Paray-le-Monial. Il a refait sa maison ancienne grâce à des aides publiques

Les chars russes à Paris ? Le même délire qu'en 81

Les va-t-en guerre contre la Russie sont des inconscients ou des menteurs. Mais faire peur au peuple est toujours utile en politique.

Par Edouard Frémy

En 1981, François Mitterrand marchait vers le pouvoir avec ses alliés communistes ; la droite agita, aux yeux des électeurs, l'épouvantail des chars soviétiques sur les Champs-Elysées. Quarante ans plus tard, les mêmes escroqueries intellectuelles reviennent. On nous explique que Moscou nourrit des ambitions impérialistes sur l'Europe, et que la France est menacée. Quittons un instant les postures martiales idéologiques pour observer sérieusement les réalités : le scénario d'une Russie conquérante s'effondre alors. D'abord, une évidence que l'on feint d'ignorer : la Russie n'a ni les moyens humains, ni les capacités économiques d'un expansionnisme global. Avec 140 millions d'habitants, elle pèse trois fois moins que l'Union européenne et cinq fois moins que l'OTAN. Son PIB, inférieur à celui de l'Italie, ne permettrait pas de soutenir l'effort de guerre nécessaire à une campagne militaire d'envergure contre l'Europe entière. Combattre un continent hérissé de puissances démographiques et industrielles, ce n'est pas la même chanson que défourailler contre la faible Ukraine. Ensuite, la géographie. Chaque conflit a un coût, et celui d'une guerre contre l'Occident serait démesuré. La Russie peine déjà à sécuriser ses gains en Ukraine. Comment imaginer qu'elle puisse ouvrir un front contre l'ensemble de l'Europe, avec des lignes logistiques s'étendant sur plusieurs milliers de kilomètres ? L'armée russe, même avec ses capacités de mobilisation, ne peut pas occuper durablement un continent peuplé de 450 millions d'habitants. C'est un non-sens stratégique. Enfin, l'histoire. Depuis la fin de l'URSS, Moscou n'a jamais montré de velléité expansionniste au-delà de son espace post-soviétique. Ses interventions – en Géorgie, en Syrie, en Ukraine – relèvent d'une logique de sphère d'influence, non d'un projet de conquête. Contrairement aux États-Unis, qui ont multiplié les opérations militaires à des milliers de kilomètres de leurs frontières… Les chars russes n'iront pas jusqu'à Brest, seulement jusqu'à Brest-Litovsk.