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Bilan de la Sociologie française contemporaine: Sociologie et psychologie - Sociologie et histoire - Ethnologie - Morphologie sociale - Sociologie juridique et économique
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Bilan de la Sociologie française contemporaine: Sociologie et psychologie - Sociologie et histoire - Ethnologie - Morphologie sociale - Sociologie juridique et économique
Livre électronique164 pages2 heures

Bilan de la Sociologie française contemporaine: Sociologie et psychologie - Sociologie et histoire - Ethnologie - Morphologie sociale - Sociologie juridique et économique

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À propos de ce livre électronique

« Bilan de la sociologie française contemporaine », le programme paraîtra sans doute ambitieux, les champs où glaner trop vastes. Il est certain que si nous voulions relever seulement tout ce que les savants français ont pu faire, depuis la guerre, pour avancer sous une forme ou une autre la connaissance des sociétés humaines, il y faudrait une longue série de volumes de la taille de celui-ci.

Mais il importe de distinguer, et de préciser dès l'abord notre
objet. Nous nous plaçons délibérément au point de vue adopté par la sociologie proprement dite, telle qu'elle nous paraît définie le plus nettement par l'équipe des chercheurs groupée dans l'Année Sociologique autour d'Émile Durkheim, lui-même continuateur, sur le terrain scientifique, d'Auguste Comte. Nous nous placerons, dans les revues qui vont suivre, sur la ligne de jonction entre sociologie spontanée et sociologie méthodique. Et nous essaierons de préciser ce que celle-ci ajoute à celle-la par un certain nombre d'exemples, - qu'il s'agisse de psychologie ou d'ethnologie, de géographie humaine ou d'histoire, de science du droit ou d'économie politique.


Dans ce livre de 1935, le sociologue Célestin Bouglé (1870-1940) propose un vaste panorama de la sociologie française en plusieurs volets thématiques :

Chapitre I: Sociologie et psychologie
Chapitre II: Ethnologie et sociologie
Chapitre III: Morphologie sociale
Chapitre IV: Sociologie et histoire
Chapitre V: Sociologie juridique
Chapitre VI: Sociologie économique
Chapitre VII: Sociologie économique (partie 2)
LangueFrançais
Date de sortie15 juin 2021
ISBN9782322383764
Bilan de la Sociologie française contemporaine: Sociologie et psychologie - Sociologie et histoire - Ethnologie - Morphologie sociale - Sociologie juridique et économique
Auteur

Célestin Bouglé

Célestin Charles Alfred Bouglé, né à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord, actuellement Côtes-d'Armor) le 1er juin 1870 et décédé à Paris le 25 janvier 1940, est un philosophe et sociologue français. Proche d'Émile Durkheim, il contribua à diffuser sa pensée, bien qu'il en soit resté distant dans ses propres travaux. C'est également avec lui qu'il lança la revue L'Année sociologique, revue à laquelle est également attaché le nom de Marcel Mauss (le neveu de Durkheim). Bouglé fut aussi influencé par Georg Simmel et son travail sur la différenciation sociale. La pensée de Simmel est présente dans son premier ouvrage : Les Sciences sociales en Allemagne. Les méthodes actuelles

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    Aperçu du livre

    Bilan de la Sociologie française contemporaine - Célestin Bouglé

    Sommaire

    Avant-propos

    Chapitre I : Sociologie et psychologie

    Chapitre II : Ethnologie et sociologie

    Chapitre III : Morphologie sociale

    Chapitre IV : Sociologie et histoire

    Chapitre V : Sociologie juridique

    Chapitre VI : Sociologie économique

    Chapitre VII : Sociologie économique (suite)

    Conclusion

    Avant-propos

    « Bilan de la sociologie française contemporaine », le programme paraîtra sans doute ambitieux, les champs où glaner trop vastes. Il est certain que si nous voulions relever seulement tout ce que les savants français ont pu faire, depuis la guerre, pour avancer sous une forme ou une autre la connaissance des sociétés humaines, il y faudrait une longue série de volumes de la taille de celui-ci.

