Économie L2S3 UFR
Économie L2S3 UFR
Économie L2S3 UFR
Introduction à l’économie
Notes de cours
2
Avertissement
- Ces notes concernent la théorie du cours. Elles sont susceptibles d’être révisées
régulièrement.
- Leur usage par les étudiants du cours est indispensable. Il est demandé de ne
pas les diffuser ni d’y faire référence.
Bibliographie
Plan
Chapitre 7 : Le PIB
1.1 Préliminaires
1.2.1 Arbitrage
- la rareté des ressources implique l’obligation d’arbitrer, c-à-d de faire des choix
- certains choix sont individuels (ex : je choisis d’aller à Lille3 en vélo plutôt qu’en
bus) et d’autres collectifs (ex : la société décide qu’on roule à droite)
- les ressources étant multiformes, il existe différentes formes de rareté (en termes
de budget, temps, ressources naturelles, espace,…)
Constat important : sauf rarissime exception, rien n’est gratuit. Avoir plus d’une chose
implique de renoncer à une autre. Du fait de la rareté, les arbitrages sont des réalités
permanentes de la vie.
4
1.2.2 Incitations
- question de départ : comment les agents font-ils leurs choix, et comment ces choix
peuvent-ils changer en fonction des circonstances économiques ?
- un agent confronté à un choix évalue et compare les avantages et inconvénients
des différentes options possibles (ex : un consommateur compare les rapports
qualité/prix de 2 voitures, un entrepreneur compare les avantages/inconvénients de
différentes localisations possibles de sa nouvelle usine)
- définition : incitations = avantages de tous ordres qui font pencher le choix d’un
agent en faveur d’une option particulière
- ex d’incitations : qualités d’un BS (en termes de performance, robustesse,
esthétique, économie de fonctionnement,…), prix, garantie, service après-vente,...
- s’il existe une causalité claire entre une incitation et un choix, on peut prévoir
comment un changement au niveau de l’incitation va affecter le choix
Constat important : les agents réagissent aux incitations ; celles-ci sont importantes
pour comprendre les choix effectués.
1.2.3 Echange
- l’échange existe depuis la nuit des temps. Dans les sociétés modernes, des millions
d’échanges ont lieu à tout instant (BS contre BS, BS contre argent, travail contre
salaire,...). Quasi personne ne produit tous les BS qu’il consomme (contrairement à
Robinson sur son île !). Au contraire, les agents tendent à se spécialiser dans une
activité et à échanger le produit de leur activité contre de l’argent ou contre d’autres
productions.
- l’échange permet de la variété des BS que l’on peut détenir
- nombre d’échanges posent des problèmes d’information et de risque de ne pas être
satisfait (ex : voiture d’occasion ou échange via internet)
- si elles sont bien informées et si l’échange est volontaire, les 2 parties sont
gagnantes par rapport à la situation sans échange. En effet, si une des parties
s’estime perdante à l’échange, elle n’échangera pas ! En revanche, si l’une des
parties est contrainte à l’échange (suite à des pressions), alors elle peut être
perdante à l’échange.
1.2.4 Marchés
- les échanges se font sur des marchés
- définition : marché = toute situation où se produisent des échanges (ex : foires,
marchés de village, bourse, grandes surfaces)
- la monnaie est l’intermédiaire habituel dans les échanges (par opposition au troc)
- économie de marché : économie où la plupart des échanges sont marchands (c-à-d
qu’ils se font sur un marché)
- la quantité échangée de l’objet considéré et son prix sont déterminés par le
« marchandage » libre entre vendeurs et acheteurs1.
- dans une économie de marché, c’est via les choix des agents sur les marchés que
se résolvent les questions fondamentales suivantes : quels BS produire et en quelles
1
Ce marchandage ne se fait pas toujours au cours d’une discussion entre vendeurs et
acheteurs (ex : achat dans une grande surface).
5
quantités ? Comment produire ? Pour qui produire ? Qui prend les décisions
économiques ?
- pour certains BS, l’Etat peut intervenir soit au niveau du prix (le prix est
réglementé), soit en tant que producteur de BS (ex : enseignement, santé,
défense,…)
- économie mixte : économie de marché, mais où l’Etat intervient dans de nombreux
domaines (en tant que producteur, via la réglementation, via la redistribution des
revenus,…). C’est le cas de la France.
1.2.5 Information
- pour choisir entre différentes possibilités, l’agent a besoin d’informations sur ces
possibilités (ex : infos sur la qualité, le prix des produits disponibles)
- l’absence ou l’asymétrie d’info (ex : dans le cas d’une voiture d’occasion) peut être
un obstacle à un échange dans de bonnes conditions. L’Etat peut être amené à
intervenir (ex : en réglementant la publicité) ou les demandeurs peuvent être amenés
à s’organiser (ex : via les associations de protection des consommateurs).
