Cancer Des Voies Biliaires
Cancer Des Voies Biliaires
Cancer Des Voies Biliaires
Chapitre : 8
11/07/2007
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8. Cancer des voies biliaires
8.1. Introduction
8.1.1. Méthodologie
8.1.2. Incidence
Les cancers biliaires sont relativement rares, avec une incidence d’environ 2000 nouveaux cas par
an en France, soit environ 3 % des cancers digestifs [4]. Cette incidence, variable dans le monde
(supérieure chez les Asiatiques), a augmenté au cours des 30 dernières années dans les pays
occidentaux plus que ne le voudrait une simple amélioration du diagnostic ou du codage de ces
cancers [4,5].
8.2.1.1. Clinique
Le diagnostic est le plus souvent tardif à un stade avancé, chez un patient de plus de 65 ans dans
environ deux tiers des cas [5-8]. Les circonstances de découverte diffèrent selon la localisation [6-
9] :
Tumeurs de la vésicule biliaire (environ deux tiers des cas) :
Incidence au moins deux fois plus élevée chez la femme, reflétant l’épidémiologie de la
lithiase vésiculaire, principal facteur de risque (risque relatif d’au moins 3) [5,10,11]
2
Masse des segments IV et V centrée sur une vésicule pathologique, éventuellement ictère.
Facteurs de risque le plus souvent absents, plus fréquents avant 50 ans, notamment
cholangite sclérosante primitive (CSP), facteur de risque le plus fréquent en Occident
[5-8,11,12]
Il n’y a pas de marqueur tumoral sérique spécifique des cancers biliaires [13-15]. Le CA 19.9 a
une sensibilité et une spécificité d’environ 80 % (étudiées surtout en cas de CSP) ; l’intérêt d’un
dosage combiné de l’antigène carcino-embryonnaire (ACE) et/ou du CA 125, moins sensibles
(environ 30-50 %) et pas plus spécifiques, est controversé [13-20]. Tous trois peuvent être élevés
au cours des obstructions biliaires bénignes : dans ce cas, une élévation persistante après drainage
biliaire est évocatrice de cancer.
8.2.1.3. Imagerie
L’imagerie est essentielle au diagnostic compte tenu de la difficulté fréquente à obtenir une
confirmation cyto/histologique. L’échographie est encore souvent l’examen de première
intention. Elle confirme, et localise, environ 90 % des obstructions biliaires, en montrant une
3
dilatation des voies biliaires intra-hépatiques, isolée en cas de tumeur péri-hilaire, ou associée à
une dilatation des voies biliaires extra-hépatiques (et de la vésicule en fonction du site de la
tumeur et du niveau d’implantation du canal cystique) en cas de tumeur extra-hépatique.
Cependant, elle ne visualise, et ne caractérise, qu’inconstamment la tumeur biliaire, notamment si
celle-ci est infiltrante, petite, et/ou péri-hilaire ou extra-hépatique. Elle aide au diagnostic
différentiel avec les autres causes d’obstruction biliaire, notamment lithiasiques (syndrome de
Mirizzi inclus). L’imagerie par résonance magnétique (IRM) avec cholangiographie (CRM) est
l’examen de choix en cas d’obstruction biliaire, qu’elle confirme et localise dans environ 95 %
des cas [21-23]. Lorsque l’IRM est inaccessible ou insuffisante, notamment au diagnostic
différentiel entre obstacle bénin et malin (fiabilité d’environ 90 %) [21], le diagnostic fait appel à
la tomodensitométrie (TDM) spiralée, notamment avec appareil multi-détecteur (reconstructions
multiplanaires, utiles dans les tumeurs hilaires) [23-25]. La cholangiographie directe, percutanée
transhépatique (CTH) ou rétrograde endoscopique (CRE), ne devrait être effectuée qu’à des fins
thérapeutiques ou de prélèvements tumoraux, compte tenu de ses risques (angiocholite,…) [6]. La
tomographie par émission de positons au F18-fluorodésoxyglucose (TEP) a une sensibilité et une
spécificité d’environ 80-90 % pour le diagnostic de cancer vésiculaire ou de cholangiocarcinome
nodulaire en cas d’échographie et/ou TDM non concluantes ; la sensibilité est beaucoup moins
bonne (< 20 % dans certaines études) en cas de cholangiocarcinome infiltrant, et des faux positifs
sont possibles en cas de CSP, de prothèse biliaire ou de maladie granulomateuse [26-28].
