elles durrent un mois, et occuprent TUENTE-SEPT sances, aussi bien remplies qu'difiantes. Dans le procs verbal sign le 2 juin les informateurs font cette d claration importante. Nous n'avons rien aperu dans aucun tmoin qui puisse nous faire conserver des soupons sur sa sincrit ; tout, au contraire, dans leur air et dans leur maintien, nous a fait connatre que, pntrs del religion du serment qu'ils avaient prt, ils avaient vri tablement cur d'en remplir les obligations. Mgr dePressy se hta d'adresser Rome le rsultat des "graves ludes du tribunal qu'il avait institu. En mme temps qu' Rome et Boulogne, des enqutes semblable " avaient lieu Lorette, o Benot Joseph venait souvent en plerinage, ainsi qu' Paray le Monial et l'abbaye de Sept-Fonds. Elles taient peine termines, que, de toutes parts par-: venaient Rome des supplications ardentes, demandant que le nom du vnrable fut bientt inscrit dans les fastes de l'glise. Aussitt que les volumineux dossiers de ces enqutes furent entre ses mains, l'avocat, Jean-Baptiste llegani, commena son plaidoyer en faveur de l'introduction de la cause. Imprim Rome, en 1787, ce plaidoyer ne compte pas moins de CINQ CENT TRENTE-TROIS pages, in-4. Ce n'tait pourtant qu'un expos sommaire, et la discussion ne devait s'tablir qu'aprs les observations critiques du Promoteur de la foi. Rdiges par M. Charles Erskine avec vivacit, avec violence mme, en soixante-trois pages in-4, a u x quelles on eut soin d'ajouter plus de cent pages d'objections empruntes aux ennemis les plus acharns de la Cause,
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elles parurent en 1791. La rponse ne se fit pas attendre. L'avocat legiani la composa avec une ampleur de discus sion,.une vigueur de polmique, une finesse d'aperus, qui font de celle rplique un vritable chef-d'uvre. Le rapport prsent la Sacre-Congrgation des Rites, juge- de ce premier conflit, par son illustre Prfet, en mme temps Rapporteur de la cause, le cardinal Lon rchint, fut favorablement accueilli et adopt par elle. Elle
soumit son tour son jugement au souverain pontife, Pie VI, le 31 mars 1792, lui demandant de p r o c d e r a l'enqute gnrale cl officielle, qui devait aboutir la .Ba tification. Cette requte fut agre par le Pape; le serviteur de Dieu fut ds lors proclam vnrable,et le procs apos tolique tait inaugur. La Commission apostoHquc,dfinitivement constitue en mai 1792, informa d'abord sur la rputation de saintet, puis sur les vertus et les miracles. Les procs-verbaux de ses TRENTE-SIX SANCES, discuts au sein de la Congr gation des Rites et approuvs par une sentence favorable, furent sanctionns par le souverain pontife, le 19 f vrier 1794. Ce mme procs apostolique aurait du se poursuivre en France, Boulogne comme utun, mais la Rvolution avait tout boulevers. Il s'instruisit cependant Lorette dans les derniers mois de 1792. En mme temps, Rome, dans une enqute complmentaire, de la fin de mars 1792 la fin de juin 1796, on entendit QUATRE-VINGT NOUVEAUX TMOINS. Aprs quoi, les juges, suivant l'usage, ordonnrent la visite du tombeau et la reconnaissance du corps. .Le nouveau Cardinal Vicaire voulut lui-mmey assister avec tout le tribunal, deux mdecins-et deux chirurgiens asser ments, Quoique dans une dissolution trs avance, les restes du cadavre ne donnaient aucune mauvaise odeur. Le rapport des quatre experts fut lu dans une nouvelle sance
PRFACE
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du 11 juillet, et, ce jour lmme,lepostulateur demandait la publication du procs, qui fut ordonne par un dcret des Juges. L'ensemble de tous les actes compte T.MS MILLE NEUF CENT SOIXANTE-BIX-NEUF PAGES : La collation de la copie avec l'original ne ncessita pas moins de CTNQUANTECINQ SANCES de plusieurs heures chacune; elle fut dpose aux archives du Vicariat, le 20 juillet : ce fut le jour de la clture des informations de Rom'e qui avaient exig en tout CINQ CENT SOIXANTE-TROIS SANCES. Ce volumineux dossier fut transmis tout aussitt la Sacre Congrgation. Le dpt fait, il suffisait d'une auto risation du Souverain Pontife, avec dispense des cinquante ans, pour que la discussion des vertus et des miracles com ment. Mais l'heure de la perscution avait sonn pour l'glise de Rome, comme pour l'glise de France, et la tempte rvolutionnaire agitait violemment la barque de saint Pierre. Pie VI et Pie VIHureflt successivement enlevs de Rome et trans en exil. Ce ne fut qu'en 1828 que la question de rhrocit des vertus fut dfinitivement aborde par la Congrgation des Rites. Elle prit d'abord connaissance des plaidoyers de Louis Alegiani, des observations critiques du Promoteur, Vincent Pescatelli; de l rplique de l'avocat Hyacinthe Amici qui n'a pas moins de TROIS* CENTS PAGES, et se terminait ainsi : Au flambeau des actes du procs et par la voix concordante de CENT SOIXANTE TMOINS, la plupart illustres par leur foi, par leur caractre, parleurdbctrine, Dieu a convaincu de mensonge ceux-qui onbalbuti qu'il ne constail pas de la saintet de Benot-Joseph Labre ; notre Censeur a t lui-mme forc d'avouer que, s'il a suivi hroquement les voies de la pnitence, il a conserv jusqu''la fin l'innocence du baptme. Le cardinal Rap porteur admit ces conclusions et la Sacre Congrgation
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les sanctionna par son vote. Le moment lail venu pour le Souverain Pontife de prononcer solennellement, et en der nier ressort, aprs trois consistoires ouRunionssolennelles. Dans la premire, Anti-prparatoire, en prsence du Collge entier des cardinaux, le prsident de la c o n grgation ds Rites fit son rapport et lut son jugement. Chague cardinal, qui le secrtaire avait distribu d'avance un abrg de Ici vie, des vertus et des miracles du serviteur de Dieu, donna son avis librement et indpendamment. Dans la seconde, la Runion prparatoire, tenue le 22 mars 1836, en prsence du sacr Collge, de tous les voques prsents Rome, des consulteurs et des officiers de la congrgation des Rites, des dignitaires de la cour romaine, des dputs des villes ponficales, des Ambassa deurs des puissances catholiques, un Avocat consistorial clbra les mrites de Benoit-Joseph Labre. Dans la troisime enfin, Runion plnire, le 3 aot 1841, le Souverain Pontife Grgoire XVI, aprs avoir entendu les savantes discussions des avocats et du Promoteur, soumit une dernire fois l'apprciation du Sacr-Collge et des vques prsents Rome la vrit des vertus hroques du serviteur de Dieu; puis, aprs avoir employ DIX MOIS ENTIERS tudier, rflchir et prier, il promulgua enfin,le 22 mai 1842, le dcret qui proclame Phrocit des vertus du vnrable Benot-Joseph Labre. Enfin, quelques jours plus tard, le jour de la trs sainte Trinit, aprs avoir long temps implor le secours d'en haut, aprs avoir clbr les saints mystres, sa Saintet fit appeler au Vatican le cardinal Pedicini, prfet de la Congrgation des Rites, le cardinal vicaire Patrizzi, Rapporteur de la cause, le R. P. Frattini, Promoteur de la foi, le secrtaire Fatari, et leur dclara, selon la formule reue, que LE VNRABLE BENOIT-JOSEPH
LABRE AVAIT VIDEMMENT PRATIQU *LES VERTUS THOLO GALES ET LES VERTUS CARDINALES AU DEGR HROQUE.
PUFACE
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Restait le proces, plus immense encore,de la constatation des miracles. Le Postulateur de la cause, l'abb Francois Virili, de la congrgation des missionnaires du Prcieux Sang, fat somm par la congrgation des Rites de s o u mettre trois miracles son approbation. Celui-ci proposa : 1 La gurison instantane et parfaite de Marie-Rose de Luca, d'une phthisie confirme, au dernier degr. 2 La gurison instantane et parfaite de Thrse Tartufoli d'un ulcre invtr de la gorge, fistuleux, sinueux, bords calleux. 3 La gurison instantane et parfaite de sur AngcleJosphine Marini d'une obstruction ancienne, squirreuse ou pierreuse de la rate, aggrave de S3 mplmes trs alar mants d'autres maladies. Dans l'information relative Marie-Rose on entendit jusqu' SOIXANTE-SEIZE TMOINS. Dans l'information r e l a tive Marie Thrse, survenue au sein d'un couvent, on se contenta de SEIZE TMOINS oculaires. La premire infor mation, en 1824, sur la gurison de sur Angle Marini, amena la comparution de neuf tmoins, et exigea TRENTETROIS INTERROGATOIRES ; dans la seconde, DOUZE nouveaux tmoins furent entendus. Ds que les pices des procs furent parvenues Rome, le Postulateur en demanda la vrification,qui lui fut accorde en avril 1848. Alors commena le travail de l'avocat de. la cause et celui du Promoteur de la Foi sur les trois miracles prsents. Us furent soumis aux investigations les plus mi nutieuses; ils furent habilement attaqus par le promoteur Andr Frattini, mais victorieusement tablis par les r ponses magistrales de l'avocat Franois Mercurelli, qui ont quelquefois jusqu' 300 pages, petit in-f. Ce travail con sidrable ne fut publi qu'en 1853. Immdiatement aprs, le R.P. Virili demanda la runion de l'assemble Anti-prparatoire, qui se tint chez le c a r r
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LES SPLENDEURS DE LA F O I .
dinal Patrizzi. Les gurisons de Thrse Tarlufoli et de s u r Angle Marini furent unanimement reconnues m i r a culeuses. Mais la gurison de Marie-Rose de Luca fut r e n voye l'examen de deux nouveaux mdecins experts. L'un, Jean-Baptiste Girelli, conclut sans aucune hsitation au miracle ; l'autre, Charles Maggiorani, maintint que Ton ne pouvait point exclure' de cette gurison les causes- n a turelles, tout en y voyant quelque chose d'extraordinaire. C'en tait assez pour rclamer une contre-expertise confie au docteur Valentini, professeur de clinique l'universit de Rome ; celui-ci conclut absolument au miracle. Ds lors, l'assemble Prparatoire put se tenir; elle eut lieu au Vatican, le 15 septembre 1837, et les consul t e s confirmrent les miracles parleur suffrage unanime. Restait l'assemble gnrale; elle fut tenue, le 15 mars 1859, au Vatican, en prsence de sa Saintet P i e L \ . Aprs le rapport du Cardinal Rapporteur, les Cardinaux prsents et les Consul leurs affirmrent de nouveau unanimement, par leur vote, la vrit des trois miracles. Pie IX, aprs avoir rclam et attendu de nouvelles prires, aprs de mures rflexions, et aussi des supplica tions ferventes, rendit son jugement solennel et dfinitif, le jour de l'Ascension 1859. Lorsque le Saint Pre fut mont sur son trne, le- r v rend pre Franois Virili clbra dans un loquent d i s cours les vertus et les miracles de Benot-Joseph. Le Souverain Pontife, prenant alors la parole, fit l'loge du serviteur de Dieu, exaltant l'humilit et la pauvret qui ont jet sur lui un si grand "clat. Vint ensuite la supplique par laquelle l'avocat Mercurelli, au nom du Poslulaleur Virili, et en son propre nom, rcla ma pour son illustre client les honneurs d e l batification : nous ne pouvons nous dfendre de - rappeler ici sou admi rable proraison. La France entire, o le serviteur de Dieu.
PRFACE
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a reu le jour, les pays qu'il a parcourus et ceux o la re nomme de sa saintet a retenti, Rome avant tout, et, dans Rome le quartier o il a pass ses derniers jours et rendu le dernier soupir, rclament trs humblement de votre Saintet que le nouvel habitant du ciel, propos bientt la vnration des fidles, et-devenu l'objet de leur vnra tion, leur apprenne de nouveau par ses exemples que les moyens d!acqurir la vritable flicit ne sont ni la richesse, ni le faste, ni les volupts,mais le mpris de ce qui passe et le dsir de ce qui demeure, joint l'humilit et couronn par la mortification. Le Promoteur Frattini, son tour, dposant sa verge de Censeur et de Critique, se joint son adversaire, rclamant l'exaltation de celui qui s'tait humili dans la plus extrme pauvret et le plus absolu dnment. Enfin, aprs la Bndiction Urbi et Orbi donne du haut du belvdre de la tribune de la basilique du Vatican, Pie IX se rendit la Sacristie des Chanoines, et l, entour de tous ses prlats, sa Saintet proclama le dcret de B a tification du vnrable serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre, protestation solennelle CONTRE LE SENSUALISNE I M
PIE, QUI A ENVAULLA SOCIT MODERNE, ET QUI NE SAURAIT TRE NERGIQUEMENT PAR LA PRATIQUE DE ET FRUCTUEUSEMENT LA PAUVRET SI COMBATTU QUE AMOUREUSEMENT
Un an s'tait peine coul que l'infatigablePostulateur sollicita la reprise de la cause, en vue de la Canonisation. L'avocat Mercurelli se fit l'interprte inspir de l'glise, et le Souverain pontife lui donna gain de cause en mars 18G6. Le Postulateur fil aussitt choix de deux nouveaux miracles survenus l'un Rome mmo, l'autre au mont Falisque. A Rome, ThrseMasselti fut guriesubitemenl,dansl' glise du Vatican, le jour de la solennit de la Batification,
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au moment prcis o Tan dcouvrit P'image du bienheu reux, d'un squirre cancreux au sein gauche. Au mont FaJisque, sur Marie Thrse de l'Immacule Conception, religieuse professe du monastre du Divin Amour, fut gurie subitement et parfaitement d'un cancer ulcr de l'estomac. Une commission compose de trois vques fut charge d'informer sur le miracle de Rome ; DIX-HUIT TMOINS comparurent avec la miracule elle-mme. L'avocatIlilaire Alibrandi, dfendeur de la cause et le promoteur de la foi furent entendus CHACUN TROIS FOIS, ct,apres une trs savante tude du docteur Alexandre Ceccarelli, la Sacre congrga tion des rites se pronona en faveur du miracle. Aprs six ANNES de discussion, commence presque en mme temps que celle de Rome, aprs u n long dbat sur les questions que les rapports des mdecins experts soule vrent, aprs une trs remarquable consultation mdicale du docteur Vincent Diori sur le cancer do l'estomac, qui a CENT DIX PAGES, grand in-4, la congrgation prparatoire put avoir lieu au Vatican, le 23 avril 1872; la promulgation solennelle du dcret approbatif des miracles, le 29 d cembre; l'approbation dfinitive des deux miracles, donne l'unanimit des membres de la Sacre congrgation, le 14 janvier 187S; le dcret de Tulo, autorisant procder la solennit, le 9 fvrier de la mme anne. Ce ne sont l encore que des prliminaires! Il est un Jugement Suprme prononcer, qui n'a aucun analogue dans les CAUSES de la terre, et, doit tomber de la, bouche du reprsentant directfdeiCELur donUai voix du. pre cleste descendant desciux disait: Voici mon fils bien-aim, en qui j ' a i mis toutes mes complaisances, coutez-le. Quand l'heure du dcret de canonisation a sonn,, et que le reprsentant de Jsus-Christ a pris place sur son Trne.,
PRFACE.
XIX
le Postulateur de la cause demande instamment d'abord, plus instamment ensuite, trs instamment enfin, de donner au nouveau saint sa place dfinitive parmi les protecteurs et les patrons du monde catholique. A la-premire postulation, le Secrtaire des brefs rpond au nom du trs Saint Pre : Prions. Le trs Saint Pre se lve et s'agenouille devant l'autel pour rciter les Litanies des Saints. C'est c o m m e u n e invocation s u p r m e , une der nire supplication, appelant les lumires de l'Espril-SainL et l'assentiment de la cour cleste, avant l'admission du nouvel lu au nombre de ceux que l'glise peut et doit invoquer. Aprs le chant des Litanies, le Pape remonte sur son trne, et le Postulateur redouble son instance. Le secr taire des brefs rpond une seconde fois, Prions 1 On e n tonne le Veni Creator. Et pendant que le Postulateur rest genoux supplie une dernire fois, trs instamment, le Pape, la Tiare en tte, c o m m e docteur infaillible et chef de l'glise universelle,,prononce le dcret suivant. Pour Thonneur de la sainte elindivisible Trinil,.pour l'exaltation de la foi catholique et le dveloppement de la Religion chrtienne,par l'autorit deNotre-Seigneur JsusChrist, des bienheureux aptres Pierre et Paul, et par la Ntre, sur le conseil entendu de nos vnrables Frres, les cardinaux de la sainte glise romaine,.les patriarches, les archevques et vques, nous dfinissons que le b i e n heureux Benot-Joseph Labre est dnomm SAINT, et nous insrons son n o m dans le catalogue des Saints. Nous s t a tuons en outre que sa mmoire devra tre honore chaque anne,avec une. pieuse dvotion, par l'glise universelle, le 16 avril. Au nom d a Pre et du Fils et du Saint-Esprit. Tout est consomm. Yoil le tribunal ou les tribunaux, voil les juges, voil
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les jugements ! Si ronn'admeltaitpas qu'un arrt prononc dans ces conditions de lenteur, de maturit, de svrit, de sollicitude d'inquisition, hors de l'influence de toute pression humaine,en prsence et sous l'inspiration de Dieu, est ncessairement infaillible, et l'expression manifeste de la vrit absolue; que, par consquent, les cinq faits cla tants de gurison qui en ont t la base essentielle et in dispensable, sont des miracles incontestablement divins, il faudrait non-seulement croire, mais proclamer, comme certain, que tous les jugements rendus par les tribunaux humains, en matire criminelle, correctionnelle ou civile, non-seulement peuvent, mais doivent tre considrs comme incertains, et, par consquent, comme injustement rendus 1 Cette conclusion est effrayante, mais elle est r i goureuse, invitable, et l'on ne saurait lui chapper. Il ne s'est agi jusqu'ici que d'une sorte de certitude e x trinsque, fonde sur l'excellence du tribunal, des p r o c dures, des jugements. J'ose ajouter que la certitude intrin sque fonde sur la nettet, la rigueur magistrale des a r guments et des preuves invoqus l'appui de la vrit de chacun des miracles proposs pour la batification et la canonisation des saints en gnral, de saint Benoit-Joseph Labre, en particulier, ne laisse absolument rien dsi rer, que toutes les plaidoiries entendues au sein del Con grgation des Rites sont la hauteur des plaidoyers les plus admirs des tribunaux et des barreaux humains, dans l'antiquit et clans les temps modernes. J'ai lu, pendant de longues annes, les thses de Doctoral, d'ggrgation, de Professorat, de l'Ecole de mdecine de Paris, thses qui ont rendu glorieux les noms d'un grand nombre de lutteurs intrpides, les Jules Gurin, les Miction, les Bouvier, les Malgagne, les Boucharclal, les Gurard, etc., etc., et je n'hsite pas dire qu'aucune ne m'a plus satisfait, plus
PRFACE.
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ravi, que les rponses.loquentes de Franois Mercurelli aux observations critiques du Promoteur de la Foi. Et cependant, le dirai-je, ces plaidoieries taient de grandes et regrettables inconnues. Personne encore n'avait pu prendre connaissance de l'ensemble des pices d'un seul procs de batification ou de canonisation. Les actes d'un mme procs, n'avaient t runis que trs acciden tellement, de sorte que la dmonstration complte de la vrit d'un seul miracle n'tait pas faite pour le public, puisque tousses lments, expos,discussion,objections,rponses, jugements, n'avaient pas t condenss en un seul tout indivisible. Il y a plus, Urbain VIII avail cru devoir dfendre que ces procdures si admirables fussent impri mes. C'est qu'en effet, dans les ges bienheureux de foi simple et vive, il y et eu peut-tre quelque danger, ou du moins quelqu'inconvnient, faire connatre aux fidles combien d'objections,etquelles objections! onpouvaitsoulever contre des faits clatants,palpables, dont la possibilit tait un dogme de foi, qui se reproduisaient si souvent et partout sous les yeux de tous. Cette dfense a t leve depuis, mais ces actes ont toujours t imprims en peti nombre avec la signature du promoteur ; ils sont le plus souvent rests entasss dans les archives de la Sacre Con grgation des Rites ou du Vatican. Ces procdures admirables, j'en avais une ide vague, p a r c e qu'en disait la renomme publique, mais je ne les connaissais rellement pas, quand, il y a p r s de trente ans, sous une inspiration que j'aime croire sainte et providentielle, je pris la rsolution d'en publier une aussi compltement que possible. La dmonstration scien tifique de la Possibilit du miracle par sa Ralit est a u jourd'hui absolument ncessaire, or celte dmonstration scientifique n'est faite que dans et par les actes des procs de Batification ou de Canonisation.
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Sa Saintet Lon XIII a daign dclarer et prouver, par des arguments trop honorables pour moi, dans ses belles lettres pontificales du 3 juillet 1879, que j'avais eu mission spciale pour publier mes Splendeurs del Foi: je suis, par la mme autoris croire que j'avais mission, non moins spciale, pourpublicr les Actes d'un procs de batification et de canonisation, puisque celle publication entrait pour une part essentielle dans le plan de mes Splendeurs. Lorsque le moment fut venu, et que je demandai la S a cre congrgation des Riles,par l'intermdiaire de mon sa vant et vnrable ami, Mgr Fabini, chanoine de Sainte Marie Majeure, l'autorisation de publier les procs de ba tification et de canonisation de saint Benoit-Joseph Labre, et, par consquent, la livraison, ou mise en main,dc toutes les pices essentielles de ces procs, j'ignorais complte ment, je le rpte, la valeur intrinsque des actes de ces procdures sans rivales. Je ne m'en tais pas encore fait une ide, quand j e les confiai mon trs savant ami, M. l'abb Gainet, auteur de la Bible sans la Bible,mon compagnon de route Rome, qui eut avec moi l'honneur et le bonheur de se prosterner aux pieds de immortel Pontife Lon XI, pour qu'il les ft traduire, sous sa direction, par ses plus savants confrres du diocse,de Reims. Je ne les ai connues que lorsque je lsai lues, en preuves, et qu'il s'est agi de donner la traduction son dernier degr possible de fid lit, d'exactitude, d'lgance. Mais, .partir d e c e moment, quoique cette rvision et ces corrections aient t un travail excessif et difficile l'excs, mon admiration a t grande, et elle n'a pas cess de crotre jusqu' la fin. Je dois mme dire que ces exposs et ces plaidoyers ont eu pour moi un charme immense, tant ils sont vrais, loquents et victorieux, tant. ils apportent.de satisfaction ? l'esprit et de soulagement au cur.
PRFACE
XXIII
Je ne suis pas mdecin, mais, dans l'espoir que je serais appel un jour aux Missions de la Chine, j ai quelque temps'tudi la mdecine sous des matres minenls, li caniier et Roux, l'un mdecin en chef, l'autre chirurgien en chef de' l'Iltcl-Dieu de Paris, Plus tard mes devoirs de journaliste encyclopdique m'ont mis dans l'heureuse ncessit de lire le plus grand nombre des journaux de mdecine et de chirurgie, la Gazette 'mdicale, l'Union mdicale, la Gazelle desthpitaux, le Moniteur des h pitaux, les Mmoires de mdecine'et de chirurgie, les M moires de la chirurgie* militaire, etc., de les dpouiller, la plume la main, de traiter un nombre considrable dequesliions d'liologie, de diagnostic, de thrapeutique, (le, de manier'chaquc jour les dictionnaires de mdecine de chirurgie, et de thrapeutique, etc., etc. J e n e suis donc pas mdecin, mais, et ne m'est-il pas.permis d'y voir un in dice nouveau d'une mission spciale, tant de connaissances acquises m'ont fait plus que mdecin, en quelque sorte, et .elles m'avaient surabondamment prpar m n e r a bonne fin l'immense publication que j'achve aujourd'hui. En l'absence de celte science encyclopdique, j'aurais t forc d'accepter la collaboration d'un mdecin, ou plutt de confier cetravail presque en entier un mdecin que j'aurais cherch partout, sans le rencontrer nulle .part, qui n'aurait pas compris l'tat rel de la question, qui aurait fait chaque instant fausse roule, et ne serait jamais arriv au but. Il faut que j'en fasse la confidence, j'ai tent dans celte direction un essai de quelques jours, qui a pens tout compromettre. Si mon travail laisse dsirer, ce ne sera pas la science mdicale qui m'aura fait dfaut, d'autant plus que j'ai pu, quand il tait ncessaire, recourir nonseuiement aux sources, mais des mdecins savants et
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XXIV
grand nombre des mdecins qui consentiront lire mon livre seront, bon gr, malgr, amens reconnatre que, les cinq miracules de Saint Benot-Joseph Labre, qui bnira et fcondera leur lecture, ont t incontestablement guries, en dehors de toutes les forces de la nature et des ressources de l'art : Marie-Rose de Luca d'une phthisie confirme, au dernier degr; Thrse Tartufoli, d'un ulcre invtr de la gorge, fistuleux, sinueux, bords calleux: nglo-Josphine Mariui, d'une obstruction an cienne squirrheuse ou pierreuse de la rate; Thrse Massetti d'un squirrhe cancreux au sein; Marie Thrse de l'Immacule Conception, d'un cancer ulcr de l'estomac Le poumon, la gorge, la rate, le sein, l'estomac ce sont des organes essentiels ; ces maladies forment un ensemble remarquable; et quel prcieux fond d'instruction cet en semble apportera ceux, prtres ou laques, qui liront ce volume. Voil le sentiment qui m'inspirait, quand je demandai la sacre congrgation des Rites, pour les reproduire, les pices du procs de batification et de canonisation de l'a vant dernier des saints placs sur les autels. Il me reste dire, aussi brivement que possible, p o u r quoi, ayant choisir entre TRENTE-QUATRE procs de batification et de canonisation, jugs par la congr gation des rites, d'aprs les rgles si savamment et si sagement formules par-Benot XIV, je me suis arrt saint Benot-Joseph Labre, le dernier de tous. Je rponds sans hsiter, par vnration et pa amour pour Pie IX. Ce grand et pieux Pontife daigna avoir de l'affection pour moi, il me l'a souvent tmoigne par l ' i n termdiaire de son Eminence la cardinal Bonaparte, et il m'a donn de son affection une preuve clatante. Or, l'acte le plus surnaturel, le plus courageux, le plus glorieux du
PRFACE.
XXV
pontificat de Pie IX fut la batification de saint BenotJoseph Labre, le pauvre des pauvres, batification, que l'impit, la libre pense, la Franc-maonnerie, l'enfer accueillirent avec tant de rage, une rage qui ne s ' teindra jamais. Voil le motif premier de mon choix ; voici le second. Benot-Joseph a voulu tre le dernier des saints ; aucun saint ne s'est fait aussi humble aussi petit, aucun ne s'est plus ananti 1 II a t au plus haut degr un de ces riens humains, qui, changeant leur nant contre la toute puis sance divine, sont seuls capables de confondre les plus forts. Et j'ai voulu qu'il fut le premier nous apporter la dmonstration scientifique du miracle, moyen, peut-tre le plus efficace, de ramener la foi ceux des incrdules du dix-neuvieme sicle qui n'ont pas pch contre le SaintEsprit, c'est dire qui ont gard une certaine bonne foi, qui ne repoussent pas de parti pris la vrit dmontre et reconnue comme vrit. Saint Benot-Joseph en outre est un saint tout fait extraordinaire, qu'aucun lien, mme infiniment petit, ne tenait attache la terre, qui tait toujours en prire, tou jours prt entrer en extase, ou mieux,toujours en extase, toujours prt monter vers le ciel, faisant sans cesse des actes hroques d'amour de Dieu et du prochain. Des milliers de personnes l'ont vu, les bras croiss sur la poitrine, le corps soulev de terre et comme suspendu en l'air, le visage enflamm, resplendissant d'une vive lumire depuis les pieds jusqu' la tte.Chaque jour, pendant huit longues aimes, il passa toutes ses matines aux pieds de la madone de Notre-Dame du Mont, genoux, mais t o u chant peine,ou mme ne touchant pas la terre, immobile sous les yeux de Marie, tout occup d'elle, se consumant d'amour, laissant chapper demi voix ces invocations tendres : Ma mre 1 oh 1 Marie I oh 1 ma mre 1
XXVI
Le miracle est en permanence et brille de tout son c l a t a u x lieux de plerinage, clans les sanctuaires bnis consacrs par l'apparitions de la trs Sainte Vierge, d'un archange, d'un ange, par le berceau, la demeure, Te tom beau des grands serviteurs de Dieu ; etc. Or, saint Benot Joseph Labre fut le plerin des plerins, sa vie ne fut qu'un long plerinage. De Parray-le-Moiaial, o il vint tout cl-abord apprendre plus parfailement tre pauvre d'esprit, doux el'humble de cur, il s'lana vers NotreDame-de-Liesse, le Mont-Saint-Michel, Lorette, Rome, leMont-Gargan, Bari, Saint-Jacques de Gompostelle, etc., etc. Si La Salelte, Lourdes, Pont-Main, la Basilique du Vu National, avaient exist; il serait venu la Salette, Lourdes, Pont-Main, Montmartre. Et j'aime croire, que sa vocation, fut de condenser en sa personne 'la vertu de tous les miracles! c'est donc ben 'lui qu'il fallait demander'la dmonstration, solennelle'du Miracle. Saint Benot-Joseph Labre enfin est le plus m e r v e i l leux peut-tre des thaumaturges. Le nombre de ses miracles autheritiquement recueillis a dpass de beau coup le chiffre de deux cents; et le plus clatant, le plus incomprhensible de tous les miracles, la multilocation, ou la prsence la fois en plusieurs lieux, qu'on rencontre trs rarement-dans les Annales de l'glise, qui ne se produisit qu'une ou deux fois dans la vie des saints illustres qui en furent favoriss, tait presque habi tuelle' Benot-Joseph Labre. Qui pourrait dire combien de fois il fut en mme temps,-et dans l'hospice Mancini, o'il. rentrait .chaque-soir, et aux pieds du Saint-Sacrement, dans celle des glises de Rome o se clbraient les quaratte heures ?'Qu'on me l e pardonne, saint 'Benot-Ioseph tait plus qu'un saint,'puisqu'un angeordinaire: c'tait un sra phin, ou mieux une sorte d'incarnation divine, un autfe Jsus-Christ. Rien de lui ne vivait en lui, Jsus Christ seul
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PUFAG
XXVII
tait sa vie 1 son souvenir, comme saint Jean Chrysostme au souvenir du Grand Paul, je reste confondu, s t u pfait, ananti; j'admire et j'admire encore, je vnre et je vnre encore, je prie et je prie encore, j'arme et j'aime encore. Dans ces conditions, c'tait comme un acte de justice distributive, que les premiers procs publis de batification et de canonisation fussent ceux du saint dont la vie toute entire fut un miracle incessant et clatant, un miracle de premier ordre. Voil le second motif qui m'animait, quand je demandai la sacre congrgation des Rites la collection des pices de la Cause de l'illustre mendiant. 'Plus tard cependant j'eus un scrupule qui m'arrta presque court. Les cinq miracules de saint Benot-Joseph Labre sont des femmes, et il entrait dans mon programme que le sujet de l'un au moins'des miracles fut unhomme I C'tait, je l'avoue, u n l g e r manque de foi, auquel je n'at tachais pas d'ailleurs une grande importance, mais que je crus devoir soumettre l'apprcia lion de sa Saintet Lon XIII, au beau jour de l'Audience particulire qu'elle daigna m'accorder. Mais j'avais peine ouvert mon cur que le grand Pontife me rassura. Oh! non,ne changez pasl Votre choix est excellent! Restez fidle sainiBenot-Joseph et Pie IX. I Quand il s'agit de miracles fminins,comme il vous plat de les appeler, la Sacre congrgation-des Rites est encore plus sur ses gardes et plus svre ; elle exige une surabondance de preuves extraordinaire, et, s'il tait possible; le miracle serait rendu encore plus certain: Et en efet, ds gue je me mis l'uvre, je constatai sur le champ que, par cela mme qil est fminin, le mi racle fait la partie incomparablement pius belle au Pro moteur de la Foi, l'avocat du diable, qui m manque jamais de donner une place norme f hystrie, la n vrose, et l e u r fait jouer uu rle immense; dans la maladie
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XXVIII
SPLENDEURS DE LA FOI-
pour dissimuler sa gravit, dans la gurison pour lui e n lever tout ce qu'elle pouvait prsenter de miraculeux, pour en faire un effet, ou mme un jeu de la nature. Mes lecteurs seront heureux de constater par eux mmes la pro fonde sagesse du jugement port par le trs saint Pre. Je suis donc rest fidle Benot-Joseph, Pie IX! Celle fidlit sera la gloire elle bonheur do ma vie t Quelle gloire et quel bonheur, en effet, que d'avoir t appel le premier combler une lacune infiniment regrettable, faire briller une des splendeurs les plus clatantes de la sainte glise catholique, apostolique, romaine, admirable surtout, comme Dieu, dans ses saints, dans les saints in nombrables qu'elle engendre, et qu'elle engendre seule, parce que seule elle est divine ! MIRABILIS DEUS IN SANCTIS
SUIS.
M.Renan a fait, dans la prface de sa vie de Jsus-Christ, cet aveu trange, mais prcieux : Si le MIRACLE A QUELQUE RALIT, mon livre est un tissu d'erreurs. Si, au contraire, LE MIRACLE EST UNE CHOSE; INADMISSIBLE, j'ai eu raison d'envisager les livres qui contiennent des rcits miraculeux, comme des lgendes pleines d'incertitude et d'erreurs de parti pris.Enchrissant sur son mule, M. Ernest-Haveta os dire : Non seulement Jsus n a jamais fait de miracles, mais j'ajoute hardiment qu'on n'a pas pu dire, qu'on n'a pas pu croire cela I C E N'EST QU'A DISTANCE, et longtemps aprs, qu'on a imagin de pareilles choses 1 Quand la cri tique refuse de croire au miracle, ELLE N ' A PAS BESOIN D'APPORTER DE PREUVES l'appui de sa ngation. C E QU'ON
J
RACONTE
EST
FAUX,
SIMPLEMENT,
PAR
CE QUE CE QU'ON
Et voici que, pour la premire fois, j'apporte, la dmons tration rigoureuse et complte par la science la plus avance, la conscration clatante par le tribunal le plus auguste et le plus clair de l'univers, de cinq miracles,
PRFACE.
XXIX
en tout semblables aux miracles de l'vangile, oprs de nos jours, en pleins dix-huitime et dix-neuvime sicles! L'incrdulit, dbusque de son avant-poste, l'Impossi bilit ! est donc ramene forcment sur le terrain du Fait. Or? le plus grand des miracles, si ce n'tait pas la plus m o n s trueuse des absurdits, serait que CE QUI EST NE FUT PAS ! O mdecins, car c'est vous surtout que s'adresse mon livre, vous dont la sainte criture a dit: La science du mdecin lui fera porter haut la tte, et lui vaudra les louanges des grands. Le Trs-Haut a donn au m decin la science, par laquelle la vertu des mdicaments arrive jusqu' lui, et cette science le fera honorer. Voici que je vous offre une occasion unique de remplir une mission de salut, d'exercer une influence minemment bienfaisante. J'ai mis sous vos yeux, avec les preuves les plus irrcusables l'appui, cinq gurisons certainement miraculeuses, de. maladies incurables par les forces de la nature ou les ressources de Fart, de maladies que vous iravez jamais guries subitement, compltement, i r r v o cablement. Or si, comme je n'en doute pas, aprs m'avoir lu, votre conviction est faite, vous faisant votre tour juges de.faits que vous aurez examins fond, exprimez-la par ce simple mot, avec votre signature, CONSTAT, il conste ! Votre adhsion n'est nullement ncessaire la constatation de la vrit, mais, si vous me l'accordez, elle aura une porte immense. Prononc par cent ou deux cents m d e cins seulement, ce CONSTAT produira des effets merveil leux ; il fermera la bouche l'incrdulit, et contribuera puissamment au retour la Foi dans notre belle et chre Patrie. J'ai fini. Oh PETIT GRAND SAINT I je vous ai appartenu uniquement dans ces deux dernires annes de ma vie.Le travail de r daction et d'impression de cet norme volume m'a absorb tout entier. Daignez le bnir et assurer son succs. Ouvrez
XXX
SPLENDEURS DE LA FOI.
les yeux et touchez le cur de ceux qui le liront. Des c i r constances indpendantes de ma volont, mnages sans doute par l'ternel ennemi de Dieu et le vtre, qui ne voulait aucun prix de la dmonstration scientifique du miracle, ont rendu mon travail tellement difficile, qu'il est .rest forcment imparfait au point de vue, secondaire heureusement, de la distribution et de la correction t y pographiques. Jetez un voile sur ces dfauts, faites qu'ils passent inaperus, afin que le succs de cet ouvrage, entrepris uniquement pour la gloire de Dieu et la vtre, ne soit pas trop amoindri. Votre d.evise est la mienne : LUT, Jsus-Christ, IL FAUT QU'IL CROISSE, moi, U GLI que je diminm! Je lui ai t assez fidle pour me sentir capable de supporter sans trop de peine l'humiliation que les imperfections dont je parle doivent m'attirer. Mais T O U S , saint Benoil-Jsepli, vous lui avez t fidle jusqu' l'h r o s m e ; elle a t le mobile de votre vie toute entire. Depuis le berceau jusqu' la tombe,, vous n'avez pas cess un instant de diminuer volontairement, incessamment, indfiniment, pour faire crotre Jsus-Christ en vous et hors de vous, partout et.toujours I Et c'est ainsi que TOUS tes parvenu vous anantir au point qu'il n'y avait plus en vous rien de vous, que Jsus-Christ vivait seul en vous I Comme rcompense de ma bonne volont, je ne TOUS demande qu'une grce : obtenez que ce bienheureux anantissement s'opne aussi enmoi.l J'aurai alors mon tour chang ma faiblesse contre la force divine; je confirmerai mes frres dans la Foi 1 15 avril 1882, jour o je suis entr'dans* ma soixantedix-neuvime anne I
F..MOIGNO.
P. S. Qu'il me soit permis d'exprimer ma reconnais sance M. l'abb Menin, mon collaborateur aux Mondes,
PRFACE.
aumnier des Dames carmlites de Saint-Denis, qui m'a tant aid dans la coordination des innombrables matriaux que j'avais mettre en uvre, et dans la correction des preuves. Saris lui, que de fois je me serais perdu dans un labyrinte sans fin. Je dois aussi de grands remerciements M. l'abb Deramecourt, professeur au petit Sminaire d'rras. Son histoire de la Canonisation du bienheureux Joseph Labre (Arras, Pradier 1881. In-18, 160 p.) pouvant seule me fournir les noms, les dates et les nombres sans lesquels cette Prface eut t impossible, et qui lui donnent tant d'intrt. F. M.
LES
SPLENDEURS DE LA FOI
LE MIRACLE ET LA SCIENCE
RSUM
Trs-abrg de la doctrine de Benot XIV sur la batification et la canonisation des Saints.
i. CANONISATION ET APOTHOSE , CONFUSION QUE l/ON QUELQUEFOIS FAITE D E C.tS DEUX MOTS SI DIFFRENTS. A
Benot XIV commence son grand trait par une rfu tation du rapprochement que Tona voulu faire entre la canonisation et l'apothose. Les hrtiques osaient affirmer que la canonisation des Saints, dans l'glise catholique, est une drivation de l'apothose chez les paens, c r monie dont Ilrodien, Dion, etc., nous ont laiss la d e s cription dtaille, et qui avait pour but d'lever un simple mortel (souvent quel mortel I) au rang des dieux. La diff rence est cependant norme. 1 La canonisation des saints repose : sur la solide affirmation de nombreux tmoins, attestant les vertus hroques des grands serviteurs de Dieu, e l l e s miracles qu'on leur attribue; sur dus laits et des dpositaires m u l tiplies et minutieusement discutes, etc. Chez les paens, au contra ire, la dification de certains personnages comme Romulus, Octave, Drusille, etc., avait lieu -par l'accla mation intresse ou enthousiaste d'une seule personne. 2 Chez les paens, les honneurs de l'apothose n'taient vi. 1
dcerns qu' des empereurs, des princes, des princesses, des grands hommes, personnages souvent impies et c o r rompus. Chez les chrtiens, la canonisation est accessible toutes les classes d'individus sans dislinelion de dignit ou d'illustration dans le monde, sans autre motif d t e r m i nant que la ver Lu minente du saint, ou le martyre intrpidement endur pour la foi de Jsus-Christ. 3 L'apothose levait un homme souvent souill de crimes au rang des dieux ; l'glise, au contraire, ne pr sente, par la canonisation, la vnration des fidles qu'un homme orn de toutes les vertus, un ami de Dieu; elle ne l'invoque qu'en celte qualit ; et quoiqu'il soit permis de lui adresser des prires comme un intermdiaire gracieux, entre Dieu et les hommes, il reste, malgr la sublimit des vertus qu'il a pratiques, une distance infinie de la m a jest divine.
p
2.
LA
CANONISATION
DANS
LES PREMIERS
SICLES D E
L'GLISE.
De tout temps et ds les premiers sicles, l'glise a r e cueilli avec soin les actes des martyrs, et les rcits c o n s tatant les vertus mineotes des confesseurs dont elle inscrit les noms au catalogue des saints. Le zle, dans cette direction,des voques de la primitive glise nous est manifest dans Je livre des pontifes romains (Liber Pontifiealis). Nous y lisons que saint Clment avait constitu dans les diffrents quartiers de Rome sept n o taires chargs de collectionner la srie des actes vridiques des martyrs, et ces actes devaient tre gards fidlement dans les archives de chaque glise. Les chrtiens se les procuraient de deux manires : d'abord en offrant une rtribution aux notaires paens, pour en avoir une copie ; ensuite en s'aidant cle chrtiens zls qui exeraient ce notariat au milieu des gentils, lorsque les martyrs paraissaient devant leurs juges. Ces actes taient lus dans l'assemble des fidles, aprs avoir reu l'approbation de l'autorit comptente. Ce fait nous est attest par le pape Glase, et par le pape Adrien dans une lettre Cbarlemagne cite par Mabillon. Il y avait dans chaque glise un tribunal charg d'exa miner les actes des martyrs, de mettre en garde contre
l'exagration et de porter un jugement sur les faits. Ce jugement appartenait l'vque du diocse; dans l'glise d'Afrique, il tait mme rserv au seul Primat de Carthage. Ce n'est qu'aprs ce jugement qu'on renfermait dans les autels la relique des martyrs. Le vocabtUairede la primitive Eglise avait un mol c o n sacr pour dsigner le martyr dont les reliques pouvaient tre exposes la vnration des fidles. On les appelait Vindicatif donnant ce mot la signification attribue aujourd'hui aux Batifis. Ainsi on trouve dans Optat de Milet, que l'archidiacre Cciiien reproche Lucillc de baiser des ossements d'un martyr qui n'tait pas au rang des Vindicaii. U importe grandement d'insister sur ce point, et de bien faire sentir la haute importance que l'Eglise catholique a attache de tout temps tablir sur des fai ts historiquement inbranlables le culte qu'elle a p e r m i s d e rendre aux p e r sonnes d'une vertu clatante, .surtout aux martyrs. Ce n'lait pas assez encore que ce jugement des glises particulires pour tablir la vrit historique du culte des saints ; par l'intermdiaire d'un contrle gnral centralis dans Rome, on envoyait, d'une glise l'autre, les noms et les actes des martyrs, afin que leur culte ft connu et consenti par tous les vques de la chrtient. De l les lettres encycliques, les calendriers, les martyrologes, etc. Un grand nombre d'auteurs anciens certifient ce fait, comme on peut le voir dans Avezedo, abrviateur du grand trait de Benot XIV. Ces rapports des diverses glises avec l'Eglise r o maine et les souverains pontifes sont attests par les lettres de saint Cyprien Moyseeiaux autres confesseurs dtenus dans les prisons de R o m e ; par l'ptre de saint Ignace martyr aux Romains ; par les actes de saint Denys l'Aropagite, parla lettre des martyrs de Lyon au pape Eleuthre,; par les actes de saint Vigile, vque de Trente, envoys Rome (Bolland. 6 juin), etc. Saint Grgoire de Tours nous apprend qu'un vque ne put consacrer une glise en l'honneur de saint Palrocle qu'aprs avoir obtenu dltalie les actes de son martyre, etc.
3.
DANS
LES TEMPS
MODERNES
ET
ACTUELS.
1. Congrgation des Rites. Membres de cette Congrgation; ses assembles; questions proposes. Parmi les
quinze congrgations de cardinaux institues par Sixte V, la cinquime est celle des Saints-Rites, laquelle sont dvolues les causes de batification et de canonisation des serviteurs de Dieu. Elle fut d'abord compose de cinq car dinaux, mais dans la suite on en trouve quelquefois jusqu' sept et mme neuf. Aujourd'hui elle comprend vingt-six cardinaux, et parmi eux les plus grandes illustrations de l'Eglise. Ces prlats ont leur lte un prfet ou prsident perptuel, et, dans chaque procs de batification, le pape nomme l'nn d'eux l'office de Rapporteur. Les juges de second ordre, aujourd'hui au nombre de vingt-sept, portent le nom de Consulteurs; ils sont nomms par le pape, mais, pour plusieurs officiers de la Curie r o maine, ce titre est attach leur charge. Le matre du sacr palais, le sacristain de la chapelle pontificale, l'audi teur et l'assesseur de l'inquisiteur sont consulteurs de droit, de mme que les trois plus anciens auditeurs de rote : ceux-ci ont conquis ce privilge le jour o les causes de batification ont pass du tribunal de la Rote celui de la Congrgation des Rites. Ces auditeurs d'office ont en outre le droit de se choisir un conseiller comme les cardinaux; tandis que les autres consulteurs ne peuvent le faire qu'avec dispense. Los Dominicains, les Mineurs, les Darnabites, les Ser vtes, les Jsuites fournissent galement quelques membres ce tribunal si auguste. La Congrgation des Rites a en outre ses officiers. Les uns, dignitaires d'ordre,plus lev, ont droit de suffrage et rang de consulteurs, tels sont : 1 Le promoteur de la foi, dont les fonctions sont l'quivalent d celles de procureur ou d'avocat gnral dans nos cours souveraines, c'est lui qui reprsente le minisire public-, il lve des doutes et suscite des difficults qu'il faut rsoudre, il opine n a n moins comme juge, moine contre le sentiment qu'il a e x prim comme promoteur, quand le droit et les faits sont
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suffisamment clairs. 2Le secrtaire de la Congrgation; il est charg de notifier aux prlats qui la composent le jour des assembles et les matires dont on doit traiter. 3 Le protonotaire apostolique, qui remplissait autrefois la charge de secrtaire, et qui le fait encore en son absence. Les officiers d'ordre infrieur sont: 1 Le sous-promo teur, conseil et supplant absent du promoteur de la foi, il fait l'extrait de la procdure et des mmoires, il en signe les minutes et les copies, imprimes et manuscrites, i! est prsent toutes les informations, vrifications ou recon naissances d'critures; 2 le notaire de la congrgation, qui dresse tous les actes authentiques et veille la garde des archives enfermes au Vatican : il en tire copie, par ordre du cardinal rapporteur, ou la demande du promo teur, des anciennes procdures de canonisation ; autrefois on les communiquait aux procureurs en original, mais prsent on n'en dlivre que des copies ; 3 les procureurs du sacr Palais qui peuvent seuls crire dans les causes de batification ou de canonisation; 4 les avocats consisloriaux qui traitent dans ces procs les questions de droit et dressent les mmoires, c'est du corps des avocats c o n s i s toriaux qu'on tire toujours les promoteurs de la foi, ils sont au nombre de douze et remplissait d'ordinaire cer taines autres fonctions; aussi, la congrgation des rites les fait-elle suppler par d'autres avocats qu'elle approuve; S viennent enfin les interprtes pour les actes dresss en langue trangre, les mdecins, les physiciens, les ma thmaticiens et autres savants quand les circonstances l'exigent. Toutes les procdures d'une batification ou d'une cano nisation ne s'accomplissent pas au sein de la congrgation des rites. Les procdures prliminaires ont lieu dans le diocse du serviteur de Dieu, sous la direction de l'voque charg de s'enqurir minutieusement de ses vertus, de sa rputation de saintet et de fournir la preuve qu'il n'est l'objet d'aucun culte public preuve qu'on appelle attes tation de non culte. Toute personne qui remplit un office dans les procs de batification ou de canonisation est tenue, sous la foi du serment au secret' le plus rigoureux ; la mme obligation pse sur les tmoins.
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Voici en quels termes les juges prtent serment : Je jure et promets sur les saints vangiles de remplir fidlement la commission qui nest confie de dresser les * procdures ncessaires la batification ou canonisation - du serviteur de Dieu N. selon la formule ordonne par les dcrets de la sacre congrgation des rites, et spcialement par ceux que N. S.-P. le Pape Innocent XI - a confirms. Je jure et promets en outre de garder r e l i gieusement le secret, tant sur le contenu des interroga toires que sur les rponses des tmoins, et de n'en c o n frer avec personne qu'avec les juges, le notaire et le sous-promoteur dputs dans la cause, et ce, sous peine de parjure et d'excommunication (lat sententi) dont je ne pourrai me faire absoudre que par le Pape en personne, l'exclusion mme du grand Pnitencier. Ainsi je jure et promets : Dieu me soit en aide cl ses saints vangiles . Les juges dlgus, le vice-promoteur et le notaire p r tent leur tour serment (dans les mmes termes) devant les consulteurs. La formule du serment impos aux tmoins, est quelque peu diffrente: Je jure et promets sur les saints vangiles de dire la vrit tant sur les interrogations que sur les articles qui me seront proposs, et aussi de garder inviolablement le secret sur les dits interrogatoires et articles, comme sur mes rponses et dpositions, sous peine de parjure et d'excommunication (lat sententi) dont je ne pourrai tre absous que par le Pape en personne, l'exclusion mme du grand Pnitencier, except l'article de la mort. Ainsi, je jure et promets : ainsi, Dieu me soit en aide et ses saints Evangiles. La congrgation des rites constitue donc une vritable Cour de Haute Justice, et de quelles sages prcautions on a entour l'exercice de son autorit I On ne trouvera, chez aucun peuple civilis, une cour d'assises, une cour suprme, mme exceptionnelle, qui prsente les mmes garanties? Pour qui connat la nature humaine le plus difficile faire, dans l'apprciation des vertus d'un homme, c'est de savoir se tenir en garde contre les ides de la foule. L'opi nion populaire en effet est bien souvent trop peu consciente
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de ce qu'elle affirme. Si on ne donne un frein la rumeur publique, elle peut dfigurer la vrit au point de la faus ser. C'est du jugement du peuple que le proverbe a d i t :
trCrescit eundo . '
Aussi, qui n'admirera les prcautions si profondment sages prises par la Cour, romaine dans l'instruction d'un procs de batification ou de canonisation? Au dbut, l'enqute est confie l'vque du lieu de -naissance, et sa premire dmarche est de s'assurer qu'on n'a pas donn le titre de saint, qu'on n'a pas rendu un culte au pieux personnage, au vnrable, dont on instruit la cause, et cela sous les peines les plus svres. C'est un crime aux yeux de l'glise d'invoquer publiquement celui dont elle n'a pas mrement discut et consacr les litres de saintet. La seconde prcaution prendre c'est de garder le silence le plus rigoureux, devant le public, sur les r e n seignements que l'on a fournis comme tmoin, et de ne chercher en aucune manire connatre ce qu'ont attest les autres tmoins. Ajoutons qu'aprs l'audition des t moins, aprs les explications des mdecins, aprs le c o n trle et les preuves contradictoires des juges de la haute congrgation, elle ordonne un sursis dans la marche de l'affaire et de la procdure avant de conclure dfinitive ment sur le procs de batification ou de canonisation. Aucune cour judiciaire ayant prononcer sur les i n t rts les plus graves de l'ordre purement temporel, ne s'est entoure de prcautions aussi minutieuses pour arriver une connaissance parfaite de la vrit. Le temps consacr, le nombre des juges et la diversit de leurs fonctions, le nombre et la varit des conLrles, les moyens que l'on emploie pour s'assurer de la vracit des tmoins : tout se runit ici pour fermer tout accs l'erreur. La Congrgation des rites se runit tous les mois, dans le palais pontifical, en assemble ordinaire laquelle sont convoqus seulement les cardinaux, le promoteur de la foi, le protonolaire, le matre de crmonies et le s e crtaire. C'est gnralement dans les assembles extraor dinaires que se traitent les questions les plus importantes que soulvent les procs de batification ou de canoni sation. Ces congrgations extraordinaires sont de trois sortes : antprparatoires, prparatoires et gnrales.
La Congrgation antprparatoire se lient dans le palais du cardinal rapporteur ; eUe a pour but de le mettre plus parfaitement au courant de l'instruction dont il est charg. Les consulleurs lui donnent tour tour leur avis; sans qu'il fasse connatre sa propre opinion. La Congrgalion prparatoire, runie dans le palais pon tifical, a pour objet d'instruire des circonstances et des dif ficults de la cause tous les cardinaux du sacr tribunal. Chacun des consulleurs donne son avis ; mais Leurs m i nences rservent leur opinion. La Congrgation gnrale est honore de la prsence du Souverain Pontife. Les consulteurs y parlent debout, ils sortent aussitt, mais ils se tiennent daus l'antichambre, tout prts rentrer, s'ils sont rappels. Les cardinaux disent ensuite leur avis. Dans les assembles extraordinaires, on discute quatre sortes de questions appeles DOUTFS.Les unes sont des pr liminaires, les autres sont des rsolutions dfinitives. Voici ces questions : 1 La qualit requise des vertus chrtiennes est-elle bien atteste? Premier doute p r l i m i naire. 2 Les miracles sont-ils en nombre comptent? Sont-ils suffisamment prouvs? second doute prliminaire. 3 Est-il expdient de procder la batification? C'est le premier doute rsolu d'une faon dfinitive. 4 Apres la batification et la reprise d'instance, on demande s'il faut procder la canonisation : c'est le quatrime doute et le deuxime dfinitif, pour cet objet. 2. Des formalits anciennes.Jusqu' Urbain VIII, c' tait gnralement dans un Concile cumnique qu'on pro nonait l'arrt dfinitif de la canonisation. On y lisait la vie du serviteur de Dieuavec le rcit et les preuves de ses vertus. On ajoutait les dpositions authentiques des t moins oculaires attestant les miracles, et le concile d c i dait si on devait inscrire au catalogue des saints le s e r v i teur de Dieu. Les Souverains Pontifes avaient cru devoir prendre des prcautions encore plus rigoureuses pour proposera la vn ration des fidles les vertus hroques du serviteur do Dieu. 1 La Cour de Rome sollicite par des personnes graves, demandant un jugement de canonisation, prenait un dlai
suffisant pour apprcier fond la validit des tmoignages apports. Ce temps coul, le Pape, dans un consistoire secret, communiquait aux cardinaux les requtes prsentes et les raisons dont on les appuyait. Sur l'avis favorable du c o n sistoire., il ordonnait quelques vques, voisins des lieux, de soumettre une information juridique le bruit gnral de la saintet de ceux qu'on lui recommandait, et la r e nomme publique des miracles oprs parleur intercession. Celte procdure tait ensuite examine dans un second consistoire secret. Si le pape et les cardinaux taient satis faits, on donnait une commission nouvelle aux premiers dlgus ou d'autres, avec mission d'informer, non plus seulement d'une manire gnrale sur la renomme des miracles et de la saintet, mais encore sur la vie tout entire du serviteur de Dieu, sur chacune des vertus en particulier et Sur chacun des miracles qui avaient t proposs. Troisimement : Ces enqutes termines, on en adressait au Souverain Pontife les procs-verbaux authentiques, et Sa Saintet les confiait des hommes .habiles, ses chapelains, ses auditeurs de rote, etc. pour les rsumer, et en faire l'objet d'un rapport. Ces examinateurs t r a d u i saient les preuves en questions sommaires qui devaient tre juges par des cardinaux. Quatrimement: Quand tous les doutes avaient t levs l'avantage des solliciteurs de la cause, sur les rapports d'un vque, d'un prtre et d'un diacre, tous trois membres du sacr collge, on t e nait un consistoire public o tous les cardinaux vques taient appels; et l'on chargeait une commission ordinai rement forme de sept ou huit de ces prlats de faire l'ex position dtaille del cause. Enfin, le Souverain Pontife, aprs avoir demand le secours du Saint-Esprit, incliquait un jour pour la canonisation.
3 . Formalits prescrites par la Congrgation des Rites depuis h dcret d'Urbain VIII. Les premires enqutes
sont faites sur les lieux par l'vque diocsainjuge absolu dans les deuxqueslions prliminaires. 1 Opinion srieuse de saintet s'altachant au serviteur de*Dieu. 2 Attestation qu'aucun culte p u b l i e n t t adress au personnage vnr.
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Ces enqutes et les jugements de l'voque sont ports la Cour du Pape et dposs chez le notaire de la Congr gation des Rites. Les solliciteurs de la cause en deman dent l'ouverture, par une requte prsente en sance ordi naire, et l'on dclare la procdure ouverte. Celte ouverture se fait en prsence du Cardinal Prfet de la Congrgation, On demande alors au Pape de nommer un cardinal Rap porteur et des Traducteurs interprtes, s'il en est besoin. On examine les crits du vnrable (s'il y en a). Le pape signe ensuite la Commission, qui permet la Congrga tion des Rites de procder l'instruction du Procs de batification: mais dix annes doivent s'tre coules depuis que la supplique de Pvque du lieu a t dpose. Aprs dcret d'attribution ou de pouvoir pour informer sur chaque vertu particulire et sur chacun des miracles; une seconde procdure, faite avec le mme soin que la premire, commence et se poursuit sous le nom de p r o c dure apostolique. Les procs verbaux une fois termins, on les porte la Congrgation des Rites qui les soumet un examen a t tentif. Si la Congrgation trouve que la procdure a t faite selon les formes prescrites, elle passe la discussion particulire des vertus et des miracles. Il ne doit rester aucun doute, aucun point ohscur; tout doit tre clairci. La dcision dfinitive sur les vertus hroques d'un s e r viteur de Dieu ne peut tre prononce Rome que cinquante ans aprs le dcs du vnrable. C'est alors seulement qu'ont lieu les trois assembles dfinitives (antprparatoire, prparatoire et gnrale) dans lesquelles on prononce irrvocablement sur les doutes soulevs. Si les avis sont favorables, on songe fixer le jour solennel de la batifica tion.
4, AVEC QUELS SOINS PARTICULIERS, L'GLISE E X A M I N E DES VERTUS. LA
SAINTET DE
L A V I E E T L'HROISAIE
Voyons maintenant de plus prs comment, dans la pratique, on procde ces divers examens. L'glise se proccupe davantage de la saintet de la vie et du degr hroque des Vertus des serviteurs de Dieu que des miracles. Elle est le meilleur juge du vrai hrosme. L'-
il
vangile et la vie sublime deJsus-Christ lui fournissent le type parfait d'un hros digne du nom de saint. Une vertu mdiocre n'entrera donc jamais en possession d'un culte public. On peut avec des vertus ordinaires gagner le ciel, mais ce n'est pas assez pour devenir l'objet de la vnra tion des fidles. Pour tre plac dans les diptyques sacrs, la saintet doit se.rvler sur tous les points et embrasser la vie entire, c'est--dire la pratique de toutes les vertus, vertus thologales, vertus cardinales et toutes les vertus morales. La moindre dfaillance atteste sur un seul de ces points suffit pour faire interrompre le procs et rejeter pour toujours l'examen de la cause.
1. Examen des crits des serviteurs de Dieudonlla cause
est appele en Cour de Rome. Soit que ces crits aient t publis, soit qu'ils se trouvent encore en manuscrit, il faut qu'on s'assure qu'ils ne renferment aucune erreur soit sur le dogme, soit sur la morale. Le Cardinal rapporteur prside cette rvision des ou vrages. Il choisit des thologiens habiles et en nombre suffisant; ces examinateurs donnent leur avis par crit. Ils dressent le catalogue des ouvrages, leur planet leur objet, l'analyse raisonne de la doctrine et la manire dont ils sont rdigs. Si certains passages donnent lieu des doutes, le procs reste en suspens jusqu' l'claircisse ment complet de toutes les difficults. Cette enqute se fait sous le sceau du secret; les solliciteurs de la cause, surtout, ne doivent avoir connaissance du jugement des examinateurs qu'aprs la batification dcrte. L'examen prliminaire des vertus et des crits est le fondement de toutes les procdures subsquentes. 2. Commission apostolique. La nomination de la com mission apostolique suit toujours de prs l'approbation des ouvrages et l'examen des vertus. Par celle commission, le Pape donne pouvoir la Congrgation des Rites de t r a vailler l'instruction du procs propos. C'est en c o n s quence de celte permission que les juges sont dlgus, qu'ils informent sur les lieux, et que leurs enqutes sont examines d'abord dans les sances ordinaires. Cette c o m mission est nomme aprs une requte motive sur les actes
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de l'vque diocsain, et revtue de l'approbation de la Con grgation. Le promoteur prend connaissance del requte avant sa prsentation la signature. Il ne manque jamais d'opposer des difficults que les consulteurs sont chargs de rsoudre. Dans la rigueur stricte du droit, on ne devrait faire cette demande qu'en assemble gnrale ; dans la pra tique on sollicite ordinairement une dispense du Pape, et la Congrgation ordinaire dcide. Quand les cardinaux ont jug que les commissions peuvent tre expdies, le procureur lui-mme en dresse la formule; le secrtaire la porte contresigne son promoteur. Le Pape approuve par ce mot, crit de sa main sign de la premire lettre de son nom propre, placet il nous plat. Pour que le Pape accorde cette expdition impor tante, neuf conditions essentielles doivent avoir t remplies : 1 Il faut que les demandes des solliciteurs soient appuyes par des lettres et les instances souvent ritres de prlats ou autres personnes constitues en dignit. 2 L'ordinaire du lieu doit avoir men bonne fin sous son autorit propre l'enqute locale dont nous avons parl. 3 Les actes de celte enqute prsents la Congr gation doivent tre dclars rguliers et sans dfauts essentiels, de fond ou de forme. 4 Dix annes doivent s'tre coules depuis le dpt de ces actes entre les mains du secrtaire de la Congrgation. 5 Tous les traits, lettres, mditations et autres crits des personnes proposes, exigent une approbation solen nelle, aprs srieux examen, 6 La renomme de saintet doit toujours tre bien constate. 7 La requte prsente pour obtenir la signature doit avoir t vise par le promoteur, et dbattue en Congr gation gnrale, moins d'une dispense du Pape. 8 Il ne doit se trouver aucun obstacle, aucune opposi tion considrable contre l'iniroduclion de la cause. 9 L'vque diocsain doit certifier par ses lettres que la bonne odeur des vertus et le bruit des prodiges n'a fait que crotre de plus en plus depuis les dix annes coules.
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Telles sont les rgles inviolables dont l'excution est confie au promoteur. Quand toutes ces conditions sont remplies, et alors seulement, commence rellement le procs apostolique.
3. Comment les commissaires apostoliques procdent pour mettre en marche les procdures ordonnes par la
Cour suprme des rites. C'est la Congrgation des Rites qu'appartient le droit de nommer les juges dlgus par l'autorit pontificale pour dresser sur les lieux la dernire information qui sert de point de dpart toutes les discus sions des mdecins et des juges, soit pour approuver les faits surnaturels, soit pour les repousser comme insuffi samment prouvs. Ceux qui poursuivent la cause solli citent le dcret d'Attribution ou de Qualification par une requte dans laquelle ils doivent dsigner parmi leurs voi sins les voques qui leur paraissent les plus propres bien s'acquitter de cette commission. Le promoteur peut rcuser les prlats indiqus et s'en faire proposer d'au res. Toutes ces formalits remplies, le procureur de la cause rdige Je programme des questions qui doivent diriger l'instruction du procs ; il range sous diffrents titres les faits qu'il faudra constater pour mettre en vidence les verlus principales et les miracles qu'on a dessein de faire valoir comme preuves de saintet. Ces faits, questions ou positions (positiones comme on les appelle) servent diriger l'interrogatoire des tmoins. Le promoteur qui prend connaissance de toutes ces critures prparatoires, rdige sur le mme sujet un grand mmoire sous forme pistolaire pour celui qu'il destine tenir sa place sur les lieux. On appelle celui-ci vice-promoteur; ses fonctions sont trs-importantes. Les serments que doivent prter les juges, les officiers et les tmoins sont joints celte lettre commissive, enferms sous une mme enveloppe, avec le dcret d'attribution sign du notaire de la congrgation, du prolonotaire, du prsident et du secrtaire, et la copie des articles rdigs par le procureur. Les originaux de toutes ces pices restent dans les a r chives de la Congrgation, et le notaire a soin dcacheter le paquequi contient toutes les pices expdies. Les commissaires apostoliques sont ordinairement trois
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voques. Parmi eux figure le plus souvent l'vque du lieu de la Spulture du serviteur de Dieu. Si l'un des vques venait manquer, on le remplacerait par deux chanoines de l'glise cathdrale. Un vicaire gnral peut seul jouir en cette qualit, du privilge de reprsenter son vque. Les juges dlgus commencent leur entre en fonctions par l'ouverture du dcret d'Attribution. Vient ensuite le serment qu'ils prtent eux-mmes d'abord, et qu'ils reoi vent ensuite de tous ceux quisont placs sous leurs ordres,
c'est--dire du vice-prsident, du notaire apostolique ( s e r
vant de greffier), de celui qui rdige, collationneou t r a n s crit les procdures, enfin du procureur de la cause. On n'admet tous ces emplois que des ecclsiastiques, dont le caractre sacerdotal doit tre tabli, les laques .sont rigoureusement exclus de ces fonctions. Les commissaires apostoliques reoivent les dpositions des tmoins, au jour, l'heure, et dans le lieux dsigns par les assignations. On choisit toujours une glise, une chapelle, ou tout au moins une sacristie, pour entendre les dpositions, dans le but, sans doute, d'inspirer aux tmoins
un plus grand respect du s e r m e n t . Les a u t r e s actes j u d i ciaires s'expdient dons la salle d'audience qui sert la
justice contentieuse de l'ordinaire. Aprs la prestation du serment, on interroge chacun des asserments sur les ar ticles dresss par le Procureur. A la fin de chaque sance, on arrte et on signe les registres qui doivent tre cachets jusqu' la prochaine assemble. Toute pice extra-judi ciaire insre dans le procs le rendrait nul d'aprs le d cret dlnnocent XI. L'information termine, les juges d lgus apposent leurs signatures et leurs cachets. Puis on fait la visite et l'ouverture du tombeau. Un procs-verbal bien circonstanci de cette formalit est aussitt dress. Si
le lieu de la s p u l t u r e est compltement ignor, on doit en
faire m e n t i o n dans les pi tes j u r i d i q u e s . Les minutes de foutes les pices sont conserves dans les archives de l'vcb ; on en fait copier un exemplaire bien libell par n'importe quel copiste. Cet exemplaire doit tre collationn devant les juges mmes par le secrtaire de la commission et par un autre notaire apostolique; les juges et lours assesseurs le revtent de leurs signatures et de leurs cachets : ce duplicata qui est ensuite port la
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cour de Rome par un messager ayant prt serment de s'ac quitter fidlement de sa commission. La vrification des signatures et des cachets se fait avec le plus grand soin en prsence des membres del Congrgation des Rites.
4. Preuves et tmoins Vappui des vertus un seul, testis unus, testis nulhts; du serviteur
soient guids dans leur dposition par aucun intrt per sonnel. Les tmoignages suspects ou peu concluants ne peuvent pas tre invoqus en faveur d'une dclaration de saintet. Cette pratique si sage est base sur l'impor tance de la matire, et sur le prjudice que porterait la religion un jugement mal fond. Entrons dans quelques dtails sur ce que Ton exige des tmoins. Les tmoins doivent tre deux ou trois au moins pour affirmer le mme fait avec ses circonstances accessoires. Les personnes in terroges ne doivent dire que ce qu'elles ont vu de leurs yeux ou entendu de leurs oreilles. On n'coule que rare ment les tmoins par ou-dire ; et ces sortes de tmoi gnages ne sont jamais accepts pour la preuve des mi racles. Enfin, on veut dans les tmoins l'ge, les qualits elles connaissances acquises que prescrivent les rgles du droit ecclsiastique et civil. On exige enfin qu'ils soient ca tholiques, et qu'ils sachenlfaire le discernement dos vertus et des miracles. Dans tous les cas, leurs dpositions sont .soumises un examen svre. On ne se sert des donnes des historiens que comme documents complmentaires. On voit avec quelle intelligente circonspection agit la Cour de Rome. La procdure des commissaires renfermant toutes les pices de conviction, est examine d'abord au point de vue de la forme dans les assembles ordinaires de la con grgation. Puis, on fait de tous Jes actes principaux des sortes de Sommaires (Summarium) qui seront discuts dans les assembles, extraordinaires. La Congrgation des Rites procde avec unelenteur, sage jusqu' l'excs. Ses jugements ne sont rendus qu'au bout de dix, vingt, trente annes. Rome ne formule un dcret de batification ou de canonisation que quand la vrit a brill de tout son clat. Le nombre des tmoins entendus est trs considrable ; et l'on pousse l'exigence jusqu'
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l'extrme dans l'apprciation des personnes appeles d poser quand il s'agit de discerner les vrais miracles d'avec ceux qui ne le sont pas.
5. Nature et caractres distinctifs des miracles vrais
et faux. 1 Le vrai miracle ne doit pouvoir tre attribu scientifiquement qu' Dieu et non l'art ou la n a t u r e ; 2 sa production doit surpasser les forces de la nature; 3 il ne consiste pas dans la seule force des paroles, comme la transsubstantiation dans l'Eucharistie, o l'effet reste invisible, son effet doit au contraire tre visible et constant; 4 il doit avoir pour but ou pour con squence la confirmation d'un point de doctrine ou la manifestation de la saintet u n serviteur de Dieu. Les miracles vrais diffrent des faux miracles d'abord par l'efficacit: ils oprent ce qu'ils montrent. Exemple : l'illumination d'un aveugle, la rsurrection d'un mort. Le miracle qui ne laisse rien aprs lui qui soit un tmoignage de son efficacit, est un faux miracle: c'estce que l'on a vu dans les jongleries du diacre Paris. 2 Levrai miracle subsiste et persvre dans son effet merveilleux ; il porte avec lui sa pice de conviction ; les prestidigitations qui simulent les miracles ne laissent rien aprs elles. 3 Le vrai miracle a pour mobile ou pour but la gloire de Dieu; le faux miracle n'a pour objectif que la vanit ou l'illusion. 4 Le vrai mi racle s'obtient par la prire, la mortification et la con fiance en Dieu; les faux miracles sont raliss ou par ruse, ou par forfanterie, en tous cas par des moyens qui ne dpassent pas les forces humaines. Un fait par lui-mme miraculeux, c'est que l'Eglise ca tholique seule ait gard le prcieux pouvoir de faire des miracles. Dieu en effet ne peut permettre la ralisation de prodiges qui seraient le triomphe de l'erreur. Cette vrit trouv sa confirmation clatante dans le gratid schisme d'Occident. L'Eglise tait hsitante reconnatre le vrai pape entre plusieurs concurrents; et il plut Dieu do faire voir qu'on pouvait s'attacher chaque obJience de bonne foi. sans s'garer. Eu voici la preuve; il y a eu des saints canoniser dans chacune des obdiences, et par consquent des miracles en confirmation de leur sain tet. Mais, ni chez les luthriens, ni chez les calvinistes,
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ni chez les antres hrtiques ou schisma tiques, on ne re trouve le privilge absolument divin du miracle.Les librespenseurs croient expliquer ainsi ce fait crasant : le miracle a disparu avec la superstition. Mais cette assertion gratuite ne dmnt pas les innombrables miracles dont s'honore l'glise de Jsus-Christ, miracles dont ce volume apporte la dmonstration irrfragable.
6. Examen des doutes relatifs aux miracles. Nombre des
miracles exigs. Le premier clouto peut venir des tmoins qui l'attestent. Us peuvent n'avoir pas les qualits de bonne foi ou d'intelligence voulues, ou bien ils peuvent avoir t conduits par des considrations d'amour-propre et d'intrt personnel. Le second doute tient au fait lui-mme. Bien que p o s sdant toutes les qualits qui constituent un fait, on a pu se tromper sur la cause qui l'a produit. Surpasse-t-elle ou ne surpasse-t-elle pas les forces de la nature? Le troisime doute vient des illusions que peuvent se faire les tmoins par suite des dispositions particulires de leur esprit. Les miracles sont de premier, de second ou de troi sime ordre. Un miracle est de premier ordre lorsqu'il est contraire aux lois de la nature, qu'il y a cration de substance, ou que la substance du fait accompli est l'objet mme du mi racle. cette classe appartiennent la fcondit et l'enfan tement de la glorieuse vierge Marie. Le miracle est de second ordre quand le fait accompli dpasse seulement les forces de la nature, comme la g u rison du paralytique, du boiteux, de l'aveugle-n. Le miracle de troisime ordre est celui dans lequel le mode seul de la production du fait est au-dessus des forces de la nature, en ce sens que la nature opre les mmes effets, mais dans de tout autres conditions.Exemple: sainteScholastique voulant empcher son frre saint Benot de re tourner son couvent fit tomber une pluie torrentielle par un ciel entirement serein. Il pouvait certainement pleuvoir ce.jour-l, mais pas sans un miracle l'heure prcise o l'horizon tait tout fait sans nuages, et en concomitance avec la prire de la sainte.
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Les miracles de premier ordre ne perdent rien de leur force pour n'tre pas faits instantanment, parce que la preuve du surnaturel reste assure daus le fait mme, celui, par exemple, de la rsurrection d'un mort. Il faut deux miracles au moins pour la batification, et deux autres, survenus aprs la batification prononce, pour obtenir la canonisation. Les miracles de deuxime et mme de troisime ordre suffisent, parce qu'ils donnent la certitude entire et absolue de l'intervention divine.
7. Conditions et caractres d'une gurison vraiment
miraculeuse T o u t e gurison, pour tre vraiment m i raculeuse, exige imprieusement le concours de plusieurs circonstances: 1 Il faut que la maladie soit grave et i n c u rable; si elle peut se gurir par les ressources de l'art mdical, il faut alors que la gurison soit subite. 2 La gurison doit survenir dans la priode d'intensit la plus forte et non la fin de l'volution du mal, lorsqu'il peut survenir une crise salutaire. 3 On ne doit pas avoir e m ploy de remdes qui aient pu efficacement enrayer la maladie; ou bien, si on a employ des remdes, il faut avoir acquis la certitude qu'ils n'ont produit aucun effet favorable, ou mme qu'ils ont produit un effet contraire. 4 La gurison doit tre instantane et subite. 5 11 Faut qu'elle soit complte et non suivie de rcidive. 6 Enfin, qu'on n'ait pas remarqu dans les moments qui ont p r cd la gurison, une crise, ou une vacuation notable qui pourrait avoir t la cause de la gurison. Dans l'opinion commune les mdecins, ces rsolutions favorables arrivent plutt dans les maladies aigus que dans les maladies chroniques. La nature peut gurir de trois manires : 1 par le dplacement de l'humeur peccante qui passe d'un organe noble un organe moins essentiel, comme lorsque, les parotides tant dangereusement envahies, l'humeur passe aux joues ou aux pieds. 2 Par une crise, une vacuation, un vomissement, des sueurs abondantes, le saignement de nez, l'apparition des lmorrhodes, ou chez les femmes le retour de menstrues abondantes. 3 La plupart des maladies parcourent des priodes
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rgles, et ces priodes sont au nombre de quatre. La ma ladie a son principe, son accroissement, son- paroxysme ou apoge et son dclin. Souvent une solution favorable sur vient au moment de la plus grande intensit du mal : les humeurs organiques peuvent alors prendre un volume ou une malignit tels que les parties saines fassent effort pour les rejeter de l'organisme par des suppurations et des jec tions diverses. La dlivrance, dans ce cas, est si rappro che du paroxysme de la maladie, qu'elle peut sembler miraculeuse, tandis qu'elle n'est qu'un effet naturel. Mais dans toutes les maladies, les priodes sont loin d'tre de mme longueur ou dure. C'est au mdecin examiner dans chaque maladie particulire ses causes, son accroissement, sa dure, son intensit, ses relations avec d'antres affections. Quand il s'agit de miraclesdelroisime ordre, il faut des preuves plus videntes de la gravit de la maladie, de l'instantanit de la gurison, et de l'impossibilit de l ' o b tenir par des moyens naturels. Les juges doivent insister dans les questions adresses aux tmoins et aux mdecins, pour savoir; si la gunson est survenue dans la premire phase du mal ou aprs la crise? S'il y a eu crise, quels ont t les remdes employs et les effets de ces remdes? Si Ja maladie a cess entire ment; si les forces sont revenues ; si la voix a repris son timbre ordinaire ; si les marques de. faiblesse ont reparu aprs quelque temps? Enfin, pour admettre dfinitivement le miracle, il faut avoir conslal la persvrance de la gurison, sans cela la preuve ne serait pas faite. En outre de ces instructions, il y a les rgles suivre pour viter la surprise et les faux jugements porter sur la gurison dans chaque maladie spciale. La Congrga tion des Rites a pris toutes les prcautions possibles, avec un soin infini, en vue d'viter les erreurs qu'on pourrait commettre dans certains cas particuliers de gurisons. Les interrogations faire subir aux tmoins soit formules avec une prcision qui rend impossible l'oubli de toute question importante ou d'un claircissement essentiel obtenir. Comment de tout ce qui prcde, ne pas conclure a que la lgislation spciale de l'Eglise sur les procs de batica-
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tion et de canonisation est nn chef-d'uvre de prvoyance, de sagesse, de prudence, de connaissance du cur humain, de loyaut, de science des lois de la nature et des secrets de l'art mdical. Gloire au beau gnie, au profond savoir du grand Benoit XIV qui a mis le sceau celte admirable lgislation! De la thorie passons la pratique. Montrons par la publication des actes principaux de la Batification et de la Canonisation de saint Benoit-Joseph Labre que ces solennelles enqutes, dont aucune n'a encore t publie, non-seulement ne laissent absolument rien dsirer, mais dpassent tout ce qu'on pourrait imaginer en fait d'enqutes judiciaires, qu'elles sont l'idal de la rigueur dmonstrative. Nous avons choisi saint Benot-Joseph Labre, parce qu'il fut le plus petit, le plus humble, le plus extraordi naire de tous les saints, si extraordinaire qu'il semblait impossible qu'on put songer Je batifier et le canoniser, tant taient profondes les rpugnances que le grand men diant inspirait tous. II a fallu, pour l'lever sur les autels, le courage de l'un des plus doux et aussi de l'un des plus forts parmi les Souverains Pontifes, l'immortel Pie IX.
VIE
Merveilleuse et vertus hroques de saint Benot-Joseph. Labre.
Sur les confins de l'Artois, de la Flandre et du Boulon nais, se trouve un joli pelit village, Amelles, perdu au milieu des terres; c'est la patrie de ce pauvre volontaire qui mrita d'tre appel par le grand pape Pic IX, le modle et le patron du plerin. Benoit naquit le 2G mars 1748, de Jean-Baptiste Labre et Anne Barbe Grandsire; Dieu, qui avait sur cet enfant des vues particulires, commena par lui donner un second pre selon l'esprit, qui devait la former de bonne heure la vertu, .Fran ois-Joseph Labre son oncle, trs-digne ecclsiastique qui, du consentement du cur d'Amettes, baptisa son neveu, et fut aussi son parrain. Remplis de l'esprit de la vritable pit, ses parents mirent tous leurs soins le bien lever, et dirigrent ses premiers pas dans la roule qui devait le conduire un si haut degr de vertu. Il n'avait pas plus de cinq ans, que dj il montrait une ardeur, extraordinaire cet ge, pour aller l'cole, sans autre but que de pouvoir lire de ses propres yeux et crire de sa propre main les premiers lments de notre sainte religion, tant il se .sentait d'attrait pour les choses de Dieu'. Tous les moments dont il pouvait disposer, il les passait dans sa chambre, soit prier, soit lire quelque livre de pit. On montrait encore, il y a quelques annes, sur la place du village, un arbre sculaire au pied duquel le jeune Benot runissait ses compagnons, le dimanche aprs l'office, pour leur faire une lecture instructive et amusante. A mesure qu'il croissait en ge, il croissait galement en sagesse et en grce devant Dieu et devant les hommes.
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Vers Tage de douze ans, il fut envoy chez son oncle Franois-Joseph Labre, alors cur d'Erin, pour y recevoir une instruction plus tendue. M. le cur d'Erin tait un pasteur plein de zle et d'une charit vraiment apostolique. Charm de la conduite difiante et des murs ansfiiques de Benot, il lui annona bientt qu'il fallait se dis poser sa premire communion, A cette nouvelle, notre Bienheureux ressentit une joie, un bonheur indicible. Il redoubla de lerveur clans la prire et se livra encore davantage aux lectures de pit; il commena passer des heures entires au pied du Saint-Sacrement, pour supplier son Bien-Aim d'lever de plus en plus ses penses vers lui, et de le rendre digne de le recevoir. Absorb dans la prire et'dans la mditation, il ne laissait chapper que des lans d'amour, et quand vint le jour tant dsir, il n'tait plus sur la terre, il ressentait la flicit des h a b i tants du ciel. Apres sa premire communion, le bienheureux Benot Labre redoubla du ferveur dans l'accomplissement de ses devoirs. Il se levait toujours de grand malin pour se m nager le temps de rciter exactement ses prires et d'y ajouter une lecture de pit, avant l'heure du travail. Au premier son de la cloche annonant la messe, il se rendait aussitt l'glise, afin d'avoir le bonheur de servir l'autel. Use tenait presque constamment en la prsence de Dieu, et il n'avait pas d p l u s douces jouissances que de converser avec lui. C'tait surtout au pied du tabernacle qu'il se sentait comme inond de ces dlices ineffables dont parlait l'aptre saint Paul, et qui le ravissaient au troisime ciel. H refusait son corps le bien-tre qui n'tait pas strictement ncessaire pour conserver sa sant ; il priait toujours genoux, ne s'approchait jamais du feu en hiver, couchait souvent sur u n e simple planche ou s u r la t e r r e nue, n'ayant qu'un morceau de bois pour oreiller. A Erin comme Amettes, on le surprit plusieurs fois couchant s u r la dure ou passant une partie de la nuit en prires. Lorsqu'il n'usait point de son lit, il avait soin de le remuer, afin qu'on ne s'en aperut pas. Il tait bon, affable envers ses camarades et toujours dispos leur rendre service. Sa patience ne se dmentait jamais, son caractre rflchi no l'empchait pas d'tre gai et jovial
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dans les rcrations; II tait le premier mettre en train une partie de jeu, mais en trouvant le moyen d'y donner encore des exemples de vertu. Le moment approchait o il allait avoir l'occasion d'exercer sa charit jusqu' l'hrosme. En 17GG, une ma ladie terrible se dclara tout coup Erin ; une cruelle pidmie porta le ravage dans la paroisse; les maisons taient pleines de malades, et leur nombre s'accroissait chaque jour. Dans cette situation dsespre, on vit le pasteur et son neveu, aqims tous les deux du mme esprit, lutter de zle et de dvouement pour les malheureux; visiter, consoler, soulager les malades; multiplier leurs soins mesure que le mal lui-mme s'tendait; n'couter ni rpugnance, ni dgot; donner tous et partout des marques d'une tendre charit, et s'oublier eux-mmes pour ne penser qu'aux autres. Accibl par toutes ces fatigues et ces veilles incessantes, le digne pasteur languit et tombe frapp par le flau destructeur. 11 mourut en odeur de saintet, entour des bndictions de son peuple, dont la douleur et les larmes taient la plus touchante des oraisons funbres. Aprs ce coup terrible, notre bienheureux resta encore quelques semaines Erin, jusqu' oe que le flau et cess ses ravages, et que les habitants de cette pauvre paroisse n'eussent plus besoin de ses services et de son dvouement; il revint alors la maison paternelle, rsolu ne plus s'occuper dsormais que de son salut ternel. La p h y s i o nomie humble et modeste, le maintien grave et rflchi du jeune Benot, manifestaient d'une manire vidente le secret de son intrieur et ses intimes penses. Ds sa plus tendre jeunesse, il s'tait propos d'tre, autant qu'il le pourrait, une vive image de notre divin Sauveur. Il avait toujours ressenti une grande aversion pour le monde et un penchant bien marqu pour la retraite; aussi le silence perptuel, la parfaite solitude, l'austrit, l'exacte rgularit do la Trappe attirrent ses regards et fixrent son choix. Il s'en ouvrit ses parents; mais ceux-ci voulurent prouver encore p e n dant quelque temps cette vocation si extraordinaire. A toutes les objections que sa famille opposait son dsir de se retirer du monde, il rpondait avec fermet: Dieu m'appelle une vie austre et pnitente, il faut lui obir.
Devant une telle dtermination, ses parents n'osrent plus faire de difficults ; ils demandrent seulement leur fils de renoncer la Trappe dont l'austrit les effrayait, et de se rendre plutt chez les Chartreux qui possdaient p l u sieurs monastres dans les environs. Benoit consent ce dsir et part pour la chartreuse de Longucnesso, prs Saint-Omer. Mais, le couvent vient cle subir des perles considrables par suite d'un terrible incendie, et l'on ne peut y admettre do novices pour le moment. On l'engage aller frapper la porte de la chartreuse de Neuville, o le suprieur le trouve trop jeune. Benoit revient Ametles mais pour aller immdiatement avec la permission de ses parents frapper la porte de la Trappe de Mortagne en Normandie. Il a soixante lieues faire pied par des pluies continuelles! Rien ne l'arrle; il vole plutt qu'il ne marche et il arrive enfin. Mais la rgle du monastre est inflexible et n'admet personne avant vingt-quatre ans accomplis. Benot dsol, constern, est forc de reparatre Ametles aprs un mois d'absence, les babils en lambeaux, les pieds dchirs, mais toujours calme et plein d'abandon entre les mains de son Dieu. Il resle encore deux ans la maison paternelle, menant au milieu du monde la vie des anciens Pres du dsert, priant sans cesse et les yeux toujours levs vers les montagnes ternelles, pour obtenir la grco de correspondre pleinement aux volonts divines. Aprs cette trop longue attente, le 12 aot 1769, Benot dans sa vingt-deuxime anne, part autoris et bni de ses parents, se prsenter tour tour la chartreuse de Montreuil o aprs trois mois d'preuves ses suprieurs lui annoncent que Dieu ne le veut pas dans leur ordre et l ' a p pelle mener une vie plus pnible encore et plus mritoire; la Trappe de Mortagne.o on lui oppose une seconde fois la rgle inflexible do n'admettre de novices qu'gs de vingtquatre ans ; enfin l'abbaye de Notre-Dame de Sepl-Fonts dont il put franchir le seuil, mais pour quelques semaines seulement. Il est donc vrai que Dieu avait ainsi rsolu de promener par le monde ce divin vagabond, comme une leon vivante, un modle incomparable de la pauvret et de la mortification si recommandes dans l'Evangile. Benot qui avait rsolu de ne plus retourner la maison paternelle, se rendit Paray-le-Monial, afin de demander
au Sacr-cur les lumires dont il avait besoin pour con natre ses desseins sur lui. Il logea plusieurs jours l'hos pice de la ville, passant de longues heures en oraison au pied de l'autel des Apparitions ; et les surs de la Visita tion aiment penser que ce fut dans leur chapelle, par l'intercession de la vnrable Marguerite Marie, qu'il reut l'inspiration de se vouer la vie de pieux plerin appel visiter lour tour les sanctuaires les plus clbres et les plus chers la pit des fidles. La manire dont il accomplissait ses voyages et la c o n duite qu'il y menait, montrent suffisamment que le Seigneur lui-mme lui avait inspir cette vocation extraordinaire. Il allait toujours pied, dpourvu des choses les plus ncessaires, mme de la plus petite somme d'argent pour se les procurer, ne portant que des babils grossiers et uss qu'il racommodait l u i mme aussi longtemps qu'ils ne tombaient pas en l a m beaux, couchant presque constamment sur la terre nue ou sous un hangar, ne prenant aucune prcaution pour se dfendre des injures du temps, de l'ardeur du soleil ou des rigueurs du froid, vitant les rouies publiques et recher chant les voies solitaires, refusant toute compagnie, mme celle des personnes honntes, disant qu'il dsirait faire oraison en voyage, mais, au milieu de toutes les privations et de tous les dangers, se montrant plein de courage et de confiance, soutenu par son ardent amour pour Dieu et sa tendre pit envers la sainte Vierge. C'est celte dvotion Marie qui le porta commencer sa carrire de plerin par une visite N.-D. de Lorette. Il se dirigea ensuite vers Assise pour y vnrer le tombeau de saint Franois; on le vit passer de longues heures en oraison dans l'glise de Sainte-Marie des Anges, dans les sanctuaires de 1Alverne, et surtout l'endroit o saint Franois reut les stigmates. Benot-Joseph arriva Rome pour la premire fois la fin de l'anne 1770; passa trois jours dans l'hpital SaintLouis fond pour les plerins franais, et bientt se sentit inspir d'aller Fabriano, au tombeau de saint Romuald. De Fabriano il revint Lorette, puis il entreprit de visiter dans le royaume de Naples, les sanctuaires les plus renom ms; Bari, l'glise do Saint-Nicolas ; Naples, celle cle
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Saint-Janvier; au mont Gargan, celle de Saint-Michel. Il avait coutume de sjourner quelque temps dans chacun des lieux o sa dvotion l'avait attir ; et partout il trouvait moyen de rendre une foule de services au prochain, de consoler les affligs, de visiter les prisonniers, de veiller les malades, d'ensevelir les morts. Aprs un long sjour dans le royaume de Naples, il va de nouveau saluer sa bonne Mre Lorette, et passe le reste do Tanne Rome. Ensuite, pouss par l'esprit de Dieu, il reprend sa gourde de plerin, se rend successivement en France Notre-Dame de Liesse et deux fois Notre-Dame d ' E i n seilden en Suisse, puis il court aux clbres sanctuaires d'Espagne qui l'attirent : Notre-Dame du Mont Serrt, Notre-Dame du Pilier, le Christ de Burgos, enfin SaintJacques de Composlellc, le but principal de son voyage en Espagne. Il ne cessait de prier en marchant, ne s ' a r rtant jamais pour regarder ce qui aurait pu satisfaire la curiosit; jamais non plus il ne mettait les pieds dans les htelleries; il passait les nuits en plein air, et en e m ployait une partie mditer sur les mystres de notre sainte religion. Aux pieds des Madones vnres, ou l'as pect des tombeaux et des reliques des saints que Dieu s'est plu glorifier, son me ardente et gnreuse s'exaltait et se sentait plus vivement encore porte la vertu. Mais l'Italie est en possession du sanctuaire le plus a u guste et le plus clbre par son antiquit et par la foule des plerins qu'il attire, c'est le sanctuaire de Notre-Dame de Lorette, la Santa Casa, la maison mme o s'est accompli le mystre de l'Incarnation, transporte miraculeusement par les anges de Jude en Italie. Le saint revenait ch que anne rendre ses hommages Notre-Dame de Lorette. Tant que les portes de la basilique taient ouvertes, du malin au soir, on le voyait persvrer dans la prire: tantt il assistait dans une immobilit complte, aux messes qui se succdaient, presque sans interruption, toute la matine; tantt il s'unissait au chant des offices et des litanies de la sainte Vierge, avec un accent de pit et de ferveur qui touchait tous les assistants; tantt ilse retiraitdaus quelque recoin ou derrire uu pilier, afin de pouvoir s'y livrer plus aisment, sans tre aperu, aux transports de sa dvotion et aux panchements de son amour. Il restait l'glise
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jusqu' la fermeture des portes; c'est alors seulemenlqu'il prenait un petit repas, faisant ainsi un jene continuel et des plus rigoureux, suivant l'antique usage des plus a u s tres anachortes. Tous les plerins faisaient l'loge des
vertus extraordinaires du petit saint franais. Les uns
l'avaient surpris se donnant une rude discipline pour ob tenir la conversion des pauvres pcheurs; d'autres a s s u raient l'avoir vu en extase devant une statue miraculeuse de la sainte Vierge. La plupart s'lonmient qu'il put faire l'aumne un grand nombres d'indigents, lui qui ne demandait jamais rien pour lui-mme. On admirait sa fer veur, son recueillement, sa pieuse coutume d'aller tou jours saluer le bon Dieu l'glise, lorsqu'il traversait un village; sa rpugnance loger dans les hospices, cause des offenses contre Dieu qui y sont commises. Mais Rome pouvait seule, par le nombre prodigieux de ses glises, par la multiplicit de ses dvotions, par la faci lit qu'elle offre de gagner des indulgences innombrables, tancher la soif des eaux de la grce qui consumait Benot. Rsolu de s'y fixer, il chercha d'abord un abri solitaire pour la nuit, et le trouva prs duGolyse ; c'tait un enfon cement suffisant pour contenir un homme. Il n'eut plus d'autre logement que celte misrable retraite. C'est l qu'il prenait un peu de repos, aprs avoir pass toute la journe en prires dans les glises, et avoir assist, le soir, l'ins truction qu'on fait aux pauvres. De grand matin, il sortait de sa grotte et se rendait aussitt Notre-Dame des Monts. II n'en sortait que pour recevoir la soupe la porte d'un couvent, et se diriger au plus vile vers un autre sanctuaire o il passait le reste de la journe. Le mauvais temps ne l'arrtait jamais: qu'il plL verse, que le froid ft des plus rigoureux, Benot ne paraissait pas s'en apercevoir. Il rcitait tous les jours le brviaire et d'autres offices p a r t i culiers; il faisait ensuite plusieurs lectures de pit, qui lui inspiraient de nombreuses oraisons jaculatoires. Aux prires des quarante heures qui ont lieu d'une manire continue dans les diverses glises de Rome, on ne vit jamais d'adorateur plus fidle et plus recueilli. Une de ses p r i n cipales dvotions consistait mditer s u r la passion du Sauveur: sous les arcades du Colyse, celte vaste arne o tant de martyrs ont reu la palme de la victoire, il aimait,
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dans l'obscurit de la nuit, parcourir les stations du c h e min de la Croix. Souvent aussi, il montait genoux, l e n tement, mditant chaque degr sur leshumiliationsetles douleurs du Sauveur, le Santa Scala que son bon matre avait gravi si pniblement Jorqu'on le tranait au Prtoire. Tous ces pieux exercices avaient fait de ce pauvre, inconnu de tous et si mprisable en apparence, sans qu'on s'en doull, l'objet de la vnration et de l'admiration publique. La faim, la soif, la nudit, le froid, le chaud, les intol rables vermines qui le dvoraient, les railleries, les affronts, les mauvais traitements, rien ne put jamais troubler la paix do son me. 11 s'occupait si peu des besoins, des ncessits de son corps, qu'il semblait en quelque sorte ne plus vivre sur la terre et ne plus en ressentir les infirmits. El ce qu'il y a de plus louchant, c'est que ce pauvre de JsusChrist, qui s'tait prescrit, pour rgle, de ne jamais deman der l'aumne, et de ne recevoir que ce qu'on lui donnerait volontairement, trouvait encore moyen de soulager d'autres indigents. Un grand nombre de personnes ont assur qu'elles l'avaient vu, les bras tendus ou croiss sur la poitrine, les yeux fixs au ciel, le corps soulev de terre et comme suspendu en Pair, tout rayonnant de gloire, le visage enflamm, resplendissant d'une vive lumire qui l'enveloppait depuis les pieds jusqu' la tte. Dieu lui avait rvl l'poque et les circonstances de sa mort. Un jour, tout perdu et dans une agitation violente, il dit l'abb Marconi : Mon Pre, j'ai cru que j'tais mort et qu'on m'enterrait Notre-Dame des Monts du ct de rpitre ; il y avait autour de mon corps une foule de monde qui faisait grand b r u i t ; Jsus-Christ m'a dit: Je te cde ma place. Hlas I on iail le Saint-Sacrement, ou cessait les prires des Quarante-Heurcs, et, au lieu d'adorer notre divin Matre, dans le sacrement de son amour, une m u l t i tude de gens de toute espce ne s'occupaient qu' donner des marques d'honneur un pcheur comme moi. En parlant ainsi, il avait le cur plong dans la plus vive douleur, ce qui se comprend facilement, si l'on considre d'un ct son humilit et son mpris pour lui-mme, de l'autre son ardent amour pour Jsus-Christ. Celle prdiction s'accomplit de tous points el en quelque sorte la lettre. En effet, les forces ne rpondaient plus l'ardeur
vie e t v e r t u s d e benoit-joseph
labre
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toujours croissante de Benot ; depuis quelques mois s u r tout, on le voyait s'affaiblir graduellement. l'glise de Sainl-Thodore,onclbraitunc fteenl'honneur du SacrCur, le bienheureux tait l, gnnoux, depuis de longues heures, plong dans une douce contemplation, tmoignant au Sauveur sa tendresse et sa reconnaissance, lorsque tout coup on le voit tomber presque inanim sur le pav ; on accourt, on relve ce corps dbile et dcharn, on veut lui faire prendre quelque chose, mais Benoit revenu luimme, remercie de ces bons soins, se rapproche de la ba lustrade contre laquelle il s appuie, et continue ses o r a i sons jusqu' la lin des crmonies. Le mercredi-saint 1783, aprs tre rest longtemps en prires Notre-Dame des Monts, son glise de p r d i lection, il se sentit dfaillir et voulut sortir, esprant que le grand air le ranimerait, mais il tomba sans c o n naissance sur les marches de l'glise. Au mme moment, arrive le boucher Zaccarelli, l'ami du serviteur de Dieu, dont la maison tait peu loigne. Le malade prend son bras, mais comme cela ne suffit pas, plusieurs p e r "sonnes lui viennent en aide, et l'on parvient le t r a n s porter chez Zaccarelli, qui le fait mettre tout habill sur un lit. Un prire, qui se trouvait l fortuitement, reconnaissant la gravit du mal, demande au malade s'il y avait longtemps qu'il ne s'tait approch des sacrements ? Benoit rpond qu'il avait eu ce bonheur depuis peu. Le prtre lui ayant fait quelques questions sur l'tat de sa conscience, il rpondit qu'il n*y avait rien qui lui fit de la peine, et qu'il tait tranquille. Ce furent ces dernires p a roles : la respiration devint de plus en plus embarrasse, il perdit connaissance ; on ne put lui faire recevoir le saint Viatique, mais on lui administra le sacrement de Pextrmeoclion. Sans convulsions, sans aucun symplrne d'agonie, avec toutes les apparences de la plus douce tranquillit, ce grand serviteur de la Mre de Dieu, s'envola dans le sein de son crateur, le mercredi-saint 16 avril, de l'anne 1783, Tge de trente-cinq ans.
J
Aussitt que Benoit eut rendu le dernier soupir, Dieu qui sait tirer sa gloire de la bouche des enfants, inspira un grand nombre d'entre eux de parcourir les principales rues, de Roi^e en criant : Le saint est mort, le saint est
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les splendeurs de l a
foi
mort. Aux cris des enfants se joignent bientt les voix du peuple et de toutes les autres classes de la socit. A peine le bruit s'est-il rpandu que Benot vient de mou rir, que de toutes parts on se met en mouvement, Rome tout entire s'branle. Le peuple se rassemble en foule devant la maison de Zaccharclli ; on demande voir le corps du saint pauvre; on entre de force. Les uns versent des larmes de tendresse et de regret ; les autres publient haute voix les louanges de Benoit ; tous envient son h e u reux sort. Ce spectacle fit tant d'impression sur plusieurs pcheurs qu'ils se convertirent, et commencrent une vie nouvelle de pnitence et de ferveur. A raison des offices de la semaine sainte, on ne put exposer le corps dans l' glise mme ; on le transporta provisoirement dans un oratoire attenant la sacristie. C'est l que pendant quatre jours, la foule ne cessa de venir vnrer le corps du saint p a u v r e ; les personnes de tout ge, de tout sexe, de toute condition s'y rendaient l ' e n v i ; o n y accourait de toutes parts : des prlats et des grands seigneurs ne craignaient pas d'attendre des heures entires que leur tour fut venu de pntrer auprs de ces humbles restes ; les uns se prosternaient ses pieds, d'autres faisaient toucher leurs chapelet au corps du saint pauvre.; ceux-ci lui baisaient les mains, ceux-l l'invoquaient avec ferveur ; tous taient dans l'admiration, en voyant ses pieds, ses mains, ses chairs conserver leur flexibilit, et n'exhaler aucune odeur; il y eut mme plusieurs gurisons obtenues par le simple contact avec ce corps que le Seigneur voulait glorifier. Le dimanche de Pques, jour fix pour l'inhumation, avant de renfermer le corps dans le cercueil, on voulut enlever les vtements du saint, et le revtir d'une tunique blanche ; or,au moment o,pour procder avec plus de fa cilit, on mettait le corps inanim sur son sant, il s'leva une clameur de stupfaction, et le c r i : miracle I miracle t se fit entendre. La main du cadavre avait saisi le banesur 1 cquel il* tait appuy, et s'y tenait vigoureusement ; on cherche dtacher la main, puis on renouvelle l'preuve, et la main soutient de nouveau le poids du corps, par uu effort nerveux. Beaucoup de personnes furent frappes de ce p r o d i g e ; du reste, on tait tmoin d'un autre miracle; depuis cinq jours que durait l'exposition, la souplesse des
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membres tait reste entire, et il ne s'en exhalait aucune mauvaise odeur. Enfin, ces restes prcieux furent renferms dans un double cercueil, transports dans l'intrieur de l'glise de Nolre-Dame-des-Monts, et dposs prs du grand autel, du ct de l'plre. Ou continue d'accourir de toutes partsNolroDame-desMonls : les hommages, les prires, les supplications ne restent point sans rcompense ; on entend continuellement
clakT ces cris confus: Je suis guri, miracle!... Vive le saint pauvre 1... prodige /... miracle I Plus on r e
oit de grce et de faveurs, plus la reconnaissance se m a nifeste, plus le concours s'tend et s'accrot. Un fait non moins remarquable se passait Lorette; c'tait peu prs l'poque du plerinage, annuel de Benot. Les poux Sori chez lesquels il avait coutume de loger, s'entretenaient souvent de sa prochaine venue; et chaque fois, leur petit enfant, nomm Joseph, g seulement de cinq ans, r p
tait ces mots : Benoit ne viendra pat, Benoit se meurt :
Le cur me le dit t Le jeudi-saint, la femme Sori voulut prparer la chambre de Benot, mais Joseph s'y opposait :
Je vous ai dj dit que Benoit ne viendra pas, il est all en Paradis.
Il estimpossiblede raconter tous les miracles oprs de puis la mort du saint; la vue est rendue aux aveugles, l'oue aux sourds, la parole aux muets ; les maladies les plus invtres sont parfaitement guries. El ces miracles ont lieu non-seulement Rome, mais encore dans les d i verses villes de l'Italie, spcialement Notre-Dame de Lo rette; ils se multiplient tous les jours en France, en Espagne, en Suisse, en Allemagne, et dans presque tous les royaumes de l'Europe. Plus de deux cents miracles ont t constats juridique ment, d'innombrables suppliques ont cl envoyes au Sou verain-Pontife pour demander la batification ; mais Rome agit toujours avec une sage lenteur; elle exigea des e n qutes dans tous les lieux qu'avait habits Benoit-Joseph Labre ; la procdure ne fut termine qu'aprs soixante ans. Grgoire XVI alors dclara que le vnrable Benoit Joseph Labre avait pratiqu la vertu dans un degr h roque ; et le grand pape Pie IX lui dcerna les honneurs de la batification. Ce lui le 20 mai 1860 qu'eut lieu dans
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la ville ternelle cetle incomparable solennit. Jamais on ne vit tant de magnificence! Il est vrai qu' Rome, aprs saint Philippe de Nri el saint Louis de Gonzaguc, il n'est pas de saint plus populaire que Benot Labre. C'est dans la basilique de saint Pierre que se fit la c r monie. Quand aprs la lecture du bref pontifical procla mant la batification, le moment fut venu d'abaisser le voile qui recouvrait l'image du bienheureux, et qu'au chant du Te Deum au son de toutes les cloches, aux d tonations majestueuses du fort Saint-Ange, ce pauvre de Jsus-Christ couvert de haillons bnis, apparut bien haut dans une gloire flamboyante, cette immense multitude tomba soudain prosterne devant celui que le roi du ciel voulait glorifier, et des larmes d'motion s'chappaient de tous les yeux, en voyant si bien ralise la promesse du
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sera
exalt.
La pit envers le bienheureux Benoit Joseph Labre, loin de diminuer, ne fit que s'accrotre de jour en jour. Non seulement Rome et Loretle, mais Arras et Ameltes, berceau de son enfance, dans tous les endroits o on lui a lev une statue, partout o l'on vnre ses re liques, on vient en foule se prosterner ses pieds ; des grces innombrables attestent son pouvoir auprs de Dieu et sa charit compatissante pour ceux qui l'invoquent. Aussi Pic IX, voulant tendre son culte encore davantage aprs une nouvelle enqute de la sacr Congrgation des Rites, a-l-il dclar qu'on pouvait procder srement la canonisation du Bienheureux Benot-Joseph L a b r e : Celui, disait le Trs-Saint-Pre, qui pendant qu'il vivait au milieu des hommes, tait pauvre, humble et m p r i sable, le Bienheureux Benoit Joseph Labre, lev,' aprs sa mort, au plus haut des cieux, revtu des splendeurs des saints, couvert d'une couronne incorruptible de gloire, a t plac par le souverain juge des mrites sur un sige d'immortalit. Mais pour qu'il fut exalt d'autant plus sur la terre, qu'il s'tait humili plus bas, le Roi tout-puissant Ta illustr du pouvoir des miracles, faisant connatre ainsi que ce bienheureux personnage, qu'il a voulu honorer devant ses anges, devait tre galement honor devant les hommes. Ce dcret de canonisation avait t rendu le 9 fvrier
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1873; l'Eglise avait dcid que nous pouvions donner le nom de saint celui que l'on avait invoqu jusque l sous le titre de bienheureux. Mais les temps difficiles dans l e s quels nous vivons, et la triste situation faite la ville de Rome ont fait renvoyer au 8 dcembre 1881 les grandes solennits de la canonisation, qui tendront l'Eglise u n i verselle le culte public de saint Benot-Joseph Labre.
dien... Et le bon Dieu voulant rcompenser cet abandon filial lui accorda toujours ce qui lui tait ncessaire. Dieu Amenait mme quelquefois son secours d'une manire inattendue, en sorte que dans notre saint pauvre s'est par faitement ralise cette divine parole : Le Seigneur me
conduit et rien ne me manquera!
Uamnur de Dieu. Le feu de l'amour divin dont son cur tait consum, se manifestait par la pratique conti nuelle de l'oraison qui le ravissait en Dieu. On le voyait, mmo eu compagnie, les yeux baisss et tout son extrieur saintement, profondment, recueilli, marcher sans cesse en la prsence de Dieu, et s'cnlrcteuant constamment avec son Bien-Aim. Embras du feu sacr de l'amour divin, il vi. 3
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supportait les peines, les souffrances, les faLigues, l'indi gence, les humiliations, les injures et les mauvais traite ments, non seulement avec calme, patience et rsignation, mais encore avec une joie admirable 1
Charit pour le prochain. Benoit-Joseph ne se conten
tait pas d'adresser chaque jour Dieu de ferventes prires pour la conversion clos hrtiques et des pcheurs, il sai
sissait encore toutes les occasions de p o r t e r les a u t r e s la v e r t u . Tantt il leur rappelait la gravit d u pch et la n
cessit de faire son salut, tantt il reprenait avec force ceux qui offensaient le Seigneur; tantt il touchait les curs, en parlant de la boul cl de la misricorde de Dieu. Malgr son dnmont extrme, il pratiquait toutes les uvres de charit corporelle ; il consolait les affligs, visitait les ma lades,ensevelissait les morts. On le trouvait toujours prt rendre tous les services qui dpendaient de lui. II porta cette vertu jusqu' ses dernires limites, car non-seulement il pardonnait ceux qui le maltraitaient, mais il leur tmoi gnait la plus grande bienveillance, leur faisait du bien, el
les aidait dans toute la m e s u r e du possible. U avait ainsi
ralis en lui la perfection dos deux grands c o m m a n dements, l'amour de Dieu et l'amour du prochain l La mortification. Il s'tait condamn la pauvret v o lontaire; il n'avait mme pas une pierre pour reposer sa t t e ; il ne possdait que quelques misrables haillons, suffisant pour le couvrir modcslemenl, mais qui ne pou vaient le protger contre l'intemprie des saisons. Il passait une grande partie des nuits en prires el ne s'accordait qu'un court sommeil. Quant sa nourriture, on sait qu'il se contentait presque toujours u a peu de pain tremp
dans l'eau des fosss; quelquefois moine, il n'avait p o u r
se soutenir que des dbris de lgumes; el bien souvent, surtout Je vendredi el les jours de jeune, il ne mangeait qu'une fois dans la journe, vers le soir, selon l'ancienne coutume de l'Eglise, il avail toujours les yeux baisss, et ;ne voyait rien, ne remarquait rien dans ses voyages ; il ne pensait qu' son Dieu avec lequel il semblait converser incessamment. Mme dans les glises, il n'arrtait ses regards que sur les objets qui pouvaient satisfaire sa d -
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votion; il n'y connaissait gure que deux choses : l'autel du Saint-Sacrement et la statue de la Madone. Il ne parait pas avoir us ordinairement d'instruments de pnitence, tels que les ceintures de fer ou les disciplines; mais il avait trouv le moyen de mortifier son corps d'une manire bien plus pnible et plus continue, et l'on peut dire de lui ce qui a t crit de saint Thomas de Gantorbery: Aprs qu'il eut subi la mort du martyre, on trouva son cilice entirement plein et grouillant de vermine, preuve lo quente d'un martyre volontaire, plus cruel peut-tre par sa dure, que le martyre du sang. 11 aurait pu se dbar rasser facilement des innombrables petites bles qui le dvoraient, mais il tait heureux d'offrir ce supplice con tinuel son Dieu, cl l'on ne comprend p a s , qu'il put au milieu de ces souffrances, rester des heures entires immobile,comme il le faisait chaque j o u r !
Dvotion pour la divine Eucharistie. Ds son enfance,,
on le vit adorateur assidu et passionn du Dieu de nos au tels. Dans tous les endroits qu'il traversa, il a laiss le souvenir de son ardent amour pour le Trs-Saint Sacrement. Son assiduit dans les glises o se faisaient les exercices de l'adoration perptuelle, lui avait fait donner le nom du Pauvre des Quarante-Heures. Lorsqu'il adorait Jsus dans son Sacrement, expos la vnration publique, on le voyait souvent fixer son regard vers l'hostie sainte, rester ainsi longtemps immobile, et, dans cette altitude, prouver une telle joie intrieure, qu'elle transpirait au dehors, et se traduisait par un sourire qui tenait plus de l'ange que de l'homme. C'tait surtout dans la sainte communion qu'on voyait se manifester sa tendre dvotion pour le Dieu cach clu tabernacle; il s'y disposait par une fervente confession; il la faisait prcder d'actes multiplis de foi, d'esprance, d'adoration, d'humilit, de respect et d'a mour, et lorsque venait le moment de recevoir son divin Sauveur, il clatait en transports: Mon Souverain bien... Mon tout... seul et unique objet de mon cur. Ah ! venez; je vous dsire, je vous attends... Venez, Seigneur Jsus, venez. Les prtres et les fidles admiraient non sans motion, son air inspir, au moment de la sainte communion. Je voyais, dit Tun d'eux, quand il tait au
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moment de communier, une telle ardeur, un tel entrane ment, qu'il semblait vouloir s'lancer pour recevoir plus tt le pain eucharistique. Je n'ai jamais rien vu, qui sait si je verrai jamais rien de semblable? El. son action de grces... Rien que d'y penser, je me sens mu et a t t e n dri 1
Dvotion la passion du Sauveur. La seule image de
la croix lui occasionnait de saints transports, et l'on a pu dire de notre bienheureux comme de saint Franois d'Assise, qu'il pleurait sur son Bien-Aim, que son m e souffrait vritablement avec lui. Il montait plusieurs fois par semaine la Santa Scala avec une grande dvotion et en versant des larmes abondantes sur les souffrances de Celui qui la gravit un jour, pour paratre devant un juge ddaigneux, et tre prsent la multitude comme l'Homme de douleurs. Il allait aussi frquemment visiter la Sainte Colonnek laquelle le Sauveifr fut attach; il y mditait longuement sur sa cruelle flagellation, et il.offrait au S e i gneur de ferventes rparations pour les iniquits des hommes, vritable cause de ses souffrances. Il avait sur tout une dvotion particulire faire le chemin de la croix; il s'acquittait de ce pieux exercice, presque chaque jour, soit au Golyse dont il aimait la solitude, soit en d'autres endroits ; et il le faisait avec une telle c o m p o n c - , tion, que bien des personnes ne pouvaient dtacher leurs
yeux de ce saint pauvre qui ressemblait sus-Christ portant sa croix! Amour filial pour la trs-sainie tout fait J-
Vierge.
Ds sa p l u s
tendre enfance, Benoit-Joseph Labre avait choisi la Mre de Dieu pour sa patronne spciale, et il avait plac en elle, aprs Dieu, toutes ses affecLions. Dans ses voyages, il portait toujours un chapelet suspendu son cou, comme marque publique de sa dvotion la Mre do Dieu; il r citait chaque jour cette couronne de prires, en mditant sur les mystres du rosaire; il ne manquait jamais de r citer aussi le petit office et les litanies de Lorelle. Il suffi sait de le voir prostern devant la Madone de N . - D . des Monts pour comprendre quels taient les sentiments dont son me tait pntre. Pendant huit ans, il passa presque
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toutes ses matines au pied de cette sainte image, ge noux, immobile, sous l'il de Marie, tout occup d'elle, se consumant d'amour. On ne pouvait le contempler priant sa bonne Mre, sans tre aussi touch qu'difi des transports de sa tendresse. Lorsqu'il se croyait seul, il laissait quel quefois chapper demi-voix ces invocations: Ma Merci Marie I Ma Mre! Et il avait coutume de saluer les per sonnes qui il devait parler, par ces mots : Lous soient Jsus et Marie!
Je le demande tout homme de bonne foi : celte vie incomparable et sans prcdent, ces vertus, hroques dans leur simplicit, ne caractrisent-elles pas au plus haut degr, dans la langue du grand Paul, un de ces insenss sublimes que Dieu choisit pour confondre les plus sages; un de ces faibles surhumains qui ont pour mission de confondre les plus forts; un de ces tres vils et mprisables suivant le monde, un de ces riens tranges, capables de faire rentrer dans le nant les existences les plus fires d'elles-mmes?
ACTES
Principaux de la Batification de saint BenotJoseph Labre (1).
MIRACLE I
GURISON INSTANTANE ET PARFAITE DE MARIE ROSE DE LUGA ATTEINTE DE PHTHISIE PULMONAIRE CONFIRME ( 1 ) . ARTICLE PREMIER
EXPOS D U JUIRACL, PAR LE CARDINAL RAPPORTEUR.
1. Atteinte, dans sa quinzime anne environ, par la rou geole, alors pidmique Mazzano, la jeune Marie-Rose de Luca s'alita au commencement du mois de mars 1783. Elle n'avait jamais souffert d'aucune maladie, moins qu'on ne veuille nommer de ce nom une sorte d'asthme nerveux engendr par un temprament plthorique qui ne lui enlevait rien de sa vigueur, et qui, en aucune manire,
(1) Les actes abrgs des procs de Batification et de Canonisation de saint Benot-Joseph Labre ont t traduils aussi fidlement que possible. Les premiers miracles s o n l d e L783: Les sciences mdicales et chirurgicales se sont depuis cette poque considrablement modi fies dans leurs thories et leurs systmes ; la langue aussi de ces sciences a beaucoup vari. J'ai respect le caractre particulier de la m d e c i n e du dix-septime sicle, j ' a i rendu le mieux possible les e x p r e s s i o n s qui ont vieilli. Kt queiqu'aient pu tre les progrs ac c o m p l i s , je n'hsite pas l'affirmer, aucun mdecin instruit et de b o n n e foi n'hsitera reconnatre que la dmonstration de l'incur a b i l i t de chacune des affections graves subitement guries, est aussi a b s o l u m e n t faite qu'elle pourrait l'tre par les plus minents spcia listes du dix-neuvime sicle. F . M O I G N O .
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ne faisait obstacle au libre exercice de toute son activit. Or, le virus de la maladie exanthmatiquc n'ayant pas fait pleinement ruption, affecta la poitrine, et par son cret produisit une pleuro-pripneumonie qui vient de ce que
le virus de certaines maladies exanthmatiques rpercut, ou ne fait pas librement irruption ou bien est la peau,
comme l'enseigne Sauvage, parlant de la pripneumonie exanthmatique, suivant d'ailleurs, en cela, Sydenham,
dont il le Vcrit sur la pripneumonie aprs rougeole. par rougeole ou
2. Que la premire maladie se ft change en celte autre, on ne saurait en douter, si on tudie, tant la nature de la cause trs-apte engendrer la pripneumonie , que l'ensemble des symptmes qui se produisirent aussitt: savoir une fivre violente et continue, la difficult de res pirer, la toux, la soif, etc. Cette nouvelle maladie mal r solue n'eut pas une plus heureuse issue : et la malade n'en fut dlivre en aucune manire aux jours critiques. C'est pourquoi l'humeur acre, laquelle par la rpercussion des boutons avait produit la pripneumonie, n'ayant t ni rejete, ni expulse, lsa le parenchyme des poumons, dis solvant et dchirant leur tissu organique, convertissant une partie en pus, et engendrant l'abcs ou vomiquequifut l'origine de la phthisie dont nous avons parler. 3. Et il n'y avait pas autre chose attendre; car, d ' a prs l'enseignement d'Hippocrale les pripneumoniques
1
quelconques qui n'ont point t purgs aux jours critiques, mais ont dpass, avec des mouvements dsordonns de Vesprit le quatorzime jour, sont en danger de suppuration (1). Elle (la suppuration) s'indique dans les sept, les neuf, les onze oues quatorze jours (2). Quiconque n'est pas gurie le septime, ou le neuvime ou le dixime jour,
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commence suppurer (2). Or' le mois de mars n'tait pas encore fini que ces choses arrivrent la malade ; c'est ce que nous apprennent les tmoignages que, peu de jours aprs la gurison de la jeune fille, rendirent le mdecin, le chirurgien et l'archiprtre de Mazzano : ils purent alors, dans le souvenir tout rcent des choses, fixer plus facile(1) De Morb. lib. I, n . 23. (2) Ibidem lib. 3, n . 21.
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ment la dtermination des temps que ne rtablirent les tmoins entendus quatorze ans aprs. On y lit : la maladie passa en vomique dans l'espace d'environ vingt jours, compter du dbut de la pri pneumonie, et cet acci dent s'taient ds lors joints dj l'enrouement, la toux, une vacuation de pus par en haut, une petite livre hec tique, une respiration haletante, menaant (parfois) d'in lercepter le souille, la consomption, des sueurs nocturnes, une diarrhe colliquative. Et ces symptmes, partir du commencement d'avril s'accrurent de jour en jour. 4. Donc la fin du mois de mars vil le commencement de la phlhisie. Mais avant de poursuivre cette histoire, il importe de bien examiner ce qu'il faut penser de l'avis du mdecin, quand il affirme que la vomique dgnra en empyme auquel succda la phlhisie. De fait, si le mol empyeme est pris dans le sens plus large o il tait employ par les anciens, il n'y aura nul empchement ce que nous adhrions l'avis du mdecin. En effet, il est certain que le mot cmpijme, autrefois employ avec une signification plus large, dsignait une suppuration quelconque des parties internes du corps, comme on Le peut dmontrer par plusieurs textes d^llppocrate, de Galien et
d'krte (1). Puisque la jeune ration des poumons, comme l'histoire de sa maladie, il ne n'ait souffert d'un empyme Mais, si l'on veut suivant les
fille a t afiectc de suppu le tmoignent la nature et sera point douteux qu'elle pris dans ce dernier sens. modernes dsigner stricte
m e n t par ce mot une collection de pus dans la cavit du thorax en dehors du poumon (2), l'opinion du mdecin
est contredite par l'ensemble des symptmes que nous allons bientt numrer, et desquels ressort la nature vi dente de la phlhisie : on pourrait lui opposer aussi, si Ton s'en rapporte Hippocrate, la brivet du temps qui ne pa rat pas avoir t suffisante la constitution de l'empvme: puisque le mdecin certifie que l'mission du pus, la fin de mars, avait dj lieu. Le vieillard de Cos, sagement a p puy de l'exprience, a crit (3) : Ceux qui devenus pieurtiques ne sont pas purgs en quatorze jours subissent le
{{) Van Swiet. Aphor. 1183. (2) Castelli Lexicon M e d i c Verb. Empyema (3) S c o U Aplior. 8.
il
Si donc aux quatorze jours ncessaires la formation de la suppuration, nous ajoutons au moins vingt jours pour que la vomique ainsi amasse ail pu faire irruption, et se rpandre dans la cavit du thorax, nous aurons excd le mois de mars, et cela d'autant plus que la pripneumonie, chez la malade, ne s'est pas dclare au commence ment de mars, mais suivi la rpercussion de la rougeole dont les dbuts dataient du commencement de ce mois. C'est pourquoi des circonstances principales du miracle nous pensons devoir tout fait carter Petnpyme et r duire tout la phthisie. 5. Revenons l'histoire de la maladie. Ce pus rassem bl dans les poumons ne pouvait pas en fait ne pas c o r rompre le tissu trs-dlicat de ce viscre, et ne pas produire la phthisie. Dj Ilippocrate (2) avait averti que
lessnppurs passent d la phthisie et Grter interprtant sa prdiction (3) a crit : si quelqu'un atteint de pleursie, n'est pas purg dans les quatorze jours, il tombe souvent dans la phthisie. La suppuration que- constatent
chez la jeune fille Je raisonnement mdical non moins que le fait historique signifie donc par elle-mme qu'elle avait d tomber dans la phthisie. Et cela d'autant plus que dj avait prexist une cause propre engendrer la phthisie, savoir la maladie exan thmatique rtrocde;
car la phthisie prend origine des fivres exanthmatiques, surtout des varioles ou des rougeoles rentres, comme aussi des ruptions cutanes chroniques rpercutes, entre lesquelles la phthisie qui suit la rougeole supprime est chez les enfants et frquente et funeste (4).
6. Donc s u r l'existence de la phthisie chez Marie-Rose deLuca il ne saurait y avoir des doutes, quand on consi dre soit l'ruption exanthmatique rentre ou supprime
(1) 2) 3) (4) Prno. lib. i, p . milii 78. lom. 1 oper. Lib. 5 Aphor i 5 . Mcic. Uippoc. lib. r>, Aphor, 9. Sauvages vol., 2 p . 459.
dont elle avait t atteinte au commencement du mois de mars, soit la suppuration qui suivit la pripneumonie non rsolue. Il n'est pas non plus permis de c o n tester que cette phlhisie ait pris naissance la fin de ce mme mois de mars, puisque tous les symptmes de la phthisie s'observaient alors chez la malade, comme nous avons vu. Il ne nous reste clone maintenant, pour confirmer l'existence et la nature de la maladie qu' retrouver les symptmes essentiels que nous venons d'numrer, non plus dans le tmoignage extra-judiciaire (auquel uous avons fait appel pour tablir simplement les vritables poques de la maladie), mais cette fois dans la dposition des tmoins entendus judiciairement. 7. James, d'aprs Clius Aurelianus a donn les symptmes suivants de la phthisie. Elle vient accompagne
une petite fivre hectique qui commence vers le soir, et diminue ci l'aube du jour, d'une toux violente qui vers ce mme temps devient plus forte. Les malades expuent ds le
9
plus
lard notablement. Ils rendent des crachats gluants, livides, verts, purulents... Ils ont la voix rauque et aigu, les joues rouges, le reste du corps de couleur cendre et
livide, la phthisie s'accompagne d'une soif extraordinaire. d'enflure des pieds, etc. Sennert ajoute (1). Le corps
entier est puis et extnu. Souvent mme les phlhi siqaes suent par dbilit de la facult naturelle, qui ne peut retenir les liquides naturels ou excrmentiels... Enfin il survient chez tous une diarrhe par faiblesse retentrice du ventricule et des intestins. A ces symptmes il faut ajouter, surtout au dernier degr de la phthisie, que
tourmente
est tout
8. Voyons donc si la fivre hectique, la toux, l'excr tion purulente, l'enrouement, la pleur de la face avec la rougeur des joues, la soif, l'maciation du corps, l'op pression, les insomnies, les sueurs, les diarrhes se ren contrent chez notre jeune fille.
(1) Medic. pract. lib. 2, part 2. cap. 12.
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1. FIVRE. Le mdecin traitant du passage de la suppu ration la phlhisie dit l'avoir reconnu divers symptmes,
la fivre devenue plus lente, parce que dj la suppuration
ma
dire de la mre de la gurie qu'elle avait la fivre. 2. Teux. Cette mme mre de la gurie dit qu'elle toussait; le soi xante-douzime tmoin qu'elle toussait, et que sa toux
tait sche, ce qui faisait entendre qu'elle venait de lapoi-
irine; le mdecin parmi les symptmes rapporte la toux : Je soixante-quinzime tmoin dit qu'elle toussait, toujours toussait, et n'avait jamais de repos: le tmoin soixanteseizime, elle toussait. 3. EXCRTION PURULENTE. La mre
de la gurie affirme qu'elle crachait des malproprets ; comme des matires gluantes et cuites, qu'elle crachait vilain... elle avait les crachats laids, des crachats purulents, dit le mdecin, et ces crachats devinrent par la suite plus copieux, sanieux et ftides : le tmoin soixante-
dix-septime dit qu'elle faisait des crachats sales et puants : le tmoin soixante-dix-neuvime, qu'elle crachait des matires sales. 4. ENROUEMENT. Ce symptme que les autres tmoins ne rapportent pas parce que dans leur rusticit ils n'y firent peut-tre pas attention, le mdecin l'nonce en constatant explicitement Y enrouement. 9. En outre ce qui frappait les yeux des visiteurs, c'tait : 5. La PLEUR DE LA FACE ET LA COULEUR ROUGE DES
JOUES. Le tmoin soixante et onzime dit qu'elle paraissait
une moribonde;
le tmoin soixante-dix-neuvime
qu'elle
tait devenue uncadavre, et le mdecin qu'une couleur rouge se montrait sur les pommettes des joues. 6. SOIF. La mre de la gurie dit : elle se lamentait toujours de sa grande soif: le tmoin soixante-tlouzime, elle avait une soif telle qu'elle ne se rassasiait jamais de boire, parce que, comme elle disait, elle se sentait en dedans comme brle. 7. MA
CIATION DE TOUT LE CORPS. Le tmoin soixante-dixime :
tait toute consume ; le mdecin, il y avait aussi une grande consomption ; et le tmoin soixanterquinzime, elle
(1) Morton iphtliisiolog. giliis. lib. 2 cap. 2, de tussi perptua, et v i -
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faisait compassion, elle tait rduite la peau et aux os, et ne pouvait plus se lever du lit mme pour qu'on le refit. 8. OPPRESSION. La more de la gurie d i t : elle tait toute oppresse; le tmoin soixante-douzime, elle ne pouvait plus prendre haleine, elle avait la bouche ouverte parce que la poitrine lui faisait Veffet d'un soufflet qui s'lve et affaisse sans souffler; le mdecin signale la difficult de respirer, une trs-grande oppression, du malane d rester tendue, d'o le besoin que la pauvre malade avait de se tenir parfois le tronc dress; le tmoin soixante-quinze, elle avait une oppression telle qu'elle ne pouvait reprendre son souffle; le tmoin soixante-quinzime, elle tait oppresse.
9. INSOMNIES. La mre de la gurie rapporte que la jeune fille passait les nuits sans sommeil : la nuit elle ne pouvait jamais dormir, et le mdecin confirme ce fait en n u m rant avec le reste les insomnies. 10. SUEURS. Le mdecin nonce les sueurs du seul mol habituel sueurs; il avail en outre dj signal ces mmes sueurs en ajoutant : je me
souviens bien qu'il // en avait, mais je ne puis me rappeler si elles taient du genre de celles que nous appelons colli-, qaatives ; cependant la malade tait rduite un tel tat que je crois possible qu'elles fussent telles, quoique, cause du temps coul, yaieperdu le souvenir de ce dtail : le tmoin soixante-quinzime dit qu'elle suait. 1 1 . DIARRHE. Le m
decin a affirm deux fois que la malade eut la diarrhe, et dans le tmoignage rendu, la malade tant peine gurie, il ajoute que cette diarrhe tait colliquative (diarrha colliquativa) : le tmoin soixante-quinzime, elle avait un relchement du corps. 12. Enfin il y avait DME, caria m r e de la gurie a rapport que ses pieds avaient enfl,
et que Venflure tait arrive jusqu' mi-jambcs le tmoin soixante-quinzime, on lui voyait les jambes gonfles.
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10. Donc les symptmes que des mdecins enseignnt tre caractristiques de la phthisie, taient tous runis chez notre jeune fille. Mais comment connatrons-nous si cette phthisie tait confirme ou complte? Sennert
rpond (1) : La phthisie confirme se reconnat aux mmes signes, mais dj plus apparents et prenant encore
(1) Mea. pract. lib 2 part. 2, cap. 12.
de Vaccroissement. En effet, si une personne mme du peuple vient voir un homme blme, dbilit, toussant, battu par la maigreur, il le dclare atteint de vraie phthisie... La phthisie confirme se reconnat avec certitude d l'ulcration des poumons, la fivre lente continue, et, consquemmcntdcela, l'maciation, If extnuation de tout le corps, la respiration difficile, etc. Or que chez
Marie-Rose ces symptmes aient t trs-vidents, et soient parvenus au summum d'accroissement, ce que nous avons rapport le montre assez, car l'ulcre des poumons tait rendu patent par les crachats qui taient devenus de
plus en plas abondants, sanieux et ftides, qui taient sales, puants. La livre tait lente et continue et la toux la tourmentait toujours ; elle toussait, toujours toussait, elle n'avait jamais de repos. L'maciation du corps et la dbi lit des forces taient extrmes, car elle tait rduits d la peau et aux os, elle wcj pouvait plus se lever du lit mme pour qu'on le refit.., elle paraissait moribonde.., elle tait devenue un cadavre. La difficult de respirer enfin en tait venue au point qu'elle ne pouvait pas reprendre son haleine, qu'elle se tenait toujours la bouche ouverte, parce que la poitrine lui faisait l'effet d'un soufflet qui s' ve et s'affaisse sans donner de vent... Il fallait que la pauvre malade se tint le tronc un peu redress pour avoir son soufjle.
tmes signals ne sont pas seuls la caractriser, elle Test aussi par l'inutilit des remdes qui furent depuis suppri ms, par la condition de la maladie qui s'empirait do jour en jour, par l'abandon des mdecins dsesprant de sa gurison, etc. Le mdecin dpose : Je ne me souviens pas de quels remdes on fit usage. Tls furent certainement proportionns au mal. la dernire priode dans l a quelle, comme je l'ai dit, le mal tait tout fait dses pr, on n'administra que des bouillons, des herbes, et des remdes pareds innocents, propres seulement adoucir la violence de la toux, et la force de l'oppres sion, mais non gurir la maladie principale. Si donc on ordonnait quelque mdicament, il tait non pas cu ratif, le caractre et la nature de la maladie ne l'admet taienl pas, mais bien palliatif et lnitif, pour prolonger
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la vie de la malade le plus qu'il se pourrait, et lui rendre moins cruels les accidents morbides. Le tmoin soi xante-quinzime dit : Au commencement ils lui donnaient des drogues de pharmacie, qui furent abandonnes, dans la suite: on ne lui donnait plus que du petit-lait ou du lait, des bouillons d'herbes qui faisaient bien la poitrine; je me souviens qu'on lui donnait manger du pain tremp dans du lait; qu'on continua lui prescrire le pclil lait jusqu' noire dpart de Mazzano; quand le mdecin et le chirurgien disaient qu'on lui donnt du lait, du sirop ou quelques bouillons d'herbes, je me rappelle qu'ils ajoutaient: qu'on lui donne de ceci, qu'on lui donne de cela, peu importe, tant le cas est dsespr! Le tmoin soixante-seizime dit : Au commencement on lui donna des drogues de pharmacie, mais par suite on ne lui en donna plus, parce que le cas tait dsespr. Et la mre de la gurie : Plus tard on lui ordonna des choses rafrachissantes, telles que de la mie de pain dans du lait, ou du lait boire ml avec de l'eau, et je continuai tou jours ainsi. 1 1 . Evidente est donc la cause pour laquelle, dans le cours de la maladie, les mdecins s'abstinrent d'employer des mdicaments. Le mdecin dit en effet: Je n'ai jamais vu chez Marie-Rose une amlioration; elle est toujours alle de mal en pis : c'est la raison pour laquelle, quoique nous la visitions, on pouvait la dire abandonne
parce que Vart n'avait aucun remde ejjicace pour la
gurir. Ce que confirme le tmoin soixante-douzime en disant : Je la trouvais toujours dans un tat p i r e . . , elle allait sans cesse de mal en pis : vous p o u vez comprendre par l que les mdicaments ne lui s e r vaient rien.. 11 est donc certain que les mdecins d sespraient de la malade. Les signes et les symptmes, dit le mdecin, taient mon jugement dcisifs; ils taient aussi jugs tels par le chirurgien du lieu ; d'o il suit que nous avions tous deux perdus enti rement l'esprance de pouvoir rtablir la jeune fille.... <f Sgarzi et moi nous avions donn la maladie pour tout fait incurable. Et le tmoin soixante-douzime : Mon beau-frre le chirurgien donnait toujours pour impos-
LES
MIRACLES
AU
TRIBUNAL
DE
LA
SCIENCE.
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sble que Marie-Rose gurit. Le mdecin ngelucci le disait de son ct : Quand il m'est arriv de les entendre discourir ensemble... ils concluaient que pour Marie Rose il n'y avait plus d'espoir, ils ajoutaient mme qu'elle serait bientt morte. Le tmoin soixante-quinzime : le mdecin Angelucci et Jacques Sgarzi notre c h i r u r gien nous disaient clairement que Marie-Rose tait bel et bien condamne, qu'il n'y avait ni remde, n i e s p < rance, qu'il fallait lui donner les derniers sacrements, ( qu'elle n'avait plus lrc assiste que par des prtres. Et le tmoin soixante-seizime; Tant le susdit Jacques Sgarzi, quele mdecin ngelucci, la donnaient pour belel bien perdue, ils disaient qu'il n'y avait point de remde.
12. Les mdecins ne pouvaient pas avoir d'autre senti ment, car ils savaient que s'il est quelque espoir do salut dans la phlhisie pulmonaire, il ne peut exister que dans le commencement; parce que dans la phlhisie con firme, lagurison est peine admissible ( i ) . Or les symp tmes chaque jour plus graves qion rencontrait chez la malade confirmaient cet aphorisme mdical, et la jeune fille en tait arrive ce que Jes sacrements des mourants dussent lui tre administrs. Le mdecin dit : a Les signes et les symptmes taient, mon jugement, dcisifs*, et ils taient aussi jugs tels par le c h i rurgien du lieu... Pour cela nous fmes d'avis qu'on ne devait plus tarder lui faire adminis trer les sacrements, et la remettre aux soins du mdecin spirituel ; aussi bien fut-elle munie des s a c r e ments jusqu' l'extrme-onction inclusivement; feu M. l'archiprtre Gorneli lui prta son assistance, ayant des raisons de craindre une mort peu loigne. Et le tmoin soixante-quinzime : < On lui donna le viatique, on lui donna l'extrmc-onction ; M. l'archiprtre C o r neli, qui maintenant est mort, l'assistait bien mourir. Il me semble que c'tait vingt jours avant que nous ne vinssions Rome. Le tmoin soixante-seizime : On lui donna tous les sacrements jusqu' l'huile sainte : elle tait entre les mains des p r t r e s ; de moment en moment nous croyions avoir l'ensevelir, et dj nous
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tenions tout prpar; si Ton sonnait la cloche, nous croyions de suite que Marie-Rose tait morte. 1 3 . Donc l'aggravation des symptmes qui dnotait une phthisie trs-avance et confirme, l'abandon des trois mdecins qui avaient dj renonc aux ressources pharmaceutiques, se joignait le jugement ouvertement pro nonc par eux de la mort prochaine del malade: ajoutons enfin la notorit d'un tat de maladie laquelle, l'extrmeonction ayant t donne, la recommandation Dieu tant faite par les prires des agonisants, prsageait une sortie imminente de cette vie. C'est pourquoi, de mme qu'il n'est pas possible de douter de la qualit de la maladie, on ne peut pas rvoquer en doute son extrme gravit. 14. On en tait arriv l, lorsque Dieu qui avait dcrt de rendre la jeune fille saine et sauve par l'intermdiaire ' de Benoit-Joseph Labre, voulut lui inspirer confiance dans le patronage de son saint serviteur. 11 arriva qu'un soldat, Antoine Gavelti, de retour de Rome, parla beau coup de la saintet et del puissance de Benot-Joseph qui venait do mourir, et apportt quelques images de lui. La malade, sa mre et sa cousine touches de la n a r ration du soldat, reprirent tout aussitt l'esprance que cette sant dsespre et perdue serait restitue par ce cleste secours. C'est pourquoi, elles approchrent de la jeune fille une image obtenue de Gavetli, en mmo temps qu'elles priaient du fond de leur cur, que la sant fut rendue la jeune malade, et promettaient par vu, si cela se faisait, qu'elles iraient Rome. 1 5 . Mais ce miracle devait se faire non Mazzano mais la tombe mme du vnrable Joseph. Dieu n'accorda alors aux prires faites que le retour u n peu de forces qui lui permissent de se lever de son lit, et de penser au voyage, quoiqu'il ne ft pas sans danger de mort, dans l'excution. La maladie resta naturellement dans le mme tat, pour fournir au miracle un sujet convenable. Nous crmes, dit la cousine de la gurie, que Benoit-Joseph lui avait donn la force de pouvoir se lever...., en mme temps qu'elle continuait tre trs mal Toute
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l'amlioration consistait en ce que j ' a i dit : pouvoir se lever. Marie-Rose avait toujours la mme oppression, la mme toux, la mme diarrhe; elle rendait les mmes crachats vilains et puants. Le mdecin et le chirurgien ne tenaient nul compte de cette amlioration, et ne donnaient aucun espoir que Marie-Rose pt gurir, ils disaient qu'elle mourrait srement. Et le tmoin soixante-seizime: l'amlioration consistait en ce qu'elle se soulevaitun peu sur son lit,qu'clle pouvait quoique peu se tenir assise, et qu'tant soutenue elle faisait quelques pas dans la maison : mais en ralit elle tait malade de la t( mme manire, et je me souviens que je disais sa mre, elle se meurt, vous n'en tirerez rien car elle est abattue, en consomption et tousseuse autant qu'avant. 16. Et elle resta dans le mme tat jusqu' son dpart qui eut lieu presque la fin de mai. Au dire du t moin soixante-douzime : Quand Marie-Rose arriva Rome elle tait pire, et le chirurgien m'avait dit qu'il craignait qu'elle ne revnt plus Mazzano, mais qu'elle mourt en route. Et la cousine de la gurie : Le Mdecin et le chirurgien... croyaient sur qu'elle ne re viendrait plus Mazzano. Le tmoin soixante-seizime: On voulut la conduire Rome, et cela me paraissait d e voir tre une tmrit parce qu'elle tait plus morte que t( vive, tout le monde disait: ils la mnent mourir Rome ; elle ne nous reviendra plus Mazzano ; je la vis la veille do son dpart; elle tait aussi mal que d'habitude, et-je me dis en m o i - m m e : que Dieu la b nisse t Et le Mdecin : je ne pourrais cette heure ci terminer prcisment le jour o pour la dernire fois je vis Marie-Rose en tat de maladie, d'antre part je puis affirmer avec certitude qu'elle ne fut pas plus de deux jours avant de partir de Mazzano pour Rome, et je me souviens bien qu' celle dernire visite je la retrouvai comme d'habitude oppresse et accable On p o u vait constater une plus grande oppression, une gne rester tendue, qui obligeait la pauvre malade de se tenir de temps en temps le tronc dress* de la rougeur des pommettes...., et finalement des sueurs et la diarrhe.,.. Il y avait aussi une grande consomption, v. 4
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de l'insomnie Les crachats taient de plus en plus copieux, sanieux, et ftides: Tel tait l'tat o je trouvai la malade lorsque je la visitai la dernire fois. 17. Quelqu'un demandera peut-tre : si, au dire du mdecin, la malade tait dans un tel tat, pourquoi donc lui permettait-il le voyagea Rome? Parce que sans doute la situation tait pleinement dsespre. En effet, le m decin lui-mme le dit : A ma dernire visite je la pleurais comme morte, et c'est pourquoi je ne fis point de diffi culte lui accorder la permission de se faire porter Rome, dans la persuasion qu'il n'y avait plus de remde pour elle. Auparavant il avait d i t : En l'absence de confiance dans les secours de l'art, il lui fut accord par nous d'aller Rome, et d'essayer les remdes r e l i gieux, ceux de l'art tant devenus inutiles . Et a u p a ravant : Elle et sa mre ayant dcid le voyagea Rome; elles m'appelrent avec le chirurgien qui fut du mme avis que moi. Le chirurgien en considration de la g r a vit du mal, jugeant imposssible que l malade put s o n g e r a un tel voyage crut devoir le lui dconseiller, bien persuad qu'elle pouvait mourir en route. J'avais la mme persuasion, mais voyant la confiance tant de la mre que de la fille, je dis au chirurgien qu'on pou vait leur accorder tout ce qu'elles voudraient. P o u r nous le cas tait dsespr; il valait tout autant que la jeune fille mourt Rome qu' Mazzano, ou en route, et le fait d'avoir pu mettre en roule une malade aussi avance que l'tait Marie-Rose, fut pour moi un coin ce mencement de Miracle. Tout cela est confirm par la cousine de la gurie. 18. Ainsi la gravit ae la maladie qui avait conduit la jeune fille au seuil du tombeau subsistait tout entire, et restait telle, que le mdecin attribuait un prodige com menant, la possibilit pour une semblable malade d ' e n treprendre le voyage. En route, la jeune fille ne changea pas de manire d'tre. La dbilit de ses forces tait telle qu'elle ne pouvait mme pas se tenir assise sur l'ne. Elle fut mise, dit la mre de la gurie, aussi au milieu que possible, bien en quilibre, sur le petit ne...mais il
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t fallait que quelqu'un de nous la soutnt, Et sa cousine : Nous l'accommodmes au milieu tant que nous pmes, assise sur le petit ne, mais elle ne pouvaUse tenir d'ellc mme et serait tombe. C'est pourquoi toujours quel qu'un lui prtait son appui. Le tmoin soixantedixime: Elle fut mise sur le petit ne, mais elle ne s'y soutenait p a s ; il fallait que quelqu'un de nous lui prtt son appui; et cela ne suffisait pas encore; la pauvre fille demandait tre mise dans un des paniers, mais cela ne pouvait se faire parce qu'il aurait fallu un contre-poids de l'autre ct. Le tmoin soixante-seizime : on parvint avec peine l'asseoir sur un petit ne, en l'aidant et la soutenant. Son oppression tait-elle et s'augmentait tellement par la marche de l'ne, quoiqu'il et une allure trs-douce, qu'il fut ncessaire de dposer souvent la jeune fille terre, de crainte que le souffle ne lt pleinement inter cept. Elle avait un grand loufiement, dit le t moin soixante-dixime. Et le tmoin soixante-douzime. chaque instant il lallail s'arrter...., pour la descendre de dessus l'ne et la faire asseoir terre, afin d e l reposer, pour calmer ce grand louffement qui P o p p r e s < sait, et qui s'accroissait par la marche : Et la c o u c sine de la gurie : chaque instant il fallait s'arrter parce que la pauvre fille, quoique Tne allt doucement, aprs quelques pas se trouvait plus touffe : il fallait qu'elle prt un peu haleine,, et souvent mme, on dut l'enlever et l'asseoir terre. 19. Combien intense tait celte difficult de respirer, on peut l'arguer non-seulement des dpositions des t moins, mais encore de la longueur du temps que dura le voyage. Car cause de l'oppression, on avanait si l e n t e ment, et l'on dut s'arrler si souvent que treize heures furent employes faire les vingL-cinq milles qui s parent Mazzano de Rome. De Mazzano Rome, dit la -mme personne, il y a vingt-cinq milles ; les jours alors commenaient de bonne heure ; nous partmes huit heures en plein jour et arrivmes Rome neuf heures-dusoir.La soif tourmentait beaucoup la malade, au rapport de sa mre. A tout moment il fallait lui
donner boire, parce qu'elle se plaignait sans cesse d'une grande soif. Le tmoin soixante-douzime dit: A chaque instant, il fallait s'arrter, pour lui d o n n e r a boire, parce qu'elle se sentait brler, elle aurait voulu boire tout moment. La cousine de la gurie : Elle disait qu'elle se sentait brler l'intrieur, et il fallait chaque instant lui donner un peu boire pour teindre la soif qui la torturait; sa bouche tait sche et elle se sentait bride d'uu feu intrieur. Le tmoin soixantedixime : toujours elle demandait boire, parce que la pauvrette tait brle en dedans, et vous pouvez vous imaginer quelle soif elle a d avoir. Les autres symptmes ne manquaient pas, car, la mre dpose que, " pour obir la foi de sa fille, elle l'avait conduite Rome, que la pauvre enfant tait dans le plus mauvais tal, touffe,toussant,crachanl bien vilain .Le tmoinsoixanledixime : la pauvrette tait tout fait en consomption, elle toussait son tat s'empirait, elle ne pouvait prendre son souffle, elle avait de l a t o u x , tait maigre, d'une vilaine couleur, et paraissait une morte. Le t moin soixante-douzime: La pauvre fille tait dans un trs-mauvais tat. Le tmoin soixante-seizime : Je l'accompagnai jusqu'au pont vraiment il me s o m blait voir une morte, tant Marie-Rose tait extnue. 20. C'est dans cet tat que la jeune fille, par la faveur de Dieu, arriva enfin Rome, o elle coucha chez le soldat Antoine Gavclli : il ne fallait donc pas s'attendre ce qu'elle passt une meilleure nuit. Celle nuit la pauvre malade se trouva bien mal comme d'habitude, dit sa mre, elle ne dormit pas et ne me laissa pas dormir. A te chaque instant il fallait lui d o n n e r a boire ; cause de rtouffemenl, elle ne pouvait se tenir couche, il fallait la tenir souleve et assise sur le lit. Le tmoin soixantedixime : cette nuit elle ne fit que se lamenter, et je Je sais parce que j'tais dans la mme chambre. Le t moin soixante-duuzime : * telles furent les plaintes de la pauvre fille tout endolorie et touffe, que je n'ai pu dormir le cur me fendait, et cela me faisait plus de peine que de ne pas pouvoir dormir.
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21. Enfin le jour se leva, et celles qui taient venues implorer le secours divin pensrent qu'il fallait auparavant purifier leur me par les sacrements, afin de se rendre Dieu favorable ; la malade fit exception, car elle ne pouvait tre jeun, et elle avait souvent bu la nuit, elle s'abs tint donc de la communion. Tous de la place Margana o ils avaient couch, ils se rendirent l'glise voisine de Sainte-Marie in ra-Cli et de l l'glise de SainteMarie ad Montes, o lesTcsles du vnrable Benoit-Joseph sont conservs. La jcuile fille cependant ne pouvait pas avancer seule..., je la soutenais d'un ct, dit la mre, et Laure Rosa, sa cousine, de l'autre. De l'glise de l'ra-Coeli, nous allmes celle de la Madone des Monts, pour visiter le tombeau de Benot-Joseph, et nous t r a i te nmes la jeune fille cle la mme manire, en la soutenant de chaque ct. Nous entrmes dans l'glise, o il y avait une grande foule d p e u p l e . . . . Dans cette foule, l'touffement augmenta tellement que je ne pus plus la faire avancer, il me fallut la porter hors de l'glise. Je la fis asseoir sur les escaliers, et afin, de lui humecter un peu la bouche, je lui donnai quelques cerises. Le tmoin soixante-dixime: Par la rue, je conduisais grand'peine la pauvre enfant, parce qu'elle ne pouvait pas' se tenir, et qu'il fallait lui donner un appui... A cause de sa faiblesse et de son louffemenl, il fallait chaque instant s'arrter, cl lui laisser reprendre haleine. Le tmoin soixante-douzime : Marie-Rose put grand' peine se transporter, toujours appuye et soutenue par deux personnes, l'une d'un ct, l'autre de l'autre ; en te core fallait-il s'arrter pour la faire reposer. La cou sine de la gurie : Marie-Rose ne pouvait marcher seule, il fallut que nous la tranions en quelque sorte, sa mre et moi, l'une d'un ct, l'autre de l'autre.
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22. Au tombeau du vnrable serviteur de Dieu, la jeunefille parut recouvrer un peu de forces, la maladie cepen dant restant dans le mme tat. En effet, au rapport de sa mre : Dans la nuit qui suivit la premire et la seconde visite.... elle se trouva aussi mal que d'habitude, touffe, ayant de vilains crachais, de la soif, ne pouvant dormir, ne se tenant pas couche, mais la tte et le tronc un peu
soulevs. Le tmoin soixante-douzime : Marie Rose continuait tre mal... le soir quand je revins elle tait au lit et touffe... La cousine : Nous la reportmes la maison comme auparavant. La mme chose arrive le jour suivant, d'aprs l'assertion du mme tmoin : Dans toutes ces visites, tant h l'aller qu'au retour, il fallut traner et soutenir h deux Marre-Rose. La mre affirme que sa Qlle resta toul le second jour dans le mme tat de maladie : Elle continua tre trs mal, et cet tat dura toute la journe. 2 3 . Mais la splendeur du prodige allait tre accrue par l'aggravation qui se produisit la troisime nuit. Baglivius (1) enseigne que, dans la phthisie si une douleur de
ct violente survient tout coup, le malade entre bientt en dlire, une grande fivre s'allume, et peu de jours aprs
il meurt. Or, ce trs funeste symptme apparut chez la malade, d'aprs la dposition de sa cousine . La nuit suivante elle fut pire que jamais, car h une certaine heure elle se mit crier, et dire qu'elle se sentait une trs vive douleur la poitrine. Ce que confirme la mre : peine m'tais-je leve, que ma fille m'appela en criant et me priant de mettre ma main sur sa p o i truie, parce qu'elle y sentait une trs grande douleur. Le tmoin soixante-dixime : Peu aprs que nous fmes au lit, Marie-Rose poussa un cri et dit sa mre de la so ft courir, car elle sentait une grande douleur la poitrine. Voil o en taient les choses quand l'approche d'une image de Benot-Joseph, toute la malignit de la maladie, abattue du coup, fit place au sommeil, comme nous le ver rons tout l'heure.
ARTICLE DEUXIME
DU MIRACLE E T DE ^INVOCATION.
24. Que la malade et ses parents aient mis toute leur confiance dans le seul vnrable Benot-Joseph et qu'ils aient particulirement implor son patronage, l'histoire mme du fait le prouve assez. Car lorsque le soldat G a l. Prax. Med. lib. II, cap. v i n , 3.
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vetti eut fait connatre Mazzano les vertus et les prodiges de cet homme vnrable, et y eut apport ses images, la fille et la mre prirent une grande confiance e n B e n o t Joseph, et se recommandrent lui de tout leur cur, dit le tmoin soixante-seizime. La cousine dpose : Quand nous connmes cela, nous reprmes s u b i t c ment courage, et nous pensmes que ce saint bni aurait le pouvoir de faire un miracle pour Marie-Rose. La malade, sa mre, moj/et les autres, nous conmes cette esprance; nous nous fimes donner par Gavetti une des images qu'il avait, et l'appliqumes avec ferce veur la malade en la lui recommandant poui: qu'il la gurt. Et si nous la recommandions avec ferveur, la pauvre enfant avait plus de ferveur encore. Bien plus, sa confiance alla jusqu' demander, bien qu'elle ft dans les dernires luttes de la mort, d'tre conduite Rome au tombeau du vnrable Benoit-Joseph, ainsi que le dit sa mre : Ma pauvre fille voulait aller Rome, et je lui disais : Ma fille, je t'y conduirai, mais attends d'tre mieux, autrement, comment veux-tu que nous t'y p o r ti tions. C'tait impossible: mais elle s'obstinait dire qu'elle voulait aller Rome. Je faisais toujours les mmes difficults, Marie-Rose me rpondait qu'elle se ferait mettre dans un des paniers du voiturier Antoine Gavetti. Tant de confiance leva tous les obstacles et flchit enfin la mre : Envoyant, poursuit celle-ci, qu'elle avait tant de foi, je voulus la satisfaire, et bien que la pauvre fille ft si mal... sur la fin de mai, je me rsolus la transporter Rome. 28. Or Rome nous avons dj dit qu'elle visita plus d'une fois le spulcre du vnrable Benoit: et que la pauvre * fille se recommanda avec grande ferveur au saint, dit la mre"; le tmoin soixante-douzime dit aussi : Dans Tglise de Notro-Datne des Monts nous nous rccomman dames tous Benot-Joseph; ma femme et Marie-Rose, oui taient malades, se recommandrent avec plus de ferveur que les autres. Du spulcre, la vrit, la malade revint dans le mme tat de maladie, quoique un peu plus forte, mais pour cela ni sa mre ni elle ne p e r dirent leur confiance, qui parut mme augmenter en elles,
car la troisime nuit, quand la jeune fille se trouva pis, et que saisie tout coup d'une vive douleur la poitrine, elle se plaignait et demandait sa mre de mettre sa main l : <ru lieu, dit la mre, de mettre ma main, voici ce que je fis : Il y avait une image de Benot-Joseph la tte du lit, je la pris et la mis sur l'endroit o la jeune fille di sait sentir cette grande douleur, en disant : prends ceci, et ma fille, recommande-toi lui, Benoit-Joseph peut seul le secourir. La cousine confirme ce fait ainsi: Dans cette extrmit, la mre prit l'image de Benoit-Joseph. l'appliqua sur la poitrine de sa fille, et lui dit de se rappeler qu'elle pouvait tre gurie par lui.
ARTICLE TROISIME
DE L'AUTBE EXTHME DU MIRACLE, OU DE LA GURISON PRODIGIEUSE,
INSTANTANE,
PARFAITE ET
DFINITIVE.
26. Tant de loi ne devait pas tre sans effet. A r a p proche de l'image du vn. Benot, toute la malignit de la maladie s'vanouit sur-le-champ, et celle qui la p r e ci mre nuit n'avait pu dormir, toujours touffe, se p l a i gnant toujours, ayant besoin toujours de boire... une fois l'image applique, repose, prend sommeil, et toute la nuit dort tranquille, dit la mre. L'image applique, dit la cousine, la jeune fille s'endort... le reste d e l nuit elle ne sent plus rien et dort profondment : elle s'veille le matin, et, toute joyeuse, s'crie qu'elle est guricqu'elle n'a plus rien...Le tmoin soixante-dixime: aprs l'application de l'image, nous n'avons plus rien entendu, la jeune fille ne se plaignit plus.son rveil l e malin,elle dit qu'elle se trouve bien et qu'elle eslgurio. 27. Les faits montrrent donc que la gurison instantane de la jeune fille tait absolument parfaite. En effet, celle qu'il fallait, pour la lever de son lit, habiller de la tte aux pieds, et, une fois habille, faire asseoir, parce qu'elle n'avait pas la force de se mouvoir et de marcher, ce matin-l, s'habilla seule et se mit marcher, plus l e s tement que moi, dit la m r e . . , . Nous retournmes l'Eglise de la Madone-des-Monts pour remercier notre
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bienfaiteur, le long clu chemin non seulement la jeune fille n'eut pas besoin d'tre soutenue, mais s'chappait pour nous devancer; elle ft de mme encore dans l'Eglise de la Madono-des-Monts, passant au milieu de la grande foule accourue pour vnrer le spulcre du vn. serviteur de Dieu. Le tmoin soixante-dixime dans sa dposition rapporte les mmes faits: ^Elle se leva, s'habilla et nous allmes tous la Madone-des-Monts pour remercier Benol-ifoseph ; la jeune fille marchait seule; elle n'avait pas besoin de soutien, elle marchait plus lestement que moi ; elle n'avait plus touss; elle n'tait plus touffe: il semblait qu'elle n'et jamais t malade; elle tait joyeuse, son esprit vif. Avant elle ne < pouvait pas manger, alors elle mangea bien et avec r apptit. Le tmoin soixante-douzime confirme ce fait, et le rapport de la cousine est identique: Elle s'ha billa seule, n'avait plus d'Loutfcment, plus de toux, ne se plaignait d'aucune douleur, avait repris ses forces^ ses couleurs ; en somme , il semblait qu'elle n'et jamais t malade, elle dit qu'elle avait grand'faim et mangea avec bon apptit de ce qu'il y avait. Nous allmes tous ensemble remercier Benot Joseph : quand nous fmes pour sortir de Tglise la mre et moi nous voulions-Ja soutenir, comme nous avions fait d'abord, mais elle nous dit qu'elle ne voulait pas tre soutenue, qu'elle n'en avait pas besoin, qu'elle tait gurie: et de ' fait elle marcha plus leste cl plus agile que nous, tou jours en avant de nous; nous ne pouvions pas la suivre, comme dans la rue elle nous disait qu'elle avait encore faim, nous lui achetmes des cerises et des petits pois. 28. Mais la preuve d'une gurison parfaite apparut plus vidente encore dans le voyage qu'elle fit, le mme jour. Aprs avoir remerci le serviteur de Dieu, dit la mre, nous nous remmes en route et nous retournmes la maison; la jeune fille monta seule sur le petit n e ; je voulais l'aider, mais elle ne le voulut pas et me dit: Mamanjesuis gurie, je serai seule, je n'ai plus besoin de rien : il ne fut pas ncessaire par la route de la soutenir, ni de lui donner boire parce que, parfaitement gurie, elle tait rentre dans toute sa force. La cousine dit:
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Le mme jour nous retournmes Mazzano, et en route la jeune fille non seulement n'eut besoin de personne pour la tenir ou la maintenir sur le petit ne, mais en outre elle ne voulait plus le monter, et tenait s'en aller pied : Hors la porte Angelica elle fit presque deux milles pied, plus leste et plus agile que nous. En route elle n'eut besoin de rien, et ne donna pas signe de sa maladie passe: au contraire, elle n'aurait volontiers pas fait autre chose que de manger parce qu'elle disait avoir faim : et quand nous nous reposmes a la Storta,elle fit un bon repas avec un apptit qui faisait envie tous. 29. Ces faits prouvent non seulement que le miracle fut parfait, mais qu'il fut rendu plus clatant encore par le rtablissement des forces et des couleurs. En effet toute la force du miracle consiste dans ce fait que, tout coup, la malignit de la maladie est limine : s'il en est ainsi, le miracle est parfait, bien que la pleur, l'maciation, la dbilit des forces puissent persister. Or, celle qui ne paraissait pas avoir t malade, qui tait gaie et vive, qui marchait de telle.sorte qu'on ne pouvait la suivre, qui ne
voulait plus monter son ne, qui voulait aller pied ; qui, hors la porte Angelica, fit presque deux milles pied, leste
et agile, offrait certes, outre la perfection de la gurison, d'clatantes additions. Et en effet l'arrive Mazzano... il se fit u n rassemblement autour d'elle tous demeu rrent merveills, dit la mero . Tous ceux qui la virent demeurrent stupfaits , dit le tmoin soixantedouzime; et la cousine : Arrivs Mazzano, tout le monde se montra joyeux, et l'on disait: Est-ce Marie-Rose? Il semble que ce n'est plus elle, comment avez-vous fait?.... Et tous confessaient qu'un autre qu'un saint n'aurait pu gurir Marie-Rose, et la gurir de telle sorte, qu'elle avait recouvr ses forces, ses couleurs, qu'elle avait mme de l'embonpoint... Le tmoin soixante seizime : Quand nous la vmes, nous restmes stup faits: elle marchait libre et agile, avait de la force, de belles couleurs au visage; il semblait qu'elle n'avait jamais t malade: et remarquez qu'elle marchait non sur une route plane, mais sur une cte rapide... Elle tait comme avant qu'elle ft malade....
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30. Ce sentiment d'admiration ne se manifesta pas seu lement chez de grossiers villageois; le chirurgien, l'archiprtre, le vicaire et les autres montrrent la mme joie comme le dclare la cousine. coutons le mdecin: J'allai le dimanche Mazzano, o son tour elle tait arrive la veille. La jeune fille se trouvait alors avec les autres l'Eglise paroissiale... je la fis appeler... A sa premire vue je ne pus m'empcher de sentir une certaine com motion intrieure, en remarquant un changement aussi total et aussi parfait. La seule attitude extrieure de la malade tait pour moi une raison plus que suffisante pour confesser le miracle. Cependant je voulus... m'as surer davantage qu'il ne subsistait aucun reste, aucui vestige, qui pt passer pour des reliquats des incommo dites passes, et je trouvai que rellement il n'y en avait aucun..; elle avait la respiration libre et naturelle, sans toux d'aucune sorte, sans aucun signe ni marque du mal vanoui. Je vis que pour venir de l'Eglise moi elle avait descendu expditivement et vivement les quelques degrs du perron; je lui vis de bonnes couleurs naturelles, cette vivacit qui indique la sant; je voulus tter le pouls, et non seulement je ne trouvai aucune apparence de fivre, mais tes pulsations taient rede venues gal'es et rgulires... J'admirai l'uvre de Dieu, et je me dis qu'elle avait t le sujet d'un beau miracle... a M. Sgarzi chirurgien tient le mme langage, et tous tant que nous tions nous ne pouvions songera nier un miracle aussi clair et aussi vident. Mais non seule ment le retour instantan des forces, les couleurs, l'allgre vivacit de tout le corps, qui excitrent l'admiration de tous accrurent l'clat du miracle; mais encore il s'y joi gnit la gurison de l'asthme convulsif dont la jeune fille souffrait avant sa maladie. Aprs le prodige, en effet, affirme le mdecin, elle fut: de plus dlivre de cet asthme convulsif qui la fatiguait habituellement avant qu'elle ne tombt malade. 31. Cette cure fut non-seulement instantane, non-seu lement trs-parfaite, et trs-clatante parles circonstances qui l'accompagnrent, mais la persistance de la sant confirma pleinement le jugement rendu par tous sur ce
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Irs-vident miracle. Le'Mdecin dit en effet: La gurison fut aussi persistante, la malade n'tant plus retombe en tal de maladie au moins aussi longtemps qu'e j'eus le service de Campagnano,c'est--dire jusqu' l'anne mille sept cent nouante-cinq, ou deux ans aprs la gurison. Je vis plus d'une fois la jeune fille et toujours dans le < mme tal de parfaite sant. La mre de la gurie dit: (
Elle se porta ensuite toujours bien. Quelques annes aprs, elle pouvait avoir alors u n e vingtaine d'annes,elle
prit mari, puis mourut dans son second accouchement : Tout le temps qu'elle fut marie, elle se porta t r s bien, et ne souffrit jamais plus d'aucune des incommo dites dont elle avait souffert dans sa maladie. Le mari de la gurie dit: Elle fut toujours bien depuis; j e l e sais, parce que trois ou quatre ans aprs je la pris pour femme, et elle m'a t conserve quatre a n s : elle a eu deux accouchements, et n'a jamais t malade; quand elle est morte, elle est morte des suites deses couches. E t la cousine: Elle se remit de suite faire ce qu'elle avait
faire dans la maison ou aux c h a m p s , en r a p p o r t avec < son age, comme si elle n'eut jamais t m a l a d e : P a r c
la suite elle se porta toujours bien, et n'a jamais eu aucune maladie: aprs son mariage, elle eut deux filles, et mourut dans son second accouchement. 32. Et, dans ce fait tonnant, il ne peut tre question de souponner une crise favorable, soit qu'on considre la nature de la maladie, soit qu'on coute les rapports des tmoins; puisque le pus si abondant et si repoussant que la force de la toux rejetait hors des poumons prouvait que leur tissu tait corrompu, ramolli et consum; on ne
pouvait songer aucune vacuation bienfaisante, qui put
reconstituer et gurir le parenchyme dcompos de ces viscres en restituant les lobes dtruits.En outre la cousine de la gurie qui couchait avec la malade dans le mme lit, interroge d'office : si avant la gurison ou dans la nuit qu'elle se fit, ou aprs, Marie-Rose avait eu quelque mission de sueurs ou liquide, par la bouche ou par quelque partie du corps, rpondit explicitement qu'il n'y avait jamais rien eu de cela. Et de plus, pour qu'on ne sup pose pas quelque bienfait de l'arrive des menstrues, le
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mdecin d i t : * La jeune fille n'avait pas encore eu ses rgles quand elle tomba malade; elle ne les eut ni pendant,la maladie ni la suite elle ne les avait pas encore lors de mon attestation qui date de quelques mois aprs la cure (elle fut donne au mois de juillet) et tout autant que la mmoire puisse me le rappeler, elle fut au moins sept ou huit mois avant cle les avoir. La mre ajoute son tour : Et quant aux rgles des femmes, la jeune fille ne les avait pas encore. Elle les eut aprs sa gurison, et quelque temps aprs: mais je n'ai pas ' tenu compte du temps prcis. Ainsi donc tout soupon de crise tant cart, il n'est pas permis de douter de ce trs-clatant miracle.
ARTICLE SECOND.
DPOSITIONS DES TJIOINS SUK LE r HE MER MIflCLE.
Francoise
de
1 interrogatoire. Oni, Monsieur, j'ai connaissance d u beau miracle q u e Benot-Joseph a fait . Marie-Rose, ma fille, qui alors tait enfant, et qui s'tant marie depuis, est morte maintenant. Je suis une ignorante, et c o m m e n t voulez-vous que j e vous dise si la chose est u n miracle o u si elle n'en st pas un? Je comprends, mais j e ne puis pas m'expliquer. Oui, ce fut u n beau miracle qui arriva Marie-ltose, parce qu'on peut dire qu'elle tait morte eL q u e subitement, elle se trouva gurie. Je vous dirai c o m m e n t la chose arriva, malgr que j e sache: peu parler et encore moins m'expliquer. Cette jeune fille pouvait avoir quatorze ou quinze ans, dans l'anne o l'on dcouvrit la saintet de ce bon serviteur de Dieu. Elle tomba malade de la maladie qu'on appelle l a rougeole, c'tait dans le mois de mars : on tait alors s o u s l'inlluence de la rougeole. Mais cette rougeole ne se passa pas bien ; l'enfant alla de mal en pis, et, au contraire, il fut ncessaire d'appeler le mdecin et le chirurgien. Je me souviens que celui-ci tait le seigneur Jacques Sgarzi qui est mort maintenant. P o u r le mdecin, j e n e m e rappelle pas si c'tait Angelucci o u quelqu'autrc ; mais il m e semble que c'tait plutt A n g e lucci. Je n e peux vous dire ce q u e c'tait que le mal;
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j e vous dirai seulement quf la pauvre pelite restait toujours au lit, qu'elle tait fort agite, avec une loux et une fivre violentes : le mdecin et le chirurgien disaient qu'il n'y avait point de remde, et m e l'avaient d o n n e pour morte. Ceci est si vrai,qu'on lui administra les derniers S a c r e m e n t s , l e viatique et l'huile sainte. Si vous m e demandez quand ils lui furent administrs, je vous rponds que j e n e m e rappelle pas tant de choses ; je ne savais pas qu'un m i racle dt s e f a i r e , a u t r e m e n t j e l ' a u r a i s r e m a r q u ; il m e s e m b l e q u ' i l s l u i f u r e n t d o n n s d a n s le m o i s d e m a r s ; et ce fut Monsieur l'archiprtre Corneli qui les lui d o n n a ; celui-ci aussi est m o r t ; s'il tait vivant, il saurait bien, lui, vous expliquer la chose m i e u x que moi. Les susdits m d e c i n et chirurgien venaient toujours la v o i r ; mais ils disaient qu'il n'y avait point de r e m d e , e t que l petite fille mourrait bientt. Elle fut dans cet tat pendant deux mois, u n peu plus, un peu m o i n s ; j e ne m e rappelle pas b i e n les jours, mais je vous dis deux m o i s , parce que la j e u n e fille gurit aprs ce t e m p s , c'est--dire environ vers la fin du mois de mai. J'ai oubli ,de vous dire que les gens di saient que la petite fille tait phthisique o u deviendrait phthis i q u e ; le chirurgien le d i s a i t a u s s i ; si le m d e c i n l e d i s a i t g a l e m e n t , je n e m ' e n s o u v i e n s p a s . L a p a u v r e p e l i t e r e n d a i t souvent des crachats pais c o m m e des matires confites e t cuites. Si vous m e demandez si c e s matires sentaient m a u vais, j e vous rponds que j e n e l'ai pas remarqu. V o u s voulez savoir maintenant c o m m e n t gurit Marie-Rose, j e vais v o u s le dire du mieux que je pourrai. Il arriva que le bruit se rpandit, dans Mazzano, q u ' R o m e on avait dcouvert un saint qui tait un pauvre h o m m e appel Benot-Joseph,et qui faisait de grands miracles. Ma pauvre fille se mit dans l a t t e d'aller H o m e et je lui dis : je l'y conduirai, ma fille, m a i s auparavant attends que tu ailles un peu m i e u x , a u t r e m e n t , c o m m e n t veux-tu que je fasse pour t'y transporter d ' i c i ? Cela t a i t vraiment impossible, mais elle s'obstinait et continuait d i r e q u ' e l l e v o u l a i t a l l e r R o m e , el c o m m e j e reptais les m m e s difficults, Marie-Rose m e rpondait qu'elle se ferait mettre dans un des paniers du voiturier A n toine Gavetti, aujourd'hui m o r t . E n voyant q u e l l e avait une si grande confiance, j e voulus la contenter, et, quoique la pauvre petite ft si malade, si agite, e n dpit de sa loux e l de ses crachats frquents et pais, j e m e dcidai la transporter R o m e . Mais quelle peine pour l'y porter I On la m i t d u m i e u x qu'on put sur un n e , parce q u e d ' e l l e - m m e elle n e pouvait monter ; mais il iailait que quelqu'un de
nous la maintnt, et, chaque instant, il fallait lui donner boire, parce qu'elle se plaignait toujours d'une grande soif. Avec nous vinrent Hlne Marini, c e l l e vieille qui a prl serment avec m o i , et ma nice Laure ; j e ne me rappelle pas si la Cnsata et Joseph Mancineili l a i e n t a v e c nous. Mon mari ne vint pas avec nous parecque j'tais veuve. Nous allmes loger dans le quartier des Campitelli, dans la maison d'Antoine CLavetti, et, pendant cette nuit, la pauvre petiie alla mal c o m m e h l'ordinahe. Avant de vous dire comment elle gurit, j e veux encore vous rpter ce qu'on disait Mazzano ; c'est que la pauvre petite avait les p o u mons consums, qu'il n'en restait que trs peu, et qu'elle mourrait aussitt qu'ils finiraient de se consumer. Les gens me rptaient cela pour l'avoir enlendu dire p a r l e chirurgien le seigneur S g a r z i ; mais le seigneur Sgarzi n e me le disait pas moi-mme, parce qu'il ne voulait pas m'attrister. Cette nuit donc JViarie-Itose alla mal c o m m e l'or dinaire, elle ne dormit pas, et ne m e laissa pas dormir ; chaque instant il fallait lui donner \ boire ; elle ne pouvait rester couche cause de son oppression, il fallait la tenir souleve et assise sur son lit. Le matin, n o u s n o u s le vmes et nous allmes l'glise d'Ara-Cli, o nous fmes nos dvotions ; Marie-Rose ne les lit pas, parce qu'elle avait bu pendant la nuit, et qu'elle ne pouvait rester un instant saris boire. Elle ne pouvait pas marcher seule, et nous dtsjes la porter bras ; j e la soutenais d u n ct, et Laure Rosa sa cousine la soutenait de l'autre. De l'glise d'Ara-Gli n o u s allmes celle de la Madone desMonls pour visiter le tombeau de Benot-Joseph, et nous y tranmes la pauvre, fille de la m m e manire, en la soutenant de chaque ct. Nous entrmes dans l'glise o il y avait une grande foule de peuple. Nous arrivmes grand'peine au tombeau du serviteur de Dieu ; n o u s n o u s recommandmes lui, et la pauvre iille s'y Eecommanda avec une grande ferveur; mais l'oppression s'accrut si fort cause de cette foule qu'elle ne pouvait plus rester et nous dmes la porter hors de l'glise. Je la lis asseoir sur les degrs, et, afin qu'elle s'humectt un peu la bouche, je lui donnai quelques cerises, quelques petits pois verts, (juand elle se lut repose et rafrachie, j e la reconduisis dans l'glise; elle lit sa prire et ensuite n o u s sortmes : quoiqu'elle continut aller mal, il me paraissait pourtaut qu'elle tait moins oppresse qu'aupara\ant, et qu'elle avait moins besoin d'tre soutenue. Ainsi se passa toute cette journe. Le hoir nous n o u s mmes a u lit ; mais peine lai&-je couche, que la petite m'appelle
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avec un grand cri, et m e dit de lui mettre la m a i n sur la poitrine, parce qu'elle y sentait une trs grande d o u leur ; je m'pouvantai, croyant qu'elle allait mourir ; au lieu de mettre la main sur sa poitrine, voici ce q u e j e fis : il y avait la tte du lit une i m a g e de Benot-Jo seph, j e la pris et j e la mis la place o la petite disait qu'elle sentait ceLle grande douleur, en lui disant : ma fille ! recommande-toi Benot-Joseph, il peut aider, pour m o i que veux-tu que je te i'asse? L'image peine applique, la petite se c a l m a ; moi je m e couchai, j e pris sommeil et je dormis tranquille. P e n d a n t toute la nuit, elle ne me de m a n d a pas boire et je ne l'entendis pas se plaindre. Au matin elle s'veille en disant qu'elle est gurie; puis elle s'ha bille e l l e - m m e librement, facilement, c o m m e si jamais elle n'avait eu aucun mal. T o u t e s ces choses sont arrives par miracle, puisque auparavant : elle ne pouvait jamais dormir la nuit, elle tait toujours suffoque, elle se plaignait t o u j o u r s , elle avait toujours besoin de boire, elle ne se reposait pas, et moi j e ne reposais pas n o n plus. Quand on la levait du lit, il fallait rhabiller de la tte aux pieds, et q u a n d elle tait vtue, il fallait l'asseoir, parce qu'elle n'avait pas la force de se mouvoir et de marcher. Mais ce matin-l, elle s'habilla toute seule et se mit marcher, plus leste que m o i . Nous l m e s toutes h e u r e u s e s ; et c o m m e n t v o u l e z - v o u s que n o u s ne fussions pas heureuses maintenant aprs l'avoir vue si mal,lorsque nous la voyions belle et gurie, c o m m e si jamais elle n'avait t malade ! Ce m m e jour n o u s retournmes l'glise de la madone des Monts, pour remercier notre bien faiteur; pendant la route, n o n seulement la petite n'eut pas besoin d'tre soutenue, mais elle marcha devant n o u s , et elle ft de m m e encore dans Tglise de la m a d o n e des Monts, passant au milieu de la grande foule assemble, pour aller au tombeau du vnrable serviteur de Dieu, et le re mercier du miracle qu'il lui avait fait. Je m e rappelle que les soldais qui taient de garde nous reconnurent et nous firent place.A ce propos, il est ncessaire que j e m explique m i e u x ; voici: n o u s restmes trois j o u r s Rome, avant que ma fille n e g u r i l i n o u s tions alles visiter le tombeau de BenoiL-Joseph deux fois en deux jours diilrents;et quand ma fille se trouva m o i n s suffoque et moins fatigue, ce fut la s e c o n d e visite et n o n la premire, ce q u e j e n'ai pas su expliquer plus h a u t . On me d e m a n d e c o m m e n t la petite se trouva dans l a n u i t entre la premire et la s e c o n d e visite; j e rponds qu'elle alla m a l c o m m e l'ordinaire ; elle tait suffoque par des cra chats pais, ayant soif,sans pouvoir dormir, sans pouvoir res-
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ter couche,mais avec la tte et lebuste un peu soulevs.Il m e semble que je me suis explique un peu m i e u x . Aprs avoir remerile serviteur de Dieu, nous nous remmes en route et nous retournmes la maison ; la petite monta sur l'ne toute s e u l e ; je voulais l'aider, mais elle ne le voulut pas, et me dit : m a m a n , j e suis gurie. j e veux aller toute seule, je n'ai plus besoin d'appui; en effet, pendant toute la roule, il ne fut plus besoin cle la soutenir, ni de lui donner boire, parce qu'elle tait vraiment g u r i e , et qu'elle avait repris toutes ses forces. Arrive Mazzano, et passant prs de la maison de Virginie Barbieri de Luca, ma sur, elle l'appela par son n o m , et lui dit ces propres paroles : Ma tante, je suis gurie. Ma sur avait sa chambre audessus de l'appartement que j'habitais, Marie-Rose n'eut pas la palienee d'attendre q u e l l e ft la maison pour dire qu'elle tait g u r i e ; elle le lui cria de la rue. Les gens s'attrouprent, et tous ceux qui savaient dans quel tat se trouvait ma fille quand je la transportai Rome, la voyant maintenant parfaitement gurie, restrent mer veills, tous confessrent q u e l l e avait t l'objet d'un beau miracle. J'ai oubli de dire une c h o s e , c'est que le seigneur Sgarzi, le chirurgien, m'avait dit : faites attention si ses pieds se gon lient, parce que si ses pieds enflent, alors elle s'en va E t e n effet quelque temps avant d'aller Rome, ses pieds enflrent et restrent enfls pendant les deux jours que n o u s passmes R o m e , avant qu arrivt le miracie ; je le sais moi, parce que en l'habillant, j e lui mettais ses bas, ce qu'elle ne pouvait l'aire elle-mme ; cette enflure arrivait jur^qu'au milieu de la j a m b e . O n me demande si quand j e pressais ce gonflement avec le doigt, il y restait une fossette, j e rponds que j e ne l a i pas vu de mes yeux, parce que j e n'ai j a m a i s essay de le presser avec mes duigts. Quand ensuite arriva le miracle le gonflement s e n ada t o u t seul. Vous me demandez si j'en ai lait l'observation, je vous rponds: quoi cela aurait il servi q u e j y regardasse, puisque Marie Rose tait gurie et marchai i lestement. Si elle avait eu les pieds et les j a m b e s eniles c o m m e avant, elle n'aurait pu marcher si facilement. Un me demande si le matin, quand Marie-Rose dit qu elle tait gurie, elle avait encore la douleur pour Lquidle elle m avait appele la nu.L, et sur laquelle j avais appliqu l'image de Benot-Jo seph,, je rponds et vous dis qu elle tait panaitemeni gurie, et qu elle n'avait plus aucun mai ; mai* j e u ai pas fait tant de recherches, j e puis vous dire une seule chose c'est que c e fut la premire fois qu'elle se plaignait d'une douleur aussi
V.
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a i g u , et je crus que c'tait u n signe de sa m o r t prochaine; or n o n seulemeut elle n e m o u r u t point, mais e n c o r e , par l'intercession du serviteur cle Dieu Benot Joseph, elle gurit parfaitement et elle se porta toujours trs bien depuis. Quelques annes,aprs, elle pouvait avoir alors une vingtaine d'annes, elle se maria et dans sa d e u x i m e c o u c h e , elle m o u r u t ; mais pendant t o u t le temps qu'elle fut marie, elle se porta toujours trs-bien, et n'prouva aucun des maux qu'elle avait souffcrls dans sa maladie. T o u t ce q u e j e vous ai dit, je le sais de m a propre science, c o m m e mre de la j e u n e fille. J e m e suis mal explique, sans d o u t e ; mais j'ai dit la vrit et il m e semble que j'ai tout dit. 2 interrogatoire. J e n e peux rien dire de plus que ce que j'ai dit plus haut et je n e sais pas m'expliquer mieux. Si le chirurgien,le seigneur Sgarzi, tait vivant, il pourraU parler m i e u x q u e m o i . Vous m e demandez si la petite tait d'un b o n temprament, si elle avait soufli t d'autres maladies, si dj elle avait ses rgles. A ces questions je rponds qu'elle tait d'un b o n temprament, quel le n'avait jamais t malade, q u e sa premire maladie fut la rougeole qui la rduisit un si triste tat, q u e , sans le secours du serviteur de Dieu B . J o s e p h , elle en serait morte. Pour ce qui regarde ses rgles, elle tait petite fille alors, elle ne les avait point encore. Elle les eut quelque t e m p s aprs qu'elle fut gurie, mais j e n'ai pas tenu n o i e du temps prcis ; je sais qu'elle se maria q u a n d elle veut une vingtaine d'annes; mais depuis c o m b i e n de t e m p s tait elle en tat de pouvoir prendre un mari, j e n e m e le rappelle pas. Vous m e d e m a n d e z si la petite, o u avant d'&lre malade, o u pendant sa maladie, ou depuis sa g u r i s o n , n'a j a m a i s soulfert de convulsions, on d'autres m a u x propres aux f e m m e s , spcialement celles qui sont s u r le point de voir leur temprament se former; je rponds q u ' e l l e n'a jamais souffert de ces maux, a u m o i n s tantqu'elle l'ut j e u n e tille. 3 inteiragatoire. Le chirurgien qui visitait ma fille tait l e seigneur Jacques S g a m qui e&t mort maintenant ; il venait la voir jusqu trois f o i s p a r jour. Quant au m d e c i n , qui m e parat avoir t le s e i g n e u r docteur Angelucci, il venait peu, parce qu il n'y a point de m d e c i n s Mazzano, et qu'il h a b i ' tait Campaguauo Pour l'ordinaire, il ne v e n a i t Mazzano que t o u s les huit j o u r s , s'il n y avait pas grave n c e s s i t ; ainsi se d o i t expliquer ce q u e j'ai dit plus haut, bavoir, q u e le m decin e i le chirurgien v e n a i e n t ensemble voir la malade,parce q u e le mdecin venait a v e c le chirurgien quand de Camp a g n a n o il se rendait Mazzano. Ils parlaient entre e u x ,
e e
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mais moi je ne comprenais rien ce qu'ils disaient. 4 interrogatoire. Le chirurgien disait q u e la petite m a r chait la phthisie, mais il ne le disait pas devant moi, n e voulant pas m'apprendre cette mauvaise nouvelle : il le disait aux autres qui m e le rapportaient. Je n e m e rappelle pas c e que disait le m d e c i n . C o m m e n t voulez-vous aussi que je m e souvienne des mdicaments ordonns la petite ? Une fois on lui tira du sang, et ce f;:t au c o m m e n c e m e n t de la m a ladie ; ensuite on lui ordonnait des choses rafrachissantes, c'est--dire de la bouillie au lait, du lait tendu d'eau, e t c . ; j'ai toujours c o n t i n u ainsi. Vous me demandez si pendant les deux jours que nous avons pass Rome avant l e miracle, je lui donnais encore du lait. Je rponds, n o n . Et comment voulez-vous que je fisse pour aller chercher d u lait ? Je lui donnais a boire de l'eau et du vin. La petite ne s'est jamais trouve mieux, au contraire, elle alla t o u jours de mal en pis. Tout JVlazzano a cru et a dit q u s Marie-Rose a t gurie par miracle ; et c o m m e n t voulez-vous qu'il n'en soit pas ainsi, quand la pauvrette est revenue e l l e - m m e subitement de la mort la vie ? Marie-Rose a toujours t bien portante depuis, et si elle n'tait pas morte en c o u c h e , vous auriez pu la voir ici et l'entendre.
2 . Dposition
Miracule.
'70. Je suis u n e pauvre femme ignorante, je c o m p r e n d s p e u de chose, et j e sais encore moins m'expliquer; mais j e vous dirai ce q u e je sais, c o m m e je le sais, et d u mieux q u e je pourrai, relativement au miracle qui est arriv en la per sonne de Marie-Rose d e L u c a . Vous me demandez ce que c'est qu'un miracle. Je le comprends, mais je ne sais le dire. Les bienheureux saints font h s miracles. Il faut que vous sachiez que notre pays de Mazzano est petit, et que ce qui y arrive est c o n n u de t o u s ; c'est pourquoi quand m m e j e n'allais pas la maison de Franoise de Luca qui avait s a fille malade, j e savais pouitant que cette petite fille, alors ge d'environ quatorze ou quinze ans, tait trs mal ; q u ' o n lui avait d o n n tous les s a c i e m e n l s , qu'elle tait enire l e s mains des prtres, el q u e , par tout Mas.zano, on disait q u e l l e ne pouvait pas chapper la mort. Vous m e demandez q u e l tait le mal de Mane-Ruse ; et je vous rponds c e c i : j'entendais dire par tous q u e la maladie commena par la rougeole, q u e celte rougeole lui tait retombe sur la -
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p o i t r i n e , qu'au dedans elle tait toute b r l e et qu'elle n e p o u v a i t gurir. J e ne peux p a s vous en d i r e d a v a n t a g e p a r ce q u e j e n'en sais pas d a v a n t a g e . D a n s cette anne, il arriva q u e mourut le serviteur de Dieu B e n o t - J o s e p h , q u e , p a r t o u t Mazzano on disait que c'tait un grand saint et qu'il faisait de grands miracles. J ' a v a i s u n e p a r e n t e m a l a d e qui se n o m m a i t Elisabeth Mancini ; elle voulait aller R o m e p o u r se r e c o m m a n d e r B e n o t - J o s e p h , et m a i n t e n a n t elle est m o r t e . J'avais envie d'aller avec elle, d ' a u t a n t plus q u e j e voulais venir trouver un mien parent, frre au couvent d ' A r a - G l i . Nous r s o l m e s donc d'aller R o m e , et avec nous vint encore F r a n o i s e q u i c o n d u i s a i t sa fille M a r i e - R o s e . Celle-ci fut place sur un n e , mais elle n e p o u v a i t s'y tenir toute s e u l e ; il fallait q u e q u e l q u ' u n d e n o u s l ' a p p u y t et la maintnt. Cependant cela n e suf fisait p a s , et la p a u v r e petite d e m a n d a i t qu'on la m t d a n s un panier, m a i s cela ne se pouvait, p a r c e qu'alors il a u r a i t fallu un contre-poids de l'autre c t . Nous c o n t i n u m e s la t r a n s p o r t e r Rome. La p a u v r e petite tait trs f a l i g u e ; elle avait une grande oppression, elle toussait, et d e m a n d a i t t o u j o u r s boire, j e le c o m p r e n d s , parce q u e l a pauvrette tait toute brle en d e d a n s , et vous pouvez v o u s figurer quelle soif elle avait. Nous a r r i v m e s eufin R o m e , et nous a l l m e s loger dans la m a i s o n d'un h o m m e q u e l'on n o m m a i t v u l g a i r e m e n t B a t t i p a s s o n e mais qui se n o m m a i t rellement Antoine Givetti, et a u j o u r d hui, il est m o r t . Cette m a i s o u tait p r o c h e des C a m p i t e l l i . L a pauvre p e t i t e allait t r s - m a l , et pendant toute cette nuit elle ne fit q u e se plaindre, j e le s a i s parce q u e j ' t a i s d a n s la m m e c h a m b r e ; elle couchait avec s a mre d a n s un lit, et m o i a v e c L a u r e d a n s un a u t r e . Au j o u r n o u s s o r t m e s et n o u s a l l m e s faire nos d v o t i o n s ; j e ne me r a p p e l l e pas si la petite les fit a u s s i , j e ne m e rappelle pas non plus si n o u s a l l m e s d'abord l'Ara-Cteli ou la M a d o n e - d e s - M o n t s : m a i s attendez, voici q u e maintenant j e me souviens q u e n o u s nous s o m m e s confesses i'Ara-Cli, q u ' a p r s n o u s avons fait dire une m e s s e la M a d o n e - d e s - M o n t s , et q u e n o u s y avons c o m m u n i . Pendant le chemin n o u s c o n d u i s m e s avec b e a u c o u p de peine la pauvre petite p a r c e qu'elle n e pouvait pas m a r c h e r , et q u il tait ncessaire de t o u j o u r s lu soutenir. S a m r e la s o u t e n a i t ; si sa c o u s i n e L a u r e l a s o u t e n a i t aussi, j e ne m'en s o u v i . m s pas ; m a i s c a u s e de s a faiblesse et de son o p p r e s s i o n , il fallait c h a q u e instant s'arrter pour qu'elle reprt haleine. Nous a r r i v m e s & l a Maduiie-des-Monls, n o u s n o u s r e c o m m a n d m e s B e n o l - J o -
s e p h , n o u s fmes notre prire son t o m b e a u , la petite se recommanda lui avec une grande ferveur, mais le miracle ne se fit pas ; pourtant il sembla qu'elle allait un tantinet mieux. Nous la reconduismes la maison, et dans la nuit qui suivit elle gmit et se plaignit, mais pas autant que la prcdente. Le lendemain n o u s retournmes vers Benot Joseph ; la petite tait faible, suffoque, mais un tantinet moins que le premier jour, nous revnmes la maison et le soir venu n o u s nous mmes au lit. Nous avions achet nne image de Benot-Joseph. P e u de t e m p s aprs que n o u s tions au lit. Ma rie-Rose jeta un cri aigu et dit sa mre qu'elle vnt l'aider, qu'elle sentait dans sa poitrine une grande d o u l e u r : la mre lui r p o n d i t : ma fille que puis-je te faire, moi, recours Benot-Joseph, recommande toi. l u i : en m m e temps elle lui appliqua sur la poitrine l'image sur papier que n o u s avions achete. Nous n'entendmes plus rien pendant Ja nuit, la petite ne se plaignit plus ; s'veillantle matin, elle dit qu'elle allait bien et qu'elle tait gurie; elle se leva, s'habilla, et nous allmes toutes la Madonedes Monts pour remercier Benot-Joseph : la petite marchait seule et n'avait plus besoin d'appui ; elle marchait plus vite que nous, elle ne toussait plus, elle n'avait plus d'touffcments, et il semblait qu'elle n'et jamais t malade. Aprs avoir remerci le serviteur de Dieu, nous allmes la sacristie p o u r y faire inscrire c e miracle. Dans cette m m e journe n o u s retournmes Mazzano, et pendant la route la petite n'eut plus besoin d'appui, elle se maintenait seule sur son ne, elle voulut m m e aller quelquefois pied, et marchait plus vite que n o u s ; la mre ne voulait pas qu'elle descendt, mais la petite rpondait : je veux mar cher, m a m a n . Arrives Mazzano, tous ceux qui la virent restrent stupfaits, et tous disaient: quelle belle grce! quel beau miracle elle a obtenu ! Elle tait encore un peu maigre, mais pourtant elle allait bien et n'avait a u c u n mal, ni a u c u n e f a t i g u e ; aprs trois ou quatre jours elle reprit de bonnes couleurs et gagna de 1 embonpoint, t e l lement quelle paraissait une fleur. Trois ou quatre ans aprs elle se maria avec m o n neveu Julien, et eut deux fils, mais dans sa s e c o n d e couche elle m o u r u t ; ne croyez pas qu'elle m o u r u t de mal dont elle avait t gurie par miracle, car elle m o u r u t des suites de c o u c h e . Du reste elle avait toujours t en b o n n e sanl, elle n'avait plus eu aucun m a l ; v o u s pouvez le demander tout Mazzano, tous vous diront que je vous ai dit*la vrit, et j e la sais parce que j'tais prsente.
70
Julien Ranucci
de
Je sais qu'un miracle est arriv en la personne de MarieRose m o n pouse, mais alors elle tait demoiselle et m m e petite fille; elle tait bien jeune q u a n d ce miracle arriva, ee fut lorsque Benot Joseph se rvla; c'est--dire alors q u ' o n d i s a i t q u ' R o m e il t a i t m o r t u n s a i n t et q u ' i l f a i s a i t de g r a n d s m i r a c l e s . Q u e v o u l e z - v o u s q u e j e vous e x p l i q u e moi pauvre paysan, c o m m e n t v o u l e z - v o u s q u e je vous dise e n quoi consiste c e miracle ? Je sais que Dieu fait les miracles et que Marie-Rose fut gurie par miracle, car elle tait sur le point de mourir, et elle g u r i t instantanment par l'intercession de ce bon serviteur de D i e u . Marie-Rose m a f e m m e m e disait que Benot-Joseph l'avait gurie subitement, et que sans Benot-Joseph elle n e serait plus de c e m o n d e , parce que son cas tait dsespr. Depuis elle s'tait toujours bien porte , elle n'avait j a m a i s s o u f f e r t d'aucune maladie, p e n d a n t les quatre annes qu'elle f u t avec moi ; elle faisait t o u s les travaux de la m a i s o n et d e la c a m p a g n e c o m m e f o n t les a u t r e s p e r s o n n e s d e n o t r e t a t , d e n o i r e c o n d i t i o n , e t j a m a i s e l l e n e s'est plaint d'aucun mal o u d'aucune f a t i g u e . Elle mourut des suites d'une mauvaise c o u c h e , parce qu'elle accoucha h u i t m o i s . Depuis sa c o u c h e elle resla m a l a d e une vingtaine de j o u r s , soutirant toujours du mal qui lui avait t occasionn par le mauvais a c c o u c h e m e n t qui n'tait pas t e r m e .
4. Dposition
miracule,
J'ai une parfaite connaissance d'un miracle qui arriva en la p e r s o n n e d ' u n e j e u n e fille a p p e l e M a r i e - R o s e de Luca, d a n s le p a y s de M a z z a n o m a p a t r i e . Vous m e d e mandez ce que c'est qu'un miracle. J e vous rponds : j e comprends ce que c'est, mais je s u i s u n pauvre h o m m e ignorant, et j e n e saurais vous l'expliquer. Marie-Rose, cela e s t certain, gurit par miracle, car elle tait rduite u n tel tat qu'elle devait mourir, et cependant elle gurit et gurit instantanment, non par la vertu des m d e c i n s , mais par l'intercession du vnrable serviteur de Dieu B e not-Joseph Labre. En effet, toute malade qu'elle tait, elle se fit conduire Rome pour visiter le t o m b e a u du sus-
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dit vnrable serviteur d e Dieu, elle le visita, elle garit e t le miracle fut tout de suite fait. Il y a de cela treize o n quatorze ans, car la chose arriva en 1783, quand mourut ce hon serviteur de Dieu, Benot-Joseph., Marie-Rose fille de Franois de Luca tomba malade alors... On disait que la maladie-de Marie-Rose tait un cas de rougeole, mais c e t t e rougeole ne se passa pas bien, s'empira et alla toujours de mal en pis. On disait que le mal tait t o u t 1 intrieur e t dans la poitrine ; il fallait qu'elle restt au lit, et moi, c o m m e j'tais son parrain parce que j e l'avais tenue sur l e s fonts du baptme, j'allais quelquefois la voir sa maison. Elle m e faisait compassiou parce qu'elle tait toute dfaite, e t avait un si grand touifernent qu'elle ne pouvait reprendre sa respiration, elle tenait toujours la bouche ouverte, parce que sa poitrine tait c o m m e un soufflet qui se lve e t s'abaisse sans souffler; elle toussait, d'une toux sche et l'on sentait bien qu'elle venait de la poitrine ; elle avait une soif que l'on n'aurait j a m a i s pu rassasier, parce que, ainsi que j e vous le disais, elle se sentait c o m m e brle e n dedans. Je ne m e souviens pas d'avoir remarqu si elle avait d e mauvais crachats, j e n e m e souviens pas d'avoir entendu dire qu'elle et la fivre, j e n e m e rappelle pas si elle tait enfle, m a i s j e rnc rappelle bien qu'elle recevait les visites de m o n cousin Jacques Sgarzi chirurgien de Mazzano, h o m m e , qui savait son tat e t qu'on appelait partout des pays voisins ; j e m e rappelle qu'il m e disait q u e le cas de Marie-Rose tait desespr, qu'elle tait bel et bien perdue, et qu'elle en mourrait. Il me disait quel mal elle avait, mais il se servait pour cela de certains termes q u e m o i j e ne comprends pas ; en substance il voulait dire qu'elle tait ou qu'elle devenait phthisique. Vous pouvez vous figurer ce que souffrit sa pauvre mre ! Or, il a r r i v a dans ce L e m p s qu'on publia Mazzano les miracles qui se faisaient R o m e dans l'Eglise o t a i t enterr le vnrable serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre. Ceux qui avaienL des malades voulaient tout d e s u i t e les transporter R o m e , et moi qui avais ma femme estropie j e me rsolus l'y conduire. c e t t e o c c a s i o n la mre de Marie-Rose voulait essayer aussi de conduire sa fille avec nous, mais la chose tait u n peu difficile, parce que l'enfant se trouvait dans u n trs-mauvais tat, e t j e me souviens que m o n cousin le c h i rurgien m e disait qu'il avait peur qu'on ne put la ramener Mazzano, qu'il craignait mme qu'elle ne m o u r t e n route, et cela il m e le dit m o i - m m e . Je ne me rappelle pas si j e dis Franoise la mre, ce q u e m'avait dit le chirurgien,
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j e m e souviens, que, prcisment pour cette raison, je n'avais a u c u n envie d'aller Rome avec eux ; mais c o m m e elle tait ma filleule, j e ne voulus pas lui causer cette peine, et n o u s partmes tous e n s e m b l e . Je vous dis la vrit: quand nous partmes la pauvre petite tait dans un t r s mauvais tat. Nous la plames le mieux que n o u s p m e s sur un ne, mais Marie-Rose ne pouvait s'y maintenir, il fallait que l'un ou l'autre de c e u x qui taient avec moi la soutnt, parce que moi j'avais assez faire de soutenir m a f e m m e . Le voyage fut pnible, parce que quoique les htes marchassent trs doucement, cependant chaque instant il tait ncessaire de s'arrter pour deux raisons, Tune pour donner boire Rose car elle se sentait brle et aurait voulu boire tout m o m e n t , l'autre pour la descendre de l'ne et l'asseoir h terre afin de la reposer, de calmer le grand touffement qu'elle avait, et qui s'augmentait c h a q u e pas que faisait l'ne sur lequel elle tait m o n t e . Quand Dieu v o u l u t , n o u s arrivmes R o m e , et nous allmes u n e p e tite maison des Campitelli o nous restmes pendant cette n u i t . Mais qui put dormir ? Ce furent des plaintes si grandes de la pauvre petite malade suffoque, que m o i j e n e pus pas fermer l'il, et, cause de cela je n e voulus pas passer l les autres nuits ; j'allai coucher chez u n cousin qui tait frre au couvent de 1 Ara-Cli.Je n'tais pas pour tant dans la m m e chambre, j'en occupais une autre avec m a f e m m e : dans celle qu'habitaient Marie-Rose il y avait deux lits,dans l u n couchaient Marie-Rose avec sa mre,dans l'autre Hlne Marini et Laure de Luca qui taient venues avec n o u s ; mais de cette s e c o n d e chambre j'entendais les plaintes de la pauvre malade, elles m e crevaient le cur, et cela m e donnait plus de fatigue que de n e pouvoir dormir. Au matin n o u s nous levmes, n o u s allmes l'Eglise d'AraGli pour n o u s confesser, et c e fut grand'peine qu'on y put conduire Marie-Rose en la soutenant de chaque ct ; c h a q u e instant il fallait s'arrter pour la laisser se reposer. De l'glise d'Ara-Cli n o u s allmes l'glise de la Madone des Monts o vint m o n cousin le religieux qui n o u s dit la m e s s e et n o u s c o m m u n i a ; pendant le trajet MarieRose fut trane grand'peine, s o u t e n u e et appuye c o m m e elle Pavait t pour venir l'glise d'Ara-Cli. Vous m e demandez si Marie-Rose fit aussi ses dvotions ; j e v o u s rponds que je ne m'en souviens pas, mais il m e semble plutt q u e l l e ne les fit pas ; elle n'tait pas en effet en tat de le faire parce qu'elle tait trop malade. Dans l'glise d e l Madone des Monts n o u s n o u s r e c o m m a n d m e s t o u s
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Benot-Joseph ; ma f e m m e et Marie-Rose qui taient ma lades se recommandrent lui avec plus de ferveur que les autres. Aprs quelque temps nous sortmes de l'glise ; moi et ma femme n o u s allmes dans un autre logement; Franoise avec Marie-Rose et les autres femmes retour nrent aux Campitelli. Mais Marie-Rose continuait aller mal, elle disait pourtant qu'elle se sentait un peu m i e u x ; le soir quand je retournai chez eux, pour leur laisser ma femme, et revenir l'Ara-Cli, je lui demandai c o m m e n t elle se trouvait, elle m e rpondit qu'elle se sentait un p e u mieux-, mais elle tait au lit et toujours oppresse. Le jour suivant nous retournmes la Madone d e s - M o n t s ; nous y stationnmes q u e l q u e peu : quand n o u s sortmes Marie-Rose disait qu'elle se sentait encore un p e u m i e u x , mais elle tait suffoque, il fallait toujours la s o u t e n i r ; cependant en lasoutenant on tait moins fatigu, Je la revis le soir, et j e la trouvai c o m m e la veille. Le troisime jour j e la trouvai debout sur ses pieds, elle tait parfaitement gurie, elle marchait seule, lestement, c o m m e si jamais elle n avait e u aucun mal, et l'on m'apprit que le saint Benot-Joseph avait fait un miracle, au m o m e n t o pendant cette nuit sa mre lui avait pos sur la poitrine l'image de B e n o t - J o s e p h . Depuis ce m o m e n t la petite avait dormi sans se plaindre, sans s' veiller; au matin elle s'tait trouve gurie, l i b r e , c o m m e je la voyais ; et ceci arriva le troisime matin, c o m m e vous pouvez le comprendre d'aprs m o n rcit : car ils res trent Rome trois jours seulement ; mais moi je voulus y demeurer un peu plus. Dans cette m a t i n e n o u s allmes t o u s ensemble la Madone-des-Monts pour remercier le serviteur de Dieu, et Marie-Rose marcha lestement c o m m e les autres, toute seule, et sans avoir besoin d tre soutenue. Elles partirent ensuite pour retourner Mazzano. Je la vis assise sur son ne et elle s'y tenait ferme et droite, bien diilrente de ce qu'elle tait en venant. Je revins Maz zano dix o u onze jours aprs, et j e vis Marie-Rose aller par tout c o m m e si j a m a i s elle n'avait eu de mal, dj elle avait repris de l'embonpoint et rie bonnes couleurs. Aprs quelques annes elle se maria, elle eut des enfants, d e meura toujours b i e n p o r t a n t e , et mourut de suites de couche. Toutes ces choses je le sais parce que j'tais son parrain, que j e la voyais souvent, et que dans un petit pays c o m m e Mazzano on sait tout de suite ce qui arrive. ...Je vous ai dj dit ce que disait m o n cousin le chirur gien, qui regardait c o m m e impossible la g u e n s o n de MarieRose. Le m d e c i n Angelucci disait la m m e chose ; je m e suis
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rencontr quelquefois quand le mdecin et le chirurgien parlaient ensemble de Marie-Rose ; j e ne pouvais pas c o m prendre les termes dont ils se servaient, mais pourtant j e saisissais bien leur conclusion qui tait que Marie-Rose tait dsespre, que sa maladie finirait mal ; ils ajoutaient qu'elle mourrait bientt.
le docteur
Darius
1er interrogatoire. Je n'ai t nullement instruit d'aucune manire de ce dont je dois dposer dans m o n prsent e x a m e n . Je n'ai e u aucun entretien ou confrence avec le P . Palma, postulateur de la cause du vnrable serviteur de Dieu B e not-Joseph Labre, relativement ce m m e e x a m e n , si ce n'est que j'ai reu de lui l'avis que je devais me prsenter ici p o u r prter serment, et dposer ce que sais relativement au miracle qui a t fait dans le pays de Mazzano, diocse de Npi, e n la personne d'une jeune fille n o m m e Marie-Rose de L u c a , p a r l'intercession du vnrableserviteur d e D i e u B e n o t Joseph Labre, alors qu'tant mdecin gag Campagnano, j e devais aller aussi Mazzano, pays peu loign, dans lequel, cette p o q u e , il n'y avait pas de mdecin rsidant.Je fis dans ce t e m p s une dclaration dans laquelle j e rsumai tout ce que je savais tant par rapport la maladie de la j e u n e fille, q u e par rapport la gurison qui survint et persvra. Je dois dire que cotte attestation n'a pas t signe s e u l e m e n t par m o i , mais aussi par le seigneur archiprtre Stanislas Corneli et par le chirurgien du lieu , Jacques Sgarzi, tous deux morts prsent. L'un et l'autre, bien informs du fait, m e chargrent de rdiger la dclaration susdite, et aprs l'avoir reue, lue et pese, trouvant l'exposition des faits sin cre et vritable, ils la signreut. Ainsi souscrite par eux et par moi, je l'envoyai Rome au baron de Mazzano, le seigneur Clment deL Brago, qui est mort prsent. C o m m e , selon moi, ce fait tait t e l l e m e n t surprenant et prodigieux qu'il devait tre regard c o m m e u n miracle, dans un voyage que je fis quelque temps aprs Rome, je demandai au susdit seigneur marquis, si o n en avait fait, o u si o n se pro posait d'en faire la preuve juridique ; et c o m m e il m e r pondit qu'on n'avait rien fait du tout, je demeurai t o u t s u r pris; j e me disais en m o i - m m e , et peut-tre l'exprimai-je aussi e n paroles, que si on n e tenait pas c o m p t e de ce grand miracle, qui avait t o u s les caractres ncessaires, je
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ne savais pas de quel autre on pourrait tenir compte, comme le comprendront vos illustrissimes et rvrendissimes Seigneuries, par les rponses que j e serai mme de faire aux questions qui me seront poses. E n apprenant q u e Ton voulait avoir la preuve d'un tel miracle, j e me suis tout fait rjoui, non par aucun motif temporel et h u m a i n , m a i s pour la gloire de Dieu, qui se manifeste dans ses serviteurs, et pour l'amour de la vrit laquelle, contribuant la gloire, de Dieu, ne doit jamais rester dans l'ombre et l'oubli. Je suis parfaitement inform qu'un miracle est arriv au pays de Mazzano e n la personne de la susdite, petite fille Marie Rose de Luca. Avant de rapporter tout c e qui touche ce miracle on m e demande de dire en quoi, mon avis, consistent l'essence et la qualit du miracle. A cette question je rponds : e n m e bornant aux maladies qui sont du domaine de la facult de mdecine, j'entends par miracle les gurisons qui ne peuvent tre produites ni par la nature, ni par l'art. Je crois e n outre que le prodige peut tre dans la substance du fait o u dans le m o d e selon lequel il se produit. Dans le premier cas, la gurison d'un mal qui, de sa nature et de son essence est t o t a l e m e n t incurable, sera un mi racle. Dans le d e u x i m e , la gurison subite d'une maladie sera un miracle, alors m m e que cette maladie aurait pu tre vaincue par la force de la nature o u par le secours de l'art ; mais non sans q u e les unes et les autres eussent exig un long temps, car la nature et les remdes oprent petit petit. Ayant pos cette dfinition, je passe maintenant rapporter ce que j e sais de la susdite gurison de MarieRose de Luca. Dans l'anne 1783, et prcisment dans le mois de mars, cette petite fille qui pouvait compter alors quatorzeans d'ge, fut attaque d'un mal pidmique, vulgai rement appel rougeole, laquelle fut c o m b a t t u e par les r e mdes spcifiques qu'on a c o u t u m e d'opposer ces sortes de maux; mais, soit qu'ils n'eussent pas t administrs c o m m e il arrive ordinairement chez les gens de la campagne, ou par tout autre raison, la maladie ne suivit pas s o n cours ordi naire, et m a n q u a n t de la crise ncessaire, elle dgnra en un autre mal. L'humeur maligne n'tant pas purge, occa sionna la j e u n e fille une forle attaque de la poitrine, le sang vici restant stagnant dans les cavits de l'estornac occa sionna un e n g o r g e m e n t des p o u m o n s qui dgnra en u n e pleuropneumonie. Tout ceci m'est parfaitement c o n n u , parce que tant alors mdecin gag de Campagnano, j'avais c o u tume d'aller Mazzano deux ou au moins une fois la semaine. Je rdigeai alors l'observation de la petite m a l a d e ; les renseignements opportuns m'taient fournis par le dfunt
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chirurgien Jacques Sgarzi, h o m m e de b o n n e doctrine, qui n e s e bornait pas pratiquer les oprations de chirurgie, mais encore tait capable de gurir les maladies proprement dites, qui sont de la c o m p l e n c e du mdecin ; et quoiqu'il demeurt dans un petit pays c o m m e Mazzano, cause de s o n habilet, il aurait pu faire bonne figure dans des localits civilises et plus populeuses. S'il tait encore vivant il vous aurait rendu c o m p t e avec plus de prcision que je ne peux le faire moi m m e , de t o u t ce qui c o n c e r n e la srie des diverses phases de la maladie, c o m m e quelqu'un qui tait l e n permanence et qui, cause de cela, faisait un grand cas du prodige arriv, ainsi que vous pouvez le voir encore par l'attestation qu'il signa avec moi. La malade n'ayant pas les soins ncessaires, ou ne prenant pas rgulirement les remdes prescrits par le susdit chirurgien et par moi, le mal fit de grands progrs, qui rduisirent la pauvre petite u n tat dplorable de vritable phlhisie, n o n pas de celles q u i sont de l o n g u e dure, mais de celles qui, dans peu de t e m p s , enlvent la vie au malade. Les s y m t m e s qui se mon traient taient tous funestes, c'est--dire l'enrouement, les douleurs (je ne m e rappelle pas maintenant si elles taient locales et permanentes, il m e semble pourtant qu'elles voyageaient et qu'elles taient surtout dans les articulations), la t o u x , les crachats purulents, la'difficult de respirer, une fivre lente et c o n t i n u e , la diarrhe, la sueur, je me r a p pelle trs-bien que tout cela existait ; j e ne m e s o u viens pas si les sueurs taient du genre q u e n o u s appelons colliquatives, mais la malade fut rduite un tat tel qu'on doit croire qu'elles taient de ce genre, q u o i q u e par le laps du t e m p s j'en aye perdu le souvenir. Ces caractres et s y m p t m e s taient dcisifs, m o n j u g e m e n t , et le chirurgien du lieu les regardait aussi c o m m e tels, ce qui faisait que tous deux nous avions perdu toute esp rance de gurir la petite fille ; cause de cela nous fmes d'avis qu'il ne fallait pas tarder lui administrer les sacre m e n t s et la r e c o m m a n d e r a u x s o i n s du mdecin spirituel. Et, en effet, elle fut m u n i e des sacrements jusqu l'extrmeo n c t i o n , e t le dfunt seigneur archiprtreCorneli lui prta son assistance c o m m e u n e personne dont on peut craindre la m o r t prochaine,ainsi qu'il arrive aux (pleuro-pneumoniques) q u i sont souvent suffoqus p a r l e s matires qui remplissent la poitrine. Pour n o u s , n o u s n'avions pas autre chose faire, et si n o u s ordonnions q u e l q u e mdicament, il n'tait pas n e r g i q u e , le caractre et la nature de la maladie ne l'admettant pas, m a i s seulement palliatif, et lnitif,destin prolonger la
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-vie de la malade, autant que faire se pourrait, et lui rendre moins douloureux les accidents morbides. Se trouvant dans ce malheureux tat, la malade implora les secours clestes, alors que les secours h u m a i n s ne lui taient plus d'aucune utilit. Je ne pourrais pas fixer a c t u e l l e m e n t le jour prcis dans lequel je -vis pour la dernire fois Marie-Rose e n son tat de maladie, je puis cependant affirmer avec c e r t i tude que ce ne fut pas plus de deux jours avant son dpart de Mazzano, pour R o m e ; je m e souviens aussi que dans cette dernire visite, j e la trouvai oppresse et abattue comme de c o u t u m e , et je suis certain qu' ce moment, elle et sa mre, pensaient au voyage de R o m e ou,que peut tre l'ayant dj rsolu d'avance elles n o u s demandrent moi et au chirurgien qui tait prsent notre avis et notre c o n seil. Le chirurgien considrant la gravit du mal, et j u geant qu'il tait impossible que la malade pt entreprendre un tel voyage crut devoir l'en dissuader, convaincu qu'il tait qu'elle pouvait mourir en c h e m i n . Moi aussi j'avais les mmes convictions, mais voyant la confiance de la mre et de la fille, je dis au chirurgien qu'il pouvait les h i s s e r faire ce qu'elles voudraient. P o u r n o u s le cas tait dsespr, peu importait d o n c que la petite mourt Mazzano, Rome o u en route. Je ne la vis plus. Je sais bien, cependant, qu'elles partirent deux jours aprs, et le fait m o n avis, qu'une m a lade aussi affaiblie que Marie-Rose pt se mettre en route, fut dj un miracle c o m m e n c . J e s a i s de science certaine tout ce que j'ai rapport jusqu'ici. Je sais, parle t m o i g n a g e d'autrui ce que je vais dire ci-aprs : le motif pour lequel la petile malade poussait sa mre la conduire Rome, t a i t de se recommander l'intercession du vnrable serviteur de Dieu Benot-Joseph Labre, dont on publiait partout les prodiges, et de visiter son tombeau avec l'esprance d'y o b tenir par ce moyen le recouvrement de sa sant perdue. Que ce motif ft le vrai motif de sou voyage, je le sais parce q u e la mre et ia fille l'ont exprim en ma prsence. Ayant d o n c obtenu de n o u s la permission, elles se disposrent au voyage. On prit un petit ne et grand'peine on plaa dessus la malheureuse petite malade, dans l'tat qu'on sait; et,en c o m pagnie d'autres dames, elles prirent le chemin de Rome distaute d'environ vingt cinq milles. Je n'ai rien dire pour vous faire comprendre co.uhien un tel voyage deva.il. tre difficile et pnible pour une malade de cette sorte. E.le ne pouvait se soutenir seule sur le baudet,non-seulement cause de sa faiblesse, mais beaucoup plus encore cause des pernicieux s y m p t m e s qui la tourmentaient : il fallait q u e
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d'autres personnes de sa c o m p a g n i e la soutinssent. Elles arrivrent enfin R o m e ; la malade passa une nuit d o u loureuse c o m m e elle avait c o u t u m e de la passer. Dans la matine du l e n d e m a i n , les personnes de sa compagnie allrent l'glise d'Ara-Cli pour y faire leurs dvotions ; elles conduisirent aussi avec elles la malade soutenue par deux personnes, car elle n'tait pas dans le cas de faire un pas t o u t e seule. De l'Eglise d'Ara-Cli on la trana de la m m e manire L'glise de la Madone-des-Monts o repose le corps du vnrable serviteur de D i e u Benot-Joseph Labre. Arriv l on la porta au t o m b e a u du serviteur de Dieu, o e n u n i o n avec l e s personnes de sa socit elle fit sa prire pour la gurison dsire. Mais q u e l q u e grande que ft sa irveur,quelque grande que ft sa foi, elle n'ob tint rien pour le m o m e n t , et de la m m e manire qu'on l'avait c o n d u i t e s l'glise de la Madone-des-Monts, on la ramena tout afflige son logement. Je sais qu'on la conduisit deux fois encore cette glise pour y renouve ler ses prires, m a i s , fut-ce dans la m m e journe o u dans des jours diffrents, ou bien je n e l'ai pas su, ou bien j e n e m'en souviens pas. Mais j e m e souviens trs-bien qu'elle n'obtint la gurison dsire dans a u c u n e des visites qu'elle fit au tombeau, que ce fut s e u l e m e n t dans la soire du m m e jour, si les trois visites fuient faites dans un seul jour, ou dans la soire du jour o elle fit la troisime visite, La malade coucha dans le m m e lit que sa mre, dans le m m e tat d puisemcnt,avec les m m e s s y m p t m e s d o u l o u reux. Il y avait peu de temps qu'elle s tait m i s e au lit quand - u n cri aigu rveilla l a n i r e dj endormie. A peine veille e l l e interroge sa fille et lui demande c e qui lui arrive. Elle eut pour rponse qu'elle sentait une douleur excessive dans la poitrine et qu'elle priait sa mre de vouloir bien m e t t r e ia main sur l'endroit o elle sentait la douleur. La p a u v r e mre prenait piti de sa fille, mais elle comprenait b i e n qu'appliquer sa main sur 1 endroit douloureux serait d'un petit s e c o u r s , o u plutt n'apporterait aucun soulage m e n t , aussi crul-elle m i e u x laire de prendre une image sur papier du vnrable serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre, et de l'appliquer sur ia poitrine de sa iille. La malade ne se plaignit pius, elle reposa tranquillement, et dormit douce m e n t pendant toute la nuit, sans se faire entendre 1 Le matin v e n u , elle dit t o u t e j o y e u s e qu'elle tait gurie, elle put s'habiller seule, elle n'avait plus aucun des pernicieux s y m p t m e s qui l a v a i e n t t o u r m e n t e jusqu'au soir prc dent, elle avait de plus recouvre ses forces, et dans ia m m e
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journe, elle put, avec sa mre et les autres femmes qui taient venues avec elles, se transporter l'glise de la Ma done des-Monls pour remrcier son bienfaiteur. Ce voyage fut bien diffrent de ceux qu'elle avait laits le jour pu les jours prcdents : en effet, dans ceux-ci, c o m m e je l'ai dj dit, il fallait deux personnes pour la soutenir, dans celui-ci, elle put marcher seule, librement, d'un pas si vif qu'elle prcdait toutes les personnes de sa socit. Elle remercia son bienfaiteur, puis elle passa la sacristie de l'glise pour y faire consiguer le prodige qui tait arriv en sa personne. Avec la mme libert elle retourna sa de meure, laquelle, autant que j e m'en souviens, tait situe sur la place Mcrgana dans le voisinage des Gampitelli, et, ayant obtenu tout ce qu'elle dsirait, elle retourna Mazzano avec toutes les personnes de sa socit. Dans le voyage n o n seulement elle n'eut besoin de personne pour la soutenir et la maintenir sur son n e , mais encore elle voulut faire pieds un bon bout de c h e m i n , autant que je m'en souviens, ce fut environ l'espace de deux milles. Arrive Mazzano tous ceux qui l'avaient vue malade peu de jours auparavant restrent frapps d'admiration et de surprise, la vue d'un changement si subit, et d'un si grand prodige : ils voyaient, en effet, la petite fille n o n - s e u l e m e n t gurie de tousses maux, mais encore avec toute sa vivacit et toutes .ses forces, apte faire tout ce que font les personnes bien portantes de son ge et de s o n sexe. Tout ce que j'ai rapport jusqu'ici j e le sais par les relations qui m'en ont t faites, soit par ia petite gurie, soit par sa mre, soit p e u t - t r e aussi par ceux qui l avaient accompagne R o m e . E t maintenant j e reprend* le rcit de c e qui m'est c o n n u de science certaine. 11 n'y avait que pu de jours que j e Pavais vue malade, j e ne peux e n dterminer le n o m b r e avec prcision, il m e semble pourtant que c'tait tout au plus cinq o u six jours ; ce dont j e suis certain c'est que dans le cours d'une m m e semaine j e l'ai vu malade et j e l'ai vue g u r i e . Je m e tiouvais Campagnano, h e u de m a .rsidence, quand j'entendis raconter que Mane-liuse avait recouvr la sant par les mrites du serviteur de D i e u , Benot-Joseph Labre. Je restai bien surpris en apprenant une telle n o m e l l e , car, j e savais dans quel lat m a l heureux et dsespr j e l'avais laisse peu de jours a v a n t ; aussi, avec la plus grandepromptitude possible, j e me trans portai Mazzano pour admirer dans la guerison de MarieRose l'uvre admirable de Dieu qui rieu n'est impossible J ' y allai un j o u r de dimanche, et suivant m o n souvenir, elle
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tait revenue Mazzano le samedi prcdent. Tous m'affir mrent avec grande joie la vrit de ce p r o d i g e ; la petite s e trouvait alors avec les antres enfants dans l'glise parois siale ppur apprendre la doctrine chrtienne, c o m m e o n a coul urne de le faire chaque dimanche. Je la fis appeler, dsireux de voir de m e s yeux le sujet d'une gurison si a d mirable.A premire vue j prouvai u n e c o m m o t i o n intrieure en constatant un changement aussi c o m p l e t et aussi p a r fait. Je la fis entrer dans l'picerie o ditrentes personnes entrrent avec moi et le chirurgien Sgarzi. Le seul e x a m e n extrieur de la petite gurie tait plus q u e suffisant pour m e forcer confesser le miracle. N a n m o i n s , je voulus savoir de sa bouche toutes les circonstances qui avaient a c compagn ou suivi ce grand prodige. Je lui fis ensuite diff rentes questions relatives aux maux et s y m p t m e s qu'elle avait endurs p r c d e m m e n t pour m'assurer de plus e n plus qu'il n'en restait ni ombre, ni vestige, ce qu'on pourrait appeler les reliques des infirmits passes, et rellement j e trouvai qu'il n'y avait plus rien. Mais, c o m m e j e l a i dj dit, la seule inspection oculaire du sujet suffisait en d o n ner la preuve vidente, car elle respirait librement et n a turellement, elle n'avait aucune toux, de quelque sorte que ce lt, ni aucun signe ou indice du mal pass. J'ai v u qu'en venant de l'glise vers moi, elle descendit rapidement quelques degrs qui sont l, j e l'ai vue avec de bonne c o u leurs naturelles, et avec cette vivacit qui indique la sant, j e voulus lui tterle pouls, el n o n - s e u l e m e n t je ne trouvai pas de livre d'aucune sorte, mais les pulsations t a i e n t gales et normales, c o m m e elles le sont chez les personnes qui n e souffrent aucun malaise, ni intrieur ni extrieur. J'admirai l'uvre de Dieu, j e lui dis qu'elle avait t l'ob j e t d un beau miracle, et q u e l l e devait tre bieu reconnais sante envers son bienfaiteur; le seigneur chirurgien Sgarzi dit la m m e chose, et aucun de ceux qui taient l n e songea contredire un miracle si clair et si vident.Jusqu' l'anne 1785, j e gardai la place de mdecin gag Campag u a n o , ei c o m m e m d e c i n , qu'entre nous on appelle d m i s sionnaire (dsaronn) j'allais ordinairement deux fois, o u au m o i n s une fois par se.naine M.tzzauo, en outre des visites plus frquentes q u e j'y faisais daus les cas urgents. A c a u s e de cela, j ai eu pendant ce temps bien des fois l'occasion de voir Marie-ltose, et toujours je l'ai trouve daus le m m e tat de sante parfaitement recouvre, sans qu'elle et jamais besoin de mes soins, m m e pour le plus lger malaise. Aprs avoir abandonn la place de Gampagnano, j e n'ai plus revu.
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Marie-Rose ; aussi ne puis-je rien dire de science certaine sur l'tat de sa sant dans les temps suivants : mais j e dois ajouter que j'ai entendu dire qu'elle se maria quelques annes aprs, qu'elle eut des-entants et qu'elle mourut e n couche. Voil tout ce que je puis affirmer de la gurison de ladite Marie-Rose, tout cela m e confirme dans la pense qu'elle fut le rsultat d'un miracle vident; et l'on n e parviendra pas branler ma conviction, mme en ayant recours des subtilits et des sophismes. On me d e m a n d e quel tait le temprament de la petite fille gurie avant de tomber malade : on me demande encore si, avant, p e n dant, ou aprs sa maladie elle a t sujette des accidents hystriques et convulsifs. Enfin, on veut savoir de m o i si dj elle avait eu ses rgles, ou si elle tait prs de les avoir, et si cette concidence a pu amener dans s o n t e m p rament une rvoluLion, c o m m e il arrive aux femmes lors qu'elles changent ainsi de c o m p l e x i o n . Je rponds ces trois questions qui m'ont t poses : la premire, je dis qu'autant que ma m m o i r e m e le fournit, elle avait le t e m prament plthorique ; elle souffrait habituellement d'un asthme de poitrine qui, dans m o n apprciation, tait convul sif; pour le gurir on a pratiqu une seule fois, une lgre saigne; mais cette circonstance, m o n sens, accrot e n core la splendeur du miracle qui est survenu. Assurment il y aurait toujours eu miracle si, une fois gurie de la phthisie, elle avait conserv son infirmit habituelle d'asthme convulsif o u essentiel qui, n'avait rien faire avec les m a u x incurables occasionns par la mauvaise issue des influences morbides. Mais c o m m e , dans sa parfaite gurison, la petite fille fut encore dlivre de l'asthme convulsif dont elle souf frait avant sa.maladie, c h a c u n comprend trs-bien que ce surcrot donne beaucoup d'importance au prodige arriv. Bien que, c o m m e j e viens de le dire, elle ft, avant sa m a ladie, sujette un asthme c o n v u l s i f , cela ne l'empochait pas de vaquer aux petits travaux de son ge et de s o n sexe ; cet asthme donnait s o n visage un coloris trs-vif et, si j e l'ai appel convulsif, ce n'est pas qu'il vnt d'un vice i n trieur, mais plutt du temprament plthorique de la j e u n e fille. Je rponds maintenant la seconde question qui m'a t pose, et j e d i s ; j e ne sache pas que jamais cette jeune iilie ait eu des accidents hystriques o u convulsifs avant, pendant ou aprs sa maladie ; et le terme de c o n vulsii ajout l'asthme, n'indique rien de c o m m u n avec l'affection hystrique convulsive sur laquelle on m'inter roge. Enfin, j e rponds la troisime question que la
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j e u n e fille n'avait pas encore ses poques mensuelles, quand elle t o m b a malade, qu'elle ne les eut pas dans le cours de la maladie, qu'elles ne survinrent pas dans l'acte de la g u rison, et qu'elle ne les eut pas par suite de cette m m e gurison Elle les'a eues aprs, mais je n e peux en fixer le temps prcis. Je suis certain qu'elle ne les avait pas lorsque, plus d'un m o i s aprs, je donnai mon attestation de sa gu rison, et, autant que j e m e souviens, elle ne les eut que sept o u huit mois plus tard. H m e semble tre certain de ce que je dis, cependant, je ne puis afiirmer que le relard ne fut pas encore plus long.Celle ngation prouve que le c h a n g e m e n t de c o m p l e x i o n et la venue des poques mensuelles n'entre pour rien dans la gurison. D'ailleurs, la m a l a d i e tait de telle nature que la rvolution occasionne par l'ar rive des p o q u e s mensuelles n'aurait pu produire a u c u n bon effet, car il s'agissait d u n mal qui, de sa nature, tait incurable. Il m e semble que, par ces rponses, j'ai satisfait pleinement aux questions qui m'ont t faites. . . . P a r m i les questions que Ton m e pose, on m e d e m a n d e de rapporter tous et chacun des s y m p t m e s qui ont a c c o m pagn la maladie de Marie-Rose, et en particulier ceux qui sont aptes en dterminer le caractre et la nature. P o u r rpondre avec autant de prcision que de clart cette i n terrogation, j e fais observer en premier lieu que la maladie prise ds son principe jusqu'au j o u r de la gurison, dura plus de deux m o i s ; c'est -dire depuis le m o i s de mars (sans pouvoir arriver prciser le jour auquel Marie-Rose t o m b a malade) jusqu' la fin de mai o survint la gurison. Maintenant, pour la maladie e l l e - m m e , j e distingue cinq tats o u cinq phases qui se s o n t succd l'une l'autre, et qui o n t t produites l'une par l'autre. Dans le principe le m a l ne l'ut qu'une influence pidmique de rougeole ; celleci succda une affection ou inflammation d"e poitrine; l'in flammation succda'l'ulcration des p o u m o n s , o u la v o m i q u e ; la v o m i q u e l'enipicme, l'empime la phthisie, si n o u s ne voulons pas joindre ensemble l'empime et la phthisie. Je laisse de ct la rougeole qui a ses s y m p t m e s particuliers, et qui, dans le cas qui nous occupe, n'est que la cause occasionnelle des funestes effets qui se sont produits dans ia suite. Les humeurs n ayant pas t expulse^ dans l a priode a c c o u t u m e , cherchrent une place, et, en stagnation dans la cavit du thoiax, vinrent attaquer les p o u m o n s ; ceux-ci par suite s'enflammrent, et cette inflammation se manifesta par une respiration oppresse, diffrente de celle q u e produit l'asthme c o n v u l s i f auquel, auparavant, tait
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habituellement sujette Marie-Rose, accompagne d'une toux fatiganle et sche, et d'une fivre violenfe, du genre des fivres inflammatoires.Mais c o m m e cette inflamrnaiion.ne put se rsoudre dans les jours critiques, de petits tubercules se formrent dans les p o u m o n s , se runireut e n s e m b l e , et con stiturent le sac purulent que nous appelons v o m i q u e . Celleci se manifesta par une fivre suppurative. une toux plus hu mide, des crachats purulents et ftides, une oppression plus grande, etc. Je ne peux me souvenir maintenant si la malade prouvait des douleurs locales, j e me rappelle seulement bien qu'elle tait sujette des douleurs. Enfin, les matires contenues dans la v o m i q u e , quand celle-ci s'ouvrit, s e rpandirent dans la cavit du thorax et la remplirent, et ce fut un bonheur pour elle q u e l l e n'en fut pas touffe, c o m m e cela arrive le plus -cuvent dans les cas semblables. "Voil l'empime form, et il se manifestait par les signes pr cdents, par un plus grand touffement, p a r l a diliicultde rester couche, d'o rsultait pour la pauvre malade la n cessit d'tre toujours c o m m e assise, par la couleur rouge des pommettes qui se montrait dans les accs de fivre, de venue plus l e n l c ' p a r c e que la suppuration existait dj, et enfin par les sueurs et la diarrhe qui prouvent que la p h t i s i e se joint Pempime ; c'est pourquoi je les ai unis ensemble. On pourrait ajouter qu'un gonflement d m a t e u x apparaissait aux extrmits. Je n e m e souviens pas bien de cette circonstance, et d'ailleurs une semblable e n flure n'accompagne pas toujours l'empime o u la phthisie, surtout lorsqu'il y a des sueurs et de la diarrhe. 11 y avait en outre une grande c o n s o m p t i o n , des i n s o m m i e s , et peuttre quelque autre signe dont je ne peux m e souvenir cause d u laps de temps coul depuis. Je n'ai firme pas qu elle et la face hippocranyue, parce que la couleur rouge des p o m mettes, caractristique de l'empime, faisait qu'on n e p o u vait s'en apercevoir. Les crachats de^enaienl chaque jour plus abondants, plus purulents et plus ftides. Tel tait l'tat dans lequel se trouvait la malade, lorsque je la visitai pour la dernire fois ; alors n'esprant plus pouvoir lui donner aucun soulagement par les ressources de notre art, n o u s consentmes la laisser aller Rome, et avoir re cours aux remdes aurnaLurels, les secours de Part tait devenus impuissants La srie seule des accidents montre c o m m e n t un mal a succd un autre m a l , e t les symptmes que je viens d'numerer rendent sensible le vrai caractre des maladies n o m m e s ci-dessus : tout ce que j'ai dit, j e m'en souviens bien, je l'affirme avec certitude, tant
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c a u s e des observations que j'ai faites sur la malade, q u e par suite des tudes thoriques et. pratiques que j'ai faites dans la profession de mdecin q u e j'exerce. Le chirurgien Sgarzi qui avec moi, donnait ses soins la petite malade, et qui la voyait plus souvent que m o i , a remarqu les mmes degrs, et observ les m m e s s y m p t m e s de la maladie. Enfin, j'affirme q u e ces s y m p t m e s , qui se s o n t succd dans Tordre que j'ai relat plus haut, ne Pont j a m a i s quitte, mais se sont toujours aggravs davantage, car jamais la malade n'prouva a u c u n e amlioration a p p a rente, quelque passagre qu'elle ft. A part le dfunt Jacques Sgarzi, et m o i , aucun autre pra ticien n'a s o i g n la jeune malade Marie-Rose. Tous d e u x nous Pavons soigne ds le c o m m e n c e m e n t d e l maladie, et dans ses diverses phases successives, jusqu' un jour trsvoisin de son dpart pour Rome ; pour ce qui m e c o n c e r n e , c e fut au plus deux jours avant ce dpart ; pour ce qui tout regarde le chirurgien, l'espace de temps dut tre plus court, p e u t - t r e m m e l ' a - t i l vue se mettre en r o u t e ; en effet il habitait Mazzano, et dans les petits pays c o m m e celui l t o u t le m o n d e sait la moindre nouvelle, tous voient ceux qui se mettent en voyage pour un autre pays. Le chirurgien visitait donc la malade, plus souvent que moi ; j e ne pouvais le faire, m o i , que lorsque j'allais Mazzano, c e qui pour l'ordinaire, m'arrivait dux fois la s e m a i n e . D'autres m d e cins n'ont point t appels pour la m a l a d i e ; si on en avait appel, j e l'aurais su c e r t a i n e m e n t parce que dans l e s petits pays on ne peut rien faire e n secret. . ...On me demande quel tait m o n j u g e m e n t sur la maladie de Marie-Rose et sur les diverses phases de cette m m e mal a d i e ; de plus, on veut savoir quelles preuves et quels signes o n t dtermin ma conviction. A cette double question j e - rponds que m o n opinion a vari au fur et mesure q u e variaient aussi les accidents chez la malade. Ici encore, j e laisse de ct la rougeole qui a peu d'importance ; je passe ce qui a rapport au second tat, c'est--dire l'inliammation de poitrine : c'est une maladie dangereuse, n a n m o i n s je crus qu'elle pouvait se gurir en suivant son cours a c c o u t u m ; mais c o m m e cela n'arriva pas, et qu'au contraire le mal se fixa sur les p o u m o n s , qu'il s'y forma des tubercules, et que c e u x - c i se runissant ensemble occasionnrent u n e v o m i q u e , je crus et je jugeai n o n - s e u i e m e n t q u e la m a l a d i e tait dangereuse, mais encore qu'elle tait d'une trs-diffi c i l e g u n s o n , le danger tant b e a u c o u p plus grand etl'esp-' rance illusoire. Quand la v o m i q u e creva, quand, e n m m e
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temps, les matires purulentes inondrent la poitrine, alors je changeai encore d'opinion ; je perdis le peu d'esprance que j'avais conserv j u s q u e - l , je jugeai le mal incurable ; je m'appuyais pour porter ce jugement sur renseignement de nos matres, et sur les leons journalires de l'exprience. La vdmique le plus souvent est mortelle ; quelquefois cependant on en gurit. L'empime ne gurit jamais. Que l'empime ft le mal de Marie-Rose dans cette quatrime phase, et que l'empime ft joint l'tisie, que nous pouvons appeler le dernier degr de cette maladie, cela ressort des preuves et des signes que j'ai rapports pins haut, lesquels en fixant mon j u g e m e n t sur le caractre et la nature de la maladie, m e foraient convenir qu'il y avait i m p o s sibilit de la gurir. Le dfunt Jacques Sgarzi pensait et jugeait c o m m e moi ; il me Ta manifest plusieurs fois, quand il me rendait c o m p t e de tout ce qui tait arriv la malade depuis ma dernire visite, lorsque nous confrions ensemble sur la marche suivre et le jugement porter. Passant maintenant une autre question, on me demande si nous avons e m p l o y des mdicaments et des remdes, et quels ils furent. Je rponds : tant que le mal fut aigu, nous avons employ les remdes qui peuvent conjurer les progrs du mal, combattre l'inflammation et dbarrasser les organes envahis. Quand l'inflammation eut dgnr en vomique, j e ne me souviens pas bien de quels remdes nous fmes usage. Ils furent certainement proportionns la gravit du mal, et tels que nous pouvions les prescrire eu gard au peu de ressources du lieu et la pauvret des personnes. Dans le dernier tat, alors que, c o m m e je l'ai dit, la position tait tout fait dsespre, nous ne prescrivions que des infusions d'herbes et d'autres remdes semblables qui peuvent bien adoucir et calmer la violence de la toux ou la force de l'oppression , mais sont impuissants gurir la maladie principale, laquelle est de sa nature incurable. Je ne saurais affirmer m m e que dans les derniers jours qui prcdrent le dpart de Marie-Rose pour Rome nous e m ploymes encore ces remdes innocents ; il me semble plutt que n o n . . . . ...Marie Rose n'a jamais prouv aucune amlioration dans son t a t ; au contraire elle est toujours.alle de mal en pis ; aussi, malgr nos visites, on pouvait dire qu'elle tait aban donne, parce que l'art ne fournissait aucun remde qui ft capable de la gurir. On me demande quel temps prcis les sacrements furent administrs la j e u n e malade. Je rponds que j e n e m'en s o u v i e n s plus. Je suis pourtant cer-
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tain qu'elle les avait reus depuis bien des jours quand e l l e entreprit le voyage de R o m e , On me demande dans quelle phase de sa maladie elle r e u t les sacrements. Je rponds que l'administration a e u lieu lorsque dj la v o m i q u e avait dgnr en e m p i m e , parcp qu'alors le danger prochain de mort tait permanent. Enfin on me d e m a n d e de fixer le temps prcis auquel U vomiqne dgnra en e m pime, afin c e pouvoir fixer ainsi la dernire phase de la m a l a d i e - A cela j e rponds que, ne m e souvenant pas du temps o la jeune fille fut prise de la rougeole p i d m i q u e , j e n e puis fixer exactement le t e m p s de la quatrime phase d e l maladie, laquelle, suivant l'enseignement d'Hippocrate, la conduisirent les diverses priodes des tats p r c dents. C o m m e la maladie c o m m e n a certainement dans l e mois de mars, je place cette poque le c o m m e n c e m e n t de l'inflammation. Mais c o m m e les inflammations non guries et dgnres en v o m i q u e , si elles ne cdent pas dans un espace de quarante jours, arrivent l'empime, il me semble que j e puis conclure en fixant la dernire priode de l a maladie la fin d'avril, ou au c o m m e n c e m e n t de m a i . Quoi qu'il en soit du reste du t e m p s prcis, c o m m e il y avait dj plusieurs jours que Sgarzi et moi avions dclar sa maladie tout fait incurable, il s'ensuit que dj depuis plusieurs jours l'cmpime s'tait form. Ce que j e puis encore affirmer c o m m e certain, en faisant appel tous m e s souvenirs, c e s t que la dure entire de la maladie, en la prenant l'inflammation suite d e l rougeole, dpassa d e u x mois. ...J'ai dit plus haut l'admirable manire dont la petite Marie-Rose de Luca fut gurie, et je ne peux que rpter ici c e q u e j'ai dj rapport. La gurison, au dire de la petite et de sa m r e , arriva s u b i t e m e n t , i n s t a n t a n m e n t : elle s'tait c o u c h e le soir aussi m a l a d e ; elle fut prise ensuite d'une atroce douleur de poitrine qui la fit rveiller samre; et aprs avoir plac sur l'endroit douloureux l'image d u serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre, elle put prendre c e doux et tranquille s o m m e i l dont elle ne sortit que le m a t i n , rendue une pleine et parfaite sant. Les deux p o q u e s entre lesquelles j e l'ai vue malade et gurie, ne dpassent pas u n e semaine ; et celle que, dans ma dernire visite j e regar dais c o m m e morte, laquelle cause de cela j'avais accord la permission d'aller R o m e , parce qu'il n'y avait plus de r e m d e son mal, j e U revois totalement c h a n g e , dans un tat de parfaite et florissante sant, et, ce qui e s t plus fort, dlivre encore de cet a s t h m e convulsif qui la t o u r -
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mentait habituellement, avant qu'elle ne t o m b t malade. Je dis donc que la gurison fut parfaite, j'ajoute qu'elle fut constante, puisqu'elle n'eut plus aucune maladie ; au moins jusqu' l'anne 1785, p o q u e laquelle j e cessai d'tre m decin Campagnano. S'il en lait arriv autrement, j e l'aurais certainement su, car, c o m m e je l'ai dj dil, rien ne peut rester cach dans les petits p a y s , le chirurgien Sgarzi m'en aurait inform II est certain que j'ai vu plusieurs fois la j e u n e fille, et toujours dans un tat de parfaite sant. On me demande si, avant, aprs, ou pendant la gurison il s'est produit une crise heureuse et salutaire laquelle o n puisse attribuer cette m m e gurison. Je rponds qu'il n'y eut aucune crise ; du m o i n s , ainsi me l'ont rapport et la mre et la fille interroges par moi ce sujet; ainsi encore m e l'ont affirm ceux qui les avaient accompagnes Rome.Jc dis en outre qu'aucune crise n'arrive dans ces sortes de maladies ; une crise ne peut avoir lieu en effet que dans les maladies aigus et qui sont d'une certaine manire priodiques. J'ajoute que si par une fausse hypothse on voulait absolu ment admettre une crise salutaire, c o m m e n t aurait-on pu attendre d'elle le recouvrement subit des forces et de la vivacit, puisque une crise violente aurait plutt d affai blir la malade. Vous me demandez maintenant si cette grande douleur que la j e u n e fille accusa sa mre pendant la nuit peut tre considre c o m m e l'indice d'une rvolution subite favorable sa gurison. Je vous rponds qu' m o n avis, cette grande douleur ne pouvait rien produire de bon, et n'a pu a u c u n e m e n t contribuer rsoudre la maladie. Les matires corrompues n e pouvaient tre absorbes, et les parties attaques n e pouvaient tre raffermies, quand mme on voudrait recourir quelques-uns de ces exemples extraordinaires rapports par certains auteurs, qui racontent que, par un long c o u l e m e n t d'urine, quelques personnes ont t guries de maladies de poitrine rputes incurables. Mme en admettant c o m m e vrais ces exemples extraordi naires, les malades qui ont t guris de la sorte ont d avoir une t r s - l o n g u e convalescence. Or cela n'arriva pas notre Marie-Rose, car aussitt l'application de l'image elle s'endormit de suite, et ne se rveilla qu'au matin, entirement gurie, ayant recouvr ses forces et sa vigueur, ainsi que je l'ai dit plus haut. De tels prodiges ne sont pas l'uvre de la nature. On m e . demande si Marie-Rose n'a pas pu gurir petit petit entre les deux poques o je l'ai vue malade et gurie; et quelle est m o n opinion sur cette gurison ? A cela je rponds que c e qui estarriv n'a pu se faire naturelle-
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m e n t , l'incurabilit du mal tant constate : et quand m m e o n voudrait admettre tort la possibilit d'une gurison, j'affirme qu'il tait impossible que la malade pt passer e n si peu de temps, du trs-malheureux tat o j e la laissai, l'lat de pleine, entire et parfaite gurison o j e la trouvai le d i m a n c h e suivant. J'affirme enfin que, quand m m e la gurison se serait graduellement opre entre ces deux poques, j e ne crois pas qu'il y et de quoi amoin drir le miracle, parce qu'il s'agissait l d'un mal absolument incurable, et que, admise m m e c o m m e vraie la fausse possibilil dont nous avons parl plus h a u t , il aurait fallu un bien plus*long espace de t e m p s pour la raliser, sans c o m p t e r celui dont aurait eu besoin la petite gurie pour se rtablir parfaitement. m o n avis, et c o m m e on peut'le dduire de tout ce que j'ai rapport, j'ai toujours regard ce merveilleux v n e m e n t c o m m e un miracle clatant, et j a m a i s je n'ai chang de manire de voir cet gard. Le d funt Jacques Sgarzi jugeait cet v n e m e n t c o m m e m o i , et, bien des fois, il a admir avec moi l'uvre de Dieu dans c e t t e gurison. Le dfunt archipretre Corneli pensait aussi de m m e , et c'est cause de cette c o m m u n e conviction que, p e u de mois aprs l'vnement, j e rdigeai l'attes tation qu'on m'a reprsente ici,et qu'ils ont signe avec moi : j ' e n dis encore autant de la gurie, de sa mre, et de tous les habitants de Mazzano et de Campagnano qui jamais n'ont vari dans leur apprciation de ce fait, et qui, c o m m e j e l'ai dit plus haut, seraient contrists et dus si on n'ta blissait pas les preuves juridiques de ce miracle. ...Je n'ai rien ajouter ma dposition pour rpondre aux questions qui m'ont t poses : je suis certain q u e jusqu' Tanne 17S5, c'est--dire, tout le temps q u e j e restai mde cin Campagnano, Marie-Rose a toujours j o u i d'une trs-par faite sant : pour ce qui regarde le temps qui s'est coul e n suite, je ne puis rien affirmer de visu et de science certaine. J'ai appris qu'elle s'tait marie depuis, et qu'elle tait morte d'une maladie qui n'avait a u c u n rapport avec celle dont elle Bvait o b t e n u la miraculeuse guridon; en effet elle m o u r u t de c o u c h e .
de
Oui [je sais trs-bien q u e B e n o t - J o s e p h a fait un grand miracle Marie-Rose ma c o u s i n e germaine. Regardez c o m m e certain qu'il la rappel de la mort la vie, et que sans le
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secours de ce bon saint, Marie-Rose n'aurait pu le raconter car elle serait m o r t e alors. Oui elle fut bien gurie ; aprs sa dlivrance, elle se maria, elle eut deux enfants, et si elle n'tait pas morte en couche, elle vous aurait racont, elle-mme c o m m e n t la chose se passa. Vous m e d e m a n derez ce que c'est qu'un miracle ? Que voulez-vous que j e vous rponde, m o i , qui ne suis qu'une pauvre femme i g n o rante ? Je vous dirai donc s e u l e m e n t c o m m e je le c o m prends, que Dieu seul et les saints font des miracles. Et maintenant, je vais vous dire c o m m e n t s'est fait le miracle de Marie-Rose. 11 faut que vous sachiez que cette petite fille avait quatorze o u quinze a n s ; moi aussi j'avais le m m e ge, car nous tions nes toutes deux la m m e poque. Dans le cours de cette anne, il y avait une pidmie de rougeole, et Marie-Rose en fut atteinte, cette rougeole la prit vivement, et on la voyait sortir par tout son c o r p s ; mais ensuite elle disparut, et rentra; Marie Rose alla plus mal, parce que le mal tomba sur la poitrine, et allant toujours de plus mal en plus mal, elle fut rduite l'extr mit. Le mdecin Angclucci demeurant Gampagnano venait souvent Mazzano et la v i s i t a i t ; notre chirur gien Jacques Sgarzi, qui maintenant est mort, la visitait plus souvent; ils disaient quelle tait la maladie de MarieRose, mais ils se servaient pour cela de m o t s et de termes, je ne sais s'ils taient latins ou autres, mais n o u s autres femmes nous n e les comprenions pas ; ce que l'on compre nait pourtant, c'est qu'ils disaient que Marie-Rose tait bel et bien perdue, qu'il n'y avait ni r e m d e , ni esprance, qu'il fallait qu'elle ret es derniers sacrements, qu'elle ft assiste par ls prtres. Et, e n effet, on lui donna l e viatique et l'extrme-onction, et le seigneur archiprtre Corneli qui est m o r t maintenant la prpara bien mourir. Je regrette vivement que l'archiprtre et le chirurgien soient morts tous les d e u x ; s'ils taient vivants, c'est'eux qui pourraient vous raconter tout bien mieux que nous autres pauvres femmes ne pouvons le faire. Le susdit chirurgien nous disait que les p o u m o n s de Marie-Rose taient lout gts, et c o n s u m s , qu'il en restait bien peu, et que quand ce peu serait dtruit, Marie-Rose mourrait. Vous voulez que je vous dise le triste tat de la pauvre petite, et les signes qui indiquaient qu'elle ne pouvait chapper la mort. Que voulez-vous que je vous dise l dessus? Je c o m prends bien, mais j e ne saurais l'expliquer. Ce qui est cer tain, c'est que Marie-Rose faisait piti, et nous croyions tous qu'elle mourrait sous p e u . Elle avait un tel toutfement qu'elle ne pouvait reprendre son souffle ; elle avait toujours,
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l a b o u c h e ouverte cau,se de l'oppression, et la poitrine lui faisait c o m m e un soufflet. Elle toussait et toussait toujours, et jamais elle ne s'arrtait; elle rejetait de vilains crachats purulents, elle suait, et avait un r e l c h e m e n t de corps. Elle n'avait plus que la peau et les os, et ne pouvait pas m m e sortir du lit pour qu'on le reft. Oh 1 vous figurez-vous quel tat el e tait rduite ! Dans ce t e m p s , un tranger n o m m Antoine Gavetti, qui depuis est mort, vint Mazzano, et n o u s apprit qu' R o m e s'tait rvl u n bon saint qui faisait beaucoup de miracles, que ce saint tait un pauvre, n o m m Benot-Joseph Labre ; en m m e temps cet tranger apporta quelques images sur papier de c e saint. En appre nant ces choses n o u s reprmes de suite courage, et nous p e n s m e s que ce bon saint pourrait bien faire un miracle e n faveur de Marie-Rose. L a malade, sa mre, moi et d'antres encore n o u s c o n m e s cette esprance ; n o u s nous fmes donner par Gavelti u n e des images du saint qu'il avait a p portes, n o u s la plames avec ferveur sur la malade, en Je priant de vouloir bien la gurir, et, si n o u s primes avec ferveur, la pauvre petite malade le ft avec une ferveur plus grande encore : je m e souviens que n o u s disions : si vous voulez n o u s la laisser et n o u s la rendre, n o u s vous pro m e t t o n s de la conduire Rome, mais si c'est n o n , achevezla et dlivrez-la de s e s p e i n e s . i l nous parut q u e l l e c o m m e n t aller un tantinet mieux, et pourtant la maladie c o n t i n u a i t ; mais je vais vous dire c o m m e n t arriva cette amlioration. Vous devez savoir qu'il y eut Mazzano une secousse de tremblement de terre ; nous e m e s t o u s peur e t n o u s n o u s sauvmes e n disant : Eh ! c o m m e n t allons-nous faire avec cette pauvre m a l a d e ? Il est impossible de la por ter hors d'ici. Benot, pensez elle, vous, a u t r e m e n t elle va mourir crase sous les pierres ; pour n o u s , n o u s nous en allons. L.a pauvre petite prise de peur, t o u t e suffoque qu'elle tait, se leva sur s o n lit et voulut se vtir ; un peu s e u l e , un peu avec l'aide des autres elle y parvint, et n o u s la portmes dans la c a m p a g n e la Madone des grces, l o i g n e d environ u n demi-mille de M a z z a n o : arrivs l, n o u s la c o u c h m e s par terre sur quelques hardes que nous avions a p p o n e s a v e c n o u s , et n o u s demeurmes l jusqu'au j o u r , puis n o u s r e t o u r n m e s la maison : N'allez pas croire que soit pour aller, soit pour revenir, Marie-Rose pt marcher seule, n o n ; il fallait quelqu'un pour la soutenir de chaque ct, et quelquefois mme il fallut qu'un des h o m m e s qui tait avec n o u s la portt sur s o n dos. Nous c r m e s que Benot-Joseph lui avait donn la force de se
LES
MIRACLES
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DE
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lever pour chapper au d a n g e r ; pourtant elle continuait aller bien mal, n o u s avions peur d'tre obliges de la laisser la Madone des grces, et qu'elle n'y mourt ; car, pendant toute cette nuit, elle ne fit que marmotter, tousser et se lamenter, avec u n e grande oppression. Ramene la maison, dans les jours suivants, elle se levait un peu, si peu que ce soit ; mais il fallait la porter sur un sige, et elle n'en bougeait pas ; quand elle tait assise, on voyait ses jambes enfles. Nous voulions essayer si nous parviendrions la faire un peu marcher, nous l'engagions se mettre en mouvement, elle disait qu'elle ne le pouvait pas, et n o u s , nous exigions qu'elle le ft. Enfin, elle se dcida essayer, appuye, sur n o u s , un bton la main, elle c o m m e n a faire quelques pes dans la chambre, puis elle retourna s'as. seoir, et l'on voyait qu'elle avait e u grand'peine faire ces quelques pas : d'aulres fois appuye seulement sur s o n bton elle faisait peine quelques pas, tout oppresse. Voyant donc que la maladie ne cdait pas, Marie-Rose c o m mena presser sa mre de la conduire Rome pour visi ter le tombeau de Benot-Joseph : sa m r e lui disait qu'eHe lui donnerait volontiers cette satisfaction, mais qu'elle n e savait comment elle pourrait faire pour la conduire j u s q u e l, puisque, bien qu'elle se levt quelques heures chaque jour, la malade continuait a aller aussi m a l qu' l'ordinaire ; mais la pauvre petite continuait ses instantes prires. Sa mre se rsolut enfin la contenter, et m o i j e dclarai que je voulais l'accompagner. On demanda la permission a u mdecin et au chirurgien, et tous d e u x dirent que cela tait impossible, q u e l l e ne pourrait se tenir cheval, q u e nous n e la ramnerions pas Mazzano, qu'elle mourrait en route. Mais v o y a n t que nous tions rsolues la con duire .Rome tout prix, ils finirent par cder, et n o u s laissrent partir : j e m e souviens parfaitement qu'ils dirent alors qu'un saint pouvait seul la gurir, parce que MarieRose tait bet et' bien perdue ; nous comprmes trs bien qu'ils pensaient que Marie-Rose ne reviendrait pas Maz zano, moins que le serviteur de Dieu n e lui ft la grce de la gurir. Enfin avec ces permissions du mdecin et du chi rurgien, n o u s vnmes R o m e ; je ne saurais vous dire le jour prcis de notre dpart, mais ce que je dis est t o u t vrit. Du mieux que nous pmes, noua plames MarieRose assise sur un petit ne ; mais c o m m e elle ne pouvait se maintenir, et qu elle serait t o m b e , il fallut toujours q u e quelqu'un la soutnt : le voyage l'ut long et trs fatigant. De Mazzano R o m e , on compte vingt-cinq milles ; alors il
faisait jour de bonne heure, n o u s partmes huit heures, il tait dj jour, or n o u s arrivmes R o m e en Ire la ving t i m e et la vingt et u n i m e heure : e n route il fallait s'ar rter tout instant, parce que la pauvre petite, encore que l'ne marcht au petit p a s , se trouvait plus suffoque aprs quelques pas, et avait besoin de reprendre un peu son souffle; elle disait qu'elle tait c o m m e brle l'in trieur, il fallait trs souvent lui donner boire, cause de la soif qu'elle prouvait, et pour lui rafrachir la b o u c h e , .qui tait s-che, par s-uile de ce feu intrieur qui la b r lait ; quelquefois aussi, il fa lait la descendre de son une et l'asseoir terre. Mais c'est assez : ce fut un voyage trs fatigatit, c a u s e de notre pauvre malade. Arrives R o m e la m a i s o n du susdit Antoine GavelLi, nous allmes visiter le tombeau de Benot-Joseph ; Marie-Rose no pouvait marcher seule, sa mre et moi n o u s devions la soutenir tou jours, l'une d'un ct, l'autre de l'autre : mais elle n'obtint pas sa gurison, et nous la ramenmes la maison aussi malade qu'auparavant. Je ne saurais vous dire au juste c o m b i e n de temps nous passmes Rome ; a doit tre deux j o u r s , parce que n o u s avons mis quatre jours pour l'aller, le sjour R o m e et le retour; pendant les deux jours d e notre sjour R o m e , n o u s conduismes trois fois, la petite malade au tombeau de Benot-Joseph, et je me rappelle qu'une fois avant de n o u s rendre la Madone-des-Monts, n o u s allmes faire nos dvotions l'glise d'Ara-Gli, o il y avait u n religieux frre d'Elisabeth Mancini, qui e s t mort maintenant. On m e d e m a n d e si TMarie-Rose fit aussi ses dvotions avec n o u s . Je rponds que n o u s n o u s tions tous confesss, mais je ne m e rappelle pas si elle c o m m u n i a avec n o u s , parce que je n e m e souviens pas si elle avait pu passer la nuit prcdente sans boire. Dans les trois visites que n o u s fmes au t o m b e a u du serviteur de Dieu, tant A l'aller qu'au retour, il fut ncessaire que deux p e r s o n n e s conduisissent et s o u t i n s s e n t Marie Rose. Elle fut plus mal q u e j a m a i s la n u i t qui suivit la troisime v i site :en effet, une certaine heure, elle se prit jeter des cris aigus et dire qu'elle prouvait u n e atroce douleur la poitrine. Nous nous l e v m e s toutes aussitt, n o u s a l l u m m e s u n flambeau ; sa pauvre mre lait dsespre, parce qu'il n'y avait l ni m d e c i n , ni c h i r u r g i e n ; cependant Antoine Gavctti proposa d'en aller chercher un. Dans cette angoisse la mre prit une i m a g e de Benot-Joseph et la plaa sur la poitrine de sa fille, en lui disant qu'elle se r e c o m m a n d e lui, q u e lui seul pouvait la gurir. A peine l'image fut-elle
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place que la petite fille s'endormt, et n o u s toutes nous r e tournmes au lit. Pendant tout le reste de la nuit on n ' e n tendit plus rien, la malade dormit p r o f o n d m e n t ; elle s'veilla au matin, et elle dit toute j o y e u s e qu'elle tait gurie, qu'elle n'avait plus rien ; elle s'habilla toute seule, elle n'avait plus d'oppression, elle ne toussait plus, elle n e se plaignait d'aucune douleur, elle avait repris ses forces et ses couleurs; en un mot elle paraissait c o m m e quelqu'un qui n'a j a m a i s t m a l a d e , et n o u s disait qu'elle avait u n e g r a n d e faim : e l l e m a n g e a de c e q u i t a i t l a m a i s o n , d e t r s bon apptit. Toutes ensemble nous allmes la Madonedes-Monts pour remercier Benot Joseph ; quand n o u s vou lmes sortir de l'glise mot et s a mre nous nous apprtions, la soutenir c o m m e nous le f a i s i o n s auparavant, mais elle nous dit qu'elle ne voulait p a s tre soutenue, q u ' e l l e tait gurie, qu'elle n'avait plus besoin d'aide, et en effet elle marcha librement, plus vite q u e n o u s , elle nous prcdait toujours, nous ne pouvions la suivre, et par les rues elle rptait encore q u ' e l l e avait u n e grande faim; nous lui ache tmes des cerises et des petits pois. Nous remercimes notre bienfaiteur, nous fmes enregistrer le miracle la sacristie; t o u s c e u x q u i a v a i e n t v u la p a u v r e p e t i t e les j o u r s p r c d e n t s f u r e n t t o n n s d e la v o i r g u r i e , m a i s je n e sais p a s qui ils taient. Nous revnmes Mazzano le m m e j o u r ; pendant la route n o n s e u l e m e n t la petite 'n'eut plus b e soin d'tre soutenue sur s o n n e ; mais elle voulut y monter seule, et m m e quelquefois aller p i e d s ; en dehors de la porle Angelica elle fi t c o m m e deux milles pieds plus librement et plus vite que n o u s . 'Pendant toute la route elle n'eut besoin de rien, elle n'avait aucun reste du m a l pass ; loin de l, elle n'aurait fait que manger, si o n Pavait laisse faire, parce que, disait-elle, elle avait faim ; el quand nous nous arrtmes en route, elle lit un bon repas, avec un apptit qui faisait envie voir. Quand nous arrivmes M a z z a n o , t o u s se rjouirent e n la v o y a n t g u r i e e t se m i r e n t dire : Quoi ! c ' e s t l M a r i e - R o s e ? N o n c e n ' e s t p a s e l l e . EL comment avez-vous.fait? Et n o u s nous disions que c'tait Benot Joseph qui avait fait le miracle : tous restaient stupfis parce qu'en la voyant partir de Mazzano tous croyaient qu'on ne l'y aurait jamais ramene. Cette j o i e fut particulirement partage par le chirurgien, l'archiprtre, le vicaire et les autres prtres ; et puis, quand j e dis tous, il me parat que j'en ai dit a s s e z , tous confessaient qu'un autre qu'un saint n'aurait jamais pu gurir Marie-Rose, et la gurir de telle manire qu'elle et recouvr ses forces, ses
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couleurs, et mme encore de l'embonpoint. Bref elle r e c o m m e n a de suite faire les travaux de la campagne et de la maison proportionns son ge, c o m m e si jamais elle n'avait t malade, et dans la suite elle s'est toujours bien porte, n'ayant jamais eu aucun m a l . E l l e se maria plus tard, elle eut deux enfants, et mourut sa deuxime c o u c h e . Tout ce que je viens de vous dire, j e le sais de'science certaine, p a r c e q u e Marie-Rose tait ma cousine g e r m a i n e ; nous habitions la m m e m a i s o n , Tune au-dessus, l'autre au-dessous; j'tais t o u jours avec Marie-Rose, je vins Rome avec Marie-Rose, je restai encore avec elle depuis jusqu' son mariage; bien plus n o u s c o u c h i o n s toujours dans le m m e l i t ; aprs son mariage, j e l'ai rpvue t i s souvent et c'est pour cela que j e sais qu'elle n'a jamais plus t malade, l'exception de quelques fivres pendant l't, chose qui arrive peu prs tout le monde dans notre mauvais air. Vous m e demandez, quels taient ceux qui taient en notre compagnie lorsque n o u s vnmes Rome, j e vous rponds qu'avec la mre de Marie-Rose et m o i il y av<iil Anloine Gavetti, Elisabeth M a n cini, son mari, ses deux surs Jrmetto et Hlne Marini. ...Avant de tomber malade Marie-Uose tait d'un bon t e m p r a m e n t , elle n'avait jamais souffert d'aucune i n c o m modit. Vous me demandez si elle avait un peu la respiration difficile. Je vous rponds qu'il m e parat que n o n : n o u s tions petites filles toutes les d e u x , ensemble n o u s j o u i o n s et n o u s cautions, et quand on est enfant on ne remarque pas tant de choses. Vous me demandez si avant de .tomber malade elle avait les poques des f e m m e s , j e v o u s r p o n d s que je ne m e le rappelle p a s . Vous me demandez si avant sa maladie, ou pendant &on cours, o u depuis sa gurison elle a souffert quelques-unes de ces i n c o m m o d i t s que l'on appelle ordinairement des convulsions o u affections hystriques. Je vous rponds que tout au m o i n s tant qu'elle est reste petite fille, elle n'a jamais souffert aucun mal de cette sorte. Depuis son mariage il peut se faire qu'elle en ait endur, parce que dans les grossesses toutes les iemmes soutirent plusou moins de ces i n c o m m o d i t s . Vous m e demandez c o m bien de t e m p s dur la maladie. Je vous rponds qu'en c o m m e n a n t par la rougeole elle a dur environ deux m o i s . 11 m e semble q u e l l e eut la rougeole au c o m m e n c e m e n t d'avril, et n o u s vnmes R o m e o se lit le miracle sur la fin de mai. On m e demande si et quand Marie-Rose r e u t les derniers sacrements. Je rponds que je n e m e rappelle pas ! p o q u e prcise, mais il m e aemnto que c e dut tre envirun. vingt j o u r s avant notre dpart p o u r Rome. On m e d e m a n d e
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pendant combien de t e m p s Marie-Rose fut visite par l'archiprtr Corneli. pour qu'elle ne mourt pas sans secours. Je rponds, car je me le rappelle trs bien, q u e l l e fut assiste, pendant un certain n o m b r e de jours, et par Tarchiprtre, et parquelqu'autres prtres, le vicaire, entre autres,qui mainte nant est mort; mais j e n e m e rappelle pas le nombre prcis de ces jours. On m e d e m a n d e depuis combien de temps ces visites taient interrompues lorsque n o u s partmes pour Rome. Je rponds que je ne me le rappelle pas prci sment ; c'tait depuis quelques jours, et probablement depuis qu'Antoine Gavetti n o u s eut apoort l'image de Benot-Joseph. On m e demande pourquoi les prlxes ces srent de la visiter. Je rponds : c'est qu'il paraissait que le danger de mort n'tait plus aussi prochain. On me demande si depuis que les prtres avaient cess de la visiter, ou depuis que la malade c o m m e n a donner quelque signe d'amlioration, en se levant de son lit, en fanant quelques pas comme j e l'ai expliqu plus haut, on esprait que MarieRse pt gurir. Je rponds que toute l'amlioration con sistait en ce que j'ai dit, mais que Marie-Rose allait toujours mal; elle avait la m m e oppression, la m m e toux, le m m e drangement de corps, elle rejetait les m m e s crachats vilains eL purulents. Le mdecin et le chirurgien ne tenaient aucun compte de cette amlioration, e t ne donnaient aucune es prance qu'elle pt gurir, au contraire ils disaient qu'elle mourrait certainement, c'est pourquoi ils ne voulaient pas nous permettre d'aller R o m e , assurs qu'ils taient qu'elle ne reviendrait pas Mazzano, si ce bon saint ne faisait pas pour elle un miracle.
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j'allais lavoir, je demandais sa mre ce que disait le s e i gneur Jacques Sgarzi, notre chirurgien, qui maintenant est m o r t : la mre m e rpondait que le seigneur Jacques Sgarzi et le mdecin Angelucci qui rsidait Campagnano, mais venait aussi Mazzano parce qu'il y tait oblig, la re gardaient c o m m e perdue, et disaient qu'il n y avait point de remde son mal, que ses p o u m o n s taient consums, qu'il n'en restait qu'un petit peu, et que quand ce petit peu serait consum, alors Marie Rose mourrait. Il vous suffit de savoir qu'on lui donna tous les sacrements jusqu' la Sainte Huile, qu'elle tait entre les mains des prtres, et q u e de m o m e n t en m o m e n t on s'attendait devoir l'ensevelir c o m m e les morts ; dj o n tenait prt tout ce qui tait ncessaire, et aussitt qu'on sonnait la c l o c h e des morts nous croyions tous que c'tait pour Marie-Rose. Dans ce temps, vint Antoine Gavetti ; la petite et sa mre c o n urent une grande confiance en Benot-Joseph, et se r e c o m mandrent du fond du c u r sa protection : il parait qu'elle c o m m e n a aller un peu' mieux, mais ce m i e u x con sistait e n ce qu'elle se levait un peu de son lit, qu'elle se t e nait un peu assise, qu'lant soutenue elle pouvait faire quelques pas dans la maison ; elle tait cependant tou j o u r s malade de la m m e manire, et j e m e souviens que j e disais sa mre, elle se meurt, ne v o u s y trompez pas, parce qu'elle tait oppresse, c o n s u m e et qu'elle toussait c o m m e avant. F i n a l e m e n t on voulut la conduire R o m e ; il paraissait que c'tait impossible, parce qu'elle tait plus m o r t e que vive, et tous d i s a i e n t : ils la m n e n t mourir R o m e , elle ne reviendra pas M a z z a n o ; je la vis le soir avant son dpart, elle allait mal c o m m e d'ordinaire et je m e disais part moi : Dieu la bnisse ! Ils partirent de b o n n e h e u r e le matin, j e n'tais pas encore leve et je n l a v i s p a s . Trois o u quatre jours aprs elle revint Mazzano, m a i s que voulez-vous que je vous dise, Marie-Rose tait tout autre. J'entendis dire par tout le monde que MarieRose revenait et qu'elle tait gurie; pour ma consolation et m o n c o n t e n t e m e n t j e courus au-devant d'elle, et j e me s o u viens qu cause de ma prcipitation j e tombai. D'autres personnes encore allrent au-devant d'elle ; quand n o u s la vimes nous restmes stupfaits; elle marchait l i b r e m e n t et vivement, elle avait toutes ses forces, de belles couleurs sur le visage, on et dit qu'elle n'avait jamais t m a l a d e ; e t remarquez bien qu'elle n e marchait pas sur une route u n i e , m a i s par des ctes rapides. T o u s nous lui fmes bon accueil, tous n o u s nous rjoumes et elle nous disait t o u s : j e s u i s
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gurie, je suis gurie ! Elle disait la vrit, car elle se portait trs-bien, tout c o m m e avant qu'elle ne tombt malade, et quand elle fut prs de la maison de sa tante, elle lui cria d e l a r u e : tante, tante, je suis gurie, et aussitt elle se mit courir dans les escaliers pour se faire voir sa tante. La mre, la fille et tous les autres qui taient l n o u s racontrent que le serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre, avait fait un miracle parcequ'elle s'tait recommande lui et qu'elle avait t gurie instantanment. Sgarzi et Angelucci la virent ensuite, et eux aussi demeurrent stup faits, je leur ai e n t e n d u dire bien des fois que celte g u rison tait un miracle de ce bon saint ( quand Marie-Rose tait malade, ils disaient dj que personne ne pouvait la gurir si ce n'est un saint. C'est l tout ce que je sais ; ce que je'puis ajouter c'est que je le sais parce q u e j'tais l'amie de la mre et de Marie-Rose, j'allais la voir, j e l'ai vue quand elle tait malade, j e l'ai revue ensuite gurie, c o m m e je viens de vous le dire, et depuis elle s'est toujours bien p o r te, elle se maria, eut deux enfants, et m o u r u t en couche. Il y a treize ans m a i n t e n a n t que ce miracle est arriv ; la maladie dura pas mal de temps, il m e semble que a doit lre environ deux mois ; j e me souviens que quand MarieRose tait malade on mangeait les fves et elle gurit sur la fin de mai. Avant de tomber malade elle tait forte et ro buste, blanche et rose c o m m e une cerise, elle se livrait aux travaux de la campagne. Yous m e demandez si avant de tomber malade elle avait la respiration oppresse, et je vous rponds que non. Pour ce qui. regarde sa maladie et les mau vais eiTets qui en dcoulrent, j e ne saurais m'expliquer mieux que j e ne l'ai fait. Vous me demandez quand lui furent administrs les sacrements et combien de temps avant son dpart pour Rome ; je rponds : je sais que les saints sacrements lui furent administrs, je sais qu'elle a t remise entre les m a i n s des prtres; mais j e ne peux rien me souvenir de plus, encore moins p u i s - j e vous dire la date.
ARTICLE CINQUIME
DISCUSSION DU PREMIER MUSCLE.
i . L'an 1783, au mois de mars, Marie-Rose de Luca, j e u n e fille trs pauvre de la ville de Mazzano, dans la quatorzime
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o u quinzime anne de son ge, fut atteinte de rougeole pidmique. En effet, le dbut de sa maladie nous est ainsi racont par Franoise de Luca, sa mre : Je vais v o u s d i r e c o m m e n t se passa la c h o s e . . . Cette pauvre enfant avait quatorze ou quinze a n s . . . Elle fut atteinte de r o u er g e l e ; c'tait dans le m o i s de m a r s . . . Darius Angelucci mdecin qui la traitait est d'accord avec elle et aussi les autres tmoins j u s q u ' a u dernier. B i e n t t la r o u g e o l e n'aboutissant p a s u n e c r i s e p a r f a i t e , la m a l a d i e d g n r a s u c c e s s i v e m e n t en d'autres qui prsentrent les plus graves s y m p t m e s : M a i s , ajoute Franoise de Luca, cette rougeole n e sortit pas bien, elle n e gurit pas et alla de mal en pis, il fallu! appeler le m d e c i n et le chirurgien... Je n e puis dire ce qu'tait le mal, j e dis s e u l e m e n t que la pauvre enfant tait toujours au lit, t o u t touffe, toussant, ayant la livre ; le m d e c i n et le chirurgien disaient qu'il n'y avait p l u s de r e m d e et m e l'avaient donne pour morte. Ce que cette trop pauvre f e m m e , tout fait illettre n e peut rvler, Darius Angelucci mdecin traitant l'explique ainsi dans s o n opinion. 11 dit que les h u m e u r s p e c c a n t e s , n o n e x p u l s e s avaient t r e p o u s s e s d a n s la p o i t r i n e , q u ' e l l e s t a i e n t ensuite a p p a r u e s s o u s f o r m e d e v o m i q u e . puis d e m p y m c auquel s'tait joint la phthisie. C'est p o u r quoi, parce qu'il n e paraissait plus d'espoir de salut et qu'on voyait la maladie a u g m e n t e r de j o u r en j o u r , Marie-Rose re ut d a n s ce m m e m o i s de mars, d e l'archiprtre Gorneli le secours des derniers sacrements. 2 . P e n d a n t ce temps arrivait Mazzano, Antoine Gavett qui, avec quelques images du vnrable serviteur de Dieu,, apporlait la nouvelle des miracles que Dieu, disait-on, accomplissait son tombeau de R.omc. Laure Rose de Luca le r a c o n t e a i n s i : En ce temps, il arriva que vint Mazzano u n voiturier ; il se n o m m a i t Antoine Gavetti, et il est m o r t d e p u i s ; il affirmait qu' R o m e on faisait grand bruit d ' u n h o m m e q u i f a i s a i t d e g r a n d s miracles, q u e c ' t a i t u n petit pauvre,, appel Benot-Joseph L a b r e ; d o n t il apportait quelques i m a g e s . Quand elle entendit cela, Marie Rose excite par l'espoir de recouvrer la sant re courut ce vnrable serviteur d Dieu. Aussitt (ce s o n t les paroles du prcdent tmoin) la maladie c o m m e n a s'amliorer un tant soit peu, le mal continuait c e p e n dant . Mais pour qu'on n e ft pas induit en erreur par c e s paroles, cette f e m m e sincre et franche s'exprime c o m m e il s u i t : Je vais vous dire c o m m e n t arriva cette amliora it tion. 11 faut que vous sachiez qu' Mazzano il y eut une
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a secousse de tremblement de terre, que tout le monde fut dans la terreur, que tout le monde se sauva... La pauvre a enfaaat saisie de crainte, tonte essouffle, s'assit sur son lit et voulut s'habiller, elle le fit un peu toute seule, un peu aide : n o u s la portmes dans la campagne, la Madone . des Grces, qui est-distante-de Mazzano d'un d e m i - m i l l e . . . Reporte, la maison elle fut remise au lit, mais les jours .a suivants elle se levait tant soit peu chaque jour. On le voit donc Marie-Rose fuit une premire fois soulage des peines :et des douleurs de sa maladie. '3. Bu reste, les autres tmoins ne disent m o t de c e t r e m h t a e n d e terre. Ils racontent feulement que Marie-Rose mue de la clbril du vnrable serviteur de Dieu se m i l penser Home. Franoise, sa m r e , voyant l a gravit de la maladie, et jugeant tout d'abord le voyage impossible, se rcria en ces i ci m e s : Mu fille j e l'y ferai conduire ; mais . c attends d'abord oire un4.eu mieux, autrement c o m m e n t < veux-<lu qu'on fatso pour le porter. Marie-Rose persistait, elle -s'obstinait dire qu'elle voulait aller R o m e ; et <t comme sa mre faisait les mmes diJiiculls, elle rponc dait qu'elle t e ferait m e l l r e clans un panier du voiturier f Antoine Gavetli. Enfin S U T ses pressantes sollicitations elle fut conduite Ronve sur un ne. Elle fut mise (ainsi parle la mre] en quilibre aussi bien que possible . sur un ne, parce qu'elle ne pouvait monter seule, il fallut encore que quelqu'un de no.us la soulnt, et t o u t instant il fallait lui donner boire parce qu'elle se plaignait sans cesse d'une grande soif. 4. Ce que nous a^sons jusqu'ici rapport parat d p r i m e aboid vraiment extraordinaire : mais allons en avant, exa minons attentivement ce qui va bientt suivre. Ayant sur mont les difficults du voyage, Marie-Rose parvint Rome, ce qu'on dit, sous Je poids des m m e s symptmes de la maladie, encore aggravs. Elle est reue par Antoine Ga' vetti et les siens en sa maison ; il habitait cette partie de la ville qu'on n o n m e l t s Campilclli, prs de la rue ou place de m i m e n o m . Cette premire nuit, dit Hlne Marini une des compagnes -de Marie-Rose, la pauvre fille fut assez '.mal, elle ne fit que se plaindre . Nanmoins, au matin elle a assez de forces peur pouvoir, s o u t t n u e par deux femmes, monter la pente du Capilolc, entrer dans le temple -de la "Vierge IL re de Dieu, m Aratveli, assister au saint-sacrifice, et iifin aller au t o m b e a u 'du vnrable s e n i t e u r de Dieu dans l'glise consacre sous le vocahle de Sainte-Marie aux Monts. Des pi-iies y fuient faites c o m m e l'atteste la mme
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Hlne Marini. Mais le miracle n'arriva pas, il paraissait cependant qu'elle (Marie-Rose) tait un tantinet mieux. Retourne la maison, la nuit suivante elle marmottait et se lamentait mais pas autant que la premire n u i t . Lorsque brilla le jour, elle se dirigea par le m m e chemin vers l ' h o m m e vnrable, et regagnant ensuite la maison elle rpondit aux demandes qu'elle se sentait un petit p e u mieux . Cependant Gaspar Mancini dit elle tait essouf fle et il fallait l'asseoir. Enfin la troisime n u i t - p r i s e tout coup d'une vive douleur de poitrine elle veille de ses cris sa mre endormie, celle-ci dnue de secours h u m a i n s se rpand en prires devant le vnrable Benot-Joseph et applique son image sur la j e u n e fille souffrante. Ainsi se fit, dit-on, que Marie-Rose reposa tranquillement, et qu'au m a t i n rveille de son s o m m e i l elle se reconnut parfaitement gurie. 5. De ces faits contenus dans le sommaire, l e s patrons de la cause croient pouvoir conclure que, par l'intercession du vnrable serviteur de Dieu, Marie-Rose a t instanta n m e n t ramene d'une phthisie pulmonaire confirme s o n ancien tat de sant. En vrit j e dsirerais que la c h o s e ft ainsi; mais je vois trop que la question n'est pas aussi claire, et qu'elle soulve beaucoup de difficults. Q u a n t a moi dans les objections que je suis charg d'office de soulever, j e n e m'carterai pas, de la largeur d'un ongle, de la route que l'immortel pontife Benot XIV nous a trace avec tant de sagesse, dans les causes de cette sorte. 6. T o u t d'abord, t u d i o n s a v e c soin, et pesons avec m a t u rit la doctrine que formule BenoitXlV (de la batification des serviteurs de Dieu et de la canonisation des bienheureux, liv. IV, part. 1. c. 8, 2) : Car ceci est le fondement de toute l ' e n q u t e : Pour que la gurison de maladies et d'infirmits (ainsi parle le glorieux Pontife,) soit compte parmi les mi racles, plusieurs conditions doivent concourir : l a p r e m i r e est q u e la maladie soit grave, impossible o u difficile a g u r i r ; la seconde, que la maladie chasse n e soit pas dans sa dernire priode o u phase, trs voisine de son d clin; la troisime, qu'aucun m d i c a m e n t n'ait t e m p l o y , ou, s'il en a t administr, qu'il ait t sans effet u t i l e ; l a quatrime, que la gurison ait t subite et instantane ; la cinquime, q u e la gurison ait t parfaite, entire, t o taie ; la sixime, qu'il n'y ait e u aucune vacuation notable, a u c u n e crise survenant e n t e m p s opportun, par une cause c o n n u e ; car s'il en a t ainsi, la gurison ne passera plus alors pour miraculeuse, elle sera naturelle en tout ou
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partie ; la dernire condition est que la maladie enleve ne revienne plus Donc pour que la gurison de MarieRose soit admise c o m m e vrai miracle il faut que toutes ces conditions requises soient remplies en elle. Car que dire si la gravit du mal n'est pas vidente? Que dire si la difficult d'une gurison par les remdes naturels ne peut" pas tre prouve? Que dire si manifestement, la malade est revenue par degrs, et non instantanment, s o n tat primitif de sant? Or, vraiment si nous poursuivons quelques instants avec attention une semblable enqute, nous rencontre rons soit du ct de la maladie, soit du ct de la gurison des raisons qui enlveront au cas actuel toute apparence de miracle. 7. Pour ce qui concerne la maladie, il n'y a pas de quoi la juger aussi grave qu'on l'affirme ; et, e n admettant jus qu' certain point sa gravit, elle n'tait certainement ni impossible, ni difficile gurir. L-dessus j e constate tout de suite que Darius Angelucci mdecin traitant, en dter minant la maladie principale de Marie-Rose, s'est grande ment tromp, et que le dfenseur de la cause lui m m e s'est spar de.son opinion. Ecoutons-le, je vous prie, dfinissant ainsi le caractre, la nature et l'volution de la m a l a d i e :
Relativement
< maladie de Marie-Rose) je distingue cinq tats, ou cinq r priodes de la maladie, se succdant Tune l'autre, et produites l'une par l'autre. Au c o m m e n c e m e n t la maladie ne fut que la rougeole pidemique ; la rougeole succda l'attaque o u l'inflammation de poitrine ; l'inflammation l'ulcration du p o u m o n ou la v o m i q u e ; la vomique l'empyme, l'empyme la phthisie, si toutefois on ne confond pas e n s e m b l e la phthisie et l'empyme. Ailleurs il s'explique plus explicitement disant : E n l'anne 17-83, prcisment au mois de mars, la j e u n e fille susdite, qui pouvait alors compter environ quatorze ans d'ge, f( fut atteinte de la fivre morbilleuse, vulgairement appele a rougeole. On administra tous les r e m d e s convenables, habituellement e m p l o y s , mais la maladie ne poursuivit pas son cours a c c o u t u m , et, manquant de la crise < voulue, dgnra on une autre; car l'humeur maligne n o n expulse occasionna une violente inflammation de la p o i trine; le sang contamin rest stagnant dans la cavit de la poitrine, occasionna une vomique des poumons, Ia quelle se changea ensuite en un e m p y m e incurable. 8. Puis, pour tablir l'existence de l ' e m p y m e et pouvoir insinuer la gravit de la maladie, le m d e c i n accumule les
LES SPLENDEURS
LA FOI.
argumentsjiavoquant jusqu' la doctrine m m e dTIippocrate. fl dit en effet; : Q u e la maladie de Marie-Rose en sa q u a r. trirne priode ait t un e m p y c m e et qu' Vempyme se . soit jointe la phthisie, que nous pouvons appeler la der te nire. priode de la maladie, c'est ce q u i rsulte des signes a e des preuves q u e j ' a i numrs plus haut, lesquels, e n if m m e temps qu'elles m e dterminrent porter un juge m e n t sur le caractre et l'a nature du m a l m e firent aussi juger la gurison impossible. Mais enfin quels sont d o n c ces s y m p t m e s rappels par lui et ces preuves? Il a assez l o n g u e m e n t numr ces s y m p t m e s . Mais la preuve princi pale il la tire de l'autorit. P o u r ce qui'regarde l a seconde forme de la maladie, c'est--dire l'infiammation, maladie trs dangereuse, je croyais nanmoins qu'elle pourrait suivre son cours dans la ppiodte-accoutume ; mais papee q u e t e l n e Eut pas le cas, qu'au contraire l e mal s'arrta dans l'es poumons, il s'y forma des tubercules ; c e u x - c i a g g l o mrs ensemble produisirent la v o m i q u e , et j e jugeai le mal non-seulement dangereux mais d'une cure des plus difficiles. J e changeai alors de sentiment, l'espoir, si petit) ft-Il, qui" jusqu'alors m'tait rest s'vanouit, e t je jugeai Je mal tout fait impossible gurir. Appuy sur les a enseignements de nos matres et sur c e que j'ai appris <\ j o u r n e l l e m e n t par m a propre exprience, j'admets q u e la vomique tue le plus souvent d'olle-m-rac, quelquefois cependant elle se repurge, tandis que l'empyrne j a m a i s n e se gurit jamais.
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9. G?est vraiment trs-beau,- m a i s c'est b e a u c o u p m o i n s vrai. Q u e dire e n effet si, suivant Hippocrate, de l'autorit' duquel n o t e m d e c i n s e fait tan-t gloire, on arrive dmontrer qwi'il m'y a jamais e u de vritable e m p y m e c h e z Marie-Rose? Q u e dire si, par d'irrfragables preuves, on peut pleinement convaincre-d'erreur le j u g e m e n t que l e mdecin l u i - m m e a prononc sur la maladie de Marie-Rose ? Mais c e t t e dmonstration n'est pas ncessaire, puisque sur ce point le dfenseur de la cause lui-mme est d'accord avec n o u s sur ce point capital. Voyons donc quelle a pu tre la maladie d e la j e u n e fille? Puisque, de l'aveu de Darius Angelucci, il e s t certain et prouv que de la rougeole p i dmique est n e une pleursie (I), il ne sera pas sans intrt d'examiner ce qu'enseigne Hippocrate dans cette h y p o t h s e . Sa doctrine ce sujet e s t comprise sous trois chefs,
(1) Chez Hypoorate le- mot Pleursie signifie galement soit Pneumonie, Pripneumonie ou iuQ immation du poumon, soit pleursie ou inflammation de la plvre.
