L’équipe de France de cross-country a ramené quatre médailles collectives des championnats d’Europe à Antalya (Turquie), dont l’argent du relais mixte, la sixième de rang dans cette spécialité.

La Perf'

Le relais mixte, six fort

Les Français aiment les formules toutes faites, mais aiment aussi les faire mentir. « On ne change pas une équipe qui gagne », par exemple. Trois des quatre relayeurs de l’équipe mixte championne d’Europe à Bruxelles l'an dernier avaient cédé leur place, mais le collectif bleu n’a rien perdu de sa superbe. Ce dimanche à Antalya, les Tricolores ont décroché l’argent, leur sixième médaille de suite dans l’exercice, au terme d’une course passionnante, à un souffle de l’Italie mais devant les Britanniques.

« C’est un scénario qu’on avait prévu, et on est très content d’entretenir la tradition, puisque les Français obtiennent toujours une médaille en relais », savourait Antoine Sénard, qui s’est chargé de lancer l’opération bleue en dominant le premier segment avec autorité, conclu avec une quinzaine de mètres d’avance sur tout le monde. « On avait un peu de pression par rapport aux années précédentes, et on savait que les autres nations étaient très fortes », ajoutait en souriant Simon Bédard, fier d’avoir ramené la France à bon port en fin de parcours, même s’il n’a rien pu faire face au finish de l’Italien Pietro Arese. Entretemps, Emilie Girard a « rempli la mission » qui lui avait été attribuée, en « limitant les écarts face à des filles plus fortes », et Agathe Guillemot a fait admirer son finish pour ramener l’équipe à hauteur des Italiens et Britanniques au terme d’une boucle tout en maitrise. Nul ne sait qui composera l’équipe l’an prochain à Lagoa (Portugal), mais il y a fort à parier qu’elle sera, comme toujours, à la lutte aux avant-postes.

La Décla

« Avec Jade, cela faisait quatre ans qu’on courait après cette médaille, et c’était notre dernière occasion chez les juniors. Il était temps ! »

Présentes depuis Dublin 2021, Jade Le Corre et Margot Dajoux ont l’habitude de porter l’équipe de France U20 sur leur dos. La Francilienne, médaillée de bronze l’an dernier à Bruxelles, et la Clermontoise, championne d’Europe de course en montagne au mois de juin, connaissaient les joies d’un podium en solo. Cette fois, elles sont montées sur la boîte avec leurs trois camarades Lili-Meije Delaunay-Foglino (25e), Noreen Sdour Fort (31e) et Laly Porentru (34e), récompensées d’une très belle médaille d’argent. Si les Britanniques d’Innes Fitzgerald, qui a conservé son titre individuel avec aisance, étaient intouchables, les Françaises ont parfaitement joué le coup pour mater leurs autres adversaires. Elles récoltent ainsi le meilleur résultat d’une équipe U20 aux championnats d’Europe, à égalité avec la génération Cassandre Beaugrand, argentée à Samokov (Bulgarie) il y a dix ans. La précédente médaille dans la catégorie remontait à 2019, avec la bande à Manon Trapp et Flavie Renouard.

Sur le plan individuel, Jade Le Corre a tenté de s’accrocher au wagon de tête dans les deux premiers tours, mais n’avait « pas les armes » pour suivre les Britanniques Fitzgerald et Bailey quand elles se sont échappées avec l’Allemande Ehrle. Elle a dû se contenter d’une cinquième place « un peu décevante », largement compensée par le bonheur partagé avec ses camarades. Parfaite gestionnaire, Margot Dajoux a joué la carte de la prudence avant de lâcher les chevaux dans la deuxième moitié de l’épreuve, pour cueillir une très honorable neuvième place.

Le Temps Fort

Le réservoir masculin ne se tarit pas

La génération Gressier-Hay fait désormais les beaux jours de l’équipe seniors, mais les médailles continuent à tomber à intervalle régulier chez les U20 et U23 masculins. Les deux collectifs ont contribué à garnir le butin bleu ce dimanche sur les bords de la Méditerranée. Les plus âgés ont réalisé un tir groupé de grande qualité, plaçant trois représentants dans le top 10, avec Luc Le Baron cinquième, Pierre Boudy neuvième et Martin Perrin dixième. Une prestation remarquable, mais qui n’a pas suffi pour dominer d’intenables Britanniques, emmenés par un Will Barnicoat souverain pour conserver sa couronne individuelle. « C’est une belle médaille mais on aura tous un peu de regrets, car on visait l’or par équipes, estimait Luc Le Baron. On est sans doute partis un peu vite, tous, en ne respectant pas les consignes qu’on avait. Nous avions pourtant regardé les courses juniors, mais à la fin du premier tour, on s’est retrouvés devant. On l’a sans doute payé par la suite. »

