Ferstugiere, Sainte Thecle, Saints Come Et Damien, Saints Cyr Et Jean, Saint Georges
Ferstugiere, Sainte Thecle, Saints Come Et Damien, Saints Cyr Et Jean, Saint Georges
Ferstugiere, Sainte Thecle, Saints Come Et Damien, Saints Cyr Et Jean, Saint Georges
SAINTE 1'HECLE
SAINTS COME ET DAMIEN
SAINTS CYR ET JEAN (ExTRAITs)
SAINT GEORGES
TRADUITS E1' ANNOTES
PAR
A.-J. FESTUGIERE, o. P.
MElIlDRE DE L'INSTITUT
AVERTISSEMENT
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Beaucoup de savants connaissent, et sans doute une partie
aussi du grand public, los recueils latins des miracles des saints (1),
car ils ont pour auteurs des hommes illustres, en Afrique saint
Augustin, en Gaule Gregoire de Tours. Les miracles relates
par saint Augustin so lisent en l'un de ses ouvrages les plus ce-
lebres, la Cite de Dieu (413-426), livre XXII, chapitre 8 : une
premiere serie concerne des miracles des saints Gervais ou
Protais, ou d'autres martyrs. Une seconde serie, la plus interes-
Bante, se rappo:rte a des faveurs obtenues par l'intercession de
saint Etienne : la decouverte de son corps a Caphar Gamala,
en 415, avait eu un grand retentissement. Plusieurs de ses re-
ligues avaient ete distribuees en des lieux divers d'Afrique,
en des lioux voisins d'Hippone et a Hippone meme. Elles pro-
duisirent un grand nombre de faits extraordinaires, que saint
Augustin voulut faire consigner en des sortes de proces-verbaux
ou libelli. Ces documents si import ants sont d'un extreme
interet et ont ete souvent etudies. Moins celebres evidemment
que la Cite de Dien, les livres II-VI des M iraculorum Libri de
Gregoire de Tours (540-594), Ie livre II cons acre aux miracles
accomplis sur la tombe de saint Julien it Brioude, les livres III-
VI aux miracles accomplis par saint Martin et dans sa basi-
Ii que a Tours et dans d'autres lieux de son culte en Touraine,
n'en ont pas moins joui d'une grande notoriete, du moins en
France. Au xvn e siecle, Dom Ruinart en donna un tres bon
texte pour l'epoque (1699), avec des notes precieuses sur des
(1) Disons d'emblce qu'il s'agH uniquement en ces recueils, qu'ils soient grecs
ou latins, de miracles accomplis aprils la mort, en dependance de sanctuaires ou
© Editions A. et J. Pi. <:es saints reposent, ou tlu moins sont crus reposer, qui sont donc des Heux de peIe-
card, Paris, 1971. rinage, dont Jes collectiOns de Miracula constituent les annales.
8 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES AVImnSSEJlIENT 9
edifices disparus depuis lors it la Revolution. Sur ce texte, parfois sur une longue duree de temps : au Cosmidion, du
VIe siecle de notre ere (peut-etre avant) ii 10. fin du xm e siecle,
H.-L. Bordier fit au XIX e siecle (1857-1864) une traduction
pour Ia Societe de l'Histoire de France (vol. 88, 103, 114, 125). apres l'occupation latine de Byzance. Les Miracles de saint
Epuisee depuis longtemps, donc lue, cette traduction, qu'ac- Georges, qui se rattachent ii plusieurs eglises (Lydda, Paphla-
compagnait Ie texte de Ruinart, n'a ete reproduite photogra- gonie), offrent les details les plus curieux sur la domination
phiquement qu'en 1965, par les soins d'une maison d'edition des Surrasins en Palestine et sur leurs incursions, ainsi que
americaine. Depuis lors, tous les savants connaissent la grande celles des Bulgares, dans l'Asie Mineure. Outre cela, ces recueils
edition critique des Monllmenta Germaniae Historica (1884 /1885). donnent des indications tres intcressantes sur les moours du
Beaucoup moins repandus sont les recueils grecs de miracles. temps: restes de magie (1) (beaucoup dans les Miracles de Cyr
Plusieurs raisons expliquent cette ignorance. On lit moins, et Jean), restes de pratiques palennes - incubation (Come et Da-
on lit de moins en moins Ie grec. Et meme si on Ie lit, qui se mien, Cyr et Jean), jeux du cirque (Come et Damien) (2) -
soucierait de preteI' attention it des textes grecs necessairement restes de croyances paiennes; quand il s'agit de miracles de
de basse epoque, dout les auteurs, ou bien sont anonymes guerison (Come et Damien, Cyr et Jean), beaucoup de rensei-
(Miracles de Come et Damien, Miracles de saint Georges) ou gnements sur les maladies elles-memes et sur Ies remedes', en-
bien sont loin d'approcher 10. reputation de saint Aug~stin fin on voit paraitre la vie de chaque jour, la vie surtout des
ou de Gregoire de Tours? Qui a ouvert jamais dans 10. Patro- pauvres gens, et cela peut toucher ce commun fond de sympa-
logie grecque de Migne, Ie tome 85 (Basile de SOleucie : sainte thie humaine qui ne disparait pas, on l'espere, meme en 1'his-
Thecle) , Ie tome 87 ter (Sophronius de Jerusalem : Cyr et torien Ie plus abstrait.
Jean) (1)? Ajoutons que quelques-unes de ces editions sont De ces recueils grecs de miracles, on n 'a traduit ici qu'un
opui~ees et fort rares : ainsi pour les Miracles de Come et Damien, choix, mais qui illustre, ce semble, 10. diversite de toute 10. serie.
pubhes pal' L. Deubner (1907), dans un ouvrage presque introu- Certains saints manifestent leur pouvoir, non pas seulement
vable. Ou bien elles sont comme perdues dans de vastes col- it l'occasion de guerisons, mais en une grande variete de cir-
lections d'ecrivains classiques : qui aurait l'idee de chercher constances : ainsi sainte Thecle, saint Theodore d'Euchaita,
dans la celebre collection Teubner, Ie tout petit volume consacr~ saint Menus du desert Mareotide, saint Georges de Cappadoce.
en 1913 par J.-B. Aufhauser aux Miracllla S. Georgii? On a choisi ici la premiere et Ie demier.
Cependant ces recueils grecs ne Ie cedent nullement en inte- D'autres saints sont plus specialement a£fectes aux maladies:
ret aux recueils latins. Leur origine est la meme. Ces recits Come et Damien, Cyr et Jean, Art6mius, dont les reliques
ont ete composes a Ia gloire d'un grand sanctuaire : c'est sur etaient conservees it l'eglise Saint- Jean-Baptiste de Constan-
dans Ie cas de Meriamlik (Cyrrhestique) pour sainte Thecle tinople (3), Therapon, dont Byzance egalement gardait Ie
du Cosmidion (Constantinople) pour Come et Damien d~
M~nouthis (pros de Canope) pour Cyr et Jean; cela me p~rait
(1) Ou do co qu'on croyait ctre do la magic: couramment, en M. Gyr. et Jo., une
maladio cst atLrihueo a de la TCEptEPY[CX.
tres probable dans Ie cas de Lydda (Palestine) et de cel.tains (?) J e dis prn tiquos palennes, parce quo J. Chrysostome condamnait cos jeux
comme LeIs : mais chacun sait qu'a Byzance, les courses de l'hippodrome avaient
s~ncLuair~s paphlagoniens. pour saint Georges. Ainsi, tout quasi rang de ceromonio officielle, cf. Const. Porphyrog., L. des ceremonies, II,
d abord, 11s nous font connaitre l'bistoire de ces sanctuaires , eh. 77-82.
(3) Cr. Janin, G60gr. eccles. de l'Emp. byz. (Paris, 1953), 58. Sur les Miracles,
(I) Cf. H. G. Bccl{, Kirche ... im Byzanlinischen Reich (Munich, 1959), 458. Delehaye, A. B., 43 (1925), 32-38.
I
corps (1). Dans cette categorie, les recits les plus originaux sont
ceux de Come et Damien, qu'on a choisis. On y a ajoute des
extraits des miracles de Cyr et Jean.
« Elle s'endormit en paix », disaient les Actes. « Nullement » Leras sur In. collino, et, au milieu, un grand mur qui enclOt l'eglise
re ~rque Basile, « ainsi que l'atteste Ie bruit tres repandu et plus'
't ou est 10 martyrium; ce martyrium est fort beau. Le mur a ete
vrm », €xo~[-t~01), we; /) 1t0'AUe; xed eXA1)O€O'Te:poe; Myoe;, ouSCGfLwC; mis lil pour garder l'eglise contre les Isauriens, car ce sont de
(560 A 3 s.). « Elle s'enfon<;a vivante et penetra sous terre, Dieu tres mechantes gons et qui pilJent souvent; ils pourraient
ayant ainsi decide que la terre pour elle s'ouvrit et se fendU au bien tonter quelque mauvais coup sur Ie monastere qui dessert
lieu meme ou l'on a fixe la divine et sainte table de la celebra~ion I'eglise. Arrivee lit au nom de Dieu, apres avoir fait une priere
liturgique, au centre d'un peristyle circulaire de colonnes d'ar- au martyrium et avoir lu de plus tous les aetes de sainte Thecle,
gent (1). » Telle est donc la tradition il Seleucie VOl'S 450, et ello j'ai rendu d'infinies actions do graces au Christ noLro Dieu qui
remonte. plus haut si la premiere eglise-martyrium, mentionnee a daigne, si indigne et depourvue de merite que jo sois, combler
p.ar ~asIle, est du lV e siecle. Or, outre les deux chapiteaux co- en tout mes desil:'s. Alors, etant restee la doux jours, ayant vu
rmthrens decouverts par Guyer (2), Ie temoignage d'Etherie, les saints moines eL apotactitos, tant hommes que femmes,
dont On convient aujourd'hui qu'il date de Ia fin du lV e siecle , qui y etaiont, ayant fait rna pl'iere ot la communion, je suis re-
p.r~uve qu'il faut bien remonter jusqu'il l'epoque post-constan- venue a Tarse rotrouver rna route ... » II resulte de ee texte que,
~m~enno. Je reproduis ici Ie passago do la Peregrinatio qui nous vel'S 393/394 (1), il oxistait a Meriamlik non seuloment l'eglise-
mtoresse (23, 2-6), en empruntant l'excellente traduction de martyrium, mais au moins un monastere d'hommes pour la
Mlle Petre (3) : « Comme de lil (do Seloucie) il l'eO"lise de SainLe- desservir et un ou plusieurs monasteres de femmes. Tout cela
Thecle qui se trouve plus loin que la ville su; une hautour n'a pas ete construit on un jour, tout cela suppose uno assez
. "
~~IS formant plateau, il y avait environ quinze cents pas, longue installation.
J'm prMere poursuivre rna route jusque-Ia, pour y fa ire la halLo Revenons maintenant au 1tOAUe; Abyoe; de Basile, a la disparition
que j'avais decide do fairo. Aupres du sanctuaire, il n 'y a pas do Thecle dans la grotte. Elle est attestee encore par toute uno
autre chose que des monasteres innombrables d'hommes et serie de manuscriLs dos Actes. Tout d'abord, selon les manus-
de femmes. J'ai retrouve la une do mes moilleures amies, il qui crits M (2 e famille) ot ABC (3 e famillo), Thecle a vecu dans une
tout Ie monde en Orient rendait temoignage pour sa vie: c'ost cavome, ABC ajoutant : « elle y vecut soixante-douze ans, se
une sainte diaconesse du nom de Marthana que j'avais connue nourrissanL d'herbes et buvant de l'eau ». Ensuite, ces memes
il Jerusalem ou elle etait montee pour prier; elle dirigeait des manuscrits, et G de Ia 2 e famille, parlent de la disparition sous
~~nasteres d'apotactites ou vierges. Quand elle me vit, quelle terre, ot ce miracle est destine lit encore a sauveI' la vierge d'une
Jore POUl:' elle et pour moi I Comment pourrais-je vous la decrire? aventuro picaresque. Je traduis ici, l'un apres l'autre, los textes
Mais pour en revenir a mon sujet, il y a lit boaucoup de monas- do ABC ot do G (270-272 Lipsius) :
ABC: (4.4) « Quelques-uns de la ville, qui etaient parens, medo-
(1) B~sile de Sel~ucie, etant mort c. ['59, n'a pas dft voir la grande basilique de cins de metier (2), envoyerent vel'S elle ,de jeunes insolents pour
Merwmhk, cons~rUlte dans I~ se?onde m~itie du VO siecle, mais la premiere eglise,
datan! du IV· sIecle, dont I abslde devalt se trollver au-dessus de I'abside de la la violor. lIs disaient en oiret : « Elle sert Artemis comme etant
grotte, la Ae:~TOUPY~xo~ TpCm€~OC (c'est·a·dire J'autel) etant juste placee au-dessus viorgo, et de Iil viont qU'elle a pouvoir pour les guerisons. » Mais
du rocher en~rouv~rt pour 'l'!l~cle. Cf. E. Herzfeld·S. Guyer, Meriamlik und Korylcos,
ap .. Mon. ASlae JY!I1I. Ant. (CIte MAMA) II (Manchester, 1930), 1-89. Sur la premiere par la providence de Diou olIo entra vivante dans Ie rocher et
eghsc, 5-8. Su~ la gra~de bnsil!que, 8·38. Sur la grotte sacree (premiers amenage- s'onfon<;a sous terro. Et elle alIa it Rome voir Paul - je revien-
menls au I~C sIecle, pUIS :emall1e~ents au vel, 38- 1,6. Sur Ie rapport entre Tpocm~~CG
ot rocher, tb. ? : « Was dw Lage dleser tl.ltesten 'rheklakirche anbetrillt so vermute drai sur ce point - et elle 10 trouva mort. Ayant demeure la
ich, dass sie sich tiber der ... IIohlenkirche erhob und in diesom Fall~ dtirfen wir assoz peu do temps, olle s'y endormit en un doux sommeil.
wohl annehmen, dass die Apsiden der unteren und der oberen Kircho tiber einander
lagen. » Le texte de Basile fait de cette hypothilse une certitude.
(2) MAllIA, II, 6 et fig. 3. (1) Altancr, Patrologie 3 , 1951, 1 ~)r,.
(3) Sources chretiennes, 19'>8, 182-185. Le texle est celui de Geyer. (2) 'l'hecle leur faisait concurrence par sos guerisons, 1t&:fL1tOAAOC Se !&:[-tOCTCG Te:At-
O'ocO''X 2?L 1 .
AVEIl'rISSEMEN'l' 17
16 COLLECTIONS GDECQUES DE MIRACLES
beaucoup de yin, donnons-Ieur beaucoup d'or et disons-Ieur :
Elle est enterree a environ deux ou trois stades du tombeau de Si vous reussissez it Ia violeI' eL la souiHer, nous vous donnerons
son maitre Paul. encore d'auLres sommes. »
(45) Elle fut jetee au feu it I'age de dix-sept ans, aux betes it Les m6decins se disaient donc enLre eux : « S'ils reussissent
dix-huit ans, elle pratiqua l'ascese dans la caverne soixante- it Ia souiIler, ni les dieux ni Artemis ne l'ecouteront plus dans
douze ans, comme j'ai dit, en sorte que Ie total de sa vie fut de Ie cas des malades. » Ils firent donc ainsi. Ces vauriens vont a
quatre-vingt dix ans. Apres avoir accompli une in finite de la montagne, et, so tenant comme des lions pres de la cavern?,
guerisons elIe repose au lieu des saints, s'etant endol'mie Ie ils frapperont it Ia porte. La sainte martyre Thecla leur OUVl'lt
24 septembre dans Ie Christ-Jesus notre Seigneur, a qui gloire, la porte, confiante dans Ie Diou auquel elle croyait : do fait elIe
etc. » connaissait it l'avance leur ruse. Elle leur dit : « Que voulez-vous,
G : « Une nuee lumineuse la guidait (depuis Iconium). Etant mos enfan ts? » lIs diront : « Qui est ici celIe qu'on nomme The-
entree it Seleucie, eUe s'en eloigna it la distance d'un stade. cIa? » Elle demanda : « Que lui voulez-vous? » Ils repondirent :
ElIe craignait les habitants parce qu'ils adoraient les idoles. « Nous voulons coucher avec elle. » La bienheureuse Thecla leur
Quelqu'un la guida vel'S la montagne dite du Kalamon ou du diL : « J e ne suis qu'une humble vieille, mais la servante de
Rhodeon. Ayant trouve lit une grotte, elle y entra. Elle demeura mon Seigneur Jesus-Christ. Et queIque violence que vous veuil-
Iii. plusieurs annees, et elIe eut iI. soutenir beaucoup de penibles liez me faire, vous no Ie pourrez pas. » Ils lui dirent : « II ne se
tenta.tions de la part du diable, mais elle les SUppol'ta vaillam- pout que nous ne fassions avec toi ce que nous ,:oulons. » S~r
ment avec l'aide du Christ. Certaines des femmes nobles, ayant ce, ils la saisil'ent fo~'tement et chercherent it la vlOlenter. Mars
entendu parler de la vierge Thecla, vinrent it ene et elIes ap- eIle leur diL gentiment : « Attendez, mes enfants, et vous verrez
prenaient d'eUe 1a. parole de Dieu : beaucoup d'entre olles 1'0- la gloire de Dieu. » Alors, tandis qu'ils la tenaient, elle leva les
noncerent a.u monde et menaient avec elIe la vie ascetique. yeux vel'S Ie ciel ct. dit : « ~ie~ tel'l'ible: sans pareil,. qui ti~es
Un renom de vertu se repandit partout it son sujet et des gue- (floire de tes ennemlS, to! qUI m as sauvee du feu, qm ne m as
risons s'accomplissaient par elle. Toute la ville, donc, et Ie pays ~as livree it Thamyris (it lconium), qui ne m'as pas livree a
avoisinant, ayant connu la chose, ils apportaient leurs malados Alexandre (it Antiocho), qui m'as sauvee des betes, qui m'as
sur la montagne, et ceux-ci, ava.nt meme de s'etre a.pprocMs presel've e dans l'abime (Ie bassin de phoques), qui m'as partou.t
de la porte, quelque maladie qui 1es tint, en Haient aussitot donne ton aide et qui as glorifie ton nom a mon sujet, sauve-mol,
debarrasses, et les demons impurs s'en aUaient en poussant des cette fois-ci encore, de ces libertins, ne Iaisse pas violeI' la vir-
cris. Tous rentraient chez eux en bonne sante (lire uYLd.; : (finite que j'ai gardee jusqu'it ce jour it cause de ton nom, parce
UYL'ij cod.), louant Dieu qui donnait une teUe grace a la viOl'ge ~ue je t'aime, te desire et t'adore, toi Ie Pere, Ie Fils et Ie Saint-
Thecla. Cependa.nt les meuecins de la. ville de Seleucie a.vaient Esprit dans les siecles. Amen. » Et une voix se ~t entendre
eLe reduits a neant, ils a.vaient perdu leur clientele, nul ne du ciel, qui disait : « Ne crains rien, Thecla, rna vrare servante,
s'adressait plus it eux : remplis done de jalousie et d'esprit de je suis avec toi. Tourne les yeux, regarde lit OU il Y a une ouver-
rivalite, ils se demandaient ce qu'ils pourraient bien faire contre ture devant toi, ce sera lit ta demeure eternelle, c'est lit qu'on
la servante du Christ. Le diahle alors leur suggere un vila.in te visitera ('t~'I bd(n{e~L'I S£xn). » Alors la bienheureuse Th~cI~,
projet. Comme ils s'etaient rassembles un jour en conseil, ils ayant regarde attentivement Ie lieu, vit que Ia roche s'~tar~
EO mettent it discute:r ensemble, dis ant : « Cette vierge est consa- ouverte assez pour qu'y passat un corps, eUe fit ce, qm lu~
cree it la grande deesse Artemis. En tout ce qu'elle lui demande, avait ete dit et entra vaillamment dans la roche, ayan~ echap;pe
Artemis l'ecoute parce qU'elle est vierge, et tous 1es dieux aux libertins. Et aussitot la roche se referma, au pomt qu on
l'aiment. Eh bien done, pJ'enons des libertins, enivrons-Ies avoc ~
ECQUES DE MIRACLES INTIWDUCTION 19
18 COLLEcn ONS GIl •
,A d. J' ointure. A Ia vue de co miracle extra- (( Thecla aI'I'iva donc on cotte (557 B) ville, elle s'y plut, et,
'y voymt meme pas e , •
n , ' etaient devenus comme hoI'S deux-memes; ayant gagne 10 sommet de la montagno voisine sise au midi,
ol 'dlnmre Ies gargo ns " , ' '
'1 . nte de Dleu mms s etawnt olle y fixa sa demeure comme Elie sur Ie Carmel, comme Jean-
iIs n 'avaient pu retemr a serva , " "
, ' t d capeline, dont 11s tlrerent a eux un mor- Baptiste dans 10 desert. Elle s'y dresse comme un rompart
saiSIS seulemen e sa " d D' contre 10 demon Sarpedon, qui occupait Ie promontoire sur la
est toujours lit pal' la pel'l1nSSlOn e IOU,
coau et ce morceau , ' 1 ' ; t't db' , mel', ot qui induisait on erreur et detournait de la foi beaucoup
, , d coux qui VOlent Ie sawt lOU, a 1 re e ene-
Pour Ia creance e" ations it vemr , '
pour ceux qm crolCnt un
, d' de gens par ses nombreuses tromperies et ses faux oracles.
diction pour Ies gener ,', .} , Elle s'y dresso comme un rempart contre la deesse guerriore
-SeiO'neur J esus-Chnst » (Ie reste ressembJe
crour pur on N a t re e·
do I' Acropolo, Athena, qui, it la maniere d'un vautour, comme
it ABC). 't lJ;! enfin a un rOCI· , 't anal oguecaVO d ' au t res dit Homcre (fl., VII, 59), occupant peut-etre aujourd'hui encore
Lo manuscrI . (27')) U . 1 d" 'I la fortoresse qui porte son nom, appelle de ses cris aigus les
,. ' loment resumes par LipslUs ...,. n seu e"Ul ,
t. raltS, s~mp .' t ssez obscur de G : « Un morceau de la tissorands ot homoncules bavards qui habitent it l'entour,
qu i eclmre Ie tex , e .l d' resta a . (w~
all dehors ,~7t&[LE~vev E~c!lOZV
' ) pour
seconant sa noiro egide hordee de franges (ll., V, 738), pour
ca eline pour alllS Ire "
p 'I ' ance des VISIteurs. » nous donner lieu do ridiculiser taus ceux qui, a l'instar des
afi'el'ml r , a CJ oy . . reporte it Basile on constate que d'une AthOniens (557 C), habitont lit SUI' l'Acropole et se gIorifient de
S1' ~ awtenant on se '
" '. avec mains de precision et dans un styl~ plus leur Pallas.
certame mamele, t'nllateurs des Acta Theclae, car 11 est Apros qu'elle out annonce I'evangile de saIut, qu'elle eut cate-
1 . , e les can I
alam )Ique qu tIes memes renseignements sur Ia chise, baptise et enrole dans l'armee du Christ un grand nombre,
't (1) il nous appor e . , 'fl d
r h e eur, 1 'I J traduis WI Ie texte a la III e Ia qu'elle eut fait aussi heaucoup de miracles, comme Pierre it
vie eremitique de T le~ e..... ,e 'X(:~~V wp[L1)cre: (556 C 10 s.), repl'is Antiocho et dans Ia trcs grande Rome, Paul it Atbenes et chez
" t' de E:7tt 'T:1)V -",SASU Gfl
Vw, a par II' d Acles &7t'~AOSV d~ ~S/,tuxS~~V (2 ",5 s.). taus los peuples (560 A)} Jean Ie trcs grand theologien it Ephese,
Presquo toxtuolloment
, ' 'II s I' gxrpp~cr~~ (
os lola ville de Seleucie, qui ap- ot que, par ses miracles surtout, elle eut amene tout Ie man de
J e tradUlrai ai eur
, , O'enre alors coura
nt dans los ecoles de rhCtoriquo
2 a la foi, eUe ne mournt nllllement, comme l' atteste le brllit tres
partlCnt a un b , ' 'd J ,'llants morceaux de bravoure ( ). repandZl et plus reridiqlle, mais s' entonr;a rirante et penetra dans
rce qu'il donnaIt heu a e,)l1
pa , 557 A fIl1 la terre, Dieu ayant ainsi decide que la terre pour elle s'ouvrit
Commengons donc a ' , et se fendit, au lieu meme au l'on a fixe la divine et sainte table
, T!" t (Iu'un demarquage des Actes,. IllalS
trait . La. " ,'La n es
cn particulier , comme I'] so (Olv 1" CItez de la celehration liturgique, au centro d 'un peristyle circulaire
(I) Jo n'insisto pas sur . I' co ents' IIttormrcs, ,
av ec toutos sortes d'enJo n~em ) 'ux discours (cI. (iSO D 5 ss. : 7tpOcrUq:>1)VIXV'T:E~ de colonnes d'argent. Et de 10. elle fait jaillir des flots de gueri-
.
un historien anCICn, IllS·1" erLiOIl de nom JrG , -
" a ' EVOV &pxcx:~6'T:po7tov CX:U'T:n 7tpocre:v~q..tIXIl·~v, -' - w~ •
a€ ~U'T:'ii XlXt (1)[L1)Yop[lX XIX'T:IX;O EX?Y XlXt &'p[L6~ov EXclcr'T:Cp 7tpocr6)7t'1l q:>U),cl~lX~
z sons qui remOdient 0. tonto peine, it toute maladie, sa grace
Or[LIX~, XclAA?~, V;E'T:& ,"Cou xd ,,'T:° t o~~~~~~lIGment dans cos ~isco~lI's que S?, donne virgin ale epanchant de lit, comme d'un canal, des guerisons
"",y,"1X XIX'T:IX 'T:OU~ AOYOU~). C es I L ccnt dans Ie dormer dlscours de 1 Melo i>
~A',r "
II'bre cours la rhoLorlquC.
Un exemIJ 0 ell r o ,
" Ios d og, mes y pa<sent)
. '0" '
1)XIX o~1X pour coux qui en ont besoin et qui la prient. En sorte que 10
", - (tous ~ , I1UlS quaLl'e [LEILIX b' I
Paul: quinze ~yvwv o~1X ~ou . riMo de 'l'hCele it Iconium quaml olle at~e. os lieu est un contro public do cures (7t1XVa1J[1.0V tlX'T:psiov), un lieu
crou 552 C 8-553 D. 12. C~. auss.I I~ oP 6 (pU'IS deux fois m'Y1crt) , suivi d'un parLlClpe,
•
lieux ou Paul a proc o.
• h' . cmq fOlso E: ~ T · ' . 0' • ,
0 [ • 0 '~I; xCX:'T:CX:~~6lcrlX~ [LE:, 0 <:u~ 0 XIX~ ... XCX:- commun de propitiation pour la terro enticre. II est sur .on tout
I; OE:O~ I; €V'T:IXU01X [Lo~ ... €7t;YvC!Jcr. e: ~, to ~~Oo(1)Y~crlX~. cas qu'on ne samait jamais trouvo:r son sanctuaire, au plutot
p~cr1X[LSVO~, I; xd ... XIX'T:IX~~wcrlX~, 0 xC( 'l' . IV 9?1.9H (notro toxLe n'est pas
(2) Cf. G. Downey, RAC, s. y, Ekp !r~s~;, L hObcrt Journ. des Sarants (19Gl), meme (560 B) sa ville - cal' il a pris desormais toute l'exten-
cite), mon Antioche. clI. I et Addcntda, £lcn dOs . traits ~Ollt des elemenLs obliges sion d'une ville quant it l'aspect, les commodites ot la beaute
105·10G, 151·1GG. Dans notre tcx e, . te rand our bonne condition du c1imat,
en ces sortes do desGriptiO~S ~.Y. gr. ~~nodrt6 des e;ux et biens publiCS, eLc. :Mais - sans la presence d'habitants de Seleucie ou d'etrangors,
affiucnco des fruits at marc Ian IS?S, co ent sur la topographic, at ant pel'mis tous affiuant VOl'S elle de tout cote: los uns par simple desir de
d'autres indica~ions sont tdr,cts pr~clscsl' nsol.i~r~~ Meriamlik (1891.1892), cf. MAMA,
a Hcbcrdcy,Wllhclm de 0 ermmcr 0 . reverenco et do priero, ot pour lui ofl'rir et consacror quolqu'un
III (1931), 3 S.
20 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES INTRODUCTION 21
de leurs biens; les autres, Ilour lui demander secours et guerison do Thecle it Meriamlik, et il reste it l'expliquer. Nous nous
des maux et douleurs qui les tiennent, ou encore etre delivres trouvons, en fait, devant deux enigmes. D'une part une hero~ne
des demons ... )) de roman, qui n'a PDS plus existe que la Chariclee d'Heliodore,
Basile, comme on voit, donne plus (Sarpedon, Atl~ena) et ou I'Anthia de Xenophon d'Ephese, ou la Leucippe d'Achille
moins que les continuateurs des Actes. II n'a pas la tentative Tatius, et qui devient, grace aux Acta Theclae, l'une des saintes
de viol des j eunes vauriens, qui a occasionne Ill. disparition los plus celebres de l'Orient. D'autre part, it Meriamlik, un culte
dans Ie roc: cela ne prouve pas d'ailleurs que la fable n'ait pas solidement atteste, non seulement par des textos (1), mais par
deja circule; il a pu la trouver de mauvais gOllt, indigno de des monuments, des Ie lV e siecle, alors pourtant que ce cuIte,
prendre place en son noble recit. L'ossentiel est qu'il ait Ie fait contrairement it l'usage universel, n'est pas fonde sur une tombe,
meme de la disparition, et que mome il y insiste, bto~[L~O'l) mais apparemment sur du neant : « celebratissimus S. Theclae
ouSct[Lw<;. II ale sejour sur la montagne, et Ia phrase EV (ll7tZP 't" 6mil, cultus )), ecrivent les Bollandistes (2), « raro et propemodum
etc. (560 A 6) prouve qu'il connait Ia grotte OU Thecle est censec nnico aplld antiqzws exemplo incunabula habuit in basilica
avoir demeure. II connait Ie role de Theele comme apotre et Seleuciensi, ubi numquam !nit S. Theclae sepulcrnm )) (c'est moi
thaumaturge. Et s'il ne presente pas Thecle comme l'initiatrico qui souligne). C'est assurement l'un des phenomenes les plus
de la vie monastique it Meriamlik (a moins que 7tOMOU<; •.• etranges du culte des saints, ce qui revient it dire, it cette opoque,
(jt"pct't"OAOY~crctcroc t"cil Xp~cmil 557 C 3 s. n'ait ce sens, cf. G, p. 271, du culte des martyrs. Mais il y a moyen peut-etre de l'elucider.
"at 7tOMOCt e~ ctUt"WV - sc. des EUYE\ltSW\I yU\lOC~XW\l de Seleucie _ Tout d'abord Ia premiere onigme n'en est pas une pour les
cX7tE't"&.~ct\lt"o t"CI) ~t<}l xoct (jU\I~crxOU\I ctUTjj) , Ill. seconde partie de son chretiens de ('e temps. Les Acta Pauli et Theclae, pour l'immense
ouvrage (Miracles) confirme Ie temoignage d'Etherie sur Ies majorite des lecteurs, apaient paleur canoniqlle. Quand Eth6rie
monasteres qui s'y trouvaient. Basile parle lit de ce grand les lit au martyrillm memo par acte de devotion, ene les tiont
nombre d'hommes et de femmes qui ont fait partie du tagma. evidemment pour aussi valables que les Evangiles ou les Epitres
de sainte Thecle ou en ont ete les higoumenes (t"o t"OcrOI)-rO\l {mo pauliniennes. Sans donte Tortullien proteste : selon lui, Ie protre
t"ctU'rfl t"ctXO~\lct~ t"E xoct e~&pXE~\I xop6v 817 C. 2 s.), des moines qui tour qui los a composes a ete convaincu de faux, il a Gcrit « par amour
it tour ont colonise ce monastere (t"OI)-rO [LI:\I cX\liX [Lepo.; <ppo\/'t"~cr't"~. de saint Paul )), il a confesse son crime et a ete dechu de son rang
pW\I otxtcrOCVt"ct<; 617 A 15 s., plus haut t"WV t"o [Lctpt"6p~ov otXOU\/'t"WV (loco decessisse, de bapt. 17, 13). Mais Tortullien a une raison
617 A 2), des vierges qui appartiennent it Thecle ([L(ct t"WV ctU· personnelle pour emettre un doute sur l'authenticite. II lui
't"ij<; 7tocpOevwv 600 C 8 s.), et qui parfois couchent meme dans parait exorbitant qu'une femme se mele de catechiser et de
l' eglise (1:ctut"ct t"WV ~VSOV t"~vl:<; ,,6t"1:: XctOzuSoucrwv 7tctpOevwv 596 A 6). II baptiser (<pwt"(()"(xcrct, 269.7 Lips. peut avoir co sens) : comment,
nomme quelques-unes de ces nonnes (617 B 7 ss.), dont Mar- dit-il, saint Paul peut-iI avoir permis cela it ThOcle, lui qui no
thana, peut-etre l'amie de la pelerine EtMrie (1). permet meme pas que les femmes apprennent la doctrino (1 Cor.,
14, 34 s.)? Des lors les Actes ont tort, on ne peut les croire, il
3. Les enigmes de sainte Thecle faut les faire passer pour apocryphes. C'ost l'opinion de Tertul-
Ainsi donc il semble bien qu'une tradition continue, de l'epoque (1) Premiere mention ap. Gregoire d" Nazianze (329.389), Garm., II, 51, 7-54 9
7tpw't"ov [L/;v ~AOOV d<; l:ZAEUXe:~ctV <puyd:<; t"ov 7tOCpOzvwvct 't"ij<; cXo;St[LOU x6~"IJ~ 0t-
post-constantinienne it c. 450, nous mette en presence d'un culto XAIX~. Gregoire, nommo malgr6 lui eveque de Sasima (372), mms dcme~re il ~a·
zianze (Tliocosaroe de Cappadoce), a fui en effet cette ville oil on voulmt Ie fmre
(1) Mn~meion de deux moniales ([LOV"IJcrt"P~wv = [LOVlXcrt"P~wV) il Mcriamlik, Pau- eveque, vcrs 375, pour se refugior il Seleucie d'Isaurie, P. W., VII, 1860. - Autres
line et Theelo, J. Keil·Ad. Wilhelm, Denlcmiiler aus dem Rauhen /(ililcien, MAMA t6moignnges Iitt6raires ap. Delehaye, Gulte des Martyrs, 192. Le plus fameux est
III (1931), no /,5 (da~e non indiquee). ~c nom de Thecle est.<ievcnu naturellemcnt celui d'Etheric (fin <iu IVO s.), cito supra.
a a
populaire dans Ia regIOn, deux KoraslOn (nOB 126,101), hUlt Korykos (nOB 372, (2) Martyrologillm ]IonIa/Him •.• scholiis instructum (Ilruxelles, '191,0), au 23 sep-
378,411 a, 1,86, 532, 570, 6Gr., 700). tembre, p. "12.
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lien. Rien n'autorise a. croire qu'eHe fut generaJe. II faudra quo nous ponsons, nous, mais d'apres ce que croyaient les ~ons
attendre Gelase (492-496), ou, si Ie Decretum Gelasianum n'est d'alors. Or, s'il se faisait des guerisons dans la grotte de Menam-
pas de Gelase, Ie VIe siecle meme, pour quo los Acta Theclae lik, c'ost que Thecle etait la, dans son tomheau. Sinon, on n'eut
soionL condamnes comme apocryphos (Preuschen, Analecta, pas edifie au-dessus une egliso, il n'y aurait pas la tontes ces
153.28). Aux yeux des pelerins du lV e et du v e sieclo, dos visi- pierres. Qu'il ne fut pas difficile de decouvrir un tomhe~u,
tours de la grotte, des constructeurs de l'ancienne eglise-marty- cent oxomples l'attostent. Mais queI besoin de Ie deCOUV1'lr?
rium au lV e siecle, de Zenon l'Isaurien qui, apres 476, fora cons- On avait la grotto - peut-Hro, de touto antiquite, une grotte
truire l'eglise a. coupole ou peut-etre memo la grande hasilique sacreo commo tant d'autres. Des lors, tout natureHemont,
(Guyer, 31, 73 s.) (1), Thecle a reellement vecu et ello a fini c'est dans cotte grotte que Thecle avait du vivre. Meme, comme
ses jours a. Meriamlik ou elle accomplit ses miracles. Cela est Ie lVe sieclo est aussi Ie tomps ou se repand Ie bruit des ermites
aussi clair a leurs yeux que la presence de saint Jean a. Ephese, d'Egypto, Theclo avait vecu lit on ormite, se contentant d'horhes
ou de saint Theodore Tiron a. Euchaita, ou de saint Serge a. et d'eau (manuscrits ABC). Et c'est la qu'elle etait morto et
Rosaphat. Au VIe siecle, un hrave anachorete do Palestine met ensevolio dans 10 rochor meme : lxd yap oTxoc; edwvtOC; ~o"'Tcxt 0"01,
Ie pelerinage de sainte Thecle au meme rang que ces trois alltres x&xd 'T'~v' bdO"wlnv 36ZYI (G 272). On en montrait aux visit ours
(Pre Spirituel 180, PG. 87, 3052 B 4-8). Or, on co tomps, cela une prouve concrete. Solon un mode de fabulation ~tio?ogiq.ue
ne peut avoir qu'un sens : c'est que Ie corps, ou du moins Ie hion connu (1), une saillie du roc dans la grotte etmt pnse
tombeau, de sainte Thecle est d lYIeriamlik. pour un bout du maphorion de la vierge. Commen~ douter:
Et nous nous trouvons alors devant la seconde enigme : OU est desormais qu'elle fut la? x&xdvo (Ie [J.epoc; du maphorlOn) XCX'T();
le tom beau de sainte Thecle d lYIeriamlik? Mais cette enigme se O"uyzwp't)O"\'I Ow\) 1tP0C; dO"'t"tv 'TWV OPO)V'TWV 'TOV O"e:~&O"[J.LO'l 'T61tOV
resout facilement - et il y a peut-etre quelque exageration (G 272), [J.tpoc; 'TL 'TO\) [J.cxtpop[ou WC; eX1tz[J.e:LVe:v ~!;wOe:'l 1tPOC; 1t[o"'T~o"L'I
dans Ie propos des Bollandistes cite plus haut - si l'on veut ~t~CXL();V 'T0)V 0PWV'TCUV (lYI 272). On croit entendre los bons mOl~os
hi en se souvenir de I'immense credulite des chretiens en ces vieux custodes de la basilique. Et los ofTrandes allaient bon tr~m,
ages, et par suite de leur extreme facilite a admettre n'importe xcxl 'TL 'TWV oixdc,)'J &Vcx.Oe:l:Vcx.L wh'ii xed eXVLEPWO"();L 0"1tou3cx~6v'TWV (BasIle,
quoi comme tomheau d'un martyr (2). Car il y a d'emblee, pour 560 B 5 s.). En verite, loin que cotte tombe fut douteuse po~r
eux, deux evidences. Les Actes, texte saint, texte inspire, disent l'homme ancion, on pourrait dire que nul tombeau ne se pre-
que Thecle est venue a. Seleucie et qu'eHo y est morte. Nior cola? sentait a sos yeux avoc plus de garantios (2). ~out c~la, pour
Autant vaudrait nior los Lieux Saints a .Jerusalem. Deuxieme qui connait les textos, parait clairement une « mventl~n » d?
evidence: les miracles. Peu importe qu'ils soiont vrais ou faux', lVO sieclo - au doublo sens du mot, invontion-fiction et mfJentw
pour l'intelligence de toute cette epoque, et de tous les historiens corporis ou monlllnenti. Et des lors il allait de soi qu'on dut
ecclesiastiques a cette epoque, et de tous los toxtes hagiogra- batir sur la grotte une eO'lise - au lV e siecle deja, avec dos
phiques contemporains, iI faut raisonner non pas d'apres ce , , b I' t I
moines desservants et des vierges apotactitos - et que au 0
do cotte eglise fut place juste au-dessus du liou ou Ie rocher a
(1) En raison de certains elements architecturaux, Guyer (I. 0., 32) veut dater la
grande eglise de o. !'60 ou 470, donc avant ZOnon l'Isaurion (1174-4\1'1). lIIais 10 texte
d'f)vagrius peut-i1 designer autre chose que Ie grand ensemble basilical avec son (1) Dejil dccelc par Radermacher, IIippolytos ll. TheMa, 60. Don exemp~ dans
les Paroemiographcs grecs (t. I, p. 65, 12 ss. = Zenobios, III, 32), a propos hU pro-
peribole? Cf. h. e., III, 8, p. 108.2 ss. Bidez-Parmentier : une fois reprime Dasiliskos
OU'~ TOC; 0• Z'
~'t)vcuv [J.EYLo"'
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l'OV 'TEILe:VOC;
I 'I: - 'Te: xcx.," XtxAAe:L 1tpOU)(W
e:<,oXYI T
eXVCX'l'toELXe: .rn' verbe : «'I'u os plus luche quo colui qui a sorti la tete. » Fuya~t He~aki~' ~fc- o~~e
, C \','" "" , .~ , -'r" ." so cache dans uno cayorno. Ayant sorti la teto (1t();pcx.xu<jJCXC;), II VOlt I ra { s e, .~
1tP6)'TOILCXP'TUPL ~exl\YI cx',!(); ;'t)v -;"EI\e:uxewv 'T"jV, 1tpOC; 't'TL mxupcuv Z6)pq: Xe:LILEV't)V, frayour, cst aussitot chango en pierre (&1te:ALOW'T't)), « ot aujourd'hui encore on YOI
1tAdO"'TOLC; )<();L f-CXO"LALXOLC; ();VCXO'I)IL();O"L 3LCXXOO"I·t't)(l'CXC;, 'TOLC; xcd [J.Z)(PLC; ~ILWV O"cu~o la pierre qui a forme humaino et qui drosse la tete au.dos.s us do, I~_ caverno {; rotte
[J.evoLC;.
(2) Nolons au surplus quo, du temps de Basilo, on aYail d~ _e~illOr dans ~[3
(2) Cf. v. gr. II. Lucius, Origine dll oliite rle,~ saints (trad. fr., Paris 1908) I. II un cenolapho enlour6 do hnlTicrcs, enr iI parle du O&Acx.ILOC; do I hecla lOt de ;uyx e:C;,
ell. :l (I.e martyr indig(J1!e), p. 18'o.21(). ' 1 ,
20 Mirado, 568 J) \l,
COLLECTIONS GHECQUES DE II1IHACLES I N'rnOD UCTION 25
cnglouti la martyre (BasiI8, 560 A 3 ss.). Tout cela se tient, tout des traits de fantaisie. Mais Ie fond, jc Ie repete, me parait lie
cela respire I'epoque post-constantinienne, la devotion populaire et au cuIte et au tombeau dans la grotte et b. l'autel. Or cuIte,
de ces grands enfants it qui sont dues tant d'autres fables, Ie tombeau dans Ia grotte, autd sont attestes des le IVe siecle.
(.tupov de saint Nicolas de Myre, la X'I)peuT~ des saints Cyr et Jean,
la veItu salvifique de la poussiere au pied des tombes ou de II. DE L'OHDONNANCE DES MIRACLES DE THECLE
I'huile des lampes qui les ornaient.
Et ceci m'amene, pour finir, a dire un mot sur ce que j'ai Radermacher (1) a voulu trouver dans les miracles I'ordre
appele les continuateurs des Actes. II ne fauL pas, it mon sens, suivant. Apres 10. 7rpoOzeup!cx (562 A-565 C fin) et Ia victoire sur
Jes mettre tous sur Ie meme plan. La Jegende des manuscrits ABC, Sarpedon (I) qui continue en quelque sorte la preface - car
selon lesquels Thecle, une fois entree dans Ie rocher, va a Rome, celle-ci montrait la superiorite des oracles chretiens sm les
ou elle sera enterree non loin de saint Paul (supra, p. 15 s.) a ete palens, et Ie chapitre ler montre Ie triomphe de Thecle sur celui
evidemment forgee pour annexer Thecle a Rome. De cette venue de Sarpedon - trois parties :
temoignent deux ecrits du haut Moyen Age. 1) L'Itineraire dit A) II-XII, ainsi divises : quatre miracles pour des femmes
de Salzbourg (1) : et sic (Jadis ad sanctum Paulum , (Jia Ostiensi , (Aba, Bassiane, I'epouse de Bytianos, Paula) II-V; sept faveurs
et in anstrali parte cerne ecclesiam sanctae Theclae supra montem diverses VI-XII. Tous ces miracles sont des epcxL13p6TEPCX Ocxu(.tCX'l"CX,
positam, in qlla corpus eins q~descit in spelunca in aqldlone parte. des miracles de bien veillance.
On not era les analogies avec 10. situation a Seleucie : sllpra B) XIII-XX. Miracles de colere et de punition, separes des
montem positam, in spelunca. 2) De locis SS. Martyrnm (2) : precedents pal' une sorte de prologue au milieu du chapitre XII :
prope quoque basilicae S. Pauli ecclesia S. Teclae est llbi ipsa "On 13[;, (.tEO' ~t; eXEL xapL'I"ot;... dt; '1"0 pO'l)Odv ... , Xcx! TOUt; AUTWUVTCXt;
corpore iacet. Ces deux notices, et celIe des mss. ABC, vont direc- O:VTLAU7tdv (o!l3zv iJ (.tapTUt;) (588 A 12 s.), prologue qui s'acheve ainsi
tement it l'encontre de la tradition de Seleucie. On peut leur (588 c 4) : Xcx! ~ep' E:TEpCX 13e: PCXI3LO'T€OV, o:ep' WV ~O'TL (.taALO'Tcx XCX! OPYLl:O(.t€V'ljV
assigner une meme date tardive, peut-etre Ie VIle siecle, qui tl3dv X'I"A ..
est 1a date des deux Itineraires. II n'y a pas, d'autre part, a C) XXI-XXXI. De nouveau miracles de bienveillance, se-
tenir compte des Catacombes de sainte ThOele, liees au culte des pares des precedents pal' 10. transition XXI 604 B 7 s. ('AMa yE 13~
martyrs Felix et Adauctus (3). La popularite de sainte Thecle (.tETap'I)OL - 'l"whov Y:XP (.taL 7taALV p'I)T€OV [cf. pcxl3LO'Teov 588 C 5] - O:7tO
a fait donner son nom it d'autres vierges. TWV XCX't' I)epEO'TZPeuV h! TeX; epcxL13p6npcx OCXU(.tCXT~ X'I"A.). Et ceux-ci de nou-
II n'en va pas de meme des continuateurs qlli font demeurer veau (cf. A) montrent d'abord sept faveurs diverses (XXI-
Thecle aMeriamlik, ou elle a sa « domus aeterna » et ou I'on vient XXVII), puis quatre miracles pour des femmes (Calliste, Bas-
la visiter. La presence du culte des Ie rv e siecle, l'existence de siane, Dosithea [avec aposiopese], Xenarchis : XXVIII-XXXI).
la grotte, l'etablissement de l'autel juste au-dessus du tombeau
Ainsi les miracles « plus sombres )), partie mediane (B), seraient
presume, tout cela, d'apres les donnees communes du culte des
encadres par les miracles « plus lumineux )) des deux parti~s
martyrs, incite a assigner it cette partie des Actes, dans les
extremes, et, dans chacune de celles-ci, on aurait 10. meme dI-
mss. Get M, 10. date du rv e siecle. II se peut que, dans 10. belle
vision 4 + 7 - 7 + 4, les quatre femmes de 10. fin de C r6pondan t
histoire du ms. G, un redacteur imaginatif ait ajoute plus tard
aux quatre femmes du debut de A. Cette ordonnance me parait,
(1) Cite DACL, xv, a
2, 2235, propos de Iu Cutacornbe dito de Thecle. Cot je dois Ie dire, tout it fait artificielle. II faut y regarder de plus
itinerai~e daterait du pupe Honorius (625-638) j cf. DACL, VII, '2, 1915-1916.
(2) Clto egalernent DACL, XV, 2, 2235. Merne dato que pour l'ecrit precedent
pres.
DACL, VII.2, 1916-1917. '
(3) Cf. D;1CL, Xv, 2, 2235-2236. (1) lIippolytos und Thekla, Appcnuico a p. 62 ss. «Die Wunder 'l'heklas», 120-126.
26 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES IN,!'RODUGTION 27
Apres Ie prologue et Sarpedon (I) qui, comme je disais, iJ6~(,)'1 (1.'1'1)I1.0VzucrtXt n XtXL cL'Tt"zL'I, XO:XeLVO epw. Et sans doute elle
forme une suite du prologue, Basile ecrit, a. 10. fin du chapitro I comportera des miracles de colore et de vengoance, mais ceux-ci
(568 B 7 s.) : tous les miracles de 10. martyro sont vrais, ils sont ne repondront pas au desir Dssez fDntaisisto d'introduire une
ot seront toujours tels. Premiere preuve de coci, 10. guerison grosse tache d'ombre ontro deux parties lumineuses ; ils naitront,
d'Aba (II) : tout Ie monde 1'0. vuo marcher, courir, s'activer des on Ie verra, du sujet meme. Enfin, en plein milieu des miracles
pieds (569 A 2). Deuxieme preuve, Ie soulagement do Dassiane do vengeance, Ie chapitre XVI nous fer a voir une des plus tou-
(III) : xed "ocu"a 8e il'Tt"ap, oux O'lOCp €ilpiho xal [1.&p"u~ {, EX "a\h1)~ chantes manifestations do la bonte de Thecle : elle fer a une
YE'I6[LE'IOt; 'Tt"ar<;, qui vit encore ot qui raconte 10. choso (569 D 12 ss.). visite, pour l'encourager, a. Basile qui la louo.
Dans les deux miracles suivants, l'epouse do Bytianos qui re- X contient deux 'Tt"tXp&ilo~tX relatifs au sanctuairo que Thecle
couvre l'affection de son mari (IV), 10. decouvorte d'un vol aux possede haut dans 10. montagne, a. Dalisandos. Elle s'y rend
noces de la fiIle de Paula (V), c'est pur hasard s'il s'agit encore chaque annee, sur un char de feu, depuis son temple de Seleucio,
de femmes. E'n fait Ie lien entre III et IV est tout a. fait lache et sans quitter d'ailleurs ce temple (1) (ouil' w<; "OU1'O'l xtX1'tXAdtjJtXO"a
(IV in. 572 A 8 OUX axapL ile oUilI: €xd'lOU [L'I1)[Lo'JZucraL "ou Oau[1.a"ot;), 1'0'1 veOlV 581 C 10 s.). En outre, second 'Tt"lXp&ilo~o'l, Thecle a souvent
Ie sujet de IV ost aussi bien Bytianos que son epouse, et cette defendu ce sanctuaire de Dalisandos contre les peuplades voi-
epouse est meme blamee a. 10. fin, pour avoir contracte un second sinos qui l'attaquaient, : elle apparaissait terrible sur une mon-
mariage (572 C 9 ss.). Sans doute, au debut de V (572 D 5 s.), tagne voisine et leur faisait ainsi lever Ie siege (581 D 8-584 A 3 :
Basile dit : « Passons a. un autre exploit miraculeux, qui lui aussi xtXl "oU 'Tt"OALOpXEr'l &'Tt"ocr,,~crtXcrtX 581 D 12 s.). Cette notion de
a concerne une femme. » Mais ce n 'est pas Paula qui est Ie vrai 'Tt"OALOPXLtX introduit les doux 'Tt"ap&ilo~tX suivants, XI ot XII.
sujet. Le vrai sujet est la decouverte du vol commis aux noces XI in. 58~ A 5 s. 'E'Tt"d il€ 11.'1~(1.1) 'Tt"OALOPXLtX~ YEYtt'l1)"tXL (cp. IX in.
de 10. fille de Paula, et Ie pore de cette enfant, Chrysermos, est 'E'Tt"d 81: bcpOtXA[l.W'I E[L'I'I)[LOVEucrtX(1.E'I). (1.1)ile "ou XtX1'Oc. 1:f:A1)'10U'I"tX Oau(1.tX1'o;
aussi nomme (573 B 13). La seule prerogative de Paula dans tl'Tt"EP LiJOl [LEV.Selinonte etait infostee par des peuplades voisines ;
co recit est que, commo elle est bonne chretienne et vertueuse Thecle commande qu'on y batisse, sur un sommet, une « maison )}
(573 C 2 s.), c'est elle qui a beneficie de l'apparition do Thoele. (o!XO'l 5810 D 3) OU ello hahitora; desormais 10. ville est on paix.
Beaucoup plus serre en revanche, parce qu'issu du sujet memo, XII in. 585 A 9 otO'l iJe XlXt ,,6ilE t:PE~E OtXu(1.tX (cp. VI in. Tou"o "0
est Ie lion ontre V et VI. Vol en V, vol aussi en VI : To\ho ,,0 OtXU!1.tX x<X1 ... &'Tt"E3d~a,,0). Siego encore, mais coLte fois a. Meriamlik
OIXU[1.1X (c'est la meme sorte de miraclo) xal 'Tt"EPL "L "W'I o!xdro'l meme. Des Laostrygons (2) ont envahi ot devaste Ie temple;
auTIi~ (do Thecle) €'Tt"Eild~a"o XEL[L1)ALro'l (576 A 1 s.). Avoc VII, on ils partent charges de butin : Thecle s'arrango pour los faire
a de nOUVODU une guerison, sans lien avec VI. Transition massacrer par les troupes de Seleucie. Comme de teIles invasions
quelconque : « Qui voudrait aussi negliger Ie miraclo accompli des voisins sont frequentes et toujours possibles, Ie recit amene
dans Ie cas de Pausikakos? » (576 B 3 s.). Basile onfile ses perles. nuturellement une supplication a. Thecle, 585 D 11-588 A 9
Mais, de nouvoau, Ie sujet meme do VII (guerison d'une cecite) (do meme aussi deja a. la fin de XI, 585 A 5-7). Et comme ces
conduit par une pento naturelle a. VIII ot IX, OU il s'agit egale- trois dorniers 'Tt"lXp&30;tX (X fin, XI, XII) ont montre Thecle
mont d'ophtalmies. VIII, 576 D 3 "0'1 ~"EpO'l "0)'1 bcpOaA[l.0l'J txL'IM- dans son role de vengoresse et a. l'occusion pleine de col ere
'1EUcrE'I. IX in. 577 D 9 s. 'E'Tt"d 81: OcpOIXA[1.0)'1 tl1.'11)11.0'lf.UcrlXl1.E'I, ilAOl(; (1.1)ill: (X 581 D 11 xo:t 'Tt"UpOC; OOpiXV[OU 3[x1)'1 1'cXc; "WV 'Tt"OAE[Llw'l otf:LC;... xtX-
exd'lo 'Tt"IXPlXkLtoIJ.ElJ. "tX'Tt"A~~tXcrrt., XI 58'I D 12 "ocrtXu"'l)'1 ~ IJ.&p't'UC; XlXl e'l "Ort; cpo~;:por~ •••
&'10P6l'Tt"OL(; emildxvu1'IXL ,,~v !crXU'I, XII 585 C 13 'Tt"POt; g,;,oq1.0'l cr<ptXy~v
Avec Ie chapitre x commence une serie de 'Tt"lXp&ilo~tX" c'ost-a.-dire
de faits plus merveilleux encoro que de simples guerisons ou 1lo1'pzmcrE - sc. los ennemis - "or~ cr"ptX"LWTtXLt;), naturelle aUSSI
des revelations de vol. Cette serie s'ouvre par une formule do (1) cr. II. Dclohayc, Anal. Boll., ',:I, 1 ()25, sr..
transition tros nolto, X in. 580 D 7 s. E! 8l: "L xP'~ xal "W'I 'Tt"tXptX- (2) Sc. des habitanls do Lamos on Cilicie Trachee, cf. p. 5'., nule ;)7.
l
surde de vouloir retrouver ici « 7 verschiedene Begnadungon » narchis) : "0 3t: {Lou xd vuv 'I'·~v {LV~[1.'I)V u7l"e3prx{Le, XrxAOV {L"I)31: u{LiX~
&7I"OXpuq;rxcr{)O:L 617 C 8. Co dernior chapitro (XXXI), au surplus,
+ « 4 Wunder an Frauen )), comme on aurait eu au debut
« 4 Wunder an Frauen » + « 7 verschiedene Bognadungen » n'est pas seulement un hors-d'reuvre : il est un appendice,
(Rad. 122). L'economie est ames yeux difi'erente. EIle me parait car Ia conclusion a ete donnee on XXX. D'abord Ia brusque
dependre de la nature def! documents que Basile utilise. aposioposo 'AMeX'I'OU'l'c.>V {Lev &AL~ 616 C 1, puis une suite do lioux
Les trois premiers miracles tprxL3p6'l"e:prx, qui sont de guerison, communs T[ yexp xd Otp€AO~ ••• &xlX"l)'l"rx 3LWXE:LV 616 C 1-D 5, enfin
ont pour trait commun que la guerison ost duo it une source, que l'enumeration de quolquos moinos ot nonnos particulieromont
Thecle a fait soudainement jailIir dans son sanctuairo, XXI saints 616 D 5-617 D 4.
604 D 3 ss. Cette source met fin d'abord it une epidemie qui af-
fecte tout Ie hetaiI (XXI). En particulier elle gu6rit un cheval En resume, it liro Basilo ligne a ligno, on n'a pas du tout l'im-
(XXII). Elle guerit aussi un Chypriote amige de cecite (XXIII, pression d'un cadr~ rigide impose du dohors, mais tout d'~bord,
605 D 1-5). a premiere vue, d'une ordonnance assoz lache ou los mIraclos
Sur ce, pal' une interruption soudaine qui sent Ie rheteur, sont enfiles commo dos perlos. Bientot pourtant, dans l'onfilago,
32 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
mais dans In 7tOm~A£O: (Isocr., Philippe (V) 27). Cette 7tOm~A£O: est Vie et Miracles de sainte Thecle
tout evidente quand il y a contraste. EIle est plus subtile
dans les variations it l'interieur d'un meme groupe. Alors on se A. Extraits do la Vie
repose. Y aident de jolies descriptions: Ie jardin de Meriamlik,
avec ses bosquets et ses oiseaux (VIII); les hautes futaies et
les pres de Dalisandos (X); Ie roc escarpe de Selinonte (XI). 1. Description de Selellcie.
Ou bien c'est un charmant detail, plein d'humour : Bassiane [556 C 10]. Elle partit pour Seleucie. C'est une ville situee sur
qui, etouffant de chaleur, se colle it la fraicheur des marbres les premiers cOn fins des territoires de l'Orient (1), qui tient la
(III) ; l'enfant que pique une grue (VIII) ; l'agathe avec laquelle premiere pluce et u rung de metropole (2) dans toute l'Isaurie,
joue en chemin Ie jeune fils d'Olympios (XXIV); Thecle qui sise pres de Ju mer et avoisinant un fieuve. Kalykadnos est
s'asseoit pres de Basile (XVI) ou qui vient lui tirer l'oreille [556 D] Ie nom du fieuve, qui prend su source quelque pal't en
(XXVII). Si 1'on compare ces nurrations uvec d'autres textes, haut dans Ie plateau interieur de Ia Kietis (3), qui longe beau-
par exemple avec les monotones formules stereotypees des coup de regions et de villes, qui, dans sa course jusqu'it nous (4),
Miracles de Come et Damien (1), on reconnait aussitot qu'on u reyoit aussi d'autres rivieres - lesquelles s'y adjoignent depuis
affaire ici a un lettre, qui a eu la chance de tl'ouver encore de des regions et lieux de chaque cote et donnent au fieuve l'am-
bons maitres, et qui u su profiter de leurs Jeyons. plitude que nous lui voyons desormais - et qui finit it cette
ville-ci et a Ia mer avoisinante, laquelle s'etend vers PEst et Ie
(1) II ya hourousomont autro chose on cos Miracles, v. gr. dos details do moours, Midi et nous separe de Chypre.
des particularitcs do maladies. Neanmoins c'est du groc plat, diffus, sans vivacite
ni fratcheur. La ville est digne d'admiration et pleine d'agrements [557 A],
~e ]a grande~r convenab]e pour qu'il ne lui manque rien en
Juste proportIOn, d'un tel eclat et d'un tel charme qu'elle sur-
~asse Ie plus grand nombre et en ega Ie d'autres, et qu'elle rivu-
lIse avec la belle Tarse pur les montagnes, la position, l'heureux
e 'r
· (I) Description J. Keil-Ad. Wilhelm, MAMA III (1931) 3-8 Voir aussi
I:..ugO ~p. P; lIt (1903) 1203 Seleulreia no 5. Pa~tinus tradui't 55G'C 11 s. 7t6A~<;
't"I)<; (:)~<; op .c.uv v 7tpoo~[L[(p X€~[L€v'l) « urbs ... in ipsa aditu montium oriontom
spectanllUIIl
· . d slta, » co qui Il'est
. 1)as faux quant tt~ Ia t opograp h'\0 (S"I' ~ I
~ eUCIe est" a
!tIllite e monlagncs tournees vcrs l'Est) mal's!! t't .
tugncs ». ' ' vp~o: = « errl Olres », non « mon-
rang des dieux - notre vierge Ie fit se contractcr a. nOUveau pied: Ia douleur cessera sur-Ie-champ, et tu te serviras do tes
[568 B] des qu'eIle fut arrivee a. ce pays et qu'ayant mis Ie pied piods pour I'usage auquel les pieds doivent servir. » Aussitot
chez nous elle cut occupe cette montagne j elle lui rabaissa son dit, aussitot fait, oui, et jusqu'a ce jour [569 A] Ie miracle est
caquet et reduisit totalement au silence Ie tres bayard chresmo- proclame, tant par Ia femme que par ceux qui l'ont vue march.er,
logue, ce miracle faisant office de pierre de touche pour savoir courir, s'activer des pieds. Qui plus est, a Ia suite d'un tel prodlge
si elle etait venue en maitresse et en reino (13), de peur quo co clIe est devenue chretienne, et une chretienne toIle qu'il est
qui etait vision reeIle .ne parut un songo. Mais c'etait bion une naturel qu'on Ie devienne apres une telle experionc.e. Car l~
realite. Car tous les miracles do la martyre sont vrais, sans guerison du pied a fait naitre en meme temps la guerlson aUSSI
mensonge, parfaits, ils sont et seront toujours tols. de l'ame. Et ainsi les deux guerisons ont eu pour cause un seul
et meme miracle.
2e miracle. GzuJrison et cOnfJersion d' Aba.
3e miracle. Bassiane sazwee par une apparition de sainte Thecle.
Aba 6tait encore pai'enne, cependant ni elle n'abominait les
Mais que se presente aussi a nos yeux une autre dame, qu'ell~
Juifs ni elle ne se detournait des chretiens, mais restait dans l'in-
raconte Ie miracle dont eUe fut l'objet et nous meuve tous a
certitude [568 C] sur tous et sur tout. Or donc eUe tombe de sa
l'admiration. L'une des nobles dames de la Kietis do par ici (15),
mule, et Ia jambo fut en si mauvDis etat -I'os, qui s'otait brise,
Bassiane - tel ctait son nom - [569 Bl avait etC regue chez
avait violemment traverse la chair tendue sur Ie pied et etait
no us en otage, en vertu de certaines conventions qui d'une part
ressorti au dehors - que Ie mal paraissait d6sormais l'emporter
nous promettaient Ia paix, a l'abri d'actes de brigandage, d'autre
sur tout remede : car il s'etait aggrave avec Ie temps, la femme
part nous donnaient une garantie formello de cette paix en la
ne pouvait plus bouger, bien que tantot les Juifs, tantot nos
personne de Bassiane. Elle passait presque tout son temps pres
enchanteurs d'ici, et avec eux aussi l'excellent Sarpedon, se
de Ia martyre et se collait a elle, sans douto en tant que chre-
jouassent d'eIIe. Mais ils avaient beau lui promettre Ia gueI'ison,
tienne mais aussi parce qu'alle suppliait d'etre delivree de Ia
ou meme appliquer quelque traitemeht, lours efforts n'ahoutis-
saient pas, et, au terme, Us ne purent rien. A la fin, suivant
contr~inte qui alors la retenait. Un jour, dans Ia saison d'ete,
alors que Ie soleil est 10 plus brulan1i, ol1e etuit la au temple se
des conseils, ou encore par inspiration propre, elle se fit conduire
Iivrant a ses pratiques habitueIles, pleurunt, chantant des
au temple. Et quand, Dvec beaucoup de larmos et de gemis-
psaumes, priant, et tout ce que font d'ordinaire gens qui souffrent
sements [568 D] propres a flechir notre viorge, clle eut implore
et qui prient. La nuit approchant, et Ia chaleur etant devenue
la martyre, trois jours pleins ne se passerent pas qu'elle ne rep ar-
plus intense, tout d'abord, en personne qui n'y etait pas ac:
tit marchant : en sorte qU'eIIe n'eut meme pas besoin de guide
coutumee, Ia voila qui s'irrite, qui ne sait que faire, qui perd quaSI
et que, comme on dit, eUe rentra chez eUe « it toutes voiles ».
Ie soume, qui ruisselle de sueur. Tantot el1e se tournait et ~e
Quant it la nature du remede pour la guerison - cela aussi,
tournait sur son grahat, cherchant sans cesso a calmer Ia peIllO
vous voulez Ie savoir - il fut de toute fagon ce qui justement ne
[569 C] de son corps et a reprendre haleine. TantOt, quand elle
coute rien, n'a rien de raffine, n'est pas une de ces ingenieuses ctait trempee de sueur, elle bondissait hors de la couche et s'ap-
inventions dont se targuent les AscIepiades. « Tu vois, dit Ia
martyre, la crasse accumu1ee pres de ma tombe : gratte-Ia tout d'Euthyme, Cyr. ScyLh. 61.23 S. 0 Ill: &pX~e:7tlo"X07tOC; 7tP07tE(J.\jiOCC;; ,"~v ,"e: Emxe:~(J.E;,'1lV
7tArXXOC (J.e:,"~ TIjc; &pyup&C; X6J\I'1lC; xocl. '"~ XUXAOl:i\I,"OC XrXy~e:AAOC; La me~ l~~
autour des barrieres (14), applique-la-toi it la partio malado du dans notre texte d'un OrXAOC(J.OC; et de x~yxAtlle:c; donne iJ crOiro qu au temp
Dasile il existait dans la grotte un cenotapho do sainte 'l'h1:cI~. . d
(13) En 568 B 5 liro 't"I)v lle:o"7tonx~\I Exdv'1lC; (exe:!\l1)v ed.) xocl. 0occr~A~X~V ollomo- (15) La Kietis (supra, p. 33, n. ~) doit etre ici la haute reglO.n du Kal?,ka dnaos~
ptOC\l &7t07te:tpco(J.evou (·(J.E\l1)) ,"ou Oocu(J.oc,"OC;. sans doute occupec on ce temps par les Isauriens, dont la r.eputatlOn do brI.gan g
(14) Xt"(XAtoCOV ... 7te:P~!;Eo"oco"OC 568 D 9 s. p,lrri<)res aussi autour de la tomba est traditionneHe dans l'antiquile, cf. Percgr. Aeth. 23, r" Cite Introd., p. 1;).
42 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES MIRACLES DE SAINTE THicLE 43
puyait contre les marbres, parce qu'ils etaient plus froids et implora sa favour. II y avait une certaine dame, des plus for-
susceptibles de la rafraichir. En fin, comme elle etait vaincuo tunees par la richesse, ot pleine de jactance aussi de ce qu'elle
par Ie mal - son ventre se bombait dans l'attente d'un enfant, avait epouse un commundant d'armee, [572 B] qui etait tres
ce poids I'opprimait, et cette chaleur extreme dont elle n'avait puissunt - il so nommait Butianos - et qui se glorifiait de
pas l'habitude ne lui permettait pas de negliger son 6tat (16) - son triomphe sur les Perses (19). Cette dame donc, dans la pensee
elle s'elanga vers l'une quelconque des citernes sises pres do lit (17), qu'elle etait outragee dans son honneul' d'epouse par son mari
qui etait profonde et pleine d'eau, dans !'intention d'y plonger - car Ia femme ost toujours egoiste et non mediocrement ja-
et d'y nager, ou meme de s'y noyer : co sera it lit de toute fagon lonse, terriblemont habile d'ailIeurs it soupgonner les mreurs
la fin de son mal. Mais la martyre lui apparut, se saisit de son d'un epoux qui vagabonde avec d'autres femmes et des pros-
manteau et 1'arreta dans son elan, avec force [569 D] reproches tituees - £0 rend en grand abattement vel'S la martyre, pleurant,
pour son audacieux projet. Puis, ayant appele une jeune fillo, Iangant des maledictions et des imprecations, non it vrai dire
qui l'accompagnait comme petite servante : « Apporte-moi, contre son epoux - il etait clair en aITet que son mari lui etait
dit-eIle, ce bassin. » De fait, on voyait Ia petite tenir en ses oncore tres cher - mais contre ces petites servantes devant
mains un bassin. Elle l'apporta, il 6tait plein d'eau. La tres Iesquolles Butianos etait si fascine qu'il en etait contraint it
douce Thecle y mouilla Ie doigt et, l'ayant ainsi humecte, ello negliger sa femme. Que fait donc la martyro? Elle ne se detourna
en oignit Ie front et les deux clavicules. Puis elle s'en fut, n'ayant pas de la supplication, olIo n 'eut point horreur pour Ie decoura-
laisse pour ainsi dire derriere elle it Bassiane que Ie doux efIluve gement importun do Ia femme. Prenant mal plutot [572 C]
d'un zephyr. II arriva donc que, alors que tous etaient grilles l'oITense au mariage, vu qu'il etait meprise et outrage par cette
par Ia chaleur torride, elle seule etait comme au printemps, impudento debauche, olle a.ccorda sa faveur en corrigeant
comme it Daphne au bois touITu que traversent millo brisos. tout soudain les mreurs de l'homme, elle transfera conven able-
Or tout cela [572 A] eut liou en vision reelle, non on songe. mont vel'S l'epouse les desirs qu'il eprouvait vilainement pour
Ainsi 1'atteste Ie fils qui naquit alors de cette damo, c'est Mo- ces femmes. Non qU'elle eut fait passer quelqu'un do sos membres
destus Ie bien connu, qui est oncore en vie, et I'ornoment de la a un etat meilleur ou pire, c'est 1'ame du mari qu'elle forga a
villo qui tire son nom du mot « paix » (18). C'est un homme de prendre en consideration ce qui ost droit et selon la loi divine,
belle humeur, tout rempli de la grace des Muses, et qui raconte it hair la debauche impie, it respecter les beautes et les justes
Ia cllOse avec on ne saurait dire combien d'6Iegance. regles du mariage.
Ceci dit bien que notre excellente dame, apres tant de si
beaux enfants, apres un age trop avance pour les noces, n'a
4e miracle. Comment un mari infidele quitte la debauche. absolument pas supporte de se contonter dans Ie veuvage des
II n'est pas ine16gant non plus de mentionner Ie miracle que fils qu'ollo avuit ous de Butianos, mais au lieu du chef d'armee,
voici. Et dut Ia martyre en rougir un peu, ce n 'est pas pour du destructeur des Perses, a pris en echange a nos yeux Gre-
elle-meme qu'elle rougirait, mais plutot pour Ia fomme qui goire, ayant elu un vaga.bond, un etranger, un medicastro de
chevaux et mulets, et faisant menage avec lui. La raison qui
(16) Sic en prenant '1"0 '1"013 CPAoy[J.ou 7l"OAO 'l"e: Xell &TjOe:~ comme sujet de oux OAt- l'a poussee, [572 D] il no sorait sans souiIlure ni pour moi de Ia
ywpe:rv 7l"elpe:crxe:UelO"EV (569 C 8 s.). Ou, en Ie prenant comme complement ot comme
sujct yelcr'l"po~ I)yxo~ (569 C 6) : « et co poids qui l'opprimait no lui per~ottait pas dire ni pour vous de 1'approndre.
de bravor la chaleur, etc .• On notera l'insistance sur Ie pou d'accoutumanco iJ la
chaleur : w~ i1v Xell &cr\)V~O'l)c; 569 B 12 s., '1"0 ..• &'I)Oe:C; 569 C 8. Bassiane doit venir (19) II y eut guerre entre Tlulodose II (!,08-',50) ot Bahram V (!,20.'<38) en 421,',22,
de la montagne.
(17) Sur les citernes de Meriamlik, cr. Herzfeld.Guyer, MAMA, II 78·82.
cr.
Stein, I, 279·281. Incursion encore des Perses dans I'Bmpire romain, parallele·
(18) Sc. Eirenopolis d'Isaurie, pres de Claudiopolis et de Germanico~olis. Cf. Ruga
ment il. une revolte des Isauriens, sous Yezgerd II (apros ',38), ib. 291.
ap. P. W. V, 2135 (s. v. 1).
44 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
MIRACLES DE SAINTE TuicLE 45
5e miracle. Decouperte d'un poleur. croyante et vivait de maniere a lui plaire, elle l'honora par ce
miracle.
Passons a un autre exploit miraculeux, [573 A] qui lui aussi
a concerne une femme. II eut lieu comme cecL II y avait noce,
et des festivites de noce, avec une grande assemblee de peupJe. 6e miracle. Noupelle decolwerte d'un poleur.
On avait, comme il se doit, bien nettoye 10. chambre nuptiale, [576 A] La meme sorte de miracle, Thecle Ill. fit voir encore
bien orne Ie lit nuptial. A cette ornementation avaient servi touchant l'un des objets de son tresor. Un individu enleva l'une
I 'or et l'argent, qui sont deja par eux-memes un ornement, et des croix qui lui avaient He consacrees, Ill. porta a un coin de
tout ce qu'il y a de vetements brodes, d'un tissu fin et precieux : la route qui mene de Ill. ville it son temple et l'y enfouit av~c
et tout eela en grand nombre, achete de heaucoup de marchands grand soin sous un arbre. Mais Ill. martyre considera ce for faIt
pour la parure de 1a fiancee. Sur ce, un voleur, un Eurybatos (20), comme donnant pretexte it rire it son sujet, comme si les excel-
envahit 10. chambre nuptiale, s'empare du tissu Ie plus hrillant Ients voleurs ne l'epargnaient meme pas elle-meme, et comme
et s'enfuit. C'etait une echarpe, un ohjet remarquahle et tres si it Ill. verite il devenait possihle qu'on echappat it son regard
couteux. Cette echarpe etait tissee d'or, ornee de pierres pre- omniscient et divino II cst sur du moins que, s'6tant approchee de
cieuses. L'etoffe servait de ceinture, serrant par en dessous l'un de ses serviteurs et custodes, elle lui indique de nouveau
Ill. taille et liant ensemble les vetements; les pierres, resplen- et Ie voleur et Ie site, et que, apres avoir fait rapporter Ill. sainte
dissant en cercle comme des etoiles, jetaient leur eclat qui d'un croix , elle Ill. restitue a son lieu propre. Quant it celui qui pen-
cote qui de l'autre : si bien que la heauM en etait chatoyante, sait avoir Ill. croix, il lui resta seulement d'etre nomme un
[573 B] melee qu'elle etait de rayons mUltiples et de diverse sacrilege.
teinte. Cet objet donc, d'une telle beaute, l'excellent homme,
quel qu'il ait ete, l'enleve, Ie porte a un certain endroit et l'y
7e miracle. Guerison d'un apeugle.
enfouit dans Ill. terre, sans meme jouir purement de son detes-
table gain: la frayeur s'etait insinuee en lui, il estimait n'avoir [576 B] Le miracle qui se fit pour Pausikakos, qui de plein
rien. Cependant, quand on se fut aperyu de Ill. perte, aussitot gre Ie passerait sous silence? De fait, hien que cet homme ap-
l'abattement succede aux festiviMs et a Ill. joie, les larmes au partint a Ill. classe des pauvres et des travailleurs manuels,
rire. De fait, c'etait un dommage qu'on ne pouvait souffrir. il a eM, au meme rang que les puissants et les illustres, juge digne
Mais la marLyre, qui voit tout, qui observe tout, qui voit par par Ill. martyre du miracle et compte avec eux. Ce Pausikakos
exemple l'un en train de soustraire l'objet, les autres pleurant donc, soit par 10. negligence de medecins soit par leur impe-
I a VlO . Ience qu ' on a faite au mariage, s'etant approchee de' ritie, avait eM atteint de cecite, mais grace a Ill. martyre il re-
Paula - de qui Ill. future epouse etait Ill. fille, et son mari etait couvra Ill. lumiere qui l'avait abandonne. Disons comment cela
Chrysermos, l'un des principaux parmi les avocats pres des eut lieu. II etait venu au temple, et etait arrive au terrain qui,
tribunaux (21) - lui indique et l'endroit et Ie site et Ie voleur. un peu plus loin du temple, precede Ie sanctuaire (22) : on Ie
Et ainsi [573 C] elle mit fin it l'abattement, elle restitua la nomme Ie bois des myrtes, et Ill. vierge est dite et est crue s'y
joie appropriee a des noees et, parce que Paula etait honne tenir Ill. plupart du temps. La, il s'enferma [576 C] de quelque
fagon, et, ne cessant de gemir, ne cessant d'appeler au secours
(20) Sic justomont Pantinus pour EOpU(.LOCTO<;; (573 nota 20). Nom proverbial - Ill. martyre avait souvent deja supporte ses clameurs, et lui
d'un fripon, cf. Hoefer ap. P. W., VI, 1319, S. v. 2.
(21) En 573 B 14 liro 7rept TIX &:pXeLoc (&:PXOCLOC cd.). Do memo 592 A 1 (ainsi a Iu
d'aiJIours Du Cange, &:pxeLov 3, col. 129). (22) xc('TocAa~wv ... TOV ve:wv, -.0 31: •.. 7rpo-'€(.L€vtO'(.Locn 576 B 10 S. La construc-
tion avec Ie daLif est rare, deux exemph's duns Sophocles.
46 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES MIRACLES DE SAINTE TuicLE 47
pardonnait en raison de son mal - il n'y mit point de fin qu'il toutes taches? De fait si l'on enlevait a ce ciol immense Ie s~
n'eut recupere ce qu'il avait perdu. Or il lc recupera comme cond de ses luminaires,' Ie tort ne serait pas petit qu'on .c~~sermt
ceci. Des ecailles, it ce qu'on dit, tomberent de l'interieur do sos <au ciel) (24) et a la terre: a l'un on enleverait la n:OltlO de s~
yeux, et du memo coup tomba aussi l'opacite qui alterait les beaute, a l'autre on rognerait la moitie de son e~lm~ago, ~elUl
pupilles ; a sa place entra la lumiere dont il jouissait auparavant. do la nuit. Aces plaintes, la martyre ne repondlt rle~, III ne
On l'avait vu de longues annees aveugle : on Ie vit, de longues prescrivit l'un ou l'autro remede : ot c'est pluto.t pal' Je~ que
annees encore, jouissant de la vue, et accomplissant son metier, de mamero. , .
soneuse qu ,eII e so d'sposal't
1 a' prodUlre Ie mIracle.
tirant a terre les barques du fleuve, faisant Ie debardeur, ga- Voici on offot ce qui so passa dans la cour (25) [577. B] du.temple
gnant son pain parIes memes travaux desqueJs il avait aupa- meme. II y a la toujours quelque personne en tram de Jeter ~t
ravant tire sa nourriture. Tout Seleucie en fut temoin, Seleucio d'eparpiller des graines, de ble ou d'orge et de vesce, your serVlr
qui etait a la fois sa patrie et la cite dont il etait membre. de nourriture aux colombes qu'on entretient en ce heu, ou aux
autres oiseaux. Oui, nombreux en verite et de diverse~ sortes
sont les volatiles qu'on entretient la, cygnes, grues, Oles, co-
8e miracle. Guerison d'un enfant pri()i d'un ceil. lombes ot aussi les oiseaux d'Egypte et du Phase: tous appor-
[576 D] Mais voici encore une histoire quo je dois dire, pou tes par'los pelerins, qui les offrent a la martyro pa~ affection ou
s'en faut qu'elle ne m'a,it echappe. Un potit gar(jon, tout justa pour remplir un Yom. L'enfant jouait donc la un J.our en tou~e
sorti dos hras de sa nourrice, en vint, a force de pleurer, a etre liberte et joie, tantot poursuivant en riant un Olseau, ta~tot
en peril pour l'un de ses yeux : finalement, Ie mal fut plus fort poursuivi par l'un d'eux : en sorte que les spectateurs avment
que tout traitement. La nourrice Ie prend, sort de la ville voi- plaisir a Ie voir, cela leur donnait it rire. Et voila que l'une des
sine des frontieres qui a, nom Olba, (23), et, une fois montee grues, parce qu'ill'empechait de manger, ou plut~t parc~ qu'elle
au temple, elle y passait tout son temps dans les lamentations, en avait re(ju l'ordro [577 C] de la martyre, bondit sur 1 enfant,
les supplications, les larmes, pl'esentant l'enfant it la ma.rtyre, et du bec lui creve cet ceil qui etait deFl. malade et avaiL fini
lui exposant sa hlessure, lui demandant de ne pas se montrer par s'eteindre. Sous Ie coup, l'enfant hurle; les femmes la ~re
indifferente au fait que Ie petit eut ete etabli en une telle dif- sentes appellent au secours avec lui, attendu qu'un terrIble
formite, si malsea,nte et si llOnteuse, [577 A] qui lui enlevait Ie malheur vient d'avoir lieu. Quant a la vieille nourri<;e - elle
plus grand charme du visage, puisque desormais il n'aurait etait lit - peu s'en faut qU'elle ne perdH l'ame, comme si Ie
plus qu'a moitie et a moitie agissant Ie sens de la. vue, la plus mal avait empire encore et qu'il eut retranche ce qui restait
helle ceuvre de Dieu, surtout dans l'llOmme. Qu'y a-t-il de d'ospoir. Mais en verite ce fut ce qui guerit Ie mal et y port,a
beau, parmi nos organes, comme les yeux? Qu'y a-t-il qui soit remede. En effet, comme si l'ceil avait eM troU!~ par un me-
aussi necessaire et aussi utile qu'une paire d'yeux enticrement decin et un fer, ot perce avec art, il se fait un ecoulement .de
lumineux, egalement doues de la faculte de voir, egalement toute l'humeur epaisso ot trouble qui obscurcissait la pupIlle
hrillanLs, possedant et fournissant egalement la lumiere pour - qu'on pourrait nommel' l'roil de l'roil - et, cette humeur. une
fois expurgee, l'onfant, pour la premiere fois, se remet a VOll' et
(23) TIi~ &:O''t'Uyd't'ovo~ 71'6AE:CU~ 576 D 6. « Voisino des frontiilres » plutOt quo recouvre la partio manquante [577 D] de la lumiere de ses yeux.
• voisino de Seleucie. » Ura·Olba est, de fait, voisine des frontieres de la Cilicio
Trachee l!Uut dans la montagne, a vingt.cinq kilomCtres environ au Nord de Se. (24) Lo contexte montre, comme l'a vu « vir, doctu~» ap. ~antinus (n. a 5,70 A 10).
leurie. Cf. Huge ap. P. W. XVII (1937), 2399·2403 et, auparavant, MAllIA III u'il Caut ajouter une mention du ciel, v. gr. ou [LtXPtX ~'Y)[LtcuO'E:tyl:v 't'ov ouptXv6v.
(1931) H s. (Olba diITerente de Diocesaree), 80·89 (site et monuments d'Olba); q (25) Cette tXuA~ de 577 A 15 doH etre la ~eme chose que !e bOIS de m~rt,e, Ie 71'pO-
ib. pI. I (carte du haut Kalykadnos), pI. 35 (plan d'Olba), pI. 36·37 et 38 a (monu. 't'E:[LEVtO'[LtX, do 576 n 11, une sorte de 71'tXptXaE:tcro~ plante tl arbres et ou Ion entre-
ments) ticnt tles animaux.
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COLLECTIONS GHECQUES DE JIIIHACLES MIHACLES DE .sAINTE THECLE
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'lE00': "!'lors il ne fut plus en rien estropie (26) quant a la vue, il s'en elIe etait devenue Ie remede Ie plus puissant pour tout Ie peuple
retourna complet, en possession de tous ses organes, et il donna ensemble de Ill. cite. Si bien que Ia route par deja la ville ne suf-
Ie spectacle de ce miracle a sa ville, a son pere et a son grand- fisait meme pas aux gens qui d'une part montaient avec gemis-
pere. Le pere se nomme Pardamios, Ie grand-perc, Anatolios, et sements et larmes, d'autre part descendaient avec joie et louanges
ce dernier est Ie pretre de l'eglise de la-has. a Dieu, qui montaient les paupieres collees l'une a l'autre, qui
descendaient les paupieres bien ouvertes. Et il ne s'agissait pas
seulement d'une grace telIe que celIe de cette humble et pauvre
ge miracle. Extinction miraculeuse d'une epidemie d'ophtalmie. piscine qui sauvait tout juste, [580 C] et encore avec peine, un
Puis que nous avons fait mention des yeux, ceci non plus ne seul individu (Jo. 5, 2 ss.), mais de la fontaine la plus riche et
doit ahsolument pas etre Iaisse de cote. Cela s'est produit tout la plus abondante. Deja tout ce peuple s'etait lasse d'accourir,
recemment, et nous avons tous su la chose, nous qui avons deja les flots de la piscine s'etaient lasses de se repandre, mais
joui et du miracle et de la guerison. [580 A] Une epidemie la grace de Ill. martyre ne flechissait pas, eUe accueillait, gw)ris-
d'ophtalmie a fondu sur la ville l'annee passee, en etC, du fait sait, renvoyait une fournee, et de nouveau accueillait et gueris-
qu'il s'ecoulait d'en haut, de la tete, dans les yeux un vaste flot sait une autre fournee, et elle les renvoyait tous semblablement
d'humeur acre. Si hi en qu'il n'y avait meme plus moyen pour gueris. Si bien qu'au bout de trois jours en tout, ou quatre,
les medecins d'employer leurs fameux remedes, parce que infime etait Ie nombre qu'attaquait encore la maladie. Et ces
l'humeur, con Linuant toujours de descendre, noyait la drogue gens-la, je pense, c'est du fait d'incredulite, ou encore de quelque
qu'on inserait dans les paupieres ou qu'on y ll.ppliquait au autre vice dans leur vie, qu'ils n'obtinrent pas Ie sec ours com-
dehors. Ainsi les yeux d'une part etaient prives de secours, mun qui etait a leur disposition. Ou peut-eLre pour que nous
et les medecins d'autre part etaient dans un extreme d'emhal'l'as nous rendions compte de la gravitC du mal. Car en ceux chez
et d'impuissance, etant vaincus par Ie mal, ou meme atteints qui il persist a, il amena en outre de la ceciLe: ou bien un seul
eux aussi deja par ce mal, car la terrible epidemie devorait des yeux etait completement creve, [580 D] ou bien les deux
sans pitie tout Ie monde. Cependant Ia martyre, ce refuge pro- ensemble. Tant etait terrible la maladie, une vrll.ie machination
tecteur de la race humaine, prend en pitie l'epreuve inhumaine diabolique. Mais eUe n'en rut pas moins vaincue par Ie miracle.
qui consume une telle quantite d'hommes. [580 B] EIle ouvre Ene fut aneantie et s'eloigna, eomme si, des Ie principe, elle
Ie lieu de cure qui est en son sll.nctuaire, et elle invite universel- n'avait jamais existC.
lement tout Ie peuple a venir vel'S eIle. EIle donne cet ordre,
une nuit, a I'un des patients et, par lui, Ie fait proclamer a tous,
en sorte que toutes ]es victimes de ce mal fassent usage de
10e miracle. Comment Thecle se rend a sa tete aDalisandos (28).
l'eau de sa piscine. C'etait la en eifet toute la medecine (27) qui Que s'il faut ll.ussi rappeler et dire quelqu'une des actions
devait combattre l'ophtll.lmie tout de meme que celle-ci avait extraordinaires de la sainte, en voici une que je vais dire. Dali-
pris jusqu'a ce jour l'initiative du comhat : neanmoins, comme sandos est une ville - 01.1 plutot un simulacre encore de ville, un
cette medecine avait ete meh~e a la force active de ]a martyre, simple nom -, qui, hien que rejetee parmi les lieux ohscurs et
sans gloire, n'en garde pas moins quelque illustration elle aussi
(26) imxwAe:Ue:W 577 D 1. Hapax?
(27) 't'oi3'ro yecp ~v 't'o lOG't'pe:!ov 580 D 6. J'ajoute « touto., car, it la simplicite du (28) Dalisandos. Cf. Huge ap. P. W. IV, 2023 s. j Hamsay, JIist. Geogr. 300, par.10-
lOG't'pe:LOV (ici de l'eau, plus haut c'etait Ie pun;ov coll6 aux barrieres du tombeau 17 (D. fait partia de Ia Decapolis (l'Isauria, dans Ia haute valloe du Calycadnos j
568 D 8) s'oppose Ie fait qu'iI est mCIe il. la !orce de Ia ma:tyre, &:v~xpOGOE:V 81: IS {l we; 11 distinguer d'una Dalisandos on Lycaonie). La villa a dft tirer son nom du dieu
't"ii ive:pydqc -rijc;; {lcxp't'upoC;; 580 n 8. Pantmus a comprls de meme ; «haec una Sandos·Sandon (1'. 'vV. I A 220G.20 s.). at Ie nom est peut·eire una contraction de
Damalisandos (6.OG{lOGAlO"OGv8OG, -OC;;), cf. HOfer ap. Hoscher IV, 328.11 ss. at infra,
quippe etc. » p. 59, n. 51.
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a cause de la martyre : comme en effet elle l'honore avec oclat celebre la panegyrie et accorde au peuple rassemble les dons
elle est gratifiee aussi par eUe d'un miracle [581 A] plus eclatant: qu'elle a coutume de faire, et quelques petits dons aussi au
A~ temps ~u 1'0~ y ceIeb~e 1a martyre par un~ panegyrie pays meme, elle s'en retourne de nouveau vel'S Ie mont d'ici,
- c est une fete brIllante, tres fameuse et tres frequentee, vu comme 8i elle n'avait pas meme laisse Ie sanctuaire qu'elle a ici.
que des foules y affiuent de tout cote - si, durant la sainte Cal' il n'y a point d'obstacle pour l'reil des saints, rien ne l'em-
veillee nocturne de la fete, on observe l'horizon du sommet peche d'aller et venir sans cesse partout OU il veut, et chaque
de la montagne dominant la ville, qui, tournant Ie dos a l'orient, fois qu'il veut, pays, peuples, villes, cites. De cette sorte de
reg~rde vel'S .le couchant, si donc, s'etant place la, on reste miracle, [581 D] la grande Tarse aussi, dit-on, est la Mnefi-
everlIe, on VOlt, haut dans l'air, la vierge montee sur un char de ciaire. Car Ie divin Paul quitte de la meme ragon la tres grande
feu et conduisant l'attelage, se hutant d'une maison a l'autre et royale ville de Rome pour visiter Tarse, rendant ainsi les
da celIe de Se!eucie a cette chambre virgin ale qu'elle cherit: supremes honneurs a sa patrie, a son foyer, a sa panegyrie, et
h onOre et admIre plus que toutes les autres qui sont chez nous montrant a ceux qui l'honorent qu'en verite il s'est plu a Ia
parce qu'elle est situee en un lieu pur et pourvu de tous le~ panef,ryrie, qu'il a accepte les saintes ceremonies de son culte,
av~tages. Car il y a la une foret de grands arbres qui font un et qu'en retour il a accorde les plus beaux dons.
opals couvert, [580 B] a la frondaison luxuriante, aux fruits Quant a cette meme Dalisandos, la meme martyre, je sup-
abondants; en outr~ ?~S sources charmantes, a l'eau glacee, pose, l'a souvent delivree d'un siege: etant apparue sur Ie som-
en tel nombre que, Jarlhssant pour ainsi dire de chaque arbre met de la-bas, elle a ebloui par des eclairs, comme un feu celeste,
et de chaque roche, eHes s'ecoulent de cote et d'autre et entourent Ies yeux des assaillants et les a frappes de stupeur, [584 A] Ies
Ie temple meme ; ~t la bonne aeration du site, car il est expose forgant ainsi a lever Ie siege. ~ui, et il y a encore des gens qui
Ii une foule de bmes suaves et delectables; et au-dessus de la se souviennent de ce prodige, at qui se font gloire de Ie raconter.
tete Ie chant des oiseaux,. pure merveille en verite et propre a
ch~rmer non ~~ulement qUI est deja detendu et goutant ses aises, 11 0 miracle. Comment Thecle a protege et protege Selinonte (30).
