Aller au contenu

Équation de Kuramoto–Sivashinsky

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Diagramme espace-temps d'une solution de l'équation de Kuramoto–Sivashinsky.

L'équation de Kuramoto–Sivashinsky est une équation aux dérivées partielles non linéaire du quatrième ordre modélisant l'instabilité thermo-diffusive dans un front de flamme laminaire. Son nom vient de Yoshiki Kuramoto et Gregori Sivachinski qui ont dérivé l'équation à la fin des années 1970[1],[2],[3]. Elle a été ultérieurement et indépendamment dérivée par G. M. Homsy[4] et A. A. Nepomnyashchii[5] en 1974, en relation avec la stabilité du film liquide sur un plan incliné et par R. E. LaQuey et al.[6] en 1975 en relation avec l'instabilité des ions piégés. L'équation de Kuramoto–Sivashinsky est connue pour son comportement chaotique[7],[8].

Définition

[modifier | modifier le code]

La version unidimensionnelle de l'équation de Kuramoto–Sivashinsky est :

Elle s'écrit également sous une autre forme :

Celle-ci obtenue en différenciant par rapport à et en substituant . Il s'agit de la forme utilisée dans les applications de dynamique des fluides[9].

L'équation de Kuramoto–Sivashinsky peut également être généralisée à des dimensions supérieures. Dans les domaines périodiques spatialement, une possibilité est :

est l'opérateur de Laplace et est l'opérateur biharmonique.

Propriétés

[modifier | modifier le code]

Le problème de Cauchy pour l'équation de Kuramoto–Sivashinsky 1D est un problème bien posé au sens de Hadamard, c'est-à-dire que pour des données initiales données , il existe une solution unique qui dépend continuement des données initiales[10].

L'équation 1D de Kuramoto–Sivashinsky possède une invariance galiléenne, c'est-à-dire que si est une solution, alors l'est aussi, où est une constante arbitraire[11]. Physiquement, puisque est une vitesse, ce changement de variable décrit une transformation en un référentiel qui se déplace avec une vitesse relative constante . Dans un domaine périodique, l'équation possède aussi une symétrie plane : si est une solution, alors est aussi une solution[11].

Orbite périodique relative pour l'équation de Kuramoto–Sivashinsky avec des conditions aux limites périodiques pour une taille de domaine . Après un certain temps, le système revient à son état initial, seulement légèrement translaté (~4 unités) vers la gauche. Cette solution particulière a trois directions instables et trois directions marginalement stables.

Les solutions de l'équation de Kuramoto-Sivashinsky possèdent de riches caractéristiques dynamiques[11],[12],[13]. Considérée sur un domaine périodique , la dynamique subit une série de bifurcations à mesure que la taille du domaine augmente, aboutissant à l'apparition d'un comportement chaotique. Selon la valeur de , les solutions peuvent inclure des équilibres, des équilibres relatifs et des ondes progressives, qui deviennent généralement tous dynamiquement instables à mesure que augmente. En particulier, la transition vers le chaos se produit par une cascade de bifurcations à doublement de période[13].

Équation de Kuramoto–Sivashinsky modifiée

[modifier | modifier le code]

Équations dispersives

[modifier | modifier le code]

Un terme de dérivée du troisième ordre représentant la dispersion fréquencielle est souvent rencontré dans de nombreuses applications. L'équation de Kuramoto–Sivashinsky modifiée de manière dispersive, souvent appelée équation de Kawahara[14] est donnée par[15] :

est un paramètre réel. Un terme de dérivée du cinquième ordre est également souvent inclus, qui est l'équation de Kawahara modifiée et est donnée par[16] :

Équations du sixième ordre

[modifier | modifier le code]

Trois formes des équations de Kuramoto–Sivashinsky du sixième ordre sont rencontrées dans les applications impliquant des points tricritiques (en). Elles sont données par[17] :

dans laquelle la dernière équation est appelée équation de Nikolaïevski, du nom de V. N. Nikolaevsky qui a introduit l'équation en 1989[18],[19],[20], alors que les deux premières équations ont été introduites par P. Rajamanickam et J. Daou dans le contexte des transitions proches des points tricritiques.

Applications

[modifier | modifier le code]

Les applications de l’équation de Kuramoto–Sivashinsky s’étendent au-delà de son contexte d’origine de propagation de flamme et de systèmes de réaction–diffusion. Ces applications supplémentaires incluent les écoulements dans les conduites et aux interfaces, les plasmas, la dynamique des réactions chimiques et les modèles de surfaces pulvérisées par des ions[9],[21].

