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« Unification allemande » : différence entre les versions

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=== L'occupation française pendant la Révolution et l' Empire sert de catalyseur au sentiment national ===
=== L'occupation française pendant la Révolution et l' Empire sert de catalyseur au sentiment national ===
Le sentiment national allemand est né au XVIIIe siècle chez les ''Akademiker'', « ceux qui sont allés à l'université », c'est à dire les fonctionnaires importants et les pasteurs luthériens. Ceci explique le développement d'un nationalisme allemand à caractère protestant, qui se veut éclairé, face à l'empire des [[Habsbourg]] catholique et perçu comme obscurantiste. Avec la [[Révolution française]], le sentiment national, à l'origine l'apanage des intellectuels, se popularise. L'annexion de la [[Rhénanie]] par la France est perçue comme un amputation du territoire national. En 1803, le premier consul, [[Napoléon Bonaparte]] réorganise le Saint Empire qui passe de plus de 300 états à une centaine. Toutes les principautés ecclésiastiques sont supprimées. Le août 1806, le dernier empereur du [[Saint Empire romain germanique]], [[François II]], se soumet à un ultimatum de [[Napoléon Ier]]. Il renonce à la couronne impériale et délie tous les Etats allemands de leur fidélité.<ref>http://www.tatsachen-ueber-deutschland.de/fr/lhistoire/main-content-03/la-fin-de-la-question-allemande.html</ref>
Le sentiment national allemand est né au XVIIIe siècle chez les ''Akademiker'', « ceux qui sont allés à l'université », c’est-à-dire les fonctionnaires importants et les pasteurs luthériens. Ceci explique le développement d'un nationalisme allemand à caractère protestant, qui se veut éclairé, face à l'empire des [[Habsbourg]] catholique et perçu comme obscurantiste. Avec la [[Révolution française]], le sentiment national, à l'origine l'apanage des intellectuels, se popularise. L'annexion de la [[Rhénanie]] par la France est perçue comme un amputation du territoire national. En 1803, le premier consul, [[Napoléon Bonaparte]] réorganise le Saint Empire qui passe de plus de 300 états à une centaine. Toutes les principautés ecclésiastiques sont supprimées. Le août 1806, le dernier empereur du [[Saint Empire romain germanique]], [[François II]], se soumet à un ultimatum de [[Napoléon Ier]]. Il renonce à la couronne impériale et délie tous les Etats allemands de leur fidélité.<ref>http://www.tatsachen-ueber-deutschland.de/fr/lhistoire/main-content-03/la-fin-de-la-question-allemande.html</ref>
Sous l'Empire, les armées françaises présentes sur le territoire vivent de requisitions. Le [[blocus continental]] limite les échanges commerciaux même si il permet le développement de la production de charbon dans la [[Ruhr]] en remplacement des importations anglaises.
Sous l'Empire, les armées françaises présentes sur le territoire vivent de requisitions. Le [[blocus continental]] limite les échanges commerciaux même si il permet le développement de la production de charbon dans la [[Ruhr]] en remplacement des importations anglaises.
[[Image:Johann_Gottlieb_Fichte.jpg|200 px|thumb|Fichte]]
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''"Pour les ancêtres germains, la liberté consistait à rester Allemands, (...) C'est à eux, à leur langue et à leur manière de penser que nous sommes redevables, nous, les plus directs héritiers de leur sol, d'être encore des Allemands (...) C'est à eux que nous sommes redevables de tout notre passé national et, s'il n'en est pas fini de nous, tant qu'il restera dans nos veines une dernière goutte de leur sang, c'est à eux que nous devrons tout ce que nous serons à l'avenir."''.<ref>Fichte, Discours à la nation allemande,, 8e discours.</ref>
''"Pour les ancêtres germains, la liberté consistait à rester Allemands, (...) C'est à eux, à leur langue et à leur manière de penser que nous sommes redevables, nous, les plus directs héritiers de leur sol, d'être encore des Allemands (...) C'est à eux que nous sommes redevables de tout notre passé national et, s'il n'en est pas fini de nous, tant qu'il restera dans nos veines une dernière goutte de leur sang, c'est à eux que nous devrons tout ce que nous serons à l'avenir."''.<ref>Fichte, Discours à la nation allemande,, 8e discours.</ref>


