Les équipes marketing intègrent des produits optimisés par l'IA dans presque tous les aspects de leur travail depuis déjà plusieurs années afin d’obtenir des insights ou encore d’accroître les conversions en améliorant l'optimisation des campagnes.
Côté publicité, les annonces responsives sur le Réseau de Recherche (ARR) et les annonces display responsives (ADR) ont déjà démontré la capacité de l'IA à générer des créations extrêmement efficaces en combinant de manière optimale des assets. Avec des campagnes Performance Max, pour applications ou des campagnes vidéo pour l'action l’IA permet également de diffuser la version la plus pertinente d'une annonce sur les différents canaux.
Mais ces derniers mois, l’actualité a été riche en publications sur l'IA générative. Derrière cet engouement et les premiers tests à grande échelle, nous avons pu voir à quel point il est crucial de mettre l'humain aux commandes, y compris dans les créations publicitaires.
Pour bien comprendre comment les équipes de création explorent d'ores et déjà le potentiel de l'IA, nous avons demandé à des responsables d'agence opérant dans trois régions du monde de détailler leur façon d'utiliser cette technologie. Voici leurs pratiques.
Les nouveaux cas d'utilisation des outils d'IA
1. Annonces interactives, de l'activation vocale aux parcours audiovisuels
Déjà en 2019, pendant les fêtes de fin d'année, une équipe chargée de vendre Google Nest (le système domotique de Google) en Australie a eu l'occasion unique de permettre aux gens de tester le produit dans le confort de leur propre maison, à travers une publicité interactive.
"Nous voulions faire vivre l'expérience Nest dans la publicité elle-même, un objectif pour le moins ambitieux à l'époque où on ne parlait pas encore de l'IA générative", explique Tingyan Han, directeur principal de la stratégie de données chez Essence Mediacom pour la région Asie-Pacifique. "Avec Nest, les moments passés à la maison sont encore plus agréables. Et nous devions en faire la démonstration !"
Nous avons mené une réflexion complète autour de l'API de reconnaissance vocale, qu'il s'agisse de l'expérience utilisateur, de la mesure, de l'inventaire publicitaire ou encore de la compréhension de différents accents locaux.
Pour cela, l'équipe a utilisé une API de reconnaissance vocale développée en collaboration avec les équipes Google Nest et Google Media Lab.
"Nous avons mené une réflexion complète autour de l'API de reconnaissance vocale, qu'il s'agisse de l'expérience utilisateur, de la mesure, de l'inventaire publicitaire ou encore de la compréhension de différents accents locaux", explique Tingyan Han. L'annonce s'interrompait après quelques images pour laisser à l'utilisateur ou l'utilisatrice le temps d'activer l'expérience. Quand on lui demandait : "Hey Google, montre-moi des recettes de maisons en pain d'épice", le système s'exécutait.
L'activation a conduit à une augmentation des intentions d'achat. Pour Vincent Tay, directeur de la création chez Essence Mediacom pour la région Asie-Pacifique, cette réussite est liée au fait que l'interactivité a servi à démontrer directement les avantages du produit.
S'il est un élément que nous ne devons pas perdre de vue, c'est de toujours placer la vérité humaine au cœur [de notre campagne].
"Intégrer des technologies novatrices à tous les niveaux d'une campagne est certes séduisant, mais il ne faut pas perdre de vue que l’humain doit rester l'élément central de notre stratégie", explique Vincent Tay, qui a collaboré avec un concepteur UX/UR aux côtés de Tingyan Han pour la campagne.
Plus récemment, Leo Burnett Australia, une agence appartenant à Publicis, a utilisé l'IA pour développer une voiture parlante. De son côté, Leo Burnett Taiwan a utilisé un autre type d'IA pour célébrer le Nouvel An lunaire avec des chips qui prédisent l'avenir.
"Nous utilisons régulièrement Google Colab pour développer les premiers projets de prototypage intégrant des algorithmes d'IA prometteurs", explique Laurent Thevenet, chef des technologies de création chez Publicis pour les régions APAC et MEA. "Nous commençons également à utiliser Bard, car nous apprécions le fait qu'il soit connecté à Internet et qu'il puisse récupérer des informations en temps réel."
Publicis partage régulièrement des informations sur ces technologies émergentes aux 4 000 spécialistes de la création employés dans la région. Elle forme également en interne des talents qui réintègrent ensuite leurs équipes et agences respectives forts de ces nouvelles connaissances.
"Les machines ont besoin d'opérateurs et d'opératrices et, dans le secteur de la création, cela signifie que les équipes doivent collaborer avec les machines pour faire en sorte qu'elles produisent le résultat souhaité", commente Laurent Thevenet. "Ces personnes doivent posséder des compétences hybrides : avoir un esprit critique, tout en étant capables d'utiliser et d'interconnecter ces nouveaux systèmes d'IA."
2. Imaginer des projets avec l'IA, et vendre cette vision aux client·es
"Imaginez un concept store sur la Lune. Cela ressemblerait à quoi ?"
Ed Yeoman, directeur créatif de l'agence de branding et de design Human After All, basée à Londres, a vu son équipe faire appel à l'IA au stade de l'idéation pour aider à la conception de ce type d'idées farfelues.
"Certaines personnes utilisent le prompt pour obtenir des indications verbales sur le langage et les messages, et d'autres pour obtenir des indications visuelles qui les aident à imaginer quelque chose qui n'existe pas encore", notamment sur des idées événementielles, déclarait-il.
L'annonce de Google concernant la prochaine intégration d'Adobe Firefly dans Bard constitue un engagement en faveur d'une génération éthique d'images.