I?als encore 1 etre .morne et abattu; et, repandu sur Ie sol, un
rIChe gazon aux mIlle couleurs, qui permet a chacun de prendre Puisqu'il a ete fait mention d'un siege, ne passons pas non
son repos, homme, femme, enfants jouant a l'air libre animaux plus sous silence Ie miracle accompli a Selinonte, car il suffit a
A • A •
enleve en vertu de la col ere et de la vengeance de la martyre, et de Sandas (51), lequel est aussi Herak!es fils d'Amphitryon
il est bon de l'exposer. - et cela aussi parce qu'il Ie regardait comme un homme de
talent et au sommet de toute vertu, mais encore, quand il fut
mort en cette ville de Seleucie, il voulut I'honorer particuliere-
14e miracle. Vision de Castor, en co¥ncidence arec la mort de ment jusque dans les funerailles memes (52). Or il estima qu'il
Marianas. n'y avait pas d'honneur plus grand et plus glorieux que de lui
Un certain Castor, homme excellent, orlgmaire de Lycao- rendre les derniers devoirs et de l'enterrer dans Ie temple de la
nie mais domicilie en notre Seleucie, directeur dans l'adminis- martyre. II demande alors a (53) ce tres grand et [592 B] tres divin
tration des bureaux (49) qui assistent les gouverneurs, ce Castor personnage, je veux dire Maximos, qui etait en ce temps-Ill. a
donc, durant la veillee nocturne de la panegyrie, eut la vision la tete de l'eglise de Seleucie, qu'il lui soit permis d'enterrer
que voici. II voit la vierge qui, farouche d'aspect, de regard, de Hyperechios a l'interieur du temple de la martyre dans Ie bas-
demarche, court a travers toute la ville [589 D] avec force cote droit au sud. Lors donc que l'admirable Maximos, par
claquements de mains, appelant a grands cris Marianos et respect pour lui, Ie lui eut permis, les ouvriers auxquels incombe
clamant son insolence, lui langant cette menace qu'elle va im- Ie soin de creuser les tombes, etant entres dans Ie temple, se
mediatement se venger de lui. Or ce fut lil realite, plus du tout mirent a l'ouvrage ot commencerent de tailler Ie pave. Mais
un songe. Car a peine la vision achevee, aussitOt suit la mort soudain, do quolque fagon, la martyre est Ill. pres d'eux, qui les
de I'eveque. Si bien que les deux cOinciderent, et Ie recit par gourmande, les accuse de temerite, les frappe d'effroi. et leur
Castor de la vision qu'il avait eue, et I'annonce par des mes- ordonne desormais de se retireI'. Eux, au debut, ne saValent pas
sagers de la mort de Marianos. Et il en resulta, pour tout Ie qui elle otait; et de fait il ne leur etait pas meme possible de
peuple ensemble, un grand effroi, non pas tant en raison du fait comprendre une affairo si etrange et si difficile it interpreter.
que de sa conclusion rapide. Ils se retirerent noanmoins comme s'ils lui avaient cede quelque
Voila ce qu'il en fut de cet evenement, et queUe en fut la fin. peu : puis ils so remirent it l'ouvrago. Mais de nouveau la mar-
Mais voici un autre prodige que vous allez apprendre, et qui ne tyre leur apparait, cette fois avec un regard plus severe [592 C]
Ie cede guere au precedent. II resuIta, lui aussi, de la col ere de et plus courrouce et de l'air des gehfl tres en colere. Elle leur
Thecle, mais la punition, cette fois, n'alla pas jusqu'll. la mort. ote quasi Ie souille, au point qu'il n'y avait pas un de leurs
membres qui ne fut pris de tremblement et de secousses - car
15e miracle. Comment Thecle empeche qu'on enterre dans son eglise. (51) « Ville de Damalis et de Sand~s », 7t6AEW<; TIl<; ~0(.[LO(.A[80<; 't'E xo(.~ l:a\l80(. 't'ou
<xO(.t add.) 'HpO(.xAeo<; 't'ou 'A[LqJL't'pUW\lO<; 592 A G·8. Sur ce passage VOIr Hofer ap.
[592 A] Parmi les avocats aupres des tribunaux (50) d'ici, Hoscher IV 320 s. (note) et 328.11 ss. Damalis n'est pas autremont connne .(( auf
il y en eut un, c'etait Eusebios, dont la reputation est grande jedcn Fall habcn wir in Damalis cine mit Sand as gepaarte GoWn bez. IIero~ne zu
erblicken » HOfer l. C. 321 fin do Ia notc). Sandas ou Sandon est Ie grand diC~ de
aujourd'hui encore pour sa noblesse, sa culture, la douceur do 'rarse, g6n6raIcm~nt honor6 dans toute la Cilicic et assimi!e il II6r!1Ides, cf. Hofer,.
ses m03urs et parce qu'il etait extremement digne de foi. Cot l. c. 319.333. JYapres Ie meme auteur (l. C. 328:10 ss.), « es 1St fast slCher, dass untel
der'Stadt dor Damalis und des Sandas dio Stadt Dalisallda oder Dalisandos (rMe·
Eusebios donc, non seulement cMrit tres vivement Ie celebre rences) zu vcrstehen ist, deren Name aus L'l1X1.LIXA[0'0(.\l80(., -0<; kontrahiort ist (rMe·
Hyperechios tant qu'il vecut, et le tint en grande estime - de ronces) ». Si cetto conjecture est justo, on aurait ici Ie meme manierisme q~e dans
Ie cas de Laestrygonia plus haut (cf. p. 53, n. aG), sC. l'emploi d'un nom mytlllqu~ ou
fait, ils etaient tous deux origin aires de la meme ville de Damalis comme ici, d'une peri phrase u elements mythologiques, pour designer une villo.
Sur co gout dos periphrases dans Ia rMtoriquc de ce temps, cf. v. gr. Antioche, p. G5,
("9) 't'~\1 hapxoL<; {)7t"1)pe't'ou[Le\l1J\I 8Le7tW\I O''t'po(''t'dO(.\I 589 C 9 s. Non pas, u man n. I,.
sons, " oxercitum ." adminislrans » (Plantinus). O''t'plX't'doc u cette opaque designo (52) xo(''t'cl: 't'~\1 00'[0(.\1 't'0('1h1J\I 592 A It ne so comprend guere. J'ai conjecture ot
toute espeee de charge ou d'offiee d'administration, ef. Du Cange s. V. O''t'po(''t'doc. traduit O(.UTI)\I.
(50) Lire &:PXELO(., comme supra, cf. p. 4/., n. 21.
(53) En 592 A H liro 8EL't'o('L 7to('Pcl: (m:pt od.).
MIRACLES DE SAINTE TllicLE 61
60 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
la martyre est terrible, non seulement quand elle met en crivais plus haut _ tel est Ie point precis, me semble-toil, OU
mouvement sa force, mais meme quand elle regarde fixement j'ai interrompu mon discours - que Dexianos fit yepreuve :
quiconque a merite une telle sorte de regard - et peu s'en faut il les eprouva a l'occasion d'une faute non pas aUSSI grave que
qu'elle ne les eut arraches u. la vie, en sorte qu'ils eussent eu les precedentes,. ~ais qui ~eanm?ins avait fort irrite .1~ marty:~.
besoin u. leur tour d'autres mains pour les enterrer, si son res- Comme ces crimmels qUI habitent dans notre vOlsmage (::> 1)
pect pour Maximos ne l'eut induite u. les epargner. Mais elle faisaient un jour des incursions sur notre terre, pillant tout,
apparut a Maximos et lui fit de tres vifs reproches, lui recom- faisant de tout un butin de Mysiens - ils emmenaient. en
mandant de ne pas mepriser son temple au point d'y faire esclavage les citadins devastaient les villages, [593 C] fondment
passer l'odeur infecte des charniers et del> tombes. Nul rapport, en deluge sur les champs et les maisons, rien n 'e.chappait a
disait-eIle, entre des maisons de priere et des sepulcres. Sauf leurs attaques, a leurs assauts, a leur fureur - DexIa,nos, alors
Ie cas OU un individu, bien que mort, ne serait pas vraiment encore chef des custodes du temple, pris de crainte, comme un
mort, mais vivrait [592 D] en Dieu, et meriterait d'hahiter sous simple etre humain (55), que Ie fort situe devant l'eglise ne tom-
Ie meme toit que des martyrs : tel ce divin Symposios, tel ce bat entre les mains des ennemis , et l'eglise elle-meme, vu qu'elle
, I
saint homme Samos, ou tout autre qui leur ressemblerait. 6tait remplie d'un vaste tresor, fit enlever et tra?sporter, ,a .a
ville tous les objets d'or et d'argent, dans la pensee que c ~taIt
la un lieu plus sur et tres frequente, vraisemblablement mI~ux
16e miracle. Comment Thecle encourage Basile Ii continuer. garde. II fit donc ainsi, et il estimait avoir- fait lu. une. actlO,n
Dans Ie temps meme OU j'ecrivais ce miracle, il m'est arrive prudente et appropriee aux circonstances. Mais une Journee
ceci : car il ne convient pas non plus de taire ce que j'ai regu ne s'etait pas encore achevee que, la nuit etant survenue, Ie
alors [593 A] de 1a martyre. J'en avais assez - comme je l'avoue temple est rempli de tumulte de trouble, de clameurs : la mar-
- de rassembler et d'ecrire les miracles, et j'etais paresseux a tyre court en tout sens crian~ que Dexianos la meprise [596 A]
prendre en mains tablettes et stylet, comme si j'avais renonce comme sans force comme , sans no blesse, comme n "t e an t pas
a rechercher et colliger ces miracles. Comme j'etais dans ces meme capable de 'secourir son t'emple et ceux qui y servent.
dispositions, et que je baillais, la vierge apparut ames yeux et « Ce chretien disait-elle, a pris les devants, ce pretre, mo~
vint s'asseoir it cote de moi, la OU j'ai l'habitude de me tenir propre assesse~r, il a exerce contre moi les violences d'un ennemI,
pres de mes livres. Elle me retira de la main Ie quaternioh sur il m'a privee de ma parure et depouillee, ce qu'aucun des en-
lequel precisement, d'apres les tablettes, je transcrivais mon nemis n'eut meme ose faire. » Ces paroles, quelques-unes des
recit. Et je la vis qui se mit a lire, a y prendre plaisir, a sourire, vierges qui alors couchaient dans Ie temple les pergurent, et
a me montrer par son regard qu'elle goutait alors ce que j'avais les ayant entendues, en etat de veille, de la houche meme de
ecrit, et qu'il fallait finir l'ouvrage et ne pas Ie laisser inacheve, la martyre, peu s'en faut que, de frayeur, elles ne fussent tom-
jusqu'u. ce qu'il me fut permis d'apprendre de chacun ce qu'il bees en pamoison. EIles n'attendent meme pas Ie l~ver du
savait et ce qu'on pouvait connaitre [593 B] par une scrupu- jour, mais partent et rappor-tent tout a Dexianos, ~efaIllantes,
leuse enquete. En sorte que, apres cette vision, je fus rempli de blemes, tremblantes, Ie cceur batt ant. Aussi DexIanos, sans
crainte et de zele, que je repris en mains tablettes et stylet, et
(M) En 593 n 11 s, liro 'rOO\) 7!pocrotXOU\)'rCU\) (Pantinus, n. 2 : 7!POO'~tO'OU\l'rCUV !~
continuerai de Ie faire aussi longtemps qu'eHe l'ordonnera. toxtu) &At't"IJP[CU\) (&A'1)'t"IJp[CU\) cd.). Pour MuO'oo\) AdOG\) 593 n H, cf. Zonob. V,
(Pal'oemiogr. Graeci, 1,122,1,). "
(55) e:uAO:~'1)Od<;; .. , w<;; a\)Opcu7!o<;; 593 C 3. J'~joute
simple ~, Ie sens etant,' l~~
«
17e miracle. Comment Thecle blame Ie custode en chef de son temple. penso quo Doxianos out dli compter sur Ie pouvOlr de Thecle, q~l depa~se, elle, II,
manit6. ItTt y&p 7!p6d~po<;; X'rA. donne il. penser que c'est Ie meme qUI fut ensUlto
C'est d'une colere et d'un reproche pareils a ceux que je de- eveque de Seleucie, cf. ch, XIII.
63
MIHACLES DE SAINTE TllicLE
62 COLLEC'l'IONS GHECQUES Dr, lIUHACLES
veaux arrivants, ceux qui deja repartaient, ceux qui de ~ou
differer meme si peu que ce soit, fait rap porter de la ville au veau rentraient ceux qui de nouveau s'en allaient, les uns crlant,
temple et la parure de la sainto et les vasos sacres du culte. , , d'autres
d'autres se disputant, d'autres en venant auX marns, , ,
Et meme [596 B] ainsi, c'est avec poine qu'il apaisa la martyre rcfusant de ceder, parce que chacun voulait etre Ie premIer a
et lui fit quitter sa colore. participer a I'eucharistie. Sur ce, I'un des deux, qui se nom-
Tels et en tel nombre sont les cas ou ]a punition fut legere, mait Orention, prend la parole et dit : « Que chacun de v~u.s
dans Ia mesure du moins ou iis sont parvenus jusqu'a rna connais- , ., ' 't' favol'lse
admire ce qu'il veut dans la fete : pour mOl, J al e e '
sance : car ceux qui m'ont echappe sont in finis, on ne peut les je pense, [597 A] d'un merveilleux spectacle, plus ad~ir,able
compteI'. Quant au cas ou Ie cMtiment fut plus IOUI'd et plus et plus delicieux que tous autres. Comme, d'un bas-?ote ;,e
severe, il faut les publior maintenant. I'eglise je jetais va et Ia les yeux, j'ai vu une femme SI pro I~
, , d" ' e t SI
uee
gieusemont bolle, de si nohle apparenco, SI Istmg ,
, d eux etare nt
18e miracle. Punition d'Orention qui arait conroitrJ nne femme a gracleuse quo, tout Ie temps e la synaxe, mes Y ,,
l'eglise. colles et cloues a sa merveilleuse beaute, et que ma seule pl'lere
a la martyre fut de mo faire jouir de la boaute de cotte femme,
C'etait la fete de la martyre, 10 dernier jour do la fete, que
et de rien d'autre. )) Tols etaient donc leurs propos durant ~e
nous avons l'habitude de nommor « Ie conge )), parce que la fete
repas. Or, la nuit etant survenue, tous s'endormiren~. Mals
a desormais atteint son terme. Ce jour-la, chacun s'empresse
,
cltoyen et etranger, hommo fait et enfant, gouvernant et gou-
' Orention so us I'influence de ses ponsees du jour, meme en
dormant 'ne fut pas a l'abri do la memo sorto d'imaginations, (57)i
verne, chef [596 C] d'armee et soldat, magistrat et hommo
De fait comme il Ie raconta lui-memo aux gens preso nts , rl eu
la visio~ que voici. II voyait Ia martyre assise dans son te~pI~
prive, jeune et vieux, marin et cuitivateur " tous d'un mot ,
mettent plus do zele ot d'ardeur it se rassemblor, a prier Dieu, a ' t 'b at u
implorer la vierge, it participer aux divins mysteres, pour s'en sur un haut trone [597 B] d'or sureleve, et elle dIS 1'1 U !
chacun dos pelorins rassombIes pour la panegyrie les dons qu elle
aIler sanctifies, comme de nOUVE,aux inities renouveJes do corps , , ' ' • b oup de presents
ct d'ame. Dans cetto foulo se trouvaient aussi deux bommos falsart en honnour de la panegyne memo, eauc ,
'I f' 't En dern ler ,
origin aires de la ville d'Eirenopolis de par choz nous (56). Ces splendides, bien dignes d e ceII e qUI es arsar. «, ,
hommes-la donc, la feto et la synaxe ayant pris fin, prenaient dit-il, ayant jete les yeux sur moi, elle dit : 'Et tOI, I ~omme,
, d? V t obtelllr cette
leur rep as ensemble et avec beaucoup d'autres gens, et, comme quo veux-tu prendre parmI ces ons eux- u or
fomme dont saisi d'amour tu m'as fait cotte priere extra -
il est naturel, chacun disait ce qui l'avait frappe dans la fete: , "., .' , b' d rends-Ia
I'un, son eclat et sa splendeur, un autre l'immense concours du dmarre do te la donner en JOUlssance? Eh len onc, P
. ' ' t ' M ' d't-il au comble
peuple, un autre la vaste assembIee des eveques, un autre I'elo- et va-t-en garde-Ia JOUlS do ton pres en . 01, I ,
de la joie' J' e pris :non present et m'en allai. Car Ja femme se
quence dos [596 D] predicatours, un autre la noble ardour dans , , , ' A'" cheva
10 chant des psaumos, un autre la perseverance dans la veiIIeo trouvait la, parmi les dons qu'elle dlstrlbualt.)) IllSI sa" .
sa vision selon Ie recit qu'il en fit. Or a peine une heure s et~lt
nocturne, un autre Ie bel ordre harmonieux des ceremonies en , I ' 1 dechlre
general, un autre la fervour intense des gens qui priaient, un ecouUie, qu'un demon enrage, sauvage, fond sur Ul, e
et Ie met en pieces. Ill'ecorche [597 C] a la maniere des Perses,
autre la terrible presse dans la foule, un autre ]a chaleur suf-
et, lui ayant arrache toute la peau, Ie remplit aussitot de .ver~
focante, un autre les pousseos et bousculados qu'il y avait eu X
et de pus, au point que les assistants defaillaient, sans VOI , a
durant la celebration des sacrosaints mysteres, avec les nou-
(56) Tii~ xrxO' ~(.Lii~ '\'rx{rr"l)~E1p"l)vou1t6A€")~ 596 C 8 s, Ville d'Isaurie, au voisinage (57) En 597 A 12 lire (sans virgule) ~UaE: xrxOzuaC»v '\'wv tQ'C»v &1t€A~[<pO"l) <prxv'\'rxQ'-
de Claudiopolis et de Germanicopolis, U, Uuge ap, p, W, V 2135, Uamsay Hist. !-l&:'\'C»v, Dans sa traduction Pantinus a confondu &1t€Ad<pO"l) at &7tE:A"I)<pO"l).
Geogr, 365 et carte face p. 330, Cf. supra, n, 18,
64 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
MIHACLES DE SAIN'l'E THECLE 65
Ia vue du mal si soudain qui lui etait survenu : peu s'en faut yeux memes de la vierge martyre. Car les malheureux festoyaient
qu'ils n'en perdissent la vie, tant etait horrible la maladie sous dans un des jardins de la vierge, et, de vrai, trouverent ainsi
Ie~rs yeux. C'etait done Ia la femme, celIe qui avait ete par Ie moyon de mottre Ie couronnement Ie plus inique a leur tres
1m regardee d'un oeil coupable et impie, et ensuite, plus crimi- inique debauche. En effet, alors qu'ils s'etaient tout en flam-
nellement encore, tenue enlacee 1 Finalement elIe aneantit Ie mes par leur beuverie sans mesure, et qu'ils tournaient des 01'-
t~?is f?is m~Iheureux. Car il ne dura pas meme j usqu'au troi- mais les yeux vel'S la luxure - c'est, comme il est manifeste,
S18me Jour, II fut tue par Ie demon, purgeant ainsi Ia peine do Ie terme ordinaire de [600 C] l'ivresse (59) - voici que, par ha-
son regard liconcieux, et de l'outrago dementiel qu'il avait sard, ils decouvrent une vierge qui vagabondait hoI'S des saints
infl~ge ~ l~ ~ie~ge. ~n tol ~rame ~o put etro ignore do personne quartiers : Ie demon avait ainsi machine la chose pour que Ie
- II out ete bIen digno dun poeto tragiquo - et aujourd'hui mauvais dessein regut Ie signal d'agir, Ie peche son stimulant,
oncore [599 A] Ie malheur de cet hommo est reste pour sa et ainsi la vengeance de Thecle son accomplissement (60). lIs
posterite, comme une tache deshonoranto et un stig~ate d'in- attirent a eux cette viorge, l'instalIent a leur table, la font
famie. Quant it moi, ce torrible prodige m'a frappe do paniquo s'etendre pres de leurs couches. lci, on pourrait bien admirer
et plonge dans une crainte extreme, au point que c'est a poine ce qui arriva. La martyre s'est apergue qu'une de ses vierges
si, d'une main tremblante, j'ai pu 10 rolater. est de quelque maniere entortillee deja dans les rets du pecM,
que l'agneIle a ete prise au piege entre deux loups, entrainee
e au gouffre, lit tout pret, do la perdition; en toute hate elIe sur-
1g miracle. Comment Thecle punit deux debauches qui (Joulaient
(Jioler une de ses (Jierges. vient au jardin, pres des grodins qui dorment encore, sans que
la fiIlo eut commence d'avoir commerce avec eux (61). Car,
II se presento it moi un second prodige, qui no 10 cede guero
comme l'ivresse les avait d'abord enchaines parle sommeil,
au precedent. II est meme, selon moi, plus effrayant, mais je
la faute n'avait pas trouve place : en sorte qu'il y avait eu
dois I'insCl'ire lui aussi parmi les miracles, pour qu'il invite los
[600 D] alors quelque avant age dans l'ivresse. « Que pretendez-
lecteurs de ce livre it pratiquor la continence, et les persuade
vous faire, vauriens? » dit-elle. « Quoi, vous chassez rna colombe
de detourner les yeux de toute action impio, de touto profa-
nation qui repugne au regard de la martyre. Aussi, m'en lais-
abruli par los exccs de la veille, cf. Plut., de tuenda pan. 12, 128 D : l:s ~laisirs ~e
sant moi-meme, tout Ie premier, persuader - car rna seule la chair ne sont plaisants quo pour celui qui est en bonne sante. iho 1>~L (L'l') crxom:tv
preoccupation est de parler comme il faut -, [600 B] j'ai etc 'rov txOuv d 7t'p60'cpOG'ror;" (L'l')1>t 'rov b:p'rov d xOGOOGp6r;" (L'l')1>t 'ro ~OGAOGveiov d Oep(L6v,
(L'l')1>1: 'r~V &'rOG[POGV d dl(Lopcpor;" &.n' OGu'rov d (L~ VOGU'rLW1>'l')r;, (L'l')1>1: Oo~epor;, (il l'es-
induit it raconter, it son tour, ce miracle. tomac brouille) (L'l')1>' /tCJ.lAOr;, (L'l')1>t 're;'rOGpOGY(L€Vor;,. De ltCJ.lA?<; quelqu un peut-~tre,
Deux hommes qui etaiont sortis ensemble do cetto ville ou Basile lui-meme, a tire &CJ.lA~ueO'OOGL, et, avec les deux prefixes xOG're~, on obhent
xOG're~EACJ.l~u~O'OOGt, « s'abrutir jusqu'il cpuisement (xOG're~) dans la crapule ».
d'Eirenopolis, et qui etaient montes ensemblo vel'S Ie temple, (59) En 600 B 15 lire sans doute otvOCPAUY[OGr;, (-cpAOY[OGr;, ed.), cf: non se~leT?ent
non pour y prier, mais pour y faire la fete, ensemble oncore les lexiques, mais encore Pall. 1'. Jo. Chr. 7, 39.9 ss. (sur les exactIOns de ,lev,eque
ThCophile d' Alexandrie) O'uvIXOpo[~et 7t'AljOOr;, 7t'A'l')(L(LEAWV ~ux6ACJ.lr;" 7t'Ept :OGr;, OG~[~r;,
tomberent dans Ie pechC. Ils s'etaient procure, de quelque source, xOGt €mO'xtp'r~ 'rorr;, (LOVOGO'' 'l'Jp[Otr;, &.Op6q: vux'rt otvOCPAUY'l')O'OG<; 'rOur;, 7t'!X~OGr;, 'rOur;,
de l'argent mal acquis - ils l'avaient soustrait, je crois, aux O'UV OGU'rii> , II. L. 26, 82.\) ss. B. o{hCJ.l<; 1>t YOGO''rpt(LOGPYwv XOGt OtVOCPA~YCJ.lvi:.V.~rt~
O'E:V dr;, 'rOV ~6p~opov 'rlir;, yuvOGtxdOGr;, €mOu(L[OGr;, (bon parallele il notre texte).
sommes que paient a l'omperour commo impot ceux do qui ]a (60) En GOO C !"-5 j'ai illtervcrti les deux dcrniers termes xOGt 'reAOr;" iJ 'rt(LCJ.lp[OG
loi exige cet impot - et de co gain mal acquis faisaiont plus xOGt xev'rpov -ij &'(LOGP'r[OG (ceci va avec Ie lor terme tvOG xOGt 'ro €v1>60':[L0V 'l') xOGx~ M~:n
~OUA~). Basile est loin d'ctre toujours coherent dans l'ordre loglquc ~es proposl-
mauvais usage encore, buvant sans mosure, s'enivrant, s'abru- tions, d. supra 593 B 7-11 ou xOGt yiXp €VOeV1>E 7t'oOZV, 00<; OL(LOGt, xOGt OG7t'~Adrto(LEV
tissant jusqu'it epuisoment dans la crapule (58), et cela sous les 'rov A6yov (310 s.) aurait dli venir apres les tout premiers mots 7t'OGPOGrtA'l')O'[OGr;, 1>1:
xOGt otOG<; e!rtOV (B 7) ct infra, p. 68, n. G9.
(61) (L'l')1>b,CJ.l 1>t (L'r)1>1: &.<jJOG(L€V'l')r;, -rijr;, x6p'l')r;, 600 C 1~ s: Ou « ~'ayant pas cl!-core
(58) xOG'r~~~CJ.lAe:u6(LE:vot GOO B 10. Hapax, semble-t-il. ~CJ.lAOr;, = celui qui cst cntrepris la chose ». En tout cas c'est au moyen, non «vlrgmeque mtacta » Pantmus.
5
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I
fusion Ie remMe pour toutes les betes malades. On pouvait pas nous accuser, et clamer a tous les maitres en renom qu'elles
voir desormais tout chemin, toute voie publique, qui de la seules ont ete negligees par nous, alors qu'elles ne l'ont pas eM
plaine ou de Ia montagne regarde vel'S Ie sanctuaire et y mEme, par la martyre, mais que, hien au contraire, eUes ont souvent
rempli de chevaux, mulets, bCBufs, moutons, chElVres, anes, obtenu des miracles pour les orateurs de talent et de distinc-
V'oire de chiens et de porcs, [605 B] qui tous se pressaient vers tion? Eh bien donc, allons, disons a present ce que nous avons
ce seul en droit, d'ou jaillissaient alors remedes et guerisons appris : pour que ces disciplines aussi nous rendent graces, comme
plus encore que simplement de l'eau. Quelle bete alors s'eloi- ayant ete jugees dignes elles aussi de trouV'er place dans Ie bien-
gna de l'eau, encore malade (73)? Bien plutot, comme si elIes heureux chCBur des miracles.
avaient puise de Ia sante plus que de l'eau, elles reprenaient
force at bondissaient, courant chacune vel'S son champ et son
24 0 miracle. Guerison du grammatiste Alypios.
etable, pleine de vigueur et retournant a ses travaux accoutumes.
[60S A] Olympios (75), Ie tres celebre grammatiste, avait pour
pere Alypios, qui etait lui aussi grammatiste et professait ja~is
22 0 miracle. Gzufrison a la fontaine du cheral de M aria nos. en ce pays. Cet Alypios tomba un jour en une grave maladle,
L'un des personnages marquants de la ville avait en ce temps- qui faisait craindre Ia mort. Alors que les medecins desespe-
la, a ce qu'on raconte, un cheval malade et en tres mauvais raient, que Ie mal etait juge desormais au-des sus de tout hu-
etat - Ies epaules [605 C] se contractaient vel'S I'arricre-train , main secours, qu'il ne restait plus nul espoir de vie, Alypios a
Ie reste du corps etait tire en sens contraire, et, par un res- recours au seul refuge de teIles maladies, a la martyre. 11 se rend
serrement, comme on dit, des muscles, empechait la marche au temple, et desormais ne fait plus dependre que du salut de
en avant; pour mettre a l'epreuve la sainte plus que par foi la-bas sa guerison. La martyre donc s'empresse - car eUe
il envoya Ie cheval a cette fontaine, pour voir si elle serait ca~ cherit les bonnes lettres et la culture, elle se plait toujours a la
pable de supprimer un si evident peril. Or la martyre, sans du compagnie de ceux qui la louent plus eloquemment - eUe veut
tout ignorer qu'on Ia mettait a l'epreuve, renvoyale cheval bien delivrer notre homme du peril ou il est. EUe l'en delivre ainsi.
vivant (74) a Marianos. Nul n'ignore, je pense, que celui-ci 1'30- EIle Ie V'isite une nuit, et, selon son habitude [60S B] avec les
conta son intention secrete, et la guerison inattendue du cheval, malades, s'etant montree a lui sous son aspect reel, elle lui de-
et qu'il fut dans une admiration sans bornes devant Ia maniere mande tout de go ce qu'il a et ce qu'il veut. Lui de repondre :
dont la martyre avait fait si rapidement pencher 130 balance.
Tu Ie sais. A quoi bon te dire ce qui t'est connu?
(ll. I, 365)
0
23 miracle. Guerison d'un areugle. Transition a une nourelle
C'est un mot d'Homere. Mais Alypios Ie cita alors avec plus de
section.
justesse qu'Achille autrefois ne Ie dit a sa mere Thetis. Car il
[605 D] Le bruit s'est repandu aussi que l'un des grands et avait double fin : il recommandait lui-meme son metier, et cette
notables de Chypre, qui etait prive de Ia vue, attire par Ia re- faffon d'implorer Ia vierge etait la plus belle et 130 mieux adapMe.
putation de cette eau, fit la traversee, usa du remMe, et rentra La martyre done sourit, charmee et de l'homme et du vel'S,
a Chypre en possession de la vue. pleine d'admiration pour une reponse si bien accordee; et, comme
Mais apres ceIa, est-ce que les disciplines liherales ne vont eUe se trouvait avoir dans la main un [60S C] caillou, qui pa-
, (l3) Si~ en lisan: 605 B 2. s. avec .les manus5rits (cf. ib;. n. 1) 'tt, Be: ~ij>ov 'tOU llBIX't'oc; (75) Plus loin 608 D 1, 8, on nommo un fils Solymios. Comme il ya peu d'app~
IX1t1)AO€V Ii't'~ VQcrouv; Pantmus ecrlt 't'6't'E: ~cpov ... cXrc1lAOe:v OUX€'t'~ vocrouv. a
renee que Basile ail fait erreur sur Ie nom d'Olympios, puisqu'il cst rc&vu (mms
(71,) ~wov 605 B 7 : on attendrait crwov. non aulrement connu, rien en P. W.), on supposera done qu'Alypios avait deux fils.
72 COLLECTIONS GHECQUES DE MIRACLES MIHACLES DE SAINTE THicLE 73
raissait etre tres joli, de couIeurs variees, non indigne certes de saisit aussitot du caillou, Ie tient embrasse, et sur Ie· champ
Ia main qui Ie tenait, elle Ie tendit a AIypios et l'invita a Ie sus- fut delivre de sa longue et penible maladie. C'est que la martyre
pendre a son cou, comme capable de repousser 1a maladie et avait touche Ie caillou, et voila pourquoi, a mon sens, il etait
d'apporter Ie salut. Alypios Ie re(,loit, et, tandis qu'il dormait une chose si belle et si gracieuse, voila pourquoi aussi il se montra
encore, il lui sembIait Ie tenir en la main et Ie serrer tres fort , plus fort que la mort.
comme un gage de vie et de sante. Mais, une fois sorti du som-
meil, il ouvre la main et ne trouve rien. II crut aIors avoir ete
trompe, et que Ie reve n'etait vraiment qu'un reve. En sorte 25 e et 26e miracles. Guerison de deux pro/esseurs de rhetorique
qu'a la maIadie s'ajouta Ie chagrin. Car tout objet d'espoir est paiens.
delectable, on est convaincu qu'il se produira. S'iI ne se produit 25. Apres Ie grammatiste, passons aux professeurs de rM-
pas, il rend plus acre Ia douIeur, il pique et transperce l'ame torique, je veux dire Isokasios et notre Aretarchos d'ici. Chacun
du malheureux qui s'etait livre a l'espoir. Cependant, dans Ie d'eux, bien qu'incroyant, a ete favorise d'un miracle de la
cas present, [608 D] tristesse et chagrin furent chasses par Ie martyre, mais chacun d'eux est reste incroyant. La responsa-
fils SoIymios. CeIui-ci en effot, peu apres, fit son apparition bilite pourtant incombe a qui decide, comme Ie dit quelque
chez Ie pere, et il tenait dans la main ce meme caiIlou que la part l'admirable Platon (77), Ia martyre n'est pas responsable.
vierge avait tenu durant la vision nocturne et qu'elle avait Isokasios, de grammatiste, etait devenu professeur : mais
donne au malade. Ne semble-t-il pas, en verite, que Ie recit de s'il perdit son premier titre, il n'acquit pas Ie second (78). Comme
ce miracle soit pure fiction et fable? Mais si vous apprenez ce il etait tomhe malade un jour, il fut d'abord a la ville bien connue
. s'ensuivit, et comment cela eut lieu, vous meUrez fin ,
qui d' Aegae en Cilicie (79). Puis, comme il arrive aux malades, il
Je pense, a un si detestable soup(,lon. Ce Solymios aimait tendre- cut Ie desir d'un lieu tout a fait tranquille et il vint sejourner
ment son pere et tout ensemble cherissait les etudes. II consacrait [609 C] dans Ie temple de la martyre, situe un peu a 1'ecart
donc une partie du jour a l'etude, une autre a son pere. Toute de la ville, dans la pensee qu'il obtiendrait la surtout ce qu'il
la matinee, il etait assidu aux bonnes leUres ; l'apres-midi venu souhaitait. Comme il avait donc trouve la une grande tranquil-
il montait (76) vers son pere, pour Ie visiter, lui donner seq soins' lite, un jour qu'il avait dormi un peu, il obtint, en plus du calme,
rendre tous les devoirs qu'il est juste qu'un fils rende a son per; la guerison. Car, alors meme qU'elle lui repro chait son incroyance,
et qu'un pere [609 A] re(,loive de son fils. Etant donc monte la martyre ne lui refusa pas son secours : il entendit d'eHe ce
alors, Je jour meme qui suivit la nuit OU la martyre etait ap- qu'il devait faire, il Ie fit, et il fut delivre de son mal. Cela,
parue, il trouve oe caillou sur la route. Ravi de sa beaute et c'ost l'admirable Eudokios qui me 1'a rapporte et raconte,
de sa taille - car il avait ete parfaitement roule jusqu'a for- un homme des plus distingues et consideres, qui habite cette
mer une sphere bien proportionnee, au point de sembIer fai~ tres belle ville de Tarse pres d'ici, qui en est l'ornement, et qui
au tour; et il etait mele de veines blanches et pourpres qui ne met rien au-dessus de la verite.
s'entreIa(,laient, ce qui en faisait un bijou cree spontanement par 26. [609 D] Quant it Aretarchos, un maitre de rhetorique de
la natur~ et merveilleux - il Ie ramasse au sol, et, jouant avec
lui tout en marchant, arrive ainsi chez son pere. A peine eut-il (77) ~ IX.t·rLlX. ,,{;}v ~OUAOf1.eV(!)V Bas. 609 B 7 s. : IX.t,,(1X. E:A0f1.evou PI. Rep. X
617 E " s.
paru pres du lit, a peine Ie pere eut-il aper(,lU Ie caillou qu'il (78) "I> ile Oll x"1)cr&[Levo~ 609 B 11. Bntendre sans doute « il ne se fit pas une
tenait en main, qu'il reconnut Ie cadeau de Ia martyre. II se reputation dans Ie second poste ». Comme il s'agit de paYens, ces deux chapitres
sont tras nettement depreciatifs.
(79) Centre bien connn d'un cuIte d' Asclepios en Cilicie, et du meme coup lieu de
(76) av[eL 608 D 11, aVL6JV 609 A 1. Alypios cst toujours dans Ie temple de Thecle, cure. Cf. Hamsay, Hist. Geogr. 385 s., IIirschfeld ap. P. W. I, 945 (nO 6); sur Ie
qUI cst aU-dcssus (au sud) de Seleucie. templc, Antioche, 508 s.
74 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES MIRACLES DE SArNTE TH~CLE 75
chez nous, je ne saurais dire co qui l'emporte on lui, de Ia sot- l'ame par Ia martyre, quand bien meme cela aussi (81), tu l'eusses
tise ou de I'incroyance. Uune et l'autre, de fait, florissent et rapporM a Sarpedon, ou a Apollon, ou a qui que ce soit des
prosperent si bien en lui qu'on a peine a discernor Iaquelle des demons qui te soit cher. La guerison de l'ame, nous Ia porte-
deux a Ie dessus : il n'en a pas moins Ia reputation de maitre do rioDs au compte du pouvoir de Ia martyre, ta reference de Ia
rhetorique. Cet Aretarchos fut un jour amige d'une tres grave chose a Sarpedon, cette fois encore, au compte de ta sottise.
maladie des reins, au point quo I'extreme souffrance lui faisait Ceci n'aurait pas grand poids a nos youx, pourvu seulement
souvent esperer Ia mort et que meme ilIa desirait passionne- que ta conversion nous fut acquise.
ment a cause do l'exces de ses tourments. Cependant il obtint
de Ia martyre assistance et salut. Ello lui dit que Ie remMo tres
27e miracle. Comment Thecle assiste Basile quand il doit parler
certain de son mal ne serait rien d'autre que l'huile qui brulo
la nuit dans Ia lampe qui eclaire continuelloment sa tombe. en public.
Il demanda donc de cotte huiIe, [612 A] ot apres s'en etre enduit [612 C] Voici d'auLre part a quel point Ia martyre aime l'art
et froUe au lieu meme OU il soufTrait, il obtint Ia guerison. oratoire, a quol point ene se plait aux discours d'eloge tels que
Cepondant il ne quitta pas son impiete. Car, bien qu'il fut assez les miens . .Te Veux dire un des miracles qui se sont produits
perspicace et reflechi pour reconnaitre ouvertement celIe qui pour moi et en ma faveur, un miracle dont Ia martyre meme
lui avait fourni Ie remede, c'est a un autre qu'iIl'efera Ia grace qui m'en a favorise saiL bien qu'il a eu lieu et que je ne mens pas.
du traitement : « C'est Sarpedonios, disait-iI, qui m'a ordonne C'eLait 10 temps de sa panegyric annuelle et je m'etais pre-
de Ie lui demander et de Ie prendre. » Et apres cola, 0 Ie plus pare moi aussi pour un petit sermon en I'honneur de Ia fet?,
docte et Ie plus sense des sophistes, toi qui repands sur nous 10 non pour rien dire de memorable et qui fut digne d'elle, mal::;
parfum de Gorgias Iui-r.uemo, Ie dieu qui te renvoie a un autre pour m'attirer quclquo marque de bienveiIlance de la part de la
ne t'eut-il pas fourni lui-mome, s'il l'eut pu, Ie remMe, mais martyre, puisqu'elle recompense magnifiqutlment les moindres
toi son suppliant, son thiasote, et, comme tu disais toi-meme, honneurs qu'on lui rend. II ne restait plus qu'un jour avant que
son myste ot son amant, il t'expediait a une autre personne, je padasse ot produisisse mon discours, quand un mal ~e
et cola bien qu'elle fut son ennemie? Or c'etait Ia Ia preuve frappe (82) it I'oreille, tres penible et douloureux, tel que toute
flagrante, et qu'il confessait son impuissance, ot qu'il procIa- l'oreille s'etait distendue, qu'olle etait secouee de spasmes
mait Ia force de Ia martyre, et qu'il enseignait clairement a cruols pal' suite des mouvements internes, [612 D] qu'un flatus
tous [602 B] que lui manquaient desormais et Part, et Ie pouvoir, violent se creait de force un chemin jusqu'it la concavite du
et Ie talent qu'en verite il n'avait jamais eus, mais que c'est Ia crane, et qu'il en resultait dans ma tete de grands bourdonne-
vierge a present qui peut de grandes choses et qui guerit tout Ie ments. En sorte que je desesperai entierement de parler, et
m'attendais memo a une aggravation du mal. Deja aussi, de
monde (80). Car cot excellent Sarpedonios n'out pas ete stupide
queIque maniere, j'etais pris de honte, de ce que, moi qui, aux
- a moins qu'il ne faille Ie dire sago a ta maniere - au point
yeux de la fouIe, avais reputation d'eloquence, j'eusse abandonne
de ne pouvoir memo cacheI' son imperitie, ou jo no sais s'il ne
Ie poste a l'instant meme OU il s'agissait de montrer mon talent.
faut dire son impuissance. Bien au contraire, ilIa Iivro par toi
Tout cela pourt ant , Ia martyre l'empecha. EIle vint a moi Ia
a Ia risee publiquo, par toi Ie brillant, 10 merveilleux orateur.
nuit, me prit l'oreille, Ia secoua, et, par Ia decharge d'un peu
Plut au cieI, pourtant, que tu eusses He aussi gueri quant a
(81) En 612 n 9 lire aVIXOe:'i:vIXL Be XlXt -roi:i-.o (-rOUTCf> in textu), en 612 n 13 IL~VOV
(80) En 612 B 2 s., lire avec Pantinu~ n. 2 ~ B~ 1tlXpOevo~ eo-TtV ~ ILe;YcXAIX -re; (6l~ TO 1tp6Te;pOv IL~V (IL~ in toxtu : aut fort. soclud.) d'l), cf. Pantmus notes 1 ct ~.
in textu) CiPTL 8uvlXILev'I) XlXt t<>lILev'I) 1tcXVTIX~. (82) En 612 G 12 liro 1tpOo-~cX).,).,e;L (1tpO~cXAAe;L cd.).
76 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES MIRACLES DE SAINTE TH~CLE 77
de pus, dissipa entierement Ia douleur. Quand en effet ce pus nance. Mais elle etait unie a. ill) mari volage, qui se laissait fas-
eut ete expulse des conduits tortueux et, pour ainsi dire, de ciner par les fiIles de joie, et, non content du commerce legitime
l'adyton de Ia tete, je fis mon appal'ition - aucun en effet des avec sa femme, se livrait sans me sure a. ces plaisirs vulgaires.
predicateurs ordinaires [613 A] n'etait encore Ia. - et montai De cetto Calliste donc, Puno des femmes de theatre, qui vivait
au pupitre (83) : on nomme ainsi Ie lieu ou les orateurs s'exhibent, dans la debauche avec Ie mari, avait, par un poison, ruine la
c'est l'ambon ou l'akroaterion. Je fis alors un court sermon , boaute et defigure Ie charm ant visage : ainsi, pensait-elle,
et Ia martyre me preta si bien Ia main, ajouta si bien de la grace Calliste no servirait plus aux plaisirs du mari, mais c'est elle-
a mes paroles, que je semblai meme etre de quelque importance, meme qui Ia remplacerait au lit et qui, bors de toute convenance,
et avoir parle moderement bien, et avoir remporte Ie plus vif coucherait avec l'homme. Apres cet accident, desormais sans
succes d'admiration sans qu'il y eut eu pourtant rien d'admi- commerce avec l'epoux, car la hideur de son aspect etait bien
rable dans ce que j'avais dit (84). Et quand j'eus ete juge digne pro pre a. la faire hair de Papios - tel etait Ie nom de I'epoux-,
de participer au synode des eveques (85), d'etre inscrit sur Ia liste Calliste a recours a. Ia martyre. [613 C] Elle lui expose et son
des docteurs et pontifes, Ia sainte m'assista tres souvent· elle infortune et Ia mechancete de l'hetalre, et elle Ia supplie de lui
me tendait en tout cas, m'apparaissant Ia nuit, un livre o~ un
accorder quelque remMe, en sorte qu'elle rentre en possession
document, et cela me semblait de toute fagon Ie signe, comme
de sa beaute et de Ia faveur de son mario La martyre entendit
ce l'etait en verite, qu'elle donnait Ia plus forte approbation a.
ces plaintes : ce malheur l'avait fortement emue de pitie, car
mes doctrines. Pourquoi d'ailleurs elle agissait ainsi dans ses
apparitions, faut-il m'etendre la.-dessus? Le result at du moins la femme avait mele a. ses paroles des flots de larmes, et-Ta
fut de nouveau tout a. fait clair. p'riere n'est jamais si bien assaisonnee que par un debordement
Mais voici un autre fait que je dois mentionner, c'est tout de pleurs, qui ruisselle du fond meme de Pame. Aussitot elle
juste si de quelque maniere il m'est revenu a. la memoire. indique et prescrit Ie remede : « Achilte, dit-elle, de ce savon
qu'on vend a. Ia porte de mon temple (86), impregne-Ie de vin et
28e miracle. Comment Calliste recourre et sa beaute et l'amour de lave-t-en la face : aus'litot la Iaideur s'en ira. » Sur I'heure
son mario Calliste oMit; sur l'heure aussi, ayant fait disparaitre de son
visage la tare qui Ia defigurait, elle separa du meme coup Pepoux
[613 B] CaJliste etait noble dame et d'une majestueuse conte-
de l'heta'ire, [613 D] qui etait bien pire tare. Car avec Ie savon,
(83) 8etx't"I)pto'l 612 D 12 : pas d'autro exemple en ce sens dans les Lexiquos comme on dit (87), tomba aussi ce qui causait l'ulcere. Et ainsi,
Plus loin (613.A 1) O(fL~CU'l est courant. Pour eXxp0Q;'t"I)pto'l (613 A 2) dans Ie mem~
sens, L~mpe Cite ~us. r. Canst: IV ~5, p.:. HO.8 ss. Heikel [J.'1'1)fLo'leuO'Q;t 8' &1;to'l 6><;
7tP~<; Q;u"{l yeyovcu~ (Const,antm) 'l'Il 'l'OU ~[ou 'l'eAeu'l"ii €mx~8e:t6v 'l'tVQ; A6yov € 7t L (86) Interessant. Ces PUfLfLQ;'l'Q; ... 'l'cX 7tPO 'l'OU 'IQ;OU'l'OU'l'OU 7tCUAOUfL€VQ; (613 C 10 s-)
'l'OU O'uv'1)Oou<; 8t'1)AOe:V Q;Xp0Q;'l''1)p[ou. La phrase XQ;L YcXP OU7tCU OU'l'e: 'l'WV E7t' dovaient sans do ute etre censes avoir me me vertu que, par exemplo, la x'1)pcu'l"1)
EXXA'1)O'[Q;t<; Ae:y6v'l'cuV 'l't<; ~v ?13 A 2 s. doH se rapporter a c":JrpO'1)V €7tt 'l'OU 8e:tX'l''1)- de COme et Damien. Celle-ci etaH distribuee a la vigiJe de la feto, cf. L. Doubner
p[ou 612 D 11 s., et c'est mamfestement un trait de fausse humilite : Basile prend la Kosmas u. Damian, Wunder 30.55 S. rpOM,xO"1)<; 'l"'ij<; 7tQ;wuX[80<; 'l'0 0'Q;~~,x'l''f XQ;i
parole parce qu'aucun des orateurs attitres de la fete n'est encore la. 'l''ij<; x'1)pcu'l"'ij<; 6>t; 7te:pL &pQ;V fx'l"1)v 'l''ij<; VUX'l'o<; 'l'0 AQ;0 8tQ;800elO"1)<;. Mms on
(8'» XQ;L OQ;UfLQ; 7tAercr'l'OV E7tL fL'1)8e:VL OQ;UfLQ;O''l'W 'l'WV €fLWV eX7te:veyxe:O'OQ;t A6ycuv p~uvaH e.n obLenir ~ussi en s'adrosSa!lt au clorge de l'c¥liso. dos saint.s C6mo, et Dai
613 A 5-7. Si je compronds bien, Basile veut rapporter a 'l'hecle tout Ie succes de mlCn, qUI la donnment ou la vondalCnt, on ne saurmt dire, cr. mlr. 39.12 sS. €
son discours. e:!VQ;[ 'l't XQ;L 86~Q;t 613 A fl S. (cp. 80xouv'l'CUV e:!VQ;[ 'l't Corg. fl72 A 2 ~OUA€t eXVQ;~AeljJQ;t 'l'0 'l'eXVOV O'OU, O(7t€AOe: €V 'l'0 VQ;0 'l'WV a.y[cuv KOO'fLii x,:tt l16"fL tQ;-
'l'WV O'€fL'IWV 8~ XQ;t 8oxouv'l'CUV 'l't dVQ;t Euthyd. 303 C 8) et fL€'l'P[cu<; dp'1)xevQ;; 'IOU XQ;t 8tQ;['l"1)0'Q;t 7tQ;pcX 'l'WV XA'1)ptXWV 'l'W'I EXe:tO'e: O'X€uQ;~ofLev'1)<; €V 'l'CJl o~ fLQ;'l'~
sont evidemment des Iitotos de fausse modestie. 'l'OU Xp~O"l'OU e:UAOY[Q;<; XQ;t 8€~O'1)'l't Q;U'l'WV tVQ; €mxp[O'cuO't'I 'l'OU<; orpOQ;AfLou<; 'l'OU
(85) Basile assista aux Conc.il.os ?O Constantinople (-14.8 : condamnation d'Euty- 'l'eXVOU O'ou 'l'OU €UAoyrWevou €xelvou rpQ;PfL,xxou.
cMs) et d'Ephese (f,fI9 : rehabilItatIOn d'Eutyches). Ce dernior condIe fut, comme (87) &fLQ; ycXp 'l'Ort; PUfLfLQ;O't XQ;t 'l'0 7totOUV, &<; rpQ;O'~, 'l'0 /,!AXO<; O'UV€~e7t€O'e:
on sait, qualifie par 10 pape S. Leon (t t,(1) de latrocinium, et Basile fut blame d'y 613 D 1 S. II y a la, somble-t-il, quolquo locution proverbiale comme «Avec Ie savo?,
avoir pris part. II signa alors, on 450, la lettre dogmatique du pape dite • Tome de part la saleta », mais je n'on ai trouva d'exemplo ni dans Gaisford ni dans 10 rocuell
Leon» qui servit de base doctrinale au concile de Chalcedoine (451). C'est peut-etre de Leutsch-Schnoidewin ni dans les Mittelgriechische Sprichworter de Krumbacher,
a cos discussions que Basile fait allusion dans ce qui suit, ou tout n'cst pas clair. (Munich, 1893). Peut-etre &<; rpQ;O'L = simple mont « a ce qu'on raconte D.
78 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES JIIIHACLES DE SAINTl, 'l'IIECLE 79
tout a la fois, CallisM redevint tres belle (KallistrJ) et elle plut' racontons-Ie comme dernier des miracles. Mais au vrai ni ce
de nouveau a son epoux. n'est Ie dernier, ni il n'est a craindre qu'iI y ait jamais un der-
nier miracle de la martyre : aussi longtemps qu'il y aura des
2g e miracle. Thecle re(Jele un (Jol commis en son temple. hommes, toujours aussi seront jaiIIissant ces miracles, toujours
bouillonnant, toujours prosperant, toujours apport ant de toute
Mais ne manquons pas de mentionner une autre femme bien maniere la guerison. II faut donc dire ce miracle aussi, comment
~~'el!e ait ~te pauvre et du commun. Une certaine Bassian'e, qui une de ces dames [616 C] des plus distinguees et bien nees, du
s .~talt U? JOu~ q~erellee ave? les siens, prit en secret quelques nom de Dosithea (90) - Mais en voila assez ! A quoi bon ajouter
blJOUX d or ~~ ~UI appartenawnt, de pauvres bijoux, [616 A] de quelques gouttes a I'infiniM de l'Ocean (91)? Et meme si je
ceux que preCIsement (88) une fiIeuse saurait avoir - c'etaient voulais ne dire plus de miracles, je ne saurais en trouver Ie
d~s bagues e~ de petits colliers - et vint s'otablir au temple, moyen (92). De fait, meme ces miracles-ci, c'est a grand-peine
ou elle passmt tout son temps, car elle etait irritee contre ses que je les ai rassemhIes, courant en tous sens de-ci de-lil, les
proches .. E!l~ avait pour compagne a ce moment-l a une jeune l'ecueillant et les colligeant, m'en faisant une collection comme
fille, qUI d adleurs ne tenait pas grand compte de Ia conduite si je les tirais de I'ahime, pour ainsi dire, de la longue duree du
scrupuleuse ~t ~eservee. appropriee aux vierges. Un jour qu'elle temps et de I'oubli (93), tout de meme que rassemblent ces
Lrouva Basslane tout Juste alors dormant ou absente elle Iu'
deroba ses bijoux et s'en alIa. La femme se reveille et' ne trou~ YEyov6e" t:)e, 'l'EAe:U'l'lXtOV e:!mlliJ.e:v 'l'WV OlXuiJ.1hOlV. Mais il se pourrait bien qu'on
vant plus les bijoux qU'elIe avait il n'y a qu'un in;tant eHe se cut ici ~VIX ct subj. = irnperatif, cr. TIadorrnacher, N. Test. Gramm. 1 ?O, Moulton
Prolegomena 1 ?6, 1?8 s,' v, gr, Eph, 5, 33 ~XIXO''l'Oe, 't'1iv €IXU'l'OU yuvlXtxlX O(hOle,
me~ a eto~rdir la martyre de supplications bruyante~ et de aylX1t'tX'l'(,) we, E:lXu'l'6v, 1) (ll: yuv~ ~VIX CPO~'ij'l'IXL 'l'OV r1.V(lplX, G'est sans do ute un
plamtes, cnant que ces bijoux avaient ete confies a sa garde tour de grec populaire (papyrus, Leont. Neap, V, Sym, Sali 132,23, 1ft/d" 161.12)
et Basile ecriL Ull grec de lettr6. lHais on a chez liJpictele III!" Q 'l't ouv; ~(le:L dO'EP-
et qu'elle les a perdus ou refuse de les rendre. Mais la martyr~ X6p.e:vov de, 'l'0 OtlX'l'POV 'l'OU'l'O d1t'e:tv« r1.ye:, ~VIX ~WCPPOlV O''l'e:cpIXVOl0'ii »; rXAA' exe:tvo
eu~ pitie ~ussi, de cette femme, et, comme elle avait pris en « rt.ye:, ~VIX TIJP~O'Ol 'l'~V EiJ.IXU'l'OU 1t'POlXtpe:O'W ... », IV, 1, Id "IvlX iJ.~ iJ.OlpOe, n, aAA'
~VIX iJ.1X0 1l & I1.A€yev 0 ~OlXPtX'l''1)e" Si c'cst 10 sens ici, traduirc : « Disons aussi,
hame la v~e desordonnee de la jeune fille, elle revele son vol. comme dernior dos rniracles, celui qui s'ost produit tout rccomrnent. »
(90) Apres L\.OO'We:1X 8VOiJ.IX, on a un brusque' An&. 'l'OlJ't'OlV iJ.~v rt.ALe, 616 G 2. On
C'est par la surtout qu'elle la chatiait, en manifestant sa faute peut evidemment supposer une lacune. Une soudaine interruption parait plus dans
et il c~Ile [616 B] qui avait fait la perte et a tous ceux qui se 10 style de Basile,
(91) 'l't y&.p XlXt 8cp€AOe, rX1t'dpote, 1t'€Atiye:O'LV EmpplXtvm Ijie:XtX(lIXe,; 616 G 2 s. lei
trouvment dans Ie temple. Des lors, ouvertement convaincue encore on jurorait qu'on a affaire it un proverlle. Hien pourtant d'exactemcnt pa-
du crime, la jeune fiIle rendit a Bassiane les bijoux d'or et elle reil dans les Parremiographi Graeci, Lo plus proche serait Diogen. VII 68 (I 298.20)
vecut desorma~s corrigee, en sorte que sa faute en vin{ a etre :;~'l'IXiJ.<iJ iJ.e:ytXA<}> 6X€'l'oV E1t'tXyeL et Greg, Gypr. II 6? (I 361d4) 61XAti'l"l'1l ex XlXptX(lplXe,
UOOlP,
oubIiee et qu'elle recouvra la faveur de Ia martyre. (92) o{l't'e (It, d 1t'AdovlX ~OUAOtiJ.'1)V e11t'€tv, (lUVlXtiJ.'1)V &veOP€tv Gi6 C 3 s. eopdv,
sc. d1t'dv. Pour €OptO'XOl et infinitif, cpo Epict. II 12, 2 (loe, youv <1> OtAeLe, 1)iJ.wv
l(lLw't'1)v 'l'LV&. 'l'OV 1t'poO'(lLIXAey6iJ.e:vov, oUX e:OptO'X€L XP~O'IXO'OIXL IXU'l'ii>, III 19, 5 1t'tX-
AW &'1 iJ.~ dJpOliJ.e:V cplXydv ex ~IXAIXVdou, ou(lt1t'o6' 1)iJ.WV XIX'l'IXO''l'tAA€L 't'1iv e:mOu-
30 e miracle. Basile interrompt brusquement le recit. iJ. tIXV 0 1t'IXL(lIXYOly6e" rXAA&' atp€L 'l'OV (LtXye:LpOV, Basile no veut evidernment pas dire
qu'il no saurait trouvcr d'aulres miraclos quaml il viont de declarer que ces mi-
Pour mentionner aussi ce qui s'est produit tout recemment (89), racles sont une infinite. Mais il aligno ici une serie de lieux cornmuns. (1) Grando
difficulte (iJ. 6AL e, 61 G G 5) de colliger ces faits qui ont ete comme engloutis dans
(88) En orlX rXd X€PV~'l't(lL ytVOL'l'O yUVIXLXt 616 A 1, rXd ost suremont faux Lire
l'ablrne do l'oubli, cr. Wien. Stud. ?3 (I %0),135 noto; (2) La rnatiere est immenso,
orlX (l~. X'l'A, , avec la nuan~e depreciative bien connue : « the noio of disp;rage- on ne peut rappelcr que quelques miracles, Wien. Stud. 132 S. (3) Basile n'a que de
rnent, Irony, o~ c~ntempt I~ rarely q,uite absent " Denniston, Greek Particles, 220. faibles forces, Wicn. Stud. 12Q-13L
(93) XIXt 'l'IXU'l'1X O'UV'1)pIXVLO'tXiJ.'1)V iJ.6ALe, ciJ(lt 'l'E: xax€tO'e 1t'epLOtOlv, 1t'epLIXOpot~Olv
Plus bas, on e:~pOUO'IX xIXOe~(louO'IXV, IXd ~ rX1t'OUO'IXV 'l'~V BIXO'O'LIXV~V 616 A ? s., &:d
I?e parait au~sl une corruptIOn de (l'1) : « ayant trouve juste it co moment mem B - IXU'l'&' XlXt O'UAAtyOlV, &O'1t'ep EX 'l'LVOe, ~uOou 'l'OU iJ.IXXPOU Xp6vou XlXt 'l''ije, A~6'1)e, avlX-
SIane endormle ou absente '. e as A€y6iJ.e:voe, 'l'&. OIXUiJ.IX'l'1X 616 G 5-8. Directement copie par Cyrille de Scylhopolis,
(89) Ainsi en laissant it lvlX son sens ordinaire en 616 B ? S, "IvlX (l~ XlXt 'l'0 r1.P'l'L
Prot, 6.4-8 Schwartz 'l'&. 1t'IXPIX(lPIXiJ.6v'l'lX 'l'(:) Xp6v<}> 7tIXP&' aA'1)Oe:u6V'\'OlV &:ytOlV ... ave-
80 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES MIRACLES DE SAINTE THicLE 81
pierres precieuses tant vantees ceux qui en font commerce. tres grand Elisee et les sa.ints [617 A] qui l'ont imite. De fait,
En outre, ceux qui resteraient it dire ne sont pas un petit bien que Samos ha.bitat notre ville, il etait plus assidu au temple
nombre (94), ils ne sont pas meme quelque chose qui depasse que ceux-Ia meme qui sejournent au martyrium : deux fois
tout grand nombre concevable (95), ils ne sont pas, d'un mot, cha.que jour il montait la-haut en psalmodiant, et rien ne pou-
nombrables - et d'ailleurs il ne m'a pas ete possible de naitre vait l'en empecher, « ni feu ni greIe ni neige ni gla.ce ou vent
muni d'ailes ou d'une force adamantine, et de traverser terres souffiant en tempete » comme dit quelque part l'admirable
et mers, de maniere it recueillir les miracles dans chaque cite David (Ps. 148, 8). Ainsi Dexianos, qui, « tout mortel qu'il etait,
et pays, ou chaque village, ou chaque maison. - De fait (96), n'en savait pa.s moins tenir tete it des coursiers immortels »
ni cette collection ne saurait m'avoir etC possible, ni il n'eut (Jl. XVI, 154) (98). Cal', bien qu'il fut un personnage en vue et
ete a rna portee [616 D] de tout mettre par ecrH, ni rna vie ne vecut de la. ma.niere qui convient a un homme public, il ne s'ecar~
serait assez longue pour suffire it une telle infinite de miracles. tait absolument pa.s de la vertu des hommes plus haut nommes :
Arretons donc ici, comme j'ai dit, mon discours it ce sujet, bien au contraire, comme il etait plonge dans Ie Christ, il se
pour que je ne paraisse pas non plus poursuivre choses vaines livrait aux memes pra.tiques que les precedents (99). Ainsi encore
et inaccessibles. Carterius, Jean, Philippe, qui, s'6tant etablis tour it tour dans
Neanmoins, avant de me taire lit-dessus, je veux encore ajou- Ie memo [617 B] mona.stere, y rivaliserent entre eux et avec les
ter ceci, que la martyre a fait publiquement connaitre beau- anciens, et y brilIerent pal' une eonduite plus exacte qu'une
coup d'hommes qui se sont eleves dans leur vie jusqu'au som- })alance. Ce susdit Jean, meme Ie trone episcopa.l, objet de ta.nt
met de la vertu, et qu'elle a exerce al'ascese beaucoup de femmes de convoitises, ne lui fit pa.s abandonner les coutumes de la vie
qui s'etaient engagees dans cette voie avec un zele egal. Ainsi asc6tique : cela., il est loisible a tous de Ie constater, des Iii qu'ils
par exemple, tout d'abord, ce fameux Paul, Egyptien de nais- Ie voient gouverner aujourd'hui encore sa. vie selon la. meme
sance et surnomme l'Egyptien, qui, par son genre de vie, allait regIe d'a.scese qui 6tait la sienne a.upa.rava.nt. Et pa.rmi les femmes,
de pair avec ces heros de vertu, ces hommes celestes, Elie et a leur tour, Ma.rthana, Xenarchis, l'illustre Dionysia, Suzanne,
Jean. Ainsi ce fameux Samos (97), qui depassait it la course Ie Theodule, toutes les autres que je n'a.i pa.s loisir d'enumerer,
AE~a!L1)V 6'>l)e 't'E XeXXErcrE: 1t"EptOeNv xed 1t"EptCXOpO(~NV ~\~l't'C~ x~t O"UAMYNV, i:>cr1t"EP
a moins que je ne veuille moi a.ussi, a l'exemple d'Hesiode, dres-
/be 't'tvot; ~uOou 't'ou !L~Xpou Xp6vou x~t TIjt; Aij01)t; elvtXAEy6!LEVOt;. Des expressions ser la liste des femmes les plus remarquables it l'heure presente.
analogues etaient alors courantes dans les prologues de recits Mgiographiques, cf.
Wien. Stud., 1. c., p. 135 note.
De tous ces hommes ou femmes que j'ai enumeres, Ie genre de
(9") elAA' OUTE: OA(Y~ 616 C 9 s. Bon exemple do I'equivalence OUTE = ouae pour vie , les mmurs , la. conduite conforme it Dieu sont des miracles
notre auteur, car ce qu'on a ici est manifestement Ie eXAI: 0031: progressif de la Ian guo
classique, cf. Denniston, 21 s. (§ II 9). de la mal'tyre, [617 C] et des mira.cles bien suporieurs it ceux que
(95) ou't'E: 1t"OAAWV 1t"Adov~ 616 C 10. « 'l'out grand nombre concovablo " commo j'ai narres. Que dire de plus grand en effet, touchant ces miracles,
v. gr. Ie sable de la mer. Souvenir p. e. ~'expressions comme ~s. 138 39 ), 1~ lml:p0 que de montrer qu'un si vaste chmur de moines et de nonnes
&!L!Lov 1t"A1)OuOijcrOVT~t, Jer.15, 8 t1t"A1)OUV01)cr~v ". {ml:p 't"1)v cX!L!LOV 't'1)t; O~AMO"1)t;.
Ce qui amlme tout naturellement l'idee d' Of innombrable », Sir. 1, 2 cX!L!L0V OtXA~crcr(;'lV ... est venu, sous la regIe de la martyre, ou oMir ou commander en
't'(t; t~~PtO!LijcrE:t. ses monasteres, tous ascetes desquelles ou desquels Ie monde
(96) !LijTE 'Y IX p &v 't"1)V o"uAAOy~V ye:vecrOtXt !LOt l)\Jv~'l'f)v !LijTE: X't'A. 61 GC 11, s.
Par !Lij't'e: &v et infinitif apres deux OUTE (elAA' OUTE: OA(Y~ G16 C 9 s., oUTI: E[J.Ot entier ne saurait oirrir l'equiva.lent?
I)UV~TOV ", yev€crO~t 616 C 11 s.) Basile a voulu simploment varie; 10 tour, rion no
I'empechant d'ecrire QuI)' &v !LOt I)\JV~TOV yeVOtTO 't"1)V O"UAAOYYlV 1t"OtetcrOtXt. La
difficulte n'est pas la, mais on yap. Co yap ne peut eLre une explication de co qui
precede immediatement, car precisement, si Basile avait eu des ailes et une force
31 0 miracle. Comment Xenarchis a appris a lire.
adamantine, il el1t pu recueillir tous les miracles. II faut done Ie rapporter a quelque Mais ceci encore, qui, a l'instant meme, m'est revenu a la
chose plus avant dans Ie texte, et c'est ici oUTe ilANt; O:ptO!L1)TeX. ecrTtV 616 C 10 s.
II est clair en effet que, si les miracles sont elv~pW!L1)'t'~, meme avec une force hercu-
(98) II s'ugit de Pegasos, I'un des chevaux d'AchilIe.
leenne, Basile ne saurait ni les recueillir tous ni les ecrire ni vivre assez pour les ecrire. (99) Ce Dcxiunos doit iltre un autre quo l'eveque Dexianos du cll. XIII.
(97) Samos a ete enterre dans I'eglise de 'l'hecle en tant que oe:rOt; elvijp XV, 592 D 3.
G
82 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
('I) lei cite D. L'lntroduction est citeo D. Intr. La mention M.O. ronvoie a ma
collection MQines tl'Orient, sept fascicules, Paris, 1 \161-1965,
---
86 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COllIE ET DAMIEN 87
VI Miraclos ecrits par Ie diacre Maximos. D. lntr. 29-32; calise sise au celebre monastere du Cosmidion (1) ». e\l Tii m:p~w-
b
D. 193-206. Doubner n'en a donne quo dos oxtraits, car il s'agit \lu!J.c:> !J.w'ij conYient, car ce sanctuaire etait en fait Ie lieu de
pour la plus grande part d'une reronte des series I-III (Deubner culte des Anargyres Ie plus renomme dans la ville. L'eglise avait
a do memo neglige Ie prologue [un extrait lntr. 29] ot 1'6pilogue). ete batie par Paulinos, compagDon de Tbeodose II (408-450),
Viont d'abord cette refonte, puis les Miracles 39-47, qui sont dans son domaine 1:"Or. IIC(uAl\lou vel'S 439 (J an in 297). Procope
originaux, sous resorve de 39 qui a dli s'offrir a Maximos sous en parle (de aed. I 6) : elle Hait situee, dit-il, a 1'extremite du
une forme plus ancienne. Apres 39 (et un miracle do la Vita) golfe (sc. la Corne d'Or), sur une hauteur (2) fortement escarpee
uno sorto do transition (D. 197 s.) OU l'auteur fait allusion a s; (&\1 1:"E: 1:"0 &.\I&\l1:"E:~ xC(t tcrxupw~ opotc:> 1:"e!J.E:\lo~ ex 1tc(AIXWU K. 1:"E: xd I:!... &.ylm~
promosse, dans Ie prologue, de racontor de nouveaux miracles &.\ld'l"O:~). Les modernes la placent « dans la partie occidentale
puis la serio memo de ces nouvoaux miraclos, 40-47. L'autour: d'Eyiip, sur Ie flanc des collines qui bordent la mer» (lb. 299).
non autroment connu, doit avoir vecu au tournant du xm e Au temps de Justinien (527-565), elle etait plus ou moins de-
et du XIV e siecle, car il ne fait pas soulement allusion au Meta- labree. Mais commo cet empereur, au cours d'une grave
phraste (fl. c. 960, cf. p. 197.7), et a la restauration du sanc- maladie, y et~it venu faire 1'incubation et avait ete gueri, « il
tuaire dos Anargyres sous Michel IV Ie Paphlagonien (1034- transforma entierement l'ancien edifice qui etait alors sans
104:1 : allusion dans Ie prolo!,JUe, cf. D. lntr. 30 s.), mais aussi beaute ni gloire » (lAW~ e\lc(AA&~c(~ 1:"€ xC(t !J.E:1:"C(crxe;uC(cr&!J.E:\lO~ 't"Ij\l 1tpo1:"epC(\I
a l'occupation de Constantinople par les Latins (1204-1261 : otxo80!J.lC(\I <'Xxocr!J.6\1 1:"E: xC(t <'X80~o\l OUO'C(\I), il agrandit 1'eglise et la
cf. mil'. 40.25 8S.).
pourvut d'ornements (X&AAe:~ 1:"E: xed !J.E:yWE:~ '>0\1 \lEW\I Xc(1:"e:A&!J.1tPU\lE:).
Le miracle 48, ajoute par Deubner a la fin de son Mition Un monastere y etait attenant. « On ne sait ni quand ni p~r
(p. 207-208), n'appartient a aucune des six series. II s'acyit d'ail- qui il fut fonde. En tout cas il existait deja en 518 » (JanlD
leu~s d'un miracle accompli par les Anargyres de leUl~ vivant, 297). Monastare et eglise furent devastes par les Avares en 626
et II a donc dli trouver place dans une Vie des deux saints et 629. Ccpendant ils ne durent pas rester longtemps a l'aban-
(D. lntr. 32) (1).
don. Au second concile de Nicee (787), OU fut retabli Ie culte
des Images, on fit etat d'un miracle qui avait recemment eu
Com~e l~s miracles .de Theele etaient attaches it son temple lieu (3) dans ny~C(cr!J.l\lo~ O!XO~ des saints guerisseurs (mi~'. 3?9!,
de Menamhk et les mIracles de Cyr et Jean a leur sanctuaire et l'on a conjecture avec vraisemblance que ce sanctuaire etmt
de Menouthis, les miracles de Come et Damien etaient en rela- cclui du Cosmidion (Janin 297). Michel IV, on 1'a vu ,(supr~,
tion directe avec l'une des six eglises que ces saints avaient it p. 86), fit faire des travaux a l'eglise et au monast~re :. II
Con~tantinopie (2). Des Ie debut du prologue de Ia Ire serie, ajouta a celui-ci des bains, des jardins, des pelouses : .11 vmt
on lIt (Prol. 1) 'II 0'E:1t't"lj XC(t !J.e:yC(A68(,)po~ '>W\I &.ylCllV C(h"IJ O'X"IJ\I~, OU s'y retirer Ie 10 decembre 1041, y regut l'habit mon~stIque et
o:{h"IJ ma:que. ~u'il. s'agit d'une demeure des Anargyres (crX"IJ\I~ = y mourut peu apres (lb. 297 s.). Le 14 aolit 1261, MIChel V!II
o:xo~) Sise IC~ meme: ~ans la Ville de Constantinople. Or Ie Paleologue y passa la nuit qui preceda son entree dans la vI.lIe
tIt~e. ~es « MIracles ecrlts par Ie diacre Maximos » indique tras reconquise (lb. 298). « Il est probable que Ie monastere se mam-
preCIsement Ie nom de l'eglise (D. lntr. 11 s.) : « Miracles des tint jusqu'a la prise de Constantinople par les Turcs » (lb. 299).
sai~ts et illustres thaumaturges Ies Anargyres Come et Damien, Tachons de nous rendre compte, par les recits memes des
qUI de toute antiquite se sont accomplis dans leur tres venerable
(I) ,>1j~ Kocr!J.~8lou !J.O\l1j~ 6galemcnt miracles 47, 57 s. L'eponyme Cosmidion
(1) Ce recit ne se trouve, d'ailIeurs isole, que dans Ie Vallicellianus F 16 (papier vicnt du nom m&me de S. Cosmas.
xv· s.), fol. 313 roo cr. D. Intr., p. 11. ' (2) Cf. Mir. 18.118 s. ,>W\I exe:icrE: <'X\lW eX6\1'>w\I 1:"0 !J.C(p't"llPW\I. . ,.
(3) C'est notre miracle 30, ou it est dit que, dans Ie portique. de drOlte de I eghse,
(2) Sur ?OS eglises, cf. n. Janin, Geographie ecclesiastique de l'Empire byzantin
t. III (ParIS, 1953), 294-300. Sur 10 sanctuairc du Cosmidion, 2%-~99. il y avait une icoJ)o representant la Viergc entre les deux samts, 30.18-21.
88 COLLECTIONS GHECQUES DE 1I1lllACLES SAINTS COllIE ET DAMIEN 89
miracles, de la maniere dont etait dispose Ie sanctuaire pour la sur Ie sanctuaire des Anargyres au Cosmidion pour que nous
reception des malades. Mais avant de nous y arroter, il importe puissions nous Ie representer. II s'agira donc de cet ensemble de
de savoir plus exactement queUe date nous devons assigner aces monuments tel que l'a restaure Justinien (527-565).
recits, du moins a certains d'entre eux. Or nous avons ici un L'eglise (1) etait precedee d'une grande cour a porLiques, et
precieux terminus ad quem. II est fourni par Sophronius de c'est la, sous ces portiques, qu'allaient s'etablir les malades.
Jerusalem (c. 560-638), qui fuL patriarche de la ville sainte Ceux qui ne pouvaient marcher y etaient portes par des servi-
depuis 634 et qui, en 637, assista a la prise de la ville par Ie teurs, on y installait leur lit erie (17.13; 1.13-15) et ils y demeu-
caliphe Omar. Dans sa narration des Miracles de Cyr et Jean, raient jour et nuit (2). A l'occasion, des tentures entre Ie mur
au ch. 30 (1), apres avoir rapporte la guerison d'un paralytique, de fond et Ia colonne formaient des sortes de loges (mir. 12,
Sopllronius dit : « On raconte-que les sainLs communs medecins n. 41) OU l'on pouvait s'isoler. D'autres fois, l'on couchait
et communs martyrs Come et Damien ont accompli un miracle pole-mole, hommes et femmes l'un pres de l'autre : un malade
a peu pres pareil, comme dans Ie cas du paralytique et de la a ainsi a sa droite une femme muette, it sa gauche un paralytique
femme muette (2); non seulement cela, mais Cyr et Jean ont (24.5-8); un autre a pour voisine une noble dame (26.7 s.).
accompli aussi Ie miracle de la Juive qui avait un cancer cache Ceux qui avaient l'usage de leurs jambes pouvaient naturel-
au dedans. Ce miracle, beaucoup se Ie rappellent et Ie proclament lement, durant Ie jour, aller prier a l'eglise (mir. 3.28 s.) ; cer-
comme ayant eu lieu tout juste hier. Cependant nous l'avons tains aussi, qui avaient leur sejour habituel (iltlXt'1."lX) au cate-
passe sous silence, puisqu'il est decrit dans les recits de miracles choumenion, allaient dormir la nuit a l'eglise (21.17 s.). Tous
de ces saints-la : mais quant au present prodige, nous l'avons ceux qui en etaient cap abIes se rendaient a l'eglise pour la
ins ere dans notre ouvrage, puisqu'il n'a pas ete decrit dans les pannychis du samedi au dimanche (Prol. III), durant laquelle
miracles de Come et Damien. Et que nul ne s'etonne si les saints on distribuait la kerote (30.55 s.). II y avait un lieu d'aisances
accomplissent les memes miracles de part et d·autre : c'est en (17.41 ss.) OU l'on aHait seul si l'on etait ingambe (17.43 ss.) ;
effet d'une meme source, Christ notre Dieu, que Cyr et Jean, sans quoi d'autres vous y portaient ({m' oUile:voc; XPIX'1."OU[.le:vOc; 17.43,
Come et Damien, font deriver leurs guerisons, et ils n 'ont et a propos d'un paralytique gueri). Certains gardaient a leur
n 'honorent, les uns et les autres, qu'un meme MaHre, Celui usage des serviteurs (1.14, 40; 14.17 ss. ; 22.48). Dans un cas,
qui par eux nous accorde les guel.'isons et qui opere ces prodiges un jeune malade cst mome accompagne d'un medecin, mais
de toute sorte ». Le miracle de la Juive cancel'euse esL Ie deuxiome il cst bien specifie que celui-ci est la pour soulager Ie patient
de notre serie I, Ie miracle du paralytique et de Ia femme mueUe (rrpoc; rrlXplX[.luellXv 20.19), non pour Ie guerir. Dans un autre
est Ie vingt-quatrieme de notre serie III. A la serie I nous pou- (1) Dite OUcrLIXa-ri)pLOV 7.6, 12.85s. (l'€~oce:pov du OuaLIXa-r-fJpLoV est Ie na~thex de
vons presque surement adjoindl'e la serie II, puisque celle-ci 1'6glise), mais ailleurs Ie eucrLlXa-ri)pLOv est plus exactement Ie « sanct~a!re » o~
n'a pas de prologue, commence brusquement (mir. 11) par un parvis de I'autel (21.25 ss.). L'eglise est dite aussi o!xoC; (v. gr. 7.18 s. '1."OU AUXV:Xou
ycXP tv '1."ij> otxcp 1X~)'1."WV E7tL'1."e:AOU[.leVou), bien que, de fa«;on generale, o!xoC; deslgne
auve~"/) 'twcX (lvilplX X'l."A. et semble ainsi continuer sans rupture la plutot tout I'ensemble des butiments qui composent Ie Cosmidion, v.3r. 2-I.16 s.
precedente. On aurait ainsi trois collections au moins de mi- o civ~p trrL '1."0'1 '1."WV &y(cuv ~ilplX[.le:v 0 !xov, XetL '1."~V [.l€V il,(IXL'1."IXV €V'1."cp A€tOI7€VCP
XIX'1.""/)xou[.le:vlcp (cour a portiques, cf. mir. 3, note 13), VUX'1.".cup il€ rrpoc; '1."cp lXylcp
racles de Come et Damien (I-III) (3) connues de Sophronius. eu a LlXa'1.""/) p l(p (ici "parvis de l'autel » comme Ie montre la sUite) €xocee:~Be:v, 24.5 s.
Or ces trois collections nous offrent suffisammcnt de details xlXdxe:t'1."o €v '1."W otxcu '1."WV &y(CUV, tx ile:~LWV il€ X'1."A., 23.21 ss. '1."0'1 i)ytlXa-
(.dvov ... o!xov X'IX'1."IXAIX~~OCVe:t XIX! edc; E:IXU'1."OV tv '1."0 A€YO[.l.evcp XIX'1.""/)-
xou[.le:vlcp, etc. . .
(I) P. G. 87, 3520 C 8 ss. (2) C'etait corlainemont Ie lieu de sejour ordinaire. Cependant II est parle 10.25 ss.
(2) Pas cxaclement pareil, il n'y a pas de femme muette dans l'histoire de Gesius <Pun fldele, d'ailleurs non malade, qui viellt coucher chaque ven~redi ~ans uD: petit
(30). L'histoire du paralytique et de la muette est d'ailleurs un theme de folk-lore haptistero faisant partie des hutiments de la-bas, proche du dlacomkon. AIUeurs
on Ie retrouve dans les Miracles de saint Menas, no V, cr. Delchaye, A. E., rI 3 (1925): line malade, Christine, possedee du demon (rroccrxoualX 12.94), est d~e logee « a la
"7 at !'9. colonna gauche <ill narthex de l'egliso)), EV '1."ij> cipta'te:pij> '1."01) €~lXtpOU '1."0\) OUaLlY.cr'1.""/)p(ou
(3) Soit donc les miracles 1 a 26. X(OVL 12.85 s.
90 COLLECTIONS GRECQUES DE J\IIHACLES SAINTS CO~IE ET DAMIEN 91
cas, un homme amige d'un abces, desesperant do guerir cruyxAdoucr>1) 1:~V -rW\! rpocPI.LeXX(,)V ,,?UAOCX~V X~YXAU~O~ 30.31 s.). C'est lit que
dans l'atrium des An argyres , y fait venir sos medocins pour les saints, apros l'y avoir porte oux-memes depuis l'atrium,
qu'ils l'oporent Iii meme, ev -r0 otxc:> -rwv a:y((,)v (5.8 s.). Naturel- pratiquont uno operation sur un malade (30.28 s., 32 ss.).
lement son mal empire et il est pres de mourir. Des gardiens L'operation achevee, les saints portent de nouveau Ie patient
veillaient sur ce troupeau, maintenaient l'ordro it l'egliso ot dopuis 10 ~e:vwv jusqu'it son lit dans l'atrium (30.50 s.).
dans 1'atrium. On los nomme par exemple dans Ie 3 e miraclo.
Un patient, atteint do retention d'urine, apprend dos saints On mo permettra do no traiter que brievoment la question
que, pour guerir, il doit boire do 1'eau OU il aura jote, apres los de savoir si Come et Damien succedent it Castor et Pollux, comme
avoir brules, dos poils du pubis de Cosmas (3.22 ss.). Or il se l'a pense Deubner, De Incnbatione (Teubner, 1900), 77-79, J(osmas
trouve que, quelque temps auparavant, on a donne it l'eglise nnd Damian (Teubner, 1907), 52 ss., qui se fonde surtout sur
des Anargyres un agneau que les clorcs ont nomme Cosmas. 10 miracle 9. Nous voyons lit un palen malade qui, sur Ie conseil
Notre pati~nt, dans Ie trouble OU 1'a jete ce commandement, do ses coreligionnairos, se rend au sanctuairo do Come et Damien,
doscend Ull jour du catechoumenion it l'eglise et s'y assied dans la persuasion qu'il s'agit de Castor ot Pollux, 9.16 ss. au
(3.30). Le potit agneau viont 1'y retrouver et, pendant une 1tpO~ ocu-rou~ -rou~ a:YtOU~ -roihov eX1tocr-rdAOCVTe:~> .. , eXAM 1tpO~ -r~v 1tpocr1)Y~
bonne heure, bele pres de son visage. Sur ce, me~ -rwv u1t1)pe-rwv ptOCV eXrpOp<7WTe:~ -rWv... KeXcr1:opo~ xocl noAu8e:uxou~. Mais precisement 11
-roi3... -rwv a:yt(,)v orxou accourent voir ce qui se passe et appellont s'agit d'un pa'ien. Et 1'anocdote prouve seulemont que, aux yeux
parson nom l'agneau Cosmas (3.41 ss.). L'hommo apprend ainsi des pa'ions subsisLant it Constantinople, ces Come et Damien,
qui est Cos mas. Une autre fois, une malade, Marthe, logee dont ils entendaient celebreI' les miracles (9.7 s. yv6VTe:~ -r<X
au portique gauche du caMchoumenion dans l'atrium (12.20 s.), xocptcr[LOC1:OC -r<7w tOC[LcX-r(')v W)-rwv) , etaient les Dioscures, elle ne prouv~
s'y ost constitue, somble-t-il, au moyon de rideaux une logo, nullement que l'immonse majorite chreLienne des malades qUI
OU olle invite d'autres femmes (exeXAe~ ev -r'ii xop-rtV1l (XuTIj~ 12.20). frequentaion t Ie sanctuaire fut dans la meme persuasion.
Les saints lui recommandent de ne plus admettre uno certaine De Castor ot Pollux, ces malades, presquo certainement,
possedee, Christine, car Ie demon qui la tient veut passor en ignoraiont meme 10 nom. Pour oux ne comptaient que les
olle. Le lendemain, alors que Christine -i)~ouAe-ro d~ T~V xop-rtVOCV ocu- illustros Anargyros qui faisaient tant de miracles en leur sanc-
TIj~ dcreAOeiv (12.94 s.), les gardiens du lieu 1'en empechent (C:l~ 8e: tuaire elu Cosmidion. Qu'on y pratiquat l'incubation no peut
ou cruVE:X6l(1)crOCV... at 1tOCpocrpuM-r-ravTE:~ TOV -r61tav 12.102 s.). Ceci se passe fai1'o doute uno seconde, pour la simple raison que ceux qui se
au point du jour (12.94), et il est donc probablo qu'on exer- 1'ondaiont lit etaient malad os, sortaient du lit, etaient Ie plus
gait toute la nuit une surveillance dont on pout bion pens or souvent portes par dos serviteurs, parfois meme accompagnes
qu'avec tout ce mondo, OU se trouV'aient meme des folIos d'un medecin, et que, it peine arrives sous los portiquos de
(12.18-20), elle ne dovait pas etre inutile. l'atrium, on les mettait de nouveau au lit. Qu'en outre, meme
II faut noter enfin qu'outre cet atrium it porLiques OU resi- sans et1'e malade, on aBat se coucher pros des saints pour en
daient les malades ot OU parfois, apres lour guerison, ils s'etablis- obtenir quelque oracle ou revelation, voire par simple dev~
saient meme pour plusieurs annees (un hommo gueri rogoit tion, c'ost ce quo montre Ie mil'. 10. On y voit un chretien vomr
l'ordre des saints d'y demeurer six annees, 30.70 s.), il y avait so couchor, chaque vendredi, dans Ie petit baptistere proche
parmi les batiments une maison des hOtes ou hospice (~e:vwv du diakonikon (10.25-27). Et co meme chretien ommene une
30.28 s.), pourvue d'une infirmerie ou salle d'operation (1tPO~ -ro fois avoc lui un ami pa'ien, qui, apres avoir prie dans 10 narthex
loc-rpeiov TOU ~e:vwvo<; 30.29), OU so trouvent dos grabats (crxt[L1to80'~ de 1'eglise, attondant des saints quelquo illumination pour
30.31) et uno armoire aux remedes, une pharmacie (~vOoc ~ -rwv savoir s'il doit ou non se convortir it la foi chretienne, va re-
rpocp[l.ax(')v ~crTl O~x1) 30.30), qu'entourait une barriore (1tA1)crtoV TIj~
92 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
93
SAINTS COME ET DAMIEN
joindre Ie chretien au baptistere, dort pres de lui, recommence
bienfaisants sinO'ulierement dos effiuvos de guerison, on accourt
aupres d'eu~. Un miracle suffit, une guerison. Le. br~it ,s'en
ainsi plusieurs vendredis, jusqu'a ce que, un certain vendredi,
il fut gratifie de la vision souhaitee (10.34 ss.). De In. n. rappeler
repand aussitot : si constant est Ie fait .de la ~a~ad18, SI n;:es-
l'incubation d'Epidaure ou, it cote des miracles do guerison,
saire Ie besoin d'y trouver remOde, SI enracmee dans I a~e
on voit aussi des gens bien portants se coucher pour obtenir
humaine Ia persuasion que seuls peuvent guerir les « plus pUlS-
du dieu un oracle (1), de lit donc it rappelor cos miracles et a
sants» que Ie rocours it ces celestes guerisseurs est un pheno-
etablir un lien direct entre ces pratiques paiennes ot los chre-
mene de tous les temps. Joignons par Ia pensee ces deux
tiennes, il semble qu'il n'y ait qu'un pas (v. gr. Deubner, De
croyances, comme elles Ie sont en effet dans l'ame du peuple :
incnb., 75). Mais il est trop vite franchi. Outre les sages re-
comment s'etonner, alors, qu'on aille se coucher sous les por-
marques du Pere Delehayo en l'un de ses derniers ouvrages (2),
tiques des Anargyres? lIs ont gueri, ils guerissent, done ils me
Ie probleme ost mal pose, on oublie l'une des donnees element aires
gueriront moi aussi. Ils guerissent en vrais medecins, pa:. des
de la psycbologie humaine. La croyance aux visions de songe
visites medic ales (1) qu'ils font la nuit, au cours d'appaI'ltlOns
a toujours existe, elIe est aussi commune aux Juifs de l'Ancien
en songe : donc je me couche, ou I'on me coucbe, et j'attends
Testamont et aux c111'etiens des Ie debut du christianisme (3),
cette visite. Elle aura liou a coup sur, car la foi do ces pauvres
qu'aux paiens grecs ou romains. Aussi commune, aussi univer-
gens est totale, et il ne faut pas etre grand clerc pour sav?ir
selle, la croyanco que les puissances superieures, dieux ou saints, que tout reve, dans l'antiquite, est susceptible d'une. exeg.ese
EOnt essentiellement 1a pour nous aider, pour secourir Ie pauvre favorable. Delehaye ecrit excellemment (2) : « Faut-l1 cr01re,
peuple. Des lors donc que des corps saints, qui sont ou qu'on sur la foi de nos auteurs, que les saints se montraient it leurs
croit Otre en un certain lieu (4), y degagent de certains effiuves clients durant Ie sommeil? Ceux-ci l'affirmaient, mais comme
(1) Ainsi 10 perc du joune Aristokritos de Halieis, n XXIV, Herzog, Die Wunder. toujours, en matiere de visions, ces dires echappent a notre
heilungen pon Bpidauros (Leipzig, 1931), p. 16-18. Lo gar~on s'est noyo, puis est controle. II faut avouer que leurs dispositions etaient celles
parvenu a un en droit sec, mais entoure de roehors, en sorte qu'i! n'a point d'issue ot
que son pere n'a pu Ie retrouvor. Lo pere done va faire l'incubation a gpidauro pour que l'on peut desirer pour provoquer des reyes. Surexcites par
obtenir un songo (B 23 s.). Et Ie diou lui revelo ou est son fils, plus exadement memo la fievre et pour Ie moins autant par les recits merveilleux dont
lui montre l'endroit (B 2~ s.). Une fois sorti de l'abaton, 10 pere va au lieu, taille dans
Ie roc, et, au bout de sept jours, trouve son fils vivant. ils s'etaient nourris, entoures d'une foule de malades qui, comme
(2) Les recueils antiques des miracles des saints, An. Boll., ~3 (1925), 68-73. lb. 68,1, eux, n'attendaient que la visite du saint, ils finissaient par
Delohaye mentionne ses travaux anterieurs.
(3) Cf. par exemplo A. Wikenhauser, Die Traumgesichte des Nellen Testaments in succomber au sommeil; et Ie reve, qui refletait l'unique objet
religionsgeschichtlicher Sicht, ap. Pisciculi Fr. J. Dolger dargeboten (Munster, 1939), de leurs preoccupations, ne tardait pas. Que ces reyes n'avaient
:)20-333.
(~) Dans 10 cas do Come et Damien, Ie probleme est embrouille parco qu'i! yeut pas toujours la nettete des visions telles que les racontent les
trois paires de saints ainsi nommes, avec trois fetes diITerentes, l·r novembro (ceux hagiographes, nous Ie savons par Ie temoignage du seul homme
de Constantinople), 1 Cr juillet (ceux do Home), 17 octobre (ceux de Cyrrhestique).
Indubitablement les miracles ici racontes se rapportent aux saints de Constantinople. qui nous ait fait part de ses experiences personnelles. Bien que
Mais coux-ci ne sont pas martyrs. Si nous omottons la paire do Home, hors de ques· l'on puisse soupgonner Sophrone de n'avoir pas tout a fait re-
tion (jamais mentionnee en nos toxtes), les souls martyrs sont ceux do Cyrrhostique,
auxquels fait allusion Ie mir. 12, qui mentionne leurs Ad~cxvcx 12.10 ss. ex YIXP 't-'ij<; nonce, dans Ie chapitre ou il raconte sa guerison (Mir. Cyri et
":WV KIJPPE(J'nXWV Il-;PWV -ryie; &VCX":O,A~e; E..uncxvev OPIl-CX?Ocx:, ItvOcx ".IX ":tll-L~ ),d~'7vcx Joannis 70), aux procedes peu rigoureux de son metier de
":WV OCXUll-cxcrTwV TOIJTWV. cxy£WV... CX7t6XEWTC:L. Ne~nmol~s II y avult,}U Cos~ldl~n
aussi une crop6c; des samts, 3~.21 s. EV ":11 8E~Lq; cr,,:oq; 7tA1)crtoV TIle; croPOIJ ":wv sophiste, il nous en dit assez pour fa ire comprendre que son
a.ytw~ AEL~OCVWV, 34.30 7tA1)cr£OV 't-'ij<; cropou ,,:.wv a.ytwv AEL~~VWV. On cr?yait d?nc reve bizarre n'eut rien de la radieuse clarM d'une vision. »
evidommont, 11 Constantinople, que les samts corps etalOnt la. « L oxpresslOn
cropo<; ":. a.. A.... peut a la rigucur s'expliquer do reli?ue? partiel:es » dit neloh~ye son corps, cf. Martyrol. Rom. (11 nov., § 2) et, pour Constantinoplo, Janin,
(l. c., II). Au vrai, on a quantile d'e.xempl~s, da.ns l'antI~Ulte chretwnne, d~ locahsa· Geogr. Bccl., 3~5-3" 7.
lions diverses pour des corps de smnts. N on Cltons qu un. Lo corps de samt Men as (1) e7ttcrxe~L<; 1.51, 2.28, 9.33, ~1.20, 22.2,76; 23.~O, 30.16,69; 34.25, 35.15, 16.
cst apparemment 11 quatrc endroits di~erent~ : a Sai~t-Menas. d' Alexandrie, dans I~ - emcrxerrTzcrOcxL 2.:31, 12.35, 22.55, 3'•. 77, 37.~, 39.23.
desert mareolique, a Cotyec de Phrygw, a ConstantlIlople ou des anges ont porto
(2) Op. cit., ?:l.
;-.-:;-----
Ajoutons deux observations. Les clients de Come et Damien la racine du succes de Come et Damien n'est pas qu'ils aient
sont, pour la plupart, de tres simples gens. On peut etre quasi succede it Castor et Pollux, mais que et Asclepios et Castor et
certain, j'en jurerais pour rna part, qu'ils n'ont jamais entendu Pollux et Come et Damien (1) et tous les guerisseurs possibles
parler des 1&{lct:1'1Y. d'Epidaure : en eut-on fait mention devant ont repondu it ces deux faits constants, la misere humaine, la
eux, iIs y eussent vu l'execrable superstition des palens (xct:1'tX confiance in coercible dans les celestes Evergetes.
1'0 't"lji; i)1)O"O"e~ou~ ct:()'t'WV Ofl1JO"xdct:i; (loO"o~ 9.1 0, &7t'OO"'t"ljVct:L 1'e xct:l 't"lji; &O"e-
(1) Jo ne dis pas « et Cyr et Jean» : comma on Ie verra plus loin, leur cas est dif-
~OUi; 1'WV 'EM~VCIlV 7t'A&V1J;
10.6 s.). Ce qui done les conduisait au Ceront.
Cosmidion ne pouvait pas etre un souvenir des pratiques
palennes, mais cet instinct religieux qui reste toujours Ie meme
et qui les poussait ainsi vcrs les Anargyres comme il en avait
pousse d'autres, jadis, vers Asclepios.
Et puisque cetaient de tres simples gens, il est normal que
leur religion ait ete celIe des rlldes, peu degrossie, tres depen-
dante des besoins concrets de chaque jour, tres eloignee du
« pur amour ». Delehaye Ie remarque encore (l. c. ,72) : « L'esprit
general de nos recueils de Miracles accuse un milieu OU la con-
quete des intelligences par Ie christianisme n~est pas complete-
ment achevee (1). On y chercherait en vain l'expression d'un
sentiment eleve. Le souci des inMrets materiels, souvent fort
mesquins, est presque Ie seul mobile de la devotion aux saints,
dont la puissance s'exerce pour les raisons les plus futiles ».
