S4 La Psychose PDF
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Pr L.CHERQAOUI
IV- La psychose
1- Nosographie de la psychose
Etymologiquement, le mot « psychose » est formé de psyché, esprit, âme, et du suffixe
nominal -ose soit « anomalie de l'esprit ».
Dès 1816, Esquirol sépare nettement, pour la première fois la démence (futur psychose) de
l’imbécilité et de l’idiotie. Kraeplin dans sa classification de 1906, distingue comme entités
bien différenciées la « démence précoce » avec ses différentes formes « la paranoia »,
la « folie maniaco-dépressive », les « névroses psychogènes », etc. En 1911, Bleuler crée le
terme de « schizophrènie » pour souligner la scission des processus mentaux qui s’y révèle. .
A partir de Freud, la psychanalyse influencera considérablement la classification par les
lumières qu’elle jette sur l’organisation psychique et ses troubles.
2- Définition
Les psychoses regroupent tous les troubles psychiques ayant pour origine un conflit
inconscient où le sujet est en rupture avec la réalité. Le sujet n'a pas conscience de ses
troubles et/ ou de ses comportements inadaptés voire dangereux. En général ce terme désigne
des états psychiques caractérisés par l’altération profonde de la conscience du sujet. Il peut
s’agir par exemple de troubles graves de l’identité, de perturbations dans le rapport avec la
réalité. La lucidité du trouble chez le névrosé n’est pas retrouvée chez le psychotique : le
fonctionnement inconscient prend le dessus.
La personne psychotique n’est pas aussi consciente de son trouble mais elle souffre
énormément et sa souffrance n’a pour elle pas de sens. La décompensation est ici signée par la
perte de contact avec la réalité, par exemple par le biais d’hallucinations visuelles ou du délire
ce qui ne permet plus la communication (je vous ai présenté une définition basique de la
1
psychose, l’objectif est d’avoir une idée générale de cette pathologie, néamoins il existe
plusieurs théories explicatives, chacune d’elle se base sur une et/ou des dimensions humaines
spécifiques : biologique, neurologique, familiale, sociale , comportementale, cognitive,
psychodynamique)
Les idées délirantes sont des croyances fermes et erronées qui ne changent pas même en
présence de preuves que la très grande majorité considère comme des preuves évidentes et
incontestables de la fausseté de cette croyance. Ces croyances sont souvent liées à un thème:
de persécution (c.-à-d. être harcelé par une organisation), de références (c.-à-d. quelqu’un
essaie de leur envoyer un message via la télévision), de grandiosité (c.-à-d. elles ont une
capacité ou un pouvoir unique), érotomaniaque (c.-à-d. croire faussement que quelqu’un
d’autre est en amour avec soi) ou autre.
Les hallucinations sont des expériences sensorielles très réalistes qui se produisent
involontairement et en l’absence de stimuli externes. Les hallucinations sont le plus souvent
auditives (c.-à-d. entendre des voix), mais elles peuvent être visuelles, somatiques, olfactives,
gustatives ou psychiques.
Le discours désorganisé se manifeste par des phrases incohérentes, le passage rapide d’un
sujet à un autre, des propos inintelligibles, un discours décousu et l’élaboration de réponses
non liées aux questions posées.
4- Fonctionnement psychique
Freud a créé la psychanalyse à partir de sa clinique avec des hystériques mais il s’aventure
aussi dans d’autres champs, comme celui des psychoses. Il s’interroge et développe quelques
théories. Il croyait que l’analyse des questions de la psychose aiderait à mieux comprendre le
fonctionnement psychique.Dans les psychoses, le Moi prend le parti du ça pour détruire la
2
réalité du Surmoi.Il la remplacera par une néo-réalité soit le délire.Ce délire sera bâti sur les
exigences du ça.
Les mécanismes de l’inconscient participent à la mise en forme des symptômes, autrement dit
le délire est façonné par des mécanismes tels que la projection, le clivage ou le déni. Par
exemple, le paranoïaque projette à l’extérieur son monde intérieur horrible et développe une
persécution. Le symptôme est une tentative de gérer un rapport à la réalité devenu impossible.
Quand on vit sous le primat de l’inconscient, du principe de plaisir, la réalité devient
impossible à vivre : on reconstruit donc une néoréalité plus conforme au monde intérieur.
N’importe quelle structure psychique a des difficultés à régler son désir et les limites
imposées par la réalité. Chaque organisation psychique aura sa propre manière de faire, face à
cela, sa propre « défense » : « pour la névrose comme pour la psychose, la question qui vient
à se poser n’est pas seulement (celle) de la perte de la réalité, mais aussi celle d’un substitut
de la réalité ».