    Mais il importe de distinguer, et de préciser dès l'abord notre objet. Nous nous plaçons délibérément au point de vue adopté par la sociologie proprement dite, telle qu'elle nous paraît définie le plus nettement par l'équipe des chercheurs groupée dans l'Année Sociologique autour d'Émile Durkheim, lui-même continuateur, sur le terrain scientifique, d'Auguste Comte.

    Que les sociétés humaines ne soient pas un empire dans un empire, que les faits qui s'y passent comme ceux qui se passent dans l'ordre de la nature soient eux-mêmes soumis à des lois, qu'en se livrant à une étude objective et comparative des divers types d'institutions, – des habitudes collectives qui se cristallisent en lois et coutumes, rites et techniques, et s'ordonnent autour d'un certain nombre de représentations impératives – on puisse mieux comprendre comment s'organisent, comment vivent ces êtres spéciaux que sont les groupes humains, tels sont les principaux postulats de cette École. Et il nous semble que ses membres ont commencé, par les résultats généralisables de leurs recherches, à en démontrer la fécondité.

    Est-ce à dire qu'ils aient découvert une autre Amérique, labouré des terres totalement inexplorées ? Bien loin de là. Le sociologue travaille le plus souvent sur du défriché. Des chercheurs qui ne se réclament pas de ses principes ont passé avant lui sur les sujets où il s'arrête. On n'a pas attendu le mot composé et lancé comme un signal par Auguste Comte pour réfléchir sur les aspects sociaux du droit, de l'économie, de la religion. Ainsi des disciplines spéciales se constituaient dont les fidèles, chacun partant de son point de vue, se construisaient une idée de la vie d'ensemble des groupements humains, des types qu'on y peut distinguer, des lois qui les gouvernent. Ainsi s'ébauchait une sorte de sociologie spontanée, ou si l'on veut inconsciente, capable non seulement de rassembler des faits, mais de formuler des thèses utilisables.

    Mais n'y a-t-il pas intérêt à ce que la sociologie devienne à son tour consciente et méthodique ? Si elle se représente nettement les ensembles dont elle veut expliquer la vie, n'y a-t-il pas plus de chances pour qu'elle ordonne mieux et amène à converger les résultats des recherches spéciales ? Qu'il s'agisse des faits étudiés par l'histoire comparée des religions, ou par la science du droit, ou par l'économie politique, on ne peut, rappelait Durkheim dans un chapitre de la Science française, « les comprendre que si on les met en rapport les uns avec les autres, et avec les milieux collectifs au sein desquels ils s'élaborent et qu'ils expriment ». C'est sur ce précepte de méthode que ses collaborateurs ont insisté avec le plus de force, protestant que la sociologie, pour ne pas demeurer une philosophie en l'air, a besoin des recherches spéciales, mais établissant qu'à son tour elle peut les servir en leur offrant des centres de ralliement.

    Nous nous placerons, dans les revues qui vont suivre, sur la ligne de jonction entre sociologie spontanée et sociologie méthodique. Et nous essaierons de préciser ce que celle-ci ajoute à celle-la par un certain nombre d'exemples, – qu'il s'agisse de psychologie ou d'ethnologie, de géographie humaine ou d'histoire, de science du droit ou d'économie politique.

    Série d'échantillons sans doute. Mais nous espérons qu'ils permettront au lecteur, mieux que des dissertations abstraites, de se représenter le rôle de stimulant qu'a pu jouer et que peut jouer encore, en France, la sociologie proprement dite.

    Célestin Bouglé

    Chapitre I

    Sociologie et psychologie

    On a pu croire naguère, lorsque la sociologie française cherchait à se tailler son domaine et dressait son programme de travail, qu'elle aussi, selon la formule fameuse, se poserait en s'opposant, et qu'en particulier elle voudrait réduire à la portion congrue la science qui, traditionnellement, semblait détenir la clef du monde humain, la psychologie. L'étude objective des institutions, en nous révélant, du dehors, les conditions de vie des êtres sociaux, allait-elle donc rendre inutile cette connaissance des âmes par le dedans, où tant de penseurs français avaient brillé ? Moralistes à la manière d'un Pascal, d'un La Rochefoucauld, d'un Vauvenargues, habiles à sonder les replis du cœur, spiritualistes disciples et émules de Victor Cousin, que l'analyse des facultés conduisait à l'affirmation des principes et qui au fond du puits de la conscience retrouvaient toute la métaphysique, les uns et les autres avaient acquis à notre pays un indiscutable renom. On répétait volontiers que la France aimait la psychologie et y excellait. La sociologie, pour se constituer, ferait-elle bon marché de cette tradition ?

