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Ton et teinte

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En peinture, le terme couleur est ambigu ; il signifie à la fois, comme dans le langage courant, la perception visuelle colorée, et, comme dans l'expression « marchand de couleurs », le mélange de pigment ou de teinture et de liant qui sert pour peindre[1]. Le ton ou la teinte désignent sans ambiguïté la couleur perçue.

En peinture une teinte est un mélange de couleurs, par opposition à une couleur pure, telle qu'elle sort du tube, du pot ou du godet[2]. Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, la teinte désignait l'aquarelle[3]. À la fin du XIXe siècle, c'est un mélange où une couleur apparaît faiblement[4].

Le Vocabulaire typologique et technique Dessin Peinture considère ton et teinte comme synonymes[5]. On emploie quelquefois ton et teinte avec un sens plus restreint, où teinte désigne la couleur indépendamment des effets de dégradé, de clarté ou d'obscurité, tandis que le ton désigne les autres caractères, valeur et intensité : une teinte peut ainsi avoir plusieurs tons, qui constituent une gamme[6]. Mais d'autres auteurs inversent ces précisions[7]. Dans une tradition qui comprend les ouvrages sur la couleur de Chevreul, tels que vulgarisés par Charles Blanc, dont plusieurs théoriciens de la couleur — de Paul Signac[8] à André Lhote — reprennent les termes, ton est synonyme de valeur et teinte est l'élément « rebelle à la représentation par le blanc et le noir[9] ». André Béguin constate que teinte peut avoir des « significations différentes, voire contradictoires[10] », tandis que le sens de ton, adopté plus tardivement par la peinture, varie aussi d'un auteur ou d'une spécialité à l'autre[11].

Dans les systèmes de description de couleur informatique, la teinte est la forme pure d'une couleur, c'est-à-dire sans adjonction de blanc. Les teintes sont visualisées sur le pourtour d'un cercle chromatique.


Ton

Synonyme de couleur et teinte, ton peut les remplacer dans tous leurs usages. Il est plus précis quand on parle de mélange, puisqu'un mélange de couleurs est le mélange, sur la palette ou sur la toile, de pâtes colorées, alors qu'un mélange de tons est l'effet visuel de la juxtaposition de surfaces colorées[12].

Tons clairs et tons obscurs
Tons qui s'opposent par l'impression de luminosité qu'ils dégagent.
Valeur tonale
La valeur tonale — ou valeur tout court — est le degré de luminosité relative, du foncé au clair, indépendamment de la couleur. Certains tons, comme les jaunes, ont toujours des valeurs claires, et d'autres, comme les violets, toujours des valeurs sombres.
Tons chauds et tons froids
Les tons sont d'autant plus chauds que, sur le disque chromatique, ils sont proches de l'orangé.
Tons neutres
Tons proches des gris. Les tons neutres font vibrer les tons vifs d'un tableau (LTA, p. 395).
Tons purs
Tons vivaces, de la périphérie du disque chromatique.
Tons dégradés
Tons dont la luminosité est augmentée mais la vivacité diminuée, par l'ajout de blanc.
Tons rompus
Tons dont la luminosité et la vivacité sont adoucies par le mélange d'une autre couleur à la couleur principale[13]. Le couleur complémentaire est celle qui romp le plus un ton vif ; lorsque la couleur ajoutée est proche de la couleur principale, on dit plutôt que celle-ci « tire sur » l'autre ; dit autrement, un ton rompu « tire sur le gris » (VTT, p. 46).
Tons rabattus
Tons dont la luminosité est atténuée par l'ajout de noir[14].
Tons éteints
Ton dont l'éclat et le contraste avec les voisins sont amoindris(Béguin 1990, p. 265).
Tons pastels
Tons dont la vivacité est atténuée par du blanc, comme celle des dessins au pastel.
Ton profond
À la fois sombre et saturé[15].
Ton sur ton
Assemblage de tons ne différant que par une petite nuance, comme en camaïeu[11]. Utilisé surtout en couture et en décoration.
Ton général
Le ton général ou tonalité[16] d'un tableau est la dominante colorée (LTA, p. 395). Par exemple, le ton général de Impression, soleil levant de Claude Monet est dans les tons froids.
Ton local
La couleur propre d'un objet représenté dans le tableau[17], avec les modulations correspondant à son système de clair-obscur, par exemple le ton local d'un drapé. Le ton local des manches de la Joconde est dans les ocres.
Ton plat ou aplat
Surface colorée dans laquelle le ton ne varie pas, s'oppose au dégradé et au modelé[18].
Hauteur de ton
Deux couleurs qui ont la même luminosité et la même pureté sont égales en hauteur de ton. La hauteur de ton diminue quand on ajoute du blanc ; la peinture à l'eau baisse de ton en séchant ; une lumière trop vive fait baisser le ton[19].

Demi-teinte

On parle de peinture en demi-teintes pour une œuvre exécutée « avec des tonalités douces et atténuées ». Dans une peinture plus contrastée, la demi-teinte ne se trouve que dans la transition entre ombre et lumière[20].