Dans ces conditions, l'historien averti des choses de la reli-
gion a Ie droit d'affirmer sans crainte que l'ailluence des malades
au Cosmidion n'a pas resulte de quelque souvenir du paganisme,
mais d'un mouvement essentiel de l'ame humaine; en tout
temps, et queHes que fussent les croyances, ce mouvement devait
conduire aux Guerisseurs, quelque nom qu'ils aient porte. Et
(1) Jo n oserais m'exprimer ainsi. Cette conquCte n'a jamais ete achoveo, no
l'est jamais, ne peut l'etre. Car, tout en restant « foi », il faut bien reconnaitre qu'a
to utes I~s ~poques il y a deu:, sortes de foi. Pour ne pas parler des mystiques, qui
sont ransslmes, rares sont meme, en tout temps, les chretiens qui vivont de Dieu
du Christ et du Saint-Esprit. .Mais a cote de cette foi eclairee il y a la foi des simples'
qui est toujours de la foi. C'est elle qui anime la grande masso du pouple au .Moyo~
Age, laquelle d'ailleurs permet I'eclosion, en ces memes ages, du plus admirable
mysticisme: C'est elle qui anime encore, dans les pays ou I'ensemble du peuple est
reste chretIen, les bonnes gens des campagnes. Au cours d'une vi sUe 11 Paola j'ai
vu, se dirigeant vers la basiJique de Saint-Francois de Paule (a une domi-lie~c de
la ville), une gentille petite procession famiJiale, enCants en tete, puis les parents
puis les grands-parents. Je la suivis. Arrives a I'eglise, nulle marque de deference ~
l'egard de l'auteI. On aUa droit 11 la vitrine qui garde la haire, les pantoufles, que
sais-je encore, du saint. 'rous de baiser la vitre. Et comme elle ctait trop haute pour
les enfants, la grand-mere los soulevait et leur montrait comment Caire. Sont-ils
sauves? Bien sur, Dieu aime les simples.
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V·
SERIES 1·11
Prologue.
Cet habitacle-ci (1) des saints, auguste et liberal en dons,
source, ou plutot mer inepuisable, incomprehensible, intaris-
sable, fait jaillir en toute occasion des operations de miracles,
et tous ceux qui viennent y puiser relloivent avec foi leur guerison
de la part des illustres saints sCome et Damien. Qui done osera
se lancer dans un si vaste Ocean, qui suffira it tout conteI' en
detail d'une maniere digne d'eux, it dire la surabondante, tou-
jours indestructible, extraordinaire force active de leurs traite-
ments, qui leur a Gte donnee par Dieu? Qui Ie pourrait, alors
que, si on Ie tente, on se bute it la parole de l'apotre Paul qui
dit (Hebr.11, 32) lO«letemps me manquera pourdecrire »et qu'on
subit Ie meme sort que ceux qui veulent traverser l'ocean sur
une petite barque? Neanmoins, bien que les exploits des saints
soient immensos ot innombrables, je vais commencer, disons
mieux, je vais avoir la hardiesse d'en rapporter, fut-co d'une
maniere indigne, une petito et minime partie, to us ceux du
(1) 'n O"Im-rlJ ... ,"oov &.y[wv cdh1) (nt 1) v ~ Pro!. 1. crx1)V~ est une denomination
courante, en cette suite I-II, pour l'eglise (avec son atrium) de COme at Damien,
notamment dans les debuts des narrations, v. gr. 3.10 (a la fin de la longue phrase
initiale) ,"~v I!vao~ov ,"oov &.y[wv ,"o:u'"1)v crx1)v~v xOC't"eAO:~Ev, ft.1 s. e:'t"EPO~ youv
civ~p 1tCXPOCY[VE,"CXL ~v ,"'ij 1tOAUOpUA~,"(jl '"OOV &.y[c,>v '"0: U'" 'IJ cr x 1)v 'ij, 5.2-f, ciVELA-
AEm~~ ecr,"Lv 1) '"oov cicrOzvouv,"wv &v ,"'ij Oo:u[Lcicr,"'IJ o:u,"oov (des sainls) ,"cxu'"'IJ
crx1)v'ij 1tpocrEap[CX, 8.1 s. ,"cxu,"1)~ al:... civcxxwp1)crcicr1)C;; ,"'ijc;; crx1)v'ijc;; '"oov &'y[wv,
9.3 s. I!,"Ep6c;; ,"LC;; cicrOEvooV ,"~v &.y[o:v crX1)v~v ,"cxu'"1)V xcx,"eAO:~Ev, 10.5 s. E:v
,"'ij '"oov &.y[wv 1:cxu,"'IJ ... 1tCXpcxYEvecrOcxL crx1)v'ij (ib. ,"ou,"ov ,"oov &.y[wv ... o!xov
10.2 s.), 11.3 aLIX ,"oiho (se. la maladie indiquee) ,"~V XOLVWCPEA'ij ,"cxu'"1)V XCX't"O:-
ACX[L~eXVEL crX1)v~V, 19 a 1 s. yuv~ ,"LC;; uaepou 1teXOe:L XOC't"e:X0[L€v1) ,"~V Ocxu[LOtCl'"~v
,"~VaE ,"oov &.y[WV Xo:,"e:LA~cpe:L crX1)V~v. Dans Ie cours du reeit, cf. v. gr. 5.2ft s.
!L~ ci!Le:A~crW!Le:v xOC't"IX MVO:!LLV 't"ou crunp€XELli ~v ,"'ij XOLVWCPEAd ,"o:u'"'IJ o:u,"oov
crx1)v'ij, 10.18 s. ~v ,"'ij Ocxuf-lcxcr,"'ij ,"cxu'"'IJ '"oov &y[wv ... crX1) V'ij, 11.67 1tpocre:-
8PEUe:LV ... "'Ii Oe:pO:1te:unx'ij crX1)v'ij 't"oov &'y[WV, 16.6 s. civcxyxcx[wC;; ,"e: ,"~V crX1)V~V
,"o:u'"1)V '"oov o:y[WV xo:'t"a:Acx~6v't"oc;;, 17.14 s. ~cp' OLC;; h6A(J.1lcre:v 1tPOCl'1tEAeXcrCXL
,"'ij Ocxuf-lcxcr't"'ij cxu'"oov crx1)v'ij. Le mot parait d'ailIeurs aussi dans la serie III,
v. gr. 21.55 cruxvooc;; ,"'ij crx1)v'ij '"oov &.y[wv 1tCXpCX~eXM€L.
7
98 COLLECTIONS GRECQUES DE MIHACLES SAINTS COME ET DAMIEN 99
moins que jusqu'ici j'ai inseres dans ce modeste 15ecrit. Je ne serviteurs 25du Christ, leur adressant de lourds reproches de ce
pense pas m'y etre eloigne en rien de la verite, et j'y veux exciter qu'ils eussent ete indifferents a son mal, ces saints qui toujours,
les auditeurs a remercier Dieu davantage et a louer les saints, en serviteurs du Seigneur, compaLissent aux malades et portent
pour qu'ils communiquent liberalement ces recits aussi aux leurs fardeaux, ne firent nulle attention a ses plaintes. Pal' des
fideles unis de cceur avec eux, voire a tous les autres, pour l'cdi- paroles d'encouragement, et qui leur ctaient appropriees, ils
fication et Ie profit de leurs ames. se mirent a engager Ie malade it ne pas se decourager a cause du
retard ni 300. montrer si peu de foi envers les saints: « Obeis-nous,
disaient-ils, et retourne a l'eglise des saints: ils ne te pl'iveront
Miracle 1. Sur l'hydropique.
pas du benefice de leur guerison. » Comme il refusait d'y re-
Un homme tres age se presente a la venerable eglise et avec tourner, car il dcsesperait de son mal, mais avait hate de rentrer
larmes implorait ces illustres saints et serviteurs du Christ chez lui et de gagncr Ie terme ordinaire de la vie des hommes
Come et Damien d'etre delivre du mal inguerissable qui Ie -de fait, 35son ventre tout gonfle annonyait assez l'approche de
tenait. Quelques jours ayant passe, 5comme les saints ne lui sa derniere heure - et qu'il persistait dans son refus de suivre
avaient accorde aucun soin - doues en effet d 'une sage sse la proposition de ses conseillers, ajoutant que, eut-il etC admis
divine, les serviteurs de Dieu pesent l'intention des suppliants que, cedant it leurs instances et a leurs conseils, il retournat
et ils voient a l'avance jusqu'ou s'avancera leur foi - alors que la-bas, il n'avait pas pres de lui ses domestiques, qui devaient
chaque jour, sous les yeux de l'hydropique, il se faisait beau- Ie porter - il etait arrive en effet que, par un dessein providentiol
coup de grandes guerisons en faveur des autres malades qui de Dieu, ses esclaves transportaient dans l'intervalle Ie reste
gisaient la, lOil perdit courage, ou plutot, desesperant de la vie, des bagages - les saints agreables aDieu, imitant Ie souverain
resolut de rentrer chez lui, reprochant durement aux saints de 4°Maitre qui n'a pas rougi de lavor les piods do sos disciples (J o. 13,
Ie negligeI', et cela alors qu'il etait mis a l'epreuve en une telle 5) ni de charger sur son cheval l'homme qui etait tombe dans
vieillesse, et leur lanyant des imprecations de ce qu'ilf:1 n'eussent les mains des brigands (Lc. 10, 34), apres s'etre excites ot exhor-
pas chasse sa maladie a toute vitesse (2). Puis, ce dessein s'etant tes l'un l'autre, porterent eux-memes Ie malade dans la chaise
empare de lui, il fit, par ses serviteurs, 15descelldre jusqu'au it pOI'teurs et Ie ramenerent 45au lieu ou il avait ete couche tout
port la lit erie qu'il avait apportee it cause de sa maladie et? recemment. Sur ce, ils disparurent. Le malade cependant avait
l'ayant fait mettre dans une barque, il etait assis seul dans une cherche des yeux de tout cote ceux qui l'avaient porte. Comme
chaise a porteurs, surveillant ce qu'on mettait dans la barque. il ne les avait pas trouves, desormais, ayant regard it Ia promesse
Et 10. encore, il maudissait les saints de ce que, disait-iI, ils de ses conseillors, il se mit a reprendre de l'ardem. La nuit
n'eussent pas ete impartiaux a son egaI'd , mais l'eussent ne- venue, alors qu'il etait plonge dans un tres profond sommeil,
glige. Comme done il parlait ainsi et allait entre I' dans 13 barque 50ces grands saints servitours du Christ Come et Damion, dans
au coucher du soleil, 2°1es saints serviteurs du Christ Come et leur tourneo habituelle des malades, arrivont a la placo de
Damien vinrent it lui sous un autre aspect que leur aspect habi- l'hydropique. Ils s'etaient donne l'aspect de gens qui portont
tuel et entrerent en conversation avec lui, demandant a savoir, un glaive et ils Ie lui montraient. Saisi de frayeur a la vue du fer,
bien qu'ils Ie sussent deja, que I etait son but. Comme done, car iI lanyait. des eclairs, l'homme, dans son sommeil, se deman-
a
croyant avoir affaire des passants quelconques et de hasard, dait avec angoisse comment 55all a it tourner l'affairo. Les sa.ints
iI leur racontait sa maladie et, de nouveau, tempetait contre les se placent it son chevot, font semblant d'etre en colere, se rap-
pellent l'un a l'autre la temerite du vieillard et les injures
(2) 001no'J 'l"OU 3eo'J'l"o<;; 1.13. Litt. « plus vito qu'il ne raut., (cr. Banq. 195 D 2)
mais l'expression est dovenuo stercotypee ot ne comporto plus aucune nuance qu'il leur a adressees. Puis ils entreprennent de l'operer. Ils
morale. De meme infra 11.30. envisageaient de couper Ie mal avec Ie glaive, et alOI's l'un dit
100 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DA1IIIEN 101
a I'autro : « Fais-lui une bonne incision. Pourquoi, vieux commo Commo, apres l'avoir revelo lOa ses servitours, elle roculait de-
il est, fait-il I'insolent?» 60Comme ils parlaient ainsi, 10 ventre vant co qu'il y avait do p6nible pour ello en ce cornman dement,
du malade, par leur priere, creva invisiblemont (3), ot toute la elle remit la chose a plus tard. De nouveau, pour la seconde fois,
puanteur, s'en etant epancMe, remplit tout I'Cdifico (4). Quand ces saints Come et Damien, souverains maitres de toute guerison
Ie beneficiaire de Ia guerison fut rovenu a lui-meme, il rocon- parce qu'ils en ont regu Ie pouvoir de Dieu, comme il a ete dit (6),
nut Ie miracle que Dieu avait accompli en sa favour par les lui ordonnent de manger do cette viande. Comme pourtant, a
saints, mais il so demandait comment cicatrisor 65l'incision que, cause de sa race, elle en etait tout affiigee et supportait avec
commo il 10 pensait, ils avaient opere sur lui par Ie for. Mais peino de Ie 15faire, les saints viennent a la malade pour la troi-
les serviteurs du Christ ne different pas non plus de l'aidor sur sieme fois et lui declarent tout de go qu'illeur est impossible de
cela. Ils lui fournissent Ie traitemont succinct qui est 10 leur, la guerir si ello ne satisfait pas it leur ordre de mangor de cette
et calment son inquietude en lui recommandant d'appliquer viande. Alors, considerant desormais la nature impitoyable de
sur la plaie Ie baume qui vainc et guerit tout mal, je veux dire son mal - c'etait un cancer qui lui donnait de grands malaises
la kerote (5) : il serait ainsi parfaitement 70g uer i. II Ie fit, et rentra au dodans - elle redit it ses fideles suivants 2°I'ordre dos saints
choz lui gueri, louant Dieu sans cesse et remorciant ses saints et lour commanda de lui apporter de cetto viando pour qu'elle
Come ot Damion do co qu'un tel miracle extraordinaire out ete on mangeat. Eux disaiont : « C'ost pure imagination, tu n'as pas
accompli pour lui. ete reollement visitee par les saints (7) », et ils empechaient la
malade de manger de la viande de porc, declarant que ce serait
un crime abominable que de vioJer Jes coutumes do la Loi et
Miracle 2. Sur la Juire qui arait un cancer. les traditions ancestrales. Comme elle persistait et los pressait
Alors que cot homme s'etait retire, uno femme, Juive de 25d'accomplir son ordre, ou plutot l'ordro dos saints, ot de lui
race, vint it cetto tres sainte eglise des saints. Elle avait une apporter a manger cette viando, puisqu'elle en tirerait la gueri-
maladie cacMe, on etait cruellement tourmentee, ot suppliait son de son mal, les serviteurs lui obeirent. Elle se disposait a.
les serviteurs du Christ Come et Damien de la guerir 5de ce mal. la manger quand elle apergoit son mari qui etait venu soudain
Ceu~-ci n~ la negligerent nulloment, mais, sachant quo l'uIcere lui rendre visite (8) : aussitot elle cache la viande dans 30son soin
alla\t touJours s'accroissant, ils accueiIIirent sa priere et lui pour n 'etre pas empechee par lui d'accomplir l'ordre des saints.
donnerent Ie saIut, en guerissant les ulceres non soulement de Comme la visite de son mari s'etait prolongee, la puissanco de
son corps, mais de son arne. IIs lui commandent, bien qu'elle Dieu vint a elle par la priere des saints Come et Damien (9),
fut Juive comme j'ai dit, de manger de la viande do porco fit faire un saut au cancer depuis la femme jusqu'a la viando,
et deIivra la patiente de toute 35sa maladie. Quand en effet, apres
I (3) &o~&'t"w~ €flfl&y'l) 1.61. Cpo tmObi't"E~ tTt"' (I(,hov 't"eX~ XE1:fl(l(~ &Ofl&'t"W~ 't"oihov
1,ctcr~v't"o 1;20 (~dv. avec Ie part. ou 10 V. d.), ~ YeXfl MV(l([LL~ 't"wv &y£wv ·t"(I(U't"'I)V (6) ~n fait cola a ete dit dans Ie Prologue (I. 7 S. 't"~v .•. &d 't"wv OEfl(l(Tt"ELWV c(u't"wv
(l(Ofl~n)~, EOE:£C(Tt"EUaE:V 8.13, s., I XELfl~uflyouaLv (I(,hou &ofl&'t"W~ 't"ou~ Mo [L"y)flou~ CPO~Efl(l(V tV€flYEL(I(V 't"~v tx I.lE:OU IlEllo[L€v'I)v (xu't"or~), ce qui donnerait a. penser que,
17.3", IlL(I( 't"OU Tt"EfCPO€v't"o~ c(opc('t"w~ UTt"' r:t/J't"wv &vllfl6~ 19.13. conlrairement il la conjecture de Deubner (Intr. 26 s.), ce Prologue est bien dii a.
?
(41 't"OV oIxov OAOV .62. II faut entendre presque siircment toute la cour de I'auteur de la promiere serio de miracles.
l'atrmm, non pas 1't\g!Jse. (7) OhLVE~ cp(l(v't"(I(a[(I(v, cp'l)a[v, xC(t oux €ma't"(I(a[(I(v 't"wv &.y[wv MyOV't"E~ dV(xL
(5) X'I)flwTf) 1:69, melang~ de eire et c1'huile. Malgre Deubncr (Index, S. V. 'Wachs'), 2.21-22. Cpo 3.3r, S. rv(X [L~ cp(l(v't"C(a£(I( vO[LLal.ld'l) ~ c(u't"wv Tt"(I(fl&a't"(I(OL~.
sii~ement pas Clre. seule, PUlSqU?, ?n 16.54 s., il est parle de la X'I)pwTf) de I~ lampo (8) La femme est toujours a. l'eglise, c'est Ia. que Ie mari lui rend visite. Cpo 4.S
(Auxvou) d~ candelabra, et que I aliment usuel de la lampe est de l'huile. Au surplus, un pero vient voir son fils fA I'eglise.
dans. ce miracle 16, la !cerote est bue, melee a. de l'eau. Et tout Ie sel de ce miracle (9) ~ 't"ou I.lwu MVC([LL~ IlLeX TIjI; 't"wv &y[wv Koa[Lii X(I(t ~(I([LLc(VOU Tt"flOaEux'ij~
conslste en ce que, une femme ayant refuse de boire de la kerote les saints lui font cpl.l&a(l(Q"(X 2.32-33. Cpo 3.33 S. ~ 't"ou I.lwu ~Oi)I.lELc( IlLeX TIj~ 't"wv &.y£wv K. x(l(l A.
av~Ier la ,a't"?uTt"Tt"(I(, c'est·a.-dire l'e~oupe qui sert de meche il la'iampe. L'usage do Tt"flOaEux'ij~ cpO&a(l(Q"C(, 7. 13s. ~ 't"ou OEOU ~Oi)I.lEL(I( 'l"'ii 't"wv EuC(p€a't"wv (l(u't"ou &y[wv
bOlre de I hUile de la lampe des samts, ou de s'en frotter, est d'aillcurs bien connu, [LEaL't"d~ cpO&a(l(aC(, 9. {1-6 't"0 Ill: aU[LTt"C(I.l1l't"IXQV .....(Jlv IlOUAWV 't"Ou XflLO"'t"ou ... xC(t dl;
cf. M. 0., II, 111 n. Hi; III 1, 122 n. 149, 131 n. 173, 132 n. 177; III 2, 93 n.200 't"0 E:OVO~ 't"wv ... 'EAA~'Iwv E:C(l0(l(aEY,
etc. Chez Come et Damien, on distribuait la khote fA la pannychis de la fete, 30.55 s.
102 COLLEC'l'IONS aUECQUES DE IIIIIlACLES SAINTS COllIE ET DAlIIIEN 103
Ie depart du mari, la femme eut retire la viande pour la manger, dans de l'eau, bois Ie tout bien melange et tu seras gueri. »
clIe s'aper<;ut du miracle extraordinaire que les saints avaient A son reveil, il se trouva dans un grand embarras du fait 25de
fait pour elIe. Alors, sa guerison obtenue, elIe courut avec fer- la vision, car elle comportait de l'obscurito, et il parcourait
veur a Ia foi salutaire des Chretiens, fut gratifiee du bain salvi- toute Ia maison des saints, cherchant a decouvrir sur quelque
fique de Ia regeneration et se montra digne fille de Ia 40p iscine petit tableau d'ex-voto (12) une figure de ce qui lui avait ete
baptismale. Et elle proclamait les bien faits des saints Come commande. Comme il avait recommence souvent, plusieurs
et Damien, comme ne lui ayant pas enleve seulement les maux jours, cette recherche, il se demandait desormais avec inquie-
du corps, mais aussi ceux de 1'ame. tude ce que cela pouvait bien representer. Etant donc descend.u
un apres-midi du catechoumenion (13), OU il se trouvait 30avOIr
Miracle 3. Sur l'homme qui souffrait d'une retention d'urine. son installation, il s'etait assis dans la maison des saints, en
Tandis donc que cette femme glorifiait ainsi Ie Christ et proie a un grand decouragement. Alors donc que personne ne
celehrait Ie merite des saints, racontant Ie miracle produit en pouvait lui eclaircir Ie sens de Ia visite des saints (14), e.t qu'i~
ignorait totalement Ie nom de l'agneau, Ie secours de Dleu lUI
sa faveur, grace aux saints, par Notre-Soigneur Jesus-Christ
vint par la priere des saints Come et Damien, pour que leur
10 bon berger, qui, it cause de l'unique brebis spirituelle perdue
(Lc. 15, 4 : of. Mth. 18, 12), se fit voir sur la terre 5e t se mela = ici E('jl"l)~IX.(ou (~('jl"l)~o<; sc. 'l'61to<;, cf. 23.5 m:pm€crwv 1t(W€~ XIX.'I'iX 'l'OV ~('jl"l)~OV
'l'61tov, ou ~q:>"I)~OV neutre). Pas d'autre exemple. , .
aux hommes, les saints serviteurs du Christ Come et Damien (12) 1t€LPW{L€VO<; EV dxov~S('I> X'I'A. 3.26. cr. Deubner, intr,. 72, n. 8. II.s aglt
imitant eux aussi leur Maitre pour Ie salut des hommes, en tant de 1t(VIX.X€<; representant des miracles, comme dans tous les heux deNpelerma~e.
Noter la conclusion 30.80-82 dans Ie ms. C2 : y€yplX.1t'l'IX.~ SI: 'l'1X.\hlX. EV 'l'Cp o~xcp 'l'WV
qu'ayant regu de lui leur pouvoir, firent montre, par Ie moyen liy(wv &V Tii &~€uWVU{L'I> O''I'oq. &1t(ivwO€v 'l'7j<; dcr6Sou 'l'OU StlX.xoVtXOU, :<IX.! .~cr'l'tV
d'un agnoau non spirituel (10), do la puissance qui, comme j'ai &xp~~€cr'l'€POV EV 'I''(j yplX.('jl'(j XIX.'I'lX.vo7jcrlX.~. Deubner (i'b.) rappelle l'cmplol deja de
cos rr!vlX.x€c;; a Bpidaure.
dit, leur a ete donnee par Ie Christ et manifesteront leur grace (13) h 'l'OU X1X:TIJXOU[L€V(OU ~vOIX. ~AIX.X€V IX.lhov 1t1X:PIX.[L€V€tV 3.29 s. Cpo 12.21 s. (un:
par Ie miracle quo je vais raconter. femme) dX€v SI: 'l'1)V SllX.t'l'1X:v EV 'l'C:> &ptcr'l'€PC:> E{L~6A'I> 'l'OU X1X:TIJxou{L€v(ou 'l'OU EV'I''I>
N
t~1X:€p'l>, 12.85 s. &niX {L"I)Se: tv 'l'cj:> &ptcr'l'€PC:> 'l'OU t~IX.€POU 'l'OU OucrtMTIJplou ,x(ovt,
Un grand personnage lOdu palais, amigo un jour de retention /!vOIX. "IJ IX.U'l'1) Xp~cr'l'lvlX. A6yov SlSWcrLV, &mi:A01l<;, ~1.17 s. (un homn;,e) :-IX.! 't""I)v {Ll:v
d'urino, etait venu it cette illustre demoure des saints. Or, vers SllX.t'l'1X:v EV 'l'cj:> A€yO{L€VCp XIX.TIJXOU{L€vl'l> dX€V, VUX'I'Wp SI: 1tpOe;; 'l'Cp lX.yl'l> OucrtlX.-
cette epoque, il etait arrive qu'un autre pieux fidele avait amone crTIJP(cp (interieur de l'eglise, cf. 7.6) txocOeuS€V, 23.22 s. (un homme) 'l'ov.:. o!XOV
XIX.'I'IX.AIX.[L~OCV€L XIX.! Ode;; E1X:U'I'OV tv 'l'cl> A€yO{L€V'I> XIX.TIJxou{L€vl'l>. Par lUl-meme,
dans cette sainte maison un agneau; et los pioux clercs de cotte '1'0 XIX.TIJxou{L€VtOV pourrait signifier la gal erie superieure tout au pourtour ~e la
basilique a l'interieur, cf. Du Cange, s. v. ('I'a) XIX.TIJxou{L€Voc, et, parmi les
merveilleuse eglise dos saints avaient donne a l'agneau, d'apres references, en part. Leo VI Imp. Nov. 73 (Lingenthal, Jus Gr .. Rom., Ill, p. 171)
Ie premier 15du couple des saints, Ie nom de Cosmas. Quelque EV 'l'oie;; 'l'WV exxA"I)crtwV u1tepCrOte;;, & 1tOAU<; cMlpW1to<; XIX.TIJXOU{L€VOC X~A€r:V ~YVCJ?'
Mais cela n'irait pas ici avec ev 'l'C:> e~oc€p'l>, qui ne peut signifier qu'un heu. en plem
temps s'etant ecouIe, comme Ie mal de l'homme n'admottait air, proprement la cour de l'atrium, bordee a droite et a gauche de portlques ('1'0
nulle defaite, ses souffrances l'inciterent a demander aux il- e~oc€pov esplanade du Cirque, Const. Porph., de caer., II, 1It9, 19 Vogt). C'est la
lustres saints Come et Damien, en tant qu'agreables au Christ que les malades ont leur Sloct'l'oc, et certains d'entre eux du moins (21.17 s.) vont la
nuit dormir a l'e~lise. Dans certains cas aussi, Ie (ou la) malade s'installe so us Ie
de mo~trer aussi a son sujet un effet de leur force admirable: portique d'cntrec de 1'6glise : telle cette Christine de 12.85 S. qui cst installee b. la
Ceux-CI, po~sses p~r leur bonte, previnrent 20ses supplications; colonne gauche du porche en plein air du sanctuaire, tv 'l'W &:ptcr'l'€PC:> 'l'OU E~IX.€POU
'l'OU OucrtlX.cr'l'1)('jllou xlovt Dans notre passage, XIX.'I'€AOWV· 3.28 s. n'implique pas
et, comme Ils aV810nt caleule que Ia duree aussi do sa maladie necessairement qu'i! y ait eu, dans l'utrium, des portiques superieurs (on « descen~ »
etait. deja tres lo~gue, il~ l~i aceorderent la. guerison. Ils lui ap- de l'intcrieur b. la cllte, de la campagne a la ville cr. xcf'l'€AO€ tv 'l'C:> orx'I> "IJ{LWV
encore infra 311.29), mais ce sens est Ie plus probable ct l'existence de 'portiques
pararssent une nlllt et lUI dlsent : « Si tu veux revenir it la sante it deux 6tages cst bien assuree, cf. J. Lassus, Sanctuaires chrtltiens de Syrie, 272-276.
prends quelques poils au pubis (11) de Cosmas, brule-les, jette-Ie~ (14) oM..voe;; youv SUVIX{LtVOU St€UXPtV7jcrOCt IX.U'I'W 'I'&. 'l"7j<; 'l'WV aylwv 7tIX.PM'I'OCcr€W<;
3.31 S., tvoc {L-1) ('jlOCV'I'occr[oc vO{LmOd1) "IJ IX.U'I'WV 1tOCpoccr'l'occrt<; 3.3'> S. (cp. 2.21 s.) tVIX.
~I: [.L-1) ('jllX.v'I'occrllX.v 'l'1)v 'l'WV aylwv 1tlX.poccr'l'lX.crtv VO{Llcr€L€V 'l't<; 12.90. Le sens Nde
(10) Par St' apvou ~A6you 3.7 l'autcur veut marquer un contraste avec SLa '1'0
!1v &:1tO),(»AO~ A0 Yt X0 V 1tp6~IX.'I'ov 3. r, • 7tlX.poccr'l'Mt<; est clairemon t indique 13.29 S. EV 1to(qc. 'l'OC~€t"IJ IX.U'I'WV 1tpo<; 'l'o\><; &:crO€v?~V
't"oce;; ylv€'I'oc~ 7tOCpoccr'l'lX.crte;;. C'est donc Ie sons intransitir, « presence aupres de, VI site
(11) ~x 'l'OU ~('jl~~ou Kocrp.ii 3.22. Deubner a bien vu (Index, S. v.) que E('jl~~OU
it » (do meme ~mcrvx:crloc 2.21).
104 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME E'l' DAIIIIEN 105
visite ne flit pas jugee 35 pure imagination, ot il revele au en masse de son urine, et il rentra chez lui en bonne sante, glori-
malade la solution. Voici en effot que, d'elle-meme, s'approche fiant Dieu et 55remerciant les saints Come et Damien qui sont
du malade la bete qui portait Ie nom de l'illustre saint Cosmas ; agreables aDieu.
ello se tient pres de son visage et, Ie regardant bien en face,
pousse d'une voix douce, Ie belement habituel aux agneaUx.
Miracle 4. Sur un jeune paralytiqzLC.
Ce geste, ou plutot ce miracle (15), l'agneau Ie repeta a intervalles
1°pendant une bonne heure aupres du malade, et celui-ci n'y Un autre individu s'en vient it cette fameuse maison des
comprenait rien. Certains des servants de l'iIlustre maison saints, c'etait un tout jeune homme. Frappe d'un coup d'epou-
des saints, s'etant trouves la a un moment donne, frappes de vante (16) par I'Ennemi en lutte avec Ie genre humain, il ctait
stupeur de la perseverance de l'agneau, se mirent a l'appeler tombe en paralysie. II se tenait assidument a la maison des
par son nom devant l'homme amige de retention d'urine. A saints et, durant toute la file des nuits 5et des jours, ne ces-
peine entendu Ie nom de l'agneau, Ie malade se rappelle l'au- sait d'implorer les saints d'etre delivre des liens du demon qui
guste vision 45de ces admirables saints: exultant de joie, car il a l'avaient noue. Comme un assez long temps s'etait passe, et
enfin trouve Ie salut, il envoie en hate un message et fait venir que la maladie en lui persistait, Ie jeune homme perdait courage:
un tondeur. Celui-ci vient, et l'agneau, qui lui avait ete comme finalement il reclama la presence de son pere. Car son pere, it
envoye par les saints, se laissant brider par leur influence, ne la venerable tete blanche, vivait encore, et c'etait un personnage
fait ni bond ni saut, mais, sans meme ctre tenu par personne, tres en vue dans son office. II lOarriva done. Quand il l'eut
reste tranquille et se tient Ia jusqu'a ce que Ie tondeur sOlui ait apergu, Ie jeune homme. se sentant au plus mal, lui demanda
enleve du pubis, avec les ciseaux, ce qu'il fallait de poils pour de lui venir en aide et de Ie soutenir dans sa supplication aux
Ia complete guerison du malade. Ces poils done, l'homme af- saints. Emu dans ses entrailles paternelles it la vue de ce fils
flige de retention d'urine les prit, fit ce qU'avaient ordonne les vaincu par Ie mal et qui se lamentait sur sa vie, Ie vieillard se
illustres saints et but Ie melange. Et aussitot Ie mal qui Ie mit done a implorer les saints qui soignent 15sans salaire les
tourmentait fut gueri. Car il se fit, sans peine, une evacuation maux irremediables de guerir l'enfant sorti de lui et de Ie de-
livrer de la maladie, en tant qu'il etait possede par un demon
(15) 'l"ou-:o 3e '1"0 crx~!1.1X !1.CXAAOV 3e OIXU!1.IX ... 'l"OU &pvou ... reowuvToC; 3.39 s. crx~!1.IX, funeste. Les saints prirent en pitie la jeunesse de l'adolescent
« ges~e, attitude,. posture ". Cpo Sophron. mir. Gyri et Jo. 29, 3512 n 12 : Uno
c~rl~llle Athanasle ne cesse de se moquer des deux saints. Un jour qu'elle les raille
qu'avait ainsi fletrie la persistance de la maladie, et, ac-
alllSI chez elle avec des amies, une puce la pique au talon. 'i)v ~ YUv~ xlX'I"lXcrxdv cueillant en meme temps les larmes du pere, ils repandirent it
XIXTIXVEUO'IXO'IX ~!1.E~ve:V EUOUC; tre! O'X~!1.IX'I"OC; avCJ.l Ve:UO'IX~ '1"0 Aomov oux
tcrxUOUO'IX. V. Theod. Syk. 11, 370.31 Th. Joannou : Th6odore etant encore a I'ecole flots leur misericorde sur Ie malade. lIs lui mirent invisible-
Ie diable, jaloux de sa vertu, veut Ie tuer, prend I'aspect d'un de ses camarades' ment (17) 2°1es mains sur la tete, Ie guerirent, Ie deIivrerent de
!e mEme au ha~t, ~'un precipice, lui dit : « Vois, moi, je n'ai pas peur, je vais m~
leter en bas ... I hoodore veut l'en empecher. Lo diable Ie provoque. 'rhCodore dit la maladie et Ie rendirent, marchant, it son pere, apres lui avoir
alor~: 'E~,v O'U '1"0 O'X~!1.1X 'l"OU'I"O reo~~O'nc;, x&yw ()(U'I"O reo~w. 377.9 On amone dit, en imitation du mot du Seigneur (Jo. 5, 8), mais en chan-
au Je~no I h6odor~ un enfant possGde. Theodore n'a encore chasse aucun demon
ne salt comment, falre. Le pere de l'enfant lui donne un fouet, lui dit « Fouette.le .: geant Ie mot grab at : « Prends ton fils, il marche, et rentro chez
Tn ?E:. ~!1.€pq.,,".'1) 'l"pf't"TI retXA~v '1"0 IX~'I"O O'X~!1.1X €reoL'1)O'Ev ere! 'l"iilre()(~3LCjl. Voir toi, louant Dieu toujours et Ie glorifiant. »
aussl mfra 6._6 rep::y!1.IXO'~V XIXL O'X'1)I1.IXO'LV (<< par ses actions et son attitude .)
9.30 s. '1"0 3e 'l"OWUTOV crx~I1.1X U7tO 'l"WV &'yLCJ.lV reAe:~O'TtXX~C; €re' IXU'I"W ye:v611e:vov'
1 0.-' ~ 8 30
'l"OU- 0""1 'l"OWU', I"OU O'X'1,)!1.IXTOC;... E7t!
" 7tOAAIXC; relXpIXO'XEutXC; YLVO!1.€vOU
• r
11.37
, (16) reIXpIXO'X~IXO'Odc; 4.3. Cpo gr. mod. O'X~&:~w« epouvanter» (pass. «s'epouvantcr "
ee:IX~C; JEv6t:,EVOC; ;ou Em~Ae:O'OeVToc; ure' OCUTOU O'X1)!1.IX'I"OC;, l1N1 S. 'l"ov'... 'l"7JV O'X~tXV't'~IXPOV O'X~tXO''I"POV O'x~tXX'I"POV «6pouvantail", O'XtIXO'!1.IX« epouvante ", O'X~IXO'TtX
rep60''I"IXI;~~ :,OU _'I"OWUTOU ~'1)I1.IX'I"OC;_ 'l"WV &'yLCJ.lV Em'l"e:AoUV'I"IX, 11.68 s. XIX!... repoO''I"e:- en « tremblant »), et deja gr. ane. O'X~tX« spectre " d'oil (gr. byz.) • mauvais esprit.,
'l"IXXOIX~ IXU'I"C:) 3'1)OEV '1"0 'l"O~OU'I"OV O'X'1)!1.IX, 12.19 s. !1.'1)3dc; .. &:mO'~an repoc; ou3ev 'l"WV v. gr. P. G. M. 13 a 3·5 (VI" s.) U7t6TIX~6v !1.0~ recxv rcve:U!1.IX 3IX~!1.ov[wv cpOE~PO
O~u!1.0'1"CJ.lV ~ O'~~!1.tX;CJ.lV't"_Wv &'yL,CJ.lV, 12.1,19 s. repoc; ou3ev 'l"WV OIXU!1.tX'I"<uV 1) O'X'1)!1.tX'I"WV reO~OUVTCJ.lV &:XIXOtXp'l"CJ.lV, eretylX~IX {)7t6yIX~IX ~vu3pIX XIX! Xe:pO'IX~IX, XIX! reiiO'IXv O'x~tXv.
'I"~V_IXYLW~, 1".27. e:v 'l"C:) 'l"OWU'I"Cjl crx'1)!1.IXT~, 15.31 s ex'I"ou Em'l"e:Ae:crOzvToC; reIXp' (17) &optX'I"CJ.lC; ',.20. Cf. note a 1.61.
(l(I)'t"'1)C; crx'1)!1.IX'I"OC;.
106 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAl WI'S COME ET DAMIEN 107
dire aux effrayants mysteres. Si l'on vit en ces bonnes actions,
Miracle 5. Sur l'lwmme qui souffrait d'un abces. on honore Dieu qui se plait a ces sacrifices, et l'on batit son
Vu done Ia production journaliero, par los saints Como et amo sur Ie roc (Mth. 16, 18), et les vents de la vie ne peuvent
Damien de cos miracles extraordinaires, incossante est l'as- I'ebl'anIer, puisqu'elle a ete etablie sur Ie 35fondement stable
siduite des malades en cette admirable demeure qui est la leur. de Ia foi.
Un autre homme y vint un jour, qui avait un abces dans Ie
ventre , 50 t il restait continuollement aupres de cos glorioux Miracle 6. Sur celui qui crachait du sang purulent.
et merveilleux medecins pour obtenir lour secours. Quelque
Apres donc que Ie susdit eut beneficie, comme nous l'avons
temps ayant passe, ayant remis a plus tard la guerison que les
dit, do Ia guerison procul'ee par les ser'Viteurs du Christ Come
saints pourraient lui apport or, il fit venir ses medecins accoutu-
et Damien et qu'il fut rentre chez lui, un autre homme se pre-
mes et desira vivement d'etre opere par eux dans la maison
sente a cette t1'es illustre maison des saints, suppliant les servi-
des saints. On 10 fit, lOmais l'incision du scalpel n 'enleva pas teurs du Christ 5d'obtenir d'eux Ia guerison. II etait atteint
Ie mal, Ie sang corrompu s'epancha ho~'s de l'abces (18) et gagna d'une maladie de Ia poitrine et vomissait de fa lion irreguliere
desormais aussi Ies organes sains du corps, et, il etait visible que par la bouche du sang mele de pus (19) venant du poumon,
Ie mal empirait, que Ie malade souffrait gran dement et qu'il en sorte que I'epouse qui vivait avec lui et qui avait vu qu'il
etait en peril meme de sa vie. Mais, commo de bons pilotos, los allait mourir preparait deja ses funerailles dans la maison des
sarviteurs du Christ Como ot Damion 15vinrent au navire, saints. Le mal persistant, lOcomme il perissait, et que, naturel-
ballotte par Ia tempeto, du malade, et, par Ie gouvernail qu'ils Iement coIe1'eux, excitable (20) et emporte, il proferait d'inde-
avaient re~lU de Dieu, ils Ie soignerent, Ie sauverent, Ie rame- cents blasphemes, les admirables et grands medecins Come et
nerent au port tranquille de la sante. lIs font en effet, par leur Damien, qui non seulement guorissent les maladies du corps,
grace, quo Ie sang corrompu qui l'incommodait s'evacua par mais soignent Ies ames des hommes, apparaissent de nuit,
Ies intestins, et ils Ie debarrasseront ainsi do sa maladie mortolle, non J5au mala de dont on avait desespere, mais a un autre
20en sorte que, une fois parfaitement gueri, il louait Diou et individu, disant : « Dis a celui qui crache Ie sang de cesser des 01'-
remerciait les saints Come et Damien pour 10 miracle accompli mais, dans Ia vieillesse ou il est, ses propos indecents ou pour
en sa faveur. mieux dire impies, de cesser aussi de manger du poulet, princi-
Lors donc que vous apprenez, amis du Christ, ce que vous paIement en ce temps-ci - cela en offet, il etait arrive que Ie
savez deja, je veux dire los bienfaisancos dos saints Come et malade Ie fit, il mangeait du poulet, dans Ia maison des saints,
Damion, desquellos nous avons tous, pour la plupart, joui un durant Ie saint Careme - 200t de ne prendre que Jes aliments
jour, n'omettons pas d'accourir 25de toutes nos forces a cetto qui commencent par un A (21). S'il se garde de ces deux choses (22),
demeure utile a tous qui est la leur. Les gens solides qui Ie font il sera delivre du mal qui Ie tient. » L'homme qui avait eu cette
se procurent ainsi de la securite; et ceux qui rivalisent avec vision craignit Ie peril qu'il encourrait en desobeissant et Ie
eux parmi les gens qui onto obtenu des saints leur guerison ac- dommage qui resulterait de son silence pour Ie malade, et il
quittent une dette et font un acte de gratitude, surtout quand ossaya de Ie persuader 25de veiller a son salut et de ne pas,
leur main se tient attentive aux besoins des necessiteux et
30qu'ils participent souvent a Ia sainte communion, je veux (19) a!p.E[.L1\'UCUV (q:>op&v) 6.5 s. Hapax?
(20) xe:q:>q:>ou 6.10 s. Cf. Suid. III 96.13 Adler: xe1\'q:>cuOdc;' €1\'ocpedC;, €pe:OmOdc;.
o~ecuc; €Aocuv6[.Le:voC; et 96.7 X€1\'q:>OC; 'e:!aOC; opveou O~U'l'&'l'ou.
(18) €voc1\'6cr'l'oc'l'~V ye:v6[.Le:vov 5.~ 1. L'adjectir cst un hapax, n'exist~ pas (pas (21) Scil. &Aq:>~'l'OC, de la bouillic d'orge.
plus d'ailleurs qu'oc1\'6cr'l'a'l'ov)' et II raut remonter a &q:>tcr'l"l)[.L~ pour vOIr Ie sens, (22) Nolcr la construction (non classique) avec Ie genitif 6.21 d yap &[.Lq:>O'l'€PCUV
qui d'ailleurs est clair. tv est impossible a traduire, a moins d'ajouler « a l'interieur 1\'OCpOCq:>UA&~'Y)'l'OC~, d'apres la construction d'&1\'€x.o[.LOC~, cpo &1\'oC1)(6[.Le:voc; -nje;
du corps ", ce qui va de soi. &/J.O'l'ptocc; 'l'(;lV Xp~cr'l'~avwv... ~Aacrq:>'Y)[.L[OCC;.
108 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINTS COllIE ET DAlIlIEN 109
par actes et gestes, ruiner l'effet de l'ordre des saints. Le malade
ccouta ce conseiI, il s'abstint de son Iangage blasphCmatoire sourde et muette, avant la guerison, recitait en esprit Ie Trisa-
malseant chez un chretien et de manger de Ill. viande (23) en ce gion, par Ie moyen de celui-ci et du fait de celui-ci, elle fut guerie
temps de jenne. Et ainsi, ayant veille sur son regime de vie par Ia grace des saints Come et Damien. Comme en effet on ache-
selon Ia prescription des saints, 30il recouvra Ia sante. Les vait vepres dans leur eglise et qu'on pronongait, ainsi que d'ha-
cr8chements de sang purUlent cesserent pal' l'operation des saints bitude, Ie ~OTrisagion, soudain la sourde entendit la psaI-
Come et Damien, et ils garderent Ie malade sain et sauf. Cet modie, la muette, elevant Ia voix avec les psalmodiants, se mit
homme donc loua Dieu, remercia les saints de ce qu'ils lui eussent a psalmodier avec eux Ie Trisagion. Puis, vaincue pal' la joie
c~ntre tout espoir, rendu Ia vie et, sa priere de remerciement et parIes extraordinaires miracles qui s'etaient accomplis sur
achevee, rentra en paix chez lui. elle au meme instant, elle Iaissa Ia pour un moment Ia psalmodie,
et Ja voila qui remerciait Dieu et les saints, poussant cris 25et
clameurs et racontant a to us les oeuvres admirables et les aetes
_Miracle 7. Sur la sourde et muette.
de grace de ses saints Come et Damien.
Tandis que de si belles et si grandes guerisons etaient jour.
nellement produites parIes saints serviteurs du Christ Come
et Damien, une femme arrive a leur tres sainte maison. Elle Miracle 8. Sur celle qzli aCJait une affection de La matrice.
et~i~ s.ourde et mueUe depuis de longues annees, et eUe sup- Tandis quo cette femme se rejouissait et qu'elle s'etait retiree
phmt mstamment les 5saints de daigner ]a guerir de ses deux on bonne sante de la demeure des saints, une autre fomme y
ma~x. Ell~ ne quittait ~as Ie saint, illustre, spirituel sanctuaire, arrivo, en proie D. des maux et souffrances insupportablos que lui
mms elle s en approchmt sans cesse et suppliait avec larmes et causait son interieur. C'ost surtout (25) Ia matrice qui la tourmon-
fOi.les illustr~s saints Come et Damien d'etre delivree d'une vie tait et qui ne Iaissait aucun repit a sa douleur, et elle ne cessait
qm se tr~inmt e~ longueur dans Ia souffrance, attendu que Ie d'invoquer 51es saints serviteurs du Christ Come et Damien,
mal duralt depms de Iongues annees en eHe et lOlui avait leur demandant d'obtenir d'eux la guerison. Comme 10 mal
affaibli Ie corps, et qu'eIJe etait toute honteuse devant los s'etondait toujours et aflligeait terriblement celle qui en etait
femmes de sa race avec qui elle se sentait en amitie puisqu'olle vietime, los sorviteurs du Christ se montrerent genereux pour
ne pouv.ait, se lier et converser avec elles. Lors do~c qu'eIJe se oIle, comme ils 10 font pour tous, car ils sont disposes par nature
Iamentalt a cause de tout cela et perseverait avec foi dans son a agir ainsi. Ils lui apparuront en vision, selon 101eur habitude,
imp!oration a~x sain.ts, .Ie secours de Dieu lui vint par l'inter- ot ils lui cornman dent de meIer du sue de silphion a de la menthe,
ceSSlOn des samts qm 1m sont agreables (24) l5il accuoillit ses et de 10 boire. « Si tu Ie fais deux fois, disent-ils, tu seras deIivree
plaintes et la delivra de ses deux maux. Alors en effet que la do Ia maladie et des douleurs. » Elle fit comme il lui avait ete
commande par les saints et fut completoment debarrassee du
(23) OU'I"6v 6.28. Les anciens paYens n'avaient mange d'ordinaire de I . d
les jours oul'on sacrifiait des, victimcs aux dicux , d'o"U O-UlfN nor ma1 emen a VlUtnVIC .Ct~UC mal. Car Ia puissance des saints l'avait guerie de fagon invisible,
de saCrI'f]Ice, prcnant Ie sens slmplement r~' lme
3e 'J ' " '! - ,
de «viandc» V "'r LXX G
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t. 3 16 , ..
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et ils no s'etaient pas servis de cos remedes l5autrement qu'en
! ,?O'YJ~ ~U'I"OU<;'I" xr/-;} rre:v,'1"4> e:rr! TIi<; o!x[CG<; whoii E10'&.yCGye: 1.ou<; &vOpcJmou<; les nommant - car ces sages medecins n'en avaient pas non
e:o<; 'tYJV OoXoCGV XCGo O'CflGt<,OV OU[LCG't'CG XCGL ,ho[lfCGO'ov » (op La 1" 23 L 1
6 () 6 0' I r ' " 0, 'P"'pe:'t'e: '1'<.>\1
[L_ O'X.0\1 'I' \I O'~'t'e:u't' \I, uO'.CG't'e:" XCGo CflCGy6\1't'e:<; e:u'PPCGvOW[.Le:v). On a les deux formes plus besoin pour traitor la mala.de - mais ce fut un miracle pour
OUJ.LCG ct Ou't'6v d~ll~ Pre Splr. ,6a, 291 GC : Un certain abba Stephanos etant malade, que, par 18. aussi, flit montree leur grace insurpassabb et l'in·
't'ou't'o\l !CG'I"POL YJvCGyxCGO'CG\I OU[LCG't'o<; "e:'t'CGACGr.l.e;iV. Alors qU'I'l man"'c c tt ' d
(0- )
u[LCG, son frure ' (2916 C
5 hre ' ,r
CG3e:A' t'
PO\l xOO'[L~x6\1) Ie vi site etb se 0scandal' e VlUn e comprehonsible grandeur du charisme que leur avait donne Ie
i) ';'0." J . . . I' 1 - , , ISO,
,urr"_,, rrGt\lu O't'~, CflYJO'.'\I, o:rr<.> 't'YJC; 't'oO'CGu't'Y)<; CGO'x~O'e:Cl)<; ... e:!<; 't'~\1 't'e:Ae:U't'~\I CGu't'oii Christ.
Ou't'ou [.Le:'t'€ACG~e:\I. Aussltot II tombe en extase ot voit quelqu'un lui dire' P ,
te scandalises,lu lin d3e:<; CGu't'O\l iO'O[onCG Ou't'oii ». ,{( ourquOl
(2") cr. supra note 9 (ad. 2.32 s.).
(25) [LiiAAOV 8.3 = [L&A~O''t'CG, cf. Dlass-Debrunner 2H.
---
110 COLLEC'l'IONS GHECQUES DE MmACLES SAiNTS COME ET DAMIEN 111
de soins a.upres d'eux. Pa.rvenus au lieu ou gisait l'homme
Miracle 9. Sur le paien enCloye par les paiens a l'eglise de Come envoye par les patens, qui lui aussi etait palen, ils se detournent
et Damien. de lui et continuent leurs soins aux autres 30patients. Quand
Tandis que la femme prolongeait son sejour dans l'admil'able l'envoye des paiens eut constate que cette maniere d'agir des
et glorieuse maison des saints, car elle etait insatiable, meme sa.ints s'etait souvent renouvelee it son sujet, comme il ne pou-
ap~es sa guerison, it se tenir aupres d'eux, un autre malade vait plus supporter les tortures de son mal, un jour qu'il voyait
arrlva it cette sainte demeure. De fait (26), la compassion, la de nouveau les saints visiter les maIa.des, il se mit it crier et it
gentilIesse, 51a bienfaisance des serviteurs du Christ Come et les supplier de venir aussi jusqu'it lui et de Ie soulager 35de
Damien envers tous les hommes, particulierement envers les la souffrance qui Ie tenait. Comme il persistait et criait aux ser-
malades, etaient parvenues jusqu'aux areiIIes de paiens impies viteurs du Christ Come et Damien : « Prenez-moi aussi en pitie,
et, comme ils avaient appris leurs charismes de guerison et comme tous les autres )), les saints lui repondirent avec colere :
le~ op~ralions multiples et variees de leurs miracles, ils ap- « Est-ce vers nous que tu es venu, mon ami? Est-ce nous qu'on
phqualOnt it ces glorieux serviteurs du Christ lOCome et Da- appelle Castor et Pollux? )) Comme il persistait encore avec les
~ie~ les noms, conformes it l'abomination de leur religion memes mots, 4°1es suppliant d'etre emu de pitie pour lui et
ImplO~ de Castor et Pollux. Alors clonc que cette fa!{on de juger les etourdissant de ses clameurs, les serviteurs du Christ, sou-
les samts s'etait repandue chez les paiens, il arI'iva que l'un de riant doucement, lui disent a. nouveau : « Qu'as-tu a nous as-
ceux qui appartenaient a leur croyance et it leur race, Ie malade sourdir de tes cris, mon ami, et cela alors que tu n'es pas venu
~ont ~n a parle, qui etait, it les en croire, grand clerc quant it nous, mais as ete envoye it d'autres? Nous ne sommes pas,
a la SCIence (27), tomba en une maladie tres grave et tres penible. nous, Castor et POllux, nous sommes les serviteurs du Christ,
Tous ses amis, comme d'une seule 15 vo ix, lui conseillercnt Ie Roi 45immortel, et notre nom it nous est Come et Damien.
d'aller it cette maison-cj des saints Come et Damien. lIs ne Si donc tu reconnais avec foi notre Maitre, tu recevras de lui
l'envoyerent pas it ces saints eux-memes - comment l'eussent-ils la guerison de la maladie qui te tient. )) Alors, torture et inca-
pu, puisqu'ils ignoraient, ou plutot repoussaient Ie Maitre de pable de supporter Ie poids de la maladie, comme illes appelait
ces saints, Notre-Seigneur Jesus-Christ qui, par ses saints Come it grands cris, promettait de reconnaitre Dieu leur Maitre 50et
et Damien, guerit 20toute maladie et faiblesse - mars iIs avaient Ie Seigneur de toute vie, et convenait que c'etait bien chez
regard aux noms de Castor et Pollux, dont les mythes sont eux-memes, les iIlustres serviteurs de Dieu Come et Damien,
contenus dans leurs vaines et nuisibles lectures. C'est done de qu'il avait cherche refuge - car iI avait ete illumine en esprit
cette maniere et dans cette persuasion que Ie malade, comme et appele it la. foi salvatrice des Chretiens -les serviteurs bien-
on l'a dit plus haut, se presente en cette clinique des saints. venus du Christ Come et Damien, qui avaient vu d'avance
Or, tandis qu'il lui survenait des douleurs sans repit, 251es sa conversion en tant qu'ils connaissent d'avance les biens it
serviteurs du Christ Come et Damien, deployant leurs miseri- venir, lui mirent sur la tete 551eurs saintes mains guerisseuses :
cordes habituelles it l'egard des malades, faisaient leur tournee aussitot la maladie cess a, il fut delivre de ses tourments. Quand
il eut ete ainsi corporellement reta.bli et qu'il eut reconnu Ie
(26) En 9.4. 't'~ 8~ O'U!l-1t<xO'l)'t'tXO,v equivaut 11. mon sens 11. 't'0 yap O"u!l-1t<xO'l)'t'tx6v secours et la puissance de Dieu et la grace que ses saints Come
(Sur cetto asslDulatlOn do 8e it y<xp, d. L. Deubner Sitz. Ber. Ak. Berlin J 935
640 s.). On attend un yap explicitant les raisons de I; venue de ce malade comm~ et Damien ont re!{u de lui, repoussant avec horreur les noms et
v. gr., a~res, ~'t'e:po~ IXv~P e:cpLO"'t'<X't'<Xt ... txe:'t'e:uwv... 't'e:u~<xO"O<Xt L<X't'pe:(<x~ 6.3\ on a Ie cuIte de Castor et Pollux, il eut hate 6°de laver a.ussi par Ie
OwP<XXtXll y<xp X't'A.
(27) ~v e:mO"TI)!l-'I)v Il~O~ O"xoA<X0"'t'tx6v 9.'13. O"xoA<X0"'t'tx6~ it cetto epoque, est bapMme les maux entenebres de son arne. II s'approcha du bain
reguhilrement « avocat " mms alors pourquoi Il~Oe:v, qui doit comportor ici comme de l'imrnortalito, asp ira it la verite meme, reconnut Ie hon berger
Ie plus souvent, une nuance ironiquo? Donc pluti'lt « homme savant scholar' •. Infra
10.17 Il~Oe:v = e:v't'e:uOe:v, cr. IIesych. 771 Latte. ' et createur de tous ceux qui appartiennent a. son saint troupeau
- 1
faire, et alors il fut saisi en lui-meme, dans son sommeil, d'une qui en est Ie pasteur, Ie Maitre de toutes choses, Notre-Seigneur
grande frayeur, il craignait d'avoir it subir de mauvais traiLe- Jesus-Christ 75qu i a dit (Lc. 15, 10) : « II y a grande joie de-
ments pour avoir etC pris sur Ie fait dans un lieu si saint. Car vant les anges de Dieu pour un seul pecheur qui se repent. »
c'est une regIe generale dans les pays d'Orient que, si par ha- Quelle grande joie n'y eut-il pa~, amis du Christ, et dans Ie
sard un non-chretien (30) a etC surpris it l'eglise, surtout lorsqu'on ciel et sur Ia torre, au sujet des deux paiens susdits, lorsqu'ils
celebre quelque rite sacramentel, les chreticns de cette ville-ci, eurent ete offerts au Christ par l'entremise des saints Come et
50sans avoir regard meme it aucune excuse, sans tenir compte de Damien? Quand notre homme en effet eut ete illumine par
la crainte du prefet, sans attendre aucune autre justification, la grace ot par la vision 80que j'ai decrite et qu'il eut roconnu
mais bouillants d'ardeur pour leur foi, livrent aussitot cet in- quo Ie Christ avait agree sa supplication pal' Ia mediation do
dividu it la mort par Ie feu, comme coupable d'une curiosite ses saints serviteurs Come et Damien - car c'est Ie Christ
sacrilege it l'egard des saints mysteres. Le palen donc, dans qui appello tous les hommes it Ie reconnaitre ot qui lui avait
son sommeil, etait agite par ce soupgon et il decida en sa pensee, clairement revele tout Ie mystere do son plan - il devint une
raconte-t-il, de s'enfuir. MAlors lui apparurent en cette vi- brebis elue de son troupeau, ayant ete juge digne de la
sion de songe ces tres sages mediateurs dos biens Come et Da- 85chambre nuptiale dans Ie Royaume d'on haut. Et aprcs qu'il
mien et, s'etant saisis de lui, ils faisaient semblant de l'empecher, eut regu en communion I'aliment vivifiant des mysteres de la
disant qu'il ne lui etait pas permis d'echapper. Et comme Sainte Table, il depouilla la tunique qu'avait souillee Ie culte
iI les suppliait de Ie laisser allor, pour qu'on ne s'emparat pas errone des idoles et revetit Ia robe pure du fils prodigue (Lc. 15,
de lui et ne lui fit pas subir les tortures que j'ai dites, les saints 22) et de la piscine sans tache, car il avait ecoute Ie Seigneur
lui dirent : « Ce n'est pas chose 6°possible que tu t'echappes proclamer par Ie prophete Isa'ie (Is. 1, 16) : « Lavez-vous, puri-
d'ici, puisque tu as assistC it de secrets mysteres. » Puis ils lui fiez-vous, 90enlevez de vos ames les taches de la malice. »
donnerent des pains ordinaires, en lui recommandant d'en Durant tout Ie reste de sa vie, jamais il ne se separa de la sainte
manger autant qu'il voudrait. Le paien se saisit des pains, et, eglise de Dieu : sans cesse il se rememorait ces glorieux saints
tandis qu'il manifostait comme insatiable Ie desir qu'il en avait Come et Damion, et il leur rendait graces de ce qu'ils eussent
- cal' il etait desormais assoiffe du salut - les saints ~erviteurs gouverne toute son affaire de fagon opportune et avantageuse.
65du Christ Come et Damien, tout a fait SUI'S maintenant, dans Quelle langue done, quelle eloquence humaine suffira a
leur sage entendement, qu'il ne s'eloignerait pas de leur tres 95raconter les exploits de ces admirables Medecins Anargyres,
sainte et admirable maison, s'en allerent (31). Une fois sorti du leurs guerisons spirituelles et corporeIles, leur etonnante (32) et
sommeil et revenu it lui-meme, Ie pa'ien qui avait eu la merveil- merveilleuse puissance d'invention, leur noble gouvernement,
leuse vision se rappelle tout ce qu'il a vu et entendu et, pris et comme ils decouvront sans cesse des secours extraordinaires
d'effroi, il etait dans un trouble extreme eu egard it touto 70cette it l'avantage des malades qui se refugient aupres d'eux? C'est
grace de revelation du mystere qui lui avait ete faite. II raconta pourquoi, amis du Christ, it cause de tous ces bienfaits et it
tout a I'ami croyant qui lui avait procure Ie salut, et, lorsqu'il cause de ces ilIustres JOosaints et communs bienfaiteurs apres
lui eut con fie son intention, il s'approcha sans tarder, en grande Dieu, excitons nos ames it remercier davantage notre grand
joie, du troupeau du Christ, s'etant fait Ie zeI6 disciple de Celui Dieu Sauveur Jesus-Christ. Car it Lui reviennent gloire et
(30) tXAAOEOV~(; 10.48. Litteralemcnt (( d'un al~tre p~uple " Ill ais comme ~Ov'IJ
honneur dans les siecles des siecles. Amen (33).
signifie couramment les Gentils par opp. aux JUlfs, pUIS les palens par opp. aux
chretiens, ici = simplemcnt (( palen », cpo rXMOYEV~(; = « non-Juif » et "EAA'lJ V = (32) ~ev'lJV 10.96. Cpo ~Evl~Eo"OIX~ (( s'6tonner ». De meme 16.16.
palen. (3a) Cctte conclusion indique la fin de la premiere serie. Mais la seconde y est at-
(a1) rX7tltAUO"CGV 10.67. lci intransitif (L. S. J. s. v. A VII). Cpo U6 ~P1t"rXY'lJO"CGv tachOe directement sans prologue, et les deux ne forment qu'une meme umttl.
tX1t"' CGt)"t"oii, 12.31 )(CGt rX\lEX,WP'lJO"CGV, 13.26 'rCGih-1X d1t"6ne:(; IXUr(i tX1t"eO""'IJO"lXv.
116 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 117
90Que nul n 'aille penser (48) que 180 visite des saints rut pure plus, chaque vendredi, de venir a. cette admirable maison des
imagination, ce qui est Ie fait de gens tout a. fait insenses. CelIe saints et, reconnaissante it Dieu, cne raconte a tout venant
qui avait obtenu Ie salut grace aux saints se mit en garde eu les bienfaits des saints serviteurs du Christ Come et Damien.
egard au conseil que lui avaient donne les universels et sages Et que nul, amis du Christ, ne mette en doute ou ne refuse
medecins de se retirer de leur illustre maison. Quant a 180 pos- d'accepter aucun des miracles ou des gestes d es 1"0' • sam t s,
sedee Christine, elIe arrive au point du jour et veut 95entrer que nul ne fourre comme au debarras dans un coin Ie recit de
dans 180 loge de 180 dame. Car l' esprit impur loge en elIe luttait leurs charismes , c'est-a.-dirc de leurs guerisons. Car, j'en .at-
pour penetrer dans l'objet desire et executer sa machination teste Ie Christ, aucune partie de la verite n 'y a ete alteree, bIen
contre celIe qui avait obtenu la guerison, et cet ennemi du genre au contraire, je n'ai rien fait qu'y mettre, fut-ce indignement,
humain, frappe au camr a cause des dispositions que les saints tout ce que j'ai entendu de ceux-Ia memes qui ont ete gueris,
avaient prises contre lui, poussait violemment la possedee. ou appris de ceux qui ont assiste de leurs yeux aux autres
Le demon fertile en mechancetes craignait que, 1Oo1a dame miracles.
ayant regu son conge des saints, il ne fut degu en ses esperances Qui pourra, 125 qu elle langue sera capable, quel temps suf-
- comme, en fait, sombra dans 180 honte 180 per fide machina- flsant pour raconter dignement les miracles accomplis par les
tion qu'il complotait contre cette bonne chretienne. Quand saints du Christ Come et Damien en vertu des charismes qui
les gardiens du lieu eurent refuse it la possedee la permission leur ont ete donnes d'en haut pal' lui? De fait, se conformant
d'entrer dans la loge, l'esprit impur se mit it crier: « 0 violence a 180 foi de ceux qui recourent a. eux, c'est de bien des manieres
de la part de Come et Damien (49) I Ne sais-je donc pas, Marthe, et en tout lieu qu'ils presentent aux yeux leurs activites de
105que ce sont eux qui t'ont recommande de m'interdire l'entree guerison. Ecoutez, je vous prie, comment 130ce preambule
cllez toi? » Comme il criait ainsi et exposait, ou plutot liVl'ait n'a pas ete employe a l'aventure, mais avec l'idee d'un fait bien
au grand jour (50), ses propres desseins honteux contre celIe reel.
qui avait ete prise en pitie par les saints, Christine, qui avait
recouvre 180 raison, suppliait, avec des paroles melees de larmes, Miracle 13. Sur la femme de Constantin, leq~wl se trouCJait a
180 fidele croyante d'avoir pitie d'elle et de ne pas la priver Laodicee.
llode ses bienfaits habituals, vu qu'eJIe etait innocente de Ia
II arriva qu'un individu qui avait poste a. l'armee (51), du nom
machination du demon funeste loge en elle. Mais la fidele croyante
de Constantin, homme tres croyant et qui ne cessait pas de vi-
guerie par les saints rejeta les supplications de Christine et, siter assidument les saints, quitta cette ville imperiale amie du
apres avoir rendu graces aux saints, elle regagna en paix sa Christ a. cause de son service ul'armee. Or, en quelque lieu qu'il
demeure. De ce moment jusqu'au jour d'aujourd'hui, toujours se trouvat it l'etranger, 5il portait sur lui avec foi, pour sa
plus abandonnee 115au desir qu'elle avait d'eux, elle ne cessa securite, la representation des saints sur une image. S'etant fixe
(liB) tVIX 81:... vO[J.!cr€tev 'rt~ (12.90) equivaut iJ un imperatiC (selon un tour bien a Laodicee, qu'on appelJe « CelIe qui fabrique des trimita (52) »,
connu dans la basse grecite, v. gr. V. Sym. Sali 132.23,11..4."-,161.12 Ryden: mais
rcgulier;m~nt avec le_subjonctif), c?!,respondant il. supra 12.5B XIXL [J.1) vO[J.!cr'I)'r€ x'tA. (51) EV cr'rplX'rdq: t~e'roc~6[J.evov 13.1, cr. supra EV 71:pocy[J.lXn!q: t~e'rlX~o[J.evou
(49) W 1X71:0 Kocr[J.1X XIXL LlIX[J.tlXvoU 12.104. Deubner, Index, s. v. &71:6, renvoie il. un 10.1, Constantin ap. Eus. V. Const. III 18 (86.13 s. Heikel: lettre de Constantin aux
o?vrago ~usse en russe, V. Vasiclievskij-P. Nikitin, Legendes des 42 martyrs d' Amo- eglises apres Ie Concile de Nicee) : « que la penetration d'esprit de Votre Saintate
num, Samt-Pete:sbourg~ 19~5, p. 251 (l'ouvrage est cite egalement Deck, 511). considere combian il est grave at peu convenable que [J.e'reX: 'reX:~ 'roG 71:&crzoc ~[J.eplX~
II eut ete plus uhle de dIre d un mot comment ill'enlend. Je Ie prends avec ellipse &AAou~ [J.€V tv eop'rlXt(; XIXL &vecrEcr~v E~e'r&~€crOoc~, &AAOU(; 81: 'rlXt~ ~ptcr[J.evlXt~ Ex8e-
~e ~!IX comme dans les expressions si couranles dans la V. Theodori Sykeonis, v. gr. McrOlXt V'I)cr'rdlXt~, Eus. h. e. III 30.1 (I 262.8 s. Schwartz) 0 [J.ev'rot KA-Ij[J.1)~ (Cle-
W TIj~ ~!IX~ 'roG NIX~wplX!ou 377.13 s., W ~!IX, [J.~ [J.Ot opy!~ou 303.17, W ~!IX, 'r! E'A-Ij- ment d'Alexandrie) ... 8teX: 'rou~ &Oe'roGv'rlX~ 'rov Y&[J.ov 'rou~ 'rwv &71:ocr'r6Awv E:~;:'roccr
'AUOIX~ w8e 401.30, W ~!OC &71:0 'roG 71:opvoyew-lj'rou 'rolhou "-38.29 s., W ~!IX, 'r£ Oev'roc~ t1:v cru~uy!lXt(; (qui se sont trouves dans J'elal de mariage) xoc'rIXMyet.
~'AO€~ w8e 457.26. (52) ~ 'rPt[J.t'rlXp!OC 13.6 s. Un autre ex. L. S. J. (pap. du IV· s. ap. J.-C.). Le 'l'p![J.t-
(50) EAtyXO'l'l'O~, [J.iiAAov 81: 8'1)[J.ocrteuov'ro~ 12.106 s. cr. supra note "-0 il. 11.60 s. 'rOC; ou 'rp![J.t'rov (trilix) est une 6loITe il. triple tissu, telle qu'on en fabriquait il.
126 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COl\1E ET DAMIEN 127
et y ayant fait un assez long sejour en raison de l'office dont dans un portefeuille sous l'aisselle Ia representation des saints
il etait charge, il y epousa une femme en mariage legitime. Or, sur une image. 35 11 tire aussitOt Ie portefeuille et Ie montre
au bout de quelques jours, celIe qui s'etait donnce a lui en mariage a la femme. Celle-ci, a cette vue, baisa l'image, et eUe rec~nnut
tomba malade j lOil lui poussa un abces a la machoire gauche, que les saints habitaient reellement avec eux, comme 11s Ie
et, comme elle etait cruellement eprouvee par la douleur, cela lui avaient dit. La nuit suivante, Ies memes serviteurs du
causait un profond chagrin a son mario II avait grande familia- Christ lui apparurent sous Ie meme aspect et lui disent : « N~
rite avec les saints (53), bien qu'il eut oublie que, selon son ha- t'avions-nous pas dit que nous sommes ici avec vous: De qU~l
bitude, il les portat sur lui sur une image peinte, et il dit donc souffres-tu? )) Quand elle leur eut 40indique, cO.mme Sl, de vra~,
a son epouse pour la consoler : « Comment t'aider? Je suis ils l'avaient ignore, les souffrances de sa maChOlre, elle entendlt
15a l'etranger. Car si j'etais dans rna ville, j'aurais pris de la cette reponse : « Tu n'as rien de grave. Ouvre seulement la
!cerote (54) de mes maitres, les saints Come et Damien, et aussitot bouche. » Alors l'un d'eux lui enfonlta Ie doigt dans la bouche et,
ils auraient fait cesser tes douleurs et auraient gueri ta mala- par Ie secours de Dieu et la grace des saints Come et Damien,
die. » La femme, qui etait croyante, prise d'admiration pour la il sortit de la joue un flot enorme de sang corrompu. D'un mot,
rapidite des guerisons que procurent les saints, pria d'etre jugee ayant evacue par la bouche tout Ie 451iq~ide malodorant, .eUe
digne, apres leur retour, de porter son adoration dans leur glo- fut remise en sante, en sorte que, Ie matm venu, son marl en
rieuse 20et illustre maison, car, rien qu'a entendre parler d'eux, se levant, la trouva toute joyeuse, debarrassee de tout mal.
elle avait ete penetree du desir de les approcheI'. La voila apai- Cependant, apres sa guerison, les saints voulure~t, n?n seule-
see. La nuit suivante, tandis qu'elle etait profondement endor- ment lui mettre sous les yeux la foi de son marl, malS encore
mie, elle voit ces grands et merveilleux medecins serviteurs du con firmer cette foi, et, 10. nuit suivante, ils 50lui dirent : « Tu
Christ Come et Damien se tenir pres de son lit sous l'aspect as sous ton oreiller une portion de 'drote, fais t'en une onction
sous lequel on les represente. lIs lui disent: 25« Qu'as-tu? chaque soir au moment de dormir, et tu ne seras plus troublee
Pourquoi cette agitation? Pourquoi causer des tourments a en rien par tes douleurs. ))
ton mari? Nous sommes ici avec vous, ne t'inquiete de rien. )) Vous avez vu, amis du Christ, comment, se conformant a
Ceci dit, ils s'en allerent. Une fois reveillee, elle interroge son 10. foi de ceux qui les invoquent, ces tres sages saints se trouvent
mari, voulant apprendre queUe est la figure des glorieux saints partout, non seulement par leur activite, mais aussi 55pa~ leur
Come et Damien, comment on les represente, dans quel etat presence meme. Des lors, quand 10. femme, avec son marl, fut
ils viennent visiter les malades. Alors que son mari lui decrivait arrivee a cette ville-ci amie du Christ et toute bienheureuse, elIe
la figure des saints et lui exposait 301eurs charismes, elle vint en grande reconnaissance a cette demeure guerisseuse des
s'accordait avec lui en ce qui regarde les figures, et se mit a glorieux saints, louant Notre-Seigneur Jesus-Christ, qui manifeste
lui raconter ce qui, du reste, lui avait etC dit par les saints dans en abondance au genre humain les traits de sa misericorde par
sa vision. Alors Ie mari, du fait de ce recit, se rappela qu'il avait l'entremise de ses admirables saints serviteurs Come et Damien.
les maladies, allege les souffrances, guerit les maux, soigne les it la margelle du bassin. Alors il remonte et, de la meme fagon,
langueurs, d'un mot congedie en paix, rendus a Ia sante, tous les invite Ie paralytique; lui offrant ses mains guerisseuses, il
patients. l'amena, marchant, jusqu'au bain froid, et la il l'exhortait it
Or donc (55) un certain pretre de Ia tres sainte Grande Eglise, 35descendre dans l'eau. Et comme il disait qu'il n'atteindrait
qui etait parvenu a une profonde vieillesse, ayant ete frappe meme pas I'eau a cause de sa maladie, Ie serviteur du Christ,
soudain de paralysie, s'en vint aussitot a cette auguste maison qui apparaissait au malade dans Ie role de gargon de bain,
lOdes saints, et il suppliait avec foi les serviteurs du Clu'ist Come l'enleva et ]e plongea dans Ie bain froid. Puis, etant descendu,
et Damien d'avoir regard a sa vieillesse et de traiter I'accident il Ie fit remonter et, l'ayant porte jusqu'it ses vetements, Ie
infortune de cette maladie qui l'avait atteint. Plusieurs jours deposa la, lui disant a l'oreille « Tu n'auras plus aucun m~l. »
s'etant ecoules, il voulut se rendre au bain dit curatif qui se Sur ce, il 40disparut. Voila ce que fit Ie saint cher aDIeu,
trouve a Sykae (56). Etant sorti a l'aube 15de Ia maison de ces imitant aussi en cela Notre-Seigneur Jesus-Christ qui n'a pas
saints, il cherche a gagner (57) Ie bain prive OU se soignent les dedaigne de panser de Yin et d'huile les plaies de l'homme qui
gens de Sykae. Cependant, comme il s.etait amasse des nuages etait tombe entre les mains des brigands (Lc. 10, 34). Une fois
et que deja tombait la pluie, ceux qui Ie portaient lui disent : donc remis en sante, Ie vieillard dit a ses suivants : « J'ai pris
« Pourquoi mepriser Ie bain d'ici, sire pretre, et t'empresser d'al- un bain absolument delicieux. Qu'on se souvienne du gargon
leI' it un autre bain curatif, surtout avec une telle pluie? Vois, de bain, 45je lui suis bien reconnaissant. Croyez-moi quand
Ie baill. prive d'ici passe aussi 20pour etre curatif. » Bref, les je vous dis que ses attentions extraordinaires, et vel'S Ia salle
saints ayant ainsi arrange Ia chose, on Ie persuade, it cause de interieure et de nouveau jusqu'au bain froid, m'ont rendu
la pluie, d'entrer dans Ie bain curatif d'ici. II entra donc, sur capable de marcher. Eh bien, faites-moi plaisir, donnez-Iui un
les bras des porteurs, dans ce qu'on nomme les salles vouMes bon pourboire, seulement faites-le sous mes yeux (59) ». On
des bains de vapeur, et il y etait assis seul, car la grace des saints appelle donc un des gargons de bain, mais Ie vieillard lui dit :
avait distrait au dehors ceux qui l'avaient introduit. Or l'un « Ce n'est pas toi qui m'as baigne, c'est un autre.» 50L'homme
des deux serviteurs du Christ, 25lui etant apparu sous l'aspect alors amene deux autres gargons sous les yeux du baigneur et
d'un gargon de bain (58), invita Ie malade a se lever et a entrer dit : « Voila, nous sommes les seuls gargons de bain. » Comme
dans Ia salle plus interieure. Comme il alJeguait l'impossibilite il n'en avait reconnu aucun, ils lui disent : « Va, seigneur petit
de marcher et en attribuait la cause it sa maladie, de nouveau pere (60), va offrir ce que tu veux en remerciement aux saints.
Ie saint l'encourageait, lui tendant les mains et les lui offrant Car ce sont eux qui t'ont et baigne et gueri. Aussi vrai que Ie
en guise de baton. S'etant saisi du malade 30du bout des doigts, Seigneur vit (61), nul de nous n'est entre dans la salle, nul de
ille fit marcher, bien qu'immobilise, sur ses pieds jusqu'au bas- nous ne t'a 55servi.» A ces mots, Ie pretre reconnut Ie prodige,
sin, l'y fit descendre et Ie baigna ; puis I'ayant porte, ille deposa ou plutot Ie mystere, qui s'etait accompli miraculeusement pour
lui, il courut de ses pieds a cette maison tant vantee des saints
(55) "OOev (it,.?) simplo partieule de liaison, = « nun ». Cf. 'rabaehovitz, Etudes ... , et, penetrant dans Ie saint sanctuaire, illouait et glorifiait Dieu
12 s. avec exemples tires de Malalas. De memo "OOev au debut du miracle 16, infra 16.1.
a
(5.6) Non sans .doute les 'l'hermes d'Honorius Sykao = Galata (ef. Janin, Cons-
tantmople byzantme, 2H, nos 19 ct "25), car il s'agit d'un bain priv6, 7tp!~(hov I. 16 (59) [l6'10V t7t' il~f:O'[1J [lou 1ULS. Lo pr8trc veut Ctre sur qu'on donne au gar~on
et 20. qui l'a soigne. _
(5?) tpO&ve! (14.15) inehoatif. Avec l'aee. (tpO&ve& "0 toc!LOC"!XO'l ... 7tP!~&"O'l) (60) XUP! 7tOC7t(OC H.52. Cpo Mart. Cononis 2, p. 65.1 Knopf-KrUger IIocrr(oc, xocAe:&
comme souvent, tpO&vouow xoct "0'1 ,,67to'l 1.52, tpO&O'ocne<; "~'1 x&:!LvouO'ocv 2.15, O'e 0 ~ye!L6>v, ll. Laus. 22, p. 72.13 s. (Antoine a Paul 10 Simple) <l>&ye, 7toc7t(oc, xoct
tpO&O'oc'l"e<; "0'1 ,,6rro'l 9.2? etc. rxAAO'l rrlX.~oc!L~'1. - Aprils rrocrr(oc, lire sans virgules xoct "OL<; &.y(o!<; d ,,! (= 1\ ,,!)
(58) 7tep!X1hou (15.25). rrep!Xlhoc<; est var. leot. (~~y) en Ptol. T6trab., p. 181.3 O€Ae!<; rrpoO'&yocye euxocp!O''I'w'I.
Boll-Boer pour rrocpoccrx(O'''oc<; (V Y Proel. ed.), coux qui fendont les eadavros en (61) ~n yocp XUP!o<; 1!..5 1•• 'l'our biblique, v. gr. I Uois 25, 26 xoct '1U'I, xup!e, ~n
long pour les embaumcr. Plus loin (15.3?) ~ '1epotp6po<; (se. ~!L~ocO'&<;) cst Ie bassin XUP!o<; xoct ~n ~ ~uX~ O'OU, xocO(\)<; eX6>AuO'€'1 O'e xUP!O<; X"A.
(ou baignoire) d'eau froide.
9
SAINTS COllIE ET DAMIEN 131
130 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
qui a donne une teIle mesure de puissance a sos sorviteurs Como Tu vois comme la pieuse femm~ trouva rapidement les fruits
et Damien. 60Puis, apras les avoir remercies, il 1'entra en bonne de son esperance. Vous avez reconnu, amis du Christ, comme la
sante dans sa maison. foi prete sec ours aux o:mvres et comme a l'aide des ceuvres la foi
aLteint sa porfection (Jac. 2, 22). 30Et que nul ne se figure qu'il
y ait eu dans ce prodige uno innovation de la part des saints,
Miracle 15. Sur la femme qui avail des coliques. ou que la malade ait simplement obtenu la guerison parce qu'elle
C'est a juste titre que Ie tras sage Paul, Ie pilier et doctour avaiL bu cette potion (63). Car c'est une parole du Seigneur a
de l'Egliso, clame que « l'esperance ne nous laisse pas sombror tous ses saints apotres qui dit : « Les ceuvres quo je fais, vous les
dans la honLe, parce que I'amour de Dieu pour nous s'est re- ferez vous aussi, et de plus grandes encore» (Jo. 14, 12). D'ou
pandu a flots dans nos cceurs » (Rom. 5, 5) (62). Cette esperance, viont que, 35a lors que l'ombre du Maitre lui-meme n'a jamais
une pieusc femme la possedait, elIe qui avait ete delivree do produit de miracle, l'ombro du prince des apotres Pierre a brise
plusieurs maladies graves par l'entremiso dos 5illustros saints la mort et chasse les maladies. Eh bien, ces miracles aussi,
Come et Damien. Ello ne cessaiL de se rappeler la reconnaissance Notre-Seigneur les accomplit par l'entremise de ses saints.
qu'elle leur devait, se rendant souvent a leur admirable demeure
et s'acquittant de sa dette de veneration a leur egard. D'un
Miracle 16. Sur llne trinite de miracles.
mot, chaque jour, elle gardait en pensee 10 souvenir des grands
et admirables saints Come et Damien et n'en etait jamais ras- Or donc, toujours desireux d'imitor la sainte trinite do l'unite
sasiee. Bien plus, elIe les avaiL fait peindre lOSU1' tout Ie mur divino (64), ces glorioux saints manifesterent selon ce modele, de
de sa maison et ne se rassasiait point de lcur vue : c'est pour memo nombre que Ia trinite, trois miracles dans leur tras sainte
cela que, dans son amour extreme, elIe les avait faiL peindre. maison d'ici, par Ie moyen de Ia puissance de Dieu. Un certain
Et que nul ne trouve a redire a cela, chretiens, car Ie manque de personnage en vue dans Ie pa.lais, homme de foi, 5avait une
satiete est partout juge irreprochable quand il s'agit de l'utilite plaie profondo a l'anus. Comme, les medecins qui Ie soignaient
de l'ame. ayant ete vaincus par son mal, il avait gagne par force cette
II arriva que cette femme, atteinte dans ses organes internes, demeure des saints, sa femme, comme de juste, compatissante a
fut prise chez elle de 15douleurs sans remission. Elle se roulait son epoux, l'avait accompagne, et elle avait emmene sa sceur,
sur son grab at , sa souffrance n'avait pas de cesse, il n'y avait car celle-ci s'ailligeait avec elle de Ia maladie de son 1°beau-
en elle nulle suspension de ses peines. Dans ces circonstances, frere. Alors donc que, comme j'ai diL, iIs etaient tous (65) arrives
il advint qu'elle eut ete pour un moment laissee seule. Comme it cette admirable maison des saints, Ie Dieu inapparent et in-
elIe se voyait en danger, elle se traina hors du lit, gagna Ie lieu visible, par l'onLremise de ses glorieux saints Come et Damien,
ou etaient peints sur Ie mur ces tras sages 2°saints, et, se ser- diminua peu it peu, ou plutot fit disparaitre la plaie incurable
vant de sa foi comme de baton, elle se redressa, gratta de ses par des moyens humains, et invisible aux yeux. En effet, 15graCe
ongles quelque peu de l'enduit, jeta cette raciure dans de l'eau
et but Ie melange. Aussitot elle fut guerie, les douleurs qui eLaient (63) Litleralement « par suite du geste qU'elle avait accompli )), ex 'TOU em'Te:Ae:O'-
en elIe prirent fin par 1a visitation des saints. Apras sa guerison, O€V'To<; 1tOGp' OGuTIj<; O'X~{lOG'To<; 15.31 s. Meme ideo que ci-dessus 8.11.-16, 11.105
(cf. noto Id). C'est par leur puissance, non en vertu d'un remMe, que les saints ont
elle vint dans cet auguste temple, 25remerciant notre maitre gueri.
Ie Christ qui a donne de si grands charismes a ses saints, et clIo (6't) L'auleur ecrit maladroitement 'TO {lovOGlhxov TIj<; eXytOG<; OGU'TOU (Dieu) 'TPLOC/30<;
16.1. Le contexte montra qu'il vent dire 'TO 'TPLOG/3LxOV 'T~<; eXytOG<; OG1hou {lovoc/3o<;.
raconta a tous la guerison qui lui etait advenue, par l'entremise (65) &{lqJo'Tepcuv 16.10. Cpo Const. Porph., de caerim. 56, II "7.28 ss. Vogt e:tO'lfp-
des saints, au cours du geste qu'elle avait fait. XOV"t"OGL ot 1tOG'TptXLoL XOGL XOLVCUVOUCHV, dO' olhcu<; &1tepXOV'TOGL d<; 'TO O'Xoc{lvov 'TiJw
1tOG'TPLXtC,lV, XOGL qJopouO'w O'OGYLOc &A'1)OWOc (de pourpre) &{lqJ6n:poL, ib. 78, II 119.15 ss.
(62) TIj<; &yOC1t'1)<; 'TOU Ozou €XXEXU{l€V'1)<; 16.2 s. : (hL 'fJ &yoc1't'1) 'TOU Ozou €xxe- Vogt 'To1;"ou ye:vo{levou, to''tOGV'TOGL at Mo -IJVtoXOL XOGL ot Mo {lOGtO''Tope:<; XOGL at
XU'TOGL saint Paul. Mo Ozcup'1)'TOGt, ... XOGL OZCUPoUOW &{lqJ6n:poL 'TO O'ooO'L1t1tov.
132 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 133
au savoir qui leur avait ete donne par Dieu, les saints traiterent semaine que mon mari a ete gueri et que moi je suis arrivee dans
cette plaie par un simple regime (66), au vrai admirable et eton- votre maison sans nulle maladie, mes saints, et maintenant je
nant, je veux dire au moyen de leur sainte kerote, et ils main- meurs et vous me negIigez. » Que fallait-il donc, amis du Christ,
tinrent ainsi Ie malade a l'abri de la douleur. que les saints 45Come et Damien chers au Christ fissent pour
Ensuite, tandis qu'il passait son temps en grande joie et re- la malade (68)? De fait, la nuit etant survenue, s'etant tenus
connaissance en vel'S Dieu et les saints, et qu'iI racontait a tous pres de son lit, ils lui disent : « Pourquoi te facher ainsi, pour-
que la vie, contre toute attente, lui avait ete rendue par Dieu quoi crier temerairement contre nous? ~i tu veux aper mieux
grace aux 2°saints Corne et Damien, un jour, alors qu'ils et rester sans souffrance, fais ce qu'a faIt ta soour, Jette de la
mangeaient, la belle-soour de ce personnage lui dit qu'illui etait ldrote dans de l'eau, bois, et tu seras guerie ». Or, une fois levee
venu une douleur a la gorge, et elle l'attribuait (67), disait-elle,
aux amygdales. A ces mots, comme, du fait du miracle extra-
50apre s Ie sommeil bien qu'elle se rappelat Ie commandement
,
des saints, la femme gardait la meme repugnance it. gouter
.
ordinaire qui s'etait manifeste a son egaI'd, il tenait encore de Ia kerote. Apprenez donc, amis du Christ, Ie traitement, ou
toute fraiche en lui 251'experience du si grand bienfait des plutot Ie chatiment, a Ia fois genereux et tres plaisant et juste!
glorieux saints, il dit a sa belle-soour : « Jette dans de l'eau de des glorieux saints Corne et Damien it. son sujet. Cette femme qUI
la /cerote de nos maitres les saints, et bois : cela te sera de grand avait declare qu'il lui repugnerait absolument de gouter l~
profit. » Elle n'eut aucune repugnance pour ce remMe, mais 55kerote de Ia lampe du candelabre, qu'avait ava}ee son marl,
suivit avec foi l'ordre entendu, et obtint aussitOt, remise en ils lui font, par Ieul' admirable conduite, mastiquer entierement
sante, la recompense de sa foi. Quand elle se fut levee apres Ie dans sa bouche et absorber l'etoupe preparee pour l'allumage
sommeiI, 30elle dit a sa soour : « Veux-tu savoir? Les saints des Iampes. Et vois I La nuit suivante, les serviteurs du Christ
Corne et Damien m'ont guerie moi aussi comme ton mario etant venus pres de 1,epouse
' d e 1'1wmme guerl' . a, l' anus, 6°1'un
Tu sais qu'hier soil' je ne pouvais meme pas avaler ma salive. d'eux, qui avait pris it. la lampe et tenait dans sa main droite
J'ai jete dans de l'eukraton un peu de leur sainte kerote, je l'ai la dite etoupe, l'introduisit dans les narines de Ia malade, et
bue, et par leur grace je n'ai plus aucun mal. » A ces mots sa les deux lui disent : « Puisque tu ne veux pas manger de la
BOOur lui dit : « Moi, je ne mettrais pas dans rna bouche 35de kerote flaire ceci. Vois, y a-t-illa quelque chose qui te repugne,
Ia /cerote, fut-ce pour la gouter, a plus forte raison je n'accepterais y a-t:il la une odeur fetide (69)? » Quand, dans une vision de
pas d'en boire, pas meme si j'avais a supporter une forte dou- songe it. ce qu'elle pensait, elle eut flaire et, par l'operation des
leur. » Si elle disait cela, ce n'est pas qu'elle fut disposee a saints, n'eut rien trouve 65de ce qu'elle soupgonnait, ils lui
queIque manque de foi, mais parce que, selon l'habitude des disent : « Tu vois, pas la moindre mauvaise odeur, pas d'exha-
femmes elle apprehendait des nausees. laison. Mache-Ie. » Ensuite, quand elle eut pris avec empres-
Elle ~vait parle ainsi au petit matin, et voici que, ce meme sement l'etoupe dans sa bouche, les saints la lui enfonce:rent
jour, elle tombe dans Ie meme mal que celui . 4~que sa soour peu a peu dans Ie larynx, lui recommandant de macher, et
avait alIegue. Irritee de la souffrance, elle crIalt contre les bref, a la fin, ils lui disent : « Tu vois comme cela sent bon.
serviteurs du Christ Corne et Damien, dis ant : « II n'y a pas une Si tu veux litre guerie 70comme ta soour, obeis-nous et avale-Ie,
et tu n'auras plus aucun mal. » Ainsi fit Ia femme qui s'etait
(66) ad aL(Xh''I')~ (1.6v'l')~ 16.15, sc. sans operation chirurgicale. Co~mc on ,Ie voH
plus loin par Ie consoil do l'homme 11 sa ~ell~-smur et par uno ~efIO~IO~ de I a~te~r heurtee au caract ere repugnant de la kerote, elle avala l'etoupe
16.55, ce regime a consiste 11 boiro do Ia ker~te. Done" en x(Xt. (aL':) TI)~ (Xy.[(X~ (x\)'l"W'J et fut guerie.
x'l')pwTIi~ 16.16 s., X(X! a valeur d'expIicitatlOn =« C est-1I~dlre, Je veux dire".
(67) cx.!'l"Lw(1.eV'l')~ 16.23, alors q,ue la belle-somr est sUlet d; MyeL; An~coluthe (68) Sci!. puis quo la malado refusait Ie simple remiJde qui avait gueri sa bolle-smu:.
alors courante, cpo 20.38 s. &TCeLO"1J~ ~(1.e\lev TCpO~ 'l"'I)'J 'l"OL(X\)TI)'J em'l"(xY'l')'J, CP"IJO"(X\I'l"O~ (69) Btant donne les indicatifs, (1.-1) 'l"L &'I')ae~ eO''l"L'J, (1.~ 1t\IeeL 'l"L 0'(xTCp6'J 16.63, \1
(xU'l"C:> &a\)\I&.'l"W~ ~xeL'J 'l"oii'l"o TCpa~(xL. vaut mieux voir la des interrogations que des membres dcpendanL de ~Abte 16.62.
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Cependant elIe se figurait, on ce qui regarde l'etoupe, que capturent los maux des mala des et leur procurent en peu de
ce traitement des glorieux saints Come et Damien etait seule- temps la delivrance, non seulement ils guerissent les croyants
ment une vision ou une apparition de songe, et, une fois levee, do la vraie foi, mais ils tl'aitont aussi, 5dans la bonte et la
elle dit it son 75 mari: « Veux-tu savoir, monsieur mon mari? longanimite qui leur sont propres, ceux qui se sont grandement
Cette nuit, les saints sont vonus it moi, plutOt facMs de ce que eloignes do la foi orthodoxe. Ecoutez ceci, amis du Christ.
je n'eusse pas voulu, car j'en eLais incapable, gouter a leur II y a tres peu de temps arriva it cette admirable maison
Mrote. Ils m'ont presente en vision de songe comme de l'etoupe des saints un homme qui, membre de la socte mal croyante des
d'une lampe, pour que je la flaire ot la goute. J'ai eu l'impres- Exakionites, avait ete frappe d'une maladie grave : il etait
sion ainsi que je l'avalais, parce qU'elle n'avait pas du tout paralyse des gonoux ot des jambes 10et ne pouvait absolument
Ie rolent 8°d'une lampe. Et voici, je suis guerie, mon mal de pas se mouvoir. Rotenu par un sentiment de crainte et de
gorge a passe ». A cos mots, son mari s'etonna do la longani- frayeur, il n'osa pas se coucher it l'interiour do la gloriouse et
mite des saints Come ot Damien ot de l'admirable fac;on dont illustre maison de ces saints, mais se mit pres du narthex Ijxte-
ils avaient arrange la chose. II lui dit : « Au nom de Dieu (70) rieur. C'est lit qu'il avait depose sa literie et qu'il etait assidu it
de quelle lampe estimais-tu que les saints eussent pris pou; prior les saints, los suppliant de mottre fin it leur colero c~ntre
toi l'etoupe dont tu parIes?» Elle lui dit : « II m'a semble 85qu 'ils lui, de ce qu'il avait seulemont ose 15s'approcher de leur ad-
l'avaient prise apparemment au candelabre. » Ils se mirent donc mirable demeure, dd manifester it son egaI'd la memo compas-
it la recherche de la lampe du candelabre, ot ils trouverent sion qu'ils avaient pour tous, et de Ie guerir. Quelque temps
qu'elle n 'avait pas sa mecbo d'etoupe. Alors, conscients de ce s'etant passe, comme 10 mal du malade avait empire, les glorioux
qui eLait arrive, ils admirerent comment ce n'est pas en vision saints serviteurs du Sauveur Come et Damien, au cours de leur
de songe, mais pour de vrai que les saints avaient fait avaler visite nocturne, passerent Ie long de son lit. Or, dit-il, 2°1'un
a la femme, au lieu de lour sainte 7cerote, la meche d'etoupe d'eux dit it l'autre : « Que te semblo-t-il de cet homme? II y a
prise it lalampe. longtemps qu'il est ici. » L'autre dit, de maniere a etre entendu
Voyez donc, tres croyants, tous 90les desagremonts que du malade (72) : (( Laisse·le coucher lit dehors. N'est-il pas lent
cause la desobeissance, et quels avantages, quels nombreux biens a se convertir? Viens, delivrons d'abord ceux qui tiennent la
procure la vertu d'obeissance. Une fois donc gueri avec sa femme foi orthodoxe, celui-ci vicndra it son tour. » Ils ne disaient pas
et sa belle-seeur, cet eminent personnage et fidele chretien cela comme Ie jugeant exclu de leur guerison, mais parce que,
rentra en paix chez lui, joyeux, louant Dieu avec elles et remor- 25dans leur sagesso, ils prevoyaient l'issue de sa fausse croyance.
ciant les saints 95Come et Damien chers it Dieu. Sur ce, s'etant eloignes de lui, ils continuerent leur visite des
malades. Deux jours s'etant eeouMs, ces admirables saints cbers
Miracle 17. Sur l' Exakionite (71). au Christ apparaissent une seconde fois a I'Mretique, et, fai-
sant semblant de passer outre, on pouvait croire qu'ils Ie negli-
C'est bien au loin que se deploicnt les filets de guerison de geaient. 30De nouveau l'un dit a l'autre : (( Voila 10ngtemps
ces glorieux saints Come et Damien. Par ces filets en eifot, qui
Didez-Hanson : 'E7td yelp ot &7t0 't"ij<; 'Apdou OdPE(JEW~, &tpG(LPEOEV'I'E<; "wv l:v "'Ii
(70) "OV Oe6v (Jot, sc. l:7t6/LVUl1.t 16.82 s. Cpo "ov Oe6v (Jot Epict. III 7, 19; 20, 7t6Aet tXXA'1J(JLWV E7tt 't"ij<; 8eoi)O(J(Ou ~G((JtAdG(<;, 7tpO "WV "ELXWV tXXA'1J(J(G(~ov, vux-
"'; 22,77; "ou<; OWJ<; (Jot ib. II 19, 15; III 1, 36; IV 1,/'7; M. Aur. VII 17, 2. "wp 7tp6"epov EV 'I'G(L<; i)'1Jrl.O(J(G(L<; (J"OG(L<; (JuveAEyoV'I'O ... , {mO i)/; ,,~v ~w ,,&i)e
(71) • I'~xakionites » fut la denomination des Ariens so us 'l'hCodose I (379-395) i)'1J/Lo(J(q: IjJ&:AAOV'I'e<; d<; "ou~ 'I'67tou<; &7t1lECiG(V t:vOG( xG(t l:XXA'1J(J(G(~ov, 'l'heodor.,
parce que, refoules hors de la ville, i1s se reunissaient it l'gxakionion, quartier situe haeret. fabul. comp., IV 3 'E~G(xLOvr"G(t 7tP0(JG(YOPEUOV'I'G(L &7t0 'I'OU ,,67tou -rl)v ovo-
j( entre Ie mur de Constantin et celui de Theodose )) (Janin, Constantinople byzantine /LG((J(G(v i)E~&/LEVOt tv (T) 7tOLe:Lt'OG(t dWOG((JL ,,~v (JuvEAeu(JLv. II faut lire dans notre
327, oil corriger, dans la reference il. Delehaye, Les saints stylites, 63 en 69), et dont texte (et Sophocles) l:~G(XLOVr"G(L, non E:~G(XLOVi'l'G(t.
