Jacob Lorber Grand Evangile de Jean.V2
Jacob Lorber Grand Evangile de Jean.V2
Jacob Lorber Grand Evangile de Jean.V2
EVANGILE
DE JEAN
TOME 2
Rélévations du Christ
à Jacob Lorber
Traduit de l'allemand
HELIOS
Titre original :
Johannes, das Grosse Evangelium, Band 2.
Empfangen vom Herrn durch Jakob Lorber.
Lorber Verlag.
D-7120 Bietigheim, Württemberg.
ISBN 2-88063-161-0
Volume II
Jésus et les Siens à Kis et à Nazareth
Ev. Matthieu chap. 13 (suite)
Chapitre premier
De la condamnation des malfaiteurs
1. Tard dans la nuit parvient à la grotte de Kisjonah un trésor d'or et d'argent avec
une masse de pierreries de grand prix. Il y a là près de trois livres de diamants
taillés et près de sept livres de diamants bruts, et autant de rubis, autant
d'émeraudes d'hyacinthes, de saphirs, de topazes, d'améthystes, et près de quatre
livres de perles grosses comme des pois. Plus de vingt mille livres d'or et cinq
fois autant d'argent.
2. Lorsque Faustus voit apparaître cet énorme trésor, il se prend la tête dans les
mains en disant: « Ô, Seigneur, moi, le fils d'un des plus riches patriciens de
Rome, qui ai déjà vu les plus grands trésors de cette terre, je n'en ai jamais eu de
pareils sous les yeux ! Cela dépasse les pharaons et le légendaire Crésus qui ne
savait plus que faire de ses richesses et se serait fait construire un palais en or si
son ennemi ne lui avait pas pris tout son or.
3. Maintenant, je Te le demande, moi pauvre pécheur, Ô Seigneur, Toi qui
connais toute chose, comment pareils trésors ont-ils pu tomber aux mains de ces
douze suppôts de Satan ; ce ne peut être honnêtement surtout en si peu de temps!
comment donc est-ce possible?»
4. Je dis : « Ami, ne t'en préoccupe pas ! Ce satané butin ne mérite pas qu'on en
parle. Pas un stater n'a été honnêtement gagné, sois-en certain, et ce serait trop
long d'éclaircir point par point les milliers de misérables méfaits par lesquels
cette race de serpents a amassé tout cela dans ses nids de vipères.
5. Il n'y a pas de doute, ce sont des filous de la pire espèce, mais personne n'a
besoin de savoir comment. Ils mériteraient déjà plus de dix fois d'être condamnés
à mort par la justice romaine pour avoir détourné les fonds de la caravane
impériale qui transportait les impôts, et ces trésors que nous avons là sous les
yeux n'ont pas été acquis plus honnêtement, en admettant qu'ils ne soient pas de
la même provenance !
6. À quoi bon en savoir davantage, tu ne pourras toujours les mettre à mort
qu'une seule fois ; et à vouloir augmenter leurs tortures, tu finiras par les faire
mourir ; et pour parler en termes juridiques, la torture n'est mortelle que si elle
réussit. Tu peux torturer un corps tant que tu veux, tu as beau le faire cuire ou le
faire bouillir il finit par ne plus rien ressentir, car l'âme par trop matérielle, dans
sa terreur de la mort, finit par se recroqueviller au point de se détacher quasi
entièrement du corps où elle ne supporte plus de rester et le corps devient ainsi
pratiquement insensible.
7. Je ne suis pas pour la peine de mort, qui ne sert ni au condamné, ni à la justice.
Tues-en un, mille autres crieront vengeance. Mais selon l'ordre divin, je suis pour
qu'on fouette un criminel jusqu'à ce qu'il montre des signes notoires
d'amélioration. Une bonne punition bien méritée donnée à temps vaut plus que
l'or pur. Le fouet dégage peu à peu l'âme du matériel, et l'aide à se tourner vers
l'esprit. Quand le fouet atteint ce résultat, il a sauvé une âme de la perdition et
tout l'être de la mort éternelle.
8. Selon l'ordre divin, tout juge ne doit donc pas condamner à mort même le pire
des criminels. La mort physique ne sert à rien. Il faut punir avec la verge,
conformément au crime commis. Celui qui le fait est un juge des hommes devant
le ciel, celui qui ne le fait pas est un juge devant l'enfer, et il ne sera jamais
récompensé par Dieu. Il recevra sa récompense du règne même par lequel il aura
jugé les hommes. Tu en sais maintenant assez. Fais mettre en lieu sûr les trésors,
demain nous parviendront ceux de Chorazin, nous les répartirons et nous
expédierons alors tout ce satané butin. Passons maintenant à la salle à manger où
le repas du soir nous attend. En vérité, toute cette affaire me dégoûte, et J'ai hâte
de me rendre à Nazareth.
9. Faustus dit : « Seigneur, je vois bien que cette détestable affaire t'est in-
finiment antipathique, mais que faire ? Les faits sont là. Je t'en supplie, Seigneur,
Toi mon meilleur ami, ne pars pas d'ici avant moi ; sans Toi je ne puis rien faire,
sans Toi je me mourrais du plus mortel ennui, malgré ma chère petite femme. Je
T'en prie, ne quitte pas ces lieux avant que je ne sois venu à bout de cette
détestable affaire. Grâce à Ton aide, je compte pouvoir mettre tout en ordre
demain avant midi. »
10. Je dis : « Très bien, mais Je ne veux plus voir ces onze Pharisiens et tous ces
trésors, ils me dégoûtent plus que la fiente. » Faustus dit : « J'ordonne qu'on y
veille ! »
Chapitre 2
Judas Iscariote dérobe des pièces d'or
Chapitre 3
Prières de Kisjonah
De l'utilité des miracles et de leur puissance
De la bonne façon d'annoncer l'Évangile
De la conscience du cœur
1. Sur ce, arrive Kisjonah, saluant tout le monde avec la plus extrême gentillesse
et disant : « Jésus, mon ami infiniment adoré, je Te nomme ainsi, mais Tu sais ce
que Tu es et qui Tu es pour mon cœur. C'est à Toi seul que je dois tout ceci. Je
n'ai remis qu'une petite dette de cinq mille livres aux pauvres habitants de Cana,
et Tu m'as fait avoir pour cela cinquante autres mille livres, sans compter tous les
trésors inestimables. Je Te promets, au nom de tout mon amour pour Toi, de faire
ainsi le bien aux pauvres, et ce satané bourbier deviendra finalement de l'or à la
gloire du divin ciel.
2. Je ne remettrais cet or et cet argent à personne en main propre, car c'est un
véritable poison pour le faible cœur de l'homme, mais je procurerai aux sans-
abris un toit exempté d'impôt, je leur donnerai des vêtements, du pain et du
bétail, et à tous ces heureux que j'aurai faits, Ton nom et Ta parole seront an-
noncés afin que chacun sache à Qui ils sont redevables pour tous ces bienfaits.
Ainsi, je ne serai qu'un serviteur indigne. Ô Seigneur, fortifie-moi en tout temps
pour que je serve en Ton nom, et si jamais je m'avise de convoiter quoi que ce
soit du monde, fais fléchir mes forces afin que je prenne conscience que je suis
un homme faible et que je suis incapable d'entreprendre quoi que ce soit de mes
propres forces. »
3. Je posai Ma main sur son cœur en lui disant : « Mon ami, Mon frère, garde-
Moi là-dedans, et il ne te manquera jamais la force d'entreprendre de nobles
tâches. Oui, dans la foi vivante et par l'amour pur et parfait que tu as pour Moi,
en Mon nom tu commanderas aux éléments et ils t'obéiront. Les vents ne seront
pas sourds à ton appel et la mer t'écoutera. Tu pourras dire à telle ou telle
montagne, lève-toi, précipite-toi dans la mer, et ce que tu auras ordonné arrivera.
4. Mais si quelqu'un exige de toi des preuves, n'en fais rien, car celui qui ne veut
pas reconnaître la vérité pour elle-même et pour qui cette vérité n'est pas un signe
suffisant n'a qu'à demeurer dans son aveuglement. Un miracle le forcerait à
reconnaître la vérité mais ne l'aiderait nullement à vivre selon l'enseignement de
la vérité ; aussi le miracle devient-il sa double condamnation : d'une part il l'a
obligé à accepter la vérité, qu'il la reconnaisse ou non dans son aveuglement
comme la vérité, et d'autre part, s'il n'agit pas selon la vérité que le miracle l'aura
forcé d'accepter, il encourt une condamnation d'autant plus grave que, selon
l'ordonnance divine, la réussite du miracle l'a lié par la preuve. Le fait de
percevoir ou de ne pas percevoir le signe ne justifie personne.
5. Le signe est là comme une caution incontestable pour celui qui demande un
miracle en signe de preuve de la vérité qu'on lui enseigne, qu'il la reconnaisse ou
non jusque dans ses fondements.
6. Comme son aveuglement l'empêche d'en venir aux fondements de la vérité et
que, selon ses concepts, il ne peut s'habituer aux inconvénients d'une vie basée
sur cet enseignement, le signe reste là comme une preuve indéniable mais ne
l'aide nullement à vivre selon cet enseignement qui lui coûterait, lui semble-t-il,
un horrible renoncement à lui-même et il préfère garder ses habitudes, qui sont
malgré tout bien agréables, quoiqu'elles ne soient fondées sur aucun signe.
7. Une condamnation se prépare donc pour celui qui exige qu'un miracle lui
procure les preuves indubitables contre lesquelles il ne peut trouver de preuves
contraires, si, dans sa façon de vivre, il agit contrairement à la vérité éternelle et
qu'il la bafoue réellement malgré le signe incontestable qui lui a été donné ; mais
alors il ne réussira pas à effacer de sa route le souvenir de ce signe qu'il vaudrait
mieux pour lui n'avoir jamais vu.
8. Fais autant de signes que tu voudras pour le bien et la piété des hommes, pour
autant qu'ils ne te sollicitent pas de le faire ; ce ne sera ni un péché, ni une
condamnation pour personne, mais si tu as fait des miracles pour éveiller la piété
des hommes, tu peux bien leur donner un enseignement, en admettant qu'ils en
supportent les exigences, et s'ils ne le supportent pas, mets-les seulement
sérieusement en garde contre le péché ! Ne vas pas plus loin, car ceux que tu
auras aidés te prendront pour un magicien et le signe n'aura servi à rien d'autre.
9. Tous ceux à qui sera donné le pouvoir de faire des miracles en cas d'urgence
devront suivre fidèlement ce conseil s'ils veulent véritablement faire le bien.
10. Que chacun se garde de se laisser emporter par la colère à faire des miracles.
Tout signe doit être fait avec la douceur et l'amour le plus authentique et le plus
pur. Tout signe fait avec colère ou avec dépit participe déjà de l'enfer et non
seulement il ne vaut aucune bénédiction mais il apporte la malédiction.
11. Comme Je vous l'ai déjà enseigné plus d'une fois, s'il faut bénir ceux qui vous
maudissent, d'autant moins devrait-on maudire les aveugles d'esprit qui sont
venus à vous sans aucune malédiction, si ce n'est dans l'aveugle vanité de leur
cœur.
12. Songez-y, faites-le et votre bénédiction s'étendra partout, sinon d'une manière
spirituelle, du moins physiquement comme Je l'ai fait, et comme Je le fais
toujours. Un bienfait purement physique agit souvent davantage sur le cœur et
l'esprit d'un malheureux qu'une centaine des meilleurs sermons. Pour répandre
l'Évangile, il est dans l'ordre des choses d'ouvrir le chemin du cœur des
malheureux par des bienfaits physiques pour commencer, et de ne leur prêcher
qu'ensuite l'Évangile lorsqu'ils sont heureux et en bonne santé, plutôt que
d'insister sur la prédication pour commencer, ou l'on finit par coincer les
malheureux auditeurs dans l'évidence de la condamnation que comporte le
miracle, et qui les précipite dans une misère pire que celle qu'ils connaissent
physiquement.
13. Lorsque tu es appelé auprès d'un malade, avant de prêcher, étends sur lui tes
mains pour qu'il se sente mieux et qu'ils te demande alors comment cela a été
possible. Tu lui diras alors : « Par la foi vivante dans le Nom de Celui que Dieu a
envoyé des cieux pour rendre les hommes véritablement bienheureux. » Et s'il
t'interroge à propos de ce nom, réponds-lui en te fondant sur sa faculté de
comprendre, de telle sorte qu'il se mette à entrevoir la possibilité d'une telle
manifestation.
14. Quand il en sera là, donne-lui alors progressivement de plus en plus d'in-
formations, et si, au cours de ces entretiens, tu découvres que le cœur de ton
auditeur s'éveille de plus en plus, dis-lui finalement tout et il acceptera certai-
nement et croira chacune de tes paroles ; alors que si tu donnes tout d'un seul
coup, il sera écrasé et la confusion de son entendement te rendra la tâche très
difficile.
15. De même qu'on ne donne pas à un nouveau-né la nourriture d'un adulte, car
elle serait mortelle pour lui, on ne donne pas à un jeune esprit la même nourriture
qu'à un esprit mûr. Il faut donner à l'enfant, une nourriture spirituelle à sa
mesure, sinon elle le tue et il est alors très difficile de lui rendre la vie de l'esprit.
Avez-vous bien compris, avez-vous tous saisi cela ? »
16. Ils disent tous d'un cœur ému : « Oui, Seigneur, c'est clair pour nous comme
le soleil à son zénith, et nous y veillerons très fidèlement. »
17. Je dis : « Bien, allons maintenant à cette grotte où les Pharisiens avaient
caché leur trésor, car dans cette grotte se trouve encore une autre grotte et nous
allons l'explorer. Prenez des torches en suffisance ainsi que du pain et du vin,
nous y trouverons des êtres affamés. »
Chapitre 4
Visite de la grotte et des stalactites
1. Kisjonah fait chercher tout cela, et Baram, qui ne pouvait plus nous quitter,
fait aussi chercher à ses gens le pain et le vin qui lui restent. Jairuth et Jonaël, qui
ne pouvaient également pas Me quitter, demandent à pouvoir se joindre à
l'expédition.
2. Et je leur dis : « Du reste, vous nous serez utiles ; et Ariel nous rendra un
service tout particulier. J'ajoute encore ceci : une députation de vos pires ennemis
est en train de quitter Sichar pour se rendre ici et vous inciter à rentrer. Car le
peuple s'est soulevé contre eux et a chassé avant-hier le prêtre récemment
nommé qui sera avec eux. Ils arriveront dès ce soir mais nous les ferons attendre
un peu. Mettons-nous en route maintenant. » Les femmes et les jeunes filles me
demandent à faire partie de l'expédition.
3. Mais je leur dis : « Mes chères filles, ce n'est pas une marche pour vous, restez
donc à la maison et veillez à nous préparer un copieux repas pour notre retour. »
Les femmes et les filles ainsi que Marie se déclarent satisfaites et vont s'occuper
du ménage. Lydia serait volontiers venue avec nous, mais, voyant que ce n'est
pas Ma volonté, elle reste à la maison et fait comme les autres.
4. Nous nous mettons en route. Quelques heures plus tard nous atteignons la
grotte ou la caverne où nous entrons aussitôt avec nos torches. Kisjonah s'étonne
de sa dimension et s'émerveille devant la formation des stalactites qui sont les
plus fameux de toute l'Asie Mineure où il y a pourtant une foule de grottes
semblables. Des formes gigantesques de toutes sortes apparaissent aux timides
visiteurs.
5. Faustus lui-même, qui pourtant ne manque ni de courage ni d'héroïsme romain
dit timidement qu'il pourrait se sentir malgré lui porté à croire que seules des
divinités vivant sous terre ont la force de sculpter des formes aussi gigantesques.
« Il y a là des silhouettes humaines, des animaux, des arbres, mais de quelle
dimension ! Que sont les temples géants et les statues de Rome à côté de tout
cela ! Cet Arabe-là, parfaitement sculpté, on mettrait une heure à vouloir grimper
jusque sur sa tête, et pourtant, il est assis ! J'ai le vertige à regarder sa tête, c'est
vraiment incroyable ! Le hasard ne peut tout de même pas avoir fait cela ? ! En
voici encore un groupe de guerriers avec leurs lances et leurs épées. Là-bas au
fond, surgit un éléphant énorme. La silhouette est parfaite ! Seigneur, Seigneur,
comment donc toutes ces merveilles ont-elles pu surgir ? »
6. Je dis : « Ami, regarde tout ce que tes yeux peuvent contempler, et ne pose pas
de questions, l'explication naturelle suivra tout à l'heure. Il y aura encore d'autres
choses qui t'étonneront bien davantage, mais ne pose pas de questions. Quand
nous serons ressortis, je vous éclaircirai toutes ces choses. »
7. Nous avançâmes et atteignîmes une autre salle plus vaste encore et bien
éclairée celle-là, par diverses sources de pétrole allumées de nombreuses années
auparavant par les hommes qui habitaient cette grotte. À ces grandes flammes
vacillantes s'ajoutait la lumière du jour qui parvenait au sommet de la voûte par
une faille. Ainsi cette grotte était-elle bien éclairée.
8. Le sol était également couvert de toutes sortes de figures, de serpents, de
crapauds géants et d'innombrables autres animaux plus ou moins bien formés,
ainsi que d'une masse de formations de cristaux de toutes les tailles et de toutes
les couleurs ; tout cela offrait un surprenant coup d'œil.
9. Faustus dit : « Seigneur, voilà un trésor impérial comme aucun empereur n'en
a jamais rêvé ! Mais c'est un véritable Tartare semblable à celui décrit par le
mythe grec. Il ne manque que le Styx, Charon le vieillard et les trois célèbres
juges implacables Minos, Eaque et Rhadamanthe, Cerbère le chien à trois têtes,
quelques Furies et pour finir Pluton avec la belle Proserpine, et tout ce Tartare
serait complet ! Ces feux qui jaillissent du sol et des parois, ces milliers
d'horribles formes d'animaux, bien que mortes et pétrifiées signifient que nous
sommes déjà dans le Tartare, ou du moins pas bien loin, et ce qui semble le plus
probable est que cette grotte pourrait bien être à l'origine du mythe grec. »
10. Je dis : « Il y a beaucoup de vrai dans tout ce que tu viens de dire, ou du
moins partiellement, car la plupart des autorités religieuses de tous les peuples
ont toujours été assez rouées pour savoir tirer parti de ce que leur offre la nature.
En Grèce comme à Rome, ils s'en sont servi pour donner libre cours à leur
fantaisie, et depuis bien longtemps ils aveuglent ainsi plus ou moins tous les
peuples de la terre.
11. Tant que la terre aura besoin de se représenter toutes sortes d'images
expressives, ses habitants, qui sont aveugles pour toutes sortes de raisons et dont
l'esprit craint la lumière, se forgeront dans les fantasmes de leur entendement
toutes sortes de caricatures auxquelles ils attribueront des vertus divines et des
effets extraordinaires, parce que, dans leur aveuglement, ils ne peuvent pas
reconnaître le fond des choses.
12. Mais regarde là ton Styx, le nautonier Charon et de l'autre côté de ce fleuve
large de douze brasses, qui n'est qu'une sorte d'étang profond d'une aune
seulement, facile à traverser à gué, tu peux en effet apercevoir dans la pénombre
les trois juges, quelques Furies, Cerbère, Pluton, Proserpine, mais ces figures
n'ont cette allure qu'à distance ; de plus près et mieux éclairées elles sont tout
autres que ce qu'en a fait la fantaisie humaine. Et sans payer son obole à Charon
le nautonier, allons à pied de l'autre côté du Styx, et nous contemplerons un peu
le Tartare ! »
13. Nous passâmes à gué ce Styx à un endroit peu profond et pénétrâmes par une
faille étroite dans le Tartare, où nous trouvâmes sous la lumière de nos torches un
énorme trésor ignoré de tous les Pharisiens, mettant ainsi au jour tout ce qui était
encore caché.
Chapitre 5
Histoire des trésors découverts dans la grotte
1. Faustus se prend la tête dans les mains, appelle Pilah et lui dit : « N'en avais-tu
donc aucune idée, que tu ne m'en aies jamais parlé ! Parle, sinon ça ira mal pour
toi. »
2. Pilah dit : « Seigneur ! Je n'en avais aucune idée, et jamais je ne suis allé si
avant dans la grotte. Les anciens en avaient sans doute connaissance, mais ils ont
tenu tout cela secret, et l'ont gardé peut-être en réserve, pour avoir de quoi payer
une rançon en dernier recours. Prends tout, Dieu soit loué, c'est à toi désormais !
»
3. Faustus Me demande si Pilah a dit la vérité, et Je confirme ce qu'a dit Pilah,
disant à Faustus : « Ami, quand quelqu'un épouse la fille d'un notable, il est en
droit d'attendre une dot ! Tu as eu beaucoup à faire et dans tous les partages que
tu as faits, il n'y a rien eu pour toi. Prends donc tout ce trésor pour toi, il vaut un
million de livres.
4. Les magnifiques perles, chacune grosse comme un œuf de poule, font
l'essentiel de sa valeur. Tout un coffre d'airain pouvant contenir mille drachmes
est rempli de ces perles dont chacune est d'une valeur inestimable. Actuellement,
la nature de cette terre ne forme plus de perles de cette grosseur, car les huîtres
qui les ont sécrétées, comme d'autres animaux préhistoriques n'existent plus. Ces
perles n'ont d'ailleurs pas été pêchées en mer, le roi Ninias, appelé aussi Ninus,
les a trouvées dans la terre en faisant creuser les fondations de la ville de Ninive.
Par toutes sortes de circonstances elles sont parvenues à Jérusalem du temps de
David et de Salomon et elles ont été cachées dans cette grotte à l'arrivée des Ro-
mains, quand ils ont envahi la Palestine.
5. Quand les grands prêtres ont appris l'arrivée des Romains, ils ont fait porter la
plupart des trésors dans cette grotte qu'ils connaissaient depuis longtemps. Les
lions d'or qui portaient le trône de Salomon et en gardaient les marches furent
ensevelis sous les décombres lors de la destruction du Temple par les Ba-
byloniens, mais ils furent retrouvés lors de la reconstruction, et ils sont en partie
ici, où ils furent transportés à la hâte lors de l'invasion des Romains, comme on
avait transporté une masse importante des trésors du temple à la grotte de
Chorazin, lors de l'invasion des Babyloniens qui trouvèrent pourtant au Temple
encore quantité de vases sacrés qu'ils emportèrent à Babylone. Donne l'ordre à
tes gens de tout sortir, ensuite Ariel condamnera l'entrée, pour que plus personne
ne puisse entrer. »
6. Faustus ordonne aussitôt à ses serviteurs de sortir tous les trésors, mais ils sont
incapables de soulever ces énormes coffres d'airain. Ils Me demandent alors de
bien vouloir leur en donner la force.
7. J'appelle Ariel, lui disant : « Emporte immédiatement toutes ces saletés à Kis
dans le grand magasin. » À l'instant même toutes ces nombreuses et lourdes
caisses disparaissent et, instantanément, Ariel est de retour sans que personne ait
pu s'apercevoir de son absence.
8. Faustus dit : « Voilà encore quelque chose de fabuleux ! Mes serviteurs
auraient mis trois jours à le faire, et en un imperceptible instant il ne reste plus un
coffre ! Je ne demande plus comment une telle action est possible, il faut un sens
divin pour comprendre un tel phénomène et en estimer la réelle valeur. »
9. Je dis : «Oui, oui, tu as raison, il ne serait du reste pas bon que les hommes
comprennent immédiatement les phénomènes qu'ils observent, car il est écrit :
"Tu mourras si tu veux manger de l'arbre de la connaissance." Aussi vaut-il
mieux prendre chaque miracle pour ce qu'il est, à savoir que rien n'est impossible
à Dieu, et ne pas vouloir expliquer les causes et les effets et donner des
explications qui n'en sont pas.
10. Il suffit de voir que la Terre est là pour porter les humains et les nourrir ! Si
tu savais à fond comment la Terre a été faite, elle en perdrait pour toi son attrait
et tu n'y trouverais plus aucun plaisir, tu n'aurais qu'une envie, aller voir ailleurs,
et si tu comprennais l'origine et les fondements d'une autre Terre, tu passerais à
une troisième, puis à une quatrième et à une cinquième ! Tu verrais alors que ce
sont toujours les mêmes, et tu n'aurais plus alors envie d'en découvrir une
sixième et une septième; tu finirais par tomber dans une apathie, un ennui et un
dégoût de vivre qui te feraient exécrer ton existence et maudire l'heure depuis
laquelle tu t'es laissé prendre par la connaissance. Pour ton âme, ce serait pire
que la mort !
11. Mais comme tout est régi selon l'ordre divin, l'esprit de l'homme aussi bien
que celui de l'ange ne perçoit que peu à peu la nature divine en lui-même et dans
les choses créées, ainsi garde-t-il toujours plus le goût de vivre et cet amour pour
Dieu et pour le prochain qui seul peut lui donner la félicité ! Comprends-tu ? »
12. Faustus dit : « Oui Seigneur, mon ami, je comprends parfaitement et je ne Te
demanderai plus comment les figures de cette grotte se sont constituées. »
Chapitre 6
Formation des stalactites
Chapitre 7
Faustus contrôle l'inventaire des trésors
1. Le repas terminé, sur Mes instances, Faustus alla voir si les trésors rapportés
de Kis par Ariel étaient rangés en bon ordre. Tout était parfaitement rangé à côté
d'un grand inventaire de tous les trésors avec leur estimation et l'ordre où ils
avaient été trouvés dans la grotte. Faustus demanda aux gardiens : « Qui a dressé
cet inventaire ? »
2. Les gardiens répondent : « Seigneur, nous l'avons trouvé ici quand nous avons
été placés comme gardiens, et nous ne savons que te répondre ! »
3. Faustus demande encore : « Dites-moi comment ces trésors sont venus et qui
les a apportés. »
4. Les gardiens disent : « Nous n'en savons rien, simplement, un jeune homme
que nous avons vu ces jours derniers en compagnie du médecin de Nazareth qui
fait des miracles est venu nous donner l'ordre de monter la garde près de ces
trésors. Ensuite, le juge subalterne a confirmé l'ordre, et nous voilà ici depuis
deux heures à monter la garde sans savoir un traître mot de la provenance de ces
trésors. »
5. Faustus se rend auprès du juge subalterne, l'inventaire en mains, pour lui poser
la même question. Mais le juge subalterne ne sait rien de plus. Faustus,
constatant que personne ne sait d'où proviennent ces trésors, se dit en lui-même :
« Du moment qu'ils ne savent rien, je ne vais pas attirer davantage leur attention,
pour que la chose ne s'ébruite pas dans le peuple. »
6. Faustus retourne alors à sa demeure où sa jeune femme l'attend les bras ou-
verts. Mais avant d'aller se reposer, il vient encore à Moi pour parler d'affaires
importantes ; mais je l'invite à revenir le lendemain et à aller trouver le repos de
son âme et de son corps, qui en ont besoin. Faustus alors va se reposer comme
tout le monde.
7. Dans le profond sommeil, la nuit tire vite à sa fin. Ce fut ici aussi le cas. On
croit s'être endormi depuis quelques minutes et déjà la lumière du jour vous
appelle à quitter les douceurs du lit pour reprendre les affaires du jour. Le petit
déjeuner préparé de grand matin fit sortir chacun du lit et réunit tout le monde
dans la salle à manger. Après le repas, pour la première fois, tous Me rendirent
grâce au nom de Jahvé comme David qui disait (Psaume 33) :
8. « Justes, réjouissez-vous dans le Seigneur. La louange convient aux hommes
droits. Célébrez le Seigneur avec la harpe, louez-le sur la lyre à dix cordes,
chantez-Lui un cantique nouveau, accompagnez-vous de vos instruments à
cordes et de vos cymbales; car la parole du Seigneur est juste, et ce qu'il dit, Il le
tient. Il aime la franchise et l'amour de la justice. La terre est pleine des bienfaits
du Seigneur. Les cieux ont été créés par la parole du Seigneur et toute Son armée
par le souffle de Sa bouche. C'est Lui qui tient l'eau rassemblée dans les mers
comme dans un réservoir et relègue les profondeurs dans ce qui est caché. Toute
la terre craint le Seigneur, tout tremble devant Lui, car Il fait ce qu'il dit, ce qu'il
ordonne arrive. Le Seigneur déjoue les desseins des nations, Il anéantit les pro-
jets des peuples. Mais les desseins de l'Éternel subsistent à jamais, les pensées de
Son cœur durent d'âge en âge. Heureuse la nation dont le Seigneur est le Dieu,
car Il S'est choisi ce peuple pour héritier. Le Seigneur regarde du haut des cieux
et voit tous les enfants des hommes. De son trône inébranlable Il voit tous ceux
qui demeurent sur la terre, Il conduit leur cœur et Il est attentif à leurs œuvres. Ce
n'est pas à ses armées qu'un roi doit son pouvoir, ce n'est pas à sa force qu'un
géant doit sa victoire ! Le cheval est une vaine monture et sa puissance n'est
d'aucun secours ! Car l'œil du Seigneur ne se pose que sur ceux qui Le craignent
et qui mettent leur espoir en Lui, pour qu'il les délivre de la mort de leur âme, et
qu'il les nourrisse dans la famine. Notre cœur se réjouit dans le Seigneur et nous
mettons notre confiance dans Son saint Nom ! Que Ta grâce soit sur nous ô
Seigneur, sois au-dessus de nous puisque nous mettons en Toi notre espérance. »
Chapitre 8
Du royaume des cieux
1. Après qu'ils M'ont tous rendu cette louange matinale, Faustus, qui est évi-
demment présent, Me demande : « Mais d'où Tes disciples tiennent-ils ce chant
de louanges qu'ils T'ont adressé ! Je n'ai jamais entendu quelque chose d'aussi
divin ! »
2. Je dis : « Procure-toi par les Pharisiens les Saintes Écritures et lis les psaumes
de David, tu y trouveras tout cela ! Le chef Jaïrus à qui nous avons encore affaire
aujourd'hui, te les donnera. Il y a deux jours, ils ont porté sa fille en terre car il l'a
perdue. Il regrette profondément son péché contre Moi; il mérite donc d'être aidé,
car il ne doit pas être perdu pour le royaume des cieux. »
3. Faustus demande : « Seigneur, qu'est-ce que ce royaume, où se trouve-t-il ?
4. Je dis : « Oui, mon cher ami, pour les vrais amis de Dieu, le véritable royaume
de Dieu se trouve partout, tandis qu'il n'est nulle part pour les ennemis de Dieu,
pour qui tout est enfer. Où que tu tournes tes yeux ou tes sens, que tu le veuilles
ou non, en haut, en bas, peu importe, tout est enfer. Que tu lèves tes yeux vers les
étoiles qui sont des terres comme celle que tu foules aux pieds, ou que tu
abaisses tes regards vers cette Terre qui est condamnée comme ta chair qui devra
mourir un jour et disparaître, cherche et fouille dans ton cœur, tu y trouveras ce
que tu cherches. Car dans le cœur de chacun a été déposé la graine vivante d'où
doit se lever l'aurore infinie de la vie éternelle.
5. Regarde, l'espace où cette Terre est suspendue comme le Soleil, la Lune et les
étoiles innombrables, qui ne sont que d'autres soleils et d'autres terres, est infini !
À la vitesse de la pensée, tu pourrais quitter cette Terre et aller en droite ligne
d'éternité en éternité, que tu n'arriverais jamais au bout, ! Mais partout, tu
rencontrerais les êtres les plus étranges et les plus merveilleux qui peuplent
l'espace infini.
6. Après la mort de ton corps, tu pénétreras par ton cœur dans l'espace infini de
Dieu, et selon ton cœur tu trouveras le ciel ou l'enfer.
7. Il n'existe nulle part de ciel ni d'enfer proprement constitués. Tout provient du
cœur de l'homme. Chacun se prépare son ciel ou son enfer, selon qu'il fait le bien
ou le mal, chacun vivra la foi qu'il aura professée et mise en pratique, la foi dont
il aura nourri sa volonté et qui sera passée dans ses actes.
8. Que chacun sonde les inclinations de son cœur. Il verra facilement de quel
esprit il est rempli. Celui dont les inclinations de son cœur l'attirent à aimer le
monde et lui inspirent l'ardent désir d'y jouer un grand rôle, que la pauvre hu-
manité déplaise à son cœur orgueilleux ou qu'il se sente poussé à dominer les
autres sans avoir été choisi et oint par Dieu pour régner, celui-là a déjà le germe
de l'enfer en lui, et s'il ne le combat pas et ne l'extirpe pas, il ne se prépare
manifestement que l'enfer après la mort de son corps.
9. Mais que le cœur de l'homme soit plein d'humilité et qu'il se plaise à être le
plus petit parmi les hommes, qu'il les serve tous sans se prêter aucune attention à
lui-même, par amour pour ses frères et sœurs, avec la volonté d’obéir à son chef
en toute chose, de venir en aide aux besoins de son prochain, et qu'il aime ainsi
Dieu par-dessus tout, la divine semence croîtra dans son cœur en un véritable ciel
éternel et vivant. Celui dont le cœur renferme le ciel tout entier dans la plénitude
de la foi véritable, de l'espérance la plus pure et de l'amour, après la mort du
corps, ne peut aboutir ailleurs que dans le céleste royaume de Dieu. Si tu prends
cela en considération, tu comprendras facilement quelle est la nature toute
particulière du royaume des cieux et de l'enfer. »
10. Faustus dit : « Seigneur très grand, très sage maître, mon ami, Tes paroles
semblent véritablement très sages, mais je ne puis cette fois en comprendre toute
la profondeur. Que le ciel et l'enfer puissent en quelque sorte cohabiter au même
endroit jusqu'à ce que l'un ou l'autre se manifeste paraît encore une chose
impossible pour moi, qui pense encore de façon très matérielle. Que le bonheur
ou le malheur infinis puissent s'épanouir dans mon cœur est la plus incompré-
hensible des choses. C'est pourquoi il me faut Te prier de bien vouloir encore me
donner de plus amples explications, sinon je repartirai d'ici aveugle en plein jour.
»
Chapitre 9
Jésus donne des exemples du ciel et de l'enfer
Du pouvoir des rois et du pouvoir des dictateurs
1. Je dis : « Prends bien garde, Je tiens à ce que tu rentres chez toi les yeux
avertis.
2. Ecoute : dans une maison habitent deux frères, l'un content de tout ce qu'il fait
pousser à la sueur de son front sous la bénédiction de Dieu, l'autre, le plus
malheureux des hommes, qui ne croit en aucun Dieu. Le premier, joyeux et
content, jouit du maigre produit de sa peine et sa plus grande joie est de partager
son frugal repas avec son frère plus pauvre que lui. Lorsqu'un affamé vient à lui,
il est heureux de pouvoir le rassasier sans jamais lui demander avec aigreur la
cause de sa misère, sans jamais lui interdire de revenir.
3. Jamais il ne maugrée contre les institutions de l'État et quand il doit payer ses
impôts, il loue le Seigneur en disant comme Job : « Tout ce que Tu m'as donné
est à Toi ! Ce que Tu m'as donné, Tu peux le reprendre ; que Ta sainte volonté
soit faite ! »
4. Bref, rien ne trouble cet homme dans la joie de son amour, dans sa confiance
en Dieu et dans son amour du prochain. Colère, envie, jalousie, haine, dispute,
orgueil lui sont des concepts étrangers.
5. Son frère, cependant, dit que Dieu est un concept dénué de sens et que les
hommes l'utilisent pour définir le plus haut degré de l'héroïsme terrestre. Dans la
pauvreté, seul un imbécile peut se dire heureux, comme les animaux dénués
d'entendement et de raison sont heureux, tant qu'ils peuvent maigrement pourvoir
aux besoins de leur nature insensible et muette. Mais l'homme qui, par son
entendement, s'est élevé bien au-dessus du règne animal, ne doit plus se
contenter d'une nourriture de cochon, il n'a plus à gratter la terre de ses propres
mains comme un esclave et un animal, mais il saisit son épée et la brandit en
héros puissant sous les arcs de triomphe des grandes capitales qu'il a conquises.
La terre doit trembler sous les fers de son cheval tout caparaçonné d'or et de
pierreries qu'il monte en puissant conquérant gonflé d'orgueil.
6. Voilà avec quels sentiments cet homme en vient à exécrer sa pauvre existence,
maudissant en son cœur la pauvreté, et calculant le moyen d'acquérir de gros
trésors et de grandes richesses pour réaliser ses idées de conquête.
7. Il méprise son frère qui est heureux, et tout misérable lui est odieux. Il
n'éprouve pas la moindre pitié envers lui, il le traite d'esclave, de lâche, de honte
de la société. Il pense que la magnanimité sied à l'homme — à condition de rester
exceptionnelle ! Quand un pauvre vient à lui, il l'abreuve d'insultes et lui dit : «
Arrière, fainéant, monstre glouton déguisé en gueux ! Travaille donc, animal, si
tu veux avoir ta mangeaille ! Va trouver ce frère de ma chair qui n'a rien réussi et
qui m'est un parfait étranger : ce n'est qu'une bête de somme qui travaille pour
ses semblables avec une générosité qui me fait honte. Je suis magnanime et je te
laisse pour cette fois ta vulgaire vie de vermisseau ! »
8. Regarde ces deux frères, enfants du même père et de la même mère, vivant
dans la même maison ; le premier un ange, l'autre presque un diable. Pour l'un la
pauvre cabane est un paradis, pour l'autre le pire des enfers et des tourments. Et
voilà comment l'enfer et le paradis peuvent cohabiter !
9. Bien sûr, tu diras : "Eh, bien qu'est-ce à dire ? Qu'on laisse le frère ambitieux
s'emparer du trône, il sera capable de protéger les peuples et de battre l'ennemi !"
Oh oui, c'est possible ! Mais quelle mesure lui dictera jusqu'où il doit aller, que
fera-t-il des hommes qui ne voudront pas se prosterner devant lui ? Vois-tu, il les
fera torturer de la pire des manières et il ne prendra pas plus garde à la vie
humaine qu'à un brin d'herbe foulé aux pieds. Qu'est-ce qu'un tel homme ? Vois-
tu, c'est un démon.
10. Il faut bien qu'il y ait des chefs et des conquérants, mais comprends qu'ils
doivent être choisis et appelés par Dieu dans la lignée des familles de rois qui ont
été oints. Mais malheur à celui qui délaisse sa pauvre cabane et se hâte par tous
les moyens d'obtenir le bâton de maréchal ! En vérité, il vaudrait mieux pour lui
n'avoir jamais vu le jour.
11. Je veux encore te donner une image du royaume de Dieu. Il est semblable à
une bonne terre où poussent et mûrissent aussi bien la vigne que les épines et les
chardons qui se partagent la bonne terre. Toute la différence tient à l'utilisation
de cette terre. Le pampre l'utilise bien, l'épine l'utilise mal, le chardon ne donne
rien d'utile et d'agréable à l'homme.
12. Le ciel influence donc autant le diable que l'ange, mais chacun utilise cette
influence à sa manière.
13. Le ciel est encore semblable à un arbre fruitier portant de bons fruits. Mais
lorsque les gens viennent sous ses branches richement bénies pour goûter ses
fruits, les uns n'en consomment que modérément, selon leurs besoins et avec
reconnaissance, tandis que d'autres, alléchés par ces fruits ne veulent rien laisser
sur l'arbre, et, par leur envie empêchent les tempérants d'y trouver encore
quelque chose. Ils mangent jusqu'à la dernière pomme à en être malade et même
à finir par en mourir, tandis que ceux qui auront su modérément jouir des fruits
de l'arbre se sentiront bien et seront fortifiés ! Pourtant, dans les deux cas, ils
auront mangé du même arbre.
14. Le ciel est comme un bon vin qui fortifie l'homme tempérant mais qui dé-
prave l'intempérant et le tue ; le même vin est un paradis pour l'un et le pire des
enfers pour l'autre, et pourtant ils ont bu au même goulot.
15. Dis-Moi, mon ami, si tu comprends ce qu'est le ciel et ce qu'est l'enfer ! »
Chapitre 10
La loi de l'ordonnance
1. Faustus dit : « Cela commence à devenir plus clair pour moi ! Dans tout
l'infini il n'y a qu'un grand Dieu, qu'une seule force, qu'une ordonnance étemelle.
Pour l'homme qui fait sienne cette loi, tout est ciel, mais tout est enfer, tourment
et martyre à qui veut s'y opposer. »
2. Je dis : « Oui, c'est ainsi ! Le feu est un élément utile : à celui qui sait en user à
propos et avec sagesse, le feu rend des services incalculables dont il serait trop
long d'énumérer tous les avantages. Mais que quelqu'un s'avise d'en user à la
légère ou s'amuse à mettre le feu aux toitures et aux forêts, le feu détruit tout,
saccage tout.
3. En hiver, quand il gèle, chacun aime à s'approcher de la cheminée pour se
chauffer au coin du feu pétillant, mais qui tombe dans les flammes meurt
consumé.
4. Et je dis encore ceci : pour devenir véritablement enfants de Dieu, les hommes
de cette terre doivent passer par l'épreuve de l'eau et du feu. Le ciel dans son
essence originelle est eau et feu. L'eau tue tout ce qui n'est pas apparenté à l'eau,
et tout ce qui n'est pas de feu ne peut résister au feu ! »
5. Faustus dit: «Seigneur, voilà encore que je ne comprends pas ! Comment peut-
on être eau et feu à la fois ? Il est connu que l'eau et le feu sont les éléments les
plus contraires ; l'un anéantit l'autre. Si le feu est puissant, l'eau dont on l'arrose
se change en vapeur et en air, et si l'eau est plus puissante que le feu, c'est lui qui
s'éteint sous la pression de l'eau qui l'inonde. Mais si, pour être semblable au ciel,
il faut être à la fois eau et feu, ne doit-on pas finir par se dissoudre ? Qu'en est-il
alors de la vie éternelle ? »
6. Je dis : « Oh ! c'est très simple ! Il faut avoir une juste proportion de l'un et
l'autre, et l'un et l'autre se maintiennent réciproquement. Car vois-tu, s'il n'y avait
pas de feu dans la Terre et autour de la Terre, il n'y aurait pas d'eau, et s'il n'y
avait pas d'eau dans la Terre et autour de la Terre, il n'y aurais pas non plus de
feu, car l'un engendre continuellement l'autre.
7. Faustus demande : « Comment cela ?»
8. Je dis : « Ôte à la Terre tout le feu d'où provient toute chaleur, et la Terre
deviendra un bloc de glace dur comme le diamant, où plus aucune vie ne sera
possible; et retire toute l'eau de la Terre, elle sera bientôt réduite en poussière.
Car sans eau le feu ne subsiste pas, alors qu'il est indispensable pour que la vie se
reproduise, et la mort et la putréfaction triomphent là où la création et la
reproduction sont devenues impossibles.
9. Observe un arbre qui perd sa sève, tu le verras rapidement dépérir puis dis-
paraître. Comprends-tu ? »
10. Faustus dit : « Oui, Seigneur, nous comprenons tout cela, et reconnaissons
que Tu es plein de l'esprit divin. Tu es le créateur de toute chose, car qui pourrait
expliquer comme Toi toutes ces lois qui régissent une telle création ? Le Créateur
seul peut l'expliquer aussi clairement, car Il porte en Lui l'Esprit dont toute chose
est faite et constituée. Que saurais-je faire d'autre, moi pauvre et faible pécheur ?
Je ne puis que Te remercier du fond du cœur pour les bienfaits spirituels et
matériels dont Tu m'as comblé, Toi le Seigneur de l'infini ! »
11. Je dis : « Tu as raison, mais garde pour toi tout ce que tu as vu et compris ici.
Ne Me fais pas connaître avant l'heure, et n'oublie pas les pauvres dans ton
bonheur terrestre. Ce que tu fais aux pauvres en Mon nom, c'est à Moi que tu le
fais, et cela te sera rendu au ciel. Maintenant que nous avons terminé tout ce qu'il
y avait à faire et à démêler ici, à Kis, mettons-nous en route pour Nazareth. »
Chapitre 11
Départ pour Nazareth
Mathieu 13, 53
1. Faustus dit : « Je vais donner mes ordres pour que mes affaires soient portées
sur le bateau. »
2. Je dis: «C'est déjà fait ! Comme tes deux bateaux ne suffisaient pas, Baram et
Kisjonah ont affrété leurs deux gros bateaux, et tout est prêt pour le départ. »
3. Faustus dit : « Je ne m'étonne plus de rien, car rien n'est impossible au Tout-
Puissant. »
4. Jonaël, Jaïruth et Ariel s'approchent de Moi pour Me remercier. Ils prennent
congé et lorsqu'ils se mettent en route pour Sichar, une députation que je leur
avais annoncée les aborde avec tous les honneurs, suppliant à genoux Jonaël de
bien vouloir reprendre son service de grand prêtre. Jonaël et Jaïruth se sou-
viennent alors de ce que Je leur avais annoncé.
5. Quant à nous, lorsque J'eus répété ces images du royaume des cieux et quitté
les Sicharites, après avoir fait Mes adieux, avec la promesse que Je reviendrais, à
Kisjonah qui, sur Mes instances, n'accompagnait pas Faustus et restait cette fois
chez lui, nous nous rendîmes avant midi, en deux heures, avec Faustus et sa
jeune femme qui prirent place sur Mon bateau, dans les environs de
Capharnaüm, c'est-à-dire au lieu qui servait de débarcadère à Capharnaüm aussi
bien qu'à Nazareth, qui était tout à côté.
