Voir la source de Bataille de Berlin

{{autre|les bombardements alliés sur Berlin en 1943-1944|Bataille aérienne de Berlin}}
{{Infobox Conflit militaire
 | conflit         = Bataille de Berlin
 | guerre          = [[Seconde Guerre mondiale]]
 | image           = Raising a flag over the Reichstag 2.jpg
 | légende         = ''[[Le Drapeau rouge sur le Reichstag]]'', symbole de la bataille.
 | date            = 16 avril – {{date|2|mai|1945}}
 | lieu            = [[Berlin]], [[Allemagne]]
 | issue           = Victoire soviétique décisive.
*[[Derniers jours d'Adolf Hitler|Suicide d'Adolf Hitler]]
*[[Actes de capitulation du Troisième Reich|Capitulation du Troisième Reich]]
 | combattants1    = {{Allemagne (1933)}}
 | combattants2    = {{URSS 1923-1955}}<br />{{République populaire de Pologne}}
 | commandant1     = {{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Adolf Hitler]] †<br />{{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Hellmuth Reymann]]<br />{{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Helmuth Weidling|Helmut Weidling]]<br />{{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Gotthard Heinrici]]<br /> {{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Kurt von Tippelskirch]]<br />{{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Wilhelm Mohnke]]<br />{{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Felix Steiner]] <br />{{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Walther Wenck]]<br /> {{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Theodor Busse]]<br /> {{drapeau|Allemagne|Nazi}} [[Hans Krebs]] †
 | commandant2     = [[Fichier:Flag of the Soviet Union (1923-1955).svg|border|20px]] [[Gueorgui Joukov]]<br />[[Fichier:Flag of the Soviet Union (1923-1955).svg|border|20px]] [[Ivan Koniev]]<br />[[Fichier:Flag of the Soviet Union (1923-1955).svg|border|20px]] [[Constantin Rokossovski|Konstantin Rokossovski]]<br />[[Fichier:Flag of the Soviet Union (1923-1955).svg|border|20px]] [[Vassili Tchouïkov]]<br />
[[Fichier:Flag of the Soviet Union (1923-1955).svg|border|20px]] [[Pavel Rybalko]]
 | forces1         = 50 divisions<br /> ({{nombre|766750|soldats}})<br />{{nombre|1519 véhicules blindés}}<br />{{nombre|2224 avions}}<br />{{nombre|9303|pièces}} d'artillerie
 | forces2         = 196 divisions<br /> ({{nombre|2500000|soldats}} à majorité soviétique et quelques divisions polonaises)<br />{{nombre|6250 chars}}<br />{{nombre|7500 avions}}<br />{{nombre|41600|pièces}} d'artillerie
 | pertes1         = {{nombre|92000 à 100000|tués}}<ref>Selon estimations soviétiques initiales dont {{nombre|22000|soldats}} et {{nombre|22000 [[Victime civile|civils tués]]}} pour Berlin.</ref> <br />{{nombre|220000|blessés}}<br />{{nombre|480000 prisonniers}}
 | pertes2         = {{nombre|81116|tués}}<ref>Berlin + [[Bataille de Seelow|Seelow]] + [[Halbe]].</ref><br />{{nombre|280251 blessés}}<br />{{nombre|1997 chars}}<br />{{nombre|2108|pièces}} d'artillerie<br />{{nobr|917 avions}}
 | pertes          = [[Victime civile|Civils]] : {{nombre|22000|morts}}<ref name="Antill1"/>
 | batailles       = {{Seconde Guerre mondiale-Europe de l'Est}}
 | géolocalisation = Allemagne/Europe
 | armées1         = LVI. corps blindé<br />Groupe d'armées « Vistule »<br />diverses unités de Waffen SS et Volkssturm
 | armées2         = {{1er|front}} biélorusse<br />{{1er|front}} ukrainien
}}

La '''bataille de Berlin''' constitue la dernière bataille terrestre de la [[Seconde Guerre mondiale]] en Europe. Faisant suite à l'[[Offensive Vistule-Oder|offensive soviétique Vistule-Oder]] en janvier et février 1945, elle est lancée le {{Date|16 avril 1945-}} par l'[[Armée rouge]] et s'achève le {{date|2|mai|1945}} par la reddition des derniers soldats allemands de la garnison de [[Berlin]].

Durant cette bataille, [[Adolf Hitler]], Führer d'un Reich aux abois, coordonne la défense allemande, mais les effectifs déployés par le Reich, sous-équipés, ne peuvent s'opposer efficacement aux unités soviétiques. La défaite étant devenue inévitable, Hitler [[Suicide d'Adolf Hitler|met fin à ses jours le 30 avril]], quelques jours avant le {{date-|8 mai 1945-}}, jour de  la [[Actes de capitulation du Troisième Reich|capitulation sans conditions de l'Allemagne nazie]].

La bataille de Berlin a été l'une des plus coûteuses en vies humaines de la [[Seconde Guerre mondiale]].

== L’effondrement du Troisième Reich en 1945 ==
[[Fichier:1945-05-01GerWW2BattlefrontAtlas.jpg|thumb|left|Théâtre des opérations, {{date|1|mai|1945}}.]]
Au début de l'année [[1945]], seule une infime partie de l'[[Allemagne]] a été envahie. À l'Est, les [[Union des républiques socialistes soviétiques|Soviétiques]] sont aux portes de la [[Prusse-Orientale]], devant [[Varsovie]] et ont encerclé [[Budapest]]. À l'ouest, les [[Alliés de la Seconde Guerre mondiale|Alliés]] stationnent devant la [[ligne Siegfried]], protégeant la rive gauche du [[Rhin]], en face de la [[Belgique]] et de la [[Lorraine]]. En [[France]], la [[poche de Colmar]] est encore sous contrôle allemand. [[Adolf Hitler|Hitler]] croit encore pouvoir compter sur les ''[[Wunderwaffe]]n'' (dont les [[V1 (missile)|V1]] et [[V2 (missile)|V2]]) pour renverser la situation.

Le {{date|12 janvier 1945|guerre mondiale|liens=oui}}, les [[Armée rouge|Soviétiques]] déclenchent une offensive massive (de la [[Mer Baltique|Baltique]] aux [[Carpates]]), sous le commandement des maréchaux [[Ivan Tcherniakhovski|Tcherniakovski]] ([[Troisième front biélorusse|{{3e|front}} biélorusse]]), [[Constantin Rokossovski|Rokossovski]] ([[Deuxième front biélorusse|{{2e|front}} biélorusse]]), [[Gueorgui Joukov|Joukov]] ([[Premier front biélorusse|{{1er|front}} biélorusse]]) et [[Ivan Koniev|Koniev]] ([[Premier front ukrainien|{{1er|front}} ukrainien]]). Staline joue de la compétition entre ces maréchaux pour leur faire réaliser les avancées les plus foudroyantes. En outre, les forces allemandes sont concentrées sur le front ouest en raison de la [[bataille des Ardennes]]. En moins de trois semaines, la [[Wehrmacht]] ([[groupe d'armées Vistule]]) est détruite et l'Armée rouge conquiert l'essentiel de la [[Pologne]] d'avant 1939 ; elle s'empare des zones industrielles vitales de la [[Silésie]] et de la plus grande partie de la Prusse-Orientale ; elle atteint l'[[Oder]] (future frontière germano-polonaise) à [[Kostrzyn nad Odrą|Custrin]] le {{date|31 janvier 1945-}}.