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En effet il dit d'abord (sect. V. Aphor. 8) : Chez les pleur tiques qui ne s o n t pas purges par e n haut dans les quaa torze jours, la maladie passe la suppuration. Puis (ph, 15) : a Ceux' qui ont une suppuration venue de pleursie si, quarante jours partir de la rupture de la < vomique, s'ils sont purgs par en haut, gurissent; sinon ils ( passent l'tisie. Enfin (Pronosu., 1. II, prog. 57), r i (r constate que les vomiques se rompent les unes au h u i t i m e jour, les autres au trentime, les autres au quarantime, quelques-unes m m e au soixantime jour seulement. Les choses tant ainsi prtablies, il me semble certain, moins de ranger la doctrine Hippocrate parmi les fables de vieilles femmes, que Marie-Rose n'a souffert que u n e vomique, et que cette vomique atteignait sa dernire priode, et s'ouvrait dans le temps o Ton rapporte la gurison de la malade. 10. En effet, puisque les tmoins, d'un assentiment una nime, fixent au mois de mars l'invasion de la rougeole pidmique chez Marie-Rose, aprs avoir dfalqu l'espace de temps pendant lequel la malade dut tre sous l'action de cette premire atteinte du mal, le dbut de la pleursie devra ncessairement tre report au milieu de m a r s ; et si, partant de ce m o m e n t , on compte les quatorze jours que demande Hippocrate avant la naissance de la suppuration, nous arrivons la fin de ce m m e m o i s . C'est c e t t e poque, que, les humeurs n'ayant pas t repurges, se serait forme peu peu la v o m i q u e ; et q u e l q u e vite qu'elle se soit rompue, cependant, suivant la doctrine d'Hippocrate sa rupture n o u s conduit au vingtime d'avril au m o i n s . Or d'aprs l'autorit du m m e Hippocrate, ceux qui ont une suppuration venue de pleursie, si la rupture de la vomique s'est faite en quarante j o u r s , sont ropurgs ; sinon ils passent la phthisie. Donc, il me semble, pour que la gurison de Marie-Rose soit o u ne soit pas naturelle, il faut compter quarante jours dater du vingt avril. Ce calcul nous conduit la fin de mai, exactement au temps o Ton rapporte la gurison de la malade. Il n'tait donc pas arriv le temps o devait natre l'tisie o u la phthisie confirme; et il s'ensuit qu'on ne peut, en a u c u n e manire, en affirmer l'existence. T o u t au contraire, la maladie tait parvenue au temps o l'eifort de la nature devait d'elle-mme, la faire vanouir. 11. Et, rellement, il est rendu manifeste par ce calcul que Marie-Rose a recouvr la sant la lin des quarante jours au bout desquels, suivant Hippocrate, les suppures
q u e , par consquent, l a vomique, tait sa priode e x t r m e o elle devait cesser par la propre action de la nature. La doctrine de Benot XIV nous force d o n c de n e -pas considrer cette gurison c o m m e un miracle, elle n o u s oblige l'attribuer di rectement la nature. A ce sujet, veuillez c o u t e r Zacchas qui dit ceci [Qurst. med. leg., L. IV, t. 1, q u . 8, n 6) : 11 est principalement requis q u e la maladie n e soit pas sa dernire priode, de telle sorte qu'elle doive bientt dcli n e r naturellement, o u q u e la maladie n e soit pas proche de sa crise ; car ce m o m e n t , c o m m e il appert de Topi c n i o n d'Hippocrate {Aphor. sect. II, phor. 30) tous les e s y m p t m e s sont accrus, au point q u e chez les malades la vie est en danger; mais la crise arrivant, il se fait un c h a n g e m e n t subit, inopin, salutaire qui, n o n o b s t a n t , semble m i r a c u l e u x au vulgaire. Quand donc les m a l a d e s sont en u n tel tat, ils recourent trs-volontiers aux r e m d e s surna turels : nombre d'entre e u x font des v u x Dieu et a u x saints, et, la maladie u n e fois enrsye, ils e n font u n miracle, surtout lorsque le salut inespr est arriv en u n trs-bref espace de t e m p s ; et cependant la maladie de vait tout naturellement perdre de sa gravit et dcliner. Rien n e saurait s'adapter mieux notre sujet, fiot h o m m e trs-considrable semble avoir en cet endroit dcrit presque trait pour trait l'tat de Marie-Rose vers la fin du mois de mai, c'est--dire quand, opprime par la violence des h u m e u r s ' p e e e a n t e s , et recourant l'intercession de vnrable serviteur de Dieu, elle a obtenu bientt la s a n t ; en pr sence de c e fait favorable et si heureux pour elle, elle a cri aussitt au miracle, sans faire attention qu'elle a subi dans les quarante jours u n e vacuation toute naturelle. , 1 2 . Que si les dfenseurs de la cause n o u s demandent pourquoi n o u s affirmons l'existence de cette vacuation, qu'ils fassent attention que ds les dbuts la purgation par en haut n'a point m a n q u chez Marie-Rose. Le mdecin Angelucci l'atteste, quand, parmi les autres symptmes de la
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13. Et que sera-ce, s'il est dmontr que par des remdes opportuns, le mdecin traitant a aid les efforts de la nature? Dans le cas o il en serait appliqu, Benot XIV tablit pour rgle [Lib. IV, p. 1, c h . vin, 8) que, dans le j u g e m e n t \ porter sur la gurison on ne doit pas l'attribuer un miracle, mais aux forces des m d i c a m e n t s , pourvu t o u tefois qu'ils aient t appropris, et en puissance de bien agir. Or Darius Angelucci dit : Tant que le mal fut aigu, on mit en pratique les remdes propres ralentir le pro ie grs de l'inflammation ; quand le mal dgnra en v o ie mique, je ne m e rappelle plus h prsent de quels remdes on fit usage, mais ils furent certainement en rapport avec le mal, et tels q u e pouvaient le permettre la pauvret du lieu et de la famille. Et, pour qu'il n e nous reste rien dsirer, l'oubli du mdecin, supple abondamment Franoise de Luca, la mre de la malade : a Une fois, dit elle, il lui fut tir du sang, ce fut au c o m m e n c e m e n t de la maladie ; puis on lui ordonna des choses rafrachis sants, telles que de la mie de pain dans du lait, ou du lait boire coup avec de l'eau, et cela fut toujours continu. Donc le mdecin aidait la purgation et, la gurison par u n remde trs-actif, quoiqu'il ne puisse tre dtermine avec certitude qui de Darius Angelucci, mdecin traitant, ou du chirurgien Jacques Sgarzi a conseill ce remde. Au reste, comme le mdecin ne venait Mazzano qu'une fois ou deux par semaine, c o m m e il rsulte de l'enqute que le chirur gien visitait chaque jour plus d'une fois la malade, il est trs-probable que ce remde fut employ sur la r e c o m m a n dation et le conseil de Jacques Sgarzi. Donc, qu'il ait t ordonn la malade, tant par le m d e c i n que par le chi rurgien, d'autres m d i c a m e n t s opportuns et efficaces pour hter la purgation, c'est ce qui ressort du fait m m e . Il n'en est cependant pas dit un m o t dans le procs, et cela pareeque Jacques Sgarzi, empch par la mort, n'a pu tre soumis l'interrogatoire, et que le mdecin a perdu le s o u venir du fait. 14. Or, cela soulve une nouvelle difficult. En effet, puisqu'il est certain que des mdicaments ont t employs, il faut que les dfenseurs de la cause prouvent leur inutilit, leur complte inefficacit. Quand la discussion porte sur ce point, dit Benot XIV [Lib. IV, p. 1, ch. vin, 7), il faut que nous sachions quels ont t ces m d i c a m e n t s appliqus : s'il n'y a rien de constant sur eux, et que le mdecin'traitant ne les rappelle pas dans son interroga toire, cela rendra tout fait inutile le travail des m d e -
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CIS qui sont appels par la sacre congrgation porter leur jugement. Plus loin, le trs-sage Pontife confirme la rgle par un exemple tir de la cause de la batification de saint Jean-Franois Rgis : c o m m e objection contre cer tain miracle contest, Benoit XV l u i - m m e faisant les fonctions de promoteur de la foi opposa que l'application de r e m d e s tait constate, mais qu'on ignorait quels remdes avaient pu tre e m p l o y s . Ce fut assez pour que le miracle ne ft point approuv, et cela de trs-bon droit, car parce que le chirurgien n'ayant point t s o u m i s l'interro gatoire, on ignorait si la gurison devait tre attribue aux mrites du serviteur^de Dieu ou la puissance des remdes, i 5 . En outre l'expectoration du pus, on a r a p p e l encore,' entre les s y m p t m e s d e l maladie le flux de ventre. Or qui, niera que cet effort de la nature a pu b e a u c o u p servir l'expulsion de la matire morbide? C'est ici le lieu de re mettre sous les yeux les expriences importantes rapportes par Burnet et Thonerus, mdecins do premier ordre. Thomas Burnet raconte (T/isaur.md., prac., lib. V, sect. iv, de empyemaiis purgatione) que le clbre Baubin lui crivait dernirement avoir observ prs de l'embouchure d u ven te tricule gauche du c u r une ramification particulire et remarquable, laquelle partant de l'artre veineuse, m o n t e u au dessus du p o u m o n gauche, se rflchit aussitt, a c c o m p a g n e le tronc descendant de la grande artre et s'implante sur lui au-dessous du diaphragme; or c'est par a l. (Baubin n'en doute pas) que la vomique des p o u m o n s peut tre vide dans les urines o u le flux du ventre chez a c e u x qui lui chappent et gurissent. Augustin T h o n e r u s atteste avoir observ la m m e c h o s e (Obscrv. md., lib. III, o b s . v , de empyemalis purgalione). J'ai v o u l u brivement faire savoir que j'ai trouv, e n anatomie, entre autres c h o s e s , prs de l'embouchure du ventricule gauche, u n e ramification remarquable, laquelle partant de l'artre veiu neuse, m o n t e au-dessus du p o u m o n gauche, se rflchit bientt, a c c o m p a g n e le tronc descendant de la grande artre et s'y implante au-dessous du diaphragme : c'est par elle que la vomique des poumons se verse dans les urines et le flux de, vontre, pour moi du moins j e n'en < doute pas. t 16. Les choses tant ainsi, n o u s rsumons e n p e u de mots notre argumentation. Chez Marie-Rose, ce qu'il y eut en ralit, ce fut seulement la vomique, l'tisie proprement dit o u phthisie confirme n'a jamais exist; la v o m i q u e , elle, s'est rsolue en temps voulu, dans l'espace e n effet
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de quarante jours, t e m p s h la fin duquel' o n vit la maladie gurie aprs l'expulsion des humeurs, due a u t efforts de la nature et l'action des mdicaments, l a vomique entrant alors dans sa dernire periode. La maladie dclina donc naturellement, et il n'y a l certainement aucun miracle. 17. Cette consquence cependant ressortira plus vidente si nous voulons bien considrer ce qui a prcd, a c c o m p a gn et) suivi la gurison. Ce qui l'a prcde se peut lire et l dans le procs, surtout dans le Sommaire mme, Laure de Luca raconte qu'aprs le retour d'Antoine Gavetti Mazzano, la terre fut subitement branle par un tremble ment, et que les habitants terrifis par ce choc s'enfuirent dans les champs; elle ajoute b i e n t t : La pauvre enfant .prise de peur se drossa oppresse sur s o n lit; elle voulut s'habiller et le fit, un peu toute seule, u n peu aide. Nous la portmes dans la campagne la Madone des Grces, s i t u e une distance d'un d e m i - m i l l e de Mazzano... Reporte la m a i s o n , elle fut remise au lit, mais l'es jours suivants, elle se leva un tant soit peu c h a q u e jour. Nous voulions voir si n o u s russirions la faire un peu m a r cs cher, nous la s t i m u l i o n s de se mettre en m o u v e m e n t . . . w Finalement elle essaya de le faire; e t appuye sur u n bton qu'elle tenait la main, elle c o m m e n a faire quelques pas dans la chambre pour retourner de suite s ' a s s e o i r ; . . . quelquefois encore, toute oppresse, elle faisait quelques pas se soutenant s e u l e m e n t sur le bton-, sans que nous l'appuyassions. P o u r n e pas tre trop long, je ne rechercherai pas si ce c h a n g e m e n t subit, chez la malade, ne doit pas tre attribu l'action du- t r e m blement de terre ; ce qui n'est ni impossible ni bien difficile dmontrer. Une chose me suffit, chose que ne peuvent nier en aucune manire les dfenseurs de la caisse, c'est qu'aprs le tremblement de terre Marie-Rose, souffrant depuis deux mois d'une maladie, trs-grave, dit-on, eb dj munie des derniers sacrements, avait assez de forces pour pouvoir sans appui marcher dans la maison. Or ces ffaits s o n t tels qu'on en peut l g i t i m e m e n t infrer qu'avant d'entre prendre son voyage, la malade tait dans une condition dj pleinement amliore. 18. Franoise Maggiori est d'accord avec L a w e - R o s e de Luca. E n ce temps vint Antoine Gavetti, et la j e u n e file (f commenait tre u n peu m i e u x : l'amlioration c o n s i s tait en ce qu elle se levait un peu du lit, se tenait un p e u (f assiie, et, en s'appuyant, faisait quelques pas dans la maison. Donc quoiqu'elle ne ft pas alors parfaitement
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gurie, cependant elle s e trouvait m i e u x . E t cela peut se comprendre d'aprs ce fait q u e l'assistance du cur fut aban donn. N'est-ce pas dire q u e Marie-Rose avait chapp du pril d# mort, suivant ce qu'avoue s i n c r e m e n t la mme Laure de Luca. * On m e d e m a n d e c o m b i e n de temps avant notre dpart pour Rome, on cessa de recourir l'assistance (des prtres). Je r p o n d s que j e ne m'en souviens pas prcisment ; ce fut cependant quelques jours avant... On m e d e m a n d e pourquoi les prtres cessrent de d'assister. Je rponds, parce qu'il paraissait n'y avoir pas de danger prochain de mort. On m e demande si aprs avoir suspendu l'assistance des prtres, et aprs que la malade eut c o m m e n c m o n et trer quelque sorte d'amlioration, il y e u t quelque espoir de gurison pour Marie-Rose. Je rponds q u e toute Tam lioration consistait en c e que j'ai dit. Donc la date o arriva le tremblement de terre, la maladie de Marie-Rose avait dj . c o m m e n c dcliner, et par l on s'explique trs-bien c o m m e n t elle put entreprendre c e voyage de Rome sans qu'il soit besoin de s'crier avec le m d e c i n : Dans m o n opinion, le fait m m e d'avoir pu mettre en route u n e malade aussi gravement atteinte que Marie-Rose tait p o u r m o i U Q c o m m e n c e m e n t de miracle. 19. Pour que sur cela la lumire se fasse de plus en plus, pesons un instant les circonstances du voyage que Marie-Rose entreprit la fin de m a i . Nous apprenons d'abord, par Franoise de L u c a , avec laquelle s'ac cordent les autres t m o i n s , que la malade est venue de Mazzano R o m e assise sur un ne. Voyant (ce sont les paroles du tmoin s u s - n o m m ) qu'elle avait tant de foi, j e voulus la satisfaire, et bien que la pauvre fille ft si malade, si oppresse et cracht si vilain, j e m e rsolus la fin de mai de la transporter Rome ; elle fut mise aussi en quilibre q u e possible, au milieu, sur un petit ne, car elle ne pouvait pas monter s e u l e ; il fallut e n core que quelqu'un de n o u s la soutnt. De plus, n o u s apprenons par le m m e Sommaire que Marie-Rose resta trois jours R o m e , et que dans cet intervalle elle alla pied deux fois du quartier Gampitelii o elle demeurait l'glise de la bienheureuse Vierge .Marie aux Monts. Franoise de Luca dit, en effet : Le matin n o u s n o u s levmes, n o u s allmes l'glise d'Ara-Cli, o nous n o u s fmes n o s dvotions, mais Marie-Rose ne les fit pas, parce qu'elle avait h u toute la nuit, et qu'elle ne pouvait rester sans boire. Elle ne pouvait pas marcher seule, et il fallait que
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nous la soutenions par les bras ; je la soutenais d'un ct et Laure-Rose , sa cousine g e r m a i n e , la soutenait de l'autre. De l'glise d'ra-Gli, nous, allmes celle de la Madone des Monts, pour visiter le t o m b e a u de Benotce Joseph, et n o u s tranmes l ma fille de la mme manire < en la soutenant d'un ct et de l'autre . Et, un peu ( aprs: Nous restmes trois jours Rome, et avant q u e (t ma fille ne ft gurie n o u s allmes visiter le tombeau de < Benot-Joseph, deux fois en deux jours diffrents. Hlne < Marini dit son tour : Le jour venu, nous allmes faire u nos dvotions; si la j e u n e fille les fit aussi, je ne m e l e rappelle pas, ni n o n plus si nous allmes d'abord l'Ara(i Cli ou la Madone des Monts, mais, attendez, voici que j e me rappelle : n o u s n o u s confessmes l'Ara-Cli, puis, nous fmes dire une messe et n o u s c o m m u n i m e s la Madone des Monts. P a r l e s rues, nous tranions la pauvre fille avec beaucoup de peine, parce qu'elle ne se soutenait pas, et qu'il fallait lui donner appui... Le j o u d'aprs, nous retournmes Benot-Joseph. Gaspard Mancini raconte la m m e chose. Enfin n o u s extrayons du mme Sommaire, que dans sa premire visite au tombeau du vnrable serviteur de.Dieu, elle mangea des cerises et des petits pois, Franoise de Luca dit en effet : Je la fis asseoir sur les marches, et pour qu'elle s'humectt un p e u la bouche, je lui donnai quelques cerises et quelques a petits pois. Quand elle se fut repose et rafrachie, j e la a reconduisis dans l'glise. 20. Or, tous ces faits sont trs d'accord entre eux si l'on n'admet que la vomique, et si l'on ajoute qu'elle tait alors sa priode de dclin. Quand Marie-Rose vint Rome, la vio lence de la maladie dont elle tait afflige tait sans a u c u n doute diminue, sinon, c o m m e n t et-il t possible qu'elle ft vingt-cinq milles ? Je tiens faire remarquer qu'elle n e fut pas transporte sur un char ni sur une litire, mais sur une bte de s o m m e . Admettrons-nous que cette enfant qui, au dire du mdecin, devait mourir en route, ait pu suppor ter pendant vingt-cinq milles le m o u v e m e n t de l'ne, ce qui n'est que rarement possible des gens bien portants. Mais ne l'oubliez pas, je vous prie, le mdecin traitant avait tort estim que la vraie maladie de Marie-Rose ft l ' e m pyme. En outre, si elle souffrait d'une aussi g r a v e . m a ladie, pourquoi sa mre lui donnait-elle manger des cerises et des pois? Vous direz qu'elle a agi par ignorance. Mais comment admettre l'ignorance chez une femme qui, p e n dant presque deux mois, sur U prescription des mdecins, n'a
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nourri la malade q u e de lait pur ou coup d'eau. Non, elle n'a pas agi par ignorance, disons plutt qu elle voyait la violence de la maladie diminuer depuis quelques j o u r s . Ainsi devient comprhensible le fait que Marie-Rose, partie du quartier Campitelli put faire l'ascension du Capitole, aller au temple de la bienheureuse Vierge Marie (inAra-CU), y assisterai! saM-saeri'fice, au sortir, se rendre pied l'glise de SainieMarie aux Monts, et l, demeurer l o n g t e m p s prs du t o m beau du vnrable serviteur de Dieu. On dira peut-tre: MarieRose, en faisant c e t effort, ne manqua pas d'avoir beaucoup d e douleurs, et elle ne fit ce c h e m i n qu'appuye sur le bras de deux f e m m e s . C'est trs-exact, mais q u e n o u s i m p o r t e ? car n o u s ne p r t e n d o n s point que tous les reliquats de la maladie fussent alors expulss : n o u s n i o n s f e u l e m e n t que la maladie et a l o r s persist dans sa force intgrale. 21, E t n o n - s e u l e m e n t n o u s le n i o n s , m a i s n o u s entrepre n o n s de prouver q u e , l'volution naturelle de la maladie admise, Marie-Rose a recouvr c o m m e par degrs tes forces et la son.l. Parmi les innombrables tmoignages qu'on pourrait invoquer ici, un petit n o m b r e suffirai Voici c e que rapporte GaspardMancini : u Quelque temps apres, n o u s sortmes de TgJise; ma f e m m e e t moi n o u s a l i m e b en quelque autre l i e u , Franoise avec Marie-Rose et les aulr.es dames retournrent aux Campitelli; mais M-aric B o t e c o n t i n u a i t h aller mal, elle disait cependant
qxCelh te semait
peu
ntieiur,
et le soir,
quand
je revins pour r a m e n e r ma f e m m e e.t m'en aller l'Ara Cli, je lui demandai c o m m e n t elle tait, et elle de me rpondre qu'elle se sentait un peu mieux, mais elle tait au lit, et o p p r e s s e . Le jour d'aprs n o u s retournmes a la Madone des Monts et n o u s y a n l m e s un peu ; quand .nous sortmes, Mai-Ro&e duait qu'elle se sentait im petit peu mieux, mais elle tait oppresse et il fallait la scutenir. H l n e Marini raconte ainsi la chose : N o u s arrivmes la Madone des Monts, et n o u s n o u s r e c o m m a n d m e s B e n o t - J o s e p h , n o u s fmes des prires s u r - s o n tombeau., e.t la pauvre j e u n e fille se r e c o i n m a n d a lui a \ c c une grande ferveur. Cependant il s e m blait qu'elle tait un tantinet mieux. Nous la ram-e fl&mcs l a . m a i s o n , , et dans la nuit elle -s'agita, se plaignit, mais pas autant que la nuit prcdente. L e .jour d'aprs, n o u s letourufimes vers B e n o t - J o s e p h , a 'jeune fille tait faible et oppresse, mais tant soit peu .mieux que le premier jour. * 11 faudrait encore joindre ces tfmoins F i a n o i s e de Luca, mre de la guri*, d o n t U s paroles confirment ce mfime j u g e m e n t .
Ui
22. Il ne faut donc pas en douter : ce n'est que peu peu que Marie-Rose a t gurie. J'entends qu'on m'objecte que ce mieux doittre attribu au vnrableserviLeur de Dieu devant qui la malade a rpandu de si ferventes prires. J'y souscri rais volontiers, si je n'avais devant les y e u x les dpositions ci-dessus rapportes de Laure-Rose de Luca et de F r a n oise Maggiori. En effet, il en rsulte que dj a l'poque du tremblement de terre, il y eut pour Marie-Rose une amlioration dans son lat, et il s'ensuit ncessairement qu'il faut entendre dans le sens d'une rmittence naturelle de la maladie les paroles d'Hlne Marini, de Gaspard Mancin et de Franoise de Luca. De m m e que ce fuit un signe d'entre en convalescence -que Marie-Rose se levt do son lit, revtt ses babils, pt se rfugier la chapelle de la bienheureuse Vierge Maiie, siiue prs de cinq cents pas de Mazzano, se proment dans la m a i s o n , e t c . ; il faut aussi estimer c o m m e signe du progrs de la convalescence, qu'elle vani Rome, et que du s o m m e t du Capitolc o elle tait monte, elle pt aller au tombeau du vnrable serviteur de Dieu. 23. Nous n e trouvons pas plus favorable aux dfen seurs de la cause ce que rapporte Laiare de Luca. Alors il arriva que vint Mazzano un voituricr : i s'appelait (f Antoine Gavetti, mort m a i n t e n a n t ; il nous apporta la. (f nouvelle qu' Rome on avait dcouvert un nouveau saint, faisant quantit de miracles, que ce saint tait un petit .pauvre, n o m m Jenot-Joseph L a b r e ; il en apportait quelques images. En entendant ce rcit, nous r e c o u rmes de suite lui et n o u s pensmes que Benot Joseph pouvait faire un miracle en Marie-Rose. La m a ce Jade, la mre, m o i et les autres n o u s reprmes espoir; nous nous imes donner par Gavetti une de ses i m a g e s , c nous l'appliqumes avec ierveur sur la malade, et n o u s la, e lui recommandmes, en le priant de la gurir. On le voit donc, le t m o i n l u i - m m e fait commencer la gurison non l'application de l'image du vnrable serviteur de Bieu, mais, tort ou raison, peu importe, au seul trem blement de terre : Je vous dirai c o m m e n t se fit l'amlio ration. 11 faut que vous sachiez qu'il y eut Mazzano une 'secousse de tremblement de terre, etc. .24. En outre, si c'est rellement, au secours de la'grce de Dieu et l'intercession du vnrable Benot-Joseph, dont l'image fut alors pose sur Marie-Rose, que nos adver saires veulent attribuer ces premiers indices de la conva lescence, c o m m e n t , je vous prie, dfendra-t-on l'instantanit
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du miracle prtend" ? Car Benot XIV affirme (Lib. IV, p. 1, ch. vin, 15), que si l'instantanit n'est pas exigible dans les miracles du premier et du second genre, qu'elle est tout fait ncessaire dans les miracles du troisime genre, c'est--dire dans la plupart des gurisons de maladies. Cette distinction est n o n - s e u l e m e n t s o u t e n u e par de trs m i n e n t s docteurs, c o m m e le cardinal de Laurea (1) et autres, mais encore cette distinction, c o m m e le fait r e m a r q u e r B e n o t XIV [!oc. cit., 16), e s t a c c e p t e p a r la s a c r e C o n g r g a t i o n r o m a i n e , q u a n d il s ' a g i t d e m i r a c l e s et surtout de gurisons, et cela, avec tant de rigueur qu'elle s'est parfois abstenue de compter parmi les miracles q u e l q u e s gurisons pour lesquelles les m d e c i n s o u des t m o i n s affirmaient q u e le malade avait c o m m e n c de se trouver mieux aprs l'invocation du serviteur de Dieu ou du Bienheureux, et qu'ils avaient ensuite recouvr une parfaite sant . Or, Marie-Rose c o m m e n a de se trouver m i e u x alors qu'Antoine Gavetti, de retour dans sa patrie, apporta la nouvelle de la mort du vnrable serviteur de D i e u , mais en ce m o m e n t elle n'obtint pas sa gurison intgrale. Donc, quand m m e les adversaires parviendraient rfuter (ce qui s e m b l e p r e s q u e i m p o s s i b l e ) , t o u s les arguments p a r l e s q u e l s n o u s a v o n s d m o n t r q u e le fait e x p o s n ' a p o i n t d p a s s l e s forces de la nature : ils ne russiraient pas triompher, par dfaut de l'instantanit. 25. Et cela d'autant plus que le trs-lou Benot XIV, aprs avoir (loc. cit.) reproduit les formules parfois e m p l o y e s par l e s Souverains Pontifes dans les bulles de canonisation, ajoute aussitt : Quand il a t omis d'indiquer si les gurisons rapportes dans lesdites bulles taient des m i ce racles do troisime ou de second genre, et que le dcret de c a n o n i s a t i o n a t appuy sur elles, la porte de ce fait sera que, si le mdecin traitant et les t m o i n s se sont ainsi exprims, que si les sanctions demandes ont t ainsi for m u l e s par les postulateurs pour o b t e n i r la batification et la c a n o n i s a t i o n , ces gurisons, p a r l e dfautinstantanit, n e peuvent tre mises au nombre des miracles, moins qu'il n e soit prouv que le miracle est du second et n o n du troisime genre, o u qu'il n e ressorte de tout le contexte que le terme d'amlioration n'a t employ par le m decin et les tmoins qu'au lieu de gurison parfaite et (i) In 3. lib. sent. t. IV. Disp. 20, a r t . 20 n 867 et soq. Mattheucci (Pract Theolog. Can. ad Causas Beatif. et Canoniz. tit 111, c. 2. 1 1 et soq.) Contelorius (de Canoniz. Sanctorum cap. xvii, n 9 Sed ego distingulmin.)
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subite. Nous esprons donc que les adversaires renon ceront Tune o u l'autre de leurs prtentions. Au reste, nous accorderons volontiers que la gurison affirme p r sente le caractre et la nature d'une grce, si bien qu'il faudra peut-tre porter sur elle le m m e j u g e m e n t que crut devoir prononcer Joseph Ruggieri, sur certains miracles du vnrable serviteur de Dieu. Quant aux miracles, il me semble d'une part qu'aucun n'est prouv ; mais j e crois d'autre part q u e parmi tant de faits supposs prodi ci gieux, il en est quelques-uns qui doivent tre mis a u compte des grces. Ainsi l'exigent le contexte entier, et l'autorit de Benot XIV, quand il dit (Loc. cit., n9 16) : tt Cette manire de parler exclut la gurison subite et ainsi parat signifier p l u t t une grce. 26. Ce qu'on lit, dans le sommaire, de cette douleur dont souffrit Marie-Rose l a troisime nuit, n e concourt pas du tout prouver l'instantanit de la gurison. Car d'abord de tout ce que n o u s avons tabli, et sans controverse possible, Marie-Rose a t gurie par degrs. E n s u i t e , comme aucun des t m o i n s ne n o u s d o n n e de r e n s e i g n e ment sur le caractre et la qualit de c e t t e douleur, on peut justement souponner qu'elle tait par exemple inter costale et tout fait trangre la maladie. Le mdecin l'a bien aussi prvu, pour viter r e c u e i l , il ajoutait : A m o n ce avis, une telle douleur ne pouvait produire rien de bien, elle n'tait point capable d'amener une rsolution. Le p u s ne pouvait tre limin, ni les organes putrfis c o n s o lids, qu'autant qu'on voudrait recourir . quelques-uns, de ces exemples extraordinaires (que des auteurs ra ce content avoir observs) de personnes * guries d'une maladie de poitrine crue incurable par u n flux d'urine prolong. 27. Quoi qu'il e n soit, ne laissons pas passer sans le relever l'argument assez srieux que nous offre le tmoignage du mdecin.'S'il e s t vrai, c o m m e il l'est, qu'il existe p l u sieurs exemples m m e anormaux, d'empymatiques c e r tainement guris par l'vacuation des humeurs, soit dans les garde-robes, soit dans un flux u r i n e u x abondant, q u e faudra- t-il dire, dans le cas actuel, alors qu'assurment l a vomique de Marie-Rose n'a pas t jusqu' la production de Tempyrne, jusqu' la dchirure du tgument extrieur qui tapisse les p o u m o n s et l'effusion du pus dans la cavit t h o racique, qu'il n'a pas envahi assez l o n g t e m p s les p o u m o n s pour donner naissance l'tisie o u phthisie confirme? De quelque manire qu'on comprenne la maladie, remarquez
Yi.
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b i e n , je le demande avec Benot XIV (Lib. IV, p. 1, ch. vin, 2 7 ) , que la nature, suivant Gallien, peut amener la gu rison de trois manires, par dcubitus, par crise, par simple rsolution de la maladie, ou c o c t i o n . i l est vraiment incertain qu'il soit ou non survenu chez Marie-Rose une crise salu taire. Car Darius Angelucci. cette d e m a n d e aprs la gu rison, ou en m m e temps qu'elle, est-il intervenu u n e crise salutaire qui explique la g u r i s o n ? rpondit : Il n'y eut pas de crise, du moins ce m e fut rapport par la mre de|la jeune fille gurie, interroge par moi ce sujet, et les autres personnes de leur c o m p a g n i e . On ne sau rait du m o i n s douter que la terminaison ft possible par le repos du lit et la simple rsolution de la maladie. 2S. Que chez Marie-Rose de Luca il soit arriv que l ' h u meur peccante ait pass d'un organe n o b l e dans un organe i n f r i e u r , c'est ce qu'insinuerait assez c e que raconte Franoise de Luca. Quelque temps avant de venir R o m e , les pieds lui avaient enfl, et ils restrent enfls les deux jours qu'elle fut Rome, avant que n'advnt le miracle : je le sais, parce que, en rhabillant, je lui passais ses chaussures, attendu qu'elle ne pouvait le faire seule. L'enflure lui arrivait quasi mi-jambe. E n outre, t o u t porte croire qu'il est intervenu une simple rsolution de la maladie, une coction, puisqu'on a p u constater d'une manire certaine son augmentation, son tat adulte, et s o n dclin. Ce que nous avons expo& plus h a u t met bien e n vidence les priodes d'augmentation de la maladie et de son tat adulte; q u a n t a ce qui regarde le dclin, il est facile d'infrer de ce qui a t dit que cette priode c o m m e n a de l'poque du tremblement de terre. Au reste, dans l'intervalle de temps que Marie-Rose resta dans Rome, o u m m e aprs sa gurison miraculeuse, on p u t voir encore des restes subsistants de la maladie. Hlne Marini en tmoigne : A son retour au pays, il tait rest u n p e u de maigreur . Et Joseph Mancini qui ne la vit pas aussitt aprs son retour, mais presque aussitt en par faite sant. P o u r q u o i aller plus loin? Laure de Luca, n o u s apprend que Marie-Rose, pendant l't, fut arrte par quelques accs de fivre priodique ; et nous savons par Franoise de Luca et par d'autres, quoiqu'elle et t marie dans la suite, qu'elle quitta la vie au bout de peu de t e m p s . Les choses tant ainsi, la gurison de Marie-Rose, si je n e m e trompe, au lieu d'tre un miracle, est l'uvre de l a nature, aide peut-tre jusqu' certain point par l'inter cession du vnrable serviteur de Dieu,
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1. On fait deux objections au miracle propos. On tire la premire de la brivet de la maladie, d'o l'on conclut q u e la phthisie confirme a manqu de temps pour se constituer, l a suite de la v o m i q u e dont on accepte la formation. On t r o u v e la seconde dans la marche naturelle de la vomique, en m o n trant que la gurison est arrive quand la maladie tait sa dernire priode, et quand, aprs rupture de la vomique, les poumons devaient tre n a t u r e l l e m e n t vacus. De cela, l'on infre que la maladie n'tait pas aussi grave qu'on Ta prsente, et qu'elle s'est vanouie au m o m e n t o elle devait finir naturellement : Tune et l'autre de ces hypothses font vanouir le miracle. 2 . Pour ce qui regarde la supputation du temps, nous le rfuterons aisment par la suite ; mais en attendant, puisque toule l'argumentation de notre contradicteur ne repose que sur l'hypothse de l'existence d'une vomique, il importe de la dtruire tout d'abord pour pouvoir procder ensuite plus expditivement. Il prend, suivant le sentiment le pins commun le terme de vomique dans le sens d'un abcs grand et u n i q u e du p o u m o n , de collection de pus close d partout, laquelle, aprs un espace de temps plus ou m o i n s long, doit se rompre, Or cette dfinition de la vomique en exclut l'existence dans le cas de Marie-Rose : soit qu'on c o n sidre la formation, soit qu'on considre la fin de l'abcs. 3. Le bon sens seul n o u s apprend qu'une grande quantit de pus ne peut s'assembler si le pus est vacu souvent et abondamment ; car ce qui est vacu ne peut tre collect. Aussi c'est u n signe p a t h o g n o m i q u e de vomique que le dfaut d'excrtion purulente. Burser crit (1) : Si LE PUS form
la suite [de la suppuration) N'EST PAS EXCRTE mesure qu'il se forme, mais S'ASSEMBLE au sein des poumons en un espace, dtermin, comme dans un kyste, cet abcs se nomme vo mique. Et Swieten dit de la vomique dj forme (2) : 'It s'est tabli dj dans le poumon une vomique pleine de pus qui de sa masse comprime toutes les parues voisines, et le fait au point que les parois des vsicules pulmonaires com primes les unes contre les autres s irritent continuellement : de l vient une toux opinitre, mais sche, parce que MIEN
<1) Instit. md. pract. de Vomica. 142. (2) Ad Boerbaraav. apbor. 834.
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NE PEUT TRE AMEN DU LIEU AFFECT. Eh effet, qUOiqW Cette toux continue puisse racler quelque chose du mucus qui lubrifie la surface interne du poumon, cependant elle doit tre dite sche parce qu'elle n'apporte que des crachats peu abondants, AVEC PEINE, car, jusque-l, il n'est rien amen du pus qui comprime le poumon. Nous n e nierons c e p e n
d a n t pas q u e d u pus ne puisse quelquefois tre excrt par des malades atteints de v o m i q u e ; mais n o u s observerons que c e cas est trs-rare, q u e les crachats n e s o n t jamais abondants, et n'apparaissent tels qu', la fin de la maladie, alors q u e la v o m i q u e dj prs de se rompre c o m m e n c e exsuder du p u s . Pour autoriser cette o p i n i o n , n o u s avons Sauvage qui dcrit ainsi les s y m p t m e s de la v o m i q u e (1) :
L e malade languit, tousse, n'est pas retenu oit une douleur obscure quelque part dans surtout quand il fait effort dans une toux a u lit, perla poitrine, violente, et
PARFOIS SUR LA FIN, IL EXPECTORE UN PEU DE TUS FTIDE, Sans fivre^ ou avec une fivre modre. Nous n e relevons pas q u e
ces s y m p t m e s n'ont rien de c o m m u n avec notre c a s ; mais quant l'excrtion d u pus, n o u s insistons sur ces m o t s parfois, sur la fin, un peu de pus. D'o n o u s c o n c l u rons q u e l'expectoration purulente doit m a n q u e r t o u t fait dans une vomique e n v o i e de formation, et p e u t peine apparatre l'approche de la rupture. 4. Or les choses se passrent t o u t autrement chez MarieRose. Elle t o m b a malade au c o m m e n c e m e n t de mars atteinte de r o u g e o l e , dont le virus rpercut sur les p o u m o n s , y produisit par s o n Lcret u n e p r i p n e u m o n i e . Cet accident m o r b i d e n e se rsolut pas et tourna, dans le m m e m o i s de m a r s c o m m e l'affirme le m d e c i n suppuration a c c o m p a g n e de ses caractres c o n n u s : la raucit de la voix, la l o u x , L'VACUATION DE PUS PAR EN HAUT,... t o u s ces s y m p t o m e s partir d u c o m m e n c e m e n t d'avril crrent de j o u r e n j o u r . E t , ce qu'il avait affirm dans s o n t m o i g n a g e extra-judiciaire peu aprs la g u r i s o n , il en a dpos dans l ' e n q u t e , disant : Les h u m e u r s (de la rougeole) n o n e x ce p u r g e s l'poque a c c o u t u m e cherchrent une place, et, stagnantes dans la cavit d u thorax, en vinrent a l s e r les p o u m o n s , d'o l'inflammation et l'attaque de poitrine. < Mais aux jours critiques l'inilammalion ainsi faite n e se c rsolvant pas, elle passa l a suppuration, et c e l l e - c i se rvla par la fivre suppuratoire, une t o u x plus h u m i d e , des crachats p u r u l e n t s , etc. Or, si ces cra(l) Nosol. mthod. Glas. Y. 7, N 0.
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chats ont suivi l'inflammation, si u n e fois produits E ils ont ensuite toujours augment de j o u r en jour, c e r (f taincment il n'a pu se former de collection de pus pour constituer une vomique. Et si cela e s t ncessaire au calcul de notre contradicteur, lequel a recul ou fait traner la rupture de la v o m i q u e au moins jusqu'au 9 avril, l'impos sibilit d'une v o m i q u e sautera tous les y e u x . 5. Mais ce que le caractre et la formation de la vomique e n seignentcompltementjlatcrminaisondelamaladielemontre avec encore plus d'vidence. Sauvage (1) a enseign q u e la vomique engendre dans le p o u m o n progresse jusqu' ce que,
aprs rupture finale dto follicule, un pus trs abondant soit expector ou vacu par en haut, et alors il se fait une phthisie dite par vomique, ou se diffuse dans la cavit de lapoitrine, formantempyme; ou, faisant saillie dans les intervalles des ctes s'ouvre une voie au dehors; ou enfin le pus envahissant brusquement Vintrieur des poumons les obstrue par sa viscosit et fait mourir le malade de mort subite. La v o m i q u e peut donc avoir quatre terminaisons naturelles, c'est--dire : 1 u n e grande abondance de
y
tout d'un coup jusqu' plusieurs livres de pus et de sang, et alors ils deviennent phthisiques. 2 Il peut se faire que cette
abondance n u i s i b l e de pus se rpandant dans la cavit de la poitrine c o n s t i t u e l ' e m p y m e ; l\ qu'elle s'assemble entre les ctes dans une tumeur qui s'ouvre l'extrieur; 4 enfin, que par compression des p o u m o n s , elle tue subitement le malade (2). La vomique une fois rompue, dit Burser,
n
pus et de sang est e n une seule et m m e fois la b o u c h e ; j e dis grande, car l'auteur cit a abondant; puis, s'expliquant plus clairement ajoute : il en est qui subitement expectorent
les malades prissent subitement suffoqus, alors que le pus abondant envahit subitement et obstrue les vaisseaux ariens du poumon.
6. Lequel de ces p h n o m n e s a-t-il t constat chez notre malade ? Certainement c e n'est pas le vomissement abondant de pus et de sang, puisque le mdecin et tous les tmoins ne rappellent que les crachats. Ce n'est pas l ' e m pyme, parce q u e les s y m p t m e s n o n c s dans le S o m m a i r e ne le dmontrent point ; et e n outre, n o u s - m m e s n o u s ne l'excluons pas m o i n s que notre contradicteur, qui de l'hy pothse de l ' e m p y m e va jusqu' tirer u n argument pour
(I) Loc. cit. p. n e . 12) De Vomica, 146.
infirmer le j u g e m e n t port par le m d e c i n . Ce n'est pas la t u m e u r intercostale laquelle, ouverte l'extrieur, aurait d donner une abondante sanie, car o n n e trouve m m e pas u n mot de ce p h n o m n e , p h n o m n e de soi trs-vident et qui dure assez l o n g t e m p s . Enfin ce n'est pas la suffocation, puisque la j e u n e fille vcut encore plusieurs annes. Il n e se produisit d o n c aucune rsolution de la maladie; et il n'y en eut certainement pas de surnaturelle, puisque la maladie de la j e u n e fille persista deux m o i s encore. Force est donc de choisir entre ces d e u x choses : ou nier la g u rison o u rejeter l'hypothse de la v o m i q u e . Le premier terme rpugne aux faits accepts par notre adversaire lui-mme : qu'il prtende o u n o n que la malade ait t gurie naturellement, au moins la tient-il pour gurie. Il faut donc concder l'autre terme, et ce sera d'autant m o i n s difficile pour t o u t h o m m e clair quo la terminaison n o n m o i n s que l'origine de la v o m i q u e sont directement e n opposition avec l'histoire de la maladie et les s y m p t m e s rapports dans le Sommaire. 7. La v o m i q u e exclue, toutes les objections tires d'une purgation naturelle de la v o m i q u e s'vanouissent a u s s i t t ; et avec elles s'vanouissent aussi les considrations qui attri buent aux forces naturelles une gurison obtenue dans la p riode de la prtendue crise vacuatrice. Mais pourra dire quelqu'un : le m d e c i n veut qu' l'inflammation succda l'ulcration du p o u m o n o u vomique. L e sang contamin stagnant dans la cavit du thorax causa u n e vomique dans l e s p o u m o n s . Il se fit une stagnation dans les p o u m o n s , il se forma des tubercules et ceux-ci runis causrent la v o m i q u e . E t n o n seulement le mdecin Ta affirm, mais n o u s lisons aussi dans l'information... L'cret donc, qui la suite de la rpercussion du virus morbilleux, avait caus la pripneumonie, n'ayant pas t rejete ou expulse, attaqua l e parenchyme des p o u m o n s ; et dtachant o u dissolvant leur tissu organique, convertit ces parties en p u s , e n g e n drant l'abcs o u v o m i q u e qui produisit son tour la phthisie dont il est ici question, ne de la v o m i q u e ; d o n c , et le mdecin et le p o s t u l a l e u r de la cause s'accordent affirmer que la phthisie e n question a pour origine une v o mique. 8. Cette objection n a n m o i n s n'est d'aucun poids. En effet, c'est d'aprs les s y m p t m e s rapports dans le Sommaire et n o n d'aprs l'avis de c h a c u n qu'il faut j u g e r de la nature de la maladie. Si le mdecin a err dans s o n j u g e m e n t , si n o u s - m m e s avons err avec lui, ni lui ni n o u s ne pouvons
119
changer la face du fait et attribuer la malade une maladie dont vraiment elle n'a pas s o n ffert. En outre dans le libell du titre ou qualification du miracle, il n'est fait aucune m e n t i o n de vomique, et il n'a t propos que d'y inscrire (Phthisie pulmonaire confirme). Si donc la phthisie est r g u l i r e ment dmontre, s'il y a c o n c o u r s . d e tous les s y m p t m e s qui l'tablissent, hors des chances du d o u t e ; cette dis cussion sur la vomique n'tera rien la certitude de la maladie, et devra m m e tre j u g e naturellement un horsd'uvre. Toutefois, pour n e p a s paratre vouloir dcliner par l l'objection, nous ferons remarquer que la question rside plus~dans la signification vraie du m o t vomique que dans la chose elle-mme. 9. Quoique le sens donn au m o t vomique par notre con tradicteur soit c o m m u n m e n t r e u , il n ' e s t cependant pas assez fixe et immuable parmi les mdecins pour que ce mme vocable ne puisse recevoir aussi une signification plus large. La vomique, pour Linne, est une vacuation imprvue, abondante, purulente du poumon. Pour Vogel (1), c'est une djection, par la tou, subite, abondante de pus et de sang noir, hors du poumon. Pour d'autres, c'est un abcs du p o u m o n limit par une membrane ambiante. Jamesi admet cette dfinition, et traitant de la vomique, il crit : cet abcs est proprement renferm dans un kyste ou une membrane ( 2 ) . D autres, tout en tant d'avis que le plus souvent la vomique est enferme dans un kyste, n'ont pas cependant reconnu la ncessit du kyste. Ainsi Sauvage a-dit(3): cela vomique e s t u n abcs contenant une matire puriforme ou sbace, ou pultace, le plus souvent e n v e loppe d'une tunique. D'autres mettant tout fait de ct l'enveloppe, ont appel la v o m i q u e une collection de matire purulente rassemble librement de partout. Ainsi Caslelli a dit (4) : la vomtque est la mme chose qu'un apostume suppur, un abcs avec suppw ation. Joseph Franck crit aussi ( 5 ) : les abcs des poumons qui suivent la prip-
vomiques
avec
10. Devant u n e telle varit d'acceptions, qui osera n o u s reprocher d'avoir pris le m o t de v o m i q u e dans le sens l e plus large, et d'avoir exprim par lui l'ulcration des p o u m o n s quelle qu'elle ft? Nous restons fidles, avec l'Infor m a t i o n , aux m m e s aphorismes qui n o u s sont aujourd'hui objects c o m m e admis par Hippocrate, lequel n e dislingue n u l l e part la v o m i q u e d'une autre suppuration q u e l c o n q u e des p o u m o n s , et leur donne toutes l e s n o m s de empyema, empyi, empyeses, lesquels, forms de la particule en, in, dans, o u m i e u x avec et d e pyon pus, ont tous l a valeur c o m m u n e de collection de p u s . Cette remarque avait dj t faite par
Van Swieten, qui crivait (3) : il est certain que le terme d'em-
pyme t autrefois employ dans un sens plus large, et a dsign une suppuration quelconque des parties intrieures, comme on pourrait le dmontrer par plusieurs endroits
! Hippocrate, de Galien et d'Arete, et les passages d'Hppocrate dont il s'agit ici le dmontrent e u x - m m e s ; car l o n o t r e contradicteur t r a d u i t : p a r ceux-ci se fait le p a s sage la suppuration, Hippocrate emploie le m o t empyme; et o il crit : c e u x qui par pleursie deviennent suppures, Hippocrate dit e m p y m a t i q u e s ; l enfin o il crit p l u sieurs v o m i q u e s s e r o m p e n t (4) Hippocrate s e s e i t d u t e r m e e m p y m e s . Si donc les termes m m e s d'Hippocrate paraissaient autoriser la signification plus large d u m o t ; si les auteurs les plus approuvs n'y rpugnent p a s ; si elle convenait parfaitement l'nonc d u miracle, l a phthisie p u l m o n a i r e ; il serait trop svre, pour n e pas dire trop chicanier, celui qui s'obstinant prendre le t e r m e de v o m i q u e dans le sens strict de notre contradicteur, n o u s l'objecterait c o m m e si nous l'avions e m p l o y dans le m m e sens. Quoi q u e c e soit cependant qu'il vous plaise de retenir c e sujet, ce dont n o u s voulons prendre acte, c'est q u e n o u s rejetons e n t i r e m e n t la v o m i q u e prise dans son sens troit, c o m m e v i d e m m e n t exclue de notre c a s , parce q u e t o u s les s y m p t m e s q u e n o u s possdons de la maladie s'oppo s e n t directement soit sa formation, soit sa rsolution.
v
11. Mais si tout s'oppose la v o m i q u e , t o u t a u contraire 1) 2) (3) (4) Ad Boerhr aph. 1206. Nosol. Metli, clas. IX, 24 N 3 . Inform. 6, 8. Ad. Boerrh, aph. 1183.
12
accuse la phthisie pulmonaire grave et galopante. P e r sonne ne niera q u e les causes morbifiques agissent sur l e s malades d'autant plus fort et plus vite qu'elles les a t t e i g n e n t plus affaiblis par des maladies s y m p a t h i q u e s , o u que, par elles-mmes elles sont plus actives. La phthisie suit aussi cette loi; quoiqu'elle soit en elle-mme u n e maladie lente, elle agit plus fort o u plus d o u c e m e n t suivant la diversit des circonstances. Burser a crit : d'aprs la marche ou plus
rapide ou plus lente dont la phthisie suit son cours, elle est dite aigu ou chronique. Car il y a des phthisiques qui prissent en un temps trs-court, et d'autres, au contraire, qui tranent la vie bien plus longtemps qu'on ne l'aurait espr. Et c o m m e il arrive par l q u e l e p o u m o n est dtruit
plus vite chez les u n s , plus l e n t e m e n t chez les autres, l e s modernes ont caractris la phthisie aigu par le n o m de phthoridique ou corruptrice. 12. L'ge, le temprament, les affections e l l e s causes ant rieures : tout dmontre que Marie-Rose tait prdispose la phthisie, et, une fois atteinte de cette maladie, elle a d subir la phthisie phthoridique.Parmi les maladies particulires a u x jeunes gens, Hippocrate c o m p t e l'tisie, quand il crit (1) aux jeunes gens les crachements de sang, Vtisie, parce que/ comme l'observe Hoffmann (-2), cet ge les vaisseaux
ont plus tnus et bien plus prts, que chez les personnes plus avances en ge, se rompre quand Us sont dilats. A quoi Von peut ajouter, avec Sennert (3) A cet ge le sang surabonde, fluidifi par la chaleur, les humeurs acres s'accumulent, d'o il arrive que ce sang surabondant et chaud rompt ses vaisseaux, et que les humeurs acres des cendant de la tte dans les poumons peuvent les dtruire.
Ainsi les jeunes gens s o n t sujets plus q u e les autres l a phthisie: U cause de la tnuit des vaisseaux propres cet ge ; 2 cause de l'abondance du sang ; 3 c a u s e de l'cret des h u m e u r s . La premire de ces conditions se rencontre chez Marie-Rose, puisqu'elle pouvait avoir qua torze ou quinze ans; la s e c o n d e parce qu'elle tait d'un
temprament
plthorique;
l'cret de la rougeole rentre. Donc o n trouve runi chez cette jeune fille tout c e qui prdispose la phthisie. E n outre, ces conditions s'ajoutait u n e nouvelle cause morbide, car elle souffrait habituellement d'un asthme
122 de poitrine,
et y
t e n d si bien, que les m d e c i n s ont trouv assez souvent la phthisie engendre de lui seul ( I ) , ce q u e peut-tre considrait Rivire, quand il crivait (2) : une pleursie
ou une pripneumonie survenant chez un asthma tique est mortelle. Cette affection morbide, j o i n t e la
condition naturelle de l'ge et du t e m p r a m e n t , a d rendre Marie-Rose si prdispose la p h t h i s i e , qu'une fois cette maladie produite par u n e cause q u e l c o n q u e , elle a d exercer librement, efficacement et r a p i d e m e n t t o u t e son action. 13. Et certes les causes n e m a n q u r e n t pas, elles furent m m e trs-puissantes. IL n'est ignor de p e r s o n n e , parmi les h o m m e s de l'art de gurir, que le virus exanthmatique rentr atteint les p o u m o n s et les ulcre par inflammation. Ainsi le remarquait Hoffmann (3) : Tous savent que la ma
tire vicieuse ecrmentiiielle propre des altrations im pures de la peau, imprudemment rpercutes par des to piques, se porte sur la substance molle et spongieuse des poumons et finit par y former un ulcre. Joseph
Franck avertit trs-bien que cette phthisie mtastatique est h a b i t u e l l e m e n t trs-grave e t trs-violente. La phthisie pro
venant de la disparition intempestive d'autres maladies, se nomme mtastatique... On reconnat que la maladie attaque les poumons la toux, la dyspne, etc. Si Von ne remdie promptement et d'une manire convenable ce mal, on verra bientt apparatre les symptmes de la phthisie pulmonaire confirme.,. Il n'y a espoir de gurison qu'au dbut du mal... S/v MARCHE THS-DANGEREUSE EST ASSEZ
RAPIDE.
14. Donc, il y eut unetrs-puissante cause de phthisie dans le virus morbilleux rejet sur les p o u m o n s , cause si efficace que, e n dehors m m e de toute autre action, elle devait imprimer la maladie une marche violente et rapide. Cependant cette c a u s e seconde n e produisit pas i m m d i a t e m e n t la phthisie, elle excita l'inflammation par laquelle les p o u m o n s de vaient s'ulcrer. Et cette inflammation se manifesta par la
respiration difficile, une toux douloureuse et sche fivre violente du genre des fivres inflammatoires,
une en
u n m o t par les s y m p t m e s qui dsignent la pripneu m o n i e vraie. Or, il est admis gnralement par tous ceux qui
(i) Mangctus Bibl. med. pracL de phlisi asthmatica, [%} P r a l med. lib. 7 cap. 1 de asthmate. (3) Med, syst. t. V p. iv, 4 de aiec. plitliis.
123
sont verss mme mdiocrement dans la mdecine, que la phthisie nat trs-souvent de la pripneumonie, dit Manget,
il ajoute: CETTE PUTRISIE EST TOUJOURS JUSQU' CERTAIN POINT AIGU, en tant que ne d'une maladie antrieure aigu,
par laquelle non-seulement les forces ont t grandement abattues^ mais par laquelle la masse mme du sang est laisse dans un tat colliquatif ; ainsi il peut se faire ainsi Vrs-souvent qu'il se forme une collection notable de pus dans les poumons (1).
"15. Donc l a cause prochaine d e la maladie constitue par l'inflammation est de telle nature que, prise mme h part, elle pousse trs-vite et trs-fortement h la phthisie. Ajoutez cette cause prochaine la cause plus loigne de l'humeur acre et rpercute sur le p o u m o n de l'ruption morbillense rentre. Placez l'une et l'autre cause au milieu des c o n d i tions, tant d'ge et de t e m p r a m e n t prdisposant la phthisie, que d'aptitude cette maladie cause p a r l'asthme habi tuel, et ne serez-vous pas forc d e regarder c o m m e tout fait invitable l'existence dans ce c a s d ' u n e phthisie, et de cette phthisie qui ne rencontrant n u l obslacle, mais trouvant tout prpar et tout facile, doit marcher au plus vite, s'accrotre et se prcipiter v e r s sa fin.
16. On n o u s dira p e u t - l r e : soit, t o u t cela montre la
probabilit et m m e , si vous le prfrez, la ncessit de l'existence d u n e phthisie aigu chez Marie-Rose, mais rien ne prouve encore l'existence mme de cette maladie, que les symptmes seuls pouvaient tablir. Nous n'en disconve nons pas; mais dans notre Information, n o u s avons c o m par avec la plus grande exactitude tous les s y m p t m e s de la maladie de Marie-Itose, et chacun d'eux en particu lier, avec tous les s y m p t m e s noncs par les rapporteurs du premier j u g e m e n t c o m m e indices certains et i n d u bitables d'une phthisie pulmonaire confirme ; et nous avons montr, l'aide de cette c o m p a r a i s o n , que la maladie
de noire j e u n e fille t a i t u n e v r i t a b l e p h t h i s i e pulmonaire
confirme. R a p p e l e r i c i t o u t c e q u i a t d i t alors, ce serait fatiguer d'une redite bien inutile, les oreilles des Vn rables Pres. Nous pensons qu'il n o u s suffira maintenant de leur montrer l'existence de la phthisie, e x i s t e n c e prouve par les rapports prcdents, mais confirme par des raisons q u e nous avons donnes tout r c e m m e n t , et qui prouvent q u e , dans le cas en question, la phthisie a t la c o n s q u e n c e
(!) Biblioth. nied. pract. De la phthisie ne de la pripneumonie et \ la pleursie.
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ncessaire de la marche de la maladie, et q u e , par cons quent, il faut absolument rejeter toute e s p c e de soupon d'une autre maladie, 17. Toutefois p o u r mettre sous les y e u x ici de nouveau, runies c o m m e en u n seul faisceau, t o u t e s les raisons apportes dans l'Information, n o u s transcrirons ce passage si lgant de Burser, qui parat avoir trac le tableau de la maladie de Marie-Rose. Nous comparerons ensuite avec c e tableau, le rcit m m e de la maladie fait e n p e u de m o t s , par le m d e c i n ; il sera facile alors de se prononcer sur sa nature vritable. Voici les paroles de Burseri (1) : De t o u t e s les maladies qui s u c c d e n t s u r t o u t au virus morbilleux, la plus frquente est la p r i p n e u m o n i e j a q u e l l e survenant t o u t c o u p a u desschement des b o u t o n s , conduit les malades u n danger des plus srieux de perdre l a vie, et les fait souvent mourir. Quelquefois la prip n e u m o n i e n'tant pas arrive rsolution, se t e r m i n e par la suppuration. Alors les malades toussent a s s i d m e n t , ils ont le soir en horreur; le matin, ils prouvent une abondante transpiration qui les affaiblit. Leurs expectorations sont p u r u l e n t e s . Si ces crachats purulents se j o i g n e n t u n e voix r a u q u e , la maigreur et une espce de fivre lgre continue, lente, alors il n'y a plus de doute, c'est la phthisie p u l m o naire. Voyons m a i n t e n e n t l'histoire de la maladie telle q u e n o u s la donne le m d e c i n appel soigner la m a l a d e . Marie-Rose, dit-il, depuis le c o m m e n c e m e n t du m o i s de mars a t atteinte de rougeole p i d m i q u e et de mauvais augure. La gurison n'arriva a u c u n e m e n t , il survint au contraire... u n e rtrocession vers l e s p o u m o n s . . . Alors apparut une p r i p n e u m o n i e s e t rieuse a c c o m p a g n e de s y m p t m e s trs graves... L*exu b r a n c e de Tcret du virus morbilleux dans les p o u m o n s , jointe l'extrme faiblesse de ces derniers firent q u e cette seconde maladie n'eut pas une rsolution h e u r e u s e et c o m p l t e . Elle dgnra e n v o m i q u e . . . Cette affection tait l avec ses signes particuliers et caractristiques, s a v o i r ; la voix rauque, la t o u x , l'ex pectoration purulente, la fivre htique, u n e inspiration b e a u c o u p plus difficile qu' l'ordinaire : la m a i g r e u r , les sueurs nocturnes, une diarrhe liquide. T o u s c e s s y m p tomes, partir du c o m m e n c e m e n t d'avril, allrent <i toujours en a u g m e n t a n t .
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24. Jamais uf n e ressembla davantage u n uf. On serait tent de croire que Burser a t appel auprs de notre malade, qu'il a observ avec le plus grand soin le dbut, les variations, le progrs, les s y m p t m e s des mala dies dont elle fut atteinte, et qu'ensuite il e n a.fait le tableau dans son ouvrage. Mais si ce clbre auteur, aprs avoir fait l'histoire de cette maladie, aprs avoir pass en revue chacun de ses s y m p t m e s , termine par ces m o t s : Il n'est plus permis de douter de l'existence d'une phthisie p u l m o naire; je vous le demande, un h o m m e clair pourra-t-il douter que vers la fin de m a r s , u n e vritable phthisie p u l monaire se soit dclare chez notre m a l a d e ? 25. Maintenant: q u e n o u s avons dmontr la vritable nature de la maladie e n question, de m m e que la ncessit de son existence, que n o u s avons exclu l'hypothse de la vomique, revenons aux difficults de n o t r e adversaire, auxquelles nous devions opposer d'abord c e que n o u s venons de rapporter. C o m m e n o u s l'avons dit, il prtend que la maladie e n question a t une v o m i q u e vritable; il cite quelques aphorismes d'Hippocrate concernant la marche de cette maladie, et il en conclut que la gurison est arrive l'poque o la v o m i q u e devait naturellement se vider : donc, c o n c l u t - i l en dernier lieu, il n'y a pas eu le temps ncessaire pour que de v o m i q u e , la maladie ait pu devenir phthisie pulmonaire, et il ne faut pas attribuer un miracle u n e gurison opre par les seules forces de la nature. 26. Tout ce raisonnement provient d'une erreur dans la manire de compter, erreur que n o u s avons c o m m i s e nousmmes avant notre adversaire, n o u s l'avouons en toute sim plicit. Hippocrate e n s e i g n e : 1 qu' la suite d'une pleursie, ceux-l viennent l'tat de suppuration interne qui dans l'espace de quatorze jours, partir du c o m m e n c e m e n t de la maladie, n'ont pas t guris par l'expectoration ou par les crachats; 2 que cette suppuration engendre l'tisie lors qu'elle n'est pas vacue dans l'espace de quarante jours compter de l'poque de la rupture ; 3 q u e cette rupture de la suppuration arrive ordinairement le vingtime, q u e l quefois le trentime o u le quarantime o u m m e le s o i x a n time jour. Or, n o u s avons pris ces laps de temps, n o n pas dans le sens de priodes pouvant enjamber sur une autre priode et concourir avec elle, m a i s de priodes parfaitement distinctes Tune de l'autre, o u de priodes se Succdant les unes aux autres. Notre adversaire est t o m b dans la m m e f a u t e ; il a fait
a
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u n e addition semblable, et partant du c o m m e n c e m e n t de la maladie, qui eut lieu dans les premiers jours de mars, accor dant quinze jours pour la marche des morbillons, ces quinze jours ajoutant les quatorze j o u r s de la pleursie ou de la p r i p n e u m o n i e , j o i g n a n t tout cela les vingt jours ncessaires pour la formation t la rupture de la suppuration o u de la v o m i q u e , il arrive de cette sorte a u 20 avril environ. A partir de la rupture, laquelle selon lui, eut l i e u c e t t e p o q u e , il c o m p t e e n c o r e quarante j o u r s p e n d a n t l e s q u e l s lit rpurgation o u l'vacuation a pu se faire d'une manire naturelle: e t e c n'est qu'aprs ces qua rante derniers jours couls, qu'il trouve la place de la phthisie. E t parce que la gurison est arrive le 23 mai dans l'intervalle des quarante jours ncessaires pour l'va cuation naturelle, il en c o n c l u t que la phthisie n'a pu exister, parce que le temps a m a n q u pour cela, et que la gurison n e surpasse pas les forces d e la nature, puisqu'elle est survenue l'poque de l'vacuation naturelle. 27. T o u t cet chafaudage, fond sur un calcul erron, croulera facilement, quand le calcul aura t corrig et rec tifi. C o m m e n o n s par la priode des morbillons. Marie-Rose c o m m e n a h s o u f f r i r d e l a r o u g e o l e d s l e c o m m e n c e m e n t de m a r s . N o t r e a d v e r s a i r e a s s i g n e q u i n z e j o u r s h la d u r e de cette m a l a d i e ; mais les mdecins lui e n assignent u n e p l u s courte. Il y a trois priodes dans cette maladie, savoir : la priode d e l'ruption, celle de l'cfflorescence et celle du desschement. Voici sur ce point c o m m e n t s'exprime J e a n Pierre F r a n k (1) : la priode de l'ruption n e c o m p t e q u e quelques h e u r e s , ou l'espace d'une nuit ; les pustules des morbillons durent deux ou trois jours environ l'tat d'efflorescence... Vers le n e u v i m e jour o u vers le o n z i m e , si la maladie est plus grave, o n n'aperoit plus aucune trace des morbillons sur la peau : ainsi la dure de la maladie n e dpasse p a s le n e u v i m e , tout au plus le onzime jour. Mais, dans notre c a s , l a m a l a d i e n'a pas p a r c o u r u sa priode, elle n ' e s t p a s m m e a r r i v e sa fin (la c r i s e h e u r e u s e ) , p u i s qu'elle a t rpercute. La crise parfaite des morbillons, dit
le mdecin, n'a nullement eu lieu, U est plutt arriv une mtastase (2) extemporane, ou un refoulement dans les
poumons. Et cette mtastase n o u s la plaons ncessairement dans l'eiflorescence des p u s t u l e s . Gomme cette efflorescence (1) De. la gurison des maladies de l'homme, article Morbillons. Clas. III, 348. (2) Mtamorphose de pialadie.
127
prend deux o u trois jours peu prs, n o u s ne pouvons renvoyer la mtastase au del du quatrime jour de mars. C'est donc ce jour que n o u s plaons le c o m m e n c e m e n t de la pleursie ou de la pripneumonie, car ces deux affec tions se confondent s o u v e n t Tune avec l'autre (1). 28. Hippocrate nous trace en ces termes le pronostic de cette maladie : les pleurtiques qui ne sont pas entire ment purgs par en haut en quatorze j o u r s , voient s'oprer en eux une transition la suppuration. Ainsi donc, ceux qui ne sont pas guris dans c e laps de t e m p s , passent l'tat de suppuration. Or la purgation suppose une matire qui doit tre vacue. 11 faut donc que, pendant ces mmes jours, le pus dont le malade doit tre purg puisse s'tre 'form. Il faut donc ramener le c o m m e n c e m e n t de la suppu ration, non pas la fin de la phthisie, mais bien s o n dbut. Gorterus, qui a trs-savamment illustr les aphorismesd'Hippocrate de commentaires perptuels, dit en cet endroit (2) : Pour que la pleursie ait pass en p u r u l e n c e ( a m a s d e p u s ) . . . , c'est un signe suffisant que l'inflammation ait dur qua torze jours... C'est pourquoi, si les signes d'une pleursie inflammatoire se sont prolongs pendant quinze jours, n o u s sommes certains que le pus est form. Il dit form: le pus soit n'est donc plus se former. La priode de la suppuration commence donc dans la priode de la pleursie. Mais quand commence-t-elle? Elle se prpare dans les c o m m e n c e m e n t s mmes de la maladie. Boerhaave enseigne que : La p
ripneumonie passe en une autre maladie dpendante la nature de l'inflammation... Ainsi, elle passe abord en suppuration... Il est dmontr qu'il en est ainsi: 1 etc.; 2 si
la gurison ou les signes de gurison n'apparaissent pas dans un trs-court dlai, c'est--dire, avant le quatrime jour. Il ajoute ensuite : les signes qui ont prcd dclarent que cela a dj ou lieu. Van Swieten ajoute : Nous savons qu'un abcs purulent se dclare dans les p o u m o n s lorsque nous voyons d'abord les signes dont nous avons parl dans les deux paragraphes prcdents. C'est ce.qui a fait dire (1) Franck, cit prcdemment, joint Tuno h l'autre dans la clas. 2 l'article des inflammations : J'examcn de quelques centaines de ca davres, dit-il, nous a appris, ce que dj des crivains de grande auto rit avaient remarqu que, parmi ceux qui taient morts par suite de pleursie ou de pienroprljjnenmonie accompagne d'autres affections, il y en a trs-peu chez qui le sige de i'inllainmation ne se soit pas trouv tre la plvre mme. Chez presque tous, les poumons se sont enflamms la suite de la pleursie, comme chez ceux qu'on croyait atteints de pripneumonie seulement. (2) Media Hippcrat. ltb. 5. aphor. 8. mum. 3 .
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Hippocrate : Il faut considrer c o m m e c o m m e n c e m e n t d'une suppuration future, le m o m e n t ou l e j o u r m m e o le malade a ressenti les atteintes de la fivre. 2 9 . Cela p o s , s'il faut rapporter a u dbut de l a maladie le c o m m e n c e m e n t de l a future suppuration ; si o n j u g e que cette dernire l i e u chaque fois q u e le q u a t r i m e j o u r ne d o n n e pas de signes de rsolution, si la persvrance de la m a l a d i e atteste q u e la suppuration a e u l i e u , il faut recon natre, dans l e cas o le m a l persvre, q u e l'amas de pus a e u l i e u dans la priode de la p r i p n e u m o n i e . Mais c e t amas de p u s constitue la v o m i q u e ; donc, dans l'hypothse c o n tradictoire d'une v o m i q u e simple et vritable, il n e faut pas ajouter la priode de l'abcs la priode de la p r i p n e u m o n i e , sous forme d'addition, mais il faut la confondre avec cette dernire priode, p u i s q u e la v o m i q u e c o m m e n c e se former dans l e cours m m e de la p r i p n e u m o n i e . Ainsi, q u a n d bien m m e n o u s reporterions le c o m m e n c e m e n t de la v o m i q u e au septime jour de la p r i p n e u m o n i e , et qu'en suite n o u s ajouterions vingt autres jours ncessaires pour l a rupture de Ja v o m i q u e , nous n'irions pas a u del de la fin de mars. Car, n o u s d o n n o n s les quatre premiers jours du m o i s ,'aux morbillons, les sept jours suivants la pri p n e u m o n i e , les vingt derniers la v o m i q u e , or le tout runi forme trente et u n jours. D'aprs c e calcul, la rupture de la v o m i q u e prcderait la gurison d e cinquante-deux j o u r s , puisque cette dernire e u t lieu le 23 m a i . De cette faon il n e m a n q u e pas de temps pour la phthisie, et la gurison n e concide pas avec le temps de la rpurgation naturelle, laquelle, selon Hippocrate, doit tre a c c o m p l i e quarante j o u r s aprs l a rupture de la v o m i q u e . 3 0 . Il n o u s reste encore examiner l e second a p h o r i s m e : Ceux q u i , par suite d'une pleursie, p a s s e n t l'tat de suppuration interne sont guris, si dans 1 espace de qua rante j o u r s , partir de la rupture de la v o m i q u e , ils sont purgs par les expectorations, sinon ils passent l'tisie o u l a phthisie. Notre adversaire croit qu'il faut compter ces quarante jours entiers, avant que l'aileclion phthisique n e s e dclare ; m a i s il est dans l'erreur. Il est clair, e n effet, qu'il faut raisonner sur c e t aphorisme c o m m e sur le prc dent. U n e fois q u e l e p u s , si bnin q u ' o n l e suppose, s'est rpandu, il c o m m e n c e dgnrer et devenir pus m a u v a i s , dit Van S w i t e n . Car u n e fois sorti d e s vases qui l e contenaient, il n'est plus s o u m i s aux lois d e l a circula tion : restant stagnant, sous l'action de la c h a l e u r locale, il prouve u n c h a n g e m e n t spontan, et tourne, par suite, e n
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putrfaction... il se change e n un fluide ichoreux et clair. Et cette fluidit a u g m e n t e par la putrfaction est a c c o m pagne d'une cret plus g r a n d e ; de l, ces paroles d'Hippocrate : Le pus arrt et amass dans le p o u m o n et le thorax, ulcre et putrfie. Or la phthisie pulmonaire n'est rien autre c h o s e q u e cette lente c o n s o m p t i o n de tout le corps cause par l'ulcre des p o u m o n s et l'espce de petite fivre continue qui en rsulte (1). Il ne faut donc pas placer le c o m m e n c e m e n t de la phthisie au quarantime jour aprs la rupture de la suppuration, mais on doit la faire partir du temps o le pus devenu stagnant c o m m e n c e se corrompre et ulcrer, ronger les poumons par s o n cret, ce qui se fait assez promptement, comme n o u s l'avons v u . Ainsi d o n c , puisque la v o mique se rompit, la fin de mars, c'est au c o m m e n c e m e n t d'avril ou m m e avant le milieu de ce mois, qu'il faut placer la naissance de la phthisie. Or de cette poque o elle aurait c o m m e n c jusqu'au 23 m a i , il s'est coul videmment une espace de temps assez considrable. Ainsi donc ces aphorismes d'Hippocrate, qu'on n o u s opposait, l g i t i m e m e n t interprts, n o u s montrent, nonseulement, qu'il y eut tout le temps ncessaire pour tablir une phthisie par suite de vomique, mais que la g u rison n'est pas arrive l'poque ordinaire d'une purgation naturelle; que la phthisie avait c o m m e n c bien avant la gurison; et que la gurison est arrive lorsque la pbthisie avait d. tre dj confirme. 31. Nous faisons ces observations pour rpondre au calcul tabli par notre adversaire. Car il est certain, du reste, que le mot grec phthisie, qui en latin rpond au mot tisie, ou consomption, produite par la corruption, peut se prendre, ou comme ellet, et alors il exprime cette consomption de tout le corps, qui a pour origine J'ulcre de l'organe affect, ou comme cause, et dans ce cas il dsigne la corruption mme de l'organe (2). Appliquons le double sens de ce m o t au cas prsent. D'aprs le premier sens, il est clair que l a phthisie o u la c o n s o m p t i o n do corps de Marie-Rose doit tre retarde jusqu'au m o m e n t o la cause de la c o n s o m p tion avait pris un certain dveloppement, ce qui nous place dans le courant d'avril, c o m m e n o u s l'avons tabli. Mais si par phthisie on entend l'ulcre m m e des poumons, cause de la c o n s o m p t i o n du corps, p u i s q u e la vomique n'est autre chose qu'un grand ulcre des p o u m o n s , il est clair qu'il faut
(1) Burserms. Inst. md. pracl. cap. m, c pliili. p. 1S, | 54.
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faire c o m m e n c e r la priode de la phthisie avec la priode m m e de la v o m i q u e . Or, la v o m i q u e c o m m e n a s'tablir avant le m i l i e u de mars ; donc la phthisie, qui a c o m m e n c pendant c e t e m p s , progressa depuis cette poque jusqu'au 23 mai, c'est--dire qu'elle dura deux m o i s et demi environ. Qui ne voit alors les dveloppements terribles qu'elle a pu prendre p e n d a n t un temps aussi l o n g . Ainsi donc, alors m m e , qu'on admettrait la fausse h y p o thse d'une v o m i q u e pure et simple, notre cause n'en souf frirait a u c u n e m e n t . En effet, il est dmontr que la phthisie a d ncessairement prendre naissance, et qu'elle a d tre confirme l o n g t e m p s avant la gurison, et q u e , cause de cela elle n'a p avoir lieu dans la priode de temps de la rpurgation naturelle de la v o m i q u e . E t cela apprendra videmment, qu'en excluant la v o m i q u e , n o u s no le faisons q u e par amour de la vrit, puisque m m e en admettant l'existence de la v o m i q u e , n o u s aurions p u trs-facilement dfendre notre cause. 3 2 , Aprs cela, c'est en vain que la critique nous oppose le texte prolixe de Zacchias et l'autorit de B e n o t X I V , lesquels tablissent qu'il ne faut point admettre le miracle chaque fois que la gurison a lieu pendant que la maladie est dans sa dernire priode, ou prs de sa crise. C'est en vain, di sons-nous, qu'on nous l'ait cette o b j e c t i o n ; car elle repose en principe sur 1 hypothse dj dtruite de la v o m i q u e pure et simple, et sur le faux calcul des j o u r s . En second lieu, le texte emprunt Zacchias est tout fait tranger au cas en question. Sans aucun doute, dans l'endroit cit, cet auteur parle de L'tat de la maladie, de sa diminution, du
pronostic, de la crise, d'un changement subit et soudain qui a lieu dans un laps de temps- fort court. Or, toutes ces
choses ne peuvent convenir qu'aux seules maladies aigus, et n u l l e m e n t aux maladies chroniques, telles que la vomique, la phthisie, quelque pernicieuse qu'elle soit. Car lorsqu'une maladie chronique arrive lentement et c o m m e pas pas anantir les forces du corps, dissoudre les tissus organiques, ronger les viscres, e t c . , elle ne peut tre repousse que par u n effort lent aussi de la nature et des remdes, qui rta blisse les forces p e u p e u , qui reconstitue peu p e u les tissus organiques, et runisse les parties disjointes. Dans les maladies chroniques, il n'estpas permis, c o m m e on le fait dans les maladies aigus, de provoquer une-crise soudaine, u n changement subit qui fasse disparatie toute la malice de l'affection, car cette aUection a imprim des traces profondes ftt durables de s o n action prolonge. C'est pourquoi, qu'il
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s'agisse de la phthisie, c o m m e n o u s Pavons dmontr, ou qu'il s'agisse de la v o m i q u e , c o m m e notre adversaire le prtend, il est impossible de trouver de crise qui produise une gurison subite, cause par n'importe quelle vacuation, si favorable, si abondante qu'elle puisse tre. Quand bien m m e o n a c corderait que les crachats purulents, les sueurs, la diarrhe, les urines, dans ces sortes de maladies, sont vritablement critiques et n o n s y m p t o m a t i q u e s , il n'en rsulterait cepen dant que la rpurgation de l'organe ulcr : celle-ci u n e fois accomplie, il faudrait encore attendre u n e opration lente et de l o n g u e dure de la nature et des remdes, pour q u e les parties ainsi purges, mais encore c o m m e arraches, blesses, ronges, prennent des forces, se raffermissent, se runissent, se cicatrisent. Les cavits d e l vomique une fois bien expurges, crivait Burser (De Vomic 147), il faut recourir aux vulnraires, une nourriture vgtale, au lait, l'corco du P r o u pour les cicalriser. Ce traitement bien long exclut le c h a n g e m e n t subit et soudain dont parle le texte de Zacchias, lexte fort dtourn de s o n sens. 33. Nous n o u s s o m m e s peut-tre arrt avec trop de complaisance l'hypothse de la v o m i q u e ; sortons mainte nant de ces substilits, et mettant la v o m i q u e entirement de ct, passons aux doutes qui restent sur la vritable nature de la maladie, discutons-les. Notre adversaire, rapportant le sentiment d'Hippocrate, qui enseigne que les malades sont guris lorsqu'ils sont r e purgs par en haut, pense que cela eut lieu chez notre m a lade, par cette abondante expectoration, qui faisait que la pauvre fillette rendait des crachats sales, semblables u n e matire paisse..., cette expectoration tait accompagne de diarrhe, de sueurs abondantes et d'urines ; or tout cela a pu faire vacuer les mauvaises humeurs et procurer la guri son par des m o y e n s naturels, surtout lorsqu'on ajoute le secours de remdes convenables ayant d favoriser beau coup les eflorts de la nature. 34. Nous avons donc examiner cette question u n i q u e : dans u n e vritable phthisie p u l m o n a i r e , l'expectoration purulente, les sueurs n o c t u r n e s , la diarrhe, les urines copieuses fpeuvent-elles tenir lieu d'vacuations critiques, surtout sous l'influence des r e m d e s . La solution de cette question se trouve dans le diagnostic de la maladie. En effet, puisque les sueurs n o c t u r n e s , la diarrhe, l'expec toration purulente sont les s y m p t m e s vidents et p a t h o gnomoniques d'une phthisie dveloppe et confirme, ces m m e s accidents n e peuvent tre critiques et de b o n
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augure. Quiconque a quelquefois s o i g n les phthisiques, sait fort bien, par exprience, q u e ce& symptmes n e se prsentent chez e u x , que lorsque la maladie s'est fort aggrave, et qu'elle n e laisse presque plus d'espoir de g u rison. Cette simple observation m o n t r e assez clairement q u e ces accidents n e sont pas les effets de la nature ragissant avec force contre la violence de la maladie, mais bien les effets de la malignit et de l'intensit de cette m m e m a ladie, ayant dj liqufi toutes les h u m e u r s , qui dtermine dans les p o u m o n s u n e corruption qui s'aggrave de jour en jour, d'o rsultent une expectoration plus abondante et plus ftide, des urines plus frquentes, u n e diarrhe colliquative et des sueurs, d'o il arrive que ces divers s y m p t m e s sont suivis de cet affaiblissement des forces, de cette maigreur extrme que n o u s retrouvons chez Marie-Rose. Elle tait rduite l a peau et aux os, il lui tait t o u t fait i m p o s sible de se lever de son lit, m m e pour qu'on le reft; tous signes prcurseurs de la dissolution du corps et de la m o r t . 3 3 . Burser s'exprime ainsi : Aussitt... qu'on c o m m e n c e cracher le pus vritable, il n'y a plus douter d'une phthisie confirme. Bientt un affaiblissement e x trme se produit dans tout le corps, rsultat d'une fivre violente et du pus qui est absorb par les veines. Il en rsulte d'abord que les sueurs n o c t u r n e s et matinales augmentent et deviennent presque perptuelles; elles sont suivies d'un flux de ventre qui alterne avec elles ; les urines arrivent en plus grande quantit, laissant souvent aper cevoir leur superficie une espce de graisse liqufie. De l, une trs-prompte prostration des forces et une extrme maigreur achvent le malade. De P h t . p u l m . cap. 3 60. Hippocrate aussi reconnat n o n pas u n e amlioration de la maladie, mais u n signe de mort dans u n e expectoration purulente et ftide, c o m m e chez .Marie-Iiose, qui avait ues crachats sales et de mauvaise odeur o, chez laquelle les crachais devenaient de plus en plus abondants, purulents et ftides . Hippocrate (Aph. Il, lib. 5) a crit : P o u r c e u x qui sont atteints de consomption, si les crachats qu'ils rejettent la suite de la toux ont une mauvaise odeur, c'est u n signe de m o r t ; car ces crachats, dit van Swietcn (Ad Boheraav. aph. 12 61), sont dj les indices d'une corruption b i e n c o m m e n c e . Quant la diarrhe, Hippocrate a dit (ibid.) : u Le cours de ventre se dclarant chez celui qui souffre de c o n s o m p t i o n , est un s i g n e de mort. Sur quoi, Gorter fait cette remarque : Dans toute espce de c o n somption, la diarrhe est un signe de mort, parce qu'elle
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annonce que les humeurs sont devenues colliquatves... Et le flux de ventre est nuisible aussi parce qu'il fait vacuer ce qui est nutritir, et parce qu'il conduit de la poitrine dans le ventre les lments purulents et gts. Donc, la nature de la maladie tant bien tablie, les sueurs, les cours de ventre, l'abondance de l'urine, une expectora tion purulente plus abondante, doivent tre regards n o n comme critiques et favorables, mais c o m m e des symptmes de la maladie, et des s y m p t m e s mortels. Force est donc de laisser s'crouler tout ce q u e notre adversaire a bti sur ces excrtions pour montrer qu'elles ont pu repurger c o m p l tement les poumons et ouvrir, la v o i e une gurison naturelle. 36. Vous m e direz peut-tre : Mais Hippocrate a enseign lui-mme que le p o u m o n pouvait tre guri par des crachats purulents. Nous ne le nions pas, s'il s'agit d'un pus de bonne nature, d'un pus non corrompu, qui ne produit pas d'ulcre, qui ne ronge pas. Dans ce cas, en effet, le pus tant vacu, le poumon se trouvant purg, le mauvais intermdiaire ayant disparu, les parties dchires peuvent facilement se runir. Mais ici, il est question d'un pus corrompu et ftide ; quand bien mme le malade le rejetterait, l'organe ne serait pas
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taienl que dans le p o u m o n le pus t a i t e n t i r e m e n t e o r r o m p u . E n outre, elle avait une fivre lente et c o n t i n u e , elle subissait une dissolution de tout le corps; la t o u x , toujours la t o u x , sans repos ; elle avait une soif telle que jamais elle n e p o u vait se rassasier de boire. En u n mot, aux crachats de mauvais augure, elle j o i g n a i t tous ces s y m p t m e s , d o n t Hippocrate a f a i t l ' n u m r a t i o n en disant : S'ils se trouvent tous runis, ils a n n o n c e n t la m o r t ( t ) . L'autorit d'Hippocrate q u ' o n nous oppose est donc trangre h notre cas, p u i s qu elle s'applique s e u l e m e n t l'expectoration d'un pus de bonne nature ; bien plus le s e n t i m e n t d e c e m m e l i p p o c r a t e prouve, contre notre critique, que dans le cas en question les crachats purulents n'avaient que la mort pour perspective. 37. Mais les selles et les urines peuvent tre u n m o y e n d'vacuer le pus, c o m m e le font observer Burnet et Thoner Le premier apprit de Baubin qu'il existe, et le second a trouv e n dissquant u n cadavre, u n rameau de l'artre v e i n e u s e (arteriae venosae) qui s'tendait j u s q u ' l'entre d u ventricule gauche du c u r , s'levait au-dessus d u p o u m o n g a u c h e ; se repliait ensuite, et venait s'implanter a u - d e s s o u s du diaphragme dans le tronc descendant d e l grande artre qu'il accompagnait ; d ' o il concluait q u e le p u s issu d e la vpmique, pouvait trouver passage et sortir par les v a c u a tions alvines et par l'urine. Nous passons sous silence cette observation de Matthioli : Il n'est pas croyable q u e le pus, sang ftide et cor r o m p u , n o n - s e u l e m e n t passe par les artres qui c o n t i e n n e n t les esprits vitaux, mais aussi par le ventricule g a u c h e d u c u r , au sein duquel la vie h u m a i n e et le sang dans toute sa puret rsident avec l'esprit vital, sans produire des s y m p t m e s de la plus h a u t e gravit et sans m m e causer la mort. N o u s passons galement sous silence la grande controverse qui a toujours exist entre les mdecins pour d terminer le conduit qui dverse le pus dans la vessie et dans les intestins, car il est r e c o n n u q u e la poitrine peut tre repurge p a r ces issues, c o m m e Gallien et un grand n o m b r e de m d e c i n s grecs, arabes et latins l'avaient fait observer b i e n avant Burnet et Thoner (2). Mais de quelque manire que cela arrive, c'est t o u j o u r s par absorption, et l'ab sorption n'a lieu que lorsque le pus est lger, dli. Aussi Manget, traitant de cette v a c u a t i o n de l ' e m p y m e , a dit (3) :
(1) Pronost. pag. mlii 80 in fine et Seq.
(2) Lib. i. Epist. ad Julim Alexandrinuin apud Sennert. Medic. pract, lib. 2 part. 2. cap. 15. quaist. 5.
(3) Biblioth. Chirurg. Verb. empyerna pagina mihi 57 caput 2.
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L'empyme dj bien tabli, o u l'inflammation tant arrive entirement .l'tat cle suppuration, le pus bien m r , bien digr, c'est--dire qui n'est ni capable obstruer les vaisseaux, ni en fermentation, se mlangera seul au sang. Or chez Marie-Rose, le p u s n'tait n u l l e m e n t m r , n u l l e ment fluide, puisqu'elle expectorait des crachats sales, sent' Viables de la matire lie... Il tait d o n c impossible a u poumon de se purger de cette espce de p u s par voie d'ab sorption. Mais ! accordons que ce pus ait pu tre absorb de cette manire; il s'agissait n o n pas.d'un p u s bnin, mais de pus mauvais, de pus corrompu, ichoreux et purulent, c a r i e s crachats devenaient de plus en plus abondants, sanieux et ftides; tout le m o n d e comprendra alors que cette espce de poison a d c o m m u n i q u e r son virus a u sang auquel il se f l a i t , corrompre toutes les humeurs e t donner la mort. De quelque ct que vous tourniez, v o u s serez donc forc de reconnatre ici l'absurdit do l'hypothse d'une repurgation de cette sorte. Voulez-vous m a i n t e n a n t n o n - s e u l e m e n t la solution, mais l'anantissement de cette objection? Rappelez-vous que cette question de repurgation a tout entire t tablie sur l'hy pothse de la v o m i q u e o u de l ' e m p y m e . Or d'accord avec notre adversaire, n o u s avons exclu celle-ci et nous avons rejet celui-l, par des arguments de premire force. II est donc clair q u e j'aurais pu ne rien dire de cette purgation hypothtique, et n e pas chercher la rfuter, puisqu'elle est en opposition avec le cas de phthisie confirme, dont nous avions s e u l e m e n t traiter. 38. Cette suspicion de l'action de la n a t u r e tant victorieu sement repousse, vous recourez l'art de la mdecine, e t vous dites : on a e m p l o y des remdes, des remdes pro portionns au m a l , et ils ont d certainement aider les efforts de la nature. Ce que nous avons dit prcdemment montre le valeur de cette objection. En effet, si, malgr les remdes la maladie s'aggravant c h a q u e jour, a donn naissance aux s y m p t m e s qu Hippocrate, avec tous les mde cins et l'exprience ont dmontrs mortels, l'inutilit des re mdes est vidente ; quand m m e les remdes auraient t proportionns a u mal, c'est--dire en rapport avec la nature del maladie c o m m e ils devaient 1 tre, il n e s'ensuit pas q u e , dans l e cas en question, ils furent efficaces et chassrent la maladie.Et, en effet, le soixante-douzime tmoin d i t : J e la trouvais toujours dans un plus mauvais tat... elle allait (1) Biblioth. chirurg, verb. empyema pag. mihi 53.
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toujours de mal e n pis, et v o u s pouvez comprendre ainsi que les remdes ne la soulageaient a u c u n e m e n t . Le mdecin confirme cette dposition lorsqu'il d c l a r e : Marie-Rose n'a jamais prouv aucune a m l i o r a t i o n , mais elle alla toujours de m a l en pis, c'est p o u r q u o i alors m m e q u e n o u s la visitions, elle apu se dire abandonne, parce a que l'art n'avait aucun remde pour la soulager. Et, e n effet, vit-on jamais gurir, par la vertu des remdes, d'une phthisie confirme, c'est--dire arrive ce point o elle est incurable ? 3 9 . Ajoutez que l'emploi des remdes e u t lieu s e u l e m e n t a u dbut de la maladie, et qu'ils c e s s r e n t lorsque la gravit du m a l eut enlev tout espoir do g u r i s o n . Au dbut, dit le soixante-seizime tmoin, on lui donna des r e m d e s ; on n e lui e n d o n n a plus ensuite parce que le cas tait dsespr. P e n d a n t cette priode, t o u s les soins du m d e c i n tendirent l'adoucissement de la maladie, p a r l e m o y e n des mollients ; mais on ne cherchait pas la vaincre. P e n d a n t la dernire priode, a dclar le m d e cin, lorsque, c o m m e je l'ai dit, la maladie fut dses pre, on employa des dcoctions, des infusions et d'autres remdes bnins, clans le seul but d'adoucir les accs de toux, la difficult de respirer, mais j a m a i s pour gurir la maladie principale. J'ai aussi ordonn de temps en t e m p s quelques m d i c a m e n t s , mais alors q u e la maladie n'tait pas encore invtre, et ce n'tait pas tant pour combattre le caractre et la nature du m a l , que c o m m e palliatifs et lnitifs, afin de prolonger la vie de la malade autant q u e j e le pourrais, et lui rendre m o i n s pnibles les accidents de la maladie. La m r e de la malade qui lui administrait ces remdes tient le m m e langage, elle a dit : on avait prescrit c o m m e rafrachissant de la bouillie avec du lait, et du lait mlang d'eau pour boisson, ce q u e j'ai toujours c o n tinu de lui donner. Puisqu'au dbut s e u l de la maladie o n employa des r e m d e s pour la c o m b a t t r e ; puisque malgr ces remdes la maladie s'aggrava j u s q u ' devenir tout fait i n c u r a b l e ; puisqu'aprs cette p o q u e , tout espoir de gurison tant vanoui, on prescrivit des remdes la j e u n e malade, n o n p o u r la dlivrer de s o n affection, mas s e u l e m e n t p o u r adoucir les s y m p t m e s cruels qui se manifestaient, il res sort cette conclusion vidente qu'il ne fallait rien esprer de ces r e m d e s , et que rellement ils n'ont produit aucun effet. 40. Notre savant adversaire termine cette premire partie,
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de son argumentation en affirmant que, des raisons par lui apportes, il rsulte que Marie-Rose n'a pas t atteinte d'une phthisie pulmonaire bien dclare, mais d'une v o mique, que cette dernire s'est rsolue dans le dlai ordi naire; que les p o u m o n s furent ensuite repurgs par les efforts combins de la nature et de l'art ; qu'enfin la gurison est arrive, alors que, la repurgation tant accomplie, la maladie devait ncessairement disparatre, 11 faut donc attribuer la gurison la force de la nature, et n o n pas la vertu d u miracle. Telle est sa c o n c l u s i o n . Quelle sera notre rponse? Si ce que n o u s avons dit prc demment exclut l'existence de la v o m i q u e pure et simple; s'il montre entach d'erreur le calcul qui placerait la gurison dans la priode de la repurgation naturelle; s'il met au grand jour l'existence d'une phthisie pulmonaire confirme; si nous avons repouss victorieusement t o u t e espce de s o u p on d'une purgation naturelle, et dmontr l'inutilit des remdes employs au dbut de la m a l a d i e ; si nous avons prouv qu'ils furent ensuite mis de ct, parce que le m a l s'aggravant de j o u r e n j o u r avait fait disparatre t o u t espoir de gurison; c h a c u n , dsormais, peut facilement juger de ce qu'il faut penser de l'assurance avec laquelle notre adversaire n o u s oppose les c o n c l u s i o n s q u e n o u s venons de rappeler. 41. Mais notre illustre contradicteur, se crampronnant la fiction d'une repurgation naturelle, et lui attribuant la gurison, s'efforce de fortifier sa thse par l'histoire des derniers temps de la maladie, du voyage entrepris vers R o m e , des alles et venues dans les glises de la ville. Voici son raisonnement : L a j e u n e malade, avant de s'loigner de son pays, non-seulement fut abandonne d u prtre, qui p e u auparavant l'assistait lorsqu'elle tait e n danger de m o r t , mais l'occasion d'un t r e m b l e m e n t de terre elle put tre emporte au dehors de sa maison, elle p u t se lever de s o n lit, elle put se promener quelque p e u chez elle appuye sur d'autres personnes, elle p u t ' m m e entreprendre un v o y a g e monte sur u n ne, j'accorde qu'elle a d tre soutenue par ses compagnes ; Rome, elle put se diriger pied vers l'glise de Sainte-Marie in Ara coli, et deux fois vers S a i n t e Maiie-aux-Monts, etc. il y a d o n c e u du mieux chez elle-Or, ce mieux avait prcd la repurgation abondante et d'assez longue dure dont n o u s avons parl, donc, puisque cette repurgation est un m o y e n naturel de diminuer le mal, n o u s devons lui attribuer cette e s p c e de soulagement. De l, il suit : 1 que la gurison est tout fait naturelle, puisqu'elle
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fut procure par u n m o y e n naturel ; 2 qu'il n'y a pas e u de gurison instantane, puisque l'adoucissement du m a l avait c o m m e n c b i e n avant la gurison. 4 2 , Nous ferons observer en passant le vice de cet a r g u m e n t , post hoc ergo propter hoc (ceci est arriv aprs cela, d o n c ceci est produit par cela), dont se sert notre critique lorsqu'il dit : l'vacuation a prcd, u n soulage m e n t a suivi ; donc le s o u l a g e m e n t est produit par l'va cuation. Ce que n o u s dirons plus tard montrera clairement q u e ce s o u l a g e m e n t extrieur, quel qu'il ft, et q u e notre ad versaire fait sonner si haut, n'a d i m i n u e n rien la gravit de l a m a l a d i e , et qu'il provient d'une t o u t autre cause. N o u s ferons remarquer ensuite que, dans le cas en q u e s t i o n , e n prsence de l'existence d m o n t r e d'une phthisie p u l monaire confirme , on ne pouvait n o u s opposer rien de plus vide q u e c e r a i s o n n e m e n t . Quel est celui assez tranger ces sortes do maladies et de malades, assez novice dans la pratique de la m d e c i n e , pour n'avoir j a m a i s v u , p o u r n'avoir jamais appris q u e ces alter natives s o n t naturelles dans la phthisie p u l m o n a i r e ? Est-il q u e l q u ' u n qui ignore que les personnes du peuple qui soignent les malades, et que les malades e u x - m m e s se font i l l u s i o n au point que jusqu' l'arrive de la m o r t , ils croient trouver du mieux, et esprent la g u rison? Est-il quelqu'un qui n'ait appris qu'il arrive f r q u e m m e n t que les phthisiques s u c c o m b e n t lorsqu'on y p e n s e le m o i n s , e n m a n g e a n t , en buvant, e n p a r l a n t ? D'un m a l a d e mourant de cette manire, oserait-on dire : il buvait, il m a n g e a i t , il parlait lorsqu'il mourut, d o n c il se trouvait m i e u x ? L'exprience nous apprend donc d'une manire vi d e n t e et constante, que ces s o u l a g e m e n t s apparents peuvent trs-bien avoir lieu, nou-seulement avec la continuation, m a i s m m e avec l'aggravation de la maladie. 4 3 . Ce que l'exprience nous met s o u s les y e u x , la rai s o n mdicale n o u s l'explique avec clart. On sait, dit Van S w i e t e n ( 1), q u e le p o u m o n est divis en lobes majeurs qui se subdivisent c h a c u n e n lobes mineurs; chacun d'eux arrive u n rameau de l'artre pulmonaire, rameau plus grand pour les lobes majeurs, r a m e a u plus petit pour les lobes m i n e u r s ; les vaisseaux sanguins d'un lobe n'ont a u c u n rapport avec les vaisseaux d'un autre lobe, qu'ils soient spars ou n o n par u n e m e m b r a n e . Ces cltures et ces divisions ont pour rsultat q u e , dans la phthisie pulmonaire, le p a r e n c h y m e
( i ) Ad aphol. Boerhua, 1206,
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des poumons n'est ni enflamm ni dtruit t o u t entier et d'un seul coup, mais s e u l e m e n t peu peu et par parties. Lorsque l'inflammation se dclare dans une partie, la livre prend plus de force, la voix devient rauque, la respiration devient plus difficile, la dipsne a u g m e n t e de telle sorte que ces s y m p t m e s sont s o u v e n t pour le malade une priode de mort i m m i n e n t e : mais une fois la priode de l'inflammation coule, et la suppuration ayant eu l i e u , tous ces symptmes se r e l c h e n t de leur gravit, et font voir dans la maladie cette apparence de soulagement, qui permet au malade de se lever de son lit, de se promener, do pouvoir circuler dans la ville en voiture. Mais cette priode de suppuration, qui convertit e n pus le tissu de l'organe, non-seulement n'est pas un vritable soulagement de la maladie, mais plutt un progrs et une aggravation (1). Et en effet, lorsque peu aprs u n e n o u v e l l e inflammation se dclare dans une autre partie, t o u s les s y m p t m e s prennent vite de la r e c r u d e s c e n c e , r a m n e n t un danger prochain pour la vie, et dmontrent un observateur srieux que la maladie est toujours demeure dans sa gravit. Ainsi, au milieu de ces accidents p h l o g i s t i q u e s et suppuratoires, la .maladie progresse avec des alternatives continuelles, jusqu' ce que tout l'organe se trouvant c o r r o m p u , o u du m o i n s e n grande partie, elle donna la mort au malade. C'est p o u r quoi les mdecins qui ont t souvent t m o i n s de ces faits n'attachent a u c u n e importance ce s o u l a g e m e n t extrinsque et apparent de la maladie. Mais au contraire les yeux ouverts sur les symptmes p a t h o g n o m o n i q u e s , ils observent si la fivre a quitt le malade, ils regardent si la toux a cess, ainsi que la difficult de respirer, la soif, la diarrhe, si les crachats sont devenus meilleurs : s'ils constatent que toutes ces choses continuent de subsister, ils dsesprent e n t i r e ment du malade, quoique l'extrieur ils aient vu du m i e u x en lui. 44. Ainsi, dans le cas e n q u e s t i o n , voulons-nous porter un jugement lgitime sur l'tat de la maladie, n e nous arrtons pas l'corce ; m a i s e x a m i n o n s principalement (1) Gorterus, lib. II, ad Ilippocra., aplior. 47 4 s'exprime ainsi: dans les maladies provenant d'inflammations internes, et dans quel ques inflammations externes, il est une excellente observation pratique pour un mdecin : les douleurs augmentent sensiblement dans ces parties, ainsi que la fivre, jusqu' Ja formation du pus ; une fois qu'il est form, la douleur diminue sensiblement, la livre s'apaise, ce qui nous apprend que les Symptmes de l'inflammaiion peuvent diminuer, quoique la maladie ne soit pas gurie, mais qu'elle passe l'tat de suppuration.
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si ces m m e s s y m p t m e s p a t h o g n o m o n i q u e s qui manifes taient la gravit de la maladie et l'impossibilit de la gu rison, la fin de m a r s et au c o m m e n c e m e n t d'avril, ont persvr Mazzano vers la fin de mai, s'ils ont persvr pendant le voyage et R o m e . S'il est tabli qu'ils ont c o n s t a m m e n t persvr, il sera tabli en m m e temps que la maladie a persvr dans sa gravit jusqu' la gurison. C'est c e qu'ont paru comprendre les f e m m e s sans exp rience qui a c c o m p a g n a i e n t Marie-Rose. Elles o n t bien dpos que la malade avait pu tre transporte de chez elle l'oc c a s i o n d'un tremblement de terre, qu'elle se levait de son lit, q u e , s o u t e n u e , elle faisait quelques pas dans _ sa chambre, mais elles ont ajout : T o u t e cette amlioration consistait en ce qui vient d'tre dit, en ralit, Marie Rose tait mal, ce n'tait qu'un d e m i - s o u l a g e m e n t , elle rendait les m m e s crachats sales et p u r u l e n t s . Passons sous silence les autres tmoins qui confirment le m m e fait, arrtons-nous au seul mdecin faisant cette dposition : J'ai vu Marie-Rose... deux jours avant son dpart de Mazzano pour Rome, je m e rappelle bien que dans cette dernire visite j e l'ai trouve oppresse, c o m m e l'ordinaire, l'oppression s'tait m m e aggrave... On le reconnaissait u n e inquitude plus grande, la diffi culte de garder l e lit, dans lequel la pauvre infirme avait u besoin de se tenir le t r o n c du corps un p e u soulev ; une couleur rouge qui apparaissait la j o u e . . . e l fina lement aux sueurs et la diarrhe... Il y avait u n e grande c o n s o m p t i o n , absence de s o m m e i l . . . les crachats d e v e ti naient de plus en plus abondants, sanieux et p u r u l e n t s : < voil l'tat dans lequel j e trouvai la malade lorsque j e la ( visitai pour la dernire fois. 4 5 . Voil Je s o u l a g e m e n t qu'prouva Marie-Rose avant de quitter son pays. Vous direz sans doute, elle n'en a pas moins entrepris le v o y a g e . Nous en c o n v e n o n s . Mais 1 aprs ce q u e n o u s avons dit, cela n e prouve rien ; 2 personne ne contredira qu'il faille accorder quelque chose la condition fie la malade, o n sait en effet que, pour les maladies, les habitants de Ja c a m p a g n e diffrent entirement de ceux des villes. Ces derniers, en effet, craignent les accidents les plus lgers et appellent aussitt le mdecin ; ceux-l, au con traire, s e m b l e n t j o u e r avec les maladies m m e les plus graves; ils ne se m e t t e n t a u lit que lorsqu'ils sont complte m e n t abattus par la violence d u mal, et tant qu'ils ont quelque p e u de force, ils osent tout entreprendre; 3 il faut faire aussi u n e b i e n grande part la foi religieuse; or
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cette foi tait insigne chez notre jeune malade, cela est vident, car tandis que mdecin et chirurgien taient d'un avis contraire, tandis que tout le m o n d e s'y opposait, tandis que la mre l'en dtournait, elle s'obstinait dire qu'elle voulait aller R o m e . C'est pourquoi la mre voyant qu'elle avait une foi si grande voulut la satisfaire. Le m decin l u i - m m e , qui s'tait oppos longtemps en vain cette rsolution, la vue de la confiance si grande de la m r e et de la fille, dclara au chirurgien, qu'on pouvait lui per mettre de faire tout ce qu'elle voudrait; pour lui, le cas tait dsespr ; et p e u importait q u e la pauvre fille mourt Mazzano o u R o m e , ou pendant le trajet; or on sait qu'une telle confiance a u g m e n t e les forces ; 4 enfin, si Dieu avait rsolu d'oprer le miracle de cette gurison au tombeau de son serviteur, il a d venir en aide Marie-Rose,pour qu'elle pt faire le c h e m i n et s'approcher de la tombe de Benot. 46. Tout cela explique c o m m e n t il a t possible la malade d'entreprendre ce voyage, quoiqu'elle se trouvt au plus mal. E v i d e m m e n t , le projet de faire ce voyage en un tel tat paraissait une f o l i e ; elle tait plus morte que vive, le chirurgien avait dclar qu'elle n e reviendrait pas Mazzano, parce qu'elle mourrait en c h e m i n . Et en effet, la narration du voyage confirme de point en floint cet tat dsespr de la malade. Place h grande peine sur un ne, elle ne pouvait se soutenir ; il tait ncessaire que q u e l qu'un lui vnt e n aide, et encore cela n e suffisait pas. Elle souffrait si fort de cette position qu'elle demandait avec instance qu'on la mt dans un panier, ce qui tait i m p o s sible. La marche de l'ne tait u n m o u v e m e n t trs-doux et trs-lent; on mit treize heures pour ne faire que vingt-cinq mille pas, et cependant cette marche si douce fatiguait la malade au point que le souffle lui manquait, la difficult de la respiration augmentait et devenait insupportable. Il fallait s'arrter s o u v e n t . . . Quand elle tait descendue de la: bte de s o m m e , o n l'asseyait par terre afin qu'elle pl se reposer, qu'elle sentt s'apaiser les grandes inqui tudes qu'elle avait et qui reprenaient lorsqu'elle c h e minait sur sa m o n t u r e . . , qu'elle reprt un peu haleine. Ce n'est pas tout, ce feu intrieur, t m o i n d u n e maladie d'une extrme gravit, qui avait toujours tourment notre pauvre malade, svissait avec plus de force pendant le voyage ( i ) . Sa bouche tait dessche,... elle ressentait un
(1) Parmi les signes de mort dans la phthisie Boerhaave (aphoris 1206) place u n e grande soif, et cette occasion Van Swicten avait dit antrieurement, lorsqu'il traitait de la soif produite par la fivre,
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a feu [intrieur,... elle se sentait brler, t o u t m o m e n t elle aurait voulu b o i r e . . . Il tait bien souvent n c e s s a i r e de s'arrter pour lui donner boire, et e n outre, elle n e pouvait plus respirer, elle avait u n e t o u x opi nitre... Elle ressemblait u n e m o r t e . Ce voyage dnotet-il u n e amlioration chez Marie-Rose ? Je le laisse dcider n o s illustres j u g e s . 47. Enfin o n arriva R o m e ; o n dposa l a m a l a d e dans u n l i t , m a i s elle n e dormit pas, ni m o i n o n plus, dit la mre, il fallait sans cesse lui donner boire ; Top c pression l'empchait de s e tenir c o u c h e ; il fallait la tenir souleve et assise sur s o n l i t . . . Elle n e fit q u e se l a m e n t e r . . . La n u i t elle se trouvait plus m a l qu' l'ordi naire, elle se dsolait, crachant sans cesse d e s matires sales, brle de soif, sans pouvoir dormir, sans pouvoir rester c o u c h e , il fallait lui soulever l a tte et quelquefois l e buste. Le soixante-dixime tmoin ajoute: La pauvre fille faisait entendre de si grands g m i s s e m e n t s , elle se dsolait tellement q u e j e n e pus pas dormir... Et c e p e n dant, j e n'tais pas dans la m m e chambre. On c o m p r e n d sans peine le s o u l a g e m e n t q u e de telles n u i t s procuraient la m a l a d i e . Cependant la mre et la cousine voulurent quand m m e faire lever la malade de son lit et la conduire l'glise de Sainte-Marie in Ara Cli, o elles avaient dcid de , s'approcher des sacrements. La j e u n e iille, c o m m e o n l e pense b i e n , n e pouvait marcher seule ; aussi la m r e ditelle : Je la soutenais d'un c t e , et Laure-Rose, sa c o u s i n e germaine, l a soutenait de l'autre. Cette manire de la conduire, o u p l u t t do la traner, car on pouvait la comparer u n cadavre, est loin de n o u s m o n trer u n e amlioration certaine de la maladie, et c e p e n d a n t notre adversaire n o u s la vante bien haut. Cette espce de m a r c h e la fatigua de plus en plus et aggrava la difficult de respirer. Aussi, tandis q u e des t m o i n s parlant de s o n p lerinage Sainte-Marie, in Ara Cli, ont dpos qu'elle n e pouvait pas m a r c h e r ; ils o n t dit pour le v o y a g e Saintenumrant parmi les causes de celte soif, le desschement et l'immohilil des humeurs : Nous l'avons vu plus haut, dans la phthisie le corps entier est dessch, et cet chauil'ement est le rsultat de l'im mobilit des humeurs dans les vaisseaux des poumons. Il ajoute: dans rlisie le pus est corrompu et gale le sang qui le rend plus acre, seconde cause de l'altration. Ajoutez les sueurs nocturnes qui laissent chapper du corps la partie .la plus liquide du sang, cette cause seule suffirait pour produire l'altration chez les hommes d'une excellente sant.
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Marie-aux-Monts : elle n e se conduisait pas elle-mme, et ils tmoignent de l'augmentation de la difficult qu'elle prouvait pour respirer. Pendant le trajet, disent-ils, l a pauvre fille tait conduite avec beaucoup de peine, parce qu'elle ne pouvait se gouverner e l l e - m m e . . . , c a u s e de sa u faiblesse et de sa difficult de respirer il tait ncessaire de s'arrter c h a q u e instant et de reprendre haleine... On ne pouvait que difficilement la traner; elle tait t o u jours soutenue et c o m m e porte par deux femmes, Tune d'un ct et l'autre de l'autre, et cependant il fallait sans cesse s'arrter pour la faire reposer. C'est ainsi que la jeune fille fut entrane avec beaucoup de peine au tombeau du serviteur de Dieu, Et, c o m m e . i l y avait une grande affluence de personnes, cette foule la faisait souffrir davantage, on ne pouvait plus la faire a v a n c e r ; il fallut la porter sur u n e chaise, dit la m r e . On la dposa sur les marches, et afin de lui rafrachir un peu la bouche, j e lui donnai quelques cerises. 48. De retour la m a i s o n , la j e u n e fille demeura dans le mme tat de maladie. On demandait la mre c o m m e n t se trouva la pauvre fille la nuit qui suivit la premire et la seconde visite. Elle fit cette rponse : mal c o m m e k l'ordinaire, inquite, essouffle, rendant des crachats sales, ayant toujours soif, sans pouvoir dormir, elle no put se tenir c o u c h e , il fallait lui soulever la lete et quel quefois le b u s t e . 11 est vident que tous les symptmes d'une phthisie confirme continuaient so montrer. Le jour suivant, dit le t m o i n soixante-douzime, nous retournmes la Madone-ds-Monts, n o u s nous y arr tmes u n p e u , et quand nous en sortmes, Marie-Rose nous dit qu'elle s'tait senti mieux ; mais elle tait tout touffe, il fallait la traner, et cette traction se fit avec u une grande fatigue pour elle : j e la revis le soir, et elle * tait c o m m e le soir prcdent. Ce t m o i g n a g e concorde avec celui de la m r e qui dit : elle fut repose et comme u n peu r e m i s e quand nous sortmes et, q u o i qu'elle n e cesst pas de se trouver mal, il m e paraissait qu'elle tait moins abattue q u a u p a r a v a n t ; il nous s e m blait aussi qu'il y e t m o i n s de diiiiouit pour la r e c o n duire, et c e t tat dura tout ce jour. Cette espce de diminution d une respiration difficile et de prostration des forces trouve facilement son explication dans le fait que la malade resta couche, o u se reposa deux nuits et un jour, et aussi parce qu'elle tait reste longtemps dans l'glise. Mais cette amlioration si faible et tout l'ait
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extrieure, n e fit disparatre a u c u n des s y m p t m e s p a t h o g n o m o n i q u e s de la maladie, tels que n o u s les avons vus numrs dans la nuit prcdente, et leur persistance est clairement dmontre par la respiration difficile, quoique dans u n degr u n peu m o i n d r e , et par les paroles suivantes: elle tait mal c o m m e la nuit prcdente. Mais voici u n indice plus vident encre d e la persis t a n c e de la maladie. L'exprience, d'accord avec les m d e c i n s , enseigne, que dans u n e phthisie qui t o u c h e sa fin, c'est--dire la mort, l'enflure aux pieds se dclare. V o i c i les paroles de Jean-Pierre Franck (1) : Les signes que la suppuration a e u lieu dans l'organe du p o u m o n s o n t la c o n t i n u a t i o n des signes p r c d e m m e n t rapports, la res piration frquente et difficile, l'enflure des pieds. Clius Aurelianus dit s o n t o u r : < la phthisie e s t confirme... une c livre l e n t e s'empare des m a l a d e s . . . les crachats deviennent purulents et l i v i d e s , . . . arrive enfin l'enflure des pieds (2). Riverius est encore plus c l a i r ; aprs avoir n u m r les autres indices d'une phthisie confirme, il dit : Enfin il faut ajouter q u e , la phthisie confirme t o u c h a n t sa
fin, les pieds enflent (3). Or, dans le cas e n question la mre
de la malade a dpos : Le chirurgien m'avait dit d'tre bien attentive au gonflement des pieds, parce q u e s'ils gonflaient, c'en serait fait, alors. Elle dit q u e m m e avant d'arriver R o m e les pieds taient enfls. Parlant ensuite de s o n sjour de R o m e , elle ajoute : Ils c o n t i n u r e n t a tre enfls les deux jours q u e nous restmes R o m e , a avant le miracle. Et j e le sais, parce q u e , e n rhabillant, < j e lui mettais ses b a s , qu'elle n e pouvait m e t t r e ellec m m e , et l'enflure m o n t a i t jusqu' m i - j a m b e . Nous v o y o n s donc encore subsister u n des i n d i c e s trs graves d'une maladie touchant sa fin. 5 0 . Mais voici u n s y m p t m e n o u v e a u et alfreux : c'est u n e trs-violente douleur dans le p o u m o n , s y m p t m e d'une inflammation nouvelle q u i se serait dclare, et par suite de laquelle l'organe tait atteint et c o m m e dchir en un certain endroit. Chez quelques-uns, en effet, dit Ccelius A u
d'une
grave
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hauts cris, ^ et dire qu'elle ressentait une trs-vive douleur dans la poitrine. La mre de la malade fait une dposition conforme celle-ci : J'tais peine c o u c h e , dit-elle, que la pauvre fille m'appela par un grand cri, et m e dit que j'eusse placer ma main sur sa poitrine, parce qu'elle ressentait une douleur des plus violentes. Et le tmoin soixanle dixime : Peu aprs que n o u s tions c o u c h s , Marie-Rose jeta un cri perant, elle demanda sa mre de lui venir en aide, parce qu'elle ressentait une grande douleur dans . la poitrine. * On voit tout ce que ce nouveau symptme ajoutait de gravit et de pril la maladie. Quant ceux qui sont atteints d'une maladie qui corrompt le sang, dit Baglivius, s'il se dclare tout coup chez eux une violente douleur au ct, le dlire arrivera bientt, une grande fivre se dclarera et la mort surviendra dans quelques jours (1). 51. Voil donc le soulagement que notre jeune fille prou vait dans sa maladie cette nuit m m e , o ayant plac sur sa poitrine l'image du vnrable serviteur de'Dieu, tous les symptmes de la maladie disparurent s u r - l e - c h a m p . Un sommeil trs-lger s'empara de la malade qui tmoigna, ds le matin suivant, q u e l l e tait rendue u n e sant pleine et .entire. 52. Tel est le rcit de la maladie et de la gurison que nous donne le sommaire, sans opposition aucune de la part de notre adversaire, qui se borne faire consister toute l'amlioration de la maladie, e n c e q u e Marie-Rose a pu tre tire de son lit, faire quelques pas dans sa chambre l'aide des personnes qui la soutenaient, tre installe sur un i n e et transporte l'glise. Personne n e le nie. Mais a u prix de quelles difficults, de quels efforts, de quel danger cela eut-il lieu ! E t ce voyage ne l'uWl pas entrepris,parce que d'un ct c o m m e de l'autre, on ne pouvait viter la mort ? O donc trouver une rmittence de la maladie, l o il n'y eut jamais aucun changement dans les symptmes du mal, l m m e o ces symptmes allaient toujours s'aggravant?Et puisque tous ces symptmes pathognomoniques persvrrent dans le m m e tat jusqu' la fin de la maladie, puisque cet tat lit place tout coup une sant parfaite, personne n e p e u t nier que cette gurison n'ait t miraculeuse et instantane, 53. Que n o u s oppose la critique sur ce point ? Corde toujours discordante, elle j o u e sur ces paroles des tmoins :
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LES
SPLENDEURS
DE
LA
FOL
quel tait ce mieux dont parlent les t m o i n s . Ces tmoins eux-mmes, malgr toute leur inexprience en cette m a tire, nous l'ont fait connatre d'une manire assez claire. Parlant de la circonstance, o par suite du tremblement de terre, ils tirrent la malade de son lit et la portrent Saintc-Marie-des-Grces, ils firent cette dposition : Oui, elle c o m m e n a se trouver un tant soit peu m i e u x , mais le mal empira b i e n t t . . . Ensuite le mal resta considrable, et nous craignions d'tre obligs de la laisser la Madone des-Grces, parce qu'elle pouvait y mourir. Toute cette nuit elle ne faisait que marmotter, tousser et se lamenter tant taient grandes les souffrances qu'elle endurait. Quant aux jours suivants qui prcdrent le voyage, n o u s trouvons ces dpositions : Oui elle c o m m e n a i t prouver un peu de m i e u x , mais ce mieux consistait en c e que elle se levait un peu de son lit, qu'elle pouvait un peu s'as seoir, et que, soutenue, elle pouvait faire quelques pas < dans sa c h a m b r e ; mais, en ralit, elle souffrait toujours ( de la m m e manire. Je m e rappelle q u e je dis sa m r e : ce changement est peu important, parce qu'elle souffre toujours, qu'elle est c o n s u m e et qu'elle tousse toujours. On ne saurait attribuer au plerinage c e s o u p o n d'am lioration dans la maladie, car ce voyage s'est accompli plutt par la vertu d'un miracle que par les seules forces de la na ture. On ne peut l'attribuer non plus au premier jour de rsidence Rome, puisque ce jour fut si pnible pour la malade ; moins toutefois que vous ne vouliez l'attribuer c e que les deux femmes la tranrent l'glise en la s o u t e n a n t par les bras. 54. Reste le second jour. Mais si en ce j o u r on aperoit une -respiration un peu moins difficile, l'extnuation de forces m o i n s grande, effets probables du repos de la veille et des deux nuits prcdentes, cela ne diminua e n rien la violence de la maladie, car on constatait toujours la difficult de res pirer, la prostration des forces, l'enflure des pieds; en ralit la j e u n e fille tait dans le m m e tat que le soir prcdent, sauf qu'il s'y ajouta un nouveau symptme plus grave que les autres. C'est p o u r q u o i , si notre criLique'n'avait pas tronqu dessein la dposition des tmoins, ces derniers, sans n u l secours de notre part, eussent fait disparatre la difficult ; car ils exposaient e u x - m m e s ce qu'ils entendaient par le m o t de mieux, et ils ont ajout : le mal ensuite resta c o n sidrable, la malade tait dans le m m e tat, n o u s craignions qu'elle ne mourt, elle tait extnue, c o n s u m e ; elle toussait c o m m e auparavant. Si les dpositions des tmoins
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nous apprennent que la maladie garda toute sa malice et sa gravit jusqu' la fin : c'est donc en vain qu'on nous oppose ces paroles de Benot XIV: On ne peut pas prouver l'instan tanit, lorsque les tmoins parlent d'une amlioration de la maladie qui prcde la gurison. En effet, dans le cas e n question, les t m o i n s pensfiient si peu reconnatre un v ritable mieux dans la maladie, qu'ils ont dclar que la m a lade tait dans le m m e tat. Quant au sjour Rome, ils ont dpos que : la malade tait c o m m e l'ordinaire, anxieuse, avec les crachats sales, la soif, l'absence de s o m meil, l'impossibilit de se tenir c o u c h e , moins que la tte et mme le buste ne fussent s o u l e v s , . . . les pieds conti nuaient tre enfls. C'est--dire qu'ils ont affirm la per sistance jusqu' la fin de tous les symptmes qui constituent la dernire priode d'une phthisie confirme. Puisque la gurison succda immdiatement un tel tat de maladie, les tmoins n'ont-ils pas dclar e u x - m m e s que cette g u rison fut vritablement instantane ? 55. Accordons n a n m o i n s pour u n instant notre adver saire qu'il y eut une espce de mieux dans la maladie au se cond jour du sjour Borne (car alors seulement il y eut u n peu de relche dans la difficult de respirer et dans la prostra tion des forces), qu'en c o n c l u r e ? Faudra-t-il admettre que le miracle m a n q u e d'instantanit au m o i n s m o r a l e ? Ce soulagement eut lieu la sortie de l'glise o l'on s'tait arrt longtemps ; et la gurison arriva au c o m m e n c e m e n t d e l nuit. En effet, peine s'taient-ils mis au lit, que la malade rclama le secours de sa m r e ; celle-ci approche l'image du Vnrable serviteur de Dieu de la poitrine de la malade ; puis la j e u n e fille se repose aussitt, les douleurs, latoux,la difficult de respirer avaient disparu sur-le-champ. Peut-on admettre qu'un p o u m o n ulcr, qu'une phthisie confirme et sur le point de donner la mort, pussent tre parfaitement guris dans l'espace de quelques h e u r e s ? Cela est tout fait impossible. C'est pourquoi, dans l'hypothse mme de la critique, il faudra admettre une gurison c o m plte dans le laps de temps o il aurait t impossible la nature de l'oprer. Et par cela m m e , nous sommes en possession de cette instantanit morale qui suffit pour tablir le miracle. 56. Que sera-ce donc si nous poursuivons, et si nous d i s cutons la critique dans chacune de ses expressions? Elle n o u s enseigne que, d'aprs Benot XIV, on n'exige pas l'instanta nit pour les miracles de premier et de second ordre. Or on sait que les miracles du second ordre sont ceux qui s u r -
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passent, les forces de la nature quant au sujet, c'est--dire la matire des gurisons, ceux qui font disparatre des ma ladies entirement incurables par les seules forces de la nature et de l'art. Or l'exprience, aussi bien que le consen tement u n a n i m e des mdecins, dclare que la phthisie p u l monaire confirme est t o u t fait incurable. Voici le sentiment d'Hippocrate : Lorsque la phthisie arrive, la m o r t est invitable (1). Galion, traitant des maladies des p o u m o n s et de Leurs ulcres ou de la phthisie, raconte que c'est en vain qu'il apporta les soins les plus diligents pour gurir certains pbthisiques, et il a j o u t e : Par la suite, j'ai facilement reconnu que c e u x - l taient atteints d'une affection semblable celle que n o u s v o y o n s ordinairement dans les parties extrieures, lorsqu'elles sont infectes par u n e h u m e u r qui a m n e la putrfaction. P o u r ces dernires, n o u s pouvons les couper et les brler, mais on ne peut e m ployer aucun de ces remdes au p o u m o n , c'est pourquoi il faut qu'ils prissent tous (2). Ailleurs il fait remarquer que la gurison des phthisiques n'est pas regarde s e u l e m e n t c o m m e difficile parles mdecins, mais qu'il est i m p o s sible de l'obtenir entirement, le fait repose g a l e m e n t sur la raison et sur l'exprience. Sur la raison, car le p o u m o n est de t o u s les organes celui que la respiration tient dans u n m o u v e m e n t plus continuel, or il faut le repos pour obtenir la gurison. Sur l'exprience, car nul de ceux qui ont t atteints de cette affection n'a t guri (3). Avicenne enseigne la m m e c h o s e . Traitant des soins donner aux ulcres de la poitrine et la phthisie, il crit (4) : ce Une gurison vritable est impossible, si ce n'est lorsque la maladie est encore susceptible de gurison, et n o u s avons fait connatre ce cas. Il avait dit auparavant : On peut quelquefois oprer la gurison des ulcres du p o u m o n l o r s qu'ils sont produits par la solution d'une h u m e u r par ticulire, et non pas par un aposthme ou par une h u m e u r corrosive. Il en est cle m m e de ceux qui sont produits par des ulcres, chez lesquels les crachats se produisent, sans qu'ils soient sanieux. M a i s i e s ulcres qui sont produits par un aposthme ou par des h u m e u r s corrosives ne peuvent se gurir, parce qu'alors il est impossible l'ulcre sanieux de se cicatriser, cela ne pourrait arriver que par une modilica-
1) 2) 3) 4)
De morb. lib. I, sec. 2. De locis affect. lib. IV, cap. v i n . De meth. niedic. lib. V, cap. v i n . Canon, md. lib. III, t r a c t . 5, ien 10, cap. v.
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lion de la n a t u r e d u p u s , c e q u i peu t a r r i v e r l'aide d e la t o u x ; m a i s l a l o u x a u g m e n t e l a d i l a t a t i o n d e l ' u l c r e e t sa r u p t u r e ; l a c o m m o t i o n q u i s e fait e n l u i p r o d u i t u n e d o u l e u r , l a d o u leur a u g m e n t e l'attraction d e l a m a t i r e vers l ' o r g a n e . . . force e s t d o n c q u e l ' u l c r e . . . s e d i l a t e j u s q u ' c e q u ' i l ronge t o u t le v o l u m e d u p o u m o n . . . (1). T i m e confirme c e t t e d o c t r i n e d e l ' a u t o r i t d e s a l o n g u e exprience lorsqu'il d i t (2) : J e l'avoue i n g n u e m e n t , p n dant tout m o n exercice q u i a d u r trente-sept a n s , j e c n'ai j a m a i s e n t i r e m e n t guri u n seul m a l a d e p a r m i ceux qui o n t t a t t e i n t s d ' u n u l c r e d a n s les p o u m o n s ; e t c e p e n d a n t j e n'ai r i e n o m i s d e c e q u i p o u v a i t , d ' u n e fa ir o n o u d'une a u t r e , p r o c u r e r l a g u r i s o n d e c e t t e m a l a d i e . J a m a i s n o n p l u s j e n ' a i v u u n d e ces m a l a d e s g u r i n ' i m p o r t e p a r q u e l m d e c n . m m e d e s p l u s c l b r e s . t> H o f f m a n n lui-mme n ' e s t p a s d ' u n a v i s c o n t r a i r e l o r s q u ' i l t a b l i t (3) : q u e l a g u r i s o n d e l a p h t h i s i e e s t trs-difficile, b i e n p l u s , quand elle e s t a r r i v e c e p o i n t q u e le v u l g a i r e la r e connat ses signes vidents, elle est a u - d e s s u s des ressources de l'art des h o m m e s . Manget a crit ce q u i suit s u r c e t t e q u e s t i o n : Ceux q u i se v a n t e n t d ' a v o i r g u r i e n t i r e m e n t d e s p h t h i s i q u e s , d o i v e n t p r e n d r e g a r d e d e s ' t r e laiss i n d u i r e e n e r r e u r d a n s l e d i a g n o s t i c d e l a m a l a d i e , e t d e s e glorifier a i n s i d'un t r i o m p h e i m a g i n a i r e . . . car la p h t h i s i e est l e c h e m i n c e r t a i n q u i c o n d u i t l a m o r t . 57. Mais p o u r q u o i r a p p o r t e r u n p l u s g r a n d n o m b r e d e t m o i g n a g e s e n f a v e u r d e c e s e n t i m e n t ? Les G r e c s e t l e s Latins, les A r a b e s , les d o c t e u r s a n c i e n s et m o d e r n e s n e s'accordent-ils p a s p o u r affirmer q u e la p h t h i s i e p u l m o n a i r e confirme e s t t o u t fait i n c u r a b l e ? O r , s'il e n e s t a i n s i d e cette m a l a d i e , s'il a t d m o n t r q u e M a r i e - R o s e a t v r i t a b l e m e n t a t t e i n t e d'une p h t h i s i e c o n f i r m e , il e s t d m o n t r aussi q u e la m a l a d i e a s u r p a s s les f o r c e s d e l a n a t u r e - d a n s son sujet, eL p a r c o n s q u e n t q u ' e l l e a c o n s t i t u l a m a t i r e d'un m i r a c l e d e s e c o n d o r d r e . L a c r i t i q u e n o u s a fait r e m a r q u e r q u e d a n s ces m i r a c l e s , on n ' e x i g e p a s l ' i n s t a n t a n i t ; d o a c , - a l o r s m m e q u e l'instantanit ferait r e l l e m e n t dfaut dans cette gurison, de son a v e u m m e il n ' y a u r a i t p a s d o u t e r d u m i r a c l e . Mais n o u s n ' a v o n s p a s b e s o i n d u s e c o u r s q u e p e u t n o u s f o u r n i r c e t a r g u m e n t , c a r nious a v o n s m o n t r q u e l a (1) Md. tract. 4, cap. xvin,. de ulceribus pect. e t pulm. (2) Apud Hoffmann. Med. syst. t. IV, p. 4, chap. n 19. (3) Loco citato superis.
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maladie a persist dans sa gravit jusqu' la f i n ; el puis, abondant dans l'opinion de la critique (opinion que c e p e n dant nous avons rejete), nous avons, montr que, m m e son hypothse ne laissait pas dsirer l'instantanit morale. C'est pourquoi n o u s pensons avec raison lui avoir ferm toutes les voies qu'il a suivies pour attaquer le miracle sous prtexte du dfaut d'instantanit. 58. Mais elle ne s'avoue pas encore vaincue, et cherchant des difficults o il n'y en a point, elle s'efforce de trouver l'action de la nature dans la gurison, en faisant remarquer que, d'aprs Galien, la nature peut oprer la gurison, o u par le fait d'tre rest c o u c h , ou par u n e crise, o u enfin par \& rsolution ou la cotion de la maladie. Elle fait obser ver d'abord qu'il n'est pas certain, que la crise ait m a n q u , parce que le m d e c i n n'a pas dpos de s o n absence, autre m e n t que d'aprs des entendus-dire. Or, je vous le de m a n d e , de tous les miracles de gurison dj approuvs, combien en avez-vous vus, dans lesquels le mdecin ait assist la gurison, de telle sorte, que, appuy d'un fait qui lui est propre, il puisse faire une dposition attestant le d faut de crise? S'il n'y en a aucun, o u presque a u c u n , vous accorderez ncessairement que le dfaut de crise n'a pu tre prouv que par les tmoins q u i taient prsents. Gomme il a t fait pour les autres miracles, interrogez d o n c les t moins sur celui qui nous occupe. D e m a n d e z - l e u r ( c o m m e les juges l'ont fait) : si avant la g u r i s o n et dans la nuit o elle arriva, o u aprs, Marie-Rose a eu quelque vacua tion de pus, par les sueurs, o u par les urines, o u par la bouche, ou par toute autre issue du corps, A et vous les entendrez vous rpondre : Nous savons absolument qu'il n'y a rien eu de cela. Ils ajouteront m m e : Et quant aux rgles des femmes autant que la m m o i r e m e le rappelle, elle ne les avait p a s ; ce fut s e u l e m e n t sept ou huit m o i s aprs qu'elle les eut. C'est pourquoi il n'est nullement incertain, il est au con traire a b s o l u m e n t certain, d'aprs les tmoins oculaires, q u ' a u c u n e crise n'est intervenue dans cette gurison. Le m d e c i n , bien que pour cela il ne ft qu'un tmoin auricu laire, confirme n e r g i q u e m e n t les dclarations des tmoins oculaires. En effet, il les a tous interrogs avec le plus grand soin au sujet des accidents les plus rcents, et il dpose ainsi : Il ne s'est produit aucune crise, c'est au moins ce qui m'a t affirm tant par la mre q u e par la j e u n e fille gurie, interroges l-dessus par m o i . C'est aussi la rponse de tous ceux qui ont dpos sur ce point.
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11 faut donc que la critique se rsigne exclure du cas actuel toute action de la nature. Ce qui prcde est pour combattre et dtruire l'objection par des preuves directes; nous avons vu ailleurs qu'elle tait tout 5" fait trangre notre affaire, puisque n o u s avons tabli invinciblement que les crises subites ne peuvent avoir lieu dans les maladies chroniques. 59. Vous ajoutez cependant : il est hors de doute q u e la malade est reste c o u c h e , et qu'il y a eu rsolution simple de la maladie . Nous ne contestons nullement la premire de ces affirmations, car n o u s savons que la jeune malade est reste longtemps au lit. Nous vous le demandons seulement : Pensez-vous que le seul fait de garder le lit puisse gurir de toutes les maladies? Si vous l'affirmez, vous serez oblig de convenir que tous ceux qui sont morts aprs avoir gard longtemps le lit, sont morts parfaitement guris, c e qui sera certainement une nouvelle dcouverte dans la m decine. Si v o u s le niez, accordez volontiers que dans le cas prsent, le decubittis n'a t d'aucune utilit, puisque n o n seulement la maladie a persvr jusqu' la fin dans sa gra vit, mais encore qu'elle s'est accrue, malgr le lit qu'on gardait. Mais, direz-vous, chez notre malade, outre le sjour a u lit, il y a eu une rsolution simple cle la maladie. Et laquelle, s'il vous plat, puisque tous les symptmes ont persvr dans leur force jusqu' la gurison, puisqu'il n'y eut aucune crise favorable, puisque la matire purulente ne fut jamais enti rement cuite, et que les crachats jusqu' ia fin furent sa nieux, ftides et laids? Il y a eu, dites-vous, descente de l'humeur maligne de la partie noble la partie basse, puisque les j a m b e s enflrent; et ce que n o u s avons dit plus haut du mieux survenu dans la maladie montre suffisam ment qu'il y eut une rsolution de la maladie, une sorte de coction. 60. Nous avons dit plus haut ce qu'il fallait penser de ce mieux, qui revient ici pour la onzime fois. Et nous n e voyons nullement c o m m e n t de l'enflure des jambes on p e u t conclure la rsolution ot la coction de la maladie. E n effet, tout d'abord, pour que la matire qui s'tait attache aux poumons pt tre a m e n e dans les parties infrieures par une sorte de coction, il aurait fallu qu'elle ft mre, et purifie de tout virus, ce qui n'eut jamais lieu, c o m m e nous l'ont montr les crachats demeurs mauvais jusqu' la fin. Et en effet, par le m o t de coction, les mdecins dsignent la maturit qui a lieu dans les maladies, et qui est une
purification de matires s'coulant a u dehors, ou prpares pour la sortie. C'est, ce qui arrive dans les maladies inflam matoires d e la poitrine, lorsque les m o l c u l e s clu fluide incapable d e couler et pousses aux extrmits des artrioles sont modifies par l'action d e l fivre, au point q u e , avec les m o l c u l e s extrmes des artrioles obstrues, elles sont spares par la violence du liquide qui les p o u s s e par derrire, e t sont changes en un pus blanc, lger, h o m o g n e , q u i e s t v a c u p a r l e s c r a c h a t s ; t o u t e s l e s fois q u e d e s e m b l a b l e s m a l a d i e s s e t e r m i n e n t h e u r e u s e m e n t , o n dit quela coclion d e la matire morbide a eu lieu ( 1 ) . Mais rien de semblable n e s'est produit dans notre cas, car j a m a i s n o n - s e u l e m e n t les crachats n'accusrent u n p u s
blanc, loger, homogene, mais ils devinrent a u contraire toujours plus abondants, sanieux, et ftides. 11 n'y e u t donc
a u c u n e coction chez notre m a l a d e . 6 1 . E n outre, si l'aide de la coction, cette matire ft d e s c e n d u e dans les pieds, les p o u m o n s en eussent t d l i vrs, et p a r l m m e les crachats purulents e u s s e n t cess. Or dans le cas en question, nous savons q u e j u s q u ' a u d part de la j e u n e fille de son village, alors q u e l e s jambes t a i e n t dj enfles, les c r a c h a t s t a i e n t p l u s abondants, sanieucc, ftides; elle e s t d e m e u r e d a n s l e m m e tat R o m e , o la malade avait encore des crachats-laids.Un mau vais pus remplissait donc encore la poitrine sur la fin m m e de l a maladie, c o m m e auparavant. Or, c o m m e n t ferez-vous coexister la prsence du p u s dans la poitrine, avec les p o u m o n s dbarrasss du p u s qui serait descendu dans les parties basses du corps? N o u s savons q u e v o u s essaierez de n o u s o p p o s e r quelque chose ; n o u s l o u o n s votre attention t o u t s c r u t e r ; nous admirons cette a d r e s s e qui sait rpandre l e s tnbres sur les preuves les plus videntes; m a i s nous regardons c o m m e u n e absurdit manifeste de se mettre en o p p o s i t i o n dclare avec les mdecins et avec l'exprience, et de c h a n g e r e n i n d i c e s d e m i e u x e t de rmittence d e l a m a l a d i e , l e s s i g n e s q u ' i l s n o u s d o n n e n t c o m m e t o u t fait mortels. 62. Les m d e c i n s n o u s o n t fait voir p r c d e m m e n t ce q u e l'enflure d e s p i e d s a n n o n c e chez les phthisiques. Fortifions c e t e n s e i g n e m e n t des paroles suivantes de Benedictus (2) : D a n s u n e p h t h i s i e d e l o n g u e d u r c , r e n f l u r e d c m a t i q u e des pieds est funeste. Forliiions-le de cette dclaration de Van
ri) Swieten- Ad Boerhaav. aphoris. 587. (2) In tabid. ihenlr. png. 3, apucl Swietenum ad Boerhaav. nplior. 1206.
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Swieten (1): Quand la phthisie est c o n s o m m e et approche de la mort on fait cette observation, que tout le corps tant rduit une maigreur excessive, des m e m b r e s extrmes commencent enfler. Ajoutons ces paroles de Hoffmann (2): Lorsqu'arrive une extrme difficult dans la respiration avec crainte de suffocation... si des sueurs colliquativcs, la diarrhe, l'enflure des pieds, e t c . . surviennent, la mort est certainement trs-prochaine. Voil c o m m e n t l'enflure des pieds annonce le s o u l a g e m e n t ou un m i e u x dans la mala die. Cette enflure n e peut annoncer rien autre chose. E n effet, d'aprs l'observation de Galion, elle atteste l'extinc tion de la vie qui c o m m e n c e dans les parties les plus loi gnes des sources de la vie. A v e c l e , t e m p s , dit il, leurs pieds (des phthisiques) s'enflent, c e s t le commencerhenl de l'extinction de tout le corps, qui c o m m e n c e clans, le* parties les pins loignes des sources do la vie (3). N'a vions-nous pas raison de dire qu'il lait absurde de changer en indice de mieux ce symptme si funeste, que les m decins et l'exprience de tous les jours nous montrent comme tout fait m o r t e l ? 63. Cela pos, puisque ce que vous n o u s donniez c o m m e l'indice de la gurison d e l maladie n'es tri e n autre chose que son-symptme le plus grave; puisque le fait de garder le lit n'a t d'aucune u t i l i t ; puisque toute espce de crise favo rable est rejete par les tmoins et par la nature m m e de la maladie, il est vident que la nature n'a e u aucune part dans la gurison. E t c o m m e la maladie tait incurable et mortelle, c o m m e elle a persist jusqu' la fin dans sa gravit, il est clair que sa gurison opre instantanment ne peut tre attribue qu' la vertu d'un miracle clatant. 64. Le critique l'a bien v u ; c'est pourquoi n e comptant pas trop sur l e s raisons qu'il a donnes jusqu'ici, il s'est n m atlaquer le miracle d'un autre ct ; en n i a n t la perfection de la sant rendue. Comment s'y est-il pris? Il s'est empar de ces paroles des tmoins : Elle tait reste un peu maigre, ... presque subitement en parfaite sant. 11 faut dfendre une cause bien dsespre pour recourir de semblables moyens. Ptestitucz donc le second texte dans son entier, et vous lirez: Je la vis, presque subitement, se promener dans Mazzano en parfaite sant. Vous remarquerez sur-lechamp que ces m o t s , presque subitement, ne se rapportent
s
(1) Loi. italo. (f) Medic. systm, tom. 4 part, 4. cap. 2, 23. (3) Comment. 2. i n proguost. Hippocrat. GO.,
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pas ceux qui . s u i v e n t i m m d i a t e m e n t , en parfaite sant, mais ceux qui prcdent : je la vis (te vidi), et qu'ils signi fient que le t m o i n a vu la j e u n e fille un p e u plus tard, mais qu'alors il la vit en parfaite sant. Cette dposition rvoquet elle en doute la perfection de la sant? Le critique en jugera facilement l u i - m m e , lui qui a mutil le t e x t e . Voici Hlne Marini parlant du retour de la jeune fille dans sa patrie, elle dit : Elle tait encore un peu maigre, et elle ajoute aus s i t t : Mais enfin elle se portait bien; elle n'avait aucun mal, aucune souffrance, et aprs trois ou quatre j o u r s , elle reprit de bonnes couleurs, elle recouvra de l'embonpoint, et elle paraissait une fleur. Ces paroles, certes, sont la description d'une gurison tout fait surprenante, plus c o m p l t e m m e q u e n e le demanderait la raison stricte du miracle, car cette dernire consiste dans l e l o i g n e m e n t de la maladie. Si elle s'tend en outre aux suites de la maladie, elle acquiert certai n e m e n t un nouvel clat. Or tout cela est arriv dans le cas en q u e s t i o n d'une manire trs certaine. C o m m e n t , en effet, les seules forces de la nature pourraient-elles faire que dans l'espace de trois o u quatre jours, les couleurs et l'embon point reviennent celui qui relve d'une maladie mortelle de trois mois ? 6 5 . Si cependant cette espce de maigreur, qui survcut q u e l q u e peu au mjfaclo, laissait encore q u e l q u e d o u t e , Bordonius le dissiperait par ces paroles : Je vous le de m a n d e , la pleur, une cicairice, la faiblesse et d'autres infirmits laisses par la maladie aprs le rtablisse m e n t de la sant, enlvent-ils la raison du m i r a c l e ? Non, car le miracle consiste e n ce que, par u n secours spcial de Dieu, on a recouvr e n un instant la sant t o u t entire. Mais on peut la rcuprer et conserver quelques infirmits. P o u r une sant parfaite, il suffit que le corps soit replac dans un tat tel qu'il puisse accomplir los fonctions qu'il accomplissait avant de tomber malade. Or il peut les a c c o m plir sans que ces signes aient disparu, donc ils n'enlvent e n a u c u n e manire la raison du miracle (1). N o n - s e u l e m e n t cette doctrine est vidente en elle-mme, m a i s elle est tellement en usage clans ce Tribunal, que Benot XIV a tabli ce caractre d'une sant entire m e n t rtablie par un m i r a c l e : Celui qui, a u m o m e n t o il recouvre la sant, peut immdiatement faire ce qu'il pouvait faire avant sa maladie. Or notre j e u n e fille, la quelle, jusqu'au m o m e n t de sa gurison, ne pouvait ni se
{ i ) De mirac. mdit. 7 n 24.
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lever de son lit sans le secours des autres, ni mettre ses v tements, ni marcher m o i n s qu'elle n e ft presque porte, tout coup, c o m m e l'atteste sa mre, la voil qui s'habille elle-mme... Elle va d'elle-mme l'glise pour rendre grces Benot-Joseph... Elle marchait lestement et plus vite que n o u s , elle n o u s devanait toujours, nous ne pouavions la rattraper... Elle se remettait en route... Elle n e voulait pas monter sur la bte de s o m m e , elle voulait a marcher pieds, et, en dehors de la porte Angelica, elle a fait presque deux milles, plus leste et plus vive que nous. Dans le trajet, elle n'eut besoin de rien... seulement elle n'aurait fait que m a n g e r . . . Aussi quand nous nous reposmes la Storta, elle fit un ,bon repas avec un apptit qui faisait envie.^ Est-ce que cette j e u n e fille ne fit pas immdiatement ce qu'elle avait pu faire avant sa m a l a d i e ? Elle avait donc t parfaitement gurie; oui certes, et si parfaitement, que son arrive jeta les Mazzaniens dans l'admiration; ils s'criaient: Est-ce Jrien Marie-Rose ? Il paratrait que n o n ! Et c o m m e n t donc avez-vous fait? Et, interrogs de longues annes aprs, ils dposrent : Quand nous la vmes, n o u s restmes stu pfaits; elle marchait librement et vile, elle tait forte, elle avait un visage color, il semblait qu'elle n'et jamais t malade. 66. Mais, dites-vous, elle souffrit nanmoins aprs de l a fivre tierce, et quoiqu'elle et contract mariage plus tard, elle mourut bientt. Qu'est-ce que cela nous fait? Ceux qui ont t guris par un miracle sont-ils dans la suite exempts de maladies et de la mort ? La fivre tierce et la mort par suite d'un a c c o u c h e m e n t ont-ils quelques rapports avec la phthisie? Allons, laissons tout cela de ct, c o m m e tranger notre sujet. Faisons s e u l e m e n t remarquer que les fivres tierces, si fivres tierces il y a eu, ont d tre trslgres et de trs-courte dure. En-effet, la cousine de la jeune fille gurie, seule en fait m e n t i o n , et elle s'exprime ainsi : Dans la suite, elle s'est toujours trs bien porte, elle n'a eu aucun m a l . . . Je le sais de science certaine, parce que Marie-Rose tait ma cousine germaine, nous habitions la mme maison, Tune au-dessus et l'autre au-dessous. J'tais toujours avec Marie-Rose, c'est pourquoi je sais qu'elle n'a plus t malade, si ce n'est de quelques livres pendant l't, chose qui arrive presque tout le m o n d e ' cause de l'insalubrit du climat. Ces paroles, qui nous font connatre la cause du m a l , montrent e n m m e temps la lgret de la maladie. Les d -
LES
SPLENDEURS
DE
LA
FOI.
positions des autres tmoins jettent un nouveau j o u r sur notre assertion, car aucun d'eux n'en fait attention. T o u s , en effet, ont dpos qu'elle tait parfaitement gurie, que dans la suite elle se porta toujours bien.. ; qu' s o n re tour de R o m e , elle se portait c o m m e si elle n'avait eu a u c u n m a l . . . qu'elle s'est toujours bien porte dans la <i s u i t e . . . qu'elle vcut plusieurs annes aprs, toujours en b o n n e s a n t . . . La gurison fut parfaite, elle fut constante aussi ; elle ne fut plus sujette aucune maladie... Elle est revenue g u r i e , elle se porta toujours bien dans la suite.... Dans la suite, elle se porta toujours bien. Ainsi, quelles que furent les fivres produites par l'insa lubrit de l'air, elles ont d tre tellement bnignes et de si courte dure, qu'elles n'ont attir l'attention de personne. Leur brivet, leur bnignet suffiraient pour attester la par faite gurison de la j e u n e fille, puisqu'elle se dbarrassait si vite et si facilement de ces fivres e n d m i q u e s . Quant sa mort, toutes les dpositions attestent que Marie-Rose est morte de suites de c o u c h e s . Son mari, entre autres, dclare que : Trois o u quatre ans aprs (sa g u rison), j e la pris pour p o u s e ; elle vcut quatre ans avec m o i , elle eut deux couches, elle n'tait jamais malade, et quand elle est morte, elle est m o r t e la suite de ses couches, j) La j e u n e gurie v c u t donc encore huit annes aprs le miracle, toujours en b o n n e sant, et elle est morte, n o n d'une maladie quelconque, m a i s d'une c o u c h e difficile. Peut-on dsirer une gurison plus parfaite et plus c o n s t a n t e . Or cette gurison eut l i e u parce qu'on implora l'intercession d u vnrable Benot-Joseph,, elle eut l i e u s u r - l e - c h a m p , alors que svissait davantage une maladie incurable. Il n'y a donc plus douter du miracle.
3*. Nouvelle* remarques critiques da R. P. promoteur de la foi. D.
i . En premier lieu, la discussion des. preuves n o u s a m o n t r et n o u s force relever u n dsaccord bien clair e n t r e la malade et les tmoins qui se rendaient R o m e avec elle, et qui y sont demeurs quelque temps. Le voici : La mre et sa cousine dposent, que le lendemain matin du jour de leur arrive Rome, elles se sont rendues Sainte-Marie in Ara c(i, que dans cette glise, avec les autres personnes qui accompagnaient la m a l a d e , elles ont reu la sainte Eucharistie. D'un autre ct les t m o i n s soixante-dixime et
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soixante-douzime affirment qu'ils se sont approchs de la table sainte avec eux Sainte-Marie-aux-Monts. Cette divergence, qui ne peut se concilier, n o u s empoche d'avoir une confiance pleine et entire dans ces tmoins ; et cepen dant c'est sur leurs tmoignages que repose principalement la relation de la gurison miraculeuse. 2. Examinons maintenant le tmoignage du m d e c i n Angelucei qui a soign Marie-Uose. Nous verrons alors, si nous pouvons acquiscer son j u g e m e n t , sur lequel reposent principalement la raison et le fondement cle toute la Cause. Voici c o m m e i l dcrit l'tat de la maladie. Au dbut, il n'y eut point de maladie, si ce n'est de simples morbilles pidmiques, A ces morbilles se joignit ensuite une inflammation de la poitrine. A rintlammation succda l'ulcration du p o u m o n avec v o m i q u e ; . la vomique l'empyme; l'empyme, le phthisie, moins que nous ne veuillions joindre ensemble la phthisie et Tempyrne. Or, en traant ainsi la marche do la maladie, il se montre un mdecin bien peu habile. Dans nos premires objections nous avons t d'avis de rejeter cette marche de la maladie, et le dfenseur de la cause a pens c o m m e nous, bien qu'il s'efforce d'excuser le m d e c i n , en essayant de montrer qu'il a donn au m o t E m p y m e une signification plus 'large que de c o u t u m e ; mais ce n'est pas assez pour dissiper le doute, qu'on peut trs-bien se permettre sur s o n habi let. 3. On peut encore ajouter que ce mdecin ne fit que de rares visites la malade, te Le mdecin (dit la m r e de celle-ci), j e crois que ce fut le docteur Angelucei, vint peu chez n o u s . Ce m d e c i n n e rsidait pas . Maz,zano, mais Campagnano. U avait c o u t u m e d e a i e venir Mazzano que tous les huit jours, m o i n s qu'il n'y et une ncessit grave. Comment donc pourrons-nous croire qu'un m d e c i n qui visiitesi peu une malade ait pu porterun j u g e m e n t certain sur l'tat de sa m a l a d i e ? . 6. L'aveu du mdecin l u i - m m e vient confirmer -cette difficult pour lui de prononcer un j u g e m e n t digne de foi : Je faisais alors (c'est--dire une fois par semaine) mes M observations sur la j e u n e malade ; les rapports sur l c s quels elles taient fondes m e venaient du dfunt chirur gien Jacques Sgarzi Et, s'il vivait encore il d p o serait avec plus de prcision que j e puis le faire ; il tablirait mieux t o u t ce qui a rapport la marche et aux diffrentes phases de la maladie. D'o n o u s pouvons conclure, que le m d e c i n Angelucei, n'a pas connu avec
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prcision, tout ce qui a rapport la marche et aux diff rentes phases de la maladie. Ajoutez cela ce qu'il dpose l u i - m m e plus bas (ibid. I 94): L e s signes qui apparaissaient, taient tous funestes s a v o i r : l'enrouement, la douleur (je ne m e rappelle plus & si ce fut une douleur locale et permanente, je n e m e s o u viens plus galement si elle fut vague,ou distincte),la toux, les crachats purulents, la respiration difficile, une fivre lente, la diarrhe continuelle, les sueurs. Je m e rappelle bien les sueurs, mais j e n e puis m e souvenir si elles taient de l'espce que nous n o m m o n s colliquatives. Que la malade ait t rduite cet tat, et que ces s y m p t m e s soient vritables, je puis bien l'affirmer, quoique v u le laps de t e m p s coul, le souvenir s'en soit affaibli. 7. Si n o u s e x a m i n o n s ce que Marie-Rose a fait i m m d i a t e m e n t avant sa gurison, n o u s dcouvrons que la relation ci-dessus m e n t i o n n e a singulirement exagr la gravit de la maladie.En effet : on rapporte d'abord la marche de la m a l a d i e ; on fait la description des symptmes du plus m a u vais a u g u r e ; n o n - s e u l e m e n t on reprsente la malade c o m m e toute proche de la mort et presque morte, mais o n donne ces s y m p t m e s mortels c o m m e persvrant sans relche aucune, et croissant chaque jour en gravit : J'atteste, dit le m m e m d e c i n , que les s y m p t m e s , tels qu'ils se sont <t succd dans-l'ordre que j'ai rapport plus haut, ne se s o n t jamais affaiblis; au contraire ils a u g m e n t a i e n t en intensit, car la malade n'a jamais prouv aucune a m lioration, m m e passagre o u apparente. Et un p e u plus b a s il ajoute : Le mal alla toujours en empirant. Ce mdecin est, d'ailleurs, presque d'accord avec les autres, t m o i n s ; car ils dposent que la malade s'est prpare sa dernire heure par la rception de tous les sacrements. Or, j e le demande ; c o m m e n t u n e malade arrive au seuil de la m o r l , une malade qui n'a jamais prouv aucune a m lioration m m e passagre o u apparente, bien plus, d o n t le m a l alla toujours en empirant, c o m m e n t , dis-je, aprs un intervalle de vingt j o u r s , place sur un ne, a-t-elle pu faire u n e route l o n g u e de vingt-cinq milles et en supporter les fatigues ? Gomment encore, arrive R o m e , aurait-elle p u partir le lendemain du quartier Campitelli, sans tre transporte? Gomment a-t-elle pu gravir pied la p e n t e du capitole, pour se rendre l'glise qui y est s i t u e ; SJB diriger ensuite vers Sainte-Marie-aux-Monts, et dans ce t e m p l e faire de longues prires sur le t o m b e a u du vnrable-Benot Joseph ? Je le veux bien : la malade n'a
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accompli tout cela que s o u t e n u e et c o m m e trane par ceux qui l'accompagnaient. Mais cette facult de m a r c h e r e t a g i r , quand bien m m e elle n e serait pas entirement libre et d gage, peut-elle se concilier avec cette maladie d'une extrme gravit, telle que nous la donnent et le mdecin qui a soign la malade, et les autres tmoins, 8. Passons maintenant l'examen de la nature de la m a - , ladie. Certes, on n e trouve pas fort concluant les documents l'aide desquels le dfenseur s efforce de prouver que MarieRose fut atteinte d'une phthisie pulmonaire confirme, et voici la remarque que l'un des consulteurs a pens avec raison devoir faire: Je regarde c o m m e faite t i o p la l gre, l'affirmation de la gurison instantane et parfaite de Marie-Rose de Luca d'une phthisie pulmonaire con firme, m o i n s , toutefois, que par hasard, il ne soit vrai, ou du m o i n s probable, que la jeune fille ait t sur le point de succomber une phthisie, avant d'tre atteinte a de la phthisie. 3. Et en effet, le dfenseur de la cause, prvoyant que la question serait ramene ces termes, abandorina dans ses rponses le calcul qu'il avait donn au dbut, touchant la dure des maladies qui se succdrent chez Marie-Rose, il a de plus recueilli de toutes parts t o u t ce qu'il a pu pour viter le prcipice qu'il s'tait creus lui-mme.A-t-il bien russi? V o y o n s - l e en quelques m o t s . Le dfenseur de la cause s'est aperu que du c o m m e n c e m e n t de mars, la fin de mai il y avait eu un trop court espace de temps pour tablir l'existence d'une phthisie pulmonaire confirme, alors, que c o m m e dans le cas actuel, il fallait trouver le a temps ncessaire l'volution des diffrentes affections qui se succdrent. Aussi s'appliqua-t-il diminuer la dure de toutes ces dernires, assignant toujours chacune d'elles, le temps le plus court possible. Mais, pour pro te cder avec toute la condescendance dsirable, c o m m e il convient, accordons la dfense le t e m p s le plus l o n g que les faits rendent possible, et raisonnons. 9. D'aprs le dfenseur le c o m m e n c e m e n t de mars aurait la m m e signification que le premier jour de mars, car il ne pense pas qu'on puisse reculer au del du qua trime jour de ce mois la mtastase de la rougeole. Mais quel obstacle ce que n o u s trouvions, m m e aprs le qua trime jour de mars, non point la mtastase (dplacement) mais m m e le c o m m e n c e m e n t de la r o u g e o i e ? Eu effet cette expression, L e c o m m e n c e m e n t du m o i s / p a r cela mme qu'elle indique un jour quelconque parmi les p r e -
160 c < y et u
miers jours du mois, sans en dterminer aucun, peut avec la m m e probabilit dsigner le premier, le quatrime, ou m m e le cinquime. Aussi, personne, je pense, no m e reproebera d'tre trop svre, si dans le cas e n question,
( par le commencement
au m o i n s le quatrime jour du m o i s . Eh bien ! plaons cette poque le c o m m e n c e m e n t des morbilles : voici James et Busson qui affirment dans le Dictionnaire de m d e c i n e , que, dans le sujet atteint de cette maladie,
l'ruption
n'arrive quelquefois
que le cinquime
jour.
D'aprs Jean Pierre Frank, cit par le posfculateur de la cause, l'ruption persiste presque trois jours entiers dans toute sa force. Il est clair maintenant que nous pouvons reculer avec raison, disons m i e u x , que nous devons reporter la mtastase quatre jours au del, et m m e jusqu'au douzime de mars. Faisons maintenant la part de la pleursie o u de la pripneumonie, qui ne se rsout qu'au septime jour pour faire place la v o m i q u e , le postulateur peut demander ce dlai, mais il ne peut en exiger imprieusement un temps aussi court. E n effet, si d'aprs Hippocrate, ceux-qui devenus pleurtiques n e sont pas repurgs de nouveau (repurgs par en haut), en quatorze jours, passent la suppuration, U s e r a ncessaire, c o m m e le postulateur le soutient avec raison que le pus soit form le quatorzime jour, pour pouvoir tre rejet par en haut. Or, le pus ne peut-il pas tre form au douzime ni morne a u treizime jour pour tre c o m p l t e m e n t vacu le jour suivant c'est--dire le quatorzime jour, o u bien pour passer la suppuration s'il n'est pas vacu. 11 faudra donc dans c e cas aller a u del du m o i s de mars pour avoir les jours n c e s s a i r e s , la rupture de la v o m i q u e ; il faudra m m e aller la fin de mars pour ta blir le c o m m e n c e m e n t de la vomique. D'aprs ce calcul, tt qui m e parat assez raisonnable, ce ne sera qu'aprs le c o m m e n c e m e n t d'avril, ou mieux pas avant le m i l i e u de ce m o i s , que la vomique se pompera ncessairement, si nous lui accordons une dure de vingt jours, c o m m e le p o s t u lateur l'a admis l u i - m m e . Mais c o m m e de la rupture de la vomique, jusqu'au c o m m e n c e m e n t de la phthisie, le pos<t tulateur admet lui-mme un espace de quinzo j o u r s , il faut * reculer le c o m m e n c e m e n t de cette dernire maladie de Marie-Rose, jusqu'au premier jour de mai. Et voici que cette j e u n e fille atteinte de la phthisie pulmonaire aux pre* miers jours de mai, reoit le saint viatique et l'extrmea o n c t i o n , cause du pril i m m i n e n t de mort caus par la
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phthisie, vingt et un jours aprs, alors qu'elle'se mettait en route pour Rome afin de demander sa gurison par u n miracle. Or elle arriva R o m e le 2 0 mai. Nous avons d o n c ici le cas nonc plus haut, savoir : celui d'une jeune fille sur le point de mourir de la phthisie, avant m m e d'tre atteinte de phthisie. Mais, d i t - o n , la maladie persvra jusqu'au 23 mai. Je le veux bien, si une priode de vingt-trois jours est une priode convenable et suffisante dans une phthisie pulmonaire confirme, pour con duire aux portes du t o m b e a u ? 12 Veut-on maintenant tablir un calcul plus exact? On verra que le trop court espace de temps accord s'oppose' tout fait ce qu'on puisse tablir l'existence d'une phthisie pulmonaire confirme dans la maladie de cette jeune fille. 13. Et nous ne voyons pas pourquoi le dfenseur insiste si fort pour affirmer l'existence d'une phthisie pulmonaire. Pour l'tablir il compare les signes p a t h o g n o m o n i q u e s tirs de Burserius, avec la relation de la maladie de Marie-Rose faite parle mdecin qui a soign la malade. Mais il y a lieu de craindre qu'en cela il n'ait t pareillement induit en erreur. Pour que notre discussion soit plus claire, n o u s croyons utile de c o m m e n c e r par un expos srieux de la maladie appele Phthisie. 14. Si l'on consulte les crivains les plus acecrdits qui ont trait de la mdecine, on apprendra q u e dans l'examen de cette maladie, il faut considrer les tubercules, et le pou mon sur lequel elles se trouvent. Les tubercules offrent trois priodes bien distinctes dans leur existence. La pre mire priode est celle de la formation et de la crudit des tubercules, ou des tubercules c r u s ; la deuxime, celle de l'expectoration, et du ramollissement des tubercules ; la troisime, celle de la perforation ou des cavernes pulmo naires, c o m m e les appellent les m d e c i n s . Passant sous silence ce qui concerne la premire et la deuxime priode, nous nous arrterons seulement la troisime, car d'elle dpend la solution de notre question. 15. Cette troisime priode, appele priode d'ulcra tion, c o m m e n c e par un travail analogue celui qui affai blit la peau et la perce lorsqu'elle se trouve en contact avec le pus. Tout autour de cette matire tuberculeuse, en quelque sorte liquide, le tissu spongieux du p o u m o n est rong, d truit ; les canaux bronchiques sont bientt atteints de cette destruction, et travers les ouvertures d o n t ils sont bienVI.
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tt percs, ces canaux, ouvrent u n e sortie facile la ma tire des tubercules qui est rejete au dehors l'aide de l'expectoration. 16. Les cavernes pulmonaires sont formes par la runion de plusieurs tubercules agglomrs, ou par une masse consi drable de tubercules, par l'ulcration qui dtruit le paren c h y m e du p o u m o n , par la c o m m u n i c a t i o n qui s'tablit entre plusieurs de ces foyers o u centres, et enfin par l'expectora tion de la matire tuberculeuse ramollie. Ces cavernes se m o n t r e n t ordinairement au s o m m e t , ou vers le haut du pou m o n , rarement dans la partie infrieure, de m m e q u e dans le voisinage de la plvre, laquelle, dans certains cas peut seule et par elle-mme former la paroi intrieure de la caverne. On rencontre aussi quelquefois de ces cavernes au milieu du tissu pulmonaire. 17. La matire que ces cavernes contiennent est u n m lange de pus, de mucus de sanie tuberculeuse, de srosit paisse, et de sang. On y trouve quelquefois des morceaux de tissus, que l'expectoration peut pousser au dehors. Cette expectoration chez les femmes dlicates, fait dire qu'elles crachent leurs poumons. 18. Ces cavernes peuvent s'tendre, se resserrer, d e m e u rer dans le m m e tat, se cicatriser, et disparatre. Plusieurs anciens m d e c i n s ont regard c o m m e possible la cicatrisa t i o n de ces cavernes. E n effet, V a n - S w i e t e n parle d ulcres pulmonaires qui se sont cicatriss. Laennec,dans l'autopsie, a rencontr plusieurs de ses malades guris par cicatrisation des cavernes. Elle se produit graduellement. Si q u e l q u e partie intrieure de la caverne se trouve entirement vide de p u s , ses parois se trouvent recouvertes par u n e m e m brane cellulo-vasculaire; puis la cavit disparat, il n e reste plus rien qu'une simple ligne cellulo-fibreuse, dont d pendent les grandes bronches, o u des masses plus o u m o i n s turgescentes, cellulo-fibreuses, calcaires, o u cartilagi neuses. 19. Ces transformations se sont rencontres chez p l u sieurs sujets qui, bien que prsentant tous les s y m p t m e s d e l phthisie pulmonaire o n t t guris, et sont morts long t e m p s aprs, des suites d'une maladie toute diffrente. 20. En pesant srieusement ce qui prcde, c h a c u n peut voir surgir ce doute trs srieux : cette marche, et cette volution naturelle de la phthisie pulmonaire, q u e n o u s venons de dcrire, n'a-t-elle pas eu l i e u dans la maladie de notre adolescente? Ce d o u t e peut trs-bien subsister malgr l'abondante jection de matires p u r u l e n t e s , et
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toutes les autres particularits de ce genre sur lesquelles s'appuie surtout le dfenseur. Ce que n o u s avons dvelopp prcdemment, montre clairement que ces vacuations peuvent trs-bien provenir de la cicatrisation qui s'opra dans les cavernes du p o u m o n . 91. Ajoutons, ce sur quoi les mdecins modernes ne sont pas encore accord, la question de savoir, si pour gurir d'une phthisie p u l m o n a i r e , il est ncessaire que les tubercules se ramollissent, et que les cavernes existent; s'il ne peut pas arriver que le phosphate calcaire venant prvaloir, la scrtion tuberculeuse puisse prendre fin ; enfin s'il est impossible que les tubercules rsorbs puissent dis paratre sans mtathse. Que tous ces doutes runis s'opposent considrablement, ce que nous prononcions un jugement certain et raisonn sur la gurison de Marie-Rose, tout le m o n d e le comprendra sans peine, je le crois du m o i n s . 22. Ne pourrait-on pas encore avec raison soulever cet autre doute : La gurison fut-elle vritablement parfaite, ne faut-il pas plutt admettre chez Marie-Rose une suspen sion des s y m p t m e s de la maladie? L'exprience des m d e cins nous apprend que ces cas ne sont pas rares. Nous lisons en effet dans l'ouvrage intitul : Encyclopdie populaire. Turin 1848, au m o t Phthisie : Il n'est pas rare de r e n contrer des cas de suspension des symptmes dans cette maladie (la phthisie) pendant le long espace d'un mois entier, ou m m e de plusieurs a n n e s ; quoique le malade puisse se croire guri, il finit ensuite par s u c comber ce mal h o m i c i d e . La maladie dont nous nous occupons, vu sa dure beaucoup plus courte que d'ordinaire, n o u s engage embrasser cette opinion ; Page de la malade, dans toute sa force, n o u s en donne le droit. Cette malade e n effet tait ge de q u i n z e ans environ, elle tait dans cette priode o la constitution du corps varie de jour en jour, et prend facilement de nouvelles forces. Nous s o m m e s encore pousss embrasser cette o p i nion, par l'examen p e u srieux que fit le mdecin du rtablissement de la sant. En effet, lorsqu'il examina la jeune fille aprs sa gurison, il l'avait fait venir dans u n e officine de pharmacie, et j e crois qu'il remplit alors ls devoirs de sa charge plutt par manire d'acquis, et sans la grande attention, ncessaire pour qu'on puisse ajouter foi son tmoignage. Nous y s o m m e s pousss aussi par la mort de la j e u n e Jille elle-mme qui arriva peu d'annes aprs. En effet, c o m m e o n n'assigne a u c u n e cause une
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m o r t aussi rapproche, c o m m e on ne rapporte a u c u n e autre circonstance principale de cette lin prcipite, il s'lve un j u s t e doute ; savoir si elle n'est pas survenue par suite de l'ancienne maladie qui aurait reparu. 42. Embrassant maintenant toutes ces circonstances d'un seul coup d'il, on pourra facilement s'expliquer la s u s p e n s i o n de tous les s y m p t m e s . Sans doute, que si elle a eu l i e u , la malade a o b t e n u u n bienfait qui n'est pas d daigner : v o u s l'attribuerez, si vous le voulez, h l'interces sion du vnrable Joseph ; mais vous n'y trouverez qu'une faveur, et mais n o n point u n miracle, tel que le demande u u p r o c s aussi important. 4 3 . Si n o u s passons . l'examen plus attentif do ce que le dfenseur de la cause parat avoir voulu tablir, quoique assez l g r e m e n t , dans l'expos qu'il n o u s fait de la science m d i c a l e , on reconnatra encore plus facilement le caractre de g u r i s o n naturelle. 4 4 . Faisons remarquer tout d'abord, que ce n'est pas trois, m a i s bien quatre priodes que la rougeole a c o u t u m e de parcourir, savoir : les priodes d'invasion, d'rup tion, d'efflorescence et de desschement. Tel est le s e n t i m e n t de t o u s les mdecins qui ont crit sur cette matire. Qu'il n o u s suffise de citer l'autorit de Jean Pierre Frank. V o i c i ses paroles : Dans cette maladie, c o m m e dans la variole, on distingue quatre priodes : la premire est celle de < l'invasion ou celle de la contraction de la maladie conta c ct gieuse ; la seconde est celle de l'ruption, etc. (Abr g des soins ordonns aux maladies de l ' h o m m e . Vol. II, des affections, 347). Il caractrise la priode d'invasion, par les symptmes catarrheux, une t o u x sche, l'ter n u e m e n t , la dmangeaison des y e u x , une rougeur a c c o m p a g n e de larmes brlantes, une douleur de la face, et la fivre. Alors arrive la priode d'ruption, la fin du t r o i s i m e o n au c o m m e n c e m e n t du quatrime j o u r , q u e l q u e f o i s plus tard, le plus souvent sans aucune d i m i ti n u t i o n des s y m p t m e s prcdents, o u bien m m e avec u n e a u g m e n t a t i o n vidente de ces derniers. 4 3 . Ainsi donc, dans la dfinition gnrale des e x a n t h m e s , pour dterminer leurs diffrentes phases, on e m p l o i e ces m o t s plus tard, o u plus tt, parce que selon l'affection d e l contagion d o m i n a n t e , o u s a ndLuvc,gastrique inflammatoire, ou nerveuse, elles mettent plus ou m o i n s de t e m p s parcourir leurs priodes. C'est pourquoi, c o m m e le c o u r s de la maladie de Marie-Rose a t irrgulier, e n vertu d e s causes dcoulant de la constitution de la
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malade elle-mme, soit seule, ou c o m b i n e avec l'tat de l'at mosphre, et la nature de la contagion, il n'y a aucune raison pour fixer u n jour plutt qu'un autre, surtout parce que l'on n e peut rien demander de certain au tableau chronologique de la maladie. 46. L'inflammation de poitrine, qui n'est ni repurge, ni rsolue n'arrive pas toujours la suppuration au q u a torzime jour. L'aphorisme d'Hippocrate qui nonce ce fait, doit tre entendu n o n pas dans un sens exclusif, mais dans un sens g n r a l ; car il arrive souvent, q u e la rsolution de l'inflammation, c o m m e le c o m m e n c e m e n t de la suppu ration sont diffrs jusqu'au vingtime j o u r . Haller nous le fait remarquer avec raison : ce m d e c i n de Paris qui a illustr de si beaux commentaires les aphorismes d'Hippo crate a dit, La pleursie, quand termine dans l'espace de quatorze jours au moins de v i n g t jours quelquefois elle n'a pas eu de repurgation, s'en va en suppuration... (Septime commentaire sur les aphorismes d'Hippocrate, sect, Y, aphor. XV. Scolie.) 47. Oui, avec le Dfenseur, n o u s admettons qu'il faille faire remonter le c o m m e n c e m e n t de la suppuration au j o u r o le malade a e u la fivre pour la premire fois, car cela est en effet en parfait accord avec la nature de la maladie, et l'exprience. Mais n o u s ne pouvons tomber d'accord avec lui, quand il assigne vingt jours seulement aux deux opra tions que la maladie accomplit sparment, dans la forma tion du p u s , et dans sa mobilit o u son expulsion. Car du moment o cette matire a t convertie en pus, jusqu' celui o elle est en m o u v e m e n t , et o elle est expulse, soit par les crachats, soit par les urines, soit par tout autre mtastase qui l'absorbe, il s'coule le plus souvent dix, vingt ou mme quarante jours. Les m d e c i n s les plus exprimen ts ont dcouvert la suite d'observations constantes, que l'expulsion de cette matire suppuralive avait lieu non pas ordinairement au vingtime jour, mais b i e n au trentime, a u quarantime o u bien mme au s o i x a n t i m e jour partir de celui o le malade a c o m m e n c ressentir la fivre. Ces mdecins insistent fortement pour qu'on remarque avec soin ces priodes certaines, toutes les fois qu'une inflammation de poitrine a dgnr en suppuration. 48. Cette interprtation est en accord parfait avec le sentiment exprim dans une autre sentence, o il est ques tion, cette fois, n o n de la formation du pus, mais de s o n mouvement o u de la rupture de r e m p y m e . La voici ; Les quarantejoursqu'Hippocrateassigne l'vacuation du pus,,
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l'tisie, la phthisie pulmonaire, doivent se compter n o n partir de la formation du pus, mais partir du j o u r o il se met en m o u v e m e n t . C'est pourquoi ceux qui de la pleursie passent r e m p y m e , sont hors de danger, s'ils ont tout < vacu dans l'espace de quarante jours partir de la rupc ture de l'empyme, et n o n de sa formation . 4 9 . Pour m e rsumer : il faut distinguer une double o p ration lorsque l'inflammation du p o u m o n se transforme en suppuration. Dansla premire,la matire morbide se convertit ' e n pus, et cela se fait dans l'espace de vingt jours environ. Dans l'autre a lieu l'expulsion de ce p u s . La premire c o n cerne la formation de l'abcs, et la s e c o n d e , sa rupture o u le m o u v e m e n t du pus qui s'est form. C'est pourquoi il faut compter les quarante jours partir de ce s e c o n d p h n o m n e . E t parce que ce p h n o m n e a lieu le plus souvenL, soit le trentime, soit le quarantime, soit le soixantime jour aprs que le malade a c o m m e n c ressentir la livre, elle est donc bien futile la conjecture q u i a fait assigner la production de ce p h n o m n e , le vingtime jour de la m a l a d i e de notre j e u n e fdle. 50. En effet, depuis longtemps elle gardait le lit, et s o n corps souffrait de maladies cruelles, telles que la rougeole, et la pripneumonie. Or, le pus arriv maturit se met e n mouvement plus o u moins vite selon les forces plus o u m o i n s grandes du malade, c o m m e l'enseignent u n a n i m e m e n t tous les auteurs qui ont crit sur la m d e c i n e pra tique- Tout le m o n d e peut donc voir que n o u s s o m m e s plus prs de la vrit, lorsque, pour l'expulsion du pus, n o u s c o m p t o n s au moins trente jours partir de celui o elle c o m m e n a souffrir de la pripneumonie, et, lorsque nous disons qu'il faut ncessairement e u compter encore q u a rante soit pour la gurison, soit pour l'tablissement de la phthisie. Ce calcul admis c o m m e plus conforme la vrit, il est clair, que Marie-Rose revint la sant dans le t e m p s critique^ et q u e dans cet intervalle, elle a pu tre repurge. 51. II ne sera pas dplac de confirmer de l'autorit d'Haller l'expos q u e n o u s venons de faire de ce s e c o n d aphorisme Hippocrate. Hallcr dveloppe ainsi la m m e opinion avec t o u t le talent qu'on lui connat. OEuv. cit., aphor. xv secl. v. T o u t malade atteint de pleursie, s'il doit gurir, sera repurg (1) en quatorze j o u r s , Quand le quatorzime j o u r pass, nous n e trouvons pas le (1) Expression employe par les mdecins pour dire que la maladie aura certainement une heureuse issue, ou que le principe du mal a dispara.
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malade repurg, nous disons qu'il y a suppuration. Il faut alors remarquer le vingtime, le trentime, l e quarantime et quelquefois le soixantime j o u r , parce que, la plupart du temps, les suppurations ont lieu dans c e s jours, et le pus entre en m o u v e m e n t . Ainsi, quand nous voyons le malade dlivr de la livre, c'est q u e la nature travaille dj former le pus. La livre reparat vers le vingtime j o u r , et la douleur est trs-grande, parce qu'alors a lieu la formation du p u s . . . La nature ouvre e n suite les portes, le pus ronge, pour sortir, la membrane qui le retient ; de la cavit du p o u m o n il se rpand dans le thorax, se prparant,ainsi u n e vacuation plus facile. Cette vacuation du pus s'appelle py]^tv rupture, et la suppuration est faite le vingtime jour. Supposons que la rupture pyjrw ait lieu le trentime j o u r , c o m m e cela arrive le plus souvent, pour que ce pus soit rejet par le m o y e n des crachats, il faudra n c e s s a i r e m e n t compter quarante jours partir du m o m e n t o la rupture a eu lieu. 32. C'est donc bien tort que le dfendeur de la cause croit avoir suffisamment dmontr l'existence d'une phthisie con firme, parce qu'il a trouv des rapports entre les s y m p t m e s del maladie, et la p h y s i o g n o m o n i e de la phthisie. Il s'agi rait en effet d'une phthisie pulmonaire qui ne serait que secondaire, e n t a n t que produite par l'inflammation de l a p o i trine; elle aura donc d parcourir entirement toute la priode de suppuration, par les raisons q u e nous avons d o n nes tout r c e m m e n t dans notre interprtation de la d o c trine d'Hippocrate. D'ailleurs cette m m e repurgation cri tique a pu avoir lieu par la diarrhe, p a r l e s sueurs n o c turnes, par la fivre, la toux et les autres voies numres par le dfendeur. Ces s y m p t m e s n'taient pas simplement passifs, o u les effets d'une phthsie confirme, ils taient plutt les effets de la nature qui oprait elle-mme sa propre gurison, et qui se servait de ces diffrents monctoires pour vacuer la suppuration du p o u m o n repurg. 53. Il nous est tout aussi impossible de regarder c o m m e absolument certaine la preuve de l'existence d'une phthsie confirme tire de la description de la qualit du p u s , de ce que le pus tait tout sanieux, ichoreux et ftide, m m e au commencement d'avril. Car il est bien difficile de reconnatre la nature d'un pus, et de le distinguer des autres. Quand il s'agit surtout de maladies pulmonaires aigus, l'erreur est facile. Aussi le m m e Frank fait cette remarque : B i e n des fois on suppose des suppurations qui n'existent pas, o u bien Ton croit voir une vomique oculte qui ronge le v i s -
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cre, souvent m m e l'action de rejeter de l'intrieur une matire purulente, fournit u n e preuve trop peu sre de l'ulcration. OEuv., cit. Gnralits sur Vinflammation, 128. Aprs avoir fait connatre les qaracKires physiques et chi miques du pus vritable, il ajoute : Cependant quoiqu'il (c n'ait pris son origine ni d'un abcs ni d'un ulcre, il n'en avait pas m o i n s t o u s les caractres dcrits plus h a u t , et par suite, il n e faut pas confondre avec le pus la matire puriforme. Cette sorte de glatine, e n effet, laquelle, sans aucune ulcration des parties malades, par la v i o lence de l'inflammation, p e u t transsuder a b o n d a m m e n t , sous l'action d'une simple p h l o g o s e , des y e u x , des p o u ce m o n s , de la vessie et de l'urtre ; o u aussi cette m a tire qu'on retrouve au fond de l'eau des hydropiques, o u qui est abondamment scrte par les bronches dans l a a phthsie pituiteuse, se distinguent du pus l u i - m m e , par les r e m d e s diffrents qu'il faut employer p o u r < triompher d'elle, quoiqu'elle ne se distingue pas q u a n d c on la traite par une solution alcaline. 54. Riverius l u i - m m e reconnaissant t o u t la fois la diffi cult et plus encore la ncessit de discerner les vritables caractres du p u s , pour qu'on puisse porter sans d o u t e aucun u n diagnostic certain sur la p h t h s i e , dit au ch. v u de la phthsie : Il faut remarquer avec soin, et cela est de la plus grande importance dansla pratique, qu'un catarrhe opinitre qui est tomb sur la poitrine revt souvent T a p et parence d'une vraie phthsie. La pituite putride e n effet, qui a d e l ressemblance avec le pus s'est discerne par la t o u x ; elle engendre la fivre suivie de l'extnuation du < corps ; cependant ceux qui sont atteints de cette maladie, c gurissent facilement l'aide d'un traitement habile. Il faut donc faire e n sorte de distinguer de la phthsie vritable, cette affection (catarrhe pulmonaire aigu) qui succde faci l e m e n t la mtastase morbileuse ; cette distinction se fait surtout par la diffrence qu'il y a entre la p i t u i t e putride et le p u s vritable. Voici les signes qui tablissent cette diffrence : Le pus est d'une couleur c e n d r e , et < m o i n s blanc que la pituite ; jet dans de l'eau tide, il c descend au fond o il se dissout. La pituite au contraire surnage, est toujours adhrente e l l e - m m e cause de sa nature visqueuse, et ne se dissout j a m a i s . 55. De tout ce que n o u s avons dit, d c o u l e cette c o n c l u sion vidente. Le mdecin qui a soign la m a l a d e , n o n - s e u l e m e n t a pass s o u s silence la description des divers s y n -
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dromes, qui se sont succd dans la maladie de notre j e u n e fille, niais il n'a fail a u c u n e exprience pour connatre la nature du pus. Et cependant la connaissance de cette nature est grandement ncessaire surtout dans les maladies aigus de la poitrine. De ce diagnostic h peine bauch et imparfait, appuy sur les autorits que n o u s avons rapportes, nous s o m m e s en droit de conclure avec raison, que dans la maladie de Marie Rose, il n'y eut ni e m p y m e . n i v o m i q u e , mais s e u l e ment des morbillonsirrguliers qui la firent souffrir; et qui, parce qu'ils ne disparurent jamais entirement, ont attaqu le poumon de la malade, et ont dtermin une inflamma tion, par l'envahissement d'une certaine pituite, laquelle n o n de sa propre nature, mais dans ses apparences seulement semblait tre ichoreuse et purulente. 56. Il paratrait donc qu'il faut attribuer la maladie o u un catarrhe aigu, ou h un asthme h u m i d e . La mtastase des morbilles a pu faire dgnrer sans peine e n asthme h u m i d e l'asthme habituel, dont la j e u n e fille tait atteinte aupara vant. Puis, cette sorte d'engorgement qui en rsultat put facilement se dissoudre par les forces de la nature ellemme l'aide des sueurs salutaires, des urines, de la diar rhe, et surtout par l'expectoration.
Rponse aux nouvelles observations du R. P. D. Promoteur de la Foi au sujet du doute sur l'exis tence et la nature du miracle.
Trs Saint Pre, 1. Il est assurment trs-louable, pour celui qui on a confi le rle de vengeur de la sainte Foi, de n'admettre l e s miracles qu'aprs u n e x a m e n qui ferme toute issue n o n seulement au doute, mais m m e au plus lger soupon . Et comme il n'y a pas de meilleure mthode pour lutter contre la passion insense des ennemis de l'Eglise catho lique toujours prts s'enqurir de sa discipline avec u n e curiosit tout fait i m m o d r e , que de jouer leur rle et de combattre pour leur c a m p avec leurs propres armes, n o u s nous garderons bien d'accuser de trop de svrit notre trsillustre censeur, ctTexcellentissime docteur Maggiorani, qui
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est venu s o n aide. Car si, n o n o b s t a n t le grand nombre des objections, les miracles n'en sont pas moins prouvs, il arrivera ncessairement q u e l e s ennemis de l'Eglise c a t h o lique seront impuissants h retourner c o n t r e n o u s leurs armes brises ; toute porte sera ferme au d o u t e et aux s o u p o n s , m m e les plus lgers, et le triomphe de la vrit sera d'autant plus brillant qu'elle aura t attaque par des arguments plus subtils et plus n o m b r e u x .
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3. L'opposition cherche ensuite querelle au mdecin et dit nous ne pouvons pas n o u s en tenir au j u g e m e n t de celui sur qui cependant reposent toutes les preuves et tout le fondement de la c a u s e , car ce mdecin s'est montr ignorant en dcrivant'l'tat et les progrs de la maladie ; le Dfendeur est l u i - m m e de cet avis puisqu'il Ta rfut, tout en l'excusant. 4. Pour rpondre c o m m e il convient cette objection, il faudrait avant tout discuter sur le sujet m m e du miracle. Mais comme l'ordre du dbat ne le permet point faisons o b server en attendant, selon l'usage de ce sacr Tribunal, qu' nos y e u x le m d e c i n n'est pas un j u g e , mais un simple tmoin rapportant fidlement tous les s y m p t m e s qu'il a constats; aucune erreur de j u g e m e n t ne peut dtruire la foi. son tmoignage dans une telle matire. Il suit de l que cette affirmation : La cause tout entire n'a pas d'autre base que le j u g e m e n t du mdecin perd b e a u c o u p de sa j u s tesse. En effet, son opinion sur le caractre de la maladie, sur sa gravit ou sa lgret, ses transformations occultes, ses dangers, lui appartient en propre, et ne modifie en rien la substance du mal,l'existence et la succession des symptmes, dont l'enchanement et les circonstances constituent la m a tire et la base du j u g e m e n t . C'est pourquoi si le mdecin fournit avec exactitude ces donnes qui peuvent servir de base un j u g e m e n t sur la maladie, son erreur de j u g e ment ne leur enlvera rien de leur lorce et de leur puis sance. Mais le j u g e m e n t l u i - m m e du m d e c i n ne mrite qu'un bien lger iDlme, si o n remarque que l'erreur qu'il commet tombe n o n pas sur la substance du fait, c'est--dire sur la suppuration et l'ulcration des p o u m o n s , caractres fondamentaux de la phthisie, mais sur le m o d e et la marche de la suppuration et de l'ulcration qui peuvent natre la suite de v o m i q u e , ou a u t r e m e n t . Nous t e n o n s du mdecin que la maladie de Marie-Rose runi tous ces symp tmes individuels caractristiques o u spciaux, et c'est-dire l'enrouement, la t o u x , les crachats purulents, la fivre hectique, la respiration difficile allant presque j u s qu' l'extinction du souflle dans certaines crises produites par le plus lger m o u v e m e n t , la c o n s o m p t i o n , les sueurs nocturnes, la diarrhe, choses qui t o m b e n t sous ses sens, tout fait faciles constater par le regard et l'obser vation. Et si ces p h n o m n e s rvlaient la suppuration et l'ulcration des p o u m o n s , c o m m e n o u s esprons bien le dmontrer, il est vident que le mdecin n e s'est pas tromp du tout dans son j u g e m e n t sur la substance m m e du fait,
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qu'il n'a err qu'en spcifiant le m o d e et la gense de la suppuration. Or, cette erreur n'atteint pas le j u g e m e n t port sur la suppuration e l l e - m m e , et ne p e r m e t pas de rvoquer en doute le tmoignage de ce m d e c i n quand il dcrit les s y m p t m e s qui tombaient sous ses sens. o. Mais on ne doit m m e pas tenir grand c o m p t e du m decin, considr c o m m e tmoin, parce qu'il ne voyait la malade que rarement, c o m m e e n p a s s a n t ; et, pour cette raison,bien qu'il ait s u par les rapports d u chirurgien Sgarzi, tout ce qui s'tait pass depuis sa visite prcdente la jeune fille, il a pu ne pas se former u n e ide juste de la maladie. 6. Nous rptons qu'au sujet d u j u g e m e n t du mdecin, il faudrait s'en tenir i la relation des faits. V o y o n s c e p e n dant si cette objection n o u s est faite b o n droit : On sait que dans les maladies graves, quand l'tat du malade est devenu alarmant, il est d'usage de recourir aux consultations des mdecins. De plus, quiconque a parcouru les ouvrages de Holfmann, Manget, Bonet et autres clbrits, n'ignore pas qu'ils ont e u x - m m e s rdig u n grand n o m b r e de consultations pour les malades loigns d'eux, sur le rapport des mdecins qui les traitaient. Gela p o s , o u bien on n o u s accordera que le caractre et l'tat des maladies peuvent tre connus m m e des absents, bien m i e u x encore des mdecins prsents sur les rapports du confrre qui soigne ls malades, et surtout de ceux qui o n t vu le malade aprs avoir r e u ses rapports, o u bien on le niera. Si o n le nie, il e n rsulte que l'pithte de charlatan est applicable tous les mdecins qui, soit absents, soit prsents, ont fait ou rdig de semblables consultations, et que ces consultations ne peuvent que nuire au malade. Si, a u contraire, o n l'accorde, il faudra accorder pareillement q u e le vrai caractre et l'tat d'une maladie peuvent tre c o n n u s du m d e c i n qui n o n absent, mais prsent visitant le m a l a d e , n o n pas u n e fois, mais deux fois par semaine, recevait les rapports du mdecin habituel, et le comparait avec les observations qu'il faisait l u i - m m e . 7. Mais quel tait donc ce Sgarzi de qui le mdecin recevait les r a p p o r t s ? Le mdecin l u i - m m e a rpondu : C'tait un h o m m e d'une science profonde, n o n borne aux seules oprations chirurgicales, mais capable de soigner aussi les maladies qui appartiennent en propre la m d e cine, et bien qu'il habitt une petite terre qu'il possdait Mazzano, il aurait p u , grce , son habilet, faire b o n n e figure dans une localit plus importante et plus peuple.
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Nous pouvons conclure aussi q u e le j u g e m e n t du mdecin sur Sgarzi n'excdait p a s la vrit, d e c e q u e nous savons que Sgarzi tait appel dans tous les pays du voisi nage , chose qui n'a pas c o u t u m e d'arriver ceux qui ne jouissent pas d'une grande rputation de science. Ajoutez tout cela qu'il s'agit ici d'une maladie longue, et dont les symptmes numrs plus h a u t o n t t pendant longtemps trs-vidents, en sorte que le mdecin a pu facilement et souvent les comparer " avec le rcit du rappor teur. Aprs cela, qui donc oserait affirmer encore que le mdecin n'a pas t m m e de porter u n j u g e m e n t sr au sujet de cette maladie ? 8. Mais t o u t e s ces c h o s e s , qui sont en faveur de la pro babilit d'un j u g e m e n t sain, n e sont-elles pas aussi en faveur d'une connaissance exacte des s y m p t m e s de la m a ladie, connaissance q u e c o m m e tmoin il devait faire c o n natre ? Sans d o u t e . Car si le mdecin recevait de celui qui assistait la malade t o u s les jours et la visitait trois fois par jour, une relation exacte de tous les s y m p t m e s , si l u i mme venait la voir ordinairement deux ibis par semaine, si alors il se livrait un e x a m e n scrupuleux de la j e u n e fille, si tant prs d'elle il faisait ses propres observa tions et comparait les choses qu'il voyait avec celles qu'il avait apprises, il avait certainement u n e connaissance c o n tinuelle et c o m p l t e de la maladie et de toutes ses c i r c o n stances, et par consquent il a droit la confiance la plu^ entire, c o m m e tmoin tout fait au courant des faits qu'il rapporte. Si vous mettez en d o u t e son t m o i g n a g e parce qu'il n'a pas tout v u de ses propres yeux, et qu'il n e visi taitla malade que deux fois par semaine, il n'y a pas de raison pour q u e vous ne doutiez pas de m m e de la science de tout mdecin qui ne voit ses malades qu'une o u m m e deux fois par j o u r , car, si l'on excepte le t e m p s d'une courte visite, ce mdecin n'a pu constater de ses propres y e u x les choses arrives au malade pendant le jour et la nuit, et il a d les apprendre de ceux qui s o i g n e n t ce malade, gens le plus souvent i g n o rants. 9. En outre, dans ce cas particulier, le chirurgien qui assista c o n s t a m m e n t la j e u n e fille a dpos par l'interm diaire du m d e c i n . Ce m d e c i n , en effet, appel l'enqute examina avant tout le tmoignage qui se trouve en tte du Sommaire, le reconnut, puis dit et affirma que c'tait bien celui qu'il avait crit et sign de sa propre main, p e u aprs la gurison de la malade, avec l'Archiprtre et l e
chirurgien.
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LES
SPLENDEURS
DE
LA
FO
l'autre, parfaitement renseigns sur le fait, m'ont charg de donner l'attestation c i - j o i n t e dans les termes o je l'ai r d i g e ; ils ont l u , ensuite, et examin cette attestation, et trouvant vrai et sincre l'expos des f a i t s , ils ont sign t o u s deux. Et maintenant, si le chirurgien qui tait chaque jour prs de la j e u n e tille, aprs avoir lu et examin cette dposition, a trouv vrai et sincre l'expos du fait, il est vident que l'histoire et les symptmes de la maladie qui s'y trouvent rapports ne n o u s o n t pas t attests par le mdecin s e u l e m e n t , mais aussi par le t m o i n constant de la maladie, en sorte q u e l e tmoignage du m d e c i n a d'autant plus d'autorit qu'il reproduit celui du chirurgien l u i - m m e . 10. Ce n'est pas tout. Si Ton compare t o u t ce que l e m decin a dclar au sujet de la maladie et de ses s y m p t m e s avec ce qui a t racont par les autres t m o i n s , qui taient c o n s t a m m e n t auprs de la malade, ne voyons-nous pas qu' part le langage technique c e sont absolument l e s , m m e s faits qui sont rapports par tous. Nous prenons t m o i n de cette concordance des faits notre trs-illustre adversaire lui-mme qui n'a pu trouver aucune contradiction entre les dpositions reues. E t si le m d e c i n n'a pas rap port d'autres faits que ceux q u e les personnes qui assis taient c o n s t a m m e n t la malade o n t observs de leurs propres y e u x , s'il n'en a pas rapport d'autres n o n plus que ceux que le chirurgien, t m o i n pareillement assidu de la ma ladie, a observs chez la j e u n e fille, est-ce que n o u s ne devrons pas croire qu'il a parfaitement c o n n u le mal et ses s y m p t m e s ? Et ne c o n c l u r o n s - n o u s pas de cette connais sance parfaite de la maladie que son t m o i g n a g e est des plus srieux et des plus dignes de f o i ? 1 1 . Mais le mdecin parat n e mriter aucune confiance parce qu'il a affirm que la maladie s'tait toujours de plus e n plus aggrave, tandis que d'aprs l'histoire m m e de la maladie et de sa marche, il est vident q u e la malade s'est au contraire m i e u x porte. 12. L'observation faite plus haut se reprsente ici : La rponse cette objection est tout entire dans ce qui sera dit du sujet du miracle. Supposez que la maladie dont a t atteinte Marie-Rose a t u n e vritable phthisie pulmonaire confirme. Les s y m p t m e s de cette maladie devaient tre certainement la fivre hectique, l'orthopne, les crachats purulents, la c o n s o m p t i o n de tout le corps, la diarrhe colliquative, etc. Supposez que ces s y m p t m e s aient persist toujours chez la malade ( c o m m e cela est certain, du
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reste, mme dans le voyage de Rome), quel est le m decin qui, dans cette persistance, o u plutt dans cette aggra vation des mmes s y m p t m e s , oserait dire que la malade s'est mieux porte, parce qu'elle a pu se lever, marcher, parler, manger, etc. ? Est-ce qu'on n e voit pas tous les jours des phthisiques qui meurent tout coup, et lorsqu'ils pa raissent aller m i e u x ? Si, dans l'hypothse de cette maladie, le mdecin, s'appuyant sur ces indices, a dclar que la malade tait alle toujours de plus en plus mal, il n'a cer tainement pas exagr l'tat de la maladie. Or, tel a t son sentiment. En effet, aprs avoir affirm la phthisie, aprs avoir numr tous ses s y m p t m e s , les crachats purulents et ftides, l'oppression croissant toujours, la difficult de garder le lit, d'o le besoin pour la pauvre malade de tenir le haut du corps un p e u soulev, les rougeurs qui apparaissaient sur son visage, la fivre lente, la diarrhe, la consomption, l'absence de s o m m e i l , aprs avoir constat que tous ces symptmes n'ont pas d i m i n u , mais se sont, au contraire, aggravs toujours, il conclut qu'il n'y a j a m a i s eu d'amlio ration dans l'tat de la malade . C'est pourquoi si on admet comme simple h y p o t h s e ce que nous dmontrerons plus loin, il est vident que le mdecin, en prononant son j u gement,est rest dans la vrit,qu il n'a pas du tout exagr la gravit de la maladie, o u le malheureux tat de la malade, et qu'on ne peut pas, sous prtexte d'exagration, refuser d'ajouter foi son t m o i g n a g e . 13. Mais assez de preuves. Il est clair, d'aprs l'examen et la comparaison des dpositions, qu'il n'y a pas de dissentiment parmi les t m o i n s . Il est pareillement vident que le m d e cin doit tre considr c o m m e u n tmoin, et n o n c o m m e u n juge. Toutefois, si on e x a m i n e s o n j u g e m e n t avec plus d'at tention,onconstateque,dans l e c a s particulier,il ne s'est pas du tout tromp,quant au diagnostic de la maladie consistant dans une suppuration et u n e ulcration des p o u m o n s , mais s e u l e ment sur le m o d e de la suppuration, et qu'il a pu se fairp une ide juste d u m a l , alors m m e qu'il ne voyait pas la malade chaque jour. Donc si le m d e c i n est considr ainsi c o m m e tmoin, il n'y a pas de d o u t e qu'il n'ait t parfaitement i n form, tant par son exprience propre, que par les rapports du chirurgien; cela ressort aussi de la comparaison de sa dposition avec les dpositions des autres tmoins et le rcit du chirurgien. S o n t m o i g n a g e doit donc avoir p o u r nous la plus grande autorit. Le s o u p o n d'exagration ne peut rien lui enlever de sa valeur, car cette exagration n'existe p a s , s'il s'agit, en effet, d'une vritable phthisie, c o m m e n o u s
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\ . Des choses n o m b r e u s e s et graves ont t imagi nes au sujet du caractre de cette maladie, soit par nos adversaires, soit par l'illustre docteur Maggiorani q u e si l e s principes mdicaux ne sont pas clairement exposs, si l'histoire du fait tout entier et de ses circonstances n'est pas t r s - e x a c t e m e n t dcrite, si c h a q u e c h o s e n'est pas soi g n e u s e m e n t examine, d'aprs les rgles les plus sres de la m d e c i n e et de l'exprience, il sera impossible de dissiper les tnbres amonceles sur cette question, et de rfuter toutes les o b j e c t i o n s . Que n o s illustres Pres nous permettent donc de traiter ici de la phthisie,de ses varits et de ses pro grs, et de continuer ensuite l'histoire de la maladie, e n la comparant avec les canons de la m d e c i n e ; et bien qu'il doive rsulter de l pour eux u n grand travail, je les prie de remarquer que, sans ces explications, ils ne pourraient sentir t o u t e la force des arguments que n o u s allons opposer c e u x de n o s adversaires. 2 . Burnet crivait :(1 ) S o u s le n o m de phthisie (de phlio, je corromps), en latin tabs, on comprend, en gnral, toute extnuation du corps, quelle qu'en soit la cause. C'est ainsi que les Grecs l'entendaient. Mais des auteurs plus rcents, remarquant q u e cette e x t n u a t i o n de tout le corps provenait toujours de la corruption d'un viscre, o n t distingu, tout en conservant l'ancien n o m , les diffrentes espces de cette ma ladie, et ont ajout au m o t de phthisie, le n o m du viscre d'o venait le mal : de l la phthisie hpatique, splnique, rnale, msentrique, pancratique,intestinale, utrine, etc.
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Et comme les p o u m o n s , soit cause du tissu dlicat qui les constitue, soit parce qu'ils sont plus sujet que tous les autres viscres l'action des virus morbifiques, et amnent trs-souvent la consomption du corps, Uusage s'est tabli parmi les mdecins de donner le n o m de phthisie spcialement la consomption du corps provenant de l'ulcration des p o u m o n s (!). L'tisie, affection des poumons, qui affaiblit et c o n s u m e le corps, est j u s tement et proprement appele phthisie pulmonaire pour la distinguer des autres phthisics. Bien plus, elle est si connue parmi le peuple que sous le n o m de phthision n'en comprend pas d'autre que celle dont le sige est dans les poumons (2). 18. La phthisie pour n o u s signifie donc celte c o n s o m p tion du corps qui procde d'une ulcration pulmonaire. C'est pourquoi Burnet crivait que la phthisie pouvait se dfinir : L'ulcration purulente des p o u m o n s qui dissout peu peu ou liqufie le corps tout e n t i e r ; o u bien l'ulcration des poumons par une matire acre et corrosive, avec fivre lente, toux, crachats sanguinolents et purulents, amenant i n s e n siblement l'extnuation e t . l a consomption du corps. Ou bien, comme le dit Burserius (3) en renversant les termes : La vraie phthisie est cette c o n s o m p t i o n lente de tout le corps produite par l'ulcration des p o u m o n s et la fivre venant de cette ulcration. Car, c o m m e l'observe le m m e auteur, un ulcre des p o u m o n s ne produit la phthisie que s'il cause chez celui qui en souffre la maigreur et la fivre lente (4). Cette fivre est insparable de la vritable s u p puration des p o u m o n s et de la c o n s o m p t i o n du corps. Et comme l'ulcration des p o u m o n s ne peut exister sans les symptmes qui prouvent la lsion de ce viscre, Hoffmann a fort bien dit que la phthisie est la consomption du corps avec fivre lente, respiration difficile, toux pnible et c o n tinue, jointe des crachats abondants d'humeurs et de matire corrompueet purulente,provenant d'une gravelsion de la substance pulmonaire par squirre, corruption ulc reuse ou abcs (5}. Chacun voit aisment que tous ces dtails sont ajouts c o m m e autant de s y m p t m e s v i d e n t s , par lesquels on peut reconnatre l'ulcre des poumons et la
() Burnet loc. cit. (2) Burserius, Des maladies de poitrine, 54. 3j Loc. super, cit. S 54. (4) Ibid 57. (5) Mdecin. System., t. IV, part. 4, cliap. ir. Des affections pliisiques, 2>
vi,
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consomption du corps, mais q u e l e caractre d e l a phthisie ulcreuse consiste dans u n vritable ulcre des p'oumons et dans la c o n s o m p t i o n du c o r p s , et qu' cause de cela la dfinition essentielle de cette maladie contient ces deux choses qui la distinguent de tout autre m a l . 49. Les causes de la phthisie sont n o m b r e u s e s ; elle p e u t venir o u d'une mauvaise* c o n s t i t u t i o n du corps e t des p o u m o n s , o u d'une lsion faite cet organe, ou d'un branle m e n t q u e l c o n q u e d i s p o s a n t la m a l a d i e . D ' o la phthisie
p u l m o n a i r e s e divise n a t u r e l l e m e n t e n p h t h i s i e p r i m a i r e et
secondaire, c'est--dire e n phthisie qui a sa c a u s e propre et sui gneris, c o m m e la phthisie tuberculeuse* et e n phthisie qui provient d'autres m a l a d i e s , p a r e x e m p l e de l'hmo ptysie, de la pleursie, de la pripneumonie d o n t la n o n gurison peut amener l a suppuration. Aussi Burserius cri vait-il (1) : l'hmoptysie, la pleursie et la pripneu m o n i e imparfaitement guries o u suppurantes sont des causes de phthisie. 20- Cette diversit d'origine et de causes modifie le carac tre d e la maladie ; elle fait aussi q u e certaines phthisies ont u n cours plus long, c o m m e la phthisie primaire o u t u berculaire dont la marche est e x t r m e m e n t lente ; tandis q u e
d ' a u t r e s , c o m m e celles q u i p r o v i e n n e n t d ' i n f l a m m a t i o n n o n
rsolue, et amenant la suppuration, ont une marche beaucoup plus rapide. Ces diffrences varient b e a u c o u p selon la con stitution du malade, s o n ge, et d'autres causes qui peuvent survenir. Et quoique la phthisie en gnral soit c o m p r i s e parmi les maladies chroniques, relativement aux maladies aigus qui sont bien m o i n s l o n g u e s , cependant si o n c o m pare certaines phthisies avec d'autres, il e n e s t qui sont t e l l e m e n t rapides qu'elles o n t mrit le n o m de phthisies ' aigus. Selon qu'elles o n t u n e marche plus rapide o u plus l e n t e , disait Burserius (2), les phthsies, d'aprs leur cours, sont appeles aigus o u chroniques. Il y a, e n effet, des phthisiques qui meurent e n t r s - p e u de t e m p s , tandis que
d ' a u t r e s souffrent trs-longtemps et vivent c o n t r e t o u t e esp
rance. E t on lit dans Portai ce sujet (3) : les m d e c i n s ont presque tous plac la phthisie pulmonaire parmi les maladies chroniques, et parmi celles qui o n t un cours lent et dangereux. Mais le cours de cette maladie n'est pas le m m e pour, toutes les personnes. Il est quelquefois si lent
(1) Loc. cit. 58. (2) Ibid. 55.
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q u e la m a l a d i e d u r e d e s a n n e s e n t i r e s , m a i s il e s t p a r f o i s si r a p i d e q u e la m a l a d i e a t o u t e s les a p p a r e n c e s d ' u n e m a ladie t r s - a i g u d e la p o i t r i n e . E t c o m m e ce p o i n t est assez nglig, n o u s n o u s p r o p o s o n s d e n o u s e n o c c u p e r en c e moment. Cette diffrence e n t r e la rapidit et la l e n t e u r d'une phthisie vient d'abord de son espce, ensuite de l'tat du m a l a d e , et enfin des diffrents a c c i d e n t s q u i p e u v e n t survenir. L a p h t h i s i e s c o r b u t i q u e , scrofuleuse, c a l c u l e u s e , rhumatismale, goutteuse, durent en gnral plus longtemps. La p h t h i s i e exanthmalique et celle q u i vient d'une r u p t i o n ont u n c o u r s p l u s r a p i d e . L a r a p i d i t de la m a l a d i e e s t d'autant plus g r a n d e q u e ceux qui en s o n t atteints sont p l u s jeunes. 21. C e p e n d a n t , q u e l a p h t h i s i e s o i t c h r o n i q u e o u q u ' e l l e soit a i g u , q u ' e l l e s o i t p r i m a i r e o u s e c o n d a i r e , e l l e a d e u x phases t r s - d i s t i n c t e s ; o u b i e n l a m a l a d i e c o m m e n c e , o u bien elle e s t p a r f a i t e m e n t c o n f i r m e . T o u t c e q u i o b s t r u e , distend, r e l c h e , i r r i t e , c o r r o d e , e n f l a m m e , d c h i r e les p o u m o n s e t les p a r t i e s v o i s i n e s , p r o d u i t u n u l c r e p u r u lent (1): t o u t c e l a c o n s t i t u e la p r e m i r e p h a s e d e la m a l a d i e qui c o n s i s t e t o u t e n t i r e d a n s c e p r o c d d e s t r u c t e u r d ' o viendra e n s u i t e la s u p p u r a t i o n . Mais d s q u e la m a l a d i e perd sa n a t u r e d e fivre l e n t e e t q u e , d e v e n u e p l u s a i g u , elle i m i t e l a p l e u r s i e o u l a p r i p n e u m o n i e , o u q u ' e l l e a des a c c s v a g u e s e t i r r g u l i e r s d e fivre i n t e r m i t t e n t e produits p a r la s u p p u r a t i o n , et q u e le p u s c o m m e n c e sortir, il n ' y a p l u s d e d o u t e a l o r s , l a p h t h i s i e est p a r f a i t e m e n t confirme ( 2 ) . E n effet, l a s u p p u r a t i o n e s t a l o r s p a r f a i t e et l ' u l c r e d e s p o u m o n s , e n q u o i c o n s i s t e l e c a r a c t r e e t l a nature de la vritable phthisie, c o m m e n c e devenir p u r u lent. 22. D a n s t o u t e p h t h i s i e , t o u t c e q u i p r c d e c e t u l c r e appartient p l u t t la p h a s e p r p a r a t o i r e d e la p h t h s i e q u ' la p h t h i s i e e l l e - m m e . A i n s i d a n s l a p h t h i s i e t u b e r c u l e u s e tant que les t u b e r c u l e s d e m e u r e n t d u r s , et q u e c e t t e d u r e t n'est p a s r a m o l l i e p a r u n d v e l o p p e m e n t i n f l a m m a t o i r e , c'est l a p h a s e p r p a r a t o i r e , c ' e s t l e c o m m e n c e m e n t d e l a p h t h i s i e (3). M a i s d s q u e l e p u s e s t f o r m , d s q u e l e s a b c s (1) Burserius, loc, cit. 58. (2) Burserius, loc. cit. 60. (3) H suit de l que sous le nom de phthisie commenante nous comprenons toute celte phase prparatoire que quelques-uns avec la rserve, 1 4 o n t divise en naissante et progressive, avant l'ulc ration. Nous n'avons pas adopt cette division parce qu'elle ne peut s'appliquer qu' la phthisie tuberculeuse, dont il n'est pas ici question,
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qui ]e contiennent sont ouverts, et que le m a l a d e c o m m e n c e expectorer, la phthisie alors devient phthisie confirme. Ainsi dans la phthisie qui nat de l'hmoptysie, tant q u e la toux, le crachement de sang, la douleur dans quelque partie de la poitrine, ne prouvent pas la lacration des p o u m o n s , c'est la phase prparatoire. Mais lorsque l'expectoration purulente trahit la formation c o m p l t e dans le p o u m o n d'un ulcre purulent, (Vest alors la phthisie confirme. De m m e dans la phthisie produite par la p r i p n e u m o n i e , tant q u e l'inflammation des poumons persiste, tant que les jours critiques, passs sans rsolution, rendent la suppuration i m m i n e n t e , c'est la prparation la phthisie ; mais ds que la suppuration est parfaite, et que les crachats d n o n c e n t un ulcre purulent, c'est la phthisie confirme.Ds que le pus c o m m e n c e tre expector, disait Bursrius, dj cit, il n'y a plus h douter alors que la phthisie soit confirme. C'est pourquoi Paflection tuberculeuse des p o u m o n s , pendant la priode cle la crudit et m m e du ramollissement de l'abcs, de l'hmoptysie, de la pripneunomie, etc., ne constituent pas la phthisie proprement dite, mais la pronostiquent seu l e m e n t , lui ouvrent la voie, la prparent et la produisent; car la vritable phthisie consiste dans l'effet de ces causes, c'est--dire dans un ulcre purulent des p o u m o n s produit par le dveloppement morbide de ces diffrentes affections. 26. Il y a ici deux observations importantes faire. La premire c'est que les procds morbifiques, qui prcdent l a phthisie confirme font quelquefois un tel ravage dans l e s p o u m o n s que les malades s u c c o m b e n t p e n d a n t cette phase de prparation ; tmoins certaines affections trs-graves des p o u m o n s , et entre autres, les tubercules m m e o u non encore ouverts, o u tout fait durs, qu'on a trouvs clans le corps de phthisiques qui n'ont jamais crach de pus (1). Et voil la et non aux phtbisies secondaires. Bursrius est de notre avis sur ce point ; il dit, en e/et, loco citaio, 6 : La phthisie est ordinairement divise par les mdecins eu trois degrs ; mais cette division ne semble pas pouvoir convenir toute phthisie pulmonaire, car toute phthisie ne provient pas de tubercules. Celles gui proviennent de l'hmoptysie, de la pleursie, de la pripneumonie suppurantes, d'une humeur acre et corrosive et d'autres causes semblables, ne peuvent jamais tre ainsi divises. C'est pourquoi je suis d'avis de diviser la phthisie en phthisie qui commence, ou phthisie incipiente, et en phthisie confirme. A la premire rpond la suppuration imparfaite, la seconde, la suppuration vraie, ou ulcreuse. (1) On en trouve un grand nombre d'exemples dans les auteurs de mdecine pratique. Nous nous contenterons d'en citer un, tir de Bonnet, t. I,, liv. 2, so.ot. 17, ohserv. 7 ; il crit : Lors qu'enfin David Gervis fut arrach aux misres humaines aprs de nombreuses
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r a i s o n p o u r l a q u e l l e , d a n s les c a s d e l s i o n s t r s - g r a v e s , l a p h a s e d e la p h t h i s i e d c l a r e e s t d e t r s - c o u r t e d u r e . E n effet, p l u s l a l s i o n d u v i s c r e e s t g r a v e e t p r o f o n d e p e n d a n t la p h a s e p r p a r a t o i r e , p l u s l a s e c o n d e p h a s e d o i t tre c o u r t e ; il s u i t d e l q u e c e s p h t h i s i e s s o n t a i g u s e t m m e trs-aigues r e l a t i v e m e n t celles q u i s u c c d e n t u n e p r p a ration plus c a l m e / . 24. L ' a u t r e o b s e r v a t i o n , c'est q u e la p h t h i s i e , q u e l l e q u ' e n soit la c a u s e , q u e l l e q u e s o i t la m a r c h e p r p a r a t o i r e q u ' e l l e ait s u i v i e , se m o n t r e c o n s t a m m e n t la m m e a p r s q u ' e l l e e s t confirme, e t p a r v e n u e la p h a s e d e p h t h i s i e v r i t a b l e e t p a r f a i t e . De s o r t e q u e d a n s c e t t e s e c o n d e p h a s e d i s p a r a i s s e n t t o u t e s les d i f f r e n c e s q u i e x i s t a i e n t d a n s l a p h a s e d e p r p a r a tion e n t r e l a p h t h i s i e t u b e r c u l e u s e , p a r e x e m p l e , e t l a p h t h i s i e h m o p t o q u e et p r i p n e u m o n i q u e ; et q u ' i l n'est plus p o s ' sible d e d i s t i n g u e r l ' u n e d e l ' a u t r e , m o i n s q u ' o n n e s e r e p o r t e la p h a s e q u i a p r c d ; c ' e s t d e c e l l e - c i s e u l e m e n t q u ' o n p e u t t i r e r le n o m d e l ' e s p c e d e p h t h i s i e q u e l ' a u t r e phase n e s a u r a i t f a i r e c o n n a t r e , p u i s q u ' e l l e e s t la m m e d a n s toutes les p h t h i s i e s . A u n o m d e p h t h i s i e p u l m o n a i r e , dit J o s e p h F r a n c k ( 1 ) , se r a t t a c h e n t u n g r a n d n o m b r e d e m a ladies c h r o n i q u e s d o n t l e s s y m p t m e s c a r a c t r i s t i q u e s s o n t divers, e t c e s m a l a d i e s q u a n d e l l e s n e s o n t p a s g u r i e s d e bonne h e u r e , arrivent toutes tt o u tard ceci, q u e , la
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et graves affections, nous avons ouvert son corps, et nous avons constat que la langueur qui Ta fait mourir avait sa cause dans les p o u mons. Tout le parenchyme, en effet tait rempli de tubercules trspetits, durs et visqueux. Du reste, ces observations ont t souvent faites par les mdecins: entre toutes choisissons-cn quelques-unes tires des mdecins de notre temps Portai dit, dans l'ouvrage dj cit, t. II, p. 210: Quelquefois le malade meurt sans que nous ayons pu distinguer la moindre trace de suppuration des poumons; Et Laennec dans son trait de l'auscultation mdiate t. Il, p. 25: Lorsqu'il y a un trs-grand nombre de tubercules, mme trs-petits, dans u n pou mon, la mort arrive quelquefois avant qu'aucun d'eux soit arriv un degr de ramollissement tel, quo la matire tuberculeuse ait pu s'ouvrir u n passage dans les bronches, et donner lieu h u n e excava tion ulcreuse. E t encore, p. 1 6 7 : Quelques phthisies commenant par la diarrhe arrivent au terme fatal, sans jamais avoir t accom pagnes de toux et d'expectoration. Mais alors on ne trouve ordinai rement dans les poumons que des tubercules crus. Et enfin, p. 170: Quelques malades succombent l'intensit de la fivre, et d'une affection qui n'a d'autres symptmes que ceux d'un catarrhe m u ueux trs-aigu; et la mort arrive avant que l'amaigrissement ait onn l'veil sur la nature de la maladie. On trouve ordinairement alors, h l'ouverture un grand nombre de tubercules jaunes crus, plus ou moins ramollis, et assez volumineux, et rarement u n e ruption secondaire. (i) Trait de mdecine pratique u n i v e r s e l l e , t. 1 1 , part. 2, ch. 10.
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fivre hectique tant apparue avec toux et crachats p u r u lents, elles dchirent plus ou m o i n s les p o u m o n s et finissent par teindre misrablement la vie. Et la raison en est vi dente. La phthisie ulcreuse, c o m m e n o u s l'avons vu, c o n siste tout entire dans la suppuration et l'ulcration des p o u m o n s . Or, cette suppuration, oh qu'elle ait lieu dans le eorps, quelle que soit la partie qu'elle attaque, et quelle qu'en soit la cause, a toujours les m m e s s y m p t m e s . G'est pourquoi la phthisie confirme, d'o qu'elle vienne, qu'elle soit primaire ou secondaire, se trahit toujours par les symp tmes qui rvlent u n e suppuration dj parfaite des p o u m o n s . Si les phthisies, dit Portai, prsentent, par rapport leur cause et dans leur c o m m e n c e m e n t , de notables diff rences, faciles distinguer et essentielles bien connatre p o u r leur donner les soins qui leur conviennent, elles se r e s s e m b l e n t si bien dans les derniers temps qu'il serait i m possible d'en distinguer les diffrentes espces, si on n e savait pas trs-bien tout c e qui les a prcdes (1). 2 5 . De l vient que s'il existe autant de descriptions de la phthisie ses dbuts qu'il existe de maladies pouvant engendrer une phthisie confimre, il n'y a chez tous les a u teurs qu'une seule dfinition de la phthisie confirme, c'esL-dire une ulcration des p o u m o n s produisant la c o n s o m p t i o n du corps. G'est ce que Portai constate e n c o r e en ces termes : Les mdecins m t h o d i q u e s prtendent que le caractre de la phthisie pulmonaire consiste dans la -consomption du corps avec fivre lente, accompagne le plus souvent de t o u x , d'une respiration difficile, et ordinairement de cra chats purulents. Mais cette dfinition n e peut convenir qu' l a phthisie confirme, regarde c o m m e incurable, et n e s'applique en aucune manire la phthisie qui c o m m e n c e . 2 6 . Rsumons maintenant en quelques m o t s ces observa t i o n s qu'il fallait ncessairement rappeler. Nous avons vu : 1 Que la phthisie pulmonaire ulcreuse consiste dans u n ulcre des p o u m o n s qui amne la consomption de tout le corps. 2 Que la phthisie peut tre primaire o u secondaire, selon qu'elle vient de causes qui lui sont tout fait parti culires, o u d'autres maladies. 3 Que parmi ces maladies qui prparent la phthisie, il faut n o m m e r en premier lieu l'inflammation des p o u m o n s . 4 Que la phthisie, si on la c o m p a r e aux maladies a i g u s , est toujours chronique, mais q u e ses diffrentes varits diffrent tellement entre elles dans leur cours que q u e l q u e s - u n e s , par rapport aux autres, (1) Obscrv. sur la note et le trait de la phlliisie, t. I I , p. 4 efcsuiv.
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et surtout la phthisie primaire ou tuberculeuse, qui est toujours, longue peuvent tre c o m p t e s parmi les maladies aigus, et le sont en effet par les m d e c i n s . 5 Que les exan thmes rpercuts, le j e u n e ge des malades, le t e m p rament plthorique, les maladies antrieures, et d'autres causes peuvent quelquefois tellement acclrer le cours de la phthisie, qu'elle revt le caractre des maladies les plus aigus. 6 Que deux phases doivent tre distingues dans la phthisie ulcreuse, l'une prparatoire qui ouvre la voie la maladie, l'autre de suppuration et d'ulcration des p o u m o n s qui constitue seule la phthisie vritable, la phthisie par faite et proprement dite, c'est--dire la phthisie confirme. 7 Que les progrs du mal pendant la phase prparatoire sont quelquefois si rapides qu'ils causent la mort des m a lades, avant que la phthisie devienne une phthisie confirme, et que c'est de cette violence plus ou m o i n s grande que dpend la dure de l'une ou de l'autre phase. 8 Que la seconde phase, qui est celle do la suppuration, a dans toute phthisie les m m e s s y m p t m e s de suppuration, en sorte que, pendant cette priode, une phthisie ne peut tre dis tingue d'une autre phthisie que par les circonstances qui * ont prcd, et qu'elles doivent toutes se dfinir de la m m e manire : La vraie phthisie pulmonaire d'aprs l'avis commun, est cette c o n s o m p t i o n lente de tout le corps qui est produite par l'ulcration des p o u m o n s et la fivre c o n tinue venant de cette ulcration (1). Aprs ces prliminaiies relatifs la phthisie e n gnral, n o u s revenons la ntre.
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proches rvle le vrai caractre de la m a l a d i e dont n o u s n o u s occupons. Ce caractre une fois c o n n u , il nous sera facile de rfuter les objections qu'on n o u s oppose. Mais nous avons besoin pour ce travail de l'indulgence des trs-illustres Pres ; qu'il leur plaise donc de n e pas considrer cette t u d e c o m m e e n n u y e u s e e t inutile, car, si elle les c o n d a m n e un certain travail, elle leur vitera du m o i n s l'ennui de recourir notre Information et n o s rponses p r c d e n t e s ; que n o u s avons r s u m e s dans la n o t i c e trs c o m p l t e qui va suivre. 2 8 . C'est u n fait d'exprience qu'il n'y a pas d'ge plus e x p o s la phthisie que l'adolescence, et Cous pouvait dj crire il y a vingt-trois sicles : aux j e u n e s gens les crachements de sang et la c o n s o m p t i o n (l). Aprs lui t o u s l e s mdecins ont enseign la m m e c h o s e . E t la raison e n e s t claire. Tant que le corps prend de l'accroissement, s e s forces actives croissent galement marr dans u n e proportion plus grande. Ces forces activsr deviennent telles que la puissance de cohsion dans l e s parties m o l l e s p e u t peine en supporter l'action ; il suit de l que ces forces grandissant ainsi chez les jeunes gens se traduisent p o u r la cause la plus lgre par des inflammations, des fivres ardentes, des hmorrhagies varies et des crachements de sang. Ces maladies des j e u n e s gens d g n r e n t s o u v e n t e n u n e suppuration des p o u m o n s (2). Or, la j e u n e fille dont il s'agit, quand elle t o m b a malade, pouvait avoir quatorze o u quinze ans (3). Elle ne se trouvait d o n c pas dans u n ge o on est l'abri de la phthisie, mais au contraire dans u n ge tout fait expos cette maladie. Ce danger tait a u g m e n t encore par son temprament, p u i s q u e , le t e m p r a m e n t de cette j e u n e fille tait plthorique (4). Or chez ces tempraments, si la phthisie les atteint, la cir culation y tant plus rapide, la suppuration se produit aussi plus vite (5) ; en effet, cet ge les vaisseaux sont plus tnus et se brisent beaucoup plus facilement que d a n s u n ge plus avanc (6). 2 9 . Chez cette j e u n e fille n e faisaient pas dfaut certaines d e ces causes qui affectant le corps o u u n e partie du corps mettent le malade dans un tat tel que, sous une influence
& (1) Aphor. 3, 29. fi(2) Gorter, in Hippis. aphor. p . 5, 9 Sum. p. % 7, 19. h . (4) d. p. 24. a. ib) Portal, t. III, p. 125. lu (6) Hoffmann, t. IV, part. 4.
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nuisible un peu puissante, i ^ s e trouve atteint d'une maladie particulire. Notre j e u n e fille, e n effet, souffrait habituel lement, d'un asthme convulsif lequel joint un ge et k un temprament prdisposant la phthisie, pouvait, la moindre cause suffisante intervenant, dterminer celte maladie, puisque, de l'avis des mdecins, tout asthme tend la phthisie ( l ) . 30. A c e t t e c a u s e prdisposante s'adjoignit u n e a u t r e cause beaucoup p l u s puissante, la r o u g e o l e , le v i r u s m o r billeux qui attaqurent notre malade au c o m m e n c e m e n t de m a r s ; car, prdisposantes l a phthisie sont m i n e m m e n t les pleursies, les pripneumonies imparfaitement rsolues etsuppures, les mtastases, la gale, l'herps, les morbilles de la variole, et les autres affections de la peau rpercutes et rentres (2). Voil ce qui arriva Marie-Rose, laquelle dans la priode d'ruption subit un exanthme rentr, de telle sorte que les humeurs n o n purges dans l'poque accou tume cherchrent une place dans la cavit thoracique et n e pouvaient que lser les p o u m o n s . Ce fait s'accorde parfaite ment avec la mdecine exprimentale. En cflet dans la m d e cine on voit quelquefois des humeurs vicieuses arrtes
imprudemment
dans
leurs mouvements
de sortie aller se
< loger dans la partiemolle et spongieuse des poumons, et aprs un certain sjour y former un ulcre (Hoffmann, loc. cit.).
31. Mais l'ulcre doit tre prcd de l'inflammation qui seule dissout, liqufie et rduit en pus et e n sanic les parties atteintes. A vrai dire, n o u s ne v o y o n s pas trop c o m m e n t u n homme sens pourrait rvoquer en doute que ce phnomne, qui constitue la cause immdiate de la phthisie et son tat prparatoire, se soit prsent dans le cas actuel. La raison indique assurment qu'il a d e n tre ainsi, soit que Ton con sulte l'exprience e n gnral, soit qu'on considre le cas particulier. L'exprience enseigne que, d'ordinaire, m o i n s d'tre attires la surface par l e secours de l'art, les pustules qui r e n t r e n t a u dedans attaquent l e s viscres, etengendrent les lsions les plus graves; que de plus les p o u m o n s tant les plus dlicats de t o u s les viscres, ressentent plus facilement et plus gravement leurs atteintes, a De toutes les maladies q u i succdent aux morbilles m a l i n s , dit Burserius, la plus fr quente est la pripneumonie q u i , se dclarant tout coup lors de leur desschement, m e t les malades en grand danger de vie et souvent les tue. Cela p o s , si dans le cas prsent o n
(1) Mangctus. Biblioth. ud. pract. de phtisi asthmatica. (2) Burserius. Instit. mcd. cap. 3, 58.
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tient compte tant de l'ge de la j e u n e fille, qui n'opposait que des vaisseaux dlicats, des parties plus molles et moins cohrentes, que do son temprament plthorique, tout fait propre, par une circulation trop rapide et trop nergique, faire gonllcr et se rompre les vaisseaux du p o u m o n o afflue toute la masse du sang, si l'on tient c o m p t e enfin de l'asthme chronique assez fatal au p o u m o n , toutes ces considrations persuaderont fortement que ce viscre, a pu et d tre trs-gravement e n l l a m m par le virus exanthmateux rpercut l'intrieur. 32. L'vnement d'ailleurs a prouv qu'il e n fut ainsi. C'est par les s y m p t m e s de la poitrine que Von connat si les pou mons sont atteints d'autres maladies. La phthisie n e de la fuite, contre-temps, d'autres maladies, prend le n o m de mtastatique: la t o u x , la dyspne, les douleurs dans la poitrine et le decubitus difficile sont les signes vidents que le mal s'est tabli dans les p o u m o n s ( l ) . Or ces s y m p t m e s se sont d clars chez la malade, la rpercussion de Texanthme peine effectue. Le chirurgien et le mdecin dans leur dposition avaient dit d'une manire gnrale : Une grave p r i p n e u m o nie s'est manifeste, accompagne de s y m p t m e s n o n m o i n s graves, . et le mdecin dposant par la suite parla encore plus clairement: d e l , l'inilammation etl'attaque, cette m a ce l a d i e s e dclara par u n e tvcs-grane difficult de respirer, difficult autre que celle de l'asthme c o n v u l s i f d o n t souffrait habituellement Marie-Rose, avec toux sche et fatigante,
inflammatoire.
3 3 . On pourrait tre tent de ne pas trouver dans cette numration des s y m p t m e s la douleur de poitrine dont Jo seph Frank parlait tout l'heure et qui souvent a c c o m p a g n e la pripneumonie. Mais il est remarquer que parfois cette douleur est si peu considrable qu'elle n'est remarque ni par le malade, ni par le mdecin, et n e laisse aprs elle a u c u n souvenir,. En effet, c o m m e Tarait remarquer Celse, ce genre de maladie est plus dangereux que douloureux ; quelquefois m m e la douleur m a n q u e entirement c o m m e le note S w i e t e n lorsqu'il dit: Parmi les effets reconnus de l'inflamma tion se trouvait aussi un point douloureux,...cependant cette douleur aigu ne parat pas toujours accompagner la m a l a die dont il s'agit. C'est pourquoi Galien au lieu de cette douleur avait mis au nombre des s y m p t m e s de la prip n e u m o n i e un s e n t i m e n t d'angoisse el de pesanteur, lorsqu'il a dit : quand la difficult de respirer, l'angoisse, la (1) Frank. Md. prat. univers, de plitisise, 50.
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pesanteur se joint une fivre aigu, c'est l un effet de l'in flammation pulmonaire. Et, aprs Galien et d'autres encore, Jean Pierre Frank a donn Tune et l'autre de ces sensations de douleur et d'oppression c o m m e un s y m p t m e palhognomonique de la pripneumonie, quand il a dit: La pripneu monie est une fivre avec respiration difficile, avec s e n t i m e n t de pesanteur o u de douleur fixe plus grave dansla poitrine ; avec toux frquente et revenant bientt aprs une respira tion plus prolonge (1). Or chez notre malade se trouvait ce sentiment d'oppression ou de pesanteur au point qu'elle ne pouvait, plus respirer et qu'elle avait sans cesse la bouche ouverte, parce que sa poitrine lui faisait l'effet d'un soufflet qui s'lve et s'abaisse. C'est co sentiment d'op pression que le mdecin traduisait par ces m o t s : souffle pnible, et dont, pour exprimer plus clairement sa gravit, il ajoutait qu'il eut un caractre tel, que pour prendre sa respiration la pauvre infirme avait besoin de se tenir le tronc lgrement lev. Nous trouvons donc chez Marie-Rose la difficult de respirer avec angoisse et pesanteur, puisque nous y reconnaissons ce souffle pnible, qui caractrise exactement l'oppression ; nous y t r o u v o n s la fivre aigu, car elle avait, dit-il, une fivre violente du genre dit inflam matoire ; n o u s avons enfin la toux, puisqu'il dit encore, une toux incommode et sche fatiguait la malade. N o u s avons donc tous les vritables s y m p t m e s de la pripneumonie. 34. Permettez-nous, Eminents Pres,de scrutera fond cette question et de nous y arrter plus longtemps encore ; elle est le pivot de toute la thse. L'inflammation en gnral, selon l'avis de Borehaave est u n e pression du sang rouge artriel stagnant dans les vaisseaux capillaires, et c o m m e un froissement par le sang mis e n m o u v e m e n t , sang plus for tement chass par la fivre. Si cette pression du sang sta- gnant a lieu dans les vaisseaux du p o u m o n , l'inflammation de se Yicre en rsulte, et si u n e vritable inflammation se produit dans les vaisseaux pulmonaires aptes la subir, la maladie prend le n o m de pripneumonie. Et parce que cette stagnation nat dans les artres capillaires de tout ce qui, en pressant, tiraillant, entortillant, rompant, broyant, br lant, rongeant, ridant les parois des vaisseaux les resserre tellement que le diamtre d'ouverture devienne moindre que le diamtre des globules sanguins, voil pourquoi, avant de se prononcer sur une pripneumonie, il faut, non-seulement s'appliquer discerner les s y m p t m e s , mais il faut aussi donner une attention srieuse aux causes qui peuvent e n (1) Decurand. hom. morb. de prpn. f 184.
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gendrer de tels effets. Et c'est pourquoi Swieten cherchant p r u d e m m e n t quels signes on peut reconnatre la maladie qui nous occupe et la distinguer des autres maladies d e p o N trine rpond : Les causes qui ont prcd et les effets observs enlvent facilement t o u t e espce de d o u t e . 35. Mais dans notre cas la cause antrieure fut la rpercus sion du virus exanthmatique qui produisit certainement les effets cits plus hauts, en brlant, broyant, ridant, car dans ces affections pustulaires il y a abondance telle de matire sreuse Acre, qu'on ne peut imaginer nulle cause plus propre enflammer les p o u m o n s , ainsi que le dmontre l'exprience et que tous les mdecins l'enseignent. Et, e n ralit, cette action morbifique dut tre d'autant plus forte dans notre cas qu'il s'agissait d'une j e u n e fille souffrant habituellement d'un asthme, un gc et dans un tat plthorique, qui ne pouvaient offrir que des vaisseaux pulmonaires trs-exigus dfavorables la circulation plus acclre du sang, et par consquent c o m p l t e m e n t impropres recevoir et transmettre les globules sanguins, lorsqu'une cause q u e l conque enflammait, rongeait et rtrcissait les vaisseaux dj contracts. A cette cause premire, trs-puissante et directe, ajoutez les effets observs, c'est--dire tous les s y m ptmes vidents de la pripneumonie, le souffle ambarrass, la fivre violente du genre ditinflammatoire,la toux fatigante et sche,etc.; et,dans ces conditions, je vous le demande, quelle "maladie allez-vous diagnostiquer sinon la pripneumonie? 36. On m e demandera : Pourquoi tant d'efforts pour d montrer l'existence de la p r i p n e u m o n i e ? Parce que de son existence dpend le diagnostic de la maladie qui n o u s occupe. E n effet, si l'inflammation des p o u m o n s s'est produite, si sa rsolution ne s'est pas opre, si elle est passe e n suppura t i o n , n o u s avons alors dissolution des p o u m o n s , au sein lesquels le pus s est form; e t , n d e c e pus, l'ulcre des pou m o n s qui constitue la phthisie confirme. Cette consquence, dans sa science minente, notre adversaire l'a tellement aperue qu'il a appliqu toutes les forces de son esprit d montrer- qu'il n'y avait pas eu d'inflammation ; et, e n effet, inflammation tablie, c'en tait fait de sa thse. 37. Mais, d i r a t - o n encore, cette inflammation d o n t vous soutenez si fortement l'existence, a-t-elle pass en suppu ration ? P o u ? rpondre premptoirement cette q u e s t i o n , il faut envisager tant les solutions possibles de l'inflamma tion, que l'histoire de la maladie dont il s'agit. Il y a cinq (1)
?
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solutions possibles de l'inflammation : la rsolution, la s u p puration, l'induration, la gangrne, l'hydropisie l'tat aigu. 11 serait superflu d'envisnger chacune de .ces terminaisons puisque chez notre malade ni hydropisie, ni gangrne, ni tumeur quelconque, ni induration ne s'est produite. Il reste donc seulement la rsolution et la suppuration. La rsolu tion se fait dans les jours critiques o u n o n . Dans le premier cas, elle rend la sant ; et c'est pourquoi les signes de la rsolution sont que les s y m p t m e s d'une maladie" lgre de sa nature c o m m e n c e n t tous h diminuer (1 ) ; car alors la ma tire morbifique extravase dans le tissu cellulaire est r sorbe, puis vacue au m o y e n des crachats, des urines, des sueurs ou des exanthmes. T o u s les pripneumoniques, a dit Hippocrate (2), qui n'ontpas t repurgs aux jours critiques mais, non sans agitation d'esprit, ont pass les quatorze jours, courent risque cle suppurer et ailleurs, celui qui n e s e gurit pas, au septime, au n e u v i m e au dixime jour,commence s u p p u r e r . Or dans notre cas, les jours critiques n'ont, pas rendu la sant h la m a l a d e , ils n'ont pas diminu, le mal ; donc la maladie n e disparut pas par rsolution, et elle persvra dans toute sa rigueur; s'il en est ainsi, mettant de ct le cas de mort ou d'une autre maladie mtaslatiqne, ce qu'il n'est par permis de sup poser dans notre thse, il ne reste que la solution par suppuraLion ; donc notre j e u n e fille a d passer par l. 38. Et en effet, supposer que l'inflammation ne puisse tre rsolue dans les jours critiques, arrive la suppuration manifeste, dit le mdecin, par la fivre suppuratoire, une toux moins sche, des crachats purulents et ftides, symp tmes qui furent toujours en augmentant dans ia suite, comme l'indiquaient un plus grand accablement, de la dif ficult se tenir c o u c h e (d'o le besoin senti par la pauvre infirme, de se tenir le tronc lgrement soulev) ; les c o u leurs rouges qui apparurent sur ses j o u e s ; la fivre plus lente indiquant que la suppuration avait lieu; par les sueurs et la diarrhe ; puis une grande c o n s o m p t i o n , l'insomnie; enfin les crachats de plus en plus copieux, sanguinolents et ftides. Le m m e mdecin dit plus clairement encore que la fivre constate fut lente et continue ; les autres tmoins ajoutent aux symptmes dj relats qu'elle se plaignait toujours d'une grande soif, qu'elle avait une soif telle qu'elle ne pouvait se lasser de boire ; une soif par laquelle elle se (1) Swietenus ad Boer. apho. 833. (2) Coac. phenot. num, 396
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sentait brle c o m m e l'intrieur. Elle tait c o n s u m e faire c o m p a s s i o n . . . sa p e a u t a i t colle sur s e s o s . . , ses pieds taient gonfls, l'enflure arriva d'abord mi-jambe puis la j a m b e entire fut enfle. 39. En effet, c o m m e l'enseigne Jean-Pierre Frank (1), la dcroissance de la fivre, sans cause manifeste, indique le travail de la suppuration qui c o m m e n c e ; au contraire une s u p p u r a t i o n faite et dj adulte s'annonce par une fivre lgre et continue, par les sueurs du m a t i n accom p a g n e s de scheresse et de soif incessante, par l'vacuation du pus, l'amaigrissement du corps, l ' d m e des pieds, la, rougeur des j o u e s , la diarrhe, et les autres s y m p t m e s par ticuliers tout organe e n suppuration, c o m m e dans le cas prsent une t o u x sche, Torthopne, les crachats infects, etc. ..Voil pourquoi,dans notre cas actuel,rinflammation pri m i t i v e , laquelle ne s'tait change en aucune maladie mtastatique et n'avait pas t rsolue, prouve que la suppuration des p o u m o n s avait d suivre ncessairement : s o n c o m m e n c e m e n t rel a t dmontr par le accroissement de la fivre sans cause manifeste,parlafivre suppuratoire,la fivre devenue plus lente, la t o u x plus h u m i d e etc. Il apparut de m m e que la suppuration tait faite et dj avance, par une fivre lente faite et c o n t i n u e r a i * la couleur rouge duvisage,la grande soif, la grande c o n s o m p t i o n , les crachats abondants, sanguinolents et ftides, les sueurs, la diarrhe, les jambes e n f l e s . Donc la suppuration des p o u m o n s ou l'ulcre pul monaire dans notre cas particulier, sont p l e i n e m e n t mis hors de doute, soit par le raisonnement mdical, soit par l'en semble de tous les s y m p t m e s qui dmontrent u n e s u p p u ration adulte. 4 0 . Or, c o m m e n o u s l'avons vu, la phthisie vritable o u phthisie confirme, n'est autre chose que l'ulcration du pou m o n , sous l'influence do laquelle le corps tout entier se fond, o u bien la c o n s o m p t i o n lente de tout le corps, qui suit l'uK cration des p o u m o n s , et la fivre lgre et c o n t i n u e qu'elle e n g e n d r e ; donc notre j e u n e fille qui fut atteinte de cet ulcre n'eut certainement pas d'autre maladie qu'une phthisie vraie et confirme. E t e n effet les auteurs dpeignent la p riode extrme de la phthisie ulcreuse d'aprs les s y m p t m e s que nous avons numrs (2). La phthisie c o m p l t e , dit Sennert se connat aux m m e s signes (les signes de la phthisie son dbut) mais ces signes devenus plus vidents et s'aggra(1) Loco citato, 128. (2) Md. pract. lib. II, part. % cap. 12
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vant... On connat en effet la phthisie parfaite l'ulcration des poumons, la fivre lente et continue, l'amaigrissement de tout le corps qui en rsulte, Paffaissement, la respira tion difficile. Et Portal (1) dit : Dans ce troisime tat la fivre devient plus vive, l'amaigrissement a u g m e n t e , les crachats deviennent plus mauvais, la difficult de respirer extrme (ce qu'il exprime plus clairement encore plus bas lorsqu'il dit : Les malades prouvent une grande difficult de respirer .lorsqu'ils sont c o u c h s horizontalement ( c o m m e dans le cas actuel) ; le malade est sujet des sueurs a b o n dantes, qui se c o m b i n e n t avec d'autres s y m p t m e s , la diar rhe,^ gonflement des pieds et des j a m b e s . Et Burserius (2) qui enseignequ'on p e u t s e prononcer surlaphthisie confirme d'aprs la fivre suppuratoire et le crachement de vritable pus, ajoutant qu'il n'est plus permis aprs ces symptmes de douter de la phthisie. Il avait crit auparavant : Gomme la phthisie confirme ou ulcreuse parcourt peu peu ses priodes jusqu' ce qu'elle arrive au terme dernier, c'est avec raison, que pour expliquer son tat variable, on la divise en trois degrs que caractrisent les circonstances diverses de l'ulcration et de la maigreur (remarquez, j e vous prie, que de ces deux indices surtout, ulcration et maigreur, dpend le j u g e m e n t porter sur la gravit de la maladie, pourvu qu'elle soit a c c o m p a g n e de fivre lente). Le premier degr existe quand le p o u m o n c o m m e n c e s'ulcrer et que cependant l'extnuation du corps n'est point encore sensible ; le second, lorsque Pulcration et la maigreur se m o n t r e n t plus manifestement; le troisime enfin, lorsque le .pus infecte tout, lorsque l'ulcration se rpand plus au loin, ce point que t o u t e s l e s humeurs paraissant ,se liqufier, il n e reste plus que des os recouverts de peau. 41. Que notre malade se soit trouve dans ce troisime tat, les s y m p t m e s recueillis par les tmoins le prouvent 'trop. Car, que l'ulcration se ft rpandue largement en elle, et que le pus et tout envahi, les crachats le dmon traient, puisqu'elle expectorait frquemment des crachats pais comme de la matire lie, et ces crachats, dit le mdecin, devenaient de plus en plus copieux, sanguinolents et ftides. Les sueurs, les diarrhes colhquatives prouvaient de leur ct que les humeurs s'taient liqufies; et le seul aspect de son corps, des os couverts de peau (la peau tait colle aux os), ajoutait le dernier trait au&ableau. Donc
(1) De la phthisie pulmonaire, t, III, p . 10. (2) De morb. pect. 6.
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notre jeune fille fui atteinte d'une phthisie confirme et rellement arrive s o n dernier degr, 42. Ces s y m p t m e s q u o i q u e m o i n s graves, se produisirent chez la malade, avant la fin de mars, et s'aggravrent de jour en jour. Au mois Je mars en effet (ainsi l'affirment dans leur dposition le m d e c i n , le chirurgien, et l'archiprtre), la maladie existait, avec ses signes caractristiques, la toux, l'expectoration purulente, la fivre h e c t i q u e , une res piration habituellement trs-haletante, menaant de s'arr ter presque au moindre accident, la c o n s o m p t i o n , les sueurs i nocturnes, la diarrhe colliquative. Tous ces s y m p t m e s partir du c o m m e n c e m e n t d'avril s'accrurent de jour en jour. Donc depuis la fin cle mars, et le c o m m e n c e m e n t d'avril, la phthisie tait prouve; confirme par l'ensemble de tous les s y m p t m e s runis, et entre tous les autres, l'ex pectoration purulente, la consomption, o u puisement du corps, avec une petite fivre hectique. 43. La rapidit de la maladie n'a rien d'tonnant. E n effet si la phlhisie confirme a son sige dans un ulcre des pou m o n s , que trahissent des crachats purulents, en m m e temps que la maigreur et une fivre lente ; si l'ulcre nat de la suppuration des p o u m o n s chacun c o m p r e n d , que l'inflam m a t i o n dos p o u m o n s n e se rsolvant pas, cette suppuration doit aussitt avoir lieu, et par elle l'ulcre. Mettons d c o t e , si on veut, le calcul que n o u s avons tabli prcdemment, et acceptons l'objection qui fixe le c o m m e n c e m e n t de la maladie au dixime j o u r de mars. Il faut considrer, c o m m e le c o m m e n c e m e n t de la suppuration future, dit Hip pocrate (1), le jour o le malade a c o m m e n c avoir la fivre. Que si, ajoute S w i e t e n (2), on n'aperoit avant le quatrime jour aucun amoindrissement des s y m p t m e s , il n'y a plus esprer de rsolution : car du dfaut des indices de rsolution, il appert que les h u m e u r s fluentes sont dj t e l l e m e n t modifies qu'elles ne peuvent sans danger cir culer travers les vaisseaux sans nuire aux humeurs saines, et, en m m e temps, qu'une violence considrable est faite aux vaisseaux capillaires des p o u m o n s , dans l e s quels la matire s'arrte, d'o rsulte dans leur tissu une telle faiblesse qu'ils sont facilement lss et dtruits par le choc du sang. Ces deux raisons surtout, fout qu'on ne, saurait esprer ni la rduction de la matire concrte par l'coulement, ni le dplacement du fluide stagnant dans les
(1) Prognosu lib. II. (2) Ad toa)hav. aphor. 396.
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vaisseaux encore ^ intgres, c o m m e cela serait ncessaire pour une rsolution. Or on conoit facilement que cette action dissolvante soit produite par la force inflammatoire ds le dbut de la maladie, toutes les fois qu'une rsolution bnigne ne se prsente pas ; et c'est pourquoi le pus est aussitt form par la dissolution des parties o se tiennent stagnantes les humeurs acres et qui sont divises par le choc du sang nouveau qui afflue. G'est pourquoi Gorterus (f) dit propos du h u i t i m e aphorisme d'Hippocratc : Si les signes de la pleursie inflammatoire persistent jusqu'au quatorzime jour, il est certain que le pus est form. Ce qui montre que cette action dissolvante de l'inflammation ne peut tre e m p c h e , selon la remarque faite plus haut, aprs le douzime, ou le treizime jour de la maladie' mais que la dissolution et la liqufaction des parties, o u laformation du p u s , doit avoir c o m m e n c beaucoup plus tt. 45.Ce que le raisonnement mdical prouve, s'est ralis. E n effet, nous le savons, dans le cas particulier, puisque avant la fin de mars, tous les signes vidents de la suppuration se sont manifests, et plus que tous les autres l'inflammation purulente. EtT.on ne peut douter e n aucune faon de l'exis tence de ces signes : tant parce qu'ils dcoulent sponta nment d'un mal antrieur non rsolu ; qu'ils sont multiples et trs troitement lis entre eux ; tant parce qu' ils tombent sous la vue et le toucher ; tant enfin parce qu'ils ont t rapports par l'un et l'autre docteur et par l ' a r c h i prtre ayant le souvenir le plus rcent des faits, c'est--dire aussitt aprs la gurison merveilleuse de la j e u n e lillc. C'est pourquoi si l'ulcre des p o u m o n s existait dj la fin de mars, avec la maigreur, la fivre lente et les autres symptmes de la phthisie confirme, il ressort, ce que nous avons dj dit que notre j e u n e iille tait atteinte de phthisie confirme la fin du m m e mois."Car lorsque le pus vri table c o m m e n c e tre excrt, la phthisie, est confirme ; non moins confirme aprs t r o i s j o u r s qu'aprs trois m o i s , puisque l'ulcre des p o u m o n s existe aussi bien aprs trois jours qu'aprs trois m o i s . La seule diffrence sera que dans la suite de nouvelles inflammations occasionneront de n o u velles dissolutions des parties, que le p a s se rpandant lar gement au loin corrompra tout, gtera le corps entier, et amnera la m o r t . '
;
46. Rsumons en peu de m o t s t o u s - c e s dtails : L'ge de la jeun fille e n question l'exposait on ne peut plus au (1) iMed. Ilippocralica, lib. 5, aph. 8, num. 3.
VT,
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danger de la p h l h i s i e ; c e danger tait accru encore par le temprament plthorique du sujet auquel s'ajoutait la prdisposition qui nat d'un asthme c h r o n i q u e . Dans ces dispositions elle fut altcinle de la r o u g e o l e , laquelle, d'aprs l'exprience et les canons de la m d e c i n e , engendre le plus souvent la p r i p n e u m o n i e et la phthisie. T o u s les signes de la p r i p n e u m o n i e attestrent q u e le virus de cet exan thme avait rellement attaqu les p o u m o n s de la j e u n e fille. Mais c o m m e cette autre maladie n e prit pas u n ' n o u veau cours et n e fut pas rsolue, elle tourna en suppuration et par c o n s q u e n t constitua la priode prparatoire d e l phthisie. La suppuration enfin tablie, la phthisie s e mani festa par t o u s les s y m p t m e s qui lui sont propres, et s p cialement par l'expectoration purulente, attestant avant la fin du mois de mars q u e l'ulcre des p o u m o n s tait form, q u e l a phthisie existait. Cette maladie n e fit qu'augmenter avec le t e m p s , c o m m e il parut d'aprs les s y m p t m e s chaque jour plus graves. D o n c notre jeune fille c o m m e n a souffrir d'une phthisie confirme la fin de mars; cette maladie persista jusqu' sa gurison ; et elle n e fut atteinte d'aucune autre maladie q u e d'une phthisie confirme. *
mme son dbut est si rarement gurie,rpond que parmi les causes nombreuses de ce fait, la plus srieuse, son avis, c'est que les signes diagnostiques par lesquels on peut se con vaincre de la prsence d'une vritable phthisie et des causes qui l'ont engendre ne sont pas assez vidents. Apportant ensuite l'autorit de Fernelius l'appui de son opinion, il ajoute ces autres paroles que n o u s objecte galement n o t r e adversaire ; Rien n'est plus propre n o u s convaincre de l'extrme difficult du diagnostic de la phthisie que les e r reurs frquentes des m d e c i n s , m m e les plus illustres, lors qu'il s'agit de c e t t e maladie. 48, Ces citations suffisent pour prouver que l'auteur, nous oppos par notre adversaire, n e veut tablir que la diffi cult du diagnostic de la phthisie h son dbut ; c'est d o n c en vain qu'il le ciie lorsqu'il s'agit du diagnostic d'une phthisie confirme. Cependant, pour rendre plus clair encore le s e n timent de l'autour, il faut le consulter, au paragraphe pr cdent, o il traite de la possibilit ou de l'impossibilit de la gurison. L il crit : u Quoique la gurison .de la phthisie soit e x t r m e m e n t difficile, et dfie m m e toute science h u m a i n e , lorsqu'elle arrive u n degr si avanc que tout le m o n d e peut la connatre ses s y m p t m e s , j e ne voudrais cependant pas dire la m m e chose de t o u t e phthisie, surtout lorsqu'elle est encore c o m m e son ber ceau. Cet auteur distingue donc clairement la phthisie c o n firme de la phthisie son dbat, la phthisie dfiant t o u t art humain,^ la phthisie qui est encore comme au berceau et pour laquelle il admet la gurison possible. 49. Or, dans le paragraphe suivant, il cherche p o u r q u o i si rarement, la phthisie m m e s o n dbut est gurie ; donc dans ce paragraphe il n e s'agit que de celle qui peut tre gurie, de la phthisie qui c o m m e n c e . Il serait absurde e n effet de chercher pourquoi rarement on peut gurir la phthisie confirme, qu'il avait affirme dfier toute science h u m a i n e Ce n'estpas tout. Le m m e auteur, opposant la phthisie con firme l a phthisie qui dbute, dit que celle-l est tellement vidente que tout le m o n d e peut la connatre ses s y m p tmes. Quoi de plus absurde que d'ajouter aussitt : Cette phthisie, vidente pour t o u t le m o n d e , ne prsente pas des symptmes assez vidents, et son diagnostic est tellement dif ficile, que les mdecins, m m e les plus illustres, peuvent s'y tromper? C'est pourquoi, m o i n s de vouloir, c o m m e notre adversaire, dnaturer la pense de l'auteur, n o u s s o m m e s forc d'admettre que lorsqu'il parle de la difficult d u diagnostic il n'a en vue q u e la phthisie qui c o m m e n c e , et
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q u e , par consquent, c'est bien en vain qu'on le m e t en avant pour prouver la difficult du diagnostic de la phthisie confirme, d o n t il s'agit dans notre cas. Ici en effet aprs la suppuration n e de l'inflammation, c'est--dire aprs la priode prparatoire amene par des maladies de diffrents genres, parurent aussitt les s y m p t m e s de la phthisie c o n firme. Nous ne pouvons certainement pas supposer qu'Hoff m a n n parle par hyperbole, lorsqu'il a dit que la phthisie confirme peut tre reconnue de t o u t le m o n d e des signes manifestes. Nous v o y o n s e n outre qu'il e n est ainsi t o u s les j o u r s , c'est une vieille opinion parmi l e s m d e c i n s : il y a dixhuit sicles qu'rte (1) crivait : Si q u e l q u ' u n , m m e du peuple, voit u n h o m m e ple, faible, toussant, d'une m a i greur extrme, il le dclare atteint de phthisie. Telle fut l'opinion des autres mdecins ; et parmi eux, Sennert (2) l'exprima presque clans les m m e s termes. Et Joseph F r a n c k (3) a crit : Quoique les s y m p t m e s de la phthisie confirme ne se manifestent pas toujours tous chez un m m e individu, n a n m o i n s , ils sont d'une telle vidence, qu'il est a b s o l u m e n t i m p o s s i b l e de n e pas reconnatre cette maladie. Il est donc vrai que la phthisie confirmee s'annonce par des indices qui excluent toute e s p c e de doute. 50. Tortosa, que notre adversaire n o u s oppose, ne le c o n d a m n e pas m o i n s v i d e m m e n t , lorsqu'il crit : Pour qu'un m d e c i n prudent puisse j u g e r avec f o n d e m e n t d'une guri s o n miraculeuse, il est ncessaire d'abord qu'il connaisse parfaitement la nature et le caractre de la maladie e n q u e s t i o n , c o m m e aussi le temprament et les dispositions morbides du malade : une telle connaissance peut s'obtenir o u par u n e x a m e n pratique du patient, o u par u n rcit vridique et plainement circonstanci. Car si notre adver s a i r e n'avait pas spar 1 histoire de la m a l a d i e de ses s y m p t m e s , il aurait e u , dans le cas actuel, une relation p l e i n e m e n t circonstancie. Il conste en effet de l'ge p e u avanc du sujet, fortement dispos la phthisie c a u s e de l'exiguit et de la faiblesse des vaisseaux, c o m m e du cours prcipit du s a n g . Il conste d u t e m p r a m e n t plthorique, trs enclin la m m e maladie : car alors le sang pouss en grande quantit
el avec violence vers les parties suprieures c la poitrine par les petits vaisseaux de l'artre et de la veine pulmo naire, ne peut revenir au c u r par u n libre chemin : de l,
(1) De causis et notis diulurn. morb. lib. 1, c. 8. (2) Med. pract., lib. Il, part. 2, cap, 12. (3) Trait, de md. prat. univers., tom. II part. 2, de phthisi pulmonali, 52, nuiu. 6.
:
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ncessairement (occasionns par le sang trop affluent des grandes ramifications) de trop grandes dilatations, des ruptures des vaisseaux et enfin des extravasemenls. Il conste d'un asthme chronique, qui, toujours trs-nuisible aux pou mons, engendre souvent la phthisie.Il conste de la rpercus sion du virus exanthmatique qui, habituellement, enflamme les poumons et engendre la phthisie mtastatiquo. 11 conste de l'inflammation conscutive, n o n - s e u l e m e n t par l'histoire dj faite, mais par tous l e s s y m p t m e s de cette maladie. Il conste de la sortie de la suppuration aprs l'inflammation qui ne s'est pas transforme en une autre maladie, et qui n'a pas t rsolue, c'est ce que prouvent la marche de la maladie et les produits de la suppuration. Il conste enfin de tous les s y m p t m e s de la phthisie confirme ; de sorte que, quiconque rassemble tous ces faits possde rellement le temprament, la disposition morbide du malade, et e n mme temps l'histoire vridique et pleinement circonstan cie de la maladie. Donc l'autorit de Torlosa prouve, contre notre critique, que, .dans notre cas, se trouvent runies toutes les conditions requises pour qu'un m d e c i n prudent puisse se prononcer avec fondement sur une g u rison miraculeuse. 51. Mais notre adversaire se c r a m p o n n a n t sa thse dit que, la vrit, l'histoire de la maladie a t fournie par les tmoins, mais n o n c o m p l t e , ni embrassant toutes les circonstances ; et il insinue q u e Ton n'a pas fait les e x p riences plus dcisives que semble rclamer une maladie d'un caractre si douteux. Il crit en effet : Dans les temps anciens on n'a fait tant d'expriences sur la nature des cra chats, et notre poque n'a m i s en avant la percussion de la poitrine de diverses manires, l'auscultation mdiate et immdiate de la respiration, q u e pour ajouter aux preuves, qui de temps en t e m p s se sont trouves trompeuses, le secours des signes sensibles. Il est clair que par ces paroles il accuse tacitement le m d e c i n de la malade qui a omis ces expriences, et confirme, du m m e coup, la thse qu'il soutient, savoir que la pleine c o n n a i s s a n c e des s y m p t m e s laisse dsirer : dans cette querelle nouvelle, notre adver saire a surtout en vue l'omission de l'examen des crachats. 52. Mais il n'est p e r s o n n e qui n'admette que ces o b j e c tions ont t rsolues ailleurs, s'il remarque qu'il ne s'agit pas ici de la phthisie s o n dbut et encore latente (1) dont les symptmes douteux exigent u n e investigation plus attenti
tive, et pour laquelle seulement on a c o u t u m e de recourir l'exprience pour lever les d o u t e s ; mais bien de la phthisie confirme, c'est--dire de la phthisie r e c o n n u e m m e du
t
vulgaire
ses signes
manifestes,
de la phthisie
qu'un
h o m m e du peuple dclare avec certitude tre une vritable phthisie, de la phthisie, telle qu'il devient a b s o l u m e n t i m possible de n e pas la reconnatre. D e m a n d e r , d a n s le cas le m i e u x tabli, des expriences q u e l'on n e fait q u e d a n s un cas a b s o l u m e n t d o u t e u x , c'est d e m a n d e r incontestable m e n t une c h o s e fort trange. R v o q u e r en d o u t e u n fait d'ailleurs certain, parce qu'on dsirerait le rcit de dtails p l e i n e m e n t inutiles, c'est dtruire le f o n d e m e n t de toute ' certitude h u m a i n e . 83. Il y a p l u s . Les expriences d e m a n d e s sont-elles d o n c t e l l e m e n t claires et certaines, qu'aprs les avoir e m p l o y e s on puisse porter un j u g e m e n t sr touchant la p h t h i s i e ? S'il en est a u t r e m e n t n o n - s e u l e m e n t l'observation qui n o u s est faite n'a pas de raison d'tre dans le cas prsent, m a i s de plus elle est entache de ce vice capital qu'elle veut prouver le certain par l'incertain, et qu'elle se plaint que la c e r t i tude m a n q u e parce que les c o n j e c t u r e s font dfaut. E x a m i n o n s donc le caractre de ces e x p r i m e n t a t i o n s . Les m d e cins, les m o i n s habiles, notre adversaire l'avoue, o n t fait la remarque, que toutes les expriences faites jusqu'ici p o u r distinguer les crachats vraiment purulents des crachats puriformes s o n t restes i n c o m p l t e s . Dj de son temps Arte ( l ) crivait : Tous ceux q u i prouvent et j u g e n t les crachats par le feu o u l'eau n e m e paraissent pas devoir connatre parfaitement la phthisie ; la vue est plus sre que tous les autres sens n o n - s e u l e m e n t pour tudier les e x p e c torations mais aussi pour examiner le malade. E t r c e m m e n t Portai (2) a affirm la m m e opinion disant : Un praticien j u g e souvent m i e u x par le m o y e n de la vue q u e par toute autre exprience quelle qu'elle soit. Aussi b e a u c o u p de m d e c i n s tant anciens que modernes n e v e u l e n t ajouter foi qu' la seule observation oculaire. E t j u s t e titre : car lorsque le mdecin observe en m m e t e m p s et la matire expectore, et l'aspect du malade, c'est--dire l'ensemble de tous les s y m p t m e s que prsente la maladie,il peut j u g e r plus srement de la nature du pus vritable, q u e lorsqu'il exprimente sur les crachats
(1) De causis diuturn. morb. lib. I, cap. 8, de phthisi, apud Portai, mod. citat. (2) Observt, sur la nature et le t r a i t e m e n t de Ja phlhisie, lom. I l i , page 01, g i, dit, italienne.
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seulement. C'est l'avis q u m e t t a i t J e a n - P k Franck (1) : Jusqu' ce que la nature de la matire purulente tudier soit reconnue n o n - s e u l e m e n t par le mucus, mais aussi par le pus, il faut a b s o l u m e n t que la certitude du diagnostic s'appuie sur la considration de la cause de la maladie, de la maladie t o u t entire, et sur les observations d'un il exerc. 54. Et en effet, si un doigt par e x e m p l e est enflamm, et que cette inflammation n o n rsolue entre en suppuration, que pourra-t-il sortir de l, sinon du pus vritable ? G'est pourquoi si les c a u s e s premires et tous les symptmes propres l'inflammation prouvent que les p o u m o n s sont enflamms; si en outre le cours do la maladie dmontre que l'inflammation n'a pas t rsolue,mais s'est tourne en sup puration, et que la suppuration elle-mme se trahisse p a r l e s symptmes qui lui sont propres, qui doutera que les cra chats purulents qu'expectore le malade ne fournissent un pus vritable ? Ce n'est donc pas par des analyses physiques et chimiques q u e Ton peut reconnatre la vri table nature du pus, mais par une tude minutieuse de toutelamaladie,et de tous les s y m p t m e s qui accompagnent l'vacuation purulente,surtout lorsque toutes les expriences tenlesjusqu'ici pourdistinguer le pus vritable des crachats puriformes o n t t reconnues parfaitement trompeuses, et lorsque l'examen d'un il exerc l'emporte sur toutes ces expriences. Celui, donc, qui regrette l'omission de toutes ces expriences fallacieuses, c o m m e s'il fallait les prfrera l'examen srieux de toute la maladie et de ses s y m p t m e s , o u voudrait leur donner la place d'une preuve plus solide, celui-l,dis-je, d e m a n d e videmment prouver le certain par l'incertain. SS. Il faut penser de m m e de l'auscultation mdiate et immdiate d e l poitrine, heureuse dcouverte de notre ge, qu'Hippocrate et ses disciples ont ignore c o m p l t e m e n t jusqu' la fin du sicle dernier. E n effet, celui qui consi dre que l'auscultation consiste dans un bruit lger et s p cial, facilement variable, et modifi: par la profondeur, l'ex tension, et le degr du mal latent,parla sensibilit du malade et l'action vasculaire, par l'paisseur des parties externes, par la graisse adhrente, par la forme et par la perfection de l'instrument appropri, par la manire de l'employer, par l'oue plus dlicate o u plus dure de l'oprateur, par son exp rience plus ou m o i n s grande, e t c . , celui,dis-je,quipse toutes
(I) De curantl. hom. morb., g 120, de inflam.
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ces considrations, n o n - s e u l e m e n t ne tiendra pas p o u r cer tain, mais regardera c o m m e parfaitement douteux et trom peur l'indice fournil par l'auscultation.Cependant pour qu'on ne nous accuse point de dire t o u t cola de notre propre a u t o rit, dans le but de rehausser la force de l'exprimentation propose par n o u s , il convient d'apprendre de son inventeur m m e , la valeur et la certitude de l'auscultation. Lannec, dans son trait de l'auscultation m d i a t e , divise la pecloriloquie en parfaite, imparfaite et douteuse, et il avertit qu'elle peut tre intercepie ou m m e cesser de temps e n temps :
a La pecloriloguie peut lrc pao*faite, imparfaite et douteuse ; elle peut tre suspendue pendant quelque temps, et mme disparatre presque entirement dans certain cas ( 1 ).II pro
vient que la voix plus aigue chez les f e m m e s et des enfants peut rendre la pectoriloquie plus vidente, m m o dans le cas o la broncophonie est d o u t e u s e ; c'est pourquoi dans ces cas il faut, dit-il, tre plus en garde contre la bronco phonie douteuse (2). Il ajoute, pour une raison contraire, que la voix plus grave des h o m m e s - p e u t rendre la pectoriloquie plus imparfaite, m m e dans le cas o les cavernes des p o u m o n s rendraient un son plus considrable ; dans ce c a s - l , e n eflet,le p h n o m n e est s o u v e n t imparfait, et quelquefois douteux, lors m m e qu'il existe dans les p o u m o n s des e x c a vations dans l'tatlc plus propre le produire. Il dit encore q u e les cavernes qui ne sont pas g a l e m e n t tendues de tous c t s , et celles qui sont un peu c o m p r i m e s , produisent m a l , o u ne produisent pas du t o u t la pectoriloquie : L e s excavations qui ont b e a u c o u p m o i n s d'tendue dans u n e de leurs dimensions que dans les autres, et qui sont c o m m e aplaties par Taifaissement de leurs parois, sont les m o i n s propres il produire la pectoriloquie, et ne la d o n n e n t quel quefois point du tout (3). 56, Quant la diversit du son, il dit que de t e m p s e n t e m p s il devient moindre, et ordinairement ingal, tantt il ressemble celui que d o n n e un pot fl (4); tantt lavoix semble s'introduire un p e u l'extrmit du tube, mais n e pouvoir le traverser en entier ; gnralement, ajoute-t-il, entre la pectoriloquie la plus parfaite, et celle qui est tout fait d o u t e u s e , il existe des degrs qu'il serait aussi s u it) Trait cit., lom. II, arlic, 4, pag. 130. (2) lbid., p. 131. (3) lbid,, p. 135. (4) Il faut tenir compte de l'observation d'un autre Lannec affir mant que cet indice est un signe qui n'a presque aucune valeur par lui-mme.
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perflu que difficile de dcrire (1). Quant h la manire d'em ployer l'instrument il dit : I l faut apporter une grande attention lorsqu'on explore l'espace compris entre la clavi cule et le bord suprieur du trapze, et tenir le s t t h o scope bien perpendiculairement ; car pour peu qu'on le d i rige vers le col, on entendra la rsonnance naturelle de la voix dans le larynx et la trache, p h n o m n e qu'on peut facilement confondre avec la pectoriloquie (2). 57. Toutes ces observations, empruntes h l'habile auteur de ces clbres expriences, prouvent : 1 que, suivant la condition de la maladie, suivant la constitution du m a lade, il peut arriver que la pectoriloquie fasse dfaut mme dans les plus graves lsions des p o u m o n s ; 2 que la pectori loquie peut exister sans lsions des p o u m o n s ; 3 que tout le secret consiste dans u n e lgre diffrence des sons, peine explicable, qu'un mdecin moins exerc peut facile ment prendre la pectoriloquie parfaite, pour l'imparfaite ou la douteuse et rciproquement. Nous ne nous loigne rons pas assurment du vrai si nous c o n c l u o n s que les o b servations do notre savant adversaire sont infirmes, nonseulement par co premier vice qu'elles sont trangres h la question, puisque dans une phthisie confirme et indniable on demande des exprimentations qu'on ne doit employer que dans les cas d o u t e u x ; mais par cet autre vice qu'on cherche la certitude d'une maladie parfaitement reconnue dans une argumentation fallacieuse de sa nature. 58. Nous m e t t o n s de ct ce qui a t ajout par notre adversaire sur l'insuffisance du diagnostic cause de la raret des visites du m d e c i n habituel : cette difficult a t rsolue plus haut. Mais n o u s ne pouvons passer sous si lence ce qu'il avance contre la nature de la maladie, dans le seul but d'exclure a b s o l u m e n t do la v o m i q u e qui aurait donn existence la phthisie. Notre adversaire se complat si bien dans cette ide qu'il la poursuit travers douze paragraphes, et qu'aprs avoir exclu la vomique, c o m m e cause de la phthisie, il no veut pas voir cette cause dans les tubercules qu'il exclut leur tour. De sorte que tout son argument se rduit ce d i l e m m e : la maladie dont il s'agit ne vient ni de la v o m i q u e ni des tubercules donc ce n'est pas u n e phthisie. Nous n e prtendons pas r pondre en dtail chaque objection, n o u s n o u s c o n t e n terons de montrer, e n peu de mots, que son dilemme-est
M Ibid., p. 127, 128, 132. (2) Ibicl., p. 131.
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facilement rfut d'avance par ce que n o u s avons dj dit. Car, quand, aprs avoir pralablement tabli la notion gnrale de la phthisie ulcreuse, n o u s aurons dmontr que l'histoire et les progrs de la m a l a d i e de Marie-Rose lui correspondent parfaitement, et m o n t r que sa phthi sie ne vint ni de la rupture d'une v o m i q u e , ni des tu bercules, mais de l'ulcration du p o u m o n directement engendre par leur inflammation n o n rsolue, n o u s pour rons donner notre assentiment aux deux postulata de notre adversaire, en niant son c o n s q u e n t . 59. Mais c o m m e n o u s devons porter notre attention sur chacun de ces points, ce n e sera pas u n e m i n c e entreprise que de dbrouiller la confusion des ides sur la formation du pus ; que de rtablir l'ordre dans l e calcul du temps d'apparition des affections successives ; que de traiter ensuite des tubercules, et d la gurison imparfaite, pour revenir encore sur le calcul du temps ncessaire la formation du p u s par la vomique, etc., etc. Comme tous ces points r c l a m e n t un rude labeur de notrepart et u n e grande patience des Rvrends Juges c o n d a m n s lire ces exposs, nous avons cru devoir ne pas suivre pas pas Tordre des obser vations critiques, de peur q u e les matires scindes n'en gendrent une nouvelle c o n f u s i o n . 6 0 . Nous constaterons au dbut, que j a m a i s dans s e m blables causes les observations de l'adversaire et du dfen deur n'ont t dans un si parfait accord. Nous n o u s avons, e n effet, dans nos exposs prcdents rejet l'existence de l a v o m i q u e par des arguments plus forts q u e c e u x que notre contradicteur a produits dans le m m o b u t , puisque n o u s avons dmontr que dans le cas actuel la v o m i q u e n'a p u ni se former ni se rompre. Mais il est utile de rappeler ici ces choses en dtail pour, q u ' o n puisse porter un j u g e m e n t clair. 6 1 . Nous avons donc dit : la raison n o u s e n s e i g n e , qu'une grande masse de pus n e p e u t s'agglomrer s'il est expuls s o u v e n t et c o p i e u s e m e n t . La note p a t h o g n o m i q u e de la vo m i q u e p u r u l e n t e est l'absence de l'expectoration p u r u l e n t e .
qu'il est form, mais s'il s'amasse dans un rservoir^ cet abcs s'appelle une vomique ( 1 ) . Et S w i e t e n (2) dit d e l
v o m i q u e dj forme : la v o m i q u e est dj attache au p o u m o n , pleine de pus ; e l l e comprime par son p o i d s tout c e qui la touche, de telle sorte que les parois des vsicules (1) Instit. med. pract. de vomic 142. (2; Ad boerh. nplior., 835.
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pulmonaires, presses les unes par les autres, s'irritent m u tuellement; d'o il rsulte une toux opinitre mais sche, parce que rien ne peut sortir de l'endroit 'malade, tant que l'abcs n'est pas crev. Et bien que la plupart du temps cette toux continue arrache quelque partie de la matire muqueuse qui glisse la surface interne du p o u m o n , elle mrite toujours le n o m de toux sche, attendu que les expectorations s o n t rendues e n petite quantit, avec u n e extrme difficult et que rien du pus qui comprime le pou
tmes qui tous s'accenturent de jour en jour partir du mois avril. Tous ces faits dont le mdecin avait affirm
rexactilude,cn dehors de toute dposition juridique, o n t t confirms par la dposition qu'il a faite e n ces termes dans (1) Nosol. method. clas. 5, ord. 2, 7, num. 4.
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l e procs : Les humeurs qui n'avaient pas t repurges clans la priode a c c o u t u m e o n t cherch u n e issue, se sont arrtes dans la cavit du thorax et o n t attaqu les pou mons, d'oi est venue l'inflammation o u l'attaque de l a poi trine. Mais l'inflammation n'ayant pas disparu pendant les jours critiques, elle a pass h. l'tat do suppuration qui s'est manifeste par u n e fivre suppuratoire, u n e toux plus h u
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(( vous dans une autre rponse l'apprciation suivante de la v o m i q u e : Au milieu des acceptions si diverses,dans les quelles le m o t vomique e s t pris, qui pourrait n o u s r e p r o cher d'avoir pris cette expression dans son acception la plus large,pour signifier une ulcration des p o u m o n s , q u e l l e que soit d'ailleurs celle-ci. Or dans le cas qui n o u s o c c u p e la dissolution o u l'ulcration du parenchyme pulmonaire n e peut arriver d'une autre manire, q u e p a r l a scrtion et l'amas du pus : par c o n s q u e n t l'expression reviendrait . toujours dire que c'tait u n e phthisie c a u s e par u n amas < de p u s o u par une v o m i q u e et tout ce q u e n o u s avons dit c plus haut sur l'origine de cette maladie trouve ici sa place. 66. Nous avons voulu citer t e x t u e l l e m e n t pour n e rien e n lever la force de l'observation. Mais quelle est sa valeur? Ne r e p o s e - t - e l l e pas t o u t entire sur u n e q u i v o q u e , la quelle, u n e fois claircie, rduirait nant l'objection? Revenons cependant quelque p e u sur la cause de cette qui v o q u e , afin de mieux c o m p r e n d r e l'importance de l'objec t i o n qu'on nous fait. Nous repoussions de toutes n o s forces dans le premier dbat l'existence d'une v o m i q u e , e t pour satisfaire c e u x qui n o u s reprochaient d'avoir e m p l o y dans l'information le m o t v o m i q u e , c o m m e si n o u s avions s o u tenu l'existence d'une vritable v o m i q u e , n o u s faisions remarquer q u e ce m o t a chez les auteurs des significations n o m b r e u s e s et trs-diverses ; qu'il est e m p l o y n o n - s e u lement pour dsigner u n abcs considrable des p o u m o n s , une tumeur enkyste, u n e p o c h e o u sac de p u s , c e qui cons titue la v o m i q u e p r o p r e m e n t dite ; m a i s e n c o r e pour dsigner u n abcs n o n enkyst et l'acte de v o m i s s e m e n t par lequel o n rejette les matires p u r u l e n t e s , o u enfin t o u t rejet de p u s m m e t r s - m i n i m e , c o m m e cela l i e u dans les tubercules q u e S w i e t e n (1) appelle de petites v o m i q u e s (minores vomicat) et n o u s e n tirious cette c o n c l u s i o n qu'on avait t b e a u c o u p trop svre notre gard, e n n o u s a c c u s a n t d'avoir parl d'une v o m i q u e vritable, laquelle d'ailleurs n o u s rejetions ouvertement, et sans d tour, alors q u e n o u s n o u s servions simplement, e.t sans y attacher plus d'importance, d'un m o t qui a des significa tions si diverses, admises par des mdecins de r e n o m . Bien p l u s , p o u r n e laisser douter a u c u n e m e n t q u e n o u s (1) Ou pourrait mme ajouter une autre signification donne par rtc, qui faille mol vomique synonyme, de pripneumonie. quand il dit: u C'est la maladie que les Grecs appellent paripneumonie , les Latins, pulmonio, c'est--dire la vomique du poumon. De caus. et stg. acatmorb. cap. 1. De pulmonaria.
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n'admettions pas l'existence d'une v o m i q u e , nous disions que, dans l'hypothse, admise par notre adversaire, o n o u s aurions employ ce m o t pour dsigner une vritable vomique, on pouvait attribuer cela u n e erreur de notre part m a i s que cette erreur n'avait pas pu attribuer la malade une affection qu'elle n'avait pas rellement, et qu'en consquence on devait juger du caractre de la maladie n o n pas d'aprs l'erreur que nous avions c o m m i s e , mais d'aprs les s y m p tmes consigns dans l e Sommaire. 67. Notre adversaire piloguant sur ces m o t s , collection de pus, dit qu'on n'en p e u t tirer d'autre c o n c l u s i o n , sinon qu'il existe une v o m i q u e . Mais, de grce, quand les tubercules s'amollissent, y a-t-ii scrtion de pus? se forme-t-il un petit amas de ce pus qui est ensuite expector ? El dira-t-on pour cela que toute espce de tubercule est une vomique propre ment dite ? De p l u s , si par suite de l'inflammation des p o u mons, il y a dchirure et formation d'un ulcre qui suppure des matires, bientt expectores, dira-t-on que le premier venu de ces ulcres s i p e t i t , s i p e u dvelopp qu'il soit,est une vritable vomique? Assurment aucun malade ne peut rejeter du poumon du vrai pus, si ce pus n'est pas amass dans l'ulcre du p o u m o n . Par consquent si t o u t dpt de pus, grand ou petit, ouvert o u ferm, constituait une vritable vomique, il n'y aurait pas d'autre phthisie purulente que celle qui viendrait d'une vritable v o m i q u e , ce que les mdecins, et m m e ceux qui ne le sont pas, reconnaissent facilement pour u n e absurdit. Conclure de ces mots col lection de pus que n o u s soutenons l'existence d'une v o mique, proprement dite, et le conclure aprs que nous avions dit ouvertement que nous e n t e n d i o n s dsigner par ce mot une pure et simple ulcration des p o u m o n s , aprs que n o u s avions repouss de tontes n o s forces l'ide d'une vritable vomique, ce n'est videmment pas autre chose qu'piloguer sur les m o t s . 68. Mais, a j o u t e z - v o u s , dans le cas qui n o u s occupe, l a solution de continuit,ouulcration du parenchyme pulmo naire, ne pouvait arriver autrement que par l'amas et la scrtion du pus . Nous raccordons volontiers, car il n'y a jamais eu et il n e pourra jamais y avoir d'ulcre purulent, grand ou petit, ouvert o u ferm, sans scrtion et dpt do pus. Par c o n s q u e n t il faut toujours revenir une phthisie cause par un dpt de pus o u par une vomique- Nous nions la consquence: car un amas quelconque de pus et u n e vomique n e sont pas la m m e chose.Dans la vraie v o m i q u e , il y a un dpt de pus considrable, stagnant et f e r m ,
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tandis cjue les ulcres qui s'ouvrent dans les c a n a u x de la respiration et rejettent du pus peine form, ne sont qu'un dpt trs-peu considrable, n o n stagnant, n o n ferm, cequi est bien diffrent de la v o m i q u e . 69 II est clair que puisque le parenchyme des poumons, prsente un tissu form des conduits de la respiration, si une partie de ce parenchyme vient se rompre, a s'amollir, se liqufier, et qu'une fois change en pus elle n'est pas enferme dans un kyste, elle trouvera facilement une issue par ces c o n d u i t s de (a respiration pour se rpandre de l dans les ramifications plus grosses des b r o n c h e s et tre ensuite rejete. Si la chose n e se passait pas ainsi, c o m m e n t verrait-on chaque jour des phthisiques e x e m p t s d'une vri table v o m i q u e rejeter u n e si grande quantit de p u s ? La v o m i q u e se forme alors s e u l e m e n t que le pus n e trouvant d'issue n i par les bronches, ni dans la cavit de la poitrine, s'enferme c o m m e dans une sorte de kyste. Si le pourtour de l'inflammation, dit Bellinius ( i ) , vient se durcir davantage de manire ce que le pus n e puisse ni tre rejet en cra chats aussitt qu'il suppure (on peut donc cracher le pus aussitt qu'il) est scrt,-ni s'couler dans l'intrieur de la poitrine, alors il se forme dans le p o u m o n c o m m e un abcs o u v o m i q u e c'est--dire u n e p o c h e considrable remplie de p u s , qui se rompt lorsque le contours durci est putrfi o u cuit son tour. Telles sont les conditions de la v o m i q u e . On n'appellera donc pas ainsi toute espce de scrtion o u amas de pus, qui n'est pas i m m d i a t e m e n t crach, qui ne se rpand pas dans l'intrieur de la poitrine, qui forme un c o n t o u r durer et qui, ramass en quantit considrable, forme u n abcs. S'il n'en tait pas ainsi t o u t e s les phthisies purulentes, c o m m e n o u s le disions, pourraient tre appeles des v o mi q u es^ c e qui n'est pas m o i n s absurde en soi q u e c o n traire l'exprience, car celle-ci n o u s apprend que la plupart des phthisies purulentes ne proviennent pas d'une v o m i q u e . 7 0 . Il i m p o r t e de noter en passant que notre savant a d versaire s'appuie, dans l'ensemble de ses observations cri t i q u e s , s u r la brivet cle la maladie pour e x c l u r e l'existence d'une v o m i q u e . Mais si n o u s e x a m i n o n s la causo o c c a s i o n nelle et officieuse de la maladie chez Marie-Rose, savoir, la rpercussion, le refoulement du v i r u s m o r b i l l e u x et l'inflammation des p o u m o n s , n o u s t o m b o n s d'accord avec l'opinion c o m m u n e des m d e c i n s qui affirment que l'une et (I) De mort), pector, pagina mihi 458, col. t
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l'autre de ces causes a c o u t u m e d'engendrer la phthisie galopante. An sujet do la suppression des e x a n t h m e s , Joseph Franck s'exprime ainsi (t): La phthisie cause par la disparition anormale d'autres maladies s'appelle m t a s t a tique, et le cours de cette trs-dangereuse maladie est prci pit. Prceps est periculosissimi hujus m a l i c u r r i c u l u m . En parlant de l'inflammation Mangetus (2) enseigne ; la persuasion c o m m u n e m m o , d e ceux qui sont mdiocrement verss dans la science de la mdecine, est que la pripneu
est toujours trs-aigu. Phthisis ista est semper adniodum acuta. Donc la phthisie cause par la rtropulsion des
exanthmes et par la pripneumonie a d , sous l'action s i multane de ces deux causes, tre trs-aigu et galopante (prceps). Pourquoi alors notre savant adversaire prtend-il que dans notre cas la phthisie n'a pu se produire q u e par l a scrtion et le dpt de p u s , ou par la v o m i q u e ; pourquoi n'admet-il pas qu'une autre phthisie ait pu tro cause par mtastase et par pripneumonie, outre celle qui, d'aprs lui, est trs-lente. Qu'il essaie de concilier sa manire de voir avec l'opinion c o m m u n e des m d e c i n s qui enseignent que les phthisies causes par mtastase et pripneumonie sont pour l'ordinaire trs-aigus et prcipites dans leur marche (galopantes). 71. Il est donc vident q u e toute la force de l'objection qu'on nous fait repose sur l'ambigut de ces mots amas, de 2w'(colleclionem puris), q u e n o u s avons employs pour si gnifier un dpt de pus quelconque dans l e p o u m o n m m e trs-petit et m o m e n t a n , sans lequel o n n e conoit pas de crachats purulents : tandis q u e notre adversaire s'obstine donner ces mots la signification de grand abcs, ferm de toutes parts, o le pus demeure stagnant, ce que nous n o u s n'admettons p a s . Il e s t clair galement q u e la consquence qu'on a tire de Tambiguit des m o t s tombe d'elle-mme, et qu'elle est contraire l'opinion c o m m u n e des m d e c i n s . D'o il rsulte q u e notre adversaire a e u raison d'crire: Je comprends qu'on m e fait ici le reproche d'avoir vu dans -la vomique l'origine de la phthisie pendant que le dfendeur de la cause repousse cette origine. 72. Mais m m e e n dehors de tout cela, il sera toujours vrai (ce que n o u s disions autre part) qu'on a tortur i n u t i (1) Medec. pract. u n i v e r s , de phthisi pulmonali metastalica. 30. num. 1 et G. (2) Bibiiolh. ined. pract. de phthisi a peripneumonia et pleuritide.
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l e m e n t le sens de m e s paroles puisqu'il ne s'agit pas ici des mots employs par nous, ni de notre opinion o u de l'opinion d'un autre, mais d'un fait qu'il faut chercher sans doute dans le S o m m a i r e ; or ce n'est pas en attaquant nos paroles errones o u les opinions des autres qu'on dtruit la valeur d'un fait, mais en rduisant nant les circons tances m m e s de ce fait. Qu'on exclue la phlhisie cause par u n e v o m i q u e : n o u s l'excluons aussi ; s'ensuit-il qu'on doive nier l'existence d'une vritable phthisie? ... Ne peutil pas y avoir d'autre espce de phthisie ayant une autre cause q u e la v o m i q u e ? 7 3 . Notre adversaire s'appuie sur diverses raisons pour nier l'existence de la v o m i q u e . Il attaque d'abord le calcul que n o u s avons tabli pour dmontrer la possibilit de la vomique, disant : Le dfendeur s'ellbrce d'abrger t o u t e s les priodes de dure, donnant h c h a c u n e d'elles le m i n i m u m , au lieu de leur assigner pour procder avec cer t i t u d e , le m a x i m u m de dure. S'acharnant ensuite aux priodes de dure tablies par n o u s pour les diffrentes phases de la maladie, il les rejette c o m m e trop courtes aprs avoir tabli et adopt les plus l o n g u e s , et conclut que la gurison s'est effectue avant q u e la phthisie cause par v o m i q u e ait pu se dclarer. Il s e m b l e que c'est ici le cas de rappeler ce que n o u s dirons plus loin des diffrentes phases du d v e l o p p e m e n t du virus m o r b i l l e u x et de leur dure. 7 4 . Le fondement vrai de toutes ces c h i c a n e s est, si j e n e m e trompe, qu'on a pris l'hypothse pour la thse. Nous repoussions l'hypothse d'une vritable v o m i q u e dans le procs antrieur, c o m m e n o u s la r e p o u s s o n s a c t u e l l e m e n t ; et c o m m e notre Censeur la repoussait, avec encore p l u s d'nergie d'aprs ses calculs sur la dure de la maladie, et c o m m e d'ailleurs il n e n o u s ost permis de rien ngliger des observations de notre adversaire, n o u s n o u s s o m m e s servi cle l'argument appel ad hominem pour rfuter les objections qui n o u s taient laites, et, aprs avoir tabli u n n o u v e a u calcul, n o u s n o u s s o m m e s efforc de prouver (eu gard la dure de la maladie) que la phthisie m m e cause par u n e vritable v o m i q u e a pu exister chez n o t r e j e u n e fille. C'est ce q u e n o u s avons tabli dans notre r p o n s e : et pour rendre plus vidente encore notre proposition n o u s avons ainsi c o n c l u dans un dernier paragraphe : Alors m m e qu'on admettrait l'hypothse fausse d'une v o m i q u e proprement dite (remarquez-le j e vous prie, ces m o t s hypo, thse fausse prouvent q u e n o u s avions rejet la v o m i q u e
et que le calcul tabli par nous avait pour h u l cle servir < la cause de n o i r e adversaire), alors m m e , dis-je, qu'on t admettrait l'hypothse fausse d'ailleurs d ' u n e v o m i q u e proprement dite, il n'en rsulterait aucun d o m m a g e pour notre cause : car il faudrait encore tablir que l a if phthisie a d ncessairement se dclarer avant l'poque de la gurison, laquelle n'a p u arriver dans le temps n cessaire l'vacuation de la vomique. Tout cela prouve jusqu' l'vidence qu'en rejetant la possibilit d'une v o inique nous n'tions guid par a u c u n autre motif q u e a le pur amour de la vrit : puisque, la vomique m m e < existant, n o u s pouvions parfaitement et t r s - c o m m o f dment soutenir notre cause. 75. Chacun peut se convaincre, et par le but de notre discussion et par notre opinion exprime si ouvertement, que nous tions libres d'tablir le calcul sur des priodes moins longues, qui n e fussent pas cependant en opposition avec les lois de la mdecine, puisque c'tait la possibilit seulement et n o n l'existence do la v o m i q u e qu'il fallait ta blir? J'admets q u e pour tablir l'existence de la v o m i q u e , il faille, dans u n e discussion svre, s'attacher de prfrence aux priodes plus longues : mais si les priodes plus courtes peuvent mettre e n doute l'existence de la v o mique elles n e peuvent dtruire sa possibilit, q u e seule nous voulions tablir. Et m m e quand il serait vrai q u e l e calcul tabli par n o u s part t e l l e m e n t absurde qu'il empcht d'admettre la possibilit d'une phthisie- cause par vomique, qu'en rsulterait-il ? Une seule chose, savoir qu'on doit repousser la v o m i q u e non-seulement c o m m e source, c o m m e origine de la phthisie, mais encore la p o s sibilit m m e de cette origine c'est--dire tout s o u p o n de vomique. Or c'est prcisment cela, et cela seulement q u e nous voulions, q u e nous voulons encore actuellement prou ver, rien autre c h o s e : donc le calcul tabli, loin d'tre c o n traire notre manire de voir,lui est e x t r m e m e n t favorable. 76. Pour c e q u i regarde notre autre calcul des temps Toccasion des morbilles, il a e u pour raison o u la confiance que nous avions lors du dernier p r o c s dans l'opinion du docteur Franck, o u bien la dure m m e de la maladie.Dans le premier c a s , il ressort d u caractre m m e du calcul tabli qu'on n e n o u s a pas demand de faire une description complte de la maladie et de ses diffrentes priodes, mais seulement de dterminer l e temps de sa dure. Aussi, si nous n'avons pas diminu c e t e m p s , e n rappelant les paroles de Fauteur q u i forcent de prolonger la dure de la maladie
jusqu'au neuvime et m m e jusqu'au onzime j o u r , o n ' n e pourra pas opposer notre bonne foi de n'avoir pas fait mention de la priode d'invasion. Et, en effet, Franck en parlant de cette premire priode d i t ( l ) : L'ruption -survient la fin du troisime o u au c o m m e n c e m e n t du quatrime jour b e a u c o u p plus rarement elle attend le cinquime jour. E t en parlant de l'ruption ellem m e , il ajoute, ce p h n o m n e s'accomplit dans l'espace de quelques heures o u d'une seule nuit. Quant la dure de cet tat, il dit : L'exanthme c o n t i n u e (persvre) pendant deux ou trois jours dans cet tat d'efilorescence des morbilles (morbillorum). A cet tat s u c c d e i m m d i a t e m e n t la priode de desquamation, e t i l c o n c l u t que le n e u v i m e j o u r , ou au plus tard le dixime jour de la ma ladie, on n e voit plus rien sur la peau, a u c u n e trace de morbilles. En rapportant ces dernires paroles, videmment n o u s n'avons pas attnu la dure de la m a l a d i e , bien que n o u s n'ayons pas parl expressment d u m o m e n t o elle s'est dclare. 77. Voil pour notre fidlit dans l'appel fait par n o u s l'autorit des auteurs. Quant a u fond de la question, n o u s ne croyons pas n o u s tromper, en disant q u e t o u t e recherche relative aux phases possibles, plus l o n g u e s o u plus c o u r t e s , de l'volution des morbilles est a b s o l u m e n t superflue. Ad m e t t e z , si vous voulez, q u e la course des morbilles soit plus o u m o i n s l o n g u e suivant la nature de la c o n t a g i o n d o m i n a n t e : . m o i n s q u e vous no rejetiez p l e i n e m e n t ce vieil adage, a posse ad esse in actu nihil valet illotio, cette pos sibilit ne prouvera a b s o l u m e n t rien contre le fait ! N o u s avons appris par le S o m m a i r e q u e notre j e u n e fille a c o m m e n c a tre atteinte des morbilles au c o m m e n c e m e n t de m a r s ; qu'ensuite parla rentre ou la rpercussion des m o r billes elle a t atteinte do pripneumonie ; que cette pri p n e u m o n i e n o n rsolue a dgnr la fin de mars e n sup puration, r e n d u e s o n tour vidente'par les s y m p t m e s les p l u s certains, et mise e n outre en vidence par t o u t e la suite de la maladie qui s'en est suivie. Ou d o n c il faut refuser t o u t e confiance a u x t m o i n s attestant des faits (nous disons des faits, ou des s y m p t m e s qu'ils c o n s t a t a i e n t par leurs s e n s , car nous n e parlons pas ici de j u g e m e n t qui p e u t tre sujet l'erreur), et dans ce cas t o u t e d i s c u s s i o n du miracle devient p l e i n e m e n t inutile ; o u si Ton accepte
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ces faits (1), les phases successives des morbilles devront tre ramenes aux priodes accoutumes,lesquelles en ralit laissent le temps ncessaire l'volution de l'inflammation et de la suppuration. 78. Notre adversaire pour exclure la vomiques'appuie encore sur ce que le temps trop court dans lequel elle se serait p r o duite ne serait pas en rapport avec celui que demandent les priodes de la formation et de l'coulement du pus. Aprs avoir rapport les nphorismes d'Hippocrate et le c o m m e n taire de Haller, il rsume ainsi son sentiment: Deux opra tions, dit-il, se produisent de l'inflammation du p o u m o n sa suppuration: d'abord dans une priode d'environ vingt jours la matire morbide se c h a n g e en pus, puis aprs vient l'coulement de ce p u s . Dans la premire l'abcs se forme ; dans la seconde le pus dj form s'chappe et s' coule. C'est pourquoi de l'un l'autre phnomne il n e faut pas compter m o i n s de quarante jours. Et c'est ainsi, con clut notre adversaire, que la chose a d se passer dans le cas dont nous n o u s o c c u p o n s . Car, c o m m e il s'agit d'une phthisie pulmonaire particulire, occasionne par une i n flammation de la poitrine, elle a d traverser toutes les phases do la suppuration, par cotte raison, dit-il, q u e n o u s avons donne en interprtant la doctrine d'Hippocrate. Qui ne voit n a n m o i n s que tout cela n e vient pas e n son lieu, ds lors qu'on rejette la v o m i q u e ? Une inflammation qui ne se change pas en d'autres maladies, qui n'aboutit pas l'induration,qui n e donne a u c u n indice de rsolution, doit passer n c e s s a i r e m e n t en suppuration, parce qu'il est de sa nature de dissoudre ce qui est continu et de scrter le pus. C'est d'ailleurs ce que remarque l u i - m m e notre adversaire q u a n d il tablit avec Hippocrate que le c o m m e n cement de la suppuration doit se c o m p t e r du jour o pour la premire fois le malade a eu la fivre, c'est--dire que c'est partir de ce jour que se produit le c o m m e n c e m e n t de l'action dissolvante que l'inflammation exerce forcment sur les parties malades, et par laquelle a lieu la scrtion d u pus. Aussi Gorterus a crit ceci (z): C'est un signe suffisant que l'inflammation ait dur pendant quatorze jours, car on n'a jamais ou dire qu'une inflammation ait persist plus longtemps s a n s se convertir en pus ; et la plupart d u temps,
(1) Le clbre P. Perrone dans u n e autre question fait observer sa gement que lorsqu'il s'agit de faits, c'est l'aide de m o n u m e n t s qu'il faut combattre et non avec des raisons philosophiques.De pconitentia, cap. 5. Sub initio, nota mihi 5. (2) Ad 8. Hippocr. Aphor. lib. o.