2
Remarque : l’information est elle-même un BS pouvant être gratuit ou non (ex : infos
fournies par les associations de protection des consommateurs). Elle a cependant des
propriétés particulières : contrairement à d’autres BS,
le fournisseur de l’info en dispose toujours après l’avoir fournie. Ex : si je vous
renseigne le favori du prochain tiercé, je le sais toujours après vous l’avoir dit !
l’essai avant échange n’est pas possible (une fois l’info connue via l’essai, on n’a plus
aucune raison de l’acheter !)
elle est reproductible (quasi) gratuitement. Ex : que je renseigne oralement le favori
du prochain tiercé à une ou à 10 personnes, cela me coûte le même effort.
6
marché du travail : les individus vendent leur travail contre monnaie aux firmes
et à l’Etat
marché des capitaux : les prêteurs (ménages et banques) prêtent de l’argent
aux emprunteurs contre promesse de remboursement et paiements futurs
d’intérêts. En pratique, ces prêts peuvent prendre la forme d’achats de titres
(ex : actions, obligations,...) émis par les emprunteurs (firmes, Etat, banques)
- remarques :
chaque grand marché est en fait un grand ensemble de marchés similaires
un même agent intervient sur plusieurs marchés à la fois. Ex : un individu est à la
fois consommateur, travailleur, investisseur ou emprunteur (il vend son temps et
ses compétences sur le marché du travail, achète des BS sur le marché des BS,
et prête ou emprunte sur le marché des capitaux)
beaucoup de BS produits par l’Etat (ex : enseignement, santé, sécurité) sont
gratuits ou quasi-gratuits (ex : l’enseignement à Lille3) et sont financés
autrement (cfr. infra)
dans une économie ouverte sur le reste du monde, les agents nationaux
échangent avec le Reste du Monde (RM) sur les 3 marchés
marché
des BS
marché
des
capitaux
- économie : science qui étudie comment des ressources rares sont employées pour
la satisfaction des besoins des hommes vivant en société
- par rapport à celle du point 1.1, cette définition est plus particulière dans la mesure
où elle met l’accent sur la notion de besoin (or, il existe d’autres objectifs
économiques que la satisfaction des besoins)
- besoins :
définition : besoins = exigences nées de la nature (besoins essentiels) ou de
la vie sociale (besoins d’accomplissement (formation, éducation), de confort,
de loisir, induits par la publicité,…)
sont très variables selon les individus, les sociétés (leur niveau de
développement, les traditions socioculturelles, leur environnement naturel) et
selon l’histoire (nombre de nos besoins aujourd’hui étaient inimaginables il y a
100 ans)
attention : l’économie ne pose pas de jugement de valeur sur les besoins, elle
se contente de les constater ! En effet, la notion de besoin est le plus souvent
subjective et discutable (ex : tchater sur internet est-il un « vrai » besoin ?), ce
qui rend leur nombre illimité.
2.3.1 Ménages
- définition : ménage = ensemble des personnes qui vivent ensemble dans un même
logement
- disposent de revenus (du travail, de la propriété et de transferts)
- avec leurs revenus, les ménages consomment et épargnent
3
En ce qui concernent les bâtiments et infrastructures, la réfection en profondeur est
également comprise dans l’I.
4
A nouveau, il s’agit d’une convention et un autre choix aurait été possible.
12
- ce tableau reprend l’ensemble des opérations non financières d’une économie c-à-d les :
opérations sur les produits
opérations de répartition
- les opérations financières sont donc exclues !
- lecture du tableau :
on regarde le sens de l’argent
en 1ème ligne : agent qui vend ou qui reçoit l’argent
en 1ère colonne : agent qui achète ou qui paie
ex : les traitements des fonctionnaires sont à l’intersection de la ligne « AP »
et de la colonne « Ménages » puisqu’ils sont payés par les AP aux ménages
Chapitre 3. La production de BS
fumées
consommation
intermédiaire :
- énergies
- matières premières
- biens semi-finis et
services
machines
production
obsolescence
16
Définition générale : facteurs de production = tout ce qui sert pour produire les BS.
Les facteurs de production sont également désignés par les termes « entrées » et
« inputs ».
3.3.3 Sorties
- production désirée (également désignée par le terme « output »)
- productions non désirées : pollutions (de l’eau, de l’air, du sol) à l’origine de
problèmes environnementaux (qui peuvent être locaux et/ou globaux)
3.4 Productivité
3.4.2 Remarques
- productivité d’un facteur = indicateur de performance permettant de comparer les
entreprises entre elles au niveau de l’utilisation d’un facteur déterminé ou de l’ensemble des
facteurs
- une entreprise a une productivité globale plus élevée qu’une autre si elle utilise plus
efficacement ses facteurs de production
5.1 Préliminaires
5.2 La demande
5
Plus de 90% des ordinateurs personnels sont équipés par le système Windows (Mankiw-
Taylor, p.390).