L'idée que le peuple allemand s'est soudé dans une histoire est une lutte commune est très présente dans ses discours. Il souligne aussi combien le [[luthéranisme]] est enraciné dans la mentalité allemande : « seul il pourra lutter contre l'obscurantisme » romain, c'est à dire la religion catholique. Reprenant les termes de [[Herder]], il insiste sur l'importance de la langue comme ciment de l'identité allemande.
L'idée que le peuple allemand s'est soudé dans une histoire est une lutte commune est très présente dans ses discours. Il souligne aussi combien le [[luthéranisme]] est enraciné dans la mentalité allemande : « seul il pourra lutter contre l'obscurantisme » romain, c’est-à-dire la religion catholique. Reprenant les termes de [[Herder]], il insiste sur l'importance de la langue comme ciment de l'identité allemande.


L'anéantissement de la grande armée lors de la retraite de [[Russie]] provoque une guerre de libération qui s'achève avec le retrait français en novembre 1813 après la défaite de [[Leipzig]]. De nombreux pamphlets réclament alors la fondation d'un État allemand groupant tous les peuples parlant l'allemand. Ainsi apparaît la notion de ''Volkstum'', l'union de tous les hommes de même langue, de même culture.
L'anéantissement de la grande armée lors de la retraite de [[Russie]] provoque une guerre de libération qui s'achève avec le retrait français en novembre 1813 après la défaite de [[Leipzig]]. De nombreux pamphlets réclament alors la fondation d'un État allemand groupant tous les peuples parlant l'allemand. Ainsi apparaît la notion de ''Volkstum'', l'union de tous les hommes de même langue, de même culture.
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=== 1848 ou l'échec de l'unité allemande par la volonté des peuples ===
=== 1848 ou l'échec de l'unité allemande par la volonté des peuples ===


En [[1848]], à la nouvelle des révolutions parisiennes et viennoises, l'Allemagne s'embrase. Les révolutionnaires soutiennent des revendications d'unité nationale, de liberté et de démocratie. Quelques patriotes réunis à [[Heidelberg]], dans le duché de Bade décrètent l'élection d'une assemblée constituante élue au suffrage universel et concernant tous les Allemands. L'assemblée se réunit à [[Francfort]] et décide en janvier 1849 de transformer la confédération germanique en un Etat fédéral avec un empereur à sa tête. Pour les députés, les autrichiens germanophones doivent faire partie de cette union. C'est sans compter sur la [[Prusse]] qui ambitionne de réaliser l'unité allemande à son profit et suscite un parti de la ''petite Allemagne'', c'est à dire sans l'Autriche, qui emporte finalement la décision.
En [[1848]], à la nouvelle des révolutions parisiennes et viennoises, l'Allemagne s'embrase. Les révolutionnaires soutiennent des revendications d'unité nationale, de liberté et de démocratie. Quelques patriotes réunis à [[Heidelberg]], dans le duché de Bade décrètent l'élection d'une assemblée constituante élue au suffrage universel et concernant tous les Allemands. L'assemblée se réunit à [[Francfort]] et décide en janvier 1849 de transformer la confédération germanique en un Etat fédéral avec un empereur à sa tête. Pour les députés, les autrichiens germanophones doivent faire partie de cette union. C'est sans compter sur la [[Prusse]] qui ambitionne de réaliser l'unité allemande à son profit et suscite un parti de la ''petite Allemagne'', c’est-à-dire sans l'Autriche, qui emporte finalement la décision.
[[Image:Maerz1848_berlin.jpg|300 px|thumb|La révolution de 1848, dite révolution de mars à Berlin]]
[[Image:Maerz1848_berlin.jpg|300 px|thumb|La révolution de 1848, dite révolution de mars à Berlin]]
En tant qu’empereur allemand, Frédéric Guillaume IV, roi de Prusse, ne veut tenir son pouvoir que de lui-même ou de la guerre. Il refuse la couronne que lui propose le parlement de [[Francfort]]. Son discours est très clair à ce propos :
En tant qu’empereur allemand, Frédéric Guillaume IV, roi de Prusse, ne veut tenir son pouvoir que de lui-même ou de la guerre. Il refuse la couronne que lui propose le parlement de [[Francfort]]. Son discours est très clair à ce propos :
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''« Il n’y a pas de place pour deux en Allemagne. Je veux venger l’affront d’Olmütz, je veux abattre l’Autriche. Je veux relever la Prusse et lui donner en Allemagne la situation prépondérante qui lui revient de droit.»''<ref>Pensées et souvenirs par le prince de Bismarck, 1899.</ref>
''« Il n’y a pas de place pour deux en Allemagne. Je veux venger l’affront d’Olmütz, je veux abattre l’Autriche. Je veux relever la Prusse et lui donner en Allemagne la situation prépondérante qui lui revient de droit.»''<ref>Pensées et souvenirs par le prince de Bismarck, 1899.</ref>