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c'est partir du quatrime ou du septime jour que le pus commence se former. Donc si les signes de la pleursie inflammatoire durent pendant quatorze jours, on est a b s o lument certain que le pus s'est form. 79. Mais, c o m m e n o u s l'avons dj fait remarquer, t o u t e phthisie purulente n'est pas une" phthisie provenant de v o m i q u e ; la phthisie vient quelquefois tantt d'un abcs ferm, tantt d'ulcres ouverts. C'est pourquoi : ou les d i s solutions du c o n t i n u produites par l'inflammation, e n d'autres termes les scrtions du pus, s'ouvrent passage par les bronches, la trache et la bouche du m a lade, et alors le pus est rejet par la toux aussitt qu'il est form ; o u bien le pus form demeure dans le p o u m o n et forme u n abcs ferm, et alors c'est la v o m i q u e . L'un et l'autre cas sont renferms dans ces quelques paroles de Burserius : Si, dit-il, le pus ainsi form (par la s u p p u ration) n'est pas aussitt rejet qu'il est form, mais qu'au contraire il s'amasse d a n s ' u n certain l i e u h l'intrieur-du p o u m o n , c o m m e dans u n kyste ferm, alors cet abcs s'ap pelle v o m i q u e . (De vomic, 142.) 80. Ceux qui entrent e n suppuration de cette s e c o n d e m a nire, par v o m i q u e , si dans les quarante jours partir de la rupture de cet abcs, ils sont repurgs par e n h a u t , ils sont dlivrs, sinon ils passent la phthisie, dit Hippocrate. Et il est vident dans ce cas que l'coulement du pus ne doit pas tre compt du c o m m e n c e m e n t d e l suppuraLion, mais de celui o l'abcs a crev ; il serait e n effet ridicule de parler de purge, lorsque le pus reste e n c o r e enferm dans l'abcs^ C'est pourquoi dans ce cas on ne doit pas c o m m e n c e r compter les quarante jours du c o m m e n c e m e n t de la. p l e u rsie o u bien du quatorzime jour, m a i s s e u l e m e n t de l'ins t a n t o l'abcs s'est ouvert et a r p a n d u son p u s , c o m m e le remarque Gorlcrus. Mais n o u s n e v o y o n s pas ce que ces choses ont do c o m m u n avec le cas dont n o u s n o u s o c c u p o n s , puisqu'il n e s'agit pas pour nous d'une phthisie provenant de l'abcs qu'on appelle vomique m a i s d'une phthisie ulcreuse ; c ' e s t - - d i r e qu'il s'agit pour n o u s de ces ulcres du p o u m o n qui o n t c o u t u m e de s'ouvrir sur-le-champ par la seule force de la toux, et dans lesquels on rejette Je p u s aussitt qu'il est form. E l c'est de celte phthisie q u e Burserius a crit ds lors qu'on c o m m e n c e de cracher l e pus, il ne saurait y avoir aucun doute qu'il y ait rellement phthisie.)) (De phli. p u l m . 60.) 81. C'est p o u r q u o i , m o i n s que n o u s n o u s t r o m p i o n s , o n ne peut c o n c l u r e de tous les arguments qui n o u s ont t
opposs que ceci : savoir, q u e la phthisie dont il s'agit n'a pas t et n'a pas pu tre produite par u n e v o m i q u e . G'est d'ailleurs ce que n o u s avons c o n s t a m m e n t s o u t e n u . Mais que l'coulement du pus ou la suppuration se produise n o n pas le quatorzime jour mais le vingtime, c o m m e notre adversaire le remarque d'aprs IJaller, cela ne fait abso lument rien. Car c'est pour les mdecins un fait d'exp* rience que l'action aigu de la pripneumonie,gnralemcnt parlant, dissout b e a u c o u p plus vite les tissus continus et secrte le p u s . . . et cela tellement d'une manire gnrale que c'est u n e rgle tablie par Hippocrate : les plcurcliques qui, dans les quatorze jours ne sont pas, dbarrasss du pus form subissent r e m p y m e . Yoil c o m m e n t Gorterus formule l'aphorisme H i p pocrate, et c o m m e n o u s l'avons vu il a a j o u t : Nous n e connaissons pas d'inflammation qui ait dur plus longtemps sans conversion en p u r u l e n c e ; et, le plus souvent, le pus commence se former du quatrime au septime jour, or si c'est l le cours ordinaire et naturel de cette maladie, personne certainement n e refusera d'accorder que le pus a pu se former dans le- m m e intervalle de jours, surtout lorsque, c o m m e chez notre jeune fille, l'inflammation a d tre d'autant plus aigu et plus violente que l'action viru lente de la matire rpercute qui lui a donn naissance est plus grande. Donc, puisque les s y m p t m e s vidents d e l suppuration vus et n u m r s par le mdecin sont pleinement ceux qui sont assigns au cours rgulier de cette m a l a d i e ; aucun h o m m e clair n'osera dire que dans ce cas le temps ncessaire la suppuration ait t insuffisant, ou plus court que ne l'exigent la formation du pus et son expectoration, laquelle dans la phthisie ulcreuse devait avoir lieu i m m diatement aprs la formation du p u s . 82. Notre savant adversaire n e s'arrte pas repousser la vomique par suite de l'absence des symptmes caract ristiques de cette maladie, il attribue la maladie de MarieRose le caractre n o n pas c o m m e d'autres critiques l'ont fait d'asthme h u m i d e , ou clc catarrhe aigu, mais le caractre de catarrhe chronique. Voyons d'abord ce qu'il invoque contre la vomique. Il ne suffit pas, dit-il, d'insinuer que ia malade a t atteinte d'une p n e u m o n i e ; ce n'est pas m m e assez d'affirmer que ia p n e u m o n i e a pass l'tat de v o m i q u e ; il faut absolument que Ton relate le cours, la succession,les phnomnes du passage la vomique. Arrivant ensuite aux symptmes de la v o m i q u e , il ajoute : ce Le dfendeur n'a pas dit que la malade pouvait se coucher plus facilement sur u n
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c t que sur l'autre, c o m m e cela a lieu q u a n d la vomique a d h r e . un seul p o u m o n , il n'a rien dit de la respiration strpitante, ni du soulagement et des autres modifications c o n c o m i t a n t e s de la rupture. Ge quoi j e rponds s p o n t a n m e n t et brivement qu'on cherche en vain c e qui n'a jamais exist. Si, c o m m e n o u s l'avons soutenu jusqu'ici, la v o m i q u e n e s'est jamais forme, le S o m m a i r e n'a pas pu tracer le cours, les phases, les p h n o m n e s de la v o m i q u e et les c h a n g e m e n t s qui ont suivi sa rupture. Cette omission prouverait de nouveau que la v o m i q u e n'a jamais exist. 8 4 . Discutons donc, plutt, les a r g u m e n t s formuls contre l'inflammation,car si l'inflammation tait mise hors de cause, c'est en vain que n o u s disputerions de la phthisie. L'inflam m a t i o n tablie, et amene h l'tat de suppuration, c'est en vain qu'on voudrait donner la maladie le caractre de catarrhe chronique. Les arguments de m o n adversaire sont au n o m b r e de deux. 1 L'inflammation requise des poumons survient rarement la suite des morbilles sans l'intervention de q u e l q u e cause extrieure, dont il n'est n u l l e m e n t fait m e n t i o n . 2 Il est peu probable que Marie-Rose ait t p r serve d'une maladie aigu par u n e seule mission de s a n g . 85. La premire de ces objections est tellement q u i v o q u e que p e r s o n n e ne peut facilement la comprendre. Que veut dire notre savant critique quand il admet que l'inflam mation requise des p o u m o n s exige l'intervention d'une cause e x t r i e u r e ? Parle-t-il, d'une causo directe et imm diate, o u d'une cause indirecte et mdiate 1 S'il s'agit d'une cause directe et i m m d i a t e , elleest t r s - v i d e m m e n t a c c u s e par la rpercussion o u la rentre des morbilles, rentre d o n t il est si certain qu'elle engendre habituellement l ' i n flammation des p o u m o n s , et la phthisie q u e l'inflammation fait natre, que Morton n'a pas hsit affirmer : P o u r une phthisie pulmonaire originelle o u dpendante de la d i s p o s i t i o n d u sang, on c o m p t e cinq o u m m e dix phthisies p u l m o n a i r e s secondaires nes tant des autres m a l a d i e s , q u e de la rtrocession des exanthmes (1). Et en effet, dit-il, c e genre de phthisie p u l m o n a i r e , autant que j'ai p u l'observer, est la plus usite de toutes, et l o l'on voit une phthisie p u l m o n a i r e originelle, c'<tft--dire dpendante de la s e u l e altration prdisposante du sang, o n e n c o m p t e cinq o u m m e dix engendres par les fivres crapuleuses et inter mittentes, Ta variole, les morbilles o u la r o u g e o l e , la scar latine, e t c .
(1) Phthisiologica, 3, lib. II, p. 65.
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86. Si notre adversaire cherche une cause mdiate, c'est-dire la cause d'une cause : ne serait-ce pas une nouveaut que de rvoquer e n doute un fait aussi saillant aux y e u x que la rtropulsion, la rentre des exanthmes, parce que la cause de cette rtropulsion reste cache? Personne d'ailleurs n'ignore que cette cause (si l'on exclut les causes artificielles, c o m m e le seraient les remdes astringents) consiste le plus souvent dans l'impression du froid ou le refroidissement, et que souvent elle reste si cache, qu'elle ne se rvle ni aux mdecins, ni aux assistants, ni au malade lui-mme. Celui qui voudra bien considrer que notre fait est arriv sur une colline, au c o m m e n c e m e n t de mars, chez une jeune lille de la campagne, dont la condition est de ne pas prendre de prcautions et de faire peu de cas des maladies lgres, c o m m e l'est la rougeole, ne doutera nullement que la cause exlricure est tout simplement l'impression d'un air plus froid. Que s'il reste encore incertain entre l'action d une cause interne ou celle d'une cause externe, qu'il s'a dresse aux mdecins de la malade, lesquels ne remarquant chez Marie-Rose a u c u n e de ces causes internes, excitante ou dprimante, qui dterminent ordinairement la rtrocession ou l rentre des morbilles exanlhmatiquos, ont attribu le phnomne de la rtropulsion une cause qu'ils disent avoir t externe, c o m m e s'ils avaient voulu aller audevant de notre savant critique quand ils ont dit: Il ne se produisit aucune volution parfaite de ces morbilles ; il se produisit au contraire une mtastase contemporaine o u une lente rtropulsion vers les p o u m o n s sous l'action d'une cause extrieure. Donc la mention d'une C A U S E E X T R I E U R E ne fait nullement dfaut : et cette cause tablie, notre savant critique, s'il n e veut se rfuter l u i - m m e , sera forc d'admettre que l'inflam mation requise des p o u m o n s par le virus morbilleux a d survenir dans le cas de Marie-Rose 87. Admettons que personne n'ait fait mention de cette cause mdiate et indirecte de l'inflammation ; tous certai nement ont signal la rtropulsion du virus exanthmatique que nul ne pourrait nier tre une cause toute prte et trsapte engendrer la p n e u m o n i e . Que cette pneumonie ait suivi en effet, les s y m p t m e s le constatent, car elle se manifesta par la respiration gne, par la toux importune et sche, par la fivre violente de genre inflammatoire .Ce fait fut vident n o n - s e u l e m e n t pour les mdecins mais pour les assistants: cr la fivre violente, la toux sche, la respiration difficile se manifestaient tellement aux y e u x qu'elles n chap-
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LES SPLENDEURS D E L A F O I .
paenL personne. Serait-il permis de rvoquer ce fait en cloute, parce que Ton ignorerait la cause de la cause ? 88. L'autre objection n'a pas plus de valeur, savoir qu'il est probable que Marie-Rose a t prserve d'une maladie aigu par une seule saigne. En effet, la j e u n e fille a-t-olle l prserve dans le principe? Oui, si t o m b e r d'une pri p n e u m o n i e dans une phthisie, c'est tre prserv d'une m a ladie aigu Mario-Rose fut sauve. Mais, si ce n'est pas autre chose qu'chapper une maladie grave et dangereuse pour retomber dans une maladie incurable, a s s u r m e n t , MarieRose n'a pas t prserve. Cette rponse suffit pour re tourner l'objection contre son auteur. Car, si d'aprs lui, u n e seule saigne ne peut dtruire l'inflammation, nces sairement c e l t e inflammation (si l'on e x c l u t la mtastase et la rsolution) a d engendrer la suppuration, et la phthisie qui en est la suite naturelle. 89. Mais,dira notre savant critique: de c e qu'une seule sai gne est parfaitement insuffisante triompher d'une maladie trs-aigu (et tel est le caractre de la p r i p n e u m o n i e ) , j'ai voulu conclure l'existence d'une maladie plus b n i g n e et diffrente de la pripneumonie dont il tait question. Mais outre que cette instance ne dtruit en rien notre r p o n s e , elle nous parat tre un argument d'un genre tout n o u v e a u . Les progrs de la maladie et d'autres s y m p t m e s prouvent jusqu' l'vidence l'inflammation des p o u m o n s ; or le mdecin emploie un traitement i m p u i s s a n t triom pher de la maladie ; d o n c la maladie n'est pas celle qu'in diquaient les s y m p t m e s les plus vidents. Ne serait-il pas plus simple et plus rationnel de conclure q u e le m d e c i n s'est tromp dans le traitement qu'il a e m p l o y ? S'il fallait s'en tenir l'argument du savant critique, il y aurait, j e pense, fort peu de maladies sur la nature et le caractre desquelles il ne ft permis d'mettre u n d o u t e , si videntes qu'elles paraissent. 90. Les malades doivent-ils toujours leur gurison aux soins du m d e c i n ? A entendre les allopathes, les h o m o pathes ne produiraient,avec leurs m d i c a m e n t s dose imper ceptible, a u c u n s o u l a g e m e n t aux malades, quand ils n'ag graveraient pas leur t a t . P o u r t a n t les observations recueillies dans les ouvrages de ces m d e c i n s , aussi b i e n q u e les j o u r n a u x de mdecine, attestent qu'ils ont guri plusieurs ma lades atteints de la p n e u m o n i e sans pratiquer a u c u n e saigne. D o n c on peut gurir la p r i p n e u m o n i e sans la saigne. Nous savons bien que les partisans de r h o m o p a t h i e peuvent nous objecter qu'ils ont l'appui de leur s y s t m e u n procd par-
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ticulier i n c o n n u aux allopalhes, qui leur permet de dcouvrir la cause m m e de la maladie, et de la l'aire dis paratre par la reconstitulion du s y s t m e dynamique, sans le secours du chirurgien. Mais en discutant avec le savant allopathe, nous avons cru devoir adopter l'opinion des a l l o palhes. Nous p o u v o n s n a n m o i n s tirer de ce systme, e n faveur do notre cause, des arguments que cette objection n'atteindra pas. Personne n'ignore q u e , la fin du sicle der nier, le systme d e Brown a prvalu chez un certain nombre de*mdecins.Ge systme, qui attribuait toutes les maladies l'affaiblissement des organes, les combattait toutes gale ment par des fortifiants, de m m e q u e , plus Lard la m thode de Thomassin, qui faisait venir toutes les maladies d'un excs de f o r c e , l e s traitait par des remdes dprimants. Les partisans du docteur Brown traitaient donc la pri pneumonie par l'opium et des potions de vin trs-gnreux, ce qui donnait u n e nouvelle vigueur la maladie, dj violente par e l l e - m m e . C'tait bien plus que de ne pas tirer du sang o u d'en tirer u n e seule fois. Cependant plusieurs malades, atteints de pripneumonie, sortaient guris de leurs mains. Vous m e direz qu'ils se sont guris malgr le traitement des m d e c i n s . Je ne dis pas n o n , car Jes malades seraient bien plaindre, si le plus souvent ils ne se g u rissaient pas e n dpit du traitement qu'on leur fait subir. Mais ce que n o u s disions sera toujours vrai, savoir que l'argument tir d'une seule saigne peut prouver l'impritie ou l'erreur du m d e c i n , mais n o n l'existence d'une maladie diffrente de celle qui est atteste la fois, tant par les tmoi gnages des personnes qui l'ont traite,quc par l'histoire de la maladie, par ses dveloppements- et ses s y m p t m e s . 91. Mais que penser de l'assertion qu'une seule saigne peut dmontrer et confirmer l'existence d'une vive inflam mation ? S w i e t e n crivait (1): Si l'inflammation vive, accompagne de fivre et d'autres s y m p t m e s plus alar mants, a dur plus do trois jours, et s'il y a des signes indiquant que l'inflammation tend dgnrer en s u p puration : o n est trs-partag pour savoir : 1 s'il faut s'abstenir do faire u n e saigne ou en iaire une seulement ; 2 s'il convient d'ordonner une alimentation adoucissante. Or, dans le cas qui nous concerne, il y avait une vive i n flammation, c o m m e le prouvaient l'embarras de la respi ration, la toux sche et irritante, la fivre violente ; rien n'indiquait la rsolution de la maladie, au contraire n o m (1) d Boerhaave aphor., 833.
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breux taient les signes indiquant que l'inflammation t e n dait devenir suppuration; donc il n'y avait aucune saigne ou une seule petite saigne pratiquer. Donc la saigne faite par le m d e c i n , loin de prouver contre l'existence de l'inflammation, l'attestait davantage. 92. Si donc il vous plat de considrer la chose ainsi (selon Swieten) ou d'aprs le sentiment du savant critique, l'argu m e n t de ce dernier n'en est pas m o i n s dtruit. Si v o u s j.ugez le fait d'aprs l'opinion de Swieten, une seule saigne confirmera l'existence de l'inflammation v i o l e n t e ; si le s e n timent du savant critique vous sourit davantage, vous pourrez c o n d a m n e r l'erreur du m d e c i n qui a ordonn la saigne, mais les signes diagnostiques de la maladie c o n s tats ailleurs n'en existeront pas m o i n s dans t o u t e leur vidence. Il y a plus, l'issue de la maladie vient encore confirmer ce que n o u s avanons, p u i s q u e n o u s voyons que l'inflammation, dont u n e seule saigne n'a pas pu t r i o m pher, a a m e n la suppuration, et par la suppuration la phthisicie. 93. Jusqu'ici notre adversaire a essay de dtruire n o t r e argumentation, sans y russir, il est vrai. Maintenant il tablit la sienne. Plusieurs circonstances, dit-il, concourent favoriser l'opinion que Marie-Rose a t atteinte d'un simple catarrhe pulmonaire (c'est--dire d'un catarrhe chronique, car il termine son manifeste e n affirmant q u e la malade a t affecte d'une bronchite lente ou d'un catarrhe chronique plutt que d'une phthisie vritable) ; donc selon lui, la maladie de Marie-Rose n'a pas t u n e phthisie, mais u n e bronchite lente ou u n catarrhe p u l m o n a i r e . La chose est facile dire, mais pas si facile prouver, si on vient examiner les c a u s e s ordinaires de ces d e u x maladies et leurs caractres particuliers. Mais avant que n o u s entamions c e t t e discussion, il faut que l'adversaire c o n v i e n n e avec n o u s de c e fait : La maladie de Marie qu'il prtend avoir t une b r o n chite lente a d venir d'une bronchite aigu, car l'embarras de la respiration,la toux sche et irritante, la fivre violente n e sont pas des maladies lentes mais trs-aigus ; c'est ce que l'adversaire a d m e t d'ailleurs quand il dit que la maladie de Marie-Rose consista dans un catarrhe a i g u . Nous avons tenu faire c e t t e remarque pour qu'on n'accuse pas les autorits que n o u s c i t e r o n s , e t qui parlent de temps autre de la bronchite aiguO, d'tre trangre la d i s c u s s i o n . 9 4 . La bronchite soit aigu soit chronique c o n s i s t e dans u n e affection de la m e m b r a n e m u q u e u s e qui e n v e l o p p e le larynx, la trache et les bronches, affection produite par
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l'action du froid sur un corps chaud, action qui rejette la matire respirable sur cette m m e membrane. Toutes les causes qui en la stimulant sans pouvoir suffire cependant causer u n e forte inflammation dterminent l'affluencedu sang dans la membrane qui revt les voies res piratoires, la membrane pituitaire changent sa scrtion ou la pervertissent, et sont aptes produire le catarrhe. 11 e n rsulte trs-frquemment q u e , sous l'action ressentie du froid, la matire qui pouvait tre expulse parla peau soit maintenant retenue. Que si cette matire se porte sur les parties musculeuses, le prioste, les ligaments, o u vers les parties visqueuses, il en rsultera un rhumatisme ; si elle atteint la membrane m o l l e qui scrte le mucus, qui lubrifie les narines, la gorge, la trache, les bronches, produit les catarrhes. 95. Ainsi Franck enseigne q u e la cause la plus frquente de la bronchite est l'action du froid sur un corps chaud, et, comme ce qu'il ajoute revient au m m e , videmment, celuil n'est pas dans l'erreur qui attribue la bronchite cette cause unique. Et de fait, l'exercice violent du corps ou s o n chauffement font affluer le sang autour des voies respira toires, la scrtion du m u c u s est drange ou pervertie par cette matire perspirable, laquelle ne pouvant s'exhaler est refoule vers les conduits de la respiration, l elle irrite la membrane m u q u e u s e dont la scrtion libre et rgulire se trouve entrave ; or cela quivaut une suppression de la transpiration o u un refroidissement, de sorte que toutes les causes du catarrhe se rduisent une seule, l'accs donn au froid sur-un corps chaud. 96. Tous les auteurs qui ont crit sur le catarrhe lui assi gnent cette cause unique, et n o t a m m e n t Hippocrate qui le premier a dit (1): Les substances froides, comme la neige, la
glaceront nuisibles ko poitrine; elles excitent la toux,les hmorrhagies, et produisent lescatarrhes.Govterus dit aussi (2): Lefroid,en mettant obstacle l'action naturelle et normale de la respiration du poumon, est cause que, par suite de la stagnation humeurs plus acres dans les vaisseaux respira toires, la membrane des bronches et du larynx s'imprgne d'une humeur lgre et froide qui cause le catarrhe, lequel n'est pas seulement produit par la neige ou la glace...mais presque toujours par le contact de Vair froid avec un corps chaud.
(1) Lib. 5, aphor. 24.
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LES SPLENDEURS
DE
LA
FOI-
Le Dictionnaire de mdecine externe et interne dit (i) : La cause occasionnelle du catarrhe pulmonaire aigu se trouve ordinairement dans l'impression du froid. Et Joseph Franck: Le plus souvent la bronchite provient d'un refroidissement. Ailleurs il d i t : Le catarrhe sporadigue rsulte cle Vimpression du froid sur un corps en sueur, aussi bien que de Vaction de l'humidit sur les pieds et la tte car l'effet est le m m e . Et il constate qu'on e s t surtout expos aux catarrhes lorsque l'atmosphre est plus incons tante, les intermittences du chaud et clu froid plus fr quentes, ce qui arrive particulirement l'automne et vers les quinoxes. Hippocrate (2) classe les rhumes et les irrita tions de la gorge parmi les maladies de l'automne. Selon Burserius (3), au temps des quinoxes, spcialement de l*quinoxe d'automne, et par les changements brusques de la temprature, la fivre catarrhale survient chez un grand nombre de personnes. 97. Par tous ces tmoignages nous v o u l o n s tablir deux choses: 1 Jean-Pierre Franck enseigne q u e la bronchite nat une irritation de Ia membrane pituitaire, irritation NONf
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catarrhe. Donc une diversit, de cause si vidente montre facilement quiconque ne spare pas l e s phnomnes des vicissitudes de la maladie, que Marie-Rose n'a pu tre malade d'un catarrhe. 98. Cette argumentation est confirme par l'enseignement gnral des mdecins qui, en parlant de la cause de la bronchite, se taisent sur la rentre des exanthmes, qu'ils s'accordent, au contraire, considrer c o m m e la cause de la pneumonie. Burserius (), traitant des maladies cle poitrine, d i t : Les
causes qui engendrent la pleursie et la pri pneumonie sont celles dj numres par nous, et d'o naissent les autres inflammations ; la principale est le dplacement ou mtas tase de la matire morbifre.
Il s'exprime encore plus clairement e n parlant des m o r billes en particulier (2): De toutes les maladies qui succdent
au virus morbilleux, la plus frquente est la peripneuononie, survenant la suite d'un desschement subit,elle met la vie des malades en pril, et souvent manie les lait mourir. Et Jean-Pierre Franck (3) : Laprvpnenmonie peut natre des causes ordinaires des inflammations, mais surtout de celles qui agissent plus videmment sur l'organe de la respi ration.. .Elles engendrent souvent le catarrhe varioleux,mor billeux, ulcreux,acre, et toute autre maladie de ce genre, il arrive mente que le virus se jette par mtastase sur la p o i
trine ou l e p o u m o n , engendrant la pripneumonie et l a phthisie. Et Selle (4): Les ruptions morbilleuses rentrent trs-faci
de dangereuses
inflam
99. II ^ a i t superflu de produire plus d'autorits en faveur d'une chose tellement tudie par les m d e c i n s , p r i n cipalement quand le caractre inflammatoire des e x a n thmes conduit seul cette c o n c l u s i o n . Jean-Pierre Franck
dveloppe
Vinflammation. Une fivre assez lgre, dit-il encore, accompagne quelquefois les morbilles ; mais lorsqu'elle devient plus forte, elle prend le plus souvent un caractre inflammatoire. Quoiqu'on ignore la nature des poisons et des virus contagieux, dit Portai (1)> nanmoins
(0 107.
(2) (3) (4) 1 140. D P nflannnal., 192. Ap. Portai. Op. cit., 1.1, p. 22G. 347.
habituellement
224
SPLENDEUHS DE LA FOI
par les phnomnes qu'on observe ordinairement dans les ruptions morbilleuscs on peut conjecturer que ceux-ci sont d'un caractre trs-acre et mordant puisqu'ils irritent for tement et enflamment les parties attaques, et, en les exci tant outre mesure, occasionnent d'abondantes scrtions.
Or, en outre du caractre inflammatoire de l'exanthme, si apte, par sa nature, engendrer la lsion des poumons, quand la maladie rentre, il faut ajouter que cette mme action du virus dispose les p o u m o n s h l'inflammation. Le m m e auteur parlant spcialement de la variole, aprs avoir fait remarquer qu'il en est ainsi des autres fivres rup-
tives telles que la rougeole, la scarlatine, etc., d i t : Ind pendamment de La matire variolique qui se manifeste par l'ruption, il y a chez les individus atteints de la petite vrole, une humeur trs-acre qui non-seulement se porte la peau sous forme de pustules, mais qui produit aussi des effets funestes dans les parties internes (2).
1 0 0 . Si donc la na,ture des exanthmes est inflammatoire, si les p o u m o n s s o n t t r s - d i s p o s s aux inflammations,si l'action du virus acre qui s'est port la peau les affecte, c o m m e n t ne pas voir que la rentre de l'exanthme extrieur doive pro duire dans co viscre l'inflammation et la lsion ? Ajoutons cela que c o m m e les p o u m o n s c o n t i e n n e n t autant de sang que toutes les autres parties du corps e n s e m b l e , et puisque la nature inflammatoire des exanthmes doit ncessairement produire dans le sang, u n appauvrissement e n m m e temps q u ' u n e a u g m e n t a t i o n de v o l u m e , il en rsulte une telle
plthore vraie oiv fausse, que les vaisseaux sanguins s'em plissent surabondamment, ce qui donne lieu soit des dila tations forces, soit des ruptures, soit des panchements sanguins dans la substance pulmonaire par les extrmits vasculaires qwi s'ouvrent "naturellement dans leurs cel
lules (3), soit encore ces inflammations si graves des p o u mons, suivies d'ulcrations et de phthisies engendres, c o m m e n o u s l'avons dit plus haut, d'aprs un trs-grand n o m b r e d'auteurs, par la rentre des e x a n t h m e s . C'est pourquoi si l'on tient c o m p t e de c e dernier p h n o m n e , si o n y ajoute i'cret naturelle aux e x a n t h m e s , si l'on s o n g e que dans les maladies exanthmatujuos les p o u m o n s sont exposs n o n - s e u l e m e n t aux inflammations, mais aussi au vice m m e s qui alfecte la peau ; eu Un si l'on c o n -
(1) Op. cit., 1.1, p. 225. Note.* (2) P. 317, 318/319. (3) Ibicl, p. 120.
225
sidre combien grave et profonde est l'action exerce sur le poumon par un exanthme rpercut,on comprendra facile ment pourquoi tous les m d e c i n s assignent c o m m e c o n s quences de s a rentre, n o n la bronchite ou le catarrhe, mais la pneumonie, c'est--dire l'inflammation des p o u mons ; et pourquoi notre malade, aprs cette rentre, n'a pas oert les symptmes relativement plus bnins du dbut d'une bronchite, mais ceux b e a u c o u p plus graves d'une inflammation des p o u m o n s . 101. Jusqu'ici c'est par la diversit des causes de la bron chite et de la pneumonie q u e n o u s avons montr que la maladie de Marie-Rose a d tre une pneumonie, et n o n u n e bronchite. Voyons maintenant si ce j u g e m e n t est confirm parles s y m p t m e s de la maladie. Le catarrhe pulmonaire aigu ou la bronchite (1), est une maladie plus frquente....
Elle est annonce par tels que des lassitudes, tte, des alternatives prcde quelquefois, et
les prodromes des affections aigus, de la faiblesse, des pesanteurs de de froid et de chaud; le cor iza la Vaccompagne souvent, spcialement
au dbut. Or on n e remarque rien de semblable chez notre jeune malade. Le catarrhe quand il s'est dvelopp a pour
symptmes principaux, la toux frquente, la douleur g nrale et la chaleur du thorax (il n'est pas fait m e n t i o n
non plus de cette douleur gnrale et de cette chaleur): une faible oppression (or l'oppression tait fort grande chez la-jeune fille) l'expectoration de crachats muqueux (dans notre cas, ils taient purulents ds l e , c o m m e n c e m e n t ) : un mouvement fbrile d'intensit variable (la j e u n e fille tait tourmente d'une fivre violente). De tous les symp
tmes la toux est le plus considrable et le plus incom mode: Cette toux se reproduit communment sous forme d'accs accompagns et suivis de phnomnes particuliers
(Rien de ces divers paroxysmes, car chez ia malade la toux n'tait ni intermittente, ni violente, mais c o n t i n u e l l e , s c h e et fatigante). Pendant les accs la malade souffre dans
toute la poitrine, et surtout derrire le sternum, dans la direction de la trache-artre, o les douleurs sont trsaigus,' avec une espce de dchirement et sensation de chaleur (ni le mdecin, ni la m r e de la malade, ni c e u x qui l'entouraient n'ont parl de ces douleurs). En mme temps, la face devient rouge et gonfle, les larmes coulent et la tte fait mal, au point qu'il semble au malade que les os du crne vont se disjoindre (rien encore de tout cela).
9
vi.
1S
226
Upigastre violemment secou devient le sige de douleurs plus vives que celles de la poitrine; de frquentes nauses se produisent ainsi que quelques vomissements (encore
une fois aucune douleur grave l p i g a s t r c , a u c u n e nause, nul vomissement). De tels accs se terminent par l'expecto
ration d'un mucus clair, cumeux, ml quelquefois de raies sanguinolentes (tout autres taient les crachats de notre j e u n e fille). Ces accs se reproduisent intervalles ingaux, parfois ar.ee une sorte de rgularit, mais sans cause apparente, etc. (c'est en vain q u e , dans notre c a s , n o u s cherchons c e s paroxysmes de toux). Dans le catarrhe pulmonaire la difficult de respirer est en gnral, peu considrable, moins que ce ne soit pendant et la suite des accs de toux (or la difficult de respiration tait
telle, e n Marie-Rose, qu'elle n e pouvait respirer q u e le corps
redress).Dans les cas ordinaires, le malade prouve seule ment une sensation de pesanteur derrire le sternum; et il lui semble que l'air entre moins librement dans sa poi
trine (or cette sensation tait beaucoup plus forte chez la j e u n e fille, qui, n o u s le disions t o u t l'heure, souffrait d'une orthopne). La toux qui, au commencement, est
ordinairement sche, devient souvent grasse, au second et au troisime jour ; elle amne l'expectoration* souvent pnible, et quelquefois avec des phnomnes convidsifs, de matire peu abondante, plutt sreuse que muqueuse, dans certains cas acre et sale, et mle une cume blanchtre : cette matire devient de jour en jour plus abondante et plus
dense (les crachats de la j e u n e malade, purulents ds l e principe, devinrent dans la suite, plus c o p i e u x , plus ftides, plus remplis de sanie). A ces phnomnes locaux se joignent
des phnomnes gnraux diffrents dans leur gravit. Ordinairement le mal de tte et la douleur Vpigastre qui semblent produits seidement par la toux, et qui, d\abord ne se font sentir que pendant et immdiatement aprs les accs, deviennent continuels. La plupart de ces symptmes se prsentent dans leur degr le plus lev pendant les accs de toux, et atteignent tous les soirs leur paroxysme.Alors la toux est plus frquente, plus douloureuse, plus sche : vers le matin expectoration revient, et les crachats sont plus pais. Chez quelques individus, chaque crise est prcde de lgers frissons; chez d'autres, il y a\ tous les deux jours, un redoublement de souffrances. (r a u c u n e de c e s choses
1
n'apparut dans notre cas). 102. Notre savant contradicteur dira qu'il n'a pas parl d'une bronchite aigu, mais d'une bronchite c h r o -
227
nique, et que, par consquent, ce que nous avons dit p o u r faire rejeter l'hypothse d'une bronchite aiguti, est sans objet. Toutefois, outre qu'il fallait rpondre h. l'objection qui affirmait l'existence de la bronchite, n o u s avons dj fait remarquer plus haut, que la bronchite chronique, chezMarie-Rose ri'aurait pu provenir que d'une bronchite aigu ; puisque les s y m p t m e s les plus graves se produisirent i m mdiatement aprs la rentre des morbilles, c'est pourquoi, en rejetant la supposition d'une bronchite aigu, nous reje tions en m m e t e m p s celle d'une bronchite chronique, en dpit de l'affirmation de notre adversaire. Mais pour qu'il ne nous accuse pas de ne l'avoir rfut qu'indirectement n o u s citerons encore du m m e ouvrage le passage suivant : Le
catarrhe pulmonaire chronique se montre particulirement chez les vieillards, et chez les personnes de faible constitu tion. Il peut tre quelquefois spontan, mais la plus souvent il est la suite de nombreux catarrhes aigus. Dans certains cas il accompagne quelq autre affection, spcialement certaine maladie organique du cur. Il commence pour l'ordinaire dans P automne ou dans l'hiver. Son unique symptme, chez quelques individus, consiste dans l'expec toration de crachats pais, ou demi-transparents et gri stres ; alors cette affection parat plutt constituer un simple vice de scrtion qu'une phlegmasie proprement dite. Il s'adoucit- pendant la saison chaude et s'imite durant les froids, sa dure est illimite. A l'expectoration fatigante de crachats pais el cohrents, et au milieu de douleurs diverses dans la poitrine, s'ajoutent des accs de toux et la
dyspne. T o u t e cette description montre que la maladie dont il s'agit n'est pas grave c o m m e l'tait celle de MarieRose ; elle montre que ces alternatives d'aggravation l'hiver et d'adoucissement, l't s o n t tout fait trangres u n mal qui n'a pas e u d'intermittence,quoique prolong jusqu'au 23 mai: elle montre des expectorations d'une nature bien diffrente de celles qui furent constates chez notre sujet; elle montre enfin des paroxysmes de toux, paroxysmes absents chez Marie-Rose, et une lgre difficult de respirer, quand, dans notre cas, cette difficult fut toujours trsgrande. Donc la considration directe d'une bronchite m m e chronique dtruit l'hypothse d'une semblable maladie chez, la personne dont n o u s nous occupons. 103. Nous avons donc dmontr, e n considrant l a maladie tant dans ses causes que dans ses symptmes, qu'il est plus facile d'avancer que de prouver l'hypothse d'une bronchite chronique. Mais examinons maintenant les bases
228
sur lesquelles notre savant contradicteur appuie son difice. Il dit d'abord : Le caractre catarrhal est dj l'tat latent dans les morbilles, c o m m e il est facile de le conclure des s y m p t m e s qui a c c o m p a g n e n t cette maladie. Bien des
causes diverses peuvent concourir faire sortir de sa marche habituelle le cours rgulier du virus morbilleu... Le caractre primitif catarrho-inflammatoire de la fivre morbilleuse atteint alors un degr plus lev.... Ainsi parle
Hildebrand. Nous a b u s o n s - n o u s ? ou bien notre contradicteur n ' e m ploie-t-il pas le m o y e n dont il s'est servi plus haut ; et c o m m e il l'a fait pour Hoffmann, n e fait-il pas parler Hildebrand contre son propre s e n t i m e n t ? Gerles, e n l i s a n t avec un peu d'attention les paroles qui viennent d'tre rap portes, on c o m p r e n d aussitt que celui-ci n'a voulu affir m e r qu'une c h o s e , savoir, que de m m e que des causes nombreuses et varies peuvent dtourner les morbilles de leur marche habituelle, de m m e selon la nature et la force de ces causes, les malades peuvent prouver des accidents divers. Du reste, le texte rtabli m o n t r e que c'est bien l le sentiment de l'auteur. Car aprs avoir n u m r les causes
gui tioublent le cours rgulier du virus-morbilleu, il ajoute : Ainsi le caractre primitif catarrho-inflammatoire de la fivre morbitleuse atteint bientt un degr beaucoup plus lev ; ou bien La maladie devient une -nature tout autre, soit par suite une action insolite des forces vitales, soit par l'affaiblissement grave de divers systmes orga niques; bientt aussi l'exanthme subit diffrentes ano malies dans son ruption et dans son cours : C'est par ces*
m o t s qu'il termine son paragraphe. D o n c l'auteur n'a ni e n seign ni indiqu que les morbilles rentrs engendrent des catarrhes ; il parat au contraire avoir entendu une chose t o u t e diffrente,en parlant du danger de l'affaiblissement des systmes organiques ; en effet, la phlegmasie, laquelle a p partient le catarrhe, n'est pas par e l l e - m m e une maladie grave du s y s t m e organique. J04 Notre contradicteur dira que, pour soutenir s o n o p i n i o n sur la transformation de la maladie en bronchite, il n'avait besoin q u e d'une autorit dmontrant le caractre catarrheux propre aux morbilles, caractre trs voisin de la bronchite, ce qui l'a fait citer Hildebrand qui reconnat dans la livre morbilleuse le caractre catarrho-inflammatoire. Mais on aura dmoli encore ce dernier s y s t m e de dfense, si l'on observe q u e Hildebrand attribue aux morbilles n o n seulement un caractre catarrheux,mais aussi,et m m e t o u t
229
d'abord, un caractre inflammatoire. Car ce double c a r a c tre amne tout h o m m e clair demander lequel de ces deux caracLres est d o m i n a n t dans les morbilles ? Car il est juste d'attribuer l'action principale au caractre prin cipal, et de lui rapporter la maladie plutt qu' l'autre ; surtout- si la disposition du malade, et les s y m p t m e s de la maladie montrent clairement celui-ci p l u t t q u e celui-l. 105. Le mme Hildebrand a, du reste, parfaitement trait ce s u j e t . Car avant d'expliquer chaque espce d'exan thmes, il c o m m e n c e par de n o m b r e u s e s notions gnrales sur ces sortes d'affections; il dit entre autres choses qui conviennent notre question : TOUT EXANTHME prsente,
son oriQine* UN TAT DE CONGESTION ACTIVE, OU DE VRITABLE PllLOGOSE existant sur plusieurs endroits de la surface cutane; cette congestion, relativement ses degrs et son extension, tantt prsente tous les carac tres d'une inflammation, modifis par la nature du sub strtm,tantt ait contraire elle semble imparfaitement d veloppe, ou mme tratreusement cache', tantt enfin, raison de sa cause productrice, ou d'une diathse morbide particulire, elle revt certains caractres spciaux[\)\ dit encore : Nous osons donc affirmer avec quelque certitude que DANS TOUS LES EXANTHMES... L'INFLUENCE DES PRINCIPES PJlLOGISTIQUESPRDOMINE.ElplushdiS,
lorsqu'il s'agit de la rentre des exanthmes, il dit, toujours d'accord avec l u i - m m e (2) : La marchera l'intrieur, del
nouvplle maladie quis est substitue l'exanthme disparu, NE PEUT TRE QU'ANALOGUE (quant sa nature) CELLE DE LA MALADIE PRIMITIVE: c'est pourquoi les Vr ansfor mations mHastatiques des exanthmes PRODUI SENT PARTOUT UN TAT DESymphorose active, ou DE VRITABLE INFLAMMATION. (Ibid. p. 3 2 , 60).
106. Donc si, suivant le sentiment d'Hildebrand, tous les
exanthmes revtent Ttai de vraie phlogose, si ta puissance des principes phlogistiques prdomine dans t o u s , si o n ne
peut attendre de leur mtastase d'aulres effets que des effets de ce caractre, c'est--dire de vritables inflammations, ne lui fait-on pas violence, lorsqu'en raison du caractre catarrheux des morbiiles, on lui fait enseigner qu'on ne doit pas en attendre de vraies inflammations des parties internes, mais des catarrhes? Que dirait aujourd'hui Hildebrand de cette manire trange d'interprter son opinion, principa lement lorsque ce caractre inflammatoire des exanthmes,
( l ) T o m . IV, p . 22. S 4 L (2) Ibid., p . 2 7 , 51.
230
e t l'inflammation que Ton devait attendre de leur rentre, taient tout fait favoriss par Je j e u n e ge de la malade, par son t e m p r a m e n t plthorique, et par son asthme habituel si funeste aux p o u m o n s ; quand surtout une violente fivre in flammatoire se dclarait aussitt aprs la rentre de T e x a n t h m e , quand une toux s c h e et pnible, une respiration difficile et haletante indiquaient manifestement u n e inflam m a t i o n des p o u m o n s , q u a n d , enfin des crachats purulents t m o i g n a i e n t que la suppuration s'tail t a b l i e s la s u i t e d e l ' i n flammation ? Certes Hildebrand n'approuverait pas notre sa vant c o n t r a d i c t e u r ^ , dans son irritation, il lui dfendrait d' lever son difice d'erreur sur le fondement de sa haute autorit. 107. C'est aussi sur l'asthme que notre adversaire veut baser s o n hypothse. La j e u n e fille, dit-il, tait t o u r m e n t e d'un asthme, avant les morbilles, or l'asthme a une si grande affinit avec le catarrhe pulmonaire qu'il se transforme en lui facilement dans certaines circonstances. Soit : Mais
l'asthme se divise, raison de sa cause, en asthme humide ou caus par les Immeurs, et en asthme sec, ou convulsif, spasmodique et flatulent... Le premier se reconnat une toux grasse, sifflante et comme ronflante, le malade prou vant du soulagement ta suite de l'excrtion... Dans l'asthme sec, au contraire, la toux est nulle ou peu consid rable, et sans crachats ( l ) . Que l'asthme h u m i d e ait une
grande affinit avec le catarrhe, cela est facile voir ; mais n o u s ne pouvons admettre cette affinit quand il s'agit de l'asthme sec et convulsif dont souffrait la j e u n e fille. E c o u t e z le t m o i g n a g e de son mdecin : Elle souffrait h a b i t u e l l e m e n t d'un asthme convulsif, c'est--dire, ajoutei - i l , d'un asthme qui devait provenir n o n d'un vice i n t rieur, mais de la nature m m e plthorique de son t e m p r a m e n t . Nous savons que le principal caractre de l'asthme est dans la difficult de respirer ; tous les a u t e u r s ont dfini l'asthme par cette difficult rcurrente.
L'asthme, dit Sauvages, est u n e difficult de respirer bronches : Vogel dit q u e c'est u n e respiration
prio p
dique, chronique: et Linn : c'est une respiration ronflante, pnible, difficile, chronique, cause par Vobstruction des
difficile
riodique,
chronique, avec une sensation d'angoisse. Gullen dfinit l'asthme, une difficult de respirer se faisant ressen tir par intervalles, avec sensation angoisse dans la poi trine. C'est une maladie chronique, dit Sagar, dont le prin cipal symptme est une difficult priodique de respirerai).
(1) Burserius de inorb. pector- 201, 204. (2) Apud Gullen in apparatu ad nosologiam mctliodieam.
231
Donc si l'asthme gne la libre respiration, par cela m m e , il doit faire obstacle l'ouverture des vaisseaux sanguins,et, en supposant la circulation, favoriser l'inflammation. Par
la respiration naturelle, dit Dellini, les vaisseaux du sang s'ouvrent la circulation de ce liquide comme le de mandent la nature et le besoin ; or l'asthme altrant la res piration, et empchant ainsi l'ouverture convenable des vaisseaux, le sang ne circule plus comme il le devrait, en
sorte que non-seulement de la respiration mais encore tout mouvement
la poitrine devenant difficile, lapripneumonie pourra se produire (1). En effet nous voyons d'aprs
pression et un refoulement du sang artriel en grande quantit, pouss par le mouvement propre la masse du sang, dans les plus petits canaux, et avec plus de force par lafivre.M parce q u e l e s phthisies naissent gnralement des
inflammations des p o u m o n s , Mangetus, parlant de la phthi sie asthmatique, s'exprime ainsi : Tout asthme... tend la
phthisie, parce que dans cette maladie il arrive le plus sou vent que les poumons sont contracts spasmodiquement. Le
mdecin qui avait reconnu, dans la maladie de Marie-Rose, une inflammation des p o u m o n s , d'o taient rsultes la suppuration et la phthisie a dit avec raison de l'asthme : cette circonstance augmente m o n avis, l'clat du m i racle survenu ; en effet l'asthme habituel a certainement contribu beaucoup la pripneumonie cause par l a rentre du virus morbilleux. Aprs cela, n o u s ne voyons pas de quel droit notre contradicteur a'rejet l'existence de l'asthme convulsif, afin de nier l'inflammation des p o u m o n s , pour la remplacer par une bronchite. 108. Notre adversaire appuie, e n troisime lieu, son s e n timent sur la dposition des tmoins affirmant que MarieRose n'avait pas la force de se remuer n i de marcher. Elle ne pouvait se soutenir sans tre aide et maintenue par quelqu'un de n o u s . O r dit notre contradicteur, cette fai blesse appartient plutt la bronchite chronique qu' une vritable phthisie , et il cite l'appui de sa thse ces paroles de.Joseph Frank : cette maladie (le catarrhe) est accom
pagne d'une prostration de forces inusite chez les phti siques. Selon sa c o u t u m e , et au m o y e n de quelques m o t s
pris au hasard, il attribue un auteur un sentiment qui n'est pas le sien. On sait q u e , pour les mdecins, autre chose est la prostration des forces, c'est--dire, l'extinction subite
(1) De morbis pector, pag. mihi. 451, col. 2.
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malignes et contagieuses, telles que la ptchie,dans la dyssenterie, les fivres pestilentielles...dans lesquelles ^invasion de l'infection putride dominant, toute la force naturelle chancelle avec le mouvement du cur ; or autre c h o s e est la diminution et U affaiblissement des forces, suite ncessaire d'une maladie grave (1). L'auteur qu'on n o u s oppose a par
faitement distingu ces deux choses. Il dit de la p r e m i r e :
cette maladie (le calarrhe) est accompagne de LA PRO STRATION DES FORCES, chose rare chez les phthisiques.
U n p e u avant parlant de la phthisie, suite de la pripneu m o n i e , il avait dit : Elle s'annonce tant par les signes qui
indiquent qu une pripneumonie ancienne en est arrive la suppuration, que par une toux obstine... et UNE TRS GRANDE FAIBLESSE : et pour preuve de c e qu'il avance,
y
signes avant-coureurs suivants : la toux sche et opinitre... la pleur, la maigreur, LA FAIBLESSE EXTRME c e dont S w i e t e n d o n n e la raison en c e s termes : Les sueurs noc turnes, line petite fivre habituelle qui consume lentement, et le manque d'apptit sont les causes de la maigreur et de L'EXTRME FAIBLESSE.
109 II est dont clair q u e l'auteur invoqu par notre s a vant adversaire a distingu trs-positivement la prostration des forces, c'est--dire, leur perte subite, de la faiblesse pro p r e m e n t dite, m m e extrme ; qu'il a attribu celle-l a u catarrhe plutt qu' la phthisie, tandis q u e , selon lui, c e l l e ci est tellement propre la phthisie, qu'il la range parmi ses s y m p t m e s . Or qu'on relise tant qu'on voudra notre E x p o s , on n e verra nulle part cette perte subite des forces chez Marie-Rose, tandis qu'on y remarquera u n e fai blesse a u g m e n t a n t de jour en jour avec la force de la m a ladie. Donc si l'on remarque en Marie-Rose, non le propre du catarrhe, mais celui de la phthisie, tout esprit quitable devra en conclure qu'elle a t atteinte de phthisie et n o n de catarrhe. Mais notre contradicteur prvenu e n fa veur u n e o p i n i o n toute diffrente, a prfr confondre la prostration avec la' faiblesse, chose pourtant bien distingues par l'auteur, et mettre Frank aux prises avec l u i - m m e , alin d'en tirer u n e opinion qu'il n'a j a m a i s e u e , et de n o u s opposer u n e autorit qui le contredit absolument. HO Enfin notre adversaire trouve u n e quatrime base (1) Hoffmann, med. ration., t. 4, port. 4, cap. 9, De virium lapsn.
233
son assertion dans la brivet de la maladie. Nous allons examiner sa nouvelle argumenlation plus longtemps que nous ne l'avons fait pour les autres ; non qu'elle soit plus s o lide que ses devancires, mais parce qu'elle a tellement plu notre contradicteur, qu'on la retrouve sans cesse, sous une forme ou sous une autre,dansla plupart des paragraphes des observations qu'il n o u s a adresses.lit pour mettre dans cette discussion Tordre ncessaire, nous considrerons d'abord la doctrine que n o u s oppose notre adversaire, et nous la comparerons avec l'opinion c o m m u n e des mdecins ; ensuite nous verrons sila maladie a t aussi courte qu'on nous le dit; enfin nous en appellerons cet gard aux observations des mdecins du premier j u g e m e n t . 111 "Voici c o m m e n t s'exprime notre savant contradicteur: Le cours de la maladie a t rapide : car Marie, que les morhilles avaient fait souffrir au c o m m e n c e m e n t de mars, tait, ds le m o i s d'avril, tourmente la fois par l'en-
rouement, la tou, les vacuations purulentes, une fivre habituelle une respiration tellement haletante que le souffle monaait de manquer, par le dprissement, les sueurs noctiirnes une diarrhe colliqualive, etc. Tous u ces symptmes s'accrurent de jour en jour, partir du commencement d'avril. Donc, au c o m m e n c e m e n t
d'avril, on remarquait dj les phnomnes qui, selon le dfendeur de la cause, aident au diagnostic de la phthisie confirme. Or ette rapidit dans le cours de la maladie, Joseph Franck enseigne qu'elle convient au c a tarrhe bien plus qu' toute autre maladie de la poitrine : car le cours de cette maladie (le catarrhe) est habitude
plus rapide que celui de la phthisie provenant de vomique, par consquent plus rapide que toute autre espce de phthisie ; bien p l u s , NOTEE OPINION est que les phthi sies dites cours rapide, sont des bronchites chroniques, moins qu'elles n'appartiennent la phthisie tuberculeuse (on n'a j a m a i s constat l'existence de tubercules, chez Marie-Rose), laquelle vient s'ajouter quelque m a ladie aigu.
112 Notre adversaire n o u s . permettra-t-il de lui faire quelques observations relativement ce singulier sentiment de Franck ? Nous ferons d'abord remarquer que ces mala dies prcipites que l'auteur est d'avis de placer parmi les bronchites chroniques, s o n t appeles expressment par lui phthmes cours rapide, que les Franais, dit l'au teur en n o t e , n o m m e n t phthisie galopante. J'admet donc le caractre et la qualit de la maladie ; seulement il pense
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qu'elle porte d e s n o m s diffrents. E t il a raison : car s'il attribue la bronchite chronique, le cours, les p h n o m n e s , et l'issue q u e les m d e c i n s assignent la phthisie cours rapide, c'est--dire, la phthisie galopante, il est vi dent que toute la question est dans le n o m plutt q u e dans la chose e l l e - m m e ; ce qui ressort clairement aussi du s u jet m m e de la discussion. En effet, si on suppose u n e bron chite trs-forte, par consquent u n e vritable inflammation, et n o n pas un catarrhe, o u , en d'autres ternies, s'il s'agit d'une bronchite affectant n o n - s e u l e m e n t la trache et les bronches, mais jusqu'aux plus petits conduits ariens d pendant des b r o n c h e s , qui pntrent toute la substance pulmonaire, et constituent, pour ainsi dire, tout le p a r e n c h y m e des p o u m o n s , il est vident q u e c e parenchyme doit ncessairement tre atteint de la m m e inflammation. Or si cette inflammation n e disparat pas ( c e q u i est presque impossible dans c e cas), mais si elle aboutit u n e s u p p u ration, c e sera la suppuration et ensuite l'ulcration d u p o u m o n , c'est--dire, la vraie phthisie, qui s'appellera phthi sie pulmonaire,si l'on considre le sujet de la suppuration, c'est--dire, le parenchyme pulmonaire , e l s i m p l e m e n t bronchite, ou' affection des bronches, si l'on veut dsigner l'origine de l'inflammation. 113 Qu'il soit ici question d'une diversit de n o m , plutt q u e de la c h o s e e l l e - m m e , Frank le d m o n t r e assez vi d e m m e n t dans le paragraphe i m m d i a t e m e n t prcdent, o il traite de la PHTHISIE PULMONAIRE mtastatique.Il enseigne d'abord que par PHTHISIE MTASTA TIQUE il
faut entendra celle qui suit ou la trop prompte disparition d'autres maladies ou la suppression des vacuations habi tuelles. Puis aprs avoir fait remarquer qu'on reconnat, ta toux, la dypsne, aux douleurs de poitrine,et la dif ficult de se tenir couch, que les poumons sont malades, il dit positivement: si Von ne parvient pas gurir prompte-' ment ces maux, les sijmptmes de la PHTHISIE PULMO NAIRE CONFIRME se manifestent; et,h)o\Jite-t-il,le COURS de cette trs dangereuse maladie est RAPIDE. La p e n s e
de l'auteur parat ici clairement. Car aprs avoir, tant dans l e titre q u e dans le cours du paragraphe, donn la mala
mtastatique, il dit q u e
si on n e la traite pas convenablement, les s y m p t m e s de l a phthisie confirme surviennent : et il ajoute q u e la m a l a die suit u n e marche rapide. Donc Franck admet q u e la phthisie vritable peut avoir u n e marche rapide, et q u e telle est la phthisie c o n f i r m e ; quand p e u aprs il regarde c e s
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maladies rapides c o m m e des bronchites, il considre non pas la nature d e l maladie, mais son origine, et il s'attache au nom plutt qu' la chose elle m m e . C'est pourquoi nolro adversaire ne suit pas du tout r e n s e i g n e m e n t s de l'auteur, lorsqu'il s'efforce de prouver q u e celui-ci a fait rsider la distinction tabli par lui sur la nature et le caractre de la maladie quand, au contraire il n'a tabli de distinction que dans le n o m et l'origine. 114. Mais laissons cela, et admettons cette dernire h y p o thse, c'est- dire, que Joseph Franck a eu en vue non pas le nom et l'origine de la maladie, mais son caractre et sa nature ; qu'il a considr les maladies au cours rapide comme des bronchites chroniques plutt que c o m m e de vraies phthisies pulmonaires.Certes, notre contradicteur n e niera pas que cette opinion de Joseph Franck n e soit sin gulire, et d'autant plus singulire, qu'il a dit, sans oser l'affirmer lui-mme : Nous sommes avis que les phthisies marche rapide... sont des bronchites chroniques. Ces paroles ne nous donnent que l'opinion particulire d'un mdecin*. Or si cette opinion est contraire au sentiment unanime des mdecins ; ne pourrait-on pas accuser d'imprudence celui qui, pour dfendre sa thse, placerait cette opinion particulire a u - d e s s u s de celle qui s'appuie sur l'exprience de tous ? 115 On verra facilement que le sentim'ent c o m m u n des mdecins est oppos cette opinion d'un seul, par le t moignage de quelques-uns (car nous ne pouvons les rappe ler tous), des mdecins de premier mrite. Celui qui assurment a crit le m i e u x sur la phthisie est Morton dont Joseph Frank lui-mme invoque l'autorit, lorsqu'il parle de la phthisie mtastatique. Morton s'exprime ainsi dans l'endroit de ses crits cit par Franck (1) : cette PHTHISIE PULMONAIRE (mtastatique)
dont nous traitons ex professa dans ce chapitre, bien que modre quelquefois, est cependant AIGU la plupart du temps, souvent mme elle devient SURAIGUE d'aprs le caractre propre ulcre pulmonaire, el alors elle est tou jours incurable et mortelle. Parlant ensuite (2) de LA PHTHISIE PULMONAIRE EN GENDREE par les fivres, surtout par les fivres suites d'une vie crapuleuse, des scarlatines, et des fivres inter mittentes, ainsi que des varioles et de LA ROUGEOLE^ il dit: CETTE PHTHISIE EST PRESQUE TOUJOURS RAPIDE
(1) PMhisiolog. lib. 3, c. 8. (2) Loc. cit. ch, 12.
est dj
affaibli
Auparavant, h propos do la phthisie rsultant de pri p n e u m o n i e ou de pleursie,Morton avait dit (1) : Cette sorte (( de p h l h i s e ' a toujours le caractre aigu bien prononc, a parce qu'elle rsulte d'une maladie aigu prexistante, laquelle lgue l'autre non-seulement une grande prostra t i o n , mais dans la masse du sang un tat coliquatif, et m m e trs-souvent, dans les p o u m o n s , un amas du pus assez considrable. Ailleurs, traitant de la phthisie hrditaire, dont la dure est ordinairement la plus l o n g u e , il en distingue d'abord d e u x espces, l'aigu et la chronique (ce qui confirme ce que n o u s avons dit ci-dessus, g 20, que la phthisie chro n i q u e e l l e - m m e , peut sous l'influence de diverses causes devenir aigu), puis il affirme avoir vu plusieurs personnes, mourir de cette maladie, au b o u t d'un ou de quelques m o i s au plus (2), et un peu plus loin, il ajoute c o m m e explication : Si l'engorgement des p o u m o n s et les tubercules qui en naissent, o n t m o i n s pour cause une dyscrasie particulire du sang, qu'une humeur m a l i g n e (je me rappelle e n avoir eu quelques exemples), n o n - s e u l e m e n t la maladie est c e r t a i n e m e n t mortelle, m a i s elle a u n e marche rapide, un caractre trs-aigu, et elle peut m e n e r au t o m b e a u en quelques mois pour ne pas dire en quelques s e m a i n e s . Mangetus s'exprime a b s o l u m e n t dans les m m e s termes en traitant de cette m m e phthisie (3): La frquence des cas de (f phthisie succdant une p r i p n e u m o n i e , n'est plus g u r e , dit-il, u n e question pour c e u x m m e s qui n'ont de la m d e c i n e qu'une science mdiocre , et il ajoute: Cette es p c e de phthisie est toujours trs-aigu. Burserius, que n o u s avons dj cit, dit (4) : Il y a des phthisiques qui prissent en trs-peu de temps, et d'autres qui prolongent leur vie bien au del de ce qu'on aurait pu croire, Sprengel, traitant de la phthisie u l c r e u s e , s'exprime ainsi (5): T o u t autre est la marche de la maladie quand elle se c o m p l i q u e de la rpercussion d'un exanthme, surtout de la gale ; dans ce cas, en effet, elle est ordinairement bien plus prcipite (6).
(1) Md. Cap. x (2) Ibid. lib. II, cap. v. (3) Bibliotn. med. pract. de phthisi a pripneumonia et pleuritide orta. (4) Burserius. d e m o r b o pect. 55.
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Voici enfin un autre de ces docteurs dont les crits sur la phthisie sont remarquables et font autorit. Portai dit en parlant de la marche de cette maladie ( I) : Quelquefois elle est si rapide, qu'elle a l'apparence d'une maladie trs-aigu do la poitrine , et ailleurs: le p o u m o n , aprs avoir t engorg plus ou moins, quant au degr, dans sa totalit o u s e u l e m e n t dans quelques-unes de ses parties, se c o n s u m e par une suppuration plus ou m o i n s prompte, plus ou m o i n s tendue, et d'une manire bien ((diffrente selon l'espce de p h t h i s i e : dans l'une trs rapidement, dans l'autre trs-lentement. Et encore (2) : la phthisie qui s u c c d e la goutte et au rhumatisme a le plus souvent une marche bien diffrente a de celle qui est la suite de quelque ruption rentre et qui s'est porte sur les p o u m o n s ; c o m m e celle qui succde aux dartres, la scarlatine, la rougeole et la variole. Cette dernire espce de phthisie parcourt quelquefois ses priodes avec tant de rapidit, que si on ne pouvait la re connatre, on croirait l'invasion d'une maladie aigu (f de la poitrine, toutefois elle est c o n s t a m m e n t caractrise par des sueurs abondantes, la diarrhe et le gonflement des extrmits. H y a encore d'autres circonstances, e n tirement indpendantes des causes qui ont produit la phthisie, qui e n rendent quelquefois la marche trs rapide : les j e u n e s gens meurent plus vite que ceux qui a sont avancs en g e ; peine les premiers symptmes se sont-ils dclars,queles autres viennent se succder c o m m e sans interruption. On pourrait dire que' ceux qui sont attaqus de cette maladie meurent d'autant plus vite qu'ils sont plus j e u n e s . Cela vient de c e que, tant plus sanguins, et la circulation chez eux tant plus rapide, la a suppuration s'y produit plus facilement, l'oppos de ceux qui sont dans une disposition contraire, c o m m e sont prcisment les vieillards. ;> Et plus loin (3) : il y a des phthisies plthoriques qui progressent avec plus de rapidit que les autres, et qu'on pourrait appeler aigus. J'ai vu beaucoup de malades mourir dans le dlai d'un mois o u de deux mois, sans avoir souffert auparavant aucun signe qui pt manifester en eux une disposition la phthisie. 116. Mais pourquoi faire parler un plus grand n o m b r e
1) P. 219, ibid.
d'auteurs dans le m m e sens? Est-ce que Joseph Frank, celui m m e h qui nous avons oppos ces autorits, tout en sou tenant que la phthisie par mtastase a une m a r c h e rapide, ne la considrait-il pas c o m m e une phthisie p u l m o n a i r e con firme, et ne l'appelait-il pas de ce n o m ? N'avons-nous pas vu au c o m m e n c e m e n t de cette plaidoirie, que les auteurs distinguent la phthisie a i g u de la phthisie c h r o n i q u e , pr c i s m e n t parce qu'il n'est pas rare qu'elle ait une marche r a p i d e ? Si donc la plupart des auteurs font cette distinclion,sitraitant n o m i n a t i v e m e n t de la phthisie par mtastase, de la phthisie par pripneumonie, de la phthisie par plthore, de la phthisie des j e u n e s gens, ils l'appellent tout fait ai
gu,trs-aigu,trs-brve,trs-prcipite,trs-rapide offrant toutes les apparences une maladie trs-aigu de la poitrine, p e u t - o n raisonnablement considrer c o m m e un
grave et puissant argument celui qui consiste refuser le n o m d% vraie phthisie celle qui vient de mtastase o u de pripneumonie, chez un sujet j e u n e et plthorique, cause de sa marche trop rapide ? 417. Continuons cependant. S o u m e t t o n s de n o u v e a u notre cas l'preuve du raisonnement et de l'exprience, et cher c h o n s s'il est vrai que la marche de la maladie ait t telle m e n t prcipite, qu'on doive p r u d e m m e n t , cause de la brivet du temps, exclure l'ide d'une phthisie confirme. D'abord, pour ter la critique la possibilit de n o u s o b jecter de n o u v e a u x calculs, n o u s adopterons les siens. G'est au 12 mars qu'elle fait remonter le c o m m e n c e m e n t de l'in flammation. Chose e n t e n d u e ! Depuis le 12 m a r s , jour o c o m m e n c e la maladie, j u s q u ' a u 23 m a i , j o u r o elle dispa r a t / n o u s avons soixante-douze jours f r a n c s ; c'est dans cet intervalle qu'il nous faut placer d'abord la priode prpa ratoire o u de phthisie c o m m e n a n t e , et e n s u i t e la priode de phthisie confirme. N o u s avons dj fait observer au c o m m e n c e m e n t de cette dfense, que dans les phthisies secondaires, c o m m e l'est celle qui n o u s o c c u p e , la priode prparatoire ou de phthisie c o m m e n a n t e , se confond avec les maladies qui disposent ^ ' i n f l a m m a t i o n ; et que la priode de phthisie confirme est dtermine par l'ulcration m m e des p o u m o n s . Nous avons fait observer g a l e m e n t q u e dans la priode prparatoire,la maladie est quelquefois tellement grave, qu'elle tue les m a l a d e s , avant que la suppuration et l'ulcration aient pu se p r o d u i r e ; et q u e la priode de phthisie confirme, q u a n d elle s'est b i e n rvle par les crachats sanieux, indices de l'ulcration p u l m o n a i r e , se comporte le troisime j o u r c o m m e au troisime m o i s ;
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parce que ce n'est point sur le nombre des jours, mais sur les symptmes qu'il faut tablir le diagnostic des maladies. La seule diffrence, c'est que plus sont anciens et prononcs les progrs de la suppuration, plus grave, plus complte, plus rapide se m o n t r e aussi la c o n s o m p t i o n ou destruction du viscre affect. 118. C'est un fait certain que les maladies offrent d'autant plus de gravit, et font des progrs d'autant plus rapides, que le sujet atteint y est mieux prdispos. Or personne ne niera que Marie-Rose ait eu une grande prdisposition la phthisie. Son j e u n e ge, son temprament plthorique, son asthme habituel : voil autant de causes dont la runion devait influencer la marche de la maladie pour la rendre plus violente et plus rapide. Chez un sujet ainsi prdispos, le virus de la r o u g e o l e rpercut dut agir avec une extrme violence c o m m e cause d'inflammation. La rsolution tait difficile : la raison l'indique et les faits dmontrent qu'en effet elle n'a pas e u lieu. Or, dfaut de rsolution ou de mtastase, la suppuration est invitable, quelle que soit la maladie. Les mdecins enseignent que, dans le cas o une inflammation n e se rsout pas (1), il faut faire remonter le
commencement de la suppuration au jour o se sont mon trs les premiers symptmes de fivre, et qu'on peut affir mer la complte formation du pus, quand les signes de la pleursie inflammatoire persistent jusqu'au quatorzime
jour. Telle est l'observation d'Hippocrate et celle des m d e cins, quand il s'agit d'une inflammation ordinaire des p o u mons. N'avons-nous pas des motifs particulirement p r e s sants pour l'appliquer notre cas, o la prdisposition est aussi grande que possible chez le sujet, pendant que l'ac tion de la matire morbifque sur les poumons est e x t r m e ment nergique? Quand donc les m d e c i n s qui ont soign notre m a l a d e affirment qu'elle a c o m m e n c expectorer du pus avant la lin du mois de mars, ils n'affirment rien de contraire ce qui arrive ordinairement dans les phlegmasies pulmonaires, et ce qui devait arriver dans notre cas. Partons donc de ce fait, et marquons c o m m e terme extrme de la priode prparatoire le 27 mars : il nous restera, depuis ce jour, jusqu'au 23 mai, cinquante-six jours pleins pour la priode de phthisie confirme. 119. Quelle a t la premire cause de cette suppuration ? Le virus de la rougeole rpercut. Eh b i e n ! ce virus n'a pas seulement trouv les p o u m o n s t o u t disposs l'inllamma1
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tion et la suppuration, cause de l'ge, de la plthore et de l'asthme; il les a trouvs atteints e u x - m m e s parl'affection contagieuse, c o m m e il arrive ordinairement dans les mala dies exanthmatiques ; c'est ce qui a favoris grandement en eux les progrs de la d c o m p o s i t i o n . I l est i m p o s s i b l e en effet que ce virus, toujours en c o n t a c t avec les p o u m o n s , aprs avoir exerc son action sur eux pendant tout le cours de l'inflammation, ne Tait pas continue pendant t o u t le cours de la suppuration, c o m m u n i q u a n t la matire purulente, ds le m o m e n t de sa formation, son cret et sa m a l i g n i t ; on sait, du reste, avec quelle facilit une h u m e u r acre et m a l i g n e attaque sur leurs parois les parties e n suppuration, pour les convertir en ulcres.Si donc, depuis le c o m m e n c e m e n t de la suppuration, cette cret et cette malignit n'ont pas interrompu leur action sur les parties suppurantes, il n'est pas tonnant que, peine ouvertes, elles aient tal de n o m b r e u x ulcres et fourni a b o n d a m m e n t d u pus de mauvaise nature ou sanieux ; d'o les m d e c i n s traitants ont c o n c l u la formation d'ulcres dans les p o u m o n s avant la fin de mars, et l'existence, ds cette poque, d'une phthisie confirme. 120. Assurment les 'symptmes taient bien de nature confirmer leur j u g e m e n t , quand ils considraient soit la continuit de l'excrtion purulente, s o u sa quaLit et son abondance, il n'y a point d'ulcre, dit Richter (1), dans
lequel on ne trouve le pus de mauvaise nature et l'impuret. Par impuret on entend l'effet produit, par le pus qui en dcoule, sur l'extrmit des fibres el des vaissaux qui tapissent la surface de t'ulcre, et qui sont relchs, corrods, livides, corrompus, privs de vie. On
comprend que des parties ainsi mortifies n e puissent plus engendrer les m o l c u l e s de substance qui, s'interposant et se trouvant en contact, se runiraient pour former une cicatrice. Aussi (2) tant que C ulcre se dveloppe, aban-
donn lui-mme, il devient de plus en plus impur et il largit sa surface. Or Marie-Rose a continu expec
torer du pus jusqu' sa gurison, donc il n'y a j a m a i s e u chez elle cicatrisation des parties suppures, et c'est l'impuret de l'ulcration qui les a e m p o c h e s de se cica triser. 121. Il y avait la m m e consquence tirer de la mauvaise qualit du pus. Les signes auxquels o n reconnat la m a u vaise qualit du p u s , s o n t (3j l'anomalie de sa consistance (1) Elem. dichlrurgia t. 1, 684.
(2) Md. (585.
et sa couleur, la mauvaise odeur qu'il exhale, son carac tre cret . Dans noire cas, des tmoins peu instruits
ont cependant trs-bien caractris la qualit extrmement mauvaise d u pus expector. Voici leurs p a r o l e s : clic cra-t
chait de sales choses, comme lies ensemble.Elle crachait sale. Elle avait de sales crachats. Elle faisait des cra
chats sales et infects. Mais le mdecin a encore mieux exprim la m m e chose en disant : Les crachats expecto-
rrs taient de jour en jour plus copieux, sanieux et f tides. Notez, j e vous prie, le m o t sanieux, aujourd'hui
rserv pour dsigner un pus acre et de mauvaise qualit, en un m o t Tichor . On ne pourrait assurment mieux indiquer la consistance anormale, la couleur, l'odeur et la nature acre de ces crachats. Maintenant, s'il est vrai que par ces deux caractres (pus de mauvaise qualit, et impuret), on puisse toujours dis
fait pas seulement obstacle l'limination des impuretes et la production d'une chair neuve et saine, il vicie chaque jour de plus en plus les parties saines et les putrfie. Ce qui fait que ces parties dtruites, liqufies
et transformes e n sanie, doivent chaque jour fournir u n e plus grande quantit de matires sanieuses. De fait, chez Marie-Rose, les crachats expectors taient de jour en jour plus abondants, sanieux et ftides. Donc cette abondance chaque j o u r croissante des crachats dnonait aussi u n e vritable ulcration des p o u m o n s . Mais quel effet devait pro duire une si continuelle distillation de matires liqufies?
Il y a consquemment chez le malade une dperdition des humeurs. Si l'ulcration occupe une grande tendue, ou bien encore si le malade est clans le mme moment atteint de plusieurs ulcres la dperdition est irs-considrable, et il en rsulte dbilita Hon et vrai desschement de tout le corps. Inutile d'ajouter qu'une si grave altration
ne peut avoir lieu sans livre. Or, chez Marie-Rose, n o u s trouvons perte de substance nutritive prouve par l'abon(1) Richter, 085. (2) Riclilor, g 686.
VI.
Ifi
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dance des crachats (sans parler des sueurs et de la diarrhe colliguative), n o u s trouvons aussi fivre h e c t i q u e avec m a i greur toujours croissante, telle en dernier lieu, q u e la malade tait rduite la peau et aux os ; t o u t e s c h o s e s qui sont la c o n s q u e n c e vidente de l'ulcration des p o u m o n s . Donc tout en elle venait l'appui du j u g e m e n t port par les m decins, la fin de m a r s , sur l'existence d'une phthisie c o n firme. Pourra-t-on encore, aprs cela, soutenir que cin quante-deux jours, pendant lesquels s'est exerce u n e action si destructive, sont un dlai trop court pour le d v e l o p p e m e n t d'une phthisie confirme? Or, n o u s avons constat d'autre part la suffisance du dlai pour la priode prpara toire. Donc on n'a pas raison de dire qu'une maladie de soixante-douze jours soit trop courte p o u r pouvoir m m e ressembler u n e phthisie, surtout aprs ce que n o u s avons appris des m d e c i n s du .premier ordre : qu'il y a des phthisies d'un m o i s et de deux m o i s t e l l e m e n t aigus, q u ' o n p e u t peine les distinguer d'une m a l a d i e aigu de la p o i t r i n e ; et que cela arrive principalement lorsque la phthisie s u c c d e la rougeole, chez les sujets j e u n e s et p l t h o riques. 123. Jusqu'ici n o u s nous s o m m e s appliqus tablir par la science mdicale et l'examen attentif du cas propos, que la marche de la maladie n'a pas t aussi prcipite q u ' o n pourrait le croire au premier abord ; et q u e si m m e o n tient c o m p t e des causes prdisposantes et occasionnelles, et de la violence du m a l , effet ncessaire de ces causes, o n doit peut-tre s'tonner qu'elle ait dur si l o n g t e m p s . On a v u ainsi t o m b e r de l u i - m m e le f a m e u x argument tir de la brivet du t e m p s , pour exclure l'hypothse d'une phthisie. Cependant c o m m e les faits valent mieux e n c o r e que les autorits et les raisonnements, il n e n o u s parat pas inutile de complter notre rponse par l'expos d'un c e r tain n o m b r e de cas o l'existence d'une phthisie n'a d o n n l i e u aucun d o u t e , bien que la maladie ait t encore p l u s courte. 124. Morgan traitant du crachement de sang, des cra chats purulents et sordides, de l'empyrne et de la phthisie, m e n t i o n n e le cas suivant : U n e f e m m e de la c a m p a g n e , ge de quarante ans, avait au ct interne du talon u n e tumeur qui se dveloppa, jusqu' devenir presqu'aussi grosse que la tte d'un h o m m e . Cette f e m m e fut admise l'hpital des incurables de Venise, o la t u m e u r fut e x ce tirpe. L'anne suivante elle tait revenue, parce q u e l a t u m e u r avait reparu. Mais elle n e s'tait jamais plainte
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d'aucune affection se rapportant au thorax; et voici qu'elle ressent tout c o u p une douleur poignante dans la partie gauche de la poitrine, avec fivre et respiration diffi cile. Moins de quarante jours aprs que la p l e u r i p n e u m o nie se fut ainsi dclare, la difficult de respirer s'aggrava, une sensation d'angoisse et de suffocation obligea la malade tenir la tte et t o u t le haut du corps dans la position verticale. Bientt survint l'amaigrissement avec prostration extrme, et elle mourut quinze jours aprs la recrudescence de la dypsne. Je fis la dissection clu c a davre : peine avais-je incis la poitrine, qu'une eau san guinolente s'coula de la cavit gauche du thorax : elle tait pleine d'un liquide absolument semblable. Je n e pus douter de la prsence du pus dans ce liquide, quand j'eus examin le p o u m o n : une partie de sa face antrieure offrait aux regards u n e grande cavit, cet endroit il tait corrompu et dtruit. Je le dissquai n a n m o i n s , et e t l je constatai de nombreuses tranes d'une s u b stance on ne peut plus ressemblante la matire puru lente (1). 125. Nous rencontrons ici une femme de quarante ans chez laquelle ne s'tait rvl a u c u n indice de maladie p u l m o naire.Blle se met a u lit souffrant d'une pripneumonie; moins de quarante jours aprs le c o m m e n c e m e n t de la maladie, u n e orthopne se dclare, quinze jours se passent,et elle meurt. On trouve les p o u m o n s moiti dtruits, moiti purulents. Dans notre cas n o u s avons une j e u n e fille chez laquelle la maladie trouve c o m m e auxiliaire, la circulation plus rapide du sang, l'insuffisance des vaisseaux propre cet ge, le temprament plthorique, et enfin l'asthme; il y a e u rper cussion de la rougeole ; et la maladie, depuis le dbut de la pripneumonie jusqu' la fin dure soixante-douze jours. Est ce donc un espace de temps trop court pour la cor ruption des p o u m o n s et le complet dveloppement d'une phthisie confirme ? 126. Portai, dans l'ouvrage bien des fois cit,entre autres exemples de phthisie galopante dont la dure a t gale o u un peu plus l o n g u e que dans notre cas, en signale deux bien dignes d'tre rappels (2). Une j e u n e fille, dit-il, m a d e m o i selle Dupont,avait t bien portante jusqu' l'ge de treize ans. Elle eut une toux lgre, qui fut n g l i g e ; sa respi ration tait par m o m e n t s un peu difficile, son i l tait
(1) Epist. anat. med. 22 22 et 23 (2) T. III, p. 126.
244 r ce .
gonfl, mais ces s y m p t m e s taient si peu m a r q u s qu'on n'y fit point a t t e n t i o n , et la malade pendant quelque temps ne prit aucun mdicament. On remarqua un peu de sang dans les crachats : alors je fus appel, et j ' o r d o n nai u n e saigne du pied. Le crachement de sang cessa, mais la difficult de respirer s accrut, la fivredevint c o n t i n u e l l e ; au b o u t de quelques jours survint la diarrhe, qui, six o u sept jours aprs, iait colliquative. La j e u n e fille maigrit vue d'il, cracha des matires puriformes, perdit c o m p l t e m e n t la vue, ses pieds et ses mains s'enfirent et elle m o u r u t trente jours aprs avoir prouv tous les s y m p t m e s de la phthisie pulmonaire. On trouva les p o u m o n s adhrents la plvre en plusieurs endroits. Ils taient remplis d'une concrtion s t a t o m a t e u s e : c e r taines parties taient plus rouges, d'autres plus blanches, d'autres imbibes de pus : Enfin on y rencontrait u n certain n o m b r e d'excavations qui taient autant de centres de suppuration. 127. Vous avez, dans cet e x e m p l e u n e j e u n e fille, a p e u prs du m m e ge que Marie Rose. Elle aussi, n'avait j a mais t m a l a d e . La priode de phthisie c o m m e n a n t e , j u s qu'au c r a c h e m e n t de sang, est courte et trs-bnigne. Au b o u t de sept j o u r s il y a diarrhe qui devient vite c o l l i q u a tive, et a v e c elle apparaissent les crachats purulents. La maigreur dessche le corps en un instant, et on n e peut c o m p t e r q u e trente jours entre la priode de phthisie c o m m e n a n t e et la m o r t . Des p o u m o n s corrompus,purulents et cavernes, d m o n t r e n t l'existence de la phthisie. Dans le cas d e Marie-Bose,aprs que la priode de phthisie c o m m e n a n t e a l trs-mauvaise, celle de phthisie dclare se p r o l o n g e . p e n d a n t cinquante-six jours,offrant tous les s y m p t m e s d'une vraie phthisie confirme. Est-il permis d'opposer des ca ractres si vidents, la dure trop courte de la maladie ? 28. Voici ce que dit ensuite le m m e auteur (l) : La phthisie d o n t m o u r u t m a d a m e de P i e n n e fut plus rapide. Elle n e parat pas avoir dur plus de dix ou douze j o u r s , bien qu'elle et pu exiger un temps bien plus l o n g . Aussi, n e m a n q u a t - o n pas de donner diffrents n o m s la mala die,et je f u s en b u t t e la critique pour avoir affirm qu'une <c p h t h i s i e p u l m o n a i r e pouvait devenir si p r o m p t e m e n t m o r t e l l e ... Portai dcrit ici le cours de la maladie et c h a c u n de ses s y m p t m e s , puis il c o n t i n u e : C o m m e les d i et verses opinions qu'on avait de c e t t e m a l a d i e , s e rpandaient
il) T. HLr p. 127, J29, 130,
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partout, j'engageai les parents de la j e u n e femme d funte, " faire oprer l'autopsie du cadavre ; ils y c o n s e n ti tirent, et voici quel en fut le rsultat : La poitrine conte nait une certaine quantit d'eau extravase, les p o u m o n s taient remplis de tubercules statomateux, durs, la p l u part blanchtres, quelques-uns de couleur grise, et u n a grand nombre avaient subi la suppuration. Le p o u m o n droit tait particulirement attaqu, il adhrait h la plvre sur presque toute sa surface, et offrait un plus grand nombre de cavits pleines d'une suppuration i c h o reuse. 129. La marche de cette maladie, est tellement prcipite que les mdecins ne peuvent se persuader qu'il s'agisse d'une phthisie pulmonaire, et critiquent celui qui en avait ainsi jug. Cependant l'inspection des p o u m o n s donne gain de cause ce dernier. Si cette phthisie, sans autres prodromes qu'une toux lgre, de courte dure, mais continue et pro duisant une abondante expectoralion,a pu mener la malade au tombeau dans l'espace de douze j o u r s , qui pourra, e n conscience, nier la possibilit d'une phthisie continue, quand, aprs une priode [DrparaLoire trs-mauvaise, elle a encore dur cinquanle-deux jours ? 130. Ceux qui voudraient employer leurs loisirs c o m p u l ser les observations faites par les mdecins sur les maladies et les cadavres des phthisiques pourraient runir un grand nombre d'exemples du m m e genre. Reprenons les preuves de raison dmontrant la possibilit d'une phthisie dure trs-courte; l'opinion c o m m u n e des mdecins et la distinc tion qu'ils ont c o u t u m e de faire entre la phthisie aigu et la phthisie chronique, la confirment; les faits viennent . l'appui du r a i s o n n e m e n t et des thories mdicales. Dans le cas qui n o u s o c c u p e , les prdispositions de la malade, et la violence des causes dont l'action s'est exerce sur les p o u mons, indiquent qu'il a d y avoir phthisie et mme phthisie grave et rapide; tous les symptmes se runissent pour d montrer le fait de phthisie confirme; sera-t-il, encore permis, j e vous le demande, de nous objecter la brivet du Lemps, et de nier l'existence de la phthisie . cause de sa dure trop c o u r t e ? 431. Nous voici enlin sortis, c o m m e d'un buisson d'-, pines de ce fameux paragraphe si habilement rdig p'ar notre adversaire. Il nous faut maintenant, avant d a l l e r plus loin, rsumer en quelques mots, cette dissertation un p e u longue. Dans la premire partie du paragraphe, le savant cri tique, pour exclure l'hypothse d'une phthisie, consquence
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d e v o m i q u e , a ni la pripneumonie: 1 parcequ il n'y voyait point de cause extrinsque, 2 parce que les m d e c i n s n'ont oppos au progrs de l'inflammation q u ' u n e seule saigne. 3 parce q u e , en l'absence des s y m p t m e s particuliers la v o m i q u e , il faut en rejeter l'hypothse. Nous avons laiss de ct ce troisime chef, auquel satisfaction a t d o n n e quand n o u s avons n o u s - m m e s cart l'ide d'une v o m i q u e . A u premier, n o u s avons rpondu en distinguant la cause directe d e l cause indirecte. Nous avons c o n s t a t l'existence d'une cause directe extrinsque, dans la rtrocession de la r o u g e o l e , et n o u s avons ajout qu'il y a m m e eu cause e x trinsque d e l cause, parce q u e la rpercussion n e doit pas tre attribue u n e cause interne excitante o u dprimante, mais une cause externe. P u i s , sans n o u s arrter davantage l'objection, n o u s avons fait voir c o m b i e n il est absurde do m e t t r e en doute et de nier un fait vident,par le motif qu'on n'en connat point la cause. Relativement au d e u x i m e motif, n o u s avons fait remarquer qu'il n'est pas permis de dire que Marie-Rose ait t prserve de la p r i p n e u m o n i e par u n e seule mission sanguine, m o i n s qu'on n e veuille appeler prserv celui dont on rend la maladie plus dange reuse. Qu'on accuse le m d e c i n d'incapacit o u d'erreur, parce qu'il n'a pratiqu qu'une seule s a i g n e dans une m a ladie aigu de la poitrine, n o u s l'avons permis; mais n o u s n'a vons pas pu laisser dire qu'une maladie rvlant t o u s les s y m ptmes de i n f l a m m a t i o n ^ a p a s le caractre inflammatoire. Nous avons ajout que l'homopathie, aussi bien q u e l'allo pathie, offre des e x e m p l e s de p r i p n e u m o n i e gurie sans le secours d'aucune m i s s i o n sanguine ; et qu'enfin l'unique s a i g n e , pratique peut fournir un a r g u m e n t d m o n s t r a tif du degr extrme de l'inflammation touchant-dj la suppuration. 132. Dans la d e u x i m e partie du paragraphe, le savant critique s'est appliqu asseoir un diagnostie de bronchite chronique 1 sur la nature catarrhale de la rougeole, sur l'asthme dont la j e u n e fille tait atteinte, 3 sur la prostra t i o n qu'elle a p r o u v e , 4 sur la brivet de la maladie. P o u r n o u s , e n v i s a g e a n t d'abord d'une m a n i r e gnrale le diagnostic tabli par lui, n o u s avons d m o n t r , par la diver sit des causes qui produisent les deux maladies et la s y m p t o m a t o l o g i e bien diffrente de l'un et de l'autre, qu'il n'a pas pu y avoir dans le cas, une bronchite, mais une inflam m a t i o n des p o u m o n s . Quant aux autorits mdicales i n v o ques , l'appui de c h a q u e affirmation, n o u s les avons vues se retourner contre notre adversaire, l o r s q u e , a u lieu de
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lambeaux spars du contexte, nous avons consult les ouvrages m m e des auteurs, pour y trouver leur pense. Puis, examinant e n particulier chacune des raisons invo ques, n o u s avons rpondu : la premire que la rougeole comme les autres exanthmes a un caractre des plus inflammatoires, d'o il faut conclure que la rtrocession de son virus doit produire une inflammation plutt qu'un catarrhe, surtout quand le sujet est trs prdispos l'in flammation ; la deuxime que l'asthme sec et convulsif dont la j e u n e liile souffrait, n'a pu avoir de connexion a v e c un catarrhe, mais bien avec une phthisie, dont la cause directe, selon les mdecins, est souvent l'asthme ; la troi sime que le critique confond la prostration proprement dite, dont la j e u n e fille n'a j a m a i s eu se plaindre, avec la diminution de forces et l'abattement qui sont le rsultat de la maladie ; et cela quand l'auteur m m e qu'il cite, dis tingue avec soin ces deux choses, considrant l a premire comme trangre la phthisie, et comptant la deuxime au nombre de ses s y m p t m e s particuliers ; la quatrime enfin, c'est--dire l'argument tir de la brivet de la maladie, n o u s avons fait une rponse un peu plus longue, parce qu'elle nous a paru m i e u x accueilli, par les illustres consulteurs de cette sacre congrgation ; nous lui avons oppos des arguments de raison, l'enseignement mdical, l'examen attentif de la maladie en litige, et enfin des exemples de maladies encore plus courtes, dont la nature, constate de visu, par d'habiles mdecins, ne peut laisser subsister aucun doute. i 33.Maintenant rentrons en lutte avec notre savant critique. Il ne faut pas nous objecter, dit-il, que chez Marie Rose on trouva runis tant de s y m p t m e s pouvant g a l e m e n t bien convenir u n e vraie phthisie ; car entre cette maladie et l'inflammation chronique des bronches,il y a une telle affi nit q u e les anciens donnaient cette dernire le n o m de phthisie pituitaire. Puis il allgue en sa faveur le tmoi gnage de Joseph Frank qui aprs avoir numr les s y m ptmes de la bronchite chronique, ajoute : On n e peut la distinguer d e l phthisie, que si l'on met en cause la con stitution du malade, les maladies antrieures, et surtout la marche de la maladie prsente. Enfin il insiste de nouveau sur la marche rapide de lamaladie, sur l'incertitude d'une pripneumonie antrieure, et sur le temprament relch de la malade l e q u e l , dit-il, prdisposait une affec tion catarrhale, mais n'impliquait aucune disposition la phthisie.
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134. Que r p o n d r o n s - n o u s c e l a ? De l'aveu m m e de notre adversaire il y a eu chez notre malade des s y m p t m e s qui peuvent g a l e m e n t rvler, soit une bronchite chronique, soit une vritable phthisie. Or, dans ce qui prcde, consid rant les prdispositions de la malade, ses maladies ant rieures, l'inanit des motifs allgus pour tablir l'existence d'une bronchite, nous avons conclu l'absence d'une b r o n chite ; donc nous pouvons ds maintenant, sans tre contre dits par notre critique affirmer avec certitude, que la ma ladie de Marie-Rose n'a t autre qu'une phthisie. Du reste, le texte de Frank, cit par lui est tout fait e n notre fa veur. S'il est vrai qu'on n e puisse distinguer u n e bronchite d'une phthisie, qu'en demandant des indications la consti tution du malade, aux maladies antrieures, et surtout la m a r c h e de la maladie prsente, il ne n o u s est assurment pas possible de rvoquer en doute l'existence d une phthisie. Car, ici nous avons c o m m e tmoins dposant pour n o u s : l'ge d'adolescence, le temprament plthorique, l'affection' asthmatique, u n e rougeole antrieure rentre, et une pri p n e u m o n i e n o n rsolue qui a produit la s u p p u r a t i o n et l'ul cration des p o u m o n s . 135. Nous laisserons c e u x qui ont lu ce qui prcde, j u g e r e u x - m m e s , si la brivet du t e m p s peut branler en quoi que ce soit nos c o n c l u s i o n s ; ils j u g e r o n t aussi, d'aprsl e s preuves que n o u s avons accumules, s'il peut rester u n .doute sur l'existence d'une inflammation antrieure. Mais, relativement au temprament de la j e u n e fille, le critique a retenu c o m m e de b o n n e prise deux petits m a l h e u r e u x mots du m d e c i n : temprament relch ; et il s'efforce de les i n terprter c o m m e dsignant un temprament phlegmatique, e x p o s aux phlgmases et aux catarrhes.Effort inutile. Qui c o n q u e e n effet, voudra relire la dposition du m d e c i n , se convaincra facilement, q u e dans cetendroit, il n'a pas voulu dsigner le t e m p r a m e n t , mais la constitution grle de la j e u n e fille, laquelle, facilement abattue par l'invasion de la maladie et oblige de lutter en m m e temps contre une af fection asthmatique^ l'acre virus d e l rougeole, et la dlica tesse des p o u m o n s , qui en rsultait, n'a pu produire l'effort suffisant pour rsister l'action inflammatoire, ni ragir assez pour la rsoudre. Voici ses expressions : Il survint une pripneumonie grave q u e n o u s avons s o i g n e inutilement. Un temprament r e l c h , u n asthme habituel invtr,l'af flux dans les p o u m o n s de l'humeur acre- de la rougeole, et leur faiblesse ds lors aussi grande q u e possible, lurent autant d'obstacles dans cette seconde maladie, u n e rso-
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lution favorable et complte. Ge qui prouve que par ces paroles : temprament relch le mdecin n'a pas pu indiquer un t e m p r a m m e n t lymphaliquo enclin au catarrhe, c'est non-seulement le contexte de la phrase, qui rend u n e telle signification absurde, mais encore sa rponse l'en qute, quand les j u g e s lui demandrent quel tait le temp rament de la j e u n e fille : Je rponds,a-t-il dit, que l e tem prament de la jeune lille tait plthorique. C'est tout ,1'opposd'un temprament phlegmatique. Il ne s'agit d o n c pas de celui qui est enclin au catarrhe, mais de celui qui prdispose aux inllammalions et la phthisie. Et ce n'est pas seulement le mdecin qui a ainsi caractris le temp rament de Marie-Rose, mais les tmoins m m e , dont notre
etre
malade, elle lait forte, robuste, blanche et rouge comme une cerise. Ge qui certes convient b e a u c o u p m i e u x un
temprament plthorique qu', u n temprament p h l e g m a lique. Si donc les tmoins et le m d e c i n s'accordent, pour attribuer la j e u n e lille un temprament plthorique, il est vident q u e l'expression, temperament relch, n e doit pas tre entendue d'un t e m p r a m e n t phlegmatique m a i s d'une constitution grle laquelle ne rpugnent n u l l e m e n t une sant parfaite, des couleurs vives, et des forces suffi santes, mais qui n a n m o i n s est plus facilement branle par la maladie qu'une constitution moins grle. On voit q u e l'argument tir des paroles du m d e c i n n'a aucune v a leur. 136. Cet- chappatoire ferm notre adversaire, r e v e nons un peu ses observations.Lors de la premire instance, aprs avoir a c c u m u l un grand nombre d'arguments p o u r tablir l'existence d'une vraie phthisie chez Marie-Rose, n o u s avons voulu mettre sous les yeux des Illustrissimes P r e s , comme u n rsum de toute la discussion : Pour cela n o u s avons fait'intervenir Busserius traitant de la phthisie qui succde la rougeole, et n o u s avons compar ce qu'il e n dit, avec ce qui s'est offert dans notre cas. Rurserius, avons-nous dit (1), a crit c e qui suit : De foutes les maladies qui s u c cdent la rougeole, surtout la rougeole maligne, la plus frquente est la pripneumonie qui survient inopinment v( pendant que les taches disparaissent, met les malades if dans le plus grand danger, et souvent les m n e au t o m beau.Quelque fois ia pripneunonie n o n rsolue se ter mine par s u p p u r a t i o n : alors l e s malades prouvent u n e {{) Resp. 23 et 24.
toux continuelle, ont des frissons le soir, sont tout en s u e u r le matin, et dprissent; les crachats expectors sont purulents ; si ces s y m p t m e s se joint u n e voix rauque, l'amaigrissement, une petite livre lente conti nue, on ne peut plus douter qu'il n'y ait phthisie p u l m o naire. "Voil ce que dit Burserius ; c o u t o n s maintenant le m d e c i n faisant l'historique de la maladie traite par l u i : Marie-Rose, dit-il, fut atteinte au c o m m e n c e m e n t du m o i s de mars, d'une rougeole p i d m i q u e , de mauvais augure, qui n'eut point de crise parfaite. 11 y e u t m m e rtrocession vers les p o u m o n s . . . et u n e p r i p n e u m o n i e grave se dclara,environne de tous s e s - s y m p t m e s . . . l'afllux vers les p o u m o n s de l'acre virus de la r o u g e o l e , et leur faiblesse, ds lors aussi grande que possible, furent autant d'obstacles, dans cette s e c o n d e maladie, une rsolution favorable et c o m p l t e . Elle se transforma en v o m i q u e (il et m i e u x dit, en phthisie ulcreuse), m a l a die qui ne manqua d'aucun de ses caractres particuliers, tels que voix rauque,toux, expectoration purulente, vre hectique, respiration beaucoup plus embarrasse q u e de c o u t u m e , marasme, sueurs n o c t u r n e s , diarrhe colliqua tive. Tous ces s y m p t m e s s'aggravrent de j o u r en j o u r , depuis le c o m m e n c e m e n t d'avril. 137. Aprs ces citations, d o n t la valeur, j e l'espre, ressortira encore m i e u x , de la prsente discussion, n o u s avons ajout fjamais on n e p u t voir deux choses plus ressemblantes) : on croirait que Burserius a s o i g n l u i m m e notre malade, observ avec soin les dbuts, les c h a n g e m e n t s , les s y m p t m e s de ses maladies, et qu'il a e n suite simplement transcrit ses observations dans son livre. Voil donc u n trs-savant auteur, qui aprs avoir fait 1 his toire de la maladie m m e qui n o u s occupe, et dcrit tous ses s y m p t m e s , c o n c l u t quon ne peut plus douter de l'exis
pulmonaire-
P e u t - o n , je vous le de
mande, douter srieusement que chez notre malade u n e vraie phthisie p u l m o n a i r e ne se soit dclare ds les d e r niers jours de mars ? 138. La critique fait ce qu'elle peut pour parer le c o u p qui lui est ici port. Nous y l i s o n s : L e dfenseur de la cause n'a pas raison de tant insister, sur l'existence d'une phthisie pulmonaire. E n vain pour l'tablir, m e t - i l en parallle les signes pathognomoiiiques dcrits parBursrius avec ceux qui sont dcrits dans le rapport du m d e c i n : Nous craignons bien qu'ici encore il n e se soitfait i l l u s i o n . P u i s , consacrant huit grands paragraphes, expliquer le
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mode de dveloppement de la phthisie pulmonaire, elle objecte d'abord, la dure bien plus longue des priodes, en s'attachantsurtout la priode d'ulcration. Elle n o u s e n tretient des cavernes, qui se forment dans le parenchyme des p o u m o n s , et de la matire qui s'y accumule. Elle dit que ces cavernes, peuvent s'tendre, se rtrcir, rester sta tionnmes, ou enfin se cicatriser, ce que prouve la gurison des malades. Elle affirme qu'une abondante expectoration de matires purulentes, loin d'tre un obstacle ce dernier rsultat, peut mme contribuer beaucoup dterger les ca vernes, et par c o n s q u e n t favoriser la formation d'une cica trice qui les recouvre.Enfin elle va chercher dans les auteurs nouveaux, des suppositions sur la possibilit d'une gurison sans ramollissement des tubercules, d'une cessation de la s crtion tuberculeuse due la prdominance du phosphate calcaire, et de la disparition des tubercules sans mtastase. 139. Reprenons en dtail, pour en bien examiner toutes les parties, cette m o n t a g n e d'objections. Et d'abord la critique craint que le mdecin traitant se soit tromp dans son a p prciation, bien que les s y m p t m e s sur lesquels il a bas son diagnostic concordent aussi bien que possible avec le s y n drome symptomatique dress parBurserius.pour la phthisie, quand elle doit son origine une mtastase ou au virus de la rougeole D'o vient cette crainte ?Elle n'a certainement pas sa raison d'tre dans la diffrence des s y m p t m e s , puis qu'ils sont les mmes de part et d'autre: Il faut donc qu'elle l'ait dans le m o d e de dveloppement et la dure, de la mala die qui n o u s occupe, parce que ces deux choses sont diff rentes dans la phthisie tuberculeuse. Mais si l'on n'a pas perdu de vue la distinction que nous avons faite en com menant, entre la phthisie hrditaire, ou constitutionnelle, ou primaire, et la phthisie secondaire, o n reconnatra faci lement qu'il s'agit dans notre cas d'une phthisie secondaire, succdant par mtastase une pripneumonie ; et que par consquent ou ne peut y rencontrer le mode de dvelop pement spcial la phthisie primaire, dont la tuberculose est une espce. Il suffit de regarder dans n'importe quel ou vrage de mdecine l'article phthisie, la description de la priode prparatoire de la phthisie constitutionnelle, pour se convaincre que cette dernire espce n'a rien de c o m m u n avec celle qui n o u s occupe.. Nous ne citerons, des auteurs trs-modernes, qu'un seul tmoignage, du reste trs-court, et titre d'exemple.uLaphthisie tuberculeuse,dit Eoichi ( I j , (1) Excrcitafc. palhol. vol. f, 161.
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esL une maladie aujourd'hui bien plus f r q u e n t e q u e dans les sicles prcdents, ce qu'il faut peut-tre attribuer notre manire de vivre moins bien rgle. Les premiers signes de cette maladie (sans parler de cette p h y s i o n o m i e que tout le m o n d e connat, et qu'on appelle phthisique) s o n t une grande prdisposition aux aifections catarrhales q u a u d i l y a quelque c h a n g e m e n t dans les c o n d i t i o n s de. l'air, des douleurs vagues dans la poitrine, une petite toux sche surtout aprs les repas ; plus tard,aprs q u e la per te s o n n e a prouv un plus grande malaise dans la rgion d u thorax et une certaine difficult de respiration, survient un c r a c h e m e n t de sang qui se renouvelle ensuite sans a cause apparente. Alors la toux devient plus c o n t i n u e et plus violente, avec expectoration de matires m u q u e u s e s , dans l'aprs-midi il y a quelques petits m o u v e m e n t s de fivre, e l l e corps c o m m e n c e dprir . - 1 4 0 . T r o u v c - t - o n quelqu'un de ces signes chez Marie-Rose? A u c u n . Chez elle la priode prparaloire de phthisie c o m m e n c e avec la rtrocession de la rougeole ; le virus rentr excite dans les p o u m o n s une violente i n l l a m m a t i o n , qui n e se rsout pas, et passe l'tat de suppuration ; de l ulc ration des p o u m o n s et phthisie confirme. Donc chercher u n e ressemblance entre deux maladies de nature si diverse, et dont les dveloppements suivent u n e marche si diffrente, c'est chercher l'impossible. D'autre part, v o u l o i r nier la r alit d'une phthisie parce que ses s y m p t m e s n e sont pas c e u x d'une phthisie tuburculeuse, et qu'elle n'a pas la m m e dure, c'est vouloir r a m n e r a u n e seule espce, les e s p c e s pour ainsi dire sans n o m b r e et trs diverses de la phthisie, pour n'en admettre qu'une : la phthisie tuberculeuse et c o n s t i t u t i o n n e l l e . Gela n'est pas permis ; par c o n s q u e n t il faut effacer parmi - les objections qui n o u s sont faites, tout c e qui a rapport aux diverses priodes de formation o u de ramollissement des tubercules, et tout ce qu'on a e m p r u n t aux dissertations d e l nouvelle cole, sur la manire dont p e u t s'oprer naturellement la gurison d'une phthisie t u berculeuse. 1 4 1 , Cependant c o m m e toutes les phthisies, q u a n d elles sont confirmes, arrivent se ressembler tellement qu'on n e peut plus ds lors les distinguer Tune de l'autre, sans connatre l'histoire de la maladie, et ce qui d t e r m i n e chaque espce, nous n e pouvons pas laisser sans r p o n s e cequ'on n o u s objecte concernant la deuxime p r i o d e ; et il n o u s faut examiner avec soin s'il est vrai q u ' u n e a b o n dante expectoration de pus puisse tenir lieu d'une d t e r -
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sion, grce laquelle les ulcres dj forms se.cicatrise raient. 142. Il faut avouer que cette discussion n'est pas sa place dans ce chapitre o nous ne n o u s occupons que de la nature de la maladie, pour rfuter ce qu.'on oppose son vrai diagnostic. Mais la critique nous oblige modifier notre plan. Nous allons donc, aprs avoir rappel s o m m a i rement les faits, les soumettre au j u g e m e n t de la raison, de la mdecine et de l'exprience. Il est certain, parce que cela rsulte des maladies antrieures, dos symptmes de suppura tion, et de l'aspect des matires expectores, que MarieRose a crach du pus, et du pus de mauvais caractre, des matires lies, des choses sales et infectes ; il est certain galement que les crachats sont devenus plus abondants mesure que la maladie-faisait des progrs : Ils devenaient dplus en plus abondants, sanieu et ftides. Il est certain enfin que cette expectoration a dur jusqu' la fin de la maladie, puisque la dernire nuit qu'elle a passe Rome, la malade se trouvait plus mal que d'habitude, tait
et avait toujours
de vilains
cra
143. Cette expectoration pouvait-elle procurer la gurison? Demandons-le d'abord au bon sens. Si la matire purulente se compose de parties dissoutes et liqufies, il est vident que la dissolution ou liqufaction persiste et s'alimente, tant qu'il y a abondance de crachats expectors. Par cons quent, si l'expectoration purulente dure jusqu' la fin, si d p l u s elle est abondante, il faut en conclure n o n - s e u l e ment que les ulcres ne se sont pas dtergs et cicatriss, mais, ce qui est aussi vident, que le principe destructif s'est constamment dvelopp, et que chaque jour la dissolution ou liqufaction de l'organe est devenue plus grande. C'est ce que confirme du reste la mauvaise nature des crachats. Nous avons vu quel est le signe d'une vritable ulcration : l'ulcre tant qu'il se dveloppe, abandonn l u i - m m e , devient plus impur, et gagne d'autant plus en surface q u e le pus a plus d'cret ( i ) . Donc l'abondance des crachats n'a pu indiquer autre chose qu'un agrandissement des ulcres et u n e dissolution croissante du parenchyme pul monaire. Enfin, n'est-il pas vrai que le m o t mme de r e purgation signifie limination des humeurs mauvaises, rtablissement des fonctions vitales, et c o m m e consquence des forces corporelles ? Si donc l'tat du malad,e empire au
(1) Richter : oc. cit.
lieu de s'amliorer, c o m m e il est arriv chez Marie-Rose, l'expectoration purulente devient le signe d'une consomption mais non d'une gurison. 444. A l'appui de ces observations, voici ce qu'apporte la mdecine assiste de l'exprience et de l'inspection des ca davres. Tous ceux qui o n t crit sur la phthisie ulcreuse ont compt au n o m b r e de ses symptmes p a l h o g n o m o n i q u e s , quand elle est confirme, l'expectoration purulente. Tous aussi, en termes diffrents ont dit la m m e chose que Bur serius : Des qu'on a constat dans les crachats la prsence du pus de mauvaise nature, il n'y a plus de doute p o s te sible sur l'existence d'une phthisie pulmonaire dj confirme (1) . Et en effet, si l'ulcre des p o u m o n s constitue la maladie, si la prsence du p u s , avec les autres s y m p t m e s , d n o n c e la formation c o m p l t e de l'ulcre, il est vident qu'il faut considrer l'expectoration purulente, c o m m e s y m p t m e p a t h o g n o m o n i q u e de la phthisie c o n firme. C'est ce qui a fait dire Folchi, m d e c i n lout m o d e r n e : Enfin, la fivre prend de l'intensit, en m m e a temps que la transpiration du m a t i n se montre plus abondante ; l'expectoration devient purulente, et c o n serve ce caractre jusqu' ce que le m a l a d e puis par le marasme et la diarrhe, meure paisiblement (2) . Du reste, c'est l une opinion tellement bien accrdite e n mdecine, qu'on perdrait son temps multiplier les cita tions. Cela pos, si les mdecins instruits par l'exprience, ont c o n s t a m m e n t enseign,et enseignent e n c o r e aujourd'hui, que le pus expector est un s y m p t m e p a t h o g n o m o n i q u e de l a phthisie confirme, c o m m e n t concilier avec cette doc trine, u n e doctrine oppose, d'aprs laquelle ce morne s y m p t m e serait o u pourrait tre u n indice de rpurgation et.de sant (3)? 145. Ce n'est pas t o u t . Les mdecins, aprs avoir (1) De morb. pect. | 56.
(2) Exercitat. pathol. vol. 1. 161.
tabli
(3) Mais pour faire vanouir sur-le-champ l,ous los doutes, mme dans l'hypothse possible (si tant est qu'elle soit possible), de la r purgation, il sufft de jeter les yeux sur la quantit du pus excrt. La sanie, en effet, ou des crachats bruts, pnants,des matires paisses, des crachats vilains, sanieux et ftides comme dans notre cas, ne pourront jamais signifier la coction de la maladie, ni par consquent, la rpurgation, niais seulement l'extension des cavernes, l'accrois sement du mal ; car l'esprance d'une rpurgation ne peut tre apporte que par un pus dfinitivement louable cl cuit. Il faudra en outre observer si la maladie est adoucie ou tend cesser par l'expec toration : comment, en effet, considrer comme crise heureuse ce que n'apporte aucun changement? Or nous ne voyons rien de sera-
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en principe que le crachement de pus est un signe p a t h o gnomonique de la phthisie confirme,ontenscign galement en s'appuyant toujours sur l'exprience, que la maladie arrive cette priode, laisse p e u ou point d'espoir de gurison. Mais si le crachement de pus pouvait produire Tefiet d'une rpurgation, ils auraient videmment d affir mer tout le contraire, et dire qu'il y a d'autant plus d'es poir de gurison que cette expectoration est plus a b o n dante. On ne nous fera pas admettre que la mdecine et l'exprience aient toujours t dans le faux. Il faut d o n c ncessairement convenir que les crachats purulents sont toujours un signe certain de consomption, jamais un signe de rpurgation, de rgnration des chairs et de la sant. 146. Cependant l'adversaire insiste et nous oppose des auteurs qui affirment avoir trouv plus d'une fois, en dis squant les cadavres, des p o u m o n s guris par cicatrisa tion, aprs avoir t atteints de phthisie. Nous avouons, que dans les questions en rapport avec les sciences nouvelles et les progrs des arts,nous n'avons pas u n e entire confiance (qu'on nous pardonne l'expression) en nos jeunes praticiens, quand ils affirment avoir vu ce que les anciens, beaucoup plus instruits qu'eux et faisant depuis des sicles des ex priences exactement pareilles,dclarent n'avoir jamais ren contr. Nous doutons donc que les cicatrices dont ils parlent soient de vraies cicatrices, provenant de vritables u l c r e s . Mais concdons le fait. On n e peut nier l'norme diffrence qu'il y a, relativement la fermeture, entre les plaies suppurantes et les ulcres. On sait q u e dans le premier c a s , sous un pus louable les chairs peuvent se rapprocher et se raffermir ; mais dans le second il n'en est pas de m m e : le rapprochement et l a consolidation des parties spares, ainsi que la rgnration de celles qui sont dtruites, est impossible, tant que toute la surface de l'ulcre n'est pas ramene l'tat de plaie suppurante (1). Or il est dj bien difficile d'obtenir cet heureux rsultat sur une partie
blablcdans noire cas. L'expectoration critique (dit Hildebrand, I n s t . praot. m d e c , tome III, 442, p. 195, de pneumoni) est caractrise par des crachais m u q u e u x , homogne, elloroscencos blanches, puriformes (appels communment cuits\ rejels sans difficults (la maladie tant dj mre) et avec u n soulagement sensible, copieux. Alors mme que l'on y remarquerait des traces rouge-jaunlrc de sang : ils peuvent et ils sont indices d'une crise favorable ; la seule condition qu'avec leur vacuation la maladie dcroisse avec les satel lites. {{) Yan Swieten ad Boerhaav. Aphor. 402.
LES SPLENDEURS DE LA. FOL e x t r i e u r e d u c o r p s ; e t Loul l e m o n d e c o m p r e n d c o m b i e n p l u s g r a n d e e s t l a d i f f i c u l t q u a n d il s ' a g i t d e s p o u m o n s . I c i l'a s t r u c t u r e d l i c a t e d e l ' o r g a n e , le s a n g q u i y a f f l u e , l e n o m b r e p o u r a i n s i d i r e infini d e s v a i s s e a u x q u i s ' y a b o u c h e n t offrent a u p r i n c i p e c o r r u p t e u r , q u i se d v e l o p p e c h a q u e j o u r , u n aliment tout p r p a r et facilement a t t a q u a b l e . A u s s i , l a s u p p u r a t i o n p l u s a b o n d a n t e e t p l u s fictive q u ' i l faudrait exciter et e n t r e t e n i r p o u r arriver la d t e r s i o n de l'ulcre n e servirait q u ' en a g g r a v e r b e a u c o u p le d a n g e r en l ' a i d a n t d v o r e r le p o u m o n d j a t t a q u ; e t c e p e n d a n t o n n e p e u t n u l l e m e n t e s p r e r q u e l ' u l c r e se d t e r g e e t s e c i c a t r i s e d e l u i - m m e : la d t e r s i o n r p u g n e sa n a t u r e , q u i est d ' a c c u m u l e r c h a q u e j o u r u n e plus g r a n d e q u a n t i t de m a t i r e i m p u r e , e m p r u n t e l'crel des h u m e u r s ; la c o h r e n c e n e p e u t t r e e s p r e t a n t q u e ces m a t i r e s i m pures n ' o n t pas disparu, parce qu'elle est impossible entre d e s p a r t i e s m o r t e s . D e l c e t t e s e n t e n c e d ' H i p p o c r a f e s (1) : Les ulcres n o n dfergs, n e veulent pas se refermer, q u a n d m m e o n e n r a p p r o c h e les p a r t i e s ; p l u s f o r t e r a i s o n ils n e se c i c a t r i s e n t p a s d ' e u x - m m e s . 1 4 7 . D o n c q u a n d m m e il f a u d r a i t a d m e t t r e c o m m e p o s sible la coalesccncc des t u b e r c u l e s , o n n e g a g n e r a i t r i e n n o u s l ' o p p o s e r . D a n s n o t r e c a s , e n effet, n o u s n ' a v o n s p a s c e p u s b l a n c , d ' u n e c o n s i s t a n c e assez a n a l o g u e celle d e la c r m e , g r a s a u t o u c h e r , u n i s u r t o u s les p o i n t s d e s a surface, parfaitement h o m o g n e , i n o d o r e , qui est l'indice d ' u n e s u p p u r a t i o n s i m p l e , el p a r c o n s q u e n t d e b o n a u g u r e ; n o u s a v o n s a u c o n t r a i r e d e s crachats infects, des m a t i r e s l i e s , une sale matire, des crachats de plus en plus abondants, sanieux et ftides, q u i s o n t l ' i n d i c e v i dent d'une corruption ou d'un ulcre vritable, et selon l ' e x p r e s s i o n d ' H i p p o c r a t e e m p l o y e a p r s lui p a r t o u s les a u t r e s m d e c i n s , d e trs-mauvais augure ( 2 ) . M a i s l a i s s o n s p l u t t p a r l e r A r t e . A l ' a r t i c l e d e s purulents (il a p pelle ainsi ceux qui sont atteints d'emp3 me et de phthisie) il r s u m e e n p e u d e m o t s b e a u c o u p d e c h o s e s q u e n o u s a v o n s d i t e s : E n s o m m e , d i t - i ! e n t e r m i n a n t la q u e s t i o n d e s c r a c h a t s p u r u l e n t s , s'ils s o n t b l a n c s , b i e n c u i t s , i n o d o r e s , u n i s , a r r o n d i s ; si i l s s o n t f a c i l e m e n t e x p e c t o r s , ou p a s s e n t d a n s les s e l l e s : d a n s ce cas, r e g a r d e z - l e s c o m m e
r
(1) De ulcre cap 4, apud Van Swcten raox cit. (2) Swititen, ad aplior, 2S7. (3) Le pus louable est blanc, prsente une surface unie el lisse, n ' a point de mauvaise odeur; quand il a des caractres lout opposs, il est de trs mauvais augure. Pronosi, ap. Van Swieten.
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inoffensifs et salutaires; mais s'ils sont trs-ples, bilieux, if et si leur surface n'est pas unie, ils sont mauvais ; bien plus mauvais encore, quand ils sont livides ou noirs, car alors ils indiquent la dcomposition et l'ulcre arriv son dernier terme. Cependant il est bon de considrer e n mme temps la tournure que prend la maladie et les symptmes concomitants : Si le malade supporte f a c i l e a ment l'expectoration, n'a point de fivre, digre bien, conserve ses couleurs, n'a pas de rpugnance pour les aliments ; s'il tousse sans fatigue, si le pouls est vif, si enfin ses forces se soutiennent, il est hors de d a n g e r ; < mais si la fivre s'empare de lui et si tous les autres c symptmes s'aggravent, il faut dsesprer de le s a u ce ver (1). 148. Assurment rien ne convient mieux que ce texte d'Arte, pour rpondre l'objection qu'on nous fait. Ad mettons que les tubercules en suppuration puissent se c i catriser ; quel caractre doit .alors offrir le pus qui en sort, pour qu'on voye poindre l'espoir d'une gurison ? Nous le savons, et n o u s savons aussi que la sanie expectore par notre jeune fille, n'avait point ce caractre, mais un caractre tout oppos. Elle n'avait pas une consistance uniforme de matire lie ; elle n'Lait point blanche, mais de couleur sale, sale matire ; ce n'tait point une matire cuite, mais crue et acre, crachats sanieux. Par consquent elle n'tait point l!indice d'une rpurgation, elle n'annonait point la runion des parties, mais elle accusait une con somption et des ulcres rongeurs. Maintenant de l'exa men des crachats, passons l'examen de la malade, ce qu'il importe de ne point ngliger quand on veut formuler un pronostic, et v o y o n s quelle tournure la maladie avait prise chez Marie-Rose, Est-ce qu'elle supportait facilement l'ex crtion et digrait bien? Elle avait le corps en dissolution^) une diarrhe colliquativc. 13st-ce qu'elle n'avait point de fivre? Elle avait une fivre lente et continue. Est-ce qu'elle avait conserv ses couleurs? Elle ressemblait une moribonde, elle tait devenue un cadavre. Est-ce qu'elle toussait et crachait sans trop de fatigue? Elle avait une toux sche. Ele toussait, toussait toujours et n'avait point de repos. E s t - c e qu'au moins ses forces se s o u tinrent ? Elle n'avait pas la force de se mouvoir elle ne pouvait pas se soutenir. 149. Je vous le demande, peut-on rien imaginer qui soit
(I) De ciuisiset notis diuturuor. affccluum, l i b . I, chap o. vr. 17
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en plus formelle opposition avec ces s i g n e s , qui selon Arte et les autres m d e c i n s doivent a c c o m p a g n e r l'excrtion d'un bon pus pour qu'on puisse prononcer ce j u g e m e n t : le malade est hors de d a n g e r ? Non, ici tout a n n o n c e la des truction et la dissolution ; tout confirme le mauvais carac tre de cette sanie, qui est un s y m p t m e de consomption et d'ulcres rongeurs ; tout appelle sur la tte de notre malade cette triste sentence : Il n'y a point de gurison esprer. Que ceux donc qui elle parat tant sourire, admettent s'ils le veulent l'hypothse d'une repurgation et d'une consolidation spontane des tubercules : jamais ils ne pourront lui trouver place dans notre c a s , o les crachats sanieux et la mauvaise tournure de la maladie, loin de faire souponner une repurgation, ont au contraire accus nette* m e n t la c o n s o m p t i o n des p o u m o n s et le dprissement de tout le corps. ISO. Revenons notre discussion, e n la reprenant au p o i n t o nous l'avons laisse, et s u i v o n s notre adversaire. P o u r rfuter les objections faites au vrai diagnostic de la maladie, il n e n o u s reste plus, ce n o u s s e m b l e , qu' discuter rapidement l'opinion mise d'aprs laquelle, l'affection de Marie-Rose se rapporterait un asthme h u m i d e (1). L'asthme peut-tre considr en l u i - m m e , ou dans les maladies qu'il e n g e n d r e ; dans les deux cas, il est galement impossible de rapporter ce type la maladie de Marie-Rose, Voici, dit Arte les s y m p t m e s de l'asthme s o n dbut : Les malades prouvent une sensation de pesanteur dans la poitrine, m a n q u e n t d'nergie pour s'occuper de leurs travaux habituels ou de tous autres, ont la respiration difficile et pnible pour peu qu'ils courrent, o qu'ils marchent en m o n t a n t ; ils sont enrous et toussent, ils s o n t anormalement i n c o m m o d s par des flatuosits et des ructations, n e dorment pas, se rchauffent p e u et diffi c i l e m e n t la nuit, leurs narines sont c o m m e au guet, toujours prtes aspirer ; si le mal fait des progrs, les a p o m m e t t e s des j o u e s se colorent, les y e u x sortent de leurs orbites, c o m m e s'il y avait strangulation, les ma lades ronflent sans dormir, et plus forte raison quand ils dorment ; ils veulent beaucoup d'air, et de Pair frais, (1) Nous n'avons pas parler du catarrhe aigu dont il est galement question dans les objections. Nous en avons dit autant et plus qu'il n'en faut sur le catarrhe. Du reste, il n'y a pas de catarrhe aigu qui puisse durer soixante-douze jours : ni qui offre dans ses symptmes, dans la fivre notamment, cette rmittence qui convient exclusive ment une suppuration, et qui est bien accuse dans notre cas.
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se promnent au dehors parce q u e toutes les maisons leur paraissent basses et troites, se lvent pour aspirer comme s'ils voulaient absorber tout l'air en l'attirant eux; leur visage est ple, except les pommettes qui s o n t rouges ; la sueur ruisselle autour de leur front et de leur c c o u ; ils rejettent en petite quantit des m u c o s i t s f filantes, froides assez semblables l'cume et m o u s s a n t comme elle ; leur gorge se gonfle chaque inspiration t( d'air; leur poitrine est rentre, leur pouls petit, frquent, dprim, leurs jambes dcharnes ; et si tous ces symp tomes viennent s'aggraver encore, il n'est pas rare que les malades soient trangls c o m m e dans l'pilop sic (1). Est-ce que tels ont t les dbuts et les progrs de la maladie de Marie-Rose? Chez elle, il n'y a pas d'autres dbuts qu'une rougeole r e n t r e , et une p r i p m e u monie, ni d'autres progrs qu'une suppuration et une ulc ration des p o u m o n s , c'est ce que tous les s y m p t m e s ont mis en vidence. Comment d o n c pourrait-on rapporter la maladie un a s t h m e ? l o i . Mais restreignons m a i n t e n a n t la question au cas particulier de l'asthme h u m i d e . L'asthme humide, dit Burserius, se reconnat une toux humide : avec respiu ration sifflante et slertoreuse, que soulage l'excrtion de quelques m u c o s i t s . 11 a ses alternatives d'exacerbalion et-de rmission, qui correspondent une a u g m e n t a t i o n ou une diminution des h u m e u r s a c c u m u l e s dans les bronches, mais n'offre jamais d'intermittence tant q u e la maladie n'est pas c o m p l t e m e n t gurie Les autres symptmes, c o m m u n s du reste toute espce d'asthme, sont l'anxit dans la rgion prcordiale ; un pouls petit, ingal, intermittent, t r s - l e n t ; des palpitations de c u r ; la couleur rouge, livide o u ple, d u visage ; des exacer btions le soir o u pendant la n u i t , ou mme e n c o r e chaque m o u v e m e n t du corps ; l'altration de la voix ; le froid des extrmits \ un besoin de quitter le lit et d'ou vrir les fentres ; une agitation violente dans les p a u l e s , *. les bras, la c a g e thoracique et l'abdomen ; la distension des ailes du nez ; le tremblement ; la crainte d'tre suffo que, et d'autres semblables(2). Il suffit de rapprocher c e s symptmes et la maladie de Marie-Rose, pour constater u n e parfaite antithse. Chez elle, la toux n'est pas humide, m a i s sche, c o m m e celle des phthisiques, tant que la s u p p u r a (l)De causis et not. diutur. affect. cap. n, de asthmate. (2) De diffleili respirations 204, 205.
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t i o n des poumons ne la rend pas forcment h u m i d e ; la respiration n'est ni sifffante, ni stertorevse ; elle n'prouve
point de soulagement
par s o u l a g e m e n t on n e veuille entendre l'appaisemont de l'inflammation qui est le signe d'une suppuration et par c o n s q u e n t d'un tat plus g r a v e ; elle ne se plaint pas
d'anxit dans la- rgion prcordiale, ni de palpitations de cur ; son p o u l s n e s t pas petit, inrgal, intermittent, trslent, mais il est c o n s t a m m e n t fbrile ; sa voix n'est pas al tre ; elle ne ressent n i froid aux extrmits, ni besoin de se lever et d'ouvrir les fentres, ni agitation dans les paules, les bras, la rgion thoracique, l'abdomen.
J
\ 152. Restent s e u l e m e n t quelques s y m p t m e s n o n contre d i t s ; ce sont d'abord : les alternatives exacerbation et de rmission, la non-intermittence, la pleur du visage. Or il e s t vident q u e ces trois signes appartiennent galement bien la phthisie : le premier s'y rencontre, plus apparent, il est vrai, que rel, h cause de la continuelle succession des inflammations partielles et des suppurations subsquentes ; le deuxime tient la nature m m e de la maladie ; le troisime enfin fait partie de l'maciation gnrale du corps. Quand exacerbation priodique, le soir et durant lanuit, on l'observe gnralement dans toutes les maladies g r a v e s ; et, dans la phthisie en particulier, elle est due au redoublement de la fivre hectique vers le soir. Enfin t'ag gravation du mal chaque mouvement du corps est encore assez un s y m p t m e frquent dans la phthisie ; et la crainte d'tre suffoqu est propre aussi de l'orthopne dont souf frait notre jeune fille. E n un mot, si Ton trouve chez MarieRose quelques signes pouvant convenir l'asthme humide, c'est parce que ces signes n e sont pas tellement propres c e t t e maladie qu'ils ne puissent aussi parfaitement convenir la p h t h i s i e ; mais chez elle, les s y m p t m e s vrais et pathog n o m o n i q u e s de l'asthme h u m i d e font c o m p l t e m e n t dfaut. 153. Par contre, n o u s en trouvons u n , qui selon les m d e c i n s , fait ordinairement dfaut dans l'asthme : c'est la livre. Rellini explique ainsi l'absence de fivre chez les a s t h m a t i q u e s ( l ) : L a fivre, dit-il, ne pouvant tre produite que par un vice du sang, soit clans sa c o m p o s i t i o n , soit dans son m o d e particulier de circulation ; il est vident qu'une simple difficult de respiration, qui n'implique pas d'altration du sang, et ne produit dans sa circulation a u c u n dsordre de nature dterminer la fivre, doit
(1) De morb.pect. cap. Difflcilis respiratio.
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tre sans fivre. Or la maladie de Marie-Rose a c o m menc par la fivre de la rougeole, laquelle a succd une fivre inflammatoire , puis est venue la fivre de s u p puration, et en dernier lieu une fivre hectique c o n t i n u e : Donc, considre dans ce qu'elle a de trop c o m m e dans ce qui lui m a n q u e , elle exclut absolument l'hypothse d'un asthme. 154. Mais, n o u s dira-t-on, Bellini, dans le texte m m e que vous citez, affirme que l'asthme peut occasionner u n e altration du sang suffisante pour produire la fivre. Nous en c o n v e n o n s : mais ne voit-on pas que,dans ce cas, il n'est plus question d'une livre asthmatique, mais d'une fivre symptomatique se rapportant une maladie occasionne par l'asthme? Il ne s'agit donc plus de l'asthme, mais d'une tout autre maladie. De l u n e remarque de Gorterus quand il d o n n e la dfinition de l'asthme (1): On appelle asthme, dit-il, une respiration difficile et fatigante, h a bituelle o u intermittente, qui n'est point accompagne de fivre moins qu'il ne s'agisse d'une fivre symptoma-
tique se rapportant
et
a qui n'ayant pas sa raison d'tre dans un e m p y m e ou u n e phthisie, doit tre attribue une cause morbide interne et chronique Voici, du reste c o m m e n t Bellini que n o u s avons cit, explique l u i - m m e ses paroles (2) : Bien q u e c o m m u n m e n t il n'y ait point de fivre dans a u c u n e d e ces respirations difficiles (il parle de la dyspne, de l'asthme et de Torthopne qu'il a successivement dfinis) il est possible cependant qu'elles se compliquent d'une.livre, soit parce qu'elles procdent de maladies qui i m pliquent la fivre, soit parce q u ' e l l e s - m m e s en certains cas sont causes indirectes de cette fivre : supposons par exemple, que le p o u m o n soit tellement c o m p r i m qu'il en rsulte une pripneumonie, il y aura respiration diffi cile produisant indirectement la fivre, parce que la fivre est ncessairement lie une inflammation du pou mon. Mais il est clair qu'il s'agit alors d'une livre de p ripneumonie, et n u l l e m e n t d'une fivre d'asthme. 135. Supposons maintenant q u e la pripneumonie, qui a succd a l'asthme, rsiste au traitement, et, ne se r solvant pas, donne lieu la suppuration et des ulcres : alors on n'aura plus un asthme mais une phlhisie d'asthme. Plus les accs sont frquents, dit Sprengel (3j, plus (1) Prax, med. systm. 331.
(2) Loc. cit.
(3) Iustit medic.,vol. 7. Seu pataolog. specialis, vol. 2, *5I4. Asthme adultorum.
il est craindre que l'asthme se c h a n g e en une autre maladie. Un bruit de b o u i l l o n n e m e n t qui accompagne la respiration, et la rend, c o m m e l'on dit, stertoreuse ; une toux h u m i d e , des crachats sanieux o u mles de sang ; des douleurs fixes dans u n e partie de la poitrine ; la fivre qui se dclare, quand auparavant il n'y en avait p o i n t ; la maladie d'abord intermittente o u priodique, devenant continue : tels sont les signes de sa transformation en
phthisie pulmonaire.
Il ne faudrait pas assurment s'tonner de rencontrer dans ce cas, des s y m p t m e s pareils . c e u x qui se sont montrs chez Marie-Rose. Car, ainsi q u e n o u s en avons souvent fait la remarque, t o u t e s les phthisies confirmes ont entre elles u n e ressemblance parfaite. Mais qu'en pourrait-on conclure contre n o u s ? U n e seule c h o s e : C'est q u e la maladie de Marie Rose a t u n e phthisie d'asthme ; ce qui serait toujours la rapporter une phthisie. Or cette h y p o t h s e a certainement contre elle le dbut et les progrs de la maladie. Il faut donc la rejetter. Il faut g a l e m e n t rejeter celle d'un asthme s i m p l e considr en l u i - m m e , ou abstraction faite des c o n s q u e n c e s qu'il peut avoir: c'est ce que dmontrent, le dfaut complet de res semblance dans les s y m p t m e s , la continuit et la marche rgulire de la maladie, et la prsence toujours constate de la fivre. Par consquent quelque point de vue qu'on se place, l'hypothse d'un asthme doit tre rejette n o n moins q u e celle d'un catarrhe aigu o u chronique. 157. Avant de quitter ce terrain du vrai diagnostic, r e connaissons le c h e m i n parcouru. Aprs u n e discussion gn rale sur l a p h t h i s i e , n o u s avons d m o n t r , dans le paragraphe ^prcdent, l'existence d'une phthisie confirme chez MarieR o s e : il nous restait rsoudre dans c e l u i - c i les objections de n o s adversaires. Nous avons d m o n t r d'abord contre le savant critique qu'il n'est n u l l e m e n t difficile d'tablir le diagnostic d'une phthisie confirme, c o m m e celle de MarieR o s e ; que, toutes les observations ou autorits contraires, taient inapplicables notre cas, qu'il et t c o m p l t e m e n t inutile de recourir l'analyse des crachats, o u l'auscul tation. Ensuite, avec notre savant critique et les observa tions dont il appuyait sa thse, n o u s avons rejet toute h y p o t h s e d'une v o m i q u e , nous avons tabli que chez Marie-Rose la phthisie n'a pas d son origine u n e v o mique, mais a des ulcres qui se sont ouverts i m m d i a t e m e n t ; et c o m m e l'adversaire rvoquait en doute le fait d'une inflammation principe de ces ulcres, n o u s l'avons
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maintenue et prouve. Et c o m m e il nous opposait encore la supposition d'un catarrhe chronique ou bronchite, n o u s avons compar les causes et les symptmes d'une bronchite avec les causes et les s y m p t m e s d'une pripneumonie, et fait voir, par cette comparaison, que l'hypothse d'une bronchite n'est, pas admissible. Quant aux autorits in voques par lui, n o u s les avons retournes contre l u i ; et en mme temps nous avons convaincu la critique d'erreur, lorsqu'elle donnait la maladie le n o m de catarrhe a i g u . Puis, nous avons discut les objections de l'minent p r o moteur, tires de ce que dans la phthisie tuberculeuse la marche de la maladie est plus lente et tout autre ; nous* avons montr d'abord que c e t t e phthisie n'existait pas dans notre c a s ; et ensuite, c o m m e rponse premptoire h toutes les objections runies, nous avons prouv qu'une expectoration abondante de pus, loin de pouvoir tenir lieu d'une rpurgation, est au contraire le signe bien vident une aggravation dans l'tat de la maladie. Enfin, pour exclure Phypothse d'un asthme h u m i d e , n o u s en avons dcrit tous les s y m p t m e s ; et les comparant avec c e u x de la maladie de Marie-Rose, n o u s avons conclu que l'asthme quand il est seul, est une maladie toute diffrente,et n'arrive lui ressembler que quand il a la phthisie pour consquence, autrement dit quand il y a phthisie d'asthme : ce qui n'est pas ici supposable. Passons maintenant u n e autre question.
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p o u m o n s s u c c d e la s u p p u r a t i o n (1). Car q u o i q u e les s u p purations individuellesqui succdent chaque inflammations des p o u m o n s n e soit e n ralit q u e des v o l u t i o n s e t des progrs d u p r o c d dltre, elles p r s e n t e n t a u t a n t d'appa r e n t e s r m i s s i o n s d u m a l , c a r a c t r i s e s p a r la d i m i n u t i o n d e l a fivre, p a r u n e respiration m o i n s s c h e , p a r u n c e r t a i n r t a b l i s s e m e n t d e s f o r c e s ; e l l e s n e f o n t q u e correspondre a u t a n t d e p r i o d e s s u c c e s s i v e s d a n s la m a r c h e c r o i s s a n t e d u m a l . D ' o ; . i l a r r i v e que, t r o m p s p a r c e t t e malignit i n s i d i e u s e d e l a m a l a d i e , l e s p h t h i s i q u e s c r o i e n t se p o r t e r m i e u x ; i l s se p r o p o s e n t le dpart p o u r la c a m p a g n e , q u a n d la m o r t v i e n t les s u r p r e n d r e , G o r t e r u s t a i t d e c e t avis (2). Voici u n e o b s e r v a t i o n m d i c o - p r a t i q u e r e m a r q u a b l e d a n s les m a l a d i e s inflammatoires internes et dans certaines inflammations e x t e r n e s . L a d o u l e u r e t l a fivre a u g m e n t e n t d ' i n t e n s i t j u s q u ' la n a i s s a n c e d u p u s ; la d o u l e u r s'apaise ensuite d ' u n e m a n i r e s e n s i b l e , la fivre d i m i n u e , d ' o j e c o n c l u s q u e les s y m p t m e s de l'inflammation p e u v e n t d i m i n u e r sans l a gurison d e la m a l a d i e . L ' i n f l a m m a t i o n s ' e s t r s o l u e e n s u p p u r a t i o n . L ' e x p r i e n c e j o u r n a l i r e l e p r o u v e b i e n . Il m o n t r e r a i t trop qu'il n ' a j a m a i s observ les p h i h i s i q u e s c e l u i q u i , e n p r s e n c e d e l a p u i s s a n c e d e s c a r a c t r e s pathog n o m o n i q u e s , p r e n d r a i t ces a l l g e m e n t s a p p a r e n t s de la m a l a d i e p o u r u n e v r i t a b l e dcroissance d u m a l . 159. D a n s la p h t h i s i e , p l u s q u e d a n s t o u t e a u t r e m a l a d i e , ce n ' e s t p a s d a n s u n allgement a p p a r e n t (indice p l u s o r d i n a i r e d ' u n e lin p r o c h a i n e ) , q u ' i l f a u t c h e r c h e r l e p r o n o s t i c d ' u n e r m i s s i o n vritable, l a q u e l l e s e c o n s t a t e p a r l ' a b s e n c e o u la d i m i n u t i o n v i d e n t e d e s s y m p t m e s . A r t e cit p l u s h a u t le disait bien: o n c o n s t a t e alors chez le m a l a d e e x c r t i o n b i e n s u p p o r t e , a b s e n c e d e fivre, d i g e s t i o n b i e n faite, b o n teint, b o n a p p t i t , e x p e c t o r a t i o n facile, pouls r g u l i e r , f o r c e s s o l i d e s . <Mais u n e r e s p i r a t i o n difficile, u n e t o u x v i o l e n t e , u n e fivre c o n t i n u e , l a d i a r r h e , d e s s u e u r s froideSjdpensant l e s s u c s n u t r i t i f s e t l e s f o r c e s a n i m a l e s , d e s c r a c h a t s purulents d e v e n u s p l u s a b o n d a n t s , u n a m a i g r i s s e (1) Car le parenchyme entier des poumons n e s'enflamme pas et ne se dtruit pas en u n e seule fois, niais seulement par parties la constitution mme des viscres aidant, car on sait que le poumon se divise en grands lobes, lesquels se subdivisent a. leur tour en lobes plus petits ; que le rameau des artres pulmonaires v i e n n e n t chacun de ces lobes, les grands rameaux a u x grands, les petits a u x petits, et que les vaisseaux sanguins d'un lobe n'ont aucune c o m m u nication avec ceux d'un autre lobe, cause des membranes ou des cloisons qui s'y opposent. Van Swielen ad Bocrhave aphor. 206. (2) Ad flippocr. Aphor., 47, 4 , lib. 2.
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ment continu, la perte totale ou presque totale des forces nous apprendront, d'une manire vidente, non-seulement que la maladie resle au mme degr, mais qu'elle s'aggrave continuellement,tandis que dessnppurations partielles offri ront parfois une fausse apparence de soulagement. 160. Pour juger de la permanence de la maladie, tudions attentivement ses caractres et leur intensit, ayons tou jours devant les yeux les phases diffrentes du mal, pour viter toute confusion d'ide. 161 .A la suite d'une pripneumonetrs-grave cause par le mouvement rtrograde du virus morbilleux, Marie-Rose d e vint phthisique; aigu d'abord, la maladie est devenue chro nique. La phtisie par rapport aux pripneumonies aigus est toujours chronique, bien qu'elle m m e soit aigu. Mais dj dans la pripneumonie aigu, la nutrition 'cesse, les forces musculaires font totalement dfaut, le danger de mort est trs-prochain. Si la suppuration survient, si les poumons s'ulcrent, en un mot, si la pripneumonie s e change en phthisie bien prononce, le danger de mort est ga lement certain ; mais il n'est pas aussi prochain que dans l e premier cas. De plus cette suppuration use en quelque sorte la fivre, la violence de la maladie diminue, les forces repren nent quelque peu, le malade semble se porter un peu mieux. 162. De ce m i e u x extrieur aux yeux, u n mdecin expri ment ne tire q u e cette induction : affection chronique trsgrave ou mortelle, si elle suit son cours ; la gurison en est certainement trs-difficile et tout fait douteuse. Comme la phthisie consiste dans uneactiondltere produiteau sein des poumons par des inflammations et suppurations successives et partielles 5 v i d e m m e n t u n e diminution successive et p r o gressive des s y m p t m e s suppuratifs et leur disparition c o n jointement avec le rtablissement du malade, offriront seuls des chances de salut. Examinons soigneusement si cette di minution ou-cessation des symptmes s'est manifeste chez Marie-Rose devenue phthisique, . Mazzano, pendant le voyage o u Rome (1).
(1) En vain notre savant critique accumule trs-habilement les mots suivant : La rougeole rentra... Elle se trouva plus mal... On lui donna le Viatique... On croyait qu'elle serait bientt morte... Il parat' qu'elle commena aller un peu mieux... Elle SR levnil de son lit... Elle voulait s'habiller... Le bton la main, clic commena faire quelque pas dans la chambre. Je dis en vain... car les pre miers symptmes ne regardent point la phthisie, mais la periode aigu de ia maladie cause par quelqu'une de ces inflammations p a r tielles, lesquelles pendant qu'elles exercent avec plus de violence leur action ltere, scmbleiu indiquer le danger de mort. Les
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163. Pour le premier point, le mdecin qui avait affirm avoir reconnu la nature d e l maladie un essoufflement plus prononc, la difficult de se tenir c o u c h e (difficult qui forait la pauvre malade se tenir le tronc un peu dress), la rougeur des p o m m e t t e s , la fivre ralentie par suite de la suppuration, enfin aux sueurs, la diarrhe, la c o n s o m p t i o n et aux i n s o m n i e s , la quantit plus grande de crachats sanieux et ftides ; le m d e c i n , dis-jc aprs avoir numr ces s y m p t m e s , afait cette dclaration: J'atteste que les s y m p t m e s , tels qu'ils se sont succds, dans l'ordre que j'ai marqu ci-dessus,ne se sont jamais af< faiblis,mais au contraire qu'ils ont toujours t e n a n g m e n c tant, la malade n'ayant jamais prouv a u c u n e amliora it t i o n . . . Marie-Rose n'a jamais prouv a u c u n e a m l i o r a it t i o n , bien au contraire elle a toujours t de mal e n pis ; aussi, bien que je la visitasse, on peut dire qu'elle tait abandonne, puisque l'art n'avait pas de r e m d e qui put la gurir... Tel tait l'tat dans lequel se trouvait la m a ti lade quand j e lui fis ma dernire visite Je ne saurais prsent dterminer d'une manire prcise le jour o j'ai vu pour la dernire fois Marie-Rose dans son tat de ma ladie; mais je puis du m o i n s affirmer que ce n e fut pas plus de deux jours avant son dpart de M a z z a n o ; et je m e rappelle bien que dans cette dernire visite j e la trouce vai, son ordinaire, oppresse et accable. Mais c o m m e la confiance de la malade et de la mre rclamait le p l e - rinage de R o m e : J e dis au chirurgien q u ' o n pouvait leur laisser faire tout ce qu'elles voudraient. P o u r m o i le cas tait dsespr, et je m e disais qu'autant valait p o u r la j e u n e fille mourir R o m e ou dans le trajet qu' Maz zano. 164. Il est vrai que la dposition judiciaire du dfunt c h i rurgien avant la gurison n o u s fait dfaut, n o u s connais sons cependant son opinion. Elle n o u s est fournie par s o n t m o i g n a g e relat ailleurs, et par celui des t m o i n s auri culaires. 11 disait : l'autorit mdicale, la raison et l'esp ce rience p r o c l a m e n t que cette maladie est m o r t e l l e . Elle d o i t tre rpute mortelle chez Marie-Rose s u r t o u t , c o m m e n o u s l'assurons plus loin. Car elle tait a c c o m p a gne de ses s y m p t m e s caractristiques insparables : entroisicnies constituent les rmiltencos solennelles qui semblent une sorte de .trve accorde la vie en pril, et ne sont en ralit que l'effet de mouvements lents et difficiles des muscles qui ne seront pour aucun homme clair l'indice de la cessation ou de la rmission relle de la maladie.
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ff rouement, toux, expectoration purulente,rcspiration beau coup plus difficile que de c o u t u m e , langueur, c h a q u e n u i t transpiration, diarrhe colliquative. Tous ces symptmes depuis le c o m m e n c e m e n t d'avril dernier grandirent de jour en jour ainsi que la crainte et le dsespoir d'une gurison. Ce tmoignage il l a rpt plusieurs fois au mdecin et d'autres personnes. Le mdecin dit : Les signes et les preuves que j'ai rapportes plus haut m e firent juger que la gurison tait impossible. Tel tait aussi le sentiment du dfunt Jacques Sgarzi, c o m m e il m e l'a souvent m a nifest Sgarzi et m o i nous avions dclar la maladie tout fait incurable Tous deux n o u s avions perdu ab solument tout espoir de voir gurir la jeune fille Le chirurgien , considrant la gravit du m a l , regardait c o m m e impossible pour la j e u n e fille l'accomplissement d'unpareil v o y a g e , c t i l crut devoir l'en dtourner, trs persuad qu'elle pouvait bien mourir en chemin. Ces paroles sont confirmes par la dposition d e l mre de la gurie. Les susdits : mdecin et chirurgien venaient toujours la voir ; mais ils disaient qu'il n'y avait point de remde et que la jeune fille en mourrait. La c o u s i n e de la miracule dit son tour: le m d e c i n et Jacques Sgarzi notre chirurgien nous disaient clairement que Marie-Rose mourrait certai nement, qu'il n'y avait ni remde, ni espoir... Le susdit chi rurgien n o u s disait que les p o u m o n s de Marie-Rose taient entirement gts, qu'ils taient c o n s u m s Le m decin et le chirurgien ne d o n n a i e n t point d'espoir que Marie-Rose pt g u r i r ; mais ils disaient qu'elle mourrait srement ; et cause de cela ils n e voulaient pas que n o u s la portassions R o m e , ils' croyaient pour sur qu'elle n e reviendrait jamais Mazzano. Le t m o i n soixante-seizime a dit : je savais qu'elle allait trs-mal, que c'en tait fait d'elle ; c'est ce que m e disait Monsieur Jacques Sgarzi, chi rurgien, maintenant dcd ; et cause de cela m o n ide tait que la j e u n e fille ne pouvait pas du t o u t gurir, il m'a toujours dit la m m e chose. En parlant du dpart de la jeune fille il a j o u t e : il m e sembla voir un vrai cadavre, et il y en avait qui disaient que Marie-Rose ne reviendrait point, Sgarzi disait qu'il n'y avait qu'un saint qui pt la gurir parce qu'il n'y avait pas de remde. A son tour le t m o i n soixante-douzime dpose : mon parent Jacques Sgarzi n e disait que le cas d e Marie-Rose tait dsespre, que c'en tait fait d'elle, et q u e l l e mourrait....
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il avait peur qu'on n e pt point la ramener Mazzano ; il craignait qu'elle ne mourt en route, c'est ce qu'il m'a dit moi-mme. 165. Quiconque a bien examin les faits, doit remarquer dans le tmoignage du mdecin et du chirurgien : 1 tous les caractres d'une phthisie confirme; 2 l'existence et le dve l o p p e m e n t de ces s y m p t m e s jusqu' la m o r t . J a m a i s la ma lade n'eut d'amlioration elle a toujours t de mal en pis ils se sont toujours augments de plus en plus ; 3 t o u s deux le mdecin et le chirurgien avaient perdu l'espoir de la gurison. L'art n'avait aucun r e m d e pour la gurir n o u s avions regard cette maladie c o m m e tout fait i n c u rable pour n o u s le cas tait dsespr ils disaient clairement que c'en tait fini avec elle qu'elle n e p o u vait pas du tout gurir qu'il n'y avait qu'un saint qui pt la s a u v e r que la j e u n e fille mourrait qu'elle mourrait s r e m e n t ; 4 tous deux l o n g t e m p s s'opposrent au dpart de la j e u n e fille. Ils croyaient sans hsitation qu'elle ne reviendrait jamais Mazzano que peut-tre elle pourrait mourir en route qu'elle mourrait e n c h e m i n ; 5 en d pit de tout espoir et touchs de la confiance de la malade et de sa m r e , ils accdrent au dsir do celle-ci, car peu importait au fond q u e la j e u n e fille m o u r t Mazzano, qu' R o m e ou en c h e m i n . 466. Ce que le m d e c i n et le chirurgien ont attest fut confirm par tous les t m o i n s . A leur description de c h a cun des caractres de la maladie, ils ajoutaient ; Elle tait arrive aux portes de la mort, on transportait plutt un cadavre qu'une malade. Le danger de m o r t tait i m m i n e n t p e n d a n t la route La mre de Rose disait avec raison : La j e u n e fille n'a jamais t m i e u x , m a i s elle allait toujours de m a l en pis. Et Gaspar Mancini qui allait souvent visiter Ma rie-Rose malade, j e la trouvais toujours dans u n tat plus m a u v a i s . . . , elle allait plus mal. Quand nous partmes, la pauvre fille tait dans un trs-mauvais tat.FranoisMaggiori: ils voulurent la porter Rome,et i l s e m b l a i t q u e ceft hors de p r o p o s , car elle tait plus morte que vive, et t o u t le monde disait : ils la m n e n t mourir Rome ; e l l e n e n o u s reviendra pas Mazzano; j e l a vis le soir d'avant qu'elle parfit,elle allait mal c o m m e d'habitude et je m e disais : q u e Dieu la protge bien. Et D o m i n i q u e Agostinelli : j e l'accompagnai jusqu'au p o n t qui est au bas de Mazzano, il m e sembla voir un vrai cadavre, tant Marie-Itoso tait faible, e x t n u e : c'est grand'peine qu'on la fit assseoir sur le petit ne. 1G7. Qu' Mazzano son tat ft d e v e n u de plus e n plus
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inquitant,ce fait est dmontr : n o n - s e u l e m e n t par la dure continue et le dveloppement des symptmes si clairement noncs par les mdecins et les tmoins; n o n - s e u l e m e n t par l'tat fatal et dsespr de la j e u n e fille au m o m e n t m m e d u dpart ; mais par l'addition du symptme le plus fatal, c o m pagnon ordinaire du dernier degr de la phthisie, le gonfle ment des pieds. La mre dpose en efet: M. Jacques le chirurgien m'avait dit : faites bien attention, si ses pieds viennent entier; parce que s'ils enflent, c'est qu'elle s'en va. Et en-effet, quelque temps avant d'aller R o m e , ses pieds taient enfls, et cette enflure lui montait jusqu' mi-jambe, ce que confirme la cousine de Marie-Rose en d i sant : quand elle tait assise o n lui voyait les jambes enfles. 168. Nierez-vous donc, d i r a - t - o n , malgr cette attestation si claire des t m o i n s que Marie Rose n'ait ressenti aucun soulagement Mazzano? Ce que nous venons de rappeler rpond suffisamment cette question. Si vous appelez s o u lagement, dans la phthsisie, cette apparence trompeuse, rsultat ordinaire de la suppuration, que l'on constate quelquefois chez des phthisiques prts mourir, nous n e le contesterons pas. Mais v e u t - o n parler de la disparition totale ou partielle des caractres cle la maladie, du rta blissement, mme lent et faible, cle la sant, n o u s le nions absolument, en nous appuyant m m e des tmoignages qui font mention d'un s o u l a g e m e n t apparent. Apparence, disonsnous, qui n'a pu tromper ni les mdecins, ni les tmoins, ceux-ci fussent-ils grossiers, ignorants et i n e x p r i m e n t s . 169. Une parente de notre malade raconte le fait sa m a nire et d'une faon charmante: elle parut aller un petit peu mieux, mais le mal cependant continuait, et j e vas vous dire comment arriva cette amlioration. Yous saurez qu'il y eut Mazzano u n e secousse de tremblement dterre , tous nous avions peur et t o u s n o u s n o u s sauvions ; nous partmes. Mais c o m m e n t faire avec cette pauvre m a l a d e ? Impossible de l'emporter avec n o u s . Benot-Joseph, pensez e l l e , vous, autrement, elle va rester m o r t e sous les ruines ; pour nous, nous nous en allons! La pauvre fille saisie de crainte, toute trouble, se leva sur son lit, voulut s'habiller, le fit u n peu d'elle-mme, un peu aide par n o u s , et nous l'empor tmes la Madone des Grces, distante de Mazzano d'en viron un d e m i - m i l l e ; n o u s la mmes couche par terre sur les vtements que n o u s avions emports avec n o u s , n o u s demeurmes l jusqu'au jour, puis nous retournmes la maison. Mais en allant c o m m e en revenant n e croyez pas que Marie-Rose marcht toute seule, il fallait la c o n d u i r e ,
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la soutenir, et quelquefois u n de c e u x qui se trouvaient avec nous la portait sur son d o s . N o u s crmes que BenotJoseph lui avait donn la force d'chapper ce p r i l ; mais elle continuait . aller trs-mal, n o u s avions peur d'tre obligs de la laisser la Madone des Grces et qu'elle y mourt, car pendant toute cette n u i t elle ne fit que geindre, tousser e t s e plaindre, tant tait g r a n d i e malaise o elle se trouvait. Reporte la m a i s o n , on la remit, au lit ; et les jours suivants, elle se levait tant soit peu chaque j o u r ; mais du lit il fallait la porter sur une chaise, d'o elle ne b o u geait pas, et quand elle tait assise l, on voyait ses j a m b e s enfles. Nous voulions voir si n o u s russirions la faire marcher un p e u , et n o u s l'excitions faire quelque m o u v e ment,elledisait qu'elle ne !e pouvait pas; mais n o u s voulions qu'elle le ft, enfin elle se dcidait le faire, et appuye sur u n e de n o u s et sur u n bton, elle c o m m e n a i t faire quelques pas dans la chambre, puis elle retournait s'asseoir, et on voyait qu'elle ne faisait ces quelques pas qu'avec grande difficult. Quelquefois encore, avec le m m e malaise, elle faisait quelques pas, en s'appuyant s e u l e m e n t sur u n bton, sans q u e n o u s lui donnions notre aide. 170. Voil le s o u l a g e m e n t r e s s e n t i p a r la malade Mazzano. Une grande frayeur lui fit quitter s o n lit; incapable de se soutenir, s o u t e n u e o u plutt porte par deux personnes elle fut e m m e n e cinq cents pas. Elle y passa toute la nuit n e faisant que geindre, tousser e t s e plaindre dans l e g r a n d ma laise qu'elle prouvait, tellement q u e ses c o m p a g n e s avaient peur d'tre obliges de la laisser la Madone des Grces et qu'elle n'y m o u r t . Force de se m o u v o i r bien qu'elle avout ne pouvoir pas, pour faire plaisir sa mre et sa p a r e n t e , appuye sur leurs bras o u sur un bton, tout essouifle elle faisait quelques pas, puis elle retournait s'as seoir, et l'on voyait qu'elle ne faisait ces quelques pas qu'avec u n e trs-grande difficult.Qui d o n c , u n p e u au cou rant des caractres de la phthisie,il trouvera en tout cela un vritable s o u l a g e m e n t , o u m m e une apparence de s o u l a g e ment? S u r t o u t s'il a v u desphthisiques qui jusqu' la mort se m e u v e n t et m a r c h e n t librement I Bien loign tait au c o n traire l'espoir, et m m e le soupon d'un s o u l a g e m e n t . V o y a n t la tnacit du m a l , sa violence, son a c c r o i s s e m e n t , et l'tat dsespr d e l m a l a d e , l e tmoin auteur de ce rcit ajoutait : Toute l'amlioration consistait dans ce q u e j'ai d i t ; e n r a lit Marie-Rose allait mal, avait les m m e s angoisses, la m m e t o u x , le m m e abattement et rendait les m m e s cra chats sanieux et purulents.Le tmoin soixante-seizime parle
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le mme langage quand il dit : l'amlioration consistait en ce qu'elle se levait un peu du lit, qu'elle allait un peu s'asseoir, et qu'en la soutenant on lui faisait faire quelques pas dans la maison ; mais elle tait toujours malade de la mme faon ; j e m e rappelle que je disais sa mre : elle se meurl, vous n'en tirerez rien, car elle est angoisse, c o n sume, et elle tousse c o m m e toujours. 171. Voil le bulletin de sant avant le dpart. Quel est-il pendant le voyage? Ce voyage pour la mre semblait impos sible, la malade sentait ses forces si puises qu'elle croyait ne pouvoir tre transporte qu'en litire et non pas sur un ne. Comment veux-tu que je fasse pour te p o r t e r ? G'est impossible disait la mre,mais elle rpondait qu'on la mettrait bien dans u n e corbeille. Pour accder de si ardents dsirs et une foi s i v i v e o n l a mit sur un petit baudet, mais elle ne s'y tenait point ; il fallait que quelqu'un d'entre n o u s la soutnt et la diriget, et cela ne suffisait pas encore ; elle souffrait tant d e t r e assise que la pauvre j e u n e fille n o u s demandait instamment de la mettre dans une corbeille ; mais la chose n'tait pas pos sible, parce qu'il n o u s aurait fallu un contre-poids de l'autre ct. De Mazzano R o m e il y a vingt-cinq milles. Nous partmes huit heures e t n o u s arrivmes R o m e entre huit et neuf heures. Nous e m e s mille difficults pour la porter R o m e . Bien que l'ne marcht tout d o u c e m e n t , cependant il fallait chaque instant s'arrter, pour deux raisons: la premire, pour donner boire Rose, car elle se sentait toute en feu, et chaque instant elle aurait voulu boire; la seconde pour la descendre de l'ne, et la faire asseoir par terre, pour qu'elle se repost, et qu'elle et quelque rpit, tant tait grand le malaise qu'elle ressen tait et qui augmentait quand l'ne avanait. Tous les quelques pas, elle se trouvait plus mal ; il lui fallait reprendre un p e u h a l e i n e ; elle disait qu'elle sentait e n elle un feu intrieur ;... toujours il fallait lui donner un peu boire, parce que sa h o u c h e devenait sche et qu'elle ressentait c o m m e u n feu brlant. Elle ne pouvait reprendre haleine, elle tait tout fait' mal, elle avait une grande soif; on aurait dit une morte. ces symptmes morbiies ont toujours persvr ; ils se sont m m e accrus, et la malade n'prouva jamais d'amlioration, ni passagre ni apparente. Tel tait l'lat de la malade avant son dpart. Exa minons maintenant la question du voyage. 172. Voiile rcit du voyage. Examinez quelles taient ses forces: elle ne pouvait demeurer assise q u e soutenue par
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quelqulun, e l dans cette position elle souffrait tant q u e l l e priait qu'on la mt dans u n panier. Ne pouvant pas mme supporter cette marche l e n t e de l'ne, suffoque par l ' o r thopne elle tait t e l l e m e n t oppresse qu'elle n e pouvait reprendre haleine, et souvent on devait la descendre terre pour q u e l l e pt respirer. Quelle tait, je le d e m a n d e r a c o n dition de ses p o u m o n s , quelle c o n s o m p t i o n de t o u t s o n corps, puisqu'elle t o u s s a i t ' t o u j o u r s et qu'on aurait dit un
c a d a v r e ; q u e l l e fivre la b r l a i t , p u i s q u e s a b o u c h e s e d e s s c h a i t , e t q u ' e l l e r e s s e n t a i t u n feu i n t r i e u r ; d e q u e l l e
soif elle tait tourmente, puisque elle aurait v o u l u boire chaque instant ? Ge dernier s y m p t m e n e peut tre pass s o u s s i l e n c e ; c'est un signe d e fivre. Cette soif qui provient de l'amaigrissement, de l'&cret du sang cause par la cor ruption et la perte des h u m e u r s , est chez les phthisiques un signe bien plus grave. Constate ardente et c o n t i n u e chez la j e u n e fille elle devient u n e confirmation srieuse des autres s y m p t m e s de la phthisie. G'est q u ' e n effet la soif ardente e s t m i s e par B o e r h a a v e ( l ) au n o m b r e des s y m p t m e s prcur seurs de la mort chez les phthisiques.Van S w i e t e n exposant c e t t e o p i n i o n a crit. Plus haut quand il s'agissait d e soif
f b r i l e , n o u s a v o n s c o n s t a t q u e les c a u s e s p r i n c i p a l e s d e la soif s o n t la siccit et l ' i m m a b i l i t des h u m e u r s . Effective
m e n t n o u s avons v u que le corps s e dessche tout entier par la phthisie, et que l'angoisse d m o n t r e Timmabilit des h u meurs travers les vaisseaux p u l m o n a i r e s . En m m e temps p a r l'coulement purulent le sang se vicie, devient plus acre, nouvelle cause de soif. A quoi vient s'ajouter chaque n u i t la transpiration par o s'coule la partie la plus liquide d u sang, cause qui elle seule engendre la soif m m e chez l e s h o m m e s d'une sant florissante. Je vous le demande, aprs ces symptmes,aprs u n pareil v o y a g e p e u t - o n con clure u n e amlioration ? 473. Les t m o i n s ajoutent : quand Dieu voulut, nous
a r r i v m e s R o m e , et n o u s d e s c e n d m e s dans une p e t i t e m a i s o n d e la p l a c e C a m p i l e l l i , o n o u s p a s s m e s la n u i t -
Mais qui put dormir? La pauvre j e u n e fille, accable de dou leur et de souffrance, fit clater tant de plaintes que j e n e pus m'endormir : voil ce qu'atteste Gaspard Mancini, d'accord en cela avec la mre de la malade: elle n e dormit p o i n t , e t n e m e laissa pas dormir; c h a q u e instant il fallait lui donner boire ; cause d e son oppression e l l e n e pou vait rester c o u c h e , il fallait la tenir s o u l e v e et assise
(1) Aplior. 1206.
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sur son lit. Et encore la premire nuit elle ne put jamais dormir, elle tait toujours essouffle, elle se plaignait con tinuellement, elle avait continuellement besoin de boire, elle ne reposait point, et m o i non plus j e ne pouvais pas reposer. Tout cela semblera trop naturel qui considre l'tat de la malade son dpart de Mazzano, les cruelles souffrances du voyage qui n'ont pu tre supportes que par un c o m m e n cement de miracle, et qui ne pouvaient amener aucune amlioration. 174. Nanmoins on est venu Rome pour obtenir un m i racle. On nglige toute prcaution. La malade est leve, l'aide de deux personnes elle est porte o u trane l'glise de l'Ara-coeli, puis sainte Marie des Monts o ses forces l'abandonnent, N o u s allmes l'glise de TAra-Coeli, dit Gaspard Mancini, et ce ne fut qu'avec beaucoup de peine qu'on put porter Marie-Rose : deux femmes la soute naient toujours, l'une d'un ct, l'autre de l'autre ; mais chaque instant il fallait la faire reposer. De l'glise de l'AraCli nous allmes l'glise de sainte Marie des Monts. Marie-Rose ne pouvait marcher seule, dit sa cousine, et il fallait la soutenir, s a mre et moi,l'une d'un ct, l'autre de l'autre. Elle ne pouvait pas marcher toute seule, dit la mre, et il fallait la porter en la soulevant sous les bras ; j e Ja c o n duisais d'un ct, et Laure-Rose sa cousine la conduisait de l'autre. De l'glise de i'Ara-Cli n o u s allmes celle de sainte Marie des Monts pour visiter le tombeau de Benot Joseph, et n o u s y portmes la pauvre fille, toujours de la mme faon, en la soutenant l'une d'un ct, l'autre de l'autre. Nous entrmes dans l'glise, o il y avait une grande foule de peuple. N o u s e m e s bien de la peine . arriver son tombeau ; mais cause de la foule elle prouva un" si grand touffement qu'elle ne pouvait plus bouger, et qu'il fallut la transporter hors de l'glise. Je la fis asseoir sur les degrs, et pour lui rafrachir un peu l a bouche je lui donnai quelques pois verts. Quand elle se fut repose et ra frachie, je la reconduisis l'glise; elle y revint faire sa prire, puis n o u s sortmes; mais elle n'obtint point sa g u rison, et nous la ramenmes la maison c o m m e aupara vant, ajoute sa cousine. 175. Elle se repose de ses fatigues pendant la j o u r n e . Il n'est donc pas t o n n a n t que le soir, interroge par Gaspard Mancini : c o m m e n t vous portez-vous, elle ait rpondu : u n peu mieux, on tenant compte de la fatigue de .la matine. Le mme tmoin ajoute : Mais elle tait au lit, et souffrait vu 18
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beaucoup . La mre dit plus clairement encore : Dans celte nuit qui s'coula entre la premire et Ja seconde vi site, elle alla mal c o m m e d'habitude, toujours essouffle, rendant des crachats pais, altre, sans pouvoir dormir, sans pouvoir rester c o u c h e , la tte nt le buste un p e u levs; les pieds continuaient de rester enlls ; j e le sais pertinemm e n t , c a r pour rhabiller j e lui mettais ses bas, qu'elle n e pouvait les mettre toute seule ; et cette enflure lui m o n tait jusqu' m i - j a m b e . Ici v i d e m m e n t n o u s remarquons la m m e orthopne, la m m e soif, les m m e s crachats, le m m e d m e des pieds qu' son d p a r t ; toujours m m e affaiblissement ; pour se vtir elle requrait le ministre d'autrui; en u n m o t m m e s s y m p t m e s , m m e p o s i t i o n qui ne laissent souponner a u c u n e amlioration. 176. Toutefois le repos u n e j o u r n e et d'une nuit tout entire dut allger un peu la fatigue antrieure. C'est pour q u o i Gaspard Mancini raconte : Le jour d'aprs nous retournmes Sainte-Marie-des-Monts, et n o u s y fmes une petite s t a t i o n ; quand n o u s sortmes, Marie-Rose disait qu'elle se sentait un petit p e u mieux, m a i s elle tait essouf fle, et il fallait la soutenir ; cependant, n o u s n'prouvons pas pour la conduire, autant, de fatigue q u e la veille. La mre dit : Nous sortmes ; et bien qu'elle continut d'aller mal, elle m e semblait n a n m o i n s m o i n s c s s o u f f l e que d'abord, et e n la s o u t e n a n t il me semblait qu'elle tait m o i n s lourde . Voil c o m m e n t elle alla tout c e j o u r - l . Elle continuait donc e n c o r e aller mal, elle tait essouffle, et il fallait la soutenir ; tout le s o u l a g e m e n t , q u e lui avait apport le repos du lit, consistait en ce qu'on n'prouvait point, pour la conduire, autant de fatigue q u e le jour prc dent, o s'taient m o n t r s les s y m p t m e s de la maladie aggravs au plus haut point par la fatigue du v o y a g e prc d e n t ; d'ailleurs, voil c o m m e n t elle alla t o u t ce j o u r - l . 177. La posilion ne s'tait pas amliore quand vint la troi s i m e nuit. Je la revis le soir, dit Gaspard Mancini, mais elle tait c o m m e la n u i t prcdente. Sa cousine ajoute : La n u i t suivante elle alla plus mal que jamais, parce qu' un certain m o m e n t elle se mit jeter de hauts cris, et dire qu'elle ressentait u n e terrible douleur la poitrine. La m r e dit la m m e c h o s e : Le soir nous allions n o u s mettre a u lit, mais p e i n e lais-je c o u c h e , q u e la j e u n e fille m'appela par un grand cri, et m e dit de lui m e t t r e la main sur la poitrine, parce qu'elle ressentait u n e horrible dou leur ; j'eus peur et j e crus qu'elle allait mourir.
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Tel est l'tat de la malade jusqu' la prodigieuse gurison; car alors eut lieu l'application de l'image et, uu instant aprs, la gurison. 178. De ces dpositions,il rsulte videmment qu' Mazzano la malade n'prouva aucun m i e u x , qu'elle ne ressentit aucune amlioration qui pt tromper, non-seulement des mdecins, mais m m e des ignorants. Bien plus, son tat, s'aggravant toujours davantage, tait dsespr lorsqu'elle se mit en route. Ces m m e s s y m p t m e s s'accenturent en chemin, et la fatigue les porta leur dernier degr. Rome ils durrent jusqu' la troisime nuit et firent craindre un danger de mort prochaine. Personne en comprendra donc qu'on puisse se refuser admettre qu'avant la gurison il n'y eut aucune apparence de mieux manifeste.
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tnne elle svit. Tel est l'aspect de la phthisie porte au dernier degr. 180. Mais notre savant critique ne s'carte-t-il pas de la thse p r o p o s e ? Ne se forge-t-il pas sa g u i s e un adver saire? Nous dfendons cette thse: Marie-Rose a t dans un danger certain la suite d'une phthisie confirme et perni c i e u s e ; la maladie a t trs-grave et de l'avis u n a n i m e des m d e c i n s incurable. Nous n'alirmtfns pas et n o u s n'avons jamais affirm que la j e u n e fille tait an seuil de la mort a u m o m e n t de sa gurison. Les s y m p t m e s n u m r s par notre contradicteur dsignent une mort si rapproche que ce jour-l m m e il aurait fallu prparer les funrailles. Sans d o u t e Van Swieten ces m m e s caractres n u m r s par Boerhaave, ajoute (l):Voil bien les signes d'une c o n s o m p t i o n c o n d u i s a n t la m o r t ; q u e , Sydenham r s u m e d'une faon plus claire .encore. Chaque nuit la transpiration survient, les j o u e s deviennent livides, la figure plit, le nez s'effile; les tempes affaisses, l'incurvation des o n g l e s , la c h u t e des cheveux, le flux colliquatif du vente a n n o n c e n t que la mort va s'ensuivre. Et, c o m m e les actes ne font pas m e n t i o n de ces s y m p t m e s ; c o m m e d'autre part nous n'avons pas affirm que Marie-Rose ait t sur le seuil de la mort, cette obser vation est tout fait trangre notre thse : c'est un coup frapp en l'air. 181. Bien plus, cette objection, m m e un autre titre est trangre notre thse, car l'exprience et la raison prouvent que ces s y m p t m e s ont ordinairement leur source dans le dveloppement trs-lent de la maladie qui, peu p e u , c o n s u m e les forces et le corps tout entier ; q u e c'est le propre des phthisies tuberculeuses (et pas e n c o r e de toutes) q u e par un progrs trs-lent elles ruinent, c o n s u m e n t le malade. Or quel point c o m m u n entre cette marche de la maladie et notre thse ? Il s'agit ici d'une phthisie secon daire et aigu dans laquelle ces s y m p t m e s apparents font o r d i n a i r e m e n t dfaut. Nous en appelons aux m d e c i n s et tous c e u x qui ont assist aux derniers m o m e n t s d'un phthisique. 182. Cette observation pche donc par d e u x e n d r o i t s : elle n'a pas trait la maladie en question ; et elle n o u s carte de notre t h s e . Accordons-lui cependant t o u t e la force possible. Que p r o u v e r a - t - e l l e ? Q u e la jeune fille n'a pas t sur le point de mourir, sans que j a m a i s sa maladie ait cess d'tre grave ni incurable.
(I) Ad aplior. 1206 sub fine.
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183. Ce n'est pas de la dernire heure de la maladie, mais de la phthisie confirme qu'liippocrate a dit (1) : Quand on devient tique, il faut prir. Galien traitant des affections pulmonaires et de leurs ulcres, a dit (2) : Mes soins les plus actifs ont t inutiles pour la gurison des phthisiques. Plus tard il ajoute : Je l'ai facilement r e c o n n u , leur affection n'est pas diffrente de celle qui se produit dans les maladies externes, quand la gangrne s'y introduit. Encore p o u v o n s - n o u s couper et brler ces parties, deux m o y e n s impraticables pour le p o u mon ; aussi ncessairement tous doivent prir. Ailleurs il fait cette remarque (3) : La cure de la phthisie tente par des mdecins est difficile, et n'est j a m a i s complte.La raison et l'exprience l'attestent. D'abord la raison : le p o u m o n par l'acte de la respiration est toujours en m o u v e m e n t , or les organes pour gurir ncessitent le repos.L'exprience: on ne vit jamais h o m m e atteint de cette maladie c o m p l t e m e n t guri. Avice semble ajouter encore la raison apporte par Galiens (3). Il ne serait possible de gurir l'ulcre sanieux que par l'expulsion de l'humeur ; ce devrait tre l'effet de la toux, mais la toux opre l'extension de la plaie et sa rupture. La lsion cause la d o u l e u r et la douleur attire l'humeur la partie malade, il faut donc que l'ulcre grandisse jusqu' corroder le p o u m o n t o u t entier, Time a dit (4) : Je l'avoue i n g n u e m e n t , j'ai exerc pendant trente-sept ans, et j e n'ai pu rendre une sant par faite une seule personne atteinte d'affection pulmonaire. J'ai tent tous les m o y e n s possibles. Je n'ai vu personne guri par les m d e c i n s les plus clbres. Hofimann l'enseigne ouvertement (5). L a gurison d'une phthisie est trs-difficile. Si elle est arrive ce degr,que la caractrise aux y e u x de tous, sa g u r i s o n dpasse t o u t art humain. Willis, aprs avoir dpeint les c o m m e n c e m e n t s d'une phthisie, a j o u t e r a Que si, outre l'tat que je viens de d crire, l'abondance des crachats, la dcoloration augmentent chaque jour, si la maladie empire, si la dcroissance des forces, la fivre h e c t i q u e , une soif c o n t i n u e , les transpira tions de chaque nuit, le visage hypocratique, une maigreur qui fait presque ressembler le corps un squelette sur1) De morbis lib 1, sect. 2. 2) De loc. affect. lib. 4. cap. 8. (3) Can. Media lib. 3 , tract. 3. fen. 10, cap. 4. (*> Apu Hoffmann, med. svstem. t. IV, part. 4. cap. l i , f 19.
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viennent, la mdecine n'offre aucun secours ; il n'y a place que pour un triste pronostic, o u du m o i n s t o u t espce de traitement devra tre mis de ct ; on s'en tiendra ces m o y e n s anodins, qui procureront l'ethanasie, c'est--dire u n e mort douce (1). Burserius traitantnotre sujet,c'est--dire la phthisie s e c o n daire, enseigne (2) : il faut s'opposer la maladie qui e n est le principe. Une fois contracte, les r e m d e s sont inutiles. Dans la phthisie secondaire et caractrise, il faut combattre nergiquement la maladie qui en est le principe, ou qui, par sa dure actuelle e n e s t la cause.Si cette dernire n'est car t e la phthisie ne pourra tre vaincue par aucun remde, m m e par les plus efficaces. Joseph Frank d'aceord avec ce dernier, crit : (3) la pathisie qui par la fuite intempestive d'autres maladies s'appelle mtastatique n'a d'espoir de gurison que ds les premiers pas de la maladie. Mauri citant un grand nombre d'auteurs, dit(4) ; Presque t o u s les auteurs anciens et modernes s'accordent dire que la phthisie p u l m o n a i r e son premier degr est quelquefois gurissable ; au second et au troisime degr, toujours i n c u rable. Rairnann dit que la phthisie ulcreuse et la phthisie tuberculeuse sont des pronostics de mort.Barzclletti dit que le pronostic est favorable au premier degr de la phthisie, a b s o l u m e n t dfavorable pour le troisime.Burserius est dans la ferme conviction que la phthisie qui c o m m e n c e , , permet p e i n e de concevoir quelque espoir de gurison ; la phthisie b i e n caractrise, jamais. Andria croit qu'il n'est pas pos sible de la gurir. Zacchi pense q u e la phthisie ulcreuse p e u t tre gurie quand elle n'est qu'au premier degr, etc. ; m a i s qu'elle est mortelle, quand elle est au troisime. C'est aussi l'avis de Barbetta, de Luca Tozzi, de Galien de Muller et de beaucoup d'autres, L e s quelques modernes qui prtendent gurir une phthisie confirme, et qui assurent l'avoir gurie, contrairement l'exprience et au c o n s e n t e m e n t de tant de sicles, Mangetu s e m b l e avoir v o u l u les rfuter quant il crivait ( 4 ) : Que c e u x - l qui se vantent d'avoir guri des phthisiques y rilchissent bien ; tromps sur le diagnostic de la maladie, qu'ils ne se rjouissent pas d'un triomphe imaginaire. Caria
(1) De phthisi pulmonar. cap 6, opp. mihi t. IL vers. 4 part. 2. (2) Le p h t i s i . 9 2 . (3) De PIHlnsi pulinon. metastat. 50, mim. I, 6. (4) Dlia plHisi puliuon. vol. 1, cap. 9. t) Bibl. med. praot. verbo Phtliisis, pag. m i h i 303.
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la phthisie est la voie qui, coup sr, conduit l a mort. 184 Du c o n s e n t e m e n t de tous les mdecins, de tous les ges, de l'exprience continuelle il rsulte donc que la phthisie est incurable, n o n - s e u l e m e n t quand le malade est l'article de la mort, c o m m e s'efforce de nous le faire croire notre critique, mais m m e sa dernire priode, o u quand elle est confirme. Avec des preuves si abondantes il nous est permis d'tre gnreux. Acceptons l'opinion de ce petit nombre de modernes qui se vantent d'avoir guri de vritables phthisies. Quelle conclusion en tirer? D'aprs l'exprience et le c o n s e n t e m e n t de tous les ges, ne sera-t-il pas vident que la phthisie confirme est une maladie trs'grave, d'une gurison trs-difficile, trs-dangereuse, et que par consquent elle peut devenir le sujet d'un miracle s p l e n dide ? Notre savant adversaire s'efforce de nier m m e cette assertion: Suivant lui,la gurison de cette dernire espce de plthisie qu'il a dpeinte,offrirait seule prise au miracle. Il a crit: Voil la dernire phase d'une phthisie, voici cette consomption du corps q u e , par l'intercession des saints, le doigt de Dieu peut seul gurir. Marie n'tait pas r duite ce misrable tat. Quoi ! les maladies incurables qui mettent n o s jours en danger, ne fourniraient plus m a tire miracle, la condition de l'instantanit de la gurisonl Ainsi, d'un trait de plume, nous rayerions du c a talogue des miracles, toute la troisime catgorie qui c o n siste dans le m o d e miraculeux des maladies qui peuvent se gurir. E n m m e temps nous rayerions quelques-unis des miracles de Jsus-Christ relats dans l'Evangile ; par exemple, la belle-mre de Pierre gurie de la fivre. Nous pourrions opposer notre adversaire tous les thologiens, tous ceux qui ont crit sur la canonisation et parmi eux Benot XIV. La principale condition, dit-il, pour admettre une gurison c o m m e miraculeuse, est celle-ci : que la maladie soit grave, la gurison impossible o u difficile. 185. Notre savant contradicteur pourrait n o u s objecter que les thologiens et ceux qui traitent de canonisation n'ont *pas sa science, et que par consquent, leur opinion n'est pas une preuve. Passons dans son camp et oppo sons-lui des crivains de mdecine lgale qui, certes, ne seront pas i n c o m p t e n t s , entre autres Zacchias. Au livre quatrime de ses questions mdico-lgales premire deuxime et h u i t i m e , il traite au long des diflrentes sortes de miracles, de leur nature, des conditions exiges pour une gurison miraculeuse. L, l'appui de notre thse il a crit : il est requis que la maladie soit grave, et pour tre
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LES
SPLENDEURS
DE
LA
FOI
grave, qu'il y ait danger trs-manifest de .perdre la vie, du m o i n s difficult supporter le mal avec ses symptmes alarmants, en d'autres termes qu'elle soit sinon d'une gurison impossible, tout au moins d'une gurison t r s difficile. A s s u r m e n t notre savant critique a lu toutes ces questions, il l e s cite dans son paragraphe q u i n z i m e . Si elles ont chapp ses regards, les paroles de o r t o s a , qu'il a j o i n t e s aux siennes pour formuler ses objections n'ont pas pu rester ignores de lui. Cet auteur dans le m m e texte de ses Institutions de mdecine judiciaire dit : Pour qu'un m d e c i n sage puisse juger avec f o n d e m e n t d'une gurison miraculeuse, il doit faire une exacte attention aux c o n ditions suivantes ; Il est ncessaire q u e le mal soit fort grave, impossible o u e x t r m e m e n t difficile gurir, c o m m e serait le cas d'une c o n s o m p t i o n p u l m o n a i r e manifeste. P o u r q u o i , je le demande, notre savant a - t - i l n g l i g cette doctrine tire de notre m m e ouvrage? P a r c e qu'elle militait faveur du miracle ! Il fallait tout rvoquer e n doute, m m e c e qu'il y avait de plus vident. 186. Aprs avoir ni l'idonite du sujet du miracle, rabaiss la gravit de la maladie par dfaut de symptmes trangers notre cas, notre savant appuie sa thse sur des faits. Il n o u s objecte s o i g n e u s e m e n t le v o y a g e de Rome : Comment cette j e u n e fille qui a atteint le dernier degr de la phthisie purulente a-t-elle pu faire un voyage de vingt-cinq m i l l e s , m o n t e sur une bote de s o m m e , expose u l'ardeur d'un soleil de mai, j e ne le vois pas I Je n e corn et prends pas c o m m e n t elle a pu gravir le Gapitole, visiter l'glise de la bienheureuse Vierge Marie de l'Ara-Cli, assister au Saint-Sacrifice ; puis de l aller pied Sainte Marie-des-Monts, demeurer l o n g t e m p s auprs du t o m beau du Vnrable serviteur de Dieu, si en m m e temps elle avait la fivre, la diarrhe, des transpirations a b o n dan tes. Je sais bien que les dfendeurs de la cause vont m'opposer q u e Marie, pendant le v o y a g e tait si faible qu'elle ne pouvait rester assise sur l'ne.Mais du Sommaire il rsulte que la plupart du temps il fallait que quelqu'un d'entre n o u s la soutint. Donc, parfois elle a pu se tenir. On m'objecte encore la t o u x , la soif, la difficult de respirer, c o m m e des symptmes p e r m a n e n t s durant la roule. Mais si t o u t cela dmontre la prsence de la maladie, ce n'est pas une preuve d'un danger grave. 11 est donc permis de douter que Marie, avant d'entreprendre le voyage, ft sur le p o i n t de mourir. 187. Qui a j a m a i s prtendu qu'elle ft prte mourir
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lorsqu'elle e n t r e p r i t le t r a j e t ? N o u s n ' a v o n s affirm q u ' u n e c h o s e : a t t e i n t e d ' u n e p h t h i s i e v r i t a b l e e t m o r t e l l e ; l a fa Ligue p o u v a i t la t u e r e n r o u t e c o m m e le r e d o u t a i e n t m d e c i n s e t a u t r e s (1) M a i s c ' e s t a s s e z d e s c o n c e s s i o n s d e n o t r e s a v a n t c r i t i q u e , la t o u x , l a soif, u n e r e s p i r a t i o n difficile p r o u v e n t la p r s e n c e d e la m a l a d i e . N o n - s e u l e m e n t l ' i n t e n s i t d e c e s s y m p t m e s e n c o n f i r m e la g r a v i t , m a i s l e s t m o i n s r a p p o r t e n t q u e p e n d a n t s o n s j o u r R o m e , ils r e m a r q u r e n t des c r a c h a t s s a n i e u x , p u r u l e n t s , l ' o r t h o p n e , l ' d m e d e s pieds. Si t o u s c e s s i g n e s r u n i s n o u s f o n t c o n n a t r e q u e l a p h t h i s i e s u i v i t s o n c o u r s p e n d a n t le v o y a g e R o m e , e t j u s q u ' a u d e r n i e r m o m e n t , il e s t c e r t a i n q u e la m a l a d i e a persvr d a n s s o n i n t e n s i t j u s q u ' l ' i n s t a n t d u m i r a c l e . 188. Si o n c o n c d e q u e p e n d a n t l a r o u t e , l a m a l a d e a s sise sur u n n e a p u d e t e m p s e n t e m p s se t e n i r d a n s c e t t e position s a n s le s e c o u r s d ' a u t r u i , p a r c e q o n lit d a n s l ' E x pos : la p l u p a r t d u t e m p s il f a l l a i t q u e q u e l q u ' u n d ' e n t r e nous-la soutnt, cette concession ne n u i r a point l'exis t e n c e et l ' i n t e n s i t d e s s y m p t m e s q u i s e u l s s o n t l a preuve d e p h t h i s i e confirme. Cette c o n c e s s i o n n e p r o u vera pas n o n p l u s c e r e t o u r o u c e t t e s t a b i l i t d e s f o r c e s q u i laissent s o u p o n n e r d u m i e u x ( 2 ) . C a r p a r l ' a b o n d a n c e d e s crachats p u r u l e n t s e t s u r t o u t p a r l e s t r a n s p i r a t i o n s noc turnes, la p l u s g r a n d e p a r t i e d e s l i q u i d e s s ' c h a p p e d u corps ; les v a i s s e a u x n ' t a n t p l u s g o n f l s p a r les l i q u i d e s , s e c o n t r a c t e n t , t o u t e la g r a i s s e q u i c o n s t i t u e la r o n d e u r d u corps d i s p a r a t , l a p e a u e t l e s os s e m b l e n t r e s t e r s e u l s . Cependant l ' a c t i o n d e s m u s c l e s s u b s i s t e e t t o u s l e s m o u vements m u s c u l a i r e s p e u v e n t s'exercer, a u t a n t q u e l'affai blissement l e p e r m e t , e t q u e l e s l i g a m e n t s d e s s c h s d e s a r t i c u l a t i o n s n e l ' e m p c h e n t p a s . D ' a i l l e u r s si l ' E x p o s fournit n o t r e s a v a n t c r i t i q u e c e s p a r o l e s ; l a p l u p a r t du- t e m p s il f a l l a i t q u e q u e l q u ' u n d ' e n t r e n o u s l a s o u tnt, n o u s l i s o n s d a n s c e m m e E x p o s c e t t e a s s e r t i o n faite s a n s a u c u n e r e s t r i c t i o n p a r l a c o u s i n e d e l a m i r a c u l e : elle n e p o u v a i t p a s se t e n i r e t il fallait q u e q u e l q u ' u n (1) On sait qiil survient chez les phthisiques des accidents qui peuvent les faire m o u r i r avant qu'ils ne soient arrivs au dernier terme de la maladie. Tels sont, par exemple, l'hmoptysie : une grande diffusion do pus dans les bronches, etc. (Portai, ouvrage dj cit, t. III, p. 132.) Or qui ne voit, que quelques-uns de ces accidents auraient pu tre provoqus par L'norme fatigue du voyage. (2) Nous omettons de faire remarquer que la restitution des forces sans aucune amlioration des symptmes n'est nullement un indice de la rmission de la malade. Cela est connu de tous i (31 Swietens ad BoherJiav. aphor. 1206 p. mihi 74.
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d'entre n o u s la soutnt et la conduisit, et cela ne suffisait pas encore. 18).Notre adversaire a t o u c h ce point trop la lgre, lui qui par des arguments trop svres,nous oppose avec beau c o u p trop de rigueur et le voyage et le sjour fi R o m e . Il ne voit pas c o m m e n t la j e u n e Ville a pu faire le voyage : et pourquoi ne le voit-il pas, parce qu'il s e l a figtweau seuil de la mort; qu'il dpose cette fiction,qu'il examine ce qu'a cot ce v o y a g e a Marie: Qu'il observe q u e l l e n'a pu rester assise sur l'ne, qu'il remarque cette horrible difficult de r e s pirer qui faisait interrompre la marche si lente de l'ne pour q u e la malade put tre dpose terre ; qu'il tienne c o m p t e de ce feu intrieur qui la dvorait, de cette soif violente qui la tourmentait, et il comprendra que ce voyage n'a pu tre accompli sans danger. Cela pos qu'il considre la confiance de la m r e et de la fille, qu'il jette les regards sur cette gurison prodigieuse, surtout, et c o m m e il convient en pa reille matire, qu'il rflchisse l'incomparable Providence de Dieu. Dieu en effet dispose tout avec ordre et m e s u r e . Il avait dcrt d'accomplir ce miracle Rome, c'est pourquoi il a inspir la malade et sa mre la confiance ncessaire. T o u t en conservant sa maladie la j e u n e fille d garder assez de vie et de force pour se traner au tombeau de Benot. Ainsi donc les souilrances de la malade pendant le voyage confirment la prsence et la grivet de la maladie; ainsi s'explique pourquoi la malade n'a pas s u c c o m b aprs tant de fatigues ; on voit alors facilement c o m m e n t elle a pu faire ce voyage. J 190. P r o c d o n s avec la m m e m t h o d e pour les choses qu'il ne comprend pas au sujet du sjour R o m e . Marie tait v e n u e Rome dans l'espoir non d'un secours naturel mais d'un miracle au tombeau du vnrable Benot. Elle tait v e n u e avec u n e telle confiance qu'elle ne se souciait pas du danger. Sa pauvret l'empchait de se faire con duire en voiture, et pour y tre a m e n e elle faisait peu de cas du danger. Pour se rendre digne des grces du ciel, il faut auparavant se purifier de ses pchs, sa pieuse mre et les autres eurent recours la confession sacramentelle et se nourrirent du pain eucharistique. Cela c'et t diffi cile ou impossible dans l'glise de Sainle-Marie-des-Monts cause de l'aflluence du peuple. P o u r en finir plus tt, elles allrent dans l'glise de 1'Ara-Cli o le bau-frere d Gaspard Mancini, prtre observantin pouvait leur procurer soit le secours de s o n ministre, soit celui de ses confrres, "qui alla avec elles clbrer sa messe pour la malade. Voil
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pourquoi elle fut conduite l'glise de l'Ara-Cli d'abord, Sainte-Marie des Monts ensuite. Mais c o m m e n t y fut-elle mene? Gcrlainement elle ne pouvait marcher toute seule. Aussi fut-elle porte, peu prs c o m m e un cadavre, s o u tenue par deux personnes. Ge ne fut pas sans peine. Au sujet de la visite suivante, q u i ' n o u s dit-on, fut faite par la malade aprs l e l o n g repos d'un jour et d'une nuit, les tmoins d i s e n t : pour la conduire nous avions moins de fatigue , cette fatigue excessive de la premire visite a donc d tre colle des personnes qui soutenaient la m a l a d e ; et cependant la marche n'en tait pas plus aise, car ce n e fut qu'avec peine qu'on l'y put porter, et chaque instant il fallait la faire reposer. Un cadavre n'aurait-il pas pu tre port de m m e et l. Certes nous ne voyons pas pourquoi on ne peut comprendre que la malade eut pu tre conduite de celte manire, et c o m m e n t on en conclut qu'il y avait du mieux. 191. Accordons notre savant critique, si cela lui plat, que s'asseoir pendant le voyage, se transporter d'un h e u un autre dans la ville, indiquent que les forces n'ont pas entirement disparu. Cependant quel h o m m e sens y recon natrait une dcroissance de la maladie ? S'agit-il de paralysie ou rie tout autre maladie affectant lus organes de la molilit, inconciliable avec l'action des muscles, d'une maladie dans laquelle un lger retour de forces ou la fermet, la solidit des parties malades signifierait une dcroissance du mal? Ne s'agit-il pas plutt de l'ulcre des p o u m o n s qui ronge cet organe si noble, ulcre qui se trahit par les s y m p t m e s numrs et par la consomption du corps? N'avons-no us jamais observ de phthisiques qui jusqu' leurs derniers m o ments se tiennent debout, marchent, agissent c o m m e s'ils avaient vivre encore longtemps ? Tout le monde le sait et ' souvent le cas s'est prsent n o u s . Cependant pour tablir une conclusion plus rigoureuse et plus sre, il faut s'ap puyer sur l'autorit ; j e confirmerai donc ma thse par des exemples emprunts l'observation de mdecins minents. 192. Swieten a crit (1) : j'ai vu quelques exemples pa reils, entre autres u n h o m m e illustre qui mourut plus que septuagnaire : quatre ans avant sa mort je le vis cracher avec facilit chaque matin quelques onces d'un pus blanc, compacte, el cracher trs souvent clans la journe de semblables matires. 11 affirmait avec vrit que depuis trente ans il expecloraitla m m e quantit de pus, et ce fait
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(i) Ad Boheraave, aphor. 1206. Mihi t. IV, part. i.pag. 60, in fine.
est cenfirmpardes mdecins tres dignes de foi qui l'avaient soign autrefois. Il remplt toutes ses fonctions jusqu' sa mort ; il avait une table assez hien servie et mangeait d'un bon apptit. On trouve chez Scbenk plusieurs cas semblables (I). Il m'arriva autrefois d'observer des malades qui tout en ex pectorant des crachais d'une odeur infecte, vivaient encore l o n g t e m p s et pouvaient vaquer leurs travaux habituels. Je le remarquuid'abord chez un j e u n e h o m m e qui le matin, la suite do la toux, rejetait des crachats tellement ftides que j e pouvais peine en supporter l'odeur; j e ne m e crois pas pourtant iissez dlicat pour m'aflecter de choses pa reilles, La maladie avait certainement dur l o n g t e m p s avant d'amener cette ftidit des crachats. Or ce j e u n e h o m m e v c u t encore deux annes entires o c c u p ses travaux ordinaires. T o u t coup les crachements devinrent plus frquents, il maigrit rapidement, et m o u r u t . Il dit e n c o r e : J'ai vu un habile m u s i c i e n entirement puis par une phthisie au dernier degrs, jouant des cym bale la veille de sa mort et r e m u a n t ses doigts avec une grande dextrit.On lit dans Portai (2): II y a pourtant des poitrinaires qui ne s'aperoivent pas qu'ils sont atteints de fivre; il est m m e surprenant d'en voir qui, rduits au troisime degr d'une si terrible maladie, se lvent tous les jours de leur lit, qui malgr bien de la peine sortent chaque jour de leur maison et vaquent leur besogne. U n individu du n o m de Sylvestre Gaspari, ouvrier en perles, tait un poitrinaire achev, qui se m o q u a i t de moi quand j e lui conseillais de rester chez lui, parce qu'il avait une i m m e n s e difficult de respirer, une toux violente, des douleurs dans la poitrine ; ses crachats taient purulents, le ventre un p e u libre, et une fivre trs-lente s'accentuait sur le soir. Au lieu de me transporter chez lui, il voulait toute force venir chez moi. 11 ne pouvait pas se rsoudre croire qu'il lt atteint de la fivre. Dans la journe du 16 septembre 1798, les crachats s'arrtrent l'improviste, la diarrhe fut trs abondante, la difficult de respirer in q u i t a n t e ; et en quelques heures qu'il passa dans s o n lit il expira. Et Frdrigo qui a traduit en italien les uvres de Portai fait cette remarque (3) : une j e u n e fille de dix-huit
(1) Ibid., page 72. (2) Jbid>, page 74.
LES
MIRACLES
AU
TRIBUNAL
DE
LA
SCIENCE.
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ans qui mourut, u n o consomption pulmonaire dans le m o i s de juilleL de cotte anne, ne fut astreinte garder le lit que le dernier j o u r . . . Le soir mme qu'elle expira elle tint avec ses parents la conversation la plus anime. Il y a trois ans aussi, un de ses frres tait mort d'une consomption pul monaire, et il ne resta au lit que les derniers jours. Il fut toujours assez tranquille, et il pensait toute'autre chose qu' tre bientt la victime de ce mal. Laconcc rapporte un cas semblable au sujet de Marianne Levas : il fait de plus la description des poumons et prouve l'existence d'une vritable phthisie(J).Le poumon du mme ct (droit) tait aplati... il adhrait de toutes parts la plaie costale, au mdiastin, et au diaphragme... La moiti suprieure de ce poumon tait o c c u p e par une excavation extrmement vaste, qui no contenait qu'environ deux cuil leres d'une matire puriforme jauntre assez liquide... La portion antrieure des lobes suprieur et moyen, qui seule n'avait pas t envahie par la caverne,tait encore crpitante: on y trouvait Q et l des petits groupes de tubercules miliaires jaunes ou gris... Le lobe infrieur de ce poumon l grement infiltr de srosit sanguinolente vers sa partie postrieure, contenait dans le m m e point un groupe de tubercules jaunes. Dcrivant la dernire phase de la maladie de cette femme il ajoute : les crachats taient plus a b o n dants : d'ailleurs elle se levait, et agissait encore d'une ma nire tonnante, vu l'tat de maigreur dans lequel elle tait, et la gravii des s y m p t m e s locaux ; elle parlait sur tout beaucoup, et sa voix altre c o m m e glapissante, s'en tendait de fort loin. Les signes donns par le stthoscope taient toujours les mmes : elle mourut presque subite ment. 193. On pourrait accumuler un plus grand n o m b r e d'exemples, ceux-ci paraissent suffisants pour confirmer un fait qui se prsente souvent. Si, par ces observations des m decins il reste prouv qu'il y a parfois des phthisiques qui se lvent, marchent, s'acquittent do leurs emplois, sans le secours d'autrui, jusqu' leur mort o u peu d'heures avant, qui donc osera nier la gravit et le danger de la maladie de Marie Rose, sous prtexte qu'elle n'avait pas atteint sa dernire heure, que porte par d'autres personnes elle s'tait assise sur un ne, que se soutenant avec peine avec l'aide de deux personnes elle s'est trane jusqu' l'glise. (1) Trait, de l'Auscultation mdiate, t. II, chap. i, art. 3, observ. 30 p. 142 et suiv.
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R e c o m m a n d o n s s e u l e m e n t celui qui charg de remplir la fonction de contradicteur, n o u s oppose c o m m e objection son d o u b l e trajet et son sjour R o m e , de ne plus oublier que les phlhisiques c o n s e r v e n t s o u v e n t jusqu' leur m o r t l e u r libert de m o u v e m e n t , l a n t que leur forcesle leur permettent; c o n j u r o n s - l e de jeter les yeux sur les e x e m p l e s proposs. Chez ces phthisiques presque tus par une l o n g u e c o n s o m p t i o n , o u sont ces d e r n i e r s s y m p t m e s qui seuls selon lui
p e u v e n t f o u r n i r m a t i r e h u n m i r a c l e ? Si o n ne les t r o u v e p a s m m e d a n s c e s l o n g u e s m a l a d i e s , q u ' i l d i s e p o u r q u o i il
les exige d a n s la phthisie secondaire et aigu. 194. Dbarrass des objections tires du fait en lui-mme notre savant n o u s invite l'examen des remdes. A p r e s ce q u e n o u s avons dit, la rponse devra tre bien abrge. Voici la rgle: on doit rpondre qu'il y a miracle, les autres c o n d i t i o n s subsistant, si on n'a pas e m p l o y de r e m d e s , et m m e s'il est certain que ces remdes ayant t e m p l o y s n'ont produit a u c u n effet. Par la persistance de tous les s y m p t m e s il a t p r o u v q u e la phthisie confirme a subsist chez Marie-Rose jusqu' s a gurison miraculeuse. On n e peut d o n c rvoquer en doute la parfaite inutilit des r e m d e s . D o n c
quand m m e u n r e m d e efficace e t t e m p l o y , c e l a n ' t e r i e n la c e r t i t u d e d u m i r a c l e . C r a i g n a n t q u e 'la r e n o m m e
de notre adversaire, son autorit, son reflet de m d e c i n , sur l e s q u e l s il s e m b l e c o m p t e r pour faire briller ses objections, n e puissent jeter q u e l q u e doute sur un fait aussi vident, nous s o m m e s forc d'engager une n o u v e l l e d i s c u s s i o n , et d'exa miner les uns aprs les autres les textes des auteurs qu'on n o u s oppose pour faire ressortir le p e u de valeur de ses arguments. 195. D'abord n o u s d e m a n d o n s pourquoi on lui donna t o u t d'abord des drogues de pharmacie qu'on n e lui donna p l u s dans la suite, c o m m e le dit Franoise Maggiori ? A s s u r m e n t si les r e m d e s eussent t utiles, ou s'il e t cru
qu'ils le seraient, h m o i n s d ' t r e fou, le. m d e c i n n e les a u r a i t pas r e j e t s , quand l e b e s o i n a u g m e n t a i t . O n l e s l a i s s a
d o n c d c o t e parce qu'ils avaient t i n u t i l e s , parce qu'on n'esprait pas qu'ils le fussent, c'est--dire parce q u e le cas tait dsespr, c o m m e l'affirme le m m e t m o i n . P o u r quoi aussi le m d e c i n et le chirurgien dans leur dposition ont-ils parl si c l a i r e m e n t : N o u s tions prts soulager cette j e u n e fille par les ressources de la clinique, mais n o u s creusions un puits au milieu d'un fleuve. P o u r q u o i cette affirmation, sinon parce qu'ils avaient r e c o n n u l'in utilit des remdes? De p l u s , p o u r q u o i l e m d e c i n a-l-il rap-
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port qu'alors que la maladie allait s'aggravant, laissant de ct les remdes actifs ou spcifiques, capables de vaincre la maladie, il a e m p l o y seulement des palliatifs pour diminuer les symptmes? Pourquoi a - t - i l m e m e nglig dans la suite ces remdes palliatifs ? Dans la dernire priode de la m a ladie, dit-il, on n'employa que les tisanes, les herbes et d'autres remdes innocents, aptes seulement adoucir l' nergie de la toux et la force do l'oppression, mais non gurir le mal, de sa n a t u r e ingurissable. Je n e saurais m m e pas dire si clans les d e r n i e r s j o u r s assez r a p p r o c h s du d p a r t de Marie-Rose pour R o m e , o n usait de ces remdes innocents, mais il me semble plutt que non. Cette dernire omission,qu'il rapporte en hsitant, la cou sine del miracule semble nous la faire connatre plus clai rement. Aprs avoir rappel ces remdes i n n o c e n s n u m r s tout l'heure p a r le mdecin, elle dit au sujet du petit-lait seulement : On continua lui donner du potit-lait jusqu' ce que nous partmes de Mazzano, ce qui indique que tous les autres furent abandonns la fin. Pourquoi en ft-il ainsi, sinon parce que le m d e c i n , comme il le dit l u i - m m e , tait sans espoir de lui tre de quelque secours avec toutes les ressources de l ' a r t . On en tait venu au cas i n d i q u p a r Willis : s'il n ' y a p l u s d'espoir de g u r i s o n on doit s'en tenir aux remdes qui rendent la mort plus douce. 196. La m t h o d e de traitement qui consiste d'abord employer les remdes spriiiques,puisdes palliatifsseulement, enfin abandonner tout traitement, fait voir trs-clairement l'inutilit des mdicaments. Ce que confirment fort bien les aveux de savants mdecins. Quelqu'un dira peut-tre : Les mdecins ont pu otre tromps, ce n'est p a s leur opi nion mais aux faits qu'il faut s'en tenir quand il s'agit d'un miracle. Nous ne le nions p a s , les mdecins ont pu tre tromps ; le m o d e de traitement, le j u g e m e n t des mdecins traitants considrs en particulier et s p a r s des faits ne mnent qu' u n e pure prsomption, m a i s j o i n t s aux faits qui niera qu'ils sont d'un grand poids p o u r eu p r o u v e r l'vi dence ? Or il est certain que tous les s y m p t m e s de la ma ladie en question ont toujours subsist ; ils se sont dve lopps de jour en jour ; de nouveaux et de plus funestes sont survenus : par exemple l'dme du pieds, et, la lin, la douleur de ct, etc. ; donc vaincu par l'existence de ces faits, il faudra bien accorder que joints au m o d e de traite ments et au j u g e m e n t trs-grave des mdecins ils sont une preuve srieuse de l'inutilit des remdes, inutilit que notre savant critique a entrepris de combattre.
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197. Cependant il dit l u i - m m e : on e m p l o y a les remdes qui sont d n a t u r e loigner le progrs de l'inflam m a t i o n . . . une fois on lui tira du s a n g . Sans doute que ce r e m d e appliqu u n e seule fois,de peur de compromettre la vie, et t insuffisant pour combattre une vritable pneumonie ; mais au contraire, dans le cas d'une phlogose do nature catarrheuse et exantbmatique il devait lre employ avec c e l l e prudence et cette modra tion bien grande. 198, A quoi je rponds brivement : l l'inflammation tait-elle rsolue ou n o n ? Si elle ne le fut pas il y eut suppuration, que rsulte-t-il contre nous de ce q u e . on a e m p l o y ces remdes qui sont de nature loigner les progrs de l'inflammation ? Plus on s'imaginera qu'ils pouvaient amener la gurison, plus la ralit de la maladie et leur inutilit seront mises au jour. 2 Une seule saigne tait-elle ou non capable de rduire une inflammation des p o u m o n s bien c a r a c t r i s e ? S i c i l e esl insuffisante, selon notre adversaire lui-mme,l'inutilit de remde est vidente; si elle est suffisante, l'objection dj propose va revenir. 3 La maladie en question i n d i q u e - t - c l i e u n e vritable pri p n e u m o n i e ou une bronchite? Si les signes avant-coureurs, les s y m p t m e s p a t h o g n o m o n i q u e s , le cours de la maladie: tout fait prsager une p r i p n e u m o n i e ; si, inversement, des causes et des s y m p t m e s contraires font repousser u n e bron chite ; assurrtient on devait carter le traitement appliqu dans une bronchite. D'ailleurs, si c o m m e l'affirme notre savant adversaire, Vieusseux, Bursre et autres ont re c o m m a n d la saigne au dbut d'une bronchite, ils n'ont pas voulu s'astreindre u n e seule saigne, s u r t o u t dans une bronchite grave. L'hypothse m m e d'une bronchite m i s e e n avant dans le cas de Marie-Rose par notre savant critique signifie qu'une seule saigne ne suflisait pas. Admet tons, s'il le veut, que la j e u n e lille souffrait n o n d'une p r i p n e u m o n i e mais d'une bronchite; i l n e pourra pas nier que la maladie a suivi son cour aprs la saigne et que la saigne fut par c o n s q u e n t insuffisante pour arrter le m a l .
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199. Notre critique continue en faisant remarquer qu'on a o m i s de parler des mdicaments (fl n'a pu soulever la question de leur opportunit puisqu'ils lui s o n t incon n u s ) , et il ajoute : On lui donnait seulement o u du petitlait, o u du lait, o u de la tisane faite avec des simples qui font du bien la poitrine ; j e m e rappelle qu'on lui donnait manger du pain tremp dans du lait, et l'on continua de lui donner du p^tit-lait jusqu' c e q u e n o u s partmes de Mazzano.
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Il rsulte rie l que des remdes efficaces furent employs non seulement au c o m m e n c e m e n t , c o m m e l'affirment les dfenseurs de cette opinion, mais encore dans le cours et presque jusqu' la fin de la maladie, c'est--dire jusqu'au jour o fut entrepris le voyage de Rome. J'ai dit des r e mdes efficaces : on effet si la saigne, pratique ds le prin cipe avec prcaution et propos, a t efficace, l'usage du lait clans le cours de la maladie doit tre regard c o m m e plus eflicace encore. 200 Notons eu passant cette triple habilet de notre cri vain. 1 A l a lgre, par son silence,il laisse planer le soupon sur l'opportunit de remdes inconnus, c o m m e si leur op portunit pouvait tre utile dans un cas ol'inutilil des pal liatifs employs est notoire. 5?o n numere les remdes pal liatifs qui furent toujours donns la malade aprs les remdes efficaces : ces r e m d e s il les apprend non pas des mdecins, mais de la parente de la miracule; et ce n'est pas -sans raison qu'il agit de la sorte, car cette femme ignorante ne pouvait discerner les mdicaments efficaces des remdes palliatifs: elle dit en termes gnraux des tisanes fait.es avec des herbes qui faisaient du bien la poitrine; sur quoi notre adversaire conclut : des rem-los efficaces furent donns au c o m m e n c e m e n t et mmo dan* le cours de la maladie. Or le mdecin avait dit avec raison : On n'employa que des tisanes, des herbes et d'autres remdes innocents, aptes seulement adoucir l'nergie de la toux et l'angoisse de l'oppression, mais non gurir le mal de sa nature ingurissable . Ces paroles ne faisaient pas l'alfaire de notre savant, car elles dsignaient des re mdes tout tait inefficaces. 3 Il s'est efforce d'tre conius en parlant de la vertu des mdicaments. Tout le monde sait qu'il y a une grande diffrence entre la simple proprit curative et 1 efticacit d un remde. L'une peut ne produire aucun rrsukat, tant seulement la puissance o u l'aptitude produire un effet, si rien ne s'y oppose; l'autre designe l'aptitude ou la puissance suivie d effet ; ehe produit tou jours un rsultai. Voulant donc attribuer un effet aux re mdes il mit de ct le mot aptitude pour lui substituer efficacit, et pour l'aire croire qu'il a agi sciemment, il a crit : d'o rcsuhe 1 elficdcitc des r e m d e s . . . moi, j ai dit remdes uiticdces, car si rellement la saigne a etc efficace, l'usage du uni a du l'cire, e t plus i o n e raison. Mais si les autres remdes ne produisirent pas plus d'effet que la s a i gne, sou a n u i c e n e trompera personne. 201. Ceiapob, il exagre l'utilit du lait en reproduisant vu 19
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les paroles d'Hoffmann. E s t - c e un remde n de la veille ou de l'avant-veille et n'ayant produit que trois ou quatre gurisons? Non, trente sicles, et l'exprience c o n s t a n t e d e tous les m d e c i n s de toutes les nations l'ont toujours d s i g n c o m m e trs-bon pour la sant. S o n usage a produit des gurisons merveilleuses de la phthisie. Aussi dans toute affection de poitrine et dans l'puisement, le lait peut tre regard c o m m e un remde universel, qui satisfait toutes les indications. 202.C'est t r s - b i e n sans d o u t e . C e p e n d a n t q u e prouve c e t t e autorit, sinon l'aptitude du lait au traitement de la phthisie? Or il faudrait prouver son efficacit pour rejeter le m i racle. Ni l'exprience de trente sicles, ni le c o n s e n t e m e n t des mdecins de toutes les nations n e prouveront j a m a i s q u ' u n remde apte gurir, ait t efficace dans tel o u tel cas particulier. C'est le fait et n o n la science mdicale qu'il faut interroger pour cela. Au sujet de l'cfiicacit, il est vident que la plupart du temps on n e peut l'admettre, soit q u e nousconsidrions l'ensemble de toutes les m a l a d i e s ou la s e u l e phthisie. Il n'est presque aucun phthisique qui les m d e c i n s n'aient prescrit l'usage du lait. Or, si n o u s constatons, avec Joseph Frank, que les phthisiques, g n r a l e m e n t p a r l a n t , f o r m e n t la c i n q u i m e p a r t i e de c e u x qui m e u r e n t ( l ) , t o u t le m o n d e remarquera c o m b i e n l'aptitude de ce r e m d e diffre de l'efficacit,et c o m b i e n il est absurde de vouloir faire prendre, contre toute raison, l'efficacit p o u r l'aptitude. 2 0 3 . Ce qui vient d'tre dit est extrinsque au texte object. En l'examinant s o i g n e u s e m e n t , il offre u n e rponse n o u v e l l e et plus prcise. N o u s y voyons en effet q u e le lait estrecommandparlloffmanncommedevanttrecmploynon sans m e s u r e , mais avec prudence, pour qu'il puisse gurir. Le texte ci-aprs n'a pas t remarqu {'l) : tout le secret pour gurir o u mitiger une maladie, consiste dans le j u s t e et sage u&age du lait. Si une personne ne sait user s a g e m e n t des aliments o u des mdicaments, elle se fait plus de m a l que de b i e n . P u i s , pour expliquer son opinion il ajoute (3): <t pour suivre d'une manire are et ellicace le traitement avec le lait seul, o u mlang avec les eaux m i n r a l e s , de t o u t e ncessit, il faut prendre les prcautions suivantes. 1 Examiner s o i g n e u s e m e n t si l'estomac est assez fort p o u r
ii) Tome II, part. 2, cap. 10, Dlia tisi pulmonari, 43, num. 3. (2) De aiecl. phlliis. cap. l i , g i, num.8.
(3) Ibid. 2, n u m . 7.
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digrer, puis rejeter ce mdicament. A cette principale condition que n o u s avons copie en toutes lettres, et que Ton relrouvera encore plus bas, il ajoute : 2 qu'il faut auparavant purger le malade par des mdecines particulires ; 3 il pres crit le lait anesse ou de femme, sa quantil et l'heure de le boire ; 4 au bout de six ou huit jours il faut encore, dit-il, purger le malade par des laxatifs. 5 Il numre les aliments dont il faut user ou s'abstenir, 6 Enfin il ordonne d'exciter par'l'lixir balsamique le pouvoir digestif de l'es tomac presque toujours affaibli. 204. En faisant l'loge de ce traitement par le lait que recommande Hoffmann, noire adversaire ne devait pas le sparer des conditions requises pur ce mdecin, ni attri buer un usage quelconque du lait une vertu dont tout le secret consiste dans une juste et sage mesure. Hoffmann nous avertit qu'en ngligeant celte prcaution, le lait est plus nuisible q u e bienfaisant. Laquelle de ces prcautions a-t-on observe pour notre jeune tille ? On ne lui a donn ni purgatifs, ni laxatifs, ni lixir balsamique pour faci liter la digestion ; nous savons qu'on a nglig les drogues de p h a r m a c i e ; on lui a seulement fait boire des infusions d'herbes, pour calmer la loux t l'orlhopne. Elle n'a certainement bu ni lait d'nesse, ni lait de femme, dans telle mesure, telle heure. L'usage du lait consis tait dans du pain tremp dans du lait, et du petit-lait qu'on lui d o n n a jusqu' ce que nous partmes de Maz zano . Des paysans, des pauvres ne pouvaient viter de manger des aliments indigestes, rcuss par Hoffmann, et les r e m placer, selon son conseil, par des bouillons de tortues,d ecrevisses de rivire, de viande de veau. L'estomac de la malade n'tait pas n o n plus capable de supporter et de digrer celte espce de m d i c a m e n t ; elle ne digrait pas mme les autres, la diarrhe colliquiilive en est la preuve. Si Hoffmann qui requiert c o m m e ncessaires tant de conditions pour l'usage bienfaisant du lait, conditions qui, tant ngliges, sont plus funestes qu'utiles, si Hoffmann et vu l'usage qui en a t fait, j.e ne sais si, avec notre savant, il l'appellerait un remde trs-bon pour la sant, et d u n usage merveilleux pour gurir la phthisie dans le cas actuel. 205. Ce n'est pas assez. Des mdecins d'un grand n o m n'ont pas cru devoir permettre le lait tous tes phthisiques. ils l'ont permis s e u l e m e n t au c o m m e n c e m e n t ou dans .les premires phases de la maladie. Bennelo o u Benot, dans s o n thtre des maladies de langueur, aprs avoir recommand
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l'usage du lail ajoute (I) : J ai Gru ncessaire d'en inter dire l'usage & ceux qui sont vraiment p h l h i s i q u e s cause d s c o n s q u e n c e s . C'est que chez les malades affaiblis par l'envahissement d'un suc plus acre, la partie caseuse du lait' se forme en caillots et oblitre les vaisseaux, d u n e faon opinitre; chez ceux dont la fivre est cause par la p r s e n c e de M I es putrfis et la partie butyreuse se c h a n g e e n pus. Bursrius dit (2) : de l'avis de tous, rien n'est plus utile et p l u s excellent que le lait, pourvu que le malade ne souffre p a s de faiblesse de l'estomac, ni de la s o i f , e t qu'il n'y ait pas d'autres inconvnients. P u i s il ajoute (,}) : Bien que le lait s o i t trs-profitable, il ne faut pas cependant le donner t o u s les phtisiques indistinctement, ni tout m o m e n t . Bien s o u v e n t le flux de ventre qui d'ordinaire suit o u a c c o m p a g n e l a dissolution, le dprissement, s'accrot et redouble, par la prsence du lait quand il existe, o n s'il n'est pas encore survenu, il est Irs-rapidement provoqu. Morton(4) e n g a g e , s'il y a diarrhe, s'abstenir s c r u p u l e u s e m e n t de tout, l a i t a g e . Joseph Frank (5) nous enseigne la m m e chose : L'usage du lait est contr'iudiqu par la fivre violente et l a diarrhe. Hoffmann, rat par notre adversaire, requiert d'abord un estomac capable 'le digrer le l a i t ; or, notre malade tait prive de ce bonheur : une soif ardente la d vorait, la diarrhe colliquative la faisait souffrir; d o n c , dans ce cas, le lait, m m e e m p l o y suivant les rgles, n e pouvait apporter de soulagement, if lait plutt nuisible. Mais on n'avait pas d o n n le lait c o m m e il convient,et toutes l e s rgles de son bon usage lurent n g l i g e s ; aussi a t-il d causer plus de mal que de bien. Ce n'est donc pas s e u l e m e n t l'efficacit mais l'aptitude m m e du remde q u e n o u s nions ici ; tous ces ioges du lait qui feraient bonne figure dans une dissertation aea lemique, sont trangers n o t r e thse.
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2 0 6 . Notre critique ajoutait : Le lait tient la premire p l a c e dans cette affection de poitrine, laquelle, d'aprs l'illustre Hoffmann, est la suite d'une pleursie et d une p r i p n e u m o n i e mal termine : dans c e cas il n'y a pas . d e meilleur re:nde que le lait donn en temps c o n v e nable. Je connais bon nombre de phlhisiques ayant dj (1) Cap. 26 rie Galocloposeos id est de potu lactis. <2) De Phthisi pulioon., 78.
<3) Ibid. |82.
<4) lu su physiologie, lib. Il, cap. 9, p. 53 in fuie. (S) Dlia tisi pulinonari, 44, nuin. 14, uih, p . 291.
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un pied dans la barque de Caron, qui furent rendus a ainsi h la sant premire. Qu'on me permette d'abord d'opposer ce mdecin de premier ordre qui parle ici d'une manire gnrale, un autre mderin non infrieur en m rite ; Morgan raconte qu'il a guri avec du lait de femme un malade regard c o m m e phthisique ; mais il ajoute : celui que l'on prenait pour un phthisique ne Pelant pas en ralit. La force de c e t t e observation ressortira m i e u x quand on Saura quel sens Hoffmann a al lche ce m o t p h l h i s i q u e . A celle p r e m i r e r e m a r q u e il faut'eu ajouter une autre. Hoffmann a voulu parler, c o m m e le contexte l'indique, du sage emploi du l a i t ; or, c e l l e restriction ne s'applique pas notre thse. Kemarqnons enfin cetle ruse de notre adver saire de retrancher les prliminaires du texte cit pour mieux l'adapter sa thse. 207. Dans le numro prcdent Morgan distingue plusieurs . degrs de phthisie, et promet de parler du traitement de chacune sparment. Hoffmann distingue trois t r a i t e m e n t s : curatifs, palliatifs el pr>ervatifs. On doit employer le pre miers quand il y a espoir d une gurison complte, le s e cond quand la violence de la maladie est telle qu'on ne p o u r r a la vaincre m m e avec les remdes les plus ner giques ; le t r o i s i m e , ds l ' a p p a r i t i o n du m a l . Puis dans le numro suivant cit par notre savant critique, l'au teur traite de la priode o il y a espoir de gurison. Arrivons, dit-il, la mlhode curative. Elle s'emploie sui*tout quand l'abcs du poumon se forme par la rupture de la vomique, et q u ' u n e grande quantit d h u m e u r s'coule, ce qui arrive bien souvent aprs une pleursie ou une pri pneumonie mal termines, aprs une h m o p t y s i e et une lsion du p o u m o n , condition pourtant que la substance du poumon ne soit ni ronge, ni squirreuse. Dans ce cas il n'y a pas de meilleur remde que le bon emploi du lait. J'ai connu bon nombre de phthisiques dj c o m m e m o n t s dans la b a r q u e Caron, qui furent guris et r e n d u s la sant p r e m i r e . 208. Nous avons rtabli le texte de l'auteur. Remarquez avec quelle clart il procde. Il distingue la phthisie c u rable de l'incurable, et dit d'employer contre la premire les remdes nergiques, contre la seconde les palliatifs. E t propos d e l phthisie curable, il affirme que l'abcs du poumon s'ouvre par la rupture d e l v o o n q u e , c c q u i produit une grande quantit de p u s . En effet la vomique n'est pas une vraie phthisie, mais le c o m m e n c e m e n t ou c o m m e o n dit, la phthisie son dbut, puisque la vomique e n g e n d r e
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ordinairement la phthisie. Cette v o m i q u e , d i t - i l , n a t souvent d'une pleursie, d'une pripneumonie mal termine, de l'hmoptysie o u d'une lsion du p o u m o n . Dans ce cas le remde c'est le lait, pourvu que la substance pulmonaire ne soit ni attaque, ni ronge par des ulcres, ni squirreuse. C'est de cet tat, c'est quand la substance des pouniuns reste intacte, c'est--dire au c o m m e n c e m e n t d'une phthisie, qu'il raconte avoir vu des phthsiques guris et rendus la sant premire, bien que presque m o n t s dans la barque de Caron. 209. 11 n'est pas permis de douter que ce soit le sens vrai et exact de l'auteur, soit qu'on lise attentivement le texte sur la gurison de la phthisie, soit qu'on le compare avec ses autres crits sur les diagnostics de celte maladie. Aprs avoir affirm dans les thses pathologiques dont il Tait pr cder sa m t h o d e de gurison, qu'une phthisie dclare est a u - d e s s u s de tout art h u m a i n , il a j o u t e : u Je ne voudrais pas en dire autant de toute phthisie,.surtout s o n dbut et c o m m e encore au b e r c e a u . P o u r appuyer s o n opinion sur des faits,il rapporte notre exemple presque dans les m m e s termes, et il ajoute aussitt : J'ai c o n n u p l u sieurs sujets qui, la suite d'une lsion, d'une h m o p t y s i e , d'une rupture des bronches, aprs une pleursie, une pri p n e u m o n i e , furent atteints d'abcs des p o u m o n s et de v o m i q u e s ; et qui n a n m o i n s , l'aide d'un calmant o p p o r t u n , furent entirement dlivrs de leur affection. 210. Voil les phthisiques presque m o n t s dans la barque Caron, que notre auteur a vus entirement guris a u m o y e n du lait. Mais ces phthisiques taient au dbut de la maladie. C"taient des phthisiques atteints d'un simple a b cs du p o u m o n par suite de rupture de la v o m i q u e dont ils avaient vomi le pus. C'taient des phthisiques chez lesquels le tissu pulmonaire tait sain ; des phthisiques dont les ulcres n'avaient pas rong le p o u m o n . e t dont les s t e a t m e s n'avaient pas endurci le parenchyme. C'est pourquoi Hoff m a n n affirme qu'il a pu gurir ces phthisiques au m o y e n du lait, taudis q u e Morgan, parlant de phthisies relles et avances, a pu dclarer que le lait n'a jamais guri p e r sonne. 211. Voyez c o m b i e n cette objection appuye de tant de n o m s clbres, est trangre notre cas. Hoffmann dit q u e le lait doit tre e m p l o y dans une sage mesure, notre cas n o u s montre qu'il l'a t tout de travers et sans p r c a u t i o n s . Il parle de la vomique; elle est v i d e m m e n t trangre n o t r e cas; elle est exclue par les s y m p t m e s et par l'aveu de n o t r e
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savant adversaire. Tl parle de la phthisie encore au berceau, n o u s de la phthisie avre. Il parle du cas o le p o u m o n e s t encore s a i n ; dans le ntre, la corruption et les ulcres des poumons constituent toute la force de la maladie et ses caractres. 212. Qui et j a m a i s song que ce texte si bien e n h a r monie avec notre thse serait ainsi dnatur pour dmontrer la gurison possible de la phthisie au moyen du lait? Notre savant a fait cela sans peine, il lui a suffi de retrancher tous les dtails qui auraient pu rvler le vritable sens de l'au teur. Cette habilet n e le mettra pas l'abri de nos c o u p s . Appuy de l'autorit i n v o q u e par lui, et c o m m e sr de l u i m m e , il ajoute : Si j'admets le n o m de la maladie (phthisie),'je serai bien plus en droit d'affirmer que dans la maladie de Marie on a employ le meilleur des re-" mdes. Qui ne le fliciterait d'une si fine et si vigoureuse attaque, et surtout d'une pareille victoire? 213. Continuons. Il exagre l'efficacit du petit-lait; il,-, remarque qu'on lui donna du petit lait jusqu' ce que nous partmes de Mazzano. Il cite encore Hofimann lequel se plaindrait a m r e m e n t de se voir invoqu en pareille cause, et lui fait dire : Non-seulement dans le lait, mais dans sa partie sreuse olle-mme bien prpare, rside une vertu efficace pour gurir les affections chroniques des poumons et des autres viscres; souvent ce srum est prfrable au l a i t , et est plus nergique que le lait. Pourquoi n'a-t-il pas retranch ces m o t s bien prpar qui dtruisent la force de son objection et amnent une confusion d'ides? On sait que le lait est constitu par trois substances, savoir: le beurre o u la partie grasse de la crme, le casum et le srum, qui dissout les deux premiers et les mle galement entre eux. Cette lymphe lgre, le srum, ajoute au lait pour dis soudre ses parties glutineuscs, est spare des deux autres par deux procds, le procd pastoral et le procd phar maceutique. Les bergers, lorsqu'ils confectionnent le fro mage primitif, Je fromage proprement dit, et le fromage secondaire (recuitej, l i m i n e n t le srum par une premire et une seconde c u i s s o n ; alors le serum o u le petit-lait, impur et ml de parties caseuses et butyreuses deux fois cuites, est de digestion difficile; et dans plusieurs localits on a c o u t u m e de le faire servir l'alimentation des chiens. Les pharmaciens, au contraire, prennent du lait trs-frais, le font coaguler et le s o u m e t t e n t l'action d'un feu d o u x ; ils ptrissent ensuite le coagulum jusqu' ce qu'il soit bien broy, liminent avec soin toutes les parties caseuses,
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chauffent jusqu' l'bullition, e l aprs c e l t e courte bullition.fon passer le liquide une ou plusieurs fois l r a v e r s d u papierfilirer,juf|u' ce qu'il soit trs-limpide et de couleur d'ambre. C'est pour eux la m t h o d e la plus simple pour obtenir le petit lait hinn prpar. 214 Cette prparation, on le voit, demande du temps, du travail, du soin ; ce n'est pas un m d i c a m e n t bon march. Ausi, m m e dans les grandes villes, le d o n n e - l - o n rarement a u \ malades. Cerla^inemtmt on n'a pas donn la j e u n e fille do ce petit-lnit. P e u t - t r e le pharmacien de Maz zano lait-il incapable de faire cette prparation, ou bien l'indigence do la malade s'y opposait. On lui fournissait s e u lement; les r e m d e s qu'on pouvait employer vu la pauvret do l'endroit et des personnes > ; ou bien encore on lui a J donn d'abord des drogues, de pharmacie, niais dans la suite on les a abandonnes. Il est certain que le srum qu'elle a bu ne sortait pas d la pharmacie. Reste le petit-lait des paysans : on lui aurait offert celui qui sert la nourriture des chiens. R e m d e excellent ! et la preuve, c'est l'autorit d'Hoffmann qui de m a n d e du srum bien prpar Que n o t r e adversaire n o u s dise quel effet, on devait en attendre, pour celle surtout qui souffrait de la diarrhe colliquntive. 215. Notre savant c o n t i n u e : ajoutons les infusions et d c o c t i o n s d'herbes pectorales des tisanes d'herbes qui font du bien la poitrine, et l'on aura la preuve q u e la gurison de Marie-Rose a t bien dirige. Plaise Dieu que tous les m d e c i n s suivent cette v o i e ! Il r e c o m mande encore u n e fois la vertu du lait, blme les m d e c i n s qui s'cartent de cette pratique, et termine ce h u i t i m e paragraphe si prolixe. 216. Nous o m e t t o n s de dire, propos de ces herbes, qu'il se sert des termes d'une femme nave e l ignorante qui disait d'elles qu'elles font du bien la poitrine.Nous laissons de ct les paroles du mdecin qui affirme avoir employ ces palliatifs s e u l e m e n t pour calmer la toux et l'orthopne. Mais suivant les traces de notre savant critique, nous adres serons notre tour une exhortation aux m d e c i n s . Tournez plus attentivement votre esprit et vos regards sur notre cas. P o u r faire disparatre la pripneumonie, voyez quelle fut l'efiicacit d'une seule s a i g n e : la maladie subsista dans toute sa vigueur. P o u r gurir les plaies dos p o u m o n s , c o n s i drez le succs des d c o c t i o n s et des infusions d herbes capables seulement de modrer la violence de la t o u x et de l'orthopne. Remarquez c o m b i e n fut salutaire, pour dtruire
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une phthisie, bien dclare l'usage du pain tremp dans du lait, surtout quand svissait la diarrhe. Ajoutez une potion de re srum qui n'est, donn qu'aux chiens, et couronnez ce trailement par l'admirable succs qui se produisit chez Marie-Rose l'tat le plus extrme, avant sa prodigieuse gurison. Puis avec noire savant criez-vous: Le traitement de Marie-Rose a t bien dirig! Et pour que ce fait soit utile la science, qu'il ne soit pas oubli, qu'il ne reste pas sans imitateurs et sans exemple, employez avec empres sement cotte mthode; soyez certains quk l'aide d'un moyen si h a h i l e j e nombre des phthisiques qui dj au tmoignage de Joseph Franck,forme la cinquime partie des morts,s'ac crotra avec un succs tonnant et grandement dsir ! 217 Nous n'avons pas encore examin tous les secours donns la malade. Il reste encore h faire connatre aux m decins beaucoup d'autres remdes bien utiles. Var exemple le changement de climat; l'quitation dont il ne faut cepen dant pas user sans discernement, mais seulement dans des cas c o m m e le ntre, puisque tous les remdes deviennent utiles ou nuisibles selon les circonstances. Qu'ils consi drent avant tout l'tat de la malade qui on applique ces remdes Elle tait tout essouffle; elle ne pouvait respirer; elle toussait sans c e s s e ; elle avait une soif c o n t i n u e l l e ; on aurait dit un cadavre; elle ne pouvait se tenir, on la posa sur un petit b a u d e t ; il fallait quelqu'un pour la di riger, et cela n'tait pas encore suffisant; chaque instant il fallait s'arrter pour lui donner boire, parce qu'elle sentait en elle un feu brlant; il fallait la descendre de temps en temps et la faire asse ir par terre ; presque chaque pas l'essoufflement redoublait, et il fallait qu'elle reprt < un peu. haleine. Appliquez celte maladie un autre c remde dcrit en dtail par notre savant critique : un trajet de vingt-cinq milles opr sur une bte de s o m m e en pleine ardeur du soleil, sur un chemin poudreux, la fin de mai. Qui ne voit combien ce remde a t opportun et u t i l e ? Si on est assez born pour ne pas en tre certain, qu'on en juge du moins p a r l e s efl'ets. A son arrive, elle tait accable, ne pouvait plus respirer, toussait continuellement, tait dvore de soif, et ne pouvait en aucune faon goter le s o m m e i l Oui, vraiment, le soulagement fut spontan et palpable 1 Et c o m b i e n a d ajouter 1 eliicacil de ce re mde dj si grande par e l l e - m m e , ce changement de pays durant trois j o u r s , pendant lesquels la malade, arra che de son lit, a t trane et l. De si puissants re mdes appliqus dans des cas semblables, avec autant de
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prcaution*, ne manqueront pas de faire disparatre radica lement la fois toutes les phthisies et tous les phthisiques. 218. Qui et jamais s o n g que notre savant critique et consacr un paragraphe srieux dfendre l'utilit de ces remdes? Je suis las de passer m o n temps rfuter de telles s o r n e t t e s . Ces remdes sont peut tre utiles en thorie; mais en pratique ils doivent faire horreur. C'est un principe chez les mdecins que l'exercice du c o r p s , m m e chez les gens en b o n n e snnt, ne doit tre ni exagr ni pouss jusqu' la fatigue et la lassitude. Car il est certain alors que par le m o u v e m e n t musculaire le s a n g veineux est pouss dans le ventricule droit du c u r avec une violence et u n e vitesse plus grande, d'o rsulte une contraction plus n e r g i q u e et u n e vraie fivre, bientt vanouie si la c a u s e a t lgre, durable cependant quelquefois et pernicieuse ( I ) . Si le fait se produit chez les gens en b o n n e sant, plus forte raison chez les fivreux, les purulents, et ceux qui s o n t trs-affaiblis. II faut, par c o n s q u e n t consulter r tat et les forces du malade. Joseph Frank n o u s avertit que souvent les m d e c i n s se trompent en ordonnant les exercices clu corps aux malades ex aux convalescents, surtout aux phthisiques, quand ils leur conseillent tous indistinctement d'aller cheval (2). Celse lui-mme dont on invoque souvent le t m o i g n a g e , c o n d a m n e notre savant. Si le mal est plus grave, si c'est une vritable phthisie, il est ncessaire d'y remdier ds le dbut. Si les forces le comportent,il faut se p r o m e n e r long temps eu barque, changer de pays,se rendre dans une rgion o l'air soit plus dense que dans celle que l'on quitte. On le peut ordinairement a u dbut. Si la faiblesse ne le p e r m e t pas, il sera beaucoup plus c o m m o d e de se promener en bateau mais pas bien loin. Si q u e l q u e c h o s e e m p c h e la navigation, il faut se faire porter en litire o u autrement. U n p e u plus loin il dit : Si la fivre n'est pas e n c o r e v e n u e o u s'est calme : avoir recours des exercices modrs, s u r t o u t la promenade, aux frictions d o u c e s . Celui qui c o m m e n c e sentir du m i e u x doit prendre de l'exercice, se frictionner, m a n g e r . Celse conseille donc les exercices cor porels modrs ; il les conseille au dbut et au dclin de la maladie ; il les conseille proportionns a u x forces des ma lades, il conseille les plus commodes, c e u x dans lequels le corps n'est pas s e c o u , par exemple le bateau, la litire, les (1) Vau Swielen ad Iiohaarav, aphor 580. (2) Dlia lisi pulmonari, 43, uum. 13 in nota.
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promenades peu fatigantes. Evidemment rien n'est plus propre que ces prescriptions a montrer combien est dan gereux pour une phthisie avance et inclinant vers la mort, alors que les forces font dfaut, le danger d'un trajet de vingt-cinq milles en pleine poussire, sous les riiyons a r dents du soleil, sur une bfe de s o m m e . 219. Laissons de ct l'autorit de Zviani, qui ne fait que rpter les recommandations de Celse; il traite d'ailleurs, de la phthisie catarrhale, ou d'une phthisie diffrente. Que dire du changement de c l i m a t ? Notre savant critique a si bien pens que son opinion sur l'utilit du changement de pays, pendant trois jours,tait une opinion toute neuve, qu'il s'ef force de prvenir les objections. 11 a crit : Que si quelqu'un s'tonne qu'un exercice corporel de trois jours, et le changement de pays aient pu procurer un malade u n effet salutaire, il suffira de lui rappeler que l'esprit a une influence trs-puissante sur le corps. Excite par le dsir ardent d'une parfaite gurison, anime d'une foi < robuste, cette j e u n e fille s'en allait visiter le tombeau du * vnrable Benot. Son esprit tait livr tour tour l'es prance, la rserve, la crainte ; la majest du temple, l'affluence du peuple, les prires ferventes, le souvenir < des grces obtenues,tout contribuait mouvoir son /trne; c or cette m o t i o n excite les ganglions, a u g m e n t e les forces et a pu a m e n e r la mtasynerse, c'est--dire le r e n o u vellement du corps par l'vacuation des h u m e u r s . 220. Donc, de l'avis de notre savant, il faut attribuer l'all gement o u la cessation du mal, non pas un c h a n g e m e n t de pays pendant trois jours, ni au voyage, mais la m t a syncrse ne d'une m o t i o n trs-vive. Qu'il me soit permis, en passant, de lui demander pourquoi il ne s'est pas mis sous les yeux cet apparat de rhtorique quand il s'agissait du voyage. Je ne conois pas, crivait-il liu-mtne, c o m m e n t cette jeune fille, touchant au dernier degr de la maladie, la phthisie purulente, a'pu faire co voyage de 25 milles, sous l'ardeur du soleil, la fin de mai. Je ne comprends pas comment elle a pu gravir le mont Capitoliu etc...Pourquoi ne le voyait-il p a s ? Pourquoi ne le cumprenait-il pas? lui qui a c r i t : a Personne ne doutera que l'esprit ait une in-
fluence trs-puissante sur le corps. La malade tait excite par le dsir ardent d'une gurison complte ; anime d'une foi robuste, elle allait visiter le tombeau du vnrable Be not ; son esprit tait livr tour tour l'esprance, la rserve et la crainte. Si ces motions furent suffisantes
pour amener la mtasyncrse et la gurison, pourquoi n'au-
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raent-.elles pas c l capables de lui donner des forces pour oprer le voyage et aller au t e m p l e ? C'est que celte re marque trs-opportune pour nier le m i r a c l e , ne lui a pas paru si c o m m o d e quand il s'agissait de la possibilit du v o y a g e et du sjour Rome. 2 2 1 . Laissant de ct toutes ces observations trangres notre ^uict, d e m a n d o n s - n o u s ce qu'il faut penser des obser vations de notre savant critiqne?S'agissait-il de perturbations nerveuses, de fonctions des viscres, d'insuffisance de la force sensitive ? S'agissait-il d'une maladie engendre par u n e distribution anormale des humeur?, o u une autre cause latente, que pourrait dissiper une n o u v e l l e perturbation artificielle? Ou n ' a v i o n s - n o u s pas affaire une lsion grave, matrielle et m c a n i q u e des poumons? Que penserait-il d'un m d e c i n qui conseillerait la m t h o d e m t a s y n c r t i q u e pour u n e Ira cl ure ou un bras d m i s ? ou si on la recommandait pour une blessure la poitrine, ou une plaie invtre ? Ce m d e c i n n'aurait-il pas besoin d'un grain d'ellbore? Ici n o u s parlons des ulcres du p o u m o n qui sont certes plus qu'un bras bris o u d m i s , ou tout autre solution de conti n u i t e. qui ne saurait tre gurie par u n e m o t i o n . 222. Que vient faire ici l'autorit de Sprengel qui crit ( j ) :
Les nwiions violentes de l'me offrent parfois de puissants secours, et peuvent amener une gurison mtasyncrtique? Cet auleur,en c o m m e n a n t avait rserv c e traitement dans toute maladie dangereuse, tenace, ennemie de la force vitale et dont la cause nous chappe. P u i s il faisait remarquer que la nature gurit par la fivre les maladies s pas modiques et nerveuses, ou autres de longue dure; il ajoutait que l'art doit imiter cette mlasyncrse naturelle. Au sujet de la fivre il disait : Si une distribution ingale de la force sensitive produit la fivre, par une nouvelle perturbation artificielle,la maladie cessera. Dans le passage cit par notre savant cri tique, il disait : Nous nous souvenons d'avoir vu disparatre par suite d'une frayeur, d'une colre spontane, epilepsie, hydrophobie, la mlrorrhagie et surtout la paralysie et la fivre intermittente. Mais d'accord avec l u i - m m e , il avait crit auparavant \<tCette mthode est proscrite quand la cause vidente ou au moins probable de la maladie offre la facult d'employer un remde. Ce serait une tmrit funeste, dans une fivre intermittente,de ne pas s'occuper de la torpeur des organes abdominaux et de l'intemprance des nerfs contre lesquels russit souvent le quinquina. D'o il rsulte que
1. Thrap. gnr., 17G, 178, 179.
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f a u t e u r conseille cette m t h o d e contre les maladies spasm o d i q n e s e t nerveuses, contre les aifections, rsultat de l'a gitation ou de la perturbation des humeurs, contre les (lvres engendres par une distribution ingale de la force sensitive. Il r e c o m m a n d e surtout cette mthode dans les maladies doni la cause est inconnue, et qu'il vient n u m r e r . Il
proscrit, au contraire cette mthode, quand la cause de la maladie est vidmte ou au moins probable. Or dans notre cas, la cause est bien manifeste; elle ne consiste pas dans la perturbation ou l'intemprance du fluide nerveux ; elle n'est ni spasmodique ni nerveuse; elle consiste tout entire dans la lsion matrielle et l a corruption des p o u m o n s ; donc, d'aprs Sprengcl l u i - m m e , rien n'est plus tranger la gurison de cette maladie^jue la mthode ttitasyncrtique, 223. Aprs ces preuves d'autorit, notre savant ajoute ; A quoi bon, diront les dfenseurs de la cause, quoi bon avoir e m p l o y des remdes qui n'ont produit aucun effet? Puis avouant qu'il e s t diflicile de prouver l'efficacit d'un remde, il ajoute : Si un traitement a t suivi plusieurs reprises, et si le malade se trouve mieux, on a de bonnes raisons de prsumer (pie ce remde a produit du soulage ment. P o u r prouver qu'il en l'ut ainsi, il revient Maz zano, et il y remarque un m i e u x rel, il le constate encore pendant le voyage R o m e . 24. Pour le rfuter, il faudrait recommencer la discus sion sur l'tat de la malade et sur les remdes. Mais p u i s q u e nous avons examin en dtail la vertu et la nature des m d i caments e m p l o y s , les exercices corporels considrs c o m m e remdes par notre adversaire; puisque nous avons rappel ce sujet la doctrine des mdecins, qu ils sont n o n - s e u l e m e n t inefficaces e n pratique, non-seulement insuffibants, mais la plupart du temps nuisibles et pernicieux ; puisque, reconsti tuant les faits, n o u s avons enseign que Marie-Rose n'a jamais prouv de mieux, soit Mazzano, soit pendant le trajet, soit R o m e , mais qu'elle dprissait toujours, toute la thse de notre savant critique croule d'elie-mme, et avec elle s'vanouit jusqu'au soupon de l'utilit des re mdes qu'il s'efforce d'tablir avec tant d'habilet. 225. Lui-mme n a pu s'y mprendre; car si la persv rance et l'aggravation des symptmes prouvaient parfai tement la persvrance et l'aggravation de la maladie, elle prouvait e n m m e temps l'inutilit des remdes, et dtrui sait les sophismes qu on n o u s oppose. Pour soutenir s o n argumentation chancelante, il s'est efforc d'amoindrir les principaux symptmes, alin que, leur gravit diminue, ses
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objections pussent revivre. Voil pourquoi il crivait : P o u r nier u n e amlioration, ce n'est pas assez de prouver l'exis tence de la diarrhe, de la toux, la c o n t i n u a t i o n des cra chats p u r u l e n t s , e t c . . Ce sont bien les caractres d e l phthisie, mais ils peuvent subsister alors m m e qu'elle a perdu de s o n intensit, pourvu qu'il y ait d i m i n u t i o n de la fivre, et des divers modes de scrlion. A u sujet de la p r e mire condition, diminution de la fivre, tous les t m o i n s gardent le silence. Mais n o u s la c o n c l u o n s facilement du voyage entrepris. 22b. Assurment, qui n'admirerait u n e aussi grande con fiance?,.. Sans aucun doute, le v o y a g e entrepris, parce q u e le cas tait dsespr, et qu'il importait p e u que la j e u n e fille mourt Mazzano, ou R o m e , o u e n route, accuse la d i m i n u t i o n de la fivre. Sans aucun d o u t e le mdecin qui aprs avoir n u m r n o m i n a t i v e m e n t la fivre suppuratoire, la livre devenue plus lenlc, parce que la suppuration tait dj faite avait d i t : Aucun de ces s y m p t m e s ne perdit de sa gravit, ils a u g m e n t r e n t au contraire,... la malade n' prouva jamais de m i e u x , elle allait de mal en p i r e ; . . . telle tait l'tat de la malade lorsque j e la vis pour la dernire f o i s ; sans aucun doute, dis-je, ce m d e c i n n o u s apprend certainement que la livre avait disparu, o u qu'elle s'tait q u e l q u e peu c a l m e ! Sans aucun d o u t e encore une fatigue excessive qui occasionne ordinairement la fivre chez l e s gens bien portants, et la fatigue d un v o y a g e affreux e n t r e pris par une j e u n e fille atteinle et presque tue par la fivre,, cette fatigue s o u t e n u e durant plusieurs heures, m o n t r e coup sr que la livre avait d disparatre o u diminuer ! E v i d e m m e n t cette chaleur intime dont la malade disait qu'elle la brlait intrieurement ; ce feu interne dont la v i o l e n c e devait tre apaise par des rafrachissements f r q u e n t s , annonait le ralentissement de la fivre ! E v i d e m m e n t l t a t lamentable de la j e u n e fille aprs le voyage,, l'existence et la violence de tous les s y m p t m e s aggra vs jusqu' la gurison, dmontrent que la livre n'a pi* svir 1 Et si tous ces symptmes considrs, chacun en particulier,prouvent l'absence ou la diminution de la livre, pris tous ensemble, ils en cartent bien certainement tout soupon.'
T
227. Continuons. Quant la seconde objection, c'est-dire,la nature des excretions,elle nous chappe. Nous i g n o rons qui peut chapper la nature des excrtions, puisque le chirurgien dans s o n rapport les dsigne sous l e n o m de d i a r rhe colhqualive. Le mdecin se sert aussi plusieurs fois de
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ces termes, et il ajoute que tous ces symptmes ont subsist dans ce degr et m m e se sont accrus jusqu'au dpart. 228. Il continue : relativement aux crachats, le mdecin atteste qu'ils taient sanieux, c'est--dire qu'ils avaient cette qualit qu'Arte, observateur r e n o m m entre tous les m decins anciens, a remarque chez un h o m m e en b o n n e sant. Voici ses paroles: Si le mieux- survient, la quinte de
toux se prolonge et devient plus rarc\ des crachats sanieux et 'plus aqueux se dtachent de la poitrine, un grand nombre disparaissent par les selles.
229. Cet argument par lequel on affirme que la condition des phthisiques est d'autant meilleure qu'ils expectorent plus abondamment des crachats purulents, est si singulire, que peut-tre on n'a jamais 'entendu en mdecine rien d plus plaisant, et que rien ne semble plue trange ceux qui auront quelquefois examin un ulcre. Arrtons-nous donc cette opinion si extraordinaire dont on veut faire honneur ArLe. 230. Mais notre savant critique (car la chose est peine crojable), l'a t-il vraiment affirme? Etl'a-t-ilaffirme sans aucune erreur de fait ou de droit? V o y o n s - l e ! Soit que nous considrions s o n art et sa doctrine, soit que nous pesions les paroles du mdecin : Ses crachats depuis, redevinrent mesure plus copieux, plus sanieux et plus ftides, qui sont la base de s o n argument, nous ne voyons rien qui ait pu l'induire en erreur. 11 ne pouvait certes pas ignorer que, chez les modernes, le m o t mnie ne signifie qu'ichor, ou pus de mauvais caractre, de telle sorte que cette appellation exclut toute bont du pus. Toutes les l'ois qu' cetie h u m e u r morbifique la couleur blanche vient manquer, dit Gorterus (1;, on l'appelle ichor, ou sanie, ou matire paisse, corrompue,glutineuse, mais jamais pus ; ou du moins on rappelle pus corrompu. Quand m m e il aurait voulu ignorer le fait, le m d e c i n , par l'adjectif ftide, avait tellement dtermine le sens de l'autre mot aitieux, qu'il ne restait place a u c u n doute ; car le pus ftide, alors quil aurait tous les autres aspects du bon pus, serait tou jours sens mauvais, parce qu'il est l'indice, ou que le pus Jui-mme est putrfi, ou qu il est mlang d humeurs pu trfies (2). Donc a u c u n e erreur ne pouvait exister ni sur le sens du terme, ni sur la chose e l l e - m m e ; car si, laissant de ct 1 exprience et la saine raison, nous considrons
(1) Hippocr. aphor. 20, lib. 6. (2) lbicl, aplxor. 44, lib. 7.
en e l l e - m m e la doctrine professe, il apparatra : Que de m m e q u e le pus sincre et louable est de b o n augure, parce qu'il indique q u e dans l'abcs toute matire trangre, est convertie e n p u s , qu'il n'y a plus d'afflux d'humeurs transformer e n pus, et q u e e pus n'a pas s journ assez longtemps pour la convertir e n ichor ; de m m e , au contraire, lorsque les humeurs mles au pus ne sont p.is converties, p a r la force de la vie, e n matire
p u r u l e n t e , mais, p a r la c o r r u p t i o n , en u n e m a t i r e partie p a i s s e , p a r t i e d h e , c e s t u n s i g n e que la corruption s p o n
tane a prvalu (ibidem). D o n c notre savant critique n e s'est tromp ni dans l'intelligence du m o t , ni dans l'intelli g e n c e de la doctrine, lorsqu'il a affirm q u e l e s crachats sanieux sont de b o n augure ; c'est, le sachant et le voulant, qu'il a e n s e i g n que Marie-Rose allait d'autant m i e u x qu'il tait plus vident, pour n o u s servir des termes de Gorterus, que les humeurs convertir en pus affluaient davantage dans la poitrine, q u e le pus sjournait plus l o n g t e m p s dans les ulcres de c e viscre, qu'il se changeait eu ichor, et que la matire reje Lee a t t e s t a i t l a ' p r e v a l e n c e d'une cor ruption spontane. Nous avons voulu faire ressortir plei
n e m e n t ces consquences,pour q u ' o n ne c r t pas, o u q u u n e
o p i n i o n si prodigieuse, si inouie, et t allribue par n o u s .i notre savant critique sans f o n d e m e n t , o u qu'elle ft chez lui le rsultat d'une erreur n e de la funeste interpr tation du m o t o u des choses. 231. Mais j'ai Arte pour m o i , dira-t-il ? E v i d e m m e n t , si o n lisait cela dans le texte d Arte, t o u t h o m m e clair, l o i n d'attribuer une si grande absurdit un si grand h o m m e , y verrait suit u n e interpolation, soit u n e erreur d u copiste, soit u n e faute d impression, plutt q u e de c h e r cher s'en servir pour dfendre u n e opinion t r a n g e . Mais c o m m e Arte a crit en grec, o n ne peut certainement pas trouver dans s o n texte, sovt le m o t sanieux, soit m m e le m o t tolior q u i r p o n d a u m o t sa uct mais le m o t pyon q u i signifie pus. E n elfeL, au neu cit, l o la traduction d i t : des crachats plus abondants, plus sanieux et plus huuudes s o n t rojets, o n lit dans le texte auayuye, pteynonte pyon yytvteron, ce q u i , littralement traduit, signifie : rejet de pas plus abondant et plus humide, sans aucune i n d i c a t i o n
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modernes il signifie toujours pus de mauvaise nature, le mme mot chez les anciens dsignait indiffremment toute sorte de pus.C'est ainsi, pour no rien affirmer sans exemple, que dans la version Algagi d e s - u v r e s d'Avicenne, ou l i t : La sanie louable est celle qui est blanche,douce et n'a pas une odeur horrible... La sanie mauvaise eut fotide, t m o i gnant de la putrfaction qui est le contraire de la matura tion. Ainsi, par l u i - m m e le mot est a m b i g u , et devait au moins soulever un d o u t e suffisant pour dfendre Arte, du soupon d'une absurdit. 232. Mais laissons l, s'il vous plat, cette observation : puisque la version elle-mme, sans aucun recours au texte grec, sans a u c u n e considration du sens des mots, rendait trs-clair le s e n t i m e n t d'Arto sur le bon augure tirer du pus de bonne qualit, sur le mauvais augure tirer du pus de qualit contraire, ce qui videmment rendait manifeste le sens du mot tat sanieux employ ailleurs p a r lui. Notre savant critique a consult le chapitre o n z i m e de l'asthme, parce qu'il y rencontrait ce m o t ambigu ; mais s'il avait jet les yeux sur le chapitre neuf des purulents, qui nous c o n cerne, il aurait certainement lu : En s o m m e , voici ce qu'on peut dire du pus. T o u t ce qui e s t blanc, digr, inodore,lgrement arrondi,promptement expector o u s'coulant facilement par les selles, est sans danger, et salu taire; tout ce qui est trs-ple, bilieux, ingal, sachez que c'est mauvais. Mais ce qui est livide t.t fonc est bien pire encore, car cela signifie la pourriture et des ulcres r o n geurs. Ainsi donc, non-seulement le texte vrai de l'auteur, non seulement la signification ambigu de l'expression dont s'est servi l'interprte, mais la version elle-mme rvlait ouvertement qu Arte tirait un mauvais augure des cra chats sanieux. Gomment donc a-t-on pu croire qu'un auteur si illustre aurait pous le sentiment contraire, que les phthisiques peuvent esprer l e salut de leurs crachats sanieux ? Comment, dis-je, cela a-t-il pu se faire, nonobstant la doctrine des mdecins de tous les temps, l'exprience de tous les jours, et la saine r a i s o n ? Ne n o u s montrerons-nous pas trop indulgent, si n o u s pensons que cette opinion est tombe dans le cerveau de notre adver saire endormi ? 233. U c o n t i n u e : Enfin l'dme des pieds, que l'on regarde c o m m e u n e preuve n o n - s e u l e m e n t de la persis tance de la maladie, mais de s v i o l e n c e , prouverait e n elfet sa thse, si Ton avait bien mis hors de doute qu' l' poque o ses pieds enflrent, Marie-Rose tait sur le seuil de
1
vi,
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la m o r t . Car les passages des crivains i n v o q u s par le d fenseur, font de ce s y m p t m e un mauvais a u g u r e dans la phthisie confirme, quand la mort approche, quand il y a danger de suffocation, quand on voit se hter l'extinction de tout le corps, laquelle c o m m e n c e par les e x t r m i t s . 2 3 4 . Nous avons ici deux choses noter : 1 notre savant critique avoue que l'enflure des pieds forme un indice certain de la violence de la maladie, quand elle dcline vers la mort. C'est p o u r q u o i , c o m m e n o u s c r o y o n s avoir d m o n t r que Marie-Rose marchait la mort, n o u s en c o n c l u o n s que notre adversaire est d'accord avec n o u s sur la gravit du s y m p t m e . Il confond de n o u v e a u la m o r t instante, avec u n e maladie marchant vers son dclin, et il prtend appliquer au premier cas les textes des auteurs q u e l'on verrait clairement, si on les lisait sans ide pr c o n u e , avoir en vue la phthisie arrive, non au m o m e n t de la m o r t , mais s e u l e m e n t cette priode extrme qu'une m o r t invitable a c o u t u m e de suivre. Il suit de l que ces paroles : phihisie dclinant vers la mort, phthisie tendant vers la mort,phthisie approchant de la m o r t , n e doivent pas tre prises dans ce sens, que l'dme des pieds (toutes les fois qu'il annonce la mort) doive se montrer s e u l e m e n t dans l e s dernires heures, et que les extrmits s o n t enfies s e u l e m e n t pendant un temps trs-court. 233. Mais pour qu'on ne s'imagine pas que cette inter prtation, assez vidente par e l l e - m m e , a t invente par n o u s pour les besoins de la cause, c o u t o n s un de ces au teurs qui ont dit que l'dme des pieds est l'indice d'une phthisie dclinant vers la mort. S w i c t e n avait crit (1) : Dans la phthisie c o n s o m m e et marchant dj vers la mort, o n observe qu'alors que le corps tout entier est trs amaigri, , l'extrmit des m e m b r e s c o m m e n c e enfler. E t pour e x pliquer ce p h n o m n e , il ajoute ; Dans la dernire tape de Ja phthisie, une anxit excessive a n n o n c e que le sang du c u r droite se m e u t difficilement travers le p o u m o n ; d'o r s u l t e u n obstacle a u m o u v e m e n t du sang des veines vers le c u r , et par suite une rsorption plus difficile de la l y m p h e par les veines bibuleuses. Mais c o m m e , en m m e temps,trs peu de sang circule travers les artres, ce qu'in dique la faiblesse du poids, et que l'action des arlres adja c e n t e s aux veines ne pourra pas dterminer le m o u v e m e n t du liquide veineux, la l y m p h e c o m m e n c e r a devenir stagnante et s'accumuler sur les points les plus loigns du cur,
(i) Ad Uohernav. aphor. 1206.
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ce qui donnera naissance une tumeur froide de ces extr mits.' Or, si ce p h n o m n e nat de la difficult de la circulation du sang, il est vident qu'il doit c o m m e n c e r lorsque cette grande difficult se produit ; et c o m m e celleci est manifeste par une grande angoisse, l ' d m e des pieds c o m m e n c e r a avec cette angoisse. Or, notre j e u n e fille sentait cette a n g o i s s e , au point de ne pouvoir respirer sans avoir le tronc un peu lev, et la b o u c h e toujours ouverte, parce que sa poitrine lui faisait l'ellt d'un souilet qui s'lve et s'abaisse. Donc, la cause pose, l'effet devait suivre, et c o m m e cet effet se produit chez les phthisiques n o n encore moribonds, Swieleu ne dit pas que cela arrive l'article de la mort, mais dans la phthisie dclinant vers la m o r t , o u , c o m m e il l'explique plus clairement ensuite, dans la dernire tape d'une phthisie fatale. 236. Pour faire connatre plus clairement encore le sens vritable' de cette sentence, ayons recours aux crits du p r i n c e d e l a mdecine. I l i p p o c r a t e ( l ) . D a n s le D V E L O P P E M E N T
de la maladie, le corps s'amaigrit, les jambes exceptes, celles-ci et les pieds enflent. Notez ce mot, dans le dvelop pement; il n'indique pas une mort prochaine. Galion se sert presque des m m e s mots (2) : Avec le temps, leurs pieds se gonflent. Clius Aurclianus ne dcrit pas autrement les progrs de la maladie {): La souffrance commence,... une petite fleure survient,... puis les crachats tantt purulents, tantt livides, auxquels C enflure des pieds vient s'ajouter.
Plus explicite q u e tous les autres, Jean Pierre Frank enseigne qu'il faut attendre cette complication dans le dveloppement de la maladie ; il la donne c o m m e le signe le plus certain d'une phthisie confirme : a S O N T U N S I G N E D ' U N E S U P P U R A T I O N , D J A C C O M P L I E D A N S C E vlsciib. (les poumons) la continuation
des symptmes dj manifests, une respiration frquente et.difficile, L E G O N F L E M E N T D E S PIEJDS (4). Si l'enflure des pieds
est un des signes certains d'une phthsie conlirme, il ne faut donc pas 1 attendre jusqu' la mort, car ce ne serait plus un signe de mort, le phthisique ayant t dj enlev. 237. Tout cela suffit-il pour faire connatre l'opinion vri table des auteurs, ou faut-il encore un exemple ? Nous le d e manderons Morgagni. 11 crit au sujet d'une j e u n e lillc :
teints
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de sang,est prise de toux; elle expectore une matire critarrhale, la quelle la [in-sn trane del sanie ; elle a la /lvre, elle a des douleurs de poitrine, dans la partie gauche^ sur tout, partie sur laquelle elle ne peut se coucher. Tout son corps s'amaigrit, L E S nt;ns E X C E P T S , Q U I T O U S D E U X S E G O N F L E N T . Le droit, quelques jours avant la mort, est atteint d'un rysiple; son poumon.dans l'endroit contigu la cla vicule,est un peu dur, Vulcre rsidait au contre de ce du rillon. Si les deux pieds 61 aient enfls, q u a n d , peu de jours
s
avant la mort de la j e u n e fille, un rysiple attaqua le droit, l'enflure ne se produisit pas aux derniers instants de la ma lade. Ainsi, que n o u s envisagions les rgles m d i c a l e s o u les faits, la thorie de notre savant critique est errone. L'enlluredes pieds n'est un indice de la v i o l e n c e de la maladie q u e lorsqu'elle s'effectue au m o m e n t de la mort. D'ailleurs, c e t t e erreur carte, il accorde que l'enflure des pieds est un i n d i c e de la violence de la maladie dans sa dernire priode; et, de l'existence de ce s y m p t m e , il n e p e u t le nier, il sera constat que Marie Rose avait atteint c e t t e dernire p riode, et qu'une mort certaine lui tait rserve. 238. Notre s a v a n t , n o n o b s t a n t l'exprience et les rgles de la mdecine, t i e n t son opinion.Chez les phthisiques le g o n flement des pieds est seulement fatal q u a n d arrivent les der niers m o m e n t s . Le gonflement des pieds se produisait e n Marie-Rose, dit-il, n o n aprs une l o n g u e maladie, elle tait atteinte depuis p e u de temps : elle n'allait pas rendre le der nier s o u p i r ; elle se remettait d'une crise plus grave de la maladie, ses forces ne s'affaiblissaient p a s , m a i s revenaient u n peu. Donc cette enflure n'tait pas un signe trs funeste, m a i s p l u t t u n effort salutaire de la n a t u r e . Gomment peut-il affirmer que le gonflement des pieds ne survenait pas
aprs une
longue maladie,
d e p u i s le c o m m e n c e m e n t de mars, et l'tait e n c o re la fin d e m a i ? quand le chirurgien a dit la mre de la j e u n e fille : Regardez bien si les pieds enflent.... car alors elle s'en i r a ? Si la mre s'en est aperue un p e u avant le dpart p o u r R o m e , c o m m e n t soutenir que* l'enflure des pieds fut
remarque quand
la
malade
avait repris
un
peu
de
force,...
alors q u ' e l l e avait absolument b e s o i n d'tre p o r t e de son lit sur u n e chaise, et que, presse de marcher, e l l e rpondait qu'elle n e le pouvait pas, et faisait, t o u t essouffle, quelques pas dans la chambre, s o u t e n u e et u n b t o n dans la m a i n ? P e u t - o n appeler cela recouvrer des forces, s u r t o u t dans une m a l a d i e qui ne paralyse pas les m o u v e m e n t s musculaires? Enfin de quel droit prtendre q u e l ' e n -
309
flure apparut quand la jeune fille se remettait une crise plus grave de la maladie,pm$que les actes nous apprennent qu'elle se levait malgr elle, et que tous les s y m p t m e s de la phthisie subsistaient dans leur intensit?.... Car les symp tmes pathognomoniques de la maladie,comme le Tait n o u s l'apprend, et c o m m e l'affirme le mdecin, n'ont jamais di m i n u , mais nt t toujours en augmentant. Comment pouvez-vous tirer des indices de cetfe coction de la maladie, coction en faveur de laquelle vous vous efforcez de faire natre des soupons et dont l'effet serait dans l'enflure des pieds? Appelez-en l'autorit des mdecins, tous viendront renverser vos arguments. 239. Vous rapportez que, d'aprs Boerhaave, la coction se
reconnat : 1 par la suspension du mal et sa dcroissance, -pendant que les forces naturelle* se maintiennent, ou bien s'accroissent. Certes chez notre malade vous ne trouverez
pas les forces au m m e niveau, et encore moins augmentes; vous n e verrez pas la maladie se calmer, mais devenir plus grave. Voici ce que vous avez oubli, Boerhaave ajoute q u e l'onreconnat la c o c t i o n V par la cessation et la diminution des .symptmes avec une force vitale concomitante ; 3 par
le rtablissement intgral des fonctions; par la similitude des humeurs en circulation, des scrtions, des excrtions et des djections, avec celles qui sont naturelles. C e s . c o n d i
tions, dans le cas prsent, font dfaut, et m m e sont c o n traires. Nous verrons bientt ce qu'il faut penser de la c e s s a t i o n et de la diminution des symptmes, de la force vitale c o n c o m i t a n t e , du rtablissement intgral des fonctions. Les scrtions et excrtions auraient-elles une analogie avec les scrtions et excrtions naturelles? La transpiration n o c turne, les crachats sanieux, la diarrhe colliquative d m o n trent qu'il n'en est a b s o l u m e n t rien.N'auriez-vous pas mieux fait de citer le paragraphe prcdent de Boerhaave, para graphe, o il dcrit les signes particuliers la crudit de la maladie (I). On la reconnat 1 par la vigueur persis
tante et croissante de la maladie ; par une augmenta tion continue des symptmes ; 3 par l'exercice des fonctions gravement atteint ; 4 par les humeurs en circulation, scr tions, excrtions, excrments, perdant leur tat normal,
quant la quantit et la qualit. Toutes ces conditions
auraient dpeint exactement l'tat de notre j e u n e fille, et nous auraient appris que la maladie tait i'tat de cru dit, quand apparut le gonflement des pieds. (1) Inst, med. de sig. morb. num. 9 2 8 .
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240. Quoiqu'il soit inutile de chercher u n e crise dans u n e maladie chronique, quoique les ulcres des p o u m o n s ne se gurissent point par u n e crise, si quelqu'un s'obstinait, c o m m e notre savant critique, voir, dans cette enflure d e s pieds, la crise de la phthisie, il se tromperait. Les condi tions sus-mentionnes rpondant e x a c t e m e n t notre c a s , on ne pourrait y voir qu'une perturbation critique morbifique et mortelle. L'auteur dj cit n o u s l'apprend q u a n d il crit (1): Voici les signes gui distinguent les symptmes cri
tiques des morbifiqucs : 1 Les symptmes critiques pro viennent de la force vitale dominant la force de la mala die, les symptmes morbifiques proviennent de Vnergie de la maladie dominant la force vitale; 2 les symptmes critiques sont prcds de la coction que l'on reconnat ses caractres manifestes et bons, les autres se constatent pen dant la, crudit; 3 les symptmes critiques arrivent au temps marqu par la crise, les autres ont lieu en tout temps, surtout pendant la croissance du ynal; 4 les symp tmes critiques soulagent, les autres sont funestes.
Or, dans le cas prsent.la force vitale n e l'emportait pas sur la maladie, mais tait d o m i n e par cette dernire, sa p e r sistance et son a c c r o i s s e m e n t en sont la preuve. La c o c t i o n n'avait pas prcd la crise : c'tait la crudit bien vidente. A u x autres s y m p t m e s s'ajoutait, par surcrot, l'enflure des pieds dans cette priode de crudit ; ce n'tait point u n e amlioration m a i s une aggravation. C' tait l'avis de t o u s , et, pour ce motif, les m d e c i n s c r o y a i e n t la fin de la malade. Donc, m m e en admettant l'opi n i o n n o u v e l l e , qu'il y a crise pour les ulcres p u l m o n a i r e s , cette crise n'aurait t qu'une perturbation morbifique et mortelle. 2 4 1 . De q u e l q u e ct que vous vous tourniez, vous voyez c e qu'il faut penser de l'enflure des pieds. T o u s les m d e c i n s la regardent c o m m e s y m p t m e fatal dans la phthisie. N o t r e savant e s t d'accord avec e u x ; ce n'est pas la dernire heure s e u l e m e n t , mais clans la dernire phase du mal, c'est-dire q u a n d la phthisie est confirme, qu'elle se m o n t r e . Dans notre thse il s'agissait d'une phthisie confirme. Ce s y m p t m e , survint n o n aprs une courte maladie,mais aprs u n e l o n g u e suite de souffrances; les autres s y m p t m e s n'avaient pas cess, ils svissaient e n c o r e . Il n'est pas j u s t e d e confondre un s y m p t m e mortel avec une crise, n i d'admettre u n e crise dans la phthisie purulente; c e p e n d a n t ,
(1) Loc cit, nu m. 936r
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si on s'obstinait voir u n e crise dans le gonflement des pieds, cette crise serait forcment morbifique et mortelle. 242. Laissons de ct les observations gnrales de notre savant sur l'utilit du gonflement des pieds, elles sont insi gnifiantes.Laissons galement d c o t e les autorits ciles par lui de De Haen, Baglivi et Lorry, car elles sont contraires sa thse, ou sans aucune porte. Notre savant critique fournit des armes contre lui par cette citation de De
Haen (1) : Si les symptmes diminuent, si les forces vitales galent ou siorpasscul la violence de la maladie, ncessairement la coction est bonne. Ne s'carte-t-il pas de
sa thse, en l'appuyant de cet exemple donn par Lorry :
J'ai vu ttn homme presque mort la suite d'une grave suffocation, et soulag aussitt, presque en un instant, par le gonflement des pieds. Baglivi vante le gonflement des pieds dans le catarrhe pulmonaire et les affections de l'asthme. Ceci est en dehors de notre thse ; et si Ton voulait
considrer les circonstances des maladies dont ont parl ces auteurs, et les comparer notre cas, il serait facile de constater qu'ils ne viennent nullement en aide notre sa vant critique. Mais n o u s n'avons pas besoin de discuter des faits trangers, quand les faits seuls, de notre thse amnent dj la discussion un dveloppement suffisant. 243. Notre savant dresse devant nous de nouveaux o b stacles. Je c o m m e n c e , dit-il, par dcrire cette nuit de douleur, laquelle fournit ma cause son plus solide a r g u m e n t . La j e u n e fille, qui s'tait leve, ayant ressenti .une douleur aigu de poitrine, s'appliqua l'image du vnrable serviteur de Dieu , et put goter un paisible sommeil, jusqu'au l e n d e m a i n , jour de l'apparition des symptmes de gurison. 11 serait souhaiter que ce rcit ne ft pas d fectueux, et qu'un m d e c i n et t appel pour tmoigner srement de la nature de cette douleur et des circonstances concomitantes ; o u , au moins, qu'il y et eu des t m o i n s m o i n s ignorants,et capables de donner une ide de cette d o u leur. Dans les maladies, dit LandrBcauvais, il ne faut pas juger des douleurs prises isolment, mais il convient de tenir compte des autres signes Y avait-il fivre ou n o n ? Souf frait-elle de la soif? Les excrtions a c c o u t u m e s furent-elles arrtes? Quels furent le sige prcis, le caractre, la dure de la douleur? La douleur tait-elle exaspre par la toux ou une respiration profonde? Le ventre tait-il ballonn ou d tendu (relch)? Quel tait l'aspect de la l a n g u e ? Quelle tait sa position dans le lit ? etc., etc. Oh ! heureux,el ctera! Sans autre lumire q u e cette seule affirmation si concise elle
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prouvait une Irs-grande douleur dans la p o i t r i n e : . . . . est-il aucun mdecin qui ost expliquer cette douleur ? 2 M . Pardonnez, trs-nobles Pres, si n o u s transcrivons jusqu'au dernier m o t les textes de notre s a v a n t : c'est le caractre de m o n plaidoyer de dvoiler les petites s u b t i l i t s , l'ambigut, l'erreur, les autorits sur lesquelles o n s'appuie faux. C'est pourquoi toutes ses paroles doivent tre examines et mises sous vos y e u x , afin qu'on ne croie pas que. pour favoriser notre c a u s e r o n s les avons estropies ou au moins mal interprtes. Ainsi, elles sont captieuses ces p a r o l e s : La preuve la plus clatante de la thse se
notre thse.
2 4 5 . Elle est galement captieuse cette phrase : Plaise
ne soit pas
dfectueux!
C o m m e si les t m o i n s n'avaient fait m e n t i o n que de la douleur sans rien dire de l'tal de la m a l a d e , et de c h a c u n des caractres de la maladie. Elle e s t e n c o r e captieuse et mise l pour inspirer le s o u p o n et le d o u t e , c e t t e phrase:
Plt Dieu qu'un mdecin et t appel, pour tmoigner srement de la nature de cette douleur,et des circonstances concomitantes! Pouvait-on appeler u n m d e c i n instanta
n m e n t ? La douleur fut-elle de longue dure, alors que, p e i n e dclare,elle disparut,avec la maladie.par l'application de la sainte i m a g e ? Le j u g e m e n t du mdecin sur la nature de la douleur pouvait-il ajouter la certitude du s y m p t m e , dont o n ne peut j u g e r que d'aprs la seule patiente? Elles n e sont pas m o i n s captieuses ces innombrables q u e s tions sur l'tat de la m a l a d e . Quelques-unes sont tout fait inutiles. L Expos d o n n e la rponse plusieurs autres. A m o i n s d'avoir jusqu'ici perdu notre temps et notre peine, j e p e n s e qu'il est tabli q u e la j e u n e fille tait atteinte d'une phthisie bien confirme. Qui donc, quand la douleur et ses
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s y m p t m e s apparaissaient avec vidence, qui d o n c de mandera , pour juger d u caractre de cette d o u l e u r , quelle est, sa place prcise dans la poitrine ? si le ventre est ballonn ou d t e n d u ? quel est l'aspect de la l a n g u e ? L'Expos satisfait aux autres questions : l'existence rie la fivre, la toux, la soif, le besoin do rester au lit, en sont la p r e u v e . La douleur fut-elle .exaspre, augmente p a r la tou.x ou u n e . r e s p i r a t i o n profonde? ni le mdecin, ni p e r sonne n'et t capable de s ' e n a s s u r e r , puisque la douleur disparut aussitt a p r s sa naissance. 24-6. Elle est tout fait trangre au sujet, et dfavorable h notre savant critique, l'autorit de Landr Bcauvais d i sant : Dans les maladies, il n e faut pas juger des douleurs prises i s o l m e n t , mais il faut s'clairer des autres signes)), paroles auxquelles on joint l'observation suivante : Il n'est aucun m d e c i n qui voudrait expliquer l'apparition do cette douleur, s'il n e s'appuyait sur quelques indications. Cette observation est dplace, parce q u e nous n'avons pas j u g e r u n e douleur prise i s o l m e n t , et que nous n e sommes pas dpourvus d e s indications ncessaires. Ces paroles c o m Dattent la thse de notre savant, parce que s'il n'est pas per mis au mdecin de prononcer sur une douleur isole, il se c o n d a m n e l u i - m m e . Car pourquoi spare-t-il c e t t e douleur du progrs de la maladie, laquelle, ne de la rtrocession du virus inorbilleux, a dtermin la pripneumonie,et, parcelleci, la suppuration et l'ulcration pulmonaire? Pourquoi l'a-t il spare de la fivre lente, de La toux sche, de l'orthopne, des crachats sanieux, d e s sueurs, de la diarrhe colliquative, de l'enflure des pieds, de l'amaigrissement total du corps? S'il et j o i n t cette douleur subite de poitrine au d v e l o p p e m e n t c o n n u de la maladie et de tous ces symp t m e s , pour en expliquer le caractre, il n'et pas d r e courir, c o m m e il le fait p l u s bas (c'est son invention), aux ilatuosits excites par les quelques cerises et les quel ques pois que sa mre lui avait donnas deux jours aupa ravant, alors que, m a n q u a n t presque d'haleine, e l l e s o r t i t de l'glise de Sainte-Marie-des-Monts. Pris en si petite quantit, uniquement pour humecter la bouche, elles n e pouvaient pas exciter des flatuosits, elles n'en excitrent pas ce j o u r - l n o n plus que la nuit et le jour suivants. Au c o n traire, tant pose l'existence d'un pus acre dans les ulcres pulmonaires,il et remarqu q u e cette opinion de Burserius
trs-aigu dans le
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ct affect, douleur sans aucun remde. L'humeur pntre la plvre et la ronge, elle excite les nerfs gui serpentent dans cette plvre de mme que les muscles placs auprs C'est la dissection des cadavres qui nous fournit cette connaissance. Baglivi, dj cit ailleurs, est d'accord avec lui (1) : Chez les phthisiques, si une douleur cuisante survient tout coup dans le*ct, bientt ils succomberont dans le dlire, une grande fivre les accable,ils meurent et peu de jours aprs.
Notre savant prtend que cette citation est inutile.parce q u e ici l ' a u t e u r p a r l e de la phthisie tuberculeuse, et affirme
que celte douleur n'est m o r t e l l e , q u e si e l l e e s t j o i n t e aux
m a i s que,parvenues la priode d e suppuration,ces phthisies se confondent si bien, qu'on n e p e u t les distinguer Tune d e l'autre, parce q u e la suppuration prsente toujours les m m e s caractres. P o u r les distinguerai faudra tenir c o m p t e des volutions antrieures auxquelles c h a c u n e e m p r u n t e s o n n o m . Or il est certain que B a g l i v i parle d'une d o u l e u r de poitrine chez les phthisiques, c'est--dire chez ceux qui sont atteints une phthisie, dont la c o n d i t i o n est la m m e p o u r tous.Mais, quoiqu'il attribue cette complication n o m i n a t i v e m e n t la phthisie appele t u b e r c u l e u s e , il ne s'ensuit pas qu'on ne puisse l'tendre aux autres phthisies confir
m e s prsentant les m m e s c o n d i t i o n s ; s u r t o u t q u a n d B u r s e r i u s n o u s e n s e i g n e clairement q u e c e t t e d o u l e u r provient
de l'acidit de la sanie sortant d e s ulcres p u l m o n a i r e s , et attaquant la plvre. Cette cret, en effet,est la m m e dans tout ulcre p u l m o n a i r e , qu'il provienne de tubercules o u de t o u t e autre cause, par le m m e m o d e de suppuration. 249. Les s y m p t m e s que Baglivi m e t e n premire l i g n e , n e sont pas autre chose qu'un c o m m e n c e m e n t de phthisie tuberculeuse l'tat latent, dont il serait absurde de r e (1) Prax. med. lib. 1. 2, cap. 8. nuin. 3 .
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chercher les caractres dans une phthisie secondaire et aigu c o m m e est la ntre. C'est pourquoi l'auteur les rappelle et les expose pour dterminer la nature de la d o u leur survenue, parce que, dans sa thse sur Ja phthisie . tuberculeuse, si ces conditions faisaient dfaut, il n'y aurait pas de p h t h i s i e ; il no s'agirait plus de phthisie mais d'une autre m a l a d i e ; d'o il rsulte que nous n'avons pas cit Baglivi sans raison ; son autorit prte notre thse u n appui trs ferme. 230. Nous laissons de ct les remarques et les autorits relatives aux ilatuosits, et aussi cette petite note : Si on n'admet pas ces ftutuosits, et ici il fallait videmment les rejeter,?!/ ne manquerait pas d'autres causes ^pow expliquer
qu'une longue observation nous montre produisant les mmes effets leur dbut, dans leur dveloppement, dans leur vigueur, leur dclin et leur disparition (t). Si
on en fait abstraction, on ne connatra jamais la maladie. Voici une phthisie dont le progrs et tous les caractres p a t h o g n o m o n i q u e s la fois dmontrent l'vidence. Que penser d o n c de celui qui spare des autres un symptme particu lier et familier la nature de cette maladie, pour essayer de deviner d o a pu provenir ce symptme ?Chaque symptme considr in abstracto, peut natre d'une autre cause que de la maladie en question. Personne ne le contestera. Ce n'est (1.) Gallien do subfigur. empir. cap. 6.
pas l la question. Nous avons chercher si c e s y m p t m e s'accorde avec la maladie prsente, s'il a u n e c o n n e x i o n avec les autres s y m p t m e s , s'il peut provenir et provient o r d i n a i r e m e n t de la malignit d e l maladie, s'il se prsente u n e c a u s e extrinsque vidente el suffisante, qui force de l'at tribuer son action plutt qu' la maladie. Si cette cause fait dfaut, si tous les s y m p t m e s c o n c o u r e n t la fois affirmer la gravit de la m a l a d i e , c'est c e r t a i n e m e n t elle qu'il faudra attribuer cptle douleur subite. 2 5 1 . Elles sont, v i d e m m e n t , trangres notre sujet les preuves que notre savant critique d e m a n d e h plusieurs autorits,dans le but de dmontrer l'utilit des douleurs dans
les maladies qui paralysent la force sensitive, ou qui dbi litent surtout certains organes. Or il ne s'agit pour n o u s ni
de la dbilit de certains organes, ni de la paralysie de la force sensitive, ni de la goutte, de l'hystrie o u de tout autre allection nerveuse, mais des ulcres p u l m o n a i r e s . Certes, j a m a i s personne n'a rv qu'une douleur subite dans la poitrine puisse vacuer la suppuration, fermer, c o n s o l i d e r et gurir des plaies. 252. Mais cette d i s c u s s i o n prolixe au s u j e t de cette d o u l e u r de poilrine laquelle notre savant critique a consacr trois i m m e n s e s paragraphes, el c e l l e opinion formule par lui que cetle douleur est le plus splendide argument de sa thse, n o u s d m o n t r e n t quel prix il attache ce s y m p t m e . Cetle douleur mise de c t , la phthisie confirme et se prcipitant vers la mort ne scra-t-elle pas c o n s t a t e par l'his toire de la maladie et par tous les s y m p t m e s ?A ces derniers il ajoute une douleur d o n t il n'a pu rvoquer en doute la certitude, dont il n'a pu nier q u e , par sa n a t u r e , elle con v i e n n e trs bien ce genre de maladie, dont il a i n u t i l e m e n t c h e r c h l'origine dans une cause i n c o n n u e o u bien dans q u e l q u e s cerises et petits p o i s , m a n g s deux joursauparavant, d o n t il n'a su rvoquer en doute la persvrance et la gravit, qu'en iuvuquant l'utilit des douleurs dans des maladies b i e n trangres notre sujet. Cette douleur qui arrive h a b i t u e l l e m e n t dans la dernire priode de la phthisie, qui est t r o i t e m e n t lie avec les autres s y m p t m e s , qui a sa cause n a t u r e l l e dans l'cret du pus des ulcres p u l m o n a i r e s , c e t t e d o u l e u r , dis-je, q u i , s e produisant en notre j e u n e fille si lan g u i s s a n t e , i m m d i a t e m e n t avant sa gurison,n'cst n u l l e m e n t ncessaire pour consolider notre t h s e ; elle a u g m e n t e ce p e n d a n t , d'une m a n i r e t o n n a n t e , le poids des preuves a p portes ; elle montre avec vidence la malignit de la maladie j u s q u ' lailn.
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233. Nous terminons ici le sixime chapitre de n o t r e d i s sertation, dans lequel nous avons d'abord engag la dis cussion sur l'tat rel de la malade, laquelle au lieu de s'amliorer, a -toujours empir. Puis examinant chacun des remdes en parliculier,nous avons constat leur inefficacit, bien souvent leur inopportunit et leur mauvais effet. Nous les avons envisags en eux-mmes, ou bien employs dans telles ou telles conditions. Enfin considrant les symptmes l'un aprs l'autre, nous en avons expos la c o n t i n u i t , la malice et l'accroissement. Enfin, ayant ainsi mis hors de doule la continuation de la maladie dans sa totalit jusqu' la fin, il ne nous reste plus qu' traiter du prodige et d e la gurison.
La gurison de Marie Rose fut-elle instantane, parfaite, durable ? 254. S'il est u n point dont on n e puisse douter dans c e t t e cause, c'est bien le prodige de la gurison. Nous savons e n quel tat se trouvait la malade au c o m m e n c e m e n t de la troisime nuit, coutons la suite. Je m'tais peine c o u c h e , dit la mre, que la j e u n e fille m'appela par un cri, en m e disant de mettre la m a i n sur sa poitrine, parce qu'elle y sentait une trs-grande d o u leur. J'eus peur, croyant qu'elle allait m o u r i r ; et au lieu de mettre ma main, voici ce que je fis. Il y avait au chevet du lit une i m a g e de Benot-Joseph ; j e la pris, j e la mis sur l'endroit o la j e u n e fille disait qu'elle ressentait cette grande douleur, e n lui disant : prends, ma fille, cette i m a g e , r e c o m m a n d e - t o i lui, Benot-Joseph peut te s e c o u r i r ; Dieu veuille qu'il le f a s s e ! L'image applique, la j e u n e fille se t r a n q u i l l i s a i t elle q u i , l a n u i t auparavant ne pouvait dormir, qui tait toujours inquite, qui se lamentait sans cesse, et qui avait t o u j o u j s besoin de boire, je ne l'entendis plus se plaindre. Hlne Marini et la c o u s i n e de la miracule racontent les mmes choses : elles dclarent trs-ouvertement que t o u t aussitt disparurent la soif et la toux continues, et l'or thopne, choses incompatibles avec un s o m m e i l tranquille; c'est ainsi qu'avec les effets disparut la c a u s e , c'est--dire la maladie e l l e - m m e . 255. Et en effet,en s'veillant le matin, elle s'cria t o u t e j o y e u s e qu'elle tait gurie, et qu'elle n'avait plus rien.