6. Quand nous fûmes à terre, Faustus dit : « Seigneur, je vais venir avec Toi à
Nazareth pour rendre leur demeure à Ta mère et à Tes frères et sœurs. »
7. Je dis : « C'est déjà fait, comme tu trouveras également que tout a été mis dans
l'ordre le plus parfait aussi bien chez toi que dans ta juridiction. Car Mon Ariel a
démêlé toutes tes affaires. Va à Capharnaüm, et si le chef Jaïrus vient te trouver
— ce qui ne va pas manquer — pour se faire plaindre, dis-lui que Je suis à
Nazareth pour quelque temps et que s'il veut quelque chose, il n'a qu'à venir Me
trouver, à condition d'être seul. »
8. Faustus dit : « Ne pourrai-je pas l'accompagner moi aussi ? »
9. Je dis : « Oh oui ! Mais toi uniquement. » Sur ce, nous nous séparâmes.
10. Je me rendis avec tous Mes nombreux disciples à Nazareth, dans Ma partrie
terrestre, et Faustus fit venir une foule de porteurs et d'emballeurs, avec des
chariots pour transporter tous ses trésors à sa maison de Capharnaüm. Inutile de
dire quelle sensation il fait dans Capharnaüm, si richement chargé, au bras d'une
épouse si magnifique ! On devine aussi que Jaïrus, le chef des Pharisiens, qui
était au courant du passage des douze Pharisiens en route pour Jérusalem et qui
savait que Faustus avait été appelé à Kis à leur sujet, vient à sa rencontre.
11. Faustus le reçut avec beaucoup de respect et lui dit : « Un honnête homme a
été sauvé, et ce que ces Pharisiens ont pris aux pauvres Juifs leur a été rendu à un
stater près. Onze de ces Pharisiens jouissent désormais au Temple de Jérusalem
du sort qu'ils méritent pour toutes leurs tromperies et leurs brigandages. Il serait
trop long de te raconter tous les méfaits qu'ils ont commis, mais si un jour tu en
as le loisir, viens lire toi-même les nombreux rapports qui ont été faits, tes
cheveux s'en dresseront sur ta tête. Maintenant autre chose. Qu'en est-il de ta fille
? Vit-elle encore, ou est-elle morte ? »
12. Très attristé, Jaïrus se mit à pleurer en disant : « Ô mon ami, pourquoi me le
rappeler ! Malheureusement, oui malheureusement je l'ai perdue, aucun médecin
n'a pu la secourir. Borus, le seul médecin de Nazareth a dit qu'il aurait pu le faire,
mais il ne l'a pas voulu parce que j'ai été trop dur et que j'ai trop péché envers
Jésus, son ami, son maître. Aussi ma fille adorée est morte. C'était à vous
déchirer le cœur d'entendre la mourante appeler Jésus à son aide et me reprocher
d'avoir si gravement péché envers Jésus, ce grand bienfaiteur de l'humanité
souffrante. J'ai tout fait pour trouver Jésus pour qu'il la sauve, mais Jésus n'a pas
voulu entendre mes messagers ; je me suis pourtant mille fois amèrement repenti
d'avoir péché contre lui. Maintenant tout est perdu, elle gît dans la tombe depuis
quatre jours et sent comme la peste. Que Dieu ait pitié de sa belle âme et lui fasse
grâce. »
13. Faustus dit : « Ami ! Je te plains de tout mon cœur, il est vrai, mais je puis
aussi te dire que Jésus le Seigneur tout-puissant est en ce moment à Nazareth. À
Lui rien n'est impossible, j'en ai fait maintes fois l'expérience. Pourquoi n'irais-tu
pas Le trouver toi-même? Je te le dis, Il est assez puissant pour pouvoir rappeler
ta fille de la tombe à la vie. »
14. Jaïrus dit : « Et même si ce n'était plus possible, je veux y aller et Lui de-
mander mille fois pardon de l'avoir malgré moi offensé et trompé. »
15. Faustus dit : « Bon, viens avec moi, nous allons le trouver à Nazareth dans la
maison de Sa mère. Mais Il a spécifié que personne ne nous accompagne. »
Jaïrus, plein d'espoir, accepte l'offre de Faustus. Ils font aussitôt seller deux
mules et galopent aussi vite que possible jusqu'à Nazareth, où ils arrivent
quelques heures avant le coucher du soleil. Ils laissent leurs mules à une auberge
et se rendent à pied à la maison de Ma mère, où ils Me trouvent avec Borus, qui
était un des premiers parmi les Nazaréens à être venu M'accueillir à bras ouverts,
ayant appris Mon arrivée ce jour-là..
16. Lorsque Faustus entre avec Jaïrus dans la chambre, ce dernier se met aussitôt
à pleurer. Il tombe à Mes pieds pour Me demander de lui pardonner l'ingratitude
qu'il a montrée envers Moi.
17. Je lui dis : « Lève-toi, ton offense est pardonnée, mais ne pèche pas une
seconde fois. Où ta fille est-elle ensevelie ? »
18. Jaïrus dit : « Tu sais que j'ai fait construire non loin d'ici, pour les enfants du
pays une école avec une petite maison de prière où j'ai fait faire pour moi un
tombeau. Comme ma fille est morte avant moi, je l'ai fait porter dans ce tombeau
qui n'a encore jamais servi. Ce tombeau est à deux mille pas à peine! Si Tu
désires le voir, Seigneur, cela me comblerait de joie, sinon j'en mourrai de
chagrin. »
19. Je dis : « Mènes-y Moi maintenant ! Mais que personne d'autre que toi et
Faustus ne M'y suive ! »
20. Les disciples présents demandent s'ils ne peuvent pas nous accompagner.
21. Je dis : « Pas cette fois-ci. Personne d'autre que les deux qui sont concernés.
»
22. Borus dit : « Seigneur Tu sais que je suis muet comme une carpe. Qu'est-ce
que cela fait si je vous accompagne, moi qui suis médecin ! »
23. Je lui dis : « J'en reste à ce que J'ai dit, nous trois et personne d'autre ! »
Chapitre 12
Deuxième résurrection de Sarah
1. Jaïrus referme le tombeau, tire la porte du caveau derrière lui et s'en vient avec
nous. Mais le gardien chez qui Jaïrus est allé chercher la lumière vit à soixante-
dix pas de là, dans cette école de la maison de prière.
2. Comme la soirée est éclairée par la lune montante, le gardien aperçoit aussitôt
la fille de Jaïrus marchant gaiement à Mon côté avec sa traîne blanche. Horrifié,
il dit à Jaïrus : « Qu'est-ce donc? Que vois-je? N'est-ce pas Sarah, votre fille qui
est morte ? N'était-elle donc morte qu'apparemment, cette fois encore ? »
3. Jaïrus dit : « Quoi qu'il en soit, tu ne doit pas poser de questions, mais garder
un silence absolu sur tout ce que tu vois, si tu ne veux pas perdre ton travail.
Imprègnes-en ton âme, pense, saisis, comprends que pour Dieu toutes choses
sont possibles. Mais il faut une foi et une confiance absolue. As-tu compris ? »
4. Le gardien dit : « Oui, très honorable maître ! »
5. Jaïrus dit : « J'en ai par-dessus la tête de toutes ces formules de politesse.
Parle-moi donc comme à un frère, et maintenant que tu n'as plus de cadavre à
garder, hâte-toi d'aller trouver ma femme à Capharnaüm. Ne lui raconte pas ce
que tu as vu, ni à personne d'autre, mais dis-lui seulement de se rendre à
Nazareth, dans la maison de Joseph, où j'aurai des choses graves à lui dire.
Prenez de bonnes mules afin de vous rendre plus rapidement à la maison du
charpentier. »
6. Le gardien, qui possède lui-même un âne, bride et selle sa monture et se hâte
d'aller à Capharnaüm trouver la femme de Jaïrus qui se lève tristement pour
suivre le messager. Les ânes trottent bien et en une heure à peine ils atteignent
Nazareth et la maison de la mère de Ma chair, tout heureuse d'avoir retrouvé
l'ancienne petite maison de Joseph. Lorsque la femme de Jaïrus arrive dans la
salle où nous sommes assis devant un bon repas commandé cette fois par l'ami
Borus, elle voit sa fille Sarah toute joyeuse et contente, dégustant à Mes côtés
avec un gros appétit du poisson sans arêtes servi avec du sel, de l'huile et un peu
de vinaigre.
7. La femme n'en croit pas ses yeux et dit après quelques instants, en tapant sur
l'épaule de son mari : « Jaïrus, mon époux, voilà ta triste femme à les côtés pour
entendre ce que tu as d'important à lui dire, mais je devine déjà la gravité de ce
dont il s'agit. Dis-moi, mon mari, si je rêve ou si c'est la réalité ! La fille assise à
côté de Jésus et qui semble avoir si bonne mine, n'est-elle pas le portrait de
Sarah, notre fille qui est morte ? Oh Jahvé, pourquoi m'as-tu repris Sarah ? »
8. Jaïrus, tout aussi ému, dit à sa femme : « Sois consolée, femme que j'estime
tant ! Non seulement cette fille ressemble trait pour trait à notre fille, mais c'est
elle, très sérieusement ! L'esprit divin du Seigneur Jésus l'a réveillée une seconde
fois, et si elle a bonne mine, c'est par la force incroyable de Dieu. Ne trouble pas
son appétit, elle a jeûné assez longtemps.
9. La femme, au comble de l'émerveillement et de la joie, dit : « Dis-moi, toi qui
es un maître sage en Israël, que penses-tu de ce Jésus ? Il me semble de plus en
plus qu'il s'agit, malgré son humble naissance, du Messie de la Promesse, car
jamais aucun prophète n'a fait chose pareille ! »
10. Jaïrus dit : « Oui, oui, c'est cela ! Mais il s'agit de garder le silence le plus
absolu, puisqu'il le veut ainsi Lui-même ; car si cela s'ébruitait, nous aurions tout
Jérusalem et Rome à nos trousses, à moins qu'il n'y oppose Sa divine puissance !
Femme, sois donc muette comme un mur de silence. Il ne faut pas que Sarah
trahisse son maître en se faisant voir ; elle restera en bonne santé si elle demeure
au moins un an sous Sa garde et Sa bonne conduite ou sous celle de sa très chère
et très sage mère Marie. Nous n'irons la voir que de temps à autre. En vérité,
nous n'avons plus aucun droit sur elle ! Car avec notre stupide volupté, quand
nous avons dormi ensemble, nous n'avons su que lui donner une vie de malade !
Dieu nous avait donné cette divine Sarah, douée d'une âme si parfaitement saine
! Mais nous lui avons transmis un corps physique faible et maladif. Elle est morte
par deux fois, et nous l'aurions perdue pour toujours s'il ne lui avait rendu par
deux fois une vie neuve et saine. Maintenant, la question est de savoir qui sont
son père et sa mère : Lui ou nous qui sommes de pauvres pécheurs ! »
11. La mère de Sarah dit : « Oui, tu es sage, tu connais la loi et les prophètes,
c'est pourquoi tu as toujours raison en toute chose ; mais pour moi, c'est une
bénédiction qu'elle vive à nouveau et que nous puissions la voir de temps à autre.
»
12. Jaïrus dit : « Taisons-nous, le repas est terminé et peut-être va-t-il parler ! »
13. J'appelle alors Faustus et lui dis : « Ami et frère, Je regrette beaucoup que tu
ne puisses passer ici la nuit, mais de grosses affaires t'attendent chez toi et Je dois
te laisser. Mais reviens donc quelques jours, et si on te parle de Moi, tu sais ce
que tu as à dire ! »
14. Faustus dit : « Seigneur, Tu me connais mieux que moi-même, Tu peux donc
T'en remettre à moi, car le roseau qui plie au moindre souffle n'est pas romain. Si
je dis oui, la mort ne me fera pas dire non ! Mais j'y vais. Ma monture est encore
sellée et bridée, en une petite heure je serai sur place. En Ton nom, Ô mon très
grand ami Jésus, le travail qui m'attend sera vite accompli. Je m'en remets
entièrement à Ton unique amour, à Ta sagesse et à Ta divine puissance. » Sur ce,
Faustus prend congé et sort précipitamment.
15. La mère de Sarah, très émue, s'avance alors vers Moi et Me remercie du fond
du cœur pour cette grâce aussi imméritée.
16. Je la console et dis à Sarah : « Ma petite fille, voici ta mère. »
17. Sarah se lève, salue tendrement sa mère, lui faisant aussitôt remarquer qu'elle
restera avec Moi, car elle M'aime trop pour pouvoir se séparer de Moi. La mère
et le chef Jaïrus louent leur chère petite, et expriment leur souhait qu'elle ne les
oublie pas complètement. Sarah leur donne la plus fidèle assurance qu'elle les
aime dorénavant davantage. Les parents, infiniment contents, se sentent
tranquillisés et embrassent leur fille.
Chapitre 14
De la différence entre la puissance de Dieu et la puissance de l'homme
1. Philopold se plia à mon ordre d'aller se reposer, mais il n'eut évidemment pas
un bon sommeil, tant son âme avait vécu de choses ce jour-là ; de plus il n'avait
pas un des meilleurs gîtes, les huissiers ayant tout emporté sauf un peu de paille,
il ne nous restait qu'une maison littéralement vide. Pendant la résurrection de
Sarah, Borus, Mes frères et d'autres disciples avaient été très occupés à aménager
un campement et à fournir tables, bancs, ustensiles de cuisine et vaisselle en
suffisance. Mais il y avait là près de cent personnes dont beaucoup dormaient en
plein air ou dans des auberges et des maisons du voisinage, et il n'était pas
possible de procurer à tant de monde le plus strict nécessaire.
2. Moi-même, Je passai cette nuit-là sur un banc avec un peu de paille sous la
tête et Philopold dormit par terre, sans paille. Le matin venu, il fut aussi l'un des
premiers sur pied.et Jaïrus qui avait eu une assez bonne couche de paille, ainsi
que sa femme et sa fille, demanda à Philopold comment il avait dormi sur le sol
dur.
3. Philopold répondit : « Comme le sol le permet ! Mais tout est affaire
d'habitude. En un an le corps s'y ferait mieux qu'en une nuit ! »
4. Jaïrus dit : « Si seulement tu me l'avais dit, nous avions de la paille en masse.
»
5. Philopold dit : « Regarde le Seigneur à qui tous les cieux et tous les mondes
obéissent, les anges observent Sa volonté, et Sa couche n'était pas meilleure que
la mienne ! »
6. Jaïrus, qui avait encore une bonne part de pharisianisme cachée en lui, dit : «
Est-ce que tu n'exagères pas un peu ! Il n'y a pas à nier que ce Jésus est plein de
l'esprit de Dieu, plus qu'aucun prophète ne l'a jamais été, car Ses actes dépassent
infiniment ceux de Moïse, d'Elie et des autres grands prophètes, mais qu'il y ait
en Lui toute la plénitude de l'esprit de Dieu me paraît une supposition un peu
osée ! Les prophètes ont également ressuscité des morts par l'esprit saint dont ils
étaient pleins ! Mais ils n'ont jamais osé s'attribuer un tel pouvoir. Et s'ils avaient
osé se l'attribuer, ils seraient devenus de grossiers pécheurs et Dieu leur aurait
repris Son esprit. Cependant Jésus agit par Lui-même comme un Seigneur, et
c'est ce qui te semble parler en faveur de ta supposition très osée. À certains
égards je suis parfaitement de ton avis, mais, comme je l'ai dit, avec une grande
prudence, ceci pourrait bien être une épreuve voulue d'en haut pour vérifier que
nous croyons bien en un seul Dieu ! Mais si toute la plénitude de la divinité
demeurait réellement en Jésus, il nous faudrait évidemment accepter son té-
moignage sans aucune restriction. Qu'en penses-tu ? »
7. Philopold dit : « Je partage entièrement ce dernier avis et je crois que Son
témoignage sur la plénitude de la divinité en Lui est parfaitement vrai. C'est Lui
et personne d'autre que Lui.
8. La chose est difficilement explicable à notre époque pleine de miracles où l'on
dit toujours : "J'ai vu tel ou tel mage faire des choses extraordinaires, et les
prophètes ressusciter aussi les morts. L'un d'eux a même pris un tas d'ossements
desséchés, les a couverts de viande et les a ranimés. Mais ces miracles-là ne sont
pas encore la preuve qu'il faille prendre une faiseur de miracles pour un dieu !"
9. Mais dans le cas de Jésus, c'est autre chose ! Avec tous les autres prophètes, il
faut continuellement prier et jeûner si on veut un miracle, jusqu'à ce que Dieu
juge bon d'en faire, un ! Les mages ont besoin de leur baguette et d'une foule de
signes et de formules, ils utilisent toutes sortes d'onguents, d'huiles, d'eaux, de
métaux, de pierres, d'herbes et de racines dont ils connaissent les vertus cachées
qu'ils savent appliquer. Qui a jamais vu cela avec le Seigneur Jésus ! Pas trace de
prière ou de jeûne, du moins depuis le peu de temps que j'ai la grâce de Le
connaître, et encore moins de baguette magique ou de tout autre artifice.
10. Les prophètes ont tous plus ou moins le même langage hermétique et il faut
être de leur école pour le comprendre ! Quoique je sois grec, je n'ignore pas votre
Écriture Sainte, je connais Moïse et tous vos prophètes. Celui qui les comprend
parfaitement doit vraiment être né de parents très spéciaux.
11. Mais Jésus parle des choses les plus cachées avec une telle clarté que même
un enfant peut les comprendre. Quand Il m'explique la Création je me crois
presque capable de créer un monde moi-même ! Quel prophète, quel magicien
pourrait tenir le langage de Jésus ?
12. A-t-on jamais compris une seule syllabe à ce que disent les mages quand ils
se produisent. La nuit la plus épaisse règne dans leurs discours comme parfois
dans ceux des prophètes, et dans leur pénombre, personne ne se reconnaît !
Tandis qu'ici tout est clair comme en plein jour. Tout ce qu'il dit est d'une
sagesse proprement divine, d'une lumineuse clarté compréhensible à chacun. Et
ce qu'il veut arrive instantanément !
13. Puisque c'est vrai avec Jésus, je ne sais vraiment pas pour quelle raison je
devrais encore hésiter à le reconnaître comme le Seigneur incontestable du ciel et
de la terre, à L'aimer et à L'honorer par dessus tout.
14. Regarde sur cette table, cette branche toute fraîche de .figuier portant tous ces
fruits mûrs. C'est une explication vivante qu'il m'a donnée hier tandis que vous
dormiez et que je Lui demandais comment il Lui était possible de réveiller les
morts ! Il m'a demandé un bout de bois mort. Je lui ai apporté ce qui m'est tombé
sous la main. Il n'a même pas touché ce bout de bois, mais Il lui a donné des
ordres et ce bout de bois s'est mis à verdir et à fleurir, et tu en as ici les fruits.
Prends-en et donnes-en à cette très chère Sarah qui s'en délectera ! »
Chapitre 16
Le Seigneur se rend à la synagogue
Matthieu 13, 54
1. Jaïrus réveille Sarah, qui allait ouvrir les yeux et lui tend le rameau tout chargé
de fruits ; elle mord dans le fruit mûr de pur miel. Quand Je Me réveille, elle a
fini tous les fruits.
2. Sarah est la première à Me dire bonjour et Je lui demande comment elle a
trouvé les figues. Elle répond, pleine de joie : « Seigneur, elles étaient célestes et
douces comme le miel. Ton ami Philopold me les a données en Ton nom et je les
ai toutes mangées, elles étaient si bonnes ! Tu les as certainement faites pour moi
!»
3. Je dis : « Ma très chère Sarah, oui pour toi, car c'est à ton propos que J'ai fait
reverdir la nuit dernière une branche morte de figuier, pour montrer à l'ami
Philopold comment Je réveille les morts. Il a porté ces fruits pour toi, Ma chère
Sarah ; et tu as bien fait de les manger, car ils te donneront une excellente santé !
Sortons maintenant pour qu'on mette ces chambres en ordre et qu'on les nettoie.
Nous prendrons le petit déjeuner ensuite et nous irons à nos affaires. »
4. Sur ce, tous sortent avec Moi et jouissent de la clarté cristalline du matin qui
régénère tout le monde.
5. Jaïrus vient à Moi et dit : « Seigneur, ma reconnaissance n'aura jamais de fin !
Plutôt que de m'égarer à lutter contre Toi, je vais quitter ma charge à la première
occasion, et devenir un zélé adepte de ton enseignement. Philopold restera un
ami pour la vie, car c'est à lui que je dois la vraie lumière en ce qui Te concerne.
Il est vrai qu'il est grec, mais il est meilleur connaisseur de l'Écriture que moi et
tous les exégètes de Judée, de Galilée, de Samarie et de Palestine. Bref, j'y vois
clair à présent, c'est en réalité ce que j'ai souvent pensé secrètement ! Mais il faut
que je parte d'ici pour aller à Capharnaüm où mes affaires m'attendent. Je te
recommande ma femme et ma fille Sarah, aussi longtemps que Tu le jugeras bon,
car au ciel elles ne seraient pas mieux que chez toi ! Si je puis revenir ce soir, je
le ferai avec Faustus, Cornélius et peut-être aussi le vieux Cyrénius qui doit
arriver aujourd'hui à Capharnaüm . Je me recommande donc à Ton amour, à Ta
patience et à Ta grâce. » Jaïrus prend alors congé de sa femme et de sa fille
chérie, il fait avancer ses mulets, monte le plus rapide et part au grand galop.
6. J'appelle tous les autres à venir déjeuner et nous passons dans les pièces qui
ont été rangées et balayées, et où un bon repas préparé par Borus nous attend.
7. Après le repas Borus Me prend à part et Me dit : « Mon seul et unique ami, je
sais que Tu connais depuis longtemps ce dont je voudrais discuter secrètement
avec Toi. Certains de Tes disciples n'ont pas besoin de savoir, à mon avis, ce
dont nous avons à parler et c'est pourquoi je Te prends à part. »
8. Je dis : « Ce n'est pas nécessaire de leur cacher quoi que ce soit, car à Kis J'ai
déjà raconté ouvertement à Mes disciples ce que tu veux me dire. »
9. Borus dit : « Ah ! Si c'est ainsi, je parlerai ouvertement ! »
10. Nous rejoignons la compagnie et Je dis à Borus : « Mon très cher ami, ce que
tu veux Me dire Je le sais, ainsi que tous les disciples, considérons donc la
question réglée. Tu es grec et tu as librement étudié le judaïsme, tu n'es donc pas
soumis à la loi juive, et tu as pu parler ouvertement avec les Pharisiens, mais si tu
étais un Juif circoncis tu aurais dû retenir ta langue. Mais puisqu'il était juste que
tu parles, laissons donc la chose inscrite sur le sable. Maintenant, conduis-Moi à
l'école de Nazareth. Je vais enseigner le peuple pour qu'il sache à quelle époque
nous vivons.»
11. Ma mère Marie demande si Je reviendrai à midi.
12. Je dis : « Ne te préoccupe pas de savoir si Je viens. Il suffit que Je prenne
tous les soucis sur Moi. Je reviendrai ce soir. »
13. Sarah demande si elle peut venir avec Moi à l'école.
14. Je dis: «Bien sûr, viens, quoiqu'une femme, selon la loi, n'ait pas le droit
d'entrer dans une école en compagnie des hommes. Mais tout doit changer, car
une femme a tout autant le droit à Mon amour tout entier et à Ma grâce qui pro-
cède de Dieu le Père, à travers Moi. Viens donc avec joie et en toute confiance
apprendre à cette école à quelle époque nous vivons. Allons-y. Toi, Sarah, reste à
Mes côtés, tu Me serviras de témoin, :garde sur toi ton linceul, le vêtement sera
un témoignage. Allons-y ! »
15. Sur ce, nous nous rendons à l'école.
Chapitre 17
Le Seigneur explique un passage d'Isaïe
Chapitre 18
De l'au-delà, prolongation de notre vie intérieure
De l'essence de Dieu et de la véritable invocation
1. « Quand l'homme meurt, l'âme se retire du corps et, en tant qu'esprit humain,
parvient à un endroit qui correspond parfaitement à la façon dont il a vécu toute
sa vie, et où seuls son libre arbitre et son amour pourront l'aider. Si cette volonté
libre et cet amour sont bons, l'endroit que l'âme se sera préparé elle-même par la
force et la puissance que Dieu lui aura insuflée sera bon. Si la volonté est
mauvaise et l'amour faible, ce qu'ils produiront sera mauvais, de même qu'un
mauvais arbre ne peut porter de bons fruits et qu'un bon arbre ne porte pas de
mauvais fruits. Allez décorer d'or et de pierreries un buisson d'épines, vous
verrez bien s'il vous donne des grappes de raisin, mais que vous décoriez ou non
la treille d'or et de pierreries, elle portera des grappes de raisin d'un goût
délicieux.
2. S'il en est ainsi et pas autrement, demandez-vous à quoi sert pour l'âme des
morts de blanchir des sépulcres qui ne contiennent que des os vermoulus et la
puanteur de la pourriture !
3. Croyez-vous sérieusement que Dieu soit si faible d'esprit et si fou d'orgueil
qu'il Se fasse servir avec toute la pompe du matérialisme, toute sa vanité et tout
son néant !
4. Je vous le dis : Dieu est esprit, et ceux qui veulent Le servir doivent le faire en
esprit dans l'entière vérité de leur cœur, et non pas avec la matière et dans la
matière qui n'est qu'une volonté du Père tout-puissant momentanément solidifiée.
5. Que diriez-vous à celui qui viendrait exiger de vous une récompense pour
avoir saccagé votre récolte, prétendant vous avoir rendu un bon service ! Que
diriez-vous à cet effronté coquin ? Le Père vous le dira dans l'au-delà ! Vous
devrez vous tenir éloignés de Lui, et vous serez poussés dans les ténèbres les plus
extérieures, où les cris et les grincements de dents seront votre récompense.
6. Pour ce qui est de prendre soin des veuves, l'exemple de Marie, Ma mère,
suffit. Vous lui avez tout pris, comme à des milliers d'autres veuves que vous
n'avez pas mieux traitées !
7. N'y a-t-il pas de quoi hurler de douleur, que des Juives doivent s'adresser aux
païens pour que justice leur soit rendue ? Satan doit être bien amusé de voir que
la justice et l'équité de ses enfants à lui surpassent celles des enfants de Dieu !
Oui, les enfants du monde doivent aussi devenir enfants de Dieu ! Et vous, soyez
les enfants de Celui que vous avez toujours fidèlement servi !
8. Vous qui lisez Isaïe, n'êtes-vous jamais tombé sur ce passage où il dit :
9. "J'ai plaisir à la miséricorde, et non aux holocaustes." Ou ailleurs : "Ce peuple
m'honore des lèvres mais son cœur est loin de moi !"
10. Quand vous dites : "Voilà ce qu'a dit Dieu par la bouche des prophètes !",
quelle considération pouvez-vous bien avoir pour Dieu, vous qui préférez les lois
outrageantes de votre constitution à celles de Dieu que vous foulez aux pieds
quand il s'agit de votre profit ? Oh ! mauvais serviteurs perpétuels du diable !
Comment pourriez-vous soutenir le jugement de Dieu ? En vérité, les Sodomites
s'en tireront mieux que vous, car s'ils avaient eu les signes qui vous sont donnés
actuellement, ils se seraient mis sous le sac et la cendre et Dieu ne les aurait pas
punis du soufre et du feu ! Malheur à vous — le moment n'est pas loin où il vous
arrivera ce que Je vous ai annoncé ! »
Chapitre 19
De l'impudence et de l'aveuglement des Pharisiens
1. Les plus anciens se lèvent alors avec les Pharisiens et les docteurs de la Loi et
disent d'une voix courroucée : «Qu'est ce qui te prend, espèce de jeune imberbe,
de vouloir disputer avec nous ! De quels signes parles-tu ?"
2. Je réponds à ces chefs d'école et à tous ces lévites, devant Sarah qui les
connaissait bien : « Savez-vous qui est cette jeune fille et ce qui lui est arrivé
pour la deuxième fois ? »
3. Ils écarquillent les yeux et se disent entre eux : « Au nom du ciel, c'est la fille
du grand chef Jaïrus qui avait cessé de vivre. L'aurait-il une fois encore réveillée
? Comment cela s'est-il passé ? Qu'allons-nous faire s'il l'a réellement réveillée
alors qu'elle était morte pour la seconde fois ? Jaïrus semble être de son côté,
sinon il ne lui aurait pas confié sa fille adorée ! Ou alors n'en saurait-il rien ? Le
fils de Joseph l'aurait-il réveillée en secret et il la ramènerait-il à Jaïrus à quelque
occasion ? Devrions-nous en informer Jaïrus ? La chose est par trop surprenante !
C'est elle, sans aucun doute. Et pourtant nous étions tous à son ensevelissement
ainsi qu'à Capharnaüm lorsqu'elle est morte ! Que faut-il faire ? Que se passera-t-
il si ce Dieu fait homme a l'art ou le pouvoir de faire des choses inouïes ? »
Ayant dit cela, ils se taisent.
4. Mais je leur dis en les regardant tous sévèrement : « Eh bien, qu'en dit votre
cœur endurci ! Est-ce un signe suffisant ou non, pour vous prouver la vérité de ce
que Je vous ai dit ? »
5. Les anciens répondent : « Nous ne sommes ni médecins ni apothicaires pour
étudier les forces de la nature et savoir nous en servir. Nous ne connaissons pas
mieux la magie qu'enseigne le diable, ce qui serait le plus grand péché devant
Dieu. Nous ne pouvons donc pas savoir par quel artifice ou par quel pouvoir tu
l'as réveillée. Il est donc exclu que ces signes nous induisent en erreur dans notre
foi en Moïse et les Prophètes, comme il est exclu d'accepter des commentaires de
l'Écriture qui ne sont pas autorisés par le Temple. Divers mages venus d'Orient
ou d'Egypte font des miracles et des choses merveilleuses qu'aucun Juif ne peut
ni ne veut comprendre, car toutes ces forces magiques viennent du diable ! Tout
ce que l'on peut dire ici, c'est que tes signes peuvent également être de la magie,
ils n'ont donc pour nous aucune valeur. Ils nous prouvent seulement que tu es
passé maître pour savoir les accomplir avec perfection. Mais loin de nous toute
intention d'accepter, au nom de tes signes, ton enseignement qui en fait nous
dégoûte profondément ! Un médecin pour nous, est loin d'être un prêtre, encore
moins un prophète, et moins que personne toi que nous connaissons bien depuis
trente ans, comme nous connaissons ton père. Veille donc à quitter au plus vite
cette école avec ta clique, sinon nous devrons employer la force.
6. Sarah dit : « Seigneur, je T'en prie, quitte ces misérables, ils sont plus endurcis
que des pierres, plus ténébreux que la nuit, plus froids que l'abîme. Par deux fois
Tu m'as rendu la vie, et pour ces misérables ce n'est rien ! Ils prennent cela pour
de la magie blasphématoire, et dans leur grossier aveuglement, ils osent Te
chasser de l'école ! Seigneur, c'en est trop, allons-nous-en, allons-nous-en, en la
présence de ces misérables il me semble avoir Satan en face de nous ! »
7. Je dis : « Ma très chère Sarah ! Sois tranquille ! Nous resterons ici aussi
longtemps que Je le voudrai, car Je suis un Seigneur. Les puissants de cette terre
se nomment Seigneur, bien qu'ils aient souvent bien peu de pouvoir. Quant à Moi
J'ai tout pouvoir sur les deux, les enfers et toute la terre, Je suis donc aussi un
Seigneur et Je n'ai aucun ordre à recevoir ! Ce que Je fais, Je le fais librement,
car Je suis pleinement un Seigneur ! »
8. Quand les anciens entendent cela, ils déchirent leurs vêtements en s'écriant : «
Va-t'en, il est clair maintenant que tu n'es qu'un blasphémateur. Tu accomplis tes
œuvres à l'aide de Belzébuth et tu cherches, avec ton enseignement, à détourner
le peuple de Moïse et de Dieu ! Il ne nous reste qu'à te lapider ! »
Chapitre 20
Peur des templiers d'être jugés par les Romains
1. Dans toutes les écoles des synagogues, il y avait, comme au Temple, des tas de
pierres prêtes pour les lapidations. Il y en avait aussi à cette école de Nazareth.
Dans leur furie, les anciens, les Pharisiens et les lévites de cette ville se saisirent
des pierres pour Me les lancer ! Mais les disciples s'insurgèrent et menacèrent ces
fous qui se mirent à crier et à brandir ces pierres avec des mines encore plus
courroucées. À ce moment-là, Faustus, Cornélius, Jaïrus et le vénérable Cyrénius
entrèrent dans la grande salle de l'école.
2. À la vue de ces importants personnages bien connus d'eux, ces hommes
courroucés laissèrent tomber leur engins criminels et se mirent à faire de ré-
vérencieuses courbettes.
3. Jaïrus accourut vers Moi et vers Sarah, M'embrassa en disant à Cyrénius : « Le
voici, cet homme grand parmi les hommes, et voici Sarah, ma fille adorée qu'il a
réveillée deux fois de la mort la plus absolue ! »
4. Le vénérable Cyrénius s'avança vers Moi, les yeux pleins de larmes, en disant
: « Ô Seigneur, mon Dieu, comment trouver les paroles, dans ma faiblesse et ma
pauvreté humaines pour Te remercier des grâces infinies dont Tu m'as comblé.
Ho, que je suis heureux que mes yeux aient une fois encore l'inestimable bonheur
de Te voir, Toi mon ami sacré. Depuis plus de vingt ans, je n'entendais plus
parler de Toi, bien que je sois toujours en pensée plusieurs fois par jour avec Toi,
et que je me recommande souvent à Toi !
5. Ah ! que j'étais peiné, il y a quelques jours encore, lorsque l'empereur s'est mis
à me réclamer les malheureux impôts du Pont et d'Asie Mineure, passés on ne
sait où et qui ont été retrouvés pour mon incomparable bonheur, il y a trois jours
environ, par mon ami Faustus et par Cornélius, avec une foule de trésors
inestimables d'or, d'argent, de perles et de pierreries, et tout cela grâce à Ta sainte
médiation !
6. Mon Seigneur, mon meilleur et très saint ami Jésus, dis-moi ce que je dois
faire pour alléger ma trop lourde dette envers Toi ! Veux-Tu ceindre ma cou-
ronne de grand gouverneur, je la déposerai avec un bonheur indescriptible à Tes
saints pieds !
7. En vérité, en vérité, Seigneur, Toi ma vie, comme Tu le sais bien, les vains
trésors de cette terre sont odieux. Si ce que j’ai dû envoyer à Rome était mien,
des milliers de pauvres gens en auraient profité. Mais c'était à l'empereur, tout
devait m'être remis pour que je l'apporte à l'empereur. Sans Toi et ensuite sans
mon ami Faustus et mon frère Cornélius cela eût été impossible ! Oh, quel poids
immense vous avez enlevé de ma poitrine ! Tu mérites maintenant que je Te
récompense par tout ce qui est en mon pouvoir. Ô, parle, parle, Toi le très Saint,
le meilleur ami des humains, que dois-je faire ? »
8. Ces paroles magnifiques que M'adressa Cyrénius firent blêmir et trembler
ceux qui voulaient Me lapider comme s'ils étaient pris d'une fièvre subite. Ils
croyaient que J'allais Me venger et Me plaindre d'eux à Cyrénius qu'ils
craignaient plus que la mort, car il ne plaisantait jamais ! Les juges romains
étaient connus pour l'extrême rigueur avec laquelle ils appliquaient la loi et
rendaient leur verdict. Les Juifs en avaient une peur indescriptible, tout
particulièrement les anciens, les Pharisiens et les lévites nazaréens dont on savait
qu'ils avaient participé à ce détournement de fonds.
9. Mais Je dis avec infiniment d'amabilité à Cyrénius : « Penses-tu que l'adulte
oublie ce que tu as fait pour l'enfant lorsqu'il a dû fuir de Bethléhem en Egypte à
cause d'Hérode ? Oh ! L'adulte se souvient parfaitement de tout. Tu as tout fait
pour Moi avec un parfait désintéressement parce que tu M'aimais et voilà que tu
voudrais maintenant que J'accepte de toi une récompense ! Non, loin de Moi une
telle intention. Mais, toi qui tiens de l'empereur le commandement de l'Asie
ordonne à ces obstinés qui servent Satan plutôt que Dieu, de garder le silence le
plus absolu sur ce que J'ai fait ici, s'ils ne veulent pas subir une terrible
correction, car celui qui jette une pierre à son prochain doit être très sévèrement
puni. »
10. Cyrénius dit : « Ces misérables ont-ils osé Te lancer des pierres ? »
11. Sarah dit : « Oui, oui, grand gouverneur Cyrénius, ces misérables ont voulu
lapider le Seigneur parce qu'il leur a dit la vérité. Ils se font appeler serviteurs de
Dieu et ils sont les plus grands blasphémateurs, car ils ne tiennent qu'au pouvoir
que leur confèrent les institutions qu'ils se sont données eux-mêmes, par
égoïsme, et auxquelles ils donnent un air religieux malgré tous leurs honteux
agissements.
12. Celui qui ne se laisse pas aveugler par eux est bien vite rendu aveugle et n'a
plus aucune liberté sur cette bonne terre que Dieu nous a donnée ! Il n'y a qu'à
lire Moïse et les prophètes et voir leurs institutions pour découvrir sans peine ce
que j'ai trouvé toute seule alors que je n'avais pas encore seize ans ! En vérité,
celui qui tient à Moïse et aux prophètes est leur pire ennemi, ils le traitent de
Samaritain, ce qui est la pire insulte dans la bouche des gens du Temple qui
haïssent et injurient journellement les Samaritains, alors que ce sont eux les
véritables mosaïstes et les disciples des prophètes.
13. Moi, une jeune fille, je demande si c'est là la parole de Dieu, si c'est là le
culte de Dieu ! Jésus leur a clairement prouvé que ce ne peut être que la parole
des enfers et le service que seul Satan peut désirer. Ils ont voulu Le lapider parce
qu'il leur a dit par.trop la vérité devant le peuple, ce qui pourrait finir par
amoindrir leurs riches revenus.
14. Monseigneur, je suis déjà morte par deux fois, et je sais ce que mon âme a
vu. J'ai vu Moïse et tous les prophètes, ils étaient en paix et leur joie était ce
qu'ils appellent le jour du Seigneur. Mais je n'ai vu aucun Pharisien ni aucun
lévite parmi tous les saints d'Israël, ! J'ai donc demandé où ils se trouvaient.
15. Un ange de lumière est alors venu me dire de le suivre. Je le suivis jusqu'à un
endroit très désertique où il faisait sombre comme par une nuit nuageuse. Tout au
fond rougeoyait un feu et l'ange me dit : "Voilà, c'est le gouffre infernal où ils
habitent." Je regardai et je ne vis que des diables. Je dis à l'ange messager du
Seigneur : "Je ne vois que des diables et personne d'autre, où sont ceux que je
cherche ?" L'ange répondit : "Mais ce sont eux que tu vois !"
16. Je fus horrifiée et je pensai à mon père qui est un chef de Pharisiens, mais
l'ange vit ce qui me faisait vaciller et dit : "Sois sans crainte, ton père prendra la
bonne voie et tu seras encore son guide sur terre!”
17. Voilà ce que j'ai vu et entendu, non par ouï-dire mais par ma propre expé-
rience. Je n'ai donc rien à apprendre de ces imbéciles et de ces suppôts de Satan.
J'ai vu et appris la vérité vivante, puis je suis revenue de l'au-delà. Je peux
témoigner de l'authenticité de ce qu'enseigne le Seigneur Jésus de toute éternité,
et que tout ce qu'enseignent ces maîtres diaboliques est un parfait mensonge, et
qu'il n'y a pas un mot de vrai dans ce qu'ils disent. Jai parlé. »
Chapitre 21
Cyrénius et les templiers
Chapitre 22
Guérison d'un goutteux
Témoignage d'un Nazaréen
Matthieu 13, 55-56
1. Borus amena avec lui un goutteux dont les pieds et les mains étaient si tordus
qu'aucun médecin mortel n'aurait pu trouver le moyen de le guérir.
2. Borus, qui avait fait amener ce goutteux à travers la foule, dans une corbeille,
par deux porteurs dit à haute voix devant le peuple : « Dieu seul peut aider ce
malade. Je suis pourtant l'un des premiers médecins de Galilée, et des gens
viennent de Jérusalem et de Bethléem pour se faire soigner par le médecin Borus
qui leur vient en aide, mais il ne peut rien pour celui-ci. Je Te supplie donc, Toi
mon saint ami Jésus, à qui, je le sais et je le crois, rien n'est impossible, de bien
vouloir redresser les membres de cet homme, si telle est Ta volonté ! »
3. Je dis : « Ami, il y a beaucoup trop d'incroyants ici, et une guérison est tou-
jours une chose difficile. Je le guérirai chez toi, entre quatre yeux ! »
4. Il y eut quelques murmures dans le peuple disant : « Oh ! Le fils du char-
pentier est malin ! Ce malade est trop atteint, il veut le guérir en secret pour qu'on
ne voie pas son échec ! »
5. À ces gens qui murmuraient ainsi, Je répondis : « Ô fous et insensés que vous
êtes, connaissez-vous cette fille qui est à côté de Jaïrus ? N'est-elle pas sa fille ?
Et n'est-elle pas morte deux fois ? Qui l'a rappelée à la vie ? Insensés que vous
êtes ! Si le Fils de l'homme a le pouvoir de rappeler les morts à la vie, n'a-t-il pas
le pouvoir de dire à ce malade : "Lève-toi et marche!" Pour que vous puissiez
voir que J'ai ce pouvoir, Je t'ordonne, paralytique, de te lever et de marcher avec
des membres parfaitement sains ! »
6. À l'instant même, un feu parcourut les membres de ce malade qui se sentit
parfaitement fortifié, se leva et put marcher avec ses membres parfaitement
régénérés. Sa chair et ses muscles étaient revenus, il marchait avec entrain, le
cœur plein de reconnaissance, finissant par dire avec étonnement : « Une telle
chose n'est possible qu'à Dieu ! Sans imposer les mains, sans médicament, par
une simple parole, obtenir à l'instant même une telle guérison, cela ne s'est
jamais vu ! Seigneur Jésus, je confesse et je crois maintenant que Tu es le Fils de
Dieu, ou Dieu Lui-même ayant pris forme humaine ! Il me vient l'envie de
T'adorer. »
7. Je dis : « Laisse cela, et ne fais pas de bruit ! Mais garde ce que tu ressens dans
ton cœur, le temps viendra où tu en auras besoin, et prieras le Père qui est aux
cieux et qui Lui seul a pu donner un tel pouvoir à Son Fils. » À ces mots
l'homme qui avait été guéri se tut.
8. Mais le peuple effrayé dit : « D'où vient une telle sagesse, un tel pouvoir
d'action ? N'est-ce pas le fils du charpentier ? Sa mère ne s'appelle-t-elle pas
Marie ? Ses frères Jacob, José, Siméon et Judas, et ses sœurs ne sont-ils pas tous
parmi nous ? Au nom du ciel, d'où peut lui venir tout cela ? »
9. Tandis qu'ils parlaient entre eux et se posaient ces questions, plusieurs se
mirent en colère : « C'est à devenir fou ! Nos fils ont étudié à Jérusalem, ils ont
acquis des connaissances dans les sciences et les arts, ils ont suivi l'école des
prophètes et étudié parfaitement la sagesse des signes égyptiens, et ce charpentier
qui n'a jamais suivi la moindre école et que nous n'avons vu travailler qu'avec la
hache et la scie nous confond ! Il surpasse nos enfants d'une façon si surprenante
que les plus hautes autorités sont prêtes à prendre ce charpentier bêta pour un
dieu ! C'est détestable. Il est tout en tout, parle toutes les langues comme sa
langue maternelle, il est un prophète de premier rang et fait des signes qu'aucun
dieu ne désavouerait. Mais nos fils qui ont étudié comme nous en notre temps,
sont là stupides comme s'ils ne pouvaient pas compter sur leurs doigts ! Personne
ne sait-il donc comment le charpentier est arrivé à acquérir toutes ces
connaissances ? »
10. D'autres dirent : « Qu'a-t-il pu apprendre ? Il y a quelques lunes encore il était
chez lui à bâtir des maisons ici et là avec son père et ses frères, et nous n'avons
rien remarqué de particulier chez lui. De plus, il était très peu loquace, et si on lui
demandait quelque chose il ne répondait que par monosyllabes, au point de
passer pour un demeuré et, le voilà tout à coup comme un homme vers lequel le
monde entier devrait tourner les yeux ! C'est à n'y rien comprendre, c'est agaçant
!
11. Qu'a fait cet homme jusqu'ici ? Nous savons que dès sa jeunesse, avant même
de savoir parler, il faisait preuve de dons miraculeux ! Père et mère croyaient
qu'il sortirait quelque chose de grand de cet enfant, mais toutes ces qualités qui
promettaient tant se sont peu à peu effacées au cours des années et ont même
disparu, au point qu'il n'en restait plus aucune trace ! Comme il n'a jamais voulu
aller à l'école, il n'a donc aucune instruction que celle d'un simple charpentier.