L’échoendoscopie (EE) est intéressante pour le dignostic positif et différentiel des tumeurs des
voies biliaires extra-hépatiques et de la vésicule biliaire [29-31]. Les autres techniques
(échographie avec produit de contraste, cholangioscopie, minisonde d’endosonographie,…), non
validées et peu accessibles, ne devraient être effectuées que dans le cadre d’essais cliniques.
Références (niveau de la recommandation : grade A)
IRM avec CRM
Alternatives
CTH ou CRE si drainage biliaire et/ou prélèvements tumoraux
L’IRM avec CRM et angio-IRM montre l’extension : 1) biliaire, notamment en cas de tumeur
infiltrante (fiabilité de 95 % [32]), y compris les voies biliaires obstruées ou isolées méconnues
par la cholangiographie directe (intérêt pour la planification d’un drainage biliaire) ; 2) hépatique
4
de contiguité ; 3) ganglionnaire (50 % des patients aumoment du diagnostic) (N.B. : faux positifs
(adénopathies inflammatoires) fréquents en cas de CSP) ; 4) vasculaire ; 5) métastatique
hépatique et (de façon souvent moins performante en pratique) intra-abdominale [6,7,33,34].
L’échodoppler couleur, la TDM et/ou la CTH ou CRE (qui devrait être réservée à des fins
thérapeutiques ou de prélèvements tumoraux) complètent ou remplacent l’IRM si nécessaire [6, 7,
35,36]. L’EE contribue au bilan d’extension loco-régionale des tumeurs extra-hépatiques et
permet la ponction d’adénopathies [29-31]. La TEP détecte environ 50-70 % des métastases, dont
environ 30 % méconnues par les autres examens [26,28,37].
Cependant, l’extension métastatique est rare au diagnostic (10-20 %), hormis l’extension
péritonéale [6,7], qui n’est actuellement correctement évaluée par aucun examen d’imagerie, de
même que les métastases hépatiques occultes intra-hépatiques (écholaparoscopie) ou
superficielles et les adénopathies loco-régionales ; plusieurs études, mais non toutes, ont souligné
l’intérêt de la laparoscopie dans la détection de ces atteintes méconnues [38-40]. En cas de cancer
vésiculaire, l’imagerie pré-opératoire (échographie et/ou TDM abdominale) n’est utile qu’en cas
d’atteinte de la séreuse.
Références (niveau de la recommandation : grade C)
IRM avec CRM et angio-IRM
Alternatives
Echodoppler couleur si IRM et/ou TDM insuffisantes
Elle est souvent difficile à obtenir dans ces cancers caractérisés par une infiltration sous-
muqueuse canalaire biliaire, à la fois radiaire et longitudinale [6,7]. Ailleurs, il s’agit de tumeurs
papillaires, souvent mucosécrétantes et volumineuses avec dilatation biliaire d’amont parfois
majeure, analogue des tumeurs intracanalaires papillaires et mucineuses pancréatiques (TIPMP),
5
mais souvent résécables et de pronostic meilleur [41,42]. La cytologie biliaire (si une CRE ou
CTH est effectuée) a une rentabilité diagnostique de l’ordre de 30 %, qui n’atteint que 40-70 % en
combinant différentes techniques (cytospin, préparations en couche mince, brossages avant et
après dilatation sténotique, biopsies endocanalaires, analyse d’images numérisée, FISH…). Une
cytologie négative n’exclut donc pas un cancer biliaire [6,43-46].