    Ce qui l'avait donné à penser, sans doute, c'était d'abord l'attitude du parrain de la sociologie envers la psychologie. On sait qu'Auguste Comte ne laisse à celle-ci aucune place dans sa classification des sciences, et qu'il n'a que railleries pour les apologistes de l'introspection. En s'observant eux-mêmes, ils croient entrer tout droit dans un monde intérieur, vestibule d'un monde supérieur. En réalité, ils ne font que retarder le moment où la pensée deviendra enfin homogène en appliquant à tous objets, à ceux du règne humain comme aux autres, les mêmes méthodes d'observation objective. Il appartient justement à la sociologie, en se constituant comme une science positive à l'instar de ses sœurs aînées, de chasser de leur dernier retranchement ces fantômes métaphysiques.

    Émile Durkheim, le véritable héritier d'Auguste Comte sur le terrain de la recherche scientifique, n'est pas moins désireux d'exorciser la métaphysique, ni moins dédaigneux à l'égard de l'introspection. Le sociologue qui s'y fierait ne pourrait que nous livrer ses idées personnelles, non des vérités objectives. Si l'on veut se débarrasser enfin des prénotions, en cette matière aussi il importe d'apprendre à traiter les faits sociaux « comme des choses » et à les observer « du dehors ». Ajoutons que, joignant l'exemple au précepte, Durkheim, dans sa thèse sur la Division du Travail, cherchait les raisons dernières du développement que lui ont vu prendre nos civilisations, non pas dans tel ou tel mobile du cœur humain, mais dans la forme même de nos sociétés, dans des faits de morphologie sociale – accroissement de volume, de densité, de mobilité, accessibles à l'observation externe. De là à conclure que l'auteur des Règles de la Méthode sociologique prétendait expliquer l'intérieur par l'extérieur, le supérieur par l'inférieur, qu'en dédaignant la psychologie il portait de l'eau au moulin du matérialisme il n'y avait qu'un pas qui fut vite franchi.

    On se rend compte aujourd'hui que sous les antithèses ainsi exploitées subsistait un bon nombre d'équivoques. La sociologie nie la psychologie ? Formule simpliste. Elle ne saurait convenir, – M. Ch. Blondel l'a lumineusement démontré dans son Introduction à la psychologie collective – ni à Auguste Comte, ni à Émile Durkheim. En réalité c'est à une certaine psychologie qu'ils en veulent. Le fondateur de la Philosophie positive se défiait d'une psychologie qui ne faisait confiance qu'à l'observation de l'individu par lui-même, pour aboutir à une métaphysique éclectique qu'il jugeait surannée : c'est aux « philosophes classiques » de son temps qu'il en avait, à ceux-là même que Taine devait pourfendre avec tant d'énergie.

    Ce n'est pas à dire pourtant qu'il considérât les faits de conscience comme des phénomènes sans importance, comme des « épiphénomènes ». Bien loin de là. N'est-ce pas lui qui déclare que « tout le mécanisme social repose en dernière analyse sur des opinions » ? Opinions et désirs, théories et sentiments sont à ses yeux des forces motrices de la plus grande efficacité. Ce qui reste vrai, c'est que le développement des phénomènes haut placés dans la hiérarchie a ses conditions dans les phénomènes plus simples qui les précèdent. En ce sens la psychologie ne saurait en effet se passer de la biologie. Et l'on sait que Comte, séduit par les théories de Gall, a paru croire que l'on pourrait découvrir dans les diverses parties du cerveau le siège des diverses facultés de l'homme. Mais en dehors de la théorie qui passe, le précepte de méthode reste. Comte est un de ceux qui, réagissant contre l'introspection des spiritualistes, ont ouvert les voies à la psychologie physiologique. Seulement il n'a jamais cru que cette psychologie fût la seule possible, ni qu'elle tînt dans ses mains toutes les explications. Ce dont l'homme est capable, on ne peut l'apprendre que par l'histoire. Le développement de la civilisation est nécessaire à l'épanouissement des facultés supérieures. C'est dans ce grand livre qu'il faut lire, en « expliquant l'homme par l'humanité ». Ce qui revient à dire qu'à côté de la psychologie physiologique il importe de réserver une place, et très large, à la psychologie sociale.