Souvent je demandais au vieux Joseph ce que devenait Jésus et s'il était tout aussi
muet à la maison, et la réponse était : "Plus muet encore que partout ailleurs !" Et
ses frères disaient la même chose ! S'il en est ainsi d'où peuvent bien provenir ses
capacités ? »
Chapitre 23
Justification des Nazaréens
Matthieu 13, 57
1. Comme Je leur semblais tout de même être un prophète après tout ce qu'ils
M'avaient vu faire, un vieux Nazaréen dit : « J'ai une fois entendu un voyageur
babylonien, mendiant comme ces gens extraordinaires qu'on rencontre si souvent
dans nos régions et qui, pour quelques staters, vous disent la bonne aventure,
prédire ceci :
2. "Nazareth, dans tes murs vit un homme que tu ignores. Il est silencieux et
avare de Ses mots, mais quand le temps viendra, les montagnes s'abaisseront
devant Lui et devant Sa parole, les vents et les mers Lui obéiront, la mort
tremblera devant Lui et n'aura aucun pouvoir sur Lui. Alors toute la ville sera
prise de stupeur et de colère, mais personne ne pourra résister à Son pouvoir et la
mort fuira devant Lui comme une gazelle effarouchée par le lion qui la poursuit.
Mais quand Il voudra passer de cette terre au ciel, Il se laissera tuer par Ses
ennemis pour trois jours, et le troisième jour, par Son propre pouvoir Il vaincra la
mort et Il ressuscitera dans toute la force et la gloire et Il montera au ciel en chair
et en os. Alors malheur à tous ceux qui L'auront poursuivi. Ils subiront le pire des
sorts et seront jugés par un feu comme il n'y en a jamais eu sur terre ! Malheur à
tous les Juifs orgueilleux ! Ils n'auront pas de patrie jusqu'à la fin du monde et ils
seront dispersés sur toute la terre et pourchassés comme des bêtes sauvages dans
le désert, ils devront se faire un pain immangeable avec des épines et des
chardons pour apaiser leur faim et ils en mourront !"
3. Voilà ce que disait ce Babylonien il y a environ trois ans. C'est maintenant
extraordinaire que les paroles et les actes de ce Jésus qui est dans nos murs
correspondent à un cheveu près à l'homme dont parlait ce Babylonien. Mais
alors, que faire ? Si une chose est vraie, le reste se confirmera aussi et ce
jugement arrivera. Aussi vaudrait-il mieux, à mon avis, Le laisser faire ce qu'il
veut, comme Il veut et quand Il veut. Il se pourrait bien que ce soit mauvais pour
nous de Le combattre, car Celui qui réveille les morts et devant qui les
montagnes s'abaissent, les mers et les vents se taisent, doit avoir d'autres
pouvoirs encore ! Laissons-Le aller, d'autant que des centaines de ses disciples,
comme vous le voyez, Le suivent corps et âme, et Le prennent pour le Messie ! »
4. Ces paroles du vieux Nazaréen irritèrent encore davantage la foule, mais
personne n'osa ajouter un mot !
5. Je vis qu'il n'y avait rien à faire avec ce peuple qui n'avait ni foi ni confiance.
Et, parlant brièvement, mais de façon que tout le monde M'entende, Je dis : «
Pourquoi vous mettez-vous en colère. N'avez-vous jamais entendu dire depuis
longtemps que nul n'est prophète en son pays ? Et si la sagesse populaire le dit,
pourquoi vous irriter ainsi ! Vous voulez être intelligents, mais Je vous le dis,
vous êtes aveugles, sourds et stupides. Si Je suis Celui que Je suis et que Mes
paroles et Mes actes le prouvent, pourquoi ne croyez-vous pas ? Faut-il donc
qu'un prophète s'en aille toujours au loin pour trouver des disciples ? Doit-il être
étranger à son lieu de naissance et son langage doit-il être étranger à sa langue
maternelle ?
6. Si Je venais de Perse ou de l'Inde pour accomplir les signes que Je fais, et que
personne n'a faits avant Moi, vous crieriez, la face contre terre: "Dieu nous a
visités secrètement alors que nous sommes pleins de péchés et de vices ! Qui
nous gardera, qui nous protégera de Sa colère ?" Mais comme Je suis le fils bien
connu de Joseph, vous Me demandez d'où cela vient ! Ô aveugles insensés !
Cette terre n'est-elle pas aussi sacrée que la Perse ou l'Inde ? Le même soleil ne
brille-t-il pas aussi bien ici qu'en Perse ou en Inde, pour faire mûrir les fruits par
la force de Dieu ? La lune, les étoiles et le soleil sont-ils moins divins ici qu'en
ces autres pays ?
7. Et si tout est ici sans aucun doute aussi sacré qu'en ces pays lointains,
pourquoi l'homme ne le serait-il pas aussi ? Et si J'ai accompli sous vos yeux des
actes que personne, pas même un Indien, n'a jamais pu faire, pourquoi ne
mériterais-Je pas tout autant de foi et de considération que vous en avez pour ces
Persans ou ces Indiens stupides ? En vérité, si J'allais aujourd'hui chez les Grecs
ou chez les Romains, ils M'élèveraient des temples et des autels !
8. Mais vous, comme J'ai grandi et vécu parmi vous depuis Mon enfance, vous
vous demandez avec colère : "D'où ce fils de charpentier sort-il cela tout à coup,
alors que tout le monde sait qu'il n'est qu'un balourd ?" Mais attendez ! Le
balourd vous a fait autrefois beaucoup de bien, le Maître et Seigneur vous en fait
maintenant bien davantage. Mais Il ne le fera plus. »
9. À ces mots les Nazaréens, encore plus en colère, quittèrent l'école.
Chapitre 24
Cyrénius commente l'attitude des Nazaréens
Chapitre 25
De l'indignité du peuple
Matthieu 13, 58
Chapitre 26
De la législation
1. Cyrénius dit : « Il est bon que je sache cela, et je trouverai bien le reste.
Puisqu'ils n'acceptent pas Ton enseignement, je leur en donnerai un autre. Je leur
ferai connaître par Faustus et ses hommes l'ordonnance impériale que j'ai reçue
de Rome, il y a déjà six mois. Peut-être que l'évangile de Rome leur inspirera
plus de respect que le Tien qui vient du ciel ! Cette ordonnance détermine en cent
points les délits légalement punissables du fouet et de la mise en croix. La
polygamie est interdite, l'impudicité, la fornication seront très sévèrement punies
par le fouet, l'adultère par la mise en croix, comme le vol et la fraude, la
contrebande par le fouet et une amende de cent livres d'argent, et la transgression
d'une foule de lois sur la propriété, cent livres et le fouet. Tout voyage sans
laissez-passer coûtera cent livres. Oui, voilà ce que je vais faire, et je ferai
appliquer très sévèrement ces lois, spécialement dans ces villes de Galilée, et l'on
verra s'il n'y a pas moyen de réveiller la conscience de ce peuple. ».
2. Je dis : « C'est dans tes pouvoirs, et Je ne puis te dire ni oui ni non ! Fais ce
que tu veux, mais par là, ne rends pas plus difficile Mes déplacements et ceux
des Miens. »
3. Cyrénius dit : « Nullement, car les artistes, les médecins, les sages et les
prophètes en sont exceptés ! Leur témoignage, leurs actes, leurs paroles leur
servent parfaitement de passeport, et personne ne peut les empêcher de voyager,
sous peine de mort. Je Te donne sur le champ un laissez-passer, et lorsque Tu le
montreras, personne ne pourra T'arrêter. »
4. Je dis : « Ta bonne volonté Me réjouit toujours, mais épargne-t'en la peine !
Aussi longtemps que Je voyagerai aucune puissance au monde ne pourra
s'opposer à Moi ! Mais le jour où Je voudrai Me sacrifier pour l'humanité tout
entière, aucune puissance, quelle qu'elle soit ne pourra M'offrir sa protection, et
Me l'offrirait-elle, Je ne l'accepterais pas. Ami, Celui à qui le ciel et la terre
obéissent sera plus puissant que tous les hommes de la terre, qui sont à peine
dignes d'être à Mes pieds pour Me servir. Fais ce que tu voudras, mais tu en
tireras peu de chose ! Tu auras beau établir des lois, si parfaites soient-elles, tu
verras très vite avec quelle habileté les hommes contournent la loi, et tu ne
pourras rien faire !
5. Les commandements que Dieu a donnés au peuple à travers Moïse, sont aussi
complets que peut l'être une chose parfaite. Mais, comme on le constate
aujourd'hui, les hommes savent habilement changer les commandements de Dieu
en mauvais règlements, si bien qu'ils n'ont plus conscience qu'ils transgressent
les commandements de Dieu lorsqu'ils mettent à exécution ces règlements !
6. Mais si les hommes réagissent ainsi à une volée de bois vert, comment
réagiront-ils à de pareils coups de bâton de Rome ! Fais ce que tu voudras, Je ne
te contredirai pas, mais Je te le dis :
7. Plus il y a de lois, plus il y a des crimes contre lesquels croix et fouet ne
peuvent rien ! »
8. Cyrénius dit : « Tout ce que Tu me dis là est indiscutablement vrai, mais je Te
le demande pour ma propre gouverne : que faire contre l'insubordination de gens
comme ces Nazaréens qui ne croient à aucun dieu et à aucune révélation d'en
haut, qui se raillent ouvertement des commandements de Dieu par leurs
sarcasmes et leurs actes ? Ne faudrait-il pas les punir sévèrement pour qu'ils
cessent d'assouvir sans crainte leurs mauvais instincts, comme ils aiment tant le
faire depuis si longtemps qu'ils se passent de toute loi divine et qu'ils se
comportent entre eux et avec leurs voisins plus sauvagement que les bêtes
féroces dans les bois et les déserts ! L'intransigeance de telles lois serait bien à sa
place pour rétablir l'ordre parmi des hommes devenus aussi sauvages et pour les
amener à reconnaître Dieu. »
9. Je dis : « Il n'y a dans ce cas pas d'autre moyen que la force et la loi. Mais reste
à savoir de quelles lois il s'agit ?
10. Il faut une profonde connaissance de la nature humaine et le légiste doit
toujours avoir à l'œil la véritable raison pour laquelle l'humanité a été poussée à
sa perte, sinon il ressemble au médecin qui donne la même potion à tous ses
malades sans penser que les diverses maladies dont peut souffrir le corps humain
sont de nature très diverses et ont toutes une cause différente. Un tel médecin
peut trouver de temps en temps un malade à qui sa panacée fera du bien, voire
qu'elle guérira, mais tel autre malade dont le mal et la constitution sont autres
n'ira pas mieux, ira même plus mal et mourra !
11. S'il est déjà si difficile de trouver la médecine qui convient au corps du
malade que le médecin peut voir et toucher, combien plus difficile encore est-il
de trouver et d'ordonner la médecine qui convient à l'âme humaine qui est
malade !
12. La loi fait office de médecine, à condition qu'elle s'accompagne de
l'enseignement qui explique comment et pourquoi il faut l'observer. Réfléchis
toi-même :
13. Telle âme est colérique, craintive, intrigante, jalouse, égoïste ou trompeuse,
telle autre est active, ou paresseuse, ou endormie. Dans telle maison demeurent
quatre âmes attentives, humbles, obéissantes, dans telle autre cinq âmes
indociles, et ainsi de suite en mille variantes de faiblesses et de passions.
14. Comment appliquer utilement la même loi à tant d'âmes aussi différentes? Le
craintif se désespérera, le colérique ne pensera qu'à la vengeance et à la
subversion, le tiède restera tiède, l'actif perdra tout courage, toute envie d'agir,
l'avare sera plus avare encore, l'orgueilleux se liguera avec le colérique et le rusé
et prêtera main-forte aussi bien à l'un qu'à l'autre !
15. Songe donc aux tristes conséquences que peuvent avoir des lois lourdement
établies, sans sagesse, et tu verras qu'à côté de la nécessité d'établir des lois,
existe la nécessité d'éprouver si telle ou telle loi convient ou non à tous les
caractères.
16. Si une loi n'est pas éprouvée de la sorte, il vaut mieux ne pas l'établir, car elle
causerait à l'humanité plus de dommage que de bienfait.
17. Vois-tu, Dieu le plus sage des créateurs, dans Sa sagesse infinie, n'a trouvé en
quelque sorte que dix lois bénéfiques à tous les caractères, et chacun peut
facilement les observer s'il le veut. Si Dieu n'a trouvé que dix lois en parfait
accord avec la nature et la particularité de chaque âme humaine, comment un
empereur païen pourrait-il prétendre trouver comme cela, à Rome, cent lois dont
l'observance assurerait le salut du genre humain ? »
Chapitre 27
L'âme humaine malmenée par la loi
1. « Je te le dis, tant que le peuple juif fut conduit par des juges qui observaient
sincèrement la loi, toutes les activités humaines restèrent en accord avec l'ordre
divin, mais plus tard, quand vint l'occasion de voir l'éclat des cours païennes, la
pompe dans laquelle vivaient leurs rois, et comment ceux-ci faisaient courber
leur peuple jusque dans la poussière, les plus insensés des Juifs furent aveuglés
et, se croyant le peuple le plus puissant de la terre, ils exigèrent de Dieu un roi.
Dieu ne répondit pas immédiatement à cette idiote exigence du peuple. Il le mit
en garde et lui montra les mauvaises conséquences qu'il y aurait à subir un roi.
Dieu parla à leurs oreilles sourdes par l'entremise de prophètes ; cela ne fit rien,
le peuple voulait à tout prix un roi !
2. Et Dieu donna au peuple en Saül le premier roi, et le fit oindre par son ancien
et fidèle serviteur Samuel. Dès que le peuple eut un roi, il institua aussitôt des
lois difficiles à observer ; dès lors il s'enfonça de plus en plus bas, jusqu'à
l'infâme bassesse actuelle !
3. Mais qui en est le principal responsable ? Vois-tu, ce sont les lois maladroites
instituées pour leur seul profit personnel par des hommes qui n'avaient aucune
idée de la nature humaine, et qui, par leur lourdeur grossière déréglèrent
complètement la vie intérieure des âmes.
4. Dis-toi bien ceci : quand une mécanique qui marche bien depuis longtemps,
pour la plus grande satisfaction de son possesseur, tombe en panne à cause d'une
petite pièce défectueuse, qu'un homme vienne à passer par là, enflé de
prétentions, et dise au propriétaire de la machine : « Donne-moi ça je vais le
réparer, et que le propriétaire de la machine s'imagine que ce beau parleur s'y
connaît, que se passe-t-il ? Quand le pur crétin qui ne connaît rien à la mécanique
y met sa main malhabile, il ne sait que démonter quelques pièces et finit par la
détraquer complètement au point que le véritable maître artisan qui l'aura
construite ne pourra plus rien en faire !
5. S'il faut déjà se méfier du crétin qui prétend vouloir réparer une simple
machine dont les pièces sont là devant vous, faciles à démonter, à compter et à
prendre en main, pour les regarder de plus près, à combien plus forte raison l'être
humain, qui est une machine vivante si incomparablement perfectionnée dans
toutes ses parties et dont seul Dieu connaît et voit totalement de l'intérieur le
fonctionnement, peut être corrompu, si un législateur incapable, orgueilleux et
dépourvu de toute sagesse prétend vouloir améliorer l'homme par ses lois
stupides et inutiles, alors qu'il n'a pas la moindre trace de connaissance qui lui
permettrait de comprendre la millième partie de ce qu'il faut pour faire pousser
un seul cheveu sur une tête humaine !
6. Voilà pourquoi, Mon cher Cyrénius, tu peux laisser tomber ces cent lois, car
en fait tu n'amélioreras personne ainsi. Fais en sorte que les lois de Dieu régis-
sent le monde, sanctionne-les, fais-les respecter ; c'est ainsi que des machines
humaines tu feras des hommes!
7. Quand ils seront devenus des hommes, tu pourras leur parler des besoins de
l'État, et, en véritables hommes libres, ils pourront faire plus qu'ils ne le
pouvaient lorsqu'ils étaient les rustres esclaves de lois lourdes et slupides.
8. Je te le dis : Seul ce que l'homme fait avec son libre arbitre selon son dis-
cernement intérieur est véritablement accompli et peut avoir des effets béné-
fiques. Tout acte, tout travail forcé ne vaut pas un sou ! Dans tout acte, dans tout
travail forcé, il n'y a que colère et vengeance contre l'autorité, et en aucun cas il
ne peut y avoir de bénédiction.
9. Mon cher Cyrénius, si tu te mets à penser réellement à Mes paroles, tu verras
clairement que Je t'ai dit la plus parfaite vérité ! »
10. Cyrénius dit : « Très noble et très divin ami, je n'ai vraiment pas besoin d'y
réfléchir beaucoup, Tes paroles sont aussi claires que le soleil en plein midi ! Je
ferai appliquer la loi mosaïque et je rendrai le peuple attentif pour qu'il s'y
applique à nouveau ! Très noble ami, si cela pouvait T'être agréable, je voudrais
pouvoir, avec Ton aide secrète, annoncer cette loi mosaïque aux Grecs. Les
raisons en sont aussi politiques, car il est bien connu qu'il y a continuellement
des flottements entre Grecs et Juifs provenant la plupart du temps des différences
de leur foi en Dieu et de la connaissance qu'il en ont. Les Juifs défendent leur foi
jusqu'au sang et les Grecs, qui sont bien plus forts en dialectique avec l'agilité
incomparable de leur parole, battent les Juifs empruntés, incapables de leur
répliquer. C'est ainsi qu'ils en viennent souvent jusqu'au sang, ce qui est sans
doute la conséquence regrettable de ces différences de croyance.
11. Si je demande aux Grecs d'observer les commandements judaïques et les
sanctionne par raison d'Etat, ces frottements si violents cesseront. Seigneur, ai-je
raison de le faire ? Et si je le fais dis-moi, dans Ta Sagesse insondable, ce que je
dois entreprendre pour obtenir le bon résultat. »
Chapitre 28
Le péché témoigne de la liberté de l'esprit
Du libre arbitre et de la contrainte
1. Je dis : « Ami, ta volonté est bonne, mais la chair est faible ! Ta bonne
intention aura un effet positif sur le siècle et tu feras encore de bonnes choses
dans ce sens-là. Mais garde-toi de ce "doit" romain qui fait plus de mal que de
bien dans le domaine spirituel ! Chaque fois que l'on doit, c'est un jugement sans
aucune liberté qui est appliqué, alors que la liberté seule, dans les choses
purement divines, est le champ fertile où peut germer la graine de vie, où elle
peut mûrir et porter des fruits.!
2. Si tu prends un jeune oiseau sortant de sa coquille et que tu le nourrisses pour
qu'il vole plus tôt, et que par ailleurs tu lui rognes les ailes, dis-moi, à quoi lui
servira la meilleure des nourritures ! L'oiseau végétera, et il n'aura pas la liberté
de voler tant que tu lui raccourciras les ailes.
3. Si l'oiseau ne peut voler sans ailes, l'esprit de l'homme ne peut atteindre sa
libre autonomie tant que la contrainte vient raccourcir les ailes de son libre ar-
bitre. Un esprit qui ne peut agir librement est déjà mort, parce qu'il est privé de
ce qui fait le fondement même de sa vie !
4. Tu peux donner aux hommes des milliers de lois pour la sphère terrestre et les
sanctionner avec ce "doit" romain, sans que l'esprit de l'homme en pâtisse. Mais
c'est tout le contraire lorsqu'un seul commandement de Dieu est sanctionné par
une loi terrestre.
5. Le spirituel doit rester libre et doit trouver en lui-même sa sanction, ainsi que
le jugement qui lui est lié ; c'est seulement ainsi, en lui et par lui, qu'il peut
atteindre la plénitude de la vie.
6. La libre connaissance du bien et du vrai est la lumière vivante de l'esprit. C'est
de cette lumière que l'esprit se choisit ses lois. Ces lois librement choisies sont
alors faciles à supporter et en accord avec la liberté de la vie. La volonté dont
l'esprit dispose lorsqu'il a acquis cette connaissance est une loi libre pour l'esprit,
et la nécessité éternelle d'agir selon ce libre arbitre est la sanction éternelle dont
aucun esprit ne peut se passer s'il veut agir librement.
7. Et c'est aussi l'éternelle ordonnance qui se décide elle-même en Dieu, qui n'a
évidemment aucun législateur au-dessus de Lui.
8. Le libre arbitre absolu de Dieu, selon les connaissances éternelles les plus
parfaites et les lumières les plus sages, détermine en Lui-même la loi, et la
sanctionne Sa propre nécessité, qui est toujours libre et qui est le fondement de
toutes les choses créées sur terre, car le contenu même de cette nécessité de
l'esprit dans son développement intérieur, est de prendre consistance en s'isolant
librement.
9. L'esprit humain doit devenir parfait en soi et par soi, comme l'esprit originel de
Dieu en Soi et par Soi est parfait, sans quoi l'esprit n'est pas l'esprit, mais une
condamnation à mort.
10. Et pour que l'esprit humain puisse devenir cela, il faut que les occasions lui
soient offertes de pouvoir se développer dans le temps, comme l'esprit divin de
Dieu même s'est développé de toute éternité en Lui-même, par Lui-même et à
travers Lui-même.
11. Vois-tu, J'aurais eu assez de puissance de toute éternité pour obliger tous les
hommes avec une force irrésistible à agir exactement selon la loi donnée sans
dévier d'un cheveu ; mais alors, l'homme cesserait d'être un homme et ne vaudrait
pas plus que n'importe quelle bête du règne animal. Il accomplirait son travail
avec exactitude, mais tu ne pourrais différencier son activité de celle d'une
abeille ou d'innombrables autres animaux petits ou grands.
12. Et si, avec ta connaissance acquise en liberté, tu te mettais à vouloir ensei-
gner quelque chose de supérieur à de tels hommes, tu n'aurais pas plus de résultat
que si tu voulais envoyer des abeilles à l'école pour qu'elles se mettent à
construire leurs cellules d'une meilleure façon.
13. C'est pourquoi il ne faut pas condamner catégoriquement la faculté qu'a
l'homme de pouvoir pécher, car sans cette faculté d'agir à l’encontre de la loi,
l'homme serait un animal et non pas un être humain.
14. Et je te le dis, seul le péché apporte à l'homme le témoignage de son huma-
nité ; sans le péché il serait un animal. »
Chapitre 29
De la bénéfique formation d'un esprit libre
1. « Il est certes juste et bon de punir les pécheurs quand ils s'éloignent par trop
de l'ordonnance que Dieu Lui-même a établie pour que l'homme parvienne le
plus sûrement et le plus rapidement possible à la perfection. Mais il ne faut priver
personne, par la contrainte, de la possibilité de pécher. Car en vérité Je te le dis,
Je préfère un pécheur qui fait pénitence librement à quatre-vingt-dix-neuf justes
devant la loi qui n'ont jamais eu besoin de se repentir ; le premier est un homme
à part entière, les autres ne le sont qu'à moitié !
2. Je ne veux pas dire pour autant que je préfère les pécheurs aux justes, parce
qu'ils sont toujours pécheurs. Demeurer dans le péché signifie devenir un animal
qui, sur la fausse base des instincts, passe son existence à se souiller. Il s'agit ici
du pécheur qui reconnaît librement avoir eu tort d'agir contrairement à la loi, et
qui se met à vivre en accord avec l'ordonnance de Dieu qu'il a reconnue, pour
devenir un être humain à qui aucune des leçons de la vie n'est restée étrangère.
3. Un tel esprit sera capable de faire de plus grandes choses dans Mon royaume
que celui qui, par une peur servile, n'aura jamais osé s'écarter d'un cheveu de la
loi et qui, par sa soumission craintive à l'obligation d'observer la loi sera peu à
peu devenu physiquement et spirituellement une machine sans volonté aucune.
4. Prends une pierre et jette-la en l'air : ce ne sera pas long, elle retombera très
vite à terre, selon la loi qui régit la pierre et toute la terre. Faut-il louer la pierre
d'observer si exactement la loi ? Il est vrai que tu peux faire toutes sortes de
choses avec la pierre, pour peu que tu aies une base solide ; mais demande-lui
d'agir librement, jamais elle ne sortira de son repos mortel !
5. C'est pourquoi il ne faut pas faire des hommes des êtres pétrifiés par la loi,
mais les former dans leur liberté. Alors tu auras parfaitement agi selon
l'ordonnance de Dieu.
6. Regarde, si les hommes importants de cette terre n'étaient pas aussi indolents
qu'ils le sont en général, ils comprendraient facilement, après quelques
observations simples, que l'homme lorsqu'il a atteint une certaine instruction, ne
se contente pas d'une uniformité animale. Il ne se construit plus une hutte en
torchis en guise d'habitation : il taille des pierres, fait des briques avec de l'argile
et se construit une demeure élégante avec des murailles et des tours d'où il peut
voir si l'ennemi approche de chez lui.
7. Et mille personnes cultivées se construisent mille maisons dont aucune ne
ressemble à l'autre, ni par la forme ni par l'agencement intérieur. En revanche,
regarde les nids des oiseaux et les tanières des animaux sauvages : tu les verras
toutjours semblables. Regarde le nid de l'hirondelle, celui du moineau, observe la
toile de l'araignée, les alvéoles de l'abeille et les milliers d'autres témoignages
émouvants de l'activité des animaux : tu n'y verras ni amélioration, ni
dégradation ; observe en revanche la facture des constructions de l'homme,
quelle infinie multiplicité tu découvres, bien qu'elle coûte souvent beaucoup de
peine à l'homme !
8. Il est donc facile de comprendre que Dieu, qui a donné à l'homme un esprit
semblable au Sien, n'a précisément pas créé l'homme pour qu'il devienne un
animal, mais pour qu'il puisse devenir librement et parfaitement semblable à Lui.
Chapitre 30
La formation de l'esprit face à la loi
Chapitre 31
Paroles de Jaïrus à propos de l'effet des miracles
Chapitre 32
De l'essence de Dieu
1. Je dis : « Mon ami, ton jugement est très juste, mais tu as oublié un fait, à
savoir que beaucoup de choses qui semblent impossibles aux hommes sont
possibles à Dieu. Regarde, compte Mes disciples, peu d'entre eux sont instruits.
Par la parole Je les ai éveillés et attirés à Moi, mais Je ne leur ai fait expérimenter
que par la suite la puissance de la parole divine. Alors le miracle précédé par la
parole, ne contraint plus, mais vient renforcer la parole.
2. Je n'établis pas les preuves par les miracles que J'accomplis, mais par la
lumière même de la parole. Ainsi, celui qui vit entièrement selon Ma parole
trouve en lui-même la preuve vivante que ces paroles ne sont pas creuses, mais
qu'elles sont la Parole de Dieu.
3. En vérité, toutes les autres preuves ne serviront guère à celui qui n'aura pas
trouvé cette preuve dans son cœur. Car Mes paroles sont elles-mêmes lumière,
vérité et vie.
4. Qui écoute Ma parole, l'accepte et vit d'après elle, M'a accepté en lui et a
accepté aussi en lui Celui qui M'a envoyé dans ce monde et qui est parfaitement
un avec Moi. Car ce que Je veux, Il le veut aussi. Il n'est pas un autre que Moi et
Je ne suis pas un autre que Lui, jusqu'à la peau qui nous enveloppe l'un et l'autre.
Celui qui a dans son cœur le même amour et la même sagesse qui résident en
Moi est semblable à Moi et à Celui qui M'a envoyé pour le salut et la
sanctification de tous ceux qui croiront dans le Fils de l'homme ! Comprenez-
vous ? »
5. Ils furent nombreux à dire : « Oui, Seigneur ! » Mais d'autres dirent : « Voilà
pour une fois un enseignement bien difficile, nous en comprenons à peine le
sens, comment peux-tu, Toi et Ta parole, être une seule et même réalité ? »
6. Je dis: « Si vous ne parvenez pas à comprendre ce qui est clair comme le soleil
de midi, comment comprendrez-vous de plus grandes choses ? Si vous ne
comprenez pas ce qui est terrestre, comment comprendrez-vous ce qui est céleste
? Qu'est-ce que le Père ? L'amour éternel en Dieu est le Père ! Qu'est-ce que le
Fils et qui est le Fils ? La lumière émise par le feu de l'amour. Voilà la sagesse en
Dieu. Le Père et le Fils sont un comme l'amour et la sagesse sont un.
7. Y-a-t-il parmi vous quelqu'un qui ne possède quelque amour et quelque
entendement ? Êtes-vous pour autant des êtres doubles ? Ou quand votre lampe
brûle avec sa flamme claire qui est du feu, vous faut-il tout incendier pour y voir
clair lorsque vous entrez dans une chambre? Et la lumière ne provient-elle pas de
la flamme qui est du feu ? Et puisqu'elle provient de la flamme, la lumière est-
elle autre chose que la flamme qui éclaire ? Oh, aveugles que vous êtes, vous
n'êtes pas capables de saisir les choses naturelles, comment voulez-vous
comprendre ce qui est céleste !
8. Que celui qui s'irrite à cause de Moi s'en retourne chez lui, qu'il fasse et qu'il
croie ce que bon lui semblera. Un jour, chacun vivra selon sa foi, et les actes qu'il
accomplira selon la foi qui procède de son amour seront ses juges immanents.
9. Je ne jugerai personne, mais le juge de chacun sera son propre amour, selon
cette Mienne parole que Je viens de vous transmettre. »
10. Ces explications ayant été données, ceux qui n'avaient pas compris Mon
discours auparavant vinrent Me demander de pouvoir rester, car la lumière
commençait à se faire en eux, et ils allaient se donner la peine de chercher à
comprendre Ma parole mieux qu'ils ne l'avaient fait jusque-là, disaient-ils !
11. Et je dis : « Vous ai-je jamais dit de vous en aller ? Par contre, J'ai conseillé à
tous ceux qui étaient irrités par Moi de s'en aller plutôt que de s'aigrir davantage.
Et si Je ne vous ai pas chassé pourquoi ne pourriez-vous rester ? Si vos cœurs ne
sont pas irrités, restez ! » Sur cet avis, ils se retirèrent tout contents.
Chapitre 33
Guérison d'un vieux médecin
1. Là-dessus entre dans la chambre un vieux Juif des environs de Nazareth qui
demande avec anxiété à Me voir. Les disciples Me montrent du doigt et il vient à
Moi, tombe à genoux et dit d'une voix larmoyante :
2. « Cher Maître, fils de mon vieil ami Joseph, j'ai appris ta façon merveilleuse
de guérir les malades et je suis venu à toi dans ma détresse, ayant appris que tu
étais de nouveau à Nazareth!
3. J'ai bientôt quatre-vingt-dix ans, vois-tu, et je suis déjà très impotent ! Mes
enfants et mes petits-enfants me soignent avec beaucoup d'attention, mais une
méchante maladie inconnue leur est venue qui les a tous terrassés ; et moi, le
vieillard sans force, je suis le seul à être épargné dans la maison. Je ne sais plus
que faire ! J'ai prié Dieu de m'aider, même de me donner la mort, si telle est Sa
volonté !
4. Mais tandis que je priais de la sorte, un homme est apparu à la fenêtre de ma
chambre et a dit : "De quoi te lamentes-tu, quand le secours est si proche de toi!
Va à la maison de Joseph, le Sauveur Jésus s'y trouve. Lui seul peut t'aider". J'ai
rassemblé toutes mes forces, j'ai remis à Dieu tous mes malades à qui je ne puis
venir en aide, et je me suis mis en chemin pour venir te trouver, toi cher et bon
Sauveur. De toutes mes forces je te supplie de venir en aide à mes dix-sept
malades, qui souffrent horriblement de ce mal inconnu. »
5. Je dis : « J'avais pris la résolution de ne faire plus aucun miracle dans ces
parages à cause du trop grand manque de foi, mais si tu crois que Je puis t'aider,
retourne-t'en chez toi en paix, et qu'il en soit selon ce que tu crois ».
6. À ces mots, le vieillard exprime sa reconnaissance avec une vive émotion et
s'en retourne chez lui. Lorsque, tout ragaillardi, il approche de sa maison, il voit
venir à lui ses dix-sept malades qui l'assurent être guéris subitement depuis une
demi-heure. Se sentant beaucoup mieux, ils avaient essayé de se lever, et, étant
debouts, ils s'étaient sentis beaucoup plus forts qu'avant leur maladie. Depuis, ils
le cherchaient partout avec inquiétude.
7. Le vieillard comprit alors que ce méchant mal les avait quittés au moment
même où Je lui avais dit chez Moi : « Qu'il arrive ce que tu crois ».
8. Quand il fut chez lui, les siens lui demandèrent où il était allé. Il répondit : «
J'avais appris que Jésus, le célèbre Sauveur, se trouvait de nouveau à Nazareth.
Je me suis mis en chemin et j'y suis allé. Et voilà, il m'a écouté et il m'a dit
simplement : "Qu'il en soit selon que tu crois ! " Et instantanément, sur sa simple
parole, vous avez été guéris. Dites-moi, cela s'est-il jamais vu en Israël ? »
9. Ceux qui étaient guéris dirent : « Écoute, père, si c'est ainsi, il est plus qu'un
guérisseur ! C'est sans doute un nouveau grand prophète, plus grand qu'Isaïe,
Jérémie, Ezéchiel et Daniel, oui, peut-être aussi grand que Moïse, Aaron et Elie !
À eux seuls fut donné le pouvoir de faire de tels miracles, car tous les esprits,
aussi bien à l'intérieur de la terre que sur la terre, dans l'eau et dans l'air, leur
étaient soumis. S'ils sont soumis à un si grand prophète, Il peut certes faire ce
qu'il veut en un instant !
10. Mais comment le fils du charpentier a-t-il pu s'attirer une telle grâce divine ?
Nous le connaissons tous bien. Il y a trois ans à peine, il est venu faire des
travaux chez nous avec ses frères mais rien en lui ne laissait prévoir une chose
pareille. Il doit avoir ce don depuis fort peu de temps ! Il a toujours été, il est
vrai, un homme pieux et d'une conduite parfaite. C'était un travailleur silencieux,
qui ne parlait que lorsque c'était absolument nécessaire. On ne le voyait pour
ainsi dire jamais rire, et jamais il n'était triste. Jahvé peut avoir vu ses qualités et
lui avoir donné une telle grâce, car Jahvé ne regarde jamais à l'aspect extérieur de
la personne humaine, Il voit uniquement la pureté irréprochable du cœur.
11. Le vieux dit : « Oui, oui, vous devez avoir raison, ce doit être le cas : mais s'il
en est ainsi, il nous faut aller demain de grand matin lui porter nos hommages,
car tout homme doit plier le genou devant un prophète choisi par Dieu et oint de
son esprit : car ce n'est pas le prophète mais c'est Dieu lui-même qui parle et agit
par sa bouche et son cœur. »
12. Tous disent : « Amen, c'est là notre premier et principal devoir ! » Ils entrè-
rent tous dans la maison et les plus jeunes préparèrent le repas du soir, car ils
étaient tous affamés.
Chapitre 34
Les Pharisiens jaloux d'un héritage qui leur échappe
1. Les Pharisiens de Nazareth avaient appris que les habitants de cette maison
étaient dangereusement malades et qu'ils ne pouvaient guérir. Ils s'y rendirent
pour toucher les droits de succession et préparer l'enterrement. S'ils arrivaient
après le décès, ils n'avaient plus aucun droit à l'héritage, parce que le malade était
mort sans leur assistance, en quel cas tout revenait à l'Etat. C'est pourquoi les
Pharisiens étaient venus tard dans la nuit, alors que ces gens, après leur repas
s’etait dejà couchés. Ceux qui voulaient les envoyer dans l'autre monde furent
tout déconfits de constater la bonne mine de ceux qu'ils croyaient déjà morts à
moitié !
2. Le premier Pharisien dit très prudemment, en retenant sa respiration : « Oui,
qu'est-ce donc, vivez-vous encore ? Nous pensions que vous étiez à moitié morts,
et nous sommes venus bénir vos âmes et enterrer vos corps selon la coutume de
nos pères ! Qui vous a donc guéri ? Sûrement pas Borus ! Nous savons qu'il n'est
pas venu lorsque vous l'avez appelé, car il a certainement eu très peur, comme
nous, de votre maladie. Qui donc est votre médecin ?
3. Le gendre du vieillard, un homme vigoureux et qui parlait avec fermeté dit : «
Que voulez-vous donc ? Vous n'êtes pas venus pour notre salut mais pour le droit
d'héritage, et je vous le dis, tenez-vous toujours à l'écart de notre maison, car
vous êtes parfaitement incapables, et puisque vous ne voulez ni n'osez venir en
aide à une maison en danger, allez voir ce qui voudront de vous ! Cette maison,
du moins, n'aura jamais besoin de vous, car en vérité, avec votre façon d'agir,
vous êtes pires que les vers de terre qui ne savent que manger et détruire les
beaux fruits de la terre. Qu'on ne vous revoie plus ! Sinon, vous aurez affaire à
nous ! »
4. Un des anciens dit : « Eh bien nous nous en irons, mais vous pouvez nous faire
le plaisir de nous dire qui vous a aidé ? Nous avons prié sept heures par jour pour
vous et nous aimerions savoir si vous avez été guéris grâce à nos prières, car il
n'y avait aucune chance de vous guérir par des moyens naturels. Dites-le-nous,
cela ne vous coûtera rien. »
5. Le gendre dit : « Allez-vous-en, epèces de menteurs ! Vous avez pu souhaiter
notre mort sept heures par jour et prier pour des droits d'héritage, mais sûrement
pas pour notre guérison! Et vous n'êtes pas venus pour saluer des convalescents,
mais pour nous retirer les droits d'héritage avant notre mort et pour tout prendre à
la mort du dernier d'entre nous ! Oh, infâmes coquins, je vous connais trop bien,
vous et vos prières ! Allez-vous-en sinon je serai obligé d'user de mes droits de
propriétaire. Vous n'êtes même pas dignes de prononcer le nom de celui qui nous
a aidé ! »
6. L'ancien dit encore: «Il se peut que nous soyons ce que tu crois, mais s'il est
arrivé un miracle, cela pourrait peut-être changer notre façon de penser et d'agir !
Répondez-nous donc ! »
7. Le gendre dit : « Plus rien ne vous changera sur cette terre, pas même Dieu. Et
si vous étiez capables de changer, vous l'auriez fait depuis longtemps, car vous
avez Moïse et tous les prophètes contre vous. Mais votre Dieu est Mammon, c'est
l'or et l'argent ! C'est ce dieu que vous servez dans votre cœur, et vous ne vous
affublez du costume de Moïse et d'Aaron que pour pouvoir mieux sauter sur les
troupeaux d'agneaux, lacérer leur toison de vos dents de loup et les dévorer.
8. Mais Jahvé vous connaît et Il vous donnera sans doute le salaire que vous
méritez. Dieu a suscité Jésus, le fils du charpentier Joseph, comme il a suscité
Moïse autrefois, et ce Jésus qui nous a instantanément guéris vous dira aussi quel
salaire vous méritez ; car il est rempli de l'esprit de Dieu, mais vous, vous êtes
habités par celui de Belzébuth ! Pour la dernière fois, allez-vous-en et ne revenez
jamais ici, sinon il vous arrivera malheur. »
9. À ces mots les Pharisiens quittent la maison en pensant à Jésus qui s'est encore
mis en travers de leur route, et ils se consultent pour savoir comment s'en défaire,
de peur qu'il ne soulève tous les Juifs contre eux.
10. Mais, tandis qu'ils développent ces mauvaises pensées, un grand coup de
tonnerre retentit derrière eux et les effraie au point qu'ils s'en retournent
prestement et en silence vers la ville.
Chapitre 35
Les Pharisiens lisent le psaume 37
1. De retour chez eux, ils saisissent le livre des Psaumes de David et tombent sur
le début du psaume 37, que le plus ancien se met à lire à haute voix.
2. « "Ne t'irrite pas contre les méchants, n'envie pas ceux qui font le mal, ils
seront bientôt fauchés comme l'herbe et se flétriront comme le gazon vert.
Confie-toi en l'Éternel et fais le bien. Aie ton pays pour demeure et la fidélité
pour pâture. Trouve tes délices dans le Seigneur, Il te donnera ce que ton cœur
désire ! Recommande ton sort à l'Éternel et mets ton espoir en Lui et Il agira. Il
fera paraître ta justice comme la lumière et ton droit comme le soleil à son midi.
3. Garde le silence devant l'Éternel et espère en Lui. Ne t'irrite pas contre celui
qui réussit dans ses voies. Tiens bon, renonce au courroux ; oui, ne te mets pas en
colère, sinon tu feras le mal ! Car les méchants seront retranchés, et ceux qui
espèrent en l'Éternel posséderont le pays.
4. Dans peu de temps l'impie ne sera plus. Quand tu visiteras sa ville, il aura
disparu. Les malheureux hériteront du pays, ils auront la paix et la joie. L'impie
menace le juste et lui montre les dents. Mais le Seigneur Se rit du méchant, car Il
voit son jour venir. Les impies tirent l'épée et tendent leur arc pour faire tomber
le pauvre et le malheureux, et pour égorger l'homme pieux. Mais leur glaive
pénétrera leur propre cœur et leurs arcs se briseront !
5. Le peu que possède le juste vaut mieux que les grands biens des impies, car le
bras de l'impie sera brisé, mais le Seigneur maintiendra le juste. Le Seigneur
connaît les jours des justes et des pieux et leur bien demeurera à jamais. Ils ne
seront pas confondus au jour du malheur et ils seront rassasiés aux jours de
disette. Les impies et les méchants tomberont, et même s'ils sont comme les verts
pâturages, les ennemis du Seigneur s'évanouiront en fumée. L'impie emprunte et
il ne paie pas. Le juste est compatissant et il donne." »
6. À la lecture de ce verset un Pharisien se lève et dit au lecteur : « Quelle idiotie
lis-tu là ? Ne remarques-tu pas que tout cela nous met du mauvais côté, et que le
fils du charpentier est le seul à être du bon côté ? C'est une terrible déposition
contre nous ! Et tu la lis aussi simplement et aussi joyeusement qu'une lettre
flatteuse que nous écrirait le Grand Prêtre de Jérusalem ! »
7. L'ancien dit : « Mon ami, cela ne nous fait pas de mal d'être un peu plus
éclairés sur nous-mêmes. Il vaut mieux le reconnaître entre nous avant que notre
tromperie soit mise au grand jour devant tout le monde, et que nous soyons
détestés et abandonnés de tous ! Car finalement, notre façon actuelle d'agir ne
restera cachée qu'aussi longtemps que Dieu le voudra bien. Je vais donc
continuer la lecture de ce psaume très mémorable ! »
8. Plusieurs disent : « Tu as raison — fais-le ! »
9. Et l'ancien poursuit :
10. « Car ceux que bénit l'Éternel posséderont le pays, mais ceux qui Le
maudissent seront chassés. »
11. Alors le Pharisien demande encore précipitamment : « Qui est béni, qui est
maudit ? »
12. L'ancien dit : « À voir comme ces Romains nous poursuivent, il est facile de
comprendre que nous ne sommes pas bénis ! Car si nous étions bénis, nous
n'aurions pas à subir une telle plaie dans notre pays. Tu peux deviner le reste —
Je continue la lecture !
13. "L'Éternel affermit le pas d'un tel homme et i1 prend plaisir à sa voie. S’i1
tombe, il n'est pas terrassé, car le Seigneur le tient par la main. J'ai été jeune et je
suis vieux maintenant. Mais je n'ai jamais vu le juste abandonné, ni sa postérité
mendier le pain ! Car le juste est compatissant ; c'est pourquoi il donne au
pauvre, sa postérité est donc bénie.
14. Détourne-toi du mal et fais le bien, reste juste à jamais, car l'Éternel aime la
justice et n'abandonne jamais ses saints, ils seront éternellement protégés. Mais
la postérité des impies sera retranchée, seuls les justes hériteront du pays et y
demeureront à jamais.
15. La bouche du juste dit la vérité et sa langue enseigne la justice. La loi de
Dieu est dans son cœur, ses pas ne chancellent pas. Le méchant épie le juste et
cherche à le faire mourir. Mais le Seigneur ne le laisse pas tomber aux mains du
méchant et ne le condamne pas lorsqu'il est jugé par les méchants.
16. Espère en l'Éternel et garde Sa voie, Il t'élèvera pour que tu possèdes le pays
et tu verras que les impies seront retranchés.
17. J'ai vu le méchant dans toute sa puissance, il s'étendait comme un laurier
verdoyant, il a passé et voici qu'il n'est plus, je le cherche et ne le trouve plus.
18. Reste donc intègre et aime ce qui est droit, et alors tout ira bien. Mais ceux
qui ne respectent pas la loi de Dieu seront détruits et les impies seront anéantis.
Le Seigneur n'aide que les justes en toute occasion. Il est leur seule force, leur
seul soutien. Le Seigneur est à leur côté et les secourt, Il les sauve des méchants
et leur vient en aide, car ils ont confiance en Lui." »
19. Comme l'ancien terminait sa lecture le Pharisien en colère l'invectiva en
criant : « Espèce d'âne, ne vois-tu pas que ce psaume nous traite d'impies et fait
passer pour des justes ceux qui sont avec Jésus ? Ne vois-tu pas que nous serons
chassés et qu'ils resteront dans le pays ? N'avons-nous pas l'intention de le tuer,
alors que Dieu le protège ? C’est bien un psaume pour nous !»
20. L'ancien dit : « Ce n'est pas moi qui l'ai écrit, il est dans ce livre, et si nous
restons comme nous sommes, il nous faudra bien l'accepter. Comprends-tu ce
que cela signifie et quel est le pouvoir de Dieu ? »
21. Un autre Pharisien dit : « Je comprends cela mieux que vous tous ! Notre ami
Roban a dû lire ce psaume sous l'influence de l'incompréhensible magie de ce fils
de charpentier, car il est en mesure de guérir d'une seule parole toute la famille
où nous sommes vainement venus chercher notre salut dans l'or et l'argent. Il est
parfaitement en mesure de nous obliger à lire un tel psaume, qui nous condamne
tout aussi bien que les ennemis de David.