Ie nom signifie probablement Colonnade exterieuro )) ('E~wxt6vwv), Janin, ib.
j( (72) En 17.21 lire d<; E7t~XOOV (d<; U7t~XOOV cod.) 'I'OU &(JOevouVTo<;. Cpo Hist.
Sur co refoulemenl des Ariens, cf. v. gr. Sozomene, h. e., VIII 8, 1-2, p. 360.18 S8. Mon. VIII 282, X 69.
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qu'il est lit au dehors de notre maison, il doit enfin jouir de nos plus incultes, stimulant leurs langues a louer leurs exploits.
soins. » L'autre, en reponse, lui dit avec colere : « Ce que tu veux Le recit du miracle 5qu i va suivre, recit qui depasse tout co
lui faire, fais-le vite, et qu'il sorte de notre maison, pour qu'il n 'oc- qu'on peut dire, m'a engage a parler ainsi.
cupe pas cette place qu'il emploie a son usage. » L'ayant donc re- Un homme pioux et doue de bonnes qualites, attache it la
veilIetous deux 35alors.qu'il dormait, ils lui font une operation, de religion et a la gravite des mreurs, forme d'ailleurs aux bonnes
maniere invisible (73), aux deux cuisses. Cela fait, Pun d'eux ap- lettres ot instruit dans les Saintes Ecritures - ce recit meme
porta une cuvette et une eponge, et, ayant rempli deux fois et Ie miracle extraordinaire qui s'est accompli a son sujet m'en-
la cuvette, il lava toutes les parties gangrenees. Puis, lui ayant gagen t a Ie louer ainsi - etait venu lOa plusieurs reprisos, d'un
bande tous deux les deux cuisses, ils Ie laisserent lao Quand donc pays etranger, a cette Ville amie du Christ et iI avait entendu
Ie malade ainsi traite se fut reveille au petit matin, 40incons- raconter les miracles des universels bienfaiteurs, les serviteurs
cient du miracle accompli sur lui par les glorieux saints Come du Christ Come et Damien, et leurs bien faits envers les affiiges.
et Damien, il se dressa sur son seant sur son grabat et voulut Comme de nouveau, iI y a peu, il etait venu a la Ville imperiale,
se rendre aux cabinets. Et, lui qui avait ete immobilise, il se penetre de zele pour ces glorieux saints, il voulut transferer
leva par la grace des saints, sortit sans que nul ne Ie tint, gagna ici son domicile, a cause d'eux l5surtout, mais aussi it cause
Ie lieu affecte aux besoins et reI eva sa chemise 45pour s'ac- de bien d'autres avant ages de cette Ville illustre. Ce dessein
croupir. II voit les bandages places sur ses deux cuisses, rentre ayant pris force en lui, il ne cessait ses assiduites et supplications
en lui-meme, se rappelle la vision de songe de la nuit, et se rend auprcs de ces gIorieux saints, leur demandant chaque jour
compte alors du secours qu'iI a regu de Dieu et de la grace de ses d'avoir regard a l'amour qu'il leur portait, et 2°de lui donner
saints serviteurs Come et Damien. La nuit suivante, Ies saints dans cette Ville un pretexte legitime de sejour, de quoi subve-
lui apparurent de nouveau, et, ayant constate qu'iI n'y avait nil' a son entretien et aux autres necessites, pour qu'il put satis-
rien de change 50dans son endurcissement touchant l'heresie, fa ire son desir d'habiter ici sans etre dans Ie besoin. II leur por-
ils lui disent, selon son recit, avoc colere : « Vois, tu es gueri, tait sans cesse cette supplication, mais comme, au bout de
tu n'as plus aucun mal. Qu'on no te trouvo plus ici, nous te quelque tomps, l'argent qu'il avait apporte avait ete deponse,
haissohs commo heretique. » il tomba 25dans un profond decouragement, et, puisqu'il
Et que nul he juge cette parole dure ou incroyable. C'est parce n'avait pas attoint 10 but desire, voulut regagner sa patrie.
qu'ils machinaient son salut quo les saints avaient differe a son II fit un paquet des vetements qu'il avaiL apportes, vint it la
egard de Ie visiter et guerir : de lu vient qu'iIs userent de ce maison de ces glorieux saints, qui guerissent non pas seuJement les
langage avec lui. Une fois donc remis en sante, 551'homme revint maux spirituels et corporels, mais les besoins d'argent, et la,
chez lui rend ant graces aDieu, et il racontait it tous tout ce qui dans son extreme affiiction, il langa contre les serviteurs du
s'etait passe et les bienfaits des saints Come et Damien. Christ Como et Damien 30des paroles dures, inconvenantes,
indecentes, pleines de recriminations, teIles que nul chretien
n'en accopterait en pensee, a plus forto raison n'oserait en dire,
Miracle 18. Sur le pedagogue, qui eut les saints pour compagnons
nommant les saints des imposteurs, qui n'ont nulle activite de
de route.
bienfaisance, mais dont la reputation d'avoir puissance aupres de
Alors qu'ont liou ces insignes guerisons, apres qu'on a fait Dieu est illusoire at due it une opinion precongue. Bref, 35apres
tant de fois l'experience de lours bien faits, ces glorieux saints avoir eu en pensee et profere de bouche de teIles paroles et
ne permettent pas qu'on se taise, mais ils excitent meme les d'autros pires, il entroprit Ie voyage hoI'S d'ici vers sa ville (74).
(73) eXopoc't"CJl<; 17.35. cr. supra, note 3 II 1.61. (7") 'l"'ij<; bti 't"~'1 1':6)..\'1 't"Wli e'l't"€uOeli dX€'t"o O/)omoptoc<; 18.35 S. Construction
138 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAl\IIEN 139
Or comme, au passage, il etait entre dans la venerable eglise, sion et leur dit : « C'est par comedie que vous m'interrogez,
dite « des Blachernes (75) », de la glorieuse Sainte Vierge Marie comme si vous pouviez me procurer ce que je demande.» G5A
Mere de Dieu, il y pria, Ie cceur encore bouillant. Apprenez ces mots l'un des saints parut comprendre ce que l'homme avait
donc, amis du Christ, la condescendance 4°incroyablement en tete, comme s'il avait connu son but, et il lui dit : « Que
sublime de ces admirables saints Come et Damien. Tenant pour nous donnes-tu, si no us satisfaisons ton desir? » L'homme ne
rien la masse des inj ures temeraires lancees contre eux par voulut rien entendre d'un tel marche. De nouveau, alors, l'un
I'affiige, prenant plaisir au contra ire a lui montrer longanimite de ses compagnons de route, des clercs it ce qu'il croyait, lui
et compassion, ils lui apparaissent tous deux, sous l'aspect de dit : « Si tu nous donnes une livre 70d'or, nous faisons reussir
clercs, alors qU'il sortait de l'eglise de notre benoite Dame. ton projet ». Lui, a l'idee de donner de l'argent, s'irritait encore
lIs se collent tous deux a lui et, l'ayant mis 45au milieu d'eux, plus contre eux, et, dans son depit, estima qu'on lui faisait la
essayaient d'apprendre de lui OU il allait, ce qu'il avait, pourquoi une demande insolente. Alors, ayant pris la parole a son tour,
il etait si sombre. Lui, debordant encore d'irritation et de colere, l'autre compagnon lui dit : « Meme pas cinquante sous d'or,
ne cessait pas ses outrages, leur disant, comme a des clercs a ce ou trente, ou vingL, ou dix, ne veux-tu pas nous donner cela,
qu'il croyait : « Vous aussi, vous etes des imposteurs, pareils a 75 pour que nous guerissions ta peine et fassions reussir ce que
ceux qui ont la-bas, sur la colline (76), leur martyrion. Si vous tu desires? » Comme il s'irritait davantage et leur avait dit :
ne vous retirez loin de moi, comme mon cceur est plein 50d'amer- « Pas une obole, je ne veux rien donner. D'ailleurs vous ne
tume, je vous abreuverai d'ignominie. » Apres avoir cede la pouvez pas guerir la peine de mon ame, c'est moquerie que vos
place quelque peu, ils s'approcherent a nouveau de lui sur Ie paroles », celui qui Ie premier avait propose Ie marcM retire
chemin, et iis lui posaient les memes questions, insistant pour 80toute son offre et dit a l'autre soi-disant clerc : « Laisse-Ie,
savoir de lui pourquoi il etait si enflamme. Bien qu'il persista.t frere. » Puis, s'etant tourne vers l'affiige, il lui dit : « Nous ne
dans sa colere contre eux, les serviteurs du CIU'ist Come et te demandons pas grand'chose. Donne-nous dix oboles d'encens,
Damien ne s'eloignerent pas de celui qui, par decouragement, et nous te servons en tout. » Deja il vacillait,dans son decourage-
leur lan\lait de lourdes injures, 55mais iIs machinerent pour lui ment, devant la modicite du don, et cependant les saints,
Ie salut, imitant en cela aussi Notre Seigneur Jesus-Christ qui par leur longue patience, amollissaient 85son apre humeur et,
accepta de tout supporter volontairement pour Ie salut des pour lui montrer qu'ils pouvaient prouver, par Ie fait meme,
hommes. De nouveau donc, apres un peu de temps, ils s'ap-
la verite de leur promesse, ils lui disent : « Bien que tu no nous
prochent de lui sur Ie chemin, et, l'accompagnant d'un air plein
aies pas confie ton desseih, eh bien, nous allons te reveler ce que
de sympathie, lui disent : « Jusqu'a quand 60~as-tu rester
tu pensais nous etre cache. Tu es 90 p edagogue. Tu souhaites,
dans l'inquietude, et ne pas nous confier les ~aIsons de t?n
a cause de nous, d'habiter cette Ville, tu demandes que te soit
decouragement, et ne pas meUre fin it ton ,~hagrID? » P~r sUlte
de leur constante patience, et de ce qu IIs prolongement ce donnee une occasion de te procurer Ie necossaire pour ta sub-
voyage avec lui en plein jour (77), il se relacha un peu de sa ten- sistance, et c'est pour cela que tu es entre en ce ressentiment et
cette colere contre nous. Viens, suis-nous. Nous te montrerons
libre pour ex (ou cXlt6) 'rwv eV't"E:UOEV, cpo 18.112 s. [l€AAOV't"O;; a.U'rO~ xa.'r~ Tljv E~1ic; Ie lieu OU demeure celui qui a besoin de toi. Nous te revelerons
'r;;)V €v'reuOe:v cXltOltAe:LV 011 Ie genilif depend d.o cXlt?- dans .a.ltOltAE~V. .
(73) Lo plus celebre des sancLuairos de Marie it ConstantlIlople, cf. JaIlln, Geogr. son nom et son office, pour que tu tiennes de lui, selon ta re-
Eccl., 169. 1 79. . . quete, ce qui est necessaire a tes besoins, 95et que, si tu Ie
(76) &VIil 1.8. L'6gJise des Anargyres etalt de faiL, sur nne hauteur, cr. mon Intro-
desires, tu habites cetto illustre Ville. » 0 l'extraordinaire pa-
duction, p. 87. l • A- .. , _
(77) 'r1jc; ev YJ{.L€pq. O/)OLltOpta.C; 1, 8.~2. Cp. 1~98,S. xa., a.lt C,)C; cruvo,:eucra.v'rEC; 'rep tience de ces saints, 0 Ie merveilleux prodige, 0 leur prescience,
OA~~O!.Ltvep, XIX.Otk ltpodp1)'rIX.~, E:V 1)[lE,pq. OPIX.'rc,)C; ~v ?,X1)[la.n XA1)P~XIilV. Les ~ots
E:V YJ{.LEpq. rnetLent en relief Ie caracte.re extraordlIlal~o. de ce!l~ faveur. Les saints
ola compassion que voila et la liberalite ! Bref, ayant fait route
n'apparaissent usuelJemont que la nUlt, pour leurs vlSltes medlCales. avec l'afilige, comme on l'a dit plus haut, en plein jour, visible-
140 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME E'l' DAMIEN 141
ment, sous l'aspect de clercs, ils arrivent avec lui 100au Por~ glorieux saints a son sujet, et lui dit : « Tu ne peux plus sortir
tique Tenebreux jusqu'au Grand Pretoire des prefets (78). de cette Ville. Car Dieu t'a envoye un emploi qui te procurera
lOoLes saints alors lui montrent du doigt Ie scrinium, OU tenait ta subsistance. Le scriniaire des prefets a un fils 130qui est en
son office Ie scriniaire, qui avait un fils et qui avait besoin d 'un plein dans ses legons. II a appris, par un coup de la Providence,
pedagogue. lis lui disent aussi Ie nom du scriniaire. Tout de tes bonnes qualites et il veut t'avoir en sa maison. Accepte donc,
meme, ils lui revelent Ie nom de son synallaktes, par Iequel, sois Ie pedagogue de son fils et tu pourras remercier Ie Seigneur. »
disaient-ils, devait se faire Ia rencontre du pedagogue 105et Bref, il Ie tire de chez lui et Ie remet, dans Ie Pretoire des pre-
du scriniaire. lIs lui dirent : « Voici, tu as maintenant ce qui re- fets, a ce scriniaire, vers 135lequel les glorieux saints Come et
garde ta subsistance. Souviens-toi des dix oboles d'encens et Damien l'avaient envoye et duquel iis lui avaient donne aussi
ne sois pas ainsi rude et violent. Desormais tu ne pour:ras plus tout Ie signalement. Quand cet homme donc qui jadis, par
nous voir sous cet aspect (79). » Sur ce, ils disparurent ases yeux. depit, avait bondi temerairement contre les saints, et qui etait
Cependant, toujours decourage, l'homme ni n'avait cru a leurs maintenant une brebis de leur etable, eut reconnu Ie lieu de
paroles, ni n'avait compris llol'incroyable marque de gene- sejour du scriniaire qui lui avait ete indique et qu'il eut entendu
rosite et de condescendance qu'il avait regue des glorieux saints. son nom, il comprit 14°la fagon extraordinaire dont ces ad~
II ne tint donc nul compte de ce qu'ils avaient dit et rentra mirables saints avaient tout organise pour lui. Et des lors,
chez lui. Un jour ayant passe et alors que, Ie lendemain, il devait depuis Ie moment OU il occupe l'emploi de pedagogue aupres du
faire voile hors de Ia ville, Ie synallaktes du scriniaire qui lui fils du scriniaire jusqu'au jour present, chaque vendredi il
avait ete indique par les glorieux saints - une simple rencontre achete de l'encens pour dix oboles et. arrive a cette auguste
de hasard 115Ie lui avait fait connaitre par une disposition maison, l45il l'offre au saint autel, passant ce jour dans Ie
divine - lui fit dire en sa maison par un message : « Prends jeune avec foi, temperance et grande reconnaissance en vel'S
la peine de venir au bureau, j'ai certaines choses a te dire. » notre maitre Jesus-Christ et ses saints serviteurs Come et Damien.
II etait en train de manger et, preferant son repas a l'entretien Et pour lui manifester encore plus leur bienfaisance, quelques
avec Ie synallaktes, il lui fit dire: « Prends la peine plutot, toi, jours apres qu'eut pris fin leur dispensation, comme il etait
de venir a moi, si tu Ie veux. » L'autre aussitot laisse la son tombe malade, ces saints eux-memes, 150constants bienfaiteurs
bureau 120et accourt en hate a Ia maison de l'homme. En effet et medecins, lui apparaissent la nuit selon leur habitude. Tout
les glorieux saints Come et Damien, conscients de son decoura~ d'abord, en bons bienfaiteurs apres Dieu, ils allegent par leur
gement et du trouble qui en resultait en son esprit, hataient visite Ie malaise dont il souffrait et Ie remettent en sante;
l'affaire, car ils etaient presses de lui manifester Ie pouvoir puis, au moment de s'en aller, ils lui disent, souriant Iegerement :
qu'ils avaient de l'aider et leur liberalite, pour qu'il ne les re~ « En verite, camarade, veille 155il. te bien conduire en cette mai-
gardat plus comme de simples clercs ou des hommes du com~ son, de peur que tu ne te remettes a faire Ie mechant et qu'on
mun. 125Etant done arrive, comme il a ete dit plus haut, Ie ne dise : 'Faut-il que souffrent cela ceux qui t'ont protege?' »
synallaktes du scriniaire lui confie tout Ie secret du plan des As-tu observe, ami du Christ, la prudence de ces paroles
des saints, as-tu vu comme ils manifestent (80) d'un mot plai~
(78) Itwc; 'rou O")(onWOU ~(l-~6AOU (l-expL 'rou (l-eyaAou 'rwv e1tapxwv 1tprxL'rWptOU
18.100 s. Le « Portique 'l'enebreux » n'est pas autrement connu, mais, sur Ies deux sant leur liberalite, as~tu vu comment, ils Pont mis en garde
pretoires de Constantinople, cf. Janin, Constantinople byzantine, 163·166. - Dans par leur recommandation, pour qu'il soit digne de leur benedic-
un textc comme celui-ci, il est difficile de preciser ce que l'auteur entend exacte-
ment par 01 ~1trxPXOL (censement Ie prefet du pretoire), O"XpLvdpLO~ (cf. P. W., tion (81)? Ainsi donc, quand il eut reconnu mieux encore
II A 893-90'> Scriniurn: Seeck; Stein, I, 220 s., II, Index, s. v. scriniarius, scrinium),
o"uVdAArxX't'~<;. J'ai simplemont transcrit ces mots: scriniaire, synallaktes. (80) d3ec; epcx:vepwO"rxL 18.157. Sous-entendre rxu'rou~, cf. 18.158 d3E~ 1tW~ ijO"epcx:-
(79) ev 'rCX:U't'1l Tii Oeq. 18.107. Ou « selon cette maniere de voir », sci!. en plein AtO"cx:V'rO.
jour. (81) 1tpOC; 'ro &~LOV yzveO"OrxL TIjc; cx:u'rwv mxprxO€O"EW<; 18.158 s. Je prends 1trxpaOeO"LC;
142 COLLECTIONS GnECQUES DE MIHACLES SAINTS COME ET DAl\lIEN 143
160l'etrangete du prodige dont il avait ete l'objet, celui qui comptaen tout environ vingt-six seticrs, et cola fit que Ie
avait benMicie do la faveur et de la compagnie dos saints loua volume du vontre s'affaissa, ot quo cola rendit force, aussitot,
constamment et continue do louer Ie Dieu qui a donne si grande a tous los membrcs de la femme et la fit surmonter son mal.
sagesse et grace a ses glorieux saints Come et Damion. Et ainsi olle rentra chez ello tout 25en joio, sachant gre aux
saints pour cotto guerison, et non a cet individu inconnu et
Miracle 19 (82). Sur une femme hydropique. etranger. Car ce n 'est pas non plus de lui-meme qu'il eut ose
jamais pratiquer l'operation, et assurement la fomme n'eut
Une femme, affiigee d'hydropisio, arriva a cette admirable pu se confier a lui, puisqu'elle n'avait pas fait connaissance
domoure des saints. Son ventre s'etait a. ce point gonfie quo avec lui auparavant. Mais de toute evidence, l'un et l'autre,
non seu1ement ello ne pouvait marcher, mais meme, une fois ce sont les saints qui les engagerent, l'un a agir, l'autre a se
couchee sur son lit, se re1ever d'aucune faQon : c'est seu1ement laisse1' faire.
avec l'aide d'autrui 5qu'elle satisfaisait aux bosoins de 1a
nature. Alors done qu'ello etait si mal et preferait la mort a
la vie, se presente, par un acto providentiol do Dieu, un homme (VI, 1. 25) Tout cela, amis du Christ, mottra on mouvoment,
d'un pays etranger, qui n'avait ete pousse par rion d'autre quo ou plutot rondra clairos ot distinctes (83) nos langues, et exci-
par Ie desir de s'acquittor du dovoir do veneration envers los tera nos osprits a. la reconnaissance ot h la louange de Celui qui
saints dans leur sanctuairo. II voit la femmo ainsi incapable nous a accorde a tous cotte domeure, ou plutot cotte source ine-
JOde porter Ie poids de son vontre, plaint la malheurouso a cause puis able des guerisons des glorieux saints Come et Damien. Car
de son mal ot se met a. onquetor sur la chose, los parents lui a Lui convient toute gloire dans les siecles des siecles. Amen.
expliquant en detail tout ce qui la regardait. Quand il eut
appris la duree, la cause, et toutes los autres circonstances au Miracle 20 (84).
milieu desquelles, ponsaient-ils, 10 mal avait fondu sur la femme:
Maintenant, que Votre Charite amic du Christ non seulemcnt
« Au nom, dit-il, dos saints qui m'ont conduit ici alors que jo
ne savais rien 15h son sujet, placez devant moi 10 lieu du mal, (83) x~v~O'e~... {LiXAAOV 3e 't'pc.:vwO'e~ 19 (yl).25 (cf. 11.119 et n. 112), plus loin
si vous Ie vouloz bien. » Ravis, ils accueillent cos mots avec O'X'I)V1)V 1J't'o~ 7rrJY~v 19.28. Cf. s'upra, no to ltO iJ. '1'1.60.
(8'<) Co miracle 20 n'est contonu que dans y7 (Yatic. 1608, XI Os.), ou il suit direc-
tout Ie plaisir qu'on pourrait dire, et disent : « Oui cortes, si tu tement Ie mir. 18 (19 manque) et ou il semble clore la IIo serie puisqu'I! a une sorto
as con fiance dans los saints, fais tout ce quo tu crois dovoir etre de doxologie finale 20.77 s. a1t1jAOev (6 1tc.:~p) ... ev 't'('ii otX<}l iXlhou, aO~tX~())V 7tc.:-
't'€pc.: Xc.:I u[ov Xc.:I &ywv 7t'Jeu{Lc.: d.; 't'ou.; c.:twvc.:.; 't'WV c.:twV())V . a{L~'I. Scion Deub-
utile. » II prend en main un petit rasoir ot se met, par des ner, Intr. 25 s., ce mir. 20 n'appartiendrait pas iJ. la IIo serie. Le style serait entiere-
eg~atignuros espacees, non continues, 20a incise1' Iegerement ment diITerent. y7 n'a ni titre ni prologue et Ie debut Nuv ae <&1tep) dP'l)'t'c.:L (LO~
(Lc.:vOc.:V€'t'()) 1) u{Le't'€pc.: qnA6xp~O''t'o.; aYtX1t'l) « weicht von dem ab, was wir zu An-
Ie ventro jusqu'a la region sous la vossie. II so degorgoa alors, fang der Wunder 11-19 lesen» (26). La suite immediate Xc.:I axou€'t'()) €-r€POU 't'wv
de ces incisions, un pus aqueux en toIlo quantite qu'on on &'YL())V Oc.:U{Lc.:'t'o.; 1tpO ~pc.:X€o,; yevo{L€VOU (souligne par Deubner) prouverait
clairement qu'il s'agit d'un supplement. Ces arguments me semblent peu probants.
Pour Ie dernier point, cpo 18.13 (y1) ehc.: 1tpO ~pc.:X€O'; Xp6vou, 17.7 (yl) 7tPO eAc.:xLO'-
au sens chretien (Lampe, s. v. 7), « recomm~n.d.ation}. Dieu, bCnedi?t!an D. • 't'ou Xp6vou ~AOev. Le titre manque cgalement en y7 pour les mir. 15 et 17. II n'y
(82) Dans Ie ms. Vi (Vatic. 1669, XO s.), SUlVI Jusqu leI pour la lIe sorlC (dopUls Ie a sans doute pas de prologue et la phrase initiale de 20 : « Que Yotre Charite amie
miracle 11), on a Ie debut du mir. 19 au faJ. G v o , la fin au foJ. 23 r O et, outro cela, du Christ comprenne iJ. present ce que je viens de dire et eeoute ... » rattache di-
un folio a disparu, en sorte que I'histoire est incomplete, cf. r~oubner, 1~ltr., P',5 ot G. rectement 20 iJ. la phrase finale de 18 (en y7) : « De fait les guerisons de ces saints
D'autre part, Ie recit de ce miracle ayant etc reprls par Ie ~hacre Maxlmos, I auteur bouillonnent chaque jour, et invitent tout quiconque iJ. remercier Dieu et iJ. Ie glori-
de la Yle serie, j'ai adapte ici Ie texte du ms. 1[2 (lI~a:c!an. YII 1,. XIII /XIV O ~.), fier. » Mais on constate une transition tout analogue, prccisement en Y1, entre les
publie par Deubncr sous Ie texte do yl (p. 1ft 9-1?1). J m so.uleme~t aJou~e U la hn, mir. 12 et 13, ot cola sans qu'il y ait de prologue en 13, la phrase finale de 12 faisant
apres un espacement de deux lignes, la doxalogle par qUaI Ie nnracJo s acheve en transition avec 13 : 12.129 s. axouO'c.:'t'e, 1tc.:pc.:xc.:Aw, 1tw.; ouv QUX dx'ij, aAA&: (Le't'&:
yl, parce que cetto doxologie forme la conclusion finale de toute la lIe serie. Le 1tPtXy{L~'t'o<; '1'0 1tpoot{LL(r 't'ou't'<}l exp'l)O'tX{L'I)v --+- 13.1 s. O'UV€~'I) 't'Lv&: tXv3pc.:
titre du miracle est pris au ms. yl. x't'A. En outre cet argument me parait meconnaitro Ie caractere pro pro de ces
144 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 145
comprenne ce que je viens de dire, mais ecoute un autre miracle abominable (85) : il vomissait., de fa~on irreguliere, du sang par
qui vient tout justement de se produire. Ia 5bouche, parce que Fun des vaisseaux plus interieurs avait
Le fils d'un chretien fidele etait tombe dans une maladie etc gravement endommage, en sorte qu'il etait accablC par Ie
mal, au point que tous les mCdecins avaient eM vaincus par
collections populaires de miracles et les liberLes quo 10 scribe so sent on droit de
prendre a leur egard. II ne s'agit pas de recopior oxactement 10 texto reQu d'un au- la maladie et avaient desespere du malade. Cependant, pour
tour reconnu et plus ou moins celebre, comme Basile de Seleucie ou Sophronius do que, en cela aussi, les saints lOserviteurs du Christ Come et
Jerusalem, mais, puisqu'on veut uniquemont edifior Ie lectour, chaquo scribo ost Ie
maitre de relator les miracles qu'iI connalt. Ainsi voit-on que, pour uno me me se- Damien fussent manifestes comme illustres et en grande gloire
rie, Ie nombre des miracles differe. Pour la lIe serio par exemple, qui n'est compli~to aux yeux de Dieu et comme montrant grande compassion it
(mir. 11-19) qu'en V!, on constate que les mir. 12-13 manquent on V2, V7, VB, que 16
et 17 manquent en VB, que 19 manquo partout sauf en VI et 1\12. Le seul trait Fegard des hommes (86), c'est-a.-dire comme entrain ant tous les
constant est la doxologio finale. On la trouve a la fin de 18 on V2 et VB puisquo hommes a. se refugier dans leur glorieuse maison et a. louer
ces manuscrits ne vont pas au dela, V2 ayant simplement eXfL-fJv, VB (apres 'rov Oeov
'rOV'rocrOl:U'l'1)V croep[OI:V ... 3dl<ilx6't0l: 'ro1:~ &.'Y[OL~ K. XOI:t ~OI:fLLOI:v0 18.163) is'rL OI:u'r(;) Dieu davantage par leur entremise, Ie pere du malade, confiant
(Dieu) ~ a6~0I: XOI:t 'r0 xp&'t"o~ d~ 'rou~ eXLWVOI:~ 'rWV OI:lci:lV<ilv eXfL-fJv, et precisemen't dans son ferme espoir en Notre-Seigneur Jesus-Christ et dans Ie
nous la trouvons en V7 it la fin de 20. Heste l'argument du style, mais je m'elOigno
entierement ici de Deubner, car c'est, MIas, Ie meme style, 10 mfme stylo embar- pouvoir que les saints 150nt re~u de lui (87), amene son fils dans
rasse et embrouille qui n'est ni la maniore d'ecriro toute simple do quelqu'un qui veut cette tres celebre maison, et, apres les avoir, avec beaucoup de
seulement racontar 10 fait (comme M2 pour Ie mir. 19) ni la phrase hion construite
du 7te7tOl:L3EUfL€VO~ (comme celie de Basile de Seleucie), mais d'un individu qui em- larmes, supplies instamment dans sa foi et implores de mani-
ploie la M~L~ xOI:'recr'rpOI:fLfL€V'IJ (Arist. Rhet. 1ft09 a 26) sans savoir construire. Sans fester aussi leur habituelle force thaumaturgique a. l'egard de
compter ces insupportables appendices elogioux qu'on ajoutc a la mention des
saints chaque fois que celle-ci so renconLre, ici v. gr. 20.18 ss. eXAA' tVOI: XOI:t €V son fils, il rentra chez lui, ayant laisse aupres du malade, pour
't"ou'rCj> AOI:fL7tpot XOI:t OeoepOl:v€cr'rOl:'rOL XOI:'r1X Oeov 3eLxOwcrLV 01 Oep&7toV't"e~ 'rou XPLcr- Ie soulager - car ce n'etait pas zOpour Ie guerir - l'un des
'rou XOI:t 7tOAA~V crufL7t&€eLOI:v d~ 'rou~ eXvOpci)7tou~ 3eLXVU!.LZVOL 01 &YLOL K. XOI:t ~
'lJ'rOL 7t&V't"0I:~ t1:x 'rou't"<ilV t1:ep~AXOV't"Z~ e:!~ 'r0 7tpomjleuyeLV 't"W t1:va6~<:) OI:U'tWV otX<il x~i mCdecins familiers. Or, tandis que Ie mal tantot s'enfuyait,
7tAZL6V<il~ 3L' OI:U't"WV 'rOV OZOV 30~&~zcrOOl:L, etc., etc. On trouvorait cent exoI~ples
de formules analogues dans les miracles qui precedent, v. gr. 19,11 ss. en Vl (que jo bien iI meurt. En outre, si aucun des autres manuscrits, ni avant ni aprils, n'a em·
n'ai pas traduit) : crUfL7tOl:OdOl:~ YIXP XOI:t e:ucr7tAOI:YXV[OI:~ 7tA-fJpe:L~ iSv't"z~ XOI:t XPLcr't'OU ploye ce tour, c'est sans douto qu'il n'y avait pas liou de suggerer cette nuance: de
'rou Oe:ou ~fLWV 'rou fL6vou eXYOI:OOU 'r1X OOl:UfLOI:'t"OI: XOI:t XOI:P[crfLOI:'rOl: 'rpuy1JcrOl:V't"e:~ 7tpO~ toute faQon, cela ne constitue pas une totale difference do style (<< Dass <lieses Wun-
&7tOl:V't"OI:~ eXYOI:OUVOV't"OI:L XOI:t 'ro1:~ xtXfLVOUcrLV €~ eXcrOe:vdOl:~ pq.3[<ilV ~V OI:U'rWV ~6'IJOZLOI:V der 20 nicht zu del' besprochonen Serie gohort, perrat seine ganze Sprache ", Deuh-
7tOl:P€Xoucrw, €V't"zuOZV 'rZ 'rOU fLLcrOOU OI:U'rWV fLZY[cr't"OU~ cr't"eep&vou~ XOfL[~OV't"OI:L e L ner 25 : c'est moi qui souligne).
encore 19.15 ss. 't'[~ ouv epO&creL €VOUfL'lJ0'ijVOI:L, ou MY<il epp&crOl:L, 'r1X 'rou't"<ilV ~WV (85) eX7tzux't"e<~ 20.4 = eX7tzux'rOl:[<~.
OepOl:7t6v't"<ilv 't"ou XPLcr't"OU &'Y[<ilV XOI:t fLZY&A<ilV 101:'rpwv XOI:'rO pOw fLOI:'rOl:, 'l] 'r[~ 3u- (86) Sic en construisant 20.8-10 AOI:fL7tpot XOI:t... 3eLxvufLzVOL comme attributs de-
V'lJ01j €~emdv 'r0 crufL7tOl:Oe~ OI:u't"wv 'l] 'r0 7tpocr'IJve~ 7tpO~ 'rOU~ OAL~OfLevou~; 'r0 pendants de 3eLXOwcrLV. Si on Ie prend comme simples epitlietos do ot &YLOL K.
eXVZ~[XOI:XoV XOI:t eXfLV'lJcr[xOI:xov €7tt 'r01:~ €~ OALY<ilp[OI:~ XOI:'t"OC~owcrLV OI:u't"wv, 'r0 XOI:t ~ (20.10 s., mais c'est moins sur vu l'ordre des mots), 3e:LXOwcrLV aura valeur ab-
&OXVOV 7tpO~ 7tzpw3[OI:V, etc., etc. Cela peut continuer ainsi a l'infini. Au vrai il soluo « se montrassent, fissent leur manifestation ". Outre l'ordre des mots, la
n'est qu'une seule singularite qui pourrait distinguor 20 du rosto : c'est l'emploi do suite 'lJ't"OL (= 'lJyouv) 7t&v't"OI:~... €tp€AXov't"e~ X't"A. favorise la premiere interpreta-
l'aoriste pour Ie futur en 20.24-26. Le jeune malade, n'en pouvant plus de vomir du tion.
sang, dit au mMecin qui l'accompagne : « Donne-moi une pilule d'antidoto. 'l] YIXP (87) _ OOl:PJwv, 'Lii ~Z~OI:[q. o;u'ro~ 7tpO~ 'rov XUPLOV ~fLwV 'I'lJcrouv XPLcr't"OV €A7t[3L
'rou't"o t1:v£X'lJcr€V fLoU ",0 7t&00~ XOI:t 'r0 ~'ijv fLOL t1:XOI:P £crOl:'t"o , 'l] 't"~V ~'r't"OVOI: eX7tZ- XOI:t 't"1I 'r<ilV OI:Y[<il~ €~ OI:U'rou 3uvOI:cr't"dq. 20.12-15. Phrase stereotypee qui,
VZYX&fLE:VOV U7t' OI:u't"ou ljJ'ijepOV 'rou ~'ijv fLe: XOI:t fLOI:pOl:[vecrOOl:L eX7t-fJAAOI:~e:V. » Ce tour sous une forme ou I autre, reparait soupent en VI, v. gr. 12.51 s. 01 7t&v't"OI: YLVWcr-
est bien connu en groc moderne, cf. A. Miramhel, Gramm. du Grec mod. 1?5 : xov't"e~ €~ 'rOU 300ev'r0~ OI:u't"o;;~ U7tO XPLcr't"OU XOI:p£crfLOI:'ro~, H.58-60 OI:lvwv
«Lo temps futur se rend: 01:) par 10 fut'ur de l'indicatif.. · ; ~) par I'indicatif aariste, XOI:~ 3o~0I:~~v 'rov Oz6v, ,'rov_ 'rocrOU'rOV fLe't"pov 3uv<;cr't"dOl:~ 3<ilp'IJcr&fLevov
pour marquer un futur a tres brepe ccll/Jance : i£tp't"OI:crOl: « j'arrive a I'instant », cr' ~tpOl:YOI: 't"OL~ ~zp,:t-7tOUcrLV OI:U't"ou ~. XOI:t ~., 15.24 ss. eUXOI:pLcr't"OucrOl: 't"0 3zcr7t6't'1l
« je t'aurai (familier) '. Le regrette Mirambel a bien voulu me fournir la note sui- XPLcr'r<:) 'r<:) 3z3<ilx6't"L 'rocrOl:U't"OI: XOI:p[cr(LOI:'t"OI: 't'01:~ &.Y[OL~ OI:u't"ou 16.14 ss.
vante : « A. Mirambel, De l'emplai de l'aariste en grec maderne, in Trans. of the 't"'ij ylXp 3z30fLeV1I OI:u'ro1:~ .€f, OI:u't"ou crotp[rr- ot &YLOL 'roiho ... ~epLw3zu
Philal. Soc., 19"2, 16-17 : exemples de i£tp't"OI:crOl: « je vais arrivor " X&01)XOI: « je vais crOl:V et, dans les autres manuscrlts, par exemple V2 pour la serie I : Prol. 7 s.
perir », 'reAe:L<ilcre: « eel a va finir ", ~XO~OI: « je vais couper », ~crxOl:crOl: «jo vais cravor ", 't"~V ... 't"wv Oe:POl:7te:LWV OI:u'rwv epO~e:pIXV €V€pye:LOI:V 't"~V €x Ozou 8e:30fLev'IJV
~7tVL~OI: « je vais etouffer '. Voir aussi A. 'l'zortzanos, NZOZM'lJVLX~ l:UV't"OI:~L~, 195; OI:u'ro1:~, 2.9 ss. 01 7t&0"'IJ~ tOl:'t"pdOl:~ eXvwnpoL &YLm K. XOI:t ~OI:fLLOI:VO~ w~ €X
L. Houssol, Grammaire ... rameique litteraire, 189; A. Meillet, Sur l'aariste sigma- Oeou ~XOV'rE:~ w~ dp1)'rOl:L (Prol. l. c.) 'r0 8UVOI:crOOl:L, 3.6 ss. Ozp&7tOV;Z~ OI:u't"ou
tique, in llUlanges F. de Saussure, 79-106; A. Mirambel, La langue grecque mo- &YLOL K. J;:OI:t ~OI:fLL~v6~, w~, €~ _OI:U;OU 't"o 8UVOI:cr0c;L x't"'lJcr&fLe:VOL, 3L' eXpvou
derne, 159.» C'est Ie seul example dans tout Ie recuoil de Deubner. Mais qu'est-ce eXA6you 't"'lJv 300e LcrOl:V OI:U'rO L~ <il~ eXp'IJ'rOl:L €~ OI:u't"ou 3uvOI:cr't"dOl:v 7tOl:P€cr-
que eel a prouve? Tout d'abord, il s'agit hion d'un «futur a tres breve ecMance » : 't'1)crOl:V, 9.57 ss. €myvou~ 't"~V 'rou Oeou 130-fJ0zLOI:V XOI:t 8uvOI:cr't"dOl:v XOI:t 'r~V 'rwv
car des que Ie malade aura aval6 la pilulo, ou bion les vomissoments s'arretent, ou &.YL<ilV OI:u't"ou K. XOI:t ~. €~ OI:u't"ou XeXPLV.
10
146 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 147
tantot reprenait fougue contre Ie malade, l'adolescent, profon- passait. Et de meme que Josue, fils de Nave, quand illuttait. et
dement decourage par Ie vomissement de flux de sang, ayan t guerroyait contre un peuple Otranger, attira it lui, par la priero,
mande Ie m8decin, lui dit : « Ecoute-moi, frere, donne-moi un e la force do Dieu ot commanda au soleil 60de s'en tenir aux
pilule d'antidote. Car ou hien ce remede va vaincre Ie mal limitos it lui fixees, disant : « Que Ie solei! s'arrote it Gabaon et
et me donner de vivre, 250U hien, ayant ete vaincu par Ie la lune au torrent d'Elom » (Jos. 10, 12), de mome ces sages et
mal, il va me delivrer de la vie et de l'epuisement. » Aces excellonts medecins Come et Damien , se confiant dans les cha-
mots, Ie medecin se livra it de grandes reflexions, se demandant rismes inepuisables qu'ils ont regus d'en haut, ordonnerent, par
s'il obeirait it l'ordre du malade ou se tiendrait coi et, d'un mot, leur priere, it la nature, je veux dire it la substance, du sang
considerant l'issue incertaine de Ia chose, il demeurait en grand de s'en tenir it ses Iimites propres, et ainsi guerirent Ie malade.
souci et decouragement. La nuit etant donc 30survenue, ces En eITet, apres que l'un des saints 65eut applique sa paume
tres sages saints, vraiment m8decins par la grace de Dieu, ap- sur la bouche du malade, il n'eut plus aucun vomissement.
paraissent au medecin qui accompagnait Ie malade, et ils re- Une fois gueri, iI passa quelques jours encore dans la maison
solvent Ie debat de son trouble en lui disant : « Ne donne rien des saints, et, lorsqu'il eut repris force de corps et d'ame grace
au mulade pour Ie secourir. Nous allons Ie traiter au dedans. » it l'operation miraculeuse dont il avait eM l'objet, il rentra chez
Arrive Ie petit matin, Ie medecin se leve et, plein d'admiration lui en paix, les saints 7°sorviteurs du Christ Come et Damien
35pour Ia faveur des saints et l'assurance de guerison qu'ils l'ayant rendu it son pere en disant : « Ta roi en Notre-Seigneur
donnent a ceux qui se refugient aupres d'eux, il suivit avec soin Jesus-Christ t'a sauve. Pars avec ton fils en bonne sante. »
l'ordre regu. Puis, comme, un jour apres, Ie malade Ie pressait Tu vois quels et combien nombreux sont chaque jour les
de lui donner l'antidote resultant de la pilule, il refusa d'oheir miracles dus aux graces qui ont Ote donnees aux saints par Dieu.
it ce commandement, lui disant qu'il lui etait impossible de Des lors donc Ie pere de l'enfant 75gueri rentra en joie chez
Ie faire. 4°Quand pourtant il vit Ie malade persister en sa de- lui avec son fils, et il remerciait Ie Seigneur et les saints, car,
mande, aIm's, pousse par la necessite, il raconte ce qui lui a ete comme il avait vu croHre et abonder les fruits de ses larmos,
par songe ordonne comme une prodigieuse grace par les glorieux il glorifiait Ie Pere, Ie Fils et Ie Saint-Esprit, dans les siecles des
saints Come et Damien, ajoutant que Ie malade ne devait siecles. Amen.
plus compteI' desormais sur les soins de la medecine humaine,
mais attendre 45avec ardeur la bonne promesse des saints.
L'ecoulement des flux de sang n'en continua pas moins apres
ce discours, en se maintenant it un degre moyen. Puis, quelques
jours ayant passe, des douleurs soudaines, attaquant Ie malade
comme des betes feroces, provoquerent un exces de vomis-
sements de sang par la bouche ot Ie 50r eduisirent it un etat
ou il etait sans voix et sans connaissance. Mais les medecins du
Dieu veridique font voir Ia sincerite de co qu'ils avaient an-
nonce, ils accomplissent leur promesse, ils ne traitent pas avec
mepris les Iarmos et la supplication du pere du malade : ils
accourent aupres du malade quasi mort, et l'un d'eux, lui ayant,
de sa paumo, obstrue la bouche, 55freine aussitot l'ecoule-
ment des flux de sang et etame les conduits par lesquels Ie sang
SERlE ill (1)
(1) Cette IIIe serie a ete rMigee par un malade gueri dans l'o!xoe; des saints, a
la demande d'un certain Florentius (Pro!. 16), qui en a fait la demande a l'auteur
alors que celui-ci, malade, se disposait a se rendre au sanctuaire (it'l"L -r'li v6cr<jl
me~of.ltvcoV 1Jf.looV xed -rev itv80~ov ... o!xov xcc-roO,cc~erv crrtou8cc~6v-rcov Pro!. 15-18).
Uauteur tlcrit done ce qu'i! a vu et entendu au cours de son sejour dans I'o!xoe; (&
€copeXxccf.lev xcct eXx1)x6ccf.lev 8~&yoV't"ee; tv -roo otxco ccu-roov (Pro!. 21 s.). En fait i! ne
rapporte que des miracles qu'i! a entend~ raconter, 8~1)y~crcc-ro 21.2, -rou eXv8pec;
-ro(vuv 8~1)Y1)crccf.ltvou ... eXrtoxp(ve-rcc~ /tnpoe; 22.1 s., -reX ... de; ccu-rov XCCAeX ... 8~1)You
f.levoe; 23.56-58, -rccu-rcc -rou tccOtv-roe; 8~1)youf.ltvou ... /t-re:p6e; -r~e; eXv-qp ... ItAeyev 2U-~_
C'est en particulier lors des pannychies du samedi au dimanche (-rou yexp ACCOU
O"Uv-rptxov-roe; €V 't"'(i xcc-r' /tOoe; y~VOf.ltv'lJ txe:i:cre rtccwux(8~ crcc~~&-rou tm<pNcrxouv-
-roc; Pro!. 211 s.) que les fideles qui avaient beneficie d'un miracle en faisaicnt Ie
recit (ot TIle; rtCCP' ccu-roov wx6vne; t&crecoe; 8rtcoc; It't"UXov ItAeyov Pro!. 25 s.).
Cette III" serie, qui comprend prologue, six miracles (21-26) et doxologie finale
(26.85-91 : il y a une petite doxologia aussi it la fin de 2 1" 2 1t/lO_I,2), est d'un bien
meilleur style que les prccMentes, en particulier que la lIe serie. Le recit est simple
at nature!. On est delivre de ce poids d'epithetes et de phrases laudatives qui alour-
dissaient si peniblement la narration en II. II n'y a point de prologues particuliers et
la transition se rMuit a quelques mots (-rou &.v3pee; ... 8~1)Y1)crccf.ltvou ... eXrtoxp(ve-rcc~
g-repoe; 21.1 s., xcct -rccu-rcc f.lev -reX ... yev6f.levcc, /t-re:poe; 3t -r~e; 23.1 s., -rccu-rcc -rou tccOtv-
-roe; 3~1)youf.ltvou ... /t-re:p6e; -r~e; eXv-qp X-rA. 21..1-[1, 1t-re:p6v -r~ -ro~ou-ro rteXt-tv f.le:f.lccO~
xccJlev 25.1, It-rep9S ~~ 'n,? 26,1, J'..e titre wapque pour !l2, 23 et 26.
150 COLLEC'l'IONS GItECQUES DE MIHACLES SAINTS COME ET DAIIIIEN 151
ceux d'hier, ceux de chaque jour, ceux qui ont lieu pour les honneurs, d'ailleurs devoue aDieu et aux saints et qui avait eu
foules, ceux qui ont lieu pour chaque individu, ceux d'ici, ceux recours a eux (3) raconta que, depuis l'enfance, un mal Ie tenait
d'aiIIeurs? On auraiL l'air, aux yeux de tous, d'entreprendre a l'estomac et au creur. Tant qu'il avait ete enfant, il n'avait
de me surer Ia mer ou de compter les etoiles. pas trop 5 souITert, mais, a me sure qu'il avan\lait en age,
. Puis
. donc qu'il est impossible de s'attaquer a tous les miracles ,
Je vms essayer de porter mon attention sur ceux qui sont dans
il voyait la maladie croitre et empirer. Devenu homme, les
douleurs qu'il avait a subir desormais augmentaient en fre-
mes possibilites : car ce qui est dans les possibilites est legitime quence et en violence, au point qu'il se jetait a terre et se roulait,
et digne de 15pardon. Et cela meme, ce n'est pas de mon poussant des cris : il ne pouvait supporter ces souITrances,
propre mouvement que j'ai souhaite de l'ecrire, mais pour m'etre c'etait a ses yeux comme les tortures des gens atteints de folie
souvenu, tres avise Florentius, des prieres que tu m'as faites furieuse. Et Ie pire etait qu'on ne pouvait diagnostiquer lOla
alors que j'etais encore accable par la maladie et que je desirais maladie et qu'elle se contredisait elIe-meme. Le remMe une
cherement me rendre a la glorieuse maison des saints. Tu m'as premiere fois utile, si on Ie donnait une deuxieme fois, nuisait ;
presse en eITet, quand je suis rentre en joie, d'ecrire les miracles ce qui d'abord avait nui devenait au contraire avantageux.
des saints et de t'en envoyer 2°1e recit. Satisfaisant donc Par exemple, prendre de la nourriture delivrait l'homme des
~o~r Ie present, a ta demande, j'~cris selon mes forces ce qu; douleurs, mais une autre fois augmentait Ie mal. Se baigner
J m vu et entendu durant mon seJour dans leur glorieuse mai- 6tait un jour contraire, mais un autre jour faisait un grand bien:
son, et je te donne ainsi Ie moyen, a partir de ce petit nombre pourquoi 15ce soulagement, nul moyen pour lui de Ie de-
de conjecturer par analogie la somme totale, pour ainsi dire, de~ tecter. Bref, comme Ie mal desormais l'emportait et conduisait
miracles: tu peux en eITet, comme a partir d'une frange, prendre peu a peu a Ia mort, l'homme arreta justement sa decision et
intelligence de tout Ie vetement. courut a la maison des saints. II y faisait son sejour ordinaire
De fait, alors que Ie peuple fidele accourait 25a la pan- en ce qu'on nomme Ie catechoumenion, mais la nuit il allait
nychis qui se fait habituellement la Ie samedi, aux premieres dormir pres du parvis de l'autel (4). Comme il avait passe Ia
lueurs de l'aube (2), ceux qui avaient obtenu des saints la gueri- plusieurs jours sans obtenir que les saints Ie vinssent voir, il
son raconLaient comment ils l'avaient obtenue, et il y avait
veritablement grand motif de delectation et de bon courage (3) Sic en lisant 7tpocrcpuyw\I (7tpocrcpu1"OO\l Va ml) plutot que 7tpocrcp€uycu\l Deubner
avec les aut res manuscrits.
en ces recits, chacun se figurant voir plutOL qu'enLendre ce dont (I,) «Parvis de l'autel. ici (21.18) et 21.26, 21.29 et 30,21.32, traduit OumoccrTIJPw~,
on parlait. qui doH eire meme chose en ce texte que Ie ~1i(J.oc, scil. Ie sanctuaire proprement dlt
(mais « sancluaire • est amphibologique), oil se trouve I'autel, et qui, surelev~ par
rapport ala nef, en cst separe par un cancel a trois portes (ici can col peu eleve pUisque
I'homme voH ce qui se passe dans Ie OUcrLoccrTIJPW\I). En avant du ~'ij(J.oc, ot entre
Miracle 21. Sur l'homme malade de l'estomac. Ie ~'ij(J.oc et I'ambon, se trouve l'espace dit la acu).i;oc (ou Ie crcu).i;occ;),lui-meme sureleve
d'une marche par rapport a 10. nef. XUXA(\I en fin ou XUXA(O\l 1"013 &(J.~cuvo<; (21.28)
En premier donc, un certain personnage illustre et dans les doit eire l'espace circulaire autour de I'ambon. Solea et kylelion se retrouvent dans
Ie Lipre des Ceremonies dans 10. description de 10. reception des souverains a Sainte-
(2) Scil. du dimanche. 'I'el est probablement Ie sens do 7tOCWUX(8L croc~~OC1"OU Sophie. Le patriarche les attend au narthex, on entre, «les vela romains et les eten-
E~LCP,CUcrXOU\l1"OI; ~rol. 2.5. Dans toute l'eglise d'Orient, 10. pannychis est la grando dards port ant 10. Fortune se placent de l'un et l'autre cote de 10. sol6a • (Const. Porph.,
vedlee du samedl au dlmanche. Los malados, durant cetto voiJIee, etaient couches Caerem. I, 1, p. 11.11 ss. Vogt), Ie patriarche et ensuite les souverains penetrent
dans l'atrium. Et ils pouvaient jouir d'une vision de songe (10.39 s. YL\lO(J.€\I'1)1; dans Ie bema, puis, avec Ie patriarche, • les souverains entrent par Ie cote droit du
yap '0<; 7toc\l\luXJ8o<; ... 1"€Oe!X1"~L e\l lJ7t1"occr!~, 2M ss. ~~OU,A~01) .1"~\I 7t~\I\IUX£8oc 1"013 sanctuaire dans l'cspace circulaire (XUXA(\I) oil se trouve Ie saint crucifix d'or »
a!X~~oc1"OU e\l 1"CP ... OrXCil 1tOL1)crOCcrOOCL. xoct 8~ ... xocOzu81)crocl; opoc 8LOC 't-'ij<; \/ux1"6<; (p. 12. 1-3 Vogt). Dans ce passage, XUXA(\I paralt /ltre milme chose que ~'absi~e
30.57 s. 7tEpt 8/; &pOC\l &\lOC'l"1)\I 't-'ijl; ocu't-'ij<; 7toc\l\lux£8ol; ()7tVCP XOC't"€'1€X'edl; O€cupd 1"OU~ (sic Vogt, I, p. 12, n. 1), mais, dans notre recit, 1"0 XUXAtoV 1"013 &(J.~CUVO<; dOlt deSI-
~Y~OU<; X1"A.) ou bien i!s rece;,aient 10. ~erote !niraculeuse qu'on distribuait a Ia gner un espace qui a rapport avec l'ambon et qui se trouve, non pas en arriere d.u
slXleme heure de 10. nUit (30.5a s. cpOoccroccr1)<; '1"1)<; 7toc'l\/UX(8o<; 1"00 croc~~OC1"CU xoct 't-'ij<; bema comme l'abside, mais en avant et en dehors du bema, puis que Ie saint est dlt
X1)Pc:>'t-'ij1; 6J<; 7tEpt &p.oc~ f!~'I"1)\I 't-'ijl; \I~X1"o<; 1"~ AOCC"{l 8LOC800dcr1)<;'). Bref, iis etaient • sortir du sanctuaire • (&~€PX6(J.E\lO\l &7t0 1"OV (lVO'LOCcr't"1/p(ou 21,26) et y . rentrer. (e\l
gueflS. Et, dans leur JOw, lIs racontaJent aussltot la maniero dont Us l'avaient ete. 'rc"{l OumocO''t"1/p(cp Eicr?A09)1T~ 21.29 et 30).
152 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 153
d61iherait 2°de se retirer, disant que les saints I'avaient jugc main du saint, la porta a la partie ou depuis Iongtemps la ma-
indigne de leur visite. II avait ordonne que des chevaux vinssent ladie Ie tenait, traga trois fois sur I'endroit, avec la main du
Ie prendre: or il arriva que ceux-ci tarderent it arriver. II 6tait saint, Ie signe de la croix, et sur cela 4.SIaissa partir Ie servi-
trop tard pour partir, et l'homme passa la nuit dans la sainte teur du Christ, pleinement confiant dans Ia promesse qu'il lui
eglise. Or il voit en songe quelqu'un qui lui dit qu'il doit rester avait faite de sa grace. Cependant iI disait aussi au saint que
lit jusqu'au dimanche : on etait de fait au jeudi quand il eut ce depuis de longues annees (xp6vwv) il souffrait de la machoire,
songe. 25II resta donc, et comme, selon son habitude, il et il lui demandait de la guerir. Le saint lui dit : « Le mal s'est
etait couche pres du parvis de l'autel, il voit I'un des saints qui invetere. Pourquoi ne m'appelles-tu qu'aujourd'hui? Nean-
se dispose it en sortir, jette les yeux sur lui mais sans lui adresser moins, si tu Ie veux, je vais cauteriser l'endroit. » L'homme
aucune parole, s'eloigne de ce qu'on appelle Ie solen (5) pour ayant dit « Comme tu l'ordonnes », Ie saint reprit : « Laisse
aller vel'S l'espace circulaire autour de I'ambon, puis, apres la choso demeurer en l'etat ou olle est. »
un peu de temps, fait demi-tour et rentre dans Ie parvis de On ne va pas croire que Ie saint ait dit cela parce qu'il ne
l'autel. aOQuand l'homme vit que Ie saint y rentrait sans rien pouvait guerir Ie mal, mais c'est parce qu'il pensait que ce
lui dire, il s'enhardit it y penetrer avec lui et it lui demander serait avantageux a l'homme : iI ressentirait un peu de douleur,
guerison. Le glorieux serviteur du Christ tenait dans sa main et aurait ainsi comme un frein qui retiendrait l'elan vers une
commo un grain de muscat ([.tooxchou). II en coupa une petite conduite moins bonne. Notre homme pourtant, bien qu'il n'ait
portion et allait la donner it l'homme quand se ravisant aSil pas obtenu sa deuxieme demande, se trouve satisfait de la
. "
Y aJouta une seconde portion, puis, ayant suppose que ce n'etait premiere, il en rend graces et il frequente continuellement l'ha-
pas assoz, uno troisieme portion, et il donna cette plus grande bitacle (crKIlV~) des saints.
part it I'homme, dis ant : « Prends ceci, applique-Ie it l'endroit
ou tu as mal, et tu seras debarrasse de la douleur. » L'homme Ie Miracle 22.
prit, fit ce qui avait ete prescrit, et aussitot fut delivre du mal.
Apres cela, ayant vu de nouveau Ie saint en songe, il lui an- Quand cet individu eut raeonLe la visite que lui avaient faite
nonga la guerison 4°qui lui etait survenue et lui demanda de les saints, un autre, nouvellement sorti de maladie et recon-
ne plus tomber en cette maladie. Le sorviteur du Christ lui naissant aux saints, prend Ia parole et dit qu'un chyme, qui
dit : « Tu en es completement debarrasse, a moins que tu ne s'etait ramasse par suite d'un mauvais regime, lui avait op-
manges quelque jour des Iegumineux. » L'homme alors prit la prime tout Ie corps jusqu'a un point critique. Finalement il
avait fondu 5 sur les parties sexuelles du corps et, s'etant
(5), (ht"? .'!O\) Aeyo[.t€VoU crWA'ijVO~ bd '!O XUXA[OV '!O\) &[.t~wvo~ &m6v'!oc 21.28. engage en ce qu'on nomme les testieules, il les avait reduits,
a,WATJV a ICI meme sens que crWA€OC. Je dois ce renseignement il. mon confrere il. PIns- pour Ia plus grande part, a la durete d'une pierre. II ne s'etait
tItut, M; Paul Lemerle, qui a bien voulu mo fournir la note suivante ; cr. A. K. Or-
l?n~os, II ~uA6cr'!eyo~ 7tOCAOCLOXPLcr'!LOCVLX~ ~OC(rLALX~, 3 vol. (= Bibliotheque de la pas arrete la, mais, continuant de s'ecouler, avait produit,
SOCIete arclHlologi~ue d'Athlmes, no 35), Athenes, 1952-1954.-1957, t. II, p. 535-536, sous Ia concretion pierreuse, une excroissance de chair qui entre-
s~r la crOA€~, partIe extreme surelevee de la nef centralo on avant de la porte prin-
c~pale du ~'I)[.toc; elle peut s'etendre de cettc porte jusqu'il. l'ambon. Ses denomina- tissait la membrane enveloppante des testicules a l'excrois-
tIons ; cr~A€OC, crOA[OC, crOA€OC~, croAdoc~, crwAdo~, croAdov, crwAeu~, cr W A~ v. Pour sance qui se formait a l'interieur. Sous I'action de cet ecoule-
cette dermcre forme, references (p. 536, n. 7) iJ. : 'l'Mod. PGdiasimos, "ExcppOG(l'L~ (de
la metropolo ,de Serres), dans N€o~ 'EAA'I)VO[.tV~[.twv, 15, 1921, p. 172 ; ot surtout ment du chyme, la partie malade avait ete forcce lOde
A. Or,landos" II [.t'l)'!p67tOAL~ '!wv l:eppwv xoc'!cX -rl)v ~XCPPOGcrLV '!O\) 0. IIdhoccr[ILou, grossir en volume et ne permettait meme pas de marcher aise-
da~s E7te'!. .E~OCLp. B~~. _l:7to,u8wv, 19, 19'.9, p. 259 sq. - Cf. p. 265, avec la ci-
tatIOn do PedlUslmos: E~'I)C; 8 0 AWLVO~ crWA~V xOG'!' tou '!O\) ~~[.tOG,!o~ A~YWV xoct ment. A ce mal tres penible vient s'associer une maladie dos youx,
[J.e:'!oc~u '!WV 800 xd[.te:vo~ '!O\) '!' &[.t6wvo~ xoct '!O\) Odou ~oc'!'ijpo~. Paraphraso qui Ie chagrinait Ie plus, car elle ne lui permettait meme pas,
d'Orlandos : [.te'!oc~u '!O\) &IL6wvo~ xoct '!O\) ~~ILOC'!O~ €~e'!dvc::'!o e:Wuypoc[.t[.to<; AWL-
voe; cr'!e:VQ~ 8L&8pOILO~ (crWA~V). dans sa detresse, de voir Ia Iumiere. Car tu sais , tu sais , tres cher,
154 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COJlIE ET DAI\IIEN 155
que, quelque cruel que soit Ie mal qui presse les malades, s'il se mit au service de ce qui se passait. Comme en effet il s'etait
n'en voient pas moins 15Ie doux rayon du soleil, non petite trouvc la juste au moment 450U l'eau avait commence de
ost la consolation que cela apporte a leur affiiction. Bref, op- s'evacuer, il se devetit, au dire du malade et, s'etant ceint d'un
prime par cette maladie, l'homme gagne l'universelle et bienfai- pagne a l'exemple de notre commun maitre et sauveur Ie Christ
sante clinique des saints. Apres qu'il les eut supplies, sinon (Jo. 13, 4), il ne s'en remit pas a ses esclaves qui etaient lit
autant qu'ils Ie meritent, du moins autant qu'il 10 pouvait, presents, il ne cOda pas 10. place aux esclaves qui appartenaient
il vit en songo un personnage remarquable par la venerution qu'il au malade, mais se fit, de ses propres mains, Ie ministre du traite-
inspirait, du nom de Cosmas, qui lui remettuit 20un potit ment institue par les saints. Ayant pris sOune eponge avec de
objet, comme un bout de cierge tres tendro, pareil, au toucher, l'eau chaude, il demeura la a faire sortir Ie liquide, et ne cessa de
a la kerote. II etait aussi petit qu'environ un cachet de lettre, se preteI' a cet office jusqu'a ce qu'il eut tout vide et nettoye, et
et co porsonnage lui disait que c'etait de la neige. Comme il cela bien qu'il se fit tard deja. dans 10. soiree (6). Puis il appliqua
s'etonnait do ces paroles, 1'autre lui montre duns sa main gauche de la kerote des saints sur la partie malade, traga dessus un
un morceau de glace et lui dit : « Crois-moi, Ie bout do cierge signe de croix (7), fit une priere, et apres que, par ses soins au ma-
que je t'ai donne vicnt de ceci, et c'est moi qui 1'ai rendu lade, il lui eut rendu bon courage, il se retira. II ne cessait pas
tendre, comme tu vois. » Le malade comprit alors que 1'autre pourtant, meme apres 55cela, de visiter Ie malade et de
lui decrivait Ie caract ere de 10. maladie qui Ie tenait et lui en s'occuper de lui, jusqu'a l'heure ou il devait rentrer en joie dans
administrait de quelque maniere Ie traitemcnt. Dc fait, la sa maison : car il etait lui aussi de ceux qui, pour leur salut,
concretion pierreuse qui s'etait produite ressemblait a la glace avaient eu recours aux saints. En sorte que, desormais, ce1ui
qu'on lui avait montree. Or cette concretion pierreuse etait en qui avait ete gueri priait pour son ami et disait : « Que Ie Sei-
train de se dissoudre, non d'un coup, mais peu a peu. De meme gneur lui fasse misericorde comme a Ia maison d'Onesiphore
en effet que 10. glace qui lui avait ete montree 30se changeait (II Tim. 1, 16), parce qu'il m'a souvent soulage et n'a pas eu
peu a peu en neige par 1'action du serviteur de Dieu, de meme honte devant rna 6°maladie. Que dieu lui accorde de trouver
Ie durcissement et la petrification dus it la maladie se changeaient misericorde aupres du Seigneur au jour du Jugement. »
peu a peu en tendreM, et cette tendrete se resolvait en eau. Lors donc que, par Ia grace des saints, il eut eM ainsi gueri,
Le personnage de la vision avait donc raison de dire que Ie la maladie des yeux continua de peser sur lui, en sorte qu'il ne
petit bout de cie:rge remis au malade etait de la neige. pouvait voir. Si jamais, pour sorti:r de l'oisivete, il voulait se
Tout cela s'etait passe durant Ie sommeil. Cependant, comme pencher sur un livre, il ne discernait pas les lettres, mais avait
l' excroissance de chair so us la concretion pierrcuse 35S ' etait l'impression qu'un voile 651es recouvrait. Et sans doute,
transformee en eau, qu'ainsi, la partie malade s'enflant en un si des gens se mouvaient, il observait bien leurs mouvements,
plus gros volume, il en resultait de la constriction parce qu'il mais il ne distinguait pas leurs figures. Toutefois, bien qu'af-
n'y avait point d'issue pour l'evacuation de l'eau qui s'etait flige d'une telle maladie, il refusait absolument d'user de co1-
accumulce, et que Ie malade risquait de perir, les saints, avec lyres ou de quelque autre remMe. Aussi les saints, en cela non
compassion, y apportent 10 remMe. Ayant fait, comme avec plus, ne Ie laisserent pas de cote. Comme en effet on lui appli-
une aiguille, dans la membrane qui couvrait les parties, une quait sur les yeux la kCrote et qu'il en resultait un certain degre
petite ouverture, iIs jugerent bon que par la 40toute l'eau
(6) Autrement dit, comme cet ami etait lui-meme malade et etait venu chercher
fut evacuee. Par la meme faveur des saints, survint alors un gueri~on auprcs des saints (2~ .56 s.), il el1t dl1, a cette heure tardive, ctre au lit et
ami du malade, homme en tout excellent, plein de bonte, diacre dormlr.
(7) )(OC'rocO'rppocytO'oc~ 'rbv 'r6;t0v 22.53. Cpo 21.'.4 )(oc'reO'rppocytO'EV "'Ii xetpt 'rou ocytou
de la tres sainte grande eglise de 10. Ville imperiale, tenu en grande 'rbv 'r61tov 'rp[~. L'usage est bien connu, mais ne paralt ici que dans ces deux miracles
consideration et honne.ur et tres utile aux affaires de l'Eglise, qui de la serie III et dans Ie miracle 27 de la serie IV.
156 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINTS COME ET DAMIEN 157
d'astringence, 70autant que Ie pouvaient supporter les yeux,
il y avait secretion de larmes. Aussitot venaient au secours des en ce qu'on nomme Ie catechoumenion, il confia tout son salut
yeux Ie nez et la bouche, et, par suite de la contraction des yeux, aux saints. Le troisieme jour, tandis qu'il dormait, les saints
il se faisait une evacuation de liquide en masse, au point qu'on se prcsenterent it lui 25en souriant et, d'un air gai, lui de-
ne pouvait passer au lieu ou il recrachait l'eau. Et ainsi, quand manderent apparemment (9) la cause de sa maladie. Lorsqu'il
l'eau accumulee eut ete peu it peu evacuee par les yeux, les la leur eut indiquee en pleurant, l'un des saints tata l'endroit
narines et la bouche, il put voir distinctement d'une vue nette , et lui dit : « Rien de grave n'est arrive. » Puis, ayant insinue
par la grace de Dieu et la visite des saints. sa main entre les fesses de l'homme et l'ayant portee jusqu'a la
partie malade (l'anus), 30il dit que desormais il n'avait
plus rien a craindre de la maladie, parce qu'il avait ete par eux
Miracle 23. lie de bandages sur toute cette partie, en sorte que Ie flux
Tel fut Ie miracle accompli pour l'homme susdit de la part attendu n'aurait plus d'issue, mais s'arreterait comme un courant
de Dieu et des saints Come et Damion. Un autre individu un empeche par une puissante digue. Cependant, comme l'homme
des habitants de la Ville imperiale, diacre do la tres s;inte prolongeait son sejour dans la maison des saints, il arriva qu'il
Grande Egliso, pioux on toute chose et lui aussi (8) brillant dans fut atteint d'obstruction intestinale, en sorte qu'il ne pouvait
los affaires de l'Eglise, 5avait etC atteint d'un mal au pubis meme plus 35bouger, mais desesperait de la vie. Durant la
il se produisait une inflammation et la surface meme indiquai~ nuit, il vit l'un des saints qui se disposait a lui donner un lave-
une lesion grave. Comme il souffrait de troubles it l'intestin ment. Comme, raconte-t-il, il s'y refusait, et que finalement
qui menagait de se relacher, il arriva que, affaibli de corps, Ie saint lui avait administre Ie lavement, il alIa deux fois a la
l'homme fut effraye et eut des coliques : car il ne craignait pas selle et evacua, au lieu d'excrements, deux cailloux, ensuite de
seulement Ie mal actuelIement visible, mais bien plus encore quoi il se sentit aussi leger que s'il n'avait jamais ete malade.
celui auquel lOil s'attendait. II fit venir ses medecins habi- II disait aussi 40que les saints lui rendaient souvent visite
tueIs, leur exposa tout clairement, leur montra Ie lieu et regut et se livraient avec lui it de gentils entretiens, au cours desquels,
leurs pretendus soins. Comme pourtant la lesion ne diminuait it ce qu'il rapporta, il avait meme appris d'eux de certaines
point, mais que l'enflure augmentait toujours, il decida de faire prieres a reciter contre la maladie.
venir Ie plus qualifie des medecins : c'etait Ie prince de la con- Pour moi, j'ai lieu d'admirer non seulement la faveur des
frerie. II vint et, 15bien qu'il eut employe, plusieurs jours, saints - elle depasse, commo j'ai dit (Prol. 5), tout entende-
fomentations continuelles et baumes divers, il se montra aussi ment - mais one ore la fervour d'ame 45de ceux qui ont
inferieur au mal qu'il se croyait superieur aux autres medecins ; recours it eux, du fait quo, la ou los saints ont trouve foi ardente
.
grand est aUSSI 10 secours qu'ils apportent. La gentillesse meme
'
impuissant devant la maladie, il plongea l'homme en un decou-
ragement plus grave, puisque, malgre sa reputation de grand des saints me parait un signe qui indique les bonnes qualites
homme, il n'avait pu l'emporter sur Ie mal. Comme cnfin, de notr,~ h~mme. Si ~n eflet les .saints ne s'etaient pas grande-
s'avangant 20peu it peu secretement, Ie mal rendait tout it ment reJOUIS de sa fOI et de sa plete, ils n'auraient pas converse
fait penible pour l'organe l'exercice de ses fonctions, notre ma- si souvent et si gontiment avec lui. En verite pour ceux
lade, rejetant tous les onguents qu'on lui appliquait, gagne la 6°qui aiment Dieu, tout coop ere it leur bien (Rom.' 8, 28), et Ie
(8) xed CtllT6.; 23.4. Allusion sans doute au fait que Ie diaere du mir. 22 etait deja.
a<p63pa TOL'; TIj.; exxA1)ata<; 1't'p&Y(J.aa~ xp~a~(J.o<; 22/13 s.
158 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 159
prophete David en temoigne qui dit (Ps. 144 (145), 19) : « Dieu 15jls leur fournissaient a tous deux Ie moyen de guerir d'un seul
fera Ia volonte de ceux qui Ie craignent, il exaucera leurs priores et meme coup. Uno fois reveille, l'homme pensa que la vision
et il les sauvera. » etait pure chi mere et il prit Ia chose avec insouciance. Do nou-
Ainsi donc notre homme, qui avait con fie son salut aux saints veau, uno deuxieme fois, les saints lui apparaissent ot repetont
serviteurs du Christ, Iorsqu'il eut obtenu sante parfaite et lour ordro. Mais do nouvoau notre homme garde la memo insou-
accompli ses prieres, s'etant rendu Dieu 55propice, devenu cianco, il se disait que I'ordre ne pouvait vonir des saints. Uno
l'ami des saints, fortifie quant au corps, sanctifie quant a I'ame, troisieme fois ils lui apparaissent et, a force de menaces, Ie per-
quitta Ie temple des saints, et il racontait a tous les merveilles suaderent 2°d'agir. Et voyez Ia puissance des saints. Comme
qui, par Dieu et les saints Come et Damien, s'etaient realisees ils voulaient, d'un seul coup, produire deux miracles a son sujet,
a son sujet. ils machinent l'un par I'autre, car, etant sages et amis des
hommes, c'est avec prudence qu'ils menent a fin leurs guerisons.
Ayant done guette Ie milieu de la nuit, Ie paralytique s'approche
Miracle 24. Sur le paralytique et la femme muette (10). de Ia femmo apbone, rampant doucement et petit a petit.
L'homme gueri faisait encore ce recit, apportant ainsi grande Quand il eut atteint 251e lit, la femme s'en apergut et,
edification a mon ame - car il enseignait comment il faut rejetant et sornmeil et aphonie, elle se mit a crier, a appeler au
s'approcher de Dieu avec foi, parce que la foi est Ia mediatrice secours, d'uno voix forte, ceux qui se trouvaient la pour qu'ils
des biens qui passent de Dieu a nous - , quand un autre individu, cllassont Ie miserable qui l'assaillait. Quant a lui, il veut prendre
personnage distingue et en renom, se mit a dire que, tombe Ia fuite - il voyait l'entourage de Ia femme qui poussait des
5Iui aussi en maladie, il etait une fois alite dans la maison des cris se precipiter deja Vel'S lui - , il bondit des deux pieds et,
saints. A sa droite se trouvait une noble dame, qui, par suite en courant, se jette aux genoux de l'homme 2°qui a conte
d'inquietude et d'accablement, etait devenue aphone, sans la chose. 0 merveilleux conseil des serviteurs du Christ, 0 dessein
pouvoir du tout parler, et a sa gauche, un autre malade, para- debordant de salut! Le paralytique enseigna a I'aphone a
Iytique. Alors que et ce paralytique et Ia femme mueUe et parler instinctivemen t, la muette enseigna au paralytique a
l'homme alite entre eux avaient passe quelque temps deja courir sans trebucher. Plutot ni la muette ne sauva Ie para-
lOdans la maison des saints, les serviteurs du Christ apparurent au lytique ni Ie paralytique la mueUe, c'est Dieu qui, par l'inter-
paralytique et lui dirent : « Si tu veux etre gueri, couche avec mediaire de ses saints 35Come et Damien, leur accorde a
Ia femme mueUe qui est pres de toi. » Mais que personne n'aille tous deux Ie salut. Et, comme je l'ai appris de l'homme qui s'etait
s'imaginer que ce flit Ia chose vilaine, qu'on fasse attention trouve au milieu d'eux, ils s'engagerent apres cela dans les liens
plutot au but des saints : ils ne commandaient pas, comme on d'un mariage legitime, vivant avec dignite et faisant circuler en
pourrait Ie croire, d'avoir commerce avec Ia femme, mais toute occasion Ie bruit de la grace et de Ia guerison qu'ils avaient
regues.
(10) Ce miracle comme j'ai dit (Intr., p. 85, 88), a Me cite par Sophronius. Ainsi donc, lorsqu'ils eurent obtenu leur guerison, ils quit-
Comme Ie marqu~ Deubner (p. 28), il est f?rt possible que Ie ~ecit en ait circule
comme recit autonome. II se trouve, seul miracle de la IIIe Serle, dans les manus· terent Ie temple des saints apres avoir accompli leurs prieres,
crits 0 2 (Ottobon. "15, XIV"S., cr. Deubner, p. 9), p4 (Parisi~. 1468, XI" s., cf. Dcubner, rendu graces 40aux saints, consacre leur vie aDieu, parce
p. 13) et po (Parisin. 769, XIII" s., cr. Deubner, p. H), II comportc une doxologio
particuliere dans tous les manuscrits saur trois, ot ce meme miracle est attribue a qu'a Lui conviennent gloire et domination, a Lui Pere, Fils et
s. Menas, cr. Delehaye, Les zegendes hagiographiques3 (DruxeIles, 1927), p. 11.7. Saint-Esprit, dans les siecles des siecles (11).
Scion Delehaye (1. c.), ce pourrait meme etre la transposition d'un recit palen. -
a')..rx')..o~ (titre et 2".9, 12, 32, 33) = muctte mais iI peut s'agir aussi bien d'une ex·
tinction de voix, aphonic (2". 7 d~ chpwvfrxv, 2".34 &<pwvou, 24.25 (J.E:Ta 't"ijc; &<pwvfrx~) (11) 1'4 ajoute &(J.~v.
plutOt qu'aphasie.
160 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS Cal\IE ET DAMIEN 161
les yeux du lait de Ill. femme, selon l'ordre des saints, en Ill.
Miracle 25. Comment lut manilestee la jidelite conjugale d'une presence du mari qui soupQonnait son epouse, et aussitat il vit
epouse. distinctement, glorifiant Dieu. De son cote Ie mari ouvrit les yeux
Voici un autre miracle du meme genre que nous avons appris. sur son epouse, en sorte que, des deux cotes, ce fut un miracle
Une femme qui avait vecu avec son mari plusieurs annees, qui relatif a Ill. vue. 350 traitement unique qui produisit deux
se conduisait selon Dieu et qui veillait avec grand soin sur son guerisons, 0 Ie double miracle resultant d'un seul et meme ordre I
ame, comme l'evenement Ie demontra, etait tombee sous Ie Un autre cherchait Ie remMe, un autre reQut la guerison, et
coup d'une presomption illegitime de jalousie, son mari soup- en meme temps que cessait une maladie corporelle cessait du
Qonnant qu'on lui avait vole son mariage. 5Bien que Ill. meme coup un mal de l'ame.
femme cut use des discours convenables en pareil cas, et qu'elIe C'est ainsi donc que les saints se preoccupent de guerir avec
en cut appele it Dieu comme temoin de sa bonne conscience, sagesse et amour des hommes (12), et cela, nous venons de Ie voir
disant que, fut-ce en pensee, il n'y avait jamais eu rien de tel, 40par ces deux miracles successifs. Je ne saurais donc jamais dire
mais qu'elle avait garde la foi conjugale it l'abri de tout viol et que leur commandement eut etC vilain, mais bien plutot qu'il
de toute intrigue, n'ayant jamais connu d'autre homme, pour fut sage, plus sage que les choses toutes sages. « Le malade, disent
Ill. chose, que son mari, il ne Ia crut pas, mais continuait de les saints, demandera Ie lait de la femme chaste, et celui qui
se laisser dominer fortement par Ie soupQon. lOOr donc, etait malade it cause de cette femme sera gueri. Qu'ainsi un mal
comme il etait tombe en langueur, il gagna avec sa femme Ill. soit reveIe par un autre mal, qu'un miracle soit accompli par
maison des saints. Lorsque, apres y etre reste quelques jours, un autre miracle. »
il se sentit mieux, il demanda it Dieu que lui fut connu ce qu'il
en etait de sa femme. Or il arriva qu'un individu qui soufirait
Miracle 26.
des yeux et Hait sur Ie point de perdre Ill. vue vit en songe l'un
des saints qui lui 15dit: « Si tu veux recouvrer une vue Un autre individu, dans les premiers rangs, semble-t-il, du
nette et jouir de Ill. lumiere, prends Ie lait d'une femme chaste, clerge et qui faisait partie d'une secte d'heretiques, avait entendu
frotte-t'en les yeux et aussitat Ill. lumiere brillera clairement parler de ce nombre infini des miracles des saints; tantot il y
pour toi. » L'homme reQut avec foi ce precepte du serviteur du croyait, tantat il n'y croyait pas, peut-etre restait-il toujours
Christ, mais il ne savait comment s'en tirer. II pensait que ni Ill. incredule - c'est en efiet Ie caractere propre des heretiques - ,
reputation de chastete 20n'est jamais tres sure, ni, si l'on bref il voulut Gpasser Ia pannychis du samedi dans Ill. sainte
interroge it ce sujet, I'on ne peut app:rendre exactement Ie maison des serviteurs du Christ. II y arriva donc, et, s'y etant
vrai : car de deux choses I'une, ou bien la question se ramene it endormi, il voit pendant Ill. nuit les saints qui lui disent : « Dis a
une insulte, ou bien, s'il y a du vrai dans Ill. chose, on en cache la dame couchee pres de toi, qui soufire du sein, qu'elle est de-
la honte. Bref, il demeurait perplexe et soufirait plus du trouble livree de son mal. » Comme, une fois reveille, il rougissait de
de sa pensee que des yeux memes. Cependant il communique Ill. parler lOa la dame, car il n'avait aucune preuve de ce qui
nouvelle it ses voisins. Et, cette nouvelle etant arrivee jusqu'it lui avait ete dit (13) - c'etait de fait une noble dame de Ia haute
l'homme 25en jalousie a I'egard de sa femme, il Ill. reQut
(12) 'tou cro~(;)~ t~'tpE:um xod <J'tA~\lOpro7tCll~ e7tt[lE:AOU\I't~t ot &ytOt 25.38 s. Cf.
avec joie, declarant que par lit la preuve lui deviendrait toute 24.22 s. ,cro~o~ ycxp O\l'tE:~ xcxt ~tA~\lOPCll7tOt ~po~~cre:t x~t 'to:~ tcx'tpd~~ e7tt'tE:AoucrW.
claire. 11 fit connaitre it sa femme I'ordre que Ie malade des yeux (1~) C est bIen 10 ~ens de ex'tou [l'lJ t:XE:t\l 'tCll\l Ae:yO[l€\lCIl\l &7t68e:t~t\l 26.10, cf.
8e:8C1lxcxcrt\l 8'lJ x;x-t ~7t68e:t~t\l ".(;)\1 Ae:yO[l€\lCIl\l 26.19, oli 1'&7t68e:t~t~ est Ie remMe
avait reQu des saints, et il exigea que ce Iait fut procure par que la femme dOlt,trouv:r au.p19d de son lit. Mais la suite 26.10 s. Y,\I yo:p cre:[l\l~
elIe au malade. Elle Ie fit de bon camr, donna Ie lait a son mari, 'tE: xcxt e7t[80~o~ 'I) yU\I'I) oblige it sous-entendre que l'homme est aussi hesitant
30e t Ie mari a son tour Ie donna au malade. Celui-ci se frotta it s'adrcsser it une noble dame qu'il ne connalt pas.
11
162 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 163
wciele -, de nouveau les saints Ie visitent et lui disent : « Dis Atlantique de leurs bienfaits. II aspirait, comme je 1'ai appris,
a Ia dame qu'elle est delivree de sa maladie. » Comme il rostait a devenir une brebis du troupeau orthodoxe du Christ, et il
frappe de stupeur, doutant si c'etaient bien les saints qui lui l'eut fait si ne l'eut empeche 451e respect humain, comme
etaient apparus ot se montrant negligent, ils lui disont pour la il arriva jadis aux Juifs, selon Ie dire de l'Evangeliste (Jo. 12,42),
troisieme fois : (( Parlo a la 15dame comme nous to l'avons que beaucoup de Juifs reconnurent Ie Seigneur Jesus comme Ie
deja commande. Si tu veux avoir assurance aupres d'ello, dis-lui Christ, mais que nul ne Ie confessait ouvertement, car (( ils
do chercher sous son matelas, du cote des pieds, un remedo tenaient plus it cmur leur reputation devant les hommes que Ia
fabrique par nous : oIle l'appliquera a son sein et sera guerio. » gloire de Dieu ». Tant cette miserable opinion des hommes
Comme los saints lui avaient fait une imposition, qu'en outre 50a de force pour eloigner notre raison de Dieu lui-meme I
ils lui avaient donne une preuve, une fois leve il essaya de dire
201'1 la dame ce que les saints lui avaient prescrit. Elle, pensant
Voila donc, bien-aime, comment it ta demande j'ai ecrit
qu'il s'etait approcM pour quelque plaisanterie, Ie repoussait, . "
pour Ie present les miracles des saints serviteurs du Christ
disant qu'il Hait inconvenant que lui, clerc, et coucM dans une
si sainte maison OU jaillissent les sources des miracles, il vint se Come et Damien. Je te les envoie, et si je vois qu'ils te plaisent,
moquer d'une femme. II repondit qu'illui avait ainsi parle par je t'en enverrai d'autres. Si tu veux aussi les lire ensuite it
ordre des sainls et qu'il fallait accueillir serieusement et avec d'autres, conseille-leur de s'approcher de 55Dieu et des
Jore 251eurs prescriptions. Mais de nouveau elle Ie repoussait. saints avec foi, et de faire croitre l'aumone comme fruit de Ia
Quand ilIa vit bondir de son lit avec un grand ail' de hauteur foi, de prier avec empressement, de faire que leur arne ait tout
et qU'elle refusait de converser plus longtemps avec lui, il Ie temps regard it Dieu et it ses saints. Recommande-Ieur que
pressa 1'affaire et, lui faisant connaitre sa caution, lui dit : nul de ceux qui frequentent Ies saints ne doute du salut qu'ils
(( Si tu veux t'assurer que les saints m'ont envoye vel'S toi, donnent, mais croie plutot, et ainsi obtienne rapidement d'etre
cherche a l'endroit pres de tes pieds et tu trouveras un remede sauve. 60Car si l'on ne va vel'S eux avec foi et larmes quand
30prepare parIes saints. Applique-Ie toi, et tu obtiendra.s de on demande Ia guerison, comment l'obtiendra-t-on? Examinons
leur part guerison. » La dame trouva la chose comme il avait la chose, si tu Ie veux bien. C'est pour avoir regu eux-memes les
dit, elle en frotta Ia partie malade, obtint la guerison qu'ac- charismes des guerisons que les saints les distribuent aux ma-
cordent Dieu et les saints, et eUe glorifia Dieu qui administre lades, et Dieu, qui opere par eux, peut tout et sait tout, aucune
avec tant de bonte les affaires humaines. Quant it lui, qui, par des choses humaines ne lui echappe. Car i1 cree 65tout, il est
l'evenement, 25avait acquis Ia garantie du pouvoir des Ie maitre de tout, il prend soin de l'humain plus que de tout Ie
saints - car c'est sur des preuves, non par simple audition, que reste, il nous aime plus que nous-memes. Les saints aussi, qui
Ies Mretiques ont coutume de croire -, qui d'ailleurs avait imitent sa bonte et qui ont les entrailJes du Christ nous aiment
appris par une revelation des saints qu'apres quelque temps il pareillement, et ils prennent un plaisir extreme a' nous sauveI'.
deviendrait Ie chef de sa secte, i1 partit dans des dispositions Si donc Dieu est bon, comme it coup sur il l'est toujours s'il
. .
salt tout cImrement, si rien ne lui est impossible 70et si
'
d'extreme veneration, depuis ce moment, it 1'egard des serviteurs
du Christ, et il frequentait assidument leur glorieuse 4°maison. les saints sont ses imitateurs, comment expliquer Ie ca~ de ceux
Et Iorsque, scIon l'oracle des saints, il eut obtenu, au moment qui invoquent Dieu et n'obtiennent pas leur requete? Cause
meme qu'ils lui avaient indique, Ia presidence de sa secte, il se en est, de toute fagon, notre peu de foi et notre negligence.
met it ecrire, comme je 1'ai appris, Ies miracles des saints, am- Si nous allions a. Dieu d'un cmur vigilant, si nous Ie priions de
bitionnant de compter les flots de cette mer Egee, de cet ocean toute notre arne, i1 previendrait nos demandes. (( Tu n'auras
pas fini de dire, que je te parlerai. Vois, je suis present» (Is. 58, 9).
164 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
dras avec ta tumeur plus grosse qu'avant. » Elle les quitta - car Ie membre compatit au membre - et, comme la
lOcependant, et gagne avec grande ardeur et foi la maison des lOfemme, entendant parler de scalpel, en etait devenue plus anean-
saints. Ceux-ci, it Ia vue du si beau zole de la femme, apparaissent tie, on eut recours, cette fois encore, aux saints serviteurs du
en songe a son medecin habituel et lui disent : « Si tu veux Christ Come et Damien. Elle congedie donc les medecins et
guerir la dame, va it la sainte maison OU elle est presentement, gagne la sainte maison des saints. Ceux-ci, durant la nuit, ap-
et sectionne-lui Ie sein a l'endroit que nous te montrons. » paraissent en songe a son mari, sous I'aspect des medecins, et
Sur ce, 15ayant denude Ie sein, ils lui montrerent l'endroit lui disent : « Sais-tu qU'aujourd'hui 150n opere ta femme? »
ou il faudrait opereI'. lIs circonscrivirent Ie lieu et dirent : - « Non, messieurs, repond-iI. C'est justement pour empecher
« Quand tu auras opere, mele it tel baume cet autre que voici, cela que je l'ai envoyee chez les saints, vous Ie savez vous-memes,
applique it l'endroit ou tu dois sectionner, et elle sera guerie. » pour que nul scalpel ne la touche. Car elle ne peut Ie supporter. »
Le medecin voyait la mamelle qui lui etait montree par les Laissant la Ie mari, ils vont, cette nuit meme, vers la femme et
saints, et 2°il comprenait exactement ce qu'on lui avait dit, lui disent : « Si tu veux etre deIivree du mal, prends du millet,
mais il ignorait que l'operation etait en train de se faire par la 2°chaufIe-le, applique-Ie a la partie malade, et tu seras guerie. »
main des saints. Lors donc, une fois reveille, il va en hate, selon Le jour venu, elle ordonna qu'on lui apportat du millet. Or,
l'ordre des saints, vel'S la malade pour l'operer, et, a son arrivee, s'etant levee pour prier, elle vit que son sein avait creve, et
ilIa trouve deja operee. Quand il eut examine les marques, et qu'il rendait I'humeur qui s'y etait accumulee. Elle regagna
reconnu que c'etait bien la ce que lui avaient indique ceux qui son petit lit, fit s'ecouler Ie liquide, purifia la plaie, y appliqua
lui avaient montre dans son 25sommeil comment faire la kerate des 25saints, et, apres qu'elle eut continue ainsi
l'operation, il se borna a appliquer Ie baume a I'endroit qui lui quelque temps, elle remit son sein en sante comme l'autre.
avait eLe prescrit, et Ie sein de la dame fut completement retabli. Elle satisfit alors a ses actions de graces et rentra chez elle,
Voyez-vous ce que peut la foi jointe a la grace des saints? glorifiant Dieu et ses saints et racontant a tous comment ils
Quand eUe est pure, eUe peut tout ce qu'elle veut. Que nul l'avaient guerie sans soufIrance.
malade donc qui a recours aux saints ne desespere de son salut,
qu'il croie 30plutot, et il obtiendra vite Ja gw3rison. Grands en .Miracle 30. Sur l'homme qui arait nne fistllle (3).
efIet sont les biens que Dieu a procures au genre humain par la
grace des saints Come et Damien. Un homme doue de grandes qualites avait une fistule a l'em-
boitement de la hanche. II avait use de quantite de remMes,
s'etant livre au scalpel des medecins et traine miserablement dans
.Miracle 29. sa maladie durant quinze ans. Non seulement il etait toujours
A son tour une autre femme, qui enfantait pour la premiere vaincu par elle, mais elle empirait, I'abces 5ayant creve
fois et ignorait les soins que doivent prendre les meres, soufIrit par quatre bouches, par lesquelles il rendait Ie flux accumule,
au sein parce que Ie Jait s'y etait coaguIe. Elle patienta quelques et souvent meme les liquides qu'il absorbait s'ecoulaient par lao
jours, car elle s'attendait a un mieux, et en meme temps elle Comme les medecins avaient renonce, declarant qu'il etait
rougissait de se montrer aux medecins. Cependant, Ie sein domine par Ie mal et qu'il ne se trouverait nulle main d'homme
s'etant gonfle, 51e mal empira. Comme done elle ne pouvait capable d'y remedier, il perdit desormais courage et resolut,
plus supporter la douleur, tard enfin elle alla aux medecins.
lIs constaterent que Ie sein s'etait gate par manque de soin, °,
. (3) ,Le debut do ?O mira~le ..a ~ep~is 30.1 "E'l"ep6~ 'l"L~ &.V-1)p €meLX-1)~ crcp6SpIX
JUSqu a 30.26 ~O'1)O'1)crlX'l"e: IXU'l"(:) SLIX 'l"IXXOUC;, a ete cite dans les Actes de la {to as-
et ils se disposaient a l'operer : impossihle, disaient-ils, de vaincre scmblee du 2 0 Concile de Niece (787), qui retablit Ie cull.e des images, cf. Ileuhncr,
Introd., p. 3 et 82, Halkin, Bibl. hag. gr.3 (1957), p. 135, n"!5 h.
