Aller au contenu

« Nayib Bukele » : différence entre les versions

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Contenu supprimé Contenu ajouté
m Remplacement de {{Lien}} par un lien interne, suite à la création de l'article correspondant ; changements cosmétiques
 
(40 versions intermédiaires par 23 utilisateurs non affichées)
Ligne 4 : Ligne 4 :
| image = Presidente Bukele (cropped).jpg
| image = Presidente Bukele (cropped).jpg
| légende = Nayib Bukele en 2019.
| légende = Nayib Bukele en 2019.
| fonction1 = [[Président de la république du Salvador]]<ref group=alpha>A partir du {{date-|1 décembre 2023-}} [[Claudia Rodríguez de Guevara]] assure les fonctions présidentielles par intérim ; Bukele conserve néanmoins le titre de président.</ref>
| fonction1 = [[Président de la république du Salvador]]<ref group=alpha>Du {{date|1 décembre 2023}} au {{date|31 mai 2024}}, [[Claudia Rodríguez de Guevara]] assure les fonctions présidentielles par intérim ; Bukele conserve néanmoins le titre de président.</ref>
| depuis le fonction1 = 1 juin 2019<br><small>({{Durée|1|06|2019}})</small>
| depuis le fonction1 = 1 juin 2019
| à partir du fonction 1 =
| à partir du fonction 1 =
| jusqu'au fonction1 =
| jusqu'au fonction1 =
| prédécesseur 1 = [[Salvador Sánchez Cerén]]
| prédécesseur 1 = [[Salvador Sánchez Cerén]]
| élection1 = [[Élection présidentielle salvadorienne de 2019|{{Date-|3 février 2019}}]]
| élection1 = [[Élection présidentielle salvadorienne de 2019|{{Date|3 février 2019}}]]
| réélection1 = [[Élection présidentielle salvadorienne de 2024|{{Date-|4 février 2024}}]]
| réélection1 = [[Élection présidentielle salvadorienne de 2024|{{Date|4 février 2024}}]]
| vice-président 1 = [[Félix Ulloa]]
| vice-président 1 = [[Félix Ulloa]]
| successeur 1 =
| successeur 1 =
Ligne 16 : Ligne 16 :
| depuis le fonction2 =
| depuis le fonction2 =
| à partir du fonction2 = 1 mai 2015
| à partir du fonction2 = 1 mai 2015
| jusqu'au fonction2 = 30 avril 2018
| jusqu'au fonction2 = 30 avril 2018<br><small>(3 ans)</small>
| prédécesseur 2 = Norman Quijano
| prédécesseur 2 = Norman Quijano
| successeur 2 = [[Ernesto Muyshondt]]
| successeur 2 = [[Ernesto Muyshondt]]
| fonction3 = [[Maire]] de [[:es:Nuevo Cuscatlán|Nuevo Cuscatlán]]
| fonction3 = [[Maire]] de {{lien|lang=es|Nuevo Cuscatlán}}
| à partir du fonction3 = 1 mai 2012
| à partir du fonction3 = 1 mai 2012
| jusqu'au fonction3 = 30 avril 2015
| jusqu'au fonction3 = 30 avril 2015<br><small>(3 ans)</small>
| prédécesseur 3 = Álvaro Rodríguez
| prédécesseur 3 = Álvaro Rodríguez
| successeur 3 = Michelle Sol
| successeur 3 = Michelle Sol
Ligne 35 : Ligne 35 :
| mère =
| mère =
| père = [[Armando Bukele Kattán]]
| père = [[Armando Bukele Kattán]]
| fratrie = Karim Bukele<br />[[Youssef Bukele]]<br />Ibrajim Bukele
| fratrie = Karim Bukele<br>[[Youssef Bukele]]<br>Ibrajim Bukele
| conjoint = [[:es:Gabriela Rodríguez de Bukele|Gabriela Rodríguez]]
| conjoint = [[Gabriela Rodríguez de Bukele|Gabriela Rodríguez]]
| enfants =
| enfants =
| entourage = Xavier Zablah Bukele (cousin)
| entourage = Xavier Zablah Bukele (cousin)
| université =
| profession =
| religion =
| résidence =
| signature = Nayib Bukele signature.svg
| signature = Nayib Bukele signature.svg
| taille signature = 210px
| taille signature = 210px
Ligne 49 : Ligne 45 :
}}
}}


'''Nayib Bukele Ortez''', né le {{date de naissance|24 juillet 1981}} à [[San Salvador (Salvador)|San Salvador]], est un [[homme d'État]] [[salvador]]ien. Il est [[Président du Salvador|président de la République]] depuis le {{date|1|juin|2019}}.
'''Nayib Bukele Ortez''', né le {{date de naissance|24 juillet 1981}} à [[San Salvador (Salvador)|San Salvador]], est un [[homme d'État]] [[salvador]]ien. Il est [[Président du Salvador|président de la république]] depuis le {{date|1|juin|2019}}.


D’abord membre du [[Front Farabundo Martí de libération nationale]] (FMLN), il est élu [[maire]] de Nuevo Cuscatlán en 2012 puis de [[San Salvador (Salvador)|San Salvador]], la capitale, en 2015.
D'abord membre du [[Front Farabundo Martí de libération nationale]] (FMLN), il est élu [[maire]] de Nuevo Cuscatlán en 2012 puis de [[San Salvador (Salvador)|San Salvador]], la capitale, en 2015.


Lors de l'[[Élection présidentielle salvadorienne de 2019|élection présidentielle de 2019]], se présentant sous l'étiquette de la [[Grande alliance pour l'unité nationale]] (GANA), il est élu au premier tour avec 53 % des voix, à 37 ans. Il devient ainsi le premier président depuis la fin de la [[Guerre civile du Salvador|guerre civile]], en 1992, à ne représenter aucun des deux principaux partis salvadoriens ([[Alliance républicaine nationaliste|ARENA]] et FMLN).
Lors de l'[[Élection présidentielle salvadorienne de 2019|élection présidentielle de 2019]], se présentant sous l'étiquette de la [[Grande alliance pour l'unité nationale]] (GANA), il est élu au premier tour avec 53 % des voix, à 37 ans. Il devient ainsi le premier président depuis la fin de la [[Guerre civile du Salvador|guerre civile]], en 1992, à ne représenter aucun des deux principaux partis salvadoriens ([[Alliance républicaine nationaliste|ARENA]] et FMLN).


[[Libéralisme économique|Libéral au niveau économique]] et [[Conservatisme social|conservateur sur le plan sociétal]], il mène notamment une politique [[Sécurité publique|sécuritaire]] en rupture avec l’[[État de droit]] qui conduit à une réduction importante du taux d'[[homicide]]s. Cette action lui permet d’atteindre un niveau record de popularité. Sa présidence est également marquée par un tournant [[autoritarisme|autoritaire]].
[[Libéralisme économique|Libéral sur le plan économique]] et [[Conservatisme social|conservateur sur le plan sociétal]], il mène notamment une politique [[Sécurité publique|sécuritaire]] en rupture avec l'[[État de droit]], qui conduit à une réduction importante du taux d'[[homicide]]s. Cette action lui permet d'atteindre un niveau record de popularité. Sa présidence est également marquée par un tournant [[autoritarisme|autoritaire]].


Après avoir composé à ses débuts avec un [[Assemblée législative du Salvador|parlement]] lui étant hostile, il voit son nouveau parti, [[Nouvelles Idées]] (NI), remporter largement les [[Élections législatives salvadoriennes de 2021|élections législatives de 2021]], ce qui semble acter la fin du [[bipartisme]] dans le pays. La même année, il fait face à une [[Crise politique salvadorienne de 2021|crise politico-judiciaire]].
Après avoir composé à ses débuts avec un [[Assemblée législative du Salvador|parlement]] lui étant hostile, il voit son nouveau parti, [[Nouvelles Idées]] (NI), remporter largement les [[Élections législatives salvadoriennes de 2021|élections législatives de 2021]], ce qui semble acter la fin du [[bipartisme]] dans le pays. La même année, il fait face à une [[Crise politique salvadorienne de 2021|crise politico-judiciaire]].


La [[Cour suprême du Salvador|Cour suprême]], dont il a fait renouveler la composition, l'autorise en parallèle à briguer un second mandat en 2024 {{Incise|une situation inédite au Salvador}} à la condition qu’il cède temporairement ses fonctions avant l’expiration de son premier mandat, ce qu'il fait le {{date|30 novembre 2023}}. Il remporte par la suite l'[[Élection présidentielle salvadorienne de 2024|élection présidentielle de février 2024]] dés le premier tour avec 83 % des voix.
La Cour suprême, dont il a fait renouveler la composition, l'autorise en parallèle à briguer un second mandat {{Incise|une situation inédite au Salvador}} à la condition qu'il cède temporairement ses fonctions avant le scrutin, ce qu'il fait en {{date|novembre 2023}}. Il remporte l'[[Élection présidentielle salvadorienne de 2024|élection présidentielle de février 2024]] dès le premier tour avec 84 % des voix.


== Situation personnelle ==
== Situation personnelle ==
[[Fichier:Nayib Bukele y Gabriela Rodríguez (2016).jpg|vignette|gauche|redresse|alt=|Nayib Bukele et son épouse, {{lien|lang=es|Gabriela Rodríguez de Bukele}}, {{nobr|en 2016}}.]]
[[Fichier:Nayib Bukele y Gabriela Rodríguez (2016).jpg|vignette|gauche|redresse|alt=|Nayib Bukele et son épouse, [[Gabriela Rodríguez de Bukele]], {{nobr|en 2016}}.]]
le {{date-|24 juillet 1981}} à San Salvador, Nayib Bukele est le fils d'Olga Ortez de Bukele et d'Armando Bukele Kattán, un homme d'affaires d'origine [[Palestine (État)|palestinienne]], chrétien converti à l'islam et devenu [[imam]], et figure influente dans la vie politique et de la [[Oumma|communauté musulmane]] du pays<ref>{{Lien web |titre=Mayor with Palestinian roots becomes president of El Salvador |url=https://www.dailysabah.com/americas/2019/02/04/mayor-with-palestinian-roots-becomes-president-of-el-salvador |site=dailysabah.com |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>.


Nayib Bukele naît le {{date|24 juillet 1981}} à [[San Salvador (Salvador)|San Salvador]], au [[Salvador]]. Il est le fils d'Olga Ortez de Bukele et d'[[Armando Bukele Kattán]], un [[homme d'affaires]] d'origine [[Palestine (État)|palestinienne]], [[Chrétiens palestiniens|chrétien]] [[Conversion à l'islam|converti à l'islam]] et devenu [[imam]], et figure influente dans la vie politique et de la [[Oumma|communauté musulmane]] du pays<ref>{{Lien web |titre=Mayor with Palestinian roots becomes president of El Salvador |url=https://www.dailysabah.com/americas/2019/02/04/mayor-with-palestinian-roots-becomes-president-of-el-salvador |site=dailysabah.com |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>.
En 2014, il épouse [[:es:Gabriela Rodríguez de Bukele|Gabriela Rodríguez]]<ref>{{Lien web |langue=es |titre=Así es Nayib Bukele, el presidente más joven (y hipster) de Latinoamérica |url=https://www.elmundo.es/loc/celebrities/2019/06/13/5d013caefc6c839a328b467b.html |date=13 juin 2019 |site=elmundo.es |consulté le=16 mars 2021}}.</ref>. Le couple a une fille, Layla, née en {{date-|août 2019}}<ref>{{Lien web |langue=es |titre=Presidente Bukele anuncia el nacimiento de su hija Layla |url=https://web.archive.org/web/20190922221358/https://elmundo.sv/presidente-bukele-anuncia-el-nacimiento-de-su-hija-layla/ |date=15 août 2019 |site=elmundo.sv |consulté le=16 mars 2021}}.</ref>.


En 2014, il épouse [[Gabriela Rodríguez de Bukele|Gabriela Rodríguez]]<ref>{{Lien web |langue=es |titre=Así es Nayib Bukele, el presidente más joven (y hipster) de Latinoamérica |url=https://www.elmundo.es/loc/celebrities/2019/06/13/5d013caefc6c839a328b467b.html |date=13 juin 2019 |site=elmundo.es |consulté le=16 mars 2021}}.</ref>. Le couple a une fille, Layla, née en {{date|août 2019}}<ref>{{Lien web |langue=es |titre=Presidente Bukele anuncia el nacimiento de su hija Layla |url=https://web.archive.org/web/20190922221358/https://elmundo.sv/presidente-bukele-anuncia-el-nacimiento-de-su-hija-layla/ |date=15 août 2019 |site=elmundo.sv |consulté le=16 mars 2021}}.</ref>.
Alors qu'il est le fils d'un musulman et d'une chrétienne, les opinions religieuses de Nayib Bukele sont l'objet de nombreuses spéculations lors de l’élection présidentielle de 2019, notamment lors de la diffusion par le journal salvadorien ''El Liberal'' de photos le montrant prier dans une mosquée de la [[Mexico|ville de Mexico]]. Bukele déclare n'appartenir à aucune religion mais croire en [[Jésus-Christ]]<ref>{{Lien web |langue=es |nom1=elmundo.sv |titre=Polémica por imágenes de Bukele en oración dentro de una mezquita |url=https://elmundo.sv/polemica-por-imagenes-de-bukele-en-oracion-dentro-de-una-mezquita/ |site=elmundo.sv |date=2019-01-08 |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |langue=es-ES |titre=Periódico de México filtra foto de candidato de GANA en mezquita |url=https://www.laprensagrafica.com/elsalvador/Periodico-de-Mexico-filtra-foto-de-candidato-de-GANA-en-mezquita-20190107-0200.html |site=laprensagrafica.com |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>.