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E t sur-le-champ elle donna une preuve vidente de celte gurison non m o i n s subite q u e parfaite ; car au lieu de la vtir des pieds la tte, ainsi qu'on le faisait h a b i t u e l l e ment, et de l'asseoir, parce qu'elle n'avait pas la force de se mouvoir et de marcher, cette m a t i n e , elle s'habilla e l l e - m m e , et c o m m e n a marcher, plus leste que m o i , dit la mre ; quoi la cousine ajoute : elle n'tai plus inquite, elle ne toussait plus, elle ne se plaignait plus d ' a u c u n e d o u l e u r , elle avait r e p r i s ses forces et ses c o u leurs ; en s o m m e , il semblait q u ' e l l e n'avait jamais t malade, car elle disait qu'elle avait u n e grande faim, et elle mangea de tout ce qui iait l de bon apptit . 256.Voil pour la maison; mais il fallait rendre des actions de grce s o n cleste patron pour u n si grand bienfait, ce qui fut une nouvelle preuve de cette gurison miraculeuse. N o u s retournmes, dit Hlne M a r i n i , l'glise d e N o t r e Dame-des-Monts, pour remercier notre bienfaiteur,otpar les r u e s , n o n seulement la j e u n e fille n'avait pas besoin d'tre s o u t e n u e , mais elle courait en avant ; elle fit de m m e dans l'glise de Notre-Dame-des-Monts, passant au milieu de la grande foule, et courant au t o m b e a u du vnrable serviteur de D i e u . A cela la c o u s i n e ajoute : Q u a n d n o u s fmes pour s o r t i r d e l'glise, sa m r e et moi n o u s voulions la sou tenir, c o m m e n o u s le faisions avant ; mais elle nous dit qu'elle ne voulait pas d'appui, qu'elle tait gurie et n'en avait plus b e s o i n ; c l , de fait, plus leste et plus dgage q u e n o u s , elle tait toujours en avant d n o u s , et n o u s ne p o u vions pas la suivre; par les r u e s elle disait qu'elle avait encore faim ; et n o u s lui achetmes des cerises et des petits pois. 257. Tout cela, v i d e m m e n t , dmontre la cessation trs c o m p l t e de la maladie,et la parfaite rcupration de toutes l e s forces;le retour Mazzano en fut une preuve nouvelle. Le m m e jour nour repartmes p o u r Mazzano, dit la c o u sine, et ia j e u n e fille, s u r la r o u t e , n o n - s e u l e m e n t n ' e u t p l u s b e s o i n q u ' o n la s o u t n t s u r l'ne, m a i s elle n e le voulut pas m m e m o n t e r ; elle voulait aller pied ;hors d e l a p o r t e Ang lique, elle lit deux m i l l e s pieds, plus leste et plus dgage q u e n o u s . La j e u n e lilie m o n t a d ' e l l e - m m e sur l'ne, dit la mre ; j e voulais l'aider, mais elle refusa : elle m e disait : je suis gurie, j e me suffis m o i - m m e , je n'ai plus besoin de rien ;cn elfet,pendant la route,elle n'euiplus besoin de rien ; il ne fut n u l l e m e n t ncessaire de la soutenir et de lui donner boire, parce qu'elle tait vraiment gurie, et se trouvait e n forces. L a c o u s i n e ajoute : Dans le c h e -
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min elle ne donna aucun signe du mal pass ; s e u l e m e n t elle aurait voulu toujours manger, parce qu'elle disait avoir faim : nous n o u s arrtmes la Storta, elle y fit un bon repas et de grand apptit. 258. La vrit des paroles des tmoins affirmant n o n seulement que la jeune fil le tait parfaitement gurie, mais tellement rtablie qu'il semblait qu'elle n'et jamais t malade, ressort aussi de l'admiration que sa vue excita dans Mazzano. Arrive Mazzano, dit Hlne Marini, tous ceux qui la virent demeurrent stupfaits. Tous, en voyant Marie-Rose taient ravis d'allgresse, dit la c o u s i n e , et demandaient si c'tait bien l Marie-Rose. Il semble que ce ne soit plus elle! Gomment cela s est-il fait? Tous taient frapps de stupeur : le chirurgien, larchiprtre, le vicaire, les autres prtres (donc n o n pas seulement les paysans) ; et quand j'ai dit tous, il m e semble que j'ai dit assez. Tous confessaient que nul autre qu'un saint n'avait pu gurir Marie-Hose, et la gurir de telle manire qu'elle et recou vr toutes ses forces, ses couleurs et m m e ses chairs. Parmi ceux qui vinrent au-devant de Marie-Rose, Franoise Maggiori dcrit en ces termes son admiration et celle des autres, ainsi que les preuves de parfaite sant donnes par la jeune fille : Pleine do c o n t e n t e m e n t , je courus sa rencontre si prcipitamment, que je me rappelle tre t o m b e . J'allais sa rencontre avec beaucoup d'autres; quand nous l vmes, n o u s fmes stupfaits. Elle marchait libre m e n t , l e s t e m e n t ; elle tait forte, avait do belles couleurs sur le visage, e t i l semblait qu'elle n'et jamais t malade ,: et remarquez qu'elle marchait, non sur un terrain plat, m a i s sur une cte rapide. Tous nous tions alls au-devant d'elle, tous nous tions remplis d allgresse, et elle nous disait tous : je suis gurie, j e suis gurie ; et elle disait v r a i ; parce q u e l l e tait bien rorlevcnue ce qu'elle tait avant d'tre malade ; et quand elle fut prs de la m a i s o n de ma tante, elle lui cria de la rue : tanic, j e suis gurie, et aussitt elle courut par l'escalier pour se faire voir. 259. Maintenant si la preuve du miracle consiste tout entire dans l'loigucment subit et surnaturel de la vh m e n c e de la maladie, de telle sorte que la pleur, l'amai grissement, la faiblesse et les autres consquences, mais non les s y m p t m e s , ne puissent lui cire opposs, que devra-t-on penser d'une gurison par laquelle disparat non-seulement la maladie tout entire avec ses symptmes, mais avec ses c o n s q u e n c e s , a u point que la malade,aprs trois mois d'une maladie mortelle, semblait n'avoir jamais soulfert. Ce n'es
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pas tout, car quoique l'asthme convulsif dont la m a l a d e avait toujours souti'ert ne lit pas partie du miracle, il dis parut aussi. Le mdecin affirme qu'il la vit totalement c h a n g e , et dans un tat de sant excellente et florissante ; et, ce qui est plus encore, elle tait dlivre de cet a s t h m e convuL-if qui la tourmentait h a b i t u e l l e m e n t avant qu'elle tombt malade. Si une gurison qui va jusqu' faire disparatre les c o n s quences de la maladie, et m m e les alfections qui ne fai saient pas le sujet du miracle, n'est pas trs parfaite, n o u s i g n o r o n s quelle gurison miraculeuse le sera. 260. Sa sant ne fut pas m o i n s durable q u e parfaite, p u i s q u e , peine gurie, elle c o m m e n a aussitt vaquer aux travaux de la maison et de la c a m p a g n e proportionns s o n ge, c o m m e si elle n'avait jamais t malade. Dans la suite, elle fut toujours bien, et ne souffrit plus d'aucun m a l . Et n o n pas pendant un temps trs-court, car de l'ge de q u i n z e vingt ans, qu'elle resta fille, elle allait par Mazzano rjouie et a g i l e ; elle pouvait avoir u n e v i n g taine d'annes, quand elle se maria Julien Itanucci, avec lequel elle vcut quatre annes, dans le m m e tat de sant. J e la pris pour pouse, dit-il, et j'ai v c u avec elle quatre annes : elle a t mre deux fois ; et ne s'est jamais trouve indispose. Elle supportait toutes les fatigues de la maison et de la c a m p a g n e , c o m m e le font les autres personnes de notre tat et de n o t r e c o n d i t i o n , sans se plaindre jamais d'aucun mal, ni d'aucune i n c o m m o d i t . Sa m o r t a t si trangre sa maladie de poitrine, q u e personne ne songea concevoir q u e l q u e s o u p o n cet gard, car, c o m m e le dit son mari : Quand elle m o u r u t , elle mourut de ses c o u c h e s . . . , de c o u c h e s malheureuses, au h u i t i m e mois de sa grossesse. Sa mre, sa c o u s i n e , et Franoise Maggiori racontent la m m e c h o s e : elle m o u r u t aprs avoir e u deux g a r o n s . . . , elle m o u r u t dans ses s e c o n d e s c o u c h e s . . . Jamais elle ne s'tait trouve m a l , et quand elle m o u r u t , elle mourut de ses c o u c h e s . 2 6 1 . N o u s p e n s o n s que personne ne rvoquera e n d o u t e la persvrance de cette gurison. Jamais les travaux des c h a m p s o u de la maison, une nourriture grossire, les souffrances d'une f e m m e enceinte, en c o u c h e o u n o u r r i c e , n e produisirent, en l'espace de neuf annes, la plus petite r m i n i s c e n c e de son ancienne maladie. Sa m o r t provint d'une cause bien trangre celle-ci. Or la perfection et l ' i n s t a n tanit de la gurison sont videntes. D o n c on ne p e u t d o u ter, aprs t o u t e s ces raisons, qu'il n'y ait e u u n miracle
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que les intempries des saisons causent le retour et l ' a g gravation des s y m p t m e s , s'il j o u i t d'une vigueur et d'une sant parfaite, quoi pourraient servir les remdes et les soins du mdecin pour prvenir le danger ? Il y a une grande diffrence entre la disparition et l'interruption des s y m p t m e s . Par l'une, la maladie n'existe p l u s , par l'autre, le dveloppement morbifique c o n t i n u e , et progresse chaque j o u r quoique d'une manire latente. Mais cet tat latent n'chappe pas un mdecin perspicace : une sant faible, un peu de toux, u n e certaine difficult de respirer, surtout pendant les exercices du corps, sont pour lui des indices certains de la possibilit d'une aggravation nouvelle du mal sous l'influence d'une cause lgre. Quand les poumons sont
seulement engorgs, ou que les tubercules demeurent dans la priode de crudit, la vie,quoique insupportable, n'est pas compromise pour le moment. Le 'malade cependant est ac cabl d'une oppression de poitrine, d'une respiration jus qu' un certain point difficile, et tous ces symptmes se dveloppent par te moindre refroidissement, par un mau vais rgime, et sont accompagns, selon l'poque, d'une fivre erratique ou passagre (1), 2 6 5 . Voil les caractres de Vinterruption. Or dans le cas
prsent on no vit jamais aucune dfaillance de sant, pas m m e le plus lger s y m p t m e de l'ancienne maladie n e re parut, pendant neuf ans, malgr les travaux des champs, l'inclmence du ciel, les soins d o m e s t i q u e s , etc. Donc ce n e fut pas la suspension mais la disparition des s y m p t m e s . Le t e x t e cit plus hautn'infirme en a u c u n e - m a n i c i e notre thse. 266. Evidemment, d'ailleurs, on n e p e u t esprer cette trve que dans le principe de la phthisie, o u quand les tuber c u l e s sont encore dans la priode de crudit. Car, quand la suppuration a c o m m e n c , les inflammations et les suppu rations partielles c h a n g e n t c o n t i n u e l l e m e n t de p l a c e ; les s i g n e s du dveloppement morbide, quoique lent et insen sible, ne p e u v e n t tre latents et se dissimuler si ce n'est pour u n t e m p s trs-court. L'auteur qu'on nous oppose n o u s en prvient l u i - m m e . C est, en elfet, chose certaine, que les tubercules, restant inactifs, peuvent promettre celui qui e n est allect une sant passable (remarquez, j e vous prie, ces paroles qui confirment ce que nous disons), et aussi une vie suifisamment l o n g u e ; mais quand ils c o m m e n c e n t se ramollir, ils rveillent un travail de suppuration qui se limite rarement, qui d o n n e lieu l'ulcration des parties, et cause (l) Morton phthisicolog;., lib. 2 cap. 5.
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l e plus souvent la consomption avec tous les caractres de la phthisie. 267. Donc le texte prcit concerne spcialement la phase d'une phthisie son dbut, et exclut n o m m m e n t l a phthisie confirme.Or, nous parlons seulement de la phthi sie confirme -, puisqu'ici, la priode prparatoire, c'est-dire le dbut, consiste dans une pripneumon ie non rsolue. Ainsi le texte object, de ce troiaime chef, n'atteint point davantage notre thse. 2 6 8 . Si cette pice est trangre la thse, parce qu'elle parle seulement de la. phthisie chronique, de i interruption des s y m p t m e s , de la marche d'une phthisie son dbut, v i d e m m e n t ll& n'aboutit rien, les rflexions surajoutes p o u r la corroborer, sont inutiles et, par consquent, doivent tre mises de ct. Cependant examinons-les en dtail. 2 6 9 . Dans notre cas, la maladie fut de courte dure, si o n la compare avec les phthisies chroniques, mais elle fut de l o n g u e dure, si on la considre en e l l e - m m e ; car il est manifeste, d'aprs les autorits et les laits prcits, que sou vent les phthisies aigus et secondaires sont beaucoup plus courtes que celle dont nous traitons. Celles-ci de leur nature sont trs-violentes et mortelles. La courte dure de la maladie va donc contre la critique qui nous est faite. 2 7 0 . L'objection de la fleur de l'ge est plus encore sans valeur. La physiologie et la mdecine, l'exprience surtout, ont dmontr que la phthisie est plus dangereuse chez les j e u n e s gens que chez d'autres personnes. 2 7 1 . Une recherche m o i n s active de la part du mdecin, quand la malade eut recouvr la sant, ne peut tre un obstacle l'vidence d'une parfaite gurison. Ne parlons plus du mdecin. T o u t h o m m e qui a de& y e u x , les gens de la maison surtout, peuvent observer si une personne t>e couche de t e m p s en temps dans la journe, si elle a de la fivre, si elle j o u i t d'une sant assez robuste, si elle a la respiration difficile, si elle tousse, si elle est sensible aux changements des saisons, l'intemprie du ciel, e t c . . Si tous ces acci dents font dfaut, bien plus, si pendant plusieurs annes aprs sa gurison, cette personne jouit d'une sant trs-so lide, n'est atteinte d'aucune maladie, se livre aux travaux les plus pnibles, qui donc n'y reconnatra une sant parfaite? E s t - i l besoin qu'un mdecin vienne l'affirmer, ou m m e ait visit cette personne ? D'ailleurs le lendemain de la gurison, le mdecin n'a pas visit Marie-Rose aussi n g l i g e m m e n t qu'on le pense. Le lendemain du jour de la g u rison (le dimanche, elle tait revenue Mazzano ie samedi
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prcdent), car il constata d'abord la rcupration ext rieure et c o m p l t e des forces, laquelle, v i d e m m e n t , n'avait pu se produire quatre jours aprs le dpart si critique et si dangereux, sans que la maladie e t entirement d i s paru. J'ai v u , dit-ii l u i - m m e , que pour venir de l'glise jusqu' moi, elle a descendu t r s - l g r e m e n t et trs-vite les quelques marches qui sont l ; j e vis ces belles c o u l e u r s n a turelles, et cette vivacit qui indique la sant ce qui lui fait dire avec raison : Le seul extrieur de la j e u n e fille tait pour moi une preuve plus que suffisante pour c o n fesser le miracle. Il n e s'est pas arrt l : a N a n m o i n s , dit-il, j'ai v o u l u m'assurer de plus prs qu'il n e restait aucune o m b r e , aucun vestige qu'on aurait pu prendre p o u r des restes de la maladie passe. Il e x a m i n a donc la respi ration et constata qu'elle respirait librement et n a t u r e l l e m e n t . Il e x a m i n a la t o u x , mais Marie-Rose tait sans toux d'aucune sorte. Il chercha la fivre : Je voulus sentir le pouls, et n o n - s e u l e m e n t j e la trouvai sans livre aucune, quoiqu'elle et march trs-vile,mais je trouvai les pulsations gales et n o r m a l e s . En un mot il la trouva, sans aucun signe o u indice de la maladie. Si le mdecin s'est enquis de la fivre, de la t o u x , de la respiration difficile, de la couleur du visage, de la libert des m o u v e m e n t s , de leur facilit, du rtablissement de toutes les fonctions o r g a nique?,de la cessation de t o u t s y m p t m e d e l maladie, est-il vrai d'affirmer qu'il a visit la malade n g l i g e m m e n t . La rponse cette objection au sujet de l'enqute du m d e c i n semble d'ailleurs superflue, quand plusieurs annes n o u s sont u n garant plus certain et plus durable d'une sant par faite: cette preuve est si vidente, et si solide, qu'elle carte a b s o l u m e n t t o u t soupon sur u n reste de la maladie.
mi
272. La m o r t arrive neuf ans aprs n'est pas si rappro c h e qu'elle doive veiller le s o u p o n de la permanence o u du retour de la maladie. Le genre de m o r t qui enleva Ma rie-Rose est bien propre carter tout soupon. On c o n s tate : qu'elle mourut dans sa seconde couche . La cause de ce funeste a c c o u c h e m e n t est claire : il avait lieu le h u i time mois aprs la c o n c e p t i o n . Or on sait qu'il en rsulte toujours la m o r t de mre o u de l'enfant. G'est un adage ancien et bien triste. Si l'enfantement a lieu, dans ce
mois (le huitime), par quelque cause trangre^ la mre aussi bien que l'enfant courent un grave danger. Aussi
est-il t o n n a n t que les dpositions si claires des t m o i n s aient p u chapper notre critique et lui faire crire :
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Aucune cause une mort si prochaine n'est dsigne, aucune circonstance n'est rapporte ; d'o l'on est en droit de douter si cette mort ne provient pas de la premire ma ladie reparue plus violente.
273. Si l'autorit invoque pour veiller des soupons sur la reviviscence de la maladie, est tout h fait trangre notre sujet ; si toutes les raisons qui semblent favoriser ces soupons, ou n e subsistent pas, ou affirment le dvelop p e m e n t rapide et la violence de la maladie, et par cons quent qu'une interruption n'a pu avoir lieu, il sera dmontr qu'aucun doute n e peut surgir au sujet de la permanence de la maladie l'tat latent, permanence que les arguments les plus vidents et les plus concluants combattent. 2 7 4 . Pour rendre obscure l'vidence de cette miraculeuse gurison, notre savant suit une autre route.Cette douleur de poitrine si grave, sur la nature et la signification de laquelle n o u s avons largement dissert, il la fait servir de crise salutaire. Puis il puise une nouvelle objection dans ce s o m m e i l paisible auquel se livra la malade aprs l'applica tion de l'image vnre. Il appelle son secours l'autorit de Sprengel crivant : Dans toute maladie chronique le
qui a t prcd de douleurs et d'affections nerveuses, est de bon augure (1). Il semble avoir voulu dire : Le sommeil
est surtout un excellent prsage, quand les douleurs ^se sont produites auparavanl,ainsi que les affections nerveuses. Mais peut-tre que ces signes pour notre savant critique taient dplacs. Car dans notre thse il ne s'agit point d'affections nerveuses. 'Ecoutons plutt Sprengel qui nous dit : La nature se sert
surtout d'un sommeil paisible pour adoucir les excitations trangres, ramollir, relcher tes parties trop tendues, ra lentir la circulation des humeurs et la scrtion ; apaiser et
( 1 ) Syjnpt. gener., 283.
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cause par un principe vicieux qui infectait depuis long temps les parties liquides et les solides du corps, rpon dirent justement qu'il tait naturellement impossible que des humeurs si visqueuses et si concrtes eussent pu se rsoudre dans le sommeil, et revenir leur tat primitif, le malade recouvrant tout coup la sant et la libert (2). Qa'auraient-ils dit, s'il se ft agi de la corruption d'un v i s c r e ? 2 7 7 . Celui qui examine le fait avec u n peu de soin et d'attention, est forc de conclure que l e s o m m e i l n'a pas t la cause, mais l'effet de la gurison. E n elfet, la malade, j u s q u ' la dernire nuit n e pouvait reposer. Elle tait dvore par u n e soif continuelle, s e c o u e par une toux i n cessante, e m p c h e , par la difficult de respirer, de pouvoir rester c o u c h e moins d'avoir le buste lev. Gomment j o u i r d'un s o m m e i l paisible et durable avec une seule de ces souffrances, et plus forte raison toutes tant runies ? P o u r jouir de ce s o m m e i l ? il a donc fallu avant tout, q u e la soif ft teinte, la toux apaise, la respiration d g a g e . Or tous ces effets naturels et ncessaires de la maladie
<1) Pliysiolog. gencr. 3 384. (2) uenoit XIV, lib. 4, part. 1, cap. 18, n u m . ii>.
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n e pouvaient cesser si la cause demeurait. D o n c quand le s o m m e i l paisible s'empara de la malade, la cause avait disparu. Le sommeil n e fut donc pas la c a u s e mais l'effet de la gurison. De nouveau Lancisi rpondrait, c o m m e il
n'a pas
J
Veffet de t absorption d'un narcotique, mais il a ( t produit, aprs l'invocation du vnrable serviteur de Dieu, par F ap plication des reliques; il me semble qu'un philosophe chr tienne doit pas l'attribuer plutt une cause naturelle qu' une vertu surnaturelle. Benot XIV ajoute ceci, qu'il attribue un miracle le fait qu'un malade sortant d'un sommeil trs-paisible se lve subitement sain et vigou reux (1).
278. Voil ce que pensaient et disaient du s o m m e i l , des h o m m e s qui sont au premier rang dans l'art mdical. Le fait est si clair que notre adversaire n'a pas pu lui chapper. Aussi crit-il : Que quelqu'un admette que Marie-Rose s'est livre au sommeil parce que dj elle tait gurie, aprs avoir fait application de l'image du vnrable serviteur de Dieu, j e ne m'y oppose pas ; j e m e garderai bien de nier la possibilit d'un miracle. 279. Mais n'aurons-nous que la pure possibilit d'un m i racle? Pourquoi d o n c ? Ge serait, sans doute parce que la crise du gonflement des pieds avait prcd, qu'une douleur salutaire s'y tait jointe, enfin, par toutes ces amliorations runies au sommeil, que la gurison de Marie-Rose, ou plutt l e c o m p l m e n t de la gurison, s'est opre d'une manire n a turelle, car elle tait dj en voie de gurison. Or, Zacchias a enseign qu'on ne peut appeler miracle un effet produit par des causes naturelles (2). Mais nous avons vu que l'en flure des pieds et la douleur avaient t n o n des crises de la maladie, mais des aggravrations indiquant son extrme malignit. Le s o m m e i l tait incapable de faire disparatre la maladie o u de produire la coction, il fut donc n o n une cause mais u n eifet de la gurison. Donc la gurison n'ar riva pas par une action remarquable de la nature, ni par des causes naturelles, mais par une cause surnaturelle qui dtruisit et fit disparatre instantanment toutes les causes d'une mort trs-rapproche. 280. Qui oserait dire qu'elle a t gurie de la manire ha bituelle aux causes naturelles, cette jeune fille alite depuis trois m o i s , toussant, ple, amaigrie, rejetant des crachats purulents, bout de forces, laquelle tout coup se l e v a ,
(1) Loc. cit. S15.
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prit ses v t e m e n t s , m a r c h a , courut, rclama avidement d e s aliments confortables, fit un l o n g trajet, sans aucun aide, fit preuve de toutes ses forces corporelles ; montra t o u t coup cette agilit, c e t t e vivacit, ces couleurs naturelles i n d i c e s certains de la sant, de sorte qu'il semblait qu'elle n'et jamais t malade ; n o n - s e u l e m e n t elle apparut sou dain dlivre de la maladie et de ses accessoires, mais aussi de t o u t e s les consquences de la maladie et m m e d'un asthme habituel qui n'avait rien de c o m m u n avec la m a ladie. E s t - c e l le mode d'action habituel de la nature? Zac chias, certes, dans notre c a s , n'aurait pas crit les paroles qu'on n o u s a objectes, car voici son e n s e i g n e m e n t : Un
miracle est dit au-dessus de la nature, quand l'effet pro duit est en dehors de l'ordre naturel, par exemple, quel qu'un est guri une maladie instantanment et incon tinent, sans que la coction des humeurs ait prcd, comme la belle-mre de Pierre, dlivre de la fivre sur un signe du Christ: Si elle avait t gurie naturellement il aurait fallu que ^altration des humeurs et triomph de la ma ladie dans l'ordre que suit la nature pour loigner les ma ladies... Or cette altration s'effectue naturellement*avec le temps et non instantanment. Nous faisons notre
savant cette remarque, s e u l e m e n t afin qu'il c o m p r e n n e bien que, dans le cas m m e o la maladie aurait t de sa nature gurissable, on no pourrait pas attribuer celte gurison aux forces de la nature. Mais qui n e voit qu'une phthisie c o n firme et se prcipitant vers la mort, c'est--dire u n e ma ladie incurable de sa nature n'a pas besoin de ces rserves ; parce que, dans ce cas. la gurison excde s u b j e c t i v e m e n t les forces de la nature, et est forcment u n miracle de s e c o n d ordre. 2 8 1 . Notre savant adversaire termine s o n argumentation par ces remarques. 1 La nature de la maladie dont souffrit Marie-Rose n'est pas assez c o n n u e ; cependant de n o m breux s y m p t m e s n o u s font croire u n e bronchite l e n t e , c'est--dire un catarrhe chronique plutt qu' une vritable phthisie. A cette objection rpondons par le cha pitre II de notre dissertation, o nous avons parl des carac tres, de la phthisie, de ses diffrentes sortes, de ses phases gnrales ; et par le chapitre III, o , c o m p a r a n t ces doctrines gnrales avec le cas e n question, n o u s avons constat qu'elles s'adaptaient e x a c t e m e n t notre fait, et prouvaient une phthisie vritable chez Marie-Rose. Dans n o t r e c h a pitre IV, mettant en o p p o s i t i o n les s y m p t m e s et le d v e l o p p e m e n t de la bronchite avec les s y m p t m e s et le d -
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veloppement de la maladie de Marie-Rose, n o u s avons dmonLr qu'ils diffrent de ceux de la bronchite autant qu'ils ressemblent ceux de la hthisie282. Il c o n t i n u e : 2 tant donn qu'il s'agissait d'une vritable phthisie, videmment la maladie n'avait pas atteint sa dernire priode, dans laquelle on la juge incurable. Nous lui rpondons par les chapitres V et V I : dans J e cinquime n o u s avons dmontr que la maladie avait atteint sa dernire priode, clans le sixime n o u s avons rfut les objections faites notre dmonstration. 283. 11 c o n t i n u e : 3 Dans le traitement de cette maladie, le docteur Angelucci s'est montr un excellent mdecin. Nous avons l o n g u e m e n t rpondu cette observation dans ce m m e V I chapitre, o n o u s avons dmontr que tous les remdes e m p l o y s furent tout h fait inefficaces,et mme, la plupart du temps, inopportuns, intempestifs, soit parce que la pauvret ne permettait pas d'en administrer de meil leurs, soit parce que ces remdes lui taient donns m a l a droitement et sans raison. 284. Il a j o u t e : 4 Il est hors de doute que la sant de Marie-Rose s'tait amliore quand elle entreprit le voyage de Rome. Nous avons f o r m e l l e m e n t , repouss cette assertion par l'historique des fa/ts tablis dans le c h a pitre V et m i e u x encore clans le chapitre suivant et m o n trant, e n pesant avec soin chaque s y m p t m e , l'un aprs l'autre, que tous ont subsist dans leur vigueur jusqu'au m o m e n t du miracle. 285. Il ajoute encore : 5 Ce c o m p l m e n t de la gurison par le paroxysme d'une douleur vive, suivi d'un s o m m e i l placide, a quelque chose de merveilleux, mais j e ne puis affirmer que cela soit tout fait au-dessus des forces de la nature. De tout ce que n o u s avons dit de l'histoire de la maladie, de la prtendue crise, et du sommeil placide dans le chapitre VII, il reste bien tabli que l'homme le plus sceptique n e saurait douter de la vrit du miracle. 286. Notre docteur atteste enfin qu'il a puis ses objections dans les principes de la science mdicale et dans les donns de l'exprience. Plut Dieu,s'crie-t-il ensuite, que pour la gloire de Dieu les vnrables Pres infligent la note de l gret aux arguments exposs I D'autres jugeront si les objections de notre savant sont, en effet, un cho fidle de la science et de l'exprience. P o u r nous qui s o m m e s en plein d i s s e n t i m e n t avec lui, nous ne nous en rallions pas m o i n s au v u trs-religieux qu'il a mis en finissant.
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APPENDICE
Rapport du docteur Charles Maggiarani sur cette question : Est il certain que la gurison de MarieRose de Luca ait t miraculeuse (1) ?
i . La rgle que suit toujours la sainte glise Romaine lorsqu'elle e x a m i n e la vie des serviteurs de Dieu, est de n e pas s'en rapporter des bruits vagues e t des rcits sans preuves, pour dclarer q u e certains faits s o n t m i r a c u l e u x . Avant de prononcer s o n j u g e m e n t , elle e x i g e des t m o i g n a g e s n o m b r e u x , q u ' e l l e pse e toute rigueur, en les s o u m e t t a n t un e x a m e n scrupuleux, faisant appel toujours a u x lumires des h o m m e s comptents e n c h a q u e matire. Voil pourquoi, la d e m a n d e de Tminent et Rvrendissime cardinal Patrisi, rapporteur dans le procs de bati fication et de c a n o n i s a t i o n du vnrable serviteur de Dieu Benot-Joseph Labre, j'ai exprimer m o n opinion sur la . q u e s t i o n suivante : Est-il certain que la g u r i s o n de MarieR o s e de Luca ait t m i r a c u l e u s e ? E t t o u t d'abord j'examinerai le caractre vritable de la maladie qui avait frapp Marie-Rose, Car c'est ici le lieu de rappeler les paroles si sages de Tortosa: Pour qu'un m d e c i n prudent puisse tre autoris se prononcer sur u n e g u r i son miraculeuse, il faut avant tout qu'il connaisse e x a c t e m e n t la nature et le caractre de la m a l a d i e e n q u e s t i o n , ainsi que le temprament et les prdispositions d u malade ; or u n e telle connaissance n e peut rsulter que d'un e x a m e n attentif du malade, o u d u moins du rcit v r i d i q u e et d * taill d e ce qu'il a p r o u v . . Dans le cas qui n o u s occupe, il est hors de doute que tous les t m o i n s n'ont voulu dire q u e la vrit ; mais l'histoire de la maladie n'est pas assez c o m p l t e , elle n'en embrasse pas assez les diffrentes pri p t i e s , pour que Ton puisse affirmer q u e Marie-Rose tait a t t e i n t e d'une phthisie, c o m m e le dclare le dfenseur de ' la c a u s e . G'est q u e la phthisie est un mal assez difficile b i e n constater : elle prsente parfois des p h n o m n e s bizarres, et Ton a v u d'habiles m d e c i n s , appels se prononcer dans des maladies de ce genre, tre d'avis t o u t diffrents. N'est-ce pas p o u r cela que, de t o u t t e m p s , o n a
(I) Comme ce rapport est discut d'une Rponse du dfendeur, nous nous faisons un devoir de le d o n n e r en appendice. F . M.
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mis un soin t o u t particulier tudier la nature des crachats du malade? q u e de nos j o u r s , les mdecins percutent la poi trine du phtbisique, l'auscultent attentivement, afin de se rendre un c o m p t e exact de l'tat de sa respiration ? Ils veulent appuyer d'arguments raisonnables le diagnostic assez souvent erron que Ton formule d'aprs les seuls symptmes visibles, afin de se m e t t r e l'abri de toute er reur Il est donc tout naturel qu'un savant distingu, Fr. Hoffmann, recherchant pourquoi on parvenait si difficilement gurir les personnes atteintes de phthisie, en ait donn cette raison : Cette maladie ne prsente pas toujours des signes diagnostiques assez vidents,pour que nous puissions la bien constater. Et, quelques lignes plus loin, il ajoute cette rflexion (1) : Il est vraiment difficile de reconnatre clairement une phthisie, et,en pareille matire,les mdecins, m m e les plus distingus se t r o m p e n t souvent. 2. C o m m e o n le voit, les m d e c i n s qui visitent assidment leurs malades et tudient attentivement leurs dispositions, sont souvent indcis et hsitent quand il s'agit pour eux de conclure u n e lsion p u l m o n a i r e . S'il en st ainsi, q u e de difficults a d rencontrer le mdecin de Campano, qui habituellement n'allait qu'une fois la semaine Mazzano, et n'avait q u e p e u de temps consacrer Marie-Rose, oblig qu'il tait de visiter rapidement tous les malades du b o u r g ? Nous ne voulons assurment pas mettre ici en doute l'habi let et le zle de Darius Angelucci : c'tait un h o m m e d'un mrite incontestable. Mais ayant plusieurs malades visiter e n peu de temps, ne pouvant revenir qu'au bout de six sept jours, il a d ne nous laisser, au lieu d'un rapport exact, qu'un rcit assez imparfait de la maladie de Marie-Rose. Les s y m p t m e s en auront t mal observs, et i n c o m p l t e m e n t rapprochs les uns des autres. Pour crire un pareil rapport avec fidlit, il ne suffit pas de faire entendre que la malade a t atteinte d'une p n e u m o n i e , il faut dclarer quel tait le degr de cette i n f l a m m a t i o n s eu faire connatre la nature. C e n est pas tout d'ajouter que cette p n e u m o n i e a dgnr en v o m i q u e ; n o u s avons besoin d'tre renseigns sur la marche de cette v o m i q u e , ses diffrentes phases, et les p h n o m n e s qu'a prsents cette transformation.On nous parle de toux, de fivre, de sueurs ; ces mots sont trop vagues ; n o u s voudrions savoir si les sueurs se produisaient la nuit et rgulirement, si la fivre tait priodique, et s u bissait l'influence du r g i m e de vie d e l a m a l a d e , si la toux d fi) Med. Ration. Syst, De affect. phthisica.
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venait plus sche, suivant la nourriture que prenait la malade o u les exercices auxquels elle s e livrait, c o m m e cela arrive ordinairement dans la v o m i q u e . Darius l u i - m m e confesse l'insuffisance de ses renseignements, q u a n d il dclare qu'il a d s'en rapporter au chirurgien sur c e t t e m a l a d i e ; il regrette g a l e m e n t que la m o r t de ce dernier l'ait priv d'une foule de dtails u t i l e s : J'ai trouv, dit-il, beaucoup d'excel lentes indications auprs du chirurgien Jacque Sgarzi, et s'il vivait aujourd'hui, il pourrait parler d'une manire plus prcise que je ne le fais, en rapportant t o u t ce qui se rat tache au d v e l o p p e m e n t et aux diverses priodes de la maladie. 3 . D'aprs des donnes aussi i n c o m p l t e s , ce que* l'on p e u t conjecturer avec q u e l q u e probabilit: c'est que MarieRose fut atteinte d'un catarrhe pulmonaire^plutt que d'une phthisie a m e n e par une v o m i q u e . C'est qu'en effet, dans le cas qui n o u s o c c u p e , la v o m i q u e a d rsulter d'une p n e u m o n i e ; mais il est peu vraisemblable que Marie-Rose ait t attaque d'une p n e u m o n i e . P o u r s'en rendre compte, il suffit de faire les remarques suivantes : 1 une inflammation srieuse des p o u m o n s succde rarement la rougeole, sans l'intervention d'une cause extrinsque ; or ici on n'en dsigne a u c u n e ; 2 il est peu probable que Maric-Rosc ait pu viter une maladie aigu par u n e seule porte de sang. On ne lui enleva du sang qu'une seule fois, et ce fut ds le dbut de la maladie. 3 Rien n'indique que la malade ait pu se reposer sur un ct, c o m m e cela arrive dans les cas de vomique, quand il n'y a qu'un p o u m o n d'atteint. De p l u s , chez elle, pas de respiration bruyante, pas de ces transfor mations qui a c c o m p a g n e n t toujours la v o m i q u e ; du m o i n s , rien ne l'indique.* Plusieurs c i r c o n s l a n c e s tendent au c o n traire tablir que Marie-Rose n'a souffert que d'un catarrhe p u l m o n a i r e . En effet, i l e catarrhe est gnralement l'tat latent dans la r o u g e o l e , c o m m e on le reconnat facilement a u x s y m p t m e s de cette maladie. 2 La j e u n e fille tait dj atteinte d'un asthme avant sa r o u g e o l e ; or l'asthme a de grandes affinits avec le catarrhe p u l m o n a i r e ; il peut ais m e n t se transformer en catarrhe. 3 Marie-Rose tait trsfaible : elle n'avait la force ni d e s e m o u v o i r ni de m a r cher..., elle n e pouvait se soutenir, et avait besoin de s'appuyer sur le bras de q u e l q u ' u n ; or cette faiblesse se rap porte plutt une bronchite chronique qu' une vritable phthisie. Le catarrhe amne toujours u n affaiblissement considrable, ce q u i n'a pas lieu dans les cas de phthisie. 4 Le d v e l o p p e m e n t de la maladie fut rapide, et Marie-Rose
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qui, au c o m m e n c e m e n t de mars avait dj prouv des morbilles, souffrait ds les premiers jours d'avril, d'un e n r o u e m e n t et de la t o u x ; elle tait abattue par une fivre h e c t i q u e ; sa respiration tait si courte, qu'au moindre m o u v e m e n t elle tait hors d'haleine; elle dprissait vue d'il, affaiblie par des sueurs nocturnes et une diarrhe accompagne de coliques. A partir du c o m m e n c e m e n t d'a vril, tous ces s y m p t m e s devinrent plus menaants, et on distinguait dj, dit le rapport du Dfendeur de la cause, les p h n o m n e s qui dnotent une phihisie. Or cette rapidit <?e la maladie, dit le m m e Joseph Frank, convient plutt au catarrhe qu' toute autre maladie de poitrine (1 );le catarrhe se dveloppe plus vite que la phihisie engendre par la vo mique, et m m e que toute phthisie; bien plus, n o u s s o m m e s ports croire que les phthisies galopantes, c o m m e on les appelle, sont o u des phthisies tuberculeuses , ce que l'on ne pourrait prtendre pour Marie Rose, qui sont a c c o m pagnes d'une autre maladie aigu et nglige o u qu'elles ne sont que la suite de bronchites chroniques. 4. Il importe pou maintenant de savoir si la maladie de Marie-Rose a prsent les symptmes- que l'on rencontre dans les phthisies ordinaires, puisque cette maladie a une si grande ressemblance avec l'inflammation chronique des bronches, que les anciens ont donn cette dernire le n o m de phthisie pituiteuse. Aussi le clbre Frank, aprs avoir trait de la bronchite chronique, que caractrisent la fivre la fin de la journe, des sueurs nocturnes, l'enrouement, la couleur jaune-verdtre des crachats, la flaccidit des chairs, termine en faisant observer que cette maladie dure de trois semaines trois mois, et conclut en ces termes (i) : On ne peut distinguer la bronchite chronique de la phthi sie, qu'en examinant attentivement la constitution du ma lade, e n se rappelant ses maladies prcdentes et surtout la marche de celle laquelle it est en proie. ici, daus le cas de Marie-Rose, la maladie dure peu de t e m p s ; on ne sait, c o m m e nous l'avons vu, si elle a t prcde d'une p n e u m o n i e . La j e u n e lille tait d une bonnt constitution, c'est ce que rapportent les tmoins : son temprament tait excellent, et elle n'avait jamais t malade. Avant sa ma ladie, elle tait forte, robuste, blaache et rose c o m m e une cerise, et allait travailler la campagne . Le mdecin avait bien remarqu en elle une nature molle, ce qui pouvait favo riser un catarrhe, mais n'avait aucun rapport avec laphthisie. ^i) Prax. Med. univ. morb. pulin., 51. (2) lbid.
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5. On m'allguera sans doute que j e n'carte la phthisie qu'en envisageant s e u l e m e n t celle qu'engendre la v o m i q u e , tandis que le dfendeur de la cause, dans sa rponse aux objections, n'admet pas cette h y p o t h s e . Cependant, dans la demande qu'il adresse d'Information de cette cause, il m e n t i o n n e des amas de pus dans les p o u m o n s ; dans la rponse qu'il fait pour confirmer sa thse, il cite Mangetus et Burserius, propos de ces amas de pus dans les p o u m o n s . N'est-ce pas l admettre l'existence d'une v o m i q u e ? Dans la langue de la mdecine, les deux choses ne vont pas l'une sans l'autre. De plus, dans la r p o n s e dont n o u s par lons on trouve u n e autre interprtation de la v o m i q u e . Ce m o t , y est-il dit, a t entendu de tant de faons, que l'on ne saurait n o u s reprocher de l'avoir pris dans sa plus large acception, et d'avoir indiqu ainsi u n e lsion pulmonaire q u e l c o n q u e . Or, dans le cas qui n o u s o c c u p e , les ulcres c o n s l a t s dans les parenchymes p u l m o n a i r e s ont d prove nir de scrtions et d'amas de p u s . 11 faudrait donc dire q u e la phthisie a t a m e n e par ces a m a s de p u s , o u bien par la v o m i q u e , et alors nos remarques prcdentes par rap port l'origine du mal conservent toute leur force. 6. Ainsi donc cette p n e u m o n i e mal dfinie, Pextrme faiblesse de la malade, ce qui n'arrive pas dans les cas de phthisie (tout c e l a p r c d d'un a s t h m e ) , l e cours rapide de l a maladie, i n d i q u e n t plutt une inflammation chronique des bronches qu'une phthisie. J'en trouve u n e nouvelle preuve dans la diminution de violence du m a l . Dans la phthisie, a dit Hippocrale, mesure que le mal fait des progrs, le pus devient plus clair et les livres s o n t plus violentes. Quant Marie, sa sant s'amliorait de j o u r e n j o u r ; les dcla rations des tmoins en font foi. Voici, .suivant eux, la marche de la maladie : la rougeole rentra o u fut rpercute... elle alla ensuite plus m a l . . . on lui donna le viatique... on crut q u e l l e allait bientt m o u r i r . . . il s e m b l a qu'elle c o m m e n ait aller un p e u m i e u x . . . elle se leva sur s o n l i t . . . elle voulut s'habiller... elle put l'aire quelques pas dans sa chambre, en s'aidant d'un bton... elle vint R o m e . T e l l e fut le cours de la maladie ; et, au lieu de s'aggraver, elle diminuait s e n s i b l e m e n t . 7. Bi 1 on p e u t ainsi lever des doutes s u r la nature de la maladie, plus forte raison nous p o u v o n s en contester la gravit. Pour m o i , j e ne puis partager l'opinion du D fendeur : L'extrme gravit de cette m a l a d i e , de m m e que sa nature, apparaissent avec evidence . E n effet, quand la phthisie est arrive s o n dernier degr, l e malade n e peut
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plus quitter le lit, ses o n g l e s se recourbent, ses cheveux t o m b e n t , son corps offre au toucher une chaleur brlante ; la peau est souvent toute couverte de pustules, la dglutition devient difficile, cause des aphthes qui se forment dans le gosier, le corps du malade ressemble un squelette, et ce m a l h e u r e u x est en proie une diarihe impossible ri gurir. Telle e s t la dernire priode de la phthisie ; le corps est si dissous, que Dieu seul peut en accorder la gurison. quand on la lui demande par l'intercession des saints. Marie-Rose n'a j a m a i s t dans un pareil tat; elle en tait m m e bien loin, c o m m e on e n est convaincu en songeant qu elle entre prit le voyage de R o m e . G o m m e n t une jeune fille, arrive au dernier degr de la phthisie, aurait-elle p u , m o n t e sur une bte de s o m m e , faire une route de vingt-cinq milles, par un soleil de la fin de m a i ? C'est ce jue j e n e puis comprendre. Arrive R o m e , elle n'aurait pas pu davantage monter la colline eapitoline, visiter le temple de la B.-V.-M. in Arac l i , y assister au saint-sacrifice, aller ensuite pied jusqu' l'glise de Sainle-Marie-auv-Monts, y demeurer longtemps
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mme temps n e pas abattre le malade, c e qui nuirait beau coup la gurison. Je serais trop long, si dans les limites restreintes que c o m p o r t e cet crit, j e citais les tmoignages des m d e c i n s n o u s dclarant que la p n e u m o n i e exige des saignes abondantes, tandis que dans l'inflammation catarrhale des bronches, elles doivent tre trs-lgres. Pr. H i l debrandus, qui n'est pas partisan des saignes abondantes, permet d'ouvrir trois o u quatre fois la veine, en vingt-quatre heures, pendant la priode aigu de la p n e u m o n i e , tandis
q u e t r a i t a n t d e s r e m d e s e m p l o y e r c o n t r e les i n f l a m m a t i o n s catarrhales, il n e n o m m e p a s l e s s a i g n e s (1). Il f a u t
cependant fliciter le m d e c i n de Campano d'avoir prati qu la phlbotomie ; c o m m e l'enseigne V i e u s s e u x : U n e des causes ordinaires d e phthisie, c e s t q u e l'on o m e t de pratiquer u n e saigne ds le dbut de l'inflammation, lors qu'un catarrhe est d c l a r ; ce m o m e n t p a s s , elle n e produit plus d'effets salutaires (>). On faisait aussi prendre quelques remdes la m a l a d e : c'taient des drogues a p prtes par l'apothicaire; c o m m e n o u s n'en connaissons point la composition, il n'y a aucune discussion soulever . leur endroit. Quand le mal fit des progrs, on n e d o n n a p l u s Marie q u e du petit-lait, d u lait, des t i s a n e s , ce qui
l u i f a i s a i t beaucoup d e b i e n la p o i t r i n e . Je m e r a p p e l l e q u ' o n lui d o n n a i t c o m m e n o u r r i t u r e d u pain t r e m p dans
du lait ; elle continua . p r e n d r e du petit-lait j u s q u ' a u m o m e n t o nous partmes de Mazzano. J'en c o n c l u s qu'on administrait la malade les remdes qui lui convenaient, et cela n o n pas s e u l e m e n t au c o m m e n c e m e n t de sa maladie, mais durant tout s o n c o u r s . J'ai dit q u e ces remdes convenaient dans l e cas dont o n n o u s parle ; car, s i l tait b o n , ds l e dbut de la maladie, de pratiquer une saigne, l'ubage du lait durant le cours de la maladie devait tre encore plus efficace ( 3 ) . Il est un r e m d e , dit Hoffmann, qui n e date pas d'hier, mais dont u n e exprience de trente sicles, faite par les mdecins de t o u s l e s p a y s , a dmontr l'efficacit d a n s l e s cas de phthisie ;
c ' e s t l e l a i t . EL l e m m e a u t e u r a j o u t e q u e le l a i t e s t u n
r e m d e universel pour toutes les maladies de poitrine . Soit d o n c que Marie-Rose ait t atteinte d'un catarrhe, c o m m e j e le prtends; soit qu'elle ait soullerl d'une phthisie, c o m m e le soutient le d f e n d e u r d e la Cause, dans l e s deux cas le lait conservait toutes ses proprits salutaires. Mais ses effets
(1J lus til. Pracl. M e d e c , t. IV, 349. (2) Ees Salasse, op. cit. c. XI ^3) Op. cit.
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sont surtout remarquables, dit Hoffmann, dans les maladies de poilrine amenes par une pleursie ou une p n e u m o n i e . Le meilleur remde employer alors est le lait, el j e con nais plusieurs phthisiques, qui avaient dj un pied dans la tombe, et que le lait a rendus la sant. Si j'admets l'opinion du Dfendeur par rapport la nature de la maladie de Marie-Rose, ma th*e n'en est que plus solide, savoir, que les remdes efficaces ont t employs. Je puis faire la mme observation au sujet du petit lait que Ton fit boire Marie Rose jusqu' son dpart de Mnzzano. L'auleur dont je parlais, il n'y a qu'un instant dclare galement que l'usage clu petit-lait procure encore plus de soulagement que celui du lait, surtout quand il s'agit de pulmonies chroni ques et de maladies d'entrailles ; ses proprits mdicinales sont plus nombreuses que celles du lait lui-mme. On don nait g a l e m e n t des inlusions de plantes pectorales, et ces tisanes faisaient beaucoup de bien la poitrine rie la m a lade. La manire dont on a trail la maladie de Marie-Rose ne laisse d o n c rien a dsirer. Il serait souhaiter que les m decins, ddaignant l'emploi de tant de remdes excitants et chauffants, qui fatiguent les malades, se bornassent leur recommander, dans bien des circonstances, le lait et le petitlait. Leur rle serait sans doute bien humble, mais les ma lades y trouveraient u n e n t i l i t relle. C'est que le lait j o u i t d'une foule de proprits : il purifie le sang et les humeurs, fait disparatre les ulcres, et restaure les forces. Parmi les mdecins qui font un pareil loge du lait, je n'ai cit qu'Hof fmann, de peur d'tre trop l o n g ; si j'avais voulu faire de l'rudition, j'aurais pu apporter te tmoignage d'un grand nombre d autres, tant anchm* que modernes. Je ferai cepen dant remarquer une chose, c est que les mdecins qui ont rompu avec les prceptes d'Hippocratc, faisant ainsi litire de tant d'observations dues taie exprience de plusieurs sicles, l'es mdecins, riis-je, sont d'accord pour recon natre 1 excellence du lait, et c'est peut-tre l Tunique vrit que Ton ait sauve du naufrage des vieilles thories mdicales. 9. Il e^t donc bien certain que les remdes les plus propres gurir Marie-lluse oui cl employ^, uun-bculenienl ds le duul de la maladie, mais durant, iont son cours, et jusqu' son voyage de Rome pendant ce trajet elle prenait de l'exer cice, respirait un air nouveau, e i . commenait -esprer sa gurison. L'exercice el le changement de pays sont r c i o m niaiid par tous lus mdecin*, 6i 1 on ne peut aller e n barque, dit Gelse, que du muiua on se lasse porter en litire vi. 22
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SPLENDEURS DE LA TOI
e t que Ton prenne q u e l q u e exercice (1). D Le m m e auteur ajoute ce qui suit, l'occasion de la phthisie: Il faut c h a n ger de pays et chercher un air plu? doux que celui que Ton respirait auparavant. Zcviani, parlant d e la phthisie catarrhale, fait les rflexions suivantes ( 2 : Cette phthisie se gurit surtout par l'exercice du cheval, par b e a u c o u p de m o u v e m e n t , et par le c h a n g e m e n t d'air. Si l'on trouve que trois j o u r s d'exercice s e u l e m e n t et de c h a n g e m e n t de climat n e suffisaient p a s p o u r produire u n e pareille transformation e n Marie-Rose, il faut c e p e n d a n t bien admettre que l'esprit a sur le corps une influence considrable. Or cette j e u n e fille dsirait avec ardeur sa gurison, et vint, avec une pleine confiance, invoquer le Vnrable Benot. S o n me flottait entre l'esprance, le respect et la crainte : la majest d u l i e u , Taffluence du peuple, le souvenir des grces obtenues par l'intercession du saint, faisaient sur son esprit u n e vive impression. Dans de tels m o m e n t s , il arrive souvent qu'un b o u l e v e r s e m e n t c o m p l e t se produise chez les malades, et qu'ils retrouvent la sant.Tel est l'avis d e S p r e n g e l (3).
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10. Mais, m e diront ici les Dfenseurs de la Cause, il n o u s importe fort peu de savoir si l'on a e m p l o y les remdes opportuns, p u i s q u ' i l s o n t t inutiles. J'avoue qu'il est t o u j o u r s difficile de discerner l'effet produit par un r e m d e . Toutefois, mme dans les cas o Ton ne soulve pas la ques tion de miracle, lorsque la gurison est c h o s e certaine, o n p e u t reconnatre bien s o u v e n t si elle est due la nature o u aux prescriptions de la mdecine. Quand on a suivi plusieurs fois, et avec s u c c s , la m m e marche dans le traitement des maladies, et q u e le malade se trouve ensuite m i e u x , on a d e fortes raisons d e c r o i r e que le traitement y est pour quelque c h o s e , S'il en e s t a i n s i , la mme q u e s t i o n se reprsente d e v a n t nous : Marie Rose prouva*t-elle du m i e u x avant sa c o m p l t e g u r i s o n ? J'ai dit plus h a u t m o n avis ce sujet : j e p e n s e , c o m m e le P r o m o t e u r de la F o i ; Marie souffrait m o i n s quand e l l e entreprit son v o y a g e ; il suffit, pour s'en convaincre, d'examiner ce qui se passa. Voil d o n c une m a l a d e qui, jusqu'ici, tait tendue sur s o n lit de d o u l e u r ; elle se lve, entreprend un l o n g v o y a g e , m o n t e sur une bte de s o m m e , et franchit des passages difficiles, expose aux rayons d'un soleil brlant. La route est pnible, et elle ne peut se procurer qu'une grossire nourriture : n'importe; elle se m l e la multitude, et passe de l o n g u e s
(1) Lib. 3, cap. 22. (2) De morb. purulent, t. III, p. 31. (3) Tberap. Gner., 181.
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heures genoux: elle devait assurment prouver un mieux relatif, et se sentir plus forte. Et aprs tant de fatigues, qu'arrive-t-il ? C'est qu'aux y e u x de t o u t le m o n d e , elle semble se rtablir. La premire nuit, (il s'agit ici du voyage) elle n e fit que s'attrisler; le lendemain malin, on la trouva un peu mieux -, la seconde nuit, elle se lamenta moins que la p r e m i r e ; quand vint le jour elle tait encore abattue et chagrine, mais moins que la veille ; sans doute elle n'tait pas c o m p l t e m e n t rtablie, m a i s s o n tat s*lail bien a m lior, 1 1 . On pourra chercher tablir qu'elle prouvait bien peu de s o u l a g e m e n t , en allguant que, chez elle, la diarrhe et la toux subsistaient toujours, de m m e que la ncessit de cracher.A cela je rpondrai que, dans les cas de phthisie, ces accidents peuvent subsister, m m e quand le malade se trouve mieux ; la livre est beaucoup moins violente, et les excrtions sont d'une nature meilleure. E x a m i n o n s chacun de ces trois points en dtail. Pour ce qui est de la diarrhe, les tmoins ne nous apprennent rien; mais le v o y a g e qu'elle entreprit nous montre assez en quel tat se trouvait Marie. Nous s o m m e s dpourvus de rensei g n e m e n t s sur le second p o i n t , la fivre. J'en viens la nature des c r a c h a t s ; ils prsentaient, dclare le mdecin, un aspect visqueux; or un des praticiens les plus r e n o m m s de l'antiquit, Arete, estimait que, dans ce cas,la maladie tend h diminuer d'intensit. Quant ces d m e s que l'on re m a r q u a aux pieds de la malade, ils sont, dit-on, une preuve que le mal est encore dans toute sa violence (1).Cet argument servirait merveille la thse q u e je'combats, s'il tait bien certain que ces enflures se sont produites au m o m e n t o Marie-Rose tait la dernire extrmit. Tel est l'avis des auteurs que le Dfendeur de la Cause a cits l'appui de s o n o p i n i o n ; ils dclarent que l'on observe ce phnomne" lorsque la phthisie a d u i longtemps, et que le malade d c l i n e c o n t i n u e l l e m e n t ; de m m e lorsque l'on craint un touifement, ou bien que la vie c o m m e n c e se retirer, en a b a n d o n n a n t d'abord les extrmits du corps. Lorsque cette enflure s'est produite aux pieds de Marie-Rose, il y avait p e u de temps qu'elle tait malade, et elle n'tait pas la dernire extrmit. Au contraire, aprs avoir c o u i u des dangers de mort assez srieux, elle tait beaucoup mieux, e t ses forces revenaient. S'il e n est ainsi, l'dme n'au rait pas t pour elle une m a r q u e d'affaiblissement, mais
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Lib.
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plutt u n effort de la nature pour r a m e n e r la sant. N'estil pas vrai, en effet, q u e les m d e c i n s prvoient facilement la lin d'une maladie, certains indices caractristiques ? A l o r s , dit Boerhaave, le mal n ' a u g m e n t e plus, mais, a u contraire, s e m b l e d c r o t r e ; les forces du malade, loin de diminuer, se r a n i m e n t (1). Chez Marie-Hose, la maladie prsentait m o i n s d'intensit, et les forces revenaient peu peu, puisqu'il l'poque d o n t n o u s parlons, elle tait en tat de se lever, et d'entre prendre un l o n g voyage. Du reste, s i j e voulais traiter fond c e t t e question de l'dme, et tablir c o m m e n t , dans les maladies de poitrine, lorsqu'aucun des m e m b r e s du corps n'est atteint, l ' d m e est un signe de gurison prochaine, il m e suffirait de parcourir les crits des mdecins les plus dis t i n g u s , et de citer leur opinion l-dessus. P o u r n'tre pas trop l o n g , j e ne ferai que n o m m e r Baglivi ; plus d'une fois, lorsqu'il avait traiter des catarrhes pulmonaires o u des asthmes, on l'entendit souhaiter qu'il se produist des d m e s . Lorry, dans son ouvrage classique sur les t r a n s formations des maladies , dclare ce qui s u i t : J'ai vu u n h o m m e oppress par une suffocation terrible, il tait la dernire extrmit ; ses pieds enflrent, et il fut guri en un j n s t a n t . Il est vrai q u e Marie-Rose ne tut pas c o m p l t e m e n t gurie aprs la formation de l ' d m e : cela prouve tout s i m p l e m e n t que la transformation de sa maladie ne fut pas entire, c o m m e on le voit chez b e a u c o u p de malades ; il n'en est pas m o i n s vrai qu'il p r o duisit un effet vraiment salutaire. 12. J'en viens maintenant cette nuit de douleur, dans laquelle on trouve les principaux a r g u m e n t s en faveur de la cause. La jeune fille, retire dans sa chambre c o u c h e r , prouva des douleurs de poitrine trs-vives, mais ayant e u recours une i m a g e du vnrable serviteur de Dieu, elle parvint dormir d'un sommeil p.nsible, et le lendemain o n remarquait e n elle des indices de gurison. Il serait d s i rer que le rcit de ce fait ft complet, qu'on e t appel un m d e c i n , p o u r constater la nature de la douleur, et a t t e s ter la vrit des principales circonstances de cette guridon. Les tmoins qui n o u s les ont rapportes sont e n effet peu clairs, et n'ont pu s e n rendre un c o m p t e bien exact. Dans les maladies, n o u s dit Landre Beauvais, on n e doit j a m a i s p r o n o n c e r son j u g e m e n t sur une douleur c o n s i d r e i s o l e m e n t , il faut recourir d'autres i n d i c a (1) Designis morborum.
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tions (l).Lamaladeavait-elle la fivre? tait-elle altre? n' tait-elle pas affaiblie par la diarrhe? Quel fut le caractre particulier de cette douleur, son sige, sa d u r e ? devenaitelle plus aigu quand la malade toussait on respirait plus for t e m e n t ? dans quel tat se trouvaient les entrailles ? quelle couleur prsentait la l a n g u e ? enfin, c o m m e n t la malade tait-elle c o u c h e ? T o n s les renseignements se bornent cette d c l a r a t i o n : Elle prouvait de violentes douleurs de poitrine. Avec des donnes aussi peu compltes, il n'est gure de mdecin qui ost entreprendre de dfinir la nature de l a douleur prouve par Marie. Tous, au c o n traire, dclareraient q u e les paroles de Baglivi, invoques ici par les dfenseurs d e l c a u s e , n e s ' a p p l i q u e n t n u l l e m e n t la douleur de Marie-Rose. Cet auteur parle en effet ds p e r s o n n e s que la phthisie tuberculeuse a fort affaiblies, et i n d i q u e c o m m e signe de mort prochaine : l'existence chez elles de violentes douleurs de poitrine, quand elles se pr s e n t e n t dans des circonstances dtermines. Quelles sont d o n c les circonstances dont il s'agit ici ? Notre auteur les avait n u m r e s quelques lignes plus haut. Les malades, dit-il, semblent se porter assez bien, mais leur respiration e s t g n e ; elle devient de plus en plus difficile; ils ne crachent plus, prouvent la poitrine une douleur c o n t i n u e l l e , ne peuvent se reposer sur le ct souffrant, sont accabls par une toux s c h e , e t c . Or ces symptmes diirent c o m p l t e m e n t de ceux que l'on avait remarqus chez MarieR o s e : sa toux n'tait rien moins que sche, elle crachait c o n t i n u e l l e m e n t , avant la nuit dont il est ici question elle n'avait jamais ressenti de douleurs de poitrine; elle pouvait se reposer sur le ct droit c o m m e sur le ct gauche, du m o i n s on ne dclare nulle part le contraire. Enfin elle ne c o m m e n a respirer difficilement qu'aprs avoir t bien m a l a d e , tandis q u e les personnes dont veut parler Baglivi, taient atteintes de l a d i a l h s e tuberculeuse, et du reste se portaient bien, quand leur respiration vint prsenter ce caractre inquitant. 13. Au milieu de tant d'incertitudes, il semble cependant que l'on puisse dire que Marie-Rose a prouv de ces d o u leurs de ct dont parle Hippocrate dans ses Aphorismes, et qui se produisent lorsqu'on respire un air vif et froid . Balloni en parle de la manire suivante : Les vents a m n e n t quelquefois des douleurs de ct. Ceux qui ont un temprament hypocondriaque ont besoin de beaucoup
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d'air, surtout quand le chyle se distribue dans l e s diffrentes parties du corps ;. il en est de m m e q u a n d on a l'habitude de prendre des b o i s s o n s froides, o u de manger des fruits crus (1). Marie-Rose avait p r c i sment m a n g ce jour-l des pois et des cerises; les d p o s i tions des t m o i n s en font foi. Du reste, les douleurs de ce genre s o n t gnantes, et c'est t o u t ; elles n'accusent rien de bien grave, e t ne d e m a n d e n t q u ' u n p e u de chaleur p o u r d i s paratre. Si l ' o n n e peut expliquer ces douleurs en les rapportant la prsence de vents, n o u s n'aurons pas besoin pour cela de recourir une inflammation pleurtique, car les explications n e n o u s manqueront pas. C'est Balloni qui le dclare e n critiquant l'abus des saignes. Elles n e savent d o p e pas, ces femmes i m p r u d e n t e s ; ils n e savent pas, ces audacieux charlatans, que bien des choses p e u v e n t amener des douleurs de ct. Une des causes les plus fr quentes est l'abus de la saigne. S o u v e n t cette opration e s t s a l u t a i r e , m a i s , plus souvent aussi, elle a de l a m e n t a b l e s c o n s q u e n c e s . Il suffit d'un rien pour o c c a s i o n n e r des d o u leurs au c t e (2). 14. Q u e l l e q u e s o i t d o n c l ' o r i g i n e o u l a c a u s e d e la d o u leur q u e M a r i e - R o s e prouva clans cetLe n u i L , n o u s d e v o n s n o u s garder d'y reconnatre un i n d i c e de recrudescence d u m a l : t o u t au contraire, elle n o u s apparat c o m m e u n s y m p t m e de gurison. D a n s les maladies qui ont e n quelque sorte paralys certaines parties du corps, e t rendu les membres presque insensibles, de vives d o u l e u r s sont u n heureux prsage (3). On trouve de n o m b r e u x exemples de maladies aigus o u chroniques guries par les douleurs de cette sorte, et, pour apporter le t m o i g n a g e de quelques mdecins l'appui de cette vrit, c o n t e n t o n s n o u s do citer Alberti, Bucchner, Scrike, Tunkcl, Schulze, h o m m e s d'une autorit incontestable. E t il ne s'agit pas ici d e thories a u h a s a r d ; ils ne parlent q u e d e eu q u ' i l s o n t vu, e t n o u s f o n t remarquer q u e p a r m i les crises q u e l a n a ture m n a g e e n vue d'une gurison, il faut compter, avant t o u t , u n bouleversement gnral accompagn de vives d o u leurs. C'est ainsi que bien souvent les r h u m a t i s m e s font disparatre la langueur intestinale, et que la migraine m e t fin l'hystrie. C'est d o n c tre conforme aux traditions d e la
(1) Ballon. Epidein. et E p h e m . , lib , p . o. (2) lbid., p. 53. (3) Sprengel, sympt. gener., 271.
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m d e c i n e , que de regarder cette douleur de Marie-Rose c o m m e un avant-coureur d e l gurison. 15. Aprs avoir prouv ces douleurs, Marie-Rose dormit plus profondment qu' l'ordinaire, et quand elle se rveilla, elle tait gurie. C'est l une gurison remarquable, a s s u r m e n t , mais elle m a n q u e des conditions requises pour constituer un m i r a c l e ; elle peut s'expliquer naturellement. Cette g u r i s o n , o u plutt ce complment de g u r i s o n , puisque les voies avaient t bien prpares pour une crise salutaire, s'est produite dans les conditions que suit h a b i t u e l l e m e n t la nature. En eiret, aprs de vives douleurs et u n bouleversement gnral, la malade dort d'un s o m m e i l plein. C'est bien la marche de la nature, qui remue d'abord les malades, et leur fait ensuite trouver la gurison de leurs souffrances dans un paisible repos. Quand un malade dort profondment, dit Sprengel, aprs avoir prouv aupara vant de vives d o u l e u r s , c'est un heureux prsage (1). On m e rpondra sans doute que Marie.-Rose n'a j o u i de ce sommeil paisible, qu'aprs avoir t gurie par le contact d'une i m a g e reprsentant le vnrable serviteur de Dieu. Moi aussi j'embrasserais volontiers cette opinion, car je n e veux e n rien nier la possibilit d'un vritable miracle.Mais Son Emi n e n c e Rvrendissime n'entend conclure l'existence du miracle, qu'aprs avoir consult les h o m m e s de l'art, et s'tre assur qu'on ne peut expliquer cette gurison d'une manire t o u t e naturelle. Je crois donc que, dans l e cas qui nous occupe, les seules forces de la nature auraient pu amener une gurison. 16. Je m e rsumerai en quelques m o i s de l a manire suivante : 1 On ne peut dfinir au juste la maladie de Marie-Rose. Toutefois, si l'on rapproche la plupart des observations que l'on a pu faire durant le cours de cette maladie, o n conclura une bronchite lente, ou bien un catarrhe chronique, plutt qu' une vritable phthisie. i Mme en admettant l'hypothse d'une phthisie, elle n'tait certainement pas arrive un point tel que Ton ne pt plus esprer de gurison. 3 Le docteur Angelucei, qui soigna la malade, se montra trs-habile m d e c i n . 4 Il faut sans a u c u n doute affirmer que Marie-Rose, lorsqu'elle entreprit le voyage de Rome, tait dj en partie rtablie.
(J) Op. cit. 285.
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5 II y a certainement q u e l q u e c h o s e de remarquable dans cetLe douleur porte s o n paroxysme, et suivie d'un s o m m e i l ' p a i s i b l e : toutefois, m m e en cela, je ne vois rren qui dpasse les forces de la nature, Telles sont les observations que, guid par la s c i e n c e et l'exprience des mdecins, j'ai cru devoir prsenter au sujet de la gurison de Marie-Rose. Ma c o n s c i e n c e m e d o n n e le t m o i g n a g e que, dans l'accomplissement d e l tche qui m'a t confie, je n'ai voulu servir en tout que les intrts de la vrit. Et maintenant je n'ai plus qu'une chose s o u haiter, c'est que l'on dclare dnues de f o n d e m e n t les rai sons que j'ai allgues, si ce j u g e m e n t peut procurer la plus grande gloire de Dieu.
CHARLES MAGGIORANI,
Docteur-mdecin, professeur l'cole de mde cine politique el lgale de Home, el dlgu par la Socit des mdecins et des chirurgiens pour faire le rapport que l'on vient de lire.
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et plus ordinaire an catarrhe qu' la phthisie, car Bonnet, s'exprime ainsi : Pour m o i , je pense que la plaie du poumetn n'est telle, q u e lorsque, par la longueur du temps, elle a dgnr en v o m i q u e o u en e m p y m e . Nous devons donc n o u s tenir soigneusement sur n o s gardes, pour n e pas confondre des maladies d'espces voisines, car, selon le mot de Ciceron : le faux est voisin du vrai. 2 Ajoutez cela une difficult particulire de diagnostic, car la phthisie e s t u n e maladie dont il e s t trs-difficile de dcouvrir et de reconnatre le caractre. Le dfendeur de la cause soutient q u e c e l l e difficult n'existe qu'au dbut de la phthisie ; en ralit elle existe mme pour la phthisie c o n firme. Le dfendeur n o u s en fournit malgr lui une preuve d'autorit, lorsque, s'efforant de montrer que la phthisie confirme est incurable, il cite l'opinion de Mangetus. Au c o m m e n c e m e n t de la citation, n o u s trouvons ces pa roles qui montrent c o m b i e n est difficile et obscur l e dia gnostic de la phthisie : < Que ceux qui se vantent d'avoir c guri des phthisiques, prennent bien garde de s'tre trom ps dans le diagnostic de la maladie, et de se rjouir ainsi d'un triomphe i m a g i n a i r e . II n'est donc pas si facile de reconnatre la phthisie m m e confirme, puisque les m d e cins e u x - m m e s peuvent trs-bien s'y tromper. 3 . La difficult paratra plus grande encore, lorsque nous saurons que le crachement de pus, auquel le dfendeur a attach tant d'importance, n'est pas toujours un signe p a t h o g n o m o n i q u e de la phthisie. C'est ce qu'enseigne, entre autres, Bonnet, en termes trs-exprs... Le crachement de pus n'est pas toujours un signe pathognomonique d e l phtbisie. Je connais une dame qui crache du pus chaque mois avec u n e telle abondance,que trs-souvent elle rejette jusqu' trois livres d'un pus trs-infect; dans l'intervalle elle se porte bien, elle a bon teint, elle ne tousse m m e pas, si c e n'est lorsque va arriver ce crachement p riodique du p u s ; seulement le flux menstruel n'est pas abondant. Que les savants jugent maintenant si le cra chement de pus est toujours un signe pathognomonique d e l phthisie. 4 . Mme si l'on admet qu'il y et phthisie nous avons des raisons de douter qu'elle ft assez grave pour ne p o u voir plus tre gurie naturellement, car, au second degr de la phthisie, degr o elle est encore curable, on remarque ordinairement un certain nombre de s y m p t m e s qui c o n viennent galement au troisime degr, ou la phthisie con firme: c a r i a respiration prcipite, la toux pnible et fati-
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gante, la fivre violente, les crachats purulents et ftides, la faiblesse de tout le corps, sont des s y m p t m e s qui sont re gards c o m m e c o m m u n s au d e u x i m e et au troisime degr de la phthisie. Le point sur lequel on a plus d r a i s o n de douter, est m m e , s e m b l c - t - i l , de savoir si, en a d m e t t a n t la phthisie, o n a saisi et r e c o n n u assez e x a c t e m e n t la diifrence entre ces deux degrs ; car si la nature de la maladie est telle q u e l e s . mdecins les plus clbres par leur science se t r o m p e n t d a n s ce discernement, c o m m e les doux experts l'ont tabli d'aprs de grandes autorits, nous avons encore plus de raison de craindre que les m d e c i n s de campagne, o r d i n a i r e m e n t m o i n s savants, qui ont soign Marie-Rose, soient t o m b s dans u n e erreur si facile. 5. Or, la phthisie de la jeune fille n'tait-elle pas p l u t t au d e u x i m e degr qu'au t r o i s i m e ? G'est ce que semble prouver le voyage qu'a fait la malade pour venir R o m e . Certes, quantf on connat c e l l e vaste c a m p a g n e , e x p o s e de toutes parts aux ardeurs du soleil, qui entoure au loin l a ville, et les routes brlantes et poudreuses qu' d suivre Marie-Rose, on ne se persuade pas facilement qu'elle e t pu, si elle avait t atteinte d'une maladie grave, faire vingt-cinq milles en huit heures, temps trs-court,si on se rappelle la marche ordinaire de l'ne. 11 est e n c o r e plus clair, que la soif importune dont elle paraissait p r e s q u e accable, devait tre attribue la fatigue de c long et pnible voyage et une a u g m e n t a t i o n de la livre p l u t t qu' l'extrme gravit de la maladie. 6. Que sila maladie n'avait pas e n c o r e atteint le troisime -degr de la phthisie, c e n'est pas tort peut-tre que p l u sieurs Pres soutiennent que l'effort extraordinaire du corps et u n e certaine violence de la maladie, qui furent le rsultat du voyage, aient pu contribuer la gurir plus vite, et q u e la maladie a i g u , c o m m e disent les m d e c i n s , ait pu chasser la maladie c h r o n i q u e . 7. 11 ne faut pas n o n plus mpriser l'objection tire du traitement qu'on a fait suivre la malade. Il est certain, e n effet, que, j u s q u ' sa gurison, on lui a c o n s t a m m e n t d o n n les remdes les mieux appropris son tat, et c'est tort que le dfendeur de la cause les regarde c o m m e n'ayant rien produit. Nous apprenons par les tmoins q u e notre j e u n e fille, aprs avoir t aux portes de la mort, s est trouve e n s u i t e g r a d u e l l e m e n t un p e u m i e u x ; elle a pu se lever, se promener lentement, faire ce long et pnible voyage de H o m e ; elle a gravi la pente de la colline du Gapitole, elle est
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v e n u e plusieurs fois dans l'glise de Sainte-Marie-du-Mont ; l elle s'est agenouille devant le tombeau du vnrable Joseph, tout entire sa prire, et s'est acquitte d'autres exercices de pit. Du reste, il n'y' avait alors aucun signe de la maladie qui annont u n e mort certaine. 8. Maintenant, si l'on compare l'tat de cette femme tel que nous venons de le dcrire, avec celui dans lequel elle se trouvait, quand elle r e u t les derniers * sacrements, alors qu'on attendait chaque instant son dernier soupir, il y a certainement u n e diffrence manifeste, et un srieux rsultat du traitement suivi. Elle n'tait donc pas rduite une e x trmit telle qu'il n'y et plus de ressources dans l'art h u main et dans les r e m d e s naturels. Loin d'aller plus mal de jour en jour, elle prouvait un soulagement qui allait croissant, peu p e u , avant qu'elle, sortt saine et sauve de sa maladie. 9. Tout cela bien considr,cette gurison complte,prcde d'une amlioration, doit tre attribue, partie la puis sance de la nature e l l e - m m e , qui quelquefois agit avec plus d'nergie qu'on n e le croit ordinairement pour hter la gu rison, partie aux remdes employs sans relche, et surtout a u lait et au petit-lait que la malade prenait depuis l o n g temps. Ce dernier traitement est trs-efficace pour gurir la phthisie, c o m m e l'a dmontr l'expert Maggiorani d'aprs de graves autorits, qui attestent que grce une cure de lait convenablement dirige, beaucoup de phthisiques qui avaient dj pour ainsi dire un pied dans la barque deGaron, ont t guris et rendus leur sant premire. C'est donc avec raison et bon droit que cet expert a tir de ce traitement l'augure et le prsage d'un succs h e u reux et certain. 10. ce j u g e m e n t de l'expert on ne peut pas opposer celui du mdecin qui a soign la malade. D'aprs ce dernier, les remdes e m p l o y s n'taient qu'un semblant de traitement, et n'avaient pas la force de produire l'effet cherch ; mais dans cette affaire, le mdecin doit remplir le rle de t m o i n s e u l e m e n t et n o n celui d j u g e . Quand au Dfendeur, plusieurs Pres ont trouv qu'il se laissait trop entraner par les besoins de sa cause, lorsqu'il a parl du lait, du petit-lait et des tisanes qu'avait pris la j e u n e fille, e n termes par trop m p r i s a n t s : on serait, en
chiens etnonpour une femme. On ne comprendrait pas,que, dans un bourg o le lait est abondant, le mdecin qui trai tait Marie-Rose n'ait pas pu instruire suffisamment ceux qui
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soignaient la malade, pour qu'ils prparassent le lait, le peLit-lait et m m e les lisanes selon les prescriptions de la mdecine, pour les lui donner boire. Quoiqu'il en soit, la sanl de Marie-Rose qui a paru s'amliorer un peu de j o u r e n j o u r , d m o n t r e l'utilit du traitement. 1 1 . Bien a u t r e m e n t se prsentent les phthisies t o u t fait confirmes dont Benot XIV (liv iv.par. 1, chap. xvui), n o u s signale la gurison miraculeuse. Il parle, entre autres, d'une religieuse c o n s u m e par la phthisie, qui gisait dans son lit, tellement affaiblie qu'elle ne pouvait lever la tte sans qu'on l'aidt. Il parle encore de Camille dePerraris laquelle, aprs avoir souffert de cette maladie pendant huit ans, n'ayant plus confiance en a u c u n r e m d e , et a b a n d o n n e par les m d e c i n s , attendait dans son lit une m o r t i m m i n e n t e . Eh bien ! ces phthisiques, dans un tat de maladie tel, q u ' u n aveugle m m e les et j u g dsesprs, n'eurent pas p l u t t implor les secours du Ciel, qu'elles se levrent pleines de sanl et de f o r c e , c o m m e si jamais elles n'avaient t ma lades. Voil l'aspect que prsente ordinairement celui qui se meurt d'une phthisie avance. P o u r ce qui concerne la g u rison de Camille de Ferraris, n o u s devons faire remarquer q u e si tous les auditeurs de notre saint. Ordre, et tous les membres de notre sainte Congrgation, ont cru pouvoir en t o u t e sret approuver le miracle, c'est aprs que huit m decins clbres eurent u n a n i m e m e n t d o n n un avis favorable. Ces exemples prouvent, d'une part, quel tat misrable et dsespr doit tre rduit le malade, pour qu'on puisse dire qu'il y a phthisie confirme; d'autre part, ils n o u s avertissent de ne pas nous prononcer sans rflexion et la hte sur la ralit d'un miracle. 12. Les observations que nous venons de faire, dmontrent qu'au point o en est l'affaire, le miracle n'est pas encore indubitable.Sans doute il y a le j u g e m e n t mdical de l'expert Ghirelli, qui se prononce pour le miracle. Mais, la mort de c e m d e c i n , c o m m e le lont remarquer quelques-uns des Pres, n o u s permettant d'exprimer plus librement notre avis, n o u s dirons qu'il a procd par dclamation plutt que par r a i s o n n e m e n t ; sa conclusion finale, ou s o n j u g e m e n t , ne se dduit pas lgitimement de la doctrine qu'il a expose. Au contraire, l'autre expert, Maggiorani, auquel u n e science remarquable et d'heureux s u c c s dans la pra tique ont fait un grand n o m dans la Ville, a pens que la gurison dont il s'agit dans ce dbat, devait tre attribue aux forces de la nature. 11 est vrai que l'honorable dfendeur de la cause, dans u n
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excellent plaidoyer! s'est attach dmontrer que l'expert contraire au miracle n'avait dduit son j u g e m e n t que de raisons sophistiques et presque captieuses. Lors m m e que ceci serait prouv, la science de cet illustre expert n'en devrait subir aucune atteinte, et aucun h o m m e sens, n'au rait le droit de s'en t o n n e r ; car nulle science h u m a i n e , m m e la plus tendue, n'est l'abri d'une inadvertance. Aussi c'est avec raison que Pline a.*crit : Nul mortel n'est sage loute heure. Du resle on ne peut pas s'en rapporter compltement au plaidoyer en question, car il s'agit ici do choses dont l'apprciation est du ressort princi palement d e l mdecine, et par con*quent demande dans cet art u n e exprience c o n s o m m e , que le dfendeur ne peut cerles pas s'attribuer. Une habile exprimental ion apprend beaucoup de c h o s e s , lesquelles quelquefois, peuvent et doivent chapper u n e science magistrale, mais t h o rique. En ralit, tout l'art des mdecins ne peut tre autre c h o s e que le rsultat de nombreuses et longues observa tions. G'est si vrai, que le clbre docteur Tteid, qui, en fait de rputation de science mdicale, eut peu d'gaux,et n'eut pas de suprieur, avait c o u t u m e de dire, que pour juger les maladies il ne fallait rien ngliger, donner beaucoup la raison et plus encore l'exprience. Celui donc qui doit porter un j u g e m e n t sur des gurisons de ce genre, ne doit jamais puiser ses arguments dans la science mdicale s e u l e ment, mais encore dans l'exprience. J3. Les choses tant ainsi, il faut avoir recours u n autre mdecin distingu qui, remplissant le rle d'arbitre pins expert, nous apprenne, par des arguments invincibles, si le dfenseur de la cause a bien rfut les raisons et les autorits apportes par son savant adversaire, et s'il reste e n c o r e quelques observations que l'exprience mdicale puisse opposer au miracle en question.
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ferons adhrer ce que n o u s v o y o n s tre vrai que de n o u tromper en n o u s rangeant l'opinion d'un m d e c i n , q u e l q u e r e n o m m qu'il soit. C'est pourquoi ils o n t d e m a n d d'tre clairs par des h o m m e s plus savants, p o u r savoir si n o u s avions suffisamment rfut les objections de notre habile adversaire, 2 . Quoique notre adversaire n'ait pas rpondu cette d e m a n d e d'une manire formelle, cependant dans s o n e n s e m b l e , et telle qu'elle est, sa rponse, de fait sinon d'inten tion a t si satisiaisante, q u e l l e ne m e laisse rien dsirer. Les arguments que n o u s avons rfuts, il les rfute son t o u r , et ce qui est plus considrable, la force de la v rit l'emportant, il les rejette par les m m e s a r g u m e n t s dont n o u s n o u s s o m m e s servis. Il y a entre n o u s cette seule diflrence,que lui,il les a rapidement mis nant, tandis qu' n o u s il n o u s a fallu du t e m p s et un p n i b l e labeur. La raison de cette diffrence est claire, car n o u s , nous n' t i o n s pas un mdecin rpondant un m d e c i n de grand re n o m , e t n o u s avons d non seulement rfuter les arguments les plus forts, mais rpondre aux plus m i n u t i e u s e s dilficults, l e s dpeant en quelque sorte et les dtruisant une u n e , de peur que le prestige du n o m n e nuist la cause que n o u s dfendons. N o u s avons tenu aussi confirmer chacune de n o s assertions, disons chacune de n o s paroles, par l'au torit d'auteurs d'un mrite incontestable, afin qu'on sentit b i e n que, dans une thse mdicale, n o u s n'avions pas recours n o s propres lumires, mais celles des savants les p l u s c o n n u s et les plus approuvs. Notre adversaire, au contraire, qui par s o n grand n o m , par la production de ses uvres el sa l o n g u e pratique, s'est m i s hors de pair, et n e craint pas le prestige du n o m , q u e l q u e illustre qu'il soit, de son adversaire, a s e u l e m e n t r p o n d u quelques-unes de n o s objections, et disons-le aux plus faibles, celles qui tomberaient d ' e l l e s - m m e s , les p r e m i r e s tant leves. Il n'a tenu aucun c o m p t e , en outre, de ia m a s s e d'autorits des plus excellents auteurs que n o u s lui avons opposes, il ne s'est confi qu' son propre ' sens. 3 . Mais c o m m e les diffrences entre notre adversaire et n o u s n'atteignent pas les faits et les laissent subsister, il se t r o u v e que ses attaques sont favorables notre cause par l e s arguments m m e s que n o u s avons produits. Voil p o u r q u o i , appuys s u r de nouveaux d o c u m e n t s qui j e t t e r o n t de n o u \ e i l e s lumires sur la q u e s t i o n , n o u s abordons a v e c confiance cette t r o i s i m e discussion.
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Avant t o u t , qu'il me soit permis de rendre grce aux trs-rvrends Pres de cette Congrgation, de ce qu'ils ont, reu jusqu'ici n o s paroles avec t a n t de bienveillance et de ce qu'ils o n t daign encourager par leurs flatteuses louanges, l'ardeur et la svrit q u e n o u s avons l'habitude de mettre dans la recherche de la vrit des miracles et la constatation des preuves, avant qu'ils soient proposs l ' a u guste Compagnie. D a n s notre conviction profonde, e n effet, l'Eglise est trs-gravement intresse ce q u ' o n n e propage p a s d e f a u x m i r a c l e s au l i e u d e v r a i s , p o u r ne p a s donner occasion aux htrodoxes de lui adresser des repro ches sophistiques. Ces observations une fois faites, avec l'aide de Dieu et du vnrable Benot-Joseph, n o u s c o m m e n o n s .
Gurison.
4. Le diagnostic de la maladie n e parat pas encore m i s hors de t o u t doute : 1 parce q u e les s y m p t m e s de la phthisie peuvent tre facilement confondus avec c e u x du catarrhe chronique \ 2 parce que les signes de la phthisie sont tellement compliqus en e u x - m m e s , qu'ils t r o m p e n t m m e d e s m d e c i n s h a b i l e s ; 3 p a r c e q u e s o n c o u r s a t trs-rapide ; 4 parce que l'expectoration du pus n ' e s t pas toujours un indice certain de phthisie, quoiqu'on s'appuie sur ce signe c o m m e caractristique de Ja maladie : M. le docteur Ghirclli l u i - m m e a continu ce fait de son j u g e m e n t et de son exprience. 5. Dans notre prcdente rponse n o u s avons crit: Gclui qui m e t de ct les causes de la maladie, qui ne voit pas dans un c o u p d'il d'ensemble ses diffrentes poques o u phases, qui se contente de considrer les s y m p t m e s isols e t sparment, celui-l n e connatra jamais la vraie nature de la maladie. Notre illustre adversaire le confesse l u i - m m e en d i s a n t : I l faut s'observer s u r t o u t , d a n s le j u g e m e n t q u e l ' o n p o r t e s u r l a nature de la m a l a d i e , p o u r chapper aux difficults qui e m p c h e n t de porter un j u g e m e n t sain, il faut, dis-je, tablir le diagnostic sur une connaissance absolue et certaine des causes et des s y m p tmes. Si o n nglige ce principe, il reste toujours des doutes, de nouvelles objections surgiront, et jamais ce que Ton croit tre dmontr ne le sera ; jamais on n'arrivera u n e connaissance certaine des c h o s e s . 3. Eclair par cette rgle dans nos prcdents crits,
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n o u s avons expos le temprament de la j e u n e fille, son ge, ses affections morbides antrieures, la c a u s e pro chaine et i m m d i a t e de sa phthisie, et enfin tous les s y m p tmes de cette dernire maladie. S u i v o n s toujours c e t t e rgle et les doutes s'vanouiront. Nous avons considrer u n e j e u n e fille plthorique qui, soit par l'ge, soit par le t e m p r a m e n t , tait dispose contracter la phthisie ; elle se prsente atteinte d'un a s t h m e convulsif qui, en fatiguant les p o u m o n s , l'inclinait aussi la phthisie; nous voici en pr sence de morbilles rentrs, dont le virus, trs-apte par sa nature a attaquer v i o l e m m e n t les p o u m o n s , devait dans le cas actuel svir avec plus de violence encore, si n o u s tenons . c o m p t e de l a c o n t e x t u r e dlicate du viscre, un g e aussi tendre, de l'afflux plus considrable du sang chez un t e m p rament plthoriquc,et de la prsence d'un asthme convulsif. Nous v o y o n s natre de l une inflammation vidente et profonde des p o u m o n s , c o m m e on devait s'y attendre aprs l'accumulation de tant de causes qui.ne pouvaient produire que ce rsultat. Nous voyons ensuite cette inflammation n o n rsolue mais dgnre, au contraire, en suppuration. Nous avons enfin la conversion d'une maladie aigu e n maladie chronique, entoure de tous les s y m p t m e s et de toutes les vicissitudes de la phlhisie. Quel h o m m e de b o n sens p o u r rait donc ne pas conclure c o m m e n o u s ? 6. Les causes du catarrhe chronique sont diffrentes; diffrents sont ses c o m m e n c e m e n t s ; diffrents sont ses pro grs : qu'on puisse confondre plusieurs fois ces s y m p t m e s avec les s y m p t m e s de la phthisie, s o i t ; mais celui qui ne se contentera pas d'une inspection s u p e r f i c i e l l e / q u i saura s'attacher considrer les dispositions physiques, la f a i blesse et les diverses souffrances du dbut, la srie, les tapes et les progrs de la maladie de M a r i e - R o s e , n e pourra j a m a i s l'appeler un catarrhe. 7. Par ces rflexions, n o u s satisfaisons la troisime observation sur la difficult du diagnostic, et n o u s reve nons la rgle que nous avons pose , rgle approu ve par l'excellent doclcur Maggiorani et par Franck : La spcification de la phthisie ne peut s'tablir q u e par l'examen le plus approfondi de la constitution de la m a lade, du progrs des affections morbides antrieures, et principalement des volutions de la maladie actuelle. Sans aucun doute, celui qui ngligerait la constitution du malade, qui ne tiendrait pas compte de l'asthme antrieur, qui ne ferait pas entrer en ligne de c o m p t e la rtrocession des morbilles, qui ne considrerait pas l'inflammation s u b -
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squente des p o u m o n s , celui-l certainement pourrait tre induit en erreur par la similitude des s y m p t m e s et donner le n o m de catarrhe une vritable -phthisie. Mais c e l u i - l aussi serait tromp, non par la difficult du diagnostic, mais par s o n incurie ou par le dfaut de j u g e m e n t qui lui a fait disjoindre ce qu'il fallait unir. 6. Pour ce qui regarde la brivet de la maladie, n o u s avons rappel ailleurs que les mdecins distinguent la phthi sie en phthisie chronique et en phthisie aiguO, selon sa marche lente o u rapide, et qu'on rencontre quelquefois des phthisies si violentes, qu'elles ont leur terminaison fatale dans l'es pace de quelques semaines el m m e de quelques jours. Nous avons remarqu aussi que la dure d e l phthisie con firme est d'autant plus courte, que la phase des accidents prparatoires a t plus courte et plus critique. Or, dans l e cas qui n o u s o c c u p e , nous avons fait remarquer, que dans la personne de Marie-Rose doue d'une constitution plthorique et asthmatique, soumise l'influence du virus morbilleux rpercut, et atteinte ensuited'une inflammation de p o u m o n s , la phase prparatoire de la phthisie au dbut, a d tre trs-violente ; et la preuve qu'il en fut ainsi, c'est qu'on dut lui administrer les derniers sacrements ; que, par consquent, la phase subsquente de la phthisie confirme a d tre trs-courte. D'aprs la supputation tablie par l'ad versaire l u i - m m e , la maladie s'est termine dans le terme de deux m o i s , et ce terme doit tre j u g n o n pas trop court, mais peut-tre un peu l o n g . 7. Quant ce qui concerne les expectorations do pus, n o u s ne disons pas, e t p e r s o n n e ne s o n g e a dire,que ce symp tme, isol des autres, indique une vraie phthisie; pris seul, il est m m e si p e u un s y m p t m e dcisif, que les mdecins distinguent n e t t e m e n t les crachats puriformes des crachats purulents, et e n s e i g n e n t e n m m e temps qu'on connat cer t a i n e m e n t le vrai caractre du pus, quand le cours entier de la maladie et la synthse entire des symptmes montrent que la suppuration a eu lieu. Nous ne sommes donc n u l l e m e n t embarrasss du fait qu'on nous objecte : une clame qui rejeLait tous les mois jusqu' trois livres de pus, n'avait ni fivre hectique, ni difficult de respirer, ni maigreur; elle n'tait pas m m e fatigue de la toux ni des autres vexations qui a c c o m p a g n e n t la phthisie ; au contraire, on dit qu'elle tait belle personne, que de temps e n temps elle se trouvait e n trs-bon tat. Les crachats purulents ne sont, en effet, des signes pathognornoniques, que lorsqu'ils correspondent cette s y n t h s e tle symptmes et cette priode de la m a vi.
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ladie qui indique que la suppuration est faite. Car alors s e u l e m e n t l e s expectorations purulentes accusent les ulcres des viscres, et d'autant plus s r e m e n t qu'ils sont plus fr quents, plus a b o n d a n t s ; ils d e v i e n n e n t ainsi u n e c o n d i t i o n de cet tat pathologique des p o u m o n s . 8. Ici revient donc la rgle m e n t i o n n e plus haut : on ne peut obtenir u n diagnostic certain d'une maladie sans considrer en m m e t e m p s les dispositions p h y s i q u e s de la malade, les dveloppements de la maladie, et la m a r c h e s i m u l t a n e de tous les s y m p t m e s . Or, q u i c o n q u e e x a m i n e r a les objections qui n o u s sont faites, verra qu'elles s o n t t o u t -fait en opposition avec cette rgle ; car o n a spar les s y m p t m e s de la constitution de la j e u n e fille, des progrs et du cours de la maladie, e n se bornant les comparer des s y m p t m e s semblables de maladies diffrentes. P u i s o n s'est attach la brivet de la m a l a d i e , sans tenir c o m p t e des causes prdisposantes et de la violence de la phase prparatoire. Toutes choses opposes l a vritable s c i e n c e mdicale. 9. Le critique passant du caractre de la maladie s o n intensit et sa gravit,estime que la phthisie de Marie-Rose tait arrive, n o n son troisime mais s o n d e u x i m e degr, parce q u e , d a n s le s e c o n d , o n t r o u v e , c o n i m e d a n s le,troisime, la respiration gne, u n e toux accablanLe, des crachats sanieux, la fivre. Or, dans le s e c o n d degr, la gurison n'tait pas impossible. Il cherche la preuve de son affirma tion dans le voyage de R o m e qui n'aurait pas t possible, selon l u i , la dernire ou troisime priode, et auquel il attribue la cause de la grande soif cause par la fivre. Il ajoute q u e , dans cette h y p o t h s e , il pouvait arriver que la gravit de la maladie augmente par le voyage, changet l'tat chronique du m a l e n tat aigu, et, p a r l a , donnt des chances la gurison. 10. T o u t e cette manire de raisonner repose sur une c o n fusion d'ides. Quant au fait, imagin par notre adversaire, que la soif de la malade a t excite par le v o y a g e , et qu'elle est n o n point un s y m p t m e de la maladie, m a i s u n effet de la fatigue, il est dmontr par les dpositions q u e notre j e u n e malade,alite Mazzano,dt dvore d'une soif
qu'elle ne pouvait apaiser en buvant, parce que, comme elle disait, elle se sentait brle l'intrieur. Il oublie, e n
outre, certains s y m p t m e s qui se produisent s e u l e m e n t a u d n o u e m e n t de la phthisie, c o m m e l ' d m e des pieds et la douleur de ct. Quant au droit, puisque le contradicteur prtend qu'il faut exclure l e prodige dans une maladie qui
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tait de sa nature gurissable, il pose en principe qu'aucun miracle ne peut avoir lieu sur un sujet atteint d'une maladie gurissable. Mais il est vident que celte gravit se conclut tantt d'un pril de rnoi't i m m i n e n t , c o m m e clans une phthi sie confirme, quoique les derniers symptmes ne se s o i e n t pas encore montrs, tantt de la violence des s y m p t m e s , c o m m e dans la phthisie au dbut, laquelle, quoiqu'elle soit gurissable, prsente des symptmes si violents, que, sans tre encore confirme, elle tue le malade ; quelquefois enfin cle l'impossibilit trs-absolue de faire cesser instanta nment la maladie, q u o i q u e , p.ar e l l e - m m e , elle ne cause aucun danger de mort, qu'elle ne t o u r m e n t e la malade par aucun s y m p t m e m o r t e l , et q u e l l e soit m m e facilement gurissable, c o m m e le sont le plus souvent les fractures des membres. 11. Il ne se trompe pas moins dans son j u g e m e n t mdical en affirmant que les phthisiques, lorsqu'ils arrivent la dernire priode, ne peuvent plus se mouvoir, ni agir, puis qu'il est prouv, par l'exprience journalire et par r e n s e i gnement mdical, que Faction musculaire continue exister chez ces de malades, et qu'ils ont jusqu' la fin le j e u de leurs muscles, plusieurs m m e jusque dans les dernires minutes de leur existence. Nous on avons fourni plusieurs exemples dans les actes prcdents. Ajoutons enfin q u e notre adversaire parle de la phthisie en question c o m m e si elle tait au dbut, et nullement c o m m e d'une phthisie c o n firme, puisque, pour m i e u x en affirmer la gurison possible, il invoque le second degr. Mais c o m m e cette objection a sa source dans les divisions diffrentes des phases tablies par les divers auteurs, elle n e repousse notre thse que dans les m o t s , et n o n pas dans sa ralit, ce que n o u s lui accordons sans peine. 12. La nature ou l'essence de la phthisie pulmonaire tuberculeuse consiste essentiellement dans l'ulcration des p o u m o n s , a c c o m p a g n e de fivre hectique, car les autres symptmes ne sont que les consquences de ceux-l. De l il suit que t o u t ce qui prcde la formation de l'ulcre n'est pas encore la phthisie. On en parle c o m m e d'un tat futur plus ou moins probable. Mais quand l'ulcre est constat, qu'il existe depuis u n jour, depuis u n mois o u depuis une anne, la phthisie existe, et on la dit confirme, avec cette seule diffrence que, la maladie s'aggravant, les s y m p t m e s s'aggravent aussi. De l donc la grande division entre la phthisie qui c o m m e n c e et la phthisie confirme. Dans la premire, le p o u m o n se dipose l'ulcration , dans la
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seconde l'ulcration est faite et s'aggrave jusqu' ce que m o r t s'en suive, parce que, c o m m e n o u s le disions, le p r o grs quotidien de la maladie entrane avec lui le progrs des s y m p t m e s . Quelques docteurs o n t subdivis chacune de ces d e u x priodes, o u degrs, d'abord e n deux autres, la phthisie au dbut et la phthisie en progrs, puis en t r o i s ; M a i s p a r c e q u e , ditBurserius,la phthisie confirme ou u l c reuse parcourt p e u p e u ses priodes o u phases, jusqu' c e q u ' e l l e a r r i v e son issue fatale, il est p l u s j u s t e , p o u r q u ' o n saisisse m i e u x ses divers tats, de distinguer, dans son c o u r s , t r o i s degrs n e t t e m e n t indiqus p a r la nature diffrente de l'ulcration et de la maigreur. L e premier, quand le p o u m o n c o m m e n c e en quelque sorte s'ulcrer, et que l'ext n u a t i o n du corps n e frappe pas encore la vue ; le s e c o n d , q u a n d l'ulcre et la maigreur se m o n t r e n t plus manifeste m e n t ; l e troisime enfin, quand le p u s a tout infecte et que l'ulcre s'est rpandu au loin, de sorte q u e , tous les s u c s tant liqufis, les os restent presque seuls couverts del peau. 13. La c h o s e tant ainsi explique, il est vident que notre contradicteur a voulu parler d'une phthisie c o m m e n c e , au l i e u d'une phthisie confirme. Il a rapport la m a l a d i e de Marie-Rose au d e u x i m e d e g r , cause de sa respiration touffe, de sa toux a c e r b e , de la force do la fivre, de ses crachats sanieux et ftides, enfin cause de la maigreur et de l'abattement du corps entier, tous s y m p tmes, n o u s l'avons v u , c o m m u n s au s e c o n d et au "troi s i m e degr. Par l m m e , cependant, il n'a pu traiter que d'une phthisie confirme. Or, en a d m e t t a n t la certitude d u diagnostic que n o u s avons tabli plus h a u t , les crachats s a n i e u x n e peuvent tre expectors ainsi, sans qu'il y ait ulcre du p o u m o n , et l'ulcre du p o u m o n est le signe de la phthisie confirme. D o n c , d'aprs les concessions m m e s de n o t r e contradicteur, n o u s avons u n e phthisie confirme d a n s le cas qui n o u s occupe. Alors,que l'on convertisse tant q u ' o n v o u d r a ' c e t t e m a l a d i e de chronique en aigu, q u i p o u r r a j a m a i s admettre qu'on p u i s s e gurir en une nuit, o u m m e e n d e u x j o u r s , c e t ulcre des p o u m o n s , et le gurir de manire n o n s e u l e m e n t qu'il n'y ait plus d'expectoration purulente, mais, encore de faon que tous les s y m p t m e s se soient v a n o u i s , q u e les forces soient revenues avec l'apptit et le g o t de la nourriture, q u e l'action digeslive soit rta blie, q u e la pleur et la maigreur aient disparu, q u e les forces m u s c u l a i r e s leur tour soient si bien rtablies, qu'elles p e r m e t t e n t de faire pied plusieurs milliers de pas tant la ville qu' la c a m p a g n e .
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14. D o n c entre l'attaque et la dfense, il n'y a pas ici d'op p o s i t i o n , mais u n c o n s e n t e m e n t parfait. Il n'y a de d i s s e n timent que sur un seul point : notre contradicteur veut q u e Marie-Rose, dans les derniers jours de la m a l a d i e ait t dans la deuxime priode de sa maladie,etnous-dans la troi s i m e . Or, la raison de ce dissentiment repose en partie sur l'autorit de Bursrius ci-devant expose, e n partie sur les s y m p t m e s omis par la critique. Si le second degr diffre du troisime par l'intensit des s y m p t m e s , si le troi s i m e degr existe, lorsque le pus infecte tout, et que la plaie tendant s'largir au l o i n , liqufie tout, au point qu'il ne reste plus que la peau sur les os, n o u s serons obligs d'ad m e t t r e que notre j e u n e fille tait arrive au troisime degr, p u i s q u e , de l'aveu du m d e c i n , elle rendait des crachats plus copieux, plus sanieux et plus ftides, et que ce pus expector plus c o p i e u s e m e n t , dmontrait que la plaie tait trs-large: d'ailleurs son aspect,sa prostration et sa maigreur faisaient compassion tout le m o n d e ; elle n'avait plus que l e s os et la peau. Notez encore ce signe caractristique de la priode extrme, l ' d m e , car les pieds taient gonfls jusqu' la moiti de la j a m b e . Ajoutez encore la douleur du c t , autre signe mortel et qui le plus souvent ne prcde l a m o r t que de quelques j o u r s , o u m m e de quelques h e u r e s . U n e sera plus possible alors que notre adversaire s o u t i e n n e encore que Marie n'tait arrive qu'au second degr de sa maladie. 15. Et cette conclusion n'est n u l l e m e n t combattue par l'exemple, emprunt Benot XY, de la gurison rapide de Marie des Anges, religieuse Capucine. Accable depuis trois ans, sous le poids d'une phthisie, et ne pouvant plus lever la tte sans la main d'autrui, elle fut gurie en approchant de sa personne u n v t e m e n t de saint-Charles Borrome. On n e peut pas davantage invoquer l'exemple de Camille Ferraris qui, m i n e depuis huit ans par u n e livre hectique, aprs avoir puis tous les remdes, gisait sur son lit, trs-voisine de la mort. En eifet, vous chercherez, eu vain, dans ces deux phlhisiques, les s y m p t m e s qu'on rencontre chez les autres, et qui dpendent de la constitution diffrente du malade, de causes diverses, du cours vari de la maladie, etc. 11 n e serait pas juste n o n plus de chercher, chez une malade de trois mois, cet abattement complet de forces rencontr chex. des malades de trois o u huit ans. 1 6 Du reste, s'il existe de vritables cas de phthisie con firme (cas jugs tels n o n - s e u l e m e n t par la marche de la maladie, mais encore par l'autopsie des p o u m o n s ) , ce sont
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bien ceux q u e n o u s avons rapports d'aprs S w i e t e n . Un h o m m e illustre, affect pendant trente annes d'une p h t h i sie confirme, a rempli tous les devoirs de son tat j u s q u ' la m o r t . U n j e u n e h o m m e qui, souffrant depuis l o n g t e m p s , rendait des crachats t e l l e m e n t ftides, q u e le mdecin n'en pouvait supporter l'odeur qu' grand'peine, a c e p e n dant v c u d e la sorte, deux annes entires, en vaquant
ses t r a v a u x o r d i n a i r e s . E t cet i l l u s t r e m u s i c i e n e n t i r e m e n t e x t n u p a r u n e p h t h i s i e c o n s o m m e q u i , la v e i l l e d e s a
m o r t , faisait raisonner ses c y m b a l e s avec u n e grande cl rit d e doigt. Si, dis-je, ce sont b i e n l de vritables cas de phthisie confirme, aussi bien que ceux emprunts P o r t a i , Fdrigo et Laennec, sans parler d e tant d'autres e x e m p l e s trs n o m b r e u x q u e l'exprience q u o t i d i e n n e m e t s o u s l e s y e u x ; si, malgr une si grande dure des maladies, les forces d e m e u r e n t souvent aussi considrables, chez les phthisiques*, qui donc, j e le demande, jouissant ds son bon sens,pourrait nier que notre j e u n e fille ft atteinte de phthisie confirme, au troisime degr, sous prtexte q u e , place sur u n ne e t soutenue de chaque ct, e l l e a p u se rendre R o m e o
elle a r r i v a p r e s q u e i n a n i m e ; s o u s p r t e x t e q u e s o u t e n u e d e s d e u x c o t s p a r s a m r e e t s a c o u s i n e q u i pouvaient
peine l a traner, elle eut la force do se traner j u s q u ' a u x glises de Ptome ? 17. Qu'il m e soit permis de faire ici u n e r e m a r q u e . Notre savant adversaire affirme q u e les e x e m p l e s de gurison rappels par Benot XIV, sont tels que, m m e u n aveugle v o y a n t l'horrible tat d e s m a l a d e s , reconnatrait i m m d i a t e m e n t l e prodige. Or c e s miracles furent approuvs c o m m e gurisons de phthisie confirme, ainsi que le grand Pontife le dclare. Or maintenant, j e vous le d e m a n d e , quels symptmes rvlaient ces m a l a d i e s ? On constatait, chez la religieuse capucine, la fivre h e c t i q u e , la maigreur,
u n p u i s e m e n t c o m p l e t des f o r c e s ; c h e z C a m i l l e d e P e r r a r i s , l a fivre h e c t i q u e a v e c d e s crachats s a n g u i n o l e n t s .
Si, dans notre c a s , (1) on invoquait ces seuls symptmes, les trs illustres Pres conclueraient-ils une phthisie c o n firme, e u x qui p e n s e n t que j e n'ai pas assez m i s en v i dence l e caractre de la maladie de Marie-Rose, q u o i q u e la disposition naturelle de la malade, les maladies a n t rieures, l e cours de la maladie indiquant videmment u n e inflammation violente des p o u m o n s venue suppuration, (i) Coin me si aujourd'hui les jugements de ces causos laient par trop faciles.
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el que l'ensemble entier des sympLmes assure la prsence d'une phthisie confirme et dsespre ? Que ceux qui croient que Tenqute relative aux miracles tait plus svre- autre fois, psent bien ces faits, et qu'ils relvent les anciennes thses dans lesquelles huit ou dix miracles taient exposs, prouvs , dfendus e n quelques pages. Nous n'crivons certes pas ceci pour critiquer la svrit actuelle que n o u s r e c o m m a n d o n s au contraire souverainement, c o m m e exige par l'abus de l a - c r i t i q u e et du scepticisme qui s'est gliss aujourd'hui dans les tudes de la mdecine et des sciences e n gnral. Ce que j'ai eu en vue seulement, c'est qu'on n e vante pas tant la vieille svrit, c o m m e si aujourd'hui l e s j u g e m e n t s de ces causes taient par trop faciles, 18. Nous n e n o u s arrterons pas l'observation tire du n o m b r e de huit m d e c i n s appels se prononcer sur la gurison de Camille de Ferraris, car ce nombre, outre qu'il est trange ( c o m m e le serait le fait de huit experts n o m m s la fois par u n tribunal quelconque), s'il a pu se produire autrefois, alors que tous taient initis aux p r i n cipes gnraux de la science, et que la manie du doute n'tait pas encore devenue universelle; aujourd'hui certai n e m e n t , e n prsence d'une si grande dissension des esprits et de tant d'hsitations, non-seulement, il ne contribuerait pas confirmer le miracle, mais il aurait cet effet, par suite du combat perptuel des savants, de faire rejeter tous les miracles, c o m m e dans le cas actuel. Il faut en outre considrer n o n - s e u l e m e n t le fait mais ses circonstances. Outre qu'au dix-septime sicle,on procdait bien plus ronde m e n t l'examen des miraclesjla condition du miracle de Ca mille de Ferraris tait telle, qu'on devinait plutt qu'on ne voyait le miracle. De telle sorte que, aprs avoir m r e m e n t pes tous les tmoignages, les auditeurs de rote disaient dans leur rapport: S'il n'y a pas e u de phlhysie, il y a e u du moins miracle dans le m o d e de gurison. Or, dans u n e si grande perplexit, il convenait d'entendre beaucoup d'experts. Mais n o u s qui n e pouvons pas dsirer l'appel u n grand n o m b r e de savants, de peur que, au d s hpnneur de l'Eglise, les miracles disparaissent du tableau des causes, n o u s serions cependant tent de provoquer u n j u g e m e n t semblable, afin que l'attention ft plus excite sur le mode de la gurison, que sur le n o m de la maladie. Il n'est pas rare, e n elfet, que beaucoup de miracles, de g u risons, de maladies trs graves, soient rejets par cette seule raison, que les m d e c i n s sont en dsaccord sur le caractre dfinitif de la maladie.
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9 . Mais revenons la cause. De l'examen de la nature du mal, l'adversaire passe l'tude de l'examen de la gu
rison. Il dit : On a donn des remdes la malade jus qu'au moment de sa gurison, et c'est tort que le dfenseur
de la cause les dclare inutiles. Il n o m m e e n particulier l'usage prolong du lait et sa vertu pour gurir la phthisie ; il fait grandement l'loge d'un docteur qui tirait de l'usage q u e Marie-Rose en avait fait, u n h o n augure pour sa guri s o n . Il l o u e la valeur de certaines herbes, et n'accepte pas le j u g e m e n t du m d e c i n quiregardait ces remdes c o m m e pal liatifs, parce que, en dposant, il parlait en qualit de l m o i n et n o n en qualit de j u g e , c o m m e si u n t m o i n tait, par l m m e , priv de ses lumires habituelles. A n o u s , il reproche u n trop grand zle pour la dfense, et d'avoir t jusqu' dire q u e le petit-lait administr la malade tait l e lait de beurre q u e l'on rservait aux c h i e n s , c o m m e si les personnes de la m a i s o n , guides par l e s m d e c i n s , n'a v a i e n t pas p u prparer d'excellent petit-lait. Il prtend d m o n t r e r par l la possibilit de la gurison, et faire croire que la convalescence a p u succder u n e rmission de s y m p t m e s inflammatoires, la suite de laquelle les forces seraient revenues ; tout cela opr, moiti par les remdes, m o i t i par la nature redoublant d'nergie pour arriver la gurison. . 2 0 . Le Critique tombe u n e seconde fois ici dans la m m e confusion. Il confond la convenance des r e m d e s avec leur efficacit ; il confond la rmission dont toutes les maladies, m m e les plus c e r t a i n e m e n t mortelles, offrent des e x e m p l e s , avec la convalescence.Commenons par la s e c o n d e , laquelle, carte, rendra inutile l'examen de la p r e m i r e . Il feint d'i gnorer q u e lo plus n o v i c e des lves e n m d e c i n e , qui se trane sur le banc des coles, sait parfaitement q u e l'poque inflammatoire de cette maladie est bien diffrente de l' p o q u e suppuratoire ; celle-ci a des s y m p t m e s bien plus graves et plus intenses ; l'autre a des s y m p t m e s plus m o drs. Dans l'un de ces c a s , c o m m e il s'agit de l'inflamma t i o n des p o u m o n s , la m o r t peut tre i m m i n e n t e ; il n'en e s t pas de m m e dans l'autre cas. Or, personne n'ignorant ces donnes, u n e explosion de sifflets accueillerait le m decin qui, d'aprs la rmittence des s y m p t m e s inflamma toires, rmittenec survenue la suite de la suppuration, augurerait pour l e patient u n e heureuse i s s u e de sa maladie. E n effet, dans la priode inflammatoire, qui n'est certaine m e n t pas sans danger, si l'inflammation disparat, on peut esprer une gurison parfaite ; au contraire, la suppuration
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dtruit l e n t e m e n t les p o u m o n s et a m n e u n e m o r t prompte et certaine. 21. Celui qui ferait le raisonnement suivant : Notre j e u n e fille atteinte d'une grave inflammation de p o u m o n s , arriva une telle extrmit, qu'on dut lui administrer les derniers sacrements ; puis, les s y m p t m e s ayant diminu, parce que l'inflammation dgnra en suppuration, elle put se lever, marcher lentement, et m m e entreprendre un voyage ; il est donc vident que n o t r e j e u n e fille est e n t r e en c o n v a l e s cence aprs l ' i n f l a m m a t i o n ; c e l u i , dis-je, q u i ferait u n t e ! raisonnement, n o n - s e u l e m e n t n'aurait pas tudi les p r e miers lments d e l s c i e n c e mdicale, mais encore n'aurait jamais visit de malades. Ce que n o u s avons dit de la pre mire inflammation, il faut absolument le redire des autres qui sont venues aprs. Gomme, e n effet, la marche destruc tive des p o u m o n s s'opre graduellement, par des inflamma tions et des suppurations partielles, elle doit ncessairement tre a c c o m p a g n e d ' u n e succession continue d'exasprations et de rmittences. G'est pourquoi, si ces exasprations ont pris u n tel caractre d'intensit aigu, qu'on a j u g propos d'administrer les sacrements, et d'avoir recours a u x prtres, de la rmittence de cette i n f l a m m a t i o n et de ses s y m p t m e s on n e p e u t pas d d u i r e la rmittence de la m a l a d i e ellem m e ; bien au contraire, il faut en arguer ncessairement u n e ulcration plus large, plus profonde du viscre, en par faite harmonie avec la v h m e n c e de l'inflammation p r c dente. 2 1 . Dans la phthisie, ce n'est pas sur la rmittence de l'inflammation et de ses s y m p t m e s qu'il faut fixer s o n dia gnostic, mais bien sur le cortge des symptmes de l'ulc ration, ce en quoi consiste la maladie. Si ces symptmes persistent et s'accroissent dans leur ensemble jusqu' lii lin, la marche destructive devient galement plus a c c l r e , et la maladie fait des progrs c o n t i n u s . Qu'on jette d o n c les yeux sur la runion de t o u s les symptmes, q u e Ton exa m i n e si a u c u n d ' e u x a j a m a i s disparu ou d i m i n u , et alors on verra si notre malade voyait son tat empirer ou s ' a m liorer. La libert des m o u v e m e n t s musculaires n'a rien voir ici ; non-seulement elle ne rpugne pas la phthisie, mais elle lui est trs-familire. Ils se mouvaient certaine ment avec plus de facilit que notre j e u n e fille ces malades dont n o u s avons parl plus haut, qui accomplirent j u s q u ' a u bout les devoirs de leurs charges ou leurs travaux p e r s o n nels, et cependant chez eux la maladie tait bien avance, puisqu'ils sont morts rapidement.
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22. On ne peut pas nier, n o u s dit-on, que la n a t u r e dploie une plus grande nergie de forces pour la gurison des maladies, qu'on ne lo suppose . Oui, mais la nature, quand elle agit de la sorte, enlve peu peu la c a u s e du mal et ses s y m p t m e s : c'est pourquoi, si chez un phthisique, les suffocations, la toux, la soif, la fivre h e c t i q u e , l'abondance des crachats ftides, la maigreur, l ' d m e des pieds, c o n t i n u e n t jusqu'au b o u t et ne font q u e s'aggraver, quel h o m m e , ayant son bon sens, osera dire, en s'appuyant sur cette h y p o t h s e , q u e les forces du malade n e sont pastrop d i m i n u e s ; qui osera dire, cause de cela, que dans ce cas, la nature a exerc son nergie en vue de la g u r i s o n ? E t puis, e n fin de c o m p t e , quelles taient donc ces forces de n o t r e j e u n e fille? Elle tait si faible, que la m r e , dans la description de l ' d m e des pieds, dclare q u e cette fai blesse persista jusqu'au b o u t et un tel point, qu'elle tait oblige de lui mettre ses bas, chose qu'elle tait incapable de faire e l l e - m m e . Gomment l'a-t-on assise sur l a n e , c o m m e n t a-t-elle fait le voyage, c o m m e n t s'ost-elle r e n d u e aux glises de R o m e ? Notons bien qu'il ne s'agit pas ici d'une noble et dlicate j e u n e fille, mais bien d'une de ces enfants de la campagne qui ne prennent de repos q u e c o n traintes par u n e impossibilit absolue de travailler. N o t o n s g a l c m c m qu'une foi vive d o n n e des forces, q u e la m a l a d e , p e n d a n t le trajet, tait s o u t e n u e des deux cts, et qu'elle s'est arrte plusieurs fois e n r o u t e ; n o t o n s bien enfin qu'il n'et pas t plus difficile aux parents qui la soutenaient de chaque ct,de porter un cadavre que de conduire ainsiMarieRose par lesrues de R o m e . Assurment, ils seraient m o n t s sur l'ne et auraient accompli le voyage avec plus de faci lit que noire malade cet h o m m e illustre qui remplit ses charges jusqu' la mort, et ce j e u n e h o m m e qui vaqua ses travaux ordinaires jusqu' la dernire h e u r e , et ce musi cien qui, jusqu'au m o m e n t s u p r m e lit rsonner ses c y m bales ; tous cependant taient sur le seuil de l'ternit. E n c o r e u n e fois, donc, chez u n phthisique, il faut c o n s i drer n o n pas les forces musculaires, mais les s y m p t m e s de la marche destructive des p o u m o n s ; ainsi s e u l e m e n t peut ctre diagnostiqu l'tat du malade. 23. Inutile de dmontrer ici que les s y m p t m e s de cette nature ont constamment exist et progress chez MarieR o s e ; inutile galement d'en faire ici Tnumration ; n o u s n o u s s o m m e s p r c d e m m e n t acquitt de ce devoir ; du reste, notre contradicteur n e soulve aucune objection ce sujet. Gette existence bien tablie, quoi h o n u n e
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enqute sur l'action des m d i c a m e n t s ? Furent-ils bien appropris au mal, furenL-ils convenablement administrs, produisiront-ils u n effet salutaire ? S'ils n e servirent rien, les faits le prouvent, et le progrs des s y m p t m e s de l'action destructive, quoi bon disserter sur la v a leur intrinsque de ces m d i c a m e n t s ? Le lait est un remde trs-appropri, trs-convenable aux phthisiques, soit ; on l'administre gnralement presque tous les phthisiques, et cependant, sur six cents on en rchappe peine u n ; et encore cet u n i q u e chapp d u naufrage n'tait pas atteint d'une phthisie confirme. Soutienclrez-vous, ce fait de m o r talit tabli, q u e , sur ces cinq-cent-quatre-vingt-dix-neuf morts, a u c u n n'a t frapp, en raison de ce q u e t o u s o n t fait u s a g e de lait, ce r e m d e si convenable si appropri aux phthisiques? Alors galement, lorsque chez notre malade vous voyoz c o n s t a m m e n t la m m e synthse de s y m p t m e s s'aggraver de jour en j o u r , prtendez-vous, en dpit du fait c o n s t a t , que la j e u n e Q 11c est entre en convalescence, parce qu'elle avait fait usage d'un remde apte h la g u r i r ? De cette faon vous argumentez de la possibilit au fait, ce qui r p u g n e aux principes de la logique. Sachez d o n c tablir u n e diffrence entre Y aptitude et l'efficacit. Et si v o u s c o n s t a t e z qu'aucun heureux rsultat n'a t obtenu d'un r e m d e , si apte soit-il, ne l'estimez pas efficace, et de sa convenance intrinsque n'allez pas tirer u n a r g u m e n t e n faveur de s o n utilit relle. Nous dirons la m m e chose des dcoctions d'herbes mdicinales et du petit-lait. Voyez maintenant, si n o u s , qui n'avons pas j u g ces m d i c a m e n t s mal appropris, mais qui les avons simplement d c l a r s , dans le cas actuel, inutiles, c'est -diro inefficaces, v o y e z , disje, si n o u s avons eu tort de parier ainsi. 2 4 . Vraiment inutiles sont m a i n t e n a n t les observations critiques ayant trait au t r a i t e m e n t des mdecins, au sujet des d c o c t i o n s , ainsi q u e celles n o u s concernant p e r s o n n e l l e m e n t au sujet du petit-lait. Toutefois, pour n e rien laisser dans l'ombre, n o u s ajouterons quelques m o t s sur l'une et l'autre de ces q u e s t i o n s . Tout le m o n d e reconnat que,dans ces circonstances, le m d e c i n qui a soign la m a lade remplit le rle de t m o i n et non celui de j u g e ; c'est titre de t m o i n qu'il fait connatre, dans sa dposition, la nature des remdes auxquels il a eu recours. Or, en m d e cine, il y a le traitement radical qui attaque directement la maladie, et le traitement palliatif que Ton e m p l o i e dans les cas dsesprs, pour adoucir seulement les crises s y m p tomat iq u e s; l'un et l'autre traitement appartiennent des
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remdes particuliers et divers. Eh bien ! il n'usurpe pas les fonctions d j u g e , le mdecin qui, dans sa dposition,raconte que, dsesprant c o m p l t e m e n t de gurir l'ulcre des p o u mons, il m i t de ct le traitement radical et ramena toute sa mdication t l'emploi de palliatifs, c o m m e sont les dcoctions des p l a n t e s , et autres m d i c a m e n t s anodins d o n t le but u n i q u e est d'adoucir, de calmer des accs de toux, la force des suffocations ctc, mais qui n e p e u v e n t absolument rien pour enrayer la marche de la maladie e s s e n t i e l l e . N o u s n e voyons pas pourquoi le m d e c i n n e pourrait pas tenir u n tel langage, sans tre accus de s'carter de son rle de t m o i n et de revtir la robe du magistrat. 25. Nous n e voyons pas davantage pourquoi n o u s s o m m e s i n c r i m i n s par ce q u e n o u s avons dit qu'on avait d o n n la m a l a d e du lait destin aux chiens. Si c e petit-lait n'a pas t fourni par le pharmacien, il Ta t par les bergers. Or, c e petit-lait de berger, d'une fabrication grossire, t r s i n d i g e s t e , est donn aux chiens dans n o s c a m p a g n e s . V o u s objectez q u e les domestiques, sur les instructions d u docteur, pouvaient prparer c o n v e n a b l e m e n t c e petit-lait. La m t h o d e e l l e - m m e par laquelle o n l e prpare rpond l'objection. Est-ce q u e des gens s i m p l e s , rustiques, pauvres, m a n q u a n t de tout instrument ncessaire,pouvaient faire cette prparation c o n v e n a b l e m e n t ? E t puis e n s u i t e , dites-nous franchement maintenant si c'est notre o b j e c t i o n qui provient d'un trop grand zle pour la dfense, o u si ce n'est pas, au contraire, votre observation critique qui provient d'un trop grand amour de la contradiction. 2 7 . Mais, nous le rptons, tout cela e s t superflu. Que l e mdecin ait bien ou mal jug la nature des m d i c a m e n t s ; q u e n o u s - m m e , ayons bien o u mal apprci la qualit du p e t i t - l a i t ; tout cela n e peut point renverser ce fait bien c o n s t a t , savoir, q u e tous les m d i c a m e n t s si convenables, si parfaitement administrs q u e vous pouvez le dsirer, n ' o n t a b s o l u m e n t servi r i e n ; malgr leur emploi, l e s s y m p t m e s de la phthisie ulcreuse se sont aggravs j u s qu'au b o u t . Ainsi d o n c , cette persvrance continue, c e t accroissement de la maladie jusqu' la fin, tant bien d m o n t r s , puisque notre contradicteur n e rvoque pas en d o u t e l'instantanit e t la perfection de la gurison accorde par l'intercession du vnrable Benot-Joseph, il n'y a plus lieu de douter de I c x i s t e n c c d'un vrai miracle. 2 8 . On dsirait v i v e m e n t , dans cette cause, l e concours clair d'un h o m m e r e n o m m , d'un m d e c i n clbre qui, j o u a n t le rle d'arbitre suprieur, dciderait si les diffi-
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c u l l s opposes avaient t victorieusement rsolues. Ces v u x ont t exaucs. L'illustre Pierre-Louis Valentini, m d e c i n aussi clbre dans son pays qu' l'tranger, aprs avoir montr l'inanit des objections, s'est prononc, e n connaissance de cause, en faveur du miracle; et puisque tout converge l'clatante dmonstration du prodige, nous esti m o n s que la Sacre-Congrgation en considre, sou tour, les preuves c o m m e indiscutables.
Jugement mdical formul, aprs constatation de la vrit, sur le miracle de Marie-Fa.ose de Luca, par M. le docteur Pierre Aloyse Valentini, du Collge mdico-chirurgical, professeur mrite de clinique mdicale l'universit romaine.
Trs-Saint Pre. P u i s q u e j e dois, Trs-Saint Pre, mettre un j u g e m e n t sur la gurison de Marie-Rose de Luca, gurison apprcie par des opinions entirement opposes, j e vais m'appliquer de t o u t e m o n me faire dispa'ratre tous les doutes,en donnant u n e dmonstration capable de rendre vident ce qui semble o b s c u r . l l f a u i , a v a n t tout, faire observer que pour ju ger de la nature des maladies,et viter que des 'difficults en travent le j u g e m e n t , il importe de donner de ces maladies un diagnostic tir de la connaissance absolue et certaine de ses causes et de ses s y m p t m e s . Si ce principe est n g l i g , les doutes demeureront et de nouvelles objections seront pro duites ; jamais l'objet cle la croyance n e sera dmontr, jamais o u ne parviendra u n e connaissance certaine de la vrit. De plus, il n e convient pas d'imiter, c o m m e il arrive trs-souvent dans les discussions, ceux des auteurs q u i s'approprient les tmoignages capables cle favoriser leurs opinions contre leurs adversaires, tandis qu'ils r e pousent tout ce qui est contraire leur sentiment. Mais v e n o n s notre but : e x a m i n o n s la nature de la maladie dont Marie-Rose cle Luca tait affecte; puis voyons si sa par faite gurison s'est produite naturellement, o u si elle n'est pas le fait d'un prodige divin d l'intercession du vn rable serviteur de Dieu Benot-Joseph Labre. 2. Cette j e u n e fille a t, ds sa tendre enfance, sujette aux accs d'un asthme convulsif, et atteinte, dans s o n adoles c e n c e , diffrents dgrs, de la rougeole dont l'ruption difficile n'a pas t c o m p l t e . L'asthme est une m a l a d i e qui s'annonce par une respiration pnible, avec sifflement et
oppression de la poitrine, et qui, ordinairement, a ses accs. Quel qu'il soit, il vicie les p o u m o n s et les dispose plusieurs maladies. Mais l'asthme convulsif, d cer taines lsions du systme nerveux, est plus rebelle, et affai blit beaucoup plus les p o u m o n s , c o m m e l e confirment suf fisamment, et au dclfi, les n o m b r e u x cadavres d'aslhmatiques s o u m i s l'autopsie, lesquels f r q u e m m e n t portent les traces de l'inflammation, source de l'asthme, s e l o n q u e le constate la XV Epitre de Morgani, n 13, o il parle d'u'ne j e u n e fille asthmatique. Ainsi, ds l'enfance, Marie-Rose a contract une disposition aux maladies de poitrine et aux inflammations des p o u m o n s . 3 . Les virus morbilleux, alors m m e que trs-bnins, s'associent, en effet, . des symptmes n o n - s e u l e m e n t c a l a r rheux, mais encore inflammatoires. Par eux s o n t suscites sans peine des inllammations aux p o u m o n s , surtout lorsque l'ruption de la matire morbiUeuse n'a pas l i e u , se fait d'une manire incomplte ou est rpercute. Il arrive alors frquemment q u e ce virus m o r b i l l e u x , transmis aux p o u m o n s , fait natre les s y m p t m e s inflammatoires, surtout si les .poumons sont prdisposs ces inflammations, c o m m e cela avait lieu pour notre m a l a d e , sur laquelle ont t observs de bonne heure des p h n o m n e s inflamma t o i r e s . Les inllammations de ce genre ne sont pas toujours r s o l u e s , e t elles ont alors les terminaisons de l'inflammation: quelquefois elles produisent une suppuration ou tournent en v o m i q u e , ainsi qu'on l'a constat pour notre malade. Ces suppurations et ces v o m i q u e s appellent souvent la phthisie pulmonaire et donnent bientt la m o r t : la phthisie p u l m o naire que les praticiens reconnaissent venir de v o m i q u e , fait, e n effet, u n progrs beaucoup plus rapide q u e toutes les autres phthisies.
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4 . Plusieurs p h n o m n e s essentiels q u i i n d i q u e n t d'une manire certaine les mtastases de ces maladies, ont t remarques chez notre malade. Dans sa q u i n z i m e anne, c e l t e j e u n e fille a t en effet atteinte de rougeoles o u de morbilles dont l'ruption n e s e fit pas librement et c o m p l t e m e n t , et qui r e n t r r e n t ; aussi s'en suivit-il u n e forte fivre c o n t i n u e , la difficult de respirer, u n e toux pnible et u n e grande altration. Ces s y m p t m e s dmontraient n o n une lgre bronchite, mais u n e grande et cruelle inflammation des p o u m o n s . Cette inflammation non rsolue se changea en suppuration et en v o m i q u e , ce qui dtermina une phthi sie pulmonaire, c o m m e une petite livre lente, une respira tion courte, et voisine parfois de la sulfocation, de grandes
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sueurs pendant la nuit, une diarrhe colliqualive, e t c . , e t c . , le dmontraient suffisamment. Au mois d'avril, ces s y m p tmes plus dvelopps constituaient une phthisie pulmonaire confirme. Et en effet, ou remarquait une fivre habituelle o u hectique, de l'enrouement, une expectoration purulente, la pleur du visage avec de la rougeur aux joues, la soif, une maigreur de tout le corps, l'anxit, l'absence de s o m meil, des sueurs abondantes et une diarrhe colliquativc.On laissa alors de ct, vu la gravit de la maladie, les m d i caments, et les sacrements furent administrs la m a l a d e . 5. Nous avons fait remarquer plus haut que, dans cette espce de phthisie pulmonaire, le cours de la maladie est la plupart du temps trs-rapide, et que les s y m p t m e s qui constituent le second et le troisime degr de la phthisie, apparaissent promptement. Ici, en effet, i m m d i a t e m e n t aprs l'inflammation pulmonaire, apparurent les s y m p t m e s d'une v o m i q u e , qui sont une toux pnible sans expectoralion, u n e respiration difficile, de la maigreur, puis une expectoration purulente, c o m m e cela a lieu lorsque la v o m i q u e se rompt, 6. Marie Rose de Luca n'tait point en tat de rsister cette funeste et mortelle maladie, cause do son ge, de sa constitution frle, de la faiblesse de ses p o u m o n s , et surtout de l'asthme convulsif dont elle souffrait depuis l o n g t e m p s . Aussi, dans de telles dispositions, les symptmes redouts apparurent trs-promptement, c o m m e la difficult de respirer, l'absence de s o m m e i l , la perte des forces, la m a i greur, une voix enroue, des sueurs n o c t u r n e s , une diarrhe colliqualive, la rougeur circonscrite des joues et l'enflure des pieds. 7. Le caractre de cette maladie est si clair, et sa forme si nette, qu'elle ne peut pas tre confondue avec le catarrhe des bronches et des poumons. Un catarrhe de ce genre p e u t sans aucun doute tre excit par l'exercice trop grand des membranes des bronches, dans lesquelles sjournerait u n e abondance de mucosits .cause d'une grande affluence d'humeurs aux glandes m u q u e u s e s ; il peut aussi l'tre par une inflammation lente des b r o n c h e s . Mais lorsque ce sont de grandes inflammations des poumons, aussitt apparaissentles s y m p t m e s prcits, qu'on ne doit pas confondre avec ceux des catarrhes. Les inflammations de ce genre, en effet, n'tant pas rsolues, passent facilement en s u p p u r a lion et forment vomique. Dans la maladie dont n o u s n o u s occupons, il ne pouvait y avoir aucune obscurit, pas m m e celle qui trs-souvent a lieu au c o m m e n c e m e n t d'une
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phthisie pulmonaire, cause de la similitude de ses s y m p tmes avec les s y m p t m e s catarrheux. E t , en effet, ds que l'inflammation violente existe, o n constate l'expectoration purulente. C'est pourquoi le proverbe des praticiens, d'ail leurs tomb en dsutude, ne saurait couvenir ici : la phthisie c o m m e n c e ds que cesse le catarrhe. 8. Il est faux qu' la r o u g e o l e s u c c d e rarement u n e i n flammation extraordinaire sans cause extrinsque. En effet, cette maladie, m m e au m o i n d r e degr, m o n t r e souvent u n caractre d'inflammation; et c'est pour cette raison q u e plu sieurs auteurs d o n n e n t le n o m d'inflammatoires aux r o u geoles, lorsque la fivre est grande, les s y m p t m e s a i g u s , c o m m e dans la fivre inflammatoire elle-mme, c'est--dire, douleur de tte, inflammation des y e u x , de la gorge et de la poitrine, difficult de respirer, soif ardente, pouls dur et plein. Mais ce ne serait peut-tre pas u n e cause suffisante d'inflammation des p o u m o n s , qu'une ruption peu rgulire et i n c o m p l t e des pustules o u morbilles ? Qui ignore q u e lorsque l'ruption de la r o u g e o l e est i n c o m p l t e , t r s - s o u vent le virus morbilleux atteint les p o u m o n s et y d o n n e naissance u n e inflammation profonde? 9. On regarde c o m m e peu probable que,dans une m a l a d i e si aigu, une seule saigne et pu sauver la vie la m a l a d e . P r o b a b l e m e n t la suppuration s'en est suivie plus p r o m p tement. E n effet,tous les praticiens senss c o n v i e n n e n t , d'accord avec Hippocrate, q u e la p r i p n e u m o n i e , c a u s e de saignes ngliges o u trop n o m b r e u s e s , passe la s u p puration. De ce principe confirm par la raison et l'exp rience, font trop p e u de cas les partisans du mauvais s y s t m e actuellement en usage, qui consiste rpandre le sang a u dacieusement, et sans conseil, a u grand d t r i m e n t des m a lades, o u omettre de saigner q u a n d il y a ncessit de l e faire. Je r e n o n c e rappeler ici quelques autres p o i n t s c e r t a i n e m e n t de p e u d'importance. C o m m e n t du reste p e u t - o n douter de l'extrme gravit d'une maladie, l o r s q u e de pressants et trs-graves s y m p t m e s n e peuvent t r e n i s ? Ces s y m p t m e s existant, c o m m e n t persister croire la nature calarrhale du virus morbilleux ? 10. Les m d i c a m e n t s tant dlaisss, la malade a b a n donne des m d e c i n s et agite par les s y m p t m e s de la maladie, reyut le conseil de recourir l'intercession du v nrable serviteur de Dieu Benot Joseph Labre ; et, bien q u e ses forces fussent puises, elle rsolut de s'exposer aux difficults du v o y a g e , au pril m m e de sa vie. De son pays natal ou elle tait, elle arriva R o m e , et se
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-tendit, s o u t e n u e , au monument du., vnrable. La m a l a d i e persista dans le m m e tat, m a i s la malade e u t quelque repos, t o u t en ressentant u n e grande fai blesse. Enfin la troisime nuit, la maladie s'aggrava subitement ; la malade fut prise d'une douleur de poi trine trs-vive, intolrable ; elle plaa alors l'image du vnrable sur sa poitrine et, en un instant, elle sentit c e t t e grande douleur d i m i n u e r ; puis un sommeil trsc a l m e la gagna, et elle ne se rveilla qu'au jour. A. son rveil, la j e u n e jeune fille dit qu'elle tait entirement gurie; et,sans a u c u n aide, elle se rendit l'glise de Sainte-Marie, o se trouve 'e t o m b e a u du V n . serviteur de Dieu, afin de lui rendre des actions de grce du miracle qui lui avait rendu la s a n t . L'apptit revint : elle mangea et s'en trouva b i e n ; on u n mot, tous les s y m p t m e s de la maladie avaient disparu, et, partir de ce m o m e n t , elle j o u i t d'une parfaite sant. De R o m e elle retourna Mazzano, son pays natal, et au dbut du chemin, c'est--dire ds qu'elle fut en dehors de la porte Anglique, elle fit pied deux mille pas. 11, Je ne sais par quelle raison on a v o u l u prtendre que cette narration est incomplte, et qu'il ne s'est pr sent aucun mdecin, ou t m o i n capable de porter un j u g e m e n t sur la nature de la douleur prouve par la j e u n e fille, quand surtout les douleurs de ce genre et de cette nature o n t t juges par des praticiens trs-minents. Qu'il m e suffise d'en citer un entre tous : Baglivi, qui dit dans son o u v r i g e : Prax. Med. lib. II. cap. vin, 3 : Dans les m a l a d i e s d e c o n s o m p t i o n , si une grande douleur de ct sur et vient tout c o u p , on ne tarde pas dlirer, une grande fivre s'en suit, et Ton meurt au bout de peu de jours. C'est donc un s y m p t m e d'un trs-grand poids, que m o i m m e , dans ma l o n g n e carrire rie mdecine pratique, tant dans les hpitaux q u e dans la ville, j'ai toujours remarqu tre suivi' de la mort. 12. Donc, la cessation subite el imprvue d'une trscruelle douleur, remplace i m m d i a t e m e n t par un repos trs-complet et non interrompu, est une preuve d'un v r i table prodige divin. Donc, c e symptme qui, d'aprs l'exp rience et le t m o i g n a g e des auteurs, indique une aggrava tion de la maladie et annonce une mort prochaine, a t suivi d'une gurison subite et absolue. Celui qui le nierait, nierait la clart du soleil au milieu du j o u r , et par un ciel sans nuage. _ 43. Enfin, cette gurison n'a pas t s e u l e m e n t subite et c o m p l t e , mais encore durable. Aprs deux annes, en effet, vr. 24
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d'une sant irrprochable, ainsi que l'attestent le mdecin e l le chirurgien, Marie-Rose se maria dans la vingtime anne de son ge. Le mari a rendu t m o i g n a g e q u e la sant de sa femme a toujours t parfaite, jusqu' son second a c c o u c h e m e n t o elle s u c c o m b a m a l h e u r e u s e m e n t . Et m a i n t e n a n t que j'ai satisfait autant qu'il m'a t pos sible au m a n d a t qui m'a t donn, que j'ai dmontr la vrit du miracle obtenu au n o m du vnrable serviteur de Dieu Benot Joseph Labre, il ne m e reste plus, Trs-Saint P r e , qu' baiser vos pieds sacrs en implorant votre bn diction apostolique.
>N
DU
PREMIER
MIRACLE
SECOND MIRACLE
GURISON INSTANTANE ET PARFAITE DE THRSE TARTUFOL D'UN ULCRE INVTR SINUEUX, A RORD FISTULEUX, CALLEUX (OU PIERREUX.)
CHAPITRE
PREMIER
EXPOS DU MIRACLE.
1. Les enqutes nous ont appris: 1 que Thrse Tartulblijdu village de Civila nova^ commenc souffrir d'une tumeur la gorge, laquelle, aprs l'application prolonge des remdes les plus nergiques, ne put tre ni rduite ni amoindrie, et fut enfin extirpe; 2 que les lvres dola plaie profonde cause par l'extirpation s'lant contractes, il en rsulta une callosit qui dgnra en fistule ; 3 qu'elle fut gurie miraculeusement, quelques annes aprs, par l'invocation du vnrable Benot-Joseph Labre. Ces faits, rapports par dix tmoins avec beaucoup do nettet et de dtails, sont consigns dans notre sommaire. Mais comme les tmoins ont dpos onze ans aprs la gu rison, il n'en est aucun qui ait. pu dcrire exactement les diverses phases de la maladie; ce n'est qu'en r u nissant les dtails fournis par chacun d'eux qu'on arrive facilement rtablir tout ce qui concerne l'histoire de la maladie, son dbut, l'extirpation, l'application des r e mdes, et la gurison. El comme pour arriver une parfaite connaissance des faits,l faut en connatre la succession, nous allons d'abord fixer l'ordre chronologique avec certitude. 2. L'enqute apostolique de Loretle qui contient toutes les dpositions, ^ut lieu en 1794. La jeune fille miracu leusement gurie tait alors dans sa trentime anne; elle tait ne en 1764. Elle dclare elle-mme qu'elle corn-
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mena souffrir, des sa treizime anne, de la tumeur dout nous allons parler, ce qui remonte l'anne .1777. Elle assure ensuite qu'elle a longtemps fait usage des remdes pharmaceutiques sur ordonnances du D Ricci ; mais aprs avoir suivi ce traitement avec une longue patience, sans que les douleurs eussent diminue, on a p pliqua enfin le fer cotte tumeur; l'oprateur fui le c h i rurgien Zannoni, et l'opration doit tre reporte l'anne 1780. La miracule et sa s u r dposent que la malade garda le lit deux mois entiers aprs l'extirpation, et que pendant ce temps ce fut le chirurgien Jean Sorinani qui lui donna ses soins. Mais il est certain que, dans cette anne 1780, Thrse Tartnfoli alla Monlegranaro o depuis elle demeura plusieurs annes. Ce voyage se fit au milieu du mois d'aot, car D. Joseph Natinguerra, auquel fut confie la jeune fille, raconte qu'il vint, le 18 aot, Civita Nova, o la mre lui remit sa fille; et la d o mestique de D. Natinguerra assure que ses matres, aprs avoir pass quatre jours Civita Nova, rcvinreul leur logis, emmenant avec eux la malade. Alors la plaie avait dgnr en vraie fistule, comme il appert de la descrip tion faite, soit par la malade, soit par Natinguerra et sa domestique, qui virent alors la malade pour la premire fois. Or si, en 1780, aprs la mi-aot, ia jeune Aile passa Monlegranaro, et si auparavant elle fut alite chez elle, pendant deux mois aprs l'extirpation de la tumeur, il est vident qu'il faut reporter l'extirpation au mois de juin de la morne anne, et que le commencement de la fistule doit tre fix au mois d'aot de cette mme anne; le commen cement de la fistule a certainement prcd la mi-aot, puisqu'il ce moment elle tait vidente h tous les yeux.
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3. A Monlegranaro elle fut confie aux soins du chi rurgien Anlonacci, qui la soigna pendant trois mois. Mais ce fut en vain qu'elle fut crucifie par les caustiques et le fer, puisqu'elle n'en reut aucun soulagement, el qu'elle repoussa ensuite avec nergie toute opration c h i r u r g i cale. Elle alteignil ainsi le mois d'aot 1782; et alors elle prta l'oreille au chirurgien Cremonini qui habitait la mme maison depuis le commencement de mars de la mme anne. 11 parvint faire revenir la jeune Aile de son horreur (de la chirurgie, et, aprs avoir inspect la
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plaie, il lui appliqua, deux fois en ce mois d'aot, des caus tiques; mais la malade ne pouvant plus supporter ces t o r tures, les repoussa encore, et dejDus elle n accepta p l u s aucun de ces remdes violents jusqu'au moment de sa gurison miraculeuse. 4. Toute l'histoire de la maladie se rduit donc ceci: une tumeur se produit en 1777; elle subsiste jusqu'au mi lieu du mois do juin 1780 ; extirpe alorsja plaie persiste, et se convertit en fistule. La fistule tait vidente a u mois d'aot suivant; on fit usage de nombreux remdes et cela trs-inutilement, pendant quelques mois. Depuis, on n'en treprit rien jusqu'au mois d'aot 1782. Alors, deux fois seulement, on employa des caustiques, et la jeune malade n'en voulut plus entendre parler. Toute mdication fut donc supprime jusqu' la fin du mois de mai 1783, poque laquelle la sant fut recouvre par un miracle. Ceci bien tabli, nous procdons de la manire s u i vante.
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ARTICLE PREMTER
PREMIER TERME B U MIRACLE, EXISTENCE, NATURE ET GRAVIT DE LA MALADIE.
>. Gomme le sujet du prodige consiste dans la gurison d'une fistule engendre par la blessure rsultant de l'extirpation d'une tumeur, nous pourrions ne pas nous arrter aux circonstances qui prcdrent celte extirpa tion; cependant nous rapporterons ce que les tmoins ont dit des temps qui ont prcd. Jusqu' sa treizime anne Thrse Tarlufoli jouissait d'une saut parfaite, mais l'poque de la pubert, il a p parut la partie suprieure de la gorge une tumeur de la grosseur d'une aveline, qui bientt gala celle d'un uf de pigeon. Quelle que fut la nature de celte tumeur (appele, par le chirurgieu Grcmonini, tumeur c i s tique ou folliculaire, et par le chirurgien Zannoni, glande tyrode squirreuse, ce qui est plus vraisemblable, car il est-constant que, l'extirpation faite, celle glande manquait la malade), elle tourmentait perptuellement la patiente, et comprimait tellement l'sophage, qu'elle n'oprait que
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difficilement la dglutition et jamais sans douleur. .La malade supporta d'abord son mal avec patience, parce qu'elle esprait que cette tumeur finirait par disparatre; mais les douleurs devenant de jour en jour plus intenses, elle consulta le mdecin Ricci qui fit poser un e m pltre mollient compos de mauve, de mie de pain et de lait. La malade accepta le remde et s'assujettit longtemps ce traitement, quoique l'odeur lui en fut insupportable, qu'elle n'en recueillit aucun soulagement, et que la tumeur ne donnt aucun signe de ramollissement. Alors, Thrse et sa mre, jugeant qu'il tait opportun de recourir des remdes plus nergiques, consultrent le chirurgien Zannoni de Lorette, qui dcida qu'il fallait absolument extirper la t u m e u r ; il en sortit un noyau gros comme un jaune d'uf. C. Jusqu'ici nous avons expos ce qui a prcd l'extir pation, nous arrivons la phase o apparat le sujet du mi racle. L'incision et l'extirpation de la tumeur laissaient une plaie bante, dans laquelle le chirurgien mit de la charpie et je ne sais quel mdicament. Il s'loigna alors, confiant Th rse aux soins du chirurgien Giovanni Sormani qui suivit le mme traitement. Il restait un grand trou, dit la s u r
de la malade, et le chirurgien mit dedans de la charpie et quelqwautre chose... Zannoni, aprs son opration, s'en alla, et le docteur Giovanni continua les soins. Je voyais qu'il meitoit tous les jours de la charpie et qnelqu'autre chose; la miracule dit de son ct : Il restait un grand trou, et le chirurgien y mettait de la charpie ; tait-elle sche ou enduite de quelcjues onguents, je ne le sais pas. Zannoni s'en alla et je restai dans les mains de Giovanni. Celui-ci venait tous les jours me mdicamenler, et il continuait de mettre dans la plaie de la, charpie, peuttre avec quelqiautre chose que je ne sais pas.
7. Ce traitement dura deuxmois,selon cesdeux tmoins, et ils attestent l'un et l'autre que non seulement la malade n'en recueillit aucun soulagement, mais que son mal s'ag grava. Il ne pouvait en elel y avoir que de l'aggravation, puisque les parties coupes' et incises ne se rappro chaient pas, et largissaient au contraire leur orifice. *Le pus form dans le fond de la plaie, la creusait de plus en plus; bientt les contours s'endurcirent et formrent une
:?7i
fistule
dit
8. Celle description dsigne clairement une fistule vri table, car selon Cclsc : fistie est le nom d'un ulcre troit. Le docteur Sauvage dit : La fistule se reconnat une
petite ouverture de la peau qui se continue, intrieure ment, el par un conduit plus tendu, termin par un ori fice calleux. La plaie de Thrse tait haute, suivie d'un
ferme, elle gardait sa hauteur et sa profondeur rieure, sa bouche seule s'tait contracte. Elle troite, formant extrieurement une petite bouche. tait calleuse, car au dehors elle formait un anneau
comme un cordon dur. Ses lvres grosses et dures avaient la forme d'un anneau. Le chirurgien Sonnant a vu ces choses, et parce que ces fistules sont difficiles gurir, cause de la callosit, laquelle, si on ne peut If enlever, les rend incurables, il essaya de la dtruire par des caustiques.
Lechirurgien Giovanni,dit la maladeje ne sais pourquoi, me touchait avec la pierre infernale, mais bien en vain, car., dit-elle, il s'est pass deux mois, sans que j'aie prouv autre chose que les douleurs les plus aigus: au lieu de gurir, je souffrais davantage. 9. Donc la fistule tait dj parfaite des ce moment, au milieu du mois d'aot de Tanne 1780, lorsque Thrse vint dans la famille Natinguerra Montegranaro. Et en effet tous ceux qui virent alors la malade, dcrivent la fis tule avec des traits si prcis, qu'il n'y a place au cun doute. Ainsi le prtre Koochia qui demeurait dans la mme maison que la famille Natinguerra, dpose ainsi :
Thrse Tarlufoli fut amene ici en 1780. Je vis qu'elle avait ce mal au milieu de/la yorge, el qu'au dehors elle avait un anneau gros el dur, du diamtre peu prs d'une DEMIBAioQUE ou wxmmo,environ 25 mil Inn trs, fort dur,
comme je Vexprimentai par le toucher, el au milieu il y avait un petit trou d'o dgouttait une matire pourrie. Josepb Nalinguerra dpose ainsi : La fte du principal pa tron de Givita-nova, saint Maron, tombait le 18 aot; nous nous y transportmes,mon pouse dfunte et moi. Pendant que nous y demeurions, la mre de Thrse vint nous trouver, et nous pria de la prendre avec nous, ce qui ft qu'elle nous accompagna dans notre retour Montegranaro. Quand jela vis pour la premire fois, la fistule tait forme, elle tait au milieu de la gorge : on y voyait un cercle calleux d'une couleur blanche, el, au milieu, unpelit ori fice d'o sortait une matire liquide de la couleur et de
la fluidit du pus. Laurentia F e r n n i , la domestique de Ber nardine Natinguerra, raconte que sa matresse alla passer quatre jours Civita-nova, et qu' son retour elle amena avec elle la jeune fille; elle ajoute: j'ai vu son mal, il tait au milieu de la gorge sous e menton; par dehors c'tait comme une racine ronde, et au milieu il y avait une bouche qui sans cesse laissait couler le pus. Il n'est donc pas tonnant que le chirurgien ntonacci, qui on confia cette, malade, aprs avoir constat ces faits, ail dit que c'tait une fistule; il n'est pas tonnant que les professeurs de mdecine et de chirurgie l'aient dclare mie fistule. 10. Aussi, Je docteur Antonacci, persuad que toutes tentatives resteraient inutiles si on n'anantissait pas la partie calleuse, commena par employer les caustiques les plus nergiques. Dans cet orifice, ditla sur de Th
rse, on mit la pierre infernale et d'autres remdes trs-puissants; ma pauvre sur jetait les hauts cris, tant elle souffrait. La miracule * dit de son ct : Ils m'appliquaient certains remdes trs-violents qui me cau saient de grandes douleurs, comme la pierre infernale, le feu mort, le prcipit. Et dom Natinguerra : Elle fut con fie Antonacci* qui entreprit la cure. Il employa de puis sants caustiques afin de dtruire la callosit; mais en vain, car tous ces remdes, quels qu'ils fussent, ne procuraient a l'infirme que tourment et douleur. Ils restaient tous inefficaces et inutiles. C'est pourquoi le chirugien jugea
qu'il fallait tenter les moyens extrmes, et ce que le feu ne pouvait donner, il le demanda au fer. Le chirurgien,
continue Natinguerra, voyant l'inutilit de ses mdicaments
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se dcida en venir l'opration par le fer. Et la g u r i e : le sieur Antonacci disait qu'il fallait en venir la section, comme il fit; il en sortit du sang, et je sentis une grande douleur ; puis il continua me soigner : Urne mil d'abord la sonde, pratiqua la suture, el recouvrit la place de charpie avec du prcipit, de la polasse caustique,
etc. Le dix-septime tmoin dit encore : Antonacci lui coupa cette racine ( c'est--dire la partie calleuse), et jele sais parce que je la tenais fortement pendant l'opration; il prit une aiguille longue et recourbe; avec cet instrument Il enfila la racine, la lira dehors et la coupa avec le fil el le fer; la pauvre petite hurlait de douleur. 1 1 . Mais tout cela tait inutile, comme le quatorzime
tmoin le dit : Le mdecin Antonacci ne put venir bout de la gurir; ce bord calleux, cet anneau en forme de cordon, bien qiC entaill par Antonacci, se reforma de nou veau comme je' F ai moi-mme vu; et Natinguerra:
Ce remde fut encore inutile, quoique fort douloureux, parce que ou il ne russit pas trancher la callosit, ou s'il y russit, elle no fut pas coupe tout entire, oubien elle se
reforma promplemenl comme auparavant. Et la gurie :
depuis que le seigneur Antonacci me fit une seconde op ration, la chose alla toujours de mal en pis. Il employait le prcipit et le feu mort. 12, Deux mois se passrent, pendant lesquels la malade fut soumise ces tortures do la chirurgie. Aprs ces deux mois, dit la gurie, Antonacci partit; ce fut au mois de novembre, car la cure avait commence vers la fin d'aot. Aprs le dpart d'ntonacci, il parait qu'on n'eut recours aucun chirurgien jusqu' l'arrive de Cremonini, c'est-dire jusqu'au mois de mars 1782 : peut-tre pendant ce temps fut-elle visite par quelque chirurgien des villages voisins, ou par un mdecin qui remplissait les fonctions de chirurgien. Quoi qu'il en soit, il est certain que la ma lade, fatigue d'avoir endur de si longues et si inutiles souffrances, repoussa toute mdication, au tmoignage du prtre Rocchia, qui demeurait dans la mme maison. Je ne saurais dire, ou plutt je ne m& souviens pas des mdi caments employs par Anlonnacci, ni pendant combien de temps a dur son traitement. Seulement j'ai not trois
circonstances... La seconde c'est que la malade tait lasse
de souffrir IPS grandes douleurs gui lui taient infliges, soit par la main du chirurgien, soit par les caustiques, et cela sans lui procurer aucun adoucissement. Aussi refu sait-elle toute espce de soins. Ce qui s'accorde bien avec
ce que rapporLe le chirurgien. 1 3 . Rendons-nous compte maintenant de l'tat de notre malade,aprs que, prive de toutremde clIe fut abandon ne par le chirurgien Antonacci. La fistule tait-elle reste dans le mme tat? On ne saurait avoir d'hsitation sur ce point, si on se rappelle tous les caractres pathognomiques dj numrs, savoir : la callosit, le petit orifice extrieur, la profondeur, la qualit du pus qui dcoule de la fistule; ensuite, les effets et les douleurs causs par ce mme pus enferm dans les canaux ou sinus de la fistule. Nous avons va Celse donner le nom de fistule un ulcre calleux; et Hippocrate a dit : Il y a une masse charnue leur orifice. Dj la sur de la malade, parlant du temps qui suivit l'opration, a d i t : Cela ne servit rien ; l'extrieur tait un orifice avec un anneau ou cordon dur, et l'ouverture avait le diamtre d'une demi-baioque, 25 millim. Le quatorzime tmoin : Cette matire c a l leuse, en forme d'anneau ou de cordon, bien q u ' i n cise, se reformait denouveau,comme je l'ai vu,ct elle con tinua ainsi : Et le seizime tmoin : La callosit (aprs
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l'incision) se reformait subitement pour revenir d son pre mier tat. Le dix-neuvime tmoin : Au dehors on voyait comme des lvres et comme un bouton rond.
14. Nous avons vu aussi que la fistule tait un ulcre troit, et Emullerus a dit avec justesse (prax. lib. VJ, chir. md. sect.IIl, c. m) : il est un vice qui accompagne ces fistules, c'est que leur orifice est trs troit. Or c'est toujours avec ce caractre que la plaie de Thrse est dpeinte, aprs l'opration du chirurgien Antonacci. La
s u r do Ja malade a clt : Le milieu de l'orifice tait troit,
trs-troit; et le prtre Rocchia: Quant aux symptmes du mal, ce sont ceux qui ont t dcrits plus haut, c'est-dire, que l'ouverture est trs-troite. Et le dix-neuvime
tmoin : Au milieu existe un tout petit trou.
15. En outre ia fistule doit rejeter au dehors un pus s reux ou matire purulente, Hoffmann fdissert.de list. max. I 4), dit: La fistule est un ulcre sinueux, troit, calleux,
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distillant sans cesse une matire purulente ; or la fistule de Thrse dversait sans cesse de ce pus, de sorte que, pour ne pas souiller les linges, on adaptait l'orifice des morceaux de toile de lin ou de soie. C'est ainsi que le dixneuvime tmoin dit : Le pus qui dcoulait de celte ouver ture tait fluide, et il coulait toujours ou presque toujours. Dans certains moments Thrse tenait sur le mal un linge pour ne pas tre salie par les matires qui s"chappaient; il arrivait souvent que, pendant le diner, alors qu'elle ne tenait pas elle-mme le linge d la main, le pus sortait et nous causait du dgot. El le tmoin dix-huitime : elle tenait sur la place itn linge qu'elle soulevait de temps en temps pour saisir ce qui sortait; car incessamment il suin tait au dehors un liquide purulent. El Natinguerra : De cette ouverture il sortait des matires liquides qui avaient la qualit et la couleur de pus ou matire cuite: elle ne voulut pas de chirurgien autour d'elle, parce qu'elle tait trop tourmente. Elle avait un petit linge qu'elle mettait de temps en temps pour empcher les ma tires de souiller son mouchoir de cou. Et la malade ellemme ajoute : Ces matires sortaient du mal trs souvent, je puis mme dire que c'tait toute la journe. La sur de
la malade dit de son cte: Les matires putrides coulaient toujours. 10. Mais, outre la distillation de la sanie, il faut encore tenir compte des symptmes qui prcdaient cet cou lement, car ils donnent la certitude que la plaie de Thrse tait profonde et sinueuse, ce qui est un autre caractre pathognomonique de la fistule.Comme ce caractre sinueux ne tombe pas directement sous les yeux, les tmoins nepeuvent en donner la description. Mangetus a dit: (Bibliothec. medica, vox. fistula). La fisttde est un sinus, etc., auquel on ne peut pas appliquer facilement les remdes : l'orifice, en effet, est trs troit, le fond large et calleux; c'est de plus un rceptacle de pus abondant, o s'amas- . sent des matires virulentes. Leur coulement est con tinuel. Si donc nous dmontrons que l'ulcre de Thrse tait rellement un rservoir considrable de pus, il apparatra que cet ulcre tait profond et sinueux. Ecoulons les tmoins : Thrse raconte qu'elle commena prouver celte incommodit chez elle avant d'aller
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LES SPLENDEURS*DE LA FO
Monlegranaro: Je ne sentais pas autre chose, dit-elle, que des douleurs aigus et profondes, et au lieu de gurir, il sor tait de ce trou des matires purulentes ; quand elles taient sorties, j'prouvais un peu de soulagement, mais peu peu ces matires s'amassaient de nouveau, et la douleur augmentait en proportion, Antonnacci, parlant des mo ments qui suivirent son traitement, dit : La douleur tait continuelle, mais il survenait un lger soulagement ; je puis mme dire que'la douleur cessait lorsque la cavit tait vide pas les coulements de Vorifice; mais les douleurs revenaient aussitt que la formation d'un nouveau volume de matires recommenait. Et la g u r i e : Ces matires,
quand elles se formaient et demeuraient dans l'intrieur, non-seulement me causaient une douleur aigu, mais en outre me faisaient sentir une grande gne la gorge quand je mangeais; aussi je mangeais lorsque ces matires v e naient de sortir, car du moment qu'elles taient sorties je ne ressentais pas cette trs grande gne. 17. Dans cette dposition je voudrais noter deux choses; ces douleurs lancinantes, aigus, piquantes, qui accusent la prsence de la sanie virulenie, et celte douleur la gorge lorsque le manger passait, douleur qui cessait lorsqu'elle prenait la nourriture aprs la sortie de ces sanies.Cela inclique clairement que ces matires corrompues taient assez abondantes pour presser l'sophage et mettre obstacle la dglutition ; ce qui n'aurait pas pu avoir lieu si la plaie n'avait t caverneuse et assez profonde pour recevoir ce pus abondant. Ces malaises que la malade prouvait, les autres pouvaient aussi les conclure, soit des signes irrcusables de douleur, soit de l'inspection des parties qui rougissaient et se tumfiaient quand la sauie, venant augmenter, s'accumulait dans la plaie, et qui reprenaient leur aspect accoutum avec l'coulement du pus. C'est ce que nous dit le prtre Rocchia : Quand
les matires nouvelles se reformaient, on voyait le dia mtre de la callosit extrieure se gonfler, et cette partie gonfle rougissait; alors la malade non-seulement se lamentait dans sa douleur, mais de plus ne pouvait pas avaler la nourriture, la dglutition devenant trs difficile; finalement il tombait une petite crote; les matires com menaient sortir, elle se trouvait soulage^ le gonflement
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s'vanouissait
et les parties
prenaient
Vaspect
ordinaire.
Le mme tmoin ajoute encore : Dans le cours de la maladie, il y avait des moments o Thrse avait un assez bon visage/d'autres fois elle tait ple et abattue; ceslats se succdaient selon les vicissitudes de la maladie. Voici pourquoi : Quand la matire contenue dans la fistule s'tait procur une issue, elle recouvrait son aspect naturel, et elle retrouvait sa vivacit habituelle; mais quand les matires s'engendraient, que la partie malade se gonflait, elle retombait dans d'atroces douleurs qui la Taisaient se la menter; alors disparaissait celte vivacit qui tait dans sa nature, la pleur el l'extnuation revenaient. Choses s e m blables sont affirmes par le matre de Thrse et par une domestique son amie. Toutes ces dpositions confirment la gravit des douleurs, la difficult de la dglutition, et t moignent, par consquent, d e l qualit des matires r e jetes, de la profondeur de la plaie et cle ses sinuosits. 18. Quoique jusqu'ici nous n'ayons produit aucun t - ' moignage de mdecins ayant examin la plaie de T h r s e ; l'origine de la maladie, ses progrs, ses symptmes, la nature dn traitement, son inutilit, caractrisent si mani festement une fistule, que le moindre doute n'est pas admissible. Nous avons une connaissance suffisante de sa cause dans la profondeur de la plaie (trou, fosse), sur venue la suite de l'extirpation de la tumeur, qui peuttre n'ayant pas t suffisamment bien vicie, a laiss dans les parties internes des restes dtachs del sanie virulente; maintenant, considrablement rtrci, l'orifice n'a plus pr sent qu'une petite ouverture ronde, en mme temps que la plaie se transformait en un ulcre caverneux. Il n'y avait pas encore de callosit pour constituer la fistule; mais elle s'est bientt forme, a circonscrit l'orifice. Il fallut alors que lasaiiiepritsonmouvementinlermitlent.de formation et d'jection, avec-tous ses symptmes, rougeur de la partie affecte, tumeur Ja gorge que pressait l'sophage, dou leurs aigus qui abattaient la malade, etc.; I o ut cela in diquait bien une fistule, une fistule avec tous ses carac tres, plaie profonde, orifice troit, caverneuse, laissant s'couler par intermittence des matires ichoreuses et f tides. En confirmation de tous ces signes,ajoutons le mode de traitement le plus puissant devenuinutile.Le D Sormani
v r
d'abord, puis Antonacci, employrent les plus violents caustiques pour dtruire la callosit, ainsi que les livres de mdecine le prescrivent. Mais tout, mme, plus tard, l'emploi du fer, fut inutile, comme on devait s'y attendreRien ne parvint runir les chairs, tant parce q u e le col se dtruit trs-diflicilement, que parce que le pus vi rulent s'coulanl sans cesse des parois intrieures, en raison de la profondeur de l'ulcre et de l'lroitesse de l'orifice qui s'opposaient son issue immdiate, empchait les parties spares de se runir. 19. Nous pourrions dj regarder comme dmontres l'existence, la qualit et la gravit de la maladie. Mais le chirurgien Cremonmi l'claira d'un jour plus v i dent encore, en parvenant sonder la plaie fond, au commencement d'aot 1782, Il en examina la partie ext rieure, la profondeur, les contours intrieurs varis ; cl, en y introduisant une sonde, il a pu donner la des cription de la fistule; il l'a fait avec tant d'exactitude et de fidlit, qu'on ne peut pas en donner de plus parfait.
Selon Mangetus {Biblioth., med., verbo fistula, Le fistules se reconnaissent principalement par la sonde qu'on introduit dans le fond de la plaie, afin de dcouvrir les espaces el les directions envahis, el d quelle profondeur elle pntre.
Voyons maintenant ce qu'en dit Crcmonini lui-mme : J'observai la plaie au dehors,je vis une troite perforation environne de lvres dures, de callosits formant un cercle. Je pris la sonde ou stylet, et je l'introduisis dans,la cavit, o elle pntra perpendiculairement sur une longueur d'en viron un demi-poucp, entre les deux muscles dpresseurs de la mandibule infrieure, le muscle plat miotle et le biventre ou digastrique. En voyant cela, et pareeque l'ou verture tant perpendiculaire, j'aurais d ne pas arrter la sanie, mais la faire refluer au dehors; et considrant que cela n'arrivait pas toujours, que l'amas du pus causait la malade de plus grandes douleurs, qu'elle en prouvait mme de la gne pour parler, je supposai qu'il pouvait
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exister un autre foyer du mal dirig horizontalement vers la trache, et daus lequel le pus s'amassait. Mon jugement n'tait pas erron; car, en me servant de la sonde, je vis qu'elle pntrait jusqu'aux deux anneaux cartilagineux de la trache, entre les muscles sterno-thyrode et stornohyode. Comme je l'ai dit prcdemment, ce canal avait la longueur d'un demi-pouce ; au fond se trouvait une pe tite callosit de la grosseur d'un pois ; elle iail adhrente un petit noyau que je reconnus non-seulement avec la sonde, mais que je sentis avec les doigts. Ces deux sinus aboutissant un mme orifice externe trs troit, prsen taient, je l'ai dj dit, l'intrieur, une capacit plus large. Eu gard tous ces signes, eu gard la dure du mal ctaux effets produits, je crus que ce mal tait un ulcre fistuleux, sinueux, calleux, se rapprochant d l'ulcre cancreux. Ce qui m'induisait porter ce jugement, c' taient spcialement les matires sanieuses d'une couleur jaune el verdtre, et l'odeur ftide qu'elles exhalaient. Pour les mmes raisons, j'tais port croire que le mal avait bien pu atteindre Fun ou l'autre cls deux anneaux de la trache. Mais je ne pus acqurir la certitude de cette p r somption, la malade se refusant de nouvelles expriences avec la sonde. 2 1 . Cette description de l'ulcre n'est autre chose qu'une parfaite et trs claire confirmation de tout ce que les tmoins nous ont rvl des caractres palhognomoniques de Ja fistule do JVfaie Thrse et de la nature de ses suppurations. Dans cet tat de choses, le chirurgien ne pouvait tenter qu'une opration, c'tait de ramener l'ulcre calleux, troit et profond l'tat de plaie simple et ordi naire, et il ne pouvait y arriver qu'en employant les caus tiques pour dtruire d'abord la callosit. C'est pourquoi, poursuit-il, persuad qu'il fallait exterminer le principe du mal dans son sige principal, el appliquer un puissant caustique compos de quelques poudres escharoliques dans le but de dilater Ponlice cl de dlniire la callosit, je le fis; mais impatiente par la douleur qu'occasionnait ce traitement, la malade arracha le caustique, et ne voulut plus user d'aucun autre remde. Je l'amenai cependant, encore une fois, accepter les caustiques.Je lelis, mais avec le mme insuccs, el elle protesta contre toute lunlalive
nouvelle et dclara qu'elle ne voulait plus recevoir mes soins. 22. Or ces choses arrivrent ainsi que le dit le c h i rurgien, au milieu du mois d'aot 1782, c'est--dire neuf mois avant la gurison miraculeuse, et depuis je ne lui ai plus rien ordoun. Ceci est confirm par le prtre Recchia : En aot, il entreprit la cure de cette malade; je sais qu'il lui appliqua quelque caustique, mais la jeune fille impa tiente refusa de le supporter plus longtemps, et, autant que je puis me souvenir, le seigneur Gremonini ne fit rien de plus. Thrse elle-mme affirme qu'elle ne vou lut plus de mdecin autour d'elle, et cela pendant long temps : Dans l anne de ma gurison je n'acceptai plus aucun remde. 2 3 . Or'si,.ds le mois d'aot, 1782, la malade resta dans l'tat qui vient de nous tre dcrit par le chirurgien; si, aprs le mois d'aot, elle n'usa d'aucun remde jusqu'au jour de sa gurison qui arriva au mois de mai de l'anne suivante, tous ceux qui savenl que la fistule est par ellemme trs-difficile gurir, mme en employant de puis sants remdes, ne pourront clouter que cette malade soit resie sans amlioration pendant neuf mois, et cela lors qu'il s'agissait d'une lisinle invtre atteignant une artre principale et tendant tre de nature cancreuse, comme le montrait la qualit, particulire de la sanie : ds lors donc la maladie tait ingurissable. Gremonini avait dit trs clairement que mou mal tait sans remde. Le chi rurgien lui-mme le dclare: le mal tait incurable, car il m'tait impossible de trouver aucun remde radical: je me mis croire quM tait absolument ingurissable. Ce qui est confirm par le prtre Recchia : qui attribue Cremonini d'avoir dit que ds lors la maladie lait absolument i n c u rable . C'est pourquoi, pour viter tout ennui aux vnrables pres consulteurs, nous nous abstiendrons de citer d'autres dpositions des tmoins sur ce point, car ce que le chirurgien avait prvu devait ncessairement arri ver : Je la voyais chaque jour, dit-il, souffrir, sinon sans discontiuualion, du moins avec des intermittences mesures par le temps que le pus mettait se f o r m e r ; et, pendant celte formation, elle se tordait avec vio lence, s'emportait, se lamentait continuellement, et
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cola dura jusqu'en 1783, peudanl les mois qui suivirent Pasques. 23. Il convient cependant de rappeler les rcits des t moins sur l'tat de la malade dans les jours qui prcdrent immdiatement la gurison, pour en rendre plus clatante l'action du miracle (1). Le chirurgien rapporte donc : trois jours avant le mi racle de la gurison je me souviens trs-bien que je la vis dans les angoisses. Si peu que je louchai la plaie je pus constater qu'elle tait trs-enfle comme cela arrivait toutes les fois que le pus tait ramass pour sortir. Il y avait en outre un cercle d l'orifice, comme un anneau calleux; le mouchoir avec lequel Thrse essuyait sa plaie m'a prouve que les matires sanieuscs n'taient nullement amliores dans leur qualit, mais qu'elles taient de na ture plus mauvaise encore que je ne l'avais observ autre fois : C'est pourquoi j'entrai chez madame Bernardine (la matresse de Thrse), et je me rappelle que je lui dis : celle jeune fille ne vent pas me croire ; mon pronostix cependant s'est vrifi : la maladie est incurable comme le sont les ulcres fisluleux et cancreux. Et plus bris : Irois jours au plus avant la gurison j'ai vu conserbes dans son mouchoir ces matires sauteuses, jauntres, verddlres el ftides, comme elles taient auparavant, et peut-tre de plus mauvais caractre. Outre cela, si peu que je Val touche j'ai vu ce mal en forme d'anneau calleux, avec gonflement, indice de la production et de l'accumulation du pus dans le sinus fisluleux : je crois pouvoir affirmer que le nud avait persvr dans sa gravit el son terrible caractre, jusqu'aux moments les plas rapprochs de la gurison.
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24. D'autres encore ont dpos de l'tal de la malade a des moments rapprochs du miracle. Ainsi parle le prtre ficchia : il est certain que dans les jours qui ont prcd le miracle, el spcialement dans la soire qui prcda la nuit la fin de laquelle ce prodige s'opra, la pauvre jeune fille se trouva dans des angoisses et des souffrances encore plus grandes qu' l'ordinaire; la fistule persistait
(1) Pour les relations prcdentes voir le sommaire de ia page 50 h
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dans le mme tat, en outre, le cordon constamment dur tait trs gonfl et enflamm, signe de la prsence des matires de mauvaise nature qui allaient s'chapper. Et Natinguerra : Dans les moments trs-rapprochs deFins tant de la gurison elle tait fort mal, jusqu' la fin de la nuit laquelle succda le miracle. La gurie dit de son ct : La d o u l e u r tait continuelle, j'prouvais il est vrai quelque soulagement, je puis mme dire qu'aprs le rejet des matires je ne souffrais p a s ; mais les douleurs revenaient un instant aprs, parce que de nouvelles m a tires se formaient pour une autre vacuation. Je continuai de souffrir ainsi jusqu' la fin de la nuit dans laquelle survint le miracle ; et mme vers ce dernier soir je fus plus obsde par les souffrances qu' l'ordinaire; le cordon calleux tait gros autant l'ordinaire. 2f>. Nous trouvons dans l'image du vnrable serviteur de Dieu apporte la malade, un tmoignage bien plus clatant de la gravit de la maladie, immdiatement avant le miracle. La malade dclara qu'elle Pavait pose s u r sa gorge la nuit mme;, qu'elle la chercha le malin son rveil, et qu'elle la trouva couverte et toute souille de pus et de sanie. Tout le jour suivant elle a t vue et examine par les nombreux visiteurs de ce beau jour. La gurie racontait lotis qu'elle avait pos celle iinagesursa gorge, sur le mal, qu'elle s'endormit et qu'en s'veillantelle la trouva s u r son paule gauche, toute charge de matires putrides. Le prtre Recchia parlant de la persvrance de la fistule jusqu'au moment de la gurison, dit : La preuve qu'il en ft ainsi, c'est que l'image du vnrable Benot-Joseph, que la malade avait pose s u r la fistule, fut toute couverte des matires ftides rejetes par l'orifice de la plaie. Et Natinguerra : L'image portait comme tmoin du prodige la tache laisse par les matires puru lentes sorties de la fistule; elles taient devenues sches et luisantes comme du talc: Le chirurgien ajoute: Il me fut donn de voir cette image et je remarquai les taches de la sanie qui l'avait souille; chose remarquable, quelque dessche que lut cette matire, j'y appliquai mon odorat, elle conservait encore une odeur fonde...
2 6 . S'il est constant maintenant par un grand nombre de caractres pathognomiques que la maladie de Thrse tait
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vritablement un ulcre fisluleux, sinueux, invtr et calleux, si le pus qui en manait prouve en outre que cet ulcre prenait un caractre cancreux ; si tous les symptmes runis en faisaient une maladie extrmement difficile gurir, impossible mme gurir dans Je cas spcial* cause des parties nobles menaces par le voisi nage d'un pareil centre de destruction, cause aussi de sa profondeur qui ne permettait pas l'application l'in trieur de caustiques puissants; si col ulcre dj ingurissable de sa nature a t abandonn lui-mme p a r T h o r r e u r de la malade pour les grands remdes; si enfin la nature de la maladie, le gonflement de la partie malade, la rougeur, la callosit, les douleurs, et la viru lence des matires sortant de cet orifice ont dur jusqu' la gurison, il faut qu'on nous accorde, que l'existence, la nature, la gravit de la maladie objet ou sujet du miracle sont pleinement dmontres.
ARTICLE DEUXIME
LE MOYEN DU MIRACLE OU l/lNVOCATIOK.
27. Quoique Thrse convaincue de l'inutilit des moyens humains pendant sa longue et terrible maladie, eut sou vent implor le secours de Dieu et des saints, elle n'en avait reu aucun soulagement. Dans le cours de ma longue maladie, dit-elle, je me suis recommande tous les saints du paradis, et toujours le mal a suivi son cours. Mais lorsque le mal fui arriv son dernier terme de gravit, cl que la malade fut sur le point de succomber, mourut Rome Benoit-Joseph Labre dont la renomme de saintet se rpandit en un instant, avec ses images, jusqu'aux extrmits de l'Europe. Une de ces imagos fut apporte Thrse par Je sieur Joseph Capilano, son matre. Elle la reut avec un sentiment trs vif de reconnaissance, qui lui faisait rpandre des larmes abondantes el douces, lorsqu'elle jetait les yeux sur l'image de Benoit-Joseph; on voyait qu'elle avait mis en lui toute sa confiance. L ' i mage du pauvre mendiant, mort en odeur de saintet, excita mme cette confiance qui a coutume de prcder les g u risons miraculeuses. Je me recommandai ds lors lui
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seul, et lui donnai tonte ma foi. Je pris l'image et la posai sur la place du mal... je me recommandai ce serviteur de D P U , en le priant de m'accorder ma guri son... 28. Le lendemain elle annona tous qu'elle avait mis sa confiance m Benoit-Joseph, elle disait hautement tous qu'elle avait implor le secours du vnrable serviteur de Dieu. Son chirurgien a dpos ainsi : Elle me disait s'tre recommande au serviteur de Dieu, et qu'elle avait appliqu son image sur le mal. Nous avons ensuite le prtre Recchia, et te matre de Thrse, qui affirment les faits dans les mm^s termes. Son chirurgien dit encore que depuis, soit qu'elle fut assise, qu'elle travaillt, ou qu'elle fit quoique ce soit, cette jeune fille avait devant elle cette image; pendant un grand nombre de jours a p r s , le s o u venir du saint lui remuait si grandement le cur, sa con solation tait si grande qu'elle fondait en larmes. Depuis la venue de cette image elle n a parl d'aucun autre saint, c'est lui qu'elle invoque, c'est lui qu'elle reporte sa gu rison. et c'est vers lui seul que sesout leves ses vives et longues actions de grces.
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ARTICLE TROISIME
LE DERNIER TRRM1 HO M1UAGLK OU LA GUtilUSON l'AUPAITIS ET 13URAHU2. INSTANTANE,
29. La gurison instantane el parlai te nous est prouve par le sommeil placide qui suivit l'application de l'image sur la plaie, cause auparavant des douleurs si cruelles: Avec cette image je. vie mis ait lit, el je m'endormis, dit la miracule. Je dormis avec placidit toute la nuit, chose depuis longtemps inconnue pour moi, car dans les autres nuits j'tais souvent rvei 16e par la violence de la dou leur Donc peine l'image avait-elle touch la plaie, que les douleurs s*vanouissaient, ce qui ne pouvait avoir eu lieu naturellement, car la partie malade tait gonfle et enflamme, comme il arrivait toujours quand la sanie amoncele tait prte sortir. Ajoutons encore que ce soir-l, elle avait t plus tourmente, plus tenue veille par la souffrance que les autres jours, et puisque la d o n -
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Jour est le signe de la maladie, il foui conclure que le mal avait disparu. 30. Que la maladie et disparu compltement, on peut en juger par ce que dit Thrse en se rveillant, aprs ce merveilleux sommeil : quand je vie rveillai le malin, ditelle, je ne sentais plus de mal d la gorge, je portai ma main pour 'me rendre compte de son Mat actuel, je ne trourai plus le cordon, la gorge tait souple, V ouvertur? tait ferme, tout tait guri. Je un pouvais pas voir lapartie gurie, j'allai la glace pour Vobserver, el je vis que tout ce qui tait malade s'tait vanoui, la peau s'tait reforme et avait recouvert la plaie, il ne restait qu'une, toute petite racine pour indiquer la place. Et plus loin... Quand je fis l'application de l'image, j'tais fortement endolorie par les matires corrompues qui allaient sortir comme de coutume au dehors, je sentais le cordon dur ou l'anneau : l-dessus je m'endormis; je m'veillai le matin... et je ne sentis plus de douleur. Je portai ma main la gorge et je trouvai le trou bouch; le cordon circulaire s'tait vanoui; la chair tait molle, je pouvais la loucher, la pincer, la plier sans rencontrer rien de dur.. Je me re gardai encore au miroir et je vis que la place o tait Je mal tait parfaitement,saine, comme actuellement., que seulement encore comme aujourd'hui un petit signe de chair blanche, comme une radicelle, avait pris la place occupe par la fistule. 31. Le chirurgien n'en parle pas autrement; et il la vil immdiatement aprs sa gurison: Jo vis Thrse, elle me dit avec joie qu'elle avait t 'miraculeusement gurir dans la nuit mme. Elle nie fit voir le lieu o tait le sige du mul, el je vis avec un tormcmcnl extrme la partie parfai tement cicatrise, la callosit dtruite, la douleur disparue, la chair souple comme ailleurs. Une seule petite cicatrice parfaite, avec tgugments extrieurs indiquaient seuls le lieu o tait autrefois le mal. Je confesse que telle fut ma surprise qud peine pouvais-je retenir mes larmes, et pen dant toute cette journe je restai comme interdit. El ailleurs : Je la vis dans cetle matine et je constatai la destruction de la callosit extrieure et intrieure, la chair reforme, une faible cicatrice n'empchanl pas la chair d'tre unie. Je touchai la partie avec la main, je la palpai et tout tait
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revenu sa souplesse naturelle, je ne trouvai aucun dficit dans la chair. Pour corroborer ce tmoignage, nous pour rions produire ceux du prtre Recchia,du matre de Thrse, de la sur de Thrse et d'autres encore, qu'on peut lire dans Je sommaire d'o sont tirs ceux que nous venons de citer. Mais la gurie et son chirurgien ont si bien dcrit les expriences faites par eux, tant avec les yeux, qu'avec les mains, pour constater la parfaite gurison, que nous regardons comme superflu d'insister davantage. 32. Et, celte gurison n'a pas t seulement parfaite et. subite, mais elle est demeure constante. La miracule disait longtemps a p r s : Je suis toujours demeure bien portante, sans souffrir d'aucune incommodit, j'ai toujours joui del de cette sant parfaite; et son chirurgien ajoute: Thrse et continu de demeurer .Monlegranaro pendant Vespace de trois ans jusqu' ce qu'elle se marit... et elle a joui toujours d'une parfaite sant, sans souffrir d'aucune incommodit relative ou non relative au mal prcdent. Le prtre Recchia dpose de son ct : Celle gurison est demeure constante sans que Thrse ait prouv dans la suite de douleurs d'aucune sorte. Le matre de Thrse, sa sur, tous, confirment ces t m o i gnages. Mais il nous suffira de rapporter le jugcineul de deux chirurgiens qui, onze ans aprs la gurison, furent chargs par les juges apostoliques de la congrgation d'examiner la gurie l'occasion du procs juridique. L'un d'eux a dit : Thrse Tartufoli gurie depuis plusieurs an nes a sa gorge dans un parfait tat d'intgrit, mais elle garde dans une lgre cicatrice le souvenir de sa maladie; et le second : J'ai trouv qu'elle jouissait d'une parfaite sant; son seul aspect tmoigne d'une forte sant et d'un bon temprament, ils me sont une preuve de la parfaite gurison dont elle jouit. 33. Maintenant donc que nous avons bien tabli la gra vit de la maladie, l'invocation du serviteur de Dieu, Benot-Joseph, la gurison instantane, constante, par faite de cette maladie, il resterait encore tablir que celte gurison n*a pas t l'effet d'une crise, mais dans le cas prsent qui pourrait souponner raisonnablement une crise amenant la gurison d'une fistule invtre l Le c h i r u r gien Cremonini a savamment observ qu'une crise devait
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bien reprendre les matires sauieuseselles porter dans un lieu voisin ou ailleurs ; elle aurait pu empcher ( m o m e n tanment) l'effusion de ces matires, mais elle ne pouvait jamais dtruire, anantir la callosit extrieure el int rieure, runir les lvres de la plaie, et remettre les chairs en lat de sant, runir tous les tguments par une cicatrice parfaite. Car pour produire tous ces effets alors mme que la nature et dispos et prpar l'opration, il fallait absolument la main d'un chirurgien, puisque, sans les caustiques, le fer el le fou, les callosits no pouvaient tre dtruites, et il tait impossible sans eux de ramener cetle fistule avec tous ses mauvais caractres l'tat d'une simple blessure, ce qui tait la seule manire d'arriver la gurison. Nous devons donc nous crier avec la miracule: vous voulez que ce ne soit pas un miracle, que Benoit-Joseph ait opr dans ma personne ! Tant de chirurgiens, tant de mdicaments n'ont rien produit, ils ont laiss s'aggraver le mal, et l'image du serviteur de Dieu m'a guri dans un moment. Dieu seul a pu faire tout cela
CHAPITRE T
femme
Je sais que Benot-Joseph a fait un grand miracle nui sur Thrse. On me d e m a n d e ce que c'est qu'un miracle, m a i s je ne suis qu'une pauvre femme ignorante, et je ne puis l'expliquer ; j e sais seulement que les miracles ne sont faits que par Dieu et les saints. A ce sujet j e m c o n t e n t e r a i de vous rapporter ce qui est arriv ma s u r . Il y a de longues annes dj, alors qu'elle n'tait qu'une fdlette, elle avait p e u t - t r e dix ans o u un peu plus, j e ne m'en souviens pas, et elle e n a trente aujourd'hui, il lui survint sous le m e n t o n , vers le milieu de la gorge, une tumeur que Ton disait tre scrofuleuse, et qui la gnait b e a u c o u p . Notre m Dre la conduisit Monte-Lupone o les religieuses conseillrent de mettre sur le mal un certain empltre qu'elles fournirent e l l e s - m m e s ; mais la malade ayant t ramene Civitanova, ce r e m d e ne fut pas approuv par le mdecin Ricci que Ton c o n s u l t a ; aussi o n n e l'employa pas. Pendant ce temps le mal empirait ; la pauvre petite souffrait beaucoup et ressentait une grande
Casa, et la
Madone de B o n c u o r e ; c o m m e le mal augmentait toujours davantage et semblait vouloir aboutir, la fillette fut conduite . Lorette, pour tre e x a m i n e par le chirurgien Zannoni ; celui-ci ne v o u l u t pas l'oprer, parce que ce qui tait dans la tumeur ne s'tait pas encore dtach; mais quelque t e m p s aprs, tant v e n u Civitanova, il fit l'opration, e n ouvrant la t u m e u r avec le f e r ; et j'ai v u qu'il sortit de cette t u m e u r q u e l q u e chose qui ressemblait un petit j a u n e d'uf: il resta une assez grande ouverture dans laquelle le chirurgien m i t de la charpie et quelqu'autre chose. Aprs avoir fait l'opration, Zannoni s'en retourna,
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cl le seigneur Giovanni, mari de la dame Bernardine, qui demeure maintenant, O s i m o , mais qui alors tait chirur gien Civitanova, c o m m e n a donner ses soins ma sur. Je le voyais chaque jour mettre dans la plaie de la charpie et encore autre c h o s e , mais j e ne sais pas q u o i ; ce c|ue je sais bien, c'est que ma s u r allait bien mal, qu'elle gardait le lit, et qu'elle ne pouvait boire que dans un verre b e c . Cela alla ainsi pendant deux mois, sans que rien ne s'amlioi t, et la petite allait toujours mal : alors on se rsolut la conduire Montegranaro, o, pendant deux mois, elle fut soigne par le seigneur Antonacci: je ne sais pas s'il est vivant ou mort, mais il n'est plus h. Montegranaro. Le sei gneur Cremonini le remplaa : c'est le chirurgien qui la soigna pendant plusieurs annes, mais sans s u c c s . Dans l'ouverture de la plaie on mettait la pierre infernale et d'autres caustiques nergiques, et ma pauvre s u r criait beaucoup cause de la douleur qu'elle en prouvait : autour de la plaie, il s'tait form c o m m e u n anneau ou cordon dur, de la grandeur d'une pice de m o n n a i e entre l e q u a t r i n et la demi-baoque; le trou tait trs-resserr au milieu, et il en dcoulait continuellement des humeurs avec du sang; je ne m e souviens pas si ceLte ouverture se fermait j a m a i s ; mais si elle se fermait, j e suit, sre qu'elle s'ouvrait peu aprs. Ma sur continua tre soigne pendant p l u sieurs annes; elle habitait alors la maison du seigneur Natinguerra, chez lequel elle passa neuf ans, tant malade que gurie; m a n i r e et moi nous demeurions . Civitanova; n o u s venions souvent la voir, et la pauvre petite nous di sait toujours qu'elle allait bien mal, que n o u s regardions o en taient cet anneau et cette ouverture, qu'elle ne pouvait plus rsister la douleur qu'elle endurait, et puisque les r e m d e s ne la soulageaient pas, que la douleur augmentait toujours, ou du moins ne diminuait pas, elle ne voulait plus voir de chirurgien autour d'elle. Le mal tait donc ainsi tou jours le mme, quand le bon Plerin vint . mourir Rume. Madame Bernardine chez qui demeurait m a sur lui donna une image du serviteur de Dieu, en lui disant de se recommander son intercession. Thrse le lit; en se mettant au lit, elle plaa cette image sur sa gorge, qui en ce m o m e n t la Taisait beaucoup souil'rir. Lorsqu'elle s veilla au matin, l'image n'tait plus sur la plaie, elle la trouva dans le lit souille de sang et de pus ; elle ne sentait plus aucune douleur; elle s aperut que le cordon n'existait plus et qu'elle tait g u r i e ; et, ue suite, elle alla le dire sa m a! tresse. Je lui rendis visito troib ou quatre jours aprs,
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elle tait aussi bien qu'elle est m a i n t e n a n t ; j'examinai sa gorge, et je vis qu'il n'y avait plus rien, si ce n'est une petite marque blanche h la peau, qui indiquait l'endroit o tait le mal, el on peut la voir encore maintenant. Sept o u huit jours avant sa gurison, quand je l'avais v u e , elle allait c o m m e l'ordinaire; elle avait le m m e trou trs troit avec le mme gros anneau, et, c o m m e l'ordinaire, il en sortait souvent du pus et du s a n g ; et ce que n'avaient pu faire pendant un si long temps tant de r e m d e s , et tant de c h i rurgiens, Benot-Joseph Ta fait en un i n s t a n t ! Voil le miracle que j e connais, et dont j e suis bien informe, p u i s qu'il s'agit de ma sur. Ailleurs le m m e t m o i n s'exprime en ces termes : Je ne peux vous dire exactement combien de t e m p s a dur ce mai; je sais qu'il a dur bien des annes, et dj plusieurs autres annes se s o n t c o u l e s depuis la gurison de ma s u r . Il y a dj sept ans qu elle est marie, e l elle gurit quel ques annes avant son mariage : Voici ce dont je m e souviens bien: dans les c o m m e n c e m e n t s , cette tumeur, qui dura si longtemps, grossissait et devenait plus rouge quand la lune croissait, et elle diminuait et tait plus ple quand la l u n e dcroissait. Depuis que le seigneur Zannoni lui e u t fait l'opration, la pauvre petite n'eut plus de repos. Je suis u n e f e m m e ignorante, j e ne sais pas bien m e x p l i q u e r sur les choses que Ton m e demande ; je dis cependant qu'aprs que le seigneur Z m n o n i lui eut fait cette ouverture profonde et large en lui enlevant avec le fer cette c h o s e grosse c o m m e u n jaune d'uf la plaie se rtrcit petit petit, et autour se forma un anneau rond, o u un cordon dur, au milieu d u quel se trouvait la petite ouverture par laquelle coulaient le pus et le sang. J ai vu que les chirurgiens Antonacci et Gremonini cherchaient largir cette ouverture avec leurs instruments, et la pauvre petite pleurait de douleur. T o u chant les matires qui sortaient de la plaie, j e n e saurais m'expliquer mieux que je l'a fait: c'tait du pus et du sang; s'ils coulaient toujours avec la m m e abondance, j e n e saurais vous le dire; pareeque j'allais bien Montegranaro, mais j e n'y demeurais pas. Ge que je v o u s dis cependant, c'est que Thrse n o u s affirmait qu'on la tourmentait b e a u c o u p , mais que rien au m o n d e ne la soulageait. E n regar dant la place o tait le mal, j e la vis toujours dans le m m e tal; et il tait e n c o r e tel la dernire fois que j e l e vis, sept ou huit j o u r s avant la gurison de Thrse. A une autre interrogation, le tmoin r p o n d : a Avant qu'on ouvrt la t u m e u r , le m d e c i n Ricci, qui habite m a i n -
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ienanl F e r m o , fit mettre dessus un empUtre de mauve, de mie de pain et de lait; et cft empltre tait e m p l o y pour amollir et faire percer la tumeur. On consulta Zannoni, qui vint ensuite Civitanova ; et il lit l'opration en prsence du seigneur Giovanni chirurgien de Civlanova, Ricci n'y tait pas, parce que dj il tait all s'tablir au port de F e r m o , o il est encore maintenant. Giovanni continua soigner ma sur pendant deux mois avec de la charpie, et autre chose encore que j e ne sais dire. Thrse alla ensuite Montegranaro. P e n d a n t deux autres mois elle fut soigne par le seigneur Antonacci, et pendant plusieurs an nes, par le seigneur Gremonini. Ces messieurs cherchaient largir avec le fer l'ouverture do la tumeur ; ils y mettaient aussi la pierre infernale; mais je ne sais pas s'ils employaient d'autres m d i c a m e n t s . Thrse se fatigua des chirurgiens, elle no voulut plus de leurs soins, et, quand elle gurit, il y avait dj un certain temps qu'elle n'employait plus aucun mdicament. Antonacci disait que c'tait une fistule, et que la racine tait reste dedans. Je ne sais pas ce que disait Gremonini. P o u r moi je dis que ces chirurgiens ont tortur ma s u r , mais qu'ils ne Pont pas gurie. Ma bCBiir a t gurie instantanment par l'intercession du vnrable serviteur de Dieu Benot-Joseph Labre. Quand, le soir, elle se mit au lit, elle tait aussi mal que do c o u t u m e ; quand elle se leva D\x malin, elle tait gurie ; et elle se portait aussi bien qu' prsent. L'ouverture tait ferme, l'anneau qui l'entourait avait disparu, la douleur lait tout fait passe et jamais plus elle ne l'a ressentie * en s o m m e , , il m e semble avoir tout dit quand j'affirme qu'elle tait p a r faitement gurie. Il ne reste a u c u n e trace du mal : je la vis trois o u quatre jours aprs le miracle, j e l'examinai bien, et il n'y avait rien autre chose que ce signe qui y est encore prsent, c'est-dire une tache blanche. Je la touchai avec mes doigts, il n'y avait plus aucune duret, tout tait m o u et flexible c o m m e le reste de la gorge. Depuis, ma sur s'est marie, e l l e a eu des enfants, et elle s'est toujours si bien porte que son mari n'a jamais dpens une baoquepour le mdecin et le p h a r m a c i e n . P o u r m o i , j e le dis, la gurison de m a sur est un grand et beau miracle, et il me semble qu'il ne peut s en faire de plus clatant. Tous c e u x qui ont vu et c o n n u ma sur Montegranaro, Civitanova, ou ailleurs, et qui ont appris sa gurison, ont tous dit q u e c'tait un grand et beau m i -
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racle. Vous me demandez s'il s'est trouv quelqu'un qui ne Tait pas regarde c o m m e un m i r a c l e ; j e vons rponds : qui voulez-vous qui s'en a v i s e ? Qui donc p e u t nier la vrit ? Et o voulez-vous trouver u n miracle p l u s frappant que celui-ci?
Huitime
tmoin.
Hya
Je n'ai pas c o n n u le vnrable serviteur de Dieu B e n o t J o s e p h L a b r e ; mais je l'ai e n t e n d u n o m m e r trs souvent i l'poque de sa mort, car alors on parlait de lui partout, et on rpandait aussi partout des quantits considrables de ses portraits : Tanne m m e de sa m o r t , j'ai eu occasion d'en parler plus souvent, parce, que habitant; alors la maison de c a m p a g n e de m o n s i e u r le capitaine Natinguerra, prs de Saint-Elpidio, c o m m e j e souffrais b e a u c o u p d'une fistule que j'avais la porge, ledit capitaine m e d o n n a une image du vnrable serviteur de Dieu, et, par le m o y e n de cette i m a g e , j e fus i n s t a n t a n m e n t et parfaitement gurie. Ce miracle opr dans ma propre personne m e fit concevoir une grande dvotion pour ce serviteur de Dieu ; c'est pour quoi j'en parlais souvent. Je dsire le voir batifi, mas je n e suis qu'une pauvre femme, et j e ne p e u x y contribuer : 'eepre cependant que l e grand miracle qu'il a opr en m o i et que je vous raconterai quand v o u s m'interrogerez, pourra aider sa cause. Je sais bien, moi, que j'ai obtenu un grand miracle, par l'intercession du vnrable serviteur de Dieu B e n o t - J o s e p h Labre, Vous me demandez de v o u s dire ce que c'est qu'un miracle; mais que p t m - j o vous dire, m o i , pauvre femme i g n o r a n t e ? je le c o m p r e n d s , mais j e n e sais l'expliquer ; je dis que les h o m m e s ne font point de miracles, que c'est Dieu qui les fait, et que les saints les obtiennent par leurs intercessions^ et j e crois, et j e suis certaine que le vn rable Benot-Juseph Labre e s t un saint, puisque c'est par son m o y e n q u e j'ai recouvr la sant que j'avais perdue, et qu' prsent j e vais bien, tandis qu'auparavant j'tais t o u j o u r s tourmente par des douleurs. Je vous dirai m a i n t e nant c o m m e n t le fait e s t arriv : j'habitais Civitanova la m a i s o n de mes parents ; j e pouvais avoir environ treize ans, q u a n d , sous le m e n t o n , prs de la gorge, au milieu des muscles dpresseurs^de la mchoire infrieure, il m e vint une tumeur, o u c o m m e u n n u d qui devint aussi gros
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qu'un petit uf, plus gros pourtant qu'un u f de pigeon, mais pins petit qu'un uf de poule. On me dLsait que cette tumeur grossissait quand croissait la l u n e ; je pensais, moi, qu'on se trompait, car elle me semblait toujours la m m e ; mais, qu'elle Put plus grosse o u plus petite, c e q u e je ne peux dcider parce que je ne l'ai pas vue, je la sentais certes bien, elle me causait une grande et continuelle d o u leur qui me lonrmentait toujours : je sentais les muscles se tirer, pas toujours, mais souvent, quand elle durcissait; en m a n g e a n t , quand j'avalais, je sentais un obstacle dans le gosier, et j'prouvais encore une plus grande douleur. Ce mal me vint dans le temps o, sans que je m'explique davantage, les femmes ont c o u t u m e de changer de t e m p r a m e n t : ce fut l le c o m m e n c e m e n t de mes maux. Voyant que cette tumeur ne se rsolvait pas, et me tourmentait tou jours d'avantage, le mdecin Ricci, qui alors exerait sa profes sion Civitanovn, m'ordonna de mettre dessus un empltre de mauve, de mie de pain et de l a i t ; je le fis ; la m a u vaise odeur m e fatiguait, mais le dsir de gurir me fit con tinuer ce traitement; et cependant, la tumeur restait t o u jours dure, on ne voyait pas qu'elle dt se rsoudre. Ma more me conduisit alors chez les religieuses do Montelupone, et l'une d'elles n o u s d i t que mon mal tait une scro fule de femme qui me rongerait partout, et elle nous donna un onguent pour mettre dessus: nous le prmes, mais on ne s'en servit pas. De retour Civitanova n o u s rendmes c o m p t e au mdecin du conseil qui nous avait t d o n n p a r l e s religieuses de Montelupone, et nous lui montrmes 1 empltre qu'elles nous avaient donn. Le mdecin ne l'ap prouva pas, dit qu'il ne servirait de rien, et ordonna de continuer l'usage de l'empltre : en attendant, le mal n'avanait ni ne reculait. Nous avions eu Civitanova un bon chirurgien qui tait all s'tablir Lorette, c'tait le seigneur Galan Zannoni : nous avions confiance en lui, et ma mre voulut nie conduire prs de lui. Il m'examina et dit qu'il fallait en venir, l'extirpation, mais qu'il ne pou vait la pratiquer de suite, pareeque le noyau tait trop a d h rent. Nous n o u s en allmes, et c o m m e on avait dcouvert une image de la Bienheureuse Vierge du Bon-Cur, entre le m o n t Saint-Pierre-dcs-Anges et la tour de Saint-Pa trice, au diocse de Fermo, nous allmes la visiter, ma mre et moi; et c o m m e n o u s nous en retournions, arrives une rivire qui se trouve sur la route, je sentis c o m m e un c h o c qui dtachait le noyau, et quelques jours aprs, nous r e tournmes Lorette auprs du seigneur Zannoiii ; et celui-ci
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BOUS dit que Ton pouvait maintenant faire l'opration. Ma mre ne voulut pourtant pas me laisser Lorette. et elle demandaau chirurgien de vouloir bien s e transporter luim m e Civitanova; le SP pneu r Z a n n o n i y vint quelques jours aprs. peine arriv, il mit la main l'uvre en p r sence du chirurgien rie Civitanova (c'tait le seigneur Gio vanni de Gubbio, et maintenant il n'y est plus); il m e semble que le mdecin tait l aussi : on m e mit une serviette sur la poilrine, le seigneur Zannoni, avec ses instruments, ouvrit la tumeur, le noyau en sortit et tomba sur la ser viette, mais je ne le vis pas, parce que la douleur que j ' prouvai tait si grande que je m'vanouis. Je sais que l'ou verture fut faite en croix, d'abord de haut en bas et ensuite en travers : je sais qu'il y avait un assez grand trou dans lequel le chirurgien mit de la charpie; mais je ne sais pas si cette charpie tait ^ c h c o u imbibe de q u e l q u e o n g u e n t . Je sais qu'aprs l'opration le seigneur Zannoni s'en alla, et q u e je restai enre les mains du seigneur Giovanni qui, chaque jour, venait me panser, en mettant de la charpie dans le trou laiss par l'opration, mais j'ignore s'il y met tait autre chose. C o m m e la plaie, qui d'abord tait assez large, c o m m e n a i t se rtrcir, le s e i g n e u r Giovanni, je ne sais pourquoi, la touchait avec la pierre infernale; du moins j'ai compris que Ton appelait ainsi la pierre avec laquelle il la touchait. Deux UKUS se passrent ainsi; je souffris de cruelles et. poignantes douleurs, et au lieu de gurir, il sort a i l d e m a blessure ries matires p u r u l e n t e s ; quand elles taient coules, j prouvais un lger s o u l a g e m e n t ; mais au fur et mesure qu'elles se reproduisaient, mes douleurs augmentaient. Voyant que les soins du docteur Giovanni n e m e soulageaient en rien,et sachant qu'il y avait Montegranaro un bon chirurgien n o m m Antonacci, m a mre pensa m e conduire tn ce lieu, et c o m m e la cure ne p o u vait tre prompte, elle p n a la dame Bernardine C o m m e n tt!, pouse du capitaine Joseph Nalinguerra de vouloir bien m e recevoir dans sa maison- Cette dame y consenti** et j e demeurai chez elle neuf ans, d'abord malade et ensuite gurie. Le seigneur Antouacci c o m m e n a m o soigner : il dirait que l'on n'avait pas enlev la racine du m a i , et qu'il laudrait encore une fois en venir une o p r a tion ; il la lit : j e perdis du sang et je ressentis une grande douleur : il continua ensuite de me donner des soins ; il mit dans la plaie d abord de la charpie, puis le prcipit, le feu mort et d'autres caustiques e n c o r e , et c o m m e il s'y formait de t e m p s e n t e m p s une petite crote, on e m -
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ployait aussi l'onguent rosat pour la dtacher. Mais le fait est que je n'prouvais aucun soulagement et que le mal allait toujours en empirant. Aprs deux ou trois mois Antonacci quitta Montegranaro, et le seigneur Gremonini, qui y est encore, vint le remplacer. Celui-ci entre prit de m e g u r i r : il ne me fit plus d'opration, mais il continua me mdicamenter avec le feu mort, le prcipit, et d'autres caustiques encore qiil pourra vous faire c o n natre. Quelquefois aussi il introduisait un fer dans la bles sure ; j e ne saurais vous dire . quelle profondeur il pn trait, car je ne pouvais le voir, mais j'en sentais bien la douleur. 11 continua encore quelques mois m e donner ses s o i n s ; mais bien qu'il m'et dit en c o m m e n a n t qu'il avait bon espoir de m e gurir, j'appris qu'il avait dit d'autres personnes, que m o n cas tait dsespr, et qu'il n y avait point de remde m o n mal. En apprenant cette triste nouvelle, j e m e dis part moi : s'il n'y a point de remde, quoi serL-il de me tourmenter c o m m e il le fait? Et quand il vint me voir, je lui dis en face ce que je m'tais dit au dedans de moi. Le chirurgien m e rpondit par quelques m o t s d'excuse, mais je lui rpliquai que je ne voulais plus de mdicaments, et que puisqu'il n'y avait pas de remde m o n tat, il me suffirait de supporter m o n mal sans tre torturs, et que je ne voulais plus voir de chirurgien autour de m o i ; et de fait, j e ne me laissai plus soigner par lui. Il venait souvent chez le capitaine Natinguerra o j'habitais, car il avait son logis dans le m m e palais, mais dans un appartement diffrent: j e le voyais donc souvent, mais je ne lui disais r i e n ; et s'il m e deman dait c o m m e n t j'allais, pour m e dbarrasser de lni, je lui r pondais que je me portais bien, alors m m e que je souffrais b e a u c o u p ; c'est que j'avais peur qu il ne voult r e c o m m e n c e r me tourmenter. Quelquefois il s'approchait de moi et regardait le mal, mais il nu disait rien, car il comprenait bien qu en me soignant il n'aurait rien fait de bon. Quand ma gurison arriva, nous tious au chteau de la Marina o Gremonini venait souvent, moins souvent cependant qu'il n'avait c o u t u m e de faire quand nous tions Montegra n a r o : j e ne saurais donc vous dire avec prcision c o m b i e n de temps avant ma gurison il examina ma gorge pour la dernire fois. Maintenant j e vais vous dire c o m m e n t j e fus gurie. Je m e trouvais fatigue, c o m m e a l'ordinaire, par les grandes douleurs qui me tourmentaient; les matires coulaient tou j o u r s de l'ouverture, et dessous c'tait c o m m e un cordon
LES SPLENDEURS DE LA OI
gros et dur, qui, autant du m o i n s que j'en pouvais j u c e r par c toucher, tait do la grandeur d'un q u a i t r m o ; j e parle ici du cordon, car l'ouverture qui tait au milieu tait petite. La douleur tait continuelle, mais elle diminuait un peu quand 1 h u m e u r , ou pour mieux dire, le pus en s o r l a i t ; mais ensuite elle redoublait quand les matires se formaient de nouveau. Or le seigneur capitaine Joseph apporta, un j o u r , une image du vnrable serviteur de Dieu, B e n o t - J o s e p h Labre, qui venait de mourir h Rome en odeur de saintet, et dont j'avais entendu parler, car on ne cariait pas d'autre c h o s e . Le capitaine m e donna c e l l e i m a g e , en m e r e c o m m a n d a n t de prier le serviteur de Dieu et de lui d e m a n d e r ma guri son. C'tait/justement un s o i r o i i je me trouvais plus souf frante qu' l'ordinaire; m o n mal tait toujours le mme; il y avait ce cordon gros et dur que je vous ai dcrit.plus haut. Jepris cette i m a g e , je me recommandai au serviteur de Dieu en lui d e m a n d a n t de me faire gurir, je plaai l'image l'endroit du mal, et je me mis au lit avec cette i m a g e ainsi p o s e : je m'endormis, et j e reposai tranquillement sans m e rveiller, durant toute la nuit, chose qui m'tait i n c o n n u e depuis longtemps, car, les autres n u i t s , la vio lence de la douleur me rveillait chaque instant. Quand j e me rveillai au matin, l'image du serviteur de Dieu n' tait plus o j e l'avais applique, eiie tait dans m o n lit, derrire m e s paules; j e la pris, et e n Tcx.iminant, j e vis qu'elle tait m a c u l e de pus: c o m m e j e ne ressentais plus aucune douleur la gorge, j'y portai la m a i n ; il n'y avait plus de cordon, la chair tait molle et ilexible, l'ouverture tait ferme; bref, j'tais gurie c o m m e j e le suis mainte nant. Comme je ne pouvais voir-la partie gurie, j'allai au m i r o i r , j e l'examinai bien, e t j e v i s q u e tout m o n mal tait disparu : la peau tait reforme, et il n'y avait l d'autre siguo que cette toute petite raie qui y est encore, et que tous vous pouvez voir. Ce jour m m e , ma d a m e , le capi t a i n e et d'autres personnes encore, dont j e ne m e rap pelle pas les noms, virent le prodige. Je ne me souviens pas si le chirurgien Cremouini vint la maison ce m m e j o u r ou quelqu'un des jours suivants. Ce qui est certain c'est qu'il ne se pa.ssa pas beaucoup de temps avant que p o u r la premire lois il m e vit r t a b l i e : il me dit que j ' tais patTaitemenl g u r i e et que ma gurison tait un m i racle. Miracle j e l'ai c r u , miracle i ont cru ces messieurs, miracle l'ont cru tous ceux qui l'ont c o u n u . J ai rapport les faits tels qu ils se s o n t passs, j'ai cherch dire avec exactitude toutes les circonstances qui les ont a c c o m p a -
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gns; je regrette seulement de ne pouvoir, m o i , pauvre femme, m e souvenir des temps prcis auxquels une chose a succd une autre chose, mais on peut c o m p t e r , et on verra combien de temps a dur m a maladie. J'ai maintenant h peu prs trente a n s ; j'en avais treize quand je tombai malade, et m o n mal a dur jusqu'au t e m p s o Ton c o m m e n a rpandre les images du vnrable ser viteur de Dieu Benot-Joseph Labre, c'est--dire, h m o n apprciation, .pou de t e m p s aprs sa mort. Gomme ma gu rison n'a pas eu lieu h Montegranaro, mais bien au chteau de la Marina, prs de Saint-Elpidio, o m e s matres avaient c o u t u m e d'aller au c o m m e n c e m e n t du printemps et o ils restaient assez l o n g t e m p s , il me semble q u e ma gurison a d arriver dans le m o i s de mai ou dansle m o i s de j u i n , m a i s plutt dans le mois de mai. "Voil tout ce que je puis dire : si je n'en dis pas davantage, et si je m e suis mal exprime, ayez c o m p a s s i o n de m o n ignorance, mais n e l'attribuez pas m a v o l o n t , car j'ai v o u l u dire la vrit en t o u t , et Dieu m e garde de dire un m e n s o n g e . Ailleurs la miracule s'exprime ainsi : Je vous ai dit, dans ma prcdente rponse, tout ce que j e pouvais * v o u s dire. Avant que ne m e vnt l a gorge cette t u m e u r o u ce n o y a u , j'avais toujours t bien portante. Cette t u m e u r et ce n o y a u m e vinrent l'ge de treize ans ; c'est o n c e temps, c o m m e j e le vous l'ai dit plus haut, que j e changeai de c o m p l e x i o n , vous m e comprenez bien : cette tumeur et ce noyau m e causaient plus de gne quand venaient mes poques, parce qu'alors les muscles de la gorge se nouaient davantage ; cette contraction me fai sait avaler avec difficult, et j'en prouvais un grand ma laise. Quoique dans ces temps le mal fut moins doulou r e u x , il m e fatiguait cependant b e a u c o u p ; cela dura ainsi plusieurs annes, mais ma mmoire ne m e permet pas de prciser au juste : le mdecin Ricci m'ordonna l'empltre dont j'ai parl plus haut, pour faire aboutir la tumeur, mais cela ne servit de rien. Il fallut m e mettre entre les mains du chirurgien, et quand ce boyau fut dtach, sieur Zannoni en fit l'extraction avec ses instruments : bien des annes se sont coules entre c e jour et celui de la gurison : on peut cependant en faire le compte; car, Givitanova, j e reus pendant deux m o i s les soins du sieur Giovanni, puis j e vins Montegranaro o j e d e m e u rai neuf ans, les six premiers, malade, et les trois autres, gurie. Aprs l'opration, l a plaie se rtrcit, mais ne se vi. 26
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ferma jamais, eL il e n sortaiL toujours q u e l q u e chose; quel quefois c'tait du pxis seul, d'autres fois c'tait du pus m l avec du sang, ce pus tait c o m m e des fils; et il y avait un anneau rond et dur, au milieu duquel tait la petite o u verture d'o le pus sortait goutte h g o u t t e . Je le sentais, mais j e ne le voyais pas. La douleur tait c o n t i n u e l l e ; j'prouvais bien quelque s o u l a g e m e n t , j e pourrais m m e presque dire q u e la douleur cessait, quand les matires p u rulentes taient e x p u l s e s ; mais cette douleur revenait bien vite, parce q u e le pus se formait de n o u v e a u ; e t i l e n fut ainsi jusqu' cette nuit dans laquelle arriva le. miracle ; l e soir m m e qui la prcda, j'tais plus t o u r m e n t e par la d o u leur qu' l'ordinaire. Cette douleur m e piquait (par c e t t e expression, elle veut dire que la d o u l e u r tait aigu et poignante), et je n e peux vous dire autre chose. Mon m a l tait grand quand j'allai Montegranaro ; cependant, de puis que le sieur ntonacci m e fit u n e n o u v e l l e opration e n disant que la premire n'avait pas t bien faite, et que les racines du mal taient encore dans la plaie (je l'ai compris du m o i n s ainsi, il donnait cela un n o m dont je n e m e souviens pas, il m e semble p o u r t a n t qu'il appelait cela follicule), j'allai toujours de mal en p i s . Civitanova, le docteur Ricci ne ht rien autre c h o s e q u e d'ordonner l'empltre, pour amollir et faire aboutir la t u m e u r . L'opration de l'extirpation fut faite p a r l e chirurgien Zannoni, de Lorette, en prsence du sieur Giovanni, alors chirurgien Civitanova, et, si j e m e souviens bien, aussi e n prsence du m d e c i n Ricci ; mais Zannoni, aprs avoir fait l'opration et avoir pans la plaie avec de la charpie, s'en retourna Lorette, et c'est le sieur Giovanni qui continua m e visiter et m e soigner.
CHAPITRE III
Discussion du miracle.
1. Premires observations critiques du promoteur de la Foi.
1. Afin de connatre m i e u x la nature de la maladie, n o u s en dirons les dbuts, les progrs, e l gnralement les m a u x auxquels elle donna lieu. Voici d'abord le t m o i g n a g e de Thrse e l l e - m m e . Je pouvais avoir treize ans . environ, quand il m e vint sous le m e n t o n , vers la gorge* et au milieu des m u s c l e s dpresseurs de la mchoire infrieure, u n e tumeur semblable u n n o y a u , de la te grosseur d'un petit uf do poule, o u un peu plus < grosse qu'un u f de pigeon. J'en prouvais u n e douleur c vive et continuelle, et cette douleur continue m e t o r t u < rail sans cesse ; en m a n g e a n t , quand j'avalais, j e sentais c un embarras dans le gosier, ce qui m e causait u n accrois sment de douleur. Ce mal se montra l'poque o, sans qu'il soit besoin de m'expliquer davantage, le temprament des femmes a c o u t u m e de changer ; c e fut le c o m m e n * cernent de m e s malheurs. C'tait e n 1777. Thrse, ainsi t o u r m e n t e , s'adressa au mdecin de Civita Nova qui essaya, mais e n vain, d'amollir la tumeur au m o y e n de m dicaments adoucissants, et de provoquer la suppuration. 2 . La malade fut ensuite conduite par sa mre Lorette, vers le chirurgien Zannoni. Celui-ci, aprs avoir vu le m a l dit, pour m e servir des paroles mmes de la j e u n e fille : Qu'il fallait e n venir son extirpation, mais que cela n e pouvait se faire alors, parce que le noyau jetait tropce adhrent. Quelque temps aprs, Zannoni examine de nouveau la malade, palpe la tumeur, et j u g e qu'on p e u t l'enlever, parce qu'il n' y plus d'adhrence. Il se rend d o n c au bourg de Civitanova, afin de pratiquer l'opration. Ce fut, parat-il, vers le milieu de l'anne 1780. E c o u t o n s la mala.de. Zannoni tant arriv, se mit en devoir o p -
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rer, en prsence du chirurgien cantonal de Givitanova, le sieur Jean-Baplisle Sormani. On m e mit un linge sur la p o i t r i n e ; le sieur Zannoni ouvrit la t u m e u r avec ses instruments, et extirpa l'excroissance; elle tomba sur le linge, mais je ne la vis pas, tant tait vive la douleur que j e ressentais, et qui allait jusqu' m e faire perdre c o n (c naissance. Je sais s e u l e m e n t qu'il fendit la t u m e u r en te croix, c'est--dire, en coupant d'abord en ligne verticale, puis en travers. Je sais aussi qu'il r e s t a - u n grand trou, q u e le chirurgien remplit de charpie ; j'ignore si cette ' charpie tait enduite d'onguent ou n o n . Le sieur Z a n n o ii ni tant parti, je restai entre les mains du sieur S o r te m a n i . Il faut entendre maintenant la s u r de la malade qui assistait l'opration : J'ai vu, d i t - e l l e , q u e l'on fit u sortir de la t u m e u r u n e c h o s e qui resemblait un petit j a u n e d'uf; il ^csta un grand trou dans lequel le chirur gien mil de la charpie et d'autres c h o s e s . 3 . La malade esprait que la blessure se fermerait ; mais, q u o i q u e l'ouverture se ft rtrcie, elle n'en allait que plus m a l . P e n d a n t deux m o i s elle reut les soins de Sormani, aprs quoi, conduite Montegranaro, le chirurgien A n t o nacci la fil. cruellement souffrir durant doux o u trois autres mois. Mais c o u t o n s encore Thrse : ce Le sieur Antonacci, dit-elle, c o m m e n a m e soigner. Il m e dit que la racine du mal n'ayant pas t parfaitement extirpe, il fallait une nouvelle opration. Il ouvrit en effet la tumeur, et il en sortit du s a n g ; j e souffris beaucoup. E n s u i t e il continua a son traitement. Il m i t d'abord de la charpie dans la plaie, puis il e m p l o y a tour tour la charpie et divers c a u s t i q u e s ; et c o m m e il s e formait c h a q u e fois une petite crote, il y appliquait de l'onguent rose afin de la faire t o m b e r . Mais je n'prouvais aucun s o u l a g e m e n t , e l l e m a l s'aggravait toujours. A u bout de deux o u trois mois A n ce tonacci se retira. Le dix-huitime t m o i n nous apprend c o m m e n t A n t o n a c c i opra. Je vis, dit ce tmoin, le mal (l'ulcre de Th rse) situ au m i l i e u de la gorge, sous le m e n t o n . A l'extrieur, il y avait c o m m e une racine r o n d e avec u n t r o u au m i l i e u . . . A n t o n a c c i coupa cette racine, j e le sais parce que j e tenais fortement la malade. 11 prit u n e ai guille l o n g u e et r e c o u r b e , avec laquelle il enfila la ra. c i n e , l'attira en bas et la coupa, en s'aidant du fil et du 1er ; la pauvre fille hurlait de douleur. 4 . Le chirurgien n e s'en tint pas l ; l e sieur Antonacci, dit la miracule, fit placer sur m a plaie .une petite
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plaque de plomb, afin, disait-il, d'empcher que la chair ne reprt trop vite. Je gardai cette plaque quelque t e m p s , mais je la quittai, lorsque je m e confiai aux soins du sieur Cremonini . Cremonini dit l u i - m m e : Antonacci employa les plus forts caustiques. Le dixn e u v i m e tmoin n o u s apprend la frayeur que les c a u s tiques inspiraient la m a l a d e . Je voyais, dit-il, qu'Anto(t nacci lui faisait appliquer certains remdes ; mais ces remdes lui causaient tant de douleur, que la pauvre a fille courait par toute la maison, en tendant les bras et en poussant de grands cris. On voit c o m b i e n ce trai tement irrita l'ulcre, et on n e s'tonne plus que la pauvre malade ait eu tant d'horreur des chirurgiens. Ce fut au c o m m e n c e m e n t de mars de Tanne 1782 que Cremonini succda Antonacci, mais il ne vit l'ulcre et n e le sonda qu'au m o i s d'aot suivant. Pendant six m o i s Thrse se refusa n o n seulement toute opration, mais encore l'examen de son mal. Enfin, vaincue par les importunits de Cremonini, elle consentit a le laisser oprer, cause de n o u velles souffrances pour elle. Je lui persuadai, dit Cre monini, de laisser mettre sur le sige de son mal un trs-puissant caustique compos de poudres escaro tiques, afin d'largir l'orilice et d'amollir la callosit ; elle le fit, mais ne p o u v a n t supporter la douleur que lui causait ce mdicament, elle l'enleva, et n e v o u l u t plus en accepter d'autres. Je la dcidai pourtant tenter une seconde exprience, qui aboutit au m m e r s u l t a t ; et cette fois elle jura de n e plus s'y s o u m e t t r e ; voil pourquoi j e cessai de la traiter. Et qu'on n e blme pas la rpugnance de cette jeune fille pour ces caustiques ; car, c o m m e le dit 3e d i x - n e u v i m e tmoin : Le docteur Cremonini l'a traite... Je ne sais ce qu'il mit sur la p l a i e ; mais, ce dont j e m e souviens bien, c'est que ces m d i c a m e n t s la faisaient courir, crier, et la mettaient hors d'elle. E c o u t o n s encore cette dposition du prtre Recchia : Je sais que Cremonini lui appliqua un caus tique qui lui fit enfler la gorge et a u g m e n t a ses dou leurs. Le m m e tmoin avait dj dit, peu auparavant : Je sais qu'il lui appliqua certains caustiques trs-doulou reux qui produisirent l'enflure et l'inflammation de la gorge. 5. Aprs cet expos des maux endurs par la malade, nous allons dire maintenant ce qu'il faut penser de la maladie. Si l'on fait attention que ce n'est pas seulement un o u deux mdecins, m a i s bien six h o m m e s habiles dans
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l'art de gurir qui ont tudi la maladie de Thrse, il ne restera plus de doute sur sa nature vritable. Le m d e c i n Ricci qui a trait par des mollients la t u m e u r son dbut, n'a pas t interrog. Zannoni qui l'a ouverte, a presque tout oubli. Il croit que la glande enleve par lui, au c o m m e n c e m e n t de la maladie de T h r s e , tait de nature folliouleuse ou cystique. Il ajoute aussi : Etant retourn, un < an aprs, Civitanova, il m e semble avoir vu que Thrse t qui avait u n empltre l'endroit d'o l'on avait extrait la glande, et qu'il en sortait c o n t i n u e l l e m e n t u n c o u l e m e n t de matires. Je crois m e rappeler assez bien cette circons tance, m a i s j e n'en ai pas u n e certitude absolue. D'o il c o n c l u t , p a r conjecture plutt q u e par une dduction rais o n n e : Gela m e rend assez probable le c h a n g e m e n t du m a l i e n u n ulcre iistuleux. Enfin il ajoute : Du reste, j e n e m e rappelle ni la qualit de l'empltre, ni la nature des m a t i r e s sortant de la plaie, pas plus que j e n e m e souviens d'avoir fait a u c u n e observation assez prcise sur le mal, p o u r pouvoir dcider s'il avait dj acquis l e c a ractre d'un ulcre fistuleux. 6. Peut-tre trouverons-nous plus de prcision dans les souvenirs de Sormani qui prit part l'extraction de la glande, et qui d o n n a ses soins la malade, pendant deux imois environ, ainsi que n o u s l'avons vu. Or il a encore plus oubli que les autres. Voici ce qu'il d i t : On m e d e m a n d e s i j e connais Thrse Tartufolo, et si j e l'ai traite- Je r < ponds que si elle est de Civitanova, o j'ai t, d o u z e ans, chirurgien cantonal, et si elle a e u besoin de m e s soins, il est bien probable que j e l'ai en effet t r a i t e ; mais il m'est difficile de m e souvenir des n o m s et des personnes. Interrog ensuite s'il se souvenait d'avoir, Civitanova, trait la m m e Thrse Tartufolo, o u t o u t e autre j e u n e f e m m e , d'un mal sous le m e n t o n , tout prs et e n avant du gosier il rpondit : Pendant que j'tais chirurgien Civitanova, j e m e rappelle t r s bien avoir s o i g n u n e j e u n e fille qui avait, sous la g o r g e , u n mal d'o sortait u n e h u m e u r visqueuse, et il m e s e m b l e q u e ce mal tait de nature kystique plutt q u e scrofuleuse, et situ sous l e m e n t o n , au milieu, et vers la glotte. Il ajoute, propos de la j e u n e fille, que, (a partie de Civitanova, elle s'tait rendue Monlegrana ro, chez le capitaine Natinguerra... et qu'elle avait t gurie m i r a c u l e u s e m e n t par l'intercession du vnrable serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre. 7. C'est ainsi que le chirurgien Sormani parle de la p e r ;
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sonne do Thrse. Lorsqu'on lui a demand ce qu'il pensait de la maladie de celte j e u n e fille, si lui ou un autre avait pratiqu, l'occasion de cette maladie, q u e l q u e opration chirurgicale, et, dans ce cas, quels remdes il avait e m ploys, il a r p o n d u : Bien que je m e souvienne d'une manire gnrale de la cure outreprise, ainsi que cle la tumeur qui rendait une humeur visqueuse, o u u n e matire blanchtre, preuve que la tumeur tait ouverte, et tout en m e rappelant qu'elle devait tre cystique plutt que scrofuleuse, j e ne m e souviens pas du tout d'avoir * e m p l o y la sonde, o u tout autre m o y e n d'exploration pour reconnatre s'il s'tait form un ulcre fistuleux. Je ne nie pas qu'il ait exist alors, ni qu'il se soit form depuis ; m a i s j e dis ne pas m e rappeler d'avoir sond la partie m a l a d e . . . ni d'y avoir remarqu aucune callosit... Je n e m e rappelle pas n o n plus que m o i o u u n autre ( t a y o n s fait a u c u n e opration chirurgicale. Enfin j e s u i s , quant aux r e m d e s employs, dans la m m e ignorance, Il a rpondu ne pas se souvenir davantage que le chirurgien Zannoni ft v e n u Givitanova pour soigner la j e u n e fille. 8. P e u t - t r e en aurait-on su davantage par Antonacci qui visita la malade pendant deux o u trois m o i s , et qui, avec son aiguille courbe, ses instruments de fer et ses caustiques brlants, la fit tant souffrir. Mais j e ne sais pour quelle rai s o n il n'a pas t mand lors de l'enqute judiciaire. P o u r n e pas tre oblig de s'en rapporter au seul tmoignage de Cremonini, o n voudrait bien avoir au m o i n s le rapport de Luciani. Mais celui-ci ne sait a b s o l u m e n t rien, quoique la malade ait dit : Il y avait encore le docteur Luciani qui m e voyait. Luciani convient qu'il a v u longtemps T h rse chez Joseph Natinguerra, mais il dit qu'il n'a e x a m i n sa gorge que de l o i n , et c o m m e en passant, sans prendre connaissance de l a nature du mal. Il ajoute qu'il a parl Thrse q u i n z e jours environ aprs sa gurison, mais qu'il n'a pas examin alors sa gorge. Du reste, il convient de rapporter ses paroles : La j e u n e fille demeura trois autres annes Monlegranaro, dans la m m e maison o j e la voyais souvent, ayant occasion d'y visiter m a d a m e Bernardine. Je remarquais que sa sant se maintenait bonne et florissante, sans cette pleur que j'avais obser ve en elle auparavant ; toutefois il ne m e vint jamais l'esprit de regarder sa gorge, bien q u e ce ft une c h o s e facile et sans i n c o m m o d i t pour elle o u pour moi. Ainsi Thrse partit de Monlegranaro sans que j'eusse v u la fistule, avant ni aprs la gurison.
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LES
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9. Tout cela paratrait incroyable, o u au m o i n s arrang tout exprs ; p o u r t a n t cartons tout s o u p o n , et coutons Gremonini, le seul t m o i n qui reste. Il vit d'abord extrieu rement une ouverture troite entoure d'une lvre dure, ou calleuse, formant c o m m e un cercle o u anneau. Ensuite il y introduisit la sonde perpendiculairement ; elle p ntra, s u r une l o n g u e u r d'un d e m i - p o u c e environ, entre
les d e u x m u s c l e s d p r e s s c u r s d e l a m c h o i r e i n f r i e u r e , le m u s c l e p l a t m y o d i e n e t le d i g a s t r i q u e . Ce c o n d u i t
avait,
c h i c h e ; tout prs tait une petite nodosit. Ce n e fut pas seulement l'aide de la sonde que Gremonini r e c o n n u t l'existence de c e l t e callosit, mais par la pression des d o i g t s . D a n s la p e n s e qu'il pouvait se trouver un autre sinus horizontal vers la trache, il l a chercha et la d couvrit, a u m o y e n d e l sonde qui pntra j u s q u ' a u x deux anneaux cartilagineux de la trache, entre les m u s c le s sternotirodien et sternoiodien. Ces d e u x conduits qui aboutissaient u n m m e orifice e x t e r n e , prsentaient u n e a grande dilatation l'intrieur. Cremonini a j o u t e : Pre n a n t e n considration c e s d o n n e s a i n s i q u e la l o n g u e u r < du m a l e t l e s effets p r o d u i t s , j e j u g e a i q u e le m a l t a i t u n t
ulcre iistulcux, s i n u e u x et calleux, s e rapprochant d u cancer, surtout cause des matires liquides, jauntres o u verdtres, et trs-ftides qui e n sortaient. Ces matires m'indiquaient, d'autre part, que le m a l p o u v a i t avoir attaque d e u x des a n n e a u x de la trache ; m a i s j e n'ai p u e n avoir une preuve certaine, parce que la patiente n e m e permit p l u s d'introduire de n o u v e a u la s o n d e pour faire de nouvelles explorations. 10. Au premier c o u p d'il, c'est un u l c r e de mauvaise n a t u r e qui n o u s apparat; mais, pour n e pas p r o n o n c e r t m r a i r e m e n t dans ce j u g e m e n t , il faut tout peser avec s o i n ,
et a p p o r t e r c h a q u e c h o s e un e x a m e n a t t e n t i f . D'abord, si j e n e m e t r o m p e , C r e m o n i n i se m o n t r e o u b l i e u x c o m m e l e s
autres. E n effet, si Ton s'en rapporte lui, il aurait, au mois d'aot 1782, introduit u n e seule fois la sondo dans l'ulcre; il aurait e m p l o y d e u x fois les c a u s t i q u e s , et, pour adou cir l a douleur, prescrit de t e m p s en t e m p s , o u du miel r o s a t , o u q u e l q u e autre m d i c a m e n t sans i m p o r t a n c e ; p u i s rien autre chose. Or la malade, aprs sa gurison, dit q u e ce n'est pas s e u l e m e n t une fois q u e la s o n d e a t i n troduite : Le m m e Cremonini introduisait quelquefois u n fer dans l'ouverture. Le premier t m o i n , la sur de la malade d i t : J ' a i v u que les chirurgiens Antonacci et
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Gremonini essayaient d'largir ce trou avec les instru is m o n t s de fer, et la pauvre fille pleurait de douleur, Ecoutons encore la m a l a d e : Le sieur Cremonini .. en treprit ma cure ; il ne coupa plus, mais il c o n t i n u a employer la pierre infernale, la potasse, et les autres caus tiques qu'il pouvait l u i - m m e connatre. Donc Gremo nini n'a pas seulement e m p l o y doux fois ce puissant c a u s t i q u e ^ s'est servi e n outre de plusieurs autresmdicaments. D'un autre ct, il a c o n t i n u , quelques mois encore, m e t r a i t e r , ajoute T h r s e ; ce n'est donc pas p e n dant u n m o i s seulement, c o m m e il Fa dit. Son traitement aurait m m e dur plus l o n g t e m p s , si la malade ne s'y ft refuse, en lui disant i n g n u m e n t : S'il n'y a pas de re m o d e , pourquoi m e tourmenteriez-vous davantage? Gremonini n'a donc pas abandonn de l u i - m m e la malade, c'est plutt elle qui l'a remerci.
;
1 1 . E n outre j e d o u t e , n o n sans raison, que Gremonini ft assez bon anatomiste, pour qu'on ait en lui toute c o n fiance. En effet, aprs s'tre enquis de la maladie, il a jug que la tumeur de Thrse, enleve par Zannoni, tait < la c glande tyrode devenue squirrheuse. Pourtant Zannoni, quoique ayant oubli b e a u c o u p , croit, n o u s l'avons vu, que la glande extraite tait de nature folliculeuse.ou kystique. Puis il ajoute ces paroles qu'il faut n o t e r : Je ne peux dterminer prcisment la situation ni le n o m de la glande e n l e v e ; mais, l'ayant extraite et ouverte, j e suis presque certain qu'elle tait de nature kystique, car elle renier mait u n e matire paisse et c o m m e pteuse. C'est l'opi n i o n de Sormani qui dit : u Le mal m'a paru de nature kystique ; et peu aprs, il ajoute sans a u c u n e hsitation, qu'il se souvient trs-bien < que cette t u m e u r devait tre c plutt kystique que scrofuleuse . Rapprochons de ces t m o i g n a g e s c e q u e d i t r i l l u s t r e M o r g a g n i (Adversaria anal. 1. art. 27, 26), sur la glande thyrode : Ayant s o u m i s plu ie sieurs fois au scalpel anatomique c e l t e glande gonfle et dure, tat morbide qui lui est frquent, j e l'ai trouve forme partout c o m m e de vsicules peu prs rondes et do diffrentes grosseurs, remplies d'un liquide un p e u blond et v i s q u e u x . Ces vsicules paraissaient tre les grains m m e s de la glande dilats ce point par l'amas d'humeur stagnante. 11 suit de l que la glande thyrode ne revt pas le caractre squirrheux, mais qu'elle est expose se gonfler, qu'elle n e renferme pas u n e matire paisse c o m m e une bouillie, mais des vsicules runies et pleines d'un liquide visqueux. Donc la glande enleve Thrse a t tout autre que la glande thyrode.
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42. Le noyau intrieur enlev par Zannoni tait si peu adhrent, qu'il sortit de lui-mrate, lorsque la t u m e u r fut ouverte; ce qui ne se peut dire de la glande thyrode. A ce sujet, coutons encore Morgagni. Cette m m e glande, dit-il, est tellement rapproche des quatre m u s c l e s qui s'tendent du sternum et de la rgion de la glotte l'os h y o d e et au cartilage thyrode, ainsi que des ventres suprieurs des caracohyodes, que ces m u s c l e s n e peuvent it se contracter, par suite des m o u v e m e n t s produits dans les actes de crier et de manger, vers leurs extrmits fixes qui s o n t en arrire, sans q u e la glande qui leur est pro m i n e n l e , ne soit e l l e - m m e c o m p r i m e , principalement par l'obstacle que lui o p p o s e n t les cartilages placs d e r te rire elle. Il ajoute e n c o r e , q u ' e l l e est t r o i t e m e n t lie la trache-artre suprieure sur les cts du premier cartilage et du cartilage cricode. 13. C o m m e n t donc la glande thyrode que t a n t de liens rendaient adhrente, pourrait-elle s'extraire et se dtacher au point de remuer sous ses t g u m e n t s externes ? G o m m e n t pourrait-elle sortir d ' e l l e - m m e , la rupture de ces tgu m e n t s ? Voyez ce qu'on doit penser de Cremonini q u i a cru q u e le corps dur enlev tait la glande thyrode. La place m m e de cette glande n o u s fournit encore u n a r g u m e n t n o n dpourvu de valeur. Nous avons vu qu'elle est t r o i t e m e n t attache la trache-artre ; si Ton a d m e t qu'elle ait t enleve par Zannoni, il faudra reconnatre que l'ulcre a atteint cette artre, ds le c o m m e n c e m e n t . Mais l'ulcre a dur environ six a n s , et il en sortait u n pus trsacre, presque cancreux; c o m m e n t donc la trache-artre, si l o n g t e m p s expose l'action de cette h u m e u r pernicieuse, n'en aurait-elle pas t l s e ? On dira q u e Cremonini luim m e a s o u p o n n (il n'a .pu en tre certain, n'ayant e m p l o y qu'une ibis la sonde) que peut-tre le mal avait p u atteindre Tun des deux anneaux de la trache. Mais, e n s u p p o s a n t l'enlvement de la glande thyrode, il n'y avait p l u s douter q u e l'ulcre et atteint la trache, la q u e l l e , au c o n t a c t si p r o l o n g du pus, aurait d se c o n s u m e r e n t i r e m e n t par ulcration. Or, chez notre malade, a u c u n , i n d i c e , a u c u n s y m p t m e de lsion de la tracheartre, ni de la putrfaction q u i aurait d s'en suivre. 14. Sans d o u t e , pour dfendre Cremonini, o n invoquera les m d e c i n s experts, qui, aprs la gurison de T h r s e , ont fait l'examen de sa g o r g e . Ces mdecins, il est vrai, ont - dclar avoir senti, au toucher, que la glande thyrode manquait . Mais autre c h o s e est d'affirmer que la glande
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thyrode a t enleve au c o m m e n c e m e n t de la maladie, autre c h o s e est de dire que, la maladie termine, cette glande avait disparu. I)u reste Gremonini a palp aussi l gorge gurie, et il n'a senti aucun vide, aucun m a n q u e de substance. Qui faut-il croire ? Si Ton s'en rapporte, c o m m e il convient, aux m d e c i n s n o m m s p a r les j u g e s , Gremonini est convaincu d'ignorance e n anatomie, p u i s q u ' i l n ' a p a s r e c o n n u , a u t o u c h e r , l ' a b s e n c e d e la glande. B i e n p l u s , n d e r l i n i , le p r e m i e r p a r m i les m d e c i n s experts, a senti au toucher l'absence n o n seulement d e la glande, m a i s d'une partie du tissu cellulaire , absence qui avait chapp Gremonini. 15.On voit d s lors ce que vaut ici l'opinion d e r e m o n i n i , sur lequel seul on s'appuie pour le diagnostic de la maladie. Mais e x a m i n o n s la chose de plus prs. Ce qui sortait de l'ulcre de Thrse, tait, au rapport de Gremonini, des <t matires ichoreuses, saniouses, jauntres et trs ftides . Or le seizime tmoin dit, en pariant de la malade: Il lui < coulait des matires semblables, quant au caractre et c la couleur, d u pus liqufi; ce que s e m b l e confirmer le d i x - h u i t i m e t m o i n e n d i s a n t : E l l e y t e n a i t appliqu < u n linge qu'elle tait de t e m p s en t e m p s p o u r s'essuyer, c parce que toujours ces c o u l e m e n t s purulents se produiu saient. Au contraire Sormani, dit que la tumeur rendait a u n e h u m e u r visqueuse, o u une matire blanchtre. E t que Ton n e croit pas que cela arriva ds le c o m m e n c e m e n t , car, selon les paroles de Thrse : Aprs q u ' o n eut c o u p la tumeur, l'ouverture se rtrcit, mais n e se ferma j a m a i s a entirement, e t toujours elle rejetait quelque c h o s e , tantt et d u pus seulement, tantt du pus et d u s a n g ; le pus seni ci blait filer. Lorsqu'elle parle de l'poque l a plus rappro c h e de sa gurison, elle dit : Pendant l o n g t e m p s , c^est -dire, un an peut tre avant de gurir, j e n ' e m p l o y a i a u c u n m d i c a m e n t , et quand le pus n e coulait plus < a u t a n t , j e m e contentais d e m ' e s s u y e r . Ges matires, c j e l'ai dit, taient blanches et filantes. Pour r s u m e r t o u t cela, il faut d'abord distinguer l'humeur qui coulait de la fistule, de celle que la nature elle m m e chassa ensuite ; il faut g a l e m e n t distinguer l'humeur qui sortait des parois de la fistule, de celle qui ft le produit de la suppuration. La matire purulente produite par les c a u s tiques, n'tait certes pas un pus rel, mais une srosit s a n i e u s e , ftide et blonde. De m m e l'humeur que distillait l a fistule n e pouvait pas n o n plus tre d u pus vritable, mais plutt u n e l y m p h e sortant des vaisseaux dchirs, et
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toute charge d'humeurs mauvaises. La nature oprait insensiblement, et, par la suppuration, produisait une m a tire de caractre diffrent. 16. Je dirai peu de chose du bord calleux qui formait l'orifice de l'ulcre. Voici c o m m e n t s'explique Cremonini : Je regardai la partie malade, et je vis une ouverture e x t rieure trs troite, borde d'une lvre dure,d'une callosit: ayant la circonfrence d'un petit a n n e a u . D'autres encore parlent de cette callosit, n o t a m m e n t le q u a t o r zime t m o i n , en disant : ce Je vis que le mal tait au m i l i e u , l'avant du gosier, et qu'au dehors il y avait c o m m e u n gros anneau rond, presque du diamtre d'un q u a trino, dur, ainsi q u e le toucher m e le dmontra, avec u n petit trou troit au milieu. Toutefois le diamtre de cette callosit n'tait pas toujours le m m e . E n effet, le t m o i n a j o u t e : L o r s q u e les matires purulentes avaient coul p e n d a n t quelque temps, il se formait une petite crote, et, ainsi que je l'ai dit, l'anneau ou la callosit avait l e diamtre d'un liard ; mais les matires venant s'amasser < de n o u v e a u , le diamtre devenait plus grand, la partie c malade se gonflait e t s'enflammait. F i n a l e m e n t la crote tombait, les matires sortaient encore, la malade prouvait du soulagement, l'enflure diminuait, et le mal reprenait son aspect habituel, la partie dure ayant le diamtre d'un liard ; et cela se produisait souvent, u n degr plus ou m o i n s grand. P o u r m o i je ne c o n o i s pas c o m m e n t l'enflure de la peau peut distendre une callosit circulaire si dure, et en augmenter le diamtre. Il n'y a q u e les maux d'une nature molle qui subissent ces effets; c e sont plutt les matires fongueuses q u e les calleuses, q u i s o i e n t susceptibles de s'amasser. On dira que cela se p r o duisait n o n par u n gonflement, mais par u n e a u g m e n t a t i o n de la m a s s e de matire. Mais, dans ce cas, c o m m e n t cette masse e l l e - m m e , qui devait tre d'une nature h o m o g n e , disparaissait-elle aussitt que cessait l'enflure de la peau ? Si le bord extrieur de la callosit se resserrait, pourquoi la m m e c h o s e n'avait-elle pas lieu l'intrieur? 17. Mais n o u s s o m m e s retenus ici encore par des q u i voques et des dtours. Afin de ne pas n o u s attacher des ambiguits, v o y o n s s'il y a, dans notre cas, quelque c h o s e de certain, o u au m o i n s de probable. D'abord il est vident que la t u m e u r parue la gorge de Thrse, l'poque de l'tablissement des rgles, n'tait pas scrofuleuse, mais p l u t t cystique ou d'un autre caractre. Ainsi l'ont p e n s , n o u s l'a vons vu, Zannoni, S o r m a n i , et m m e l'expert n o m m par les
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j u g e s du procs; la complexion m m e de la malade le confirme. E n effet, m m e lorsqu'elle souffrait de sa fistule, elle tait forte; ses j o u e s seules se couvraient de pleur quand le pus se formait. De m m e , le n o y a u extrait par Zannoni n'tait pas la glande thyrode, mais t o u t e autre chose, c o m m e n o u s l'avons dj dmontr. Ceci pos, remarquez que les canaux de l'ulcre taient trs-courts. Un conduit vertical s'tendait, sur u n e longueur d'en viron u n demi-pouce c'est--dire, de la longueur de la premire phalange du doigt auriculaire; mais n o u s ne connaissons pas la profondeur du conduit horizontal, nous savons seulement, par Cremonini, qu'il pntrait jusqu'aux deux a n n e a u x cartilagineux de la trache. Or, ces deux anneaux sont si rapprochs de l'ulcre, que, celui-ci guri, la cicatrice les atteignit. Donc le conduit horizontal tait trs court et dpendait de la t u m e u r de la gorge. Il est vident qu'il ne faut pas tenir grand compte, dans notre cas, de ces deux petits conduits. C'est pourquoi on peut demander si cette maladie a t assez grave pour avoir t le sujet d'un miracle ? 18. Vous produirez sans d o u t e des textes mdicaux et des exemples pathologiques pour dmontrer q u e l'ulcre si grave de Thrse tait d'une gurison n o n s e u l e m e n t diffi cile mais impossible. Mais je vous prie d'examiner srieuse m e n t chaque c h o s e , et vous serez contraint d'avouer qu'il a pu tre guri par les ressources naturelles. Nous voici insen siblement arrivs l'autre partie de l'examen, celle qui r e garde le second extrme, c'est--dire, la gurison de la m a ladie. A cet gard, rappelez-vous la parole de Baglivi: Lorsque n o s efforts ont cess d'tre efficaces, la n a ture souvent c o m m e n c e agir efficacement . C'est pourquoi aprs que le chirurgien se fut retir, et qu'on eut cess d'em ployer les caustiques et t o u t autre m d i c a m e n t , c'est--dire, u n e anne environ avant la gurison, la nature se mit oprer l e n t e m e n t . 19. Vous m e direz qu'il ne faut pas j u g e r l'ulcre la mesure du c o m p a s , mais d'aprs sa malignit et ses suites. Je n'en disconviens p a s ; et, quoique ayant dit que le noyau enlev n'tait pas la glande thyrode, j e ne nie pas q u e cette glande, ainsi que d'autres parties, m m e du tissu cellulaire, aient t incises". Les mdecins experts l'ont af firm, et la nature du pus qui sortait de l'ulcre, le d m o n t r e . Car, n o u s l'avons v u , c'tait un pus qui filait un pus blanc et filant . Ces filaments v i s q u e u x ne sont cer tainement pas autre chose que des petites portions de
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quelque glande, ou d'autres parties en d c o m p o s i t i o n . Or c'tait l'uvre de la nature qui, par l'action de la suppura tion, chassait et dtruisait les parties c o r r o m p u e s , jusqu' ce que, aprs leur limination c o m p l t e , elle s'arrtt devant les anneaux de la trache. A cet gard, je vous prie de r e marquer q u e , la veille de la gurison de Thrse, la gorge a t enQe,et, la suppuration s'tant tablie, une matire p u rulente en est sortie a b o n d a m m e n t . Cet c o u l e m e n t a e u lieu la nuit m m e de la gurison, p u i s q u e la matire p u r u lente imprgna l'image de n o t r e Ynrable. Quelle fut la quantit de ete matire, le quatorzime t m o i n n o u s le fait savoir : Il est certain q u e les matires sortirent a u m o m e n t o la malade fut gurie ; j'ai vu l'image du serviteur de Dieu souille de ces matires, bien qu'elles fussent e n petite quantit . "Voici c e q u e dit le seizime t m o i n : T h r s e . . . m e fit voir l'image qui tait t a c h e de cette matire dj dessche, et semblable u n e e s p c e de talc La tache pouvait tre grande c o m m e u n e lentille. Le d i x - n e u v i m e t m o i n parle p e u prs dans les m m e s termes. Or cette petite quantit d'humeur m o n t r e q u e les dernires portions des chairs gtes taient sorties. 2 0 . Les callosits dont parle Gremonini n e s'opposaient pas ce rsultat. La premire tait intrieure, et il la sentit s e u l e m e n t l'extrmit du conduit vertical, u n e callosit de la* grosseur d'un pois chiche, a p p u y e contre u n petit n o y a u . Mais on ne sait si cette callosit qui existait u n a n environ avant la gurison, a dur j u s q u ' la fin. P r o b a b l e m e n t la nature qui dtruisait les glandes m a l a d e s par l a suppuration, a agi de m m e l'gard de cette callosit. Car j e ferai remarquer q u e , sur la fin, la nature laisse e l l e m m e , .opra bien plus a c t i v e m e n t . N o u s savons e n effet, par les t m o i g n a g e s , que les suppurations d'abord plus rares, devinrent ensuite plus abondantes et plus frquentes. Or, cette callosit dtruite, le petit c o n d u i t vertical se f e r mait de l u i - m m e ; le pus et la putrfaction n'y sjournaient p l u s ; et quand l'irritation diminuait, la suppuration s'arrtait,et la peau, mesure que l e c o n d u i t se rtrcissait, se rejoignait la partie o p p o s e . On dira q u e .tout ceci s'ap p u i e sur des conjectures ; mais il y a, dans le sujet m m e de n o t r e dbat, assez de conjectures, pour q u ' o n e x p l i q u e par les forces de la nature ce quf a l'apparence d'un prodige. 2 1 . Sans plus vous occuper de la callosit interne, vous vous prvaudrez sans doute de celle de l'extrieur pour dire que la n a t u r e ne pouvait, avec ia persistance de cette c a l l o sit, oprer la gurison. Je r e c o n n a i s qu'avec la callosii
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extrieure, l'ulcre ne pouvait revtir le caractre d'une simple plaie, que le pus de bonne nature n e pouvait se former, pas plus qu'il n'tait possible des granules charnus de remplir les vides. Mais, dans notre cas, la nature n'avait pas besoin de tout cela, car il ne s'agit pas d'une partie charnue , pour employer les expressions deCrmonini. L'uvre accomplie par la nature tait d'un autre genre. Elle n'avait pas refaire ce qui avait t dissons, ni remplir les vides par de la chair; mais, les parties internes atteintes du mal ayant t c o n s u m e s par la suppuration, il suffisait que la peau s'abaisst et qu'elle atteignt les anneaux de la tra che, ce qui eut lieu en effet. Dans ce cas, il n'y a donc a u c u n e raison de rechercher le caractre de la matire p u r u lente, ni de savoir si les matires qui souillrent l'image du vnrable serviteur de Dieu ont t, la dernire nuit, pleines de sanie et m m e ftides, c o m m e auparavant. Quoi d o n c ? La nature n e m a n q u a i t pas d'humeurs favorables; elle travaillait seulement l'expulsion des parties infectes. Vous deman derez peut-tre pourquoi la nature a attendu si l o n g t e m p s pour accomplir s o n u v r e ? La raison en est v i d e n t e ; c'est parce que elle a t longtemps trouble dans son travail. L'illustre J o s e p h Testa dit quelque part (De vilalibits pe~ riodis grotaniium et sanorum lib. t, part. 2, cap. 7,n u m . 1) : Il est un reproche trs grave faire a u x m d e c i n s , qui, par des remdes intempestifs, contrarient la nature, retardent les maturations,et veulent e n quelque sorte que la maladie et la nature leur obissent. En outre, la n a ture a des priodes qui durent des jours dans les maladies aigus, et des annes, dans les maladies chroniques. Or la maladie de Thrse a dur sept ans environ ; on sait q u e dans les maladies chroniques ce temps est souvent critique. .Enfin la gurison s'est a c c o m p l i e dans l'espace de sept ans aprs la pubert, alors que, chez les f e m m e s principale ment, c o m m e dit Testa (id. lib. 2, part. 2, cap. 3, n u m . 39), les annes ayant produit la force de l'ge, et grce la bonne constitution des organes respiratoires, les parties solides du corps ont acquis toute leur puissance et leur fermet. Alors le corps... ayant atteint t o u t e sa stature, le systme cellulaire s'est largement dvelopp; de l les belles formes de la jeunesse, et tout l'aspect frais et plus arrondi. 22. On dira encore : c o m m e n t le durillon qui avait l o n g temps a c c o m p a g n l'ulcre de Thrse, a-t-il disparu ? P e r sonne ne peut voir u n miracle dans la seule dissolution d'une callosit. Lors m m e que n o u s ne pourrions l'expli quer, il n'est pas permis d'attribuer un miracle la gurison
d'un ulcre que la nature a p u produire. Mais quelle tait la grandeur de ce d u r i l l o n ? Je n e m'arrterai pas' ce fait que le durillon tait si souple qu'il se dilatait avec l'enflure de la gorge, et qu'il se rtrcissait, e n reprenant sa grosseur premire, lorsque l'enflure de la g o r g e disparaissait; ce qui s'accorde assez p e u avec la duret q u ' o n n o u s objecte, et m o n t r e qu'il s'agit d'un corps plutt f o n g u e u x q u e cal l e u x . J'appellerai spcialement l'attention sur sa petitesse, puisqu'il n'avait que la c i r c o n f r e n c e d'un petit a n n e a u , et
(c p e u p r s le d i a m t r e d ' u n q u a t r i n o (25 m i l l i m t r e s ) . Ce
diamtre parat m m e avoir encore d i m i n u sur la fin. E n effet, le dix-neuvime t m o i n , en parlant de l'image du vn rable serviteur de Dieu m a c u l e par la sanie, s'exprime ainsi : Cette i m a g e je l'ai v u e ; la tache tait vers la face, et elle paraissait tre l'empreinte de c e que Ton voyait d'abord en dehors du mal, c'est--dire, u n e tache de la grandeur d'un b o u t o n o u d'un a n n e a u tel que j e l'ai dcrit plus h a u t , large peu prs c o m m e un petit quatrino . L e s e i z i m e tmoin prcise encore davantage lorsqu'il dit, q u e la tache avait peu prs l'tendue d'une lentille. Or si cette ouverture de la plaie tait si petite, quoi d'tonnant qu'elle ait c o m p l t e m e n t disparu la g u r i s o n ?
2 3 . De p l u s , o n n o s a i t v r a i m e n t p a s si l a c a l l o s i t e x i s t a i t e n c o r e le d e r n i e r j o u r . S i T o n s ' e n rapporte au t m o i
gnage de Thrse, la n u i t qui prcda la gurison, le cordon o u a n n e a u qui entoure la plaie, s'y faisait encore remarquer c o m m e toujours . Mais elle est seule dire cela, e t , aprs onze ans passs dans la m m e situation de sant, elle a pu tre t r o m p e par l e s apparences. Elle a p u m m e parler ainsi par pure i n d u c t i o n , c o m m e il est arriv a u quatorzime t m o i n qui a dit: Outre l'anneau dur et calleux, il y avait encore le gonflement et l'inflammation, indiquant la formation de matires qui voulaient sortir ; et j e le sais pour l'avoir vu et observ j u s q u ' a u jour pr cdant la n u i t o elle obtint sa gurison , Quoi de plus
clair q u e ces paroles ? Cependant l e m m e t m o i n a d i t
ensuite : Craignant de n e pas m'tre exprim plus haut avec u n e clart suffisante, voici ce que j e dclare : Lorsque la gurison eut l i e u , la pauvre j e u n e fille tait t o u r m e n t e , depuis trois o u quatre jours, et p e u t - t r e p l u s , de ses douleurs habituelles, devenues m m e plus fortes e n c o r e ; j ' e n suis absolument certain. Je voyais e n outre que la gorge tait enfle, c e qui se remarquait, malgr que la a malade, selon sa c o u t u m e , ne relevt pas sa t t e : mais j e
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< ne m e rappelle pas si j e lui ai adress une observation ( particulire pour lui faire lever la tte afin de regarder la partie malade. Toutefois les douleurs dont elle se plai gnait et qu'annonait tout son extrieur, ainsi que l'en flure tout fait visible, m e font juger de la persistance de la callosit. M. En admettant que la callosit extrieure ait dur jus qu' la nuit de la gurison, cependant, la suite de l ' c o u lement des parties intrieures putrfies, elle a d certaine m e n t se modifier, d'abord e n perdant sa duret, avec la cessation de la cause qui l'enflammait, puis en diminuant de grosseur, au point que la suppuration tait extrmement faible. Cette hypothse est justifie par la tache que Ton a trouve sur l'imago du vnrable serviteur de Dieu, tache qui correspondait l'empreinte de l'ouverture de la plaie , ainsi qu'on Ta dj dit. 2 5 . Notre travail sur les deux extrmes est t e r m i n ; il n o u s resterait maintenant poursuivre nos investigations sur le m o y e n , o u l'invocation.Mais quoi bon, puisque Ton voit que la j e u n e fille a t gurie naturellement. Tout au plus la grce apparatrait c o m m e ayant aid la nature dans l'accomplissement d e s o n uvre. Or l'uvre de la nature n'a pas intervenir dans cette partie du procs qui n'a pour bt qu'une enqute sur les faits surnaturels, ou extra naturels ou m m e contraires aux lois naturelles. Quand bien m m e i n v o c a i o n prsenterait u n caractre d'vidence tel qu'il n e resterait aucun doute dans l'esprit, il n'en rsulterait au cune utilitjles extrmes faisant dfaut. C'est pourquoi nous terminerons ici n o s observations sur le second miracle.
critiques du Promoteur
de la Foi.
1. Notre illustre Censeur c o m m e n c e par n o u s faire l'his toire de cette maladie, telle q u e nous l'avions d o n n e n o u s m m e s dans notre information. Il en rsulte clairement que, l'an 1777, Thrse c o m m e n a souffrir d'une t u m e u r place en avant de la partie suprieure de la gorge. Cette t u m e u r fut extirpe en juin 1780 ; la blessure qui en rsulta se c o n vertit en ulcre listulcux dj visible au m o i s d'aot s u i v a n t . On eut recours des remdes pendant quelques m o i s ; on les rejeta ensuite tout fait jusqu'au m o i s d'aot 1782. Deux fois on employa des caustiques, mais i n u t i l e m e n t o n les abandonna, et la maladie, sans traitement aucun, s'agvi.
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grava jusqu'au m o i s de mai 1783, p o q u e o l'ulcre malin et invtr fut guri s u r - l e - c h a m p par l'intercession du v nrable serviteur de Dieu Benot-Joseph Labre. 2. la suite de c e t expos, le m m e Censeur, examinant les preuves, se p l a i n t : 1 de ce q u e , dans l'examen de la cause, on n'ait pas fait venir Antonacci, l'un des chirurgiens qui avaient trait la m a l a d e ; 5! de ce que plusieurs des m decins entendus n'ont pas eu assez de m m o i r e ; 3 enfin, de ce qu'il y a u n diffrend entre eux sur la nature de la tumeur dont souffrait la malade. P o u r le premier reproche, n o u s ferons observer en peu de mots, qu'il n'est pas tonnant qu'Antonacci n'ait pas t appel. D'abord il tait peut-tre trs-loign, les t m o i n s ayant dpos qu'ils ne savaient pas s'il tait vivant o u m o r t , m a i s qu'il n'tait plus Montegranaro; en second l i e u , parce que tout ce que Antonacci aurait put dire sur la nature de la maladie, sur les r e m d e s employs, et sur leur inutilit, se trouve si clairement dsign par les autres, q u e sa dposition . n'tait n u l l e m e n t ncessaire. On sait, en effet, qu'on doit rechercher des preuves suffi santes mais n o n pas des preuves superflues.Enfin, parce qite Antonacci ne soigna la j e u n e fille qu'au dbut de l'ulcre, et q u e la malade n'prouva aucun m i e u x du traitement de ce chirurgien. La preuve principale, dans c e cas, n e doit pas reposer sur les dbuts de la maladie, mais sur l'poque la plus rapproche de la gurison ; pendant ce t e m p s , en effet, l'tal de la maladie faisait connatre,le plus clairement p o s sible, et la nature, et la longue dure du mal. A ces o b servations particulires nous en ajoutons u n e g n r a l e : Dans les preuves, il faut faire attention celles qu'on a, et n o n pas celles qui manquent ; toutes les fois que vous avez u n e preuve pleine et entire, v o u s e n avez assez pour asseoir votre j u g e m e n t . Ce serait u n e pure chicane et l a ruine de t o u t e espce de j u g e m e n t , que d'exiger les preuves les plus c o m p l t e s possible, puisqu'on ne pourra trouver a u c u n e preuve si complte, qu'on ne puisse encore y ajouter q u e l q u e c h o s e . 3 . Pour le s e c o n d reproche, n o u s ferons observer que t o u s les mdecins que vise la critique, except le docteur Luciani qui n'a j a m a i s soign la j e u n e fille, ont vu la malade s e u lement avant l'extirpation de la tumeur, o u peu aprs cette opration, et au c o m m e n c e m e n t de la fistule. Ils durent d o n c rpondre sur u n e c h o s e passe depuis quatorze ans, car o n les interrogeait en 1794 sur des faits qui avaient e u lieu en 1780. Il ne faudrait donc pas s'tonner, si tous, avec le
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chirurgien Sormani, avaient fait cetle rponse a u x q u e s t i o n s des j u g e s : Nous arrivions quand on nous appelait ; n o u s ordonnions le traitement convenable; n o u s n'avions pas la pense de demander le n o m de la p e r s o n n e , surtout quand il ne s'agissait pas d'une famille de premier rang, < c o n n u e de tous, ou de cas remarquables et dont on peut f a se proposer de conserver le souvenir, tant pour notre instruction que pour les retrouver au besoin propos d'une cure, semblable. Ils ne furent cependant pas si dpourvus cle m m o i r e , puisqu'ils ont rapport beaucoup de choses qui confirment la nature de la maladie, c o m m e on le voit dans le S o m m a i r e , et aussi dans les paroles m m e que la critique prend pour nous les opposer. 4 . Au troisime reproche enfin nous rpondrons : P e u n o u s importe ce que les m d e c i n s ont pens de la nature de la t u m e u r extirpe, car n o u s ne faisons pas consister le mi racle dans la gurison de cette tumeur, mais dans la guri- son de l'ulcre qu'a fait natre la blessure qui rsulta de l'extirpation. Il n o u s semble avoir si clairement dmontr que ce fut un ulcre sinueux, fistuleux, calleux, qu'on ne saurait dsirer rien de plus clair ni de plus vident. Nous pourrions m m e nous fliciter cle ce que notre Censeur l u i m m e Pait jug si bien tabli, qu'il a pens qu'on ne p o u vait a u c u n e m e n t rvoquer ce fait en doute. Dans ses diffi cults, en effet, il parle constamment de fistule, et aprs avoir. propos d'office ses objections pour combattre nos preuves, il a j o u t e : laissant l tout s o u p o n , coutons Gremonini, c'est--dire, le chirurgien qui assista la malade dans les derniers t e m p s , et qui fait la description de la fistule. 5. Il est en effet t e l l e m e n t de son avis, qu'il reproduit la description d e l fistule donne par le chirurgien. Mais afin d'affaiblir l'autorit de ce docteur, il s'efforce de le donner c o m m e ayant perdu la mmoire des faits; et, dans ce but, il confronte s a dposition avec la dposition d'autres tmoins. Si Gremonini dclare qu'il a explor une fois seulement l'ulcre au m o y e n de la sonde, il lui oppose cette dposition.de la s u r de la jeune g u r i e : J'ai v u que les chirurgiens Antonacci et Gremonini a ont cherch largir la cavit avec le fer; la pauvre fille pleurait, cause de la douleur ; et la dposition de la malade elle-mme : quelquefois le m m e sieur Gremonini i n t r o duisait le fer dans la cavit. Si Cremonini dpose qu'il a appliqu deux fois seulement les caustiques la malade, il lui oppose la malade dclarant : Le sig. Gremonini
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entrepris ma g u r i s o n ; il ne m e fit plus d'incisions, mais il a continu a faire u s a g e de la pierre infernale, du prcipit, et d'autres remdes qu'on pourrait savoir par l u i . . . Il c o n t i n u a m e traiter encore pendant quelques m o i s . Enfin si le m m e chirurgien a dclar ( c o m m e le p e n s e la critique) qu'il abandonna la malade, la critique lui oppose s u r - l e - c h a m p la malade affirmant que c'est elle qui a c o n g d i Gremonini : S'il n'y a pas de r e m d e m o n mal, disait-elle quoi lui sert de me tourmenter? 6. Quel rapport y a-t-il entre ces assertions et notre affaire ? L'un nie-t-il ce que l'autre a affirm, pour q u ' o n puisse tablir une contradiction entre les t m o i n s , et d truire leur autorit ? T o u t cela empche-t-il qu'il soit certain que la malade a repouss tous les remdes l o n g t e m p s avant la gurison? T o u t cela surtout rvoque-t-il en d o u t e la nature de la maladie, et rend-il la gurison instantane m o i n s surprenante ? Si on n'en peut rien conclure de s e m blable, il n'est d'aucune utilit de s'y arrter davantage. Nous ferons cependant observer que Antonacci et Gremo nini ont introduit dans la fistule la sonde, c'est--dire, ce fer que les ignorants ont regard c o m m e devant largir l'ouverture de l'ulcre.Nous ferons remarquer encore que les t m o i n s ont fait leurs dpositions plusieurs annes aprs. T o u t e s ces remarques rendent probable que ces t m o i n s , en parlant des oprations des chirurgiens, o n t pu dire indiffremment, vu la confusion qui rgnait d a n s l e u r s i d e s , que les chirurgiens Antonacci et Gremonini o n t "cher ch" largir la cavit avec le fer.. et quelquefois le sieur -Gremonini introduisit un instrument de fer dans la cavit. Mais cette confusion d'ides nepeut point tomber sur Cremou i n i qui, dposant sur u n seul acte accompli par lui, ne p o u vait se tromper. Aussi, aprs avoir rapport le fait, ajoutet-il : Je suis certain de n e pas m e tromper dans ce que j e rapporte sur le fait qui m'est propre, et d'aprs ma propre e x p r i e n c e . Disons la m m e chose touchant la longue dure d u traitement. Gremonini aprs l'inspection de la fistule, obtint de la malade d'appliquer des caustiques l'ulcre,et, quelque t e m p s aprs, il obtint e n c o r e s o n c o n s e n t e m e n t . F a u t - i l s'tonner si, aprs une priode de dix a n s , la m a l a d e qui avait support tant de fois les m m e s o p r a t i o n s et les m m e s souffrances, ail pens que ce soit arriv plus souvent pendant le traitement de Gremonini, et qu'elle ait dclar sans rien dterminer: Le sieur Cremo n i a i r p t a l'action avec la pierre infernale, le prci. pit, et avec d'autres r e m d e s ; qu'elle ait m m e ajout :
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et II m'administra encore des remdes pendant q u e l q u e s mois. Elle confondait l'poque o elle avait suivi im traitement vritable,avec ce temps assez long pendant lequel Cremonini la visitait, l'interrogeait, l'examinait, et faisait des instances auprs d'elle, pour .qu'elle se s o u m t au trai tement. 7. C'est bien .tort qu'on oppose entre eux des t m o i n s , q u i sont en parfait accord pour affirmer une chose, pareeque l'un d'entre eux, tromp par une raison assez juste, a m o n t r , dans sa dposition, une certaine confusion d'ides. C'est encore avec plus de tort qu'on les met en opposition sur la fin du traitement, sous le prtexte que Cremonini affirme avoir abandonn la malade de son propre m o u v e m e n t , tandis que celle-ci dpose avoir rsolu d'loigner le m d e c i n ; quand le chirurgien est venu, je dis e n face celui qui voulait le faire entrer... que je n e voulais plus que l e chirurgien revienne. C'est toujours plus tort, dis-je qu'on fait cette assertion, quand Cremonini h dpos l e contraire e n termes clairs : Elle protesta qu'elle n e voulait plus de m e s soins, c'est pourquoi je cessai de la soigner; et encore, elle dclara qu'elle ne v o u l a i t plus tre tourmente. Nous savons que nous aurions d passer cela sous s i l e n c e , et ne pas le rfuter. Cependant n o u s avons prfr suivre notre Censeur dans ces b a g a telles, afin qu'on voie clairement la force de nos preuves, m m e dans s o n esprit, puisqu'il a d descendre c e s subtilits p o u r tre m m e de nous opposer q u e l q u e chose. 8. Ce qui suit, nous devrions le passer sous silence, loin de le rfuter, si nous n'avions le devoir de rta blir l'autorit de Cremonini qu'on attaque avec opini tret. Il faudrait, dis-je, le passer sous silence, car t o u t cela a pour u n i q u e but d'tablir que la tumeur extirpe n'tait pas la glande thyrode. Car, e n c o r e u n e fois, p e u nous importe cette circonstance ! puisque n o u s avons plac le miracle, n o n pas. dans la gurison de la tumeur, mars dans la gurison de la fistule qui rsulta de la blessure l Nous ne soutiendrons certes pas qu'on extirpa la glande thyrode; n o u s montrerons seulement qu'il ne faut pas rire de Cremonini, s'il a cru qu'une glande de cette espce avait t extirpe. Que lui o b j e c t e - t - o n ? Vous commencez par invoquer l ' a u torit de Morgnagni, affirmant que, dans les vsicules d'une glande thyrode tumfie, il avait trouv une liqueur j a u n e , v i s q u e u s e ; et vous en concluez que la glande thyrode
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tumfie est susceptible de s'accrotre, ce que ne peut faire le squirre : c'est pourquoi, la t u m e u r extraite de la gorge de Thrse, ne renfermant pas une matire liquide mais une matire paisse, n'a pas pu tre la glande thyrode.Vous ajoutez, d'aprs le m m e auteur, que cette espce de glande est protge par un grand nombre de muscles,qu'elle est troitement attache l'extrmit suprieure de la trache; c'est pourquoi elle ne pouvait pas tre souleve assez pour tre extraite, et qu'elle n'a p u , m m e aprs qu'on et pratiqu u n e ouverture dans son enveloppe, sortir d'elle-mme. 9. Q u a n t a la premire difficult, n o u s ferons observer que l'argument formul est vicieux, parce q u e son cons q u e n t est beaucoup plus tendu que s o n a n t c d e n t . Morgnagni, dans son observation, dclare qu'il a extrait luim m e une glande simplement tumfie, et n'tant pas encore squirreuse ; mais il n'avance pas, il ne prouve pas que la glande thyrode ne peut pas devenir squirreuse, car si Boerhaave enseigne que le squirre a pour cause tout ce qui peut coaguler, paissir, desscher les h u m e u r s dans les glandes, qu'est-ce qui e m p c h e de croire que la liqueur j a u n e trouve par Morgnagni, liqueur qui, du reste, est propre cette glande, dont un liquide jauntre, gras, et huileux parat remplir la cavit (1), qui e m p c h e de croire, dis-je, que cette liqueur coagule par u n e cause morbide interne et dessche, ne puisse y revtir la duret d'un squirre?.Certes, le clbre Flajani, dans les observations qu'il a laisses sur le goitre, remarque q u e le goitre prend souvent naissance d'un endurcissement squirreux de la glande thyrode, et il ajoute : dans ce cas, c'est sur l'extir pation de la glande que repose l'esprance de la vie. Il rap p e l l e que cette extraction a t faite, pour cette raison, par ls clbres chirurgiens Gooch, Vogel, T h e d e n , Desault (2). Dans notre cas, Zannoni a rapport que la tumeur extraite et ouverte avait laiss voir : u n e matire semblable d e l bouillie. Et la s u r de la personne gurie, qui avait assist l'extraction, a vu c o m m e un petit j a u n e d'uf. Ainsi t o u s deux affirment avoir vu dans la t u m e u r cette m m e couleur qui est le propre de l'humeur renferme dans la glander. Donc, si Cremonini a regard la tumeur extraite c o m m e tant la glande thyrode, il n'a certes rien affirm q u i puisse fournir matire un reproche.
( 0 Choquel, Trait Anatomie, descript., vol. 3, 1414. (2) Collez, di ossewaz. e rifles, di chirurgia. t. 111; p. 284, 285.
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10. Mais, dites-vous, cette glane est couverte par un si grand n o m b r e de muscles ; elle est si troitement adhrente au cricode et la trache I Eh b i e n ! aprs? Puisqu'on Ta extraite dans d'autres cas, pourquoi n'aurait-on pas pu l'ex traire dans le cas prsent? Mais cette tumeur tait mobile; une fois incise, elle sortit d'elle-mme, ce qui est i m p o s sible vu son adhrence si troite. Nous demanderons d'abord en quel endroit on a pris ce qu'on avance ici. Le chirur gien Zannoni, interrog sur ce point, rpondit: qu'il ne se le rappelait pas entirement, et il ajouta simplement par c o n jecture : il est certain, cependant, que la glande n'tait plus adhrente, mais mobile, lors del'extirpalion. Et cette conjecture est la c o n s q u e n c e naturelle de cette autre dj mise sur la nature de la tumeur, dont il ne se souvenait pas m m e trs-bien, et qu'il avait nonce en ces termes: Il m e semblait qu'elle tait du genre des kystes. Nous ferons e n suite observer que cette mobilit de la tumeur, reconnue par Zannoni, qui l'a extraite, ne fut pas bien connue de Gremo nini.On a donc tort de lui faire un reproche,de ce que, igno rant cette circonstance, il a pens qu'il s'agissait de la glande thyrode. Enfin nous remarquerons que la glande thyrode, s'attache en effet par son i s t h m e aux anneaux d e l trache, et que par les extrmits cle ses lobes elle touche des deux cots la cricode Mais le reste des lobes, c'est--dire, la par tie la plus considrable et la plus tendue, est libre, dlie, et mobile par consquent, ce qui a pour effet, que les lobes, e n se gonflant et en se durcissant, peuvent se trouver mobiles. Si maintenant, relativement l'acte mme de l'extirpation, la personne gurie a dit : Le sieur Zannoni retira au de hors un n o y a u qui t o m b a sur la serviette, cela ne prouve certainement pas que le corps (de la tumeur) sortit
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n i n i , elle laissait couler u n pus acre, c e pus aurait d ncessairement ronger les anneaux de la trache. C e p e n dant il n'y a aucun indice de lsion de cette artre, l'excep tion de cette crainte de Cremonini, q u e le mal aurait pu atteindre l'un des deux anneaux de la t r a c h e . . , de la quelle j e souponnai qu'un anneau avait pu tre at teint . 12. Mais regardez, j e v o u s prie, la direction de l'ulcre et cette difficult disparatra. Cette cavit horizontale qui, dans le cas propos, aurait d attaquer la trache, si elle s'tait dirige vers elle en droite ligne, Cremonini la trouva oblique, c'est-a-dire place a u ct de Tartcre, o u au-dessous des m u s c l e s sternode, et sterno-thyrode. Or ces muscles n e protgent par le devant de la trache, m a i s se contournent vers ses cts, et, par leur position m m e , n o u s montrent qu'il n'est pas permis de s'en servir c o m m e de prtexte pour harceler Cremonini. 13. Mais les experts judiciaires le convainquent d'inha bilet. L'un deux, en effet, examinant la personne gurie, a u m o y e n du toucher, dcouvrit l'absence de la glande e x tirpe, ainsi qu'une portion de tissu cellulaire ; l'autre, l'absence de la glande thyrode extirpe . Cremonini dit : Je n'ai trouv a u c u n vide o u m a n q u e de substance. Si vous n'piloguiez point sur les paroles des t m o i n s , si vous les interprtiez favorablement,comme l'exigent les rgles or dinaires, v o u s remarqueriez n a t u r e l l e m e n t q u e Cremonini a parl, n o n pas de la glande, mais de l'ulcre. E t e n effet, le miracle ayant e u lieu, il dut mettre t o u s ses soins, n o n p a s h rechercher si la glande avait reparu, puisqu'il n'en tait pas question,mais bien examiner si l'ulcere,qu'on d o n n a i t c o m m e le subjeclum du miracle, avait t entirement guri, ou s'il avait t s e u l e m e n t rduit quant son aspect. Il a d o n c d se livrer tout entier l'examen de la nature de la cicatrice, et rechercher avec le plus grand soin si quelque cavit, q u e l q u e vide, o u quelque callosit attesterait encore l'existence latente de la maladie. Comme il n'avait rien trouv de semblable, et c o m m e il avait vu que la cicatri s a t i o n tait parfaite, il a dit : Je touchai de la main la partie "malade, j e la palpai ; j e retrouvai sa morbidesse naturelle; mais j e n e trouvai aucun vide, o u m a n q u e de substance. Pesez ces m o t s : la morbidesse naturelle.. aucun vide... rapprochez-les d u but des observations de Cremo nini, et vous comprendrez facilement q u e ses paroles se rapportent u n i q u e m e n t la cicatrice et la cavit de Tul-
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cre, et n o n pas la glande thyrode. Et par cela m m e , c'est bien tort que, en raison de cette dclaration, on le met en opposition avec des experts qui traitent d'une c h o s e tout fait diffrente. 14. Si vous m e t t e z de ct cette interprtation trs l gitime, et si vous avez pris la rsolution de harceler tou jours Cremonini, parce qu'il n'a pas dcouvert au toucher l'absence de la glande thyrode, n o u s ferons alors remarquer que c'est tort qu'on attribue c e rsultat ngatif son ignorance.Cette glande,en effet, n'est ni bien grande ni bien tendue ; elle se cache s o u s les muscles sterno-thyrode, s t e r n o - h y o d e , o m o p l a t o - h y o d e , sterno-plastode et platismasto-myode. Ainsi donc il faut que le toucher exerce une trs-forte pression, c o m m e par exemple cela doit avoir l i e u au c o u recouvert de sa peau, pour qu'on puisse reconnatre l'existence, o u l'absence de cette glande. Par l m m e , tout dpend de la plus o u m o i n s grande pression du toucher, et n o n de l'habilet des mdecins, dont l'un r e connat l'absence de la glande, et l'autre ne la reconnat pas. Vous n e voudriez certainement pas attaquer ces experts judiciaires do l'autorit desquels vous vous servez; et cepen dant l'un d'eux a cru avoir dcouvert dans la partie gurie l'absence d'une portion de la cellulaire; l'autren'en a fait au c u n e m e n t i o n . Accuserez-vous ce dernier d'inhabilet. Allons, admettez plutt que ces deux experts judiciaires dfendent le sentiment de notre Cremonini. Tous deux, en effet, pensrent que la glande thyrode fut extraite une fois ; et ces expressions m o n t r e n t q u e ce sentiment n'est pas t e l l e m e n t absurde, qu'il faille, pour cela, accuser Cremonini d'ignorance. 4 5. Nous avons eu recours ces observations pour d fendre l'autorit de notre m d e c i n ; ce n'est pas dire q u e nous ayons voulu soutenir l'extirpation du corps thyrode : 1 parce que cela est tout fait tranger notre cause, c o m m e n o u s l'avons dit tant de f o i s ; 2 parce que, tout en tant port d'abord, par l'absence du corps thyrode que les experts admettaient aprs la gurison, regarder c o m m e plus probable l'opinion de ceux qui pensaient que ce corps avait t extirp, cependant, aprs un examen plus srieux, n o u s avons adopt le sentiment oppos. Et voici nos raisons : Zannoni qui a extirp cette tumeur, s'est montr bien oublieux dans sa dposition, et il ne prcise pas d'une manire certaine la nature de cette tumeur, puisqu'il donne entendre qu'il a d faire u n e opration vulgaire et assez facile. Les oprations trs-difficiles,, et qui
rclament t o n t e l'habilet de l'art, ne s'chappent pas faci lement de la m m o i r e ; bien plus, les mdecins clbres ont coutume de les consigner avec soin. Or l'extraction du corps thyrode est une opration trs-rare, pleine de hasards et de d a n g e r ; et, si lgrement remarque qu'elle et t, Zannoni ne l'aurait pas oublie.n outre le corps thyrode reoit quatre artres des carotides externe et sous-claviculaire,, et souvent la crosse de l'aorte lui en transmet u n e i s o l m e n t M (l).vant l'extirpation, il aurait fallu lier toutes les artres. Or ni le chirurgien, ni la sur de la personne gurie, qui tait prsente l'opration, ni la gurie e l l e m m e n'en fout aucune m e n t i o n . Cette ligature des artres est tellement difficile, que Gooch, dans l'extraction d'une glande t h y r o d e , n'ayant pu parvenir faire la ligature de
l'artre thyrode, obligea un serviteur tenir comprime Vouverture de cet artre pendant l'espace de huit jours, afin empcher l'hmorrhagie. Or, le chirurgien, la per
sonne gurie, et sa sur n e parlent ni de la difficult de cette opration, ni de la grande quantit de sang qui aurait ncessairement coul de la blessure. G est donc avec raison que l'omission de circonstances aussi graves, qui n'ont pu chapper ni l'observation, ni la m m o i r e , n o u s a a m e n conclure que la tumeur extraite tait d'une nature tout autre que celle de la glande thyrode. 16. Gardez-vous toutefois de croire que n o u s s o m m e s d'accord avec vous, et que, par ce qui prcde, n o u s atta q u i o n s l'autorit et la science de G r c m o n i n i e t des experts judiciaires qui ont pens c o m m e lui. Nous avons sous les yeux la dposition de Zannoni et des autres, et, dans leurs tmoignages runis, n o u s trouvons des arguments qui nous servent nier celte extirpation. Ils n e l'ont p u faire, parce qu'ils ne virent rien de semblable; ils avaient s e u l e m e n t appris de la malade qu'on lui avait extirp de la gorge une tumeur, d'o tait rsult u n ulcre. C'est pour quoi, considrant la cavit de l'ulcre qui correspondait la place du corps thyrode, considrant l'extrme diffi cult de la dglutition qui rsultait ncessairement de la tumeur des lobes de cette glande, considrant encore que cette glande e s t sujette aux aifections squireuses, ils o n t donc pu croire, avec raison et e n toute connaissance de cause, que ce corps avait t extrait. 17. Jusqu'ici, c o m m e on le voit, nous n o u s s o m m e s occu ps de la question des preuves. On aurait p u regarder c o m m e
(1) Cloquet. Trait d'anatom. 1475.
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hors de propos t o u t ce qui regarde la nature de la tumeur extraite, si par l on n'et pas essay d'infirmer l'autorit de Gremonini, c'est--dire le nerf principal de la preuve. Il nous faudrait maintenant parler du premier extrme du miracle, c'est--dire de l'existence et de la nature de la maladie; mais on n e n o u s oppose aucune difficult sur ce point. Ces deux points, en effet, taient tellement examins, et si exposs la vue et au toucher de tous les tmoins, qu'il tait impossible tout h o m m e sens de les rvoquer tous deux en doute. Le seul point sur lequel il tait permis de chicaner sans encourir la note de folie, c'tait la gravit de la maladie; aussi notre critique l'attaque-t-il avec beaucoup d'habilet. 11 Vattaque, non pas d'une manire directe, cela lui aurait t impossible, mais indirectement, savoir : en cherchant des circonstances, en en forgeant, pour attnuer la maladie, et pour amener croire qu'il fallait attribuer la gurison aux seules forces de la nature. C'est ainsi que de la question prliminaire des preuves, nous avons t amen au second extrme du miracle, en laissant le premier de ct. Son vidence, e n effet, sa certitude, qui sont entirement hors de doute, ont t reconnues et proclames d'une m a nire bien claire par notre Critique l u i - m m e . 18. Pour montrer que la gurison surprenante et subite cle cclt* maladie n'a eu nullement besoin de la vertu d'un miracle, notre Censeur s'applique persuader que la nature si l o n g t e m p s tourmente par les mdecins, lorsqu'elle fut abandonne " e l l e - m m e , a pu facilement prparer la gurison par le pus corrompu qui dcoulait de l'ul cre. Ce pus, en effet, faisait sortir de l'ulcre des parties intrieures corrompues ; il dtruisait la callosit par l'action de la suppuration, et prparait ainsi la voie au rapproche m e n t des chairs de la plaie qui taient spares. L'obstacle disparaissant, l'ulcre tant nettoy, il devait tendre se fermer, surtout dans un cas o, c o m m e il le dclare, il n'y avait dans les chairs rien rtablir, rien renouveler ; o il suffisait que la peau toucht les anneaux de la trache, c o m m e cela eut lieu dans la cicatrice. 19. Cette difficult est expose tout au long, mais sur de bien faibles preuves, dans sept paragraphes q u e n o u s c o n s i drerons dans leur ensemble, avant de discuter chacun d'eux en particulier.Tout ce raisonnement, o u , pour parler plus exactement, toute cette hypothse repose sur une c o n fusion d'ides qui est amene trs-adroitement; on confond l'action du p u s corrompu avec l'action du pus favorable * et on veut faire accepter c o m m e instrument de gurison c e
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qui engendre et nourrit l'ulcre fisluleux. Pour rendre cela vident, il suffit de considrer un instant l'origine de la fis tule et les caractres du bon et du mauvais pus. 20. Lorsqu'on reoit une blessure, si elle n e se cicatrise pas au premier effort de la nature, c o m m e on dit, elle peut revtir bien des aspects divers. Si rien ne s'oppose l'action bienfaisante cle la nature, l'inflammation qui s'est produite fait place une suppuration trs-utile ; sous l'action de cette suppuration, les parties dchires produisent bientt des b o u r g e o n s de chair qui, se runissant les uns aux autres, rtablissent la continuit qui avait t r o m p u e ; une peau nouvelle s'tend sur des chairs redevenues c o n t i n u e s , et la cicatrice apparat. Si au contraire quelque vice intrieur, gnral o u local, au lieu d'un pus favorable, dtermine la suppuration mauvaise et acre d'une matire c o r r o m p u e , alors la blessure se change en ulcre, c'est--dire, en m a ladie contre laquelle la nature n e fait plus d'effort, o u fait des efforts impuissants. Voici c o m m e s'exprime R i c h e rand (1) : Entre la plaie, o u la blessure qui suppure, et Tul i cre, il y a cette diffrence bien sensible et caract ristique. La premire rsulte d'une cause extrieure, et, l'aide d'une srie de priodes dtermines, ejle tend naturellement sa gurison, qui arrive toujours, pourvu qu'elle ne soit ni contrarie ni trouble dans sa marche. C'est u n mal aigu qui marche une fin h e u r e u s e . L'ul cre, au contraire, est u n e affection devenue chronique, et qui est produite par u n e cause intrieure. Aussi Regnoli fait cette remarque sur l'ulcre: U n e f o i s b i e n < tablie, la solution de c o n t i n u i t n e subit pas les phases c d e l blessure, elle tend toujours s'agrandir, ou, pour le m o i n s , elle reste stationnaire pendant un temps dter m i n . Telle est l'ide, ajoute-t-il, que Ton doit se faire de l'ulcre (2). Ce quoi il faut ajouter cette remarque de Richter : (3) Il n'y a aucun ulcre dans lequel on ne r e trouve u n virus de mauvaise qualit et des impurets, c'est l'aide de ces deux qualits qu'on distingue l'ulcre d'une blessure passe l'tat de suppuration. Voil la n a ture, voil les signes de l'ulcre. 2 1 . La fistule n'est q u ' u n e espce d'ulcre; elle se d i s t i n g u e des autres ulcres par sa forme qui est celle d'un
(1) Nosogruf. chirurg, vol. 2. Ulcre. f) Lez. di medic. opertu, p . 29. (3) Elem. di chirurg., 1.1, sess. 6, c. 26.
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petit t u y a u de p l u m e , d'o elle tire son, n o m . Beaucoup de causes peuvent changer 1 ulcre en fistule ( 1 ) : P r e s q u e toujours, dit Richter, ce qui empche ou ce qui arrte l'vacuation de la matire purulente, lait passer l'ulcre l'tat de fistule. Ainsi donc, si les lvres de l'ulcre se rapprochent d'elles-mmes, ou bien si elles se rapprochent par suite de l'imprudence du chirurgien qui, par l'abus de la charpie, o u par des bandages trop serrs.empche la libre sortie clu pus mauvais, il s'tablit une cavit troite qui prend le n o m de fistule. Et parce que, tant h cause de la longueur du canal de la fistule que de Ttroitesse de son ouverture, le pus est dans l'impossibilit de s'couler libre ment, il s'accumule en plus o u moins grande quantit dans la fistule, il l'tend, les parois s'cartent, et leur runion est e m p c h e par la prsence du corps tranger qui s'intro duit entre elles. Par suite aussi de son cret, le p u s qui e n rsulte irrite continuellement toute la superficie de la fis tule, et la m a i n t i e n t toujours dans un tat d'iailammation, n e lui permettant jamais de suppurer, ni de se nettoyer C'est pourquoi la surface de la fistule devient toujours plus sale et plus corrompue (2). En effet, examinez les fistules qu'on a ouvertes, vous verrez les parois intrieures de la fistule rcente couvertes de bourgeons calleux et vasculaires, analogues ceux que l'on observe dans la cavit d'un abcs ouvert depuis quelques j o u r s . Puis,, mesure que la fis tule devient plus vieille, ces bourgeons vont en diminuant, et sont remplacs par une couche membraneuse r o u s stre, velue, h u m i d e , peu sensible, dont l'paisseur a u g m e n t e p e u peu Cette membrane devient dans certains cas, (particulirement si elle a t surexcite souvent et fr q u e m m e n t ) , trs-paisse, dure, calleuse et presque insen sible (3). 22. Nous savons donc : 1 que la blessure se change en ulcre par suite d'un vice intrieur gnral ou local : . par u n vice local, ou par un tat morbide qui affecte toute la constitution (4); 2 q u e la nature de l'ulcre emporte avec elle une corruption o u impuret, et qu'elle est accompagne d'un pus acre, corrosif; 3 que la nature, abandonne elle-mme, est impuissante contre l'ulcre ; 4 que l'ulcre se change en fistule par suite de tout ce qui gne la libre vacuation du pus ; 5 que le pus acre et corrompu, resserr par le
(1) (2) (3) (4) Ibirt., cap. 27. Ibid. 763. DizioiL di m d i a interna et esterna actio. stota. Uoyer* Trait de% mal. chirurg., i. L
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rtrcissement de l'ouverture, entretient u n e continuelle inflammation dans la fistule ; sa surface devient plus sale, et la suppuration est e m p o c h e ; 6 Enfin, que cette irrita tion continuelle et cette stagnation d'une matire acre engendrent une m e m b r a n e morbide qui devient de plus en plus dure et paisse, surtout si l'on a supporter des irri tations graves et frquentes (1). 23. Les observations prcdentes, tires des crits des m decins, nous font c o m m e le tableau et l'histoire de la ma ladie dont n o u s parlons. La plaie cause par l'extraction de la t u m e u r ne se cicatrisa pas d ' e l l e - m m e , ni l'aide d'une suppuration favorable. Aussi, par suite d'un vice int rieur, elle dgnra e n ulcre, c'est--dire, e n u n e plaie impure et sanieuse ; et, cause de cela, la nature a b a n d o n n e e l l e - m m e dut tre dans l'impossibilit de la gurir. Cet ulcre, dans lequel le chirurgien introduisait chaque j o u r de la charpie, soit par l'abus de cette charpie qui faisait obstacle la libre sortie du mauvais pus, soit par u n vice naturel, c o m m e n a se contracter. L'ouverture qui tait d'abord large, c o m m e n a se rtrcir et se changea en ulcre.-Cette ouverture troite retenait les matires corrompues, qui s'agglomraient de jour en jour. Leur cret et leur stagnation jointes plus tard aux graves et frquentes irritations produites par le fer et les caustiques, firent natre cette m e m b r a n e dure et calleuse que Cremonini a dcrite. Maintenant si la fistule est n e du n o n - c o u l e m e n t du pus, si le pus arrt, o u s'coulant difficilement, a produit la membrane d e l fistule, si ensuite par s o n cret il l'aug m e n t a toujours, l'endurcit, et la fit arriver l'tat c a l l e u x , qui serait assez sot, assez stupide, p o u r n e pas voir q u e le pus devait causer seulement une a u g m e n t a t i o n du m a l , mais nullement la destruction de l a callosit, et la c o n s o l i d a t i o n des parties ? 2 4 . Cette histoire de la formation de la fistule montre clairement l'absurdit de l'hypothse contraire. Cette absur dit deviendra plus grande encore si n o u s tournons notre attention vers la qualit du pus et ses efets. Richter, que n o u s avons cit plus h a u t , a fait cette remarque : dans chaque ulcre il y a une matire d'une mauvaise qualit. Et de n o m b r e u s e s raisons d m o n t r e n t que ces matires ont d tre de cette sorte dans ie cas qui n o u s occupe : 1 Si le
(2) Sous le nom d'impuret, les mdecins dsignent les extrmits des fibres et des vaisseaux ronges, parties corrompues, mortes, endures qui tapissent la surface intrieure de l'ulcre. Ricin, ltn. de chirurg., t. 1, sess. 4, c. 20.