22. Outre que Joseph devait réellement descendre en droite ligne de David,
comme Marie, la deuxième femme de Joseph, est issue également de la même
lignée, on appelle Jésus "fils de David" ; aussi, ce vieux Joseph était assez rusé
pour enseigner à son fils toutes sortes de sciences secrètes, afin que celui-ci, par
ses tours de magie, trompe les Grecs et les Romains crédules et se fasse passer
pour un fils d'Apollon ou de Jupiter et élire empereur par les Romains abusés. Et
si les autorités de Rome sont aussi aveugles que celles d'ici, qui gouvernent toute
l'Asie et que Jésus tient dans ses filets, il ne manquera pas d'en venir à leur dicter
sa loi, et nous serons tous servis. »
23. Un autre dit : « Une telle entreprise pourrait être entravée par une lettre
secrète à l'empereur. »
24. Le premier interlocuteur dit : « Il te sera difficile de te mettre en travers des
projets d'un homme qui, grâce à ses dons magiques de voyance, peut deviner
toutes tes pensées cachées. Qui d'autre que lui a bien pu nous effrayer par ce
coup de tonnerre sur notre chemin de retour ? Il a sans doute perçu ce que nous
disions entre nous contre lui ! Et qui d'autre que lui nous a poussés à lire ce
psaume ? Et pourquoi ? Parce qu'il a su sans doute ce que nous méditions contre
lui ! Va t'asseoir à ta table et essaie de rédiger un message secret à l'empereur, et
je prétends que tu ne seras pas capable d'écrire un seul mot. Ou alors, sous l'effet
de son incroyable magie, tu te sentiras obligé de porter témoignage contre toi-
même. »
25. De plus, notre chef Jaïrus lui appartient corps et âme, car Il a ressuscité deux
fois sa fille, et il le soutient dans tout ce qu'il désire, et c'est pourquoi nous ne
pouvons rien contre lui à Jérusalem. Bref, nous n'avons plus le choix d'aucun
côté et nous ne pouvons bouger. Il me semble que le mieux est de faire contre
mauvaise fortune bon cœur et de rallier ses disciples. Car nous ne pouvons rien
entreprendre contre lui qui réussisse, puisque, dès que nous imaginons quelque
chose, il le sait à l'instant même.
26. Le vieux Roban dit : « C'est aussi mon avis, la seule chose à faire, est de
rester parfaitement indifférents ou alors de nous rendre à son enseignement et de
faire tout ce qu'il nous conseille ou nous ordonne, car il est impossible de se
regimber contre lui.
27. Tous disent : « Nous resterons parfaitement indifférents, c'est ce qu'il y a de
mieux à faire ; ainsi nous ne nous mettons à dos ni Rome ni Jérusalem, car telle
est la sagesse qui régit notre existence.».
28. Ils vont tous alors se reposer et chacun songe à ce qu'il a à faire.
Chapitre 36
Reste si tu veux, va si tu ne veux pas
Chapitre 37
Josa l'ancien remercie Jésus
1. Roban parti, ce fut au tour de l'ancien Josa de venir avec ses enfants et petits-
enfants guéris cette nuit Me dire leurs louanges et leur reconnaissance. Ils me
demandèrent la permission de rester une journée en Ma compagnie.
2. Et Je lui dis : « Ce que tu veux, fais-le ! Tu as eu hier soir à soutenir une lutte
avec les Pharisiens, et en Mon nom vous vous êtes bien comportés. C'est
pourquoi vous serez désormais délivrés de tout fléau de ce genre. Plus aucun
zélote intéressé ne franchira le seuil de votre porte. Allez trouver Mes disciples,
ils vous diront ce qu'il faut croire et ce que vous avez à faire. »
3. À ces mots, Pierre entre et conduit toute la compagnie à Matthieu le scribe, qui
leur donne à lire tout ce que J'ai transmis et enseigné à Mes disciples.
4. Là-dessus sortent de leurs chambres Cyrénius, Cornélius, Faustus, Jaïrus, le
chef de la synagogue, avec sa femme et sa fille. Ils Me saluent très aimablement
et Me remercient pour la bonne nuit qu'ils ont pu passer et les beaux rêves qu'ils
ont faits. Je les salue également et leur présente ceux qui viennent d'arriver.
5. Cyrénius s'avance vers eux et demande des détails. Mais quand il apprend les
menées nocturnes des Pharisiens, sa colère éclate et il dit : « Non, Seigneur ! Par
Ton nom qui m'est plus saint que tout, je ne puis plus pardonner à ces suppôts de
Satan ! Il faut que je les châtie, dusse-je en perdre la vie. Ces loups, ces hyènes,
ces renards sont les pires de toute la Palestine et de toute l'Asie mineure. Quelle
différence y a-t-il entre eux et les pires malfaiteurs ? Oh méchantes bêtes féroces
! Le jour ils se font appeler serviteurs de Dieu et réclament tous les honneurs, et
la nuit ils font les pires choses. Attendez, attendez seulement, vos sorties
nocturnes de rapine, je saurai y mettre fin de sorte que vous n'en croirez ni vos
yeux ni vos oreilles ! »
6. Je dis au grand gouverneur courroucé : « Ami, laisse cela, ce que tu songes à
faire, Je l'ai déjà fait cette nuit spirituellement d'une façon beaucoup plus subtile,
en sorte qu'ils suivront bientôt tous Mon enseignement. Leur ancien, qui s'appelle
Roban, est déjà venu aujourd'hui Me trouver et accepter Mon enseignement. Je
viens de l'envoyer à Sichar où il verra et apprendra beaucoup de choses. Il
reviendra dans deux jours et il amènera sans doute ses collègues sous Mon toit !
Vois-tu, cela vaut mieux que le fouet et la hache ! »
7. Cyrénius, quelque peu calmé, dit : « S'il en est ainsi, je retire mes paroles et ne
les poursuivrai pas en justice. Mais il faudra qu'ils me rendent raison ! »
8. Je dis : « Pas ce matin, mais cet après-midi ! Nous allons prendre le petit
déjeuner auparavant. »
9. Borus avait en effet fait dresser une quantité de tables. Mes frères, en tant que
charpentiers, l'avaient naturellement aidé, et en cette veille de sabbat, un
vendredi donc, le repas fut pris en plein air. Il y avait près de cinquante tables
avec des bancs, couvertes de mets et de vins, et il était plaisant de voir des
centaines d'hôtes en tout genre, déjà à table, chantant des psaumes de louanges et
mangeant ce copieux repas. Au milieu de toutes ces tables se dressait une sorte
de tribune où nous attendait une table merveilleusement décorée, où prirent place
avec Moi Cyrénius, Cornélius, Faustus, Jaïrus, sa femme et leur fille, Ma mère et
les douze apôtres, et, au milieu de joyeuses conversations édifiantes, nous prîmes
ce repas commandé par Borus et Faustus.
10. Mais il y manquait Lydia, la jeune femme de Faustus, qu'il avait laissée à
Capharnaüm à cause de ses nombreuses obligations domestiques alors qu'elle
serait volontiers venue à Nazareth. Ma mère lui en fit très gentiment la remarque
; il exprima le regret d'avoir laissé sa très chère femme à la maison, et décida
aussitôt d'aller la chercher.
11. Je lui dis : « Laisse donc, si Je le veux, elle sera ici avant midi ! » Faustus
M'en pria, et Je lui en fis la promesse.
12. Aussitôt, deux jouvenceaux adorables apparurent à Mes côtés, vêtus de
longues robes d'un bleu lumineux. Ils se prosternèrent devant Moi jusqu'au sol,
disant : « Seigneur, Tes serviteurs attendent Tes saints commandements dans la
plus profonde dévotion ! »
13. Je leur dis : « Allez chercher Lydia pour qu'elle soit avec nous. »
14. Ils disparurent tous deux et Cyrénius Me demanda avec étonnement : « Ami,
qui étaient donc ces deux jouvenceaux d'une beauté et d'une douceur hors du
commun ? Ciel, je n'ai jamais eu sous les yeux des créatures aussi merveilleuses
!»
15. Je dis : « Vois-tu, tout Seigneur a ses serviteurs, et s'il les appelle, ils doivent
venir le servir. Je suis aussi un Seigneur et j'ai également Mes serviteurs qui ont à
transmettre Mes ordres à tout l'infini. Ils ne te sont pas visibles, mais à Moi ils le
sont, et sans que tu t'en doutes, des légions innombrables attendent que je leur
fasse signe. Les deux serviteurs que tu vois ici en font partie, et malgré leur
apparente douceur, ils seraient capables d'anéantir la terre entière en un clin
d'œil, si je le voulais. Mais, les voilà déjà de retour avec Lydia ! »
16. Tous ceux de Ma table sont suffoqués et Cyrénius dit : « Comment est-ce
possible, ils ont à peine pu faire cinquante pas, il faut deux heures pour aller à
Capharnaüm et les voilà de retour ! Ah ! Ce qui peut arriver à un pauvre homme
de cette terre ! »
17. Lydia, accueillie par Faustus avec infiniment de tendresse, est conduite à
notre table où Cyrénius lui demande aussitôt : « Très douce Lydia, comment as-
tu pu venir si vite de Capharnaüm, étais-tu déjà en route ? »
18. Lydia dit : « Ne vois-tu pas ces deux anges de Dieu ? Plus vite qu'une flèche,
ils m'ont portée jusqu'ici ! En chemin je n'ai vu ni terre ni air, j'ai été transportée
instantanément de là-bas jusqu'ici et me voilà. Mais demande à ces deux anges,
ils sauront mieux te l'expliquer que moi ! »
Chapitre 38
De la volonté créatrice de l'homme
1. Cyrénius se tourne vers les deux anges et leur demande comment une chose
pareille est possible. Ils Me désignent avec respect de leurs mains d'une beauté
céleste et disent d'une voix très pure et très harmonieuse : « Sa volonté est notre
essence, notre force, notre vitesse. Nous ne pouvons rien par nous- mêmes, mais
nous acceptons en nous Sa volonté quand Il le veut, et nous avons alors tout
pouvoir. Notre beauté qui éblouit tes yeux est l'amour que nous Lui portons, et
cet amour n'est encore que Sa volonté en nous. Si vous voulez nous ressembler,
acceptez Sa parole vivante dans vos cœurs et mettez-la en pratique librement,
vous aurez alors en vous, comme nous, cette force toute-puissante que donne Sa
parole ; selon Sa volonté, toute chose vous deviendra possible, et vous pourrez
faire plus que nous tous, car vous procédez de Son amour tandis que nous
provenons surtout de Sa sagesse. Tu sais maintenant comment ce qui t'étonne
tant nous est possible ! Agis selon Sa parole à l'avenir, et des choses mer-
veilleuses te seront possibles ! »
2. Cyrénius ouvre de grands yeux et dit : « J'ai donc bien raison si je considère
que Jésus est le seul Dieu, l'unique créateur du monde entier. »
3. Les anges disent : « Tu as bien raison, mais ne le dis pas si fort, et si tu le vois
sous des traits humains, ne te fâche pas, car tout ce qui est humain ne serait pas
humain si cela n'avait été divin de toute éternité. Si parfois Il se manifeste à toi
en des formes qui te sont désormais habituelles, ce n'est jamais d'une manière
indigne, car toute forme, toute pensée était en Lui avant même que par Sa
volonté elle ne commence à exister en dehors de Lui. Cette terre et tout ce qui vit
en elle et sur elle n'est que Sa pensée restée éternellement fidèle et identique à
elle-même, et qui par Sa parole s'est faite vérité. Si dans Sa volonté et dans Sa
sensibilité Il abandonnait cette pensée essentielle, ce qui lui serait bien facile, à
l'instant même il n'y aurait plus de Terre, et tout ce qu'elle porte et contient
subirait le même sort !
4. Mais le Seigneur n'est pas comme l'homme, tantôt de bonne volonté, tantôt de
mauvaise volonté ! La volonté du Seigneur est éternellement identique et rien ne
peut la faire dévier de l'ordre établi de toute éternité. Mais dans cet ordre règne
cependant la plus grande liberté, et le Seigneur peut faire ce qu'il veut, comme
chaque ange et chaque être humain ! Tu peux voir qu'il en est ainsi en toi-même
comme en des milliers d'autres phénomènes.
5. Dans ta forme essentiellement personnelle, tu peux faire ce que tu veux et tu
ne te heurtes qu'à ta propre volonté. Mais cette forme essentiellement personnelle
a beau faire, elle se trouve toujours dans l'ordre divin fermement établi.
6. Tu peux sensiblement changer l'aspect extérieur de cette terre, tu peux abaisser
des montagnes, détourner des fleuves, assécher des lacs ou leur creuser de
nouveaux lits, tu peux construire des ponts au-dessus des mers et changer les
déserts en terres cultivables, tu peux faire subir à la Terre un nombre incalculable
de changements, mais tu ne peux prolonger la durée du jour, ni raccourcir celle
de la nuit, et tu ne peux faire obéir les vents et les tempêtes.
7. Il te faut souffrir l'hiver et supporter les chaleurs de l'été, et malgré toute ta
volonté, tu ne peux changer la forme des créatures. De l'agneau tu ne feras jamais
un lion, et du lion tu n'auras jamais un agneau ! C'est encore l'ordonnance
fermement établie de Dieu à l'intérieur de laquelle il t'est donné une grande
liberté d'agir, bien que tu ne puisses changer en quoi que ce soit l'ordonnance
divine.
8. Mais voici devant toi Celui qui a créé cette ordonnance de toute éternité et qui
peut à nouveau la rompre s'Il le veut. Si, dans cette ordonnance fixe qui
détermine ton être et l'être de tout ce qui t'environne, tu es cependant libre de
penser, de vouloir et d'agir, le Seigneur est d'autant plus libre de faire ce qu'il
veut.
9. Mais nous te le disons une fois encore, ne te fâche pas si le Seigneur se meut
devant vous sous une forme humaine, car jamais forme n'a été plus hautement Sa
propre Œuvre ! »
Chapitre 39
De l'influence des anges sur l'homme
Chapitre 40
L'amour envers le Seigneur
Chapitre 41
De l'essence de l'amour véritable
1. L'infiniment belle et aimable Sarah dit alors : « Oui, j'y vois plus clair
maintenant, mais alors toutes les filles d'Eve ont autant droit à Toi que moi-
même ! »
2. Je dis : « Il est vrai, si elles sont comme toi maintenant mais si elles ne le sont
pas, elles peuvent être Mes servantes ou Mes fiancées, mais jamais pleinement
Mes épouses. L'ancêtre David dont Mon corps est issu n'avait-il pas de
nombreuses épouses et pourtant il était un homme selon le cœur de Dieu !
Pourquoi n'aurais-je pas le droit d'avoir beaucoup d'épouses puisque Je suis
beaucoup plus que David ! Et Je te dis en outre que J'ai le pouvoir de rendre
infiniment heureuses autant de femmes qu'il y a de grains de sable dans la mer ou
de brins d'herbe sur la terre, et que chacune d'entre elles sera si bien pourvue
qu'elle n'aura aucun souhait qui ne soit immédiatement satisfait. Mais s'il en est
ainsi, cela peut-il te gêner que Je veuille donner à beaucoup d'autres le bonheur
dont Je te comble infiniment ? »
3. Sarah dit : « Tu es seul Seigneur et Tu es l'amour illimité et la sagesse même.
Ce que Tu fais est fait sagement, mais je n'y suis pour rien si je me meurs
d'amour pour Toi et voudrais Te posséder toute seule. Tu dois bien voir que cet
amour par trop stupide tient à mon cœur enfantin. »
4. Je dis : « Tout cela est bien ! Je te le dis. Qui ne M'aime pas jalousement et ne
Me veut pas exclusivement pour soi n'a encore pas d'amour véritable et vivant
pour Moi. Mais qui ne l'a pas, n'a pas non plus la plénitude de la vie en lui, car Je
suis la vie même en l'homme quand son âme est remplie d'amour pour Moi, et cet
amour est Mon esprit en chaque homme.
5. Si son amour pour Moi s'éveille en lui, c'est qu'il éveille l'esprit que J'ai mis en
lui, et comme cet esprit n'est autre que Moi-même, puisque, en dehors de Moi, il
n'y a pas d'esprit de vie, c'est Moi-même qu'il éveille en lui. Il est alors né à la vie
éternelle et ne peut jamais plus mourir ni jamais plus être détruit même pas par
Ma toute puissance, puisqu'il est un avec Moi ! Moi non plus, Je ne puis Me
détruire Moi-même puisque Mon être éternel infini ne peut jamais Se transformer
en néant. Ne crois donc pas que ton amour pour Moi soit stupide, il est comme il
doit être, conserve-le et tu ne verras jamais la mort ni ne la sentiras, ni n'en
souffriras. »
6. Ces éclaircissements rendire Sarah infiniment heureuse. De toutes ses forces
elle Me serra dans ses bras et se mit à Me donner de très tendres baiser.
7. La mère de Sarah la réprimanda dit : « Mais, chère Sarah, cela ne se fais pas !
Allons, tu es tout à fait mal élevée. »
8. Sarah lui dit : « Quoi, qu'est-ce qui se fait, qu'est-ce qui ne se fait pas ! Est-ce
que ça se fait de mourir et d'être parfaitement morte pour le monde, et est-que ça
se fait de ressusciter et de sorti du tombeau quand vient le Seigneur ? Oh, mère,
aimer le Seigneur plus que tout au monde, voilà ce qui se fait de mieux ! N'est-il
pas vrai, Seigneur Jésus ! »
9. Je dis : « Très juste et très vrai, si quelqu'un se gêne pour M'aimer par dessus
tout, Je Me gênerai aussi pour l'aimer devant tous les cieux et le réveiller à la vie
éternelle au jour du jugement dernier. »
Chapitre 42
Le jugement dernier
1. Tous s'étonnèrent alors d'être venus de chez Moi jusqu'au bord de la mer sans
s'en apercevoir !
2. Et Je leur dis : « Comment vous étonnez-vous encore ? N'avez-vous pas déjà
vécu cela avec Moi ? Que le vieux Josa et ses enfants s'émerveillent n'est pas
étonnant, mais vous qui vous dites Mes disciples expérimentés, que vous puissiez
encore vous étonner est vraiment incompréhensible, car vous devriez savoir que
rien ne M'est impossible !
3. Voyez-vous, ce n'est pas en vain que je dis "incompréhensible", car tout
étonnement de ce qui se passe avec Moi est toujours le signe, si petit soit-il,
d'une incrédulité restée cachée au fond de l'âme. L'homme doute à l'avance de la
possibilité d'un acte ou d'un fait, et quand celui-ci se réalise malgré tout, il est
ébloui de voir accompli ce dont il doutait et il demande avec étonnement :
"Comment est-ce possible ?" Ce que signifie une telle question, Je vous le dis :
"Je doutais de la possibilité d'une réussite, et cependant cela a réussi, c'est
étonnant et étrange !"
4. Qu'un profane s'émerveille est compréhensible, mais que des initiés s'étonnent
encore démontre qu'ils font encore partie de ceux qu'on nomme à bon droit
profanes ! Ne vous étonnez pas à l'avenir, si des étrangers vous prennent vous
aussi pour des étrangers, quand Je ferai devant eux des choses extraordinaires ! »
5. Les disciples dirent : « Seigneur, Tu sais que nous T'aimons par-dessus tout et
que nous savons bien ce que Tu es et qui Tu es. Et malgré, cela nous ne pouvons
nous empêcher de nous étonner et nous perdons contenance quand Tu fais un
nouveau miracle, car nous y sommes rarement préparés. Chaque jour de notre
vie, ne voyons-nous pas le soleil se lever et se coucher ? Mais quel est l'homme
assez insensible pour ne pas s'émerveiller chaque fois devant le lever du soleil ?
Il en va de même pour nous, Seigneur, et Tu es infiniment plus que tous les
levers de soleil, voilà ce qui nous oblige à commettre de telles fautes ! »
6. Je dis : « Bien, bien, ce n'est rien ! Mais suivez Mon conseil, à l'avenir, afin
que les étrangers reconnaissent que vous êtes Mes disciples. Maintenant, allons à
la pêche, il s'y passera encore quelques petits miracles. N'en faites point de cas.
Les étrangers trouveront bien s'il s'agit de faits normaux ou s'ils sont
extraordinaires ! »
7. Après ces remarques nécessaires, les disciples montent dans la barque, tendent
les filets et les lancent à l'eau selon l'art de la pêche, mais ils ont beau les lancer
et les relancer, il ne prennent pas grand-chose !
8. Pierre remarque que le fort vent d'ouest est contraire et chasse le poisson vers
le fond.
9. Un autre fait observer qu'avant le coucher du soleil on ne pêche pas grand-
chose, que le soleil est trop fort et que le poisson cherche la fraîcheur des fonds
et fuit la lumière.
10. Alors les deux jouvenceaux prennent chacun une barque et tendent un grand
filet qu'ils lancent puissamment au loin.
11. André, qui était aussi un maître pêcheur, dit : « À moins qu'une force
miraculeuse ne pousse le poisson dans leur filet, ils auront beau rester dix ans en
haute mer, ils ne rapporteront pas une pièce ! »
12. Mais les deux jouvenceaux font un beau coup de filet, et bien vite ils sont de
retour sur la rive avec trente grosses pièces.
13. André dit : « Ce n'est pas un miracle, et pourtant c'est d'un mérite certain de
ramener de haute mer trente silures. »
14. Enfin, Je montai Moi-même dans une barque et la courageuse Sarah dans
une autre. Nous tendîmes un assez grand filet et le laissâmes dans l'eau, et
lorsque nous le remontâmes non loin de la rive, il rapporta cinq cents pièces de
saumons et de silures, si bien que les deux jouvenceaux durent se précipiter pour
aider Sarah qui ne pouvait plus tenir le filet. Le poisson fut aussitôt amené sur la
rive, et mis dans des corbeilles qu'il y avait là en suffisance.
15. Les disciples firent encore un coup de filet, et quand ils le ramenèrent à la
rive, ils n'y trouvèrent pas grand-chose.
16. Pierre dit : « C'est mon dernier coup de filet pour aujourd'hui. Pour un vieux
pêcheur expérimenté comme moi, ça ne vaut pas la peine de monter dans une
barque pour un pareil coup de filet » Et il voulut relancer à la mer quelques petits
poissons qu'il avait attrapés !
17. Mais Je lui dis : « Garde ce que tu as pris ; les petits poissons sont souvent de
bons poissons et Je les préfère aux gros, dont la chair est souvent coriace et dure
à digérer. Mais remarque cette coïncidence :
18. Quand tu seras pêcheur d'hommes, ne t'inquiète pas si le filet de l'Évangile ne
prend que des petits poissons, car en vérité Je les préfère aux gros ! Tout ce qui
est important et grand pour le monde est une abomination pour Moi ! Laissons
cette pêche, et retournons à la maison ! Nous sommes pourvus pour aujourd'hui
et pour demain ; après le sabbat nous verrons bien ! »
19. On retira tous les filets et on ramena encore sur la rive toutes sortes de pois-
sons qui furent mis dans des corbeilles, chargés sur des charrettes et ramenés au
grand cellier que Joseph avait construit de son temps près de Ma maison.
Chapitre 44
Du sacrifice de soi
Conseils à de jeunes amoureux
Chapitre 46
Borus ami d'enfance de Jésus
Des médecins au service du prochain
1. Cyrénius dit : « Oui, Toi mon Seigneur, et visiblement mon Dieu, maintenant
je comprends, leur froideur apparente n'est que l'amour le plus pur.
2. Il me souvient d'un mythe d'une vierge que les dons de la nature avaient
rendue incomparablement belle. Jeunes gens, hommes et vieillards se battaient
pour l'obtenir. Le nombre des prétendants augmentait de jour en jour. Ces
prétendants, voyant finalement qu'ils n'arrivaient à rien en se battant à mort,
finirent cependant par se concerter, disant : "Cet être-là n'est pas d'ici-bas, elle
vient d'En-Haut, c'est une déesse. Que chacun de nous lui fasse des offrandes,
celui à qui elle offrira sa belle main sera sans conteste son époux." On lui apporta
de tous côtés d'inestimables trésors, on lui rendit de divins hommages.
L'adoration de cette beauté alla si loin qu'on oublia totalement d'honorer et de
prier les divinités, qui se mirent en colère. Elles rendirent l'attrait de cette vierge
plus séduisant encore mais rendirent aussi son souffle maléfique. Tous ceux qui
l'approchaient, même de loin, tombaient inanimés à terre et restaient là
inconscients pendants des heures ! Les dieux placèrent également sur la langue
de la vierge un dard mortel qui pouvait tuer tous ceux qui approchaient contre
son gré de sa bouche !
3. Survint un jour un jeune homme d'une stature resplendissante de beauté. Le
cœur de la jeune vierge en fut ému. Elle voyait que le jeune homme se brûlait
d'amour pour elle, mais comment pouvait-elle l'aimer ? Elle savait qu'il tomberait
inanimé si elle tournait son visage vers lui, elle savait qu'il mourrait si elle
l'embrassait ! Elle cacha donc son visage, tourna froidement le dos au jeune
homme pour qu'il ne puisse approcher de sa bouche. Elle ne pouvait l'aimer
qu'avec cette froideur apparente pour qu'il ne meure pas.
4. Tout comme dans ce mythe, ces deux jouvenceaux aiment les êtres humains de
cette pauvre terre avec une froideur apparente, parce qu'ils savent bien que les
humains ne peuvent supporter l'ardent amour de leur cœur céleste. »
5. Je dis : « Oui, c'est cela, mais leur souffle évidemment n'est pas empoisonné et
leur langue ne porte pas de dard mortel, car leur souffle ranime, et leur langue
bénit la terre. »
6. Là-dessus Borus s'approche de Moi avec Sarah, et Me demande ce qu'il
pourrait faire pour Me témoigner sa reconnaissance infinie.
7. Je dis : « Dis-Moi, Mon ami, Mon frère, où est l'homme qui a fait depuis son
enfance tout ce que tu as fait pour Moi ! Enfant, tu as été Mon compagnon de
chaque jour ! Tu faisais pour Moi tout ce qui pouvait Me faire plaisir. Chaque
année, lorsque tu partais en Grèce avec tes parents dans leur propriété, et que tu
revenais après quelques semaines, J'étais le premier que tu venais visiter et à qui
tu apportais toutes sortes de bonnes choses, et souvent de précieux cadeaux ; et tu
n'as pas été fâché lorsqu'une fois, avec un marteau, J'ai brisé un temple de Diane
en argent que tu m'avais offert. Alors Je t'ai défendu de Me faire de tels cadeaux.
8. Quand Je fus un jeune homme et que presque plus personne ne prêtait at-
tention à Moi, tu fus le seul à rester le même. Et ce que tu as toujours été, tu l'es
encore et le resteras. C'est pourquoi Je t'ai rendu cette fois ce que Mon amitié te
devait depuis longtemps. Ne t'exclame pas trop ! Tu as reçu certainement la
jeune femme la plus aimable, la plus belle et la plus éveillée spirituellement qui
soit, et Sarah a trouvé en toi l'homme le meilleur et le plus agréable. Vous ne
manquerez jamais de Ma bénédiction en toute chose, et tu resteras le meilleur
médecin non seulement de ce pays, mais du monde entier. Ainsi Je pense que
vous pouvez vivre heureux !
9. Mais n'oubliez jamais les pauvres ! N'accepte jamais d'être payé par un
serviteur ou par un pauvre citadin, que ce soit en or, en service, en grain ou en
bétail, pour ton art inégalable de guérir toutes les maladies.
10. Mais les grandes fortunes, les changeurs, les marchands et les grands
propriétaires, fais leur payer ton art, car celui qui a et qui veut vivre doit faire des
sacrifices. Il y a suffisamment de pauvres à qui tu pourras donner selon ce que le
riche aura payé pour sa vie.
11. Un médecin comme toi vend aux hommes la vie, qui est pour eux le plus
grand bien. Ils n'ont donc qu'à la payer, et ils peuvent être heureux qu'il y ait sur
terre des gens qui peuvent la leur vendre.
12. Car Je te le dis, l'art le plus grand et le plus précieux, celui qui ne s'apprend
pas, est de guérir instantanément toutes les maladies, de chasser les pires démons
par la parole, par la volonté et parfois en imposant les mains, de la plus grande
peste au plus petit rhume, que les lépreux soient purifiés, que les sourds
entendent, les paralysés et les estropiés marchent, et qu'en plus le royaume des
cieux soit enseigné aux pauvres. Ami, fais le tour du monde et cherche ton pareil
! Je te le dis, à part toi et Moi, il n'y a personne d'autre. »
13. Il est vrai qu'à Sichar j'ai éveillé un médecin en lui donnant de grands pou-
voirs ; mais il ne peut se séparer tout à fait de ses plantes médicinales et il est
donc loin de tes pouvoirs.
14. Mes disciples te rejoindront dans quelques années, mais pas tous ceux que tu
vois ici.
15. Ma chère Sarah va-t-elle aussi acquérir un art, celui de la sage-femme. Car
c'est un service très précieux devant Dieu que d'assister les femmes parturientes
dans leurs grandes douleurs. Et ainsi vous êtes tous deux pourvus, mieux
qu'aucun couple royal.
16. Je te donnerai pourtant ce conseil : quand un malade vient auprès de toi ou
que tu es appelé chez lui, demande-lui toujours très sérieusement : "Crois-tu que
je puis t'aider au nom de Jésus, le Sauveur des cieux ?" S'il te répond avec
conviction : "Oui, je le crois", guéris-le ; s'il doute, ne le guéris pas jusqu'à ce
qu'il croie que tu peux le guérir en Mon nom. Maintenant, une parole pour toi,
Jaïrus. »
Chapitre 47
Conseils à Jaïrus
Sur les cérémonies extérieures
De l'importance de l'homme
Chapitre 48
Dispositions de Jaïrus pour sa succession
1. Après ce dîner qui dura bien une heure, Cornélius dit à Cyrénius : « Altesse,
mon frère, qu'en penses-tu ? Devons-nous rester ici aujourd'hui encore, ou
devons-nous retourner aux affaires importantes qui nous attendent peut-être ? Je
te suis entièrement dévoué et j'attends tes ordres. »
2. Cyrénius dit : « J'aurais déjà dû partir ce matin aux aurores, car de pressantes
affaires m'attendent sûrement. Mais, dis-moi, qui peut quitter ces lieux, sachant
ce qui s'y trouve ! Il serait bien difficile de quitter un ami impérial qui vous dirait
: "Si tu veux rester, reste !" Mais qu'est l'empereur à côté du Créateur du ciel et
de la terre, qui est ici présent, homme parmi les hommes Ses créatures et parmi
Ses anges ? De plus, les anges ont reçu la permission de rester et ils peuvent nous
apprendre beaucoup de choses. Maintenant je ne pars plus ! Je ne bougerais pas
d'ici pour tout l'Empire romain et advienne que pourra ! Tu n'as qu'à rester aussi,
je t'en donne l'autorisation, quoi qu'il arrive, la terre ne viendra pas à disparaître,
et je pense que nous sommes mieux choyés par ce Seigneur que par Rome. Quoi
qu'il arrive, tout est dans la main du Tout-Puissant, en un clin d'œil il peut tout
aplanir. »
3. Cornélius dit : « Altesse, mon frère, cette décision me satisfait amplement et
rien ne me pousse à partir d'ici. Je ne posais la question qu'à cause de l'ordre
politique ! Il serait peut-être bon cependant d'organiser cette nuit une inspection
secrète de la ville par les gardes que nous avons avec nous, pour savoir ce que les
gens disent de notre présence ici. ! »
4. Cyrénius dit : « Si le Seigneur le juge bon, nous pouvons l'organiser, mais à
mon avis nous avons dans le Seigneur et dans Ses anges la police secrète la plus
efficace et il est inutile, tant que nous sommes ici, de faire usage d'une autre
police ! Quand nous aurons quitté cette sainte compagnie céleste, nous serons
bien obligés d'utiliser à nouveau nos services de renseignements pour connaître
les sentiments des gens et pouvoir dépister les conspirations. Mais comme le l'ai
dit, s'il plaît au Seigneur, je suis prêt à prendre toutes les mesures nécessaires. »
5. Je dis à Cyrénius : « Laisse cela ! D'une part, Je connais l'alpha et l'oméga de
tout ce qui se dit en ville. Pour l'essentiel, il n'y a rien à craindre, car ces gens
sont beaucoup trop bêtes et trop aveugles pour nous faire du mal. Laissez donc
faire ! Il n'y aura jamais d'émeute à Nazareth, soyez-en assurés ! Du reste, Mon
ami Borus est la police secrète la plus efficace ; rien ne lui échappe, et ce n'est
pas bien difficile dans cette ville qui n'est pas si grande. Par ailleurs Je pourrais
dire à Mes anges d'aller espionner, et en un clin d'œil vous en sauriez plus que si
vous placiez pendant dix ans les espions les plus doués. Mais tout cela est inutile
! Allons donc tranquillement nous reposer. Seul Jaïrus devra encore envoyer à
Jérusalem un messager pour annoncer sa démission, car demain nous aurons tout
autre chose à entreprendre. »
6. Jaïrus dit sa grande tristesse de devoir quitter la compagnie. « Seigneur, ne
serait-il pas possible de préparer ici les documents et de les envoyer d'ici par mon
messager ? Ma maison de Capharnaüm et ce qu'elle contient est tout ce que je
possède. Les prêtres n'ont le droit de posséder ni champs, ni prairies, ni aucune
terre, aussi ma maison que tu connais est-elle mon seul et unique bien. Je n'ai
rien à faire à Capharnaüm et je n'aurai désormais sans doute plus rien à y faire!
Je donne à mon gendre ma maison et tout ce qu'elle contient. Avec un document
signé de ma main, il pourra s'y rendre et, avec l'assistance des autorités
judiciaires en prendre pleine possession, comme s'il en héritait après ma mort. La
présence de ma femme et de moi-même est tout à fait superflue. Quant à mes
amis de Capharnaüm, ils sont ici, et ceux de mes amis qui sont encore à
Capharnaüm ne valent pas une visite d'adieu ; ce sont des amis de nom, mais pas
de cœur, et cette amitié-là n'a pas de poids ! »
7. Je dis : « Eh bien, reste donc aussi, J'enverrai à ta place, non pas aujourd'hui,
mais demain, jour de sabbat, un de Mes deux messagers à Jérusalem, et il viendra
à bout de cette tâche plus vite que le messager de ton choix. »
8. Jaïrus dit : « Ce ne serait vraiment pas habile un jour de sabbat, car les grands
prêtres de Jérusalem observent le sabbat plus que toute chose ! »
9. Je dis : « C'est vrai, ils tiennent tout particulièrement à ce que le sabbat soit
fêté, parce que tant de choses obligent chacun à ne pas le respecter, et les Pha-
risiens ont ainsi l'occasion de punir par des amendes sévères ceux qui ne res-
pectent pas le sabbat !
10. Mais le jour du sabbat tu peux leur apporter tout l'or et tout l'argent que tu
voudras, ils rompront aussitôt le sabbat et accepteront avec bonheur ton or et ton
argent ! Ne te préoccupe donc pas du sabbat du Temple. Mon messager saura
bien accomplir la tâche qui lui est confiée.
11. Crois-tu que les Pharisiens souhaitent que personne ne viole le jour du
Seigneur ! Oh, sois tranquille, plus le sabbat est violé, surtout par les riches, plus
les templiers jubilent en secret !
12. Que ceci soit dit encore une fois ! Sois sans crainte ! Mon messager ira
demain pendant les sacrifices qui ont lieu le jour du sabbat, et il sera très bien
accueilli, car il entrera au Temple tout chargé d'or ! Les Pharisiens l'accueilleront
les bras ouverts, et de plus, une dizaine d'aspirants attendent déjà un poste de
commandement pour lequel ils offrent de grosses sommes ! Ta démission sera
donc très bien accueillie !
13. Le sabbat sera rompu en pleine cérémonie, et ils mettront aussitôt ton poste
de Capharnaüm aux enchères et à son retour, le messager t'apprendra même le
nom de ton successeur !
14. Voilà où en sont les choses dans la maison de Dieu à Jérusalem, qui est une
ville de Satan, alors qu'elle s'appelle la "cité de Dieu". Maintenant que tout est
réglé, allons nous reposer, car le jour se lèvera tôt pour nous demain ! »
Chapitre 49
Jésus à la synagogue
1. Sur ce, tous vont se reposer ; seuls Mes frères, Marie Ma mère et Borus sont
encore occupés à la cuisine à préparer le sabbat. Sarah et Lydia aident Marie et
s'affairent à la cuisine. Quand tout est prêt, elles vont aussi se reposer. Comme
d'habitude, le lendemain matin, Marie est la première levée et elle réveille bien
avant le lever du soleil ceux dont elle a besoin pour que, selon la coutume juive,
toit soit prêt avant le début du sabbat. Borus aussi est très occupé, et toutes les
tables sont prêtes pour le petit déjeuner lorsque nous nous levons !
2. Les psaumes du matin sont chantés en plein air tandis que de délicieux
poissons attendent avec le pain et le vin sur les tables dressées tout à l'entour.
3. Nous prenons le petit déjeuner et, après le repas, J'envoie comme convenu le
messager à Jérusalem. Jaïrus attend dans l'anxiété le retour du messager, qui ne
s'absente que le temps de traiter normalement avec les templiers. Mais comme
l'entrevue dure près de deux heures, le messager ne revient que deux heures plus
tard, à la grande joie de Jaïrus, lui annonçant que sa démission est acceptée, mais
aussi que le Temple lui exprime ses félicitations et sa reconnaissance pour les
services rendus. Le nom de son successeur lui est communiqué avec la prière de
bien vouloir l'aider à prendre les choses en main le cas échéant.
4. Jaïrus, tout joyeux, Me dit : « Seigneur, du tréfonds de mon cœur je Te
remercie de m'avoir préservé de cette charge, qui m'aurait obligé visiblement à
être au service de ces suppôts de Satan ! »
5. Je dis : « Ne t'ai-je pas dit : quand il s'agit d'une bonne affaire, le Temple sait
rompre le sabbat en plein sacrifice, à toute heure du jour ? Tu vois à quel point
ils doivent tenir à Dieu et à Ses commandements !
6. À cause du peuple, nous allons cependant de nouveau rendre visite à la
synagogue et voir ce que font et enseignent les Pharisiens. Nous nous mettrons
au fond, pour ne pas trop vite nous faire remarquer par les anciens et ces
orgueilleux Pharisiens. »
7. Jaïrus dis : « Mais je ne vais pas y aller, tous les gamins me connaissent ! À la
synagogue, je devrais m'asseoir tout devant à la place des chefs, dans le
presbyterium, et vous seriez trahis. »
8. Je dis : « Ne te fais aucun souci ! Si Je propose quelque chose, tu peux t'y
joindre sans crainte. Mettons-nous donc en route ! » Et nous atteignîmes rapide-
ment la synagogue.
9. Quand nous entrons dans la synagogue, il s'avère qu'elle est presque vide ;
seuls quelques Pharisiens de service sont assis dans le presbyterium, puis
quelques vieux Juifs viennent l'un après l'autre prendre place sur leur banc pour
faire "con amore" leur petit somme de l'après-midi!
10. Après le sacrifice et le marmonnement de la Loi, quelques psaumes routiniers
et le Cantique des Cantiques de Salomon, un orateur monte en chaire et d'une
voix enrouée, se met à prêcher : « Mes chers frères en Abraham, Isaac et Jacob,
nos pères, nous vivons des temps très difficiles, presque autant que l'époque où
Noé construisit l'Arche où, sur l'ordre de Dieu, il monta avec toute sa famille.
Nous sommes de ces villes saintes à qui Daniel a prédit la terreur et la
dévastation. Comme les esclaves bannis de la sorcière païenne Mégère assistaient
aux tourments de leurs frères et attendaient dans la douleur jusqu'à ce qu'ils
soient jetés eux-mêmes dans la fournaise, nous ne pouvons nous tourner ni à
gauche, ni à droite, nous restons là abandonnés comme des souches au sommet
d'un piton rocheux, dernier vestige d'une haute forêt disparue. Que faire ? C'est
une question ! Une couronne de diamants à celui qui trouvera la réponse ! Hélas,
le bannissement et toutes les chaînes qu'on peut connaître dans le monde !
11. D'un côté les Romains, comme le mont Sinaï au-dessus de nos nuques, de
l'autre, le fils du charpentier, qui de balourd originel nous est tombé tout à coup
du ciel en prophète comme il ne s'en est plus vu chez les Juifs depuis le temps
d'Abraham. Grands et petits, jeunes et vieux, tout le monde lui court après ! Si
Dieu Lui-Même descendait aujourd'hui sur terre, Il devrait se demander comment
Il pourrait bien faire des choses plus extraordinaires encore ! D'un seul mot il
guérit à distance toutes les maladies, il fait sortir les morts des tombeaux et leur
rend la santé parfaite ! Il commande aux vents, aux flots de la mer qui obéissent à
ses ordres comme des esclaves! Quand il parle, la sagesse divine resplendit dans
tout ce qu'il dit, et la puissance de sa parole ravit tous ceux qui le suivent de ville
en ville. Avec ça, il a les sommités romaines à ses côtés, avec leurs légions prêtes
à son service. Mais nous sommes au bord de l'abîme, près d'être engloutis à
chaque instant, et nous n'avons personne à nos côtés, en dehors de ces vieux
somnolents de la synagogue ! Mes frères, encore une fois, je vous le demande,
que faire ?
12. À quoi nous servent Moïse et les prophètes, et même Jahvé qui leur a parlé
mais qui nous a laissé tomber depuis plus d'un siècle ! Nous aurions beau crier
jusqu'aux étoiles, aucun Dieu ne répond. Il nous laisse dans le pétrin le plus
honteux, comme le dernier des jeunes écervelés abandonne sa malheureuse
fiancée après l'avoir dix fois séduite ! Et pourtant nous avons encore le titre
honorable de peuple de Dieu, tandis que les impies que sont les païens possèdent
tous les biens et tous les pouvoirs de la terre que Jahvé avait promise à David,
promesse qu'il n'a jamais tenue !
13. Il est écrit magnifiquement : "Et ton règne n'aura pas de fin ! Mais où en est
le royaume de David ? Quel mensonge! Que de fois le royaume de David a été à
sa fin ! Et David lui-même eut le privilège de voir cela auprès de son propre fils,
et il aurait pu encore chanter des dizaines de psaumes à son doux Jahvé si
Absalon ne s'était pas pris dans le branchage d'un térébinthe au lieu de monter
sur le trône ! Mais laissons là le passé et voyons le présent de ce royaume promis
naguère à David. Quel beau royaume. L'âme de David est peut-être passée dans
les Césars de Rome dont le règne du moins pour le moment fait bien meilleure fi-
gure, pour ce qui est de l'éternité que le règne éphémère du grand homme selon
le cœur de Dieu ! Ne saisissez-vous pas, mes frères, que notre vieil enseignement
n'est que pure fable de poètes d'antan ? Et nous, pauvres idiots, nous nous y
accrochons comme s'il pouvait nous assurer le salut ! Quel est l'homme assez âne
pour supporter encore de porter une vieille nippe quand il pourrait la troquer
contre dix habits neufs du plus beau tissu !
14. L'Histoire et l'expérience montrent clairement que tout l'enseignement de
Moïse et des prophètes n'a aucun fondement réel et n'est qu'une noix creuse el
muette, et nous y restons bêtement attachés comme à une certitude que nous ne
voulons pas perdre, même si nous faisons eau de toute part comme le Jourdain se
jette dans la mer Morte !
15. C'est pourquoi, mes frères, rallions-nous au fils du charpentier et nous serons
protégés, car il fait sous nos yeux ce que Jahvé Lui-même n'a jamais fait dans les
fables de nos anciens Par ce discours, je crois avoir répondu à la difficile
question que j'ai posée. Faisons cela, et nous nous porterons bien mieux
physiquement et moralement !
16. Roban, un des anciens, nous a déjà précédés, suivons-le, que personne n'y
manque ! Peut-être ce fils de charpentier, qui passait inaperçu jusqu'ici, est-il
parfaitement habilité à rétablir pour un temps le malheureux royaume éternel de
David ! Par son incroyable puissance magique, à laquelle aucun pouvoir terrestre
n'est comparable, il est seul capable de se faire respecter par les Romains
superstitieux, au point même de mettre leurs légions en fuite!»
17. Alors se lèvent les anciens, les scribes, les Pharisiens et les lévites, et ils
disent : « Tu comprends bien mal l'Écriture si tu tiens de tels propos qui
humainement parlant, ont bien quelque chose de vrai, peut-être, mais spirituel-
lement sont des blasphèmes envers la majesté de Dieu, et nous sommes donc
obligés, pour notre propre salut, de t'exclure de notre compagnie et de te mettre
au rang des païens ! »
18. L'orateur dit : « Croyez-vous par hasard me punir ? Oh ! vous vous trompez
totalement ! Espèces de fous, continuez de mourir de faim si vous voulez, faites-
ce que vous voulez, restez dans la nuit de votre enfer ! Vieux idiots, citez-moi en
exemple un prophète qui ait fait sortir les morts du tombeau, comme ce fils de
charpentier ! »
19. Un ancien dit: «Dieu le fera au jour du jugement dernier.»
20. L'orateur dit : « Au jour du jugement dernier, votre Dieu vous chantera une
autre chanson ! Nous n'avons jamais entendu dire que le Jahvé de l'Écriture ait
ramené qui que ce soit à la vie ! Personne n'a jamais vu cela, et au bord de sa
brève existence terrestre, chacun n'a devant les yeux que la mort éternelle. Et
nous, les serviteurs de Dieu, qui avons le dérisoire honneur de Le servir, pour
consoler les malheureux rongés d'inquiétude devant la question : "Que suis-je, où
vais-je une fois la vie finie ? avons l'idée d'inventer ce jugement dernier qui ne se
produira apparemment jamais ! Pauvres fous, cajolés par cette pensée, nous
restons aveugles et sourds devant ces faits inouïs qui se produisent sous notre nez
! Est-il si louable, pour un vieillard en train de mourir de ne pouvoir se séparer
des câlins de son enfance ?