Ie mal a moins d'user du scalpel. Son mari pourtant s'y rofusait
170 COLLECTIONS GRECQUES DE JllIHACLES SAINTS cOJlm ET DAlIIIEN 171
comme beaucoup Ie lui conseillaient, de se rendre a la sainte l'ornement (cosmos) de l'Eglise, essayait d'inciser la plaie, saint
10maison des saints serviteurs de Dieu Come et Damien. Alors Damianos, Ie dompteur (damazon) des maladies, maintenait
qu'il se disposait a Ie faire - car la necessite rend tres sage -, l'homme, mais celui-ci se rebellait contre l'operation. Saint
il voit durant Ie sommeil les saints qui lui disent : « Viens chez Come dit : « Arrete I Je vais tout de suite Ie faire taire. » Illui
nous, tu seras gueri. » Ayant pris con fiance par cette exhorta- insera les deux pieds dans des interstices 40du grillage de la
tion, il gagne leur tres venerable et glorieuse maison, et il ne barriere, et, les y ayant resserres (5), il Ie coucha sur un bane;
cessait chaque jour 15de les supplier d'etre delivre du mal. puis il prit un scalpel et l'opera malgre ses hurlements. La lar-
Comme il etait reste la assez longtemps et n'obtenait aucune geur de l'incision qu'on avait faite etait comme la distance
visite, finalement, Hant sorti un jour dans Ie narthex en plein entre les deux doigts (6) de la main d'un homme. Quand ils
air adjoint a l'eglise des saints, il jeta les yeux sur l'image du eurent retranche par excision toute la racine du mal et purifie (7)
Sauveur placee sous Ie portique de droite - on y a peint la I' endroit, ils Ie lierent etroitement de bandelettes tres serrees,
Sainte Vierge Mere de Dieu, les saints serviteurs du 20Christ 45sans y appliquer aucun baume. Le malade leur dit : « C'est
Come et Damien, et l'un des hauts dignitaires, du nom de bien, vous m'avez opere. Mais appliquez maintenant de la char-
Leontios (4) - et fit devant elle d'instantes prieres; il pleura pie imbibee de miel (8), ainsi Ie veulent les regles de I'art. Car
la amerement plusieurs heures, et, apres avoir supplie les saints, il y a deja longtemps que dure ma maladie, et, avec mes conti-
s'en retourna au lieu de sa couche. Or, la nuit suivante, il voit nuelles operations, j'ai appris cela. » Les saints lui repliquerent :
venir a lui les serviteurs du Christ Come et Damien ; ils avaient « C'est toi qui vas nous apprendre a soigner? Soumets-toi a ce
au milieu d'eux 25la Vierge pleine de graces, et elle leur traitement, tu es traite comme il faut.» 50Ainsi done, apres
disait : « Voici Ie malade; secourez-Ie au plus vite. » L'homme ces soins, ils Ie rapporterent de l'hospice et Ie deposerent a
entendit distinctement ces paroles. Quand elle se fut retiree, nouveau sur sa couche. Mais vois au reste Ia puissance mira-
Jes saints saisirent de leurs mains Ie malade, et, Ie portant, ils culeuse des saints I A son reveil, I'homme apercevait sans doute
l'amenerent a l'hospice qui est situe tout aupres. IIs Ie porterent des bandes sur l'endroit, et pourtant, quand il Ie tatait et y
a la clinique de l'hospice, 30en la piece OU est la pharmacie, farfouillait, il n 'y trouvait aucun pansement, mais palpait a
et, apres l'avoir depose sur l'un des grabats qui sont la, pres de nu I'emplacement. Apres quelques jours de patiente 50a t-
la barriere qui enclot l'armoire aux remMes, ils se disposaient a tente, comme etait arrivee la pannychis du samedi et Ie moment
l'operer. Lui pourtant, croyant que c'etaient ses medecins habi- ou, vel'S la sixieme heure, on distribue au peuple la kCrote,
tuels qui voulaient de nouveau pro ceder a une operation, il il resta au lit, car il repugnait en lui-meme a endommager la
cherchait a les en empecher, jurant qu'il ne les laisserait pas ~Ia~e. Vel's la neuvieme heure de cette pannychis, alors qu'il
faire, attendu qu'il avait eu recours aux saints 35et qu'il et3.lt p!onge ~an~ Ie sommeil, il voit les saints qui lui apportent
n'avait plus besoin d'operation. Tandis que saint Cosmas, un chIffon ImbIbe de kCrote; ils soulevent 60les bandages
(1) Un Leontios paralt dans les deux recits du martyre des saints Come et Damien (5) emO'q:>i\;cx~ 30/,0. II ne peut s'agir d'un Millon puisque l'opere Imrie (eXe:t-
arabes iJ. Aegae de Cilicie, ct. Deubn9r, Martyrium I, titre et passim, Martyrium II
pouyY'l)O'E:V CXU'l"OV ~OWV'l"CX 30.41). '
ch. 2.17. Mais cst-ce bien lui? D'une part nous sommes iJ. I'orxo~ de Dyzance, et ii , (6) J'ai, ajout6 « les >, bien qu'i! n'y ait pas d'articlo (~v 15000v 'l"0 at'ljxov [Le:'l"CX;U
cst sur que les Anargyres de Dyzance ne sont pas des martyrs. D'autre part, si ce aUO aCXX'l"UA':lV 30/,2 ~.), car l'auteur veut presque surernent dire In distance entre
Leontios avait ete Ie martyr associe aux C(')me et Damien arabes, l'auteur ne l'eut-iJ les deux dOlgts ?xtre,mes, Ie pouce et Ie petit doigt.
pas marque par une formule plus precise que 30.20 s. xcxi 'l"t~ 'l"WV [LE:Y&AWV &.vapwv (7) :<cxOcxpov 'l"OV 'l"Ol'tOV, i:mtae:t;OGv 30.H, «fait devenir, rendu, pur >. Meme sens
AE:6v'l"to~ 'l"OUVO[Lcx? On pensera bien plutM au donatcur. - yeypcxl't'l"cxt 30.1 8 avec CXVCXaE:fXVU[LL, (class. cxl'to8dxvu[Lt), cf. Moines d'Orient, II, p. 126, n. 93.
(8) ;CXV'l"CX [Le:'l"CX [LeAt'l"t ~pe~CXV'l"e:~ 30/16. Cf. Du Cange, s. V. ;cxv'l"6v : « linteurn
(non eyp&q:>E:'l"O au eyeypcxl't'l"o) semble indiquer que la peinture se voit encore au
temps ou cerH l'auteur, cf. infra [Lexpt 'l"OU l'tcxp6v'l"o~ 30.77 s. Au surplus, si la carptu~ a,d p.lagas ", ~ans reference. Meme mot en grec moderne. _ [LE:'l"ct et datil
peinturc reprcsente Ie Sauveur avec la Vierge, il doit s'agir d'une Vierge assisc por- par asslml~atlOn iJ. auv; on a en revanche O'uv et gen., cf. nadermacher, Neut.
Gramm., 1,3.
tant sur ses genoux I'Enfant-Jesus.
--"I
(I) La Vc serie est de nouveau d'un tout autre style que, d'une part les series I-II,
d'autre part les series III-IV. 'rous ces recits, bien sur, visent a l'edification, mais
ce dessein est plus ou moins marque_ Ici l'auteur y appuie, non seulement, par des
prologues (Ie prologue de toute la serie sert de preambule au miracle 33, 35 n'a pas
de prologue), mais par des pareneses conclusives qui sont parfois tres longues (v.
gr. 33.15-135, 38.25-68). Chaque fois une transition artificielle fait passer du recit a
la parencse, v. gr. 33.55 s. : Ie recit ayant fini sur la notion que Ie malade fit en quelque
sorte peau neupe (xcd 'ro aep[lcx CXUTOU cruv TO Ie; Ilvu~LV eXAACXy7jVCXL xcxt CivcuOe:v
crXd~l>v veov CXUTOV eXvcx7l'Ach're:crOcxL CivOpcu7l'oV 33.50-52), l'auteur « enchalne » :
, Mais puisque Ie corps ressemble al'ame et les maux du corps a ceux de l'ame, prions,
nous les auditeurs de ce recit, que, comme Dieu a rajeuni corporellement cet homme,
ainsi il nous renoupelle tous par son Saint-Esprit etc. » Ou encore 35.46 s. : la maladie
ayant Iit6 Jitteralement tireo par les saints de la bouche du malade so us la forme
d'une bancle d'etofTe de la largeur cI'un cordeau ([le:TCX~U 'rC;W oa6v-rcuv e:upe6't) eXPX~
p&[l[lcx'r6e; TLVOe; ... 71'&Xoe; <lixov) crxOLV£OU 35.33-35), l'auteur poursuit : «Puis
donc (c'est presque toujours un l:7I'e:La~ ou un l:7I'd qui sert a la transition, 33·55,
34.99, 35.46, 36.29) que, nous aussi, nous gisons dans la maladie du pecM par suite
des cordeaux des pecMs enlaces autour de nous par les voluptes et passions charnelles,
invoquons Ie Seigneur etc. » Chaque fois aussi on a une doxologie finale, «aujourd'hui
ot dans les siecles des siecles, amen. » Outre cela enfin, surtout dans les prologues et
pareneses, mais meme dans Ie recit, Ie texte est parseme d'allusions al'Bcriture ou de
citations expresses de I'Bcriture, et, si la phrase est assurement meilleure que dans
Ia serie I-II, elle sent aussi plus la rMtorique que dans la serie III-IV. Pour toutes
ces raisons, je me suis borne a traduire les prologues et les narrations, omettant les
parenescs qui se ressemblent t.outes par l'insipidite. - Lo titre me me indique qu'i1
s'agit d'une « narratien partielle » (Mepoe; l:~'t)y~crecue;), en fait, d'une addition.
L'~uteur :: entendu lire les mirac!es des saints dans leur eglise (l:v Til> &:y£<p cxu'rWV
'rou'r<p VCX(p Pro!. 3), et comme, d autre part, iI a entendu raconter les nouveaux mi-
racles qui se produisaient chaque jour, a toute heure soit de la bouche m&me des
malacles gueris, soit de ceux qui ont ete temoins direct~ ou qui etaient au service des
gens gueris (Pro!. It-G), il a fait Ie vaeu de mettre par ecrit cette nouvelle sorie de
miracles (Pro!. 7 s.). Dans certains cas, iI a pu aussi utiliser des recits ecrits par ceux-Ia
memes qui avaient ete I'objet du miracle, v. gr. 34.2-4 'rl> ae: vuv r.poxd[l€\loV
de; t~~Y't)crL\l Ocxu[lct 71'CXpcX OeoqnAwv eXvapwv 'rOU'rO [lEV eXyp&ljlcue; 'rOU'rO aE xcxt
~YYP~IjlCUC; ;rrcxpeA&~O[l€\l, 35.3 s. (eXv~p 'rLe;) aL't)y~crcx'r6 [lOL, [liXAAOV aE xcxt
e:yy p cx Ijl cu e; e~We'ro.
12
178 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 179
serviteurs du Christ Come et Damien, d'apres (2) ceux qui en II va l'apporter, II va venir lui-meme et vous sauveI'. » Puis,
ont ecrit de fagon diverse et multiforme, et comme j'ai entendu comme si on lui avait demande quels seront les signes visibles
raconter clJaque jour, a toute heure, 51es guerisons qu'ils lors de la visite 30du Dieu qui doit venir, Ie prophOte a
produisent, soit de la houche de ceux qui ont He gueris, soit de ajoute ces mots (Is. 35, 5) : « Alors s'ouvriront les yeux des
ceux qui en ont ete temoins directs ou qui ont ete au service aveugles, les oreilles des sourds entendront. Alors Ie hoiteux
des gens gueris, j'ai fait vceu et desire d'un de sir extreme d'ajou- bondira comme un cerf, clair et net sera Ie parler des muets. »
tel' a leurs saints miracles, ne fut-ce qu'un miracle ou deux de Tout ceIa qui a ete annonce d'avance, iI y a bien des generations,
ceux qui n'ont pas encore ete mis par ecrit, a l'imitation de la par les hienheureux prophOtes et qui a 13M accompli lors de la
veuve qui apporta deux oboles au tresor de Dieu (Mc. 12, 42, venue du Christ, nous Ie voyons aussi de nos yeux s'accomplir
Lc. 21, 2), 10pour la gloire et la 10uange de notre grand chaque jour, 35a toute heure, par l'intermediaire des saints
Dieu Sauveur Jesus-Christ, qui non seulement au temps de sa serviteurs de Dieu Come et Damien, dans leur saint temple
presence providentielle de Ia chair, mais aussi longtemps que d'ici. C'est pourquoi moi aussi, indigne, sur Ie point d'ajouter
sera prononce Ie mot «( aUJourd'hui » (3), proclame et declare : par ecrit, dans mon langage vulgaire et rustique, au tresor de
« Mon Pere est au travail jusqu'a cette heure-ci, et moi aussi ceux qui ont avant moi richement expose, puisant aux riches
je suis au travail» (Jo. 5, 17). Or, puis que toutes les actions profondeurs de la sagesse et de la connaissance de Dieu, les
creatrices du Christ ont ete achevees depuis la creation du
4°merveilleux prodiges de ces saints, un petit nomhre de leurs
15monde, comme Ie bienheureux Moyse l'a ens eigne dans Ie livre
miracles, a l'imitation, comme j'ai dit, de la hienheureuse veuve
de la Genese (Gen. 2, 2) et comme Ie glorieux apotre Paul l'a
qui apportait deux oboles, je vais commencer mon recit apres
ecrit dans l'Epitre aux l-Iehreux, disant : « et Ie septiome jour
avoir invoque leurs prieres d'intercossion.
Dieu se reposa de toutes les ceuvres qu'il avait faites » (Hehr. 4, 4),
quelles sont donc les autres ceuvres que notre Dieu Sauveur
accomplit maintenant avec son Pere immacule et son saint, Miracle 33. Sur l'employe aux bureaux de l' Etat (5).
2°bon, vivifiant et adorable Esprit, sinon, chaque jour, par l'inter-
II y a peu de temps, il arriva que l'un des employes au bureau
mediaire de ses saints, de ressusciter les morts, guerir ceux qui
des petitions du palais imperial (6) tomba sous Ie coup de mala-
ont ete hrises de cceur, handel' leurs fractures, remplir toutes les
dies nombreuses et variees. Dans Ie principe, il souffrit deux ans
promesses relatives a son incarnation salvatrice qu'il a ann on-
d'une contraction des entrailles, et les peines, 510s douleurs
cees par ces paroles du 25bienheureux Isare (Is. 35, 3) :
mortelles n'avaient point de cesse, selon Ie mot du prophete
« Fortifiez-vous, mains defaillantes et genoux fIechissants.
Exhortez, dites a ceux qui perdent cceur 'Fortifiez-vous (4), (Ps. 17 (18), 6) : « Les liens du scMol m'ont enlace, les filets de
n'ayez point peur'. Voici que notre Dieu apporte Ia vengeance, la mort ont ete tendus devant moi. » II passait son temps jour
et nuit aux hains, cherchant a en tirer quelque soulagement de
(2) 1'ClXp&' 'rc;,v ... (l'\)yypt;yplX~6'r(J)v. Pro!. 2 s. Ou peut-Iltre « par ceux ... " en ses souffrances qui ne cedaient pas. Quand il ne put plus se
vertu de I'assimilation 1'ClXp&: = lJ1'C6, cf. Radermacher 1'.1, Linner, Studien zur
Historia Lausiara (Uppsala, 1%3), 59 s., cr. infra 3"."5 1'ClXp&. 'rou 1'CIXP€'rOU x&:(1)O~.
II n'y aurait rien d'cxtraordinaire it ce que les « miracules • qui avaient redige Ie recit (5) IIe:p! 'rOU !-,-EfLOPLIXALOU. Memorialis est Ie nom general que porte tout Cone-
de leur guerison 10 lussent eux-mllmes it I'eglise. En ce cas la difTerence d'avec Pro!. 5 tionnaire dans I'un dos scrinia imperiaux, cf. Ensslin, Memoriales ap. P. W. XV 657-
sera it que les uns !isaient un ecrit, d'autres racontaient. G59. Le notre est employe au scrinium des petitions (~v 'ri;" 'rc;,v A~~€AA(J)V crxPLVtc:>
(3) aAA&' XIX! &XPL<; 00 'ro rrI)!-'-t;pOV xIXAd'rlX~ (present = futur) Pro!. 12. Le 33.1 s.), sur quoi cf. Seeck ap. P. W. II A (s. V. Scriniumi 899, § 3 (scrinium libel-
sens est precise par 31•• 97 s. &XPL -rij<; rrI)!-'-t;pOV, !-'-OCAAOV 81: &XPL<; 00 'rO O'~!-,-t;pov XI)I;- lorum). O''rPIX'rEUO!-,-€V(J)v (33.2) est Ie mot propre, tout emploi dans les services
At;L'rIXL, sci!. dans to us les temps it venir. publics etant une militia, cr. Ensslin, I. c., 658.31 sS.
(It) En Pro!. 25 s., lire avec les LXX !O-XUO'IX're:, Xe:!Pe:<; ave:~!-,-€VIXL XIX! y6vlX'rlX 1'C1X- (6) Ilempereur chretien etant par definition ~LA6XPLO''rO<;, tout ce qui Ie conccrne
PIXAt;AU!-,-€v1X . 1'CIXPIXXIXA€O'IX're:, e:!1'CIX're: (manque en LXX) 'rOL<; OA~YOtjJUXOL<; (+ -r1i (palais, vetements, etc.) peut revctir cotte epitMte qui perd des lors touto valeur
8~IXVOLqc LXX) • to'XUO'IX're: X'rA'. religieuse ct equivaut a « imperial ».
SAINTS COME ET DAMIEN 181
180 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
qui it causo dos affiiges est venu dans Ie monde, ou plutot est
rendre aux bains du fait que les douleurs 10que lui avait descondu jusqu'au plus interieur de Ia terre, pour 4°rendre
infligees Ie demon continuaient toujours ot que ses esclaves ne vie a toutes choses, envoya ses serviteurs Come et Damien.
suffisaient plus a Ie servir, il demeurait desormais chez lui, Ceux-ci, lui 6tant apparus visiblement et l'ayant rassure en se
plonge jour et nuit dans une baignoire. Apres qu'eurent passe montrant a ses yeux, l'opererent depuis Ie nombril, en sorte que
ces deux annees, il arriva par l'action du demon, comme j'ai jusqu'a aujourd'hui se voit la cicatrico de leur incision : il en
dit, qu'il eut aussi des derangements d'esprit. Et ainsi, les at- sortit, durant vingt-cinq jours, des humeur~ infectes. avec ~e
taques ayant gagne en intensite 15et ses esprits s'eLant tres menus vers, si bien 45qu'on ne pouvmt se temr au~res
deranges, tous les tendons de son corps, et ceux des mains et de lui. Quand il eut etc enduit de l'eulogie de la kerote des sm.nts
ceux des pieds et ceux des organes de la tete qu'on nomme « tubes melee a leur huile sainte, doucement et peu a peu, par Ia mISt)-
rospiratoires » (7), furent frappes de paralysie, en sorte que ricorde de Dieu ses machoires se mirent a s'ouvrir et l'on com-
toutes les chairs de ses membres se fondirent et que ses muscles menga d'entendre sortir de sa bouche une faible voix. Puis,
n'eurent plus de volume, mais qu'on ne lui voyait plus que la petit a petit, ses epaules se mirent a se couvrir de chair! Ies
peau tendue sur les os, et 20que les tendons memes se muscles de ses membres 50 a se ramasser, ses tendons a se
montraient en relief sur la peau, que les machoires s'etaient reI acheI', la peau a se detacher avec les ongles, et il se fagonnait
contractees, si bien que l'organe do la langue ne pouvait remplir ainsi, pour ainsi dire, un nouvel homme.
son office. II lui semblait bien en lui-meme qu'il parlait a voix Voila donc ce qui concerne la maladie corporelle en laquelle
ec1atante, mais nul son absolument ne sortait de sa bouche. Ie demon avait plonge cet homme, et de laquelle Ie Dieu bon Ie
Reduit donc a une totale extremite, par la pitie et la misericorde delivra par l'entremise de ses saints serviteurs 55Come et
do 25no tre grand Dieu Sauveur Jesus-Christ, qui ne veut Damien (9).
pas tant notre mort a nous pecheurs quo notre conversion et
notre vie, etant rentre un peu de temps en ses esprits, il prend
avec lui ses serviteurs, se rend a cette sainte clinique des servi- Miracle 34. Sur l'a(Jocat Victor et JIesperos le paralytique.
teurs de Dieu et bienfaiteurs du monde et, parvenu, comme j'ai Puisque, si nous avons appris Ie precedent miracle de celui-Ia
dit, a cette sainte maison, 30s'y laisse tomber SUI' un lit (8). meme qui avait ete gueri parIes saints, celui que nous ~ous
01', si incertaine paraissait pour lui la guerison que, desesperant proposons de raconter maintenant nous a ete livre parde plCUX
de sa vie, tous ses serviteurs Ie laisserent choir et l'abandon- hommes, soit de vive voix, soit aussi par ecrit - en sorte que
nerent. Ainsi donc, abandonne tout seul, sans personne qui j'ai insere dans mon recit meme leurs 5pieuses paroles -
l'aidat a se conserver en vie, il etait force de se rouler dans je prie instamment ceux qui me liront ou qui l'entendront
ses excrements, commenous en assura par serment 35celui raconter de ne pas refuser leur foi a ce que je dis. De meme en
qui souffrit ces choses. Cependant, alors qu'il avait persevere effet que, tout en croyant les evangelistes Jean et Mathieu qui
dans cette sainte et auguste maison des saints durant sept mois, ont ete temoins oculaires et serviteurs du Verbe (10), nous croyons
et qu'il etait en grand desespoir et profonde inconscience, apres aussi Luc, Marc et l'apotre Paul, qui, bien qu'ils n'aient ete ni
Ie septieme mois Ie Medecin compatissant et ami des hommes, temoins oculaires ni serviteurs du Verbe, lOont ete instruits
par ceux qui l'avaient ete, de meme devons-nous donner notre
(7) xed TtX. (veupOG) TWV 7to3wv XOGL TWV tv "t"'{i xeqJOGA'ij opy&.vwv TWV Aeyo[l€VwV
&p't"IJPLWV 33.16 s. Je ne suis pas sllr d'avoir compris, mais en tout cas il ne peut
(9) La parenese qui suit (55-135) n'a pas ete traduite, cf. n. 1.. . .
s'agir des arteres. XE:qJOGA~ pourrait Hre pris en un seull~rge, .en ce ?as on songerait (10) D7t'IJPE:TOGr~ TaU A6you (3 11.7) plutM que TaU Myou. « Servlteurs (mIllistres).
il. la tracMe-artere : celle-cl etant comme paralysee, on s exphqueralt que Ie malade
de la Parole» n'irait pas, tous ront ~t6, mais seulement Mathieu et Jean ont serVI
ne pllt plus parler, 33.21 s.
(S) pt7tTE:L €OGuT6v33.29, comme 3,,/.2 s. pt7tTE:L €OGUTOV €7tL TIi~ XAtV'IJ~ OG\hou. Ie Verba dans sa chair,
182 COLLECTIONS GREOQUES DE MIRACLES 183
SAINTS cOr.m ET DAMIEN
foi touchant Ie miracle aujoUl'd'hui rapporM, car nous avons tendre enrance, il Hait boucher, et que, meme s'il eut su ce
comme garants de ce qu'on va dire ce qui se passe chaque jour (11). metier (13), il ne pouvait, par sa paralysie, remuer la main.
Un certain avocat, atteint d'une maladie inguerissable que A ces mots, 4°l'avocat s'en alla fache, s'imaginant que ce
Ies medecins appellent cancer, 15yient gagner la maison de qu'il avait vu etait chimere, et non vision reelle. II repandit
ces glorieux saints, ayant con fiance que, par eux, iI sera delivre donc devant Dieu beaucoup de larmes de supplication dans la
de ce mal sans remMe. II ne cessait nuit et jour de les implorer, sainte eglise, puis sortit decourage et se jeta sur son lit. Tombe
et ces medecins tres compatissants ne mepriserent pas sa priere, aussitot dans Ie sommeil, il voit de nouveau les glorieux saints
mais iIs administrent de Ia fac;on la plus expeditive sa guerison. pres de lui, qui lui disent : « Nous te l'avons deja dit, si
Et vois leUl' compassion et generosiM, comment a son sujet 45tu veux recouvrer la sante, va te faire raser par Ie paralytique. »
1'1 S a d"
mmistrent 20par un seul remMe deux "
guerisons. A son reveil, il va et supplie l'homme : mais celui-ci, aIJeguant
Un autre malade se trouvait alite dans cette sainte demeUl'e de nouveau son ignorance et son impuissance, Ie renvoya sans
m~me des saints (.12), dans la colonnade de droite, pres de la qu'il eut reussi. La troisieme nuit donc, les saints, apparaissant
chasse de leurs samtes reliques. C'etait un boucher, a la fois de nouveau , lui disent d'un air severe: « Voila deux fois qu'on .
?au~re et. malade., Son mal etait ce qu'on nomme paralysie : te l'a dit, et tu n'as pas ecoute. Voici, on te Ie dit pour.la trOl-
II 1m avalt reI ache to us les membres depuis Ies hanches jus- sieme fois, 50tu ne peux guerir si tu ne t'es pas fmt raser
qu'au bout des ongles, et il etait, lui 25auss i l'un de ceux par Ie paralytique. » Alors, s'etant releve du sommeil et etant
qui attendaient la visite medicale des saints.' Notre avocat aIle a l'homme, il se roulait a ses pieds, pOUl' qu'il accomplit
donc a la vision que voici. II lui sembla voir les serviteurs du l'ordre des saints. Celui-ci, pris de honte devant de teIles sup-
Christ s'approcher de son lit et lui dire en sOUl'iant : « Tu veux plications, mit la main sous son matelas pour en tirer les ciseaux,
etre d6b~rrasse de ton mal? » Comme il acquiesc;ait avec empres- qu'il omployait, quand il etait en sanM, 65pour ravaud~r
sement, 11s reprennent : « Entre dans notre eglise va chercher ses vetements en loques. Comme il cherchait les ciseaux, II
30 ' d I I Ad' ,
pres e a.c lasse es samtes ~eliques un homme qui est la couche, trouve des instruments de barbier, qu'assUl'ement il n'avait
un paralytlque. Demande-Im de te raser la barhe et aussitOt jamais possedes. Ces instruments tires, ils se mirent tous deux,
Ie Christ te guerira. » Une fois reveille, sous la c~nduite d'un avec les gens qui etaient la, a louer Ie Dieu ami des hommes et
guide, il s'en alla chercher l'homme. Quand il l'eut trouve il ses glorieux saints qui les avaient donnes. Ainsi donc rassure
lui dit : « Frere, les saints serviteUl's du Christ me sont appa~us de fac;on evidente sur la 60vision, l'homme, de ses mains
~n songe 35et m'ont envoye vel'S toi, pour que, sur mes paralysees, saisit les instruments et commenc;a de raser l'avo-
mstances, tu me rases la barbe et que, grace a toi je sois gueri cat, bien que sans experience et non sans grande anxieM et ~ouf
de mon mal. » L'autre jura ses grands dieux q~'il ne savait france. Or, tandis qu'il Ie rasait, il fut oblige de se mouvOir et
absolument pas meme les rudiments de l'art , que , d epms . sa de s'etirer; en s'etirant, il se releva sur ses genoux; puis, conti-
nuant la tache, il se reI eva tout dehout. Alors ils comprirent
(11) 'l",x )(cxO' ~)(&a'l"'1)v. YLv6fL~VCX 311.12, 8cil. non pas seulement les miracles q ui so l'un et l'autre la grace, la 65sagesse, la puissance de Dieu,
passent chaque Jour, mals Ie faIt que les barbiers actuels de l' T t d d
d an t s d U « mlracu. I''" • dont II . est 101. . question cf infra 3l 97 0')(0<;; son " os escen· L cette puissance miraculeuse qui s\itait offerte a eux par Ie
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1 -. I
eV'l"(O) CXY,W'l"OU'l"W ,
•
moyen des saints, ils virent comment les saints les avaient traiMs
(12) EV ~U'l"(l> 'l"01JT<:> 'l"(l> ayt(t> CXU'l"wV,ol)(t> 3't.20. lci O!)(O<;; = i~CXlise uis ue l'un par l'autre, et ils se mirent a chanter it voix haute Ie Christ,
Ie paralyhque est couche pros de la chasse (3421 30) Cf plus I . ~ ,_p q_
. I
OUaLCXa'l"l)p'<:> " • •
3· .. ld. L avocat, lUI, est ahte dans 10 catechoumen'
., " om '"v 'l"W aE:1\"'l"(o)
f" '0'
SauveUl' universel, qui leur aV'ait procUl'e Ie salut par Ie secours des
~ 3 l 29 ' - 0 '0
- v
"~ 'l"~p O,)(t> '1)fLwv
• -
I. ,CX1\"'1)A E:V cx up.wv xcxt pt1\"'l"~L ~(X\)'l"' Vmm, & t -
c . XCX'At l"E:" e:
au'l"OU 31•• '>2 s. 0 1\" 'tI)<;; x v'1)C;
(13) En 34,38 lire it mon sens ~v (tv~ cod,) a~ ;tcxt ~ae:L.
184 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COl\lE HI' DAlIllEN 185
saints. Cependant, comme, apros leur commune guerison, l'avocat pour prouver plus parfaitement la veracite de mon recit, jus-
avait donne sans doute une gratification (14) it celui qui, qu'it aujourd'hui tous ceux qui dans ce saint lieu pratiquent
70gueri avec lui, avait ete son medecin, mais cela avec hauteur et l'art de la coiffure (16) sont ou des disciples de notre homme ou
parcimonie, les serviteurs du Christ compatissants et amis des des disciples de ses disciples (17).
ames Come et Damien lui apparurent dans son sommeil et, Ie
corrigeant avec indulgence, lui dirent : « N'as-tu pas entendu
Ie mot de l'apotre 'Qui seme chichement recoltera chichement, Miracle 35. Sur le {eden! (18).
qui some largement recoltera largement' (II Cor. 9, 6)? Si Un homme craignant Dieu, ({ dont Ie nom est dans Ie livre de
75des medecins du monde t'avaient soigne, n'est-ce pas d'un air 1a vie » (Phil. 4, 3), qui ne quittait pas cette sainte clinique
joyeux et de bon camr que tu aurais repondu it leurs services? et ne cessait de louer avec eclat les glorieux serviteurs de Dieu
Mais parce que, pour te guerir, c'est par un pauvre, ce malade-ci, Come et Damien, me raconta, ou plutot m'exposa par un ecrit
que Dieu t'a vi site et soigne, afin que lui aussi il reprenne vie - j'ai introduit ses paroles memes 5dans Ie present recit
pal' toi, tu as meprise (15) son etat de mendiant? Va, donne-lui - que, comme un federe etait couche entre les deux portes
cinquante sous d'or, pour que, ayant rer,m avec joie cette grati- du saint diakonikon d'ici, les saints, qui se font tout a tous pour
fication, BOil prie pour toi avec ferveur et que, it cause de gagner tous, s'atant montres a lui par la grace que leur a abon-
lui, tout tourne a bien pour toi. » L'avocat s'empressa d'accom- damment procuree notre grand Dieu Sauveur Jesus-Christ, sous
plir cet ordre, et, quand Ie pauvre eut regu les cinquante sous l'aspect de federes 101e guerirent de sa maladie et Ie remirent
d'or, les saints lui apparurent a lui aussi et lui dirent : « Vois, aussitot en parfaite sante. Le dit federe, d'apres Ie narrateur,
Dieu t'a envoye, en plus de la sante, des instruments de travail voit en songe un sien ami qui lui dit : ({ Sais-tu OU tu es coucM? »
et de l'argent. Maintenant que tu as tout cela, ne retourne plus II repondit : ({ J'espere en Dieu que je vais l'apprendre. » L'ami
a ton ancien metier, B5apprends celui de barbier, pour vivre reprend : ({ Sais-tu que les saints veulent venir vcrs toi? » II dit :
de tes mains et n'etre a charge a personne, mais au contraire en 15({ C'est tout mon souhait, a moi indigne, qu'ils daignent me
aider d'autres en remerciant Ie Seigneur. » Quand tout cela se visiter. » Comme il attendait cette manifestation de la pitie de
fut accompli pour la gloire et la louange du Dieu fecond en Dieu par leur visite, les glorieux serviteurs du Christ qui, comme
miracles, l'avocat rentra en grande joie chez lui, glorifiant Dieu j'ai dit, se font tout it tous pour sauveI' tous, viennent a lui par
qui prod uit des merveilles inscrutables, glorieuses, 90ex tra- la grace de Dieu, so us l'aspect de federes. L'ami qui lui avait
ordinaires, qu'on ne saurait meme compteI' ; et de son cote celui promis leur venue 2°les lui montrait, disant : ({ Vois, les
qui, de paralytique, etait devenu tout ensemble barbier , mede- saints sont venus a toi. » Mais il Hait dans Ie doute et disait :
cin et bien portant, continua desormais de vivre dans cette ({ Pourquoi me trompes-tu? Ce sont des federes, mes camarades. »
glorieuse rnaison des saints, se procurant de quoi vivre par Ie L'autre insistait avec force : ({ Non pas, ce sont les saints eux-
metier qu'il avait regu des saints avec la sante. II demeura la
toute sa vie, fidele au metier de barbier, ayant dit un grand (16) Nous apprenons ainsi qu'il y avait dans l'o!xoC; un salon de coiffure. Nous
savions deja (H.1S s.) qu'il y avait la aussi des bains. Les deux vont generalement
adieu 95aux marches de viande, si bien que beaucoup de en.semble. A propos .do ce mir..34, Deubner (rntr. 74 55.) observe qu'a Rome les
ceux qui dans 1a Ville etaient gens consideras et d'importance smnts Clime et DamICn sont aUJourd'hui encore les patrons des barbiers.
(17) La parenese 3 f•• 99-120 n'a pas ete traduite, cf. n. 1.
souhaitaient de venir la et de se faire raser de ses mains. Et (IS) IIept :ou q>oLllep&Tou. Cf. Stein, /J. Bas-Emp., I (1959), 23S :« Au Vie siecle
I'on ontend generalement p~r fMeres des mercenaires barbares, toujours a cheval,
(1~) 7tlXpe!l-uO~o"IXTO 3'<.69. C!. rna note a /Jist. Mon. V 21, M. O. IV, p. f,O. recrutes en de?ors des fr?ntJ.er.es de l'Empire ; ils ne constituent pas un groupement
(1~) .L.egrec~ltlourdement ercetll'/j ... Ilt();O"ou, Ilt(); TOUTO xIXTeq>p6v'I)0"1XC; 3".7G- autonome, m~ls entrent mdlvlduellement au service de l'Empire, sont organises iJ.
7S, ~ms Jl est ~len connu que dans ces tours IlL(); TOUTO ost pure redondan<.:o ot. ne veut la mode romame tout comme les corps de troupes autochtoncs ot, comme ces derniers,
pas etre tradUlt. sont commandes par des officiers imperiaux '. Voir aussi II (19!.9), 87 s.
186 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAIN'l'S COME ET DAMIEN 187
memes que tu vois. » II finit par croire, se jotLo aux pieds de Sauvour (Is. 65, 1) : « Je me suis decouvert a ceux qui ne me
I'un d'eux et dit : « Aie pitie de moi, car il y a IongLemps que cherchaient pas, je me suis faiL voir it ceux qui ne m'interro-
je suis maIade. » Le saint dit : « CeIui qui doit 25te guerir geaiont pas. )) Pourquoi ai-je dit cela, amis du Christ? La suite
va venir. » Et de fait, voici un autre individu portant une robe du discours va Ie montrer.
d'avocat qui vient vel'S eux. Les saints lui montraiont Ie malade Une femme avait un petit gargon d'environ quatre ans, qui
ot disaient : « PaIpons-Ie de Ia main. )) Les deux alors, lui ayant subitement, par IOune operation diabolique, etait tombe en
examine avec soin 10 ventre et Ie dos, se disent I'un a I'autre : une complete cecite, et elle se lamentait sur Ie malheur survenu
« Cot hommo-Ia ne sait pas ce qu'il a. )) Cependant 10 malade les it son fils. Les saints, ayant eu pitie d'elle, lui apparurent en
adjure au nom de Diou de Ie 30guerir. lIs lui disont : « Sais-tu songe et lui dirent : « Si tu veux que ton fils recouvre la vue,
qu'iI y a une tubulure dans ton echine? )) Lui Ies impIorait de va it l'egliso des saints Come et Damien, tache d'obtenir de la
nouveau : « Guerissez-moi, saints serviteurs du Christ I )) Alors, part des clercs un peu de l'eulogie qu'on prepare la-bas
ayant invoque Ie Christ, ils lui commandaient d'ouvrir Ia bouche. luau nom du Christ, demande-Ieur d'enduire les yeux de l'enfant
Ce que 10 malade ayant fait, on lui trouva entre les dents I'extre- de ce remede beni, et Ie Christ Ie guerira. )) La femme courut en
mite d'un fil. lIs Ie tirerent un bon bout de temps 35et Ie toute joie a leur sainte maison, et, Iorsqu'elle eut fait comme lui
lui montrerent - il avait la grosseur d'une cordeleLte - disant : avaient cornman de les saints, aussitOt Ia Iumiere fut procuree a
« Regarde, te voila purge a fond de ta maladie. )) II lour dit : l'enfant aveugle, et, selon la coutume, 20Dieu fut glorifie
« Je vous en prie, mes saints. Une femme, pecheresse comme moi, en ses saints (20).
s'est approchee du Seigneur, lui a lave les pieds de ses Iarmes,
et les a essuyes de ses cheveux (Lc. 7, 38). Jo vous en suppIie
donc permettez que j'en fasse autant avec vous. )) « Pas a nous, Miracle 37. Sur le sergent dont Ntat eta it desespere.
40rep liquent-ils, mais a Notre-Seigneur Jesus-ChrisL, qu'il te « Qui dira les prouesses du Seigneur, qui feraentendre toute
soit permis de Ie faire tout a ton souhait. )) C'est en effet l'usage sa louange )) (Ps. 105 (106), 2), des lors que, it l'imitation de
des saints de tout rapporter a la gloire de Diou et de proclamer notre grand Dieu Sauveur Jesus-Christ, c'est parfois par des
avec Ie propMte (Ps. 113 (114), 9) : « Non pas a nous, Seigneur, visites terrifiantes que ses tres doux et gentils saints serviteurs
non pas a nous, mais a ton nom ronds gloire, pour ta misericorde, Come et Damien 5accordent aux malades leurs salutaires et
pour ta verite. )) II s'etait jete pourtant a leurs pieds sacres et il reconfortantes guerisons? Comme ils ont fait dans Ie miracle
remerciait Dieu, mais ils se retirerent, l'ayant laisse en bonne que je vais dire presentement.
sante et louant Dieu (19). Un certain sergent, affiige d'un mal incomprehensible a l'in-
testin, qui s'etait livre longtemps pour ainsi dire a tous Ies
medecins, et loin d'en avoir eLe en rien soulage, etait aIIe plutot
Miracle 36. Sur l'enfant qui etait derenu subitement areugle.
de mal en pis, incertain IOenfin s'il vivrait ot totalement
Ces medecins compatissants et misericordieux, cos fideles desespere, avait regIe toutes sos affaires humaines selon l'usage
serviteurs et authentiques disciples de leur Maitre et Precepteur, des mourants ; puis, comme il n'attendait plus, it chaque heure,
Come et Damien, ne guerissent pas seulement ceux qui ac- que la mort, il avaiL. gagne cette glorieuse maison, demandant
courent d'eux-memes a leur sainte clinique, mais iIs tirent aussi it en ses prieres ou d'etre vite gueri ou de mourir. Comme les saints
eux en grande compassion 5ceux qui n'y ont meme nul- l'avaient neglige un peu 15de temps, parce qu'iIs eprou-
lement songe, selon la prophetie qui dit touchant notre Dieu vaient sa foi, il se mit a Ies insulter, vomissant contre eux des
(19) La pareniise 35.4.6-54 n'a pas cUi traduite, cr. supra n. 1. (20) La parcnese 36.20-37 n'a pas ete traduitc, cf. supra n. 1.
188 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINTS co'l\m ET DAMIEN 189
mJures, dans la pensee qu'ils Ie meprisaient. II voit donc, une
et eternellos de l'ignominie, lOcomme II a fait, pour la glori-
nuit, les glorieux freres, je veux dire les saints Come et Damien,
fication de sa bonte, dans Ie miracle ici presente.
qui, apres s'etre jetes sur lui d'une maniere efl'rayante, soudain,
Un certain clorc, inscrit sur la liste du saint clerge de la Grande
ace qu'il semblait, par l'efl'et de certaines causes, se tenaient fixes
Eglise, avait ete atteint d'une hydropisie sans issue et qui meri-
sur leurs pieds. Alors qu'il etait en grand 2°trouble et
tait bien qu'on tremblat a sa vue. II etait au dela de tout secours
frayeur, craignant meme d'etre egorge, il lui semblait quo l'un
medical parce que son cas etait desespere : on ne pouvait
d'eux, ayant jete Ia main en avant, lui avait arrache soudain
15voirpartie de son corps qui ne remplit d'effroi les spectateurs, du
quelque chose do son interieur, puis s'onfuyait. Comme, Ie
fait que meme les plus petits organes etaient gonfies au deli!. de
poursuivant, il ne pouvait l'atteindro, iI demeurait la, decourage
toute taiIle jusqu'a un volume quasi infini, domines qu'ils etaient
de ce qui lui etait arrive. L'autre saint, alors, s'etait montre a
par la violence du mal. II recourut donc, par force, au seul
lui, faisant semblant, comme s'il l'ignorait, do l'interroger sur
espoir qui lui restat, il vint se refugier au temple des saints Corne
ce qui s'etait passe, d'apaiser 25sa colOre, et il lui posait
et Damien. Et la, apres qu'il y eut ete 2°alite quelques
cette quostion : au cas ou iI pourrait atteindre celui qui lui avait
jours, il fut juge digne de la visite des saints. Ce mal parad.oxal,
fait ce qu'il disait avoir subi, queUe punition lui serait-il agreable
dont on ne pourrait croire que la nature humaine y fut sUJette,
de lui infliger? II repondit aVec sorment : « Tout co que je pour-
les saints, s'etant tenus pres de son lit, Ie guerirent par un
rais faire pour Ie punir, je Ie ferais de grand camr 1 » Le saint
traitement non moins paradoxal. lIs lui ordonnerent de manger
lui dit alors : « C'est mon frero, on Ie nomme Cosmas. Ne te
trois feves seches et l'engagerent a absorber chacuno d'elloR apres
fache pas 30contre nous. C'est pour avoir eu souci tous deux
avoir invoque Ie nom du Pere, du Fils et du Saint-Esprit.
de ton salut que nous avons agi ainsi. Desormais tu seras gueri.
25Ce qu'ayant fait, Ie malade fut delivre de sa maladie avec une
Mais ne t'avise pas de lancer contre nous des injures comme tu
rapidite qui passait toute attente (22).
l'as fait jusqu'a maintenant, ofl're plutot, par de bonnes oouvres,
de continuelles actions de graces a Dieu qui t'a delivre de si (22) La longue parenese 38.26-68 n'a pas eta traduite, cr. supra n. 1.
fortes peines (21). »
(21) La parenese 37.3 1,-"" n'a pas ete traduite, cf. supra n. 1.
SERlE VI (1)
Miracle 39.
(1) La VIo serie est due au diacre Maximos, qui ecrit dans Ie style bistourne,
alambique, veritable puzzle, cher aux Dyzantins cultives. Ce Maximos, dont on ne
sait rien, a vecu apres l'Empire latin (1204-1261, cf.la transition au mir. 1,0.18-29),
auqucl il fait allusion. Son dcssein est double. D'une part, mettre en «meilleur style»
les miracles deja racontes : sont ainsi repris les miracles 21 et 22 de la IIIe serie,
puis les miracles 1,-19, 1-3 des series I et II, puis Ie miracle 39, absent des autres
series, et, d'apres Ie Metaphraste, un miracle de la Vie. D'autre part, completer la
collection. La transition se fait entre Ie miracle de la Vita et Ie miracle 40. C'est 111.
que Maximos declare qu'il va raconter aussi 't'IX tnt 't'W'I 1)fLe:'t'epc.l'l ye:v6fLe:'1OG
Xp6'1c.l'l (transition a 1,0, I. H). Sont tout a fait nouveaux les mir. 1,0- 1,7, et ceux-ci
peuvent titre exactement dates, car I'auteur declare qu'il ne peut rien dire de precis
sur les miracles accomplis « au temps de l'esclavage » (transition, I. 18-27) : ces der-
niers miracles sont donc posterieurs a 1264. Comme les series I-III, connues de So-
phronius (cf. supra, Introd., p. 88), font etat du sanctuaire tel que I'avait restaure
Justinien (527-565), et que la Vie serie no us mime jusqu'a la fin du XIII" siecle, no us
pouvons suivre ainsi l'histoire de l'lO:'t'pe:Lo'l byzantin des Anargyres durant huit
siecles. Au surplus, Maximos donne des details interessants sur les embellissements
accomplis par l'Empereur Michel IVle Paphlagonien (103 1,-1041, cr. M2, fol. 2 VO =
Deubner, Intr., p. 30 s.). Apres avoir rapporte, d'apres Procope, les travaux de
Justinien, l'auteur ajoute : « Voila donc ce qu'il en est de l'eglise (sc. au temps de
Justinien). Quant au peribole, aux lieux de residence du monastere (CPP0'lncrTIlP(ou),
aux revenus de possessions et de terrains suburbains, et a tous les autres avant ages
grace auxquels ceux qui ont choisi de vivre selon Dien obtiennent la tranquillit6,
Michel Ie Paphlagonien, mu lui aussi, a ce que je pense, par une raison analogue
?
(scil. celie de J usti~ien, c'est-a-dire apres une guerison miraculeuse), fit des dons tres
~agmfique:~ aux sawts, des dons dignes, pour tout dire, d'un empereur, agissant
dune mamere absolument convenable it un prince et tres agreable aux saints. De
fait, c'est a un ~el P?int d'eminence que s'eleva alors Ie monastere, jouissant en
abondance des b~enfUits accordes par la main liberale de cet Empereur, que passa,
non pas a cent 111 a deux au trois f~is autant, mais a mille et davantage (xOGt np6~,
cf. Evagr. II. E. 29.6, 30.8, 1,/,-20 Dldez-Parmentier), Ie nombre de ceux qui choisis-
saient de prendre rang parmi les moines, de sejourncr en ce monastere et de s'y
exercer it ce tres excellent genre de vic que menent les Nazireens de notre teIl1ps ».
't'W'I xo:O' ~fLii<; NOG~LPO:(c.l'l, <lit M.aximos, car il appartient lui-meme au monastere
comme il Ie declare au fol. 1 VO : xo:! O:lho~ 't"ii 't'W'I OO:UfLCt't'ouPYw'I ' A'IO:pyupc.l~
fLo'l'ij XO:'t'e:LAe:YIJ.€'IO~ ou npo nOAAou (Deubner, Intr., 31).
- I
pas a nous accomplissant de Ill. meme fayon leurs guerisons dans acteur de theatre, et qui, outre Ill. maladie, etait amige de Ill.
tous les cas, mais de maniere diverse, chaque fois nouvelle, plus extreme indigence, ils arretent aussitot son mal; d'autre
au-dela de ce que nous pourrions imaginer. De cette sorte aussi part, ils menacent l'acteur employe au theatre de ne pas etre
se trouve etre ce miracle-ci, 5que mon discours va sous peu delivre du mal penible qui 351e tenait s'il ne donne sa
reveler. En effet, dans ce miracle ou ils ont fait du bien a un mauvaise petite tunique au miserable deja gueri et extremement
riche et deux pauvres, ce n'est pas d'eux-memes que les saints necessiteux. Or Ie mime, cherchant it obtenir les deux, d'un cote
paraissent avoir accorde leurs bienfaits, ils se sont arranges aspirait it guerir, de l'autre conservait son manteau, jusqu'it ce
pour que chaque malade semble avoir trouve Ill. guerison l'un que, s'etant presentes it nouveau selon leur mode accoutume,
par l'autre, et ils deciderent que ce fut par un deshonneur, et ils l'eussent persuade par des paroles de tout point vraisem-
non un honneur, qu'il dut obtenir ce qui prevaut, ce qui passe blables de se defaire de son vetement en faveur du pauvre.
avant tout, je veux dire Ill. sante meme. Mais il me faut raconter Ce qui etant advenu, Ie pauvre ainsi 40vetu et en bonne
l'histoire lOon detail. sante s'en alIa joyeux.
Un personnage distingue tant par Ill. race que par l'il1ustration L'autre pourtant, toujours malade, gisait encore pres du
sociale - car il n'etait pas un homme du eommun ni de ceux temple, devenu reellement un spectacle du fait qu'on Ie voyait
qui tirent leur noblesse des biens exterieurs, mais il brillait dans nu. Le froid etant survenu Ill. nuit, il se repentait, se faisait de
Ie palais meme et etait en familiarite avec l'Empereur - forte- grands reproches dans Ill. pensee qu'on l'avait trompe, et, ou-
ment importune par son mal s'en vient a ce sanctuaire-ci. bliant sa maladie, allait de cote et d'autre pour voir s'il decou-
II y avait, a l'entour de lui, une foule nombreuse, 15ma is vrirait celui qui avait reyu son manteau; mais il n'etait nulle
en particulier, plus pres de lui que les autres, eLaient couches 45part. Ainsi donc, cruellement presse par Ie froid, il injuriait nom-
deux pauvres, tous deux mendiants et manquant du neces- mement les saints, usant, dans ses insultes, de propos peu conve-
saire, differents toutefois en ce que l'un etalait son indiaence nables ; « Pourquoi, disait-il, n'ai-je pas prefere Ie present au
b
pour se procurer de quoi vivre, tandis que l'autre avait son futur, ce que j'avais en mains it un sort incertain et ne me suis-je
emploi a Ill. sceno, a l'orchestra, aux ehoses du theatre en nullement preoccupe de ces traitres et imposteurs? Eh bien,
sorte. que" s'il lui arrivait de gagner un peu plus 20q~e Ie trompe maintenant par leurs paroles vaines et nullement
premIer, c est par de. tels moyens que lui venait ce surplus. 50solides, j'ai laisse echapper ce que j'avais, je n'ai vu encore aucun
Lors donc q~e c,es ~rOls eurent ete couches quelque temps pres accomplissement de leurs promesses, et, it en juger d'apres Ie
du temple, 11 eut ete seant peut-etre pour les saints s'ils en present, je m'attends it ce que, dans l'avenir aussi, eIles restent
avaient juge selon des vues humaines, de guerir d'abord cet desormais ineffectives. Sans doute, je me suis moque de beaucoup
homme riche et considere, puis, it Ill. suite, de visiter les pauvres. de gens divers, mais c'est moi qui en verite suis devenu Ie jouet
Mais on les voit faire tout Ie contraire. Car iI leur etait totale- de ces saints, et je meriterais bien, non seulement qu'on me raille,
ment 25indifferent d'etre blame par celui qui se glorifiait mais qu'on pleure it mon sujet. » Tandis que ce malheureux,
de sa race et de son i1lustration, ils avaient bien plutot souci de 55d'une langue intemperante, proferait de telles insolences il
.
aggravmt pour lui-meme Ia maladie, dans la mesure ou, alors
'
l'exemple du Maitre, qui, en Vue de donner Ill. meme part aux
ouvriers de Ill. derniere heure dans Ie vignoble, commenya par qu'auparavant il n'etait malade que de corps, il l'etait it cette
les demiers avant de remonter vers Ie premier (Mth. 20, 8). heure aussi spirituellement, autant ou meme de fayon pire que
Peut-titre aussi les pauvres etaient-ils arrives les premiers au corporellement. Mais attends un peu et tu verras, 0 toi, reprouve,
temple, et, pour ce motif, furent-ils juges dignes 30en abject homoncule, comment les saints te gueriront d'une fayon
premier de Ill. guerison. Etant donc apparus d'abord, Ill. nuit, proportion nee et accordee it ton genre de vie. Que mon recit
au pauvre qui 6tait en plus mauvais etat que Ie susdit mime et 13
194 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 195
s'attache a la suite, 6°qu'il parcoure en detail ce qui vient apres. paroles, dit-il, j'en ai fait moi aussi l'experience. Regarde
Quand tout cela se fut accompli de cette maniere, et alors en effet, tu 10 vois toi-meme. lIs m'ont d'abord mis a nu, et
que cet illustre personnage demeurait la couche a regarder ce pourtant ne m'ont pas debarrasse de la maladie. Si donc tu
qui se passait, d'une part il se chagrinait a tort et supportait avec leur oheis, ou hien ils ne sauraient etre pour toi qu'agents de
peine de n'avoir pas encore, lui aussi, recouvre la sante, d'autre mort, ou bien ils te procuroraient un autre dommage, qui ne
part il se rejouissait et avait plaisir a voir ceux des malades qui differe en rien de la mort. Je te conseiIle donc, a toi et a tous,
chaque jour etaient gueris : ils etaient des premices, des presages de te defier d'eux en toutes choses, et de ne preter nulle at-
evidents de sa propre guerison. 65Ces admirables saints tention 95a quoi qu'ils disent, me me si cela parait bon. JJ Or
qui prennent soin de nous viennent donc jusqu'a lui et en songe, je sais bien que, condamnant mon recit comme pur bavardage,
une des nuits, l'avisent qu'il ne sera gueri que comme ceci : vous n'allez pas I'accepter. Mais les faits memes vous permet-
« Fais venir a toi, disent-ils, Ie mime, et commande-lui de te tront d'apprendre si c'est la fiction de theatre, faux-semblant,
donner dix soufIlets sur la joue. Des Ie premier, tu te sentiras rien que paroles versees dans l'air.
quelque peu soulage de ta 7°maladie. Ensuite, apres les Bref, notre heros ne s'etait pas laisse persuader par Ie mime.
neuf autres, tu dois jouir d'une sante complete. JJ Alors donc II ne pensait pas qu'il dilt garder a part lui, sans Ie divulguer,
que, sorti du sommeil, il appliquait son esprit a cette vision de Ie detail de sa vision, mais, bien que l'autre ne voulilt 1ooabso-
songe, il n'osait pas meme, par honte, ebruiter cet ordre. De fait, Iument pas meme preter l'oreilIe a ce qu'il se disposait a dire,
il pensait que ce n'etait pas franchement un vrai reve, mais une il ]e retenait de force et se mit a lui raconter chaque chose l'une
tromperie et une derision, inventee, pour l'outrager et Ie couvrir apres l'autre. Quand pourtant ]e mime eut entendu que les
de ridicule, par un demon jaloux 75et qui en voulait a son saints lui commandaient de frapper l'homme sur la joue,
honneur. Pour quelle raison en effet eut-il pu croire a la vision? ayant pousse un grand cri de douleur, « Malheur a moi, dit-il,
Le soufIlet est, de tous les coups, Ie plus outrageant, et celui qui voila bien mon infortune I Vois en effet, non seulement on m'a
Ie devait frapper etait du nombre des hommes decries et qu'on depouille et je n'ai meme pas obtenu Ie moindre soin, mais main-
regarde comme indignes. Des lors, Ie voila plonge plus profonde- tenant 1050n me force a lutter pour rna vie meme I Autrement,
ment dans Ie malheur. « PlOt au Ciel, disait-il, que je ne fusse que peut bien signifier cet ordre perfide? N'est-ce pas que, lorsque
meme pas du tout venu ici I Bien mieux valait pour moi mourir j'aurai outrage cet homme ilIustre, je serai livre au prefet de la
avec honneur dans rna maison que de vivre aprcs sOun Ville et, pour quelques soufIlets, serai cruellement puni de mort?
outrage si manifeste. Et peut-etre ne me filt-il advenu rien de Non, Monseigneur, loin de moi d'agir jamais ainsi, dusse-je
terrible, puisque du moins je pouvais toujours compterfermement mourir d'abord. Mieux vaut pour moi mourir avant de t'outra-
d'etre gueri. Dans l'etat present, il est a craindre que, apres ger, llomieux vaut tenir, comme tres noble occasion de rna
avoir regu l'outrage, il ne me soit possible d'obtenir la sante. JJ fin, Ie refus de te faire violence que de ceder a ton invite et,
II etait donc interieurement en lutte aces pensees, et cependant, apres l'outrage, connaitre Ie meme sort. Car Ia OU ne s'offre rien
par deux fois, il voit de nuit en songe les saints se tenir pres de d'autre, Ie fait du moins d'etre loue a l'avenir de ceux qui ap-
lui et lui enjoindre les memes prescriptions, s'il ne veut pas prendront rna mort et que celle-ci sera un memorial de vertu,
etre continuellement 85en proie a la maladie. Le voila donc c'est ames yeux un gain et Ie plus grand honneur. JJ L'autre
qui se fie, malgre lui, a l'esperance heureuse de la sante et, ayant pourtant insistait encore, u5il recherchait l'outrage, se
fait venir Ie mime, il commengait de lui tenir des discours portant garant avec force qu'il ne fallait rien craindre, ni soup-
habiles, destines a Ie persuader de lui rendre sans hesitation ce gonner qu'il y eut la quelque danger, pourvu seulement que Ie
service. Mais a peine l'autre eut-il entendu Ie nom des saints que mime oheit et accomplit l'ordre. Le mime, de son cote, conti-
l'ayant coupe dans son discours : « Ne crois aucune DOde leurs nuait d'opposer les arguments contraires, et ils furent ainsi a
196 COLLECTIONS GRECQUES DE MIHACLES SAINTS COME ET DAMIEN 197
se quereller tout Ie jour jusqu'a ce que la nuit survenue les contrai-
gnit, malgre eux, a. se calmer. Sur ce, chacun d'eux, sur sa Miracle 40.
120couc he, vit en songe les saints qui repetaient les memes ordres.
lIs disaient it l'un de ne pas negliger leur commandement, mais, 1. Transition.
a peine regu Ie premier souffiet, grace auquel il lui viendrait un
Si ce recit que je viens de faire (2) vous a paru peut-etre, a
leger allegement de sa maladie, de donner en recompense deux
vous mes auditeurs, hoI'S du sujet, puisque j'avais convenu
manteaux a qui l'avait frappe, puis, a la fin, de remettre aussi
d'abord de narrer les miracles accomplis ici et que j'ai manque,
au mime une somme tot ale de cent sous d'or. 125Ces memes
pourrait-on dire, au contrat et ai fait un detour vel'S ce qui s'est
choses, ils les disaient a l'autre et, tout en l'encourageant par
passe ailleurs, je I'accorderais volontiers et serais pret Ga
la perspective de recevoir or et manteaux, ils ajoutaient que
rendre a qui voudrait mes comptes pour cette transgression,
lui-meme aussi, s'il agissait de 10. sorte, il recouvrerait la sante.
hormis seulement Ie cas OU j'eusse, en me taisant, prive les audi-
La-dessus quand, une fois reveilles, s'etant entre tenus ensemble,
teurs de recits tres agreables et certes pas sans profit. En fait,
ils eurent decouvert que leurs visions concordaient, de ce mo-
de maniere generaIe, tout ce qu'a embrasse Ie divin Metaphraste
ment ils tomberent d'accord : l'un regoit la gifle, l'autre, bien
dans ses Vies de Saints, j'ai estime qu'il ne fallait meme pas y
que malgre lui, 1300se 10. lui donner. Or des la que Ie mime
appliquer 10. main - que si d'autre part j'ai ajoute aux autres
lui eut donne Ie premier coup, 10. maladie du personnage s'al-
miracles d'ici un ou deux miracles decouverts ailleurs, qui se
legea. Lors donc il accomplit l'ordre et donne les manteaux a
trouvent etre etrangers a la matiere et au l°buL du present
celui qui etait ensemble son oITenseur et son medecin. Et apres
discours, que me Ie pardonnent de toute faQon les saints a. Ia
l'addition du reste des gifles, voila 1'01' dans les mains du mime.
gloire et louange desquels ces l'ecits sont composes, et vous
Ainsi, ~ien qu'ils eussent fait du hien a ces trois de faQon diverse,
les smnts, d'un meme coup, amenderent 135maladie, pau- aussi, je pense, vous me Ie pardonnerez, si vous n'etes des juges
vrete, orgueiI. Pour rna part en eITet, je ne saurais indiquec tranchants, sans entrailles et sans juste mesure -. Mon but est
d'autre motif aux souffiets que l'orgueil non mediocre de cet en eITet d'une autre sorte (3) : de ne pas laisser non plus de cote les
illustre personnage. lIs voulaient, en outre, faire du bien au miracles qui se sont accomplis de notre temps, 1Gmais d'y
mime au moyen des possessions du riche, car illeur est absolu- mettre aussi la main dans la mesure du possible, en les colli-
ment possible et de corriger par une drolerie ceux qui se donnent geant qui d'un cote qui de l'autre et en appretant un beau festin
de grands airs et d'enrichir a peu de frais ceux qui choisissent de de mots. II eut ete seant, apres avoir pris les choses depuis les
vivre dans l'insouciance 140et qui prennent leurs aises a premiers debuts, de me porter desormais vel'S la suite et d'ap-
l'egard du necessaire. C'est tout juste comme s'ils leur conseil- pliquer ainsi aux miracles l'ordre des temps. Or donc, ce qui a
laient, a l'un de ne pas s'enfler outre mesure - vois en eITet pu se produire durant les annees OU contre nous 20s'est
comment une legere maladie a fait en sorte qu'il fut outrage a hausse Ie sourcil des Italiens, dressee une bande armee qui, sans
l'extreme - a l'autre, qui avait vecu dans l'insouciance de posseder aucunement force reelle, fut neanmoins audacieuse et,
.
ne plus s'appbquer desormais au metier dont il usait, puisqu'il
'
mettant au-dessus de tout, oui, et meme cberissant de comploter
lui etait aise de trouver fortune aupres de ceux-Ia memes contre
qui il s'etait eleve naguere d'une langue 145.intemperante, (2) Scil. Ie recit, emprunte au Metaphraste, du miracle du serpent avala par un
paysan dans son sommcil. Ce miracle appartiont a la Vie de Come et Damien (d.
parce qu'il avait craint l'incertitude de l'avenir. Mais en verite, Vi~a, c. '1, p .. 91 s. ,~c~bncr), et il est donc « superllu, hors de sujet » (n:ctpeAxov),
lequel des deux (scil. guerison et non guerison) a chance de se pUIS que Maxlmos s etmt propose de raconter les miracles accomplis. ici » (e:v't'ctuOOr
I. 2), c'ost·a·dire au sanctuaire de Dyzance. '
realiseI', de toute fagon Dieu seul doit Ie savoir, et Ies saints (3) e:fLol yap xctl crxon:6<; 't'L<; ~'t'€pOC; n:p6X€L't'ctL, I. 13 s. sa rap porte a ce qui a ete
qu'il emploie dans son activite. Pour nous, notre tache subse- dit du Metaphraste : ~'t'€po<; par rapport au Metaphraste. La phraso d /)' ~v n:ou ...
quente est de nous appliquer aux miracles qu'il reste a decrire. 't'uYXavoL't'€ /)LXctcr't'ctt, I. 9·13 cst done une parenthese, d'ou mes tirets.
198 COLLECTIONS GIlECQUES DE MIRACLES SAINTS COME ET DAMIEN 199
contre un pays .stranger, s'est jetee avec tout ce qu'on pourrait titre et de la fonction de logothete, et qui, pour se distinguer des
dire de folie furieuse contre cette ville imperiale, y est entree autres participants a cette denomination de logothete, etait
sauvagement comme un homme ivre et a fait en sorte qu'elle appele du titre distinctif de Grand Logothete, cet homme donc,
subisse, 250U plutot a accompli d'elle-meme pour ainsi dire, les pourvu de ce titre et de cette dignite, 5avait une fille, qui
outrages Ies plus honteux, des choses parfaitement eloignees des s'appelait Theodora. Bien que pas du tout fiUe unique, elle n'en
lois de Dieu et des regles sacrees de la Nature, avec tant d'ef- etait pas moins tres cherie, d'ailleurs nullement inferieure a
front eric et, 0 Terre et Ciel, sans une ombre de pitie, tout cela, ce qui etait exige d'elle. Sa seule deficience pal' rapport aux
je presume, je ne puis Ie decrire exactement. Mais les miracles fiUes uniques consistait en ceci que, dans son cas, la Nature
qui, par la suite, se sont accomplis en faveur de la Ville quand n'avait pas juge bon que se dissolvat et en meme temps s'ar-
elle eut recouvre la liberte apres ce joug d'esclavage, je les dirai retat pour elle seule Ie doux plaisir mele de peine de I'enfante-
brievement, Ie mieux que je pourrai. De ceux-HI. meme, je ne ment, mais que, comme un producteur 10genereux, appor-
relaterai de toute fagon qu'un petit nombre, ceux 30qu i tant plusieurs fois sa quote-part au tout, elle n'avait pas pense
sont parvenus ames areilles. Car, vouloir tout embrasser, dans qu'il fallut cette seule fois-Ia payer son apport a la caisse
Ie discours, non seulement ne sera pas possible en eut-on Ie desir, d'epargne, mais surpasser d'autres contribuants en produisant
mais encore ce n'est pas d'un jugement avise que se laisse en- au jour un plus grand nombre de fruits, je ne sais s'il ne faut pas
trainer a cette besogne Ie presomptueux qui ni n'a conscience dire meme des fruits meilleurs. Or sur cette fiUe, qui etait pour
de sa pro pre faiblesse ni ne se rend compte comme il faut que son pere un si precieux tresor, avaient confiue des les premiers
beaucoup de faits se sont esquives et ont peri avec Ie temps, cheveux toutes sortes de maladies, qui, avant I'heure, mena-
bien qu'ils eussent merite qu'on les ecrivit et les gardat en gaient d'amener 15une mort crueUe, et 1'on pouvait voir
memoire. la nature en lutte avec elle-meme : ce terme final que, par I'ordre
Eh bien, il vous faut desormais, 35yous tous ici reunis , du Createur, elle a fait en sorte qu'il vint pour I'existence,
preter attention, je vous prie, a ce discours qui doit decrire en par un mouvement contraire elle ambitionnait de Ie mettre
detail les miracles et qui, sans compter qu'il dit choses vraies , hors la place. Et la nature ainsi s'armait si fort contre elle-meme
prend grand soin aussi de la proportion. Car de meme que, que, meme si, pour commencer du moins, elle s'etait avancee
chez tous les etres vivants, la Nature a fait en sorte que les vers la mort, elle ne voulait absolument pas que Ie grand nombre
parties eussent proportion avec la longueur totale du corps, s'en apergut. A la vue de ces choses, Ie pere, epreuve faite,
de meme aussi, 4°dans les compositions litteraires, 1'ar- interdit de 2°con fier plus avant a des medecins Ie soin de
rangement proportionnel des parties du disc ours ne saurait etre la guerison, mais il se precipite avec sa filIe vers ceux qui,
que tout a fait bienvenu, et non superfiu ni inutile. s'etant conduits et ayant vecu en surpassant la nature, nous
II est juste de meUre avant les autres miracles celui qui se surpassent aujourd'hui encore, comme il est raisonnable qu'il
presente encore a nos yeux sur une image. arrive a des etres qui ont mene une telle vie. Ces saints, de leur
cote, firent bon accueil a sa foi, ils jeterent sur la vierge un
regard propice et s'exciterent a la secourir. Par une visite invi-
2. J/;Jiracle.
sible et qui echappait a toute saisie des sens, 25iIs disper-
Co fameux Akropolites (4), qui fut honore par l'Empereur du
devint plus tard Grand LogothCLe, mir. {,0.2.4, cf. Du Cange, 823. On lui doH uno
XpO\lLX~ auyypocql~ sur la periode de I'occupation latina de Constantinople (120"·
(") II s'agit de Goorgios Akropolitos (1217·1282) qui fut ensemble historien et 1261). So us Michel VIII Paleologuo (1259.1282), i1 prit part au Concile de Lyon, oil,
homme d'Btat. Camarade d'etudes, puis maitre, de 'l'heodore II Laskaris (rogne do Ie 6 juillet 127'" i1 jura l'union au nom de I'Empereur. cr. Ostrogorsky, Geschichte 3,
125" it 1258), il rut nomme en 12"6, par Johannes III Dukas Vatatzes (1222.125,,), p. 3',6 et 380.
).oyoee,,,,)c; 'rou ye:VLXOU (administrateur du tresor public, Du Cange, 821 s.) et
-1
serent cette averse furieuse des maladies, et iIs rendent la jeune I'heure, il s'etait coucM pres d'une des petites maisons attenantes
fiIle a son pere et it I'existence, comme une belle statue neuve. au monastere. Et 2°de fait, comme il avait ressenti plus
Ensuite de quoi Ie pere, par un don de retour pour sa filIe, fortement les douleurs, il ne lui avait pas ete permis de presideI'
s'avance vel'S les saints en leur apportant, comme rangon, un aux hymnes qui so chan tent it vepres. Tandis qu'iI etait ainsi
peplos tisse d'or ot de soie, OU sont representees en broderie les alite et que, tout occupe it son mal, iI s'etait laisse aIler au som-
images des saints 30et celIe aussi de sa fille. Et comme, meil, il voit deux individus pres de lui, qui, it ce qu'illui semble,
tout autour du peplos, il a fait gra.ver des iambes, il porte, meme lui demandont pourquoi il est ainsi coucM. Comme, dans son
apres sa mort (1282), temoignage au miracle, et il encourage reve, il indiquait la cause et de la main avait montre la plaie,
les malades it so refugier aupres des saints. l'un 25des deux se mettait it l'examiner avec soin, it l'endroit
precis OU etait nee Ia plaie. Soudain, il sentit comme la pointe d'un
for tres aigu, et aussitot, dans son sommeiI, saute du lit et de-
Miracle 41. couvre quo son mal s'ost dissipe par evaporation: et certes, en
Quo soit ajoute it ce miracle-lit un autre de la meme familIe, verite, ses vetements trempes par Ie liquide evacue de l'ulcere,
qui s'ost produit i1 y a peu. Le temps appro chait OU a lieu la attestaient pour les spectateurs la realite du miracle. Ainsi Dieu
fete annueIle des saints. Aussitot etait accourue une vaste foule 30etait glorifie par Ie miracle des saints, et I'homme qui avait
melee, con vain cue des I'origino que l'on manifeste sa piete si I'on ete gueri promit, tant qu'il resterait en cette vie, de ne jamais
apparait vaincre 5son voisin en empressement it courir au manquer chaque annee la glorieuse fete celebree par les saints.
sanctuaire. Etaient presents aussi beaucoup de pretres et de C'est ce qu'iI fit it chaque retour annuel de la date, et iI proclame
membres du clerge. Et il y avait lit aussi avec oux celui qui se ainsi la grandeur du prodige.
trouvait etre Ie maitre du chmur des chantres : qui a ete nourri
dans les coutumes des Romains a pour habitude de Ie nommer
on grec un domesticus (5). C'etait Gregoire, qui vit encore et Miracle 42.
peut-etre a depasse lOla centaine, et qui, pour la plus grande Un autre homme, nomme Blemmides, dont Ie metier etait de
part, depossede prosque de la vie, s'offre aux spectateurs comme me surer les champs ot de les repartir entre les laboureurs qui
un spectacle etrange, sans avoir perdu sa belle voix. En ce creusent de pro fonds silIons, auquel il etait arrive, au COllI'S
Gregoire s'etait formee, par suite d'une mauvaise suppuration, d'une rixe, de recevoir par hasard it la main un coup de ba.ton,
une sorte de plaie dans la partie de derriere de la tete. Cette plaie, etait frappe 5de doulours cruelles comme par des aiguillons.
s'etant enflammee, tout d'abord avait communique la douleur II s'etait produit un anthrax a la main et toute la surface ap-
au resto de Ia tete, mais l'avait par-dessus tout trans mise l5it paraissait rougeatre. Cet accident lui etait arrive alors qu'il
l'encephale et aux regions avoisinantes. II en etait resulte, pour etait occupe it un certain village, qui non seulement etait de-
Gregoire, des vortiges, des obscurcissements, un pro fond engour- pourvu de gens capables de Ie soignor, mais manquait meme
dissement, une nausee qui lui envahissait tout Ie corps. II etait pitoyablement d'hommes tout court : il n'y en avait pas plus
donc lui aussi venu avec Ie reste du peupIe, comme je I'ai dit d'une dizaine, et qui ne savaient pas meme distinguer lOleur
plus haut, pour celebreI' la fete, et, comme il etait arrive avant droite do leur gauche (6) : chose qui assurement, meme en l'ab-
sence d'un autre mal, eut eLe une suffisante in fortune pour un
(5) Un des nomhreux sens de /)OfLe:cr-nx6<;, cf. pour celui·ci Du Cange 321 s. individu qui avait joui abondamment, depuis Ie berceau, de
Dignitas Ecclesiastica, qui curaL ut recte canatur, cantum imponit seu inchoat »,
(<<
rCferences), Beck, Kirche etc. 113 : « Dazu kommt nun das grosse Sl1ngerpersonal
fUr die Psalmodie in der Kirche mit einem Protopsa:ten, zwei Primikerioi und je (6) 'reI est Ie sens, je suppose, de xeXxdvrov fL~Te: /)e:~~cX. fL~T' eXp~crTe:pcX. TO TOU
einem Domestikos fUr die heiden Chor~eiten. » A6you d86TroV '12.9 s. Autrement dit, de parfaits imbeciles.
202 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COl\lE ET DAMIEN 203
tout ce qu'offrent mamrs policees, bonne education et bien
d'autres avantages. Comme donc beaucoup lui representaient Miracle 43.
avec instances que Ie mal irait pour lui progressant et empirant
Un laboureur, du nombre des gens attaches au monastere dans
du fait qu'il se trouvait habiter ce village, il fut force enfin,
la charge des bamfs, avait ete iniquement assailli par l'un des
malgre lui, 15de se rendre a la Ville, et Ie voila qui s'avan-
moines, je ne sais meme si celui-ci ne l'avait pas frappe de coups
~ait a toutes brides, sans se retourner, presse de gagner la Ville
et chasse malgre lui du monastere. Le malheureux, devore de
ver~ Ie soil'. Cependant il echoue, non, a ce que je pense, que Ie
chagrin - comment vivre (7) en effet desormais, lui qui n'etait
traJet se fut etendu a une plus longue mesure, ni qu'il out ete
qu'un rustre, 5entierement esclave de ses sens , nullement
negligent a passer de I'avant, mais de toute fa~on par une dis-
superieur aux betes -, roulait en son esprit Ie dessein de bruler
position divine. De fait, s'il n'en avait ete ainsi ni 2°lui-
• les provisions engrangees pour la nourriture des betes, avec
meme, accab Ie par la souffrance du coup, il n'eut ose entreprendre
'
les etables elles-memes. Comme done il ne pouvait supporter les
choses impossibles, ni ses compagnons, quand il eut pris sa
douleurs d'enfantement de ce proJ'et , notre homme " furieux
decision en tant que contraint par la violence du mal ne l'eussent
presque frappe de demence, aspirait a Ie mettre au jour et il fit
laisse partir. Mais tout a la fois il devint possible ~ue, pour lui,
eclater Ie venin lOqu'il avait au dedans. II partit de nuit,
Ie but s'accordat exactement avec Ie trajet, et il arriva que ce
ayant en main Ie feu, en telle sorte que, des la qu'il l'aurait
trajet fut juste celui qu'il fallait pour Ie but et ne s'etendit pas
appliquee au lieu ou il lui paraitrait facile et sur de l'introduire,
au dela de ce qu'il s'etait propose. Du fait que, chaque jour,
la flam me eut Ie moyen de passer par ou elle voudrait. Tel etait
au coucher du soleil, 25les portes de la Ville sont fermees
done Ie fol elan qui l'entrainait, mais il fut retenu par un lien
par des serrures et des verroux, il ne lui fut pas permis de mener
infrangible et divino Car, alors qu'il s'approchait des etables et
a terme son voyage a la lumiere du jour. Les tenebres s'etaient qu'il equipait sa main pour son 15dessein, voici deux jeunes
repandues sur toute la face de la terre, et ainsi, une fois arrive
gens, debout devant lui, qui, ayant repandu sur ses yeux un
aux remparts, il en faisait Ie tour. Comme done il ne lui parut
brouillard, ne lui permettaient pas de s'avancer, mais Ie for-
pas bon de s'endormir au dehors en plein air devant les portes
il se dirige vers l'aire du monastere, et la, fatigue 30par 1; ~aient a rebrousser chemin. Chaque fois qu'il revenait sur ses
pas, il jouissait de 1a vue comme de nature; chaque fois qu'en
longueur du voyage, il s'enfonce dans un profond sommeil
revanche il voulait s'approcher de l'enceinte, de nouveau il
malgre les douleurs cruelles que lui cause son maI. Or il lui sembla:
perdait 1a vue. Des lors, revenu a lui-meme, se gardant avec
en songe, qu'il montrait la blessure aux saints, qui etaient venus soin, desormais, 20de mal faire dans la me sure OU il crai~
Ie visiter. L'un d'entre eux lui appliquait les mains sur la tete;
gnait d'eprouver Ie meme accident, il reconnut qu'iI devait re-
I'autre, palpant la main ou il avait ete frappe, decouvre, lui
noncer a I'entreprise. Puis, apres qu'eut cesse Ie vouIoir que lui
semble-t-il, aussitot Ie mal, ot comme il avait pousse une sorte
avait inspire la nuit, qui d'aiIIeurs n'avait ete connu absoIument
de scalpel au travers de la tumeur nee dans la main, 35il fit de personne, mais etait encore dans Ie secret, cache dans une
eprouver au patient la sensation d'une incision. Une fois sorti profonde obscurite, cet artisan de mal, Ie jour venu, revel a son
de sommeil, il voit que cette partie en flee a creve et rejete les dessein. Et ainsi done, s'etant repenti devant Dieu, 1es saints,
humeurs internes. Sur Ie champ, il entre a l'eglise et, sous les yeux 25e t tout Ie monastere, i1 corrigea l'etat de son arne, passa de son
de nombreux temoins, raconte ce qui lui est arrive. Ces temoins intention mauvaise a de bonnes dispositions, et on Ie voyait
tandis que j'enquetais sur les miracles, porterent ce recit a me~ inst.ruire Ies autres du peril extreme ou iIs tomberaient s'ils
oreilles, et, si cet homme, je suppose, est mort, ils doivent bien
suffire 40pour attester Ie miracle. (7) « vivre )), qnAocrotpet'l {,3A : sens courant en gr. mod. Mais peut-etre « prendre
Mais que mon discours passe a la suite. la chose avec philosophic )).
204 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS COl'lIE ET DAMIEN 205
n'acceptaient pas de renoncer a l'iniquite, mais, pour avail' subi drait, a grand'peine, de se tirer d'affaire cette nuit-Ia, iIs esti-
de Iegers dommages, s'efforyaient d'en causer de grands. morent que, quant a lui, iI lui serait difficilement possible
Mais laissons Ia ce qui s'est accompli chez nous : ilnous faut d'echapper au peril. Et il n'y eut pas echappe si les saints,
maintenant passer a ce qui a eu lieu hoI's de Ia Ville. ayant pris les devants, ne l'avaient sauve. Au vrai Ie mousse,
apres avoir invoque les saints par leur nom, avait quitte Ie
gouvernail, et il laissait la chaloupe se laisser entrainer la ou
Miracle 44.
301es vents l'auraient poussee : il calculait qu'il avait d'autres
Un bateau naviguait un jour, pour quelque besoin du monas- pilotes, qui gouverneraient avec prudence. II fut ainsi conduit
tore, a un en droit du detroit de l'HeUespont. Comme il etait toute la nuit, confiant dans les saints, et, avec Ie lever du soleil,
tout rempli par la cargaison, il n'avait plus assez de place pour comme en vertu d'une convention, voila de nouveau barque
contenir la chaloupe, qui est une ancre de salut dans Ies ports. et navire reunis. Et ainsi Ie garyon, sauve contre tout espoir,
Les gens charges de commander Ie navire I'avaient donc at- est aujourd'hui une brebis de notre etable spirituelle: 351e
tachee a une corde 5a Ia proue et laissee vogueI' sur I'eau, et salut corporel a ete pour lui Ie point de depart du salut de son
ils avaient installe dans la barque un mousse, pour que, assis arne.
au gouvernail, il la dirigeat en arriere du bateau. La barque
s'etait avancee ainsi, gardant Ia ligne droite, assez longtemps,
tant que la mer etait restee calme, si bien que, a sa seule vue, Miracle 45,
Ies marins etaient tout aises. Mais quand une forte tourmente Une autre fois, comme Ie navire etait secoue par des vents
lOeut ec1ate, que Ia mer eut pris une couleur de plomb et fait violents et etait tombe en peril, parce qu'il allait contre une
craindre une tempete, que Ies vagues se furent dressees comme cote escarpee qui Ie menayait d'un danger bien plus grave -
des montagnes precipiteuses et tantot s'apaisaient tantot s'op- car non seulement cette cOte n'offrait point de port, mais elle
posaient en muraille, que Ie navire vibra de tous ses cordages, abondait en roches cachees sous l'eau 5et en brisants -,
excitant des mouvements de terreur, pour ne pas parler du pire, les marins, apres avoir jete les ancres, ayant laisse Ie navire
que ce tumulte se produisait Ie soleil etant a son coucher, les vaciller sur ces ancres, se lancerent, chacun comme il pouvait,
marins furent en detresse. Si en effet la tempete avait eu lieu vers la benie terre ferme. lIs s'y etaient assis sur une hauteur et,
15a l'approche du jour, ils eussent pu user de leur art contre Ia de ce lieu d'observation, de loin, attendaient avec impatience
violence des flots : mais comme Ie malheur etait survenu de ce qui aIIait arriveI', comptant plus de voir quelques epaves du
nuit, cela faisait que les responsables du navire etaient complete- navire echappees au naufrage que de Ie recouvrer lOt out
ment desesperes. Tous alors, regardant Ie reste comme secondaire, entier. Cependant ils voyaient les bons saints qui nous gou-
s'empressaient a jeter par-dessus bord la cargaison, pour que, vernent se tenir de chaque cote du bateau, flambeaux en main
Ie navire s'etant quelque peu allege, il put de toute fayon accueillir et s'excitant fermement I'un I'autre a veiller avec soin sur la
aussi la barque tiree par derriere. Or, 2°tandis qu'on s'y ap- partie que chacun d'eux avait reyue en assignation. Et ainsi,
pliquait, un coup de vent d'une violence extraordinaire, ayant ayant tire Ie navire du peril, les saints Ie rendirent au monastore
tendu a l'extreme, par la pression de la masse des vagues, Ia charge de toute sa cargaison.
corde suspendue au navire, Ia brise et coupe par Ie milieu, et
l'ecarte ainsi loin du navire et de tout salut : cependant Ie
Miracle 46.
mousse, aussitot, avait eu sur les levres nos grands thauma-
turges d'ici. Sur ce donc, les gens du navire desespererent De notre temps meme, il arriva une chose bien plaisante et
2litous que Ie garyon fut sauve. Car, lors meme qu'il leur advien- qui ne merite pas non plus d'etre Iivree a l'oubli. Les navires du
···-r
(14.) XOL'IO~[lXpXOU 48.28. Ce n'est pas un nom propre, du moins aucun martyr
de ce nom n'est-il mentionne dans DHG8. C'est donc un martyr qui fut XOL'IO-
~L&pX1)<;, c'est-a.-diro superieur general de plusieurs XOL'l6~LIX ou de tous les Iwi-
nobia d'une region donnee : tel fut par exemple Ie titre de Theodore, Ie contemporain
de Sabas, en Palestine (Cyr. Scyth. 16.1:5 Schwartz). Je ne puis dire quel a ete ce
martyr.
SAINTS CYR ET JEAN
INTRODUCTION
(1) A PEst d'Alexandrie, non loin d'Aboukir, qui n'est autre qu'une deformation
d'Apa Kyr, cf. Kees ap. P. W. xv 9G8 s.
(2) Ces textes ont ete diligemment exploites par R. Herzog dans un int6ressant
article, Der Kampf um den Kult von Menutlds ap. Pisciculi ... Fr. J. Dolger dargeboten,
116-124. Du cOte chretien, j'utilisel'ai surtout Sophronius, Laudes in ... Cyrum et
Joannem, 24-27, P. G. 87, 3!i09-3417. Pour les miracles, ib., 3423-3676. Le plan de
co second ouvrage est indique dans la Preface des Laudes, 3385 D 9-3388 A 13 :
(a) Miracles accomplis pour des Alexandrins I-XXXV; (b) Miracles accomplis pour
des :egyptiens XXXVI-XLIV et des Libyens XLV-L; (c) Miracles accomplis pour
des etrangers LI-LXX (ce dernier miraclo est celui de la gu6rison de Sophronius).
(3) Ce que dit Herzog (l. c., 120) : « Dieselben Zerstorungen und Deraubungen
(sc. les memes qu'au Serapeum d'Alexandrie) setzte 'l'hoophilos in Kanobos und
Menuthis fort, wo er die IIeiligttimer den tabennesischen Monchen aus del' Thebais
zum Umbau in Kirchen tiberlicferte, das Isieion von Menuthis zu einer Kirche del'
Evangelisten », paralt une orreur, ou du moins no s'accorde pas avec Ie recit de
Sophronius.
(4) Dans ces citations de Sophronius, d'apres un manuscrit apparemment unique
et qui est mauvais, il m'arrivera de corriger (certaines corrections sont dues il. Deubner,
De incub., 80-98).
218 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINTS CYR ET JEAN 219
deesse qui leur donnait oracles et gW3risons (n'p0qlYjTeuew xed v6croue;;
s'enfonQa et disparut lui aussi sous Ie sable ou sous les flots.
lIXTpeue:w, Laud. 24, 3409 C 7 s., tAn'L()~ pcfjcrewe;; 'l\ n'poqlYjTdlXe;;, 25,
3409 D 12 s.), et cela aussi bien les chretiens que les paiens Cinquiemement fut M.ti on l'honneur des martyrs cet edifice
(n'OAAoue;; TO d()exOI:e;; TOtiTO ()1X~(l.6vwv ... n'pocrxlXf}~crElIX~ lX\hou Tiil ~w(l.<ji ..• ave-
« qui ne perira que dans la destruction universelle et que con-
n'e~Elev, ou (l.6vov tXn'LcrToue;; XlXt n'tXVTYJ TOLe;; IXUTOU n'pocrxe~(l.evouc; xe:Aeucr(l.lXcr~v,
naissont tous ceux qui ont visite Ie sanctuaire et prie aupres de
tXA).a XlXt mcrTouc; XlXt Xp~crTOU Ta crU(l.~OAIX qlepOV't'IXC;, Laud. 25,3409 D 10 ss.).
la chasso des saints ... II est bati sur une hauteur peu eleveo
et peu ferme du rivage, entre Ie sable et la mer; du cote de
Cet etat de choses induisit Ie neveu et successour de Theophile,
Pest, il a la mel' mugissante et Ie sable qui menace de l'envahir,
Ie terrible patriarche Cyrille (412-444), it des mosures plus radi-
Landis quo, du cote de l'ouest, il a Ie promontoiro de sable qui
cales. Pour supplanter la guerisseuse Isis, il fallait trouver
s'avance en ennemi dans les flots ot s'y insinue de maniere it
d'autros guerisseurs. Selon 10 processus ordinaire (Gervais et
changer la mer en terre ferme (1) ... II se dresse tres haut, joignant
Protais, etc.), un songe lui revel a que ce devait etre Ie martyr
son toit au ciel, et il apparait aux navigateurs, depuis plusieurs
Cyr, qui avait ete, selon la legende, martyrise sous Diocletien
sLades, comme un spectacle tres desire: il accueille, des qu'on
(Laud. 18-23) et depose it la cathedrale do S. Marc it Alexandrie
los voit poindre sur la mer, ceux qui font voile vers Alexandrie
(Laud. 27). Des Ie matin, Cyrillo court it S. Marc, fait ouvrir Ie
et leur donne joie non petite en leur annonQant la proximite du
sepulcre, y trouve, comme de juste, les ossements de Cyr, aux-
but desire, et, comme il reste longtemps en vue, il accompagne
quels sont meIes d'autres restes, qui ne peuvent etro que ceux
de Jean. Ces reliques sont transportees on grande pompe dans ceux qui sortent du port et les munit d'un viatique salutaire )) (2).
l'eglise des Evangelistes a Menouthis (Laud. 27, 3413 B 5 ss.), Cette translation, et ce qui s'ensuivit, eut lieu sous Theodose II
et desormais tous les pouvoirs d'Isis passent aux deux saints. II (408-450, Laud. 24, 3409 B 1), et probablement des Ie debut
faut entendre ici Sophronius (Laud. 29,3416-3418) (1). II enumere du pontificat de Cyrille. Deux siecles plus tard, au temps de
cinq prodiges. Tout d'abord, it peine los saints furent-ils entres Sophronius, qui a reside it Alexandrie sous Ie pontificat de
dans l'eglise des Evangelistes qu'Isis fut entieroment chassee de Jean l'Aumonier (610-619) (3), Ie culte et les miracles des saints
son temple. Deuxiemement, tout Ie clerge d'Isis, hommes et Cyr et Jean etaient en pleine floraison. Sophronius fut lui-meme
femmes, fut peu it peu converti, instruit et baptise. Troisiemement guel'i it Menouthis d'une ophtalmie, et c'est co qui 1'a engage it
Ie sanctuaire (Te(l.evoc;) de la deesse, avec son autel toujours souille recueillir et raconter les miracles. II indique lui-meme la date
de sang et la statue de culte, fut recouvert par Ie sable de la greve, de son ouvrage, mil'. 8, 3437 A 5 ss. : c'est alors que Christodore
en sorte qu'iln'enresta plus aucune trace (cf. mir. 66, 3649 C 8 ss.). ost olxov6(l.oC; de l'eglise de Cyr et Jean. Ce Christodore, qui ad-
Quatriemement 10 village lui-meme de Menouthis,« ainsi nomme ministrait auparavant l'eglise de S. Jean-Baptiste, a ete place
it cause de ladeesse )) (8 TIjc; ()IXL(l.OVOC; umjpxe:v tn'cfjvu(l.ov 3416 C 2 s.) (2), it son second poste par Ie patriarche Eulogios (580-607), et les
deux successeurs d'Eulogios, Theodore (607-610), puis Jean
(1) Tout Ie recit de Sophronius est pure rMtoriquo et, comme disent les Dollan-
distes (Mart. Rom., 31 janvier, § 2), « hoc ipso die coluntur hi sancti etiam apud
Graecos, in quorum libris multa reperiuntur dc vita corum et de rniraculis sane lectu j1) I1p05 Be Bu6p.evov ~AWV (~xe~) T'ijc; IjitX(l.(l.ou TOV crx6m:Aov n'oAe(l.Lwc; E:qlOP-
digna licet naeris et fabulis non carentia. » Bon resume, avec les references aux sources (l.,WVTIX TO~C; XU(l.lXcr~V X.lXt. xepcrouv -riJv uypav tm;~crzp7tOVTIX (-epxovTIX. cod.)
Deubner, De inc., 89. Cyr aurait ete medecin, puis moine, Jean, soidat. Sophronius: 3.,16 D ~-8. Autrement dlt 11 y a Ii:t une langue de sable encerclant une portion de
par deux fois (Mir. 8, 341d D 10; 70,3669 D 11 s.), les nomme freres sans doute par mer qu~ peu i:t peu s'asscche. Est-ce i:t cause de cette situation sur une rive ni
imitation de C(}rne et Damien. ' h~ute .Ill ferlll? (l7t' ~~6~o~ OUx. UIji'l)A'ijC; ouBe O"TIXEl'l)pliC; ci>X086(l.'I)TIX~ 3(,1 6 D 1), il
(2) M~me indication Sophron., De Gyro et Joanne, 3689 A 3 ss. : tv T7j Me- Il cst rICn reste de cet edifice qUi devait durer toujours.
vouO'ij ... · o{hw yap XlXt -riJv xcfj(l.Yjv wv6(l.IX~oV IXliloL XlXt qlLATPCO) TIjc; ()IXL(l.OVOC; (2) n6sume ou traduction de 3r.16 C 7-3'118 A 4.
Vita Acephala, 3693 C 6 : en'wv6(l.IX~ov IXUTO (sc. Ie ()1X~(l.6vwv ",;, Isis) ot Alyun': . (3). Legore erreur ?hez Deubner, 88 : « ante annum 619, quo propter Persarum
TW~ Me:vouO'ij, C 11 ss. ev MevouO'{j . o{hw yap TOV T67tov Aomov ex TOU emqllX[vo- mVaSiOne!Il Soph:onlUs cu~n loanne Moschio archiepiscopo reliquit Aegyptum. »
(l.evou BIXL(1.0VOC; t7twv6(l.IX~ov. Le contraire est probablement vrai cr. IGSI 1005 L'.arcl~eveque ,ctUit. Jean dlt ~ tAe:~(l.(J)V, sur Iequel cf. La vie de Jean I' Aum,'nier par
Etcr~B~ (J)IXPLqc Ercrw T~V tv Me:vou(lL, P. Oxy. 1380.63 tv MevouO~ : AA1)OE~IXV. LeontlOs de NeapoliS (cd. II. Gelzer, lS93, rMdite par moi dans Sources clm1tiennes).
220 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS CYR ET JEAN 221
Rome, devenu a.veugIe, apres etre reste huit ans as sid ument Ie diacre Jcan (11 3452 B 11 s.) (1), un autre Jean prepose au
ici, j'a.i, par Ia. puissance des saints Cyr et Jea.n, 'recouvre Ia soin du tombeau '(40, 3576 D 3 s.), un sous-diac~e Af:L't'ouPyw~
vue », (mil'. 69, 3604 A 8-11) (1). tv 't'c7, crf:1m7, 'rwv &ytcuv ob(~(La'rL 3549 A 4 s., des portlOrs (OUpWpOL
II va sans dire que, comme au Cosmidion, Ie sa.nctua.ire de 3653 C 6, '7tUAWPOt ibid. D 13), des serviteurs du temple (a! 't'6'rf: 't'c!>
Menouthis comportait un nombreux clerg6. Au premier ra.ng, vf:c7, Iltaxovou(Lf:VOL 3425 D 12,01 'r0 Vf:C!> IlLaxavau(LcWoL 3653 B 13 s.) (2).