C'est [[Guillaume Ier]], roi de Prusse depuis 1861 qui l'appelle au poste de ministre président (premier ministre) en 1862 pour résondre le conflit entre le Landstag, le parlement prussien et le roi au sujet de la réforme de l'armée. Il instaure un gouvernement autoritaire et gouverne pas décret, ce qui permet l'organisation d'une armée nombreuse, efficace et bien armée. En effet, ''"le fer et le sang"'' sont pour Bismarck les moyens de réaliser l'unité allemande par le haut, c'est à dire sans le consentement des peuples.
C'est [[Guillaume Ier]], roi de Prusse depuis 1861 qui l'appelle au poste de ministre président (premier ministre) en 1862 pour résondre le conflit entre le Landstag, le parlement prussien et le roi au sujet de la réforme de l'armée. Il instaure un gouvernement autoritaire et gouverne pas décret, ce qui permet l'organisation d'une armée nombreuse, efficace et bien armée. En effet, ''"le fer et le sang"'' sont pour Bismarck les moyens de réaliser l'unité allemande par le haut, c’est-à-dire sans le consentement des peuples.


La courte [[guerre des Duchés]] en [[1864]] est la première étape de l'unité allemande. Le Schleswig, peuplé d'Allemands et le Holstein, peuplé d'Allemands et de Danois sont des propriétés personnelles du roi du Danemark sans faire partie de son royaume. En 1863, ce dernier les incorpore à son royaume. Ceci entraine une guerre de la Confédération germanique menée par la Prusse et l'Autriche contre le Danemark en 1864. La rapide victoire permet à l'Autriche d'obtenir l'administration du Holstein et à la Prusse celle du Schleswig. Pour Bismack, cet arrangement est provisoire. Il attend le moment propice pour affronter l'Autriche. Après s'être assuré la neutralité bienveillante de la France et l'alliance italienne grâce à l'entremise française, la Prusse multiplie les provocations à l'égard de l'Autriche et, sous un prétexte futile envahit le Holstein.
La courte [[guerre des Duchés]] en [[1864]] est la première étape de l'unité allemande. Le Schleswig, peuplé d'Allemands et le Holstein, peuplé d'Allemands et de Danois sont des propriétés personnelles du roi du Danemark sans faire partie de son royaume. En 1863, ce dernier les incorpore à son royaume. Ceci entraine une guerre de la Confédération germanique menée par la Prusse et l'Autriche contre le Danemark en 1864. La rapide victoire permet à l'Autriche d'obtenir l'administration du Holstein et à la Prusse celle du Schleswig. Pour Bismack, cet arrangement est provisoire. Il attend le moment propice pour affronter l'Autriche. Après s'être assuré la neutralité bienveillante de la France et l'alliance italienne grâce à l'entremise française, la Prusse multiplie les provocations à l'égard de l'Autriche et, sous un prétexte futile envahit le Holstein.

Version du 25 avril 2007 à 18:01

L'unité allemande concerne l'édification de l'unité du peuple allemand sous un même état au XIXe siècle et au XXe siècle. Ce problème est aussi appelé la question allemande. Elle apparait le 6 août 1806, lorsque le dernier empereur du Saint Empire romain germanique, François II, renonce à la couronne impériale. La question allemande est résolue le 3 octobre 1990 quand la République démocratique allemande intègre la République fédérale d’Allemagne. Le problème a duré 184 ans.