Références

[modifier | modifier le code]
  1. (en) Y. Kuramoto, « Diffusion-Induced Chaos in Reaction Systems », Progress of Theoretical Physics Supplement, vol. 64,‎ , p. 346–367 (DOI 10.1143/PTPS.64.346 Accès libre)
  2. (en) G. I. Sivashinsky, « Nonlinear analysis of hydrodynamic instability in laminar flames—I. Derivation of basic equations », Acta Astronautica, vol. 4, nos 11–12,‎ , p. 1177–1206 (DOI 10.1016/0094-5765(77)90096-0)
  3. (en) G. I. Sivashinsky, « On Flame Propagation Under Conditions of Stoichiometry », SIAM Journal on Applied Mathematics, vol. 39, no 1,‎ , p. 67–82 (DOI 10.1137/0139007)
  4. (en) G. M. Homsy, Nonlinear Wave Motion, vol. 15, American Mathematical Society, , 191–194 p. (Bibcode 1974LApM...15.....N), « Model equations for wavy viscous film flow »
  5. (en) A. A. Nepomnyashchii, « Stability of wavy conditions in a film flowing down an inclined plane », Fluid Dynamics, vol. 9, no 3,‎ , p. 354–359 (DOI 10.1007/BF01025515)
  6. (en) R. E. LaQuey, S. M. Mahajan, P. H. Rutherford et W. M. Tang, « Nonlinear Saturation of the Trapped-Ion Mode », Physical Review Letters, vol. 34, no 7,‎ , p. 391–394 (DOI 10.1103/PhysRevLett.34.391, lire en ligne)
  7. (en) Jaideep Pathak, Brian Hunt, Michelle Girvan, Zhixin Lu et Edward Ott, « Model-Free Prediction of Large Spatiotemporally Chaotic Systems from Data: A Reservoir Computing Approach », Physical Review Letters, vol. 120, no 2,‎ , p. 024102 (DOI 10.1103/PhysRevLett.120.024102 Accès libre)
  8. (en) P. R. Vlachas, J. Pathak, B. R. Hunt, T. P. Sapsis, M. Girvan, E. Ott et P. Koumoutsakos, « Backpropagation algorithms and Reservoir Computing in Recurrent Neural Networks for the forecasting of complex spatiotemporal dynamics », Neural Networks, vol. 126,‎ , p. 191–217 (DOI 10.1016/j.neunet.2020.02.016 Accès libre, arXiv 1910.05266)
  9. a et b (en) A. Kalogirou, E. E. Keaveny et D. Y. Papageorgiou, « An in-depth numerical study of the two-dimensional Kuramoto–Sivashinsky equation », Philosophical Transactions of the Royal Society A: Mathematical, Physical and Engineering Sciences, vol. 471, no 2179,‎ , p. 20140932 (DOI 10.1098/rspa.2014.0932)
  10. (en) Eitan Tadmor, « The Well-Posedness of the Kuramoto–Sivashinsky Equation », SIAM Journal on Mathematical Analyse, vol. 17, no 4,‎ , p. 884–893 (DOI 10.1137/0517063)
  11. a b et c (en) Predrag Cvitanović, Ruslan L. Davidchack et Evangelos Siminos, « On the State Space Geometry of the Kuramoto–Sivashinsky Flow in a Periodic Domain », SIAM Journal on Applied Dynamical Systems, vol. 9, no 1,‎ , p. 1–33 (DOI 10.1137/070705623, arXiv 0709.2944)
  12. (en) Daniel Michelson, « Steady solutions of the Kuramoto-Sivashinsky equation », Physica D: Nonlinear Phenomena, vol. 19, no 1,‎ , p. 89–111 (DOI 10.1016/0167-2789(86)90055-2)
  13. a et b (en) D. T. Papageorgiou et Y. S. Smyrlis, « The route to chaos for the Kuramoto-Sivashinsky equation », Theoretical and Computational Fluid Dynamics, vol. 3,‎ , p. 15–42 (DOI 10.1007/BF00271514)
  14. (en) J. Topper et T. Kawahara, « Approximate equations for long nonlinear waves on a viscous fluid », Journal of the Physical Society of Japan, vol. 44, no 2,‎ , p. 663–666 (DOI 10.1143/JPSJ.44.2003 Accès libre)
  15. (en) H. C. Chang, E. A. Demekhin et D. I. Kopelevich, « Laminarizing effects of dispersion in an active-dissipative nonlinear medium », Physica D: Nonlinear Phenomena, vol. 63, nos 3–4,‎ , p. 299–320 (DOI 10.1016/0167-2789(93)90113-F)
  16. (en) G. Akrivis, D. T. Papageorgiou et Y. S. Smyrlis, « Computational study of the dispersively modified Kuramoto–Sivashinsky equation », SIAM Journal on Scientific Computing, vol. 34, no 2,‎
  17. (en) P. Rajamanickam et J. Daou, « Tricritical point as a crossover between type-Is and type-IIs bifurcations », Progress in Scale Modeling, vol. 4, no 1,‎ , p. 2 (DOI 10.13023/psmij.2023.04-01-02 Accès libre)
  18. (en) V. N. Nikolaevskii, « Dynamics of viscoelastic media with internal oscillators », Recent Advances in Engineering Science: A Symposium dedicated to A. Cemal Eringen, 20-22 juin 1988, Berkeley, Californie, Springer,‎ , p. 210-221
  19. (en) M. I. Tribelsky et K. Tsuboi, « New scenario for transition to turbulence? », Physical Review Letters, vol. 76, no 10,‎ , p. 1631
  20. (en) P. C. Matthews et S. M. Cox, « One-dimensional pattern formation with Galilean invariance near a stationary bifurcation », Physical Review E, vol. 62, no 2,‎ (DOI 10.1103/PhysRevE.62.R1473)
  21. (en) Rodolfo Cuerno et Albert-László Barabási, « Dynamic Scaling of Ion-Sputtered Surfaces », Physical Review Letters, vol. 74, no 23,‎ , p. 4746–4749 (DOI 10.1103/PhysRevLett.74.4746, arXiv cond-mat/9411083)