Environ 95 % des cancers biliaires sont des adénocarcinomes [6,7]. Hormis le cas (rare) où
coexiste à proximité de l’adénocarcinome un carcinome in situ, le diagnostic différentiel avec les
métastases d’un adénocarcinome non biliaire peut s’avérer très difficile, notamment lorsque le
prélèvement a porté sur une métastase hépatique ou ganglionnaire. Il repose sur un examen
clinique complet et des examens paracliniques à discuter au cas par cas, à la recherche notamment
d’un adénocarcinome pancréatique, gastrique, colorectal, mammaire ou pulmonaire : imagerie
abdominale, endoscopies digestives haute et basse, mammographie si masse à l’examen clinique,
radiographie thoracique. Le dosage sérique de marqueurs tumoraux, la TEP et
l’immunohistochimie tumorale (cytokératines 7 et 20,…) peuvent être utiles [6,47-50].
Les cholangiocarcinomes intra-hépatiques doivent être distingués des carcinomes
cholangiocellulaires (5-10 % des cancers primitifs du foie), généralement développés comme les
carcinomes hépatocellulaires sur une cirrhose (risque relatif de 9, et même 19 en cas de forme
mixte avec contingent tumoral hépatocellulaire) [51], notamment hémochromatosique [52].
Dans environ 10 % des cas, le plus souvent seulement sur l’examen histologique de la pièce
opératoire, la suspicion de cancer biliaire est infirmée : sténose inflammatoire (pancréatite
chronique, CSP) ou postopératoire, tumeur bénigne… [53, 54].
Références (niveau de la recommandation : grade B) : une preuve histologique ou
cytologique :
Peut être obtenue au cas par cas avant chirurgie à visée curative, et évitée dans la majorité des
cas compte-tenu du risque d’essaimage tumoral le long du trajet de ponction
Doit être obtenue avant traitement palliatif (tumeur non résécable) ou néo-adjuvant
Fait appel à :
La cytologie ou aux biopsies canalaires biliaires si une CTH ou une CRE sont effectuées
Alternatives
Ponction sous échoendoscopie (tumeur extra-hépatique et/ou adénopathies)
6
8.3.1. Bilan d’opérabilité
Références
Statut hépatique (transaminases, gammaglutamyltranspeptidase, phosphatases alcalines,
bilirubinémie, albuminémie, taux de prothrombine, facteur V)
La résécabilité doit être évaluée rapidement par une équipe médico-chirurgicale expérimentée
chez tout patient jugé opérable, avant toute opacification ou drainage biliaire (l’inflammation ou
l’infection biliaire induite pouvant gêner cette évaluation). La résécabilité et la nécessité d’une
exérèse hépatique (ou pancréatique) dépendent de l’existence d’une atrophie hépatique et de
l’extension vasculaire (facteur pronostique indépendant de non-résécabilité et de survie à 5 ans) et
biliaire [55-58]. L’existence de variations anatomiques hépatiques, biliaires et vasculaires doit
être reconnue et prise en compte (IRM avec CRM et angio-IRM), de même que l’habituelle
infiltration tumorale sous-muqueuse, 1 à 2 cm au-delà de l’extension délimitée par les examens
radiologiques. La volumétrie hépatique TDM est indispensable avant hépatectomie majeure. Les
classifications TNM, majoritairement basées sur des données histologiques sur pièce opératoire
[55,56,59,60], et la classification de Bismuth-Corlette des cholangiocarcinomes péri-hilaires [61]
ne permettent pas de prédire la résécabilité, qui ne pourra souvent être affirmée (ou infirmée)
définitivement qu’au cours de l’exploration chirurgicale [6,7]. La laparoscopie, réalisable même
en cas d’ictère, peut modifier l’indication chirurgicale, et notamment éviter un programme pré-
hépatectomie lourd de drainage biliaire et d’embolisation portale. Sa rentabilité augmente
l’extension tumorale : 10-15 % en cas de stade T1 de la classification de Blumgart, 30-40 % en
cas de stade T2 ou T3 [38-40].
8.4. Traitement
7
La prise en charge des cancers biliaires est complexe et mal codifiée. Seule la résection
chirurgicale avec des marges indemnes (R0) permet des survies prolongées. Elle doit toujours être
discutée, au sein d’une réunion de concertation pluridisciplinaire en oncologie.