La naissance du sentiment national allemand

En Allemagne, a connu au Moyen Âge le Saint Empire romain germanique qui allait en s’affaiblissant et en se fractionnant. Les Traités de Westphalie (1648) mettent fin à la guerre de 30 ans et consacrent la dissolution du Reich en créant des centaines de grandes, petites et mini-principautés. Cette Paix de Westphalie consacre la territorialité comme principe de la souveraineté et de la non-ingérence dans les affaires des autres États. Elle empêche donc la formation d’un État national allemand et territorialement uni.[1]

L'occupation française pendant la Révolution et l' Empire sert de catalyseur au sentiment national

Le sentiment national allemand est né au XVIIIe siècle chez les Akademiker, « ceux qui sont allés à l'université », c’est-à-dire les fonctionnaires importants et les pasteurs luthériens. Ceci explique le développement d'un nationalisme allemand à caractère protestant, qui se veut éclairé, face à l'empire des Habsbourg catholique et perçu comme obscurantiste. Avec la Révolution française, le sentiment national, à l'origine l'apanage des intellectuels, se popularise. L'annexion de la Rhénanie par la France est perçue comme un amputation du territoire national. En 1803, le premier consul, Napoléon Bonaparte réorganise le Saint Empire qui passe de plus de 300 états à une centaine. Toutes les principautés ecclésiastiques sont supprimées. Le août 1806, le dernier empereur du Saint Empire romain germanique, François II, se soumet à un ultimatum de Napoléon Ier. Il renonce à la couronne impériale et délie tous les Etats allemands de leur fidélité.[2] Sous l'Empire, les armées françaises présentes sur le territoire vivent de requisitions. Le blocus continental limite les échanges commerciaux même si il permet le développement de la production de charbon dans la Ruhr en remplacement des importations anglaises.

Fichte

A cette époque une nouvelle forme de nationalisme éclot. Il s'agit du romantisme politique fondé sur la glorification du passé médiéval et du noble travail du sol. Le philosophe Fichte écrit, quant à lui, les Discours à la nation allemande. Dans son 8ème discours il affirme:

"Pour les ancêtres germains, la liberté consistait à rester Allemands, (...) C'est à eux, à leur langue et à leur manière de penser que nous sommes redevables, nous, les plus directs héritiers de leur sol, d'être encore des Allemands (...) C'est à eux que nous sommes redevables de tout notre passé national et, s'il n'en est pas fini de nous, tant qu'il restera dans nos veines une dernière goutte de leur sang, c'est à eux que nous devrons tout ce que nous serons à l'avenir.".[3]

L'idée que le peuple allemand s'est soudé dans une histoire est une lutte commune est très présente dans ses discours. Il souligne aussi combien le luthéranisme est enraciné dans la mentalité allemande : « seul il pourra lutter contre l'obscurantisme » romain, c’est-à-dire la religion catholique. Reprenant les termes de Herder, il insiste sur l'importance de la langue comme ciment de l'identité allemande.

L'anéantissement de la grande armée lors de la retraite de Russie provoque une guerre de libération qui s'achève avec le retrait français en novembre 1813 après la défaite de Leipzig. De nombreux pamphlets réclament alors la fondation d'un État allemand groupant tous les peuples parlant l'allemand. Ainsi apparaît la notion de Volkstum, l'union de tous les hommes de même langue, de même culture.

Après le congrès de Vienne (novembre 1814-juin 1815), le défunt empire est remplacé par la Confédération germanique ("Deutscher Bund") qui regroupe 39 états sous la direction honorifique des Habsbourg qui ne portent plus que le titre d'empereurs d'Autriche. Mais la Prusse, linguistiquement homogène contrairement à l'empire d'Autriche où les germanophones sont minoritaires, apparaît vite comme le seul élément moteur du sentiment national allemand face à l'empire d'Autriche multinational. Les partisans de l'unité allemande fustigent la faiblesse de la Confédération qui n'a aucun poids sur la scène internationale et qui dépend du bon vouloir de ses deux "grandes puissances". Jusqu'en 1840, ils recrutent ses membres presque exclusivement dans les milieux universitaires puis s'étend aux libéraux qui veulent conjuguer nation allemande et liberté.

1848 ou l'échec de l'unité allemande par la volonté des peuples

En 1848, à la nouvelle des révolutions parisiennes et viennoises, l'Allemagne s'embrase. Les révolutionnaires soutiennent des revendications d'unité nationale, de liberté et de démocratie. Quelques patriotes réunis à Heidelberg, dans le duché de Bade décrètent l'élection d'une assemblée constituante élue au suffrage universel et concernant tous les Allemands. L'assemblée se réunit à Francfort et décide en janvier 1849 de transformer la confédération germanique en un Etat fédéral avec un empereur à sa tête. Pour les députés, les autrichiens germanophones doivent faire partie de cette union. C'est sans compter sur la Prusse qui ambitionne de réaliser l'unité allemande à son profit et suscite un parti de la petite Allemagne, c’est-à-dire sans l'Autriche, qui emporte finalement la décision.