Une demi-teinte est une couleur intermédiaire entre le noir et le blanc[21] et un procédé de gravure où des hachures ou des points épars simulent les couleurs intermédiaires entre celle ou celles de l'encre d'impression et celle du fond (blanc, le plus souvent)[22]. La demi-teinte s'oppose ici à l'aplat et la gravure en demi-teintes à la gravure au trait.

Teinte des couleurs informatiques

Teintes du cercle chromatique

Les couleurs décrites par l'informatique sont les nuances possibles, relativement à un système de synthèse des couleurs à partir de trois couleurs primaires, un rouge, un vert et un bleu, dont la colorimétrie exacte dépend de la fabrication et du réglage des écrans et imprimantes sur lesquels on les voit.

Pour effectuer plus facilement des opérations sur les couleurs, de nombreux systèmes informatiques offrent la possibilité de régler, au lieu des trois couleurs primaires, trois paramètres plus liés à la perception, la luminosité, la teinte et la saturation.

Dans cette présentation, la teinte ((en) hue) est représentée par une direction repérée sur un cercle chromatique où sont disposées les couleurs sous la forme la plus pure possible[23].

Une couleur a trois composantes (r, v, b). On suppose que le système des couleurs est linéaire (Lois de Grassmann) ; cette couleur peut donc se décomposer en une somme de composantes égales à la plus petite des trois (un gris neutre) plus une teinte avec les deux composantes les plus grandes.

On repère ordinairement les teintes en considérant que les couleurs primaires sont également espacées, avec le rouge primaire à 0°, le vert primaire à 120°, le bleu primaire à 240°, et les mélanges, à des angles intermédiaires, en proportion des deux primaires qui les composent. Ce repérage nécessite peu de calculs, mais on ne peut lui faire correspondre une longueur d'onde dominante, faute de connaître la position exacte des primaires et du blanc.

Annexes

Bibliographie

  • Jules Adeline, Lexique des termes d'art, (1re éd. 1884) (lire en ligne)
  • André Béguin, Dictionnaire technique de la peinture,
  • Ségolène Bergeon-Langle et Pierre Curie, Peinture et dessin, Vocabulaire typologique et technique, Paris, Editions du patrimoine, (ISBN 978-2-7577-0065-5), p. 45.
  • André Chatel (Préface), Dictionnaire de la connaissance de la peinture : tous les courants, tous les genres, tous les mouvements picturaux, Paris, Larouse, , p. 575, 579-580.
  • Jean Petit, Jacques Roire et Henri Valot, Encyclopédie de la peinture : formuler, fabriquer, appliquer, t. 2, Puteaux, EREC, , p. 145-176 (chapitre « Couleur et colorimétrie »).
  • Louis Réau, Dictionnaire illustré d'art et d'archéologie, Paris, Larouse, , p. 447 et 456.

Articles connexes

Notes et références

  1. Petit, Roire et Valot 2001, p. 145.
  2. Trésor de la langue française « teinte ».
  3. Chatel 2012.
  4. Adeline 1900, p. 388.
  5. Bergeon-Langle et Curie 2009 ; également Réau 1930 « Ton », p. 456.
  6. M.T.B. dans Chatel 2012.
  7. Bergeon-Langle et Curie 2009 indiquent « une couleur est caractérisée par trois grandeurs, son ton, sa valeur et sa pureté » et citent Le Blon ; pour Petit, Roire et Valot 2001, p. 149 « ces trois paramètres sont appelés : tonalité, clarté, saturation ».
  8. Georges Roque, Art et science de la couleur : Chevreul et les peintres, de Delacroix à l'abstraction, Paris, Gallimard, coll. « Tel » (no 363), , p. 370
  9. André Lhote, Traités du paysage et de la figure, Paris, Grasset, , p. 46 (regroupe le Traité du paysage (1939) et le Traité de la figure (1950).
  10. Béguin 1990, p. 716 « Teinte ».
  11. a et b Béguin 1990, p. 726 « Ton ».
  12. Trésor de la langue française, « ton ».
  13. Béguin 1990, p. 871 « Rompre » ; LTA, p. 366.
  14. Béguin 1990, p. 633 « Rabattre » ; LTA, p. 353.
  15. Patrice de Pracontal, Lumiere, matiere et pigment : Principes et techniques des procédés picturaux, Gourcuff-Gradenigo, , p. 81.
  16. Béguin 1990, p. 726 « Tonalité ».
  17. Béguin 1990, p. 766 « Ton » ; LTA, p. 395.
  18. Béguin 1990, p. 48 « Aplat ».
  19. Béguin 1990, p. 331.
  20. Béguin 1990, p. 222 « Demi-teinte ».
  21. Réau 1930.
  22. Trésor de la langue française : « demi-teinte » ; Commission électrotechnique internationale : Electropedia 721-14-49 « image en demi-teinte ».
  23. La Commission électrotechnique internationale a adopté cette définition : Electropedia 845-02-35 « teinte ».