Lorsque l’on parle d’innovations digitales comme l’IA, leurs capacités de résolution ne font pas tout, loin de là. Le succès de leur implémentation réside dans nos mains, et non dans les réseaux de neurones artificiels.
En effet, ces technologies, avec toutes leurs capacités fascinantes, ne peuvent réaliser leur plein potentiel que si nous, acteurs humains, les acceptons et les intégrons judicieusement dans nos stratégies.
Pour maximiser ses chances de réussite, il faut tout d’abord accepter que chaque innovation est une rupture qui vient nous “déranger” à l’échelle individuelle ou collective. Oui, déranger. Car notre cerveau apprécie la routine, les chemins prouvés et éprouvés, c’est ce que l’on appelle également les “biais de continuation”. Alors, lorsqu’une innovation dont le potentiel peut bouleverser nos façons de faire et de penser se présente, comme ce que nous vivons avec l’IA, adopter le bon état esprit est un facteur clé de succès.
Sans rentrer dans des débats en neuroscience ou en psychologie, voici les postures “nuisibles” les plus fréquentes que nous avons pu constater et qui peuvent freiner l’implémentation de l’IA et de l’innovation en général au sein des entreprises.
1. La paralysie face à la nouveauté
Une récente étude rapporte que, aux États-Unis, la demande pour la création de contenus marketing avait été multipliée par 1.5 en 2023, mais que les équipes marketing n’arrivaient à répondre à cette demande que dans 55% des cas. En somme, cela revient à ne traiter qu’une demande sur deux. Ajoutez à cela les volumes d’appels gérés par les services clients ou encore le nombre d’actualisation de fiches produits sur les plateformes e-commerce à faire chaque jour. Pour le marketing, le niveau de saturation est tel, que nous sommes incapables d’y répondre, alors que c’est pourtant nécessaire pour remplir nos objectifs. Refuser de faire autrement, en profitant des possibilités offertes par une innovation, c’est tout simplement refuser de se libérer des tâches rébarbatives pour se concentrer sur notre valeur ajoutée. L’idée n’étant bien évidemment pas d’avoir des technologies en substitution des compétences humaines mais bien de revaloriser le facteur humain à l’heure où la quête de sens est un enjeu de fidélisation des talents.
Mise au service des talents, la technologie peut être libératrice.
2. Le tourisme digital
Explorer les tendances technologiques est une bonne chose. En revanche, le faire sans action concrète peut très vite se transformer en une fuite en avant, sans fin, ayant pour conséquence de se perdre dans les méandres des possibles, sans jamais rien en faire. C’est un des meilleurs moyens de tuer le potentiel d’innovation dans l'œuf.
Pour éviter ce travers, les entreprises doivent toujours axer ces découvertes pour les adapter dans la réalité opérationnelle. Comme le disait à juste titre Theodore Levitt, économiste américain, rédacteur en chef pendant quatre ans de la Harvard Business Review, “Ce qui fait souvent défaut, ce n'est pas la créativité au sens de la création d'idées, mais l'innovation au sens de la production d'actions, c'est-à-dire la mise en œuvre des idées”.
3. Le phénomène d’emballement
Les innovations “tendances” peuvent créer un enthousiasme fort dans les premiers mois. C’est notamment ce que rapporte Gartner dans sa célèbre courbe de la hype. Mais après la hype, viennent les désillusions. Un phénomène tout à fait normal dû au lot d’échecs qui font partie intégrante du processus d’implémentation de l’innovation. En revanche, dans de nombreux cas cette phase de test se fait au détriment de l’utilité réelle pour l’utilisatrice ou l’utilisateur final.
Toute implémentation de l’innovation doit être pensée en amont pour ne pas avoir de désillusion qui pourrait conduire à son abandon prématuré malgré un potentiel réel. Pour éviter ce biais, elle doit être pensée en réponse à des besoins spécifiques et être intégrée de manière réfléchie en adéquation avec la stratégie de l’entreprise.
Certes, cela ne vous protégera pas des erreurs mais cette approche permet de réitérer plus rapidement en lien avec un objectif clair jusqu’à trouver le bon modèle.
4. L’argument de la black box
Chercher à comprendre chaque décision prise par l’IA peut parfois paralyser l’entreprise. Avec des algorithmes complexes, de nombreux output ne peuvent être totalement expliqués. Mais de la même façon, nous ne savons pas expliquer l’ensemble de nos prises de décisions, et cela ne nous dérange pas. Selon Daniel Kahneman, pionnier en neurosciences, spécialiste en psychologie et économie, 95% de nos décisions seraient inconscientes et irrationnelles. De la même façon, expliquer le raisonnement issu de l’analyse de millions de données est extrêmement complexe, pour ne pas dire impossible.
En revanche, les entreprises peuvent se concentrer attentivement sur la pertinence des résultats proposés par l’IA. Il y a toutefois une condition : les alimenter avec suffisamment de données qualitatives pour qu’elles puissent s’exécuter et délivrer des résultats fiables à partir desquels nous sommes capables de dégager des enseignements.
En conclusion, pour naviguer avec succès dans le paysage changeant de l'innovation digitale, nous devons adopter une culture du test, être prêt·es à abandonner nos anciennes méthodes et intégrer de nouvelles solutions de manière stratégique et réfléchie. Car l'innovation ne se trouve pas seulement dans les algorithmes et les circuits, mais bien dans l'esprit humain prêt à explorer, à s'adapter et à se réinventer.
Et l’échec dans tout cela ? Il est une composante presque inévitable à relativiser. Comme disait Thomas Edison “Je n'ai pas échoué. J'ai simplement trouvé 10.000 solutions qui ne fonctionnent pas”. Sans arriver au 10 000ème échec, chaque test est un pas vers votre réussite.
Ce contenu est inspiré du cycle de conférences Re:Think Marketing with Google AI qui s’est tenu le 5 décembre 2023 à Paris. Pour visionner la rediffusion c’est ici.