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Émile Henry
Biographie
Naissance
Décès
Pseudonyme
Louis DuboisVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activités
Écrivain, anarchiste, terroriste anarchisteVoir et modifier les données sur Wikidata
Père
Mère
Fratrie
Parentèle
Augustine Agoust (d) (neveu)Voir et modifier les données sur Wikidata

Émile Henry (Barcelone, - Paris, ) est un anarchiste et criminel français, guillotiné pour avoir commis plusieurs attentats, dont le dernier visait les clients d'un café.

Jeunesse et études

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Son père, Fortuné Henry, s'était battu dans les rangs des communards. Condamné à mort par contumace, il avait réussi à échapper à la répression qui suivit la défaite en se réfugiant en Espagne où naquirent ses deux fils. Il n'était revenu en France qu'en 1880 après l'amnistie[1].

La mère d'Émile Henry, Rose Caubet[2], était aubergiste, à l’enseigne À l’Espérance[3]. Son frère Jean-Charles Fortuné Henry, lui aussi militant anarchiste, collabora au journal L’En-dehors et fonda en 1903 la colonie libertaire d'Aiglemont.

Emile poursuit des études brillantes comme boursier à l'école Jean-Baptiste-Say, où l'un de ses professeurs le dépeint comme « un enfant parfait, le plus honnête qu'on puisse rencontrer ». Promis à une brillante carrière, il suit des études scientifiques en classes préparatoire et est admissible à l'École polytechnique[3]. Il décide de ne pas se présenter à l'oral du concours d'entrée, et justifie son choix auprès de ses professeurs en arguant tout d'abord d'une réticence à embrasser une carrière militaire, ainsi que par l'opportunité offerte par un membre de sa famille, riche industriel, qui lui a proposé de devenir son secrétaire particulier[1].

Attentat de la rue des Bons-Enfants
8 novembre 1892.
Attentat du café Terminus
12 février 1894.

Le mardi , une bombe destinée à faire sauter les bureaux de la compagnie des mines de Carmaux est amenée par le concierge du bâtiment au commissariat de police du 1er arrondissement de Paris, sis 21, rue des Bons-Enfants. Elle y explose, tuant Étienne Fomorin, Marc Réaux, Henri Pousset et Charles Troutot, tous les quatre policiers ; une cinquième personne, Raymond Garin, garçon de recettes à la Compagnie des Mines de Carmaux[4] ; puis une sixième personne, le sous-brigadier Émile Henriot est victime d'une crise cardiaque en entrant sur les lieux du drame[5],[6].

Cette action a d'ailleurs donné lieu à une chanson de Marc Lemonnier et Guy Debord : La Java des Bons-Enfants[7].

Fin 1892, Emile loue un appartement villa Faucheur dans le 20e arrondissement de Paris sous le nom d'emprunt de Louis Dubois ; il y prépare ses prochains attentats. Le , à 9 heures du soir, un garçon blond pénètre dans le café Terminus, à la gare Saint-Lazare. S'étant assis à un guéridon libre, Henry tira soudain d'une poche de son paletot une petite marmite de fer blanc bourrée d'explosifs et la lança en l'air[6]. Elle se heurta à un lustre, éclata et pulvérisa toutes les glaces ainsi que quelques tables de marbre. Ce fut un sauve-qui-peut général. Il y eut une vingtaine de blessés dont un succomba à ses blessures. Émile Henry prit la fuite, poursuivi par un agent de police et un garçon de café, auxquels se joignit un cheminot sur lequel il tira mais le manqua. Un peu plus loin, il blessa sérieusement un agent, l’agent Poisson, avant de se faire prendre.

Arrestation d'Emile Henry (Le Petit Parisien illustré du 25 février 1894)

Ses actes sont loin de faire l’unanimité parmi les anarchistes. Ainsi, Élisée Reclus déclare que « Tous les attentats dans le genre de celui du Terminus, les vrais compagnons les considèrent comme des crimes[6]. »

Interrogatoire d'Émile Henry.
Henry et son avocat, Me Hornbostel (gravure d'après Régamey).
Portrait de sa mère Rose Caubet, par le journaliste et dessinateur Maurice Feuillet en mai 1894

Le , Émile Henry comparaît devant la cour d'assises de la Seine. Henri-Robert ayant refusé d'assurer sa défense, celle-ci est confiée à un jeune avocat récemment arrivé de Marseille, Nicolas Hornbostel.

À l'audience de la cour d'assises, Henry eut de cinglantes répliques : le président de la cour d'assises. – « Vous avez tendu cette main […] que nous voyons aujourd'hui couverte de sang. » Émile Henry. – « Mes mains sont couvertes de sang, comme votre robe rouge. »

Un juge lui reprochant de s'en être pris à des innocents lors de son attentat contre le café Terminus, l'accusé répliqua : « Il n'y a pas de bourgeois innocents[8] ! »

Au jury, il lut une déclaration célèbre (cf. ci-dessous).