20
prix
1,5
7 10 cornets
prix
D D’
7 11 cornets
5.3 L’offre
la courbe décrit une relation entre prix et quantité (parmi les déterminants de
l’O, on privilégie un facteur explicatif : le prix)
les autres variables (ex : équipements utilisés, coûts de production) sont
maintenues constantes
la courbe peut être décrite via un tableau (cfr. Tab 5.3) ou un graphique (cfr. Fig.
5.3). On observe une relation positive entre prix et quantité offerte: si le prix ,
l’activité devient + profitable, les vendeurs sont prêts à vendre +.
p O
- dans le cas d’un déplacement de la courbe (cfr. Tab. 5.4), on parle de corrélation
positive si, à prix donné, l’O varie dans le même sens que le déterminant
considéré (ex : il y a corrélation positive entre les perspectives de profits et l’O
de glace parce que si les perspectives de profits , alors l’O de glace )
25
négative si, à prix donné, l’O varie dans le sens opposé que le déterminant
considéré (ex : il y a corrélation négative entre les coûts de production et l’O de
glace parce que si les coûts de production , alors l’O de glace )
indéterminée si, à prix donné, la variation du déterminant considéré peut faire
varier l’O dans les 2 sens
6.1.1 Equilibre
- à l’équilibre, les dispositions des vendeurs et des acheteurs correspondent (cfr. Fig. 6.1)
- Loi de l’O et de la D : le prix d’équilibre (p*) et la quantité d’équilibre (Q*) sont
déterminés par l’égalité entre l’O et la D. Autrement dit, ils sont déterminés par les
égalités suivantes :
Q* = O(p*) = D(p*)
Offre
2.5€ excédent d’offre
2€
Demande
QD = 4 7 QO = 10 Quantité
Commentaire : à 2,5€, le prix est supérieur au prix d’équilibre et la quantité offerte (QO
= 10 cornets) est supérieure à la demande (QD = 4 cornets). Il y a excédent d’offre, au
sens où les vendeurs se retrouvent avec des invendus. Ils sont alors incités à baisser
le prix du cornet afin d’augmenter leurs ventes. La baisse du prix s’arrête quand
l’excédent d’offre a disparu, c-à-d quand le prix a atteint son niveau d’équilibre (2€).
28
6
Attention, il ne s’agit pas là d’un résultat général : avec une réduction de l’offre
suffisamment importante, on pourrait observer une baisse de la quantité d’équilibre.
30
Chapitre 7 Le PIB
7.1.1 Définition
PIB = Produit Intérieur Brut
= valeur de marché de l’ensemble des BS finals produits par un pays pendant
une période donnée
le PIB renvoie à la notion de territoire (ex : territoire français). C’est donc tout ce
qui est produit à usage final sur le territoire d’un pays.
au contraire, le Produit National Brut (PNB) renvoie à la notion de nationalité. La
différence entre les 2 concepts provient des revenus du travail et de la
propriété. Ex : un travailleur français habitant en Espagne contribue au PIB
espagnol (car il contribue à la production sur le territoire espagnol) et au PNB
français (car ce travailleur est français).
- « sur une période donnée » : par ex, un an, un trimestre
- selon l’approche par la VA, le PIB = somme des VA des différents secteurs
d’activités
- exemple : soit une économie qui se résume à un secteur agro-alimentaire
représentation graphique ou par tableau (cfr. Tab. 7.1)
le PIB s’obtient en faisant la somme des VA de chaque secteur :
Boulangerie
Agriculture Moulin industrielle Détaillants C
3 2 3 5 10
soleil
Ressources Emplois
PIB C ( ménages)
I ( ménages, entreprises, Etat)
G ( Etat)
PIB = C + I + G
- 2ème cas : économie ouverte (= avec échange avec le RM) : on a donc des
importations (M) en provenance du RM et des exportations (X) à destination du RM
tableau ressources/emplois du territoire : en ressources, on retrouve la
production à usage final du pays (par définition le PIB) et les importations, et en
emplois, on retrouve à quels usages les ressources ont été employées
Ressources Emplois
PIB C ( ménages)
M ( RM) I ( ménages, entreprises, Etat)
G ( Etat)
X ( RM)
PIB + M = C + I + G + X
ce qui peut se réécrire :
PIB = C + I + G + X – M
- application de l’approche par les dépenses à l’économie ci-dessus (cfr. Tab 7.1)
il s’agit d’une économie fermée, donc X = M = 0
il n’y a ni investissements (I = 0) ni dépenses publiques (G = 0)
la consommation des ménages correspond aux livraisons de pains de détail,
c-à-d au chiffre d’affaire du secteur « détaillants », donc PIB = C = 10 et on
retrouve bien le résultat obtenu par l’approche de la VA
7.3.1 Préliminaires
- Comme indiqué au point 7.1.2, le PIB comprend l’ensemble des BS à usage final,
ceux-ci étant comptabilisés en fonction de leur valeur de marché, qui dépend elle-
même des prix en cours de ces BS, c-à-d des prix observés pendant la période
considérée. Parce qu’il dépend des prix en cours, le PIB est qualifié de nominal.