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pus n'avait pas t mauvais, s'il et t de bonne nature, la plaie -ne se serait pas change en ulcre, mais elle se serait cicatrise; 2 parce que ce mauvais pus tait sta gnant, c'est--dire, tait renferm dans l'ulcre ; mais le
pus stagnant preuve un changement subit par la chaleur du lieu, et il se tourne en corruption G'est pourquoi le
pus gras disparat, et cette h u m e u r visqueuse, qui res semble assez au lait crm, se change en un iluide faible et i c h o r e u x ; 3 Parce que ce pus corrompu, demeurant e m prisonn, produisait de vive douleurs. Et en effet, sous l'ac tion corrosive de ce pus, la j e u n e fille devenait furieuse, elle faisait des contorsions, elle se plaignait; 4 parce que la partie malade se gonflait, s'enflammait chaque fois que les matires corrompues se trouvaient ramasses dans l'ulcre. Les conduits accidentels, c'est--dire la fistule, disent Roche et S a m s o n , lorsqu'ils sont forms, sont peu douloureux Mais dans certains cas, surtout lorsque la matire s'coule rapidement, elle produit une forte irrita tion, elle arrive ensuite s'enflammer de temps en temps ; et alors elle peut devenir le sige d'une tumeur assez c o n sidrable... et de la sensibilit la plus vive... Or, tout cela se rencontrait dans la malade. Le prtre Recchia affirme : a Quand se produisait la nouvelle matire, on voyait la partie se couvrir de boutons, et s'enflammer ; elle se gonflait, elle augmentait, et l'inflammation produi re sait la matire. Le matre de la personne gurie, dit aussi : l'intrieur de la fistule laissait voir u n e grande inflammation. Et le tmoin dix-neuvime : Cette m a ti tire'tait produite l'intrieur..., et quand l'abcs tait pour se fendre,, on le voyait un peu plus b o u t o n n e u x au ti dehors. 25. D o n c l'ulcre, considr en l u i - m m e , la stagnation de la matire dans cet ulcre, les douleurs causes par la matire, le gonflement et l'inflammation de la partie m a lade, t o u t montrait que le pus devait tre compltement mauvais. Et cependant, tout ce que cela indiquait, la qualit du pus qui s'coulait le dmontrait plus clairement encore. 11 y a une si grande diffrence entre les signes d'un pus anodin, et d'un pus dangereux. Voici les paroles d'Hippocrate : Le pus est de bonne nature lorsqu'il est blanc, gal, lger et nullement ftide, et celui qui revt les signes .contraires, est trs-dangereux (1). Avicenna traitant des signes du p u s , a dclar avec encore plus de clart : L e
(i) In Hippo. progacon. 7, de commes. 2. apud galemes.
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pus est de b o n augure, quand il est blanc, doux, et sans mauvaise o d e u r Il est mauvais, ftide, a n n o n a n t la putrfaction, quand il n'est pas mr sa sortie Quand il sort du pus de parties diffrentes, de diffrentes c o u l e u r s , de substances diffrentes, il est d'une espce oppose celle du pus favorable (!). Ces caractres qu'Hippocrate dsigne par les n o m s de blanc, gal, lger, n o u s les avons vus rendus et c o m m e peints par S w i e t e n sous la ressemblance de lait crme. A cette qualit il a oppos directement le fluide ichoreux, qui, d'aprs Galien,. est un pus aqueux et dlicat. Oui, le pus incolore, o u blanc, inodore, gluant c o m m e du lait crm, gal, c'est--dire c o m p o s d'une substance h o m o gne, est u n pus favorable, de b o n n e nature. Mais le pus color, ftide, dli c o m m e de l'eau, c o m p o s de substances h t r o g n e s , est mauvais, acre, corrosif, et les modernes lui d o n n e n t le n o m de pus corrompu (sanie), expression qui le distingue du pus favorable. 26. T o u s les t m o i n s ont remarqu que le p u s qui c o u lait de l'ulcre de Thrse, tait e n t i r e m e n t lluide, c o m m e l'eau, et color. Le prtre Recchia, qui habitait la m m e m a i s o n , d i t de ce p u s : c'tait une maiiregdte cle coulem jauntre. Le matre de la malade: Elle continuait d i s tiller par l'ouverture qui se trouvait au milieu du c o u , c o m m e u n e espce de petite pluie, qui souillait le m o u choir qu'elle avait sur les p a u l e s . . . . Par cette petite ii ouverture, coulait u n e matire semblable une petite pluie, c'est--dire, de cette qualit, d o n t la couleur r e s semblait du pus dli.. Une servante de la m m e maison: Il sortait dehors c o m m e des eaux salies. Elle distillait u n e espce de petite eau dlie d'une couleur corrompue. Et Cremonini, qui,en qualit de m d e c i n , a tudi ce pus avec soin, a dit que ce pus n'avait pas toujours la m m e c o u leur, mais qu'il tait toujours galement ftide. Il a rappel en effet : Le liquide sanieux qui coulait, et qui tait d'une couleur jauntre et verdtre, et bien ftide. Il a encore dclar : La matire tait ichoreuse, sanieuse, verdtre, jauntre et ftide. Mais l o r s q u e ces matires amasses e n plus grande quantit s'coulaient, elles laissaient apparatre des s u b s t a n c e s diverses et htrognes. La personne gurie dposant sur ce fait qui lui est propre: l'ulcre, dit-elle, laissait sor tir tantt du pus seulement, (ce que rapportent les t m o i n s (1) Cam. medic. fin. 3, trait. 1 cap. xxm.
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prcdents) tantt du pus et du sang, et u n e autre fois m m e du pus c o m m e du fil. Ces pus taient blancs et c o m m e pleins de fils. Ainsi, tous les mauvais signes du pus ci-dessus rap ports, la tnuit, la couleur, l'odeur ftide, l'ingalit, tous conviennent ce pus mauvais qui coulait de l'ulcre de Thrse. Tous les s y m p t m e s de la maladie noncs p r c d e m m e n t attestaient de la manire la plus vidente la m m e nature du p u s . Il est donc de la dernire vidence que ce pus tait des plus mauvais. 27. Quelqu'un voudra peut-tre ajouter : Mais ce p u s d ' u n e espce si mauvaise a peut-tre pu p a r l a suite se transformer en pus d'une nature meilleure. T o u t abord, il est certain que cela est c o m p l t e m e n t impossible d'aprs la dfinition et la nature de l'ulcre ; car on ne peut concevoir d'ulcre sans pus de mauvaise qualit; autrement, ce ne serait plus un ulcre, mais une simple plaie. Ecoutez Gorter : Les humeurs, dit-il, qui ont caus la pourriture o u la corruption, ne peuvent se changer en simple pus sous l'action de la chaleur , car ce qui est corrompu ne peut se changer en p u s . . . . . . . mais bien e n une corruption plus grande. E n second lieu, les faits s'y opposent. P e u de temps avant la gurison, les m a tires qui s'coulaient taient toujours de la m m e nature ; la malade endurait la m m e enflure, la m m e inflammation que l'on voit ordinairement accompagner l'amas d'un pus corrosif. Gremonini, parlant du deuxime o u du troisime jour avant la gurison, a dit : J'ai vu recueillie sur le ' mouchoir, la m m e matire ichoreuse, sanieuse, jauntre, verdtre, et ftide, c o m m e elle tait primitivement, et peut-tre de plus mauvaise qualit Et le mal existait toujours avec le m m e anneau calleux, et le cou tait gonfl, signe de la production et d'un amas de matire. .Le soir m m e qui prcda la gurison, le prtre Recchia a dit : * Il -y avait encore de l'enflure et de l'inflammation,, indice que la matire tait sur le point de sortir. On u voyait que la gorge tait gonfle : J'ai constat cela le tt soir. A cet amas de matire putrfie, cette inflam mation, cette enflure, correspondaient les douleurs i n s parables de l'action corrosive du pus ichoreux. Aussi Thrse a - t - e l l e dclar : ce soir-l j'tais plus t o u r mente qu' l'ordinaire ; et voulant exprimer la vivacit de la douleur produite par l'cret du pus sanieux, elle dit : c e t t e douleur tait c o m m e des aiguillons Ce n'est pas tout. Le pus sanieux, rpandu au m o m e n t m m e de la g u -
vi.
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r i s o n , atLeste aussi que, jusqu'au m o m e n t du miracle, il a conserv la m m e nature mauvaise, ichoreuse. T o u s les t m o i n s parlent de la tache q u e l'on vit sur l'i m a g e approche de l'ulcre. Et Cremonini qui Ta considre en connaissance de cause, n o u s a fait connatre la qualit de cette tache, lorsqu'il d i t : J'ai observ la tache de la matire sanieuse qui avait souill l'image, et quoiqu'elle ft dess c h e , j'ai pu dcouvrir par l'odorat, qu'elle tait encore ftide, c o m m e elle l'avait toujours t auparavant. 2 8 . Il est bien prouv, que le pus a persist dans sa m a u vaise nature jusqu' la fui. Que fallait-il e n a t t e n d r e ? La
cavit et les parois de la fistule sont malheureusement at teintes par ce pus corrompu, dit Swieten-; et Ilicther plus
explicite encore, dit : Le p u s d'une nature mauvaise n o n s e u l e m e n t s'oppose l a sparation des i m p u r e t s , et forme u n obstacle la croissance d'une chair nouvelle et saine ; m a i s encore, et surtout, il vicie et gte t o u j o u r s davan t a g e la partie solide qui recouvre la surface de l ' u l c r e . C'est pourquoi bien qu'il soit abandonn l u i - m m e , l'tat de ce pus devient de plus e n plus sale, et il recule ses limites d'autant plus que la matire est acre (1). Il restait donc attendre une a u g m e n t a t i o n de densit et de duret dans la m e m b r a n e de la lis tule, l e d v e l o p p e m e n t de la callosit, la formation de nouveaux canaux, de n o u veaux sinus, le dveloppement des anciens, la destruction des vaisseaux dlicats qui taient atteints, la corruption des h u m e u r s qu'ils rpandaient, et sa trop grande abondance dans les cavits. < T o u t e la surface d'une cavit, dit S w i e t e n , c qui renferme ce pus dli et rendu plus acre, est entretenue par u n liquide ichoreux et dli qui le r o n g e ; il e n rsulte q u e les extrmits dlicates de ces vaisseaux, restant toujours ouvertes, sont dtruites ; alors les h u m e u r s venant se r p a n d r e , subiront une corruption semblable, et les parois se trouvant ronges, la grandeur de l'abcs augmentera, puis les b u m e u r s venant s'y runir, l'abondance du pus s'accrotra. Voil la gurison merveilleuse qu'il faut attendre de ce bienfaisant progrs-de l'action ichoreuse, q u e la critique-nous o p p o s e avec un si p o m p e u x appareil. Aprs ces observations gnrales, il est t e m p s , j e crois, de discuter les preuves particulires. 2 9 . Afin de montrer q u e la gurison tait assez facile, n o t r e critique s'efforce d'attnuer l'ulcre l u U m m e , et fait
(1) Elem. di chirurg. 1.1. sez, 4. ctclle tileeri cap. 5 . 685.
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remarquer que les cavits de la fistule, taient de bien peu d'tendue. L ' u n e , d i t - i l , la v e r t i c a l e , s'tendait sur la longueur d'un demi-pouce ; l'autre, horizontale, s'tendait jusqu'au deuxime anneau cartilagineux de la trache. Or ces anneaux, dit-il, sont si peu loigns que, l'ulcre venant se gurir, la cicatrice s'tendit jusqu' e u x . Donc la longueur de la cavit horizontale tait bien pe tite. Si cette cavit horizontale n'et pas t oblique, si elle s'tait dirige vers la trache e n droite ligne, n o n s e u lement n o u s n e serions pas d'un avis contraire celui de la critique, n o u s ajouterions m m e qu'on pourrait peine se figurer une cavit, puisque l'paisseur de cette partie est peine plus grande que l'paisseur de la peau. Dans le cas prsent, n o u s n'avons pas besoin du secours de notre censeur qui se fait l u i - m m e celte objection : Il n e faut pas mesurer au compas la gravit de l'ulcre ; mais bien plutt,d'aprs sa malignit et ses circonstances. Or, n o u s croyons avoir fait connatre assez clairement, trop peut-tre , cette malignit et ces circonstances. Repor tons-nous aux actes. Lorsque Zannoni eut extrait la tu m e u r , il y avait a une belle cavit, une belle ouverture, et le chirurgien y a introduit de la charpie. J Si l'incision avait eu > lieu en droite ligne vers la trache, alors, la tumeur tant extraite, la peau, qu'elle tendait v i o l e m m e n t , se serait d tendue s u r - l e - c h a m p , et n'aurait pas laiss u n e belle o u verture. Il fallait donc qu'on l'et t o u c h e d'une manire oblique s e u l e m e n t . Ge que cette observation n o u s apprend se trouve c o n firm bien clairement par Gremonini disant qu'il a pntr dans u n e cavit horizontale jusqu'au deuxime anneau cartilagineux de la trache, au-dessous des muscles sterno-tyrodien, et sterno-iodien , c'est--dire que le m u s c l e sterno-thyrodien, qui est au-dessous du sterno-iodien, ayant t rong, la cavit de la fistule atteignit, mais de ct, les anneaux d e l trache, car ces a n n e a u x taient vides de leur glande t h y r o d e . Ces muscles, e n effet, protgent non pas la partie m o y e n n e de la trache qui se trouve en avant, mais les cts s e u l e m e n t . 30. La critique e l l e - m m e , sans le vouloir, corrobore n o t r e observation. E l l e fait r e m a r q u e r , en effet, que les m d e c i n s experts ont dcouvert chez la personne gurie l'absence du corps thyrodien : l'absence de la glande thyrode. Bien qu'il e n refuse l'extirpation Zannoni il ajoute cependant : J e n e disconviens pas que cette glande, et d'autres c h o s e s encore, et m m e que le tissu cellulaire n'aient t s u c c e s s i vement r o n g s .
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Mais la partie du milieu, c'est--dire l'isthme seul de cette glande, avec les parties suprieures en avant des deux lobes, adhre directement la trache, l'autre partie des lobes, et c'est la plus grande, s'tend sur les cts. Si d o n c le pus sanieux a d ronger successivement les deux lobes,il a certainement d aussi se frayer un c h e m i n j u s q u e sur le ct de la trache, o le lobe existe ; c'est pourquoi il a d se diriger vers la trache, n o n pas en droite ligne, et c o m m e de front, mais d'une manire oblique. Ainsi,que vous considriez vos observations, o u la situation du sinus horizontal indique par Cremonini, ou bien enfin cette cavit assez profonde atteste par les t m o i n s la suite de l'extraction, tout vous montre que la cavit h o r i zontale a d tre tout" fait oblique, et q u e par c o n s q u e n t elle a pu lre assez l o n g u e . Puisqu'il est ainsi certain q u e , ds le dbut, celte cavit fut assez grande, et que, par lerapprochement de ses lvres, elle a form la fistule, il doit tre certain aussi que la fistule a d s'tendre jusqu'au fond de cette m m e cavit. C o m m e o n a reconnu en outre qu'un pus acre a c o u t u m e d'largir et de dilater la cavit, et, c o m m e vous admettez que la glande thyrode a t ronge par ce pas, n'est-il pas de la plus grande certitude que cette cavit horizontale a pu n'tre pas de si peu d'tendue? 3 1 . Mais, dites-vous, q u o i q u e la cavit ft plus profonde, cependant ces espces de fils qui sortaient de l'ulcre taient des portions bien dlies des parties ronges par le m a l . Or cette vacuation qui se prolongea jusqu' la dernire nuit, tait un effort favorable de la nature qui dtruisait et reje tait t o u t e la corruption, afin q u e cette corruption venant disparatre, la peau pt se rasseoir sur les anneaux de la trache, c o m m e il arriva e n effet. Nous avons affirm n o u s m m e s qu'un travail de destruction a e u lieu dans l'ulcre, m a i s ce travail de destruction a-t-il pu amener la g u rison ? Il est facile de rpondre pour ceux qui ont lu ce que n o u s avons crit jusqu' prsent. Quelles taient en effet les parties c o r r o m p u e s dans l'ulcre? Nulles autres q u e celles qui c o n s t i t u a i e n t l'ulcre l u i - m m e , o u ses parois o u bien les extrmits des fibres et des vaisseaux panouis sa surface, par suite du pus qui e n distillait, pus qui coulait sans r e lche, extrmits relches, corrodes, ples, c o r r o m p u e s , prives de vie, e n d u r e s . Or tout cela constitue la cor ruption du pus, corruption qui a u g m e n t e par suite de la stagnation ou de l ' c o u l e m e n t d'un pus acre. Les parties environnantes sont d'abord saines, et la corruption, la cor-
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rosion dont elles sont atteintes plus tard, elles les doivent la seule cret des matires ichoreuses de l'ulcre, l e s quelles dilatent, prolongent la cavit, en viciant, en morti fiant, en dtruisant tour tour les parties restes saines j u s qu'alors. Mais si, c o m m e vous l'assurez, les espces de fils qui sor taient de l'ulcre, n'taient certainement rien autre c h o s e que de petits m o r c e a u x de quelque glande ronge, o u d'autres parties, vous convenez-vous m m e que ces espces de fils n'taient rien autres que des dbris de parties saines j usque-l, et qui se trouvrent plus tard dtruites par le travail de la corruption. E t mettant ainsi sous n o s yeux le progrs de ce travail destructeur, vous n o u s fournissez la preuve la plus claire de l'accroissement de cette maladie que vous vous tiez propos de n o u s montrer sur s o n dclin. 32. Vous insistez : Le pus sanieux qui sortit la dernire n u i t , ne fut presque rien, car la tache qu'elle imprima sur l'image du vnrable serviteur de Dieu, pouvait tre rte la
grandeur d'une lentille, ce qui montre la petite quantit de l'humeur, et prouve que les derniers dbris des parties lses avaient t expulses.
Nous voici revenus au m m e point, nous pitinons sur place. N'importe 1 accordons pour un p e u de temps notre censeur, ce qu'il dsire. Dans cette dernire nuit donc, l'ulcre fut purifi de toute espce de salet. Mais si alors il fut purg, alors aussi il passa l'tat de simple plaie. Mais la plaie doit subir la marche suppuratoire, pour se cicatriser, or dans le cas e n question, elle s'est cicatrise en un instant. Notre censeur donc, l'aide de tous ses efforts, ne fait rien autre que de remplacer le miracle de la gurisoni de Yulcre par le miracle de la gurison d'une plaie. Ce qui, videmment, estimpossible la nature et n'avance rien. 33. Que d i r o n s - n o u s e n c o r e ? La tache imprime sur l'image nous servira-t-elle de mesure pour apprcier la quantit de pus qu'on a recueilli de l'ulcre pendant cette dernire n u i t ? Les tmoins nous ont fait savoir qu'on a toujours fait sur la malade cette observation : chaque fois que des matires rassembles en plus grande a b o n d a n c e , taient stagnantes dans l'ulcre, chaque fois aussi, la gorge se gonflait, s'enllammait, et les douleurs augmentaient. Les m m e s tmoins nous font connatre encore que, avant la gurison, le soir m m e qui la prcda, il y eut gonfle ment, indice de la prsence de la matire engendre, il y avait gonflement et inflammation, signe que la matire tait sur le point de sortir..., la gorge tait gonfle... Et la personne
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gurie n o u s apprend que ce m m e soir elle souffrait plus que de c o u t u m e d'une douleur vive et piquante. Qu'il y et donc une quantit n o n mdiocre de pus sanieux a g g l o mr dans l'ulcre,- n o u s le savons par l'enflure et l'inflam m a t i o n de la gorge et par l'accroissement des douleurs. Il est donc ridicule d'apprcier la quantit d e p u s a n t r i e u m e n t amass, par la tache que l'on a observ aprs la gurison Si l'image ne portait qu'une seule goutte de ce pus, cela ne prouve pas qu'il n'y et u n e trs grande quantit de m a tire corrompue renferme dans l'ulcre ; mais, au c o n traire, cela montre l'action merveilleuse du p r o d i g e ; car ou bien cette action enleva tout coup tout le p u s sanieux, ou b i e n , par une vertu qui n o u s est i n c o n n u e , convertit ce pus en u n e autre matire reproductive des tissus et qui reconstitua les parties malades laissant l'extrieur ce lger indice de tache c o m m e un t m o i g n a g e offert tout le m o n d e , et constatant que la matire a rempli l'ulcre jusqu' la fin. 34. Aprs avoir considr la profondeur de la cavit, et la quantit de matire qui en dcoulait, la critique passe l a callosit et n o u s dit: La callosit intrieure n e s'opposait pas la gurison; car: 1 n o u s n e savons pas si cette callosit que Gremonini avait dcouverte huit mois avant la gurison, tait demeure dans le m m e tat; 2 la suppuration d e v e n u e plus abondante avait pu le faire disparatre ; et la callosit disparaissant, la cavit verticale se fermait d ' e l l e - m m e , P o u r q u o i n'en aurait-il pas t cle m m e pour la cavit h o r i z o n t a l e ? Tl vous et t aussi facile de la fermer par u n m o y e n semblable. V o y o n s , e n reviendrons-nous toujours aux m m e s arguties? P o u r la troisime fois n o u s dirons : si l e travail facorrosion qui, de votre aveu, devait enlever la callo s i t , s'est prolong jusqu' la dernire n u i t , c o m m e n t , cet o b s t a c l e venant disparatre t o u t d'un c o u p , les parties se sont-elles runies s u b i t e m e n t ? Douteriez-vous de la per sistance de cette callosit jusqu' la fin? Craindriez-vous qu'elle n'ait t dtruite par le pus sanieux? Revenez, j e v o u s prie, la description et la formation de la fistule; revenez la qualit du pus sanieux, ses effets, et vous verrez facilement, que n o n s e u l e m e n t , la callosit a d n c e s s a i r e m e n t persister j u s q u ' la lin, mais aussi que c e t t e callosit et la m e m b r a n e de la fistule ont du crotre sans cesse en duret, e n densit, sous l'action de l'cret du pus s a n i e u x . 3 3 . Vous insistez : m a i s restait la callosit extrieure, t a n t qu'elle existait, j e l'avoue, l'ulcre n'a p u revtir la * nature d'une plaie ordinaire ; le pus reproducteur (de la
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chair) n e pouvait se former, et les bourgeons charnus n e pouvaient natre pour remplir le vide. Mais dans le cas e n question, la nature n'avait pas besoin de tout cela, pour produire la partie charnue, selon l'expression de Gremonini. Le travail se fit autrement. Il n'tait pas ncessaire que ce qui avait t rong ft renouvel, ni que le vide ft rempli par la chair ,mais les parties malades intrieures se trouvant c o n s o m m e s par la suppuration, la peau revenait dans son tat naturel, et se reliait aux anneaux de la trache, c o m m e cela eut lieu en eilct. 36. Groyez-vous avoir bien russi en tablissant la fistule dans une partie cartilagineuse, et non dans une partie charnue? E c o u t e z Hippocrate: Il est trs difficile de gurir les fistules qui se forment dans les parties cartilagineuses et dans des endroits o la chair fait dfaut. Elles sont creuses, elles sont sinuleuses, et laissent couler un pus ichoreux perptuel. On gurit plus facilement celles qui se dclarent dans les parties m o l l e s , charnues, et prives de nerfs (1). Mais n o u s n o t o n s seulement cette observation en passant c o m m e trangre la question. Gremonini, dont vous i n voquez l'autorit, n'a jamais affirm que la fistule se t r o u vait dans la partie cartilagineuse, Il a m m e assez clairement enseign le contraire, lorsqu'il a plac la cavit horizontale de cette fistule, entre les muscles, slerno-hyodien et sternothyrodien, et la cavit verticale entre d'autres muscles, qui sont tous c o m p o s s de chair. Il a seulement ni, qu'on et p u employer des caustiques nergiques sur les parties qui n'taient pas revtues -d'une paisseur notable de chair o se runissaient u n grand n o m b r e de m u s c l e s importants, et sur les cartilages de la trache; car on n'aurait pu y appliquer les caustiques sans s'exposer un grand danger. Du reste, voici ces paroles : Je pouvais employer les caustiques pour dtruire la callosit extrieure, procurer la dilatation de l'orifice, et prparer ainsi plus facilement une issue la m a t i r e - f a m e u s e , mais il ne m'tait pas permis galement de hasarder l'usage d'un remde si puissant pour dtruire la callosit intrieure, avec le danger assez probable, o u plutt la certitude de produire un mal plus grand, si j'attaquais, u n e partie dpourvue de chair, une partie dans laquelle se runissaient tant de muscles importants, et aussi cause du voisinage de la trache artre, car j e <t craignais qu'un de ses anneaux ft atteint. La simple lecture de cea paroles, et e n m m e t e m p s la
(1) Apud Swieten. ad Brhaav. aplior. 413 i n n .
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vue claire de l'endroit de la cavit dsign par Cremonini, font comprendre facilement que ces paroles, si j'attaquais une partie dpourvue de chair , n'ont nullement t e m ployes par ce chirurgien pour dsigner une partie cartilagi n e u s e , mais bien au contraire, pour caractriser u n e partie c o m p o s e de muscles importants, adjacente la trache; laquelle on ne pouvait appliquer de puissants caustiques, p o u r opposer, dis-je, u n e telle partie, celles, o l'on peut avoir recours la cautrisation, cause de l'paisseur n o table de chair qu'elles prsentent. 37. Du reste, que vous choisissiez une partie charnue, o u u n e partie cartilagineuse ? Il faudra en arriver la m m e c o n c l u s i o n . Si vous prfrez un endroit charnu, la suite de la purgation h y p o t h t i q u e des cavits et de la fistule, v o u s serez forcs de reconnatre la ncessit d'un procd reproducteur. Si vous prfrez un endroit cartilagineux, v o u s n'chapperez pas la m m e ncessit. En effet, il faut d u temps pour rtablir la solution de continuit dans les par ties les plus dures aussi bien que dans les plus m o l l e s , quelle que soit d'ailleurs la manire dont la nature produise ce r sultat, ce dont les mdecins n e conviennent pas entre eux. En outre, lorsque v o u s accordez la destruction de la glande thyrode, du tissu cellulaire, et d'autres choses encore, vous tes forcs d'avouer, que les parties spares par u n e action corrosive, se sont runies de q u e l q u e m a nire. D o n c dans ces deux h y p o t h s e s , vous venez vous briser contre la ncessit invitable d'un procd assez l o n g , dont la lenteur rendra la gurison subite c o m p l t e m e n t impossible. 38. Notre censeur, avec l'intelligence dont il est dou, a v u la valeur de ces observations, il a v u en opposition s o n h y p o t h s e l'exprience journalire, et l'enseignement de tous les mdecins dclarant : que l'ulcre, tant qu'il est a b a n d o n n lui-mme, devient de plus e n plus impur, et tend ses limites d'autant plus que le pus est plus acre ( 1 ) . Mais il avait rsolu d'attribuer la gurison aux seules forces de la n a t u r e ; aussi laissant de ct ce qu'il ne pouvait faci l e m e n t rfuter, afin de paratre se proccuper de n o s preuves, il s'est propos, une objection, que nul, pensait-il, n e pourrait rsoudre : c'est--dire qu'il a v o u l u jeter de la p o u d r e aux y e u x de ses lecteurs, lesquels voyant s o n objection facilement rfute, se laisseraient aussi persuader qu'il e n est de m m e de la Cause. Il a donc crit : Vous demanderez (i) Biclher. supra relatus.
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peut-tre pourquoi la nature a si longtemps retard son u v r e ? La raison en est claire : parce que son travail a t troubl pendant trs l o n g t e m p s . Mais pourquoi donc, lorsque, auparavant, la nature fut si longtemps abandonne e l l e - m m e , alors que la maladie n'tait pas encore invtre, pourquoi dis-je n'a-t-elle p|as accompli ce m m e travail? L a jeune fille vint Montegranaro au mois d'aot 1780; pendant deux m o i s elle y reut les soins d'Antonacci. Ensuite elle n'employa aucun remde pendant l'espace de vingt-deux m o i s , c'est--dire jusqu'au mois d'aot 1782, alors qu'elle prit la rsolution de recourir aux conseils de Gremonini. Bien singulire bizarrerie de la nature! Lorsque la maladie s'tait grandement accrue, elle a voulu accomplir en huit mois, ce qu'elle avait refus de faire en vingt-deux m o i s , quand la maladie tait encore lgre !!| 39. Mais, d i t e s - v o u s , la nature a certaines priodes, qui dans les maladies aigus se c o m p t e n t par jour, et par annes dans les maladies chroniques ; or, la maladie de Thrse dura sept annes environ, c'est le temps critique ordinaire; et puis la gurison arriva sept ans environ aprs la pubert, t e m p s o, selon le tmoignage de Testa, l'ge tant aifermi par les annes, L'afflux des principes vaporeux de la vie se trouvant bien rgularis, la force et la tnacit des subs tances solides s o n t ce qu'elles doivent tre. Alors le corps se trouvant dans toute sa croissance, tout c e qui est celluleux, prend s o n entier dveloppement, d e l les formes agrables de la j e u n e s s e l'aspect rose, model et mieux proportionn. Voil une rudition bien remarquable sans doute ! Mais quel rapport a-t-elle avec notre sujet? Si Thrse et t gurie de sa maladie l'poque de sa pubert, alors que les principes vaporeux de la vie se trouvant bien tablis, la force et la tnacit des substances solides sont arrives ce qu'elles doivent tre, vous auriez peut-tre pu invoquer ce texte. Mais c'est cet g e m m e qu'elle a c o m m e n c souffrir de son mal. Que vient donc faire la citation de Testa dans le cas prsent ? Vous avez ajout : il s'tait coul sept annes depuis le c o m m e n c e m e n t de la maladie, lorsque Thrse fut gurie. Mais ces sept annes reposent sur une simple hypothse, savoir l'hypothse que la maladie a c o m m e n c au mois d'aot de l'anne 1770. Quant n o u s , d'aprs la dposition de la personne gurie, affirmant qu'elle avait alors pass sa treizime annes, n o u s avons conclu, en vertu de raisons par n o u s numres, que la
s
tumeur se dclara l'an 1777. Mais s'est-elle dclare, a u c o m m e n c e m e n t , au milieu, ou la fin de cette a n n e ; nous l'ignorons c o m p l t e m e n t . Si v o u s dites que c'est n o n pas la fin, mais dans le cours d e c e l t e anne que la t u m e u r s'est dclare, alors vous n ' a u r e z plus sept annes, mais six s e u l e m e n t ; et l'argument spcieux des annes critiques ou climatriques s'vanouit c o m p l t e m e n t . M a i s accordons cette supputation de sept ans. Dans les m a l a d i e s chroniques, s e l o n v o u s , la c r i s e se c o m p t e p a r les
a n n e s , et n o n p a r des j o u r s : la crise s e p t e n n a l e de c e t t e
maladie a certes pu c o m m e n c e r la s e p t i m e a n n e , a n n e critique, mais a-t-elle p u s'accomplir dans l'espace d'une seule nuit ; ce qui renverse encore votre h y p o t h s e . Mais t o u t cela est inutile, quand il suffit de remarquer, que la nature de la maladie e n question, a p u tre sujette quelque mtastase, laquelle, au m o y e n de l'absorption a p u transporter les mauvaises humeurs dans u n autre endroit, et donner u n nouvel aspect de m a l a d i e , m a i s dans ce cas la crise aurait t impossible. Ajoutez cela, que n o n - s e u l e m e n t les d o n n e s d u S o m maire ne n o u s m o n t r e n t a u c u n e trace de crise, mais qu'elle est n i e avec f o r c e p a r C r e m o n i n i , l o r s q u ' i l dclare : J e sais t r s - b i e n q u ' i l n ' e s t s u r v e n u a u c u n e c r i s e favorable chez Thrse Tartufolo. Voyez d o n c ce q u e devient tout c e t chaffaudage de la crise. 4 0 , Notre censeur avait crit, c o m m e n o u s l'avons v u : J e l'avoue, l'ulcre avec u n e callosit intrieure n e p e u t pas revtir la nature d'une simple plaie , c'est--dire que l a continuit interrompue des parties n e peut pas se rtablir. C'est pourquoi, n'ayant a u c u n e raison n a t u r e l l e qui l ' a u t o rise dire que cette callosit extrieure avait disparu, il revient elle, et avance, qu'elle tait bien petite, d'un dia m t r e de 2 5 millimtres a u , p l u s , qu'elle n'tait pas dure, puisqu'elle se dilatait s o u s l'action de l'enflure de la gorge ; et e n f i n , qu'elle n ' e s t pas certain q u ' e l l e ait dur jusqu' la fin. D a n s tous l e s cas, d'ailleurs, dit-il, p e r s o n n e n e p l a c e r a u n miracle dans la dissolution d'une callosit, et cola d'au tant p l u s q u e , l e s parties putrides intrieures expulses, cette callosit fut grandement.amliore, qu'elle se dpouilla de sa duret, l'irritation venant disparatre, et qu'elle fut bientt dtruite par u n e lgre suppuraLion, car enfin c e t t e callosit tait bien faible. 4 1 . F a u t - i l rfuter de semblables a l l g a t i o n s ? Dans l e s fistules o n appelle, callosit extrieure, celle qui entoure l'ouverture de la fistule ; or, le signe caractristique de. la
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fistule est u n e ouverture troite. Ce nom (de fistule} est donn un ulcre profond, TROIT, calleux, dit Celse (1) ; et Hoff m a n n dit : La fistule est un ulcre sinueux, troit et calleux. Si la fistule, pour tre fistule, doit avoir u n e ouverture troite, la callosit qui entoure cette ouverture ne devra-t-elle pas tre troite, elle aussi, par sa n a t u r e ? Et n'est-il pas absurde de mesurer la force et les mauvais effets d'une callosit, d'aprs son t e n d u e . Mais, d i t e s - v o u s , cette callosit n'tait pas bien dure, puisque quand la gorge s'enflammait et se gonflait, on voyait son diamtre s'accrotre davantage: il est donc p r o bable que c'tait une substance spongieuse plutt qu'une callosit. Si la peau s'tendait par suite du gonflement, la callosit devait n c e s s a i r e m e n t s'tendre aussi, puisqu'elle environnait l'ouverture de l'ulcre ; et parce que l'inflam mation s e j i g n a i t t o u j o u r s h la tumeur, la couleur rose qui rgnait t o u t autour devait rendre la callosit plus visible, et par consquent elle pouvait sembler avoir u n e amplitude plus grande. Mais de ce dveloppement, apparent o u vri table de la callosit fque v o u s ne croyez certainement pas aussi dure que du fer ou du bois), vous ne pouvez pas conclure contre sa duret ; et m o i n s encore conclure, que c'tait une substance spongieuse. Un fungus, en chi rurgie, est une excroissance spongieuse qui s'lve sur une plaie ou sur un ulcre, dit James ( 2 ) . Or chez Thrse il n'y avait aucune excroissance autour de l'ulcre ; on aper cevait seulement c o m m e un anneau r o n d . . . , u n bouton rond, form par la p e a u devenue plus dure. Il n'tait pas spongieux, mais fort dur, car la s u r de la personne gurie l'appelle u n anneau o u cordon dur ; et la personne gurie, u n c o r d o n gros et d u r . . . un cordon o u u n anneau dur. Le chirurgien a dit, les lvres taient dures et calleuses.., et for maient un anneau c a l l e u x : le prtre Recchia, un gros anneau rond, il tait dur, c a l l e u x . . . u n anneau dur et calleux. Le matre de la personne gurie : une callosit d u r e . . . , u n cal rond, un cal formant anneau ou cordon. Il n'y eut donc pas l de substance spongieuse, mais une callosit vritable et trs-dure qui circonscrivait l'ouverture de l'ulcre. 42. Mais vous m e direz : Cette callosit persvra-t-elle vraiment jusqu' la fin? La rponse est facile. Si la fistule persvra, et tout le d m o n t r e , la callosit a d persister aussi, puisqu'elle tait u n e partie de la fistule. Si cette r(1) De medio. Lib. C. 28, n u m . 14. (2) Dissert, deflst. . 4. (3) Dict. tuiiver. de mdec. art. fungus.
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ponse n e v o u s satisfait pas, voici le chirurgien qui dclare: Trois jours avant la gurison, j'ai vu le lieu du mal avec le m m e anneau calleux. Et le matre de la p e r s o n n e gurie qui dpose : Dans les jours qui prcdrent la g u rison elle (la gurie), fut malade d e la m m e manire, f jusqu' la nuit o arriva le miracle... p e u avant il y avait i- la m m e callosit, semblable u n a n n e a u , ou u n cordon. Entendez encore la personne gurie, affirmant de la nuit m m e de sa gurison : que : ce cordon gros et dur, tait l.[tel que j e l'ai dpeint prcdemment ; et du jour prcdent, q u e c e cordon ou anneau tait dur c o m m e il avait toujours t. La callosit persvra donc d'une manire certaine, et clans le m m e tat, jusqu' la fin de la maladie. Yous insistez. La personne gurie, qui dpose seule de l'tat de la maladie pendant cette dernire nuit, racontait u n fait dj vieux de onze a n s ; elle a p u tre induite e n erreur, t r o m p e par la ressemblance des choses ; il est m m e permis de tirer cette c o n c l u s i o n par induction : e n effet le prtre Recchia, qui avait assur avoir v u la callosit jusqu'au j o u r qui prcda la gurison, aprs avoir rflchi ajoute : < qu'il avait bien en ce jour observ tous les autres c s y m p t m e s , mais qu'il avait dduit l'existence de la callo sit, s e u l e m e n t de l'existence des autres s y m p t m e s . A cette difficult, n o u s rpondrons : 1 si tous les s y m p t m e s existaient i m m d i a t e m e n t avant la gurison, la cal losit n e pouvait pas ne pas exister ; 2 si la callosit, d'aprs la d p o s i t i o n du matre de la miracule, existait
si le chirurgien dpose
qu'elle existait trois jours auparavant, elle n e peut certai n e m e n t pas s'tre dtruite d'elle-mme pendant ce t e m p s ; 3 la miracule qui dans le cours de plusieurs annes c o n t i n u e l l e s , avait appris par l'exprience du toucher r e connatre la callo&it, put m o i n s q u e tous les autres tre t r o m p e , et de la ressemblance des choses que vous lui opposez, elle a p u conclure avec certitude complte, que ce
v cordon ou anneau
dur continuait
tre ce qu'il
avait
< toujours t . 4 Enfin le raisonnement d'induction se c tourne c o n t r e s o n auteur : le prtre llecchia, q u e les c i r c o n s t a n c e s o n t certainement moins affect que la m i r a c u l e e l l e - m m e , a p u aprs onze ans conserver u n souvenir si exact des faits, qu'aprs avoir dit par erreur qu'il avait v u la callosit jusqu' la dernire nuit, il s'est repris t o u t aussitt, sparant les autres symptmes qu'il avait vus de l'existence d e la callosit, qu'il tirait par i n d u c t i o n ; la
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miracule au contraire, qui avait t plus gravement i m p r e s sionne, elle qui dposait d'aprs sa propre exprience et d'aprs son toucher, n'a pu se tromper lorsqu'elle a assur plusieurs reprises, que la callosit a persist dans le m m e tat jusqu'au miracle. 43. Vous insistez : On ne doit cependant pas faire reposer l e miracle sur la seule rsolution de la callosit; surtout parce q u e , les parties intrieures corrompues ayant disparu, la callosit se trouvant plus l'aise, ou bien elle se dpouilla de sa duret, ou elle fut aussitt dissoute par la suppura tion, tant elle tait petite. Nous voici ramens ce rabchage fastidieux d'une rpurgafcion spontane et parfaite du pus sanieux qui avait produit la maladie. Mais nous ne redirons certainement pas la m m e c h a n s o n ; n o u s opposerons seulement notre censeur l ' o b servation qui lui a t faite deux ou trois fois, et que ses propres redites appellent e n c o r e : si cette nuit la callosit
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cette cause morbide qui corrompt les h u m e u r s , et qui par l'cret du pus sanieux qu'elle scrte, nourrit l'ulcre et le dveloppe. Roche et S a n s o n e n s e i g n e n t sur c e p o i n t : L'indication curative la plus gnrale que prsente la fis tule, est de procurer te desschement de la cause. Il n'est d o n c pas utile de se borner l'imitation des anciens, attaquer directement l'orifice et la cavit de la fistule, <c au m o y e n de l'extirpation, de la cautrisation, o u de quelqu'autre procd, parce que de semblables oprations ne sont d'aucune utilit pour la gurison de la maladie, qui ne peut avoir lieu que quand la source de l ' c o u l e m e n t anormal se trouve dessche, et qu'ainsi elle ne peut plus reprendre son cours naturel ( l ) . 4 5 . Mais n o s chirurgiens, instruits l'ancienne c o l e , m e t t e n t tous de ct la cause de la maladie, et s'appliquent s e u l e m e n t rtablir la continuit des parties. Antonacci s'effora d'abord d'obtenir ce rsultat par la compression, mettant en usage ce prcepte : comprimer fortement le fond de la fistule contre son o u v e r t u r e . C'est pourquoi il il eut recours d'abord des bandelettes pour serrer le c o u de la malade; pendant ce temps, il ajouta u n e petite p l a q u e de p l o m b . Mais c o m m e cette exprience resta inutile, il eut recours au fer et aux caustiques pour procurer u n e sortie p l u s f a c i l e a u pus sanieux;il essaya enfin d'enlever la callosit, afin q u e l'ulcre tant purg, et r a m e n l'tat de simple plaie, il frayt le c h e m i n la runion des parties spares. En effet il avait appris que pour la gurison des fistules, il fallait procurer ces trois choses : l ouvrir au pus u n p a s sage libre, et l'empcher de demeurer l o n t e m p s stagnant dans la cavit et dans la fistule. 2 T o u t e la superficie i n t rieure de la cavit de la fistule doit tre purifie et r a m e n e la condition de simple plaie. 3 Les parties purifies, mais encore spares doivent se rapprocher, et se runir les u n e s aux autres. Cremonini suivit les m m e s prescriptions, mais ni l'un n i l'autre de ces deux m d e c i n s , ni aucun de ceux qui les avaient devancs ne s'en prit la cause de la maladie, p e r s o n n e n'administra la malade des r e m d e s pour rtablir les mauvaises h u m e u r s dans leur tat normal, personne nes'appliqua desscher la source du pus sanieux. C'est pour quoi, la cause de la maladie demeurant toujours la m m e , l e s m m e s effets ont d toujours se p r o d u i r e ; et ce pus ichoreux qui coula jusqu' la fin de la maladie, a d dvelop( 1 ) Elem. di patolog, mdico chirurg, dlie stole in gnrale.
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per les cavits , accrotre la callosit , rendre la m e m brane de la fistule plus paisse et plus dure. Et les tmoins n o u s apprennent que ce qui devait ncesairement avoir lieu, est arriv rellement. Donc, et la raison mdicale, et les dpositions des tmoins montrent avec vidence, que la maladie est dmesure dans sa malice jusqu' la fin, desorte qu'on ne saurait rien dsirer de plus clair. 46. Il ne reste plus rien dans ce fait qui rclame n o s soins! Notre Censeur Louche la certitude de l'invocation avec une telle hsitation, qu'il parat craindre d'tre-bloui par la clart du plus grand jour. Mais il ne rvoque nulle ment en doute l'instantanit de lagurison. C'est pourquoi, nous n'ajouterons aucune parole inutile cette discussion dj bien l o n g u e ; n o u s passons le reste s o u s silence.
3'. Nouvelles observalions critiques du Promoteur de la Foi.
4. Thrse Tartufolo, sous les coups de la maladie, qui la retenait c o u c h e , fit venir prs d'elle plusieurs chirurgiens qui employrent les ressources de leur art pour la soulager. Les dpositions nous l'apprennent. A l'poque, o le procs fut introduit, plusieurs d'entre eux taient morts; d'autres ne lui avaient donn leurs soins que dans les premires priodes de la maladie ; et ne purent par consquent porter a u c u n j u g e m e n t sur sa gravit. Le seul Gremonini, qui soigna la malade, lorsque le mal et pris de grands dveloppe ments, a fait connatre son avis sur la nature du mal. Mais la .nature du traitement employ par lui fut telle, qu'il ne peut produire en n o u s la certitude que la maladie l'ut grave. E n elt Gremonini le dclare lui-mme : J'ai fait des m s tances afin de pouvoir observer le mal, dans le cas o j'au rais voulu o u la gurir, ou au moins lui procurer quelque soulagement. Mais j e ne pus rien obtenir... Malgr tout ce que pus dire, cela ne me fut pas possible. Il obtint cependant, d'approcher une fois sa m a i n de l'ulcre et do lui appliquer un m d i c a m e n t deux reprises dillrentes. Mais, ces devoirs de sa charge remplis, il c e s s a de soigner la malade. Je lui ai prescrit de placer elle mme, l'extrieur., sur le sige du mal, un caustique trs actif. Je l'ai a m e n sans trop de rsistance se l'appliquer une seconde l'ois ; mais elle protesta qu'elle ne le ferait plus ensuite , c'est pourquoi je cessai de la soigner, (som. p. bO, . 73.)
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2. On peut donc avec raison rvoquer e n doute l'autorit de ce mdecin. Il a pu examiner u n e seule fois l'ulcre de Thrse, et encore faisait-elle des rsistances ; elle avait en horreur le contact de la main du chirurgien, aussi peut-on croire que Cremonini a fait cel e x a m e n la lgre, et qu'il n'a pu reconnatre c o m p l t e m e n t les s y m p t m e s essentiels d'une fistule. 3. En outre, n o u s ne pouvons avoir u n e pleine confiance d a n s s o n r a p p o r t , cause du dfaut-de m m o i r e qu'il accuse dans son t m o i g n a g e . En effet tous les tmoins affirment qu'une petite glande fut extraite de la t u m e u r de la j e u n e fille par le chirurgien Zannoni, dans la ville de Civila-Nova. E t quoi qu'il et recueilli la connaissance de ce fait de la b o u c h e m m e des tmoins, Cremonini l'oublia c o m p l t e m e n t u n e premire fois, et, dans une s e c o n d e dposition, il affirma que l'opration avait t faite par le chirurgien Antonacci dans la ville de Monlegranaro. 4. Du reste, il n'est nullement probable que le n o y a u , extrait do la t u m e u r de la malade par les soins de Zannoni, ait t la glande thyrode ? Car alors cet ulcre aurait d atteindre ncessairement la trache, qui se serait ulcre au contact du pus contagieux; et, il n'est n u l l e m e n t dmontr que cet effet se soit produit. 5. Et puis n o u s n e v o y o n s a u c u n e raison de q u e l q u e valeur qui ait pu porter le dfendeur de la cause h insister sur la callosit de l'ulcre pour d m o n t r e r la nature de la fistule. En effet, d'aprs l'enseignement des m d e c i n s m o dernes que n o u s suivons, n o u s a d m e t t o n s que la c a l l o sit n'est pas a b s o l u m e n t propre de la fistule. Ils dfi nissent l a fistule un ulcre troit plus o u moins profond, u ayant la forme d'un canal, et qu'une cause locale entretient .De cette dfinition aujourd'hui c o m m u n m e n t admise, n o u s p o u v o n s conclure que la callosit n'est pas rellement de l'essence de la fistule, e t q u e c'est tort q u e les anciens docteurs enseignaient le contraire. La fistule, e n effet, peut exister sans callosit; cette dernire survient plutt par accident, selon le langage reu, et vient s e joindre la fistule. En effet la callosit a souvent son ori gine dans l'emploi rpt de la sonde. Et, ce qui est surtout digne de r e m a r q u e , la callosit est bien plutt u n effet de la fistule : c'est p o u r q u o i , le principe morbide qui entretient la fistule venant cesser, il est tout naturel q u e la callosit vienne aussi disparatre. 6. Quant ce qui regarde la gurison de la fistule, il est important de remarquer, qu'elle arrive souvent lorsque.les
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parties malades viennent se runir, ce qui arrive surtout lorsque, la faiblesse ayant cess, les chairs prennent de l'ac croissement. Une nourriture plus saine, jointe au repos, peut faire obtenir ce rsultat sans trop de difficults. A l'aide de ces m o y e n s , et de la nature aussi, plusieurs malades ont re couvr leur sant premire. Et parmi eux, il en est, n o u s le savons, qui taient atteints d'une fistule invtre et cal leuse, Boyer le rapporte dans s o n ouvrage intitul Des ma ladies chirurgicales, et il y traite la question tout au long, 7. Cela bien tabli, parlons de la maladie de Thrse, d'aprs les enseignements q u e nous venons de rappeler. Esquissons en peu de mots la marche de cette maladie. La fistule dont elle fut atteinte, est due une incision. Les chirurgiens ont employ un traitement qui aggrava le mal, au lieu d'apporter du soulagement la malade. En effet, aprs l'extraction du globule, ils ne se sont pas occups rapprocher les parties qui avaient souffert de l'incision, ce qu'il aurait fallu faire. Au contraire, l'introduction de la charpie, l'application des caustiques, l'usage de la sonde ont eu pour rsultat d'exciter u n e violente irritation et d'ame ner la callosit l'orifice de l'ulcre. Enfin la malade fati gue d'un traitement plutt nuisible q u ' u t i l e , et qui la faisait beaucoup souffrir, le rejeta compltement. G'est pourquoi, dans la suite, elle mit sa confiance dans les seules forces de la nature, qui, selon l'adage reu parmi les m decins, gurissent de nombreuses maladies. Le retour la sant est d en grande partie la nourriture plus saine que prit la malade pendant son sjour Natinguerra. P u i s , tout le pus qui se trouvait dans la poche d e l fistule, se trouvant vacu, il n'est pas surprenant que les parois de l'ulcre se soient rapproches pour se cicatriser, et que la callosit, qui fut un effet de la fistule, ainsi que nous l'avons vu, ait disparu sans laisser aucune trace. Si le -dfenseur n'tablit pas, d'une manire premptoire, que l'explication si n a t u relle de cette gurison n'a pu avoir lieu, s'il laisse subsister le plus petit doute sur ce point, cela suffira pour faire re jeter le miracle. 8. Et si nous poussions n o s difficults jusqu'au medium du miracle, c'est--dire jusqu' 1 invocation du bienheureux, on verrait qu'on ne peut l'tablir d'une manire vidente. La malade a dclar en effet aprs sa gurison : Dans le cours de ia maladie, j e me suis recommande bien souvent aux 4 saints, j e crois mme que j'ai eu recours tous les saints du paradis, et le mal persvra dans le m m e tat. Nous n e savons quels saints elle a eu recours ; les actes *. 29
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n o u s font seulement connatre que, la nuit qui a prcd la gurisorf, la malade adressa ses supplications au vnrable Benot, e n approchant de l'ulcre son i m a g e que son matre lui avait remise. En prsence de ces faits, il reste savoir laquelle de ces i n v o c a t i o n s il faut attribuer le miracle, suppos qu'il ait eu vritablement lieu. Benot XIV donne la s o l u t i o n de cette q u e s t i o n lorsqu'il crit, hb (4, par. L cap. 5. n. 7) : On s'a dresse ou bien un saint canonis, ou un serviteur de Dieu n o n encore canonis ; dans ce cas il faut attribuerle miracle l'intercession du saint c a n o n i s . Or c o m m e la premire invocation ne peut se rapporter qu'aux serviteurs de Die c a n o n i s s , le rtablissement de la sant n e peut tre attri bu l a seconde invocation. 9. Cette difficult subsiste malgr les paroles suivantes de la g u r i e : A u s s i t t que le capitane Ciuseppe m'eut apport l'image du vnrable serviteur de Dieu Benot Joseph Labre, je plaai en lui toute ma confiance, j e m e r e c o m m a n d a i lui s e u l , . . . et j e lui rapporte ma g u < rison. c Ces paroles ne dtruisent point les invocations qui avaient t p r c d e m m e n t adresses aux saints dans lesquels elle mettait aussi sa confiance. Si elle a j o u t e : lui seul je dois m a sant ; cela veut dire que l'invocation du vnrable serviteur de Dieu a t plus rapproche que les autres de la gurison. Elle ignorait du reste ce que. les rglements de ce tribunal ont prescrit dans les difficults de cette sorte. Enfin si n o u s examinons le titre m m e du miracle, il n o u s parat tout fait inutile de dire ce qu'il y a de propre u n e fistule, et ce qui l'accompagne ordinairement. Il et suffi de dire : gurison de Thrse d'un ulcre fistuleux. Cette simple expression renferme en e l l e - m m e ce qui c o n s t i t u e la nature de la fistule et ce qui l ' a c c o m p a g n e , sans qu'il soit besoin de rien*ajouter.
4. Rponses aux
de M. le
Pro-
1. La discussion de ce second miracle sera courte et f a c i l e ; car 1 L'vidence du mal qui tombe sous les sens, n e permet l'attaque de rvoquer en doute, ni l'existence de la maladie, ni son caractre, mais s e u l e m e n t sa gravit.
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2 Les deux mdecins habiles, appels pour se prononcer sur le m a l , onL confirm la nature de la maladie, et l'exis t e n c e d u miracle dans sa gurison. 2. Il y a cependant entre eux cette divergence, q u e l'un attribue la tumeur de Thrse Tartufolo u n e d i a thse scrofuleuse, dont l'extirpation a donn naissance u n ulcre fistuleux de la gorge ; c'est pourquoi il rapporte l a gurison soudaine u n miracle de troisime classe, c'est--
dire ce genre de miracles qui ont rapporta la manire dont la gurison est opre, parce que ces miracles o n t
lieu sur des maladies qui n e sont pas incurables en ellesm m e s . Le second, au contraire, est d'avis que la maladie en question fut une fistule larynge, spontane, incurable de sa nature, et, par l m m e , il rapporte tacitement la gurison subite la seconde classe de miracles, ceux qui regardent la substance mme du fait, en mme temps qu'il
prononce q u e la gurison fut instantane, parfaite^ vrante, et par consquent prodigieuse^ splendule.
pers
3. Mais q u e la fistule soit n e d'une diathsc scrofu leuse de l a personne gurie, c o m m e le pense le clbredocteur Baccelli, soit plutt, qu'elle doive sa naissance des causes inconnues, c o m m e le soutient l'excellent profes seur Albites ; tous deux n'enseignent et n'tablissent pas m o i n s d'une manire certaine, que la maladie en question
sinueux,
fistuleux,
calleux, ce qui est tout fait l e sujet du miracle propos par nous, abstraction faite des causes loignes qui o n t p l e produire. T o u s deux aussi montrent et affirment q u e la gurison de c e m a l fut tout fait prodigieuse. De sorte que s'il y a un dsaccord entre ces docteurs exp rimente, c e dsaccord n'a pour objet, n i l'existence, ni la nature d u m a l , o u ce qui constitue ce q u e nous appelons l e sujet du miracle ; mais seulement l'origine et l'espce particulire de la maladie -, et si n o u s les trouvons en. dsaccord sur le caractre du miracle, ce dsaccord est en notre faveur. En elfet, quand nous rapportons cette gurison l a troisime classe de miracles, nous avons pour n o u s l'un de ces docteurs, tandis q u e l'autre s'efforce de faire monter celte gurison u n miracle d'un ordre suprieur. 4. Voyons maintenant ce q u e nous oppose notre h o n o rable censeur. Comme n o u s l a v o n s dit, ne pouvant r v o quer en d o u t e , ni l'existence, ni le caractre d e l maladie, s o n but unique est de critiquer les preuves, c o m m e s'il d e vait e n rsulter q u e la gravit du mal n'a t n u l l e m e n t reconnue et dmontre. Mais cette m m e gravit, n o u s l'a-
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v o n s mise hors de d o u t e plusieurs reprises dans notre information, et dans n o s rponses antrieures. Certes, n o u s abuserions de la patience des vnrables Pres c o n s u l teurs, si n o u s y revenions u n e troisime fois. Nous n o u s contenterons de rappeler ici que la gravit du mal repose sur le tmoignage de huit tmoins, qui, t o u s , apportent t a n t de clart, tant de dtails, tant de prcision dans la description qu'ils nous font de toute la m a r c h e de la m a ladie, de ses s y m p t m e s , de ses progrs, qu'ils montrent tout la fois l'esprit, et m m e aux y e u x du lecteur, l'exis t e n c e d'une fistule invtre, avec chacun de ses caractres. 5 . La solidit de ces preuves ne souffre n u l l e m e n t de ce que quelques-uns des mdecins qui ont donn leurs soins la malade, sont morts avant l'introduction de la cause, de ce q u ' u n autre ne lui a d o n n ses soins qu'au dbut de la maladie, et de ce que Cremonini qui vit la maladie dj avance, ne l'a vue qu'une seule fois. E n effet, quand l'ac cord parfait des m d e c i n s et des autres tmoins, n o u s fait connatre que la maladie de Thrse consistait en une petite ouverture dans la gorge, entoure d'une 'tumeur dure et calleuse de la forme d'un petit anneau, que de cette o u v e r ture coulait un pus mauvais et ftide, lequel ens'arrtant de t e m p s autre faisait gonfler et rougir la partie malade, et causait la j e u n e fille des douleurs aigus qui ne cessaient que par le retour de l'coulement, n'avons-nous pas l'ouverture troite de la fistule, sa callosit et ses poches o u sinus, pouvant renfermer le pus, et la gravit de la maladie, mise en vidence par les douleurs et la malignit du p u s ? Les actes n o u s apprennent enoore que cette fistule tait dj parfaitement forme au mois d'aot 1780, et qu'elle dura j u s q u ' a u m o i s de m a i 1783. C'tait donc, d'aprs les actes, u n e fistule invtre ; or une fistule invtre, calleuse, s i n u e u s e , qui laisse laisse couler un p u s mauvais et ftide, a n n o n c e une m a l a d i e trs-grave; d o n c les actes nous four n i s s e n t la preuve la plus vidente de la gravit de la m a ladie. 6. Vous ajoutez : Mais les m o y e n s e m p l o y s pour obtenir la gurison n e peuvent produire e n n o u s la certitude q u e le mal tait grave. Est-ce bien vrai ? P o u r q u o i donc S o r m a n i , le s e c o n d m o i s aprs l'incision de la peau, l'avaitil t o u c h avec la pierre infernale, c'est--dire, dans le dessin d'exciter l'inflammation et la suppuration qui s'ensuivrait, afin de faire disparatre la callosit, et de ramener ainsi l'ulcre l'tat d'une s i m p l e blessure ? P o u r q u o i Antonacci, qui donna ensuite ses soins la malade, recourut-il, pour
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dtruire la callosit de puissants caustiques, c o m m e la pierre infernale, le feu mort, le prcipit? Pourquoi, en prsence de l'inutilit bien constate do ces efforts, disait-il qu'on avait besoin du fer? et en effet il retrancha cette racine, c'est--dire la callosit? P o u r ce quoi, cette callosit en forme d'anneau ou de cordon, aprs avoir t taille par Antonacci, a-t-elle reparu de n o u v e a u ? E t pourquoi Cremonini a-t-il amen la j e u n e fille placer e l l e - m m e l'extrieur sur le sige du mal, u n puissant caustique, c o m p o s d'une cerLaine poudre e s c a rotique, afin d'largir l'ouverture, et de dtruire la c a l l o site? Enfin pourquoi Ta-l-il pousse se l'appliquer une seconde fois? 7. Certainement n o u s n'entendons pas par l dfendre le traitement employ pour obtenir la gurison ; loin .de l, nous s o m m e s volontiers de l'avis des mdecins et de notre adversaire, lorsqu'ils affirment q u e ce genre de traitement dut nuire notablement la maladie, plutt que de lui appor ter du soulagement. Mais en m m e temps nous soutenons que c'est tort que notre adversaire a crit : Le traitement de la maladie fut t e l , qu'il ne peu t produire en nous la cer titude touchant la gravit du m a l . E n e i f e t , si partir du second mois aprs l'extirpation de la tumeur, tous les chirur giens n'ont eu qu'un seul but : largir l'ouverture de l'ulcre, dtruire la callosit, et ramener ainsi l'ulcre l'tat de simple blessure ; si tous leurs efforts furent inutiles ; si la callosit, brle, enleve par le fer, reparut toujours, et per sista avec opinitret jusqu' la fin ; si l'ouverture de l'ul cre ne put jamais tre agrandie ; toutes ces raisons runies ne montrent-elles pas la gravit d e l maladie en question ! 8. Mais, dites-vous, Cremonini, un des chirurgiens que nous v o y o n s dans la procdure, put examiner u n e seule fois l'ulcre de Thrse, car la malade rsistait cette ex ploration, et tmoignait une profonde rpugnance pour la main du chirurgien ; c'est pourquoi il est croire, que son examen eut lieu lgrement et la hte, et qu'il lui a t impossible de reconnatre tous les symptmes d'une fistule. y. Certes les conjectures n'ont plus leurs raisons d'tre, lorsqu'on a sous les yeux les preuves les plus claires ; et l'on n'est plus admis regarder c o m m e possible, ce qui est con tredit par les faits les plus vidents. Nous tenons de Gremo nini l u i - m m e le rcit de l'examen qu'il a fait; ce qui s'y rat tache est tellement bien dcrit, qu'il fait rejeter entirement tout s o u p o n de lgret et d'hsitation. 1 s'approche l u i 1 m m e de la malade -, avant tout, il inspecte l'ouverture ext-
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rieure, et ]a callosit ; il en dcrit la forme, l'tendue, la duret : J'observai la partie malade, et -l'extrieur j e vis une trs-petite ouverture, environne d'une lvre dure et calleuse, de la circonfrence d'un petit cercle de bague. A ces signes, reconnaissant une fistule, il en explore la p r o fondeur. Je pris une sonde je l'introduisis par l'ouver ture, elle pntra perpendiculairement, la profondeur d'un demi-pouce environ, entre les d e u x m u s c l e s d prcsseurs de la mchoire infrieure. Connaissant donc la profondeur et la direction de la fistule, c o m m e il tait impossible qu'un c o n d u i t perpendi culaire contint le pus, qui de temps en t e m p s s'amassait dans l'ulcre, il en infre qu'il existait u n e ouverture transver sale, rceptacle de ce p u s . Je supposai qu'il pouvait y avoir u n autre conduit hori zo-ntal, vers la trache, dans lequel avait lieu l'arrt indiqu. Il va donc explorer ce nouveau c o n d u i t . Oprant de nouveau avec la sonde, j e trouvai que cette ouverture tait la suite de l'anneau cartilagineux de la trache, a u - d e s s o u s des m u s c l e s slernotyrodien et sternooidien. Ce n'est pas assez : c o m m e l'aide d e s o n stylet, il avait rencontr une certaine callosit au fond d u premier canal, il a voulu avoir la certitude de s o n existence, en touchant -cet endroit h l'extrieur : Il y avait au fond du premier conduit, u n e callosit de la grosseur d'un pois, qui se trouvait prs d'une petite glande. N o n - s e u l e m e n t , j e la dcouvris l'aide de la s o n d e , mais encore e n t o u c h a n t cette partie l'extrieur avec les doigts. Il arrive enfin la nature du pus qu'il dit tre form de matires liquides et sanieuses d'une couleur jaune-verdtre, et u n e odeur trs-ftide. Ces faits constats, et, en raison de l'anciennet de la m a l a d i e , ainsi q u e des douleurs que la malade endurait s o u v e n t , il p r o n o n a q u e la fistule tait de la plus m a u vaise espce. 10. Que notre adversaire nous dise maintenant s'il est croyable, qu'un diagnostic opr avec tant de soin, et s'tendant l a fistule, la callosit, aux repaires du p u s , ait
t fait lgrement, la hte, et si cette lgret, cette hte prsumes peuvent faire rvoquer en doute la gravit d e l m a l a d i e ? Eh quoi 1 Le traitement employ par tous les chirurgiens e m p o r t e avec lui l'existence d'une fistule a n c i e n n e et d'un caractre des plus pernicieux; l'inspection l a plus minutieuse de la partie malade, et la sonde n e n o u s .montrent rien autre c h o s e qu'une fistule de cette espce ;
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tout ce qtte sept tmoins, en dehors du chirurgien, nous rapportent de l'histoire et des symptmes de la maladie qui tombent sous leurs sens, n o u s conduit la m m e c o n c l u sion ; et notre adversaire dsirerait encore des preuves pour tablir la gravit cle la maladie ? 1 1 . Vous poursuivez : En outre; nous ne pouvons donner u n e confiance inbranlable au rapport do C r e m o nini, vu le dfaut de m m o i r e dont il fait preuve dans son tmoignage. Il est certain, en effet, que Zannoni a extrait un globule de la tumeur de la jeune tille, dans la ville de Civita nova ; or, quoique Cremonini l'et appris des tmoins, il affirme que cette opration eut lieu Monte-Granaro, de la main d'Antonacci. 12. Voil certes un raisonnement bien c o m m o d e pour r e jeter tout tmoignage. C o m m e s'il tait possible de trouver, sans une extrme difficult, un h o m m e qui, aprs plu sieurs annes, conservt un souvenir assez exact des dif frentes circonstances d'un fait, pour se rappeler mme celles qui n'ont pas de rapport l'essence de ce fait. Est-il donc admissible que, si un t m o i n vient oublier telle ou telle circonstance nullement essentielle, on pourra rejeter son tmoignage, sous prtexte .qu'il a oubli quelque chose. Or, certainement, dans la cause en q u e s t i o n , il est vident que ni le lieu o le globule fut extrait, ni le n o m du chirurgien qui a fait cette opration, n'appartiennent la substance du fait, 13. Mais, d'un autre ct, Cremonini nous donne du traitement qu'il essaya sur la fistule de la j e u n e fille, une description si exacte, si naturelle, qu'il est clair qu'il a conserv de la maladie, le souvenir le plus parfait. Cette relation rpond en toul point aux traitements employs par tous les chirurgiens prcdents -, elle se lie parfaitement, et avec l'histoire ou la description de la maladie, et avec tous les s y m p t m e s rapports par les autres t m o i n s . Tout cet ensemble n o u s montre clairement que Cremonini a dcrit les choses -telles qu'elles taient, et que. n o n - s e u l e m e n t il ne se montre pas coupable d'oubli, mais qu'il fait preuve d'une m m o i r e trs-fidle. D'o il suit, que cet argument, -en vertu duquel notre adversaire, concluant du dfaut de m m o i r e sur une circonstance non-ncessaire, au dfaut de m m o i r e sur un fait rapport avec tant d'exactitude, pche p a r l e m m e ct que son argument prcdent o il oppo sait de simples conjectures des preuves certaines. 14. Continuons : quand Cremonini parlait du dia gnostic de la fistule, il rapportait une action qui l u i tait
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p e r s o n n e l l e ; quand, au contraire, il rappelle l'extirpation du globule, il parle de Faction d'un autre, action dont il n'avait pas t tmoin, et qui pourrait, il le dit l u i - m m e dans sa dposition, avoir t la causo de quelque erreur relativement aux temps et aux p e r s o n n e s . Aprs cela, pourra-t-on dire que Cremonini a perdu le souvenir de ce qui regarde l'exprience qu'il fit l u i - m m e , parce qu'il s'est tromp sur ce qu'il avait appris des autres, et qui n'avait nul rapport l'essence du fait? 15. Ajoutons qu'il tait facile d'tre induit en erreur sur ce point. Il avait en grande partie appris ces dtails de la jeune malade. Or bien qu'elle ft cloue d'une intelii gence suffisante, elle n'en tait pas m o i n s une personne ordinaire, et sans instruction ; et il est bien difficile qu'une telle personne fasse la relation d'un fait observ a avec exactitude, selon Tordre des t e m p s . E n elfet il tait certain et notoire pour tous, q u ' A n t o nacci avait incis l'ulcre et extrait la callosit Montegranaro. La malade le racontait en d i s a n t : Le seigneur c Antonacci... disait que la racine n'tait pas bien e n leve, et qu'il ferait une autre opration, c o m m e il fit. E t Laurence Ferrini compagne de la j e u n e malade, d i sait : Antonacci a galement coup la racine, je le sais, parce que je tenais fortement la m a l a d e . Il prit une a i guille recourbe avec laquelle il saisit la racine, la tira dehors et la coupa, et il crut devoir revenir une. autre fois pour la tailler encore, c o m m e il avait fait la premire fois. Or c o m m e il est certain qu'Antonacci a fait une i n c i s i o n dans l'ulcre, et que des tmoins ignorants d e l m d e c i n e disaient, en parlant de ia callosit, q u e cela fut fait parce q u e la racine n'avait pas t bien enleve, ne faut-il pas ajouter foi Cremonini plutt q u e de croire que ce m o t racine signifie que la t u m e u r fut extraite par Antonacci? 9 6 . Cela tabli, il n e peut plus tre question de m a n q u e de m m o i r e , m a i s d'une erreur de fait, erreur produite par une cause j u s t e et grave, et qui n e peut ni directement n i indirectement n o u s conduire inculper Cremonini d'un dfaut de m m o i r e . Du reste qu'il y ait erreur, o u m a n q u e de m m o i r e , a u c u n e de ces deux suppositions n e p e u t rien enlever la force de la dposition et l a p r o u v e par faitement tablie de la gravit du mal, que dmunirent la fois tant de raisons qui se corroborent m u t u e l l e m e n t . 17. Nous accordons volontiers notre censeur qu'il n e parat pas probable que ce durillon extrait de la t u m e u r de la malade par la main de Zannoni fut la glande
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thyrode. Nous l'accordons d'autant plus volontiers que dans le plaidoyer prcdent, quoique nous ayons soutenu la possibilit de cette extraction, pour dfendre Cremonini du reproche d'ignorance, n o u s avons maintenu que la t u meur extraite n'tait n u l l e m e n t une glande thyrode. 18. Arrivant enfin la nature de la maladie, l'attaque nous dit : II n'y a vraiment aucune raison pour que l'avo cat de la cause insiste tant, pour dmontrer la nature d'une fistule, sur la callosit de l'ulcre.Nous embrassons la thorie des n o u v e a u x praticiens c o m m e renfermant une science plus exempte d'erreurs, et n o u s savons ainsi que la callosit n'est pas absolument ncessaire pour caractriser la fistule. Ils dfinissent la fistule un ulcre resserr, plus ou m o i n s profond, en forme de cariai, et persistant sous l'in fluence d'une cause locale . Cette dfinition, gnralement admise de nos jours, montre clairement que la callosit n'est nullement de l'essence de la fistule, c o m m e les anciens chirurgiens se l'taient bien tort persuad. 19. Donc, de l'avis de notre adversaire, tous les mdecins depuis Hippocrate jusqu' n o u s , c'est--dire pendant vingt sicles, se sont faussement persuad que la callosit tait u n caractre propre de la fistule. Donc, nos praticiens n o u veaux sont bien m i e u x dans le vrai, Jorsqu ils affirment que la callosit n'est pas absolument essentielle la fistule. Donc encore, c'est un sentiment c o m m u n m e n t admis de nos jours !... Ne pourrait-on pas cependant diffrer d'opinion cet gard ? 2 0 . Notre p o q u e , n o u s en convenons volontiers, tend particulirement vers les nouvelles inventions. Elle met de ct la science et l'exprience des sicles passs ; elle se croit seule en possession de la lumire, tous les anciens taient dans les tnbres. Cependant, nous l'avouons, pour les choses, qui n'ont pas t claires d'un nouveau jour par des expriences plus parfaites en anatomie, et par l'tude plus approfondie des sciences physiques, nous nous en tenons aux anciens mdecins, et n o u s soutenons qu'ils sont toujours au premier rang. Tout le m o n d e sera de notre avis, si l'on veut tudier les ouvrages de mdecins rcents et anciens. On remarquera, chez les anciens, une s c i e n c e tudie j u s q u e dans ses moindres dtails, et expose avec tant de clart, que dans un petit n o m b r e de sentences ils expliquent au lecteur, c o m m e au naturel, et font p ntrer dans son esprit d'une manire l u m i n e u s e , ce que la plupart des nouveaux mdecins nous font peine entre voir, au milieu d'une foule de dtours, travers la lecture
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cle pages nombreuses. EL puis, ce scepticisme qui, de n o s jours, a envahi l o u l e s les sciences, et s'est tendu aussi la mdecine, n'a pas n a n m o i n s d p r c i les u v r e s des anciens. Une autre cause aussi a inlroduit cette plaie dans la m decine : c'est la symplowiafologie (science des s y m p t m e s ) . Les a n c i e n s , forms par l'exprience des sicles, avaient remarqu que loutcs les espces de maladies runissaient en elles des signes tellement propres, que, autant de fois on renconlrait ce concours de signes, autant de fois on reconnaissait la prsence do telle espce particulire de ma ladie. Les modernes mprisant cette perptuelle exprience, se sont mis liminer peu peu de cette runion de s y m p t m e s , t a n t t l'un, lanlt l'autre ; ils ont prtendu ensuite que tel genre de maladie existait souvent malgr l'absence de la plus grande partie des s y m p t m e s , jusque-l u n i versellement regards c o m m e pathognomoniques (indica teurs de la maladie). II en est rsult que les s y m p t m e s que l'on a conservs, ainsi spars des autres,, peuvent se rencontrer dans d'autres maladies diffrentes ; ils am nent alors confondre facilement une maladie avec u n e autre, et rendent e x t r m e m e n t difficile le d i s c e r n e m e n t des caractres diffrents des maladies. C'est au point q u e , aujourd'hui, les praticiens modernes affirment et l d a n s leurs crits l'impossibilit du ciiagnosLic do plusieurs m a ladies, pour lesquelles ce m m e diagnostic tait clair et vi dent aux y e u x de tous les anciens. a l . Et pour en revenir notre sujet, enlevez de la fistule tel ou tel de ses signes pathognomoniques, tout abcs troit, dont la tache revtira l'apparence de la callosit, sera pris pour une fistule. 22. Notre adversaire ne se fchera donc pas contre nous,, s'il nous ,est impossible de prfrer, sur la nature et les signes de la fistule, le sentiment des modernes celui des a n c i e n s , et de rejeter l'ancienne dfinition de cette maladie, pour embrasser la nouvelle. Il ne se fchera pas non plus si nous n e l'adoptons pas l'opinion des modernes .qui excluent gnralement la callosit de la nature de la fistule, et quoique cette o p i n i o n ait m a i n t e n a n t tous les suffrages en sa laveur,. Cooper cit plus haut, .un moderne certes, dfinit ainsi la fistule : Sous ce n o m , les chirurgiens entendent rigou reusement une plaie dont l'orifice est troit, assez profonde dans certaines parties, calleuse, et qui n'a pas de d i s p o sitions gurir. La Sacre-Congrgation des Rites a choisi deux chirurgiens habiles, et notre adversaire ne les rangera
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pas parmi les anciens mdecins ; lous deux ont affirm que la callosit tait essentielle h la fistule. En effet, le clbre Albites traitant de la formation du canal fistuleux, dans le cas en question, dit que l'ulcre tourna en fistule aprs avoir t calleux. Voici ses paroles : Les parties (malades) ayant t coupes par une incision, montrrent un ulcre profond, qui de calleux, se changea en fistule. L'excellentissime Baccclli s'exprime en termes plus clairs, lorsqu'il dit : La maladie consistait en un ulcc cre scrofuleux, sinueux et fistuleux, c o m m e le dclarait le mdecin Cremonini, ajoutant l'pilhte de calleux, qui est le vritable caractre de la fistule. Les modernes n'excluent donc pas c o m m u n m e n t la cal losit de l'essence de la fistule, et cette exclusion n'a pas en sa faveur le suffrage gnral. 23. Il nous est pareillement impossible de convenir avec notre adversaire qui, n o n a n t ainsi son sentiment, la calcc losit est bien plutt un effet de la fistule que sa partie essentielle conclut gnralement : 'il est vident que le principe malsain qui entretient la fistule venant cesser, la callosit cessera aussi . Nous accorderons que cela arrive quelquefois dans les fistules rcentes, dans lesquelles les souillures prsentent plutt une apparence calleuse, qu'une callosit vritable et dure ; car si la cause de l'irritation vient disparatre, si la vie est rendue aux parties malades, ces mmes parties spa res peuvent prendre de la croissance et se runir pour fer mer la plaie. Mais s'agit-il d'une fistule a n c i e n n e , recouverte d'une callosit vritable et dure, les parties malades tant entirement c o m m e m o r t e s , on peut enlever la cause de la maladie autant qu'on le voudra, jamais elles ne pourront se runir pour se souder, si on n'enlve pas la matire calleuse. Nous avons c o m m e appui dans ce sentiment Boyer luim m e que notre adversaire parat suivre dans ses attaques contre nous ; ce praticien pense la vrit q u e la callosit n'appartient pas l'essence de la fistule, et cependant il crit : Quand la fistule est trs-ancienne, et quand les c a l lositssont grosses et nombreuses, Pinertie, dans laquelle sont tombes les parties qui sont le sige de ces engorge ments termins par u n corps dur, devient un obstacle II cicatrisation, m m e aprs la suppression de la cause qui maintenait la fistule. 24. Ce que n o u s venons de dire rpond aussi suffisam ment au paragraphe suivant de la critique, o il est dit : que, par les seules forces de la nature, plusieurs ont t guris
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de la fistule, puisque souvent les parois se runissent et la pliiie.se ferme. T o u t le m o n d e en convient, s'il s'agit de petits abcs, que quelques modernes confondent avec des fistules vritables, c'est--dire avec ces ulcres troits, qui s o n t c o u r o n n s d'une callosit relle et dure. Mais s'il s'agit de ces dernires fistules, personne n'ad mettra que cette gurison spontane, telle que Boyer le rap porte ait eu lieu chez les individus atteints u n e fistule i n v t r e et calleuse. Car nous savons maintenant ce que Boyer pensait d'une fistule invtre et vraiment calleuse. 2 5 . Aprs la rfutation victorieuse de cette thorie de gurison spontane d'une fistule invtre et calleuse, n o u s pourrions omettre le paragraphe suivant, car il repose t o u t entier sur cette thorie. La premire partie parat crite pour confirmer la gravit de la maladie en q u e s t i o n . Nous y lisons : La fistule dont Thrse fut atteinte fut produite par l'incision. Les chirurgiens employrent u n traitement tel, qu'il dut aggraver la maladie plutt que de procurer du s o u l a g e m e n t . Ils ne s'appliqurent pas, c o m m e il l'aurait fallu aprs l'extraction clu globule, rap procher les parties sur lesquelles avait e u lieu l'opration, afin de les faire souder ensemble ; mais, grce la charpie qu'ils y introduisirent, aux caustiques qu'ils appliqurent, l'usage {des sondes, ils firent natre une grave irrita t i o n , et l'orifice de l'ulcre s'endurcit, devint calleux. Quelle est la conclusion naturelle de t o u t cela ? Ou bien la maladie tait de nature tre gurie son dbut, ou elle tait incurable, c o m m e le pense le clbre Albites, qui croyait une fistule spontane larynge. Si 1, c'est--dire, si le mal pouvait tre guri, cette i r r i t a t i o n conlinuelle e l l a naissance d'une callosit excessive m e n t dure, aigrirent e n m m e temps la c a u s e de la maladie, et enlevrent aussi toutes les parties atteintes l'action vitale qui pouvait seule les runir et fermer la plaie. Si 2 la maladie fut incurable m m e son dbut, certes, vu le traitement e m p l o y pour oprer la gurison, cette impossibilit devint naturellement absolue par l'irritation de la cause de la maladie ; car, c o m m e le fait observer Albites cit plus h a u t : Tout cela devait n c e s s a i r e m e n t amener la carie de l'os hyode, et du cartilage thyrode, e n m m e temps q u e l'ulcration du m m e ligament, d'o, par suite d'une suppuration mauvaise, vinrent le sang corrompu et le pus. Il est donc clair q u e , par ce traite m e n t , la fistule de Thrse est devenue d'autant plus i n c u rable, qu'elle Ttait dj de sa nature.
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26. Que maintenant notre adversaire continue c o m m e il l'entendra, et que dans la seconde partie du paragraphe, il fasse observer que la malade fatigue du traitement a rejet entirement t o u s les remdes; puis, que, grce l'air, la nourriture, l'vacuation de tout le pus, elle a procur naturellement la cicatrisation de la plaie. A qui pourra-t-il persuader cela ? La maladie n'tait-elle pas arrive tre incurable? La cause de la maladie ft-elle jamais enleve, c o m m e le dmontre ce pus de la plus mauvaise espce c o u lant de l'ulcre jusqu' la dernire nuit de la maladie? Ne vit-on pas persister jusqu' la fin, cette callosit excessive ment dure, laquelle, suppos m m e l'enlvement de la cause d u m a l , aurait toujours t un obstacle la cicatrisation des lvres de la plaie? Et quel h o m m e de bon sens pourrait jamais penser que les parois d'une telle fistule aient pu se rapprocher assez pour se l i e s s e cicatriser,en une seule nuit? 27. U n e fois tablie une gurison qui surpasse les forces de la nature, n o u s n'aurons a u c u n e peine pour dsigner celui dont le suffrage a opr le miracle. 11 pourrait bien y avoir quelque difficult, si on avait invoqu plusieurs saints la fois ; mais c o m m e cela eut lieu successivement, toute difficult disparat. Voici la rgle donne par L a m bertini : si quelqu'un a successivement recours plusieurs saints qu'il invoque, qu'il prie, et qu'il n'obtienne point ce qu'il d e m a n d e ; ce qu'il obtient dans la suite, est attribu
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2 8 . Il n'y a pas de doute possible ; il faut attribuer ce miracle au vnrable B e n o t - J o s e p h . T o u t e f o i s , pour faire ressortir avec plus de clart la faiblesse de l'objection, n o u s allons faire une h y p o t h s e des plus c o m p l i q u e s . Oui, ce serviteur de Dieu a t invoqu, mais il Ta t avec des saints canoniss que Ton invoquait en m m e t e m p s . A qui attribuer le miracle? Le cardinal de Lauraca nous rpond : Si o n invoque plusieurs serviteurs de Dieu ; le miracle ci ayant lieu, on ne peut l'attribuer l'un plutt qu' l'autre, moins qu'il ne se trouve q u e l q u e circonstance qui dtermine que le miracle est d celui-ci, de prf rence celui-l. Par exemple si des reliques, ou l'image de quelque serviteur de Dieu sont appliques, et si on a une plus grande dvotion pour celui-ci ; alors, quoique les autres aient t invoqus, il faut attribuer le miracle ce personnage dtermin.
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Mattheucci est du mme avis. Benoit XIV aussi lorsqu'il crit : Mais si les circonstances font connatre que celui qui rclame le secours des bienheureux, ait eu recours de prlrenec un serviteur de Dieu, o u bienheureux o u saint, et qu'il lui adressa des prires plus ferventes ; il ce faudra alors attribuer le miracle s o n intercession et n o n pas celle des autres, quoiqu'ils aient t invoqus. Or, dans le cas en question, on est certain de la ferme confiance de la malade au seul Benot-Joseph ; on est certain q u e l'image de Benot seul a t approche de la fistule ; il est donc certain que le miracle opr dans ces conditions doit tre attribu Benot-Joseph. La malade gurie dit : J'ai vritablement obtenu ma ce gurison par la mdiation du vnrable serviteur de Dieu Benot-Joseph Labre; la chose est certaine et peut se r a ce conter en peu de m o t s . Je me r e c o m m a n d a i lui, j ' a p pliquai son image sur m o n mal , j e plaai en lui t o u t e m a confiance Je posai l'image sur la place du <e mal , j e fus gurie en un instant. 11 y a l une c o n fiance particulire et des prires ardentes, il y a de plus l'ap plication de l'image sur la fistule, et cela rapporterait le miracle l'intercession de Benot-Joseph, quand bien m m e il aurait t invoqu avec d'autres saints. A c o m b i e n plus forte raison doit-il lui tre attribu puisqu'il fut invoqu aprs tous les aqtres, e l sparment des a u t r e s ? 2 9 . La question de ce miracle termine, notre adver saire s'en prend l ' n o n c . 11 voudrait une proposition plus simple, par e x e m p l e : c< Gurison d'un ulcre listuleux. Car ce cette dfinition comprendrait tout ce qui constitue et tout ce qui a c c o m p a g n e la nature d'une fistule, sans qu'il soit besoin d'en dire davantage.
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30. Nous n e savons si cette dernire difficult qu'on nous oppose peut s'accorder avec ce q u e noire adver saire a crit pour exclure toute callosit de la nature d'une fistule. En effet, si la callosit n'est pas tellemenl propre de cette maladie, qu'on n e puisse concevoir u n e fistule sans callosit, et cela, de l'avis de notre adversaire,
avis qui est le sentiment communment admis de nos jours, il faudra de toute ncessit ajouter l'ulcre, l'pithte de calleux. Nous ignorons pareillement si la c i r c o n s tance de invtre s'attache tellement la nature d'un ulcre fistuleux qu'une fistule rcente soit compltement impos sible; o u qu'on n e puisse rencontrer u n e fistule ancienne qui ait t rcente; car c o m m e n t une fistule serait-elle an cienne, si elle n'avait t rcente auparavant? Il faudra donc conserver le terme invtr. Enfin n o u s ne savons pas n o n plus si e n outre du petit canal qui constitue la fistule, celle-ci doive ncessairement avoir d'autres petits canaux transver saux o u obliques pour acolytes, de telle sorte que, si ces derniers viennent faire dfaut, il n'y aura pas de fistule. Mais c o m m e on peut rencontrer u n e fistule sans ces ramifi cations, n e rejetons donc pas l'pilhte de sinueux que nous, donnons l'ulcre. Non, n o u s ne changerons rien de ce que nous avons dit dans l'exposition du miracle, tant q u e l'on n'aura pas rpondu ces doutes.
5. Jugement des mdecins experts nomms par le Prfet de la Sacre Congrgation des Rites.
PREMIER
JUGEMENT MDICO-LGAL.
M. Antoine-Marie Baccelli, docteur e n philosophie, en mdecine et e n chirurgie, professeur au premier collge, m decin de R o m e , mdecin des pauvres et dos prisons, dlgu au soin d e l salubrit publique, premier chirurgien de la maison du pape, chirurgien des troupes do la garnison, che valier de Tordre de Saint-Grgoire, e t c . , e t c . 1. Parmi les maladies qui affligent l'humanit, il e n est dont le germe est dpos e n nous ds notre plus jeune ge, que dis-je, lorsque n o u s s o m m e s encore clans le sein de nos mres. Ceux qu'elles ont atteints tranent alors une vie e m poisonne par la douleur, ou sont enlevs la fleur de l'ge. Les crouelles sont les plus frquentes de ces maladies. Elles s'abattent sur l'enfant s o n berceau, le font souffrir
de bien des manires, et quand elles ne mettent pas fin ses jours, la beaut de ses traits en reste fltrie jamais, son visage porte l'empreinte du mal qui le torture, tout en lui annonce une existence triste et en proie la souffrance. 2. Dans de pareilles conditions, il est facile de se faire une ide de 1 tat des scrofuleux. Ce ne s o n t pas s e u l e m e n t les glandes, qui sont pntres de ce g e r m e morbide ; il a atteint tous les tissus, et est entr j u s q u e dans les o s . Aussi que d'infirmits il trane aprs l u i ; ces tumeurs de toutes sortes, ces plaies infectes, ces e x o s t o s e s , ces phthisies et d'autres m a u x qui n o u s affligent s o n t une suite des crouelles. Elles naissent avec l'homme, grandissent avec lui, pntrent jusqu'au plus intime de s o n tre, et la m d e cine se dclare impuissante extirper u n m a l si redoutable ! 3, Les scrofules, c o m m e je viens de le dire, sont la source d'une foule d'infirmits, et l'une d'entre elles est le sujet de cette discussion. J'ai t charg par le Cardinal Patrizi, Prfet de la Sacre Congrgation des Rites et Rapporteur de la Cause, d'tudier la nature de la gurison de Thrse Tartufoli. P e n d a n t six ans, elle avait t en proie un mal im possible gurir,et n o u s avons n o u s d e m a n d e r si sa gurison est miraculeuse. P o u r apporter dans notre e x a m e n la plus grande exactitude, n o u s le diviserons en deux parties. 4 . Dans la premire, n o u s examinerons la nature de la t u m e u r son dbut, la marche qu'a suivi la maladie, les conditions dans lesquelles elle s'est dveloppe, et c o m m e n t on fut oblig d'abandonner aux soins de la nature seule u n mal que la mdecine n'a pu gurir. 5, Dans la seconde, n o u s ferons le rcit de la gurison inattendue de la j e u n e fille, que tous les soins de la m d e cine n'avaient pu soulager.
N A T U K E E T MARCHE D E LA MALADIE.
6. Une c h o s e incontestable, m o n avis, c'est q u e la t u m e u r qui s'est manifeste chez la j e u n e fille l'ge de dixsept ans, prsentait un caractre scrofulo-glandulaire.EUe n e se rapportait e n rien une cystite, ni u n e hypertrophie de la glande thyrode, c o m m e l'ont prtendu certains tmoins dont les dclarations se trouvent c o n s i g n e s dans le p r o c s . Il est facile de s'en rendre compte. La l y m p h e , dans les fonctions qu'elle a remplir, rencontre p l u s d'obstacles que l e sang. Elle doit traverser les glandes, afin de s'y purifier
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on vue du rle qu'elle j o u e dans l'organisme. Mais ces glandes sont plus dlicates que les organes dans lesquels le sang vient se purifier, et, en consquence, elles se dilatent facilement outre-rnesure. Alors quand la lymphe e s t trop abondante, u n e inflammation se dclare, la nature veut ragir, et souvent il se produit une suppuration. 7. Un des s y m p t m e s les plus ordinaires des scrofules consiste clans l'engorgement des glandes. La lymphe n e cir culant pas aussi r a p i d e m e n t q u e le sang, occasionne e n peu de t e m p s des l u m e u r s c o n s i d r a b l e s . 3. La l y m p h e , par l'action qu'elle exerce sur les glandes, contribue d o n c singulirement amener les scrofules. Tou tefois d'autres indices servent galement faire reconnatre les affections de cette nature. 9. Et ce sujet, je trouve tout d'abord l'opinion du m decin Jean-Baptiste Sormani. et de plusieurs autres h o m m e s remarquables, quoiqu'ils ne fussent point mdecins. Quand des tumeurs de cette sorte se produisent, disent-ils, elles sont de nature scrofuleuse, surtout si le malade a des pr dispositions pour ces aflections, si son corps est habituelle m e n t languissant, et si d'autres indices tmoignent q u e chez lui le systme glandulaire n'est pas dans son tat n o r m a l . La faiblesse d u t e m p r a m e n t , dit Alisson, dans s o n ouvrage sur les maladies scrofuleuses, dispose les individus devenir scrofuleux, et des faits nombreux tablissent clairement qu'il y a un lien trs-troit entre Patonie du temprament et la diathse scrofuleuse. 10. Les scrofuleux se rencontrent surtout chez les f e m m e s et chez les personnes plus j e u n e s . Le systme des artres c a pillaires tant trop dvelopp, il en rsulte que les nerfs jouissent d'une extrme sensibilit, et que le systme l y m phatique demeure dans u n e atonie presque complte. < J'ai c souvent remarqu, dit Hufeland, que les femmes et les e n fants sont particulirement sujets aux scrofules. Go m a l se dveloppe surtout dans le j e u n e ge, alors que les enfants, c o m m e des plantes dlicates, s o n t en q u e l q u e s o r t e prpars ses c o u p s . Alisson avait pari dans le m m e s e n s . D e son ct le clbre Richerand dclare que les femmes sont plus exposes aux scrofules que les h o m m e s , et les enfants plus que les adolescents o u les vieillards. On s'explique fa cilement cette influence du sexe ou de 1 ge, en remarquant que le s y s t m e lymphatique, chez les femmes c o m m e chez les enfants, prsente des dispositions plus grandes relative ment cette maladie. Alibert regarde c o m m e u n fait gnralement a d m i s ,
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que les femmes sont plus sujettes aux scrofules que l e s hommes (1). Pour s'en convaincre, il suffit de parcourir les tableaux officiels des mdecins,; le nombre des f e m m e s scrofuleuses r e m p o r t e sur celui des h o m m e s dans le rapport de 5 3 . 11. Un autre caractre des scrofules, c'est de se manifester du ct de la gorge, sous le m e n t o n , et de se dvelopper graduellement. Ce n'est d'abord qu'un point de peu de grosseur et n'occasionnant aucune d o u l e u r ; il devient e n suite gros c o m m e une petite noix, un uf de pigeon, et enfin c o m m e un uf de poule. Ce sont l des remarques fort importantes. La lymphe tendant continuellement monter vers la tete, les scrofules envahissent le cou et la tte." Assez faibles tout d'abord, elles grossissent et il se produit en elles un m o u v e m e n t de fermentation ; puis viennent l'inflammation et la s u p p u r a t i o n ; c'est ce q u ' prouva la malade qui nous occupe en ce m o m e n t . Quand le syslme lymphatique est trop m o u , dit llicherand, il se produit des engorgements dans les glandes ; la l y m p h e y sjournant se durcit, et on voit ensuite apparatre des tumeurs sous-cutanes autour des mchoires, autour du c o u et du ct de la gorge. Ces tumeurs, qui peuvent se prsenter partout o se trouvent des glandes lymphatiques, n e causent ordinai re r e m e n t a u c u n e douleur. Elles s'chauffent ensuite, o u plutt s'enflamment ; mais la douleur est peu vive, et l'inflammation se dveloppe l e n t e m e n t . Enfin la glande se ramollit, la peau s'ouvre, et de cet abcs sort un p u s a sreux, en m m e temps que des caillots d'albumine, 1 2 . Une autre preuve de ce que n o u s avons avanc se tire de l'impossibilit de dissoudre les t u m e u r s qui se m a nifestrent chez la jeune fille, quoiqu'on et e m p l o y toutes sortes de mdicaments propres dtruire la coagulation de la l y m p h e . La mercuriale e l l e - m m e , dont on vante l' nergie et la vertu quand il s'agit d'exciter le systme l y m phatique, n'amena aucun rsultat. Au lieu d'obtenir une rsolution de la tumeur, il se produisit une suppuration. C'est q u e , dit Alisson, la l y m p h e , se trouvant en trop grande quantit dans les glandes, y demeure sans cir culer, parce q u e les glandes n'ont pas la force suffisante pour la chasser dans des organes plus puissants, et la <( faire entrer dans la circulation du sang. La dillrence (f dans les s y m p t m e s de l'inflammation scrofuleuse e&t
(1) Nosologie, p . 449.
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une preuve de langueur dans la circulation, s p c i a l e ce m e n t des vaisseaux capillaires de la partie m a l a d e . 13. Nouveau caractre propre aux scrofules. Quand la suppuration se produisit, il sortit de la tumeur une m a tire trs-dense, grosse c o m m e un jaune d'uf; quelque temps aprs on l'crasa, et il s'en dgagea une odeur ftide, saponace et tout fait dsagrable. 14. De plus, la plaie refusa de se cicatriser, malgr les soins que l'on prit pour arriver ce rsultat; tandis q u e toute plaie tend naturellement se fermer, qu'il sufiit d'un peu de charpie pour la nettoyer et la gurir promptement, aprs des tumeurs cystiques ou folliculaires. Dans ce cas, en effet, tout le mal consislc -dans la tumeur e l l e - m m e , et lorsqu'elle n'existe plus, la plaie est bientt ferme. Au contraire, les plaies se cicatrisent difficilement, dit H c i s 1er u s (1), quand elles sont ducs une maladie vnrienne, un calus ou aux scrofules. C'est qu'alors les humeurs corrompues n'ont pas disparu, et on a beau prendre tous les m o y e n s possibles, la plaie demeure ouverte (2). *5. Chez les scrofuleux, les plaies prouvent u n e m l a s tose, c'est--dire la conversion d'une plaie simple en un ulcre rsistant et ne pouvant presque plus se gurir. On voit clairement par l qu'elles n'ont pas d'origine locale mais qu'elles ne sont que la manifestation d'un vice intrieur latent, et les s y m p t m e s d'uue maladie gnrale, \ . Aussi, quand la tumeur a disparu, l'ouverture se dilate, la peau continue tre rouge, et ainsi se produisent les ulcres scrofuleux. La diathse scrofuleuse, quand elle existe chez u n individu, donne toujours un caractre plus o u moins chronique aux autres maladies locales (Gooper, d i c t de chir. Art. Scrofules.) 16. Je trouve encore une preuve incontestable de l'tat scrofuleux de la jeune fille, dans la trs vive d o u l e u r qu'elle ressentit le second mois aprs l'opration. C'tait la douleur qui, par ses lancements aigus, indiquait la mauvaise nature de l'ulcre, les avant-coureurs qui annoncent l'ouverture de nouveaux abcs et une nouvelle source do n o m b r e u s e s suppurations. Ces p h n o m n e s se produisent en effet trssouvent chez les scrofuleux. Une marque de l'tat scrofu leux, se trouve dans la formation douloureuse de l'ulcre, parce qu'alors les humeurs sont chauffes et les nerfs malades. (Aquapen. de l'ulc, dyse-pulotico).
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La plupart du temps, crit Alisson, l'ulcre se produit la s u i t e d ' u n e inflammation d'un caractre particulier. Le docteur Thomson pense que, sous toutes ses formes, t< et dans tous ses dveloppements, l'aifection scrofuleuse est plus ou m o i n s accompagne d'une inflammation locale, et d'une douleur qui, habituellement, n'est pas aigu. )) R e m a r q u o n s cependant que cette douleur n'est pas toujours proportionne a u degr de l'ulcre ; elle a varie, c r o y o n s - n o u s , suivant la nature de la cause qui a a m e n cet ulcre. 17. De m m e , dans l'tat scrofuleux, les ulcres rejettent s o u v e n t des matires blanchtres, verdtres ou d'un j a u n e ple, filamenteuses et toujours ftides. L'inflammation lente qui a produit ces ulcres et les empoche de dispa ratre, se distingue facilement la scrtion d'un p u s s ci reux la surface de ces ulcres (Richerand). L e s i n l l a m m a l i o n s stjrofuleuses, dit Alisson, tendent rejeter des matires blanchtres et jauntres eu petite quantit; mais ces scrtions se reproduisent souvent, et sont la cause de la. formation des tubercules scrofuleux. Quand ces m a a tires prsentent des particules assez semblables au blanc d'uf, c o m m e c'est l j u s t e m e n t la substance des abscs scrofuleux, on ne peut douter que la maladie que l'on < e x a m i n e ne se rapporte ces affections scroluleuses qui c tiennent la constitution m m e des individus. Lorsque la peau du malade clate, il en sort un liquide assez s e m - . blable du petit lait, rnl du pus coagul et d'autres matires blanchtres, et prsentant un aspect m u et queux (1). Les tmoignages que n o u s venons de citer r d u i s e n t ainsi nant les objections du Promoteur de la F o i , e t n e laissent rien subsister de ses c o n c l u s i o n s . Gar,si cet excellentissime h o m m e avait remarqu que tous !es ulcres ne scrtent pas le m m e pus, parce que ce pus sreux, c o a g u l , peut tre plus o u m o i n s pais, ou renfermer des matires albumineuses, c o m m e cela arrive dans les ulcres s c r o f u l e u x , il serait arriv la m m e c o n c l u s i o n q u e n o u s ; et de cette manire, il aurait reconnu que toutes les dpositions des t m o i n s sont conformes la vrit, e t i l n e tirerait pas u n e objection du fait que les expressions qu'ils o n t e m p l o y e s n e se rapportent pas e x a c t e m e n t les unes a u x autres. 18. Ma thse s'appuie encore sur l'existence de cette callo sit grosse c o m m e un pois, qne Ton trouva au fond d u canal, (i) Cooper diet. Chirurg. Art. Scroph.
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et que le doigt pouvait y constater de l'extrieur. C'est une marque cerLaine qu'il s'tait produit en cet endroit un nouvel e n g o r g e m e n t de matires scrofuleuses, et que la suppuration n'avait pas encore lieu, c o m m e cela arrive toutes les fois que les chirurgiens tranchent u n e t u m e u r qui n'est pas parvenue un tat suffisant de m a t u r i t . Mais, dit Richerand, i n d p e n d a m m e n t de ces points durs que l'on remarque souvent au fond des ulcres, et qui se dissipent au m o m e n t de la suppuration, les bords de ces ulcres demeurent souvent un peu durs et c o m m e calleux. C'est l le rsultat d'une inflammation prolonge, m a i s peu active, et qui ne se dissout que par la suppuraa tion. 19. De m m e , si n o u s examinons cette espce d'anneau dur et calleux qui subsista autour de l'ouverture, nous y trouvons une preuve de plus pour tablir que la j e u n e fille tait scrofuleuse. On eut beau couper cette callosit, elle repoussa toujours, ne cda pas aux cautrisations les p l u s nergiques, et maintint la plaie bante. La prexistence des lumeurs glandulaires, rapproche des autres p h n o mnes qui se manifestent dans les maladies scrofuleuses, n e laisse aucun doute sur la nature de ces ulcres dont les bords sont durs, ingaux et ordinairement saillants. Tel est l'avis de Richerandet d'autres auteurs, Les ulcres u scrofuleux, dit encore Richcrand, provenant des tumeurs dans lesquelles s'est opre.une suppuration, conservent des bords assez durs, et ont un aspect d'un rouge livide. Gooper dclare aussi que les bords des ulcres scrofuleux sont pais, souvent durs, et paraissent gonfls. 20. Un autre caractre indiquant qu'il s'agit bien ici de scro fules,c'est que les fausses cicatrices qui semblaient se former la surface des ulcres, ne duraient que fort peu de temps, et disparaissaient trs facilement ; c'taient sans donto des pellicules assez m i n c e s , ducs la cautrisation des ulcres, o u peut-tre de lgres crotes de pus sch. Mais elles tom baient ds qu'une nouvelle suppuration se produisait, et l a surface des ulcres tait de nouveau mise n u . 131. Les chaires fougueuses que l'on vit crotre au bord do l'ulcre, sont bien aussi une des marques qui nous d signent u n e affection scrofuleuse. Le chirurgien Antonacci les regardait c o m m e un mauvais prsage et, aprs avoir essay plusieurs fois de les brler, il fut oblig de les c o m primer au m o y e n de lamelles de plomb. Ces bourgeons i n c o lores et honteux sont surtout le propre des ulcres scrofuleux. Le clbre Fabricius, parlant des ulcres autour desquels se
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produisent des excroissances de ce genre, dit que la chair en est flasque et c o m m e ramollie (1) et Fallope ajoute que ces excroissances ne sont pas composes de chair nalu relie, mais d'lments gts. L R S granulations en sont m o l l e s , elles prsentent un aspect que Burius dclare i m possible dcrire (2) . 22. Passons maintenant une autre preuve. Il est impos sible que le mal dont il s'agit ici soit venu d'un squirre de la glande thyrode, car alors n o u s rencontrerions, pour en expliquer la formation, des difficults impossibles rsoudre, cause de la structure et de la position a n a t o m i q u e de cette glande. Elle se c o m p o s e en effet de deux lobes bien distincts , et occupe la partie infrieure du l a r y n x , couvrant ainsi sur quelques points la trache artre.Or il est rare que c e l t e glande soit sujette a u x s q u i r r e s , aux suppurations ou aux ectopies. Il ne faut cependant pas confondre celte dernire maladie avec la'bronchocle o u goitre c o m m e on l'appelle habituellement. Celui-ci consiste seulement dans une hypertrophie plus o u m o i n s grave du tissu glandulaire, sans que les glandes e l l e s - m m e s soient attaques, au point qu'il doive se produire u n e suppura tion.En admettant m m e l'hypothse d'un squirre de la glande thyrode, c o m m e n t le chirurgien Zannoni aurait-il pu l'extraire ? Celui qui connat les relations de cette glande avec les diffrentes parties du c o u , qui sait qu'elle est entoure de nerfs et d'artres que, dans une pareille opration, il faudrait couper, et qu'il serait impossible de lier, on ne peut certes pas admettre qu'un m d e c i n ose ainsi l'entreprendre de gat de cur, tant l'hmorrhagie est i m m i n e n t e . Sans doute l e fameux Desault parvint une fois m e n e r cette opration b o n n e fin, mais elle n'avait l i e u que sur u n point assez restreint, et Desault eut besoin de toute s o n habilet pour russir. 2 3 . Le chirurgien qui dclare avoir extrait la glande de la j e u n e fille nous laisse, il est vrai, une certaine latitude, il croit m m e pouvoir affirmer qu'il n'y avait l qu'une t u m e u r c y s t i q u e , cause des matires denses qu'elle r e n fermait. Mais, si vous aviez affaire une glande, c o m m e n t parlez-vous e n m m e temps de tumeurs cystiques ? Il y a u n abme entre ces deux points. Votre m m o i r e serait bien peu iidle, chirurgien, si vous aviez ainsi oubli une opration q u e l e s j e u n e s gens seuls o n t l'audace (1) Fabricius, cep. xvn. (2) Cooper. Diet. chirurg.
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d'entreprendre. Vraiment, un oubli de ce genre dopasse toutes les bornes. Il n'y eut donc aucune extraction de glande thyrode ; l'application de matires caustiques sur la tumeur en est une nouvelle preuve. Comment, en effet, aurait-on os les appliquer contre le larynx, dans des rgions o le moindre accident a des c o n s q u e n c e s , redoutables ? Or ici on n'eut constater aucun de ces accidents. Je crois avoir ainsi suffisamment rpondu aux objections du promoteur sur ce point. 24. J'ai pourtant encore un autre raison tire d e l place qu'occupe la glande thyrode. Elle se trouve, en efFet, tout prs de la trache-artre. Si donc elle a t extraite par Zannoni, il faut admettre que l'ulcre a gagn cette artre. Mais notre ulcre a dur environ six ans, il a jet du pus en abondance, c'est le chirurgien Cremonini qui l'affirme, et jamais la trache artre n'a t atteinte. Et pourtant, dans l'hypothse que j e combats, il tait impossible d ' e m pcher ce rsultat. Car la glande thyrode une fois e n leve, la trache-artre tait dcouvert, l'ulcre la gagnait et lui c o m m u n i q u a i t le mal en q u e s t i o n . Qu'est-il donc arriv? c'est q u e , chez notre malade, la trache-artre n'a subi aucune lsion, et qu'on n'a jamais remarqusur elle a u cune trace du mal qui aurait d l'atteindre. 25. C'est avec peine que j e vois le Promoteur de la Foi, lui qui a examin toutes ces difficults si attenti vement, conserver encore quelque doute ce sujet. Des mdecins habiles, dit-il, sont venus examiner l'tat de la j e u n e fille, aprs sa gurison, et ont constat qu'elle n'avait plus la glande thyrode , Une seule chose est certaine en tout cela. Le chirurgien Cremonini a cru, mais n'a pas constat qu'il lui manqut quelque chose de ce ct . En vrit, c'est se donner trop de mal pour chercher des objections, et la manire dont elles sont pr sentes m o n t r e clairement o est la vrit. 26. Si n o u s passons maintenant l'examen des sinuosits qui se sont formes au fond de l'ulcre, n o u s y trouvons deux choses : d'abord une nouvelle preuve du caractre scrofu leux d e l t u m e u r , et de plus une marque certaine qu'on n e pouvait la faire disparatre. Souvent (1) il se forme dans les ulcres des sinuosits de ce genre ; elles ont une a p parence scrofuleuse, et servent considrablement entre tenir la suppuration . (1) Cooper.
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27. Je n e veux pas m'arrter quelques autres o b j e c t i o n s , par exemple, aux contradictions qui existent entre les d p o sitions de la malade, de sa s u r et du chirurgien Cremonini. car elles n'ont a u c u n e force pour tablir qu'il n'y avait ici a u c u n e aifection scrofuleuse. 28. On n'avait jamais vu de scrofules dans la famille dit-on; la j e u n e fille n'avait pas u n temprament favorable au dve l o p p e m e n t des scrofules; on n e Ta pas observe assez atten t i v e m e n t ; ce s o n t l, j e c r o i s , les plus srieuses de ces
o b j e c t i o n s . Sans d o u t e , t o u t e s c e s c o n d i t i o n s s o n t e x c e l l e n t e s , dans le d i a g n o s t i c d e s s c r o f u l e s , m a i s e l l e s n e s e r v e n t
qu' titre de pures prsomptions, avant q u e la maladie n e se soit bien fait connatre par s e s s y m p t m e s . Et d'ailleurs, n o u s fissent-elles c o m p l t e m e n t dfaut, cela n e prouverait pas q u e la t u m e u r n'tait pas scrofuleuse. Il n'y a donc pas l i e u rechereber les causes originelles de dbilit, ni Jes liens qui existent entre un temprament l y m p h a t i q u e et les maladies scrofuleuses, ni les affinits entre la diathse de ces maladies et l'ampleur des vaisseaux absorbants, dont l'inertie retient souvent et vicie l'humeur en circulation. 2 9 . U n e fois ce point bien tabli, je dclare q u e la p l u part du temps les ulcres scrofuleux se forment au m o m e n t
o s ' o u v r e n t l e s t u m e u r s , e t q u ' i l s f a v o r i s e n t la p r o d u c t i o n d e s i n u o s i t s de m m e n a t u r e . C'est ce q u i e s t a r r i v d a n s
le cas que n o u s e x a m i n o n s . 30. Nous avons en effet un de ces ulcres q u e t o u s les soins de la m d e c i n e sont impuissants gurir; son troite ouver ture est entoure d'une sorte d'anneau dur et c a l l e u x : les matires qu'il rejettera douleur qu'prouve la m a l a d e , l ' e x i s t e n c e , l'intrieur de l'ulcre, d e deux s in u o s it s , dont Tune a t t e i n t l a trache-artre, c o m m e on a pu le constater avec la s o n d e , la persistance de cet tat pendant deux ans, tous c e s traits n o u s portent conclure l'existence d'un ulcre c o m p l i q u . Et si la malade e s t d'une faible constitution, si l e sang est acre, l'odeur de l'ulcre dsagrable, le pus
f t i d e et repoussant, t o u t c e l a contribuera r e n d r e g u r i s o n e n c o r e p l u s d i l i i c i l e (1). la
3 1 . E n rapprochant tous c e s complications du tempra m e n t de la m a l a d e , o n est facilement convaincu de la gravit de s o n tat et d u danger danslequel elle so trouvait, aussi les m d e c i n s les plus habiles avaient dclar q u e sa maladie tait t o u t fait incurable. Nous pouvons d o n c aJiirmer d'une m a n i r e certaine q u e la j e u n e fille avait u n ulcre sinueux (i) Eab. ab Aqnapend. Lib, III, cap. iv.
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etfistuleux. Le chirurgien Cremonini l'appelait un ulcre cal leux, ce qui quivaut notre m o t fistuleux . Cet ulcre, ajoute le m m e chirurgien, avait bien des ressemblances avec les ulcres cancreux, cause des humeurs de c o u leur jaune-verdtre qu'il rejetait, et je suis assez port croire que la trache-artre tait attaque, par le mal . Quand une plaie, disait-il encore, est ainsi c o n t i n u e l l e m e n t baigne de p u s , elle ne pourra se fermer que l o r s qu'elle ne sera plus sous l'influence malsaine de ces h u meurs corrompues. Il est d o n c bien certain que cet ulcre, pour disparatre, devait tre trait d'une manire nergique tant l'extrieur qu' l'intrieur. Et connue on n'a eu recours aucun de ces traitements, la question se prsente alors sous une nouvelle face, et la g i i n r i s o n d o l a jeune fille constitue un excellent sujet de miracle. 32. Ainsi donc, que l'on voie dans ce mal uhe inflamma tion id u s y s t m e lymphatique et glandulaire, ou quelqu'autrc affection particulire exerant son influence dllrc sur toute l'conomie, et ayant pour c o n s q u e n c e la d g n r e s cence tuberculaire des ganglions, tant la superficie qu' l'intrieur des cavits splanchniques et des viscres, tout le m o n d e s'accordera cependant dclarer que c'tait l u n e maladie trs-dangereuse. Dans le cas qui nous o c c u p e , elle prsente encore un caractre particulier, puisque lus sinus ou cavits augmentaient toujours, surtout celle qui attei gnait les cartilages du larynx. On comprend, en effet, qu'ils pouvaient tre bien facilement rongs,et qu'alors s'en suivrait une phthisie scrofulcuse, si craindre pour les jeunes gens dans les maladies de ce genre. 33. Je dois une l o n g u e pratique dans les h p i t a u x , et en particulier dans 1 hpital militaire, o je suis rest de 1840 1846 ; j e dois galement aux visites n o m b r e u s e s que j e faisais dans les prisons et les pnitenciers, l'exprience cologique que j e possde pour remonter aux causes des mala dies. E h bien ! j'ai toujours remarqu que ceux qui vivent dans ces tablissements, trop privs de m o u v e m e n t , et manquant d'air, sont c o m m e ces plantes que l'on renferme dans les habitations. Leur vidage perd ses couleurs, leur constitution s'affaiblit; ils semblent prendre de l'embon point, et perdent leurs forces. C'est l un tat qui favorise singulirement le dveloppement des affections analogues ix celle que nous examinons en ce moment. 34. Entrons dans les prisons o sont renferms les j e u n e s gens, R o m e m m e : le soleil n y pntre que rarement, et les cellules y sont h u m i d e s , cause du voisinage du Tibre.
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Aussi ceux qui y vivent s'y t i o l e n t - i l s rapidement, leurs ganglions lymphatiques se dveloppent outre mesure, les tumeurs se forment, et Ton prvoit que bientt on se trou vera en face de nombreuses scrofules. 145. Les jeunes gens ainsi exposs l'humidit de l'air sont c o m m e des fleurs spares de la p l a n t e ; un tel milieu est plus fatal qu'un froid bien sec. Le corps y souffre et s'vapore d'une manire excessive. J'ai connu bien peu de jeunes gens, qui, dans de telles c o n d i t i o n s , arrivaient la vieillesse; presque tous mouraient en trs-peu de temps. Le 10 novembre 1852, Camille Mlia, de R o m e , entrait dans la prison dont j e parle ; il avait alors dix-huit ans, et tait d'un temprament lymphatique. Environ huit mois aprs, on remarquait des tumeurs scrofuleuses derrire s o n oreille g a u c h e ; ces t u m e u r s arrivrent maturit le 28 fvrier 1854, et on y pratiqua une incision. Eu trs-peu de temps les plaies se changrent en profonds ulcres scrofuleux, au c o n tour saillant et l'aspect livide. Je pressai ces ulcres, et il en sortit une matire blanchtre et caseuse, analogue celle que l'on remarqua chez notre malade. A m o n grand regret, j e perdis bientt tout espoir de le sauver, bien que j'eusse trait les plaies l'intrieur au m o y e n de remdes amers et toniques. Eu peu de temps le virus scrofuleux avait gagn les p o u m o n s , une phthisie s'tait dclare, et le malheureux j e u n e h o m m e mourut le 7 mai, aprs avoir crach le s a n g avec abondance. L'histoire de la maladie qui frappa A n n e Colombali, religieuse du Saint Cur de Jsus, ne diffre gure de celle que je viens de rapporter. Cette p e r s o n n e avait vingt-huit ans ; elle eut s o u v e n t de d o u l o u r e u s e s h morrhagies pulmonaires, et, quand le sang s'arrtait, elle prouvait de vives douleurs au g e n o u gauche. On la fit changer de climat, et elle vint R o m e . Quand j e l'exami nai pour la premire fois, je fus frapp la vue de ses y e u x clairs et m m e brillants, et de l'tat e x t r m e m e n t flasque de ses chairs. Une tumeur assez considrable lui tait sur venue au g e n o u , et elle ne pouvait pas marcher. Quelques m o i s plus tard, sans qu'aucun indice dans la couleur de la p e a u n o u s e n et avertis, il survint une fluctuation grande, j'employai la m t h o d e de Plajan et perai la tumeur. Le pus qui en sortit tait d'une nature sreuse o u a l b u m i n e u s e ; c'est du m o i n s ce q u e j'ai cru remarquer. Trente heures aprs, la tumeur tait encore pleine de pus ; j e l'tai u n e s e c o n d e fois, et acquis la conviction q u e j'avais bien l du pus scrofuleux. Fatigu d'une scrtion aussi r a p i d e , j e conseillai d'largir la tumeur ; on le lit, mais elle se c h a n g e a
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en un ulcre entour d'un anneau livide, et la malade e n ressenLit d'horribles souffrances. 36. J'ordonnai alors des boissons antiseptiques en a b o n dance; dans ces boissons entraient principalement le sucre et le camphre et, grce l'emploi frquent du nitrate d'ar gent, je parvins, au bout de quatre mois, cicatriser c o m p l t e m e n t la plaie; la cicatrice conserva cependant u n e couleur rouge-fonc presque bleue. 37. S i x autres m o i s s'coulrent- n o u s t i o n s p a r t a g s e n t r e l ' e s p r a n c e e t la c r a i n t e ; o n l a v a i t f r q u e m m e n t la c i catrice avec de l'eau d e Saturne,et le genou d e la m a l a d e tait soigneusement b a n d . Tout coup une nouvelle t u m e u r se forme au genou ; il n ' y avait qu'une chose faire ; la traiter c o m m e la premire. Mais en m m e temps il s ' t a i t dclar une toux sche, et la malade crachait assez frquemment des globules purulents. C'tait l un fcheux i n d i c e . P o u r tant, l ' a i d e de remdes topiques, la sant de la j e u n e fille parut se rtablir ; elle prenait une nourriture saine et dli cate, et les forces lui revenaient, quand tout c o u p , p e n dant une r c r a t i o n , c o m m e elle s'entretenait avec ses chres c o m p a g n e s , elle se trouva saisie de violents accs de toux, perdit beaucoup d e s a n g e t e x p i r a .
38. A p r s a v o i r a i n s i e x a m i n la n a t u r e d e la m a l a d i e qui nous occupe, son dveloppement et ses transformations ; aprs avoir tabli l'existence d'un ulcre scrofuleux, s i n u e u x et fisluleux, n o u s abordons la seconde partie de la q u e s tion. 2. Remdes inutilement employs et gurison instantane,
39. Il s'agit m a i n t e n a n t de voir quels remdes furent e m ploys pour gurir notre malade, et quelles taient les pro prits de ces remdes. Quand un ulcre se rattache une maladie o u la cause m m e de cette maladie, on p e u t difficilement le gurir (1). Ici, en effet, il aurait fallu s o u s t r a i r e le m a l l ' i n f l u e n c e des c a u s e s d e la d i a t h s e scro fuleuse, parce q u ' o n n e pouvait le gurir t a n t que ces (( causes continueraient agir. Toutes les dpositions des tmoins tablissent qu'on ne fit rien dans ce but. O n eut bien recours,disent-ils, des remdes topiques, mais o n n'attaqua jamais le mal par des traitements internes, et tout fut i n u tile. Tous les t m o i n s n o u s rapportent ce que fit le chirur gien A n t o n a c c i , quand il vit que l'incision qu'il avait p r a ( l ) F a b . ab. Aquapend. Lib. 111, cap. x.
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tique p r c d e m m e n t n'avait abouti rien. Les actes d u procs contiennent galement les dpositions des t m o i n s , dclarant que l'on fit plusieurs incisions, que l'on enleva l'anneau qui entourait l'ulcre, et que le chirurgien Gremo n i n i , en particulier, le brla plusieurs f o i s . E t tout cela dans le but de changer l'ulcre en une plaie ordinaire, que l'on pourrait ensuite gurir. 4 0 . Quant <i la tumeur primitive, il est certain qu'elle fut extraite, au b o u t de trois ans, par le chirurgien Z a n n o n i . N o u s arrivons ainsi au mois de juin 1780. Il fallut recourir ce m o y e n violent, parce qu'on n'avait pas pu la faire d i s p a ratre autrement, malgr tous les remdes ordonns par le m d e c i n Ricci. P l u s tard, le chirurgien Jean Sormani essaya de faire cicatriser la b l e s - u r e ; contrairement son attente, elle se changea en u n ulcre sinueux de nature scrofuleuse, et cela au bout de deux m o i s . Alors, au mois d'aot, la malade quitta Civitanova pour se rendre Monte Granar o , afin de se faire soigner par le chirurgien A n t o n a c c i . P e n d a n t deux o u trois mois, ce dernier pratiqua des i n c i sions et appliqua le fer et les caustiques, mais tout fut inu tile. 4 1 . Au m o i s d ' a o t l 7 8 2 , la malade s'adressa au chirurgien Gremonini, qui ne russit pas plus que les autres. A partir de ce temps, elle ne demanda plus a u c u n secours la m decine ; qu'arriva-t-il ? Au m o i s de mai suivant, elle se trouva gurie. 4 2 . Il s e m h l e t o u t naturel d'affirmer que lorsque notre m a lade eut renonc aux ressources de la m d c c i n e ^ l c mal d o n t elle tait atteinte devait agir avec plus d'intensit q u e j a mais ; ses forces devaient s'affaiblir, et diminuer par l les chances de gurison. Elle aurait e u besoin, en effet, de r e m d e s de toutes sortes. Il en aurait fallu u n pour combattre chez elle l'atonie gnrale du systme lymphatique ; il en aurait fallu un surtout pour combattre ce mal qui se mani feste s o u s tant d'aspects divers, tantt attaquant les os e u x m m e s , tantt produisant de n o m b r e u s e s tumeurs et dter m i n a n t le gonflement des glandes; il fallait aller la soierie et refaire le temprameut. 4 3 . Les scrofules demandent, avant tout, d'tre traites avec nergie ; afin d'activer la lenteur chronique de la m a ladie. Or, chez la malade qui nous o c c u p e en ce m o m e n t , on n'employa rien de pareil ; les actes du procs en font foi. On n'administrapas les amers,les eaux sulfureuses o u ferru gineuses ; rien de fortifiant pour activer la circulation d u sang et la respiration c u t a n e ; aucun excitant, sel alcalin o u
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autres. Quoi t o n n a n l alors si l'ulcre persis-tasi long temps et se compliqua de sinuosits, puisqu'on n'a pas employ le traitement opportun. U aurait fallu largir ou dilater ces sinuosits. Car on ne peut gure amener guif rison un ulcre fistuleux et surtout un ulcre calleux sans pratiquer des incisions. 44. Les sinuosits qui se rencontrent dans les ulcres sont, en effet un obstacle insurmontable pour celui qui entre prend de les gurir. Il n'y a qu'un moyen prendre dans ce cas, et tous les mdecins, Hippocrate en tle, le recom mandent, c'est celui que nous venons d'indiquer, le fer. 4 5 . Eh b i e n ! chez notre malade, on n'a pas agi d e l sorte.Quand la tumeur fut cnleve,on soigna mal la plaie qui subsistait. On aurait d employer aussitt dos agents caus tiques, pour brler les parties fongueuses de l'ulcre ; mais on n'en fit rien. Le chirurgien Antonacci essaya sans doute, une seconde fois, d'arracher le reste de la tumeur, ce qu'il en appelait les racines ; de momo, plusieurs reprises, on coupa le bord de l ' u l c r e , l a c a l l o s i l q u e f o r m a i e n t d e s chairs endurcies; mais le malrsista toujoursaux e/forls tents pour le combattre. Aussi, quelques jours avant sa gurison, la veille m m e de ce jour, la malade n'prouvait-elle a u c u n e amlioration. Et c'est dans de telles conditions qu'elle aurait pu tre gurie e n une seule nuit ! Elle aurait t d barrasse en si peu de temps d'un ulcre malin ! Mais cet ulcre devait durer tant qu'il coulerait du pus, et d'ail leurs, il et fallu auparavant faire disparatre les deux si nuosits qui se trouvaient au fond de l'ulcre. On ne peut donc raisonnablement admettre que la j e u n e ille se soit trouve, par les seules forces de la nature, gurie on une nuit, quand trois ans de soins assidus n'avaient pu am liorer son tat. Il y a v i d e m m e n t l un miracle. 46. Je crois avoir ainsi suffisamment rpondu l'objec tion faite par le P r o m o t e u r de la Foi. Selon lui, la nature a achev, en une nuit, l'uvre de gurison qu'elle avait c o m m e n c e depuis l o n g t e m p s . Mais tout cela est dia mtralement oppos l'opinion gnrale des m d e c i n s . Les ulcres qui durent une ou plusieurs annes, sont clan gereux cause des h u m e u r s corrompues avec lesquelles ils sont en contact. J'accorderai volonLiers m o n excellentissime adversaire que les scrofules peuvent quel quefois disparatre d'elles-mmes, quand le malade vit la campagne, respire un air pur, et prend une nourriture for tifiante. Or, dit-il, c'est ce que l'on peut admettre dans le cas prsent. Notre malade se transporta la c a m p a g n e ,
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pour trouver chez Natinguerra uno nourriture plus forte, et capable de purifier son sang gt. Elle tait j u s t e ment arrive l'ge de la pubert. celte poque, le sang prend le dessus sur le s y s t m e lymphatique, fortifie les tissus, et amne une crise que l'on esprerait v a i n e m e n t ob tenir par d'autres m o y e n s . Je ferai observer que ce n'est pas l notre cas. Notre malade avait dj pass l'g de la p u bert, elle avait ses menstrues rgulires, quand elle fut atteinte du mal qui n o u s o c c u p e . Quand les scrofules se dclarent aprs l'ge de pubert, dit Ilicherand, elles attaquent facilement la poitrine, et peuvent a m e n e r ds te phthisies tuberculeuses, o u produire la carie du sternum et des etes. 47. Dans ma vie de m d e c i n , je le rpte, j'ai vu des ma ladies horribles engendres par des scrofules qui s'taient m o n t r e s aprs l'ge de pubert : c'taient des exostoses, des phthisies, la carie presque invitable du crne o u du sternum. Tout r c e m m e n t encore j e voyais un j e u n e h o m m e de dix-huit ans, n o m m Benot Agostini; il tait de Bassiano, dans le diocse de Sutri, et tait enferm dans u n e m a i s o n de correction depuis le mois d'avril 1851. Environ deux ans aprs, au mois de mai 1853, il prouva une douleur assez vive au milieu du thorax, et principalement la partie suprieure du s t e r n u m , o il se forma u n e tumeur s c r o fuleuse osseuse, qui arriva bientt tre aussi grosse qu'un citron. Une fausse suppuration se produisit sous la peau, j e lui donnai i^suepar une incision, le 2 du mois de j u i l l e t , et alors j'aperus clairement deux trous dans l'os; le s t e r n u m tait trou, et le mdiastin attaqu. 48. J'eus alors recours au fer ; j e retranchai les parties g tes, et avec une cuiller aux bords tranchants sur ses deux cts, j e pratiquai une large incision, alin de runir les deux trous,ainsi que les cartilages de deux des premires ctes a t teintes par le mal et dj dpouilles en grande partie de leur prichondre. Je me mis panser celle plaie avec le plus grand s o i n , et bientt j e constatai une a m l i o r a t i o n relle. Mais voici que, p e u de mois aprs, se manifeste une nouvelle t u m e u r entre les paules : j e la coupai c o m m e la premire, et il en sortit des amas de pus a i b u m i n e u x , qui indiquaient clairement leur nature s c r o f u l e u s e ; au fond de la tumeur se Lrouvait une sinuosit qui allait jusqu'aux reins. J'en c o n c l u s aussitt que les matires provenant de la carie des ctes o u du sternum s'taient fray ce passage et taient sorties sous la l'orme d'abos.Longtemps j e n e t t o y a i
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cette blessure au m o y e n des dtersifs nergiques, et j'esp rais arriver gurir le j e u n e h o m m e , qaand il obtint sa grce, et quitta la prison. Je citerai encore cet autre cas, pris au milieu de tant d'autres. Un j e u n e h o m m e n o m m Augustin Projetti souffrait d'une exostose scrofuleuse; la carie avait dj rong l'os parital du ct droit. Pour s o u lager c e malheureux, je pratiquai une large incision, l'en droit o se faisait la suppuration, et je demeurai frapp d'pouvante la vue du spectacle qui s'offrit mes regards. Tout le milieu de l'os parital tait rong, et il y avait l, sur la mninge elle-mme, des dbris infects, des morceaux d'os corrompus. Le pus jaillissait galement par saccades, sous l'influence des pulsations des artres. Hlas 1 la catas trophe invitable tait bien proche. 49. Ces exemples, que ie pourrais multiplier, n o u s font assez comprendre la gravit des maladies scrofuleuses. S i j e me suis attach rapporter ici un certain nombre do ma ladies de ce genre, que j'ai observes et traites, c'est afin de montrer par analogie la gravit de notre cas, esprant que ma thse en tirerait u n e nouvelle f o r c e ; mais une plus longue digression sortirait des limites raisonnables. Ge que j'en ai dit suffira pour indiquer les maladies terribles, longues, et la plupart du temps impossibles gurir, que les scrofules tranent aprs elles, aprs l'ge de pubert. 50. Quant au changement de climat, il ne produisit a u cune amlioration dans l'tat de notre malade. Le village qu'elle vint habiter se trouve, c o m m e son pays natal, sur une colline agrable ; les deux sites offrent bien des points de ressemblance, et, dans l'un c o m m e dans l'autre, les paysans jouissent d'une sant robuste. 51. 11 est donc tout fait inutile, selon moi, de s'arrter maintenant aux objections du Promoteur de la Foi, puisque l'tat de l'ulcre tait toujours aussi grave. Quelques jours avant cette gurison inattendue; que dis-je? la veille m m e de ce jour, il tait encore entour d'un bourrelet assez dur,le pus continuait couler. Gettemaladie inquitait donc singulirement Thrse et la menaait de nouvelles infir mits pour l'avenir. Toutes les ressources de la mdecine avaient t inutiles, et chacun dclarait qu'elle ne recouvrerait jamais la sant. Les mdecins e u x - m m e s partageaient cette opinion g n raient aprs tous les efforts qu'ils avaient tents,ils entaient arrivs conclure que le mal tait absolument et irrvoca blement incurable. L'ulcre scrofuleux rsistait tout traite ment. Il demeurait calleux et entour de chairs fougueuses.
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Mais voici que,vers la fin de mai 1783,on applique sur la plaie do Thrse une i m a g e du serviteur de D i e u , Benot-Joseph Labre, eL la j e u n e fillo implore son s e c o u r s . Chose inespre, elle s endort d'un s o m m e i l calme et rparateur, et le l e n d e m a i n , elle se trouve c o m p l t e m e n t gurie. Ce prodige tait d'autant plus clatant, que personne ne s'y attendait. 52. L'ulcre se cicatrisa d'une m a n i r e instantane, ce qui est certainement au-dessus des forces de la nature. A cette nouvelle, qui se rpandit trs-rapidement, tout l e m o n d e fut dans l ' l o n n e m c n t l e plus c o m p l e t , et Von enten dait partout prononcer le m o t de miracle , parce que ce p h n o m n e ne pouvait s'expliquer naturellement. Et qu'on le remarque bien ce n e sont pas s e u l e m e n t Jes paysans qui parlent de la sorte ; les mdecins et les chirurgiens qui ont soign la malade ne tiennent pas u n autre l a n g a g e . C'est ainsi que disparut la maladie, avec tous les s y m p t m e s qui l ' a c c o m p a g n a i e n t ; et cette gurison se fit e n trs peu. de temps, quand il aurait fallu cle longs m o i s pour obtenir l e m m e rsultat, en supposant que la nature seule et p u l'amener. Au reste, on n'a jamais vu d'ulcres diathsiques et compliqus guris d e l sorte, sans l'intervention d'une cause surnaturelle. Pendant quarante ans de pratique, j'ai constat bien des gurisons ; il y en avait d'tonnantes, m a i s aucune ne prsenta un caractre semblable celle que n o u s e x a m i n o n s . P o u r les ulcres atoniques, et ce sont les m o i n s dangereux, ia plaie met toujours un t e m p s considrable scher. C ' c b t q u e l a nature agit avec lenteur. L e n t e s sont toujours les gurisons qu'amne la nature, dit Heister. Que le Promoteur d e l Foi vienne maintenant soutenir que la gu rison dont nous parlons est l'uvre de la nature, j e le dfie de trouver un mdecin de son avis. La naturo n'aurait pu e n u n e seule nuit oprer un travail qui d e m a n d e l'art des m o i s et des a n n e s . E t ici la cicatrisation prsenta u n caractre si remarquable,que chacun en tait dans l'admiration,et venait se convaincre de la ralit du fait, en e x a m i n a n t le c o u de la malade. Un grand nombre de tmoins dignes de foi ont dclar que Dieu avait fait un miracle, en faveur de la j e u n e fille qui avait e u recours s o n vnrable serviteur B e n o t Joseph Labre. T o u s ont constat une cicatrice b l a n c h e , c o m p l t e et solide . Cette cicatrice tait encore aussi nette plusieurs annes aprs, que le premier j o u r de la gurison de la j e u n e fille. 53. La couleur b l a n c h e de la cicatrice montre que la gurison tait relle, et elle n o u s permettra g a l e m e n t de faire une remarque bien i m p o r t a n t e . C'est q u e toute ci-
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catrice rcente est rouge, et non blanche, parce que le sang est encore en abondance dans les vaisseaux capillaires, et que les diffrentes parties de la cicatrice tendent reprendre leur tat normal. La nature travaille dans ce sens, et les chairs d e m e u r e n t rouges, jusqu' ce que la circulation du sang se fasse d'une manire rgulire. Les cicatrices des ulcres scrofuleux ont m m e cela de particulier qu'elles demeurent rouges beaucoup plus longtemps que les autres. Ne devons-nous donc pas voir dans la blancheur de la ci- . catrice qui nous occupe un de ces signes remarquables qui accompagnent les miracles? N'est-ce pas un prodige de mme nature, que ce repos complet dont la jeune fdle a j o u i aussitt qu'on lui eut appliqu l'image du serviteur de Dieu? Les prodiges et les miracles ont pour but'de faire clater la toute-puissance de Dieu (Exode). "Voil donc un ulcre scrofuleux et sinueux, dont la g u rison s'opre en dehors des lois de la nature, et qui dfie toutes les explications naturelles de la mdecine. Il n'y avait que le Divin mdecin qui pt ainsi gurir instanta nment un ulcre permanent, et se jouer des complications de ce mal. Et non seulement la gurison de la malade est bien certaine, c o m m e de nombreux tmoins l'ont constat et affirm avec serment, mais encore la sant de cette per sonne se maintient florisbanle pendant de longues a n n e s . Les actes du Procs, c o m m e n c onze ans aprs cette guri son le dclarent, et les professeurs chargs alors d ' e x a miner l'tat de sant actuel de Thrse certifient qu'elle jouissait d'une sant florissante, se portait merveille, et < ne dsirait rien de plus . Mais je vais plus loin. Quand c mme o n admettrait que le mal eut pu tre guri naturel lement, la manire dont s'est produite celte gurison, en une seule nuit, et sans passer par toutes les lenteurs de la nature abandonne e l l e - m m e , cette manire, dis-je, est, elle seule, un clatant miracle. Tout ce qui surpasse les forces de la nature constitue un miracle; or, dans le cas qui nous occupe, personne n'esprait plus de gurison. Si elle s'est produite, il y a donc miracle ; si elle s'est p r o ie duite e n peu de temps, c'est un miracle remarquable ; si enfin elle s'est produite en un instant, c'est un miracle de premier ordre (1). Notre conclusion est donc celle-ci, que le prodige opr l'gard ds la j e u n e Thrse T a r t u foli, par l'intercession du vnrable serviteur de Dieu Benot Joseph Labre, appartient la troisime classe des
(I) Warenil. = Dissert, de diff. i n t e r v e r a et falsa mirac. vr. 31
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miracles. G'est n'en pas douter un miracle appartenant la troisime classe, c'est dire du n o m b r e de ceux qui le sont quant au mode de gurison . Telle est ma conviction; j e l'affirme sous la foi du serment.
II. SECOND JUGEMENT MDICAL
F o r m u l par M. Gajetan Albites, docteur en chirurgie, m e m b r e de la socit de m d e c i n e et de chirurgie, profes seur d'anatomie l'Acadmie de Saint-Luc, et premier m decin de l'hpital Saint-Jacques. 1. L'Eminentissime et Rvrendissime cardinal Patrizzi, rapporteur dans le procs de Batification et de Canonisation du vnrable serviteur de Dieu Benot-Joseph Labre, m'a confi une tche honorable, sans doute, mais assez difficile remplir. II s'agit pour moi d'examiner attentivement la g u rison d'un ulcre fistuleux invtr, gurison que l'on attribue l'intercession auprs de Dieu de s o n vnrable serviteur Benot-Joseph Labre. J'apporterai dans ce travail t o u t le soin qui m e sera possible, et j'exposerai le fond de ma pense avec franchise, me dfiant cependant de m o n propre j u g e m e n t , et n le s o u m e t t a n t tout entier la d c i sion de votre autorit a p o s t o l i q u e . 2. Je n'hsile n u l l e m e n t regarder c o m m e un miracle la gurison de cet ulcre fistuleux et calleux, gurison q u ' o b tint Thrse Tartufolo par l'intercession du vnrable ser viteur de Dieu. 3. Le Promoteur de la Foi s'est appliqu, et c'tait s o n devoir, accumuler les objections tendant enlever cette gurison tout caractre miraculeux. A m o n avis, il se t r o m p e p o u r deux motifs : le rcit qu'on lui a fait de la maladie n'est pas exact, et certains chirurgiens n'en ont pas compris la nature. La gloire de Dieu et celle de l'glise catholique r o m a i n e sont intresses ce que la vrit triomphe. Aussi m'appliquerai j e a r d e m m e n t convaincre le trs-excellent P r o m o t e u r du caractre miraculeux d e c e t t e g u r i s o n , p u i s q u e ni ia nature ni les forces humaines n'y ont eu a u c u n e part. 4 . Je ne veux pas rfuter une une les objections de m o n adversaire; j ' a i m e mieux faire u n rcit dtaill d e l maladie de Thrse Tartufolo, afin de pouvoir tablir la nature m m e de son mal et son incurabilit, c o m m e le prouvent les efforts tents en vain par les m d e c i n s p o u r le combatlie.
6. Un point admis par tout le m o n d e , c'est que Thrse Tartufolo a joui d'une sant excellente jusqu' l'ge de treize ans ; cette poque, il lui survint au cou u n e t u m e u r grosse c o m m e une noisette, et qui, en peu de t e m p s , devint aussi grosse qu'un uf de pigeon. 6. Pendant longtemps elle eut recours des remdes mollienLs; mais, c o m m e ce traitement n'aboutissait rien, le chiruigien Zannoni lit sur la tumeur une incision en forme de croix, et parvint en extraire un noyau ressem blant beaucoup un jaune d'uf. Aprs cette opration, il resta une plaie profonde au c o u de la jeune fille ; pendant deux mois on la soigna de diffrentes manires. 7. Mais la plaie, tout en se rtrcissant extrieurement, ne se refermait pas ; le pus qui y tait rest l'avait u l c r e ; bientt, un abcs de nature calleuse s'y ajouta, e t s e se changea en fistule ; ainsi l'tat de la malade empirait. 8. Alors le chirurgien Sormani essaya des agents caus t i q u e s ; tout fut inutile ; l'ulcre sauf l'ouverture, n'en subsistait pas m o i n s , toujours aussi profond, et scrtant des humeurs purulentes. 9. Au bout de deux mois, la malade se confia au chirur gien Antonacci. Celui-ci, pensant qu'on n'aboutirait h rien, si on n'enlevait pas l cal, employa des agents caustiques d'une si grande nergie, que la malade e n souffrait h o r r i blement, et ne put les supporter longtemps. Le chirurgien eut recours aux moyens extrmes; ce qu'il ne pouvait.obte nir par le feu, il voulut le raliser par le fer, et pratiqua des incisions profondes. Tout cela fut encore inutile; il fallut re venir aux caustiques, ce qui fit souffrir beaucoup la j e u n e fille, et, en lin de c o m p t e , son ulcre se changea une seconde foisenunefistule calleuse avec u n e c a r o n c u l e a s o n ouverture. 10. Pendant deux mois, trois mois a u plus, elle avait tellement souffert, les traitements q u ' o n lui faisait subir l'avaient tellement tourmente, qu'elle ne voulut plus rece voir les secours de la mdecine - son mal demeura ce qu'il tait auparavant, c'est--dire, avec la mme scrtion de pus, les m m e s effets et les mmes douleurs. 11. Sur les instances qu'on lui fit, elle consentit c e p e n dant se mettre entre les mains du chirurgien Cremonini. Quand celui-ci eut examin attentivement l'ulcre, il y plongea son stylet et put en faire connatre la profondeur et les sinuosits, mais il est faux de dire qu'il ait indiqu le caractre de c e mal. Il pensa que la glande tyrode avait t enleve. 12. Ce m m e chirurgien Cremonini appliqua aussi des
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agents caustiques ; mais ils torturrent tellement la j e u n e fille, qu'elle ne put les endurer bien l o n g t e m p s , et ne voult plus avoir affaire aux m d e c i n s . Le chirurgien Cremonini dclara son mal incurable. Ceci se passait neuf mois avant la gurison tonnante dont la j e u n e fille fut l'objet. 13. On voit clairement que Thrse souffrait d'un ulcre fistuleux, ou plutt d'une fistule laryngienne ; les incisions et les remdes caustiques ne contriburent pas peu exciter la scrtion du pus et des humeurs, en amenant la carie des cartilages et de l'os h y o d e . La nature ne pouvait rien, les remdes de la m d e c i n e taient impuissants pour gurir u n e semblable maladie, c o m m e on le verra plus bas.
PREMIRE PARTIE
IKCDBABILIT DES FISTULES EN GNRAL.
14. Parmi les maladies si nombreuses qui viennent affliger notre pauvre h u m a n i t , il faut compter la fistule laryngienne. Il y en a de trois'sortes : les fistules traumaliques, elles sont occasionnes par u n e blessure faite au m o y e n d'un instrument tranchant, dans des oprations chi rurgicales, une arme feu amnerait g a l e m e n t des fistules de c e genre ; en second lieu, les fistules provenant de maladies scrofuleuses ou vnriennes ; enfin les fistules dont on ne peut gure indiquer la cause, et qui semblent tenir la constitution m m e de celui qui e n souffre. C'est de cette dernire catgorie que j e voudrais parler; je serai aussi bref que possible. 1 5 . Cette fistule qui c o m m e n c e g n r a l e m e n t par u n e fis s u r e la glotte, s'lend le long de la glotte e l l e - m m e en s'avanant graduellement, par le ligament t y r o - h y o d e , j u s qu'au tissu cellulaire des t g u m e n t s qu'elle recouvre plus ou m o i n s en partie. Alors, par l'humeur qu'elle contient, elle altre cette partie, qui devient un follicule, c'est--dire, une sorte de g l a n d e , o u m m e u n e cystite, t r s - d o u l o u reuse pendant la d g l u t i t i o n des a l i m e n t s . Si cette glande vient percer extrieurement, elle c o n s t i t u e ce que l'on appelle proprement u n e fistule laryngienne spontane, formant, daus t o u t e sa longueur, c o m m e un cordon qui court autour de la glotte, et est e x t r m e m e n t sensible au t o u c h e r ; on a b e a u le couper ou l'arracher, il renat toujours.
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16. Les fistules de c e g e n r e ne jettent pas toujours du pus ; c'est, assez souvent, une espce d'humeur aqueuse, salivaire ou v i s q u e u s e ; parfois cependant il .s'y mle du p u s . Cette scrtion n'est pas continue; elle ne se produit que par inter valles, lorsque la fistule est remue l'occasion de l a manducation ou de la dglutition. Comme elle se trouve juste entre l'os hyode et le cartilage thyrodien, et que ces deux der niers tendent alors, 1 un monter, l'autre s'abaisser, il en rsulte que la fistule est sous l'influence de ces mouvements opposs ; elle rpand alors les humeurs qu'elle renferme, et, pendant tout le t e m p s du repas que prend le malade, ces humeurs coulent en avant de son cou. Quand elles ne sont qu'en petite quantit, elles laissent une trace assez s e m blable celle d'une limace ; si elles sont en abondance, le malade est oblig de s'essuyer souvent, c e qui ennuie tous les convives, et leur inspire de la r p u g n a n c e ; c o m m e ce mal est plus frquent chez les f e m m e s q u e chez les h o m m e s , celles-ci, qui ont toujours le cou dcouvert, offrent conti nuellement un spectacle hideux ceux qui vivent avec elles. 17. L e s fistules dont nous parlons ne sont pas toujours o u v e r t e s ; soit que la peau tende se runir ou que les humeurs olles-mmes produisent des espces de crotes, l'ouverture des fistules est parfois bouche. Alors les humeurs qu'elles renferment, irritant le cordon listuleux, se pressent contre les chairs, et font souffrir le malade, j u s qu' ce qu'une ouverture se fasse el que l'coulement puisse s'effectuer c o m m e auparavant. Le plus grand embarras est dans la ncessit de s'essuyer, pendant le temps que l'on mange. Quant la sant de l'individu, si cette fistule ne se rencontre pas avec quelque diathse vicieuse, elle n'en est nullement c o m p r o m i s e . C'est certainement une gne extra ordinaire, que d'tre oblig de s'essuyer ainsi pendant le repas ; m a i s , aprs tout, c o m m e l'ouverture de la fistule se trouve habituellement sous le menton, elle ne se remarque pas trop, tant que la tte se tient dans sa position naturelle, c'est--dire un peu incline; quand on lve la tte, au con traire, la plaie apparat, tout entire. 18. Cette fistule, c o m m e j e viens de le dire, ne contrarie gnralement pas la sant, pourvu qu'elle ne soit qu'une simple affection locale ; toutefois elle est, de sa nature, incurable. Ceux qui en sont alfligs en sont quittes pour la gne que leur causent ces humeurs qui coulent si s o u v e n t , , et n'ont rien faire, si ce n'e&t s'essuyer, se laver, et e n mme temps boucher 1 ouverture avec du crat, lorsque
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l'coulement s'arrte; les m d e c i n s n e conseillent aucun autre traitement. 19. On pourra m objecter qu'un des mdecins les plus clbres de notre sicle. Velpeau, a trouv u n e m t h o d e convenable pour oprer et gurir les fistules.c'est la Bronchoplastie, dont l'Acadmie de Paris a fait l'loge. L'argu m e n t serait excellent si la m t h o d e d e Velpeau pouvait s'appliquer toutes sortes de fistules; mais elle n e c o n v i e n t que dans les c a s de fistules de la trache-artre, o u d u cartilage thyrodien ; mais il est impossible de s'en servir quand la fistule se trouve dans l'espace t h y r o - h y o d i e n . Je sais bien qu'il s'agit ici de fistules traumatiques ; m a i s la m t h o d e de Velpeau, tout ingnieuse qu'elle soit, n e r u s sirait pas dans c e c a s . Sans doute o n pourrait arriver, grce ' elle, fermer l'ouverture de la fistule, mais elle n'en serait pas pour cela gurie. Ce q u e l'on cherche, dans les maladies de ce genre, c'est un traitement q u i puisse extirper t o u t e s les chairs gtes, et permettre la nature de r e m placer celles-ci par de nouvelles chairs, afin q u e les parties divises se soudent d e n o u v e a u , e t amnent une gurison c o m plte. Rien de tout cela ne pouvait russir dans le cas q u e n o u s e x a m i n o n s . Nous s o m m e s ici en prsence d'une fistule place dans cette partie du gosier, appele vulgairement p o m m e d'Adam ; et, c o m m e j e l'ai dj expliqu plus haut, les mouverricnts de l'organisme sparent bien souvent les diverses parties de la fistule ; le bord suprieur de celle-ci est tir vers le haut, l'autre vers le b a s . Dans de pareilles c o n ditions, il est impossible q u e de nouvelles chairs puissent se former, et tous les secours de la chirurgie seront incapables de rapprocher les parties disjointes, le moindre m o u v e m e n t venant contrarier et anantir tout c e q u e l'on aurait .pu o b tenir auparavant. C'est l ce qui arriverait chaque fois q u e l e patient prendrait quelque nourriture, quelque boisson. De plus, les mucosits qui viennent d u fond de la plaie, e m pcheront toujours les chairs de se runir, et ainsi la fistule ne sera j a m a i s gurie, l'exprience ayant dmontr q u e les ulcres de c e genre demandent q u e la gurison c o m m e n c e au fond de la plaie. 2 0 . Les plus clbres auteurs, Pare, Richter, B o u s quet, Jean Bell, Larrey et autres, nous parlent, dans leurs ouvrages, des blessures de la gorge, et dclarent qu'il est difficile de gurir les fistules. Quant celles qui peuvent avoir leur sige dans l'espace thyro-hyodien, ils ne n o u s disent rien. Sabatier tait si convaincu de l'extrme diffi cult de gurir ces fistules, qu'il ne leur consacre qu'une
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page de son ouvrage. Roche et Sanson, tous deux mdecins remarquables, dclarent qu'elles sont incurables. Si d o n c nous faisons attention aux raisons qui ont e m p c h les plus clbres auteurs, anciens o u modernes, de n o u s parler de ces fistules, deux points en ressortiront trs-nettement. Le premier, c'est que les fistules de l'espace t h y r o - h y o d i e n ne mettent jamais en danger la vie de celui qu'elles affligent ; le second, c'est qu'on ne connat aucune m a nire de les gurir. Sabatier et Sanson nous font t r s - s a g e ment remarquer que les essais de toutes sortes tents par les mdecins n'ayant jamais russi, il tait inutile d'en e n tretenir le public. 21. J'irai m m e plus loin, si le peu d'exprience q u e j'ai acquis e n soignant des fistules de ce genre peut avoir quelque autorit. A m o n avis, si" ces fistules, que je n'ai j a mais rencontres que chez les femmes, peuvent ne pas nuire toujours l'tat gnral de la sant, cependant j e les ai vues quelquefois dgnrer en phthisie trachenne, c o m m e il est arriv . l'hpital Saint-Michel, dans le quartier des f e m m e s , une j e u n e fille de dix-huit ans. 2 2 . Une autre fois, il s'agissait d'une fistule laryngienne s p o n t a n e ; j e montrai la malade au premier chirurgien de l'Htel-Dieu do Paris, M. Roux, qui tait alors venu visiter Rome, il m e dclara catgoriquement que le mal tait i n c u rable. 23. Du reste, dans tous les cas de ce genre qui se sont prsents moi dans ma pratique mdicale, j e n'ai jamais conseill que de maintenir la plaie dans un tat de grande propret, attendu que, quelque m o y e n que l'on e m p l o i e , le canal fistuleux persiste toujours. 24. Si donc toutes ces autorits dmontrent clairement que Ton ne peut gurir les fistules traumatiques dont le sige est dans l'espace thyro-hyodien, plus forte raison devons-nous en dire autant des fistules spontanes. Ici, en effet, c o m m e le disait M. Roux, n o u s s o m m e s en prsence de grandes dilficults ; la fistule est situe un endroit dfa vorable, et on ne connat ni la cause qui Ta produite, ni le point de son origine. Parfois m m e cette fistule c o m m u nique avec la cavit de la glotte par un conduit troit, et amne une extinction de voix. Enfin une des preuves les plus frappantes pour tablir qu'elles sont incurables, c'est que les professeurs de chirur gie n'indiquent aucun remde propre a i e s gurir.
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SECONDE PARTIE
INCURBILIT DE LA FISTULE LARYNGE DE THRSE TAUTUFOLO, EN PARTICULIER.
2 3 . Aprs avoir do*nn les raisons de l'incurabilit des fistules laryngiennes, j'examinerai maintenant la maladie de notre jeune fille, Thrse Tartufolo, maladie dont l'ori gine tait regarde c o m m e spontane, car on n'en c o n naissait a u c u n e cause externe ou interne dans le tempra m e n t de la malade. Pour tablir ce point, j'examinerai attentivement quel tait le sige du mal, et quels furent ses dveloppements. Les dclarations de Thrse et les d positions des tmoins nous aideront b e a u c o u p dans ce tra vail. 2 6 . Voici c o m m e n t parle la j e u n e fille au procs : Je pouvais avoir treize ans, quand il m e survint, sous le . m e n t o n , au milieu du gosier, une t u m e u r grosse c o m m e u n e n o i x . La sur de Thrse, qui a dpos e n q u a l i t d e t m o i n , confirme ces deux points, en disant elle aussi : Il lui vint u n e tumeur sons Le menton; la t u m e u r tait au g o sier . Cette dclaration de la malade, aussi bien que la dposition de sa sur, nous d m o n t r e clairement qu'il s'agit ici d'une fistule laryngienne, et qu'elle prsente une t u m e u r caractristique au milieu de la gorge. Nous savons m a i n t e nant quel tait le sige de la t u m e u r . 27. L'impossibilit o Ton fut de cicatriser cette t u m e u r , qu'elle et t ouverte d'elle-mme ou par .des i n c i s i o n s , p r o u v e une fois de plus que c'tait l une fistule laryn gienne. 28. D'autres tmoignages confirment encore que la fis t u l e de Thrse tait laryngienne. Yoici ce que dit le dix-huitime tmoin : J'ai vu le mal, il se trouvait au m i l i e u du gosier, sous le menton . Le m m e tmoin e n spcifie la nature en disant que l'on voyait une t u m e u r assez semblable une racine r o n d e ; au milieu de cette t u m e u r on pouvait remarquer un trou par lequel il sortait du pus et des h u m e u r s . ISlle avait besoin de s'essuyer bien bouvent. n Ces caractres correspondent exactement ceux qui se rencontrent habituellement dans les fistules laryngiennes. 29. Un autre t m o i n , le dix-neuvime, parlant du sige
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m m e de ce mal, d i s a i t : Cette jeune fille avait un mal sous le m e n t o n , au milieu du gosier, et exactement au pli qui s'y trouve . Le chirurgien Sormani, qui succda Zannoni, et ouvrit le premier cetle tumeur, parlait ainsi, aprs la gurison remarquable de la jeune fille: Ce mal se trouvait sous le m e n t o n , et au milieu de la gorge . Tous ces tmoignages suFfiseut amplement, j e pense, pour tablir quel tait le sige du mal. 30, Quant sa nature, ce mal peut tre rang dans la ca tgorie des fistules. Les chirurgiens et les tmoins tendent tous 1'afirmer dans leurs dpositions. Je n'en veux citer qu'une seule, celle du seizime tmoin. Dans la pre mire partie de sa dposition, il dclare avoir entendu dire que, depuis longtemps, Thrse souffrait d'un mal au gosier, sous le m e n t o n , et qu' cet endroit s'tait forme une fistule , Il ajoutait que l u i - m m e avait vu cette fisa tule ; elle tait creuse L'intrieur, et les bords en taient calleux, 3 1 . C'tait donc bien une fistule, il n'y a pas en douter. Les mdecins et les chirurgiens ne nous en ont pas fait con natre le caractre particulier ; mais la place m m e qu'elle occupait, d'aprs les n o m b r e u s e s dpositions des tmoins, nous montre clairement que c'tait une fistule laryn gienne 3. Pour rsumer en peu de mots tout ce que j'ai dit par rapport la nature de ce mal, n o u s sommes en prsence d'un mal que tous les auteurs dclarent incurable, et qui cependant ne contrarie pas la sant de celui qui en est at teint. Thrse e l l e - m m e affirmait qu' part le mal dont il est question, et que les mdecins n o m m e n t fistule, elle jouissait d'une sant parfaite . 33. Quant ces h u m e u r s qui coulaient avec plus ou moins d'abondance, j'ai expliqu plus haut quels inconvnients assez srieux en rsultaient pour la j e u n e fille, et pour ceux qui avaient sous les y e u x un spectacle aussi rpugnant. 34. Le dix-neuvime t m o i n ce sujet dpose ainsi : Toutes les fois que Thrse tait table, elle avait besoin dtenir un linge sur son gosier; sinon les humeurs la salis saient aussitt, et cela nous causait un vif sentiment de dgot. 35. En rapprochant toutes ces indications, toutes les donnes, tous les caractres que nous possdons par rapport au mal dont tait afflige Thrse, il est vident qu'elle avait une fistule laryngienne. G'est l mon' avis. Je veux maintenant faire quelques rflexions au sujet des traite-
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m e n l s assez pnibles auxquels a t l o n g t e m p s s o u m i s e la j e u n e fille, traitements qui ont mis ses jours en danger.
TROISIME PARTIE
IMPUISSANCE DES REMDES ET GULUSON INSTANTANE.
36. Je n'ai l ' i n t e n t i o n d ' t a b l i r ici q u e d e u x p o i n t s : le p r e mier, q u e la maladie de Thrse tait incurable ; le second, que les remdes essays en v u e de la gurir n'ont fait qu'ag.graver son tat. Je ne m'appuierai que sur les rapports des t m o i n s , et je serai bref. Toutefois je m e permettrai d'insister sur un point, c'est que les m d e c i n s qui ont tour tour soign la ma'ade, Zannoni, Sormani, Antonacci, Gremonini, n'onl pu dterminer la nature particulire de s o n m a l . Si j'ose ici les critiquer, c'est que ma c o n s c i e n c e m'y oblige, n'ayant qu'un seul but, celui de faire triompher la vrit, et de faire ressortir davantage le caractre prodigieux de la gurison de la j e u n e Mlle. 37. Le chirurgien Zannoni,qui le premier donna ses soins la j e u n e fille, c r u t q u ' e l l e avait t o u t s i m p l e m e n t u n e t u m e u r , et la coupa. Je n e le condamnerai pas en cela, car cette opration fit du bien la malade, en la dbarrassant de toutes ces humeurs qui la gnaient c o n s i d r a b l e m e n t , surtout lorsqu'elle mangeait. Cependant je crois qu'il et m i e u x fait en ne pratiquant qu'une simple incision l o n g i t u dinale; la plaie et t moins tendue, et se lt plus facile m e n t cicatrise. Mais, en faisant son incision en forme de croix, il laissait dcouvert la partie malade, et l'air p o u vait agir directement sur elle, ce qui est funeste dans les cas de fistule. D'ailleurs, cette glande, cette tumeur, cette noix saillante, c o m m e il l'appelait, tant une partie essentielle d e l fistule, ne pouvait tomber d ' e l l e - m m e ; mais, tranche ' p a r le fer, elle laissait aprs elle u n e blessure profonde. 38. P l u s tard, Zannoni remplit la plaie de charpie ; j e n e l'en blme pas. 11 ne savait pas qu'il avait devant lui une fis tule laryngienne, et par l m m e incurable, et il esprait qu'une suppuration abondante allait se produire, qu'avec le temps, les chairs pourraient repousser, et la plaie se refer mer. C'est ce qui arrive ordinairement aprs une incision ; les chairs reviennent d'abord au fond de la plaie, et peu peu la blessure est cicatrise. 39. Le chirurgien Sormani, qui succda Zannoni, suivit
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la m m e marche que lui ; il crut reconnatre dans le mal e n question une fistule; mais n'en distinguant pas l'espce, ne remarquant pas surtout que c'tait une fistule incurable, il eut recours aux remdes caustiques. 40. Ce m o d e de traitement, recommand par les auteurs anciens lorsqu'il s'agit de. fistules en gnral, devenait ici tout fait inutile. Cependant, sans cette incision en forme de croix dont j'ai parl, une cautrisation assez lgre et pu produire de bons rsultats, c o m m e le prouve l'exprience. Mais une ibis une incision de ce genre pratique, surtout profonde c o m m e elle Ttait, on ne pouvait plus cautriser la plaie; elle se changeait alors en un ulcrefistuleux, le mal pouvait gagner l'os hyode, le ligament thyro-hyode, peut-tre m m e le cartilage thyrode, irriter les membres les plus proches, et amener une carie funeste. Ce qui con firme mes craintes, c'est qu' cette poque, les parties ga gnes par l'ulcre prsentaient dj un aspect blanchtre, les bords de la plaie taient calleux, et on c o m m e n a i t remarquer ce cordon de chairs fongueuses dont j'ai donn plus haut la description, et qui revenait chaque fois qu'on essayait de l'enlever. 41. Le chirurgien Antonacci, qui succda Sormani, crut que l'on ne pourrait empcher ces chairs fongueuses de repousser tant qu'on n'aurait pas enlev le cordon calleux dont je viens de parler. Comme Sormani, il eut recours des cautrisations qui faisaient horriblement souffrir la jeune fille ; il essaya de couper et d'arracher le cordon de chairs calleuses, ce qui la fit souffrir encore plus. 42. Il ne se borna pas cela : c o m m e ce cordon revenait toujours, il appliqua de nouveau ses remdes caustiques, ce qui torturait la j e u n e fille. Le dix-neuvime tmoin affirme que pendant ce temps la pauvre enfant courait dans sa chambre, les bras tendus et jetant les hauts cris, tant ses douleurs taient vives . 43. Faut-il s'tonner si, aprs cela, cet ulcre fistuleux rejette encore du pus et des h u m e u r s ? Le ligament t h y r o hyodien ayant t mis n u , de m m e que les cartilages thyrodiens, et la cautrisation venant encore faire souffrir la jeune fille, au point qu'elle courait travers sa maison, les bras tendus, dans de telles conditions, il fallait ncessai rement que le cartilage thyrodien et l'os hyodien fussent attaqus par la carie, et qu'une nouvelle suppuration se produist. 44. Que dirai-je maintenant de Cremonini? Ce chirurgien examina la malade, sonda m m e la plaie avec son stylet, et
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dclara qu'on avait enlev la glande thyrode. Je vous le d e m a n d e , la glande thyrode a-t-ellc j a m a i s t sous le m e n t o n ? Il suffit, pour rduire nant cette assertion de notre chirurgien, de citer une partie de la dposition du q u i n z i m e tmoin. Parlant de Thrse, voici ce qu'il dit : Je la voyais tenir la tete h a u t e , et le chirurgien (Cremo nini) l'examiner et la soigner . Le mal tait donc sous le m e n t o n ; or la glande thyrode n'est pas vers le m e n i o n ; elle est au milieu du c o u , 4 5 . D'ailleurs, si Von avait enlev ainsi cette glande h la j e u n e fille, elle en serait morte, parce que cette opration aurait a m e n une hmorrhagie contre laquelle la m d e c i n e n e connaissait pas alors de remde. Aussi le P r o m o t e u r de la Foi a - t - i l e u facilement raison d'un pareil argument, et a-t-il dclar fausse et errone l'opinion de Cremonini. Toutefois, Cremonini, connaisant mal l'tat vritable de la malade, voulut aussi employer les cautrisations. Ses r e m d e s taient bien violents, nous dit le dix-neuvime t m o i n : Quand M. Cremonini soignait Thrse, j e ne sais de quels mdicaments il faisait u s a g e ; mais j e m e rap < pelle fort bien que la pauvre enfant courait, dlirait et c jetait les hauts cris . D'un autre ct, le quatorzime t m o i n nous dclare que, par ses cautrisations, Cremo. nini faisait goniler la gorge de la j e u n e tille et augmentait a ses souffrances . 4 6 . A la fin, Cremonini dclara q u e le mal dont souffrait Thrse Tartufolo tait incurable. Q u a n t a celle-ci, fatigue de tant de traitements douloureux et inutiles, elle ne voulut plus jamais avoir recours la mdecine. 47. Comme on a pu le voir, ce mal n e fut nullement s o i g n c o m m e le demandait sa nature, et bientt, on n'en p e u t douter, il tait compliqu d'une carie plus o u moins dangereuse du cartilage thyrodien et de l'os h y o d i e n ; la preuve en est dans ce pus et ces humeurs qui n avaient pas d'autre cause. Le mal aurait en p e u de temps gagn l'int rieur du larynx et de la trache, et amen une irritation grave, laquelle devait ncessairement dgnrer en phthisie trachenne. J'ai vu des cas de ce genre, bien qu'il n'y et eu auparavant a u c u n e cautrisation. 48. Les fistules du larynx, quand elles sont spontanes, sont aussi incurables. Mais, dans le cas qui n o u s occupe, celle de Thrse l'tait d'autant plus, qu'on ne savait quel mal on avait affaire, et qu'on le traita l'aventure. Ceux qui la suignrent agirent si imprudemment, qu'ils mirent sa vie e n danger.
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49. On pourrait peut-tre encore me faire une objection. Les fistules laryngiennes spontanes, dirait-on, et c'est d'une fistule de cette nature qu'il s'agit ici, ne sont pas abso lument incurables ; la nature a en e l l e - m m e des ressources que nous ne connaissons pas, et qui peuvent triompher de ce mal. On a pu voir des gurisons de ce genre, j'en conviens, et cela malgr que les mdecins les aient d clares impossibles ; mais il nous faut ajouter que l'on avait laiss la nature agir seule ds le c o m m e n c e m e n t mme de la maladie. Quant la fistule de Thrse Tartufolo, les m decins l'avaient traite d'une manire si peu propre . la gurir, qu'ils mirent la vie de la j e u n e iille en danger. Dans de telles conditions, je crois que personne ne viendra c o n tredire ce que j'ai avanc, et prtendre que cette fistule n'tait pas incurable. J'ai pour m o i , dans cette question, la nature m m e du mal, et, de plus, les traitements violents subis par la j e u n e fille. 50. Voici maintenant ma c o n c l u s i o n : Le fait que nous avions examiner consistait en une fistule laryngienne, de sa nature incurable, et qui se changea ensuite en un profond ulcre fistuleux, ce qui rendait une fois de plus la gurison impossible. La gurison ayant t instantane, complte, et s'tant maintenue, est donc prodigieuse et clatante. 51. A mon avis, .il y a l un miracle, et l'on peut dire qu'il consiste dans la gurison subite et complte de Thrse Tartufolo atteinte d'une fistule laryngienne incurable de sa nature, et que les traitements subis par la jeune fille ont encore rendue plus incurable. 52. Je vous soumets, Trs-Saint-Pre, m o n humble travail au sujet de ce miracle. Si j'ai mis la main l a plume, c'est uniquement pour servir les intrts de la Religion et de la Vrit. J'espre avoir port un j u g e m e n t vrai sur les choses que j'ai examines. Cependant m o n esprance serait vaine si votre Autorit, si votre j u g e m e n t infaillible ne venaient confirmer m o n uvre. Mais, avec cette haute confirmation, je serai sur d'avoir dit vrai, et j'en serai combl de joie. En attendant, j e me jette humblement vos pieds sacrs, et sollicite ardemment votre bndiction apostolique.
CAJETAN ALBITES.
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plus qu'une chose, c'est de prouver, le plus victorieusement possible, la persvrance du mal jusqu'au m o m e n t de la gu rison miraculeuse. Elle ajoute qu'il plairait q u e l q u e s - u n s des Pres devoir raliser ce que l'habile expert Albites a pro pos quant la formule m m e du miracle. 2. Rien de plus facile que de faire ce que l'on nous d e mande, si, le caractre et la gravit de la maladie tant d sormais h o r s d e cause,on ne conteste pas la forceet l'existence des s y m p t m e s , car c'est d'eux que dcoule naturellement la dmonstiation demande. Rduisons donc notre raison nement deux points trs-courIs. Il est certain qu'aucun ulcre ne peut tre guri tant que le pus y abonde, puisque Fcret de la srosit, en irritant sans cesse les parois, s'oppose leur nettoyage, la suppuration ncessaire au rapprochement des chairs, et empche tout fait ce rap prochement. Ces matires, raison de leur cret, irritent continuellement toute la surface de la fistule, la main tiennent dans un tat d inflammation, et ne lui permettent ni de suppurer ni de se nettoyer G'est pourquoi elle (t devient toujours plus sale et plus obstrue. (Richter. Elments de chirurgie Tome I ) D ' a p r s cela, s'il est prouv que jusqu' la lin l'ulcre de Thrse a rendu ce pus acre dont nous parlons, il sera dmontr que la fistule est de meure dans le mme iat jusqu' la gurison. 3. Il est encore certain que cetle h u m e u r p u r u l e n t e p r o d u i t peu peu u n e callosit qui s p a i e les chairs de telle sorte que, m m e aprs la disparition de la cause productrice du pus, elles ne peuvent se joindre. La callosit devient un obstacle la cicatrisation, m m e aprs la suppression de la cause qui faisait durer la fistule. (Boyer, t o m . I, chap. n) Ici encore, si l'on montre q u e la callosit s'est maintenue jusqu' la fin, il sera vident que la fistule sera reste la mme jusqu'au m o m e n t du miracle. 4. Or, coutons les t m o i n s . Le second ou le troisime jour avant la gurison, le chirurgien Gremonini a vu, ainsi qu'il Ta dclar : le mouchoir couvert des mmes matires it ichoreuses, jaune-vercllres et flids c o m m e auparavant, sinon p l u s . . . . et au sige du mal, le m m e anneau calleux, avec gonilement, indice de la formation et de T a c c u m u latien des matires . Le prtre Recchia dit son tour: Il est certain que, les jours qui ont prcd la gurison, et spcialement au commencement tle la nuit pendant laquelle le miracle eut lieu, la pauvre j e u n e fille se trouvait plus souffrante que d'habitude, et la fistule tait toujours dans le m m e tat. Outre la persistance du
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rebord dur de la plaie, le gonflement e t l'inflammation annonaient la prsence de matires qui v o u l a i e n t < sortir ( Je voyais la gorge enfle, et j e l'ai vu j u s q u ' cette soire. . Remarquez, j e v o u s prie, cette i n flammation et ce gonflement de la partie malade, indice vident de l'accumulation du p u s ; n o l e z bien aussi c e s p a r o l e s : elle tait plus souffrante que habitude, qui montrent que la douleur venait prcisment de l'acre t du pus. C'est ce que la malade gurie confirme en d i s a n t : ce J'tais, ce soir l, plus t o u r m e n t e que d'habitude: cette douleur me causa U dos lancements aigus, n 5. Mais ce n'e*t pas assez. A ces indices si clairs et si srs s'ajoute un fait plus vident encore ; c'est le pus qui, sortant de la plaie, vint souiller l'image de Benot-Joseph qu'on en avait approche. Je trouvai, dit la malade, l'image du a serviteur de Dieu macule par le pus. . Et, dans sa d position, Cremonini a dclar que ce pus tait d'aussi m a u vaise nature (juc toujours. J'ai examin, dit-il, la tache des matires purulentes dont l'image tait souille, et q u o i qu'alors elles fussent dessches, j e m'assurai, l'odeur, qu'elles taient encore ftides, ainsi qu'elles l'avaient a toujours t. 6. Donc, s'il est certain q u e la fistule persiste et s ' a g g r a v e t a n t q u e l'humeur y a b o n d e , et q u e la callosit l'obstrue ; si cette callosit a persist jusqu' la dernire n u i t ; si, jusqu' cette dernire nuit, le pus s'est amass et a c o u l jusqu'au m o m e n t de la gurison, qui doutera que la fistule ait dur, dans s o n tat le plus grave, jusqu' la gurison m i raculeuse ? 7. Quant la formule de dsignation du miracle, certai n e m e n t nous devons acquiescer avec dfrence au s e n t i m e n t des Pres qui prfrent un titre propos par l'illustre pro fesseur Albits, titre qui indiquerait q u e la maladie tait par e l l e - m m e incurable, et par consquent le sujet d'un miracle
du deuxime ordre ; toutefois deux considrations nous engagent conserver la formule primitive. D'abord les deux experts se sont accords sur cette formule qui indique qu'en ralit il s'agit d'un ulcre sinueux, fistuleux, pierreux ; quoique l'un attribue l'origine de cet ulcre un t e m p rament scrofuleux, l'autre une cause i n c o n n u e . De plus, la nouvelle formule propose serait un b l m e inflig tous les mdecins qui o n t donn leurs soins la malade ; or cela n'tant pas ncessaire, il convient de n e pas le rappeler.
FIN DU SECOND MIRACLE.
TROISIME MIRACLE.
GURISON I N S T A N T A N E ANGELE, JOSPHINE OU ET PARFAITE D'UNE DE
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DE
LA
RVRENDE
SUR
MARINI
ANGIEXNNE RATE,
OBSTRUCTION DES
SQUJRKHEUSE
PIERREUSE ALARMANTS
LA
AGGRAVE
SYMPTOMES TRS
ET D AUTRES
MALADIES.
CHAPITRE
PREMIER
Expos du miracle.
ARTICLE PREMIER.
DU PREMIER TERME DU MIRACLE.
1. Sur Angle, Josphiue Marini, religieuse du m o nastre de Saint-Antoine de Pennabilli, quoique d'une complexion dlicate, jouit d'une bonne santo jusqu'en Tanne 1792, c'est--dire jusqu' sa vingt-deuxime anne. Durant cel espace de temps, clic n'eut qu'une pleursie, et (si la mmoire du huitime tmoin est fidle) quelques compul sions, ainsi que des relards dans ses rgles. Frquemment elle se livrait des exercices trs fatigants. Pendant les jours de carnaval, elle dansa trois heures de suite avec une des s u r s ; il en rsulta ncessairement une grande fatigue musculaire et une sueur abondante, ce qui fut la cause prdisposante d'une obstruction de la rate, ( d ' a u tant plus que tout cela eut lieu dans une atmosphre froide et humide, comme est celle qui rgne, principalement en hiver, autour du monastre situ sur le sommet d'une col line surplombe elle-mme par les pics neigeux plus levs). Cette maladie fait l'objet de la prsente dissertation. 2. Aussitt apparurent: un trouble dans l'conomie des fonctions naturelles, le commencement de l'obstruction de
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la rate, et le cortge de diverses maladies qui, par i n t e r valles, pendant vingt-six annes, assaillirent la religieuse jusqu' l'poque de sa gurison miraculeuse. Ces maladies provenaient, d'un ct, de l'obstruction del rate, de l'autre d'une perturbation du systme organique en gnral. A partir de cette poque, c'est--dire de 1792, son tat s a n i taire laissa toujours dsirer.... Elle prouvait des m a laises frquents, des lassitudes qui lui rendaient la marche difficile. De temps en temps aussi il se produisait des a l l rations assez graves dans son tat gnral. Ainsi elle tait sujette des affections hystriques...; pendant le cours de sa maladie ses rgles ont t irrgulires, et, parfois mme, totalement arrtes... De frquentes migraines, deux ou trois vomissements de sang, des coliques, des convulsions, des douleurs de poitrine etc. faisaient dire au mdecin Zabarella que Josphine Marini tait moiti phthisique. 3. Mais la pricipale maladie consistait daus l'obstruc tion de la rate. Voici en quels termes lucides la malade indique elle-mme le commencement et les causes de son tat : Ma maladie dbuta par une douleur la rate, que je crus le rsultat d'un refroidissement survenu la suite de violents exercices du corps, et, en particulier d'une danse de trois heures, avec une de mes compagnes, pen dant le carnaval. Cette douleur plus ou moins intense, et qui ne me quittait presque pas, ne me permettait de me baisser, de faire le pain, et surtout de me coucher sur le ct gauche, qu'avec une extrme difficult. Elle augmenta peu peu au point que je fus oblige de cesser tout travail, parce que le moindre mouvement des bras rpondait au sige mme de mon mal, et me causait une souffrance intolrable. Il fallut me mettre au lit, et demander les soins du dfunt docteur Battelli. 4 . Nous ferons remarquer en passant que l'air vif, humide et froid, surtout lorsque le corps est chauff par des exercices violents, peut tre une cause fortement p r disposante de l'obstruction de la rate. Cette observation est confirme par la science mdicale. Grottanelli, en s ' a p puyant sur l'exprience, a crit : Parmi les principales causes occasionnelles des maladies de la rate, on compte juste titre la temprature froide et humide de l'air, surtout quand le corps est chauff par l'exercice ou
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couvert de sueur. Nous estimons doue que notre reli gieuse a judicieusement indiqu la cause de sa maladie en attribuant ses douleurs de rate un refroidissement sur venu la suite uu violent exercice corporel. Tel fut le dbut de cette affection morbide: bnigne dans les c o m mencements, elle prit un caractre plus accentu d'aggra vation, la suite de l'exercice violent d'une danse prolonge pendant trois heures de suite et en hiver. dater de celte poque, et il n'y a l rien d'tonnant, de violentes douleurs firent souffrir la malade ; dans la rate se forma une callo sit de nature tellement pierreuse qu'elle semblait runir aux yeux des mdecins, mmo dans sa formation initiale, tous les indices caractristiques d'un squirrhe. Le mdecin Battelli, qui, le premier, fut appel donner ses soins la patiente, la crut atteinte d'une affection squirrheuse. C'est ce que la malade dit elle-mme au cinquime tmoin. Du reste,ngle Marini, soit dfaut de science,soit plutt induite en erreur par des douleurs utrines dont le sige est voisin de la rate, ne connaissait pas au juste le sige de son mal. Au commencement, tout lui faisait croire que la maladie provenait de l'utrus. Elle parlait nettement d'une callosit squirrheuse: Elle me disait, rapporte l'abbesse du m o nastre, cite comme tmoin du miracle, que deux ans environ avant mon entre dans le monastre, le docteur Battelli l'avait traite pour une maladie qui tait un' squirrhe l'utrus, selon que l'avait jug le m m e d o c teur . Que les rvrendissimes Pres de 1B Congrgation veuil lent bien prendre bonne note do la constatation, au dbut mme de la maladie, de cette callosit squirrheuse, afin de pouvoir mieux tablir leur jugement sur une affection morbide subsistant et s'aggravant pendant vingt six ans. 5. En vain, pendant une anne entire, Battelli lutta contre le mal, affirma la religieuse aprs sa gurison mira culeuse : Le traitement auquel je fus soumise pendant un an, me procurait, il est vrai, quelque soulagement, mais pour bien peu de temps, car j'tais toujours reprise de mes grandes souffrances. Le huitime tmoin a dpos que Josphine Marini disait que malgr les remdes qu'on lui donna, durant cette anne, son tat empira toujours. 6 . Malgr le traitement, la maladie conservant son mme
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degr do gravit, et la duret pierreuse subsistant, plusieurs mdecins, l'exemple de Battelli, portrent le diagnostic d'une affection squirrkeuse de la rate. Le tmoin c i n quime, dj cit, l'affirme clairement en ces termes : Sa maladie tait considre par le mdecin Farani et par le docteur Scaraniucci, comme un squirrhe dans les v i s cres. Aussi los remdes employs avaient-ils tous pour but de rsoudre le corps dur dont l'existence tait constate. Le pharmacien Magnaniqui fournit tous les mdicaments dit qu'ils furent trs-nombreux, mais il esta remarquer, ajonta-t-il, qu'ils vie produisirent pas de rsultat bien favo rable. Au rapport du premier tmoin cit au procs, le docteur Scaramucci lui a formellement dclar que la maladie de la sur Marini tait un squirrhe dont elle e s prait gurir, mais il ajoutait qu'il se trouverait bien peu de mdecins capables de gurir celle sorte de maladie. Dans une autre circonstance, le mme Scaramucci a dclar qu'aucun mdecin n'aurait pu la gurir. 7. La maladie suivit ainsi son cours pendant dix-huit ans, c'est--dire jusqu'en 1810, poque laquelle Josphine Marini fui chasse de son monastre avec toutes les autres religieuses. Durant cet espace de temps, elle fut- afflige d'autres maladies dont nous avons dj parl : affections hystriques, irrgularit ou suppression des rgles, ilueurs blanches, frquentes migraines, vomissements de sang, violentes coliques, convulsions plCLirsies,pripneumonies; tout cela justifiait bien l'instabilit de sant de la religieuse, souvent rappele par les tmoins. La patiente (comme on le voit encore dans sa vieillesse) tait gaie, d'un esprit naturellement vif et plaisant. La force du mal l'anantis sait. Mais l'intensit de la souffrance venant s'apaiser, elle se montrait ses compagnes, bien que la maladie p r i n c i pale subsistt, pleine de force et comme en parfait tat de sant. C'est ce qui justifie ces paroles des tmoins: Elle tait tantt bien et tantt mal. Elle-mme disait, aprs sa gurison: Tous ces maux m'assaillaient par intermit tence, l'exception de mes douleurs la rate qui taient continuelles. 8. Ces alternatives de sant et de maladie, cette mme persistance du mal principal continurent la tourmenter
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pendant les annes qu'elle passa hors du clotre, au sein de sa famille. Elle l'atteste elle-mme en ces termes : De temps en temps aussi, saint Lon, j'tais a sujette d'assez graves allratious dans ma sanl. C'tait or mon ancienne inflammation, mes fortes migraines, les fivres, et des attaques de poitrine par deux fois. Pour la maladie principale, celle de la rate, elle ne se calma jamais... la douleur tait continuelle. 11 n'en pouvait pas tre autrement, car l'obstruction de la rate devenait de jour en jour plus dure, plus douloureuse. On s'en aperut clairement lorsque, ayant quitt la maison paternelle, notre religieuse vint s'tablir au couvent de Sainte-Claire de Maccrata o, l'occasion d'une pripneu monie, elle dut se livrer l'examen des mdecins, Je constatai, dit le docteur Ciccolini, une obstruction inv tre la rate, obstruction squirrcuse, qui s'tendait la rgion de l'utrus avec engorgement de ce dernier o r gane. Caslellani jugea; comme Ciccolini, que l'obstruc tion tait irrsoluble.... et qu'elle datait d'une poque dj bien loigne. 9. Ainsi donc, l'assertion de Josphine Marini au sujet de la persistance de sa maladie de rate, au sein de sa fa mille, c'est--dire de 1810 1815, est clairement confir me par les mdecins. Ceux-ci, aprs l'examen le plus complet, dclarrent que le mal tait invtr et remontait plusieurs annes. Si donc on rapproche de ce jugement port par les mdecins sur la gravit et l'anciennet du mai en 1816, ce que la patiente a elle-mme racont de son tat de sant pendant son sjour hors du clotre, et que nous joignions tout cela ce que nous avons appris de l'histoire de la maladie, de 1792 1810, il ne sera plus possible d'avoir le plus petit doute sur la malignit et la dure constante du mal, depuis son origine jusqu' sa der nire priode commenant en juin 1815, et finissant en avril 1818. .10. Cetle dernire priode du mal ne manqua point d'tre accompagne do son cortge ordinaire des autres ma ladies. Bien plus, e t comme on devait s y attendre, dans ce corps dbile, tortur depuis tant d'annes, ces maladies accessoires furent plus aigus et plus dangereuses. Peu de temps aprs son entre au monastre de Macerata, on vint
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annoncer la patiente que l'un de ses frres venait d'tre frapp d'apoplexie, et restait sans mouvement. A ce rcit, elle tombe vanouie, et on est oblig de la mettre au lit. Une maladie inflammatoire se dclare; on appelle Je mde cin, celui-ci s'exprime ainsi dans sa dposition: Quelques jours aprs l'arrive de la religieuse, je (us appel pour la soigner d'une pleursie et d'une pripneumonie dont elle venait d'tre atteinte. Ce n'est qu'un c o m m e n c e m e n t . Josphine Marini, dit-il encore, a eu souvent des convulsions et autres accidents hystriques, jusqu' tre frappe d'une hmiplgie dans tout le ct droit, et spcialement dans le bras qui perdit, pour quelque temps, tout mouvement et tout sentiment.... Les pleursies et les pripneumonies auxquelles elle tait sujette, lui occasionnaient des crachats sanguinolents et purulenls Toutes ces maladies ont du tre, en partie, l'effet de la maladie principale, c'est--dire, de l'obstruction de la rate. 1 1 . Le chirurgien Jean Castellani partage et confirme ce jugement et ces apprciations du mdecin. Les attaques nerveuses, dit-il, devinrent si frquentes, qu' la fia, elles causrent u n e hmiplgie au bras droit, prcde de dmangeaisons et de fourmillements, et suivie de la privation de mouvement et de sensation. ... Les pleursies frquentes, les pripneumonies, les crachements de sang devenaient plus graves mesure que la maladie principale augmentait... Les inilamma tions aux viscres de la poitrine, etc., reparurent, p r cdes d'agitations pnibles, de soif ardente, de r e s p i r a it tion difficile, de la toux et de l'impossibilit de se coucher sur l'un ou l'autre des deux cts, preuve non-seulement de l'affection de la rate, mais aussi des maladies des p o u m o n s . . . Les maladies accessoires dont je trouvai la patiente atteinte, ds mes premires visites, persistaient . ou cessaient alternativement, tantt l'une aprs l'autre, et tantt simultanment... Les menstrues taient s u p it primes depuis plusieurs mois, quand je commenai traiter la malade, et cette suppression dura jusqu' la gurison. 12. La malade, aprs sa gurison, s'exprima en ces ter mes : Dans les derniers mois de ma maladie, j ' e u s s o u -
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vent des vomissements de sang accompagns d'une toux trs-forte. Les convulsions m'ont toujours tourmente plus ou moins, mais surtout vers la fin de ma maladie, o elles ne me quittaient presque pas, quoiqu'elles fussent moins violentes, raison de la diminution de mes forces. Je me souviens aussi d'avoir perdu tout mouvement dans mon bras droit... A celte dernire priode du mal, les i n flammations de poitrine, avec complication d'asthme, devin rent si graves que je faillis en mourir et qu'on appela une fois, le prtre pour m'assister. J'chappai, il est vrai, la mort, grce aux remdes qui me furent administrs ; mais je ne ressentis aucun soulagement de mes douleurs de rate, ni de celles de l'utrus ; au contraire, elles ne firent qu'aug menter. 13. Gela concerne les maladies accessoires, lesquelles, considres en elles-mmes et sparment, offrent un tel degr cle gravit, qu'on demeure tonn de voir la malade rsister si longtemps leurs attaques multiplies. Si tous ces maux accessoires si nombreux nous ajoutons le mal principal, celui-ci en acquerra un caractre de gravit et de danger, d'une vidence qui saule aux yeux. Mais ce rapprochement est inutile. A quoi bon se retrancher derrire les maladies accessoires, lorsque le mal principal se prsente sous un aspect aussi terrible. Exami nons cet tal pathologique dans la dernire priode de sa dure. Notre religieuse miraculeusement gurie s'exprime ainsi : Tous les mdecins se sont accords dclarer ma maladie un squirrho ou une obstruction squirrheuse Les docteurs Battelli et Zabarella affirmaient que le mal s'tait mme tendu la rgion de l'utrus... Et, de fait, je sais que l'utrus prsentait une enflure trs-forte et t r s dure... Quant aux principaux effets produits par cette ma ladie, ils consistaient en une douleur continuelle au ct gauche, sous les ctes, douleur qui m'empchait de me coucher sur ce ct, d'y appuyer le bras, ou d'y supporter le poids des draps, du corset, pas mme celui de mon cha pelet, sans me sentir prs de m'vanouir. De plus j'prouvais un dgot extrme de la nourriture, au point que je me mettais pleurer lorsqu'on m'en prsentait, el une telle privation totale de sommeil, que je ne pus fermer l'il pendant les-six mois qui prcdrent ma gurison. Enfin-
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je rendais des flueurs blanchtres, jauntres et p u r u lentes... On m'administra des mdicaments trs nombreux et trs varis, mais cela ne russit me procurer autre chose qu'un soulagemeut passager, qui n'empchait pas le mal de persister et mme d'augmenter. Je ne puis dire quelle tait la vritable opinion des mdecins sur mon tat, mais d'aprs leur altitude, leurs gestes, leurs regards, et le conseil qu'ils me donnrent de recevoir le saint viatique et Pextrme-onction, je conjecturais avec raison qu'ils m'avaient condamne. 14. La malade, en effet, apprciait bien l'opinion des mdecins qui considraient sa position comme absolument dsespre, et sa gurison tout fait comme impossible. Par suite d'observations attentives et conformes l'art mdical, je jugeai, dit le docteur Ciccolini, que la maladie d'Angle Marini tait une obstruction de la rate, trs-forte et invtre, d'une duret irrsoluble et comme pierreuse, laquelle s'ajoutait un notable engor<c gement de l'utrus. Ceci m'tait dmontr par Pauscul tation de la partie affecte, par l'agitation fbrile du pouls, par des crises convulsives, et d'autres s y m p tomes caractristiques de cette maladie ; mais Pindi cation la plus sre tait la duret extraordinaire de la rate, duret qui se manifestait non seulement au loucher, mais l'il, tant elle tait tendue et saillante... Quant l'affection de l'utrus, on n'en pouvait douter la vue des matires mauvaises et purulentes qui en sortaient frquemment... Les consquences de ce double mal taient, pour la patiente, des coliques, des douleurs fr quentes, des nauses, le dgot de la nourriture, la pri vation de sommeil, l'impossibilit de rester couche sur la partie malade, etc. Les remdes les plus actifs furent employs pour s'opposer au mal et le gurir : dsobs truants, apritifs, clystres, boissons diurtiques, em pltres, fomentations, en un mot tout ce que Part prescrit en pareil cas ; rien ne fut omis. Or, sauf quelque soula ge gement produit de temps en temps, tous ces remdes n'empchrent pas la maladie de conserver sa gravite aussi bien dans les effets que dans les symptmes. Le calme et les soulagements produits par les remdes taient de courte dure, une heure, une demi-journe
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au plus, et ils consistaient en une diminution de la fivre, quelquefois des douleurs. Vers l'poque de la gurison le squirre tait si dur, que sile mal se fut prolong il aurait dgnr en sphacle et en gangrne, maux qui, tant mortels de leur nature, auraient certainement conduit la patiente au tombeau. Pour moi, je dsesprais de la malade, surtout cause du squirre et de l'engorgement de l'utrus contre lesquels il n'y a, mon jugement, aucun moyen humain de gurison; aussi je lui conseillai de recevoir le Saint-Viatique. 15. Le chirurgien Gastcllani parle dans le mme sens dans sa dposition. Lorsque je commenai, dit-il, con jointement avec le docteur Ciccolini, traiter la sur Marini, voici les symptmes que prsentait l'obstruction de la rate: Des douleurs accompagnes de piqres au viscre, du genre de celles que l'on appelle lancinantes... a Elles devinrent de plus en plus insupportables el fr quentes... La malade souffrait beaucoup lorsqu'on pal pat avec les doigts, et mme au seul contact des habits ou des draps du lit. Il en rsultait des accs de fivre sans cesse rpts, el la recrudescence des maladies diverses qui drivaient de la principale... De plus, l'utrus, raison du voisinage du viscre malade, des fivres con tinuelles et des douleurs violentes de la rate, s'tait engorg, et il s'y engendrait des humeurs irritantes qui le rendaient trs douloureux el dur au toucher. Ces humeurs sortaient acres et blanchtres, et quel quefois sanguinolentes ; d'abord inodores, elles de vinrent ftides et infectes. il numre ensuite les remdes employs, et termine ainsi : Ni les m d i te caments externes que je prescrivis, ni les rerfides internes ordonns par le mdecin, ne produisirent de rsultats favorables pour la gurison, tant la violence du mal et ses progrs rapides se montrrent rebelles aux ressources de l'art... L'aggravation continuelle du principe morbide dpos l'intrieur ne p e r ce mettait plus les esprances mme les plus loignes... et si la gurison instantane et miraculeuse ne fut sur venue, la maladie aurait progress, pour ainsi dire, au galop, dgnrant en sphacle, et en une complte d sorganisaton du viscre.
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16. Que la maladie ft absolument incurable et mor telle, malade et mdecins le pensaient. C'tait aussi l'opi nion du quatorzime tmoin qui s'exprime ainsi : Le sentiment des savants docteurs appels lui donner leurs soins tait trs-affirmatif sur le caractre incurable de la maladie de Josphine Marini. Ils me le manifestaient ou vertement, en insistant particulirement sur ce point, que la maladie principale lait un squirrhe, cl, je crois, une obstruction de la rate. Et le prtre Torsani dit, de son cot, qu'il jugea plusieurs fois la malade en danger de mort, et lui administra les sacrements. 17. II no suffirait pas d'avoir montr la gravit et le danger de la maladie, si Ton ne prouvait encore que le tnal ne perdit rien de sa malignit jusqu' l'poque de la g u rison. Nous ferons celle preuve en trs-peu de mots. Le chirurgien, aprsavoirexprimson opinion, rapporte plus haut, sur l'imminence du sphacle du viscre attaqu, ajoute : Cette opinion, je me la format lors de mes d e r nires visites la malade, c'est--dire, un jour ou deux tout au plus avant sa gurison, car j'avais l'habitude de la voir presque tous les jours, surtout vers la fin, le mal s'aggravant beaucoup. Or de celle invariabilit et de l'aggra vation des symptmes du mal, jusqu'au moment mme de la gurison, il faut conclure que la maladie tait suprieure la vertu et l'efficacit du systme thrapeutique employ pour la combattre. 18. Ainsi donc, le chirurgien qui visita la malade, un ou deux jours avant sa gurison, dclara son tat dsespr ; le mdecin fut du mme avis, lors de sa visite, la veille mme de la gurison : Je trouvai, dit-il, la malade dans un tal trs-grave, non-seulement la veille de la gurison, maisaussi les jours prcdents. Et si, dans les dpositions, j'ai dil que le mal avait sa gravit habituelle, cela signifiait, dans mon esprit, qu'elle tait dans un tat dsespr, trsprs d'un terme fatal, l'obstruction de la rate persistant avec la mme intensit. 19. Le langage de la religieuse miraculeusement gurie ne diffrait pas de celui des mdecins : Je voyais la mort s'approcher, dit-elle, et je m'y prparais, car la douleur de la rate et de l'utrus ne cessait pas; loin de l, elle d e venait de plus ou plus forte. El rillrnrs : Jamais mon
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.tat De fut plus douloureux qu'au moment ou j'allais tre gurie ; je n e pouvais plus me remuer dans le lit ; j'tais absolument sans force, et, l'exception de quelques g o r ges de bouillon, je ne prenais aucune nourriture. Une heure avant sa gurison, elle se sentait, dit-elle, encore plus accable qu'elle ne l'avait jamais t. 20.Ainsi donc, non-seulement la maladie persista dans sa malignit jusqu' la gurison miraculeuse, mais encore elle alla de mal en pis; ce point tabli, et la gravit du mal cons tate, pourra-t-on hsiter prononcer qu'il y ait ou matire miracle dans cette gurison ? Douter de la gravit du mal n'est plus possible aprs ce que nous avons dit. Il s'agiten effet d'une maladie commence en 1 7 9 2 , et qui persiste jus qu'en 1 8 1 8 , c'est--dire, durant un espace de vingt-six an nes. Pour en obtenir la gurison, en vain s'appliqurent tour tour les mdecins Ballelli, Mei, Scaramucci, Donali, Forani, amanli, Neri, Ciccolini, Biolti, Castell;mi, Zabarella. La maladie se montra rebelle tous les efforts, tous les mdicaments. Bien plus, elle ne fit que s'aggraver, malgr les soins des mdecins, malgr l'emploi des r e mdes. Dans les derniers temps, une fivre continue s'em para cle la malade ; elle ne pouvait plus supporter l'ins pection faite avec les doigts, tant cela lui occasionnait des' douleurs aigus ; Je contact du linge lui tait impossible ; elle ne pouvait pas se coucher sur le ct gauche ; toute espce de nourriture tait rejete; privalioti de sommeil pendant plusieurs mois ; la callosit pierreuse de la rate devint si grosse qu'il n'tait plus besoin du doigt pour la sentir, elle apparaissait l'il n u ; l'utrus, cause de son voisinage avec le viscre attaqu, tut atteint d'inflam mation ; il se tumfia et laissait chapper du p u s ; finale ment, les mdecins dsespraient tellement de gurir la malade, qu'ils annoncrent, comme solution prochaine et fatale, le sphacle du viscre et la mort de la patiente. 2 1 . Ajoutons encore que, pendant ces vingt-six annes, la religieuse splnlique fut tourmente par d'autres ma ladies, les unes provenant du mal principal, les autres aggraves par son action. Nombreuses pleursies et p ripneumonies, vomissements de sang aprs toux et a c compagns de crachats purulents, convulsions et affections hystriques, migraines, violentes coliques, etc. apparurent
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au commencement, pendant l'volution, et jusqu' la fin de l'obstruction de la rate. Dans la dernire priode il y eut cette diffrence, savoir, que ces maladies accessoires d e vinrent plus frquentes, plus intenses, et ne disparurent qu'avec la maladie principale. Ainsi Ta dclar le c h i r u r gien : Je me souviens que l'irritation de l'utrus p e r sista avec toute ses apparences mauvaises jusqu' la g u rison ; et je puis assurer que les autres maladies durrent autant, sauf l'hmiplgie. 22. Tout le monde connat la violence de quelques-unes de ces maladies lorsqu'elles attaquent un homme mme robuste; eh bien, runissez-les toutes, affligez-en un corps dbile, infirme, peine convalescent d'une autre maladie; recommencez, continuez, tendez cette srie de maux sur la mme personne pendant vingt-six annes conscutives ; ajoutez le tout une maladie constante, incurable, qui porte en elle-mme le terrible arrt de mort de la malade, je vous le demande, n'aurez-vous pas, dans ce cortge de maladies entasses les unes sur les autres, et qui gurissent subitement, la magnifique preuve d'un miracle d'autant plus clatant, qu'on a bien de la peine croire que cet tat ait pu tre support par u n corps humain pendant vingtsix ans ?
ARTICLE DEUXIME
DU MEDIUM DU MIRACLE OU DE i/iNVOGTION.
23.Ces prliminaires du sujet une fois bien tablis, il est temps de parler de l'invocation. Dire que c'est d'elle que date le commencement du miracle, n'est pas une assertion tmraire, si l'on considre que la malade fut incite demander le secours du bienheureux Benot-Joseph par une religieuse qu'elle ne connaissait pas, el qui n'habitait pas ce mme monastre, puisqu'il est constant qu'aucune religieuse du couvent ne vint voir la malade ce moment. En outre, on ne put retrouver dans le monas tre l'image que cette religieuse inconnue fit voir la pa tiente, et qu'elle emporta, aprs l'avoir applique sur le sige du mal. Laissons la parole Josphine Marini; aprs sa gurison, elle s'exprime ainsi: En l'anne 1818, vers la mi-avril, le lundi ou le mardi de la semaine sainte, me trouvant beaucoup plus malade que d'habitude, je vis
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s'ouvrir la porte de ma chambre, et une sur converse in connue s'approcher de mon lil. Il tait environ dix heures du soir. Gomment allez-vous, me clemanda-t-elle ? Trs-mal, lui rpondis-je. Puis elle ajouta: Ayez c o n fiance... Alors elle me prsenta une image que je recon nus tre celle du vnrable serviteur de Dieu, Benot Jo seph Labre, tel que je l'avais vu pendant sa vie, quand il vint San Leo et que je lui fis l'aumne d'un pain. Ayant pris l'image, je fis cette prire : O vnrable serviteur de Dieu, pour ce pain que je vous ai donn, ob tenez-moi l'une de ces trois grces, ou la sant, ou la mort, ou la patience; puis, toujours tenant l'image, je me signai au front, ainsi que sur les parties douloureuses, baisant et rebaisant l'image, rptant souvent ma prire et des lvres et du cur, avec une motion intrieure dont je ne pourrais exprimer la vivacil. Je voulais garder l'i mage, mais je dus, mon grand chagrin, la rendre .la religieuse qui me quitta en refermant la porte. 24. Josphine Marini confirme ensuite le caractre vrai ment merveilleux de celte visite d'une religieuse inconnue : La sur converse n'tait certninemenl pas une des religieuses du monastre, car, ne l'ayant pas reconnue, je priai la mre Abbesse de s'informer si quelqu'une d e nos converses n'tait pas entre dans ma chambre l'heure que j'indiquai. Aprs enqute, P Abbesse rn'as sura qu'aucune d'entre elles n'tait venue auprs de moi, celte heure. Je fis encore demander si une r e l i gieuse possdait quelque image du vnrable Joseph Labre, et ayant appris que la sur Bibiane Angelini <c seule en avait une entre les mains, je me fis apporter cette image, mais je vis de suite que ce n'tait pas celle qui m'avait t montre par l'inconnue; celle-ci repr sentait le serviteur de Dieu en pied, tandis qu'il n'tait qu'en buste sur l'image cle la sur de Bibiane. Bien sur je ne dormais pas, quand la converse entra dans ma chambre, car j'entendis trs distinctement le bruit de la porte qui s'ouvrait, et je me rappelle la contrarit que j'prouvais de voir quelqu'un venir me fatiguer de ses questions' dans l'tat si pnible o je me trouvais; je me souviens bien aussi d'avoir tourn un peu la tte pour voir qui entrait.
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2 5 . Les dpositions de PAbbesse et rie la sur Angelini s'accordent parfaitement avec celle de la miracule. La premire s'exprime ainsi: J'ignore quelle est la religieuse qu'a vue la sur Marini; mais ce ne fut certainement aucune de mes converses... J'ai su, il est vrai, qu'une des surs du monastre avait une image du vnrable; seulement, la sur Marini a toujours dit qu'elle ne r e s semblait pas celle que la converse lui avait remise. De son ct, la sur Bibiane Angelini dpose : Aucune de nos converses, autant que je le sache, ne s'est rendue auprs de le sur Marini, l'heure dont elle a parl... Je me rappelle trs-bien que, aprs sa gurison, je portai* la dite sur une image du vnrable Labre, le r e p r sentant en buste, mais elle n'tait pas du tout semblable celle que lui avait montre la converse. 2 6 . Que ces faits se soient passs en imagination ou. en ralit, il est indubitable qu'ils n'ont pas pu ire produits sans un miracle. L'invocation du vnrable Benoit Joseph est absolument certaine. Nous en avons la preuve dans la dposition de la religieuse gurie, dposition qui renferme les paroles employes dans sa prire ; et dans les re cherches faites sur le champ pour retrouver l'image du vnrable qui lui avait t prsente. De plus, tous ceux qui ont counu le fait de cette gurison miraculeuse, ont affirm que le secours du seul vnrable Benoit Joseph avait t invoqu. Avant que n'arrivt le temps de ma gurison, dit la sur, je n'avais eu recours aucun saint, parce que, convaincue que je ne gurirais pas, je m'tais prpare rendre mon me mon crateur, avec rsigna tion. Il n'y a donc pas lieu de mettre en doute qu'elle ait eu recours uniquement au patronage du vnrable Benot Joseph.
ARTICLE TROISIME
DU SECOND TERME DU MIRACLE.
principal
2 7 . Au simple contact de la sainte image, la religieuse se sentit dlivre du poids de tous ses maux; la nuit qui suivait,elle dormit d'unsommeiltrs-caIme,ce qu'elle n'avaitpu
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faire depuis six mois. A son rveil, elle se dclara compl tement gurie, mangea de la bouillie, et bien que ce jour l, pour obir au mdecin, elle demeura couche, le len demain elle se leva, descendit la cuisine, se rendit au r fectoire, mangea des lgumes; pendant les derniers jours de la semaine sainte, elle fit usage d'aliments maigres, la table commune, avec ses compagnes et s'acquitta de ses fonctions dans le monastre. Voici son propre rcit : Je me sentis tellement soulage, que, toute la nuit, je dormis tranquillement, chose surprenante pour moi qui n'avais pu fermer l'il depuis six mois. En m'veillant, le matin, je n'prouvais pins aucun mal, il ne me restait qu'un peu de fatigue et de faiblesse. L'infirmire, en en trant de bonne heure dans ma chambre, me demanda comment je me trouvais. Trs-bien, lui dis-je. Toute joyeuse, elle ajouta : Rendons en grces au Sei gneur. Puis elle m'apporta une soupe que je mangeai avec apptit. Peu aprs le mdecin arriva... Le jeudi saint (lendemain de la gurison), je me rendis la c u i sine, gurie et aussi leste qu'autrefois, et je mangeai des choux bouillis, assaissonns avec de l'huile et du poivre, sans en tre incommode, tandis qu'auparavant l'huile et les pices m'taient on ne peut plus contraires. Le ven dredi et le samedi, je mangeai avec les surs, au rfec toire, les mets prpars pour la communaut, toujours impunment. J'obtins aussi, sur la demande que j'en fis la mre suprieure, un emploi dont je me suis toujours acquitte depuis lors. A partir de ma gurison, mes rgies reparurent trs-exactement, jusqu' l'ge de cinquantedeux ans environ. 28. Je puis certifier, dit le mdecin, son tour, qu' tant venu visiter la malade vers neuf heures du soir, je la trouvai aussi mal que d'habitude. En revenant le lende main matin, je dus constater la parfaite gurison et de sa maladie principale et de toutes les autres... J'tais extraordinairement surpris. Je lui ttui le pouls; la fivre avait disparu. En palpant le squirrhe de la rate, je sentis que la duret n'existait plus; la rate tait molle et flexible. Aucune tumeur, aucune inflammation n'existaient dsor mais dans la rgion de l'utrus. Enfin je fus convaincu que la gurison tait parfaite, et qu'elle ne pouvait l'tre.
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que par le secours cleste, soit de Dieu lui-mme, soit de ses saints... 29. Le tmoignage du chirurgien n'est pas moins prcis, Il visita la malade vingt-quatre heures environ aprs la gurison : Je vis, dit-il, chose tout--fail insolite, la fentre ouverte, el la malade me dit, toute joyeuse et <c souriante: Je suis gurie et dlivre de tout mal. Le mdecin qui est venu me visiter tout Vheure assure qu'il m'a trouve sans fivre... J e n e laissai pas cepen* dant de consulter le pouls, et je constatai l'exactitude de l'assertion du mdecin. Je palpai l'hypocondre gauche, et la rgion droite de l'pigastrc, et cela avec le plus grand soin, allant mme jusqu' abuser, en quelque sorte, en appuyant avec une force plus qu'ordinaire, pour m'assurer que la sensation douloureuse, si sensible auparavant, avait entirement disparu. Non-seulement la malade ne se plaignit pas, mais elle rptait: Appuyez, pressez tant que vous pourrez je ne sens ni ne ressens aucune douleur. Pour moi, je ne retrouvai pas trace de la duret et de l'incurvation de l ' u t r u s ; l'enflure mme de l'abdomen qui s'tait manifeste dans les d e r niers temps de la maladie, n'existait plus Les rgles reparurent, aussitt la gurison produite, et elles ont continu rgulirement jusqu' un ge avanc ; or cette reproduction rgulire dnote suffisamment Je r e l o u r d e la force et de l'nergie corporelles chez la malade gurie La sur Marini ne recouvra pas la sant par degrs, mais, en considrant l'intervalle si court qui spara la gurison de ma visite, on ne peut douter de l'instantanit de cette gurison, aussi bien pour la principale maladie, l'obstruction de la rate, que pour toutes les autres maladies accessoires prcdemment <f dcrites. Je suis donc oblig, conclut Caslellani, cle r e connatre hautement et avec certitude qu'une telle g u rison instantane, laquelle, depuis, n'a laiss aucun motif de faire supposer une rechute possible, a t Peflet d'une puissance surhumaine. 30. Aprs des paroles si concluantes, nous croyons tout . fait superflu de rapporter ici les dpositions des autres tmoins sur cette gurison miraculeuse. La gurison de la maladie principale et des autres maux concomitants
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ne fut donc pas seulement instantane el parfaite; mais, de plus, elle fut constante, et la religieuse qui, pendant vingtsix annes,avait t torture par une obstruction do la rate accompagne de nombreuses el trs-graves maladies, jouit constamment, dater de sa gurison, d'une excellente sant. J'assure, dit la sur, que depuis ce moment, c'est--dire depuis 1818 jusqu'en 1847, poque o nous sommes, j'ai toujours t en bonne sant, et qu'il ne m'est rest aucun vestige de la terrible maladie qui devait, comme je le croyais, me conduire au tombeau. Je puis assurer, dit le mdecin, qu'il n'est rien rest, chez la sur Marini, de sa maladie d'obstruction de la rate, de son engorgementde]'iilrus,ou de ses autres affections accessoires, et qu'elle a continu jusqu' ce jour jouir de la plus parfaite sant. j'afiirme, dit sou tour le chirurgien, qu'elle n'a plus jamais t afflige do cette maladie, et que ni la maladie principale, ni les maladies accessoires ne reparurent en elle. Les mdecins experts chargs par les juges apostoliques d'examiner l'tal de la religieuse, ont certifi qu'ils n'avaient pu trouver en elle aucune trace do sa maladie. L'un, le docteur Marc Gardini, a dit dans son rapport: La religieuse continue a jouir d'une bonne sant, et elle a, malgr ses soixante seize ans, toute la force que comporte cet ge, pour accomplir parfaitement ses fonctions naturelles el humaines. L'autre, le docteur Ferdinand Greco, a crit dans le mme s e n s : ' Prsentement elle jouit de la plus parfaite sant ; toute sa personne prsente une telle force, et l'accomplissement de ses fonctions naturelles <f et humaines se fait d'une faon si normale, qu'on croirait qu'elle n'a que cinquante ans. 31. Or, si la vieillesse est dj par. elle-mme une ma ladie, que doit-on penser, Faction miraculeuse mise de cl d'une femme presque octognaire, dont le t e m p rament tait dlicat, qui avail.L affecte pendant toute sa jeunesse et son ge mr de maladies de la raie, de l'ut rus, des poumons, de la tte, du ventre, de tout le systme nerveux, el tout cela un degr tel de gravit, que la ma lade fut souvent en danger de mort? Assurment, un corps ainsi tortur, tellement dbilit: par la force du mai, telle ment troubl dans l'exercice de presque toutes ses fonc3
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lions naturelles, n'aurait pas pu facilement, par les seules ressources de la nature,(surtout cinquante ans, poque laquelle les forces humaines ont pour habitude de dcli ner), recouvrer celle vigueur qui la fit jouir d'une sant juvnile dans un Age aussi avanc. Donc cette gurison instantane, parfaite, puisqu'elle a fait disparatre la fois et d'un seul coup les maladies et leurs consquences, con stante aussi dans ses effets, cette vigoureuse sanl, t r s rare dans une vieillesse extrme, ne peuvent pas avoir t ralises par les seules forces de la nature, dans un corps dlicat, tourment par des maladies continuelles et graves pendant vingt-six ans ; donc il y a l une vritable action miraculeuse. 32. Pour mieux faire apparatre le miracle dans toute, sa splendeur, il nous faut encore discuter Phypothse de l'action d'une crise salutaire, d'autant plus que notre reli gieuse fut sujette de temps autre aux missions san guines et au flux hmorrhodal. Quant ce dernier, il ne fut jamais abondant, d'aprs le tmoignage mme du m decin, a La Marini, dit le docteur eccolini, n'a jamais prouv, pendant tout le temps que- je l'ai soigne, de flux sanguins abondants, venant des intestins. Or on sait : 1 Que pour dissoudre une obstruction quel conque, il faut une abondante vacuation ; 2 que celte dis solution naturelle a coutume d'tre prcde d'un flux de ventre ou d'une abondante excrtion de matires, ce qui n'est arriv notre religieuse aucune poque de sa m a ladie; 3 que cette dissolution opre quelquefois par les seules forces de la nature, diffre essentiellement du cas de gurison que nous avons sous les yeux; qu'en outre, une vacuation naturelle ne peut pas donner une sant subito et parfaite; que son action salutaire se borne l i miner la duret, diminuer le volume; mais qu'elle ne parvient pas dtruire le noyau de Pobstruclion qui s u b siste quand mme, de telle sorte que ceux qui sont atteints de cette maladie retombent, la plus lgre occasion, dans leur tat pathologique; 4 que notre religieuse, p e n dant le cours de sa maladie, fut atteinte d'irrgularits dans ses rgles; que leur suppression complte survint dans les derniers temps de la maladie; que comme la na ture a coutume de suppler Pabsence du flux calamnial
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par une autre vacuation, il en rsulte que le flux hmorrhodal, dans le cas prsent, doit tre attribu toute autre cause qu' celle d'une crise salutaire; 5 que, quant aux missions sanguines rendues par la bouche, iJ Faut noter qu'elles arrivaient pendant les pleursies el. les pri pneu monies; que ces vomissements de sang taient prcds d'une forte toux; qu'ils taient suivis d'une expectoration purulente, ce qui prouve clairement que ce sang venait des poumons; il faut donc encore ici rejeter l'hypothse d'une crise salutaire comme cause de la gurison. C'est l'opinion formelle du mdecin : Los vomissements de sang el les crachats' purulents venaient du poumon, raison des maladies de la poitrine, el ne pouvaient en aucune faon rsoudre la maladie principale. 33. G Considrons, en outre, que, soit aprs ces vomis sements, soit aprs ces vacuations, Ja malade n'prouvait qu'un soulagement passager de quelques heures, suivi d'une recrudescence dans le mal, ce qui loigne complte ment l'hypothse d'une crise bienfaisante, ainsi que le chirurgien le constate: Je ne puis, dit-il, ni ne dois regarder toutes ces pertes comme critiques, et comme ayant en aucune faon con tribu l'amlioration lente ou la diminution de la maladie principale; car le volume extraordinaire du viscre atteint, c'est--dire de la rate, elles autres symp tomes douloureux n'ont jamais cess de se manifester; tous, au contraire, devenaient plus graves, soit aprs chaque perte, soit chaque rcidive des maladies addi tionnelles. C'est pourquoi, je le rpte, on ne pourra jamais appeler ces pertes des crises bienfaisantes. Ces observations du chirurgien s'appliquent avec plus de raison encore aux flueurs blanches dont la malade soutirait de temps en temps, ainsi qu'aux matires de mauvaise nature qui sortaient de l'utrus, attendu que, non seulement, la malade n'en ressentait aucune modification heureuse dans son tat, mais que ces matires, prenant chaque jour un caractre plus mauvais, montraient manifestement l'ag gravation de la maladie. Enfin il ne faut pas oublier que ces vacuations ne se pro duisirent ni dans les jours qui prcdrent, ni dans ceux qui suivirent immdiatement la gurison; car, nous l ' a 0
vons vu, Ja maltffle tait, cello poque, plus mal que d'ha bitude. Elle a dit, en effet, dans sa dposition: Au sujet d'une crise, je dois dire qu'il ne s'en est produit aucune au temps de ma gurison, soit par vacuation 'de sang ou de toute autre matire par la bouche ou par ailleurs, soit des sueurs plus ou moins abondantes. Je n'ai pu trouver aucun indice de crise, dclare le mdecin : pas de sueurs abondantes, nulle vacuation de matires quelconques par la bouche, les excrments ou les urines.. E t le chirurgien : Aucun indice ne me permet de conclure l'existence d'une crise salutaire. Pas de crachements lymphatiques, sreux, sanguinolents, vraiment purulents; pas de vomissements de matires digres ou non, aucun coulement extraordinaire ou abondaut, pas mme de sueurs. Aucune crise ne s'est produite, affirme l'abbesse, ni avant, ni pendant la gurison, car je l'aurais su par les surs infirmires. 3 4 . Puisque la maladie dont il s'agit fut grave, accom pagne continuellement d'autres infirmits ; puisque le mal principal el les affections morbides concomitantes se sont vanouis l'invocation du vnrable Benot-Joseph, sans laisser aucune trace; puisque la gurison fut nonseuleineul parfaite et constante, mais qu'il s'en suivit, pour la religieuse gurie, une vigueur de sanl trs-rare clans un ge avanc; puisque l'hypothse d'une crise utile et salu taire doit tre rejete, nous sommes donc en prsence d'un fait revtant tous les caractres d'un miracle certain et in discutable. Et, pour q u ' i l n e il pas permis de nier ou de rvoquer en doute l'action miraculeuse, il a plu Dieu de montrer par un nouveau prodige que cette gurison devait. bien tre uniquement attribue une cause surnaturelle. Voici en quelle circonstance : Quelques annes aprs avoir , t rendue la sant, pendant l'instruction du procs, la religieuse tait fortement trouble par l'ide de d poser sous la foi du serment de tout ce qu'elle savait lui tre arriv. Elle tait anxieuse, hsitante ; or voici que ses anciennes douleurs reparaissent et la font souffrir avec plus, de violence qu'autrefois. Elle tombe genoux, demande pardon Dieu et son serviteur de son manque de foi; elle promet de raconter, sous le sceau du serment et sans
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hsitation aucune, ce qu'elle sait lui tre arriv certaine ment. l'instant mme, les douleurs s'vanouissent, son excellent tat de sant reparait, et, depuis, il s'est maintenu jusqu' ce jour. 35. Mieux vaut ici couter la religieuse elle-mme nous faire ce rcit : Quelques annes aprs ma miraculeuse gurison, ayant appris que j'allais tre oblige de dposer sous serment ce sujet, j'en fus toute consterne, craignant de ne pouvoir m'expiiquer avec toute la prcision dsira ble, et de mettre ainsi ma consciencedansrembarras.Danscette anxit de mon esprit, un jour que je rcitais l'office au chur, je ressentis la rate une douleur plus forte que je ne l'avais jamais ressentie dans le cours de ma maladie. Toute tremblante, je me rendis seule dans ma chambre o, me jetant genoux, je m'adressai avec une grande foi au vnrable serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre; je lui demandai, pardon de mon hsitation, lui promettant que je jurerais, non pas une fois, mais mille fois, pour attester tout ce que je savais du miracle qu'il avait opr en moi. Ma prire finie, toute douleur disparut immdiatement, en mme temps que tout doute el toute crainte ;el, grce Dieu el son serviteur, je n'ai plus jamais souffert depuis. 36. Qui donc, aprs ce nouveau tmoignage du ciel, pourrait encore douter de la vril du miracle? Jean ROSATINI. Franois MERCURELLI.
CHAPITRE II
Discussion du miracle.
1. Premires observations du Promoteur de la Foi.
4. Nous ferons remarquer tout d'abord que les maladies de nature si diverse et si anormales dont fut l o n g t e m p s afflige la sur Angle-Josphine Marini, dpendaient d'une obstruction de la rate, c o m m e on le verra bientt manifes tement. Cette religieuse, quoique petite et mince, abstrac tion faite d'une pleursie dont elle a t atteinte une certaine poque, et aussi des affections hystriques aux quelles toutes les femmes sont plus o u m o i n s assujetties, jouissait d'une bonne sant en Tanne 1792, dans le monas tre de Saint-Antoine Pennabilli. Avant cette p o q u e elle s'tait souvent livre des occupations fatigantes, et en cette m m e a n n e , elle dansa l o n g t e m p s avec d'autres religieuses, pour se rcrer, pendant le carnaval. Ce fut la principale cause de l'obstruction de la rate dont n o u s nous occupons e n ce moment. Mais laissons la parole la malade e l l e - m m e qui a ainsi dpos aprs sa gurison-: Jusqu', l'ge de vingt-deux . vingt-trois ans, j'ai toujours j o u i d'une bonne sant, car, malgr m o n apparence assez frle, j'avais un b o n temprament. A partir de cette p o q u e , j'ai c o m m e n c tre malade d'une douleur la rate, . douleur que j e jugeai produite par des chauifements r sultani de fatigues excessives, et particulirement d'une danse de trois heures au moins, h. laquelle j e m'tais livre avec quelques surs dans le monastre de Pennabilli, pendant le carnaval. Cette douleur m e faisait presque c o n s t a m m e n t souffrir plus ou m o i n s P e u peu e l l e augmenta au point que, pendant TA vent de la m m e anne, je fus oblige de cesser toute espce de travail , de prendre le lit, et d'accepter les soins du dfunt docteur Battelli Le s o u l a g e m e n t que j'prouvai fut de c o u r t e dure, et j e fus bientt assaillie par de grands s p a s m e s .
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2. Celle obstruction dura vingt-six ans : et, e n m m e temps que la rate endure tait malade, l'utrus qui en est fort prs souffrait galement. Aussi les rgles taient-elles ir rgulier es, et parfois supprimes pendant plusieurs mois,
tant au commencement
arrls o u les irrgularits des menstrues ainsi que la c o m pression de l'utrus donnaient lieu des pleursies, des pripneumonies, des h m o p l y s i c s , des scrtions puru lentes, des flueups blanches, des convulsions, dos affections hystriques, des migraines, des coliques. 3. Cependant tous ces maux cessaient quelquefois, et la malade qui avait paru tre la mort, semblait reprendre ses forces et recouvrer la sant. Elle resta dans cette situation Pcnuabilli jusqu'en 1810, quand le malheur des temps la jeta, ainsi que les antres religieuses, hors de son couvent. cet gard, je suis tout fait d'accord avec le d fenseur de la cause qui dit : D'un esprit naturellement vif, port la gaiet et aux ris (disposition qu'elle c o n serve encore aujourd'hui dans sa vieillesse), cette pauvre j e u n e fille tait abattue par la violence du mal ; mais celui-ci s'apaisait-il, encore que la principale maladie per? sistt, elle reparaissait aux y e u x des surs, forte et c o m m e gurie. C'est ce qui fait dire aux tmoins qu'elle tait tantt bien portante, et tantt malade; et ce qu'elle a e l l e - m m e explique plus clairement en ces termes : Tous ces m a u x m'assaillaient avec quelque rpit; mais celui de la rate ne me quitta jamais. Je uc passerai pourtant pas sous silence le soupon que le caractre do la .malade avait fait concevoir au c i n q u i m e tmoin, l'Abbesse d u m o nastre de Saint-Antoine de Pennabilli : Le caractre de la s u r Marini, dit-elle, a toujours t vif, gai, entre prenant. Je n'ai jamais cru que celte religieuse ait feint d'tre malade, mais j'ai dout quelquefois que son mal ft tel qu'elle le prtendait. 4. La s u r Angle-Josphine demeura dans sa famille jus qu' 1 anne 1815 ; et pendant c e temps, la duret de la rate ayant persist, elle souifrit peu prs les mmes maux que prcdemment. Cependant, selon son habitude, lorsqu'elle allait un peu mieux, elle se disait gurie. La paix ayant t rendue l'glise, la sur Angele, pour certaines raisons, ne rentra pas dans le couvent o elle avait prononc ses v u x , mais elle se retira au monastre de Sainte-Glaire de Macerata Feltria. L, peu de temps aprs, l'annonce d'une nouvellle fcheuse dont elle fut vivement frappe, elle tomba terre ; et, depuis ce m o m e n t , tous ses
LKS SPLENDEUiiS BK L FOI m a u x roparurenl; de chronique qu'elle tait auparavant, sa maladie devint aigu. Par suite d'un plus grand gon flement de la raie, l'utrus s'enflamma un point 'extrme, et donna lieu des coulements ; u n e fivre continue se d clara, et la douleur s'accrut jusqu' lui rendre insuppor table le seul attouchement des doigts, et m m e le contact des linges. Et Tobstruclion de la rate, n o u s l'avons fait remar quer tout d'abord, lait la seule cause, l'unique source de tous ces maux, ainsi qu'il rsulte du tmoignage du mdecin et du chirurgien. 5 . La question se rduit donc la maladie de la rate ; et n o u s allons voir ce qu'il i'aut penser de celte maladie. E c o u t o n s d'abord avec attention le onzime et le d o u z i m e t m o i n , c'est--dire, le mdecin et le chirurgien. Le premier, cette d e m a n d e oflicielle : Pensez-vous que la maladie de
la sur Angele Marini ait t prcisment un squirrhe la raie ou une autre maladie ? a rpondu : Je dois rpter
ce q u e j'ai dj dit plus haut, savoir, que la maladie d'Angle Marini tait une obstruction trs-forte et a n c i e n n e d e la rate, devenue d'une duret opinitre et c o m m e pierreuse,avec e n g o r g e m e n t de l'utrus: Car, au s e n t i m e n t . des auteurs les plus accrdits, principalement chez les m o d e r n e s , t o u t e congestion d'humeurs parvenue cet tat de duret ne peut s'appeler rellement, un squirrhe dans cette rgion des viscres du bas-ventre, mais bien du n o m de la maladie ci-dessus dcrite. Si, dans le cours de m e s observations, et en parlant de la maladie d'An gle Marini, je n'ai pas toujours e m p l o y des expressions appropries et prcises, j'ai cependant toujours e n t e n d u parler d e l maladie m i n u t i e u s e m e n t explique dans cette rponse. 6. Voici maintenant les paroles du d o u z i m e t m o i n , le chirurgien Gastellani : Je puis dire que, d'aprs l'opinion de la plus grande partie de ceux qui ont trait Angle Ma te rini, on pouvait donner aussi le n o m de duret squirrheuse T o b s t i u c t i o n trs-invtre, et par l m m e chronique, de la rate, obstruction j u s t e m e n t appele opinitre. Pour tant j e n e puis m'unir ce sentiment presque u n a n i m e , parce q u e les signes primitifs et distinctifs du squirrhe et du cancer ne permettent pas de confondre ces deux maladies avec la duret des autres viscres. En effet, si j ' e x a m i n e les crits des divers auteurs sur le squirrhe, et, dans l'espce, s i j e lis avec attention les dissertations, sur ce sujet, du trs savant professeur, le chirurgien A n et l o i n e S c a r p a , j e conclurai aveclui, d'abord, que le squirrhe
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et le cancer n'occupent jamais primitivement le systme lymphatique et les glandes; en second lien, que le squirrhe et le cancer n'envahissent jamais non plus primitivement les viscres proprement dits, l'exception de ces organes internes qui sont pourvus d'une enveloppe intrieure de peau replie sur e l l e - m m e , tels que l'sophage, le la ce rynx, l'estomac, etc. L'endurcissement des autres viscres, ainsi que les tuhercules invtrs rie la rate, du foie, du a poumon, du pancras, d e s reins, de l'ovaire, de la prostate, de la vessie, ne s o n t p a s d e s cancers o u d e s s q u i r r h e s ; ils
<t n e p e u v e n t ni n e d o i v e n t se n o m m e r a i n s i ; ils n e s o n t
pas non plus des f u n g u s mdullaires. Apres avoir ainsi parl, cette illustre professeur devenu classique, ajoute : Il n'y a que deux tissus organiques qui peuvent tre le sige <t de la formation et de l'volution clu squirrhe et du cancer, - ce sont les glandes conglomres et la peau . Son inter rogatoire achev, Castellani a dit encore : Je me* s o u viens d'avoir dlivr une ou plusieurs attestations au sujet de la maladie et d e la gurison de la sur M a r i n i , quoique j'ignore maintenant par qui elles m'avaient t demandes et qui je l e s ai adresses; si, dans ces p i c e s , j'ai dclar que l'affection h la rate pouvait s'appeler, si mme'jc l'ai appele positivement, ou une tumeur squir rheuse, ou une duret squirrheuse, ou simplement un
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squirrhe, j e vois maintenant qu'il y a e u de ma part quivoque sur la dnomination de la maladie, quivoque pa tage par m o n collgue le docteur Ceccolini ; car tous deux n o u s avons t tromps par les effets de Tobstruction tant de fois dcrite, et qui sont presque semblables ceux des durets squirrheuses. Je sais que le dit docteur Ceccolini est absolument de m o n avis sur la maladie principale, et qu'il est persuad d'avoir fait quivoque sur le nom que nous lui avons peut-tre donn u n e autre poque, car tous deux n o u s savons que les viscres du bas-ventre ne sont pas le sige d'un squirrhe ou d'un cancer, ainsi que je l'ai expliqu en son lieu.
7. Il faut d o n c dj, r a y e r le m o t squirrhe de la spcifi cation de la maladie, et n e parler que d'une obstruction de la rate. O r ds le dbut de cette discussion, j'hsite et j e suis dans l'incertitude, car on ne peut avoir une notion parfaite des maladies qu'autant que leur sige est clairement c o n n u . Haller enseigne, en effet, dans ses remarques sur les leons acadmiques de Brhaave, 98, que le mme mal produit des maladies diffrentes,selo a la partie qu'il affecle.'De plus, pour que le diagnostic d'une maladie soit certain, il faut
connatre parfaitement l'organe attaqu. Haller, si habile mdecin, disait (1. c. 168) : Souvent j'ai eu traiter des maladies sur lesquelles il m'tait trs difficile de porter un j u g e m e n t , attendu que je ne connaissais pas encore la nature des organes. De l cet autre aveu du mme <t s a v a n t : La c o n n a i s s a n c e d'une m a l a d i e dpend de la (f connaissance parfaite de ses effets(ibid. * f>98) ; on ne peut $ connatre une maladie, que si l'on connat entirement la constitution des parties atteintes ( (>58). En un mot, pour juger des maladies, la connaissance anatomique et physiologique du viscre malade est ncessaire. C'est sous ce double point de vue que nous examinerons le viscre malade dont n o u s n o u s o c c u p o n s , c'est--dire, la rate, afin que l'on sache bien ce qu il faut penser de la maladie de la sur Angle. 8. Les anciens anatomisles n'"onl trouv, dans la rate, rien autre chose qu'une runion de glandes dpourvues de conduits scrteurs. Les modernes n'y voient que des plis et replis de Tarire et de la veine s p l n i q u e ; mais tous s'ac cordent signaler le p e u d'importance do ce viscre. Quel est son rle au point de vue physiologique? La rate ne parattre qu'une dpendance du f o i e , c o m m e le dit Brhaave.Et les anatomistes, d'accord avec les physiologistes, affirment qu'un h o m m e pout vivre sans rate. Des expriences faites sur des animaux, n o t a m m e n t sur des chiens, ont d m o n t r l'exacti t u d e de ces paroles de Haller : Des a n i m a u x auxquels on a enlev la rate, survivent sans trop d i n c o m m o d i t s , cette opration. 11 serait trop long de n o m m e r les auteurs qui ont reconnu ce fait- qu'il suffise de citer, parmi les plus Glbres, Malpighi et Bohnius, lesquels, aprs avoir, avec une trs grande habilet, extrait la rate de plusieurs chiens, e n prvenant en m m e temps 1'h.morrhagie par la ligature des vaisseaux sanguins, leur ont recousu l'abdomen. 9. E n consquence de ces faits, p u i s q u e le degr d'une maladie dpend du viscre attaqu, p u i s q u e la rate est un viscre de trs m i n i m e importance, et qu'il n'est pas absolu m e n t ncessaire la vie ; puisque enfin le sige de la ma ladie d e l s u r Angle tait la rate, on n e doit pas regarder cette maladie c o m m e tellement grave, qu'elle n'ait pu tre gurie par les seules ressources de la nature. Je demanderai donc si l'obstruction de la rate est, oui o u n o n , tellement grave que ni l'art ni la nature ne puissent la dissoudre ? T o u t le monde lui refusera cette gravit, car on peut citer des exemples innombrables d'obstructions aussi invtres que possible, que l'art d'Hippocrate, o u la seule nature, ont
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fait cder, qu'ils ont dissoutes et entirement dtruites. Vous direz que, dans notre cas, la maladie tait arrive ce point que la mort tait imminente, sans que la nature ou l'art y pussent q u e l q u e chose. Je ne dirai rien de l'art m dical, mais je citerai encore l'aphorisme si connu de Baglivi : Souvent la nature c o m m e n c e un nouveau travail au m o m e n t o cessent nos efforts impuissants . N'en a-t-il pas t ainsi pour noire malade ? Voyons-le. 10. Nous voici parvenus au m o m e n t de rechercher la cause de la gurison. Assurment l'obstruction invtre d'un viscre quelconque ne peut tre rsolue, sans qu'il se p r o duise dans tout le corps des perturbations graves et de longuedure. P o u r que l'obstruction soit dissoute, et q u e l e s matires qui rendaient le viscre malade, soient peu peu expulses, il doit se produire dans les autres viscres les plus rapprochs, un autre tat maladif. C'est ainsi que souvent la grande bronchocle, (la hernie de la gorge, le goitre) est gurie la suite d'uneblennorrhe s p o n t a n e : rcemment, Rome, une femme qui souffrait d'une obstruction n o r m e et ancienne de la rate, avec affaiblissement gnral, a t parfaitement gurie aprs une fivre aigu, des vacuations mensuelles trs abondantes, des vomissements et de la diar rhe. Ceux qui, ignorant la puissance curative de la nature, ne distinguent, dans les maladies, que les effets du mal, qui les confondent avec les m o u v e m e n t s salutaires de la nature, se trompent b e a u c o u p , et sont exposs de grossires bvues dans leurs j u g e m e n t s sur les phases de la maladie. Et rellement, quiconque s'approche des malades, avec ces prjugs, considre ncessairement toute aggravation de symptmes c o m m e une aggravation de la maladie e l l e - m m e , et tout nouveau s y m p t m e c o m m e u n e nouvelle maladie. Tels furent le mdecin et le chirurgien qui soignrent notre religieuse clans les derniers temps, car ils ne songrent pas le moins du m o n d e une solution spontane du mal. Il n'est donc pas tonnant qu'ils aient regard la fivre continuelle, la douleur toujours croissante de la rate, le gonflement de l'utrus, avec ses vacuations de matires corrompues; p u rulentes et ftides, c o m m e le progrs et l'extension d'une maladie rpute par eux incurable et mortelle. Certes, u n mdecin intelligent qui, par exprience, connat l'action de la nature, et l'apprcie par des expriences quasi-quoti diennes, penserait diffremment de la maladie de la s u r Angle. 11 verrait, dans la fivre continue, le moyen d o n t se-sertla nature pour attaquer, dissoudre et rejeter les ma tires morbides ; dans l'augmentation de la douleur de la
rate, l'effet de cette m m e fivre, pour mettre en m o u v e m e n t et chasser ces matires ; il augurerait de la douleur et du gonflement de l'utrus, la transformation de la ma tire au sein de cet organe; enfin clans la matire purulente et ftide qui sortait de ce mme u t r u s , il reconnatrait l'vacuation dfinitive de la matire m o r b i d e . H . Donc, tandis que la dernire phase de la maladie de notre religieuse semblerait u n mdecin inexpriment un m a l irrparable, un mdecin de savoir et d'exprience l'au rait considr c o m m e l'action salutaire de la nature. Car il faut faire remarquer ici qu'une crise instantane n'est pas possible tant que la matire m a l i g n e est abondante, paisse et adhrente aux parties internes des organes. Alors, au contraire, c'est u n e crise de longue dure et continuelle qui a lieu, ainsi qu'il arrive dans les livres gastriques, o Ton voit la scrtion de la matire morbide paratre ds le premier jour et durer jusqu' la fin. Et l'obstruction de la s u r Angele, aux y e u x d'un mdecin expriment, tait prcisment arrive un tat tel que sa dernire phase a t rellement une raction de la nature faisant effort contre le mal pour le vaincre. 12. Il ne sera pas sans objet d'ajouter ici quelques consi drations l'appui de notre s e n t i m e n t . La sur Angle, quoique petite et frle, avait, n o u s l'avons vu, une remar quable vivacit d'esprit qui influait t e l l e m e n t sur son corps, qu'elle faisait son gr de celui-ci c o m m e l'esclave de sa v o l o n t . Or, cela contribue p u i s s a m m e n t la production des m o u v e m e n t s salutaires de la nature. De plus les tmoins e u x - m m e s ont s o u p o n n cette action efficace de la nature chez notre religieuse. En effet, le c i n q u i m e tmoin aprs avoir n u m r les graves maladies qu'elle e u t P e n n a billi, ajoute : L e s grands maux clc poitrine qu'elle prou vait se terminaient h e u r e u s e m e n t , j e ne sais si c e fut grce l'efficacit des remdes, o u par u n e disposition na turelle. Au contraire, la malade, en raison de son carac tre si vif, considrait ces m m e s maladies c o m m e trs-graves, ' et en tait trs-affecte. Je voyais, dit le vingt-et-unime a tmoin, qu'elle s'effrayait beaucoup de sa maladie. Cela arrive ordinairement aux personnes qui cdent facilement l'ardeur de leur imagination, et surtout aux f e m m e s , et ce n'est pas un m i n c e obstacle la connaissance de la gravit de la maladie. De l vient aussi q u e , sur la.fin,on n'a pas pu constater suffisamment l'tat de l'obstruction de la r a t e ; car la m a l a d e tait e n n u y e , et le seul contact de ses v t e m e n t s o u des draps de s o n lit la faisait beau-
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coup souffrir ; d'un autre c l c o m m e le mdecin et l e chirurgien n'employaient que les mains et les doigts, l o r s qu'ils jugeaient ncessaire de se rendre compte du mal , il est certain q u e . dans les derniers jours, o ils d s e s p raient d e s o n salut,ils durent s'abstenir t o u t f a i t de l'examen srieux de la rate. j3. .Mais il e s t une autre grave observation critique faire sur la manire dont la sur Angle fut gurie. Quand la gu rison est l'uvre de Dieu, elle est instantane ; la nature, a u 'contraire, opre insensiblement, et laisse voir tes vestiges de la maladie. Or la sur Angola n'a pas quitt le lit aussitt qu'elle et recouvr la sant, mais elle s'est leve s e u l e ment u n j o u r o u deux aprs; fait d'une grande i m p o r tance dans notre discussion, vu la vivacit bien c o n n u e de la malade. D'ailleurs, quoique le mdecin ait dclar avoir
le malade une morL certaine; ne considrerez-vous pas la cessation subite de ces n o m b r e u s e s maladies c o m m e le plus remarquable effet du miracle; et m m e vous scmhle rait-il possible qu'un corps humain ait pu les supporter et pendant vingt-six a n s ? Cette remarque semble s rieuse au premier a b o r d ; mais elle perd beaucoup d o s a force, quand on rflchit au caractre de la malade. Ne s'agit-il pas, en effet, de cette religieuse que le Dfenseur de la cause l u i - m m e dclare doue d'un esprit trs-vif et trs-gai, m m e dans sa vieillesse, h tel point que, des que ses maladies diminuaient de violence, elle paraissait aux autres surs forte et c o m m e gurie? Les maladies dont elle fut atteinte Pennabilli taient graves, et cependant elle disait souvent qu'elle tait soulage, et de fait, elle parais sait, dans ces cas, trs bien portante . Lorsque le malheur des temps la lit sortir du clotre, elle tait bien , dit le. c i n q u i m e tmoin. Elle a t ensuite gravement malade chez elle ; n a n m o i n s , de son propre aveu, elle se rendait de lomps e n temps, dans les pays voisins, pour se disor traire ; et le v i n g t - d e u x i m e tmoin dit d p l u s : qu'elle a allait parfois dans les paroisses voisines pour se confes(c ser... et souvent chez un certain Dom Michelangc Staccia rini... qui demeurait Pitra Maura, un peu plus do deux milles de Saint-Lon. Donc, si l'on en excepte 1 obstruction de la rate dont elle souffrait plus o u m o i n s , les autres ma ladies qui l'affligeaient en m m e temps, o n t bien pu l'affai blir, mais ne l'ont pas du tout abattue; surtout parce que, c o m m e nous l'avons vu, elles se terminaient ntgnemcnt, 15. Une autre difficult ressort aussi des paroles de la sur Angle qu'on lit dans le s o m m a i r e et dans l'informa t i o n , paroles dont le Patron de la cause se prvaudra peuttre de cette manire. Lorsque la s u r Angle, dans la crainte de n e pouvoir rapporter, sous la foi du serment,tous les faits qui avaient trait sa gurison, hsitait en elle-mme sans pouvoir se dcider parler, elle ressentit une trs-grande douleur la rate, douleur qui s'apaisa aussitt qu'elle eut de m a n d pardon au Vniableserviteur deDieu.Donc,dira-t-on, cet autre prodige confirme le premier, et enlve tous les d o u t e s . A cela la rponse est facile. La malade seule rap porte ce fait ; or l'autorit d'un tmoignage unique est nulle. De plus cette doulr.ur qui cesse subitement, n'tait peut-tre pas dans la rate, mais dans les intestins ou ail leurs, et probablement des llatuosits l'avaient cause.D'ailleurs il n y avait pas de raison pour que la religieuse ft pu n i e , attendu q u e l'a crainte de prter serment n'est pas une
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faute, et que bien des personnes trs recoinmandables la subissent. Elle et plutt mrit d'tre punie lorsqu'elle dit au onzime tmoin : qu'elle avait reu la grce de sa g u rison plus par l'intercession du Vnrable serviteur de a Dieu, que par l'application des remdes humains . Bien que, dans ces p a r o l e s , elle ait attribu sa gurison en partie aux remdes, et qu'elle ne se serve que du n o m de gice pour la dsigner; il ne lui en arriva aucun mal. Or si la malade e l l e - m m e ne voit dans sa gurison qu'une simple grce, pourquoi, nous, l'atlribuerions-nous un miracle? 16. A m o n avis, j'ai fourni assez de preuves en faveur de ma lhse,pour que je puisse passer Yinjoocaiion sous silence. Cependant il ne sera pas inutile de nous y arrter quelque peu, car n o u s y trouverons un autre argument en faveur de l'action manifeste de la nature. D'abord il n'est pas assez vident que le secours du Vnrable serviteur de Dieu ait t vraiment demand. Si on lit attentivement ce que dit la s u r Angleau sujet de l'invocation, tout semble s'tre pass dans un songe plutt que dans la vie relle. Qu'est-ce, en effet, que' celle religieuse i n c o n n u e qui lui apparat la nuit ? Pourquoi la malade ne l'a-t-elle pas r e c o n n u e ? Gomment ne sent-elle pas elle-mme dans quel tat elle se trouve, et si son mal a cess ou n o n ? E c o u t e z - l a : Je ne peux le dire, parce que j e demeurai c o m m e hors de moi. Mais pour quelle raison tait-elle ainsi hors d'elle-mme ? Elle ne croyait pas une apparition surnaturelle ; elle pensait que c'tait quelqu'une des surs du couvent ; et elle n'abandonna celte pense que le m a t i n en apprenant q u ' a u cune sur n'tait entre dans sa cellule, au m o m e n t . . . < o l'image lui fut apporte . Mais si aucune religieuse r n'est entre dans la cellule de la sur Anglo, quelle est donc celle qu'elle a vue ? Que vient faire l'apparition d'une religieuse inconnue dans une uvre accomplie par l'inter cession du Vnrable Benot Joseph ? Et pourquoi montrer l'image de ce Vnrable, sans vouloir la laisser la malade, malgr les prires de celle-ci? Si vous admettez que tout ceci s'est pass dans un tat de veille, j e ne sais plus ce que c'est qu'un rvel 17. Je ne condamnerai pourtant pas la malade gurie, pour avoir confondu un songe avec la ralit, et jur qu'elle tait veille lors de cet vnement. Car, dans la v i sion de la religieuse inconnue, il faut voir un de ces p h n o mnes naturels, et m m e c o m m u n s , qui se produisent f r quemment tant au dbut q u ' - l a lin des maladies. Alors,
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l ' h o m m e qui s'veille, peroit le c h a n g e m e n t b o n o u m a u vais qui se passe eu l u i - m m e . cette perception s'unissent des i m a g e s vives qui ont de l'analogie avec ce m m e chan g e m e n t , el qui se rattachent aux ides du m a l a d e , en sorte qu'elles ont l'apparence n o n d'un s o n g e , mais d'une vision relle. 18. Du reste, la s u r Angele avait des dispositions ces sortes d'hallucinations. Voici les paroles du c i n q u i m e t m o i n : Souvent la Marini ine disait avoir reu diffrentes grces dans ce monastre (de Saint-Antoine de Penna hilli), et quoique je ne puisse prciser quelles taient ces grces, par quelle intercession elle les avait obtenues, je crois cependant qu'elle on avait reu une par l'intercession de la Bienheureuse Vronique Giuliani. Au dbut de l'enqute, plus de vingt ans auparavant, ce tmoin avait dj d i t ; D a n s ce monastre, o elle endurait dj les maux dont j'ai parl, elle disait bien souvent avoir t dlivre de l'un o u de l'autre, soit par l'intercession de la B. Vronique, ou de quelque autre saint, soit mme par celle de personnes vivantes, particulirement du m i s te sionnaire Joseph Bighetti et de Dom Louis Santinelli de San Angelo in Vado, maintenant Jsuite; j'ignore si c'tait par prires, bndictions ou au c o m m a n d e m e n t de la sainte obissance. 19. il rsulterait de ces paroles du c i n q u i m e t m o i n une autre consquence encore laquelle devrait faire cesser toute l'admiration qu'ont inspire au dfendeur de la cause les maladies de la Sur Angele. 11 s'tonnait que notre reli gieuse et support, pendant vingt-six ans, une masse a de maladies qu'un corps h u m a i n semble incapable d'en<t durer. . Cependant il n'y a en cela rien de surprenant, si on admet en m m e temps qu'elle a t aide par u n e mde cine cleste, el qu'elle a reu des grces qui faisaient dis paratre telle o u telle de ses maladies. A ces grces joignez la dernire, celle qui a donn l'efficacit l'opration de la n a t u r e ; vous partagerez, ainsi que nous l a v o n s dit, l'opinion de la malade gurie, et la question sera rsolue. Au reste, j e souhaite ardemment que, dans ce miracle aussi bien que dans tous les autres, les difficults disparaissent, et que le Vn. Benot Joseph, inscrit parmi les bienheureux, dtruise, par son exemple, la vanit et l'orgueil de notre sicle.
ANDIUS MARIE FRATTINI, A TOC. de la S. cong. et promoteur de la sainte foi-
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LES
SPLENDEURS
DE
LA
FOI
la r a t e dura vingt-six a n s . C'est--dire j u s q u ' l a gurison. L'information prtend enfin que la m a l a d e fut e n t i r e m e n t gurie d e l'obstruction; et la critique n e le rvoque n u l l e ment e n d o u t e . En prsence d'un tel accord dans les faits principaux, les causes d e dissentiment doivent tre bien peu n o m b r e u s e s et bien p e u srieuses. E x a m i n o n s - l e s les unes aprs les autres. 2 . Nous n g l i g e o n s l ' o b s e r v a t i o n c r i t i q u e q u i n o u s est f a i t e l ' o c b a s i o n de T b b e s s e q u i s ' e x p r i m a i t a i n s i : Je n'ai j a m a i s pens que la sur M a r i n i ft semblant d'tre malade, q u o i q u e j'aie dout quelque fois que la maladie ft telle qu'elle le dclarait. E n effet, puisqu'elle n'a j a m a i s cru que la m a l a d e simult une maladie, elle n'est certaine m e n t pas oppose l'existence de la maladie. Quant son opinion sur la nature ou la gravit de cette maladie, ce n'tait pas son affaire d'en j u g e r . Aussi ceux qui seront appels se prononcer d'aprs les s y m p t m e s , seront n c e s sairement en dsaccord avec elle. Nous passons galement sous silence l'observation de la critiqu, affirmant que la maladie d e la religieuse a eu u n e r e c r u d e s c e n c e , l o r s q u ' e l l e r e u t l a n o u v e l l e i n o p i n e q u e son f r r e a v a i t t f r a p p d ' a p o p l e x i e , e t q u e d s lors, de c h r o nique qu'il tait, le mal passa l'tat aigu. Nous aurons plus tard une occasion plus favorable de discuter ce fait. Nous n g l i g e o n s enfin une autre difficult tire d u m o t squmheu que la critique voudrait voir elfac de l'nonc d u miracle, afin q u e l'on vit bien qu'il n e s'agit pas de squirrhe. N o u s la n g l i g e o n s , dis-je, parce que n o u s avons dj expos clairement le sens de cette pithte ; si n o u s avons t e n u l'employer dans l'nonc du miracle, c'est parce q u e , dans le sommaire, les m d e c i n s qui ont soign la malade l'ont souvent employ, pour exprimer l'extrme duret de la rate, et parce que l'nonc du miracle doit indiquer c l a i r e m e n t t o u t ce d o n t il s ' a g i t . 3. A r r i v o n s n o t r e sujet. N o t r e critique n o u s d i t : Pour porter u n j u g e m e n t certain sur u n e maladie,il'estncessaire de possder la connaissance a n a t o m i q u e et p h y s i o l o g i q u e de la partie malade. Or, Tanatomie de la rate, le viscre dont il e s t ici question, n'a j a m a i s t suffisamment c o n n u e ni des anciens, qui faisaient consister sa substance dans la runion d e petites glandes prives de conduit excrtoire, ni des m o d e r n e s qui reconnaissent seulement, dans la rate, un c o m p l e x u s form des plis et replis de Tarire et de la veine
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splniques . On ignore presque compltement son u s a g e , et elle parat n'tre qu'un supplment au foie. Il est c e r tain d'ailleurs que ce viscre n'est pas d'une grande i m p o r tance, puisque l'exprience nous apprend que des a n i m a u x , auxquels o n a enlev la rate, vivent encore assez facilement. Gela pos, il conclut que la maladie de la sur Angle Josphine Marini, qui avait son sige dans ce viscre, ne doit pas tre regarde c o m m e bien grave. 4 . Presque chacune de ces expressions demanderait u n e rfutation. Mais nous prendrons le chemin le plus c o u r t . Et d'abord n o u s accordons que les maladies sont d'au tant plus graves et plus dangereuses qu'elles attaquent des organes plus ncessaires aux fonctions vitales. Mais il n e s'ensuit n u l l e m e n t que les maladies qui affectent des parties m o i n s nobles, o u m m e qui ne seraient pas d'une a b s o l u e ncessit pour la vie, ne puissent tre ni graves,ni m o r telles. La gravit, en effet, dpend moins de la nature de la partie atteinte, q u e du danger et du dtriment qui peuvent survenir pour tout le corps, d e l maladie de celte partie, si secondaire qu'elle puisse tre. On ne dira pas que les cuisses soient ncessaires pour vivre; et cependant si on n'attaquait pas trs-vite la gangrne qui se dclare la cuisse, le corps entier prirait. Et quoiqu'on puisse rendre la sant et la vie en coupant la cuisse, personne m e conclura que la gangrne la cuisse soit un mal lger et qu'on doive mpriser. 5. Nous accorderons aussi qu'il est beaucoup plus facile de connatre les maladies et de les gurir, lorsqu'on connat la nature et l'usage des organes malades. Mais n o u s nierons de m m e qu'il faille en conclure qu'on ne peut ni dcouvrir, ni gurir les maladies des parties m o i n s parfaitement c o n n u e s . Hippocrate, mort depuis vingt-deux sicles, a certainement d ignorer l'anatomic et la p h y s i o logie d'un certain nombre de parties qui n'ont t c o n n u e s que des modernes, et dont plusieurs portent le n o m de ceux qui les ont dcouvertes. Et cependant, ce m m e Hippocrate a pori des j u g e m e n t s tellement justes sur le diagnostic, les pronostics, et le traitement des maladies de la rate, tant internes qu'externes, qu'il a toujours t, et qu'il est e n core regard par tous les h o m m e s senss, comme le prince de la m d e c i n e . Bien plus, il a donn une description si exacte des maladies de la rate, organe alors inconnu, dans s o n Livre des affections internes, que les modernes m m e r e c o m m a n d e n t les observations qu'il fit sur.ee point. Qu'y cut-il de plus iacile constater, chaque poque, qu'y eut-il de plus c o m m u n que 1 obstruction de la rate;/
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Est-il un m d e c i n qui ne s'en s o u v i e n n e ? En est-il un qui n'ait donn des prescriptions pour la traiter? Quelle en est la raison ? La voici : En dehors de la connaissance parfaite de la partie malade, les maladies se rvlent par des s y m p tmes certains, dont la constante observation fait connatre au mdecin ia nature du mal, et la marche suivre dans l'emploi d'un traitement convenable. S'il en tait autrement Celui qui a d o n n aux h o m m e s la connaissance des remdes, le T r s - H a u t , moins d'agir inconsidrment, aurait d leur d o n n e r auparavant une science complte de l'anatome, de la p h y s i o l o g i e de toutes les parlies. de tous les organes du corps. 11 est donc vi dent qu'on peut connatre et soigner u n e maladie, tout en ignorant Vanatomie et la physiologie de la partie du corps qu'elle affecte. 6. Mais si Ton ignorait autrefois la c o n s t i t u t i o n anatomique rie la raie, il n'en est plus ainsi de nos j o u r s . Par courez les descriptions a n a l o m i q u e s du corps h u m a i n qui se trouvent dans toutes les m a i n s , et v o u s y verrez dcrits avec le plus grand soin : la tunique sreuse et fibreuse de la rate, ses vaisseaux artriens, veineux, lymphathiques, ses nerfs, son tissu cellulaire, ses parties granules, s o n paren c h y m e propre. Les tableaux ou planches vous m e t t e n t tous ces objets sous les y e u x . Quant l'usage de ce viscre, les m d e c i n s , il est vrai, n e sont pas d'accord entre eux ; cependant la plupart ont paru tre d'avis, que, quelque soit la fonction de cet organe, il doit tre trs-important, par la remarque qu'ils ont faite, que les maladies de la rate engendraient un grand n o m b r e d'autres maladies dans le corps h u m a i n . G'est une opinion assez c o m m u n e chez les anciens et chez les m o d e r n e s , que les fonctions principales de la raie con sistent purifier le sang et se l'assimiler. Mettons les an ciens de ct ; et parmi les modernes n'en citons que deux, savoir : Scnnert et Hoffmann. Le premier dclare ( l ) : P o u r la production d'un sang plus pur, une premire sparation des e x c r m e n t s d'avec < le chyle dans les intestins, n'est pas suffisante. Lorsque ce chyle, renferm dans les veines.msentriques, y a reu quelques l m e n t s du sang, ce sang doit tre purifi d plus en plus de sa partie paisse et fculente, et c'est ce que fait la rate. Hoffmann, aprs avoir tudi la structure de la rate, (1) Seimcrl. mdec. lib. L cap. 9. de Iicnis usa.
LES
MIRACLES
A U TRIBUNAL
DE LA
SCIENCE.
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dit (i) : La structure de ce viscre parat dispose pour ce but u n i q u e , savoir : que le sang, aprs avoir travers des milliers de petits vaisseaux, aussi bien dans les p o u mons q u e dans le placenta utrin, soit intimement dis sous par u n broiement incessant, plus fondu et plus fluide, afin que, vers dans le sang qui revient p l u s l c n t e ment et plus p a i s des viscres profonds d u ventre, travers l e s ramifications de la veine porte, il lui rende la fluidit ncessaire pour continuer sa route travers le
foie, A u s s i u n c h i e n v i e n t - i l t r e p r i v d e sa r a t e , l e foie s'endurcit, l ' a n i m a l d e v i e n t p l u s p a r e s s e u x , plus g r a s ;
voil ce q u e nous apprennent de nombreuses expriences anatomiques. En outre de cette fonction principale de la rate, les m m e s docteurs n o u s apprennent encore qu'elle aide aux fonctions du foie et de l ' e s t o m a c ; celte conclusion dcoule pour eux des relations intimes qui existent entre ces organes. 7. "Voil c e q u e c e s auteurs o n t reconnu de la structure de la rate d'aprs les maladies causes par ses affections et ses relations intimes avec les autres organes; l e s m d e cins actuels, riches d'un plus grand nombre d'observations, clairs par les flambeaux plus lumineux de la p h y s i q u e et
de la c h i m i e , l ' o n t m o n I r a b s o l u m e n t . Il f a u d r a i t sur cette q u e s t i o n l i r e l e t r a v a i l si b i e n fait q u e l ' i l l u s t r e Charles
Maggiorani a m i s au jour sur les fonctions de la rate. Il enseigne d'abord, l'aide de raisons pathologiques, qu'un grand nombre des maladies causes par le s a n g qui s'est paissi anormalement, o n t leurs sources dans u n e affection maladive de la rate, et que ces maladies sont gu ries par les m m e s remdes qu'on emploie contre l e s affec tions de la r a t e ; ce qui montre l'action vidente d e la rate dans la confection du sang ou dans l'hmatose. Confirmant ensuite ce qu'il vient de dire par des raisons anatomicophysiologiques, il fait remarquer qu'on trouve la rate chez les seuls a n i m a u x qui o n t du sang vritable, de la chair,,
des m u s c l e s , u n a p p a r e i l u r i n a i r c ; e t q u e la s t r u c t u r e de
ce viscre s e rapproche l e p l u s possible de celle d u placenta, organe propre la confection du sang. De plus la dispo sition des vaisseaux d e la rate, le fluide trouv dans s e s vais seaux lymphatiques, les tubes annexs aux petits grains placs aux extrmits des rameaux des artres, la nature de l'humeur, le vide que Ton trouve dans ce viscre, si on le coupe aprs le repas o u aprs un jene prolong, sa tunique (1) Syst. md. lib. 1. sect. 1 cap. 8 et 12. scliol.
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fibreuse et les parois fibreuses de ses cellules, parois qui procdent de r a l l o n g e m e n t des m e m b r a n e s de la veine splnique, tout cela montre que la rate c o n c o u r t la con fection du sang. Puis, appelant la Chimie son aide, il dmontre que dans la rate se trouvent tous les principes ncessaires et c o n v e nables pour transformer en sang la matire grasse et h u i leuse du chyle, et pour le colorer. Or tout cela serait inutile, si la nature n'avait tabli ce viscre pour l'laboration du sang. 8. Le lien troit qui se trouve entre l'appareil urinaire et la rate, fournit cet h o m m e illustre u n e nouvelle raison pour dfendre son opinion. Il dit e n effet : Si la rate est destine laborer l'azote, un des c l m e n t s qui c o m posent le sang, n o u s comprenons alors la relation intime qu'elle a avec l'appareil urinaire, destin spcialement liminer de l'organisme l'azote surabondant et rduit en ure ou on sel a m m o n i a c . Ces organes urinaires appa raissent, dans le rgne animal, c o n j o i n t e m e n t avec la rate. S'ils d o n n e n t une urine ple, aqueuse, dpourvue d'ure, c'est parce que ce viscre est e n g o u r d i et inactif..... Au contraire si l'ure est abondante, ou si l'urine est im prgne et salie par la partie colorante du sang, c'est une preuve que la rate est dans un tat d'hypertrophie et de c o n g e s t i o n actives. Ce r a i s o n n e m e n t a pour rsultat la fois, et de confirmer ce qui a t tabli prcdemment, et de montrer le rle de ce viscre dans la scrtion des urines. 9. Outre sa fonction principale, qui est de concourir la formation du sang, fonction que notre illustre auteur, appuy de raisons rassembles de tous c t s , attribue la r a t e ; il lui en attribue encore beaucoup d'autres. Il fait remarquer que la bile surabonde en h y d r o g n e , et que le sang de la veine splnique, qui va au foie, o la bile est scrte, est l u i - m m e trs-riche en h y d r o g n e . Gela pos, il d i t : c'est de l. q u e nat l'opinion c o m m u n e , que le sang de la veine splnique plus fluide, plus hydrogn, et ' putrescible, contribue pour beaucoup la formation de la bile. il confirme ces fonctions de la rate, en constatant que les affections de ce viscre ont c o u t u m e de prcder les affec tions du foie, et de se joindre elles, surtout dans l'acte de la scrtion de la bile, et que, chez les a n i m a u x qui on a enlev la rate, la bile est m o i n s a b o n d a n t e en parties rsineuses, c'est--dire, en ces parties ou l'hydrogne abonde principalement.
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10. Il fait encore remarquer que la rate modre la d i s tribution du sang dont l'estomac a besoin pour remplir ses fonctions. En effet, c o m m e l'artre splnique procde du principal vaisseau annex l'estomac : II rsulte de c e t t e < disposition que quand le stimulus appelle une plus grande quantit de sang dans le ventricule, il en afflue moins dans la rate ; quequand le ventricule a achev son travail, la rate reoit u n e plus grande quantit de sang, et c o m mence alors son travail. Cela est d'accord avec ce fait, que les maladies de la rate tendent troubler les fonctions de l'estomac, et que les troubles de l'estomac font natre l e s affections splniques. 11. En outre, parmi les autres utilits de la rate, il signale celle-ci que beaucoup de docteurs ont observe : ce viscre parat jouer le rle de modrateur, et s'opposer toute espce de trouble et de saccades dans la circulation du sang, en lui offrant dans ses cellules une retraite convenable, pour qu'il n'envahisse pas les viscres plus n o b l e s . Hodgkin s'est exprim c o m m e il suit sur cette question : La rate, remplit, dans l'conomie animale, une fonction semblable celle qui est produite par les tubes et les soupapes de sret dans les diffrentes espces d'appareils chimiques ( et mcaniques. < Enfin, de ce que ce viscre a la vertu de produire le fer dans son tissu organique, le mme auteur conclut qu'on peut avec raison considrer la rate c o m m e un gnrateur d'lectricit pour le sang qui en drive. 11 s'appuie sur l'autorit d'Arlhaud qui regardait ce viscre c o m m e u n appareil lectrique , puis il ajoute : E t cet tat fait voir comment la prostration des forces a c c o m p a g n e constam ment les maladies de la rate, et c o m m e n t l'irritabilit vient s'accrotre par l'usage du fer, q u i exerce principa lement son action sur la rate. 12. Ce m m e docteur termine ainsi son important tra vail : Si les faits rapports sont vritables, si les raisons que nous avons donnes ne sont pas sans valeur, n o u s pouvons conclure que la fonction principale de la rate est : que le suc gastrique qui lui est apport par l'artre splnique, s'y animalise davantage, et c o m m e n c e y acqurir la nature du sang, surtout par l'adjonction de u. l'ammoniaque et du fer auxquels il s'unit ; que, par suite a de cette action, elle entre en relation avec le foie et lui a fournit l'lment efficace de la scrtion de la b i l e , savoir l'hydrogne ; que, par ses liaisons vascuiaires et nerveuses avec l'estomac, elle s'associe lui, de sorte qu'elle
LES SPLENDEURS DE LA FO
devient occasionnellement le rgulateur priodique de l'a fil ux du sang dans ces deux organes, selon leurs bes o i n s ; la source, pour Tun, des sucs acides, pour l'antre, des sucs alcalins; qu'en unissant le fer el l'albumine, il doit exercer une certaine influence sur l'tat lectrique du sanp;, et sur la vie des tissus musculaires auxquels le sang s'incorpore en grande partie. 43. Tout ce qui procde a pour but d'tablir, qu'on n'ignore ni l a n a t o m i e , ni la physiologie de la rate, autant que la Critique le prtendait. Il n'tait n u l l e m e n t besoin d'un travail si tendu pour combattre l'assertion gratuite que cet organe est de peu d'importance ; elle a t rfute en effet par la Critique avant qu'elle ne n o u s ait t o p p o s e . Car qu'a voulu notre Censeur en affirmant que l'ut rus a souffert de l'obstruction de la rate, que les rgles furent diminues et supprimes, qu'il y eut des affections hyst riques, que les p o u m o n s furent atteints par des pleursies et par des pripneumonies, suivies quelquefois de crachats purulents, que les fonctions de l'estomac et des intestins furent troubles, d'o naquirent des coliques,, e t c . , e t c . ? Qu'a-t-il voulu, dis-je. en entrant dans ces dtails? Sinon n o u s apprendre que les fonctions de la rate sont si troite m e n t lies aux fonctions clc lous les organes les plus nobles, q u e les premires venant tre gravement troubles, toutes les autres doivent l'tre aussi? N'en a-t-il pas d o n n une n o u v e l l e confirmation lorsqu'il a dclar : L'obstruction de la rate, c o m m e n o u s l'avons observ ds le dbut, tait la cause u n i q u e , l'unique source de fous ces m a u x ? Com m e n t donc fera-t-il accorder tous ces antcdents avec cette assertion s u b s q u e n t e : C e t organe est de peu d'impor. tance ? 1 4 . Il aura peut-tre recours l'exemple que nous avons rapport plus haut, de la c u i s s e gangrene, qui aurait fait succomber tout le corps. Mais n o u s le prions de remarquer que l il s'agit seulement de l'panchement de la corruption, laquelle, de n'importe quel m e m b r e moins important du corps, peut diffuser partout le virus qui. infectera toutes les h u m e u r s . Mais, dans le cas e n ques t i o n , il s'agit d'un organe, qui, par le mal dont il est atteint, excite, au soin des autres organes des maladies propres c h a c u n d'eux. Ce qui tablit clairement que cet organe est si important, qu'une fois troubl et gravement affect, et ne pouvant plus remplir c o n v e n a b l e m e n t ses f o n c t i o n s l'gard des autres, il les expose de graves perturbations qui leur sont propres.
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15- On objectera peut-tre : Puisque ce viscre est si i m portant,d'aprs ce que vous dites, c o m m e n t se fait-il que les animaux qu'on en a privs, ont pu vivre encore, c o m ment mme leur vie n'en a-t-elle pas t rendue plus pnible? Faisons remarquer tout d'abord que, autre chose est d'avoir la rate malade, aulre chose est d'en tre priv. Tant que la rate sera malade, elle sera la source et l'origine des autres maladies; si on l'extrait, on enlve avec elle la cause des maladies, et on abandonne la nature le soin de s u p pler aux fonctions de la rate. La rponse ne sera pas ntre. L'illustre Maggiorani a prvenu la difficult ; il Ta mme regarde c o m m e sans valeur dans le cas o l'on prtendrait que la rate seule est appele la formation du sang, parce que la nature peut prendre d'autres m o y e n s pour produire la m m e action. Une partie vient-elle manquer, la force de l'organisme se relve, afin de suppler d'une manire ou d'une autre aux fonctions de la partie absente, c - l'aide d'un appareil analogue. Car personne n'a e jamais attribu l'hmatose, la conversion du chyle e n sang, a la rat seule ; ce ne sont pas les seules veines de la rate qui peuvent produire cet eifet, mais encore toutes les racines des veines portes. De sorte que, la rate tant extraite, o u son action se trouvant intercepte, il reste t o u jours, pour produire, ce rsultai, les rameaux du msen tre suprieur, et aussi les veines qui affluent l'artre splnique au lieu de l'extirpation. S'il n'en tait pas ainsi, les animaux, auxquels on a enlev la rate, n'auraient pas pu vivre, et ceux dont la rate avait t compltement obstrue n'auraient pas p u vivre plusieurs annes. Ainsi donc, puisque les observations qu'on nous oppose ne sont d'aucune valeur pour tablir que la rate est un viscre de peu d'importance ; puisque les raisons par nous apportes tablissent, au contraire, l'importance de la raie dans les fonctions qui lui sont confies, ainsi que l'action majeure qu'elle exerce sur les organes plus importants, il est tabli que la maladie en question doit tre regarde c o m m e grave, par cela m m e qu'elle avait son sige dans cet organe. 16. Mais j e vous entends me d e m a n d e r : si l'obstruc tion de la rate est tellement mortelle, q u e ni l'art, ni la nature ne puissent la faire disparatre ? Vous le niez, et vous ajoutez que les mdecins nous donnent un grand nombre d'exemples d'obstructions vritables que l'art et la nature ont guries. E t quoique, dans le cas que nous dis cutons il s'agisse d'une maladie bien reconnue par les m decins, vous n o u s opposez de nouveau l'autorit de Baglivi
qui dclare que le plus souvent la nature c o m m e n c e une action nouvelle, alors que tous n o s efforts ont cess . 17. Votre premire question a deux d f a u t s : T e l l e de m a n d e plus qu'il n'est juste ; elle d e m a n d e , e n effet, qu'on dmontre que la maladie en question ne puisse disparatre ^ ni par le secours de l'art, ni par les forces de la nature. Or, nous ne serions obligs de fournir cette preuve que si l'on devait rapporter la gurison un miracle de deuxime ordre, o le sujet doit excder les forces de la nature. Mais pour les miracles de troisime ordre, il n'est plus question de faire cette preuve, il suffit d'tablir que le mode seul de la gurison est au-dessus des forces de la n a t u r e ; il suffit de prouver que la maladie tait grave et difficile gurir. C'est pourquoi Benot XIV, numrant les conditions ncessaires pour constituer u n e gurison miracu leuse, a dit : La premire consiste en ce q u e la maladie soit grave, et impossible gurir, s'il s'agit d'un miracle du d e u x i m e ordre, ou difficile gurir, s'il est question d'un miracle de troisime ordre. Cela pos, le reste de l'objection croule, puisqu'elle repose sur des e x e m p l e s d'obstructions disparues sous les efforts de la nature ou de l'art. Personne ne peut nier ces f a i t s ; mais, passant sous si l e n c e pour le m o m e n t les circonstances particulires chaque maladie, circonstances qui c o n s t i t u e n t d'normes diffrences entre les diverses maladies de la m m e espce, n o u s n'avons dans le cas actuel n o u s occuper q u e du mode de la gurison. Or, ces obstructions invtres, que vous rapportez,disparurent-elles, oui o u n o n , t o u t c o u p , et sans crise a u c u n e ? Si elles ne disparurent pas de cette sorte, par' la seule action de la nature ou de l'art, c'est en vain que v o u s n o u s les opposez. 18. 2 En outre l'observation, critique dont il s'agit d e m a n d e beaucoup plus qu'il ne faut. Qui oserait rpondre cette question : la fivre, de but en blanc, la gangrne, la phthisie sont-elles t e l l e m e n t mortelles, q u e ni la nature, ni l'art ne puissent les gurir? Considrez avant tout la nature, le degr et la dure de la fivre ; voyez si la gangrne c o m m e n c e se dclarer, ou si elle a dj gagn t o u t le corps; voyez aussi si la phthisie ne fait que montrer les premiers et lgers indices de son existence, o u si elle est dj arrive sa troisime priode; alors, et alors s e u l e m e n t , suivant le degr de la maladie, vous donnerez des rponses n o n seule m e n t diffrentes, mais tout fait o p p o s e s . 19. Suivons le m m e procd pour l'obstruction de la rate. Regardez-vous c o m m e pouvant tre gurie, l'obstruction
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dcrite par Bartholini (1)? Obstruction dans laquelle tout le parenchyme de la rate tait tellement ls, sa duret devenue
si grande, qu'un couteau pouvait peine y pntrer, moins de le pousser avec violence? Ou bien encore cette
autre mentionne par von Filawmerdingue (2), o le viscre tant compltement corrompu, la rate toute entire tait dure, de la couleur du plomb, large et paisse..., renfer mant en abondance dans son intrieur une matire s e m semblable la lie de vin r o u g e : ou bien enfin cette troisime que nous voyons dans Christian R u d n i c i u s ( 3 ) : Ce docteur avait extrait d'un cadavre une rate dont presque la m o i ti tait incruste d'un cartilage osseux, tellement dur, que le couteau le plus tranchant pouvait peine la fendre, et qu'on ne put le retirer sans lacrer le parenchyme? Regarderez-vous c o m m e curables, l'aide de la nature o u de l'art, ces obstructions de rate qui ont emport les malades ? Et cependant, c'taient des obstructions ; donc les obstructions de la rate peuvent tre mortelles, et tout fait incurables. Dans le cas en discussion, n o u s ne parlons pas d'une obstruction quelconque, rcente, lgre et 1res c i r conscrite, mais au contraire d'une obstruction qui prsentait la duret de la pierre, qui formait une tumeur se manifestant la simple v u e , qui avait apport le trouble dans toutes les fonctions des organes principaux, qui avait atteint les p o u mons, rduit l'estomac l'inertie, a m e n la mtrite et la suppuration de l'utrus, qui enfin, rebelle aux efforts de tous les m d e c i n s , aprs avoir tortur la malade pendant vingt-six ans, l'avait conduit, la dernire e x t r m i t ? Exposez un fait semblable aux mdecins, demandez-leur ensuite si cette maladie a cl assez grave, et si on pouvait facilement la gurir par les seules forces de la nature o u par les ressources de l'art? 20. Mais, vous direz encore : quand les mdecins se retirent, la nature c o m m e n c e son uvre. Que cela ait eu lieu quelque fois, n o u s ne le nions pas; mais cela est-il arriv pour notre m a l a d e ? nous allons l'examiner. L'examen ne sera pas difficile ; nous avons le m o d l e auquel nous r a m nerons l'uvre de la nature, qui n'accomplit rien par s o u bresaut, et qui emploie cette fin toutes les forces phy siques en rapport avec le mal. Nous serons conduits ainsi h la seconde partie de la question, celle o nous avons traiter do la gurison miraculeuse.
(1) Lib. 4. part, i cap. 8 ium. . (3) Apud. Mangetum liibl. med. de morb. lienis. Apud eiundem.
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21. Noire Censeur, voulant attribuer la gurison aux forces naturelles et une crise salutaire,fait remarquer que les obstructions clesviscres, de longue dure, n e peuvent se rsoudre sans occasionner des troubles assez graves dans t o u t le corps.Comme, dans le cas propos, il s'agissait d'une maladie invtre, d'une tumeur considrable, paisse, adhrente aux parties intrieures des viscres, elle n'a pu cire gurie subitement, la gurison, au contraire, a nces sairement demand un t e m p s assez l o n g , p o u r tre parfaite. La m a t i r e m o r b i d e a d t r e digre p a r le travail m o r b i d e des aulres viscres, pour t r e chasse des parties affectes. Cela eut lieu chez la malade, qui entra e n convalescence aprs une fivre aigu, des vomissements et un coulement purulent de l'utrus. Ceux qui ignorent le travail de la na ture, peuvent tre m u s , effrays-mme, d'une aggravation , q u e l c o n q u e des s y m p t m e s . Mais les m d e c i n s dcouvrent s o u v e n t dans ces accidents une future gurison. Dans le cas qui n o u s occupe, ces mdecins, s'ils avaient t instruits et prudents, auraient d voir dans la fivre continue le m o y e n ordinairement employ par la nature pour cuire et rejeter la matire morbide, dans la douleur de la raie, l'effet de la fivre qui chassait cette douleur, dans l'engorgement de l ' u t r u s , la m t a s t a s e de la m a t i r e , ot enfin d a n s cette matire puriforme et de mauvaise odeur, qui s'en coulait, la sortie de la matire morbide, sortie qu'ils ne s o u p o n nrent pas m m e de loin. 2 2 . T o u t cela n'est certes pas n o u v e a u , ni pris a u ha sard. Galien, avait dit il y a l o n g t e m p s : Les crises sont toujours prcdes d'un assez grand trouble dans le corps du malade . 11 avait m m e trac un l o n g tableau de ces t r o u b l e s . 11 avait averti depuis l o n g t e m p s : q u e suivant la nature variable d e l maladie, les crises se dclarent plus o u moins v i l e ; que les maladies aigus sont juges plus p r o m p t e m e n t , que les maladies de l o n g u e dure le sont m o i n s p r o m p t e m e n t . .(De dieb. dcret, cap. 1.) D e p u i s l o n g t e m p s les m d e c i n s s a v a i e n t q u e : la crise a lieu , p a r transfert, n o n pas e n ce sens q u e la matire est j e t e hors du corps, mais q u e l l e est transporte dans u n autre endroit. Nous c o n c d o n s tout cela. Nous a c c o r d o n s aussi que les ignorants s'effraient souvent de cette aggravation des symp tmes, tandis que les mdecins y dcouvrent l'annonce du retour la sant. Mais nous nions q u e , dans notre cas, ils aient d ou aient pu voir, dans l'aggravation de la maladie, ce que la Critique y voit. Nous nions qu'il y ait e u transport de matire d'un l i e u dans un autre. N o u s n i o n s qu'il se soit
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fait une coction vritable; nous n i o n s en un m o t l'existence d'une crise salutaire. Si notre censeur persistait affirmer son existence, eh bien, nous soutiendrions que cette crise a d tre mortelle. 23. Pour le dmontrer, il faut ncessairement c o m m e n cer par dfinir la crise. D'aprs Galien : La crise, c'est -dire le j u g e m e n t , est un changement subit qui se pro ie duit dans la maladie, soit pour la gurison, soit pour la mort (1) . EL ailleurs ( 2 ) : L a crise, qui signifie u n ' changement subit dans la maladie, peut avoir lieu de a quatre faons : ou bien les malad.es sont tout coup dli vrs de leurs maux, ou ils obtiennent un changement notable en mieux, ou ils m e u r e n t aussiLt, ou leur tat devient bien pire . D'aprs la dfinition de la crise et la description de ses effets, il est clair que la crise proprement dite ne peut avoir lieu que dans les seules maladies aigus : car, quoique les a crises arrivent quelquefois, dit-on, dans les maladies de longue dure,alors,cependanf,le m o t c r i s e e s l e m p l o y d a n s ,0 un sens plus gnral (3) . Comme, n o u s avons discuter une crise dans une maladie chronique; n o u s prendrons-donc ce mot dans le sens le plus tendu ; et c'est pourquoi nous retranchons le moisubit de la dfinition de la crise. Mais n o u s laisserons ceux-ci : c'est un c h a n g e m e n t qui se produit dans la maladie, soit pour la gurison, s o i p o u r la mort. Or, dans la maladie dont il s'agit, il y a eu a g g r a vation continuelle et de longue dure de tous les s y m p tmes, mais point de c h a n g e m e n t ; donc dans le cas e n question, il n'y a pas eu de crise. 24. Mais, dit la critique, il y a eu un changement, et mme un changement grave et remarquable. Car, notre re ligieuse : frappe par une triste nouvelle, tomba terre. Et alors les maux qu'elle avait endurs jusque-l prirent une recrudescence c r u e l l e : la maladie d'abord chronique
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frre, < se manifesta, c o m m e elle Je dpose, un j o u r du r mois de juin de Tanne m m e o je vins, c o m m e je l'ai dit, dans ce monastre . Elle avait dit auparavant : J e me trouvai dans ce monastre la lin d u vingtime jour d'avril 1815 ou 1816, prcisment u n an aprs que le Saint-Pre Pic VII, revenant de sa captivit, rentra triomphant dans Rome . Or, on sait que le saint Pontife fut rendu la Ville ternelle le 24 mai 1814; c'est donc au m o i s de juin 1815 qu'eut lieu celte aggravation de la m a ladie, et elle persvra jusqu' la gurison, qui eut lieu la Semaine sainte, en avril 1818 . Cette aggravation douloureuse, c'est--dire cette maladie aigu se prolongea donc au moins pendant trente-trois ans. P h n o m n e inou dans les annales de la mdecine. 26. Mettons t o u t e plaisanterie part ; puisque la maladie chronique ne s'est pas transforme en maladie aigu, puis qu'on n'a aperu d'autre c h a n g e m e n t qu'une aggravation douloureuse de toutes les affections, il faut en conclure rigoureusement que la crise n'a pas e u lieu. 27. Vous prendrez peut-tre l'cxacerbalion m m e de la ma-, ladie -pour une crise ; alors rappelez-vous que la crise peut tre favorable ou m o r t e l l e , puisqu'elle est un c h a n g e m e n t qui apporte la gurison ou la mort. Vous n'oublierez pas n o n plus que, dans ces sortes de crises, les malades, ou bien m e u r e n t aussitt, o u bien leur tat devient pire. C'est ce dernier rsultat que nous voyons chez notre malade. Le S o m m a i r e nous le fait connatre a m p l e m e n t , ainsi que notre Information dans laquelle n o u s avons emprunt au sommaire b e a u c o u p de faits relatifs l a dernire priode de la maladie. Cependant, il ne sera pas inutile de rappeler, c o m m e spcimen, ce que rapporte le m d e c i n de la duret obstrue de la rate trs grande, et sur l'affection de l'utrus p e n d a n t les derniers temps ; voici ses paroles : La duret ne se manifestait pas seulement au toucher, mais elle tait si t e n d u e et si saillante, que l'il pouvait l'apercevoir la seule i n s p e c t i o n de la partie affecte... L'utrus paraissait engorg outre mesure; le squirrhe spcialement (le mdecin e m p l o i e ce m o t p o u r signifier l'extrme duret de la rate obstrue et gonfle) et l'engorgement de l'utrus, mon avis, ne pouvaient Ire gu ris par aucun m o y e n h u m a i n . . . . Je dsesprais de* la gurison de la s u r Marini, e t c . , et j'ordonnai l'administration du saint Viatique. 28. P o u r les maladies secondaires, n o u s rappellerons la dposition de la miracule ; Dans les derniers mois de m a grave maladie, les crachats de s a n g devinrent
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beaucoup plus frquents, et ils taient accompagns d'une toux t r s - v i o l e n t e . . . Les convulsions me firent souffrir plus ou m o i n s . . ; le flux menstruel tait irrgulier, et, sur < la fin, il fut supprim pendant plusieurs mois. Je souffris c aussi, dans ces derniers temps, d'une inflammation la t poitrine complique d'un a s t h m e ; m o n tat devint d'une telle gravit que, une fois principalement, le prtre fut a appel... L'utrus, qui s'tait soulev, prsentait une duret trs grande, qui persvra jusqu' fa gurison. 29. Nous rapporterons enfin la dposition du chirurgien. Celui-ci rappelle d'abord les douleurs de la rate, puis il ajoute : Elles devenaient toujours plus insupportables et plus frquentes... la malade souffrait mme du contact de ses vlements o u des draps du lit, etc. Ces douleurs p r o te duisirent le m a n q u e d'apptit, l'aversion pour toute sorte de nourriture, l'tat de veille, ou le manque de s o m m e i l , des accs de fivre rpts et continuels, l'altration, et enfin l'aggravation des- maladies concomitantes L'utrus, cause du voisinage du viscre affect, des assauts rpts de la fivre, et des douleurs continuelles de la rate fut envahi, sur toute son tendue, par une inflam tnalion trs grave, qui rendit ce viscre si sensible, que son simple toucher tait extrmement douloureux. Il en sortait une humeur acre e t . b l a n c h e qui fut ensuite sanguinolente, et qui, d'abord inodore, devint peu aprs ichoreuse et d'odeur ftide... Ce ferment acre, se dvelop pait, s'accroissait l'intrieur, et il ne laissait plus place qu' un espoir bien loign, ou plutt impossible. Si le mal alla toujours progressant et s'aggravant jusqu' la fin, la crise hypothtique n'a pu tre que mortelle, c'est--dire une de ces crises, la suite desquelles, si les malades n e meurent pas i m m d i a t e m e n t , leur tat devient b e a u c o u p plus grave. 30. Il y avait une fivre c o n t i n u e l l e , c'est--dire, ce moyen ordinaire, l'aide duquel, la nature met en m o u vement la matire morbide, et l'vacuaiL. II y avait une augmentation de douleur dans la rate, signe q u e cette mme matire tait agite et pousse au dehors. Il y avait gonflement de l ' u t r u s , signe de la m t a s tase de la matire. L'utrus laissait couler une matire puriforme et de mauvaise odeur, ce n'tait que la sortie de la matire morbide. A tout cela, vous pouvez ajouter encore les vomissements de sang, le ilux hinorrodal, et pour n e rien oublier, les pleursies, les pripneumonies, avec l e s expectorations sanguines et purulentes, toutes choses quiT
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dans votre h y p o t h s e , ne seraient qu'autant de mtastases de la matire m o r b i d e . 31. Nous avons vu jusqu'ici, q u e la maladie a persist dans toute sa crudit, qu'elle a toujours t en a u g m e n t a n t , et qu'elle n'a jamais montr le moindre signe de c o c t i o n . C'est pourquoi, si vous- voulez regarder c o m m e critiques tous les accidents q u e nous venons d'nurnrer, n o u s vous ferons remarquer avec Riverius (1) : ce Qu'il Faut regarder, c o m m e mortelle, surtout, la crise qui n'est pas prcde des signes de c o c t i o n . E n elfet, si a u c u n e c o c t i o n n'est apparue, et qu'il survienne quelque trouble ou mouvement dans les h u m e u r s , avec vacuation de ces h u m e u r s , c'est un indice des plus certains que la nature est irrite, qu'elle est gare par la malignit des h u m e u r s . . . preuve vidente que les conditions et les h a b i t u d e s d e l nature sont bouleverses de fond en c o m b l e , et puises par la violence du m a l . Hippocrate n'tait pas d'un avis diffrent, lorsqu'il cri vait. La c o c t i o n indique la proximit du j u g e m e n t (de la < crise) et une sant certaine, mais les humeurs crues qui c sortent sans tre transformes par la coction, et qui se changent en abcs mauvais, i n d i q u e n t , ou l'absence du jugement (de la crise), ou les d o u l e u r s , o u une longue dure, o u la mort, ou une rcidive. Et ces douleurs, cette l o n g u e dure, ces rcidives, ce danger de mort, nous les v o y o n s en effet produits chez notre malade par les troubles et les vacuations. D'aprs le tmoignage du chirurgien, aprs ces vacuations et ces troubles, non s e u l e m e n t la maladie principale demeura dans toule sa violence avec les autres maladies ; mais chaque perte, chaque rechute des maladies additionnelles, tous < les s y m p t m e s s'aggravaient de plus e n plus. Ils ame c nrent m m e les mdecins dsesprer; il en fut de mme de la malade, qui dans les derniers t e m p s de sa maladie, atteste : qu'elle attendait la mort chaque m o m e n t . 32. Vous comprendriez qu'il n'a pu en tre autrement, si vous considriez la nature de la matire vacue. Le m decin rappelle la matire sale et purulente qui sortait frquemment de l'utrus. Le chirurgien dclare qu'il a v u ces m m e s h u m e u r s , d'abord acres et blanchtres, puis s a n g u i n o l e n t e s : en premier lieu elles taient ino dores, elles devinrent sales, de trs-mauvaise odeur. (i) Inst. md, lib. II sect. 2. cap. '3. Vide etiam Zacohiam quaest, mdie. leg. lib. I tit. 2. quaest. 27, 28.
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La miracule dclare que ces mmes humeurs furenl d'abord blanchtres, puis jauntres et purulentes. Or, comme n o u s l'avons Tait remarquer dans le miracle p r c dent, puisque le pus sanieux est distingu du bon p u s , surtout par l'htrognit de sa substance, et par son odeur ftide, il est clair que les humeurs qui sorlaient de l'utrus n'avaient aucunement subi le pouvoir de la nature, et n'avaient pas t domptes par elle, qu'elles n'taient aucunement dpouilles de leur qualit dltre, qu'elles n'taient pas devenues plus bnignes, et mieux disposes l'vacuation ; en un mot, il est vident q u e l l e s taient restes dans leur crudit. La crudit, en elfet, est la corruption d'une substance, la putrfaction de l'humeur par laquelle elle devient diffrente d'elle-mme quant sa substance et - ses qualits. C'est pourquoi, les excrtions de cette sorte doivent ncessairement produire les effets des vacuations crues signals par Hippocrate, et qui se produisirent vrita blement dans notre c a s ; c'est--dire, qu'ils doivent pro duire une crise mortelle. 33. Si des vacuations n o u s portons nos regards sur les troubles et les mtastases, nous verrons galement u n e crise mortelle, surtout, si vous considrez, non pas la nitrite seule, mais aussi les pleursies et les pripueumonies comme des maladies mtaatatiques. E n effet, pour tre favorable, la crise par dplacement et transport de m a tire exige avant tout un en roit moins noble et loign. C'est pourquoi, si le lieu vers lequel la matire est trans'porte est aussi noble, et mme plus noble que le lieu de la maladie, il s'en faut beaucoup que ce dplacement se fasse l'avantage du malade, il le conduira, au contraire, une maladie tout ausai grave, et p e u t - t r e plus grave. (1) L'utrus ne le cde certainement pas en dignit la rate, et le poumon est un organe beaucoup plus noble; ainsi,d'a prs l'endroit mme o se porterait la matire morbide, la mtastase se montrerait trs-dangereuse, quand bien m m e il s'agirait de bon p u s . Mais, dans le cas en question, il s'agit de pus mauvais, de pus s a n i e u x ; le prit, et le d o m m a g e s'accroissent donc beaucoup, et il ne pouvait y avoir d'autre crise, qu une crise mortelle. 34. Nous sommes entrs dans tous ces dtails, p o u r donner une entire satisfaction notre illustre Censeur. IL dcouvrait une crise dans 1 aggravation de la m a l a d i e ; o n (1) Sennert. inst. md. lib. III par 3 cap. 20.
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lui a montr clairement de quelle nature aurait t cette crise, dans son h y p o t h s e . Pour nous, n o u s avons rejet l o u t e espce de crise, et n o u s l'avons fait avec raison, c o m m e on en conviendra, si l'on veut remarquer qu'il n'y a eu a u c u n changement dans la maladie. La malade souffrit de temps en l e m p s de la fivre pendant tout le cours de sa maladie; si la livre se reproduisit, ce n'tait que la reproduction d'un s y m p t m e qui s'tait dj manifest. Elle souffrit aussi de temps en l e m p s d'affections des p o u m o n s ; en effet, le gon flement de la rate troublant et gnant l'laboration et la circulation du sang, ce dernier a d refluer avec plus de violence vers les p o u m o n s , et leur causer du mal. Il y a une relation trs-Lroite entre la rate et l'estomac, c o m m e n o u s l'avons vu, et la rate tant malade, il a d en rsulter une lsion dans les fonctions de l ' e s t o m a c . L'irrgularit et la suppression des rgles n o u s ont montr que, ds le c o m m e n c e m e n t , l'utrus tait grivement affect; et la maladie de l'utrus produisit des migraines. Eniin que dcouvret - o n de nouveau dans la maladie avec le t e m p s ? quelle m a ladie insolite se dclara? aucune certainement, si ce n'est l'aggravaiion de toutes les maladies. Mais l'aggravation n'est pas le changement. Donc le c h a n g e m e n t n'ayant pas eu lieu, il n'y a eu aucune crise. 35. Apis ces considrations gnrales sur l'expos de la maladie, si Ton examine chaque c h o s e en particulier, on arrive au m m e rsultat. "Vous n o u s objectez la fivre, c o m m e tant critique. Mais a - t o n j a m a i s vu un trouble tel, u n e inflammation semblable de tous les viscres, sans fivre a u c u n e ? Cette fivre fut s y m p t o m a t i q u e , et n o n pas critique. Vous objectez les douleurs de la rate qui a u g m e n t r e n t ; mais si la violence de la maladie s'appesan tissait chaque jour davantage sur ce viscre, s'il tait ar riv un degr tel de grosseur et de duret que les mdecins craignaient un sphacle, tait-il possible la malndie de de venir plus aigu, sans augmentation des douleurs? Objectezn o u s encore, si vous le voulez, les v o m i s s e m e n t s do sang, les flux hmorrodaux, nous vous rappellerons que ces acci dents concidaient avec le trouble et la suppression des rgles, suppression qui apportait ces p h n o m n e s avec elle. Si la circulation du sang, ait Aslruce (I), est interrompue sur une partie q u e l c o n q u e du corps, o se trouvent des vaisseaux Ira-dlicals, ou affaiblis, l e sang pourra se frayer une roule, et produire des hmorrhagies prio(1) De
inorh.
diques, c o m m e il arrive ordinairement dans les rgles rtrogrades. Louis Mercatus a dit (1) : Lorsque la na t ture s'efforce de produire les rgles, si elle est dtourne de son but, ou si un obstacle quelconque obstrue la voie naturelle, les vacuations mensuelles se font au m o y e n a d'une grande abondance de sang rejet par les narines, ou par la bouche. Ajoutez cela, que, la suite de ces vacuations, ou, c o m m e le dit le chirurgien chaque perte, tous les s y m p t m e s s'aggravaient, la tumeur et la duret de la rate non seulement ne diminuaient pas, mais au contraire, se trouvaient augmentes. Cela indiquait clairement que le sang vomi ne provenait pas de la rate, mais qu'il tait un s y m p t m e , ou plutt une consquence del suppression des rgles, o u , si vous Je prfrez, d e l maladie des p o u m o n s . Vous allez enfin chercher la mtastase dans l'enflure de l'utrus, et la sortie de la matire morbide par les crachais purulents. Mais si la mtastase, ou le transfert de la m a tire morbide, si son vacuation avait eu lieu, en m m e temps la rate aurait diminu de volume, en m m e temps aussi sa duret aurait disparu, la rate se serait r a m o l l i e ; or la duret et la lumeur s'accrurent jusqu' la fin. Donc il n'y eut aucune mtastase, aucune vacuation de la matire morbide. Ainsi donc, de quelque ct que vous vous tour niez, tout rejette clairement l'existence d'une crise. 36. L'hypothse d'une crise tant victorieusement car te, et se tournant m m e contre son auteur, on n'a plus rien de srieux nous opposer. Suivons cependant notre .Censeur jusqu'au bout. Il dit que notre religieuse avait un caractie trs-ardent et trs-vif, c'est--dire, un caractre trs-apte provoquer les m o u v e m e n t s salutaires de la n a ture. Et c o m m e l'un des tmoins affiimail avoir entendu dire q u e l l e craignait beaucoup les maladies , notre Cen seur attribue cette crainte ce m m e caractre, et fait ob server que cette disposition de l'me est un obstacle ce que l'on connaisse parfaitement la raison de la maladie. Il croit en outre q u i l n'est pas assez certain que l'obstruc tion de la raie a i f p e r s v e r dans le mme tat jusqu' la fin ; car il est probable que les mdecins, pendant ls der niers jours, se sont abstenus de toucher celle partie qui ne pouvait pas mme supporter le contact des linges du corps. 37. La premire de ces dilficulis se rapporte la crise, comme on le voit, et elle tombe d'elle-mme,d'aprs ce que (i) De millier, aflect. lib. I. cap. 7.