Hitler ordonne, comme toujours, à ses généraux de ne plus reculer et de contre-attaquer. Ses analyses, complètement déconnectées de la réalité, ne prennent pas en compte que chaque [[armée]] allemande nominale a en fait tout au plus la valeur combative d'une [[Division (militaire)|division]]. Il se brouille régulièrement avec [[Heinz Guderian]], chef d'[[état-major]] pour le [[Front de l'Est (Seconde Guerre mondiale)|front de l'Est]] qui lui tient tête en vain, jusqu'à son remplacement fin {{date|mars 1945-}} par le général [[Hans Krebs]]<ref name="ReferenceA">{{Ouvrage|langue=en|prénom1=Anthony|nom1=Beevor|lien auteur1=Antony Beevor|titre=Berlin|sous-titre=The Downfall 1945|éditeur=Penguin Books|lieu=Londres|année=2003|pages totales=528|isbn=0-14-028696-9|isbn2=978-0-140-28696-0|oclc=51272329}}.</ref>.

En pénétrant sur le sol allemand, les troupes soviétiques ont propagé la panique parmi les populations allemandes des provinces de l'Est. D'innombrables cas de [[pillage]]s, de [[meurtre]]s et de [[viol de guerre|viols collectifs]] sont rapportés par la [[propagande]] de [[Joseph Goebbels]] et ont été plus tard attestés à mots couverts par les archives militaires russes<ref name="ReferenceA"/>. Un exode massif draine vers l'Ouest des millions de réfugiés des territoires allemands qui ont déjà été attribués, par les [[Alliés de la Seconde Guerre mondiale|Alliés]] à la Pologne, à l'est de la [[Frontière entre l'Allemagne et la Pologne|ligne Oder-Neisse]]. Les [[Victime civile|pertes civiles]] sont très importantes, comme lors du torpillage par un sous-marin soviétique du paquebot ''[[Wilhelm Gustloff (paquebot)|Wilhelm Gustloff]]'', évacuant des réfugiés allemands par la [[mer Baltique]]. Le [[froid]], la [[famine]] et les [[bombardement]]s sont les causes de mortalité les plus fréquentes.

Les réfugiés allemands sont très rarement pris en charge par les autorités nazies. Il se peut que la désorganisation générale et la fuite rapide des plus hauts cadres nazis en soit la principale cause mais il est également vraisemblable que cela fut une stratégie délibérée pour inciter les soldats allemands à combattre plus énergiquement pour protéger les civils restés sur leur sol natal. Le [[Führer]] avait par ailleurs demandé que soit appliquée dans toute l'Allemagne la [[politique de la terre brûlée]], ne pouvant supporter que le sol national allemand tombe dans les mains des [[Slaves]] sans qu'il soit retourné à l'[[âge de la Pierre]]. Il estimait également que le peuple allemand, qui avait échoué dans le dessein qu'il lui vouait, méritait son sort de destruction et s'était, selon plusieurs témoignages, complètement identifié à l'Allemagne, considérant que sa propre disparition était liée à la disparition de son pays. [[Albert Speer]], intime d'Hitler et ministre de l'Armement, fit la tournée des [[Gauleiter]] pour les inciter à refuser d'obéir aux directives allant dans ce sens.

Goebbels, de plus en plus exposé alors qu'Hitler n'apparaît plus en public et qui par ailleurs a été nommé commissaire du Reich pour la défense de Berlin, organise les unités du ''[[Volkssturm]]'', unités composées des dernières réserves (les hommes les plus âgés ou malades). Les adolescents des [[Jeunesses hitlériennes]] sont également intégrés aux forces militaires ; leur [[fanatisme]] en fait les combattants les plus motivés de Berlin mais aussi les plus gravement décimés, la majorité d'entre eux périt. Cependant, la [[Feldgendarmerie]] ainsi que les membres  de la [[Schutzstaffel|SS]] exécutent sommairement de plus en plus de civils et de soldats soupçonnés de [[désertion]], dont un grand nombre de membres du ''Volkssturm''.

Le {{date|13 février 1945|guerre mondiale|liens=oui}}, les Soviétiques s'emparent de [[Bataille de Budapest|Budapest]], durement défendue par les Allemands. Les Alliés à l'Ouest s'avancent jusqu'au [[Rhin]]. Les [[Bombardements stratégiques durant la Seconde Guerre mondiale|bombardements stratégiques]] [[États-Unis|américano]]-[[Royaume-Uni|britanniques]] continuent à accabler l'Allemagne : du {{nobr|13 au 15 février}}, le [[bombardement de Dresde]], alors lieu de transit de nombreux réfugiés, cause près de {{unité|25000|morts}}.

== Situation stratégique ==
{{Article connexe|Bataille de la ligne Oder-Neisse}}
[[Fichier:Bundesarchiv Bild 146-1985-092-29, vor Berlin, Volkssturm mit Panzerabwehrwaffe.jpg|thumb|right|300px|Soldat du [[Volkssturm]] armé d'un [[Panzerschreck]], affecté à une ligne de défense extérieure de Berlin.]]

En [[Mars 1945 (guerre mondiale)|{{date-|mars 1945}}]], l'[[Armée rouge]] conquiert la [[Poméranie]], assiège [[Kaliningrad|Königsberg]] et [[Wrocław|Breslau]] et a établi des têtes de ponts sur la rive occidentale de l'[[Oder]], à moins de {{unité|50|kilomètres}} de [[Berlin]]. Cependant, les forces [[Alliés de la Seconde Guerre mondiale|alliées]], à l'Ouest, progressent à l'Est du [[Rhin]] début mars et la {{IIIe}} armée de [[George Patton]] opère une percée fulgurante en Allemagne centrale. Le {{1er}} avril, le groupe d'armée B du maréchal allemand [[Walter Model]] est encerclé dans la [[Ruhr (région)|Ruhr]]. Les Alliés avancent alors plus rapidement que les Soviétiques. Ils sont susceptibles d'arriver à [[Berlin]] ou à Prague avant eux. C'est du reste ce que souhaitent Patton, [[Winston Churchill]] et [[Bernard Montgomery]], qui craignent un futur conflit avec les [[Union des républiques socialistes soviétiques|Soviétiques]].