Les juniors ont conquis de haute lutte le droit de participer à la cérémonie protocolaire, en se classant troisièmes derrière la Norvège et la Hollande. Ishak Dahmani a montré l’exemple en résistant comme un diable lors d’un dernier tour acharné, achevé à la sixième place. Leni Remer Mancini et Maël Henric, un temps dans le gros groupe de tête, ont serré les dents pour se classer respectivement quatorzième et vingtième, et offrir un moment de bonheur à leurs camarades.

Le Chiffre

2012

Voilà douze ans qu’on n’avait plus vu deux Françaises ensemble dans le top 10 des championnats d’Europe de cross chez les seniors. Manon Trapp et Flavie Renouard ont succédé à Laurane Picoche et Sophie Duarte, respectivement cinquième et sixième à Budapest. La Savoyarde a pris les choses en main en se portant en tête dès la première des cinq boucles, creusant rapidement un trou de huit secondes sur l’ensemble de la meute. « Je ne voulais pas refaire la même erreur que lors de mes derniers Europe (à Turin en 2022, NDLR), où j’avais trop attendu pour faire mon effort, et où je n’avais jamais réussi à m’exprimer. Là, j’ai fait l’expérience de l’erreur inverse. J’ai pris mon rythme, en voyant très vite que le groupe n’était pas sur des allures élevées. J’ai manqué de repères pour tenir ce rythme jusqu’au bout », regrettait-elle, évoquant une fin de préparation rendue compliquée par un deuil. Rejointe à l’amorce du quatrième tour par un groupe de cinq femmes, elle a tenté de s’accrocher aux basques de la future lauréate Nadia Battocletti, avant de finir à bout de souffle (8e).

Neuvième après avoir frayé aux alentours de la quinzième place pendant les deux tiers de l’épreuve, Flavie Renouard mêlait « la satisfaction d’un top 10 européen en cross, ce qui n’arrive pas tous les jours », et la pointe de déception de ne pas avoir converti la bonne affaire en podium par équipes, son « objectif principal du jour ». Il s’en est fallu de peu pour que Sarah Madeleine (35e), Célia Tabet (49e) et Alice Mitard (59e) ne complètent le tableau. Les Françaises ont finalement terminé cinquièmes, à six points des Belges, troisièmes.

Et aussi

Schrub a tout tenté

Vainqueur en 2023, Yann Schrub a mis un point d’honneur à défendre avec panache son titre européen, mais a dû déposer les armes dans l’ultime boucle du circuit turc. Comme annoncé, Jakob Ingebrigtsen n’a fait qu’une bouchée de ses rivaux, même si l’Italien Yemane Crippa (deuxième) ou le Britannique Hugo Milner (onzième) ne se sont pas privé de l’attaquer. Sixième sur la ligne, le Mosellan s’est « battu avec les jambes du moment, sans être dans une énorme forme ». Face à la flopée de très bons coureurs, « plus forts aujourd’hui », le podium était « à la fois pas très loin (4 secondes, NDLR) et très compliqué à aller chercher ». C’est finalement l’Espagnol Thierry Ndikumwenayo qui a pris le bronze, agrémenté de l’or collectif, l’équipe ibérique ayant survolé les débats. Avec Valentin Gondouin bon douzième et Alexis Miellet 22e, les Bleus ont échoué à une rageante quatrième place, à un tout petit point du Royaume-Uni.

Les U23 féminines savaient qu’il leur faudrait un exploit pour exister sur le devant de la scène. Elles s'y sont employées, et leur sixième place collective ne traduit pas complètement leur combativité. Inattendue cinquième en individuel, Camille Place a montré une audace bienvenue. La Bourguignonne de l’EA Saint-Quentin-en-Yvelines a filé le train des meilleures du continent pendant trois tours, et n’a cédé qu’en fin de parcours face aux assauts de la Finlandaise Mononen, battue sur le fil par l'Anglaise Phoebe Anderson. « J’avais un peu de mal à évaluer mon niveau, donc je visais d’abord un top 15 ou un top 20. Mais le parcours était vraiment taillé pour moi et j’ai eu d’excellentes sensations tout du long… Se retrouver devant, ça donne envie de se donner encore plus à l’entraînement pour revenir encore meilleure la prochaine fois… »

Etienne Nappey pour athle.fr
Photos : © Jean-Marie Hervio / KMSP / FFA

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