1'0!xov6(Lo<; (2), qui est a. Ia. fois l'administra.teur et Ie cure de 'Dec'rivons maintenant la maniere dont s'accomplissent les
l'egIise. A trois reprises, on nous Ie montre proceda.nt aux en- guerisons. D'une maniere generale, tout se ~asse comme au
censements, c'est-a.-dire accomplissant Ia liturgie (3) : 31, 3524 Cosmidion. Le malade arrive, porte quclquefOls - quand par
A 2 ss. d -r1i 't'pt't'Tl 1)(L€pq; 7tapL6v't'0<; 't'ou 0!xov6(Lou xat (Lf:'riX Xf:tpa<; 't'0 Ou- exemple iI est paralyse (52) - par des serviteu~s, se couc~e dans
(LLa't'1)pwv ~xov't'o<; xat OU(LLWV't'O<; 't'0 'r€(Lf:vo<;, B 9 s. XpLcr'rollwpou yiXp OU(LLWV'rO<; l'eglise et s'endort : la pratique de l'incuba.tIOn est eVldente,
-r1i 't'pt't'Tl 't'0 't'wv &ytwv (Lap-ropwv (0!xov6[.L0<; yiXp oiho<; e-royxaVf:v), 32,3528 D 3 on rencontre couramment des expressions comme €xeXOf:ulle
s. xat 't'OU 0!XOV6[.LOU xa'riX 't'OV xaLpov 7tapL6v'ro<; 't'OU OU(LLeX(La'ro<; xat 't'o OU(LLa't'1)- IIpLa(LwO e7tt cr'rpw(La'ra xat ~A€7tetV e/l6Xf:L 't'ou<; &ytau<; 3605 D 7 s., exeXO€u-
pwv ~xoV'ro<;. Une autre fois, ce sont les sa.ints eux-memes qui a.p- Ilev Ill: e7tl 't"ij<; cr't'PW(Lv~<; 0 IltiXxavo<; xat 01 (LeXp't'UP€<; aim!> XOt(LW(L€v,!> 7tlXptcr-
paraissent sous l'aspect de Christodore (et d'un serviteur) pro- 't'av't'o 3637 C 5 ss., tpav€v't'f:<; yiXp aU't'0 ... €7tt 't'wv cr'rpw(LeX't'wv xaO€U/lov't'L
cedant aux encensements, 32, 3528 C 1 ss. yf:v6(Levo<; yiXp d<; 'r0 Ku- 3648 D 7 s., vu~ -/iv. xat ~wtpp6vw<;
(l'auteur lui-meme) €7tt't'wv cr't'pw-
pOU xat 'IweXwou Of:L6'ra'rov 't'€(Levo<; ~~Af:7tev ev crX~(La't'L XpLcr'rollwpou 'rOU 't"lJV (LeX't'wv €xeXO€ullf:. xat xaOf:ullwv ... €Ilo~f: 3669 A 8 ss. C'est donc dur.ant
IlWtX'llcrLV ~xov'ro<; 't'ov Vf:WV 7tf:pLeXyoV'ra<; xat OU(LLwv'ra<; 0f:0 OU(LLeX(LacrL.
Le Ie sommeil, au cours d'un songe, que Ie patient voit les samts
venerable Christodore a aupres de lui un vO'reXpw<; (4) ou secreLaire lui faire une «visite medicale » (e:7t(crX€~t<; 2, 3429 B 2 j 9, 344.8 A 13 j
(Menas, 39,3576 A 12 s., 40, 3576 D 5-7). Sont mentionnes aussi 27, 3500 A 10 j 34, 3540 B 8 j 53, 3620 B 8). Quelquefo~s ils Ie ,gue-
rissent par un attouchement, o~ 't'iX A€XO€v't'a (L6PLOt: (testlCuIes) 'IlP€(LO:
(1) Le P. Delehaye (op. cit .• 21 s.) a parfaitement montre comment. de ces trois 7tw<; 'ro:t<; X€pcrt <xll('t'a~~xov'rf:<; xal 'r0 'rOU otll~(La't'o<; ~eXpo<;> (3) xa't'a~~~€crw
!ignes. Sophronius a tire d'amples developpements qui n'ont point d'autre sourco que
sa rhetorique verbeuse ot sa feconde imagination. En particulier. de ce que I'inscrip- tpuyallf:ucrav'rf:<; 16, 3473 A 7 s., 0 't'0 -/i7t0:P Ill: 't'at<; &tpOt:t<; tacreX(Lf:vo<; 61,
tion a cite placee au narthex (7tpO 't"ij~ 7tUA'Il<; TOU 't'€(L€vou<;) ot quo Joan dit. en 3637 C 14 s. xo:l 't'wv O(L(LeX't'wv &~eX(LevaL xat tpO:p(LeXxw; ou 7t0:po:yydAav't'€<;
cette inscription. oX'rw Xp6vou<; bOeXll€ 7tpocrxOGpTep~crOG<;. Sophronius a dMuit
que. «au lieu de chercher son refuge. comme tout Ie monde. II l'interieur du temple. xp~crll((JOaL A 1 s. (4). Le plus souvent ils lui pr~~crivent
69, '3664
Jean s'en est interdit l'entree » aussi long temps qu'il ne serait pas gueri. ef. 3GG1 C un remMe et c'est la. qu'apparait la plus grande vaneLe.
10 ss. : « C'est devant la porto de I'egliso qu'il demeurait. assis. coucM. y prenant
ses repas. y dormant. brule en la saison d·Ne. congelO l'hiver. tan tot trempe de la L'etabli;sement de bains voisin du sanctuaire (of. supra,
pluie, tantO! consume par Ies rayons ... Ainsi passa-t-il huit annees en plein air. » p. 220) pouvait servir simplement a. se laver - ainsi dans Ie cas
II faut. comme on voit. se defier de notre rMteur. Quand. par exemple. il d6clare
(Laud. 31. 3 1,20 A I, ss.) qu'il rapportera seulement des miracles accomplis de son
(1) II a son IlW(LeX'rLOV attenant II I'eglise. ct n'a bcsoin que de traverser l'cglise
temps. dont il a et6 lui-meme Ie temoin ou dont il a entendu 10 recit de t6moins oeu-
laires. c'est la un lieu commun usuel. qU'on ne doit pas prendre ala leLtre. commo 10 pour rentrer chcz lui 31,52 D 2 ss. .
(2) On lit mir. 5. 3432 C 10 ss. « Apros Isidore .... c'est ~e moment de.pr~dUlre
prouve Ie recit de la punition du bon mMecin Gessios (ou G6sios) de Petra. Celui-ci
a vecu en elIet a la fin du VO siecle (cf. Herzog. l. c.• 122 s .• W. Schmid ap. P. W. VII. Menas 't'ov tptA67tovov. qui presidait sur, Ie tpt~07tOVerOV slt~e. pres de ~ eghse ~e
132~ : Gessios a cache dans sa maison Ie philosophe lIeralskos lors de la persecution
S. Andre au quartier de Perone» (xa'rOG 't'ov Avllp€ou TOU Odou 'rou d<; :r!~
de Zenon contre les Neoplatoniciens en 1,81. Herzog 122). et tout ce que Sophronius II€pwv'IlV)' II s'ugit sans doute d'uno de ces congrega~ions. ~oitie lalqu,es. mo~tI.e
monastiques. comme il s'en est rencontre II Alexandrw. II Jerusalem (S~OudalOl)
raconte il. son sujet ne peut etre que vilaine legende. Gessios avait mis en do ute que ot II Dyzance cf. Beck 138 s. DilI6ronts de ceux-ei sont les tpLA67toVOL du IIllracle 35
les saints operassent leurs guerisons par un pouvoir miraculeux (OUy. ex OdOG<; (35M! B 13 ot C 5) qui' portent du temple II la grove Ie malade Theophile : ce SO?t la
'rLVO<; xOGt {l1t€PTeX't"I)<; lluveX(Lf:cu<; 351G A 9). ils n'usaient. disait-il. que des recettes d'anciens malades qui. une fois gu6ris. sont rostes au sanctuaire pour y rendre divers
ordinaircs de la mMecino. II fut donc puni. et la legende de sa punition est anterioure services. cf. C 5 e:~ aUTwv U: dcrL 'rwv &crO€VWV o! lluveX(Lf:vOt et Deubner, De
de plus de cent ans a Ia composition des Miracula.
(2) Cf. H. G. Dock. Kirche ... im byzantinischen Reich (Munich. 1959). 100.
incub .• 93. . . .
(3) Addidi. cf. lat. leniter manibus confricantes et tumoris pondus confrtcatwntbus
(3) C'est Ie sens qui paralt Ie plus vraisemblable. Sans doute. avec tous ces malades
effricantes. .
et ce peuplemallave.encensertoutel.eglisen·etaitpasinutile.mais eut·on laisse (4) Ajouter un cas d'insumation. Martyria a un ver intestinal. Les snint~ lUi
ce soin a I'oikonomos plutOt qu'a quelque serviteur? ouvront la bouche. eyr soume trois fois dednns. Elle se reveille. va a la selle et rOlette
(4) Cf. Beck, 99.
Ie ver (3ft8ft C 4 ss.).
1-
de Theodora, qui y fait une chute (9, 3445 C 5 ss.) - mais l'on Doue de vertu aussi, comme en d'autres lieux, tout ce qui
s'y baigne parfois en vertu d'une prescription (AOU'rp0 31: 'It"poO'tp6pwe; etait en rapport direct avec Ie tombeau, surtout l'hui1e des
xeAeoouO'~ xp~O'ocO'Ooc~ 3448 B 3, de; 't"o AOU't"pOV yap 't"oihov !evoc~ xeAeOOUO'LV
lampes et Ia cire des cie:rges. Tantot ces deux sont lies : 't"ou (.t€V
3600 B 8). Le cas du paralytique Zosime est particulierement cr't"o(.teXxou ~AOCLOV ~v xoct X'IJpwTIj 't"0 XOCOeXPO'LOV, a'lt"ep OCU't"wv 't"~v O'opov 'It"UpOC;
interessant. II est completement immobiIise, il faut plusieurs (.tocp(.tocpuy'jj xoc't"ocM(.t'lt"oucr~ 1, 3428 C 7-9, ~AOC(Cjl xoct X'IJPw't'ij 't"OtC; 't"ov 'It"UP-
hommes pour Ie porter, il a besoin d'un aide pour se retourner O'OV 't"ov 't"~v &y(cev OCU't"wv cropov tpw't"(~ov't"oc 't"petpo')O'~v 't"ov 'It"63oc 't"ov 'It"eXcrxov't"oc
dans son lit, on doit lui mettre les aliments dans la bouche AL7t"oc(ve~v xeAeOOUO'LV 22, 3485 C 9-11, eAoc(Cjl 't"0 tpeyyoc; &xo((.t'IJ't"ov 'It"ocpa
(52, 3617 B 5 ss.). Arrive a l'eglise, il y prie trois jours, et, au 't"~v OCU't"wv cropov &'It"ocuyeX~ov't"~ l) (et v. 1.) X'IJPw't"'ij 't"'ij XOC't"a mXO"'I)e; lxoOOll
bout de ces trois jours, reyoit l'ordre d'aller au Aou't"p6v et d'y v6crou 't"0 aovoccrOoc~ &Adtpe~v 't"ov 'It"68oc xeAeUOUO'LV 50, 3609 D 4-7, 't"~e; o!xdoce;
prendre un bain chaud. On l'y porte donc, et Ie depose, au cal- OCU't"WV x'IJPw't"~e; eAoctCjl AuOdO"'l)c; 't"0 TIjc; lm't"U(.t~(ou Xocv8~AOCe; oc~'t"wv 'It"ep~'t"'t"eu~v't"~
darium ('t"wv ~(.t'lt"OpWV cxepwv Iiv30v yev6(.tevoc; 3617 C 7 s.), sur un ma- 't"OtC; OtpOOCA(.tOte; lv~evoc~ xeAeuoucr~v 70, 3669 A 2-4. Tantot on a la Clre
telas. Puis les porteurs, par une dispensation divine (o!xovo(.t(q: seule. Ainsi une cecite est guerie par une application de cire,
Oeou C 10), sortent du caldarium. Alors parait en vision reeUe 65, 3649 B 8 s. De meme dans Ie cas du jeune Theodore, esc1ave
(il'lt"ocp D 2), Ie martyr Cyr sous I'aspect d'un moine, et il ordonne d'un citoyen d'EIeutheropolis en Palestine, nomn:e Proco~e.
it Zosime de se plonger la tete la premiere (eyxu~~O'TIjO'oc~ D 4) Theodore a accompagne a Menouthis son maitre, qUI eS,t at~elIl~
dans la piscine d'eau chaude. Le malheureux repond qu'il ne d'une excroissance au-dessus du nez. Le maitre reste a prIer a
peut bouger. Cyr reitere l'o:rdre. Zosime alms, s'aidant des I'eglise l'esclave etant jeune, prend des bains de mer. Un
pieds et des mains, rampe vers la marche de descente dans la jour, un " chien de mer Ie happe, I'entraine au fond. M' alS, I'd
a 0-
pis cine (-rljv 1i(.t~ocO'~v D 10, 14), et, des qu'il est descendu dans lescent ayant invoque les saints, ils Ie tirent sur Ia greve et Ie
l'eau, se trouve gueri. Le saint cependant a disparu, et Zosime raniment. Cependant un de ses pieds a ete presque entierement
est it la fois heureux de la guerison, malheureux de ne pouvoir detache par Ia dent du monstre, il pend et se balance comme Ia
remercier son bienfaiteur (3620 A 13 ss.). II sort, court a l'eglise feuille d'un arbre. Les saints alms rattachent ce pied ala jambe
remercier Dieu et Ie saint. Et de ce moment, les pelerins au moyen de Ia kerole, 't"c:> TIje; x'IJPwTIje; tpocp(.ttXXCjl 'It"pocr~vwcrocv 53,
« allaient a ce bain comme a un temple, et, y etant entres, ils 3621 B 2 s. Ou bien on a l'huile seule : lAOC(Ci' 't"c:> TIje; XOCV8~AOCC; EX
s'y lavaient tout en priant, vewv OCU't"O xoct AOU't"POV op~~6(.tevoP) (3620 B 10). 'It"pocr't"eXy(.toc't"oe; &Ae~tp6(.tevoc; 3,3429 D 10 s., ~AOC(Cjl 't"oue; 'It"63oce; &Adtpe~v 'It"pOO'-
La fontaine etait egalement douee de vertu. Theodore, at- 't"eX't"'t"e't"oc~ 't"0 tpw't"t 't"0 vuxn:p~v0 TIjv cropov OCU't"WV xoc't"ocuyeX~ovn 7,3436 C 13-15.
teint de leucomes, est invite a s'y laver Ies yeux (2, 3429 B 8 ss.). Ou bien 'encore il s'agit de la cire melee a une autre substance:
Elie Ie Iepreux do it se frotter d'un melange de cette eau et de Ia empliitre de eire et pain, 3425 D 1, cire et mures (en friction)
crotte d'une chamelle (13, 3465 A 5 ss., B 2 ss.), Jean, couvert 3449 D 13 s., cire et fromage de Bithynie 3613 D 11 s. (a
d'ulceres, se frotter de cette eau melee it du verre pile (15, appliquer sur les yeux) (1).
3469 C 9 ss.). Marie l'hydropique guerit apres avoir ete friction-
(1) Dans Ie melange de vin et d'huile que les saints commandent a I'oikonomos
nee, de la tete au pied, d'un melange de cette eau et de pain Christodore d'appliquer a un fou furieux qui, lors d'une crise, s'est coupe la gorge,
paxamete (1) (20, 3481 B 3 ss.). Un sourd-muet, originaire de il peut s'agir simplemenl du remMe employe par Ie Don Samaritain (rappele 3656
B 3-6). Le miraclo est interessant par un autre trait. Dans Ie premier moment d'af-
Tyr, reyoit I'ordre de boire de cette eau (64, 3645 C 11 ss.). folement, l'un des portiers, ealoetes, est alltl en hate chercher un medecin. Celui-ci
est accouru, mnis n'a rien pu faire. La nuit suivante apparemment, les saints flagel-
(1) Sorte de biscuit que, dans Ie cas present, on va chercher au village voisin lant Caloeles avec uno grosse corde, lui repro chant d'avoir appele ce mCdicastre
d'Herakleia 3481 Dr.. L'llistoire lausiaque a les formes 'It"oc~oc(.tiXC; ('t"oue; 'It"oc~oc(.ttX8ocC;, (!oc't"p(crxov ~xer\lov 3656 B 10, de meme 3577 C 4, D 13) : • Ne sais-tu pas, lui
Itvoc 'It"oc~oc(.tiXv XXII 6, 7) et 'It"oc~oc(.ttX3~ov (XXII 7). Heparalt ici, sous la memo disent-ils, que notre maison est la clinique (!oc't"petov) du monde entier? Ne sais-tu
forme rlp't"oC; 'It"OC~OC(.t~'t"'IJC;, 3436 A 12 (il s'agit d'un cataplasme compose de sesame pas que Ie Christ nous a donnes comme medecins aux croyants? Ne sais-tu pas que
et de miel melanges a du paxameles reduit en poudre). nous t'avons arrache aux portes de la mort? (Caloetes avait ete gueri d'une atTection
pulmonaire 365G C, 6 ss., et il arrivait que des malades, une fois gueris, restassent au
15
226 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS CYR ET JEAN 227
Parmi les autres remecies, certains ne sont pas trop surpre- (LevO\l 3592 C 2-4) de vin pur. » L'erdant n'est sans doute pas
nants et 1'0n en trouverait sans doute l' equivalent chez Pline habituee au vin, brcf, elIe vomit et expulse les trois lezards
ou Ie~ medecins de l'antiquiM. Aussi bie n Sophronius dit-il (3592 B 11 ss.). Stephanos, souffrant de leucomes, est gueri en
une fois (3637 A 2 ss.) : 1t'po<; e:UtpWLO(\I '"''ii<; Ku pou XO(t 'Icoawou a\.)\la- se frottant les yeux avec du suc d'endives (3569 D 12-14).
(Le:co<;, ,",W\I ouaoc(Le:\lo1:<; XO(t IjJtA01:<; ~O'1)O~(LO(O't \I !O'Xup&: XO(t (Le:Y&:Ao( 1t'O(u6\1- Procope, auquel a pousse une excroissance sur Ie nez, doit s'in-
,",CO\l \loO'~(LO('rO(.
Theodora, l' epouse de 1'0ikonomos Christodore, troduire dans les narines du poivre grille dans une poele it frire
etant tombee aux bains et s 'etant blesse Ie coude, est in- (3620 D 1 s.). Denys de Damas, qui descend de l'illustre « phi-
vitee it s'eponger Ie bras avec du vin de Mareotis et it appliquer losophe Nicolas de Damas, Ie conseiller d'Herode (Ie grand),
sur la plaie la chair d'un loup de mer (3448 A 15, B 1). Christo- Ie precepteur des enfants d' Antoine et de Cleopatre » (3621 D 8-
dore lui-meme qui, it la suite d'une noya de (dont les saints Pont 10), a un fils Isidore, qui est epileptique. On l'amene au sanc-
tire) a eu tout Ie corps couvert comme d'ecailles de poisson tuaire, et les saints prescrivent en songe a la mere de lui frotter
qui ~nt produit des anthrax, doit se frictionner de puree ~e tout Ie corps de graisse de porc (3624 C 8 s.). Theodore de Chypre
poix (mO'O(pL{p 3441 C 13, non mO'O'O(pLcp). Manous, la fiUe de ChrIs- qui, par suite de malefices, est devenu bancal (AopI>61t'ou<; 55)
todore, est guerie d'une infection vermin euse dans les oreilIes devra faire griller sur du feu de charbon un poumon de cochon,
par une simple application de mi~l «(L€At'rt IjJtA<r 34~9. D 6~. A Ie piler avec du vin et s'en enduire les jambes (3625 C 1). Meme
Isidore, malade du poumon, les samts tendent en VISIOn reeUe prescription a Georges de Chypre, lui aussi, pour la meme rai-
({)1t'O(p) un morceau de citron: il prend les martyrs pour de simples son (1), malade des jambes, mais la materia est cette fois de
visiteurs du sanctuaire, accepte avec joie Ie morceau, l'avale, la viande de veau (3629 B 5-7). A un homme qui souffre
et aussitot rejette, avec l'aliment, Ie ver qui lui rongeait Ie d'ecrouelles au cou, on prescrit un cataplasme de pain ecrase,
poumon (3432 B 12 ss.). lIs tendent de meme, cett: fo~s en ~onge, encore tout chaud (3632 A 12 ss., cf. ch. 1) : pour un autre,
une figue seche it Menas, qui souffre d'une obstructIOn mtestmale : atteint d'urticaire, Ie remede sera, en liniment, un melange d'eau
Ie jour venu, on trouve la figue sur Ie grabat, Me~as l'avale et et de « l'argile dont usent, pour boucher leurs tonneaux, les
est gueri (3433 B 2 ss.). Jean 0 xpuO'W\I'1)<; (1) ales CUlsses gangre- producteurs egyptiens de vin de Cnide » (3636 C 9-11 : lire
nees : on lui commande en songe de se frotter les cuisses d'un X\ltI>LCO\l, X\I[I>W\I). Philemon a une maladie du foie, et, au cou,
melange de sel et de cumin (3476 A 4 s.). Elpidia l'hemorroisse une fistule d'ou sort du pus. Les saints ordonnent, pour la
est invitee it boire un melange de myrte et de vin (3496 A 14 s.). fistule, .une application de feuilles de citronnier pulverisees j
La nonnette Anna, agee de douze ans, ayant suce un roseau, pour Ie foie, des rameaux verts d'olivier : une partie sera mangee,
a avale par megarde trois petits Iezards, dits samamithia. une autre trituree et mise en cataplasme sur Ie lieu du foie
ElIe souffre atrocement, on la conduit au sanctuaire, ou eIle ne (3637 C 13-D 2). CaloetOs (cf. snpra, p. 225, n. 1) a ete gueri d'une
cesse de pousser des cris sans pouvoir dormir. Les saints ap- affection pulmonaire en buvant simplement de l'aloes (<l:AW'1)\I
paraissent en songe it un « ~rer~ » (m?ine?) .malade et !ui dis~nt : (L6\1'1)\I 3656 C 8). Joanna, prise de coliques (elle aussi tx 1t'e:ptepYLO(<;
« Dis it cette nonnette qUl CrIe qu elle arIle au petlt matm it 68), devra manger des lentilles bouillies, puis se frictionner Ie
l'une des tavernes avant d'avoir rien avale, ni aliment ni bois- ventre, durant un bain, de puree de lentilIes (3657 D 2-5). Les
son, et qu'elle absorbe la, a jeun, trois coupes (xO(w[O(, avec douleurs se calment, sans disparaitre. Nouvelle apparition,
l' explication dl>o<; ,",oii'ro xO(O€O''r'1)xe: XUAtXO<; O()'rCO 1t'O(p' 'AAe~a\ll>pe:uO't Ae:y6- on lui tend un pastillns, « e'est une sorte de gateau », et une
tablette ou est ecrit un psaume : qu'eIle mange Ie gateau et
sanctuaire pour y servir, cf. II, 3ft53 A 5 ss., 36, 3561 A 2 s., 1,0, 3577 A 13 ss.).
Pourquoi done nous as-tu amenes dans notre maison un autre mMecin, qui aurait (1) Georges est chasseur ct poursuivait un lillvre. II ne l'a pas pris, car c'6tait
lui.meme bosoin de notre mMecino? » (3656 B 1l-C 2). un demon, qui lui a paralyse les jambes (56, 3628 A 11 ss.). L'aneedote est d'un typo
(1) Qui achllto ou change de l'or, d'oil officier de finance on flgyptc. eonnu, cr. Vie de TluJodore de Sykt!on, eh. 106, 107.
228 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS CYH E1' .TE AN 229
recite continueJIoment Ie psaume. Elle oMit et est gu(3rie (3657 il constat a que son mal n'etait pas ressuscite avec lui » (66,
D 10 ss.). Peut-etre faut-il ranger en cette mome cutegorie des 3652 B 13-C 12). Voici maintenant ElpidIUs qui, par suite d'un
ordonnances normales celle que regoit Taurinus Ie bancal : malefice encore (1l"e:p~e:pyd~ 63), a la tete qui tout Ie temps
pileI' une caille saupoudree de sel et, de cette poudre, se froLter s'agite et se balance. On lui commande de raire apporter de
los jambes (3588 D 4-6) (1). l'eau des Adyta - « c'est un etang, distant de cinq cents stades
D'autres recettes, tout en paraissant plus etrangos, ne laissent d'Alexandrie, vel'S l'ouest et la Libye » (Libyaeqne (Jicinnm v. 1.,
pas que d'avoir leur raison. Patricius a des leucomes. I1lui est 1l"pOe; A![J.V'l)V T~V ydTOVCX, 1. A~~u'l)v 3644 B 14) - : Elpiclius devra
enjoint d'aller au AOUTp6v et de se mettre sur les yeux un lini- en boire et s 'en laver Ie visage et la tOte. II suit l'ordre, Ie mal
ment de Acx~vdov (2). « Cette substance, dit-on, si on l'a d'abord clisparait aussitot. En effet ce flot vcX[J.cx etait &aTcxTov, comme etait
trempeo dans de l'eau, est pour la plus grande part de la chaux &!'JTCXTOV Ie visage (1l"p6aw1l"ov). Mais la rencontre de ces deux
vive (&a~e:aTOe;). Elle est extremement caustique et presque comme &aTCXTCX a fait que l'un a arrete (raT'l)) Ie mouvement de l'autre
du feu pour bruler les cadavres humains (eXvOpwmvcx aW[LCXTcx) (3644 C 5-10). De valeur homeopathique aussi, ot cette valeur
(47, 3600 B 10-13). Patricius n'hesite pas ((1.'l)31:v ev3ucXacxe; = ev30~cX est, dans ce cas, formellement declaree, la recette de guerison
acxe; B 14), court, apres ce songe, au AOUTp6v, se frotte Ies yeux de imposee it Theodore (27). II a ete, comme d'habitude, empoi-
Ia substance indiquee ; puis, apros avoir attendu un peu, comme sonne par un malefice (1l"Ep~e:py!cxe; ex ~pW[J.CXTOe; ... oMv'l)v CXUT(P ye:vvwa'l)e;
on fait quand un medecin vous applique un collyre, il ouvre eXql6plJTOV 3497 C 8-10). II a los entrailIes brulees ('Iii ~pwae:~ TO\)
les yeux - il les avait fermes - et soudain recouvre la vue xcxuaT~xou <pCXp[J.,xXOU TeX !'J1l"AcXYXVCX qlA!:y6[J.!:voe; D 14 s.). Qu'il mange done
ayant laisse tomber les Ieucomes comme des Iar-mes » (C 1-6): une vipere, ordonnent los saints. Naturel1ement, il refuse. Par
Le remede se comprend. II s'agissait de faire pleurm> Patricius : trois fois, on repete l'ordre. Refus toujours. Alors, Ie prenant
les yeux lui ont pique, et il a expulse les leucomes. Ailleurs on a on pitie, au cours d'une quatrieme apparition, les saints lui
?omme de la medecine homeopathique. Menas est hydropique, disent : « Puis quo tu n'as pas voulu faire ce qu'on t'a souvent
11 souffre atrocement, reclame Ia mort, et se rend chez les saints dit, demain, Vetant leve des l'aube, SOl'S vel's cette fontaine,
dans la pensee que, soit qu'on Ie guerisse soit qu'il meure il et ce que tu auras trouve a mangel' sur Ie chemin, mange-Ie
aura ce qu'ii souhaite. « SOl'S du sanctuaire, lui dit-on, et ~n sans hesiter : cela suffira complOtement a te guerir. » S'etant
terre-toi dans Ie sable voisin. » Menas se dit, apres ce songe, que done dirige Ie lendemain Vel'S la fontaine des saints, il trouve,
c'es~ lit Ie signe qu'ii va mourir. Neanmoins, comme il souhaitait
devant la porte, un concombre. II Ie ramasse avec joie et Ie
l'un ou l'autre, « bien que non pas de Ia meme fagon », il oheit mange (3500 C 7 lire a~xuou : aux!ou cod.), mais, soudain, voit
et s'enterre. Or cela meme Ie guerit. « Car, en s'enterrant com- dans Ie concombre Ie reste d'une vipere. II en a done avale
pletement dans Ie sable, il tenait enterree aussi sa maladie : une partie, est epouvanM\ jette Ie tout, croit qu'il va mourir.
mais une fois que, apres cette sepulture, ii fut sorti du sable , La terreur, Ie degout font qu'il vomit et, avec ce qu'il avait
avale de la vipere, il expulse aussi Ie poison qu'on lui avait
(I) ~'ignore los.~rop:i6tes mMic.ales de Ia caille. D'apres Jacquos Andre, L'ali- clonne. « Car les saints ne font pas comme les medecins de la
mentatwn et la CUISine a Rome (PariS, 1961), 125 s., « la caille ... perdit de sa faveur
et on Ia bannit ~es tables parce qu'oHe picorait la graino d'une horbe vencncuse »
terre, ils ne guerissent pas les contraires par les contraires, mais
(en ?ote 142 : «Ph~o, 10, 69; la plante venoneuse ost l'eH6bore d'apres Lucr. t., 6',0 .... les sembI abIes par les semblables », eX).).' tw[J.€v(uv TOre; o[J.o!o~e; 'reX ll[J.o~cx
Ia clgua d'aprcs DlOg. Laert. 9, 80. »). '
(2) «ACX~VZrOv quid?» Sophocles. Absent do Du Cange et dos lexiques. Ne soraH.ce
(3500 D 5 s.). C'est la definition meme de l'homeopathie.
pas une forme de nco·grec, ACX~WV!:wv, sur ACX~WV!:~v au Acx~6vv~~v «sauciare Los remCcles de Cyr et Jean sont on general simples et faciIes,
vulnerare »? cr. Du Cango, s. v. ACX~WV!:LV et par exemple Pernot" Chrestomathi~ OU3CX[J.LVeX xcxl IjJLAcX ~O'l)O~[J.OCTCX 3637 A 3. Dans un cas pourtant, iIs
ne~.helleni[ue, 68 ss. (A~sises ~u royaume do Jerusalem), oil l'on trou~e TO M~w[Lcxv
".?U XTlJVOU (68, § 1), on ~Acx~waev 'r? (§ 2), 'ro xT'l)VOV TO ACX~W[L!:VOV (§ 4), etc. impliquent un Jong voyage : l'~)I'(lrE;l I;)st d'a,Iler se baigner dans la
C est en tout cas uno substance caustlque. La v. I. a colore, qui n'est d'aucun s _
cours. 0
230 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAIN'fS CYO ET JEAN 231
piscine de Siloam a Jerusalem (46). Cet ordre est donne a deux
les martyrs, m'ont envoye vel's toi, et ils t'ordonnent de me
aveugles, l'un richo, l'autre pauvre ; ot Ie vrai miracle consistora ,
donn~r un sou d'or, pour mes frais de voyage, car ils m'envoient
non. pas dans Ia guerison, car celle-ci ost due a I'eau de Siloam ,
a la Ville Sainte'. » Reveille, Ie moine se rend a Aloxandrie
malS en .ce que les saints aideront miraculeusement Ie pauvre a
(-djv 1t"6ALV B 10 : Ie songe a donc eu liou a Tabennese), cherche
accomplIr ce voyage. Le premier avougle ost un tribun, originaire
Thomas, lui repete l'ordre. II regoit aussitot Ie sou d'or (v6[LtO'[Loc)
~u liou meme OU se trouve, dans Ie desert mareotique, Ia basi-
- « Thomas s'empressa en effet d'obeir aux martyrs » - va
hque de ~. Menas (1). Ce qui nous vaut, de Ia part de Sophronius,
aux Lieux saints, se lave les yeux a Siloam et recouvre la vue.
un premIer paragraphe a la gloire de S. Menas (3596 A). Pour-
quoi d'ailleurs ce tribun ne s'est pas adresse au grand thauma-
turgo de son pays (2), Sophronius ne Ie dit pas : et peut-etre Je me suis etendu assez longuement sur ces pratiques parce
co silonce ne va-t-il pas sans Ie secret dessein de mettre en plus que je n'ai pas l'intention de traduire tous les miracles de Cyr
grand relief la puissance de Cyr et Jean. Quoi qu'il en soit ot Jean. Apres les quarante-huit miracles de Come et Damien,
plein de foi en ces deux saints, Ie tribun va a Menouthis s~ il eut ete fastidieux de m'imposer a moi-memo la traduction
couche (xot(.Lcil[LEvo~ 3596 C 6), et s'entend dire en raison de' sa - je ne dis pas la lecture, car je les ai tous Ius evidemment -
foi, comme l'avougle de l'Evangile, « Va te baigner aux eaux et au lecteur la lecture du long ouvrage (70 chapitres) de So-
de Siloam, ot tu vorras. » II oMit, est gueri. Mais voici l'histoire phronius. Au surplus il s'y trouve beaucoup de fatras; maints
de l'avougle pauvre (3596 D 7 ss.). Celui-ci est un moine de recits sont insignifiants et n'ont d'int6ret que de montrer com-
Tabennese, un fils de Pachome. Quand il regoit, des saints, Ie ment l'auteur compose. II voit un ex-voto. Par exemple un
me me ordre, il repond gentiment (XlXPt€VTCI)~) : « Cet aveugle de chancre, ou la representation du membre atteint d'un chancre
I'Evangilo, 0 bienheureux, etait a Jerusalem, Siloam etait proche (cf. supra, p. 221 ot n. 1). On aura donc : (a) Un premier para-
et, bien qu'on Ie connut comme mendiant, il n'avait besoi~ graphe sur Ie mal dit XlXPXLVO~ (mil'. 19, 3477 D 1-7). (b) Un
d'aucune depense pour oMir au Seigneur. Moi qui, avant d'etre seeond, developpant Ie lieu commun usuel, que les medecins
moine, etais pauvre, et qui Ie suis aujourd'hui bien plus ce n'ont rien pu faire (3477 D 7-380 A 5). (c) Un troisieme, qu'on
peu que j'avais avant d'etro aveugle, je l'ai depense chez' les trouve evidemment partout : Ie (la) malade recourt enfin a
medecins; et avoc.;ant de ~ilometres jusqu'a Siloam, avec quoi Cyr et Jean (3480 A 6-13). (d) Un quatrieme, egalement attendu
voulez-vous que J accomphsse votre ordre? » Ravis de cette et inevitable : les saints ont eu pitie et guerissent. lci parfois
reponse, Cyr et. Je~n, avec un leger sourire (O'E[LVW~ = « un peu » se roncontre une variante : il arrive que les saints veuillent mottre
3597 A 13), lUI dlsent alors : « Va a l'entrepot (&1t"60'TlXO'tV) dit a l'epreuve la foi du patient, ils ne guerissent pas aussitot :
de Fro~ton - car on nomme ici &1t"60'T(XQ't~ ce qui, en d'autres 13, 3464 B 10-33 OUX OALYOU 81: 1t"lXPEXTOCO€VTO<; xpovtXOU 8tlX~[Lcx.TO<; [L'1l 8I:v
pays, heux et villes, est appele grenier (&1t"oO~X'1l, horreum v. 1.) ov~O'cx.<; i)OU[L1)O'EII, 't'WV &'YLCI)V otXOVO[LLcx.t<; TtO'Lv TlX[LtEUVO[L€VCI)V -djv (lXmv, 37,
- cherche la Thomas, l'homme de confianco (mO'Ttx6v) de 3561 C 6 ss. evtlXuToU 81: Eve<; att1t"1t"EUO'lXVTO<; TIj<; TWV &'YLCI)V &pCl)y'ij<; i)~tou't'o
Kuminas I'Egyptien, et tu lui diras 'Abba Kyros (3) et Jean, xcx.L X<iPLTO<;, 38, 3565 C 12 ss. 1t"PWTOV [Ll:v yap e1t"L [L'ijvcx.<; 't'EClO'<iplX<; E:AOOVTIX
't'ev LT€CPcx.VOV &VE1t"LO'XE1t"TOV dlXO'lXV, aLa't'OUTOU -djv aUO'XlXT<iO€TOV lXUTOU yvcil[L1)V
(1) cr. p~~ exemple la description du site ap. Guide Baedeker, E'gypte (1914)
p. 270. Daslhqu~ du temps d'Arcadius (395-li08). ' [LOCA<iO'O'OVTE~ xcx.L 1t"plX6TEp6v 1t"CI)<; 1t"pe<; 1t"lXpcx.8ox~v TOU ~€ATLOVO<; epycx.~6[LEVOt,
(2) Sur les !'flracula de Menas, cf. Delehaye, Op. cit., li6-ft9. Une tradition les rap- etc. (e) Un dernier paragraphe enfin indique Ie traitement ou
porte au patrlurch~ Timothee d'Alexandrie (381-385).
(3) C!r a ~te ;nome, d'oiI son titre, que n'a pas l'autre. Cf. miracle 10, 3'.49 B 9-11 •
la prescription. C'est ici, comme on l'a vu, que parait la plus
[LOVlXO'~~ "(lXP EY€VETO (sc. 0 Kupo~), xed [LOVlXO'TWV &d ocpdAEm'('t CPlXLVEO'OlXt 0' ': gran do variete. Dans Ie cas present (19), les saints touchent
[LlX't't. I arrols pourtunt 115 se presentent tous les deux sous l'aspect d . X'1l
mir 13 3~ 6f. C 1 3 ' Ie chancre, et il tombe a terre palpitant (e[L1t"€0'6vTlX XIXL O'XlXL-
. _' :! ,. - H 'i e momes,
ss. lXVlXXCI)POUVTt 01;; XlX,lX 'N M"lTPiX ,QU &'yLOU [LlXP't'Up tOV
[LOVlXXCI)V U1t"OCVT'1)O'OCVTE~ crx~[LOCTt. •..
tv
POVT(X 3480 B 15). Sur quoi les serviteurs du temple Ie ramassent
232 COLLECTIONS GHECQUES DE MIHACLES SAINTS CYH ET JEAN 233
et Ie suspendent. Beaucoup l'ont vu et ont raconte la chose a et, comme les Phantasiastes etaient en meme temps « AphtharLo-
Sophronius. Une ligne eut suill pour attester Ie miracle: « On docetes » (incol'l'uptibiliLe du corps du Christ des l'Incarnation),
voyait autrefois un chancre suspendu » (XPE[1.cX[1.E:VO'l 3480 C 1) : Ie ThCodose etait Ie chef de la secte rivale des « Phthartolatres »,
rocit n'cn comporte pas moins de cinquante-six. appeles ici « Theodosiens » (1. c.). Comme, aux yeux des Ortho-
Les quatre miracles que je citerai ont ete choisis parce qu'ils doxes, ces deux branches du monophysisme etaient egalement
sont caracteristiques de certains types. Une croyance populaire dans I'erreur, Ie recit les condamne les uns et les autres : [1.E:Y£o"'t"ou<;
repandue voulait qu'on tombat malade pour avoir avale un opxou<; xoct q:>PLXWOEL<; OLW[1.VUVTO w<; ou roc'(ocv£'t"oc<;, ou eEOOOmOCVou<; tv [1.thp'll
reptile: une petite fille a avale des samamithia (44, cf. supra, 7tL0"'t"(;'W ~ EUo"E~WV ap£O[1.'ll ~XEL XPLO"TO<; ~ AOY£~E't"OCL
(3460 B 2-4). On voit
p. 226 s.) ; un~ femme a avale une petite grenouille qui, ayant que ces deux sectes subsistaient encore it Alexandrie au debut
cru en elle, lUI cause des souffrances epouvantables (26). J'ai du vue siecle. Le miracle 36 concerne egalement un disciple de
choisi, dans ce type, la guerison, particulierement cocasse d'un Julien d'Halicarnasse (3549 D 6 s.). II offre un detail curieux.
enfant qui avait avale un ceuf de serpent (34). ' Le sous-diacre « Julianien » Theodose refusant de se convertir
Selon une autre croyance populaire tres commune, la maladie malgre les visites de Cyr et Jean, les saints Ie pressent d'en-
etait due it un artifice magi que (cf. supra, p. 227, 229). trer dans leur eglise, et, comme on passe devant Ie q:>CUTLO"'t"~PLOV
Outre qu'elle presente des details amusants (1), l'aventure de ou sont gardees les saintes especes (3553 B 4 S., 3556 B 10,
Theophile, victime d'un envoutement, offre un bon exemple C 11 3557 A 10 : mais en 37, 3561 D 1, a propos de commu-
de ceLte serie (35). nion aussi, on a OUo"LOCo"~PLOV), l'invitent a recevoir la commu-
Interessants pour l'histoire des heresies a Alexandrie au nion. Theodore refuse, on s'approche du tombeau, et, comme
debut du vue siecle sont les miracles 12 et 36-39. En 12, i1 les barrieres sont ouvertes (lv oO"'ll 't"a 't"OU [1.V~f1.OC't"O<; ~Vt'llX't"OCL XcXVXEAAOC
s'agit d'un jeune comte Julien, disciple de Julien d'Halicar- 3553 B 13), il demande la permission d'emporter de l'huile
nasse dit ici I' « ApolIinariste » (3457 B 6-8). Julien d'Halicar- de la lampe. « Sophrone fait remarquer que beaucoup de ceux
nasse de Carie (depose en 518) avait eLe monophysite, et, sans qui ne veulent pas communier avec les orthodoxes prennent
se rattacher directement a ApolIinaire, il pouvait etre dit « Apol- de I'huile de Ia lampe des saints a Ia place du corps et du sang
linariste » du fait que, selon ApolIinaire (c. 310-390), Ie Christ du Seigneur» (Delehaye 29, cf. 3553 B 14-C 5). Le sous-diacre
n'avait pas complete humanite, l'intelIigence humaine eLant Jean du mil'. 37 et Stephanos de Cynopolis (mil'. 38) sont
en lui remplacee par Ie Logos divino Julien d'Halicarnasse, des disciples de Severe, dans la secte des Theodosiens (eEO-
apres sa deposition, s'etait fixe a Alexandrie, et il etait devenu oocr£ou yap xoct l:E')~POU (, 'IcucXw1)<; u'lt'ijPxev (,f1.6oo~o<; 37, 3561 D 11-13,
Ie chef de la secte des « Phantasiastes » (Ie corps humain du TIj<; 't"ou 7l'poAoc~6v't"o<; u'lt'ijPxev OC!ptO"ECU<; 38, 3565 C 5). Du paralytique
Christ est pure apparence), appeIes ici (3460 B 2) « Gaianites », Pierre (39), iI est dit seulement qu'il refuse Ie concile de
du nom du patriarche Galanus qui, en 537, avaiL soutenu la Chalcedoine (451, cr. V. 1. 3574 A 10, B 2 s., grec 3573 C 12) : il
secte. Contre Gaianus s'etait eleve Ie patriarche rival Theodose , cst donc monophysite. Dans cette serie, j'ai choisi Ie mir. 12.
Mon dernier miracle enfin (31) appartient a la categorie des
(1) 'Mais rossortissant pout·etre aussi, comme l'observe Dalehaye (A. fl" l. c,' punitions, et je 1'ai elu tant pour son etrangete que parce qu'il
2f;)!a un ~,ujet de ~ c?ntrovers~ » ou ~e d6c~amation habi,tucl dans les ecoles, Delehaye
ecrlt ; « Cost preClsement (scll, la dISCUSSIOn entre Ie pocheur at 10 client dos saints) contient une citation (ou pseudo-citation) de Porphyre. Dans les
l'oxemple quo Suo Lone propose de ce genre d'excrcice, Aestipo tempore adolescentes autrcs cas, les saints ont puni ou parce qu'on n'a pas eu foi en
urbani cum Ostiam p~nissent, litus ingressi, piseatores trahentes rete adierunt et pepi-
gerunt, bolum quantl emerent,' nummos solperunt; diu exspectaperunt dum retia
eux (29), ou parce qu'on a pretendu que leurs guerisons n'ont
extraherentur; aliquand~ extrae.tis, piscis nullus af(uit, sed sporta auri ~bsuta, tunc rien d'extraordinaire, qu'ils ne font qu'appliquer les regles
emptores bolum suum amnt, plseatores suum, » D6Ja not6 par Deubncr Dc ineub,
88 s. (d'apres ~sane:)" q~i ,ajout,e justomc.nt, « (!ua ex I'e (I'emprunt a~x rhoteurs)
usuelles de la medecine (30), ou parce qu'on a communie indi-
quomodo de nllracuhs Illis III Ulllversum SIt IUdlCandum satis clucet. » gnement (32). La serie des miracles punitifs (29-32) s'ouvre
234 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS CYH ET JEAN 235
par un petit exorde (29, 3508 A 10-B 3), OU Sophronius mani- au chatiment a coup d'argent (en 3524 D 9 lire €1t"Ep.ep.IjJa.:'t"o :
feste son dessein de constituer cette serie comme un groupe - 7I"E{J.IjJa.:'t"O cod.), 3524 D 7-3525 A 6. Sorti de prison a Byzance,
particulier : « Ecrivons maintenant deux ou trois recits (il y en il part pour Alexandrie, esperant y eehapper aux recherches.
aura quatre, et a la fin du quatrieme, l'auteur annonce qu'il II y est atteint de paralysie (3525 D 6), Ie mal atteignant jus-
va revenir aux 't"EPnveX 3529 D 13 ss.) par lesquels on connaitra qu'a sa langue et Ie rendant incapable d'articuler aucune parole
aussi ce qu'il y a de strict et d'acre chez nos saints » quand iIs (3528 A 1-3). On lui conseille d'aller a Menouthis. II obeit, mais,
veulent punir. Ainsi la noble dame Athanasia passait son temps de crainte que les saints ne Ie repoussent comme palen, il joue
a se moquer de Cyr et Jean. Un jour qu'elle se livrait, en com- Ie chretien, pens ant ainsi abuser et Ie public et les martyrs.
pagnie, a ces railleries, une puce la pique au talon. Elle se baisse NaIve erreur 1 Les saints (un saint?) lui apparaissent la nuit
pour se gratter et ne peut plus se redresser (29). Nous avons sous l'aspect de Christodore, lui reprochent son audace, lui
deja vu (supra, p. 222, n. 1) Ie cas du medecin Gesios (30). Pour annoncent qu'il sera flagelle en public, puis disparaissent (3528
lui, qui est docteur et professeur de medecine (ta.:'t"pOO'OCPLO''t"'f)~ C 1-13). Le jour venu, Christodore se montre pour l'encensement,
(30 titre), Cyr et Jean n'ont aucun pouvoir miraculeux, ils Agapios se jette a ses pieds et Ie supplie de ne pas Ie flageller :
operent simplement ex 't"exv"IJ~ h't"PLX'ij~ (3516 A 7-9) (1). Cepen- Christodore jure qu'il n'en a jamais eu la pensee (D 10-12).
dant il tombe lui-meme malade, et, malgre Galien et Hippocrate On donne la communion; comme, jouant cette fois l'heretique,
(D 2), ne peut guerir. II va chez Cyr et Jean et reQoit l'ordre il s'est recuse, et qu'il en est ne du tumulte a l'eglise, il veut
suivant : « Prends Ie bat d'un ane et porte-Ie sur tes epaules, effaeer ce souPQon et communie. Aussitot, iI est pris de convul-
ton cou, ton dos, toutes ces parties ou tu as mal. A l'heure de sions, tout en restant incapable de parler (3529 A 1-B 3). Trois
midi, fais Ie tour ainsi de tout notre sanctuaire, criant •J e suis jours se passent ainsi. Ses domestiques alors se disposent a ]e
un imbecile, completement fou'. Ceci fait, tu seras gueri » ramener a Alexandrie. II meurt en chemin (B 4-15).
(3517 B 6-12). Pure imagination, pense-t-il. Nouvelle visite, Crime et chatiment, en ces trois exemples (29, 30, 32), s'en-
meme ordre : mais en plus il devra suspendre une clochette a tendent aisement. Dans Ie miracle, en revanche, que j'ai
son cOU. « Ces tres divins et tout philanthropes (I) martyrs » choisi (31), Ie motif de la punition est tout a fait etrange. On
apparaissent a nouveau. Meme ordre : mais en plus, il devra peut neanmoins expliquer la chose. II est raconte qu'un jeune
avoir au cou une bride comme les betes, et se laisser tirer par homme, Theodore, apres avoir communie, pris d'une sorte de
un de ses serviteurs (3517 B 12-D 8). II cede en fin, et, avec Ie folie furieuse, peut-Hre parce que quelqu'un l'avait irrite,
bat, la clochette et la bride, depose sa douleur (3520 A 12-15). non seulement a blaspheme la Divinite et lui a lance des injures
Une puce avait venge les saints des insult.es d' Athanasia comme a un compagnon d'esclavage, mais a produit, par une
(w~ 't"wv &.y!cuv 01t"EPP.a.:xouO'a.: 3512 B 10). Ils s'etaient venges eux- inspiration de sou me dans les narines, un bruit SOUI'd comme un
memes du scepticisme de Gesios (30). Dans Ie cas du palen eclat de tonnerre, qui a fait trembler tous les spectateurs et a
Agapios, ils vengent Ie Christ (32). Agapios est changeur ou paru tres malseant aux auditeurs. Sophronius ajoute que beau-
banquier (&:PYUp01t"peX't""IJ~ : - 7tPeXx't""IJ~ cod.) a Alexandrie (non coup de Chretiens agissent ainsi, n e pens ant pas sans doute
indique, mais la serie alexandrine va jusqu'au ch. 35), et palen. blasphemer «ou) voP.(~OV't"E~ CampelI Bonner), mais ignorant
Pour cause de paganisme, il est envoye a Byzance, mais echappe totalement Ie sens de ce. bruit: car, s'ils Ie savaient, meme apres
dix-mille tortures ils refuseraient d'agir ainsi (3521 A 2-B 3).
P) Gesios interrogeait les malades gu(lris sur Ie remMe employe et constatait Quel est donc Ie sens de ce reniflement, ou grognement, lie ici
que tel remMe vonait d'Hippocrate, « illo prescrit en eITet en tol ecrit » (3516 A 15), a un mouvement de col ere ? Dans un ingenieux article (1),
tel autre de Galien, « cela se trouve en tel traite » (B 1), tel autre de Democritc,
«et il rappelait Ie lieu oil etait indique cet emplatre » (B 1-3). IJ s'ag-it de Democrite (1) A Tarsian Peculiarity (Via Prus. Or. 33) ap. l!arpard Theal. IIcPiew, 35 (1942),
Dolos, cf. Repclatian d'l!ermes Trismegiste 12 (Paris, 1950), 197 S5. 1-11.
236 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINTS CYR ET JEAN 237
Campbell Bonner a montre que ce meme bruit pouvait etre Ie
signe d'une extreme jouissance sensuelle : on ose a. peino expri- etro un signe do colore, commo dans 10 recit de Sophronius.
mer do quoi il s'agit, disons un grognoment de volupte. En On voit des Jors ce que Sophronius veut signifier quand il dit :
Or. XXXIII 36, Dion do Pruso dit qu'a Tarse co bruit, qu'il « Si los Chretions savaient de quoi il s'agit, meme apros des mil-
nomme un ronfiement (ptyxoucrt 33), s'ontend partout, dans liers de tortures, ils ne feraient pas entendre ce bruit. » Ou tout
les rueIles, pres des maisons, au marche, au thea.tre, au gymnase : au moins cette explication s'ajoute a. celle qu'il indique lui-meme,
or, declare-t-il, si, passant devant une maison, on l'entendait, OU il aUogue un rite, reel ou controuve, des sacrifices paJens.
no semblerait-il pas que c'est un bordel (xC(p.C(t"U7te:i:ov 36)?
Que penserait-on d'une villo OU chacun ferait 10 gesto du digitlls
infamis ("eli p.tcrcp Sc(XWA(p)? Ou se promenerait la tuniquo rolevee,
comme dans une mare (37)? Davantage, si Cleanthe a reconnu
un homme, d'aspect pourtant tres viril, pour un x[vc(tSOC; du
seul fait qu'il a eternue (54, cf. D. L. VII 173), ne faut-il pas
tenir pour tel un individu qui emet un son qui n'est d'homme, de
femme OU d'animal, non pas me me d'uno prostitueo dans l'oxer-
cice de son metier, mais comme en produirait un inverti dans la
posture Ia plus obscene et la pratiquo la plus abjecto (60)?
L'association d'idees, chez Ie rheteur, n'est que trop claire.
Elle est confirmee pal' deux textes de Tatien (ad". Graecos 22,
p. 25. 7 ss. Schwartz) et Clement d'Alexandrio (Paed. III 4,
29, 2-3, t. I, p. 253. 11 ss., 19 s. Stahlin). « Quollo est la sorte
de monstruosite a. laquelle on ne se livre sur vos scenes? » de-
mande Tatien. « On souffie bruyamment du nez (ptVC(UAOUcrt),
on dit des obscenites, on fait des mouvements indecents, vos
fiUes et vos gargons voient sur la scene des gens habiles a. lour
mont reI' comment on doit s'accoupler. » PWC(UAe:i:V, dans ce con-
texte, ne peut etre qu'un C(lcrxp6v. Et de meme, chez Clemont,
SttX ptvwv €m~oqlouv"e:e; €mxtvC([Stcrp.C(. Je traduis tout Ie passage :
« Des femmes se rejouissent de voir des ombrassemonts d'an-
drogynos, il affiue sur la scene des troupes glapissantes d'in-
vertis, ignobles quant au corps, ignobles quant a. la voix, emas-
cules «av)7JVapcup.tvOt Mayor) pour des services abjects, mi-
nistres de Ia prostitution, qui rient aux eclats, gazouillent, qui
sans reserve, pour entrainer a. l'impudicite, accompagnent par
un bruit des narines Ie geste obsceno propre aux putains (xC(t
,,0 7tOPVtXOV aVZa7JV de; acrtAye:tC(V attX ptVWV €m~oqlouv"e:c; €mxtvC([atcrp.C(), chor-
chant a. plaire par des paroles ot des postures impudiques et
invitant au riro, qui est l'avant-garde do la volupte. » Plus
loin (253.17-20), Clemont indiquo quo 10 meme hruit pout
SAINTS CYR ET JEAN 239
eut paru tel aux O'arf'ons comme a Eve (2), a cause de l'impcr-
o ';( , I'd d'
fection de leur fwe
o , auquel manquait encore une facu te e IS- .
cernement (.3) bien exercee pour separer Ie bon du mauvms.
Vu ce manque, comme je disais, ils se jeterent sa~s examel~
sur l'oouf, pensant que c'etait Ie produit d'un .d.es ,Olsea~x qUI
Choix de miracles de Cyr et Jean menent leur ronde dans l'air. Cal1inique s'en salslt a la hate et,
l'ayant pris - il avait devance en effet :8pimaque, son cadet -
34. Sur DorotMe, de qui le petit garfon, Callinique, en chemin i1 Ie tenai~ en main comme un pnlcieux tresor. Comme pour-
Clers 1es saints, aCla1a un ami de serpent. tant son frere, ayant manque 18 [3537 A] butin, fondait en
larmes et que sa more lui avait ordonne de remettre la trou-
[3536 B 6] C'est a point que se presente a nous une autre vaille ~u cadet pour arreter ses pleurs, vite Ie gar90n mit la
femme qui, elle aussi, eprouva sur Ie chemin menant aux mar- main a sa bouche et avala l'rouf, OU se trouvait deja forme et
tyrs les machinations du demon, mais obtint visible et prompt complet 10 serpenteau, image de sa mere. Ainsi, pour avoir co~tre
secours de la part des saints. Elle veut qu'on la joigne a I'he- venu a l'ordre maternel, il eut recolte la mort comme frUIt ~e
roine du miracle precedent, pour proclamer non seulement sa desobOissance, si les martyrs Cyr et Jean n 'avaient pel'lIllS
de bouche, mais par ecrit, Ie triomphe de ceux qui 1'ont sauvee. qu'il echappat au filet mortifere. SUI' ce, pou!'suivant leur che-
Nous donc, admirant ses bonnes dispositions, satisfaisons a min, ils parvinront au sanctuaire. .
son desir, lui pretant langue [C] et calame, pour obtenir lIs y etaient arrives , avaient fait a Dieu leurs prieres, avment
avec el1e, si Dieu Ie permet, Ie salaire de sa devotion.
.
venere Ie tomboau des saints, quand, peu apres leurs adoratlOn~,
La femme se nommait Dorothee, et elle avait deux petits Callinique se mit a souffrir dos entrailIos, car l'rouf [B] s'etmt
garl{ons, Callinique et Epimaque. Callinique, l'aine, avait en- ouvert en son ventre et avait evacue ce tres funesLe tresor.
viron douze ans, Epimaque achevait sa neuviome annee. La Tout d'abord, les douleurs avaient l'air de coliques, mais, augmen-
mere se rendait avec ces deux au temple des saints, pour y tant peu a pou, el1es ne se faisaient plus reconnaitre comme des
prier et y venerer leurs augustes reliques. Quand ils eurent par- coliques, mais ressemblaient a des tortures dues a des demons.
couru Ie plus fort de la route, ils s'assirent so us un arhre, pour En offot 10 detestable serponteau etait sorti de Ia membrane os-
se reposeI': ils etaient venus a pied, car Ie manque de ressources treeuse enveloppante, et, comme iI ne trouvait pas aupres de
les empechait de voyager a cheval. lui sa mere il rampait a sa recharche et courait par-ci par-la
A peine les voit-il sous l'arbre, que Ie Prince du mal se souvint dans les vi~ceres de l'enfant : pout-etre meme les mordait-il,
de ses anciens artifices contre nous sous l'arbre, [D] par pUlsqu'il n'y trouvait pas sa nourrice. L'enfant d'abord pleurait ;
lesquels, en la personne d'Adam et d'Eve, il a fait peril' des puis Ie mal empirant Ie fit passer des larmes aux cris ; et quand
fleches de sa jalousie toute la race humaine. II montre done il n'eut plus la force de supporter les tourments du serpent, il
aux garl{ons, gisant pres du tronc de l'arbre, un rouf clair (1) tomba a terre et s'y roulait, se dechirait, se tordait [C] de
de serpent, du serpent par leque! il avait jadis complot6 notre cent manieres, au point que, apres cela, il ne put plus meme
perte. Cet rouf n 'etait ni bon it manger ni beau it voir, bien qu'il clever la voix, mais qu'a Ie voir on pensait qu'il aUait aussitot
mourir.
(1) cj>OV OilpLOV 3536 D 3 = im1)vef1.LOv, «oil il n'y a que du vent " Monne a
premiere vue car on nomme ainsi un omf sans germe, sterile, ce que n'etait pas Dorothee qui, comme j'ai dit, avait enfante ce fils et son frere,
cet Oluf, puisque f1.Ef1.op<pwf1.evov tj81) xed 'reAEtoV ~XOV TO rije; TEXOUO"1)e; Of1.o(w!l.oc
3537 A 4 s. Mais il est redevenu clair, Ie serpenteau a mange to ute la substance ot II (2) Drachylogie pour we; XOC! (TO f1.~AO\l> 'tii EilCf D 7.
est pres d'eclore. (:1) Lire OC!()"01)T~PLOC 3536 D 9 : &()"X1)T~PLOC cod.
COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINTS CYR ET JEAN 241
240
voic pas, moi vivante, Ia perte de mon fils. Si en revanche
etait dechiree en ses entrailles plus encore que Callinique,
rien de cela [B] ne vous agree, alors rendez-moi mon gar({on,
voyant qu'il perissait miserablement. Elle s'approche en hate
imitant votre Dieu et Maitre, qui est sensible a la pitie. »
des martyrs et, avec larmes et gemissements, les suppliait en
Elle dit, et plus encore, et de toute la nuit ne cessa de pleurer,
ces termes : « Helas, mes saints, de quelle fa({on avez-vous ac-
puis, vel'S l'aube, s'endormit, non que l'eussent vaincue les
cueilli mon sacrifice? Helas, de quelles recompenses m'avez-vous
traits du decouragement et de la fatigue, mais pour qu'elle put
gratifiee? Helas, quel accueil m'avez-vous reserve? D'autres
voir en songe les saints la visiter. Lui etant apparus, comme ils
femmes, qui n'ont pas d'enfants, enfantent quand elles ont eu
font pour tous, ils lui ordonnerent de sortir l'enfant de l'eglise
recours a vous : et moi, qui etais arrivee ici flanquee de deux
vel'S la troisieme heure du jour, de Ie placer au milieu de l'atrium
gar({ons (8opuq><O)POUfL€V'I] 3537 C 12 s.), c'est avec un seul, si
exterieur, et que personne ne s'approchat de lui, non pas meme
vous ne vous hatez, que je partirai d'ici. D'autres viennent
sa mere, mais qu'elle s'assit a peu de distance et considerat
respirant deja. la mort, et s'en vont [D] se riant d'elle :
Ie prodige que Ie Ciel accomplirait pour lui. Voila ce que dirent
et a moi malhoureuse, mon petit gar({on, qui arrivait jouant et
les martyrs et, ayant ainsi parle, ils s'envolerent. Dorothee,
sautant, va mourir suroment, si vous ne Ie sauvez : la route
a l'heure dite, obeit a l'ordre, sortit son fils de I'eglise et Ie couch a
qu'il a faite pour von iI', il ne la refera pas vivant. Vous m'avez
a I'endroit indique, tandis qu'il se roulait continuellement de
enleve Ie soution de rna vieillesse, vous m'avez pris Ie baton cote et d'autre : la pJupart pensaient qu'il allait mourir, mais
de rna faiblesse, vous m'avez ravi l'espoir de mon ultime repos : sa mere avait con fiance qu'il vivrait.
celui sur lequel je comptais pour me nourrir aprcs Dietl, vous Une demi-heure environ apres qu'on l'eut couche, aIOI's qu'il y
Ie gardez. Si, moi, j'ai faute, 0 martyrs, pourquoi chatiez-vous avait lit une grande foule qui etait restee pour voir l'issue, voici
mon petit? Si j'ai peche, c'est moi qu'il faut punir. Pourquoi que la mere serpent qui avait produit l'amf s'avance a la re-
rejetez-votls sur des enfants innocents les erreurs de leur mere? cherche de cet ceuf, rampant et sifIlant, poussant des appels
Pourquoi vous faites-vous les vengeurs des maledictions de la comme une femme a coutume de pousser gemissements et cris
Loi, des condamnations de Moise? « Que les fautes des peres, de douleur, quand elle cherche son bebe cheri qu'el1e a perdu.
dit-il (Ex. 20, 5), retombent sur leurs enfants. » Mais « de cette Elle penetra, a la vue de tous, [D] par la porte exterieure de
malediction de la Loi, Ie Christ nous a rachetes, lui qui s'est l'enceinte, et, passant au travers de tous ces gens qui etaient
fait malediction pour no us » (Gal. 3, 13). II a mis fin a cette la aupres, que, des l'abord, elle mit en fuite, elle court vel'S
condamnation par Ie prophete, [3540 A] proclamant ouverte- l'enfant malade et tourne it plusieurs reprises autour de lui.
ment qu'on ne dira plus ce dicton « Les peres ont mange des Tantot elle murmurait a. son oreille, tantot elle s'approchait de
raisins verts, et les fils ont eu les dents agacees » (Ez. 18, 2). sa bouche, et, par de legers cris, appelait son fils qui etait lit
Chacun desormais repondra devant Dieu de sa pro pre conduite, quelque part tout au fond, loge dans Ie ventre du gargon. Or
et non un autre pour un autre. La personne qui peche, c'est elle Ie serpenteau prit conscience de la presence de sa mere; il re-
qui mourra, et co n'est pas un autre qui subira par elle jugement connait son sifIlement, accourt en hate, sort par la houche et
et punition (cf. Ez. 18, 3-4). Ce n'est pas nous, mais d'autres, va vcrs eIle, comme si, maintenant qu'il avait etC mis au monde,
qui ont ete esclaves de la malediction de 1a Loi, ceux qui n 'ont il ne voulait plus rentrer dans Ie sein (xuoq>ope:!aOlXt 3540 D 10 :
pas re({u Christ Ie Liberateur, Ie Fils de Dieu. Nous qui, par Lui, -!pope:!v cod.), ou plutOt parce qu'il avait reconnu l'ordre des
avons ete adoptes comme fils, nous avons re({u, non un esprit saints - i1 est plus pieux de parler ainsi, car c'est en obeis-
d'esclavage pour la crainte, mais un esprit d'adoption, dans sance a. cet ordre que la mere serpent etait venue, en peu de
lequel nous crions « Abba, Pere » (Rom. 8, 15), libres desormais temps, Ie chercher - et que, eut-il voulu demeure I' dans Ie
en tant que Ie Christ nous a liberes. Ou bien donc punissez-moi 16
et laissez aller mon enfant, ou pUl1issez-moi avec lui, que je ne
242 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS CYR ET .TEAN 243
ventre, il ne Ie pouvait plus. Quand donc la mere serpent eut Le pere et maitre de la haine entre hommes et entre freres,
vu Ie serpenteau [3541 A] qui bondissait hoI'S de Ia bouche, celui qui des Ie principe a trompe [C] Ie genre humain et,
et qu'elle eut reconnu que c'etait bien son rejeton, celui qU'elle pour aut ant qu'il etait en lui, l'a prive de la grace divine, ne
cherchait, aussitot vu aussitot fait : elle Ie saisit par Ia gueule se contente pas de sa pro pre fureur et col ere c~ntre les hommes,
et sautant, toute joyeuse, elle rentra dans sa taniere. C'est de et de tous Ies malheurs et accidents dont il les frappe conti-
Ia meme fagon aussi que Dorotbee, apras la sortie du serpenleau, nuellement, comme dit Job 1'inspire, mais il les excite souvent
en leva sur Ie champ son fils Callinique, qui avait ete ainsi gueri. les uns c~ntre les autres, inserant en eux les germes de sa haine
Elle chanta avec lui sa reconnaissance aux martyrs qui l'avaiellt des hommes, lui qui (8<; C 7 : Gl<; cod.) les anime d'une teIle fIamme
sauve, et, dans l'exaltation et la joie, reprit Ie chemin de la ville. it se detester mutuellement qu'ils Ie prennent souvent comme
Quant it la foule presente, qui avait vu ce miracle, elIe repelait aIM de leur ressentiment, causant ainsi les pires dommages
it voix haute ce mot de l'Evangile (Lc. 5, 25) « En verite, nous d'abord it eux-memes - car c'est mort de l'ame que de convenir
avons vu aujourd'hui des prodiges », et it cette occasion honora avec Satan - et ensuite aux freres, que pourtant nous avons
d'acclamations, de toutes ses forces, Dieu et les martyrs. regu Ie commandement d'aimer comme nous-memes. Ce prince
Nous aussi donc, ayant offert avec elIe les hymnes de louange du mal, certains individus, desireux de nuire it Theophile,
convenables au Christ notre Dieu et it ses saints martyrs, nous [D] se l'etaient concilie comme patron (3), non sans d'ail-
allons aIler de l'avant pour accomplir la fin que nous IlOUS leurs son pro pre dessein : ce dessein, ils s'empressaient de l'ac-
proposons. complir, et ainsi attiraient Satan vel'S eux comme allie pour Ie
complot. Obeissant it leurs impures invocations, il avait afIlige
35. S~lr TMophile qui, par suite d'une operation maglque, eut grandement Th6ophile, lui ayant lie les mains et les pieds, et
les mains et les pieds lies. il Ie persecutait (4) de peines cruelles autant qu'il lui plaisait,
peut-etre meme non pas autant qu'il lui plaisait et Ie V'oulait
[3541 B 3] Digne d'etonnement vraiment est Th6ophile, et - car ill'eut fait peril' s'ill'avait pu - mais autant que Dieu
Ie recit qui Ie concerne. Et peut-etre est-ce pour cela qU'il s'est lui ll.Vait permis de Ie tourmen tel'. Tbeophile, ignorant la cause.
garde pour nous en dernier, ou plutot ce n'est pas lui, mais les du mal, avait mande Ies medecins, il Ies suppliait de l'assister
admirables martyrs qui Pont mis it cette derniere place. Mais selon leurs moyens et les pressait de Ie sauveI' au plus vite, car
nous Ie disons dernier seulement de ceux qui ont ete composes il gisait inerte et immobile [3544 A] et perissait miserable-
pour les Alexandrins, pour qu'il soit l'ornement supreme des ment par l'effet des douleurs. Mais comme ces medecins igno-
miracles qui Pont precede, et rejouisse amplement et magni- raient avec lui la cause du dommage, ils ne pouvaient exercer
fiquement les auditeurs, et pour que tout ce qui a ete inflige it leur art. Car l'art medical ne prescrit, quand on ignore Ie mal,
Tbeophile, n'etant pas cacM parle recit d'un autre miracle, aucun traitement particulier, seulement ce qu'inspirent l'enten-
soit eternellement garde en memoire (1). Nous aussi donc, pris dement pro pre et Ie jugement d'un zele industrieux. Quoi qu'il
d'admiration pour la sagacite de Theophile (2), nous allons en soit, apres avoir applique beaucoup d'antidotes et de purga-
raconter son aventure, couronnant ainsi de fa90n excellente les tifs - ils pensaient que la maladie venait d'une surabondance
recits anterieurs. d'humeurs - puis d'autres remedes au moyen de liniments et
d'un changement de diete, comme ils n'aboutissaient it rien,
a
(1) En 35 111 B 10 s. lire x!X.t 7tpo<; !X.u't'OV ad <ILV'1)ILOVEUO"IJ't'!X.~> 7tiiv ~IL7tE:q:.>6p'1)'t'o
(-q:.>6PEU't'O cod.) hepou yp!X.q:.>'ij ILl} O'l;'E7t6IL7vov. (-vo<; cod.). Ce recit venant en der- (3) En 3541 C 1ft, Toih6v 't'~VZ<; a3~x'ij0'!X.~ eE6q:.>~AOV OeAov't'E<; (I> OtXE~WO'!X.V't'o
nier n'est pas cacM par un autre qUi Ie sUlvralt.
(2) QueUe sagacite(-rij<; <rUveO'ECJ)<; 35 111 B 12)? II n'a fait qu'obCir aux saints.
< >
ne va pas. Peut-etro Gl<; 7tpoO''t'cX't'1)V Ot){E~WO'!X.V't'o, cf. v. I. Ilt proprillm patronllm
asciscere cllraperunt.
Mais peut-litre fut-iJ sagace en ceIa meme, qu'iJ s'est adrosse a eux. (II) ~(X.O'!x'v[~CJ)v D 6 : ~!X.O''t'&~c.)V cocl,
244 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS CYR ET JEAN 245
ils arretoront lours soins. Quand onfin il cut constate (5) qu'ils Ia priso soit petite ou grande, qu'il y ait plus de choses ou moins,
avouaient avoc peine leur ignorance du mal, et, avec cotte it moi sera , comme si c'etait un coup de des, ce qu'aura pris Ie ,
ignorance, leur impuissance, iI ordonna qu'on 10 portat chez los filet. » « Une silique (9) », repond Ie pecheur. Ayant donc de-
saints, qui connaissent par voie celeste les maladios dos mortels ploye Ie filot, ille Ianga dans Ia mer, pensant prendre pout-etre
et, par suite, leur apportent Ia guerison. Etant done arrive it quolquo petit poisson ou quoi que ce soit qui vit dans l'eau :
l'eglise do Cyr ot Jean, il supplia les martyrs do faire cesser Ie et de meme pensait evidemment I'infirme qui avait pris it gages
mal, et, apros pou de tomps, [B] fut exauce et obtint Ia Ie coup. Comme, peu apres, on avait tire Ie filet, on ramen a,
guerison. Car iIs ont compassion pour ceux qui soufTront ot non pas ce it quoi s'attendaient I'un et l'autre, mais une tou~o
ils lour accordent vite la guerison, it moins que Ie malado on petite cassette. Ello ne tenait pas, cache dedans, MoIse, mms
soit totaloment indigne, ou qu'iI ait besoin d'uno correction un malefice pareil it coux de Jannes et Mambres ('10), [3545 A]
plus longue, pour certaines raisons (G) - par exomple dos fautes non un Iegislatour gracioux et, comme il a ete montre, plus doux
cacheos - que seuls connaissent Ie Maitre do l'univers et coux que tous hommes, mais un objet crimineI, Ie produit d'un~
it qui il lui aura plu de les reveler, parce qu'ils Ie meritont. ferociLe demoniaquo. Mais 10 pecheur I'ignorait, comme aUSSl
Puisque nous avons indique Ia maladio, nous dirons aussi Ie 10 malade, ot ils se disputaient au sujet de Ia cassette, I.'un disan~ :
mode de la guerison, car il est digne d'une grando admiration, « Jo n'ai pas vondu une cassetto, mais Ie poisson qUI mo.ntera~t
ot c'est memo on vue do racontor co mode quo nous avons in- de l'eau », Ie malade retorquant qu'il avait achote ce q~l surgl-
dique Ia maladio. Les saints lui apparuront on songo et lui pros- rait, et non pas soulomont un poisson. Ce qui .fome~tm~ .cette
crivirent ceci : « Demain it I'aubo, disent-ils, apres avoir on gage quorello n'etait pas seulemont Ia cassette, qUI avmt 1 all' de
les philopons (7) it to soulever et porter, SOl'S vel'S Ia mer : tu contenir quelque objet de prix, mais aussi sa fermeture sur-
rencontreras un pecheur on train do jeter SOIl filet dans l'eau; chargee. Car elle n'etait pas soulemont etroitement serree de
conviens avec lui de tel ou tel salaire [C] pour qu'il deploie ficoHes et munie de sonures, mais on y avait imprime des sceaux
Ie filot it ton compte. Quolquo objet qu'il ait capture, cola ser- ~~~. .
vira it ta guerison : une fois mis it nu, il do it te delivrer du mal. » Commo, apres s'etro Iongtemps disputes, iI~ ne pouvment se
Ainsi parIerent en wngo los martyrs, puis ils s'envolerent. convaincre l'un l'autre ot qu'ils no supportalOnt pas non plus
Theophile, au petit matin, fit vonir los philopolls - ce sont de ced~r I'un it I'autro,' [B] ils vont it I'oikonomos de l'egl~se
d'ancions malades qui ont repris force - ot, lour ayant trans- pour Ie prendre commo arbitro du litige. Celui-ci: les ~eux ~a~tI~s
mis I'ordro des saints, il les suppliait de Ie soulovor ell hate. entondues refusait de rendre son jugement (11) « a mOIllS, disalt-II,
A l'oule du commandement dos martyrs, ils Ie souloverent aus- , "1
que je n'aie d'abord ouvert Ie couvercle ot vu ce qu I y a au
sitot et sortirent de I'eglise. Arrives pres de Ia mer, ils trouvent dedans. » Ayant donc ouvert it grand peine, aux ~eu~ de tous,
un pecheur avec ses filets, pret it capturer los fruits do la mol'. Ia cassetto, il y trouva un spoctaclo horrible, tout. a faIt afTreux,
lIs I'abordent, et deposent I'infirme sur Ie sable. S'adrossant rien de ce que croyaient Ies auteurs de Ia trouvmlIe et tous los
alors au pecheur (8), Theophile lui dit : « Combien veux-tu ga- spectateurs presents, mais une chose qui nageai~ a~ fond de
gner pour un seul coup, si tu me romets co qu'aura pu [D] cap- l'abime et que Ies saints, dans l'ocean de leur miserlCorde, en
turer ton filet? Qu'il rameno quolque choso ou ne tiro rien, que
(9) Petite piece de monnaie (X€ptX.TLOv), 1/2"· du sou d'or. , . .
(5) En 35',', A 10-11 dp'Y)x6Tec; ... EXeA€Ue, ou prendre dp'Y)x6't"ec; pour un nom. (10) Magiciens d'Bgypte dont il est souvent question da~s I anClenne htterature
absolu (dur I), ou lire dp'Y)x6't"occ; <!J.ocOWv) ou (yvouC;) ou (tawv). juive et chretienne. Mambres est I'orthographe des textes latins, IdesDg;ecs fon; uCsuhel~et-
(6) En 35!,', B " lire aLeX A6youC; : aL' &:A6youc; cod. . M . A XXI9?) Cf Oxfor Ict.O tile rls.
ment Jambrcs (v. gr. IllS!. on. In egypto ~ .. ' IV 1 t it XXI 9?
(?) Cf. l'Introduction it Cyr et Jean, supra, p. 223, n. 2. Church, s. v. Jannes and Jambres, et mes "[oines ~'Or!ent, , no e ~ .
(8) Litteralement « pccheur it la ligna », &:cr1tOCALE:UTIjV 35"" C 13. Mais il n'est (11) En 3545 n (lliro ~v o~,., t~'P0V (<pepew) 'lJ'I~(Xe:"I"Q. v. 1. non ... dare senten-
partout question que de peche au filet. tiam patiebatur.
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avaient tiree. C'etait une figurine de forme humaine, dont la clous. Et tandis qu'ils les enlevaient, l'infirme etait delivre de
matiere etait d'airain, faite it la ressemblance de Theophile, ses liens et de ses tortures, jusqu'it ce qu'ils les eurent tous ar-
et qui portait quatre clous enfonces aux pieds et aux mains, it racMs : et ainsi Ie malade fut delivre de to us les effets de l'ope-
raison d'un clou par membre. A cette vue, tous furent hoI's ration magique ot du fleau diabolique. En effet, it peine degage
d'eux-memes, [C] et ne savaient ce que pouvait etre cette Ie clou sur la main gauche de la statuette, aussitot Ie maIade
apparition. Des lors, Ie caract ere de la trouvaille leur etant etendit sa main gauche; et de meme, it peine enleves les clous
devenu manifeste, Ie combat des deux plaideurs cesse de lui-meme. fixes aux pieds de la figurine, Ie malade, sans souffrance ni
Peu s'en faut qu'on ne se fut mis (12) it rejeter l'objet it la mer douleur, mut ses pieds. Alors, s'etant releV'e en hate, il courut
et qu'on n'eut cache dans les flots l'ignoble image, sans que it la chasse des reliques des saints, et, levant ses mains vel'S Ie
Theophile en eut tire aucun secours, si, de nouveau, les martyrs ciel, iI chanta it voix haute [B] leurs louanges : avec lui chan-
n'avaient mu l'oikonomos it se demander ce que pouvaient bien taient ceux qui Ie voyaient.
eLre les clous qui avaient eM enfonces dans les quatre memhres Quant it nous, apres avoir celebre les martyrs de notre mieux,
de la statuette. II ordonna donc it l'une des personnes presentes et couronne par ce recit ceux OU no us avons ecrit les miracles
d'arracher les clous, s'il Ie pouvait. Celui-ci (13), ayant rec;u en accomplis pour des AIexandrins, commen«;ons desormais ceux
main la statuette et s'etant saisi du clou fixe dans la main qui ont eu lieu pour des Egyptiens et des Libyens, implorant
droite, Ie tira violemment de toutes ses forces et Ie detacha : Christ notre Dieu de se faire Ie chorege de notre discours, ainsi
it peine out-il ete arrache, voici que la main droite de Theo- que les martyrs Cyr et Jean qui, par son influence, produisent
phile [D] etait liberee, elle deposait Ie poids do la doulour leurs miracles.
ot l'immobilite qui y etait jointe. Alors fut reconnue de tous
l'infame ligature magi que dont il avait ete vicLime, cette liga-
12. Sur le comte Julien qui, par suite d'une operation magique,
ture que les sorciers avaient opereo avec l'aide des impurs ot
elait paralyse de tous les membres.
tres mechants demons, et qu'ils avaient ensuite plongeo au fond
de la mer ('14) pour qu'elle ne fut jamais dissoute. Mais ils furont [3456 A 5] Voici que s'avance, pour que je parle de lui;
convaincus d'impuissance et de folie, puis que Cyr, et avec lui Julien, qui est plus admirable aujourd'hui qu'auparav~nt, qm
Jean son allie, demontrerent clairement leur erreur, et prou- abonde puissamment en richesses et n'est pas non plus depourvu
verent it l'evidence qu'aucune partie do la creation ne lour est de tresors de verLu, qui est issu d'une illustre rac.e e: ~ue t~us
inaccessible, ni ciel ni terre, ni air ni feu, ni eau ni mer; mais connaissent comme un noble personnage. II avalt ete attemt
qu'ils traversent toutes choses en sauvant ceux qui sont pieux d'une douhle infirmite, et il beneficia, contre l'une et l',autre,
et fideles. Mais c'est lit pour tous une verite manifesto, lors meme d'une double guerison. II est encore en vie, et ilraconte a tous
que nous manquerions it la proclamer. ce qui lui est arrive. II veut pourtant etre insere da~s ce tre~ bref
[3548 A] Quand ceux qui entouraient alors l'oikonomos ouvrage quo je compose, et, comme s'il devait survlvr~ touJour~,
eurent vu et appris Ie malefice, qu'ils euront constate quo Theo- annoncor aux generations futures Ie miracle accomplI pour 1m.
phile mouvait sa main droite, pris d'une joie extreme ils cele- Nous donc, admirant son affection pour les saints [B] et
breront les martyrs et s'empresserent de detacher les autres approuvant son dessein it leur egaI'd, entreprenons de mettre
pal' ecrit son aventure. .
(12) En 35'~5 C " ~o.faut.il ~as liro Kcxt (.LLXPOU !Xv cxu't"o lVOCXACX't"'t"e:\)€~V [€v]Z~&AOV, Julien etait dans toute sa force au temps de sa Jeunesse, et
selon Ie sens I~translhf de ~CXAA€LV, « commencer de, se mottre it ", bien connu dans
la langue tardive? cette force avait pour compagne l'opulence, qui est la mer~ de
(13) En C 10 lire 8e; (roe; cod.), memo faute que ci·dessus 35'.1 C 7. la luxure et la maitresse de toute espece d'impudicite. La Jeu-
(14) Ceci dit par metonymie : c'est la figurine d'envoutemont agent de la ligature
qui a ete jetee a la mer. " nesso onfantait les pIaisirs ot se los proposait commo but, l'opu-
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lence les allaitait et nourrissait. Et il y avait guerre en son du corps : bien plutot Dieu l'avait conserve, lui qui, dans so.
arne contre l'opulence et ensemble la jeune ardeur du corps. bonte, ne se souvient pas des fautes des jeunes, detourne les
Mais cette arne, ces deux l'avaient vaincue de vive force, ils yeux des peches des mortels et ne leur fait pas sentir so. colore
l'avaient fait prisonniere, la tenaient en esclavage et 10. for- sur Ie champ, mais [3457 A] prend toujours patience, a~
9aient d'accomplir leurs vouloirs, car elle n'osait resister aux tendant notre retour et notre conversion. Le gargon donc fa1-
ordres brutaux qu'ils lui donnaient, pas plus que l'antique sait pitie it voir : ce qui s'offrait aux yeux, c'etait, pour ses
Israel quand il servait jadis comme mercenaire en Egypte. P urents " Ie mulheur' pour so. jeune epouse et pour 10. race, . I
Et l'on pouvait 10. voir telle un cocher sans force ni pouvoir un deuil inattendu au lieu de la joie; pour tous ceux qm e
emporte par des chevaux fringants, [C] incapable de retenir voyuient, un miserable spectacle. Autres que les siens etuient
leur elan, mais entraine malgre lui, violemment ravi par eux, Jes pieds qui Ie portaient, les mains dont il faisait usage; c'est
et qui a 10. fin lache les renes et tombe avec eux dans Ie preci- par d'autres qu'il accomplissait tous les aetes que Dieu a ~cco~de
pice. Tout de meme l'ame du jeune homme, sous 10. tyrannie de aux hommes d'accomplir par eux-memes. Aucun des medee-Ills
l'opulence, dominee par les delices et la pleine vigueur d'un ne pouvait Ie delivrer du mal, ni par regimes, ni par antidotes,
corps juvenile, etait entrainee vel'S les plaisirs honteux et se ni par onguents se succedant les uns aux autres, ni par remedes
courbait en esclave sous les passions vicieuses. Dans cet etat, quels qu'ils fussent. Le mal l'emportait sur tout celo., refusant
Julien, avant de justes noces, convolait en des unions illegitimes, de tendre 10. main it la main des hommes.
avant les embrassements d'une epouse, se Iaissait prendre a des Conscients de cette situation ses parents ont recours it Dieu
embrassements etrangers au mariage, avant d'avoir acquis une et aux martyrs. lIs envoient p~omener les secours [B] med,i-
source bien a lui, s'abreuvait, pour en boire l'eau, it une source caux (2), ayant choisi it leur place l'aide divine. Or ces tres
sans maitre, avant une biche qui fut l'objet de ses faveurs, avait saints martyrs euren t pitie du jeune homme, ils emousserent les
commerce avec une biche objet d'un desir vagabond ('1). De pointes de ses douleurs et lui accorderent de mouvoir et etendre
fait, iI s'etait enamoure d'une don zelle, et c'est avec elle qu'il quelque peu mains et pieds. Donner entiore guerison it ces
prenait ses ebats. membres etait empeche par une cause relative au dogme.
[D] Quand pourtant il eut contracte plus tard un mariage Ce Julien Ie Jeune etait en effet Ie disciple de Julien l'aine,
honorable et se fut attache it une couche sans souilIure, il prit d' Halicarnasse, qui avait ete Apollinariste (3) : il partageait
conscience du dommage que lui causait son lien iIJegitime et ses sentiments et ses opinions. Comme son arne etait d~nc
cessa ses relutions avec 10. donzelle. Mais elle n'accepta pas cette imbue de ces doctrines ce n'est pas pousse par elIes que Juhen
rupture, et, en ayant congu une jalousie sceIerate, elle se vengea Ie Jeune allait aux sai~ts mais a eause de sa maladie. Cepen-
du jeune homme pur un poison, et, it cause de la separation, dant, par de frequentes ~pparitions nocturnes, les martyrs lui
machina sa mort. Elle ne reussit pas neanmoins a tuer l'adoles- conseillaient de renoncer it cette maniere de voir et d'embras-
cent, quoiqu'elle l'eut rendu tout pareil it un cadavre, lui ayant ser 10. communion de l'Eglise cathoIique. Plusieurs fois aussi
lie, par Ie poison, mains et pieds et rendu inerte chaque membre ils lui avaient apporM Ie calice plein du saint Corps [.C] ~u
Seigneur et de son Sang, iIs l'engageaient a commumer; .Ils
(1) Je traduis litteralement 3'>56 C 12 s. : TCPO TC6>AOU Xo:p['t"wv Pe:fL~O:O"fLoi3 faisaient semblant eux-memes de communier et invitaient Juhen
TC6>A<j> 6>f·dA"1JO"e:V parce que c'est une reminiscence de Provo 5, 19 eAa;cpo.; cptA[a;.; xa;~
TCooAO'; 0"00'1 xa;phw'l ofLtAd't"W O"Ot. 'rout ce morceau de rMtorique verbeuse est it communier avec eux. Parfois aussi ils disputaient avec lui sur
d'ailleurs plein d'cchos de Provo 5. La source: cr. Provo 5, 15 TCL'Ie: iSaCi';'t"a; aTCo O"oov
ayydw'I xa;~ aTCo 0"00'1 cppe:a't"wv TC"1JY~';, 5, 18 ~ TC"1Jy~ O"ou 't"ou 1)8a;'t"0.; eO"'t"w crOt (2) En 3M 7 A 15 s. lire sans doute xa;[pe:tv fLev .1a;'t"ptxoL,; ~o"1JO~fLCi';()"tV (e:lTC6v't"E:';)
18 [a;. Les embrassements etrangers : cr. Provo 5, 20 fL~ TCOAU'; rO"Ot TCpO'; aAAo't"p[a;v
fL"1J8e cruvexou ayxaAa;t.; ~.; fL~ 18[a;.;. En C 13 PE:fL~o:crfL6.; vient sans doute de
ou (MyoV't"E:';). En D r, S. 't"E:Ada;v yap (rCi';()"tv).
(3) Sur ce passage, cr. supra, I'Introduction il. Cyr oL Jean, p. 232.
Sap. Sal. 4, 12 pE:fL~a;O"fLO'; emOufL[a;.; fLE:'t"a;AAE:UE:t voi3v &xo:xov.
250 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS CYH ET JEAN 251
Ie dogme, lui expliquaient la verite procIamee dans l'Eglise, et lui wlenncls et terribles, quc pas un GaYanite, pas un Theodosien,
affirmaient par serment que c'etait Ia la doctrine officielle tou- n'etait tenu ct compte par lc Christ au nombre des orthodoxes
chant l'union hypostatique saIvatrice du Christ notre Dieu. ct des vrais croyants. Quand Julien cut regu, de la part des
Comme pourtant, ma]gre toutes ces avances et bien d'autres saints, cctte attcstation par sermcnt, comme les epreuves ct les
encore, iIs n'avaient pu persuader Julien, qui refusait de se laisser f;crmcnts lui avaient enseigne la veritable doctrine, il renonga
convaincre, ils Ie firent se ressouvenir de ses anciennes douleurs, it I'une et l'autre secte (5), et, avcc la sante de l'ame, il regut
ils reveillerent les aiguillons de ses souffrances, peut-ilLre meme cn plus, grace a la vraie foi, 1a guerison corporelle.
avec quelque addition, lui ayant lie [D] comme auparavant Je penserais nuire a mon recit, si je Laisais Ie trait brill ant
mains et pieds, et ayant augmente ses tortures, dans Ie desir et gracieux dont firent montre les saints touchant 1a communion
peut-etre de demontrer en acte Ie mot du Psaume (31 (32), 9) : de Julien. Le voici. Comme ils voyaient quc d'una part il renon-
« serrant par Ie mors et Ie frein les machoires de ceux qui ne s'ap- gait a son ancienne heresie et cmbrassait la vraic confession du
prochent pas de Dieu » avec foi. De fait, ce brave jeune homme, Sauveur, mais que d'autre part il repugnait, pal' respect llU-
qui avait meprise tant de conseils, tant de temoignages et de main, a participer aux saints mystores et rougissait de ce dont
si grandes visions, et avant tout cela Ie miracle qui avait eu [Cj il cut du se glorifier, ils machinent un tour admirable et
lieu en sa faveur, n'eut pas la force de mepriser ces modiques rejouissant. Lui eLant apparu cn songe, a leur habitude, ils
flagellations : il poussait clameurs et c~is, appelait, implorait, lui disent : « Voici, c'est bientot l'anniversaire de la naissance
adressait aux martyrs supplications et invocations. Mais il n'y du Sauveur, en laquellc Ie Fils unique du Dieu et Pere s'est
avait personne pour Ie delivrer, Ie sauver, l'arracher aux souf- incarne et a ete fait homme. Cette fete sainte et solennelle, Ies
frances, personne qui put l'aider, car ce qui se passait etait une Alexandrins qui sont fils et nourrissons de l'Eglise catholique
punition des saints. la celebrent en I'eglise dite de Theonas dediee it la Sainte Vierge
Mais quand, par ces tourments, iis eurent calme sa bouil- Marie Mere de Dieu. Va donc toi aussi a cette panegyrie, joins-toi
lante ardeur (4) [3460 A] et qu'ils eurent amene it I'obeis- aux fidoles qui celebrent pieusement la fete, meM a l'assemblee
sance celui qui auparavant refusait d'obeir, alors ils lui ap- des croyants, unis-toi a la psalmodie, ecoute les legons des
paraissent, Ie visage souriant et enjoue, et ils lui demandaient apotres et la proclamation des saints evangiles, carles gens de
pourquoi il poussait ainsi cris et clameurs. Lui, comme s'ils ta secte [D] restent jusqu'a la fin de ces lectures. L'evangile
ignoraient son mal, Ie leur dit, et les invitait a Ie secourir en acheve, SOl'S scIon ton ancienne habitude pour t'eviter it toi-
son peril. Mais ces excellents martyrs lui rappelaient de nouveau meme tout soupgon. Une fois sorti de l'eglise, va attendre au
la regIe de foi qu'ils lui avaient expliquee en vision, lui repre- Dromos » - c'est un lieu insigne de la ville d'Alexandrie, en
sentaient que les souffrances qu'il endurait avaient pour cause forme d'avenue, borde de deux portiques, orne de colonnes
son refus, et qu'il ne se~ait pas debarrasse de ses peines avant et de marbres, OU se presse un peuple nombreux, et qui abonde
qu'il ne se fut degage de l'heresie qui Ie retenait et n'eut em- en boutiques OU se vendent toutes sortes de provisions - ;
brasse la communion de l'Eglise apostolique. Or c'etait la pre- « promene-toi la, disent-ils, surveillant la fin de la synaxe.
cisement Ie but que Julien desirait de voir, et il les pressait de Et quand tu auras vu que tous les gens se sont retires chez eux,
l'instruire a ce sujet. Comme donc les martyrs voyaient que Ie entre discretement dans l'eglise sans que desormais nul ne te
jeune homme leur cedait, ils lui firent connaitre aussi, pour Ie voie, et communie aux saints mystorcs. Puis reviens dans notre
rassurcr d avant age , ces instructions nouvelles. Levant [B] les maison et [3461 A] tiens-toi en paix. De cette fagon, il ne se
mains vers Ie ciel, ils lui affirmerent, par Ies sermcnts les plus
(5) &:WPo'tepc>>v cxu't"wv &:7t1)AM't't"E't"O 3460 D 6. A la verite iI ne pou-:ait appar-
tenir qu'lt l'une ou It l'autre, car elles elaient diamctralement oppos6es, bien qu'elles
(r,) En 31,57 D 15 lire sans doute 'to cxWucrcrov ('t"o cxWo:crcrov cod.). se reclamassenL toutes deux de Julien d'IIalicarnassc, cf. Introd., p. 232 s.
252 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINTS CYH ET JEAN 253
peut que tu n'echappes au blame qui te viendrait des h6retiques et il connut que les saints avaient fait de lui un objet de scandale.
avoues sitot qu'on leur aurait parle de ta communion, et d'une II raconta alors, it ces gens qui l'interrogeaient, comment les
part tu mettras fin it ta suspicion d'avoir it rougir devant eux, martyrs l'avaient catechise (8) et toute leur machination, com-
d'autre part tu t'acquerras une louange incessante puisque tu ment ils l'avaient expose it tous les yeux rougissant de sa com-
te seraS SaUve. » Tels furent les conseils des saints. munion.
Julien accept a ce conseil puisqu'il lui venait des saints, et, Telle fut Ia maniere dont Julien [DJ se rattacha it l'Eglise
comme il l'avait reconnu en accord avec son propre dessein, catholique, et ce fut chose miraculeuse et stupefiante, OU se
il promit de Ie mener it fin (6). Mais, bien qu'il se figurat que voyait it plein la douceur des saints et leur grace: car la guerison
la chose conseiIIee se passerait bien ainsi, cela ne se fit pas comme du corps y avait cOIncide avec la conversion de l'ame.
il Ie pensait, ni comme il Ie desirait et souhaitait, mais comme Quant it nous, apres avoir acheve la narration qui Ie concerne,
les saints l'avaient decide et decrete, et comme l'avait prescrit et donno nos louanges aux saints, passons it un autre de leurs
Ie mot du Sauveur (Mth. 5, 16) : « Que voLre lampe briIIe aux miracles et faisons-en Ie rocit.
yeux des hommes, pour qu'ils voient vos bonnes rouvres et
glorifient votre Pere qui est dans les cieux. » Car ce qu'il voulait,
lui, cacheI' dans Ie secret, [BJ les saints voulaient Ie proclamer 31. Sur Theodore qui, apres a~oir commlwie, fit entendre un fort
sur les toits. bruit par Ie nez, et aussitOt perdit la ~ue.