Il a pour but théorique de diminuer la morbidité (de l'ordre de 50 %) et la mortalité (de l'ordre de
10-15 %) élevées des hépatectomies (notamment majeures) sur foie cholestatique [55,62,63]. Il
peut constituer une aide technique en cas de dissection hilaire difficile, et permet d’effectuer des
prélèvements cytologiques. La résection est généralement différée jusqu’à régression suffisante
de l’ictère (bilirubinémie < 50 µM). Il comporte un risque lié à la CTH ou à la CRE (pancréatite
aiguë,…), d’essaimage tumoral, et surtout d’infection [64]. Les résultats des essais randomisés
disponibles (anciens) sont discordants, certains montrant un effet délétère du drainage avant
hépatectomie ou duodénopancréatectomie céphalique (DPC) [65-68]. Isolément, son intérêt est
discutable ; s’il est effectué, le drainage doit s’intégrer dans une stratégie pré-opératoire, au cours
de laquelle il doit drainer le futur foie restant et précéder une éventuelle embolisation portale du
foie à réséquer [68-71].
Elle a pour but d’hypertrophier le futur foie restant (lobe gauche le plus souvent ; secteur
postérieur du foie plus rarement) lorsque le volume de celui-ci est inférieur à 30 % à la volumétrie
TDM [71-75]. Associée à un drainage biliaire du futur foie restant, elle permet d’intervenir en
l’absence de cholestase et d’augmenter les réserves hépatiques fonctionnelles, avec pour objectif
de diminuer la mortalité et la morbidité postopératoires [71-76].
8.4.1.3. Résection
La résection, seule chance de guérison, n’est possible que dans environ 20 % des cas tous stades
et localisations confondus. Il s’agit le plus souvent de résections majeures (hépatectomie souvent
élargie ; DPC, risquée (fistules) sur un pancréas en règle normal), avec une mortalité (5-10 %)
postopératoire importante, supérieure à celle des résections effectuées pour d’autres indications et
des résections biliaires seules (2-4 %) [62,72,73,77], d’indication délicate chez des patients
souvent âgés et/ou à l’état général altéré : elles ne doivent donc être discutées et effectuées que
par des équipes très expérimentées.
La survie à 5 ans après résection est globalement de l’ordre de 10-20 % (survie médiane : 12-24
mois). Elle est meilleure en cas de cancer papillaire, de cancer extra-hépatique distal (> 40 %) et
de cancer de la vésicule superficiel (> 85 %). L’ajustement sur le stade atténue cependant ces
8
différences [6,62 78-83]. Le caractère R1 de la résection (marges histologiquement positives)
divise schématiquement la médiane de survie par deux (9-24 mois contre 19-44 mois) et effondre
la survie à 5 ans (0-12 % contre 19-57 %) [56,62,63,71,77]. L’envahissement ganglionnaire
(survie à 5 ans < 5 %), péri-nerveux ou portal est également de mauvais pronostic [71, 84].
L’exploration chirurgicale avec examens histologiques extemporanés, notamment de la ou des
tranches de section biliaires, est donc essentielle. L’intervention comprend :
Une résection monobloc du segment biliaire tumoral. En cas de cholangiocarcinome intra-
hépatique périphérique, cette résection se confond avec celle des segments hépatiques envahis.
Après résection de la convergence biliaire principale et du canal hépatique commun (tumeurs
péri-hilaires) ou de la voie biliaire principale (cholangiocarcinome extra-hépatique, cancer
vésiculaire avancé ou envahissant le cystique [85,86]), la reconstruction biliaire fait appel à
une anastomose hépatico-jéjunale termino-latérale trans-mésocolique sur anse en Y
suffisamment longue (60 à 70 cm) pour éviter tout reflux
Si nécessaire une résection hépatique ou une DPC (recoupe biliaire basse envahie, cancer du
tiers inférieur de la voie biliaire principale), voire exceptionnellement les deux [71,82,88-90].