    Il n'est pas moins inexact de taxer Durkheim de matérialiste, comme s'il déniait tout prix aux faits de conscience. Dans un article sur les représentations individuelles et les représentations collectives, il a pris la précaution de noter ce qu'avait d'inadmissible à ses yeux la théorie de la conscience épiphénomène, qui, assimilant les faits de conscience aux lueurs qui se dégagent d'une locomotive en marche, paraît admettre dans l'ordre psychique des faits sans effets. Il a relevé l'autonomie relative des idées par rapport à leurs antécédents ou leurs concomitants physiques ; il a signalé que toute la vie de l'esprit suppose des synthèses, génératrices de propriétés nouvelles, incompatibles avec les postulats de l'atomisme associationniste dont on s'est longtemps contenté. Si après cela il nous demande de traiter les faits sociaux comme des choses et de les observer du dehors, c'est pour nous apprendre à nous défier des prénotions, des idées toutes faites que chacun de nous trouve en lui-même et qui traduisent ses préférences bien plus que la réalité elle-même. Des institutions comme le mariage, ou comme les Églises, ou comme l'échange, non seulement revêtent des formes diverses que nous n'aurions pas inventées, qu'il nous reste à constater dans l'histoire, mais elles répondent à des besoins, elles remplissent des fonctions qu'on ne saurait comprendre en partant du moi tout seul : il y faut la considération des ensembles. Cela ne signifie pas pour autant que ces ensembles soient purement matériels ; si un certain nombre de choses s'incorporent dans les sociétés – bâtiments, routes, aménagements divers de la nature – les sociétés elles-mêmes sont essentiellement des liens d'homme à homme, et des liens qui ne sont pas tous visibles. Même séparés par la distance, les individus sont membres d'une même société s'ils partagent un certain nombre d'idées, de sentiments, d'aspirations. C'est ce noyau spirituel qui est l'élément constitutif d'une association. « Tout ce qui est social consiste en représentations, déclare Durkheim dès ses premiers ouvrages, par conséquent est un produit de représentations. » Et plus tard, lorsqu'il aura mis en pleine lumière la force associante des croyances, singulièrement plus pesante, à ses yeux aussi, que les intérêts matériels, lorsqu'il aura montré à l'œuvre les jugements de valeur, par lesquels la vie morale des collectivités se manifeste et s'entretient, il introduira un lien de plus en plus étroit entre la notion de la société et la notion d'idéal. Il ira jusqu'à dire que la principale fonction des sociétés est de créer de l'idéal. Tant il est loin de nier ni la réalité ni la valeur de la vie spirituelle.

    Seulement, pour comprendre d'où elle vient et où elle va, ses origines et ses fonctions, il importe de se représenter non pas seulement l'effort de l'individu sur lui-même, mais l'action de tous sur chacun. Il faut faire entrer en compte ce qui naît du rapprochement des consciences ; ce sont des forces spirituelles originales, dont l'individu, en se repliant sur soi, ne pouvait prévoir le développement. Ici l'on voit à l'œuvre une notion pour Durkheim capitale, qu'il dit lui avoir été rappelée par Renouvier, qu'un Hegel déjà avait souvent utilisée ; l'idée que dans le tout il y a plus que la somme des parties, qu'un changement quantitatif entraîne un changement qualitatif. N'était-ce pas au surplus une idée que le progrès de la chimie rendait familière à tous ? La synthèse implique que la combinaison des éléments fait apparaître des propriétés inédites que l'analyse des éléments isolés n'eût pas permis de découvrir. Cette analogie est une maîtresse-pièce de la pensée de Durkheim. S'il nous invite à nous défier de l'introspection, analyse du moi par lui-même, c'est justement pour

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