Alors qu'il est le fils d'un [[musulman]] et d'une [[chrétien]]ne, les opinions religieuses de Nayib Bukele sont l'objet de nombreuses spéculations lors de l'[[élection présidentielle salvadorienne de 2019|élection présidentielle de 2019]], notamment lors de la diffusion par le journal salvadorien ''[[El Liberal]]'' de photos le montrant prier dans une [[mosquée]] de la [[Mexico|ville de Mexico]]. Bukele déclare [[irréligion|n'appartenir à aucune religion]] mais croire en [[Jésus-Christ]]<ref>{{Lien web |langue=es |nom1=elmundo.sv |titre=Polémica por imágenes de Bukele en oración dentro de una mezquita |url=https://elmundo.sv/polemica-por-imagenes-de-bukele-en-oracion-dentro-de-una-mezquita/ |site=elmundo.sv |date=2019-01-08 |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |langue=es-ES |titre=Periódico de México filtra foto de candidato de GANA en mezquita |url=https://www.laprensagrafica.com/elsalvador/Periodico-de-Mexico-filtra-foto-de-candidato-de-GANA-en-mezquita-20190107-0200.html |site=laprensagrafica.com |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>.
{{clr|left}}
{{clr|left}}


Ligne 73 : Ligne 70 :
=== Premiers mandats ===
=== Premiers mandats ===
[[Fichier:Nayib Bukele.jpg|vignette|redresse|gauche|alt=|Nayib Bukele {{nobr|en 2015}}.]]
[[Fichier:Nayib Bukele.jpg|vignette|redresse|gauche|alt=|Nayib Bukele {{nobr|en 2015}}.]]
Membre du [[Front Farabundo Martí de libération nationale]] (FMLN) à partir de 2012, il est élu maire de la municipalité de [[:es:Nuevo Cuscatlán|Nuevo Cuscatlán]] en 2012 avec 49,72 % des voix<ref name=tse2012>{{Lien web|langue=es |url=http://www.tse.gob.sv/resultados2012/paginas/paginas/dat04/DMU041599.htm |titre=Élection municipale de Nuevo Cuscatlán |site=tse.gob.sv |date=12 mars 2012 |consulté le=29 mai 2016}}.</ref>. En 2015, il est élu maire de la capitale, [[San Salvador (Salvador)|San Salvador]], avec 48,47 % des voix, toujours sous l'étiquette du FMLN<ref>{{Lien web |titre=Nayib Bukele, d’origine palestinienne, élu président du Salvador |url=https://www.francemaghreb2.fr/news/nayib-bukele-d-origine-palestinienne-elu-president-du-salvador-20153 |site=francemaghreb2.fr |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>{{,}}<ref name=tse2012/>. Il est exclu du parti en 2017 après avoir lancé une pomme au visage d’une conseillère municipale<ref name=":1">{{Lien web |langue=fr |prénom=Emmanuelle |nom=Steels |titre=Salvador : Nayib Bukele, un an de populisme punitif et de popularité record |url=https://www.liberation.fr/planete/2020/06/03/salvador-nayib-bukele-un-an-de-populisme-punitif-et-de-popularite-record_1790175 |site=libération.fr |date=2020-06-03 }}.</ref>.
Membre du [[Front Farabundo Martí de libération nationale]] (FMLN) à partir de 2012, il est élu maire de la municipalité de {{lien|lang=es|Nuevo Cuscatlán}} en 2012 avec 49,72 % des voix<ref name=tse2012>{{Lien web|langue=es |url=http://www.tse.gob.sv/resultados2012/paginas/paginas/dat04/DMU041599.htm |titre=Élection municipale de Nuevo Cuscatlán |site=tse.gob.sv |date=12 mars 2012 |consulté le=29 mai 2016}}.</ref>. En 2015, il est élu maire de la capitale, [[San Salvador (Salvador)|San Salvador]], avec 48,47 % des voix, toujours sous l'étiquette du FMLN<ref>{{Lien web |titre=Nayib Bukele, d'origine palestinienne, élu président du Salvador |url=https://www.francemaghreb2.fr/news/nayib-bukele-d-origine-palestinienne-elu-president-du-salvador-20153 |site=francemaghreb2.fr |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>{{,}}<ref name=tse2012/>. Il est exclu du parti en 2017 après avoir lancé une pomme au visage d'une conseillère municipale<ref name=":1">{{Lien web |langue=fr |prénom=Emmanuelle |nom=Steels |titre=Salvador : Nayib Bukele, un an de populisme punitif et de popularité record |url=https://www.liberation.fr/planete/2020/06/03/salvador-nayib-bukele-un-an-de-populisme-punitif-et-de-popularite-record_1790175 |site=libération.fr |date=2020-06-03 }}.</ref>.


=== Élection présidentielle de 2019 ===
=== Élection présidentielle de 2019 ===
Il se présente comme candidat de la [[Grande alliance pour l'unité nationale]] (GANA), un parti conservateur classé au centre droit, à l'[[Élection présidentielle salvadorienne de 2019|élection présidentielle de 2019]]<ref name=":0">{{Lien web|langue=fr|nom1=Gomez|prénom1=François-Xavier|titre=Salvador : l'inquiétante dérive du président|url=https://www.liberation.fr/planete/2020/02/10/salvador-l-inquietante-derive-du-president_1777908|site=libération.fr|date=2020-02-10}}.</ref>. S'affichant comme « [[antisystème]] », il domine le débat en se focalisant sur l'importante criminalité due notamment aux gangs, ainsi que sur la pauvreté que connaît le pays. Âgé de {{nombre|37|ans}}, il mène une campagne axée sur les jeunes générations, très dure avec le personnel politique classique.
Il se présente comme candidat de la [[Grande alliance pour l'unité nationale]] (GANA), un parti conservateur classé au centre droit, à l'[[Élection présidentielle salvadorienne de 2019|élection présidentielle de 2019]]<ref name=":0">{{Lien web|langue=fr|nom1=Gomez|prénom1=François-Xavier|titre=Salvador : l'inquiétante dérive du président|url=https://www.liberation.fr/planete/2020/02/10/salvador-l-inquietante-derive-du-president_1777908|site=libération.fr|date=2020-02-10}}.</ref>. S'affichant comme « [[antisystème]] », il domine le débat en se focalisant sur l'importante criminalité due notamment aux gangs, ainsi que sur la pauvreté que connaît le pays. Âgé de {{nombre|37|ans}}, il mène une campagne axée sur les jeunes générations, très dure avec le personnel politique classique.


Dès le premier tour, le {{date-|3 février 2019-}}, il est élu avec son colistier [[Félix Ulloa]], et ce, avec 53 % des voix exprimées<ref>{{Lien web|titre=Salvador : Nayib Bukele, 37 ans, devient le nouveau président|site=[[Le Monde|lemonde.fr]]|date=2019-02-04|url=https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/04/salvador-le-candidat-antisysteme-nayib-bukele-remporte-la-presidentielle_5418725_3210.html|consulté le=2019-02-04}}.</ref>.
Dès le premier tour, le {{date|3 février 2019-}}, il est élu avec son colistier [[Félix Ulloa]], et ce, avec 53 % des voix exprimées<ref>{{Lien web|titre=Salvador : Nayib Bukele, 37 ans, devient le nouveau président|site=[[Le Monde|lemonde.fr]]|date=2019-02-04|url=https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/04/salvador-le-candidat-antisysteme-nayib-bukele-remporte-la-presidentielle_5418725_3210.html|consulté le=2019-02-04}}.</ref>.


== Président de la République ==
== Président de la République ==
=== Investiture ===
=== Investiture ===
Nayib Bukele prend ses fonctions le {{Date-|1 juin 2019}}, succédant à [[Salvador Sánchez Cerén]]<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Avec Nayib Bukele, le Salvador se choisit à son tour un président «hors-système» |url=https://www.liberation.fr/planete/2019/02/04/avec-nayib-bukele-le-salvador-se-choisit-a-son-tour-un-president-hors-systeme_1707323 |site=libération.fr |date=2019-02-04 |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>{{,}}<ref>{{Article |langue=fr |auteur1= |titre=Salvador : Nayib Bukele, 37 ans, devient le nouveau président |périodique=Le Monde |date=2019-02-04 |lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/04/salvador-le-candidat-antisysteme-nayib-bukele-remporte-la-presidentielle_5418725_3210.html |consulté le=2019-07-22 |pages= }}.</ref>. Depuis la fin de la [[Guerre civile du Salvador|guerre civile]] en 1992, il est la première personne à accéder à la tête du pays sans appartenir à aucun des deux principaux partis salvadoriens ([[Alliance républicaine nationaliste|ARENA]] et FMLN). Élu à l'âge de {{nobr|37 ans}}, il est l'une des personnes les plus jeunes à être élues chef d’État sur le continent américain<ref name="ElPaís 2021">{{Lien web |titre=Le président Nayib Bukele met le Salvador sens dessus dessous |url=https://www.courrierinternational.com/article/portrait-le-president-nayib-bukele-met-le-salvador-sens-dessus-dessous |date=4 mars 2021 |site=courrierinternational.com |consulté le=14 mars 2021}}.</ref>, après [[Alan García]] et [[Gabriel Boric]].
Nayib Bukele prend ses fonctions le {{Date|1 juin 2019}}, succédant à [[Salvador Sánchez Cerén]]<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Avec Nayib Bukele, le Salvador se choisit à son tour un président «hors-système» |url=https://www.liberation.fr/planete/2019/02/04/avec-nayib-bukele-le-salvador-se-choisit-a-son-tour-un-president-hors-systeme_1707323 |site=libération.fr |date=2019-02-04 |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>{{,}}<ref>{{Article |langue=fr |auteur1= |titre=Salvador : Nayib Bukele, 37 ans, devient le nouveau président |périodique=Le Monde |date=2019-02-04 |lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/04/salvador-le-candidat-antisysteme-nayib-bukele-remporte-la-presidentielle_5418725_3210.html |consulté le=2019-07-22 |pages= }}.</ref>. Depuis la fin de la [[Guerre civile du Salvador|guerre civile]] en 1992, il est la première personne à accéder à la tête du pays sans appartenir à aucun des deux principaux partis salvadoriens ([[Alliance républicaine nationaliste|ARENA]] et FMLN). Élu à l'âge de {{nobr|37 ans}}, il est alors la plus jeune personne à être élue chef d'État sur le continent américain depuis [[Alan García]], [[Élections générales péruviennes de 1985|élu en 1985]] à la tête du [[Pérou]] à l'âge de 36 ans<ref name="ElPaís 2021">{{Lien web |titre=Le président Nayib Bukele met le Salvador sens dessus dessous |url=https://www.courrierinternational.com/article/portrait-le-president-nayib-bukele-met-le-salvador-sens-dessus-dessous |date=4 mars 2021 |site=courrierinternational.com |consulté le=14 mars 2021}}.</ref>.


{{Gallery |width=240 |height=180 |lines=2 |align=center
{{Gallery |width=240 |height=180 |lines=2 |align=center
|Fichier:Victoria 3F (cropped).jpg|Nayib Bukele prononçant son discours de victoire, le {{date-|3 février 2019}}.
|Fichier:Victoria 3F (cropped).jpg|Nayib Bukele prononçant son discours de victoire, le {{date|3 février 2019}}.
|Fichier:Nayib Bukele talks at his inauguration ceremony.jpg|alt=|Nayib Bukele lors de son investiture à la présidence, le {{date-|1 juin 2019}}.
|Fichier:Nayib Bukele talks at his inauguration ceremony.jpg|alt=|Nayib Bukele lors de son investiture à la présidence, le {{date|1 juin 2019}}.
}}
}}

=== Réélection ===
{{Article détaillé|Élection présidentielle salvadorienne de 2024}}
En septembre 2021, la Cour suprême de justice juge légale la candidature d'un président à sa réélection immédiate, malgré son interdiction par la [[Constitution du Salvador|Constitution de 1983]], réaffirmée par un jugement en 2014 confirmant l'obligation pour un président d'attendre au minimum la durée de deux mandats présidentiels avant de se représenter. En 2023, la cour juge cependant légale cette pratique dans le cas où le président cèderait auparavant ses fonctions à son vice-président avant la tenue du scrutin. La décision est vivement critiquée par l'opposition, qui la qualifie d'inconstitutionnelle<ref>{{Lien web |auteur=RFI |titre=Salvador: la Cour suprême autorise le président Bukele à se représenter |url=https://www.rfi.fr/fr/am%C3%A9riques/20210904-salvador-la-cour-supr%C3%AAme-autorise-le-pr%C3%A9sident-bukele-%C3%A0-se-repr%C3%A9senter |site=RFI |éditeur=RFI |jour=04 |mois=septembre |année=2021 |consulté le=10 janvier 2024}}.</ref>. Cette nouvelle jurisprudence permet à Nayib Bukele d'annoncer le 26 octobre 2023 être candidat à sa réélection avec son vice-président, [[Félix Ulloa]]<ref>{{Lien web |titre=Le président Nayib Bukele candidat à sa réélection |url=https://www.lapresse.ca/international/amerique-latine/2023-10-27/salvador/le-president-nayib-bukele-candidat-a-sa-reelection.php |site=La Presse |éditeur=LaPresseFB |jour=27 |mois=octobre |année=2023 |consulté le=10 janvier 2024}}.</ref>. Il obtient le 30 novembre par une décision de l'Assemblée nationale {{incise|votée par 67 voix pour et 11 contre}} de confier temporairement ses pouvoirs à [[Claudia Rodríguez de Guevara]], qui devient ainsi présidente par intérim le lendemain sans que Bukele ne démissionne lui même<ref>{{Lien web |titre=Au Salvador, le président Nayib Bukele quitte son poste pour pouvoir préparer sa réélection en 2024 |url=https://www.lemonde.fr/international/article/2023/12/01/au-salvador-le-president-nayib-bukele-quitte-son-poste-pour-pouvoir-preparer-sa-reelection-en-2024_6203315_3210.html |site=Le Monde.fr |éditeur=Le Monde |jour=01 |mois=décembre |année=2023 |issn=1950-6244 |consulté le=10 janvier 2024}}.</ref>{{,}}<ref>{{Article|langue=fr|titre=Au Salvador, le président Nayib Bukele quitte son poste pour pouvoir préparer sa réélection en 2024|périodique=Le Monde.fr|date=2023-12-01|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2023/12/01/au-salvador-le-president-nayib-bukele-quitte-son-poste-pour-pouvoir-preparer-sa-reelection-en-2024_6203315_3210.html|consulté le=2023-12-01}}</ref>.

Plébiscité pour sa lutte contre les gangs, il remporte l'élection présidentielle du 4 février 2024 dès le premier tour : il obtient 84,65 % des voix contre 6,40 % à Manuel Flores ([[Front Farabundo Martí de libération nationale|FMLN]]) et 5,57 % à Joel Sánchez ([[Alliance républicaine nationaliste|ARENA]]). En parallèle, [[Nouvelles Idées]] remporte 54 des 60 sièges à l'Assemblée lors des [[Élections législatives salvadoriennes de 2024|élections législatives]] organisées le même jour. Bukele prête serment le 2 juin pour un second mandat. A cette occasion, il déclare qu'après un premier mandat focalisé sur la guerre contre les gangs, le second sera quant à lui consacré à l'amélioration de l'[[Économie du Salvador|économie salvadorienne]]<ref>{{Lien web|auteur=|titre=Au Salvador, Nayib Bukele entame son second mandat avec les pleins pouvoirs et l’économie en mire|jour=02|mois=juin|année=2024|url=https://www.nouvelobs.com/monde/20240602.OBS89165/au-salvador-nayib-bukele-entame-son-second-mandat-avec-les-pleins-pouvoirs-et-l-economie-en-mire.html|site=Le Nouvel Obs|consulté le= 2 juin 2024}}.</ref>.