Mais à la [[conférence de Yalta]], en [[Février 1945 (guerre mondiale)|{{date-|février 1945}}]], les Alliés se sont mis d'accord sur leurs zones d'occupation respectives. Le territoire à l'Est de l'[[Elbe (fleuve)|Elbe]], comprenant Berlin, doit revenir à l'Armée rouge. Le commandant en chef des Alliés, [[Dwight D. Eisenhower|Eisenhower]], invoquant les accords et souhaitant épargner les vies américaines (estimant de façon surestimée que poursuivre l'offensive causerait des pertes de {{nombre|100000|hommes}}), arrête l'avancée de ses troupes : elles ne doivent pas dépasser l'[[Elbe (fleuve)|Elbe]] alors que Berlin n'est plus qu'à une centaine de kilomètres. Se posait aussi le problème de la longueur excessive des lignes de communication américaines. En outre les généraux américains ne savaient pas que de nombreux militaires allemands préféraient que Berlin fût prise par les Américains et n'étaient pas loin de céder{{sfn|Beevor|2004|p=235 et s}}.

L'ordre de ne pas passer l'Elbe est donné le {{date-|15 avril}}, soit trois jours après la mort de Roosevelt alors que des têtes de pont ont déjà été installées et que les chars franchissent le fleuve. Cette décision porte un coup au moral des troupes américaines qui avaient connu jusque-là une avancée fulgurante péniblement contenue par quelques poches de SS{{sfn|Beevor|2004|p=235 et s}}.

Du côté soviétique, Staline avait caché à ses alliés et même à ses commandants d'armées que Berlin était son objectif militaire, prétendant que son effort principal porterait sur Dresde vers la mi-mai et que seules des troupes de deuxième ordre seraient dirigées vers Berlin. Staline espérait en réalité dans un premier temps encercler la capitale mi-avril afin d'empêcher toute intervention des Anglais et des Américains puis prendre la ville et mettre la main sur la recherche nucléaire allemande qui y était située{{sfn|Beevor|2004|p=226-228 et 242}}.

La {{1re|armée}} américaine de [[Courtney Hodges]] et l'armée soviétique de Joukov opèrent leur [[Jour de l'Elbe|jonction sur l'Elbe]] à [[Torgau]], le {{Date-|25 avril 1945}}. Les forces allemandes sont coupées en deux. {{refnec|Le {{Date-|26 avril 1945}}, les troupes soviétiques s'emparent de l'[[aéroport de Berlin-Tempelhof|aéroport de Tempelhof]], ce qui prive les troupes allemandes du soutien de la [[Luftwaffe]].|date=29 janvier 2023}}

== Berlin avant la bataille ==

Au printemps 1945, Berlin semble relativement loin de la zone de combat mais ressemble à une métropole en guerre : le [[Großer Tiergarten|Tiergarten]] a été transformé en parc pour l'artillerie lourde, les bâtiments portent les traces des bombardements{{sfn|Kershaw|2012|p=379}}, la population se terre dans les abris et vit dans l'obscurité ou à la lueur des bougies{{sfn|Kershaw|2012|p=380}}.

Dans cette capitale en guerre, un intense marché noir permet aux habitants de trouver, en dépit de la répression, tout ce qu'elle pouvait désirer{{sfn|Kershaw|2012|p=380}}. Au début du mois d'[[avril 1945 (guerre mondiale)|avril]], {{nombre|200|personnes}} affamées prennent d'assaut et pillent une boulangerie : ce pillage est réprimé (deux personnes sont pendues après jugement) et une action de propagande est décidée par le [[Kreisleiter]]{{sfn|Kershaw|2012|p=409}}.

== Forces en présence ==
[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-J31320, Berlin, Posten beim Bau einer Straßensperre.jpg|thumb|250px|Membres du Volkssturm armés de [[Panzerfaust]] dans les rues de Berlin en {{date|mars 1945|guerre mondiale}}.]]
{{Article détaillé|Ordre de bataille lors de la bataille de Berlin}}

;{{URSS 1923-1955}} :
Berlin est encerclée par deux groupes d'armées soviétiques : ceux de [[Gueorgui Joukov|Joukov]] ({{1er|front}} biélorusse) et de [[Ivan Koniev|Koniev]] ({{1er|front}} ukrainien), avec en appui celui de [[Constantin Rokossovski|Rokossovski]] ({{2e|front}} biélorusse), que la récente prise de [[Königsberg]] vient juste de libérer.

;{{Allemagne (1933)}} :
Au début de l'offensive soviétique, le Reich dispose de deux Heeresgruppen (''groupe d'armées'') pour défendre Berlin jusqu'à [[Prague]], et de la garnison de Berlin :
* le [[groupe d'armées Vistule|Heeresgruppe Vistule]], commandé par le [[generaloberst]] [[Gotthard Heinrici]], qui défend la zone au nord de Berlin et jusqu'à [[Szczecin|Stettin]] sur la Baltique, les hauteurs de [[Seelow]], protégeant directement Berlin, et, plus au sud, la ligne [[Cottbus]]-[[Liberec]] ;
* le [[groupe d'armées Centre|Heeresgruppe Mitte]], du [[generalfeldmarschall]] [[Ferdinand Schörner]], défend l'Est de Prague avec la [[17e armée (Allemagne)|17. Armee]] et la [[1. Panzerarmee]]. Lors de l'offensive sur Berlin, ces unités, placées sur un axe de pénétration secondaire, ne jouent pas de rôle stratégique important ;
* La garnison de Berlin sera elle-même composée du LVI. Panzerkorps (corps blindé) du général [[Helmuth Weidling]]. Ce corps est composé de la [[Panzerdivision Müncheberg]], de la [[20e Panzergrenadier Division|{{20e}} Panzergrenadier Division]], de la [[9. Fallschirmjäger-Division]]. Les unités [[33. Waffen-Grenadier-Division der SS Charlemagne (französische Nr. 1)|françaises SS de la Charlemagne]], anglaises du [[Britisches Freikorps (SS)|SS British Free Corps]], [[11e SS-Freiwilligen-Panzergrenadier-Division Nordland|néerlandais de la SS Nordland]] et le [[Volkssturm]] ({{nombre|40000|hommes}}) complètent le dispositif. Les effectifs de la garnison ne dépassent pas les {{nombre|85000|hommes}} ;
* La [[12e armée (Allemagne)|{{12e|armée}}]] du général [[Walther Wenck]] défend Berlin par l'ouest, sur le front de l'Elbe, indépendamment de l'armée de la Vistule.

== Déroulement ==
=== L'offensive générale soviétique ===
[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-E0406-0022-012, Sowjetische Artillerie vor Berlin.jpg|thumb|250px|L'artillerie soviétique aux portes de Berlin.]]

Les combats débutent le {{date-|16 avril}} avec l'attaque de nuit, à la lueur de projecteurs de [[Lutte antiaérienne|DCA]], à partir des hauteurs de [[Seelow]]. Cette bataille manque de tourner au fiasco, pour avoir été mal préparée.
{{Article détaillé|Bataille de Seelow}}
Les plans de l'armée soviétique sont d'encercler la ville, puis d'éliminer par des tirs de barrage toute résistance. Mais ces bombardements gênent ensuite la progression des troupes à l'intérieur de la ville.