La névrose remplace la réalité par ses fantasmes et son symptôme, la psychose par une néo-
réalité qu’est le délire. Alors pour Freud, chaque forme d’organisation psychique aurait un
mode de défense spécifique. Chez les névrosés, il y aura un refoulement des forces
pulsionnelles (du Ça). Le refoulement dans les névroses obsessessionelle est caractérisé par
un déplacement des représentations, des idées et des sentiments hostiles envers les autres ou
les objets. Chez les névrosés hystériques, il y a un effacement des idées, des sentiments et
représentations, afin de les étouffer, de les « taire ». Mais, comme dans tout processus de
défense, il y a des failles et les idées et sentiments reviennent dans les symptômes (comme les
symptômes corporels). Les symptômes des névrotiques sont les « dérivés » du refoulé. Les
formations symptomatiques sont les moyens qu’il a trouvés pour avoir accès à la conscience :
« la névrose serait le résultat d’un conflit entre le Moi et le Ça, la psychose, elle, l’issue
analogue d’un trouble équivalent entre le Moi et le monde extérieur »1
Chez les névrosés, la scène, la situation angoissante, pour laquelle le sujet ne dispose pas de
moyens internes (représentations) pour faire face, est éloignée de la conscience par le
mécanisme de refoulement, alors que chez les psychotiques, cela se passe autrement. Au lieu
de cacher cela et de le refouler, il y aurait un refus de la réalité qui n’entre même pas dans les
représentations psychiques du sujet psychotique : le sujet ne veut rien savoir sur la castration :
Selon Freud, le mécanisme spécifique des psychoses est un rejet plus radical d’une réalité
intolérable pour le sujet. C'est un mécanisme distinct de celui utilisé par les névroses, le
refoulement :
« Il existe pourtant une espèce beaucoup plus énergique et efficace de défense. Elle consiste
en ceci que le Moi rejette la représentation insupportable en même temps que son affect et se
comporte comme si la représentation n’était jamais parvenue au Moi. »
1
FREUD, S., « Les psychonévroses de défense » (1924), in : Névrose, psychose et perversion, Paris : PUF,
2008, p. 300 et 301.
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Dans son article La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose, Freud affirme qu’il
y a une perte de la réalité tant dans la névrose que dans la psychose mais cela se passe
différemment dans chacune de ces deux organisations psychiques. Dans les organisations
psychotiques, selon Freud, il y aurait d’abord une coupure du Moi avec la réalité extérieure
qui serait comblée par « son désir » du Ça. Dans un deuxième temps, le sujet psychotique
reconstituerait sa « perte de la réalité » par la constitution d’un délire. Le délire serait pour
Freud une tentative de reconstruire ce monde, non symbolisé à cause de son
désinvestissement affectif et son mécanisme de défense envers cette réalité insupportable pour
le sujet et déniée par lui : « Dans le cas de la psychose ; il y a là aussi deux temps, dont le
second comporte le caractère de la réparation ,Le second temps de la psychose vise bien lui
aussi à compenser la perte de la réalité ; mais ce n’est pas au prix d’une restriction du ça, à la
manière dont, dans la névrose, c’était au frais de la relation au réel ; la psychose emprunte une
voie plus autocratique, elle crée une nouvelle réalité à laquelle, à la différence de celle qu’est
abandonnée, on ne se heurte pas. » (c’est toujours la même idée du rejet de la réalité)
« Nous sommes familiarisés avec la conception selon laquelle la pathologie peut, en les
agrandissant et en les grossissant, attirer notre attention sur des conditions normales qui,
autrement, nous auraient échappé. Là où elle nous montre une cassure ou une fissure, il peut y
avoir, normalement une articulation. Si nous jetons un cristal par terre, il se brise, mais pas
n’importe comment, il se brise selon les directions de clivage en des morceaux dont la
délimitation, bien qu’invisible, était cependant déterminée à l’avance par la structure du
cristal. Des structures fêlées et fissurées de ce genre, c’est aussi ce que sont les malades
mentaux. »
5- Conclusion
On peut reconnaitre l’existence des critères distinctifs suivants :
- La gravité des troubles : Ils vont souvent entrainer des déficiences importantes,
conduisant, quand elles sont définitives à un véritable handicap (dans le sens
invalidité).
- L’absence de la conscience de la morbidité des troubles : c’est ainsi qu’un délirant
croit à la réalité de son délire et n’admet pas qu’il s’agit d’une maladie nécessitant un
traitement.
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- L’étrangeté et la bizarrerie des troubles : elles sont ressenties par l’entourage avec un
sentiment de malaise, dans la mesure où il n’est pas possible de leur donner une
explication ou d’en discuter véritablement avec le psychotique.
- La difficulté de la communication, voire l’incommunicabilité totale du psychotique :
celui-ci fuit souvent le contact, s’enfermant dans son silence et ses réticences et utilise
parfois un langage incompréhensible rempli de néologismes.
- Le repli sur soi qui s’accompagne d’une véritable rupture avec la réalité extérieure,
qui n’est plus reconnue comme telle, et qui peut même être déniée en tout ou en partie
et remplacée par une néo-réalité personnelle à l’individu connue de lui seull,
incommunicable à autrui.
Névrose Psychose
Le Moi est au service de la Le Moi se soustrait à la
Première phase réalité refoule les motions réalité
pulsionelles du ça
Le refoulement est mis en La réalité est perdue. Il y a
échec. Cela crée la névrose création d’une néo-réalité
Deuxième phase par un processus de dans le délire et
dédomagenemt de la l’hallucination
réalité
Lectures recommandées
Henri Ey, Hallucinations et Délire, Alcan (réimpr. 2000) (1re éd. 1934) (réédition
L'Harmattan