=== Politique sécuritaire ===
=== Politique sécuritaire ===
{{Article détaillé|Répression des gangs salvadoriens de 2022}}
{{Article détaillé|Répression des gangs salvadoriens de 2022}}
Nayib Bukele met sur pied en 2019 un « plan de contrôle territorial » visant à confier à l'armée des tâches de sécurité publique dans les quartiers aux mains des organisations criminelles<ref name=":4">{{Lien web |langue=fr |titre=Au Salvador : « Sans corps, pas de crime » |url=https://www.monde-diplomatique.fr/2023/06/FERNANDEZ/65865 |site=Le Monde diplomatique |date=2023-06-01 |consulté le=2023-06-24}}</ref>, tandis qu'un accord conclu entre la [[MS-13]] et [[18th Street Gang|Barrio 18]], les principales ''[[Maras (gang)|maras]]'' du pays, aurait conduit à une diminution des règlements de compte dans le pays<ref name=":0"/>. Le président salvadorien met en avant la baisse de {{formatnum:2398}} meurtres en 2019 à {{formatnum:1147}} en 2021<ref>[https://www.lepoint.fr/monde/salvador-bukele-le-president-millenium-devenu-en-3-ans-chef-de-guerre-anti-crime-01-06-2022-2477883_24.php Salvador: Bukele, le président "millenium" devenu en 3 ans chef de guerre anti-crime], lepoint.fr, {{1er}} juin 2022</ref>, soit un taux d'homicides de 17,6 pour 100 000 habitants, le plus faible depuis des décennies<ref name=":4" />. La politique très répressive envers le crime organisé voit le taux d'homicide au Salvador passer de 51 pour 100 000 en 2018, avant son arrivée au pouvoir, à 2,5 pour 100 000 en 2023, ce qui vaut à Bukele une popularité record de 92 % d'opinions favorable cette année là<ref>{{Lien web|auteur=|titre=SALVADOR : BAISSE DRASTIQUE DU TAUX DE CRIMINALITÉ|jour=15|mois=mars|année=2023|url=https://raids.fr/2023/03/15/salvador-baisse-drastique-du-taux-de-criminalite/|site=Magazine Raids|éditeur=histoirecollections|consulté le= 4 février 2024}}.</ref>.
Nayib Bukele met sur pied en 2019 un « plan de contrôle territorial » visant à confier à l'armée des tâches de sécurité publique dans les quartiers aux mains des organisations criminelles<ref name=":4">{{Lien web |langue=fr |titre=Au Salvador : « Sans corps, pas de crime » |url=https://www.monde-diplomatique.fr/2023/06/FERNANDEZ/65865 |site=Le Monde diplomatique |date=2023-06-01 |consulté le=2023-06-24}}</ref>, tandis qu'un accord conclu entre la [[MS-13]] et [[18th Street Gang|Barrio 18]], les principales ''[[Maras (gang)|maras]]'' du pays, aurait conduit à une diminution des règlements de compte dans le pays<ref name=":0"/>. Le président salvadorien met en avant la baisse de {{formatnum:2398}} meurtres en 2019 à {{formatnum:1147}} en 2021<ref>[https://www.lepoint.fr/monde/salvador-bukele-le-president-millenium-devenu-en-3-ans-chef-de-guerre-anti-crime-01-06-2022-2477883_24.php Salvador: Bukele, le président "millenium" devenu en 3 ans chef de guerre anti-crime], lepoint.fr, {{1er}} juin 2022</ref>, soit un taux d'homicides de 17,6 pour 100 000 habitants, le plus faible depuis des décennies<ref name=":4" />. La politique très répressive envers le crime organisé voit le taux d'homicide au Salvador passer de 51 pour 100 000 en 2018, avant son arrivée au pouvoir, à 2,5 pour 100 000 en 2023, ce qui vaut à Bukele une popularité record de 92 % d'opinions favorables cette année-là<ref>{{Lien web|auteur=|titre=SALVADOR : BAISSE DRASTIQUE DU TAUX DE CRIMINALITÉ|jour=15|mois=mars|année=2023|url=https://raids.fr/2023/03/15/salvador-baisse-drastique-du-taux-de-criminalite/|site=Magazine Raids|éditeur=histoirecollections|consulté le= 4 février 2024}}.</ref>.


Le site d’investigation ''El Faro'' indique en {{date-|septembre 2020}} que Nayib Bukele négocie secrètement depuis un an un accord avec le plus puissant gang du pays, la [[Mara Salvatrucha]]. Le journal ''[[El País]]'' estime que la baisse des homicides dans le pays n’est pas due à la politique sécuritaire du gouvernement mais {{citation|à un échange de bons services}} : en contrepartie d’un assouplissement des conditions de détention de ses membres et d’autres promesses, le gang se serait engagé à réduire le nombre d'assassinats et à soutenir la formation politique de Nayib Bukele lors des élections<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Criminalité. Salvador : le président Bukele aurait (aussi) négocié avec les gangs |url=https://www.courrierinternational.com/article/criminalite-salvador-le-president-bukele-aurait-aussi-negocie-avec-les-gangs |site=courrierinternational.com |date=2020-09-08 }}.</ref>. Nayib Bukele a démenti avec vigueur et annoncé peu après l'ouverture d'une enquête pour « une grave affaire de blanchiment d'argent » concernant le média en ligne ''El Faro''. Il a également été accusé par Laura Andrade, la directrice de l'Institut sur l'opinion publique de l'[[Université centroaméricaine]], d'essayer d'« affaiblir » plusieurs titres de presse indépendante (notamment la revue ''Factum'', le quotidien ''La Prensa Grafica'' et la revue ''Gato Encerrado'', selon Oscar Martinez, l'un des directeurs d'''El Faro'') et ONG critiques envers son gouvernement<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Salvador: menacé par la justice, le président Bukele s'attaque à la presse |url=https://www.france24.com/fr/20200926-salvador-menacé-par-la-justice-le-président-bukele-s-attaque-à-la-presse |site=france24.com |date=2020-09-26 }}.</ref>.
Le site d'investigation ''El Faro'' indique en {{date|septembre 2020}} que Nayib Bukele négocie secrètement depuis un an un accord avec le plus puissant gang du pays, la [[Mara Salvatrucha]]. Le journal ''[[El País]]'' estime que la baisse des homicides dans le pays n'est pas due à la politique sécuritaire du gouvernement mais {{citation|à un échange de bons services}} : en contrepartie d'un assouplissement des conditions de détention de ses membres et d'autres promesses, le gang se serait engagé à réduire le nombre d'assassinats et à soutenir la formation politique de Nayib Bukele lors des élections<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Criminalité. Salvador : le président Bukele aurait (aussi) négocié avec les gangs |url=https://www.courrierinternational.com/article/criminalite-salvador-le-president-bukele-aurait-aussi-negocie-avec-les-gangs |site=courrierinternational.com |date=2020-09-08 }}.</ref>. Nayib Bukele a démenti avec vigueur et annoncé peu après l'ouverture d'une enquête pour « une grave affaire de blanchiment d'argent » concernant le média en ligne ''El Faro''. Il a également été accusé par Laura Andrade, la directrice de l'Institut sur l'opinion publique de l'[[Université centroaméricaine]], d'essayer d'« affaiblir » plusieurs titres de presse indépendante (notamment la revue ''Factum'', le quotidien ''La Prensa Grafica'' et la revue ''Gato Encerrado'', selon Oscar Martinez, l'un des directeurs d'''El Faro'') et ONG critiques envers son gouvernement<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Salvador: menacé par la justice, le président Bukele s'attaque à la presse |url=https://www.france24.com/fr/20200926-salvador-menacé-par-la-justice-le-président-bukele-s-attaque-à-la-presse |site=france24.com |date=2020-09-26 }}.</ref>.


Pour Jeannette Aguilar, consultante sur les thèmes de sécurité et justice, les discours du président relèvent du {{citation|marketing médiatique}}, affirmant que {{citation|Bukele se présente comme l’homme fort qui soumet les criminels, mais lorsqu’il était maire de la capitale, il avait conclu des accords avec les gangs pour gouverner en paix<ref name=":1" />.}}
Pour Jeannette Aguilar, consultante sur les thèmes de sécurité et justice, les discours du président relèvent du {{citation|marketing médiatique}}, affirmant que {{citation|Bukele se présente comme l'homme fort qui soumet les criminels, mais lorsqu'il était maire de la capitale, il avait conclu des accords avec les gangs pour gouverner en paix<ref name=":1" />.}}


La trêve entres les gangs criminels et le gouvernement est rompue en mars 2022 avec une vague de 87 assassinats en seulement trois jours. En réaction, Nayib Bukele déclare la « guerre contre les gangs » et décréte le [[Répression des gangs salvadoriens de 2022|régime d’exception]] qui autorise des arrestations sans mandat judiciaire. Près de 70 000 personnes (en date de juin 2023) ont été arrêtées dans ce cadre, hissant le Salvador au rang de pays affichant le plus haut taux de détention au monde (estimé à 1 086 personnes pour 100 000 habitants par le World Prison Brief et à 1 220 pour 100 000 habitants par ''[[La Prensa Gráfica]]'', le journal le plus important du Salvador). Selon l'ONG salvadorienne Cristosal, des milliers d'innocents se trouvent parmi les détenus et des dizaines de personnes sont mortes à cause des violences subies lors de leur interrogatoire. « La plupart des arrestations sont arbitraires. Il n'y a pas eu d'enquête préalable ni de mandat d'arrêt », indique l'ONG<ref name=":5">{{Lien web |langue=fr |titre=Au Salvador, bitcoins, gangs et buzz présidentiel |url=https://www.monde-diplomatique.fr/2023/06/CORREA/65864 |site=Le Monde diplomatique |date=2023-06-01 |consulté le=2023-06-24}}</ref>.
La trêve entre les gangs criminels et le gouvernement est rompue en mars 2022 avec une vague de 87 assassinats en seulement trois jours. En réaction, Nayib Bukele déclare la « guerre contre les gangs » et décréte le [[Répression des gangs salvadoriens de 2022|régime d'exception]] qui autorise des arrestations sans mandat judiciaire. Près de 70 000 personnes (en date de juin 2023) ont été arrêtées dans ce cadre, hissant le Salvador au rang de pays affichant le plus haut taux de détention au monde (estimé à 1 086 personnes pour 100 000 habitants par le World Prison Brief et à 1 220 pour 100 000 habitants par ''[[La Prensa Gráfica]]'', le journal le plus important du Salvador). Selon l'ONG salvadorienne Cristosal, des milliers d'innocents se trouvent parmi les détenus et des dizaines de personnes sont mortes à cause des violences subies lors de leur interrogatoire. « La plupart des arrestations sont arbitraires. Il n'y a pas eu d'enquête préalable ni de mandat d'arrêt », indique l'ONG<ref name=":5">{{Lien web |langue=fr |titre=Au Salvador, bitcoins, gangs et buzz présidentiel |url=https://www.monde-diplomatique.fr/2023/06/CORREA/65864 |site=Le Monde diplomatique |date=2023-06-01 |consulté le=2023-06-24}}</ref>. Selon l'ONG Socorro Jurídico Humanitario, sur les 83 100 personnes arrêtées en dehors de toute procédure régulière depuis mars 2022, au moins 30 000 sont innocentes. Bukele conteste ce chiffre, l'estimant {{Citation|inventé}} par des {{Citation|organisations de gauche}}<ref>{{Lien web |langue=es |auteur=Susana Peñate |titre=Socorro Jurídico califica de “irresponsables” y “calumniosas” las declaraciones de Bukele |url=https://www.elsalvador.com/noticias/nacional/socorro-juridico-califica-de-irresponsables-y-calumniosas-declaraciones-bukele/1181098/2024/ |périodique=El Diario de Hoy |date=13 novembre 2024 |consulté le=17 novembre 2024}}</ref>. Le 12 novembre 2024, il concède toutefois : {{Citation|Évidemment, les opérations ne sont pas parfaites et, bien, sans aucune intention de nuire à une personne innocente, des innocents sont évidemment capturés, de la même manière qu'ils le sont en France, en Allemagne et au Japon et dans tous les pays du monde et nous les libérons. Nous avons déjà libéré 8 000 personnes et nous allons libérer 100 % des innocents}}<ref>{{Lien web |langue=es |auteur=Susana Peñate |titre=Bukele asegura que han liberado a 8,000 personas inocentes capturadas con el régimen |url=https://www.elsalvador.com/noticias/nacional/bukele-asegura-han-liberando-8000-personas-inocentes-capturadas-con-el-regimen/1180911/2024/ |périodique=El Diario de Hoy |date=12 novembre 2024 |consulté le=17 novembre 2024}}</ref>.


En janvier 2023 est inauguré le [[Centre de confinement du terrorisme]] (CECOT), une gigantesque prison pour {{formatnum:40000}} détenus. En dépit des critiques des ONG de défense des [[droits de l’homme]] pour les abus commis, la « guerre contre le crime » vaut au président Bukele une « écrasante popularité »<ref>[https://www.journaldemontreal.com/2023/02/01/le-president-salvadorien-bukele-vante-sa-gigantesque-prison-pour-40000-criminels-presumes Le président salvadorien Bukele vante sa gigantesque prison pour 40 000 criminels présumés], journaldemontreal.com, {{1er}} février 2023 </ref>. L'ensemble des organisations civiles et internationales, dont [[Amnesty International]] et le [[Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme]] (HCR), dénoncent des détentions arbitraires, tortures et mauvais traitements infligés dans les centres de détention<ref name=":5" />.
En janvier 2023 est inauguré le [[Centre de confinement du terrorisme]] (CECOT), une gigantesque prison pour {{formatnum:40000}} détenus. En dépit des critiques des ONG de défense des [[droits de l'homme]] pour les abus commis, la « guerre contre le crime » vaut au président Bukele une « écrasante popularité »<ref>[https://www.journaldemontreal.com/2023/02/01/le-president-salvadorien-bukele-vante-sa-gigantesque-prison-pour-40000-criminels-presumes Le président salvadorien Bukele vante sa gigantesque prison pour 40 000 criminels présumés], journaldemontreal.com, {{1er}} février 2023 </ref>. L'ensemble des organisations civiles et internationales, dont [[Amnesty International]] et le [[Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme]] (HCR), dénoncent des détentions arbitraires, tortures et mauvais traitements infligés dans les centres de détention<ref name=":5" />.


Le taux d'homicides dans le pays chute à un niveau historiquement bas de 7,8 pour 100 000 habitants en 2022<ref name=":6">{{Lien web |langue=fr-FR |titre=Salvador. Baisse drastique du taux de criminalité |url=https://raids.fr/2023/03/15/salvador-baisse-drastique-du-taux-de-criminalite/ |site=Magazine Raids |date=2023-03-15 }}</ref>. Pour autant, son bilan en matière de sécurité publique est à nuancer. Son administration a modifié la publication des chiffres des homicides pour en exclure les corps trouvés dans des fosses communes clandestines. Le nombre de disparus, en hausse constante depuis 2018, dépasse le nombre d'homicides, ce qui suggère que la diminution réelle des meurtres pourrait être significativement moins importante que celle mise en avant par les chiffres officiels<ref name=":4" />. D'autre part, le Salvador connaissait avant même l'arrivée de Nayib Bukele au pouvoir une très forte baisse de la criminalité, avec une chute du taux d'homicides pour 100 000 habitants de 103 en 2015 à 36 en 2019<ref name=":6" />.
Le taux d'homicides dans le pays chute à un niveau historiquement bas de 7,8 pour 100 000 habitants en 2022<ref name=":6">{{Lien web |langue=fr-FR |titre=Salvador. Baisse drastique du taux de criminalité |url=https://raids.fr/2023/03/15/salvador-baisse-drastique-du-taux-de-criminalite/ |site=Magazine Raids |date=2023-03-15 }}</ref>. Pour autant, son bilan en matière de sécurité publique est à nuancer. Son administration a modifié la publication des chiffres des homicides pour en exclure les corps trouvés dans des fosses communes clandestines. Le nombre de disparus, en hausse constante depuis 2018, dépasse le nombre d'homicides, ce qui suggère que la diminution réelle des meurtres pourrait être significativement moins importante que celle mise en avant par les chiffres officiels<ref name=":4" />. D'autre part, le Salvador connaissait avant même l'arrivée de Nayib Bukele au pouvoir une très forte baisse de la criminalité, avec une chute du taux d'homicides pour 100 000 habitants de 103 en 2015 à 36 en 2019<ref name=":6" />.


