Les Enseigne Ments 190125
Les Enseigne Ments 190125
Les Enseigne Ments 190125
Enseignements
du Bouddha
Ṭhānissaro Bhikkhu
Jutindharo Bhikkhu
Avec la collaboration de
Ṭhānissaro Bhikkhu, Khamaṇo Bhikkhu,
Philippe & Wathanee Cortey-Dumont,
Michel & Marie France Leplus.
Copyright 2016 Ṭhānissaro Bhikkhu
Cette publication est protégée par une licence :
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INTRODUCTION
Existe-t-il un bonheur qui ne meurt pas et qui met totalement
fin à la souffrance et au stress ?
S’il existe, ce bonheur peut-il être réalisé grâce à l’effort humain ?
Et cela d’une manière inoffensive et irréprochable ?
C’est pour trouver la réponse à ces questions, qu’un jeune
homme du Nord de l’Inde, il y a 2600 ans, quitta sa famille pour
vivre dans la nature sauvage. Il réalisa finalement que la réponse
à ces trois questions est « Oui » : Oui, il y a un bonheur qui met
totalement fin à la souffrance. Oui, il peut être réalisé grâce à
l’effort humain. Et oui, cet effort est inoffensif et irréprochable. En
s’éveillant à ces faits, il devint le Bouddha : l’Éveillé. Dévouant le
reste de sa vie à enseigner aux autres comment trouver ce bon-
heur pour eux-mêmes, il établit un système d’apprentissage et de
pratiques qui s’est ramifié dans les nombreuses formes de boud-
dhisme que nous connaissons aujourd’hui.
La manière dont le jeune bodhisatta – bouddha en devenir –
trouva la réponse à ces questions, a joué un rôle majeur dans la
forme que prit la voie de pratique qu’il enseigna. Pour
comprendre ses enseignements, il est donc bon de voir comment
il les a lui-même découverts dans sa propre quête. Ce qui suit est
un bref récit de sa vie, ponctué des leçons qu’il a par la suite tirées
de sa propre expérience et enseignées aux autres.
SATI DE LA RESPIRATION
La technique de méditation que le bodhisatta utilisa pour
atteindre les jhānas la nuit de son éveil est Sati de la respiration,
c’est à dire garder sa respiration à l’esprit. C’est en fait la technique
qu’il enseigna le plus souvent, et le plus en détails. Il divisa ses
instructions en quatre ensembles, appelés tétrades, car chacun
d’eux consiste en quatre étapes. Chaque tétrade traite d’un aspect
différent de la manière de stabiliser l’esprit sur la respiration,
mais qui sont néanmoins étroitement liés les uns aux autres.
1) La première tétrade traite de la respiration elle-même. Vous
devez (a) discerner si c’est une longue respiration, (b) discerner si
c’est une courte respiration, (c) vous entraîner à respirer en étant
conscient du corps entier, et (d) calmer l’inspiration et l’expiration
jusqu’au point où, sans les forcer, elles s’immobilisent d’elles-
mêmes.
2) La seconde tétrade traite de la qualité des sensations (plaisir
et douleur) ressenties dans le corps et l’esprit. Vous vous entraînez
(a) à respirer avec un sentiment de ravissement, (b) à respirer
avec une sensation de plaisir, ou d’aisance, (c) à respirer et être en
même temps conscient de la manière dont la qualité des sensa-
tions et les perceptions – les étiquettes que l’esprit place sur les
choses – ont un effet sur l’esprit, et (d) à vous focaliser sur le
développement de sensations et de perceptions qui calment cet
effet, et finalement se calment elles aussi.
3) La troisième tétrade traite des états de l’esprit. Vous vous
entraînez (a) à respirer en étant sensible à l’état dans lequel est votre
esprit, puis, en fonction celui-ci, (b) à respirer en le réjouissant
quand il se sent faible, (c) en le stabilisant quand il est instable ou
éparpillé, et (d) en le libérant quand il se sent accablé ou qu’il est
piégé dans un état malhabile.
4) La quatrième tétrade décrit les étapes permettant de libérer
l’esprit des problèmes, soit concernant les distractions à la
concentration, soit ceux qui apparaissent dans la concentration
elle-même. Ces étapes sont : (a) se focaliser sur le fait que tout ce
qui apparaît dans l’esprit est inconstant et n’est pas fiable, (b) se
focaliser sur le sentiment de dépassion que vous ressentez alors
pour cette perturbation, (c) se focaliser sur la perception de sa
cessation causée par votre dépassion, et enfin (d) se focaliser sur
le dessaisissement du problème dans son ensemble.