« […] Je suis anarchiste depuis peu de temps. Ce n'est guère que vers le milieu de l'année 1891 que je me suis lancé dans le mouvement révolutionnaire. Auparavant, j'avais vécu dans les milieux entièrement imbus de la morale actuelle. J'avais été habitué à respecter et même à aimer les principes de Patrie, de Famille, d'Autorité et de Propriété.
Mais les éducateurs de la génération actuelle oublient trop fréquemment une chose, c'est que la vie, avec ses luttes et ses déboires, avec ses injustices et ses iniquités, se charge bien, l'indiscrète, de dessiller les yeux des ignorants et de les ouvrir à la réalité
[…] Il me suffira de dire que je devins l'ennemi d'une société que je jugeais criminelle
[…] Dans cette guerre sans pitié que nous avons déclarée à la bourgeoisie, nous ne demandons aucune pitié. Nous donnons la mort et nous devons la subir. C'est pourquoi j'attends votre verdict avec indifférence. Je sais que ma tête ne sera pas la dernière que vous couperez […]. Vous ajouterez d'autres noms à la liste sanglante de nos morts
[…] vous n'avez pas pu détruire l'Anarchie. Ses racines sont profondes : elle est née au sein d'une société pourrie qui s'affaisse ; elle est une réaction violente contre l'ordre établi ; elle représente les aspirations d'égalité et de liberté qui viennent battre en brèche l'autoritarisme actuel. Elle est partout. C'est ce qui la rend indomptable, et elle finira par vous vaincre et par vous tuer. »

« J’aime tous les hommes dans leur humanité et pour ce qu’ils devraient être, mais je les méprise pour ce qu’ils sont. »

Il est condamné à mort. En sortant, il s'écrie : « Camarades, courage ! Vive l'anarchie. »[Note 1].

Exécution d'Émile Henry
21 mai 1894.
Inhumation factice d'Émile Henry
au cimetière d'Ivry.

Il fut guillotiné le , par l'exécuteur Louis Deibler, à l’âge de 21 ans. Assistèrent à son exécution Maurice Barrès et Georges Clemenceau qui, bien que tous deux peu suspects de sympathie pour l'anarchisme, se montrèrent émus du sort du jeune homme. La foule salua le fourgon qui transportait le corps d'Émile Henry ainsi que le relata le même Barrès dans l'édition du journal Le Matin du .

Opposé à la peine de mort, Clemenceau écrira à son sujet : « Je sens en moi l'inexprimable dégoût de cette tuerie administrative, faite sans conviction par des fonctionnaires corrects. […] Le forfait d'Henry est d'un sauvage. L'acte de la société m'apparaît comme une basse vengeance[9]. »

Maurice Barrès l'évoque ainsi : « J'ai regardé mourir Émile Henry ; je fus le seul, je crois à lui sauver l'honneur, en affirmant comme j'avais vu, qu'il était mort avec une âme brave dans un corps qui claquait de froid. Mais si j'avais détourné la tête ou si j'avais menti ? Le pauvre exalté demeurait sans honneur[10]. »

Il fut inhumé le jeudi au cimetière de Brévannes (aujourd'hui Limeil-Brévannes)[11]

Notes et références

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  1. Son procès est suivi, en particulier, par le journaliste et dessinateur de croquis d'audience Maurice Feuillet. Ses croquis sont publiés dans l'hebdomadaire d'actualité L'Univers illustré (texte en ligne sur Gallica).

Références

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  1. a et b Badier 2010, p. 161.
  2. Gauthier Langlois, « Caubet Rose [épouse Henry] », sur Le Maitron, (consulté le ).
  3. a et b Jean Birnbaum, « Le terrorisme à visage humain », Le Monde des livres, 10 juillet 2009, p. 1 et 6.
  4. Archives de Paris en ligne, actes de décès des victimes dressés à Paris 1er le 10/11/1892, vue 16/31.
  5. Le Petit Parisien, 11/11/1892, image BNF Gallica.
  6. a b et c « Anarchistes au XIXe siècle : la propagande par le fait », paris-luttes.info, (consulté le ).
  7. "La java des bons enfants" (circa 1960). Du temps des cerises aux feuilles mortes.
  8. André Salmon, La Terreur noire : chronique de l'action anarchiste, Jean-Jacques Pauvert éditeur, 1959.
  9. Michel Winock, Clemenceau, éditions Perrin, septembre 2007, cité p. 222.
  10. Les Amitiés françaises, Paris, éditions Émile-Paul-Frères, 1918, p. 250-251.
  11. « Le Petit Journal 26 mai 1894 », sur RetroNews - Le site de presse de la BnF (consulté le )

Sources primaires

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Bibliographie

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Vidéographie

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Articles connexes

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Liens externes

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