Le choix du type de résection hépatique est guidé par l’existence d’une dysmorphie hépatique
(atrophie d’un lobe) et/ou d’une atteinte vasculaire unilatérale, et par l’extension biliaire, qui,
même limitée, peut nécessiter une résection parfois majeure [71,91]. Ainsi, l’atteinte du
plafond de la convergence biliaire principale (type supérieur ou égal à 2 de Bismuth) impose
la résection du segment I (lobe caudé ou lobe de Spiegel), car ses canaux biliaires sont alors
envahis dans environ 90 % des cas [55,56,62,63,92,93]. Par ailleurs, la longueur
anatomiquement plus grande du canal hépatique gauche fait habituellement préférer
l’hépatectomie droite
En résumé :
Cholangiocarcinomes périphériques : résection des segments hépatiques envahis
Cholangiocarcinomes extra-hépatiques :
9
Tiers moyen : résection biliaire, habituellement sans résection hépatique ou pancréatique
Cancers vésiculaires :
8.4.1.5.1. CT adjuvante
8.4.1.5.2. RT adjuvante
10
Des essais (non randomisés) ont suggéré un bénéfice de survie avec la RT administrée à la dose
de 45 à 60 Gy (les doses les plus fortes étant habituellement administrées en cas de marges
positives), seule ou associée à une RT peropératoire, notamment en cas de marges positives ou
d’envahissement ganglionnaire [106-108].
D’autres études n’ont pas montré de bénéfice, notamment de réduction du risque de récidive
locale [109].
L’addition d’une curiethérapie endobiliaire à la RT externe ne paraît pas apporter de bénéfice de
survie, et peut même être délétère (augmentation significative du taux d’angiocholites et de fuites
biliaires) [110,111].
Il n’existe pas d’essai randomisé de RCT adjuvante. Des essais non randomisés (par exemple, 40
Gy plus 5FU bolus) ont suggéré un bénéfice de survie [112,113], notamment en cas de marges
positives (R1, mais non R2) [114,115]. Le bénéfice en cas de marges négatives est là aussi
incertain. Enfin, une étude rétrospective n’a pas montré de bénéfice de la RCT adjuvante sur la
RT adjuvante seule [116].
Références
Le drainage biliaire doit être évité avant évaluation de la résécabilité, et avant résection à visée
curative, hormis délai important à l’intervention, indication d’embolisation portale,
angiocholite grave, dénutrition sévère ou ictère majeur (bilirubinémie > 200 µM) (niveau de
la recommandation : grade A)
Une embolisation portale doit être discutée avant résection hépatique majeure (niveau de la
recommandation : grade C)
L’objectif de la résection doit être d’obtenir des marges saines (R0), facteur pronostique
indépendant (niveau de la recommandation : grade B)
Essais thérapeutiques
Aucun.
Les taux de survie 5 ans après transplantation hépatique pour cancer biliaire résécable ou non
résécable sont de l’ordre de 25-30 % ; cependant, la majorité des patients récidivent dans les 2 ans
[117-123]. Cependant, des taux de survie à 5 ans atteignant 80 % ont été obtenus chez des
patients très sélectionnés (tumeur unique < 3 cm) [124], notamment dans des études pilotes chez
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des patients avec cholangiocarcinome péri-hilaire stade I-II comportant une RCT et une
curiethérapie néo-adjuvantes [125]. Les exentérations sus-mésocoliques suivies de
transplantations en grappe du foie et du bloc duodénopancréatique (cluster) sont grevées d'une
lourde mortalité péri-opératoire et sont pratiquement abandonnées aujourd'hui [118].
Références
Les cancers biliaires ne sont pas une indication validée de transplantation hépatique, qui ne
devrait être effectuée que dans le cadre d’essais cliniques dans des situations particulières (cancer
débutant sur CSP avec donneur vivant disponible,…) (niveau de la recommandation : grade B).
La survie médiane en cas de tumeur non résécable est de 9-15 mois [6-8]. Le décès survient
principalement par insuffisance hépatocellulaire ou infection biliaire. Compte tenu de cette courte
espérance de vie, l’objectif premier du traitement palliatif doit être le maintien ou l’amélioration
de la qualité de vie (ictère, prurit, douleur), l’augmentation de la survie ne devant être qu’un
objectif secondaire. Ce traitement palliatif ne doit pas être différé du seul fait de l’absence de
confirmation histologique.