La révolution de 1848, dite révolution de mars à Berlin

En tant qu’empereur allemand, Frédéric Guillaume IV, roi de Prusse, ne veut tenir son pouvoir que de lui-même ou de la guerre. Il refuse la couronne que lui propose le parlement de Francfort. Son discours est très clair à ce propos :

« Cette » couronne n'est pas une couronne. La couronne que pourrait prendre un Hohenzollern, ce n'est pas, (...) la couronne fabriquée par une assemblée d'un germe révolutionnaire, (...) c'est la couronne qui porte l'empreinte de Dieu, la couronne qui fait souverain par la grâce de Dieu celui qui la reçoit (...) qui associe toujours le dernier oint du Seigneur à l'antique lignée qui le précède. La couronne qu'ont portée les Othon, les Hohenstaufen, les Habsbourg, un Hohenzollern peut la porter, cela va sans dire ; elle est pour lui une surabondance d'honneur, un rayonnement de mille années d'éclat. Celle-là au contraire,(...) déshonorée surabondamment par l'odeur de charogne que lui donne la révolution de 1848, la plus niaise, la plus sotte, la plus stupide,(...).[4]

Fréderic-Guillaume IV propose alors, en vain, une union allemande avec, d'une part, l'Empire d'Autriche et, d'autre part, un Empire allemand dont il serait le souverain. L'Autriche refuse et même sa tentative d'établir une union restreinte de la Prusse et des petits Etats se heurte à l'hostilité internationale. Les révolutions de 1848 échouent à faire l'unité allemande.

La Prusse, moteur de l'unité allemande de 1870

Dans les années 1850, la Confédération germanique s'industrialise. Le Zollverein (union douanière), la constitution d'un réseau ferré nécessairement transfrontalier, l'adoption d'une monnaie de compte unique par presque tous les Etats de la Confédération sont autant d'éléments d'une unité économique qui précède l'unité politique autour de la Prusse. Le courant unitaire qui était peu actif depuis l'échec du parlement de Francfort renait en 1859. Le Nationalverein (union nationale) reprend largement les idées développées en 1848. Le terme de Realpolitik apparait un essai de l’auteur libéral Ludwig August von Rochau, publié en 1853 sous le titre Grundsätze der Realpolitik. Angewendet auf die staatlichen Zustände Deutschlands (Les principes de la Realpolitik appliqués au contexte étatique de l’Allemagne). La Realpolitik va à l'encontre du principe français du droit des peuples à disposer d'eux mêmes. Elle accorde donc plus d’importance à l’unité qu’à la liberté. Les idées sur d’unification allemande se trouvent également relayées par de nombreuses associations évangéliques des sociétés de bienfaisance, de tir, des chorales et des cercles de lecture. L’éducation joue également un grand rôle dans la propagation de l'idéologie unitaire. L’enseignement primaire est généralisé dans tout le royaume ; celui de l’enseignement secondaire se popularise et compte en proportion deux fois plus d’élèves qu’en France.

Bismarck

L'unité allemande est largement l'oeuvre d'Otto von Bismarck. Ce noble prussien aux opinions très conservatrices représente la Prusse à la diète de Francfort de 1851 à 1859. Il en acquiert la conviction qu'il n'y a pas de place pour deux puissances en Allemagne. Il pense que tôt ou tard l'affrontement se produira entre les deux Etats. Ses écrits sont très clairs à ce propos :

« Il n’y a pas de place pour deux en Allemagne. Je veux venger l’affront d’Olmütz, je veux abattre l’Autriche. Je veux relever la Prusse et lui donner en Allemagne la situation prépondérante qui lui revient de droit.»[5]

C'est Guillaume Ier, roi de Prusse depuis 1861 qui l'appelle au poste de ministre président (premier ministre) en 1862 pour résondre le conflit entre le Landstag, le parlement prussien et le roi au sujet de la réforme de l'armée. Il instaure un gouvernement autoritaire et gouverne pas décret, ce qui permet l'organisation d'une armée nombreuse, efficace et bien armée. En effet, "le fer et le sang" sont pour Bismarck les moyens de réaliser l'unité allemande par le haut, c’est-à-dire sans le consentement des peuples.