35
- Le PIB nominal varie d’un période à l’autre en fonction des variations des quantités
produites et en fonction des variations de prix. Une grandeur qui n’évoluerait qu’en
fonction des variations des quantités produites reflèterait plus fidèlement l’évolution
des richesses réellement produites par l’économie. C’est précisément l’objectif du
calcul du PIB réel.
- la variation du PIBn entre 2000 et 2005 est mesurée par PIBn = PIBn5 - PIBn0.
Elle dépend à la fois des changements de prix et des changements de quantités
survenus entre 2000 et 2005. Il est même possible que le PIBn uniquement à
cause de la des prix ! D’où l’intérêt de calculer un indicateur de production qui ne
dépendent que des quantités et qui soit indépendant des variations de prix.
il en découle que la variation du PIB réel entre 2000 et 2005 n’est due qu’à la
variation de quantités entre 2000 et 2005. En effet, étant donné les 2 égalités
précédentes, on a :
PIBr = PIBr5 – PIBr0
= Pp0 Qp5 + Po0 Qo5 - Pp0 Qp0 + Po0 Qo0
= Pp0 Qp5 - Qp0 + Po0 Qo5 - Qo0
36
- remarque : PIBr et déflateur sont des mesures complémentaires. Alors que le PIBr
n’évolue qu’en fonction des quantités (les variations de prix étant neutralisées), le
déflateur n’évolue qu’en fonction des prix (les variations de quantités étant
neutralisées).
PNN = PNB – Am
ce concept définit la richesse produite par tête et permet de comparer des pays
de populations différentes
7.5 Lecture
39
8.1.1 Préliminaires
- définition : le marché du travail (MT) est le « lieu » où se rencontrent les agents qui
offrent leur « force » de travail (ceux qui cherchent un emploi) et les agents qui
souhaitent engager des travailleurs (ceux qui offrent des emplois).
- dans sa version de base, la description de MT est très similaire à celle d’un marché
de BS parfaitement concurrentiel (cfr. Chapitres 5 et 6)
- attention : les travailleurs offrent du temps de travail et demandent des emplois,
tandis que les employeurs demandent du temps de travail et offrent des emplois. Par
convention, la description du MT retient la variable « temps de travail ». En
conséquence, sur le MT, la demande provient des employeurs et l’offre des
travailleurs !
un salaire w plus élevé implique que le travail est plus attractif, ce qui rend
les travailleurs prêts à sacrifier + de temps libre afin de travailler +. En
conséquence, l’OT est une fonction croissante de w (cfr. Figure 8.1)
l’OT dépend non seulement du salaire, mais aussi d’autres variables comme
la qualité des emplois disponibles, les perspectives de carrière, l’ambiance
de travail,…
- comme la courbe d’OT décrit une relation entre w et LO,
si w varie, on se déplace le long de la courbe LO
si un autre déterminant explicatif de l’OT varie, alors c’est la courbe LO qui se
déplace. Par exemple, si à un niveau de salaire w donné, la qualité des
emplois , alors l’OT correspondante (mesurée par LO(w)) . Ce raisonnement
étant vrai quel que soit w, la courbe LO se déplace vers la gauche.
w LD
LO
w*
L
L* N
42
8.2.1 Notions
- population adulte :
définition : ensemble des personnes en âge de travailler
leur âge doit être à l’âge minimum légal pour travailler (ex : 16 ou 18 ans)
- population active : ensemble des actifs, c-à-d des travailleurs et des chômeurs
- inactifs : ensemble des adultes ne faisant pas partie des actifs (étudiants, retraités,
femmes au foyer)
- chômeur : personne qui satisfait les 3 conditions suivantes :
(1) personne sans travail,
(2) disponible pour travailler,
(3) à la recherche d’un emploi
- l’ensemble de ces notions sont ordonnées dans le schéma de la Figure 8.2
population totale
adultes enfants
actifs inactifs
travailleurs chômeurs
TA = (# actifs) / (# adultes)
TC = (# chômeurs) / (# actifs)
- ces deux taux sont deux indicateurs très utilisés dans la littérature économique pour
décrire le marché du travail
43
8.3 Lecture
En France, tous les ans, 2,3 millions d'emplois disparaissent. Ramenée à l'échelle
quotidienne, l'ampleur du carnage est impressionnante : chaque jour ouvrable, la
France perd 10000 emplois; 10 000 par jour, c'est l'emploi d'une ville comme
Fécamp, c'est 7 par minute. À ce rythme, il n'y aura plus aucun emploi en France
dans moins de sept ans! Voilà des chiffres qui pourraient facilement convaincre
n'importe qui, de bonne foi mais partiellement infondé, de l'inéluctable fin du travail.