LA BIENVEILLANCE
La bienveillance (mettā) est un vœu de bonheur véritable. En
tant qu’exercice de médiation, cela consiste à répandre des
pensées bienveillantes à vous-même et à tous les êtres vivants
dans toutes les directions, et dans tous les différents niveaux du
cosmos. Le Bouddha recommanda la manière suivante d’exprimer
ce vœu : « Que tous les êtres soient libres de toute animosité, de
toute oppression, de tout soucis, et puissent-ils prendre soin
d’eux-mêmes aisément! »
Pour qu’elle soit vraiment puissante, la bienveillance doit être
universelle. En d’autres termes, vous devez l’étendre même aux indi-
vidus que vous n’appréciez pas ou qui causent du tort. Souvenez-
vous que, en accord avec les principes du kamma, les autres êtres
vivants ne vont pas trouver le bonheur simplement parce que
vous le leur souhaitez. Celui-ci viendra de leurs propres actions.
Ainsi, avoir de la bienveillance pour tous signifie que vous
exprimez le souhait qu’ils comprennent les causes du bonheur
véritable et agissent en conséquence. Quand vous pensez de cette
manière, vous pouvez rendre votre bienveillance universelle sans
aucune hypocrisie.
Le développement de la bienveillance, cependant, n’est pas
simplement un exercice de méditation. Elle est également supposée
informer vos choix sur ce que vous devez faire, dire et penser en
toute situation. Le Bouddha dit que cette pratique amène de la
tempérance dans ce que vous appréciez et n’appréciez pas, dans
vos passions et aversions, de telle sorte que ces émotions ne vous
rendent pas partial ou injuste dans vos rapports avec les autres.
Vous voulez agir d’une manière qui favorise le bien-être de tous,
indépendamment de votre appréciation des individus compris
dans ce « tous ». De cette manière, la bienveillance fait de vous une
personne plus fiable dans vos relations avec les autres, et vous
pouvez également avoir une plus grande confiance en vous-même.
En effet, quelles que soient les difficultés que vous rencontrerez,
vous serez plus susceptible d’agir de façon inoffensive en toute
circonstance.
La bienveillance sans limite est la première de quatre attitudes
appelées brahmavihāras, ou attitudes sublimes. Ces attitudes vous
font ressembler à un brahmā – habitant des plus hauts paradis de la
forme et du sans-forme – dans cette vie, et pourrait même vous
amener à en devenir un après la mort. Les trois autres étant :
• La compassion sans limite : vouloir que tout ceux qui
souffrent soient soulagés de leur souffrance, et que tous arrêtent
de causer de la souffrance par leurs actions; c’est un antidote au
plaisir que l’on peut trouver dans la souffrance des autres;
• La joie empathique sans limite : vouloir que tout ceux qui
sont heureux continuent de l’être, et que tout ceux qui agissent
d’une manière qui mène au bonheur continuent dans leurs
actions; c’est un antidote à la jalousie et au ressentiment;
• L’équanimité sans limite : réaliser qu’il y a des moments où ce
que l’on souhaite à travers notre bienveillance, notre compassion
et notre joie empathique ne peut se réaliser, et qu’il faut donc
focaliser son attention là où nous pouvons aider; c’est un antidote
à la passion.
Bien que ces quatre attitudes puissent vous rendre plus digne de
confiance dans vos actions, elles ne vous rendent pas totalement
fiable. L’esprit humain est très changeant; les souillures de l’avidité,
de l’aversion et de l’illusion peuvent vous faire facilement renoncer
à votre conviction dans les principes du kamma et de l’intégrité.
Cette perte de conviction va alors diminuer le bien que vous tiriez
de vos bonnes actions, altérant d’autant plus votre conviction, et
ainsi de suite, dans un cercle vicieux. Vous devenez une personne
vraiment fiable seulement quand votre conviction dans l’éveil du
Bouddha est confirmée par votre propre première expérience du
sans-mort. C’est la raison pour laquelle le Bouddha déclara que la
plus haute forme de bonté est la réalisation de l’entrée dans le
courant, et qu’il encouragea tous ses auditeurs à aspirer à l’éveil.
Beaucoup d’entre eux, en entendant son enseignement ou en
voyant son exemple, souhaitèrent vivre la vie de mendiant, tout
comme il l’avait fait. Il institua alors deux communautés monas-
tiques, ou Saṅghas, une pour les hommes et une pour les femmes.