=== Tensions avec le Parlement ===
=== Tensions avec le parlement ===
À ses débuts, il doit composer avec une [[Assemblée législative du Salvador|Assemblée législative]], le parlement [[Monocamérisme|monocaméral]] du pays, dominée par des partis de droite<ref>[https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/04/salvador-le-candidat-antisysteme-nayib-bukele-remporte-la-presidentielle_5418725_3210.html Salvador : le candidat antisystème Nayib Bukele remporte la présidentielle] </ref>{{,}}<ref>[http://www.francesoir.fr/actualites-monde/les-salvadoriens-elisent-leur-sixieme-president-depuis-la-guerre-civile Salvador: Nayib Bukele l'anti-système remporte la présidence] </ref>. En {{date-|février 2020}}, alors que les députés ne sont pas suffisamment nombreux pour approuver un emprunt de 109 millions de dollars, il se rend à l'Assemblée législative, où ses partisans sont en minorité, accompagné par des militaires équipés de fusils et gilets pare-balles pour intimider les parlementaires et les somme d’approuver sa décision, et appelle à « l’[[Crise politique au Salvador en 2020|insurrection populaire]] ». Installé à la tribune, le président menace alors de dissoudre l'assemblée avant d'éclater en sanglots et d'effectuer une brève prière. Annonçant solennellement avoir entendu Dieu lui parler pour l'encourager à faire preuve de patience, il renonce à dissoudre l'assemblée, puis s'adresse à une foule de partisans aux portes du bâtiment dans un discours enflammé où il décrit les députés comme des {{citation|voleurs et des scélérats}}<ref>{{Article|langue=es|auteur=|titre=Petitions are processed to remove President of Salvador Nayib Bukele|périodique=cadenagramonte.cu|date=16 février 2021|url texte=https://www.cadenagramonte.cu/english/show/articles/32139:petitions-are-processed-to-remove-president-of-salvador-nayib-bukele}}.</ref>{{,}}<ref name=irruption>{{Lien web |langue=fr |titre=Salvador : les députés de droite mettent en doute la santé mentale du président Nayib Bukele |url=https://www.lefigaro.fr/flash-actu/salvador-les-deputes-de-droite-mettent-en-doute-la-sante-mentale-du-president-bukele-20210209 |site=lefigaro.fr |date=2021-02-09 }}.</ref>. S'ensuit une vague de désapprobation : « Le déploiement policier et militaire au sein de l’Assemblée législative nous rappelle les époques les plus sombres de l’histoire du Salvador », réagit [[Amnesty International]]<ref name=":0" />.
À ses débuts, il doit composer avec une [[Assemblée législative du Salvador|Assemblée législative]], le parlement [[Monocamérisme|monocaméral]] du pays, dominée par des partis de droite<ref>[https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/04/salvador-le-candidat-antisysteme-nayib-bukele-remporte-la-presidentielle_5418725_3210.html Salvador : le candidat antisystème Nayib Bukele remporte la présidentielle] </ref>{{,}}<ref>[http://www.francesoir.fr/actualites-monde/les-salvadoriens-elisent-leur-sixieme-president-depuis-la-guerre-civile Salvador: Nayib Bukele l'anti-système remporte la présidence] </ref>. Le {{date|8|février|2020}}, alors que les députés ne sont pas suffisamment nombreux pour approuver un emprunt de 109 millions de [[Dollar américain|dollars]] auprès de la {{Lien|langue=en|trad=Central American Bank for Economic Integration|fr=Banque centraméricaine d'intégration économique}} pour financer son programme sécuritaire, il se rend à l'Assemblée législative, où ses partisans sont en minorité, accompagné par des militaires équipés de fusils et gilets pare-balles pour intimider les parlementaires et les somme d'approuver sa décision, et appelle à « l'[[Crise politique au Salvador en 2020|insurrection populaire]] ». Installé à la tribune, le président menace alors de dissoudre l'assemblée avant d'éclater en sanglots et d'effectuer une brève prière. Annonçant solennellement avoir entendu Dieu lui parler pour l'encourager à faire preuve de patience, il renonce à dissoudre l'assemblée, puis s'adresse à une foule de partisans aux portes du bâtiment dans un discours enflammé où il décrit les députés comme des {{citation|voleurs et des scélérats}}<ref>{{Article|langue=es|auteur=|titre=Petitions are processed to remove President of Salvador Nayib Bukele|périodique=cadenagramonte.cu|date=16 février 2021|url texte=https://www.cadenagramonte.cu/english/show/articles/32139:petitions-are-processed-to-remove-president-of-salvador-nayib-bukele}}.</ref>{{,}}<ref name=irruption>{{Lien web |langue=fr |titre=Salvador : les députés de droite mettent en doute la santé mentale du président Nayib Bukele |url=https://www.lefigaro.fr/flash-actu/salvador-les-deputes-de-droite-mettent-en-doute-la-sante-mentale-du-president-bukele-20210209 |site=lefigaro.fr |date=2021-02-09 }}.</ref>. S'ensuit une vague de désapprobation : « Le déploiement policier et militaire au sein de l'Assemblée législative nous rappelle les époques les plus sombres de l'histoire du Salvador », réagit [[Amnesty International]]<ref name=":0" />.


[[Fichier:Salvador Assemblée 2021.svg|vignette|alt=|Composition de l’[[Assemblée législative du Salvador|Assemblée législative]] à la suite des [[Élections législatives salvadoriennes de 2021|élections de 2021]] :
[[Fichier:Salvador Assemblée 2021.svg|vignette|alt=|Composition de l'[[Assemblée législative du Salvador|Assemblée législative]] à la suite des [[Élections législatives salvadoriennes de 2021|élections de 2021]] :
{{Légende/Début}}
{{Légende/Début}}
{{legend|#00ABED|[[Nouvelles Idées]] ({{nombre|56|sièges}}) ;}}
{{Légende|#00ABED|[[Nouvelles Idées]] ({{nombre|56|sièges}}) ;}}
{{legend|#00529F|[[Alliance républicaine nationaliste|ARENA]] ({{nombre|14|sièges}}) ;}}
{{Légende|#00529F|[[Alliance républicaine nationaliste|ARENA]] ({{nombre|14|sièges}}) ;}}
{{legend|#4BC0C7|[[Grande alliance pour l'unité nationale|GANA]] ({{nombre|5|sièges}}) ;}}
{{Légende|#4BC0C7|[[Grande alliance pour l'unité nationale|GANA]] ({{nombre|5|sièges}}) ;}}
{{legend|#DC143C|[[Front Farabundo Martí de libération nationale|FMLN]] ({{nombre|4|sièges}}) ;}}
{{Légende|#DC143C|[[Front Farabundo Martí de libération nationale|FMLN]] ({{nombre|4|sièges}}) ;}}
{{legend|#4169E1|[[Parti de la concertation nationale|PCN]] ({{nombre|2|sièges}}) ;}}
{{Légende|#4169E1|[[Parti de la concertation nationale|PCN]] ({{nombre|2|sièges}}) ;}}
{{legend|#00A550|[[Parti démocrate-chrétien du Salvador|PDC]] ({{nombre|1|siège}}) ;}}
{{Légende|#00A550|[[Parti démocrate-chrétien du Salvador|PDC]] ({{nombre|1|siège}}) ;}}
{{legend|#93C97D|[[:es:Nuestro Tiempo (El Salvador)|NT]] ({{nombre|1|siège}}) ;}}
{{Légende|#93C97D|[[Notre temps (Salvador)|NT]] ({{nombre|1|siège}}) ;}}
{{legend|#104D8F|[[:es:Vamos (El Salvador)|V]] ({{nombre|1|siège}}).}}
{{Légende|#104D8F|[[En avant (Salvador)|V]] ({{nombre|1|siège}}).}}
{{Légende/Fin}}]]
{{Légende/Fin}}]]
En vue des [[Élections législatives salvadoriennes de 2021|élections législatives de février 2021]], Nayib Bukele porte en avant son parti récemment créé, [[Nouvelles Idées]] (N ou NI), dirigé par son cousin Xavier Zablah Bukele. Ce dernier se retrouve rapidement en tête des sondages avant de largement creuser l’écart avec ses concurrents, une situation inédite dans un pays dominé depuis des décennies par l'Alliance républicaine nationaliste (ARENA) et le [[Front Farabundo Martí de libération nationale]] (FMLN). Dans un contexte de participation en hausse (50,3 %), NI l’emporte avec 66,5 % des suffrages exprimés, obtenant 56 des 84 sièges de députés à pourvoir.
En vue des [[Élections législatives salvadoriennes de 2021|élections législatives de février 2021]], Nayib Bukele porte en avant son parti récemment créé, [[Nouvelles Idées]] (N ou NI), dirigé par son cousin Xavier Zablah Bukele. Ce dernier se retrouve rapidement en tête des sondages avant de largement creuser l'écart avec ses concurrents, une situation inédite dans un pays dominé depuis des décennies par l'Alliance républicaine nationaliste (ARENA) et le [[Front Farabundo Martí de libération nationale]] (FMLN). Dans un contexte de participation en hausse (50,3 %), NI l'emporte avec 66,5 % des suffrages exprimés, obtenant 56 des 84 sièges de députés à pourvoir.


=== Tournant autoritaire ===
=== Tournant autoritaire ===
À la suite de cette victoire, les autorités prennent une série de décisions interprétées comme une dérive autoritaire : les membres de la Cour suprême et le procureur général sont révoqués et remplacés par des fidèles du président, les juges âgés de plus de soixante ans sont mis à la retraite<ref>{{Lien web |langue=fr |nom=AFP |titre=Crise politique au Salvador après la destitution de juges de la Cour suprême |url=https://www.challenges.fr/monde/crise-politique-au-salvador-apres-la-destitution-de-juges-de-la-cour-supreme_762979 |site=Challenges |date=2021-05-02 |consulté le=2023-03-13}}</ref>, la commission anti-corruption mise en place par l'[[Organisation des États américains]] est dissoute, des ministres appartenant à l'ancien gouvernement sont arrêtés et la Constitution est amendée afin de permettre au président d'effectuer plusieurs mandats<ref name=":3">{{Lien web |langue=fr-FR |auteur=Hilary Goodfriend |titre=Rien ne va plus au paradis salvadorien du Bitcoin |url=https://lvsl.fr/rien-ne-va-plus-au-paradis-salvadorien-du-bitcoin/ |site=lvsl.fr |date=2021-10-27 }}</ref>.
À la suite de cette victoire, les autorités prennent une série de décisions interprétées comme une dérive autoritaire : les membres de la Cour suprême et le procureur général sont révoqués et remplacés par des fidèles du président, les juges âgés de plus de soixante ans sont mis à la retraite<ref>{{Lien web |langue=fr |nom=AFP |titre=Crise politique au Salvador après la destitution de juges de la Cour suprême |url=https://www.challenges.fr/monde/crise-politique-au-salvador-apres-la-destitution-de-juges-de-la-cour-supreme_762979 |site=Challenges |date=2021-05-02 |consulté le=2023-03-13}}</ref>, la commission anti-corruption mise en place par l'[[Organisation des États américains]] est dissoute, des ministres appartenant à l'ancien gouvernement sont arrêtés et la Constitution est amendée afin de permettre au président d'effectuer plusieurs mandats<ref name=":3">{{Lien web |langue=fr-FR |auteur=Hilary Goodfriend |titre=Rien ne va plus au paradis salvadorien du Bitcoin |url=https://lvsl.fr/rien-ne-va-plus-au-paradis-salvadorien-du-bitcoin/ |site=lvsl.fr |date=2021-10-27 }}</ref>.


Le 11 janvier 2023, le gouvernement salvadorien ordonne l'arrestation de cinq figures de la lutte contre les mines et la défense de l'eau, qui avaient joué un rôle de premier plan dans la campagne pour l'interdiction minière de 2017. Sous l'administration de Bukele, le Salvador semble proche d'annuler l’interdiction minière et a rejoint le Forum intergouvernemental sur l'exploitation minière financé par le gouvernement canadien et a adopté une loi pour créer une Direction des hydrocarbures, de l'énergie et des mines<ref>{{Lien web |langue=en |prénom=Owen |nom=Schalk |prénom2=Pedro Cabezas / |nom2=January 21 |titre=El Salvador arrests anti-mining activists as transnational companies eye investment |url=https://canadiandimension.com/articles/view/el-salvador-arrests-anti-mining-activists-as-transnational-companies-eye-investment |site=canadiandimension.com |consulté le=2023-02-10}}</ref>.
Le 11 janvier 2023, le gouvernement salvadorien ordonne l'arrestation de cinq figures de la lutte contre les mines et la défense de l'eau, qui avaient joué un rôle de premier plan dans la campagne pour l'interdiction minière de 2017. Sous l'administration de Bukele, le Salvador semble proche d'annuler l'interdiction minière et a rejoint le Forum intergouvernemental sur l'exploitation minière financé par le gouvernement canadien et a adopté une loi pour créer une Direction générale de l'énergie, des hydrocarbures et des mines <ref>{{Lien web |langue=en |prénom=Owen |nom=Schalk |prénom2=Pedro Cabezas / |nom2=January 21 |titre=El Salvador arrests anti-mining activists as transnational companies eye investment |url=https://canadiandimension.com/articles/view/el-salvador-arrests-anti-mining-activists-as-transnational-companies-eye-investment |site=canadiandimension.com |consulté le=2023-02-10}}</ref>.


Les journalistes des médias ''El Faro'', ''Revista Factum'', ''Gato Encerrado'' ou ''[[La Prensa Gráfica]]'' sont visés par le gouvernement : trente-cinq d’entre eux ont fait l’objet d’espionnage avec le logiciel [[Pegasus (logiciel espion)|Pegasus]]. La rédaction d’''El Faro'' est contrainte de s’exiler au [[Costa Rica]] pour échapper au pressions. La « loi bâillon », votée en avril 2022, punit de quinze ans de prison quiconque transmettra des messages « susceptibles de générer anxiété et panique au sein de la population ». Toutes les informations publiques sont classées « secrets d’État ». Qu’il s’agisse des statistiques sur les homicides, les féminicides, les disparitions, les achats de bitcoins ou de la politique de santé<ref name=":8">{{Article|langue=fr|titre=Le Salvador sous l’emprise du « système Bukele »|périodique=Le Monde.fr|date=2023-07-04|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2023/07/04/le-salvador-sous-l-emprise-du-systeme-bukele_6180398_3210.html|consulté le=2023-07-04}}</ref>.
Les journalistes des médias ''El Faro'', ''Revista Factum'', ''Gato Encerrado'' ou ''[[La Prensa Gráfica]]'' sont visés par le gouvernement : trente-cinq d'entre eux ont fait l'objet d'espionnage avec le logiciel [[Pegasus (logiciel espion)|Pegasus]]. La rédaction d'''El Faro'' est contrainte de s'exiler au [[Costa Rica]] pour échapper aux pressions. La « loi bâillon », votée en avril 2022, punit de quinze ans de prison quiconque transmettra des messages « susceptibles de générer anxiété et panique au sein de la population ». Toutes les informations publiques sont classées « secrets d'État ». Qu'il s'agisse des statistiques sur les homicides, les féminicides, les disparitions, les achats de bitcoins ou de la politique de santé<ref name=":8">{{Article|langue=fr|titre=Le Salvador sous l'emprise du « système Bukele »|périodique=Le Monde.fr|date=2023-07-04|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2023/07/04/le-salvador-sous-l-emprise-du-systeme-bukele_6180398_3210.html|consulté le=2023-07-04}}</ref>.


De forts soupçons de corruption pèsent sur son gouvernement sans qu'aucune enquête ne soit menée. La Commission internationale de lutte contre l’impunité au Salvador (Cicies), mise en place par Bukele lui-même en 2019, est démantelée en 2021 par les autorités après avoir révélé au moins douze affaires touchant des membres du gouvernement<ref name=":8" />.
De forts soupçons de corruption pèsent sur son gouvernement sans qu'aucune enquête ne soit menée. La Commission internationale de lutte contre l'impunité au Salvador (Cicies), mise en place par Bukele lui-même en 2019, est démantelée en 2021 par les autorités après avoir révélé au moins douze affaires touchant des membres du gouvernement<ref name=":8" />.