Heureusement, ce point de vue oublie une moitié de l'histoire. La moitié omise est
pourtant tout aussi intéressante. Elle se résume en une phrase : chaque jour, la
France crée 10000 emplois8.
Tout compte fait, la vérité est beaucoup plus déconcertante que la banale fin du
travail si souvent annoncée. Les créations et les destructions d'emplois sont
gigantesques et, bon an mal an, parviennent à s'équilibrer. Ainsi, en 2002, en
France, la croissance nette de l'emploi - mesurée par la différence entre les créations
et les destructions - a été de 60 000 emplois, soit 0,4 % des effectifs. L'année 2002
n'est pas exceptionnelle. Elle reflète assez bien la situation moyenne du marché du
travail depuis plusieurs décennies. Entre 1970 et 2000, l'économie française a
détruit, chaque année, approximativement 15 % de ses postes de travail... et en a
7
Extrait de « Le chômage. Fatalité ou nécessité ? », Pierre Cahuc et André Zylberberg,
Flammarion, 2005, p.17-32.
8
L'évaluation des créations et des destructions d'emplois soulève des problèmes délicats. La
démarche habituelle consiste à utiliser un échantillon d'entreprises dont on observe les
effectifs à deux dates bien précises (par exemple le 1er janvier et le 31 décembre, ce qui
correspond à l'intervalle d'une année). Si, entre ces deux dates, une entreprise augmente
ses effectifs, on comptabilise cette augmentation comme autant de créations d'emplois. A
l'inverse, si entre ces deux dates, une entreprise diminue ses effectifs, cette diminution est
comptabilisée comme autant de destructions d'emplois. Le taux de destruction est égal au
nombre total de destructions divisé par le stock moyen d'emplois de toutes les entreprises de
l'échantillon sur la période. En utilisant cette méthode, on aboutit à un taux annuel de
destruction de l'ordre de 10 % (voir l'article de Richard Duhautois, « Les réallocations
d'emplois en France sont-elles en phase avec le cycle ? », Économie et statistique, n° 351,
2002). Cependant, cette méthode sous-estime les créations et les destructions d'emplois,
car elle néglige les destructions et les créations résultant des variations brèves de l'activité.
Elle néglige aussi les modifications de la structure des emplois au sein des entreprises, qui
peuvent, par exemple, détruire des emplois d'ouvriers et créer des emplois de cadres tout en
conservant un effectif constant. Les contributions ayant estimé ces créations et destructions
d'emplois supplémentaires suggèrent qu'elles sont importantes. Leur prise en compte
conduit à un taux de destruction annuel de l'ordre de 15 % (voir notre ouvrage Le Marché du
travail, De Boeck, 2001). Il y a en France 15,5 millions d'emplois dans le secteur marchand
non agricole, ce qui donne environ 2,3 millions d'emplois détruits chaque année, soit environ
10 000 emplois détruits par jour ouvrable (il y a 240 jours ouvrables par an). Il faut noter que
ces chiffres sous-estiment le volume total des mouvements d'emploi puisqu'ils ne tiennent
pas compte de l'agriculture et des secteurs associatifs et publics (comprenant 8 millions
d'emplois) qui contribuent aussi aux créations et destructions d'emplois.
44
créé 15,5 %, de manière à assurer une croissance nette de l'emploi de 0,5 % par an.
En 2000, année la plus faste depuis plus de cinquante ans en France, la croissance
nette des effectifs n'a atteint que 2,5 %, ce qui est faible au regard des 15 %
d'emplois détruits chaque année.
9
Voir en particulier, le chapitre 7 de Capitalisme, socialisme et démocratie [1942], Payot,
coll. « Petite Bibliothèque Payot », 1969.
10
Dans L'Horreur économique, Fayard, 1996, p. 74.
45
millénaristes - et celle de la fin du travail en fait partie - aura toujours plus d'écho
qu'une étude sérieuse, chiffrée qui aboutit à des conclusions peu spectaculaires et
pas toujours tranchées.
En fait, nous ne sommes pas les témoins de la disparition du travail, mais bien de
son incessante recomposition. Cette recomposition est massive. Nous verrons que la
croissance repose, pour l'essentiel, sur elle. Mais elle crée aussi du chômage, des
inégalités et de l'exclusion. Le processus de créations et de destructions d'emplois
est donc au cœur des grands problèmes économiques et sociaux de notre temps. Il
est encore largement méconnu. C'est sans doute pour cette raison que des discours
les plus abracadabrantesques sur l'avenir du travail, le rôle de la mondialisation, les
licenciements boursiers, la montée des inégalités, ou encore la paupérisation
croissante, peuvent prospérer. Élaborer une régulation efficace et équitable du
marché du travail nécessite de comprendre pourquoi ce processus de créations et de
destructions d'emplois est indispensable.