Les résections palliatives sur le plan macroscopique (R2) n’ont pas d’intérêt, la survie étant
comparable à celle après traitement palliatif endoscopique. Les dérivations (et les intubations
transtumorales) biliaires chirurgicales n’ont pas été démontrées supérieures au drainage
prothétique en termes de qualité de vie ou de durée de survie, avec une mortalité (> 25 % dans
plusieurs séries) et une morbidité non négligeables ; toutefois, le drainage biliaire chirurgical
permet généralement une palliation prolongée à la totalité de la survie des patients [126-129]. S’il
est effectué, une cholécystectomie peut être associée afin d’éviter les complications infectieuses
(cholécystite). Une dérivation digestive (gastrojéjunostomie) est recommandée en cas de
cholangiocarcinome extra-hépatique distal [130]. L’efficacité antalgique de la neurolyse cœliaque
n’est pas démontrée au cours des cancers biliaires.
Le drainage biliaire constitue la principale mesure thérapeutique palliative en cas de tumeur non
résécable ou chez les patients inopérables. Il est indispensable en cas d’angiocholite, de prurit
incontrôlé, et si une bilirubinémie normale est requise avant CT [6,8]. Il allonge la survie des
patients. Le drainage doit être le plus complet possible, en privilégiant les secteurs fonctionnels et
en minimisant le risque iatrogène (drainage de tout secteur opacifié, antibiothérapie). Il doit être
confié à un centre expert possédant les compétences en endoscopie et en radiologie
interventionnelle, qui doivent fréquemment être utilisées successivement ou simultanément,
12
notamment en cas de tumeurs péri-hilaires complexes. La cholangio-IRM, éventuellement
complétée par une TDM, est dans cette situation l'examen de choix pour planifier la pose de
prothèse(s), afin de limiter le risque d’angiocholite post-procédure [131].
La voie d’abord dépend du site et de l’extension du cancer : endoscopique dans les
cholangiocarcinomes extra- hépatiques (percutanée si échec), endoscopique ou percutanée (selon
les compétences locales) dans les cholangiocarcinomes péri-hilaires de type II à IV. Il n’y a pas
de recommandation actuelle concernant le choix du type de prothèse [132-134]. Les prothèses
métalliques, plus longtemps perméables, ont été démontrées par des essais randomisés plus
efficaces et plus économiques que les prothèses plastiques en cas de survie présumée supérieure à
6 mois (notamment en l’absence de métastases hépatiques et de taille tumorale < 3 cm) ; une
alternative est le changement systématique de prothèse plastique tous les 3 mois [135-141]. La
plus longue perméabilité des prothèses couvertes n’est pas démontrée, et pourrait être
contrebalancée par une incidence supérieure de cholécystites et pancréatites aiguës [142-144].
Aucun essai randomisé n’a démontré l’efficacité d’une intervention médicamenteuse (acide
ursodésoxycholique, antibiotiques,…) dans la prévention de l’obstruction prothétique [145-148].
En cas d'obstruction d'une prothèse métallique, une prothèse plastique peut être placée à
l'intérieur ; en cas d’obstruction d’une prothèse plastique, une prothèse métallique doit être
discutée en cas d’espérance de vie supérieure à 6 mois. Les prothèses métalliques hilaires sont à
réserver strictement aux traitements palliatifs (chirurgie définitivement exclue). La pose d’une
prothèse métallique unilatérale sur un obstacle tumoral hilaire pourrait selon certain être aussi
efficace qu’une pose bilatérale [131-133]. Cependant, les gestes ultérieurs peuvent être rendus
plus difficiles : leur pose doit être soigneusement réfléchie par un opérateur expérimenté. Le
drainage externe percutané est la seule solution en cas d’échec ou d’impossibilité du drainage
prothétique interne.
13
8.4.2.4. CT et/ou RT palliatives
Les cancers biliaires sont relativement chimio- (et radio-) sensibles, mais la tolérance des
traitements peut être problématique chez des malades souvent âgés avec comorbidités et à l'état
général altéré.