La courte guerre des Duchés en 1864 est la première étape de l'unité allemande. Le Schleswig, peuplé d'Allemands et le Holstein, peuplé d'Allemands et de Danois sont des propriétés personnelles du roi du Danemark sans faire partie de son royaume. En 1863, ce dernier les incorpore à son royaume. Ceci entraine une guerre de la Confédération germanique menée par la Prusse et l'Autriche contre le Danemark en 1864. La rapide victoire permet à l'Autriche d'obtenir l'administration du Holstein et à la Prusse celle du Schleswig. Pour Bismack, cet arrangement est provisoire. Il attend le moment propice pour affronter l'Autriche. Après s'être assuré la neutralité bienveillante de la France et l'alliance italienne grâce à l'entremise française, la Prusse multiplie les provocations à l'égard de l'Autriche et, sous un prétexte futile envahit le Holstein.

La bataille de Sadowa, 3 juillet 1866

Dans la guerre austro-prussienne qui s'ensuit, l'Autriche, bien que bénéficiant du soutien de la Confédération germanique, est sévèrement battue à la bataille de Sadowa le 3 juillet 1866. Quand l'armistice est signée le 22 juillet 1866, les armées prusssiennes ne sont plus qu'à 60 km de Vienne. La Prusse qui bénéficie toujours du soutien français annexe le Schleswig-Holstein, le royaume deHanovre, le duché de Nassau et la Hesse, ce qui permet à la Prusse d'avoir un Etat d'un seul tenant, de former la Confédération de l'Allemagne du Nord excluant l'Autriche et dans laquelle les Etats catholiques du sud de l'Allemagne refusent de rentrer. Aucun plébiscite n'est organisé pour s'assurer de l'accord de peuples concernés par les annexions. L'unification se fait bien par le haut.

En 1867, la Confédération d'Allemagne du Nord regroupe donc 21 Etats. Chaque Etat garde son gouvernement local mais il existe au dessus un gouvernement fédéral dirigé par le président, Guillaume Ier et le chancelier fédéral Bismarck et comprenant deux chambres. Il existe une armée commune composée des armées de chaque membre. Pour achever l'unité allemande, le chancelier doit combattre les sentiments anti-prussiens des Etats du Sud. Les maladresses de Napoléon III lui permettent de dresser l'opinion publique de tous les états contre la France. En effet, après l'éclatante victoire de la Prusse, l'empereur des Français qui n'avait jusque là rien réclamé, demande des compensations pour sa neutralité, des territoires sur la rive gauche du Rhin d'abord, puis le Luxembourg. Bismarck a l'habileté de rendre publiques ces revendications qu'il qualifie de politique des pourboires.

proclamation de l'Empire allemand le 18 janvier 1871 dans la galerie des glaces de Versailles

En 1870, une nouvelle pomme de discorde surgit entre les deux états. Les Espagnols qui ont chassé leur reine, proposent dans le plus grand secret à Guilllaume de Hohenzollern le trône. Quand cette proposition est connue en juin 1870, le France s'émeut. Elle ne veut pas d'un souverain prussien au Sud. Dans un premier temps, Guillaume Ier assure à l'ambassadeur français, Benedetti qu'il ne s'opposera pas à un retrait de la candidature Hohenzollern en Espagne. Mais la France s'obstine et demande la garantie que le roi s'opposera à toute nouvelle candidature Hohenzollern. Guillaume éconduit l'ambassadeur et fait part de la rencontre dans un télégramme, la dépèche d'Ems, que Bismarck, qui n'en attendait pas tant, s'empresse de publier. Les Etats allemands voient dans l'insistance française un désir de les humilier. La guerre franco-allemande commence. La France, ulcérée par la publication du télégramme déclare la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870. L'impréparation française la conduit au désastre alors que les Etats d'Allemagne du Sud acceptent dès novembre 1870 d'entrer dans la Confédération d'Allemagne du Nord et que l'Empire allemand est proclamé le 18 janvier 1871 dans la galerie des glaces du château de Versailles, jour anniversaire de couronnement du premier roi de Prusse à Koenigsberg en 1701. La défaite française a fini de sceller l'unité allemande. Le traité de Francfort est signé le 10 mai 1871. La France cède à l'Empire allemand le nord de la Lorraine et l'Alsace sauf Belfort. L'antagonisme franco-allemand nait de cette annexion.