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nous avons dit. La seconde est e n opposition avec la pre mire. En cfFet, si la malade avait t rellement craintive cause de sa maladie, elle aurait certainement manqu de cette vivacit qui e-t surtout trs-propre produire des m o u v e m e n t s salutaires; or, cette vivacit, naturelle chez notre malade, est non s e u l e m e n t r e c o n n u e par tous l e s t m o i n s , mais encore par notre Censeur, qui dclare plus b a s : Les maux qu'elle endura furent graves, et cependant quelquefois elle faisait connatre qu'elle tait soulage au point qu'elle paraissait gurie. Donc le t m o i n auri culaire qui nous est oppos doit tre rejet c o m m e ayant t induit en erreur; de m m e qu'on doit rejeter aussi l'observation ci-dessus rapporte. P o u r ce qui regarde l'tat de la maladie, i m m d i a t e m e n t avant la gurison, nous avons vu que la t u m e u r de la rate tait lelle, qu'on la dcouvrait sans l'aide du toucher, et l a seuleinspcction des y e u x . Les mdecins ont donc pu s'assurer de l'existence de la maladie sans avoir recours au toucher. En outre, c o m m e la malad.e devait demeurer dans le mme tat aussi longtemps que tous les s y m p t m e s accuseraient la m m e intensit, si nous s o m m e s certains que les symptmes ont persist, nous ne pouvons nullement douter de la c o n t i nuation de la maladie. Le chirurgien, qui s'est approch de la malade la veille, ou l'avant-veille de la gurison, Ta d c l a r : La persistance opinitre de la maladie dura jusqu', la fin, et conserva toujours sa m m e n a t u r e : cela dcoule invinciblement de la persistance de tous les s y m p t m e s que j'ai dcrits. Le mdecin qui visita la malade la veille de la gurison s'exprime encore plus clairement : Je trouvai la malade, dit-il, b e a u c o u p plus souffrante que le jour prcdent... je vis que la m m e obstruction de la rate persistait avec la m m e intensit. La malade aussi, qui cerles a droit d'tre entendue, puisqu'il s'agit d'un fait qui lui est personnel et d'une chose qui ost du do maine des sens, dpose q u e : L ' u t r u s tait soulev, et prsentait une duret bien grande qui dora jusqu' la gurison ; il en tait de mme de la duret de la rate. 38. Ainsi, m m e dans l'hypothse (que n o u s n'accordons certes pas) o les mdecins n'auraient pas r e c o n n u la ma ladie a l'aide du toucher, nous pouvons, par u n e a u t r e voie, acqurir galement la certitude que la maladie persvra dans le m m e tat jurqu' la gurison. 39. La Critique qui fait un pas vers la reconnaissance de la gurison, cherche attaquer sa perfection: 1 Parce que la miracule ne s'est pas aussitt leve de s o n lit, mais qu'elle
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le garda encore un jour o u deux ; 2 Parce q u e , quoique le mdecin affirme qu'il a trouv la fivre disparue, il ajoute nanmoins: qu'il restait e n c o r e u n c petite altration du pouls, cause u n i q u e m e n t par l'affaissement et la privation des forces, or l'a Critique n e pense pas qu'on puisse concilier ce manque de forces avec l'uvre divine ; 3 Parce que, m m e aprs sa gurison, la malade fut sujette aux maladies de poitrine, d'aprs la dposition du dix-septime t m o i n : <i plusieurs fois, sur Marini a souffert de points de ct, et d'autres maladies de poitrine,aussi bien avant qu'aprs la susdite gurison. 40. Le mdecin va au devant de la premire difficult: il raconte la gurison miraculeuse de la religieuse, les e x p riences qu'il a faites pour connatre parfaitement la vrit; et il ajoute : J e lui ordonnai, pour plus grande prcaution, de garder le lit au m o i n s le jour qui suivit cette g u r i s o n ; mais j e la vis leve les autres jours suiva'nts. Ainsi, la malade garda le lit un jour seulement aprs sa gurison, et cela n o n parce qu'elle n e pouvait se lever, mais parce que le mdecin lui avait ordonn de rester couche. Et il le lui avait ordonn, n o n par ncessit, mais pour plus grande prcaution. Que conclure de ce fait contre la perfection de la gurison? Mais, dites-vous, et cette petite altration du pouls cause par l'affaissement? Eh b i e n ! le miracle c o n sistant e n ce q u e toute la malice de la maladie disparat sur-le-champ, la lgre altration du pouls cause par l'af faissement n'emporte avec elle aucune malice de la maladie; elle n'est pas n o n plus un reste de la maladie, elle en est seulement la suite, et n e peut par consquent dtruire le miracle. Vous insistez encore : mais on n e peut concilier le manque de force avec une uvre d i v i n e ? Nous avons enseign positivement le contraire, d'aprs Bordonius et Benot XIY. Si cependant,en dehors de ces autorits qui sont pour n o u s , vous en dsirez d'autres, voici Castcllini qui d clare (1) : pour qu'on puisse dire que le miracle a t in stantan, il suffit q u e la malice de la maladie soit enleve ti a en un instant Si, dans la suite, la faiblesse du corps rsultant de la gravit de la maladie ne disparat que quelque temps aprs, cela ne dtruit pas la raison du mi racle. Voici encore Pignatelli qui nous enseigne : Ce n e serait pas u n obstacle un miracle du troisime ordre, si une personne gurie par u n e vertu qui surpasse les forces de la nature, conservait une lgre pleur, une cicatrice, ( 1 ) De cert. glor. sanct. caput. 8, punct, 30. 2. 3.
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u n e tumpur, ou m m e u n e certaine faiblesse du corps ou dos m e m b r e s 11 suffit q u e la malice de la maladie ait a disparu instantanment, lorsque les forces de la nature ne pouvaient la faire disparatre (I ). Voici Zacchias (2). ( Mais quoi bon tant de t m o i g n a g e s , pour u n e cause aussi claire ? 41. Ce n'est pas t o u t : quelle fut d o n c cette faiblesse, qui permit la miracule de descendre le lendemain la cuisine, et de se montrer partout parfaitement g u r i e ? Le a jeudi-saint, d i t - e l l e , e l l e - m m e , c'est--dire le second jour aprs la gurison, j e m e transportai la cuisine, saine et libre c o m m e auparavant, j e mangeai des brocolis prpars Thuilc et au poivre, sans e n prouver aucun i n c o n v nient ; cependant auparavant l'huile et les autres pices m'taient trs-nuisibles. L e vendredi suivant, je m e rendis au rfectoire, j e mangeai avec les autres religieuses des < m e t s de la c o m m u n a u t ; j e le fis aussi le s a m e d i - s a i n t c sans en ressentir la moindre i n c o m m o d i t . Certes, une faiblesse qui permet d'agir ainsi, n e dut tre ni grave ni longue. 42. Enfin, quant la troisime difficult, bien q u e les p r i p n e u m o n i e s que Ton dit tre survenues aprs la gurison, ne puissent aucunement nuire a u miracle, parce q u e le m i racle consiste dans la gurison merveilleuse de l'obstruction de la rate, nous les rejetons cependant, parce qu'elles sont r e jetes par tous les tmoins dans le Sommaire, et s u r t o u t par le mdecin qui affirme : Et'cet tat de parfaite gurison dur jusqu'aujourd'hui. Le chirurgien a fait u n e dpo sition conforme celle l : E t cet tat de sant recouvre par la sur Marini a dur c o m m e il dure e n c o r e m a i n t e nant. Sans doute q u e le t m o i n , q u i parle de ces mala dies aprs la gurison, fut induit e n erreur par quelque lger r h u m e , ou par quelque malaise semblable, auquel la miracule, c o m m e tous les autres, a t quelquefois sujette, m a l a i - e q u e le t m o i n aura confondu avec les maladies prcdentes, et qu'il crut trs grave. En effet le m d e c i n , tout e n affirmant que la miracule avait toujours j o u i d'une b o n n e sant, a j o u t a : T o u t e f o i s , pendant c e long espace de temps, elle a e u quelquefois souffrir de q u e l q u e lger r h u m e de poitrine, et d'une fivre lgre provenant de constipation c e qui arrive chacun. Or, o n voit par faitement que cela ne s'oppose nullement une sant parfaite.
(I) Consult. canon. n>4. tom. 4. (3) Quasst. med. leg. lib. 1 0 cons. 3 n. s.
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4 3 . Cela n'a pas chapp noire illustre Censeur, et, b o u t d'argumentSjVoulant chicaner sur la perfection d e l gurison, il met tout en uvre pour obscurcir son vidence, autant qu'il le peut. Et parce que la gravit de la maladie p r i n c i pale recevait un accroissement notable des maladies secon daires, dont l'ensemble pouvait peine paratre supportable au corps humain pendant vingt-six ans, notre Censeur s'applique les attnuer, afin de rendre moins clatant le miracle de la gurison. Il dclare en eifel : Si vous mettez de ct l'obstruction de la rate, dont elle souffrit plus ou moins, les autres maladies qui svissaient de temps en temps, devaient l'affaiblir tant soit p e u , mais n o n pas
tait
bnigne, et quand elles avaient cess, la malade se p o r tait de telle sorte, qu'elle paraissait en b o n n e sant, que quelquefois m m e elle faisait pied des voyages assez longs.
44. L'clat du m i r a c l e - n ' a rien craindre de ces r e marques : elles dmontrent en effet ce que n o u s avons affirm, ce, que confirme la critique e l l e - m m e , savoir, que la religieuse, vive et alerte dans sa vieillesse, n'a jamais permis, quand elle tait dans la force de l'ge, la violence du mal de l'accabler et de l'abattre. Voil c o m m e n t elle se montrait c o m m e gurie, aussitt que la violence de ces affections venait disparatre; mais ces raisons n e prouvent nullement, que ces maladies ne furent pas de nature > abattre et briser le corps qu'elles torturrent vingt-six a n s . La critique crit elle-mme : elles furent graves les m a ladies qu'elle supporta Pennabilli.., elles furent graves aussi les affections qu'elle souffrit ensuite chez elle. Or, si ces maladies frquentes furent rellement graves, leurs effets n'ont certes pas pu tre de p e u d'importance. Et remarquez-ici, j e vous prie, que ces maladies secon daires furent toutes produiles par l'obstruction norme de la rate, et q u e , u n e fois produites, elles constituaient autant de maladies distinctes, avec leurs marches particulires, leurs issues, leurs ravages. 45. Dans notre dissertation sur les fonctions de la rate, nous avons vu que c e t organe fournit une abondante matire au foie pour la scrtion de la bile, et que la bile est absolument ncessaire la digestion. Nous avons v u aussi l'union si troite qui existe entre la rate et l'estomac. On peut donc conclure,avec les mdecins, qu'il est impossible d'intercepter i m p u n m e n t les fonctions de. la rate, sans attaquer en m m e temps l e foie et l'estomac. Et n o u s
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savons qne cela eut lieu dans le cas qui n o u s o c c u p e ; car ces viscres troubls pendant un si long temps, produisirent enfin, chez la malade, un m a n q u e d'apptit, et une aversion pour toute espce de nourriture qui lui causait un tel dgot que, lorsqu'on lui prsentait des aliments, elle se mettait pleurer. ISt cette rpugnance, qui a m e n a enfin la malade au seuil de la mort par le dfaut de nourriture, q u o i q u e cause par la rate ds le dbut, constituait alors u n e maladie distincte, par suite du trouble produit dans les fonctions de Veslomoc et du foie. 4 6 . Le sang repouss par la rate, et rejet tumultueuse m e n t vers les p o u m o n s , excita de frquentes inflammations dans ce viscre. On les combattit toujours par le sys t m e dprimant et contre-stimulant , c'est--dire, par des saignes gnrales, des applications frquentes de vsicatoires, des frictions, e t c . ; et ces remdes ont d ncessaire m e n t troubler l'quilibre des fluides, abattre les forces du corps, et priver les nerfs de tout frein. Aussi, entendonsn o u s la personne gurie n o u s dire : Les convulsions m'ont toujours plus ou m o i n s affaiblie, mais spcialement dans le cours de la dernire maladie. Nous voyons les m d e c i n s rappeler : les veilles, ou le dfaut de s o m m e i l . Parlant de ces veilles, la miracule dclare que pendant six m o i s elle n'avait pu fermer l'il . Cetle faiblesse, ces j e u x effrns des nerfs, quoique produits par la maladie principale, constituaient n a n m o i n s u n e maladie particu lire et grave, laquelle la gurison de la maladie principale ne pouvait pas apporter de soulagement. 47. Si on envisage la marche des pleursies et des pripneumonies, on dcouvre que souvent elles en vinrent au p o i n t d'ulcrer les p o u m o n s : Or l e s pleursies et les pri p n e u m o n i e s , disent les m d e c i n s , taient frquentes ; elles produisaient des crachats s a n g u i n o l e n t s , et quelquefois p u r u l e n t s . Combien grande est la gravit, combien redoutable est le danger de ces maladies, quand bien mme l'organe n'en serait atteint qu'une seule fois, le premier miracle n o u s Ta fait voir. Que penser donc, lorsqu'il se rpte si s o u v e n t et tant de f o i s ? Mais voici que les pou m o n s furent atteints gravement par l'invasion des maladies a d d i t i o n n e l l e s , lesquelles, quoique produites par la maladie principale, n'en constilurent pas m o i n s cependant dans la suite des m a l a d i e s distinctes et pernicieuses. 48. Le reflux du sang de l'utrus tant e m p c h par Tirrgularit et par la suppression des rgles, effets produits par la maladie de la rate, et peut-tre aussi le sang affluant
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eu trop grande abondance l'utrus, parce que sa circula tion dans la rate est empche, produit une inflammation de cet organe,et bientt cette inflammation dgnre en sup puration, c o m m e l'atteste l'vacuation d'une matire puru lente. Or, c o m m e Louis Mercatus l'atteste aprs Hippocrate, il est prouv a que cette maladie est trs pernicieuse, et c'est peine si une femme peut s'en tirer... Car c'est une chose reue par tous les docteurs, que les inffammalions de l'utrus sont trs graves, avec cette diffrence cepen dant, que celles qui s'attaquent l'orifice de l'utrus peuvent se gurir plus facilement, mais que celles qui affectent l'utrus tout entier sont incurables (1). Dans le cas en question, l'utrus tait atteint tout entier par r e n g o r g e m e n t , c o m m e le prouve l'norme tumeur visible l'il, et si douloureuse qu'elle ne supportait aucun contact. Astruc le dclare en effet: Si la douleur, la tension, la rsistance occupent tout le volume de l'utrus; si la Lumeur est trs grosse, il n'y a plus aucun doute, la < matrice est affecte dans toute son tendue (2). Le m m e c auteur discourant sur le m m e cas, ajoute : Lorsque cette inflammation affecte l'utrus tout entier, ou en affecte la plus grande partie, il reste peu d'espoir. Cette maladie si grave procdait de la maladie de la rate, mais dj, par sa propre violence, elle conduisait la malade la mort, et elle tait arrive au point que sa gurison ne dpendait nullement de la gurison de la maladie principale. 49. Jugez, par toutes ces raisons runies, si n o u s n' tions pas fonds soutenir, dans notre Information, que cet assemblage de maladies offre la plus magnifique matire au miracle, parce qu'elles taient peine supportables un corps h u m a i n pendant vingt-six ans. Or toutes ces m a ladies ont disparu s u b i t e m e n t ; donc tout ce que la critique pourra runir contre l'vidence du miracle, n e parviendra pas m m e l'obscurcir. 50. Il est u n vieil adage ainsi c o n u : S i v o u s n e pouvez frapper l'ne, vous frapperez la litire. Ainsi en est-il de la Critique; n'ayant pu infirmer lemiracle,ni lui enlever quoique ce soit de son clat, elle s'efforce d'attaquer un autre fait prodigieux accompli e n confirmation du premier. Notre religieuse, appele quelques annes aprs sa gurison p o u r tre interroge, savait qu'il lui fallait dposer sous la foi du serment; elle craignait de ne pouvoir rapporter clairement (1) De mul. afect. lib. 1 cap. 7. (2) Loc. cit. 5. 6.
et convenablement roui ce qui avait eu lieu ; elle c o m m e n a se troubler, se demander si elle devrait dposer. Mais peine s'tait-elle arrte cetle pense, q u e j e sentis t o u t coup, dit-elle, u n e douleur la rate, douleur bien plus * forte q u e j e ne l'avais jamais ressentie dans le cours de < ma maladie.lors courbe, et remplie de crainte, je m e r e tirai seule dans ma c h a m b r e . . . Je m e jetai genoux a u x pieds du lit, j e m'adressai avec u n e foi vive au vnrable serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre, j e lui demandai pardon de m o n h s i i a l i o u , j e lui promis q u e j'irais fran* c h e m e n t prter n o n pas u n , mais mille serments pour attester tout ce q u e je savais du m i r a c l e . . . Cette prire v( termine, la douleur cessa i m m d i a t e m e n t , ainsi q u e t o u t e espce de doute et toute espce de crainte, et grce Dieu , grce Benot-Joseph, j e n'ai plus souffert depuis. 5 1 . Ce fait est pour notre Censeur u n e confirmation trop vidente du prodige. Il cherche donc affaiblir la force de c e t m o i g n a g e . Et d'abord, il nie qu'il faille ajouter foi c e l l e qui parle, parce qu'elle est un t m o i n u n i q u e . Il fait observer, e n second lieu, qu'elle rapporte u n e chose invrai semblable, car il n'y avait pas de raison celte p u n i tion, puisque l'hsitation procdait de la crainte religieuse du serment ; il affirme au contraire q u e la miracule m r i tait p l u t t u n e punition pouravoir affirm, aprs le miracle, qu'elle avait obtenu la grce de sa g u r i s o n plus par l ' i n tercession du vnrable, q u e par l'application des remdes a humains. Saisissant enfin mordicus c e t t e expression de grce chappe dans la dposition ci-dessus rapporte, il n o u s demande si n o u s appellerons miracle c e q u e la p e r s o n n e gurie regarde c o m m e u n e grce. 52. Cela mrite-t-il une rponse? Si c e t t e circonstance tait retranche du S o m m a i r e , l e miracle de la gurison n e serait c e r t a i n e m e n t pas m o i n s certain, ni m o i n s splendide ; mais n e ngligeons a u c u n e vrit, on rfute chaque chose en particulier. Avec Benot XIV, nous rpondrons la premire difficult : Il faut admettre q u e c'est la rgle do ne pa& s'en rapporter au t m o i g n a g e d'un seul, pour terminer le dbat par c e t m o i g n a g e u n i q u e . Mais cette rgle n'est ni universelle, ni tellement absolue, qu'elle n e souffre quelques exceptions ( l j . C'est pourquoi, selon la rc marque d e Mascardus, s'il tait trs difficile o u e n t i c remeut impossible d'avoir plusieurs t m o i n s , il faudrait (1) Lib. 3. cap. o. nuin. >.
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alors ajouter foi la dposition d'un seul t m o i n ; tel est <t le sentiment des jurisconsultes (I). Or ce qui affecte l'me, o u les parties intrieures du corps, n e peut tre c o n n u , en l'absence de tout signe extrieur,de nul autre q u e de la patiente ; c'est pourquoi il faut lui donner une pleine confiance quoiqu'elle soit seule. Mais cela n'a pas besoin d'tre prouv au sein de cette sainte congrgation qui, lorsqu'il s'agit de miracles, admet de temps en temps, comme bien prouves, des invocations appuyes sur la seule dposition de la personne qui faisait l'invocation, et cela parce qu'on ne peut avoir de preuve plus surabondante. 32. Pour la seconde difficult, il ne n o u s est pas permis de scruter les desseins de Dieu, ni de demander Dieu pourquoi il a envoy cette maladie dans telle circonstance plutt que dans telle autre. Nous ferons remarquer que cette hsitation de la personne gurie aurait enlev a u . m i r a c l e ses preuves principales et n c e s s a i r e s ; donc, p u i s q u e cette u v r e divine devait tre manifeste, il tait ncessaire que toute e s p c e d'hsitation et rie doute cesst chez la reli gieuse, et qu'elle ft en m m e temps c o m m e force de rapporter les faits. Or ce rsultat ne pouvait s'obtenir d'une manire, ni plus convenable ni plus efficace que par l'envoi soudain de l'ancienne maladie, et par sa disparition subite k la suite de la prire, surtout puisqu'elle devait avoir pour c o n s q u e n c e la tranquillit de l'esprit. 53. Quant aux paroles pour lesquelles notre Censeur v o u drait que la religieuse fut punio, nous les tenons s e u l e m e n t d'un tmoin auriculaire qui, faisant sa dposition aprs trente ans peu prs d'intervalle, n'a peut-tre rendu ni les paroles, ni le sens des paroles prononces. Et en effet, la miracule, dans sa dposition, employa une manire diff rente de s'exprimer.Parlant des remdes, elle a dit:a Tout, ce q u e j e sais, c'est qu'ils ne m'ont fait aucun bien, puisque m o n mal ne cessait pas; qu'au contraire, il augmentait. Et parlant de la gurison, elle assura qu'elle avait toujours t certaine du miracle. Or, cette manire de parler est bien diflrente de celle-ci : Qu'elle avait reu la grce de la gurison plus par l'intercession du vnrable que par a l'emploi des remdes h u m a i n s . C'est pourquoi, si la personne gurie a rellement pens ainsi, c o m m e le fait e n tendre sa dposition, en cas de punition, elle aurait t p u nie n o n pour une faute c o m m i s e par elle, mais pour un o u bli venir qui lui tait tranger.
<i) De probat. qna?st. l i . n u m 18.
34. Accordons toutefois q u e cette g u r i s o n miraculeuse ait f dsigne par elle sous le n o m de grce. Depuis long temps on a fait j u s t i c e dans les discussions de l'adage : a Le matre l'a dit. Et certes, u n e religieuse n e peut s'attribuer en m d e c i n e ou en droit canon assez d'autorit, pour prononcer ex cathedra s'il est question de miracle ou. de grce. Si les preuves tablissent u n vritable miracle, le m o t grce signifiera miracle, quand bien m m e et la per s o n n e gurie, et tous les tmoins ensemble auraient dsign ce miracle par le n o m de grce ; c o m m e , au contraire, ce m o t signifierait grce, nonobstant le sentiment contraire de t o u s les t m o i n s , si les preuves affirmaient la prsence d'une
grce et non celle d'un miracle. 55. La critique e n arrive enfin l'invocation, et plus elle l a trouve ressemblant u n prodige, plus elle s'applique dployer de sagacit pour la combattre. Elle attribue u n s o n g e l'apparition de la religieuse i n c o n n u e , qui lui offrait l'image du vnrable Benot, d'o est rsulte la gurison. Nous n o u s garderons bien de fatiguer les RR. Pres d'une nouvelle relation du f a i t ; elle s e trouve dans le Sommaire, et aussi dans noire Information. Mais n o u s ferons observer: 1 Que la personne gurie a renvers d'avance l'objection de notre Censeur, lorsqu'elle a d c l a r : j e n e pouvais plus a u c u n e m e n t d o r m i r ) ) , lorsqu'elle a rapport l'ennui q u e lui causait l'arrive i m p o r t u n e de la sur, et le dialogue qu'elle eut avec c e l l e - c i ; lorsqu'elle a-racont e n toutes lettres l'invocation qu'elle fit, et enfin lorsqu'elle oppose l'tat de s o m m e i l qui suivit l'tat de veille de l a n u i t prcdente, d i s a n t : Je m e senlis si s o u l a g e , q u ' i m mdiatement j e dormis tranquillement, cette n u i t ; chose merveilleuse pour m o i , qui depuis six m o i s n'avais p u fermer l'il. > 56. Si cela n e parat pas suffisant, n o u s ajouterons qu'il n e put y avoir alors de songe. Les songes, e n effet, se c o m posent de la runion de tableaux qu'on s'est fait auparavant. Or la malade, pendant la priode entire de sa dernire m a ladie, n'avait nourri aucune ide d'invocation. Et, bien q u e dans les temps antrieurs, elle et pu avoir l'esprance de recouvrer u n e parfaite sant, et que, pour cela, elle e t pu recourir quelque saint, elle avait, au m o m e n t de la g u r i s o n , perdu entirement tout espoir, et pensait unique m e n t la m o r t : D a n s cette dernire maladie, dit-elle e l l e - m m e , j e n'ai e u recours aucun saint, parce que j e n'esprais plus gurir ; j e m'tais prpare rendre m o n me en toute rsignation m o n Crateur. E t cette
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dernire priode d e l maladie se prolongea, c o m m e nous Pavons vu, pendant pres de trois ans. Une aussi l o n g u e tranquillit d'esprit, une dsesprance si c o m p l t e d'obtenir la saut du corps, excluent totalement une confiance trsvive et une invocation qui n'auraient exist qu'en songe. 57. Donc, quoique nous ignorions si l'apparition de la religieuse inconnue, et celle de l'image ont eu lieu s e u lement par vision d'une manire p h y s i q u e , et non relle, nous regardons le lait c o m m e certain. Et n o n - s e u l e ment les raisonnements prcdents nous conduisent cette c o n c l u s i o n , mais encore la confiance insigne envers ce ser viteur de Dieu, excite par l'arrive de la religieuse,.car jamais la malade n'avait eu recours lui. Le souvenir d'une ancienne bonne uvre faite en sa faveur, lui servit de titre pour implorer s o n secours, elle lui disait : Par ce petit pain que je vous ai donn, de trois grces accordez moi l ' u n e , o u la s a n i , o u la mort, ou la patience. D'ail l e u r s une gurison, surtout, lorsqu'il s'agit de lsions orga n i q u e s , n'aurait jamais pu filre la suite d'un s o n g e . 58. Mais, dites-vous, pourquoi, dans cette uvre, qui parat accomplie par l'intercession du Vnrable Benot Joseph, pourquoi introduire la figure d'une religieuse i n c o n n u e ? Demandez-le Dieu seul. Pour n o u s , n o u s n'oserions le faire. Il nous suffit d'avoir dmontr que cela n'a pu arriver par le m o y e n d'un songe, et que, pour c e t t e raison, l'invocation a rellement eu lieu. 5L Nous ne voulons pas retenir plus l o n g t e m p s les Rll, Pres avec ces riens, qui n'ont pas eu la force de c o n vaincre celui-l m m e qui les objectait. t p u i s q u e l e peu de valeur m m e des objections tablit l'vidence de ce mi racle, puisque tout le reste est dmontr aussi c l a i r e m e n t ; n o u s avons la juste confiance que notre rpon&e rendra favorable le j u g e m e n t que les Pres consulteurs porteront avec leur prudence habituelle.
FHANOIS MERGURELLL
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u n e obstruction squirrheuse de la rate, dure c o m m e la pierre, a v e c c o m p l i c a t i o n de trs-graves s y m p t m e s et d'autres maladies. Je suis loin de nier que la rate de c e l t e religieuse ait t atteinte de quelque maladie ; mais il est clair que sa maladie la plus grave tait dans l'utrus. Le docteur chirurgien Jean Ciccolini, l'un de ceux qui ont donn leurs soins la m a lade, s'exprime ainsi : a C e l a i t , c o m m e j e l a i dit plus haut, u n e obstruction forte et invtre de la rate, d'une duret irrductible, et semblable celle de la pierre, jointe un e n g o r g e m e n t notable de l'utrus. L'utrus tait g r a v e m e n t atteint, ainsi que le dmontre la matire maligne et purulente qui en sortait f r q u e m m e n t De l, p r o v e n a i e n t chez elle, les crises h y s t r i q u e s , l'aversion pour la nourriture, le d g o t de l'estomac, les convulsions, les vertiges, et enfin les aulres maladies que les tmoins rap portent dans leurs diffrentes dpositions. Or pourquoi placer dans la rate plulfc que dans l'utrus le sige d e l maladie et le sujet du m i r a c l e ? 2 . Du j u g e m e n t du m d e c i n expert, il ressort clairement q u e l'utrus a souffert de plusieurs aflections ; or ce viscre est b e a u c o u p plus important que la rate et si on ne place pas' en lui le sige principal de la maladie, en voici la rai son u n i q u e : On ne sait pas, dit-on, si cette cause pourrait tre l'engorgement de l'utrus ; or, si ce d o u l e existe pour la maladie de 1 utrus, il devient b e a u c o u p plus grave pour robslpuction de la rate. La dilficult devient plus grande encore, lorsque n o u s remarquons qu'on n'assigne a u c u n e cause l'obstruction de l'utrus, d'o il rsulle que n o u s ignorons si elle doit son origine la rupture de quelque vaisseau, un amas d'humeurs, ou l'aiflux du sang. Or, o n n e peut, en aucui.e manire, porter u n j u g e m e n t sur u n miracle, tant que son sujet demeurer dans l'incertitude. 3 . La question s'embrouille de plus e n plus, si l'on a d m e t l'obstri-ction s q u i u h e u s e de la rate. En effet, le propre du squirrhe e s t d e n e pas affecter le v i s c i e tout entier, et de n'en atteindre qu'une partie. Cela tabli, il faudra e x a m i n e r si l'obstruction lut partielle ou universelle, c'est l la question. Si vous allii mez que 1 obstruction de la rate fut universelle, vous rejetez le squirrhe; si elle fut simplement partielle, nous vous demanderons alors c o m m e n t toutes les f o n c t i o n s de la raie, surtout Jes plus importantes, furent troubles au point de donner n a i s s a n c e s une maladie qui puisse constituer t n n i t n t le sujet du miracle? -I. 11 ne faut pas non plus ajouter trop de confiance au
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tmoignage de la gurie lorsqu'elle d c l a r e : Ces maux m'as&aillirent diffrentes reprises, mais la maladie de la raie fut toujours constante , car la suprieure du monastre souponna e l l e - m m e , chez la m a l a d e , une cer taine exagration qu'elle considra c o m m e un effet de l ' i m a g i n a t i o n ; voici ses p a r o l e s : J e n'ai jamais cru que ma sur Marini ait agi par dissimulation, lorsqu'elle par it lait de son mal, quoique j'aie dout plusieurs fois que la < maladie ft telle qu'elle le donnait entendre. ( 5. V e u t - o n voir m a i n t e n a n t la force des motifs de l ' i n certitude qui n o u s e m p c h e de reconnatre l'obstruction de la rate c o m m e l e , s i g e principal de la maladie? Exami n o n s les donnes de la physiologie et de la pathologie, afin de constater les diffrentes f o n d i o n s de la rate. Nous d couvrirons m i e u x alors les malaises que le trouble de ce viscre peut occasionner, nous apprendrons si et c o m m e n t la duret de la rate peut se rsoudre, et,par consquent, si la g u r i s o n s'est produile d'une manire naturelle. 6. Et d'abord, pour ce qui concei ne les fonctions d e l rate, tous les physiologistes et tous les palhol o g i v e s c o n v i e n n e n t que, jusqu' prsent, ces fonctions n'ont pu tre d t e r m i n e s d u n e manire certaine. Sur ce point, les s e n t i m e n t s des auteurs, tant anciens que modernes, qui ont trait la question, varient presque '1 infini. Passons sous silence ce qu'ont crit sur ce viscre les anciens c o m m e P i a t o n , Empdocle, Arislote, et Elmontius, qui se s o n t t r o m p s tous plus ou moins. Quand aux physiologistes trsmodernes,ils ont sur ce point des opinions diffrentes.Les uns ont regard la rate principalement c o m m e un organe auxil i a i i e de l'estomac dans le travail de la digestion. Ce sont : Bertrand, Caramelli, et Moreschi. Ce dernier surtout s o u tient ce s e n t i m e n t avec une vigueur qui l'en a fait regarder c o m m e le principal auteur. Crawnford pense que les fonc t i o n s propres de la rate sont de fournir la chaleur ncessaire la digestion. Tiedman e t G m e l i n sont d'avis que la rate a certaines affinits avec la calgorie des vaisseaux lympha tiques ou blancs. Ils la dfinissent une espce de glande arrondie, dont le sang est scrt sous forme de fluide rouge et coogulable, reu dans les vaisseaux lymphatiques, et port dans les tube thoracique pour se transformer en chyle. Les autres, au contraire, c o m m e Slranz et Arthaud, enseignent q u e Ja raie est un viscre de nature ncessairement n e r v e u s e et dpendant du systme ganglionnaire. 7. Mettons t o u t cela de c t . Actuellement l'opinion c o m m u n e est que la rate j o i n t son action celle du foie
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pour scrter la bile. Cependant les auteurs, plus rcents encore, qui se rangent ce s e n t i m e n t , font remarquer que cette fonction n'est pas la seule q u e remplisse la rate. Car, disent-ils, c o m m e le dfaut de scrtion se trouve suppl dans un grand nombre de cas, ce viscre serait alors presque inutile. C'est pourquoi la rate doit avoir d'autres fonctions qui n o u s sont encore i n c o n n u e s , puisque c'est u n viscre o u un organe particulier distinct des autres. 8. Nous ne rencontrons pas un avis diffrent chez le c lbre Maggiorani, que le dfenseur de la cause a cit dans ses rponses. Il a bien e m p l o y tous ses soins e x a m i n e r la rate, mais il avoue l u i - m m e que ce qu'il a crit et l sur ce viscre, ne repose que sur des conjectures plus o u m o i n s probables. 9. C'est un fait trs certain, et bien constat par les mdecins experts, q u e les vaisseaux de la rate o n t de nombreuses c o m m u n i c a t i o n s avec c e u x de l'estomac : savoir avec le d u o d n u m , le pancras, et avec le foie. Ils e n ont conclu que la rate est destine fournir ces organes une quantit plus grande de sang, toutes les fois qu'il e n est besoin, soit pour ta digestion, soit pour l confection d u chyle, fonctions qui exigent une bien plus grande a b o n d a n c e , tant de sucs gastriques, que de bile et de fluide pancratique. Et, lorsque cela est opportun, la rate leur enlve une partie du sang qu'ils c o n t e n a i e n t ; elle le retient dans sa cavit, et l ' e m p J i e d'tre nuisible, c o m m e cela arrive dans u n e course prcipite o u dans l'acte de sauter. Alors la rate se gontle, on ressent une douleur dans l'hypocondre gauche ; mais c'est tort que la cause de cette douleur est attribue la r a t e ; la rate ne fait que modrer et rgir le sang d e s viscres qui contiennent le chyle. 9. Georges Guvier affirme que la rate a n a t u r e l l e m e n t , d'un ct, des rapports immdiats avec la scrtion d e l bile, de l'autre, des rapports indirects avec la scrtion des sucs de l'estomac, et des intestins grles, et que proba blement les fonctions qu'elle remplit o n t pour objet l'une et l'autre de ces deux oprations. B o r n o n s - n o u s ces donnes de la physiologie.De son ct la pathologie n o u s apprend que la rate peut quelquefois revtir un caractre de d u r e t ; par exemple lorsqu'un obstacle s'oppose la circulation dans les veines du foie. Dans les affections organiques du cur, elle peut passer de Ttat spongieux et m o u l'tat de duret. Il y a r a r e m e n t hypertrophie de la rate, sans que la nature de son tissu subisse quelque c h a n g e m e n t ; et son volume prend
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toujours de l'accroissement, lorsqu'elle cesse d'tre m o l l e . La rate peut s'tendre en haut, e n bas. et sur le c t . Quelquefois elle prsente des aposthmes, et des s u p purations. Si ces aposthmes s'ouvrent l'intrieur, ils donnent la mort au malade; si c'est l'extrieur, ils ne lui c a u s e n t aucun inconvnient. 12. Le parenchyme d e la rate peut s'amollir sous l'in fluence de diverses affections, sans qu'on puisse tablir si l'inflammation a produit cet amollissement. Vers l e 4 o u vers le 8 jour du gonflement, la rate ordinairement se ramollit. Dans toute maladie du tube digestif, ou de tout autre or gane, l'apparition de la forme adynamique, arrive le r a mollissement de la rate, ce qui est trs-frquent la suite des fivres intermittentes. Enfin la rate est porte h se ra mollir toutes les fois qu'il y a u n trouble dans la circulation et dans rnervation qui arrivent e n m m e temps. 1 3 . De ces notions physiologiques il est facile de con clure qu'on est dans une incertitude presque complte par rapport aux maladies de la rate. Ce que la science nous a fourni jusqu'ici u r ce point ne saurait revtir cette certi t u d e et cetie vidence ncessaires pour que nous puissions n o u s prononcer avec certitude sur ceux qui sont atteints de cette maladie. Cela pos, tout le monde voit clairement, d'abord qu'il n'est pas certain que les diffrentes maladies da la Sur Angle aient eu leur origine dans la rate. Et parceque n o u s avons montr avec vidence que l amollis sement de la rate pouvait provenir de plusieurs causes na turelles, surtout la suite d'un trouble survenu dans les organes de la digestion, te ramollissement de la rate, qui a pu avoir lieu chez notre religieuse, peut certainement avoir t produit par les forces de la nature En effet, que cette religieuse a u t sujette plusieurs maladies eL plusieurs troubles de celte espce, dans la dernire priode de sa ma ladie, le dtenteur non-seulement en couvieut, mai s'elfjree grandement de le prouver. Main le trouble dans le cours du sang, la fivre, l'augmentation du volume de la rate, son inllainmation, et les autres allecuons morbides, qui prirent de grands dveloppements b u r . u u t cette poque, lurent, d'aprs les principes de la patliuiogid, a u t a u t d e e a u s e o qui ont pu a m e i K T chez la malade le ramollissement de la r a . e . Et ce ramollissement une l o i s a r r i v e , les autres uididies accessoires durent ncessairement disparatre.
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1 4 . La plupart des remodea adui.maires la m dade sont propres a nous faire admettre une guerisou n.amvtie. \s crise qu il laut reconnatre daus i c vomis^euieat du s>aug,
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dans l'coulement des hmorrodes, dans i e s matires fcales, et dans des vacuations plus abondantes, c o n d u i s e n t la m m e c o n c l u s i o n . Il en e s t encore ainsi de l a nature mme, de la gurison qui n e n o u s apparat ni ins-, t a n l a n e , ni parfaite. Kn effet avant d'tre malade, elle j o u i s s a i t d'une sant forte e l florissante ; et deux jours a p i s sa gurison, elle est oblige de garder le lil. On donne, bien pour cause cet accident : une H s - l g i e allration du pouls. Mais donnez-lui le nom q u e vou voudrez il y avait l soit un c o m m e n c e m e n t , soit un reste de livre. 15. Mais voici un obstacle plus srieux : quoique la maladie paraisse gurie dans son espce, elle se transforma c e p e n d a n t ensuiie en d'autres affections. Le XVII tmoin rapporte q u e dans la suite la religieuse souffrit des attaques, des points et d'autres affections de poitrine, et qu' cause de ces maux, elle c o m m u n i a u n e i o s en via: tique.Cela, ajoul.a-t-ii, arriva, aussi bien avant qu'aprs la premire gurison . La gurison ne lut donc ni instan tane, ni paifaite. Si vous voulez objecter qu'il faut dis tinguer ces maladies de l'obstruction d e la / a i e , alors je v o u s accuserai de coniradition. Car, puisque les maladies de c e l l e espce vous paiaissaient, a\iini la gurison. se rappoitfci l u b s t r u c t o n de la raie, pourquoi pas aprs? 4 6. Si n o u s en venons l'examen de I i m u c i i o n , eb biem, sur ce point, il y a quelque chose aussi dsirer dans cette gurison. Dans nos premires critiques, nous a \ o n s montr qu il faut attribuer u n songe c e l l e vision o il est dit qu'une religieuse i n c o n n u e est a p p a i n e Angle Josphine, lui pr sentant 1 image du vnrable Benot, i exhortant en mme t e m p s m e t l i e toute sa confiance au p a l i o n a g e de ce servi teur de Dieu, pour obtenir sa gurison.Il c o n r i e n t d'ajouter ici une raison qui confnniera nos n m a r q u e s premires, et qui infirmera avec plus d r i d t n c e les preuves de l'mvo-c c a t i o n . Il est parfaitement clair que personne,parmi les reli gieuses de c e m o n a s l i e , n'a prsente 1 image du Vnrable la s u r malade. 11 s'ensuit donc r i g o u i e u s e m e n t que ce que la malade e l l e - m m e ra( poi le de la religieuse inconnue est l'eflet d'un songe, ou d'une rision qui lui serait arrive en dehors des lois de ia n a t u i e . Mais il n e faut admettre ce qui surpasse l'ordie de la n n i u i e , qu'autant que cela est b u n clan et bien tabli par des preuves lgitimes, ce qui e t i impossible lorsqu'il n y a que n U m o i g n a g e d'une seule p e i s o n n e . Reste d o n c a l l u u u i r cette vision un songe, ou fopi alion d'une imagination un peu rive, ce qui est Tquivaieni d'un s o n g e . Et aiors a n'y a plus d ' i m oca Lion,
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L'invocation n'est-elle pas un acte de religion qui procde de l'intelligence et de la v o l o n t ? Or l'inlelligence et la volonl d'un h o m m e moiti endormi ne sont capables de rien, car l'homme alors n'a pas conscience de l u i - m m e , l'invocation en tant qu'acte religieux, ne peut pas m m e tre suppose dans l'tat de s o m m e i l . 17. Et d'ailleurs la malade e l l e - m m e le dclare. J e n e saurais dire si ma maladie a cess en ce m o m e n t , parce que j tais hors de m o i . Ainsi, puisque son esprit n'tait pas prsent, elle ne pouvait produire un acte humain et volou taire. 18. Tout cela se confirme parfaitement, si nous consid rons la nature un peu vive de la sur Angle qui avait une imagination galement vive, et m m e qui fut souvent sujette de violentes attaques d'hystrie. La Marini tait sujette aux convulsions, l'hystrie, et son corps tait s o u vent livr des m o u v e m e n t s extravagants . Ces affections se sont prolonges jusqu' la gurison. Faut-il s'tonner que cetie religieuse, brise par de si longues veilles, se soit livre au sommeil, et que ces affec tions maladives aient produit, pendant que le corps tait tendu, extnu, cette sorte de dlire, avec une puissance telle, qu'elle ait cru, la lgre, que cette espce de songe et ces illusions taient bien la ralit. Rappelons-nous donc ces paroles si bien appropries du p o t e : Les songes lgers
avons reconnue ailleurs pleine d'habilet et de f o r c e ; l'in trt de la dfense l'exige. Et la nature d'une cause si j u s t e n o u s donne le droit d'attendre des experts choisis par l'Eminent Prsident, le j u g e m e n t le plus exact sur c e troisime miracle. Les Rl. Pres p e n s e n t q u i l faut c h a r ger de ces fonctions srieuses deux habiles m d e c i n s , afin q u e leurs raisons savan les et claires produisent en n o u s la certitude, en vertu de laquelle n o u s prononcerons s'il faut en tnu le sret attribuer ces gurisons au miracle. Andras Maria Frattinis. adv. c o n s . et p r o m o t e u r de la foi.
lu snxfe cause et la- source unique des diffrentes maladies, bien que prsentement, il reconnaisse aussi que la rate et:t niteinte de quelque maladie grave, et qu'il s'applique
t o u t entier bien expliquer la gravit d'une affection s p l nique, cependant il c o m m e n c e par d e m a n d e r * pourquoi il faut placer dans la rate plutt que dans l'utrus le sige de la maladie et le subjectum du miracle, lorsqu'il est vident que l'utrus a t plus gravement atteint. C'est pourquoi, afin de ne pas btir sur te sabie, au com'mencemeni m m e de notre dissertation, nous montrerons que dans le cas en q u e s t i o n , l'obstruction de la rate fut la maladie piincipale, qu'elle fut la cause et la source de toutes les affections m o r b i d e s .
principale.
2. Ceux qui habitent des contres marcageuses sont sujets particulirement aux obstructions de la rate. C'est un fait que n o u s voyons si frquemment de nos propres y e u x ,
qu'il n'a besoin d'aucune preuve.Monleggia (l)l'a constat en ces termes : Les causes les plus ordinaires de ces obslrucc tions sont les longues fivres intermittentes ritres et la rsidence dans des lieux humides. E t bien avant lui Bonetus avait crit dans son livre intitul le cimetire ( 2 ) , < ceux qui habitent dans des lieux humides ont o r d i n a i r e c m e n t de grandes rates . Nous nous bornons ces cita tions, car tous les autres mdecins, d'accord avec ceux q u e nous venons de n o m m e r , o n t plac l'humidit de l'air parmi les causes principales des obstructions. Or, quiconque a vu le pnys habit par notre religieuse ds son enfance sait, n'en point douter, qu'il est d'une extrme humidit, car Pennabilli est situ sur u n e colline environne de toutes parts par les monts Feretraniens. 3. E n outre, u n e cause trs-grave des maladies de la raie se trouve dans les exercices violents du corps; la physiologie mme de c e viscre n o u s l'apprend. 11 est certain, dit Gortcr (!5) ; que la raie est un viscre dont le tissu est des plus compliqu : elle n'a qu'un faible m o u v e m e n t vital;* la circulation du sang y e s t trs-lente; elle dverse son sang dans la .veine porte, laquelle ne peut le verser dans la veine cave, dans le foie, qu'aprs avoir franchi rouver te ture resserre de l'artre porte, ce qui cause l beaucoup plus qu'ailleurs un retard dans la circulation. Or dans c e viscre paresseux, qui rend si difficilement le sang qu il a reu, une assez grosse artre transporte u n sang abondant. Si donc un m o u v e m e n t violent des muscles vient activer la circulation du sang, ce dernier affluera dans la rate avec plus de force et d'abondance par l'artre de cet organe. Mais c o m m e ce m m e sang ne peut se rendre dans la veine porte avec la m m e promptitude, ni en aussi grande abondance, soit cause du peu d'activit de la rate, soit cause de la difficult du trajet, il y, aura videmment des arrts, des engorgements. L'exprience vient confirmer ce qui est clair et manifeste pour la raison. Citons ce rapport de Morgagni : Un jeune h o m m e de vingt ans environ se trouvait valtudinaire depuis prs de deux ans, malgr la (k force de temprament dont il tait dou. Il attribuait la cause de son tat soit la chasse, la danse et autres exercices semblables, auxquels il s'tait beaucoup livr, soit sa propre profession, car il peignait le lin Une (1) Ins. chirurg, vol.. 2, g 1143. (2) Lib. 3, seci. 10 de liypochond. tumor. (3) Gorteren Hippocrates, apli. 32, num. o, lib. 3.
sec
it
forle tumeur se dclara Phypoehondre g a u c h e . . . . l o r s qu'on ouvrit le cadavre... les viscres du ventre attiraient les regards par une pleur i n a c c o u t u m e , ou mieux par leur blancheur. Il faut e n excepter toutefois la r a t e qui avait conserv sa couleur naturelle, mais elle tait t e l lement augmente de v o l u m e , qu'elle galait le foie en grosseur et qu'elle pesait 4 livres 1/2 ( l ) . 4. Puisqu'un air h u m i d e et un violent exercice du corps sont chacun sparment des c a u s e s propres et efficaces d ' o b s t r u c t i o n s splniquos, p o u r r a i t - o n refuser cle leur r e c o n natre la m m e proprit et la m m e efficacit lorsqu'ils se trouvent r u n i s ? Interrogeons les faits. Celle qui a t gurie s'exprime ainsi : Jusqu' ma v i n g t - d e u x i m e o u vingt-troisime anne j'ai toujours joui d'une b o n n e sant, parce que, sous u n e frle apparence, j'ai un fort temprament. A partir de cette poque, je c o m m e n a i m e sentir malade d'une douleur la rate. Je crus qu'elle (f provenait d'un grand chauffement d de violents et frquents exercices du corps, et spcialement un bal qui a dura bien trois heures, auquel j e pris part avec mes autres c o m p a g n e s , pendant le carnaval, dans le m o n a s tore de Pennabili. 5. La maladie d'Angle-Josphino c o m m e n a donc la rate ; elle c o m m e n a en hiver, dans un lieu trs-froid et h u m i d e ; elle c o m m e n a aprs de violents exercices du c o r p s ; et, c o m m e les faits le dmontrent, ces causes diff rentes, qui, par leur action naturelle, agissent ordinaire ment sur la rate, ont vritablement exerc leur aptitude et leur efficacit sur ce viscre. Et pour n e pas revenir plus tard sur ce point, faisons remarquer contre notre censeur et contre le mdecin expert, que n o u s n'avons pas omis de dsigner, et que, dans le fait, on n'a pas eu dsirer les causes capables de produire une obstruction de la rate. 6. C'est d'abord la malade gurie qui dit: je c o m m e n a i me sentir malade d ' u n e douleur la rate . Elle p o u r suit et elle ajoute ; Et cette douleur alla croissant de jour en jour de faon que, au temps de l'Avent qui suivit le * carnaval relat plus haut, je fus contrainte de cesser tout travail, de m e mettre au lit, et de m'assujettir au trai t e m e n t du docteur Battelli . Et un peu plus bas, parlant de cette maladie, elle dit : Cette douleur la rate fut t o u jours constante jusqu'au m o m e n t o j'en fus dlivre (1) Epist. anut. om. 36, 2.
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par l'intercession du vnrable serviteur de Dieu, Joseph Labre. Et a i l l e u r s : Celte douleur la rate n e m e quittait pas. Puis enfin parlant des derniers temps de sa maladie, elle accuse une douleur continuelle a u ct gauche en bas des ctes, laquelle m'empochait de reposer sur ce mme ct, d'yappiiyer le bras, ou roos h i b i t s , ou le corset, ou mme m o n rosaire sans en souffrir a u point de m'vanouir. 7. Donc la malade, aprs l'action des causes propres l a dterminer, ressentit toujours une affection tres grave de la rate jusqu' la fin de la maladie, et elle la dsigne constam ment par le m o t de douleur. Mais la maladie ne consista pas dans ce seul s y m p t m e latent, elle se trahit l'ext rieur par u n e tumeur dure ['hypochondre g a u c h e ; les mdecins-l'appelaient tantt un squirrhe, tantt u n e o b s truction, et pendant vingt-trois ans ils la combattirent unanimement avec des remdes dsobstruants. Voici les noms de ces mdecins: A Pennabilli, les docteurs Battelli, Mei, Scaramucci et Donati, le chirurgien Forani Luigi.... et aussi le mdecin T a m a n t i . . . . S. Leo, le docteur Neri; < Macerata Feltria, le docteur Giccolini, le chirurgien c Biotti, Gastellani, et le docteur Zabarella. Ces onze mdecins n'taient plus tous vivants l'poque de l'intro duction de la cause ; il ne restait que le mdecin Giccolini, et le chirurgien Gastellani, les derniers de tous ceux qui soignrent la malade. Mais les tmoins n o u s apprennent que tous s'accordaient croire et dire q u e la maladie tait le gonflement et la duret de la rate (quoiqu'ils aient quel quefois appel cette affection squirrhe et obstruction), et ils s'appliquaient la dissoudre. 8. En effet, le premier q u i entreprit le traitement de notre gurie pendant un an tout entier, fut Battelli. Je fus pendant une anne environ soumise au traitement en question, dit notre gurie. Le huitime t m o i n parlant dece traitement d'un an dit : o n l a p u r g e a pendant u n an entier avec une mdecine que l'on faisait venir de Pesaro... a et elle prit par la bouche un certain savon fait exprs, pn it dant l'espace d'un mois o u deux. Scaramucci, qui Ta remplac, porta le m m e d i a g n o s tic et e u t pareillement recours a u x dsobstruants. Le cinquime tmoin dit : J'ai remarqu qu'elle souffrait d'un mal la rate, et je jugeai q u e c'tait d'un squirrhe... A u tant que j e m e le rappelle, elle avait t traite pour c e mal par le docteur Antoine Scaramucci... Sur la na t ture mauvaise de la maladie j e fus d u m m e s e n t i m e n t
LES SPLENDEURS DE LA EOI que le dit professeur... Le mdecin Scaramucci avait prescrit pour la gurison du squirrhe, une potion laite avec u n e dcoction de l'herbe appele Napel..: on la frictionnait aussi la partie malade. Ce qui e s t confirm par le neuvime tmoin et par la ma lade gurie, qui ce traitement a j o u t e : Des frictions sur la rgion de la rate. Tamanli, qui succda Scaramucci, conserva le m m e traitement suivant le tmoi gnage du c i n q u m e tmoin dj mentionn. Je m e s o u viens de l'usage de la potion prescrite par le docteur Tamanti. Le h u i t i m e tmoin confirme le m m e fait. Le chirurgien Forani ne fut pas d'un avis diffrent sur la maladie, it se joignit Scaramucci et Tamanli pour soigner la malade. En ellct, le t m o i n c i n q u i m e dj rappel, aprs avoir rapport l'opinion de Scaramucci sur la maladie du squirrhe, a j o u t e : Il m e semble que le m m e j u g e m e n t fut a port par le chirurgien d'alors, le sieur Louis Forani. Mais n o u s ignorons si c'est cetle p o q u e , o u une poque antrieure, qu'il faut rapporter ce que dit le neu v i m e t m o i n de la prescription de l'corce de saule et de a c h n e prendre en dcoction. Selon le quatorzime t m o i n , on fit loujours venir, pour le traitement, les mde cins du lieu, et parmi eux il p l a c e : le dfunt chirurgien Yincent Biolti en ajoutant : Selon l'avis de ce chirur gien, la maladie de la s u r Marini tait incurable... et affirmant encore que le mal principal tait un squirrhe, et, il m e semble, une obstruction de la rate. Le mdecin Zabarella, appel dans la dernire priode de la maladie, a t du m m e avis, ainsi que l'atteste la dpo sition suivante du c h i r u r g i e n : Je m e rappelle que deux mdecins seulement, le docteur Francesco Zabarella maintenant dfunt, et le docteur Louis Ciccolini mdecin actuel, se sont rencontrs pour la prescription du mme traitement. J'ai dit plus haut les remdes qu'ils prescri virent ; et il ajoute : pour moi j'ordonnai t o u s les re m d e s que Ton a c o u t u m e d'employer dans les obstruc lions de la rate. 9. La srie des m d e c i n s est ferme par.le chirurgien Castellani et par le m d e c i n Ciccolini. Le premier dit, qu' s o n arrive, il apprit de la malade que depuis longtemps elle tait souffrante d'une trs grave obstruclion de la rate, sa principale maladie, et il a j o u t e : J e trouvai que cette maladie existait encore au m o m e n t o j e c o m m e n a i visiter el soigner la malade, qu'elle avait per te sist, qu'elle s'tait m m e a g g r a v e ; qu'elle avait fait
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(c des progrs, malgr les traitements.... Les remdes pres( crils.... du ressort de la chirurgie.... se bornrent aux f suivants. .. Il y eut soixante-dix applications d'empltres soit rsolutifs soit mollients,des sangsues appliques sou vent la rate; des saignes gnrales, des fomentations.... (c Je conclus et ,e j u g e c o m m e j'ai conclu et c o m m e j'ai jug pendant le traitement,que la maladie de la rate,chez la sur Marini, ne pouvait autrement se dfinir, qu'une vritable obstruction irrsoluble, qui aurait dgnr en sphacle de ce m m e viscre, dont la consquence aurait t la mort certaine de la patiente, si la gurison insian tane et miraculeuse n'tait venue arrter les progrs du mal. De son ct, le mdecin Ciccolini a fait celte dpo sition : Appel . parler de la maladie dont j'ai entrepris le traitement... je dois dire la vrit toute e n l i t e . J'ai procd selon les rgles de l'art, et, aprs la plus dili gente observation, je jugeai que le mal de la sur Marini tait, c o m m e il est dit plus haut, une obstruction grave et invtre de la rate, offrant une durel irrductible et semblable une pierre. Cette duret se percevait non pas seulement au toucher, mais elle tait si tendue et si prominente, que l'il pouvait l'apercevoir toute entire . la seule inspection de la partie.... J'ai eu recours aux remodes les plus actifs; j'ai conseill l'usage des dsobs truants nergiques,des apritifs, des clistres, des boissons diurtiques, des empltres, des frictions, et autres que l'art peut suggrer en pareil c a s . . . . Ces remdes n e p r o duisirent aucun effet salutaire, le mal demeura au m m e degr. La maladie squirrheuse vers le temps de la gurison tait d'une durel telle, que si elle avait persist dans le mme tat, on pouvait, on devait croire que le mal se terminerait par un sphacle ou la gangrne,qui sans aucun doute la conduirait au tombeau. C'est donc avec raison, que notre gurie, aprs avoir numr tous les m d e c i n s qu'elle avait appels pour la soigner, a pu conclure de la sorte : Us ont toujours jug tous, quels qu'ils furent, que la maladie tait un squirrhe ou une obstruction de la rate. 10. Que conclure de tout ce qui p r c d e ? 1 La maladie d'Angle Josphine c o m m e n a par un mal de la rate produit par des causes naturelles et efficaces, mal reconnu et soi gn c o m m e tel pendant un an par Battelli, au m o y e n des dcoctions et des saponacs. Ce mal s accrut continuelle ment pendant vingt-trois ans, avec ses symptmes n o n seulement rationnels ou thoriques, mais sensibles, de
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tumeur et de duret, r e c o n n u s par les mdecins So.aramucci, Forani, Tarnanti, Biotti, Giccolini, Gastellani. T o u s , pendant cet espace de temps, ne portrent pas d'autres j u g e m e n t s q u e celui du premier m d e c i n Battelli ; et t o u s , ils eurent recours aux amers, aux dissolvants, la c h a l e u r , aux mollicnts, aux dsobstruants, aux frictions et autres remdes conseills par la mdecine pour ce genre de m a ladie. 3 Ces eiiorts demeurrent tous i n u t i l e s ; le mal persvrait, il prit sans cesse de n o u v e a u x d v e l o p p e m e n t s , jusqu' sa gurison miraculeuse. Personne n'aura lieu de s'en tonner car, lorsque l'obstruction, en quelque endroit qu'elle existe, est arrive un tel degr, qu'elle est d e v e n u e invtre, il n'est plus du tout e n notre pouvoir de la c o m battre victorieusement; c'est pourquoi le pronostic sera toujours de mauvais augure, et le traitement palliatif (1). 11. Cela p o s , si tous ces faits sont de la plus grande certitude; si, moins de bouleverser les lois fondamentales de la certitude morale, on ne peut pas admettre que ces h o m m e s si n o m b r e u x qui se sont succd pendant tant d'annes dans le traitement do cette maladie, et qui tous ont reconnu clairement l'existence des s y m p t m e s r a t i o n nels et sensibles d e l maladie, soient t o m b s dans les rnemes erreurs; si ce que, de fait, la personne gurie rapporte de l'origine et des progris de sa maladie, malgr son ignorance entire de la mdecine, confirme le j u g e m e n t des m d e c i n s , et fait l'loge du .traitement c o n t i n u e l l e m e n t e m p l o y pour obtenir la gurison, il faut admettre n c e s s a i r e m e n t q u e cette maladie, qui se manifesla la premire, qui se m o n t r a trs-grave et incurable jusqu' la fin, que tous reconnurent c o m m e la principale, et attaqurent c o m m e telle, il faudra admettre, disons-nous, que cette maladie fut bien la maladie mre de toutes les autres. 12. Faites remarquer, si v o u s le voulez, qu'il m a n q u e encore b e a u c o u p de choses pour prouver entirement notre thse. Et, d'abord, les dpositions des tmoins n o u s m o n t r e n t l'emploi d'un traitement , la fois dsobs truant, et anfciphlogistique, et ce second traitement p e r m e t d'attribuer le principe du mal une maladie autre q u e celle cause par une obstruction. Ensuite, puisque la m a ladie de l'utrus se lit sentir jusqu' la fin, la preuve tire de la persistance de l'obstruction devient bien faible pour montrer q u e le principe du mal fut l'obstruction. Enfin
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l'anciennet du dbut de la maladie ne fait rien la chose, car pour regarder un mal q u e l c o n q u e c o m m e principal, il ne suTiit pas de montrer qu'il a exist le premier, il faut prouver en outre qu'il est lout fait de nature produire les autres maladies, qu'il est de telle sorte, en un mot, que les autres puissent dcouler de lui c o m m e de leur source. 13. Nous devons rpondre ;\ ces objections qu'on pourrait nous adresser avec raison. A. la premire nous disons : Le traitement antiphlogistique qui est mentionn et l dans le sommaire, n'est n u l l e part signal c o m m e continuel e t constant, mais bien c o m m s employ dans une circonstance particulire: O u t r e la maladie appele squirrhe o u plus a exactement obstruction invtre.... il y avait d'autres affections, la pleursie, la pripneumonie, etc., et e l l e s taient frquentes. Elles produisaient des crachats s o u (( vent purulents, des v o m i s s e m e n t s s a n g u i n o l e n t s . . . Ces symptmes se manifestrent bien des ibis chez la s u r Marmi avant la gurison de la rate... Onces inflammations furent toujours traites par le systme dprimant e t contrestimulant, et aussi par d'abondantes saignes, par des applications frquentes de vsicatoires, des frictions.,. e t c . . Et puisque ce traitement antiphlogistique d'abord employ, puis abandonn, fut repris plus tard, selon que les maladies aigus apparaissaient, disparaissaient et revenaient, on ne peut pas certes le rapporter un mal persvrant, qui seuL peut tre le principal au milieu de tant de vicissitudes, et qui seul peut constituer le sujet du miracle. 14. Pour rpondre d'une manire pleinement satisfai sante il la deuxime et la troisime olijection, nous m o n trerons que la maladie n'a pas c o m m e n c et n'a^ pu commencer par une affection de l'utrus. Cette dernire ainsi que toutes.les autres ne furent que de simples c o n s quences naturelles et spontanes de la maladie de la rate. 15. En effet jetons les yeux sur les causes de la maladie ; nous voyons que ces causes furent de la nature de celles qui pouvaient exercer leur inlluence sur le cours du sang, et agir directement sur la rate, mais n o n pas sur l'utrus. En effet, l'air humide et les exercices violents du corps n'affectent pas directement l'utrus. L'examen des faits nous apprend que la Gurie n'accusa aucune affection de l'utrus au dbut de la maladie, mais simplement une douleur de la r a t e : Je c o m m e n a i , dit-elle, m'inquiter d'une d o u leur que je ressentis la rate... et j e dus en c o n s q u e n c e m'assujettir au traitement du dfunt docteur Baltelli....
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et je suivis pendant environ u n e anne entire le traite m e n t en question. Et quel fut ce traitement : On la purgea avec une mdecine que Ton fit venir de P e s a r o . . . elle prit par la bouche un certain savon prpar e x p r s . Ce traitement certes convient aux maladies de la rate mais n o n pas celles de l'utrus. Bien plus, les actes n o u s m o n t r e n t qu'on ne vit apparatre aucun traitement pres crit pour l'utrus, avant que le mdecin Tamanti et le chirurgien Forani ne fussent appels auprs de la malade. Le c i n q u i m e t m o i n dit en effet : Je m e rappelle l'usage de la douche ordonne par le docteur Tamanti et de certaines injections. Et le huitime t m o i n parlant du chirurgien Forani, il prescrivit une injection avec une seringue dans les voies naturelles... traitement que j ' e x cutai m o i - m m e . 16. Puisque les causes de la maladie sont aussi propres produire une affection de la rate, qu'impropres engendrer une maladie de l'utrus, puisque l'affection m o r bide de ce dernier ne se montra nullement au dbut de la maladie, puisque le traitement employ tait dirig contre u n e affection de la rate, et non contre une affection de l'.utrus, et que ce n e fut que bien plus tard qu on traita ce dernier, force est de conclure que la maladie de l'utrus n e se dclara que plus tard. II deviendra vident, d'ailleurs, q u e la maladie de l'utrus a t cause par l'obstruction de la raie, obstruction qui avait pris de grandes proportions, si l'on considre avec Palmieri que les viscres affects a u g m e n t e n t grandement de v o l u m e , c o m m e on le voit d a n s les obstructions de la rate, qu'alors i l s deviennent doulou reux et durs au toucher qui les explore l'extrieur de l'abdomen. Ces organes atteints se troublent dans leurs fonctions, ils compriment m c a n i q u e m e n t les organes voisins, suscitant les troubles les plus graves dans i'co n o m i e animale (1). Et il en est arriv ainsi dans le cas en q u e s t i o n ; t m o i n le m d e c i n Giccolini qui, aprs l'ins pection de la malade, remarqua une telle augmentation du v o l u m e de la rate, qu'elle touchait la rgion de l'utrus, et c e t t e circonstance 1 affecta b e a u c o u p . 11 vit en effet cette ' religieuse atteinte d'une obstruction invtre de la rate que Ton pouvait appeler dsormais squirrheuse et qui s'lendait la rgion de l'utrus avec e n g o r g e m e n t de ce viscre, et cet e n g o r g e m e n t avait t produit par la vio l e n t e compression de la rate. Le chirurgieu Gastellani
{ i ) Palmieri. Diet. med. chirurg, art. obstruct.
LES MIRACLES AU TRIBUNAL O'E LA SCIENCE. 5 7 . ' } est du m m e avis, lui qui ritra l'inspection avec la main, et les doigts chaque fois qu'il le crut ncessaire . Aprs avoir numr d'abord les symptmes que prsente l'obstruction de la rate, il ajoute : Ses effets furent le manque d'apptit, etc.; l'utrus raison du voisinage du viscre affect, tait atteint de phlo gose. 17. Ainsi, d'un ct, nous s o m m e s certains que la m a ladie a comhienc non par l'utrus mais par la rate ; d'un autre, l'exprience des mdecins nous apprend que la pression exerce sur les intestins par la rate devenue trop volumineuse a produit les plus graves perturbations dans l'conomie animale P . Nous savons cela, disons-nous, et nous savons encore, par les visites et les expriences souvent ritres, que, dans notre cas, le volume de la rate avait occup une partie de la rgion de l'utrus. Il est vident donc que l'affection de cet brgane tait due la pression exerce par la rate devenue dure, et, par consquent, que ce n'est pas la maladie de TuLrus, mais bien l'obstruction de la rate qui fut la maladie principale de la religieuse. Du reste pour rejeter l'opinion qui attribue l'utrus le rle principal dans la maladie, une seule observation sulfirait, et la voici: L'utrus, si malade qu'il soit, ne peut pas engendrer l'obstruction de la raie. 18. Voyons maintenant si cette obstruction de la rate a pu facilement engendrer les autres maux. Car s ' i l . e s t prouv, d'une part, q u e ces affections, paraissant et repa raissant tour tour, ne pouvaient constituer le sujet prin cipal ; d autre part, que le mal qui se dclara avant les autres, et qui persvra jusqu' la lin, n o u s fournait l'expli cation naturelle de tous les autres p h n o m n e s , il sera ctair comme le jour e n plein midi, que ce mal eL nul autre doit tre regard c o m m e le mal principal. 19. Les prcdentes observations nous montrent que la pression purement mcanique de la rate durcie sur l'u trus et, p i r consquent, sur ses gros vaisseaux, sur ses nerfs, a d lelletneui affecter tout sua ensemble, que les fonctions de cette partie du corps en ont t troubles. En effet, de l viennent naturellement la me tri te, dont nous parlerons plus bas, la leucorrhe, la suppression, la d i m i nution, l'irrgularit des rgles. L uterus tant amsi affect, sesdouleurs.s'ajoutaut celle- de la rate, et l'extrme .sensibilit de ia malade, n'e&t-il pas naturel de voir surgir des convulsions, sous forme hystrique o u sous une autre? En effet bauvage, e n suivant la mthode d aprs laquelle il
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tablit les espces des maladies selon leurs causes, place entre les espces d'hystrie, I'hysthrie qu'il appelle emphractique, c'est--dire l'hystrie obstructionnclle. Voici ses paroles : L'hystrie cmphractique provient de l'obstruction des viscres de l'abdomen, c o m m e le foie, la rate, le pan cras. Elle diffre de la pltore, etc. E n outre, celte pression continuelle gnant le libre cours du sang dans l'utrus, ses fonctions sont troubles, l'cou l e m e n t m e n s u e l se trouve d i m i n u , supprim, irrgulier. F a u t - i l s ' t o n n e r ds lors de voir a p p a r a t r e des selles, san g u i n o l e n t e s , des h m o r r h o d e s , des h m o p t i s i e s , de vives inflammations des p o u m o n s , ele Comment en tre surpris puisque, en dehors m m e de l'inflammation de l'utrus, la seule obstruction des viscres abdominaux produit ordi n a i r e m e n t les m m e s effets ! Folchi le montre clairement d a n s ses Exercices pathologiques, lorsqu'il d i t ( l ) : Rien n e s'oppose davantage la rapidit de la circulation du sang travers les conduits du bas-venlre, et rien ne favorise davan tage sa congestion ou ses p a n c b e m e n l s , que la maladie des viscres abdominaux, du Joie surtout et de la rate. Si v o u s considrez en ellet la c o m m u n e origine de l'artre du foie et de la rate avec celles du ventricule sortant du tronc c l i a q u e , ou si vous c o n s i d i e z la veine porte f o r m e de la r u n i o n rie la veine s p l c n i q u e e i m s c n l r i q u e s u p r i e u r e ; e t si vous reniai quez qu part le peu de sang reu dans la veine a z y g o s , presque tout le sang des veines du ventricule traver.-e les ^ai^scaux courts, la coronnaire et le g a s l r o - p i p l o q u e , pour passer dans la veine splcnique et do l dans la \ e m e p o i l e , alors v o u s c o m p i e n d r e z facilement que t o u s ces viscres tanl malades, les veines du ventricule et des intestins suprieurs ne peuvent que difficilement r e m plir leurs fonctions, et que les artres apportent ces or g a n e s plus de sang que n'en peuvent transporter les veines correspondantes. Aussi arrive t i l que si I o n dissque les cadavm de ceux qui sont morts de la maladie noire, c o m m e Hoffman, Morgagni, Portai. Jean-Pierre Franck et d'autres F o n t fait, on t r o u v e trs f r q u e m m e n t u n e r a t e excessive et c o r r o m p u e , remplie d un sang noir, et quelquefois divise en particules cartilagineuses . 2 0 . Les autres m d e c i n s tiennent le m m e langage sur les c a u s e s des hmorrhagies buccales ; ce sont l aussi les causes des h m o r r h o d e s . En eil'el lorsque les artres attirent e l l e s u n e bien plus grande quantit de sang qu'elles ne (1) Exercitat. pathol. 1287.
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peuvent en faire retourner travers les veines... il doit en rsulter des vacuations sanguines... Et, on peut le c o m prendre, la cause des hmorrhodes n'est pas beaucoup diffrente... Une vie sdentaire retarde le retour du sang des veines de l'utrus dans les canaux artriels... De m m e la compression mcanique des intestins...,et c'esfrce que pro duiront les lumeursjlesobstructions, lessquirrhes d e l rate, du pancras, etc. 2 t . Il faut en dire autant de Thmoptisie, au t m o i gnage de Sauvage d'accord en cela avec les autres mdecins. Ceux qui sont atteints d'obstructions et de squirrhes de la rate et des autres viscres, sont exposs h diffrentes hmorrhagies, l'hmoplisie, parce que, la circulation du sang dans ces lieux obstrus tant diflicilo, il se porte vers des endroits m o i n s rsistants. ."23. Enfin il faut en gnral en dire autant des maladies de la poitrine ; Jean-Pierre Frank le dclare en ces termes : Nous avons j u g convenable d'indiquer ce qui -peut prin cipalement attaquer la poitrine; ce sont en premier l i e u , . , l e s pressions abdominales, et surtout la pression des visi'res de la rate, du foie, l'augmentation du volume de l'utrus, et les tumeurs squirrheuses.(De c u r . h o m . morb.) 2 4 . Ainsi, en ralit, n o u s avons, dans l'obstruction de la raie, la cause naturelle, sulfisante, et mme la cause elfirar-e de toutes les affections douloureuses qu'Angle Josphine souffrit pendant 23 ans. Or si l'obstruction d e l rate explique clairement tous les phnomnes qui appa rurent chez notre sur pendant toute cette poque, et en constitue la cause efficace, puisqu'il apparat avant toutes les autres affections ; si, n o n - s e u l e m e n t les s y m p t m e s naturels, mais le v o l u m e et la duret de cette obstruction firent apparatre cette cause aux yeux des praticiens h a biles ; s'ils purent mme la reconnatre au t o u c h e r ; si en outre, ces h o m m e s expriments, se succdant les uns aux autres pendant de si'longues annes, dclarrent tous d'une voix unanime que l'obstruction de la rate cunsiituait le sujet principal de la m a l a d i e ; si tous-ils dirigrent les ressources de la m d e c i n e vers ce point, la destruction de cette obstruction; si, enfin, celle-ci persistant, apparurent et se dvelopprent les autres maladies, si, et malgr les elluits des m d e c i n s , elle dura jusqu' la gurison miracu leuse, il est bien hors de doute pour tous, que l'obstruction de U rate fut vritablement, et doit tre regard c o m m e la maladie principale.
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partie, pourquoi toutes les fonctions animales furent-elles troubles ? 27. Car quel indice pourrait convaincre de l'existence d'un squirrhe vritable? Les symptmes d'un vritable squirrhe font compltement dfaut; ils sont m m e i n c o m p a t i b l e s avec ceux qu'on a observs. Pour ne pas parler des autres, cette tumeur si tendue qui occupait tout l'hypochondre gauche, etalteignait l'utrus, est tout Fait en oppostion avec le peu de volume qu'occupe ncessairement dans tout squirrhe, si tendu qu'il soit. Le traitement n'a rien non plus qui res semble aux soins donns un squirrhe, o u qui puisse per suader que les m d e c i n s croyaient se trouver en prsence d un squirrhe vritable. 11 ne nous reste donc que les expres sions : squirrheux e l obstruction squirreuse. Or remarquons tout d'abord que ces expressions se rencontrent assez s o u vent chez les anciens mdecins, pour dsigner, dans les parties malades, des tumeurs trs-dures e t e n g e n d r e s p a r l e s progrs de la maladie,, parce que leur duret les rend c o m parables au squirrhe, c'est--dire, un morceau de marbre. Kt notre savant adversaire n'a pas hsit dire, lorsqu'il s'appuie sur l'autorit de Vater qui traitant du diagnostic du squirrhe, faisait observer que les anciens tendaient ce nom aux engorgements assez durs (1). Nous ajouterons, que chez les modernes il est d'usage aussi d'appeler squirrheux des viscres trs fortement endurs. Ainsi, par exemple, Federigo, dans les notes qu'il adresse Antoine Portai, fai sant la description d'un p o u m o n trs-dur, qu'on avait trouv dans le cadavre d'une femme l'appelle quasi squirrlieux. Bien plus, ouvrez les ouvrages m m e des auteurs les plus rcents, par e x e m p l e de Cruveilhicr, vous verrez que toute espce de duret morbide des viscres est si frquem m e n t ^ c o n s t a m m e n t dsigne par le n o m de squirrhe,qu'on pourrait croire t o m b dans l'oubli le diagnostic dusquirrhe vritable et proprement dit. 28. Donc, si les mdecins appels traiter la malade se sont servis de ces expressions pour dsigner cetle duret, non-seulement il n e faut pas les en blmer, mais encore moins iaut-il abuser de leurs paroles pour affirmer l'exis tence d'un vritable squirrhe, surtout quand on considre qu'ils ont employ indiffremment c o m m e synonymes, les expressions de : obstruction invtre, de squirrhe, obstruconsquirrheuse; ce qu'ils n'eussent certainement pas i a i t , c e qu'ils n'eussent pas p u faire, s'il se ft agi d'un squirrhe v r i (i) Hoc nomcn veteres dnriorbus obstruction i bus cxtendebant. vi.
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table. Parfois m m e ils ont tellement expliqu leur senti ment, qu'ils o n t banni toute espce de doute, m m e le plus lger, que ce ft un squirrhe vritable. C'est ce qu'a fait le chirurgien Caslellani, lorsqu'il a d c l a r : Avoir toujours t d'avis que l'obstruction invtre et par c o n s q u e n t chronique d e l rate pouvait aussi tre appele duret squirreuse, Le mdecin Ciccolini l'a fait aussi, lorsque, ayant parler des maladies qui se sont ajoutes la premire il d c l a r e : Outre la maladie du squirrhe, ou pour m i e u x dire l o b s truction invtre de la rate, elle tait sujette, e t c . , etc. Il y a plus : ce dernier, interrog par les j u g e s apostoliques, s'il croyait que la maladie do la religieuse
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est de la plus grande absurdit de demander si r e n g o r g e a i e n t s'tendait dans l'organe tout entier ou s'il n'existait que dans une partie. Or, une fois Pobstruction extraordinaire de tout le viscre bien tablie, il est inutile de rpondre la dernire question, savoir: Comment un engorgement partiel pourrait-il troubler toutes les fonctions vitales? 31. Vous croyez qu'il ne faut pas ajouter foi la malade disant aprs sa gurison que ses autres maladies paraissaient et disparaissaient, mais que la rate fut constamment affec te. Certes, nous ne reviendrons pas aux preuves dj rapportes ; mais, si vous ne croyez pas la personne gurie, croyez n l'avis de tous les mdecins, croyez au trai tement continuellement prescrit, croyez aux symptmes qu'numrent et la gurie et tous les tmoins ; croyez enfin Caslellani, croyez Ciccolini, qui entreprirent le traitement de la malade dans les dernires annes, et auxquels, nonseulement les signes rationnels, mais les yeux e u x - m m e s , et le toucher firent reconnatre la maladie dj invtre et incurable, ce qu'ils ont atteste jusqu' la fin. '32. Nous approuvons la doctrine de notre adversaire, qui rapporte en six paragraphes srieux presque tous les senti ments dos auteurs anciens et modernes sur la physiologie de la rate ; mais nous ne voyons pas c o m m e n t tout cela pourrait renverser notre thse.Nous ne dirons rien de ce fait, que : les mdecins connaissent assez maintenant la p h y siologie de la rate telle que n o u s l'avons dcrite dans une discussion prcdente, d'aprs l'ouvrage si prcieux de l'excellentissime docteur Maggiorani, dont la certitude ne peut n u l l e m e n t tre atteinte par la conclusion de cet h o m m e remarquable.il se sert il est vrai de la particule si, mais dans sa b o u c h e cette particule n'exprime pas un doute, elle est un eilt de la modestie de l'auteur, et par consquent-, elle n'te rien la force des raisons que nous avons apportes. Nous o m e t t o n s l'argument tir* de ce qu'on ne connat compltement ni le caractre, ni les fonctions de la rate, car il prouverait trop. S'il devait suivre de l qu'on ne pourrait connatre les causes spcifiques des maladies de ce viscre, ni conclure leur vritable existence, leur gravit, leur gurison, il faudrait en dire autant de toute espce de maladie intrieure. En effet, personne n'a jamais pu sonder la nature dans ses secrets les plus intimes; personne n'a pu scruter ses procds vitaux absolument cachs, ses m o u v e ments organiques, soit agissant normalement dans l'entre tien de la vie, soit troubls par des causes morbides ; il r sulterait de l que personne ne peut connatre le caractre
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e l la gravit d'aucune maladie interne.Loin de l cependant, les effets et les rsultats de ces m o u v e m e n t s internes tombant sous les y e u x , l'exprience a pu nous apprendre les causes spcifiques de chaque espce de maladie, ses s y m p t m e s p a t h o g n o m o n i q u e s , ses c o n s q u e n c e s , le pril qui peut en rsulter, et la mthode de traitement. D o n c il faut admettre pour la maladie de la rate ce qu'on admet pour les autres maladies internes. Accordons qu'on ne connat pas e n t i rement sa physiologie, qu'on ne connat pas c o m p l t e m e n t ses fonctions (ce qui e*t faux); on ne pourra pas conclure de l qu'on ignore ncessairement les causes morhides qui peuvent affecter ce viscre, les maladies auxquelles il est sujet, les consquences qui peuvent en rsulter, les dangers qui peuvent survenu*, si le traitement reste inefficace. 3 3 . Oui, nous passons tout cela sous silence. Mais si, n o u s rappelant le rcit que nous avons fait plus haut de la m a l a d i e en question, nous examinons de nouveau le lien de toutes ces maladies, en rapportant toujours leur origine h une affection de la rate, n o u s constatons que ces p h n o mnes trouvent une explication naturelle et trs-claire dans l'examen matriel de l'artre qui porte l e s a n g la rate, et des veines qui le reprennent la rate pour le porter aux autres viscres. Non certes, il n'est pas besoin d'une connaissance t e n d u e de la nature et des fonctions de la rate pour tre m m e de pouvoir juger de ce qu'il faut attendre, si la cir culation du sang, travers ce viscre, se trouve e m p c h e par une obstruction. Donc puisque cette d p e n d a n c e est e n quelque sorte du d o m a i n e des y e u x , en dehors m m e d'une connaissance ample et dtaille de la nature et des fonctions de la rate; puisque l'obstruction a c o u t u m e de fournir, et a fourni,dans le cas en question, des signes vidents de sa pr s e n c e , par les s y m p t m e s soit rationnels, soit sensibles, p e r s o n n e , si n o u s ne n o u s trompons, n e pourra p r u d e m m e n t douter, en prsence d'une trs-grave obstruction de la rate, que c'est elle qu'il faut attribuer certainement le principe et la cau^e des autres maladies dans le cas o il en existerait. 34. Passant de la physiologie du viscre sa p a t h o l o g i e , n o t r e savant adversaire e m p l o i e cinq paragraphes montrer q u e la rate a pu se ramollir par l'action des r e m d e s ou des autres maladies, par e x e m p l e le cours irrgulier du s a n g , la fivre, les v o m i s s e m e n t s sanguinolents, les h m o r r h o d e s , etc. 3a. Que ce ne soit l qu'une simple mais i n g n i e u s e s u p position, tout le m o n d e e n conviendra. Mais rien n'est o b s -
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tin c o m m e les faits: si quelque hypothse vient se heurter contre eux, c o m m e contre des cueils, elle se brisera ncessairement. Reprenons le rcit des faits, Ici qu'il se trouve dans l'Information ; n o u s avons l'accord de tous les t m o i n s , mdecins ou n o n , pour affirmer l'inutilit des remdes ou des perturbations morbides pour dissoudre ou m m e pour amollir la tumeur si dure de la raie. Bien plus, ils attestent que cette affection a toujours fait des progrs et a persist jusqu' la gurison miraculeuse. Voil un fait; faut-il l'admettre, faut-il le rejeter? Si on le rejette, c'est en vain que n o u s discutons propos du m i r a c l e ; si on l'admet, il faut rejeter entirement l'hypo thse de notre adversaire. 36. Poursuivons ; lorsque n o u s avons parl des rapports des maladies, n o u s avons vu que l'hmatmsc ( v o m i s s e m e n t de sang), l'hmoptysie (crachement de ^ang) les hmorrhodes venaient d'une trs grave obstruction de la r a t e : que la fivre ne soit n u l l e m e n t trangre aux obs tructions graves, tout, le m o n d e en convient. Si donc ces choses sont les suites et les symptmes naturels de la maladie principale, elles ne peuvent en tre la crise; elles ont pu irriter le niai, mais non l'adoucir. Le chirurgien Casteilani l'a constat avec j u s t e s s e ; Je fais observer que je ne puis pas regarder c o m m e critiques les pertes causes par les maladies ci-dessus dcrites, ni accepter qu'elles aient pu contribuer une amlioration lente, ou une diminution de la maladie principale, car l'tat volumineux du viscre affect, c'est--dire de la rate, et les autres s y m p t m e s douloureux ne disparurent j a m a i s , m m e en p a r t i e ; au contraire, chaque perte nouvelle, chaque rcidive des maladies secondaires, tous les s y m p t m e s devenaient plus graves. C'est pour quoi j e rpte que toutes ces pertes ne peuvent en aucune manire s'appeler des crises salutaires, et je puis affirmer tout cela en raison des visites et des examens frquents que u j'ai faits moi-mme. 37. Personne ne sera surpris, si le chirurgien dans cette partie de sa dposition ne mentionne que le volume du vis cre, et non sa duret, car aprs avoir numr les s y m p tmes de la maladie, et en particulier la duret et le v o lume de la rate il a cru avoir parl assez .clairement en dclarant : que l'tat volumineux du viscre alfect et les autres s y m p t m e s ne disparurent jamais m m e en partie: surtout aprs avoir trs-prudemment fait remarquer ]'in variable persistance de tous les symptmes que j'ai d-
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crtts; et cela jusqu' la dernire visite la malade qui eut lieu un jour o u deux tout au plus avant la gurison. Si l'on veut toutefois quelque chose de plus clair en c e t t e matire, coutons le mdecin Ciccolini affirmant que l'obs truction squirrheuse, jusqu'au t e m p s tout proche de la gurison, tait d'une duret telle, que, si la malade avait persvr dans le m m e tat, l'obstruction aurait fxni par < le sphacle ou la gangrne. c L'autorit des mdecins, aussi bien que les faits, d m o n t r e que ces c o u l e m e n t s et ces perturbations que notre Censeur voulait donner c o m m e critiques, ne sont rien autre que les consquences et les s y m p t m e s du mal, o u qu'ils taient de nature non pas adoucir le mal, mais l'augmenter. f' 3 8 . Enfin, puisque les mdecins n o u s enseignent e t l q u e ni les forces de la nature, ni celles de l'art ne peuvent rsoudre les e n g o r g e m e n t s durs et invtrs, c'est--dire qui ont atteint l'organisme d'un viscre, nous pensons q u e l'hypothse qui nous est oppose se rapporte aux seules obslructions rcentes, o u celtes qui prsentent s e u l e m e n t un accroissement de volume, sans duret, o celles qui n'ont pas encore vici l'organisme. Or. dans l'un c o m m e dans l'autre c a s , cette h y p o t h s e est tout fait trangre au cas e n q u e s t i o n , c o m m e on le voit facilement. Mais, quand m m e n o u s accorderions que des obstructions dures et invtres de vingt ans puissent se ramollir c o m m e des obstructions rcentes, et se rsoudre c o m m e celles qui n e sont pas endures ; qui ne voit c o m b i e n il faudra de t e m p s la nature et l'art pour amener la gurison? Ainsi donc, ou bien il faut nier tout fait l'existence de c e fait, unanimement affirm par tous les t m o i n s , que l'obstruction a persist jusqu' la fin, dans sa duret et dans son v o l u m e , et cette ngation m e t fin la dis cussion ; ou bien, il faut accorder qu'une obstruction de cette espce n'a pu tre enleve en u n instant par aucune c a u s e naturelle; et cette concession dtruit l'hypothse qui n o u s est oppose. Cela est si certain, que le Censeur l u i m m e , malgr les c o u l e m e n t s et les troubles qu'il avait sous les yeux, et sur lesquels il s'appuie, a cependant c r i t : Assurment, s'il tait hors de d o u t e , q u e la rate de la roli gieuse arrive la duret de la pierre, a recouvr s o n tat naturel en un court espace de t e m p s , personne, j e p e n s e , n e pourrait douter du miracle. E n eliet cotte c o n d i t i o n attesterait le vice-organique, et la gurison a c c o m p l i e court dlai serait ncessairement regarde c o m m e a u . dessus des forces de la nature.
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3 9 . Les autres parties do l'attaque regardent l'invocation et la perfection de la gurison dont n o u s parlerons plus tard. C'est pourquoi, pour ne pas nous loigner du sujet de notre discussion sur l'existence et le caractre de la m a ladie, il nous faut donner satisfaction aux objections du mdecin expert, M. le docteur Maggiorani. 40. Toute espce de maladie a ses signes particuliers et pathognomoniques qui constituent sa nature, et sans l e s quels on ne peut la concevoir. De m m e , elle est en o p p o sition avec certains autres signes contraires, tels que, si ces derniers se prsentaient, la maladie ne saurait exister, el elle constituerait une affection d'une nature toute diffrente. C'est un fait que personne ne peut rvoquer en doute. Eh bien! confrontons les caractres principaux de la maladie dont nous traitons avec le diagnostic donn par notre ad versaire, le mdecin expert : dans cette confrontation nous trouverons entre les deux une telle opposition, qu'il faudra ncessairement rejeter l'un o u l'autre ; et, la certitude des faits tant admise, o n en conclura facilement l'erreur du diagnostic, d'aprs ce principe de contradiction bien c o n n u : le m m e ne peut pas tre, et en m m e temps n'tre pas. 41- Les faits n o u s apprennent que par suite de causes propres et efficaces, la maladie c o m m e n a par une douleur de la r a t e ; que la tumeur et la duret apparurent, ensuite peu p e u ; que pour les faire disparatre, plusieurs m decins ont employ e n vain toutes les ressources de la m d e c i n e pendant vingt-trois a n s ; bien p l u s , que ces affections se sont toujours accrues avec la douleur, de telle sorte que, dans les derniers t e m p s , la douleur tait des plus graves, la duret comparable celle de la pierre, la tumeur d'un v o l u m e si grand, qu'on la constatait l'il c o m m e au toucher. Ou bien il faut admettre tout cela c o m m e absolument certain et incontestable, c o m m e rsul tant de toutes les dpositions, ou bien il faut abandonner entirement l'enqute c o m m e n c e , c o m m e reposant sur des rcits trompeurs, Dans ces faits, relatifs la cause en ques tion, nous ne considrons ni la nature du mal, ni sa liaison avec les autres maladies, ni les jugements des mdecins, ni l'emploi des remdes, ni leur inutilit ; nous considrons seulement la dure continuelle de la maladie pendant vingttrois ans, son dveloppement lenl et uniforme, l'identit des s y m p t m e s pendant tout ce temps, l'vidence de la duret et de la tumeur, demeurant toujours , s'accroissant jusqu' la iin, et cette duret, cette constance, cet accroissement
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uniformes, cette identit, n o u s allons les confronter avec la diagnostic du mdecin expert. 42. Celui-ci r a m n e la maladie tout entire a u n e affec tion nerveuse. Voici ses paroles : Cette maladie a du rap port a v e c les nvroses , et puis : l'affection d e l rate n e fut probablement rien autre chose qu'une.nvralgie; et encore : La maladie essentielle dont souffrit Angle Joa sphine,avait son sige principal d a n s le s y s t m e nerveux.
D s i g n a n t m m e u n e e s p c e d e n v r a l g i e , il a d i t : E n u n m o t , la m a l a d i e d e l a s u r n ' t a i t r i e n a u t r e q u ' u n e / 1 1 / J
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qui n e f u t pas i n t e r m i t t e n t e ; mais permanente, elle tait cause et n o n elet, et on doit la regarder c o m m e la source des autres m a u x . Enfin rsumant en peu de m o t s , la fin de son argumentation, c e qu'il avait s o u t e n u trs au long, il dclare que le mal principal de sur Angle-Josphinc fut l'hystrie. 4 3 . Ainsi,au j u g e m e n t de l'expert, j u g e m e n t rpt et dve lopp satit, la maladie de notre religieuse fut tout s i m p l e m e n t u n e affection nerveuse, et m m e essentiellement nerveuse, car ce mal, ou m i e u x cette cohorte de maux q u e
les a n c i e n s d s i g n a i e n t p a r l ' e x p r e s s i o n d ' a f f e c t i o n hyst rique, d o i t t r e r a p p o r t e j u s t e m e n t e t a v e c p l u s de
raison que toute autre affeclion aux passions s p a s m o d i c o convulsives et m m e universelles du genre nerveux. (1) 44. Ce genre de maladie entrane ncessairement et na turellement ces deux choses : 1 Quelque permanente q u e soit l'hystrie, elle n'est permanente qu'en puissance et n o n de fait\ par c o n s q u e n t elle n'est ni continuelle, n i constante ; elle n e procde pas p e u p e u , mais elle se manifeste subitement par des paroxysmes, c o m m e toutes les autres affections nerveuses (2)? En- un m o t , cest une maladie intermittente? Gette maladie revt des formes t o u j o u r s i n c o n s t a n t e s , et tout fait diverses. Il n'y a rien
e n elle q u i p u i s s e durer d e n o m b r e u x j o u r s , p l u s f o r t e r a i s o n p l u s i e u r s m o i s o u p l u s i e u r s a n n e s ; e t elle n'a de
constant que s o u i n c o n s t a n c e . Ses s y m p t m e s , en effet, selon la remarque de S y d e n h a m (3) sont si divers, si contraires entre e u x , si varis de leur nature, que P r o t e n'est rien auprs d'eux, ni le camlon qui
(1) Hoffmann. Md. syst. tom. 4. part. 3, cap. 3. (2) Palinieri,Dict. de La mdecine et de la chirurgie. Article hystrie. (3) Dissertations en l'orme de : De la variole et tics affections hys triques.
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change continuellement de couleur. Ces s y m p t m e s ne s o n t pas seulement multiples, ils ne peuvent supporter la contrainte d'aucune loi, d'aucun type u n i f o r m e ; ils sont un assemblage de p h n o m n e s , pris c o m m e au h a sard et sans ordre. 4 5 . Telle est donc la nature del'hystrie ; qu'elle n'est pas une maladie continuelle, qu'elle ne progresse ni rgulire m e n t , ni uniformment, que ses symptmes el ses accrois sements sont inconstants. Ds lors, cette douleur, et cette t u meur dure c o m m e une pierre, qui ds leur apparition se sont dveloppes peu peu, qui ont toujours offert les mmes s y m p t m e s , qui se sont accrus uniformment pendant vingt-trois ans, qui enfin, taient devenues sensibles nons e u l e m e n t au toucher, mais aussi la vue, et qui ont persist jusqu' la fin, quelle qu'ait t leur nature, certainement ne peuvent pas tre rapportes l'hystrie. Car si vous rapportez l'hystrie cette maladie d'un accroissement constant et rgulier : oui, vous pourrez avoir une hyslrie, dans votre h y p o t h s e et dans votre opinion, mais en ralit vous serez en opposition avec les caractres essentiels de l'hystrie, et par consquent vous n'aurez pas l'hystrie. Ce qui revient, v o u s le? voyez, au principe de contradiction. Il faut donc re jeter de deux choses l'une : ou les faits attests et rapports plus h a u t , o u le diagnostic de l'hystrie ; or on ne peut re jeter les faits moins de rejeter en m m e temps* tous les tmoignages, le rcit tout entier, c o m m e mensongers. Donc d'aprs le principe de contradiction, il faut rejeter le diag n o s t i c de l'hystrie, 46. Mais, nous objectera-t-on, le savant expert n'a pas a b s o l u m e n t exclu toute affection de la rate, quand il a d clar q u e la maladie principale de sur Angle-Josphine tait une hystrie? Non, personne ne nous fera cette objec t i o n . L u i - m m e , en effet, parlant 1res au long de l'obs truction a dit : Je n'ai jamais reconnu l'existence d'une semblable maladie dans le cas en question . Il a mme r a m e n la maladie de la rate l'hystrie, lorsqu'il crivait, qu'il avait remarqu plusieurs fois chez les femmes hystriques, que les m u s c l e s de l'abdomen taient t e l l e m e n t tendus et durs, qu'on croirait toucher une table de b o i s , plutt que des tissus m o u s . Et il affirme d'une manire gnrale, c o m m e n o u s l'avons vu, que a la maladie n'tait rien autre qu'une hystrie, qu'on doit regarder c o m m e la cause et la source des autres m a u x . Ainsi, d'aprs lui, la rate n'tait nullement atteinte d'une affection organique, et cette douleur, celte tumeur, cette duret,
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tout ce qui a paru, qui s'est dvelopp, qui s'est accru une manire uniforme pendant vingt-trois ans, ne fut rien autre que l'action des nerfs. L'illustre praticien attache donc l'hystrie ces s y m p t m e s si constants, si continuels qui sont en opposition avec les interruptions naturelles de l'hys trie, avec sa perptuelle inconstance, et n o u s devrons conclure encore, qu'il faut absolument rejeter le diagnostic de l'hystrie. 47. P a r l cependant nous ne voulons pas exclure enti rement toute affection hystrique de la maladie en question. Cela est si loin de notre pense, que n o u s croyons, nous affirmons expressment, que notre religieuse a quelque fois souffert de l'hystrie. La raison en est : que les m d e cins ont r e c o n n u clairement cette affection, ainsi que la malade gurie, et les autres tmoins ; t aussi parce qu'il est bien rare qu'un mdecin soignant une f e m m e tourmente de maladies graves et invtres ne la trouve plus ou m o i n s sujette aussi aux affections hystriques. 48. Mais autre c h o s e est d'alfirmer q u e l'hystrie s'est jointe d'autres maladies, autre, et bien autre chose, est de rapporter l'hystrie une affection du corps prolonge pendant de nombreuses annes, et qu'on pouvait reconnatre au toucher et la vue, de la lui rapporter c o m m e sa cause, sa source, c o m m e s'il tait question d'un des s y m p t m e s de . l'hystrie. Tout le m o n d e affirmera la premire proposition, et tout le m o n d e regardera la seconde c o m m e absurde. Mais, puisque le diagnostic qu'on nous oppose est atteint de ce dfaut, avec lui s'croulent, c o m m e d ' e u x - m m e s , tous les arguments si ingnieux, si savants, qu'on a i m a gins pour tablir c e l t e hypothse. Nous c o n c l u o n s d o n c , sans aucun danger pour la cause, qu'on peut rejeter tout ce q u e le savant expert a condens dans son a r g u m e n t a t i o n . 4 9 . A j o u t o n s : Quand une chose est prouve, elle reste prouve, jusqu' ce qu'elle soit renverse par d e s r a i s o n s c o n traires. Or, dans le cas en question, on a dmontr une trsgrave obstruction de la rate, et on Ta tellement bien prouv, qu'un autre expert a affirm que : La rate, affecte d'une obstruction trs invtre, avait pris la duret de la pierre, et que la maladif, depuis longtemps dj, avait r sist tous les traitements . Le savant Promoteur de la foi, lui-mme, a crit dans le plaidoyer prcdent : L'obs truction de la rate tait la seule cause, la source u n i q u e de tous les m a u x . Et dans la discussion actuelle, malgr nn certain d o u t e qu'il a mis sur la maladie principale, il a cependant avou : que la religieuse a e u la rate .atteinte
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d'une maladie grave . Le fait est donc dmontr de telle sorte, qu'il arrache m m e l'aveu de celui qui est confie la charge de le rvoquer en doute. Or, on n'oppose notre dmonstration rien autre chose qu'un diagnostic entach du vice de contradiction. Donc l'existence bien prouve de l'obstruction demeure intacte et immuable. Ce point acquis, n o n s e u l e m e n t n o u s n'avons plus combattre contre l'il lustre expert, n o u s ayons invoquer son suffrage en notre faveur, puisqu'il a crit : Une obstruction de la rate inv tre et dure c o m m e la pierre se trouvant gurie en peu de (( temps, surpasse c o m p l t e m e n t les forces de la nature. A m o n avis je regarderais cette gurison c o m m e miracu le use . 50. Ce peu de paroles, on le voit, suffirait pour terminer notre discussion avec l'illustre Maggiorani ; mais l'usage de ce tribunal sacr nous impose l'obligation de discuter sparment toutes les raisons qu'il nous a opposes. Et parce q u e ce devoir exige un travail un peu long, n o u s prions les Pres consulleurs de ne pas n o u s faire un crime de la fatigue et, de l'ennui prolongs qu'ils ressentiront en nous l i s a n t ; ils s'en prendront la ncessit seule. 5 1 . C'est avec peine que nous n o u s voyons en dissenti m e n t avec cet h o m m e si clbre, dont la science a pour elle l e suffrage gnral, autant de fois qu'tant appel traiter ces sortes de causes nous rencontrons les arguments qu'il a prsents nos j u g e s . Mais la fonction qui nous est confie n o u s fait un devoir de dfendre la thse que n o u s avons en treprise, et pareeque n o u s croyons vritablement combattre en faveur de la vrit, il nous est impossible de ne pas ex primer librement le s e n t i m e n t qui nous a n i m e . 5 2 . D'abord, cet h o m m e si exact, qui ne trouve jamais assez claires les preuves q u e Ton apporte, fait cette dcla ration chaque fois qu'il est charg de dire son avis sur les gurisons miraculeuses : J e suis oblig de me fcher contre u les mdecins dont l'incurie e t T h s i t a t i o n o n t l a i s s presque toujours la vrit dans l'incertitude et dans les tnbres; car si un mdecin habile, en prsence de la gurison p a r f a i t e d'une maladie, gurison qui parat surpasser Tordre et les forces de la nature, crivait sur le champ l'histoire exacte de cette m m e maladie ; s'il en exposait les a causes, le cours, les s y m t m e s , les mtaposes ( c h a n g e m e n t s e n bien ou e n mal), les epigenses (maladies accessoires), la thrapeutique (les remdes e m p l o y s , les phnomnes qui accompagnent la fin de la maladie ; alors on rencontrerait bien peu de cas, o il resterait
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LES SPLENDEUHS DE LA OI
quelque doute, quelqu'obscurit, ou place quelque controverse sur la cause de la gurison . 53. A coup sr notre e x p e r t , aurait facilement v i t cette indignation inspire par la science, s'il eut rflchi qu'un semblable desideratum exige implicitement, p o u r les m d e c i n s , le don de prophtie, dont ils manquent la plu part du temps. Qui ne le sait, dans les maladies vulgaires, c h r o n i q u e s , et qui n'offrent la science rien de particulier, r i e n d e d i g n e de remarque, c o m m e par e x e m p l e l'obstruction de la rate, yeut-t-il jamais eu un m d e c i n , qui ait en l'habi tude de consigner c h a q u e j o u r , sur son registre, les s y m p t m e s qui pouvaient se prsenter dans le courant de la j o u r n e , les c h a n g e m e n t s en m i e u x o u en pis, les maladies qui survenaient, le traitement suivi chaque jour, les p h n o m n e s du jour et de la n u i t . . . Et si nul ne le fait, c o m m e n t , aprs une maladie de l o n g u e dure, (dans le cas prsent, aprs vingt-trois ans) lui sera-t-il possible de raconter avec prcision, le cours, les symptmes, les pigenses, les mtaposes, la thrapeutique et les phnomnes, quand bien m m e , aussitt aprs la gurison, il aurait essay de mettre ses souvenirs en crit? 11 faudrait donc q u e , ds le dbut du traitement, le mdecin, en prvision d'une future g u rison miraculeuse, juget convenable de noter tout chaque j o u r . Or cela exigerait chez lui le don de prophtie. 5 4 . Mais tant de soins sont-ils ncessaires dans l'affaire e n question? Quand, dans les j u g e m e n t s , on s'informe de la vrit d'un fait, on n'exige pas la connaissance absolue de t o u t e s les circonstances, sans distinction, mais seulement de celles qui se rattachent la substance de la chose, et dont la dmonstration tablit la certitude du fait jusqu' l'vidence. Dans la question prsente, on ne d e m a n d e c e r tainement pas ce qui est survenu chaque jour la malade, q u e l l e s furent t o u s les remdes prescrits; n o n . Mais on d e m a n d e : 1quelle fut la naturede la maladie principale, et quels furent les s y m p t m e s propres et p a t h o g n o m o n i q u e s qui l'ont r v l e ? 2 quelle espce de remdes furent e m p l o y s , et quels furent les principaux? 3 quelle en a t l'utilit pour la m a l a d i e , et c o m m e n t la nature est v e n u e e n aide l'art de la m d e c i n e ? 4, l'gard de la persistance de la maladie, a-t-elle persvr jusqu' la fin avec s o n caractre malin, s'est-elle m m e aggrave? 5 enfin c o m m e n t s'opra la gurison ; fut-elle soudaine, parfaite, sans aide a u c u n de la nature o u de l'art? 53. Mais notre expert s'est cart l u i - m m e de cette rgle dans la cause de Germaine Cousin, alors vn-
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rahle, et maintenant batifie, lorsque, regardant c o m m e inutiles les preuves apportes en faveur du rachitisme de Jacqueline Gatala, il crivait: Je ne puis prononcer avec certitude qu'il s'agisse bien de rachitisme chez notre j e u n e fille, parce que les signes d e l maladie apports p a r l e s tmoins sont ambigus, et aussi parce qu'on ne trouve pas tous les autres indices que les mdecins exigent o r d i n ai rement pour diagnostiquer une maladie avec certitude. 56. Les autres mdecins, au contraire, et la sacre c o n grgation prirent cette rgle pour guide, ils dcouvrirent un rachitisme vritable dans Jacqueline Gatala et se p r o noncrent pour le miracle. Si donc, clair par l'exprience, notre Censeur et actuellement suivi leurs traces, il et dcouvert, dans les dpositions des tmoins, tout ce qui est ncessaire pour dmontrer l'existence d'une obstruction de la rate invtre, trs-tendue et trs-dure. Il et vu q u e la maladie a t produite par des causes naturelles, qu'elle s'est accrue peu peu, qu'elle s'est manifeste plus tard au toucher et ia vue, et qu'elle a progress jusqu' la fin sans interruption. La compression exerce par ce viscre sur les autres viscres,ou bien le sang gn dans sa circulation, lui eussent montr les pigenses qu'il demande. Il et vu aussi que ls seuls remdes employs contre le mal principal ont t des dsobstruants, et contre les maux secondaires les antiphlogistiques. 11 aurait vu leur inutilit complte, et la maladie n o n - s e u l e m e n t persvrant toujours dans sa nature maligne, mais s'accroissant de jour en jour. Enfin il l'aurait vue disparatre tout c o u p , en dehors des forces de la nature et des ressources de l'art. Tout cela lui aurait fait connatre qu'il' y a des preuves suffisantes, et que les m d e cins n'ont mrit ni le reproche d'incurie, ni celui d'hsi
tation.
57. Mais voici que notre Expert nous donne, dans le second paragraphe de son rapport, un spcimen de l'obscu rit et de la confusion reproches aux mdecins appels soigner un m a l a d e ; et certes on ne pouvait rien apporter de plus propre tablir notre proposition. Peut-tre, V n rables Pres, il vous est arriv quelquefois, c o m m e il nous est arriv souvent n o u s - m m e s , de rencontrer un h o m m e certainement remarquable et possdant des connaissances nombreuses, mais ayant une telle obscurit et une telle confusion dans les ides, qu'aprs l'avoir consult sur un sujet parfaitement clair pour nous, nous avons d -nous retirer aprs un long entretien, cause de diflicults si n o m breuses et si grandes dans notre esprit, qu'il nous s e m b l a i t
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presque ignorer ce que nous croyions connatre auparavant. Or, ce rsultai caus en nous par u n dfauL inhrent l'es prit d'un individu, le paragraphe en question semble avoir voulu le reproduire dessein. E n effet, si quelque passage extrait du lexte prcdent extraiL du sommaire engendre u n e certaine obscurit, si q u e l q u e chose se rapportant 5 la maladie principale plutt qu'aux maladies secondaires, et vice versd, peut concilier les dpositions entre elles, il faut l'avouer, tout cela est retranch, rassembl, exagr, omis avec tant d'-propos, et d'art, que n o u s m m e s , qui pensions connatre d'une manire certaine l'histoire de la maladie, n o u s avons dout, aprs la lecture de ce paragraphe, si le fait avait vritablement eu lieu c o m m e n o u s l'avions pens. 58. Un examen dtaill le dmontrera facilement. C o m m e n o n s par ce qui a t o m i s . Le mdecin s'est prononc la lgre sur l'existence d'une obstruction de la rate; notre Censeur le fait observer dans les lignes suivantes: Le docteur Ciccolini dclare dans son t m o i g n a g e : j e puis rpter avec assurance que depuis Pennabilli elle a souffert de la maladie de la r a t e ; car, la premire fois, q u e je " la vis, et dans les visites subsquentes que je lui fis, j e r e connus que la maladie tait la m m e et invtre. C o m m e si l'obstruction de la rate pouvait au premier coup d'il ce faire connatre son ge, et c o m m e si, l'aspect des signes d'une consiitution maladive, o n pouvait reconnatre la longue dure de la maladie. 59. Non certes les paroles du m d e c i n Ciccolini n ' i n diquent pas, q u e l'obstruction de la rate fut au premier coup ceit j u g e invtre ; car celui qui dit : Quand j e la vis la premire fois, et dans les visites subsquentes, j e r e c o n n u s q u e la maladie tait la m m e et i n v t r e , c e l u i - l dclare ouvertement qu'il a rendu plusieurs visites a v a n t d'avoir port son j u g e m e n t . Si pourtant notre Expert n e trouvait pas cela assez clair, pourquoi n'a-t-il pas exig u n e explication plus nette dans la fin de la dposition? P o u r q u o i a-t-il omis sans les faire remarquer, et a-t-il e n t i j e m e n t pass sous silence ces paroles si claires du m d e c i n , qu'il rapporte cependant en partie un peu plus b a s : Je dois dire en t o u l e vrit, qu'aprs avoir procd avec la plus scrupuleuse observation, j'ai j u g (ce n'est donc pas, la premire vue, mais bien aprs des obscr valions rptes et laites avec le plus grand soin) que le mal tait, c o m m e je l'ai dit plus haut, une affection forte et i m l r e de la rate, d'une durel irrductible, et c o m m e de pierre...
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Tout ceci, j e l'ai dduit par le toucher de la partie < affecte... et spcialement par la duret qui se manifestait c si notablement dans cetle partie cette duret se mani feslait n o n seulement au toucher, mais elie tait si grosse et si saillante, que l'il la dcouvrait, la seule i n s p e c tion de cette partie du corps. Et ce n'est pas d'aprs son observation seule qu'il a port ce j u g e m e n t ; car, dit-il, j'ai appris de la sur Marini, qu'elle avait t soigne ( Pennabilli) par les docteurs Scaramucci, et Zabarella, et par d'autres encore pour la mme maladie de la rate. 11 n'a donc pas prononc son jugement du premier coup. d*il, mais d'aprs l'histoire du mal, . la suite de frquentes visites, d'aprs les s y m p t m e s , et d'aprs ce qu'il avait trssouvent touch et vu. 60. N'est-il pas c o n n u de tous que la marche d'une o b s truction de la rate e s t l o n g u e et tardive? L'expert n'a-t-il pas dit l u i - m m e : L'obstruction se fait d'une manire lente et successive. Il e n appelle l'autorit de Bursrius comme preuve de son opinion. G'est pourquoi si Ciccolini,, la premire visite qu'il fit la malade, vit et sentit s o n hypochondre gauche une duret comparable a celle de la pierre, si tendue et si saillante, qu'elle se manifestait n o n seulement au toucher, mais qu'elle s'apercevait l'il, la seule inspection de la partie m a l a d e ; si, dis-je, il a vu cela, s'il l'a t o u c h , est-il permis de penser qu'il a port un jugement la lgre, quand m m e , ds la premire visite, il se serait prononc sur l'anciennet de la maladie? Combien il sera m o i n s permis de l'accuser de lgret, lorsqu'il a procd avec tant de lenteur, tant de prudence, pour porter son j u g e m e n t , puisqu'il n'est arriv se prononcer que d'aprs l'histoire de la maladie, et aprs de frquentes visites faites la m a l a d e ? Que l'Expert runisse les parties homologues de la dposition, et il renoncera facilement au soupon qu'il a mis, savoir: que le j u g e m e n t avait t port la lgre, et la premire vue. 61. Aprs cet exemple d'omissions, arrivons de suite aux exemples d'exagrations. Il accuse le chirurgien Castellani d'avoir d i t : Je puis dclarer que l'obstruction trs-inv tre, et m m e chronique de lu rate de la Marini, qu'on doit par consquent, n o m m e r maladie irrsoluble, pouvait e n ' core recevoir de moi le n o m de duret squirrheuse. Et il ajoute: L e tmoin, quoique assidu auprs de la malade, ne sait pas encore ce qu'il doit pronostiquer! Voyons : Castellani est-il donc indcis entre la prsence d'une o b s t truction ou d'un squirrhe ? Mais on l'a certainement entendu
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LES
SPLENDEURS
DE
LA
FOI
dclarer : Et cette obstruction trs-invtre de la rate, je pourrais la n o m m e r u n e duret squirrheuse , or par l il avoue clairement que la maladie n'est pas un squirrhe, mais u n e obstruction. E n effet le mme chirurgien voulant expliquer cette dnomination, ajoute qu'il n e veut abso l u m e n t parler d'aucun diagnostic d'un vritable squirrhe. Parce que les signes distinctifs et primitifs d'un squirrhe, ou d'une gangrne, n e peuvent confondre ce mal avec u n e autre duret du viscre. Et cela n e lui suffit pas encore, il en appelle l'autorit du clbre Antoine Scarpa dont il rapporte les paroles : Le squirrhe o u la gangrne f o n t point primitivement occup le viscre proprement dit. 6 2 . Certainement notre Expert connat ces observations de Cas tel lani, car il a eu le procs entre les mains. Or, quand bien mme il se serait content de rapporter l'affaire e n abrg, il a d lire plus de cent fois ces dclarations du chirurgien: Oui, c tait une obstruction trs-grave de la rate, et sa maladie principale, cette obstruction fut appele irrrductible. Irrductible tait l'tat de l'obstruction de la rate. Les r e m d e s extrieurs que j e prescrivis furent administrs avec cette intention constante e l invariable, j e voulais dtruire l'obstruction invtre de la r a t e ; a j e conclus cl j e j u g e , c o m m e j'ai c o n c l u et c o m m e j'ai j u g pendant le traitement, que la maladie de la rate chez la sur Marini ne pouvait autrement se dfinir, qu'une o b s truction irrductible. Mais celui qui produit s o n senti m e n t avec tant de solidil et avec tant de constance, n e saurait tre accus d'incertitude quand il affirme que cette obstruction fut appele aussi duret squirrheuse. 6 3 . Il censure g a l e m e n t Ciccolini q u a n d il affirme : Angele Jos phine tait atteinte d'une maladie venant d'une obstruction invtre de la rate, q u e j e pourrais a aussi appeler squirrheuse. La rate s'tendait jusqu' l a rgion de l'utrus, avec u n engorgement de c e t organe, et a. cel engorgement avait t produit parce que la rate tait furtemenL embarrasse. Aprs avoir extrait ces paroles notre adversaire ajoute : Bon Dieu I quel fatras de paroles 1 q u e veut-il donc dire par M grand embarras de ta rate
de l'utrus!
Mais
si la rate est d e s c e n d u e jusqu' l'utrus, alors d o n c il n e s'agit plus autant de s o n obstruction q u e de sa descente. Et parce que Gastellani affirma le m m e l'ait par suite de ses visites et de s o n exprience, n o t r e critique t o u r n e sa scurit en ridicule, c o m m e s'il eut dit : Que la rate
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& et la matrice se jetaient dans les bras l'un de l'autre pour s'embrasser. 64. Oui dposition monstrueuse ! c'est u n ne sur l e s toits ! E x a m i n o n s toutefois, et sans n o u s effrayer, si cette dposition e s t rellement si prodigieuse, si elle peut faire rougir le front du mdecin, si elle prsente un fra Iras de paroles, u n e confusion d'ides, u n e ignorance capable d'en lever toute confiance la dposition du t m o i n . Que veut d i r e : Un fort embarras de la rate qui
les viscres affects augmentent beaucoup de volume, comme il arrive dans les obstructions de la rate... ils com priment mcaniquement les organes voisins, et produisent ainsi un trouble assez grave dans Vconomie animale. (Palmieri, cit plus haut.) Si la rate descendait jusqu' l'utrus, il ne s'agissait donc pas autant do l'obstruction du v i s <L cre, que de sa* chute. Mais s'il n'y a eu aucune cause capable de dplacer ce viscre de s o n sige naturel, s'il ne se produisit aucun s y m p t m e de prolapsus, si la tumeur et la duret de l'hypocondre gauche, i m m d i a t e ment au-dessous des ctes, nous apprennent au contraire que la rate est constamment reste sa place, c o m ment pourra-t-on mettre m f m e le simple soupon d'un prolapsus! Est-il donc certain q u e la rate ne puisse a t teindre la rgion de l'utrus, sans un prolapsus de sa part? N'a-t-on j a m a i s expriment que ce viscre, tout e n demeurant sa place, ne puisse augmenter de v o l u m e j u s qu'au point d'occuper m m e le bas-ventre? 65. Voici c e qu'crivait Folchi (Exercices pathologiques, voLII,p. 319) : L a raie est sujette un grand nombre de ma ladies. Les plus frquentes chez n o s habitants de la campagne sont l'obstruction o u engorgement, et cette maladie n'apporte pas continuellement avec elle la m m e modification dans ce viscre... Tantt son volume est tellement augment, qu'il remplit la rgion du ventre, et quelquefois colle de l'iliaque. Morgagni, traitant la mme question, avait dit avant l u i : Il y avait u n h o m m e , dont le ventre tait gonfl jusqu'aux deux aines; mais l'enflure du ct gauche, qu'on savait tre une hernie, causa la mort par suite d e l colique de -miserere qui'survint. On saisit cette occasion pour savoir dans quel tat se trouvait le ct droit. On ouvrit le ventre. On trouva
VI.
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la rate tendue jusqu' l'aine du ct droit () ; cette rate tait du poids de trois livres environ, d'une paisseur de cinq doiats de la main; sa largeur et sa l o n g u e u r de douze doigts Elle avait l'extrieur certains appendices. Avant Morgagni, Bonnet, dans son ouvrage intitul Le C i m e t i r e , parlant des observations faites sur les t u m e u r s des h y p o condres, avait d i t : La comtesse Franoise Elisabeth de Pustemberg, qui souffrait depuis l o n g t e m p s d'un accroisse m e n t de la rate... expira en marchant. S o n abdomen ouvert laissa voir u n e r a t e d ' u n e g r o s s e u r n o r m e ; sa l o n g u e u r galait c i n q fois la l a r g e u r de la m a i n , sa largeur q u a t r e fois, et son paisseur, u n e fois et d e m i e ; elle pesait six livres, elle portait u n e excroissance plus l o n g u e que la m a i n qui naissait de la partie infrieure au-dessous du nombril et qui s'tendait droite. Le m m e Folchi rappelle ailleurs (Lib. 3 . sect. 16. observ. 1 7 ) : Atius (lib. VII) a c r i t : La rate, chez ceux qui en s o n t malades, arrive souvent, p a r sa longueur, jusqu' l'aine, et touche le foie par sa largeur. Ensuite, sous co t i t r e : douleur de r h y p o c o n d r e gauche cause par la grandeur dmesure de la rate, il raconte ce fait : Un clibataire a u x cheveux roux, g de p l u s de trente ans,qui souffrit pendant d e l o n g u e s annes d'une d o u l e u r et d ' u n e t u m e u r a u ct gauche, vint m o u r i r ; d e u x j o u r s a p r s la m o r t , j e fis l'ouverture du cadavre ; la r a t e , d'un volume dmesur, s'tendait de deux largeurs de mains au-dessus du rein g a u c h e ; elle allait jusqu' l'ouverture et la cavit de la hanchp, et pesait quatre livres. 06. D o n c , et les faits et les livres de mdecine qui se trou vent dans toutes les mains, nous apprennent que la rate, t o u t en demeurant sa place, atteint parfois un tel volume, que, dans sa largeur, elle peut toucher la rgion du foie, e t j d a n s s a l o n g u e u r , dpasser l e n o m b r i l , d e s c e n d r e jusqu'aux aines, et arriver l a rgion de l'iliaque, c'est--dire, jusqu'au bassin. Ds lors, j e vous le demande, faut-il regarder c o m m e b i e n prodigieuse la dposition des m d e c i n s appels soigner n o t r e m a l a d e , p u i s q u ' e l l e s'accorde si bien avec ces faits et ces d o c u m e n t s c o n n u s de tous ? Notre E x p e r t a-t-il sujet de s'tonner de ces dpositions, parce qu'il a dclar que, sans un prolapsus, la r a i e ne pourrait jamais arriver lu rgion de l'utrus, Texiguit de son volume s'y o p p o s a n t ? A-t-il i g n o r ces bien tristes effets? les a-t-il (O Rem arcpicz,s'il vous plat, cet effroyable accroissement de la rate, bien suprieur celui dont nous nous occupons, puisque l'aine se trouve plus de huit pouces au-dessous de la partie suprieure de J'uterus,qui accusait une pression cause par la rale,chez sur Mariai.
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c o n n u s ? S'il les a connus, pourquoi alors regarder c o m m e prodigieuses les dpositions de Giccolini el de Castellani. lorsqu'ils affirment que l'engorgement le l'utrus fut caus par l'norme obstruction de la rate qui le comprimail?Pourquoi a-t-il donn leurs affirmations ce sens, que la rate et la matrice s'unissaient dans de mutuels embrassements ? Qu'il prenne garde de les trouver, lorsqu'ils liront ces lignes, prets lui rpondre sur le mme ton. 67. Ces exagrations (reproches nos tmoins) sont suivies d'exemples de contradictions d;ins leurs affirmations. Il accuse Gastellani de cette faute, parce que le mdecin a dit, propos de l'vacuation du sang et de son c o u l e m e n t : A chaque perte, tous les symptmes augmentaient d'in tensit ; tandis que, un peu plus bas, il aurait dit le con traire par ces paroles : Je m e souviens bien que, aprs les pertes sus-mentionnes, telles que vomissements de sang, hm'orrhodes, etc. la patiente prouvait une trve m o m e n t a n e , et un allgement passager dans ses dou te leurs. Dans ces paroles notre Censeur dcouvre la plus manifeste contradiction. 68. Mais qu'il consulte le Sommaire : Gastellani traitant de la maladie principale, affirme que l'coulement du sang ne procura j a m a i s un s o u l a g e m e n t vritable, et il nie qu'on puisse le regarder c o m m e une crise favorable. Qu'on re marque, dit-il, que j e ne puis, ni ne dois juger c o m m e critiques les pertes qui ont e u lieu dans les maladies d crites, et qu'elles n'ont en aucune faon contribue la l e n l e amlioration ou la diminution de la maladie prin c c cipale. Au contraire, chaque perte, chaque rcidive dos e maladies secondaires, tous les s y m p t m e s s'exagraient davantage. Parlant ensuite de l'effet que ces coulements produisirent sur les maladies secondaires, il dit : Je me souviens bien qu'aprs les pertes sus-dites, c o m m e les vomissements de sang, le flux hmorrhodal e t c . , la patiente prouvait une trve m o m e n t a n e , et u n allgement passager dans ses douleurs, dans la toux, dans la respiration difficile une t asthmatique, mais ces trves taient bientt suivies d'un redoublement de s y m p t m e s alarmants et douloureux, u c o m m e j e l'ai dit p r c d e m m e n t . 69. Ainsi l'allgement ne s'appliquait pas la maladie principale, c'est--dire, l'obstruction de la rate, mais bien aux maladies secondaires: les douleurs> la toux,la respiration asthmatique. Et cela pos, quelle contradiction p e u t - o n trouver dans ce qui est attribu des sujets diffrents ? Oui,
si vous le voulez, Castellani a toujours parl du m m e sujet, mais c'est de la maladie principale. Il en a fait l u i - m m e la remarque ; les coulements ont eu lieu dans les crises vio lentes de la maladie, chaque perte... t o u s les s y m p t m e s a devenaient beaucoup plus graves ; e t i l ajoute un peu plus bas, que, aprs ces coulements, il y avait quelques relches, q u e l q u e trfivc m o m e n t a n e . Du reste, lorsqu'on voit un redoublement de gravit . la suite d'une relche passa gre, cela dnote u n cours rgulier dans la maladie. Mais ces trves de courte dure, ces rmissions produites, chez les m a l a d e s , par la faiblesse des organes, a u g m e n t e n t le mal, loin d'y apporter du s o u l a g e m e n t . Aussi Castellani a-t-il ajout : ces trves taient i m m d i a t e m e n t suivies de s y m p t m e s b e a u c o u p plus alarmants. Castellani a donc suivi avec b e a u c o u p de soin, dans sa dposition, les pr ceptes de l'art mdical, il est rest d'accord avec luim m e , il tait tout h fait dans le vrai e n rejetant toute ide de crise, et en affirmant que les vacuations n'ont apport a u c u n e amlioration vritable la maladie ; il fait si bien sentir sa marche uniforme et c o n t i n u e jusqu' la fin, et son aggravation rgulirement progressive, qu'il n e laisse a u c u n e place la supposition d'une crise finale favorable. 70. Rapprochons maintenant ces dclarations des paroles suivantes de Ciccolini : Les remdes produisaient quelques calmes intermittents la patiente, mais ils m a n q u r e n t d'efficacit pour vaincre la nature du mal Parce que les remdes n e produisirent aucun eifet favorable.., la ma ladie persistait dans le m m e degr, aussi bien daus les effets que dans les s y m p t m e s . Le c a l m e procur par l'application des remdes tait de courte dure, l'espace d'une heure dans une d e m i - j o u r n e , et il consistait dans u n e d i m i n u t i o n de la fivre, quelquefois aussi de la d o u ce leur. Ces paroles sont parfaitement d'accord avec les observations prcdentes ; aussi le lecteur s'criera : Ou sont donc les contradictions? 7 1 . Notre habile critique,voulant revenir la charge pour accuser Ciccolini d'ignorance, cite d'autres paroles de ce m d e c i n . Nous s o m m e s oblig de les transcrire ici, bien malgr nous, mais c'est l'usage, afin que la force de l'attaque n e soullrc pas de sa sparation du texte. D'aprs notre cri tique, Ciccolini a dclar: La maladie de sur Marini tait une obstruction forte et invtre d e l rate, d'une duret . irrductible et c o m m e pierreuse, j o i n t e h u n ' e n g o r g e m e n t de l'utrus. J'ai dcouvert cela par le t o u c h e r de la partie
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MIRACLES
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malade, par le pouls fivreux, par une altration convulsive, et par d'autres symptmes caractristiques de cette maladie Les mouvements nerveux.... taient causs en partie par la maladie principale de la rate, et en plus grande partie par une importante affection de l'utrus L'affection squirrheuse aurait fini par dgnrer en sphacle et en gangrne Je dsesprais cle la gurison principalement cause du squirrhe, et de l'embarras de l'utrus. Aprs ces extraits de la dposition, notre Censeur, toqn, stupfait d'une telle ignorance, s'crie : Allez donc maintenant mettre confiance dans un tmoin qui emploie indistinctement, c o m m e ayant la mme signification, les m o t s , embarras, affection, engorge ment, squirrhe, qui donne un pouls fbrile et les con vulsions c o m m e les effets ncessaires de l'obstruction de la rate, contrairement ce que nous apprend l'cxp r i e n c e ; qui attribue le rle principal, tantt la rate, tantt l'utrus; qui voit le danger de mort tantt dans un viscre, tantt dans un autre; qui craint que la rate n o n enflamme, mais s i m p l e m e n t obstrue, ne d gnre en sphacle et en gangrne ! ! 72. P o u r nous, nous ne voyons pas dans tout cela une ignorance assez grande pour mriter deux points d'excla m a t i o n (!!). Et d'abord, quant au n o m donn la maladie, lorsque le mdecin dclare expressment que la maladie tait une obstruction invtre de la rate, d'une duret semblable celle de la pierre, nous ne dcouvrons pas quelle confusion il peut en rsulter, ou quelle ignorance on
engorgement,
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Le mot affection est un terme gnrique, qui, l'espce du vice morhifique une fois dtermine, ne peut dsigner que ce vice particulier l u i - m m e ; c'est ainsi que et l. les mdecins le font passer d'une signification gnrique une signification particulire et dtermine. L'emploi de ces diffrents termes ne peut donc dcouvrir aucune trace d'ignorance. 73. Voyons si les faits mettront mieux c e l t e ignorance en vidence. Giccolini, dit notre critique, affirme contraire m e n t l'exprience, qu'un pouls fbrile et des c o n v u l sions sont les effets ncessaires de l'obstruction de la rate. O donc Giccolini fait-il cette affirmation ? Ce n'est certes pas dans sa dposition, car, l m m e , i l parle la fois de l'obstruction et de la mtrile, et il affirme les avoir reconnues Tune et l'autre au toucher, h la fivre,aux convulsions, et aux autres s y m p t m e s . La maladie, a-t-il a dit, lait une obstruction invtre de la rate, j o i n t e h u n e n g o r g e m e n t de l'utrus ; j e l'ai r e c o n n u au toucher, a u pouls fbrile, l'altration convulsive, et d'autres s y m ptmes. De quel droit donc notre critique prtend-il que Giccolini a attribu la fivre et les convulsions e x c l u s i v e m e n t l'ob struction ? De quel droit peut-il l'affirmer, lui qui a lu et qui nous a oppos ces autres paroles du m m e m d e c i n : Les m o u v e m e n t s nerveux et les convulsions furent surtout causs, j e pense, par l'affection de l'utrus,lequel paraissait attaqu outre mesure, c o m m e le dmontrait la matire paisse et purulente qui sortait souvent de ce m m e utrus ? 74. E n outre, nous avons tabli victorieusement p l u s h a u t que la_ raie tait la maladie principale ; cl, passant e n revue la succession et le lien des affections secondaires, n o u s avons m o n t r , que n o n - s e u l e m e n t l'obstruction de la rate avait prcd les autres maux, mais qu'elle tait leur cause naturelle tous, tandis que nul d'entre eux ne p o u vait l'engendrer. Quiconque se rappellera ce que nous avons dit sur ce point, pourra voir facilement qu'il ne faut n u l l e m e n t accuser Giccolini d'ignorance, quand bien m m e il a u rait attribu la fivre et les convulsions l'obstruction, c o m m e le veut notre Censeur. En effet, puisque l'obstruction fut la cause premire do tous les maux, elle dut tre aussi la cause premire, quoique mdiate, de la fivre et des c o n v u l sions. Bien plus, si l'on considre l'norme tumeur et la d u r e t du viscre, ainsi que les douleurs qui l'accompagnaient,
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donlenrs si vives qu'il ne pouvait supporter aucun contact au ct gauche, on c o n c l u r a c e r l a i n e m e n t que la fivre et les convulsions eurent leurs causes directes et mdiates dans l'obstruction e n question. Voyez alors combien de titres l'ignorance de Ciccolini se change en science. 75. Mais, dites-vous, le mdecin (Ciccolini) attribue le principe de la maladie tantt la rate, tantt l'utrus, < et il place le danger de mort, ici, dans un viscre, l c clans un autre. Que Ciccolini ait plac le danger de mort indiffremment dans la maladie des deux viscres,personne ne peut l'accuser en cela d'ignorance, si l'on se rappelle et l'tat de la rate dans la dernire priode, et la mtrito qui avait atteint l'u trus. Mais qu'il ait tabli le principal sige du mal tantt dans la rate, tantt dans l'utrus, nous le nions formel lement. Et, pour soutenir cotte ngation, n o u s n'avons besoin ni de recourir l'Expos ou Sommaire, o chaque fois qu'il s'agit de la maladie principale, il dsigne la maladie de la rate, ni de rapporter la dclaration rappele plus haut, dans laquelle il dit u n e manire absolue, et sans rserve, que la maladie de la religieuse Marini tait une obstruction forte et invtre de la rate, obstruction arrive une duret irrsoluble, comparable la duret de la pierre. Non, n o u s n'avons pas besoin de ces preuves, nous faisons tout simplement appel sur ce point l'autorit de notre Censeur. Lui-mme, dans ce paragraphe o il veut reprocher Ciccolini son fratras de paroles, demande ce que signifie un fort embarras de la rate, qui donne naissance un en gorgement de l'utrus ? S'il a pens que cela tait impos sible sans un prolapsus de la rate, s'il en a demand l'ex plication, c'est qu'il a vu clairement que Ciccolini attribuait le principe du mal, non l'utrus, mais la rate, et qu'il rap portait tellement l'affection de ce dernier viscre celle du premier, qu'il regardait la maladie de l'utrus c o m m e en tirement secondaire. Pourquoi donc oublier si vite sa propre admiration, et reprocher Ciccolini un sentiment contraire celui qu'il traitait avec tant d'aigreur quelques instants auparavant? 76. Continuons : Ciccolini craignait que la rate n o n enflamme mais obstrue ne vnt se convertir en sphacle et en gangrne ! ! Nous demandons tout d'abord notre critique o il a trouv que Ciccolini, vu l'tat si horrible de la maladie de la rate, ait rejet la possibilit d'une i n flammation prochaine, capable d'amener le sphacle et la gangrne? Pourquoi noter de deux points d'exclamation
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ce sentiment qui, en dehors m m e de l'existence de l'inflam mation, n'a rien de nouveau, ni de merveilleux dans la mdecine ? Il existe en effet une espce de sphacle qui est surtout produite par une cause intrieure, et qui se dclare spontanment, contrairement .ce qu'on en attendait. Or les obstructions qui interceptent le cours du sang, p e u v e n t amener cette espce de sphacle ; cela est clair pour q u i c o n q u e comprendra que la vie et la vigueur de tout le corps et de chacune de ses parties, leur prservation de toute corruption instantane, et l'intgrit do toutes les fonctions, dpendent du cours libre et gal des humeurs vitales dans tout l'individu... Ainsi, non s e u l e m e n t la m o r t de tout le corps, ruais aussi la mort de chacune de ses parties,dpendent de l'arrt de la circulation du sang ou de sa suppression Et ce mal est plutt chronique, il n'enlve pas la vie avec promptitude, mais il dure quelquefois assez l o n g t e m p s , et fait mourir insensiblement ( 1 ) . 77. Gela est souvent confirm par l'autopsie des c a davres qui montre une rate tout--fait corrompue, dissoute par un sphacle, sans aucune inflammation prcdenle.Pour citer des exemples l'appui de notre assertion, n o u s e n ap pellerons d'abord B o n e t u s , d o n t les citations n o u s montrent les faits c o m m e ils taient sous n o s y e u x . II rappelle d'abord cette observation de Salzman : < J'ai ouvert le corps du * chirurgien Agens, qui se plaignit l o n g t e m p s d'une faiblesse gnrale, mais surtout d'une vritable douleur l'hypocondre gauche, avec perte d'apptit et u n e soif c o n tinuelle. Il avait frquemment employ le mercure de vie que Ton prpare avec de l'antimoine (oxj'chlorure d'an t i m o i n e ) . A l'ouverture de l'abdomen, apparut une rate ple, sorte de substance smiputride avec quelques scis sures. Il rapporte encore la m m e chose,d'aprs Sennerte : Un h o m m e trs intelligent et quinquagnaire se plaignait, depuis quelques semaines, d'avoir perdu t o u t dsir de m a n g e r et de boire ; il se plaignait aussi de douleurs P h y p o c o n d r e g a u c h e . On lui administra un clystre moi-. < lient qu'il rejeta d'abord avec des excrments ; ensuite ( il rendit sans excrments une grande quantit de sang noir, et b e a u c o u p de m o r c e a u x solides semblables de la chair, de la grosseur d'une chtaigne ou d'une noix. L'eau n'en pouvait dissoudre aucun, et ils taient si n o m u breux, qu'avec e u x on aurait pu faire trois o u quatre rates. Cette sorte de djection dura t o u t e la j o u r n e ,
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ainsi que le 2 eL le 3 jour. Le 4 , on donna un second clystre m o l l i e n l e t lgrement astringent, qui fit encore sortir par trois fois du sang corrompu el des h u m e u r s dessches. Les jours suivants, les excrments furent trs naturels. La mort arriva le 15 jour de la maladie. On o u vrit le corps, on trouva la rate entire et sans lsion apparente; mais lorsqu'on eut incis la membrane, toute la substance de la rate s'coula sous forme de lie s a u g u i n o lente, d'une odeur un peu ftide ; elle tait si entirement corrompue, qu'on n'apercevait pas mme les fibres du viscre. (Bonetus, De sepulchreto, lib. 3, sect. 17.) Et plus bas e n c o r e : Une douleur s'tait fixe l'hy pocondre gauche de J. N., on trouva la rate pourrie, demi lacre, et d'un volume considrable... Un h o m m e trop adonn la boisson avait ressenti des douleurs dans les hypocondres, surtout au ct gauchc.La rate,augmen t e d u quadruple, tait fort dure et tendue par une sorte de lie noire... L'ill. N. atteint de maladies diverses, se plaignait aussi d'une douleur dans la rate. Aprs sa mort, la rate fut trouve entirement corrompue. Balloni crit son t o u r : J. P o r m a g e l se plaignait de douleurs aux deux hyp'ocondres, mais surtout celui de gauche ; la seule approche de la main lui tait a douloureuse ; le- pouls se faisait sentir la rate, et n o u s pensions qu'il y avait l un anvrisme. Le jour m m e que la veine fut coupe, il mourut, en rpandant du sang en abondance. La rate tait corrompue, et l'hy pocondre gauche on trouva une grande quantit de sang caill en grumeaux. (Ibid.) 78. Le clbre Morgagni va clore cette srie d'obser vations que nous aurions pu rendre plus considrable. Il parle ainsi : Un j e u n e h o m m e qui s'tait adonn au vin et ce qu'on appelle les spiritueux, sans en cesser l'usage m m e pendant qu'il avait la fivre intermittente, avait t atteint d'une douleur de ventre que l'mission des vents t par ' l e bas dissipa d'abord. Mais la douleur reparut aprs quelques jours, et c o m m e il ne pouvait la supporter chez lui, six jours aprs le retour de cette douleur, on le reut c dans l'hospice de Sainte-Marie de Vita de Bologne. La douleur tait incessante 1 hypogastre... Morgagni dcrit au long toute la marche de ia maladie, marche qui cachait, dit-il, la vritable nature du mal, et qui tait telle ment exempte de tout vestige d'inllammation, qu'on n e dcouvrait pas m m e de fivre. Ce fut le cinquime jour q u e le docteur interrogea le m a l a d e , et il dit : le p o u l s
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n'avait jamais rien eu, et n'avait encore rien qui pt laisser dsirer. Il n'y avait certainement aucune fivre, et personne no lui en vit jamais tout le temps qu'il passa dans l'hospice, si ce n'est peut-lre u n e fois. Les choses tant ainsi, qui alors aurait pu souponner le monstre prodigieux que ce malade portait en lui ? Il continue ensuite la description de la m a l a d i e , d e la mort inattendue, de l'autopsie du cadavre. A l'ouverture du ventre il s'chappa u n e grande quantit d'humeurs s e m blable du s a n s c o r r o m p u , et c o m m e d l a y d a n s des e x crments l i q u i d e s ; l'intestin grle tait noir c o m m e d u charbon. Il ajoute e n s u i t e : La rate tait atteinte,au m o i n s en partie, de sphacle on gangrne ( 1 ) . 79. Cette arme d'observations prouvent, sans doute, que la rate, obstrue o u n o n , peut, en dehors de toute in flammation, ou m m e en dehors de tout indice qui annonce u n e inflammation, tre entirement corrompue, sous l'in fluence de causes nombreuses, latentes ou apparentes, et arriver l'tat de sphacle. Dans tous ces cas n a n m o i n s , il y a ceci de constant : ds que cette dcomposition de la rate se prpare, il se m a n i f e s t e u n e douleur aujourd'hui plus lgre, demain plus grave, et quelquefois tellement intense, q u ' e l l e ne peut supporter le toucher. Nous avons voulu faire toutes ces remarques, parce que notre critique veut tirer de la douleur m m e une prouve contre l'obstruction. C'est pourquoi, si, e n prsence de cette douleur, en prsence aussi de cette t u m e u r n o r m e et dure c o m m e la pierre, Ciccolini ( m m e e n cartant, c o m m e le voudrait notre criiique, le s o u p o n d'inflammation, que le mdecin certes n'a jamais exclue), si, dis-je, Ciccolini et Castellani dans ces conditions n'ont pas h s i t prononcer d'un c o m m u n avis que le sphacle ou l a gangrne tait craindre, ils n'avanaient rien de contraire l a science m dicale. Ne faudra-t-il pas, nous ne voulons rien dire de plus, taxer notre Censeur d u n e nouvelle exagration, en raison de^ l'admiration qu'il fait p a r a t r e propos de l'avis des mdecins qui traitaient la malade? 80 Pour peu que l'on veuille envisager dans son ensemble tout ce qui vient d'tre dit contre le s e c o n d paragraphe de la dposition du m d e c i n , o n verra clairement que tout ce qu'on taxe d'ignorance dans le traitement des mdecins tait plein de sagesse, q u e les diffrentes parties de leurs dpositions sont parfaitement d'accord entre-elles, qu'ils
(i) Morgagni eph, anaLo. 35, g 14.
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n'ont jamais hsit, ni pour dfinir la nature du mal, ni pour en dterminer l'origine, que leurs dclarations tous deux sont en t o u t conformes la science mdicale et l'exprience. Par consquent l'obscurit, la divergence de sentiment, les opinions tonnantes, la confusion d e s ides dans le rcit des faits, r i e n de cela ne doit leur tre i m p u t , mais doit l'tre la rponse de notre Expert qui, tantt a pass certaines choses sous silence, tantt a altr les l a m beaux dpositions, en l e s isolant o u e n les groupant, tantt
p r o c l a m t r a n g e s l e s e x p r e s s i o n s les p l u s u s u e l l e s . A p r s t o u t e s ces r e m a r q u e s , n e n o u s s e r a - t - i l p a s p e r m i s d e r e t o u r
ner contre l'Expert les paroles m m e s qu'il a employes pour critiquer les mdecins appels auprs de la m a l a d e ? Voici un spcimen d e l manire dont procde notre Cen seur dans les observations critiques. Il avait dit, lui, d e s m decins et de leurs dpositions: certainement elles ne se recommandent ni par leur accord, ni par la clart du rcit, ni par l'usage convenable des expressions mdicales; et l'on ne doit pas ajouter confiance leur j u g e m e n t , leurs dci sions, sans q u e l q u e rserve. 81. Aprs affimation u n e telle confusion de faits et d'ides, il n e faut pas s'tonner, que notre Censeur ne s e soit
pas p r o p o s d e r e c h e r c h e r ce q u i t a i t c o n n u p a r les a c t e s , mais s e u l e m e n t de c h o i s i r tout c e q u i l u i p a r a i s s a i t vrai
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ils sont lis par la religion du serment, nulle raison, dans les usages de la Justice ou de la critique, n'autorise rvoquer en doute leur tmoignage, surtout lorsque tous sont d'accord pour affirmer une chose qu'ils savent par exprience, qu'ils ont vue e u x - m m e s . 1 Ce n'est pas en justice ; car alors on ne pourrait jamais juger une cause qui s'appuie sur la dposition des tmoins'; 2 Ce n'est pas devant la critique, puisqu'alors le fondement de t o u t rcit serait branl, et la certitude de tous les faits s'croulerait. Or, nos t m o i n s , et parmi eux, deux qui sont habiles dans l'art de gurir, d posent avec le plus grand accord, et aprs une longue exp rience du fait, que An gle-Josphine souffrait d'une t u m e u r de la rate, tumeur sensible la vue et au toucher; ils la d signent tantt sous le n o m d'obstruction, tantt sous le n o m de squirrhe, et aussi sous celui de duret squirrheuse. Donc celui qui rejette un semblable tmoignage, pche g a l e m e n t contre les rgles de la justice et de la critique ; il dtruit le fondement sur lequel repose toute la certitude des faits. 85. Jja saine critique nous fournit encore un autre a r g u m e n t pour rpondre l'observation qui nous est o p p o s e . Onze mdecins, des poques diffrentes, ont donn leurs soins ci la malade. Deux seulement, il est vrai, les der niers, ont pu dposer dans le procs. Les actes attestent ce pendant q u e tous ont port le m m e j u g e m e n t touchant la m a l a d i e principale; tous l'ont invariablement attaque par l e s d s o b s t r u a n t s . Ils ont t tous ignorants,- si vous le voulez ; mais ignorants, ils devaient ressembler aux autres h o m m e s dont il est dit: autant de t t e s , autant de s e n timents. C o m m e n t d o n c pourra-t-on croire que, tous, les uns aprs les autres, soient tombs, p e n d a n t tant d'annes dans u n e erreur unique et toujours la m m e ? Surtout si Ton envisage cette tendance si naturelle de l'esprit de l ' h o m m e rechercher avec soin les fautes de ses d e v a n ciers, dans le double but, et de m e n e r une fin plus h e u reuse l'uvre entreprise, et de mriter les honneurs dus au s u c c s ? . . . Donc, o u tous ces m d e c i n s avaient une nature diffrente de celle du reste des h o m m e s , o u bien les signes de l'obstruction de la rate s'offrirent si clairs, si vidents leur raison et leurs yeux, qu'ils furent dans l'impossibi lit d'attribuer u n e autre nature la maladie. P e r s o n n e n'admettra la premire alternative ; si v o u s n o u s accordez la seconde, vous nierez, en niant l'obstruction, un fait de la dernire vidence. 8 0 . Vous direz qu'ils ont pu tre t r o m p s par la tension
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des muscles, car vous affirmez les avoir vus quelquefois, surtout au ct gauche, si tendus, et si raides, qu'on aurait cru toucher une table de pierre, plutt que des tissus m o u s . Eh bien ! par l encore vous vous engagez dans de plus inextricables difficults. Nous ne nous arrterons pas faire remarquer que cet exemple est entirement tranger notre question. Car la tension des muscles, c o m m e vous le dites, offre ordinai rement l'apparence d'une planche ou d'une table de pierre, selon votre expression, c'est--dire, d'une surface plane et unie; l'ide de tension ne comporte rien autre chose. Or, dans le cas en question, il s'agit d'une tumeur ou d'une duret d'une certaine tendue, et prominente, que a l'il pouvait dcouvrir la seule inspection de la partie m a l a d e , suivant la dclaration si claire de Ciccolini. Et cette e m i n e n c e convexe ne ressemble absolument en rien une surface plane : passons sur cette observation. Mais si vous persistez croire que cette tension a induit les mdecins en erreur, il vous faudra admettre que cette m m e tension persist autant d'annes que la malade a senti et vu sa tumeur l'hypocondre gauche, autant d'annes que les mdecins ont employ les trai tements dsobstruants. La mdecine a-t-cllo jamais constat une t e n s i o n des muscles qui se soit prolonge pendant un aussi grand nombre d'annes ?
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87. Ce n'est pas tout. Rejetons l'obstruction de la rate comme la cause naturelle et ncessaire des autres m a l a dies, ainsi que nous l'avons vu prcdemment ; attribuons le principe du mal une affection nerveuse, l'hystrie par exemple; il faudra dire que toutes les autres mala dies ont dcoul de cette hystrie. C'est ce que notre Censeur a aflirm clairement lorsqu'il a dit : On doit regar der l'hystrie c o m m e la cause et la source des autres maladies. Nous accorderons volontiers, que l'hystrie est protiforme, qu'elle offre des aspects et des phnomnes si varis, si surprenants, si nombreux, qu'il est en quelque sorte i m possible d'en faire la description o u l'numration. Cepen dant, c o m m e chaque puissance ne peut exercer son empire que dans les limites de s o n action, chacun peut facilement comprendre que ces aspects et ces phnomnes, si varis, si surprenants, si multiples qu'ils aient t, ne peuvent pas sortir de la sphre des forces nerveuses. Et parce que ces phnomnes, quels qu'ils soient eniin, ont leur source dans une distribution irrgulire du lluide nerveux, o u dans
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un trouble s i m p l e m e n t d y n a m i q u e , ils ne reposent sur au c u n e affection matrielle cl organique. Ils sont donc tout fait inconstants. D'o ce caractre solennel des phnomnes hystriques, qu'ils ne se produisent que par paroxysmes, qu'ils s'loignent par intervalles,sauf revenir plus tard, et q u e , dans ces m m e s intervalles, ils laissent les malades libres et pleins de s a n t . Or, dans le cas qui nous occupe, on rencontre de fr quents phnomnes qui ne peuvent venir q u e d'une condition pathologique du systme sanguin , et parenchymateux des viscres, c o m m e les crachements et les v o m i s s e m e n t s de sang, la pleursie, la pripneumonie, la motrite, la leucorrhe, les hmorrhodes. Et tous ces m a u x , engendrs par des affections matrielles, eurent pour eux la continuit, une marche certaine, une fin dtermine, et demandrent u n traiLement particulier. Or, je le d e m a n d e , quoi notre Censeur rattachera-t-il, c o m m e leur c a u s e , ces faits et ces consquences ? Sera-ce l'hystrie, c o m m e il le dit, ou une autre cause ? Mais il n e peut choisir entre ces deux alternatives sans se contredire. S'il choisit la premire il soutiendra que l'affection nerveuse, incapable par sa nature de produire ces p h n o m n e s , est cependant de nature les produire. S'il prfre la s e c o n d e , il retirera l'hystrie le principe du mal, et cela contrairement . son assertion. 88. Telles sont les absurdits qu'il l u i faudra digrer, s'il s'obstine h rejeter l'obstruction de la rate, et s'en tenir son h y p o t h s e . Si rien de cela n e peut l'branler, qu'il marche hardiment, n o u s y c o n s e n t o n s , et, c o m m e il en a pris la rsolution, qu'il assume volontiers la note de tm-
rite .
89. Persistant d o n c dans s o n apprciation, notre Cen seur pense que tous les m d e c i n s , pendant un si grand n o m b r e d'annes, furent tromps par la continuelle tension des m u s c l e s , qui, selon lui, explique beaucoup mieux la t u m e u r qui s'esl dclare dans la rgion de 1 utrus, qu'une simple obstruction de la rate. Toutefois, c o m m e cette opinion pourrait paratre par trop dure et pour les logiciens et pour les mdecins, il ajoute : J'appuie, m o n doute, sur l'autorit de Galien. Ge dernier n'ap prouve pas b e a u c o u p la mthode de toucher et de presser sans c e s s e les h y p o c o n d r e s ; il dclare m m e capables d'induire en erreur, dans la recherche des maladies des viscres hypocondriaques, les signes four n i s par le t o u c h e r , moins que le viscre n e soit en-
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flamm, ou que les muscles n e soient: trs affaiblis (I). 90. Mais prenez garde de ne pas dtruire d'une main ce que vous construisez de l'autre. Que signifient, j e vous le demande, ces dernires paroles : a moins q u e le viscre ne soit e n f l a m m , ou que les muscles n e soient trs affaiblis ? Gela signifie videmment, que ce que l'on d couvre la vue et au toucher ne peut servir que clans le cas o la tumeur du viscre se manifeste clairement, soit par une augmentation bien sensible de volume,- c o m m e dans le cas d'une grande inflammation ( 2 ) , soit par la faiblesse des m u s c l e s que Ton touche, car cette faiblesse rend vidente la tumeur suppose, si petite qu'elle soit. Ou bien, en d'autres termes, cela signifie que les yeux et le t o u cher peuvent faire connatre d'une manire vidente une tumeur que les indices rationnels ne feraient pas reconnatre sans ce caractre. Certes, ni Galien, ni aucun mdecin sens n e pourraient dire autre chose, moins de donner raison aux arguments contre 1rs faits, car videmment, le signes rationnels ne sont que des indices, qui font connatre la maladie par voie d'induction ; tandis que les affections qui tombent s o u s le sens, sont des faits qui montrent la m a ladie e l l e - m m e d'une manire vidente ( 3 ) . 91. La chose parle d'elle-mme. Voyons cependant si telle est Topinion de Galien. L u i - m m e , dans l'endroit qui nous est oppos, parlant des affections du foie, fait celte remarque : Ce viscre est sujet, o u a des maladies produites par le seul vice des humeurs,sans tumeur aucune, lesquelles, par c o n s q u e n t , n'tant pas apprciables au toucher, ne peuvent tre reconnues que par les indices rationnels ; ou d'autres maladies, dans lesquelles la tumeur existe en m m e t e m p s que les humeurs vicies, c o m m e Yinflamma(1) C'est donc bien tort que Burserius a plac le diagnostic des obstructions dans les seuls indices sensibles du volume et de la durcie, quand il crit: Toutes les fois qu'un viscre prsente une duret plus est obstru ou engorg. Tom. VIII cap. 12 146. (2; En ciet, l'inflammation, on tant qu'ardeurdu viscre cach,n'est pas apprciable au toucher, mais on peut la reconnatre par la tumeur et la durele qu'elle produit dans ce viscre. (3) En outre, puisque, comme notre adversaire et Censeur le d clare, dans ses observations, les obstructions considrables de la rate peuvent exister sans maladies secondaires, on pourra rencontrer une obstruction \ritable, extraordinaire mme, en l'absence des indices rationnels. Ensuite, comme les maladies secondaires ne peuvent tre causes que par une obstruction de la rate bien dveloppe, il s'en suivrait qu'o ne pourrait dcouvrir un engorgement de celte espce
grande que sa nature ne le comporte, ou une augmentation de vo lump, et qu'il fait rsistance, les mdecins s'accordent dire qu'il
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lion, l'crysiple, le squirrhe, ou t u m e u r endure, e t c . , que leur nature d'affection organique et matrielle rend m a n i feste et place sous le domaine des sens. Il distingue ensuite dans ce viscre une partie convexe, on bosse, adhrente l'hypocondre droit, et reconnaissable au toucher, et une partie creuse o u c o n c a v e , situe l'intrieur, et hors du domaine du toucher. Cette distinction ainsi tablie,il dit ; P o u r les inflamma tions qui se dclarent dans ce viscre, si elles existent dans la partie gibbeuse,surtout si elles sont considrables, on peut les reconnatre trs f a c i l e m e n t au seul t o u c h e r ; mais pour les inflammations des parties c o n c a v e s , il faut les rechercher par d'autres indications accidentelles plutt que par le toucher. On voit, par ces paroles, que, d'aprs Gallien,il faut avoir recours aux indices rationnels, lorsque la maladie ne peut tre reconnue au toucher. E n d'autres termes, il est d'un sentiment en complte opposition avec celui de notre Censeur. 92. Il s'agit l du foie ; mais Gallien exprime encore plus clairement le m m e s e n t i m e n t au sujet de la rate, dans le chapitre suivant. Voici c o m m e n t il. entre en m a tire : Dans ce que nous avons dit du foie, on peut trouver facilement ies signes auxquels on reconnat les maladies de la rate : Vous noterez s e u l e m e n t que ses iniamma tions, c a u s e de leur durel, sont saisies facilement par le toucher. Puis, aprs une courte description des maladies de la rate et de leurs effets, il c o n c l u t : C'est pourquoi il ne faut pas n o u s arrter plus l o n g t e m p s ce viscre, parce que ses affections instrumentales (c'est--dire ses affections matrielles) n'ont pas besoin d'un diagnostic de raison. G a l i e n e s t s i loign d'admettre la ncessit des indices rationnels dans la recherche des affections matrielles de la rate, qu'il enseigne clairement au contraire que, vu leur duret, on les dcouvre facilement au toucher, et qu'elles n'ont a u c u n besoin d'un diagnostic de raison . 93. Aprs avoir justifi le diagnostic de la maladie d o n n par les mdecins, aprs avoir veng l'autorit de Galien des attaques de notre censeur, suivons-le clans son. opposition l'existence de l'obstruction de la rate, d'aprs sa naissance, ni dans son dveloppement, el qu'on ne pourrait prescrire aucun traitement. Enlin, comme cette escorte de maux qui sont produits ordinairement par l'obstruction de la raie, ne parait pas lui tre exclusivement propre, puisqu'elle pourrait provenir de la cachexie, on voit combien est faible ci douteux du sa nature l'ar gument lire des indices rationnels.
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les causes, le cours de la maladie, ses s y m p l m e s , ses effets et l'action des remdes. U. 11 fait remarquer l u i - m m e , que la rate peut se se gonfler lgrement, ou s'engorger, ou mme se solidifier sons l'action d'une inflammation. Or il nie que ce troisime cas ait eu lieu chez notre malade ; il exclut galement l'obstruction qui n'aurait pu se prsenter que par suite d'une vie paresseuse d'une nourriture insuffisante, de (f graves soucis de l'Ame et de fivres intermittentes inv tres, et parce q u e la maladie se dclara aussitt aprs des danses prolonges, tandis que, selon lui, l'obstruction ne doit se produire que lentement et successivement. 95. Nous accorderons volontiers que notre malade ne fut pas atteinte d'une inflammation del rate; mais nous nierons formellement que notre censeur puisse rejeter l'existence de l'obstruction par dfaut de causes productrices. Pour qu'il pt le faire, il faudrait dmontrer, qu'il n'existe pas d'autre cause d'obstruction que celles nonces par lui : Or il est dmontr t o u t la fois, et par la raison mdecinale, par l'autorit de Morgagni, et par le fait qu'il a rapport, que les violents exercices du corps fournissent une cause naturelle et suffisante des obstructions les plus graves. Tout le monde sait aussi, q u e toute cause dbilitante, et, en premier lieu, l'air h u m i d e , c o m m e celui de Pennabilli, en hiver, peut produire le m m e accident : Les habitants des contres humides ont ordinairement de grandes rates, cri vait Bonet (1). Puisqu'il y a, dans le cas prsent, le c o n cours de ces deux causes, il faut abandonner c o m p l t e m e n t l'objection tire du dfaut de causes. 90. Pour ce qui regarde la manifestation rapide de la maladie, n o u s rpondrons : Autre chose est la douleur, qui manifeste promptement l'action des causes morbifiques sur quelque viscre en particulier, autre chose est l'affection organique de ce m m e viscre. Or, personne n'a jamais dit qu'aussitt aprs les danses, la rate se ft tumfie, mais seulement qu'elle faisait mal. Bien plus, pour c e qui regarde le volume excessif qu'elle avait atteint, et qui tait sensible l'il aussi bien qu'au toucher, nous n'avons rien de cons tat cet gard, si ce n'est dans les dernires annes de la maladie. Il suit de l que le progrs de la maladie s'opra fort lentement ^successivement pendant une longue priode d'annes.Du reste, quand bien mme la rate serait tumfie e n
(1) Insckoliis more. ad observ. 16 lib. 3, sect. 16 de fypochonduorum tu-
vi.
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peu de temps, n o u s ne v o y o n s pas ce que pourrait objecter notre censeur, puisqu'il a dclar : La rate est un viscre m i n e m m e n t vasculeux, surtout et parce que la capacit des veines est beaucoup plus grande que celle des artres, et que les veines sont u n e nature trs extensible cause du peu d'paisseur d e leurs parois ; lorsque le sang y afflue outre mesure, il y trouve u n e voie facile et un *vasle r c i p i e n t . C'est a i n s i q u e g o n f l e p a r c e s a n g , la
rate prouve une tumfaction temporaire.
Or, il est vident que, aprs un violent exercice de danse pendant trois heures, le sang prcipit avec plus de force dans sa course, a d affluer la raie outre mesure, et que cette dernire a pu se tumfier. Si maintenant vous c o n sidrez qu' raison de la circulation naturellement lente travers ce viscre, et de l'clroitesse de la veine porte, tout le sang n'a pas pu s'couler assez vite dans la veine cave, vous comprendrez que le gonflement passager de la rate produit par cette stagnation de sang, a pu devenir le c o m m e n c e m e n t d'une obstruction. Ainsi, quand bien m m e la rate se serait tumfie rapide m e n t , il n ' e n rsulterait r i e n d'absurde c o n t r e n o u s , m m e d'aprs l a thorie d e n o t r e C e n s e u r : ( m a i s d a n s le c a s en question, les t m o i n s n'ont pas affirm ce fait, et nous ne l'affirmons pas n o n plus); c ' e s t p o u r q u o i , l'objection tire de l'engorgement rapide de la rate tombe d'elle m m e . 97. Des causes et de la marche de la maladie, notre Cen seur passe aux s y m p t m e s . Selon lui, c e u x qui sont atteints de la maladie de la rate, se trouvent beaucoup m i e u x e n se couchant sur le ct gauche, tandis que notre religieuse ne pouvait se coucher sur le ct gauche . Et de plus, les obstructions de la rate a m n e n t ordinairemment une d o u leur obscure, croissant peu peu ; tandis que la religieuse accusait un tourment insupportable . Donc, conclut-il, les indices m m e tirs d e s s y m p t m e s font rejeter l ' o b s truction d e la r a t e . 98. Quant la difficult de se coucher, n o u s a c q u i e s ons volontiers au sentiment de notre expert, lorsqu'il d i t : 11 est facile de comprendre que le viscre, v u r a c ci croissement de son v o l u m e et sa duret, doive faire prouver au m a l a d e la sensation de son poids et de sa traction, lorsqu'il vient se coucher sur le ct droit. Mais, son tour, il n e doit pas faire difficult de n o u s accorder que cela arrive, lorsque la douleur i n t rieure est s e u l e m e n t sourde et s a u g m e n t e graduellement. Mais si la douleur est aigu et intente ; si elle se prolonge
jusqu'aux parties externes, au point de ne pouvoir suppurter de contact, il sera clair alors que la partie malade ne pourra aucunement supporter le poids de tout le corps qui pse sur elle, et qu'elle endurera plus facilement la sensation de poids et de traction, q u e cette pression considrable. 99. Du reste, on le sait, le caractre, le sentiment, l'in tensit de la douleur dpendent, ou de la nature de la marche de la maladie, ou de la sensibilit des autres vis cres afects par la pression, ou de l'tat passif des vais seaux sanguins et des ramilicalions des nerfs. C'est pourquoi les uns souifrent d'une faon, les autres d'une autre faon, de sorte qu'il est impossible de tirer un indice pathognomo nique de la difficult de se coucher sur un ct plutt que sur un autre. Citons un exemple. Tout le monde sait que cette mme raison de poids et de traction du viscre est cause que, dans les maladies des poumons, la plupart des ma lades ne peuvent se coucher sur le ct sain. Ce fait trs or dinaire ne constitue pas cependant une loi gnrale. Aussi Pierre Frank, faisant connatre les signes de la pripneu monie, ne mentionne pas plus la difficult de se coucher sur le ct sain, que celle de se coucher sur le ct malade; mais il dit en gnral : L e coucher est douloureux tantt sur ce ct, tantt sur l'autre. Antoine Portai parlant des phthisiques, dit: Les uns ont la respiration pnible, seulement quand ils sont couchs horizontalement, les autres peuvent respirer lorsqu'ils sont couchs sur l'un o u l'autre ct, mais non sur le dos... d'autres ne le peuvent que sur un seul c t . . . On a remarqu que certains phthisiques reposent plus facilement sur la partie m a ie lade, que sur le ct qui est sain; mais en cette question, il est des observations .dont les rsultats ont t c o n fit traires... Quelquefois les poumons se trouvent ulcrs du (i ct sur lequel les malades ne peuvent se coucher (1). 100. Ainsi donc, p u i s q u e c e sont les diverses circons tances dans lesquelles se trouvent les malades et les mala dies, qui produisent indistinctement la difficult de se coucher sur un ct ou sur l'autre, quoique la maladie du viscre soit la m m e , on ne peut regarder c o m m e un signe p a t h o g n o m o n i q u e l'impossibilit de se coucher droite.ou g a u c h e . C'est donc bien tort que, sur cet indice incer tain, on conteste la nature d'une maladie qui est tablie, d'ailleurSjSur des s y m p t m e s manifestes,continuels,elpalhognomoniques. Or c'est bien l le cas que nous traitons, car
(I) De la phthisie pulmonaire, tome. 1H, page 01.
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lo volume dmesur du viscre, sa duret de pierre, les douleurs intenses qui ne peuvent supporter le moindre contact, indiquent la cause vidente de l'impossibilit de se coucher s u r le cot malade. 1 0 ! . Il nous reste seulement k parler de la nature de la dou leur.Or qui ne sait que la nature de la douleur dpend, et de la diversit de la marche de la maladie, et de la diffrence de la sensibilit chez les m a l a d e s , et de tout le s y s t m e n e r veux, el du systme p a r t i c u l i e r du viscre m a l a d e . B u r s r i u s , traitant spcialement d ' u n e maladie semblable t celle qui fait l'objet de notre discussion, nous apprend ceci : Il n'y a a pas de douleur, si l'obstruction, par suite de sa l o n g u e dure, a revtu une nature squirrheuse; au contraire, la douleur est aigu el piquante, avec une sensation de chaleur, quand elle est transforme en chancre, en spha cle ou en abcs de m m e nature. Il ne faut donc pas s'tonner si, chez notre religieuse, la douleur est devenue aigu et insupportable, puisque chez elle l'obstruction menaait de devenir u n e gangrne. Gela c o n c o r d e parfaitement avec les observations prcdentes de Bonet, et, surtout avec la maladie de ce Jean F o n n a g e t , dont 1 hypocondre devenait d o u l o u r e u x l o r s q u ' o n y a p p r o chait la main. 102. Si cependant, selon la remarque du Censeur : nous v o y o n s journellement les habitants de nos c a m p a g n e s , quoiqu'ayant la rate plus grosse que d'ordinaire, conduire la charrue, manier le b o y a u , faucher les bls, sans sour it frir de la rate au milieu de ces travaux, ou,s'ils en souffrent habituellemeut, sans voir augmenter leur douleur , cela prouve que leur e n g o r g e m e n t n'a pas tourn en g a n g r n e ; cela prouve encore qu'il n'y a p o i n t chez eux c e t l e sensi bilit du systmenerveux, gnral ou particulier, qui produit ,des douleurs aigus. E t en effet, en dehors du pril d'abcs et de sphacle, n o u s avons vu plus haut u n h o m m e souffrant d'une obstruction extraordinaire de la rate, sans q u e celle-ci ft c o r r o m p u e , mourir trs amaigri par la douleur du ct gauche et la tumeur ; et certes, si cet h o m m e est mort puis par la douleur, cette douleur chez lui ne dut pas tre seu l e m e n t graduelle et sourde, c o m m e chez n o s habitants de la campagne. 103. Les s y m p t m e s ne s'opposent donc pas l'existence de l'obstruction ; voyons maintenant si l'absence de ses effets o u consquences s'y oppose davantage. Notre c e n seur crit : Si Angle-Josphine a souffert d'une duret de la rate pendant vingt-trois ans et plus, pourquoi ne vit-on
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jamais chez elle les effets produits habituellement par Tinterruption des fonctions de ce viscre? On a constat que, la rate tant affecte, la masse entire' du sang Test galement, et que l'tat ordinaire du corps est mauvais. Mais, d'un autre ol, s'appuyant sur l'autorit d'un grand nombre d'auteurs, il donne c o m m e signe de cette altration notable du corps : une mauvaise couleur, des pustules sales, la tumfaction des gencives et leur ulcration, l'branlement des dents, la mauvaise odeur de la bouche, les ulcres aux lvres ou aux pieds, des hmorrhagies, un malaise gnrai, la maigreur, les fivres lentes, de l'enflure, des urines c o u leur de brique, l'ascite, Tanasarque, les autres espces d'hydropisie, et beaucoup d'autres encore qui forment c o m m e l'escorte oblige des maladies de la rate. A la suite de cette numration, il c o n c l u t : La rvrende sur ne prsenta ni des couleurs mauvaises, ni le scorbut ni des ulcres, ni aucune espce d'bydropisie, malgr la longue dure a de sa m a l a d i e ; on peut donc affirmer srement l'absence chez elle des effets qui se manifestent ordinairement dans une obstruction invtre de la rate. Les suites de la maladie faisant dfaut, c o m m e il ne trouve aucune proportion entre la cause et les effets, il rejette galement notre sentiment, qui place le principe du mal dans l'obstruction de la rate, cause efficace des autres affec tions , et son observation critique prcdente, tendant nier que l'obstruction de la rate ft la cause unique, el Tunique source de toutes les autres affections. 104. Cet argument peut se rsumer ainsi : Une obstruction grave et invtre de la rate doit produire une dyscrasie (1), ce qui se manifesterait par les effets numrs plus haut. Or on peut assurer d'une manire certaine, qu'on ne ren contre aucun de ces effets dans le cas qui nous occupe ; donc l'absence de ces effets fait conclure l'absence de la cause de la dyscrasie, c'est--dire, de l'obstruction. 405. Pour peu qu'on y rflchisse, on verra facilement combien de titres ce raisonnement est vicieux. D'abord, (1) Le mot dyscrasie se compose de la parLicalc dys, qui signifie mal, mauvais, etc., cl du mol crasis, l'nergie ou le temprament u corps; les mdecins, par ce mot crasis, dsignent le tempra ment vital ; c'esl l'espce et la diffrence premire et essentielle de la sant, ou bien la facult du corps humain et de ses parties de remplir leurs fonctions. (Caslelli, lexique nidic, mot crasis.) Nous employons ce mot de dyscrasie, * ou de mauvais tempra ment, pour rendre entirement, par un seul mol, cette altration, qui, dans les engorgements, vient glor la masse du sang, el vicier l'tat ordinaire,du corps, crit notre censeur.
personne n'est assez simple pour n e pas comprendre l'im possibilit de rencontrer, dans un seul et m m e malade, tous les indices recueillis par l e s diffrents auteurs. On r e c o n natra donc que tantt ceux-ci, tantt ceux-l, se manifes teront, suivant les conditions diffrentes des malades, et la marche de la maladie: d ' o on conclura q u e , l'obstruction tant bien prouve, l'un ou l'autre des indices de cette ma ladie est suffisant pour tablir l'existence de ses effets.
Or p e r s o n n e n e p e u t nier q u e l e s hmorrhagies, l e s fivres l e n t e s , la m a i g r e u r , u n m a l a i s e gnral d u c o r p s ( t o u t e s
choses que notre censeur numre clairement c o m m e effets d e l'obstruction) n'aient t dsigns par les mdecins appels soigner la malade. Il est donc certain q u e la vrit n e se rencontre n u l l e m e n t dans ces paroles de notre habile cri tique : On peut affirmer e n toute assurance que les effets qui se produisent ordinairement dans une obstruction de la rate, ont fait dfaut ici. Or, admise l'existence d e ces effets, on ne peut en nier la cause; et par suite s'croule l'chafaudage de l'argumentation. 106. Mais, passons l d e s s u s ! Le r a i s o n n e m e n t de notre adversaire n e pourra conserver sa force qu' ces deux c o n ditions : Il faudra prouver: t Q u e t o u s les effets d e l ' o b s truction, e t chacun d ' e u x e n particulier, o n t t n u m r s si entirement et avec tant de soin, q u e , tous venant manquer, on puisse affirmer en toute scurit, qu'il n'y a e u rellement aucun effet de cette maladie. Car, si l'obstruction peut avoir des effets diffrents de ceux qu'on a n u m r s , et si ces eirets ont exist rellement,la force d e l'argument t o m bera. 2 Que les m m e s effets sont si ncessairement i n h rents au caractre et la nature de l'obstruction, que, s'ils manquent, il faut rejeter l'existence de c e t t e maladie : En effet, si elle peut exister sans ces effets, c o m m e n t de leur absence pourra-t-on arguer .de l'absence de l'obstruction? 107. N o n - s e u l e m e n t notre critique si habile n e prouve n i Tune ni l'autre de ces d e u x propositions, mais il les n i e t o u t e s d e u x . Premirement, q u a n d il numre chacune d e s suites d u n e obstruction de la rate, il avertit,d'aprsLommi, que ce n e sont pas les seules qui dcoulent de l'obstruction, mais qu'il y e n a encore beaucoup d'autres qui forment c o m m e le c o r t g e oblig des maladies de la rate . D e u x i m e m e n t il a crit : On voit dans les auteurs qui o n t recherch les causes des maladies par l'autopsie des cadavres, des exemples de rates engorges, et converties en grande partie en une substance cartilagineuse, o u osseuse, sans cependant quelles eussent produit chez c e s
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h o m m e s , pendant leur vie, nul autre inconvnient dans le viscre atteint, que de lgres souffrances l'hypocondre gauche. A l'appui de ce sentiment il cite Foresti, Lommi, Bigsby, qui rapportent des exemples d'obstructions de rate extraor dinaires et invtres, n'offrant aucun des effets numrs plus haut. Mais si notre censeur affirme lui-mme, qu'en dehors des effets qu'il a rapports, il y en a encore beaucoup d'autres qui peuvent se rencontrer chez les malades de la rate, comment de l'absence de ceux qu'il a numrs, c o n c l u e r a t-il l'absenee de tous les eifets de l'obstruction ? Et si une obstruction de rate extraordinaire el invtre peut exister sans produire ces effets, de quel droit fait-il servir leur absence p.our rejeter l'obstruction? 108. Mais son raisonnement a un autre dfaut beaucoup plus grave : Il est en opposition avec les faits les plus vidents. Quoiqu'il soit difficile de rencontrer runis et si longtemps permanents de plus graves dsordres dans les viscres, dans tout le systme, et dans toutes les fonctions vitales, ou u n e dyscrasie mieux dclare que dans notre cas, on nie cependant cette dyscrasie, parce que les mdecins n'ont fait aucune mention de mauvaises couleurs, de scor but, d'ulcres, d'hydropisie. On pourrait aussi demander, si ce sont les seuls signes par lesquels la dyscrasie se manifeste, et puis,s'il est permis de nier l'existence de quelques-uns d e ces symptmes, parce qu'ils ont t passs sous silence par des mdecins qui dposent trente annes environ d'inter valle, lorsqu'ils parlent de maladies si graves et si n o m breuses, que compares elles, la mauvaise odeur de la bouche, la tumfaction des gencives, les couleurs mauvaises peuvent paratre peu de chose, et dignes d'tre passes sous silence (1). 109. Eh bien encore, lors m m e que nous ne n o u s arr terions point cela, il suffit de lire avec attention les textes des auteurs cits par ntre habile critique, pour re marquer qu'il existe entra eux une divergence. Les uns, en (1) Surtout parce que la mauvaise haleine, v. g. pourrait avoir pour cause le trouble des fonctions de estomac et les mauvaises dit gestions qui taient signals. Mais on ne pouvait manquer de trouver les mauvaises couleurs dans nue personne qui soufiait depuis plus de viugt-lrois ans, dont la rate tait certainement engorge; qui avait eu de frquents ilux et vomissements de saug,ctdesemissions sanguines plus frquentes; qui souffrait des douleurs excessivement aigucs,et qui, a la fin de sa maladie, ne prenait plus ni nourriture ni sommeil depuis plusieurs mois.
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effct,se sont borns numrer les effets extrieurs de la dyscrasie, et ont peine effleur les signes intrieurs. Les autres au contraire, c o m m e Burseri, ont s e u l e m e n t dcrit les signes intrieurs en ngligeant les autres (I). T o u t cela fut f a i t n o n pas la lgre ; on le comprend facilement, si on se rappelle cette loi physique si bien c o n n u e , en vertu de laquelle les maladies qui manifestent leur intensit l'extrieur prin cipalement, affectent peu ou point l'intrieur, et rciproque ment, et celles qui affectent ce dernier avec violence, ne produisent que peu d'effets l'extrieur. Or, dans notre cas, t o u t e l'intensit de la maladie se dveloppa Tintrieur ; elle ne put donc manifester l'extrieur des indices nombreux et graves de son existence. C'est pourquoi (en accordant, sans toutefois l'admettre, l'absence des effets ex ternes), si ces effets manqurent, non-seulement il-n'est pas pour cela permis de conclure l'absence de la cause de la maladie, mais au contraire, on doit la regaider c o m m e d'autant plus grave, que la marche intrieure du mal est plus dangereuse, q u e le trouble gnral fut plus grave, et la maladie plus concentre l'intrieur. 110. Rappelons, en courant, avec qu'elle intensit l'obs truction de la rate a svi l'intrieur, et quelle masse de m a u x elle engendra. L'utrus fut affect le premier, soit cause de la marche progressive de la maladie, soit cause d'une pression t o u t e mcanique. Atteint d'abord d'une inflammation l e n t e , il se mit se gonfler, s'endurcir, faire endurer de vives douleurs ; puis une vritable mtrile s'tant dclare, il laissa couler un liquide corrompu. On vit alors des fivres violentes qui ne purent tre apaises que par un traitement antiphlogistique gnral et local ; en m m e temps, les fonctions naturelles du viscre tant trou bles, l'coulement m e n s u e l fut tantt irrgulier, tantt supprim. La circulation du sang arrte tout la fois et par la c o n d i t i o n morbide de ce viscre, et par le gonflement de la rate, reflua avec violence dans les p o u m o n s , elle provoqua des v o m i s s e m e n t s sanguins, une pleursie, des pripneum o n i e s qui se rsolurent ensuite par des suppurations. Ces douleurs v i o l e n t e s de l'utrus et de la rate, jointes la difficult de la circulation du sang, durent ncessairement
( i ) Berseri ( l'endroit cit par notre adversaire), donne les signes de tension, de douleur fixe, de tumeur, de dilicnlt de respirer, de t o u x , et ajoute ensuite : Toutes ces choses durent longtemps, et s'augmentent s e n s i b l e m e n t : Ajoutez le reste est rapport par n o t r e censeur.
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branler, puis irriter le systme nerveux; de l ces violentes convulsions tant gnrales que partielles, qui prirent quel quefois l'apparence de la paralysie et de l'apoplexie. Ensuite, raison de cette maladie des principaux viscres et de tout le s y s t m e , survinrent l'anorexie, les nauses, la digestion difficile, la faiblesse de tout le systme musculaire, le dfaut de s o m m e i l , la fivre lente, et enfin le lit gard pendant six mois. 111. Cette complication de maladies que les tmoins ont rapporte plus au long et en dtail, mais avec le m m e degr de force, fait voir, dans notre religieuse, une bien grave dyscrasie produite par un vice ou une perturbation des viscres, de tout le systme du corps et des f o n d i o n s vitales; elle montre aussi que ces affections morbides furent des plus videntes et des plus nombreuses, et qu'il y eut toujours u n e trs-grande proportion entre ces effets et leur cause, c'est--dire, l'obstruction de la rate. De quel droit notre expert vient-il condamner notre, sentiment et celui de l'attaque sur la nature du mal premier et principal, en nous opposant le dfaut de rapport entre la cause et les effets, puisqu'il n'y croit pas? De quel droit a-t-il crit : <c Si la maladie de la rate tait la seule ou bien mme la prinu cipalo c l u s e de tous ces m a u x que la sur a endurs pendant vingt-six ans, il est vident qu'il dut y avoir quelque proportion entre cette affection, c o m m e cause, et ces m a u x , c o m m e effets; mais les faits rassembls dans le sommaire s'y opposent. Le sommaire ne contient-il donc pas les faits que n o u s avons n o n c s ? Nous en appe lons aux lecteurs. 112. Revenons au point que nous avons quitt pour r pondre cette observation qui n o u s tait faite. On voit maintenant les dfauts du raisonnement qu'on nous oppose, dfauts qui procdent de l'absence des effets de la m a l a d i e : 1 Car plusieurs de ceux qu'on a noncs, et les plus graves, sont relats dans le sommaire par les mdecins de la m a lade: il est vident qu'il suffit d'eu avoir plusieurs, puisqu'il est impossible de les rencontrer tous. 2 L'numration de ces effets, ncessairement dfectueuse, laisse place d'autres effets, et c o m m e ces derniers subsistent, on ne p e u t nier l'existence de la cause, m m e en l'absence de tous ceux qui sont indiqus. 3 Ces effets ne sont pas si ncessairement lis la nature du mal, que leur absence doive faire rejeter le mal lui-mme. Notre Censeur'l'avoue, les obstructions inv tres et trs-graves peuvent exister et existent sans eux. 4 Enfin, quand ou s'attache aux moindres choses, o n n -
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glige les principales; et malgr u n e vidence si grande d'effets les plus terribles et de dyscrasie gnrale, o u nie l'existence de ces effets et de la dyscrasie. 113. Notre Critique n o u s oppose cependant encore u n e nouvelle observation pour rejeter l'obstruction. Il crit : Enfin, on n e voit pas bien c o m m e n t une obstruction te qui se serait dclare chez u n e religieuse encore j e u n e , sans avoir t prcde de fivres l o n g u e s , et contre ce laquelle on employa les remdes convenables, se soit cependant montre rebelle jusqu' la fin, lorsque tous les auteurs sont d'accord q u e , dans c e s c i r c o n s t a n c e s , <t la gurison de la maladie est facile. Voil certes u n genre d'argument tout n o u v e a u . U n e obstruction, s o n dbut, peut tre gurie par l'emploi des remdes c o n v e nables. Or, dans le cas prsent, la maladie, s o n dbut, ne fut pas gurie par ces sortes de remdes ; donc la maladie n e fut pas une obstruction. Que penserait notre Censeur si n o u s crivions : Une livre gastrique, u n e pleursie, la frac ture du tibia p e u v e n t naturellement tre guries l'aide de traitements convenables. Or, malgr l'emploi de ces r e m d e s convenables, ds le dbut de ces maladies, les malades n'en sont pas moins m o r t . Donc ces malades n'avaient ni p l e u rsie, ni fivre gastrique, ni fracture du tibiat II ne d c o u vrirait nulle obscurit, j e pense, dans ces c a s , q u i s'offrent j o u r n e l l e m e n t avec vidence ; et s'il les regardait c o m m e certains, alors il serait forc de reconnatre d'une manire certaine q u e c'est son raisonnement qui est obscur. 114. Mais pour qu'il se fasse l u i - m m e u n e rponse plus convenable, nous n e lui mettrons pas devant les y e u x les seuls exemples q u e nous avons rapports d'obstructions i n vtres de la rtc, qui ont conduit l e s malades la moFt, mais bien ceux qu'il rapporte d'aprs Poresti, L o m m i et Bigsby, de c e s obstructions extraordinaires, et m m e c a r t i lagineuses et osseuses, qui n'ont jamais t guries.Nous lui d e m a n d e r o n s ensuite s'il croit que ces obstructions o n t t rcentes u n e certaine p o q u e ? S'il en convient, nous le presserons : p o u r q u o i donc ces obstructions, gurissables leur dbut, n'ont-elles pas cd aux r e m d e s ? S'il rpond : c'est parce q u e , o u bien la marche particulire de la m a ladie, o u bien la constitution particulire du malade o n t rsist au traitement, cette rponse dissipera toute l ' o b s c u rit de c e s cas et d u ntre. l l o . Voici c o m m e il termine tous ses arguments rassem bls pour nier l'obstruction de la rate, et dont c h a c u n peut maintenant apprcier la force. D o n c les signes rationnels
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fournis par les causes de la maladie, par son cours, ses symptmes, ses vicissitudes et par l'action des r e m d e s , a t testent que l'obstruction de la rate est invraisemblable. 116. Nous pensons, au contraire, qu'on peut, d e c e que nous avons dit ci-dessus, dduire et formuler, plus juste titre, un jugement tout fait oppos au sien. En effet, a u dbut de la discussion, n o u s avons dmontr l'existence et la nature de la maladie, affirm que l'engorgement de la rate tait le principe de toutes les autres maladies, et veng les dpositions des tmoins du reproche ignorance,de dissenti ment, d'exagration. l'aide de la raison mdicale et des faits, nous avons montr : 1 Que les causes taient propres produire l'engorgement; 2 que la marche de la maladie en question a t lente ; 3 que les symptmes produits par elle taient naturels ; 4 que les vicissitudes si nombreuses et si dangereuses de cette m m e maladie taient tellement lies entre elles, que, de m m e que leur origine et leur liai son sont claires, videntes, l'existence de l'engorgement ad mise, elles deviennent o b s c u r e s , dsunies, et sans causes suffisantes, en dehors de cet engorgement. 5 Nous avons vu enfin ce que vaut le reproche d'obscurit tir de l'opinitret d'une maladie qui devait tre gurissable par elle-mme. C'est pourquoi les signes rationels fournis par les causes de
lamaladie, par sa marche, ses symptmes, ses vicissitudes, par l'emploi des remdes, tout cela, non seulement n'atteste pas que Vohstruction de la rate est invraisemblable; mais
qu'au contraire, tout l'affirme le plus clairement possible et d montre son existence avec plus de force el plus d'vidence. 117. Jusqu'ici-nous avons veng notre thse des attaques du docte censeur. Voyons maintenant ce qu'il a pens de la nature de la maladie. Voulant ramener t o u t e la maladie une pure nvralgie, et plus particulirement une simple hystrie, il affirme que t o u t , dans le cas en question, dnonce, non pas une obstruction de la rate, mais u n e simple splnalgie, et il s'efiorce de le prouver en ces termes: Une maladie qui ouvre la voie a. la d o u l e u r . . . qui e m p c h e les exercices du corps... qui s'aggrave par une marche prcipite et par Tquitation... qui devient plus aigu par un chagrin inopin... qui, au milieu des fluctuations et des troubles de l'me causs par la crainte du serment, reparat de n o u v e a u aprs une courte dispa rition, .... qui exerce u n e telle action sur les m u s c l e s , que le corps se courbe forcment, . . . c e t t e maladie c e r t a i n e m e n t est une affection nerveuse et doit tre dsigne
par le n o m de splenalgie.
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i 18. Sans vouloir manquer au r e s o e c t d un h o m m e aussi clbre, n o u s n o u s permettrons d'affirmer qu'il ne pouvait c e r t a i n e m e n t rien apporter de plus clair q u e l'histoire de cette maladie dans sa marche, pour exclure la srnp/esplnalgie. Nous disons simple, car la splnalgic, c'est--dire la douleur de la rate,de m m e qu'elle peut exister sans substrtm [\), quand une affection nerveuse la produit, a c c o m p a g n e ce pendant aussi l'obstruction, l'abcs, le polype et les autres affections rie la rate, et dans ces cas elle devient le s y m p t m e de la maladie en question. Mais ici notre censeur rapporte cette d o u l e u r aux nvroses ; la discussion roulera donc sur la simple splnalgie, que n o u s rejetons d'aprs les rai sons avances par lui. Sans d o u t e , la douleur cause par une simple affection nerveuse, par cela qu'elle m a n q u e d'une cause matrielle, n e peut tre constante, elle ne p e u t plus forte raison tre de l o n g u e dure ; de sorte que, si elle se prolonge pendant quelques j o u r s , cetle dure m o n t r e aux mdecins q u e sa cause n'est pas dans une maladie de nerfs. Or notre cri tique, d'accord avec le sommaire, reconnat dans le cas en question u n e douleur constante pendant vingt-trois ans ; il rapporte les faits qui dmontrent celte vrit, il emploie m m e les expressions : elle devient plus aigu, elle prend de nouvelles forces^ qui supposent l'existence n o n i n t e r r o m p u e de la maladie. Donc, cette d o u l e u r qu'il appelle nvrose par ses expressions, il d m o n t r e , p a r les faits, qu'elle n e peut tre une nvrose; il se rfute l u i - m m e . Mme sans tenir c o m p t e de nos raisons, il m o n t r e q u e la m m e douleur s y m p t m a t i q u e a d tre produite par u n e c a u s e matrielle. 119. Notre prsente observation se trouve e n c o r e c o n firme d'une autre manire par le Critique, lorsqu'il fait remarquer q u e la douleur s'est aggrave par une marche prcipite et par Vquitation. Il est en effet reconnu q u e les violents e x e r c i c e s du corps agissent plus directement sur le s y s t m e s a n g u i n que sur le s y s t m e nerveux, et par c o n s q u e n t font sentir leur contre-coup de prfrence sur ls viscres o se porte principalement le s a n g , lorsqu'il est p o u s s avec v i o l e n c e . La rate e s t de ce n o m b r e . Sauvage, traitant de c e t t e q u e s t i o n , crivait t o u c h a n t l'obstruction de la rate : On ressent ensuite u n e certaine douleur aigu, surtout dans la course et dans u n e p r o m e n a d e prcipite . ( 1 ) Nous ne voyons pas d'expression franaise pour rendre ce mot, d'ailleurs compris du monde savant.
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Notre critique parat donc avoir rapport ce second fait pour faire rejeter son h y p o t h s e . 120. Nous ne disons rien pour le m o m e n t de cette t o n nante rechute dans la m m e maladie, longtemps aprs la gurison ; nous en parlerons-.plus tard. Nous discute rons actuellement ces paroles du critique: S'il y a dans < la rate une assez grave douleur, sans le substrtm f matriel de l'obstruction, de quel droit admettrez-vous ce substrtm clans les douleurs plus lgres qui ont prcd ? Qui pourrait ne pas. remarquer les vices de ce raisonne ment? Assurment ce n'est pas nous, qui oserions affirmer que ces douleurs furent reproduites par l'anxit de l'hsi tation jointe au substrtm, c'est--dire, l'obstruction. La gurie," en effet, accusa seulement ces douleurs, et, dans cet accs instantan et violent de douleurs, aussi bien que dans le trouble si grand de son esprit, elle ne put remarquer si une tumeur s'tait aussi produite.Du reste, c o m m e il s'agit de la rapparition prodigieuse de la maladie, et que l'obs truction n'en est pas exclue, il ne sera permis personne d'affirmer que l'absence d'une tumeur est certaine et hors de doute. Il n'est jamais permis de tirer une conclusion certaine de faits incertains. On pourrait peut-tre tirer cette conclusion, si la douleur seule nous faisait admettre et prouver l'existence de l'obstruction; mais, en considrant soit les causes de la maladie, soit sa naissance et sa marche, soit Tordre et le lien de toutes les affections qui en dcoulent, soit la mthode constante de traitement, soit enfin 1 evidence qui se manifestait la vue et au toucher, il s'en faut tant que la seule douleur puisse servir dmontrer la maladie, que, devant les preuves si varies et si l u m i n e u s e s , il y a place peine pour une dmonstration par la douleur. Quelle force donc peut conserver, contre tant de preuves, ce rai sonnement bas sur la seule nature hypothtique de la douleur? 121. Maisrevenonsl'attaque de ces preuves,Iecritiquedit : Le renseignement fourni par le toucher est faux, et il est croire qu'on y eut rarement recours chez notre reli gicuse. Pour les autres indices, ils loignent l'ide de l'obstruction. Est-ce bien vrai?*Mais, pour ce qui est de la fausset d u renseignement fourni par le toucher, chacun peut en j u g e r par ce que n o u s avons crit sur ce point, en n o u s appuyant sur la raison et sur l'autorit de Galien (que notre critique avait invoqu en sa faveur). La dposition du chirurgien ci-
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dessus rapporte (1) montre s'il est si facile de faire croire qu'on n'a eu que rarement recours l'exprience des yeux et du toucher. De mme tout ce que n o u s avons oppos notre Critique, dans le chapitre prcdent, montre s'il est juste de prtendre que les autres indices loignent l'ide de l'obstruction. Comme tout, au contraire, se runit pour af firmer l'existence d'une obstruction, tout se runit pareille m e n t et ncessairement pour dtruire l'hypothse d'une simple splnalgie. 122. Notre critique continue cependant, mais d'une ma nire indirecte, dfendre, dans le paragraphe suivant, l'hypothse qui rejette l'obstruction. En effet,celle-ci n'exis tant pas, la douleur sans substrtm donnerait gain de cause la splnalgie. Aussi, pour montrer que l'organisme g n r a l n e lut pas atteint, ce qui aurait d arriver, selon lui, dans le cas de l'obstruction, il fait remarquer que les dbuts de la maladie, quoique assez pnibles, n'ont cependant pas interrompu les exercices ordinaires, ni l'accomplissement des devoirs. Il y eut ensuite des intervalles, dans lesquels, malgr l a persistance de l'affection de la rate, la malade se
pression des monastres, la religieuse se trouvant hors du clotre, fat assez bien rtablie, sauf une certaine douleur la rate qui ne cessa pos. D'o il c o n c l u t : Il n'y eut donc j a m a i s aucun rapport entre l'tat de la rate et la condition de tout l'organisme, et, par c o n s q u e n t , la maladie de la rate ne doit pas tre regarde c o m m e la cause u n i q u e , la seule source de tous les m a u x . 123. Nous avons dj prvenu l'objection, lorsque nous avons m o n t r qu'il y avait e u proportion exacte entre la c a u s e et les effets ; que la condition de tout l'organisme fut atteinte, et par consquent q u e Uobstruction de la rate doit tre regarde c o m m e la cause u n i q u e , l'unique source de t o u t e s les maladies, ainsi qui leurs liaisons et leur ordre le d m o n t r e n t . Nous ne nous y arrterons donc pas une s e c o n d e fois. Nous ferons plutt observer que ces paroles de la d p o s i t i o n : La douleur la rate ne cetsa pas, et l'aveu du critique lui-mme : malgr la persi&tance de l'affection de la rate, ont d lui montrer la nature d e l douleur, ba dure, e n effet, pendant un si g i a n d nombre d'annes, est en opposition avec une simple splnalgie, comme aussi elle apporte avec elle la nature s y m p l o m a tique, q u ' o n ne peut concevoir sans cause m a t i i e l i e . (i) Voir plus haut, n 89 a 91.
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124. Nous nierons ensuite cette consquence gnrale : Il n'y eut donc jamais de rapport entre l'tat de la rate et la condition de tout l'organisme. En effet, on aurait peine (remarquez bien cet adverbe qui sera bientt expliqu) pu tirer cette consquence, si, jusqu' la fin de sa maladie, la religieuse s'tait trouve tantt bien, tantt mal. Mais il n'en fut ainsi que jusqu' l'poque de la suppression des monastres, c'est--dire, jusqu' quelques annes avant la gurison.Pendant les dernires annes, au contraire, elle a toujours souffert d'une maladie plus ou moins grave, et gard continuellement le lit pendant les six derniers mois. Pendant tout ce l e m p s , il exista donc bien une relation des plus videntes entre l'tat de la rate et l'tat de tout l'orga nisme. Pour ce qui regarde les temps antrieurs, le critique luimme, pendant qu'il constatait cette manifestation subite de l'affection de la rate, la suite de danses , n'a-t-ii pas , affirm que cette maladie arriva fort lentement et successi vement. P u i s q u e telle est son affirmation, il a d recon natre aussi que la m m e lenteur a exist dans la manifes tation des effets. Dans cette perptuelle vicissitude de son tat de sant, il sera oblig de voir cette marche lente de la maladie, qu'il semblait dsirer, laquelle, seconde par les autres maladies nes successivementdelaprincipale,affaiblit tout le corps peu peu, jusqu' ce que celui-ci ayant t at teint tout entier, la malade soit compltement abattue. Qui conque connat l'histoire de ce fait verra facilement que la religieuse, en affirmant, malgr toutes ces trves, la c o n s tance non interrompue de sa maladie d e l rate, comprenait simplement par le m o t de trve, une disparition temporaire des maladies phlogistiques engendres par l'obstruction. En effet ces douleurs d'abord aigus, ayant suivi leur cours, de vaient ncessairement s'apaiser. 125. Ce qui prcde regarde l'hypothse de notre critique, qui a prsent jusqu'ici le vice de tout l'organisme c o m m e la consquence ncessaire de l'obstruction de la rate; voil pourquoi, dans la ngation de son consquent, nous avons employ l'adverbe peine. Mais parce qu'on pouvait lui opposer de n o m b r e u x exemples d'obstructions consid rables et tout fait i n c u i a b l e s , qui n'avaient aucunement troubl l'organisme gnral, il a voulu prvenir l u i - m m e robjction,en rapportant plusieurs exemples de cette nature. Voici c o m m e il a tabli son raisonnement : Eh bien, accor< dons l'obstruction de la r a t e : i l peut se prsenter deux c a s . Ou bien surviendront les effets, qui ont c o u t u m e d
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( se produire, lorsque la fonction de la raie dans l'conomie animale *o trouve interrompue, o u ils n'arriveront pas. La premire supposition est exclue par l'espce mme du fait... Pour la s e c o n d e . . . qu'importe que l'obstruction a du viscre persiste plus ou m o i n s , puisqu'il n'en revient que peu ou point d'inconvnient pour le corps? Il rap porte les exemples dont nous avons parl, puis il a j o u t e : te On voit c o m m e n t l'obstruction de la rate, moins qu'elle ne gale la masse du sang, et qu'elle ne corrompe la c o n s titution de tout le corps, manque ordinairement de gra vit, et par consquent, ne peut fournir une matire suffisante au miracle. 426. Aprs ce que nous avons dj crit, notre r ponse cette difficult serait courte, et n'exigerait qu'une simple rtorsion du raisonnement. Ou bien de l'obs truction de la rate dcoulent les eifcts q u e l'on voit ordi nairement se produire, lorsque les fonctions de ce viscre dans l'conomie animale se trouvent interrompues, ou ils n'en dcoulent pas. Cette dernire hypothse est exclue par les faits ; la premire ressort avec vidence des preuves apportes plus haut. Donc, c o m m e l'obstruc t i o n a vici la constitution de tout le corps, d'aprs le s e n t i m e n t m m e du critique, elle doit fournir au miracle un sujet c o n v e n a b l e , 127. Mais ne laissons pas passer i m p u n m e n t cette d e r nire observation : L'obstruction de la rate, h moins de vicier tout le corps, m a n q u e ordinairement de gravit, et par c o n s q u e n t ne fournit pas une matire suffisante au miracle. Ce raisonnement est certainement vicieux. L a gravit d'une chose ne se juge pas toujours par la chose elle-mme, mais par ses suites; e n o u t r e , o n j u g e du miracle p l u t t d'aprs son utilit, que d'aprs la nature du fait. Selon ce raisonnement, on pourrait tre atteint d'une infir m i t corporelle naturellement incurable, mais qui ne serait ni trop pnible ni dangereuse, c o m m e serait, par exemple, u n e b o s s e ; sans qu'il y eut matire u n miracle. Yoici u n e obstruction norme de la rate, elle est cartilagineuse et m m e o s s e u s e , Elle existe depuis bien des annes, sans danger pour la vie, et m m e sans i n c o m m o d i t s graves. Peut-elle n a n m o i n s tre gurie? Si elle ne peut l'tre, c o m m e tout la m o n d e en convient, o u bien m m e , dans l'hy pothse qu'on la j u g e de nature tre gurie par un traite m e n t de l o n g u e dure, si elle vient . disparatre instanta n m e n t , elle sera une matire propre u n miracle, c o m m e ayant t gurie e n dehors de l'ordre de la nature. Le m i -
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racle, en effet, n'est rien autre chose que ce qui arrive e n dehors de l'ordre de la nature (1). 127. Gela est si clair que notre Critique l u i - m m e a crit : Certainement, s'il tait hors de doute que la rate de la religieuse, arrive la duret de la pierre, soit revenue son tat naturel dans u n court espace de temps, personne, je pense, ne pourrait douter du miracle. Cette condition constituerait le vice organique, dont la gurison instan ci tane devrait tre regarde c o m m e au-dessus des forces de la nature. Et e n c o r e : La gurison d'une obstruction invtre et pierreuse de la rate, qui s'oprerait en peu de a temps, surpasserait certainement les forces de la nature et devrait, m o n avis, tre considre c o m m e miraou leuse. 11 a donc r e c o n n u lui-mme dans cette obstruction pier reuse et invtre de la rate, considre en elle-mme et en dehors des fcheux rsultats qui en dcoulentpour la sant, une matire convenable au miracle, c'est--dire, une gu rison instantane d'un vice organique, gurison qui s u r passe c o m p l t e m e n t les forces de la nature. Pourquoi donc, aprs cela, malgr l'absence de fcheux rsultats, et malgr que la gurison ne produise pas un avantage notable pour la sant, pourquoi afflrmo-l-il que la mme maladie manque de gravit, et que par consquent elle ne peut fournir le sujet convenable d'un miracle? 128. Aprs l'avoir affirm, il essaie encore n a n m o i n s de nier cette aptitude du sujet, et pour cela, il s'en prend aux mdecins qui craignaient de voir l'obstruction d g nrer e n sphacle et en gangrne. Cela, fait-il observer, n'arrive ordinairement que lorsque le viscre tout entier est infect, ce qu'il est difficile de reconnatre, ajoute-il. A la v rit, n o u s ne nierons pas qu'il n'est pas toujours bien facile d'avoir cette connaissance, tant que n'apparaissent pas des indices vidents que la chose existe. Mais quand une obs truction qui dure de nombreuses annes, quand une tumeur norme dure c o m m e la pierre et vidente pour les yeux comme pour le toucher, atteste l'existence dp la chose ; certes, il n'y a plus lieu de douter de la maladie du viscre dans t o u t son o r g a n i s m e . C'est pourquoi,il est pass en cou tume chez tous les mdecins de rgarder c o m m e entirement incurables les obstructions i n v t r e s et pierreuses, parce que nul remde ne peut avoir l a vertu de rtablir une orga nisation si gravement atteinte.
(1) St Thomas i part, ifuest
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Palmieri traitant de ces obstruction? crivait : Quelquc fois elles causent une telle dsorganisation, que, malgr les centaines d'autopsies que j'eusse dj faites dans les hpitaux, j e restai nanmoins stupfait, il y a quelques annes, lorsque dans l'abbaye de Farfens, j'ouvris, en prsence de nombreux spectateurs, le corps d'un certain Antoine Castcllani de Montepoli. Sa rate de couleur blanc-cendr, trs-dure, aussi dure m m e , son centre, que la pierre, tait d'un volume n o r m e , et pesait douze livres huit o n c e s . . . Lorsque les obstructions, quelles qu'elles soient, sont arrives u n tel degr, et qu'elles sont si invtres, il n'est plus e n notre pouvoir de les combattre avec succs ; aussi le pronostic est-il dfavo rable, et le traitement purement palliatif. Or, c o m m e , dans notre cas, des indices certains et vidents de longue dure, de v o l u m e et de duret, ont fait reconnatre q u e tout l'organisme du viscre tait vici, notre critique est forc, d'aprs ses propres principes, d'accorder qu'il fallait mal augurer de l'issue de la maladie.Est-ce donc tort ou raison que les mdecins ont craint le sphacle et la gangrne ? Nous l'avons fait voir t o u t au l o n g dans ce qui prcde. 429. L'Expert ajoute : Il faut se rappeler q u e les h o m m e s de l'art ont reconnu chez la rvrende souir une maladie de la rate, un squirrhe proprement dit, et tel dans son essence, qu'il leur a fait craindre avec raison l o p a s sage au cancer. Mais, l a suite d'un e x a m e n plus atten tif, ayant dcouvert leur erreur, ils c h a n g r e n t d'avis,dans le procs m m e . Mais, c o m m e n t arrive-t-il prouver cette assertion, que, d'accord avec tous les mdecins, n o u s n'avons pas cess de rejeter jusqu'ici? Il la prouve par ces paroles de Caslellani : Si j'ai dclar que la maladie de la rate de notre malade pouvait s'appeler, et si je l'ai appele une t u m e u r squir rheuse, u n e duret squirrheuse, ou un squirrhe, tout s i m p l e m e n t , j e dclare prsentement avoir fait dans cette d n o m i n a t i o n u n quivoque de m o t . O y a-t-il donc j u g e m e n t port sur un squirrhe ? o y a - t - i l rtractation du diagnostic de la m a l a d i e ? Ce que n o u s v o y o n s , c'est un m o l que Caslellani pense seulement avoir e m p l o y pour un autre. Mais n o n , n o u s l'avons du reste montr assez l o n guement, Caslellani n e s'est pas tromp lorsqu'il a donn cette si ancienne obstruction de la rate un n o m que les anciens employaient ordinairement, et qu'on retrouve encore chez les m o d e r n e s .
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430. Combien de fois faudra-t-il donc lui rappeler la mme c h o s e ? Quelle autoril lui opposer pour le c o n vaincre, lorsque dans cette matire il ne se rend pas sa propre autorit ? Voulez-vous voir non-seulement le m o t , mais encore la chose m m e actuellement en question claire
ment* exprime? Riverius, traitant du squirrhe de la raie, crivait : La matire efficiente de l'obstruction de la rate, s'paissit de plus en plus en se prolongeant pendant un a temps notable, et elle contracte une duret de pierre. Mais c o m m e la nature d'un squirrhe dans la rate et dans le foie est la m m e , nous pouvons appliquer dans la c i r constance prsente ce que n o u s avons dit d'un squirre au foie. Il s'agit trs-clairement ici d'une matire qui produit l'obstruction et qui, cause de cela, remplit le viscre tout entier ; on affirme qu'avec le temps cette m a tire s'paissit, et amne dans le viscre une duret de pierre: or cette duret s'appelle clairement et absolument squirrhe (1). De quel droit donc, de ce n o m donn ordi nairement u n e obstruction pierreuse, de ce simple mot, dis-je, (et encore le chirurgien le regrette), oser affirmer que le chirurgien a considr la maladie c o m m e un squirrhe proprement dit, vraiment tel dans son essence? De quel droit surtout, lorsque le chirurgien, plusieurs reprises, a expliqu ce m o t dans le sens d'obstruction, et a dclar que cette obstruction seule tait la principale maladie de la religieuse, et qu'il a c o n c l u en ces termes : Je juge, c o m m e j'ai conclu et j u g pendant la cure, que la maladie de la rate de sur Marini ne peut se dfinir a u trement q u e c o m m e obstruction irrductible. N'est-ce pas faire ouvertement violence au vritable s e n t i m e n t de Castellani q u e de prtendre qu'il a conclu un squirrhe?
131. Mais il importait notre critique de lui attribuer cette erreur, et de lui reprocher aussi la crainte du pas sage du squirrhe au cancer, afin de conclure : Etant r e jet le diagnostic d'un squirrhe vritable, il faut rejeter en
(1) Si vous dsirez que l'auteur fasse connatre son sentiment par des expressions plus claires,lisez ce qui s u i t : Le diagnostio d'un squirrhe de la rate est le moine que celui d'un squirrhe du foie... Puis revenez au chap. v, lib. II, qui traite, du squirrhe du foie. Vous lirez : Les signes d'un squirrhe dans le foie sont fournis : par la duret et la rsistance de l'hypoconclre circonscrivant tout Je foie. Si Ja tumeur et la duret de ce squirrhe enveloppe tout le viscre, c'est--dire, toute sa circonfrence, il est vident qu'il s'agit ici d'une simple obstruction trs-dure,qui affecte tout le viscre, mais non pas d'un squirrhe vri table et proprement dit, car il ne peut occuper qu'une parlic du viscre.
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m m e lemps le pronostic dangereux de sa dgnrescence en cancer. Nous ignorons c o m p l t e m e n t l'endroit d'o le critique a puis cette asserLion du pronostic de la dgn rescence du squirrhe en cancer. Nous avons bien des fois lu dans les actes la crainte formule p a r l e s mdecins de la rsolution du viscre en sphacle ou en gangrne.Mais nous ne voyons nulle part qu'ils aient e m p l o y le m o t de cancer. E t parce q u e , pour la production d'un sphacle o u de la gangrne, la prexistence d'un squirrhe rel n'est nulle m e n t ncessaire, n o u s ne savons pas pourquoi le critique insiste si fort pour attribuer aux m d e c i n s le j u g e m e n t d'un squirrhe. 132. On pourrait passer sous silence le consquent de son a r g u m e n t : D o n c , ou l'affection de la rate chez Angle Josphe Marini n'tait qu'une nvrose, o u bien, si c'tait u n e obstruction, il ne fallait pas la juger incurable, car elle ne mettait pas la vie en danger. Certes, rejetez autant que vous le voudrez le diagnostic d'un squirrhe et d'un cancer, mais gardez-vous bien d'affirmer que la maladie ne pouvait tre qu'une nvrose; il faudrait encore m o i n s en conclure que l'obstruction, dans l'hypothse de son existence, n'tait pas incurable. Que l'obstruction n'ait pas m i s la vie en danger (ce que nous avons prouv tre contraire la vrit), cela e s t tranger notre sujet. En effet, admettez qu'elle soit incurable, c o m m e n o u s l'avons d m o n t r , le miracle c o n sistait dans sa gurison, sans m m e q u e la vie ait t e n danger. 133. Le critique se complaisant dans s o n hypothse d'une nvrose, passe l'examen de l'affection de l'utrus. Tout d'abord il s-c figure des monstres, pour jeter de la confusion dans les ides, et pour les vaincre plus facilement, c o m m e des futilits. Seule, de tous les t m o i n s , l'abbesse du m o nasi re confondant la maladie de la rate avec celle de l'utrus, o u . par un dfaut de mmoire, avait report cet organe la maladie attribue la rate ; elle a fait cette dpo sition : J e la trouvai (ia sur Marini) saine et robuste ; elle m e dit toutefois que deux ans auparavant elle avait x< t traite par le dfunt G. G. Battelli, pour une maladie q u ' e l l e - m m e affirmait tre un squirrhe l'utrus. Le critique attaque savamment ce squirrhe, qu'il rejette, en se fondant sur 1 ge de la malade, sur l'absence des s y m p t m e s , e t aussi sur le s e n t i m e n t des mdecins. N o u s s o m m e s c o m p l t e m e n t de son avis sur ce p o i n t ; mais il n'tait pas bien difificile d'arriver ce rsultat. Il suffisait de considrer le. silence de tous les tmoins, de peser les j u g e m e n t s divers des
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mdecins, de remarquer la qualit du dposant, et les circon stances dans lesquelles il se trouvait. Pour une femme igno rante des lois physiques, qui avait souvent entendu parler de squirrhe, et qui avait vu frquemment.appliquer des fomen tations l'utrus, elle a pu croire facilement qu'il s'agis sait d'un squirrhe l'utrus. ^ On aurait pu facilement dcouvrir cette erreur, par les paroles mmes du tmoin : Scaramucci a prescrit pour le traitement du squirrhe des douches aconite napel. Comme ce remde tait employ pour le traLcmcnt cle la rate, et n o n pour celui de l'utrus, on et facilement reconnu Terreur. On pourrait aussi, en confirmation de ce fait, rapporter les paroles du m m e tmoin, lorsqu'il dpose plus longuement sur celte m m e maladie : Il me semble que le < docteur Scaramucci s'tait prononc pour un squirrhe des r viscres, et ces autres paroles plus claires encore : Ds le premier m o m e n t que je m e mis en rapport avec Angle Marini dans le couvent, j'appris qu'elle souffrait d'une maladie la rate, laquelle elle donnait le n o m de squirrhe. Il fallait aussi tout d'abord remarquer que le tmoin a dpos, n o n pas de science personnelle, mais de ce qu'il avait appris de la personne gurie,. Il est une maxime ainsi conue : autant vaut le tmoin, autant vaut ce qui est attest.Or, d'aprs les actes, il est cer.tain, que la personne gurie n'a jamais parl d'un squirrhe de l'utrus, mais seulement d'un squirrhe ou engorgement .dur de la r a t e ; l'erreur de ce tmoin aurait t m a n i feste, et elle aurait du n o n pas tre rfute, mais passe sous silence. 434. L'existence du squirrhe l'utrus, qui n'a jamais exist, tant facilement.abandonne, le critique en vient l'inflammation de ce viscre, et il veut faire accepier la leucorrhe pour une mtrite, mais il n'y russit pas. Nous ne nions pas que la leucorrhe ait exist p r c d e m m e n t ; nous prtendons seulement, que dans la dernire priode de la maladie, il s'agissait non d'une leucorrhe, mais d'une vritable inflammation de l'utrus. Cette observation faite, passons un examen plus srieux. Lorsque n o u s tablissions l'existence de l'obstruction de la rate, n o u s avons montr que le volume de ce viscre normment accru s'tendait jusqu' la rgion de l'ut rus ; que, par suite de la pression qu'il exerait, il a inter rompu la libre circulation du sang travers ce viscre, et produit son engorgement. Or, Astrucc traitant des causes de l'inflammation de l'utrus s'exprime ainsi : Pour
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LES
SPLENDEURS
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LA
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trouver l'origine de cette inflammation, il ne faut rien de plus que de rechercher les causes du trop-plein des vaisseauxsanguins. Selon lui, ce trop-plein se rencontre chaque fois que, dans ces parties, la pression arrte la circulation du sang, ou du m o i n s la rend trop lente. E n effet la pres sion ne se borne pas crer des obstacles la circulation travers le viscre, mais elle arrte aussi l e reflux du sang, ce qui produit ncessairement le trop-plein. Le reflux nces< saire du sang est retard, diminu, si les veines de l'utrus, c contractes et comprimes dans leur diamtre, sont resa serres (!).Le rcit que nous avons fait de la maladie qui nous occupe, donne l'inflammation une c a u s e si naturelle, si apte la produire, que le dfaut d'inflammation dans le cas prsent, paratrait comporter quelque c h o s e d'inaccoutum, et serait une anomalie vritable. 135. Le m m e rcit nous apprend q u e la tension et la douleur se sont dclares dans ce viscre, et qu'elles ont t trs-considrables dans les derniers t e m p s de la maladie. La malade dclare: l'utrus tait soulev et prsentait une bien grande duret. Et le c h i r u r g i e n : L'utrus.... tait bien douloureux aussi, il se montrait dur au t o u c h e r . Et le m d e c i n , en rappelant un e n g o r g e m e n t notable l'utrus, dit plus clairement : L'utrus paraissait affect outre m e s u r e . Or, d'aprs Astrucc, la tumeur, la t e n s i o n , et la rsistance de l'utrus, s o n t les consquences les plus ncessaires de la trop grande i n t u m e s c e n c e des vais s e a u x : Aussi ces phnomnes rpondent-ils au nombre des vaisseaux tumfis et la gravit de l'engorgement. Ainsi donc, puisque la tumeur et la tension sont les consquences les plus ncessaires du gonflement des vaisseaux sanguins et de la force de l ' e n g o r g e m e n t , il faut a b s o l u m e n t reconnatre q u e , dans le cas e n q u e s t i o n , ces vaisseaux taient remplis, et ils ont d l'tre sous l'action d'une cause aussi naturelle que la pression, c o m m e n o u s l'tablissions plus haut. Si la t u m e u r , la tension, la rsistance rpondent au nombre des vaisseaux tumfis, et la grandeur de l'engorgement, il faut accorder g a l e m e n t que, dans le cas prsent, le nombre de ces vaisscux tumfis fut assez grand, et l'engorgement assez .considrable, d'o cette d p o s i t i o n : t L'utrus pa raissait affect outre mesure, et prsentait une bien <t grande duret. 136. Outre c e t t e t e n s i o n et cette d u r e t , les t m o i n s , c o m m e nous l'avons vu, ont aussi parl de douleur, (i) D P niorb. mul. lib. H , cap. 1. 2.
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dpend entirement la douleur de Vutrus ; elle tend, allonge, dchire ec comprime les fibres nerveuses, qui sont
le sige de la douleur. (Astrucc ibidem.) De quel genre e s t cette douleur ? Ses effets peuvent n o u s l'apprendre. En effet, selon' le m m e Astrucc, les malades sont quelquefois atteintes de veilles longues et continues, lorsque la douleur devenue trop intense, branle les esprits crbraux et d i s tend les fibres. Dans notre cas, les veilles de la religieuse sont galement*mentionnes par les mdecins et dcrites par elle-mme, quand elle affirme : qu'elles furent de telle sorte que pendant les six derniers mois avant sa g u rison, elle n e pouvait fermer l'il. Elle devait donc tre bien intense cette douleur qui causait de telles i n somnies. 137. A c e s symptmes les mdecins a j o u t e n t : < Des r '- accs fbriles rpts et c o n t i n u e l s . . . . Ils accompagnent ordinairement l'inflammation. Car l'inflammation de l'ut rus a la fivre pour c o m p a g n e habituelle. Et enfin ils dcrivent l e s suites ordinaire de l'inflammation e n disant : Il y avait des flueurs jauntres et virulentes.... des h u meurs ilcres d'une odeur mauvaise et infecte... u n e m a tire p u r u l e n t e : les accs produits par l'inflammation prcdent u n coulement purulent. L'histoire de la m a ladie n o u s fournit donc u n e cause naturelle et active d u trop-plein des vaisseaux de l'utrus, et d e l ' e n g o r g e m e n t ; nous avons la dmonstration de c e trop-plein et de c e t e n gorgement source de l'inflammation, dans la tumeur c o n s i drable, la tension, la duret et la douleur. Nous avons la compagne de l'inflammation, la fivre, et enfin les c o n s quences de l'inflammation, les matires purulentes. 138. Mais cette inflammation fut-elle une inflammation ? vritable et profonde? n e fut-elle pas plutt un c o m m e n cement d'inflammation, chose trs-lgre, une phlogose superficielle? Certes l'histoire de la maladie exclut la phlo gose superficielle, e n m m e temps qu'elle dnote c l a i rement u n e inflammation profonde. La violence d e s symptmes indique le degr du mal : ainsi, il y aura s i m p l e ment phlogose, quand la douleur, la tumeur, la duret e t la fivre n e feront souffrir q u e lgrement.Au contraire, il y aura une trs-grande inflammation, quand tous c e s d sordres sviront avec plus de violence (1). Or, ici, la tumeur, la tension, la duret, la douleur,
(I) Astnu-ciiH. li!>. IL cap. I. S .'i.
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c o m m e nous l'avons v u , taient graves et faisaient souffrir beaucoup.La fivre tait de l'espce de celles qui, c o m m e le m o n t r e le sommaire, demandent tre c o m b a t t u e s par un traitement srieux et antiphlogistique. Les coulements purulents sont la suite, n o n d'une simple phlogose, mais d'une inflammation proprement dite. Donc tout se runit pour tablir qu'il y eut dans l'utrus une inflammation,sinon trs-grande, du moins certainement grave. 139. Cependant notre Expert c r i t : Mais j e suis bien loin de croire que, dans le cas prsent, l'utrus de l sur ait t atteint d'inflammation. P o u r le prouver, il a recours d'abord la prtention ; et il a raison, car ce qu'il avance aurait d tre pass entirement sous silence : j e passe sous silence, dit-il, que la suppression des rgles pro duit la chlorose plutt que la mtrite . Nous ne le nions pas : mais qui a jamais pens que la mtriLe avait pour cause la suppression du llux mensuel ? Ce ne sont pas les mdecins certainement; ils ont Loujours rapport la mtrite l'action matrielle du gonflement de la r a t e - s u r l'utrus, ou la pression de ce viscre, et c'est pour cela, qu'ils sont maltraits par l'Expert. Ce n'est pas nous n o n plus, car n o u s avons affirm la m m e cause que les m d e c i n s , et n o u s en avons ajout une qui est fort probable, savoir : la diffusion du virus rnalin de la rate, qui se rpandit au loin. 440. J e n e signale pas, continue-t-il, la production hy pothtique de cette inflammation par la maladie de la rate. Cette filiation paratra d'une absurdit complte, si l'on veut se rappeler que la douleur de la rate a dur vingt-six ans, plus ou . m o i n s , tandis que la maladie de l'utrus n'a eu quelque gravit que dans les derniers mois s e u l e m e n t . Est-ce bien l une absurdit? Mais on sait q u e la maladie de l'obstruction marche lentement et suc cessivement: tant que le volume de la rate, affreusement accru et endur, ne fut pas arriv la rgion de l'utrus, et ne le comprima pas, il ne pt y avoir ni e n g o r g e m e n t ni inflammation. Il a donc d s'couler un grand n o m b r e de ces vingt-six annes, ou plutt de ces vingt-trois annes de maladie, avant l'apparition de la maladie de l'utrus. En outre les actes n o u s apprennent que bien avant, non pas les derniers m o i s , mais les dernires annes, Scara m u c c i et Forani avait prescrit des injections dans l'utrus. E t de plus, les docteurs Battelli et Zabarella o n t affirm qu'il y avait un e n g o r g e m e n t dans la rgion de la r a t e , avant que Castellani et Ciccolini n'eussent m i s la main au
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traitement. L'utrus tait donc dj malade lorsque ces m decins donnrent leurs s o i n s l a malade.Or l'affection aigu, dont il fut d'abord atteint, se changea ensuite en inflamma tion lente. Cettat est dmontr avec vidence et presque mis sous les y e u x par la tumeur, la tension, la duret, la douleur, la fivre, la matire purulente.Dans ces conditions, nous ne voyons nullement pourquoi, vu la longue dure de l'obstruction, on puisse regarder c o m m e absurde que l'inflammation de l'utrus soit ne de la maladie de la rate. 141. L'Expert continue : Je passe fous silence la suppu ralion rve, parce que la sortie d'humeurs blanchtres a. de Tulrus n'implique nullement l'existence de pus. Rien certes n'est plus hypothtique que cet coulement d'humeurs blanchtres mis la place de la suppuration des derniers temps de la maladie Que la leucorrhe ait prcd, nous ne le contestons pas. Mais, en supprimant mme toute autre cause d'inflammation, sera-t-il permis de dire que la suppuration qui a suivi tait rve? Astrucc tait d'un avis bien diffrent, lorsqu'il dclare : Tous les flux de cette espce, quand bien mme ils a u raient, au dbut, un caractre bnin, finiront, tant devenus plus acres, et corrosifs, par ronger le vagin surtout les organes gnitaux, et les couvriront d'ulcres. Par une raison semblable, ces flux bnins, une fois devenus m a u vais, fatiguent les parois internes de l'utrus, et amnent une phlogose plus ou moins intense ( I ) . 11 donne mme entendre que cette intensit peut aller jusqu' produire une vritable inflammation qui engendre du pus. Car nous avons constat, dit-il, que les flueurs blanches invtres, quoique diffrents degrs et diffrents intervalles, de viennent enfin purulentes. Et parlant encore de ces Ilueurs blanches qui dgnrent en pus, il dclare que le flux purulent est prcd d'un accs d'inflammation. {Ibidem). 142, Ainsi, dans l'hypothse mme qui sourit tant notre critique, de l'absence de tout espce de cause diffrente des flueurs blanches, puisqu'il ne saurait disconvenir que l' coulement blanc a t de longue, dure, et puisque 1 e x p rience nous montre que, par suite de,sa l o n g u e dure, il devient ordinairement acre et corrosif; que, dans le cas en question, il l'a t rellement, puisque la raison mdicale nous apprend que ce flux ainsi vici fatigue les parois
(i) Oiiv. cit. Uh. I. ch. x. % 4.
internes de l'utrus h cause de son cret, et produit la phlogose et l'inflammation, laquelle son tour engendre le p u s : nous ne c o m p r e n o n s pas bien, pourquoi, dans l'hypotse de notre adversaire, on doive regarder c o m m e rve l'existence de cette matire purulente Mais, tout cela vient, c o m m e de c o u t u m e , de la confusion des ides qui est son uvre. L'Expert a confondu les flueurs blanches avec un /lux dj corrompu ; et pareeque les premires, tant qu'elles conservent leur nature propre, no font craindre ni inflam m a t i o n , ni suppuration, il a refus ces effets au second coulement, malgr l'exprience des mdecins et l'vidence des faits. 143. Du reste, on verra combien est hypothtique, c o m m e n o u s le disions, et contraire notre cas,la substitution une mtrite de cet coulement blanc, dans les derniers temps, si on veut se remettre devant les y e u x les s y m p t m e s de la tumeur, de la tension, de la duret, de la douleur, de la fivre, de l'coulement purulent, qui se s o n t dclars chez notre malade. Les simples flueurs blanches sont l'elTet de la mauvaise scrtion des h u m e u r s , dont le sige n e dpasse jamais la membrane muqueuse de l'utrus, m e m b r a n e , qui dans ce cas, scrte mal les humeurs. Il en rsulte que cette maladie est sans fivre, sans douleur; l'utrus n'est ni t e n d u , ni tumfi; il n'y a a u c u n e inflammation. Aussi, en prsence des s y m p t m e s dcrits plus haut, tout le monde reconnatra que, clans le cas que n o u s discutons, il ne peut tre question de simples flueurs blanches. Si notre Expert invoque l'acret des humeurs, il faut alors qu'il n o u s accorde q u e l'tat de la maladie avat c h a n g . Et dans ce cas, il ne contestera plus que l'inflammation n'est pas c o m p l t e m e n t trangre cette maladie (1). Mais une fois l'inflammation dclare, et manifeste par ses symp t m e s pathologiques, on p e u t aborder la question de son origine. Vient-elle des seules flueurs blanches qui l'ont pr cde? Vient-elle d'une autre cause o u de toutes les deux e n s e m b l e ? E n aucun cas, on ne pourra plus nier l'existence admise de l'inflammation. C'est pourquoi, c o m m e , dans le cas en question, il est impossible de rvoquer e n doute les s y m p t m e s de l'inflammation, la discussion de l'Expert pourra tout au plus aboutir ce rsultat unique, de rendre d o u t e u s e l'origine de cette affection. Mais puisqu'ici la cause extrinsque et matrielle de l'inflammation se manifeste ( 1 ) 11 avait, lui aussi, soutenu la vrit de celte assertion en s'appuynnt sur l'autorit d'Astrucc.
LES
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la raison, et se rvle aussi aux yeux et au toucher dans l'obstruction de la rate, il no pourra m m e obtenir ce rsultat. 144. Mais revenons aux prtentions de notre Expert J e passe enfin sous silence l'absence de tous les s y m p t m e s que le mme Astrucc donne d'une inflammation de l'ut rus, savoir : la cuisson do l'urine et la difficult d'uriner, a des djections alvines rares et pnibles, u n e angoisse de cur, le hoquet,-des efforts pour vomir, des douleurs a latte, le sommeil, le dlire, les veilles, les grincements de dents, des m o u v e m e n t s convulsifs, le pouls faible et ingal, u n e douleur au pubis, dans l'aine, aux reins, la cuisse et au coxis. De tous ces s y m p t m e s , i l'ex ception des veilles, vous n'en trouverez aucun qui n e se soit rencontr chez Angle Josphine dans le cours de sa maladie. Mais l'Expert lui-mme, qui tient tant aux convulsions, qu'il a ramen toute la maladie une simple nvrose, d dcouvrir aussi des mouvements convulsifs en dehors des veilles. Ouvrez le S o m m a i r e , v o u s y verrez : les douleurs fr quentes, des nauses, une espce d'agitation^haletante. Tout cela runi fournissait n o n pas un, mais plusieurs s y m p tmes trs concordants. En outre, si on examine que le m decin, aprs avoir dpos : Gomme consquence du cours de la maladie, la malade ressentait des coliques, u n e fivre frquente, des nauses, du dgot pour toute nourri ture, de la privation de sommeil, ajouta : e t d'autres in c o m m o d i t s q u e j e n e m e rappelle pas prsentement. Si, dis-je, o n fait attention ces dernires paroles, on c o m prendra s u r - l e - c h a m p qu'il n'est pas permis de rejeter l'existence des s y m p t m e s , par la raison que le mdecin dans une dposition faite presque trente a n s aprs, affirme qu'il ne se les rappelle pas tous. 145. C'est assez de cette rponse directe un argument qui d'ailleurs tombe par suite d'un vice intrinsque. En effet, on sait que les auteurs runissent e u u n seul faisceau les divers s y m p t m e s qui se prsentent chez diffrents m a lades, et dans les formes diffrentes d'une m m e maladie, afin que le lecteur puisse les saisir d'un seul c o u p d'il, et voir si parmi eux se trouvent numrs ceux qu'il a rencontrs dans telle o u telle affection particulire. Ainsi, dans le cas prsent, par exempIe,on a mis ensemble le sommeil et l e s veilles, quoique ces symptmes s'excluent m u t u e l l e m e n t . On a runi de mme l'urine brlante, les douleurs au pubis a u x cuisse*, -aux reins, quoique l'auteur dj, cit d i s e : l'ardeur deTurine, et los douleur- du p.ibis ont hou lors jue la partie
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antrieure
autour
de son col; que la douleur aux reins, ne se dclare que dans l'inflammation du fond mme de l'utrus, que la douleur
l'aine et aux cuisses existe lorsque les cotes voisines de Vutrus sont enflammes. P e u t - o n raisonnablement exiger la runion de tous ces symptmes chez la m m e malade? P e u t - o n raisonnablement de l'absence de tel ou tel signe conclure la n o n - e x i s t e n c e de la m a l a d i e ? 146. Tout cela cependant est peu de chose. Considrez cette longue numration de s y m p t m e s ; parmi eux vous n'en trouverez aucun qui ne puisse convenir des maladies t o u t fait diffrentes, vous en concluerez facilement qu'ils peuvent tre accessoires et secondaires dans l'inflammation de l'utrus, et n o n pas p a t h o g n o m o n i q u e s . D o n c notre Expert, en passant ces derniers sous silence; et n e prsentant que les premiers aux lecteurs, afin que de leur absence on rejette l'inflammation; a bien pu ainsi jeter de l a poudre aux yeux inexpriments du vulgaire, mais nullem e n t a u x y e u x d e s s i v a n t s . L e m m c a u t e u r Astrucr^prsnous, a montr, c o m m e s y m p l m e s p a t h o g n o m o n i q u e s ue l'inflam m a t i o n de l'utrus, la t e n s i o n , la tumeur, la duret, la d o u leur, la fivre,aprs avoir pris soin de passer ensuite en revue les s y m p t m e s secondaires, pour nous montrer que par eux o n peut reconnatre quelle est la partie malade de l'utrus, ajoute ensuite: S i enfin la douleur, la t e n s i o n , la rsistance occupent tout le v o l u m e de l'utrus, si la t u m e u r est tres et grosse, il n'y a a u c u n doule, la matrice est atteinte dans toute son tendue, quand bien m m e c e s effets se produi raient quelquefois i n g a l e m e n t . Si notre Expert s'tait arrt aux signes p a t h o g n o m o n i q u e s , il n'et certainement p a s rejet aussi facilement l'inflammation. 147. Aprs cet argument de prtention, il ajoute : Voici, j e pense, u n argument beaucoup plus solide dans l'affaire qui nous occupe : les inflammations qui affectent la s u b stance du viscre, ou ce qu'on appelle les tumeurs phleg m o n e u s e s , tant qu'elles demeurent violentes, n'empchent n u l l e m e n t la scrtion ni l'exhalation des h u m e u r s ; t a n c dis que dans l e cas en question, d'aprs le t m o i g n a g e d u e mdecin, il y eut un flux continuel de l'utrus : c o m m e par c l e pass, dit-il, il s coulait goutte goutte des organes ge nitaux des h u m e u r s acres et blanchtres qui sortaient de l'utrus. Je crains bien que cet argument si fort ue vaille pas plus que les autres. Et en effet, c o m m e n t constate-t-il la continuit de ce U u x ? De cette dposition du chirurgien : L'utrus, m m e dans les derniers jours, aussi bien qu'au-
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paravant, laissait couler u n e matire purulente, une h u m e u r acre, blanchtre, d'une odeur forte et trs mauvaise. Mais cette dposition n'affirme point la continuit. Si cependant ces paroles du chirurgien lui causaient quelque scrupule, il aurait pu interroger le m d e c i n ; celui-ci aurait fait dispa ratre tout scrupule sur-le-champ en lui rpondant q u e l'inflammation de Putrus fut dmontre par la matire mauvaise et purulente qui sortait frquemment de l'ut rus m m e . Il aurait appris par l que le flux n e fut nul lement continuel, mais q u i l a cess avec les grandes dou leurs de l'inflammation, et qu'il a reparu lorsque cette dernire, diminuait de force cause de la suppuration qui s'tait produite. 148- Il est d o n c clair que l'affection de l'utrus dont n o u s parlons est bien tort rduite u n e simple leucorrhe, car celle-ci ne peut avoir pour simplmes la tension de l'utrus, la tumeur, la douleur, la iivre, les matires purulentes,symp tmes qui dnotent u n e inflammation profonde et vritable. C'est en vain q u e l'on conclue sa non-existence, de son origine hypoihtique, d e l prtendue absence de quelques symptmes, et de l'assertion d'un coulement continuel. C'est pourquoi,quand notre savant Expert crit: a On peut donc acl mettre u n e phlogose superficielle et lgre, o u mieux u n e hyprmiede la membrane interne de l'utrus ; mais il n'y arien qui dmontre u n e profonde inflammation du viscre ou une vritablemtrite , lorsque,dis-je,qu il tient ce l a n gage, n o u s pouvons affirmer le contraire e n toute confiance: c'est--dire qu'il faut admettre u n e vritable et profonde i n flammation de l'utrus. Q u a n t a la phlogose superficielle et lgre de la membrane interne de L'utrus et, plus forte raison,quant l'hyprmie, o u un simple trop plein de l'u trus, n o n - s e u l e m e n t il n'y a rien qui les dmontre, mais tout force a i e s rejeter. Quand le m m e Expert ajoute : On a suffisamment dmontr qu'il s'agit ici de flueurs blanches qui n'offrent a aucun danger, q u i le plus souvent disparaissent sans le secours de l'art, et qui n e peuvent, par consquent, e o n s i tituer le sujet du miracle, n o u s lui rpondrons e n t o u t e scurit : 11 est suffisamment dmontr qu'il ne s'agit point ici de flueurs blanches, et il est tout fait draisonnable de formuler contre le m i i a c l e u n e conclusion tire de ces flueurs blanches hypothtiques. En effet, le sujet du miracle se trouve n o n pas dans l'affection de l'utrus, mais dans celle de la rate. Si n o u s maintenons l'inflammation de l'utrus, n o u s l e faisons par amour de la vrit, cause
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de la liaison ncessaire qui existe entre la pression exerce par la rate obstrue et l'affection de l'utrus. S'il vous plat de briser ce lien, cela n'enlvera rien la force des preuves en faveur de l'obstruction de la rate, car ces preuves n e reposent pas sur la rtialadie de l'utrus, mais sur une argumentation toute diffrente. 149. Aprs tant de subtilits de la part de notre Expert, p o u r ramener une nvralgie la maladie de la religieuse, soit en donnant le n o m de splnalgie l'obstruction de la rate, soit en repoussant mme l'obstruction, soit en rem plaant la mtrite par des flueurs blanches, qu'il pourra en suite rattacher d'une certaine manire l'hystrie (1), aprs tant de subtilits, ai-je dit, il fait de l'hystrie u n e espce de nvralgie. Voici ses paroles : a La maladie de la sur n'tait rien autre qu'une hystrie, n o n pas succdant une ma ladie, mais la prcdant, n o n pas intermittente, mais continue ; clic n'tait pas l'effet, mais la cause et la source des autres affections. Voil ce qu'il faut accepter. 150. Pourquoi ? Parce que les assauts nerveux o n t prcd de b e a u c o u p la maladie principale... Ds les premires annes qu'elle passa dans le monastre, elle c o m m e n a souffrir de convulsions haletantes... elle pou vait avoir seize ou dix-sept ans environ . . . Car puisque les m o u v e m e n t s convulsifs constituent le caractre le plus saillant de l'affection hystrique, que ces m o u v e m e n t s ont prcd ehez la sur les autres formes de la maladie, et qu'elles se sont manifests b e a u c o u p plus souvent que G les autres, il est vident q u e l'hystrie a t la cause et la source des autres affections. 151. Notre critique n o u s parat accorder ces paroles plus de porte qu'elles n'en mritent. Gomment en effet en tire-t-il c o m m e conclusion certaine, q u e les convulsions ant rieures furent de l'hystrie ? P e r s o n n e certainement ne leur donne c e n o m , et cependant les t m o i n s auraient d le leur
( 1 ) Soit parce que, aprs les crises d'hystrie, il sort une humeur s reuse, l y m p h a t i q u e et sanguinolente de l'entre du vagin, soit parce que la suite du mal produit par ces paroxysmes, violents et rptes, la menibrane muqueuse puisse tre aieele," au point de scrter des humeurs morbides : En effet, en dissquant des cadavres de femmes qui ont souffert des violentes douleurs, par suite de leur hystrie, on trouve constamment quelque altration de l'ovaire, des trompes, et de l'utrus. (Astrucc.) Mais chacun peut constater que le premier coule m e n t ne consiste pas dans les flueurs blanches proprement dites, el que le second change la nature de la maladie, car il n'est pas produit direc tement par l'hystrie, mais par la condition pathologique de la mem brane muqueuse, ou par u n vice matriel produit en elle par Jes paro xysmes de l'hystrie.
(>3S)
donner d'aprs la dclaration des mdecins. L a ' m a l a d e a bien dpos : qu'elle tait sujette de frquentes convul-, sions, diffrentes affections hystriques, qu'elle pensait que ces effets taient produits par l'hystrie. Mais lisez le Sommaire, vous verrez facilement qu'elle n'a dit cela que du temps de sa maladie. Nous accordons volontiers que
les mouvements
convulsif s constituent
le caractre
prin-
cipal de l'hystrie. Mais les mouvements convulsifs diffrent de l'hystrie c o m m e le genre diffre de l'espce. Toute h y s trie en effet a ses m o u v e m e n t s convulsifs, mais tous les mouvements convulsifs, si violents qu'ils puissent tre, ne procdent pas de l'histrie.Cela est vident chez les h o m m e s qui, privs d'utrus, sont exposs ces mouvements c o m m e les femmes. 152. E n outre, tant que l'hystrie n'est pas excite par les autres maladies, qu'elle n'est pas produite par elles, mais qu'elle est la maladie principale, elle a alors ses signes parti culiers qui la font reconnatre. Et quoiqu'elle aime se dissi muler, donner souvent le change, cependant, parmi tous ses diffrents symptmes, il en est quatre principaux que l'on rencontre ordinairement dans toute attaque de l'affec tion hystrique, et que, quoi qu' diffrents degrs, on peut appeler pathognomoniques. Il est certain en effet 1 que l'attaque c o m m e n c e c o n s t a m m e n t par quelque impression confuse,par un soubresaut latent de l'utrus que les malades " ressentent assez b i e n ; 2 cela amne une certaine suffo cation qui fait croire aux malades qu'ils vont tre trangls ; 3 le thorax est c o m m e entour d'un cercle de 1er vers les . fausses ctes ; 4 enfin dans l'abdomen, les malades ressen tent c o m m e une boule qui r o u l e , qui se transporte et l dans le bas ventre, tantt plus grosse, tantt plus petite, tantt plus dure, tantt plus molle (1). Or on ne parle a u cunement de ces signes pathognomoniques dans le S o m maire, soit avant la maladie, soit pendant sa dure. Gom ment donc affirmer que l'hystrie est ta maladie principale? Comment donner le n o m d'hystrie aux convulsions plus anciennes? Comment, de l'affirmation gratuite de ces signes prcurseurs de l'hystrie, p e u t - o n conclure que toutes les autres maladies dcoulent d'elle ? 153. Nous n e nions pas pour cela la prsence de l'hystrie chez notre malade. Nous s o m m e s volontiers de l'avis, et des mdecins qui ont soign la malade, et de la malade e l l e mme, attestant tous l'existence de cette affection, pendant (1J Astrucc. qui expose la cause de ces phnomnes, dans l'ouvrage dj cit.
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la maladie. Nous reconnaissons volontiers, que dans une r u n i o n si complexe de maladies, d'une violence si grande, el d'une aussi l o n g u e dure, il a t impossible que la passion hystrique ne ft pas mise en j e u ; n o u s avons admis de bon c u r qu'elle a d tre produite par la grave afleclion de l'utrus ; il est des indices assez clairs qui le m o n t r e n t . Nous m a i n t e n o n s s e u l e m e n t q u ' o n ne peut n u l l e m e n t prouver q u e l'hystrie ait prcd la maladie, et q u e l l e ait t la maladie principale. 151 Accordons notre Expert l'anciennet qu'il rclame pour l'hystrie. Elle aura c o m m e n c des l'adolescence de la j e u n e fille; elle aura provoqu les convulsions, dont la j e u n e fille souffrit avant sa maladie. Qu'en c o n c l u r e ? Pour placer dans l'hystrie la c a u s e et l'origine des autres mala dies, il ne suffira point de prouver q u e l'affection hystrique a prcd, il faudra en outre montrer qu'elle est apte les produire efficacement. En effet, si on ne le fait, j a m a i s les lo giciens n'accepteront cette c o n c l u s i o n : hoc post hoc, ergo hoc ex hoc. Il faudra donc montrer que l'hystrie peut pro duire l'obstruction de la rate, la mtrite, la pleursie, la sup puration des p o u m o n s , les c r a c h e m e n t s de sang, e n un mot les conditions pathologiques, o u e s vices matriels des sys t m e s du sang et des viscres. Mais tant qu'il demeurera cer- ' tain, que tout cela ne peut pas tre produit par la seule dis tribution irrgulire du fluide nerveux, quelqu'ancienne que v o u s supposiez l'hystrie, on ne pourra jamais la regarder c o m m e la cause de tous ces m a u x . Si de votre hypothse, vous prtendez conclure q u e la force de l'hystrie est telle, que peu peu elle puisse atteindre et vicier tous les organes, - et par l amener toutes les maladies, qui donc, ds lors, oserait affirmer qu'il s'agit, de l'hystrie? Si on se casse la . cuisbe dans une chute, et que ensuite, la gurison des os fracturs ait lieu, qui dira qu'il s'agit de la gurison d'une c h u t e ? Mais les convulsions revenaient souvent avec une nouvelle vigueur. Oui, car dans une maladie si longue, si douloureuse, si complique, il tait impossible que toul le s y s t m e nerveux n e ft pas gravement atteint ; mais tout, h o m m e sage en conclura que les convulsions furent une consquence de la maladie, et non pas la c a u s e .
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155. Voici un autre argument de m m e valeur. L'Expert fait l'numration des s y m p i m e s qui se sont dclars chez la malade , et les compare avec les s y m p t m e s do l'hys trie fournis par plusieurs auteurs. De leur concidence ma trielle, il conclut, que la maladie a t l hystrie Mais cette maladie a des faces s i v a r i e s , si multiples, qu'il n'est presque
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aucun symptme des autres maladies, qu'elle ne puisse simuler (pourvu toutefois qu'elle n'exige pas un vice mat riel de l'organe.) S'il vous plaisait de suivre la voie trace par leCenseur, c o m m e les symptmes qu'il numre, savoir: la paresse des cuisses, des indices de paralysie, une toux sche, les lipothymies, l'asthme, les fausses inflammations, les douleurs diverses, les migraines, l e d g o t des aliments, etc. peuvent se rencontrer chez les h o m m e s c o m m e chez les femmes, il serait plaisant de voir quelqu'un tirer pour c o n clusion, que les h o m m e s chez lesquels on rencontre plu sieurs de ces indices, souifrent de l'hystrie ou d'une maladie de l'utrus. 156. 11 n'y a nulle erreur, si norme qu'elle soit, dans le diagnostic des maladies, qu'on ne puisse dfendre, en mettant de ct la nature et la marche de la maladie, en rassemblant de tous cts des signes et des accidents secon daires. Mais, j e le demande, l'hystrie peut-elle tourmenter .une femme pendant plusieurs annes, continuellement, r gulirement, et sans relche aucune? Si cela est impossible, une maladie vraiment continue ne sera pas une hystrie. Peut-elle avoir un substrtm matriel? Si elle rsulte cle la distribution irrgulire du lluide nerveux, par cela mme, et de sa nature elle manque de substrtm matriel. La maladie, qui prsentera un substrtm matriel, ne sera pas l'hystrie. P e u t - e l l e tre soumise des lois certaines, et garder des priodes dfinies dans son origine, dans ses progrs, dans sa d i m i n u t i o n ? Non, puisqu'elle se montre subitement, et que, disparaissant subitement aus^i, elle laisse pleines de sant les malades qui paraissaient sur le point de mourir. Une maladie qui montrera une marche certaine dans son origine, dans ses progrs, et dans sa rmission, ne pourra tre appele hystrie. L'hystrie revient par alter natives, qu'on appelle paroxysmes, a dit Astruc. Ses retours sont irrguliers, n'observent aucune priode. Dans les accs du mal, les malades paraissent tre en d a n g e r ; viennent-ils disparatre, elles recouvrent une tranquillit et une sant parfaite L'hystrie est une espce de convulsions Ces convulsions ou m o u v e m e n t s convulsifs atteignent les muscles et les libres musculaires de tout le corps ; les fi brilles tendineuses Tous ces mouvements, qu ils appar tiennent aux libres musculaires ou aux fibrilles tendineuses dpendent galement de l'coulement trop abondant Bt trop soudain des esprits animaux Il est certain q u e dans rhystrie on ne peut nullement souponner des causes idiopathiques qui soient capables de produire ces
vr.
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effets; et il en rsulte q u e la cause de ces commotionsqu'on observe chez les f e m m e s hystriques, est purement s y m p a t h i q u e . (1) Oui, telle est la n a t u r e de l'hystrie, elle se m o n t r e s e u l e m e n t par p a r o x y s m e s ; elle n'observe a u c u n e loi, dans ses manifestations; elle rend la santsur-le-champ, de la m m e manire qu'elle avait paru mettre t o u t c o u p la vie en d a n g e r ; elle m a n q u e de cause idiopat h i q u e , c'est--dire de c a u s e propre et spcifique, et elle se p r o d u i t s e u l e m e n t d'une manire sympathique, o u comme par c o n f o r m i t . Ds lors, c o m m e n t p o u r r a - t - o n rattacher l'hystrie, une maladie c o n t i n u e , qui prsente des phno m n e s d u s h des causes idiopathiques qui a e u son cours rgulier, qui a suivi des lois certaines, et prsent des priodes videntes? 157. C o m m e t o u t e la rponse du Critique tend vouloir faire accepter de force l'hystrie, bon gr, malgr, il ne sera p a s hors de propos de comparer ces rgles thoriques avec la maladie en question. P o u r ne point prolonger notre plai doyer, n o u s n e nous arrterons pas montrer que l'obstruc t i o n de la rate, cause de sa longue dure et de sa conti nuit,est c o m p l t e m e n t o p p o s e a u x paroxysmes de l'hystrie. E t , parce q u e n o u s avons trait cette question plusieurs reprises, surtout, lorsque, nous appuyant sur cet argument, n o u s avons reiut l'opinion priori de notre Censeur. N o u s omettrons g a l e m e n t un autre a r g u m e n t dont nous n o u s s o m m e s servi, lire des p h n o m n e s particuliers aux vices d u systme sanguin ou des vicres, lesquels, parce qu'ils sont trangers l'action et l'influence du systme nerveux, de m m e qu'ils exigent u n e caute matrielle, sont en dehors du jeu de l'hystrisme.Nous considrerons plutt les maladies accessoires dans leur c o u r s , car, puisqu'il est certain, que les accs de l'hystrie sont irrguliers, qu'ils n'observent au c u n e loi dans leur marche, m dans leurs retours, qu'aprs leurs paroxysmes, ils laissent les malades libres et e n bonne s a n t , si n o u s constatons que ces maladies ont suivi une m a r c h e rgulire, qu'elles ont obi a u n e loi certaine dans leur origine, clans leur accroissement, et dans leur dclin, n o u s en dduirons u n argument nouveau et des plus vi dents pour rejeter l'hypolbse de l'hystrie. 158. La s u r Thrse-Marguerite Cavalicri a dpos : S u r Marini dans notre monastre tait sujette des in flammations de poitrine A cause de cette maladie, on lui tira du sang, on lui appliqua des vsicaloires; on.lui 1. Astruc, ouvrage dj cit.
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administra par la bouche des infusisons de lichen m langes avec du lait. La susdite maladie de poitrine s'apaisa ainsi notablement. La S u r Lucie Marini dclare : Elle souffrit aussi d'un point de ct, avec accompagnement de fivre ; c o m m e (c traitement on lui fitunenouvellesaigne. La sur Joseph AgOhtini raconte : Elle tait sujette de frquents accs de livre provenant d'inflammations de poitrine... on lui tirait du sang,et une fois on appliqua un vsieatoire. Le mdecin Ciccolini dpose : Elle tait sujette des pleursies o u des p n e u m o n i e s , ce qui arrivait frquem ment, elle rejetait parla bouche des crachats, sanguino lents d'abord, puis purulents.... Plus tard curent lieu des vomissements de sang provenant des pommons, spciale m e n t l'occasion des maladies que nous avons fait c o n natre prcdemment. L'inflammation de poitrine se d clara chez sur Marini plusieurs reprises, elle fut grave dans sa nature et dans son caractre. On c o m b a t l i t c e s in disposilionspar des remdes approprisqui lescalmrent. Le chirurgien Castellani a dpos : L e s inflammations'de poitrine, dont elle avait t quelquefois atteinte avant ma premire visite, avaient reparu prcdes d'accs violents qui suffoquaient la malade, d'une soif brlante, d'une respiration pnible, de la toux, et de l'impossibilit d o s e tenir couche sur le ct. Je traitai toujours ces inflam mation p a r l e systme drivatif, par les contre-stimulants, par une saigne abondante et par l'application frquente de vsicatoires. Enfin, voici les paroles de notre gurie ; Dans le monas 1re de Pennabili, outre le susdit mal de la rate, j'ai d rejeter du sang par la bouche une fois o u d e u x . . . . Je souf frais beaucoup de la poitrine; c'taient o r d i n a i r e m e n t d e s p o i n t s . . . . Tous ces maux m'assaillirent plusieurs re prises. Depuis ma sortie du couvent de Pennabilli ma sant a souvent subi des altrations graves ; et une fois ou a deux j ' e u s u n e inflammation mortelle Outre cette in flammation je fus prise de fivres et de tiraillements dans poitrine par deux fois Puis les inflammations de la poitrine revinrent avec une grande difficult de la respi ration, surtout dans les derniers temps de la maladie. EUes furent si graves, une fois principalement, que je fus sur le point d'tre administre, je me croyais toute proche de la mort. Tout cela c o m m e le reste, fut vaincu par les saignes, el par d'autres remdes dont j e ne m e souviens pas.
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139 L'accord parfait do ces d p o s i t i o n s , n o u s apprend: que les pleursies et les pripneumonies ont suivi une marche r gulire dans leur dure n o r m a l e . Nous l'apprenons aussi par les nombreuses saignes que l'on fit, par la description des s y m p t m e s propres des inflammations vritables, par la re crudescence et la rmission des maladies, par leur volution, les crachats sanguinolents bientt suivis de crachats p u r u l e n t s ; n o u s le v o y o n s enfin par l'efficacit du traitement antiphlogistique, s u r m o n t a n t peu peu la maladie, et la fai sant cesser d o u c e m e n t . Or cette srie de vicissitudes est en c o m p l t e opposition avec la nature des paroxysmes h y s t riques. Ces derniers, en effet, sont e s s e n t i e l l e m e n t anor m a u x ; jamais ils ne se prolongent au del de quelques jours, et ils disparaissent tout ii c o u p . Donc l'expos de ces maladies secondaires renverse l'hypothse de l'hys trie. 160. Mais, en outre, cet expos des maladies accessoires fait natre tout naturellement d'autres observations qui ren versent directement l'hypothse de l'hystrie, c o m m e prin cipe de tout le mal. En effet, il est certain que ces affections de la poitrine furent frquentes pendant ces vingt-trois annes entires ; il est galement certain, q u e pour les c o m battre, on a eu c o n s t a m m e n t et a m p l e m e n t recours au trai tement antiphlogistique. Il est enfin certain, que ces m m e s maladies cdaient assez promptemenl ce traitement,de telle sorte qu'elles ne reparaissaient que par intervalles, et, que dans les dernires annes, elles ne laissrent subsister chez la malade que la seule affection de la rate ; or tout le m o n d e sait, qu'il n'y a rien de plus contraire aux affections ner veuses qu'une abondante saigne. Car puisque la vie et la force de la sant rsident dans le sang, que cette vie et cette force de la sant maintiennent en force et dans l'ordre les esprits animaux, et compriment par l m m e , les m o u v e m e n t s dsordonns des nerfs, il est vident q u e si vous s u p primez ce frein les affections nerveuses devront ncessaire m e n t augmenter d'intensit. Ou, si quelquefois, dans des cas trs-graves, chez ceux qui sont atteints de plthore, avec un pouls trs-fort, alors que 1 hystrie, clans son p a r o x y s m e , enlve le m o u v e m e n t et la sensibilit, de sorte qu'elle semble avoir revtu la nature de l'apoplexie,plutt que celle d'une syncope, la saigne peut produire une amlioration m o m e n t a n e . Il faut cependant viter avec soin de la rpter trop souvent, car elle enlverait les forces et la maladie de viendrait plus opinitre et plus dangereuse!. C'est pourquoi, s'il fallait embrasser le sentiment de notre savant adversaire,
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que l'hystrie a t la maladie principale, dont les autres affections n'ont t que des formes et des jeux, il est vident que non-seulement, les maladies secondaires n'auraient pu, en aucune manire, cder a un traitement antiphlogistique si abondant et si souvent rpt, mais qu'elles se s e raient au contraire aggraves de plus en plus au point de donner lieu avec le temps des phnomnes de plus en plus effrayants. Or l'histoire nous apprend que le contraire e u t lieu. Il est donc de la dernire vidence, que ces maladies avaient leur caractre propre et particulier, trs diffrent de la nature de l'hystrie-, et q u e , par consquent, l'hys trie n'a pu tre ni leur cause, ni leur source. 161. Poursuivons. Le mme expos de ces diverses mala dies nous apprend d'une manire certaine, qu'elles furent toujours accompagnes de fivre ; et ce q u e nous avons dit ailleurs n o u s donne la certitude que la fivre accompagna l'inflammation de l'utrus; et d'aprs le Sommaire, il est certain aussi, q u e sur la fin la fivre fut lente et continuelle.' Or l'hystrie, par sa nature, exclut la fivre ; et plus ses paroxysmes sont violents, plus elle donne au pouls un carac tre tranger celui de la fivre. On distingue trois tats dans l'hystrie, d i t A s t r u c (op. cit). Dans le premier.., la res piration e l l e s pulsations du cur persistent ou sont lgre ment troubles.Dans le second la respiration et les pulsations du pouls subsistent quoique faibles, et elles sont le plus s o u vent trs ingales. Enfin, dans le dernier la respiration fait dfaut, ainsi que la contraction du cur; on dirait presque un cadavre. Qui ne voit combien ces conditions du pouls sont contraires . celles du pouls de la fivre. Bien plus, l'ex prience nous apprend q u e la fivre est le moyen naturel dont la nature s e sert le plus souvent pour dissiper les af fections nerveuses. Donc, si dans le cas e n question, l'hys trie avait t la maladie principale, si les autres affections avaient t seulement ses formes diffrentes et n a t u r e l l e s ; ou bien la malade n'aurait jamais eu la fivre, ou bien, la fivre venant h se dclarer, la malade aurait t gurie. Or. l'expos des faits atteste q u e la malade a souvent souffert de la fivre aigu, et trs longtemps d'une fivre lente. Donc les maladies dont elle fut atteinte sont aussi loignes de l'hystrie que le ciel Test de la terre; et par c o n s quent, on ne peut voir dans l'hystrie le principe de la maladie. 162. R s u m o n s - n o u s . L'hystrie c o m m e source principale ou premire, est rejete par la dure et la constance de la maladie dominante, par la nature des affections secondaires,
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qui n'ont aucun rapport avec le s y s t m e nerveux, par la marche et les vicissitudes de ces m m e s affections, p a r l a m thode de traitement employe, par la fivre. Elle se trouve tellement en opposition avec chacune de ces chojses, qu'il y a contradiction vritable et parfaite entre l'expos des faits et la nature de l'hystrie. Ou bien d o n c , il faut rejeter toutes les dpositions c o m m e m e n s o n g r e s ; o u bien il faut relguer parmi les romans l'hypothse de la primaut de l'hyslric. Si vous reculez devant la premire de ces alterna tives, alors embrassez la seconde. 163. L'hystrie c o m m e maladie principale tant rejete tant de litres, il faut trouver un autre m a l , qui par sa dure, par sa c o n s t a n c e , rponde la dure et la constance de la maladie, qui ait des liens naturels avec les autres af fections, qui par sa nature puisse tre d m o n t r e apte p r o duire tous les effets que nous avons constats dans le cas e n question. Nous dcouvrons ce mal dans l'obstruction de la rate prolong pendant vingt-trois ans ; - n o u s avons prouv, on effet que son action est de nature produire les autres maladies, qui e n dcoulrent s p o n t a n m e n t c o m m e de leur source. 164. Mais si la nature de la maladie n'est pas seule r voque en doute, si mme sa disparition ou sa diminution, au moins possible, se trouvent rejetes, il ne suffit pas, pour tablir le miracle de la gurison d'avoir montr l'existence, la nature, la gravit de la maladie, il faut encore prouver sa malice et sa persvrance jusqu' la fin. 163. La maladie de notre religieuse persvra-t-elle dans son tat naturel jusqu' la Bu? Nous avons rappel s o u vent de quelle manire le volume et la duret de la rate s'taient manifests la vue et au toucher jusqu'au m o m e n t du prodige: et nous avons remarqu en outre que cette du ret de pierre tait la preuve vidente de la destruction de l'organe. Les douleurs en attendant devenaient plus fortes: la douleur la rate ne cessait pas, elle se reproduisait au contraire avec une violence plus grande, et elle rvlait ainsi la prsence accumule du ferment intrieur qui annonait la dcomposition du viscre. Ge ferment acre dvelopp l'intrieur, dit le chirurgien, ne laissait plus concevoir l'esprance mme la plus l o i n t a i n e , . . . . la m a ladie marchait, pour ainsi dire, au galop vers le gan grne. La dgnrescence squirrheuse, dit le m d e c i n , tendait finir par la g a n g r n e . . . . Je dsesprais de la gurison.
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166. L'utrus atteint par le dveloppement morbide de la rate, et comprim matriellement parle volume endur de ce viscre, avait contract une inflammation qui avait fini par l'envahir tout entier; je le voyais attaqu d'une manire extraordinaire, il s'tait soulev et il p r sentait une trs grande duret. En eifet, si la douleur, la tension rsistante, la duret occupent tout le v o l u m e de l'utrus, si la tumeur est trs-grande, il n'y a plus de doute que la matrice tout entire n e soit atteinte (1). La tumfac tion indiquait donc que le viscre tait malade dans toutes ses parties; quant la douleur, dans les derniers temps, il en tait c o m m e de celle de la rate, la religieuse gurie dit e l l e - m m e : La douleur de l'utrus ne cessait pas, mais elle se reproduisait avec une violence toujours plus grande. Caslellani, aprs avoir dcrit tous les s y m p tmes et l'coulement purulent, ajoute: L'irritation u t rine persista et empira jusqu' la fin. Or ce que pronos tique une telle maladie dans de semblables conditions est trop clair; car il est admis par tous les auteurs que les inflam mations de l'utrus sont graves,avec cette restriction cepen dant, que les inflammations du s o m m e t de l'utrus se g u rissent plus facilement, et que les inflammations, totales ne gurissent jamais (2). Il n'y a donc rien d'tonnant que Cic colini ait dit : Je dsesprais de la gurison de la sur Ma rini cause de la multiplicit des maladies qui la' tour te mentaient, spcialement cause du squirrhe de la rate et de l'inflammation de l'utrus, qui, m o n avis, ne p o u vaient se gurir par des moyens humains. 167. L'obstruction de la rate avait en outre a m e n des vomissements des crachements de sang, et une inflamma tion des p o u m o n s qui alla jusqu' la purulence. . La p l e u rsie et la pneumonie occasionnrent des crachements et des vomissements de sang et ensuite de pus, dit Gicco lini. E t Gastellani parlant des derniers mois a j o u t e : Non seulement ces accidents durrent, mais ils allrent en augmentant jusqu' la gurison... ils furent plus o u moins alternatifs; c'tait tantt l'un, tantt l'autre qui c e s sait, et quelquefois ils se produiraient tous en m m e temps. La malade e l l e - m m e conlirme ces assertions quand elle dit : Il m e survint dans les derniers temps de la maladie une inflammation d e l poitrine avec asthme, ils furent tellement graves qu'un jour on appela le prtre
(1) A s t m a , ouv. cit, liv. 2, cli. i, j5. (2) Mercatus, des maladies des femmes, liv. l , ch. v u .
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pour m'assister la mort. La violence et la gravit de ces maladies sont d o n c assez notoires pour que toute observation paraisse superflue. 468. Il fallait cependant les combattre par un traitement antiphlogistique. De l la rupture de l'quilibre des fluides, l'puisement, des forces, la surexcitation du s y s t m e n e r v e u x . De V des crises nerveuses qui persistrent, pour ainsi dire, toute la dure d e l a m a l a d i e , crises t e l l e m e n t in t e n s e s , qu' la fin, elles amenrent une h m i p l g i e du ct droit, particulirement du bras, qui pendant quelque temps p e r d i t l a s e n s i b i l i t et l e m o u v e m e n t . De l , c o m m e aussi de la v i o l e n c e dss d o u l e u r s , des i n s o m n i e s telles que p e n dant les derniers six m o i s elle n e put fermer l'il. De l le trouble c o m p l e t des fonctions de l'estomac, au point q u e la m a l a d e n e pouvait p l u s supporter la vue m m e de la n o u r r i t u r e ; j'avais, d i t - e l l e , un tel d g o t du manger que lorsqu'on m'apportait quelque chose, j e m e m e t t a i s ' pleurer. De l cet extrme abattement du corps, qui fora la malade rester c o n t i n u e l l e m e n t au lit pendant six m o i s . De l enfin la peinture saisissante qu'elle fait d'ellem m e : A l'poque voisine de la gurison, j e n e voyais plus assez pour me guider, j e ne pouvais plus faire aucun m o u v e m e n t d a n s m o n l i t , je m e t r o u v a i s c o m p l t e m e n t p r i v e de forces, je n e m e n o u r r i s s a i s de q u o i q u e ce soit, si ce n'est de quelques gorges de bouillon q u e j e prenais a avec rpugnance. 169. Telle tait la maladie dans sa dernire priode, elle tait a c c o m p a g n e d'une fivre lente, dont les accs deve naient plus ou m o i n s forts, selon que l'inflammation tait plus ou m o i n s grande. Aussi ne craindrons n o u s pas de rpter e n c o r e : R u n i s s e z t o u t ce q u e nous avons dj dit, et voyez si, dans notre information n o u s avons eu tort d'affirmer que toutes les maladies runies sur cette femme n e pouvaient pas tre guries autrement que par le plus cla tant de tous les miracles, car c'est peine si le corps h u main peut souffrir a u t a n t e t aussi longtemps. E t q u o i q u e n o t r e d o c t e a d v e r s a i r e ait p u c r i r e p o u r a t t n u e r n o s d m o n s trations, n o u s p e n s o n s toujours avec les m d e c i n s qui ont soign la malade, que l'tat de sant de cette femme tait tout fait dsespr; et n o u s s o m m e s parfaitement d'accord avec eux quand ils aflirinent : que la maladie l'aurait rapidement conduite au tombeau, parce qu'elle tait mortelle de sa nature, s'il n'tait survenu u n e gurison instantane et miraculeuse.
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SECTION II
GURISON INSTANTANE ET PARFAITE.
170. Le prodige de cette gurison est diversement attaqu tant par les remarques critiques'du R. Promoteur que par le. mdecin expert. La critique objecte le ramollissement possible du viscre,les coulements de sang,les remdes, e t c . Comme nous avons montr en traitant de^la maladie ce que valent ces objections, nous ne les rfuterons pas de n o u veau. L'Expert, lui, s'attachant d'abord l'hypothse de l'hystrie,comme source principale de tous les maux, et tout en admettant celte maladie puisse donner l i e u , c o m m e tant d'une gurison difficile un miracle de troisime ordre, si la manire dont la gurison s est opre dpasse Tordre na turel, ne veut pas cependant de miracle dans le cas en ques tion, parce que la gurison, d'aprs lui, ne s'est pas faite ainsi. Laissant ensuite de ct son hypothse, et rangeant l'hystrie dans les maladies secondaires, il rejette de n o u veau tout miracle, parce qu'il pense que la gurison s'est opre peu peu et par degrs. 171. En v r i l , n o u s ne comprenons pas qu'il ait consacr deux paragraphes entiers nous apprendre que l'hys trie, m m e grave et invtre, peut disparatre tout--coup par l'effet des seules forces de la nature, s'il tait rsolu reconnatre, dans cette maladie, la matire d'un vrai miracle, pourvu que la gurison s'opre d'une manire qui ne soit pas naturelle ; et nous ne voyons pas pourquoi il n e rejette ici ce mode surnaturel de la gurison, qu'en s'appuyant sur des autorits nouvelles, affirmant que l'hystrie peut dispa ratre d'elle-mme et tout coup. Quoi qu'il en soit de ces vtilles, nous admettons volontiers la doctrine de notre adversaire sur la possibilit de la gurison naturelle subite et parfaite de l'hystrie. Bien plus, ce sentiment admis, nous dclarons qu'il serait tout--fait imprudent de pr senter la sacre Congrgation un cas de cette maladie, non pas parce qu'elle ne peut ftirc gurie miraculeuse ment, mais parce que dans la gurison d'une maladie pure ment-dynamique et sans substrtm, on n'a pas de raison de meltie entirement de ct l'action de la nature. 11 sera extrmement difficile, dit Benot XIV, de pouvoir mettre au rang des miracles les gurisons de celte maladie. Quelque-
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fois des postulateurs do causes de batification et de c a n o nisation l'ont essay, jamais cependant j e n'ai vu que ce cas et t admis ( 1 ) . 1 7 2 . Mais c o m m e il a c t e suffisamment d m o n t r que l'hys trie n'tait pas la maladie principale, pour qu'il n'y ait plus de d o u l e ce sujet; ce serait n o u s contredire que de dis cuter la gurison tout fait h y p o t h t i q u e de cette maladie. Examinons plutt la valeur des a r g u m e n t s d'aprs lesquels o n affirme que la gurison s'est opre graduellement. L'ex pert crit : Si l'on range la maladie primaire et essentielle parmi celles qui s o n t secondaires et additionnelles, et qu'on veuille porter principalement s o n attention sur les formes morbides, m m e dans ce cas, la gurison de la religieuse n e prsentera rien d'extra naturel; parce que, sans doute (ainsi qu'il le dit) les s y m p t m e s ont disparu les uns aprs les autres. Si n o u s n e nous trompons pas, notre adversaire engage l u n e l u t t e contre u n fan tme. En effet : la forme morbide, chez les m d e c i n s , n'est autre chose que cette runion particulire de s y m p t m e s , qui constitue chaque maladie (2) ; d'o il rsulte qu'il ne peut y avoir de forme morbide l o il n'y a pas de maladie pour produire les s y m p t m e s particuliers. Or notre adver saire, aprs avoir ni jusqu' prsent l'obstruction de la rate, pour dclarer l'hystrie la maladie primaire, se range maintenant notre avis, et classe la maladie qu'il appelait primaire et essentielle parmi les formes morbides. Puis, sans mettre d'autre maladie la place, il continue ses recherches sur la fivre, sur la faiblesse, sur le gonflement de l'utrus, sur les douleurs de poitrine, c o m m e sur autant d f o r m e s morbides. Mais, lui demanderons-nous, quelle maladie ces formes appartiennent-elles ? Si vous refusez d'admettre une maladie principale, les autres ne seront que des fantmes de votre imagination, qui n'auront aucune ralit. Par c o n s q u e n t l'examen que, pour ne pas admettre de miracle, v o u s faites des maladies accidentelles et de leur gurison gradue est une pure chimre. L'hypothse est doublement fausse, soit parce q u e l l e est sans fondement, soit parce qu'elle n'a pas de but. Gela est rendu vident par ce que nous avons dit, et par la chose e l l e - m m e . Ds lors, en effet, q u e vous rejetez la maladie principale qui pouvait tre l'objet d'un miracle, le miracle disparat en
( 1 ) Liv. 4, I
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mme temps, et sa disparition rend inutiles toutes l e s attaques diriges contre les symptmes. Mais passons sur c e vice intrinsque de l'hypothse. 173. Quant la maladie mme, notre adversaire c o n t i n u e ainsi : Si Ton fait attention h la fivre, on voit qu'elle d i s parut peu peu, puis que le lendemain il y en avait des vestiges dans l'agitation du pouls, (il y restait une petite altration). Ici il a en sa faveur les observations cri tiques du Promoteur qui, sur ces dernires paroles c o n signes au sommaire, a dit : Appelez cette agitation comme vous voudrez, certainement c'tait un c o m m e n cement o u u n reste de fivre. 174. D'abord n o u s nions que ce soit le lendemain de la gurison que le mdecin a trouv une agitation du pouls, comme l'affirme notre adversaire. Car le mdecin dit for mellement. Vers la vingt et u n i m e heure (neuf heures du soir) d'un jour, que j e ne puis indiquer, je trouvai la religieuse souffrant de son mal secondaire habituel, et tant revenu la matine suivante, j e fus oblig de c o n s tater sa parfaite gurison. Mais la malade est plus prcise quand elle dit : Aprs un sommeil tranquille, j e me rveillai et mangeai une bouillie que je trouvai d l i cieuse. Peu aprs survint le mdecin , Par consquent, le mdecin interrogea le pouls, il peine quelques heures aprs la gurison. 175. Nous nions ensuite que l'agitation du pouls fut u n reste,bien moins encore le c o m m e n c e m e n t d'une livre dont ensuite on ne parle plus; n o u s le nions parce que le mdecin a formellement mis cette altration en opposition avec la fivre: J e lui ttai le pouls et je reconnus que la fivre tait totalement disparue, bien qu'il restt une petite alif lration. Gomment aurait-il pu dire que la livre tait entirement disparue, si le pouls prsentait encore une agitation fbrile? Est-ce qu'un h o m m e sens pourrait dire : la fivre tait entirement disparue, quoiqu'il restt un vestige de fivre. G'est ce qui rsulte encore plus c l a i rement de la dposition du chirurgien, qui atfirme que, le jour mme de la gurison, et peu aprs le mdecin, il visita la malade qui lui d i t : le mdecin qui m'a visite tout l'heure, assure qu'il m'a trouve sans fivre. Ge qu'en tendant le chirurgien, l u i - m m e interrogea le pouls et le trouva parfaitement b o n . J e me htai, dit-il de lui tler le a pouls, et je trouvai vrai le dire du mdecin, et il ne parle pas du tout d'altration. L'motion n'ayant pas tard se calmer, l'agitation du pouls avait galement cess,
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LES SPLENDEURS
DE LA
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c e q u i p r o u v e q u ' e l l e n ' t a i t p a s d u e l a fivre, m a i s unetout autre cause. 1 7 6 . A r r t o n s - n o u s c e p e n d a n t u n p e u l ' h y p o t h s e des observations critiques et de l ' E x p e r t : m a n q u e r a - t - i l pour c e l a q u e l q u e c h o s e h l a p e r f e c t i o n d u m i r a c l e ? Ce m i r a c l e p o r t a i t sur u n e o b s t r u c t i o n d e la r a t e , l a q u e l l e t a i t d e v e n u e d u r e c o m m e d e l a p i e r r e , c ' e s t - - d i r e s u r u n e affection q u i a v a i t d s o r g a n i s c e v i s c r e . O r l o r s q u ' u n o r g a n i s m e est d s o r g a n i s , il n ' y p a s d e f o r c e s d e la n a t u r e q u i p u i s s e n t le r e c o n s t i t u e r ; il e s t d o n c v i d e n t q u ' i l y a v a i t l m a t i r e u n miracle de second ordre, qui n e d e m a n d e pas l'instan t a n i t d a n s s a p r o d u c t i o n ( 1 ) . V o i l p o u r q u o i , si la fivre qui tait la suite de cette o b s t r u c t i o n n e s'tait pas dissipe i m m d i a t e m e n t , cela n e n u i r a i t e n r i e n a u m i r a c l e . Mais a c c o r d o n s m m e qu'il n ' y et pas lsion de l'organisme, ce qui donnerait lieu s e u l e m e n t u n miracle de 3 ordre; il e s t i n d u b i t a b l e q u e p o u r d t r u i r e u n e o b s t r u c t i o n a u s s i i n v t r e , p o u r r e n d r e libres les c a n a u x e n g o r g s , p o u r d b a r r a s s e r l e v i s c r e d e s h u m e m ' s q u i s'y ' a i e n t a c c u m u l e s , p o u r r e n d r e a u s a n g son l i b r e c o u r s , p o u r r a m e n e r son j u s t e v o l u m e u n e t u m e u r m o n s t r u e u s e , il e t fallu la n a t u r e u n travail n o r m e de raction, et u n e l o n g u e u r de t e m p s c o n s i d r a b l e . On s a i t e n o u t r e q u e d a n s les m i r a c l e s d e 3 o r d r e , o n a d m e t 1 i n s t a n t a n i t s o i t p h y s i q u e , soit m o r a l e , c'est--dire, u n espace de t e m p s trop c o u r t p o u r q u ' i l suffise l ' a c t i o n d e l a n a t u r e ( 2 ) . O r l a fivre-disparut e n t i r e m e n t q u e l q u e s h e u r e s a p r s la g u r i s o n ; c a r l e c h i r u r g i e n , v i s i t a n t l a m a l a d e p e u a p r s le m d e c i n , n e t r o u v a m m e p l u s c e t t e a g i t a t i o n d u p o u l s q u e le m d e c i n a v a i t c o n s t a t e . D o n c , c e m o m e n t la g u r i s o n t a i t p a r f a i t e , ce qui tait impossible n a t u r e l l e m e n t . Donc dans l'hy p o t h s e m m e de nos adversaires, n o u s a v o n s l'instantanit m o r a l e . D e l a fivre d o n c , il n e p e u t p l u s t r e q u e s t i o n , soit p a r c e q u ' i l n ' e n r e s t a i t p l u s , s o i t p a r c e q u e si l ' o n e n a d m e t u n r e s t e , c o n t r e le sens m m e des m o t s , elle d i s p a r u t e n u n instant, moralement parlant.
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1 7 7 . L ' e x p e r t c o n t i n u e : P o u r p a r l e r d e l a f a i b l e s s e , ce fut p a r d e g r s qu'elle d i s p a r u t et q u e les forces revinrent, p u i s q u e c'est q u e l q u e s j o u r s aprs la gurison qu'elle p u t faire q u e l q u e s petites choses. A cela la critique a j o u t e : C e t t e f e m m e q u i a v a n t sa m a l a d i e t a i t forte e t a l e r t e ,
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(1) Card. de Laurea, XX diss. n 867. Benot XIV, liv. IV, I partie, ch. vin, n 15. (2) Benot, XIV endroit cit.
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dut se remettre au lit deux jours aprs avoir t gurie. 178. Nous ne v o y o n s pas qu'on puisse tirer une preuve de faiblesse, de ce que la malade, sans l'avoir demand ni dsir, garda le lit sur la prescription du mdecin, pres cription faite non pas ncessit, mais par prudence : j e lui ordonnai, dit le mdecin, do se tenir au lit, par plus grande prcaution . Mais cette prcaution, en effet, l'lal de la malade ne l'exigeait pas, puisqu'on la vit parfaitement gurie, non-seulement de la maladie principale mais aussi des maladies accessoires ; que son extrieur fut tout chang, ce qui ne pouvait se faire, aprs une si longue et si cruelle maladie, sans un recouvrement complet des forces ; que ses longues insomnies liront place un doux sommeil, le dgot d e l nourriture i\ un bon apptit; puisqu'en un mot elle agit en tout c o m m e une personne en bonne sant. Le mdecin frapp de cet vnement merveilleux tout . fait inespr, et ne voulant s'en rap porter ni la vue, ni au toucher, ni l'exprience, regardait alors cette gurison c o m m e devant tre passagre. 179. Mais, o y a-t-il faiblesse, o y a-t-il retour par degrs des forces, chez une personne, qui sur-le-champ peut remplir les fonctions des personnes bien portantes, qui, au bout de deux jours, n'tant plus tenue par l'ordon nance du mdecin, se jette hors du lit, vole la cuisine, mange, avec une sorte d'avidit, des lgumes fortement assaisonns, et tout de suite se soumet la loi du j e n e et de l'abstinence? Le jeudi saint, ou le second jour depuis ma gurison, dit-elle, j'allai la cuisine, saine el libre, comme autrefois, j e mangeai des c h o u x cuits l'eau assaisonns avec de l'huile et du poivre, sans prouver aucune i n c o m m o d i t , tandis qu'autrefois l'huile et les pices m'taient funestes. Le vendredi saint j'allai au r fectoire, et je mangeai c o m m e les autres religieuses, les mets prpars pour la c o m m u n a u t , ce que j e fis le s a it medi saint sans prouver de mal. Est-ce ain&i que pour rait agir une personne dont les forces reviendraient peu peu? Les forces taient donc dans loute leur i n t g r i t ; et c'est seulement un ordre du mdecin, ordre fond sur u n e fausse ide de la gurison, et non sur la faiblesse, qui l'avait force se remettre au lit. Que si, les premiers j o u r s elle ne fit que de petits travaux, cela n'est pas d la faiblesse, mais parce qu elle n'avait plus de fonction spciale, la sienne lui ayant t retire pendant sa l o n g u e maladie, e n sorte qu'elle dut la redemander sa suprieure. Au b o u t
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de quelques j o u r s , tant bien gurie, dit-elle, j'allai demander la Suprieure un e m p l o i , c o m m e les autres religieuses, et depuis lors j e ne l'ai pas quitt jusqu' prsent. 180. Mais de m m e q u e n o u s l'avons fait pour la fivre, d i s c u t o n s , pour la faiblesse, l'hypothse de la critique et de l E x p e r t . D aprs t o u t ce qui a cl dit, cette faiblesse ne p e u t tre prolonge au del du l e n d e m a i n de la gurison. Or, je vous d e m a n d e si une malade qui a souffert pendant vingt-trois ans de n o m b r e u s e s et graves maladies, qui est reste au lit six mois entiers, qui, pendant tout ce temps, a e n d u r d'atroces douleurs, qui a t sujette des accidents inflammatoire sans cesse renouvels, dont on a tir presque t o u t le sang, par suite d'un traitement antiphlogistique c o n t i n u , qui est resie six mois sans dormir, qui a t habituellement sujette aux c o n v u l s i o n s , qui enfin depuis l o n g t e m p s ne prenait plus de nourriture, j e vous demande si une telle malade, qui recouvre l'intgrit de ses forces en deux jours, de manire pouvoir faire abstinence et jener sans i n c o m m o d i t , au vu et au su de tout le m o n d e , se serait rtablie peu peu et graduellement ? 181. Accordons cependant cette amlioration graduelle, bien singuliie dans les annales de la m d e c i n e . A l'occa sion des miracles, la question de la faiblesse n'est pas nou velle, au sein de la S. Congrgation, on y a toujours rpondu qu'il y avait miracle, quand tout ce qui est de l'essence u n e maladie disparat en une seule fois et d'une manire qui n'est pas dans l'ordre de la nature ; q u e par consquent ce qui pourrait rester n o n de la m a l a d i e , mais des suites de la maladie, n'enlve rien au miracle . Contelorius a crit: D'aprs ce qui a t tabli plus h a u t , la faiblesse des m e m b r e s , ou la faiblesse gnrale qui resterait chez une personne m i r a c u l e u s e m e n t gurie, n'est pas une preuve contre le miracle et ne d i m i n u e e n rien le vrai mi racle (1). Et Castellini : Ce qui constitue u n vrai miracle se fait toujours instantanment, q u o i q u e certaines suites du miracle' ne se produisent qu'avec le t e m p s . . . Si la fai blesse du corps rsultant d'une grave infirmit disparat e n s u i t e graduellement, cela ne fait pas disparatre le mi racle (2). Et Pignalelli : Rien cependant, dans les miracles du troi(1) Canon, des S , ch. x v n , n 16. (2) Certitud. de la gloire des S , ch. vin, art. 30, n 3.
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sime genre, n'empocherait que la personne gurie d'une ma nire surnaturelle, conservt quelque tache livide, q u e l q u e cicatrice, quelque t u m e u r , quelque faiblesse du corps o u d'un m e m b r e . . . 11 suffit, en effet, que ce qui constitue une maladie, incurable par les m o y e n s naturels, disparaisse e n un instant. (1) Et Bordoni : O n demande si la pleur, une cicatrice, la faiblesse et d'autres restes d'iniirmit laisss par la maladie, font disparatre le miracle? Je rponds que non, parce que le miracle consiste en ce que, en vertu d'un secours spcial de Dieu, o n recouvre intgralement la sant en un instant. O on peut la recouvrer ainsi, tout en gardant certaines traces de la maladie. Pour la sant parfaite, il suffit que le corps soit rtabli dans un tat tel, qu'il puisse remplir toutes les fonctions qu'il faisait avant la maladie ; il peut les rem plir tout en gardant quelques traces du mal disparu ; donc ces traces ne dtruisent pas de miracle (2). E t Z a c c h i a s , dont l'autorit est si grande dans ces sortes de causes et si c o n n u e , il est compltement d'accord avec les auteurs que nous venons de citer, puisqu'il dit : P o u r v u que la maladie disparaisse incontinent, quand m m e il en resterait des suites, par exemple, de la lassitude, de la faiblesse, quelque cicatrice, de la douleur et autre chose semblable, cela suffit pour qu'il y ait miracle(3); et encore : (Ce n'est pas une difficult contre le miracle si, aprs la gu rison de la maladie principale, il reste quelque suite de la maladie, et si la malade n'a pas t tout coup gurie de ces restes ; il suffit que la maladie, dans ce qu'elle a d'essentiel et de grave, ait-disparu l'invocation du serviteur de Dieu, immdiatement aprs l'application de la mesure de son bienheureux corps, et instantanment (5). 182. Aussij soit parce qu'on n'a pas de preuves de la f a i blesse restant aprs la gurison, faiblesse que tous les i n dices et tous les raisonnements nous font rejeter; soit parce q u e , dans l'hypothse de l'existence de cette faiblesse, elle n e disparut certainement pas naturellement, car il tait bien impossible qu'une personne demi morte pt en deux jours s e u l e m e n t retrouver une sant parfaite ; soit parce que, sans tenir compte de l'observation prcdente, la faiblesse, n e pouvant tre qu'une suite et n o n pas un l ment de la maladie, n e doit pas nuire au miracle, qui c o n (1) Consult., cauoniq. 54 n 4, t. IV. (3) Mdit, sur les miracles, v u , n 24. (3J (juest. md. lgal, liv. 4, Lit. I , quest. 3. (4) bid.j consil 6, n 8.
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sisle dans la disparition subite, surnaturelle et totale de la m a l a d i e ; il est vident qu'on ne peut considrer la g u rison c o m m e imparfaite en raison de cette faiblesse, puisqu'au contraire elle est rendue clatante par le complet et rapide'rtablissement des forces, malgr la cruelle et l o n g u e maladie prcdente. 483.Notre adversaire continue : Si l'on considre le gon flement de l'utrus et du ventre, il n'y a rien d tonnant s'il n'est plus aujourd'hui ce qu'il tait hier; car une enflure quelle qu'elle soit peut diminuer d'un jour l'autre et surtout celle de la matrice, si des h u m e u r s mieux digres et bientt un c o u l e m e n t de sang prcdrent le dclin de la maladie. Il dcoulait del'utrus des h u m e u r s blanchtres <i qu'ensuite on put voir s a n g u i n o l e n t e s . 184. Ces observations doivent tre mises de ct, et cela sans hsitation, car elles n'ont pas de rapport avec le cas que n o u s examinons. Il ne s'agit pas ici d'un simple gonfle m e n t de la matrice, mais d'une inflammation profonde, c o m m e n o u s l'avons bien suffisamment dmontr. Il ne s'agit pas non plus de flueurs blanches devenues ensuite sangui nolentes, et qui auraient prcd la fin de la maladie, car ces humeurs n'taient autre chose qu'un c o u l e m e n t de pus, produit par l'inflammation ; en effet, ces humeurs taient tantt blanchtres, mais acres, tantt sanguinolentes, q u e l quefois couleur de b o u e et jauntres, mais toujours de mau vaise odeur,rpandant l'infection de lapourriture,et toujours u n e matire purulente. Il ne s'agit pas enfin de diminution enlurc se produisant de jour en j o u r , o u de rmission de la maladie, mais de cet engorgement de l'utrus, qui dans la phase de la maladie ne pouvait au dire du m d e c i n , se gurir dernire par aucun remde h u m a i n , q u e dans sa dernire vi site, le chirurgien avait trouv e x t r m e m e n t aggrav, et dont les douleurs alors, d'aprs la malade, augmentaient d'inten s i t . Or cette maladie, qui en tait ce point, neuf heures d'un certain soir, avait entirement disparu la matine sui vante ; le m d e c i n qui le rapporte ajoute : Je palpai n a n moins la rgion de l'utrus, et je sentis que toute trace d'enflure tait disparue, je trouvai l'utrus dans son tat naturel; il n'y avait plus ni gonflement, ni mtorisme, ce que dit aussi le chirurgien. 185. Rien d o n c ne se rapporte m o i n s notre cas, que ces observations qui changent l e s p c e d e l maladie et que Ton fonde tort sur une diminution graduelle du mal. Accordons cependant, pour un instant, notre adver saire qu'il s'agissait de simples flueurs blanches ; accordons
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qu'elles ont pu occasionner l'irritation de l'utrus, des douleurs et de l'enflure. Ce n'est pas dire que tout cela ft un souffle capable de disparatre en un instant. Si le soir tous ces s y m p t m e s existaient, si, dans l'hypothse o ils auraient t produits par quelque vice de la m e m b r a n e muqueuse, oprant d'une manire clfeclucuse la scrtion des humeurs, il fallait du temps pour I P S dissiper peu peu, une fois la cause mauvaise disparue ; et puisque n a n m o i n s ils se sont dissips tout coup, on est bien oblig, m m e dans l'hypothse susdite, de reconnatre qu'ils ont disparu d'une manire qui n'est pas naturelle. 186. Notre adversaire continue : Si nous examinons les douleurs de poitrine et les autres incommodits, nous savons que chez les sujets hystriques ces accidents n'ont pas la m m e importance que chez les autres, et que, par consquent, ils ont pu disparatre facilement et rapide ment. D'ailleurs je n'ai pu trouver nulle part ans le s o m m a i r e , q u e la religieuse et conserv jusqu'au m o m e n t de son rtablissement une maladie de poitrine difficile gurir. 181. Nous ne savons par quelle fatalit notre adversaire qui, n'a pu rien dcouvrir de favorable au miracle dans le Sommaire rdig cependant tout entier pour dmontrer le prodige, ait si bien vu, au contraire, et, au besoin, dans des textes tronqus et disparates, tout ce qui parat le c o n tredire ou l'obscurcir, tous les mots sens d o u t e u x , m m e les points (1) qui pouvaient prter des objections. C'est ainsi par'exemple, qu'il n'a pas vu ces paroles du chirurgien, qui, numerant les nombreuses maladies supportes par la maltide dit : quelquefois elles se trouvrent toutes runies ensemble. Et voil pourquoi il crit : 11 est facile de voir que la religieuse Angle-Josphc n'a jamais eu lutter contre toutes ces maladies reunies, mais seulement contre chacune d'elles sparment. Ainsi ( c o m m e d u r * s l e i l l u i est arriv souvent daus bon rapport) il n'a pas vu n o n plus le retour de graves inflammations dans les derniers temps. Et cependant le chirurgien qui parle des quatre derniers mois avait dit formellement : Ces douleurs inflammatoires de la poitrine durrent et augmentrent m m e pendant le traitement. Et la malade e l l e - m m e a dit trs-claire ment : u ii m e survint la lia de la maladie, des inflamma tions de poitrine avec asthme qui devinrent si g r a v e s , q u u n e Ki) Allusion l'omission d'un point, dont on a.profit pour faire des arguties el dtourner ie sens d'une phrase. vi. 42
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fois on appela un prtre pour m e donner les derniers sacrements. Bien que ce recours au prtre n'ait t j u g ncessaire qu'une fois, c e p e n d a n t ces paroles, ils devino ml si graves, s'appliquant tous les m a u x e n durs par la malade, indiquent q u e tout ce qu'elle souffrit alors aval en effet une gravit extraordinaire- L e m decin l u i - m m e est de cet avis q u a n d il dit : la pleursie et la p n e u m o n i e amenrent des crachats sanguinolents qui devinrent ensuite purulents: or des crachats puru lents ne sont certainement pas l'effet d'une lgre in- . flammation. Et cela dura j u s q u e dans les derniers temps, c o m m e l'a formellement alfrm le chirurgien, qui, aprs avoir dit en parlant de toutes les maladies a c c e s s o i r e s : a l'irritation utrine persistait et prsentait un trs-mau vais caractre l'poque de la gurison , ajoute aussice t t : je puis assurer que les autres maladies eurent cette m m e dure, except l'hmiplgie, dont j e n e me rappelle pas bien la dure.
