Epictète

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Explication du texte d'Epictète (bonheur / liberté)

thème : bonheur et liberté

thèse : vivre en faisant la distinction entre ce qui dépend de nous et ce


qui ne dépend pas de nous produit nous rend libres et heureux ; au
contraire, vivre dans leur confusion nous prive de liberté et nous
précipite dans le malheur.

problème : comment être libre et heureux, alors que nous nous sommes
sans cesse contraints et exposés à la frustration ?

doxa critiquée : être libre et heureux, pense-t-on généralement, c'est


faire et obtenir tout ce que l'on veut, ce que l'on désire. Or force est de
constater que nos désirs sont rarement entièrement satisfaits, que nous
n'obtenons pas toujours ce que nous souhaitons.

plan détaillé :

I. La distinction entre ce qui dépend de nous et ce qui ne


dépend pas de nous (début - "étranger")

Mots clés : 1) ce qui dépend de nous : pensée, impulsion, aversion, tout


ce en quoi nous agissons ; cela nous est propre / 2) ce qui ne dépend
pas de nous : argent, corps, réputation, charges publiques, tout ce en
quoi ce n'est pas nous qui agissons; cela nous est étranger

⇒ ce qui dépend de nous relève de l'intériorité, de la pensée, du


jugement, de la prise d'initiative ; ce qui ne dépend pas de nous de
l'extériorité, des circonstances qui nous échappent

⇒ ce qui dépend de nous est libre, ce qui ne dépend pas de nous est
esclave ; donc on comprend que la vraie liberté, pour les stoïciens, n'est

1
pas une liberté physique (liberté du corps, de déplacement), mais réside
dans le contrôle de son jugement, dans sa volonté et ses émotions.
Exemple du taureau de Phalaris : on peut jeter mon corps en prison,
mais on ne peut pas me forcer à vouloir y entrer

⇒ ce qui dépend de nous nous est propre : cela nous définit, nous
appartient ; ce qui ne dépend pas de nous nous est étranger, ne nous
appartient pas. Par exemple, mon argent, mon corps ne m'appartiennent
pas (à la différence de mon jugement sur mon corps ou mon argent), ce
qui peut sembler paradoxal.

Arguments : distinction conceptuelle, pour dissiper une confusion ; nous


avons tendance à considérer comme ce qui nous est propre ce qui, au
contraire, ne dépend pas de nous (la santé, l'argent, etc., bref les objets
habituels du bonheur)

repères : ce qui dépend de nous : ce qui est relatif à nous ; ce qui ne


dépend pas de nous : ce qui est détaché de nous, ce qui existe dans
l'absolu

OU :

nous exerçons un contrôle absolu sur ce qui dépend de nous ; au


contraire, nous n'exerçons qu'un contrôle relatif sur ce qui ne dépend
pas de nous (d'où l'absence de liberté, puisqu'il est présupposé que
celle-ci est absolue, entière)

commentaire : 1) Epictète VS Machiavel, lequel pense que l'on peut


exercer une action, même indirecte, sur les circonstances extérieures à
nous (la fortune) ; 2) stoïcisme proche du fatalisme ? c'est un
renoncement beaucoup plus actif que celui prôné par le fatalisme, qui
est une résignation passive

objections : 1) le corps, la santé ne dépendent-ils vraiment pas de ce


que l'on fait ? l'importance de la diététique et de l'hygiène de vie chez
Epicure. 2) Est-il certain que notre volonté et notre pensée nous soient

2
propres, nous appartiennent ? Ne peuvent-elles être influencées à notre
insu (manipulation des esprits, cf. Milgram) ?

II. Conséquences de la distinction

Arguments : Epictète opère une déduction à partir de cette distinction :


si on fait la distinction, on sera libre et heureux ; si on ne la fait pas, on
sera malheureux et esclave

Mots clés : "contrarié", "chagriné", etc. ⇒ vivre dans la confusion, c'est


vivre dans le malheur, et s'exposer à la haine du monde, s'en séparer
("tu t'en prendras aux dieux et aux hommes") ; "contraindre", "barrer la
route" : la confusion produit aussi de la servitude

"personne ne pourra te contraindre" ou "te faire de mal", "tu ne t'en


prendras à personne", etc. ⇒ la distinction produit du bonheur et une
certaine ouverture au monde (physique et social). On accueille les
évènements pour ce qu'ils sont et on fait du mieux possible avec eux, au
lieu de se lamenter qu'ils soient contraires à ce que l'on désire. On
apprend à accepter que l'on puisse être malade, ruiné, ou perdre un être
cher : c'est un art de vivre exigeant, qui demande un véritable effort.

Repères : 1) faire la distinction, apprendre à renoncer activement à ce


qui nous est étranger nous procure un bonheur et une liberté absolus,
qui ne dépendent pas des circonstances pour exister (je peux rester libre
et heureux dans la maladie, l'exil, etc.). 2) Celui qui vit selon cette
distinction épouse l'ordre du monde, il est immanent à la vie du monde ;
celui qui ne la fait pas, au contraire, s'en sépare, et est condamné à faire
l'expérience du malheur. 3) On remarque que toute la deuxième partie
du texte est au futur, comme si les conséquences de la mise en oeuvre
(ou non) de la distinction étaient inévitables : le stoïcisme est bien une
pensée de la nécessité (rien n'arrive sans raison, par hasard, dans le
monde; il n'y a aucune contingence, tout est nécessaire).

Commentaire : Stoïcisme s'inscrit dans l'idée antique du bonheur


comme fruit d'un art de vivre (Socrate, épicurisme) ; écho du stoïcisme

3
dans l'amor fati de Nietzsche, à ceci près que ce dernier insiste
davantage que les stoïciens sur le fait de vouloir les moments de
malheur ou d'ennui (comme occasions de mettre à l'épreuve sa vitalité).

Objections : un tel idéal de bonheur parfait et absolu n'est-il pas une


illusion ? n'est-il accessible qu'à quelques sages ? pessimisme
philosophique (Pascal et les tourments de la tranquillité d'âme)

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