21. Où voulez-vous en venir avec votre commerce juif, qui, dans cette actuelle
dissolution des peuples, ne durera pas un demi-siècle ? Je ne serai certes pas
assez fou pour attendre la fin de cet enseignement aveugle qui ne comporte que
des noms historiques vides de signification, ou du moins des noms de fables et de
contes de fées que les nourrices racontent aux enfants qui, plus tard, recollent
tout cela pour en faire un enseignement divin où ne brille pas la moindre
étincelle de logique grecque.
22. Et si Jahvé n'est même pas capable de parler et d'enseigner avec autant de
logique qu'un philosophe grec, il n'a qu'à se mettre à leur école avant de vouloir
enseigner la vérité, l'ordre et la sagesse à des peuples qui ne sont pourtant pas
tombés sur la tête !
23. Mais loin de moi l'idée d'imaginer un Jahvé pas plus sage que celui qu'un
prophète apprend de sa nourrice, et dont, malgré toute sa sottise, il a encore le
bon sens de donner un enseignement si obscur qu'il est le premier à ne pas le
comprendre, ce qui est dans ses intentions, car il est ainsi plus certain que
personne d'autre ne le comprendra ! Arrêtez donc avec votre Jahvé ! Croyez-moi,
j'ai sincèrement honte d'avoir pu appartenir à une doctrine aussi stupide !
24. Si cette doctrine de Moïse a eu quelque chose de bon pour commencer, ce
quelque chose a été forcément déformé par la bassesse de l'homme, si bien que,
pour finir, il n'en reste rien, si ce n'est un nom sans doute plus ou moins mal
prononcé !
25. C'est pourquoi je me fais aujourd'hui disciple de ce charpentier Jésus. Il est
bon et ne repoussera sans doute pas comme vous un honnête homme. »
Chapitre 50
Propos des anciens sur l'état d'esprit en Judée
Chapitre 51
De l'Arche d'alliance
1. L'orateur, qui n'avait pas perdu un seul instant son attitude stoïque au cours de
ces propos très pertinents, dit : « Cher amis et frères, ce que vous me prêchez là,
je le savais tout aussi bien que vous, mais je vois avec joie pour la première fois
de ma vie que vous n'êtes pas tombés sur la tête. Ce que vous dites est vrai. Il
n'en reste pas moins que ma question demeure sans réponse.
2. Je n'ai voulu que vous provoquer avec mes raisonnements. J'ai réussi pour la
première fois, depuis vingt ans que nous nous connaissons, à vous faire parler
ouvertement !
3. Mais vos vues et les miennes ne diminuent en rien le mal qui nous occupe, et
toute la question demeure.
4. Moi, le fils d'un grand prêtre de Jérusalem, élevé au Temple, je sais exac-
tement ce qu'il en est de l'Arche d'alliance. Le bois, l'or et l'argent de l'ancienne
Arche subsistent, mais le bâton toujours vert d'Aaron est tombé en poussière, les
Tables de la Loi sont brisées et la manne n'est plus qu'un souvenir ! Quant à la
colonne de feu, où est-elle ? On sait par les annales que tout profane qui posait la
main sur l'Arche d'alliance perdait la vie, et maintenant, n'importe qui peut
monter sur l'arche et la toucher sans qu'il en sorte le moindre feu.
5. Les voyageurs étrangers offrent beaucoup d'or pour visiter l'antique merveille,
promettant de garder le silence. La demande leur est toujours accordée le
lendemain seulement, pour avoir le temps de rétablir artificiellement le feu, non
pas dans l'authentique ancienne Arche, mais dans une réplique faite de métal,
comprenant un foyer en son couvercle avec un réservoir d'huile de naphte si bien
dissimulé qu'on ne peut voir d'où provient la flamme allumée une heure
auparavant. Ce feu de six aunes imite la colonne de feu.
6. Lorsque les curieux ont admiré béatement cette colonne de feu, s'ils souhaitent
voir l'intérieur de l'Arche, avec toute une cérémonie formelle accompagnée de
vaines litanies, on soulève le couvercle en prenant garde aux flammes, on le pose
sur un trépied et les visiteurs peuvent voir les Tables de Moïse, le bâton d'Aaron
et la manne fraîchement déposée dans l'Arche!
7. Certains visiteurs sont très impressionnés, d'autres, les Grecs notamment,
sortent avec le sourire et disent ensuite : "Quelle belle composition ! La plupart
de ces visiteurs déplorent que le Temple soit si mal tenu ! Je vous le dis, je parie
que l'Arche d'alliance a fini par être complètement reléguée et remplacée par la
copie en airain.
8. Si vous refusez de me croire, déguisons-nous en Romains, par exemple, et
allons au Temple à Jérusalem comme font les étrangers. Un homme de service
sera là pour nous demander méthodiquement d'où nous venons, ce que nous
cherchons à Jérusalem, combien de temps nous comptons rester dans la Ville
sainte et si nous voyageons avec beaucoup d'argent, si nous avons à vendre de
l'or ou de l'argent et si nous voulons visiter le Saint des Saints contre une
modique petite somme. Si nous demandons alors le prix de la visite, on nous
parlera d'une centaine de livres d'argent. Nous dirons que c'est trop et que nous
ne tenons pas à voir ces choses, mais que pour dix livres nous accepterions, et
pour dix livres nous entrerons tous dans le Saint des Saints et vous verrez alors si
tout ce que je vous dis est vrai ou non !
9. Mes chers amis, mes frères, si un homme d'un esprit un peu éclairé voit de ses
propre yeux que ce lieu sur lequel repose toute la doctrine n'est qu'un lieu de
mensonge et d'escroquerie, en somme canaillerie tenue secrète, que dira-t-il des
commandements et de toute la doctrine ? J'ai dit. À vous de parler, je vous
écoute. »
10. Un ancien dit: «Avais-tu la permission de dévoiler de tels secrets, n'as-tu pas
fait un serment avant de quitter le Temple?»
11. L'orateur dit : « Mais je suis libre de ne plus respecter un serment qui n'a pour
moi aucune valeur, et de dire à tout le monde comment on vous trompe. À
Nazareth on n'y regarde pas de si près, on peut sans crainte se risquer à rompre
un tel serment. »
Chapitre 52
Le faux et le vrai
1. Les anciens disent : « Nous voyons bien que tu as raison, mais jusqu'à un
certain point seulement. Il te manque au moins vingt ans d'expérience pour com-
prendre tout cela. Le Temple a bien l'aspect que tu dis, mais il n'en a pas toujours
été ainsi. Tu as peut-être raison, mais admets que s'il n'y avait jamais eu rien de
vrai et de réel, il n'y aurait également jamais eu personne pour mentir et tromper
en imitant le vrai. N'est-ce pas pour la même raison que nous sommes envahis, à
notre époque si prospère, de tant de faux diamants, de fausses perles, de faux or
et de faux argent !
2. Les châles les plus beaux et les plus fins sont fabriqués par les Perses, qui ont
le secret de fixer et de tisser les plus belles couleurs. Mais sur les marchés de
Jérusalem, de Sichar ou de Damas, il faut être bien connaisseur pour ne pas
acheter au même prix les vulgaires imitations falsifiées chez nous ! Que faut-il en
conclure ?
3. Sans diamant, sans perle, sans or sans argent véritables, sans toile persane
véritable, il ne viendrait à l'idée de personne de faire des faux ! Sans la valeur
incomparable de l'authenticité, jamais l'imitation ne pourrait exister ! Personne
ne fera de faux calcaire parce que le vrai se trouve partout. Tu comprendras faci-
lement qu'on n'aurait jamais pu faire une fausse Arche d'alliance si la véritable
n'avait pas existé auparavant ! »
4. L'orateur, qui se nommait Chiwar dit : « C'est bien, c'est clair, mais alors
pourquoi la vieille Arche est-elle comme morte ? Pourquoi, alors qu'elle existe
toujours, est-elle cachée et remplacée la plupart du temps par cette fausse arche
que l'on montre aux visiteurs ! Il y a trente ans à peine, à part le grand prêtre,
personne n'avait le droit de la voir, excepté celui qui siégeait sur le trône d'Aaron.
Seul le grand prêtre avait le droit de franchir, trois ou quatre fois l'an, le seuil du
Saint des Saints.
5. Comment se fait-il que ce Saint des Saints ne le soit plus que par le nom, qu'il
ne mérite pas davantage qu'une synagogue comme celle-ci ? »
6. Un ancien dit : « Personne dans tout Israël ne sait pourquoi ni comment, mais
le fait est que la colonne de feu s'est éteinte tout d'un coup après l'assassinat du
prêtre Zacharie entre l'autel des sacrifices et le Saint des Saints, et ne s'est plus
jamais rallumée depuis, malgré toutes les prières et toutes les supplications !
7. Tu sais bien pourquoi cela a été tenu caché au peuple ! Il se serait soulevés, et
avec les Romains dans le pays, quel bain de sang et quelle désobéissance cela eût
entraîné !
8. À part nous, personne n'en sait rien dans tout Israël, et ces Galiléens qui
somnolent là devant nous ne peuvent saisir le murmure de nos paroles, et, de
toute manière, il n'y a rien à craindre, ils sont plus Grecs que Juifs, et prati-
quement convaincus que la religion n'existe que pour opprimer le peuple et qu'on
peut s'en servir quel que soit le mystère qui la fonde !
9. Qu'importe à un Galiléen que l'Arche soit vraie ou fausse, et qu'elle aveugle le
peuple crédule, si l'effet voulu est obtenu ! On peut tout se dire entre amis ici à
Nazareth, à Capharnaüm ou à Chorazin, et quant aux Grecs et aux Romains, nous
savons bien à qui nous avons affaire !
10. C'est principalement pour cela que nous avons mis en prison Jean le prédi-
cateur qui sévissait à Béthanie depuis des années, car il était à craindre pour les
prêtres de Jérusalem que ce fils de Zacharie ne sache quelque chose de cette
fausse Arche d'alliance et ne le dise au peuple.
11. Le charpentier est également poursuivi parce qu'il est aussi à craindre qu'avec
son don de prophétie il ne parle au peuple. Ceci doit rester secret entre nous, il ne
doit pas y avoir la moindre fuite et nous ne devons point nous résigner si vite ! »
12. Chiwar dit :« C'est une affaire bien désespérée ! Pourvu que ceux qui sont là
à la porte n'aient rien entendu ! »
13. L'ancien dit : « Nos paroles n'étaient guère qu'un murmure et ceux qui sont
là-bas n'ont rien pu entendre ; et s'ils ont entendu quoi que ce soit, ce sont des
Grecs et des Romains pour la plupart, qui ne peuvent comprendre de quoi il s'agit
!»
14. Chiwar dit : « Mais j'ai reconnu parmi eux Jésus, le fils du charpentier, le
grand gouverneur Cyrénius, le chef Jaïrus, le commandant Cornélius, Faustus et
d'autres gens connus ! »
15. L'ancien dit :« Ce sont des hommes contre lesquels nous ne pouvons rien,
qu'ils aient entendu ou pas, peu importe. S'ils veulent parler au peuple, ils se
passeront de notre assentiment, car ils savent sans doute depuis longtemps ce
qu'il en est de l'Arche du Temple ; et ils se tairont s'ils le veulent. Nous n'avons
donc rien à craindre. Mais nous qui sommes initiés, veillons à ne pas ébruiter la
chose, et si jamais il le faut plus tard, cela devra se faire avec les plus grandes
précautions ! »
Chapitre 53
Chiwar témoin de l'œuvre et de la vie de Jésus
1. Chiwar dit : « En vérité, je dois louer votre sagesse ! Depuis si longtemps que
nous vivons et agissons ensemble, je n'avais jamais eu l'occasion de vous
connaître comme aujourd'hui, et je me réjouis particulièrement d'avoir à mes
côtés des hommes et non plus de stupides serviteurs du Temple. Quoi qu'il en
soit, ce charpentier est le phénomène le plus extraordinaire jamais vu sur terre.
Adam et ses aventures millénaires est éclipsé ! Henoch n'est plus qu'un mendiant
de l'esprit, Abraham, Isaac et Jacob, Moïse, Aaron, Elie sont de pauvres diables
comparés à nous ! Il arrive chaque jour plus de merveilleux que tous nos pères
ont jamais pu voir !.
2. Hier, et aujourd'hui encore, j'ai pu voir de loin ce qui se passe dans la maison
du vieux Jacob ! Je le dis, miracle sur miracle ! De véritables anges le servent. La
femme de Faustus était à Capharnaüm et le charpentier la voulait à sa table pour
le petit déjeuner. Il faut quatre heures pour venir de Capharnaüm à Nazareth. Que
s'est-il passé ? Le charpentier a fait signe aux deux anges, ils ont disparu et un
instant après ils sont revenus, ramenant joyeusement avec eux la belle Lydia, la
femme de Faustus ! Qu'en dites-vous ? C'est plus que tout ce que nous pouvons
imaginer !
3. Les anciens demandent : « Qu'as-tu vu encore ? »
4. Chiwar dit : « Vous connaissez la fille de Jaïrus, et vous savez aussi qu'elle est
morte par deux fois, et qu'à sa deuxième mort elle a passé plusieurs jours au
tombeau. Mais vous ne savez pas que Sarah, cette fille de Jaïrus divinement
belle, est devenue la femme de Borus ! N'est-il pas inouï qu'une femme morte
deux fois devienne l'épouse d'un homme, et cela par un mariage comme on n'en
avait encore jamais vu sur cette terre ? Quand le fils du charpentier l'a bénie, elle
a vu le ciel s'ouvrir et des myriades d'anges remplir l'espace en louant Dieu de ce
qu'il accorde aux hommes de cette terre tant de grâce et tant d'honneur. Mais
quand Jésus a béni le couple, les cieux se sont refermés à un signe visible du
charpentier, et seuls les deux anges sont demeurés comme ils étaient auparavant
et comme vous pouvez les voir à la porte de la synagogue, où se tiennent ces
deux célestes jouvenceaux. Regardez-les et dites-moi d'où ils pourraient venir, si
ce n'est du ciel !
5. Et si tout cela est aussi merveilleux, ce que personne ne peut nier, pourquoi ne
pas considérer que ce fils de charpentier est bien plus qu'un disciple des
Esséniens, qu'il n'a d'ailleurs jamais pu rencontrer puisqu'il n'a jamais quitté la
région à ma connaissance, sauf pour se rendre quelques fois à Jérusalem avec son
père et ses frères et une fois également à Sidon, où ils ont construit une maison.
6. Quoiqu'on sache qu'il a toujours été un ouvrier solitaire et silencieux, passant
même pour être un peu demeuré, on sait aussi qu'il a fait des choses
extraordinaires jusqu'à l'âge de douze ans. Sa naissance également aurait été
merveilleuse, aux dires du capitaine Cornélius que j'ai rencontré dernièrement à
l'occasion d'une festivité.
7. Si les choses sont ainsi, je me demande sérieusement s'il ne faut pas considérer
ce Jésus pour le moins comme un fils de Dieu. Tout ce qu'il fait, les ordres qu'il
donne aux anges qui lui obéissent au moindre signe, tout laisse supposer que
derrière ce Jésus se cache l'esprit originel de Dieu.
8. Devant de tels faits et une telle doctrine, je ne sais vraiment pas pour quelle
raison nous demeurerions attachés à l'arche qui est morte, alors que nous avons
sous les yeux celle qui est vivante. Pour la forme, nous pouvons rester ce que
nous sommes aux yeux du peuple et ne pas rendre la chose publique mais dans
nos cœurs nous devrions tous le reconnaître. »
9. Le plus sage d'entre eux dit : « Tout ou rien ! Si le divin est en lui, toute demi-
mesure lui fera horreur, et si ce n'est pas le cas, mieux vaut rester attachés à
l'ancienne Arche en souvenir de ce qu'elle fut, plutôt que d'accepter une chose
dont ont n'est pas certain. »
10. Chiwar dit : « Eh bien ! Nous allons pour vous mettre la chose à l'épreuve.
Mais quant à moi, je n'ai besoin d'aucune preuve. Tout est clair, et je sais
exactement ce que je fais si je le suis. »
11. Le plus ancien dit : « Crois-tu que le Temple ne bougera pas si, l'une après
l'autre, les communautés tombent comme des fruits mûrs de l'arbre ? Le Temple
n'a pas longtemps attendu pour envoyer ses sbires partout ! Et alors, malheur à
ceux qui auront renié le Temple, ils seront durement tourmentés ! Mieux vaudra
alors avoir adopté la doctrine de la sagesse grecque que d'avoir fait partie de ces
disciples de Jésus qui ne sont plus Juifs, encore moins Grecs, et qui savent bien,
pour certains d'entre eux, ce qu'il en est de la vanité du Temple et de ses
prétendus mystères sacrés.
12. Je vous le dis, rien ne soulèvera davantage la colère du Temple que cet être
prophétique appelé Jésus et ses disciples ; et tous ces suppôts de Satan n'auront
de cesse que ne soit détruite une doctrine qui est pour eux une pareille menace.
13. N'avez-vous pas vu, l'an passé, quel sort le Temple a réservé à un Grec pour
avoir fait courir dans le peuple le bruit que le Temple prenait aussi l'or et l'argent
des Grecs et des Romains, au lieu de n'accepter que les monnaies d'Aaron ? En
lui faisant miroiter toutes sortes de profits, on l'a attiré au Temple où, une fois
capturé grâce à ce subterfuge, on l'a aussitôt fait disparaître ! Il faut donc être
d'une extrême prudence et commencer peut-être par devenir totalement Grec
pour se joindre ensuite seulement, corps et âme, aux disciples de Jésus ; sinon,
restons ce que nous sommes, la demi-mesure ne servira à rien !»
14. Chiwar dit : « Tu as raison quant à la prudence que le monde exige, mais soit
dit entre nous, si ce fils de charpentier, le Messie de la Promesse, comme David
le nomme avec infiniment de respect, est Jahvé en personne, nous faut-il
vraiment employer toutes ces ruses pour devenir Ses disciples, et ne devons-nous
pas plutôt brandir sa bannière céleste, sans plus nous laisser émouvoir par ces
suppôts de Satan, parce que nous pouvons être assurés d'avoir en Lui la vie
éternelle, même si cela devait nous en coûter notre pauvre et courte vie terrestre !
»
15. À cette conclusion de Chiwar, tous sont perplexes et ne savent plus que dire.
Chapitre 54
L'ange s'adresse aux templiers
1. Les deux anges s'approchent alors en disant : « Chiwar a raison, et toi aussi, le
plus ancien, qui dis qu'il faut appartenir entièrement à Dieu, car Dieu a horreur
des demi-mesures. Mais nous qui sommes Ses témoins célestes, nous pouvons
vous le dire, ne craignez pas ceux qui ne peuvent rien contre vos âmes, craignez
plutôt Celui qui est le Seigneur au-dessus de toute vie sur la terre comme aux
cieux. Sans Lui il n'y a pas de vie, ni dans les cieux, ni sur terre. C'est pourquoi,
nous qui sommes Ses témoins, nous vous conseillons de suivre les conseils de
votre ami Chiwar. »
2. Le plus ancien dit : « Qui êtes-vous charmants jouvenceaux qui vous dites les
témoins du ciel ? »
3. Les deux jouvenceaux disent : « Demandez à Chiwar, qui nous a vus à
Capharnaüm chercher la femme de Faustus, il vous dira qui nous sommes ! »
4. Le plus ancien dit : « S'il en est ainsi, il n'y a plus rien à dire, et il faut tourner
le dos au Temple ! »
5. Les deux anges disent : « Pas de cette façon, chers amis, car le Seigneur est
bon en toute chose, il suffit de Lui appartenir dans votre cœur, et de croire qu'en
Lui l'Écriture est en train de s'accomplir sous nos yeux. À part cela, restez
comme vous êtes, afin que les serviteurs du monde et du diable, dont le Temple
est rempli, ne se réveillent pas avant l'heure. Enseignez au peuple Moïse et les
prophètes, et veillez à l'observance des véritables commandements de Dieu. Mais
ne tenez aucun compte des lois humaines du Temple, et vous serez tout aussi
bien Ses disciples que ceux qu'il a appelés et choisis dans les villages de
pêcheurs.
6. Dans deux jours, vous recevrez de Jérusalem un nouveau chef qui paraîtra
pour commencer très attaché au Temple, mais qui finira par se laisser acheter
dispense sur dispense, car lui-même ne croit pas un brin au Temple et vous aurez
beau jeu. Jaïrus s'est retiré, il vivra chez son gendre, mais ne dites rien au
nouveau chef de toutes les merveilleuses choses qui vous sont arrivées ici ! »
7. Chiwar dit très respectueusement : « Serviteurs de Dieu, du royaume de la
lumière et de la vie éternelle, il est bon de suivre le conseil que vous nous avez
donné par la grâce du Seigneur, mais quant à moi je voudrais davantage. Qu'en
serait-il si je devenais moi-même un disciple ? »
8. Les deux anges dirent : « Sur cette terre, chacun est libre et peut faire ce qu'il
veut! Mais celui qui a la grâce, comme vous, de recevoir un conseil du ciel, fait
bien de le suivre, car il viendra sur les disciples qui sont avec le Seigneur de
fortes tentations. Ils seront éprouvés en esprit et par le feu. Ce sera plus facile
pour vous, et vous pourrez atteindre en toute quiétude ce que les disciples
atteindront dans la peur et les persécutions. Toi, Chiwar, tu peux faire ce que tu
veux, mais il vaut mieux pour toi rester où tu es. »
9. Chiwar dit : « Oui, je vais rester à ma place mais tant que le Seigneur de-
meurera ici, j'aimerais rester dans Son voisinage, pour Le voir et L'entendre. Ne
dois-je pas faire cela non plus ? »
10. Les deux anges disent : « Ah ! Tu le peux bien, quoique le Seigneur ne par-
lera guère ici et fera peu de chose, parce que les gens d'ici sont quasi incrédules
et prennent le Seigneur pour un magicien. Mais vous aurez suffisamment
l'occasion de les enseigner vous-mêmes peu à peu, ce pourquoi le Seigneur ne
refusera pas de vous récompenser. Roban reviendra ce soir et vous apportera
d'importants témoignages sur Jésus le Seigneur, et vous aurez en lui un sage et
intelligent conducteur. Car Roban est un des plus grands esprits parmi vous. »
Ayant ainsi parlé, les deux anges s'éloignèrent pour venir rejoindre notre com-
pagnie.
Chapitre 55
Du lien du peuple au souverain et de l'autorité en éducation
1. Cyrénius Me demande alors s'il serait judicieux d'acquitter ces Pharisiens, ces
anciens, ces lévites et ces docteurs de la loi, qui sont totalement convertis à son
avis, de la sévère loi qu'il a édictée contre eux.
2. Je dis : « Lorsqu'on a le droit d'édicter des lois, il ne faut jamais faire usage
précipitamment de ce droit ; et quand une loi est établie, il faut veiller encore
davantage à ne pas la supprimer trop précipitamment, car le conseil des sages
doit faire preuve de sa compétence. Vois-tu, lorsque tu édictes une nouvelle loi,
tu te fais des ennemis de tous ceux que cette loi condamne, mais si tu abroges
cette loi, personne ne t'en saura gré, on se moquera de ta faiblesse et l'on dira
d'un air triomphant : "voyez le tyran, il cherche à retrouver la faveur de son
peuple en abrogeant subitement une loi qui lui a valu par trop d'ennemis ! Mais il
trouvera peu d'amis dans le peuple. Qui se montre tyrannique une fois le devient
doublement s'il recourt au pouvoir une seconde fois !
3. Il vaut donc mieux conserver une loi déjà établie plutôt que de l'abroger, mais
on peut se permettre secrètement de ne pas l'appliquer dans certain cas et se
montrer clément en ne jugeant pas trop sévèrement. Si le souverain vient à
changer, libre à lui d'abroger entièrement la loi de son prédécesseur pour apaiser
ainsi la colère du peuple. Au cas où ces Pharisiens viendraient t'en supplier, tu
pourrais abroger cette loi dans sa partie la plus sévère, mais à la condition
expresse qu'elle soit rétablie au moindre signe de danger.
4. Voilà avec quelle sagesse tout souverain devrait guider son peuple s'il veut le
gouverner avec bonheur. Un souverain tiède et négligent regrette vite de s'être
laissé dépasser par son peuple.
5. Car les peuples sont avec leurs dirigeants comme des enfants avec leurs
parents. Les parents qui savent élever leurs enfants avec autant de sagesse que de
sévérité ont des enfants obéissants et serviables, qui aiment leurs parents et les
honorent, alors que les enfants de parents faibles se montent vite la tête et
finissent par les chasser de la maison.
6. L'amour dans la sagesse et la sévérité est une loi éternelle ; qui agit ainsi ne
fait pas de faux pas, et les fruits en sont bons et savoureux. M'as-tu bien compris
?»
7. Cyrénius dit : « Oui, parfaitement, Seigneur ! Et il en fut toujours ainsi en ce
monde ! Un souverain trop bon est faible et il perd vite son pouvoir ; mais un
tyran trop sévère ne dure pas longtemps. Je pense que la sagesse est entre la
bonté et la fermeté. »
8. Je dis : « Oui, c'est cela : elle est entre les deux, comme Je te l'ai montré !
Rentrons maintenant à la maison, l'après-midi est déjà avancé. »
9. Cornélius demande : « Mais Seigneur, ces vieux citadins vont-ils rester ici à
dormir ? Ces gens pourraient tout aussi bien fêter le sabbat chez eux, ils ne
dérangeraient plus ainsi l'auditoire avec leurs terribles ronflements ! C'est à faire
fuir, de ronfler de la sorte ! Cela m'est très désagréable. Je puis supporter toutes
sortes d'incommodités, mais le ronflement d'un dormeur peut me mettre au
désespoir. »
10. Je dis : « Bien, bien, ne t'en fais pas ! Tant qu'ils ronflent, ils ne commettent
aucun péché, et il est bon qu'ils ronfflent en ce moment ; car s'ils ne ronflaient
pas, ils entendraient ce qui se dit et ils seraient en colère, et voilà qui ne serait pas
bon ! Mais ils ont dormi si profondément qu'ils n'ont rien vu ni entendu. Ainsi ils
ne sont pas en colère, ce qui est fort bien ! Mais laissons-les et allons-nous-en. »
11. Nous nous dirigeâmes vers la porte, mais les Pharisiens et les anciens se
précipitèrent à la porte, qui était à moitié ouverte, pour l'ouvrir tout grand en
disant : « Seigneur, il est écrit : "Ouvrez vos portes, élevez vos linteaux, pour que
passe le roi de gloire. Mais qui est ce roi ! C'est Jahvé Sabaoth ! À Lui toute
louange, tout honneur et toute gloire, d'éternité en éternité. »
12. Et Cyrénius leur dit avec un sourire amical : « Oui, c'est ainsi, et que cela
reste ainsi. Que le Seigneur soit avec vous ».
13. Ils répondirent : « Et avec ton esprit, afin que tu nous sois compatissant
comme Lui, car tes lois nous ont jusqu'ici plus durement opprimés que la mort !
Mais maintenant que nous sommes devenus Ses disciples, nous nous soumettons
entièrement à ta loi et ta loi ne nous fait plus peur. Même, nous te remercions
pour cette loi, sans elle nous aurions facilement pu trahir cette très sainte cause.
Nous ne te demandons plus d'abroger cette loi sévère, puisque, pensant, croyant
et agissant désormais comme toi, nous l'abrogeons par notre façon d'agir et nous
la gardons pour l'éternité jusqu'au moindre iota. »
14. Cyrénius dit : « En ce sens, je vous libère de cette loi avec le ferme espoir de
ne jamais avoir à y revenir. Ne vous égarez donc plus et suivez exactement ce
que ces deux anges vous ont conseillé de faire, nous resterons les meilleurs amis
dans le Seigneur Dieu et mon gouvernement ne vous opprimera pas. Et si le
nouveau chef de votre école venait à vouloir vous poursuivre parce que vous êtes
les amis de Jésus le Seigneur de toute éternité, et les amis des Romains qui ne
vous veulent que du bien, vous saurez trouver le chemin qui conduit à moi et les
mesures seront prises pour que vos droits physiques et spirituels soient garantis.
Je vous le répète, que le Seigneur soit avec vous ! »
15. Et tous répondirent : « Et avec ton esprit ! »
16. Ils nous firent alors une profonde révérence, et nous passâmes la porte grande
ouverte pour rentrer à la maison où un bon repas de pain, de vin et de toutes
sortes de douceurs et de fruits nous attendait. Nous rendîmes grâce en nous
mettant à table et nous mangeâmes peu à peu ce qu'il y avait sur les tables,
restant assis à nos places, jusqu'au coucher du soleil, à échanger des propos
édifiants.
Chapitre 56
Roban et Kisjonah font part de leurs expériences
Chapitre 57
Les anges au service du monde
Une gousse globale(*)
1. Chacun prit ses quartiers et s'endormit jusqu'au petit jour. Je M'étendis Moi-
même et Je dormis deux heures. Mais les deux anges accomplirent pendant la
nuit leur tâche de direction du monde, et à leur retour, au lever du soleil, ils
s'approchèrent de Moi, Me rendant grâce et disant : « Seigneur, tout est
parfaitement en ordre dans le grand homme universel. Les premiers soleils
centraux sont en position et leurs rotations sont identiques. Les orbites des soleils
centraux de troisième classe qui pivotent autour des soleils de deuxième classe
sont aussi en ordre ainsi que les soleils centraux de quatrième classe avec leurs
dix fois cent mille soleils planétaires (parfois plus, parfois moins), comme Tu l'as
établi, Seigneur, au commencement. Les innombrables soleils planétaires, avec
leurs petites planètes et lunes dont la plupart ne brillent pas, continuent de
dépendre de l'ordonnance des grands soleils directeurs. Ainsi tout est
parfaitement en ordre dans cette gousse globale que nous avons tous surveiller, et
nous pouvons de nouveau être auprès de Toi, Saint Père, et passer une journée
auprès de Tes enfants qui nous sont si chers. »
2. Je dis : « Très bien, donnez-leur à chaque minute toutes sortes d'enseigne-
ments, car Mes enfants en ont encore grand besoin. »
3. Les deux anges se retirent dans la joie et la félicité, et saluent Marie, les
disciples, Cyrénius, Cornélius, Faustus, Jaïrus, Kisjonah et Borus. Mais Cyré-
nius, qui nous a vaguement entendus parler de ces nombreux soleils, demande
aux deux anges de quels soleils nous avons bien pu parler, vu qu'il ne connaît
qu'un seul soleil.
4. Les deux anges disent avec infiniment d'amour : « Très cher ami et frère dans
le Seigneur, ne cherche pas à savoir ce que tu ne peux saisir encore, le salut de
ton âme n'en dépend vraiment pas ; ce dont nous avons parlé avec le Seigneur te
tuerait si tu le comprenais et le voyais à la mesure où nous le comprenons et le
voyons. Les nombreuses étoiles que tu vois briller par une belle nuit, et toutes les
autres étoiles que ton œil ne peut percevoir parce qu'elles sont trop éloignées
pour être vues d'ici, sont d'innombrables univers solaires d'une dimension
(*)
« Gousse globale » désigne l'ensemble d'un décillon de décillon de soleils répartis en soleils centraux
de première, deuxième, troisième et quatrième classe, avec chacun ses innombrables soleils planétaires
comme noire terre en est un, tournant tous en vastes orbites autour d'un point central qui lui-même est
un soleil central principal. Ainsi d'innombrables gousses globales de cette sorte, toutes situées les unes
des autres à des distances inimaginables pour nous, forment dans le vaste univers ce qu'on appelle le «
grand homme universel ». Ceci pour mieux faire comprendre le rapport matinal des deux anges à Jésus.
(Jacob Lorber.)
insaisissable pour ta raison. Ce soleil que tu vois est un des plus petits soleils
planétaires ; mais il est cependant déjà un million de fois plus grand que cette
terre. Songe alors à un soleil central de la quatrième classe autour duquel au
moins dix fois cent mille de ces soleils planétaires gravitent en vastes cercles
concentriques avec leurs planètes ou petits mondes non lumineux, comme celui
que tu habites ! À lui seul, cet univers solaire est aussi grand que la somme des
grandeurs de tous ces soleils planétaires comprenant ces mondes et ces lunes qui
tournent autour d'eux. Dis-moi, mon ami, peux-tu te représenter une telle
dimension ? »
5. Cyrénius dit : « Très chers serviteurs de Dieu, je vous prie de ne plus m'en
parler, cela me donne le vertige. Qui aurait pu imaginer cela en rêve ? Et vous
supervisez cela en un clin d'œil ! Quelle puissance et quelle profonde sagesse
divine il y a en vous ! Mais comme je suis avide de savoir, dites-moi simplement,
d'une façon générale, ce qui se trouve sur ces soleils innombrables ? »
6. Les deux anges disent : « Ce que tu vois sur cette terre, tu le retrouves en
beaucoup plus grand et beaucoup plus noble sur ces univers solaires. Comme ici,
il y a là-bas des hommes, des animaux, des plantes de toutes sortes, des
bâtiments d'une grandeur et d'une beauté incomparable à côté desquels le Temple
de Jérusalem ou le palais de l'empereur à Rome ne sont que de misérables
coquilles d'escargot, et Celui-ci en est le Créateur et Seigneur éternel ! »
Chapitre 58
La relation de l'homme terrestre avec le Père céleste
1. Cyrénius dit : « Oui, je comprends, hélas ! Car je vois bien peu de résultats !
Où en sont les hommes, et combien d'entre eux seraient seulement capables
d'accepter et de comprendre un enseignement ? Et de ceux qui ont été enseignés
combien ont la volonté suffisante pour mettre en pratique ce qu'ils ont appris ? Je
parie que sur mille personnes il s'en trouvera dix à peine avec la volonté et le
courage nécessaires, notamment dans les peuples superstitieux et fanatiques. Car
à quoi leur servirait-il de mettre en pratique la doctrine de l'étemelle et claire
vérité, si dès le lendemain l'égoïsme et le fanatisme viennent lamentablement les
étrangler ?
2. Vous êtes bien les sages et puissants serviteurs du Très-Haut, mais avec ma
vieille expérience d'homme d' État, je puis vous dire que cette doctrine réelle-
ment divine n'a aucun avenir si on n'exerce aucune contrainte sur personne. Pour
le moins faudrait-il impitoyablement extirper le fanatisme et la superstition, si on
ne veut pas éternellement avoir à en pâtir !
3. Nous croyons bien évidemment à la pure vérité qui nous a été révélée ici, mais
ce ne fut pas sans contrainte ; et celle que vous exercez, vous et le Seigneur, avec
votre façon d'être, n'est pas des moindres, et sans cette contrainte, d'ailleurs, il n'y
aurait pas ici plus d'un millier d'auditeurs et d'adeptes. Et si cette contrainte n'a
pas fait de nous des machines, comme ce serait à croire à ce que vous semblez
dire, ce ne serait pas un mal de vouloir exercer une certaine contrainte sur
l'homme qui veut devenir enfant de Dieu. »
4. Les anges disent : « Tu as raison d'une certaine manière, et certaines pressions
extérieures ne seront pas délaissées. Mais tu en viendras à te convaincre que la
contrainte extérieure est pire qu'une certaine contrainte intérieure qui est
invisible. Car Satan fait également usage de contraintes extérieures pour
entretenir la superstition. Et si pour répandre la doctrine du ciel nous utilisions
les moyens de Satan et marchions sur ses traces qu'aurions-nous par là à gagner
pour le bien de l'humanité ?
5. La superstition va toujours de pair avec le feu et l'épée et son entrée dans le
monde fait toujours verser le sang. Si la parole de Dieu emprunte la même voie,
l'homme peut-il alors reconnaître le message de paix du ciel ? Ne devra-t-il pas
dire : « Dieu, ne Te suffit-il pas que l'humanité soit tourmentée par Satan à faire
dresser les cheveux sur la tête, pour que Tu doives venir à nous par les mêmes
voies que lui ? »
6. Vois, très cher ami et frère, comme il serait absurde que Dieu, pour répandre
sa doctrine parmi les hommes en vue de leur félicité éternelle, se serve de
moyens utilisés par l'enfer qui propose toujours des fruits empoisonnés !
7. Oui, les temps viendront où la doctrine du Seigneur sera souillée au point
d'être prêchée aux peuples par l'épée et le feu ! Mais ce sera pour le plus grand
malheur des hommes ! Comprends-tu ? »
8. Cyrénius répond : « Malheureusement, je comprends, et je demande alors
pourquoi les cieux ne pourraient nous garder de tels maux, et pourquoi en ce
monde toutes les portes sont ouvertes au mal ! »
9. Les deux anges disent : « Très cher ami et frère, si tu es quelque peu sage, tu
comprendras que le pour et le contre ne vont jamais l'un sans l'autre ! A-t-on
jamais vu quelqu'un devenir un héros sans combattre ? Y aurait-il jamais eu de
combat sur cette terre s'il ne s'y était trouvé que des brebis pieuses ? Où pourrais-
tu éprouver ta force si tu ne trouvais jamais d'obstacle pour t'y mesurer ? Y a-t-il
montée sans qu'il y ait descente, et peux-tu faire le bien si personne n'a besoin de
ton aide ? Que serait une bonne œuvre si elle n'était nécessaire à personne ?
Peux-tu enseigner celui qui a l'omniscience ?
10. Vois-tu, dans un monde où l'homme doit devenir par ses propres moyens un
véritable enfant de Dieu, il faut que toutes les bonnes et les mauvaises occasions
lui soient offertes d'exercer pleinement l'enseignement de Dieu !
11. Il faut qu'il fasse chaud et qu'il fasse froid pour que le riche ait l'occasion de
vêtir le pauvre son frère ! Qu'il y ait des pauvres pour que les riches puissent
s'exercer à pratiquer la charité et que les pauvres apprennent la reconnaissance,
qu'il y ait des forts et des faibles pour que les forts aient l'occasion de prendre les
faibles sous leur protection et que les faibles reconnaissent leur faiblesse dans
l'humilité de leur cœur ! Il faut aussi en quelque sorte qu'il y ait des sots et des
sages, sinon les lumières des sages leurs seraient vaines !
12. S'il n'y a pas de méchants, où l'homme bon peut-il mesurer sa bonté ?
13. Bref, à cette école où l'homme se forme lui-même, le pour et le contre en
toute chose est nécessaire pour que les libres enfants de Dieu puissent pleinement
s'exercer, sinon il leur serait impossible de devenir les véritables enfants tout-
puissants du Très-Haut.
14. Nous te le disons, l'homme n'est pas enfant de Dieu tant qu'il ne parvient pas
à chasser Satan du champ de bataille par ses propres forces dans toutes sortes de
circonstances. Et comment deviendrait-il vainqueur de cet adversaire si toutes les
occasions de se frotter à l'ennemi lui étaient ôtées ? Oui, le royaume de Dieu
s'acquiert par un véritable combat, à cause de la liberté de la vie éternelle. Il faut
donc que l'occasion vous soit offerte de participer au combat entre le ciel et
l'enfer. »
Chapitre 60
De l'utilité des passions
1. Les anges : « Ainsi, tu constateras que les hommes sont dominés par diverses
passions. L'un a le besoin de posséder tout ce qui peut avoir de la valeur ; c'est
évidemment le vice de la cupidité. Pourtant c'est à ce vice que tu dois de voyager
en mer, car seule la convoitise peut pousser l'homme à mettre sa vie en danger
pour aller au-delà des mers chercher des trésors dans des pays qui en regorgent
peut-être ! Ainsi parvenus au-delà des mers dans des terres totalement inhabitées,
entièrement refroidis dans leur cupidité par les grands dangers qu'ils ont dû
surmonter, ils n'ont plus le courage de retraverser les mers et ils s'établissent là
où le vent les a conduits, ils se construisent des huttes et des maisons et finissent
par peupler ces régions jusqu'alors inhabitées. Juges-en toi-même, sans la passion
du gain, ces hommes auraient-ils jamais découverts ces terres étrangères ?
2. Prenons encore l'exemple de la passion des sens : imagine que le plaisir
charnel n'existe pas, et que l'humanité soit parfaitement chaste. Il n'y aurait que
des vierges parfaitement pures et des vieux garçons parfaitement pudiques jusque
dans leur grand âge ! Mais songe à tous ces êtres parfaitement chastes et
pudiques et dis-moi ce qu'il adviendrait alors de la reproduction du genre hu-
main, établie selon l'ordre divin ! Tu vois bien que cette passion doit habiter
l'homme, sinon la terre se dépeuplerait rapidement ! Il est vrai, comme l'expé-
rience le prouve chaque jour, que certains se laissent dépraver, et cette passion
devient un vice à l’encontre de l'ordre divin. Mais la passion ainsi pervertie,
devenue péché parce qu'elle va à l'encontre de l'ordre divin, vaut toujours mieux
que l'extirpation complète de cette passion.
3. Toutes les forces qui sont données à l'homme et qu'il éprouve pour commencer
comme des passions difficiles à juguler doivent être susceptibles d'évoluer vers
le haut ou vers le bas, sans quoi l'homme, comme une eau tiède, tombe dans une
inertie croupissante.
4. Nous te le disions, il n'y a pas de meilleur témoignage de la destinée divine de
l'homme que cette contradiction du vice et de la vertu en lui. Cette contradiction
est le signe visible que des facultés infinies sont données à l'homme de cette
terre. Du ciel divin le plus élevé, qui nous est inaccessible même à nous les
anges, jusqu'aux enfers les plus bas, c'est la voie de l'homme, et s'il n'en était pas
ainsi, jamais il ne trouverait sa filiation divine.
5. Nous avons à faire avec des êtres humains d'innombrables autres mondes.
Mais quelle différence entre ici et là-bas ! Là-bas les hommes sont spirituel-
lement et physiquement établis dans des limites qu'ils ne peuvent guère dépasser.
Mais vous, les hommes de cette terre, en votre esprit vous êtes aussi peu limités
que le Seigneur Lui-même, vous pouvez tomber aussi bas que Satan lui-même,
qui fut autrefois lui aussi créé par Dieu comme un esprit totalement libre ; mais
quand il chuta, il fallut qu'il tombât dans la corruption la plus totale, d'où l'on ne
revient que très difficilement, parce que Dieu a conféré au vice, comme à la
vertu, la même possibilité infinie de se perfectionner. »
Chapitre 61
Du libre arbitre
1. Les anges : « Sur cette terre, tout est question de libre arbitre, et l'ensei-
gnement du Seigneur doit se faire avec aussi peu de contrainte que possible, il est
suffisamment compréhensible pour que chacun puisse le mettre en pratique.
Personne ne peut prétendre être excusé de ne l'avoir pas compris, car aimer Dieu
et aimer son prochain comme soi-même est si facile à comprendre qu'un aveugle
peut le saisir avec les mains ! Et qui veut suivre cet enseignement si facile à
comprendre bien qu'il englobe tout, est conduit par le Seigneur Lui-même à
découvrir dans son cœur même toute la sagesse qui lui permettra d'enseigner
ensuite son prochain. Vous pouvez donc vous éduquer les uns les autres, jusqu'à
ce que vous soyez saisis par le Seigneur et qu'il vous apprenne à devenir
véritablement enfants de Dieu.
2. Voilà la véritable propagation du saint enseignement selon l'ordre céleste ; tout
ce qui est au-dessus ou en-dessous de cela est mauvais et n'apporte que peu ou
pas de bénédiction aux plantes du ciel divin. Comprends-tu cela ? »
3. Cyrénius dit : « Oui, j'ai tout compris, je vois clairement la grandeur destinée
par Dieu aux hommes et à cette terre. Mais qu'il est fâcheux que les enfants de
Dieu soient élevés côte à côte avec les enfants des ténèbres, dans la même école,
chacun dans sa sphère il est vrai ! Pourtant je vois bien, du point de vue de la
plus profonde sagesse divine, qu'il ne peut en être autrement. La surabondance de
la sagesse, de la bonté et de la toute-puissance du Seigneur est si grande qu'il
saura bien donner un jour une autre orientation à l'enfer ! L'éternité est assez
longue pour que, dans sa durée infinie, toutes sortes de modalités amènent le
séducteur et ceux qu'il a entraînés à se rendre. »
4. Les anges disent: « Ta supposition dépasse largement le champ de notre
compétence, mais toi qui es un enfant du Seigneur, tu es visiblement plus proche
de ton Père que nous qui ne sommes que de pures créatures, et tu peux ressentir
plus vite que nous dans ton cœur une aspiration parfaitement divine. Nous savons
aussi qu'à Dieu rien n'est impossible. Mais nous ne pouvons y ajouter une
syllabe.