Les positions allemandes, évacuées puis réoccupées après le barrage d'artillerie soviétique du {{date-|16 avril}} (ce qui leur permet d'opposer une vive résistance sur les hauteurs de Seelow), sont finalement débordées le {{date-|19 avril}}. Le lendemain, les unités allemandes de Wenck et Heinrici commencent à montrer des signes de désagrégation{{sfn|Lopez|2010|p=568}}, mais certaines unités, composées notamment de membres des [[Jeunesses hitlériennes]], tentent d'arrêter les chars soviétiques au moyen de [[Panzerfaust]], dont la neuvième armée est abondamment pourvue. Les différentes lignes de défense avancée de la ville sont tournées avec plus ou moins de facilité par les avant-gardes soviétiques, dans un premier temps par la pince sud, puis par la pince nord de l'offensive soviétique{{sfn|Lopez|2010|p=570}}.

Le {{date-|20 avril}}, Joukov lance l'exploitation de la percée obtenue la veille, face à une {{9e|armée}} en cours de désagrégation, tandis que la Luftwaffe lance ses dernières forces dans la bataille{{sfn|Lopez|2010|p=568}}. Dès la fin de journée, la première ligne de défense, clairsemée et peu pourvue en hommes et en matériel, est tournée et débordée, les défenseurs ne trouvant leur salut que dans la fuite{{sfn|Lopez|2010|p=570}}. Le lendemain, la ville est tournée par le nord, prélude à l'encerclement, tandis que le centre de la ville est bombardé par l'artillerie lourde soviétique et les premières unités soviétiques s'en prennent à la ligne du S-Bahn, constituant les défenses extérieures de la ville proprement dite{{sfn|Lopez|2010|p=571}}.

La pince sud, commandée par Koniev, est, dans un premier temps, gênée par la configuration du terrain, propice à la défense, s'infiltre dans Berlin, et enfonce la ligne de défense extérieure de la ville{{sfn|Lopez|2010|p=574}}.

Le 24, les unités commandées par Joukov font leur entrée dans les faubourgs nord de la ville, tandis que celles de Koniev avancent dans le Sud du [[Brandebourg]]{{sfn|Masson|1994|p=466}}. Les forces des deux fronts soviétiques ferment la poche en opérant leur jonction sur les arrières à [[Potsdam]]{{sfn|Lopez|2010|p=577}}. Cette progression se fait au prix de pertes importantes causées par les troupes allemandes.

Des poches de résistance naissent alors, comme au [[Großer Tiergarten|Tiergarten]].

Les Soviétiques massent autour de Berlin plus de {{nombre|40000|pièces}} d'artillerie (1 pièce tous les dix mètres).

=== Les combats dans Berlin ===

Le {{date|20 avril 1945|guerre mondiale}}, après la cérémonie du {{56e}} [[anniversaire]] d'Adolf Hitler, de nombreux hauts dignitaires nazis quittent Berlin précipitamment en abandonnant le [[Führer]]. Les Berlinois appellent cet épisode « la fuite des faisans dorés »{{sfn|Beevor|2004|p=291 et s.}}.

Les dispositifs de la défense comptent l'ensemble des moyens de la guerre urbaine : barricades, [[champ de mines|champs de mines]], passages entre immeubles{{sfn|Masson|1994|p=469}}.

Une fois les faubourgs conquis, au prix de lourdes pertes en hommes et en matériel, la prise de la ville proprement dite commence le {{date-|25 avril}}{{sfn|Masson|1994|p=469}}. Les obstacles mis sur la route des Soviétiques vers le centre-ville sont balayés les uns après les autres à partir du {{date-|28 avril}}, à l'image du quartier général de la police, à la fois siège de la police et prison, défendu pendant 36 heures par des policiers et des SS fanatisés, exploitant la configuration particulière de ce lieu, mais victimes d'une solide préparation d'artillerie{{sfn|Lopez|2010|p=589}}.

Le lendemain, les ponts sur la Spree tombent les uns après les autres sous le contrôle des Soviétiques ; le pont Moltke, massivement miné et défendu depuis l'autre rive, est pris d'assaut le {{date-|29 avril}}, avec l'immeuble du ministère prussien de l'Intérieur, défendu avec acharnement par une troupe hétéroclite de SS, de marins, d'aviateurs et de soldats de la Wehrmacht mais l'obstacle est franchi dans la journée{{sfn|Lopez|2010|p=593}}.

{{refnec|Les combats font rage dans le quartier des ministères, autour du [[Palais du Reichstag|Reichstag]] et du [[Führerbunker]] défendu par des volontaires SS de différentes nationalités ; parmi ces derniers combattent les Scandinaves et les Hollandais de la [[11e SS-Freiwilligen-Panzergrenadier-Division Nordland|{{11e}} SS-Division Nordland]], à laquelle a été rattaché le groupe de combat ''Charlemagne'', regroupant quelque 300 Français sous les ordres du SS- Hauptsturmführer (capitaine) [[Henri Fenet]], ainsi que des éléments aussi épars que des Espagnols du capitaine Izquierda, des Baltes rescapés des combats de Lituanie et jusqu'à 3 ou 4 [[Royaume-Uni|Britanniques]] du [[Britisches Freikorps (SS)|SS British Free Corps]].|date=18 mars 2024}}

{{refnec|La plupart des volontaires étrangers ayant survécu aux ultimes combats des {{1er}} et 2 mai, et qui tombèrent aux mains des soldats de l'Armée rouge furent, à part de rares exceptions, traités dans le cadre de la [[Conventions de Genève|convention de Genève]]. Le cas n'était pas si fréquent sur le [[Front de l'Est (Seconde Guerre mondiale)|front de l'Est]].|date=16 mars 2020}}

{{refnec|L'Armée rouge se voit obligée d'amener, dans le secteur même des combats, des pièces d'[[artillerie]] qui font feu à tir tendu pour réduire les poches de résistance.}}

=== Prise du Reichstag ===
[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-V00397, Berlin, zerstörter Reichstag.jpg|thumb|Le [[Palais du Reichstag|Reichstag]] en ruines en 1946, un an après sa prise.]]

Dès 1943, le Reichstag, le bâtiment {{n°|105}} sur les cartes et les maquettes utilisées par les Soviétiques pour préparer la bataille, est désigné comme l'objectif final de la confrontation avec le Reich ; bâtiment massif et isolé, il convient à la mise en scène de la victoire telle que les responsables soviétiques l'imaginent{{sfn|Lopez|2010|p=611}}.

À l'extérieur du Reichstag se trouvaient également quatre [[Canon de 88 mm|canons de 88]] et deux chars [[Panzerkampfwagen VI Königstiger|Tigre II]]. La défense du Reichstag était assurée par le SS-[[Brigadeführer]] [[Wilhelm Mohnke]].

Dès le {{date-|28 avril 1945-}}, une puissante attaque soviétique est montée contre les abords du quartier gouvernemental, ce dernier étant protégé sur trois côtés par la Spree, les ponts étant défendus depuis les abords et les immeubles, où ont été concentrés de nombreux moyens humains et matériels{{sfn|Lopez|2010|p=591}}.