=== Politique économique ===
=== Politique économique ===
Divers économistes ont pointé la faiblesse des politiques du gouvernement salvadorien dans ce domaine. Aucune véritable politique visant à combattre la pauvreté, les inégalités et l’absence d’accès aux services de base n'a été mise sur pied au cours du premier mandat de Nayib Bukele. La pauvreté a augmenté entre 2019 et 2022, plus de la moitié de la population ne mange pas à sa faim et le Salvador présente, en 2023, le taux de croissance économique le plus bas d'[[Amérique centrale]] (1,6 %)<ref name=":7">{{Lien web |langue=fr |titre=Salvador: Nayib Bukele, président depuis 4 ans d'un pays économiquement à la dérive |url=https://www.rfi.fr/fr/am%C3%A9riques/20230601-salvador-nayib-bukele-pr%C3%A9sident-depuis-4-ans-d-un-pays-%C3%A9conomiquement-%C3%A0-la-d%C3%A9rive |site=RFI |date=2023-06-01 |consulté le=2023-06-24}}</ref>{{,}}<ref name=":5" />.
Divers économistes ont pointé la faiblesse des politiques du gouvernement salvadorien dans ce domaine. Aucune véritable politique visant à combattre la pauvreté, les inégalités et l'absence d'accès aux services de base n'a été mise sur pied au cours du premier mandat de Nayib Bukele. La pauvreté a augmenté entre 2019 et 2022, plus de la moitié de la population ne mange pas à sa faim et le Salvador présente, en 2023, le taux de croissance économique le plus bas d'[[Amérique centrale]] (1,6 %)<ref name=":7">{{Lien web |langue=fr |titre=Salvador: Nayib Bukele, président depuis 4 ans d'un pays économiquement à la dérive |url=https://www.rfi.fr/fr/am%C3%A9riques/20230601-salvador-nayib-bukele-pr%C3%A9sident-depuis-4-ans-d-un-pays-%C3%A9conomiquement-%C3%A0-la-d%C3%A9rive |site=RFI |date=2023-06-01 |consulté le=2023-06-24}}</ref>{{,}}<ref name=":5" />.


=== Cryptomonnaies ===
=== Cryptomonnaies ===
Nayib Bukele fait en septembre 2021 du [[bitcoin]] la monnaie officielle au Salvador au même titre que le dollar américain. Les autorités mettent en place un premier fonds de 150 millions de dollars afin de garantir la convertibilité automatique du bitcoin en dollars, font installer quelque 200 distributeurs automatiques permettant d’échanger des bitcoins et lancent une application devant permettre de procéder à des paiements ou virements en bitcoins. Ses usagers recevront une prime de l’équivalent de 30 dollars en bitcoins<ref>{{Article|langue=fr|titre=Au Salvador, des centaines d’opposants au bitcoin comme monnaie légale dans la rue|périodique=Le Monde.fr|date=2021-09-02|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2021/09/02/au-salvador-une-centaine-d-opposants-au-bitcoin-comme-monnaie-legale-dans-la-rue_6093074_3210.html}}</ref>. Le [[Fonds monétaire international]] (FMI) a cependant mis en garde le gouvernement salvadorien contre les risques du bitcoin : « Compte tenu de la haute volatilité du bitcoin, son utilisation en tant que monnaie officielle génère des risques importants pour la protection du consommateur, pour l’intégrité du système financier et pour la stabilité financière<ref name=":2" />. » L'opposition de gauche manifeste contre cette décision<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Cryptomonnaie. L’adoption du bitcoin comme monnaie officielle divise le Salvador |url=https://www.courrierinternational.com/une/cryptomonnaie-ladoption-du-bitcoin-comme-monnaie-officielle-divise-le-salvador |site=Courrier international |date=2021-09-02 }}</ref>.
Nayib Bukele fait en septembre 2021 du [[bitcoin]] la monnaie officielle au Salvador au même titre que le dollar américain. Les autorités mettent en place un premier fonds de 150 millions de dollars afin de garantir la convertibilité automatique du bitcoin en dollars, font installer quelque 200 distributeurs automatiques permettant d'échanger des bitcoins et lancent une application devant permettre de procéder à des paiements ou virements en bitcoins. Ses usagers recevront une prime de l'équivalent de 30 dollars en bitcoins<ref>{{Article|langue=fr|titre=Au Salvador, des centaines d'opposants au bitcoin comme monnaie légale dans la rue|périodique=Le Monde.fr|date=2021-09-02|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2021/09/02/au-salvador-une-centaine-d-opposants-au-bitcoin-comme-monnaie-legale-dans-la-rue_6093074_3210.html}}</ref>. Le [[Fonds monétaire international]] (FMI) a cependant mis en garde le gouvernement salvadorien contre les risques du bitcoin : « Compte tenu de la haute volatilité du bitcoin, son utilisation en tant que monnaie officielle génère des risques importants pour la protection du consommateur, pour l'intégrité du système financier et pour la stabilité financière<ref name=":2" />. » L'opposition de gauche manifeste contre cette décision<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Cryptomonnaie. L'adoption du bitcoin comme monnaie officielle divise le Salvador |url=https://www.courrierinternational.com/une/cryptomonnaie-ladoption-du-bitcoin-comme-monnaie-officielle-divise-le-salvador |site=Courrier international |date=2021-09-02 }}</ref>.


Le président Bukele annonce en novembre 2021 la création à venir d'une ''Bitcoin City'', qui constituerait une [[zone économique spéciale]] avec des avantages fiscaux pour les investisseurs<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=À la Une: fin de campagne minée par la violence au Honduras |url=https://www.rfi.fr/fr/am%C3%A9riques/20211126-%C3%A0-la-une-fin-de-campagne-min%C3%A9e-par-la-violence-au-honduras |site=RFI |date=2021-11-26 }}</ref>. Il explique que « zones résidentielles, zones commerciales, services, musées, divertissements, bars, restaurants, aéroport, port, chemin de fer – tout [sera] consacré au bitcoin », et que toutes les taxes autres que la TVA seront supprimées dans la ville. Le gouvernement prévoit d’émettre une [[Obligation (finance)|obligation]] d'un milliard de dollars en 2022 pour financer le projet. La moitié des fonds sera convertie en bitcoins et l’autre moitié sera utilisée pour les infrastructures et le [[Minage de cryptomonnaie|minage de bitcoins]]. La ville, dont la forme circulaire évoquera une pièce de monnaie, s’élèvera dans l’est du pays et recevra son approvisionnement énergétique du volcan de [[Conchagua]], lequel devrait fournir l’énergie nécessaire aux activités de minage, très énergivores<ref name=":2">{{Lien web |langue=fr |titre=Le Salvador annonce la construction d’une « Bitcoin City » |url=https://www.20minutes.fr/high-tech/3180903-20211124-le-salvador-construira-la-premiere-bitcoin-city-au-monde |site=www.20minutes.fr |date=29/11/2021 }}</ref>.
Le président Bukele annonce en novembre 2021 la création à venir d'une ''Bitcoin City'', qui constituerait une [[zone économique spéciale]] avec des avantages fiscaux pour les investisseurs<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=À la Une: fin de campagne minée par la violence au Honduras |url=https://www.rfi.fr/fr/am%C3%A9riques/20211126-%C3%A0-la-une-fin-de-campagne-min%C3%A9e-par-la-violence-au-honduras |site=RFI |date=2021-11-26 }}</ref>. Il explique que « zones résidentielles, zones commerciales, services, musées, divertissements, bars, restaurants, aéroport, port, chemin de fer – tout [sera] consacré au bitcoin », et que toutes les taxes autres que la TVA seront supprimées dans la ville. Le gouvernement prévoit d'émettre une [[Obligation (finance)|obligation]] d'un milliard de dollars en 2022 pour financer le projet. La moitié des fonds sera convertie en bitcoins et l'autre moitié sera utilisée pour les infrastructures et le [[Minage de cryptomonnaie|minage de bitcoins]]. La ville, dont la forme circulaire évoquera une pièce de monnaie, s'élèvera dans l'est du pays et recevra son approvisionnement énergétique du volcan de [[Conchagua]], lequel devrait fournir l'énergie nécessaire aux activités de minage, très énergivores<ref name=":2">{{Lien web |langue=fr |titre=Le Salvador annonce la construction d'une « Bitcoin City » |url=https://www.20minutes.fr/high-tech/3180903-20211124-le-salvador-construira-la-premiere-bitcoin-city-au-monde |site=www.20minutes.fr |date=29/11/2021 }}</ref>.


En 2023, cette politique apparaît comme un échec. Dans la capitale, presque aucun commerce n'accepte les paiements en cryptomonnaie, et seuls 2 % des transferts effectués par la diaspora sont passés par ce biais. En outre, face à la chute du cours du bitcoin, les fonds publics que le gouvernement détiendrait dans la cryptomonnaie ont perdu plus de la moitié de leur valeur initiale. Lors d'un entretien accordé à la chaîne américaine [[Fox News Channel|Fox News]], en novembre 2022, Nayib Bukele soutient que l'adoption du bitcoin était avant tout une opération de communication destinée à améliorer l'image du pays à l'international<ref name=":5" />.
En 2023, cette politique apparaît comme un échec. Dans la capitale, presque aucun commerce n'accepte les paiements en cryptomonnaie, et seuls 2 % des transferts effectués par la diaspora sont passés par ce biais. En outre, face à la chute du cours du bitcoin, les fonds publics que le gouvernement détiendrait dans la cryptomonnaie ont perdu plus de la moitié de leur valeur initiale. Lors d'un entretien accordé à la chaîne américaine [[Fox News Channel|Fox News]], en novembre 2022, Nayib Bukele soutient que l'adoption du bitcoin était avant tout une opération de communication destinée à améliorer l'image du pays à l'international<ref name=":5" />.

En 2024, la trésorerie en bitcoins du gouvernement se serait appréciée de 40%<ref>{{Lien web |langue=fr-FR |prénom=Rémy |nom=R |titre=Les réserves en Bitcoin du Salvador se sont appréciées de +40% selon Nayib Bukele |url=https://journalducoin.com/bitcoin/reserves-bitcoin-btc-salvador-appreciees-40-nayib-bukele/ |site=Journal du Coin |date=2024-02-29 |consulté le=2024-04-17}}</ref>.


=== Politique étrangère ===
=== Politique étrangère ===
Ligne 142 : Ligne 147 :
Peu après son investiture, Nayib Bukele rompt les relations diplomatiques avec le [[Venezuela]], expulse les diplomates vénézuéliens et reconnaît l'opposant [[Juan Guaidó]] comme nouveau président de ce pays. Sa décision est saluée par l'ambassade des États-Unis<ref>{{Article |langue=en-GB |auteur1= |titre=El Salvador expels Maduro's Venezuela diplomats |périodique=BBC News |date=2019-11-03 |lire en ligne=https://www.bbc.com/news/world-latin-america-50279917 |pages= }}.</ref>.
Peu après son investiture, Nayib Bukele rompt les relations diplomatiques avec le [[Venezuela]], expulse les diplomates vénézuéliens et reconnaît l'opposant [[Juan Guaidó]] comme nouveau président de ce pays. Sa décision est saluée par l'ambassade des États-Unis<ref>{{Article |langue=en-GB |auteur1= |titre=El Salvador expels Maduro's Venezuela diplomats |périodique=BBC News |date=2019-11-03 |lire en ligne=https://www.bbc.com/news/world-latin-america-50279917 |pages= }}.</ref>.


Il rompt aussi les relations avec la [[République sahraouie]], refuse l’ouverture d’une ambassade [[Palestine (État)|palestinienne]] et supprime les programmes [[Cuba|cubains]] d'aide médicale<ref>{{Lien web |langue=en-US |titre=El Salvador’s Democracy Was Hard-Won. Now President Nayib Bukele Threatens It. |url=https://jacobin.com/2022/01/nidia-diaz-el-salvador-chapultepec-peace-accords-bukele-fmln |site=jacobin.com }}</ref>.
Il rompt aussi les relations avec la [[République sahraouie]], refuse l'ouverture d'une ambassade [[Palestine (État)|palestinienne]] et supprime les programmes [[Cuba|cubains]] d'aide médicale<ref>{{Lien web |langue=en-US |titre=El Salvador's Democracy Was Hard-Won. Now President Nayib Bukele Threatens It. |url=https://jacobin.com/2022/01/nidia-diaz-el-salvador-chapultepec-peace-accords-bukele-fmln |site=jacobin.com }}</ref>.


Ses rapports avec les [[États-Unis]] se détériorent en 2021, à la suite d'un rapprochement commercial avec la [[Chine]], qui a procuré au Salvador des [[Vaccin contre la Covid-19|vaccins contre la covid-19]] et une aide économique. Les autorités américaines publient en réaction une liste de « fonctionnaires corrompus » appartenant à l'entourage de Nayib Bukele, incluant notamment son chef de cabinet, l'ancien ministre de la Sécurité et le président du parti GANA<ref>{{Lien web |langue=es |titre=El Salvador firma millonario acuerdo de cooperación con China y se pone en la mira de EE. UU. |url=https://www.eluniverso.com/noticias/internacional/el-salvador-firma-millonario-acuerdo-de-cooperacion-con-china-y-se-pone-en-la-mira-de-ee-uu-nota/ |site=eluniverso.com |date=2021-05-19 |consulté le=24 mai 2021}}.</ref>.
Ses rapports avec les [[États-Unis]] se détériorent en 2021, à la suite d'un rapprochement commercial avec la [[Chine]], qui a procuré au Salvador des [[Vaccin contre la Covid-19|vaccins contre la covid-19]] et une aide économique. Les autorités américaines publient en réaction une liste de « fonctionnaires corrompus » appartenant à l'entourage de Nayib Bukele, incluant notamment son chef de cabinet, l'ancien ministre de la Sécurité et le président du parti GANA<ref>{{Lien web |langue=es |titre=El Salvador firma millonario acuerdo de cooperación con China y se pone en la mira de EE. UU. |url=https://www.eluniverso.com/noticias/internacional/el-salvador-firma-millonario-acuerdo-de-cooperacion-con-china-y-se-pone-en-la-mira-de-ee-uu-nota/ |site=eluniverso.com |date=2021-05-19 |consulté le=24 mai 2021}}.</ref>.
Ligne 152 : Ligne 157 :
Il fait une campagne présidentielle « post-idéologique » en 2019, dénonçant la corruption et les partis politiques traditionnels, tout en bénéficiant d'une image jeune et irrévérencieuse<ref name=":3" />.
Il fait une campagne présidentielle « post-idéologique » en 2019, dénonçant la corruption et les partis politiques traditionnels, tout en bénéficiant d'une image jeune et irrévérencieuse<ref name=":3" />.