Après avoir constaté que la masse des créations d'emplois équilibrait, bon an mal an,
celle des destructions, les chercheurs attendaient que leurs investigations ultérieures
confirment une intuition de bon sens, à savoir que les emplois détruits provenaient
principalement des secteurs en déclin et que leur répondaient en contrepartie des
emplois créés dans les secteurs en expansion. Une surprise supplémentaire fut de
constater que ces mouvements de créations et de destructions avaient lieu de
manière simultanée au sein d'un même secteur. Prenons l'exemple de l'industrie
textile et de l'industrie pharmaceutique entre 1990 et 1996 en France. La première
occupe la tête de la liste des secteurs en déclin, tandis que la seconde est un
secteur « de pointe ». Dès lors qu'à l'échelle de la nation les créations d'emplois
équilibrent à peu près les destructions, on attend qu'un secteur comme le textile
détruise des emplois et que la pharmacie en crée. Le tableau ci-dessous nous
apprend que la réalité est plus subtile.
Entre 1990 et 1996, le textile, en déclin, crée chaque année à peu près autant
d'emplois que la pharmacie/parfumerie, en plein développement (respectivement 7,1
% et 7,3 %), Le textile est sur le déclin car, chaque année, il détruit sensiblement
plus d'emplois qu'il n'en crée, tandis que la pharmacie/parfumerie est en expansion
car, tous les ans, elle détruit un peu moins d'emplois qu'elle n'en crée. Mais jamais
un secteur d'activité ne fait que créer, ou, à l'inverse, que détruire des emplois. Au
contraire, tous les secteurs sont toujours en train de créer et de détruire beaucoup
d'emplois, Le déclin est un phénomène cumulatif de longue période où chaque
année les destructions d'emplois dépassent sensiblement les créations.
46
Autrement dit, un secteur en déclin perd bien ses emplois en faveur des secteurs en
expansion, mais, pour reprendre la célèbre expression d'Alfred Sauvy, ce «
déversement » se réalise lentement. Au cours d'une année, la très grande majorité
des emplois détruits dans le secteur textile sont remplacés par des emplois dans… le
secteur textile. Par exemple, dans le Nord-Pas-de-Calais, les usines spécialisées
dans l'assemblage des textiles traditionnels ont réduit continuellement leurs effectifs
au cours des deux dernières décennies. Mais, depuis le début des années 1990,
l'assemblage des textiles « techniques » à base de fibres synthétiques et utilisés,
entre autres, par le personnel médical, dans le bâtiment et dans la pratique de
certains sports, a connu une croissance forte et régulière. Aujourd'hui, autour de
Lille, s'est implantée une authentique « vallée » du textile technique qui compte plus
de 150 sociétés, Une partie des emplois détruits par le textile traditionnel se sont
déversés dans le textile technique. Il s'agit là encore d'une « loi » valable dans tous
les pays industrialisés, Les études faites à ce jour indiquent que la plus grande part
des mouvements croisés de destructions et de créations d'emplois - ce que les
économistes nomment les réallocations d'emplois - n'ont pas lieu entre des secteurs
différents, mais entre des établissements appartenant à un même secteur. Si l'on
découpe le système productif français en 600 secteurs, les mouvements d'emplois
entre secteurs représentent moins de 20 % du total des réallocations.
11
Plus exactement, dans une entreprise ou un secteur donnés, la productivité du travail est
égale au rapport entre la production, généralement mesurée en euros, et le nombre d'unités
de travail utilisées. On parle de productivité par tête si ces unités de travail sont des
personnes, et de productivité horaire si ce sont des heures.