L'assaut des Soviétiques sur le [[palais du Reichstag]] débute le {{date-|30 avril 1945-}}. Les combats à l'extérieur et à l'intérieur durent toute la journée puis la nuit, se poursuivent au corps à corps, même après que le drapeau rouge eut été hissé sur le toit du Reichstag vers {{heure|22|50}}{{sfn|Lopez|2010|p=592-594}}. Le {{date|1 mai 1945-}}, en fin d'après-midi, les défenseurs capitulent ({{nombre|300|soldats}},sous-officiers et officiers se rendent au lieutenant de l'Armée rouge Berest). {{nombre|500|blessés}} gisent dans le poste de secours des caves du Reichstag{{sfn|Beevor|2004|p=397}}. Staline a demandé au photographe ukrainien [[Evgueni Khaldeï]] d'immortaliser la pose du drapeau rouge sur le bâtiment, mais il n'était pas présent le jour de la prise du Reichstag, alors que toutes les unités engagées à Berlin se sont vues dotées d'un drapeau dont les symboles soviétiques ont été rendus plus visibles{{sfn|Lopez|2010|p=612}}. La [[Propagande#Propagande soviétique|propagande soviétique]] recrée la scène le {{date|2|mai|1945}}. Le soldat d'origine géorgienne [[Meliton Kantaria]], sur ordre de Staline, [[Raising the Flag on Iwo Jima|hisse le drapeau à la manière des soldats américains à Iwo Jima]] le {{date|23|février|1945}}. La célèbre photographie fut retouchée pour effacer une des deux montres, celle au poignet droit de l'officier soutenant le soldat portant le drapeau, montre laissant apparaître qu’elle avait été volée.

Peu de temps avant que Hitler ne se suicide et que le [[Palais du Reichstag|Reichstag]] ne soit pris, la radio berlinoise réussit à diffuser, pour la dernière fois, une œuvre de [[Richard Wagner]] : ''La Marche funèbre de Siegfried'', afin de donner du courage aux troupes. Celle-ci annonçait la fin du [[Troisième Reich]]. Le {{date|1 mai 1945-|guerre mondiale}}, à {{heure|21|30}}, le [[Großadmiral|grand-amiral]] [[Karl Dönitz|Dönitz]] annonce, sur les ondes du ''{{lien|langue=de|trad=Nordische Rundfunk AG|texte=Reichssender Hamburg}}'', que Hitler est tombé en combattant à la tête de ses troupes et qu'il en est le successeur{{sfn|Beevor|2004|p=406}}.

=== La reddition allemande ===
[[Fichier:Polish flag 1945 Berlin.jpg|thumb|right|Le [[Drapeau de la Pologne|drapeau polonais]] flotte sur les ruines de Berlin.]]
[[Fichier:Берлин. Рейхстаг. 1945 год..jpg|thumb|right|Commandants du {{8e}} Corps de chars de la Garde à Berlin devant le Reichstag.]]

Dès le suicide de Hitler, le gouvernement mis en place par [[Joseph Goebbels|Goebbels]], nouveau chancelier en exercice, se rapproche des Soviétiques afin de connaître les conditions de la reddition allemande, tandis que les combats prennent une allure sporadique et décousue{{sfn|Lopez|2010|p=594}}. Une suspension des combats est actée de fait le {{date|1 mai 1945-}} entre {{heure|4}} du matin et {{heure|15}} dans l'après-midi, le temps des négociations entre Goebbels, représenté par le général [[Hans Krebs]], et les militaires soviétiques ; après l'échec des négociations, les Soviétiques reprennent leur progression vers {{heure|16|30}}{{sfn|Lopez|2010|p=595}}. La neuvième armée du général Busse traverse les forêts au sud de Berlin, pour rejoindre l'Elbe et se rendre aux Américains ({{nombre|25000|soldats}} et des milliers de civils){{sfn|Beevor|2004|p=387}}. Les véhicules de la douzième armée du général Wenck les acheminent en direction de l'Elbe{{sfn|Beevor|2004|p=420}}. Le {{date-|1 mai 1945-}}, la citadelle de Spandau, abritant le laboratoire de défense contre les gaz de l'armée, se rend (les savants allemands capturés sont envoyés en URSS, pour poursuivre leurs recherches. Ceux qui refusent de collaborer rentrent en Allemagne en 1954){{sfn|Beevor|2004|p=397-401}}. La [[tour de Flak|tour de DCA]] du [[Jardin zoologique de Berlin|zoo de Tiergarten]], abritant un hôpital et des milliers de civils, des soldats de la Wehrmacht et des SS, se rend également vers minuit{{sfn|Beevor|2004|p=397-401}}, après que des blindés allemands de Tiergarten tentent une percée vers Spandau, en empruntant le Charlottenbrücke, défendu par les [[Jeunesses hitlériennes]]. Les soldats et les civils subissent le feu de l'artillerie soviétique en franchissant le pont mais des canons antiaériens autopropulsés ripostent et permettent, brièvement, le passage de nombreux Allemands (mais seule une poignée de soldats réussit à atteindre l'Elbe les jours suivants){{sfn|Beevor|2004|p=402-410}}. Quant aux derniers défenseurs de la [[Chancellerie du Reich|Chancellerie]], ils tentent en vain une sortie par le pont de Weidendamm pendant la même nuit{{sfn|Beevor|2004|p=402-410}}. Le peu qui réussit à s'échapper par d'autres voies est fait prisonnier les jours suivants{{sfn|Beevor|2004|p=413}}.

Le {{date-|2 mai 1945-}}, à {{heure|4}} du matin, le dernier commandant de la place de Berlin, Helmuth Weidling, signe la capitulation des derniers défenseurs ; le cessez-le-feu est effectif à {{heure|17}}, heure de Berlin, tandis que le vice-ministre de la Propagande fait diffuser une proclamation destinée à faire cesser les combats{{sfn|Lopez|2010|p=596}}.

=== Le calvaire des civils durant le siège ===

[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-H29659, Berlin, Jägerstraße, Trümmerfrauen.jpg|thumb|200px|[[Femmes des ruines|Femmes  ramassant des ruines]] d'habitation à Berlin en [[1946]].]]