Ainsi les adeptes du Bouddha se divisent en quatre groupes :
ce que l’on appelle la quadruple parisā des moines (bhikkhus),
des nones (bhikkhunīs), des hommes laïques (upāsakas), et des
femmes laïques (upāsikās).
La vie dans le Saṅgha a été conçue pour être un apprentissage,
où les jeunes disciples sont amenés à vivre avec des moines qui
ont plus d’ancienneté pour une période de plusieurs années. De
cette manière ils peuvent non seulement acquérir l’enseignement
sur le Dhamma, mais aussi apprendre, par l’exemple, comment
celui-ci doit être appliqué dans tous les aspects de la vie.
Les membres des ordres monastiques vivent des dons des
personnes laïques. Cela leur donne la liberté de vouer entièrement
leur vie à l’apprentissage des enseignements du Bouddha dans leurs
moindres détails, et de les mettre pleinement en pratique. Le
Bouddha encouragea ses moines à vivre dans la nature sauvage,
comme il l’a fait lui-même, pour entraîner leur faculté d’endurance
et pour profiter de la solitude de ces lieux, leur permettant de se
focaliser directement sur l’entraînement de leur esprit avec un
minimum de distractions. Cependant, même durant la vie du
Bouddha, les deux Saṅghas reçurent rapidement des dons de terres,
qui finalement se développèrent en monastères. De cette manière,
les moines et les nones avaient le choix de diviser leur temps entre
deux styles de vie : une vie établie dans une communauté, et du
temps en errance, parfois seuls, dans la nature sauvage.
Au cours de la vie du Bouddha, alors que les Saṅghas grandis-
saient, tous ceux qui devenaient moines n’étaient pas véritablement
intéressés par la pratique. Il fut alors forcé de mettre en place un
code de discipline afin d’établir des standards sur la manière dont
les moines et les nones devaient se comporter. L’ensemble
complet des règles de discipline est appelé le Vinaya. Au cœur du
Vinaya, pour chacun des ordres, se trouve un code composé de
règles importantes, appelé Pāṭimokkha, que les membres de
chaque Saṅgha doivent écouter toutes les deux semaines.
Le Bouddha établit les règles du Vinaya pour servir trois objectifs :
• Préserver la foi des personnes laïques,
• Promouvoir l’harmonie au sein des Saṅghas, et
• Aider chacun des moines et des nones à devenir sensibles aux
souillures dans leur esprit, et ainsi être capable de s’en purifier.
Le fait que les moines et les nones doivent se comporter d’une
manière digne du soutien des personnes laïques est un thème
récurrent dans les règles. Cela fournit un environnement idéal aux
personnes laïques pour qu’elles ressentent véritablement de la joie
dans la pratique de la générosité. Afin de s’acquitter du soutien des
personnes laïques, les moines et les nones doivent pratiquer sincè-
rement et partager gratuitement leur savoir sur le Dhamma. C’est
une des raisons pour lesquelles les religieux Bouddhistes, bien
qu’ils soient encouragés à rechercher la solitude, ne vivent pas dans
des cloîtres coupés de la communauté laïque. Même en vivant dans
la nature sauvage, ils doivent au moins avoir un contact quotidien
avec des personnes laïques pour recevoir leur nourriture en
offrande. De cette manière leur exemple vivant ne profite pas
uniquement à l’ordre monastique, mais à la société toute entière.
LE TRIPLE JOYAU
Le Bouddha utilisa le terme « Saṅgha » a deux différents
niveaux de sens : le Saṅgha conventionnel, qui désigne la
communauté monastique, et le noble Saṅgha, qui désigne la
communauté de ceux, laïques ou ordonnés, qui ont atteint au
minimum leur première expérience du sans-mort.
Le Saṅgha conventionnel, même s’il est imparfait, est le
vecteur principal des enseignements du Bouddha – le Dhamma
– sur la voie vers le bonheur véritable. Le noble Saṅgha donne
vie à ces enseignements en fournissant des exemples vivants de
personnes ayant tiré le meilleur parti du Dhamma. C’est pour
cette raison que le Saṅgha, dans les deux sens du terme, est,
comme le Bouddha et le Dhamma, un exemple et une source
primordiale de savoir sur la manière de trouver un bonheur
fiable et inoffensif : un trésor inestimable pour le monde. C’est
la raison pour laquelle le Bouddha, le Dhamma et le Saṅgha
sont appelés le Triple Joyau. Ils sont aussi désignés comme
les Trois Refuges, parce que l’exemple qu’ils fournissent est
vraiment fiable.