S'il souffre d'une mauvaise image à l'international<ref name="O'Boyle">{{lien web|nom=O'Boyle|prénom=Brendan|date=29 April 2020|titre=Behind Nayib Bukele's "Shocking" Turn|url=https://americasquarterly.org/article/behind-nayib-bukeles-shocking-turn/|consulté le=30 mai 2022|website=Americas Quarterly|langue=en-US}}</ref>{{,}}<ref name="Kitroeff">{{article|nom=Kitroeff|prénom=Natalie|date=5 May 2020|titre=Young Leader Vowed Change in El Salvador but Wields Same Heavy Hand|langue=en-US|périodique=The New York Times|url=https://www.nytimes.com/2020/05/05/world/americas/el-salvador-nayib-bukele.html|consulté le=30 mai 2022|issn=0362-4331}}</ref>{{,}}<ref>{{lien web|nom1=Crane |prénom1=Emily |titre=El Salvador's president declares himself world's "coolest dictator"|url=https://nypost.com/2021/09/22/el-salvadors-president-declares-himself-worlds-coolest-dictator/|site=[[New York Post]]|date=22 September 2021|consulté le=30 mai 2022}}</ref>, Bukele demeure le président le plus populaire de l'histoire du Salvador<ref name="info">{{lien web|url=https://elsalvadorinfo.net/nayib-bukele-approval-rate/|titre=Nayib Bukele Approval Rating. Majority of Salvadorans approve of Bukele|date=9 March 2022|consulté le=30 mai 2022|langue=en|prénom=Eddie|nom=Galdámez|website=elsalvadorinfo.net|éditeur=El Salvador Info}}</ref> avec un taux de popularité qui se maintient généralement autour de 90 % d'opinions positives auprès des Salvadoriens<ref name="popularity">{{lien web|url=https://www.latimes.com/world-nation/story/2021-05-16/nayib-bukele-the-most-popular-president-in-the-world-is-a-man-with-one-ideology-power|titre=El Salvador's Millennial President is a Man with One Vision: Power|website=Los Angeles Times|date=16 May 2021|consulté le=30 mai 2022|nom=Linthicum|prénom=Kate}}</ref>{{,}}<ref name="approval">{{lien web|url=https://globalvoices.org/2021/02/22/despite-claims-of-authoritarianism-president-bukeles-popularity-continues-to-be-strong-in-el-salvador/|titre=Despite Claims of Authoritarianism, President Bukele's Popularity Continues to be Strong in El Salvador|website=Global Voices|date=22 February 2021|nom=Galdámez|prénom=Eddie|consulté le=30 mai 2022}}</ref>.
S'il souffre d'une mauvaise image à l'international<ref name="O'Boyle">{{lien web|nom=O'Boyle|prénom=Brendan|date=29 April 2020|titre=Behind Nayib Bukele's "Shocking" Turn|url=https://americasquarterly.org/article/behind-nayib-bukeles-shocking-turn/|consulté le=30 mai 2022|website=Americas Quarterly|langue=en-US}}</ref>{{,}}<ref name="Kitroeff">{{article|nom=Kitroeff|prénom=Natalie|date=5 May 2020|titre=Young Leader Vowed Change in El Salvador but Wields Same Heavy Hand|langue=en-US|périodique=The New York Times|url=https://www.nytimes.com/2020/05/05/world/americas/el-salvador-nayib-bukele.html|consulté le=30 mai 2022|issn=0362-4331}}</ref>{{,}}<ref>{{lien web|nom1=Crane |prénom1=Emily |titre=El Salvador's president declares himself world's "coolest dictator"|url=https://nypost.com/2021/09/22/el-salvadors-president-declares-himself-worlds-coolest-dictator/|site=[[New York Post]]|date=22 September 2021|consulté le=30 mai 2022}}</ref>, Nayib Bukele demeure le président le plus populaire de l'histoire du Salvador<ref name="info">{{lien web|url=https://elsalvadorinfo.net/nayib-bukele-approval-rate/|titre=Nayib Bukele Approval Rating. Majority of Salvadorans approve of Bukele|date=9 March 2022|consulté le=30 mai 2022|langue=en|prénom=Eddie|nom=Galdámez|website=elsalvadorinfo.net|éditeur=El Salvador Info}}</ref> avec un taux de popularité qui se maintient généralement autour de 90 % d'opinions positives<ref name="popularity">{{lien web|url=https://www.latimes.com/world-nation/story/2021-05-16/nayib-bukele-the-most-popular-president-in-the-world-is-a-man-with-one-ideology-power|titre=El Salvador's Millennial President is a Man with One Vision: Power|website=Los Angeles Times|date=16 May 2021|consulté le=30 mai 2022|nom=Linthicum|prénom=Kate}}</ref>{{,}}<ref name="approval">{{lien web|url=https://globalvoices.org/2021/02/22/despite-claims-of-authoritarianism-president-bukeles-popularity-continues-to-be-strong-in-el-salvador/|titre=Despite Claims of Authoritarianism, President Bukele's Popularity Continues to be Strong in El Salvador|website=Global Voices|date=22 February 2021|nom=Galdámez|prénom=Eddie|consulté le=30 mai 2022}}</ref>.


À l'instar du [[Président des États-Unis|président américain]] [[Donald Trump]], il communique essentiellement sur les réseaux sociaux<ref name="ElPaís 2021" />, ce qui lui vaut le surnom de ''« président Millenium »''<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Salvador: le président Bukele s'affuble du nom de «dictateur» sur Twitter |url=https://www.lefigaro.fr/flash-actu/salvador-le-president-bukele-s-affuble-du-nom-de-dictateur-sur-twitter-20210920 |site=LEFIGARO |date=2021-09-20 |consulté le=2022-07-04}}</ref>{{,}}<ref name="El Salvador’s president is remaking the government’s social media in his image">{{Lien web |langue=en-US |titre=El Salvador’s president is remaking the government’s social media in his image |url=https://restofworld.org/2021/el-salvador-digital-coup/ |site=Rest of World |date=2021-05-11 |consulté le=2022-12-23}}</ref>. Il se démarque notamment par son utilisation de [[Twitter]] lors de la campagne pour l'élection présidentielle de 2019<ref>https://revistas.unav.edu/index.php/communication-and-society/article/view/39038/34141 The communications strategy via Twitter of Nayib Bukele: the millennial president of El Salvador]</ref>. Il reste, après son élection, particulièrement actif sur les réseaux sociaux<ref name=":5" />.
À l'instar du [[Président des États-Unis|président américain]] [[Donald Trump]], il communique essentiellement sur les réseaux sociaux<ref name="ElPaís 2021" />, ce qui lui vaut le surnom de ''« président Millenium »''<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Salvador: le président Bukele s'affuble du nom de «dictateur» sur Twitter |url=https://www.lefigaro.fr/flash-actu/salvador-le-president-bukele-s-affuble-du-nom-de-dictateur-sur-twitter-20210920 |site=LEFIGARO |date=2021-09-20 |consulté le=2022-07-04}}</ref>{{,}}<ref name="El Salvador's president is remaking the government's social media in his image">{{Lien web |langue=en-US |titre=El Salvador's president is remaking the government's social media in his image |url=https://restofworld.org/2021/el-salvador-digital-coup/ |site=Rest of World |date=2021-05-11 |consulté le=2022-12-23}}</ref>. Il se démarque notamment par son utilisation de [[Twitter]] lors de la campagne pour l'élection présidentielle de 2019<ref>https://revistas.unav.edu/index.php/communication-and-society/article/view/39038/34141 The communications strategy via Twitter of Nayib Bukele: the millennial president of El Salvador]</ref>. Il reste, après son élection, particulièrement actif sur les réseaux sociaux<ref name=":5" />.


La presse internationale est généralement séduite par sa communication, voyant en lui un « candidat antisystème » ou encore « un nouveau [[Emmanuel Macron|Macron]] ». Le ''[[Washington Post]]'' salue son positionnement « non idéologique » et son tempérament « rafraîchissant »<ref name=":5" />.
La presse internationale est généralement séduite par sa communication, voyant en lui un « candidat antisystème » ou encore « un nouveau [[Emmanuel Macron|Macron]] ». Le ''[[Washington Post]]'' salue son positionnement « non idéologique » et son tempérament « rafraîchissant »<ref name=":5" />.


En matière de [[communication non verbale]], il se démarque de ses prédécesseurs en dérogeant régulièrement à la tradition du costume. Bukele apparaît ainsi souvent dans les instances gouvernementales avec un style décontracté (jeans, t-shirt, débardeur) afin que les citoyens s’identifient à lui par son apparence<ref name="El Salvador’s president is remaking the government’s social media in his image" />. ''El País América'' relève à son sujet en 2021 : {{citation|Véritable président du {{XXIe|siècle}} proche du peuple, selon ses partisans, provocateur qui distille un discours de haine, selon ses opposants, Nayib Bukele est un personnage clivant qui a bouleversé la politique salvadorienne en moins de deux ans. Et bénéficie d’un taux de popularité unique dans l’histoire du pays<ref name="ElPaís 2021" />.}}
En matière de [[communication non verbale]], il se démarque de ses prédécesseurs en dérogeant régulièrement à la tradition du costume. Bukele apparaît ainsi souvent dans les instances gouvernementales avec un style décontracté (jeans, t-shirt, débardeur) afin que les citoyens s'identifient à lui par son apparence<ref name="El Salvador's president is remaking the government's social media in his image" />. ''El País América'' relève à son sujet en 2021 : {{citation|Véritable président du {{s-|XXI}} proche du peuple, selon ses partisans, provocateur qui distille un discours de haine, selon ses opposants, Nayib Bukele est un personnage clivant qui a bouleversé la politique salvadorienne en moins de deux ans. Et bénéficie d'un taux de popularité unique dans l'histoire du pays<ref name="ElPaís 2021" />.}}


Il bénéficie d'une popularité évaluée entre 70 et 92 %<ref name=":8" />, un niveau record sur le continent américain<ref name=":7" />. Il s'auto-proclame ironiquement le « dictateur le plus cool du monde »<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=La rédaction – Nayib Bukele, le «dictateur le plus cool du monde» |url=https://www.24heures.ch/nayib-bukele-le-dictateur-le-plus-cool-du-monde-758218110241 |site=24 heures |consulté le=2022-07-04}}</ref>. Alors que, par le passé, les présidents du Salvador étaient inconnus à l'échelle internationale, Nayib Bukele inspire au-delà des frontières de son pays. De nombreux dirigeants politiques d'[[Amérique latine]] promettent ainsi de reproduire dans leur pays ses politiques sécuritaires<ref name=":5" />.
Il bénéficie d'une popularité évaluée entre 70 et 92 %<ref name=":8" />, un niveau record sur le continent américain<ref name=":7" />. Il s'auto-proclame ironiquement le « dictateur le plus cool du monde »<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=La rédaction – Nayib Bukele, le «dictateur le plus cool du monde» |url=https://www.24heures.ch/nayib-bukele-le-dictateur-le-plus-cool-du-monde-758218110241 |site=24 heures |consulté le=2022-07-04}}</ref>. Alors que, par le passé, les présidents du Salvador étaient inconnus à l'échelle internationale, Nayib Bukele inspire au-delà des frontières de son pays. De nombreux dirigeants politiques d'[[Amérique latine]] promettent ainsi de reproduire dans leur pays ses politiques sécuritaires<ref name=":5" />.

=== Candidat à l'élection présidentielle de 2024 ===
{{Article détaillé|Élection présidentielle salvadorienne de 2024}}
En septembre 2021, la Cour suprême de justice juge légale la candidature d'un président à sa réélection immédiate, malgré son interdiction par la [[Constitution du Salvador|Constitution de 1983]], réaffirmée par un jugement en 2014 confirmant l'obligation pour un président d'attendre au minimum la durée de deux mandats présidentiels avant de se représenter. En 2023, la cour juge cependant légale cette pratique dans le cas où le président cèderait auparavant ses fonctions à son vice-président avant la tenue du scrutin. La décision est vivement critiquée par l'opposition, qui la qualifie d'inconstitutionnelle<ref>{{Lien web |auteur=RFI |titre=Salvador: la Cour suprême autorise le président Bukele à se représenter |url=https://www.rfi.fr/fr/am%C3%A9riques/20210904-salvador-la-cour-supr%C3%AAme-autorise-le-pr%C3%A9sident-bukele-%C3%A0-se-repr%C3%A9senter |site=RFI |éditeur=RFI |jour=04 |mois=septembre |année=2021 |consulté le=10 janvier 2024}}.</ref>. Cette nouvelle jurisprudence permet à Nayib Bukele d'annoncer le 26 octobre 2023 être candidat à sa réélection avec son vice-président, [[Félix Ulloa]]<ref>{{Lien web |titre=Le président Nayib Bukele candidat à sa réélection |url=https://www.lapresse.ca/international/amerique-latine/2023-10-27/salvador/le-president-nayib-bukele-candidat-a-sa-reelection.php |site=La Presse |éditeur=LaPresseFB |jour=27 |mois=octobre |année=2023 |consulté le=10 janvier 2024}}.</ref>. Il obtient le 30 novembre par une décision de l'Assemblée nationale {{incise|votée par 67 voix pour et 11 contre}} de confier temporairement ses pouvoirs à [[Claudia Rodríguez de Guevara]], qui devient ainsi présidente par intérim le lendemain sans que Bukele ne démissionne lui même<ref>{{Lien web |titre=Au Salvador, le président Nayib Bukele quitte son poste pour pouvoir préparer sa réélection en 2024 |url=https://www.lemonde.fr/international/article/2023/12/01/au-salvador-le-president-nayib-bukele-quitte-son-poste-pour-pouvoir-preparer-sa-reelection-en-2024_6203315_3210.html |site=Le Monde.fr |éditeur=Le Monde |jour=01 |mois=décembre |année=2023 |issn=1950-6244 |consulté le=10 janvier 2024}}.</ref>{{,}}<ref>{{Article|langue=fr|titre=Au Salvador, le président Nayib Bukele quitte son poste pour pouvoir préparer sa réélection en 2024|périodique=Le Monde.fr|date=2023-12-01|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2023/12/01/au-salvador-le-president-nayib-bukele-quitte-son-poste-pour-pouvoir-preparer-sa-reelection-en-2024_6203315_3210.html|consulté le=2023-12-01}}</ref>.

Plébiscité pour sa lutte contre les gangs, , il remporte l'[[Élection présidentielle salvadorienne de 2024|élection présidentielle de février 2024]] dés le premier tour avec 83 % des voix. En parallèle, [[Nouvelles Idées]] remporte au moins 58 des 60 sièges à l'Assemblée lors des [[Élections législatives salvadoriennes de 2024|élections législatives]] organisées le même jour<ref>[https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20240205-pr%C3%A9sidentielle-au-salvador-nayib-bukele-revendique-sa-victoire-avec-plus-de-85-des-voix Présidentielle au Salvador : Nayib Bukele revendique sa victoire avec "plus de 85 % des voix"], france24.com, 5 février 2024</ref>.


== Prises de position ==
== Prises de position ==
Souvent considéré comme un [[Libéral-conservatisme|libéral-conservateur]], Nayib Bukele est présenté comme ni de [[Droite (politique)|droite]] ni de [[Gauche (politique)|gauche]] par ''El País América''<ref name="ElPaís 2021" />.
Souvent considéré comme un [[Libéral-conservatisme|libéral-conservateur]], Nayib Bukele est présenté comme ni de [[Droite (politique)|droite]] ni de [[Gauche (politique)|gauche]] par ''El País América''<ref name="ElPaís 2021" />.


Il défend des conceptions économiques plutôt [[Libéralisme économique|libérales]], estimant que « plus d'impôts [signifie] moins d'opportunités » et indiquant ne pas être « en faveur de la réduction des [[Liberté économique|libertés économiques]]. » Il considère que la pauvreté doit être combattue au moyen de mesures de lutte contre la corruption (« il y a assez d'argent quand personne ne vole ») plutôt que par la mise en œuvre de politiques redistributives<ref>{{Lien web |langue=en-US |titre=El Salvador’s New Savior |url=https://upsidedownworld.org/archives/el-salvador/el-salvadors-new-savior/ |site=upsidedownworld.org |date=2017-11-20 }}.</ref>.
Il défend des conceptions économiques plutôt [[Libéralisme économique|libérales]], estimant que « plus d'impôts [signifie] moins d'opportunités » et indiquant ne pas être « en faveur de la réduction des [[Liberté économique|libertés économiques]]. » Il considère que la pauvreté doit être combattue au moyen de mesures de lutte contre la corruption (« il y a assez d'argent quand personne ne vole ») plutôt que par la mise en œuvre de politiques redistributives<ref>{{Lien web |langue=en-US |titre=El Salvador's New Savior |url=https://upsidedownworld.org/archives/el-salvador/el-salvadors-new-savior/ |site=upsidedownworld.org |date=2017-11-20 }}.</ref>.


Sur le plan sociétal, il est opposé au [[mariage homosexuel]] et à l'[[avortement]], à l'exception du cas où la vie de la mère est en danger<ref>{{Lien web |langue=es |nom1=Marín |prénom1=Claudia |titre=Nuevo presidente de El Salvador se opone al matrimonio igualitario y al aborto |url=https://www.elmundo.cr/mundo/nuevo-presidente-de-el-salvador-se-opone-al-matrimonio-igualitario-y-al-aborto/ |site=elmundo.cr |date=2019-02-04 |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>.
Sur le plan sociétal, il est opposé au [[mariage homosexuel]] et à l'[[avortement]], à l'exception du cas où la vie de la mère est en danger<ref>{{Lien web |langue=es |nom1=Marín |prénom1=Claudia |titre=Nuevo presidente de El Salvador se opone al matrimonio igualitario y al aborto |url=https://www.elmundo.cr/mundo/nuevo-presidente-de-el-salvador-se-opone-al-matrimonio-igualitario-y-al-aborto/ |site=elmundo.cr |date=2019-02-04 |consulté le=2019-07-22 }}.</ref>.