Les civils [[berlin]]ois (deux millions environ) pris au piège par les combats se réfugient dans le [[métro]], dans les abris ou les caves, pour échapper aux bombardements aériens et d'artillerie. En de nombreux endroits, la distribution d'eau est coupée ainsi que l'électricité. L'inondation d'une partie du [[métro de Berlin]] est supposée avoir été ordonnée par le Führer car, si l'armée soviétique l'avait investi, son parcours lui aurait permis d'arriver en {{nombre|120|minutes}} jusqu'à son bunker, mais aucun document ne permet d'attester ce fait qui semble même être contredit. En effet, dans son ouvrage ''{{Langue|de|Die letzten Tage mit Adolf Hitler}}'', [[Erich Kempka]], SS présent à la chancellerie à l'époque des faits, rapporte dans l'un de ses écrits la correspondance écrite qu'il a reçu de [[Wilhelm Mohnke]] le {{date-|2 août 1975}}, selon laquelle {{Citation|Jamais un tel ordre ne fut transmis par la Chancellerie du Reich}}<ref>{{Citation étrangère|Es ist niemals von der Reichskanzlei ein solcher Befehl erteilt worden|langue=de}}. [[Erich Kempka]], ''Die letzten Tage mit Adolf Hitler'', 1975, {{p.|239}}.</ref>. La thèse de cet ordre est également qualifiée de {{Citation|mensonge infamant}}<ref>{{Citation étrangère|infame Lügenlegende|langue=de}}.</ref> par R. Fritz Kraft, qui fut responsable du métro pendant des années et de sa remise en état après la guerre. La cause de cette arrivée d'eau soudaine dans une partie des tunnels du métro berlinois et qui coûta la vie à environ un millier de Berlinois - chiffre jamais vérifié - est selon lui liée à un impact de bombe sur la voûte du ''U-Bahn'' entre les stations Märkisches Museum et Klosterstrasse, voûte se trouvant sous la rivière [[Sprée]]<ref name="Kempka 240">[[Erich Kempka]], ''Die letzten Tage mit Adolf Hitler'', 1975, {{p.|240}}.</ref>. Le tunnel du métro sous le Landwehrkanal fut détruit également, mais aucune victime par noyade ne fut à déplorer en ce lieu<ref name="Kempka 240"/>.

Il y eut aussi la tragédie des femmes systématiquement violées<ref name="Échos">{{article|périodique=Les Échos|lire en ligne=https://www.lesechos.fr/07/11/2002/LesEchos/18777-139-ECH_dans-l-enfer-de-la-bataille-de-berlin.htm|titre=Dans l'enfer de la bataille de Berlin|auteur=Emmanuel Hecht|jour=7|mois=novembre|année=2002}}</ref> ({{refnec|et parfois assassinées}}) par les troupes soviétiques. Ce drame humain, vécu par un peu plus de cent mille Berlinoises<ref name="Échos"/> (10 à 20 % de la population féminine<ref>{{Ouvrage|auteur1=Nicholas Stargdart|titre=La Guerre allemande|sous-titre=Portrait d'un peuple en guerre 1939-1945|éditeur=La Librairie Vuibert|année=2017|mois=août|jour=21|pages=800|isbn=978-2-311-10227-7|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=FuM3DwAAQBAJ}}</ref>) de tout âge et de toute condition, {{refnec|a longtemps été occulté par la plupart des récits de la bataille}}. {{refnec|Il a fallu attendre la [[Mur de Berlin|chute du mur de Berlin]] et le processus de [[réunification allemande]] qui s'ensuivit pour que l'on puisse, enfin, évoquer ce sujet épineux, tant d'un point de vue humain que politique}}.

Ce sont aussi les Berlinoises qui déblayèrent des milliers de tonnes de gravats ; elles furent surnommées les ''[[femmes des ruines]]''.

== Divergences dans le commandement ==
=== La rivalité au sein du commandement soviétique ===

Dans les semaines qui précèdent la percée soviétique sur Berlin, les deux principaux commandants des troupes soviétiques sont engagés dans une compétition orchestrée par Staline en personne, qui, depuis le Kremlin, joue le rôle de coordinateur de la prise de la ville : il a donc la charge d'informer chacun des commandants de [[Front (unité soviétique)|front]] des progrès de l'autre, ce dont il s'abstient lors des opérations à l'extérieur et à l'intérieur de la ville.

Il dissimule ainsi à Joukov les progrès de Koniev, son rival, allant jusqu'à courir le risque que les unités respectives des deux maréchaux soviétiques se tirent mutuellement dessus. Dans le cadre de cette compétition, Staline lui-même fixe, modifie régulièrement, tout en les laissant dans le flou au-delà d'un certain point, non encore atteint par les troupes soviétiques, les limites d'opération des troupes des fronts respectivement commandés par Joukov et Koniev{{sfn|Lopez|2010|p=579}}.

Cette compétition modifie les choix des deux commandants soviétiques ; ainsi, le {{date-|25 avril 1945-}}, Joukov lance les unités commandées par Tchouikov en direction du quartier gouvernemental, non seulement pour saisir plus rapidement certaines positions, mais aussi pour couper la route aux unités de Koniev : au bout d'une nuit de combat, les unités de Tchouikov prennent le contrôle des points de passage sur la [[Sprée]] que Koniev avait choisi pour faire traverser ses unités{{sfn|Lopez|2010|p=582}}. Au terme de trois journées de combat, alors que Koniev et Joukov sont à égale distance du bunker de la chancellerie, Staline, le {{date-|28 avril 1945-}} dans la soirée, annonce que le quartier gouvernemental est dévolu à Joukov{{sfn|Lopez|2010|p=591}}.

Une fois le centre-ville octroyé aux soldats de Joukov, les unités qui composent son armée sont mises en compétition entre elles, entraînant des frictions pour la prise de tel ou tel édifice remarquable ; ainsi, l'armée de Tchouikov, composée d'unités de la Garde, est-elle placée en rivalité avec la {{5e|armée}} de choc pour la prise du Reichstag : en se référant à Joukov, Tchouikov parvient à assurer pour ses unités la prise de ce bâtiment{{sfn|Lopez|2010|p=589}}.

=== Les derniers soubresauts du {{IIIe}} Reich ===

La bataille de Berlin constitue l'occasion de l'expression des divergences entre les différents dirigeants du Reich. Dès avant le suicide de Hitler le {{date-|30 avril}}, les avis au sein des derniers hauts dignitaires nazis présents à Berlin divergent concernant la demande de négociations pour un [[armistice]] ; les jusqu'au-boutistes comme [[Joseph Goebbels]] s'y opposent formellement.

Dès la mort de Hitler, les lignes de fracture au sein de l'appareil nazi réapparaissent ; une tendance, groupée autour de [[Heinrich Himmler|Himmler]], [[Hermann Göring]] et [[Karl Dönitz]] tente de négocier avec les Alliés occidentaux une reddition partielle, afin de tourner les dernières unités disponibles contre l'Armée rouge et ses alliés{{sfn|Lopez|2010|p=594}}, tandis que [[Joseph Goebbels|Goebbels]] et [[Hans Krebs|Krebs]] tentent de négocier un armistice séparé avec le commandement soviétique{{sfn|Lopez|2010|p=595}}.

== Actions de propagande ==
=== Propagande allemande ===

La propagande mise en œuvre par le ministère de [[Joseph Goebbels|Goebbels]], également [[Gauleiter]] de Berlin, dans la ville rapidement privée de tout contact avec l'extérieur, fait la part belle aux [[rumeur]]s. Ainsi, la propagande insiste sur une [[Wunderwaffe|arme nouvelle]], capable de détruire les chars soviétiques, ou sur une armée nouvellement constituée et richement dotée en matériel, qui s'est mise en route depuis le Nord du Reich afin de libérer la ville investie{{sfn|Lopez|2010|p=613}}.