5. Si tu veux de plus profonds éclaircissements, adresse-toi au Seigneur même ;
pour Lui, ce que les éternités à venir contiennent de caché est clair comme le
jour. Mais nous pensons qu'il ne dira rien à un mortel, car Satan a l'oreille fine et
quand on parle de lui, il faut se tenir sur ses gardes si on ne veut pas l'agacer
davantage ! »
6. Cyrénius dit : « Je comprends, je n'y ferai donc pas allusion devant le Sei-
gneur. »
7. Je dis : « Tu n'as pas besoin de parler à haute voix, Je comprends également ce
que tu te dis et ce que tu demandes dans le secret de ton cœur ! »
Chapitre 62
De la pensée du cœur
1. Cyrénius dit : « Seigneur, cette pensée du cœur pour moi est inconcevable,
depuis ma jeunesse je suis habitué à penser avec la tête, et il me semble im-
possible qu'on puisse penser avec le cœur ! Comment s'y prend-on pour penser
avec le cœur ? »
2. Je dis : « C'est très facile et tout naturel. Tout ce que tu peux penser et crois
penser avec ton cerveau provient d'abord du cœur. Toute pensée, si minime soit-
elle, a toujours une motivation, Cette pensée est d'abord suscitée dans le cœur par
un besoin quelconque, ensuite seulement elle monte vers le cerveau où l'âme
examine, puis celle-ci déclenche dans le corps les mouvements appropriés afin
que la pensée intérieure se traduise en paroles ou en actes. Mais que l'homme
puisse penser uniquement dans sa tête est parfaitement impossible. Une pensée
est une création purement spirituelle et ne peut surgir ailleurs que dans l'esprit de
l'homme, qui réside au cœur de l'âme d'où il anime tout l'homme. Comment une
création pourrait-elle surgir de la matière, aussi subtile soit-elle ? Toute matière,
même celle du cerveau de l'homme, n'est que pure matière et ne peut jamais
jouer le rôle de créateur, elle n'est que création. Comprends-tu bien cela ? Sens-tu
maintenant que personne ne peut penser dans sa tête ? »
3. Cyrénius dit : « Seigneur, oui, je le sens vivement, mais comment cela se fait-
il ? Il me semble maintenant que je n'ai jamais pensé que du cœur ! Étrange !
Comment est-ce possible ? Oui je sens littéralement les mots dans mon cœur, et
même des mots entièrement formulés. Il ne me paraît plus du tout possible que
les pensées se forment dans la tête ! »
4. Je dis : « C'est le signe tout naturel que s'éveille de plus en plus en ton cœur
l'esprit qui est l'amour que vous avez envers Moi et que par Moi vous avez pour
tous les hommes.
5. Ceux dont l'amour n'est pas encore éveillé forment bien leurs pensées dans
leur cœur, mais comme ce dernier est encore par trop matériel, ils ne perçoivent
leurs pensées que dans leur cerveau, où l'impulsion du mouvement est un
matériel plus perceptible, parce que les pensées sont amalgamées aux images
extérieures dont les sens ont imprégné les cellules du cerveau. Ces images des
sens sont matériellement imprimées dans le cerveau où elles deviennent à leur
tour matérielles et mauvaises aux yeux de l'âme et doivent être considérées
comme origine des mauvaises actions de l'homme.
6. C'est pourquoi tout homme doit naître de nouveau dans son cœur tout aussi
bien que dans son esprit s'il veut entrer dans le royaume de Dieu. »
7. Cyrénius dit à Pierre qui se tenait debout à côté de lui : « Comprends-tu bien
cette nouvelle naissance de l'esprit dans le cœur, et en quoi consiste et où se
trouve ce royaume des cieux dont Lui et les deux anges parlent constamment et
qui est la promesse future faite à notre foi ? »
8. Pierre dit : « Évidemment, je le comprends, sinon, au lieu d'être là, je serais à
m'occuper de ma maison. Cherche, noble Seigneur, mais dans ton cœur
uniquement, tu y trouveras rapidement plus que tout ce que je pourrais te révéler
pendant cent ans !
9. Regarde, nous qui sommes Ses premiers disciples et témoins, parlons-nous
beaucoup avec Lui? Pourtant, nous parlons beaucoup plus avec Lui que toi et
beaucoup d'autres extérieurement par la bouche ! Avec Lui nous parlons
seulement dans notre cœur où nous Lui demandons toutes sortes de choses, et Il
nous répond par des pensées claires et précises. Nous y gagnons doublement,
parce qu'une réponse du Seigneur mise dans le cœur de l'homme est déjà en
quelque sorte une activité vivante, tandis qu'une parole extérieure ne devient
activité vivante que par la mise en pratique des exercices de l'âme.
10. En ce qui concerne Satan, tu peux aussi, noble seigneur, interroger ton cœur,
et le Seigneur y mettra la bonne réponse si silencieusement et si secrètement qu'il
sera impossible à Satan de le percevoir, même s'il est toute ouïe ! De la même
manière, tu peux interroger le Seigneur sur la nouvelle naissance de l'esprit dans
le cœur, et sur le royaume de Dieu. La réponse la plus claire te sera faite aussitôt.
»
11. Cyrénius dit : « Bon, j'ai maintenant compris, ce qui m'a étonné plus d'une
fois, pourquoi vous n'échangiez presque jamais un mot avec le Seigneur ! Je vais
aussi essayer. Si le Seigneur vous fait cette grâce silencieusement, Il pourra aussi
le faire pour moi. Je L'aime par-dessus tout, preuve en est que je délaisse ma
lourde charge gouvernementale pour être auprès de Lui et fortifier mon âme à
chacune des paroles de Sa sainte bouche.
12. Je crois aussi que, par amour pour Lui, j'ai fait et je fais encore plus que vous
tous. Je Le connaissais déjà lorsqu'il était tout petit. Je L'ai fait passer à l'étranger
avec Ses parents et Ses frères, et si vous Lui avez sacrifié vos filets de pêcheurs,
je suis prêt, s'il l'accepte, à quitter aussitôt mes biens et dignités terrestres pour
Le suivre et être le plus petit parmi vous, et risquer ma vie pour Lui comme pour
vous, ainsi que je l'ai déjà fait quelques fois sans m'inquiéter de ce qui pourrait
m'arriver à Rome.
13. Si je fais tout cela par pur amour pour Lui, Il me fera aussi cette grâce qu'il
vous accorde en si grande abondance. »
14. Je dis: « Tu l'as déjà, Mon très cher ami et frère, et ce que tu as, tu n'as pas
besoin de le chercher encore, ni de te donner du mal pour l'avoir. Sois donc
tranquille et essaie dans ton cœur de Me demander quelque chose, et Je mettrai la
réponse claire, distincte et intelligible dans ton cœur qui M'aime par-dessus tout.
»
Chapitre 63
Du retour de l'enfant prodigue
Chapitre 65
Des génies légendaires de la montagne
Des magiciens
1. Kisjonah dit : « Oui, Seigneur, j'ai tout compris, d'autant que les mineurs qui
extraient le minerai de ma montagne m'ont souvent raconté la même chose, à
savoir que le pain et le vin parfois viennent à disparaître sans qu'on puisse savoir
qui a bien pu les voler. Ces mineurs dont l'appétit est ainsi contrarié ont parfois
perçu certains bruits de rires et vu des petites formes humaines scintiller autour
d'eux, de couleur bleue, rouge, verte, jaune et aussi toute noire.
2. Dernièrement, un de mes plus vieux montagnards m'a raconté qu'un petit
homme bleu lui a conseillé de porter à l'avenir son pain et son vin dans un petit
sac en bandoulière, de la façon que les êtres affamés de la montagne ne puissent
s'en emparer. Il fallait aussi que personne ne parle trop fort dans les mines de la
montagne, et surtout ne siffle pas et ne jure pas, car les génies de la montagne ne
le supportent pas et font tout le mal possible à ceux qui ne respectent pas ce
commandement. Personne ne doit rire dans la montagne, car ces gaillards ne
supportent pas le rire, par contre ils aident volontiers à trouver les métaux les
plus nobles les mineurs qui leur laissent du pain et du vin !
3. Je prenais ces histoires pour des fables, n'ayant jamais rien vu de tout cela
moi-même, bien que je visite souvent les mines de la montagne. Mais après Tes
explications, tout m'est parfaitement clair. Il y a encore une chose pourtant que je
ne saisis pas. Comment ces génies de la montagne, qui sont de purs esprits,
peuvent-ils consommer une nourriture physique ? Comment ces êtres étranges
peuvent-ils bien boire et manger ? »
4. Je dis : « À peu près de la même manière que le feu consume ce qu'il attaque.
Mets dans le feu une goutte de vin ou une miette de pain et tu verras comme ils
vont disparaître. C'est un peu de cette manière que ces génies de la montagne
consomment la nourriture physique. Ils dissolvent l'aspect matériel et
transforment la substance spirituelle présente dans la matière, et transforment en
substance spirituelle que leur être spirituel assimile aussitôt. Maintenant que tu le
sais, tu n'as plus besoin de t'inquiéter de rien ! »
5. Kisjonah dit : « Seigneur, je Te remercie pour cette information, elle réjouit
mon âme et je reconnais que tout ce qui m'environne de tout côté n'est que pure
vie. »
6. Je dis : « Très bien, Mon très cher ami, mais Je te prie, ainsi que tous ceux qui
en auront connaissance, de garder cela pour toi, car il n'est pas bon que tout un
chacun le sache. Les magiciens perses et égyptiens ont bien souvent commerce
avec les esprits et les lutins, grâce à l'aide desquels ils réussissent toutes sortes de
tours de magie. Mais toute cette magie est une abomination aux yeux de Dieu et
celui qui l'exerce, en vérité, parviendra très difficilement au royaume de Dieu,
car ces magiciens empêchent ces esprits de s'incarner, et à leur mort, ils
deviennent prisonniers de ces âmes immatures dont ils ont d'autant plus de mal à
se libérer que leur nature s'est assimilée ces esprits bruts immatures. Je vous le
dis, malheur au magicien, car un véritable magicien n'accomplit jamais une
bonne action avec sa magie. Ce n'est partout qu'avidité et cupidité accompagnées
du plus insolent désir de domination. De tels esprits recevront leur humiliante
récompense au plus profond des enfers. »
7. Faustus dit : « Seigneur, Seigneur, voilà un mauvais présage pour tous les
magiciens et tous les tireurs d'horoscope du vaste empire romain ! Ces gens-là
sont pris pour des dieux à Rome, et d'un mot ont le pouvoir de faire fléchir la
volonté de l'empereur comme des plus grands héros, ou au contraire de les rendre
courageux à faire trembler les montagnes ! »
8. Je dis : « Oui, ami, un jour tout cela finira mal pour ces hommes qui jouent les
demi-dieux, car ils savent tromper abominablement ceux qui ne sont pas initiés à
leur art, et ils leur font souvent commettre toutes sortes d'horreurs, mais tout cela
finira mal pour ces misérables qui vendent le néant à prix d'or et sont la cause
d'innombrables horreurs qui perdent l'humanité. »
9. Plusieurs dirent : « Mais s'ils s'amélioraient, ne pourraient-ils aussi être sauvés
?»
10. Je dis : « Oui, oui, s'ils s'amélioreraient, ils pourraient être sauvés, mais le
malheur est que ces hommes-là sont précisément les moins aptes à s'améliorer.
Assassins, voleurs, bandits, fornicateurs, adultères peuvent se convertir. Un
empereur, un roi peut facilement renoncer à sa couronne, alors qu'un magicien ne
peut se séparer de sa magie, car ses invisibles compagnons ne le laissent pas faire
et s'emparent de lui s'il veut quitter sa magie.
11. C'est pourquoi Je vous le répète, malheur à la magie, tous les malheurs en ce
monde sont venus par elle.
12. Qui veut faire des miracles doit avoir reçu de Dieu la force intérieure, et
même alors, le miracle ne doit intervenir qu'en cas de nécessité extrême.
13. Mais qui fait de faux miracles et prétend dire la bonne aventure par toutes
sortes de maximes et de signes, n'a plus besoin d'être condamné, car il s'est déjà
entièrement condamné par sa propre volonté. Gardez-vous donc de la magie
malfaisante et des prédictions, qui font le plus grand mal à l'esprit de l'homme. »
14. Tous ceux qui avaient entendu ces paroles étaient profondément effrayés, et
ils Me demandèrent s'il fallait encore faire cas de l'antique expérience des
pronostics du temps.
15. Je dis : « Oui, s'ils sont établis sur des fondements scientifiques mesurables,
mais si ce n'est pas le cas, c'est un péché d'y mettre sa foi, car on finit par croire
davantage en ces signes qu'à la seule véritable toute-puissance de Dieu, et la foi
en Dieu s'affaiblit.
16. Qui demeure dans la foi pure peut demander et il lui sera donné ce qu'il aura
demandé, même si les plus mauvais signes de la terre et du ciel lui sont
contraires. Mais qui se fie aux signes, vivra selon ces signes. Les Pharisiens
observent ces signes dont ils se font acheter à prix d'or l'interprétation. Ils n'en
seront que plus condamnés.
17. Dieu n'a-t-Il pas créé Lui-même tout ce dont les hommes ont besoin en fait de
signes ? Et si Dieu a créé tout cela, Il restera bien le Maître au-dessus de tout, et
Il mènera et dirigera tout. Si Dieu est le seul Maître, le seul conducteur de toute
chose créée, de tout phénomène, ces signes ne peuvent rien annoncer sans Lui ;
que l'homme demande donc à Dieu qui permet toute chose l'interprétation de ces
signes, il sera plus tranquillisé que de s'en remettre à tous ces voyants ! »
18. Tous ceux qui étaient présents à Ma table dirent : « Seigneur, tout cela est
certain et vrai ! Mais si Tu voulais faire que le monde pense et agisse ainsi, tout
se passerait autrement dans le monde ! C'est facile pour nous qui sommes auprès
de Toi, nous T'avons sous la main, Toi le fondement de toute existence et de
toute manifestation. Mais ce n'est pas aussi facile pour des centaines de milliers
d'autres qui n'ont pas le bonheur inestimable d'être dans Ta très sainte compagnie
et d'entendre de Ta bouche les paroles de vie ! Ils aspirent certainement aussi
comme nous à Celui dont toute la Création est le visible témoignage. Mais leur
regard ne Te trouve pas dans les étoiles et leur aspiration n'est jamais satisfaite. Il
n'est pas étonnant que chez ces gens-là les prodiges et les signes que font les
magiciens trouvent si facilement un écho, car ils répondent en quelque sorte à
leur aspiration aux choses divines, dont ils semblent porter la marque malgré leur
fausseté ! »
Chapitre 66
Des magiciens et diseurs de bonne aventure
1. Cyrénius reprit alors la parole et dit d'un air très sérieux : « Seigneur, il est
parfaitement vrai que Tu es très certainement Celui que nous avons reconnu
depuis longtemps déjà, et aucun de nous ne peut le nier ; mais je dois cependant
T'avouer que je n'ai guère retrouvé, dans ce que Tu viens de nous expliquer au
sujet des magiciens, des devins et des diseurs de bonne aventure, la miséricorde
et l'amour que je Te connais d'habitude ! Pourtant, qu'il existe de telles choses ne
dépend que de Toi seul, car Tu administres Toi-même aux hommes des coups
qui les font beaucoup souffrir, et ensuite, malheur à celui qui se met à crier que
cela lui fait mal ! Mais cela est-il juste, je me le demande !
2. Oui, les hommes sur terre sont sans doute pour la plupart aveugles et stupides,
donc également méchants. Mais je pose la question : à qui la faute, et d'où vient
le mal ! Et cette question, la posent comme moi des centaines de milliers de
Romains qui ne manquent sans doute pas d'expérience !
3. Cela ne veut pas dire qu'il faut supposer que l'homme, au commencement, est
sorti mauvais de Ta main, pas plus qu'aucun enfant ne vient au monde comme un
diable ; mais si le premier homme était bon, comment se fait-il que le deuxième
ou le troisième soit devenu mauvais ? Était-ce aussi Ta volonté, ou celle de ceux
qui l'ont ensuite procréé ? Mais alors, quoi qu'il en soit, tout cela doit être arrivé
par Ta volonté ! Et si c'est Toi qui l'as voulu ainsi, pourquoi cette lourde
condamnation de ceux-là mêmes qui n'ont fait au fond que sauver les hommes
d'un désespoir certain, alors que Tu ne voulais pas Te manifester à eux malgré
leurs appels ? C'est pourquoi, je T'en prie, sois juste, mais ne sois pas dur ; car la
créature n'est pas armée contre son Créateur, elle ne peut que prier, attendre,
souffrir et désespérer ! »
4. Je dis : « Mais, Mon cher Cyrénius, as-tu déjà tout oublié de ce que tu as ap-
pris de Moi ainsi que des deux anges ? Ai-je dit que Je jugerais ou damnerais
Moi-même ces gens-là ? N'as-tu pas voulu faire fouetter, il y a quelques jours
encore, ceux qui voulaient Me lapider, et Je t'en ai empêché ! Il semblerait
presque que tu veuilles maintenant prendre leur mauvais parti ! Ou saurais-tu
mieux que personne ce qu'il faut faire de l'homme pour que dans cette situation,
il soit obligé de devenir un enfant de Dieu, s'il le veut ! Tu vois comme tu es
encore faible !
5. Es-tu si magistralement versé dans l'histoire universelle de toute l'humanité
que tu puisses Me reprocher de ne Me soucier que maintenant de ceux qui ap-
pellent et qui cherchent ?
6. Les premiers hommes n'ont-ils donc pas toujours été en contact avec moi ? De
Noé à Moïse, qui était donc ce grand prêtre de Salem nommé Melchisédec, qui
résidait à Salem comme un véritable Roi des rois ? Qui était cet esprit de l'Arche
d'alliance ? Et puisque cet esprit est venu de cette Arche en Moi — question :
Qui suis-Je maintenant?
7. Ceux qui M'appelaient voulaient Me voir descendre des étoiles, parce qu'ils
Me trouvaient trop commun lorsque je vivais parmi eux et que je ne faisais pas
d'éclat comme un astre.
8. Vois-tu, ce qui t'anime maintenant est fondamentalement faux, et Satan, qui a
quelque peu remarqué que tu portes en toi son secret, t'a juste un peu éprouvé et
voilà déjà que tu te mets à vouloir te quereller avec Moi ! Mais demande-toi donc
s'il y a quoi que ce soit de juste dans ce que tu dis !
9. Puis-Je être dur ou injuste envers qui que ce soit ? Ou suis-Je injuste si Je
t'offre l'or le plus pur à la place du faux, ou dois-Je vous abandonner à l'ancienne
superstition, qui était mauvaise et vaine ? Plus que toi, n'avais-Je pas le droit,
Moi le Seigneur, de vouloir la perte de ces méchants Pharisiens rebelles ? Les ai-
Je condamnés ? Oui, ils eussent été leurs propres juges si Je ne les avais
merveilleusement sauvés !
10. Vois-tu ! comme tu es encore myope ! Je pense, Mon ami, que tout ce que tu
as déjà vu et entendu aurait dû te donner une plus large vue ! »
11. Cyrénius Me demande pardon, ainsi que tous les autres, qui voient leur
erreur. Mais Je les console tous en leur disant : « Oh ! vous subirez d'autres
épreuves plus dures encore. Mais alors, n'oubliez pas ce qui vient de se passer et
ce que Je vous ai dit ici, sinon vous pourriez être soumis à des tentations plus
fortes encore ; et, bien que vous M'ayez vu et que vous M'ayez parlé, vous vous
sépareriez de Moi pour retomber dans les mensonges et les tromperies du monde,
et vous deviendriez semblables à ceux dont vous pensez qu'ils M'ont appelé et
cherché et que Je les ai abandonnés aux voyants et aux tireurs d'horoscopes pour
pouvoir mieux les damner ! » Tous Me demandent encore pardon et Je les bénis
tous.
Chapitre 67
Jésus guérit un malade de la rage
1. Là-dessus arrive de la ville une foule de citadins annonçant qu'un homme est
atteint de la rage.
2. Je leur demande ce que Je dois faire de ce malade.
3. Et les citadins disent : « Nous savons que tu es un médecin qui fait des
miracles et que tu as annoncé et raconté aujourd'hui aux Pharisiens que tu as
guéri par ta simple volonté la famille du vieux Josa, et que tu serais bien plus que
le charpentier Jésus que nous connaissions. »
4. Je demande comment cet homme a attrapé la rage.
5. Les citadins disent : « Cher maître, un chien enragé l'a mordu et il a attrapé ce
mal terrible qu'aucun médecin n'a pu encore guérir. À sa mort, il faudra le brûler
ainsi que toute sa maison, car il suffirait de le toucher à peine pour attraper ce
mal terrible. C'est pourquoi nous l'avons enfermé dans sa maison pour
l'empêcher de sortir et de communiquer son mal. Cher Maître, libère-nous de
cette plaie ! »
6. Je dis : « Amenez-le ici pour qu'il guérisse ainsi que tous ceux qui l'ont déjà
touché pour l'enfermer ! »
7. Les citadins disent: «Qui le sortira ? C'est mourir que de le toucher ! »
8. Je dis: « Si vous ne croyez pas et n'avez aucune confiance, Je ne puis lui venir
en aide, pas plus qu'à vous ! »
9. Les citadins disent : « Maître, tu as pu venir en aide à la famille de José qui
était atteinte d'un mal presque aussi grave, ils n'ont pas eu besoin de venir jusqu'à
Toi. Tu peux donc aussi aider cet homme qui a la rage sans qu'il soit nécessaire
de te l'amener ! »
10. Je dis: « Josa croyait, et vous ne croyez pas ! Vous êtes venus plutôt pour
M'éprouver et voir ce que Je saurais faire de cet homme atteint de cette rage
incurable. C'est pourquoi Je vous le répète, sortez-le et vous serez aidés, lui
comme vous ! Car vous tous, tant que vous êtes, vous avez déjà en vous ce mal
qui ne va pas tarder à se manifester. Mais si vous croyez et faites sortir cet
homme, ce mal satanique sera chassé. »
11. Ils allèrent alors chercher le malade atteint de la rage et ils ramenèrent un
homme à l'allure effroyable, écumant et rugissant comme un lion affamé. À cette
vue Mes nombreux hôtes furent saisis de frayeur et les femmes s'enfuirent dans
la maison, n'ayant pas le courage de regarder cet effroyable spectacle. Même Ma
mère se cacha dans la maison et le cercle de Mes disciples se desserra. Judas se
cacha derrière un arbre. Seuls Cyrénius, Faustus, Cornélius, Kisjonah et Borus
restèrent près de Moi.
12. Je dis aux citadins : « Détachez-le et laissez-le en liberté. »
13. Horrifiés, ils s'écrièrent : « Seigneur, nous sommes perdus ! » Ces citadins
n'osaient bouger, tant le peuple et tous les disciples criaient ! »
14. Je dis alors à Borus : « Va le délier, il est déjà guéri et ne peut plus faire de
mal à personne. »
15. Borus s'approcha alors très courageusement de l'enragé et lui dit : « Le
Seigneur Jésus soit avec toi, sois guéri en Son nom ! »
16. À l'instant l'enragé fut guéri. Son visage devenu presque aussi noir que celui
d'un Maure avait recouvré son teint naturel et il pria Borus avec une expression
de grande reconnaissance de bien vouloir le dégager de ses bandes, et Borus le
dégagea de ses bandes, qui étaient propres et sans trace d'aucune bave. Et celui
qui était guéri vint à Moi Me remercier avec une profonde émotion pour ce
bienfait inouï, et il Me pria de le préserver à l'avenir d'un tel malheur.
17. Et Je lui dis : « Toi et tous ceux qui sont tombés malades à cause de toi, vous
êtes maintenant parfaitement guéris. Mais à l'avenir, soyez les amis du genre
humain et non des chiens. À quoi vous servent tant de chiens ? Les chiens sont
utiles aux chasseurs de gibier et de bêtes féroces ou aux bergers pour protéger
leurs troupeaux des loups et des hyènes ; à part cela, personne n'a besoin de
chien. Mais celui qui en veut un doit le tenir attaché pour que les pauvres ne
soient pas empêchés d'approcher la maison quand ils viennent demander
l'aumône. À l'avenir, celui qui ne suivra pas ce conseil subira par son chien le
même sort que celui qui fut le vôtre.
18. Prenez les enfants des pauvres dans vos riches demeures plutôt que des
chiens inutiles qui comportent de tels dangers, et vous ne serez jamais mordus
par un chien atteint de la rage, qui est un poison de Satan. »
19. À ces mots, ils Me promirent tous de faire disparaître leurs chiens et de ne
plus jamais en avoir. Mais quelques personnes encore faibles dans leur foi Me
demandèrent si elles étaient parfaitement guéries d'un tel mal et si elles n'en
seraient plus jamais atteintes.
20. Je dis : « Ô gens de peu de foi, ! Ne voyez-vous pas que celui que vous avez
amené ici est parfaitement guéri ? Et s'il a été aidé, vous le serez aussi, vous qui
n'auriez pas été atteints avant longtemps. Si Je fais sortir les morts des tombeaux,
ce mal-là n'est pas pire que la mort. Avec le temps vous aurez la preuve que vous
êtes guéris. Retournez maintenant tranquillement chez vous. Mais allez d'abord
trouver les Pharisiens et les anciens, montrez-leur que vous êtes parfaitement
guéris, et allez rendre sur l'autel les sacrifices que Moïse a ordonné aux lépreux
qui guérissent. »
21. Ils Me remercièrent tous avec vive émotion, demandant ce qu'ils pouvaient
faire pour Me remercier d'un tel bienfait.
22. Je leur dis : « Croire et faire ce que les Pharisiens et les lévites vous ensei-
gnent. »
23. Ils prirent alors le chemin du retour et se rendirent aussitôt à la synagogue
raconter aux Pharisiens tout ce qui leur était arrivé, et offrir leurs sacrifices.
24. Les Pharisiens, qui n'étaient pas informés de la rage de ce malade, furent dans
l'émerveillement et dirent : « En vérité, cette guérison n'est possible qu'à Dieu
seul. Une telle chose ne s'est encore jamais vue dans tout Israël. Cet homme en
vérité accomplit des choses qu'aucun des plus grands prophètes n'a jamais pu
accomplir. Il n'est pas de maladie qu'il ne soit en mesure de guérir et aucun mort
dans la tombe qu'il ne puisse rappeler à la vie ! N'est-ce pas là un être humain
comme la terre n'en a jamais porté ? Rentrez chez vous et revenez demain matin,
nous en discuterons davantage. »
Chapitre 68
Évangile des riches
De l'adoption d'un enfant pauvre étranger
1. Les citadins s'en retournèrent chez eux et ramenèrent l'homme qui était
maintenant guéri à sa femme et à ses enfants. Avec un flot de larmes de
reconnaissance et de joie, cette femme accourut à Moi avec ses dix enfants. Ils se
jetèrent tous à Mes pieds pour dire leur reconnaissance devant un bienfait aussi
inouï. Cette femme Me demanda aussi de lui permettre de servir Ma maison
selon ses forces, ainsi que tous ceux que Je lui désignerais.
2. Je dis : « Tout ce que tu feras aux pauvres en Mon nom sera considéré comme
si tu l'avais fait pour Moi. Pour le moment et pour la brève période que J'y
passerai encore, Ma maison n'a besoin de rien, mais lorsque Je reviendrai, tu en
seras informée. »
3. La femme pleure de joie et de reconnaissance et dit : « Seigneur, Toi le très
véritable maître que le ciel nous a donné, j'ai une grande fortune ; je veux
aussitôt en donner la moitié aux pauvres, et j'administrerai l'autre partie pour eux
en sorte qu'ils trouvent toujours quelque chose chez moi. Je pense que c'est bien
ainsi, car il est connu que les pauvres ne savent pas gérer de grosses sommes,
qu'ils dépensent tout en une seule fois et n'ont ensuite plus rien en cas de besoin.
»
4. Je dis : « Fais cela, chère femme ! Et si tous les riches le faisaient, les pauvres
ne seraient jamais dans la misère. Car la misère est une mauvaise chose qui cause
à l'homme plus de tourments que la richesse. Le riche a toujours officiellement
bonne réputation et il cause moins d'ennuis aux autres que le pauvre, qui est trop
vite capable des pires agissements. Mais le riche insensible qui utilise le pauvre
pour assouvir ses vices est, malgré sa bonne réputation, mille fois pire que le
pauvre le plus vicieux. Le pauvre est entraîné au vice par la nécessité, tandis que
le riche crée le vice par l'usage qu'il fait de son superflu.
5. Mais, chère femme, avec ce que tu veux en faire et ce que tu en feras, ta
fortune est une bénédiction du ciel et elle procurera les plus gros gains à ceux qui
l'administreront. Que celui qui veut être vertueux soit économe et bon ges-
tionnaire de ses biens, afin qu'en temps de misère il soit capable de prendre sous
sa garde les pauvres et les faibles.
6. Je vous le dis à tous, si votre amour pour vos enfants brille comme une lu-
mière, l'amour pour les enfants étrangers des pauvres devrait être un brasier, car
personne au monde n'est plus démuni qu'un enfant abandonné, qu'il soit fille ou
garçon. Celui qui, en Mon nom, prend sous sa garde un tel enfant et soigne son
corps et son esprit comme s'il s'agissait de son propre sang, Me reçoit, et celui
qui Me reçoit, reçoit aussi Celui qui M'a envoyé en ce monde et qui est un avec
Moi.
7. Si vous désirez que la bénédiction soit sur vos maisons et qu'elle soit un
champ destiné à une riche récolte, établissez dans vos maisons des pépinières
d'enfants pauvres et vous serez submergés de bénédictions, comme un fleuve en
crue recouvre les plaines qu'il inonde de sable et de galets. Mais si vous re-
poussez loin de vous les enfants pauvres et affamés et si vous éprouvez de la
rancœur à leur égard comme s'ils vous avaient fait un tort quelconque, la
bénédiction disparaîtra de vos maisons comme le jour s'enfuit devant la nuit qui
avance à grands pas. Malheur aux maisons que surprend une pareille nuit. En
vérité, il n'y fera plus jamais jour. Maintenant, rentre chez toi, chère femme, et
fais ce que tu as décidé et pense à l'avenir aux pauvres veuves et aux orphelins.
8. Ayant reçu cet enseignement, la femme se relève avec ses enfants, Me
remercie encore et proclame enfin à haute voix: « Ô, Dieu d'Abraham, d'Isaac et
de Jacob, que Tu es grand, bon et saint, infiniment sage et puissant, de nous avoir
donné, à nous pauvres pécheurs, un homme qui provient de Ton cœur et qui est
capable de guérir toutes nos infirmités physiques et spirituelles. À Toi Saint Père,
louange, honneur et gloire. Ô très cher Père, que Tu es bon envers ceux qui se
confient en Toi seul. Tu punis bien sévèrement ceux qui ne suivent pas Tes
commandements, mais quand le pécheur repentant Te crie à nouveau : "Saint
Père, aie pitié de moi pauvre pécheur", Saint Père, Tu l'écoutes, et lui tends
aussitôt Ton bras tout-puissant et lui viens en aide.
9. Ô humains, suivez mon exemple ! J'étais moi aussi pécheresse, et Dieu m'a
puissamment soumise à son fléau étemel ; mais je n'ai pas perdu confiance, j'ai
regretté mes péchés, j'ai prié avec ardeur le Père céleste ; et voyez, Lui seul a
entendu ma supplication, Il m'est venu merveilleusement en aide dans mon
immense et terrible misère.
10. Ainsi, confiez-vous tous en Lui, misez tout sur Lui. Il vient en aide au
malheureux que plus personne ne peut secourir. Louez-Le sans cesse. Lui seul
peut réellement aider chacun. Toi, l'envoyé du ciel, je te remercie encore, car tu
dois être toi-même un instrument sacré dans la main du Tout-Puissant ! »
11. Cette exclamation qui, à l'insu de cette femme ne concernait que Moi seul,
Me tira quelques larmes d'émotion qui M'obligèrent à Me détourner d'elle.
12. Cyrénius le remarqua et dit : « Seigneur, qu'y a-t-il, pourquoi pleures-tu?»
13. Je répondis : « Ami, il n'y a pas beaucoup d'enfants comme celui-là sur terre !
Ne devrais-Je pas être ému aux larmes, Moi qui suis le Père qu'elle a loué de tout
son cœur ? Oh, Je te le dis plus que tout autre père ! Voilà une enfant comme
toutes devraient l'être, et elle Me cause une joie indescriptible. Mais il faut aussi
qu'elle sache pourquoi Je pleure de joie à cause d'elle. »
14. Je séchai alors les larmes de Mes yeux et dis à cette femme dont le cœur était
encore tout embrasé d'amour pour Dieu : « Toi, Ma chère femme, puisque ton
amour et ta foi sont si grands et si rarement vus, Je ne puis te laisser repartir ainsi
! Envoie ton fils aîné chercher son père, car J'ai encore des choses très
importantes à lui dire. »
15. À ces mots le garçon part en courant et revient peu après avec son père guéri.
16. À leur arrivée, Je dis au père : « Ami, pour que non seulement ton corps mais
surtout ton âme qui vivra éternellement, soient parfaitement sains, et afin que tu
saches ce qui s'est passé ici, Je t'ai fait appeler. Pour commencer, tu seras Mon
hôte ce soir avec ta chère épouse et tes enfants, ensuite, les choses que tu verras
et entendras ici te feront comprendre qui est Celui qui t'a guéri. Alors toi et ta
femme, vous serez mille fois plus heureux encore, et dans la joie de ton âme tu
verras véritablement que tu es parfaitement guéri.
17. Mais avant de souper, nous allons faire un petit tour à la nouvelle synagogue
construite par Jaïrus. Et Jaïrus, sa femme, sa fille et Borus son mari, Cyrénius,
Cornélius, Faustus, Kisjonah, ta femme et tes enfants vont nous accompagner. Tu
y verras quelque chose qui va fortifier ta foi ! »
18. Celui qui venait d'être guéri, qui s'appelait Bab, dit : « Maître, que ta volonté
soit faite, je suis prêt à te suivre jusqu'au bout du monde ! »
19. Sur ce, nous nous rendîmes tous à la synagogue, qui se trouvait à un quart
d'heure d'une bonne marche ou à une demi-heure d'un pas plus tranquille.
Chapitre 69
Visite de la crypte de Jaïrus
Chapitre 70
Résurrection de Josoé
1. C'en était trop pour Bab et sa femme, et celle-ci lui dit : « Cher Bab, ne vois-tu
pas que nous sommes deux grands pécheurs et que la plénitude de Dieu réside en
cet homme Jésus ? N'est-Il pas Celui qui est annoncé par tous les prophètes et par
Zacharie et son fils Jean ? N'est-Il pas Celui que David appelait son Seigneur
quand il disait : "Le Seigneur a parlé à mon Seigneur !" Celui dont David parlait
en disant : « Élevez vos linteaux, ouvrez les portes de la ville pour que passe le
roi de gloire ! Mais qui est le roi de gloire ? C'est le Seigneur Jahvé Sabaoth !
Jahvé seul est mon époux, nous sommes pécheurs, nous sommes indignes de
rester devant Lui ! Allons nous purifier selon les commandement de Moïse et
nous pourrons alors revenir et nous approcher de Lui. »
2. Je dis à ces époux profondément émus : « Celui qui réveille les morts peut
vous purifier sans avoir recours à Moïse. Restez donc ici, Moïse n'est pas plus
grand que Moi et que Celui qui l'a suscité pour être ce qu'il a été ! Vos péchés
vous sont pardonnés, vous êtes donc purifiés et n'avez plus besoin de Moïse, car
sans Moi, Moïse n'est rien ! »
3. Bab dit : « S'il en est ainsi, ce dont je ne doute plus du tout à présent, restons,
car jamais Moïse ne nous purifiera davantage que le Tout-Puissant Lui-même. »
4. La femme dit : « Je suis aussi la servante du Seigneur, qu'il arrive ce que tu
voudras et comme bon te semblera mais cette présence par trop sainte de Dieu
m'oppresse. »
5. Je dis: « Femme, J'ai vu à Nazareth ta dévotion et c'est d'abord pour toi que j'ai
fait ce que tu as vu. Tu peux rester auprès de Moi, mais Je vous le dis à tous, n'en
dites mot à personne, non à cause de Moi ni à cause de vous, mais à cause de
tous les incroyants, pour qu'ils ne soient pas condamnés à croire au Fils de
l'homme et qu'ils puissent croire librement lorsque l'Évangile leur sera annoncé !
6. Un tel témoignage enfermerait dans des chaînes d'airain les hommes d'au-
jourd'hui en les contraignant à croire en Moi, ce dont la liberté de leur existence
souffrirait beaucoup. Par la suite, leurs descendants trouveraient ces récits exa-
gérés et se mettraient à les considérer comme des inventions inadmissibles de la
plus pure fantaisie, repoussant ainsi l'enseignement de la vérité étemelle. Il vaut
donc mieux que les actes que J'accomplis restent parfaitement cachés, parce
qu'ils ne peuvent servir à personne, surtout dans ces premiers temps de mon
enseignement.
7. Et toi, Jaïrus, qui devras ramener ce garçon le moment venu à ses parents, tu
lui diras fidèlement comment il doit considérer la chose. Il doit croire, mais en
aucun cas il ne doit faire sensation. Comme ce garçon a passé par l'épreuve de la
putréfaction, il ne mourra plus jamais selon le corps, mais quand son tour
viendra, il sera appelé par un ange et il suivra librement cet appel, et aucun œil
mortel ne le verra plus jamais nulle part sur cette terre !
8. Maintenant que ce garçon a pris du pain et du vin et que le crépuscule s'an-
nonce, rentrons à la maison. »
9. Nous sortîmes de la synagogue. Jaïrus et Borus refermèrent derrière eux la
crypte où les deux anges, sur leur demande, avaient instantanément replacé le
cercueil.
Chapitre 72
L'office divin véritable
1. Cyrénius Me dit alors : « Seigneur, si une pareille chose arrivait à Rome, les
pierres mêmes s'abaisseraient devant Toi et T'invoqueraient à haute voix, et nous
faisons comme si tout cela n'était que très naturel ! Seigneur, soit indulgent pour
notre faiblesse et notre bêtise ! »
2. Je dis : « Si Je l'avais voulu, Je serais venu au monde à Rome au lieu d'être né
à Nazareth. Ne faites que ce que Je vous demande, tout le reste est propre aux
païens et n'est que péché. Ne sais-tu donc pas qu'aimer Dieu plus que tout et son
prochain comme soi-même plaît infiniment plus au Dieu du ciel et de la terre que
de bâtir des temples de bois et de pierre ?
3. Si Salomon disait en son temps que le ciel et la terre eux-mêmes sont trop
petits pour contenir la majesté divine, que ferait une misérable bicoque de pierres
de taille ou de briques, quand Dieu a créé toute la terre aussi bien que tout l'infini
!
4. Dis-moi, que dirait un père à ses enfants qui seraient assez sots pour construire
avec ses excréments une maisonnette à la mesure d'une mouche, ou même plus
grande, et qui voudraient faire de la fiente de leur père une image du père, pour
se mettre à genoux devant elle quand tout serait prêt, et prier et louer leur père
devant ce temple d'excréments ! Si tes enfants faisaient cela, que dirais-tu de les
voir ainsi ramper devant ce temple d'immondices, stupide, dégoûtant et indigne
de toi, et si de plus, ils obligeaient des frères parfois plus éclairés qu'eux à payer
des impôts ecclésiastiques et exerçaient sur eux un droit de vie et de mort ? Dis-
moi, une dévotion aussi stupide et aussi obscène de tes enfants pourrait-elle te
réjouir ?
5. Regarde, ton cœur se révolte violemment contre cela, et Je te le dis, une
dévotion aussi stupide des enfants d'un père terrestre vaut mieux encore que celle
que les hommes ont pour Dieu dans leurs temples, car ces enfants construisent
leur temple avec le résidu de la nourriture de leur père, tandis que les hommes
construisent des temples avec les excréments de Satan pour y adorer Dieu leur
Père ! Dis-moi, une pareille dévotion te plaît-elle ? »
6. Cyrénius dit : « Seigneur, je voudrais pouvoir foudroyer à l'instant même tous
les temples de la terre ! Mais tes deux anges pourraient les réduire en poussière
en un clin d'œil ! »
7. Je dis : « Ami, cela est déjà arrivé, arrive et arrivera encore, et pourtant les
hommes ne cesseront de construire des temples. Celui de Jérusalem sera dévasté,
des temples idolâtres on ne verra plus rien, et pourtant à leur place on en verra
des milliers d'autres ; tant qu'il y aura des hommes sur cette terre, ils chercheront
à bâtir des temples plus ou moins grands où ils chercheront leur salut, mais bien
peu d'hommes se mettront à construire un temple vivant dans leur cœur pour que
Dieu seul y soit reconnu, honoré et adoré, parce que cela seul assure la vie
éternelle de l'âme.
8. Aussi longtemps que les hommes demeureront dans des palais et que ces
palais seront un prétexte à se faire rendre les honneurs par ceux qui ne peuvent
en avoir, les hommes se feront construire à côté de leurs palais des temples
dédiés à un dieu quelconque, sinon pour l'y honorer vraiment, du moins pour s'y
faire honorer eux-mêmes parce qu'ils les auront érigés !
9. Les hommes s'attribueront ainsi les honneurs dus à Dieu seul. Leur œuvre aura
le salaire qu'elle mérite. Ils ne seront pas reconnus dans l'au-delà, et ils seront
repoussés dans les ténèbres les plus extérieures avec ce déchaînement de cris et
de grincements de dents que sont les querelles et les guerres des ténèbres.
Laissons donc pour l'instant les choses où elles en sont, tous les nœuds seront
déliés dans l'au-delà. »
Chapitre 73
Le repas chez Marie
De la connaissance
Chapitre 74
Dispute de Judas et de Thomas
1. Tous les disciples sont satisfaits de cette réponse, sauf Judas. Ils louent la
bonté, la sagesse et la puissance de Dieu qui agissent en Moi, mais Judas fait la
moue et dit à part lui d'une voix assez forte : « Lorsque les Pharisiens montrent
en cachette le Saint des Saints aux étrangers contre de l'argent, Il déchaîne sur
eux du ciel une pluie de soufre, mais lorsqu'il montre des choses sacrées à des
étrangers et non à nous qui sommes Ses compatriotes, cela est juste et conforme
à l'ordre divin ! A-t-on jamais vu cela ? C'est une faute envers le ciel et la terre
que les prêtres de Jérusalem le fassent, et c'est juste et parfaitement dans l'ordre
divin de Melchisédec quand c'est Lui qui fait presque la même chose ! On ne
peut s'y opposer, mais c'est tout de même agaçant. »
2. Thomas, qui avait Judas toujours à l'œil, lui dit : « Y a-t-il une fois encore
quelque chose qui ne te plaise pas ? Je m'étonne que tu n'aies pas encore repro-
ché au Seigneur d'avoir placé le soleil si loin de la terre, alors qu'il pourrait sé-
cher tes pots sans que tu aies un sou à dépenser pour les faire cuire !
3. Regarde comme il ferait bon pouvoir voler comme les oiseaux ! Oui, l'envie
m'en a bien souvent chatouillé les épaules, comme si j'allais partir à la suite d'une
troupe de grues que je voyais planer joyeusement dans les airs ; mais j'avais beau
bondir et sauter, mon pesant corps ne se soulevait pas d'une aune au-dessus du
sol !
4. Mais je retrouve rapidement mon aise quand je me dis que si Dieu avait voulu
que l'homme puisse voler comme un oiseau, Il lui aurait donné des ailes. Mais
Dieu, voyant qu'une telle faculté serait plus nuisible que profitable, a préféré lui
donner une paire de bons pieds bien solides capables de le transporter d'un lieu à
un autre. En plus de ces deux pieds, Il lui a donné une paire de mains très utiles
et un entendement avec lequel il peut atteindre jusqu'aux étoiles et obtenir mille
commodités qu'une paire d'ailes d'oiseau serait incapable de lui offrir, car il est à
se demander si les oiseaux savent estimer leur ailes comme l'homme sait
apprécier ses pieds, ses mains et son entendement !
5. Regarde, l'homme évolue bien mal dans l'eau, il n'a ni nageoires ni palmure
entre les orteils, mais l'entendement que Dieu lui a donné lui permet de cons-
truire des bateaux pour traverser les mers, alors que le poisson, lui, ne peut
jamais quitter les eaux où il demeure. Nous pouvons avoir toute certitude que
notre postérité fera encore de grands progrès en architecture navale, et qui sait si
les hommes ne parviendront pas un jour à se construire des ailes artificielles pour
se soulever dans les airs comme les anciens Indiens ! »
6. Judas l'interrompt avec colère : « T'ai-je demandé d'être mon censeur, que tu
me fasses des sermons à tout bout de champ ? Garde ta sagesse pour toi et tes
enfants et laisse-moi en paix, sinon tu m'obligeras à te clore violemment le bec,
et quand je le veux, je m'y connais ! Je ne t'ai jamais dit un mot de travers et je ne
sais ce que tu as à toujours me lancer des pointes. Balaie donc devant ta porte, je
m'occupe de la mienne. Si quelque chose ne me va pas, cela me regarde ; ne
t'occupe plus de moi désormais, as-tu compris ?
7. Souviens-toi, à Kis, comme le Seigneur a clos le débat qui nous opposait toi et
moi. Que cela nous suffise, nous n'avons plus rien à faire ensemble. Si j'ai une
question à te poser, tu n'as qu'à me répondre gentiment, en admettant que tu en
sois capable. Mais tu peux attendre longtemps avant que je te fasse cet honneur !