Dernière version du 22 novembre 2024 à 02:30

Nayib Bukele
Illustration.
Nayib Bukele en 2019.
Fonctions
Président de la république du Salvador[a]
En fonction depuis le
(5 ans, 6 mois et 8 jours)
Élection
Réélection
Vice-président Félix Ulloa
Prédécesseur Salvador Sánchez Cerén
Maire de San Salvador

(3 ans)
Prédécesseur Norman Quijano
Successeur Ernesto Muyshondt
Maire de Nuevo Cuscatlán (es)

(3 ans)
Prédécesseur Álvaro Rodríguez
Successeur Michelle Sol
Biographie
Nom de naissance Nayib Armando Bukele Ortez
Date de naissance (43 ans)
Lieu de naissance San Salvador (Salvador)
Nationalité Salvadorienne
Parti politique FMLN (2012-2017)
GANA (2019)
NI (depuis 2019)
Père Armando Bukele Kattán
Fratrie Karim Bukele
Youssef Bukele
Ibrajim Bukele
Conjoint Gabriela Rodríguez
Entourage Xavier Zablah Bukele (cousin)

Signature de Nayib Bukele

Nayib Bukele
Maires de Nuevo Cuscatlán
Maires de San Salvador (en)
Présidents de la république du Salvador

Nayib Bukele Ortez, né le à San Salvador, est un homme d'État salvadorien. Il est président de la république depuis le .

D'abord membre du Front Farabundo Martí de libération nationale (FMLN), il est élu maire de Nuevo Cuscatlán en 2012 puis de San Salvador, la capitale, en 2015.

Lors de l'élection présidentielle de 2019, se présentant sous l'étiquette de la Grande alliance pour l'unité nationale (GANA), il est élu au premier tour avec 53 % des voix, à 37 ans. Il devient ainsi le premier président depuis la fin de la guerre civile, en 1992, à ne représenter aucun des deux principaux partis salvadoriens (ARENA et FMLN).

Libéral sur le plan économique et conservateur sur le plan sociétal, il mène notamment une politique sécuritaire en rupture avec l'État de droit, qui conduit à une réduction importante du taux d'homicides. Cette action lui permet d'atteindre un niveau record de popularité. Sa présidence est également marquée par un tournant autoritaire.

Après avoir composé à ses débuts avec un parlement lui étant hostile, il voit son nouveau parti, Nouvelles Idées (NI), remporter largement les élections législatives de 2021, ce qui semble acter la fin du bipartisme dans le pays. La même année, il fait face à une crise politico-judiciaire.

La Cour suprême, dont il a fait renouveler la composition, l'autorise en parallèle à briguer un second mandat — une situation inédite au Salvador — à la condition qu'il cède temporairement ses fonctions avant le scrutin, ce qu'il fait en . Il remporte l'élection présidentielle de février 2024 dès le premier tour avec 84 % des voix.

Situation personnelle

[modifier | modifier le code]
Nayib Bukele et son épouse, Gabriela Rodríguez de Bukele, en 2016.

Nayib Bukele naît le à San Salvador, au Salvador. Il est le fils d'Olga Ortez de Bukele et d'Armando Bukele Kattán, un homme d'affaires d'origine palestinienne, chrétien converti à l'islam et devenu imam, et figure influente dans la vie politique et de la communauté musulmane du pays[1].

En 2014, il épouse Gabriela Rodríguez[2]. Le couple a une fille, Layla, née en [3].

Alors qu'il est le fils d'un musulman et d'une chrétienne, les opinions religieuses de Nayib Bukele sont l'objet de nombreuses spéculations lors de l'élection présidentielle de 2019, notamment lors de la diffusion par le journal salvadorien El Liberal de photos le montrant prier dans une mosquée de la ville de Mexico. Bukele déclare n'appartenir à aucune religion mais croire en Jésus-Christ[4],[5].

Ascension politique

[modifier | modifier le code]

Premiers mandats

[modifier | modifier le code]
Nayib Bukele en 2015.

Membre du Front Farabundo Martí de libération nationale (FMLN) à partir de 2012, il est élu maire de la municipalité de Nuevo Cuscatlán (es) en 2012 avec 49,72 % des voix[6]. En 2015, il est élu maire de la capitale, San Salvador, avec 48,47 % des voix, toujours sous l'étiquette du FMLN[7],[6]. Il est exclu du parti en 2017 après avoir lancé une pomme au visage d'une conseillère municipale[8].

Élection présidentielle de 2019

[modifier | modifier le code]

Il se présente comme candidat de la Grande alliance pour l'unité nationale (GANA), un parti conservateur classé au centre droit, à l'élection présidentielle de 2019[9]. S'affichant comme « antisystème », il domine le débat en se focalisant sur l'importante criminalité due notamment aux gangs, ainsi que sur la pauvreté que connaît le pays. Âgé de 37 ans, il mène une campagne axée sur les jeunes générations, très dure avec le personnel politique classique.

Dès le premier tour, le , il est élu avec son colistier Félix Ulloa, et ce, avec 53 % des voix exprimées[10].

Président de la République

[modifier | modifier le code]

Investiture

[modifier | modifier le code]

Nayib Bukele prend ses fonctions le , succédant à Salvador Sánchez Cerén[11],[12]. Depuis la fin de la guerre civile en 1992, il est la première personne à accéder à la tête du pays sans appartenir à aucun des deux principaux partis salvadoriens (ARENA et FMLN). Élu à l'âge de 37 ans, il est alors la plus jeune personne à être élue chef d'État sur le continent américain depuis Alan García, élu en 1985 à la tête du Pérou à l'âge de 36 ans[13].

Réélection

[modifier | modifier le code]

En septembre 2021, la Cour suprême de justice juge légale la candidature d'un président à sa réélection immédiate, malgré son interdiction par la Constitution de 1983, réaffirmée par un jugement en 2014 confirmant l'obligation pour un président d'attendre au minimum la durée de deux mandats présidentiels avant de se représenter. En 2023, la cour juge cependant légale cette pratique dans le cas où le président cèderait auparavant ses fonctions à son vice-président avant la tenue du scrutin. La décision est vivement critiquée par l'opposition, qui la qualifie d'inconstitutionnelle[14]. Cette nouvelle jurisprudence permet à Nayib Bukele d'annoncer le 26 octobre 2023 être candidat à sa réélection avec son vice-président, Félix Ulloa[15]. Il obtient le 30 novembre par une décision de l'Assemblée nationale — votée par 67 voix pour et 11 contre — de confier temporairement ses pouvoirs à Claudia Rodríguez de Guevara, qui devient ainsi présidente par intérim le lendemain sans que Bukele ne démissionne lui même[16],[17].

Plébiscité pour sa lutte contre les gangs, il remporte l'élection présidentielle du 4 février 2024 dès le premier tour : il obtient 84,65 % des voix contre 6,40 % à Manuel Flores (FMLN) et 5,57 % à Joel Sánchez (ARENA). En parallèle, Nouvelles Idées remporte 54 des 60 sièges à l'Assemblée lors des élections législatives organisées le même jour. Bukele prête serment le 2 juin pour un second mandat. A cette occasion, il déclare qu'après un premier mandat focalisé sur la guerre contre les gangs, le second sera quant à lui consacré à l'amélioration de l'économie salvadorienne[18].

Politique sécuritaire

[modifier | modifier le code]

Nayib Bukele met sur pied en 2019 un « plan de contrôle territorial » visant à confier à l'armée des tâches de sécurité publique dans les quartiers aux mains des organisations criminelles[19], tandis qu'un accord conclu entre la MS-13 et Barrio 18, les principales maras du pays, aurait conduit à une diminution des règlements de compte dans le pays[9]. Le président salvadorien met en avant la baisse de 2 398 meurtres en 2019 à 1 147 en 2021[20], soit un taux d'homicides de 17,6 pour 100 000 habitants, le plus faible depuis des décennies[19]. La politique très répressive envers le crime organisé voit le taux d'homicide au Salvador passer de 51 pour 100 000 en 2018, avant son arrivée au pouvoir, à 2,5 pour 100 000 en 2023, ce qui vaut à Bukele une popularité record de 92 % d'opinions favorables cette année-là[21].

Le site d'investigation El Faro indique en que Nayib Bukele négocie secrètement depuis un an un accord avec le plus puissant gang du pays, la Mara Salvatrucha. Le journal El País estime que la baisse des homicides dans le pays n'est pas due à la politique sécuritaire du gouvernement mais « à un échange de bons services » : en contrepartie d'un assouplissement des conditions de détention de ses membres et d'autres promesses, le gang se serait engagé à réduire le nombre d'assassinats et à soutenir la formation politique de Nayib Bukele lors des élections[22]. Nayib Bukele a démenti avec vigueur et annoncé peu après l'ouverture d'une enquête pour « une grave affaire de blanchiment d'argent » concernant le média en ligne El Faro. Il a également été accusé par Laura Andrade, la directrice de l'Institut sur l'opinion publique de l'Université centroaméricaine, d'essayer d'« affaiblir » plusieurs titres de presse indépendante (notamment la revue Factum, le quotidien La Prensa Grafica et la revue Gato Encerrado, selon Oscar Martinez, l'un des directeurs d'El Faro) et ONG critiques envers son gouvernement[23].

Pour Jeannette Aguilar, consultante sur les thèmes de sécurité et justice, les discours du président relèvent du « marketing médiatique », affirmant que « Bukele se présente comme l'homme fort qui soumet les criminels, mais lorsqu'il était maire de la capitale, il avait conclu des accords avec les gangs pour gouverner en paix[8]. »

La trêve entre les gangs criminels et le gouvernement est rompue en mars 2022 avec une vague de 87 assassinats en seulement trois jours. En réaction, Nayib Bukele déclare la « guerre contre les gangs » et décréte le régime d'exception qui autorise des arrestations sans mandat judiciaire. Près de 70 000 personnes (en date de juin 2023) ont été arrêtées dans ce cadre, hissant le Salvador au rang de pays affichant le plus haut taux de détention au monde (estimé à 1 086 personnes pour 100 000 habitants par le World Prison Brief et à 1 220 pour 100 000 habitants par La Prensa Gráfica, le journal le plus important du Salvador). Selon l'ONG salvadorienne Cristosal, des milliers d'innocents se trouvent parmi les détenus et des dizaines de personnes sont mortes à cause des violences subies lors de leur interrogatoire. « La plupart des arrestations sont arbitraires. Il n'y a pas eu d'enquête préalable ni de mandat d'arrêt », indique l'ONG[24]. Selon l'ONG Socorro Jurídico Humanitario, sur les 83 100 personnes arrêtées en dehors de toute procédure régulière depuis mars 2022, au moins 30 000 sont innocentes. Bukele conteste ce chiffre, l'estimant « inventé » par des « organisations de gauche »[25]. Le 12 novembre 2024, il concède toutefois : « Évidemment, les opérations ne sont pas parfaites et, bien, sans aucune intention de nuire à une personne innocente, des innocents sont évidemment capturés, de la même manière qu'ils le sont en France, en Allemagne et au Japon et dans tous les pays du monde et nous les libérons. Nous avons déjà libéré 8 000 personnes et nous allons libérer 100 % des innocents »[26].

En janvier 2023 est inauguré le Centre de confinement du terrorisme (CECOT), une gigantesque prison pour 40 000 détenus. En dépit des critiques des ONG de défense des droits de l'homme pour les abus commis, la « guerre contre le crime » vaut au président Bukele une « écrasante popularité »[27]. L'ensemble des organisations civiles et internationales, dont Amnesty International et le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCR), dénoncent des détentions arbitraires, tortures et mauvais traitements infligés dans les centres de détention[24].

Le taux d'homicides dans le pays chute à un niveau historiquement bas de 7,8 pour 100 000 habitants en 2022[28]. Pour autant, son bilan en matière de sécurité publique est à nuancer. Son administration a modifié la publication des chiffres des homicides pour en exclure les corps trouvés dans des fosses communes clandestines. Le nombre de disparus, en hausse constante depuis 2018, dépasse le nombre d'homicides, ce qui suggère que la diminution réelle des meurtres pourrait être significativement moins importante que celle mise en avant par les chiffres officiels[19]. D'autre part, le Salvador connaissait avant même l'arrivée de Nayib Bukele au pouvoir une très forte baisse de la criminalité, avec une chute du taux d'homicides pour 100 000 habitants de 103 en 2015 à 36 en 2019[28].

Tensions avec le parlement

[modifier | modifier le code]

À ses débuts, il doit composer avec une Assemblée législative, le parlement monocaméral du pays, dominée par des partis de droite[29],[30]. Le , alors que les députés ne sont pas suffisamment nombreux pour approuver un emprunt de 109 millions de dollars auprès de la Banque centraméricaine d'intégration économique (en) pour financer son programme sécuritaire, il se rend à l'Assemblée législative, où ses partisans sont en minorité, accompagné par des militaires équipés de fusils et gilets pare-balles pour intimider les parlementaires et les somme d'approuver sa décision, et appelle à « l'insurrection populaire ». Installé à la tribune, le président menace alors de dissoudre l'assemblée avant d'éclater en sanglots et d'effectuer une brève prière. Annonçant solennellement avoir entendu Dieu lui parler pour l'encourager à faire preuve de patience, il renonce à dissoudre l'assemblée, puis s'adresse à une foule de partisans aux portes du bâtiment dans un discours enflammé où il décrit les députés comme des « voleurs et des scélérats »[31],[32]. S'ensuit une vague de désapprobation : « Le déploiement policier et militaire au sein de l'Assemblée législative nous rappelle les époques les plus sombres de l'histoire du Salvador », réagit Amnesty International[9].

Composition de l'Assemblée législative à la suite des élections de 2021 :

En vue des élections législatives de février 2021, Nayib Bukele porte en avant son parti récemment créé, Nouvelles Idées (N ou NI), dirigé par son cousin Xavier Zablah Bukele. Ce dernier se retrouve rapidement en tête des sondages avant de largement creuser l'écart avec ses concurrents, une situation inédite dans un pays dominé depuis des décennies par l'Alliance républicaine nationaliste (ARENA) et le Front Farabundo Martí de libération nationale (FMLN). Dans un contexte de participation en hausse (50,3 %), NI l'emporte avec 66,5 % des suffrages exprimés, obtenant 56 des 84 sièges de députés à pourvoir.

Tournant autoritaire

[modifier | modifier le code]

À la suite de cette victoire, les autorités prennent une série de décisions interprétées comme une dérive autoritaire : les membres de la Cour suprême et le procureur général sont révoqués et remplacés par des fidèles du président, les juges âgés de plus de soixante ans sont mis à la retraite[33], la commission anti-corruption mise en place par l'Organisation des États américains est dissoute, des ministres appartenant à l'ancien gouvernement sont arrêtés et la Constitution est amendée afin de permettre au président d'effectuer plusieurs mandats[34].

Le 11 janvier 2023, le gouvernement salvadorien ordonne l'arrestation de cinq figures de la lutte contre les mines et la défense de l'eau, qui avaient joué un rôle de premier plan dans la campagne pour l'interdiction minière de 2017. Sous l'administration de Bukele, le Salvador semble proche d'annuler l'interdiction minière et a rejoint le Forum intergouvernemental sur l'exploitation minière financé par le gouvernement canadien et a adopté une loi pour créer une Direction générale de l'énergie, des hydrocarbures et des mines [35].