A l'approche donc de la sainte fete de Noel, Julien, se rappe-
lant l'ordre des saints, se rend, dit-il, it l'eglise dite de Theonas. [3520 D 15J Le jeune Theodore, qui est l'occasion du pre-
II y entendit les legons des apotres et l'evangile, et, apres cela, sent [3521 AJ recit, procure une legon tres utile si l'on veut
sortit et alla aU Dromos. II y resta tout Ie temps de la synaxe, bien ecouter attentivement mon discours. Ce gargon etait entre
puis, quand elle fut achevee et que les fideles se furent retires, dans l'oglise des saints, et, apres avoir communie aux mysteres
il rentra dans l'eglise en cachette et secretement, it ce qu'il vivifiants du Christ, sous l'efIet de je ne sais quel motif, soit
croyait (7), regut la communion. Mais, tandis que, tete baissee que quelqu'un l'eut porte it une crise de rage <soit que nul ne
et Ie corps incline, comme il convenait, il participait aU Corps l'eut irrite) (1), enflamme d'une fureur extreme, bouillant de
du Sauveur, des clercs de la secte dite des GaIanites, au nombre colero par Ie mouvement du sang qui bouillonne autour du
peut-ctre environ de cent, entrerent it l'eglise [CJ pour y crour, non soulement, l'infortune, langa des insultes it la Divinite,
prier; certains font d'ordinaire ainsi apres la fin de I'office, lui jetant, 10 trois fois malheuroux, des blasphemes et lui faisant
pour honorer la saintete du lieu et pour rendre it la Mere de Dieu de violents reproches comme a un compagnon d'esclavage,
les hommages habituels de veneration. Lorsqu'ils eurent vu mais, par l'absorption de l'air a travers Ies narines, produisit
Julien en train de communier, ils furent frappes de stupeur de un bruit rotontissant pareil it un terriblo eclat de tonnerre, un
sa conversion, et ils se faisaient signe l'un it l'autre et Ie mon- bruit qui aussitot fit trembler tous les gens qui etaient la et Ie
traient it ceux qui ne l'avaient pas vu. Quant it Julien, il avait voyaient et de leurs oreiIles, bien malgre eux, l'entendaient.
reI eve la tete apn3s qu'il eut depose en lui l'aliment vivifiant. Beaucoup de Chretiens font de meme, ne pensant pas (2),
Aussitot qu'il les eut apergus, son visage se couvrit de rougeur, comme je crois, agir avec irreverence, [B] mais ignorant
(6) En 31,61 A 7 s. je lis xed 't"cj) o!xdCjl crxomj> yvou~ (30u~ cod.) eXX6AOUOOV dc; (8) Lire 34(H C 11 S. xoc..-!jxOVTf.~ (-eXovTf.<; cod.), cr. v. 1. instruentes.
't"eAo~ (EV't"OAcx.r~ cod.) &ye~v cruveOe't"o, cf. v.1. quod proprio pidebatur concordare con- (1) En 3521 A 5 s. lire v. gr. ehe 't"~vo<; ctu't"ov 7tpo<; Ou[.tov 7tctpo't"puvo~'t"o~
silio in finem reducere repromisit. <ehe (J.1)3evo<; ctu't"ov EpeO(~ov't"o<;), cf. v. I. sipe hunc quisquam ad furorem mCI-
(7) En 3!,61 B 9 s. lire apparemment 7t&A~V 't"cj> vecj) 7tpocmeMcrcx.c; hexpu7t't"o taper it sipe nemo exacerbaflerit.
(2) <ou) vo[.t(~ov't"e<; Campbell Bonner (3521 A 15).
XOCL <xpucp[(})<;) w<; &36xe~ (et occulte ut putabat v. 1.) X't"A.
254 COLLECTIONS GHECQUES DE lIrIHACLES SAINTS CYH ET JEAN 255
completement Ie sens de l'acte : car, s'ils Ie savaient exactement, habitude, ils ne regardaient pas cet acte comme une faute.
ils ne l'accompliraient pas, fut-ce apres mille tortures. Tous versaient d'abondantes larmes, suppliant, chacun pour
Peut-etre (3) n'est-il pas sans profit que j'explique cette lui-meme, Ie Christ et les martyrs, implorant Ia grace du gargon
vilaine chose: car il se peut que, s'ils en apprennent Ie caractere, atteint de cecite, pour que Dieu prit pitie de ce malheureux,
et que c'est une invention digne de I'impiete des palens, certains accueillit sa repentance et lui rendit Ia vue par l'intermediaire des
se tiennent en garde contre un tel acte de folie. Porphyre dit saints.
que, quand les paiens offrent it leurs idoles leurs sacrifices mau- Les martyrs donc lui apparurent en songe et lui dirent :
dits, ils font entendre par leurs narines un bruit tres eclatant, « Qui donc, malheureux, t'a pousse it commettre une action si
produisant ce son par une violente inhalation et la force de I'air abominable? Tous devraient s'en abstenir la vie entiere, car
inspire, estimant qu'ils offrent ainsi une sorte d'hymne it l'hon- c'est une pratique paienne et chere aux demons. Et meme si
neur du divin (4), si bien que, ensuite, ceux qui participent au la plupart agissent ainsi par ignorance, ils devraient surtout
sacrifice se donnent toute licence et rivalisent it qui mieux [3524 A] en avoir horreur quand ils viennent de s'approcher
mieux en un concours, pour voir qui vaincra l'autre en explo- des mysteres du Christ. A present donc, si, dans trois jours,
sions nafales, pour que Je plus capable soit declare premier, et alors que l'oikonomos passe et, tenant en main l'encensoir,
soit Ie plus charm ant aux yeux des demons. Cette sorte de encense l'eglise, tu vois les charbons de l'encensoir et la fumee
bruit [C] est d'institution eu egaI'd au culte des demons, de l'encens qui monte au toit, tu seras completement delivre
et il en resulte fatalement que ceux qui Ie produisent celebrent du fleau et recouvreras pleine vue comme auparavant. Si en
it leur insu les demons impurs. Aussi engageons-nous vivement revanche, dans trois jours, tu ne vois rien de ce que nous avons
ceux qui s'y Iivrent, maintenant qu'ils en savent Ie caractere dit, sache que tu as gagne la cecite pour toujours, et que tu ne
dommageable et funeste, de s'en abstenir comme d'une chose verras plus jamais rien des choses visibles. » Voila ce que les
dementielle qui ruine l'ame. « Quelle association en effet entre saints lui dirent en songe.
Ia lumiere et les tenebres? » (2 Cor. 6, 14), et ce qui suit. Theodore, plein d'agitation apres cette vision, se lamentait
Bref, quand, apres la manducation du pain de communion plus encore, calculant la courte duree de l'eclleance. Aussi
immacule, Theodore eut fait entendre ce bruit repugnant et priait-il instamment; il versait, sans les retenir, des flots de
cher aux idoles, il fut aussitot prive de la vue, vide de regard, larmes, passait son temps, [B] jusqu'a l'heure fatale qui lui
la punition ayant coincide avec son acte d'irreverence. A Ia suite avait ete dite, a supplier Dieu et les martyrs. Tous ceux qui
de cet accident, comme nous I'avons dit (5), la terreur s'empara etaient dans Ie temple intercedaient aussi pour lui, multipliaient,
de tous les assistants, il se repandait en eux une grande crainte avec larmes, leurs supplications pour lui, accomplissaient Ie
qu'ils ne tombassent eux aussi [D] dans Ies memes peines, precepte de la charite fraternelle : « Priez les uns pour les autres
puisqu'ils commettaient souvent la meme faute et que, par afin que vous soyez gueris » (Jac. 5, 16). Cette priere universelle
fut agreee, Theodore recouvra la vue, il deposa la crainte de
(3) Sur ce passage, cf. Campbell Bonner (cite supra, p. 235, n. 1), p. 8-1'1, qui rester aveugle.
produit, entre aut res textes, Porphyre ap. Eus. Praep. Ev. IV 22, sur les flatulences
dues a I'introduction de demons dans Ie corps par Ie canal du soullle. Mais uno En effet, alors que, Ie troisieme jour, Christodore - c'est lui
flatulence n'est pas une pLvoxwrr[a. Jo croirais plutot a quelque pratique usit6e qui etait l'oikonomos - encensait Ie martyrium des saints et
dans les rites magiques : i! s'y en trouve de fort etranges, ct Porphyre a pu y faire
allusion, par exemple dans Ie de phil. ex orac. haurienda. Au surplus, meme si I'on qu'il passait devant l'endroit OU Theodore etait assis aveugle,
admet que Sophronius n'invente pas cette reference, il est bien sur qu'il paraphrase il n'eut pas plus tot gagne Ie lieu du martyrium OU se trouvait
et qu'i! faut voir ici non pas une citation do Porphyre, mais tout au plus un testi-
monium. Ie baptist ere (6), que Theodore, soudain, apergut les charbons
(11) En 3521 B 11, lire, je pense, \l[lVOV rroLEicrOaL <vo!1.[~OV're~> cre~&cr[lLoV.
(5) cr. 3521 A 12-H?
-,
17
INTRODUCTION
1. Miracles isoles ou recueil de miracles?
Sans doute, dans son petit volume de la collection Teubner (1),
Aufhauser a puise dans quinze manuscrits, choisissant Pun pour
tel miracle, un autre pour tel autre. Mais c'est simplement qu'il
en prMerait Ie texte, cela ne veut nullement dire qu'il n'a pas
existe pour Georges, comme pour les autres saints thauma-
turges, do recueils de miracles. Certains manuscrits, il est vrai,
ne contionnent, avec d'autres matieres (homelies, aut.res Lextes
hagiographiques), qu'un seul miracle ; ainsi 10 Laurentianus
plut.. 31 (xv e s.) Ie mil'. 7, Ie Parisinus 1190 (1568), Ie mil'. 6,
10 Vatican us 1130 (XVI-XVIIe s.), Ie mil'. 6 encore (les deux im-
primes face it face, Aufhauser p. 64-89), Ie Vaticanlls Ottobo-
nianus 415 (XIV e s.), 10 mil'. 1. Certains autres n'ont que quelques
miracles, sans qu'on aperlioive de regIe fixe en ce choix. Deux
manuscrits (Angeliclls 46, Parisin. 770) ont seulement Ie ce-
lebre miracle de la vierge et du dragon, accompli par Georges
de son vivant (mil'. 12), et Ie miracle du demon (mil'. 13) qui
Ie suit immediatement; un autre (Parisin. 1164) a ces deux
miracles, mais auparavant la revelation qui confirme Georges
en sa vocation (nO 15) et un miracle accompli par Ie saint apres
sa morL (mil'. 5); un autre (Parisin. 401) a ces trois prodiges
qui vont ensemble (revelation, dragon, demon), plus l'autre
« signe )) demande et obtenu par Georges au debut de sa carriere
(miracle de la ceinture, nO 14), et encore deux miracles posthumes
(nOS 4 et 5); deux manuscrits (Ambrosianus 192, Atheniensis,
Bib!. nat. 278) ont la revelation et Ie dragon, plus deux miracles
posthumes, l' Ambrosianus Ie fils de Leon et les booufs de Theo-
piste (nOS 4 et 5), l' Atheniensis Ie fils de Leon (2) et la resurrection
(1) J. n. Aufhuuscr, Miracula S. Geor'gii, 'l'eubner, 1913.
(2) Je ne puis l'ufIirmcr. Lo titre est ~~~Y1)O'L~ 7tE:pL. OlXui1.IX'TO~ ... 'TO (I) d~ 'TO
~-'
de Manuel (nO 11); un autre (Vaticanus 1190) a Ie miracle du (nO 6), la colonne donnce pal' la veuve (nO 1), tous ces miracles,
dragon, plus quatre des miracles posthumes (nOS 1, 9, 10, 5); sauf celui du demon, etant des miracles posthumes. Manquent
d'autres enfin n'ont qu'un choix de miracles posthumes, Ie Jes deux prodiges anterieurs it la vocation de Georges (revela-
Parisinlls 1604 (x Ie S.) les nOS 1-3, Ie Mosqllensis, bibl. syn. 381 tion et ceinture : nOS 14 et 15), lesquels d'ailIeurs se rencontrent,
(1023), les nOS 1-4. l'un (15) seulement en trois manuscrits (Atheniensis 278, Pa-
D'autres manuscrits cependant contiennent de veritables re- ris. 1164 et 401), l'autre (14) en un seul (Paris. 401), et les mi-
cuoils ; ainsi Ie ms. de Chalkis, scholae theol. 39 (1559) qui, outro racles de la resurrection de Manuel (nO 11) et de l'omelette
Ie miracle du dragon, Ie plus celebre, a six miracles posthumes, (n ° 10), qui sont, eux aussi, fort rares (6).
les nOS !, 9, 2, 3, 5, 8; ainsi surtout Ie ms. de l'Athos Joasa-
phaion 308 (1878), entierement a l'honneur de S. Georges, qui, 2. Comment dater et le reclleil et les miracles isoles?
apres six panegyriques du saint, contient, avec les deux miracles
connexes du dragon et du demon (nOS 12-13), neuf SUI' onze des Malheureusement Ia tradition manuscrite ne nous offre
miracles posthumes, les nOS 5, 8, 3, 2, 6, 1, 4, 9, 10. Au surplus, aucune assurance que Ie reclleil des miracles de S. Georges soit
que de tels recueils de miracula S. Georgii aient existe dans les ancien. Le manuscrit de Chulkis est, comme on Fa vu, de 1559.
monasteres de l'Athos, nous en avons la preuve par l'hymne Plus recent encore Ie Joasaphaion (1878). Man confrere it l'Institut,
ins ere dans ce meme Joasaphaion (nO 16) et que j'ai traduit en M. Paul Lemerle, a bien voulu m'ecrire it ce sujet : « L' Athaus
dernier lieu. On a la (en ordre disperse puisqu'un miracle du Joasaphaion 308 fait partie des manuscrits rassembles au com-
temps de la vie est mele aux miracles posthumes), apres Ie mi- piles par un certain moine Joasaph, peintre d'icones, originaire
racle de la vicrge et du dragon qui, comme presque toujours, de Cesaree (de Cappadoce), qui vecut it l'Athos, a Kerasia,
vient en tete (nO 12) : la fleche suspendue en l'air (nO 7) (3), dans un (J.o\lu3pw\I place sous Ie double vocable de la Presenta-
Ie demon enferme sous une roche (nO 13), miracle du temps de tion de la Vierge et de saint Georges. D'ou ce codex 308 entiere-
la vie, generalement conjoint, dans les manuscrits, a la deli- ment consacre it saint Georges. Sur Kerasia, pointe sud-est de
vrance de la vierge (nO 12) (4), un autre miracle sur l'image trans- l'Athos, voir pal' exemple G. Smyrnakes, '1'0 "Ayw\I "Opoe; (Athenes,
percee (nO 2), une simple mention des prisonniers liberes (nOS 3, 1903), p. 404-407 : mention d'un &:Xp(J)T~PW\I TOU &ytou rec.>pytou,
4, 9), la resuI'l'ection des bamfs de TMopiste (nO 5) et la resur- d'un keJlion russe du meme nom. » Certes, on ne pourrait con-
rection du soldat (8) (5), la vision miraculeuse du Sarrasin clure, de la date reconte du manuscrit, au peu d'anciennete de
l'hymne, rien n'empechant a priori qu'il eut ete comp?se plu-
IXtX(J.IXAc.>'nerOz'l't'1X 7r1X~IHO\l yE\l6(J.E\lo\l XlXt 7rlXp' tA7rt31X 3~lXerc.>OZ\lTIX (Pro!. sieurs siecles auparavant. Rien ne l'empeche, mais l'len non
p, VII). Or trois de ces miracles posthumes sont relatifs a un jeune homme cap:
ture et sauve, Ies nOB 3, 4 et 0 : quand Aufhauser ne donne aucune precision on plus no pousso a Ie croire. M. Grosdidier de Matons, l'editour de
peut !tesiter entre I'un de ces trois. De meme, dans 10 ms. do Chalkis, sous Ie titro Romanos a eu la bonte do me donner sur ce point les precisions
"ETepo\l OIXU(J.IX... 7rep! TOU 7r1X~30C:: &:vlXp7rlXerOZVToe; t\l Tlu erTpIXTc.>7rlf3(u (Prol.
p. XII), iI pout s'agir ou du fils de Leon emmene chez les Dulgarcs (no 4) ou 'du jeun~ que voici' : « On ne distingue dans cet hymne a~cun fait ~e
homme de Mytilene emmene chez les Sarrasins de Crete (no 0). langue qui permette de Ie dater, meme d'une mamere, approxI-
(3) II Y a Ill. peut-etre une variante dans la legondo. L'hymne dit TO ~eAoe; TOO \l1X(";)
&:7r71chp'1)erlXe; erlXq:>ooe; de; (J. \1'1) (J.6 eru\I 0\1 Tlu\l er 00 v OIX U (J.IX er t 00\1 ero U 7rO~Aoo ~
mative. La fl'equence, surtout a la fin des kola, d adverbes
(v. 117 s.), ce qui donnerait 11 croire que Ia fleche reste, encore actuellement sus- passo-partout comme eraq:>oot;, euOut;, 3e~\loot;, XIXAoot;, AIX(J.7rpooe;,. etc.,
pendue en l'air. Dans Ie recit du Laurentianus, la fleche retourne vers l'ass;iIlant
et Ie frappe a Ia main, TO 8e: ~eAoe; ... de; i.\ljJoe; &:pOe:\I Ilrreerev XIX! ~7rA'1)~e\l T~\I XeiplX
qui forment aut ant de chevil1es, trahit plus Ia gaucherIO du
IXlhou 90.14 s. poete que Ja maniere d'une epoque. Les vel'S 23-24, p. 153,
(4) Cf. supra Angelicus 46, Parisinus 770, Parisinus 11M, Parisinus 401 Joasa-
phaion 308. Ajouter Ie Monacensis lat. 14473 (Prol., p. XIV). '
(5) L'hymne marque Ie lien ontre ces deux : &:\le~chc.>erlXe; erlXCpooe; (broufs) v. 128 (6) lIIanuel seuloment Q(l.!l§ r 4thenien5is 278, I'omelette dans Ie Vatican!ls 1190
suivi de (v. 129) KIX! t~(erou eru TO ~~\I 3t3c.>e; XTA. ' (t Ie .Joasaphaion,
262 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEORGES 263
font allusion au mont Athos deja peuple de monasteres ot d'er- Neanmoins, des Ie VIe siecle, Gregoire de Tours (c. 540-594)
mitages, donc assez eloigne de ses debuts. P. 151, 'les vors 23-26 parle de « miracles» de S. Georges au pluriel, rnulta de Georgio
mentionnent, parmi los devots du saint, « les rois do la terro », rnartyre rniracula gesta cogno(Jirnus. 11 est peu probable qu'il ait
mais il n'est pas question du salut et de 10. prosperite do l'empire, lu deja une vorsion latine de miracles grecs. Mais l'on circulait
theme pourtant frequent dans Ie kontakion commo dans Ie sans cesse entro 10. Syrie-Palestine et Ie sud de 10. Gaule (mar-
canon, et particulierement nature 1 dans Ie cas d'un saint mili- chands syriens, pelerins en Torre sainto). On racontait los
taire. L'empire existe-il encore au moment de la composition miracles do Palestine. On rapportait des reliques. Et c'est pre-
de co poeme? Cela parait douteux. Ces versiculets de cantil ene, cisement au sujet de reliques ainsi rapportees (huius enirn reli-
qui resument avec une application scolaire tout ce quo l'autour quiae curn reliqlwrurn sanctorurn a quibusdarn jerebantur) que
a juge pro pre a edifier dans 10. Passion et les Miracles de Saint Gregoire narro un miracle qui s'est produit dans 10. region de
Georgos, n'excCdent pas les talents de n'importe quel athonite Limoges (8). C'est Ie theme folklorique bien connu dos porteurs
un peu lettre entre Ie xv e et Ie xvm e siecle. » do reliquos (chez les paiens, d'un objet saint) qui ne pou-:ent
Ajoutons que, dans la 3e edition de 10. Bibl. Hag. Graeca, si plus avancer. D'ou l'on conclut qu'il raut laisser 10. rehq.ue
diligemment compiJee par Ie Pere I-Ialkin (Bruxellos, 1957), (l'objot) sur place. Et comme de juste, cette relique ou cet obJet
on ne trouvo, apres les Passions et Laudationes (nOS 1-15, accomplit des miracles. Dans une autre region (Le Mans).'
p. 212-217), aucune indication qu'il ait existe un rocueil ancien S. Georges accomplissait des miracles de guerison : narn caec.~,
des miraclos de S. Georges (7). Enfin 10. tradition manuscrito claudi, frigoritici, (Jel reliqui infirrni saepius ibi sanitatllrn ~ratw
latino, du moins d'apres 10. Bibl. Hag. Latina des memos Bol- rnunerantur. Un doute, il est vrai, pourrait venir a l'espr~t au
landistes (reimpression, 1949), n'offro pas plus de secours. sujet de ce texte. Quand Gregoire dit rnulta... cognMunuS,
II y a bien la 10. mention de recuoils de miraclos, v. gr. nO 7 ce cognMirnus pourrait ne se referer qu'a des miracles accom-
(t. I, p. 506) Miracula in ecclesia Royensi patrata saec. XI, plis, grace aux reliques rapportees, en Gaule meme, et non pas
nO 10 (p. 507) Translationes et rniracula. Mais, comme 10 montrent it des miracles palestinions dont il eut entendu pa~ler. No~s ~e
les sous-titres, il s'agit alors manifestement de miracles accom- presserons donc pas ce texto, bien qu'on ait 10. certItude, temoIIl
plis par des reliques de S. Georges rapportees en Occident, Fortunatus (c. 535-c. 600), que les Actes de S. Georges f~ssent
notammont au fameux monastere de S. Georges a Venise (cf. connus on Gaulo des Ie VIe siecle (9). Mais voici, au siecle sUlvant,
nO 10 I Translatio capitis Venetias an. 1462, nO 10 III Translatio une preuvo indubitable qu'il existait au moins un embryon d'u~
brachii Venetias an. 1296), et qui n'ont donc pas 10 moindre rap- recuoil de miracles au sanctuaire palestinien de S. Georgos a
port avec nos miracles grecs. Lydda.
Au VIle sieclo on efIet, Adamnanus (c. 624-704), abbe du
. (7) Les ~iracle.s c~mprennent les no' 16-29, p. 217-223. II s'agit, sauf une excep- monastere d'lona fonde par S. Colombo. (521-597) ~ans .l~s
hon, de rmracles Isoles : Ie ru:ag~n, no' 16 et 16 a-m; Ie fils de Leon (avec variantes),
nO' 17 a-f; les bccufs de Theoplste, nO' 18 et 18 a-d; la vision du Sarrasin no, 19 iles Hebrides, aut our d'une Vie de S. Colombo. ot d un reClt
et 19 a-c ;.l'icone percee d'une fleche, no 19 i ; l'icone pereee suivie de la co~version de voyage en Terre Sainto (De locis santis, CSEL 3~), rap~ort~,
~u SarrasIn, no 20; Ja colonne de la veuve, nO' 21 a-c; Ie soldat assassine, no 22 ;
I adolescent de Mytrlene, no 23; l'omelette, no 2",; Manuel, no 25; la ceinLure de d'apres un certain Arculphe « homo sanctus », qUl aurUlt lUl-
S. Georges.. no 26; l'ado.lescent pa~hlagonien, no' 27 a-b ; la vision de S. Georges ct
son ent~etlen av;c Ie d;mon, nO' !8 a-c. La seule exception cst Ie no 26 ]{ dont je (8) Gregoire de Tours Libri miraculorum, lib. I, De gloria martyrum, cap. CI, ~d.
reprodurs la notrce (p. 222) : « Mlracula v. Inc. pro!. ut 26 (sc. Aufhauser, p. 13'1 H. L. Bordier t. I (Soc. iIist. de France, Paris, 1857), p. 27 '1 =.-!'f0n . Germ:, Scnpt.
cI>O~EPO<; <:I, X6P~E, X'rA.). - D~s. ~v 'reT) otX(:> ... 0Z01dcr'rol). Cod. Drix. A III, rerum lIferMingicarum t. I pars I (IIanovre, 188!1), Gregoru Turonenns oper:-"
saec. xv~, fo!.. 298-307 v. Insunt mlracula 26,16,16 k, 17, 18 ", dans Ia numerotation ed. W. Arndt-B. Krusck p. 5511-555. Va~iantes insi~nifiantes. La n?te 3 ~e Ia p. 5,,"..
de HaIklll, SCI!', les no, 1,1, 12, 13, 4, I) d'Aufhauser. Le manuscrit 6tanL du XVI" siecle, reproduit simplement celIe de d9111 Rllm~rt (Dordler, 1. c., p. 27'1, n. ).
donc co.ntemp?rain de ce~ui de ChaI~is, nous ne remontons pas plus haut qu'avcc
ce dermer, qUI nous ofirart un recued de sept miracles (supra, p. 260). (9) Carm. II 12,
- ..--
.. ~
meme appris la chose a Constantinople « a quibusdam expertis d'une llec1w par Ie Sarrasin. On lit en eiIet, au debut de ce
civibus », deux miracles qui se sont passes dans Ie sanctuaire de dernier miracle, tire, comme Ie precedent, du Paris. 1604 : 'Ell
S. Georges a Diospolis (161.10, 164.7). Diospolis est, depuis Ie IXt)'rn TIXU't"() T(i 1l'6Ae~, ev fl i!<jlIX[1.F;V TO 1l'pO TOUTOU TeptXO'TWV yeyovevlX~, I;IXPIX-
n e siecle, la denomination de Lydda, et Lydda est la [1.'l)TP~)c( (nO 2, p. 8.1 s.). Ces deux miracles sont evidem-
X'I)IIOL 1l'OTe XTA
1tOALXII'l) de Palestine, mentionnee tout au debut du 1er miracle ment posterieurs a la conquete arabe (vne s.). Le lien forme!
(colonne de la veuve), OU repose Ie corps de S. Georges ct OU entre Ie nO 2 et Ie nO 1 (colonne de la veuve) dans Ie
des Ie VIe siecle, on a fonde en son honneur une tres celebre eO'li~ Paris. 1604 (XleS.) (If)) donne lieu decroire al'existence d'un recueil
se (10). D'apres l'analogie des sanctuaires analogues (Thecle Co~c de miracles « diospolitains », et, dans Ie meme manuscrit, la
et Damien, Cyr et Jean), tout porte a Cl'oire qu'il a lleUl,j assez presence du nO 3 aussitot apres les deux premiers suggere la
tOt, autour du sanctuaire de Lydda, des recits de miracles. pensee qu'a ces miracles « diospolitains » on en aura ensuite
Adamnanus tient son recit d'Arculphe, qui Ie tient lui-mome ajoute d'autres, de provenance diiIerente.
d'habitants de Constantinople : eel a nous ramene quasi au Quant aces autres miracles, on doit noter aussitot un fait
VIe siecle. L'archidiacre Theodose, auteur d'un De situ terrae intel'essant. Le recit de l'enlevement par les Sarrasins ('AYIXP'I)IIOL
sa.nctae .qu'o~ da~e d'~nviron 5.20-530 (11), ecrit a propos de 101.4) et de la delivrance de l'adolescent de Mytilene (nO 9)
DJOspohs : m Dwspoltm ... , ub£ S. Georgius martyrizatus est. mentionne des Ie debut l'existence d'un tres celebre sanctuaire
ibi ~t corpus e~us et multa m.irabilia jiunt (12). La done, a Lydda: de S. Georges : ce sanctuaire est atteste par ail1eurs (lEi). De
a du se constItuer Ie premwr noyau du recueil des miracles de mome, dans l'aventure analogue du jeune paphlagonien (nO 3 :
S. Georges. Dans la collection d'Aufhauser, on peut regarder ici encore enlevement par des Sarrasins, 'AYIXP'I)IIWV 13.2), on ra-
les deux miracles relates par Adamnanus comme les plus anciens conte des Ie debut que ce jeune llOmme faisait partie du clerge
de ce premier recueil. On y joindra Ie miracle de la colonne de du martyrion de S. Georges au lieudit Pharis (13.4-6) (17).
1a veuve (nO 1). Dans ce recit en eITet, la Palestine depend encore De meme encore, dans Ie recit de meme encre relatif a l'enle-
du basileus de Constantinople : TOil... oIxOIi &IIO~XO~O[1.'ijO'lX~ XIXt dl;; vement du fils du dllx Leon (nO 4) (18), on nous annonce des Ie
[1.d~olllX XeXAAO'; &lIeyerpIX~ ~IXO'~AeUe; Eyvwxwe; XTA (13). Viennent ensuite debut que S. Georges est particuJierement honore dans la region
pour Ie sanctuaire de Lydda-Diospolis-Ramle Ie miracle d~ d'Amastris, et qu'il a un ires beau et venere temple au lieudit
la vision du Sarrasin (nO 6) (14) et Ie miracle de'l'icone frappee « du Fleuve ». C'est aussi dans un celebre temple de S. Georges,
(to) Cf. H. Delehaye, Les legendes grecques des-saints militaires (Paris 1(09) (15) Aucune indication d'origine dans 10 Catalogus codicum hagiographicorum
p. "-6 s. ' , graecorum bibl. nat. Parisiensis (nruxelles-Paris, 1896), p. 37~ s. Oulre diverses
(1~) Cf. Altancr, .Patrolo?ie (3 0 M., 195t), p. 19'1, no 3. homelies ot des tyXW[1.~IX, co ms. contient une sorle d'anthologie de [1.IXp-roP~IX et do
(L) P. Geyer, Itlnera Iherosolymitana (CSEL 39) p. 'lB9 cit6 par Dolchaye I ~LO~ pour les 6, 8, 9, 17 mars, les 1, 23, 25, 26 avril,le 29 juin, les 2 et 26 juillot. Los
p. 46. " ( , . c., trois OIXU[1.IXTIX de S. Georges (nOS 1-3 do Aufhauser) suivent immildiatement 10 [1.IXP-
(13) ~ P. 3.1-3 Auf~., d'apres Ie faris. 1GOr.. Dans les paralleles,le Vat. 1190 donne TUPWII de co saint. II n'y a apparemment pas d'autres ElIXu[1.IXTIX dans ce recueil.
~II TO~I;; [1.€peO'~ 't"'I)~ ~UpLIXe; XO(Q'TPOII eO"r! Aey6/1.F;IIOIi 'PeX~~WII (p. 2 Aufh (16) Cf. Dig. saints mil., p. 49, avec renvoi a CIG 890. Rien dans P. W. s. v. Myti-
In fine), Ie Jo~saphalOn de; XtXO'TPOIi Aey6[1.elloll 'PeX[1.eA (p. 3 Aufh., in fine). Rabdio~ lene, XVI 1411-1427 (n. Herbst).
est pour ~abhon (Syn. G., cf: AUfh. app. cr. p. 2), et Rablion cst pour Rumpli,l'uno (17) Rien dans P. W. ni a Pllaris ni dans l'article Paphlagonia, XVIII 2,2"86-
des graphws, sous les Sarrasllls, de Hamle idcntific a Diospolis cf no G p 66 fi 2550 (Huge-K. Bittel).
(d'aprcs 10 Joasaph.) : d~ TI)II Ll~60'1l'OA~II, TI)v 01l'OLIXIi o[ ~IXPIXX'I)~Ot 6I1o[1.tXto~1I 'Pe I~ (18) La scene se passe encore en Paphlagonie. La Mosqu. 381 (1023), suivi par
1l'A~. On rotrouvc Hemph dans Ie mome no G du Joasaphaion (p 78 fin) et I' o n [1.a Aufhauser, dit ell Tn 1l'ep~xwp(}l T'ije; 'A[1.IXO'TpL~OI;; (19.1), de meme Ie Joasaph. ell;;
RamIe, sous la forme 'PeX[1.eA, dans 10 no 1 du Joasaph. cf. (au ba~ des pag' cs) Il 3 t 'rli 1l'epLXWplX T'ije; 'A[1.IXO'TpL~OI;; (19.7, bas de la page). Le lieudit est (Mosqu.) til
~"719~'rtl
il.', t '
~ ., .-. ou co a se r~ppor e a la mome Diospolis (Hamlc fut, comme on sait,
.. , 'r61l'C» T~lIt AeYO[1.€IIC» TOU IIoTIX[1.ou ~TO~ TOU Olx~IXxou (t 0.3 s.) = (Joasaph.)
a 2,,, km. de Lr~da, la capital: ~rabe do la Palestine, fondee on 71 G par Soulclman, dl;; IXthov YOUII TOil 'r61l'0Il, 1l'A'I)O'LOIi TOU 1l'O't"IX[1.ou OIiO/1.IX~O[1.ellou 'Ix~IXx61;;
fils de AbdIJlmoh~, cf. ~bol, GUide Syrie-Palestine (,1032), p. 557). La formo la plus (19. 7 s., has). Aucun de ces noms en P. W., l. c. 11 est Ilotable que ce miracle peut
aberrante pour DiO~p.olis-Hamle est "A/1.1l'eAo,;, quo donne Ie Vat. 11;)0 (XVIO-XVITO s.) Nre date, grace a UIle indication du Joasaphaion (23.1 s., bas de la page) : 0 ~e ~IXO'~Aeul;;
dans Ie reCit de la~ VISIOn du Sarrasin (nO G, p. 65.7 8S.) : Ell Tn !~[q; 1l'6Ae~ 1)11 XIX),OUO'~II <I>wx51I;;, we; ~IXO'~AeUe; (mou ~noll T6Te T'ijl;; KWIIO'TIXII'r~1I01l'6Aewl;;. II s'agit de
01 ~IXPIXx'I)yot 't"() !~L.q;. ~~IX),exT.C:) ~'A[1.m:Aov.... EO'T~ ~E: Exer IIIXOe; [1.€yIX<; XTA. Nikephoros Phokas, 963-969 (Ostrogorsky, 238-21,;)). Insolence des Bulgarcs
(11) Le lieu est prOClsel!llJnt llldlque, cf. nole prcc6dcnlc. sous SOll rogne, ostl'ogorsky 242.
266 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAIN'l' GEOHGES 267
en Paphlagonie encore (€V 't"0 6e[Lcm TIj~ rrcx~Acxyovtcx~ 103.1, pas anMrieur au IX e siecle (nO 10, De libo, p. 103.2, bas de la
bas de la page), au lieu dit {Dcx't"puv6~ (19), qu'est accompli Ie page) (23). L'enlevement par les Bulgares du fils du dnx Leon
miracle de l'omelette (nO 10). Et enfin Ie recit de la delivrance a eu lieu au XC siecle (24).
du paphlagonien Manuel (nO 11) nous met aussitot en contact Que dire maintenant des miracles isoles? Le jeune My tile-
avec un O'e7t't"6't"cx't"0<; vcx6<; de S. Georges, sis au lieudit Didia, nien du nO 9 est enleve par des Arabes et emmene en Crete
aux alentours de Ia metropole de Gangra (20). Voila, comme je (01 TIj~ Kp~TIJ~ 'Aycxp'I)vot, p. 101.4) : la Crete a ete conquise au
disais, un fait remarquable : cinq des « autres )) miracles sont IX e siecle (2~), c'est done Ie terminns post qnem. Le miracle des
etroitement lies a un centre de culte de S. Georges, et quatre bceufs de Theopiste se passe en Cappadoce « au temps de notre
d'entre eux (nOS 3,4, 10, 11) sont lies a un sanctuaire de Paphla- tres pieux empereur Theodose )) (nO 5, p. 44.3 s., bas de la page).
gonic, de cette Paphlagonie dont on nous dit (nO '1, p. 18.2 ss.) On croira diilicilement qu'il puisse s'agir de ThCodose I (379-
que ses habitants brulent de foi et de ferveur a l'egard du mar- 395) ou de Theodose II (408-450), s'il est vrai que Ie cnlte de
tyr Georges, en sorte qu'ils ont construit en son honneur de S. Georges n'est pas atteste avant Ie VIC siecle (26). On ne pensera
nombreux temples, qu'ils sont assidus a s'y rendre et a y cele- guere non plus a I'insignifiant Theodose III (715-717). Tout
breI' ses fetes et panegyries. Comment ne pas croire que les recits porte il croire que Ie nom de I'Empereur a ete simplement con-
de ces miracles ont flouri aut our de ces sanctuaires, comment trouve. Quant aux miracles relatifs a S. Georges de son vivant
meme refuser d'admettre une sorte de recueil « paphlagonien? )) (dragon et vierge nO 12, rencontre du demon nO 13, ceinture
On aurait donc en premier Ie recueil de Lydda-Diospolis-Ramle, nO 14, vision du saint nO 15), on n'en peut strictement rien dire,
commence probablement des Ie VIC siecle, continue sous I'oc- car il cst convenu que ces recits de Ia jeunesse du saint s~nt,
cupation sarrasine (21). Puis, a ce recueil « diospolitain )) comme les Acta memes, do pures et tardives fantasmagories.
s'ajoutent, eux aussi lies a des sanctuaires, soit des miracles Bornons-nous it citer Ies Bollandistes (27) : « Sunt quibus visa
isoles (nO 9 : Mytilene) soit meme des recueils, comme Ie recueil sint Acta graeca latinis meliora. Reapse bona nulla sunt neque
« paphlagonien )) qu'il me parait qu'on doive supposeI'. tolerabilia... Hanc autem (28) cumulum ineptiarum merito
Ce recueil suppose, paphlagonien, est posterieur au diospoli- dixeris, nec satis cst apertissima inde mendacia tollere ut ad
tain. Le pelerinage a S. Michel a ChOnal (pres de Colosses en historiae veritatem reducatur. ))
Phrygie) ne semble pas avoir existe avant Ie VIlle siecle (nO 11,
p. 108.18 et passim) (22). Le « theme )) de Paphlagonie n'est
3. Caractere des miracles de S. Georges.
(19) Manque en P. W., l. c.
(20) Didia manque en P. W., l. c., mais Gangra est bien connu, cf. P. W. VII 707, Theele etait generalement la patronne d'une ville et de tout
no 1 (Ruge), XVIII 2, 2541 s. Ie pays avoisinant, et par suite les miracles qu'elle faisait cou-
(21) II faut y joindre - je m'en aper~ois apres coup -Ie miracle 8 (de milite
interfecto). Un officier, envoye en expedition contre les Sarrasins (01 'Aycxp'I)vot vraient une grande diversite d'especes : il y a.vait la sans doute
93.3, bas de la page) €V 't"ot<; O'uptcxxot<; [Lepe:O'tv (93.2), envoie son ordonnance des gu6risons, mais aussi Ie secours c~ntre des ennemis, et des
au pres de sa femme avec de I'argent. Apres trois jours de marche, Ie soldat passe la
nuit chez Ie gardien (7tpoO'[LOVOCpto<;) d'une eglise de S. Georges; celui-ci l'assassine (23) Ostrogorsky, p. 173 s.
et Ie d6pouiIIe. Cette meme nuit, la femme du soldat rove que son mari est en grande (2") Cf. supra, n. 18.
detresse. Le jour venu, eIle va, portant huile, encens, cierges et autres offrandes, a (25) Ostrogorsky, p. 172 ot n. 2.
l'eglise (locale) de S. Georges, remet ses offrandes au gardien de cettc egIise, et va se (26) La plus ancicnne legende date peut-titre deja du V O siecle, cf. Delehaye, Saints
prosterner 7tpo<; 't"~v Mpvcxxcx, ~v6cx 0 &yto<; xcx't"exe:t't"o (95.11 s.). Le lieu oil habite militaires, p. 51 et 69 s. Mais Delehaye note (p. 70) : « La premiere 16gende, teIlo
cette epouse n'est pas indique, mais, sauf translation de reJiques au invention d'un qu'elle nous est connue, se signalait comme d'eIle-memo il la defiance des fideles ».
faux S. Georges (cf. Delehaye, Saints militaires, p. f,8), ce doit etre normalemen t La Passio de S. Georges cst a l'Index dit de Gelaso (vr· s.), Prcuschen, Analecta,
Diospolis. p. 155, no 56.
(22) Narratio de miraculo ... Chon is patrato cd. Max Bonnet (Paris, 1890), (27) Martyrologium Romanum (BruxeIles, 19',0), au 23 avril, p. 152.
p. XXXVIll S. ; H.-G. Beck, Kirche ... im byz. Reich (Munich, 1959), p. 171 S. (28) Scil. la version latine de la Passion de S. Georges.
268 COLLECTIONS GRECQUES DE I\1IHACLES SAIN'!' GEORGES 269
sortes variees d'assistance, meme l'aide a. des hommes de lettres bouger. Ils donnent chacun de 10, petite monnO,ie - comme prix,
en mal d'idees. Come et Damien, Cyr et Jean, etaient essentiel- je suppose, de l'encens - meme impossibilite. Ils donnent en
lement des guerisseurs. Georges, lui, est un soIdat. Des lors, commun un sou d'or, rien ne change. C'est seulement quand
iI est naturel qu'un assez grand nombre de ses miracles concerne ils ont donne chacun un sou d'or, soit quo'tre sous d'or, que
des cas de delivrance. Ainsi Ie plus celebre (12), accompli par l'empochement cesse. Sortant alors, ils disent : « Grand saint
Georges de son vivant : 10, vierge delivree du dragon. Ainsi les Georges, tu es bien apre au gain (xvL7ta) quand tu vends tes
quatre miracles posthumes relatifs a. des prisonniers, captifs omelettes, nous ne t'en acheterons plus », mot repete presque it
soit des Sarrasins (3, 9, 17), soit des Bulgares (4). Deux traits 10, lettre par Ie militaire du nO 19 : « So'int Confesseur ... , tu es
sont communs a. toutes ces legendes : d'une part Georges, ap- bien dur et apre au gain (avarus) quand tu exiges Ie prix du
paraissant soudain, saisit Ie captif esclave alors qu'il est en cheval ». II n'est pas it croire qu'un recit copie l'autre, trop de
plein travail (17 fait exception, Ie mansionaire est dans un details different : on doit avoir lit plutot un theme de folklore
cachot), d'autre part il ramene « en un clin d'roil », sur son cheval qui se promene de recit en recit.
blanc, Ie prisonnier soit chez lui (3,4, 9), soit au lieu meme d'ou Un troisieme type est constitue par les miracles de vengeance.
il avait ele enleve (17). A ce type se rat tache aussi Ie nO 19, II comporLe deux especes. au bien Georges se venge contre un
qui est un miracle de preservation: un militaire promet a. Georges sacrilege qui a outrage une de ses images, soit en til' ant contre
son cheval s'il est sauve des perils de 10, guerre, et Georges, en elIe une fleche (2, 7), soit en lui donn ant un coup de lance (18),
fait, Ie preserve. cette premiere espece comprenant eIle-meme deux sortes dis-
Mais ce miracle 19 ressortit aussi a. une seconde categoric : tinctes, scIon que Ie coup able meurt. (2) ou se repent et se con-
10, punition de celui qui, ayant fait une promesse, ne l'accomplit vert it (7, 18). au bien Georges venge 10, mort d'un de ses fideles
pas (5, 19), ou qui, ayant cause un dommage au saint, ne Ie (en 8, c'est un militaire 1) miserablement assassine, it cause de
dedommage pas en suffisance (10). Theopiste (5) a perdu une l'argent qu'il porte, par un prosmonaire (8), ou encore il empeche
paire de bamfs, il pro met it Georges, s'il 10, retrouve, un des au dernier moment que son fidele soit tue par des brigands (11)
bamfs. Les bamfs retrouves, il sacrifie un chevreau, puis un et il se vengo sur ceux-ci en les faisant peril'. Dans Ie premier
mouton et un agneau : chaque fois Georges se fache. II ne s'apaise cas, Ie soldat est ressuscite comme 1'0, ete Ie betail de Theopiste ;
enfin que si Theopiste lui saerifie ses deux paires de bamfs, dans Ie second, Ie pieux Manuel est amene a cheval en un clin
plus tout ce qu'il a de petit hetail, moutons et porcs. Alors il d'roil au lieu ou il devait aller (l'eglise de S. Michel a ChOnal),
vient au repas, et ensuite, genereusement, ressuscite toutes les ce qui rappeIle l'un des traits caracteristiques des miracles de
betes. Le militaire qui a promis son cheval (19) l'aime trop pour delivrance.
s'en separer, et il offre, it 10, place, vingt sous d'or, Ie prix du Deux autres miracles (1 et 6) constituent chacun une espece
cheval. Sorti de l'eglise et remonte it cheval, il ne peut bouger. a lui seuI. L'un (1) est un miracle de gentillesse. On restaure
II rentre, offre dix autres sous d'or : mome scene, trois fois 1'0- l'eglise S. Georges it RamIe, il faut des colonnes, Ie maitre
petee. C'est seulement quand il a. offert soixante sous d'or, plus d'rouvre va en chercher en un lieu eloigne pres de la mer. Or
Ie cheval, que Ie lien magique se derail. Sauf qu'iJs n'avaient une veuve, par pieLe, veut offrir l'une de ces colonnes. Le maitre
pas fait de promesse, toute pareille, jusque dans Ie detail, est d'reuvre 10, refuse, fait embarquer sur des radeaux celles qu'il a
l'histoire des quatre mo'rchands qui derobent a. l'eglise une ome- choisies. La veuve se plaint au saint. Celui-ci apparait, fait
lette qu'un petit garQon, exauce par Georges, lui avait apportee. glisser la colonne jusqu'a 10, mer, ou, miraculeusement trans-
Etant entres it l'eglise, ils voient l'omelette : « Ie saint n'en a. portee, eIle arrive au but avant meme Ie maitre d'reuvres et son
po,s besoin », disent-ils, « nous lui donnerons it 10, place de l'en- ehargement.
cens ». L'omelette mangee, ils veulent sortir : impossible de L'autre miracle (6) est ce qu'on pourrait appeler un miracle
270 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEORGES 271
theologique, on eut dit au xvr e siecle un miracle de la « Presence chretiennes, lui disent : « Que pensais-tu donc faire, que tu aies
Reelle ». Le debut semble se rapporter a notre troisieme type, voulu tirer sur l'image de S. Georges? » II mande Ie pretre,
la punition d'un outrage envers Ie saint. Un noble Sarrasin fait lui dit : « Qu'est-ce donc que ce tableau que tu inV'oquais? »
entrer ses chamelles dans l'eglise de S. Georges it RamIe, et, Le pretre repond (91.9 ss.) : « C'est Dieu que j'invoquais, Ie
du haut de la galerie ('t"ck X~'t"1)xou!J.€V~, 't"0 XM1)XOU!J.EVOV), il les Createur du ciel et de toutes choses visibles et invisiblos (cf. Sym-
regarde manger. On s'at.tend a ce qu'il soit puni; mais il n'y a bole do Nicee), ot non pas Ie tableau, comme tu dis. » Lo Sar-
pas de punition (29), bien au contraire iI est favorise d'une extra- rasin demande alors : « Qu'est-co alors que ce saint Georgos,
ordinaire vision, et il est bien evident que cette vision est Ie qui a un tol pouvoir bien qu'il ne soit pas Dieu? » Sur quoi Ie
propre sujet du recit, comme I'indiquent les titres du Vati- pretre se lanco dans tout un developpement, evidemmont ins-
canus 1130 (7tEpt 07t't"~0"[~';;) et du Joasaphaion (7tEpt 'rou ~~p~x1)vou pire par Ie 2 e Concile de Nicee (787) (30), sur Ie caractere propre
(mOll dl)E 't"~v 07t't"M[~V). Le pretre desservant en offet dit la messe, du cuIte des Images (je resume) : « Nous nous faisons une repre-
arrive a la consecration, et Ie Sarrasin voit alors, sur l'autel, sentation du saint, et, quand nous Ie voyons sur cetto represen-
un petit gar ((on decoupe en morceaux sur Ia patene, cependant tation, nous Ie saluons et venerons (7tpocrxUVOU!J.EV), tout comme
que Ie pretre fait couler son sang dans .Ie calice. L'auteur du toi, si tu vois quelquo chose qui ait appartenu it tes morts,
recit a nettement conscience de Ia valeur du miracle. Lo Sar- tunique, voile, vetomont, tu Ie baises et pleures et l'approches,
rasin ayant demande au pretre : « N'y a-t-il rien de reel en co de tes yeux, commo si tu voyais Ie mort lui-meme ... Nous
que j'ai vu? », Ie pretre repond (72.7 ss.) : « Si fait, messire, Ia de memo, nous nous raisons representer les saints sur des ta-
chose est bien reelle, nous croyons que Ie pain et Ie vin, quo bleaux, des murs, des etoITes, et nous saluons et venerons ces
nous oITrons, sont Ie Corps et Ie Sang de Notre Seigneur Jesus- imagos, non pas comme des diellx, loin de nOllS cette pensee (oux
Christ, Ie Fils du Dieu vivant. Mais ce que tu as vu, nul autre 00';; OEOU';;, !J.~ ytVOL't"O 92.5), mais comme des figures des serviteurs
jamais ne l'a vu que Ie Seigneur qui doit juger 10 mondo ... de Dieu, et les saints, par ces images font des miracles. » Soyons
Meme les Peres les plus illustres, Basile, Gregoire Ie Theologion, assures que 10 brave Sarrasin n'en demandait pas tant, et qu'on a
Jean Chrysostome, n'avaient de ce mystere qu'une vuo spiri- ici un reHet de la fameuso Querelle.
tuelle, ils ne Ie voyaient pas de fa((on sensible (je resume). »
Sur ce, Ie Sarrasin se convertit, est baptise, retourne proclamer Trois miraclos enfin (13-15), tous trois relatifs it Ia jounesse
sa foi devant les Sarrasins ot subit Ie martyre. Do portee theo-
de Georges, ne ressortissent a aucune de ces categories. Deux
10gique aussi, et contemporain de Ia Querelle des Images ou d'entre eux (14, 15) confirment Ie jeune homme dans la grandeur
posterieur a cette Querelle, est Ie miracle 7, qui commence,
de sa vocation de thaumaturge et de martyr. II jouit d'une vision
cette fois encore, comme un miracle du troisieme type. Un extraordinaire (15), superieure encore it celles dont ont ete favo-
Sarrasin entre dans une eglise de S. Georges; iI y a la, au- rises Isale, Daniel, Paul et Etienne (145.6 ss.), OU Dieu lui-memo,
des sus de l'autel, un tableau du saint; Ie pretre, en train de dire lui annon((ant son futur martyre, l'assure qu'il sera Ie premier
la mesee, fait des inclinations (XEXUrpW';; 90.8); Ie Sarrasin, dans Ie Royaume des cieux (~o"E~ 7tpw't"o,;; tv 't"'Ii ~~O"LAdtl' !J.ou
croyant qu'il adore I'image, se moque (( Voyez ce fou », 't"OV
143.2 s.). L'historiette releve du genre des Apocalypses. Mais
~~oXov 90.10), et, prenant son arc, tire sur l'image une flecho.
il est notable que Georges, apres avoir jeune quarante JOUl'S
La fleche revient a lui et Ie frappe a Ia main. II retourne, souf- (138.5 s.), a demande lui-meme cette revelation (t!J.rp&v~0"6v !J.0~
frant terriblement, chez lui. Ses petites servantes, qui sont
(30) Noter les expressions &0"7t~~6!J.EO~ x~t 7tpoO"XUVOU!J.EV 91.26 s., 92.2, 4. s.,
(29) Du moins pour Ie Sarrasin; les chamelles, elles, sont punies : elles s'afTaissenL ou 7tPOO"XUVE!V est Ie terme propre pour Ie culte des images, par opposition
Il. terre et meurent (m;O"ouO"~~ t~6rp1)0"~v 06.20). Lo Sarrasin admire ce O"1)!J.Etov au culte de latrie (A~'t"PEUE~V), qui n'es! dil qu'it Dieu.
(lb.).
';/'--...-- -
(1) Je traduis Ie texte du ms. Paris. 1 G04, saec. XI, fo!. 170 vo-177 Vo (ef. Pro!.
XIIIe s.) imprime au haut des pages pour les miracles 1-3, p. 2-18. J'indiquerai, a
I'occasion Ies variantes de S = Synaxarion ap. Paris. Coislin. 223, de 0 = Vatic.
Ottob. IdS, du ms. Vatic. 1190, an no 1542 (cf. Pro!. XIV) et du ms. Athous Joasa-
phaion 308 (cf. Pro!. VII-XI), imprimes au bas des memes pao;es.
(2) EV TOr~ (.I.EPEO"t T'ii~ l:Up!lX~ XrXO"TPOV EO"T! Aey6(.1.evov 'prX~awv Vat. 1190
'PrX~AWV S 'APrX~AtOV 0 d~ TOV T6TWV T'ii~ l:up!lX~ d~ XrXO"TPOV Aey6(.1.evov ·pat.J.eA
Athous Joasaphaion.
(3) Litt. « Ia maison de prierc », euxT1)ptOV o!xov
18
...
274 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINT GEORGES 275
pour Ie martyr, lui avait fait vreu de fournir a ses fl'ais une tres
belle colonne pour son eglise. Ayant trollve une colonne qui ne avait inscrites 10. main du saint. L'officier imperial prepose a
Ie cedait en rien a ce qu'elle desirait et l'ayant achetee, elle la construction vit ces lettres, reconnut la colonne, et, dans
s'approcha de la mer et se mit a supplier. [5] l'ofIicier d'em- sa grande admiration de la foi de la vouve, il fut comme hoI'S do
barquer sur Ie radeau cette col?nnc aU~~l on plus. des uutros. lui-meme, et il louait Dieu ot celebrait 10 pouvoir du martyr.
Mais il repoussa so. demande, dIS ant qu II ne fallult pas meIer Sans rotaI'd aucun, il accomplit l'ordre qui lui avait ete donne
a Ja liberalite de l'Empereur Ie don d'une veuve, ni charger sur par 10 saint au moyen de ces divines lettres (5).
Ie radeau construit aux frais de l'Etat Ie pesunt cadeuu d'une [8] Quunt a nOlls, upres avoir implore Ie grand Athlete de
femme privee. Iliaissa donc cette colonne sur lu place, et, uyant nous secourir all plus vite, nous allons passor a un autre recit
embarque seulement sur Ie radeau les colonnes imperiales, il do sos miraclos.
mit a la voile. Cependant la femme, en se voyant ainsi mepriseo
avec son cadeau, disait au saint avoc grands gemissemonts : 2. Autre miracle du megalomartyr Georges, sur des Sarrasins (1).
« Helas, saint martyr du Christ Goorges, pourquoi n'uf:-tu pas
accepte ce puuvre mien don que voici, a l'imitaLion de ton Dans cotte memo bourgade OU nous avons dit qu'eut lieu Ie
Maitre? Pourquoi n'as-tu pas suLisfait mon creur a cotte occu- precedent miracle, les Sarrasins un jour dresserent leur camp,
sion? Ne suis-tu pas combien est grande la confiunce que j'ai apres avoir fait prisonniers tous ceux qu'ils avaient rencontres.
en toi? Ne sais-tu pas combien ardent [6] mOll amour pour Ils y fixerent leurs tentes et se reposaiont la, se livrant a des
toi? Maintenant je sais que tu es en courroux contre mon ame (:1). beuveries ot a des orgies. Et quelques-uns d'entre eux on vinrent
Maintenant je sais que tu m'as depouiIUie de to. protection. » a un tol degre d'impudence qu'ils dejeunerent a l'interieur
Alors qu'elle se lamentait ainsi, voici que lui apparait un [10] de cetto admirable eglise OU gisait Ie corps glorieusement
soldat a cheval, qui lui demanda Ia cause do tunt de pleurs. triomphant du martyr, ct, une fois, ivres, y dormirent, puis
Quand olle Ie lui eut dit, il repondit : (( A quol endroit do l'oglise jouorent aux des. Ensuito, tendant leurs arcs, ils langaient leurs
voulais-tu placer cette colonne? » (( Comme seconde colonne, traits contre les images des saints placees au haut de l'eglise.
Seigneur, dit-elle, dans 10. travee de droite. » L'apparition alors L'un des prisonniers, ayant pris liberte de parole devant eux,
descendit de choval, et de son doigt inscrivit sur la colonne , leur dit qu'ils ne devaient pas agir si vilainement contre les
selon les propres termes de la femme: (( Que cette colonne de la saints. (( Puisque, dit-il, Ie martyr, dont cette egliso se glorifie
veuve soit placee la seconde dans la travee de droite de l'oglise ». de porter Ie nom, a ete un soldat invincible, il peut jusqu'a
[7] Puis il dit a la femme: (( Pendant que je soulove un bout ce jour punir ses ennemis de leur mechancete. » Eux, pris d'un
de la colonne, pousse toi-meme, femme, l'autre bout. » Fl'appee tres joyeux eclat de riro, repondirent a cet homme : (( Et loquel
de stupeur elle saisit l'autre bout, et aussitoL olle vit la colonne est-ce donc de ceux-ci? Indique-Ie nous. » Alors il leur mont I' a
qui prenait sa course vel'S Ia mer. Sur Ie champ, celui qui lui du doigt, placeo en haut, l'image du saint fixee au monument
Hait apparu sous I'aspect d'un soldat disparut. Alors, l'emplie de en mosalque tout a fait brillante (2), rocouverto d'une cuirasse
crainte et d'emerveiIIement, assuree que c'etait Ie saint, la femme militaire, [11] chausseo de cnemides d'airain, tenant en
rentra chez eIle, remerciant Dieu et Ie saint martyr.
(5) Le ms. Vatic. 1190 ajouto (p. 8.12 s.) : • Cotte colonne se dresse jusqu'il. au-
Cependant la colonne, transportee sur la mer, avait devance jourd'hui pour rappeler sans cesse Ie souvenir de la femme et pour qu'on s'6merveille
les colonnes du l'adeau imperial, et elle gisait sur Ie rivage, du miracle (OC£VIX't'O~ cod., mais [.I.lXp't'Up~xou OIXU[.I.OC't'O<; S) >.
(1) Une histoire analogue est racontee au miracle 7.
portant, comme si on les y uvait gruvees, les lottros qu'y (2) dx6vIX 1)i1)<pr(J~\I d.V!;(J't'1)AC!)[.I.eV1)V 10.13. Lo ms. Athous Joasaphaion a
(11.3 ss.) 't'1JV dx6vIX 't'ou [.I.C£p't'Upo<; 01t'OU €(J't'ex!;'t'o opO~, xlXt ~'t'O\l €~C!)yplX<p~(J[.I.eV1)
(~) 1t'po(JWXO~(JIX~ 't"ii ~C!)'ii [.I.ou 6.1. Puroment hiblique. [.I.~ 1)i1)<p[et 1t'oAM Aetl1.1t'pC£.
SAINT GEORGES 277
276 COLLEC'l'IONS GRECQUES DE :MIRACLES
bourreau, mais, I'ayant prive de son service plus intime, il
main une lance guerriere et jetant un regard foudroyant sur I'envoya pour assister Ies cuisiniers, ayant donne ordre qu'il
ceux qui lui font face. Aussitot l'un des Sarrusins, ayant dirige portat I'eau et coupat Ie hois. Et ce jeune homme, considerant
en droite ligne sa javeline contre cette venerable image, Ia fit de quel beau service du martyr il etait tombe it queI triste es-
partir. Mais Ia javeline, ayant devie de Ia course droito, revient clavage des per fides, ne cessait de supplier avec Iarmes Ie saint
en arriere, et, ayant frappe celui qui l'avait lancee au milieu du d'avoir pitie de lui en sa misere et de tendre une main secourable
creur, s'enfonQa dans Ie dos. Et comme il etait aussitot tombe it celui qui avait hesoin de son secours.
et avait expire, les autres ennemis vi rent que l'image du saint Alors donc que Ia con fiance du jeune homme dans Ie grand
avait etendu Ie bras. Pris d'une terreur extreme it cette vue, serviteur du Sauveur croissait de jour en jour et qu'il ne pou-
Ies Surrasins s'enfuirent. Comme frappes d'un gluive, Ies uns vait se rassasier de pleurer, un jour que, tard au soil', il allait
perissaient dans leur fuite, d'autres, se foulant mutuellement vcrs sa couche et passait Ie long de la porte de Ia cour, il entendit
aux pieds, perdaient leurs miscrahles vies, d'autres en fin, aux- quelqu'un qui, du dehors, [15] I'appelait par son nom.
quels il fut permis de se procurer [12] par Ia fuite Ie salut, « Qui es-tu, Seigneur? » diL-il. L'autre disait qu'illui etait connu
se disperserent dans leurs patries, ou ils celchraient Ie pouvoir du et qu'il desirait Ie voir. Le jeune homme, sans aucune hesita-
saint. Dc ce moment, aucun ennemi n'osa plus s'approcher de tion, tout ctonne seulement que, se trouvant au dehors, I'autre
ce saint sanctuaire, muis c'est avec tout respect et grande l'eut vu qui etait au dedans, entrouvrit Ie portail. II voit un
crainte et reverence que, lorsqu'illeur faut passer Ie long de cette homme it cheval, jeune d'age, resplendissant de beaute. Apres
eglise, iIs s'avancent en magniflant Ia puissance de ccIui qui y I'avoir salue, il chcrcha a savoir plus exactement si, de quelque
demeure. maniere, I'autre pouvait Ie reconnaitre. Mais I'autre, comme
Quant a nous, celebrant en ce cas aussi Ie Dieu qui par Ie apparemment pour I'embrasser, se pencha. Et tandis qu'il Ie
saint accomplit ses miracles, decrivons Ie mieux possihle un saisissait, l'ayant souleve de dessus terre, il Ie mit sur Ie cou
autre exploit dehordant de bonte de notre valeureux heros. du cheval. Ayant IacM les renes au cheval pour Ia course, il
partit au plus vite. Au hout de peu de temps, ayant fait des-
3. Autre miracle, sur le jeune homme qui avail elf! emmene loin cendre du cheval Ie jeune homme, Ie prenant par la main il Ie
de la Syrie. conduisit do.ns une certaine demeure. Puis il I'embrassa et dis~
parut. Le jeune homme donc, dans Ie grand embarras ou Ie
[13] Comme une armee des Agareniens avait fait un jour plongeo.it l'affo.ire, et comme toto.lement paralyse par 10. stupeur,
une incursion sur Ie territoire de Ia Paphlo.gonie, qu'ils avaient finit par s'endormir, sans savoir ni ce qui lui etait arrive ni Ie
pris beaucoup de prisonniers et rassemble un but in enorme, il lieu ou Ia mo.ison OU il se trouvait.
arriva que fut au nombre des prisonniers un jeune homme Au petit jour, un homme etant entre dans Ia [16] maison
appo.rtenant au clerge du martyrium du suint situe au village avec une lampe, Ie jeune homme I'aperyut et, s'etant Ieve, alIa
nomme Phatris par Ies habitants du lieu. Tous les prisonniers it sa rencontre. Quand l'homme l'eut vu vetu de Ia robe des
ayant donc ete conduits vel'S Ie chef impie de l'armee, et les Agareniens, so.isi d'effroi et souPQonnant que c'etait un voleur,
uns ayant ete I'ouvrage du couteau, Ies autres Iivres par Ie chef il fut trouble et se mit it crier. Pareillement ce jeune homme,
en esclavage, ce jeune homme, comme il paraissait plus beau it Ia vue de l'intrus, qui avait l'apparence d'un Chretien et qui
que les autres, fut place comme esclave uu service du chef. eto.it vetu de la robe du clerge, frappe lui aussi de stupeur, se
[14] Quand donc Ie maitre de ce jeune homme fut rentre chez mit a crier. Des individus arriverent en courant, s'emparerent
lui, il essaya de lui faire apostasier Ia foi des Chrctiens. Comme du jeune homme et lui demanderent qui il etait, et d'ou, et com-
pourtant il n'arrivait pas it Ie persuader, il ne Ie livra pas au ment il etait entr6 litl tOl,lt9l'l portes fermees. Tout tremblant,
SAINT GEORGES 279
278 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
nom de Leon, pieux et craignant Dieu, abondamment pourvu
[17] dil .leur rac on t a en b on or d re toute I, . .
ente affaIre. Et comme lIs des biens de fortune. II avait une femme tout a fait digne,
Iarmn arent ' ce q u " l I d 'ISaIt,
leur , leurs vIsages
' ruisselaient de nommee Theophano, qui se conformait a lui quant au choix
a tes,et 11s obs erVaIen
't I ' d u Jeune
es traIts . homme : car ils ap- d'une vie vertueuse. Tous deux avaient voue au saint megalo-
P r enarent pr.esque t ous, comme lUI,' au clerge du martyrium du
saint martyr une foi sans ombre de doute et un brulant amour, ils
d' 't' Qua?d 11s I'eurent reconnu pour etre vraiment celui qu'iI etaient continuellement assidus it so. tres sainte eglise et cele-
d Ism t I, apres
' a VOIr ' ec
'I ate' en louanges du Dieu qui accompliss alt .
braient chaque annee, avec de grands sentiments de tendresse,
e
a . e s mIracle ' .
s par son samt martyr, IIs expliquerent Ia chose so. memoria, s'etant mis sous son patronage et Ie tenant pour
u, Jeune
t homme'. « E< n verI "t'e, d"ISaIent-11s
, c'est ici l'eglise du gardien, protecteur et curateur de tous leurs biens, Ce person-
sam, . martyr Georges, de Iaquelle tu as ete enIeve ' comme priso n - nage etait inscrit dans les registres de l'armee et il se montrait
llIer.
't 't b'» Alors l' • I' •
,evenu a UI-meme, assure que ce qui Hait arrive irremissiblement applique it son service.
e al len reel ' avec eux [8] 1 tous II' se mit en pleurant it
II leur naquit un enfant male; ils lui donnerent nouvelle nais-
1oUer
, Ie S '
Clgneur, et desormais il proclamait tout " Ie temps les
Bance par Ie saint bapUlme, avec une foi sans melange,
mIracles du tres grand Athlophore. [20] dans 10. tres venerable eglise du saint megalomartyr, et,
wus Ie char me de leur amour pour Ie martyr, ils Ie nommerent
4. Recit
, du pr0 d'19leux
. . Ie accompl£. par Ie saint et tres glorieu x
mlrac Georges, Quand Ie petit Georges eut ete sevre, ils Ie confierent
megalomartyr Georges pour un adolescent emmene en captifJite au pretre du lieu, Ie prosmonaire de 10. tres sainte eglise du mar-
et sa UfJe' contre tout espoir (1). tyr, pour qu'il apprit les Saintes LeUres. IIs l'eIevaient, selon
Ie mot de l'Apotre (Eph. 6, 4), en usant de corrections et so-
,Je veux" que
v o u s sac h"rez, 0 congregation amie du Christ, monces inspirees du Seigneur, Ie nourrissaient comme une jeune
samt auditoire
, ,que Ies h a b'It ants d u pays de Paphlagonie ont branche verdoyante, se rejouissaient de sa bonne mine, de son
utne tr~s grande foi dans Ie tres glorieux megalomartyr Georges intelligence, de so. conduile reguliere, et ils suppliaient Ie saint
e qu'Il s l' mment
' d'un brulant amour, en sorto qu'iIs ont bati de lui donner entendement ot de Ie conforter et guider vel'S ce
~n son honneur des eglises majestueuses, qu'iIs s'ompressent, qui est meiIIeur et qui assure Ie salut. Ainsi fortifie par les inter-
ans .Ieur ferveur, de l'y venerer assidument et qu'ils celebrent cessions du saint, comme il etait d'un bon naturel, tres prompt
ses fetes et pa"negyries en toute f01' et rectItude
, ' principalemen t a apprendre et heureusement doue, non seulement l'enfant
c~xq'
.' u~ [19] demeurent en 10. region d'Amastris,, comme Ie etait assidu it l'etude des kUres, mais encore il perseverait,
reCIt qUI suit va Ie mont reI'. resolument et avez zele, dans les prieres de regIe, et du jour et
l'O~li~Si par exemple, en un certain lieudit du Fleuve ou de de 10. nuit, en sorte qu'il se rendit aimable it tous et qu'on Ie
, 1,oakos (2), est consacree au saint une eglise tres belle et cherissait unanimement.
venerable , ou t uso ' accourent avec fO!, obtiennent promp-
ceux qUI Sur ces entrefaites, il survint contre nous, les Chretiens, un
tement leurs demand es. II y aVaIt '1'a un certam
' personnage du tres violent soulevement des peuples de l'Occident, je veux dire
des Bulgares, Hongrois, Scythes, Medes et Turcs, en sorte que
M~~~u~~sI?i~~~~e 4 (P/8.4.0) et I'Bpilogue qui Ie suit (p, 40.42) sont tires du mS non seulement il s'en fallut de peu que les contrees qui les
cf Prol .f!III 'csYtn~, 381, ~oI. 11 ro·1G va, copie en 1023 par Ie moine TMophane'
,
recit, et, I'B s,
'I er ames vanantcs sont tirees d u m,s A t hous J oasaphalOn,
' Cc m~me' avoisinaient ne fussent devastees, mais qu'ils deliberaient
C 92 BU ' pi ogue" se trouvent dans Ie ms, Ambrosianus 192 saec XIV (ante a [21] meme de ravager notre Ville Imperiale protegee de Dieu,
I'BPil~g~~) i~~~i~~n~n~: ~~ c~1 ms, sont jndiquee~ dans I'appdrat d~ Aufhauser, n'eut Me que la bienveillance et la providence du Tout-Puissant
seul que " t d ,( P S < pi ogue du JIJosquensls) p, 1,2.1,1., C'cst do ce dcrnicr
0
2 J Ui ra U1t une partie. n'eut rendu vains leurs desseins. Ceux qui tenaient Ie sceptre
lv(o!,~e ~s, A~hloUS Joasaphaion a (19,7 s,' bas de la page) 'IT),Y1cr(ov ~ou
{) r~"o[lC;'101) xLC(x6~, 0, ,'ITOTOCP.OU des Homains mcttol1t partout it leurs postes ceux qui etaient
-<1--
couches et endormis. A notre reveil, no us n'avons rien trouve. » te montrera quelque chose. » Etant aIle, il trouva la paire de
EIle dit : « Tu ne Ies as pas bien cherches partout it la ronde. » bmufs qui se tenait sur la route et broutait. Plein de joie
II dit : « Crois-moi, femme, nous avons parcouru tout lieu it la [49J et reconnaissant uu saint, il les poussa et ramena chez lui.
rondo, mais nous n'avons rien trouve. » Ayant fixe son regard Sa femme, voulant l'eprouver, lui dit : « Peut-etre n'etais-tu
pas aIle sur cette route?» II dit : « Crois-moi, je 1'avais suivie
(I) Ce miracle est tire du ms. Vatic. 1190, cr. supra mir. 1, n. 1. Aufhauscr donne d'un bout a 1'autre et ne trouvais rien. Et c'est un bon bout
aussi (app.) les variantes du ms. Ambros, 192 (cf. supra mir. 4, n. 1) ot (bas des pages)
Ie texte de Joasaphaion 308. de chernin, il y a plus d'un stade de marche. » EIle lui dit : « Re-
19
290 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEOHGES 291
mercions Dieu et Ie megalomartyr Georges. Maintenant fais alles. Suppose que de ce moment nous ne les ayons plus. < Ne
vite ce que tu as promis. » II dit : « Egorgeons une chevrette, t'en fais pas >, car Ie saint nous los rendra. » Lui pourtant refu-
pour que nous ceIebrions Ia memoria du saint. » Ayant ainsi fait, sait de l'ontendre, mais domeurait sans mangor ni boire, a cause
iIs ceIebrerent Ia fete, pens ant que cela sufIirait au saint. du chagrin qui avait fondu sur lui.
Cette nuit-la, Ie saint lui apparait et lui dit : « Theopiste ! » Cette nuit-Ia Ie saint lui apparut, assis sur un cheval blanc,
II dit : « Qu'y a-t-iI, Monseigneur?» [50] Le saint dit : « Est-ce tenant aussi Ia preciouse Croix, et lui dit : « Homme, tu as un
pour cette chevrette que tu avais a m'inviter? Tu Ie sais bien, demon, toi qui dis que je suis un fantome. » Cependant il lui
est-ce que cette chevrette me sufIit? Fais vite ce que tu as pro- montrait aussi la precieuse Croix et illui dit : « Par Ia puissance
mis, egorge ton bomf et j'arrive. Sinon, tu t'en repentiras. » de mon Christ, si tu ne fais pas comme je veux, je t'enverrai
Au reveil, Ie voila decourage, et il dit a sa femme: « J'ai vu ceci un feu venu [54] de Dieu, et je vous consumerai, toi et ta
et ceci en reve. Egorgeons un mouton et un agneau, Ie saint maison, dans les flammes. » Et comme il lui montrait aussi de
Ies acceptera. » De nouveau Ie saint lui apparait cette nuit-Ia terribles chaLimonts, il lui dit avec menaces : « Appelle-moi
et dit : « Theopiste ! » II dit : « Me voici, Seigneur. » Le saint dit : beaucoup de riches et de pauvres pour que tu les serves a table. »
« Est-ce pour ce seul mouton et cet agneau que tu avais a m'in- Au reveiI, saisi d'une grande crainte, il s'ecria a voix forte :
viter? Ne [51] sais-tu pas que je suis comte, et qu'un peuple « Je ferai ce que tu ordonnes, Monseigneur, non seuIemont j'egor-
immense me suit? N'est-ce pas de toi-meme que tu m'as dit : gerai mes betes, mais moi, et tout ce que j'ai, nous sommes a
'J'egorgerai l'une des betes au joug et j'inviterai Ie saint'. Je toi. »
disais naguere (50.3) que j'aurais amitie avec toi en me conten- II donna ordre a ses esclaves et a ses parents, en ces termes :
tant d'un seul beeuf, mais j'en ai assez de toi. Si tu n'egorges pas « Egorgez toutes mes betes : car j'ai vu en reve ceci et ceci. »
tes deux paires de beeufs et tout ce que tu as de moutons et de Eux se disaient en eux-memes : « Est-il peut-etre devenu fou, pour
porcs, je n'irai pas dejeuner chez toi, mais je prierai Ie Seigneur, qu'il veuiIIe detruire son honneur? » Cependant, egorgeant les
et toi et ta maison, je vous consumerai par Ie feu. » moutons, les porcs et ses paires [55] de beeufs, ils preparerent
Au reveiI, saisi d'une crainte extreme, iI s'ecrio a voix forte: Ie dejeuner ot du Yin, pour qu'iI y en eut en suffisance pour Ie
« Helas, que fairo? Qui est celui [52] qui m'est apparu en repas. II invita des pauvres et beaucoup de gens de son village,
Bonge? N'est-ce pas un fantome, et qui se moque de moi, pour et il invita aussi Ies pretres qui du soil' au maLin chantent I'of-
que je perde d'un coup tout mon bien, et que, moi et ma femme, fice canoniaI du saint. Ceux-ci, apres avoir accompli 10. liturgie
nous soyons des pauvres? Ne sont-ce pas la los paroles du saint: dans les nombrouses eglises du saint, vinrent pour Ie dejeuner.
'Egorge toutes tes betes, et je viendrai dejeuner?' Comment Et quand iIs eurent fait 10. benediction, ils s'assirent a tablo, at-
est-il possible qu'un cadavre vienne dejeuner? Je no ferai pas tendant Ia venue du saint.
cola, pour dCtruire mon honneur. Plut au CieI que jo n'eusse pas A cette heure meme il se fit un grand bruit de sabots et un
du tout trouve les beeufs! » Sa fomme Eusebie l'encourageait grand tumuIte. Et aussitot apparurent plus de trente jeunes
par des paroles de consolation, disant : « Dieu te pardonne, de gens a cheval, qui disent : « Notre comte arrive. » Pendant qu'ils
ce que tu penses que Ie saint soit un fantome. Tu exLenues 10 sens Ie disaient, on voici d'autres plus [56] nombreux qui crient :
de la visite du saint. Peut-etre doit-il nous enrichir, comme il on a « Theopiste, Ie comte arrive, SOl'S a sa rencontre. » Etant sorti
enrichi beaucoup d'autres. » II se rasserena quelque peu en son en grande frayeur, il demande : « Qui est-iI, Messieurs? » IIs
ceeur. [53] Sa femme Eusebie reprit : « Monseigneur, suppose lui disent : « C'est un jeune comte. So. race est de Cappadoce,
que nous no les ayons pas trouves. Suppose qu'il y ait ou une et il vient ici pour dejeuner. » IIs lui disent aussi : « L'Empereur,
tempete, et que nos vingt moutons, nos dix cochons s'en soient Ie tenant pour un serviteur utile, non seuloment lui a donne Ie
292 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEORGES 293
titre de comte, mais l'a charge de tout surveiller. » Le jeune Ie saint leur dit : « Chantez it Ia louange du saint. » IIs chanterent :
paysan, frappe de stupeur, dit it I'envoye : « Peut-etre n'aurai-je Georgetheis hypo tMon et Ia suite. Puis ils se mirent it adresser des
ni assez de pain ni assez de Yin pour que ces gens-lit soient ras- louanges au nom du saint, et, quand ils eurent dit « Tres sainte
sasies. » mere de Dieu, secours nous », tous se leverent de table.
[57] Comme il parlait encore, apparait Ie saint sur un cheval Le saint remonta it cheval et dit : « Apportez-moi ici les os. »
blanc, deux jeunes gens tres beaux Ie tenaient de chaque cote, IIs se disaient entre eux : « Peut-etre est-il ivre et ne sait-il ce
et toute une foule se montre Ie suivant par derriere, les uns it qu'il fait. » Theopiste dit : « Peut-etre veut-il avoir pitie de moi. »
cheval, d'autres it pied, et il y avait aussi des hommes de ce vil- Ils apporterent [61] les os et les jeterent devant Ie saint.
lage, criant « Le comte est venu ». Le saint dit : « Salut it toi, Alors, ayant leve Ies yeux vers Ie eiel, il dit : « Seigneur Jesus-
Theopiste, et it tous ceux qui sont avec toi. » Prosternes it terre, Christ, pour qui j'ai lutte, moi ton esclave, que descende ta
ils lui dirent : « Bienvenue it toi, saint de Dieu, notre comte. » benediction sur ton serviteur Theopiste et sa maison, et de meme
Le saint descendit de cheval pour dejeuner et dit : « Me voici, que tu as multiplie les astres du ciel et la poussiere de la terre,
Monsieur. » Et il lui dit : « Comme j'ai appris que [58] tu multiplie tes bienfaits en faveur de ton serviteur Theopiste. »
devais inviter Saint Georges, me voici it sa place, car je m'ap- A ce moment il se produisit une secousse de la terre, en sorte
pelle Georges de Cappadoce. Mais ne te chagrine pas, tu n'auras que tous tomberent sur Ie sol. Et it l'heure meme, tou~es l~s
pas perdu ta peine. » betes furent ressuscitees au triple. Alors, apres aVOlr dit
Theopiste se rasserena un peu et illui dit : « Qu'entrent tous [62] « Soyez saufs », Ie saint disparut de leurs yeux avec son
ceux que tu veux, Seigneur, pour dejeuner. » Georges lui dit : cheval.
« Non pas, ils doivent festoyer, eux, chez un autre soIdat. » A Ia vue du prodigieux miracle, la foule cria « Kyrie eleison »
Et illeur ordonna a tous de partir sur leurs betes, ayant prescrit une bonne heure. Theopiste et sa femme se mirent it se lamenter
que leurs chevaux ne prissent ni foin ni orge. Cependant il et it dire : « Pourquoi n'avons-nous pas embrasse ses precieux
commanda aux deux petits jeunes gens de servir it table. Puis pieds? » Et ils se mirent it crier it voix haute: « Pardonne-nous,
il dit : « Theopiste 1» Uautre dit : « Me voici, Seigneur. » Le comte Seigneur, pour notre folIe ignorance. »
lui dit : « Que tous tes amis s'asseoient ; toi, ta femme et ces deux [63] Puis, ayant trouve la trace de son pied, lit OU Ie sai~t
jeunes gens doivent faire Ie service de Ia table. » Theopiste dit avait marclie, ils ramasserent cette poussiere. Oui, je vous Ie dIS
aux petits jeunes gens : « Voici les cruches [59] de vin. en verite, elle a gueri beaucoup d'aveugles, de sourds, de pos-
Quand elIes auront ete pleinement videes, qu'on ouvre aussi sOdes , de malades frissonnant de fievre et pris de douleurs.
la jarre. » IIs prirent de petits flacons, et plus ils puisaient dans Le hruit de ce miracle se repandit dans toute la region it l'en-
les cruches pour Ie melange, plus elles se remplissaient, et ni Ies tour, au point qu'il parvint jusqu'aux oreilles de notre tres pieux
cruches ne furent pleinement videes ni on ne perQa la jarre, et empereur Theodose. Et Pon glorifia Dieu.
Ie pain servi it table abondait toujours plus, et tous furent lit [64] Theopiste devint fameux dans toute cette contr~e, au
en grande lie sse.
point qu'il lui fut donne des myriades de tetes de het~Il. Ses
Le saint dit au peuple : « Mangez tous les viandes, mais provisions de bIe et de vin ne se comptaient plus. II procrea sept
gardez avec soin Ies as pour Ie martyrion du saint, que personne fils et trois fiIles. Vingt-deux annees de sa vie s'etant ecoul~es
n'en jette un seuI, sans quoi je Ie punirai durement. » Theopiste depuis le depart du saint, il se tondit ses cheveux, Iouant DI~U
dit tout bas it sa femme: « Ne t'ai-je pas dit que non seulement et Ie saint megalomartyr du Christ Georges, it qui gloire et PUIS-
ils mangeront man bien, mais encore nous puniront durement, sance, ainsi qu'au Pere sa,ns commencement, daml les siecles des
moi et mes amis? » Elle lui dit : « Tais-toi 1Cet homme [60] ne
siecles. Amen,
nous a fait aucun mal. » II se tut. Quand tous se furent rassasies,
294 COLLECTIONS GHECQUES DE MIHACLES SAINT GEOHGES 295
6 A. Autre reeit et narration [65] 6 B. Reeit historique de rusalem, ils arriverent il. Ia Les Pl'etres de cette vene-
tout a fait utile sur le Sarrasin Gregoire. tres utile et tres plai- sainte eglise du megalomartyr rable eglise Ie prierent en ces
qui emt aNotre-Seigneur Jesus- sant sous maints rapports, sur Georges. Parvenus il. cet en- termes : « Sire, ne fais pas
Christ et fut martyrise sous le la (Jision qu'eut un jour un Sar- droit, Ie Sarrasin ordonne il. ses cela, c'est un temple de Dieu,
regne de M ermes, qui regna sur rasin, apres qzwi il erut et subit esclaves de faire leur halte dans ne Ie meprise pas, ne fais pas
e~tte seete des Sarrasins en Sy- le martyre pour Notre-Seigneur I'eglise de S. Georges. lIs entrer tes chamelles dans Ie
ne, en Arabie et a Jerusalem. Jesus-Christ. Beni~, perf:, (1a). oheirent il. wn ordra, et, tandis saint tabernacle de Dieu. » Le
Du meme moine Marc (1). Le commandant militaire qu'il etait montO lui-meme au Sarrasin, en homme grossier
Dans Ie district de Jerusa- Nicolas, dit loulus, me raconta eateehoumenion, il commanda et temeraire, ne voulut pas
l~m au ~ays des Cappado- que, dans sa ville, que les qu'on introduisit aussi ses cha- ecouter les prieres des pretres,
Clens (I) II Y avait une eglise Sarrasins nomment dans leur melles, au nombre de douze, mais dit en langue arabe a
consacree au megalomartyr langue AmpeIos l'emir de Sy- pour qu'illes regal'dut manger ses serviteurs : « N'allez-vous
Georges .sur Ia route de Syrie. rie envoya son cousin adminis- il. son habitude. pas m'obeir? » , et aussitot
Or un Jour un Sarrasin, du trer certaines terres hypo the- Bien que Ies pretres de cette ses esc]aves firent comme il
nom de Malmeth, fuyait de qu6es au fort susdit (sc. Ampe- venerable eglise l'eussent prie avait commande. Et soudain,
devant Ia face [66] de son los) (2). II Y a lil. une grande de n'en rien faire, ce Barbare, VOlOl que, [67] par un res-
oncle Mermes parce que celui-ci eglise, ancienne et admirable, qui tout ensemble etait gros- crit divin, les chamelles qui
voulait Ie nommer hecaton- du saint et tres glorieux mega- sier, apres Ies avoir menaces, etaient entrees dans l'eglise
tarque. Ayant ainsi echappe il. lomartyr Georges. Quand Ie renouvela l'ordre il. ses esclaves s'afIaisserent toutes et mou-
la prescription de son oncle et Sarrasin eut vu de loin cette de faire entrer les chamelles rurent. A la vue de ce prodi-
emmene des esciaves avec'ses eglise, il ordonna il. ses esclaves dans l'eglise de S. Georges. gieux miracle, Ie Sarrasin, hoI'S
chamelles et toute une provi- de porter ses bagages dans Ses serviteurs ayant obei il. cet de lui-meme, ordonna il. ses
sion de couvertures, de vete- l'eglise, puis d'y mener ses ordre, il. peine les chamelles serviteurs de tirer hoI'S de
ments. et de vivres, il sortit chamelles au nombre de douze, furent-elles entrees dans l'eglise l'eglise et de jeter au loin les
de nmt. Comme iis s'etaient pour que, de la galerie en haut, du saint qu'elles s'afTaisserent chamelles ainsi tuees. C'est ce
engages dans Ia route de Je- il les vit manger. et moururent. A la vue de ce qu'ils firent.
miracle, Ie Barbare admira la Comme il y avail fete ce
(1) Outre la version en grec
ce miracle ne se trou
d .
. mo erne du Joasaphawn (p. 66 ss., au bas des pages), puissance du saint megalomar- jour-lil. et qu'approchait l'heure
(an no 1568 cf Prol ;;I~u~fans ~eux manuscrits, Ie Paris. 1190, fo!. 211 v o .217 tyr Georges, et il commanda de Ia divine liturgie, Ie pretre
du Paris 1190 est '. . e e Val!e.1130, f. 1·11 (s. XVI· XVII, Pro!. XIV). Le texte
p. 65 ss. 'sur les . a I~~p~~me ~. 6'. ss. sur les pages de gauche, celui du Vatic. 1130 il. ses esclaves [68] de jeter qui devait commencer Ie saint
f
gences je les a' ~ 't l'dro1te. Ces deux textes prcsentant d'assez grandes diver·
I I ra nUl s un en face de l'autre sur deux colonnes so us les n O ' 6 A
les cadavres des chamelles hoI'S sacrifice etait en grande crainte
et 6 B.' ligna
S'
ons en du Sarrasin, se demandant
de la recension bI'em que p
d ,our 6 D A I
,uf !auser donne dans l'apparat' les variantes de la sainte eglise.
'I·t L pu I e. ans les Acta Sanetorum, au mois d'avriI, t. III P XLII
(la) 'I reo a recensIOn des A t S · ,. . Ceci fait, comme etait arrivee comment il pourrait devant
TOU .6.eXIX7rOALTOU e a anctorum, avril, t. III, p. XLII, porte rp'l)yoplou
l'heure du saint sacrifice et lui celebreI' Ie sacrifice non
(2) J'ai traduit.659 ' s . 7rpue; que Ie pretre etait venu ofIrir sanglant. Un autre pretre, son
1
xoccr Tu1 "ULOtX'I)crlXt
-
8ouAdlXe; TtVIXe; de; TO dp'Y)[Levov
est 't'lOV en f~nc~on de Joasaphaion 66.1 ss. (bas de la page) qui pour ce debut
, Po us proc e e 6 D que de 6 A: gcr't'etAe TOV &.veljilov TOU de;' ~v At6cmoAtv' Ie sacrifice non san gIant au compagnon, dit il. celui qui de-
~~ 7rol~v ot LIXPC:X,'Y)VOL OV?[Loc~oucrtV 'Pe[L7rAt, 8tIX VIX Oe(o)p~crTl [Lept)((Xe; 67roOe~ Seigneur Dieu, Ie Barbare ob- vait consacrer : « Ne crains
. e; 017r 0U dXev ex,e~. Remph est Ie meme lieu que Ramel (auJ· Hamlc dans 10
mlrac
Pal re 1 (3 1 5 {,I, 7.1, 9.~9 [t. ous au bas de la page]), que DiOspolis
(.,. . . = Ccsaree de servait ce preLl'e pour voir ce rien. N'as-tu pas vu Ie prodi-
es me 66.2 [bas de la page]) et que Ampclos (65.8).
qu'il allait fDire. 01' Dieu, gieux miracle? De quoi as-tu
296 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINT GEOnGES 297
qui est compatissant et a~~ ~es pour? » Le susdit pretre done
hommes, qui abonde en PI~I~ ~t commenya . sans frayeur Ie salllt
. Quand Ie pretre eut acheve Ia communier, Ie Sarrasin vit de
qui est indicible en ses mlserl- sacrIfice.
. A Ia Vue de ces prepa-
' divine liturgie, il prit une par- nouveau, pour Ia troisieme fois,
cordes ouvrit les yeux de ratlfs, Ie Sarrasin so mit it tie des oblats et les apporta Ie pretre donner part aux com-
I'ame dU Sarrasin et lui fit voir observer, dans l'attonto d aussi au Sarrasin. Celui-ci, les muniants, avec la pincette, au
, II 't f . e ce
un merveiIleux prodige. Du- qu a ar alre Ie priHre. Quand ayant vus, dit en langue bar- corps et au sang du bambino
rant en effet la presentation dos done . Ie pretre eut comm ence' bare : « En quoi ceci nous Et quand les fideles eurent
saints oblats, il voyait un la sarnte oblation et qu'ay t est-il commun, it nous et a participe, avec componction,
. l' an vous? Ne sommes-nous pas au corps et au sang de l'enfant,
petit garyon assis sur I'autel. pns e pam il se disposait '
Et quand Ie pretre eut com- accomplir Ie sacrifice non san-a dans l'ignorance de la religion Ie Sar:rasin fut rempli de col ere
mence la consecration des gIant, Ie Sarrasin vit que 1 des Cbretiens, et tu veux que et de fureur contre eux tous.
oblats, Ie Barbare voyait que pret:re avait pris en ses mao e nous fassions une offrande avec A la fin de la divine liturgie,
. ms
Ie pretre egorgeait l'enfant, que un .petlt garyon, qu'il l'egor- de tels oblats 1 » Le pretre dit : apres que Ie pretre eut donne
son sang etait recueiIIi dans Ie go art ·en versant son sang d ans « Nous les offrons en don au la communion it tous les cbre-
saint calice, et que Ie pretro, Io caIICO et qu'ayant place son Seigneur notre Dieu, et tu dis, tiens, il se devetit de tous les
ayant coupe l'onfant en mor- corps sur la [69J pateno ill Messire, 'Qu'est-ce la?' » Le o:rnements sacres (3), puis,
ceaux, les playait sur la sainte fractionnait. Co speetacle Ie Sarrasin lui repondit avec co- ayant choisi parmi [71] les
patEme. A cette vuo, 10 Bar- mit hors de lui-meme ot il etai~ lere et fur cur : « C'est avec ces plus beaux morceaux du pain
bare e'tait rempli de colere rompli d'une furour extreme oblats que tu celebrais la litur- qu'il avait cons acre, il voulut
gie, impur coquin? Car je te en donnor aussi au Sarrasin.
et de fureur contre 10 pretre. contre Ie pretre : il voulait 10
voyais, comment tu as egorge « Qu'est-ce lit? » dit celui-ci en
Et quand Ie pretro out com- tuer. Quand fut venu Ie mo-
Ie bambin et recueiIli son sang langue arabo. Le pretre dit au
mence la divine liturgie et qu'il men t do la sainto ontree 1
fut arrive it I'hymne cheru- S~r~asin vit de nouveau ~lu:
dans Ie calice, comment, Sarrasin : « Seignour, c'est
l'ayant fractionne membre it un morceau du pain que nous
biquo, Ie Sarrasin voyait qu'il dlsLlllctomont l'enfant de-
membre, tu as place ces avons consacre. » Le Sarrasin
levait de des sus I'autel la coupe en quatre morceaux sur
membres sur la patene, et com- dit en colere : « C'est avec cola
sainte patene pleine des la paUme, et son sang dans Ie
ment, aux gens qui s'appro- que tu as consacre, sale chien,
membres de l'enfant et 10 calice calice; et do nouveau il fut
chaient de toi pour communier, impur assassin? N'ai-je pas vu,
plein du precieux sang, qu'illos de colere, hoI'S de lui-meme: tu leur mettais dans la bouche moi-meme. que tu as pris un
deposait de nouveau SUI' Ia Et quand fut venue Ia fin de une viande sanglante. Ne t'ai-je petit gar~on, l'as egorge, as
sainte table et qu'il Ies :recou- Ia di.vine liturgic, alors que pas vu quand tu faisais tout verse son sang dans Ie calice,
vrait du saint voile. Et quand cortams des cllretiens vou- cela, abominable meurtricr? » et, ayant decoupe son corps
fut venu Ie moment de faire laient participer aux saints A l'oule de ces paroles, frappe morceau par morceau, l'as de-
communier Ie peuple aux saints mysteros, quo Ie pretro avait de stupeur et de tremblement, pose sur la patene? N'ai-je pas
mysteres, Ie Barbare voyait dit : « Approchez-vous dans Ia
que Ie pretre distribuait au crainte du Seigneur et avec (3) J'ai adopte ici Ie texte des Acta Sanctorum (69, app. cr.) [J.€1'€3cux€ 1'0
peupJe les chairs [70J de foi », que to us les fideles, en &\I't't3cupov 0 !€p€Ue; 7tcxcr~ 1'oLe; xp~cr1'~IXvoLe;, t~Ev€3Ue1j 3e 7tCXcrIXV 't"I]V !EPIX'l'LX~V
cr1'OA~V xIXl X1'A. Le Vatic" par une erreur evidente, intervertit les deux actions
l'enfant, et, it cette vue, Ie Sar- grande reverence, baissaient la Wl.19 s.) : 0 !EpEUe; t~EvM01j rlJv 7tCXcrIXV !EPIX1'~X~V cr1'OA~V xIXl [J.E1'€3cuXE 1'0
rasin etait hors de lui-meme et tete, et que certains d'entre &v1't3cupov 7tcxcr~ 1'oLe; xp~cr'l'LIXVOLe;, ~x 3e X1'A. (Pour 1'0 av'd3cupov, Ie Joasaphaion
a 'llLA03wp1j[J.IX ?O.5, bas de la page). Plus loin, ?1.1, avec ~x 3h'wv XIXAA~cr1'EUOUcrwV
l'cmpli d'clTroi. eux se furon~ avances pour 1'ou &P1'ou, so us entendre 7tpocrcpopwv, que donne 6 A (?O.4).