»
8. Thomas dit : « Mais dis-moi, frère Judas, que t'ai-je dit de blessant et de
méchant, pour que tu sois pareillement monté contre moi ? N'est-il donc pas vrai
que trop souvent, à ce que je sais, tu t'en prends à Dieu parce qu'il a placé le
soleil si loin de la terre et qu'il ne t'a pas fait d'ailes pour voler comme tous les
oiseaux du ciel ? »
9. Comme Judas Iscariote ne lui répond pas, Thomas ajoute après quelques
instants : « Si tu veux me haïr, hais moi sans raison. Sous les yeux du Seigneur,
un comportement aussi peu fraternel n'est vraiment pas louable. Une humeur
comme la tienne ne sied pas à ceux qui sont du nombre des disciples du
Seigneur, et tu ferais mille fois mieux de retourner à ta poterie au lieu
d'importuner inutilement la compagnie de Dieu que tu profanes avec ton humeur
si hostile à l'ordre divin. As-tu déjà oublié le sermon sur la montagne que le
Seigneur a donné à Sichar en Samarie, où Il nous incite à aimer nos ennemis,
bénir ceux qui nous maudissent et à rendre le bien pour le mal ?
10. Si tu ne veux pas suivre la parole de Dieu et si tu ne veux pas t'exercer à
chaque occasion au renoncement à soi-même, demande-toi, au nom même de
Dieu, dans quel but tu infliges ta présence à notre compagnie.
11. Tu ne parles jamais à personne, et si quelqu'un te demande quelque chose, tu
ne réponds pas, ou tu réponds avec autant de rudesse et de grossièreté que
possible, si bien que personne ne se risque à te poser une seconde question. Est-
ce là le comportement d'un disciple du Seigneur ? Fi, honte à toi, deviens donc
un autre homme, sinon prends tes cliques et tes claques et va-t'en.
12. Vraiment, j'ai plus de remords de t'avoir amené à cette compagnie que si
j'avais commis un crime ! Je m'en vais supplier le Seigneur que Sa toute-puis-
sance t'éloigne de nous si tu ne changes pas d'humeur. »
13. Judas, remâchant visiblement sa colère, mais affectant de sourire, finit par
dire : « Ni toi ni le Seigneur ne peuvent me donner l'ordre de partir ou de rester !
Comme chacun de vous tous, je suis un être libre et je peux faire ce que je veux.
Vois-tu, si je savais ne pas être une telle épine dans ton œil, j'aurais déjà quitté
depuis longtemps votre compagnie pour m'en choisir une autre, mais je reste
pour t'agacer quand le cœur m'en dit et pour servir de pierre d'achoppement à ta
patience, à ta longanimité, à ton amour envers tes ennemis, pour te mettre à
l'épreuve. Je veux ainsi t'apprendre à exercer toi-même le sermon sur la
montagne de Jésus. M'as-tu compris, toi le sage Thomas ! »
14. Thomas dit en se tournant vers Moi : « Seigneur, moi-même et nous tous,
nous te supplions d'éloigner cette brebis galeuse. À ses côtés, aucune vie
fraternelle n'est possible et nous ne pouvons mettre en pratique Ton saint ensei-
gnement, car il est et demeure un fauteur de trouble et un traître. Pourquoi reste-
t-il au milieu de nous si, au lieu de mettre en pratique Ton enseignement sacré, il
nous nargue continuellement alors que nous nous donnons la peine de vivre et
d'agir selon Ta parole ? »
Chapitre 75
Le Seigneur avertit Judas
Chapitre 76
De l'humilité et du renoncement à soi-même
Chapitre 77
La mesure des trois sortes d'amour
1. Je dis : « Très bien, Je vais te donner une mesure par laquelle tu pourras juger,
toi et tout un chacun, quels doivent être l'amour de soi, l'amour de Dieu et
l'amour du prochain.
2. Prends le chiffre 666 qui, selon ses bonnes ou ses mauvaises proportions,
signifie l'homme parfait ou le parfait diable.
3. Partage l'amour en l'homme en 666 parts. Donnes-en à Dieu 600, 60 au pro-
chain et 6 à toi-même. Mais si tu veux être un parfait diable, donnes-en 6 à Dieu,
60 au prochain et 600 à toi-même.
4. Vois-tu, les loyaux serviteurs, valets et servantes cultivent les champs de leur
seigneur. Selon toi, ils devraient aussi disposer de la récolte puisqu'elle est le
fruit de leur ardeur et de leur zèle ; cependant ils l'engrangent dans les greniers de
leur seigneur et ils éprouvent une grande joie de pouvoir dire à leur seigneur : «
"Maître, toutes tes granges et tous tes greniers sont pleins et il reste encore la
moitié de la récolte sur les champs, que devons-nous faire ?" Leur joie sera plus
grande encore si le seigneur leur dit : "Je loue votre ardeur et votre zèle si
désintéressés ; allez me chercher des maçons et des charpentiers pour qu'ils me
construisent rapidement des greniers où je puisse mettre à l'abri cette bénédiction
des champs en prévision des années peut-être moins bénies que celle-ci qui fut si
abondante". Vois-tu, rien n'appartient à ces gens de service, ils ne possèdent ni
grange, ni grenier, ni remise, et cependant ils travaillent pour un maigre salaire
comme si c'était pour remplir leur propre grenier. Mais ils savent bien qu'ils n'ont
pas à craindre la misère quand tous les greniers du maître sont pleins.
5. Et vois-tu, l'action de ces serviteurs loyaux donne toute la proportion de ce qui
va à l'homme, au prochain et à Dieu. Le véritable serviteur met de côté 6 parts
pour lui, 60 parts pour plaire à ses compagnons de service et 600 parts à son
maître, mais, sans qu'il le sache les 666 parts sont pour lui, car ses compagnons
qui auront remarqué son abnégation l'estimeront infiniment et le maître finira par
le placer au-dessus de tous les autres. Mais la paresse du serviteur qui ne songe
qu'à remplir son propre sac, qui vient toujours le dernier au travail et ne met la
main qu'aux plus petites besognes le fera mal considéré de ses compagnons et ne
passera pas inaperçue aux yeux de son maître verra. Celui-ci, voyant bien qu'il ne
pense qu'à lui-même, ne le mettra jamais au-dessus de ses compagnons ; au
contraire, il diminuera son salaire et le placera tout au bout de la table, et si ce
serviteur paresseux ne s'améliore pas, il sera chassé avec un mauvais certificat et
se retrouvera sans travail ; mais s'il lui reste un seul ami envers lequel il ne se
sera pas montré égoïste, ce dernier le prendra dans sa maison, ce dont le maître
ne le blâmera pas. Comprends-tu ?
6. Tout homme a et doit avoir l'amour de soi à un certain degré, sinon il ne
pourrait pas vivre. Mais, comme je l'ai montré, à un moindre degré ; et un degré
de trop rompt déjà le rapport, à un cheveu près, le plateau de la balance de l'ordre
divin penche de l'autre côté. Maintenant, tu connais les limites, et nous verrons
bien si tu les respectes. »
7. Judas dit : « Il faut une sagesse beaucoup plus profonde pour pouvoir juger si
l'on respecte la mesure exacte d'amour de soi ! Comment le myope peut-il en
juger ? »
8. Je dis : « Il fait ce qu'il peut avec sa bonne volonté, et Dieu se charge du reste !
Mais il n'est pas à craindre que l'homme en fasse moins que six parts pour lui-
même, surtout quand il s'agit de gens de la sorte ! ».
9. À ces mots, Judas se tait et, quittant la table tout pensif, va se préparer une
couche pour la nuit déjà tombée depuis longtemps.
10. Le jeune Josoé s'avance alors et dit : « Que la bêtise de cet homme me fâche !
C'est un disciple aussi bête qu'une chouette en plein jour. J'ai compris tout ce que
Tu lui as dit, Seigneur, mais il n'a rien compris avec toutes ses questions et toutes
ses objections, et, à la fin il est reparti aussi bête que si Tu ne lui avais pas dit un
seul mot ! Qu'un enfant pose ces questions, c'est excusable, mais qu'un homme
de son âge, qui de plus se veut plus sage que ses voisins pose de telles questions,
et cela visiblement dans une mauvaise intention, il y a de quoi se fâcher ! Je
mourrai trois fois sur cette terre si cet homme ne s'améliore pas ! C'est
visiblement un avare qui calcule combien d'or et d'argent il pourrait accumuler en
peu de temps s'il avait les mêmes pouvoirs que Toi ! Et moi, aussi vrai que je
m'appelle Josoé, je donnerais tout ce que j'ai et souffrirais tout ce qu'un homme
peut souffrir pour que cet homme puisse s'améliorer. »
11. Je dis : « Mon cher Josoé, laisse cela, nous avons besoin de tous les bras pour
construire un nouveau ciel et une nouvelle terre, même Judas peut y être utile.
Mais dis-Moi maintenant ce que tu vas dire à tes parents terrestres quand tu les
retrouveras. »
Chapitre 78
Ruse de Josoé
1. Josoé dit en souriant gentiment : « Seigneur, je pense que cela se passera très
simplement. Sous la conduite de mon oncle Jaïrus, j'arriverai à la maison de mes
parents qui me pleurent toujours. Ils ouvriront de grands yeux en voyant un
garçon qui ressemble à ce point à leur Josoé. Si mon oncle leur dit que je suis un
enfant trouvé et que je porte le nom de leur défunt, mes parents m'accepteront
aussitôt comme leur enfant et m'aimeront autant que leur Josoé, et peu à peu, par
toutes sortes de détours, ils seront amenés à découvrir la vérité et comprendront
alors que je suis réellement leur fils Josoé ; ils y seront amenés au moment que
Tu jugeras bon, Seigneur ! Est-ce bien ainsi ? »
2. Je dis : « Ce n'est pas mal pensé, Mon cher Josoé, mais il n'y a qu'un seul
obstacle à cela, c'est qu'il s'agit là d'un mensonge, et tout mensonge vient du mal
et engendre le mal. Tu n'es évidemment pas un enfant trouvé ; ainsi, comment
justifieras-tu devant tes parents et devant Dieu le fait d'être un enfant trouvé ! »
3. Le garçon répondit : « Seigneur, si Tu souris ainsi, c'est sans doute un bon
signe et je suis déjà justifié devant Toi, comme Jacob qui avait enveloppé ses
mains de peaux de mouton pour tromper son père aveugle. Seigneur, c'était un
mensonge pire que le mien et cependant Jacob a reçu de Dieu la bénédiction du
premier-né. Si Dieu autrefois a pu fermer les yeux sur une tromperie qui était un
véritable mensonge, il ne s'opposera pas à Josoé enfant trouvé, quand il n'y a
jamais eu de plus véritable enfant trouvé sur cette terre ! Je veux dire, Seigneur
mon Dieu, qu'il ne pourrait pas être moins perdu pour cette terre qu'un mort, et
donc qu'il ne pouvait pas être davantage trouvé au sens propre. Tu comprends ce
que je veux dire, Seigneur ! »
4. Je dis : « Tu as bien réussi ! Je savais que tu trouverais une bonne raison mais
Je voudrais aussi savoir par quels détours tu feras finalement comprendre à tes
parents que tu es réellement leur fils Josoé »
5. Josoé dit : « Oh ! Seigneur, c'est chose bien facile ! Quand je serai dans la
maison, je m'y comporterai comme je me comportais auparavant. Je poserai les
mêmes questions que celles que je posais précédemment, je reprendrai les
mêmes jeux, et mes parents seront bien obligés de se dire : "C'est notre Josoé,
peut-être sorti de la tombe grâce aux remèdes secrets de Borus, et complètement
guéri depuis !" Je les laisserai le croire quelque temps et, le moment venu, ils
apprendront la vérité et tout se passera bien. »
6. Je dis : « Mais c'est encore un mensonge ! Regarde, laisser quelqu'un dans
l'erreur équivaut à lui mentir, comment te blanchiras-tu ? »
7. Josoé dit : « Seigneur, tant que Tu souris en m'interrogeant, c'est bon signe ! Je
pense qu'il y a diverses sortes de mensonges. Mentir dans la mauvaise intention
de cacher la vérité est d'une malignité satanique ; mais mentir apparemment pour
voiler à quelqu'un la vérité qu'il ne supporterait pas, et qui lui ferait plus de tort
que de bien, n'est en soi pas un mal, puisque l'intention est bonne et procède d'un
noble cœur.
8. En ce sens-là chaque parabole serait un mensonge puisqu'elle cache la vérité,
et pourtant les prophètes les plus sages ont parlé par paraboles. Borus, le plus
connu des médecins, Te représente comme les trois anges venus trouver
Abraham représentaient Jahvé, et ma ruse équivaut à celle de Joseph en Egypte,
dont le comportement envers ses frères venus chercher des céréales m'a toujours
paru un mensonge alors qu'il n'y avait là qu'une ruse du ciel, tandis que le
véritable mensonge appartient au règne satanique du mal. »
9. Je dis : « Viens donc ici, Mon cher Josoé, et laisse-Moi t'embrasser, car bien
qu'encore jeune, tu es un tendre garçon plus sage qu'un vieux connaisseur de
l'Écriture.
10. À ces mots Josoé fait aussitôt le tour de la table et vient Me serrer dans ses
bras, il Me donne un petit baiser en disant avec un enjouement réfléchi : «
Regardez, vous tous, vieux esprits célestes, voilez-vous la face, forces et
puissances qui n'avez jamais vu ce qui se passe ici, le Père céleste et éternel,
parfaitement présent devant nous en Son fils Jésus Se laisse charnellement
embrasser par l'une de ses créatures !
11. Celui qui était éternel revêt maintenant l'existence temporelle qu'il cajole et
rend éternelle et identique à Lui-même. Ô ! Toi, unique et véritable Père de tous
les hommes, quelle douceur a Ton amour ! »
Chapitre 79
Deux anges offrent leurs services à Josoé
1. Deux anges se présentent alors à Josoé et lui disent : « Oui, très gentil garçon,
tu as dit vrai, nos yeux n'avaient encore jamais vu cela, alors même que nous
fixions déjà l'espace infini de Dieu bien avant qu'aucun soleil n'y annonce de ses
rayons sa présence. Reste donc toujours animé de cet esprit divin qui t'habite, et
nous serons éternellement tes frères. »
2. Josoé dit : « Qui êtes-vous donc pour dire des paroles aussi sages, n'êtes-vous
pas des êtres humains comme moi ? »
3. Les deux anges dirent : « Très cher frère, en esprit nous sommes parfaitement
semblables à ce que tu es et ce que tu deviendras de plus en plus. Mais nous
n'avons jamais eu ni chair ni sang. Nous sommes des anges du Seigneur et nous
sommes ici uniquement pour Le servir. Mais s'il veut nous donner la grâce d'aller
et venir comme Lui avec un corps de chair, nous serons alors tout à fait
semblables à toi ! Pour l'instant tu as sur nous cet avantage ; mais l'éternité est
longue et infinie, et toutes les différences finiront par s'estomper. Nous t'offrons
cependant nos services, ordonne ce que tu voudras et nous te servirons. »
4. Josoé dit : « Qu'aurais-je à faire de vos services ? Nous avons tous un Dieu, un
Seigneur, un Père de toute éternité, Lui seul peut nous rendre justice, à vous
comme à moi ! Nous qui sommes entièrement créés par Lui, nous n'avons pas
d'ordres à nous donner entre nous, mais nous devons nous servir continuellement
les uns les autres, que nous soyons anges ou hommes et quel que soit le service !
5. Et je ne tiens pas non plus pour parfait celui qui, même avec obligeance, vient
en aide à un frère dans le besoin qui l'en supplie. Car on ne vient ainsi en aide
qu'à ceux qui ont le courage, la force et l'occasion d'exprimer leur supplication.
Mais qui vient en aide à celui qui n'a ni le courage, ni l'occasion de supplier celui
qui a le moyen de l'aider ? S'il ne me paraît donc pas bon d'avoir à mendier l'aide
des autres, combien pire encore sera une aide qu'on aura ordonnée !
6. Ainsi je vous le dis en présence de Celui qui est un Seigneur de la vie et de la
mort, si vous voyez que j'ai besoin d'aide, aidez-moi sans que j'aie à vous le
demander et sans que je vous l'ordonne comme un maître, et je ferai de même si
je puis vous venir en aide ; sinon je n'ai besoin d'aucune aide ni d'aucun service,
et encore moins d'ordre à vous donner, ce qui serait pire !
7. Mais celui qui en a le moyen doit rechercher assidûment parmi ses frères dans
le besoin celui à qui il peut venir en aide d'une manière ou d'une autre, et lui
apporter cette aide quand il l'aura trouvé. Ainsi, à mon avis, sera-t-il sans nul
doute agréable au Seigneur et au Père qui agit toujours de cette manière, et il sera
en harmonie avec la sainte dimension de Dieu selon laquelle il a été créé ; mais
celui qui n'aide son prochain que lorsque ce dernier le lui réclame en soupirant
est bien loin de cette dimension parfaite ; pire encore est de n'aider que lorsqu'on
vous en donne l'ordre.
8. Voyez-vous, chers amis, si votre sagesse n'était pas plus grande que celle des
hommes qui devraient vous donner des ordres pour obtenir votre aide, moi qui ne
suis qu'un garçon, je ne voudrais pas avoir affaire à vous. Mais si votre intention
n'était que m'éprouver, je crois n'avoir pas trop mal passé l'examen ! Si les
paroles sorties de ma bouche vous ont quelque peu heurtés, ne m'en veuillez pas.
Ce n'est pas pour vous faire la leçon que j'ai pris la parole, mais à cause de la
vérité que vous n'avez pas respectée en me faisant votre proposition. Mais les
parfaits esprits célestes que vous êtes auraient dû deviner le fond de ma pensée et
vous auriez sans doute donné une tout autre tournure à votre proposition, que je
ne loue pas, si vous aviez su que je répondrais ainsi. »
9. Les deux jouvenceaux, quelque peu déconfits, battent en retraite en disant : «
En vérité, aucun ange ne se serait attendu à une si haute et si pure sagesse dans
ce garçon ! »
10. Je dis : « Oui, Mes chers, rien n'échappe au regard perçant de Dieu qui
découvre aussi des taches chez les anges les plus parfaits. Car le cœur de
l'homme lorsqu'il est parfaitement pur est aussi pénétrant que le regard de Dieu.
J'ai permis cela non pas à cause de vous, mais pour que les hôtes ici présents
apprennent de la bouche si pure de ce garçon ressuscité combien ils sont loin de
ressembler à Dieu. Dès sa naissance, du reste, ce garçon a montré la pénétration
d'un esprit exceptionnel, et que personne ne croie que Je lui ai mis ces paroles sur
ses lèvres, elles sont entièrement de son cru, et le temps viendra où il Me sera un
précieux défenseur. »
Chapitre 80
Cyrénius adopte Josoé
1. Cyrénius dit : « Seigneur, j'aimerais prendre chez moi ce garçon, et s'il veut
bien venir, je désire non seulement le traiter comme mes enfants, mais aussi le
placer au-dessus d'eux. Ce serait pour moi véritablement un grand bonheur que
ce cher garçon, qui est plus ange qu'être humain, soit l'un des miens. De toute
manière, sa position chez ses anciens parents sera bien difficile, et c'est à se
demander s'ils l'accepteront ! Je sais bien qu'avec le temps ses parents, qui sont
très respectueux du temple à ma connaissance, finiront par reconnaître leur
Josoé. Mais bien qu'ils soient libres de le reprendre, je demanderai qu'il puisse
rester chez moi, toujours attaché à moi, où que je sois en Asie, en Afrique ou en
Europe, car je tiens par-dessus tout à sa sagesse. »
2. Je dis : « Décide cela avec Jaïrus et avec le garçon. Tout Me conviendra car
Mon cher Josoé est un garçon qui Me restera fidèle où qu'il soit ! »
3. Le garçon dit : « Père, Tu n'auras jamais à en douter, à moins que Tu n'inspires
d'autres sentiments à mon cœur, mais Tu ne le feras jamais et je Te resterai donc
éternellement fidèle. Mais si j'avais à choisir où demeurer sur terre, c'est auprès
de Toi que je resterais le plus volontiers, car y a-t-il rien de plus élevé, de
meilleur et de plus céleste dans tout l'infini des anciens et des nouveaux cieux
que d'être près de Toi, la source de l'amour, de la sagesse et de la vie ? C'est le
plus profond désir de mon cœur, mais je sais aussi obéir et j'irai toujours là où Ta
sainte volonté le décidera. J'irais volontiers chez Cyrénius, que j'estime et
considère infiniment, ou je retournerai chez mes parents terrestres qui me sont
également très chers et très précieux, mais il ne me sera pas facile de faire quoi
que ce soit sans Ta volonté. »
4. Je dis : « Que tu veuilles rester près de Moi et que par la suite tu ne veuilles
plus Me quitter, tout ton être semble le prouver, mais pour l'instant tu as encore
besoin d'un peu de calme à l'écart de Moi, pour que s'établisse un lien plus solide
entre ton âme et ton nouveau corps. Dans un an environ, lorsque ce sera fait, tu
pourras revenir près de Moi et tu pourras rester dans Mon entourage sans que
J'aie besoin, par la puissance de Ma volonté, comme en ce moment, de retenir ton
âme dans ton corps. C'est la raison pour laquelle je te laisse partir quelque temps,
pour ton bien. Mais demande-toi si tu préfères partir avec le gouverneur romain
Cyrénius ou si tu préfères retourner chez tes parents. Pour Moi, c'est tout un ;
cependant, il est vrai que chez Cyrénius tu gagneras plus qu'à être un étranger
dans la propre maison de tes parents, qui ne sauront que faire de toi ! »
5. Josoé dit : « Très bien, je sais maintenant à quoi m'en tenir, je m'en vais avec
le gouverneur Cyrénius. Mais j'aimerais pourtant voir mes parents et savoir quel
effet leur fera ma vue. »
6. Cyrénius dit : « Il sera très facile de le faire demain en allant à Tyr et à Sidon.
Nous passerons par Capharnaüm chez mon frère que tu vois ici à côté de moi et
dont le nom est Cornélius. Nous déjeunerons chez lui et tes parents seront invités
avec d'autres sommités de la ville. Tu auras tout le loisir de les voir, d'entendre et
d'observer tout ce qu'ils diront à ton sujet, mais il faudra veiller à ne pas te trahir
par une parole en l'air. Ils ne pourront pas te reconnaître dans les vêtements que
tu porteras, car tu seras vêtu comme un Romain d'une de mes toges, mais je te le
répète, veille à ce que ta bouche ne te trahisse pas. »
7. Le garçon dit : « Sois sans crainte, je maîtrise assez bien la langue romaine et
la langue grecque et je parlerai dans ces deux langues si on m'interroge. Mes
parents, évidemment, maîtrisent également ces deux langues, mais cela ne fait
rien, avec l'aide de Seigneur qui m'a réveillé, je saurai faire tout ce qu'il faut. »
8. Cyrénius serre l'enfant sur son cœur, l'embrasse et lui dit : « Vrai, je t'aime
infiniment et je te considère désormais comme un fils que je préfère encore à
tous mes chers enfants et à tous les autres enfants dont je suis devenu
volontairement le père, et à qui tu seras très utile avec l'esprit que tu as. »
9. Le garçon dit : « Je m'en réjouis aussi, ma plus grande joie a toujours été de
pouvoir me rendre utile. »
10. Je dis : « Bien, Mon Josoé ! Quand Je constaterai que tu restes fidèle à ta
décision, Je t'enverrai du ciel une force grâce à laquelle tu pourras faire plus de
bien encore, et tu ne sauras de quelle force il s'agit que lorsque tu la recevras.
Maintenant allons nous reposer, car il est bientôt minuit. Demain est un nouveau
jour, et Je ne veux pas dévoiler à l'avance ce que sera demain : nous accepterons
tous ce qui sera. Le bien sera notre partage et nous saurons rejeter le mal. Allons
maintenant nous reposer. » Et tous allèrent se reposer.
Chapitre 81
Les agissement du nouveau chef de la synagogue
1. Au matin suivant, la joie de tous les hôtes était encore très vive, et tous ceux
qui s'étaient couchés avant nous s'agitaient déjà autour de la maison lorsque Je
sortis avec les disciples, les Romains et Kisjonah.
2. Alors que nous nous trouvions ainsi dehors depuis quelques instants, Bab et
toute sa famille arriva de la ville où il était retourné tard dans la nuit pour ne pas
nous déranger. Dès son arrivée, il nous raconta en hâte qu'une grande agitation
régnait en ville et notamment à la synagogue, au point qu'il n'avait osé demander
ce qui se passait. Ce devait être quelque chose de très important, car il n'avait
jamais vu une telle agitation chez les serviteurs et les maîtres de la synagogue.
3. Je dis : « C'est la suite du grand coup de balai survenu après la nouvelle de la
démission de Jaïrus à Jérusalem, et nous aurons probablement de la visite
aujourd'hui, ici à Nazareth. Mais qu'importé, cela ne nous empêchera pas de
passer une matinée tranquille. »
4. Là-dessus, Je me tourne vers les deux jouvenceaux présents et leur dis : «
Hâtez-vous d'aller à la synagogue et ramenez-Moi Roban l'ancien, J'ai à lui
parler. Mais faites calmement votre entrée pour ne pas attirer l'attention. ». Les
deux anges font aussitôt ce que Je leur ordonne et nous passons à table où nous
prenons gaiement notre petit déjeuner.
5. En nous levant de table, nous voyons arriver Roban et les deux anges. Roban
se prosterne devant Moi et devant les autorités romaines encore présentes et dit
d'un air accablé : « Ah ! Seigneur, ici c'est le paradis, alors que là-bas dans la
synagogue, c'est l'enfer. Seigneur, je sais bien que je n'ai pas besoin de Te le dire,
à Toi à qui rien n'échappe en ce monde, mais ce que fait notre nouveau chef de la
synagogue est à désespérer.
6. Si cet homme n'est pas le frère charnel de Satan, je ne réponds plus de mon
humanité. Non seulement il nous prend tout notre argent, mais il nous arrache
tous nos biens, de sorte que nous ne savons pas de quoi vivront désormais nos
familles. Il prend toute la farine, tout le grain, toutes les céréales, tous les
poissons fumés, il considère que nos bœufs, nos vaches, nos veaux, nos moutons
et nos ânes sont la propriété du Temple et il va nous les enlever. Il prétend que
nous sommes tous rebelles au Temple et il veut nous infliger toutes sortes de
condamnations, car Jérusalem serait au courant de tout ce qui se passe ici et il
serait expressément chargé de T'arrêter comme agitateur et provocateur, pour te
livrer au tribunal. Que dis-Tu de toute cette bestialité ? »
7. Hérode est au courant de toutes Tes allées et venues, il aurait déjà pris depuis
longtemps des dispositions contre Toi s'il n'était retenu par la fausse idée que lui
a mise en tête son conseiller, un ancien disciple secret de Jean-Baptiste, que tu es
Toi-même Jean-Baptiste ressuscité ; car, sur la demande de sa courtisane
Hérodias, il l'a fait décapiter dans sa prison et sa tête lui a été présentée sur un
plat pour exaucer son vœu.
8. Tu devines, Ô Seigneur, ce que cela signifie. Je Te le dis, si Tu ne mets pas en
œuvre tout ce qui est en Ton pouvoir avec tous ceux qui sont ici avec Toi, Tu es
perdu ! Je ne puis dire mieux : c'est proprement l'enfer qui se déchaîne, et la mise
à prix de Ta tête n'est que de dix mille livres d'or ! »
9. J'appelle alors Matthieu et lui dis : « Ecris ce que tu vas entendre. »
10. Matthieu apporte aussitôt ses tablettes et se met à écrire.
11. Je dis encore à Roban : « Ami, tu n'as fait qu'une brève allusion à la mort de
Jean-Baptiste ; aies la bonté de nous raconter ce que le nouveau chef de la
synagogue t'a appris, Je tiens à ce que cela soit mis par écrit. »
12. Roban dit : « Je vais le faire avec le plus grand empressement du monde, sans
rien oublier, je l'espère. Mais nous risquons de voir survenir ce grand frère de
Satan, qui fera ici un affreux tintamarre ! »
13. Je dis : « Ne crains rien, nous avons encore assez de pouvoir ici pour lui
trouver un maître. »
14. Roban dit : « S'il en est ainsi, je vais alors te répéter mot pour mot ce que le
nouveau chef nous a appris. Voici ses paroles : »
Chapitre 82
Mort de Jean-Baptiste
Matthieu 14, 1-12
Chapitre 83
Le nouveau chef de la synagogue à Nazareth
1. Sur ce, Roban s'en retourne chez lui en hâte, et à peine y est-il depuis quelques
instants qu'arrive un messager lui enjoignant de se rendre à la synagogue où le
nouveau chef veut s'entretenir avec lui à Mon sujet, car il a appris que Roban est
allé à Sichar à cause de Moi. Roban se rend en hâte à la synagogue, où le chef
s'adresse à lui très durement.
2. Mais Roban dit : « Je suis un ancien de Nazareth et je suis septuagénaire,
bientôt octogénaire, et tu as à peine plus de trente ans ! Parce qu'avec ton argent
tu as pu te faire nommer chef, tu n'es pas pour autant Aaron, ni Moïse et tu ne
vas pas m'apprendre ce que je savais déjà avant que tu sois né ! Nous avons tous
rempli notre service envers le Temple à la satisfaction de tes respectables
prédécesseurs. Nous avons observé tout ce qui se passait de l'œil juste de Juifs
soumis à Dieu et nous avons mis des barrages là où ils étaient nécessaires. Si tu
crois mieux faire et si tu crois pouvoir à coups de bâton faire de tous les Grecs et
de tous les Romains des Juifs, vas-y, mais je t'assure qu'à part nous il n'y aura
plus un seul Juif dans toute la Galilée !
3. Vois-tu, l'important bourg de Jessaïra est devenu entièrement grec pour cette
raison, et tous les Pharisiens, les lévites et les prêtres ont dû quitter les lieux.
Vas-y, pose tes brutales questions, et ils te répondront de telle sorte que tu
n'auras pas assez de jambes pour les prendre à ton cou et t'enfuir assez vite.
Pourquoi les habitants de Jessaïra ont-ils apostasié ? C'est à la suite de la dureté
et de la rapacité de la prêtrise, et maintenant ils confessent Pythagore au lieu de
Moïse !
4. Il ne teint qu'à un cheveu qu'il en soit bientôt de même ici, et nous comme toi,
nous devrons tous prendre le large. Ne sois donc pas aveugle et reconnais la
vérité.
5. Les plus hautes autorités nationales sont les Romains et les Grecs, ils voient
d'un très mauvais œil les Juifs passer à leur doctrine. Comment veux-tu empê-
cher cela alors que, dans toute la Galilée, il est par trop connu que le Temple
n'est plus qu'une noix vide. Qui d'autre en est responsable, sinon les rapaces
templiers eux-mêmes, qui ouvrent le Saint des Saints aux étrangers contre de
l'argent et qui, malgré leur serment, vont ensuite en riant ébruiter la chose dans le
peuple. Va interroger les habitants de cette ville, ils te le diront comme à nous ! »
6. Le chef dit : « Que dis-tu ? Le peuple saurait tout cela ? »
7. Roban dit : « Oui, il sait tout cela ! Va donc lui reprendre sa science ! »
8. Le chef se met à arpenter la synagogue avec gravité et finit par dire : « Ce
prophète nazaréen doit bien y être pour quelque chose ! Il faut donc lui réserver
le sort que le roi Hérode a réservé à Jean-Baptiste ! »
9. Roban dit : « Oui, oui, mais essaie seulement de te saisir de ce guérisseur, et le
peuple des Romains, des Grecs et des Juifs qui le vénère comme un Dieu aura
vite fait de t'envoyer promener ! Moi qui suis un ancien de Nazareth, je te le dis
et te donne ce conseil : "Suis les traces de ton prédécesseur Jaïrus et tout ira bien
; mais si tu mets tout sens dessus dessous, tu te retrouveras très bientôt à
Jérusalem ! Jaïrus lui-même est dans la main des Grecs. Borus est son gendre,
Borus, le second guérisseur, qui possède des trésors de toute sorte et à qui tu
aurais bien vite affaire aussi. Bref, essaie donc, et tu me diras après si je t'ai
donné un bon conseil ! »
10. Le chef tape du pied avec colère et dit : « Vous êtes déjà tous avec le diable
et vous semblez tenir plus à nos adversaires qu'à nous. Vous êtes des adeptes de
cet homme qui trompe la foule. Je vous chasserai donc tous de la synagogue, je
vous remplacerai par des gens de Jérusalem et vous remettrai à la Justice ! Une
fois encore, je te le demande, qu'as-tu fait à Sichar chez les Samaritains ? »
11. Roban dit : « J'ai soixante-dix-neuf ans et je sais ce que je fais et ce que j'ai à
faire ! Tes menaces n'effraient ni moi ni personne, et si tu veux nous remettre à la
Justice, tu peux essayer, nous verrons bien de qui le tribunal s'emparera en
premier, nous... ou toi !
12. Par bonheur, nous sommes dans les bonnes grâces du gouverneur, qui est un
frère de l'empereur Auguste et qui a une très haute influence à Rome, et comme
tu peux le penser, il ne nous jettera pas facilement en prison ! Le Temple, à cause
de son ambition hait Jésus, alors que c'est à lui qu'il est redevable de ne pas déjà
avoir été effacé de la surface de la terre par les Romains !
13. Tu as certainement entendu parler du célèbre détournement de fonds exécuté
il y a cinq semaines par l'agent du Temple déguisé en gouverneur. Il a été arrêté
avec son convoi crapuleux, ainsi que bien d'autres choses volées avec une
violence honteuse, à Kis, grâce à la clairvoyance du richissime Kisjonah. Vois-
tu, ce Jésus que le Temple hait sans raison et que les Romains vénèrent plus que
leur Jupiter était là pour détourner, grâce à Sa parole et à ses miracles, la tempête
qui allait s'abattre sur Jérusalem ! Mais la tempête n'est pas définitivement
écartée, un seul entêtement de votre part et la tempête éclatera.
14. Il suffit d'un signe de Borus, de Jaïrus ou de moi et tu pourras aller voir, dans
trois fois sept jours, ce que seront devenus ta Jérusalem et ton Temple ! Tu auras
du mal à en retrouver la place ! M'as-tu compris ? »
15. Le nouveau chef de la synagogue tape une fois encore du pied avec colère et
dit : « Qui peut affirmer cela sous la foi du serment ? Ceux qui en ont le droit
siègent au Temple ! »
16. Roban dit : « Selon la loi romaine, le coupable ne prête jamais serment, mais
seulement les témoins de la partie adverse, et ils peuvent en faire venir au besoin
dix mille autres, ce qui devrait suffire, je pense, contre ces dix infâmes criminels
!»
17. Le chef de la synagogue dit : « Avec ces Romains, il ne faut plus se fier alors
à Jahvé, à Moïse et aux prophètes, et leur loi n'est donc plus à observer par
personne ? »
18. Roban dit : « Ne me parle plus de Moïse, de Jahvé et de tous les prophètes, il
n'y en a plus la moindre trace chez toi ni chez les autorités du Temple. Voilà déjà
trente ans que le Temple est devenu une maison de commerce et de change et ne
donne plus le moindre signe de fidélité à Moïse. Les loups se cachent sous des
peaux de moutons, pour mieux saisir les pauvres brebis. Si tu vivais selon la loi
de Moïse, tu n'aurais jamais acheté cette charge pour tant d'or et d'argent, et je
gage sur ma vie que jamais Moïse n'a ordonné d'acheter à prix d'or la charge de
grand prêtre ! »
19. À cette réplique de Roban, le nouveau chef s'arrache presque la barbe de
colère et dit : « Tant pis ! Je vous trouverai donc à tous un maître qui vous en-
verra en enfer, car je sais certaines choses que vous ne savez pas et je connais
certaines voies que vous ne connaissez pas. »
20. Roban dit : « Bien possible, mais il est aussi très possible que nous connais-
sions tes voies beaucoup mieux que toi et il est très probable que nous ayons déjà
barré toutes les voies auxquelles tu penses pour nous prendre à revers. Comme je
te l'ai dit, une seule tentative et tu sauras ce que nous avons à te dire. »
21. Ceux qui étaient présents dirent à Roban : « Mais, frère, pourquoi mets-tu en
garde cet homme inhumain ? Il est entre nos mains et il peut appeler le ciel à son
aide si nous prenons la liberté exceptionnelle de lui faire goûter les pierres de
Nazareth ! » Et, s'adressant au chef de la synagogue, ils dirent : « Nous sommes
Pharisiens et lévites autant que toi, si ce n'est davantage, car nous descendons de
Lévi, alors que nous savons que tu t'es acheté ta généalogie, comme tout s'achète
à notre époque, même le ciel ! Tu n'es qu'un intrus dans le Saint des Saints, un
blasphémateur, et tu mériterais d'être lapidé pour ton infamie. Tu n'as plus grand-
chose à faire pour que nous nous saisissions de pierres ! »
22. Cette menace énergique calma le chef en apparence, mais son amertume ne
fit qu'augmenter. Il finit par dire : « Ne vous trompez pas sur mon compte, car je
connais aussi bien que vous les méfaits du Temple ; il ne s'agit que de savoir
comment les dévoiler et comment faire pour que le Temple retrouve son
ancienne valeur. »
Chapitre 84
Chiwar témoin de Jean-Baptiste
1. Là-dessus, l'orateur Chiwar dit : « Pourquoi être si désagréable avec des initiés
comme nous ? N'ai-je pas été serviteur du temple dès l'âge de dix ans et jusqu'à
vingt-cinq ans ! Je ne sais que trop ce qui se passe là-bas ! Si j'avais voulu être
méchant, que n'aurais-je pas déjà dévoilé ! Mais je me disais : le peuple aveugle
tient toujours au Temple comme par le passé.
2. Pourquoi ôterais-je au peuple la foi sur laquelle repose encore son espoir infini
et qui assure du moins notre bien-être terrestre, à nous autres prêtres. Et si nous
serrons par trop les rênes, elles casseront, et alors finie la chanson et nous
pourrons aller à la pêche dans des eaux sans fond !
3. Que pouvons-nous contre un ennemi qui devient plus puissant de jour en jour
? Crois-tu donc que le Temple nous protégera ? Il ne faut pas y compter ! De
nombreux Juifs vivent déjà à Rome où ils mènent grand train grâce aux trésors
illégalement amassés par le Temple ; ils ne prendront pas plus notre défense que
les templiers actuels, dont les ailes frémissent comme celles d'hirondelles prêtes
à s'envoler à la première occasion au-delà des mers pour atteindre l'Italie et ne
jamais revenir en Asie.
4. Il serait donc de bon conseil pour nous d'exercer modérément notre fonction
de prêtres et d'appliquer le in medio beau ( le juste milieu) des Romains, sans
quoi nous pourrons aller à la pêche dans peu de temps !
5. De plus, c'est précisément l'époque qu'ont choisi pour se manifester deux
hommes dont la puissance toujours insaisissable est capables de gagner la terre
entière en peu d'années. Jean-Baptiste, qui n'est déjà plus du nombre des mortels,
s'est fait connaître le premier par sa doctrine dans la moitié de la Judée et en
Galilée, où il est maintenant plus célèbre encore que de son vivant. Hérode dans
sa lubricité a eu beau priver de sa tête le corps de ce prophète notoire, il ne saura
certainement pas séparer l'esprit du prophète de l'esprit de sa sainte doctrine ! La
persécution rend les bonnes doctrines invincibles.
6. Jean a bien été écarté physiquement, mais à sa place est survenu le fameux
Jésus, à côté de qui Jean-Baptiste n'est qu'une taupinière en face du mont Ararat !
Son allure et comportement d'une douceur surhumaine et d'une incomparable
bienveillance, la profonde sagesse de chacune des phrases de son discours plein
d'onction de la vérité divine, si facile à comprendre et dont tout homme doué de
la moindre intelligence du cœur ne peut douter qu'elle vient du ciel, tous ses
actes enfin vous font dire que tout ceci n'est possible qu'à Dieu seul.
7. Qu'allons-nous faire, que pouvons-nous encore faire contre lui ? Nous
pouvons certes, face à une manifestation aussi extraordinaire, nous rendre odieux
et détestables, mais ce ne sera que pour notre plus grand malheur.
8. Il s'agit donc d'être aussi intelligent que possible et de tourner nos regards vers
l'avenir plutôt que vers le présent sans quoi nous ne subsisterons pas ! »
9. Le chef de la synagogue dit : « Tu trouves qu'on ne devrait pas arrêter ce
Jésus, mais attendre gentiment qu'il nous ait condamnés ? »
10. Chiwar dit : « Empare-toi de lui si tu le peux ! Que n'avons-nous pas tenté
contre lui, et à quoi tout cela a-t-il servi ? Je te le dis, à rien, si ce n'est à lui faire
quelques milliers de disciples qu'il nous a enlevés, et aussi à avoir la joie de nous
faire tirer les oreilles par les Romains qui le vénèrent comme un Dieu !
11. De plus, ce qui ne s'est jamais vu sur terre, il a dans sa suite deux anges dont
la tendresse et la fragilité apparentes cachent une puissance et une force que
notre petite raison ne peut concervoir ; et tu veux mettre la main dessus ! Je t'en
conjure, sois tout ce que tu voudras, sauf un insensé ! Avant même de faire un
pas contre lui, tu seras paralysé ! Mais peut-être crois-tu qu'il ne sait pas ce que
nous faisons ici ! Je te le dis, tu te trompes, tous ceux qui sont ici en sont témoins
: il y a quelques jours encore, il a su dans les moindres détails ce que nous avions
dit et décidé à son sujet à minuit et en grand secret.
12. C'est très agréable de se faire raconter une grosse tempête en mer, mais c'est
autre chose de l'avoir essuyée soi-même ! Je te le dis, reste parfaitement calme,
exerce ta charge sans faire d'esclandre et il ne t'arrivera rien. Mais si tu veux
jouer les tyrans, nous sommes là pour te dire que non seulement toi et
Capharnaüm, mais aussi tout Jérusalem serez jetés par terre. Avec notre intelli-
gence, nous pourrons tenir debout Jérusalem pendant cinquante ans encore, mais
nous pouvons aussi provoquer sa chute par notre stupidité en quelques semaines.
13. Tu es libre de choisir ce que tu veux faire ; les Romains ne sont qu'à deux pas
de nous ! Ils sont nos amis, Dieu soit loué, mais pour toi le chemin risque d'être
très difficile, et il faut toute l'intelligence humaine pour savoir faire passer une
noix creuse pour une pleine ! Le Temple depuis longtemps n'est plus qu'une noix
creuse, que veux-tu encore en tirer ? Ne serait-il pas plus avisé de regarder vers
l'avenir, où l'on peut trouver quelque chose ? Je te le dis très clairement, tous les
grands et les puissants de Rome se laissent mener par Jésus comme des agneaux
! Si tous ces gens-là sont favorables à sa doctrine, que pouvons-nous faire contre
lui ? Si tu fais mine de vouloir t'en emparer, tu sera aussitôt arrêté et personne ne
fera un pas pour te libérer. Comporte-toi intelligemment et les Romains devien-
dront tes amis, et tout ira aussi bien pour toi que pour Jaïrus. Mais fais comme tu
voudras, la suite te montrera si nous t'avons donné un bon ou un mauvais conseil
!»
14. Ces paroles de Chiwar ne manquent pas leur effet. Le chef se radoucit
comprenant que Roban et Chiwar ont parfaitement raison, et il promet de suivre
leur conseil. Ainsi fut calmée cette première tempête à la synagogue.
Chapitre 85
Le Seigneur félicite Chiwar et Roban
1. Une heure plus tard, Chiwar vint Me trouver pour Me raconter tout ce qui
s'était passé à la synagogue.
2. Je lui dis : « Ami, épargne-t'en la peine ! Tu sais bien que rien ne M'échappe.
Du reste, Je te le dis, Roban et toi avez très bien agi ; le chef aurait entrepris bien
d'autres folies, mais il est maintenant convaincu qu'il serait insensé
d'entreprendre quoi que ce soit contre les Romains et il se tiendra tranquille du
moins un certain temps ! Mais ne vous fiez pas entièrement à lui, soyez sur vos
gardes et ne le quittez pour ainsi dire pas des yeux ! Mais puisque tu as été Mon
ardent défenseur, et que tu l'es toujours, Je vais te donner le don de guérir les
malades par la prière et par l'imposition des mains, et la capacité de prévoir dans
ton cœur les plans du nouveau chef et de prendre les décisions nécessaires, qu'il
faudra aussitôt appliquer, sinon elles seront vaines. Ces mesures nécessaires te
seront montrées. Reçois donc Ma bénédiction. »
3. Chiwar se jette à genoux devant Moi et implore Ma bénédiction. Je mets Ma
main droite sur son cœur et Ma gauche sur sa tête, et la clarté se fait aussitôt en
lui. Il dit alors : « Seigneur, les ténèbres ont disparu de moi, tout est clair en moi,
il me semble que tout mon corps est devenu une matière transparente comme le
diamant à travers laquelle la lumière du jour peut passer sans entrave. Ô
Seigneur, laisse-moi à jamais cette bénédiction, je saurai toujours y prendre
garde et en comprendre la valeur avec reconnaissance. »
4. Je dis : « Mets toujours en pratique Mon enseignement et tu n'auras jamais de
raison de déplorer la perte de cette lumière.»
5. Chiwar alors se lève et constate qu'il n'y a plus personne à part Borus, Jaïrus,
Marie et les frères de Ma maison, et que même les douze disciples ne sont plus
là. Il me demande ce qui s'est passé.