47
Les études que nous venons d'évoquer ne nous disent pas pourquoi les
réorganisations des emplois au sein des établissements existants n'ont, dans
certains secteurs, qu'une responsabilité modeste dans la croissance de la
productivité. Ricardo Caballero et Mohamad Hammour ont particulièrement étudié
cette question. Leur principale conclusion est que le fonctionnement d'une entreprise
a toujours un fort degré de spécificité. Chaque entreprise est une alchimie complexe,
façonnée par le temps, de savoir-faire technique, d'imbrications de liens personnels
ou collectifs pas toujours explicites, d'organisation du travail ayant ses règles et ses
coutumes, de manière de prendre des décisions, etc. Cet amalgame est en grande
partie propre à chaque entreprise et il ne fonctionne bien qu'au sein de cette entité
particulière. Une entreprise ressemble plus à un système composé de liaisons
irréversibles entre certains de ses éléments qu'à une collection d'individus
48
L'exemple du transport aérien n'est pas isolé. Tous les pays de l'OCDE sont affectés
par un fort taux de création et de disparition d'entreprises. Eric Bartelsman, Stefano
Scarpetta et Fabiano Schivardi ont constaté qu'environ 10 % des entreprises
49
Mais c'est aussi l'extrême spécificité de chaque entreprise qui requiert une telle
ampleur des mouvements de main d'œuvre. En suivant 1 669 entreprises françaises
entre 1987 et 1990 John Abowd, Patrick Corbel et Francis Kramarz ont mis en
évidence l'importance et la racine de ce phénomène. Ils montrent que la gestion de
la main-d'œuvre est marquée par un nombre considérable d'embauches et de
départs simultanés. En moyenne, une entreprise qui crée un emploi embauche trois
personnes et se sépare de deux autres. Plus surprenant, ils ont aussi constaté que
les entreprises qui détruisent des emplois continuent d'embaucher. En moyenne, la
perte d'un poste de travail se traduit par deux embauches et trois départs. L'étude
confirme bien que chaque embauche réussie est le fruit d'un processus d'essais et
d'erreurs, car chaque emploi a sa spécificité, qui dépend non seulement des tâches
demandées, mais aussi du réseau de relations personnelles, de la culture de
l'entreprise, de sa localisation et d'une multitude d'éléments qui peuvent convenir à
certaines personnes et déplaire à d'autres. Tous ces éléments ne se découvrent pas
en quelques instants. C'est en grande partie pour cette raison que les périodes
d'essai et les embauches sous contrat à durée déterminée sont abondamment
utilisées : aujourd'hui, 70 % des embauches se font sous forme de contrat à durée
déterminée; seulement un tiers d'entre elles sont transformées en emploi stable. La
croissance est donc le fruit d'un processus joint de créations et de destructions
d'emplois et de mouvements de main-d'œuvre. Ce processus joint est massif. Il
reflète à la fois les choix des entreprises et la liberté de mouvement des travailleurs.
Faut-il du chômage ?
Les mouvements d'emplois et de main-d' œuvre transforment de nombreux
travailleurs en chômeurs12 devant rechercher un nouvel emploi. Cette activité de
12
Pour le Bureau international du travail, un chômeur est une personne en âge de travailler
(15 ans ou plus), qui répond simultanément aux trois conditions : être sans emploi, c'est-à-dire
ne pas avoir travaillé, ne serait-ce qu'une heure, durant une semaine de référence; être
50
recherche est essentielle au bon fonctionnement de l'économie, car elle permet aux
emplois détruits de donner naissance à des emplois nouveaux, plus productifs. La
recherche d'emploi, ou, en d'autres termes, le chômage, est donc un rouage
indispensable du processus de destruction créatrice et de la croissance. Cependant,
alors que tous les pays industrialisés se ressemblent en termes de créations et de
destructions d'emplois - tous les ans, environ 15 % d'emplois sont créés et 15 %
d'emplois sont détruits -, ils divergent considérablement en termes de chômage. Par
exemple, en 2001 (une excellente année), la France affiche un taux de chômage de
8,8 %, tandis que la Suède plafonne à 5,1 %, les États-Unis font mieux avec 4,8 % et
les Pays-Bas encore mieux avec 2,7 %. Quand la situation se détériore, les écarts
subsistent. Le taux de chômage des États-Unis peut atteindre 7 % et celui de la
France 12 %. Comment expliquer la persistance d'écarts aussi importants ? De
nombreux analystes incriminent les facteurs démographiques. Selon eux, il y aurait
trop de personnes désireuses de travailler (des jeunes, des femmes, des immigrés)
alors que le nombre d'emplois offerts stagne et que l'âge de la retraite recule. Nous
verrons au chapitre suivant que cette thèse ne repose sur aucune base solide. Au
contraire, ce sont les pays industrialisés où l'accroissement de la population active
est le plus soutenu qui ont les taux de chômage les plus faibles.
disponible pour prendre un emploi dans un délai de deux semaines; avoir entrepris des
démarches spécifiques pour trouver un emploi au cours des quatre semaines précédant la
semaine de référence. Les notions de « sans emploi », de « disponibilité » et de « démarches
spécifiques» peuvent être interprétées de manière plus ou moins restrictive et aboutir à des
statistiques de chômage différentes. Les problèmes concrets posés par ces interprétations et
les procédures d'harmonisation internationale sont discutés en détail dans l'article d'Olivier
Chardon et Dominique Goux, « La nouvelle définition européenne du chômage BIT »,
Economie et statistique, n° 362, juillet 2003, p. 67-83.