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188. Qu'allons-nous donc penser de ces paroles de notre honorable adversaire : . Je n'ai pu trouver dans le s o m maire rien qui prouve que des douleurs de poitrine, diffi- * ciles apaiser, aient dur jusqu'au m o m e n t de la gurison chez notre religieuse? Que penserons-nous encore de cette autre observation relative la gravit des diverses maladies, lesquelles, dit-il, ne sont pas aussi tenaces chez les hyst riques q u e chez les autre sujets, et peuvent disparatre avec rapidil et facilit? Notre adversaire rcgarde-t-il ces maux c o m m e de simples formes morbides de l'hys trie? Dans ce cas il reviendrait la prdominance de l'hystrie qu'il avait tout 1 heure abandonne. P e n s e - t - i l que l'hysteric puisse produire de vritables inflammations? Qu'il n o u s apprenne alors c o m m e n t l'excitation dyna m i q u e des nerfs peut causer l'inflammation et la suppu ration des p o u m o n s . Que s'il prtend q u e l'existence de l'hystrie, en tant que maladie secondaire, prserve les p o u m o n s d'une trop grave atteinte de l'inflammation, il devra d'abord dmontrer la valeur de sa thorie, et ensuite combattre les faits opposes. Mais quand m m e sa thorie serait certaine, et l'inflammation vraiment lgre, dans notre cas, il devra toujours nous dire c o m m e n t uue inflam mation relle (et non pas apparente ou rsultant de l'hys trie), c o m m e n t une vritable maladie des p o u m o n s peut tout c o u p disparatre. Qu il cherche donc des arguments valables ; pour n o u s , nous nous flicitons de lui avoir mis bous les y e u x t i o ^ tmoignages qui tablissent la gravit de
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l'inflammation, dans les derniers temps, t m o i g n a g e qu'il n'avait pas su trouver dans le sommaire. 189. Celui qui nous lira comprendra facilement que si nous discutons ainsi le langage de notre adversaire, c'est afin de ne laisser aucune partie de sa rponse, sans une rfutation spciale, et de lui ter tout point d'appui sur lequel il puisse baser ses hypothses. Mais quoique nous dfendions la vrit des graves, longues et nombreuses ma ladies accessoires, dont la disparition subite rend plus cla tante l'action du miracle, n o u s n'en avons nullement besoin pour affirmer le miracle lui-mme. Que l'inflammation de la poitrine ait t plus ou m o i n s grave, que celle de l'utr.us se soit, si l'on veut, rsolue en flueurs blanches, t o u t cela ne fait rien l'existence de l'obstruction et de la duret de pierre de la rate, dont l'incurabilit est le sujet du miracle. C'est pourquoi tant que l'obstruction pierreuse restera prouve la lgret des autres maladies, s o u t e n u e par notre adversaire, peut tre, sans difficult aucune, laisse de ct. 190. Il attaque cependant l'existence de la maladie prin cipale, quand il dit : Reste l'affection morbide de la rate, dont j'ai dit plus haut ce que je pense, c'est--dire, que ce l'obstruction et la duret de ce viscre ne sont pas suffi samnicul prouves. Et il appuie son affirmation du rsum de ce qu'il a crit prcdemment. Il rappelle l'ignorance des mdecins, leur n g l i g e n c e noter les dtails, le m a u vais temprament, les habitudes hystriques, qui, outre les nombreuses .maladies qu'elles produisent, occasionnent le gonflement de l'utrus et des bypocondres. 19J .Nous avons d i t , n o u s a u s s i c e que nous pensons, et nous croyons avoir suffisamment indiqu les causes, l'existence, la marche "de l'obstruction de la rate; montr l'habilet et le zle des mdecins, numr les symptmes et les effets de la maladie, et rfut, p r i o r i c o m m e p o s t e r i o r i , l'hy pothse de l'hystrie. Mais, c o m m e nous pensons, l'xperlct nous d'une manire tellement ditlrente et mme tellement oppose au sujet de la nature de la maladie principale, ce sera aux trs-minents Consulteurs dcider dans leur sagesse, ce qu'il faut penser en realit. Que s'ils admettent l'obstruction, n o u s croyons qu'il ne leur sera plus possible d'avoir aucun doute sur l'instantanit jusqu'alors c o n teste de la gurison. 192. 11 y a encore contre la perfection de la gurison une observation laquelle il faut rpondre. On dit, d'aprs le tmoin dix-septime, que la malade fui sujette, avant et
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aprs sa gurison, des gnes, des points de ct, et d'autres maladies de poitrine qui obligrent h lui donner quelque fois la c o m m u n i o n en vialique. Et parce qu'ils ont plac le sujet du m i r a c l e n o n dans ces infirmits, mais dans u n e t o u t autre maladie, ils ajoutent : Si vous voulez sparer ces maladies de l'obstruction de la rate, alors vous vous mettez en contradiction avec v o u s - m m e . En effet, si ces mala dies tenaient l'obstruclion avant la g u r i s o n , - p o u r q u o i n'y tenaient-elles plus a p r s ? 1U3. Notre opinion est que les auteurs d'une objection faite dans le seul but de ne rien omettre de ce qui pour rait n o u s tre contraire ont e u x - m m e s rpondu avec sagesse cette question. Il est vident, en effet, que cet. argument n'aura de Force que quand on pourra prouver que Tobstruclion de la rate est la cause u n i q u e et n c e s s a i r e des inflammations de poitrine; car sans cette dmonstration, l'argument tombe de l u i - m m e . Or, p e r s o n n e n'ignore qu'il se rencontre partout des causes directes., trs-puissantes e t tout fait vulgaires de ces inflammations, telles que la fatigue, une l o n g u e route faite au soleil, quand on n'en a pas l'habitude, une ruption rentre, le passage brusque du chaud au froid, etc. Quand ces causes se prsentent et pro duisent une inflammation, il voudrait plaisanter celui qui les nierait, sous prtexte qu'il n'y a pas d'obstruction la rate. Or, ces inflammations chez notre religieuse, et pendant sa maladie, taient l'effet du reflux dsordonn du sang vers les p o u m o n s , l a circulation tant e m p c h e par l'obstruction de la rate. Mais cet e m p c h e m e n t tant lev, l'obstruction gurie, il ne s'en suit pas n u l l e m e n t q u e la religieuse ne sera plus expose des inflammations produites par d'autres causes, par exemple, par un brusque refroidissement. Or c'est surtout cette cause que la malade les attribue, quand elle dit dans sa dposition : Je pense que m e s dernires maladies de poitrine sont venues du peu de soin q u e j'ai toujours e u de ma sant, et spcialement de ce que je res tais'expose l'air en tout temps, par suite de m o n emploi de portire, me trouvant l'entre de la porte ouverte pour donner passage aux voitures. 194. E n outre, parce que les inflammations de poitrine ne s o n t pas des maladies rcurrentes, ou revenant par accs, c o m m e les livres priodiques, l'pilepsie, etc., il s'en suit que l'inflammation une fois disparue, soit naturellement,soit m i r a c u l e u s e m e n t (pourvu que la sant soit redevenue par faite, et persiste assez longtemps), doit tre regarde c o m m e
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ayant entirement disparu, bien que de nouvelles causes la fassent ensuite reparatre. Si cette proposition est vraie quand il s'agit de maladies de m m e nature, plus forte raison l'est-elie, quand il est question de maladies de nature toute dinrcnle.et qui videmment ne sont par une rcidive: car on appelle rcidive ou rechute une maladie rsultant des restes d'une maladie antrieure, c o m m e Hippocrate le dit : Ce qui reste d'une maladie aprs un temps d'arrt amne ordinairement une rechute (1). Mais, qui-appellera une maladie de poitrine rechute d'obstruction de la rate? Supposez, si vous le voulez, mais contrairement tous les tmoignages insrs au procs-verbal, et contre toute vi dence, que l'obstruction de la rate n'a pas t parfaitement gurie; supposez qu'il soit rest quelque cho^e qui ait chapp aux regards, aux recherches des mdecins, la malade e l l e - m m e , sans toutefois empcher le parfait exercice de toutes les fonctions ; en un mot, supposez des restes d'obstruction t o u t fait latents ; dans cette hypothse mme, vous ne pourrez pas dire que l'inflammation de la poitrine soit "une rechute de la prcdente maladie, (mme en ne considrant pas les diverses affections c o m m e de nature diffrente,) parce qu'on ne peut pas les faire dcouler d'un vice cach et trop peu considrable. En effet, pour que l'obstruction de la rate empche tout fait la circulation, et, par suite repousse avec violence le sang vers les poumons et les enflamme, il faut qu'elle soit complte et trs-grave; autrement elle gnerait, mais n'intercepterait pas entire ment la circulation; et par consquent on n'aurait pas ce reflux violent du sang au p o u m o n s , qui produit Tinflammalion. Tournez-vous du ct que vous voudrez, faites toutes les suppositions imaginables, jamais vous ne pourrez faire considrer c o m m e rechutes les inflammations qui ont suivi la guridon; et jamais vous ne pourrez en faire ressortir cette conclusion, que la gurison a t imparfaite. Aussi n o u s ne voyons pas pourquoi dans les observations critiques on veut que nous soyons en contradiction avec nous-mmes, parce gue nous affirmons que pendant la maladie l'inflammation pulmonaire tenait l'obstruction de la rate qui arrtait la circulation du sang, et qu'une fois l'obstruction disparue, elle n'eut plus rien de c o m m u n avec elle. 95. Il y a plus. Ces maladies inflammatoires, que cite le tmoin dix septime, mais qu'il ne distingue pas bien, no se produisirent que longtemps aprs la gurison, et toujours
(i)Ben. XIV, liv. 4, 1 part. ch. vin, n 31.
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sans gravit, except une, laquelle, peu avant la procdure mt la malade en danger. Or, on sait qu'entre la gurison et le S o m m a i r e il s'coula p e u prs (rente ans (1). Voici c o m m e n t le mdecin parle de ces accidents : a La malade e s t r e s t e dans cet tat de parfaite sant jusqu'aujourd'hui. Ce n'est pas que, dans ce long intervalle, elle n'ait pas souffert de quelque lger r h u m e , de quelques petites livres d u e s la constipation, m a i s ces i n c o m m o d i t s ne p o u if vaient provenir de la maladie principale, gurie depuis l o n g t e m p s , elles furent l'effet d ' a u t r e s c a u s e s n o u v e l l e s , et c h a q u e a c c i d e n t avait la s i e n n e . E c o u t o n s le c h i r u r g i e n : (f Elle tait depuis longtemps (f sujette des maladies c o m m u n e s qui la contraignirent de recourir aux secours de l'art et aux refsources de ' la m d e c i n e , c o m m e qui dirait la constipation, des < < rhumes peu longs. Une seule fois je m e le rappelle un c de ces accidents inflammatoires, o u rhumes de poitrine, a resta quelque temps rebelle l'art, et menaa m m e la vie de la malade ; il y a quelques annes de cela, mais je ne m e rappelle pas l'poque prcise ; de p l u s , pendant que celte maladie c o m m u n e donnait de l'inquitude, je ne vis reparatre aucune altration des organes qui, auparavant, t a i e n t le sige de la m a l a d i e principale. L a i s s o n s p a r l e r la r e l i g i e u s e : J'ai souffert d ' a u t r e s maladies de poitrine, d'une surtout, grave et mortelle, mais seulement dans ces dernires annes ; et bien que j'aye t en danger de mort, cependant j e n'ai plus souffert de mes a n c i e n n e s douleurs de la rate et de l'utrus. lt)6. Mettez de ct, si vous le voulez, la diffrence qui existe entre la nature des inflammations et celle des obstruc tions ; supposez mme que la maladie principale, qui fut gurie miraculeusement, n'tait qu'une inflammation de poitrine-; direz-vous que la premire n'a pas t parfaite mont gurie, parce que vingt ou vingt-cinq ans aprs, il en s u r v i n t u n e n o u v e l l e , qui m e n a a d'tre m o r t e l l e ? C r o i r e z v o u s que n o t r e religieuse u n e fois g u r i e m i r a c u l e u s e m e n t de son inflammation, n'a jamais pu tre reprise de rhumes oucle catarrhes m m e lgers, et provenant d'une autre cause? Il y a tant d'arguments qui prouvent la fausset de l'hypo thse d'une rechute qu'il faut considrer la gurison c o m m e a b s o l u m e n t parfaite et constante.
(1) La gurison est arrive en avril 1818, et les dpositions n'ont eu lieu qu'en septembre et octobre 1847. (Prou. f 187, 203, 227.)
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197. Mais puisque n o u s en s o m m e s sur la rechute, re poussons une autre hypothse de notre honorable a d v e r saire, qu'il fonde sur ce que quelques annes aprs sa g u rison, la malade ressentit tout coup ses douleurs de rate, alors que, saisie de la crainte religieuse de faire un faux serment, elle se demandait, pleine d'hsitation et d'in quitude, si elle devait dposer en faveur du miracle. Il dit : Cette maladie qui reparat peu de temps aprs la a gurison, au milieu du trouble et de l'inquitude q u e cause la ncessit de prter serment, appartient aux nvroses. Puis donc qu'il exista ' de violentes douleurs . la rate, qui n'ont pas eu pour cause l'obstruction rnat rielle, de quel droit veut-on que celles qui prcdrent et qui furent m o i n s graves aient eu pour cause cette obstruction? 498. Il est vident que toute cette argumentation repose sur la priorit qu'on donne l'hystrisme et sur la ngation de la ralit de l'obstruction. r nous avons repouss la premire, et dmontr la seconde, l'argument est donc* sans valeur. Toutefois, c o m m e le mot reparat et que t o u t ' le contexte pourrait faire admettre ceux qui n'y regardent pas de prs, l'identit de l'affection et la ralit d'une re chute, il ne sera pas hors de propos de n o u s arrter un peu rfuter cette hypothse. Celui qui croira cette rfutation superflue pourra laisser de ct les derniers paragraphes de celte seclion. 199. Notre religieuse a racont ainsi le fait : Quelques annes aprs ma gurison m i r a c u l e u s e , Mgr l ' vque Begni, d'heureuse mmoire, m'obligea lui r e mettre une attestation du miracle qui s'tait opr. Pensant que j e devais dposer sous la foi du serment, je me laissai aussitt aller une grande consternation, douu tant de m o i - m m e , et ne me croyant pas capable d'ex pliquer avec assez de prcision tout c e qui se rapporte au *t miracle. C'est pourquoi je n'tais pas du tout tranquille ; en songeant la gravit du serment ; m o n imagination me reprsentait des choses dont ma conscience pouvait se trouver embarrasse . Dans cette situation d'esprit, tandis que j e m e rendais au c h u r pour y rciter l'office, c je me sentis prise de douleurs intermittentes la rate, plus fortes que j a m a i s je ne les avais prouves dans le cours de ma maladie. Alors, toute courbe et saisie par la peur, je me retirai dans ma chambre, seule, ayant refus d e m e laisser accompagner, et je me jetai aux pieds de m o n l i t gmissant, m e r e c o m m a n d a n t avec une vive foi au v-
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nrable servi Leur de Dieu, B e n o t - J o s e p h Labre. Je lui demandai pardon de mon hsitation, et je lui promis que j e prterais n o n pas un, mais mille serments pour attester ce que je savais du miracle qu'il m'avait obtenu. Cette prire peine finie, i m m d i a t e m e n t m e s douleurs se passrent, ainsi q u e tons mes doutes et toutes mes craintes; j e remerciai Dieu, el depuis j e n'ai pas eu d'autre souffrance. 200. Disculous ce fait, selon les rgles tablies par B e
n o t X I V p o u r j u g e r d e l a r e c h u t e . L e s m d e c i n s , dit-il, r e c o n n a i s s e n t la r e c h u t e fi q u a t r e m a r q u e s p r i n c i p a l e s : a u
m o d e de terminaison de la premire maladie, l'tat du malade entre la p i e m i r e et la seconde maladie, au Lemps qui s'est coul entre les deux, enfin l'espce des maladies e l l e - m m e s , c o m m e l'enseigne Zacchias. Du mode de termi naison de la premire maladie, on c o n c l u t que la seconde est u n e rechute, quand la premire s'est termine sans crise et sans v a c u a t i o n ; de Ttat du malade entre la premire et la seconde, quand il est rest la peau une chaleur qui n'est pas naturelle, ou quand le malade prouve des n a u ses et des vomissements ; du t e m p s c o u l entre les deux maladies, quand ce temps e s t court ; de l'espce enfin
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une nouvelle cause de nouvelle maladie (1). 201. Nous n'avons pas besoin de n o u s arrter la pre mire de ces conditions, ou l'absence de crise, qui peut se rencontrer dans les gurisons miraculeuses c o m m e dans les gurisons naturelles subites, car, dans notre cas, il s'agit de l'obstruction invtre et fort dure d'un viscre, et dont la gurison n e pouvait pas se produire subitement par les seules forces de la nature. Quand la s e c o n d e condition ou l'tat de la malade entre l u n e et l'autre affection, le chi rurgien affirme : qu'il ne resta aprs la gurison aucune trace de maladie dans les organes qui avaient t attaqus, que s u r Marini resta dans c e t tat de b o n n e s a n t recou v r e et q u ' e l l e y r e s t e e n c o r e a c t u e l l e m e n t . L e m -
decin dit qu'il n e resta rien de la maladie d'obstruction, dont elle souffrit la rate, ni de l'embarras de l'utrus, ni des autres m a u x accessoires, et q u e cet tat de parfaite sant a dur jusqu'aujourd'hui. La religieuse gurie, qui le sait de sa propre science et de l'exprience, dit q u e , depuis le m o m e n t de sa gurison jusqu'aujourd'hui elle (i) Liv. 4, part. 1, chap. vin, n 31.
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s'est toujours bien porte, qu'elle ne ressentit plus le moindre reste de son mal, si terrible et si douloureux, qu'elle avait cru qu'il l'aurait conduite au t o m b e a u . Toutes les fonctions naturelles ont t rtablies sur-lechamp et parfaitement, c o m m e le dmontre l'empressement qu'elle mit observer les lois du jeune et de l'abstinence, sans prouver la moindre i n c o m m o d i t , et surtout le retour des menstrues qui dsormais revinrent rgulirement. La s e conde condition exclut donc la rechute; il en est de m m e la troisime. Ce n'est pas, en effet, un peu de temps qui s'est coule entre la premire et la seconde maladie, mais quel ques annes, ce que notre adversaire lui-mme ne peut pas appeler un court intervalle. Quant la quatrime condition, savoir que la maladie ft de m m e espce et produite par la m m e cause, elle est mise de ct par les faits e u x - m m e s et par notre adversaire. En cifet,unc cause consistant dans le trouble de l'esprit est toute diffrente de l'air humide, et des violenls exercices corporels qui avaient produit l'obstruc tion, tandis que la premire cause est incapable de la p r o duire. L'espce, suivant notre adversaire, fut une nvrose, c'est--dire, des douleurs sans substrtm. Or la maladie consistait dans l'altration matrielle d'un viscre, dont les douleurs constituaient un s y m p t m e , mais n o n pas le principal. Donc, c o m m e , non seulement, il n'y a aucun rapport, mais opposition formelle entre les conditions de la rechute et les faits, il faut de toute ncessit rejeter cette hypothse. 202. Mais on pourrait insister et dire : il est vrai qu'on ne peut soutenir l'identit de maladie, dans l'hypothse qu'on vient de rfuter, mais -qui peut nous assurer q u e les douleurs qui sont tout coup revenues taient sans fondement, car la malade, dans sa frayeur, n'a pu se rendre c o m p t e si la rate tait de nouveau obstrue ou non ? A cette h y p o t h s e que nous ne pouvons ni admettre, ni rfuter, dfaut de preuves, nous rpondrons : 11 y aurait bien dans ce cas une vraie rechute, mais qui n e serait pas naturelle, qui n e proviendrait pas de la premire maladie, et qui n e servirait qu' rendre le miracle plus clatant. En effet, c o m m e l'obstruction tait depuis longtemps parfaitement gurie, et c o m m e la nouvelle maladie, qui aurait d tre trs-lente par elle-mme, s'est trouve tout coup porte a u suprme degr, prsentant des symptmes plus graves que ceux qu'elle offrait, quand l'obstruction tait invtre et la rate devenue dure c o m m e la pierre, il est vident que cela n'a pu se faire que par miracle. Et une obstruction de
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cette sorte n'aurait pu disparatre tout c o u p sans p r o d i g e . La cause du prodige est d'ailleurs c o n n u e . Dieu qui fait tout pour sa gloire, avait guri une religieuse par les prires de son serviteue Benot-Joseph, afin que la gloire de son servi teur s'augmentAt de cette gloire accidentelle.Mais cette gloire ne pouvait s'obtenir que par la c o n n a i s s a n c e et la preuve du miracle, et c'est surtout la religieuse gurie qui devait les donner par sa dposition. Mais elle, bien q u e ne doutant pas du miracle, vainement eirrave de la saintet du serment, hsitait et semblait dcide a ne pas faire de dposition. Dieu aussitt brisa cet obstacle, par le retour miraculeux de la premire maladie; la religieuse terri lie fut force de recon natre son erreur et sa f a u t e ; et pour obtenir s o n pardon elle promit de dire franchement et simplement tout ce qui lui tait arriv. Cette promesse faite, non-seulement Dieu fit aussitt disparatre les s y m p t m e s qui s'taient reproduits, mais c o m m e dans toutes les oprations divines, il fit goter la religieuse une tranquillit, une paix de l'me, qui lit vanouir tous ses doutes et toutes ses h s i tations. 203. Ce que dit Matteucci vient bien . notre sujet : Si un aveugle avait recouvr la vue par l'intercession d'un ser viteur de Dieu, et que, dans la suite, oubliant la faveur reue, il ft de nouveau frapp par Dieu de ccit, bien loin que cette nouvelle perte de la vue pt prjudicier au premier miracle, il faudrait dire qu'elle a t produite par un n o u veau miracle, en punition du pch (1). Et Benoit XIV parlant d'une manire plus gnrale, crit : T o u t e difficult cessera, si l'on peut constater, que la maladie est reve n u e , pour la plus grande gloire de Dieu, (2). Il s'tait form c e t t e doctrine par des exemples, et e n particulier par le fait de la gurison miraculeuse du fils de l'empereur Valence. Cet enfant avait t guri la prire de saint Basile, mais quand le Saint fut parti, ou le livra de n o u v e a u aux hrtiques, il retomba malade et m o u r u t . On ne pourrait, dit Benot XIV, nier le miracle de la gurison de cet enfant, sous prtexte qu'il est retomb dans la m m e maladie, puisque les circonstances font clairement voir que Dieu a permis la gurison ainsi que la rechute, en t m o i g n a g e de vrit de la foi catholique (3). 204. Si donc on embrasse l'hypothse de la rechute, ce (1) Prat. thol. du droit can. tit. 3, chap. i, n 42. (2) Liv. 4, l" pari. chap. vin, n 33. (3) lbid, n 30.
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prodige confirmera le miracle de la premire gurison. Si 1 on pense avec notre adversaire que les douleurs se sont re produites sans leur cause, ou aura une maladie toute diff rente de la premire, et laquelle on ne pourra pas donner le n o m de rechute. Mais l'hypothse de la rechute t a n t mise de ct, la gurison tant dmontre parfaite et instantane, il semble qu'il ne reste plus rien qui puisse le moins du m o n d e obscurcir l'vidence du miracle.
SECTION III.
DE L'INVOCATION.
205. L'apparition d'une religieuse inconnue, qui montra une i m a g e du vnrable Benot-Joseph, dont il n'existait par u n e seule dans le monastre, et qui en m m e temps inspira la malade de la confiance dans le secours qu'il pourrait lui prter, donne lieu notre adversaire de pr tendre que dans le miracle i l y a dfaut d'invocation. Comme en effet il attribue t o u t au j e u de l'imagination et au som meil (opinion qu'encouragent, qu'expliquent la faiblesse corporelle, les longues insomnies, l'hystrie et toute la ma nire d'tre de la malade), et c o m m e la nature du sommeil est d'empcher tout acte libre et religieux, tel, par exemple, que l'invocation, il conclut de l qu'il manque au miracle son moyen, c'est--dire qu'on ne sait qui on doit l'attribuer. Bien que notre honorable adversaire reconnaisse que c e l t e partie de la cause soit tout fait trangre la m d e c i n e , parce que, cependant, il comprend que des observations fictives seraient bien utiles l'hypothse de l'hystrie qu'il a soutenue, il saisit avidement l'occasion qui se prsente, et cite des autorits mdicales, pour dmontrer que les personnes infirmes, prives de sommeil et hystriquessont sujettes ces j e u x de l'imagination. 206. Avant de rpondre, nous demanderons Leurs E m i nences de vouloir bien n o u s accorder ces deux p o i n t s : q u e pour rejeter les dpositions de tmoins attestant un fait, ce n'est pas assez d'affirmer gratuitement ou de s o u p o n n e r que ces tmoins ont pu se tromper ou rver, mais qu'it faut de toute ncessit s'assurer si le soupon .repose sur un s o l i d e fondement, si les circonstances permettent d'affirmer p r u demment l'erreur ou le rve. Si cela n'est pas d'abord parfai-
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t e m e n t tabli, c o m m e il n'y a pas de limites possibles aux soupons et aux hypothses, il n'y aura plus alors de fait si certain qu'il ne puisse tre rvoqu en doute. 207. P o r t o n s donc notre attention sur les circonstances du miracle. 11 est cerlain et reconnu par notre adversaire l u i - m m e que la malade, jusqu'au jour o elle invoqua le bienheureux, fut, habituellement prive de s o m m e i l . Si un jour, elle s'endormit tout h c o u p , c'est qu'il dut s'oprer en elle un c h a n g e m e n t subit, qui amena enfin le sommeil, si longtemps dsir. Or les faits tablis dmontrent que ni la gravit de la maladie, ni la douleur, ni les crises ner veuses n'ont aucunement diminu jusqu'au jour de la gu rison ; bien plus la malade dit du m o m e n t m m e de l'appa rition : Je me trouvai plus accable et plus souffrante que de c o u t u m e . Donc si les douleurs taient plus violentes, si les crises nerveuses ne s'taient pas calmes, si la maladie se faisait plus cruellement sentir que de c o u t u m e , c'est qu'il n'tait survenu aucun changement, qui put transformer une i n s o m n i e continuelle en profond s o m m e i l . Et quel h o m m e raisonnable souponnerait qu'une malade ainsi tor ture va tout coup s'endormir? 208. Notre religieuse confirme cette remarque par sa dposition, puisque non-seulement elle nie catgoriquement qu'elle fut endormie, quand la s u r i n c o n n u e lui a p p a r u t ; mais elle dislingue parfaitement l'tat, dans lequel elle se trouvait, du s o m m e i l qui le s u i v i t ; et elle cite des faits qu'on ne peut remarquer que dans l'tat de veille. Je ne dormais certainement pas, d i t - e l l e quand entra dans ma chambre la sur converse. Elle fait remarquer qu'elle n e s'endormit pas aussitt aprs l'apparition et l'invocation , qui eut lieu vers les v i n g t - d e u x heures ; elle parle de l'intervalle qui s'coula entre la prsenta tion de l'image et le m o m e n t o elle s'endormit, ; elle affirme qu'elle s'endormit i m m d i a t e m e n t dans la n u i t ; et q u e , dans les instants qui prcdrent, se sentant m o i n s souffrante elle refusa les soins de l'infirmire; Je me souviens que ia sur Charlotte Crucifix insistait pour rester auprs de moi pendant la nuit, afin de me donner les soins a c c o u t u m s , j e lui dis qu'il n e le fallait pas, et j e l'obligeai en quelque sorte aller se reposer. Notre religieuse affirme donc q u e n o n - s e u l e m e n t elle ne d o r m a i t pas, quand la sur i n c o n n u e lui apparut, mais distinguant, c o m m e e l l e le fait, son tat de veille du s o m m e i l qui suivit, et faisant le rcit de ce qui lui est arriv
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pendant cet intervalle, elle montre clairement qu'elle n'tait pas du tout endormie. 209. Notre adversaire ajoute : La malade a dit de l'instant o la maladie l'avait quitte qu'elle ne peut l'assigner, parce qu'elle tait c o m m e hors d'elle-mme, d'o .il conclut qu'elle avail perdu l'esprit. Mais celui qui lira la dposition de la religieuse non pas dans l'extrait et l'ahrg t'ait pour le sommaire, mais dans le texte des procs verbaux , comprendra facilement que la dposante, par ces paroles, je restai c o m m e hors de moi, n'a pas voulu indiquer autre chose que les trs-vifs sentiirients de pit excits en elle. Aprs avoir rapport la prire qu'elle tit en ce m o m e n t , elle ajoute : Je me signai avec cette image au front et la partie malade, je la baisai et la rebaUai, et je me sentis excite par un m o u v e m e n t intrieur des actes d'affections que je ne saurais exprimer (mais que dans la suite elle rend par ces mots : je restai c o m m e hors de moi). Je voulais retenir u l'image et la garder pour moi, mais je ne le pus ma honfe, malgr des instances trois fois renouveles, je la rendis donc avec un souverain dplaisir la religieuse i n c o n n u e , qui aussitt partit en refermant la porte, La a maladie disparut tout fait dans un instant que je ne puis indiquer, parce que je restai c o m m e hors do moi. Cette alination ne fut donc qu'une espce de transport caus par les vifs sentiments de pit et de confiance qu'elle cont tout c o u p , et il n'eut Heu qu'aprs l'apparition de -la religieuse inconnue qu'elle avait accueillie avec une parfaite prsence d'esprit, mais avec dplaisir, pensant qu'elle venait l'ennuyer par ses importunes questions, sur le triste tat o elle &e trouvait (1). 210. A moins donc qu'on ne veuille tout attribuer un songe, on regardera certainement cette absence, c o m m e se rapportant bien plutt aux extases causes par les ardeurs de la charit divine qu' u n e vritable alination i n c o m patible avec l'acte d'invocation. On ue peut soutenir l'tat de s o m m e i l , parce qu'il ne s'lait produit dans la maladie aucun changement qui pt amener ce sommeil, p a r c e que la violence de la maladie et des douleurs devaient nces sairement l'loigner, parce que la malade consciente de ses actes affirme qu'elle tait veille, qu'elle discerne l'tat, dans lequel elle se trouvait alors, du s o m m e i l qui suivit, parce qu'enfin elle r a c o m e les faits qui se sont produits dans l'intervalle. 211. On dit e n c o r e : -Si Ton n'admet pas le s o m m e i l , il faudra attribuer la c h o s e au fait d'une vision, qui a d
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se produire e n dehors des lois de la nature. Or ce qui est en dehors de ces lois ne peut tre admis que sur de < b o n n e s preuves, lesquelles certainement ne c o n s i s t e n t pas c d a n s le t m o i g n a g e d'une seule personne . Mais, r pondrons-nous, si vous tablissez cette rgle,il faudra i m m diatement rejeter toutes les visions et les apparitions dont les saints o n t t favoriss. Et ne dites pas qu'il ne s'agit pas de saints, mais d'une religieuse, car les saints, qui pen dant leur vie eurent des visions clestes, n'taient pas re c o n n u s c o m m e tels par l'Eglise. De plus, souvent aprs leur mort il y en eut qui apparurent leurs amis et leurs clients qui, n'taient pas des saints, pour leur faire c o n natre le bonheur ternel dont ils jouissaient ; et cette m a nifestation de leur gloire a t affirme dans les procsverbaux par ceux qui ils l'avaient fait connatre. Faudra-t-il donc rejeter ces apparitions, parce que malgr la r g l e que vous avez nonce, les visions ne peuvent s'appuyer que sur le t m o i g n a g e d'un seul, et qu'il n'y a que celui qui en a t favoris qui puisse les certifier? 212; Ajoutez qu'ici il ne s'agit pas de l'approbation des a p p a r i t i o n s ; car lorsqu'une fois les principales c i r c o n stances du miracle sont bien dmontres, et qu'il est re connu que le fait dpasse les forces de la nature, la Sacre Congrgation des Rites l'approuve, sans mentionner aucu n e m e n t l'apparition; de sorte qu'il s'est introduit u n e espce de c o u t u m e , laquelle on ne droge gure, de ne rien dire des apparitions ( i j . 11 s'agit seulement qu'on ne puisse pas rejeter une apparition, c o m m e si c'tait un s o n g e , afin que l e s principales circonstances du miracle tant bien prouves on p u i s s e dcider par l'intercession de qui le miracle a t o b t e n u . Chacun voit clone que, pour avoir le droit de rejeter" parmi les songes une apparition, il ne suffit pas qu'on n'ait qu'un t m o i n , ce qui est invitable en cette matire, mais qu'il faut examiner si l'apparition est bien en rapport avec le m i r a c l e dont il s'agit, s'il n'y a r i e n en elle de contraire au respect de la majest divme, et la bont de Dieu, si elle n'est pas'ridicule, mutile, etc. Si elle n'a aucun de ces d fauts, si elle peut servir l'accroissement de la pit et de la religion, si elle peut tre utile aux h o m m e s et procu rer la gloire de Dieu, si surtout elle n'est pas en opposi tion avec les faits; analogues qui se rencontrent dans la vie des saints, ce n'est pas sans tmrit qu'on la mettrait au
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rang des songes, sous prtexte qu'elle n'est appuye q u e sur le l m o i g n a g e d'un seul. 13. Or dans le cas en question, il s'agissait de ranimer la confiance peu prs perdue rie la malade, de rtablir sa sant dsespre, de procurer par le prodige la gloire de Dieu et de son serviteur Benot-Joseph ; enfin l'apparition en ellem m e reproduisait un fait tout fait ordinaire dans la vie des saints. Souvent en effet, dans le rcit de leurs miracles, on lit que, m m e sans avoir t invoqus, ils ont apparu tel ou tel, qu'ils ont ranim sa confiance et ordonn de recourir soit e u x - m m e s , soit d'aulrcs bienheureux, si l'on voulait obtenir les grces dont on avait besoin. Dans la seule vie de saint Franois Xavier, o n rapporte tant de faits de ce genre, que son biographe a pu crire avec beaucoup de raison : Il parat que le saint avait un got paiticulier accorder ses faveurs, que trs souvent il venait les apporter de sa propre main, se laissant voir revtu d'une trs grande beaut, et m m e , qu' plusieurs qui ne l'invoquaient pas il tait le premier offrir son secours, allant jusqu' se lamenter si l'on n'acceptait pas (1). Si donc, dans le cas qui nous occupe, l'appa rition ne fut pas diffrente de ce qu'elle fut pour tant d'autres, si elle fut utile notre religieuse pour le corps et pour l'me, si elle fut digne de la bont et de la majest divines, si elle avait un but surnaturel et devait procurer la gloire de Dieu et de son serviteur, si elle est appuye de la preuve possible en pareil cas, si elle est confirme par les faits relatifs la premire maladie prcdente, qui tait mor telle et la gurison instantane qui a suivi, nous ne voyons n u l l e m e n t pourquoi on la rejetterait parmi les songes, que tout n o u s force repousser. 2 1 1 . Admettons cependant, c o m m e n o u s l'avons dj fait, pour un instant, l'hypothse de notre adversaire dans ses obbcrvalions. Tout le m o n d e certainement reconnat que l'invocation n'appartient pas la substance du miracle, puisque plusieurs miracles se sont oprs cL s'oprent sans aucune invocation. On la requiert seulement dans les causes de canonisation, afin qu'on sache mieux si le miracle doit tre attribu celui dont la cause a t introduite. C'est tellement vrai, que le trs docte cardinal de Lauraea, autrefois consulteur de cetle Sacre Congrgation, Irailapt des conditions requises o le miracle, place le m o y e n du miracle non pas clans 1 invocation, que dans la c e r ( 1 ) Massei, Jiv. 3, ch. xvz.
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t i t n d e d e l'intercession de quelque serviteur de Dieu. Voici ce qu'il d i t : Outre la preuve des deux termes e x t r m e s du miracle, il faut donner c e l l e du m o y e n , ou de l'interces s i o n , afin q u e le miracle puisse tre attribu h un saint d termin ( l ) . Benot XIV s ' e s t servi d e s m m e s t e r m e s : Quand il s'agit d e s miracles dans les procs de batification et de canonisation, il n e suffit p a s d e prouver l ' t a t antc dent et l'tal subsquent p a r les dpositions de tmoins a s s e r m e n t s , e t q u ' i l soit a i n s i c o n s t a t q u e le fait e x c d e les forces d e la n a t u r e ; m a i s il est n c e s s a i r e a u s s i d e p r o u v e r q u e le miracle a t opr p a r l'intercession du serviteur de Dieu dont la batification ou la canonisation est en cause (2). Matteucci qui n'est p a s m o i n s c o n n u , u t qui lui aussi fut autrefois consul leur de cette Sacre Congrgation, s'exprime encore plus c l a i r e m e n t : L e s textes s a c r s , d i t - i l , n o u s apprennent q u e Dieu a fait de nombreux miracles s a n s q u e personne l'en a i t pri et sollicit ; mais s'il en fait quelquesu n s sans qu'aucune invocation l u i ait t adresse, ils n e peuvent servir pour une cause de canonisation, m o i n s qu'il n e se prsente d e s circonstances telles qu'il faille e n conclure qu'ils ont t oprs en coufirmation de l a saintet d u serviteur de Dieu (3), 215. P a r c o n s q u e n t , le p o i n t i m p o r t a n t t a n t q u e l'on ait la preuve certaine d e l'intercession de celui dont la cause est introduite, si les autres c i r c o n s t a n c e s peuvent donner c e t t e preuve sans recourir l'invocation (4), il e s t vident q u e l'invocation n ' e s t requise dans c e s sortes de causes que c o m m e un simple indice, et que l e s obser vations sur l'impossibilit de faire pendant ie s o m m e i l un acte de religion, u n acte volontaire, un acte h u m a i n , tel q u e l'invocation, ces observations, disons-nous, sont e n dehors du sujet. En effet, dans le cas prsent, il ne s'agit p a s d e - l a valeur et de la nature de l'acte, qui du reste n'est pas ncessaire pour la production du miracle, mais s e u l e m e n t d e l'utilit de l'indice qui en rsulte c o m m e preuve de l'in tercession particulire d e q u e l q u e s a m t .
(i) Totn. IV, 20 dissert, sur les mir. art. 25, 3 . (2j Liv 111, cli. v, n 16. (3) Pral. tliol. Cun. tit. lit, ch. iv, n 14. (4) Concevez par ex. que Saint Franois Xavier non invoqu soit apparu plusieurs personnes runies dans la c h a m b r e d'un malade qu'aprs lui avoir inspir de la confiance et lui avoir impos les mains, il ait disparu,aprs lui avoir rendu une s a n t parfaite, uierezvous que ce miracle et t opr par te secours de saint Franois Xavier, parce qu'il a t opr sans Tin vocation de personne.
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2 1 6 . La question tant ainsi ramene dans ses justes li mites,examinons l'hypothse du sommeil.La malade se serait endormie ; pendant son sommeil, une religieuse i n c o n n u e lui serait apparue, pendant son sommeil elle lui aurait pr sent u n e image inconnue dans le monastre; pendant son s o m m e i l la malade aurait bais cette image, elle-l'aurait applique aux parties de soii corps o elle souffrait le plus, elle aurait fait des prires et les aurait rptes,elle aurait t remplie d'une confiance peu habituelle et tout fait extra ordinaire. Personne, ne peut raison des circonstances attri buer ce sommeil au d m o n , il y en a peut-tre qui le diront naturel. Mais la malade rduite une extrme faiblesse, t o u r m e n t e de cruelles douleurs, sujette de perptuelles attaques de nerfs et des convulsions, aurait d avoir un sommeil naturel, rpondant cet tat de souffrance, c'est-dire, un sommeil de malade agit, irrgulier, troubl par d'affreux fanLmes, la nature devant selon l'tat du corps agir sur l'imagination. Or contrairement aux lois habituelles et ncessaires de la nature, tout ce que nous voyons est calme paisible, tranquille. D'abord apparat la relig.euse i n c o n n u e dont l'arrive trouble la malade, tant elle tait fatigue des visites et des conversations. L'trangre cepen dant s'approche, calme le trouble qui s'est produit dans l'me, exhorte la patience et la prire, et peu peu ins pire la confiance. Alors elle s'enhardit, elle montre l'image de Benot-Joseph, dont la vue rappelle la malade le s o u venir du morceau de pain, que bien des annes auparavant elle avait donn au mendiant. Soutenue par la pense de son ancienne aumne, elle demande au serviteur de Dieu la sant, ou la mort, o u la p a t i e n c e ; elle baise plusieurs fois de suite l'image qu'on lui prsente et en t o u c h e les parties malades. La confiance cependant s'augmente, elle fait place des m o u v e m e n t s de pit, qui produisent une sorte de transport. Elle demande inutilement de pouvoir garder l'image, elle est force de la rendre malgr elle l'inconnue qui aussitt s'en va. Elle prouve un grand sonlagement, q u e l q u e s heures aprs elle s'endort, son rveil elle re connat qu'elle a vritablement recouvr une sant parfaite et elle le montre. 217. Quoi de plus tranquille, de plus calme, de plus p a i sible que ce sommeil ? Il n'y a certainement rien de moins en rapport avec l'tat de la malade, mais aussi rien ne se lie m i e u x , ne prpare m i e u x l'avnement surnaturel qui en est la suite. Or si dans l'tat o se trouvait la malade, ce s o m m e i l ne pouvait pas tre naturel, si tout y respire un vi. 43
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parfum de religion, de pil, de confiance ; si v i d e m m e n t il parat amen pour prparer le prodige qui le suit i m m diatement, personne ne niera que ce s o m m e i l envoy par Dieu lui-mme, ne soit c o m m e le s o n g e de Pharaon, auquel rpondirent les annes de strilit et 1rs annes d a b o n dance ; c o m m e le songe de la mre de saint Dominique, voyant un petit chien portant dan* sa g u e u l e un fl.imbeau a l l u m ; c o m m e le s o n g e de la mre de saint Camille de Lellis, croyant mettre au m o n d e un enfant marqu du signe de la croix et c o n d u i s a n t u n e troupe d'enfant* marqus du m m e signe, ce dont les vnements montrrent la ralisa tion. Si donc ce s o m m e i l doit tre regard c o m m e divin, qui n'y verrait l'indice de la volont divine qui avait rsolu de procurer la gloire de Benot Joseph par le miracle qui allait se produire, et qui tait d ses mrites, 218. Cette c o n c l u s i o n qui ressort des faits e u x - m m e s est confirme par les dtails que donne la miracul*. Elle dit elle-mme : A l'poque de ma gurison, et morue i m m diatement avant la gurison oe ma dernire maladie qui dura six m o i s , et depuis, j e n'ai eu recours aucun saint, < parce que je dsesprais de gurir et q u e je m'tais prr ce pare avec t o u t e la rsignation possible rendre m o n m e mon crateur . Si donc elle n'avait demand le secours d'aucun saint, si elle av.iit s e u l e m e n t implor fa protection de Benot-Joseph, soit dans le s o m m e i l , suit e n dehors, si ce secours a peine implor, le mira oie s'est produit, qui p e u t - o n l'attribuer, si ce n'est B e n o t - J o s e p h ? Ajoutez que c'est h lui seul que la malade a i m p u t la faveur qu'elle a reue,ajoutez enfin que lorsque la miracule, aprs sa gurison, saisie d une vaine crainte, repoussait l'ide de prter serment, et, qu'en punition elle se trouva t o u t coup prise de douleurs plus graves, elle n'eut pas recours d'autres qu' Benot-Joseph, c'est lui seul qu'elle demanda pardon, lui seul q u e l l e promit de tout raconter bien clairemeut pour sa gloire, lui seul qu'elle d e m a n d a la sant, qui lui fut rendue aussitt, ce qui cer tainement ne serait pas arriv, si un autre que Benot-Joseph lui e u t rendu auparavant la sant. 219. Donc p u i s q u e d'un ct le s o m m e i l n o u s donne par l u i - m m e une preuve vidente et l i s forte de l'intercession du seul Benot-Joseph, et que de l'autre les circonstances du miracle et la dposition de la religieuse s o n t en laveur de cet indice, la c h o s e doit tre regarde c o m m e tout fait certaine. Mais n o u s n avons taut discute sur le sommeil q u e pour combattre les remarques critiques et l'hypothse de
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notre adversaire. Au reste il est des faits tellement clairs, qui renversent toute supposition de s o m m e i l , e t qui dmontrent clairement l'tat de veille, qu'aucune personne srieuse n'a d admettre cetle h y p o t h s e . 220. Nous devrions n o u s arrter ici, si notre adversaire dans ses observations ne demandait qu'on retrancht du titre du miracle l'pithte de squirrheuse, ou dure c o m m e la p i e r r e , ajoute au m o t o b s t r u c t i o n . On voit, par l'emploi de la disjonctive que n o u s avons pris ces a d j e c tifs c o m m e s y n o n y m e s , ou ; si donc aprs les explications suffisantes et surabondantes q u e nous avons donnes du m o t squirrheuse, la critique veut supprimer l'un des deux adjeciifs, nous ne nous y opposerons pas, et nous ad mettrons sans difficult le titre ainsi abrg. Mais, la nature m m e de la question s'y oppose, et nous ne pouvons pas permeltre qu'on les supprime tous les deux la fois. Car l'obstruction pourrait tre lgre et rcente, o u mme quoique ancienne, elle pourrait n'tre pas fort dure,et ne pas a m e n e r la dsorganisation du viscre; ds lors chacun voit que bi l'on supprime ces adjectifs, non-seulement on fait dis paratre un m o t sans l e q u e l on ne peut ranger le prodige dans la seconde classe des miracles, c'est--dire, qui, de sa nature, surpasse les forces naturelles, mais on fait disparatre la matire m m e du miracle, qui demande toujours une ma tire grave, matire pour laquelle ne suffit pas la premire obstruction venue. 2 i l . Il nous reste enfin nous adresser l'Expert et le remercier, non moins pour ce qu'il a affirm q u e pour ce qu'il a ni de l'obstruction. Ses ngations ont pro duit c e t heureux rsultat, qu'un examen plus attentif a eu l i e u , et a fait rejeter toute ide de maladie autre que 1 ob struction. Ses affirmations n o u s ont valu une double rponse judiciaire parfaitement concordante dans l'affirmation dil miracle de la gurison. Lui-mme avait dit expressment que dans l'hypothse de l'existence de l'obstruction et de la duret de pierre, il fallait rpondre en laveur du miracle. Mais c o m m e il ne croyait pas que la nature de la maladie ft bien c o n n u e , il ne cessa d'argumenter contre dans sa dissertation. Cependant, c o m m e il avait peu de confiance dans la valeur de s o n opinion et de ses arguments, il ajouta pour l'acquit de sa c o n s c i e n c e : Si, sduit par l'apparence et mconnaissant la ralit, j'ai pris pour la vrit ce qui n'en est que l'image, j e souhaite d en tre puni et de voir c t o u s mes raisonnements confondus, en sorte que tout ce < qui pouvait obscurcir les uvres de Benot-Joseph tant (
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enfin repouss c o m m e contraire la vrit, ces uvres u brillent d'un clat tout cleste. C'est, croyons-nous, ce qui s'est produit; l'existence de l'obstruction a t d montre, malgr tous les arguments contraires ; et de toute la rponse de notre adversaire, il ne reste rien autre chose que cette proposition qu'il a mise en faveur du miracle quand il crivait : S'il tait tout fait h o r s de doute que notre religieuse ayant la rate dure c o m m e de la pierre a, v u ce viscre recouvrer son tat naturel, en trs p e u de temps, je pense qu'il n'y aurait personne regarder le m i te racle c o m m e incertain La gurison rapidement opre d'une obstruction de la raie, invtre, et de la duret de la pierre, surpasse t o t a l c m e n t l e s forces de la nature ; d o n c , c e t t e gurison, mon avis, devrait tre regarde et r e c o n n u e c o m m e miraculeuse. 222. E n ralit notre Expert c o m b a t pour nous, parce q u e , si n o u s ne n o u s flattons pas trop, il est tout l'ait hors de doute, par tout ce que nous avons dit, que la raie de notre religieuse qui tait devenue dure c o m m e de la pierre a en peu de t e m p s recouvr son tat naturel. Et c o m m e le premier m d e c i n Expert a port sur le miracle un j u g e m e n t qui ne lui est pas m o i n s favorable, n o u s esprons, n o n sans raison, q u e la S. congrgation partagera le s e n t i m e n t de ces deux personnages. C est ce que n o u s demandons trsr e s p e c t u e u s e m e n t avec le prtre Franois Virili, de la c o n grgation du Trs-Prcieux S a n g de Notre-Seigneur J s u s Christ, postulateur de la cause. Franois
MERCURELLI.
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Aussitt, (jue le proces de batification de Benot-Joseph Labre fut introduit, la congrgation des Rites exigea imp rieusement q u e le postulateur de la cause, l'abb Franois Vinti, de la congrgation des Missionnaires du Prcieux S a n g , prsentt trois miracles son approbation. Le premier.avait t opr le 2i mai 1783, en faveur d'une j e u n e paysanne du village de Mazzano, dans le diocse de Nepi, arrive au dernier degr, d'une phthisie confirme et j u g e incurable par le mdecin et le chirurgien. Le second miracle, qui date aussi de \81A fut la gurison instantane et parfaite de Thrse Tartufoli de CioitaNova, qui souffrait depuis plus de six ans d'un ulcre la gorge ; fistuleur et calleux, que le fer et lefeu n'avaient pas pu gurir. Le troisime miracle enfin avait t le retour subit la sant de la sur Angle Marini du monastre de Pennabili ; rduite la dernire extrmit par une obstruction pierreuse et squirrheuse de la rate, avec engorgement de l'utrus et tout un cortge d'autres maladies graves. Quand les pices des enqutes juridiques relatives ces trois miracles, arrivrent Rome, le postulateur ne tarda pas demander que la sacre congrgation des Rites pro cdt leur vrification et leur confirmation, ce qui lui fui accord en avril 1848, Alors c o m m e n a la lutte vraiment gigantesque d'un avocat plein de talent Franois Mercurelli dfendeur de la cause et du Promoteur de la foi, mdecin m i n e n t , Andr Frattini, charg de l'attaque. Cette discussion mmorable n e fut publie qu'en 1853. Immdiatement apre le pre Virili, provoqua la runion de r a s s e m b l e anti-prparatoire qui se tint chez le cardinal Patrizzi. Les gurisons de Thrse Tartufoli et de sur Angle Marini furent u n a n i m e m e n t reconnues miraculeuses Mais 1 assemble exigea que le miracle de Marie-Rose de Luca fut soumis une nouvelle expertise, conlie au docteur Valentini, professeur de clinique 1 Universit r o m a i n e : celui-ci conclut absolument au miracle. Alors l'assemble prparatoire put se tenir. Elle eut lieu au Vatican le 15 sep tembre 1857, et le suffrage des consultants lut affirmatif l'unanimit. Restait l'assemble gnrale : elle fut tenue le 15 mars 1859 au Vatican, en prsence de Sa Saintet P i e IX. Le Cardinal rapporteur ayant propos de nouveau la question de c o n s tation des miracles, les Cardinaux prsents et les Con sultant donnrent chacun l e u r suffrage favorable.
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Le souverain pontife, suivant l'usage, avant de se p r o noncer dans une question si grave, rclama de nouvelles prires, rflchit,et pria beaucoup l u i - m m e , et rendit enfin son j u g e m e n t dfinitif et solennel, le j o u r de l'Ascension 1859. Aprs la bndiction papale d o n n e urbi et orbi du haut du belvdre de la tribune de la Basilique. P i e IX se rendit la sacristie des chanoines, et l, entour de tous ses prlats, v.fues et cardinaux, sa Saintet proclama le dcret de batification du vnrable serviteur de Dieu, Benot-Joseph Labre, protestation solennelle CONTRE LU SENSUALISME IMPIE
QUI A ENVAHI LA SOCIT MODERNE, PAUVRET SI ET QUI NE SAURAIT TRE NERGIQUEMINT E T FRUCTUEUSEMENT COMBATTU QUIS PAR L'AMOUR AMOUREUSEMENT AIME D U
E T LA PRATIQUE DE LA
SECONDE PARTIE
Proces de canonisation.
HISTORIQUE.
Il y avait un an peine, que les ftes d e l a batification taient passes, lorsque l'infatigable postulateur sollicita la reprise de la cause de son glorieux client, en vue de la cano nisation. L'avocat Mercureli se fit l'interprte loquent des dsirs de l'glise ; montra combien il tait opportun d'op poser, l'orgueil du sicle e t aux vanits du monde, u n si merveilleux e x e m p l e d'hurnilit e t d e dtachement. Il emprunta h cet effet les admirables paroles prononces, dans la cathdrale d'Arras, par l'loquent voque de P o i tiers, le cardinal Pie, lorsqu'il disait. Le naturalisme, c o m m e un fleuve qui a bris ses digues, allait engloutir la terre : u n humble serviteur de Pieu s'est lev, pour repousser le torrent dvastateur ! Benot Labre a plant sur le sol son bton de plerin e t l e flot s'est arrt et le naturalisme a fait un pas en arrire ! Le souverain Pontife approuva la reprise de la cause, e n mars 1861. La c o m m i s s i o n romaine n o m m e cet effet avait surtout s'occuper des nouveaux miracles,que le postulateur apportail 1 appui d e sa demande. On e n choisit deux qui s'taient produits l'un . Rome m m e et l'autre MouleFalcu. A Liome, Thrse Mussetli fut gurie subitement, dans l'glise du Vatican, le jour de la solennit de la Batification a u m o m e n t prcis o l'on dcouvrit l'image du Bienheu reux A Monle-Falco, l'objet du miracle fut la sur MarieLouise de l'Immacule Conception, religieuse professe d u monastre du Divin Amour, atteinte d'un ulcre grave de l'estomac. L'enqule de Monte-Falco se termina l e 17 mai 1866.
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Les annes suivantes furent e m p l o y e s par la congrgation des Rites aux discussions que les rapports soulevaient. La congrgation prparatoire put avoir lieu, le 2J avril 187'2; la Congrgation gnrale, le 19 novembre. L'appro bation dfinitive des deux n o u v e a u x miracles donne l'unanimit des membres de la sacre Congrgation fut p r o m u l g u e le 14 janvier 1873, et le dcret du tuto le 9 fvrier de la m m e anne.
PREMIER MIRACLE
GURISON INSTANTANE ET PARFAITE DE DAME THERESE MASETTI ATTEINTE D'UN SQUIRRHE CANCREUX AU SEIN GAUCHE.
CHAPITRE
PREMIER
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2. Mais cet autre cancer, pargn d'abord par les m decins, s'aggrava tellement dans, le cours de Tanne qui suivit la premire opration, et fit tellement souffrir la malheureuse Thrse, qu'il tait facile de voir qu'il prsentait un caractre plus mauvais encore que la tumeur enleve. Les mdicaments que l'on employa d'a bord ne furent mme pas des palliatifs ; ils furent absolu ment illusoires; ils ne produisirent rien sur l'implacable ennemi qu'ils avaient combattre, et qui ne voulait s u p porter ni le contact des doigts, ni le plus lger frottement. Le docteur Mascelti tait d'avis de faire appel cette fois encore au fer ; mais Scalzaferri rpugnait ce moyen qui serait moins un instrument de salut, qu'une cause d'inu tile torture : Je jugeais toui-~fail inutile, dit-il dans sa dposition, de soumettre la pauvre malade cette seconde extirpation, attendu que, d la fin, elle serait victime de sa diatlise squirrheuse. De son ct, le professeur Tancioni, interrog, dans l'enqute, sursonsentiment cetgard, rpondit : que le mal tait arriv d un tat presque d sespr, et que la seconde opration n'aurait servi cl rien il a mme affirm, dans un autre endroit de sa dposition, qu'elle aurait acclr la mort . Donc une mort immi nente tait invitable; et la malade n'avait pas longtemps vivre, car le mal faisait des progrs incessants: Thrse, par son extrme maigreur, et la pleur de son visage, ressemblait plutt une morte qu' une personne vivante; elle n'avait plus de sommeil et ne prenait aucune n o u r r i t u r e : affaiblie outre mesure, la poitrine et le dos horri blement douloureux, elle ne pouvait remuer le bras, ses pieds soutenaient peine son corps courb en deux. Tous les symptmes s'aggravaient de jour en jour: Cette aggravation tait la fuis progressive el violente, et, dans les derniers jours, (ceux qui prcdrent le 20 mai 1860) il tait devenu intolrable . C'est le chirurgien Mascelti qui s'exprime ainsi. 3. Rduite ces extrmits, el n'ayant plus d'espoir dans la science et le secours des hommes, la malheureuse femme plaa toule sa confiance dans le bienheureux Benoit Joseph Labre,dont la batification solennelle allait bientt tre clbre, et elle se mita le prier avec d'autant plus d'ardeur qu'elle ressentait une horreur toujours plus
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grande de l'opration dont elle tait menace. Le chirur gien Mascetti, non moins remarquable par sa pit que par sa science, l'engagea fortement implorer le patronage de Benot; et, au moment de la quitter, la veille d e l solennit, il me dit (ce sont les paroles de Thrse) que si je ne voulais pas qiCon me fit Vopration, il fallait m*adresser avec une grande foi au vnrable . Aussi, le jour heureux du 10 mai 1860, elle se rendit, en voiture, avec la fille de sa sur et d'autres parents, la basilique Vaticane, et pendant toute la dure de la solennit, elle im plora avec une trs grandeferveur son cleste patron. Pres que insensible aux choses extrieures, elle ne s'aperut pas du moment o Ton dcouvrit l'image du bienheureux ; mais la jeune fille qui l'accompagnait l'en ayant avertie, elle commena la contempler sans interruption ; et voici que, durant cetle contemplation ardente, elle sent que toute douleur a disparu; elle presse de la main le sein malade, et celui-ci, qui ne pouvait mme pas supporter le lger frottement de la plume avec laquelle on lui appliquait les liniments prescrits,ne ressent aucun mal de cette pression. Les forces taient soudain revenues, le corps s'tait r dress, la joie brillait sur son visage et dans ses regards. Aprs lessolennits dumatin,elleailadmerchezIeRvrend DomJuvenal Palami, avec son cousin, le cur Dom Nicolas Pitorri, et se montra trs-gaie ; Ma cousine fut exception nellement alerte et joyeuse, dit ce prtre dans son tmoi gnage, et elle mangea de bon apptit. Aprs midi, elle re tourna l'glise du Vatican o elle passa le reste du jour prier, tant parfaitement gurie. Lorsque les crmonies furent termines, elle sortit du temple, d'un pas agile, le corps bien droit; et elle alla, pied, jusqu'au pontHlius o elle remonta en voiture. Enfin elle revint chez elle, et l, ayant pu regarder en toute libert le sige de son mal, elle vit que le cancer n'existait plus. Alors, dit le troi sime tmoin, elle se mit crier pleine de joie, qu'elle tait gurie,courant et sautant avec facilit par toute la maison, et sedonnant de grands coups dans la poitrine pour mon trer qu'elle n'y avait plus aucun mal . Et la maladie, ainsi disparue par l'intervention divine, ne revint plus d sormais.
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n'est pas inutile non plus de rappeler qu'une tante de Thrse, du ct paternel, est morte d'un cancer. 5 . Une cause tout extrinsque s'tait encore ajoute celles que cette malheureuse femme portait en elle-mme pour hlerlc dveloppement de son mal ; Ma tante, dit le troisime tmoin, en causant avccmo pendant le cours de sa maladie,attribuait,comme elle le fait encore sans cesse, sa maladie ou son squirrhe des coups reus par elle sur la poitrine, del main d'un neveu, g d'une douzaine d'annes, qu'elle s'efforait de maintenir et de calmer, pendant qu'il se dbattait et tmoignait son chagrin du dpart de son oncle Nicolas P i t o r r i . H eut t bien tonnant que le squirrhe ne se dclart pas sous L'influence de ces causes internes et externes runies. El, de fait, il parut avec tous les symptmes ordinaires de cette ma ladie. 6. Deux ans environ avant la batification de B. J.Labre, dit le docteur Scalzaferri, madame Thrse, dont le nom est Mascetti, je me le rappelle maintenant, fut atteinte d'un squirrhe au sein droit. Il lui vint l une tumeur d'abord petite, mais qui augmenta lentement et acquit la duret d'un squirrhe. Elle avait son sige dans la glande m a m m a i r e ; bientt sa grosseur aiteignil celle d'un bel uf de poule, et mme la dpassa. Un peu plus loin le mme docteur ajoute : La tumeur faisait des progrs et acqurait la duret propre au squirrhe; en mme temps tous les symptmes de l'irritation squir rheusesc montraient clairement, c'est--dire, la couleur rouge de la tumeur, et, dans les autres parties du sein, une douleur lancinante par intervalles, une sensation a de grande chaleur dont se plaignait la malade, de plus, l'engorgement de certaines glandes, sous Faisselle, de ce mme ct droit. Tout cela, je puis l'attester pour l'avoir vu de mes yeux et touch de mes mains. 7. Voici maintenantesparoIesduDomMasceUi: Lorsque je commenai donner mes soins madame Thrse, elle pouvait avoir quarante ans. Je constatai qu'elle avait une duret chaque sein, celle du sein droit tait plus forte que l'autre, car elle s'tendait la glande mammaire presque entire, avec des douleurs lancinantes qui s'exaspraient particulirement aux
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poques menstruelles, et s'tendaient, par irradiation. nerveuse, au bras correspondant. Celle duret tait vraiment squirrheuse ; elle prsentait des rugosits, et, pour la sentir, il n'tait pas ncessaire d'enfoncer beaucoup le doigt, car elle'occupait une grande partie du parenchyme de la glande, sa forme tait irrgulire. Les symptmes allant toujours en s'aggravant, nous fmes obligs d'en venir l'extirpation du squirrhe. Les d o u leurs lancinantes faisaient voir d'ailleurs que ce squirrhe n'en tait plus sou premier degr, c'est--dire, dur et indolent ; mais qu'il tait dj devenu un cancer latent, c'est--dire qu'il commenait dgnrer, et que mme on voyait la peau pntrer dans les creux de la tu-. meur. 8. L'illustre professeur Gatan Tancioni s'exprime en ces termes : On reconnaissait que la maladie dont souffrait la patiente tait un squirrhe avanc, aux caractres physiques propres ce mal ; les voici en quelques mots : Apparition du mal sans symptmes i n llammaloires des lissus externes; au dbut, peu ou point sensible ; sensation de douleurs cuisantes deve riant lancinantes ; augmentation graduelle allant jusqu' atteindre un volume notable; de forme irrgulire ; adhrence sur quelques points la peau, d'o diminu tion de la motilit ; sige spcifique du mal, le sein. 9 . Le squirrhe du sein droit fut extirp ; mais tous les tmoins sont unanimes dclarer que le mal qui affec tait le sein gauche tait de mme nature et prsentait les mmes signes caractristiques. Au moment, dit l ' h o n o rable Mascetli, o il tait question d'enlever le premier squirrhe, il tait parfaitement reconnu par le D'Scalza ferri, le professeur Tancioni et moi, que le mal affectant le seiu gauche tait un vritable squirrhe absolument semblable au premier, mais non encore parvenu la mme priode de gravit que celui du sein droit. Il at teignt et dpassa mme son congnre extirp, en malignit et en douleurs aigus : Eu effet, les douleurs aigus et 'lancinantes taient arrives un tel point que la patiente ne pouvait mme plus supporter le contact de la main ; c'est pourquoi comme je lui avais ordonn des onc-
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lions de pommade rsolutive el sdative, elle tait obli ge de se les faire au moyen de quelques objets trs lgers, tels, par exemple, qu'une plume, un pinceau, du coton ; je ne me rappelle pas maintenant quels sont ceux dont elle fit usage. Elle accusait aussi de vives souffrances dans le bras gauche, dont elle ne pouvait se servir, le plus petit mouvement de ce bras correspondait en effet au sein malade; le contact des vtements lui faisait mal ; en un mol, il tait manifeste que ce s e cond squirrhe galait le premier, et on pouvait dire qu'il en tait une drivation. Indpendamment des fortes douleurs lancinantes, elle prouvait encore des sensations pnibles de chaleur, effets qui so manifestent ordinairement quand le squirrhe tend dgnrer. 10. Ce n'est pas encore assez ; le mme docteur ajoute : Le second squirrhe offrait des symptmes plus violents que le premier; la sensation de la chaleur tait plus forte, la douleur plus intense, la sensibilit plus g rande; Ja pa ticnte,comme je l'ai dit,ne pouvait supporter le plus lger attouchement, la douleur correspondante du liras riait plus vive que dans le premier squirrhe, et les mouvements du bras taient beaucoup plus douloureux. L'augmenta tion des souffrances tait d'une violence progressive, dans les derniers jours la douleur tait devenue in loi rable.La similitude de ce second squirrhe avec celui qui fut extirp, et l'identit des symptmes sont galement affir mes et dmontres par les autres tmoins dans le Som maire. 11. Ce que les symptmes rvlaient ouvertement, l'inefficacit des remdes employs le confirmait : 11 n'y a aucun doute (dit trs pertinemment le savant D Scal zaferri) qu'on ait eu affaire mi vrai squirrhe, puisque malgr tous les secours de l'art mdical, employs par moi el par le chirurgien, le D ' Aiaseetti, [jour dissoudre la tumeur, celle-ci ne faisait que progresser. Le D Mascetli dit au sujet de ces re.iidcs : Quand on est en prsence d'un vritable squirrhe tous les indi ments ne valent rien. Ou lit toutes les tentatives pres crites par l'art mdical pour dtruire ce second squirrhe, comme on l'avait t'ait pour le premier ; ou employa les remdes internes et externes dont j'ai parl, mais sans
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espoir fond d'amener la gurison, uniquement pour puiser toutes les ressources de l'art, et pour satisfaire la malade ; mais ni moi, ni aucun autre mdecin, ne. nous sommes imagin que ces remdes pussent tre efficaces ; et de fait, il n'en rsulta aucun effet salutaire, car le squirrhe du sein gauche se montra plus perni cieux que celui du sein droit, sans cder le moins du monde aucune mdication. 12. Selon sa louable habitude, l'illustre professeur Tancioni saisit cette occasion de distinguer le squirrhe d'avec les tumeurs strumeuses, d'aprs l'inefficacit des mdica ments dous une action tonique ou rsolutive. En effet, les tumeurs strumeuses sont guries ou du moins amlio res par cette mdication ; tandis que, sur un squirrhe
elle ne produit autres rsultats que Vaggravation du
mal . Et il en tait ainsi dans notre cas : tout remde fut inutile, affirme la malade aprs sa gurison, car le squirrhe
du sein gauche avait une marche plus rapide, tait plus cruel, et ses effets taient bien plus tristes. Le second t
moin confirme ce tmoignage. Avant que le mal ne fut si avanc, ceux-ci (les mdecins) s'tudirent a i e traiter p a r l e s remdes "externes et internes, employs, pour gurir l'infection par les humeurs ; quels taient ces re mdes, je ne puis le prciser ; je crois qu'ils taient semblables ceux employs dans le traitement du pre mier squirrhe. Mais la fin ils renoncrent toute esprance de pouvoir obtenir la gurison par l'emploi de mdicaments dont les effets taient nuls, et en dpit desquels la tumeur faisait des progrs de plus en plus rapides . Plus loin, il ajoute : Tout ce que j'ai dit du mal et de ses symptmes, tout allait croissant de jour en jour. Je ne voyais pas la partie affecte, mais je n'en tais pas moins bieu inform. Les douleurs devenaient plus .atroces, les plaintes plus grandes, le dprissement des forces plus apparent, les incommodits plus consi drables. La malade pouvait peine manger le strict ncessaire pour ne pas mourir de faim; si elle mangeait, si elle faisait u n mouvement, tout correspondait dou loureusement au mal dont elle souffrait. Le troisime tmoin n'est pas d'un autre avis : Le chirurgien t le mdecin dsigns plus haut la trouvrent dans cet tat
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avanc du mal, dont ils entreprirent le traitement par les moyens dj employs dans le premier squirrhe, c'est-dire par des sirops, des onctions locales avec la pommade de belladone, en y ajoutant un cautre au bras gauche, et cela pendant plusieurs mois, certainement dans la pense qu'elle pourrait gurir. Mais il en arriva autrement ;. le mal devint plus grave, plus dangereux que le premier, malgr les nombreux mdicaments employs , 13. A tous ces arguments il est bon d'en ajouter un quatrime, particulier au cas prsent, et trs prcieux, car les corps vivants le fournissent bien 'rarement. U est tir de l'opration chirurgicale elle-mme. Grce l'extirpation subie par Thrse dans le sein droit, on a pu tudier le cancer dans ses plus intimes racines. Cette tude faite, il ne pouvait subsister de doute sur la nature du mal affectant le sein gauche;, c'tait bien une maladie du mme genre, puisqu'elle olfoiit un caractre semblable, tout fait identique.Trs judicieusement, comme il convient un homme savant et sage, le R. D. Nicolas Piltori fait le raisonnement suivant : Il me semble que si Pon avait pu conserver quelque doute, il devait disparatre devant le lmoignage de deux savants chirurgiens, comme M. M'ascetii et Tancioni, et devant celui d^un mdecin expriment comme le D Scalzaferri ; or ils ont dclar qu'il s'agissait de deux squirrhes, et cela aprs u n long examen, aprs une tude minutieuse du mal, et aprs l'ex tirpation du premier squirrhe. D'autant plus que non seulement ou pt observer du regard la premire tumeur sur Je sein de la malade, mais que ce squirrhe, excis et extirp avec le fer, demeura entre les mains de l ' o prateur, qui put l'examiner avec soin et l'analyser loisir. Si ce second mal eut t d'une nature autre que celle du premier, il s'en serait certainement aperu,, et il aurait modifi son jugement, ce qu'il n'a pas fait .
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14. Au sujet de l'autopsie du premier squirrhe excis, l'illustre D Mascetti s'exprime en ces termes: Aprs l'opration;, on voulut, pour se rendre compte des ravages causs dans la partie malade, dissquer la tumeur excise, et on reconnutque la partioextraite tait . un squirrhe prsentant en certains endroits des indices
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de dgnrescence, c'est--dire, passant au cancer. La grosseur de la tumeur rpondait deux fois celle d e m o n poing en largeur; sa forme tait irrgulire, sa surface lgrement rugueuse, sa couleur quelque peu sombre, sa duret comme celle de la pierre. La tumeur ainsi extirpe ne fut pas conserve. Le professeur Tancioni qui assista l'opration, et qui observa trs attentive ment la tumeur du sein gauche, dclare qu'il ne peut y avoir de doute sur l'identit des deux t u m e u r s : Les signes caractristiques manifests dans le sein gauche taient la duret, le volume, l'irrgularit d'une tumeur galementcancreuse,situe profondmcnt,danslesusdit sein, sans aucune altration du tissu externe; il tait donc impossible de douter que la nature de cette tumeur ft d'un genre diffrent . D u reste il est superflu de s'arrter davantage sur l a - s i militude parfaite des deux tumeurs, nous l'avons l o n g u e ment et suffisamment dmontr au parag. 10. 15. Le caractre et la qualit de la maladie tant bien ta blis, il nous reste parler de sa gravit. Le squirrhe, (dit Monteggia cit plus haut), devenu douloureux, et montrant tendance dgnrer, prend le nom de cancer occulte. (Ouv. cit. Part. 1, chap. 13 1052.) Au sujet des cancers occultes, l'aphorisme d'Hippocrate est bien connu: P o u r les personnes atteintes de cancer occulte, mieux vaut Vabsence de traitement; les remdes tuent plus promptement ces sortes de malades; Vabsence de mdication prolonge leur vie. Or, ilest vident que le squirrhe de Thrse tait bien devenu un cancer occulte; les douleurs lancinantes qui crucifiaient la malade, le tmoignage du D Mascetti, cit plus haut au parag. 9, le prouvent clairement. Il est bon cependant d'couler la patiente aprs sa gurison: Certes, les douleurs prouves par moi au sein gauche taient plus cruelles que celles du sein d r o i t . Non moins pertinemment s'exprime le second t m o i n : C'tait vraiment un squirrhe dj cancreux, qu'accu saienl les douleurs graves, aigus, lancinantes. Il n'y avait pas l simplement squirrhe, mais bien cancer, au trement, il n'y aurait pas eu de douleurs aussi intenses.
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E n consquence, le chirurgien qui donnait ses soins la malade n'hsita pas dclarer que : le second squirrhe
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tait devenu un cancer occulte. En effet, ilprsentait, sans aucun doute, les caractres du cancer occulte. 16. Et de plus, le squirrhe du sein gauche laitd'une na ture plus accentue et plus grave. Nous en avons la preuve (on l'a vu au 10) dans la plus grande violence des symp tmes. 11 ne pouvait pas en lre autrement: aprs l'extir pation du premier, le second squirrhe devait tre plus violent. Le squirrhe du sein droit, (dit le chirurgien dj cit), ayant t enlev,celui du sein gauche se dveloppa toujours davantage, et devint un cancer occulte d'une nature plus dangereuse. L'minenl praticien instruit par une triste exprience no put conserver aucun espoir cle gurison. Je n'eus plus le courage, dit-il, d'entre prendre aucun traitement; j'vitai mme de le faire, car j'avais vu, dans d'autres cas semblables, la reproduction du squirrhe aprs l'opration, et sa dgnrescence en cancer ingurissable. Et cela n'est pas tonnant car (comme le rappelle l'habile chirurgien) il est dans la na ce ture de ce mal, lorsqu'on a extirp un premier squirrhe, d'en voir apparatre un second avec des caractres de violence plus intense. 17. Outre ce caractre de maliguit, cette tumeur du sein gauche avait un degr de gravit plus grande,parce qu'elle s'tait dveloppe plus longtemps dans l'organisme malade; elle tait, en effet, apparue peu de temps aprs la pre mire. Thrse nous le dit elle-mme: Jecroisncessaire, dit-elle, de consigner ici que le squirrhe du sein gauche s'est dvelopp peu de temps aprs celui d usein droiil or, il subsista jusqu'au 20 mai 1860, c'esl--dire,plus d'une anne aprs l'extirpation de son frre jumeau. Comment dcrire alors les ravages causs, tant dans le sein malade que dans tout l'organisme, par la diffusion du virus? Sa couleur tait livide, violace, semblable du sang cxlravas. La couleur de la tumeur tait... livide, et violace, rouge sombre,et livide.Son volume tait considrable, celui,paratil, -d'un gros limon. La veille du jour o le prodige eut lieu, la grosseur tait inoue. Pour en donner une ide, dit Thrse aprs sa gurison, je puis dire que, le soir du 10 mai 1860, qui prcda la batification du Vnrable Labre, tant au lit, je pris la coupe du Vnrable et l'ap pliquai sur le sein gauche, auquel elle s'adaptait parfai1
teiient.Orcette coupe de forme smi-sphriqiie a,dans sa partie concave, un diamtre d'environ une demi-palme, el mesure, en profondeur, peu prs un quart de palme. J'ajoute, en outre, que le sein alors fortement gonfl, tait parsem, au centre,de plusieurs bosses dont une, plus grosse, en avant, avait le volume d'une noix. Ces bosses n'taient pas cnnligues les unes aux autres, mais bien spares. Le plus lger attouchement tait insup portable dans cette partie malade. La malade ne polirait souffrir le plus lger frottement. Ce tmoignage de la patiente est confirm par les dposilions des autres t moins. Le bras gauche ne pouvait faire aucun mou vemeni, la douleur correspondait au dos. 18. Le trouble des fonctions de l'esiomac tait dnot par la dyspepsie et l'anorexie; l'excessive maigreur, dont tout le corps tait atteint, indiquait le marasme. Jaune tait la couleur du visage, vritable indice d j cancer; la pros tration des forces tait trs grande; la malade pouvait peine dormir; de plus elle tait sujette des dfaillances. Avec cel affreux ensemble pathologique, le mal cancreux faisait des progrs. Ecoulons les divers tmoignages sur ce point. J'ai dj dit combien grande lait la faiblesse de mes forces, dit la malade. J'tais plus maigre que je ne le suis prsent, je n'ai jamaist bien grasse, maisj'lais <c alors beaucoup plus maigre. Le teint de mon visage tait d'un jaune ple. La nourriture rne dgotait; je n'avais aucun apptit, je mangeais un peu de soupe et quelque autre petite chose; la vue d e l viande m'tait insup portable. Dom Nicolas essayait de me prparer que ques petits mets inattendus, mais peine en avais-je got, que je les faisais remporter. De plus, les fonctions de a la digestion s'oprant difficilement, dit le D 'Mascelti, elle ne pouvait se nourrir suffisamment. 19. Mme langage dans la bouche d'un autre tmoin: Celte fois Plat de choses tait-pire; la malade avait <f beaucoup moins de-forces, et elle se plaignait plus vive ment, en me disant qu'elle allait bien mal. Les symptmes externes rpondaient son lat de souffrauce; le teint tait jaune, mais d'un jaune ple, comme un le remarque chez les personnes travailles par la fivre et par un mal inlrieur, quelquefois le visage affectait une couleur
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rouge, tachete, livide; cela n'arrivait que momentan ment, probablement lorsque l cs douleurs taient plus poignantes. La prostration des forces tait si grande, qu'elle pouvait grand peine se remuer pour subir le plus petit traitement. Un peu plus loin nous lisons: (t elle pouva.il peine prendre la nourriture strictement ncessaire pour ne pas mourir. Aussi explicite est le troisime tmoin : Les forces de ma tante diminuaient chaque jour, elle ne pouvait faire que bien peu cle choses dans la maison, el avec une grande peine. Sa figure respirait la souffrance; son visage tait d'un jaune livide; elle sortait un peu, allait grand peine l'Eglise, a et faisait quelques petits tours dans les environs.Etplus loin: Elle lait ple, jaune, elle souffrait horriblement cl dprissait vue d'il. Et ailleurs: La malade n e s e moltailau lit qu' contre-cur parce que le lit lui tait douloureux; elle dclarait n'y pouvoir prendre aucun repos. 2 0 . Lecinquicme lmoin doit tre cit, il dit: L'aspect extrieur de la malade lait mauvais, et dcelait le mal dont elle souffrait; elle allait tous les jours de mal en pis, elle perdait de plus en plusses forces; son amni grissement tait tel que sur la fin on ne lui voyait plus que la peau sur les os; ce que je dis l s'applique aussi bien la priode du premier squirrhe qu' celle du s e cond; toulefois dans cette dernire, elle tait encore plus maigre, elle avait la pleur d'une personne vraiment malade; son teint tait d'un jaune terreux. Et ensuite: Auparavant, elle accomplissait dans la maison ce qu'elle avait faire; mais pendant ces maladies elle ne pouvait presque plus rien faire, surtout mesure que le mal progressait ; il suffit de dire qu'elle ne pouvait ni marcher, ni se remuer qu' grand peine, quoique le cou rt rage ne lui manqut pas. Elle sortait difficilement, quel quefois pour aller IVglise entendre la inesse, les jours de fle, el faire quelques pas cle promenade. Elle avait la poitrine oppresse, ce qui se remarquait surtout quand elle moulait un escalier, la tumeur lui rendaut la respi ration trs difficile. Elle souffrait .aussi daus le lit, et je sais qu'elle n'y pouvait rester. Elle ne prenait certaine ment pas la quantit de nourriture d'une personne bien
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portante. Il lui fallait des aliments toul particuliers, sans cela elle n'aurait rien mang . De son ct, lo seizime tmoin s'exprime ainsi: Je puis affirmer en toute c e r l i tucle que la malade tait d'une faiblesse extrme, t r e s ti amaigrie, d'un Ici ni ordinairement ple, et, comme on dit souvent d'une personne hypochondriaque; parfois il tait cadavrique. Elle avait peu d'apptit, el la nourri ture lui occasionnait des nauses. Enfin, le dixime t moin dclare q u e : A v a n t le miracle,elle tait sujello clos troubles, des drangements organiques, et des va nouissements. Je passe sous silence les autres tmoi gnages de ce genre que l'on peut lire clans les pages du sommaire. Mais je ne puis taire l'observation des deux chirurgiens sur les signes de marasme. L'iLluslre D^Gatan Tancioni disait dj au mois de mai 1868: l tait bien facile de remarquer en elle u n commencement de ma rasme. L'illustre D Ange Mascelti avait galement an nonc que telle devait tre l'issue de la maladie, (si le miracle ne fut arriv) : Avec le temps, ce mal aurait fini p a r u n m a r a s m e lent. 2 1 . En prsence d'aussi solides prouves intrinsques sur la gravit de la maladie, il devient pour ainsi dire inu tile de citer les jugements des trs savants experts qui ont dclar celte maladie incurable, et devant amener fa talement la mort courte chance. Dans le nombre, c e pendant, il est bon d'en choisir quelques-uns, afin que ce gienre de preuves extrinsques ne fasse pas non plus d faut: Humainement parlant, dit le D Scalzaferri, et selon ma manire de voir, la gurison de madame T h rse tait tout fait dsespre, car le second squirrhe ne pouvait se dissoudre de lui-mme, ni par les forces de la n a t u r e , ni par le secours de fa mdecine ; on no pou' v a i t n o n plus esprer aucun bon rsultat de l'ablation, laquelle, je le crois, pouvait hter la morldc la patiente. Dans le cas, en question, ajoute l'illustre D Mascelti, le squirrhe avait dj rviu une duret pierreuse, l a ce quelle, par suite de ses progrs, avait produit un cancer occulte qui, la fin, se serait ouvert. Or, les forces de la nature sont impuissantes faire disparatre les v gtalions cancreuses externes. Cela se reconnat la rsistance que celle maladie^ diffrente en cela de toutes
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les autres, oppose aux traitements mdicaux. Ainsi, le mal vnrien, les humeurs herptiques sont autant de virus dltres ; cependant, dans ces sortes de maladies, la nature, aide par l'art, fournit des remdes propres faire disparatre ou neutraliser les virus, ce qui n'a pas lieu pour le cancer. Enfin le clbre professeur Tancioni s'exprime ainsi : Dans cet tat si dplorable, je tiens pour certain que l'extirpation du c second squirrhe. loin d'amliorer l'tat do la malade, e n'aurait fait qu'acclrer l'heure de sa mort. Devant des tmoignages aussi premploires, tout homme de bonne foi reconnatra que non seulementcettemaladietait grave, d'une gurison trs difficile, mais encore qu'elle portail en elle les germes d'une mort courte chance, et qu'il n'y avait pas lieu d'esprer un retour la sant opr par les forces de la nature ou les ressources de l'art.
III. D u m o y e n o u d e l ' i n v o c a t i o n .
22. Pour que les Rvrendissimes Pres puissent faci lement prendre connaissance de tout ce qui concerne la substance du miracle, on a eu soin, dans les tables du som maire, de diviser les tmoignages selon qu'ils se rapportent la maladie, l'invocation, ou la gurison. Or, quant aux tmoignages relatifs l'invocation, tous les tmoins tant unanimes dclarer la vrit du fait, il sera suffisant de rapporter la dposition de la personne gurie, dont l'au torit, en ceci, est, tous en conviennent, telle qu'il n'en est pas besoin d'autre pour tablir la dmonstration de l'invo cation. Avant l'exhumation, faite dans l'glise de Notre Dame des Monts, du corps du bienheureux Benot Joseph Labre, je l'avais certainement entendu nommer plusieurs fois, mais j'y avais prt peu d'attention; ce fut autre chose quand il fut question de la reconnaissance du corps, quelque temps avant la sentence de Batification; alors mon cousin D. Nicolas, cur de l'glise annexe de Notre-Dame des Monts, m'apporta une coupe, dont me dit-il, s'tait servi le bienheureux, qui n'taitencore en ce moment que vnrable, A partir de ce jour, j'eus une
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grande confiance dans ce serviteur de Dieu ; je souffrais alors d'un squirrhe au sein gauche, et jc-dsirnis beaucoup viter l'opration que je sentais bien ne devoir pas lreloigne. Dj les chirurgiens m'avaient extirp un squirrhe du sein droit, et le souvenir douloureux de celte opration tait trop prsent ma mmoire. Et dans un autre endroit: Eprouvant toujours une vive rpugnance me faire de nouveau oprer, je me re commandai bien au vnrable B.J.Labre, lui demandant de ne pas cire expose un si cruel traitement, objet de mes crainles, car j'y avais dj l soumise. Il n'y avait aucune raison pour esprer, humainement parlant, ma gurison, e l J e l O m a i 1859, le D Mascelti, voyant que les prparatifs de la batification de B. J. Labre Snint Pierre louchaient leur terme, me dit, en sortant, que si je ne voulais pas tre opre, il fallait me recomman der fortement au vnrable. Et un peu plus loin : On peut dire que tout le monde dans la maison avait confiance en l'intercession d e c e Bienheureux, el particulirement le curD. Nicolas qui fil faire en l'honneur du bienheureux un tritlitum de prires, les trois jours qui prcdrent la batification. Je me recommandais lui continuellement, et lui seul. Je crois que dans ma maison on n'agissait pas autrement. 2 3 . Les autres tmoins nient aussi qu'on ait invoqu u n autre bienheureux ou un autre saint : Je ne sache pas; dit le deuxime tmoin, qu'elle ail invoqu cet effet directement d'autres saints ou bienheureux, ou quel .qu'autre serviteur de Dieu. Jcnel'ai entendue invoquer ' qaie le seul vnrable B. J. Labre. J'tais parfaiLemenl mme de savoir si elle s'adressait un autre s a i n t . Mme dposition de la part du huitime tmoin. l'ex oeption du bienheureux Labre, il n'est pas ma connais sauce, que Thrse ait invoqu-d'autres saints ou saintes, d'autres bienheureux ou bienheureuses, ou d'autres serviteurs de Dieu. Toute la confiance de Thrse el la ntre, dit Dom N i colas, reposait sur B. J. Labre; s'il en eut t autrement, je crois que je l'aurais su.La patiente attendait, ainsi que n o u s j e j o u r d e la Batification, pourvoir se raliser notre demande. Le vnrable pasteur disait souYenl Mascelti:
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o Attendons la Batification. Mme dclaration dansla dposition du dixime tmoin: Tout ce fjue je pnisdire,, c'est qu'elle s'adressa au seul vnrable . Enfin le seizime tmoin s'exprime ainsi: Ma la nie, rpugnant absolument subir une seconde oprai ion, se recom manda i'inlercession du Bienheureux Joseph Labre, el certainement, ma connaissance, elle n'a pas invoqu d'autre saint, d'autre bienheureux, ou serviteur de Dieu . O U e confiance ardente, pleine d'lan, de la pieuse dame Thrse lui valut la ralisation du prodige qu'elle avait demand. C'est ce qui ressort des tmoignages divers que je vais mettre sous les yeux du lecteur.
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du Bienheureux.Ma nice, dont j'ai parl-plus haut, me le fit remarquer, elc'estalors que je ine mis la regarder, ce sans pouvoir en dtourner mes yeux.Pendant ce temps je ne sentais plus de douleurs, bien que jusqu'ce moment j'eusse beaucoup souffert; j'avais beau presser la partie malade, je n'prouvais aucune souffrance; pourtant je ne dis rien personne, me rservant d'examiner le sein ma lade mon retour la maison. Mais je me sentais si bien que, sortie de Saint-Pierre aprs l'Angelus, je marchais droite, et je courais, ce dont s'merveilla M. Ariodanle. Sans rien dire personne, je rendaisiutorieurementgrce au Bienheureux, certaine que j'tais d'avoir obtenu ma gurison.Renlre la maison, j'examinai de suite la partie malade, cl la trouvai parfaitement saine; le mal avait a entirement disparu. Je me mis alors crier, frapper sur ma poitrine; Dom Ariodanle courut annoncer le fait Dom Nicolas, qui tait dans une maison voisine; mais celui-ci lui recommanda le silence pour ne pas attirer l'attention publique. 25. La nice qui accompagnait la malade parle ainsi son t o u r : Le matin de la batification, ma tante, accom pagne par moi, se*rendit en voiture Saint-Pierre. Elle put faire le voyage, quoiqu'elle fut dans un triste tat, tant tait grande la foi qui l'animait. En arrivant la Ba fl .silique, elle souffrit beaucoup de se tenir debout, en a l ce tendant le moment de s'asseoir.Nous pntrmes avec nos billets dans la tribune rserve aux dames. J'tais si a l tentive aux crmonies que je ne m'occupai pas beaucoup de matante qui se tenait prs de moi. Lorsqu'on dcou vrit le tableau, au moment du Te Deum, elle me demanda avec tonnement si on avait dj dcouvert l'image du Bienheureux? Elle ne s'tait pas aperu cle ce qui s'tait pass auparavant, ce qui me fait supposer qu'elle avait dormi; d'autant plus qu'elle me dit plus tard que je l'avais veille, ce dont je ne me souviens pas. A ce moment ma tante tait gurie de son squirrhe,bien qu'elle n en eut rien dit, et que je ne l'aie appris que le soir, lorsque nous fmes rentrs la maison. La crmonie du matin t e r ce mine, nous allmes pied chez Pelami, au palais C o rimboni, situ sur la place Saint-Pierre, droite, e n r e gardant la faade rte l'glise. L nous dinmes et nous
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retournmes ensuite pied la Basilique, o nous nous assmes sur des bancs, dans la grande chapelle. Le soir. nous revnmes la maison, pieds, jusqu'au pont Saint A n g e ; l nous .montmes dans une voiture que nous trouvmes. Je ne savais pas que ma tante fut gurie, mais ensuite, en rflchissant bien, je dois dire que, pendant celle journe, partir du Te Deuni, je ne lui ai plus en tendu profrer de plaintes, il n'y avait plus en elle aucun signe visible de maladie; la faon dont elle fit allgre ment, pied, la route pour revenir la maison, il tait < visible qu'elle ne souffrait plus, et lorsque nous c h e r ( chions une voiture pour la transporter, elle nous avait rpondu que cela importail peu,qu'elle aurait pu faire le chemin pied. Ajoutons cela que,vers u n e heure de la nuit,ma tante ayanl examin sa lumeur,nous dclara nel tment qu'elle avait enlirementdisparu. Aussitt elle se milcrier,toutejoyeue,qu'cllelailparfailementgure; elle sautait avec aisance dans la maison ; elle se frappait trs fort la poitrineavcclamain,pournousmieuxprouver qu'elle n'avait plus rien ; elle nous raconta alors que la gurison avait eu lieu Saint-Pierre au m o m e n t cie la dcouverte de l'image du Bienheureux; elle s'en lait bien aperu ce moment, elle s'en lail mme assure; en se louchant la poitrine, autant que ses vtements le lui permettaient; elle sentait parfaitement qu'elle avait recouvr la sant; si elle s'tait abstenue d'en parler jusqu'alors, c'tait pour s'assurer auparavant qu'il n'y avait ni erreur, ni illusion. Les tmoignages des autres personnes sont entirement conformes ceux-l. 26. Peu de jours aprs cette gurison, le chirurgien Mascetti visita la malade; ayanl entendu de sa bouche le rcit de sa gurison, il voulut explorer le sein. Le r sultat de c e l e x a m e n est consign dans les parolessui vantes : Aprs, le rcit de dame Thrse, je palpai le sige du mal, sans qu'elle y prouvt aucune douleur, je l'examinai avec beaucoup de soin, je poussai le scrupule jusqu' presser et serrer fortement. Elle ne profrait aucune plainte, quoiqueceltepressionflcapabledecauser del douleur, mme une personne dont le sein n'aurait pas t malade. En poursuivant mon examen, je trouvai.au centre del glande mammaire une petite duret indolente
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(( de la grosseur de la moiti d'une noix ordinaire. Pour qu'on ne suppost pas que c'tait l un reste du mal c a n creux, le chirurgien ajoute: Cette duret n'tait qu'un simple engorgement, sans aucune analogie avec le squirrhe, autrement il se serrait dvelopp dans la suite el aurait produit les effets du squirrhe disparu....Je ue puis diagnostiquer la nature cle cette duret ou engorgement, mais j'affirme qu'il n'y avait rien l de cancreux. Quand le sein gauche avait t affect du s q u i r r h e , la glande mammaire tait devenue dure comme de la pierre; mais celte duret, ou celle espce de ptrification, n'existait plus du tout, el je retrouvai certainement celle mme glande mammaire dans sou tal normal. 2 7 . Il importe galement, pourplus ample confirmation, de rapporter ici le tmoignage de l'illustre professeur Gatan Tancioui qui, de concert avec le prcdent chirur a .gien, examin la miracule: La gurison, .dit-il, de dame Thrse a t complte; c'est l un fait que je puis attester, en connaissance de cause; car, quelque temps a p r s , m ' l a n l rendu chez.elle avecM.MasceUij'examinai 'le sein gauche, et le trouvai dans son lalnonnul bieiidif frenlde Ptai dans lequel il tait autrefois. Je ne puis dire (n'en ayant pas conserv le souvenir) si M. Mascelti fi tun nouvel examen du sein en ma prsence, mais je me rap pelle trs-bien qu'il considrait la gurison comme m i ce raculeuse. S'il est rest une duret dans le sein, ce que je n'ai pas vrifi, elle ne pouvait pas infirmer le prodige, attendu que, si elle availtune partie del tumeur squir rheuse, le squirrhe, aprs six mois environ, se serait re produit avec plus de violence, et aurait certainement t incurable. D'autre part, comme je l'a appris, la dame Thrse n'a plus jamais t aUeinleclesipiirrhes d'aucune sorte. Etant donc admise l'hypothse de cette duret, elle n'tait certainement pas squirrheuse; elle ne pouvait tre qu'une duret naturelle, congnitale, comme .sont les verrues, les ncevus, les taches de naissance, etc. 28. Il n'est pas non plus sans uliiit d'apporter ici le t moignage du D. Scalzaferri qui, peu de jours aprs la gu rison, visita la miracule. 11 ressort de cet examen que loul vestige de squirrhe avait disparu.Lorsquece grave praticien eut entendu del bouche de Thrse que ce squirrhe avait
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disparu, il voulut se rendre compte du fait par lui-mme. Voici son rcit: Je voulus en faire l'exprience, j'exami nai, je palpai le sein gauche de la personne gurie, et je consialai qu'iln'yavaitplusdesquirrhe.Lelissucellulaire 'taitseulement affect de turgescence, mais, je le rpte, il n'y avait plus de trace rie squirrhe. Je ne demandai pas la malade gurie si elle n'avait point prouv une crise quelconque, et je ne pouvais pas le lui demander, parce que j'tais certainalors, comme je le suis prsentement, que le squirrhe ne peut tre guri par aucune crise. J'affirme donc n'avoir trouv chez dame Thrse aucun symptme morbide, la turgescence dont j'ai parl ne pouvant tre considre comme telle, mais bien comme un simple emptement du tissu cellulaire. J'ajoute que, en palpant le sein, il me fut bien facile de reconnatre que la glande mammaire tait dans sou tal normal, et ne prsentait aucun indice de squirrhe. 29. Cette horrible tumeur, origine et centre de toute la. maladie,ayantdisparu,les foi*ces revinrent, el louslessymp tmes pathognomoniquess'vanouirenl. Une resta en moi, dit Thrse, aucune Ir.ico de maladie, et je ne souffris plus aucun des maux prcdeuts. Les douleurs du dos, de l'pine dorsale, ne sont plus jamais revenues; je n e e te sentis dsormais aucune souffrance, aucune incommodit' > dans les reins; en un mot, je me suis trouve beaucoup mieux qu'avant le dveloppement des deux squirrhes. El [dus loin: Depuis le miracle, je n'ai rien prouv qui pl m'empcher d'agir, je devins agile et capable de faire ce qui m'tait impossible autrefois. Mme langage de la part du second tmoin : Je trouvai Thise toute autre que par le pass. Elle se portait trs-bien; elle passa la main'sursa poitrine, l'endroit de la tumeur, ' en me disant qu'il n'y avait, et qu'elle ne ressentait, plus rien. Elle n'tait plus triste, abattue, mais au contraire on la voyait allgre, rianie, avec le teint de la sant. : El-le dclarait que l'inapptence avait disparu, et en effet, je sais qu'elle mangeait de bon apptit. Peu peu elle reprit de l'embonpoint, revenant Ttai naturel de sa complexion. A ce moment elle tait trs gaie, je voyais qu'elle tait libre dans ses mouvements, forte et capable de lout faire, bien que je. ne susse pas ce qufelle avait
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LES
SPLENDEURS
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LA
TOI.
fait. J'ai continu la voir ensuite, et je puis attester que sa constitution physique tait redevenne excellente; elle s'acquittait de tous ses travaux intrieurs avec une grande facilit et une entire libert d'allures. Tous les tmoins affirment la mme chose, comme on peut le voir dans leurs dpositions. 30. Aucune crise salutaire n'intervint; les tmoins le dclarent l'unanimit, et Thrse elle-mme appuie ces tmoignages des paroles s u i v a n t e s : Ni avant ma gurison, ni encore moins au moment o je p u s constater le miracle, je n'ai prouv de crise. Est-il donc bien ulile de r e tenir plus longtemps sur ce sujet l'attention des savants Juges ? Quelle crise salutaire pourrait-il donc survenir dans les maladies organiques? Quelle purgalion, quelle vacuation pourrait rendre la sant dans les affections can creuses ? La duret pierreuse qui constitue le squirrhe ne peut disparatre que par la force toute puissante et thaumaturgique de celui qui dit Mose: Tu frapperas le .rocher et Feau en jaillira. (Exod.XVII, 6.) Pour que cette dgnrescence, qui engendre la maladie dans les glandes conglomres, fasse place l'ancien tat sain et normal de l'organe, aucune excrtion du virus morbifique ne peut tre efficace, il faut une restitution du tissu primignial qui a t vici; de sorte que ce qui doit intervenir ici, ce n'est pas la force dissolvante, mais, pour ainsi dire, l'intervention de la puissance cratrice. Donc, la crise carte, il sera plus intressant de rapporter ici les jugements des hommes illustres qui rangent cette gurison au nombre des plus beaux miracles: Je ne me suis jamais entretenu avec d'autres personnes de la gurison de madame Thrse, dit l'illustre professeur Tancioni, mais j'ai entendu les autres en parler el la considrer comme un vritable el grand miracle; du reste, je la considre moi-mme comme telle. 3 1 . Mme opinion exprime par le D Scalzaferri, qui nous rend certains de la pense de tous cet gard: La miracule, aussi bien que ses parents, et tous ceux qui ont connu sa maladie squirrheuse, en ont attribu la gu rison un vritable miracle, obtenu par l'intervention du Bienheureux Joseph Labre. Je partage entirement cette manire de juger; il m'est impossible avoiraucun doute
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* sur la ralit du miracle,aprs avoir vu et touch de mes mains le premier squirrhe. Enfin l'minent,D Mascelti, chirurgien habituel de la miracule, s'exprime ainsi: Je puis affirmer en toute certitude que, d'aprs les donnes de la science, d'aprs mon exprience en ces matires, la gurison du squirrhe, dont j'ai parl n'est arrive ni par les forces de la nature, ni par les ressources de l'art; el qu'il faul l'attribuer une action surnaturelle. Tel est mon jugement; je ne crois pas pouvoir m'avancer plus loin, puisque, comme tmoin, je ne dois rapporter que des faits, et, comme chirurgien, je ne puis affirmer que les principes de la science et les donnes de l'expe rt rience. Je le rple donc : la gurison de dame Thrse Masselli, atteinte d'un squirrhe dj avanc et dgnr en cancer occulte, doit tre certainement range parmi . les faits surnaturels. Ce n'est donc ni par aveugle crdulit, ni par pieuse simplicit qu'on a attribu un insigne miracle de Dieu la gurison de Thrse Massetti. On y a t contraint par l'vidence des faits, par une logique svre, appuye sur les principes d'une science avre, et confirme par l'autorit des hommes les plus minenls.
CHAPITRE SECOND
Discussion du miracle.
ARTICLE PREMIER.
P&EMIRJ5S OBSERVATIONS CRITIQUES DU PROMOTEUR DE LA KOI.
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1. Connatre une maladie est souvent c h o s e assez difficile; la physionomie trompe frquemment, m m e les h o m m e s habiles en c e l l e matire.C'est ainsi qu'un squirrhe peut faci l e m e n t se confondre avec certains durillons qui, q u o i q u e de trs vilain aspect, en diffrent totalement, et peuvent d i s paratre pur les seules forces de la nature.De l'avis des plus habiles praticiens, ce n'est que pr le progrs de la m a l a d i e qu'on peut discerner le squirrhe vritable des autres tu meurs : clans celles-ci Je corps dur se dissout, tandis que le squirrhe dgnre en un cancer patent. C'est ce qu'ensei gnait l'illustre Antoine Trasmundus: (Elments de mdecine externe, t. u, vol. I, chap. xvui, v'20.) Ce quoi, ditil, o n devrait srieusement rflchir, dans le diagnostic du cancer, si rel q u i ! soit, c'est qu'un certain n o m b r e des. s y m p t m e s caractristiques du squirrhe sont c o m m u n s d'autres t u m e u r s c h r o n i q u e s , dures, indolentes des parties molles; de l souvent un srieux embarras pour le mdecin. E t encore: (id. p. 210) T o u t e s les durets squirrheuses, o u de marbre, si Ton veut s'en tenir Ptymologie r i g o u reuse, peuvent ne pas tre des squirrhes, de m m e q u e t o u t e s les ulcrations d'apparence c a n c r e u s e peuvent n e pas tre des cancers. 2. C'est ce qui se prsente surtout dans notre c a s . On dit, en effet, que Thrse Massetli a t atteinte d'un double squirrhe, l'un au sein droit, l'autre au sein gauche.Celui du sein droit a CL enlev par une opration chirurgicale, tandis
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que l'autre aurait disparu par un miracle. S'il tait a b s o l u m e n t certain que cette masse dure c o m m e la pierre enleve au sein droit, fut un vritable squirrhe, il serait permis de souponner que celle du sein gauche tait de m m e nature. Mais c'est ce qui prcisment n'est point assur. Ecoutez la gurie elle-mme.Elle dit en effet: Baruffi, (Pun des c h i rurgiens qui la soignaient, celui qui n'avait point pris part la susdite opration) Barufi jugeait que le mal n'tait qu'un simple engorgement, et il ne cessait de s'tonner que j'eusse consenti tenter l'extirpation chirurgicale du mal. 3. Aussi ne c o m p r e n d - o n pas que, en prsence d'une telle divergence d'opinions, on ait nglig ce qui aurait pu dissi per tous les doules, c'est--dire le srieux examen de la tumeur enleve. Il fallait la dissquer, se rendre compte do sa composition intime, la s o u m e t t r e z atlentives observa tions avec le microscope, afin de s'assurer si elle renfermait quelques clments du cancer. Mais tout cela ne s'est point fait. Le chirurgien Mascetti, qui a enlev la tumeur droite, se borne en signaler quelques caractres externes, et le m d e c i n Scalzaferri, charg du pansement, y a donn si peu d'attention qu'il avoue, dans le procs verbal, n'avoir pas m m e - t o u c h e du doigt cette tumeur. 4 . A dfaut donc des expriences qui auraient d tre faites sur le corps extrait d'abord du sein droit, examinons de quelle nature a pu tre la tumeur qui s'est dclare au sein gauche. G'est en vain que nous nous adressons ce sujet au mdecin Scalzaferri qui ne se souvient pas s'il a exa min o u mme s'il a palp la tumeur du sein gauche. In terrogerez-vous la gurie? Mais elle vous dira qu'elle ignore m m e de quelle couleur tait son sein gauche, et elle s'en rapporte au tmoignage de sa nice et de sa domestique. Or la nice rpond qu'elle n'a jamais vu la tumeur dont il s'agit. De son ct, la servante d i t : Bien que j'aie souvent, non-seulement palp, mais encore vu le sein gauche de ma d a m e Thrse, j e ne m e suis nanmoins jamais aperue que cette partie eut une couleur extraordinaire. Il est certain ponrtant qu'il faut tenir compte de la couleur extrieure dans le diagnostic du squirrhe. Quant la grosseur de cette t u m e u r , on en peut j u g e r par cette dposition d'Irne Amoti, d o n t voici les paroles, dignes de remarque: Elle me disait (la malade) que tandis que dans le premier cas, c'est--dire dans le sein droit, le squirrhe atteignait le volume d'un tout petit pain, dans le second il ne dpassait pas celui d'une noix : il resta ainsi et n e diminua pas, malgr les esprances qu'on avait conues, car jusqu'au m o m e n t d e l gurison
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miraculeuse, cette noix Lait reste la m m e , et j e sais cela pour le lui avoir entendu dire.
2. D u second terme du miracle ou de la gurison.
5 . Mais la gurison dont n o u s parlons n'offre point le c a ractre d'une uvre divine, laquelle est parfaite de sa nature, car elle n'a t c o m p l l e ni ri.-ms le sein malade, ni dans les autre:s parties d u c o r p s . L e c h i r u r g i e n M a s c e t t i d i t e n e f f e t : a II e s t r e s t p e n d a n t q u e l q u e t e m p s u n e p e t i t e duret ou e n g o r g e m e n t dans une partie de la glande m a m m a i r e , et j e crois qu'elle a disparu d ' e l l e - m m e dans la suite, n'en ayant plus entendu parler. Ce chirui gien ajoute ; C o m m e j e n'ai qu' exposer les faits et n o n les juger, je n'ose pas dire q u e celte gurison ail t un miracle, cause de cet e n g o r g e m e n t . Et si on lui d e m a n d e c o m m e n t tait la petite grosseur, ou l'engorgcmeuL qui subsista, il rpond qu'elle galait bien la moiti d'une noix c o m m u n e , ou qu'elle q u i valait la moiti de la grosseur q u i existait avant la gurison. Or la gurie elle-mme, c o m m e nous l'avons vu, avait dit Irne A m o l i que la tumeur survenue son sein g a u c h e n ' a v a i t j a m a i s d p a s s le v o l u m e d ' u n e n o i x . 6 . La gurison n e fut p a s n o n p l u s parfaite dans le reste de l ' c o n o m i e . Car, le soir m m e de la susdite gurison, Irne A m o t i remarqua que Thrse avait la m m e c o u l e u r qu'au temps de sa maladie, c'est--dire, qu'elle tait un peu jaune. U n e d a m e noble, la c o m t e s s e Ncgroni, ajoute : P e u peu elle se mit reprendre de l'embonpoint, tat qui tait propre sa complexion. 7 . Mais au m o i n s le virus m o r b i d e disparut-il e n t i r e m e n t la suite de cette gurison? N u l l e m e n t . Celle qu'on disait gurie, fut d'abord atLeinle d'apoplexie et d'autres infirmits, et finit par s u c c o m b e r une affection tuberculeuse des p o u m o n s , c o m m e l'atteste le m d e c i n D e M a u r o . Et pour qu'on n e p u i s s e m'accuser d e p a r l e r la lgre, coutons l e s t m o i n s . L a n i c e de Thrse d i t : E n v i r o n d e u x a n s aprs la gurison o b t e n u e , m a tante a rendu par le bas une certaine matire noirtre semblable du sang caill et battu. Un autre t m o i n a j o u t e : Depuis la m m e p o q u e elle a souffert d'autres m a u x et s p c i a l e m e n t d'une attaque trois Ibis r pte. J'ai appris que le chirurgien Mascetti ne voulut pas dlivrer une attestation. La dame Irne d'Orozi.., d i s c o u rant autrefois a^ec m o i , se montra incertaine du miracle, m e disant que si la gurison de la dame Thrse eut t u n
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vrai miracle, elle ne serait pas morte si promptement,et que, malgr celte gurison, il lui tait rest intrieurement le principe du mal, lequel se dveloppa et la conduisit la .mort. Un autre tmoin est du mme avis. 8 . Cet tat subsquent de sant indique donc, si je n e m e trompe, la gurison au sein gauche d'un simple e n g o r g e ment, dont avait t dj atteint le sein droit, de l'avis de Baruffi, lequel engorgement, attaqu longtemps par des dis solvants pharmaceutiques, finit par diminuer, et qui, dispa raissant ensuite par voie de mtastase, se rpandit dans les autres parties du corps jusqu' ce que, s'emparant des pou m o n s , il lit succomber Thrse une affection tuberculeuse.
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ou de la maladie.
1 . S'il s'agissait d'un squirrhe son dbut dont aurait t atteinte Thrse Massetti, l'objection propose en premier lieu par le trs illustre censeur, pourrait offrir quelque difficult : il fait observer que c e n'est qu'aprs le progrs de- la maladie, q u e le squirrhe se distingue des autres d u rets, parce que, dans ces dernires, la tumeur se dissout, tandis que, dans le squirrhe, elle se change en un cancer vident.wQuel est, je le demande, le signe certain du squirrhe chang en c a n c e r ? C'est une douleur aigu et lancinante. Cela est connu m m e des barbiers et des sages femmes. Or, mettant de ct les autres tmoignages recueillis dans l'in formation, il me suffira de rapporter tes paroles du chirur gien D. Angeli Mascetli. Les douleurs lancinantes et aigus augmentrent tellement, que la malade n e pouvait plus s u p porter m m e le toucher de la main. 2. Je passe sous silence les signes fournis par la teinte livide, la surface rude, et la mobilit qui diminue avec le t e m p s ; puis le trouble de toutes les fonctions organiques dcelant un virus s'lendant au loin, et les autres indices de la maladie que l'illustre Gatan Tancioni n u m r e d'une m a nire admirable A priori, dit-il, on reconnaissait que la maladie de la patiente tait un squirrhe dj avanc,et cela, d'aprs les caractres certains et physiques de la maladie e n
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question, caractres qu'on peut rsumer brivement c o m m e il s u i t : 1 Le mal s'est manifest, sans q u e les s y m p t m e s de l'inflammation aient paru sur les tissus e x t e r n e s ; 2 il a c o m m e n c par une duret peu ou pas sensible, mais qui avec le temps, est devenue le sige de douleurs brlantes, puis de douleurs lancinantes ; 3 il a grossi graduellement j u s qu' atteindre un volume notable de forme irrgulire ; 4 il a contract des adhrences avec la peau, ce qui a diminu sa mobilit ; 5 enfin il avait son sige spciale au sein. 3. Que faut-il ajouter de plus ? Il existe un signe infail lible qui se montre assez rarement, c'est le retour du cancer aprs l'enlvement de la tumeur. Quelques auteurs, remarque trs j u s t e m e n t le docteur Mascetti, regardant le cancer c o m m e incurable, pensent, lorsque le m a l n e reparat plus aprs l'enlvement de la t u m e u r , qu'il ne s'agit pas alors d'un vrai cancer : cette opinion m e semble aller trop loin. Mais, dans notre cas,nous avons eu aussi cette preuve, puisque le cancer enlev du sein droit s'est d v e lopp davantage au sein gauche, formant un cancer occulte d'un caractre plus mauvais. Que p e u t - o n produire contre c e l a ? L'opinion du D Baruffi qui, appel au c o m m e n c e m e n t de la maladie pour la soigner, a j u g qu'il n'y avait l qu'un simple e n g o r g e m e n t ! Mais la critique e l l e - m m e n o u s prpare la voie la rfutation de cette o b j e c t i o n , car c'est elle qui nous rappelle que le squirrhe se reconnat d'aprs la marche de la maladie. Si Jean-Baptiste Baruffi n'a examin que les c o m m e n c e m e n t s de la maladie; pour quoi tendre son j u g e m e n t ses progrs. Je n'invente rien ici. Baruffi, dit la personne gurie, m'a s o i g n e p e u de t e m p s . . . . Ensuite m o n cousin Nicolas fit venir le chirur gien Angelo Mascetti, qui seul a continu ma cure, d'autant plus que Baruffi ne venait plus m e visiter depuis quelques j o u r s . S o n cousin, le R. D. Nicolas Pitorri, rapporte la m m e chose : Son ancien chirurgien, dit-il, tait Jeau-Baptiste Baruffi, aujourd'hui chirurgien militaire, dans lequel elle n'avait pas b e a u c o u p de confiance, quoiqu'il eut observ le mal son dbut : avertie par son m d e c i n , Flix Scalzaferri, qu'elle avait besoin d'un chirurgien, elle mit sa c o n l i a n c e d a n s le professeur Mascetti, dontj'ignorais le n o m . C'est pourquoi ceux qui traitrent son premier squirrhe aussi bien que le s e c o n d , furent le m d e c i n Scalzaferri, qui a toujours t le m d e c i n de la famille depuis quef n o u s s o m m e s venus aux Monts, ledit chirurgien Mascetti, et le chirurgien Gatan T a n c i o n i . Il ne pouvait y avoir d'anti thse plus remarquable et plus vidente. La critique r c l a m e
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avec beaucoup de sagesse un j u g e m e n t diagnostique form d'aprs les progrs de la maladie; Baruffi n'est donc d'aucun poids dans cette affaire, puisqu'il n'a observ la maladie qu'a son dbut. 4. Je ne sais ce que la critique pourrait exiger de plus fort. Veut-elle que n o u s fassions venir Baruffi pour lui d e mander, maintenant que tout est rgl, et qu'il a pu s'assu rer des progrs de la maladie, de l'enlvement du soin droit, du retour cle la tumeur au sein gauche et de la gurison, ce qu'il pense enfin de la maladie, non plus a son dhut, mais dj trs avance dans son cours ? Est-ce l ce que demande la critique ? il me semble voir l'illustre Promoteur de la foi perdre un peu de la gravit du Censeur, sourire lgrement, et se dfendre en rougissant, presque, de v o u loir une chose aussi difficile. Nanmoins, puisque nous le pouvons, n o u s allons le contenter. Voici les paroles de JeanBaptiste Baruffi appel plus tard rendre tmoignage : Je suis certain que la premire tumeur dure survenue la dame Thrse et soigne par moi, a t un vrai squirrhe, el Von en voit la preuve dans son extirpation. La seconde que j e n'ai point c o n n u e a t aussi un vrai squirrhe, puis qu'elle est survenue la suite de l'extirpation du premier, c o m m e je l'avais pens. Aprs ce tmoignage si clair et si vident t o u t ce q u ' o n p e u t ajouter doit tre rejet c o m m e superflu. 5. Ces arguments sont si puissants, si premptoires, que le trs habile Censeur, vaincu par la dmonstration des ph n o m n e s qui tombaient sous les sens, a eu recours ceux que les yeux ne pouvaient pas naturellement apercevoir. Il d e m a n d e srieusement des instruments d'optique et des microscopes ; il se plaint de c e qu'on n e les ait pas e m ploys pour examiner le sein coup, et tudier son tissu i n t i m e ; on aurait pu ainsi s'assurer s'il s'y trouvait les l m e n t s du cancer. L'illustre Censeur ne pouvait rien appor ter, je crois, qui fut plus propre montrer l'absence de toute objection srieuse. D'abord, si l'omission d'un examen fait l'aide du microscope avait assez d'importance pour faire hsiter et rester dans le d o u t e sur la prsence du can cer, on n e devrait tenir aucun compte de la plupart des n o m b r e u s e s gurisons de cette maladie reconnues par le Saint-Office dans les causes de batification et de canonisa tion, car ces gurisons ont t obtenues sans une incision pralable du squirrhe, et sans examen fait avec le m i c r o s cope. 6. Du reste les professeurs de chirurgie affirment que la texture intime du cancer est une chose qui t o m b e sous les
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sens et q u o n peut connatre sans instrument d'optique. Si on examine, dit Jean-Baptiste Monleggia, u n e tumeur squirrheuse dans cet tat {de cancer occulte, tel qu'en souf frait Thrse), on voit, dans sa substance interne, certains points sanguinolents, autrement dit, dgnrs et changs en u n e substance molle, fongueuse,ou fluide e l virulente, o u ' sanieuse, contenue dans de petites cellules qui sont le c o m m e n c e m e n t du changement du squirrhe en cancer. Le squirrhe simple prsente une substance solide blanchtre o u jauntre, d'apparence lardace ou c o u e n n e u s e (1). Ces pa roles sont tout fait en rapport avec ce q u e le savant auteur conseille au chirurgien qui aura pratiqu l'opration du squirrhe : Il examinera, dit-il, avec b e a u c o u p d'attention la partie coupe, atin de bien remarquer si la substance d u cancer extirp est de forme lardace. {Ce qui indique qu'il
7. Puisqu'il en est ainsi, il faut avoir une pleine confiance aux trois h o m m e s si habiles qui o n t asbist l'ablation du cancer : J ' t a i s p i s e n t , dit SealzaFerri, et j'ai v u faire tout ce qu'on a c o u t u m e de faire pour l'enlvement d ' u n , squirrhe. Cette grosse masse u n e fois extraite, et ayant devant les yeux tout ce qu'on avait tir de l'intrieur, j e n e pouvais mieux tre assur d e la nature d c o l l e tumeur q u e n o u s tenions maintenant entre n o s mains. J'ai pu l'observer et la toucher, afin de mieux appuyer le j u g e m e n t dj port par m o i dans le cours de la maladie. Ange Mascelti qui a enlev avec le fer le sein malade, confirme notre o p i n i o n d'une manire encore plus prcise : Aprs l'opration qui fit connatre tout le d o m m a g e caus la partie malade, on
ouvrit la tumeur extraite, on vit alors que la malade avait t affecte un squirrhe, et q u e toute l a partie extraite offrait sur quelques points le signe d/une dgnrescence im minente en cancer. La grosseur de la tumeur arrache avait
deux fois la largeur de m o n poing : sa forme tait irrgulire, sa surface un peu r u g u e u s e , et de couleur s o m b r e , sa duret presque la duret d e l pierre. Le chirurgien T a n c i o n i , qui a examin attentivement la contexture du tissu malade, a vu les m m e s c h o s e s . Aprs l'avoir dtach, dit-il, sur (1) Inst. chirurg. Patli. 1, cap. 15. 1063.
(2) Op. et cap. cil. g l l i 5 .
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les cts et la base, on le tira dehors entirement, on arra cha aussi le tissu cellulaire engorg, qui aurait pu r a m e ner une t u m e u r semblable a la premire.... Le squirrhe tout entier prsentait une forme irrgulire, et paraissait e n c o r e plus v o l u m i n e u x cause du tissu malade qui y adhrait. Comme l'opration tait faite par le chirurgien Mascelti, il ne faut pas s'tonner si Scalzaferri, dans une sance sui vante, a dit quil doutait d'avoir touch la tumeur avec sa* main : J'ai vu ensuite ce squirrhe dj enlev, et peut-tre aussi Vai-je touch avec le do'nt.)) 11 suffisait que, prsent, il constatt les phnomnes qui se produisaient sous le fer de l'oprateur. Or le mdecin a vu que ces phnomnes taient tels qu'il ne pouvait y avoir aucun doute sur la nature de la maladie. J'ai vu le squirrhe (dit Scalzaferri dans la m m e sance,) dans la chambre m m e de la malade, et on n e pouvait rellement pas mettre en d o u t e son existence. * La personne gurie dit e l l e - m m e : Lorsque le squirrhe eut t enlev du sein droit, les m m e s professeurs m'ont dit qu'ils avaient trouv en lui le tissu spongieux du squirrhe. Que la censure mette donc de ct les lentilles de verre et les microscopes dont l'usage ici serait bien inutile. Espret-elle trouver d a n s le tissu du c a n c e r q u e l q u e animal cule semblable au s a r c o p t e , q u ' o n dit cach d a n s les v s i cules de la gale? Ah ! que la critique ne s'inquite donc pas tant de trouver de nouvelles familles d'insectes n u i s i b l e s ; on en connat dj tant, que leur nombre suffirait pour n o u s craser. 8. L'observation rvoque en doute les signes et les carac tres extrieurs de l'autre tumeur qui apparut au sein gauche, aprs qu'on eut extirp .la premire, sous prtexte que des tmoins n e l e s ont pas aperus.Que peut-on inventer d p l u s faible que cette artifice de logique. Le mdecin, ditelle, ne s'en souvient pas. Thrse n'en sait rien, la servante l'ignore ; donc tout est enseveli dans un profond mystre. Que p e u t - o n imaginer d p l u s extraordinaire? Mais, j e le d e m a n d e , c o m b i e n y a-t-il cle tmoins qui aient t interrogs? Dix-huit, si j e ne m e trompe. L'Introducteur de la cause e n a a m e n dix ; quatre ont t appels d'office, et quatre ont sign les dpositions. Et parce qu'il y en a trois dontles dpo sitions ne nous apprennent pas ce que n o u s voudrions savoir* .tout serait perdu et dsespr ! Si deux tmoins dignes de foi rapportent ce que n o u s demandons, cela ne suffit-il pas pour qu'on dise que la cause est en bonne voie d'information? Les chirurgiens et les tmoins, aprs avoir dcrit avec soin l e premier squirrhe, n'avaient pas besoin de parler l o n g u e -
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ment du second, il leur suffisait d'affirmer qu'il tait s e m blable au premier. Le chirurgien Mascetti qui Ta vu, touch et soign inutilement, dit : C'tait un fait bien vident
que le second squirrhe tait semblable au premier, et Von pouvait bien dire qu'il en drivait. U n peu plus bas il ajoute. L'autre mal du sein gauche tait absolument unvrai squirrhe gal au premier*..le second squirrhe avait beaucoup progress et prsentait, sans doute possible, les symptmes d'un cancer occulte. Le trs illustre Gatan Tancioni dit plus
l o n g u e m e n t et plus exactement : L e s caractres que pr sentait le sein gauche taient la duret, le v o l u m e , l'irrgu larit d'une tumeur galement cancreuse, c a c h e dans ce m m e sein, sans altration des tissus externes,et l'on ne p o u vait douter qu'elle pt tre d'une autre espce. 9. Les autres tmoins sont d'accord avec les h o m m e s de l'art. Le deuxime tmoin dit : les caractres, les symp t m e s , les signes, les accidents, tout, en u n mot, ne diffrait e n rien du premier squirrhe cancreux. Le c i n q u i m e dit aussi : La description que j'ai faite tant du premier que du second squirrhe n'offre d'autre diffrence que celle-ci, savoir, q u e le second tait plus avanc, plus grave et plus dan gereux . Le h u i l i m e ajoute : Nous tions tous attentifs considrer la marche q u e suivait le m a l , craignant srieu s e m e n t qu'il ne se dveloppt un squirrhe n o n m o i n s grave q u e le premier, et de fait il en fut ainsi, car la tumeur alla grossissant c o m m e la premire, avec les m m e s s y m p t m e s les m m e s caractres, les m m e s i n c o m m o d i t s pour la malade ; elle devint m m e plus grave. Enfin le troisime tmoin dit : Le d v e l o p p e m e n t de cette tumeur fut s e m blable a celui de la p r e m i r e ; c'taient les m m e s douleurs qui augmentaient sans cesse, les m m e s plaintes conti n u e l l e s de m a tante et ainsi du reste. 10. P o u r ce qui est de la couleur livide et violace de la t u m e u r , jai dj produit les dpositions qui l'affirment clai r e m e n t . Mais, pour apprcier combien le cancer gauche tait intrieurement m a u v a i s , il ne faut pas s'arrter au c h a n g e m e n t de c o u l e u r de la peau, il suffit de remarquer s u r t o u t ce que les h o m m e s de l'art ont indiqu du carac tre mauvais d'un cancer qui renait, et sur les effets plus dsastreux qu'il produit : Quoique le second squirrhe, disait savamment le professeur Mascetti, q u a n d j e pus le palper, prsentt un v o l u m e moindre q u e le premier, cela n'empchait pas qu'il lt d'un caractre plus mauvais, ce qui e s t dans la nature de c e s sortes de m a u x ; car, lorsqu'on traita u n premier squirrhe par des m o y e n s violents, le se-
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cond s'irrita davantage. Il ajoute ensuite: a Les s y m p t m e s du second squirrhe taient plus violents; ainsi la sensation de chalcnr lait plus grande, les lancements plus profonds, la douleur plus intense et plus sensible ; la malade n e p o u vait pas, c o m m e elle Ta dit d j / s u p p o r t e r le plus lger a t t o u c h e m e n t au sein ; la douleur se rpandait dans le bras correspondant, et les m o u v e m e n t s de ce bras taient plus d o u l o u r e u x que lors du premier squirrhe. Cette aggravation tait progressive et si forte, que, dans les derniers jours, elle tait devenue insupportable. Aussi les docteurs Scalzaferri et Tancioni ont-ils dclar cet tat dsespr. Le premier parle ainsi : lorsque j'eus dcouvert l'existence de ce second squirrhe, il n'y avait plus d'esprance de sauver la malade... Comme j e l'ai dit autrefois, dans une autre sance, je savais que le mal tait irrmdiable, d'autant plus que j'avais, c o m m e preuve, une de m e s locataires qui avait subi aussi une opration ; mais un autre squirrhe s'tant dclar dans la partie oppose, il n'y eut pas de remde possible, et il lui, fallt succomber. Le second rapporte qu'il dit au chirurgien Mascelti : la chose en tait arrive un tat presque dsespr, et s'il avait fallu faire une seconde o p ration, elle n'aurait jamais t profitable. La malade ellem m e a senti que son second mai tait plus cruel et plus vio lent que le premier. Le squirrhe du sein gauche suivait u n e marche plus violente et plus rapide, et produisait des effets plus douloureux: les lancements plus profonds taient pour m o i une preuve que le sein gauche tait plus atteint que le sein droit... Le v o l u m e du sein gauche allait en aug m e n t a n t de plus en plus, et rapidement. Aussi l'tat gn ral de la sant avait t bien plus bris, plus troubl, que dans la premire maladie. Gomme j'ai dcrit cela trs au l o n g dans l'Information, j e m'abstiens volontiers de la rp tition fatigante des m m e s c h o s e s . 1 1 . T o u t cela prouve assez un h o m m e judicieux que la nature de la maladie tait trs-mauvaise, quand m m e on. croirait que le cancer au sein gauche a t d'une grosseur moindre qu'au sein droit. Mais que celte noix, emprunte d'Irne Amate, et q u e la critique a prise dans je ne sais quelle corbeille, ne trompe personne : j e rappellerai que cette dposition est relative aux confidences qu'une f e m m e sans instructions avait reue de Thrse Massetti e l l e - m m e :
J'ai
pu le savoir,
dit-elle, pour
9
le lui avoir
entendu
dire. Thrse a t interroge la premire dans le procs, elle se souvient de la noix el elle a expliqu trs-clairement c o m m e n t la chose avait eu lieu : Le soir qui prcda la
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batification du vnrable Labre, dit-elle, quand j'allais au lit, j e pris le gobelet dont il s'taitservi, et j e l'appliquai au sein gauche, de manire les mettre parfaitement e n c o n tact. Ce gobelet de forme demi sphriquc, a dans sa partie creuse, un diamtre d'une demi-palme et u n e profondeur d'un quart de palme. J'ajoute que ce m m e sein qui tait tout gonfl, avait au centre, plusieurs b o s s e s , et u n e plus grosse en avant, gale au volume d'une b o n n e n o i x . T o u t e s ces bosses ne semblaient p a s runies mais distinctes les unes des autres. C'est tout ce que je puis dire . Qui ne voit que cette dame a s i m p l e m e n t dcrit la nature de la tumeur c a n c reuse, laquelle, ordinairement, prsente des bosses ingales, et se c o m p o s e d'un grand nombre de durets ? Le sige du mal se nonfle ingalement, disait Heistcrus (1); Scarpa disait aussi : Le tout est comme un compos d'un grand nombre de morceaux agglutins (2). La grosse noix tait le centre de la t u m e u r . Mais m e s u r e - t - o n toujours la grosseur d'une m a s s e o u d'un lieu, d'aprs son c e n t r e ? Parce que Delphes tait le centre de la Grce, la circonfrence de la Grce t o u t e e n tire serait-elle forcment gale la circonfrence de Delphes ? Ajoutez c e l l e noix, qui tait au centre, les parties voisines et ce qui s'y rattache, el vous ne v o u s tonnerez plus que le second tmoin ait dit : L a tumeur tait semblable la premire, elle avait le v o l u m e d'un gros citron .
2. Du dernier terme du miracle, ou de la gurison
12. La critique prtend que la gurison de Thrse a t imparfaite, en s'appuyant sur cette dposition du chirurgien Mascetti : Il ne lui est rest, que pendant quelque temps une petite duret ou engorgement i n d o l e n t dans une cer taine partie de la glande mammaire . La malade a dit q u e cette duret avait la grosseur d'une d e m v n o i x ordinaire, d'o notre adversaire conclut qu'il est rest la moiti de grosseur qui existait avant la gurison Mettant de ct t o u t ce que n o u s avons dit tout a l'heure de la grandeur de la tumeur avant la g u r i s o n , supposons un instant que cette m o i t i de la noix tait gale la moiti de la premire tu m e u r . Si n o u s disions que cela tait un reste du cancer, v o u s verriez les cueils n o m b r e u x contre lesquels n o u s v i e n drions nous heurter. 1 3 . D'abord la gurison d'un squirrhe, par la d i m i n u t i o n subite et spontane de la moiti de sa grosseur, est quelque
"fi) Heisler. Inst. chirurg. (%) Memorra sullo scirro et sui canon.
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chose de tout nouveau et inoui dans les annales mdicales, et qui n e peut se concilier ni avec la nature telle qu'on la con nat, ni avec la violence d'une maladie aussi funeste. Voici c o m m e n t Ranzi parle de cette maladie: Pour fixer nos ides seulement sur la chose, c . - - d . sur la nature d e l maladie cancreuse cherchons s'il n'y a rien de constant, de fixe, d'immuable dans ces maladies, qui permette d'tablir quelques caractres inbranlables et toujours durables, qui aient travers tous les temps et toutes les coles, s a n s souf frir do changements, et qui dureront autant que le cancer continuera tre le flau de l'humanit. Or, cette maladie prsente c o n s t a m m e n t u n e srie de productions acciden telles. Quelques-unes de ces productions se dveloppent dans nos tissus en procdant sourdement et lentement. Leur dveloppement cach tend envahir les -parties circonvoisines, au milieu desquelles elles couvent en quelque sorte, se les appropriant, les convertissant, les fondant en leur propre n a t u r e ; alors ces parties ainsi dsorganises se trouvent bientt l'tat d'ulcration ; la maladie, en progressant, sort de ses premires limites, et tend plus loin ses funestes influences ; elle donne naissance, dans les autres tissus, la m m e production anormale, par les m m e s pro cds portant dans toute l'conomie un tel c h a n g e m e n t , que l'organisme est pour ainsi dire empoisonn partout o ces produits particuliers se sont dvelopps Voil ce que n o u s trouvons de constant clans les affections cancreuses ; de l vient qu'elles se rvlent nous plus par leur marche, par leur m o d e d'invasion, leur progrs et leur fin, que parleur forme . (1) Donc toute diminution,tout affaiblissement, tout arrt dans cette maladie, est oppos l'observation et l'exprience des sicles, 14. Il suit de l que, si la maladie eut persist dans la moiti dp la tumeur, tous ces phnomnes auraient d ga l e m e n t persister, quoique un degr moindre Cependant ils ont tous disparu, ce qui a t clairement dmontr par cette phalange de tmoins qui n'admet aucune excepLion. Pourrait-il se faire, qu'il y et une cause sans effet, une m a ladie sans symptmes, u n e chose signifie sans les signes n cessaires ? Il serait plus facile d'imaginer une lampe allume sans l u m i r e , des charbons ardents sans chaleur, qu'un cancer sans les p h n o m n e s qui l'accompagnent ordinaire m e n t . Si cette duret qui est reste devait tre attribue au squirrhe, elle aurait produit, c o m m e le remarque trs-sage m e n t Ange Mascetti, des effets proportionnels.
(1) Lez. di niedic. .oper. tom. 2. lez. 5.
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15. Mais supposez, s'il vous plat, que Dieu, infiniment bienveillant, ait voulu n'accorder qu'un demi-miracle, c o n trairement ce qu'il fait toujours. Dans c e cas, ce n o y a u au rait t cancreux. Or Thrse a vcu plus de cinq ans aprs sa gurison, et pendant tout ce t e m p s le cancer est rest t r s tranquille:* depuis sa gurison miraculeuse jusqu' sa mort, il n'y a jamais eu chez madame Thrse a u c u n indice qui put faire suspecter que le squirrhe t o u t entier n'avait pas t radicalement e n l e v (1). P o u v a i t - i l se f a i r e q u e c e t t e demin o i x , si e l l e e t t cancreuse, fut r e s t e si longtemps en repos, sans dvelopper de n o u v e a u sa v i o l e n c e et sans grossir, surtout aprs avoir t dompte deux fois ? P e r s o n n e n e le croira. Gatan Tancioni a dit : S'il est rest quelque duret au sein gauche, j e ne l'ai point observ ; du reste elle n e saurait dtruire le miracle, car, si elle et t u n e partie de la tumeur du squirrhe, aprs sept mois environ, elle aurait reproduit le squirrhe avec plus d e violence, t o i l e serait devenue certainement incurable.D'ailleurs madame Thrse, c o m m e j e l'ai appris, n'a plus cl sujette a u c u n e espce de squirrhe. L'excellenlissime Mascelti est cle cet avis : a La duret qui est reste n'tait qu'un s i m p l e e n g o r g e m e n t qui n e prsentait p o i n t d u t o u t le c a r a c t r e d ' u n s q u i r r h e , a u t r e m e n t il s e s e r a i t d v e l o p p dans la s u i t e . L e s a v a n t D. de Mauro, interrog s'il fallait attribuer la gurison de Thrse un miracle, a dit : D a n s ce cas, puisque le squirrhe a disparu en un instant, sans se reproduire e n s u i t e , cela n'a pu arriver que par une force surnaturelle . Bien plus, il a ajout : Je suis certain particulirement q u e , deux jours avant sa mort, ses seins ne portaient aucune trace de squirrhe ; j e l'ai palpe a t t e n t i v e m e n t p o u r examiner, par la percussion et l'auscultation, l'tat de son p o u m o n , je n'ai trouv aucune t u m e u r o u a u c u n e duret ; et s'il y en avait e u , je l'aurais v i d e m m e n t vu, puisque les m a m e l l e s s'taient dtendues par suite de la maigreur . D o n c , d i r a - t - o n , avec le t e m p s le c a n c e r s'est o u v e r t , e t i l a disparu ? U n e t e l l e supposition, d i t Baruffi, est tout fait absurde, et n e peut-tre admise par la science, car un vrai squirrhe n e peut se dissoudre,puisque sa substance est c o m m e celle d e la pierre. S'il arrive quelque fois qu'une durel, semblable un squirrhe se dissipe, alors il faut dire qu'elle n'tait point un squirrhe, qui de sa nature est irrsoluble. 16. tout cela il faut ajouter q u e c c t l e tumeur tait tout fait diffrente de la t u m e u r dure c o m m e la
(i) Tmoignage du prtre Antoine PacetlL
LES
MIRACLES
AU
TRIBUNAL
DE
LA
SCIENCE.
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pierre qui constitue le squirrhe,ainsi quel'on certifi unani m e m e n t le mdecin Scalzaferri et le chirurgien Mascetti. Le premier dit : J'ai voulu alors faire une exprience ; j'ai observ et palp le sein gauche de la personne gurie, et j'ai reconnu qu'il n'y avait point de squirrhe. J'y ai remarqu sculemenl du gonflement dans le tissu cellulaire, mais j e rpte qu'il n'y avait pas l'ombre d'un squirrhe . Le second, aprs avoir dit que la tumeur n'offrait point le ca ractre d'un squirrhe, a j o u t e : j'ai observ le squirrhe qui s'tait form autrefois dans le sein gauche ; la glande m a m maire avait acquis une duret de pierre ; mais cette duret, o u , si l'on veut, cette sorte de ptrification avait disparu, et j e retrouvai cette m m e glande dans son tat ordinaire, sauf r e n g o r g e a i e n t signal . Cette tumeur ne pouvait tre le reste de la maladie ; de m m e , si d'un terrain on arrache u n . bloc de pierre, et qu'on y trouve ensuite une motte de terre, qui oserait dire que le bloc n'a pas t bien enlev, et qu'il en est rest un fragment dans la m o t t e ? 17. Si donc n o u s voulons tre satisfaits,il faut, pour expli quer le fait de cette petite tumeur,raisonner sur quelque chose de croyable et de vraisemblable. L'illustre professeur Tancioni disait avec beaucoup de prudence,en parlant en gnral de l'affaire prsente : Dans l'hypothse de cette duret, elle n'tait certainement pas de nature squirrheuse, mais ce pouvait tre une duret naturelle et congniale, c o m m e les verrues, les nvus, les envies, etc. Elle pouvait tre un durillon temporaire, s'vanouissant avec le temps, entire m e n t indpendant de la premire maladie qui a t l'objet du miracle dont il s'agit. De plus un m o u v e m e n t irrgulier, l e buste trop serr, u n lger coup, un frottement trop p r o n o n c sur le sein, m m e un simple contact avec de l'eau froide, o u une suppression de la sueur, suffisaient pro duire aussi cette nodosit, cette duret. Comme, au t m o i gnage de Mauro cit plus haut, il est vident que cette grosseur a disparu avec le temps, il faut recourir aux causes qui, d'aprs le savant chirurgien, produisent ces durets temporaires; et, puisqu'il cite surtout les coups et les frois s e m e n t s , il convient d'examiner si ces causes ont exist. Ds que Thrse se fut aperue de la disparition de la maladie, elle c o m m e n a se frapper fortement le sein, afin de prouver la victoire remporte sur l'ennemi: Depuis ce t e m p s , dit le septime tmoin, c'est--dire ; depuis que madame Thrse, ayant dcouvert la partie malade,se fut assure du fait de la gurison, j e l'ai vue aller et venir joyeuse et contente, frap pant fortement, avec sa main, la partie gauche de la p o i -
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trine, au lieu m m e o avait, t le squirrhe, tandis qu'au paravant elle pouvait peine la toucher l g r e m e n t . Le quinzime t m o i n ajoute. Je l'ai revue le soir h la maison; elle n'tait plus courbe, elle marchait, en rptant qu'elle allait bien, et, pour montrer qu'elle tait parfaitement gurie, elle frappait la partie autrefois malade . Le d i x septime tmoin dpose ainsi : Madame Thrse est v e n u e m o i , toute j o y e u s e , disant qu'elle tait gurie, et, pour le prouver, elle se frappait la poitrine . Le troisime t m o i n lui demandait en plaisantant, si elle ne voulait pas donner occasion de nouveaux miracles, c En la voyant se frapper e ainsi la poitrine et publier le miracle, nous lui disions qu'elle avait obtenu de bon gr et n o n par .contrainte que le Bienheureux lui accordt ses faveurs . 48. A ces coups que la personne s'est donns, il faut ajouter les fortes pressions de la main du chirurgien. Ange Mascetti l'avoue lui-mCuie : En entendant le rcit de m a d a m e , Thrse j e palpai la partie prcdemment malade, j e pouvais le faire sans qu'elle en ressentit aucune douleur ; j e la palpai avec un soin qui alla jusqu'au scrupule, en serrant autant que je le p u s . Elle ne se plaignit point, et c e pendant ces pressions taient assez fortes pour produire une sensation dsagrable sur un sein bien portant . Le c o u s i n de la malade gurie confirme la m m e c h o s e : P o u r assurer n a n m o i n s le fait d'une telle gurison, j e rsolus d'appeler le chirurgien qui la soignait, j e ne m e souviens pas si ce fut le lendemain o u le s u r l e n d e m a i n . i l vint et examina le sein guri ; je dirai plus, il le maltraita,en quelque sorte, par des compressions rptes et le ptrit en quelque? sorte,sans c o m passion . Thrse e l l e - m m e craignit que ces pressions ne fissent renatre de nouveau la m a l a d i e ; elle dit : Il ne se contenta pas de me toucher lgrement, m a i s , dire vrai, il c o m m e n a h m e serrer le sein, et quoique je n'prouvasse aucune douleur, je lui dis : \ o u l e z - v o u s d o n c faire revenir l e m a l p a r f o r c e ? Si le sein ainsi tourment avait pu parler, il se serait plaint avec Job : M a f o r c e n ' e s t p o i n t l a
force
de la p i e r r e , et m a c h a i r n ' e s t p o i n t u n e c h a i r a i r a i n .
Devrons-nous n o u s tonner, si, aprs qu'on a pos des causes si aptes a laire natre une tumeur, il se soit produit un clfet conforme ? Bien plus, ne faut-il pas s'tonner que le cancer ne soit point revenu dans la rgion qu'il avait nagure adandonne, quand tout tait fait si i m p r u d e m m e n t pour le faire renatre? 19. Cette difficult ainsi leve, c'est en vain que l ' o p p o sition accuse c o m m e signe d'un reste de maladie, la couleur
LES MIRACLES
A U
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DE
LA
SCIENCE.
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j a u n e que Thrse avait encore, dit-on, en revenant de la basilique vaticaneaprs sa gurison.. Elle n'tait pas e n c o r e remonte dans sa maison, a dit Irne Amati, quand, gravissant l'escalier,en revenant de Saint-Pierre, elle se heur tait contre moi ; elle avait encore ses vtements de sortie. Nanmoins j e savais pour quelle cause elle tait all SaintPierre; en la voyant agir et en l'entendant parler d'une faon si p e u h a b i t u e l l e , j e crus tout d'abord qu'elle tait folle: mais lorsqu'elle m'et mieux racont la chose et que j'eus bien reconnu q u e son tat tait trs diffrent de l'tal lamentable o elle se trouvait auparavant, car elle paraissait bien portante, quoique la couleur de s o n visage fut encore la m m e , c'est--dire jauntre, j e fus persuade d e l vrit de ses paroles, et j e lui en lis m e s compliments . Il est bon de se demander d'abord quel m o m e n t Irne a vu revenir Thrse. Elle rentra U chez elle le soirf el la rencontrai
cadavre....
La couleur
cadavrique.
Mais le lendemain de la gurison madame la comtesse Ngroni fut fortement surprise de voir le changement de couleur de son visage : Elle n'tait plus, dit-elle, affaiblie et courbe, c o m m e auparavant, mais j o y e u s e , souriante et
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difficult, si ,aprs la gurison de la maladie principale, il en restait quelques suites dont la malade ne serait pas aus sitt dbarrasse ; il suffit que tout ce que la maladie a de grave et de srieux ait disparu subitement, l'invocation du serviteur de Dieu. Certes toute la gravit de la maladie
avait videmment disparu, et si noire Irne avait attendu la fin des vives motions qui lui faisaient croire que Thrse tait folle, si elle eut attendu qu'elle eut joui des douceurs du s o m m e i l , aprs le repas d u soir, et q u e l e soleil qui dis pense les couleurs et les met au jour eut rpandu sa lumire, elle aurait aperu avec les autres tmoins sur le visage de Thrse une coloration qui respirait la sant. 2 3 . La critique supporte avec peine que Thrse n e soit pas devenue aussitt grasse et obse: mais qu'elle ait repris peu peu de l'embonpoint. Je crois m m e qu'elle voudrait qu'un vieillard, s'il est guri par miracle, ft e n m m e (l) zaccliias quest. mdico-lg. lit. 10, cons. 0. nura. 8..
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t e m p s rajeuni. Mais traitons-nous d e l gurison du cancer ou de la rsurrection gnrale des morts? Le Seigneur a dit, en parlant de c e l l e - c i : Je ferai crotre la chair sur vos ossements.Mais dans les gurisons,mme du troisime genre, l'exigence la plus svre n'a jamais demand ce nouveau miracle de la puissance cratrice. On cpnfond ici bien mala droitement deux phnomnes tout fait diffrents, et on suppose que l'un est le complment de l'autre. L ' a u g m e n tation de la nutrition n'a point de rapport avec l'entire et parfaite destruction de la maladie, de m m e q u e la rdification de maisons dtruites par un e n n e m i n'a point de rap port avec une victoire complte remporte sur lui.Dans l'ide de gurison de la maladie sont c o m p r i s s e rtablissement de l'conomie de la vie animale qui avait t trouble, et la destruction d e l cause morbiflque. Mais dans l'ide de nutrition est renferm l'acte dernier et final des cinq appa reils physiologiques qui par leurs actions correspondantes constituent le corps h u m a i n et lui donnent d la vigueur. Les aliments subissent une espce de mtamorphose qu'au c u n naturaliste n'a jamais pu expliquer. La nutrition, disait Bclard, considre d'une manire gnrale, consiste dans
une srie de transformations successives que subissent les substances nutritives depuis leur entre dans C organisme jus qu' leur sortie (2) Et le savant Descuret dit : Si te flam beau de la physiologie s'teint, rien ne peut plus nous clai rer sur faction molculaire qui a lieu dans intime struc-* turc des organes, lorsqu'ils identifient leurs tissus le fluide nutritif pour renouveler les parties sches ou mortes qui aut aient augment indfiniment le corps, Dieu sans doute
pourrait faire q u e ces actions produissent leurs eifets le plus vite possible, et que la matire prpare nouvellement enveloppt subitement les o s , mais cela serait-il ncessaire pour qu'on ait le droit de dire que la maladie a t compl t e m e n t loigne ? Toutes les fois que des mdecins ontgueri des maladies par des remdes h u m a i n s , o n dit que la g u rison cherche e s t parfaite, quoique le mdecin ne fasse pas crotre les cliairs sur les os du malade (ce qu'il n e peut produire avec s o n art, car il ignore c o m m e n t la chose a h c u j , pourquoi donc exiger cela dans une gurison opre par u n m i r a c l e ? Si l'nonc du miracle lait c e l u i - c i : miracle d'une gurison parfaite instantanne ; un m o d e de gurison diff rent, ainsi q u e a u t e u r d u m i r a c l e r e s t e r a i e n t s o u s - e n t e n d u s ,
(2) Bclard trait lm. de-physicologie, liv. 10 Cons.6,num. 8, (a) Descuret merveilles d u corps humain, ch. iv.
vi,
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mais quant la n o t i o n de la g u r i s o n , e u t tant que g u r i s o n , elle doit rester la m m e , et la m m e aussi q u e c e l l e s des gurisons opres a et l par les h o m m e s . 2 3 . Ces critrium*, ouvrent la voie la rfutation de l'ob j e c t i o n c o n t e n u e dans les deux derniers paragraphes des -observations critiques : Celle qu'on disait gurie, ditnot^e Censeur, al sujette une attaque d'apoplexie et d'autres maiadi.es, et elle est morte d unephtisie pulmonaire . Cela n e prouve rien contre l'intgrit de la gurison car tous ceux qui sont guris d'une manire q u e l c o n q u e , soit n a t u relle, soit surnaturelle, devront mourir ensuite alors m m e qu'aucune cause extrieure ne produirait leur mort violente. T o u s sont sujets quelque maladie qui les enlve de c e m o n d e . Assurment le Promoteur de la foi si remarquahle par sa sagesse, ne s'arrtera pas cette considration faite l g r e m e n t par l'pouse rie l'artisan d'Urazi: Si la g u r i s o n de madameThr-e avait t le fait d'un miracle, elle ne serait pas morte si prompteinent. D'abord il faut l e rappeler, K L L K A V C U I N C O H B CJKQ A N S E T D E M I ; ensuite il s e rait on ne peut plus ridicule de juger de la vrit et de l'inlgr.l d'un miracle, d'aprs le temps q u e la personne gurie aurait continu vivre. Paul de Maximis a t rappel la vie par Philippe de Neri, et chaque a n n e Rome clbre la mmoire de ce frit, or nous savons tous que c e j c u n e h o m m e -mourut de nouveau | curie temps aprs. Ne serait-il pas trs ridicule de dire que si ce miracle eut t vrai, il n e srail pas mort si p r o m p l e m e n l ? Quelle qu'ait t l'opinion de cette pauvre femme, la sacre Congrgation s'appuie sur d'autres critriums. Bien plus s'il veui adopter ce qu'Irne a pens, aprs flexion faite, il ne disconviendra pas qu'il y e u t u n vrai miracle. En ellet, elle a dit : P o u r le peu que j e puis comprendre, je crois un miracle . 2 4 . Menant tout cela de ct, arrivons plus particulire m e n t et plus immdiatement au fait. P o u r quelle raison la Critique conclut*elle que la gurison n'a pas t entire et parfaite, parce que des maladies sont survenues? Pour q u e nous ne perdions pas noire lemps chercher en vain, lais sons-la-exposer m m e toute la srie de son argumentation. .Si la sant a recouvre, c e^t : s i j e ne m e trompe, parce
engorge
ment, au sem g a u i h e , e n g o i g e m e n t dont avait dj t affect le sein droit, au j u g e m e n t de Baruffi, et qui aprs avoir dimi nu d'abord foi ce de remdes dissoIvants,a disparu ensuite, grq.ee une mctustae, allant attaquer autres parties du corps, jusqu' ce que s'Lulroduisani enfin dans les p o u m o n s
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il ait fait mourir Thrse d'une phtisie tuberculeuse. Tout dpend donc d'un nouveau diagnostic de la maladie, diag nostic que dfend l'autorit de Baruffi. Cette mtastase r e p o s e sur la supposition d'un simple e n g o r g e m e n t . Or il a t dmontr trs clairement, tant dans l'Information de la cause, que dans les rponses prcdentes, que la maladie de Thrse avait t un cancer vritable, et semblable au p r e mier. Quant l'opiniou de Baruffi, j'en ai parl dans ma r ponse au 3 paragraphe des observations critiques, et j'ai d montr par ses propres paroles ce qu'il avait pens de la ma ladie plus avance. G'est pourquoi en reprenant le diagnostic du cancer, o n fait vanouir l'objection. Le docteur Mascetti qui a vu souvent la p e r s o n n e gurie, aprs le miracle, n'a pu dcouvrir en elle aucun s y m p t m e qui indiqut,d'une ma nire quelconque un reste du Yirus morbilique. Quoique dit-il, j'aie eu l'occasion de voir souvent madame Thrse avant sa mort, je u'ai certainement jamais remarqu aucun sigue qui put m e faire conclure, que la cause morbifique du squirrhe ft reste en elle. Les affections morbides q u e j'apercevais chez elle dpendaient, m o n avis, de ses prdispositions aux attaques d'apoplexie, d'autant plus qu'elle souffrait probablement de quelque dsordre dans l'organisme du cur. 2 5 . Ce qu'il y a maintenant de trs important, c'est qu'il faut loigner ncessairement toute ide de mtastase, quant au squirrhe et au cancer, car elle est oppose la nature de ces maladies. Nous pourrons invoquer ici la dclaration du corps mdico-chirurgical, pour ainsi parler. Le trs illustre D. Pierre de Mauro nous dit : E n admettant que la dame Thrse et rellement un squirrhe au sein, et qhe c e squirrhe soit devenu un cancer occulte, la dernire maladie n e peut pas tre une c o n s q u e n c e de ce m m e squirrhe, car celui-ci ne peut tre guri ni par rsorption, ni par mtastase parce que dans le vrai squirrhe il se forme une altration des tissus qui prennent une duret corrodante, laquelle de sa nature ne peut cesser ni par absorption, ni par mtas* tase . D. Nicolas Bianchi compare trs propos cette mtastase Active la translation d'un os d'un lieu dans un autre, il dit : Quant m o i , si ce qu'on m e disait est vrai, c'est--dire, que la dame Thrse avait dj subi l'extirpa tion d'un vrai squirrhe, et qu'aprs cela il s'en tait dve lopp un autre dans l'autre sein, que celui-ci n e consistait pas e n une simple duret squirrheuse, niais dans un vrai squirrhe dgnr en c a n c e r : si, dans ces conditions, une gurison instantane a e u lieu, on ne peut pas douter du
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miracle, sans renoncer a u x principes de l'art m d i c a l . En effet, quand le squirrhe a dgnr en cancer, c'est qu'il s'est dj produit dans le tissu u n e grande altration, laquelle ne p e u t disparatre par le m o y e n d'un crise q u e l c o n q u e ; de m m e , le mal ne peut tre transporl d'un lieu un autre, pas plus que, dans la m a c h i n e h u m a i n e , u n os ne p e u t tre transport d'ue place une autre. 26. Le trs honorable professeur Tancioni, explique d'une manire n o n m o i n s grave et profonde pour quelle raison intime cela est i m p o s s i b l e . Il dit : d a n s les maladies organiques il n'existe pas de crises, ni de m t a s t a s e . Cette proposition tablie, il la d m o n t r e avec tant de clart et de netlet que ceux qui ne s o n t j a m a i s entrs dans le sanctuaire d'OEsculape peuvent facilement percevoir et comprendre la c h o s e , car il ajoute : P o u r bien comprendre cette proposition, il faut retenir qu'une maladie organique est celle qui attaque la texture intime d'un organe, de manire en altrer les fonctions et a i e s faire m m e cesser m o m e n t a n m e n t ou pour toujours. Il est d o n c vident q u e cette maladie ne peut pas se transporter d'une place u n e autre par la simple raison qu'elle consiste dans l'altration des parties organiques c o m p o s a n t le v i s c r e : Par exemple une maladie organique du c u r peut par venir un tel tat qu'elle produise une n o r m e dilata tion des parois, or cette n o r m e dilatation n e peut tre transporte dans un autre viscre: a/insi e n est-il dans notre cas du cancer ; c'est une dgnrescence des glandes c o n g l o mres, dgnrescence telle qu'elle d o n n e naissance u n c o m p o s nouveau que les praticiens appellent chancre bu cancer. Gomment un tel travail opr trs profondment aux dpens du corps glandulaire, pourrait-il se porter sur une autre partie et produire ainsi la mtastase? L'exprience a prouv, pour tout dire en un m o t , que cela n'arrive j a m a i s . 2 7 . Le docteur Scalzaferri est d'accord avec ce trs savant m d e c i n , lorsqu'il parie e n ces termes : On ne peut pas dire que la seconde maladie fut une mtastase de la p r e mire, car elle est survenue longtemps aprs. En outre c o m m e je l'ai dj dit, j e suis trs persuad q u e le mal de m a d a m e Thrse au sein gauche tait un vrai squirrhe c o m m e l'avait t celui du sein droit. Ge n e pouvait tre l'eilet d'une mtastase qui n'aurait pu avoir lieu qu'autant qu'il se serait agi d'un faux squirrhe, c'est--dire d'un s i m p l e engorgement de la g l a n d e . Que dire de plus ? B a rulli lui m m e que la contradiction prend pour chef et pour guide, en est venu convenir srieusement que, m m e
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dans l'hypothse fictive de la mtastase, on ne pouvait point expliquer la drivation des maladies subsquentes du squirrhe qui aurait prcd. La mort de madame Thrse dit-il, en supposant une mtastase, n'a pu en aucune faon provenir du squirrhe, car il faudrait supposer que le squirrhe lui m m c s e serait dissous, or que cette dissolution, absorbe p a r l e sang, aurait ensuite constitu un virus (c'est--dire,une dgnrescence des liquides) lequel en passant d'un endroit un autre, se fut jete sur la poitrine. Mais une telle suppo sition est tout fait absurde,et la s c i e n c e n e peut l'admettre, car une vrai squirrhe ne peut se fondre, en raison de sa substance pierreuse. De quelque ct que se tourne la Critique, elle rencontre des obstacles insurmontables, et il ne peut e n Lre autrement, car les uvres de Dieu ont un tel cachet, de telles marques de perfection, qu'elles m a n i festent trs clairement la main de son trs parfait auteur-
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la version, c o m m e nous l'avons vu, e^L toute diffrente de la s i e n n e . Or, bien qu'il importe peu au fond de notre cause de savoir si une f e m m e malade souffre plus o u m o i n s au lit, il "n'en est pas m o i n s vrai que de ces contradictions dans les dpositions, on peut supposer bon droit que les t m o i n s ont exagr la gravit du mal dont Thrse a t atteinte. Ces t m o i n s n e doivent donc pas inspirer une entire confiance, car celui qui exagre un fait en le ra contant, ne peut-tre, suivant l'adage c o n n u , ni un bon
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MIRACLES
AU
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DE
LA
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.atteinte d'aussi grandes douleurs qu'on le s u p p o s a i t ; o u bien que ces douleurs n'ont pas disparu en un seul instant, pendant la clbration de la grande solennit. 3.. El puis encore, il y a une telle divergence entre le rcit de Thrse et celui de sa nice, au sujet de cette gurison, que nous s o m m e s bien forcs d'avoir des doutes sur la ra lit de cet vnement inopin et prodigieux. La malade aprs sa gurison dclare ce qui suit : Ce jour l je-me recommandai sans cesse au Bienheureux Labre, lui disant u n i q u e m e n t que je ne voulais pas qu'on m'oprt. Du reste, j'tais c o m m e hors de m o i , au point que je ne m'a perus pas qu'on et dcouvert le tableau du Bienheureux. Ma nice m e le fit remarquer, j e commenai alors le re garder, et j e ne pouvais en dtourner mes yeux. La nice, de son c t , raconte le fait diffremment: Nous e n trmes ave nos billets dans l'enceinte rserve aux femmes; t o u t e m o n attention tait porte sur les crmonies ; je ne m'occupais pas de ma tante qui se tenait prs de moi. Lorsqu'on dcouvrit le tableau, au c o m m e n c e m e n t du Te jDeura,.elle m e tmoigna son tonnement qu'on et dj dcouvert le Bienheureux, car elle n'avait rien remarqu de t o u t ce qui avait prcd. D'o j e conclus que jusqu' c e m o m e n t elle avait dormi, d'autant plus qu'elle m e dit que j e l'avais veille. Assurment, ces dpositions de la. mi racule et de sa nice se contredisent tel point qu'il n'est pas possible de savoir laquelle des deux a dit la vrit. Il n'est donc pas permis sur de tels tmoignages, de statuer sur l'instantanit de la gurison. 4. Si maintenant nous e x a m i n o n s le t m o i g n a g e des m decins habiles qui ont soign la malade, nous n y trouve rons pas n o n plus ce qu'il faut pour tablir un vritable diagnostic d e l maladie. Ainsi, le mdecin Flix Scalziiferri appel auprs de la patiente n'a jamais examin srieuse m e n t le squirrhe survenu au sein gauche ;il n'a pas ordonn les remdes convenables, d'aprs son propre t m o i g n a g e : Environ trois mois aprs (aprs L'ablation du squirrhe d,u sein droit) elle accusa de nouveau un mal semblable, non plus au sein droit, mais au sein gauche. A celte nouvelle j e confesse la vrit, je portai i m m d i a t e m e n t , u n mauvaispronostic ; c'est que la maladie prcdente n'tant pas sur-, venue par suite d'une cause extrinsque, mais d une dia thse squirrheuse, celle-ci subsistait entire et s'attaquait, un autre endroit. Je n'eus donc pas le courage d'entre prendre aucun traitement, j'essayai plutt d'y chapper;, car j'avais vu d'autresj|cas semblables de squirrhes repro-
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duits aprs une opration,et qui toujours aboutissaient ;\un cancer irrmdiable. G'est pourquoi je ne m e suis pas ren seign sur cetle s e c o n d e maladie, c o m m e j e l'avais l'ait sur la premire, mais toutefois j e suis certain de son existence, pour en avoir t assur par le chirurgien traitant. Ge n'est donc pas d'aprs son j u g e m e n t propre, niais bien sur l'autorit scientifique du chirurgien que le tmoin en question a formul s o n opinion sur la nature et la gravit du mal. 5. Le chirurgien Gatan Tancioni a explor le mal de Thrse avant que le squirrhe fut extirp du sein droit. A cette poque s e u l e m e n t , il diagnostiqua une t u m e u r au sein gauche qu'il estima tre de la m m e nature que celle du sein droit, q u o i q u e d'un v o l u m e m o i n d r e . Aprs quoi, il ne revit plus la malade, d'o il suit q u e t o u t ce qu'il rap porte depuis sur la maladie, il l'aemprunt aux paroles d'un autre chirurgien. Cet autre chirurgien, A n g e Mascetti, qui a d o n n le plus l o n g t e m p s des soins Thrse, a souvent examin l'tat et la condition du mal. Mais, bien qu'il ait certifi que la t u m e u r survenue au sein g a u c h e tait relle m e n t un squirre, il n'a pu affirmer d'une manire certaine que, dans celte t u m e u r , la duret pierreuse, signe caract ristique et essentiel du squirre, ait persist jusqu'au m o m e n t de la gurison. 11 avoue en effet q u e , quand le mal fut devenu plus grave, il n'a jamais pu t o u c h e r le sein gauche de la patiente. C'est pourquoi s'il n'est pas bien avr, s'il demeure incertain que cette duret pierreuse, proprit essentielle du squirrhe, n'ait pas c o n s t a m m e n t persist dans la tumeur, on ne peut pas n o n plus alfirmer avec certitude que la maladie de Thrse doiVte tre c o n s i dre c o m m e squirrheuse. Dans un tat de choses aussi douteux, il est permis de dire que cette tumeur, qui, s o n origine, affecta les signes du squirrhe, se rduisit, sous l'in fluence des r e m d e s rsolutifs, a cet e n g o r g e m e n t , qui resta au sein g a u c h e de notre malade, m m e aprs qu'on l'et dit gurie. Ainsi donc, mme les tmoigriaqes des per sonnages officiels s o n t insuffisants n o u s donner un diag nostic indubitable et entirement raisonn de la vritable maladie de Thrse. 6. Ces insuffisances que nous rencontrons dans les t m o i n s rendent vraiment difficiles nos investigations sur le sujet qui nous occupe. T o u t e s les difficults qui surgissent devant le mdecin dans l'tude des maladies internes, deviennent bien p l u s grandes, beaucoup plus ardues, quand il s'agit d u d i a g n o s t i c vrai d'un squirrhe cancreux. Ge diagnostic
est tellement incertain, tellement obscur, qne la science mdicale n'a pas encore pu en dfinir, d'une faon e x a c t e , les s y m p t m e s essentiels et caractristiques. T o u t ce q u e l'cole a jusqu' prsent enseign sur cette matire ne re pose que sur des hypothses et des conjectures plus o u m o i n s probables. De plus, cette affection morbide revt des caractres c o m m u n s autres maladies totale m e n t distinctes du squirrhe ou du cancer. II en rsulte que, sous la dnomination gnrique d'affection c a n c reuse, se trouvent comprises de nombreuses maladies ayant quelques rapports de ressemblance, mais offrant galement des diffrences considrables. De nos jours m m e , la science mdico-chirurgicale n'est pas encore parvenue dissiper les ombres qui planent sur le vritable caractre du cancer. L'anatomie pathologique n'est ici d'aucun secours ; on ne peut faire sur l'homme vivant des expriences portant sur la substance des l m e n t s constilulionnels, seul m o y e n pourtant d'tablir un certain diagnostic du cancer. 7. Ces considrations gnrales mises en avant, arrivons"! l'examen plus particulier de la tumeur de Thrse. Par tout ce que nous venons de dire, on comprend facilement que cette lumeur ait pu simuler la nature du cancer, puisqu'elle en offrait les signes ordinaires. A ce sujet, voici ce qu'en seigne trs j u s t e m e n t l'illuslre Voyel : Je dois avertir que quelquefois le mdecin le plus expriment doute qu'il s agisse d'un vrai squirrhe, quoiqu'il ait sa disposition tous les moyens d'observation ; c est cause des transitions nombreuses qui existent entre le mal qu'il observe et les autres tumeurs. (Trait d'anatomie pathologique. Venise 1847. Page 254). C'est donc en vain que vous e n appelez au t m o i g n a g e du mdecin et celui des deux chirurgiens qui se sont prononcs pour la maladie cancreuse. Car il a pu se faire que dans une maladie,si imparfaitement connue, ils se soient tromps dans leur apprciation, d'autant plus que, c o m m e n o u s l'avons fait observer, ils n'ont pas suivi par e u x - m m e s la marche de la maladie.Prenons, par exemple, c e t t e attestation du D Mascelti : On en vint la dissection de la tumeur exlraite, et on reconnut que toute la partie extirpe tait de nature squirrheuse, offrant dj sur que.ques points certains signes de dgnrescence immi n e n t e en cancer. Le v o l u m e de la tumeur tait d en viron deux lois la largeur de mon poing, sa forme tait irrgulire, sa surface quelque peu raboteuse, sa couleur un peu sombre, et elle avait la duret de la pierre. Mais ces signes numrs par le mdecin, la tumeur les prsentait
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LES SPLENDEURS DE LA FO
lorsqu'elle .tait adhrente au sein. P o u r bien remplir s o n rle, le docteur devait pousser ses recherches plus loin, et signaler sparment dans sa dposition, c o m m e n t les m e m branes internes du sein avaient t atteintes par le squirrhe ; quels taient ces symptmes dgnrescence dcmminnnte; e t en lin par quels dveloppements successifs la t u m e u r avait revtu c e caractre d'induration pierreuse. On aurait eu alors, autant que faire se peut, u n diagnostic exact de cette maladie si c o m p l e x e . 8. En examinant trs attentivement la gurison de Thrse, n o u s la trouverons si imparfaite qu'il est impossible d'y voir srement les caractres d'un miracle. E c o u t o n s d'abord le chirurgien Mascetti qui observa le sein avec une grande attention : a 11 n e lui resta, pendant q u e l q u e t e m p s , qu'une durel ou e n g o r g e m e n t dans une certaine partie de la glande m a m m a i r e , elle tait indolente, et je crois qu'elle disparut d'elle-mme, n'en ayant plus e n t e n d u parler. Ce reste du mal lui parut assez grave pour l'empcher d'attri buer la gurison une action miraculeuse, c o m m e on peut le voir par les paroles suivantes : Gomme je n'ai qu' e x poser les faits et n o n pas les j u g e r , j e n'ose dire q u e cette gurison fut miraculeuse, et cela cause de cet e n gorgement. De plus, n o u s ferons remarquer q u e Thrse d e m e u r a aussi p i l e , aussi maigre aprs sa gurison qu'anparavant. Le dfenseur de la cause ne rsout n u l l e m e n t la difficult, lorsqu'il dit qu'on ne p e u t voir dans, c e l t e t u m e u r grosse c o m m e la moiti d'une n o i x , un reste de cancer, attendu
que la gurison de la moiti d'un squirrhe obtenue subitenant, instantanment est un fait entirement nouveau et inconnu dans les annales mdicales. Mais, c o m m e c e t t e
d a m e n'a j a m a i s t parfaitement gurie, les rvrendissimes Pres ont le droit d'infrer de cette rponse que la tumeur du sein a simul l'aspect du squirrhe cancreux :
cause des nombreuses analogies qui existent entre cette tumeur et celtes d'un autre genre, ainsi que le remarque
l'auteur dsign plus haut. 9. Du reste, c e virus morbide, d'o le squirrhe a pris naissance, n'a jamais e n t i r e m e n t disparu ; d'o Ton peut conclure que c'est ce m m e virus qui a engendr la tu berculose dont est morte Thrse, encore la fleur de l'ge, cinq ans aprs sa guridon : A ce sujet, l'un des rvrendissimes Pres faisait j u s t e m e n t remarquer ce qui suit; A bon droit, l'un et l'autre mdecins o n t j u g inutile et mortelle une nouvelle ablation de la tumeur, parce q u e ,
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l e s germes arrachs, la racine morbide qui aurait * infailliblement tu la malade, ne pouvait tre tranche p a r le fer. Eh bien, cette racine morbide qui devait i n vitablement causer la mort, a-t-elle rellement disparu aprs la gurison? Assurment, il n o u s importait beau c o u p de savoir c o m m e n t est morte Thrse Massetti. Or, n o u s apprenons par le mdecin appel au chevet de la malade, qu'elle a s u c c o m b une phthisie pnlmonaire occasionne par cette racine morbide qui avait donn < naissance aux tumeurs. Que faut-il de plus pour tre ( e n t i r e m e n t certain qu'aprs l'extirpation de la premire t u m e u r , qu'aprs la rsolution spontane de la seconde, non seulement la constitution et le temprament natifs de Thrse demeurrent dans le mme tat, mais encore que tout le virus, t o u t le principe morbide de la maladie, dont les autres furent les consquences, subsistrent et se manifestant enfin aprs diverses volutions, o c c a s i o n nrent la mort de la patiente. Je n'ignore pas que le m m e docteur a dit que d'une seule et m m e cause mor bide avaient pu natre deux maladies indpendantes.Mais c e j u g e m e n t est e n opposition avec ce principe de logique : a Deux choses gales une troisime sont gales entre elles. Donc si un seul et m m e virus a engendr et les t u m e u r s et la phthisie tuberculaire (ce que constate e x pressment et propos le mdecin, par l'expression TOMBER A PLOMB) il est plus clair que le jour que Tune et l'autre maladie se relient parfaitement entre elles et ont des relations d'affinit incontestables. 10. Quant l'opinion que nous devons embrasser sur c e point, particulier de notre sujet, nous avons, pour asseoir solidement notre j u g e m e n t , une rgle certaine dans le d cret port sur les miracles invoqus pour la cause de la ba tification du vnrable Jean Berchmans. En effet, le troi sime miracle n'a pas t admis parceque la religieuse Maria Crucifixa Acajani, bien que dlivre de la fivre hec tique, ne paraissait pas videmment tre entirement d barrasse d e l cause essentielle de son mal, c'est- dire, de cette dangereuse diathse organique, d'o naquit dans la suite uue tumeur cancreuse. On ne peut pas davantage attribuer un miracle la gurison de la maladie qui n o u s occupe, avant qu'il soit clairement tabli que le mal a t o t a l e m e n t disparu, avec sa cause premire et efficiente.
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toute la nuit.
Il y a une autre raison n o n - s e u l e m e n t croyable, mais qui s'impose pour ainsi dire, ce sont les douleurs lancinantes et continuelles dont elle tait tourmente. Gomme elle n e pouvait se coueber du ct gauche que dans des conditions trs-difficiles, et que par consquent elle ne pouvait se coucher ordinairement sur ce ct, elle tait force de s'ap puyer sur le ct droit s e u l e m e n t . Qui s'tonnera m a i n t e nant que Thrse, la vue des longues nuits qu'elle allait passer immobile, dans l'insomnie et la souffrance, ait refus d'aller au lit, et ait fait entendre des plaintes. Sa nice, la fille de sa sur avait donc raison de dire : ce n'est qu' contre
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a plus. Mon teint, ce qu'il m e s e m b l e , tait d'un jaune ple, et la nourriture m'tait tellement nausabonde que a j e n'avais plus aucun apptit. Enfin: j e n'avais plus a u c u n e esprance h u m a i n e de gurison . Les m d e c i n s c o n firment la m m e chose, c o m m e j e l'ai m o n t r dans l'infor m a t i o n . G'est donc tort q u e l'observation prtend infrer de l qu'en ralit Thrse n'a jamais t afflige de m a u x considrables. 3. Si vous ne m e l'accordez pas (car j ' e n t e n d s la critique faire une instance) il faut que vous admettiez la seconde partie de m o n dilemme deux cornes ; savoir, que t o u s c e s maux ne se sont pas vanouis tout c o u p pendant qu'on clbrait la solennit de la batification. Gomment en arri ver l, si tous les tmoins d'accord avec l a personne gurie publient qu'ils se sont vanoui ? (c'est ce qu'ils ont fait dans leurs dpositions)? Mais cela ne peut tre,poursuit notre ad versaire, car s'il s'est produit chez Thrse un changement si insolite et si prodigieux, c o m m e n t se fait-il qu'aucun des trois tmoins n'ait t particulirement frapp de ce chan g e m e n t , en son temps et en son l i e u ? P o u r q u o i personne n ' a - t - i l remarqu qu'elle prenait tout c o u p une force i n a c c o u t u m e ? Pourquoi personne n e s'est-il aperu qu'elle avait t subitement g u r i e ? P o u q u o i enfin per s o n n e n'a-t-il dit m o t de cet vnement merveilleux avant que cette dame de retour dans sa maison ne montrt qu'elle tait g u r i e ? Tous ces points d'interrogation deviennent inutiles, ds |ue Thrse atteste, qu'en regardant l'image dcouverte de IL Benot Joseph, pendant la s o l e n nit de sa batification, /elle s'est sentie parfaitement g u rie, bien qu'elle n'ait pas voulu divulguer le prodige i n c o n sidrment, avant d'avoir visit son s e i n , son retour la m a i s o n : A l'instant m m e je ne ressentis plus de douleur la mamelle gauche, laquelle jusqu'alors m'avait tant fait souffrir, j e pressai avec la main la partie malade, et j e n'prouvai plus aucune douleur ; toutefois je n e dis rien personne, m e rservant de retour l a maison d'exami ner la partie malade. Et plus loin : Je ne m'aperus pas qu'on dcouvrit l i m a g e du Bienheureux, mais j'en fus avertie par ma nice Aune Marie. Alors pensaut m o n mal, je reconnus que je n'prouvais plus de douleur ; j e pressai la m a m e l l e malade, j e ne ressentis a u c u n e dou leur et pour cela je tins pour certain que j'tais gurie. Mais il est faux que personne parmi les c o m p a g n o n s de Thrse n'ait rien aperu d'extraordinaire et d'insolite pr sageant la gurison. ils taient trois Nicolas Piltorj, Ario-
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dant Cicolini, et la fille du frre de Thrse. A ces trois il faut ajouter un quatrime, Andr Pitorri leur convive au repas qui eut lieu dans la maison de Juvnal P e l a m i . O r l e R. Nicolas Pitorri a tmoign en ces termes : la c r m o nie termine, nous n o u s trouvmes ensemble chez P e lami, au palais Accorimboni,o nous prmes notre repas.
Ma cousine tait toute joyeuse, et gaie au del de ses ha bitu des, elle mangea d'un bon apptit ne faisant aucune
allusion sa gurison. Andr Pitorri parlant ausi de ce repas, ajoute : J'y arrivai aussi et nous nous mmes tous table. Ma tante n'tait plus courbe, mais redresse et joyeuse. Anne Marie la sur de ce dernier ajoute : Je n'eus pas la pense que ma tante ft gurie, mais ensuite, en rflchissant bien tout, il est vrai que dans cette a journe depuis le T E DEUM, je rentendis plus aucune
a plainte de ma tante, et je nevis aucun signe indiquant qu'elle ft malade. Aussi,en voyant la manire expeditive avec laquelle elle fit pied la route tout d'un trait, il me
parut qu'elle n'tait plus malade. En effet, lorsque nous cherchions un m o y e n de transport, elle rpondit que cela
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q u e tous les c u r s taient remplis d'une pieuse m o t i o n , la j e u n e fille, soit par q u e l q u e e x c l a m a t i o n , s o i t en lui t o u c h a n t le bras, soit par u n e interpellation directe, rveilla sa tante demi assoupie. Celle-ci s'informa de c e qui s'Lait pass, et demanda si l'image dn Bienheureux tait dj d couverte ? La j e u n e fille l'affirma, et fit connatre la malade o l'on en tait. Alors Thrse en regardant la sainte i m a g e sentit que ses douleurs s'taient v a n o u i e s , et portant la m a i n sa m a m e l l e affecte de la maladie, elle c o m p r i t qu'elle tait g u r i e . T o u t cela rsulte v i d e m m e n t de l ' e n semble des dpositions de l'une et de l'autre, et voici ce que Thrse n o u s apprend: Dans cette j o u r n e j e m e r e c o m m a n d a i s sans cesse a u Bienheureux Labre, lui disant u n i q u e m e n t que j e n e vou lais pas m e laisser faire l'opration ; d'ailleurs ce j o u r l j'tais c o m m e hors de moi, ce q u i m'empcha de m'aper cevoir du m o m e n t o u Ton dcouvrit l'image du B i e n h e u reux. Ma n i c e , ci-dessus n o m m e , m e l'apprit ; alors j e c o m m e n a i la regarder attentivement, et j e n e pouvais en dtourner m e s yeux. Dans cette c o n t e m p l a t i o n , j e ne v sentis plus de douleur la m a m e l l e gauche, bien que j u s qu'alors elle m'et fait beaucoup souffrir ; c'est pourquoi j e pressai avec la main la partie malade et j e n'prouvai a u c u n e d o u l e u r . Anne Marie fille de sa sur dclare son tour : Nous entrmes avec des billets dans la tri bune des d a m e s ; j'tais attentive la c r m o n i e et m'oc cupais p e u de ma tante qui se tenait ct de m o i . Lors qu'on dcouvrit le tableau, an c o m m e n c e m e n t du Te Deum, elle me parla avec un air d t o n n e m e n t , de c e q u e le tableau du Bienheureux lt dj dcouvert, sans qu'elle ce et pas remarqu tout ce qui avait prcd; cela me fait supposer qu'elle avait sommeill jusqu' ce m o m e n t , d'au tant plus qu'elle m e dit ensuite, que j e l'avais veille, c e d o n t , du reste, j e ne m e souviens pas. A ce m o m e n t - l m a tante tait gurie de son squirrhe.
J
La critique prtend que ces deux tmoignages sont si dif frents qu'on ne saurait saisir de quel ct se trouve la vrit. Elle est, rpondrai-je, dans l'un et dans l'autre, 'car ils concordent pour la substance du fait, et cela suffit, s e l o n la prescription du droit, pour qu'on ajoute foi aux t m o i n s . De plus il ne peut y avoir qu'un seul doute ; celui de savoir si dans le court dialogue qui e u t lieu entre Anne Marie et sa tante, la premire interpellation sortit de la bouche de la ma lade o u de celle de la j e u n e fille. 11 est de toute vidence que ce fut la j e u n e fille qui veilla Thrse. E n elfet 1 lorsque de
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deux tmoins Tun affirme le fait et l'autre dit : je ne m'en souviens pa*, il faut prfrer celui qui garde la m m o i r e du fait ; 2 dans une conjoncture aussi rcente, la tante a d i t la jeune fille que celle-ci 1 avait veille, et Anne Marie l'atteste elle m m e : Elle m'a dit que je Pavais veille, 3 Quand il s'agit de deux personnes dont l'une n'a cess de dormir pendant que l'autre tait certainement veille, et qu'on ne sait quelle est celle qui, la premire, a adress la parole l autre, le sens c o m m u n nous dit assez claire m e n t que c'est celle qui tait veille G est donc en vain
<plasiion s /ois l'tat et le* con tuions de la m \ ladu\ elle nie pourtaut qu il ait pu affirmer aoec certitude que cette duret de pierre, particulire la nature et au caractre du squirrhe, au persist jusqu' la gaensm du mit. Il avoue en effet, dtt-etle, que, te mal croissant, tl ne lui avait plus t possible de toucher la mam"ile gauche de cette- femme.
Il e&t bon de rpondre ces objections en suivant l'urdre inverse, et de donner la premire place au docteur Mascetti, vu que, au dire de la Censure, c'est lui qui a donnai Th rse tes soins l<-s IUUS assidus. Je crois bien que la relation du clbre mdecin est corpplte ; mais supposons un i n s tant qu'elle laisse encore quelque chose dsirer.. Il est reu dan* noire Droit que la totalit des lments dont se c o m p o s e un mm^ fait ne se cherche pas uniquement d*n-> le t uoignage d u mdecin, tu.us dans l'ensemble d e s dclarations de tous les tmoins afin q u e , au besoin, l e s rponses des uns supplent c e qui pourrait manquer a u t m o i g u a g e des autres. Bleu plus, ou pourrait se passer c o m p l t e m e n t du tmoignage du mdecin, lorsque les
aunes len ima sont capables d'a/fir-ner clairement les qua lits de la maladie ; In+qae la maladie est de celtes qui sout e idetites par elles-mmes ettjui e>arat tre connues par des pets mues q^ .M sont m m> deci us ni chirurgiens*
(Ben. XIV, livre 111 chap. vu, i) la lin.) Si l on peut a d mettre cette r^le pour l'enseiiible de tous les s y m p t m e s ,
vi.
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plus forte raison peut-on le faire quand on interroge des m d e c i n s et quand il s'agit d'un seul s y m p t m e qui tombe sous les sens, se peroit au toucher, et peut, en c o n s q u e n c e , tre reconnu el attest par l'homme le plus i n c o m p t e n t . L e m a m e l o n d'un sein est-il .souple ou d u r ? il n y a pas de f e m m e si sotie qui ne puisse s'en assurer en touchant, et le dire avec une clart suffisante. Or tant que la tumeur p u t supporter le toucher, Thrse e l l e - m m e et Candide Cortesi qui la servait, sentirent la duret. g. Mais lant que la tumeur put se toucher, insiste la Cen sure, le chirurgien, lui aussi, sentit qu'elle tait dure au t o u
accru,
impossible, parce que la ma lade ne pouvait souffrir mme le plus lger attouchement. y>
Nous voil bien malheureux 1 et Ton va infrer de l que le d i a g n o s t i c du cancer est incertain ! Ah ! ce diagnostic n'en sera-t-il pas, au f-ontraire, plus clairement confirm ? Est ce q u e l'intensit de ces douleurs lancinantes ajoute aux autres s y m p t m e s si terribles n annonait pas v i d e m m e n t q u e le squirrhe s tait transform en un cancer occulte, c o m m e tous les m d e c i n s l'ont reconnu ? Bien plus, celte poque, on aurait v a i n e m e n t cherch de la duret, puisque le cancer en tait arriv a la priode qu'on appelle la priode de Y amollissement. Cette tumeur ( e n a seigne Till. Ranzij qui se m o n ire dure et de la c o n s i s t a n c e de la pierre, qui ensuite aune penode de ramollisse ment et enfin donne lieu u n e ulcration h o r r i b l e , . . . est a n o m m d'abord squirrhe, puis cancer occulte dans la p riode de romolli.^semmt, et enfin cancer manifeste, quand la tumeur est parvenue la priode d'ulcration (lianzi P a t h o l . chirurg vol. 1). N o u s pouvons donc nous e n tenir srement au rcit du docteur Mascelti, et le considrer c o m m e a b s o l u m e n t c o m plet- , 6. U n e fois admise, c o m m e parfaite, l'attestation du d o c teur qui donna des soins assidus la malade, attestation qui c o n c o r d e merveile avec les dpositions des autres t m o i n s n o n initis l'art mdical, on ne peut rien dsirer de plus, d'aprs les prescriptions du droit et la c o u t u m e reue ; les suffrages de deux autres m d e c i n s minents sont la vrit trs utiles, et il faut les estimer beaucoup, mais ils n e sont pas ncessaires notre preuve. Ainsi donc, quoique le docteur Scalzalerri n'ait vu que rarement la malade quand elle sour irait du second o a n n r , c t qu'il al tet-te beaucoup par oui-dire; q u o i q u e l'illustre Tancioni ait inspect le squirrhe du ct
L E S M I R A C L E S A U T R I B U N A L DE L A S C I E N C E .
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gauche, quand il commenait, et n'avait encore pas pro gress, on ne peut rien conclure de l qui puisse rendre moins forte la dmonstration de la maladie. De plus, il est bon de rappeler qu'il faut faire .grand cas du tmoignage du docteur Scalzaferri, parce qu'il resta assidment prs de Thrse pendant qu'elle souffrait du squirrhe du sein droit, et parce qu'il vit et tudia la nature du cancejr aprs qu'on l'eut enlev ; or celui de gauche fut la continuation du mal antrieur,., et tous les tmoins dclarent, qu'il tait en tout semblable au p r e m i e r . Quant l'illustre Tancioni, il n'examina pas seu.ement deux fois la tumeur gauche, mais il fut prsent la premire amputation, et tout le m o n d e comprend sans peine quelle force son tmoignage apporte notre c a u s e : Avant l'opration de la mamelle droite, j e m e rappelle avoir aussi observ et explor la gauche par le toucher, et c'est ainsi que je la trouvai s e m blable la droite, mais n o n encore parvenue au m m e degr. 11 ajoute peu aprs : Je ne me rappelle pas pr cisment combien de jours se passrent entre ma premire visite et l'opration laquelle je fus prsent. Ce qu'il y a de certain, c'est que Je j o u r de l'opration je retrouvai la tumeur dans l'tat o elle taitlorsque je l'observai la pre mire fois. Et plus loin : Les caractres que prsentait la mamelle gauche taient la duret, le volume et l'irr gularit d'une tumeur galementcancreuse qui se cachait < au sein de c e l t e mamelle, sans altration aucune des tissus c externes ; mais il tait impossible de douter que cette t u m e u r ft d'une espce diffrente. Si donc vous runis sez dans*votre esprit tous ces d o c u m e n t s , vous trouverez n o n pas quelques preuves isoles, mais un nombre de preuves vraiment imposant. Que la critique s'efforce aprs cela de sparer les tmoins et de les prendre part, pour assaillir le bataillon tout entier, c'est l un artifice vieilli et us, ddaign et repouss depuis longtemps, dans une foule de causes, par la sagesse de cette sainte congrgation. 7. Aprs avoir essay d'infirmer l'autorit des tmoins et la force des preuves, la critique atlaque d'une manire gn rale les s y m p t m e s du cancer : que ne peut-elle les bannir de la terre! mais elle les dit incertains, obscurs, d o u l e u x , e t tels, en un mot, que la science mdicale n'a prs encore p u les designer d'une manire dfinitive. Si l'on lirait les consquences logiques des termes que la Censure emploie avec toutes sortes d'ornements et d'lgance, et si l'on j u geait svrement ses expressions, non seulement on les trou verait injurieuses pour la noble science de la mdecine et
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pour ses plus m i n e n t s adeptes, mais elle blesserait encore grivement la dignit et la grandeur de la sacre c o n g r g a tion car, dans les anses de batification e t de canonisation, elle a rpondu souvent qu'il tait certain (c'est--dire qu'il tait manifeste) q u e des cancers taient guris ; et il n e s'a gissait pas s e u l e m e n t de e u x qui avaient affect u n e partie extrieure du corps, c o m m e celui dont il est ici q u e s t i o n , mais encore de ceux qui taient les p us difficiles connatre ,et se cachaient au fond des viscres. B e n u t X l V rappelle des gurisons miraculeuses de cancer q u e la sacre Congrga tion des rites a reconnues dans les causes de saint Louis de Gonzague, de saint Laurent Justinien, de saint Jean de F a c u n d o (Livre IV g 1, cha p. xvu, li et s u i v ) . Qued'autres sont venues la suite de celles-l! Ils le savent, les Pres trs sages, qui rien n'est plus frquemment offert, dans la discussion des miracles, q u e la lecture de c e s titres :
Gurison instantane
et parfnte
tumew cancreuse, etc .11 le sait aussi le-savant P r o m o t e u r de la F o i , qui, oblig, raison de ses f o n d i o n s , de tr.iiter f r q u e m m e n t de ces sujets et d'en disputer savamment, peut raisonner sur les cause* m i e u x qu Hippocrate ou Boeihaave. Je pourrais, m o i aussi, apporter ici le rsultat de m o n e x p rience en ces matires,si je ne craignais de paratre en cela m e vanter de quelques palmes lgres q u e j e n'ai certes pas cueillies sans de pnibles etforts. Qui oserait donc dire q u e cette i ottgrgalion a tant de (ois prononc le constat, sur u n e maladie dont l'existence ne peut lre c o n s t a t e par des indices certains ? J'ai dj d'ailleurg tabli, d'aprs Ranzi,que les savants j u d i c . e u x , q u i cultivent la s c i e n c e m dicale, o n t pu tabnr quelques caractres incontestables, et
de tout temps reus,qui ont traa *e tous les sicles et toutes les coles, si s susciter de contradiction, qui dureront autant de temps que la maladie, cancreuse persistera tre un flau de l'humanit* .De mineMonteggia, traitant des signes diagnostiques du cancer, c o n c l u t ainsi : < De tout cela il rsulte qu'il n'y a pas un seul caractre sur et non quivoque du squirrhe, mats, de mme que dans beaucoup d aunes maladies, son diagnostic doit se tirer de Cen il senib*ude plusieurs circonstances qui, runies, arrivent d a crer la certitude sur le caracte) e de la maladie ^Institut.
chirurg. Par. 1, chap x v 105 ) .
8. M a i s la Cetisure n'a confiance ni en m o i , tranger aux mystres d Esculape, ni daus les autorits que j ai cites; il faut dune s e n rapporter, pour tre bien fix e n cette affaire, celui dont la sacre congrgation a suivi s c r u p u -
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leusement la doctrine, et lni demander c e que l'art de g u rir peut offrir de renseignements, ce que les plus habiles dans cet art ont crit sur les signes de cette maladie. Or ce grand mdecin a dclar expressment : Bien qu'il puisse arriver, et cela trs-rarement, que le diagnostic d'une affection cancreuse resle quelque temps douteux, cependant les tumeurs malignes de ce genre sont ordi nairement acccnrj agnes de telles circonstances, et pr s e n t e n t des symptnies tels, que l'on peut trs bien dire
qu'il n\j a nutlheurevMwrni / as de diagnostic plus cer it tain. Et jvsUn>c7it, dans le cas en question se rena contrent les circonstance* dont j'ai parle; car, de fait,on y trouve tout ce que les plus clbres auteurs exigent pour tablir arec pleme certitude le diagnostic du cancer (juge a a ff m e n t mdical de Texcellenlissime Alexandre Ceccarvlli, lett. E ) . Et plus loin : 1 est vrai que dans quelques 1 cas, et en particulier, lorsque le cancer a son sige dans les parties les plus intimes de l'organisme, ou bien quand il en est ses dbuis, le diagnostic offre quelqup difficult, m a i s al n'en est pas ainsi dans l e cas en discussion, o l'on trouve tous les caractres qui peuvent servir le rvler. En effet Vogel cil par l'adversaire dit : q n d quefois on peut rester dans le doute, mais ici les experts n'ont pas pu se tromper sur la -qualit de la maladie, par suite d'une obst rvation peu exacte, puisqu'il rsuite du procs qu'ils en laient compltement informs.En oulre, les paroles du docteur Mascetti numrant les caractres dcouverts par l'examen analomique du cancer de la mamelle droite, sont tout fait apte montrer qu'il y avait bien aussi de 1 autre cl un-vrai cancer. (Jugement mdical de l'excellent docteur Alexandre Ceccarelli sur la fin).
9 Joignez cela que, dans le fait propos, il se trouve encore une sorte d'argument 1res lumineux, qui n'a jamais paru,, que je sache, dans les causes de ce genre : je veux dire l'inspection des parties intimes du tissu c a n c reux, lesquelles furent mises dcouvert sous l e s re gards fidles des mdecins, lorsqu'on eut enlev du sein droit la t u m e u r squirrheuse, semblable celle dont nous n o u s o c c u p o n s . L'importance considrable d'une preuve de c e genre n'chappera pas au trs-sage Promoteur de la foi, qui Ta indique indubitablement, quoique d'une manire obs cure et indirecte, quand il a dit la fin de ses observations critiques : Les modernes docteurs en mdecine ou en.chi rurgie n e sont pas'arrivs non plus, malgr les observations
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les plus attentives, jeter assez de lumires pour dissiper c o m p l t e m e n t l'obscurit de la nature du cancer. L'anatomie pathologique n e saurait en effet procurer aucun clair
n'est
pas possible
vivant
seraient de t o u t e ncessit pour saisir les l m e n t s , au m o y e n desquels on pourrait asseoir un diagno-tic plus cer tain du cancer.)) Or, dans le cas dont il s'agit, on a pu faire ces obst-rrations svr un homme vivants. On a trouva q u e l'assemblage i n t i m e des l m e n t s qui forment la substance m a l i g n e du cancer tait l e m m e chez notre Thrse, q u e sur les cadavres de ceux qu'on a explors aprs q u e le c a n cer les eut fait mourir Je l'ai dmontr dans ma r ponse aux premires observations, o j'ai compar les avis et les enseignements de J- B. Monteggia avec les pa roles des trois mdecins qui o n t assist l'amputation du cancer. La force de celte preuve fameuse n'est pas reste cache n o n plus l'illustre Expert qui a puis l son troi sime argument pour formuler son j u g e m e n t , e n disant q u e le cancer de la m a m e l l e droite ;iyant t amput e t a n a t o m i j e , il tait constat q u e c'tait un vritable cancer. 10. C e s t en*vain que, pour obscurcir la lumire clatante d'une dmon>tration si claire, on oppose les subtilits q u ' a nnoneellent les observations critiques. Ne pouvant supporter la relation du docteur Mascetti, qui a fait l'opration du cancer, et en a dcrit la structure intima, elle dit qu'elle d sirerait une description plus dtaille, parce que ces marques
que le mdeein dsigne, la tumeur lespr 'sentait quand elle tait encore adhrente la mamelh' et identifie avec elle.
Mais le chirurgien reoit ici un reproche tout lait i m m rit. Ne voyez-vous pas qu il a dcrit ce qui lui est apparu en inspectant le tissu intime du cancer ? Vous vous plaignez que la tumeur n'ait pas t autre alors, q u e ce qu'elle pa raissait, quand o n e n n'en voyait q u e l extrieur. Mais c'est une plainte injuste ; car il fallait ncessairement qu'il en fut ainsi. Si un architecte, par exemple, o u un ouvrier m a o n , voulait dcouvrir la nature intime des. murs ou des parois dont il a i n s p e c t la face extrieure, et si aprs avoir brch et ouvert les murs au m o y e n du ci&eau et du marteau, il se plaignait de n'avoir trouve dans les parties in trieures de l'difice q u e la c h a u x , les pierres, et les briques dont les ttes et les angles avaient frapp ses regards l'extrieur du btiment, n e serait il pas accueilli avec un rire gnral ? 11 faut vous en rjouir, lui dirait-on, puisque cela prouve que vous aviez bien j u g de l'difice, rien q u e
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par son aspect extrieur C'est l prcisment ce qui. e s t arriv nos mdecins ; l'autopsie du cancer leur a d m o n tr qu'il tait l'intrieur, tel qu'ils l'avaient autrefois j u g ses signes extrieurs, c'est--dire, la vue et au t o u cher. Toute cette masse tant extraite, tout ce qui tait cach l'intrieur tant maintenant au dehors, rien ne a pouvait m i e u x nous confirmer la nature de celte t u m e u r , que dsormais nous avions tonte entire dans nos mains, j e pus ainsi la toucher et l'observer pour mieux me prou ver l'exactitude du j u g e m e n t que j'en avais dj port durant tout le cours de la maladie (c'est Scalzaferri qui < parle;. Quant la brivet ou la prolixit de la re*c lation crite par l'illustre docteur Mascetti, un des m decins experts a dit s a g e m e n t : Ces paroles, il est vrai, ne contiennent que les remarques les plus essentielles, mais elles taient la conclusion qui rsultait de l'observation, et on ne pouvait prtendre que le docteur Mascetti ft de la tumeur u n e description tellement minutieuse et telle m e n t technique, qu'elle n'aurait servi qu' montrer beau<t coup d'rudition, sans ajouter la moindre force la v rite de son assertion. Et vraiment pourquoi aurait-il a plutt mrit d'tre cr s'il avait fait connatre m i n u tieusement et en dtail tpus les caractres du cancer m m e les plus insignifiante? Ajoutez qu'il n'y a pas eu que le seul Mascetti mettre ce j u g e m e n t , puisque Tancioni et Scalzaferri taient prsents e t , a v e c l u i , furent du m m e avis. (Jug-m. md.) 11. Puisque,d'aprs ce q u i a t dit, n o u s avons constat la nature relle et vritable du cancer, sans qu il reste a u cune chance d'erreur, il n'a pas pu se faire que la tumeur de Thrse n'ait eu q u e l'apparence d'un squirrhe c a n c reux, a raison des transitions nombreuses qui sparent le squirrhe des autres sortes de tumeurs c o m m e on le lit a la fin du 8 des Observations critiques. Par consquent, cette duret dont on remarque plus tard l'existence dans la glande mammaire, ne saurait le moins du monde tre considre c o m m e un reste de cancer. Tous les autres s y m p t m e s cessant, l'enflure disparaissant, le v o l u m e de la t u m e u r diminuant la duret succdant une priode manifeste de ramollissement, il faudrait dire q u e dans ce cancer il y a eu une marche rtrograde d un n o u veau genre. Or cela est tout fait contraire la nature c o n n u e de cette maladie, dont le propre est de progresser toujours, sans jamais rtrograder, (comme le disent N y s t e n . et Ranzi dj cits. Et qu'on ne dise pas que les Pres
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doivent au m o i n s rester dans le d o u t e , car puisque cette, marche en arrire, aussi subi e q u ' t o n n a n t e , du cancer, est contre les lois c o n n u e s de sa nature, et q u e plusieurs causes peuvent expliquer ceite tumeur n o u e u s e , qui plus tard s'vanouit d'elle m m e , c o m m e l'a d m o n t r savam m e n t le ducleur Galan Tancioni, il faut, si n o u s v o u l o n s juger d'aprs les lumires de la raison, rejeter la p r e m i r e hypoibse, et admettre q u e des tumeurs diff rentes sont produites par des causes diffrentes. Thrse en s'apercevant de sa gurison, avait saui de joie (t se
donnant avec les 'mains de grands coups sur ta poitrine pour montrer Qu'elle n'avait plus rien. Or, on sait qu'un lger coup ov mme un frottement vn peu jO)t pouvaient produire la nodosit et la duret. Qu'y a-t-il d'tonnant
qu'il soit rsult u n effet en proportion vidente avec sa cause ? Tandis qu'au contraire, si on l'attribue au cancer qui avait tant svi dans ses progrs et ses ravages, lYffet n e rpond nullement la cause. Bien plus, quand m m e l e s coups n'auraient caus aucune irritation ; l'engorgement pouvait paratre la suite de l'irriiation produite parle c a n cer ancien, c o m m e Ta enseign un h o m m e trs-comptent. (Examen mdical, n : Dans ce cas, c e n e serait pas u n vritable reste de maladie, car ce n'tait p a s , proprement parler, u n s y m p t m e de carcinome, puisque tout, corps tranger fix dans la m a m e l l e n e pouvait en tre arrach, f u t - c e par miracle, sans engendrer le m m e effet. Si l'on expliquait la tumeur selon ce sentiment, et si on ne l'at tribuait pas une cause postrieure, c o m m e l a fait l'il l u s t r e Gatan Tancioni, elle serait t o u t au plus le signe d'une maladie prcdente, ce qui n'infirmerait en rien la perfection de la gurison, c o m m e l'a bien fait remarquer l'excellent docteur Mascetti : Je retrouvai certainement la g l a n d e m a m m a i r e elle m m e dans s o n tat normal, m o i n s l'engorgement dj indiqu l e q u e l , m o n avis, p e u t tre regard ammn un signe de ta maladie ant<* rteure, ainsi qu'il arrive pour les blessures q u i , aprs leur tf gurison, laissent u n e cicatrice. 13. Ces paroles du savant docteur nous dlivrent h e u r e u s e m e n t de toutes les craintes-que la Censure essaye de nous inspirer propos de c e s autres paroles : N'ayant faire
que l\Xj osition des fats, et non les juger, je n'ose dire, <f a raison de vet engorgement, que cette gurison a tmi racu/euse. Cela signifie q u e cei h o m m e minent n'a pas
voulu prendre le rle de matre, dans des questions qui se rapportent purement et simplement aux rgles de n o t r e
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Droit ; pour ce qui regardait sa personne et sa science, il reconnaissait le prodige : Je pins affirmer avec ceittide
el d'aprs les principes scientifi(fues, que la enrison du (( squirrhe dont j e viens de parler doit cire attribue une action surnaturelle. Mais c o m m e il ignorait si des signes tels que les vestiges des plaies qui, aprs leur gurison, laissent leur cicatrice, sont regards, d'aprs
. n o s rgles, c o m m e infirmant la perfection u n e gurison miraculeuse, il ne voulut pas aller plus loin : je hp.crois pas pouvoir aller plus avant.- Mais, noire tribunal, on m e t hors de doute ce dont le mdecin doutait., e n s'appuyant sur ce sentiment de Benot XIV : La cicatrice rsultant d u n e blessure est une consquence du mal ; mais j e n e croirais pas qu'elle pt nuire l'affirmation de la gu rison obtenue par miracle, si celte gurison tait prouve nettemeni et juridiquement (Benot XiV, livre 4,chapitre 8, i2). On opposerait, avec bien moins de raison encore, la pleur du visage puisque, au dire des nombreux tmoins que j ai cits dans la rponse aux' premires observations, il est suffisamment tabli que, le lendemain de sa gurison, Thrse avait le teint de la sant. Ge qu'il y eut de vrai m e n t tonnant, ce fui de voir, le jour m m e de sa gurison, la miracule en possession de toutes ses forces, c o m m e il appert des tmoignages cits plus haut. Or, quand m m e elle ne les et recouvres que plus tard, cela n ' e m p ' h e r a i t pas le m o i n s du monde de reconnaire le prodige, ds lors qu il s'agit d'un mirac:e du second ordre (Benoit XIV c h a pitre et cits plus haut). De l il est facile de passer la s o l u t i o n . d e l'objection tire du fait que la personne gurie n'est pas devenue de suite grasse e t d u d u e . Elle avait mang trs peu au temps de sa maladie,et toutes ses forces avaient t puises*;- son visage a d o n c d ncessairement porter les signes de la maigreur. A moins d'une cration n o u velle, une b o n n e nourriture de tous les jours pouvait seule, en engraissant les muscles, donner de l clat la peau. En attendant le laps de temps suffisant, Dieu aurait d , (pour' contenter la Censure), ou donner un effet rlroactil' l'ali m e n t a t i o n graduelle qui suivit, ou produire un effet ne r p o n d a n t nullement la cause, ou bien, 1 instant m m e , et par une action cratrice, donner de nouveaux accroisse m e n t s des muscles desschs. Les deux premires hypo t h s e s rpugnent aux attributs de Dieu, la troisime c o n s tituerait un miracle de premier ordre, que personne n'exige ni n e demande dans les gurisons miraculeuses. 11 n'y a q u ' u n e seule chose qu'on puisse exiger d c e m m e n t et rai-
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s o n n a b l e m e n t ; c'est que la femme qui auparavant avait du dgot pour toute nourriture, se trouvt i m m d i a t e m e n t m m e de prendre avantageusement une nourriture b o n n e et profitable, qui pt faire disparatre c o m p l t e m e n t la mai greur. Or c'est ce qui eut lieu, ds le jour m m e o elle fut gurie ; car en arrivant dans la maison de M. Juvenal Pelam i , elle mangea d'un bon apptit. Et, c o m m e le rapporte le d e u x i m e t m o i n : Et le continua manger de bon apptit. A ussi, peu peu recouvra-t-elle son e m b o n p o i n t et revint elle l'tat naturel sa c o m p l e x i o n . lit. La Censure prtend, en outre, que le virus morbifiqne ne fut j a m a i s parfaitement purg, ni enlev du corps de la malade, et cela parce que plus de cinq ans aprs, elle m o u r u t . d u n e phthisie tuberculeuse. P o u r augmenter les difficults, elle prle l'un des rvrendissimes Pres des paroles qui, tout en paraissant dites avec trop de rigueur, n laissent pas de contenir, si je ne m e trompe, le germe et le principe de la solution. On lit ceci en effet : Non s e u l e m e n t , aprs l'enlvement de la premire t u meur, mais encore aprs la seconde qui se rsolut d'ellem m e , la malade vcut, je ne dirai pas avec la constitution
corporelle et la complexion
indlbiles,
mais avec le virus de la maladie tout entier; bien, plus, avec toute la maladie principale dont les autres ne furent que la consquence, et laquelle enfin elle s u c c o m b a , le mal ayant pris un n o u v e a u caractre. Ce j u g e trs sage d i s tingue donc bien le viras morutfique et la constitution du
corps, ainsi que le temprament que la nature fait ind lbile. Que cette constitution du corps et cette complexion
naturelle soient restes telles q u e l l e s taient, cela n'enlve rien videmment la perfection du mirac.e ; ce qui n o u s nuirait, ce serait la persi&tauce du virus du cancer et de la maladie principale. Que cela ait persist, l'illustre Juge le dduit des paroles du docteur de M >uro dans sa dposition. Car ces paroles, en supposant m m e q u ' e l l e s . n e soient pas bien comprises, ne signifieraient pas qu il y ait eu un reste de maladie, ce que d'ailleurs le^mdecin nie, en re connaissant deux mal i aies indpendantes l une de l autre, m a i s une vritable m t a s t a s e ; et par cette expression o n entend tout transport ou toute transformation du mal (Chumel pathologie Gen. t o m e 2 chapitre 10 article 1). Or le cancer avait d'abord envahi le sein en laissant le p o u m o n intact, puis il disparut ; dans la suite, et l o n g temps aprs, les p o u m o n s f i r e n t infects. C'est ce qu'a trs exactement cons at le m m e Pre en ces t e r m e s : Si un
L
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seul et mme virus s'est rpandu dans les deux maladies de la tumeur et de la phthisie tuberculeuse, ce que iexoert a justement exprim par te mot tomber plomb, il serait plus clair que le jour que Vune el l'autre maladies ont eu ncessairement entre elles de la parent et de l'affinit au premier chef. Or ni les paroles du docteur de Mauro, ni
celles d'ajtioun autre n e peuvent faire-qu'il existe une mtas tase dans le cancer, car dans les maladies organiques il n'existe ni crise ni mtastase, c o m m e l'a clairement d montr le savant Taneioni, auquel adhrent les autres m decins et de Mauro l u i - m m e , lorsqu'il d i t : Dans le squirrhe il se forme u n e altration de t i s s u s . . . . , laquelle d'aprs sa nature, ne peut cesser, ni par rsolution ni par mtastase,(voyez les rponses aux premires observations c r i l i q u u s e t les tmoignages des mdecins qui y sont rap p o r l s j . D o n c , pour n e pas dire que le savant mdecin s'est contredit, et qu'il a affirm en m m e temps ce qui est incroyable, ce qui rpugne aux enseignements les plus clairs de la science, il faut chercher une raison l*aide de laquelle n o u s expliquerons l o g i q u e m e n t ce qu'il a voulu dire. , 14. Certes, quant ces paroles qui plus que toutes les aulres frappent la Censure, alors si la substance morbide
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n e satisfaisaient pas quelques uns des trs-savants Pres, pour expliquer clairement la pense de l'auteur, je les prie de faire attention ce que l'habile Expert n o m m par la Sacre Congrgation a crit avec beaucoup de science sur la nature des deux m a l a d i e s : Jusqu' ce jour a u c u n au teur, quelqu poque que ce soit, n'a parl de relations, du genre des relations d'effet cause, entre Tune et l'autre maladie, ni m m e du plus faible lien entre elles. Si les diffrentes maladies auxquelles a t sujette Mme Massetti, et, en particulier, les deux ci dessus rappeles, prouvaient quelque chose, ce serait tout au plus q u e sa constitution organique tait assez mauvaise, c o m m e le d m o n t r e n t une ioule de t m o i g n a g e s , et qu'elle foiir nissait ainsi un terrain facile et convenable aux d v e l o p p e m e n t s de productions anormales. Aprs tout, que celui
qui affirmera qu'il y a quelque rarport entre la tu ai berai ose et -le cancer essaie de le prouver. (Jug. m,d.)
Ensuite arrivant celle des observations que n o u s discutons en ce m o m e n t , il dit : La neuvime objection est e n c o r e moins srieuse ; il y a dj t rpondu par les dclara it tions annexes au dernier considrant, o l'on dit en par c ticulier. Si les diffrentes maladies auxquelles Mme Mase < setti a t sujette, et particulirement les deux rappeles ( t o u t l'heure, prouvent quelque chose c est que sa c o n s t i tution organique assez mauvaise, c o m m e de fait le d m o n traient un grand nombre de tmoignages, offrait un terrain facile et convenable leur d v e l o p p e m e n t . Voil en quel sens n o u s devons entendre les paroles du docteur de Mauro. P o u r les m m e s raisons il fait remarquer qu'il n'y a rien d'oppos notre cause dans les paroles du d o c teur Scalzaferri que la critique n o u s objecte. En effet l'il J l u s t r e et habile, mdecin dit : Ainsi en effet, il n y a au-
curie relation entre C assertion du docteur Scalzaferri relativement la diathse squirrheuse, ou la cachexie du cancer, et la tuberculose, et cela par la raison d/ dite
(Jug. md.) 1 est certain d'ailleurs, que ce que le docteur 1 Scalzaferri avait dit ne renfermait aucune obscurit, si on fait attention aux prmisses poses par lui, un peu aupara vant. Il dit en effet: Je n'eus plus le courage d'entreprendre u n traitement, et j e fis en sorte d'y chapper, parce que
f avais ru d'autres cas semblables de SQTJIRRHR R E PRODUITS apu>& COJ ramn, etse terminant mathetaeu sentent par UN CANCER irrparable... Le chirurgien
Mascetti parlait d'une opration c o m m e ncessaire dans ce s e c o n d cas, le mal tant arriv un point semblable
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au premier, mais il ne trouva aucun appui en moi, par ce q u e je jugeais inutile de soumettre la pauvre malade cette seconde extra-lion, puisqu'elle aurait fini par mourir invitablement de sa diaths squirrheuse. Donc le savant docteur prsageait un nouveau cancer aprs l ' e x traction, et n o n une t u b e r c u l o s e ou une autre maladie ; car une mauvaise racine tant qu'elle n'est pas arrache e n tirement, produit toujours des fruits de mme nature. Or aucun cancer ne s'tant produit aprs la gurison, c'est un indice assez clair que la racine vicie avait t t o t a l e m e n t extirpe. Jb\ Tout cela nous ouvre la voie pour rfuter le dernier chapitre des observations critiques, o Ton nous objecte le dcret port daus la cause du B. Jean Berchmans (observa tion 10). Si le troisime miracle ne fut pas admis, dit la censure, ce fut surtout parce que la religieuse Maru Crucifixa Ancajan, bien q u e gurie de sa Jivre hectique, n e paraissait pas entirement dbarrasse de la cause naturelle de sa maladie, c'est--dire, de cette diathse mauvaise; du corps tiui finit par engendrer une tumeur canc e u s . D u reste, une autre gurison de cette maladie ne fut attribue un miracle qu'aprs qu'on et dmontr clairement q u e la maladie avec sa cause premire avait bien t c o m p l t e m e n t dtruite. Rappelons-nous ce dernier miracle ainsi n o n c : .gurison parfaite et instantane de s u r Maria Crucifixa . Aueaj mi, atteinte d'une tumeur c a n c reuse bien confirme Or aprs l'accomplissement du prodige, c e t l e femme prsenta quelques signes de dcomposition d'humeurs d'o le trs habile Censeur concluait que la cause intime de la maladie n'avait pas t d t r u i e . Mais l'illustre Gabriel Taussig. dont la sacre congrgation a admis l'autori rpliquait ainsi : < Reste la difficult que les H 11 PP. r trouvent daus la gurison m'ne, la considrant c o m m e impartait, parce que les crotes qui couvraient l'a raa nielle taient reste-. 1 ngtetnps encore leur place, qu'il y avait chez la malade des signes d humeurs ni'i igns, et que de temps en .emps elle sou [frai t d'rysiples, d e dyspne etc. Quant cet argument il me semble avoir dmontr clairement qu'une g i r i s o n inattendue d'une maladie essentiellement mortelle n'exclut pas le m i n c i e ,
malgr, ia permanence
des dispositions
individuelles
* i'uhiente* c/utca*. (Ba if du V S. de D Jean Berchu mans. Nouv. posit. su les miracles. Jug. du D. T u s s y page 3 ) . M a i s c o m m e dans notre cause on a j u s t e ment prouv ce l'ait capital, * que la constitution* or-
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g-"nique de Thrse Masseiti tait assez mauvaise et a offrait un terrain facile et convenable au dveloppe ment de productions anorma'es (Jug. m d . D. Ceccarelli
cit plus haut), on peut en infrer, par pont de raisons, que le cancer dont il s'agit n'a pas t moins parfaitement guri q u e ne l'a t la t u m e u r cancreuse de sur Crucifixa Acajani. Ajoutez qu'ici l'acret des t u m e u r s parat avoir q u e l q u e affinit avec le virus cancreux, tandis qu'au c o n traire, dans cette dernire maladie (de notre Tnrse) o n voit qu il s'agit seulement d'un vice du s y s t m e veineux qui n'a absolument a u c u n rapport avec le squirrhe e t le cancer.
Ls tumeurs de ce genre, dtffertnt par le nombre ;pour la qualit, elles sont une seule et mme chose. Mais le
sens de cette doctrine n e doit pas tre pris dans u n e accep t i o n si large, qu'il puisse rpondre entirement ce q u i fait l'objet de notre desideratum. Plusieurs tumeurs s e sont dveloppes dans le corps de la malade, avant qu'on ait v u l'apparition des deux autres, dont n o u s avons parl, et q u i sont survenues dans la dernire priode de la maladie ; c'est sa nice qui nous 1 apprend e n ces termes : D'api s m e s souvenirs, dit-elle, m a tante a toujours t maladive ; elle
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a souffert de la poitrine... elle a eu un abcs la j a m b e . . . une tumeur an c o u . . . une inflammation des y e u x . . . u n abcs l'oreille. . et si je ne m e trompe, la fivre tierce, une t u m e u r considrable au cou et autres maux s e m blables. Je puis dire qu'elle tait constamment malade et couverte d'empltres. Eh bien, quoique ces prcdentes tumeurs dnotassent videmment une di a thse dangereuse et morbide du corps, cependant il ne viendra l'esprit d'au cune personne sense de leur reconnatre toutes i n d i s tinctement une seule et m m e nature, sous prtexte qu'on a r e c o n n u les symptmes du cancer dans la tumeur qui a t extirpe. 11 i-erait beaucoup plus rationnel d'induire de cette funeste diathse, qu'elle ft la cause de tous les maux divers auxquels fut sujette Thrse ; il y a donc l un m o t i f de plus pour douter si la tumeur qui fait l'objet du miracle tait de m m e nature que celle qui affecta le sein droit. 2. D'ailleurs, q u e l q u e graves que soient les s y m p t m e s signals dans la marche de la maladie, il n'en rsulte pas m o i n s , d'aprs les circonstances trs-certaines du fait, que cette gravit s y m p t m a l i q u e du mal en question doit tre rpute trop peu considrable pour tre mise en comparai son avec les atroces souffrances d'un carcinome. 11 rsulte en effet des actes m m e s du procs que la maladie n'a jamais empch cette femme de vaquer aux soins de sa m a i s o n , a b s o l u m e n t c o m m e une personne bien p o r t a n t e ; on la vit se rendre la basilique Vaticane, assister aux ftes solennelles clbres en l'honneur du bienheureux B.J.Labre, prendre part un joyeux repas, sans que personne put r e marquer si elle souffrait encore o u si elle avait recouvr u n e sant parfaite. 3 . Nous savons de plus que Thrse fut, dans la suite, atteinte d'une maladie longue et complique dont elle mourut cinq annes aprs la gurison de son mal au sein gauche. 11 et donc t fort utile de rechercher la nature relle de cette maladie dernire. A ce sujet, les RR. Pres prouvent un vritable regret de ce qu'on n'ait pas procd l'autopsie, ce qui et t un excellent moyen d'arriver la connaissance de la vrit sur ce pointimportant. Les m decins appels soigner la malade, quoique habiles chacun dans leur art, sont loin d'tre de la m m e opinion, lorsqu'ils parlent de cet ensemble de maux qui avait une grande-ana logie avec la premire maladie : toutelois on ne peut douter que l'ancien virus, subsistant dans le corps de la malade, n'ait t la cause prdominante des maladies subsquentes. A la vrit, dans leur dposition, les mdecins affirment bien
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qu'aucun vestige de squirrhe ou de cancer n e s'est mani fest, et que la mtastase de cette maladie organique ne pt jamais avoir eu lieu. Mais, ces affirmations, un illustre m e m b r e de cette congrgation oppo-* ce qui suit : Sans m arrter ce fait que, dans le cas prsent, personne n'a constat si, oui ou n o n , quelque affection semblable n'a pas attaqu au moins les viscres internes (et qu'on veui le bien rem irquer q u e les s y m p t m e s indiqus par les tmoins sur l'tat des viscres s e m b l e n t n o u s autoriser tenir ce raisonnement), je demanderai si l'apparition d'une tumeur semblable aurait e m p c h l'existence J i mi racle? N'aurait-il pas fallu.cdant au t m o i g n a g e des yeux, admettre que la prem re t u m e u r avait t extirpe jus |ue te dan-% ses dernires racines ? Au surplus n o u s n'avons de raison de tenir cela, qu'autant qu'il serait encore rest un germe vivace du mal. Car, si ce virus e u rellement reste dans l'organisme, et s'il a produit les mmes etfets pernicieux, quelque soit la forme qu'il ait adopt, il n'y aurait plus lieu d attribuer au miracle la gurison s u r venue. 4 . G e s t .tort que le dfenseur de la c a u s e nie la persis tance du principe morbide, et qu'il le confond avec U cons titution du corps et le temprament in llbile, lesq ieU, de fait, n'ont jamais cau* la mort personne. C'est encore d'une faon inopportune qu'il cherche appuyer s o n j u g e m e n t sur l'autorit du D De Mauro, ( 14 et suiv. Rp. aux obs crit.) Car ce mdecin qui a soigne T h r e s e dans les derniers t e m p s , n'a pas s e u l e m e n t reconnu le simple effet d'une constitution naturelle, coin ne Ta imagin l'expert j u l i c i a i r e par une interprtation d t o u r n e , mais il a de puis, part* tiie/neiiL saisi ta vritable origine maligne de la m'aladie : Cela ressort elaireineiu de sa dposition : il se pro luit quelquefois d..ns L'individu u n e cacotrophie o u corruption d humeurs l e s j u e i i e s , en s'accumulant dans la glande peuvent dterminer an squirrhe. Dans ce cas. le squirrhe proe ie n ituMleirint de lui-mme, la cacotropnie o u La corra^tion remut dans les humeurs, et pouvant se porter ensuite sur m u t e ce autre partie... mais dans ce cas, il y aurait d e u t m iiadies indpendantes l aii de l'autre , c'est--dire, le s i'nrrue et sa cause. 11 a doue pu se faire que m u l a m a Taerose e u t des humeurs vicies qui aient produit le s q u i r m e , et qui ensuite, resta m dans a n tat latent ou i i i c u b u i u u . . . aient amen la tuberculose , maladie qai devait u r j l a dernire pour elle.
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S. E n ce qui regarde la mtastase proprement dite d e l tumeur, l'expert en admetcertainement l'hypothse, c o m m e le prouvent les paroles suivantes : Si la place du squirrhe, il y avait un simple engorgement ganglionnaire. Ainsi, ce tmoin aussi habile que prudent, par son langage rserv, n o u s avertit en peu de mots, il est vrai, mais d'une faon trs-claire, que, de la nature de la dernire maladie ou de l'ensemble des maux, ayant pu se produire par mtastase, il faut conclure le motif pour lequel le diagnostic de la tumeur prcdente demeure douteux et incertain. Au c o n traire, le trs zl dfenseur du miracle, considrant c o m m e certaine la formation cancreuse de la prcdente t u m e u r , question nullement tranche, il n'y a rien d'tonnant ce que, passant outre sur cette grave difficult, il combatte en toute confiance l'impossibilit de la mtastase II est donc de toute ncessit que les divers arguments que nous venons de rappeler soient rfuts entirement par le dfenseur de la cause afin qu'il n y ait plus aucun doute aussi bien sr la nature de la maladie, que sur la parfaite gurison de la malade.
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squirrhe extirp et dissqu par la main du chirurgien. Nos doutes subsistent, m m e en prsence de cet ax.me rappel notre s o u v e n i r : Les tumeurs de ce genre, dif frent par le n o m b r e , pour la qualit, elles sont une seule et m m e chose. Car le sens de celte doctrine n e doit pas tre pris dans une acception si large, qu'il puisse rpondre entirement ce qui fait l'objet de notre desi deratum. Cette objection n'a m m e pas l'apparence d'une difficult ; car elle passe sous silence et nglige enti rement la s e c o n d e des propositions sur lesquelles reposait m o n argumentation. Rparez cet oubli, et m o n argumenta tion apparatra ce qu'elle est, rigoureuse et parfaite. T o u s les mdecins appels en t m o i g n a g e , t o u s les tmoins ordi naires, proclament hanatement que tous les signes externes (il serait absurde de s'enqurir des signes internes, puisque dans le second cancer, il y a eu intervention divine) qui se montrrent dans le premier squirrhe. furent les m m e s dans le second ; les deux tumeurs taient absolument semblables, c o m p l t e m e n t identiques. En tenant c o m p t e de cette iden tit absolue proclame par tous les t m o i n s , il faut bien avouer q&e l'argumentation a paii (tire de la parit) est c o m p l t e t o u s les points de vue. Voici bien l'tat de la question. Deux tumeurs envahirent les seins de T h r s e ; forme, aspect, couleur, induration, v o l u t i o n , effets per nicieux, tout fut identique. L'extirpation et la dissection montrrent que la premire tumeur tait un vritable c a n c e r ; donc la seconde tumeur tait g a l e m e n t un cancer. 2. 'Ne voulant pas tre tdx de tmrit en alfirmant que les mdecins et les autres tmoins ont r e c o n n u les m m e s signes caractristiques dans l'une et l'autre tumeur, j e vais citer quelques-unes de leurs dpositions. L'illut-tre D Ange Mascetti, qui a donn ses soins la malade, aprs avoir l'ait u n e description minutieuse de la s e c o n d e tumeur, conclut en ces termes : En un mot, il tait vident que le second squirrhe tait identique au premier. P u i s , faisant appel deux collgues pour certifier et confirmer son assertion, il d i t : Dans le temps o il tait question de l'exLirpalion du premier squirrhe, n o u s savions trs bien, le D Scazalferri, le prolefcseur Tancioni, et moi, que le mal affectant le sein gauche tait vraiment un squirrhe identique au pre mier. L'illustre D Tancioni souscrivit volontiers cette a s s e r t i o n : Les signes caractristiques affectant le sein g a u c h e , dit-il, taient la duret, le volume, l'irrgularit d'une tumeur galement caitceieiue enferme dans le dit sein sans altration aucune des tissus externes ; il n'tait
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pas possible de douter que cette tumeur ft d'une antre espce. coutons maintenant le D Scalzaferri: a La malade accusait un mal semblable, n o n plus au sein droit, mais a u sein gauche... le mal e u t son cours, et il suivit la mme marche que le premier, avec cette diffrence qu'il disparut par u n e gurison miraculeuse. 3. Aux dpositions des mdecins se j o i g n e n t celles des autres tmoins. Parmi eux, apparat tout d'abord la malade e l l e - m m e : Je puis simplement dire que l'induration d u ff sein gauche tait gale cello du sein droit ; seulement, dans celle-ci, l'induration s'tendait plus vers le bras q u e vers l'estomac ; pour celle du sein gauche c'tait le c o n te traire. Vient e n s u i l e le tmoignage de la comtesse Ngroni : Je savais que la couleur de cette tumeur.tait parfaitement semblable celle du premier squirrhe, c'est a-dire livide et violette. J'ai eu plusieurs fois l'occasion de toucher et de regarder cette seconde tumeur.En outre, par la malade ainsi q u e par les auires, j'tais pleinement i n < forme que les caractres, les symptmes, les signes, les f
souf/rances, tout, en un mot, tait ce qu'il ft dans le pre mier squirrhe cancreux. Anna Maria Pittori, f$Ie de la
s u r de la malade, tient le m m e langage sur sa tante : A proportion que la tumeur du sein gauche se dveloppait, elle ressentit les m m e s douleurs, la fivre et toutes tes autres incommodits de la premire. Les forces physiques allaient galement en diminuant. Un peu plus loin, elle a j o u t e :
En un mot, dans son dveloppement la seconde tumeur suivit absolument la mme marche que la premire. Le
11. Nicolas Pitorri est encore plus affirmatif: La descrip tion que j'ai faite convient aussi bien a u premier squirrhe qu'au second, car il n'y eut aucune diffrence entre l'un et Vautre, si ce n'est que le second tait plus douloureux, plus grave et plus dangereux. Eniin le R. D. Ariodantes Ciccolini vient iaire cho tous ces tmoignages, en ces termes : Nous tions tous attentifs voir quelle tournure a prendrait ce m a l , craignant avec beaucoup de raison u n squirrhe non m o i n s grave que le premier. Et de fait, c'est c e qui eut lieu, la tumeur crt de la mme faon que la
premire, avec tes n bernes symptmes, les mmes carac ires, les mmes incommodits pour la malade; il devint
m m e pire q u e l'autre. 4 . S'il y a quelque diffrence noter entre Tune et l'autre maladie, elle consiste en ce que les symptmes de la seconde, quoique de la m m e nature, furent plus violents et plus per nicieux ; c'est ce q u e n o u s ont appris dj les dpositions
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de deux t m o i n s . Et cela cadre trs-bien avec les d o n n e s de la science mdicale. D'ordinaire, dit Monteggia, (Inst. chirurg. 1 partie, chap. 15. 1118) l'extirparLion des squirrhes et des cancers a trop souvent u n rsultat infruc tueux et m m e funeste, puisque la p e r s o n n e opre n'a presque j a m a i s le temps de se remettre du coup port a sa constitution par une grave opration, qu'elle p r o u v e djsoit la rcidive du m m e mal et au m m e endroit, s o i t des symptmes plus graves de la cachexie cancreuse. Astruc. (trait des t u m e u r s , liv. 4, ch. 2) dit son tour: Il arrive souvent que le malade, aprs u n e opration labou rieuse qui lui a rendu une apparence de sant, est atteint, au bout de quelques mois seulement, d'un cancer nouveau et plus mauvais, Au^si, le savant D Mascetti dit trs justement, en parlant dii second squirrhe : On doit croire que, d'aprs la nature m m e de ces sortes d'affections, c e m second squirrhe prsenta un caractre plus mauvais e n c o r e , car, lorsqu'on traite un premier squirrhe par des m o y e n s violents, le second se dveloppe davantage . Cela lui fait ajouter un peu plus loin : Dans le second squirrhe tous les i s y m p t m e s taient plus violents ; de l une plus grande sensation de chaleur, de plus grands l a n c e m e n t s , u n e a douleur plus intense et beaucoup plus sensible, au point a que la malade, c o m m e j e l'ai dit, ne pouvait supporter le plus lger c o n t a c t ; et cette douleur s l e n d a i t dans le bras correspondant, ce qui rendait les m o u v e m e n t s de c e < bras plus douloureux que oetifc du bras droit dans le pr t te mier squirrhe. Cette augmentation dans les s y m p t m e s a tait progressive et violente, et dans les derniers jours elle
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u tait devenue insupportable u Le squirrhe du sein gauche tait encore plus intraitable q u e le premier, e t il n e cdait aucun remde . T o u t ceci s'accorde bien avec ces paroles d e l m a l a d e . T o u s les remdes taient inutiles. Je m e souviens qu'aprs l'opration, on m e fit prendre des buins, vingt environ, u mais ce fut galement i n u t i l e ; le squirrhe du sein gauche marchait plus rapidement et plus violemment, et ses effets taient plus pernicieux. Certainement les l a n c e nt ments douloureux q u e j'prouvais dans le sein g a u c h e taient plus aigus que ceux du sein droit. Tant que le mal s u t son sige principal dans le sein droit, j e pouvais m e faire des onctions avec les doigts, mais lorsqu'on eut fait l'opration du squirrhe, et que le mal du ct g a u c h e se fut a u g m e n t , il me fut impossible de continuer ces onc t i o n s avec les doigts, cause de l'excessive douleur que
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j'en ressentais, et j e dus m e servir d'une plume. A son tour le deuxime t m o i n , aprs avoir dit que la seconde t u m e u r tait de la m m e nature que la premire, ajoute : Mais le o mal tait pire cette fois, car la malade tait encore plus affaiblie ; elle souffrait davantage, m e disant qu'elle tait bien malade.... Le second tmoin d'office dit aussi : Il o se dveloppa dans l'autre sein un second squirrhe pire que le premier. Enfin la sur de la m a l a d e : C e t t e seconde maladie fut plus mauvaise que la premire ; les douleurs taient plus violentes, et s'tendaient, c o m m e l'autre fois, dans l'pine dorsale; son cou se penchait tout raidi vers l'paule gauche o se trouvaient des glandes engorges. Dans cet tat tout espoir de gurison par les remdes humains tait perdu; car l e mal tait plus o srieux et plus grave que la premire fois . 5. De tout ce qui vient d'tre dit il ressort nettement, et d'une faon plus claire que la lumire du jour, combien faible et vicieuce est l'instance de notre minent contradic teur, lorsqu'il avance que, d'aprs des circonstances trs-cer taines du fait, il est absolument impossible de mettre en pa
rallle les symptmes peu inquitants de la maladie en question avec les terribles symptmes du cancer. Autre
chose est de disserter sur les maladies, autre chose est de les endurer: le chirurgien nous a fait connatre prcdemment toute l'tendue, toute la violence du mal dans les derniers jours, la souffrance tait intolrable. Si, par antiphrase, il
convient d'appeler lgers des maux reconnus intolrables, j e ne m'en tonnerai pas, tant, depuis longtemps, nous s o m m e s t o u s habitus voir nombre de paroles interprtes dans u n sens c o m p l t e m e n t oppos celui voulu par l'usage. On n e doit pas appeler lgre une maladie cancreuse, sous prtexte que le malade ne reste pas constamment au l i t ; elle peut tre trs grave et m m e mortelle, bien que le malade marche et s'occupe de quelques affaires. Mais la critique o b jecte : a Cette maladie ri empcha jamais cette femmeagir
dans la maison comme Vaurait fait une personne bien por tante. Vraiment, c o m m e une personne bien portante ! Ecoutez le troisime tmoin, compagne assidue de sa t a n t e : Elle avait le visage ple, jaune, le teint d'une malade; elle prouvait un grand malaise, et perdait toutes ses forces. C'est ce quej'ai constat de mes yeux. Je ne puis affirmer avec prcision, si, cette fois, des tumeurs lui vinrent sous le bras gauche, mais j e puis dire que ce bras tait m a lade, douloureux, et incapable de s e m o u v o i r , ce qui la for ait le tenir pli et immobile pour m o i n s soufirir, e t elle
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< ne pouvait s'en servir pour a u c u n travail . La m a l a d e ( < ne pouvait pas mme reposer la n u i t : Elle disait ne c pouvoir prendre aucun repos pendant la nuit. Sur la fin, les forces lui manquaient t o u t - - f a i t ; j e voyais que t o u t en elle allait mal ; elle avait un aspect absolument m a u vais. E c o u t o n s le frre de ce t m o i n : On voyait, d'un seul c o u p d'il, que ma tante devait beaucoup souffrir, car elle marchait lentement dans la maison, elle tait devenue courbe, et c o m m e bossue. Il ajoute ailleurs : Je puis dire avec certitude qu'elle tait trs faible et trs amai grie ; habituellement elle avait le teint ple, et, c o m m e * on dit, mlancolique; mais alors son teint tait cada vreux. E n outre l'apptit lui faisait dfaut, et les aliments lui rpugnaient. Le troisime tmoin cit d'office, et qui habitait la m m e m a i s o n , s exprime ainsi : Elle mar chait toujours courbe... et j e voyais bien qu'elle perdait a ses forces. Il parle ainsi de son repas du soir : Madame Thrse se couchait de bonne heure. Quand j e revenais chez elle, vers l'heure de Y Anglus, je lui apprtais s o u te vent son souper, avec sa nice Anna Maria Pitorri. Il fallait, dans ces circonstances, la soulever, et lui mettre derrire le dos trois, quatre et jusqu' cinq coussins, et on ne parvenait que difficilement les bien placer. Son repas consistait en quelques cuilleres de bouillie, elle repoussait le reste avec d g o t . . . J'ai dj dit que ses forces dimi nuaient de jour en jour, qu'elle tait trs maigre et trs ple, ou, pour mieux dire, qu'elle semblait un c a d a v r e . . . Absolument sans forces, elle paraissait une ombre a m b u lante, et son visage tait celui d'un cadavre. Ge n'estpas a s s e z ; la malade dit de son ct : Je dois ajouter que j'tais si faible, que la chaufferette me tombait des mains, n'ayant pas la force de la soutenir. 6. A ces t m o i g n a g e s , ajoutons encore celui du R. D. Ni colas P i t t o r i : L'aspect extrieur de la malade tait m a u vais, et annonait bien son tat ; elle empirait de j o u r en j o u r , perdait ses forces toujours davantage, et s o u visage s'maciait au point de ne prsenter, la fin, que la peau et les o s . . . Elle faisait autrefois ses travaux du m n a g e , mais durant ses ma'adies elle ne pouvait presque plus rien < faire, surtout, lorsque le mal e u t fait des progrs; il suffit r de dire qu'elle ne pouvait marcher et se remuer qu'avec b e a u c o u p de peine, et parce q u e le courage la s o u t e n a i t . Elle ne sortait de chez elle q u e contrainte, p o u r aller entendre la messe les jours de ftes,et encore pas t o u j o u r s ; sa respiration tait gne la m a i s o n , et surtout e n m o n -
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tant l'escalier ; c'est la tumeur qui en tait cause. D o m Rv. Ariodante Ciccolini s'exprime de m m e : a Je m'aper cevais que la pauvre malade arrivait peu peu un tat d'abattement plus grand q u e dans la premire maladie. Et, en particulier, je la voyais, sur la fin,, marcher toute courbe, se plaindre de douleurs trs grandes dans la partie malade qui semblait lui peser conaidrablenaent, et dont extrieurement on remarquait le dveloppement e n volume. Sa physionomie annonait bien une malade a bout de forces... E l l e n e pouvait m m e plus se servir d'une plume pour les onctions faire sur le sein-malade, sans le faire souffrir un point extrme ; elle se trouvait trs mal soit au lit, soit leve ; elle mangeait p e u . . . peine si ellepouvaitse mouvoir et marcher un peu dans la maison,et de faon faire p e i n e . . . On voyait que ie bras gauchetait trs douloureux et tout raidi ; elle ne le remuait qu'avec une extrme difficult. Ses forces taient absolument " tombes, dit enfin la comtesse Negroni, tel point que c'est grand peine qu'elle pouvait se remuer lorsqu'elle avait subir quelque opration. Puis elle ajoute, m Les douleurs devenaient toujours plus atroces, les plaintes plus nombreuses, l'affaissement plus visible, les i n c o m modits plus graves. A peine pouvait-elle manger ce qui lui tait strictement ncessaire pour n e p a s mourir : Quand elle faisait un mouvement, tout rpondait au mal d o n t elle tait afflige. Recueillez avec soin tous ces renseignements; reprsentezvous une femme d u n e maigreur excessive, n'ayant plus qu'une peau j a u n e sur les o s ; marchant pniblement l e dos courb, ne pouvant plus remuer ni bras, ni jambes, ou porter les objets les plus lgers, sans les laisser s'chapper de ses mains : essaie-t-elle de se tenir debout, on la voit chanceler droite et g a u c h e ; la dyspne lui coupe la respiration; d'atroces souffrances la font continuellement pleurer ; tout m o u v e m e n t lui arrache des plaintes, en augmentant les m a u x du sein malade ; toute nourriture lui inspire du dgot, le s o m m e i l est impossible. Au lit, c'est peine si elle p e u t trouver, au milieu de nombreux oreillers, une place m o i n s pnible ; son visage, et tout son extrieur expriment p l u t t l'image d un cadavre que celle d'une personne vivante; c o n templez donc cette malheureuse femme, et vous aurez ainsi (tel est le bon plaisir de la Critique) le trs-agrable portrait d'une personne disante excellente, et jouissant d e t o u s ses avantages. 7 . De quelque faon enfin que les choses se soient passes,
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poursuit h i critique, il rsulte des actes du procs q u e la maladie n'a pas empch cetle f e m m e . . . d e s e rendre la Ba silique Vattcane, et d assister a u \ fles solennelles de la B a tification de Benot Joseph Labre. Elle a pu se rendre la Basilique Vaticane i Mais o demeurait-elle? Prs l'glise de Sainte-Marie des Monts. Et encore, c o m m e n t a-t-elle fait c e court trajet?Nous la conduismes en voiture, Saint-Pierre du Vatican, dit le h u i t i m e t m o i n . A h ! en v o i t u r e ! Maintenant j e comprends trs-bien ; mais o n conduit aussi trs facilement en voiture, M i r un char, l e s corps des t r passs, et on les transporte ainsi n o n seulement a u del du pont St-Ange, mais encore au del du P et du R h n e . E t de plus, il faut se rappeler q u e ce transport e n voiture de la malade ne s'effectua pas sans grande fatigue, sans douleur. La comtesse Ngroni nous le d c l a r e : Le jour de la batification tant v e n u . . . elle voulut absolu m e n t se faire transporter en voiture, dans la matine, Saint-Pierre du Vatican, pour y assister, malgr les d o u leurs et les i n c o m m o d i t s du voyage, raison des s e t cousses de la voiture, c o m m e elle m e l'attesta plus tard. ' Les difficults augmentrent lorsque la malade e u t fait son* entre dans la Basilique, n o u s dit la j e u n e fille qui l'accom p a g n a i t : Arrive dans la Basilique, elle parut souffrir beaucoup de l'obligation de se tenir debout e n attendant le m o m e n t de gagner sa place et de s'asseoir, demandant le faire le plus t t possible. * De son ct, l'minent > D Tancioni dclare son tour ce qui s u i t : a On m a r a p port q u e le transport de la malade l'glise fut trs p nible pour elle. Qu'en cette occasion, notre trs doux Censeur nous permette h u m b l e m e n t de n o n s plaindre de ce qu'il s e montre si rigoureux, si svre envers notre B i e n h e u reux, lorsqu'on a procd bien plus d o u c e m e n t et plus quit a b l e m e m dans u n e affaire semblable avec le bienheureux, aujourd'hui saint, Paul de la Croix. 11 tait galement ques tion d'une gurison semblable de cancer affectant le sein de Rose d'Alna. La malade pour recouvrer la sant, par c o u r u t cheval, et pendant trois h e u r e s , u n e distance de quinze milles entre C a m p o d i m d e e t Frgellas. Cependant aprs les secondes observations critiques du P r o m o t e u r , l a question fut tranche sur cette objection et sur toutes les futres. Et, dans le procs qui n o u s occupe, voici dj trois d i s c u s s i o n s ouvertes. Vraiment cette rptition de critiques c o m m e n c e sentir le moisi ; n o u s tournons dans u n cercle vicieux.
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termine le troisime article des observations critiques ? A sa voir, que la malade gurie prit pari au repas de fte, de
telle faon qu'aucun des assistants ne put remarquer si elle souffrait encore, ou si elle avait recouvr une pleine et en tire sant. La Censure s'appuie sur une fausse supposition.
Car dans ma rponse aux nouvelles obs. crit. ( 3.) j'ai cit le t m o i g n a g e de Thrse elle m m e qui, n e sentant plus la douleur, et ayant press son sein impunment, tenait pour certain qu'elle tait gurie ; j'ai galement cit les paroles desquatre convives qui remarqurent fort bien le changement survenu inopinment dans l'tat de la malade. Dom Ariodante Ciccolini s'tonna de voir qu'elle marchait redresse et m m e qu'elle courait. Les deux jeunes Pittori remarqurent qup leur tante n'tait plus courbe en deux, qu'elle tait
plainte ; bien plus, qu'elle fit rapidement et sans se reposer tout le trajet pied. Cet autre dtail n'chappa pas n o n
plus son cousin, savoir que, table, elle tait joyeuse, active contre son habitude, et qu'elle mangea de bon apptit. Ce m m e c o u s i n , comparant l'tat de cette f e m m e tel qu'il tait aprs la gurison demande et obtenue, avec l'tat de sant existant 1 poque du repas dans la maison de Juvenal Pelami, trouve entre les deux u n e parit complte. Je dois dire en toute, vrit que j e fus tout fait content et satisfait de son aspect extrieur, n'apercevant plus aucun signe de la maladie passe. Rfl chissant maintenant la circonstance du dner que nous prmes ensemble chez Ptamt, il est certain que l'tal de ma cousine tait tout fait le mme, elle mangea g aiment et
autrefois. parfaite,
Mais vous persistez dire que tout cela ne suffisait pas faire
Quoi de m o i n s fond, je le d e m a n d e , que cette insistance ? Il s'agit d'une maladie qui avait son sige certain dans le sein,, et on n e pouvait constater la parfaite gurison qu'en dcou vrant la partie atteinte. Le soir, de retour chez elle, Thrse acquit cette entire certitude, et tout le m o n d e la partagea. 11 en fut de m m e pour cette Rose d'Alena, dont j'ai parl plus haut, elle ne sut, d'une certitude absolue, qu'elle tait gurie, qu'aprs avoir, son retour chez>elle, cart les vtements et les bandelettes qui recouvraient le sein malade. Admettons, si vous le voulez, que les autres tmoins n'ont t certains de la gurison que le soir, et que pendant le jour, ils n'ont pu prsumer le retour la sant que par l'absence de la douleur : en quoi cela peut-il faire c h e c au.
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miracle ? Dans la cause invoque p r c d e m m e n t , la gurison fut ignore de t o u s , except de Rose d'AIena. Ce ne fut que le lendemain matin q u e ce rsultat fut c o n n u des amis d e l personne miracule. Et cependant, c e tribunal sacr aprs deux discussions, c o m m e j e l'ai dit, se dclara suffisamment clair, et n e souffrit pas u n nouveau et strile dbat. 9 Cette gurison miraculeuse arriva le 20 mai 1860 ; la dernire maladie de Thrse Massetti e u t lieu vers le 15 octobre 1865. et dura environ deux mois. Le c o m m e n c e m e n t , les s y m p t m e s , le progrs de celte maladie o n t t dcrits avec soin par le docteur Scalzaferi qui avait trs bien connu Thrse, lorsqu'elle tait atteinte de son double c a n cer. Eh bien, il n'y a r i e n , mais a b s o l u m e n t rien, dans les signes p a t h o g n o m i q u e s de cette dernire maladie, qui puisse se rattacher aux cancers prcdents. Le docteur de Mauro l u i - m m e , appel dans les derniers t e m p s auprs de la m a lade, a dclar qu'il n'y avait pas plus de distance entre le ciel et la terre qu'il s'en trouvait entre c e t t e maladie et le squirrhe. Voici son t m o i g n a g e ; il est clair et p r c i s : La
dernire maladie riaurait jamais pu tre la consquence du squirrhe antrieur. Le prudent promoteur de la F o i
reconnat volontiers ce fait, car il dit : la vrit, les m decins e u x - m m e s , dans leur t m o i g n a g e , affirment q u ' a u c u n vestige squirrheux n'a t reconnu, e t q u e la mtastase de cette maladie organique ne peut avoir UeiO). La critique regreite u nouveau degr de certitude q u i aurait clair tout fait la question, savoir, l'autopsie du cadavre, laquelle si o n n'avait pas nglig de la faire, aurait fourni le meil
leur moyen ar/iver une pleine et entire connaissance de la vrit. Je le reconnais, l'autopsie cadavrique aurait
pu apporter quelque lumire de plus dans la question pr sente ; mais il n'est pas toujours possible de faire la^preuve de tout ce qui pourrait tre apport en faveur d'une cause. En d'autres circonstances, c e sacr tribunal a statu favora blement sur des gurisons miraculeuses, aprs la mort de la personne miracule, bien que l'autopsie n'eut pas t faite. Non seulement cela est arriv, j e m e le rappelle, dans le procs du B. Pierre Ganisius, o fut prouve miracu leuse la gurison d'Anne Marie Buman, bien qu'elle fut m o r t e depuis l o n g t e m p s , et que l'autopsie de son corps n'et point t faiLe. Trs souvent il arrive qu'on termine u n procs de c e genre, deux o u trois ans aprs la gurison. T o u t e la discussion roule s u r les actes du procs, e t , jamais on n e s'informe de c e qui est arriv la personne gurie m i r a c u l e u s e m e n t . Celle-ci meurt un p e u plus t t ,
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l'autre un peu plus tard, souvent m m e la m o r t arrive avant que le j u g e m e n t ne soit port sur le prodige. J'ai dit souvent, l'exprience n o u s l'apprend, que de semblables j u g e m e n t s ne sont mis l'tude que longtemps aprs l'arrive du fait miraculeux. S u p p o s o n s donc que la cause fut i n s truite deux ans aprs la gurison, et la dposition de la mi racule faite. Supposons que, la discussion c o m m e n c e e n 1862 ait t termine e n 1865. Juridiquement, et dans les formes, le j u g e m e n t pouvait tre rendu, parce que o u avait pu dmontrer que la sant de la gurie avait c o n t i n u se maintenir jusqu' la c o n c l u s i o n . La mort de Thrse serait survenue vers la fin de cette m m e anne. Cette mort pou vait-elle porter atteinte au miracle r e c o n n u ? Quoi, seraitce donc parce que, aprs la mort de la miracule, une n o u velle audition des t m o i n s , une nouvelle dposition des mdecins a y a n t assist la moribonde rclament une d i l i gence nouvelle et i n a c c o u t u m e dans les autres procs? Car, je l'ai dit, d'ordinaire, aprs l'audition des tmoins ayant c o n n u le mal et sa gurison, personne ne s'inquite plus de ce qui a pu arriver la personne qui a bnfici d'un m i racle. Est-ce p a r c e ' q u e nous nous sommes montrs plus diligents que d'autres, que la censure n o u s accuse de ne pas avoir ralis le' c o m b l e de la diligence e n ngligeant l'au topsie? Mais notre trs bienveillant critique ne j o u e - t - i l pas ici le rle de ce pre de famille qui applique un vigoureux soufflet sur la j o u e de s o n enfant, parce qu'il a remport dans un concours littraire le second p>*ix ? Interrog sur sa svrit l'gard u n enfant si bien mritant, cet h o m m e , difficile contenter, rpondit que l'enfant aurait d r e m porter le premier prix, la plus grande r c o m p e n s e attache l'tude et la diligence. 10. Au reste ce ne sont pas seulement les s y m p t m e s varis de la dernire maladie, qui font voir que la maladie ancienne avait t entirement gurie.Il y a encore la nature m m e de la maladie organique qui ne peut admettre, aucune mtastase, selon la judicieuse remarque de la critique. J'ai dvelopp prcdemment cette thse fond, il m suffit donc de 1 noncer. L'espace de temps coul entre mai 1860 et octobre 1865 est encore une preuve confirmative ; car il est certain qu'un virus pernicieux n'aurait pu rester aussi l o n g temps cach, s'il n'avait pas cess compltement d'exister. Le cancer , selon la doctrine de Mercali (Mal. des f e m m e s , ch. 17), bien qu'extirp profondment, revient peu de temps aprs l'opration. Etendez le sens de cette dernire expression aussi loin q u e vous le voudrez, vous arriverez
(
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un mois, un an ; mais cinq a n s , cela est impossible. L'illustre Tancioni fixe la dernire limite sept m o i s . Sept mois aprs l'opration, le squirrhe se serait donc reproduit. Mais qu'au bout de cinq annes, e cancer relve la tte, et re vle la forme d'une t u b e r c u l o s e p u l m o n a i r e , cela est entirem e n t n o u v e a u , i n o u i , incroyable, M Ton tient compte des lois physiques tudies et dmontres jusqu' prsent. N o t o n s encore q u e Thrse, quoique d'un t e m p r a m e n t dlicat, jouit d'une sant et d'une agilit remarquables aprs sa gu rison miraculeuse. Elle avait acquis de grandes forces ,dit le troisime t m o i n . Le c i n q u i m e t m o i n tient le m m e langage : Ma cousine, aprs sa gurison miraculeuse, s'ac quittait de tous les soins domestiques, c o m m e avant sa maladie, et m m e avec plus de (a ci lue et d'entrain qu' cette poque. Durant sa maladie, elle ne pouvait goter a u cun repos, depuis sa gurison jusqu'aujourd'hui, elle a repos et bien d o r m i . Ces dernires paroles indiquent q u e c e t heureux tat de sant subsistait encore l'poque o le pro cs fut ouvert, c'est--dire, jusqu'en 1865. Cela ressort encore mieux des paroles du troisime t m o i n : Elle avait un trs b o n teint, et n'tait plus j a u n e c o m m e autrefois ; elle jouissait d'une assez grande vigueur pour accomplir tous les travaux domestiques, sans prouver aucune gne : elle allait et venait sans ressentir a u c u n e douleur au sein qui avait t malade, ou dans d'autres parties du corps. P u i s c e t m o i n ajoute : Ma tante persvra et persvre encore dans cet lat, sans a u c u n e apparence de squirrhe au sein o u ailleurs, et sans aucune i n c o m m o d i t qui pourrait ressem bler un squirrhe . La comtesse Negroni rend un t m o i gnage n o n moins prcis sur la c o n t i n u a t i o n de la sant et s u r l'absence de toute reproduction du squirrhe.
!
44. O donc voyez-vous et tle maladie longue et com plique, q u i n e cessa qu' la mort de la malade ? Oui certes, T h r s e fut atteinte d'autres maux, m a i s c e s m a u x n'taient q u e des maladies de f e m m e s , c o m m e le rapporte sa nice : des coliques utrines,des affection*, nerveusesxues vanouis sements. Qu'y a-t-il l de c o m m u n avec le cancer ? Cette f e m m e e u t u n e s e u l e maladie grave ; elle eut une attaque d ' a p o p l e x i e , , o u c o n g e s t i o n crbrale.. Cette attaque e u t lieu plusieurs fois, selon l'habitude de ce mal ; mais 1 a p o plexie diffre essentiellement du cancer. D'aprs les actes, il rsulte du t m o i g n a g e du c o u s i n , q u e c e l t e seconde maladie avait u n e cause particulire e t externe. Elle eut, u n jour, u n e attaque d'apoplexie, q u e je n'hsite pas c o n sidrer c o m m e le rsultat du c o u p d'un marteau chapp
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par hasard des mains d'un ouvrier, et qui l'avait frappe < la tte, en lui causant une blessure grave d'o le s a n g c s'chappa. On sait que trop souvent de tels coups sont . suivis d'attaques d'apoplexie, non pas aussitt, mais aprs quelques m o i s . L'attaque se rpta deux autres fois, bien qu'avec moins de violence. Qui donc peut exiger, dans la dmonstration parfaite d'un miracle, que celui qui en a t l'objet, ne soit pas atteint la tte par le marteau d'un ouvrier? Si n o u s en croyons les mdecins, la m a l a d i e , cause de la mort de Thrse, avait plus d'affinit avec l'apo plexie qu'avec toute autre affection morbide. Si donc dans l'organisation physique de cette femme il y avait une prdis position ce genre de mort, il faut en chercher l'origine dans un vice cardiaque plutt que clans le cancer. Quoi qu'il en soit, l'mnent docteur Ange Mascelti le dclare sans ambages : Elle tait sujette des aUaques d'apo plexie, et finalement elle mourut d'une de ces at taques. Le docteur de Mauro dit aussi : Cette mort, m o n avis, doit avoir t produite par suite d'un trouble adynamique, c'est--dire, .par la cessation des m o u v e ments du cur, cause par la faiblesse. Enfin le d o c teur Scalzaferri, qui. soigna la malade dans sa dernire maladie, s'exprime ainsi : Elle mourut d'un trouble dans & les vaisseaux sanguins qui doivent avoir prouv quelque part une lsion funeste...... Dans cette'dernire maladie, on ne remarque qu un seul vice, et dans le systme veineux, vice qui n'a aucun rapport avec le squirrhe et .-le cancer. Ce sont deux maladies indpendantes qui n'ont entre elles a u c u n e relation. 12. Le mauvais tat des poumons peut facilement s'expli quer par ce seul fait, que Les congestions crcbra e.s et l'ir
tuberculose.pulmonaire.
Thrse, dj frappe e deux attaques d apopiexie, fut at teinte d'une mtrorrhagie vers le 15. octobre 1865, c'est alors que se dclara la dernire maladie. Ecoutons le m decin : Cette maladie c o m m e n a vers le milieu d'octobre dernier, et depuis le premier accs, il y et de l'irrgu larit dans les menstrues trs abondantes, et qui se succdaient aprs quelques jours d'interruption. Si, e n cas de fivre, o u administre hautes doses le sulfate d e quinine, il n'y a n e n de plus apte dvelopper et expli- ' quer la maladie tuberculeuse. Frank*en redoutait l ' u sage, aussi prcautionnait-il les mdecins contre le t r a i t e m e n t intempestif des fivres intermittentes, leur dclarant q u e les malades dlivrs contre temps de leurs fivres
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intermittentes
par le quinquina,
lose. C'est pourquoi, l'illustre E m i l e Negri clans son rapport mdical, fait sur l'invitation de cette sacre congrgation au sujet du troisime miracle dans la c a u s e de la B i e n h e u reuse Marguerite Marie Alacoque, miracle portant sur une tuberculose, atlribue-t-il la principale cause du mal l'emploi abondant e l continu du quinquina. Eh bien, ds les dbuts de sa maladie, on administra Thrse le quin
rapprochs.
P e u de
t e m p s aprs, dit le m d e c i n je prescrivis de nouveau T u sage du quinquina. La s u r M e la m a l a d e , qui la visita p e n d a n t la dernire maladie, r a p p o r t e : J'appris d'ellem m e qu'elle avait pris beaucoup de quinquina. Quoi d o n c d'tonnant si le fatal remde (je m e sers des paroles de l'illustre E m i l e Negri) si longtemps, si contre temps, si
copieusement
administr,
d'une f e m m e , dj prdispose cette m a l a d i e ? Quelle q u e soit l'origine de ia maladie de poitrine, il demeure, et il de meurera toujours certain, selon le t m o i g n a g e de l'illustre m d e c i n que : la maladie laquelle a s u c c o m b Thrse Massetti n e peut avoir aucun rapport a v e c la tumeur pr c d e n t e du sein g a u c h e . Cette affirmation, poursuit l'm i n e n t m d e c i n , restera inbranlable, tant que personne n'aura prouv, par des observations ou des expriences qu'il p e u t exister un rapport entre la t u b e r c u l o s e et le cancer. Jusqu' ce jour, aucun auteur, d'aucune p o q u e , n'a dcou vert j e ne dis pas u n e relation de cause effet entre l'une et l'autre maladie, mais m m e un simple lien d'af'iinil. (Rapport mdical de l'illustre docteur Ceccarelli.) Monneret n o u s enseigne l'immense distance qui spare ces deux ma ladies, en signalant entre elles les trois traits difirentiels s u i v a n t s : L e tubercule n'est pas vasculaire, le cancer l'est. Le cancer est un parasite qui possde u n e vie propre, il n'en est pas de m m e du tubercule. L e tubercule n'est pas infectant, le cancer l e s t . (Trait de pathologique gnr. Paris 1857. T o m e 2 p. 6 4 3 , 644). 13. De t o u t ce q u i vient d'tre dit jusqu'ici, o n , peut conclure, j e l'espre du m o i n s , qu'il a t amplement s a tisfait aux nouvelles observations faites par la Censure, sur u n v u mis par l'un des i m i n e n t i s s i m e s membres de la Sacr congrgation, en ce qui concerne surtout les affec t i o n s internes ayant ls les viscres, c'est--dire les pou m o n s 11 m e reste ajouter quelques mots sur ce lger e n g o r g e m e n t q u e m o n e m i n e n t contradicteur suppose ressembler au squirrhe. Je demande, dit-il, si l'ruption
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semblable n e doit pas nuire la ralit de la gurison miraculeuse ? Sommes-nous forcs de croire, par le t m o i g n a g e des yeux, q u e la premire tumeur ait t excise j u s q u e dans h s dernires racines? II faut ncessairement que n o u s admettions qu'il en a t ainsi, o u convenir qu'il est rest quelque germe d u mal. Passant sous silence les rfutations compltes qui se trouvent dans la rponse aux premires et aux secondes observations critiques, je me contenterai d'attirer l'attention sur un p o i n t : l'objec tion formule ne repose que sur un mot habilement mis en avant, sur l'pithte semblable ajoute au m o t t u m e u r . Enlevez cette pithte, et la difficult disparat d'elle-mme.Car, si, au lieu de similitude, il y a diffrence, varit, l e miracle reste intact. Mais pourquoi e n l e v e z vous c e m o t ? dira m o n m i n e n t contradicteur. Je l'enlve, rpondrai-je, parce que la loi ordonne de tirer les faits des actes e u x - m m e s . Or, le docteur Mascetti qui a soign la malade, affirme s a v a m m e n t a qu'il n'y avait qu'un simple e n g o r g e m e n t , n e prsentant en aucune faon les carac tres du squirrhe. Or c'est d'aprs les caractres c'est--dire, les signes servant au diagnostic, que l'on doit prononcer sur la similitude ou la diversit des tumeurs. D o n c cette grosseur n'tait pas le squirrhe ( c o m m e le d clare le cinquime tmoin) mais une chose qui lui tait t o u t fait trangre. Allons plus loin, admettons ,par hypo1hse,qu'il y et similitude dans l'espce, il n'en resterait pas moins encore une diffrence substantielle ; car cette tumeur disparut promptement, et le cancer de sa nature est irrsoluble. a Le cancer, dit Grisolle, n'est pas-suscep tible de rsolution (1). J. Baptiste Monteggia dclare que les caractres propres du squirrhe s o n t : 1 Une duret particulire... 2 une incurabilitabsolue. (2) Cette maladie n e pardonne pas (dit son tour Monneret) (S) ; il n'est donn au mdecin que de rencontrer des cancers incurables.C'est d o n c avec discernement q u e le docteur Baruffi argumentait dans notre cause en disant : Si quelquefois il arrive qu'une duret qui paraissait squirrheuse se dissipe, il convient de dire alors que cette duret n'tait pas du tout u n squirrhe, lequel est de sa nature incurable.
j
d'une tumeur
14. Toutefois, si cela vous est agrable, a d m e t t o n s q u e cette lgre tumeur ft u n reste de la maladie. Je prtends encore q u e cela n e porte aucune atteime la ralit du il) Grisolle du cancer en gnral 1055. 2) ionleggia, instit. chirurg, part. 1 cap. 15 p. 1055. (3) Monneret. Trait de pathologie gnrale toiu. 3 ,p. 63G. 1857,
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miracle. Voyez j u s q u ' o j e m'avance, tant est grande ma confiance dans a b o n l de ma cause. D'aprs les actes, il ressort que cette lgre t u m e u r disparut aprs peu de j o u r s , avant la fin de la semaine : Le c i n q u i m e tmoin d i t : Cette petite c h o s e , engorgement ou duret, reconnue p a r l e chirurgien Mascetti disparut tout fait, au bout de trots ou quatre jours. Je le sais pour l'avoir appris < de Thrse, et probablement du chirurgien l u i - m m e . r Mascetti est aussi de cet avis, bien que sa m m o i r e soit un p e u en dfaut ce sujet : Je ne puis assurer, dit-il, q u e cette duret ait disparu, mais j<> le crois. L'ensemble des divers t m o i g n a g e s , met la vracit du c i n q u i m e tmoin apparat dans un jour indiscutable La miracule rapporte q u e , deux jours aprs la gurison, le chirurgien M.iscetti a examin le sein, et q u e cette fois seulement, il a dcouvert u n e petite tumeur. Elle ajoute que, moins d'une semaine aprs la gurison, le m m e doeteu vnt l a v o i r accompagn de l'illustre Tancioni, et q u e l'un et l'autre la trouvrent c o m p l t e m e n t gurie : dans la suite, le docteur Mascetti lui rpta qu'il n'y avait plus rien dans le sein guri. D'autre part, le docteur Tancioni constate qu'il a examin avec soin le sein, et que dans cet examen il n*a trouv aucun vestige de tumeur Voici les paroles mmes des t m o i n s . Thrse parle la premire : Le chirurgien me ft une visite le mardi suivant, c'est--dire, deux jours aprs le miracle. Ses o b servations faites, il m e dit qu'il tait rest une petite chose a u sein gauche. Je ne l'interrogeai pas, ni ne lui demandai s'ilattribuait o u n o n ma gurison un miracle. Quelques jours aprs, c'est--dire, la fin d e l m m e semaine, j e crois, il revint accompagn du professeur Tan cioni, et tous deux, aprs avoir regard attentivement le * sein gauche, dclarrent que m a gurison nu faisait a u c u n doute. Mascetti est revenu plusieurs fois encore, et t o u j o u r s il m'a rpt, aprs observation faite, qu'il n'y avait plus rien. Tancioni, dont la nice de la miracu
lu partie
malade, a port c e t m o i g n a g e : M tant rendu chez elle avec Mascetti, j'ohservai le sein gauche et le trouvai dans son tat n a t u r e l . . . Qu'il y soit rest quelque duret, j e n e l'ai pas du tout remarqu. Pour faire concorder tous c e s tmoignages entre eux, il faut dire que le troisime j o u r aprs la gurison, le chirurgien Mascetti dcouvrit cette petite duret s u r le sein de Thrse, mais qu'avant la P e n t e c t e , elle avait c o m p l t e m e n t disparu. 4 5 . La vrit des faits tablie, j e maintiens la ralit du
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miracle, quand m m e on attribuerait au squirrhe ce lger engorgement. Car, le cancer est de sa nature incurable,, et sa gurison constitue un miracle du second ordre. C'est ici le lieu d'appliquer la doctrine de Benot XIV ; La g u r i son de ces sortes de maladies appartient n o n la troisime mais la seconde classe de miracles : donc, en ce qui les concerne, pour constituer le miracle, il n'est pas ncessaire que la gurison ait lieu instantanment (Liv. IV. Part. l ch. 8, 15). Le m m e Pontife raconte que, dans la cause de saint Franois Solani, la gurison de Jeanne d e B l a n c a s , atteinte d'une tumeur cancreuse, fut dclare miraculeuse, bien q u e l e s effetsde la maladie n'eussent absolument disparu que neuf jours aprs le p r o d i g e : T o u t espoir humain tant perdu, la malade s'adressa au bienheureux Solani, plaa son image sur son cancer, et s'endormit paisiblement. A son rveil, t o u t e douleur avait disparu. Elle se rendit l'glise, pria avec ferveur devant l'image du bienheureux, et son retour, la tumeur du sein creva tout coup avec tant de force, que l'eau en rejaillit sur les assistants et sur la muraille. Semblable a u n e morte, la malade se coucha ; oh appela le mdecin et le chirurgien ; ce dernier extirpa le cancer d'un vaste ulcre du sein, et cela sans la moindre douleur et sans une goutte de s a n g ; ce cancer tait norme, il tait grand c o m m e la main, ses racines taient larges et cartes , sa couleur trs sombre variait entre le vert et le noir. Le chirurgien remplit la cavit du cancer extirp avec de la charpie imbibe de miel rosat ; le n e u vime jour, la chair tait reconstitue ; la gurison fut c o m plte (Be, XIV, liv. 4, p a r t . l . c h a p . 1 7 , 9 ) . L o i n d e m o i toute pense d'envie; m o n intention n'est pas de diminuer e n quoi que ce soit la gloire de Saint. Franois Solani ; mais il m'est permis de dire sans jactance que le bienheureux Labre a obtenu de Dieu pour son h u m b l e cliente quelque chose de plus- prodigieux, de plus admirable.
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16. Dans les deux derniers paragraphes des observations critiques, tandis que la Censure semble me poursuivre dans mes efforts en l'honneur du bienheureux, elle attaque avec un art trs subtil, en le soumettant pour ainsi dire la question, l'minent docteur Pierre de Mauro qui, n'ayant jamais c o n n u la malade ft appel, le soir de l'avant-dernier jour , et qui s'tant retir, aprs lui avoir prdit u n e heureuse issue, apprit, deuxjours apres,qu'eile tait morte. Trs-peu au courant des faits passs, n'ayant jamais vu le cancer dont Thrse fut atteinte six ans auparavant, et dont elle avait t gurie, l'minent docteur a mis h y p o vi. 49
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thtiquenaent, t par abstraction, quelques ides, dont s'em pare avec empressement notre contradicteur, allant jusqu' lui attribuer, ce qui est faux, un certain d o u t e sur la mala die prcdente. Ainsi, dit le* censeur, c e t m o i n , aussi ha bile q u e prudent, n o u s avertit en termes mesurs, il est vrai, mais d'une faon trs-claire, qu'il faut chercher dans la nature de la dernire maladie o u dans l'ensemble des u m a u x ayant pu se produire par mtastase, la cause pour laquelle le diagnostic de la tumeur prcdente demeure douteux et incertain . Si cette interprtation n'tait pas manifestement contraire l'intention du t m o i n ; il y aurait singulirement lieu d'en rire. Gomment c e m d e c i n , appel vers la fin de dcembre 1865, et r e c o n naissant, aprs u n seul e x a m e n , qu'il s'agissait d'une tuber c u l o s e chez u n e f e m m e qui devait mourir le l e n d e m a i n , c o m m e n t a-t-il pu deviner que cette maladie pouvait p r o venir de la mtastase d'un mal i n c o n n u , qu' premire vue il supposerait avoir t tout autre qu'un cancer, quand ce cancer qui,avait exist cinq ans auparavant ; il avait t con stat par deux mdecins les docteurs Baruffi et Scalzaferri; quand les deux illustres chirurgiens Mascetti et Tancioni en avaient dissqu les fibres les plus intimes ? Ovide l u i - m m e .n'aurait pas os donner place dans ses m t a m o r p h o s e s des fables aussi incroyables. 17. A u surplus, c o m m e j e l'ai dj dit, autre fut la pense d u docteur de Mauro : acceptant, sur le t m o i g n a g e de ses c o l l g u e s , l'existence du squirrhe prcdent qu'ils avaient e u x - m m e s constate, il admet le fait c o m m e indubitable ; inluctable ; bien plus, il renouvelle s o n affirmation sur t o u t ce qu'il avait entendu dire de ce squirhe arriv la priode de dgnrescence. Interrog sur cette question, s a v o i r : la gurison instantane d'un tel mal peut-elle tre rpute m i r a c u l e u s e ? il rpondit : Oui certainement, car, a dans ce cas particulier, le squirrhe ayant disparu en u n instant, et n e s'tant pas reproduit depuis lors, cela n e pouvait arriver que par une puissance surnaturelle. De plus j e m e rappelle avoir entendu dire par plusieurs per< sonnes, dix jours environ avant la batification du B. J. t Labre, que m a d a m e Thrse allait subir, sous p e u de jours, l'extirpation du squirrhe, ce qui annonait que ce mal tait dj trs a v a n c . G est pourquoi, quand ce savant d o c teur dit : si ensuite au lieu d'un squirrhe, il se fit agi tm
simple
engorgement
la vrit, et il n'en parle que pour satisfaire les juges sur tous les points. Quand on lui demande si la dernire maladie
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de Thrse e t sa mort peuvent avoir quelque relation avec le squirrhe dont elle a t gurie miraculeusement, il rpond pertinemment : Cette relation entre la premire et la dernire maladie aurait pu exister, s'il s'tait agi d'une t u meur d'un autre genre, et diffrente de celle qui existait rel lement . Puis il ajoute : La dernire maladie n'a pu tre en aucune faon la consquence du squirrhe antrieur. On ne peut pa exprimer son sentiment d'une faon, plus claire, plus explicite. 18. En prsence de ces explications si nettes, disparat galement l'antilogie apparente que le Critique, l'art. 5 de ses remarques, cherche avec finesse et croit avoir dcouvert dans les paroles du tmoin.Gomment un h o m m e intelligent, affirmant l'existence de deux maladies indpendantes l'une de l'autre, a-t-il pu les chercher dans le squirrhe et sa cause ' spcifique ? O veut en arriver le Critique? Toutes les parties du t m o i g n a g e concordent-lles ensemble, c o m m e cela convient au langage d'un h o m m e instruit et sage, o u bien notre mdecin a-t-il tout confondu, tout brouill p a r d e grossires contradictions? Dans le premier cas, il est n c e s saire d'accepter l'explication des mots, expose rationnelle m e n t et sans dtours parl'Expertjudiciaire dans s o n rapport,, savoir : Que la constitution organique trs mauvaise de cette femme offrait un terrain facile et propice au dveloppement des maladies (Jugem. m d . , 3). Le Cri tique soutient-il, au contaire,que Je tmoignage du docteur de Mauro est obscurci par de misrables contradictions ? Eh bien I alors,il faut le rejeter c o m p l t e m e n t , c o m m e document contradictoire et dnu de toute valeur. Cette perte nous inquite peu. Car, enfin, ce mdecin n*a examin la malade qu'une seule fois; il n'a pas vu le cancer; il arrive lorsque la gurison obtenue est .confirme par une dure de plus de cinq aimes. Les j u g e m e n t s des trois chirurgiens qui ont donn leurs soins la malade, Baruffi, Mascetti, T a n cioni, demeurent vrais et inattaquables, ainsi que ceux des deux mdecins qui connaissaient Thrse de l o n g u e date, Bianchi et Scalzaferri.Et pour les couronner, ces dpositions certaines viendra encore s'adjoindre la grave autorit de l'illustre Expert judiciaire, Alexandre Ceccarelli . Oui, j e le pense, les dclarations et les tmoignages si u n a nimes, si pleinement d'accord entre eux, d'hommes consi drables et illustres par leur science, prvaudront sur la d position d'un mdecin appel au dernier m o m e n t , dposition dont les termes renferment, dit-on, des contradictions. Ajoutez- cela que les principes gnraux et particuliers
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d e l pathologie c a n c r e u s e d o n n e n t raison au j u g e m e n t formul par les six docteurs cits plus h a u t . On sait en eifet que les causes spcifiques des maladies p r o d u i s e n t des mala dies dtermines, e t q u e tous les effets d t e r m i n s naissent de causes dtermines, lorsqu'elles sont p l a c e s dans la m m e c o n d i t i o n . On sait q u e le virus p e r n i c i e u x qui e n g e n d r e l e cancer, s'il n'est point limin du corps, produit des mala dies cancreuses.On sait enfin, c o m m e l e d i t l'habile Expert, qu'en aucun t e m p s a u c u n auteur n'a trouv de r e l a t i o n q u e l c o n q u e entre le squirrhe et la t u b e r c u l o s e . Gomme il s'agit ici d'une proposition ngative, cette proposition reste inbranlable, puisque dans a u c u n e observation e x primentale, il n'a t trouv de rapport entre la t u b e r c u l o s e et l e cancer , par consquent n o t r e propre asser t i o n repose sur u n e - argumentation indiscutable. (Rap. md.) 19. Quoique n o t r e thse soit dsormais bien tablie et l'abri de t o u t e attaque,il est b o n de remarquer encore q u e la Critique s'appuie sur u n e supposition sans valeur, lors qu'elle refuse de rapporter la c o n s t i t u t i o n o r g a n i q u e du corps et au t e m p r a m e n t naturel les paroles du docteur de Mauro sur les h u m e u r s peccantes de Thrse, et cela parce que cette chose n'a jamais t pour personne u n e cause de m o r t . Assurment il n'y a pas erreur o u fraude dans l'esprit de celui q u i porte cette affirmation, mais il a p u errer dans les m o t s . Oui certainement le t e m prament du corps est indlbile, et la syncrasie n a t u relle des h u m e u r s n e porte pas e n e l l e - m m e un g e r m e de m o r t ; mais elle peut en tre la c a u s e occasionnelle, selon ces paroles du savant Expert : a offre un terrain
des phnomnes
mor
bides anormaux ; c'est ainsi qu'un h o m m e dou d'un ca ractre "bouillant et irritable sera prdispos des actes d e colre. Que cet h o m m e soit gravement offens, s'il ne s'est pas habitu par u n long exercice se contenir, il se livrera certainement q u e l q u e acte de violence. La qualit de c e t acte est dtermine par la volont actuelle, laquelle, par certaines paroles o u certains faits, constitue tel o u tel pch de colre. E t voil c o m m e n t a lieu l e crime, bien q u e le c a ractre naturel ne soit pas e n soi u n pch,et que,intrinsque-
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dans les maladies. Il y a des causes prdisposantes, au n o m b r e desquelles se trouvent le temprament e t l ' i d i o s y n crasie,(c'est--dire, l'tat des humeurs propre chacun).II y a des causes excitantes o u occasionnelles, qui provoquent le dveloppement d'une maladie chez ceux qui y sont prdisposs . Et enfin il y a des causes dterminantes, a qui exercent une action plus vidente et moins contro verse attendu qu'elles produisent par elles seules et toujours une mme maladie (Chomel, Pathol. ch. v.). Appliquons cette doctrine et cette terminologie m d i cales aux paroles du docteur de Mauro. et Ton verra claire m e n t ce que cet h o m m e minent a voulu dire. Il n'a point e u l'intention de parler de la cause dterminante, car il a reconnu q u e les deux maladies taient indpendantes Tune de l'autre, plus forte raison de forme diverse, chose que les enfants et les femmes les plus vulgaires comprennent. Il n'avait point davantage en vue la cause occasionnelle o u excitante ; car il tablit doctement les conditions sous les quelles la tuberculose aurait pu se produire, si quelque cause avait exist. 11 pouvait se faire que madame Thrse^ de complexion dlicate, d'un teint toujours terreux, et .un temprament bilieux,et cleshumeurs mauvaises,lesquelles mises en mouvement par quelque cause occasionnelle, pro ie duisirent d'abord le squirrhe,lesquelles, ensuite, revenues leur tat latent ou d'incubation par quelque autre cause occasionnelle ayant pu avoir de l'influence sur le poumon,. o n t dtermin la tuberculose . Ces paroles ce par cjuelque autre cause occasionnelle qui a pu avoir de t'influence sur le poumon*, ont t p r u d e m m e n t omises par notre Censeur la fin du 5 de ses observations. La cause occasionnelle et dterminante tant carte,il reste la cause prdisposante, n o n pas .vague et gnrale, mais n o m m m e n t la constitu tion du corps et le temprament indlbile, ce que la Crit i q u e r e f u s e de reconnatre dans la dposition du docteur. E t cependant il dsigne par son nom la constitution du corps : Il pouvait se faire que madame Thrse, de c o m plexion dlicate... etc. Aussi le trs savant expert a-t-il interprt l'intention du tmoin, en disant que la consti tution de cette femme tait mauvaise, et qu'elle avait ainsi offert un terrain facile et propice au dveloppement < de phnomnes ntorbides anormaux c . Mais la Critique, la tte enveloppe de bandeaux, frappe droite et gauche des coups de son pe deux tranchants ; elle accuse de contradiction le docteur de Mauro ; elle accuse l'illustre C e c carelli d'avoir pris dans un sens dtourn la constitution du
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corps ; et elle n e craint point d'tre accuse de dissimulation auprs des simples qui ne connaissent pas vos habitudes j u diciaires. P o u s s , pour ainsi dire, par u n amour excessif de l'objection, r m i n e n t rdacteur des observations critiques, trs-exerc dans la discussion des maladies, semble avoir v o u l u ignorer la valeur des m o t s , et relguer dans une le i n c o n n u e la technologie mdicale qu'il connat fond.
de nos jours, Rcamier, pensaient que le cancer est hr ditaire ; l u i - m m e souscrit cette opinion, c o m m e on le verra ci-aprs, dans la n o t e annexe la lettre E de ce m m e j u g e m e n t . De fait, il rsulte des tmoignages c o n signs au procs, que la tante de la personne gurie
mourut d'un
cancer.
775
B. De Vexistence d'un autre cancer la mamelle droite. Ce fait est absolument tabli par la dposition des t m o i n s dont voici un rsum : l'anne de la Batif. du vn.Labre, o n lui extirpa un squirrhe de la mamelle droite...Le tmoin,qui tait prsent, jugea que son mal tait un nouveau squirrhe. Le squirrhe de la mamelle droite avait les caractres du cancer... Des mdecins habiles extirprent, sans retard, l e squirrhe de la mamelle droite... Une petite tumeur apparut la m a m e l l e droite. Elle avait le vrai caractre du squirrhe... Dans le mal de l'infirme (celui de la mamelle droite) le tmoin reconnut un vrai squirrhe... La tumeur (celle de la m a m e l l e droite), croissant peu peu, fut j u g e par t o u s tre un squirrhe... La tumeur de la ma* melle droite fut regarde par le t m o i n et par tous les ff h o m m e s experts, c o m m e tant un cancer occulte... Affecte d'un squirrhe la mamelle d r o i t e . C. D l'extraction du cancer de la mamelle droite, lequel soumis la dissection, a prsent tous les caractres d'un vrai cancer. Voici encore un rsum des tmoignages : Le squirrhe tant enlev, toute sa masse apparut squir rheuse... La tumeur, ayant t extirpe, fut reconnue <t tre un vrai squirrhe... On explique la qualit et la gran it deur de la tumeur enleve. D. Du jugement port par trois hommes comptents dans Vart mdical. Au bout de trois m o i s e n v i r o n , u n mal semblable apparut la mamelle de la malade. (Docteur Scalzaferri)... A l'autre mamelle (la gauche) se trouvait- u n e tumeur pareille (Docteur Tancioni)... Il y avait aussi un squirrhe la m a m e l l e gauche (Docteur Tancioni)... Cet autre squirrhe (celui du sein gauche) tait dj devenu u n cancer occulte (Docteur Mascetti). Elle (la tumeur de la mamelle gauche) fut juge par les experts tre un squirrhe. Le tmoin (Docteur Mascetti) et d'autres mdecins habiles reconnurent un nouveau squirrhe la mamelle g a u c h e . . . Le chirurgien la jugea tre un vrai squirrhe (la tumeur de la mamelle gauche) . E . Des caractres fournis, indpendamment du susdit jugement, par les dpositions des tmoins et de la malade. Q u o i q u e , dans quelque cas trs-rares, le diagnostic d'une affection cancreuse puisse demeurer douteux pendant quelque temps, cependant, ordinairement, les tumeurs m a lignes de ce genre se prsentent accompagnes de telles circonstances et de tels symptmes que l'on peut trs-bien dire qu'il n'y a pas, malheureusement, de diagnostic plus certain. Les circonstances, dont je viens de parler se r e n (
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LES
SPLENDEURS
DE
LA
FOI.
contrent exactement dans le cas en question. En effet, on y trouve t o u t ce que les plus clbres auteurs exigent pour tablir, avec u n e pleine certitude, le diagnostic du cancer. Boerhaave, dans son ouvrage De la connaissance et du traitement des maladies, a dpeint m a g i s t r a l e m e n t les carac tres des affections cancreuses : On reconnat, dit-il, le cancer occulte d'aprs les signes du squirrhe qui l'a prci cd, savoir : un chatouillement, u n e sensation de d m a n g e a i s o n , de la chaleur, de la rougeur, u n e douleur a lancinante, brlante, p o i g n a n t e , une couleur r o u g e , purpurine, bleutre, livide noirtre, une grande d u ret, des bords rudes, coups pic, avec une pointe au m i l i e u , augmentation de la t u m e u r ; les vaisseaux s a n ci; guins avoisinantssontgonflSjnoueux, variqueux,tchs de <c rayures noires . Pearson (Principes of Surgery pag, 331): a Quand la maladie (le cancer) en est venue de l'tat i n d o ce lent l'tat violent, la t u m e u r est d'une forme ingale ; elle devient douloureuse, la peau prend une couleur purce purine !ivide,et les veines sous-cutanes deviennent souvent variqueuses. La douleur est aigu, lancinante, et ses accs sont plus ou moins frquents . "Vidal (Pathol. externe, I I vol.) d o n n e c o m m e s y m p t m e s pathognomoniques directs pour le diagnostic du cancer de la m a m e l l e : a l D e s douleurs lancinantes, 2 l'engorgement des ganglions sous les aisselles, 3 la frquence du cancer de la m a m e l l e , 4 la rcidive, 5 l'hrdit. Nlaton, dans son ouvrage de Pathologie chirurgicale, 1 v o l u m e , dit : a Dans les cas m m e douteux, on pourra croire l'existence d'un cancer : 1 toutes les fois <c qu'il se prsente une t u m e u r chez un individu appar t e n a n t u n e famille, dans laquelle on a p r c d e m m e n t a observ un ou plusieurs cas de cancer ; 2 toutes les fois q u e le malade a subi l'extirpation d'une tumeur, r e c o n n u e de nature cancreuse ; 3 lorsque le malade ressent ce des douleurs lancinantes dans la tumeur; 4 s'il y a une pro cit fonde altration gnrale, sans qu'on puis se* l'expliquer par aucune lsion des viscres ; 5 quand Ja tumeur a son ce sige dans un organe f r q u e m m e n t affect du cancer, et rsiste aux m o y e n s e m p l o y s ordinairement pour amener la rsolution d'une t u m e u r non cancreuse . P o u r ce qui regarde la plus grande frquence du cancer la m a m e l l e des femmes, j e puis .citer, outre les paroles de Vidal rapportes ci-dessus, celles de Billroth, actuellement professeur l'Universit de V i e n n e : La maladie canc reuse ne se rencontre nulle part plus frquemment qu'
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la mamelle des femmes (Pathol. et Thrap. Chi rurg, gnrales). Or les dpositions ont montr que L a douleur tait plus vive la mamelle gauche qu'elle n e l'avait t la droite, tellement que, pour y faire u n e onction, il fallait se servir d'une plume. La mamelle gauche se prsentait chaque jour plus tumfie ; elle tait c o m m e bossue ; on voyait en avant une tumeur plus grosse que les autres. La malade tait extnue de m a i greur et avait le visage trs ple. La couleur de la t u m e u r tait livide. Au milieu de la mamelle apparaissait u n e tumeur livide. La malade tait ple et absolument sans forces. Cet autre squirrhe passa par les m m e s s y m p t o m e s que le premier.... Chaque s y m p t m e est numr < dans les dpositions. Tous les s y m p t m e s annonaient u n c vrai squirrhe. Les douleurs lancinantes augmentrent tel point que, la malade ne pouvait toucher son s e i n / E l l e endurait aussi de fortes douleurs au bras g a u c h e , etc. etc. II, Considrant : que la maladie de m a d a m e Mas cetti tait trs-grave, et de celles qui ont constamment u n e terminaison funeste. A l'appui de ce j u g e m e n t , q u e d'ailleurs vient confirmer u n e exprience journalire, j e citerai les paroles des plus minents chirurgiens du sicle. Boyer d i t : Le cancer de la mamelle, c o m m e celui des autres parties du corps, est du nombre de ces maladies dans lesquelles tous les ce efforisde la nature sont destructeurs, et qui, abandonnes elles-mmes, tuent ncessairement les personnes qui e n sont affectes. (Trait des maladies chirurgicales, 1 vol.). Le cancer, dit Ranzi, est une maladie incurable et au dessus des forces de la nature et de l'art. (Pathol. chi r u r g , I vol.) Nelaton. aprs avoir expos tous les m o y e n s thrapeutiques qui, diffrentes poques, ont t vants c o m m e avanta geux dans le traitement du cancer, aprs avoir montr, que, entre les mains des plus habiles praticiens, leur efficacit n'avait point t constate, s'exprime ainsi : < II est permis c de croire q u e ces gurisons de cancers furent obtenues sur des tumeurs d'une tout autre nature, telles que l e s engorgements inflammatoires simples, scrofuleux, v n <t riens etc. (ouv. cit. 1 vol.). Vidal, parlant des tumeurs des mamelles, conclut, aprs beaucoup de considrations : La complte gurison des tumeurs malignes est donc impossible (Pathol. extern. I' vol.)
er e r e r
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Enfin, dans les paroles suivantes de N y s t e n , se trouve clairement expose l'impossibilit de la gurison de ce mal A partir de Hunter, de Rayele et de Laennec, le a m o t cancer a servi dsigner toutes les t u m e u r s qui d sorganisent les tissus o elles se dveloppent, qui se les assimilent, s'tendent progressivement sans jamais r t r o grader, et le plus s o u v e n t , quand elles o n t t enleves, se reproduisent, d'aprs la cause i n c o n n u e qui a prsid a la gnration primitive. Q u e l q u e s - u n s ajoutent ou re t r a n c h e n t cette dfinition LA TERMINAISON CONS TAMMENT FUNESTE DU MAL... III. Considrant que, p o u r gurir la maladie dont tait affecte m a d a m e Massetti, on a inutilement eu recours l'ap plication de remdes q u e , quoiqu'ils fussent e m p i r i q u e s , o n v o u l u t cependant essayer. Ceci rsulte v i d e m m e n t des dpositions des t m o i n s o on lit les affirmations suivantes : Quelques remdes furent prescrits sans aucun profit pour la m a l a d e . Les r e m d e s prescrits par eux (les mdecins) ne lui profitrent a u c u n e m e n t . Malgr l e s remdes prescrits, la maladie e m pira. On e m p l o y a v a i n e m e n t les r e m d e s . Le premier squirrhe, ayant t enlev, la malade fut soumise un ce t r a i t e m e n t qui fut i n u t i l e . Les remdes e m p l o y s ne lui profitrent a u c u n e m e n t . On prescrivit des remdes, sans a u c u n espoir de gurison. Et en effet, ils furent c o m p l t e m e n t inutiles. Les r e m d e s e m p l o y s n e pouvaient qu'adoucir le mal. IV. Considrant : que dans le cours de la maladie de la dame Massetti, il n'y eut aucune amlioration mais a u contraire u n e aggravation quotidienne et considrable, et que les souffrances de la malade taient m o n t e s leur comble. Cela rsulte encore du contenu du s o m m a i r e . D'aprs les t m o i n s : Chaque j o u r , la m a m e l l e gauche app te raissait plus tumfie. La tumeur allait en empirant ; en dpit des remdes prescrits, la maladie s'aggravait. En vain on employait des r e m d e s , le squirrhe de la m a m e l l e < gauche faisait des progrs. Il n'y avait presque plus ( d'espoir de gurison. Chaque j o u r , l'tat de * la malade devenait plus mauvais, .La douleur, croissant c o n s t a m ment, tait devenue intolrable dans les derniers jours. Chaque jour, elle allait plus mal. Sa maigreur et sa pleur lui donnaient l'aspect d'un cadavre. V. Considrant : q u e , par le fait, la t u m e u r disparut soudainement, et qu'ainsi la patiente fut l'instant gurie de sa maladie.