La question allemande au XXe siècle

L'Allemagne après le traité de Versailles

La première guerre mondiale et la défaite allemande sont lourdes de conséquences pour le territoire et le peuple allemands. Le traité de Versailles, que l’Allemagne signe le 28 juin 1919, est ressenti comme un "diktat" car il ampute le territoire allemand au profit de la Pologne renaissante. Le traité affirme la responsabilité de l’Empire allemand dans l’éclatement de la guerre. La séparation de l'Allemagne en deux territoires distincts, le corridor de Dantzig séparant la Prusse orientale du reste du territoire, l'interdiction faite à l’Autriche de s’unir à l’Allemagne alors qu'il n'y a plus d'obstacle à la réalisation de la grande Allemagne sont perçus comme autant d'injustices. Cette interdiction ne parvient pas à endiguer la résurgence du rêve d’une grande Allemagne. L’Allemagne vaincue sur le plan militaire et souffrant des conséquences de cette défaite, n’est que plus sensible aux attraits d’un passé paré romantique. Le Saint Empire romain germanique du Moyen Age redevient un espace idéalisé.

Dans l'entre-deux guerres, la lutte contre le traité de Versailles mobilise aussi bien le parti communiste que la droite. Cependant, la question allemande redevient plus aigüe avec l'arrivée au pouvoir d'Adolf Hitler en 1933. Le nationalisme allemand prend un tour revanchard, ouvertement raciste et antisémite. L’occupation de la Rhénanie démilitarisée en mars 1936 et le rattachement (l’Anschluss) de l’Autriche en mars 1938, font grimper la popularité de Hitler à des taux record dans toutes les couches sociales. Le mythe de l’Empire et de sa mission historique, dont Hitler sait jouer remarquablement lui donne le soutien des classes cultivéees.

L’effondrement du troisième Reich en mai 1945 représente une rupture bien plus profonde que la fin de l’Empire en novembre 1918. L’Empire avait subsisté en tant que territoire après la Première Guerre mondiale. Les vainqueurs: Etats-Unis, Union soviétique, Royaume-Uni et France assument le pouvoir et décident de l’avenir de l’Allemagne. L’élite politique et militaire perd ses biens et son pouvoir. Les territoires à l’est de l’Oder et de la Neisse sont concédés à la Pologne ou à l'URSS. les populations allemandes sont chassées de ces régions. Pourtant ces conditions plus dures et plus arbitraires qu'en 1919, n'ont jamais constitué un terreau pour les revendications nationalistes ou unitaires.[6] Après 1945, L'Allemagne est de nouveau désunie. Le partage du pays entre zones d'occupation occidentales et soviétiques aboutit à la naissance de deux Etats indépensant en 1949, la RFA capitaliste et libérale, et la RDA communiste. Les ancrages poltiques semblent marquer un fossé de plus en plus grand. La République fédérale d'Allemagne entre à l’OTAN en 1955, alors que la République Démocratique allemande fait partie du pacte de Varsovie

Il faut attendre les années 1980 pour que l’ordre d’après-guerre se mette à chanceler. A l’automne 1989, la pression des protestataires dans l’Etat est-­allemand est si forte que le régime communiste, discrédité, finit par capituler. Le 9 novembre 1989, le mur de Berlin, un symbole d’oppression, tombe. L'année suivant la RDA intrègre la RFA. Les Allemands regroupés dans un Etat unitaire, débarrassé des scories du nationalisme.

Voir aussi

Références

  1. Werner Ruf, département des siciences sociales de l'université de Kassel in http://www.hommes-et-migrations.fr/articles/1223/1223a.html
  2. http://www.tatsachen-ueber-deutschland.de/fr/lhistoire/main-content-03/la-fin-de-la-question-allemande.html
  3. Fichte, Discours à la nation allemande,, 8e discours.
  4. Frédéric-Guillaume IV, "Correspondance", cité dans "Les Mémoires de l'Europe", Paris, R. Laffont, 1972, t. V, p. 209
  5. Pensées et souvenirs par le prince de Bismarck, 1899.
  6. Eric Hosbawn, Nation et nationalisme depuis 1780, page 184 et 185

Bibliographie

  • Albert Malet et Jules Isaac, La naissance du monde moderne,, Hachette, 1961.
  • Divers articles de l'encyclopaedia universalis, DVD, version 2007
  • José Rovan, Histoire de l'Allemagne, Seuil, 1994.
  • Jacques Droz, Histoire de l'Allemagne, PUF

Liens internes

Liens externes

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