La ville de Berlin directement menacée, Goebbels tente de motiver les soldats de la [[12e armée (Allemagne)|{{12e|armée}}]] afin de libérer la ville, en l'inondant par avions de tracts (dont certains étaient faussement destinés à l'armée de Wenck{{sfn|Lopez|2010|p=613}}) ou par des messages radio, autant destinés aux soldats allemands qu'au commandement soviétique (qui ignore où cette armée va frapper leurs unités){{sfn|Lopez|2010|p=556}}.

=== Propagande soviétique ===
{{Article connexe|Le Drapeau rouge sur le Reichstag}}

Dans les jours qui précèdent la prise de la ville, lorsque les banlieues sont progressivement conquises par les unités soviétiques, les responsables soviétiques de la propagande incitent les civils à se rendre, notamment en diffusant par haut-parleurs les noms des prisonniers ou en infiltrant à l'intérieur des lignes allemandes des militants communistes allemands ou des prisonniers retournés ; le {{1er}} mai, les unités de Joukov obtiennent la reddition de près de {{Formatnum:3000}} défenseurs allemands{{sfn|Lopez|2010|p=575}}.

En outre, dans les derniers jours du conflit, le commandement soviétique doit aussi motiver leurs soldats, dont certains adhèrent au [[Parti communiste de l'Union soviétique|parti communiste]], afin de préparer l'après-guerre{{sfn|Lopez|2010|p=614}}.

La bataille de Berlin fut racontée dans un [[La Chute de Berlin|film]] de propagande soviétique réalisé par [[Mikhaïl Tchiaoureli]] à l'occasion du {{70e|anniversaire}} de Staline en 1949<ref>{{Ouvrage|langue=Anglais|auteur1=Martin McCauley|titre=Stalin and Stalinism|passage=p.89|lieu=Abingdon, Oxon|éditeur=Routledge|date=2019}}</ref>.

== Récapitulatif par dates ==

* {{Date|21|avril|1945}} : derniers bombardements aériens américains ;
* {{Date|24|avril|1945}} : entrée des armées soviétiques dans Berlin proprement dit ;
* {{Date|25|avril|1945}} : jonction des troupes américaines et soviétiques à [[Torgau]] ;
* {{Date|30|avril|1945}} : [[Derniers jours d'Adolf Hitler|suicide de Hitler]] et de sa femme [[Eva Braun]] ;
* {{date|1|mai|1945}} : [[Joseph Goebbels]] se suicide à son tour, l'état-major des unités engagées à Berlin capitule ;
* {{date|7|mai|1945}} : capitulation à [[Reims]] auprès des armées alliées ([[Royaume-Uni|Britanniques]], États-Unis, France), signature à 2 h 41 ;
* {{date|8|mai|1945}} : la [[8 mai 1945|capitulation sans condition]] de l'Allemagne nazie est entérinée à Berlin par le maréchal Keitel et l'amiral Friedeburg, au nom des Allemands (signature à 22 h 43) .

== Conséquences et bilans ==

[[Fichier:Berlin Eiermann Memorial Church.JPG|right|thumb|250px|L'[[église du Souvenir de Berlin]] fut conservée comme mémoire des destructions et son clocher fut volontairement laissé brisé.]]
{{Référence nécessaire|La ville de [[Berlin]] est détruite à 33 % (jusqu'à 70 % en centre-ville)|date=16 avril 2018}} ; les zones [[aéroport]]uaires et leurs alentours ont été épargnés autant que possible. Selon le plan d'invasion, les aéroports devaient être utilisables le plus rapidement possible par les Alliés après la chute de la ville. La destruction « complète » de la ville est une rumeur : la ville (établie sur 20 districts et plus de 800 kilomètres carrés)  était trop grande pour être rasée, comme l'avaient été [[Cologne]], [[Hambourg]] ou [[Dresde]].

De très nombreux [[Victime civile|civils ont été tués]] durant les combats, d'autres sont brutalisés ou exécutés par les soldats de l'[[Armée rouge]], ivres de vengeance contre les Allemands<ref>{{article|périodique=[[La Libre Belgique|La Libre]] |url=https://www.lalibre.be/international/l-heure-de-la-revanche-russe-a-berlin-51b889a8e4b0de6db9ac00fd|titre=L'heure de la revanche russe à Berlin|auteur institutionnel=[[Belga]]|jour=2|mois=mai|année=2005}}.</ref>. Au début, ces comportements sont tolérés par l'état-major de l'[[Armée rouge]] mais, dès que l'armistice est signé et que l'occupation soviétique se met en place, ces exactions sont rapidement arrêtées par le [[NKVD]]. En 1945, {{nombre|4000|officiers}} soviétiques ont été jugés pour crimes contre des civils{{refnec}}.

Les archives [[Union des républiques socialistes soviétiques|soviétiques]] revues par [[Grigori Krivocheïev|Krivocheïev]]<ref>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=[[Grigori Krivocheïev|G.F. Khrivosheev]] |titre=Soviet Casualties and Combat Losses in the Twentieth Century |éditeur=Greenhill Books |année=1997 |isbn=978-1-85367-280-4}}.</ref> estiment les pertes soviétiques et polonaises à {{nombre|81116|tués}} (dont {{nombr|2825|Polonais}}) et {{nombre|280251|blessés}} et malades pour l'ensemble des trois engagements (ville de Berlin, [[Bataille de Seelow|bataille des hauteurs de Seelow]] et de la [[Bataille de Halbe|poche de Halbe]]).

Du côté allemand, les pertes humaines totales ont été estimées à {{nombre|458080|tués}} et blessés et {{nombre|479298|prisonniers}}<ref>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=David M. Glantz |titre=When Titans Clashed |sous-titre=How the Red Army Stopped Hitler |éditeur=University Press of Kansas |année=1998 |isbn=978-0-7006-0899-7}}.</ref>. Les pertes dans la seule ville de Berlin seraient de {{nombre|22000|soldats}} tués et autant de civils<ref name="Antill1">{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Peter Antill|titre=Berlin 1945|sous-titre=End of the Thousand Year Reich|éditeur=Osprey Publishing|année=2005|isbn=978-1-84176-915-8}}.</ref>.