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Les tmoignages nous le dmontrent encore ; on y lit en effet: L'image d e B . J. a y a n t t dcouverte, elle n'prouva plus aucune douleur, Rveille par sa n i c e , p o u r qu'elle regardt l'image du B . , elle n'prouva plus a u c u n signe de maladie. Dlivre de toute douleur, elle revint d'un pas dgag la m a i s o n . L, elle reconnut, en se touchant le sein, que la tumeur tait vanouie. La g u r i s o n eut lieu, n o n peu peu, mais subitement.Lorsque l'image du B. fut dcouverte, elle reconnut qu'elle tait gurie, De retour la maison, ayant examin sa mamelle, elle dcouvrit que la tumeur s'tait vanouie. Il n e restait aucun vestige du squirrhe. La gurison doit tre considre c o m m e instantane. L'image d u B . tant dcouverte, elle obtint sa gurison. Le mdecin appel dclara que le squirrhe avait disparu. Quelques jours aprs, les experts ayant examin de nouveau le sein, le jugrent guri. VI. Considrant: que la gurison subite de madame Massetti ne fut due aucune crise, c o m m e , de fait, vu le caractre de la maladie, aucune crise ne pouvait s'oprer par les seules forces de la nature. Ce considrant renferme deux parties: dans la premire il est dit qu'il n'y eut pas de crise ; dans la seconde, qu'il ne pouvait point y en avoir. Quant la premire, elle est appuye des dpositions qui se trouvent au procs et particulirement de celles-ci: Ni avant, ni aprs la gu-. rison, il n'y eut aucune crise... Il n'y eut pas de c r i s e . l l ne se produisit aucune crise...; sans' aucune crise o u mtastase. Il n'est pas possible d'admettre une crise o u u n e mtastase dans le squirrhe. Sans aucune crise. Ni avant, ni aprs il n'y eut de crise, et il ne pouvait p o i n t y en avoir. Il n'y eut aucune crise . Quant la seconde partie, c'est--dire, l'impossibilit d'aucun p h n o m n e critique dans la maladie en question (je veux parler d'une crise favorable et complte), outre les j u g e m e n t s dj cits, n o u s pouvons ajouter les divers argu m e n t s suivants : 1 La raison pour laquelle u n e crise (ce m o t crise signifie j u g e m e n t , Boerhaave) se produit dans les exanthmes, dans les maladies provenant d'infection, dans les pyrxies, et aussi peut-tre dans les nvroses, est" la m m e qui l'em pche de se produire dans les maladies provenant d'une af fection pathologico-mcanique, ou,si vous voulez,organique : o u , pour mieux dire, lorsqu'il s'agit de l'existence de n o plasmes organiss,lesquels, bien que trangers l'organisme, vivent en lui,cependant, par une nergie qui leur est propre. ce
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Et il n'y a pas de cas o cela se vrifie m i e u x que. dans le cancer. En lui, disent Brard et Denonvilliers,s'accomplit c o n t i n u e l l e m e n t un travail de production nouvelle ; Iui m m e s'accrot, se propage et se rpare c o n t i n u e l l e m e n t par une gnration incessante, c o m m e s i l c o n t e n a i t en lui m m e un principe, fcondant, dont l'activit n'a pas de relche. Qu'on se rappelle, pour ce qui concerne cette question, la phrase dj cite de Nysten, sans jamais rtro grader. Par l il est vident qu'on est ici tout fait l o i g n de t o u t e ide de crise, qu'on veuille la faire consister, soit dans le transport de* h u m e u r s , selon les h u m o r i s t e s , soit d a n s l e . transport de l'irritation, suivant les solidistes. (Voyez Chomel, E l m . de PathoL gnr. II vol., de l a p a g . 372 375). 2 11 est des h o m m e s de la plus grande autorit en m d e c i n e , qui affirment plus ou moins directement, mais t o u tefois clairement cette impossibilit d'une crise favorable. Bufalini, aprs beaucoup de considrations sur la crise, s'exprime ainsi : Dites en outre qu'il est grandement pro bable que les observations, dans ces cas, avaient pour objet les seules h u m e u r s ; d'autant plus que, difficilement, les matires solides pourraient avoir la mobilit de celles que n o u s voyons sortir dans les crises (Fondements de l a P a t h o l . analyt. II v o l . ) . Et notez bien qu'il parle v i d e m m e n t des n o p l a s m e s . Boerhaave dfinit ainsi la nature de la crise Dans les
e
maladies aigus,
qui consistent
il
a ? T f ; c , q u ' u n m o m e n t d o n n , la matire morbide se d i s p o s e de telle sorte qu'il se fait un passage subit de l'tat maladif l'tat de sant (Instit. m d i c , 913). Enfin Puccinotti c r i t : Les tiopathies mecanico-orga n i q u e s , celles qui proviennent d'un vice instrumental o u de l'action mcanique de forces adventices, sont de leur nature acritiques (Pathol. induct., 2 partie). 3 Aucun auteur, ancien ou moderne, ne fait mention de e n s e dans un cas semblable celui en q u e s t i o n . 4" T o u s les mdecins j u g e a n t la maladie incurable,(comme on le voit d'aprs les n o t e s annexes au 2 considrant), p a r c e l a m m e , excluent la possibilit d'aucune crise favo rable. 5 Enfin, c o m m e il s'agit ici d'une proposition ngative, qui ne peut se prouver que par l'absence des preuves c o n traires, celui-l devrait bien produire ces preuves qui croit la crise possible dans le cas d o n t on parle. VII. Considrant enfin que la gurison du cancer,
e e
LES
MIRACLES
A U
TRIBUNAL
DE
LA
SCIENCE.
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objet de cet expos, fut regarde par tous c o m m e parfaite et permanente, et que la maladie qui a amen la mort, cinq ans et demi aprs , ne peut avoir aucun rapport, tel que celui d'un effet sa cause, avec la tumeur qui existait la mamelle gauche. Ce considrant renferme aussi deux parties: la premire est u n argument de fait,bas sur les dpositions dont n o u s allons donner en abrg les principales: a Tous les symptmes de la maladie disparurent entirement. Depuis ce temps la sant de la personne gurie parut meilleure. Depuis sa gurison elle marcha avec facilit. Elle put vaquer ses affaires domestiques sans souffrir aucune douleur. Les coups sur <t la poitrine ne la faisaient pas souffrir.. Elle ne souffrait rien. Il n'apparut, dans la suite, aucune trace de squirrhe. La personne gurie ne ressentit aucune douleur, lors m m e q u e le t m o i n lui eut sensiblement c o m p r i m le sein. Les forces lui furent entirement rendues. Le t m o i n , a aprs' avoir explor la mamelle, reconnut une parfaite gurison. On n'aperut plus aucun vestige du squirrhe. Elle fut parfaitement gurie du squirrhe. Aucun s y m p t o m e de squirrhe ne reparut dans la suite du temps. Au c u n e trace de squirrhe ne subsistait dans la mamelle, qui et se montrait parfaitement saine .
1
La seconde partie de ce dernier considrant contient cette affirmation : La maladie dont est morte m a d a m e Mas setti ne pouvait avoir aucune relation, c o m m e d'effet sa c a u s e , a v e c la t u m e u r prcdente de la mamelle gauche. Ici encore j e suis forc de raisonner c o m m e j e l'ai fait relativement ce qui regarde la crise. Il s'agit, en effet,d'une assertion ngative, qui demeure inbranlable jusqu' ce que quelqu'un ait prouv, par l'observation ou rexprience,qu'il peut y avoir un rapport entre la tuberculose et le cancer. Or jusqu'ici aucun auteur, de quelque poque que ce soit, n'a parl ni de relation, c o m m e d'effet cause, entre ces deux maladies, ni m m e de l'existence du plus petit lien entre e l l e s . Si les diverses maladies auquelles la dame Massetti fut sujette, et particulirement les deux rapportes plus haut, prouvaient quelque chose, ce serait tout au plus que sa cons titution organique tait trs-mauvaise,comme le dmontrent en effet bon n o m b r e de tmoignages, et offrait u n terrain favorable au dveloppement des excroissances anormales. Aprs tout, si quelqu'un prtend qu'il existe quelque rap port entre la tuberculose el le cancer, qu'il l'tablisse par des preuves. Quoique notre raisonnement soit si indiscutable q u e des
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citations spciales n e puissent g u r e ajouter sa valeur, nous en indiquerons cependant q u e l q u e s - u n e s , sans leur donner toutefois le dveloppement qu'elles prsentent dans la dposition des t m o i n s . Voici c e qu'on lit au s o m m a i r e des dpositions : Le tmoin j u g e a q u e la maladie dont elle est morte tait une tuberculose. La mort est survenue par suite des troubles du coeur; la maladie n'avait d o n c pu avoir s o n origine dans le squirrhe, cardans le squirrhe on n e peut admettre de mtastase, La mort de la per ce sonne gurie n'a pu tre produite par le squirrhe. La m a a ladie dont elle est morte diffrait du squirrhe du t o u t a u tout . Considrant tout cela, et voyant c o m b i e n ce procs prsente d'intrt, le soussign est d'avis que la gurison du cancer de la mamelle gauche de m a d a m e Thrse Massetti,telle que cette gurison est rapporte, n e pouvait avoir lieu par les forces de la nature, ni par l'influence de l'art mdical, mais prsente tous les caractres d'une gurison miraculeuse. Les objections contenues dans les o b s e r v a t i o n s c r i t i q u e s d u R . P . P r o m o t e u r d e l a F o i ont t savamment rsolues, et on en a dmontr toute la faiblesse, dans l a R p o n s e
c e s o b s e r v a t i o n s , etc.
De m m e les objections runies dans les n o u v e l l e s o b s e r v a t i o n s c r i t i q u e s n'infirment sur a u c u n point l ' o p i n i o n mise. D'autant plus que, pour n e parler que de ce qui regarde la partie physique de la sixime et de la s e p t i m e objection, je rponds : 1 Il est vrai que, dans quelques c a s , et e n particulier lorsque le cancer a son sige dans les parties les plus i n times de l'organisme, ou quand il en est son c o m m e n c e ment, le diagnostic offre quelques difficults, mais il en est autrement dans le cas en question, o l'on trouve tous les caractres qui peuvent servir le faire reconnatre. Vogel, il est vrai, cit par notre adversaire, a dit : q u e l q u e f o i s on peut rester dans le doute. Mais les experts ne pouvaient pas tre induits en erreur sur la nature de la maladie, par suite d'une observation peu d i l i g e n t e ; car il rsulte du procs qu'ils taient suffisamment informs. E n outre, les paroles du docteur Mascetti, dans lesquelles il n o n c e les caractres que la dissection du cancer de la m a m e l l e droite fit reconnatre, sont bien propres nous faire voir q u e ce fut un vrai cancer qu'on enleva. Ces paroles, il est vrai, ne sont que des notes trs-judicieuses, mais elles sont la conclusion o u le rsultat de l'observation ; o n ne pouvait exiger que le docteur M a s 1
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cetti ft une description tout fait minutieuse et vraiment technique de la tumeur, description qui n'aurait t qu'une pure parade d'rudition, sans ajouter aucun nouveau motif de croire son assertion. E n vrit, pourquoi mriterait-il davanlage d'tre cru, s'il avait dcrit un un,et en les dve loppant,les caractres les plus minutieux du cancer? Ajoutez q u e le docteur Mascetti ne fut pas seul mettre un s e m blable jugement, puisque Tancioni et Scalzaferri qui taient prsents partagrent s o n opinion. 2 Quanta l a h u i t i m e objection,on doit dire que l'engorge m e n t qui demeura dans le sein gauche,quelque temps aprs la gurison du cancer,tantparfaitementindolent e t , s t a n t dis sip de lui-mme, ne pouvait dpendre que d'une trop grande affluencede sang; engorgement passager, qui se produit tous les jours soit autour d'une tumeur, soit autour d'un corps tranger, e n un m o t prs de tout endroit o u il existe un sti mulant. C'est pour cela que l'on dit :. l o est le stimulant l est l'afflux. Ensuite, si la dame Massetti est reste pendant q u e l q u e temps ple et maigre, cela est bien naturel, car, bien que cet tat dpendt en grande partie de l'influence exerce par une production htrogne sur l'conomie, une fois cependant ces altrations produites dans les h u m e u r s , et, par elles, dans la nutrition gnrale, elles y existaient par elles-mmes,et elles ne pouvaient tre modifies que par b e a u c o u p d'autres circonstances, par exemple, u n e b o n n e nourriture, etc. 3 La neuvime objection est encore moins srieuse, et dj on y a rpondu par la dclaration annexe au dernier considrant, o il est dit expressment : que si les diverses maladies auxquelles- M Massetti fut assujettie,et spciale m e n t les deux rappeles tout rheure,prouvaient quelque chose, ce serait tout au plus que sa constitution orga nique tait trs mauvaise, ainsi que l'ont dmontr de nombreux t m o i g n a g e s , et offrait un terrain favorable c au dveloppement de ces maladies . Voil en quel sens on doit entendre les paroles du docteur de Mauro. On voit donc, par la raison donne plus haut, qu'il n'y a aucun rapport entre l'assertion du docteur S c a l zaferri, relative la diathse squirrheuse o u cachectique du cancer, et la tuberculose. Donc, les objections produites dans les observations cri
m e
tiques du R. P. Promoteur de la Foi et dans ses nouvelles observations, n'ont a u c u n e valeur, et, partant, le soussign
maintient nergiquement l'opinion mise ci-dessus savoir : que la gurison du cancer de la mamelle gauche de madame Thrse Massetti prsente tous les caractres d'une gurison miraculeuse. DOGTKUH ALEXAJNDHE CECCARELLI.
SECOND MIRACLE.
GURISON INSTANTANE ET PARFAITE DE LA R. M. MARIE LOUISE DE L'IMMACULE CONCEPTION RELIGIEUSE PROFESSE DANS LE YEN. MONASTRE DU DIVIN AMOUR DU MONT-FALISQUE, ATTEINTE D UN CANCER ULCR DE L'ESTOMAC
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1. Le g e r m e fatal de la .maladie de l'estomac dont souffrit l o n g t e m p s et cruellement Marie Louise de l'Immac u l e - C o n c e p t i o n , elle l'a apport en naissant. Son pre souffrait de l'estomac, sa mre s u c c o m b a aux suites d'une gastrite. E l l e - m m e , ds son plus j e u n e ge, fut sujette plusieurs maladies stomacales ; elle avait de frquents vo m i s s e m e n t s . Yers Tan 1845, l'ge de sept ans, elle fut ad mise c o m m e lve au Monastre du Divin amour saint Eusbe de Rome ; elle y demeura jusqu'en l'anne 1849 ; l elle souffrait dj de l'estomac, prouvait de l'anxit, de l'anorexie, des nauses. Etant sortie de p e n s i o n , les m m e s infirmits subsistrent ; l'usage des bains, les potions ra frachissantes, les saignes frquentes n e procurrent a u c u n e amlioration. Dans cet tat de sant, la j e u n e fille but inconsidrment u n e assez grande quantit de rhum ; elle ajouta de la sorte un nouvel aliment au feu intrieur qui la dvorait. Les douleurs d'estomac, les v o m i s s e m e n t s s a n guins vinrent se joindre auxautres s y m p t m e s , et la malade, qui.fut en danger de mort, ne parvint qu'avec beaucoup de p e i n e se rtablir quelque peu, grce aux remdes qu'on lui administra. Sa gurison n'tant pas complte, on essaya d'un climat plus salubre, on ordonna des bains de mer, mais ce fut sans grand profit. On arriva ainsijusqu' l'anne 1857. A cette poque, vers la fin du m o i s de mars, la j e u n e fille fut atteinte gravement de la rougeole ; et, cette maladie, peine gurie, les douleurs d'estomac accompagnes de v o missements se firent sentir de plus en plus chaque j o u r . 2. Tel tait l'tat de sant de Marie-Louise, lorsqu'elle entra, ge de dix-neuf ans, au monastre du Divin-Amour Monte Falco, au mois de septembre de Tanne 1857- Dix
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mois aprs, c'est--dire au mois de juillet 1858, elle prit l'habit monastique. Ce n o u v e a u genre de vie parut plus nuisible que salutaire la religieuse, car sa maladie a u g mentait graduellement, les douleurs d'estomac devenaient plus intenses, les vomissements, plus frquents. P u i s s u r vinrent des vanouissements. Bien plus, vers P q u e s , en l'anne 1860, une tache livide extrieure apparut sur la r gion de l'estomac. Bien que la malade s'tudit avec soin cacher la gravit de son mal ses compagnes, la chose ne put pas demeurer longtemps ignore. Le docteur Bernard Mancinetti fut appel ; il ordonna la malade d e s e coucher.. U n e put porter un diagnostic certain parce que la novice, craignant que la dcouverte de la gravit de sa maladie n'empcht sa profession religieuse, n'indiqua pas, quoi qu'elle en ft prie, tout ce qu'elle avait souffert, tout ce qu'elle souffrait encore, et dissimula beaucoup d'iqcidents. Nanmoins elle fut s o u m i s e par le mdecin un traitement svre, dans lequel on fit usage de vsicatoires, de potions rfrigrantes, et de saignes rptes. Or pendant ce temps-l, le ventre se gonflait; puis survenaient Iadysurie,la diarrhe, l'anxit, la dyspne, la dfaillance des forces, les vomisse m e n t s de matires dgotantes, et de nombreuses s y n copes. 3. Aprs tre reste quarante jours au lit, la violence du mal ayant paru diminuer, la malade se leva, mais les symp tmes morbides persistaient. Bien plus, les douleurs de l'estomac augmentaient, et il s'y ajoutait une pnible sensa t i o n de pesanteur ; le fmur et le bras droit taient endoloris, et la lividit qui apparaissait aux regards, devenait plus visible et accentuait une teinte plus sombre : enfin au mois de juillet, l'anxit devenant plus grande, la malade rejeta par la bouche une certaine quantit de sang, tant caill que liquide, v o m i s s e m e n t qui diminua pour un moment ses souf frances. C'est alors qu'elle se prpara sa profession reli gieuse, qui eut lieu le 26 aot 1860 ; mais les vomissements frquents tmoignaient de la persistance opinitre de la maladie ; les douleurs stomachales tourmentrent encore cruellement la fervente religieuse, deux jours avant sa pro fession, et le jour m m e de cette solennit. 4 . A partir du jour de la profession jusqu'au 21 octobre 1860, les aocidents morbides furent tels que l'homme le m o i n s expriment en eut conclu certainement que la ma ladie faisait des progrs et prsageait une issue fatale. Une aggravation manifeste et inquitante apparaissait dans les p h n o m n e s morbides. Les rgles autrefois dj irrgulires, vu oO
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avaient cess depuis trois m o i s , et ne se montrrent plus durant tout le cours de la maladie. Les douleurs de jour en jour plus vives de l'estomac, gagnrent les autres viscres et m m e les membres e x t r i e u r s ; la tte e l l e - m m e tait malade. Le trouble des fonctions digestives tant excessif, l'anorexie s'augmentait, et elle rejetait dans ses v o m i s s e m e n t s des matires j a u n e s noirtres. La diarrhe tait trs f o r t e ; les selles t a i e n t remplies de matires m u q u e u s e s , sanguinolentes et ftides. Marie Louise tait dvore par la fivre hectique et la soif, sa faiblesse l'anantissait ; sa maigreur tait extrme, la toux et les syncopes ne cessaient de la faire souffrir, la douleur, l'anxit et l'insomnie la privaient de tout r e p o s . Tous les remdes taient i n u t i l e s ; le m d e c i n d c o u r a g affirmait qu'il devait exister un squirrhe o u du moins u n e lsion grave de l'estomac, bien que la t u m e u r et le v o l u m e indiquassent plus spcialement la prsence du squirrhe. 5. Dans les derniers jours qui prcdrent la fte* de saint Raphal, la malade ne pouvait supporter a u c u n e nourriture, aucun breuvage, elle vomissait tout : les autres phnomnes morbides svissant t o u j o u r s , l'anurie vint s'y joindre, et la suppression des fonctions -alvines faisait endurer la patiente d'atroces douleurs. Dans cet tat de souffrances aigus, la malade espra apporter quelque a d o u cissement ses maux,en prenant un bain le 24 octobre 1860, mais il n'en fut rien, et elle se remit au lit toute dcourage. La sur infirmire voyant la pauvre Marie-Louise afflige outre mesure, conseilla son a m i e d'invoquer le secours du Bienheureux Joseph Labre, dont l'image tait appendue au m u r de sa cellule. Mais la malade impatiente par l ' e x cs de la douleur et de sa tristesse rpondit : Je ne veux pas faire-autrement qu'il ne fera mon gard. Alors re gardant l'image bnie, au-dessus de laquelle tait suspen du le crucifix, et l'apostrophant d'une manire plutt n a politaine que toscane : Ou rends-moi la sant, dit-elle, ou je te jette au feu avec la croix qui te surmonte. Mais sur le champ une pense t o u t e contraire saisit son m e pieuse, elle manifesta sa c o m p a g n e son chagrin des p a roles offensantes qui venaient de lui chapper, demanda h u m b l e m e n t pardon au Bienheureux, renvoya la sur au chur, aprs l'avoir prie de fermer la fentre de sa cellule, et resta demi assoupie. 6. Or, voici qu'au milieu du silence gnral, interrompu seulement par le chant rgulier des religieuses .apparat la malade Un j e u n e h o m m e portant sur ses traits l'empreinte
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d'une joie cleste et environn de lumire. 11 dit qu'il est Benot-Joseph ; ayant fait le signe de la croix, sur le front,restomac et l'abdomen de Marie-Louise,il lui annonce qu'elle est gurie,.et lui ayant donn de salutaires instruc t i o n s / i l disparat au milieu des anges, envelopp d'une n u e brillante.La religieuse merveille,sette,et se regarda pour voir si les signes de son mal n'existaient plus, tout s'tait vanoui. Il n'y avait plus dans la rgion de l'estomac ni couleur livide, ni tumeur, ni duret. Elle se lve, et, a u retour de la sur infirmire, elle la prie de faire venir l'abbesse laquelle elle raconte que Benot-Joseph l'a gurie. Sur l'ordre de la suprieure, elle s habille promptement et descend au rfectoire,o elle mange avec plaisir ce qui tait servi la lable des surs; puis, c o m m e elle a encore faim, on lui donne d'autres aliments plus substantiels ; enfin elle but trois verres de vin pur. Elle participa au repas du soir, et y mangea de la viande de buf et de porc, des lgumes en salade et du fromage. Toutes les fonctions organiques, telles qu'elles s'accomplissent dans le plus parfait lat de sant avaient repris leur cours normal; toute douleur avait disparu, ainsi que toute i n c o m m o d i t . Elle alla se coucher et dormit trs-bien. Le jour suivant et les autres jours, ce bien-tre continua c o m m e si elle n'avait jamais t m a l a d e ; elle accomplit j o y e u s e m e n t les devoirs de son lat, m m e les plus rudes, observa les rgles et les j e n e s de la c o m m u n a u t . Sa sant, e n un mot, tait c o m p l t e m e n t bonne.
fut
une inflammation
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brlante par tout le corps, j'prouvais de violentes d o u c leurs d'estomac ; on m e conduisit R o m e , et j e fus cone <c fie aux soins du docteur Tridenti. Il me saigna, m'ap<t pliquades sangsues,d'abord restomac,puis au fondement Mais les douleurs stomacales continuaient, je vomissais a des matires verdtres ; peu de jours aprs j e rejetai du sang caill en partie, et cela pendant environ deux heures ; alors on m'administra les sacrements, y compris les saintes h u i l e s . Mon tat s'amliorant quelque p e u , mais la maladie persista pendant peu prs quatre mois, avec une fivre intense des douleurs d'estomac, et des vomissements quotidiens ; je rejetais parfois des grumeaux de sang. 10. L'emploi continu et intelligent de la mdication a n tiphlogistique loigna la mort sans doute, mais ne rendit pas une pleine sant la j e u n e fille. Car, aprs l'usage des bains et le sjour la campagne l u s c u l u m , et dans la Sabine, elle revint Rome, toujours malade, et son tat s'empira plutt qu'il ne s'amliora. Dans les premiers jours d'octobre, j e revins Rome o, en dpit de tous les traitements, mes douleurs d'estomac continurent. L'an n e suivante 1857, l'estomac n'tait pas encore guri, car la suite d'une forte rougeole, dont fut atteinte la j e u n e fille, il se produisit de nouveaux symptmes du mauvais tat d e
l ' e s t o m a c : a Gurie de la lougeole, dit-elle, je me sentis un peu mieux, malgr les douleurs d"estomac quej*avi$ a toujours plus ou moins, et malgr mes vomissements quo tidiens qui survenaient soit le jour, soit la nuit, dans lesquels je ?*ejetais tantt de la bave et tantt les ali-
ments. Tel tait mon tat sanitaire quand, au mois de septembre 1837, j'entrai au monastre pour me faire re ligieuse.
11. Pendant les trois annes de son sjour au monastre jusqu' l'heure o elle fut gurie par le Bienheureux Labre, notre religieuse souffrit toujours de l ' e s t o m a c ; et le mal d'abord plus bnin avait fini par devenir graduellement plus grave. Quelle tait cette maladie? Le mdecin, bien que, cause des rticences de la jeune fille, il ne connt pas tous les antcdents du mal, pensait tre en prsence d'un squirrhe. J'inclinais croire, dit-il, que c'tait un squirrhe. J Il et encore t de cet avis, lors m m e qu'il au rait eu connaissance de la gastrite antrieure, car les ma tres dans l'art mdical comptent le squirrhe de l'estomac parmi les maladies qui sont les suites de la gastrite, c o m m e nous l'apprend Valentini dans son Trait des inflammations.
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Bien plus, c e l l e absorption de rhum tjui avait d o n n nais sance la gastrite, pouvait par e l l e - m m e dterminer l' volution du cancer, d'aprs ces paroles d'Antoine Scarpa : Les causes dterminantes du dveloppement du principe morbide dpos par les forces vitales et latentes dans le squirrhe, eensuile, sa dgnrescence en cancer,- sont tous des s t i m u l a n t s internes et externes, capables d'exciter l'ac tion vasculaire de la glande squirrheuse vers un processus
taient
de
rgularit.
(Jamet, Dictionnaire de mdecine, au m o t Squirrhe, T o m e X. p. 480).Roche et Sanson ont crit ; Dans le plus
grand nombre des cas, le squirrhe est caus par des coups, par la suppression des rgles et du flux hmorrhoidaL & (Nouveaux lments de pathologie. T o m e I, p. 654). Or,
notre religieuse raconte ce qui suit : J'eus mes rgles pour.la premire fois entre q u i n z e el seize a n s . . . ; d a n s l a suite, leur apparition fut irrgulire et toujours provoque par quelque mdication. Ajoutons ces paroles la d p o sition du cinquime t m o i n : Quant aux rgles, elles taient peu abondantes quelque temps aprs sa prise d'habit, et puis elles cessrent tout fait. Le troisime tmoin dit : Ses rgles tirent dfaut jusqu' Tpoque de sa gurison. 13. Ce diagnostic, que le critrium tiologique indique est l u m i n e u s e m e n t confirm par l'ensemble des p h n o m n e s . La premire priode de la maladie, plus douce et plus b nigne, fut suivie de progrs graduels et d'aggravation dans le mal. u La maladie (dit Bayle), s'annonce ordinairement par un malaise la rgion pigastrique, auquel succdent aprs un certain temps une gne habituelle, une douleur sourde et profonde dans la m m e rgion, des digestions dif ficiles, avec dveloppement de gaz dans l'estomac et les
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intestins, et de temp&en temps des vomissements (Bayle, Trait de Pathologie mdicale, art. Cancer p. 461). Que les Rvrendissimes Pres veulent bien se rappeler ici ce q u e n o u s avons dit de l'tat sanitaire de la malade avant son e n tre au monastre, en y ajoutant ce que notre religieuse rapporte elle-mme de sa sant dans les premires annes de son sjour au c o u v e n t : P e n d a n t les dix premiers mois, dit-elle, j e m e trouvai assez bien, quoique j'prouvasse toujours une lgre douleur l'estomac, des crampes et quelques envies de vomir, lesquelles cependant n'taient presque jamais suivies de vomissements. Le 11 juillet 1858 je pris l'habit monastique. A partir de cette poque, pendant un an peu prs, m o n tat empira graduellement, les douleurs stomacales augmentrent, j'avais de frquents v o m i s s e m e n t s ; mais j'avais soin que les religieuses ne s'en doutassent pas, ce qui fait qu'elles ne connaissaient pas m o n mal, car j'avais peur d'tre exclue de la Profession. Je me contentais de dire la Matresse des novices que j e souffrais de l'estomac, chaque fois qu'arrte par le mal je ne pouvais pas vaquer aux exercices c o m m u n s . 14. La matresse des novices confirme ce t m o i g n a g e : P e u avant la prise d'habit elle c o m m e n a maigrir ; elle di sait simplement qu'elle prouvait un peu de peine digrer, e t c . ; Aprs la prise d'habit, elle alla toujours en maigrissant et en s'affaiblissant ; je m'apercevais que le maigre et les aliments un peu lourds de lui russissaient pas. Quelquefois j e ne la voyais pas dans le Noviciat, je demandais s e s c o m pagnes o tait Marie-Louise,et l'une d'elles me disait en s e cret, qu'elle s'tait retire l'cart pour vomir. Je sus aussi qu'elle dormait peu, qu'elle marchait avec difficult, et qu'elle avait beaucoup de flatuosits . Les autres tmoins tiennent le m m e langage c o m m e on peut le voir dans leurs dpositions. 15. Un an aprs ia prise d'habit, la maladie devint plus in tense. Elle entra dans une nouvelle priode, ainsi que l'indi qurent les vomissements plus frquents, plus abondants, d'aprs r e n s e i g n e m e n t de Lbert : Tel est le premier ordre des s y m p t m e s , qui insensiblement passent au second, dans lequel on observe des vomissements de plus en plus a b o n
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de m e s compagnes, s u r Marie Madeleine, s u r Marguerite, et soaur Sraphine; j'essayais de leur faire croire que m e s vomissements avaient pour cause du poisson frit que j'avais mang au repas. A dater de cette poque, (tout en c o n t i n u a n t h garder le silence sur m o n vritable mal), j e m e sentais d e plus e n plus malade ; c'est pourquoi pendant VAvent de la dite anne, la matresse des novices m e d i s pensa de l'observance du j e n e , et m e permit l'usage du lait, ce qui me fut permis galement les autres jours de j e n e prescrits par la rgle. Le septime tmoin dclare son tour ce qui suit : Je puis dire qu'au c o u v e n t son mal d'estomac alla en croissant, car bien qu'elle cacht sa vri table maladie, on remarquait que ses digestions taient trs pnibles ; la nuit on 1 entendait se plaindre, les douleurs d'estomac se faisaient sentir plus violentes qu'auparavant, il m'a sembl aussi qu'elle vomissait, je me rveillais trs s o u v e n t son agitalion, ses plaintes et aux soulvements de son estomac . Mais ce mal importun finit par se laisser deviner dans la turgescence de la rgion pigastrique. Aprs ma prise d'habit, dit la religieuse, je me rappelle que l'enflure reparut un peu, et alla en croissant jusqu'au m o m e n t de la gurison . A ce gonflement s'ajoutait u n e s e n s a tion de-pesanteur. Marie-Louise (dit le c i n q u i m e tmoin) s e plaignait d'prouver intrieurement au fond de l'estomac et presque continuellement de l'enflure et de la pesanteur,qui lui causaient de la gne pour respirer; cela lui dura pendant tout s o n noviciat, et persista m m e aprs sa profession avec un plus grand degr d'intensit. Yalentini ne se trompe d o n c pas lorsqu'il enseigne que le squirrhe de l'estomac se reconnat par l e s v o m i s s e m e n t s ,
par l'enflure el la tension du viscre affect, lequel produit par son poids et sa masse une sorte de traction sur des parties trs sensibles.
1G. Pendant le Carme de 1869,1a maladie ayant progress, d o n n a des signes plus visibles de sa gravit. Les troubles et les incommodits de l'estomac laiemt tels que la malade s'vanouissait, elle devenait anxieuse la dgnrescence interne du tis&u se trahissait au dehors par une couleur l i vide de la peau. Mon mal d'estomac (rapporte la religieuse aprs sa gurison) ne fit qu'augmenter pendant ce Carme,, j e tombai en syncope plusieurs fois ; pour n e p a s m'vanouir au c h u r , lorsque je sentais une sueur froide m e gagner, je m e retirais, mais, peine sortie et assise,l'vanouissement avait lieu . Puis elle ajoute : Le lundi saint j'eus un long vanouissement qui effraya beaucoup les s u r s , jusqu'alors
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ignorantes de la.gravit de m o n mal, Le D Mancinetti tant venu au nonastre pour une autre malade m e vit pour la premire f o i s ; il me demanda si je n'avais pas autrefois souffert de ce mal ; je le lui cachai et ne lui parlai que de ma rougeole. Alors il m'ordonna de prendre de la casse, mais je la vomis; peu aprs m o n confesseur me permit de boire du bouillon. Pendant les jours de la semaine sainte je re marquai au creux de l'estomac u n e couleur livide, j a u n e fonce, -et je n'en parlai personne. Aprs la semaine sainte je me sentis toujours plus mal, c'est pourquoi la s e conde fte de P q u e s , le jour de Quasimodo on appela le m m e docteur qui me fit sa visite au parloir, t m'or donna d'aller m e mettre au lit, dclarant que- j'avais la fivre. Enfin, venant expliquer c o m m e n t elle avait r e connu cette teinte livide l'endroit de l'estomac, elle dit : Je ne connais pas d'autre cause qui ait pu occasionner cette lividit, que le mal dont j'ai parl, puisqu'aprs m o n entre, au monastre, je n'avais fait aucune application de sangsues, ni d'aucun autre remde, et n'avais reu aucun c o u p ; si j e m'en aperus c'est que ressentant une douleur plus grande que d'habitude, j e fus contrainte d'enlever le I D U S C de m o n corset, pour prouver quelque soulagement . 17. Ce que la palienLe souffrit pendant ce douloureux Ca rme, sa c o m p a g n e Marie-Madeleine de Saint Franois de Sales nous le confirme e n ces termes : Pendant son se cond Carme, aprs son entre en religion, l'tat de MarieLouise ne fit qu'empirer; elle souffrait beaucoup, et le matin principalement elle se plaighait de m a u x d'estomac ; elle avait alors des crampes et des vomissements ; elle vomissait une matire aqueuse; elle avait des tremblements, des sueurs froides et tait trop faible pour venir au chur avec nous ; quelquefois elle nous y rejoignait. Elle essaya parfois de prendre une goulte de caf ; cela paraissait lui faire du bien. Aux approches de Pques, elle avait de la fivre, le soir . EL un peu aprs Avant celte maladie (c'est--dire avant la recrudescence du mal qui eut lieu pendant les ftes p a s cales) Marie-Louise ayant entendu dire qu'une personne s'tait bien trouvede l'usage de farine mle de r a n i s , e l l e en prit deux cuilleres dans de l'eau, cela lui produisit un si grand trouble et de telles douleurs dans l'estomac, qu'elle se crut perdue, mais tant all faire une petite promenade au potager avec sa compagne la sur Sraphine, elle put vomir et se sentit soulage. Ce fut pendant la maladie de Pques, laquelle je viens de faire allusion tout l'heure que j'eus l'occaion de voir que son corps tait enfl ; l'es-
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t o m a c en particulier Ttait-il ? j e n e m e le rappelle pas. Seulement j'y vis une tache de couleur s o m b r e et c o m m e livide, peu pres de la grandeur d'un c u ; j'ignore gale ment, si cette tache tait ancienne o u rcente. 18. Ici, selon m o i , deux choses sont n o t e r : la violence des douleurs qui porta la malade examiner la rgion p i gastrique, et les fivres lgres qui dans la suite (nous le verrons bienll) fournirent au m d e c i n , qui ignorait les faits prcdents, l'occasion de diagnostiquer q u e cette maladie avait eu pour principe une gastrite- lente. Les douleurs in diquent surtout la dgnrescence du squirrhe en cancer. En cette matire les auteurs anciens et modernes sont d'ac cord. Le signe qui distingue le cancer du squirrhe (dit Van S w i e l e n ) est la douleur . (Comment, sur Brhaave Aphor. 492). Parmi les m o d e r n e s , Lbert e t Valentini dj cits n e parlent pas autrement. Nous arrivons, dit le premier notre question importante, c e l l e de la valeur patholognom i q u e des douleurs, et nous voyons encore dans ce symp t m e un des signes les plus propres clairer le diagnos t i c . . . Nous ne c o n n a i s s o n s en effet a u c u n e maladie de l'es t o m a c aussi douloureuse que le cancer. La douleur est par consquent un des syptmes dont il faut l e p l u s t e n i r c o m p t e (Lbert, endroit dj cit). Valentini s'exprime son tour de la faon s u i v a n t e : L e squirrhe d'abord bnin cause beau coup de m a l . . . lorsqu'il est arriv T t a t a i g u ; mais quand il s'est chang en cancer il fait prouver les plus atroces dou leurs (endroit cit plus haut). Quant aux fivres, il n'y a pas lieu de s'tonner de les rencontrer dans une maladie apyrectique, car la fivre hectique est classe parmi les principaux signes de la cachexie cancreuse, aprs l'amai grissement dont les tmoins nous ont dj parl... Les symp t m e s (dit Monleggia J.-B.) de cette cachexie sont l'amai grissement, la fivre hectique, les douleurs ostocopiques....
une teinte jauntre de la peau. (Instit. chirurg. 1" partie chap. 15 1060). Ce fut cause de ces fivres que le m d e cin fut appel le lendemain de Pques, et bien que tenu par la malade dans l'ignorance de ses antcdents, il prescrivit un traitement antiphlogislique : cela ressort clairement de l'inspection des tmoignages : Ces fivres, dit le c i n q u i m e tmoin, continurent et m m e devinrent plus intenses. C'est pourquoi le deuxime jour de Pques, le D. Mancinetti tant venu au monastre pour soigner une autre malade, vit e n m m e temps Marie-Louise ; lui trouva d e l fivre et lui ordonna de se mettre au lit . 19. Ecoutons maintenant l e rcit de la malade e t celui d u
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mdecin. Le lundi saint, dit notre religieuse, le mdecin ve nant voir une de mes compagnes malades, m e visita g a l e ment; il me demanda si je n'avais pas eu quelque maladie pr cdente; j e n e lui pariai q u e d e la rougeole. I l m e p r e s c r i v i t d e l a a s s e , mais je la vomis quelque temps aprs lavoir-prise . En m m e temps le mdecin lui ordonna d e s e mettre au lit. 11 m'ordonna d'aller me coucher, dclarant que j'avais la livre . Puis elle raconte la suite de la maladie. Je gardai donc le lit par ordre du mdecin, et j'y restai environ quarante'jours ; pendant ce temps, d'aprs les prescriptions du docteur, on m e mit des sangsues l'estomac, sur le corps et aux veines hmorrhodales ; on me saigna au bras, on y appliqua des vsicatoires, et je ils un usage constant de rfrigrants. Comme j'avais le corps un peu enll et que j ' prouvais de la difficult uriner, le mdecin m e traita par les fomentations. Il me fit observer une dite svre, m e permettant seulement l'usage du bouillon et de la s e m o u l e ; mais je les vomissais quelquefois; l'envie de,vomir n e m e quittait jamais. Une fois, m a compagne, sur MarieMarguerite, m'ayant donn sur mes instances u n e lgre tartine de beurre, je fus prise de crampes d'estomac, et j e vomis presque aussitt. Le matin et quelquefois dans la journe, j e prenais un peu de caf p u r ; c'tait l'unique chose que m o n estomac pouvait garder. Les matires que j e rejetai dans le cours de ces quarante jours taient ordi nairement glaireuses, jauntres, d'un got amer, parfois c'tait simplement de la salive paisse; une ou deux fois seulement les matires avaient une couleur sombre ressem blant du caf noirtre. Je n'avais point de s o m m e i l . P e n dant plus d'un mois, j'eus plus ou moins, mais c o n t i n u e l l e m e n t une diarrhe brlante. J'prouvais aussi cette poque de la difficult respirer et beaucoup de faiblesse. J'eus galement, un certain soir, une grande syncope, ind p e n d a m m e n t de ceile quej'avais eue l'occasion d'une sai gne. Le jour ma peau avait une couleur jauntre et pique c o m m e celle d'une p o u l e ; le soir elle devenait rouye et lafivre redoublait . 2 0 . Voici maintenant les paroles du mdecin. La pre mire fois que je fus appel pour la sur Marie-Louise, ce ft le 9 avril 1850. Je trouvai sa physionomie trs altre et fort maigre, j e reconnus de suite, malgr qu'elle me ca cht l'tat antcdent de sa sant, qu'elle tait malade de puis longtemps. Interroge par moi sur ce qu'elle ressen tait, la malade accusait des douleurs de tte, u n e grande soif, des souffrances dans la rgion pigastrique, des r a p -
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ports aigres, des vomissements, des c r a m p e s , des ilatuosit s ; mas elle ne m e fit connatre tous ces s y m p t m e s que d'une manire imparfaite, un jour p l u s , u n j o u r m o i n s , pendant le cours de cette maladie, c e s t pourquoi j e d i a g nostiquai une gastrite chronique. Je la s o u m i s des sai gnes rptes, gnrales et locales ; je lui prescrivis des boissons mucilagineuses et rafrachissantes, une dite s vre, e t tout ce que l'art ordonne en pareil cas. A la fin de la premire s e m a i n e , elle prouvait un certain calme ; mais bientt il y eut une recrudescence du mal a c c o m p a gne de fivre plus o u moins forte, il en fut ainsi pendant cinq semaines. 11 y eut relche ensuite dans les symptmes, ils taient moins intenses mais subsistaient toujours. La fivre tait devenue trs lgre, mais elle ne cessa pas tout fait. Ge n'tait gure qu'un m o u v e m e n t fbrile si faible, q u e l'on pouvait clouter de l'existence de la fivre. En cet tat de choses, je cessai mes visites, en r e c o m m a n d a n t de continuer l'emploi des diluants, des mucilagineux, des r frigrants; pour soutenir la malade, j e permis l'usage du bouillon et de toute nourriture lgre qu'elle pourrait gar der. Je ne fus pas appel avant le 28 aot de la m m e a n n e . Durant mes visites, je me rappelle encore avoir ordonn des vsicatoires, et qu'on me fit savoir que la malade se plaignait d'avoir des borborygmes et de la difficult dig rer. 2 1 . Si r m i n e n t praticien et t au courant des a n t cdents de la malade, il aurait de suite diagnostiqu un squirrhe, ce qu'il fit dans la suite. Ces signes p a t h o g n o miques que, tromp par la livre, il avait attribu une gastrite lente, conviennent parfaitement au squirrhe de l'estomac, d'aprs ces paroles d'Hildebrand. Les s y m p t m e s du squirrhe ou carcinome de l'estomac sont ordinairement les rapports acides et ftides, les vomissements, de m a tires c h y m e u s e s bilieuses, m m e sanieuses, et de m a u vaise odeur , une douleur fixe* aigu, l'pigastre au dbut intermittente, dans la suite continue, intolrable,loignant le sommeil. Du reste, en voyant l maladie se p r o longer aus&i l o n g t e m p s , le docteur Mancinetti inclinait croire c o m m e je l'ai dj not, que la cause du mal tait dans un squirrhe. (Voir plus haut, 11). Un h o m m e ins truit ne pouvait penser autrement, en prsence d'une ma<ladie laquelle aprs quarante jours, d'un traitement le plus propre combattre la gastrite, ne faisait que s'aggraver. Quel fut l'tat de la novice partir du m o m e n t o elle quitta le lit jusqu'au jour de sa profession^ les actes du procs
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l'ont fait connatre trs compltement. Nous allons en citer quelques extraits afin de donner aux Rvrendissimes consulteurs u n e ide de celte atroce maladie s'aggravant de jour en j o u r . 2 2 . V e r s le soir, dit Marie-Louise, j'tais saisie par un certain m o u v e m e n t fbrile, l'insomnie et la diarrhe persis taient, quoique cette dernire fut un peu diminue. Les envies de vomir continuaient aussi, et de fait, j e vomissais de temps en temps. La douleur d'estomac tait i n c e s s a n t e . J'prouvais au ct et au bras droit une douleur qui avait c o m m e n c dans la priode des quarante jours, et que j'a vais dj ressentie autrefois chez nous dans le bras et le ct gauche. Le bras et le ct droits enflaient un peu vers le soir. En m m e temps que la douleur de l'estomac a u g m e n t a i t , la tache livide dont j'ai parl s'largissait, elle tait d'un jaune plus fonc, et je sentais une grande pesan teur l ' e s t o m a c ; c'est alors que je me dcidai pour la premire fois montrer cette tache livide la matresse des novices, qui en parla la suprieure. Ici, MarieL o u i s e n o u s apprend que le mdecin et le chirurgien, aprs avoir examin cette tache livide, lui prescrivirent des bains de mer, mais que sur ses instantes prires, pour ne pas voir diffrer l'heure de sa profession, elle obtint d'chapper ce traitement. Gela dit, elle continue de la sorte son r cit : Peu de temps aprs, prcisment le jour qui suivit celui o dans le monastre on clbrait la c o m m m o r a t i o n de l'ouverture des yeux de notre Vierge d e s - d o u l e u r s ; c'est--dire le 12 juillet, je m e sentis saisie de crampes et de douleurs plus grandes l'estomac, je m e retirai et allai vomir plusieurs gorges de sang moiti liquide moiti caill tant entre dans la salle du noviciat, la matresse des novices me voyant toute dfaite, m'interrogea sur ce qui tait arriv, et en voyant que je pleurais, elle me de manda si j e voulais aller dans ma famille. Mais sur ma r ponse que si elle avait su ce que je savais, elle ne m'aurait pas parl ainsi, elle n'insista pas davantage. Mais peu de jours aprs, ma compagne sur Marie-Sraphine m e de mandant ce qui m'tait arriv, je le lui racontai en confi dence. Aprs ce vomissement de sang, je m e sentis un peu m i e u x . Cet tat dura jusqu'au troisime jour avant ma profession qui eut lieu le 20 aot 1860. Pendant les deux jours qui prcdrent ma profession j'eus de frquents v o m i s s e m e n t s , et le matin mme de la crmonie, je vomis trois fois. Pendant cette crmonie elle-mme, m'tantpros terne terre au m o m e n t de la rcitation des litanies des
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saints, j e vomis dans m o n m o u c h o i r le b o u i l l o n que j'avais pris aprs que j ' e u s s e reu la sainie c o m m u n i o n , car je n'aurais pas pu rester j e u n . Au m o m e n t m m e de pro noncer les vux solennels j e m e sentis prise de violentes douleurs de l'estomac, et n'y voyant plus clair, j e dus s u s pendre la formule dj c o m m e n c e , juste un peu avant r mission de mes v u x ; aprs un instant de repos, j e conti nuai et achevai ma profession. 23. La matresse des novices confirme cette assertion. /< Outre les susdites fivres quotidiennes, aprs les qua rante jours, les maux de l'estomac continurent avec leur cortge d'incommodits habituelles; les digestions ne se fai saient pas ; la malade ne dormait pas; elle avait des crampes, des envies de vomir ; chaque fois qu'elle vomis sait, elle rejetait des matires jauntres, et, dans cer tains m o m e n t s plus fonces. Un jour, vers le milieu de j u i l l e t 1860, j'appris d'une de ses compagnes-, qu'au ca binet elle avait vomi du sang avec des matires en abon dance, et m o i - m m e j e constatai dans ce cabinet la pr sence des matires marcieuses , bien qu'on eut lav avec de l'eau. Les v o m i s s e m e n t s avaient lieu principale ment le soir, quoi qu'elle ne manget qu'un peu de semouille et autres-choses aussi lgres. Je me rappelle e n core que sa c o m p a g n e Marie-Marguerite lui ayant donn la drobe une mince tartine de pain beurr, elle fut prise de violentes douleurs et de crampes dans l'estomac, le t o u t accompagn d'une sueur froide et de grands vomisse ments. 2 4 . Du jour o Marie-Louise eut p r o n o n c ses v u x jusqu'au m o m e n t o elle fut gurie, la suite de la vision cleste, la maladie fit de tels progrs que tout semblait pr sager la mort prochaine de la religieuse. Alors en effet, n o n seulement les symptmes locaux se montrrent dans leur plus grande intensit, mais aussi beaucoup de symptmes sympathiques se dvelopprent de plus en plus, lorsque le cancer, ne se bornant pas selon l'habitude, envahir les parties voisines, produire des embarras et des troubles dans les viscres abdominaux, tendait en outre tous les membres les effets nfastes de son pernicieux virus. Ecoutons ce sujet le rcit de la sur infirmire qui, de puis la profession de Marie-Louise, fut m m e d'observer toute la violence du mal dans sa marche envahissante : Aprs sa profession, dit-elle, vers la fin du mois d'aot 1860, Marie-Louise rentra dans sa cellule, et c'est alors que je commenai lui servir d'infirmire. Elle tait trs-ma-
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lade ce m o m e n t ; la fivre, c o m m e je l'ai dit, tait trs forte ; presque toujours elle rejetait les aliments, peu de temps aprs les avoir pris ; elle avait la diarrhe, ses selles taient d'un jaune fonc et trs ftides ; la respiration tait haletante, la maigreur extrme ; la soif la tourmentait beau coup aussi usait-elle de boissons rafrachissantes, princi palement de tamarin; on dut suspendre l'emploi de la casse que la malade ne pouvait garder; elle se plaignait d'une cuisson l'estomac et avait des rapports. La l i m o nade lui tait insupportable, elle lui glaait, disait-elle, l'es t o m a c ; elle prouvait de la difficult pour uriner; on lui donna pour obvier cet inconvnient de la tisane de mauve, et on lui fit des fomentations. Elle accusait des douleurs dans le foie et dans la rate ; les sangsues lui furent appli ques ; on fit galement usage de cataplasmes de graine de lin. Les douleurs d'estomac dont elle se plaignait, corres pondaient l'paule. La poitrine tait enfle du ct droit; je remarquai que le bras droit tait gonfl jusqu' la main, et que le ct droit Ptait galement jusqu'au p i e d ; la main et le pied taient aussi lgrement enfls. Je n'ai pas.remarqu que l'enflure et atteint le ct g a u c h e ; le corps entier tait gnralement enfl et tordu. Elle n'aimait pas parler. Plusieurs fois elle s'vanouit dans son lit ; si elle se levait, elle' se sentait dfaillir, et on tait oblig de la ramener au lit. Sa faiblesse tait extrme. Je ne me rap pelle pas si les sueurs taient gnrales ? Elle transpirait beaucoup de la tte, on devait souvent changer ses bonnets. Les douleurs de tte existaient, et parfois l'tat spasmodique. Elle avait des agitations, et se tenait couche tantt sur un ct, tantt sur un autre ; rarement sur le dos. Elle n'avait pas ses rgles qui firent dfaut jusqu'au m o m e n t de sa gurison. 2 5 . Parmi les divers symptmes nous en choissons encore un, c o m m e indice manifeste de cachexie cancreuse ; c'est celui qui rsulte de la maigreur extrme et du teint j a u n e . Le teint, dit Lbert, est gnralement ple et a n m i q u e , ou d'un jaune paille... la maigreur et le marasme trs pro n o n c . (Trait de pathologie mdicale, art. cancer).-Com parons cette donne scientifique avec les dclarations des t m o i n s . J'tais, dit e l l e - m m e la malade, si amaigrie, que je n'avais plus que la peau sur les os, je ressemblais un cadavre... Mon teint tait jaune, aussi bien sur la figure q u e sur tous les autres membres, m o n amaigrissement tait tel qu'on m'aurait prise pour un cadavre. Le t m o i n o n z i m e : Depuis sa prise d'habit, l'amaigrissement alla
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toujours croissant-; vers la fin d e l maladie, sa maigreur et sa consomption taient arrives un tel degr, que, sur le visage aussi bien que sur les autres m e m b r e s , il n'y avait plus que la peau sur les o s . A partir et la suite de la mala die de quarante jours, ses yeux se creusrent, et j'ai cru voir q u e . s u r la fin d e l maladie, ils semblaient jaunes, ils taient certainement trs enfoncs dans l'orbite. Le troisime tmoin fait des remarques s e m b l a b l e s : Elle tait trs amaigrie, sa peau tait pique c o m m e celle d'une poule, et trs flasque; son aspect tait c a d a v r e u x . . . Je ne faisais aucun doute que celte couleur cadavrique et cet tat de consomption dpendissent de la maladie interne et n o n pas encore du m a n q u e de n o u r r i t u r e . Le t m o i n quatrime dit son tour : Marie-Louise tait sche, jaune, dcharne, c o m m e on pouvait le voir sur son visage, el je crois bien fermement qu'il en tait ainsi pour le reste du corps . Et plus loin : Elle tait tellement macie, qu'elle n'avait plus que la peau sur les os. Le t m o i n cinquime : MarieLouise tait extrmement amaigrie, et l'on voyait sous sa peau une teinte jaune n o n seulement au visage mais sur les autres parties du corps < la malade n'avait plus que la c peau sur les os, elle tait maigre, extnue, un tel degr qu'on n e pouvait pas la reconnatre ; sa peau tait colle sur les o s ; son aspect tait cadavrique, la respiration tait haletante, la voix trs basse. Les dpositions des autres tmoins sont identiques. 26. La pauvre femme en tant rduite une pareille extrmit, rien d'tonnant ce qu'on n e conservt plus d'espoir de la sauver. Le second t m o i n dit 1res j u d i c i e u s e m e n t : Autant par ce que dclarait le mdecin dans ses visites, que par ce qu'on voyait, l'opinion gnrale des r e l i gieuses du monastre, tait que Marie-Louise non s e u l e m e n t ne pouvait pas revenir la sant, mais encore ne larderait pas mourir, tant les symptmes que j'ai dj m e n t i o n n s s'taient aggravs de plus en plus clans les derniers t e m p s . La sur infirmire confirme ces paroles : Tous ces s y m p tmes devenaient de plus en plus menaants, j'tais per suad que la gangrne avait dj fait des progrs, car u n e odeur insupportable se faisait sentir dans la cellule ; el l'ha leine de la malade tait tout--fait infecte; j'tais bien persuade, et je le disais, qu'elle n'irait pas loin. La mre suprieure en dit autant; d'aprs le langage du mdecin d'aprs ce que je voyais m o i - m m e , il n'y avait plus d'espoir de gurison. P e u de jours avant de cesser ses visites, la mdecin m e dclara qu'elle n'irait pas m m e jusqu' J e
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chute des feuilles, c o m m e il l'avait d/abord suppos, mais qu'elle se mourait d'un sphacle . coutons le mdecin : L a maladie,; s'aggravait toujours ; il n'y avait plus de ressource ; et dans ma conviction que la maladie consistait e n un squirrhe de l'estomac, ou e n . u n mal analogue, j e la jugeais i n c u r a b l e . L'issue fatale tait manifeste ; les forces d la nature taient puises, et l'impuissance des remdes produire un effet salutaire quelconque dnotait- claire m e n t l'existence d'un cancer ingurissable. J'avais, dit pertinemment le cinquime tmoin, la ferme persuasion que la malade ne pouvait pas gurir, parce que non seulement les remdes ne procuraient aucun soulagement, mais encore parce que le mal allait toujours e n a u g m e n t a n t ; du reste, telle tait l'opinion du mdecin vers la fin de ses v i sites . Le docteur engageait la malade implorer le secours du Ciel, parce que lui ne pouvait plus lui procurer aucun
soulagement
Du moyen ou de l'invocation.
2 7 . Dans cette douloureuse extrmit, on eut recours, c o m m e j e l'ai dit, au patronage du bienheureux Joseph Labre, dont l'image tait appendue auprs de la malade. Le Bienheureux ne rejeta pas la prire de cette vierge si cruelle m e n t torture par la maladie ; et, bien qu'il en eut reu des paroles offensantes, il s'en vengea d'une manire digne d'un habitant du ciel. Le rcit de cette gurison miraculeuse est admirablement fait par Marie Louise. Pendant que j e me tordais cause de m e s douleurs, dit-elle, l'infirmire me suggra de me recommander au Bienheureux Joseph Labre. A moiti folle de souffrances, et dans un m o m e n t d'extrme impatience, j e rpondis : Je ne veux pas agir autrement qu'il n'agira mon gard. Alors, m e retournant vers u n e image du Bienheureux qui tait fixe au mur a u dessous d'un crucifix, j'ajoutai : Ou rends-moi la sant ou je te jette au feu avec la croix qui te surmonte. L'in firmire fut un peu formalise de cette sortie. Rflchissant ensuite aux paroles qui venaient de m'chapper, j e me repentis, et dis la sur que si j'tais morte, ce pch serait rest n o n pardonn.EUe essaya de me consoler par quelques bonnes paroles et m e conseilla de ne pas m e laisser troubler par de semblables p e n s e s . Elle partit ensuite pour se rendre au c h u r , ainsi que j e l'ai dit. Aprs son dpart, j e fis des
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actes derepentir, au sujet des paroles que j'avais prononces, et je m e recommandai avec plus d'ardeur et de confiance au "Bienheureux, puis j e m'assoupis. J'tais entre Ja veille et le s o m m e i l couche sur le ct droit, la j o u e appuye sur la main droite et les yeux ferms. Tout coup j'aperus un h o m m e j e u n e , de taille m o y e n n e , avec u n vtement l o n g , un peu ouvert sur la poitrine, o brillait une vive l u m i r e ; s o n visage, tait empreint d u n e joie cleste. II s'approcha de m o n lit e n souriant, leva la main droite de bas en haut et m e d i t : Levez-vous, vous tes gurie. Je revins m o i , et ouvrant les y e u x , j e ne vis plus rien, je crus une illusion satanique, et sur cette ide, je m e tournai de l'autre ct en m e disant : il ne me manquait plus que cela. 28. P u i s elle ajoute : J'tais couche sur le ct g a u c h e , les y e u x a demi ouverts, et bien veille, puisque j'entendais les religieuses rciter la dernire Heure au choeur, quand m a cellule s'emplit d'une lumire trs vive. Les yeux grands ouverts, j e m e mis sur m o n sant et je vis le m m e j e u n e h o m m e tout resplendissant de clart; celle qui s'chappait de sa poitrine tait particulirement si intense, que m e s y e u x n'en pouvaient pas supporter l'clat. Il tait tourn et inclin vers m o i , ayant les bras un peu ouverts et levs la hauteur de la poitrine, la paume des mains tourne en avant ; une n u e lumineuse l'entourait, et dans la nue apparaissait une i m m e n s e quantit d'anges resplendissants aussi de lumire ; trois petits anges dans toute leur hauteur, mais de tailles diffrentes, se tenaient, le plus grand et le plus petit, la droite du personnage, et l'autre sa gauche. Le plus grand avait la main un lys ; celui qui tenait le milieu par la taille avait une couronne de fleurs, le plus petit portait un bton semblable un b o u r d o n . T o u s trois taient tourns vers le Bienheureux. J'aurais v o u l u m'lancer vers lui et lui parler, mais je n e le p o u vais pas. U se dtacha alors de la n u e , et accompagn des trois a n g e s , il s'approcha de m o n lit. Avec le doigt du milieu il fit ostensiblement sur m o i le signe de la croix, d'abord sur l'estomac, puis sur le corps et enfin sur le front. Aprs quoi il m e dit : Je suis Benot Joseph. Profondment m u e au son de cette voix, je laissai retomber ma tte sur
de quatre fistules l'estomac. Sois reconnaissante au Sei~ gneur de la grce que tu reois. Vas trouver la suprieure, raconte-lui le fait et dis-luordonner l'enqute, Sois fidle observatrice de la rgle ; sois obissante la suprieure, et le Seigneur te viendra en aide en tout et partout. Il m e dit
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encore d'autres choses qui concernaient la direction de m o n me, puis la n u e s'levant peu peu disparut. Les reli gieuses terminaient alors la rcitation des Heures, car j e les entendis dire le Salve Regina. Les esprits de nos lecteurs sont en suspens et ils attendent l'issue de l'apparition. P o u r ne pas trop m'attarder, j e passe de suite l'exposition de l'autre extrme du miracie.
29. La vision cleste disparut en m m e t e m p s aux regards de la vierge couche sur son l i t ; la stupeur, la joie enva hirent son esprit; mais ces deux sentiments furent vivement accrus quand, aprs s'tre examine de t o u s cts, elle vit qu"l n'y avait pas l d'illusion, mais une vritable appa rition ; avec son cleste protecteur tous ses m a u x cruels et indomptables avaient disparu. Je demeurai, dit-elle, toute stupfaite, m u e et pleurant de bonheur. Je regardai m o n e s t o m a c , il n'y avait plus cette tache livide que j'avais encore vue le matin : Mon ventre ballonn et trs dur un peu auparavant, avait repris son tat naturel ; plus de douleurs, plus d'incommodits ; la gurison tait complte. Je m e m i s sur m o n sant, et, au m o m e n t m m e o j e m e prparais m'habiller, l'infirmire rentra. E n me voyant tout m u e , elle insista pour savoir ce qui tait arrjv, m e demandant s i j e m e trouvais m a l ? Non, lui dis-je, j e n e me sens pas mal, appelez la Mre suprieure. Sortie de ma cellule, elle appela la suprieure haute voix, et rentra en disant : si tu n e t e sens pas mal, lve-toi. Alors j e commenai m'habiller; au m o m e n t o je laais m o n corset, la Mre suprieure entra, et j e n e pus rpondre ses questions que par m e s l a r m e s . i l m'a gurie, dis-je,en montrant l'image du B i e n h e u r e u x J o s e p h , e t e n m m e t e m p s j e l u i fis voir mon corps o il n'y avait plus de mal. La suprieure m e dit: Si vous tes gurie, habillez-vous et venez au rfectoire avec n o u s . Aussi tt habille, j e m e rendis directement au rfectoire, o la suprieure m'avait prcde, portant e l l e - m m e la nou velle de ma gurison. J'entrai donc dans la salle et me mis m a place. Les religieuses taient surprises : celle-ci m e demandait une chose, celle-l une autre. Je rpondis q u e j e satisferais leurs demandes aprs avoir mang. Une des religieuses m e r e c o m m a n d a de ne pas tant manger, dans la crainte d'une indigestion. Mais la Mre suprieure fit
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observer q u e si c'tait un vrai miracle j e devais manger sans crainte. Je pris donc part au repas de la c o m m u n a u t ; il consistait en potage, b o u i l l i , l g u m e s et u n e p c h e ; c o m m e j'avais encore apptit, on m e donna une tranche de j a m b o n , u n peu de rti, deux o u trois chtaignes b o u i l l i e s , et je bus trois verres de vin pur. Diins la m m e j o u r n e , au goter, je mangeai un gteau, et au souper j e mangeai de la salade, de la viande, la m o i t i d'une saucisse et une tartine de pain avec des confitures. Les fonctions du corps s'accom plirent dans cette journe naturellement, sans vacuation extraordinaire. Le soir j e m e mis au lit, m o n s o m m e i l dura toute la n u i t , pendant laquelle m e s rgles reparurent, ce qui n'avait pas eu lieu depuis plusieurs m o i s . 30. Ce rcit est confirm par les tmoigntes des autres reli g i e u s e s ; n o u s citerons de prfrence celui de la suprieure. Aprs la rcitation des Heures, dit-elle, je m e r e n d i s a u rfec toire avec les religieuses, pendant que l'infirmire retournait vers Marie-Louise; bientt on m e prvint que la s u r infir m i r e m'appelait haute voix et avec instance; j e lui rpondis que j'irais aprs la bndiction de la table. Une f o i s l e bndi cit achev, j e m e rendis la cellule de la malade, et je trou vai Marie-Louise en train de s'habiller ; elle m e montra son corps en me disant qu'elle n'avait plus rien, que le Bien h e u r e u x Joseph l'avait gurie. Son m o t i o n tait si grande qu'elle pouvait peine s'expliquer. En peu de m o t s , elle m e raconta que le Bienheureux Labre lui tait apparu en per sonne avec beaucoup d'anges, qu'il l'avait marque du sign de la croix sur le front, sur l'estomac et sur le corps, et cela d'une faon visible ; e l l e ajouta que le Bienheureux lui avait dit qu'il avait obtenu de la gurir de quatre fistules de l'estomac, qu'il lui avait r e c o m m a n d d'tre fidle la rgle et l'obissance, lui assurant que le Seigneurl'aiderait en tout et p o u r tout, enfin qu'il lui avait ordonn de dire la s u p rieure de demander l'enqute. A ce rcit je fus m u e d'une faon inexprimable, et j e brlais d'impatience d'en faire part nos religieuses ; je dis donc Marie-Louise : si vous tes vraiment gurie, habillez-vous et venez au rfectoire. Je m'y rendis m o i - m m e , et j'annonai aux religieuses que le Bienheureux B. Joseph avait guri Marie-Louise. P e u de t e m p s aprs, elle raconta e l l e - m m e ses c o m p a g n e s , saisies d'un t o n n e m e n t indescriptible, ce dont elle m'avait dj fait part. JUe se m i t ensuite table, partagea le repas de la c o m m u n a u t , et m a n g e a de plus u n e p c h e , des ch taignes, de la viande d e porc, sans que j e m e rappelle aujourd'hui si c'tait du j a m b o n , o u du petit sal, et elle but
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trois verres de vin.Au goter, elle mangea encore un gteau; au souper, elle prit de tout ce qui fut servi la c o m munaut, et, je crois, quelque autre mets en plus. 31. Ce jour-l, le mdecin tait absent, mais il vint le lendemain. Apprenons de l u i - m m e c o m m e n t il trouva la m a l a d e : Quand j e fus appel aprs la gurison, j e trouvai Marie-Louise debout, au parloir, et j'en fus bien surpris. Sa physionomie tait celle d'une personne bien por t a n t e ; elle avait les chaires fermes, et elle me dclara ne plus sentir aucune douleur ni aucun s y m p t m e morbide. Elle m e raconta q u e , aussitt aprs l'apparition, elle avait m a n g abondamment, n o n seulement d e c e qui tait servi aux religieuses, mais encore de la viande de porc, et des fruits, et qu'elle avait bu trois verres de v i n ; que, la nuit m m e aprs le miracle, elle avait revu ses rgles dont elle tait prive depuis plusieurs m o i s . Je lui dis de rester au lit le lendemain matin pour que je pusse la visiter. A m o n retour j'examinaij'explorai le bas-ventre etl'ensemble,de sa p e r s o n n e ; j e lui trouvai les chairs fermes ; elle n'tait plus reconnaissable,la forme morbide avait entirement disparu. 32. Bien que, dans ce genre de maladies, on ne puisse i n voquer ni crise, ni mtastase, j e citerai nanmoins, pour plus ample dmonstration, certains tmoignages tablissant clairement qu'il ne s'est rien produit de semblable. Je n'ai eu, dit la miracule, ni crise, ni mtastase, et je n e vois ab solument rien qui puisse faire supposer l'une ou l'autre et de ces choses. Les symptmes morbides disparurent i n s tantanment, c o m m e aussi, instantanment, je passai de a l'tat de maladie grave l'tat de sant parfaite . Voici maintenant le tmoignage d'une personne trs comptente, celui de la s u r infirmire. Les fonctions du corps, m'a dit Marie-Louise, reprirent, le jour m m e de sa gurison, leur cours normal, sans qu'il lui soit arriv aucune crise, aucun trouble ou vacuation extraordinaire. La gurison de Marie-Louise a t instantanment complte ; elle n'a t sujette aucune mtastase, ou transfert du mal d'une partie du corps dans une autre partie ; tous les s y m p t m e s morbides disparurent instantanment. Mme langage dans^ la bouche de la suprieure : Assurment la gurison a t instantane, sans aucune crise, et sans q u e , certaine ment, le mal passt d'un endroit du corps dans un autre aussi tous les s y m p t m e s morbides ont disparu instanta n m e n t . Aux nombreuses questions qui lui taient faites, Marie Louise rpondait qu'elle tait si bien, que jamais a elle ne s'tait trouve c o m m e en ce jour.
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33. P o u r ce qui concerne la continuation de la sant, qu'il me soit permis de choisir q u e l q u e s citations entre beaucoup d'autres. A partir du j o u r de ma g u r i s o n , dit la miracu le, j e pus exercer sans i n c o m m o d i t les charges de l a v i e r e l i g i e u s e qui m'taient attribues, entre autres l'office de panetire, celui de portire la m a i s o n de a c a m p a g n e , et aussi les soins de la lingerie partags avec d'autres religieuses. Egalement, h partir du dit jour, j n'eus pas d'autre nourriture que celle de la c o m munaut, aliments tantt maigres, tantt gras; j'observai les j e n e s de l'Eglise e l ceux prescrits par notre rgle, sans ressentir aucune douleur d'estomac. E n c e m m e j o u r j e m e rendis au c h u r , et sans aucune fatigue je p u s psalmodier-avec les autres religieuses, chose que j'ai c o n t i n u e et que je continue jusqu' prsent. Depuis ma g u r i s o n , il m'est possible de me livrer tous les exercices du monastre, ce que j e n'avais pu faire auparavant, parce que j'tais toujours malade ou indispose . . E t un peu plus loin : <f Depuis ma gurison, j e ne sens aucun s y m p t m e qui puisse me faire souponner que t o u t e la c a u s e morbide n'ait pas disparu, pas plus qu'il soit survenu a u c u n e mtastase. Les autres tmoins confirment dans leurs d p o s i t i o n ce qui vient d'tre relat. 34. Fortifions ces t m o i g n a g e s par le j u g e m e n t officiel du m d e c i n Expert ; n o u s extrayons ce qui suit c o m m e trs digne de remarque : < Les rponses franches et prcises c qu'elle a faites indiquent u n parfait accomplissement de t o u t e s les fonctions digestives, en c o m m e n a n t par l'ap petit, et en finissant par l'acte de la dfcation. Ces asser tions avaient nos yeux, u n degr de certitude qui ne laisse rien dsirer, parce que cette certilude reposait sur a le tmoignage d'une nourriture rgulirement prise, et de la reproduction des chairs. A cela s'ajoutait l'intgrit des viscres du bas-ventre, intgrit constate par l e t o u cher et la percussion, d'o il rsultait qu'il n'y avait a u c u n e apparence de dsordre matriel dans l ' e s t o m a c o u a dans ses fonctions, pas plus que dans le foie, les intestins, e n un mot, dans tous les viscres destins au travail de la digestion, et qui, au temps de la maladie, taient en si mauvais tat. Pour ces motifs, avec un esprit sr e t t r a n quille, n o u s dclarons que la R. Mre Marie-Louise de l'Immacule-Gonception est parfaitement gurie, et qu'il n e reste en elle aucune trace,soit matrielle, soit fonction n e l l e de sa maladie passe T> . 35. Dans un pareil tat de choses, c'est donc b o n droit
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que ceux qui o n t suivi toutes les volutions de l'vnement, ont rang parmi les miracles de la Toute puissance divine la gurison de notre religieuse. Le chirurgien Emygdien Ulisse, certain de la gurison de Marie-Louise, a crit : Cette gurison ne peut avoir t obtenue instantanment sans un miracle, et j e la tiens pour miraculeuse . L'opinion publique, dit son tour Mancinetti, a considr c o m m e mi raculeuse la gurison de Marie-Louise, j e la considre aussi c o m m e telle, car cette mala.de'ne pouvait tre gurie instan tanment, ni par les forces de la nature, ni par les remdes de la science mdicale. Les apprciations des autres tmoins sont toutes semblables. 36. Cette croyance gnrale, corrobore par le j u g e m e n t des savants experts, nous fait prsager c o m m e certain qu'il plaira aux Rvrendissimes membres de ce Tribunal sacr de reconnatre ici, dans lenr sagesse et leur religion, l'existence du miracle, d'affirmer par leurs trs .graves suffrages s o n accomplissement rel. De concert avec le trs zl Postulateur de la cause, le R. D. P . Franois Virili missionnaire apostolique, nous v o u s e n prions de t o u t notre c u r et en t o u t e humilit. Hilaire Alibrandi.
CHAPITRE II
Discussion du miracle.
I. OBSERVATIONS CRITIQUES DU PROMOTEUR DE LA FOI. 1. Du premier Terme du miracle.
4. On s'tonnera peut-tre du titre donn la maladie dont nous n o u s occupons, lorsque la personne gurie rap porte q u e le B.Benot Joseph, lui tant apparu, s'est exprim
fistules
Veslomac-. Pourquoi donc un diagnostic cleste, e n substituer u n a u t r e ? Mais cet tonnement disparatra si n o u s rflchissons que dans la membrane si. dlicate de l'estomac il est impossible qu'il se produise des fistules,c'est-dire, des cavits sinueuses caches intrieurement, et cela
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parce que la plus petite perforation de l'estomac occasionne bientt la mort. Au reste, dans ses j u g e m e n t s , la sainte c o n grgation tient p e u c o m p t e de ces sortes d'apparitions; elle n'a jamais faitdpendre d'elles le diagnostic d'une mala die, mais bien de preuves et d'arguments physiques. Disons de plus que les religieuses e l l e s - m m e s n'ont pas ajout une foi pleine et entire cette apparition, c o m m e o n e n peut juger par ces paroles de l'une d'entre e l l e s : a Cest pour
, et par ces
autres d e l m m e : J'ai toujours cru et je crois encore f e r m e m e n t au miracle, mais je ri ai pas cru toutes les par
ulcre, une perforation, un ramollissement, un endurcisse ment, un cancer, etc. l u i , ce m m e dfenseur de la cause,
allant l'extrme, c o n c l u t non seulement que c'est un c a n cer m a i s un cancer ulcr. 3. Je conviens parfaitement que Marie Louise a t long temps aftlige d'une mauvaise sant ; bien plus, chacun savait qu'elle avait dans l'intrieur un certain virus qui se rpandait tantt ici et tantt l, et que, pour cette raison, c o m m e son pre et son frre, elle souffrait quelquefois de
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ou plutt dites que sa maladie n'tait qu'une pure nvrose souvent cause par des humeurs mauvaises, et qui disparat dans la suite sans qn'on s'en occupe, mais ne dites pas qu'elle avait un cancer ulcr l'estomac. 4. Vous allez peut-tre vous fcher et nous regarder de travers, e n fronant les s o u r c i l s ; mais, de grce, dridez votre front. Car, plus les arguments que je produirai auront de poids, plus aussi j e vous fournirai de preuves de m o n estime. La cause que nous discutons est en effet de celles o l'on aime mieux tre vaincu que vainqueur, mais la victoire n e serait d'aucune importance si la lutte n'avait pas de difficults. Examinons donc de prs la q u e s t i o n . L'minent dfenseur de la cause, pour faire adopter son sentiment, se sert d'un double critrium, tiologique et s y m p t o m a t i q u e . Tous les deux sont excellents; mais, sije ne m e trompe, ils sont tout fait incapables de nous conduire au diagnostic d'un cancer. En ce qui concerne le premier, rien ne prouve qu'il y ait eu un mal cancreux hrditaire. Et. en effet, bien qu'il soit constat que les parents de notre religieuse aient souffert de l'estomac^il ne s'ensuit pas nces sairement qu'ils fussent atteints d'un cancer de cet organe. D'ailleurs le pre et la mre de notre religieuse ont t e m ports par des maladies bien diffrentes, d'aprs le t m o i gnage de leur fille. 11 y a dj, dit-elle, plusieurs annes que m o n pre est mort... Quand il mourut, il avait environ trente-neuf ans; je m e souviens qu'il souffrait de l'estomac et de la vessie. Sa mort fut attribue sa maladie de la vessie a-mal soigne. Environ quinze mois aprs la mort de m o n pre, ma mre mourut aussi, l'ge d'environ quarante a n s . Sa dernire maladie fut une inflammation bilieuse de l'estomac, provenant de trois mauvais coups qu'elle avait reus . 5. Il faut aussi tenir compte de l'ge de notre religieuse : elle aurait donc t atteinte d'un cancer ds sa jeunesse et m m e ds son adolescence, chose impossible,puisque ce mal n'a pas c o u t u m e d'arriver cet ge d e l vie; c'est pourquoi, pour en tablir le diagnostic, il faut principalement faire attention l'ge : En effet Niemayer, dans son trait de P a t h o logie (vol. II, pag. 163) nous apprend que l e s points princi paux auxquels, dans le diagnostic diffrentiel, il faut d o n ner une attention spciale, sont les suivants: d'abord l'ge du malade, puisque le cancer l'estomac peut tre ni
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connatre que celles de tous les autres c a n c e r s . . . Ce que Ton dit de l'influence de l'usage de l'eau-de-vie, des sour it frances morales, de la suppression des e x a n t h m e s et des ulcres, n'est pas prouv . Il faut en dire autant de la perturbation des rgles, perturbation laquelle le dfenseur d e l cause attribue la production dn cancer. Certainement, l'poque critique, lorsque les femmes vont entrer dans Tge de la vieillesse, et que le flux mensuel s'arrte de luim m e , c e t t e s u p p r e s s i o n e x e r c e u n e i n f l u e n c e e t p e u t dtermi ner le cancer de l'utrus ou d'autres maladies de cet organe. C'est un fait d'exprience qui s'explique facilement. Mais qu'on ne croie pas que chaque disparition des rgles chez u n e j e u n e fille soit capable d'amener un cancer l'estomac. Il pourra se trouver, je l'avoue, quelqu'un qui le dise, mais quel est le paradoxe qui n'ait pas t s o u t e n u ? Si donc il arrive que les rgles soient dranges chez une femme atteinte d'un cancer, cela ( c o m m e le remarque James daas s o n dictionnaire universel de mdecine, au m o t squirrhe, T o m e X , p. 4 8 0 ) , ne prouve rien en votre faveur, m a i s o n doit plutt regarder cette suppression c o m m e la suite de l'affec t i o n cancreuse. 7. Ne faites pas driver non plus le prtendu cancer d'une gastrite igu contracte par suite de la quantit de rhum qu'aurait absorbe la j e u n e fille. Rien en effet n'autorise penser qu'un squirrhe puisse se substituer une gastrite. D'ailleurs les p h n o m n e s morbides que vous attribuez au squirrhe o u au cancer existaient bien auparavant. 8 . Ecartons donc le critrium tiologique, pour examiner avec soin le critrium symptomatique qui est plus propre faire reconnatre les maladies.La nialadie de la religieuse prs e n t e - t - e l l e la marche et les symptmes pathognomoniques d'un cancer l'estomac ? Je ne le pense n u l l e m e n t . E n ce qui concerne la marche de la maladie, cette marche suit u n e progression continuelle dans le cancer, et prsente des p h n o m n e s toujours de plus en plus graves. Les intermit t e n c e s et "les l o n g u e s disparitions des s y m p t m e s indiquent u n e affection morbide quelconque', et surtout une nvrose, p l u t t qu'un cancer. E n effet Grisolle, traitant du cancer de l'estomac, crit ceci : Une fois c o m m e n c s , les accidents ne rtrogradent gure ; ils peuvent rester plus o u moins d longtemps stationnaires, presque toujours ils s'aggravent l e n t e m e n t . . . La maladie a une marche qui est c o n t i n u e . (Trait de Pathologie interne. Paris, 1 8 6 5 , t o m e II, p. 5 9 8 , 5 9 9 ) . Et,de son ct,Niemayer (dans l'ouvrage cit plus haut, pag. 1 6 1 ) , dit : Dans le cours d'un cancer l'estomac n o u s
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observons la plupart du temps un continuel accroissement des symptmes, rarement il se rencontre des priodes dans lesquelles le malade se troute mieux, o les douleurs e t les v o m i s s e m e n t s se dissipent, et o l'apptit se rtablisse. 9. Vous pourrez m'objecter que, dans ces passages, Gri solle et Niemayer parlent de ce qui arrive ordinairement, mais qu'ils ne disent pas du tout qu'une intermittence o u u n e cessation, de s y m p t m e s ne peuvent jamais avoir l i e u dans le cancer de l'estomac. J'en conviens ; cependant, veuil lez, j e vous prie, ne pas oublier que, dans le diagnostic d'une maladie, c o m m e d'ailleurs dans toutes les choses hu m a i n e s , ! ! faut plutt se baser sur ce qui arrive frquemment q u e sur ce qui arrive rarement.Or, voyons de quel genre ont t, dans notre cas, les intermittences et les cessations de s y m p t m e s . Assurment la maladie de Marie-Louise, qui a dur plusieurs annes, n'a pas offert le spectacle de progrs continuels et ininterrompus dans les mauvais s y m p t m e s ; elle fut plutt toujours caractrise par des paroxymes sui vis d'apaisements, ou m i e u x , de rpits d'assez longue dure. Cela aurait-il pu avoir lieu avec un carcinome de l'estomac, lequel se serait dans la suite amolli, chang en ulcre, et aurait infect de son virus l'estomac, le sang et tous les or g a n e s ? Quoique ces longs rpits n'aient point t rapports par les tmoins, c'est u n fait cependant qu'ils ont eu l i e u ; car, si les p h n o m n e s morbides n'avaient pas entirement o u presque entirement disparu-, on n'aurait jamais permis Marie-Louise de faire ses vux et de s'engager dans un genre de vie plus svre. D i r a - t - o n qu'elle a cach son tat ? Mais c o m m e n t l'aurait-elle fait? Les religieuses, en leur qualit de f e m m e s , sont curieuses, et elles se font un cas de consience de n'admettre parmi elles personne qui ne puisse suivre les rgles de l'Institut. a 10. Mais quoi bon discuter davantage, devant ces paroles de Grisolle : le cancer de l'estomac n'a pas de signe patho gnomoniqu. Et, en effet, c o m m e l'attestent les plus h a biles dans l'art bienfaisant de la mdecine, on ne peut le reconnatre d'une manire certaine, tant que le malade est e n c o r e en vie. On ne peut certes pas regarder c o m m e signes pathognomoniques ceux qu'apporte le dfenseur de la cause. En effet, on' ne saurait regarder c o m m e tels les douleurs de l'estomac, les vomissements, la maigreur, l'affaiblissement de tout le corps,cette tache noirtre que Ton a vue apparatre sur la rgion pigastrique, la diarrhe et le reste. Et d'abord, pour c e qui regarde les douleurs de l'estomac,
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les anciens pensaient qu'on n e pouvait les regarder c o m m e symptmes du cancer que lorsqu'elles taient lancinantes, c'est--dire, tout fait aigus. Et les auteurs modernes disent leur tour que ces douleurs n e prouvent pas du tout l'existence d'un cancer. E c o u t o n s Grisolle : La d o u leur, dit-il, est loin d'tre un p h n o m n e constant du cancer de l'estomac; ce s y m p t m e m a n q u e , en effet, e n tirement dans quelques cas, et ce n'est qu'exceptionnel l e m e n t qu'on observe les douleurs lancinantes qu'on re garde tort c o m m e tant presque ncessaires dans les affections cancreuses. 11. Vous m'opposez ensuite les v o m i s s e m e n t s s a n g u i n o lents et dont la couleur tait quelquefois semblable du marc de caf. Or, Niemayer parlant de ces v o m i s s e m e n t s , dit.: . B e a u c o u p ont attribu leur valeur diagnostique une importance plus grande que celle qu'ils ont r e l l e ment. Au reste, de l'aveu m m e de la malade, ces vomissements n'ont eu lieu qu'une ou deux fois ; et, dans ces c i r c o n stances, elle avait pu prendre peu auparavant du caf d o n t elle faisait un frquent usage. Qui donc oserait assurer q u e ces matires rejetes ont t non le liquide bu, mais u n e m a tire cancreuse. 12. J e ne dirai rien du v o m i s s e m e n t - d e sang, puisqu'il peut venir de causes tout--fait diffrentes les unes des autres. C'est ce qui arrive surtout chez les f e m m e s dont les rgles sont arrtes ; et dans ce cas ce v o m i s s e m e n t de sang appar tient des hmorrhagies qu'on appelle supplmentaires parce qu'elles t i e n n e n t lieu des rgles. Ne parlons pas d a vantage de la diarrhe, parce que, c o m m e l'enseigne Gri solle (l. c , pag. 5, 99) dans le cancer d e T e s t o m a c . . . il existe presque toujours une constipation opinitre, qui ne cde qu' l'usage des lavements. La maigreur e t l'af faiblissement de tout le corps sont des s y m p t m e s c o m m u n s plusieurs m a l a d i e s , et spcialement celles qui troublent les fonctions digestives. Enfin personne n'a jamais regard u n e tache sur la peau c o m m e le s y m p t m e d'un cancer c a ch dans l'estomac. Car la membrane de l'estomac ne d pend nullement de la membrane du ventre; il faut donc voir en cela une tache h p a t i q u e , ou plutt une ecchymose pro duite par une compression ou par un coup quelconque dont la malade ne s'est pas aperue; c e qui peut arriver trs faci lement. 13. La question se rduit donc ceci : c'est qu'il est vi dent que tous les s y m p t m e s , apports par le dfenseur de
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lafcause n'ont aucune importance ; et qu'on ne peut pas l e s regarder c o m m e pathognomoniques.Gela n e surprendra p e r s o n n e , puisque, c o m m e n o u s l'avons vu plus haut (n<> 0),
le cancer de Vrsfomac n'a pas de signe pathognomo<( nique. Il est priv, en effet, de ces signes, qui, pendant
la vie du malade,pourraientle faire reconnatre d'une manire certaine. Mais si, on a pu le dcouvrir au toucher, cela n e serait pas u n signe, mais un fait; fait qui peut r a r e m e n t arriver tant que le malade est en vie. Du reste, Andral, Niemayer, Cantan et une foule d'autres, parmi les m o d e r n e s , admettent u n a n i m e m e n t le toucher c o m m e unique signe pathognomonique du cancer de l'estomac. . E c o u l o n s Cantan (dans ses additions l'ouvrage cit p l u s haut de Niemayer, p. 373).
palpable.
La p l u -
part du temps on la sent descendre sous les doigts ; le malade alors p o u s s e un profond soupir, et presque t o u jours aussi la pression exerce produit une d o u l e u r . . . Quant aux autres signes aidant au diagnostic, c o m m e l'ge du malade, la dure du mal, l'tat d'entretien et de ce force de l'organisme, la nature de la douleur (douleur obtuse, et n o n de vrais paroxysmes cardiaques avec une douleur trs aigu), ainsi que l'aspect du sang vomi, qui se trouvent cits par les auteurs, ils n e sont pas assez certains. Au reste, le mdecin qui a trait notre malade n'a pas trouv cette tumeur, et par consquent nous en par lerions inutilement. 14. Quelle a donc t la maladie de s u r Marie-Louise? G'est ce que dfinira certainement l'habile mdecin choisi par la Sacre congrgation.En attendant, qu'on me permette de rapporter ces paroles de Grisolle (1. c. p. 6 0 1 ) : Cer taines nvroses, lorsqu'elles se caractrisent surtout par les vomissements, ou par la dispepsie, peuvent simuler l e cancer de l'estomac. S'il tait permis dans une affaire aussi grave d'user de conjectures, je ne manquerai pas d'argu m e n t s trs srieux pour montrer que la maladie dont il s'agit n'est qu'une pure nvrose, qui avait pris les dehors d'une gastralgie chronique, maladie que Grisolle l u i - m m e a si bien dcrite. (Ibid., p. 743). Ce qui nous confirme dans cette opinion, ce sont la longue dure de la maladie, ses larges intermittences, le drangement des rgles, ds le c o m m e n c e m e n t et pendant tout le cours de la maladie, les douleurs vagues non-seulement dans la rgion de l'estomac, m a i s
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dans d'autres parties du corps, les dfaillances, les touffem e n t s , le b a l o n n e m e n i du ventre, les vents, les borborygmes, les contractions de la gorge ou la boule hystrique, les per turbations dans la qualit et dans r m i s s i o n de l'urine, e t c . T o u t cela est confirm par les dpositions de la malade et de son mdecin. 15. Ce diagnostic convient bien la maladie dont notre religieuse a t atteinte et qui n'a pas t* aussi grave qu'on le dit. En effet, Marie-Louise est entre a u couvent a u m o i s de septembre 1857, c'est--dire,longtemps aprs le c o m m e n c e m e n t de la maladie. Elle prit ensuite l'habit religieux, le 11 juillet 1858, et ce ne fut qu'aprs u n e dfaillance qu'elle eut alors, que le mdecin fut appel. Si la maladie dont il s'agit eut t grave, elle n'aurait pas pu la cacher si l o n g t e m p s , et, de leur ct, les religieuses n'auraient pas laiss s'couler presque trois annes sans montrer leur sur un m d e c i n , o u plutt elles ne l'auraient pas reue parmi elles, elles ne lui auraient pas laiss prendre l'habit religieux, et certainement elles ne lui auraientpas permis, le 26 aot 1860, c'est--dire, peu avant sa gurison, de faire ses v u x solen nels.
2. De l'autre terme du miracle ou de la gurison.
16. La solution de cette question dpend de celle que n o u s venons de traiter, c'est--dire, du diagnostic d e l m a ladie. Si n o u s la regardons c o m m e u n e pure nvrose, sa gurison instantane devra tre attribue aux seules forces de la nature. Car, de m m e qu'aprs u n e cessation absolue des rgles,les mauvais s y m p t m e s d'une maladie deviennent plus graves la fin de chaque m o i s , de m m e , lorsque les fonctions utrines redeviennent rgulires, ces s y m p t m e s disparaissent. Et c'est ce qui est arriv notre malade, lorsque, dans la nuit m m e qui suivit sa gurison, c'est-dire, le 24 octobre 1860, ses rgles revinrent, suivirent t o u jours depuis leur cours rgulier. 17. Telle tant la situation, reste lever, les doutes r e latifs tant la premire qu' la s e c o n d e gurison, et parce que ces doutes ne peuvent tre levs q u e par des h o m m e s habiles dans l'art de la mdecine, il n e m e reste plus, pour accomplir ma tche, que de prier la Sacre congrgation de choisir un mdecin habile, r e c o m m a n d a b l e par sa religion, sa doctrine et sa pratique, qui, aprs avoir examin srieu sement les raisons donnes de part et d'autre, n o u s a p prendra quelle a t la maladie de Marie-Louise et si sa g u -
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que la personne gurie, doue d'un naturel ardent, avait t emporte par son imagination fougueuse, et que, par consquent,on doit procder avec beaucoup de circonspection dans cette enqute. Si donc il est vident que l'imagination
a t trs ardente chez notre religieuse, il faudra conclure qu'elle a p u , en un instant et sans miracle, recouvrer la sant dont on dsesprait absolument. O force admirable ! i n fluence merveilleuse des organes crbraux sur l'estomac ! Que n e peuvent-ils, ces fervents adorateurs des muses, apai ser, par l'ardeur d'une imagination si puissante, les autres i n c o m m o d i t s de l'estomac, et en particulier la faim I 2. Ce n'est pas que n o n s j u g i o n s mprisable cette diffi cult qui nous est prsente avec beaucoup d'habilet, nous faisons seulement remarquer, au c o m m e n c e m e n t de la discussion, qu'il suffit d'un simple coup oeil pour voir qu'elle ne peut nuire notre cause, quand m m e ce q u e suppose la censure serait prouv. Nous avons en ceci l'as sentiment de notre illustre adversaire qui dit fort sagement :
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Dans ses jugements la sacre congrgation tient peu de compte de ces sortes apparitions ; elle n'a jamais fait dpendre d'elle le diagnostic d'une maladie mais bien de preuves et d'arguments physiques. S o i t ! Le j u g e m e n t
porter sur la maladie ne doit pas s'appuyer sur la vision ; et la gurison est plus indpendante encore de cette v i s i o n , car c'est un fait qui t o m b e sous les y e u x de t o u s , et qui a t d m e n t constat par les experts choisis. Toute la diffi cult du miracle consiste en ceci : Ou la religieuse a t modre et de sang froid, ou, c o m m e vous le supposez, elle voyageait dans les n u e s et avait u n e imagination plus ar dente que Sapho e l l e - m m e . D a n s cette alternative, j e prieles illustres Pres de considrer ce que j e vais dire sur le pre mier article des observations critiques, c o m m e m'iant dict par l e dsir de donner encore plus de clart aux Actes, et n o n par la ncessit de .la dfense. P o u r moi, j'accep terai la charge qui m'est impose d'autant plus volontiers que j e suis certain de contribuer davantage la gloire du Bienheureux, s i j e montre qu'il a mis le comble au b i e n fait de la gurison en y ajoutant u n e apparition cleste. 3 . On sait trs bien que ceux qui parlent par une inspi ration divine, qu'ils soient des saints o u des prophtes, o n t u n e manire de parler accomode la porte des h o m m e s avec lesquels ils s'entretiennent, et ne dpassant point la mesure de leur intelligence. On sait aussi que le vulgaire (et nous ne faisons point d'injure la religieuse gurie en l'im pliquant dans ce terme) comprend sous le n o m de fistule les lsions occasionnes par le cancer. Du m o i n s l'immortel Matre de notre droit l'affirme-t-il, lorsqu'il dit : Vulcre, la
gangrne, le sphacle, la fistule sont pris indistinctement pour le cancer par ceux qui ignorent la mdecine. Il n'y a
donc rien d'tonnant que le Bienheureux, t o u t rempli qu'il ft d u n e sagesse cleste, voulant apprendre un fait cach une f e m m e ignorant la m d e c i n e , se soit servi des t e r m e s les plus propres cet effet. Bien p l u s , c o m m e il n e s'agissait pas tant d'indiquer le genre de la maladie, que les lsions et les d o m m a g e s o c c a s i o n n s par elle, le m o t t e c h n i q u e cancer, o u carcinome,aurait t impropre cela,tandis q u e le terme vulgaire de fistule exprimait la chose clairement e t n a t u r e l l e m e n t . C'est p o u r q u o i a u c u n h o m m e sens ne regardera la vision dont fut favorise la religieuse c o m m e le rsultat du s o n g e d'une personne en dlire, par cela seul qu'elle dit avoir e n t e n d u le Bienheureux prononcer ces p a
roles : Je Vai obtenu la gurison des quatre fistules que tu as dans Vestomac.
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4. Si nous examinons la chose fond et plus i n t i m e m e n t , n o u s trouverons q u e le B. Labre n'a rien dit qui soit oppos aux vrais principes de la pathologie. Le n o m de fistule est gnral, e t i l est donn aux ulcres sinueux qui durent trs longtemps et qui sont profonds et calleux : Si l'abcs, dit Monteggia, o u la plaie quelconque d f o r m e sinueuse, n'a pas cette rapide tendance l'adhrence par suite'de sa nature froide et peu o u point inflammatoire, o u parce q u e quelque partie d e l surface interne n'est pas dispose l'adhrence, o u encore quand le fond du canal comrau nique avec u n e cavit interne, formant l un vide n o n Susceptible de se fermer, et lui envoyant continuellement quelque h u m e u r . . . , dans ces circonstances le canal arri vera facilement peut-tre se resserrer, mais n o n pas se fermer. Alors la matire ou l'humeur q u i , venant du fond, parcourt toute la longueur du canal jusqu' l'ouverture extrieure,le maintient constamment ouvert et en fait un petit conduit morbide aux parois duquel des callosits se forment avec le temps. Un conduit de c e genre, ancien et
calleux, prend le n o m de fistule. Holfmann, avec plus de concision et de clart, dfinit la fistule : un ulcre sinueux, troit,et rpandant une matire purulente. De l vient que la fistule n'estpas compte parmi les maladies primaires. Or, le cancer de la religieuse tait ulcr ; rien n'empche donc q u e ces ulcres trs infects e u s s e n t la nature et le caractre de la fistule. 5. Gela n e plat pas l'minent c e n s e u r q u i rappelle que,
dans la membrane si dlicate de l'estomac, il est impossible qu'il se produise des fhstul'es,est-a<Ure,des canaux sinueux cachs l'intrieur, parce qu'une seule et lgre perforation de l'estomac est promptement mortelle. Que dirait donc le
Censeur, s'il apprenait des matres les plus habiles dans l'art, que l'ulcration amene par le cancer < dtruit quel c quefois toute l'paisseur des parois de l'estomac, creusant m m e les parois contigus avec lesquelles celles de l ' e s tomac sont en adhrence. On a v u s'tablir ainsi u n e c o m m u n i c a t i o n entre l'estomac et le c o l o n i e foie tant rong et profondment a dtruit, la rate creuse c o m m e un vaste - rcipient, l e diaphragme perfor, les vertbres dorsales ronges et les parois m m e s de l'abdomen attaques (Roche et San son : Nouv. lm. pathol., mdic. e t c . Florence 1850, vol. I, page 784). Mais, laissant cela de ct,attaquons directement l'instance de la Gensure.Gette instance,qui parat trouver sa raison dans
VI.
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les secrets profonds de l'anatomie, est renverse par une simple interrogation. Mari-Louise souffrait-elle de l'estomac ou n'en souffrait-elle p a s , q u a n d Benot-Joseph lui a parl? E l l e souffrait certainement d'un squirrhe opinitre et dj a n c i e n . Les m e m b r a n e s dlicates et les pellicules dont se c o m p o s e l'eslomac sont-elles dans la m m e condition quand ce viscre est sain que quand il est affect d'un squirrhe ? Je ne le crois pas. C'est u n e c h o s e bien diffrente d e v o i r , dans la dissection d'un cadavre, u n viscre qui a conserv sa forme et eon tat naturel, ou de le voir aprs une marche pathologique, c o m m e celle d u n squirrhe, marche sui generis e t trs l o n g u e , qui se manifeste par des s y m p t m e s de duret et d'ulcration. Lorsque l'estomac se trouve dans cette condition morbide, hlas ! quels ulcres, quelles cavernes sinueuses le mal n'a-t-il pas pu y produire peut-tre ! et il doit en tre ainsi ; car les fistules e n t r e t e n u e s souvent par un virus malfaisant, qui corrompt et d forme la structure des parties,suivent toujours une p h l o g o s e prcdente plus o u m o i n s l e n t e . C'est pourquoi, m m e dans u n e s t o m a c v o l u m i n e u x et aux parois plus paisses, c le cancer, c o m m e l'enseigne N i e m a y e r , commence par <
s ulcrer, il se forme des excavations peu profondes d'abord, mais qui ensuite pntrent plus avant, o il rsulte un ulcre cancreux de forme irrgulire, bord durs et cal leux.
6. Que notre trs docte adversaire prte t o u t e s o n atten tion cela, et qu'il examine si les m e m b r a n e s de l'estomac de Louise n'ont pas pu tre creuses par des fistules,et fournir une matire propre aux ulcres s i n u e u x . 11 est certain que notre religieuse tait sujette, depuis l o n g t e m p s , u n e inflammation de l'estomac. L e t e m p r a m e n t de la j e u n e fille n'tait ni sain, ni intgre d'aucune m a n i r e ; s e s p a rents avaient t malades de l'estomac ; des principes n u i sibles et h t r o g n e s circulaient travers l'organisme. L'absorption trs malencontreuse d'une liqueur forte avait contribu augmenter de plus e n plus l'inflammation de l'estomac. Qu'y a-t-il d'incroyable d i r e q u e , par suite d'une gastrite prcdente, des principes htrognes nuisibles se sont introduits dans l'estomac, c e qui aurait a m e n l'en gorgement de la membrane et d'autres p h n o m m e s m o r bides qui o n t dur trs l o n g t e m p s ? Cela devait donner la muqueuse u n e paisseur insolite, l sortout o elle est n a turellement plus paisse. C'est pourquoi tous les auteurs disent q u e le squirrhe provient d'une gastrite c h r o n i q u e prcdente, parce que la m e m b r a n e devenue plus paisse et
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plus dure subit u n e dgnrescence cancreuse (Diction, classique de mdecine ; art. cancer de l'estomac). Or, cette grosseur malsaine fait q u e les conduits internes sont nces sairement rtrcis, de l la difficult de faire passer les ali ments les plus lgers, de l de violentes douleurs,de l le rejet de la nourriture et un vomissement continuel.L'effort m m e pour vomir augmentait encore l'inflammation intrieure, engendrait des spasmes, distendait le viscre ; et cette c o n dition a n o r m a l e . des membranes de l'estomac devait n cessairement produire des dchirements et des hiatus d'o s'chappait u n e humeur nuisible. 7. Cette progression lente et graduelle dans le cours des phnomnes pathologiques q u e j'ai numrs, progression qui rpond admirablement aux symptmes observs dans l a maladie, indique s o n caractre cancreux, et confirme e n m m e temps l'existence des fistules. Que le trs cligne c e n seur coute, j e l'en prie, c e qu'enseigne l-dessus le savant Scarpa : o Le squirrhe et le cancer de 1 estomac c o m m e n c e n t toujours par u n e induration d e l membrane m u q u e u s e intrieure du ventricule, qui n'est que l a continuation de la peau replie e n dedans et devenue paisse, dure, c a r i i lagineuse, puis ulcreuse : le mal se propage de cette tunique intrieure aux autres membranes, et produit l e squirrhe,puis la duret cancreuse avec l'ulcration. C'est pourquoi, lorsqu'on ouvre les cadavres de gens atteints de cancer de l'estomac, on trouve des ulcres et des perfo rations dont Chaussier a distingu avec soin de nombreuses varits quant au nombre, la forme et au lieu qu'elles occupent. E n tenant un compte srieux de ces observations, on se persuadera facilement q u e le Bienheureux a us de termes pleins d'-propos et d'exactitude, quand il a dit :
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politiques et les philosophes y trouveraient sans aucun doute une occasion d'accrotre leurs connaissances. 8. Mais, sans n o u s arrter davantage pour le m o m e n t l'autorit d'une rvlation prive, n o u s n e pensons pas avoir t trop hardi et trop tmraire, en affirmant que le squirrhe de Marie-Louise tait tellement avanc, qu'il en tait l'tat le plus dsespr de l'ulcration. Que la Censure n e n o u s objecte point diffrents t e r m e s e m p l o y s par le mdecin,, qui l u i - m m e inclinait pour le* diagnostic d'un squirrhe : < J'inclinais croire que c'tait un squirrhe. Bien p l u s , f il dit qu'il en fut persuad en soignant la malade : Con-
vaincu de Vexistence d'un squirrhe dans l'estomac, ou de quelqu'autre maladie semblable, je la regardais comme incurable. Quant au point o le squirrhe tait parvenu,
les paroles qu'il fait entendre ailleurs n e laissent lieu a u c u n d o u t e . D'aprs ce que j'ai expos plus haut, il m e semble q u e m o n opinion sur la maladie d Louise c o h a corde avec tout ce qu'a dit le Bienheureux. Il avoue donc que dans c e squirrhe se sont ouverts des ulcres s i n u e u x ; quant n o u s , dsirant s e u l e m e n t expliquer ce q u e le m decin avait dit, il n e n o u s restait plus qu' noncer u n cancer ulcr dans l'pigraphe du miracle. Nous arrivions ainsi y renfermer tout ce que la censure considre c o m m e les varits de .la maladie, au milieu desquelles le m d e c i n demeurait incertain. En effet, lorsque vous supposez u n squirrhe arriv par un progrs insensible l'tat de cancerulcr, vous avez rellement Y induration, le ramollisse
carcinome du ventricule, de squirrhe de Vestomac, d'hyper trophie, e fungus, de dgnrescence carcinomateuse, etc.
Qui a j a m a i s pens q u e ces expressions fussent contradic t o i r e s ? personne. Ainsi c'est de cette manire que, s i j e n e m e t r o m p e , sont opposs entre e u x les mots rapports plus h a u t , pour dcrire les phases successives de la maladie, et que le m d e c i n a e m p l o y s . Grisolle emploie certainement aussi ces m m e s mots, et il se sert m m e du m o t perfora tion, lorsqu'il dcrit les diffrentes priodes de la maladie et les dsordres qu'elle e n g e n d r e . T o u t cela suffit pour d truire l'objection au point d e v u e de sa force extrinsque ; toutefois la principale raison p o u r laquelle n o u s p e n s o n s
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que l'pigraphe du miracle a t justement formule, c'est qu'elle rpond aux symptmes essentiels. Les rgles de T i n formation ne doivent pas tre puises dans ce que le m d e c i n charg du soin de la malade a pu dire au c o m m e n c e m e n t o u la fin, mais b i e n dans les signes pathognomoniques qui montrent le vrai caractre de la maladie. Mais, parce q u e la censure n'attaque pas encore les s y m p t m e s , ce q u e n o u s avons dit sufft pour que la discussion puisse passer a u x autres chefs d'objections. 10. Notre illustre adversaire avoue volontiers que la reli gieuse de Falisque avait dans l'intrieur un certain virus erratique, mais il nie que ce virus ait pu engendrer u n c a n cer ulcr. 11 faut pourtant expliquer ~ce qu'est ce virus et quelle est sa nature. Si l'on veut rechercher l'origine de la diathse que les mdecins appellent cancreuse, dans un virus sui generis, n o u s n'y rpugnons pas : mais si n o u s supposons l e s h u m e u r s vicies par u n principe d'un autre genre, j e n e sais pas ce q u e nous pourrons trouver. Suppo s o n s - n o u s q u e l q u e dyscrasie herptique ? mais celle-ci s e manifeste par des signes trs connus de tout le m o n d e , c o m m e les autres ruptions analogues qu'on pourrait i m a giner. Dans les faits rapports, il n'y a aucun vestige de ces signes. Et cependant ces dartres fictives auraient d tre graves, manifestes, trs douloureuses et opinitres, puisque c'est de leur rabsorption que seraient ns les s y m p t m e s mortels qui se sont montrs dans le cours de la maladie, c o m m e les lipothymies, l'hmatmse, ou le v o m i s s e m e n t de sang, l'impossibilit de garder les aliments, la cardialgie, e t tout cela progressant toujours jusqu' ce que la malade ait t rduite la dernire extrmit. Gomment pourrait-on supposer h y p o t h t i q u e m e n t u n e telle perversion dans les h u m e u r s , alors que personne n'a p u la remarquer, et que la manifestation naturelle de ses funestes effets a fait c o m p l t e m e n t d f a u t ? Que serait cette dyscrasie e l l e m m e en admettant les phnomnes dcrits plus h a u t s , ainsi q u e ceux qui sont relaies dans les actes? Que signifie raient-ils sinon q u e cette dyscrasie tait tout au plus u n e cause loigne de maladie, mais pas du tout, la forme mor bide et particulire qui constituait le vritable tat p a t h o logique cle notre religieuse. H . Il faut dire la m m e chose des autres dyscrasies qui sont dsignes sous les noms de scorbuti'que, d'arthritique, de goutteuse, de scrofuleuse. Supposerez-vous la dyscrasie s c o r b u t i q u e ? Mais les dents et les gencives taient e n - t r s b o n t a t ; aussi, lorsque, dans l'exaltation de s o n i m a g i n a -
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tion, c o m m e le vent la censure, elle crut avoir vu le Bien heureux Benot, elle se m i t table avec de si bonnes dents,
que les religieuses l'avertirent de ne pas tant manger, de peur d'avoir une indigestion. Supposerez-vous la dyscrasie
arthritique? Mais o sont les-douleurs articulaires? Toutes les souffrances taient concentres dans l'estomac; et quelle articulation y a-t-il dans l'estomac qui est un rservoir
dont les parois sont composes de superposes, unies par du tissu mus
culaire? Vous rejetlerez-vous sur la g o u t t e ? Mais ses pieds taient t o u t fait exempts de mal; et, pendant q u e la mala die exerait en elle ses ravages, elle pouvait cependant se lever et marcher dans le monastre. Enfin parlerez-vous des scrofules? Celles-ci causent des difformits extrieures q u e les h o m m e s les plus simples reconnaissent aussitt, et qui n'auraient pu chapper la vigilance des surs et du m decin. Mettez donc de ct toutes ces hypothses gratuites, car vous tes oblig b o n gr mal gr d'en revenir au cancer. 12. Une conjecture plus vaine et m o i n s heureuse encore est celle qui tire de la bote de Pandore une nvrose pure et simple. Pourquoi n e dirions-nous pas putride? E n effet,
une trs mauvaise odeur rgnait dans la cellule de la ma lade par suite de sa maladie, mais cette odeur provenait de
son haleine. Oh ! si toutes les nvroses portaient avec elles c e s y m p t m e , les j e u n e s filles et les personnes-maries n e simuleraient pas si facilement les convulsions m m e c h r o niques.La pieuse religieuse n'est point accuse de cela, et la censure e l l e - m m e admet qu'elle n'a pas t atteinte d'une vraie nvrose. Elle n e parat pas regarder sa maladie c o m m e trs g r a v e , mais c o m m e une de celle qui pro
duisent les mauvaises humeurs, et qui s'vanouissent en suite sans qu'on s*cn aperoive ( I ) . Quoi qu'il e n soit, il est
certain q u e cette nvrose, si elle a exist, a attaqu l'esto m a c , car des s y m p t m e s trs vidents prouvaient q u e ce viscre tait malade. Du reste, la religieuse, c o m m e son pre et s o n frre, souffrait de l'estomac. La censure le re connat. Aussi est-il ncessaire de trouver une nvrose q u i affecte l'estomac ; or, c e t t e maladie est c o n n u e des m d e cins e t s'appelle gastralgie. Quoique, dans cette maladie, les douleurs soient trs a i g u s , la fivre ne se montre pas, et le m a r a s m e n e t u e pas o r d i n a i r e m e n t les malades. Grisolle
de souffrances
aussi
conserve
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gnralement son rhythme iormal. Il ajoute plus bas : Non obstant le trouble permanent des digestions, il est rare de voir les malades dprir; la plupart mme conservent 4 peu prs leur embonpoint et leurs forces. Le dprissement et la fivre lente qu'on observe quelquefois... indiqueront presque toujours quelque COMPLICATION ORGANIQUE.
Louise marchait accompagne d'une fivre plus ou moins forte, et sa maigreur tait telle qu'elle Or la maladie de
ressemblait
sang, des jections de matire noire, de l'haleine pestilente, de l'altration de son visage? Qui osera rapporter, tous ces s y m p t m e s une simple nvrose de l'estomac? S'il plat la censure de supposer une cardialgie squirrheuse, telle que Ta dcrite Bonet, ou u n e gastrodynie ulcre, dont il ne manque pas d'exemple, elle aura quelque chose de moins loign de la maladie de notre religieuse. Mais, dans cette h y p o t h : e , notre titre sera plus charg, puisqu'il s'y ajoutera une maladie nerveuse, et de plus on sera oblig de rejeter cette m e n t i o n consolante : le mal disparut l'improviste, puisque Sauvages dit que les nvroses de l'estomac dter mines par des lsions organiques sont tout fait i n c u rables. 13. Enfin, dit la censure, quelle qu'ait t la maladie de la religieuse, il n'est pas suffisamment prouv q u e ce ft un cancer, puisqu'on peut opposer une foule d r a i s o n s aux ar guments tiologiques et phnomnologiques apports dans l'information de la cause. D'abord, pour ce qui est des causes de la maladie, l'indice d'un mauvais germe chez les parents semble bien peu concluant j-sans doute ils ont souffert de l'estomac, mais il n'est point du tout prouv qu'ils aient t affects d'un cancer. De plus, le pre a t tu par l'inhabilet du chirurgien, et la dernire maladie de
observer deux choses : d'abord si, en dveloppant les causes tiologiques, j'ai parl de la maladie de l'estomac dont ont souffert ie pre et la mre de la religieuse,ainsi que son frre, c'tait pour montrer qu'elle avait une prdisposition n a t u relle et congnitale aux maladies de l'estomac. Elle a c o m m e n c par tre atteinte d'une gastrite, c'est--dire, d'une inflammation de l'estomac, maladie qui a fait mourir sa mre, c o m m e l'avoue le trs illustre censeur. L'ingurgitation d'une liqueur trs irritante et prise avec excs a b e a u c o u p contribu aussi dterminer la gastrite, et, cette maladie une fois dclare, le squirrhe pouvait facilement survenir, car tout le m o n d e sait qu'ordinairement le cancer de l'estomac
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succde une gastrite chronique. Je ferai ensuite remar quer respectueusement que chacune des causes d'une ma ladie ne doit pas tre considre c o m m e devant donner elle seule une dmonstration de la maladie; mais c'est l'exa m e n de leur ensemble qui ouvre une voie s i m p l e et naturelle la maladie qui s u r v i e n t ; et si tous les p h n o m n e s de cette maladie rpondent bien au reste, si ceux qui ont pr c d et ceux qui ont suivi se rapportent bien au m m e objet, alors on a du diagnostic u n e dmonstration parfaite. C'est pourquoi, si cette maladie d'estomac dont taient affects les parents et le frre de la religieuse, et qu'on p e u t regarder c o m m e une maladie de famille, n e suffisait pas par e l l e - m m e pour la dfense complte de notre plaidoyer, du moins nous devions, avant tout, c o m m e n c e r par n o u s y appuyer, c o m m e sur le m o y e n le plus propre persuader les lecteurs dans tout ce que n o u s avions expliquer et dmontrer plus amplement. i 4 . N o t r e contradicteur s'efforce de trouver dans l'ge de la malade une raison d'attaquer le diagnostic que n o u s avons d o n n : Celle-ci (la malade), ds son bas ge et dans l'ado
lescence, aurait t affecte d'un cancer ? Or, c'est l ce qui exclut le caractre cancreux de la maladie ; car ordinai rement on n est pas atteint de cette maladie dans le premier
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ge. On mle adroitement ici deux choses qui se prsen trent dans des temps bien loigns l'un de l'autre. Autres furent les maux d'estomac dont Louise fut affecte ds son enfance,et qui n'eurent jamais beaucoup de gravit, et autre est le cancer dont elle a t gurie. Les premiers prpa rrent les voies la maladie mortelle qui suivit ; mais per s o n n e n e les dsigna sous le n o m de cancer. La m a l a d e souffrit d'une gastrite aigu en 1855 ; et c'est aprs q u e cette gastrite fut devenue chronique, qu'apparurent les s i g n e s certains et vidents du cancer, d'aprs cette sentence bien c o n n u e : la gastrite chronique peut tre considre
cancreuse. En
1860 la maladie atteignit s o n plus haut degr de gravit, et t o u t coup elle fut gurie par l'invocation du B. Labre. 15. Ne faites point attention aux temps, je vous en prie ; supposez que Marie-Louise ait fait ses vux avant l'ge de pubert. Dj, une fois auparavant, son e s t o m a c avait t languissant et malade, et elle avait pens se faire du bien e n buvant avec une autre jeune fille, une bouteille de punch au rhum : qui s'tonnera qu'une gastrite se soit d c l a r e ? Aprs l'emploi des r e m d e s antiphlogistiques, qui sera
surpris qu'une inflammation chronique soit survenue ? Et lorsqu'une gastrite chronique se fut empare du viscre malade, qui pouvait empcher la naissance d'un cancer? Dans l'ordre physique, les causes poses, les effets suivent invitablement, et on aurait beau jurer par le n o m de Nicmayer o u d'un pathologiste quelconque, c e n'est pas cela qui pourrait dtourner les progrs morbides de leur cours na turel. Si la maladie se ft dclare spontanment, il serait plus facile de faire intervenir l'argument de l'ge plus avanc, et la doctrine de Niemayer trouverait ici sa place. Mais,comme la gastrite qui engendre le cancer avait t pro duite par une cause trs efficace,et sur un sujet dj trs dis pos aux maladies d e c e g e n r e , c o m m e n t opposer la faiblesse de l'ge, c o m m e s'il s'agissait d'une exemption de charge, ou de l'tat militaire? Du reste on trouve des exemples de personnes qui, dans un ge encore moins avanc, ont eu un cancer de l'estomac, et Valleix dit : On a cit quelques cas
beaucoup
plus
16. Mais, pour que n o u s dsesprions de trouver u n e vritable cause de cette maladie, l'illustre Promoteur de la foi rapporte un passage de Niemayer oh il dit : Les causes
du carcinome de l'estomac sont obscures, comme celles de tous les autres cancers en gnral.- En prenant ces paroles dans un sens strict, elles signifient : qu'il faut renoncer au oritiium tiologique, quand on cherche tablir un dia
gnostic. C'est un spcimen du p i o g r s scientifique c h e z e e r tains auteurs qui ont rduit la mdecine, l'histoire et t o u t e s les autres sciences un pur septicisme. Ds lors que beaucoup de ceux qui ont crit sur les choses de la mdecine ont dit, appuys sur leur exprience,qu'ils avaient dcouvert frquem m e n t des cancers, la suite dtelle ou telle cause dtermi nante, il est plus que ridicule de dire, par e x e m p l e : ce que l'on dit de l'influence, etc. n'est pas prouv. Je comprends qu'on ignore le rapport intime qui existe entre certaines causes et certains effets, et j'accorderai facilement que le cancer n'est pas toujours la suite de chagrins ou d'excs de li queurs alcooliques, car la force et la vigueur d'un trs bon t e m p r a m e n t peut vaincre ces causes, c o m m e unepierre-qui se trouve au milieu des flammes et qui ne brle point : mais qu'on e il a ce d'un trait de p l u m e ce que les auteurs de tous les temps, ont crit, en historiens, sur l'observation perptuelle de certaines maladies survenant aprs certains antcdents, c'est une chose intolrable e t qui dmontre c o m b i e n la logique mdicale laisse dsirer chez quelques-
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u n s de ceux qui critiquent l'antiquit. S'ils eussent t crs avec notre premier pre, et si, aprs avoir assist toutes les observations dont se forme l'exprience dessicles, s'ils avaient dcouvert que dans chaque fait il s'est gliss q u e l q u e erreur, alors ils seraient en droit de dire : cela n'est pas prouv. Mais, puisqu'il en est t o u t autrement, il faut s'en tenir ce qui a t s o i g n e u s e m e n t remarqu par les anciens et par les modernes touchant certaines causes qui ont pour effet constant le cancer. 17. Notre respectable Censeur l u i - m m e attaque indirec t e m e n t l'enseignement gnral de Niemayer sur l'obscurit des causes qui engendrent le cancer, lorsque, dessein,il pr tend que la cessation du flux mensuel, qui arrive avec l'ge avanc, est u n e cause propre faire natre u n cancer de l'utrus. Si vous admettez cette cause, vous enlevez la doctrine de Niemayer s o n caractre de gnrali., et vous t e s forc de faire accueil tous ceux qui produisent d'autres causes, ds qu'ils peuvent dire de ces causes ce q u e le Pro m o t e u r de la foi dit de la sienne : est constat par l'exp rience. Or leclbreMunniks,instruit,non par des recherches abstraites, mais par l'exprience, comptait parmi les causes .du squirrhe la suppression des rgles, ce qu'ont admis les auteurs cits par nous dans le 44 de l'information. P e u t tre que la simple suppression des rgles,ou u n trouble dans leur mission, n'auraient pu par e u x - m m e s a m e n e r aussitt u n squirrhe de l ' e s t o m a c ; mais la mauvaise constitution h rditaire du viscre ayant prpar la voie, on peut attribuer aussi une certaine action aux autres causes qui sont surve n u e s et dont Grisolle dit qu'elles peuvent par e l l e s - m m e s dterminer la maladie, lorsque le malade en porte ou le
d e contredire la puissance de la prdisposition due a la m a l a d i e des parents, puisqu'il dit l u i - m m e : dans quelques familles cette affection sembletre hrditaire. Du reste, pour e n revenir au trouble du flux menstruel, la Censure n o u s console en nous avertissant qu'il doit tre regard non c o m m e une cause, mais c o m m e une consquence du cancer, ce qui n o u s fait savoir qu'il a t plac avec raison, n o n parmi les causes, mais parmi les s y m p t m e s de la maladie. C o m m e , p o u r former un j u g e m e n t diagnostique, le critrium
s y m p t o m a t o l o g i q u e tient la premire place, parce qu'il est trs propre faire connatre les maladies, dit la censure (Observt, critiq., n 8), celle-ci n e fait q u e fortifier nos m o y e n s de dfense; et si, dans cette cohorte t i o l o g i q u e , elle dsire renforcer un endroit plus faible, elle p e u t encore
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ajouter l'angoisse de l'me, dont la malade tait affecte au suprme f^re,parcequ'elle craignait d'tre renvoye-du monastre cause de sa maladie d'estomac. Si cette douleur n'a pas engendr les premiers germes d e l maladie, elle a pu du moins concourir puissamment la dvelopper et l'augmenter. 18. J'ajouterai peu de c h o s e sur la gastrite cause, disent les actes, par le Rhum qui a t b u , car j'en ai dj parl souvent, et notre contradicteur n'ose pas nier thori q u e m e n t q u e le squirrhe puisse succder a u n e inflamma tion. S'il le niait, il aurait contre lui tous les auteurs qui attestent que les cancers succdent aux inflammations. Le
La gastrite engendre dans l'estomac l'induration des mem branes et a u g m e n t e leur paisseur, c o m m e je l'ai dit plus haut, ce qui donne lieu la dgnrescence de la substance encphalode, d'o le squirrhe et le cancer. Broussais et Andral ont expliqu ainsi cette marche ordinaire de la m a ladie, et Valleix s'est rattach leur opinion. Mais, ditesv o u s , il n'y a pas eu de duret squirrheuse ? Il n'y; en a pas eu chez ceux qui taient forts, et dont le mal durait l o n g t e m p s , mais ce symptme n'a pas manqu chez Louise qui
prouvait celte sensation de pesanteur el de gonflement in trieur, qui l'empchait de dormir. Mais la Censure insiste
en disant que ces souffrances, attribues au squirrhe ou au cancer, c o m m e n c r e n t longtemps avant la gastrite. Cette objection a dj t rfute, quand on a fait remarquer que les lgres souffrances qui prcdrent l'inflammation, lorsque la malade tait encore enfant ou adolescente, ne devaient pas tre confondues avec ces symptmes plus graves qui rvlrent le cancer aprs la gastrite. 19. Du reste, j e ne nierai pas que, avant son entre au monastre, il n'ait exist certains symptmes s e m blables aux derniers, et qu'on peut facilement rapporter la mauvaise prdisposition au squirrhe. De plus on a re marqu que le progrs de cette maladie est assez lent, et, c o m m e elle est cache dans le viscre, personne n'a pu saisir le premier instant o elle a commenc exister. T e n o n s pour certaines ces q u a t r e ' c h o s e s : 1 Les souilraneea prcdentes de l'estomac qui se sont manifestes ds l'en fance, 2 l'ingurgitation immodre et trs fcheuse d'une liqueur irritante, 3 une gastrite aigu dont les signes ont t certains, 4* les symptmes pathognomoniques du cancer
il) Roche et Sanson,Nouv. lm. de Patholog, mdico-cliirurg.
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manifests dans le temps qui prcda la gurison ; et, avefc cette certitude, il n'y a plus qu'une vaine subtilit discuter sur les principesde chaque s y m p t m e , par exemple, savoir .si le vomissement, l'anxit, la douleur existaient d j a u p a ravant,ou s'ils ont c o m m e n c paratre aprs. 20. Ce q u e nous avons expos en quatrime lieu ne parat pas notre minent adversaire suffisamment clairci; car, dit-il, le cours des s y m p t m e s du cancer est continuel et n o n sujet des interruptions o u des intermittences ; d'o il c o n c l u t que les phnomnes morbides auraient t o u jours d s'aggraver. Or, la maladie de Marie-Louise, qui
a dur plusieurs annes, sans manifester un progrs continuel et non interrompu de mauvais symptmes, a donn plutt des alternatives perptuelles de paroxysmes
et de rmittences, ou de suspensions. De cela on est port
infrer que la maladie dont il s'agit doit tre regarde c o m m e trangre au cancer, et rejete pr la censure. Mais, de g r c e , est-ce que dans le cancer de l'es t o m a c il y a toujours ncessairement dveloppement p r o gressif et continuel des s y m p t m e s ? Ils peuvent rester plus ou moins stationnaires, dit Grisolle, cit par la Cri tique : il reconnaissait donc qu'il peut y avoir des alterna
ou plutt de
suspensions.
Qu'ont enseign les autres auteurs ? Valleix, traitant du pro grs d e l m m e maladie, d i t : Cette marche est assez variable suivant les cas. Chez certains sujets, elle est r e m a r quable par sa rapidit ; chez d'autres, au contraire, ce n'est qu'aprs de longs troubles digestifs,sans caractre bien p r o nonci que les s y m p t m e s caractristiques surviennent, et ordinairement alors la maladie prend une marche plus aigu. Il ajoute plus bas : Chez u n petit n o m b r e de s u jets la marche de la maladie est remarquable par ses varia tions ; on voit les principaux s y m p t m e s , et surtout les v o m i s s e m e n t s , se suspendre pendant un temps plus o u m o i n s long, pour revenir plus tard et se supprimer encore. Roche et Samson disent de m m e : Jusqu' cette poque (avant le dernier degr de la maladie); les symptmes de la
maladie ont souvent prsent de longues intermittences, et, pendant quelques mois, certains malades se sont crus guris, mais tt ou lard, et quelquefois sans cause notable, les phnomnes morbides reparaissaient avec une plus grande intensit.
21. Lorsqu'on traitait la cause de la B. Marguerite-Marie Alacoque, on proposa pour s e c o n d miracle la gurison d'un cancer de l'estomac. Le dfenseur de la foi objectait u n e
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difficult semblable celle qu'on a prsente t o u t l'heure. L'honorable Emile Negri, choisi par la Sacre Congrga t i o n , dissipait ainsi tout doute de l'esprit des Pres : Ces rpits apparents qui se montrrent d'abord., quand la re ligieuse entra au monastre, non-seulement n e sont pas
le Promoteur de la foi, mais,d'aprs l'enseignement de l'il lustre Monneret, ils se montrent, mme souvent, dans la
premire priode,pour faire place ensuite des s y m p t m e s plus graves. Ds que le produit morbide s'est manifest, dit-il, il peut rester stationnaire un certain temps, trs
court en gnral, plus rarement rtrograder. Il n'est pas un mdecin qui n'ait vu des tumeurs gastro-intestinales, donner lieu des accidents graves qui s'arrtent oVune faon inespre. En mme temps la tumeur (cancer) dimnue trs sensiblement pour reprendre une marche ascendante, c o m m e cela est arriv notre malade.
2 2 . Ce passage de Monneret n o u s apprend qu'il peut a r river non-seulement des interruptions de s y m p t m e s , m a i s e n c o r e des retours apparents et des diminutions dans la m a ladie. Grisolle, de l'autorit duquel notre digne* Censeur fait tant de cas, confirme la m m e chose. Il dit quelque
part : Ces troubles peuvent rester assez longtemps sationnaires ; quelquefois on les voit diminuer et presque cesser ; les malades reprennent alors une partie de leur embonpoint et de leurs forces ; cependant les mmes accidents ne tardent pas reparatre.ya\e.ni\m, enfin, parlant d'un cas semblable
a u ntre, o la gastrite a dgnr en squirrhe, d i t : Ces
symptmes du squirrhe cessent de temps en temps, ou ils s'adoucissent; ensuite ils reparaissent et deviennent dejo.ur en jour plus graves. 23. Cette marche ascendante se fit remarquer surtout
lorsque Marie-Louise eut fait ses vux. Ayant fait profes s sion, dit le deuxime t m o i n , elle quitta le noviciat, et j e e sais qu'elle alla toujours de plus en plus mal, jusqu' la gurison miraculeuse ; et je m'en apercevais dans les v i -sites que j e lui faisais chaque jour. La sur infirmire dit : Je puis affirmer que,pendant tout le temps que Marie Louise a reu m e s soins, sa maladie d'estomac n'a jamais diminu ; mais, sauf quelques courtes priodes station naires, elle est toujours alle en s'aggravant.A cette aggra vation je n e connaissais pas d'autre cause que le mal i n a trieur de l'estomac, reconnaissable- ses vomissements et l'impossibilit de digrer. Le premier tmoin dit d e m m e : a Lorsque, son noviciat achev, elle eut fait profes-
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sion, le mal alla toujours en a u g m e n t a n t . Le sixime lmoin ne parle pas autrement : Ces fivres continurent jusqu' la fin du noviciat ; ensuite elles a u g m e n t r e n t , parce que lamaladie s'aggrava,etque le mal d'estomac alla toujours en croissant. Enfin le s e p t i m e t m o i n dit : On voyait clairement q u e la maladie progressait, et q u e Marie-Louise allait toujours de plus e n plus m a l . L e m d e c i n appel au m o i s d'aot reconnut aussitt le progrs de la maladie : Au premier coup d'il, dit-il, on voyait q u e la maladie tait trs aigu. 24. La Censure, il est vrai, s'appuie s u r des prsomptions graves, pour affirmer l'amlioration avant la profession.Elle
dit : Si les phnomnes morbides ne s'taient entirement ou presque entirement dissips, on n'aurait jamais permise Marie-Louise de faire ses vu^et de s'assujettir un rgime plus svre. Mais q u e peuvent ces prsomptions contre les
faits? Qu'elle accepte la vrit de la bouche de l'abbesse qui, raison des fonctions de sa charge, devait tre
plus svre que toute autre,pour nepas laisser entrer enreligion et pour ne pas recevoir au nombre des religieuses une personne incapable de suivre les rgles de l'institut.
Voici s o n t m o i g n a g e : L'tat de l'estomac d e Marie-Louise a t continuellement, jusqu' la profession, tel q u e j e l'ai dcrit plus h a u t , mais toujours e n s'aggravant, de
sorte que j'tais trs embarrasse d- mesure que s'ap prochait le temps de faire profession ; j'allai c o n a sulter sur cela le suprieur qui, aprs rflexion faite, dcida qu'on l'admettrait la profession comme par compassion. Le m a t i n du jour de la c r m o n i e , Marie L o u i s e n e pouvant rester j e u n , fit la sainte c o m m u n i o n ayant l'arrive de Mgr l'vque. Pendant qu'on rcitait les litanies des saints, et quand elle se prosternait, terre, selon l'usage, elle fut prise de son m a l d'estomac et v o m i t , c e qui causa u n e grande frayeur. Lorsque le m o tt m e n t fut venu de prononcer la formule des v u x s o l e n n e l s , elle dut s'arrter deux ou trois fois, cause d u m a l qui alors la faisait souffrir. Enfin l a crainte fut telle q u e la c o m m u n a u t crut qu'elle mourrait le jour m m e de la profession. Les autres religieuses voyaient bien aussi c e qui n'avait pas chapp aux yeux de l'abbesse. a Quelque t e m p s avant la profession, dit le huitime t m o i n , on a voyait la sant de Marie-Louise aller toujours e n d c h et nant, et la matresse des novices n e savait pas q u o i s'en tenir pour prparer les vtements usuels. Les religieuses e l l e s - m m e s s'opposaient c e qu'on l'admit la profes#
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sion, cause de sa mauvaise sant, et elles n e Tac et ceptrent que sur les avis des suprieurs. Ce fut la commisration des surs, que l'excellente religieuse dut d'tre admise, quoique malade, parmi les pouses de Jsus-Christ, ainsi que le rapporte son confesseur : <c Aprs la maladie de Pques, Marie-Louise ne revint jamais son premier t a t ; au'contrairej son mal d'estomac alla toujours en s'aggravant ; cela est si vrai que, quand a p procha l'poque de sa. profession, il s'leva des difficults a trs srieuses ; plusieurs fois elle me pria, en pleurant, tant elle craignait de ne pas tre admise faire profession, de dfendre sa cause. Ailleurs il dit encore : Quand il fut question de l'admettre la profession o u de l'en ex d u r e , u n des motifs que j e mettais en avant,pour amener les religieuses l'admettre, fut de leur reprsenter que, dans l'tat o elle se trouvait, il ne convenait pas de la faire sortir du monastre, que, du reste, elle ne vivrait pas l o n g t e m p s , et qu'ainsi il n'en rsulterait pas u n grand d o m m a g e pour le monastre. La maladie empirait tou te j o u r s . Le mdecin ne gardait plus aucune esprance et l'engageait. se recommander aux saints. E n rsum, c o m m e ce qu'oppose la censure aux synjpt m e s de la maladie, soit thoriquement, soit historique m e n t , ne rpond ni aux donnes de la science, ni aux faits, il arrive ncessairement que les difficults objectes dans les 5 et 6 des observations se dtruisent d'elles-mmes et t o m b e n t compltement. 25. Quoique nous ayons renvers toutes les objections proposes, cependant l'auteur des Observations critiques se prpare u n refuge dans l'autorit de Grisolle qui, t m o i n et matre la fois, enseigne que le cancer de l'estomac ne peut tre certainement c o n n u durant la vie du malade, parce qu'il n'a point de signe pathognomonique . C'est pourquoi, si les causes du carcinome de l'estomac sont obs cures, s'il n'y a rien attendre du ct des symptmes, dans l'absence de tout signe pathognomonique, il faut conclure que la Sacre Congrgation, dans la cause de la B. Marg. Alacoque, dont il a.t fait mention plus haut, a attribu la gurison du cancer de l'estomac un miracle,en s'appuyant sur les seuls critriums thrapeutiques fournis par les t m o i gnages tant favorables que dfavorables. Or cela est i m p o s sible, car on donne des remdes ceux qui vivent, et tant
que le malade vit, on ne peut reconnatre le cancer avec certitude . C'est donc par une. rvlation divine que le trs illustre Promoteur d e l foi aurait t inform de rezistence
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facile, mais, avec de l'attention, il est impossible d la reconnatre dans la plupart des cas.
26. Soit d o n c ; aucun signe, p m part ne peut tre ap pel un signe p a t h o g n o m o n i q u e , (quoique la t u m e u r avec la sensation de la pesanteur enlve toute raison de d o u t e r ) ; cependant il faut certainement attribuer une grande valeur certains i n d i c e s . Or, plusieurs indices graves et c o n c o r dant, sur un m m e fait sont une s o u r c e de certitude m o rale, c o m m e l'enseigne la.logique, laquelle doivent se s o u mettre les m d e c i n s e u x - m m e s , s'ils veulent tre regards c o m m e amis de la science. Grisolle n u m r e deux signes en particulier dont il reconnat et p r o c l a m e la force. Nan
d'un cancer l'estomac; a u t r e m e n t , c o m m e il y avait eu doute sur la certitude du fait, il n'aurait pu, quant lui, ordonner qu'on passt plus avant. O allons-nous, d i t e s - m o i , si n o u s entassons doutes sur doutes, et si n o u s n i o n s opinitrement ce qu'ont crit des matres instruits par une longue exp rience ? En poursuivant la discussion avec cette discrtion qui convient des h o m m e s sages, nous ne conclurons pas, d'une affection mauvaise q u e l c o n q u e de l'estomac, 1 existence d'un c a n c e r ; et, d'un autre ct, nous ne r e fuserons pas non plus de nous rendre des indices vidents. R o c h e et S a m s o n , discutant sur cette maladie, ont dit avec prudence : Le diagnostic de la maladie n'est pas tou
moins il est deux symptmesqui,sanstreabsolum gnomoniques,ont cependant une valeur trs gra parler des vomissements noirs et de la tumeur p
Qu'et donc dit Grisolle,s'il et seuti cette tumeur dont n o u s avons parl, s'il et vu les matires rejetes par le vomisse m e n t ue couleur noire semblable au caf brl? il dit,si ces deux symptmes trs graves il et vu se runir tout ce que les auteurs de tous les t e m p s ont signal c o m m e les caractres du cancer, savoir, les douleurs trs a i g u s , le trouble des digestions, la diarrhe, et m m e la couleur cancreuse j a u n i e du visage? 27. C'est en vain que la critique attaque dessein c h a c u n e de ces choses l'une aprs l'autre, il faut les combattre toutes dans leur e n s e m b l e . P o u r ce qui est des douleurs, le passage de Grisolle,cit dans les observations critiques, n'est pas o p p o s l'enseignement que la Censure reconnat, venir des anciens. L'crivain franais ne nie point que le cancer engendre des douleurs, mais il blme ceux qui ne veulent point r e c o n natre le squirrhe, si le malade n'est pas accabl de souffrances, car on peut quelquefois porter e n soi ce m a u vais hte, sans qu'il se manifeste par des douleurs, . La dou-
L E S MIRACLES A U T R I B U N A L D E L A S C I E N C E .
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leur est bien loin d'tre un phnomne constant du cancer de l'estomac, ce symptme manque en effet entirement
Donc le plus souvent il existe. Ainsi, dans un foyer, le feu peut briller, sans qu'il sorte de fume, mais, si on voit de la fume, on la reconnatra certainement c o m m e le signe naturel et certain du feu. Nous ferons remarquer ici en passant que ces quelques cas dont parle Grisolle, se rapportent des carcinomes encore latents, car lorsque le cancer est ouvert et ulcr, la douleur est nces sairement excite, m o i n s qu'on ne suppose que la s u b stance de l'estomac ne soit d'argile ou d'air. 28. Quant aux matires noires rejetes par vomissement, la Censure nous avertit de ne pas leur attribuer trop d'im portance, parce que beaucoup leur ont attribu comme
DANS QUELQUES C A S .
diagnostic une importance plus grande qu'elles rien ont en effet. Pour n o u s , n o u s leur en accorderons autant que le fait
Grisolle si estim de la Censure et dont n o u s avons n o u s m m e fait l'loge un peu plus haut. Bien plus, nous leur e n accorderons autant queNiemayer s'est plu l e u r en attribuer,lui dont notre adversaire suit l'opinion en ce m o m e n t . Le docteur de Tubingue aprs avoir montr c o m m e n t on peut .distinguer un cancer d'un ulcre de l'estomac'dit : Les
moments qu'on doit prendre spcialement en considration, quand il s'agit du diagnostic diffrentiel de ces deux mala dies, sont les suivants... la qualit du sang rejet. Da'&s l'ulcre de Vestomac, on rejette plutt le sang en grande quantit mais peu altr ; tandis que,dans le cancer, il y a plus souvent, mle au vomissement, une petite quantit de sang sous forme d'une masse noire SEMBLABLE A DU MAKC DE
Voyez donc c o m m e n t les tmoins, quoique trangers aux mystres Esculape, ont bien littralement exprim le fait, quand ils rapportent, ainsi q u e l'avoue la Censure, que
CAF.
le vomissement tait semblable au marc de ces fves d'arabieque nous appelons caf. (Observ. crit., 11 ).
29. On objecte seulement que, d'aprs l'aveu de la malade, ces vomissements n'ont eu lieu qu'une ou deux fois. Mais la malade n e parle ici que de ce qui est arriv pendant les 4 0 jours qui ont suivi les ftes de Pques de l'anne 1860. (Exposit. du miracle, 2 et 3). Du reste ces vomissements de matires noirtres ont r e c o m m e n c plus tard, et surtout aprs q u e Louise eut pro n o n c ses vobux de religion. Il faut d'abord entendre la sur infirmire qui fait connatre parfaitement ce qui a e u lieu dans le temps qui a suivi la profession, Aprs qu'elle eut fait profession, et qu'elle eut sa propre. cellule, je devins son infirmire et j e pus m i e u x connatre
vi.
53
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a
sa maladie de l'estomac. D'abord c'tait avec peine et beaucoup de souffrance qu'elle digrait l a s e m o u l e et l e caf avec un petit biscuit, mais elle n e pouvait pas d u tout digrer les aliments plus solides ; une fois j'essayai de lui faire m a n g e r du pain bien sch au four, parce q u e je le croyais plus lger, la digestion fut si pnible qu'elle l u i causa u n e sueur froide,et je crus qu'elle mourrait ce j o u r l. T o u t e s les fois qu'elle prenait q u e l q u e nourriture, elle la rejetait peu de temps aprs, et ces vomissements taient trs frquents. Les matires ainsi rejetes renfermaient, outre le peu de nourriture pris par elle, une sorte de flegme de couleur noire . La suprieure du m o n a s t r e dit : J'ai su de Marie-Louise qu'elle vomissait souvent, et les m a t i res taient tantt c o m m e une e a u jauntre d'une saveur amre, tantt c o m m e de l'cume ; quelquefois ces j e c tions taient noires comme dwcaf brl, et m m e mlan ge ges de pus et de sang. Ces v o m i s s e m e n t s de pus et de a sang, m'a dit Marie-Louise, lui taient arrivs aussi p e n dant son noviciat . Ces paroles indiquent clairement q u e l a malade a v o m i des matires noirtres aprs tre sortie du noviciat. Il ne faut pas non plus passer sous silence la dposition du 2 tmoin qui s'exprime ainsi : Ces accidents < continurent aprs les 40 jours, car ses douleurs d'estomac' x ne cessrent j a m a i s , elle ne pouvait pas digrer et elle n e dormait p a s ; toujours elle prouvait u n e surexcitation que provoquait le v o m i s s e m e n t elle rejetait des mati res jauntres, et parfois plus fonces . La Censure explique agrablement ce triste p h n o m n e , en rappelant que la religieuse faisait usage de caf: qui donc, c o n c l u t elle, oserait affirmer que ces matires rejetes ne sont point,
E
sements
lui arrivaient
Comment une boisson prise pendant le jour aurait-elle pu conserver sa couleur et sa nature de manire tre rejete telle qu'elle avait t prise ? Et ces p h n o m n e s de douleurs
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si atroces, de faiblesse, de marasme, de tumeur, qui a c c o m pagnaient les vomissements, taient-ils aussi produits p a r l e caf? S'il en est ainsi, il faut fermer le plus tt possible toutes les maisons o Ton fournit indistinctement tous, les citoyens une boisson aussi nuisible et aussi dangereuse. 3 1 . La Critique semble faire peu de cas des vomissements de sang, quoique Chomel dise que Vhmatmse et ihmo-
funes
cela arrive surtout aux femmes qui sont prives du flux menstruel, et,dans cette circonstance,ce vomissement mme appartient ces hmorragies qu'on appellesupplmentaires, parce qu'elles supplent au dfaut des menstrues . Mais de
quoi tenaient-elles la place ces matires purulentes, jau ntres, rejetes en abondance avec le s a n g ? Si ces vomisse m e n t s remplissaient la fonction supplmentaire des rgles, ils auraient d se produire des temps dtermins, m a i s , au contraire, ils avaient lieu le jour et la nuit, et les ma
taient
morceles
et
jauntres.
Ils taient, j e pense, dous d u n e puissance toute particu lire, puisque cette fonction supplmentaire qu'ils remplis saient les rendait si opinitres. Quoi qu'il en soit,ces mati res rejetes parla religieuse rpondent exactement la des cription qu'en d o n n e Grisolle, qui dclare qu'elles sont m les d'une bile j a u n e , et d'une matire moiti-solide, n o i rtre, imitant, c o m m e on l'a dit plus haut, le marc de caf. Nous passerons la diarrhe sous silence, s'il plat la Cen sure, mais jamais nous ne tolrerons qu'on dise que ce s y m p t m e est presque contraire au diagnostic que nous avons tabli, car on remarque souvent que les malades en sont affects, sur la fin de la maladie Il est frquent,dit\ Vllei, de voir la diarrhe vers les derniers mois; et il ajoute que souvent les malades ont des selles involontaires. 3 2 . La Censure semble presque ne tenir aucun compte de cette extrme maigreur dont la malade tait afflige, car' elledit que cette maigreur est c o m m u n e a bien des maladies, et surtout celles qui troublent les fonctions digestives. Je rappellerai ici deux choses : 1 Dans u n e nvrose de l'es t o m a c , telle que la Censure la suppose, les malades conser vent une certaine apparence extrieure de sant ; c'est pour quoi il tait important, puisqu'il s'agit ici d'un cancer, de faire remarquer la maigreur et l'puisement des forces. 2 Parmi les auteurs de mdecine, il n'en est point .qui, en dcrivant le cancer de l'estomac, ne place avec soin ce symptme au n o m b r e des autres. Ainsi Grisolle, que la Cen sure consulte volontiers, enseigne exactement c o m m e n t cette
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maladie trouble, ds le principe, l ' c o n o m i e gnrale d e tout le c o r p s ; et certainement les m a l a d e s maigrissent d'au tant plus vite, q u e la force de la diathse cancreuse s'unit celle qui provient de l'imperfection des digestions, l e s quelles finissent par n e plus se faire. Aussi les malades dprissent p r o m p t e m e n t et ils m e u r e n t dans le dernier tat de marasme, avec tous les signes de la cachexie cancreuse. Cesdeux forces nuisibles et malfaisan tes conspiraient d'une manire dplorable perdre MarieLouise : E n effet, elle n'avait plus que la peau et les os ; elle tait si maigre et si afiaiblie, qu'on ne la r e c o n naissait plus ; aussi la peau tait-elle pendante sur les o s ; elle avait u n teint cadavrique, la respiration oppresse et a la voix teinte , Les fonctions digestives n e s'excutaient plus, puisque, d'aprs la sur infirmire, elle tait rduite
un tel tat qu'elle ne pouvait plus ni manger, ni boire; elle rejetait tout ce qu'elle prenait.
33. Quant cette tache livide q u i apparut la rgion pigastrique, elle n e n o u s inquite pas beaucoup, q u o i q u e nous puissions soutenir, d'aprs l'autorit des h o m m e s les plus srieux, qu'on a trouv quelquefois les parois' mmes
de Vabdomen attaques
interne. Une e c c h y m o s e cause par le f r o t t e m e n t n'aurait pas p u tre si opinitre, et aurait prsent un aspect roqgetre, Une tache hpatique n'aurait p u tromper le mdecin ni le chirurgien,et elle n'aurait pas paru seule. Pourquoi alors dirions-nous q u e la malade a contract d'autres infirmits dont les indices n'existent pas? P o u r en finir le plus tt p o s sible, n o u s dirons que cette tache a exist, e t m m e qu'elle aurait p u apparatre sur d'autres parties du corps. Mais parce q u e ces taches se montrent habituellement dans les mauvaises maladies, indiquant ainsi la corruption d e s h u m e u r s , t o u t le m o n d e comprend qu'il est trs naturel qu'elles arrivent dans la dyscrasie humorale cancreuse, car, le cancer une fois dclar et dvelopp, le virus qui
l'entoure, pntrant dans le canal de la circulation, n' pargne aucun tissu organique. Qu'y a-t-il d'tonnant si l'in
fection des h u m e u r s s'est produite surtout dans cet endroit, plac trs prs de la source principale de ce virus si n u i sible, alors qu'il tait dj rpandu dans tout le corps de la malade ? 34. 11 n'est pas ncessaire de noiis arrter longtemps sur ce point, puisqu'il est un autre signe extrieur indestructible trs certain q u e l'illustre Censeur appelle, avec raison, n o n pas un signe mais un fait. Je veux parler de cette tumeur
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dont nous avons un si grand nombre de tmoignages dans les actes. Commenons par la personne gurie. Pendant A la maladie q u e m e donna, lorsque j'tais dans ma famille, cette bouteille de rhum dont j'ai parl ailleurs, m o n estomac se gonfla" un peu' extrieurement, et le mdecin, e n pesant sur cette partie, m e le faisait remarquer. Je n e peux dterminer combien de temps cette enflure a dur; j e ne peux pas prciser si elle est venue p e u - peu, o u si elle a paru tout coup, car j e n e m'en suis aperu que quand elle existait dj. Mais j e peux dire q u e , m o n entre dans c e monastre, cette partie me paraissait dans son tat naturel. Je m e rappelle que ce gonflement avait un peu reparu aprs m a vetre, e t i l augmenta jusqu' m a gu rison, poque laquelle il tait devenu plus sensible. 35. La matresse des novices dit : Je m e souviens d'avoir vu la poitrine et l'estomac de Marie-Louise un peu enfls e x t r i e u r e m e n t ; et ailleurs elle ajoute : Dans les derniers jours de la maladie l'enflure extrieure surl'esto mac avait augment : le ventre aussi tait ballon, j ' e n t e n dis dire par l qu'il tait dur. La sur infirmire affirme la m m e ' c h o s e : Dans les derniers jours, son estomac tait u n p e u enfl l'extrieur le ventre aussi tait enfl et tendu c o m m e u n tambour. La suprieure du monastre a dpos ainsi: Louise disait qu'elle sentait d a n s l ' i n t rieur de l'estomac c o m m e un poids et u n e enflure ; plus bas elle ajoute : Elle sentait un poids et un gonflement l'intrieur Le cinquime tmoin dpose la m m e chose : J'eus l'occasion de voir quelle avait le ventre enfl et ailleurs : Elle disait sentir l'intrieur, et au fond de l'es tomac, u n e certaine enflure et un certain poids, presque continuellement. 36. II faut noter ici avec soin ce qui est rapport dans ces passages des actes rcemments crits, au sujet du sentiment de pesanteur, de la variabilit de cette sensation, ainsi que de la tumfaction et de la duret de tout le ventre, car elles se rapportent parfaitement ce que dit Niemayer : Les cancers au cardia n e produisent presque jamais u n e t u meur sensible, quand ils ne sont pas trs tendus ; l e s cancers la petite courbe n'en produisent u n e que quand ils s'tendent vers la grande courbe ; enfin les cancers au pylore n'en produisent que quand il n'est pas adhrent aux parties, voisines, mais qu'il se porte par son propre poids vers le fond de l'abdomen. La tumeur dans la plu part des cas se place dans le voisinage du n o m b r i l . . . si le v o l u m e de celui-ci est m o i n s considrable, alors elle forme une prominence visible sur le ventre Dans
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beaucoup de cas la tumeur est mobile, e t change de place selon q u e l'estomac est vide o u r e m p l i . . . la sensibilit de la tumeur est aussi variable : quelquefois on observe sur l'pigastre, au lieu d'une t u m e u r circonscrite et bossele,
une prominence uniforme plus ou moins tendue et rsistante. > II arrive souvent q u e cette tumeur provoque
un bruit semblable au sifflement du v e n t . . . un bruit de souffle, dit Grisole, c'est ce q u e la malade semble avoir prouv lorsqu'elle dit : je sentais frire dans mon estomac comme dans une.pole. C'est d o n c avec raison q u e la m a tresse des novices rptait que Louise devait avoir q u e l q u e grosseur dans l'estomac. 37. L'illustre Censeur n'ajoute pas foi tout cela, e t i l dit que ce.sont des mots en l'air : car le mdecin de la malade
n'a jamais'.senti de tumeur, et, par consquent, c'est inuti lement que nous discutons sur ce point.Cependant c o m m e il
s'agit de faits positifs, et q u e sur dix personnes qui o n t p u voir, u n e seule dit qu'elle n e sait pas, tandis q u e toutes les autres affirment u n a n i m e m e n t qu'elles ont vu et senti, c'est plutt leur t m o i g n a g n e qu'il faut admettre, e t i l n'est pas permis de douter du fait. De plus il faut se souvenir q u e l e mdecin a explor u n e seule fois la rgion pigastrique, avant q u e la malade n'et fait sa profession, alors q u e la tache livide jetait la suprieure dans de grandes inquitudes. A cette poque, la malade tant couche, et toute l'attention se portant- sur l'examen de cette tache, il n'est pas tonnant que la tumeur, quand m m e elle e t t dj apparente, ait peu attir la sollicitude du m d e c i n . Ajoutez tout cela q u e le mdecin se conduisait avec la plus grande rserve, et si la tumeur s'tait manifeste auprs du nombril, c o m m e n o u s l'avons appris de Niemayer, tandis que la tache tait au creux de l'estomac, il est assez probable q u e cette partie n'a point t dcouverte devant le m d e c i n . 38. Pour n e point paratre inventer des choses inutiles, j e rapporterai les paroles du mdecin lui-mme : Je ne m e souviens pas d'avoir trouv l'estomac de Marie Louise enfl extrieurement. Quand la tache livide, on n'en avait point parl, et j e n e l'avais pas vue, avant l'ap-
couvrir la malade
m e rvla l'existence de cette tache aprs l'application des sangsues, et l'ayant alors examine, -je l'attribuai aux sangsues qui avaient pris sur cette place j e n e sais combien auparavant. Que c e t examen du m d e c i n ait eu lieu avant la profession d e la religieuse, les actes l'attestent d'une manire vidente ; car, aprs avoir observ
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la lche, il voulut essayer une nouvelle mthode de trai t e m e n t : Marie-Louise s'y refusa nergiquement, disant qu'elle n e voulait point s'assujettir u n autre traitement avant d'avoir revtu le voile de la profession. 39. Dans la suite on n e l'examina plus ; e t c'est la pleur du visage de la religieuse que le mdecin concluait la pleur gnrale de toutes les autres parties du corps. Dans l e temps o j e la visitai,c'est--dire, depuis la fin du m o i s d'aot, la malade avait le visage, trs-ple, et je tiens qu'il devait en tre ainsi de tout son corps . Sur la fin de la maladie, alors que la tumeur apparut distincte, les bandes du gnral Niois envahirent la ville, et, partir de ce t e m p s , le mdecin s'abstint prudemment de parler d'examen du
mal : il craignait qu'en entrant dans le monastre* quelques soldats n'y vinssent aprs lui. Mais avant de se retirer, c o n
traint par la ncessit, on lui dit que la malade avait u n e grosseur sur le ventre ; il s'en alla en prescrivant des bains. E n effet la malade gurie parlant de ce qu'elle devait se r a p
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c o m m e l'avait fait avant lui Grisolle l u i - m m e , qui e n seigne qu'il ria jamais vu mourir un malade des accs de
la g astra Igie.
4 1 . Ajoutons que l'extrme maigreur du corps, la d i g e s tion trs incomplte, et, pour m i e u x dire, t o u t fait i m possible, la fivre lente, les flux de sang et d'humeurs c o r r o m p u e s et noirtres ne se produisent jamais dans une gastralgie primitive. Il peut arriver cependant qu'elle soit secondaire, c'est--dire, qu'elle vienne la suite d'une autre maladie primitive et organique. Mais, dans ce cas, il s'agit d'une lsion grave de l'estomac, c o m m e c e l l e dont n o u s n o u s efforons de dmontrer l'existence, et q u e l a Censure cherche nier. Certes, si le trs illustre Censeur tente de n o u s p e r suader qu'au cancer se sont ajoutes u n e gastralgie, u n e gastroynie, des nvroses quelconques, ou l'hystrie ellem m e , n o u s ne n o u s y opposerons pas, et m m e , si cela lui plait, n o u s admettrons sans aucune contestation, que toutes ces maladies ont t c o m m e le cortge du cancer. Or j e prie les sages consulteurs de se rappeler que, dans une nvrose, il n'y a jamais a u c u n e affection pathologique d'un viscre particulire, mais plutt une certaine affection g n rale, variable et inconstante dans les s y m p t m e s par les quelles elle se manifeste : aussi jamais op. ne pourrait, par cette affection, expliquer cette tension, cette douleur aigu, ces fonctions interrompues, ces vomissements de sang p u rulent, ces sentiments de pesanteur et de t u m e u r dont se trouve affect le viscre atteint et gravement ls. Enfin, quelle que soit la raison que l'on donne pour tablir le doute entre la gastralgie et le cancer de l'estomac, elle dis paratra promptement devant cet enseignement de Grisolle, savoir, que le progrs du cancer se manifeste par des vo m i s s e m e n t s noirtres, par u n e t u m e u r l'pigastre et par d'autres signes de la cachexie cancreuse. C o m m e ces signes se sont produits chez notre religieuse, tout doute est donc dissips. 42. Le contradicteur vaincue par des arguments directs et intrinsques,se rfugie dans certainesinductions extrinsques qui n e peuvent atteindre ni diminuer la vrit des choses attestes par les actes. Si la maladie de la religieuse tait si grave, dit-il, on n'aurait par d la recevoir, ni lui donner la vure.Nousavons rpondu cette difficult plus haut,dans le 24 o j'ai dmontr, sur le t m o i g n a g e du confesseur, p o u r q u o i elle avait t reue, m m e avec la croyance sa mort prochaine.Mais la personne a cach son mal pendant prs de trois a n s , e t les religieuses o n t laiss passer tout ce t e m p s
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avant de la faire voir au m d e c i n . Gomment cela est-il possible, dans une maladie aussi terrible? Notre critique est excusable d'ignorer, dans la sincrit et la simplicit de son c u r , ce que peuvent les femmes en fait de dissimulation : et en parlant ainsi, je ne fais injure personne, car n o u s avons l-dessus l'aveu de Marie Louise elle m m e : et son t m o i g n a g e est t o u t fait digne de foi, tant parce que n o u s connaissons la marche trs lente du cancer, que parce qu'il a des temps d'arrt et des retours apparents, ainsi qu'il a t. dmontr plus haut. Que l'on veuille donc bien comparer les choses ainsi tablies avec ce qu'on lit dans la dposition * de Marie-Louise,dposition que Ton a vue dans l'expos du miracle et que je ne veux point rapporterici pour ne pas fa tiguer les lecteurs. On comprendra facilement c o m m e n t , malgr les progrs de la maladie, la religieuse, dans un pieux dessein, mais n o n sans quelque dtriment de la vrit, a pu tromper quelque temps les autres religieuses qui attri buaient aux jenes et l'abstinence prescrits par la rgle, les s y m p t m e s morbides q u i . a u r a i e n t d tre attribus une maladie existant depuis longtemps, et qui progressait insensiblement. 43. Du reste, n o u s ne devons pas nous tonner, si, lorsque Marie-Louise faisait son .noviciat, ses compagnes montraient moins de sollicitude pour elle, car, dans les dbuts de la vie monastique, chaque religieuse se fait un scrupule de s'oc cuper des affaires des autres. Cependant l'tat de la malade n'chappa pas entirement la matresse des novices-, mais la pieuse femme, ignorant le pass de la jeune fille, garda pru d e m m e n t le silence, croyant lamaladie moins srieuse qu'elle n'tait en ralit, jusqu' ce que la gravit des s y m p t m e s l'obliget le rompre. Voici ses paroles : P e u avant la vo it ture, elle c o m m e n a maigrir, mais elle disait, bien qu'avec une certaine rticence,que le j e n e lui fatiguait un peu l'estomac Aprs la vture, elle alla toujours e n maigrissant et en dclinant ; j e croyais qu'elle tait fatigue , de manger d u m a i g r e et que les autres aliments luitaient un peu lourds. Quelquefois,ne la voyantpoint aunoviciat, et ninformant d'elle ses compagnes, l'une d'elles, qui l'avait remarque,me disait secrtement qu'elle s'tait e ce lire pour vomir. Je m'apercevais pareillement qu'elle dormait peu. Un jour, elle avait mang de la friture, elle fut prise d'un violent vomissement qu'elle ne put cacher. Pour ces motifs j e la d i s p e n s a i quelquefois du lever, de la discipline,du j e n e et des autres observances d e l rgle, u C'est pendant le progrs de la maladie^u'arriva le carme de cette anne qui fut celle de sa gurison : elle le passa
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trs mal. s e pouvant pas m m e s'acquitter de ce qu'elle avait faire la sacristie. Elle marchait avec peine et abattement ; elle avait beaucoup de vents, et, c o m m e je ne savais rien de sa maladie, supposant que c'tait une simple indisposition de l'estomac, il me semble que j e lui fis prendre quelque chose de t o n i q u e ; mais j e voyais que rien ne la soulageait.Cettat dura j u s q u ' l a d e u x i m e fte de Pques de cette m m e anne 1860, car j e me rap pelle qu'elle prcda celle de l'invasion des Garibaldiens. C'est alors que,le mal augmentant notablement, on appela pour la premire fois le mdecin Mancinetti. 11 y a dans ce rcit, avec lequel t o u s les autres concordent, tant de caractres de la vrit, que nous ne p o u v o n s ni accuser les religieuses de simplicit et d'erreur, ni dire que la maladie tait plus lgre qu'elle n e Ttait en ralit.
II. De Vautre terme du miracle, ou de la gurison.
44. P o u r attaquer l'vidence si parfaite de la gurison mi raculeuse, l'excellent Censeur n'a pu inventer d'autre raison q u e celle-ci, savoir: que cette gurison intervertirait l'ordre naturel des causes et des effets,des prcdents et des c o n s quents. En effet, lorsque la malade eut t soulage par la rvlation cleste, aussitt elle se leva, marcha et se sentit dbarrasse de tous les s y m p t m e s morbides. Elle se mit table pour le dner et la collation,mangea trs volontiers,en grande quantit, des choses lourdes, p r c i s m e n t pour prouver que son estomac dont les f o n c t i o n s eri dernier lieu avaient t interrompues, n'tait plus m a l a d e . Elle alla se coucher l'heure rglementaire,et dormit parfaitement toute la nuit. Qui n'avouera que la cause d e l gurison, quelle qu'elle ait t, avait prcd tous ces faits? C'est pourtant c e que nie la Censure, et elle reconnat la c a u s e du r e c o u vrement de la sant en ce que, la nuit qui suivit la gu
rison, ses menstrues suspendues revinrent et coulrent depuis rgulirement. E n vertu de ce raisonnement, si un m
decin APRES LAGUER1SON avait donn quelque remde, il faudrait lui attribuer le rtablissement de la sant. Tout, le m o n d e voit qu'il y a dans cette objection un aveu tacite par lequel le trs prudent P r o m o t e u r de la foi montre ceux qui sauront le comprendre, qu'il n'a rien opposer au fait si vident de la gurison. Du reste, il dit sans dtour que cet e x a m e n de la gurison dpend du pass, c'est--dire, du diagnostic de la maladie C'est pourquoi il dclare ouver t e m e n t qu'il n'aurait rien objecter, si le diagnostic du can cer avait t dmontr par des preuves certaines. Or n o u s
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avons confiance qu'il en a t ainsi, il ne reste d o n c plus qu' reconnatre un miracle vident dans cette gurison ins tantane. 45.Ainsi rien ne s'oppose ce que le Saint-Office se m o n t r e favorable aux demandes que nous avons prsentes dans la conclusion de l'information,d'accord avec le prudent postu lateur de la cause, le R. P . Francisco Virili, missionnaire apostoIique,demandes que nous renouvelons ensemble avec instance.
H I L A R E S ALIBBANDI.
t ralise de s u i t e ? Cet effet merveilleux confirme et < corrobore la vision, il n'est donc pas facile de repousser c le diagnostic des quatre fistules, tabli par le Bienheureux, a De plus, la religieuse ne savait pas, n e s o u p o n n a i t m m e pas. que ses douleurs, ses maux d'estomac provenaient de fistules. Le mdecin Reconnaissant u n e grande pertur bation de l'estomac, souponna fortement la prsence d'un c a n c e r ; mais de fistules proprement dites, il n'en a est nulle part question dans ses dpositions. Ainsi d o n c on peut estimer qu'il n'a jamais prononc ce n o m de fis tules ni devant la religieuse ni devant ses c o m p a g n e s . Or, s'il en est ainsi, c o m m e n t , j e le d e m a n d e , Louise a-t-elle pu ayoir l'ide de ce n o m et le formuler de vive voix, s i n o n la suite d'une rvlation d'en h a u t ? Cependant tout en admettantjpar suite de la rvlation,l'existence de fistules dans l'estomac de la malade, c o m m e tant la vri table et principale maladie de Marie-Louise, il est loin de ma pense que cette maladie ne doive pas tre e x a m i n e et confirme par la science mdicale ; j e dsire m m e vivement que cette confusion que l'on remarque dans la dfense, disparaisse, et que le patron de la cause emploie les forces de son intelligence et de s o n habilet confir mer le diagnostic surnaturel de la maladie en nous pr sentant toute la srie des s y m p t m e s , et le mettant ainsi de plus en plus e n lumire.
2. E n parcourant le sommaire de la cause,l'existence d'un cancer ulcr dans l'estomac d e l religieuse parat si incer taine et si d o u t e u s e , qu'il semble plus hardi que prudent de vouloir la soutenir. On voit, en effet, par les actes, q u e cette femme parvint, force d'habilet et de ruse, dissi-, m u l e r son mal jusqu' l'poque de la gurison, ' dans la crainte d'tre renvoye du couvent. Il e n est rsult que ni les religieuses avec lesquelles elle vivait, ni le m d e c i n qui lui donnait des s o i n s , ne souponnrent l'existence de la maladie. Il n'tait donc pas grave ce m a l que l'on pouvait ainsi dissimuler. G'est pourquoi, peu de t e m p s avant la gu rison, elle fut admise prononcer ses vux, parceque les religieuses ne la s o u p o n n a i e n t atteinte q u e d'un mal lger. Aussi, le mdecin,ds qu'il apprit de la personne gurie que la rvlation d'un mal plus grave lui avait t confirme par un t m o i g n a g e cleste, fut trs tonn, quoique d'une crdulit excessive, "et se plaignit du silence inopportun q u ' o n avait gard. me fit, dit la malade, une bonne
eu bonne c h a n c e , mais qu'il ne fallait pas m'y accoutu mer. Mais,tout autre h o m m e suffisamment sage et pru-
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dent se ft demand s'il tait raisonnable d'ajouter entire ment foi une religieuse qui avait menti si l o n g t e m p s . 3. Ce fut donc cette poque que Ton c o n n u t pour la premire fois'la maladie de Marie-Louise, maladie dont le m d e c i n , plein d'hsitation et de scrupules, a dit : a J'ai
o: toujours t persuada qu'il s'agissait d'une altration morbide l'estomac, qui pouvait tre un squirrhe, j'tais mme port croire, que c'tait un- squirrhe ; mais ce pouvait tre encore une ulcration, une perforation, un ramollissement, une induration, un cancer, etc. En
indiquant ainsi d'une faon aussivague,aussi peu dlimite, le caractre de la maladie, le mdecin n'a pas entirement rempli son devoir. Il nous fallait un diagnostic bien avr, car, faute de ce fil d'Ariane, n o u s s o m m e s destins . n o u s garer dans un labyrinthe inextricable de recherches. A j u s t e titre, les RR. Pres se plaignent de ce que, sur une dsignation aussi vague, aussi douteuse,-d'une affection mor bide, laquelle embrasse, surtout raison de ces mots et csetera, toutes les maladies de l'estomac, le dfenseur de la cause ait choisi c o m m e sujet du miracle, le cancer ulcr, dont le diagnostic donne beaucoup de travail aux plus ha biles m d e c i n s , et ouvre un vaste champ l'imprvu. 4 . Au reste, en examinant plus attentivement la longue maladie de Marie-Louise, il apparat clairement combien sont vains les efforts du dfenseur pour tablir srement le caractres du carcinome. A cela rpugne d'abord le j e u n e ge de la malade, c o m m e n o u s l'avons prouv dans nos premires observations critiques, en citant sur ce sujet les tmoignage de clbrits mdicales. Nous avons encore pour n o u s le savant Valleix : Parmi les causes prdisposantes, dit-il, il n'en est pas qui soit mieux c o n n u e que l'influence de l'ge. C'est de cinquante soixante, soixante-dix ans, q u e le cancer de l'estomac se manifeste le plus frquem m e n t . (Guide du mdecin praticien. Paris, 1853, t. II.) 5. Quant ce qui peut donner lieu au cancer, on ne peut invoquer c o m m e cause occasionnelle, selon l e langage des. mdecins la vie clibataire de la femme. Velleix, e n effet, a rfut cette fausse opinion, lorsqu'il dit dans l'ouvrage cit plus haut : Bayle pense que le clibat est une des causes du dveloppement du carcinome de l'estomac, a mais cette assertion t o m b e videmment devant les faits, car, dans les observations que nous avons rassembles, presque tous les sujets taient maris ou vivaient marita le lement. La suppression des rgles ne peut pas davantage tre invoque c o m m e une cause du carcinome. Beaucoup de femmes ne sont pas atteintes de cancer, bien qu'elles
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soient sujettes la s u p p r e s s i o n s flux c a t a m n i a l ; d'autant plus que, dans ce cas, par u n bienfait de la nature, les m i s sions sanguines par la bouche, deviennent u n s o u l a g e m e n t de cette maladie. 6. Au surplus, la maladie de notre religieuse n'offrait aucun des symptmes qui constituent l'essence propre du cancer. Le principal de ces s y m p t m e s est u n e t u m e u r dure dans l'a rgion de l'pigastre, t u m e u r facile reconnatre au toucher. Ce signe est tellement caractris tique, que,en son absence, aucun sage clinicien n'osera pro n o n c e r en toute certitude sur l'existence d'un cancer. C'est pourquoi l'illustre Andral, dans sa clinique m d i c a l e , t. IV, p . 429, aprs avoir rapport tous les s y m p t m e s du cancer, r s u m e ses observations par cette phrase : Il suit de ces considrations, que, hors le cas, o une tumeur se fait seri tir travers les parois abdominales, il n'existe aucun (f signe certain pour distinguer ce qu'on appelle dans le langage ordinaire mdical, un cancer de l'estomac, de ce qu'on appelle une gastrite chronique. Roche et Sanson n e s'expriment pas autrement ( t o m . I, p . 782). Si celte poque on palpe la rgion pigastrique, on y sent alors un signe plus ou moins remarquable Ce signe est peut-tre le seul vritablement p a t h o g n o m o n i q u e du cancer de l'estomac. E h bien ! il n'est n u l l e m e n t q u e s tion dans les actes du procs de cette t u m e u r dure de l'pigastre. La patiente parle bien, il est vrai, d'une certaine turgescence dans la rgion de l'estomac, mais il y a loin d'une simple turgescence une t u m e u r indure et circon scrite telle qu'on la trouve tfans l'estomac d'un-cancreux. Cette turgescence a donc p u provenir de causes t o u t fait trangres au cancer. Du reste, les mdecins n'ont fait au c u n e recherche sur cette turgescence, on n e peut d o n c pas raisonnablement conclure l'existence du cancer. 7. U n autre s y m p t m e bien caractristique du cancer et r e c o n n u tel par les mdecins rside dans la sensation de douleurs, l a n c i n a n t e s ; les cancreux les prouvent t o u s . R o c h e et Sanson parlant de la .priode o le squirrhe devient cancreux, disent : Les douleurs deviennent vives et l a n cinantes, et se font sentir chaque instant de la journe ( t o m . I , p. 783). Regnolius parlant de ces d o u l e u r s , dit : Leur caractre est tel que, pour le dcrire, il faut les a assimiler celles que produirait une aiguille, o u tout autre instrument pointu, qui traverserait la t u m e u r . Puis considrant la marche de la maladie, il ajoute : Les piqres deviennent toujours plus obtuses et plus frquentes, et,
er
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p e u p e u , u n e douleur continue leur succde. E h bien 1 aucun des tmoins n e fait mention de douleurs de ce genre chez Marie-Louise. Qu'elle ait souffert de 1 esto mac, ils sont unanimes l'affirmer. Mais de quelle nature, de quelle espce taient ces douleurs, vous le chercherez e n vain dans leurs dpositions. Bien plus, cette femme, ds ses premires annes jusqu' l'poque de sa gurison, ayant c o m m e elle le dit e l l e - m m e toujours souffert de l'estomac, on peut probablement conjecturer que ses souffrances n e venaient pas d'un cancer, l'existence duquel son ge s ' o p posait, mais d'une toute autre cause, en conservant jusqu' l'poque de la gurison, leur caractre propre. ,8. Le troisime s y m p t m e , sans parler des autres, par lequel se manifestent habituellement le squirrhe et le c a n cer, est la constipation. En effet, d'aprs l'illustre Yalentini : P u i s q u e le squirrhe succde l'inflammation de l'estomac, il est indiqu, au milieu des autres symptmes, par la constipation. Roche et Sanson dj cits ont galement dit : 11 survient une constipation opinitre, et pour ainsi dire constante. (P. 782, ibid.) Or, d a n s , l a maladie de Marie-Louise, ce symptme fait dfaut, c'est m m e le c o n traire qui existe. Elle-mme dclare avoir t sujette la diarrhe, ds sa plus tendre e n f a n c e ; cet tat n e cessa que trois jours avant la gurison. La diarrhe, dit-elle, qui
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rgles. Les Rvrendissimes Pres sont d o n c e n droit de c r o i r e q u e , pendant la nuit o le bienheureux Joseph s'est montr, dit-on, la malade, dans une vision miraculeuse, les fonctions normales d'une bonne sant reprirent leur cours, et qu'alors la maladie disparut avec t o u s ses s y m p tmes. 10. De tout ce qui vient d'tre dit, il ressort manifeste m e n t que le diagnostic d'une ulcration cancreuse ne revt pas les qualits d'une certitude suffisante, d'une vidence absolue. Dans cet tat de choses, il semble que n o u s ayons assez fait, propos de la dmonstration p r s u m e de cette gurison merveilleuse, pour qu'il n o u s soit permis de t e r m i n e r ici notre tche. Puisqu'il n'existe rien de certain sur le caractre principal de la maladie, personne, pas m m e le trs quitable Censeur, ne peut tablir la gravit du mal, base de toute gurison que Ton veut attribuer au miracle. T o u t cela est assez clair et conforme nos lois, pour qu'il n e soit pas besoin d'en appeler aucune autre autorit q u e l conque. 1 1 . Nous esprons que le rsultat de n o s remarques cri tiques sera d'amener les Rvrendissimes Pres diffrer leur sentence jusqu' ce que la science leur ait aussi fourni ses lumires. L'investigation de l'un et l'autre miracle tant entoure de plusieurs difficults fort graves, n o n - s e u l e m e n t l e s m d e c i n s mais encore les chirurgiens doivent formuler u n j u g e m e n t dans lequel seront tablis premptoirement le caractre et la gravit des deux maladies, afin que n o u s sachions d'une faon plus certaine, si la gurison doit tre attribue au miracle, o u aux seules forces de la de la nature. Nous dsirons vivement voir les illustres j u g e s de la cause, par leur perspicacit et leur exprience, faire ressortir l'admirable action de la droite du Trs-Haut dans l'une et l'autre gurison. L'minent dfenseur de la cause aurait alors des hases plus solides, et, pour ainsi dire, in branlables, sur lesquelles il pourrait avec plus de sret et de confiance tablir l'uvre de la dfense. Ceci dit sous la censure, etc.
Pierre MINETTI,
Avoc. de la S. C. et Promoteur de la foi.
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racle, il a rsolu avec laut de force chacune des objections proposes par la critique (Jugement mdic. du chevalier Diori, n. LX1I1 et suiv.), qu'il m'a priv de tout m o y e n de recueillir une nouvelle moisson, et d'ajouter quelque c h o s e ses savantes et laborieuses dissertations. Les Rv. Pres se fatigueraient bon droit des inutiles rptitions qu'offrirait ma froide dissertation aprs la lecture de ce remarquable j u g e m e n t . E n outre la postulation de la cause, passablement charge de frais dans ces temps difficiles, semble m e prier de ne pas les augmenter au-del du ncessaire. G'est pour quoi, renvoyant volontiers lesEminents conseillers au remar quable travail fourni par le mdecin, o ils trouveront c h a cune des objections de la Censure rsolue une une et victorieusement repousse, j e ne m'en rserve que deux qui m e paraissent appartenir avant tout aux devoirs de ma charge. D'abord je dirai quelque chose de ce chapitre des obser vations critiques, compris dans les 12 et 13,o l'on soulve la question de la force des preuves. Ensuite j'ajouterai quel ques rflexions sur les rapports mutuels et l'attitude qu'af fectent vis vis l'une de l'autre m o n ancienne dfense et le j u g e m e n t du trs savant Expert ; afin que personne, en le voyant dcouvrir et clairer une foule de points que j e ne pouvais apercevoir assez, cause de m o n insuffisance,et m e contredire m m e dans l'interprtation de quelques p h n o mnes qui se produisirent dans la longue marche d'une maladie complique, ne nous accuse aussitt de n o u s q u e reller ensemble, et ne dclare qu'il faut e n appeler u n nouveau j u g e ou un autre arbitre. 2. On voit par les actes de la cause, disent les observations critiques, que la personne malade, force d'industrie et de prcaution,a cach sa maladie interne jusqu' l'poque de la gurison, parce qu'elle craignait que,le mal une fois dcouvert, on ne la renvoyt du monastre. IL en est r suite que ni la maison religieuse dans laquelle elle vivait, ni le mdecin qui la traitait, n'en ont jamais rien su. Elle n'tait donc pas grave cette maladie, pour se cacher si < l o n g t e m p s par un difficile artifice. Aussi peu de temps ( avant sa gurison, fut-elle admise sans difficult p r o noncer ses v u x , attendu que les religieuses ne la croyaient atteinte que d'un mal lger (Obs. 2 et 3). Comme il est reconnu par Louise elle-mme dans sa dposition, qu'elle n e ngligea aucune prcaution pour que le mal dont elle tait tourmente n e part pas au dehors (elle craignait, en effet, q u e si o n le connaissait, elle n e ft renvoye de la m a i s o n vi. 34
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religieuse), la Censure perd son temps dclarer, dans l'in t e n t i o n de faire croire 4 u n e maladie lgre, que les t m o i n s n'en ont point eu la m o i n d r e notion. 1 est remarquer 1 d'abord que, dans les maladies internes qui affectent les vis cres, on ne comprend peu prs rien, si le malade ne d couvre lui-mme ce qu'il prouve l'intrieur : que d'ailleurs il est trs, difficile d'estimer la gravit du mal, quand le pa tient s'efforce de cacher m m e les s y m p t m e s qui de leur nature se montrent extrieurement. Or, c'est ce que faisait Louise qui dit : Je vomissais souvent mais en cachette, c'est pourquoi les surs ne connaissaient pas ma maladie. Il faut se souvenir en second lieu, qu'aprs avoir e m p l o y , toute la finesse de la f e m m e dissimuler sa maladie, Louise ne put empcher la matresse des novices et ses compagnes du noviciat de s'apercevoir qu'elle tait gravement malade de l'estomac,et qu'elle allait de mal en p i s , c o m m e il rsulte de leurs t m o i g n a g e s . Il lui fut bien m o i n s possible de cacher son infirmit au t e m p s de P q u e s de l'anne 1860, alors que, le mal tant dans t o u t e sa force et que les plus graves s y m p t m e s se m a n i festant malgr elle, il fallut appeler le m d e c i n . Et il faut ici rendre un h o m m a g e mrit la sagacit et l'habilet de celui que la Censure accuse tort d'tre par trop crdule. il demandait e n effet la malade ce qu'elle avait souffert auparavant et ce qu'elle souffrait dans le m o m e n t , et n'ob tenant que des rponses qui ne s'accordaient n u l l e m e n t avec la gravit de la maladie, il s'impatientait e n disant, o u que les s y m p t m e s dclars par la malade n'taient pas les vrais, o u qu'il n'tait pas vrai que sa maladie ft s o n dbut, c o m m e elle voulait le faire croire. Bien plus, le m d e c i n se montra trs-sage quand, ignorant, cause du silence obstin de la malade, les symptmes internes et les souffrances antrieures, il parvint comprendre, par des ar guments purement extrinsques, qu'il y avait dans l'estomac o u u n ulcre o u un cancer ; L a maladie s'tant beaucoup . aggrave, rapporte la Suprieure, le mdecin dit plusieurs fois que la Mre Louise avait ou une plaie o u un squirrhe dans l'estomac. Tout le m o n d e voit c o m m e n t ces paroles rpondent admirablement au cancer ulcr dont l'existence relle fut reconnue quand la maladie se. termina, d'aprs le r s u m de tous les tmoignages et d'aprs la confession entire de la personne gurie. Que le Censeur trs h u m a i n prenne plaisir tant qu'il voudra tourner en ridicule une situation si malheureuse, propos du m o t et cetera dont l'minent docteur s'est servi daqs une autre o c c a s i o n ; le
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mdecin a suffisamment montr son savoir quand il a d i t : Dans ma conviction de Texistente d'un squirrhe l ' e s t o m a c , o u dequelqu'autre maladie de ce g e n r e j e la regardais c o m m e incurable. 3 . En outre,il faut remarquer que,pour estimer la gravit de la maladie, on doit la considrer principalement au m o ment o elle est s o n p a r o x y s m e , c o m r d e o n dit,c'est--dire, quand elle svit dans toute s o n intensit. Or, n o u s dira-t-on qu' ce m o m e n t les tmoins furent assez stupides pour n'y pas prendre garde ? Revoyez, si vous voulez, sans parler des autres tmoignages, celui de sur Marie Minime de Jsus qui prsidait l'infirmerie, et vous trouverez dcrite avec clart et prcision une sombre cohorte des plus mauvais
lgre: Il
n'y avait plus d'espoir,rapportela religieuse n o m m e plus haut) c'tait l'opinion du mdecin, et il en tait ainsi m e s yeux expriments ; aussi rpondais-je chaque religieuse qui m'interrogeait sur l'tat de l a malade, qu'elle n e pouvait pas aller bien loin, parce que les s y m p t m e s susdits allaienttoujours en s'aggravant.Je m e rappelle que, plusieurs fois en la visitant,* le mdecin lui disait de se recommander aux saints. On voit videmment par l combien est loin de la vrit ce qu'on lit dans les observations critiques ; c'est pourquoi, peu
de temps avant sa gurison, Louise fut admise prononcer ses vux, car on croyait qu'elle n'avait qu'une incommodit lgre. Tout au contraire, elle fut admise parce que s o n con
fesseur le conseilla aux religieuses (Voyez rp. aux premires observt. 24). La raison q u e fit valoir le prtre prudent pour persuader les religieuses, nous est expose par l u i m m e : u Quand il fut question de l'admettre o u de l'exclure de la profession, une des raisons dont j e m e servis pour amener les religieuses l'admettre, fut de leur exposer q u e , dans l'tat o elle se trouvait, il n e convenait pas de la faire sortir du monastre, qu'elle ne pouvait survivre longtemps,et qu'en consquence le monastre n'en souffri rait aucun d o m m a g e . Tel tait le sentiment de tous. La Mre Louise, dit une autre des Mres, fit sa profession sur la fin d'aot de l'anne mil huit cent soixante. On fai sait beaucoup de rflexions dans le monastre, pour savoir si Ton devait l'admettre la profession, cause de sa sant, mais l'opinion gnrale tait qu'elle ne pouvait plus vivre q u e bien peu de temps. Il est donc vident q u e cette perspicacit intelligente pour dcouvrir la gravit de la m a -
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ladie ne manqua pas aux tmoins, et qu'on n e p e u t c o n clure de leurs rponses que la maladie leur parut plus lgre qu'elle n e Ttait rellement. 4. Il m e reste seulement dire un m o t du j u g e m e n t de Tillustre Expert, j u g e m e n t dont la puissance est telle qu'il enlve de l'esprit des A. A. Pres tout motif d'hsitation. E n effetj il dmontre invinciblement non s e u l e m e n t q u e le prodige s'est accompli par la puissance divine, la prire du Bienheureux Joseph Labre, mais il prtend encore q u e le sujet du miracle doit tre maintenu tel que nous l'avons propos. En effet, aprs u n e rcapitulation exacte de t o u t c e qu'il avait trs s a v a m m e n t discut de c h a c u n e des p riodes de la maladie, Tillustre docteur en arrive cette con clusion : Puisque cela revient dire que les ulcrations Testomac de notre religieuse gurie taient d'un caractre cancreux, puis qu'on ne distingue a u c u n e ulcration cancreuse, part celle qui appartient au cancer ulcr : on c o n c l u t trs facilement que la dernire et la plus cruelle phase qu'aient subie les douleurs endures par Ma ce rie-Louise,peut se c o m p r e n d r e , m d i c a l e m e n t parlant,et se ranger sous le titre de cancer ulcr de Testomac ; et cela nonobstant la multiplicit et l'immense varit des m a u x antrieurs et simultans dont il a t question en son lieu (Jug. m d . , p. 102). E t plus b a s : Si quelqu'un disait qu'il s'est agi d'une gastrite chronique ulcre et maligne, c o m m e le cancer surpasse par sa malignit toutes les maladies c o n n u e s , il n e s'loignerait pas beaucoup de la vrit. Mais, ainsi qu'il a t dit, puisque, aprs la constatation des s y m p t o m e s d'oedmes partiels et douloureux, o n n e peut, au <t t m o i g n a g e de Trousseau, raisonnablement douter qu'un cancer ulcr, o u , ce qui est la m m e c h o s e , u n ulcre cancreux ait exist dans Testomac de notre malade ; n o u s j u g e o n s superflu de proposer et de soutenir u n n o u veau titre donner au prodige que n o u s avons discut . (Au m m e endroit p. 103) Enfin, quand il eut, c o m m e il est dit au 1, p l e i n e m e n t satisfait Tun des A. A. P r e s , qui au rapport des observations critiques, aurait v o u l u que l'pigraphe du miracle nont les lsions exis t a n t dans l'estomac et rvles la malade par le B i e n heureux Labre, il ajoute : C'est pourquoi je croirais v o l o n tiers que le Bienheureux a indiqu le mal qui menaait d'un danger prochain et invitable, q u o i q u e ce mal empruntt s o n origine une autre cause maligne qui se . cachait. On sait q u e les h o m m e s mesurent et psent e n
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quelque sorte les causes d'aprs leurs effets. Le B i e n h e u < reux, apparaissant la religieuse, lui rvla le dernier et ( < le plus promptement mortel effet de l'ulcration de l'estor mac, et, par la puissance du Dieu Tout-Puissant, il le fit disparatre subitement et immdiatement.Pourquoi et-il dnonc de prfrence u n e cause laquelle ne se rapporo: teraient pas ncessairement les mmes effets? Le cancer ulcr de l'estomac peut se rencontrer parfois sans fistules gastriques ; et les fistules gastriques peuvent bien tre sans le cancer ; puisque c'est un des caractres, des ulcres can creux d'engendrer les fistules, tout le monde voit que, relativement notre tribunal, l e . t i t r e donner au prodige q u e nous devions discuter et que nous avons discut, res sort plus nettement du cancer qui produit les fistules que des fistules e l l e s - m m e s (Jug. md. cit p. 104). 5. Je ne nie pas que ceux qui ne voudraient pas suivre jus qu' la fin ce savant travail,ne puissent tre induits en erreur et se figurer que" le savant Expert n'a diagnostiqu qu'une gastrite chronique ulcreuse ; mais il faut remarquer qu' l'instar d'un sage vainqueur, qui s'empare graduellement du pays ennemi, et ne court une seconde conqute qu'aprs avoir achev la premire, cet h o m m e illustre s'avance de manire s'approprier et s'assurer d'abord c e qu'il ren contre de primordial dans la maladie, pour passer ensuite ce qui est de rcente et dernire date. C'est pourquoi o n s'carterait du vrai, si, en s'arrtant au \ 54 de son important j u g e m e n t , on pensait que j'ai donn compltement ct de la nature relle du mal quand j'en ai propos le titre. En effet cet habile personnage force par ses raisons le lecteur ramener la maladie de Marie-Louise au moins u n e gastrite chronique ulcre (au m m e 54), puis, allant plus loin, il explique la forme spciale de l'ulcre perforant de l'estomac, et il la dfend en l'attribuant la gastrite primitive,quand j avais voulu la faire venir directement du c a n cer ; m a i s e n s u i t e lorsqu'il s'est dfendu contre les censures prvues par lui, de la part de Critiques exagrs ( 56), il se pose cette question : Quelqu'un dira-t-il maintenant que la maladie dont a t gurie Marie-Louise n'a pas rvl dans son essence le caractre vraiment et rellement canc reux qu'elle cachait? ( 57 au com.). Puis exposant scrupu leusement cet endroit ce que prsage le triste syrhptme des tumeurs, invoquant l'autorit de Trousseau, de Lebert et de Grisolle, qu'il compare avec les actes de la cause, il arrive prendre le cancer c o m m e avec un h a m e o n qu'on plongerait au fond des eaux,pour ainsi dire, tandis que,dans
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m a simplicit, j'avais cru pouvoir, en tendant la main, le saisir la surface c o m m e u n flotteur. Voici ce qu'il tablit e n consquence : Appliquant au cas de notre religieuse a gtirie le critrium q u e Trousseau a rvl c o m m e dcisif entre l'ulcre simple de l'estomac et le cancer du m m e viscre, n o u s p e n s o n s pouvoir affirmer avec scurit et j u g e r q u e la maladie dont fut afflige si longtemps Mariece Louise, avait rellement et vritablement le caractre can creu. C'est pourquoi on peut inscrire et garder pour
pigraphe le titr que le Postulateur a donn notrepro dige (Jug. m d . , 59). II confirme le m m e sentiment en
divers autres endroits, prcdent surtout dans ceux q u e j'ai eu soin de transcrire dans u n paragraphe prcdent. 6. Mais dans la crainte qu'on n'estime plus grave qu elle n e l'est l a dissidence de n o s opinions, j e voudrais qu'on fit l e s considrations s u i v a n t e s . Certes j'ai soutenu qu'il fallait placer le principe des m a u x endurs (Inform., 9 ) , d a n s u n e violente gastrite qui n'avait j a m a i s t gurie, m a i s qui avait e u diffrentes priodes morhides (fbid., 11). Je n e rougis pas d'avouer qu'en dcrivant c e s priodes, j e n'ai pas e u la parfaite habilet qu'a fait voir l'minent d o c teur choisi par l'Ordre sacr, cependant j'ai affirm q u e le m a l avait envahi les viscres voisins (Inform., 11). Quant l'ulcration,loin de la m c o n n a t r e j e l ' a i e x p o s e d a n s l e t i t r e m m e ; bien plus, et autant que le permettaient m e s faibles talents, j'ai dfendu, contre les objections de la Censure, l e s fistules m m e s q u e le Bienheureux Benoit-Joseph a d n o n c e s (voyez la rp. aux prem. observ. 7) : pour ce qui est du caractre cancreux de la maladie dont Louise .fut enfin gurie par l'assistance divine (ce qui appartient la substance du fait), e l'ai soutenu de t o u t e s m e s forces. Dans c e t t e question j e n'ai pas seulement affirm l'issue des m a u x telle q u e l'a r e c o n n u e le docteur, mais j'ai pos le dernier effet qui rpond la cause premire, car l'minent docteur dit aussi: P u i s q u e , d'aprs nos" conclusions, n o u s en s o m m e s venus tenir pour certain q u e la cause occa sionnellc de la maladie de l a religieuse Marie Louise tait u n e diathse cancreuse, qui produisit u n ulcre rongeur l'estomac, n o u s pouvons raisonnablement etc. Que si, tromp par les apparences, j'ai t persuad q u e l e cancer s'tait produit avant qu'il n e se manifestt relle m e n t , si j'ai attribu quelques p h n o m n e s au squirrhe plutt qu' la gastrite, j e crois mriter quelque indul gence, car la fivre m m e , qui a surtout rvl l'expert la gastrite permanente,apparat aussi dans les cancers occultes
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propre exprience
(Voyez jug, m d . p. 94) Quoi qu'il en soit enfin, et quoique je ne Taie pas e m p o r t d'emble en expliquant chaque point de l a question, le pro dige n'en e s t pas renvers pour cela, et il n'est pas besoin de lui donner u n autre titre. L'illustre personnage conseille t o u t a u plus d'ajouter quelques petits mots c o m m e ceux-ci :
Gurie d'un dernier cancer ulcr de l'estomac et d'une ma ladie mortelle entre toutes celles dont elle avait t afflige.
P o u r c e qui m e regarde, j e n'y aurais aucune rpugnance, et j e ne soutiendrais pas qu'il n'y a pas e u .d'autres mala dies ; mais, c o m m e o n doit considrer la gurison au m o m e n t m m e o elle a e u lieu, il est naturel qu'on la rapporte la maladie qui a t la dernire : partant je croirais volon tiers cettte addition peu prs superflue, d'autant plus que cette maladie est de toutes la plus mauvaise et absolument incurable, de l'avis unanime des mdecins. Du reste, quoi qu'en dcident les Pres trs sages, j e l'accepterai d'un c u r dispos et soumis. Je voudrais s e u l e m e n t qu'ils fissent attention une chose, s'ils pensent ad mettre l'addition, c'est qu'elle diffre considrablement d u correctif important qu'un h o m m e plus clbre q u e m o i , Emile Negi, m i t au titre du troisime miracle, dans la cause de la B. Marguerite Alacoque. L'nonc tait la g u rison de sur Philippine Bollani, atteinte d'une tumeur scorbutique. Le docteur dmontra avec beaucoup d'lo quence q u e la maladie avait t u n e phthisie tuberculeuse des poumons ; et s o n amendement fut accept, q u o i q u e le dfendeur tnt bon, et n'y donna les mains qu'au dernier m o m e n t . Nanmoins o n fit appel aucun autre mdecin. Aussi avons-nous b o n n e confiance, e n argumentant du plus a u moins, qu'il n'est plus besoin maintenant des travaux d'un nouveau m d e c i n , et qu'en consquence, pour c e second miracle, de m m e que pour le premier, c'est--dire la gurison <Je Thrse Nassetti, la Sacre-Con grgation donnera un avis favorable, conformment au v u du zl Postulateur, le R. Francois Virili, , missionnaire apostolique, a u n o m duquel nous vous renouvelons, aussi bien qu'en notre n o m , n o s prires trs h u m b l e s .
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C'est pourquoi
H IL A I R E ALIBRANDI,'AV.
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On a vu, la fin de ses nouvelles observations critiques, le 'R. P r o m o t e u r de la Foi demander l'Auguste tribunal de la Sacre-Congrgation des rites, la n o m i n a t i o n d'un mde cin expert charg de formuler un j u g e m e n t scientifique s u r le caractre et la gravit de la maladie dont la gurison fait le sujet du second miracle propos pour la canonisation d u B. Benot-Joseph Labre. Le sacr tribunal, acquiesant cette d e m a n d e , confia au docteur Vincent Diorio le soin d'y satisfaire) et l'minent docteur ayant accept l'honorable mandat qui ui tait propos, remit bientt entre les mains des juges de la cause un travail complet, qui ne laisse rien dsirer s o u s le rapport de la science et de la clart. Nous regrettons que l'tendue considrable de cette uvre m a gistrale ne n o u s permette pas de l'insrer ici en e n t i e r ; mais la ncessit de ne pas donner ce volume un d v e l o p pement excessif, exige que nous n o u s bornions une simple analyse et quelques extraits des principaux passages. Voici c o m m e n t le docteur expose lui-mme l'tat de la question et la m t h o d e qu'il c o m p t e suivre dans son travail.: Les efforts du dfenseur de la cause, pour dmontrer la vrit de ce miracle, ont t si heureux, qu'il ne m a n q u e plus au tribunal, avant de prononcer la sentence solennelle affirmant son existence, que l'avis mdical qui,aprs l'examen des deux termes du fait propos, en tire une conclusion, sans aucun doute possible et raisonnable, constatant que la m a l a die de la religieuse n'a pu tre gurie,d'une manire parfaite et permanente, que par la seule intervention immdiate de la droite du Tout-Puissant... P o u r nous acquitter de ce d e voir, deux voies s'ouvrent devant n o u s . L'une, choisie dj par le dfenseur de la cause, consisterait recueillir tous les symptmes qui, d'aprs les auteurs^ rvlent le cancer u l cr, et les comparer ceux qu'a "prsents la maladie de la R. M. Marie-Louise, de sorte que, si ces derniers corres pondent exactement aux premiers, on en tire cette c o n s quence naturelle, que la maladie de la religieuse tait vri tablement un cancer ulcr. L'autre voie, beaucoup plus difficile et plus complique, serait d'tudier et de peser dans la balance mdicale toute l'histoire de la maladie, de faon en rechercher le caractre, la nature et le n o m , par u n e complte analyse des s y m p t m e s , par une comparaison n a turelle et c o m m e p o n t a n e de toute la maladie avec l e s
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types spcifiques fournis par les auteurs. Nous prfrons cette mthode synthtique dans les dissertations de ce genre ; c'est pourquoi n o u s tirerons des pices du procs le rsum de la maladie principale, et de toutes celles qu'elle a e n g e n dres, de sorte q u e , si nous prouvons synthtiquement et analytiquement son caractre d'incurabilit, nous aurons ouvert u n e voie plus facile au j u g e m e n t de sa gurison miraculeuse. T o u t le travail est divis en deux parties comprenant chacune trente-cinq paragraphes. Dans la premire partiel'auteur suit pas pas, pour ainsi dire, toute la marche de la maladie, si longue et si complique de la R. M'. MarieLouise ; il l'tudi, l'explique et la discute d'aprs les pices du procs et l'autorit des mdecins les plus clbres. Dans la seconde, il examine les dissertations et discussions m dicales auxquelles a donn lieu la gurison, ainsi que le diagnostic s o u t e n u par le dfenseur de la c a u s e ; puis, aprs avoir rsolu chacune des objections proposes, il d o n n e ses c o n c l u s i o n s . Voyons rapidement de quelle manire t o u t cela est trait. PREMIRE PARTIE.
HISTOIRE DE LA MALADIE.
Marie Cogiatti (sur- Marie-Louise de l'Immacule-Gonception), n e Rome, est entre au monastre du DivinAmour du Mont-Falisque, l'ge d'environ vingt ans. Le" mdecin du monastre, le docteur Bernardin Mancinetti, dit
que le temprament de Marie-Louise est astnique (dbile), impressionnable, et sa complexion cachectique. Or Polchi
a dit de ces tempraments : Les personnes de ce t e m prament sont timides, souponneuses, ennemies de la socit et quelquefois de leur propre vie, d'un esprit i n g nieux, d'une imagination drgle, recevant et retenant facilement les impressions... et exagrant leurs infirmits. Elles sont sujettes la mlancolie, aux humeurs chagrines, l'anxit et l'oppression des hypocondres, aux c o n v u l sions et au flux hmorrhdal... les digestions sont i r r gulires, et les excrtions lentes et difficiles. (Polchi, Hygine et thrap. gcnr^ Milan, 1843.) Marie Cogiatti fut pauvre de sant, ds son enfance ; elle tait particuli rement faible d'estomac, et souffrait de la dyspepsie. A l'ge de sept ou huit ans, elle fut place dans le monas-
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tre du Divin-Amour, prs Saint-Eusbe de Rome, pour y faire son ducation ; mais elle en sortit aprs q u e l q u e t e m p s , par suite des fivres intermittentes dont elle fut s a i s i e . A onze ans, u n e frayeur subite lui occasionna des convulsions qui la t o u r m e n t r e n t pendant plus d'un an ; et e l l e eut beaucoup de peine traverser l'ge de sa formation, qui n'ar riva que dans sa dix-septime anne. Ds avant cet g e , elle avait dj u n e grande dvotion au B. Benot-Joseph. A la suite d'une attaque de fivre pernicieuse, on l'avait conduite la campagne, Porto F i u m i c i n o . L elle b u t , un j o u r , dans le courant de la j o u r n e , et plusieurs reprises, avec une j e u n e fille de son ge, u n e bouteille de r h u m . Cette n o r m e tourderie devait avoir un effet dsastreux, a La nuit m m e de ce jour, dit-elle au procs, j ' e u s u n e trs grande fivre; j'tais brlante et j'prouvais u n e forte douleur l'estomac. On m e ramena de suite R o m e et te on m e confia aux soins du docteur Tridenti, qui m e fit saigner et appliquer des s a n g s u e s . A la douleur d'estomac se joignirent des v o m i s s e m e n t s de matires g r u m e l e u s e s 9 verdtres ; il m arriva mme un jour de rendre par la
bouche et plusieurs reprises, pendant l'espace de deux heures environ, du sang caill en partie. A cette o c c a sion on m'administra tous les sacrements, y c o m p r i s celui des Saintes-Huiles. C'tait l uue gastrite dangereuse qui fut en grande partie l'origine de la grave maladie, sujet du m i r a c l e ; c'est pourquoi le docteur Diorio en fait l'objet d'une t u d e approfondie. Joseph-Frank, Spedalieri et "d'autres d o n n e n t l'abus des liqueurs spiritueuses c o m m e une des causes occasionnelles de la gastrite. (Frank, Princip, de mdecine prat., malad. de l'estomac, etc.) La constitution l y m p h a t i q u e . . . l e s af fections de l'estomac... la dyspepsie... disposent cette maladie {ibid.). Le m m e auteur parlant des s y m p t m e s de la gastrite, dit : II se p r o d u i t . . . u n v o m i s s e m e n t d o u l o u r e u x . . . de bile verte, de sang, ce-dernier rejet tantt avec effort, tantt par r u c t a t i o n . . . . (lbid.) Requin parle dans le m m e sens. Or, ces s y m p t m e s sont bien ceux qui se manifestrent chez la j e u n e malade qu'il importe de suivre dans le rcit qu'elle fait de son mal : ' Environ quatre m o i s aprs, on m'envoya Frascati, pour changer d'air; mais t o u t le temps, j e continuai d'avoir une petite fivre. C'est pourquoi... le mdecin crut bon de m'envoyer aux ce bains de mer, Fiumicino.Je m e baignai deux fois seule t ment, car la seconde fois on m e retira du bain plus morte que vive.De l jefus ramene R o m e , o le docteur Fratoc-
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a < t
chi... dcida de m'envoyer respirer l'air de Gottanello; j ' y demeurai avec quelque avantage depuis le mois d'aot j u s qu' Nol, et j'en revins sans fivre dclare, mais avec u n pouls u n peu agit... De retour Rome (Nol 1855), o n continua l e traitement par les rafrachissants jusqu' la fin de mai de l'anne suivante, m e trouvant, cette poque, plutt pire q u e m i e u x . . . C'est pourquoi, sur le conseil des mdecins, je retournai Gottanello, et j'y restai jusqu' la fin de septembre sans prouver aucun soulagement. Dans les premiers jours d'octobre, j e revins Rome, o
traitement
habituel... Au mois de mars de Tanne suivante, 1857, j e fus atteinte de la rougeole, qui fut si forte que je reus le <t saint Viatique. Gurie de la rougeole, j e m e sentis u n peu mieux, nonobstant la douleur de l'estomac que je ressen-
' tais continuellement, plus ou moins forte, et je continuai vomir quotidiennement, soit le jour, soit la nuit... J' tais dans cette situation, lorsque, a u m o i s de septembre 1857, j'entrai dans ce monastre pour m'y faire religieuse. On voit par ce rcit q u e Marie-Louise, atteinte, probable m e n t ds avril 1855, d'une gastrite aigu, n'tait pas gurie au mois de septembre 1857. Il est donc permis de supposer que cette phlogose de l'estomac produisit quelqu'un des effets auxquels d o n n e n t lieu les inflammations de ce genre n o n rsolues e n t e m p s opportun. Cela est-il arriv relle m e n t ? et, dans c e cas, de quelle nature a t cet effet? Les mdecins les plus clbres s'accordent reconnatre qu'on trouverait difficilement u n e maladie qui donne nais sance un aussi grand nombre de maladies secondaires dan gereuses, q u e la gastrite aigu n o n rsolue s o n temps. On doit redouter beaucoup la gastrite, dit Valentini, car elle dpasse rarement l e quatrime j o u r , et trs souvent s e termine par la gangrne... La suppuration est rare, le squirrhe plus rare e n c o r e . . . Si la suppuration succde l'inflammation... quelquefois il se produit des ulcres qui
dvorent les tuniques de l'estomac, et en rongent les vais seaux, d'o rsulte une hmorrhagie mortelle (Leons de t mdec. prat., I I vol., 392). Requin et Joseph Frank
e
parlent galement de vomissements de sang. Or c vomisse m e n t se produisit chez notre malade, puisqu'elle parle de
vomissements
coagul. La gastrite aigu avait dpass, sans tre gurie, le temps ordinaire de sa dure ; elle e n tait donc venue un de ses dnouements habituels, soit par changement de forme, soit par dgnrescence.
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Mais quel fut le caractre de ce d n o u e m e n t ? Les suites de la phlogose, dit Frank, sont souvent pires que la maladie e l l e - m m e ; c'est pourquoi elles sont particuli r e m e n t redoutables (Leons de pratiq.mdia.95). De la gastrite, dit-il ailleurs, peut natre un abcs de la s u b stance de l'estomac, lequel abcs, s'il n'amne pas la mort par l u i - m m e , s'ouvre de diffrentes manires, et dans c e cas laisse quelquefois des cicatrices, mais b e a u c o u p plus souvent des ulcres (ibid.). 11 poursuit e n indiquant les s y m p t m e s qui font reconnatre ces suites de la gastrite : P o u r tablir le diagnostic toujours difficile d'un abcs de l'estomac, il est ncessaire d'avoir la c o n n a i s s a n c e de la maladie et du traitement des maladies prcdentes, ainsi q u e de la constitution du malade. Il i m p o r t e b e a u c o u p
aussi de connatre la condition de la fivre hectique, la quelle, dans notre prsente maladie (que n o u s appelons phthisie de l'estomac produite par un abcs), se montre de bonne heure et est trs violente, tandis que, dans les autres
espces de phthisies de l'estomac, elle n e se dveloppe que tardivement,et est peu apparente (ibid., 97). Or, dit la religieuse, la maladie dura quatre mois avec persistance d'une fivre violente... ensuite on m'envoya F r a s c a t i o j'eus c o n s t a m m e n t une petite fivre. T o u t ceci ne four nit il pas une forte prsomption de penser que la gastrite de Marie-Louise engendra soit un ulcre, d'aprs la doctrine de Valentini, soit un abcs, d'aprs celle de Frank. Cette der nire supposition serait la plus probable, raison de la per sistance et de la dernire forme de la fivre, et aussi par la l o n g u e dure de la maladie (quatre m o i s ) , c e qui n'et pas eu l i e u dans le cas de suppuration, c'est--dire, d'ulcre, p u i s q u e si la suppuration survient, dit Valentini, les s y m p t o m e s durent environ une semaine encore, mais vont en s^affaiblissant. Il parat donc bien raisonnable d'ad mettre ici l'existence d'un abcs de l'estomac conscutif u n e p h l o g o s e n o n rsolue de ce viscre; et la matire puru l e n t e retenue l'intrieur (car elle n'tait pas d'abord r e j e te par les vomissements), explique trs bien la fivre hec tique qu'elle provoquait. Le rapport du savant Expert insiste beaucoup sur l e s s y m p t m e s accusateurs d'un abcs, il cite encore ce sujet r e n s e i g n e m e n t de Frank, ainsi formul : a Les s y m p t m e s d'un abcs vident de l'estomac sont : une douleur l'pi gastre, les nauses, l'anxit, le vomissement quelquefois d'une matire puriforme, sanguinolente, ressemblant presque de l'encre ; la nourriture, m m e en petite q u a n -
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tit, augmente les douleurs ; il survient des frissons dans l'aprs-midi, la chaleur et la rapidit du pouls a u g m e n tent vers le soir... le corps maigrit, les extrmits ainsi que la face se tumfient. Ona observ .aussi une tumeur dans la rgion de l'estomac, trs douloureuse au c o m m e n cernent et devenant peu peu indolente, perceptible au toucher, avec une douleur descendant, c o m m e une flche,
Lorsque Marie Cogiatti se dcida entrer en religion, elle venait d'tre gurie de la rougeole, mais il lui tait rest une douleur continuelle l'pigastre et un v o m i s s e m e n t quotidien : la maladie prcdente continuait donc. Elle fut assez bien les dix premiers mois ; pourtant elle ressentait toujours la douleur l'pigastre, avec de l'inquitude (an xit de Frank), des envies de vomir qui ne lui faisaient presque rien rejeter (nauses). Aprs sa prise d'habit s o n tat n e fit qu'empirer graduellement, la douleur d'estomac augmentait, les vomissements taient plus frquents, si bien, qu'au bout d'un an, il fallut appeler le mdecin qui c o n s tata la fivre et ordonna le lit. Ds ce m o m e n t les symptmes deviennent plus graves que jamais, et il est ncessaire de les tudier avec une grande attention. D'aprs le rcit de la malade, elle garda le lit quarante jours de s u i t e ; son ventre lait un p e u enfl, elle avait de frquentes nauses ; elle vomissait ordinairement des matires grumeleuses, jau ntres, et d'une saveur amre ; quelquefois ce n'tait qu'une s i m p l e b a v e ; mais quelquefois aussi les matires prsen taient la couleur du caf brl. Ajoutez cela une diarrhe brlante, et la recrudescence de la fivre tous les soirs. Au bout de quarante jours, il se produisit u n peu d'amliora tion: nanmoins aucun des symptmes ne cessa entire ment. 11 y eut toujours un mouvement fbrile vers le soir, de la diarrhe, des nauses et quelques v o m i s s e m e n t s ; l a douleur de l'estomac persvra, ainsi qu'une douleur la cuisse et au bras droits, douleur qui s'tait fait sentir autre fois la cuisse et au bras du ct gauche. Il est impossible de n e pas saisir la parfaite analogie de ces s y m p t m e s avec
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ceux fournis par Franck pour le diagnostic d'un abcs de l'estomac. Or c e t abcs, que l'on ne peut nier avoir exist dans l'es tomac de la religieuse, a d s'ouvrir, car si l'abcs de l'es t o m a c n'entrane pas la m o r t par l u i - m m e , dit Franck, il s'ouvre de diverses manires, et alors laisse quelquefois des cicatrices aprs lui, mais beaucoup plus souvent des ulcres . Il existe encore, dit le m m e auteur, u n e autre terminaison n o n mortelle de l'abcs de l'estomac ; n o u s voulons parler de la fistule de l'estomac, qui se produit lorsque, par suite d'une adhrence morbide de la surface antrieure de ce viscre avec le pritoine, le p u s peut s'ouvrir une issue travers cette m e m b r a n e , o u travers les m u s c l e s abdominaux, o u travers les t g u m e n t s ext r i e u r s et quelquefois par l'ombilic... (Franck, v o l . cit, 98). D'aprs Gruveilhier, l'ulcre de l'estomac e s t c a r a c tris par les signes s u i v a n t s : Dfaut absolu d'apptit o u apptit bizarre; tristesse insurmontable; digestion laborieuse; malaise ou douleur sourde l'pigastre... d o u <r leur trs vive au niveau de l'appendice xiphode et dans le point correspondant de la c o l o n n e vertbrale ; a m a i g r i s s e m e n t p l u s ou m o i n s r a p i d e ; c o n s t i p a t i o n ; nauses; vomissement des aliments, de matires noires, brunes, ou de sang pur (hmatmse), et enfin vacuations alvinesde m m e nature . Eh bie! qu'on lise seulement l'histoire du miracle propos, et l'on reconnatra sans peine que les s y m p t m e s qui viennent d'tre numrs sont absolument identiques ceux que fournissent les pices du procs, l'exception toutefois de la fivre hectique et de la diarrhe qui, dans notre malade, indiquaient qu'il s'agissait n o n d'une simple gastrite ulcreuse, m a i s d'une ulcration conscutive un abcs de l'estomac. Veut-on encore d'autres p r e u v e s ? (le c o n s c i e n c i e u x Expert en a t, pour ainsi dire, prodigue), que Ton coute Grisolle affirmant, avec l'autorit de sa science si connue, qu'il y a cinq critriums qui tablissent le diagnostic d'une gastrite chronique ulcreuse : 1 La dou
leur vive et perforante ; 2 La douleur se faisant sentir d l'appendice xiphode, 3 2 4 fixit de la douleur ce point ; 4 Son irradiation ou retentissement dans le dos ; 5 Enfin
une hmatmse abondante. Les deux derniers sont particu lirement et infailliblement caractristiques.Or, encore u n e fois, l'examen des symptmes d e l maladiedeMarie L o u i s e m e t hors de doute leur analogie parfaite avec les critriums de Grisolle : la dmonstration du docteur est surabondante h c e t gard ; e t i l tire cette premire conclusion de tout ce
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qui prcde : Nous pouvons porter un j u g e m e n t certain sur l'existence d'ulcres de l'estomac chez Marie Louise . En poursuivant l'tude d e l maladie et de ses symptmes, le docteur Expert est amen supposer que des fistules se sont formes dans les tissus- de l'estomac par suite des adh rences morbides de ce viscre avec les viscres voisins. En effet la grande quantit de matires purulentes rejetes diffrentes fois par la malade dans ses vomissements, an nonait videmment la rupture d'un norme abcs cach soit dans l'estomac, soit dans l'un des viscres voisins. Or, en s'ouvrant,cet abcs a form une vritable fistule, et peuttre plusieurs, dans les parois gastriques. De l pour les viscres adhrents, n o t a m m e n t pour le foie, une phlogose dont le rsultat est absolument incontestable, d'aprs tous les s y m p t m e s . Le rapport du mdecin entre ici dans de trs longues et trs habiles considrations, appuyes sur les autorits mdicales les plus solides, pour dmontrer l'exis tence chez la religieuse d'une hpatite, laquelle, jointe la gastrite ulcreuse dont elle fut la consquence et le produit, rendait l'tat de la malade tout fart dsespr. Enfin une nouvelle phase de la maladie s'est manifeste dans les derniers temps Il s'agit d'une pritonite secon daire. Voici c o m m e n t le docteur Diorio s'exprime pour d montrer la justesse de son diagnostic, a Nous apprenons, par les matres de la mdecine, que les malades atteints d'une gastrite ulcreuse sont ordinairement affligs des maux suivants : l'irritation et la phlogose causes par l'ulcre qui ronge la surface interne du ventricule, et e n dtruit les parois, gagnent les parties voisines et produisent l'inflam mation lente d'abord et inaperue de la membrane p r i t o nale servant de ligament suspenseur des viscres h y p o c o n driaques Si les lsions causes par l'ulcration primitive qui a perfor le ventricule ne parviennent pas se ci catriser, ces phlogoses se renouvellent sans cesse, pro duisant des destructions toujours plus grandes dans les viscres voisins, et, par suite, l'piploon qui couvre les intestins, et le pritoine lui-mme qui revt les parois ab dominales, sont atteints d'une inflammation spciale appele pritonite secondaire. Cette pritonite marche quelquefois avec lenteur, d'autrefois, au contraire, elle se dclare brus q u e m e n t par une fivre violente et d'atroces douleurs du ventre.Le propre de cette maladie est de produire une subite tumfaction tympanitique de l'abdomen, et d'amener la sup pression des urines et des matires fcales.
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Or les. symptmes observs dans la dernire priode de la maladie de la religieuse r v l e n t : 1 la continuation du travail de l'ulcration primitive qui ronge les tissus organiques, ce que font clairement reconnatre le sang v o m i dans les derniers jours de la maladie et la d o u leur poignante de Testomac, correspondant l ' p a u l ; 2 la suppuration du foie n o n encore arrte, c o m m e n o u s l'in diquent le pus rendu avec le sang, la couleur j a u n e de t o u t le corps et la douleur s'tendant au bras droit; 3 u n e pritonite secondaire produite par les graves lsions des viscres hypocondriaques, ce que manifestent i n d u b i t a b l e m e n t la recrudescence de la fivre, les douleurs a b d o m i nales, la tympanite, et la suppression des fces et des urines. T e l e s t le rsum de la premire partie d u j u g e m e n t mdical port par le docteur Diorio sur l a ipaladie de la Mre Marie-Louise ; et dj le clbre praticien affirme que cette maladie, o u plutt cette complication de maladies, ne laissait aucun espoir de gurison, que m m e la mort tait p r o c h e , et qu'il a fallu u n vritable miracle pour l u i rendre la sant.
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DEUXIME PARTIE.
DISSERTATIONS MDICALES SUR DIFFRENTS POINTS FOURNIS PAR L'HISTOIRE DE LA MALADIE. RFUTATION DES OBJECTIONS ET CONCLUSION.
Afin de donner plus de force encore sa dmonstration, si c o m p l t e et si claire, de la gurison miraculeuse de la S u r Marie-Louise, le savant Expert s'attache, d a D s la s e c o n d e partie de son rapport, rfuter scientifiquement certaines objections qu'une critique svre pourrait opposer diff rents points de sa t h s e . Et, en cela, c o m m e dans le reste, il russit prsenter ses arguments sous un tel ensemble de solidit, de clart et de l o g i q u e qu'il impose la conviction et fait vanouir tous les doutes. On en jugera par cette courte et, m a l h e u r e u s e m e n t , trop incomplte analyse. On se demande d'abord s'il est possible d'ajouter foi la parole de la religieuse prtendant avoir t favorise de l'apparition du B. Benot-Joseph. Dans T tat si grave o elle se trouvait, et avec sa t e n d a n c e naturelle l'imagination, n'est-il pas bien plus probable qu'elle pris u n rve pour u n e ralit ? et n'en voit-on pas la preuve dans cette question
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defistulesau nombre de quatre dont elle assurait avoir t gurie? elle avait certainement rv une chose si trange et dont jamais il n'avait t question jusque-l dans les divers traitements des mdecins qui la soignaient. Ge qai serait bien plus trange, ce serait d'expliquer, comme la suite d'un rve, une gurison aussi complte, aussi instantane et aussi durable que Ta t celle de la sur Marie-Louise. Gar il n'y a pas possibilit de nier ou mme de discuter le fait ; c'est bien la suite du prtendu rve,que la malade, celle qui tait sur le bord de la tombe, se lve, va, vient, mange sans fatigue, sans douleurs, en un mot, sans aucun vestige de mal. Un rve, une simple ima gination peuvent-ils produire un tel rsultat? Non, mille Fois. Un miracle seul est admissible ; ds lors l'apparition doit lre vraie en elle-mme et dans ses dtails. G'est donc bien rellement que la malade a entendu ces paroles: Je l'ai obtenu fa grce de te gurir DE QUATRE FISTULES DANS L'ESTOMAC. Si elle ne les avait pas en tendues, comment expliquerait-on qu'elle se ft servie d'un terme qui lui tait sans doute inconnu, et dont il n'avait pas mme t fait mention devant elle, puisque les mdecins n'en souponnaient pas l'existence? Loin donc que cette particularit infirme la ralit de l'apparition, elle ne fait, au contraire, que la corroborer. Quant la prsence mme de cesfistulesdans le viscre malade, admise la vrit de l'apparition surnaturelle, on doit croire que les paroles du Bienheureux n'taient ni men songres, ni errones. D'un autre ct, la science est loin de voir en elles une contradiction son enseignement et ses expriences. On a vu, dans la premire partie, comment l'ulcration des viscres peut produire et produit frquem ment des fistules. Frank, Niemayer, Frierichs, Cruveilhier, ce dernier surtout, ont trs savamment parl des fistules gastriques et hpathiques, rsultat d'ulcres et d'abcs ulcrs. Frierichs dit, entre autres choses, que le mme viscre peut compter jusqu' trois abcs simultans pouvant former autant de conduitsfistuleux.Or de trois quatre, il n'y a pas loin. Le savant Expert, revenant sur les symp tmes de la maladie de Marie-Louise, montre qu'il est bien difficile d'expliquer quelques-uns d'entre eux sans supposer des fistules, d'abord au nombre de trois ; et il trouve la quatrime manifeste par la tache livide qui parut pendant un certain temps l'pigastre del malade, et dont aucune autre raison ne donnerait d'explication satisfai sante.
VI.
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Cette premire objection rsolue, le docteur e x a m i n e la question de l'pigraphe du miracle. La postulation appelle la maladie dont la religieusefut miraculeusement gurie, un cancer ulcr de Vestomac. L'examen m d i c a l n e permet pas d'approuver le choix de ce titre, attendu que la maladie n'a pas prsent les s y m p t m e s d'un cancer, mais bien ceux d'une gastrite chronique ulcreuse. Ici encore l'minent Expert entre dans de trs nombreuses et trs minutieuses considrations, dans lesquelles ce simple rsum de son important travail ne p e u t le suivre. Bornons-nous donner u n aperu de son raisonnement. En principe, il est trs difficile d'tablir u n diagnostic certain et indubitable entre les ulcres c h r o n i q u e s , simples o u perforants, de l'estomac et les ulcres cancreux. Cepen dant il est des cas dans lesquels u n e t u d e intelligente et bien dirige des critriums diffrentiels permet de porter u n j u g e m e n t au moins probable entre les uns et les autres ; c'est c e qu'il est possible de faire dans le cas prsent. * Si vous avez, dit Niemayer, u porter un diagnostic dif frentiel (entre le cancer et l'ulcre chronique de l'esto mac), les points principaux sur lesquels vous devez por ter une attention spciale sont les suivants : 1 l'ge du malade,'car on peut presque avec certitude nier l'existence du cancer chez les jeunes gens ; 2 la dure de la maladie, car si l'affection dure depuis quelques annes dj, il y>a bien m o i n s de probabilit en faveur du cancer ; .3 les forces et l'tat de nutrition de l'organisme que l'ulcre perforant n'abat ordinairement que p e u p e u et tardive m e n t , tandis que, avec le cancer, elles disparaissent ra ci p i d e m e n t et en peu de t e m p s ; 4 la nature des douleurs, attendu que les vrais paroxysmes cardialgiques sont plus favorables au diagnostic de l'ulcre chronique qu' celui d u cancer ; 5 la quantit du sang rejet avec le v o m i s se s m e n t : dans l'ulcre perforant il est ordinairement vomi e n plus grande quantit, et it ne prsente qu'une lgre c altration, tandis que, dans le cancer, la quantit rejete est beaucoup moindre, et il offre l'aspect d'une masse n o i r e , semblable du marc de caf c e n'est que par exception que l'hmatmse est abondante, dans le c a n <t cer, o u que les matires v o m i e s , dams l'ulcre chronique, renferment u n e masse noire et grumeleuse ; (i la pr te s e n c e o u l'absence d'une tumeur palpable ; dans le pre* mier cas, on. peut admettre c o m m e peu prs certaine . l'existence d'un cancer de l'estomac, car trs rares sont les cas o l'ulcre rond donne, par l'paississement des
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parois gastrites et par la formation de n o u v e a u x tissus adhrents aux viscres voisins, naissance .une t u m e u r . D'un autre ct, o n . n e doit pas oublier que l'absence d'une t u m e u r n'exclut pas t o u j o u r s a b s o l u m e n t le d i a g nostio d'un carcinome de l'estomac. Le docteur adoptant ce p r o c d de Niemayer dans la r e cherche du vritable diagnostic de la maladie s o u m i s e son j u g e m e n t , passe m i n u t i e u s e m e n t en. revue c h a e u n des six points indiqus ici,en les comparant aux phases et symp tmes divers de la maladie de Marie-Louise qu'il prend ds son b a s - g e . 1 Marie Cogiatti d'une constitution naturellement faible, a beaucoup souffert de l'estomac dans son enfance et a u x jours de son adolescence. Elle eut peine atteint sa dix-sep time anne, qu'une gastrite chronique ulcreuse se dclare; pendant cinq ans son tat ne fait qu'empirer, et vingtdeux ans elle ne doit sa gurison qu' un miracle. Si cette l o n g u e maladie a t un cancer, c'est un fait dont la raret tonne toujours, et, bien qu'il n e soit pas absolument i m p o s sible un ge si peu avanc, il est au m o i n s peu probable. 2 D'autre part, quand les meilleurs-auteurs, Lebert entre autres, assignent au cancer de l'estomac, dit marche ra pide, une dure de trois six, m o i s , et au cancer marche lente, une dure d'un . deux ans, ne d o i t - o n pas arguer que ls cinq annes continues de la la maladie de Marie-Louise doivent faire rejeter l'existence e n elle d'un c a n c e r ? 3 Le cancer abat l e s forces rapidement. Or, Marie-Louise malade depuis 1855, entre au monastre deux ans a p r s ; p e n d a n l e s dix premiers mois (prs d'un an), elle supporte les fatigues de la vie religieuse et reprend mme un peu de chair.Ge n'est qu'au mois de juillet 1858 que le mal s'aggravant, ses forces et son e m b o n p o i n t diminuent pro gressivement jusqu'en 1860. Ce n'est d o n c pas l. n o n plus l'effet habituel du cancer. 4 Les douleurs causes parle cancer s o n t relativementb.nignes* elles s'exasprent rarement, et sur la fin.Marie-Louise avait souvent des. douleurs e x c e s s i v e s qui la faisaient tomber en dfaillance ; elle en mordait ses draps. Or tous les m decins s'accordent reconnatre l'extrme violence des d o u leurs dans l'ulcre aigu o u chronique de l'estomac, 5 On rejette peu de sang, dans le cancer, et ce sang est toujours noirtre, plus o u m o i n s coagul. La religieuse a rendu, plusieurs fois du sang e n assez grande quantit, du sang vif.et liquide.Et, bien qu'on aitremarq.u,.dans un petit nombre de circonstances, que le sang vomi tait en g r u -
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rneaux et noirtre, l'hpatite explique parfaitement c e t t e exception. En s o m m e , ses vomissements ressemblaient bien plu Loi. ceux que provoque un ulcre. 6 Quant la t u m e u r , qui doit presque toujours exister dans un cancer, on ne la dcouvre pas chez Marie-Louise. Il y a chez elle des enflures de l'estomac et du ventre, m a i s de t u m e u r proprement dite, aucune ; n o u v e a u signe en f a veur du diagnoctic de l'ulcre. A ces six critriums, l'auteur du j u g e m e n t mdical e n ajoute deux autres, la diarrhe, el la fivre. Il est i n c o n testable que Tun des effets du cancer de Testomac est u n e constipation opinitre qui n'est suivie de diarrhe que dans les derniers mois de la maladie, quelquefois mme dans les dernires semaines, et souvent dans les derniers jours. Or, chez notre religieuse,au m o i n s depuis s o n entre au couvent, trois ans avant sa gurison, la diarrhe Tut continuelle. De m m e on sait, e t m m e on s'en t o n n e , que dans une m a ladie aussi grave que le cancer, il n'y a pas de fivre, moins qu'il ne survienne q u e l q u e c o m p l i c a t i o n d'une m a ladie inflammatoire, o u d'une affection tuberculeuse. Ma rie-Louise, au contraire, e u t presque c o n s t a m m e n t la fivre plus ou m o i n s forte. De toutes ces considrations, il rsulte donc que, trs vraisemblablement, la maladie de la j e u n e religieuse n'tait pas un cancer, et qu'en c o n s q u e n c e , il y aurait lieu de changer l'pigraphe d o n n e par le Postulateur l a gurison miraculeuse. Toutefois le savant Expert se garde b i e n de condamner absolument le titre auquel il prfrerait le sien, car il reconnat que certains s y m p t m e s , manifests surtout vers les derniers t e m p s , semblaient indiquer le caractre c a n c reux de la maladie. Quoi qu'il en soit, il a dit, lui, Expert charg d'une mission graveet sacre,ce que ses connaissances scientifiques lui ont montr se rapprocher le plus de la v rit, ce qui n'empche pas sa c o n c l u s i o n dernire d'tre semblable celle du dfenseur de la cause, savoir, la gu rison i n c o n t e s t a b l e m e n t miraculeuse de la religieuse, et cela par l'intervention du B. Benot Joseph Labre.
1. Quoique la gravit d e l maladie donttaitatteinte MarieLouise ail t dmontre par les symptmes manifests dans
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sa marche, .et surtout s o n poque terminale, cependant.sa nature propre et caractristique restait encore dans une cer taine obscurit. Le premier travail du dfenseur de la cause, bien q u e trs-rudit, n'a pas russi dissiper cette obscurit, de faon enlever tous les doutes. C'est alors q u e les Ryrendissimes Pres, dans leur sagesse, ont confi un habile reprsentant de la Science mdicale le soin de nous montrer d'une manire claire, nette et prcise, d'aprs une tude approfondie de ses s y m p t m e s caractristiques, la nature et le caractre de cette maladie. Ce savant mdecin, ouvrant les trsors de la science mdi cale, n o u s a fait u n rapport loquent et peut-tre plus ten du qu'il ne l'aurait fallu, et rendant sa tche plus grande e n core, en sortant des bornes de la question dont il avait s'pcc u p e r , i l a joint s o n , travail une trop l o n g u e dissertation sur la mauvaise foi des incrdules, race d'hommes que cha c u n sait tre aussi prjudiciable aux intrts de l'Eglise qu' ceux de l'Etat. Mais ce volumineux travail importait peu notre c a u s e ; car, charg p a r l e devoir de notre fonction de prsenter des Observations critiques sur la vrit des m i racles, nous n e s o m m e s pas de ceux qui croient follement devoir ramener toute chose au doute. Nous avons principalement en vue que les miracles qui arrivent selon le bon plai&ir et les secrets de la Providence de Dieu Crateur de l'ordre naturel, n e soient pas admis prcipitamment par u n e crdulit inconsidre. En c o n s quence, toutes les fois qu'd s'agit d'examiner leur ralit, la saine critique doit puiser tous les moyens pour dmontrer leur inluctable vidence. 2. Au reste, ce n'est pas sans raison q u e la critique pers picace des R. R. consulteurs a regrett que l'habile expert ait pass sous silence, dans son volumineux rapport, la partie principale de l'uvre dont il tait charg. 11 n'a pas en elfet, dissipant, c o m m e il convenait de le faire, .toutes les ambiguts et les contradictions, tabli la nature certaine de la maladie c o m m e cancer ulcr de l'estomac, m a i s , d'une manire vague, il la fait consister dans une complication de maladies diverses, gastrite chronique, abcs cach du foie, pritonite, et tout cela, assure-t-il, dans u n corps c o n s u m de langueur. Bien que, dans la dernire par tie de son travail, il affirme qu\m peut dfendre la thse
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De t o u t l'ensemble de cette dissertation, on c o n c l u t facile m e n t que s o n auteur n'avoue pas l'existence d'un c a r c i n o m e dans l'estomac de M a r i e - L o u i s e . 3 . Si l'on examine c e j u g e m e n t dans ses parties p r i n c i pales , il parat tre si contraire au s e n t i m e n t des R. R. Consulteurs, qu'il s e m b l e i m p o s s i b l e c e u x - c i d'y adhrer. Ds l'abord, en effet, il emploie tous ses efforts prouver, en s'appuyant des autorits de la science m d i cale, que la maladie de notre religieuse n e fut rien autre chose qu'une gastrite chronique u l c r e , susceptible d'tre gurie p a r l e s seules forces de la nature ; c'est pourquoi il a estim q u e le dfenseur de l a c a u s e , e n proposant le titre du miracle, s'tait c o m p l t e m e n t cart de la vritable nature du mal. E n s u i t e , il a dcouvert et expliqu une espce d'ul cre spcial perforant de l'estomac, dou d'une force p e r n i c i e u s e . P l u s loin (Rap. m d . x x x m ) , i l dit : En considrant n o n s e u l e m e n t dans leur entit chacun des s y m p t m e s nu mrs, et pris sparment, mais encore, et surtout en les prenant.dans leur e n s e m b l e , dans toute leur valeur et leur signification, en t e n a n t c o m p t e de toutes les phases auxquelles a donn lieu la l o n g u e maladie de la religieuse gurie, je pense ne pas m'loigner de la vrit en s o u t e nant que, dans les derniers t e m p s de la maladie, il s'agis sait d ' u n e pritonite secondaire m e n a a n t gravement la vie de la malade. > Mais si, c o m m e il le dit, dans les der
mac, dernire et moite Ue maladie, entre plusieurs autres dont elle avait t atteinte ? U n e telle manire de raisonner
est si contradictoire, si o b s c u r e comprendre, qu d i p e , malgr sa perspicacit, pourrait p e i n e e n saisir les rapports et l'enchanement. 4.C'est donc juste titre que l'un des Rvrendissimes Pres interpelle ainsi le savant Rapporteur ; Je demanderai ci 1 minent Expert ce q u e j e dois admettre ici : e s t - c e une
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.gastrite chronique ou bien.un cancer ulcr? Car la g u rison de la premire maladie pouvant avoir t opre par les forces de la nature, ne p e u t tre considre c o m m e miraculeuse qu'au point de vue du m o y e n , et ne sera plus .qu'un miracle de troisime ordre; au contraire, la guri te son de l'autre maladie serait entirement prodigieuse, ' .cause de s o n incurabilit,et constituerait, en consquence, un miracle de second o r d r e . D p l u s , pourquoi dans l'origine, rejeta,it-il le titre propos par la Commission Rogatoire et adopt par le Dfenseur ; et pourquoi, plus tard dclara-t-il que Ton pouvait inscrire et conserver ce titre d u m i r a c l e ? Voici e n effet ses paroles : Nous estimons pou
voir affirmer et juger que la maladie dont Marie-Louise a si Longtemps souffert,avait rellement un caractre cancreux.C'est pourquoi il est permis de donner et Von peut con server dans le titre du miracle, les termes proposs par le .Postulateur . (Rap. md.).
5. C'est en vain que le Dfenseur du miracle, satisfait du j u g e m e n t favorable de l'illustre mdecin, voulant expli quer et interprter favorablement les contradictions de l'argumentation mdicale, s'efforce, l'aide d'une figure de Rhtorique, de n o u s le montrer c o m m e un sage vainqueur
qui s'empare province par province du territoire ennemi; il fait la conqute de l'une et passe ensuite aux autres ; ainsi fait notre Savant; il prend d'abord el met en lieu sr ce qu'il a dcouvert sur l'origine de la maladie, il marche ensuite de nouvelles recherches et finit par dcouvrir le
cancer. (Rp. a u x n o u v . observ., 5). Quoi qu'il en soit, la lecture attentive de ce rapport fait voir clairement que son auteur n'admet pas l'existence du cancer ulcr, avec cette fermet de j u g e m e n t qu'il a manifest ouvertement.lorsqu'il affirmait tout d'abord, e n invoquant les clbrits de la science mdicale,qu il s'agissait, dans le cas de Marie-Louise, d'une gastrite chronique. 6. Ainsi donc, le mdecin-dlgu ne dtermine pas dans son rapport d'une faon assez nette, assez ferme pour exclure le doute, la nature propre et particulire de la maladie*. Bien plus, en cherchant tablir ce diagnostic vritable, il fait l'effet aux Rvrend. Pres d'avoir ajout des tnbres plus paisses la premire obscurit. Aussi, c e u x - c i , qui n e sont pas obligs de jurer sur les paroles d'un matre q u e l c o n que, comprennent-ils que toute raison, m m e la plus lgre d'hsiter, leur fait une loi de n e pas rpondre au doute propos par le Constat (1) sacramentel, p u i s q u e (1) Expression consacre qni reprsente dans la congrgation des rites la formule de l'approbation.
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c mot, c o m m e l'enseigne l'auteur trs-sage de n o s r g l e m e n t s , exige, avant d'tre p r o n o n c , des preuves tout fait premptoires, et, pour ainsi dire, plus claires que la l u mire du jour. Autrement l'office de j u g e expert, en se p o r tant sur des choses sans valeur, nuirait plutt la dcouverte de la vrit. 7. Dans cet tat de c h o s e s , il n'y a plus qu'un desideratum, c'est que l'minent Dfenseur de la cause emploie les r e s sources de sa grande intelligence mettre en lumire le caractre prcis de la maladie. Qu'il s'efforce surtout de n o u s apprendre, par des arguments convaincants, c o m m e n t u n e gastrite chronique peut s'accorder avec un cancer ulcr ; il ;uidera ainsi nos pas errants travers les ddales de ce abyrinthe, il nous montrera la voie droite que n o u s puis sions suivre e n toute sret. Nous demandons une d m o n s tration telle que, grce elle, le titre du miracle puisse tre conserv sans l'ombre d'un doute, et donner ceux qui le liront, la vrit certaine du fait. Lorsque ce devoir de sa charge aura t rempli avec t o u t le soin voulu, n o u s n'au rons plus rien demander.
critiques.
, 1 . Dans un ample et savant rapport, l'minent m d e cin d l g u par la S. Congrgation a expos avec soin tous les m a u x dont Marie-Louise avait t atteinte, et il a dissi p toutes les causes de doute, en faisant ressortir la splen deur de ce miracle avr. Cependant la Censure cherche dtruire la force et l'autorit de cette grave dissertation, sans toutefois oser infirmer le plus petit des arguments dont se c o m p o s e , tant dans l'ordre des faits que dans celui des doc trines scientifiques, cet important travail. C'est pourquoi, si vousparcourez attentivement chacun des paragraphes de ces nouvelles observations critiques, vous trouverez que l'on a c o n d a m n soit la manire dont cet h o m m e illustre a mis son opinion, soit le motif mis en avant par lui, soitsa manire ^d'argumenter dans un discours par trop long, soit enfin certains accessoires, certains o r n e m e n t s qui ne touchent pas la substance de la question. Mais si vous demandez ce qu'il y a de faux dans les doctrines mdicales, ce qu'il y a d'imaginaire dans la narration des faits, ce qu'il a de mau vais dans les arguments apports, c e qui peut pcher dans les c o n c l u s i o n s tires, la Critique se tait et dcline toute dis-
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cussion. Cela m e donne bon espoir; c'est une preuve qu'on n'a rien trouv de solide lui opposer; en m m e temps n o u s voyons combien est sage la rsolution des Rvrendissimes Pres, qui, tout en se plaignant que le rapport dont n o u s parlons ne les ait pas satisfaits, s'abstiennent p r u d e m m e n t de faire appel un expert plus habile. 2. Et en effet, les h o m m e s illustres et m i n e m m e n t p r u dents qui sont appels donner leur suffrage, ne pouvaient ni avoir d'inquitude srieuses, n i faire appel la science d'un mdecin plus habile, sous le prtexte que celui-ci a joint son rapport quelques pages pour percer j o u r la mauvaise foi des incrdules qui pensent devoir en toute cir constance faire paratre douteux toute espce de miracles.
a Nous ne sommes pas de ce nombre , dclare son tour
r m i n e n t P r o m o t e u r de la F o i . Assurment, il n e viendra l'esprit de personne de ranger dans cette catgorie d'indivi dus un h o m m e aussi religieux; ce n'est pas l n o n plus l'ide de notre trs pieux docteur. Mais il s'est dit que sa disserta tion pourrait bien tomber entre les mains de ces h o m m e s qui se procurent ces sortes de travaux pour les railler ; et voil pourquoi il s'excuse d e l prolixit de son t r a v a i l , e n disant qu'il a agi avec prudence, prcaution et scrupule, car s'il avait agit autrement u n e poque aussi perverse, au milieu de tant d'hommes perdus et perfides, ceux qui r e j e t tent absolument l'existence des forces surnaturelles se s e raient par trop rjouis de ses erreurs (Rap. m d , p. I et 2). Tel est le motif pour lequel il a parl des incrdules. Mais, n o u s direz-vous, cette partie de la dissertation est inutile. Soit, rejetez-la parmi les agrments accessoires ; si vous y trouvez u n e superfluit de paroles, il ne faut pas vous emporter pour c e l a ; chacun sait que de semblables appen dices ne peuvent en rien attnuer ou infirmer la substance d'un rapport mdical. 3 . On reproche ensuite l'habile mdecin a de n'avoir pas tabli que la nature certaine et bien reconnue de la mata it die consistait dans un cancer ulcr de l'estomac, mais d'avoir parl, et encore d'une manire vague, d'une c o m plication de diverses maladies, gastrite chronique, abcs cach du foie, pritonite, tout cela, ajoute-t-on, dans u n corps affaibli et en langueur . Daigne la Censure, dans un aussi grave sujet, nejias avoir recours de misrables ambiguts. Que signifie cette expression vague ? , Si l'on entend par l que l'expert ne s'est prononc q u ' a vec hsitation et incertitude sur le diagnostic de chaque maladie, n'y aurait-il pas l une vritable antithse avec
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celui a qui a tabli te caractre certain et bien tudi de la maladie ? Est-ce l le sens de vos paroles?Mais alors v o u s Les contredit par tout le travail du mdecin ; car o u voit dans s o n rapport q u e chacune des maladies de la religieuse repose sur u n diagnostic c e r t a i n ; l e s faits, tels qu'ils ressprtent, des actes s o n t soumis a u contrle de la science m d i cale la plus rigoureuse ; toutes les affirmations de l'crivain sont ainsi prouves par u n e dmonstration premptoire. Si par ce m o t vague vous entendez q u e le mdecin rappor teur, trouvant n o n pas u n e seule mais plusieurs maladies, est oblig de parler de c h a c u n e d'elles sparment, d e passer ainsi de l'une l'autre, et aller a et l, pour ainsi dire ; alors n o u s acceptons l'emploi du m o t vague n ; m a i s cela n e rend pas l e diagnostic incertain, et la faule de cette c o m plexit, o u , pour mieux dire, de cette multiplicit de mala dies, n e retombe pas sur l e Docteur, mais bien sur le corps de l'infirme, accabl malheureusement de tant de m a u x . L'habile mdecin s'est acquitt de son devoir, car tous les m a u x venus sa connaissance, il les a indiqus avec u n soin minutieux. Bien plus, o n doit le fliciter de c e qu'il fait voir q u e toutes les maladies remontent une m m e origine, qu'il tablit leur c o n n e x i o n et leur dpendance, e t e x p l i q u e avec soin les effets funestes d e chacune d'elles. 4 . Bien q u e , poursuit la Critique, c e docteur affirme dans la dernire partie de s o n travail, qu'on peut dfendre la thse d'un cancer ulcr de l'estomac et conserver ainsi le titre du miracle, il apparat visiblement q u e cette assertion est faite plutt e n v u e d'tre agrable a u patron de la cause, qu'en vue de dfinir e x a c t e m e n t le vritable diagnostic de la maladie. P o u r tre agrable a u palron de la cause. L'illustre Professeur charg par la sacre Congrgation de formuler u n j u g e m e n t sous le s c e a u d u s e r m e n t , a d o n c m c o n n u la saintet de la parole jure, il a livr sa conscience, viol la vrit, foul aux pieds la reli g i o n du serment, pour m'tre agrable, pour reconnatre le miracle, lui conserver s o n titre, n o n pas parce q u e Dieu l'a opr, mais parce q u e j e le dsirais ! Il m'a donc prfr D i e u , la vrit et la religion qui viennent de Dieu ! C'est l u n nouveau genre de crime ; j e sais qu'il y a plusieurs espces d'idoltrie, mais l'advocatoltrie o u (pour employer plus purement un m o t grec) la syngoroltrie, j e n e la c o n naissais p a s . Ainsi, vousj illustre Chevalier, vous clbre par tant d'ouvrages, vous aussi remarquable par la s c i e n c e q u e par la pit, m'avez-vous d o n c prfr, moi misrable, i n fime de corps, plus infime d'esprit, priv de crdit e l de
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richesses, objet de mpris pour les bons et les mchants, m o i dont v o u s n'avez _ rien esprer o u craindre, vous m'avez prfr, dis-je, vos devoirs, la foi, la justice, la religion, l a saintet de ces serments, Dieu enfin v e n geur des parjures, vous avez os rendre un semeur de paroles le culte d la vrit ? E t cet injurieux soupon aurait pu trouver un accs facile dans l'esprit des Rvrendissimes Pres ? Non, j e ne puis m e rsoudre le croire. S. Mais enfin, pour quel motif ce docteur minent auraitil, dans l'intention de conserver au miracle le titre qu'il por tait, sacrifi la vrit des faits. P o u r m e plaire I Car ( r e * prend la Censure la fin du 2), il ressort facilement du contexte entier de la dissertation, que pour l'Expert l'exis tence d'un carcinome dans l'estomac de Marie-Louise n'est rien m o i n s q u e prouv . Qu'avons-nous donc entre les mains, d'aprs la c e n s u r e ? est-ce un srieux travail du che valier Diorio, fait en vue de la vrit, ou bien une histoire de Quinte Curce, o u les idylles de Thocrite o u d e B i o n ? Dans le premier cas, que notre contradicteur relise la divi sion de l'ouvrage j o i n t e l'exorde, et aussitt il verra Je savant rapporteur si bien fixer l'attention de ses l e c t e u r s , qu'ils s'attendent t o u s voir la terminaison cancreuse d'une maladie multiple. Voil ce qu'il promet de dire au 57 : Par tous les arguments fournis dans la prsente d i s sertation, il est affirm et prouv que la dernire maladie de la miracule avait le caractre vritable et rel du can cer. Ensuite il parle de ce que contiendra le paragraphe suivant, Lvui Pour prouver la thse prcdente, il est fait m e n t i o n de quelques symptmes passs sous silence.; or ces symptmes, d'aprs l'enseignement de Trousseau, ta blissent la nature cancreuse de la maladie gurie. Comme le j u g e m e n t du mdecin se forme e n associant les faits aux doctrines, il annonce, que dans le paragraphe 5 9 , il recueil lera les paroles des tmoins qui confirment, dans le cas de notre miracule, l'existence des symptmes prcits. T o u t e s ses promesses , l'minent rapporteur les a fidlement tenues dans le cours de son travail ; bien plus, pour que personne ne se trompt sur sa conviction de la nature can creuse de la maladie, il a rsolu avec soin et clart t o u t e s les objections faites non pas contre la gastrite o u la pri tonite, mais contre le cancer ulcr. Il est bon de rappeler spcialement c e que l'illustre Professeur a dit des d o u leurs cancreuses. Il voit dans l'tude de leur nature n o n seulement un puissant m o y e n de lever les difficults, mais encore un argument invincible pour .tablir le diagnostic d u
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cancer. P o u r qu'il n e vous reste aucun d o u t e sur ce sujet, dit-il, j e vais citer les paroles de Lebert sur ces sortes de . douleur dans le cancer de l'estomac : Les douleurs (sur
les quarante-deux cas analyss)... chez 35 ont t prononces. Cest donc un signe qui s'est rencontr d^une manire non douteuse au moins 5 fois sur 6... Quanta' la nature des douleurs, elles sont rarement gravatives; elles consistent dans la sensation une pesanteur conti nuclle au creux de L estomac : quelques malades les com f1 parent des coups de canif; elles sont parfois sipersis tantes et si fortes, qu'elles privent les malades de tout
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a spmmeil. (Lebert., Ouv. cit., pp. 506-507). Nous v o y o n s dans les actes que notre miracule disait d'elle m m e : Je n e dormais presque jamais Je ne pouvais pas
dormir du tout, et cause de la douleur et des spasmes que f prouvais, je rongeais mes draps de lit. Elle s'est
plainteaussi d'une pesanteur presque continuelle au creux de l'estomac : que vous faut-il de plus p o u r arriver c o n natre par la nature des douleurs la vritable existence du cancer ? Dites-le, j e vous priq. Qui donc oserait dire encore que ce sont l les paroles d'un h o m m e favorisant le patron de la c a u s e ? Qui n'y voit plutt le solide raisonnement d'un h o m m e clair qui fait part aux autres de ce qu'il connat, et d m o n t r e l u m i n e u s e m e n t c e qu'il a dcouvert tre vrai? 6. G'est en vain que la Censure t o u j o u r s e n veil runit certains passages, quelques lambeaux du rapport mdical pour accuser de contradiction un h o m m e trs instruit et toujours consquent avec l u i - m m e . C'est pour ainsi dire par l'ascension graduelle et persvrante de 70 degrs, numrs. au c o m m e n c e m e n t de son rapport, qu'il est parvenu atteindre le i'ate de son ouvrage. S o n opinion diffre de la ntre e n ce qu'il nie que le squirrhe et ensuite l e cancer se soientproduit e n 1^55, la suite d'une gastrite n o n t e r m i n e : appuy de l'autorit de clbrits modernes, il combat ce que n o u s avions tenu pour certain et expri m e n t , d'aprs ces paroles de Valentini : Si les inflamma tions ne sont pas rsolues et ne suppurent pas, elles d g nrent souvent en squirrhe. Rap. m d . , 51. C'est pourquoi notre savant rapporteur affirme que,
dans le cas pi*sent, il ne s'agit pas a'un simple cancer ulcr, mais d'une gastrite chronique, plus tard suiciede Vulceration cancreuse qui a caus tes fistules allant de l'estomac aux viscres voisins. (Ibid., 78 l a i i n j .
Avant d'arriver cette conclusion, il est oblig de passer
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par bien des tapes, de s'arrter de n o m b r e u s e s s t a t i o n s , d'numrer beaucoup de maladies dont la-patiente a t afflige. Il semble parfois, avant, d'arriver ta fin de l ' o u vrage, mettre de la confusion dans l'esprit ds lecteurs, e n paraissant tendre un but entirement diffrent de celui qu'il poursuit. Mais ceux-ci ne peuvent tre induits e n erreur ; quand ils ont saisi le fil d'Ariane dans l'exorde du dis cours, et quand au moyen de l'index des chapitres,ils peuvent regarder de t e m p s en temps e n arrire, avant o u aprs la lecture de chaque chapitre. En outre rmanent docteur, lorsqu'il semble n o u s c o m battre, emploie s c i e m m e n t certaines locutions c o n d i t i o n nelles ou suspensives qui font voir clairement qu'il n'a pas 1'intenion d'insister, l o il propose quelque chose diffrent seulement en apparence de notre opinion. Ainsi, par exemple, au 2 1 . Il s'lverait (notez la forme du verbe, un m o d e conditionnel) de l une diffrence m a nifesle entre l'pigraphe du prodige en discussion, p r o pose par le postulateur, et le n o m que conseillerait de a donner la maladie gurie tout ce que nous avons expos si (quelle force a ce petit m o t !) si la lumire n e venait d'ailleurs pour clairer une thse si embrouille. Et certes l'habile rapporteur fera jaillir une abondante l u mire sr ces obscurits, si le lecteur veut le suivre patiem m e n t jusqu'au -bout de sa discussion. De m m e encore la fin du 23 : Il ne vous paratra ni tonnant, ni puril, R. R. Pres, de voir jusqu'ici le diagnostic du miracle propos u pour la canonisation duBienheureux Labre, chang,et tout le travail de l'minent dfenseur de la cause renvers de fond en c o m b l e , lorsque dj il pensait toucher la borne du triomphe. Et pour ne pas paratre m'tre avanc trop lgrement dans cette discussion, permettez-moi de pour suivre la route c o m m e n c e , et que votre patience qui m'a u dj a c c o m p a g n bien des fois dans de semblables c i r constances, ne m'abandonne pas dans l'arne. 7. Avec plus de circonspection il avertit ses lecteurs dans ce passage qui offusque davantage la censure, passage dans
l e q u e l il s e m b l e montrer que la maladie de notre religieuse
la le de ne fut en ralit qu'une gastrite chronique ulcreuse que nature seule peut quelquefois gurir, et o il pense que dfenseur en proposant le titre du miracle, s est cart
la vritable
nature
du mal
ses
lecteurs qu'ils n e doivent pas se figurer tre arrivs au b o u t d e l roule parcourir, car, dit-il (Jug. md., 51) : Qui et c o n q u e lira notre faible travail verra facilement que jus-
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ce qu'ici notre j u g e m e n t porte plutt sur l e miracle par rap port au m o d e , q u e sur le miracle par rapport la maladie. U n p e u plus loin : D e l , si la maladie d e o- notre religieuse pouvait tre ramene u n e gastrite ulc<(c reuse chronique, t o u t l'chafaudage d u postulateur para t r a i t c r o u l e r (Ibid.). II. tablit alors u n e c o m p a r a i s o n des critriums diffrentiels dont j e m'tais servi, et par les quels on diagnostique les ulcres perforants de Testomac ; cette comparaison tablie, il dveloppe sa pense la fin d u 50. Aprs une srieuse comparaison des critriums entr eux, il semblerait q u e n o u s devrions n o u s carter raison n a b l e m e n t d u premier titre propos pour indiquer la a maladie dont fut gurie Marie-Louise d e l'Immacule Gon1
c e p t i o n , moins-
toutefois
que
d'autres
dcouvertes
ne
a nous
fassent
agir
autrement.
L e l e c t e u r est d o n c pri
de suspendre s o n j u g e m e n t jusqu' c e qu'il ait v u si u n autre motif n e viendra pas suggrer u n e ligne d e c o n d u i t e diffrente. Or, afin q u e tout le m o n d e c o m p r e n n e q u e Til lustre rapporteur, en expliquant la gastrite ulcreuse e t l a production des diverses perforations, a s e u l e m e n t accompli une partie de sa route, il e n avertit deux fois ses lecteurs, "Voici notre opinion et notre j u g e m e n t dans le cas d e Marie-Louise; il s'est agi d'une maladie d'estomac trs grave et trs complique qui, pour le moins,doii tre c o m p t e a u n o m b r e des gastrites ulcreuses ; d'aprs T-ensemble d e s s y m p t m e s e t u n impartial examen mdical (Rap. m d , ,
5 4 . ) . L'expression a pour le moins e s t digne de r e m a r
que ; l'expression jusqu'ici, e m p l o y e plus bas, l u i est c o r respondante. Le postulateur s'est arrt au titre d e e cancer u l c r ; quant no\is jusqu'ici n o u s avons s o u t e n u c l'ulcration e t la perforation. (Ibid., e n d . cit.)
7
8. Si l e lecteur, muni de ces avis, s'avance p r u d e m m e n t dans la lecture du travail, il rencontrera u n e objection s rieuse e t i m p o r t a n t e q u e se fait l u i - m m e l'minent rap porteur ; il y trouvera aussi.sa rponse. E c o u t o n s - l e : ' 56 :' Il m e semble entendre certains critiques me dire: quoi c b o n t o u t c e q u e vous avez crit, simulant un vain talage e * de science, puisque vous vouliez., aprs tout, conclure l a ralit de la gurison miraculeuse d e Marie-Louise? Telle * tant votre intention, un petit n o m b r e d'arguments plus simples vous suffisaient. Pourquoi avoir recueilli c e t amas de citations pour faire chec Tillustre dfenseur d e la
c a u s e , lorsque vous aviez l'intention arrte de conclure
f comme
n'avons
lui?
P e u aprs, n o u s l i s o n s : . A u reste,
eu l'ide arrte &contredire
nous
le-savant
jamais
879
880
m m e que l'inflammation s'tendit jusqu'au foie, elle g a gna de la m m e manire le pritoine. De ces deux mala dies secondaires, l'illustre rapporteur a parl sparment, c o m m e il convenait, et, quand il arrive la seconde, il aver tit clairement, que, dans les derniers j o u r s qui prcdrent la gurison, le pritoine, par des s y m p t m e s indubitables qui annonaient son inflammation, participait a s s u r m e n t la phlogose venant de l'estomac ; et rien que pour qette raison, m m e e n l'absence d'autres m a u x , la vie de la r e l i gieuse fut e n danger grave. C'est ce que signifient les paro les suivantes du XXXIII qui .ont dplu la Critique: En considrant n o n seulement u n u n et sparment l e s symptmes n u m r s , dans leur entit, mais encore et c surtout en les prenant dans leur e n s e m b l e , dans t o u t e leur valeur et leur signification, en. tenant c o m p t e de t o u t e s l e s phases morbides, par lesquelles a s i longtemps pass la religieuse gurie, j e pense ne pas m'loigner de la vrit en soutenant que, dans les derniers temps de la maladie, il s'agissait de la pritonite secondaire menaant g r a v e a m e n t la vie de la malade. Il est en m m e t e m p s avr que le savant rapporteur n'avait pas r e c o n n u ce seul m a l chez Marie-Louise, car il ajoute au XXXIV: Soit que v o u s considriez la dure et la malignit de la gastrite c h r o nique ulcreuse, soit q u e vous teniez c o m p t e de l'origine < de l'abcs interne du foie et l'impossibilit d'arrter la ( M corruption progressive du viscre, soit enfin que v o u s a jetiez les y e u x sur cette pritonite se dveloppant dans u n corps tout c o n s u m , il y a dans u n e seule de ces maladies de quoi persuader un h o m m e . m m e ignorant de la mde cine, q u e c'en tait fait de la vie de Marie-Louise. C o m te m e n t d o n c tous les symptmes, pris ensemble, ne d m o n ie treraient-ils pas une issue fatale i m m i n e n t e ? (Rap. m d . , I XXXIV.). Mais la racine et la source de toutes ces m a l a dies taient dans les ulcres de l'estomac revtant dans les derniers t e m p s le caractre c a n c r e u x ; ils mritaient d o n c la premire place dans le titre du miracle, bien q u e j u s q u ' a u m o m e n t du prodige, le pritoine ft enflamm, et que la pritonite secondaire dt encore subsister, puisque la pre mire qui lui avait donn naissance, allait toujours en empi rant. Que notre contradicteur relise avec soin la rcapitula tion (Rap. m d . , LX1I) des sept priodes morbides par lesquelles a pass le corps de Marie-Louise ; et, dans les trois dernires r e f e r m a n t la c o n c l u s i o n , l verra la solution de sa difficult. Les voici textuellement, a 5 Fistules gastriques cause des cavits de Testomac et des c o m m u n i c a t i o n s
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.<( pathologiques produites d a n s les* viscres par les u l c r a it tions prcdentes. 6 Pritonite secondaire et mortelle o c c a s i o n n e tant par la diffusion de l'envahissement p h l o gistique que par l'ulcration rongeante et perforante de l'estomac. 7 U n e volution visible de phlegmasie sur une parlie du corps, d ' o , vu la runion des autres sym ptmes, le caractre cancreux d e l maladie miraculeuse m e n t gurie, apparat, selon la doctrine de Trousseau, dans toute sa ralit, et aussi clairement que la lumire dv jour. Or c o m m e ceci revient affirmer que les ulcra lions de l'estomac taient de nature cancreuse, puisqu'on ne distingue a i u c u n e ulcration cancreuse autre que celle provenant du cancer ulcr, il e n rsulte donc que la der nire et la pluscruelle phase des maladies dont'fut atteinte Marie-Louise peut tre range, mdicalement parlant, au nombre des cancers ulcrs de l'estomac, "nonobstant la varit et la multiplicit des maladies prcdentes et c o n u comitantes dont il a t question en t e m p s et lieu. J u g e m , m d i e . LXII. Ces dernires paroles indiquent aussi p o u r quoi le savant professeur a propos ce lger c h a n g e m e n t qui parat rpugner la Censure; savoir : qu' cette expres sion : d'un cancer ulcr)), le savant Rapporteur ajoute :
dernire et mortelle maladie dont, au milieu de beau* coup d'autres, Marie-Louise avait t afflige y>.
Jl a c r a i n t j C e t h o m m e consciencieux,qu'en laissant*intact le titre propos par l e P o s t u l a t e u r , la maladie, qui en ralit tait multiple, n e ft c o n s i d r e c o m m e unique par les lec t e u r s n o n prvenus. Je crois'que, dans ces titres, il faut noncer la vrit, mais il n'est pas toujours ncessaire d'exposer t o u t e la vrit. La principale maladie rsidait dans l'estomac, la lsionla plus grave d u viscre consistait dans les ulcres causs par l'inflammation, ces ulcres avaient un caractre canc reux (ce qui m e t e n relief la graviL du mal), et, d'aprs la terminologie mdicale n o u s apprend ce cas pathologique est suffisamment dsign parles m o t s de cancer ulcr de l'estomac; y avait-il d o n c ncessit d e m e n t i o n n e r , e n gnral o u en particulier les maladies,secondaires s o i t du foie,soit du, pritoine ? Dans l a c a u s e du R. Pierre Canisius,il fut question de la gurison d Elisabeth Vondeweit atteinte d'une hpatoemphraxie mortelle ; il fut r e c o n n u dans le cours de la dis cussion,que plusieurs graves maladies secondaires en taient issues ; et cependant on ne fit m e n t i o n d ' a u c u n e d'elles dans le titre du m i r a c l e ; et l'inscription, propose fut main tenue. En ce qui me concerne,, je ne refuse pas d'admettre
t
vi.
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l'addition, propose par le savant rapporteur ; eMe est c o n forme la vrit, et fait ressortir davantage la splendeur du miracle.;, mais, s i j e sigeais a u nombre des j u g e s , j e prf rerais ma" rdaction c o m m e plus simple et plus c o n cise. i 0 . T o u t ce qui vient d'tre dit a prpar la rponse la demande d'un des Rvrendissimes Pres dsirant savoir de l'Expert s ' i l f a l l a i t croire une gastrite c h r o nique o u , bien un cancer ulcr. Si l'on dsire remon ter l'origine de la malade, il faut remonter la gastrite ; si Ton veut connatre la provenance des lsions de Teslomac et leur, nature maligne, on peut certainement invoquer l'ul cre cancreux, o u , ce qui revient au m m e , le cancer ulc r. Si r'minent contradicteur a cru dcouvrir u n e contradic tion dans, les sept volutions morbides exposes au LX1I du Rap. m c j q u ' i l a c c u s e alors directement l'illustre rap porteur de contradiction o u de j u g e m e n t double s e n s ; mais, tant que cette contradiction ne sera pas reconnue, (et j e crois que personne n e prlendra srieusement qu'elle le soit),'qu'on laisse le savant professeur, l'aide des lumires de la science et de sa sagesse,revendiquer c o m m e cause de la maladie la gastrite protopathque n o n rsolue par la crise ncessaire,et, c o m m e dernier terme de la maladie, le cancer' ulcr. C'est en usant de son droit que cet h o m m e savant a p u dire,: tout ce qui a t discut par n o u s sur la gastrite a hrqnique ulcreuse, tout et chaque point en particulier a demeurent dans leur intgrit, quand bien m m e le carac t r e et la nature de la maladie discute, en raison des s y m p t m e s r c e m m e n t voqus, paraitraient avoir revtu u n e forme pernicieuse e t vraiment cancreuse (Rap. m'd. JLIX). Mais la gastrite tait gurissable, et le cancer e s n c u r a b l e . C'est bien. Aussi le savant professeur, arriv a XLI de son travail, n'ayant encore dmontr jusque l que, l'inflammation de l'estomac, prvient avec habilet qu'il n'a encore mis son opinion sur le miracle, q u e quant son m o d e et non sur l e miracle respectivement la maladie. Mais dans la suite, expliquant les dernires phases du mal, il d i t : l natur<e.cancreuse envahissant l'ulcre, tout espoir de gurison est eplev la m a l a d e . (Rap. m d . ibid).
1
11..'RsumpnsTnous rapidement. Si n o u s n'tions pasper- ' suadquQ.rillustre rapporteur di$vocd graduellement dans rexpp^itiqn de son j u g e m e n t , n o u s ne pourrions rien c o m prendre pes pages savantes et consciencieuses. Si au c o n traire nous tenoiis pour certain qu il a fournisept tapeb,pour ainsi' dire, comprenant soixante-dix paragraphes, c o m m e it
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l'avoue avec simplicit dans la division du discours plac aprs l'exorde, ce qu'il confirme du reste dans la rcapitu lation ( LX1I), toute difficult disparat, toute espce de doute s'vanouit. Ce n'est d o n c pas sans raison q u e , dan nos prcdentes rponses a u x Observations critiques, n o u s avons compar cet habile mdecin - un sage conqurant qui s'empare d'un pays ennemi par parties, n e passani u n e seconde conqute qu'aprs avoir assur la premire. Notre illustre contradicteur blme l'opportunit (ie, cette comparaison, parce que, dit-il, s i l e rapport mdical est lu avec s o i n , o n verra clairement que son auteur n'est pas aussi affrmatif au sujet de l'existence du cancer qu'il l'a t* lorsque, auparavant, appuy sur le tmoignage de savants m d e c i n s , il assigne la gastrite chronique c o m m e maladie principale chez Marie-Louise, (Obs. crit. 5 la fin). La^ fermet de j u g e m e n t , j'imagine, ne peut ressortir q u e du genre de mots employs par le savant mdecin, lorsque! parle du cancer. Or ses. expressions sont bien celles d'un h o m m e ferme, convaincu, affirmant s o n opinion. Car, dans un chapitre de sa dissertation, il dit ( LY1II); Pour prouver la thse pr cdente (il s'agit du caractre cancreux vritable e t rel de la maladie), il fait m e n t i o n de certains symptmes passs sous silence, et de c e s symptmes, d'aprs l doc te trine de Trousseau, il dduit la nature cancreuse de l a maladie g u r i e . Puis, a u LIX': N o u s croyons pouvoir affirmer en toute scurit q u e la maladie dont t si longtemps afflige Marie-Louise, fut vraiment et
rellement
de nature
Dans notre c a s , ce q u e nous avons dit de l'action corrosiv a de l'ulcre simple sur les tissus de l'estomac, est confirm
de plus en plus par la dcouverte du caractre canc* reux de la terrible maladie . Et plus loin : Vu la runion a des autres symptmes, le caractre vraiment t relfe ment cancreux de la maladie gurie apparat en pleine.
lumire, (lbid., LXII, n 7)*. rit encore, LXI : D'aprs n o s recherches, nous sommes-arrivs reconnatre que,la cause occasionnelle d e l maladie de Marie-Louise fut Une diathse cancreuse ; cela nous est bien prouv. 1 ajoute enfin : > Comme, d'aprs ce qui a t dit, o n n 'peut u douter raisonnablement de la prsence d'un cdneer t-
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quelles formules plus claires, plus n e t t e s , doit s e servir un h o m m e instruit, pour manifester p l e i n e m e n t , avec, certi tude e t . constance, la fermet de son j u g e m e n t sur l'exis t e n c e d'un cancer ulcr ? 12. L a fermet de j u g e m e n t tant acquise notre illustre rapporteur, si l'on y joint la convenance h a r m o n i e u s e de t o u t e s les parties de sa dissertation, le corollaire du f 12 des bs. crit. t o m b e de l u i - m m e . A u c u n - d o u t e n e reste donc* rien n e peut faire hsiter les Rvrendissimes Pres r p o n d r e au doute propos,par le terme approbatif,6'oniftf.f. Il i?ae reste seulement satisfaire, selon m e s faibles forces,, a u v u exprim par les RR. PP. de savoir comment la'gastrite chronique peut s'allier avec le cancer ulcr. La difficult de concevoir cette v o l u l i o n morbide consiste principalement e n i c e q u e b e a u c o u p de personnes,s'imaginent qu'il n'y a pas d'autres cancers que celui qui provient d'un squirrhe (tur ipeur dure-et i n d o l e n t e ) . Or cela est faux, car les ulcra tions cancreuses peuvent exister, bien qu'il n'y ait pas e u d'abord de squirrhe. Il est des plaies cancreuses,.dit J. B. t Monteggia, qui n'ont pas t prcdes d'un squirrhe ; a elles sont, par consquent, dpourvues de base v o l u m i neuse et squirrheuse, mais les chairs sont g a l e m e n t dures et ingales, les lvres scuvent irrgulires; leur tendance se dilater est la m m e , ainsi que leur incurabilit par les r e m d e s ordinaires. On peut les appeler s i m p l e m e n t plaies i cancreuses ou ulcres, cancreux, en rservant le n o m de* ^carcinome celles qui auraient e u . p o u r principe, o n qui a conserveraient encore pour base le squirrhe, c'est--dire, a'iatunieur squirrheuse, puisque la terminaison orna sert la plupart du t e m p s indiquer une t u m e u r (Instit. chirurg. P a r t . 1 , c h . xv* 1054). Quelle que soit l'origine de l'ul ? cration, elle peiit tre doue du m m e caractre pernicieux, s u r t o u t s i le. malade est atteint.de diathse cancreuse. Ds: que ce caractre pernicieux est dcouvert dans l'ulcre,, il n e diffre plus de ce qu'on n o m m e cancer ouvert, o u ulcr. Aussi l'auteur prcit diagnostique de la m m e faon le can cer ouverte.t l'ulcre cancr.eux.(lbid., 1057), et il, ajoute que les .ulcres,de nature diflrente.peuvent revLir ce-caractre de .mauvaise nature.Quelquefois en effet u n vice loGal s o u s forme, de, t u m e u r , ou d'ulcre d'une autre nature, prend
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dgnrescence (j'emploie un m o t moins usit) dite tissu can creux, dans laquelle consistent la force et la substance du cancer. Car, c o n m e l e dit Mouneret: a Le cancer est un pa rasite qui s'y est greff (dans l'organisme), q u i vit aux dpens des tissus,et qui entrane par sa mort leur dsorganisation. il est constitu par un tissu parasite organis, vasculaire, qui ne ressemble aucun de ceux que nous connaissons ( p r o duction htrologue) ; et ailleurs : a le tissu propre rsult ou de la formation d'un tissu cellulaire nouveau, oudel'hyJ perlrophie et de l'induration de celui qui appartient l'or gane envahi. Grisolle dit g a l e m e n t : Le cancer est u n tissu de formation rcente, sans analogue dans l'conomie (Trait, lment, et prat. de pathol., vol. IL, p. 273). C'est pourquoi, lorsque les parois du tissu dans lequel la blessure parat bante deviennent telles, il existe une ulcration can* c r e u s e tout aussi bien que s'il se ft trouv un squirrhe ramolli et ouvert. Reprsentez-vous donc Marie-Louise atteinte d'une gastrite chronique, et, par suite de la violence de cette maladie, afflige dulcratiops dans T e s t o m a c ; voyez ensuite ce virus dltre contenu dans la diathse cancreuse, donner naissance en cet endroit un cancer, et rien n'empchera l succession morbide du cancer, aprs la gastrite et les ulcrations produites par elle. C'est pourquoi l'ulcration a constitu la lsion du viscre dont la restitu tion fut l'objet de la gurison, c o m m e Ta si j u s t e m e n t dit
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cancer, mais d'une gastrite chronique, laquelle succda une ulcration cancreuse qui dtermina des fistules entr l'estomac et les viscres voisins, la prsence et la prcocit relatives de la diarrhe n peuvent pas exclure le diagnostic d'un cancer (ibid., LXVIIIJ.Il avait dj dit prcdemment: Nous rappellerons, au sujet de l'ulcration de l'estomac, dans le cas prsent, que des arguments irrfutables peuvent se- tirer de ce que n o u s avons dit jusqu'ici. C'est pour quoi;, c o m m e il est facile, en recherchant sa nature perni c i e u s e , de constater, par l'aveu unanime des t m o i n s ocu laires, l'existence de critriums certains, dmontrant c e t t e mauvaise nature chez notre malade avantle 24 octobre 1860, on n e peut donc pas dire qu'il soit impossible de porter u n j u g e m e n t certain sur Vulcre cancreux ( I b i d . , | LXIV). E t ailleurs encore : T o u t c e qui a t l o n g u e m e n t expos par
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15. T o u t le monde sait q u e ce, ne s o n t pas l des;nou> veauts dans les annales mdicales. L ' i m m o r t e l Borhave et Stol ont observ souvent ce .que notre savant Expert a constat chez la religieuse du Mont-Palisque,. savoir u n e gastrite chronique gurissable par e l l e - m m e , devenir incurable par suite,de l'apparition c a n c r e u s e : O r d i n a i rement, ajoutent Boerhave et Sloll, .cette inflammation devient promptement mortelle avec le squirrhejet l e c a n cer (Diction, des sciences m d i c , Venise, 1829, titre gas trite,, vol. IX, p..8). Grisolle est peu prs du m m e avis, car ilplace le cancer et la pritonite parmi les suites de la gastrite (comme jl e s t advenu chez notre religieuse), tout en niant avec notre rninent Expert que le cancer soit un eflet direct de la gas-r trite. La gastrite chronique, dit-il, est toujours une ma ladie de longue dure, et il est rare qu'elle se prolonge. m o i n s de deux ou trois mois, nous la voyons m m e d u r e r frquemment des annes entires. L'issue funeste. v est due, la plupart du t e m p s , quelque maladie c o n c o - . m i t a n l e , ou un accident quelconque de la gastrite elle m m e , par exemple, une hmatmse ou a u n e p e r f o ration. Si, dans ce dernier cas, la solution de continuit n'est pas ferme par un organe voisin, elle donne lieu .; une pritonite aigu. Il est prouv aujourd'hui que le> cancer de l'estomac n'est ni u n e varit ni un effet de la gastrite; nanmoins il est incontestable que, chez certains
individus prdisposs, un cancer peutse dvelopper dans a Vesto mac par suite d'une inflammation, de m m e qu!on
voit quelquefois le cancer de la mamelle succder une phlegmasie traumatique de cet organe. D'ailleurs il existe dans la science plusieurs faits dmontrant qu'un cancer a envahi les parois de l'estomac, par suite d'une violente phlegmasie. (Ibid,, p. 150).
Remarquons en passant que les vomissements noirtres(tels que les avait notre religieuse) sont rputs s y m p t m e s , de gastrite chronique par ce mme auteur, et qu'ils sont, g a l e m e n t indiqus par lui c o m m e indice certain du cancer r Les vomissements que Ton observe dans la gastrite c h r o n i q u e . . . se composent de liquides acres, brlants, amers,. d'aliments plus ou moins d:grs, et quelquefois de sang pur rendu en grande quantit, ou bien altr et semblable. la suie ou au marc de caf. Ces derniers vomissements, <t sont appels mlassiques leur prsence indique presque srement une affection cancreuse de Vestomac dont ils
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attestent que la succes'sion des maladies dont n o u s parlons est frquente ; voici c o m m e n t , e n traitant des origines du cancer, ils s'expriment: F i n a l e m e n t celui-ci s u c c d e assez f r q u e m m e n t la gastrile chronique, quelles qu'en aient t les causes, et par le seul fait de l a l o n g u e dure de cette affection (Roche et S a n s o n , E l m . de P a l h o l . , t o m e I, p . 782). L'autopsie des cadavres a confirm cette doctrine de la manire la plus vidente. En effet le clbre de Raimann, parlant de plusieurs sujets ayant succomb la gastrile. dit : Dans les dissections des cadavresora trouve ordinairement des paississements du ventricule, des endurcissements, des dgnrescences et des cancers dans les parties atteintes, ( d e R a i m a n n . , P a t h o l . , v o l . I,srieK, i n f l a m m a t . d e r e s t o m a c ) . Avant de laisser l cet auteur, que les Eminentissimes Pres m e permettent de citer de lui une parole qui, t o u t en pa raissant u n peu trangre la controverse de la succession morbide dont nous nous entretenons, est cependant bien e n faveur des expressions par lesquelles notre B i e n h e u r e u x a dsign la maladie. Il dit, en effet; La suppuration, c o n s q u e n c e de la gastrile, a m n e avec elle plusieurs suites, selon que l'abcs s'ouvre dans la cavit de l'esLomac ou de l a b d o m e n . . . formant alors une fistule de l'estomac. .(Ibid.) 16. Mais pour en revenir la question, j e comprends qu'on puisse encore m e faire une objection sur l'explication que j e viens de fournir ; savoir : tant donne la nature de la ma ladie, telle que je l'ai expose, il eut t prfrable de l'ap peler ulcration cancreuse de Cestomac ( c o m m e l'appelle e n diffrents endroits notre habile Professeur), plutt que cancer ulcr de l'estomac.Mais le savant expert a prvu luim m e l'objection, et il l'a rsolue en montrant que les deux expressions ont la m m e valeur. Car, aprs avoir prouv avec Trousseau la nature cancreuse du mal guri,il* poursuit 'ainsi : c o m m e ceci revient affirmer* que les ulcrations de l'estomac chez noire religieuse taient de nature canc reuse, puisqu'on ne connat pas d'autre ulcration canc reuse ' que celle provenant du cancer ulerr, on en dduit facilement que la dernire et la plus cruelle phase - traverse p a r l a maladie dont fut atteinte Marie-Louise, p e u t tre range, m d i c a l e m e n t parlant, au nombre des ' cancers ulcres de l'estomac. Et plus loin : D'aprs c e (r qui a t dit, d aprs le tmoignage de. Trousseau, et d'aprs les s y m p t m e s recueillisdes d m e s partiels et dou loureux, on ne peut raisonnablement douter de l'existence
N
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dans l'estomac de Marie-Louise d'une ulcration c a n c rense, ou d'un ulcre cancreux, ce qui revient au mme, n o u s croyons tout fait superflu de proposer ou a c c e p ter n'importe quel changement dans l'nonc du miracle -en discussion (Ibid.,LXlII).En effet,ds lorsque l'affreux noplasme, dans lequel consistent la substance et l'nergie' du cancer, s'est jet sur une partie du viscre, et que cette partie a son ulcre, ce sera toujours la m m e chose que vous l'appeliez cancer ulcr ou ulcration cancreuse. Une autre raison de cette synonymie est que les auteurs dsignent par fois le cancer m m e ouvert du nom d'ulcration canc reuse. Ainsi Monneret: Lorsque le cancer est dvelopp dans un parenchyme ou dans l'paisseur d'une membrane, celle de l'estomac par exemple, il finit par faire irruption dans la cavit viscrale... alors s'tablit une ulcration dont les effets immdiats sont de jeter dans les viscres o u dans les cavits libres la matire cancreuse en dtritus (Ouvr. cit., vol. II, p. 629.). Valleix tient le m m e l a n g a g e : Dans le plus grand nombre des cas, j'ai dit qu'il existait une ulcration (Guid.du mdecin p r a t i c , vol. I, p. 706) . De m m e Roche et Sanson : c'est toujours par la m e m brane muqueuse qus Y ulcration c o m m e n c e (ouvr. cit, vol.T, p. 784.).Au reste, s'il parat aux membres de la Sacre Congrgation que les moisulcrationcancreuse de l'estomac expriment plus justement et plus exactement, par leur addiLion, le sujet du miracle, nous n'avons aucun mtif pour n o u s y opposer. 17. Selon la mesure de mes forces, j'ai rpondu l'unique dsir du trs bienveillant Censeur; de s o n ct il a dclar n'avoir plus rien objecter aprs cette discussion. J'unis donc ma prire ardente et confiante celle du Postulateur, le R.P.Franois Virily,missionnaire apostolique,dela congrga tion du Prcieux-Sang de N.-S. J . - C , pour que, le doute qui a motiv de notre part cette triple discussion tant enfin dis sip et dtruit, un suffrage unanimement affirmatif soit mis et qu'il soit suivi de la sentence solennelle porte par vous, Trs-saint Pre, etc. C'est pourquoi etc. HILAIRE ALIBRANDI, Avocat.
8 Dcembre 1882.
Deux heures avant le c o m m e n c e m e n t de la c r m o n i e , les escaliers du Vatican taient envahis. Ceux que 1'exiguit de la salle en tenait loigns s'alignrent bravement sur la place Saint Pierre, ou pntrrent dans l'glise, pour s'unir de cur et de prire leurs frres plus heureux. On dit que le nombre de ces intrpides assistants d'esprit devint si considrable, que, un m o m e n t donn, la place Saint-Pierre s'en trouva remplie. Admirable courage, qui donna, d i t - o n , des regrets au Souverain-Pontife, et mrita certainement les meilleures faveurs des nouveaux saints. Les longues heures d'attente qui leur taient i m p o s e s permirent aux premiers venus d'tudier loisir les mer veilles dcoratives de PAULA, excutes par le c o m m a n d e u r Fontana, l'habile architecte du palais apostolique. Le portique suprieur de la basilique Vaticane est trans form en un beau temple, vraiment digne, dfaut de Sai&t-Pierre, de la solennit grandiose qui va s'y accomplir. Le trne pontifical est plac au fond de la salle, et cinq larges degrs couverts de drap rouge y donnent accs. L'autel papal est situ au milieu, vers les deux tiers de la salle.Des deux cts du trne, et tout autour de l'autel, sont l e s b a n c s d e s cardinaux, desarchevques, voques et prlats. Il tait dix heures quand le cortge pontifical est entr dans la Loggia, travers les lumires et les fleurs, a u milieu des flots de peuple fidle et des ornements de toutes sortes, signalant la gloire des hros de l'glise, nos matres, nos protecteurs, nos amis, que le S a i n t Esprit allait dnoncer il notre foi et h notre amour par la voix infaillible du Souverain Pontife. Deux deux, portant un cierge allum, symbole de leur mission de lumire et de vigilance, coiils de la mitre de lin, au milieu d'un silence et d'un respect que nous ne pouvons dcrire, que nous ne pouvons faire comprendre, et dont il faut avoir ressenti l'impression, les vques s'avancent lente m e n t et se dirigent vers l'autel. Ils prennent place sur les bancs prpars pour eux, et pour divers prlats, dont je ne puis vous donner la nomenclature.
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Les archevques viennent ensuite, puis les cardinaux. Tons sont en chapes et en mitres blanches. De loin en loin, dans cette l o n g u e et imposante p r o c e s s i o n , apparaissent quelques mitres prcieuses, privilge de divers siges orientaux. La procession se continue, et les places rserves aux prlats se garnissent. Le c h u r au del de l'autel se remplit. Je ne dcris pas la garde papale, la garde suisse, la garde d'honneur, les camriers circulant dans leurs brillants c o s t u m e s ; toul plit, tout s'efface devant la simplicit m a j e s tueuse et touchante des vques, des archevques et de tout le corps cardinaliste. Tout coup, l'entre de la salle, entour de ses f a m i liers, prcd par les flambellis, apparat le pape port sur
la Srhn gcstatoria.
L e S o u v e r a i n - P o n t i f e a l e t r i r g n e s u r l a tte, il est revtu de ses vtements pontificaux, tout reluisants d'ore! de pierreries. Que dire.de sa personne sacre? Sa main s'lve e t . b n i t de tous cts ; son regard se promne sur cette assistance confondue devant lui ; Lui, l'autorit suprme sur la terre, lui, le vicaire de Jsus-Christ, Lui que, dans un langage ner gique auquel l'Eglise ne trouve rien redire, le docteur nouveau dont il va proclamer la gloire, Benot-Joseph Labre, appelait le vice-Dieu. Ce n est pas une vision de la terre, en effet, c'est une vri table apparition du paradis. Il passe au dessus des t t e s , bnissant toujours, s'humiliant et se dressant tout la fois sous l'autorit immense qui devrait l'accabler, et qu'il porte bnignement pour le bien, pour la consolation, pour la l u mire de tous. C'est le pape ! C'est le Roi ! C'est le P r e ! A l'aspect du Saint-Pre, les chantres de la chapelle S i x Une l'accueillent par le motet habituel aux grandes solen nits : Tu es Pelrus. L'enthousiasme contenu de la foule tait c o m m e s o u l a g par ces chants ardents qui se continurent jusqu' ce q u e le Pape et pris place sur son trne. Aprs 1 obdience dans laquelle Sa Saintet donna baiser sa main aux cardinaux, son genou aux vques, et sa m u l e aux abbs, le cardinal B.irtolini, Poslulateur de la c a n o n i s a tion, c o m m e n a ses postulations au nombre de trois. Le procureur demande instanter d'abord, instanlius en suite, et enfin instantissime la canonisation des n o u v e a u x Saints.
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A la premire postulation,le secrtaire des Brefs,Mgr Mercurelli. qui se trouve en face du trne, rpond e n - l a t i n au n o m du Saint-Pre, gui s'agenouille devant l'autel avec t o u t e l'assemble pour rciter les litanies des S a i n t s . C'est c o m m e u n e invocation suprme, c o m m e u n e der nire consultation, qui rclame les lumires de l'Esprit saint et l'assentiment de.la Cour cleste, avant d'admettre les n o u veaux lus au nombre de ceux que devra invoquer l'Eglise. Aprs le cbant des litanies, le Pape est r e m o n t sur s o n trne, et le Postulateur de la canonisation renouvelle les instances. Le prlat secrtaire rpond de nouveau au n o m de Sa Saintet, et, aprs le chant du Veni Creator, pendant que le prlat Postulateur rest genoux en suppliant, le Pape, la mitre en tte, c o m m e docteur infaillible et chef de l'E glise universelle, p r o n o n c e le dcret suivant :
Pour l'honneur de la sainte et individuelle Trinit, pour Pealtation de la foi catholique et le dveloppement de la religion chrtienne, par l'autorit de Notre-Seigneur JsusChrist, des bienheureux aptres Pierre et Paul et par la Ntre, aprs mre dtibration,et ayant souvent implor le secours de Diru, sur le conseil aussi de nos vnrables frres, les cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, les pa triarches, les archevques et vques, nous dfinissons que les bienheureux Jean-Baptiste de Rossi, Laurent de Brindes, Benoit-Joseph Labre, confesseurs, et Claire de la Croix, vierge, sont nomms Saints .et nous les inscrivons dans le catalogue des Saints.' ffousstatuons en outre que leur m moire doit tre honore chaque anne avec une pieuse dvo tion par l'Eglise universelle, savoir, parmi les Saints con fesseurs non pontifes, celle de Jean-Baptiste le 23 mai, celle de Laurent le 7 juillet, celle de Benoit-Joseph le 16 avril ; parmi les saintes vierges, celle de Claire le 18 aot. Aunom du Pre et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsisoit-il.
Le dcret solennel tait promulgu, l'Eglise c o m p t a i t quatre nouveaux Saints et notre Bienheureux prenait rang pour toujours parmi les protecteurs et les patrons du m o n d e catholique. Aux trompettes d'argent qui annoncent an loin l'heureuse nouvelle, les cloches de Saint-Pierre font c h o en sonnant toule vole, et bientt toutes les cloches de la Ville Sainte rpondent par les plus j o y e u x accords !
TABLE
DU.TOME.SIXIEME
LE MIRACLE AU TRIBUNAL DE LA-SCIENCE.. Rsum trs, abrg de la doctrine, de Benot XIV sur les batifi cations et les canonisations des maints Canonisation et apothose Canonisation dans les p r e m i e r s sicles de l'Eglise Canonisation des saints dans les temps modernes et actuels Congrgation des. Rites Des formalits anciennes Formalits prescrites par la-Congrgation des Rites depuis'la , dcret d'Urbain V1I E x a m e n de la saintet et de l'hrosme des vertus Examen des crits Commissions apostoliques Comment elles procdent Preuves et tmoins l'appui des vertus Nature et caractres distinatifs des miracles. Doutes relatifs aux.miracles et leur nombres Caractres d ' u n e gurison vraiment miraculeuse Vie merveilleuse et vertus hroques de' saint Benot-Joseph Labre PREMIRE PARTIE. Actes de la batification desaintJBenot-Joseph; Labre P R E M I E R M I R A C L E . Gurison instantane et parfaite de MarieRose de Luca atteinte de Phthisie pulmonaire-confirme
E X P O S D U MIRACLE
1 i 2 4 4 8 9 10 il II 13 15 16 17 18 21 38 38
38
Le premier terme du miracle, c'est--dire l'existence et la gravit de la maladie L'invocation et lamiracle \ Le second extrme du miracle ou la gurison prodigieuse, insr tantane, parfaite et dfinitive. DPOSITIONS DES .TMOINS. Sur la vrit du .miracle DISCUSSION, du premier.miracle -. Premires objections ou observations critiques;du Promoteur de la Foi Rponse aux observations.critiques du Promoteur de-la.Foi Nouvelles observations.critiques .du Promoteur de-la.'Foi Rponse, aux nouvelles- observations. critiques dui, Promoteur de la Foi
894
TABLE DES MATIRES. 170 176 176 194 263 275 330 331 344 349 365 371 371 373 387 388 ' 392 396
403
Discussion des preuves Discussion du sujet du miracle,ou de la ralit de la p h t h i s i e . . . De la Phthisie en gnral, ses varits et ses progrs Vritable caractre de la maladie de Marie Rose. Solution des objec tions contre le caractre de la maladie La maladie conserva-t-elle sou caractre jusqu' la fin? Examen des objections au sujet de la dcroissance de la maladie La gurison de Marie-Rose fut-elle instantane,parfaite, durable. Rapport de M. le docteur Maggiorani, mdecin expert, sur cette question : esl-il certain que la gurison de Marie-Rose est miraculeuse ? Dernires observations critiques du Promoteur de La Foi Rponse aux dernires observai ions critiques du Promoteur de la Foi .... Jugement mdical de M. le docteur Pierre Louis Valenlini SECOND M I R A C L E . Gurison instantane et parfaite de Thrse Tartufoli d'un ulcr invtr, sinueux, fistuleux bords cal leux Expos du miracle Premier terme du miracle, existence, nature et gravit de la maladie Le moyen du miracle ou l'invocation Le dernier terme du miracle, ou la gurison instantane, parfaite et durable Dpositions des tmoins Dposition de la miracule
DISCUSSION D U M I R A C L E
Promitres o b s r n a l i o n s critiques du promoteur de la Foi 403 Rponse aux observations critiques du promoieur de la Foi 417 Nouvelles observations critiques du promoteur de la Foi 447 Rponse aux nouvelles observations critiques du promoteur de la^Foi 450 Jugement des mdecins experts 463 Premier jugement mdical, de M. le docteur Baccelli 463 Nature et marche de la maladie 464 Remdes inutilement employs, et gurison instantane 475 Second jugement mdical de M. le Docteur Albits 482 lncurabilit des fistules en"gnral 484 De l'incurabilit de la fistule larynge de Thrse Tartufoli en particulier 488 Dernires observations critiques du promoteur de la Foi 494 T R O I S I M E M I R A C L E . Gurison instantane et parfaite de sur Angle Marini d'une obstruction ancienne, squirreuse, ou pier reuse de la rate 497 E X P O S D M I R A C L E . D U premier terme du miracle, existence, nature et' gravit de la m a l a d i e . . 497 Du mdium du miracle, ou de l'invocation 508 Du second terme du miracle : Gurison instantane, parfaite et constante du mal principal et des maladies concomitantes 510 DISCUSSION D U M I R A C L E . Premires observations critiques du pro moteur de la Foi 518 Rponses aux observations critiques du promoteur de la Foi 529 Nouvelles observations critiques du promoteur de la Foi 557 Rponse aux nouvelles observations critiques 564 L'obstruction de la rate fut la maladie principale 564 Rfutation des objections du promoteur de la Foi contre cette thse principale *. 570
TDLE DES MATIRES. La gurison a t instantane et, parfaite L'invocation est ' certaine Rsum du procs de batification ",
SECONDE PARTIE ... ; P R O C S DK C A N O N I S A T I O N
895 * :
679 Gurison instantane cl parfaite de Dame Th'rse Massetti atteinte d'un squirrhe cancreux de l ' e s t o m a c . . . 6 8 1 Expos du, miracle .' 681 Du premier terme du miracle : du caractre et de la gravit de la maladie i 684 Du moyen du miracle, de l'invocation 695 Historique
PREMIER MIRACLE. DISCUSSION D U MIRACLE ; ! 704
Premires observations critiques du promoteur de la Foi 704 De la maladie 704 De la gurison 706 Rponse aux premires objections clu promoteur de la Foi. Nature et gravit de la maladie 707 D e l gurison 714 Nouvelles observations critiques du promoteur de la Foi 728 Rponses a u x nouvelles observations critiques du promoteur de la Foi 732 Dernires observations critiques du promoteur de la Foi , 750 Rponse aux dernires observations critiques du promoteur de la Foi 753 Jugement mdical, formul d'office sur le premier miracle par M. le docteur Alexandre Ceccarelli 774 SECOND MIRACLE. Gurison instantane de la R. M. Marie-Louise de rinimacule-Conception, religieuse professe du monastre du Divin-Amour,du mont Falisque, affecte d'un cancer ulcr de l'estomac 784 Expos du miracle 784 Du premier terme du miracle ou du caractre et de la gravit de Ja maladie 787 Du moyen du miracle ou 1 invocation 80i Du second terme du miracle ou de la gurison 803 Discussion du miracle 807 Observations critiques du promoteur de la Foi 1 807 Rponse aux observations critiques 81S Nouvelles Observations critiques du promoteur de l Foi. 843 Rponse aux nouvelles observations critiques 848 Analyse et rsum du jugement mdical du docteur Vincent Diori sur la gurison de la sur Marie-Louise, de l'ImmaculeConception 856 Histoire de la maladie 857 Dissertation mdicale sur diffrents points de l'histoire de la maladie; rponse aux objections; conclusions 864 Dernires observations critiques du promoteur de la Foi..' 868 Rponse aux dernires observations critiques.., 87 La solennit de .la canonisation '.. 8 9 0
FIN.
1901.
AUBE V I L L E .
TYP.
ET
STIK.
GUSTAVE
llK:AL'X.