298 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEORGES 299
Ie pretre tomba sur sa face, se vu tout cela, abominable as- voyaient sans doute spirituel- ses esclaves et it. tous ceux qui
saisit des pieds du Barbare et sassin? Ne t'ai-je pas vu man- lement cet admirable et gIo- etaient dans l'eglise d'en sortir,
dit : « Tu es beni, Seigneur, ger et boire du corps et du rieux mystere, en tant que tout et, ayant pris Ia main du
Dieu de nos peres, toi qui as sang de l'enfant, et n'en as-tu it. fait dignes et grands priHres pretre, illui dit : « Comme je Ie
fait Ie ciel, la terre et la mel', pas donne part, en outre, aussi et serviteurs de Dieu, mais iIs vois et en suis assure, grande
et toutes Ies creatures qui s'y aux assistants? Et maintenant ne Ie voyaient pas des yeux est la croyance des Chretiens.
trouvent J Ce que tu me ils ont de la viande sanglante du corps. Quant it moi, je suis Eh bien, pere, si tu Ie veux
[72J dis, jamais je n'ai eM dans leurs bouches. » Aces un pecheur et, j'en jure par Ie bien, baptise moi. » Le pretre
juge digne, moi, de Ie voir. mots, Ie pretre fut hoI'S de lui Seigneur Dieu, je n 'ai pas dit au Sarrasin : « Seigneur,
Et de ce que, Messire, tu aies et dit : « Seigneur, je ne suis merite de Ie voir, je voyais nous croyons, nous, et no us Ie
ete juge digne de voir un si qu'un pecheur et je ne puis seulement devant moi Ie pain confessons, en Notre-Seigneur
effrayant mystere, j'ai assu- voir un tel mystere. Mais et Ie Yin offerts en sacrifice. » Jesus-Christ Ie Fils de Dieu,
rance en Dieu que tu es un puis que Ta Seigneurie a vu un [74J A ces mots, Ie Sarra- qui est venu dans Ie monde
grand homme et que Dieu te tel mystere, j'ai assurance en sin, pris de crainte reveren- pour notre salut ; nous croyons,
compte au nombre des sauves. » Dieu que tu es un grand cielIe, baissa Ie visage; apres nous, en Ia sainte, consubstan-
A ces mots Ie Sarrasin, hoI's de homme. » Le Sarrasin ayant une bonne heure il reI eva Ia tete tiel1e et indivisible Trinite,
lui-meme, repondit : « La chose dit : « Eh bien donc, n'en et, revenu it lui-meme, iI or- Pere, Fils et Saint-Esprit,
n'est-el1e donc pas comme je est-il pas comme je l'ai vu? » donna it. ses serviteurs de se DeiM unique; nous croyons en
l'ai vue? » Le pretre dit : « Si « Si fait, Messire », dit Ie pretre, retirer et dit au pretre : Marie Ia toujours Vierge,
fait, Messire, la chose est bien « il en est bien ainsi. Mais moi, « Comme je Ie vois et en suis [75J mere de Ia Lumiere, qui
telle, nous croyons que Ie pain comme je suis pecheur, je ne assure, grande est Ia croyance a enfanM Ie susnomme Notre-
et Ie vin que nous consacrons puis voir un tel [73J mys- des Chretiens, et maIheur it Seigneur Jesus-Christ, Vierge
sont Ie corps et Ie sang de tere, je ne vois que du pain et ceIui qui a passe inutilement avant I'enfantement, Vierge
Notre-Seigneur Jesus-Christ, Ie du vin, et ce pain et ce vin, toute sa vie dans l'infecte reli- dans I'enfantement, Vierge
Fils du Dieu vivant. Mais ce nous croyons, et nous gardons gion des Sarrasins. Mais si apres I'enfantement ; nous
spectacle, seul Ie Seigneur l'a cette foi, que nous Ie sacrifions c'est la volonte de Dieu, bap- croyons en tous Ies saints
vu, lui qui doit juger tout it l'imap-e du corps et du sang tise-moi, pour qu'au moins it apOtres, prophetes, martyrs,
ce qui est sous Ie ciel, nul de Notre Seigneur Jesus-Christ. partir de ce jour je serve Ie saints et justes en tant que
autre jamais n'a eM juge digne De fait, les grands et admi- Seigneur Dieu avec une cons- serviteurs de Dieu. Eh bien,
de voir un si grand et effrayant rabIes Peres, les luminaires et cience pure. » A ces mots, Ie Monseigneur, ne reconnais-tu
mystere. Et puis que Ie Seigneur Docteurs de 1'.I1;glise, tels que pretre dit : « Je n 'ose pas Ie pas que Ia croyance des Chre-
Dieu t'a juge digne de voir Ie divin et grand Basile, et l'i}- faire, Messire, et te baptiseI'. tiens orthodoxes est meilleure
ce mystere, j'ai assurance que lustre Chrysosostome et Gre- Car tu es un grand personnage, que toutes autres? » Le Sar-
tu es un grand homme. Cal' goire Ie TMologien, ne voyaient et ton cousin est Ie roi de rasin dit de nouveau : « Je
les grands et admirables Peres pas ce merveilleux et effrayant Syrie. Si je Ie fais, nous autres, t'en prie, pere, baptise moi. »
et Docteurs, les luminaires de mystere. Comment puis-je, nous serons tues et l'on de- « Impossible », dit Ie pretre,
I'Eglise, comme Basile Ie moi, Ie voir? » truira les eglises. Mais si tu « je ne puis Ie faire ; si je Ie fais
Grand, Gregoire Ie Tbeologien, A ces mots, Ie Sarrasin fut veux de toute ton arne qu'on et que ton cousin I'emir I'ap-
Jean it la Bouche d'Or, hoI'S de lui-meme, iJ ordonna it. te haptise, va it. l'insu de ta prend, il me tuera et detruil'a
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300 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEORGES 301
suite vers Ie patriarche de l'eglise. Mais si tu veux etre martyr Georges. L'higoumene je suis? » Le pretre dit : {( Un
Jerusalem et il te baptisera. » baptise, va a tel endroit sur fit scIon sa demande et l'en- homme que je n'ai jamais vu,
Sur ces paroles, Ie pretre Ie la montagne du Sinal, il y a Ill. voya. Etant arrive a l'eglise du comment Ie reconnaitrais-je? »
quitta. un grand pretre, et il te bap- tres glorieux megalomartyr Dc nouveau l'ex-Sarrasin dit :
Le Sarrasin, a l'insu de ses tisera. » Georges et y ayant fait sa « Ne suis-je pas Ie Sarrasin
gens, s'etant saisi d'une tu- Le Sarrasin fit une metanie priere, iI se prosterna devant cousin de l'emir, et quand j'ai
nique de poil et s'en etant au pretre et sortit de l'eglise. I'image [78J du saint mar- introduit mes chamelles dans
reveLu, prit de nuit Ia fuite Une heure apres, dans Ia nuit, tyr et devant Ie pretre qu'il l'eglise et qu'elles sont to utes
vcrs Ie patriarche [76J de Ie Sarrasin revint au pretre, avait vu jadis sacrifier mortes, et que durant la divine
Jerusalem, et, prosterne a ses se depouilla des vetements do- l'agneau, et il lui dit : {( Ne liturgic j'ai vu l'effrayanle
pieds, il lui demanda Ie saint res de son rang royal et revetit reconnais-Lu pas, honore perc, vision? »
bapteme. Quand, au bout de une miserable tunique de poil ; qui jc suis? » Lc pretrc lui [79J Quand il I'eut reconnu,
huit jours, il l'eut obtenu, il puis iI s'enfuit de nuit et dis- repondit : « Comment tc re- Ie pretre fut hors de lui et
dit au patriarche: « Voici que parut. II se rendit a Ia mon- connaitrais-jc, puis que jc ne loua Dieu, voyant que I'ex-
par la grace de Dieu, saint tagne [77] du Sinal et y re- t'ai jamais vu? » « Vraiment », loup arabi que etait devenu tres
Maitre, je suis devenu Chre- gut Ie saint bapteme des mains dit Ie moine, {( tu ne me reCOll- douce brebis du Christ. II se
tien. Que dois-je faire, pour du grand pretre. nais pas, honore pere? Ne prosterna devant lui avec fer-
que rna pauvre arne trouve mi- Au bout de trois ans il sut suis-je pas Ie Sarrasin, Ie cousin veur et I'invita dans sa cel-
sericorde? » Le patriarche dit : par coour Ie psautier et il Ie de Mermnes, Ie roi de Syrie, lule pour manger du pain. L'ex-
« Si tu veux etre sauve, va recitait chaque jour. Un jour qui, moi-meme, me trouvant Sarrasin lui dit : « S'il te plait,
a Ia montagne du Sinai. II ya done, il dit au grand pretre : au cateclwurnenion de cette ve- pere, je veux et desire voir Ie
Ia un monastere, OU il y a des « S'il te plait, Maitre, com- nerable eglise, ai vu la vision Christ. » Le pretre dit : « Va
moines, des hommes pieux et ment dois-je agir pour voir Ie terrifiante? Eh bien, par Ia cllCZ ton cousin, proclame Ie
saints. Babite avec eux revetu Christ? » Le grand pretre lui grace de Dieu et tes prieres Christ, blaspheme et anathe-
du saint habit, et apres peu dit : « Prie avec une foi bien regues de Dieu, je suis matise Ia foi des Sarrasins et
de temps tu seras du nombre droite, et il doit arriver qu'un devenu cllreLien et moine. Mais leur faux prophete Moham-
des sauves. » A ces mots Ie jour tu voies Ie Christ comme j'ai un autre desir, a cause med, proelame droitement,
Sarrasin partit pour Ia mon- tu Ie desires. » De nouveau, duquel je suis venu vcrs toi, sans frayeur, la vraie foi des
tagne du Sinal, il y renoD/;a I'ex-Sarrasin dit : « S'il te et, au nom du Seigneur, n'lle- Chretiens, et alors tu verras Ie
au monde et aux choses du plait, Maitre, permets que site pas a me Ie satisfaire. » Christ. »
monde, s'y revetit du saint j'aille chez ]e pretre qui m'a A ces mots, Ie pretre ]oua A ces mots, Ie Sarrasin par-
et angelique habit, et, quand instruit, quand j'ai vu l'ef- Dieu, dans l' emerveillement de tit avec ferveur, et, durant ]a
il eut passe trois ans au mo- frayante vision dans l'egIise du voir que cet ex-Ioup arabique nuit, il frappa a grands coups
nastere, il sut par COOUI' Ie tres glorieux martyr Georges. » etait devenu tres douce brebis a la porte du Sarrasin son
psautier. Le grand pretre dit « Va en du Cllrist, et il lui dit : {( Quel cousin. Les gardes de la porte
Ces trois annees achevees, il paix. » Et ainsi il alla chez Ie desir as-tu, Messire? » Le et du palais de I'emir deman-
demanda a I'higoumene de pretre, lui fit une meLanie, se moine dit : « Je brule de voir derent : « Qui est celui qui eric
l'envoyer au pretre qui residait prosterna devant lui et lui Notre Seigneur Jesus-Christ. » et qui frappe a la porte? » II
dans l'eglise du saint megalo- dit : « Reconnais-tu, pore, qui Le pretre repondit : {( Si tu repondit : « Je suis Ie cousin
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302 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEORGES 303
desires de voir Notre Maitre de I'emir, celui qui un jour a tendue part out, et [S2] les un signe de tete, l'emir dit :
et Seigneur Jesus-Christ, va fui et disparu. [SI] Main- Sarrasins, reveilles, aCCOU- « Que radotes-tu, malheureux,
chez ton cousin Ie roi, tenant je veux voir mon cou- raient a la tour avec des que radotes-tu? Que t'est-il
[SO] et devant lui, en pre- sin et lui dire quelque chose. » lampes et des torches pour voir arrive, malheureux, que t'est-il
sence de tous les Sarrasins, Les gardes de cette porte dirent qui criait ainsi. Une fois la, a arrive? Malheur a toi, malheur
confesse que Notre Seigneur aussitot it l'emir : « Sire, c'est la vue du moine, ils lui deman- a toi, pauvre ami. Comment
Jesus-Christ est Ie maitre et ton cousin qui jadis a fui et derent : « Qu'y a-t-il pour toi, as-tu abandonne ton genre de
fabricateur de toute la creation, disparu. » L'emir poussa un moine? » II leur dit : « Que vie et Ie sceptre royal, et vas-
qui d'une part, de toute eter- gemissement et dit : « OU me ferez-vous de bon, pour tu circulant comme l'un dES
nite, regne avec Ie Pere et est-il? » lIs dirent : « A la porte que je vous annonce ou est pauvres, vetu de cette puante
Ie divin Esprit, et d'autre part, du palais. » II ordonna it ses Ie cousin de Mermnes, votre robe de poil? » Le moine lui
it la fin du temps fixe, s'est esclaves d'aller it sa l'encontre roi, ce cousin qui a fui et repliqua : « Par la grace de
incarne pour notre salut dans avec des torches et des lampes. disparu? » lIs lui firen t cette Dieu, tout ce que j'avais quand
Ie sein de la toujours Vierge Tous alors obeirent a I'ordre du promesse : « Si tu nous fais j'etais Sarrasin, c'elait Ie ter-
Marie, qui a accompli dans Ie roi-emir, ils prirent par la cela et nous annonces ou est ritoire et Ie lot du diable C-j);
monde, de lui-meme, des mi- main Ie moine jadis Sarrasin cet homme iIlusLre et qu'on ce dont tu me vois revetu,
racles extraordinaires et pro- et Ie conduisirent a l'emir son Ie trouve, nous te couvrons c'est rna gloire, mon sujet d'or-
digieux depassant toute pen- cousin. Quand il I'eut aper~u, d'or et d'argent, autant que gueil, Ie gage de l'eternelle vie
see, qui a ete crucifie, enterre, l'emir se rejouit extremement, tu en voux. » Alors Ie moine: aveniI'. Oui, moi, j'anathema-
qui est ressuscite Ie troisieme il I'embrassa avec larmes et « Conduisez-moi aupres do tise la religion des Sarrasins
jour, qui est remonte en gloire dit : « Qu'est-ce que cette Mermnes ot je lui dirai ou est et leur faux prophete. »
vers les cieux, et tu Le verras robe? Ou habitais-tu jusqu'a son cousin. » A ces mots ils L'emir dit : « Jetez-le dehors,
alors lui-meme, en toute liberte maintenant? N'es-tu pas mon Ie saisiront et Ie monerent en il ne sait ce qu'il radote. »
d'acces, assis sur son trone et cousin? » Le moine dit : « Ne grande joie aupres do Mermncs. lIs Ie firent sortir, Ie mirent en
venant juger les vivants et les me reconnais-tu pas, ton cou- lIs lui dirent : « Co moin 0 sait un coin du palais et lui ap-
morts. » sin? Maintenant je suis devenu et connait Ie lieu ou est ton porterent a manger et a boire.
Le moine, convaincu par les chretien et moine, comme tu cousin. » Mermnes lui demanda II passa la trois jours. Cepen-
paroles divinement appropriees vois, par la grace du Dieu en la langue dos Barbares s'il dant ni il ne mangeait ni ne
de ce vertueux pretre, Ie moine Tres-Haut, et j'habitais au de- savait vraiment ou etait son buvait, mais priait Dieu d'un
jadis Sarrasin alla chez son sert pour heriter duroyaume des cousin. Le moine repondit : coour droit et plein de foi, di-
cousin Ie roi. Arrive de nuit cieux, et, comme j'en ai l'es- « Non seulement jo Ie sais, mais sant it genoux : « C'est en
a 1a tour ou les Sarrasins ont poiI' dans l'indicible miseri- c'est moi, je suis devenu chre- toi, Seigneur, que j'ai mis mon
coutume de veiller dans les corde du Dieu Tout-Puissant, tien et je crois dans Ie Pere, espoir, que je n'aie pas a rougir
gardes de nuit et de garder j'heriterai de son royaume. De Ie Fils et Ie Saint-Esprit, Tri- pour toujours (Ps. 30, 1), que
leur roi, il s'approche et erie quoi as-tu peur? Re~ois, toi nitEi consubstantiolle et indivi- ne rient pas de moi mes enne-
en langue arabe : « Venez aussi, Ie saint bapteme des see, Deite [S4] unique, et je mis (Ps. 24, 2) ». Et encore :
par ici, Sarrasins, j'ai quelque Chretiens orthodoxes, pour que
tu herites de la vie eternelle. » (ll) En 83.8 je lis VOfLoC; (VOfLoC; ed.) xexl XA'ijpOC; 'rou atIX~OAOU, d. 6 A fLeplc;
chose it vous dire. » Comme xIXl xA'Y)POVOfLLIX 'r. a. SU G, Joasaph. IlAOC fL€ptC; 'r. a. S'>.2 (bas de la page).
c'etait la nuit, sa voix etait en- [S3] Eclatant de rire, avec
I
~
COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
304 SAINT GEORGES 305
sse I'un des trois, Notre « Aie pitie de moi, mon Dieu ,
con fe " , st selon ta grande mit:ericorde dont tu dis qu'il a fait une malheuroux, glorifie-toi de ton
Seigneur J esus-Clmst, qUI s, e
, e dans Ie sein de la samte efface mon iniquite selon I~ infinite de biens aux Sarrasins, rang royal, ne meprise pas Ie
mcarn ' f 't dans multitude de tes pardons qui au vrai, par ses paroles genre de vie qui te convient et
\ "lerge Marie , qUI a 'bl aI t (Ps. 50, 1 s.) ». Encore: « Illu- abominables ct impures, vous ta toute belle jeunesse, ne
onde ses admlra es e
1e m , 'tf.. mine mes yeux, Christ, mon a induits en erreur. » Mermnes, vague pas sottement comme un
gran d s mIra, 'cles qUI a, e t:
Dieu, de peur que je ne m'en- qui lui avait prete l'oreilIe miserable pauvre. Malhour it
crucI, fiIe,' eterre
n , et qUI est , comme s'il avait eu pitie de, toi, malheureux, qu'as-tu en
't' des morts Ie troI- dorme en un sommeil de mort ,
ressUSCI e . lui, dit : « II a parle comme tete? » Le moine rit et dit it
.. ' qui est, remonte de peur que mon ennemi ne
Sleme Jour, un idiot [86] et il ne sait ce l'emir : « Ne gemis pas sur ce
aux cieux et qui dOlt de nou- dise 'J'ai triomphe de lui'
qu'il radote. Jetez-Ie dehors », que j'ai en tete. Je songe a la
veau venir pour juger toutes (Ps. 12, 4) ». « Seigneur, forti fie
commanda-t-il, « ot chassez-Ie. » maniere dont j'accomplirai
mon cceur, pour que je guer-
choses. » Les Sarrasins qui, siegeant l'ceuvre de mon Christ et du
A ces mots, frappe de stu- roie contre celui qui egare les
avec Mermnes, etaient des pere qui m'a envoye, ce pretre
Mermnes dit : « Qu'est-ce sens des Sarrasins, pour que ne
peur, d chefs, co qu'on nomme des qui m'a instruit. Quant aux ve-
me foule pas a ses pieds Ie
q, U t'a pris
I ' malheureux, ,e mauvais demon et que je ne
« temoins » - c'etaient plutot temonts que tu as fait prepareI'
qUI'tter ta maison et les 1'1- , de faux temoins - priront la pour moi, vends-les et donnes-
chesses immenses que tu aVaIS, craigne pas de mourir en ton en l'argent aux mendiants;
parole et dirent : « Quoi, tu
et de passer ta vie ici et. la saint nom ». Et ayant fait Ie quitte, toi [87] aussi, Ie
laisses alIer cet homme qui
comme l'un des pauvres, vetu signe de la croix, il disait : anathematise notre religion, sceptre ephemere de ta royaute
de cette puante robe de poil? « Seigneur, mon illumination ephemere pour recevoir Ie
qui a blaspheme Ie grand
Ne vas-tu pas main tenant re- et mon sauveur, qui crain- prophete et qui merite mille sceptre royal de Ia vie eter-
venir a notre religion, ne drai-je? Seigneur, protecteur de chatiments et la mort? De- nolle, ne mets pas ton espoir
vas-tu pas confesser no~re pr~ rna vie, devant qui tremble- sormnis done, devenons nous dans Ies choses presentes, mais
phete Mohamme~, qUI a faIt rai-je? (Ps. 26, 1 s.) » Et de aussi chretiens et renions notre dans les futures, ne crois plus
une infinite de bwns aux Sar- nouveau, elevant la voix en ce religion ancestrale. » Alors, dans Ie faux prophete Moham-
rasins? » Le moine dit : « Tout qui concernait l'emir, il di- commo Mermnes les voyait en med, l'ignoble, l'abominable, Ie
ce que j'avais quand j'etais sait : « ~mir, regois Ie saint revolte et qu'il demeurait dans fils de perdition, mais crois en
Sarrasin, c'etait la part et bapteme, pour que tu gagnes la crainte qu'ils ne fissent une Jesus-Christ Ie Nazareen qui a
l'heritage du diable. Cette robe Ie royaume des cicux, ce revolution contre lui, il leur eLe crucifie, crois dans Ie Pere,
en revanche, don,t tu me v?is royaume sans bornes ct sans ordonna d'agir a leur guise. Ie Fils et Ie Saint-Esprit, Tri-
vetu c'est rna 9'IOlre, mon sUJet limites (5). » S'etant leves, lui et eux, nile consubstnntielle et indi-
d'or~ueiI, Ie gage de la vi? a De nouveau l'emir ordonna d'un meme mouvement, ils se visible, I'unique Deite. »
venir et de l'eternelle glOlre. qu'on Ie ra.menat devant lui, saisircnt du moine, gringant Ceux qui siegeaien L avec Ie
J'anatbematise toute Ia reli- il avait fait preparer pour lui des dents, Ie pousserent 1101'S roi dirent : « Cet homme-la a
gion des Sarrasins et Ie faux des vetcments magnifiques. de Ia ville et Ie lapiderent. voulu souiller et corrompre In
prophete Mohammed, celui L'emir lui dit : « Rejouis-toi, Ainsi, apres avoir invoque Ie religion des Sarrasins. N'en-
nom de Notre-Seigneur Jesus- tends-tu pas comme il blas-
Christ, Ie serviteur du Christ pheme et anathematise notre
Joachim Ie pieux martyr mou- grand prophete? » Le moine
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des voyageurs, ou assistes des combattants a la guerre, ou aides grand nombre, qui par chance se trouvaient la, et se mit it les
des malheureux en detresse, ou que tu sois, va de l'avant. rassembler, membre a [99] membre et jointure a jointure,
Saint, delivre ton serviteur. Oui, Saint de Dieu, en toi est tout bref, comme tous Ies membres sont ranges dans Ie corps humain,
mon espoir de secours. Ou que souffre ton serviteur, rejoins-Ie, l'un a la suite de l'autre. Puis, apres avoir, les mains tendues
qu'il soit en peril dans un fIeuve, ou prisonnier chez un peuple vel'S Ie ciel, prie pendant trois heures, il posa les mains sur Ie
barbare, ou en peril dans un nid de brigands, ou torture par soIdat et lui dit : « Je te Ie dis, au nom de Notre Seigneur Jesus-
des chefs : tu Ie sais, toi, moi, je l'ignore. Oui, Saint de Dieu Christ qui est ressuscite des morts, leve-toi. » Aussitot les join-
aie pitie, comme tu as eu pitie du fils de la veuve et lui as rend~ tures commencerent de se lier l'une it l'autre, les chairs de se
vie, comme tu as sauve la vierge du dragon venimeux, comme coller aux os. Une seconde fois, il dit : « Leve-toi rapidement,
tu as ordonne aux quatorze trones, durant ton martyre, de soldat, et poursuis au plus vite ton voyage. », Aussitot il se releva
pousser des rameaux, ainsi, Saint [97] de Dieu, aie pitie de SUI' ses pieds et' comme en extase, il regardait de tous cotes,
ton serviteur et sauve-Ie du malheur qui Ie tient. » Sur ces mots admirant l'odeur suave et l'aspect viril du jeune homme, ainsi
s'agenouillant devant Ie saint, elle se jeta au pied du cercueir' que la beaute et les fortes hanches du cheval et sa noble stature.
disant : « Je ne me releverai pas, je ne releverai pas la tete qu~ II ne savait qui il etait ni ce qui lui etait arrive, sauf que cela
je n 'aie appris, sur mon epoux, quelle injure il a subie.» , avait commence chez Ie prosmonaire (4). Le saint, apres l'avoir
Le saint eut les entrailles remuees par ses larmes et sa sup- parfaitement rctabli, l'envoya it son voyage, pour qu'il conti-
plic~tion. Assis en manifestation visible sur son cheval, apres nuat en paix.
aVOlr parcouru l'espace en un clin d'ceil-la longueur du voyage [100] La sage epouse du soldat, couchee sur Ie sol devant
etait de quinze cents stades - il se tint pres de la cellule du Ie cercueil, vit en songe Ie prodigieux miracle qui s'etait produit.
prosmonaire, criant : « SOl'S, prosmonaire, viens a moi I » Quand Elle se reI eva en toute modestie et raconta au prosmonaire et it
il fut sorti et l'eut vu, illui sembI a bon, comme c'eLait un grand tout Ie peuple : « Par les intercessions du saint mon mari se
chef, de se prostemer devant lui. Le saint lui dit : « Ou est Ie porte bien. » A son retour, Ie soIdat entra dans sa maison aupres
soIdat qui a demeure ici? » Le prosmonaire lui dit : « Maitre de sa femme. Cette excellente et sage epouse lui raconta tout
il y a six jours qu'aucun homme n'est venu dans rna maiso~ en pleurant, et lui, de son cote, lui dit son aventure. Ils remer-
d'hOtes. » Le saint lui dit : « Et Ie soldat que j'ai envoye de cierent Dieu et Ie saint eL, ayant apporte maintes offrandes, ils
Syrie chez moi avec de l'or, et qui a demeure ici, ou est-il? » louerent Notre Seigneur Jesus-Christ, it qui gloire et puissance
Le prosmonair.e dit : « Par Ia puissance de mon saint Georges, aujourd'hui et toujours dans les siecles des siecles. Amen.
dev~nt lequel Je me tiens nuit et jour, il est arrive tard un soil',
a pris son repos, a re9u de moi tous honneurs possibles et Ie 9. Autre miracle. (Sur le jeune homme de Mytilene fait prison-
matin, il est parti pour ta maison. » Le saint pris de col~re 'lui nier) (1).
. "
dlt : « Tu n'es pas un prosmonaire, mais un assassin; tu n'es
pas un prosmonaire, mais un brigand, une peste. Tu ne dessers Le miracle qui eut lieu it Mytilene frappe de stupeur toute
pas une eglise de saints, mais un temple de demons. Va cher-
cher la somme et les bijoux, apporte-Ies moi ici, et aussi 1es (4) Le Joasaplzaion ajoute ici un detail important (99.14 s., bas de Ia pago) :
morceaux de viande que tu gard,es dans Ie pithos. » Saisi de oile &ywC; Itilwxev de; C(UTOV TO XPuO'[OV xC(t TO apyupwv.
(1) Ce miracle et 10 suivant sont tires du Vatic. 1190 (cf. supra, mir. 1, n. 1).
crainte, l'homme se jeta aux pieds du cheval, se lamentant. Les deux sont donnes aussi par 10 Joasaplzaion, et Ie miracle 9 se trouve en outre
dans 10 Paris. Coislin. 223, d'apres Iequelle Perc Dolehaye l'a publie dans Ie Syn.
Le saint descendit de cheval, et, etant entre dans Ia cellule du ceel. Constantinopolitae (Druxolles, p. 623 ; Aufhauser a ajoutc Ies variantes de cette
prosmonaire, en retira l'argent et la viande du soIdat. II playa recension a la fin do son livre, p. 176 s.). En un endroit ou Ie Vatic. present.o une la-
les morceaux devant Ie prosmonaire et les autrcs personnes, en
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314 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SArN'r GEOHGES 315
oreille et tout entendement. Dans cette lIe (Lesbos), il y a une coupe, s'appretait, en Crete, a Ie donner it l'emir, 0 merveille,
eglise [101J tres renommee et fameuse du saint megalomartyr il se trouva offrant Ie Yin a sa mere a Mytilene. A sa vue,
Georges. Chaque annee, it la memoria du saint, une foule consi- [103J tous les convives furent frappes de stupeur, et ils se
derable de peuple a coutume de monter it 1'eglise et d'y celebreI' mirent it lui demander oir il etait aIle, d'oir il venait, comment
la panegyrie. Les Agareniens de Crete, ayant appris cela, at- il ctait la, au milieu d'eux. Le jeune homme repondit : « J'avais
taquerent un jour les habitants de 1'11e, vel'S Ie soil', it l'heure rempli de Yin ce gobelet pour Ie donner a 1'emir en Crote, sou-
de la panegyrie. I1s lierent et capturerent tous eeux qu'ils trou- dain j'ai ete enleve par un homme rayonnant de gloire, j'ai et8
verent dans l'eglise; de ceux qui etaient au dehors, la plupart assis sur son cheval, tenant d'une main la coupe, de l'autre la
prirent la fuite, mais ils en retinrent quelques-uns, qu'ils em- croupe du cheval, et me voici, comme vous voyez, au milieu de
menerent en Crete. Parmi eux se trouvait un adolescent, qui vous. » A ces mots, tandis qu'ils Ie regardaient, ils furent hors
fut offert it 1'emir par 1'Agarenien qui l'avait pris. d'eux-momes, frappes de stupeur a ee spectaele extraordinaire.
Du temps s'etant eeoule, alors qu'etait venue la fete du tres Et s'etant tous leves de table, ils passerent toute la nuit a chanter
glorieux martyr, l'adolescent etait en train de servir 1'emir. des hymnes de reconnaissance au Dieu Tout-Puissant.
Ses parents, qui n'avaient rien derobe it leur foi, qui ne s'etaient
nullement endurcis it cause de la perte de leur fils, mais qui, 10. Autre miracle (Sur l'omelette).
ayant mis leur espoir dans Ie Seigneur et remerciant Ie saint,
avaient celebre sa fete, sortirent. it leur habitude pour appeler Dans Ie theme de Paphlagonie, il y a une eglise fameuse du
ceux qu'ils uvaient invites au repas. [102J Cependant la mere saint megalomartyr Georges, que les gens du pays appellent
de l'adolescent etait retournee it l'cglise et y avait ete laissee Phatrynon. Comme elle etait au debut tout a fait [104J petite,
seule. Elle se jeta sur Ie sol, importunant et suppliant Ie saint menac;ait ruine, et qu'il n'y avait pas d'argent pour la redresser,
de delivrer son fils de la captivit8, par tels moycns qu'il saurait ou pour mieux dire Ja reconstruire, il se produisit Ie fait suivant.
grace it la faveur toute-puissantc de Dieu. Le saint done, prompt Des enfants s'etaient un jour rassembles la, ils se livraient
it secourir, ne meprisa point les larmes de la femme, mais, a des jeux, et I'un d'entre eux, qui avait eu souvent Ie dessous,
ayant gagne la Crete en toute hate, ramen a chez lui sain et sauf etait raille par les autres. II tourna les yeux vel'S l'eglise de
l'adolescent et Ie rendit it ses parents. A l'hcure cn effet oir Ia S. Georges et dit : « Saint Georges, fais moi vain ere, j'apporterai
femme achevait sa priere, Ia table etant prete ct Ie mari ayant it ton eglise une belle omelette» (1). [105J Aussitot, s'etant
commence par proposer, au benedicite, la protection et Ie se- remis a jouer, il fut vainqueur, non pas une fois ou deux, mais
cours du saint, Ies echansons se tenaient prets it verser Ie Yin. souvent. Alors, etant aIle vers sa mere, il lui demanda que rut
Alors, par la faveur de Dieu, se produisit un miracle, it la fois donne au saint Ie cadeau qu'il avait promis. La femme, qui
inou'i et extraordinaire, presque incroyable si l'on n'est pas aimait beaucoup son petit et qui aimait Ie martyr, confectionna
initie aux reuvres prodigieuses de Dieu : mais si l'on a regard sur Ie champ Ie plat demande et Ie remit a l'enfant. Celui-ci Ie
it Habacuc et se met en pensee comment, ravi par un ange, prit l'apporta au temple devant l'autel et s'en alIa. A ce moment
il passa en un clin d'reil de Jerusalem it Babylonc (Dan. 14,33 ss.), meme, quatre marchands, [106]. qui passaient par la, en-
ce miracle-ci non plus, it mon avis, ne paraitra pas incroyable. tI'orent it l'eglise pour y prier (2). Quand ils eurent trouve l'ome-
Au meme instant oir l'adolescent, ayant verse Ie Yin dans 1a
(1) mpoyyii't'o'l10r,.8. La Joasaphaion oxpJique Ie mot (10!I,21 ss., bas de la page) :
,VouIez-vous savoir ce qu'est Ie sphoungdton (sic)? On casso des roufs et les frit a
cune (102.71, Ie Coislin. permet de completer Ie texte. Lire, apartir de 102.6, cbt'l'€p<Jl la poille avec de petits oignons et d'autres condiments. »
't'&:xe~ 't"I)'1 Kp~TIJ'I XIX'l'IXAIX~OO'l <btlX'IIXO'w~e~ 'l'oi:~ otxdo~~ 'l'0'l 7t1Xi:81X>' 'l'1X'J'l"l'J~ (2) Bn 106.1 lire sans doute 7tpoO'eu~6!Le'lo~ (- e:u~&:(l.e:'10~ cod.), cf. Joasaph.
y,xp X'l'),. Pour 10 sujet, com parer les miracles 3 at 4. '1,x 7tpoO'XU'I~O'OU'I 'l'~'1 dx6'11X 'l'OU &:YLOU 105.6 s. (bas de la page).
I,F""»
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--JIJ.
320 COLLECTIONS GHECQUES DE MIHACLES
(1) Co miracle est tire du ms. Angeliclls 1,6 (C. ".1), fol. 189·191 v o, XII" s. (Prol.,
p. VI). L' Angeliclls ne contient que ce seul miracle et un texte, mutile a la fin, du
miracle suivant (13). Outre la version en grec moderne du Joasaphaion, Aufhauser
olTre (pages de droile, sous Ie texto de I' Angeliclls) une recension latino, plus devo·
loppee, tireo du Monacensis lat. 11,1,73, fol. 1·5, XII" siecle. Cos paralleles ajoutont
quelques details ot pcrmettent de corriger certaines Mvues de I' Angeliclls. V. gr.
Georges est martyrise au temps de la persecution de DiocleUen et Maximien en 30:)
(v.la!" 115.2). Le nom de la ville, Lasia (Ang. 113.8), est confirmo par v.lat. (117.1),
mais v. lat. ajoute par erreur in provincia Cappadociae (115.21) ; Ie Joasaphaion
dit plus exactement (1H.G s.) d~ TIJV 7t6AtV "Cwv AomcrulX!cuv (I. AlXcrcrlX!CUV, cf.
123.13) {mou dVlXt XWPIX TIj~ IIIXAlXtcr"C[v'I)~: la Cappadece est la patrie de Georges
(~PXe:"Co Ilk XIX! IXU"CO~ e7t! -ri)v KIX7t7tlXl)6xcuv XWPIXV 7tPO~ TIJV 11l[lXv 7t1X"Cp!1l1X
Ang. it 9/,·1 20.1), et c'est au cours de son retour de Palestine en Cappadoce qu'a
lieu Ie miracle. L'eveque qui baptise Ie roi et son peuple n'est pas I'eveque
d'Alexandrie (Ang. 128.6), mais l'eveque Alexandre (Alexandrllln episcopllm
v.lat. 128.22) do Palestine ("Cov &PXtE:7t!crX07tOV TIj~ IIIXAlXtcr"C!v'I)<; Joasaph. 121•• 17 s.).
Jo signalcrai en leur lieu d'aul.rcs varianles.
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322 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEOHGES 323
ses troupes et partit en guerre contre Ie monstre : mais on eut Iarmes, tournant les yeux de cote et d'autre et se lamentant.
beau troubler l'eau on ne put meme s'approcher de son gite. Le saint lui dit : « Qui es-tu, femme, et quel est Ie peupIe qui re-
Co.m~e il m~ngeait les habitants, ils etaient cruellement op- garde de loin avec de grands gemissements (4)? » La vierge dit :
pl'lmes. La vIlle enfin se rassembla, et ils vinrent crier au roi : [121] « Ce serait une trop longue histoire, je ne puis te Ie dire.
« Roi, Ie site de notre [115] ville est beau et bon, et pourtant Mais fuis, avant de mourir de male mort. » Le saint lui dit :
nous perissons miserablement. » Le roi dit : « Donncz vous « Dis-moi, femme, la verite. Car, par Dieu mon maitre, je veux
tous, un registre de vos noms, et que soit remis a chacun d'e nous mourir avec toi, je ne t'abandonnerai pas. » AlaI'S, ayant pousse
un numero. J'ai moi-meme une petite fiIle unique, eh bien je un triste soupir, 1a vierge [122] dit: « Monseigneur, Ie site
1a donne, comme vous, au tour de mOn numero. II ne faut pas de notre ville est beau et bon. Mais il cst ne dans I'eau de cet
que nOus soyons chasses de notre [116] ville.» Ce discours eLang un cruel dragon. Chaque jour il sortait et devorait Ies
plut a tous. Et ils commencerent de donner, chacun, jour apres habitants de 1a ville. Mon pere a rendu un decret, et il m'a
jour leurs petits enfants, jusqu'a ce que fut venu Ie numero du envoyee pour etre mangee par Ie monstre. Eh bien, je t'ai tout
roi. Le roi revetit sa fiUe de pourpre et de byssos il l'orna de dit : fuis au plus vite. » A ces mots Ie saint dit a la vierge : « Ne
bijoux d'or, de gemmes et de pedes, et, l'ayant eI~brassee ilIa crains rien de ce moment, aie con fiance. » Puis illui demanda :
baisait tendrement, se Iamentant sur elIe comme sur une ~lOrte « Quel dieu adore ton pere, et ceux qui habitent avec lui? »
et dis ant avec Iarmes : « Va, mon unique, va. rna tres douce La vierge repondit : « Heracles et Scamandre, Apollon et la
enfant, lumiere de mes yeux. Qui, toi partie, ~a [117] tres grande deesse Artemis. » Le saint dit [123] ala vierge : « Toi,
douce enfa~t~ chercherai-je des yeux pour avoir un peu de joie? crois (5) en mon Dieu. Ne crains rien de ce moment, mais
Quand ferm-Je ~e~ noces? Quand verrai-je la. chambre nuptiale, aie confiance. » Le bienheureux eleva Ia voix vel'S Dieu et dit :
quand allum~r.3.l-Je les ~orches, quand entonnerai-je l'epithalame, « Dieu qui es assis sur les CMrubins et sur les Seraphins et qui
quand verraI-Je Ie frUIt de ton sein? Helas, va rna tres douce jeUes [124] les yeux sur les abimes, toi qui es et qui toujours
enfant, toi sans qui tout n'est plus que mort, m~ voila separe de continues d'etre Ie vrai Dieu, toi qui sais que les cmurs des
toi. » Le roi [118] dit au peuple : « Prenez de 1'01', de I'argent , hommes sont vanite, toi qui as manifeste tes efl'rayants miracles
prenez mon sceptre, et laissez-moi rna petite fiIle. » Mais nul pour ton serviteur Moyse (6), manifeste pour moi aussi ta mise-
ne Ie lui permit, a cause du decret qu'il avait rendu. Alors Ie roi ricorde, fais avec moi un miracle pour notre bien, subjugue
aya~t pousse un. cri de deLresse, la fit partir vel's l'Hang. Tout~ sous mes pieds ce monstre cruel, pour qu'on sache que tu es
1a vIlle, des petIts aux grands, y accourut avec lui pour voir Loujours avec moi. » Et il vint du ciel une voix qui disait : « Ta
ce qui arriverait a la fiIle. ' priere est allee aux oreilles du Seigneur, elle est exaucee. Fais
Le Dieu bon et misericordieux, qui ne veut pas la mort du ce que tu veux. » Aussitot Ia vierge poussa un cri : « Malheur,
pecheur, mais qu'il se convertisse et [119] vive (cf. I Tim. 2, 4), Monseigneur! Va-t'en, la bete vient. » Le saint courut it Ia ren-
voulut manifester un miracle par I'entremise du tres glorieux contre du dragon, fit [125] un signe de croix et dit : « Sei-
megaIomartyr Georges. En ce temps-Ia saint Georges etait vi-
vant, il avait Ie rang de comte. Or il arriva que l'armee fut €~eveucrev est explicite par v. lat. 123.17 s. : contigit ... ut.·· egregius martyr Ceor-
gws ... ~aululum a pia declinaret, polebat enim equum adaquare.
dissout~. Georges s'en alla lui aussi, vel's [120] Ia Cappadoce (t,) Sw en gardant Ie texte de I' Angelicus 120.7 s. ,r(<; 0 AO(.O<; 0 &1t0 (J.IX:xp60ev
sa patrlO (2). Par un dessein providentiel de Dieu, Ie saint passa ecrTw<; XIX:L opwvTe<; (J.eyeXAw<; Op'IJvoucrw. Aufhauscr ecrit, inutilement a mon
par ce lieu, et il fit un detour pour abreuver son cheval dans <
sens, XIX:L Tt> OpW\lTe<; XTA.
(5) En 123.1 lire l:u Ile: mcrTeU71<; (ou mcrTeoe : mcrTeoe~<; cod.) d<; TOV
l'etang (3). II voit la vierge assise, inondant ses genoux de €(1.ov Oe:6v, cpo v. lat. (125.30 s.) credas in dominum Jesum Christu'm.
(6) Sic pour Tcli Oep&1tov1:£ crou Mwcr'jj (12".3 s.) plutOt que «aux yeux de ..• "
cpo v. lat. 127.3 s. qui "irgam Moisy (1) ramuli tui in draconem et persa pice draconem
in aridum lignum pertisti.
SAINT GEOHGES
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324 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
Saint Georges accomplit beaucoup de miracles et de prodiges
gneur mon Dieu, change Ie crour de cette horrible bete pour par la grace qui lui avait etC donnee.
qu'obeisse et croie [126] ce peuple infidele. » Sur ces mots,
par Ie concours de Dieu et Ia priere du saint, Ie dragon tomba aux
pieds du saint. II dit ala vierge : « DOfais ta ceinture et Ia corde 13. Sur le demon (1).
de mon cheval (7) et apporte-Ies moi ici. » La vierge les de fit
Alors que Ie saint etait sorti de Ia ville et qu'il allait it la ville
et les donna au saint. Par la providence de Dieu illia Ie dragon
sa patrie, un demon vint a sa rencontre sur Ia route, l'air humble,
et Ie confia a Ia vierge, disant : « Amenons-le a la villo. » La filIe
tranquille, et tenant en main un baton (2). Ayant re~u .un
ayant pris Ie dragon, ils allerent a Ia ville. Quand Ie peuple out
salut de paix (3), il vint au devant de saint Georges et lUI dlt :
vu ce prodigieux miracle, saisis de frayeur, ils etaient prets a
« Paix [130] a toi, Georges. » Le saint dit : « Comment ~s-tu
fuir par peur du dragon, mais saint Goorges lour cria : « Ne
ose m'appeler par mon nom, que tu ne connais pas. Ne ser~Hs-tU
craignez rien, demeurez en place ot voyez Ia gloire do Dieu,
pas un mauvais demon? » Le demon dit : « Comment oses-tu
croyez [127] en Notre Seigneur Jesus-Christ Ie vrai Dieu, et
parler ainsi aux anges de Dieu? Veille a ton langage. » S~int
ensuite je tuerai Ie dragon. » Le roi et toute la ville s'ecrierent :
Georges dit : « Si tu es un ange de Dieu, montre-moi ton pou~Olr .. »
« Nous croyons dans Ie Pero, Ie Fils et Ie Saint-Esprit, en Ia
Et, ayant trace sur Ia terre Ie signe de la precieuse CroIx, II
TrinitC consubstantielle 8t indivisible.» [128] Sur cos mots
clotura en cercIe Ie demon (4), et lui dit : « Au nom de Notre
Ie saint, ayant tire son glaive du fourreau, tuale dragon et rendit
Seigneur Jesus-Christ, viens ici, suis-moi. » Aussitot Ie demon
Ia viOl'ge a son pere. Alors la foule du peuple se rassembla, et ils
s'ecria : « Malheur a moi, Georges, de ce que je t'ai rencontre· »
baisaient Ies pieds du saint en Iouant Dieu. Saint Georges A
ayant fait venir l'archeveque Alexandre, il baptisa Ie roi, ses Saint Georges dit : « Je t'adjure, mauvais demon, par ton ch~
timent eternel de mo dire [131] qui tu es, et ce quo tu voulals
grands et tout Ie peuple durant quinze jours au nombre environ
me fairo. » Le demon dit : « J'avais rang, Georges, aussitot apres
de ~eux cents quarante mille (8). « Et il y eut grande joie en
ce heu » (Act. Ap. 8, 8). Ie premier Samuel (S), moi, Georges, j'avais sous moi q~aran~e
mille anges. Quand Dieu a cree Ie ciel, j'etais lao Quand 11 a se-
[129] La ville de Lasia erigea alors un tres auguste tomple
en I'honneur de saint Goorges. Quand l'eglise eut etc construite,
tantam habuerunt, ut, quicumque in deum credens ex his haust~m sum~ret, fieret sanus
Ie saint se tint a un certain endroit (9), fit au-dessus une a quacumque detincretur infirmitate. Sur ces fontaines ou pUitS gu{mss
eurs
da~ I;:
priere (10), et il jaillit une fontaine de sanctification (H). Alors (ou attenant aux) eglises, cf. infra, miracle 11" 135.15 ss. et v. gr. J. Hubert, . •
A. 1., 19G8, 567·il7:l. . XIII
ils cruront on so soumettant au Seigneur. (1) Ce miracle est tire du ms. Parisin., fol. 7'1 vo·75 yO, an no 1315 (Prol., p. ),
qui ne contient que celui ci avec Ie precedent. Commo pour Ie miracle 12, Aufhauser
(7) AGc:ov '0~~ ~6>v'l)V (J?.u xoct ..I> (JX~w[ov ..oG trC1tolJ [Lou 12G.'i s. De meme donno ici aussi la recension en grec moderne du Joasaphaion (page~ de .gauche; e~
Joasaph~to~ {1_-.10 s.) AU(Je -r1)v ~WV'l)V (Jou xed .. I> (JXo,v[ov .. oG D:A6you [Lou. bas) et la recension latine du Monacensis (pages de droite, en bas). Co mtacl~;Jen~U
V. lat. dIfTere (127. 18 ss.) : Solve comas tuas et prebe mild cordas tricarurn tuarum. immMiatcment a la suite du precedent, of. Paris. 129.1 s. 'E~epX;0[L }OUOC [1°
pueUa pero ... dissolutis crinibus tradidit sancto .... beatus Georgius aeceptis cornarum &.ytou ex T'ije; 1t6) ewe; xoct D:1tEPX0[L€VOU 1tpl>e; -r1)V tB[OI:v 1t6AW OCUTOU 1t TP 01:,
redimieulis ligapit draconem etc. precise par Joasaph. 130.1 'E~epx6[LEvoe; BI: 0 &'YLOe; D:1t~ -r1)V 1t6A,V T<1~ A/occruoc,tw~
.(~) j\rerr~e nomb,re de jours en v. lat. (1.28.22), mais seulement numero quadraginta (sic., of. mir. 12, n. 1. V. lat. n'a pas cette phrase), et zn(ra 133.3 s. cru 1°C~' XUP~
milia hommum (128.23.12'..1). Joasaphalon n'a aucun chiffre. XOCpBLOYV<1crTOC, 0 B~croce; xoct BEcr[LeucrOl:e; ev ..-n XELpt [Lou TI>V 7tOV~pl>v pOCXOVT.
(9) V. lat. precise 129.7 s. ante altare beatus Georgius peniens de memo J oasa·
(2) Joasa],haion et v. lat. precisent : XPOl:.. <1v ..OI:e; de; xE,plXe; ..ou. poc~otov
phaion 126.9 s. btA'l)crloccrev 0 &.ywe; de; ..I> !epl>v Oucr,occrTI)P,o~ xoct €crcppeXy,crev . ) ., 'b'
YEPOVT,x6v (de moine) 130.3 s., peregrino (de pelerm el ria ItU 0 plam I'
b' cnlt 131 ~ s
.- •
de; fvoc ..61tov xoct X't"A. (3) C'est 10 sens, je suppose, de AOC~WV dp'l)v,xeX 129.1, .
. (10) Ou « u?e. benediction », cr. Joasaph. (n. prec.) et v. lat. 129.8 faetoque (11) II y a deux gestes (a) signe de la croix sur Ie sol (cp. supra v. lat. 129.8 fac·
sIgnaculo crUClS m terram. toque signaculo crucis in'terram), (b) cercle magique oil est enforme 10 demon. Nom-
(11) 1t'l)y/j &'y,occr[L0G 129.4. De meme Joasaph. 126.10 ss. €~y'ijxe [L[oc ~pu(J,e; hreux paralleles, v. gr. Vie de Theodore de SyTceon, ch. 92, 93.
&.y,eXcr[LOCTO~, avec l'addition de; tocTpdocv €xdvwv 01tOU mcrTeuouv de; .. I>v
x6pwv ~[L<1\1 'I. X. De merne v. lat. 129.9 ss. largissime aqlte fontem vivum eduxit, (5) 'Eyw -\][L'l)v ... WV 7tP6>TOU :l:OCp-OU~A Qe~wpo~ ey<il13 1 ,2 s.
de quo in spiritus sancti gratia renati sunt unipersi. cuilts fontis aque in se pirtutem
326 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES 327
SAIN'!' GEOItGES
pare la terre, j'etais present. Quand il a cree la colonne qui sou- [134] Louons tous Ie nom admirable du saint megalomartyr
tient la terre, je me tenais lao Quand il a scelIe l'abime, j'etais Georges et adressons un chant de gloire a Dieu. Au Pere, au
spectateur. J'avais pouvoir sur de terribles eclairs, j'enchai- Fils et au Saint-Esprit ensemble [135] conviennent toute
nais les nuages. Aucun etre humain ne peut me voir, les legions gloire, honneur et adoration, maintenant et toujours dans les
des anges me craignent. Mais, a cette heure a cause de mon
siecles des siecles. Amen.
orgueil, mes pieds foulent la terre, et ce qui est pire en tout cas
,
c est que les cadavres des morts [132] tomMs en poussiere
'
nous souillent (6). Moi, Georges, j'a.i jalouse la grace qui t'a 14. Narration relatifJe a la eeinture du saint. Cinquieme reeit (1).
ete donnee, et j'ai voulu aIler a ta rencontre, pour que tu
m'adores, parce que j'en ai separe beaucoup d'autres de la gloire [134] Tu es admirable, Seigneur, et tes operations sont di.gnes
de Dieu. Voila, je t'ai tout dit. Rappelle-toi, Georges, ma gloire d'emerveillement et tres glorieuses, en ce que tu as prodmt de
d'antan et la misere qui a suivi pour moi. Ne me laisse pas des- prodigieux miracles a l'honneur et ala gloire de ton saint martyr
cendre dans l'abime, parce que ceux qui sont dans l'abime, sont Georges, et les as manifestes aux yeux de tous, pour que nous
les premiers transgresseurs, et puisse-j e n 'y j amais entrer pour sachions que tu es Ie vrai Dieu, grand et admirable, et qu~ tu
l'eternite I » Alors Ie grand Georges eleva la voix vel'S Ie Dieu de recompenses en gloire ceux qui te glorifient : c'est pourquOl tu
l'Univers et dit : « Seigneur mon Dieu, ecoute [133] ma nous as donne ce saint pour qu'il nous aide et nous secoure
priere, parce que tu m'ecoutes toujours. Car c'est toi-meme qui et qu'il rasse des miracles, comme notre bon, tres fidele et fer-
l'as dit, Seigneur: 'Celui qui vient a moi, je ne Ie jetterai pas vent intercesseur et protecteur.
dehors' (Jo. 6, 37). C'est toi, 'Seigneur qui connais les camrs' ~coutez les exploits merveilleux et extraordinaires que ,Ie
(Act. Ap. 1, 24; 15, 8), qui as lie et enchaine par ma main Ie grand martyr accomplissait par la grace qui lui a~ait ~te d~nnee.
cruel
. dragon. Eh bien, ce demon qui n'a pas accompli ton vouloir , Quand Ie bienheureux eut appris la gloire qm 1m aVaIt ~te
qm n'a pas garde tes commandements, mais qui a persiste (7) revelee, aprcs avoir jeune quarante jours, il com~enga de prIer
dans sa mechancete et ne s'est pas tourne vel'S toi Ie seul vrai devant Ie Seigneur en ces termes : « Createur du Clel, de. la ~erre,
Dieu, jette-Ie au lieu terrible, pour qu'il soit chatie et ne tente de la mer et de tout souffie de vie toi qui nous as fmts a ton
pas l'image que tu as modelee de tes mains. » image et ressemblance 1 Tu nous as ~laces au Paradis de delices.
II y avait la une pierre enorme. Le grand Georges fit sur elle Mais no us n'avons pas gard6 ton commandement, [~35] et,
un signe de croix et lui dit : « Au nom de Notre Seigneur Jesus- a cause de notre peche , nous avons ete exiles du ParadIs.
, ", Tu ast
Christ, ouvre-toi, pierre, et regois ce mauvais demon. » Aussitot ordonne a la terre de ne faire pousser pour nouS qu epllle~ ~
la pierre se fendit et il en sortit un feu. Le saint saisit Ie demon plantes piquantes' (Gen. 3, 18), mais, par tes entrailles de mIse-
et Ie jeta dans Ie gouffre en plein milieu du feu (8). Puis il fit ricorde tu t'es montre sur la terre et tu as converse avec les
, . d . 1 par
rev:-nir la pierre a l'etat ou elle etait auparavant. Et Ie demon hommes. Seigneur mon Dieu, toi qui as fait es mlrac es.
etmt dans l'abime, puni par Ie feu jusqu'a l'achevement de ma main exauce cette fois encore ma priere, montre-mOl un
l' eternite. signe par'l'instrument de ma ceint~re, pou.r qu~ je ~oie si tu. es
Ie Dieu avant tous les siecles, car Je ne sms powt d autre D18u
~)..)..' on )(~t O'W!L~'l"~
L--.!6) OUV [Lii)..)..ov,
O"[L'Y)XouO"~v?"
Y'Y)LVCIlV
smeared» LSJ.) 131.'11
cf. 0"[L'Y)){'l"6e;«
es paralleles n ont pas ce membre do phrase.
&'VOPW7tCllV l)[Liie; O"[LLYOUO"W
S. Je no suis pas sur du sens. (1) Co miracle cst tire du ms. Parisin. 401, fo!. ?5-78, XIV-XV· s. (Pro!., p: XII s.!.
Le Parisin. ',01 ne conticnt que des textes relatifs a ~'. G;orges, et, pa:m~~=~x~~~
(7) En 133.6 s. lire &.)..)..' l'[Le:~ve:v de; (€[LL~Ve:V cod.) 'l"'I)v E~U'l"OG 7tOV'Y)PL~V, efiectivcment cinq miracles. Cependant il n'a pas SUiVI lordre que lUi ? .
cf. J oasaph. 132.16 ~[Le:~ve:v de; 'l"'I)v )(~){L~V 'l"OU.
modele car Ie A6yoe; 1: vient ici en troisiemo. Pas de parall~le_ Po~~~~our~~~aJlhe ~~~~
. ~8). D~ns la ~. lat., c'est Ie feu lui-memo qui ontralno Ie demon, 135.2 s. at exirit I 'egliso, cf. ,J. Hubert, SQ7H~C$ $(J.crees et sourceS samtcs, • ' p.
In e IgnIs teterr/mus, qui demonem irwolpens ipsum ad in(emllTn detraxit.
5?3.
328 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAINT GEOHGES 329
que toi. » Et il vint une voix qui lui dit : « J e ferai pour toi tau t
15. Vision miraculeuse du saint et glorieux megalomartyr Georges.
ce que tu demanderas. »
Lorsqu'il l'eut entendue, Ie saint remercia Ie Seigneur, et il lYfaUre, benis (1).
pla({a devant l'autel sa ceinture, un morceau de sa tunique et un Lovez les yeux de 'Votre esprit, freres, et voyez ce prodige
vase d'argent. Puis il ferma la porte et se retira. Le saint conti- qui s'est accompli de nos jours. Considerez la bonte in.dicible de
nuait de prier Dieu, pour qu'illui montrat un signe par l'instru- Diou et donnez-Iui Iouange de gloire. Ecoutez Ies torrlbles mer-
ment de sa ceinture. Apres sept jours, Ie saint entra dans Ie veilles du tres glorieux megalomartyr Georges. Approchez,
sanctuaire en grande crainte. II trouve une source d'eau jail- vous taus qui craignez Dieu, et je vous raconterai les eITrayants
Iissante, il vit un signe terrifiant, et, se tenant immobile, secrets dont Ie saint eut Ia vision.
[136] il Ioua Dieu pour Ia gloire qui lui avait ele revelee. [138] Apres que saint Georges eut ete enfante et qu'il eut
II fabriqua un vase d'or, jeta dedans de l'eau puisee a la fontaine atteint l'ago viril, il arriva que la grace du Saint-Esprit ~'eclai~a
sainte, et, ayant pris en main sa ceinture et l'urne sacree, sortit et Ie poussa a la crainte de Dieu. II se mit a servir Dwu nUlt
en quete d'un miracle. Quand il fut arrive a Ia ville, il trouva Iil. et jour par des jeunes, des veilles et des prieres, et, lorsqu'il eut
un paralytique. L'ayant regarde, Ie saint lui dit : « De quelle jeune quarante jours, il COmmeD({a d'invoquer Dieu en ~es
religion es-tu? » L'homme paralyse des membres lui dit : « De termes : « Dieu sans commencement, Principe Ie plus premIer
celIe qui s'adresse a Heracles, Apollon et Artemis ». Le suint de la vie du Monde, Toi qui n'as ni commencement ni fi~,
lui dit : « Voila pourquoi tu en es venu a un si triste GLat. Si tu Toi qui, par une misericorde ineITable, t'es mon~re a. to~ ser~l
avais cru dans Ie Dieu du ciel, tu n'aurais pas a souITrir ainsi. » teur Moyse sur Ie mont Sinal a cause de ton blen-m.me ~sraeI,
Le paralytique dit : « Dieu du ciel au dieu de Ia torro, nul ne si je suis digne de ton royaume et s'il te plait que Je SOlS to.n
peut me guerir. » Le saint dit : « Crois en mon Dieu, et tu seras csclave montre-toi it moi avec toutes tes armees, pour que Je
gueri de ce mal. » Le paralytique dit : « Va-t'en loin de moi. sache ~ue tu es bien mon Dieu, comme Dieu terrible a~ant
Je te vois beau, puissant, en grand honneur, et tu te joues de autorite sur toute Ia terre. » Telle fut Ia priere du tres glorwux
moi et me condamnes! Si tu us quelque pitie, jette dans rna martyr Georges, et l'eternel et vrai Dieu ne Ia dedaigna p?i~t,
bouche l'euu que tu tiens et rafraichis ma langue dessecMe qui il ne meprisa point sa requete, mais, au cours d'une VISIOn
me torture cruellement depuis deja vingt-huit ans. Tu vois mes
memhres putrides, tu vois la dissolution de mon corps et Iu (1) Co recit est tire du ms. Parisin. 1164, fol. 10!1 v.-108.' X~-:VIO s. (Pr.oL,
disposition de mes doigts, tu entends ma voix deformee, il ne p XII I). II se lrouvo egaiemont dans I' Ambros. 192 (= A), l' Athenlensls ~ 78 av;~Ie titre
pius oxact 'AltOX&.AU\jJ~~ 'rou &.ytou X't'A. (= B), 10 Paris in. ft01 (= C~e ~~s el~
me reste plus rien que la voix et la langue, et tu me dis 'Si offrant dans I'apparat Ies variantes de cos manuscrits, Aufhausor a gar t d
tu avais cru, tu ne serais pas devenu ainsi' I Va-t'en loin de moi, texto I'orthographe et los Mvues du Paris. 116 /1 . Certaines fautos sont pourla~ es
Iapsus 6vidonts (non des variantes) et voulent etre corrigecs. V. gr. pour XIX;EV01)(IX't'E
meme si tu ne rougis pas de me regarder. » Alors Ie saint dit au 137.6, lire XIX't'IXVOl)O'IX't'E AB. €[LtpU't'EOO'W:; 138.9 est impossible: il faut ~u Egtp::\~~:
(AB) (O'EIXU't'OV), cpo E:[Ltp&.vm6v [Lo~ O'EIXU't'OV 138.12, ou E:[LtpIXV~O'O~t<; . ,/p
paralytique : « Tu n'as pas foi dans mes paroles, tu vas voir 't'O... \jJ&'AAOV 142.7 est par exemple simplement une ,erre~r de Iec:ure, pou,,:
maintenant Ia puissance de Dieu. » Le saint pla({a sa ceinture ~P~IXV't'O ... \jJ&'AAEL\I BC (\jJ&'AAO\l't'E<; A). Au lieu de Ii E:IXV AU~1l~ €,V 't'c:l t;:rV~:l
au-dessus du paralytique et Ie frotta de l'eau puiseo a Ia sainte 1i0''t"1X~ AEAU[L€VOV E:ltt TIj<; Y'ij~ 1f.3.3 s., lire naturellement Ii E:IXV AUO'1l<;
y'ij<; 1i0''t'1X~ A. E:V 't'ciJ OUPIXVciJ (XlXt E:V 't'or~ ouplXvor~ B) avec. BC lorn: 1)' Pour ~
11
source. Aussitot, par Ie concours de [137] Dieu; tous ses IXU't'O 143.11, lire a~cl: 't'O AC ('t'o B), etc. - Bien que Ie SUJet SOlt different, ~a-bas
O'7)[Le!ov ici <OX&.AU\jJ~~ ce recit presonte des ressembiancc~ avec 10 p~6cMent
membres pourris furent gueris, l'homme fut ontierement romis en (De zond S. G.). II s'agit, dans los deux cas, d'un fait qui?e produ.lt duran~ la Je.uness~
sante par 10 Dieu bon et rnisericordieux et par 10 trcs saint et de Georges et qui Ie conllrme dans sa vocation. Certams del.aIls sont IdentI9ues .
• L
V1)O''t'EOO'IX<; 1)[L~PIX~ '138
'rEO'O'IXPIXXOV't'IX ' .ae S. = 13'
_ -I. 11 "S '• _priore pour obteIllr
a' une _
tres glorieux megalomartyr Georges, et il louait ot glorifiait -
revelation de Dieu, rvlX yvw on crU d 0 OEO<; ~[Lwv 138.13 - aE~~OV O'1)[LELOV ~IX 't"1J~
-
Ie Pere, Ie Fils et Ie Saint-Esprit, maintenanL et toujours ot ~WV1)~ 11.0U, d O'U e:! Oe:O~ 0 ltpO 't'iJw IX!WV(,)V X't'A. 135.6 s.
dans Ies siecles des siecies. Amen.
330 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEOHGES 331
nocturne, un ange du Seigneur vint [139] et lui dit : ({ Georges, fondre l'ame et l'esprit. Mais je ne comprenais pas ce qu'ils
ta priere est montee aux oreilles du Seigneur, il l'a exaucee, disaient. Et tandis que je m'en etonnais, je vis du cote du Sud
et voici Ie message qu'il t'a envoye : 'J'ai entendu ta voix, ta quatre roues qui arrivaient avec violence. Ils cbantaient eux
requete est venue it Moi. Eh bien, Je satisfais a ta demande. aussi : 'Seul est saint, seul Seigneur, Jesus-Christ qui vient dans
Veille avant l'aube sur 180 montagne, et tu verras ce que tu as Ie monde, surtout vers saint [141] Georges'. Quand les
demande, pour que tu saches que Je suis avec toi'. » quatre corps de troupes se furent rassembIes, un doux solei!
({ Moi, Georges, quand j'eus entendu cela, je montai sur la vint vers nous. Comme j'avais fixe les yeux pour voir d'ou
montagne chantant Ie verset de David (2) (Ps. 118, 133) : venait cette 1umiere, je vis douze trones au-dessus des nuages,
'Dirige mes pas selon ta parole, que ne domine sur moi nulle et des hommes de belle apparence et admirables, et ils etaient
iniquite'. Alors que je disais ce verset et d'autres encore, un assis sur les trOnes. Ils vinrent eux aussi rejoindre les corps de
eclair de feu vint de l'Orient et donna un coup pres de moi (3). troupes, et aussitot je vis un grand vase d'or, i! etait dresse au
Saisi de frayeur et ayant fixe les yeux pour voir d'ou venait Ie milieu de nous , et iI en sortait un merveilleux parfum. Et de ce
feu, je vis quatre roues comme si elles Haient toutes d'or, et parfum il remplissait Ie ciel, la terre, la mel', les montagnes, les
une foule de peuple au-dessus des roues (4). Ils se mirent it arriver collines, Ie monde entier. Et comme j'etais rempli du parfum,
avec violence et ils chantaient : 'Gloire a Dieu au plus haut des je vis un grand nombre de Puissances qui descendaient, et avec
cieux et paix sur la terre' (Lc. 2, 14). [140J Ils vinrent pres elles une nuee lumineuse, et au milieu de la nuee une image
de moi et aussitot cesserent. Comme je me demandais avec d'homme plus pure qu'un rayon de solei!. Elle vint et se tint
crainte ce qu'etait cela, j'entendis un coup de tonnerre venu au milieu des corps de troupes, et ils se mirent un par un it
du Couchant. AlaI'S que, pris d'effroi, je regardais vel'S Ie Cou- adorer cette image, puis aussitot cesserent. Comme je rene-
chant pour savoir ce qu'etait ce bruit, je vis six roues pareilles chissais avec crainte, je vis quatre colonnes de feu qui descen-
aux autres, et, au-dessus d'elles, des multitudes de peuple bel- daient du ciel , eIles vinrent [142] elles aussi rejoindre. les
lement ornees, bellement formees (5), portant des ornements corps de troupes, et tout cela etait rassemble pros de mOl. Et
d'or, brillantes comme 1'01' ; et ils chantaient eux aussi : 'Saint moi, it cause de mon extreme crainte, je ne savais que faire.
est Dieu, Saint, Fort (6)' et autres exelamations pareilles. Et je vis un grand vent qui faisait fondre monts et rochers;
Ils vinrent aussi avec les autres. Et il surgit aussitot une lumiere et il y avait un son de brise legere, et une nuee ressemblant it
du cote du Nord, et je vis douze roues pareilles aux autres et un feu et des multitudes innombrables au milieu de la nuee.
des foules nombreuses au-dessus d'elles, eIles faisaient un bruit Et quand ils furent arrives a 180 distance d'un stade, tous les
terrible, et leur psalmodie etait admirable (7), elle faisait corps de troupes se mirent it chanter : 'Seul est saint, seul
Seigneur Ie Roi de gloire'. Et il vint une voix qui me disait :
(2) Pour'l"ou<; 1t'<:p! 'l"OU .6.oc~!3 Myou<; 139.7, liro '1". 1t'OCpcX '1". .6.., ou oxclure 'Georges, mets ton visage sur Ie rocher et ecoute avec soin'.
1t'<:pL Be ont correctement 't'OU .6.oc~t3, A omet 'l"OU ('1"0 .6.oc~!3 't'0 eXAA'1)),OU~oc).
(3) ~3wx<:v 1t'A'1)cr£OV (Lou 139.11. Cpo 142.10 xoc! ~AO<:v eXX'I"!<; YjA£OU xoc! Et il vint un rayon de solei! et il me donna un coup au sommet du
~3wxtv (LOL d<; TIJV xopucp~v et Pre Spirituel 70 eXvoc'l"dvoc<; TIJV XdplX i1t'l '1"0 crane et il me jota dans Ie trouble, et mon arne tomba en une
30uvoc~ (battre) wh6v.
(4) 'l"pOxou<; 139.13. « Roues» ou «tourbiIIons », cf. Ps. 76, 18 (vox tonitrui tui complete defaillance (8) et rna langue se colla it rna gorge.
in rota Vulg.). Alors vint 1a voix immacuIee de Dieu, cette voix premier prin-
(5) En HO.5 s. lire <:UxIXAA6.1mcr'l"O~ (XOCA01t'O~'1)(Ltvo~ e), <:ucrx'1)(Lch~cr'l"o~
(om. e) : eXxocAA6.1mcr'l"O~, eXcrx'1)(LGh~cr't'o~ Par. 116~.
cipe de toute vie, qui a brise les liens de la mort, plonge Ie diable
(6) "Ayw<; 0 Oe6<;, &yw<; .!crxup6<; HO. 7. C'es~ Ie . deb~t" du 'l"p~cr&yLO<; ()(L~O~
de la liturgie byzantine, cf. BrIghtman, Eastern Ltturgles, "3,,.1 et Index, s.v. 7 rI- /;~~pxe't'o /;~ ocu't'ou (AB om. e : ocu't'ov I Paris.) €uw3toc cpo~ep&, lH. 16 't'~
sagion, p. 590. cpo~€p& (= dxwv eXvOp6.11t'OU xoc6ocpw't'tpoc -i)A~OCX'ij<; eXX't'LVO<;, 1"-.1.12 s.).
:"0.11.
(7) (<jJocA(Lcr3£1X) cpo~ep&, Par. : OlXu~occr~AI!' Do_n exemple de ~'cquiva
lence en grec tardif. De ml'me Infra H1/. Olv3pe<<; <:u<:~3e~<; xod cpo~<:pou<;, 1"-1.7
(8) En H2.11 lire d<; ~XA€~tw (All : ~YXA'1)cr~V lam.) 'I"€Adocv /;y€v<:'t'o.
Pour co membre, e a ~az~),[occre.
I
I
~
332 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
SAIN'!' GEORGES
333
dans les tenebres, ressusciLe Adam, et elle me dit : 'Voici,
Georges, j'ai satisfait a ta demande, a cause de loi je suis des- toi dans ma louanO'e b'
meO'alomartyr
b
du Christ Georges, dans
cendu du ciel. Mais il est impossible que tu voies mon visage, l'Ancienne Alliance ou dans la Nouvelle? Isare, Ie grand pro-
parce que nul homme qui a vu ma face [143] ne continuera phete, a re"u
¥ sur ses levres
, au moyen de la pince, Ie charbon 't
de vivre. Ceci te sera un signe. Ma droite te couvrira, je mettrai celeste: toi, 0 tres bienlleureux Georges, tu as entierement reveu
mon esprit sur toi et tu seras Ie premier dans mon royaume. l'Esprit-Saint (Is. 6, 6). Daniel Ie prophete, aux bords du fleuve
Tout ce que tu auras lie sur la terre sera lie au ciel et tout ce ChObar a vu les trones l'Ancien des Jours Hait assis et des
" .
milliers de milliers Ie servaient (Dan. 7, 9.10) : tOI, tu as vu
que tu auras delie sur la terre sera delie au ciel (Mth. 16, 19);
tout ce que tu auras demande en mon nom, je te Ie donnerai non seulement des milliers de milliers, mais des myriades de
(Jo. 14, 13) et ton nom sera dans Ie Livre eternel. Tu subiras myriades, et Ie Roi de gloire avec les puissances celestes, tu
pour moi Ie martyre : trois fois ils te mettront a mort, mais je l'as vu face it face et tu as entendu sa voix immacuIee.
te ressusciterai pour l'exultation des peuples et ton nom sera A qui te comparerai-je dans ma louange, megaloma~tyr d~
fameux d'un extreme al'autre de la terre. Je n'aurais pas voulu Christ Georges? A ce fameux apotre Paul? Sans doute 11 a ete
t'appeler a temoigner pour moi, mais c'est pour que tu sois Ie ravi au Paradis et il a vu mais il n'a pu rien raconter (2 Cor. 12,
" .
soutien des martyrs. C'est pourquoi je t'ai aime comme Abra- 4) : toi, tu as conLemple les admirables merveilles des Cleux, e't
ham, Isaac et Jacob, et partout ou tu seras, je serai avec toi. tu peux decrire leur gloire.
Va en paix, elu de mon Royaume, va a la plaine que foulent A qui te comparerai-je dans ma louange, tres bienheureux
les hommes, dans peu de temps tu reviendras dans mon Royaume Georges? A ce fameux prOto martyr Etienne? Sans doute, au
perpetuel et eternel'. Sur ces mots, Ie Seigneur remonta au ciel, moment do [146] rendre son dernier saint soupir, il vit Ie
et, m'etant releve, je ne vis plus aucun de ces etres. » ciel ouvcrt et Ie Fils de Dicu debout it Ia droite du Pere (Act.
[144] 0 Ie prodigieux miracle 1 Qui de tout siecle a jamais Ap. 7, 55) : toi, 0 tres bienheureux Georges, tu as vu non seul.e-
entendu dire d'aussi grands prodiges que ceux que Ie Seigneur ment Ie Fils de Dieu, mais Ie Pere, Ie Fils et Ie Saint-EsprIt.
a accomplis a l'egard de saint Georges? « Aussitot en dIet Comment te louerai-je, megalomartyr du Christ Georges (9)?
survint l'un des Seraphins, il m'appela et me dit : 'Georges, Je ne trouvo rien qui soit digne de toi, Ie pionnier des martyrs,
veux-tu savoir ce que signifie ceUe vision? J'ai ete envoye par qui as merite d'entendre la voix immaculee, l'elu de Dieu, Ie
Ie Seigneur, je vais t'expliquer tout co que tu as vu. Les quatre concitoyen des anges, qui as merite d'etre inscrit au Livre et~rnel,
roues venues de l'Est sont les terribles Cherub ins ; les roues Ie prepare pour Ie Royaume de Dieu, qui as reQu pOUvOl~ de
venues de l'Ouest, les saints Seraphins, les glorieux anges aux lier et de delier, Ie familier de la Sainte Trinite, Ie bon consmller
six ailes; les douze rouos venues du Sud, les douzo legions des des Chretiens, Ie pont qui m€me a la Vie, Ie secours des gens en
anges aux yeux multiples; les douze trones sur les nuees sont detresse, Ie prompt assistant des pecheurs, Ie sanctifie par la
grace, Ie Iiberateul' des prisonniers, Ie port des marins, Ie prompt
les douze disciples du Christ qui viendront juger les douze tribus
visiteur de ccux qui sont dans les prisons et les chaInes, Ie
d'lsrael; Ie vase d'or qui remplit de parfum tout l'espace est
l'Esprit de verite, la nuee qui contient les multitudes d'anges prompt visiteur ct auxiliaire des desesperes.
est Ie Fils de Dieu, les quatre eolonnes sont les archanges et
(9) Nul besoin d'insistcr sur l'insipide rMtorique de ce mo~ceau ou t~i~m~ho
l'image admirable dans la nuee est Ie Seigneur qui t'a parle. l'anaphore. Quatre ITou O'e: €YXW[LLcl:O'W 11..5.1" 15, 20, 14.6.6. Dtx-sept 0 SUiVI dun
Va en paix, toi qui es Ie bien-aime [145] et l'elu de Dieu, qualificatif : 0 01l07tm6~ 0 xM~~~wOd~, 0 €xAe:){,1'6~, 0 O'UfL7tOA£'l"1J~, 0 ye:YP~fLfLtfvo~,
o• oS-,(t'O~fL~O'fL"vo~,
L' r<' • L • r< 0' 0•
0 A~~C:)V, 0 YVWP~fLo~, 0 X~AU~ O'uf':"OUI\O~, '1) Y"'Pupoc, 0 ,,0'1) ot;,_
'. • 1 ,
toi l'illumine precieux aux yeux de Dieu'. » 't'~Xu~ ~o'1)06~, 0 ... &yLO~, 0 f;A€UOe:pW'l'"f)~, 0 A~~1)V, (~?) 't'~X,e:i~ f;7t~O'xe:(lJt~, ~ 't'OCXe:~~
o Ie prodige, l'etrange mystere 1 Qui a entendu dire, qui de &7t£O'xe:(lJt~ x~l (301)0e:~~ HG.7-"l8. Treize fLOCX~pLO~ OU fLOCX~PLO~ "l·,6.18-H7.tO. PUIS
trois imperatifs asyndeLes, O'wO'ov, ~l7t6't'oc~ov, AU't'PWO'~~ H7.10-H, suivis do
tout siecle a vu une teIle gloire? Ou irai-jo chercher un pareil a Ia doxologie habiLucllo H7:15-18.
334 COLLECTIONS GltECQUES DE lIIIltACLES
(1) Ce recit est tire du ms. Monacensis lat. 1!.473, fol. 6·9, XII" s. (Prol., p. XIV),
qui avait fourni deja des variantes pour les miracles du dragon et du demon (nOR 12
et13). A coLo d'auLros hagiographica, cc ms. ne contient que ces trois miracles de
S. Georges. Lo dornicr miracle, cclui du mansionaire, se trouve egalement dans Ie
cod. Capituli s. Joannis in Lalerano A 79, XI· XII" s. (Prol., p. XIV S.: Aufhauser donne
les varian Los dans l'apparat, p. 15'.·1 GO). J'ai adopte les le((ons suivantes de ce rna·
nuscrit : 156.3 quando (quoniam Mon.), 158.5 his similia (hec similia Mon.), 159.1It
et baiolus : « Rocolis ubi iam es » (et baiolus rccolit : « Ubi iam es » Mon.). J'ai neglige
Ie debut du prologue, p. 15',.16·155.10.
336 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAIN'I' GEORGES 337
eLant proche, il voulut visiter la moisson d'un champ qu'il avait seme A qui j~mais, s'il a prevarique conLre un commandement divin, n'est-il
de ses mains pres de la mer: mais par la crainte extreme qu'il avait pas arrIve un malheur comme i! m'a,rrive it present? »
des Agareniens, il ne pouvait s'approcher de ce champ. A Ill, fin, partage C'e~t par ces paroles, eL d'autres semblables, qu'il ne cessait jour
entre son amour de la moisson et Ill, terreur des Sarrasins qui fai- et nUlt, avec larmes, soupirs et lamentations, d'implorer Dieu. Car,
saient des incursions ici et la sur les cotes pour capturer des hommes Dieu l'inspirant, il s'etait mis devant Ies yeux de l'esprit ce mot de
ou se livre I' a d'autres depredations, Ie dit gardien parla ainsi a sa l'Evangile qui claironne continueJ.lement : « Demandez, et vous re-
femme: « Chere femme », dit-il, « qU'est-ce qui convient a ton avis? cevrez j cherchez, et vous trouverez j frappez a. la porte, et l'on vous
J'hesite beaucoup, parce que Ie bruit courL d'une attaque des Bar- ouvrira» (Mth. 7, 7). Oui bien, cet homme demanda, et il reQut la de-
bares, j'ai peur que, si je m'avance vel'S la cote, ils ne m'emmenent livrance j il chercha, et il trouva la redemption j il frappa, et Ie Sei-
peut-etre avec eux pal' la mer comme captif. » Elle a,lors, dit-on, lui gneur lui ouvrit la fermeture du cachot. 0 l'admirable pitie, 0 l'inef-
repondit : « N'aie aucune crainte, mon cher mari, nulle terreur, mais fable misericorde, 0 l'incomprehensible clemence I « Dieu, qui T'a
va au plus vite visiter ta moisson. » Voyez a que 1 point detestable se ch?rchC de tout son cceur et ne T'a pas trouve, quel pecheur ou deso-
montre cette seconde Eve I La premiere, poussee par Ie serpent, of- beIssant est revenu a. Toi et n'a pas ete accueilli, quel prisonnier lie de
frit a son mari la coupe de mort qui chassa du paradis de delices Ie chaines T'a invoque et n'a pas etc delivl'e? Que me secoure aussi,
premier-ne des creatures : celle-ci, par une inspiration satanique, maintenant, moi indigne, une large pitie, que m'assiste une benigne
envoya Ie gardien de la sainte basilique au roya,ume des Sa,rrasins. misericorde, que me delivre une tout abondante clemence I Viens a.
Voyez cette seconde tres impie reine J eza,bell La premiere, par Ill, moi, saint Georges, serviteur de Dieu I Ne regarde pas, adorable
terreur qu'elle lui [157] inspirait, obligea Ie prophete Elie a se marLyI', a. mon ignorance et a. rna legerete I Intercede aupres de Dieu
retirer pour un Lemps (3 Rois 19) : celle-ci poussa son mari it ne pas pour moi, qui ai meprise tes saints conseils de vie, pour que, sorti de
redouter ce qu'on disait des palens. Bref, comme, apres cette conver- ce cachot, je puisse revoir La sainte maison et me livrer tres pieusement
sation, elIe l'avait delivre de ses craintes et qU'elle l'obligeait a vivre au service de Dieu eL au tien tous les jours de ma vic. »
avec une bourse bien garnie, alors qu'il reposait sur son lit, il lui ap- Comme, sans reluche, il faisait ainsi jour et nuit, avec larmes, ces
parut dans son sommeil un tres beau jeune hom me aux vetements ecla- supplications, [159] peu de jours apres il lui apparait en vision
nocturne un jeune homme, qui, l'exhorLant gentiment, lui dit :
tants, qui lui demanda : « Ou veux-tu aller, gardien?» « Seigneur, je
« Leve-toi, qui que tu sois, love-toi, homme qui pries Dieu en toute
veux visiter rna moisson. » Alors Ie jeune homme : « Veille a ne pas ne-
sincerite, n'hCsite pas it me suivre au plus vite I » Lui alors : « Comment
gliger mon conseiI. Car si tu vas la-bas, les Sarrasins te feront aisement
puis-je te suivre », diL-il, « gisant comme je suis, lie dans ce cachot? »
prisonnier et t'emmimeront en leur patrie. » Sur quoi : « Qui es-tu done, Et Ie jeune homme : « Le Seigneur, a. coup sur, va briser tes chaines,
tres beau jeune homme», diL Ie gardien, « qui me donnes, it moi indigne, deja il a ouvert la porte de cet aITreux cachot par 1es mains de son
ce consei! prevoyant? » L'autre dit : « Les fideles me nomment saint serviteur que Lu as invoque avec foi. Leve-toi, n'hesite pas I » A
Georges. » Aussitot reveille, Ie gardien rapporta it sa femme ce qu'il ces mots, Ie mansionaire remercia Dieu eL, delivre, se huta de suivre Ie
avait vu. Mais elIe : « Tu as vu cela », dit-elle, « parce que hier soil' tu jeune homme. A la porte du temple (?) se trouvait un cheval blanc
as parle des Sarrasins. Allons, IOve-toi, va, n'aie pas peur. » Holas, tout pret : Ie jeune homme s'y assit et lui ordonna de monter derriere
quel cst Ie emur viril que n'arrivent pas a. corrompre, sans peine, les lui. 0 I'admirable pitie de Dieu, 0 l'admirable clemence de Dieu, en
paroles d'une femme! Bientot il se leve, eITraye pourtant, et s'en va. un clin d'roil Ie gardien fut ramene heureusement au lieu d'ou il
Et voici : au cours d'une attaque soudaine il est capture par les Is- avait eLc malheureusement enlevc. Celui qui Ie ~ransportait dit :
maelites, qui Ie conduisent, enchaine avec d'autres, en leur pays, « Reconnais-tu ou tu es mainLenant, gardien? » « Oui bien », dis-je,
c'est-a.-dire Palerme. Alors, sans tardeI', mains et pieds lies par des « oui bien, Monseigneur, je l'econnais que je suis dans mon champ. »
chaines de fer, ils Ie jeterent en un aITreux cachot. Bon gre mal gre Alors, pa,r un audacieux souhait, il demande, en l'interrogeant, Ie
l'evenu en fin it Iui-meme, pleurant et gemissant il se mit it clamer » : nom du porLeur : « Qui es-tu, Monseigneur, toi qui pour moi, miserable
[158] « C'est bien fait, malheureux! Pourquoi as-tu meprise un contemptem du conseil que j'avais reQu, as fait disparaitre les embar-
conseil de vie, pourquoi as-tu ecouto la voix de ta miserable femme? ras de rna vie? » L'autre dit : « On me nomme Ie soldat du Christ.
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338 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES
35 Mais comme, (rois jours enliers, il y cst reste sans dommage, qu'elIe cst chreiienne, elle repousse son epoux,
cela plonge Ie Prince incredule en une extreme agitation. et, s'etant portee d'elle-meme a un supplice volontaire,
Cette fois, il lui fait meUre chaussolls do fer avec des clous en rend son ame au Christ avant Ie billot.
[dedans, 75 Prenant les devants avec courage, Ie martyr dit par testament
et il les fait passer au feu par on dessous. a son esclave ou il veut que soit iransporte son corps,
Mais lui, les ayant rec;us, court toul brulant de zele : « Georges », qu'il faut Ie mettre au tombeau dans la terre de Palestine,
[dit-il, car c'est la patrie de sa mere.
40 « cours, cours main tenant, loi aussi, Puis il fait sa priere au Dieu qu'il desirait depuis l'enfance,
pour atteindre co que tu desires depuis to. plus (endre enfance, 80 un glaive Ie decapite et sa tete roule a terre.
Jesus, Ie Sauveur, Ie vrai Dieu. » Alors, joyeux, il rend au Christ son ame toute brillante,
Cruellement ensuHe on lui eCOrcllC Ie visage couronnee comme il convient.
et tout Ie corps: il est tout en jOie dans Ie Christ. Le dit serviteur aussitol transporie pieusement son corps,
1.5 On lui fail prendre en boisson d'affreux poisons avec zeJe, au lieu indique.
qU'a prepares un sorcier, un magicicn tres mechant. 85 C'etait alors Ie 23 0 du mois de Pharmouthi Ie desire,
Mais comme, Ies ayant bus, il n'en eprouve nul dommage, a Ia saison du printemps.
Georges suscHe, 0 fideles, applaudissements dans l'assistance. Quelque temps apres, les pieux fideles de Lydda y fonderent
Et lorsque, comme Ie Chrisl, il rossusciLe un cadavre une 6glise en I'honneur de Georges.
50 et pal' sa priere exauce 10. demande des infideles, L'eglise bellement achev6e, ils la sanctifierent avec eclat
alors (1), quand il a vu cela, Ie terrible Alhanase 90 en y installant Ie cercueil du martyr Georges. ..
se fait esclave du Christ ot combat pour Lui. C'etait Ie 30 de Novembre, jour que nous avons rec;u tradition
Enferme dans so. prison, Ie martyr, en touto joio, par ses parolos, de feteI', comme de juste, splendidement.
par ses miracles, converm Ie peuplo it la foi. Telle est la vie du puissant stratege, l'excellent chef,
55 Si bien que CB n'etait plus term pour une prison (2), Ie sage illustre et admirable Georges,
mais, grace au saint, pour un !iBu sacre, un temple. 95 dont 10. gioiro et l'honneur rayonnent sur les habitants de Ia terre
Aussi Ie Souverain Maitre de l'Univers lui-meme comme I'astre radieux, :)omme Ie brillant solei!.
se montre·t-il it l'ilIustre Georges. Co saint, Georges, veux-je dire, a ete riche, est riche encore
II l'embrasse, Ie fortifie et Ie remplit de la grace de gloire divine, jusqu'aux limites de la terre.
60 qu'il possede, lui, Ie Dieu Souverain Maitre. Tous les peuples, incredules et fideles, Ie v6nerent,
Le tyran, reprenant courage, veul Ie gagner par flatteries, il pro- 100 chacun en sa langue, en sa iribu.
[clame Tous les rois de la terre Ie c6Iebrent a l'envi, et les chofs,
qu'il va attirer it lui 1'elu de Dieu. et l'armee, et Ie peuple fidele,
Ensemble ils entrent a l'interieur du temple pour y voir Patriarches, savants et pretros, archipretres,
Ies dieux qui sont la, que faussement on nomme dieux. moines ot ascetes, avocats et juges.
65 Lorsque Ie s8int les a vus qui se dressent pres de 1'autel, 10;; Car il est Ie triomphateur do toUS los ennomis de la terre,
il dit avec autorit6 que ce ne sont pas des dieux. des invisibles ot des visibles.
Alors, par la malediction du martyr et son commandement terrible,
ils tombent a terre et s'ecrasent en peUts morceaux. Quant a ses miracles, quel esprit sumra jamais a Ies compteI',
Sur quoi, grandement emu de colere, l'Empereur ales mettre par ecrit diligommont? ,.
70 aussitot ecrit la sentence et 10. signifie. J'en ecris pOllrtant quelques-uns, mon chor athlete, parce qu lIs
Alors l'impera~rice Alexandra rend temoignage sont plus connus parmi tous tes amis.
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La ville des Lassaiens porte temoignage en ta faveu~ (3) sur la
(1) Aux vers 1,.9-51 lier nalurellomont "O"E: ill: el ..6..E: il~, donc virgule (non point) destruction du serpen t ot la joie de to utes les familIes,
apres ilt' E:Ux'ij~ v. 50.
(2) En "OOe;v ouX w~ <puAax~ eAoy!~e;..o au't"'{i au v. 55, au't"'{i est incomprehensible. (12) comment tu as sauve Ie peuplo de ce monstre et l'as guide
11 raut lire au't"l) (ou auTIj au sons du demonstratif, possible on grec tardir - cf.
IIpo~ au..&: v. 69, ilt' au ..o v. 135 - bien que 6 au .. 6~ soit plus courant en ce cas, (3) Au vel'S 110 liro O"ot (O"ou cod.) [Lap't'Upe:'i:. La vi~le de ~asia n'est pas la patrie
cf. infra v. 65 'l'OU'l'oU~ 6 au ..o~ tild>v, ot passim). de Georg.e$ ; jJ passp, par II!. pour rentror dans sa patrIe 1'19 .• s.
J
342 COLLECTIONS GRECQUES DE MIRACLES SAINT GEORGES 343
vers Ie Dieu de tes nombreux miracles (II). Car tu es notre protecteur, pour que nous soutenions avec aisance
115 Comme fils adoptif de Dieu, tu as fait jaillir la-bas (5), aux yeux de 10. hrulanie chaleur de l'et6, jusqu'a la vendange. .
tous une fontaine de sanctification. 'I'u veilles egalement sur nous, pour nous preserver du frOId,
'fu as fait que reste suspendue en l'air la fleche lancee dans ton et des pluies et des ven is funestes.
(7) temple, visiblement, en memorial de ies nombroux miracles. 155 Car, des mains de 10. pure Mere do Dieu Marie, tu tiens la charge
Ayant frappe uno roche en son milieu, iu as enforme au dedans do garder et preserver les sanctuaires de l'Athos.
120 (13) l'Ennemi terrible pour Ie genre humain. 'I'u as la des sMtes, des monasteres, des ermitages en grand
Et celui qui un jour outragea ton imago, 0 habiIo, nombre, tu as 1ft de saintes maisons et d'admirables images.
(2) tu 10 fais mourir, mon cher athlete du Christ. On t'appelle « Gardien de 10. Montagne », do 10. noble guette,
Nombreux sont les prisonniers que tu as delivres des mains des im- lGO iu veilles sur to us los moines de PAthos.
(0, 4, 3) pies parce qu'iIs avaient crie vers toi, 0 tres sage. Agree aussi de notre part, excellent Chef, avec bonte to utes ces
125 Bien plus, les broufs du laboureur eO'orges par ton commandement fetes que des Ie premier jour nous ceIehrons en ton honneur.
( .,~) 'I' b ,
u ne les as pas laisses so perdre, maisles as rostitues tous sains et Accueille-les et donne-nous, qui t'honorons avec eclat,
saufs : car tout ce qu'il y avait (1'os en ce belaiI, tout cela, sans Une vie qui s'ecoule en paix et 10. Iumiere de l'esprit. .
. coupure aucune, tu l'as fait revivre aux yeux de tous, 0 prodi- 165 Donne-nous de comprendre, en faeon qui plaise ft Dieu co~m~ II est
gIeus~ merveille I Pareillement, tu rends la vie et Ie souffie au soldat juste, ce qUI importe au salut, d'y veiller et de vivre Ul~SI.
130 qUl avait peri egorge Et puisqu', 0 GeorgeE, iu abondes singulieroment, en VerIte,
(8) par Ie prosmonaire qui desservait ton eglise : car il s'elait fait en 10. franchise de parole aupres do Dieu,
l'esclave de Par, son esprit etait aveugIe. Ne cesse pas de demander, d'interceder, de considerer taus moy~ns,
En outre, Ie cruel Sarrasin, quand il eut vu en ta sainte egJise 170 pour que no us soyons sauves nous aussi, et delivres de la rUlne.
(0) , Ie plus extraordinaire miracle , Et accepte avec con fiance, de nous qui crions vel'S toi,
135 a cause de cela fut baptise et devint moine et vaillamment o Georges notre berger, notre « Amen, Amen, Amen I).
temoigna pour la fOi, confessant Ie Christ.'
II) Dans cette meme eglise tu as accueilli aussi, par un evideni miracle,
la colonne de la femme veuve.
A Jaffa aussi, 0 sage Georges, ton eglise atteste
140 l'ev.eneI?~nt de joie qui s'y est produit (6).
De fmt, SI Je voulais relater taus ces miracles exactement
mon ecrit n'y suffirait pas: ils sont sans nombre. '
C'est la verite meme, et nul ne doute qu'ils sont une infinite
,et n'admett~nt pas qu'on les mette par ecrit (7).
H5 C est po~rquol nous aussi, pleins d'une roi sans deviation,
nous dlsons que toujours tu reussis en tout ce que tu veux.
(1) « denoues • (resolvas), eomme on disait jadis « nouer les aiguillettes " seil.
par un lien magi que : cr. infra 167.10 « lieet invisibilibus alligamentis vineulatum. »
TABLE DES MATIERES
Pages
AVERTISSEMENT. 7
S,linte 'l'hcclo
INT110DUC'l'ION. 11
TEXTE • 33
Saints Como ot Damion
INTRODUCTION. 85
TEXTE • 97
Saints Cyr ot Joan
INTHODUCTION. 217
TEXTE • 238
Saint Georgos
IN'l'HODUCTION. 259
TEXTE • 273
NOGENT-LE-HOTHOU
IMPHIMIlHIE UAUPELEY-GOUVEIIXIWn
1971
[10:.7 - 5 -1971.
Depot ICgul :
editeul', 1367.
impr., 2' trim. 19;1. - 1610.