51
9. Le coût de la vie
9.1.1 Définition
- l’IPC est un indicateur qui mesure l’évolution du coût des BS achetés par un
ménage typique
- son calcul a pour but de comparer le coût de la vie, et donc le pouvoir d’achat des
ménages dans le temps
- si l’IPC , alors il faut disposer de plus d’€ pour avoir le même pouvoir d’achat
9.1.2 Calcul13
- étape 1 : déterminer la composition d’un panier de BS représentatifs pour l’année
de référence
on choisit une année de référence t0, dite année de base (ex : t0 = 2000)
le panier est constitué de l’ensemble des BS les plus importants pour les
ménages typiques, c-à-d choisis dans la moyenne. On exclut les cas extrêmes
(ex : milliardaires, SDF).
en pratique, le panier contient plusieurs milliers de BS
les BS ont un poids différent dans le panier selon leur importance dans la
consommation des ménages
- étape 2 : trouver les séries de prix des BS du panier pour toutes les années pour
lesquelles on veut calculer l’IPC
- étape 3 : calculer le coût du panier pour chaque année t
soit t l’indice de temps (en années). t0 = 0 (pour 2000) désigne l’année de base
et t = 1,2,3,4,5 (pour 2001,…, 2005) indique les années ultérieures.
on prend l’exemple d’un panier à 3 biens : abricots (a), bananes (b), cerises (c)
on observe :
► les quantités consommées de chaque BS en t = 0 : Ca0, Cb0, Cc0
► les prix des différents biens pour toutes les périodes t : pat, pbt, pct (t = 0,1,…, 5)
Le coût du panier à la date t (CPt ) se calcule comme suit :
CPt = pat Ca0 + pbt Cb0 + pct Cc0
remarque importante : la composition du panier en terme de BS étant fixe, il
en découle que CPt varie au cours du temps en fonction des prix des BS
contenus dans le panier, et non en fonction de la composition du panier ! C’est
précisément le but recherché : un indicateur du coût de la vie ne doit varier
qu’en fonction des prix.
- étape 4 : calculer l’IPC
formule :
IPCt = CPt / CP0 ( 100 si en %)
où CP0 est le coût du panier en t = 0 (année de base)
remarque : plus un BS a un poids important dans le panier, plus la variation de
son prix affecte l’IPC
13
Réalisé en France par l’INSEE.
52
14C-à-d les loyers versés par les locataires mais aussi les « loyers imputés » que les
propriétaires auraient à payer s’ils étaient locataires du logement qu’ils habitent.
53
9.3.1 Préliminaires
- question : comment comparer dans le temps le pouvoir d’achat d’un ménage entre
2000 et 2012 ?
- il ne suffit pas de comparer les revenus de ce ménage (exprimés en €) entre ces 2
dates, car entretemps, le niveau général des prix (mesuré par l’IPC) a . Pour
répondre à la question, il faut donc tenir compte de la variation des revenus et de
celle de l’IPC. Pour ce faire, on introduit la distinction entre revenu nominal et revenu
réel.
- Plus généralement, les économistes distinguent entre une quantité exprimée en
terme nominal (ex : le salaire nominal tel qu’il apparait sur la fiche de paie) et cette
même quantité exprimée en terme réel (ex : le salaire réel). La quantité réelle est
obtenue de la quantité nominale après correction pour tenir compte de l’évolution des
prix.
- exemple : Alfred a vu son salaire (égal à son revenu) nominal de 2% entre 2010
et 2011, mais entretemps, le coût de la vie (tel que mesuré par l’IPC) a de 3%.
Comment a évolué son salaire réel ? La formule précédente conduit à ∆rRr ≈ 2% -
3% = -1%. A cause de l’inflation, le pouvoir d’achat d’Alfred a (à peu près) de 1%.
15
Remarque : l’approximation (indiquée par le symbole « ≈ ») n’est bonne que si les
variations sont petites (quelques %). En cas de fortes variations, il faut utiliser la formule
exacte.
55
le ti réel rrt est défini comme la variation relative du placement en terme réel.
En conséquence de (4), le ti réel vaut :
9.3.4 Indexation
- l’indexation est un mécanisme destiné à maintenir le pouvoir d’achat des revenus,
autrement dit à les protéger contre la hausse des prix
- principe de calcul : le revenu nominal de la période t est obtenu à partir de celui de
t-1 en tenant compte de l’inflation
Cette formule garantit le maintien du pouvoir d’achat entre les périodes t et t+1 ; en
effet, en vertu de la formule (2) du point 9.3.2, on vérifie que le revenu réel est
préservé :
Rrt+1 = Rnt+1 / IPCt+1 = Rnt / IPCt = Rrt
- les intérêts générés par certains placements financiers peuvent également être
protégés contre l’inflation, en ajustant l’évolution du ti nominal sur celle de l’inflation.