Gabriel Cheung, directeur exécutif de la création chez TBWA\Chiat\Day New York pour le monde, soutient que le contenu généré par IA peut également inciter les équipes à repousser leurs limites créatives. "Nous laissons aux outils optimisés par l'IA le soin de générer rapidement un premier jet. De notre point de vue, si l'IA peut générer la même idée, c'est que nous n'avons pas été suffisamment créatifs pour proposer quelque chose de nouveau", explique Gabriel Cheung.
Google a récemment annoncé une nouvelle expérience de conversation dans les campagnes Google Ads et sur le Réseau de Recherche permettant d'améliorer la phase de brainstorming. Un cas d'utilisation que M. Yeoman et son équipe ont trouvé particulièrement utile.
"Cette phase [de prompt] du processus vous met à la place du directeur ou de la directrice de la création ou de la stratégie", explique Ed Yeoman. "Bien souvent, à ce stade, vous contribuez à proposer des défis pour inciter les autres à accomplir certaines choses. C'est la même chose avec l'IA. Vous espérez proposer un défi qui motivera à obtenir un résultat optimal."
L'empathie et la raison sont au cœur de notre métier, et nous nous efforçons d'appliquer ces principes dans tout ce que nous faisons.
L'annonce de Google au sujet de la prochaine intégration d'Adobe Firefly dans Bard constitue un engagement en faveur d'une génération éthique d'images. Firefly est en effet entraîné sur un catalogue de centaines de millions d'images Adobe Stock sous licence. Alors que les entreprises technologiques privées développent une IA responsable et réclament l'adoption d'une réglementation dans ce domaine, les agences créatives rédigent leurs propres directives éthiques.
"Nous avions l'impression que peu de personnes s'interrogeaient sur les implications de ces technologies pour les humains", poursuit Ed Yeoman. "L'empathie et la raison sont au cœur de notre métier, et nous nous efforçons d'appliquer ces principes dans tout ce que nous faisons."
3. Guider l'itération des concepts, la stratégie et la production à grande échelle
Chaque année, l'agence créative Jellyfish Group invite ses propres spécialistes tech à participer à un hackathon interne. Cette année, les participant·es ont dû relever un défi d'un nouveau genre : concevoir une solution optimisée par l'IA pour améliorer la qualité et les performances des assets de création. 120 spécialistes dans les domaines des données, des médias et de la création ont ainsi uni leurs forces pour mettre au point cette solution.
"Les avantages sont énormes pour tous, tant sur le plan des connaissances que de l'expérience acquise. De plus, les bénéfices se font sentir pendant toute l'année", explique Sam Yates, directeur des solutions chez Jellyfish.
L'IA n'est pas seulement une question d'éthique ; c'est littéralement un problème commercial pour nous. Si nous n'utilisons pas l'IA de la bonne manière, cela pourrait entraîner des biais liés aux échantillons d'entraînement.
"L'IA s'est développée très rapidement et offre d'innombrables possibilités. Cependant, il faut reconnaître que c'est un peu le Far-West…", explique Di Wu, vice-présidente du département Science des données de Jellyfish Group. "Les gens commencent à peine à penser à la nécessité de réglementer l'IA et à ce que signifie pour nous l'adoption de cette technologie. Nous avons créé un groupe de travail qui n'envisage pas simplement l'IA du point de vue de l'éthique, mais la considère comme un problème commercial à part entière. Si nous n'utilisons pas convenablement l'IA, cela peut donner lieu à des biais liés aux échantillons d'entraînement utilisés [pour entraîner le modèle hypothétique]." Bientôt, les agences auront accès à un plus large éventail d'outils pour créer des variantes de leur propre travail, ce qui leur en assurera la propriété.
Selon Sam Yates, le fait de collaborer avec un réseau de partenaires bien établi est un moyen de travailler de manière sécurisée. "Notre but n'est certainement pas de brider l'innovation. Cependant, il est de notre devoir de penser à différentes méthodes permettant d'atténuer les risques liés à l'exploration de nouvelles technologies", explique-t-il. "Collaborer avec Google, par exemple, est pour nous une excellente occasion d'explorer une pile technologique de manière sûre et responsable."
Google n'a pas attendu 2023 pour collaborer avec Jellyfish à la conception d'un service sur mesure optimisé par les API Vision et Vidéo de Google Cloud Platform. Ce service baptisé "Optics", permettait de décoder les éléments les plus performants d'une annonce en fonction des objectifs d'une marque et de définir des bonnes pratiques, comme le permettent les principes ABCD de YouTube. Grâce aux progrès réalisés dans le domaine de l'IA, ces méthodologies ont permis aux équipes d'identifier les émotions contenues dans les annonces, voire la présence de traits d'humour, afin de déterminer les choix créatifs auxquels les audiences de leurs marques accordaient le plus d'intérêt.
Une fois que les équipes ont finalisé les assets de création, elles peuvent en tirer tout le potentiel à l'aide de formats de création intelligents tels que des ARR et des ADR. Des outils comme Performance Max permettent de s'assurer que la bonne annonce touche la bonne audience au moment opportun et qu'elle est optimisée pour les formats d'écran choisis. Les recherches montrent que les annonceurs enregistrent en moyenne deux fois plus de conversions lorsqu'une ADR est intégrée à un groupe d'annonces incluant une annonce display statique.
Du test des créations au storyboarding, les solutions optimisées par l'IA ont un rôle central à jouer dans le développement futur des créations. Ce rôle doit être défini par les besoins des créatifs et créatives et il se peut que quelques-unes des applications les plus utiles soient découvertes de manière fortuite. En explorant et en expérimentant l'IA de manière active, nous pourrons élaborer des méthodes plus concrètes pour concevoir les garde-fous que nous souhaitons mettre en place et découvrir les avantages que peuvent en tirer les spécialistes de la création.