Aucun essai randomisé contrôlé n’a démontré un bénéfice de survie de la RT, seule ou associée à
une curiethérapie, ou de la RCT comparé au drainage biliaire seul dans les cancers biliaires
localement avancés [6,8,108,150-161]. Certaines études ont suggéré une efficacité supérieure de
la RCT en cas d’irradiation à forte dose (> 55 Gy) en terme de survie à long terme [161]. Des
résultats encourageants ont été rapportés avec une RT conformationnelle associée à une CT
régionale [162]. Des réponses objectives tumorales à la RT ou à la RCT ont occasionnellement
permis de rendre secondairement résécables des cancers biliaires au cours d’essais de phase II,
avec quelques survivants à long terme. La RT ou RCT peut contribuer au contrôle local tumoral
[159-162] et symptomatique (décompression biliaire, douleur, perméabilité prothétique)
[113,163,164].
8.4.2.4.2. CT palliative
Un essai contrôlé randomisé (le seul à ce jour) a montré qu’une CT par 5FU, acide folinique +/-
etoposide (FELV) augmentait la qualité de vie et la survie par rapport aux soins de support chez
des patients avec cancer pancréatique ou biliaire avancé (6,0 vs 2,5 mois, p < 0,01), cependant de
façon non significative dans le sous- groupe des patients atteints de cancer biliaire, et au prix
d’une toxicité considérable (grade 3-4, 41 %) [165]. La revue de plus de 100 essais disponibles
(dans la quasi-totalité des cas de petite taille et non contrôlés (phase II)) ne permet pas de
démontrer de façon formelle une augmentation de la survie après CT par rapport au drainage
biliaire seul [6, 8]. Le taux de réponse objective tumorale (RO) (souvent difficile à apprécier
radiologiquement au cours des cancers biliaires) variait entre 0 et 60 % :
Monothérapies (cytotoxiques anciens (5FU +/- acide folinique, mitomycine C, cisplatine,
etoposide, methotrexate, adriamycine, nitroso-urées) ou récents (tegafur-uracile, irinotécan,
docetaxel, paclitaxel,…)) : environ 10 % (extrêmes : 0-33 %), survie médiane généralement
inférieure à 8 mois (extrêmes : 4,5-10 mois) [166-170]
14
Gemcitabine en monothérapie : environ 20 % (extrêmes : 0-60 %), tolérance généralement
bonne, survie médiane généralement inférieure à 8 mois (extrêmes : 5-16 mois) [178,179]
Les meilleurs taux de RO et de survie ont été observés avec les associations 5FU (ou
capecitabine) plus sel de platine [172] ± épirubicine (19-43 %, 5-11 mois) et gemcitabine plus
capecitabine ou sel de platine (cisplatine, oxaliplatine) (10-50 %, 4,5-15,4 mois) [183-189]. Une
revue systématique récente de 88 essais (2137 patients) suggère un bénéfice marginal de la
gemcitabine comparativement au 5FU ou à la capecitabine en termes de taux de RO (22 % vs 17
%). L’addition d’un sel de platine conférait un bénéfice en termes de taux de RO de 10 % avec le
5FU (27 % vs 17 %), et de 20 % avec la gemcitabine (42 % vs 22 %) [190]. Les résultats
préliminaires d’un essai de phase II randomisé multicentrique britannique (UK ABC-01) évaluant
la gemcitabine seule ou associée au cisplatine chez 86 patients atteints de cancer biliaire
localement avancé ou métastatique suggèrent un bénéfice en termes de taux de RO (15 % vs 24
%), de contrôle tumoral (58 % vs 76 %) et de survie sans progression (4,0 mois vs 8,0 mois), au
prix d’une toxicité supérieure (asthénie grade 3-4 : 9,1 % vs 28,6 %) [188]. Une extension en
phase III chez 400 patients (UK ABC-02) est en cours. Le schéma GEMOX (gemcitabine à débit
de perfusion fixe plus oxaliplatine) a été évalué dans deux essais de phase II multicentriques,
français et international, chez 33 et 70 patients atteints de cancer biliaire localement avancé ou
métastatique respectivement, avec des résultats encourageants (taux de RO : 24-36 % ; survie
sans progression : 3,1-5,7 mois ; survie globale : 9,5-15,4 mois) [185,187]. Le schéma GEMOX a
l’avantage sur les schémas gemcitabine-cisplatine de ne pas nécessiter d’hyperhydratatation. Il est
réalisable même en cas de dysfonction hépatique, et semble pouvoir apporter un bénéfice clinique
même chez les patients à l’état général altéré [185,187].