Les journalistes des médias El Faro, Revista Factum, Gato Encerrado ou La Prensa Gráfica sont visés par le gouvernement : trente-cinq d'entre eux ont fait l'objet d'espionnage avec le logiciel Pegasus. La rédaction d'El Faro est contrainte de s'exiler au Costa Rica pour échapper aux pressions. La « loi bâillon », votée en avril 2022, punit de quinze ans de prison quiconque transmettra des messages « susceptibles de générer anxiété et panique au sein de la population ». Toutes les informations publiques sont classées « secrets d'État ». Qu'il s'agisse des statistiques sur les homicides, les féminicides, les disparitions, les achats de bitcoins ou de la politique de santé[36].

De forts soupçons de corruption pèsent sur son gouvernement sans qu'aucune enquête ne soit menée. La Commission internationale de lutte contre l'impunité au Salvador (Cicies), mise en place par Bukele lui-même en 2019, est démantelée en 2021 par les autorités après avoir révélé au moins douze affaires touchant des membres du gouvernement[36].

Politique économique

[modifier | modifier le code]

Divers économistes ont pointé la faiblesse des politiques du gouvernement salvadorien dans ce domaine. Aucune véritable politique visant à combattre la pauvreté, les inégalités et l'absence d'accès aux services de base n'a été mise sur pied au cours du premier mandat de Nayib Bukele. La pauvreté a augmenté entre 2019 et 2022, plus de la moitié de la population ne mange pas à sa faim et le Salvador présente, en 2023, le taux de croissance économique le plus bas d'Amérique centrale (1,6 %)[37],[24].

Cryptomonnaies

[modifier | modifier le code]

Nayib Bukele fait en septembre 2021 du bitcoin la monnaie officielle au Salvador au même titre que le dollar américain. Les autorités mettent en place un premier fonds de 150 millions de dollars afin de garantir la convertibilité automatique du bitcoin en dollars, font installer quelque 200 distributeurs automatiques permettant d'échanger des bitcoins et lancent une application devant permettre de procéder à des paiements ou virements en bitcoins. Ses usagers recevront une prime de l'équivalent de 30 dollars en bitcoins[38]. Le Fonds monétaire international (FMI) a cependant mis en garde le gouvernement salvadorien contre les risques du bitcoin : « Compte tenu de la haute volatilité du bitcoin, son utilisation en tant que monnaie officielle génère des risques importants pour la protection du consommateur, pour l'intégrité du système financier et pour la stabilité financière[39]. » L'opposition de gauche manifeste contre cette décision[40].

Le président Bukele annonce en novembre 2021 la création à venir d'une Bitcoin City, qui constituerait une zone économique spéciale avec des avantages fiscaux pour les investisseurs[41]. Il explique que « zones résidentielles, zones commerciales, services, musées, divertissements, bars, restaurants, aéroport, port, chemin de fer – tout [sera] consacré au bitcoin », et que toutes les taxes autres que la TVA seront supprimées dans la ville. Le gouvernement prévoit d'émettre une obligation d'un milliard de dollars en 2022 pour financer le projet. La moitié des fonds sera convertie en bitcoins et l'autre moitié sera utilisée pour les infrastructures et le minage de bitcoins. La ville, dont la forme circulaire évoquera une pièce de monnaie, s'élèvera dans l'est du pays et recevra son approvisionnement énergétique du volcan de Conchagua, lequel devrait fournir l'énergie nécessaire aux activités de minage, très énergivores[39].

En 2023, cette politique apparaît comme un échec. Dans la capitale, presque aucun commerce n'accepte les paiements en cryptomonnaie, et seuls 2 % des transferts effectués par la diaspora sont passés par ce biais. En outre, face à la chute du cours du bitcoin, les fonds publics que le gouvernement détiendrait dans la cryptomonnaie ont perdu plus de la moitié de leur valeur initiale. Lors d'un entretien accordé à la chaîne américaine Fox News, en novembre 2022, Nayib Bukele soutient que l'adoption du bitcoin était avant tout une opération de communication destinée à améliorer l'image du pays à l'international[24].

En 2024, la trésorerie en bitcoins du gouvernement se serait appréciée de 40%[42].

Politique étrangère

[modifier | modifier le code]
Nayib Bukele et le président américain Donald Trump le .

Peu après son investiture, Nayib Bukele rompt les relations diplomatiques avec le Venezuela, expulse les diplomates vénézuéliens et reconnaît l'opposant Juan Guaidó comme nouveau président de ce pays. Sa décision est saluée par l'ambassade des États-Unis[43].

Il rompt aussi les relations avec la République sahraouie, refuse l'ouverture d'une ambassade palestinienne et supprime les programmes cubains d'aide médicale[44].

Ses rapports avec les États-Unis se détériorent en 2021, à la suite d'un rapprochement commercial avec la Chine, qui a procuré au Salvador des vaccins contre la covid-19 et une aide économique. Les autorités américaines publient en réaction une liste de « fonctionnaires corrompus » appartenant à l'entourage de Nayib Bukele, incluant notamment son chef de cabinet, l'ancien ministre de la Sécurité et le président du parti GANA[45].

Style, communication et popularité

[modifier | modifier le code]

Décrit comme un excellent communicant, Nayib Bukele était, avant de faire son entrée en politique, à la tête de l'entreprise publicitaire fondée par son père, Obermet, qui organisait des campagnes électorales pour le compte de partis politiques[24].

Il fait une campagne présidentielle « post-idéologique » en 2019, dénonçant la corruption et les partis politiques traditionnels, tout en bénéficiant d'une image jeune et irrévérencieuse[34].

S'il souffre d'une mauvaise image à l'international[46],[47],[48], Nayib Bukele demeure le président le plus populaire de l'histoire du Salvador[49] avec un taux de popularité qui se maintient généralement autour de 90 % d'opinions positives[50],[51].

À l'instar du président américain Donald Trump, il communique essentiellement sur les réseaux sociaux[13], ce qui lui vaut le surnom de « président Millenium »[52],[53]. Il se démarque notamment par son utilisation de Twitter lors de la campagne pour l'élection présidentielle de 2019[54]. Il reste, après son élection, particulièrement actif sur les réseaux sociaux[24].

La presse internationale est généralement séduite par sa communication, voyant en lui un « candidat antisystème » ou encore « un nouveau Macron ». Le Washington Post salue son positionnement « non idéologique » et son tempérament « rafraîchissant »[24].

En matière de communication non verbale, il se démarque de ses prédécesseurs en dérogeant régulièrement à la tradition du costume. Bukele apparaît ainsi souvent dans les instances gouvernementales avec un style décontracté (jeans, t-shirt, débardeur) afin que les citoyens s'identifient à lui par son apparence[53]. El País América relève à son sujet en 2021 : « Véritable président du XXIe siècle proche du peuple, selon ses partisans, provocateur qui distille un discours de haine, selon ses opposants, Nayib Bukele est un personnage clivant qui a bouleversé la politique salvadorienne en moins de deux ans. Et bénéficie d'un taux de popularité unique dans l'histoire du pays[13]. »

Il bénéficie d'une popularité évaluée entre 70 et 92 %[36], un niveau record sur le continent américain[37]. Il s'auto-proclame ironiquement le « dictateur le plus cool du monde »[55]. Alors que, par le passé, les présidents du Salvador étaient inconnus à l'échelle internationale, Nayib Bukele inspire au-delà des frontières de son pays. De nombreux dirigeants politiques d'Amérique latine promettent ainsi de reproduire dans leur pays ses politiques sécuritaires[24].

Prises de position

[modifier | modifier le code]

Souvent considéré comme un libéral-conservateur, Nayib Bukele est présenté comme ni de droite ni de gauche par El País América[13].

Il défend des conceptions économiques plutôt libérales, estimant que « plus d'impôts [signifie] moins d'opportunités » et indiquant ne pas être « en faveur de la réduction des libertés économiques. » Il considère que la pauvreté doit être combattue au moyen de mesures de lutte contre la corruption (« il y a assez d'argent quand personne ne vole ») plutôt que par la mise en œuvre de politiques redistributives[56].

Sur le plan sociétal, il est opposé au mariage homosexuel et à l'avortement, à l'exception du cas où la vie de la mère est en danger[57].

Notes et références

[modifier | modifier le code]
  1. Du au , Claudia Rodríguez de Guevara assure les fonctions présidentielles par intérim ; Bukele conserve néanmoins le titre de président.

Références

[modifier | modifier le code]
  1. « Mayor with Palestinian roots becomes president of El Salvador », sur dailysabah.com (consulté le ).
  2. (es) « Así es Nayib Bukele, el presidente más joven (y hipster) de Latinoamérica », sur elmundo.es, (consulté le ).
  3. (es) « Presidente Bukele anuncia el nacimiento de su hija Layla », sur elmundo.sv, (consulté le ).
  4. (es) elmundo.sv, « Polémica por imágenes de Bukele en oración dentro de una mezquita », sur elmundo.sv, (consulté le ).
  5. (es) « Periódico de México filtra foto de candidato de GANA en mezquita », sur laprensagrafica.com (consulté le ).
  6. a et b (es) « Élection municipale de Nuevo Cuscatlán », sur tse.gob.sv, (consulté le ).
  7. « Nayib Bukele, d'origine palestinienne, élu président du Salvador », sur francemaghreb2.fr (consulté le ).
  8. a et b Emmanuelle Steels, « Salvador : Nayib Bukele, un an de populisme punitif et de popularité record », sur libération.fr, .
  9. a b et c François-Xavier Gomez, « Salvador : l'inquiétante dérive du président », sur libération.fr, .
  10. « Salvador : Nayib Bukele, 37 ans, devient le nouveau président », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  11. « Avec Nayib Bukele, le Salvador se choisit à son tour un président «hors-système» », sur libération.fr, (consulté le ).
  12. « Salvador : Nayib Bukele, 37 ans, devient le nouveau président », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  13. a b c et d « Le président Nayib Bukele met le Salvador sens dessus dessous », sur courrierinternational.com, (consulté le ).
  14. RFI, « Salvador: la Cour suprême autorise le président Bukele à se représenter », sur RFI, RFI, (consulté le ).
  15. « Le président Nayib Bukele candidat à sa réélection », sur La Presse, LaPresseFB, (consulté le ).
  16. « Au Salvador, le président Nayib Bukele quitte son poste pour pouvoir préparer sa réélection en 2024 », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  17. « Au Salvador, le président Nayib Bukele quitte son poste pour pouvoir préparer sa réélection en 2024 », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  18. « Au Salvador, Nayib Bukele entame son second mandat avec les pleins pouvoirs et l’économie en mire », sur Le Nouvel Obs, (consulté le ).
  19. a b et c « Au Salvador : « Sans corps, pas de crime » », sur Le Monde diplomatique, (consulté le )
  20. Salvador: Bukele, le président "millenium" devenu en 3 ans chef de guerre anti-crime, lepoint.fr, 1er juin 2022
  21. « SALVADOR : BAISSE DRASTIQUE DU TAUX DE CRIMINALITÉ », sur Magazine Raids, histoirecollections, (consulté le ).
  22. « Criminalité. Salvador : le président Bukele aurait (aussi) négocié avec les gangs », sur courrierinternational.com, .
  23. « Salvador: menacé par la justice, le président Bukele s'attaque à la presse », sur france24.com, .
  24. a b c d e f g et h « Au Salvador, bitcoins, gangs et buzz présidentiel », sur Le Monde diplomatique, (consulté le )
  25. (es) Susana Peñate, « Socorro Jurídico califica de “irresponsables” y “calumniosas” las declaraciones de Bukele », El Diario de Hoy, (consulté le )
  26. (es) Susana Peñate, « Bukele asegura que han liberado a 8,000 personas inocentes capturadas con el régimen », El Diario de Hoy, (consulté le )
  27. Le président salvadorien Bukele vante sa gigantesque prison pour 40 000 criminels présumés, journaldemontreal.com, 1er février 2023
  28. a et b « Salvador. Baisse drastique du taux de criminalité », sur Magazine Raids,
  29. Salvador : le candidat antisystème Nayib Bukele remporte la présidentielle
  30. Salvador: Nayib Bukele l'anti-système remporte la présidence
  31. (es) « Petitions are processed to remove President of Salvador Nayib Bukele », cadenagramonte.cu,‎ (lire en ligne).
  32. « Salvador : les députés de droite mettent en doute la santé mentale du président Nayib Bukele », sur lefigaro.fr, .
  33. AFP, « Crise politique au Salvador après la destitution de juges de la Cour suprême », sur Challenges, (consulté le )
  34. a et b Hilary Goodfriend, « Rien ne va plus au paradis salvadorien du Bitcoin », sur lvsl.fr,
  35. (en) Owen Schalk et Pedro Cabezas / January 21, « El Salvador arrests anti-mining activists as transnational companies eye investment », sur canadiandimension.com (consulté le )
  36. a b et c « Le Salvador sous l'emprise du « système Bukele » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  37. a et b « Salvador: Nayib Bukele, président depuis 4 ans d'un pays économiquement à la dérive », sur RFI, (consulté le )
  38. « Au Salvador, des centaines d'opposants au bitcoin comme monnaie légale dans la rue », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
  39. a et b « Le Salvador annonce la construction d'une « Bitcoin City » », sur www.20minutes.fr,
  40. « Cryptomonnaie. L'adoption du bitcoin comme monnaie officielle divise le Salvador », sur Courrier international,
  41. « À la Une: fin de campagne minée par la violence au Honduras », sur RFI,
  42. Rémy R, « Les réserves en Bitcoin du Salvador se sont appréciées de +40% selon Nayib Bukele », sur Journal du Coin, (consulté le )
  43. (en-GB) « El Salvador expels Maduro's Venezuela diplomats », BBC News,‎ (lire en ligne).
  44. (en-US) « El Salvador's Democracy Was Hard-Won. Now President Nayib Bukele Threatens It. », sur jacobin.com
  45. (es) « El Salvador firma millonario acuerdo de cooperación con China y se pone en la mira de EE. UU. », sur eluniverso.com, (consulté le ).
  46. (en-US) Brendan O'Boyle, « Behind Nayib Bukele's "Shocking" Turn », sur Americas Quarterly, (consulté le )
  47. (en-US) Natalie Kitroeff, « Young Leader Vowed Change in El Salvador but Wields Same Heavy Hand », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  48. Emily Crane, « El Salvador's president declares himself world's "coolest dictator" », sur New York Post, (consulté le )
  49. (en) Eddie Galdámez, « Nayib Bukele Approval Rating. Majority of Salvadorans approve of Bukele », sur elsalvadorinfo.net, El Salvador Info, (consulté le )
  50. Kate Linthicum, « El Salvador's Millennial President is a Man with One Vision: Power », sur Los Angeles Times, (consulté le )
  51. Eddie Galdámez, « Despite Claims of Authoritarianism, President Bukele's Popularity Continues to be Strong in El Salvador », sur Global Voices, (consulté le )
  52. « Salvador: le président Bukele s'affuble du nom de «dictateur» sur Twitter », sur LEFIGARO, (consulté le )
  53. a et b (en-US) « El Salvador's president is remaking the government's social media in his image », sur Rest of World, (consulté le )
  54. https://revistas.unav.edu/index.php/communication-and-society/article/view/39038/34141 The communications strategy via Twitter of Nayib Bukele: the millennial president of El Salvador]
  55. « La rédaction – Nayib Bukele, le «dictateur le plus cool du monde» », sur 24 heures (consulté le )
  56. (en-US) « El Salvador's New Savior », sur upsidedownworld.org, .
  57. (es) Claudia Marín, « Nuevo presidente de El Salvador se opone al matrimonio igualitario y al aborto », sur elmundo.cr, (consulté le ).

Liens externes

[modifier | modifier le code]