== Notes et références ==
=== Références ===
{{Références|colonnes=3}}

=== Notes ===
<references group="note" />

== Voir aussi ==
{{Autres projets
|commons=Category:Battle of Berlin
}}
=== Bibliographie ===

* Tony le Tissier, ''Race for the Reichstag, the 1945 Battle for Berlin,'' edition Pen& Sword Military, 2010, 288 p. 
* Yuri Barashkov (trad. du russe), ''Moscou, Stalingrad, Koursk, D-Day, Berlin'', éditions Le Sémaphore, 2019, 192 p. {{ISBN|978-2-3522-6047-9}}.
*{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[François Cavanna]]|titre=[[Les Russkoffs]]|éditeur=[[éditions Belfond]]|année=1979|pages=374|isbn=978-2-7144-1234-8|oclc=475479716|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=d9jl5ALyibEC&printsec=frontcover&dq=Les+Russkoffs}}.
*{{Ouvrage|auteur1=[[Cornelius Ryan]]|titre=La Dernière Bataille|sous-titre=La chute de Berlin|éditeur=Robert Laffont|année=1966}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Antony Beevor]]|traducteur=[[Jean Bourdier]]|titre=La chute de Berlin|titre original={{langue|en|Berlin. The Downfall 1945}}|éditeur=Librairie générale française|lieu=Paris|année=2004|pages=633|passage=235 et s.|isbn=978-2-253-10964-8|oclc=57199310}}
* {{Ouvrage|auteur1=Anonyme|titre=[[Une femme à Berlin]]|sous-titre=Journal 20 avril-22 juin 1945|éditeur=Éditions NRF Gallimard|année=2006|isbn=}}.
** {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Auteur inconnue|titre=Une femme à Berlin|sous-titre=journal 20 avril - 22 juin 1945|éditeur=Gallimard|collection=Écoutez lire|lieu=Paris|nature ouvrage=Enregistrement sonore|année=2009|isbn=978-2-07-012396-4|oclc=718099335}}.
* {{Ouvrage|auteur1=[[Jean Mabire]]|titre=Mourir à Berlin|sous-titre=Les SS français derniers défenseurs du bunker d'Adolf Hitler|éditeur=|année=|isbn=}}.
* {{Ouvrage|auteur1=Andrew Tully|titre=La Bataille de Berlin|éditeur=éditions Plon|année=1963}}{{commentaire biblio|édition de poche : [[J'ai lu|Éditions J'ai lu]], collection [[Leur aventure]]}}{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Joachim Fest]]|traducteur=Frank Straschitz|titre=Les Derniers Jours de Hitler|éditeur=Perrin|année=2005|pages totales=205|isbn=978-2-262-02329-4|oclc=937710382}}.
* {{Ouvrage| langue=fr| prénom1=Ian| nom1=Kershaw| lien auteur1=Ian Kershaw| titre=La Fin| sous-titre=Allemagne, 1944-1945| éditeur=Seuil| lieu=Paris| année=2012| pages totales=665| isbn=978-2-02-080301-4}}. {{plume}}
* {{Ouvrage | langue=fr | prénom1=Jean | nom1=Lopez | lien auteur1=Jean Lopez | titre=Berlin | sous-titre=les offensives géantes de l'Armée rouge. Vistule - Oder - Elbe (12 janvier-9 mai 1945) | éditeur=Economica | lieu=Paris | année=2010 | pages totales=644 | isbn=978-2-7178-5783-2}}. {{plume}}
* {{Ouvrage| prénom1=Philippe| nom1=Masson| lien auteur1=Philippe Masson| titre=Histoire de l'Armée allemande| sous-titre=1939-1945| éditeur=Perrin| lieu=Paris| année=1994| isbn=978-2-262-00844-4}}. {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Armand Toupet]]|titre=Berlin 1945, ce fut l'enfer|sous-titre=22 avril - 29 avril|éditeur=Éditions Les Presses de la Cité|lieu=Paris|année=1985|pages totales=213|isbn=978-2-258-01552-4|oclc=13559256|lire en ligne=http://www.armandtoupet.fr/livres/adulte/berlin-1945-ce-fut-l-enfer_1985}}.
* [[Henri Fenet]], ''Derniers Témoignages'', Edition de L'Homme Livre, Référence 2014-01, Code EAN 8/13 ou code UPC : 9782368960233, 352 pages, format 14X21, broché, plus d'une centaine de photos et illustrations.

=== Filmographie ===

* ''[[La Fin d'Hitler]]'' (''Der letzte Akt''), de [[Georg Wilhelm Pabst]], 1955 ;
* ''[[Libération (film, 1971)|Libération]]'' : ''Le Dernier assaut'', de [[Iouri Ozerov]], 1971 ;
* ''[[Les Dix Derniers Jours d'Hitler]]'' (''Hitler: The last 10 days''), d'[[Ennio De Concini]], 1973 ;
* ''[[Le Bunker (téléfilm, 1981)|The Bunker]]'', téléfilm de George Schaefer avec [[Anthony Hopkins]], 1981 ;
* ''[[La Chute (film, 2004)|La Chute]]'' (''Der Untergang''), film basé sur le livre de [[Joachim Fest]], 2005 ;
* ''Une femme à Berlin'' (en [[allemand]] : ''Anonyma - eine Frau in Berlin)'' de [[Max Färberböck]], 2008 ;
* ''[[Enfant 44 (film)|Enfant 44]]'', de Daniel Espinosa, 2015 : première scène sur la prise du Reichstag.

=== Jeux vidéo ===

* ''[[Call of Duty (jeu vidéo)|Call of Duty]]'', 2003 ;
* ''[[Call of Duty: World at War]]'', 2008 ;
* ''[[Sudden Strike 4]]'', 2017.
* [[Enlisted (jeu vidéo)|Enlisted]], 2021

=== Articles connexes ===
* [[Bataille de Seelow]]
* [[Bombardement de Berlin pendant la Seconde Guerre mondiale]]
* [[Groupe d'armées Vistule]]
* [[Ordre de bataille lors de la bataille de Berlin]]
* [[Derniers jours d'Adolf Hitler]]
* [[Vague de suicides en 1945 dans l'Allemagne nazie]]
* [[Bannière de la Victoire]]
* [[Capitulation du Japon]]
* [[Chronologie de la Seconde Guerre mondiale|Chronologie]] : [[avril 1945 (guerre mondiale)|avril 1945]] - [[mai 1945 (guerre mondiale)|mai 1945]]

=== Liens externes ===
* {{fr}} [http://worldwartwo.free.fr/evenements/1945/Berlin/batailleberlin.html La bataille de Berlin, ''worldwartwo''].
* {{fr}} [http://www.secondeguerre.net/articles/evenements/es/45/ev_batailleberlin.html La bataille de Berlin, ''secondeguerre.net''].

{{Palette|Seconde Guerre mondiale|Principaux événements militaires de la Seconde Guerre mondiale}}

{{Portail|nazisme|Seconde Guerre mondiale|Berlin|URSS|années 1940}}

{{DEFAULTSORT:Berlin}}
[[Catégorie:Bataille ou opération de la Seconde Guerre mondiale]]
[[Catégorie:Bataille de la Seconde Guerre mondiale impliquant l'Allemagne]]
[[Catégorie:Bataille de la Seconde Guerre mondiale impliquant l'Union soviétique]]
[[Catégorie:Berlin sous le IIIe Reich]]
[[Catégorie:Bataille de 1945]]
[[Catégorie:1945 en Allemagne|Bataille de Berlin]]
[[Catégorie:Bataille de Gueorgui Joukov]]
[[Catégorie:Avril 1945]]
[[Catégorie:Mai 1945]]