Il est à noter que le pronostic, ainsi que la sensibilité à tel ou tel schéma de chimiothérapie,
variaient dans certaines études selon le site tumoral primitif (vésicule biliaire, voies biliaires intra-
hépatiques, voies biliaires extra- hépatiques). Par exemple, le schéma GEMOX semblait moins
efficace en cas d'adénocarcinome de la vésicule biliaire qu'en cas de cholangiocarcinome [187],
alors que le schéma CapOX semblait actif en cas d'adénocarcinome de la vésicule biliaire ou de
cholangiocarcinome extra-hépatique, mais inactif en cas de cholnagiocarcinome intra-hépatique
"périphérique" [191]. Il est difficile d'en tirer des règles univoques, compte tenu : 1) du faible
effectif de ces études ; 2) de la proportion variable (ou souvent non précisée) de cancers de
chaque localisation inclus ; 3) de résultats discordants entre certaines études pour le même
schéma de chimiothérapie (activité anti-tumorale préférentielle pour tel site tumoral primitif dans
une étude, et pour tel autre dans une autre). Globalement, on peut cependant retenir que les
15
adénocarcinomes de la vésicule biliaire localement avancés ou métastatiques semble avoir un
moins bon pronostic que les cholangiocarcinomes, cet élément devant être pris en compte dans
l'interprétation des résultats des essais thérapeutiques [183,185,187,192].
PS entre 0 et 2 :
Essais thérapeutiques
Traitements endoscopiques :
Comparaison de l'efficacité du traitement des obstructions biliaires hilaires d'origine tumorale
par prothèse métallique expansible avec drainage d'un ou de deux lobes hépatiques: étude
randomisée multicentrique sous l'égide de la SFED (coordonnateur : Pr Marc Barthet, Hôpital
Nord, Marseille. Contact : [email protected])
Stents métalliques non-couverts versus couverts dans le traitement palliatif des sténoses
malignes de la voie biliaire principale : étude randomisée multicentrique sous l'égide de la
SFED (coordonnateurs : Dr M. Ciocirlan et Pr Thierry Ponchon, Lyon. Contact :
[email protected])
16
(responsable : Pr Jean Boyer, CHU, Angers. Contact : [email protected]. Coordonnateur
: Dr Vincent Maunoury, CHU, Lille. Contact : [email protected]).
Traitements médicaux :
FFCD 9902 : essai randomisé de phase II-III (cancer non résécable non métastatique) :
drainage + RCT (50 Gy + 5FU 300 mg/m2/j 5j/7 J1-33 + cisplatine 20 mg/m2 J1-5 et J29-33)
vs drainage + GEMOX (coordonnateur: Pr Bruno Chauffert, Centre Georges-François Leclerc,
Dijon. Contact : [email protected])
8.5. Surveillance
Clinique + échographie hépatique tous les 3 mois la première année puis tous les 6 mois
Changement d'endoprothèse en cas d'infection ou d'ictère par dilatation des voies biliaires et
non par envahissement tumoral intra-hépatique (échographie)
Après RCT : évaluation selon le protocole employé : échographie, TDM ou CRM tous les 2 mois.
L’intérêt de la répétition des dosages sériques d’un ou plusieurs marqueurs tumoraux pour le suivi
au cours du traitement ou la surveillance post-thérapeutique n’est pas démontré.
17
La récidive est souvent loco-régionale. En cas de récidive biliaire après résection, le traitement
nécessite une approche chirurgicale ou percutanée (abord endoscopique rendu impossible du fait
de l’anastomose hépatico-jéjunale).
Thierry André (CH Tenon, Paris), Michel Ducreux (Institut Gustave Roussy, Villejuif), Daniel
Jaeck (CHU Hautepierre, Strasbourg) et Jean-Louis Jouve (CHU Dijon).
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