6. Je dis : « Cela devait arriver ainsi. Vois-tu, l'automne arrive, puis ce sera
l'hiver. Le temps de la récolte est proche, je dois aller engager des ouvriers pour
la moisson et la vendange. Si nous moissonnons bien cette année l'hiver sera
paisible et, le printemps revenu, nous reprendrons la tâche avec de nouvelles
forces.
7. Je vais quitter ces lieux aujourd'hui, car Hérode est un rusé renard et le nou-
veau chef est à sa solde ; il ne faut pas que Ma demeure devienne le champ de
bataille de Satan. J'ai fait partir Mes disciples il y a déjà quelques heures ; ils sont
allés avec Mon frère Kisjonah et vont attendre à Kis les disciples de Jean pour
leur apprendre que le royaume des cieux est proche. Ils reviendront ici au-
jourd'hui encore avec les disciples de Jean et quitteront ces lieux dans la soirée.
Quant à savoir où nous irons, tu le sauras en toi-même, ainsi que beaucoup
d'autres choses.
8. Concerte-toi souvent avec Borus et Jaïrus ; ce sont là les deux hommes les
plus estimables de tout Nazareth. Ils ont tout Mon amour et par Moi la grâce de
Dieu la plus parfaite. Personne ne M'aime et ne Me connaît comme eux, pas
même un seul de Mes disciples.
9. Tous Mes disciples, à une certaine époque qui ne saurait tarder, en viendront
tous à M'en vouloir, tandis que ces deux hommes-là ne se laisseront
impressionner par rien. Ils Me connaissent parfaitement. Si tu te fies à eux tu
parviendras toi aussi à l'état qu'ils ont atteint. »
10. Chiwar; satisfait de cet avis, demande seulement ce que sont devenus les
deux anges, qu'on ne voit plus nulle part.
11. Je lui dis : « Lève tes yeux, tu n'en verras pas deux, mais des myriades autour
de toi. »
12. Chiwar lève les yeux et voit dans une grande lumière les deux archanges
accompagnés d'une multitude d'anges prêts à Me servir à chaque instant.
13. Chiwar baisse les yeux vers la terre et dit : « Seigneur, je suis un pécheur et
mes yeux ne peuvent supporter cette sainte vision. Mais c'est sans doute mon
ardente aspiration qui m'a rendu digne de l'apercevoir un instant ! »
14. Je dis : « Sois juste en toute chose et ta récompense sera grande dans le ciel
dont tu as vu la lisière. Retourne maintenant à la synagogue où le chef, qui va
rester quelques jours à Nazareth, ne veut pas être privé de la présence, car il tient
désormais à tes conseils. »
Chapitre 86
Le nouveau chef Korah et Chiwar à la synagogue de Nazareth
1. Tandis qu'ils sont en train de manger de bon appétit, échangeant toutes sortes
de propos spirituels, Borus entre dans la salle, salue tout le monde et présente sa
femme Sarah, demandant qu'elle soit inscrite comme sa femme légitime selon la
loi juive.
2. Chiwar va aussitôt chercher le gros livre des mariages et les inscrit tous deux
comme ayant été unis légalement devant Dieu et devant les hommes.
3. Mais le chef demande à Chiwar si cela est acceptable, car Borus est à
l'évidence un Grec.
4. Chiwar dit : « Chez nous, tout est possible, et ce serait folie de ne pas vouloir
unir un mariage que Dieu a déjà uni depuis longtemps ! »
5. Le chef dit : « D'où sais-tu cela ? »
6. Chiwar dit : « Tu es loin de savoir tout ce que je sais, sois tranquille, ici tout se
passe autrement qu'au Temple. »
7. Le chef sourit, paraît content.
8. Borus tire aussitôt de sa poche une lourde bourse pleine d'or pour s'acquitter
de la taxe, bien moins lourde que la bourse qu'il tend, puis il prend congé.
9. Borus sorti, le chef soupèse la bourse et dit : « Voilà plus de cinq livres d'or en
pures pièces frappées à l'effigie d'Auguste et de Tibère. Est-ce ici la coutume ?
Au Temple, une seule livre eût largement suffi. »
10. Chiwar dit : « Il n'est pas rare de voir ici de tels dons ! Mais Borus, qui est
après Jésus le plus grand médecin du monde, est trop homme d'honneur, et de
plus trop riche, pour se salir en une telle occasion. »
11. Le chef demande alors : « Qui était sa petite femme si belle et si adorable ? »
12. Chiwar dit : « C'est la fille du chef Jaïrus, dont je t'ai déjà dit que Jésus l'a
réveillée deux fois de la mort. »
13. Le chef dit : « Elle n'était peut-être qu'évanouie, ce qui ne serait pas étonnant
pour une aussi tendre et aussi ravissante personne ! »
14. Chiwar dit : « Oh ! Quand on se décompose depuis quatre jours dans la
tombe et que le cadavre empeste déjà, comme nous avons pu le sentir malgré
tous les onguents, lorsque nous l'avons descendue dans la crypte en chantant des
chants funèbres, il n'y a pas trace d'évanouissement. Mais Jésus le bon Sauveur
l'a rappelée à la vie avec la plus merveilleuse facilité, d'un seul mot, sans autre
aide que celle de Dieu seul, et elle est maintenant vivante et en meilleure santé
qu'elle ne l'a jamais été, car elle est encore très jeune et compte à peine seize
printemps. »
15. Le chef demande : « Depuis combien de temps s'est-elle réveillée de la mort
?»
16. Chiwar dit : « Six ou sept jours tout au plus ! Je ne saurais le dire exactement,
mais c'est assurément au début de la semaine dernière qu'elle a été réveillée de la
mort à la vie ! »
17. Le chef transporté d'admiration dit : « Voilà véritablement une chose qui ne
s'est jamais vue sur terre ! Une telle fraîcheur chez cette petite femme, alors que
son cadavre a été mis quatre jours au tombeau ! C'est vraiment inouï, en
admettant que vous disiez là l'entière vérité, ce dont je ne veux pas douter, car
bien des miracles semblent réunis en ces lieux. »
18. Chiwar dit : « Oui, c'est vrai, et le Sauveur Jésus attire tout particulièrement
l'attention sur Lui, car tout ce qu'il accomplit dépasse incomparablement tout ce
que nous savons des prophètes. Jamais rien de semblable n'est arrivé jusqu'ici. Il
n'existe pas de maladie qu'il ne guérisse instantanément d'une simple parole, sans
même voir le malade et sans même le toucher. Qu'il veuille un changement et il
arrive instantanément.
19. La démission de Jaïrus il y a quelques jours et la présentation simultanée de
cette démission au Temple à Jérusalem est un pur miracle. Par voie naturelle, ce
document, à cette heure-même, ne serait probablement pas encore parvenu au
grand prêtre. Et c'est ainsi que tu as pu arriver il y a deux jours à Capharnaüm et
être ici ce matin à l'aube. Tout s'est passé dans les règles. Par cette voie
merveilleuse, te voilà l'archiprêtre de toute la Galilée, et la démission de Jaïrus
avec toutes les explications nécessaires est dans la main du grand prêtre ! Des
témoins dignes de foi nous ont aussi raconté que ce Jésus, il y a quelques
semaines, a promis une très grosse tempête, et la mer et les vents ont aussitôt
obéi à la parole du Sauveur. Je pourrais te raconter une foule d'autres histoires,
mais le moment ne d'y prête pas. On pourrait croire que cet homme est un
disciple de Satan, si chacun de Ses mots, de Ses enseignements et de Ses conseils
n'étaient tous meilleurs les uns que les autres.
20. Je te le dis tout net, Ses actes sont extraordinaires et merveilleux, mais ils
disparaissent devant Ses paroles et Ses enseignements. Il t'apprend des vérités
dont aucun prophète n'a jamais rêvé. Il te parle si bien de la vie humaine que
personne ne peut plus douter de l'immortalité de l'âme. Il te la représente d'une
façon si compréhensible que tu ne peux douter que l'âme vive éternellement
après la mort du corps, parce que l'esprit divin y demeure.
21. Bref, de ce Jésus aux capacités si inhabituelles on peut dire en toute
conscience qu'il n'a jamais existé un tel homme sur terre depuis Adam ! Tous les
éléments Lui obéissent, des myriades d'esprits sont prêts à Le servir, Il a même
obscurci totalement le soleil en plein midi pour le rétablir l'instant suivant, à ce
que m'ont dit plusieurs de Ses disciples. C'était lors de son voyage de Sichar à
Cana en Galilée.
22. Roban et plus de cent témoins nous ont raconté qu'il a rétabli à Sichar en un
instant les ruines de l'antique demeure de Benjamin et de Joseph ainsi que du
vieux palais d'Esaü, qui appartient au riche marchand Jaïruth. Tous les archi-
tectes de la région reconnaissent ouvertement qu'il aurait fallu au moins dix ans
pour le faire par des voies naturelles, et ces bâtiments énormes ont été
reconstruits en un clin d'œil en matériau lourd, selon toutes les exigences de l'art
et d'une si belle façon qu'aucune main humaine de maçon n'aurait pu le faire !
23. Un certain Grec de Cana en Samarie, nommé Philopold, m'a raconté des
choses quasi incroyables que j'ai été bien obligé de croire, puisqu'il m'a montré
un millier de témoins.
24. Celui qui peut accomplir de telles choses est à mon avis plus qu'un homme et
plus qu'un très grand prophète. Il a bien dit, il y a quelques jours, en mer, je crois,
lors d'une pêche qui fut elle-même un véritable miracle, que tout homme peut
accomplir de tels miracles si sa foi est assez forte et sans le moindre doute ; mais
quant à moi, je pense qu'une foi pareille est déjà un miracle en soi, car elle ne
peut être que la conséquence évidente de capacités conscientes d'elles-mêmes et
portant en elles tous les succès imaginales.
25. Qui connaît ses forces peut s'y fier lorsqu'il a une tâche à accomplir, parce
qu'il sait depuis longtemps par expérience qu'elles seront suffisantes. Mais celui
qui doit croire à des choses qui dépassent les forces qu'il se connaît, celui-là,
selon moi, commencera à douter dès qu'il verra devant lui la charge à soulever,
sentant trop bien qu'il n'a pas en lui les forces nécessaires.
26. Une pierre de plusieurs livres, je puis l'ôter sans nul doute de mon chemin,
mais non un bloc de roche de cent mille livres, malgré toute ma foi ! J'ai beau
réunir toute ma volonté, c'est inutile, parce que la conviction subjective qu'il est
possible de soulever un poids de cent mille livres avec un levier prévu pour deux
cent livres me fait totalement défaut.
27. Mais tout est possible à ce Jésus, comme à un dieu. Une montagne n'est pas
plus pour Lui qu'une parcelle de poussière ! La terre, l'eau, le feu, l'air et le vent
lui obéissent comme les brebis suivent leur berger. Il maîtrise l'éclair mieux que
le meilleur archer sa flèche. Que faut-il en conclure ? Donne-nous ton avis, toi
qui es notre supérieur. »
Chapitre 88
De la crapulerie du Temple
1. Le chef dit : « S'il en est ainsi, ce dont je ne doute pas, il doit être allié de
quelque manière incompréhensible avec le tout-puissant esprit de Jahvé, comme
Moïse ou Elie qui pouvaient s'adresser au feu du ciel et le faire obéir. Ils ont
peut-être fait d'autres miracles encore, qui n'ont pas été relatés, mais dont font
état des légendes populaires peu dignes de foi bien qu'elles puissent comporter
une part de vérité !
2. Ainsi Elie, si ma mémoire ne me trompe, a redonné la vie à tout un tas
d'ossements sur un champs de bataille et les a regarnis de chair, de peau et de
cheveux ! À une autre occasion, il a également fait tarir les sources du grand
Euphrate, ordonnant aux nuages d'éviter ces cieux pendant trois ans. Ce n'est que
lorsque les gens firent pénitence qu'il rouvrit les sources du fleuve en ordonnant
aux nuages de traverser le firmament et d'arroser le sol durci par la sécheresse.
On raconte encore une foule de prodiges de tous les prophètes, qui ont fini avec
le temps par être dénaturés et l'on dit qu'Elie reviendra une fois encore avant la
fin des temps et fera de grands signes pour amener les hommes à la repentance,
car on sait que ce prophète mystérieux n'est jamais mort, mais qu'il est monté au
ciel sur un char de feu ! Il est très possible que ce Jésus soit porteur de l'esprit de
ce grand prophète, et que, du fait de son lien étroit avec la puissance de Jahvé il
soit capable d'accomplir de tels miracles possibles à Dieu seul. »
3. Chiwar dit : « Ton avis n'est pas si faux, et je voudrais presque t'approuver si
je n'avais vu de mes propres yeux chez ce Jésus des choses qui dépassent
infiniment Elie. Tu dois te demander ce que cela peut bien être ! Je dois t'avouer
qu'il me manque les mots pour te le décrire, car il faut l'avoir entendu soi-même,
l'avoir vu, l'avoir senti, pour pouvoir s'en faire une idée ; selon mon avis et selon
l'avis de milliers d'autres gens, ce Jésus est tout simplement le Messie de la
Promesse, car, je vous le demande, si ce dernier devait venir en d'autres temps,
accomplirait-il de plus grands signes encore ? De plus, il descend en droite ligne
de David, selon la chronique. (Matthieu 1, 1-17). Achim fut père d'Eliud, Eliud
père d'Eleazar, qui fut père de Matthan, qui fut père de Jacob, qui fut père de
Joseph, qui fut père de Jésus ; et si tu remontes plus loin dans la chronique, tu
aboutis en droite ligne à David. Or, il est écrit que le Messie descendrait de
David, et que chacun le reconnaîtrait à Ses actes.
4. À mon avis, rien ne manque à ce Jésus. Son ascendance est authentique, et
jamais on n'a vu sur terre de tels actes et une telle abondance Je ne sais vraiment
pas ce qui devrait nous empêcher de Le prendre pour ce qu'il est.
5. Que le despotisme du Temple n'y voie pas son avantage est facile à com-
prendre, mais nous ne devons plus nous guider d'après le Temple, qui est parfai-
tement mort à mon avis, et qui ne nous procure ni protection, ni sagesse, ni aucun
bienfait durable, si ce n'est que ce que nous devons lui verser pour acheter une
charge suffirait à nourrir dix hommes pendant cent ans !
6. Calcule la somme d'or et d'argent que tu as dû verser au Temple pour acheter
ta charge, et tu verras facilement qu'elle t'aurait suffi pour vivre princièrement
pendant cent ans ! Mais sois seulement poursuivi par les Romains, et tu verras
sur quel appui du Temple tu peux compter ! Non seulement il ne pourra rien
faire, mais il ne voudra rien faire ; tout au plus, moyennant quelques bonnes
pièces d'argent, te donnera-t-il une consolation sur un mode sibyllin, à la manière
de l'oracle de Delphes, qui a toujours raison lorsqu'il dit que le destin peut être
bon ou mauvais !....
7. Je connais l'actuelle vilenie du Temple ! Et je n'ai aucune mauvaise conscience
de le mystifier autant que possible. Quoi qu'il en soit, mon cher ami, à notre
époque, celui qui ne veut pas être le dupe du Temple doit avoir l'intelligence de
se donner la peine de le duper ; ou crois-tu donc que tu puisses arriver à quelque
chose en étant honnête et droit avec le Temple ? Oh, personne n'y songe, et je
parie que tu fais des templiers ce que tu veux !
8. Je me souviens d'un certain Bar qui était Grec circoncis. Il devait avoir une
grosse fortune, car il était toujours couverts de perles et de diamants. Cet homme
avait toujours le visage en sueur, parlait peu, et ce qu'il disait était toujours plus
ou moins mensonger. Quand il demandait mille livres d'or pour un parchemin qui
ne valait pas un demi stater, le grand prêtre haussait les épaules, mais Bar faisait
alors une mine comme je n'en ai vu à personne d'autres et disait fièrement : Hum
! Aut Cœsar, aut nihil ("Tout ou rien !") À quoi le grand prêtre, Dieu sait
pourquoi, blêmissait et faisait verser les mille livres d'or à Bar sans jamais rien
recevoir en retour. Il apparut un an après que ce Bar n'était qu'un mystificateur de
la plus extrême scélératesse.
9. Il y avait là aussi de braves Juifs qui venaient mettre en gage leurs biens pour
se faire prêter de l'argent. Mais ils ne touchaient rien, car ils étaient par trop
honnêtes et par trop francs d'où j'ai déduit cette maxime : soit être trompé par le
Temple, soit tromper le Temple ! Aussi je ne demanderai jamais au Temple si
Jésus est le Messie de la Promesse, car Il l'est pour moi, même sans le Temple !
Qu'en dis-tu ? »
Chapitre 89
Entretien de Korah et Chiwar au sujet du Messie
1. Le chef dit : « Ami, je t'aime, car je n'ai jamais vu une âme comme la tienne !
Tu as parfaitement raison ! Je connais encore trop peu ce Jésus pour pouvoir
partager ton avis, mais si la Promesse n'est pas une noix creuse, puisqu'elle n'a
jamais été accomplie depuis David et que l'occupation romaine est une
tribulation pire que les quarante années de captivité à Babylone, je ne vois pas
d'obstacle à partager ta foi ! Mais il s'agit maintenant de savoir ce que vous allez
dire et comment les prêtres et les Pharisiens des autres villes vont réagir ! »
2. Chiwar dit : « Ce que je t'ai dit là exprime la voix de toute la ville, et ceux de
Capharnaüm qui ont déjà pris quelques bonnes leçons, n'en sont pas si loin !
Quant aux autres villes, laissons le temps agir jusqu'à ce que les choses aillent
mieux.
3. Si ta place à l'avenir est ici, laisse-moi m'en préoccuper, et dans peu d'années
la Galilée sera indépendante du Temple. La Galilée est inscrite à la fin des
registres du Temple, que peut-il arriver si nous arrachons cette dernière page. Les
Romains et les Grecs sont de notre côté, cela est certain, et c'est un peu grâce à
Dieu ; le Temple, d'ailleurs doit en être désespéré. »
4. Korah dit : « Je te donne entièrement raison et j'en suis plus persuadé qu'avant,
mais il faut toujours nous rappeler que l'archange Michel, le plus puissant esprit
céleste après Dieu, s'est battu de toutes ses forces avec Satan trois jours et trois
nuits pour lui disputer le corps de Moïse. Si Satan s'en prend à nous, comment
résisterons-nous alors ? »
5. Chiwar dit : « Je me battrais non seulement contre une, mais contre des
milliers de forces sataniques, bien que je sois loin d'être semblable à Michel ! Il
suffit d'avoir le courage de barrer la route à ce mauvais tentateur, et tout son
enfer ne peut rien faire. Mais qu'on lui montre une seule faille, il s'accroche et le
combat est évidemment beaucoup plus dur encore.
6. Aussi vrai que Dieu m'a créé, je ne dédierai jamais de temple à Satan et je ne
lui brûlerai jamais d'encens pour qu'il me laisse en paix. Il peut lutter avec
Chiwar si ça lui plaît, vous verrez que j'en viendrai à bout en moins de trois jours
!»
7. Le chef dit : « Ami, quelle audace tu as, toi le moustique de défier le lion au
combat au lieu de prier Dieu pour qu'il te garde des ruses de Satan ! »
8. Chiwar dit : « Je connais un nom qui suffit pour vaincre des légions de démons
sataniques. Qu'il se montre, celui qui a le courage de se battre avec moi !
9. Le moustique n'est rien en face du lion, mais s'il le veut, il peut mettre en fuite
le lion le plus puissant ; il se précipite dans son oreille pour y bourdonner au
point que le lion finit par croire à une tempête effroyable, et voilà le roi des
animaux qui prend la fuite !
10. Il ne s'agit pas d'être plus fort que le puissant, il faut être plus intelligent. Tu
nous a abordés avec une bonne part de satanisme, et regarde, maintenant, mon
peu d'intelligence a su le vaincre, et te voilà un homme libre et notre chef élu,
sans que Satan ait pu nous faire le moindre mal, et il ne pourra jamais nous en
faire !
11. Je sais ce que je sais, je peux ce que je peux, et une chose est certaine, Satan
ne sera jamais mon seigneur et maître ! »
12. Korah dit : « Ami, ne parle pas si haut, le mal a des yeux et des oreilles
partout. Avec l'aide de Jahvé et celle de ton Messie que je connais si peu encore,
il ne pourra rien nous faire, mais n'allons pas l'appeler ! Que Dieu nous garde de
sa visite bien intentionnée ! »
13. Chiwar dit : « Je ne souhaite pas plus cette lutte que la fuite. »
14. À ces mots de Chiwar apparaît tout à coup dans la salle un géant en furie,
faisant mine de ricaner devant Chiwar et lui disant d'une voix tonitruante à faire
trembler les piliers de la salle : « Es-tu ce vil moustique prêt à soulever la
tempête dans l'oreille du lion ? Essaie donc de lutter avec moi, malheureux ver de
terre ! Je vais te dire quelque chose que tu ignores encore : ton Messie ne dépend
que de ma magnanimité, car il n'est guère respectable pour moi de me battre avec
un moustique ; mais s'il me fait des blagues, je vais l'écraser à une poutre du
plafond ! Que vas-tu faire si je te mets en miettes ? »
15. Chiwar se redresse tout doucement et maîtrise le géant, qui n'est autre que
Satan, avec ces mots : « Misérable, si tu es entré ici, veille à ne plus jamais reve-
nir dans ces saints lieux ! Va-t'en, sinon le Seigneur Jésus te jugera, je t'en pré-
viens. »
16. À l'appel du nom de Jésus, le géant recule de plusieurs pas et, furieux, me-
nace Chiwar en lui enjoignant de ne plus jamais prononcer ce nom-là.
17. Chiwar dit : « Je vais bourdonner dans ton oreille pour que tu voies comment
un moustique met le lion en fuite ! Et Chiwar de répéter encore : « Jésus, le Fils
du Très-Haut te juge et te condamne ! Jésus, le Fils du Très-Haut te chasse à
jamais d'ici ! Jésus, le Fils du Très-Haut te punit pour tes innombrables iniquités
!»
18. Et, sans attendre cette dernière strophe, Satan s'éloigne en hurlant.
19. Chiwar dit à Korah agité comme une feuille de tremble : « As-tu vu comment
on met en fuite le lion? Pourquoi ne m'a-t-il pas aussitôt réduit en poussière ?
Voilà sa force ! Il n'a qu'à revenir si l'envie l'en démange, et je t'assure qu'au nom
de mon Jésus il se sauvera plus vite encore qu'il n'est parti cette fois. »
20. Le chef dit : « Écoute, ami, j'admire ton courage et, par tous nos pères, je me
sens revenu en des temps merveilleux, mais laisse moi te dire qu'il ne faut plus
jamais inviter Satan à lutter avec toi, car il est infiniment ingénieux et sait
prendre toutes les formes, jusqu'à celle d'un ange lumineux. Je crois qu'il est plus
dangereux en vêtements célestes que dans cet accoutrement avec lequel il nous a
fait l'honneur d'apparaître ! »
21. Chiwar dit: «Oui, mais nous avons la pierre de touche qui nous permet de
reconnaître n'importe laquelle de ses apparences, et nous pouvons être parfai-
tement tranquilles qu'il s'est éloigné pour longtemps ! »
Chapitre 90
Korah se souvient avoir vu le Seigneur purifier le Temple
Chapitre 91
Les amis de Jésus chez Borus
1. Cette nouvelle afflige le chef. Borus l'invite aussitôt chez lui avec Chiwar, et il
les accueille princièrement dans sa somptueuse demeure.
2. Bab et Roban s'y joignent évidemment, et toute la soirée il n'est question que
du Seigneur Jésus.
3. Le chef dit : « Mais enfin, dites-moi comment il se fait, après tout ce que j'ai
appris à son sujet, qu'il n'ait pas osé rester ici ! Passe encore s'il avait à se rendre
quelque part pour sa très haute profession, mais la crainte d'Hérode semble
l'avoir fait quitter ces lieux ; celui à qui le ciel et la terre obéissent, pour autant
que je sache, et qui compte, qui plus est, le grand gouverneur romain parmi ses
amis intimes, ne devrait avoir aucune raison de fuir devant le faible roi feudataire
de Jérusalem !
4. Prenons la chose comme on voudra, mais il est certain qu'en toute logique il y
a là quelque chose qui ne va pas, si un Dieu se met à craindre le diable et prend
la fuite. Hum, hum, plus j'y pense, plus la chose me paraît bizarre !
5. Donnez-moi de meilleures raisons. Malgré toute l'affection que je vous porte,
je dois vous dire que nous nous trompons entièrement à propos de cet homme. Le
Tout-Puissant n'a vraisemblablement pas à craindre un Hérode qui n'a peut-être
jamais pensé à le poursuivre. Moi qui suis un favori de ce roi feudataire, et qui le
connais mieux que personne, je sais qu'il a mille fois regretté la mort de Jean-
Baptiste, et la fin tragique d'Hérodias et de sa fille a mis le roi dans un tel
désarroi qu'il ne tuera plus jamais un prophète !
6. Les sept disciples de Jean ont beau lui avoir parlé des atrocités d'Hérode, Jésus
est parti d'ici pour de tout autres raisons. À en croire ses disciples, pour autant
qu'ils ne mentent pas, cet homme omniscient sait tout ce que nous disons de lui !
Personne n'a donc de meilleure explication à me donner de son départ ? »
7. Borus dit : « Cher ami, il y a là en effet anguille sous roche, sa fuite nous a
tout autant surpris que toi, bien que nous soyons persuadés qu'il est Celui que
nous avons reconnu et accepté. Il a également exprimé la crainte qu'il a de toi, et
ce matin Il a congédié tous Ses disciples ainsi que les sommités romaines qui
étaient avec Lui ces derniers jours. Il avait pourtant peu de raisons de te craindre,
à ce que je vois, puisque tu es maintenant pour Lui et nullement contre Lui ; une
autre raison a bien dû le pousser à un départ aussi subit ! »
8. Le chef : « Dites-moi donc comment cela est arrivé et ce qui s'est passé avant
son départ ! Peut-être en trouverai-je la raison, ou plus probablement mon ami
Chiwar !
9. Borus dit : « Voilà ce qui s'est passé : ce matin Il a envoyé Ses douze disciples,
qu'il appelle Ses apôtres, au bord de la mer trouver un bateau pour Lui et savoir
si quelque espion soudoyé pour le tuer n'a pas été envoyé de Jérusalem. Les
disciples de Jésus ont trouvé les sept disciples de Jean Baptiste au péage de
Sibarah, qui appartient à un certain Matthieu, un autre disciple de Jésus. Ces
disciples de Jean, qu'ils avaient déjà rencontrés lorsque Jean était encore en
prison et qui leur avaient rapporté ses paroles, ont raconté ce matin tout ce qui est
arrivé à leur maître emprisonné à Jérusalem. Ils ont aussi raconté comment
Hérode s'est fait accroire que Jésus n'est autre que Jean-Baptiste ressuscité et a
donné secrètement l'ordre à ses espions assassins de le lui ramener avec les plus
grand égards, mais s'ils découvraient qu'il ne s'agit que de Jésus, de le tuer sans
tarder !. Une grande récompense est promise à ceux qui parviendront à l'as-
sassiner, mais si Jésus se révêle un être divin réellement invulnérable, Hérode
offrira la même récompense à ceux qui le lui amèneront, et il se fera un adepte de
Jésus avec toute sa cour !
10. À ces nouvelles qui Lui ont été rapportées ce matin, le Seigneur a dit : « Par
une épreuve aussi indigne, Hérode ne deviendra jamais Mon disciple. La terre est
vaste et Je saurai toujours trouver un recoin où l'insolence d'Hérode ne saura
jamais Me trouver. Le Fils de l'homme est-Il venu pour devenir ce qu'il est par
les mains des tueurs à gage ? Non, à jamais, non ! Qui vient Me demander qui Je
suis un poignard à la main, n'aura jamais de réponse. Il est grand temps de partir
d'ici, allons en terre étrangère trouver des hommes capables de croire sans
tourner leur arme contre nous. »
11. Jésus est alors parti en disant: «Allons-nous-en, Je le veux, six cents assassins
à la solde d'Hérode marchent contre Moi, Je les vois même très près de Moi.
Allons-nous en. » Sur ce tous les Siens se sont mis en route avec les disciples de
Jean en direction de Sibarah. Actuellement ils doivent se trouver en haute mer. »
Chapitre 92
La grâce du Seigneur
1. Le chef dit : « Ah ! C'est tout autre chose, il n'est pas parti par peur, mais par
pure sagesse, pour couper court à toute tentative d'Hérode. Ah ! Il a bien fait, je
ne puis que l'en féliciter.
2. Hérode, en un mot, est un personnage que personne ne connaît vraiment. Sa
bonté d'une part est sans mesure, mais il est aussi un diable de tout premier ordre.
Aujourd'hui, pris d'un accès de magnanimité, il vous fait les promesses les plus
louables, qu'il tient aussi envers ceux qui se présentent alors devant lui. Mais
malheur à qui veut les lui rappeler le lendemain : non seulement il ne lui donne
rien mais il le congédie en sorte qu'il ne lui viendra plus à l'idée de lui rappeler
ses promesses.
3. Pas question de vouloir se lier d'amitié avec lui. Si quelqu'un rompt ses
amitiés, c'est Hérode ! Et notre Sauveur Jésus le sait aussi bien que nous, et il a
eu raison de s'enfuir ; car même si Hérode avait la conviction que Jésus est
invulnérable, rien ne prouve que ce qui compte pour lui aujourd'hui sera valable
demain ! Ou cet homme n'a pas de mémoire, ou il vit selon des principes qui
n'avantagent que lui seul.
4. Qu'il soit un fieffé renard n'a pas à être prouvé ! Il sait l'art d'extorquer les
impôts, mais il sait aussi comment ne jamais payer les fermages qu'il doit aux
Romains. Je connais sa façon d'agir, mais nous en parlerons une autre fois.
5. Je voudrais bien savoir si notre Sauveur Jésus ne va pas revenir à Nazareth. Ne
vous en a-t-il pas parlé ? »
6. Borus dit : « Nullement. J'espère qu'il passera l'hiver chez nous, bien qu'il
puisse aussi bien le passer à Sidon ou à Tyr. Nous recevrons de Ses nouvelles en
temps voulu.
7. Marie Sa mère, qui semblait tout attristée, dit : « Il reviendra ici, mais sans
doute pour quelques jours seulement. »
8. Le chef dit : « Oh ! Chère mère, ne t'en fais pas, Il ne nous oubliera pas et toi
moins encore ! »
9. La mère dit : « Il ne nous oubliera pas, mais il est triste pour moi de voir et
d'apprendre comment les hommes, dans leur méchant aveuglement, méconnais-
sent volontairement leur éternel Bienfaiteur, Le pourchassent et Le traitent avec
tant d'ingratitude ! »
10. Le chef dit : « Vois-tu, chère mère, les êtres humains sont comme ils sont, et
ce n'est pas pour rien que David s'est écrié, alors qu'il était en péril : « Ô combien
inutile est toute aide humaine, puisque les hommes ne peuvent aider celui qui est
poursuivi ! » Tel a toujours été le triste sort des grands hommes doués par Dieu
de qualités supérieures, d'être poursuivis par des hommes qui ne sont que des
vers de terre. Les petits hommes veulent être grands malgré leur nullité, et ils ne
peuvent supporter la grandeur parce qu'elle leur montre trop clairement la mesure
de leur propre vanité !
11. Regarde les grands prophètes, de tout temps, quel fut leur sort ! La misère
dès la naissance, manques, privations, échecs, persécution et finalement la mort
violente de la main même de ces vers de terre égoïstes. Que Dieu le veuille ainsi
m'est une énigme depuis mon enfance. Mais l'expérience nous enseigne qu'il en a
toujours été de même et nous n'y pouvons rien, pas plus que nous ne pouvons
empêcher les jours de raccourcir en hiver. Espérons seulement que tout ira mieux
dans l'autre vie.
12. Ton divin Fils, je m'en rends compte, aurait pu d'un seul coup mettre fin aux
désordres de l'humanité. Mais on comprend qu'il ne l'ait pas fait, lorsqu'on
constate qu'il préfère prendre la fuite devant Hérode ce ver de terre qu'il pourrait
anéantir d'un simple souffle. Lui à qui ce serait si facile, Il ne le fait pas, et nous,
nous ne pouvons rien faire ; c'est toujours la même histoire !. Il faudra que je Lui
en parle sérieusement quand il viendra. »
13. Borus dit : « Cela ne servira pas à grand-chose ! J'ai déjà été témoin de tous
les conseils qu'il a donnés à ce propos au grand gouverneur, qui est un parent de
l'empereur ! Mais à quoi bon ! Il nous a clairement expliqué ce qu'est l'humanité
et comment il faut gouverner sans tribunaux et sans condamnation, pour qu'elle
atteigne librement le but éternel fixé par Dieu. Le gouverneur, comme nous tous,
a reconnu qu'il avait raison et qu'une dure punition était souvent parfaitement
inutile ; c'est pourquoi je puis t'assurer par avance qu'il en ira de même pour la
discussion que tu envisages. »
Chapitre 93
De la nature humaine
1. Le chef dit : « Nous verrons bien ; car si l'on considère les choses de ce
monde, l'humanité ne s'est pas améliorée, tout au contraire. Qu'en est-il de Moïse
et des prophètes ? Je vous le dis, dans les cercles soi-disant bien pensants, on s'en
rit, quoiqu'on les prenne pour des êtres pieux. Et l'on tient que, pour l'esprit
humain, leur enseignement n'est qu'une vaine fable comparé à celui d'un Aristote
ou d'un Pythagore, et qu'il est la preuve vivante que l'institution de Jahvé, si
sublime et véridique soit-elle au fond, n'atteint pas du tout, auprès des hommes,
le but qu'elle s'est fixé selon Sa parole!
2. À quoi bon répandre cette parole, si elle ne dispose pas constamment des
moyens palpables qui seuls lui permettraient de se faire toujours respecter des
hommes ! Que des parents essayent seulement d'élever sans verge leur enfant, et
l'on verra si l'enfant respecte le sage enseignement de ses parents !
3. Je ne réponds d'aucun enseignement et même d'aucune loi qui ne soit
enseignée avec la verge ou l'épée. L'homme est fondamentalement mauvais et
doit être fouetté pour devenir meilleur. »
4. Borus dit : « Je suis bien de ton avis ; mais il y a un grand mais, que tu ne
connaîtras que si tu l'entends de Sa propre bouche à Lui !
5. Si nous regardons par exemple une machine destinée à un quelconque travail,
nous commençons par nous en étonner ; puis nous nous mettons à lui trouver
toutes sortes de défauts auxquels nous voulons remédier, et nous allons dire cela
à l'artisan.
6. Il sourira et vous dira : "Mes amis, tout cela est bien beau, mais il y a beau-
coup de choses à considérer dans le fonctionnement de cette machine. Elle a été
construite pour une fonction définie, vouloir la transformer ne peut que la
dégrader. Toute machine ne dispose que de la force correspondant à son utilité.
Et le tisserand cassera son fil à coup sûr s'il ne tisse pas avec le bon fil, qui ne
doit être ni plus gros ni plus mince. Certes, à l'usage, toute machine finit par se
détériorer, c'est alors seulement qu'il faut la remettre en état pour qu'elle retrouve
son utilité."
7. Voilà ce que dira l'artisan et nous finirons par dire qu'il a raison, parce qu'il
connaît son œuvre mieux que nous tous ! C'est à peu près la même réponse que le
Seigneur Jésus pourrait nous faire si nous Lui demandions comment il se fait que
les hommes, à côté de leur sagesse divine soient capables d'être si sataniques !
8. Que savons-nous de l'homme et de ce dont il est fait. Nous maudissons
souvent ce par quoi Dieu nous bénit. Nous ne savons distinguer ni le bien ni le
mal !
9. Tout homme a en lui plus ou moins d'égoïsme, et selon sa disposition à cet
égard, il se fait plus ou moins le juge de son prochain, toujours prêt à le prendre
en faute selon le critère que lui dicte son égoïsme. Tout homme ne pense que par
égoïsme. Il n'y a sur terre que de faux jugements, et ces faux jugements
engendrent le mécontentement et finalement le chagrin, l'envie et la colère.
10. Qui d'autre que l'homme lui-même est responsable de la détérioration hu-
maine ? La machine humaine finit aussi par devenir avec le temps inutilisable,
elle est alors réparée par son glorieux artisan et parfois même complètement
remise à neuf.
11. Après plus de mille ans, une telle remise en état semble à nouveau nécessaire.
Mais l'humanité n'en sera améliorée que pour deux mille ans à peine ; et comme
je l'ai dit, nous serons témoins de ce qui arrivera. »
12. Le chef dit : « Je te félicite, tu es un disciple digne de ton maître ! Je vois
bien à présent que je ne puis rivaliser de sagesse avec toi, mais je ferai tout, aux
côtés de mon ami Chiwar, pour devenir capable de converser avec toi de ces
choses, car la sagesse actuelle du Temple de Jérusalem n'y suffit pas, et il n'y a là
rien d'étonnant, car cette sagesse ne va pas loin ! »
Chapitre 94
La vie communautaire à Nazareth
Chapitre 95
Guérison et multiplication des pains pour cinq mille hommes dans le désert
Matthieu 14, 13-24
1. Informé par les disciples de Jean de ce qui lui était arrivé, et que Je savais
déjà, sinon Je n'aurais pas congédié toute la compagnie le matin même, Je quittai
donc Nazareth avec Mes disciples pour aller à Sibarah, où nous prîmes un bateau
pour Bethabara. En mer, les disciples Me racontèrent ce qu'ils avaient fait et
enseigné le jour même. Je les en félicitai.
2. Lorsque nous fûmes à destination, J'ordonnai aux disciples de rester dans le
bateau et Je descendis sur la rive, accompagné seulement de quelques disciples,
et J'allai chercher dans le désert un endroit pour y passer quelques jours à l'abri
d'Hérode.
3. Mais notre bateau était suivi de loin d'une foule d'autres petites embarcations,
d'autant mieux informées de Ma présence que Je n'avais nullement l'intention de
Me cacher des hommes qui avaient besoint d'aide.
4. Je n'étais pas dans ce désert depuis un jour que déjà le peuple affluait en foule
de toutes les bourgades, des marchés et des villages avoisinants pour se joindre
aux quelque huit cents personnes qui Me suivaient déjà et que J'avais pourtant
renvoyées chez elles le matin précédent.
5. Il y avait là ceux de Cana en Galilée et ceux de Cana en Samarie, ceux de
Jessaïra, de Kis, de Sibarah, de Capharnaüm, ceux de Chorazin, de Césarée de
Génézareth et de Bethabara. Ils avaient parlé de Moi dans toutes les villes et dans
tous les marchés, et les gens en foule venaient à pied, par le désert, par la mer,
avec leurs malades et leurs estropiés. Comme Je l'ai dit, le jour ne tirait pas
encore à sa fin que déjà près de mille pèlerins avaient trouvé le lieu de Ma
retraite et l'encerclaient !
6. Le lieu que Je M'étais choisi dans le désert était une vaste grotte sans issue à
l'autre extrémité. Cette grotte située sur les hauteurs était environnée d'arbres, et
là, devant l'entrée, sous un vaste et épais ombrage, plusieurs milliers de
personnes avaient pris place et installé tout à leur aise leurs malades.
7. Voyant affluer ces gens de toutes parts, les disciples, qui savaient où J'étais
s'inquiétèrent de Moi, et, laissant le bateau aux huit matelots, ils accoururent
pour me prévenir qu'une pareille foule pouvait facilement cacher les émissaires
d'Hérode.
8. Je le savais bien, et, voyant arriver ces disciples si soucieux de Mon sort, Je
sortis de la grotte et regardai la foule en larmes qui Me suppliait de guérir ses
malades.
9. Et Je guéris instantanément tous les malades et tous ceux qui avaient péni-
blement gravi le chemin jusqu'à Moi. Leur louange et leur reconnaissance
n'avaient pas de fin. Jusqu'au soir affluèrent encore d'autres gens, alors que leurs
malades avaient déjà été guéris en chemin ; ils venaient exprimer leur re-
connaissance et leurs louanges. La place devant la grotte était comble, et Mes
disciples s'en inquiétaient beaucoup. Des jeunes gens montaient aux arbres pour
mieux Me voir !
10. Quand vint le soir, les disciples s'approchèrent de Moi en disant : « Seigneur,
c'est ici le désert, la nuit tombe déjà et, comme nous l'avons tous remarqué,
personne n'a de quoi manger. Congédie le peuple pour qu'il aille acheter du pain
et des victuailles dans les marchés des environs ! »
11. Je dis aux disciples : « Il est inutile que la foule aille au marché, donnez-lui à
manger ! Quant à boire, ils ont l'eau des sources en abondance.»
12. Les disciples surpris dirent : « Seigneur, nous n'avons ici que cinq pains et
deux poissons frits, qu'est-ce que c'est pour tant de monde ! »
13. Je dis : « Apportez-les-moi ! »
14. Quand ils l'eurent fait, J'invitai toute la foule à se rassembler sur l'herbe. Je
pris les cinq pains et les deux poissons, regardai vers le ciel, remerciai le Père,
rompis les pains, les donnai aux disciples qui les donnèrent à la foule. Mais les
deux poissons ainsi qu'un peu de pain restèrent pour les disciples.
15. Tous ceux qui étaient là eurent à manger en suffisance et furent tous ras-
sasiés. Et comme ils ne pouvaient venir à bout de tout, ils rassemblèrent le reste
des pains dans des corbeilles que les gens portaient avec eux selon la coutume.
Ces corbeilles, assez grandes, se portaient en bandoulière, et il y eut ainsi douze
grandes corbeilles remplies de pains. Près de cinq mille hommes, sans compter
les femmes et les enfants, eurent ainsi à manger.
16. Ce repas, qui dura une bonne heure, suscita un grand étonnement dans le
peuple, ce qui est bien compréhensible, et le peuple décida alors de M'élire pour
son roi !
17. Voyant l'intention du peuple, J'ordonnai aux disciples de monter en bateau et
de gagner avant Moi l'autre rive, jusqu'à ce que Je quitte le peuple ! C'était pour
détourner le peuple de son intention, car quelques hommes commençaient déjà à
parlementer avec Mes disciples, disant qu'ils voulaient par là Me témoigner leur
insigne reconnaissance. Mais personne n'osait M'approcher !
18. En faisant partir Mes disciples en avant, J'enlevais au peuple le moyen de
réaliser son intention, et, voyant les disciples rejoindre le bateau au clair de lune,
le peuple se mit peu à peu en mouvement. Quand les disciples eurent donné
quelques bon coups de rame, Je quittai le peuple, qui s'éloigna aussitôt de bon
gré.
19. Je montait sur un mont dénudé où je priai pour unir davantage au Père Mon
humanité charnelle. Je restai tout seul au sommet de cette montagne d'où Je
pouvais facilement voir de Mes yeux humains, sous le clair de lune, la barque
des disciples en difficulté au milieu des flots d'un bras de mer assez étroit, sou-
levé par un puissant vent contraire.
Chapitre 96
Les disciples sur la mer houleuse
1. Que les disciples ne fussent pas d'excellente humeur est facile à comprendre !
Ils glosaient sur Ma conduite. Pierre disait : « N'avait-Il rien de mieux à faire que
de nous envoyer cette nuit à la mort dans les flots ! C'est tout de même étrange
de Sa part ! Je n'ose plus ramer, quelques coups de rame encore et nous voilà
échoués sur un banc de sable ! Le pêcheur expérimenté que je suis ne répond
plus de rien ! Mieux vaut rester ici en haute mer jusqu'à demain matin ! »
2. Thomas dit : « Je voudrais savoir ce qu'il a bien pu avoir en tête pour nous
congédier si subitement et nous faire partir avant Lui ? »
3. André dit : « À ma connaissance, il n'y a plus un seul bateau sur la rive dé-
sertique, je me demande comment Il va bien pouvoir nous suivre. Va-t-il faire le
tour par les terres ? Il Lui faudra quatorze heures pour atteindre Sibarah où nous
avons l'intention d'accoster. Et s'il veut rejoindre Kis, il Lui faudra deux jours de
marche, de ce côté-là la mer est plus large et Il devra longer la baie et les marais.
»
4. Judas Iscariote dit : « Vous n'y comprenez rien ! Il y a longtemps que je vois
bien que nous L'agaçons ! Jamais Il n'a trouvé l'occasion de se débarrasser de
nous, et elle est enfin arrivée ! Nous voilà quittes ! Maintenant nous avons beau
le chercher, même avec des torches, nous ne risquons guère de le revoir ! Que ce
soit louable de Sa part, c'est une autre affaire ! »
5. Jean l'aimé dit : « Il ne fera jamais, cela, je Le connais trop bien et depuis trop
longtemps ! L'homme qu'il est ne le fera pas ; et le Fils de Dieu qu'il est aussi, à
n'en pas douter, dans toute la plénitude de l'espoir divin, le fera encore moins ! Il
a, comme toujours, de profondes raisons d'agir comme Il le fait, et je sens que
vous allez tous bientôt vous en rendre compte.
6. Mon Dieu, s'il avait voulu nous éloigner, Lui à qui obéissent le ciel et la terre,
d'un simple souffle de Sa bouche et nous étions transportés à l'autre bout du
monde comme nous l'avons été il y a trois ou quatre semaines au plus sur cette
haute montagne que nous voyons très bien d'ici. Par un voyage éclair à travers
les airs, nous nous sommes retrouvés près de Lui au sommet de la montagne !
Mon cher Judas, ne te livre pas devant moi à des suppositions aussi ridicules à
Son sujet, tu ne fais par là que prouver ton incrédulité. »
7. Nathanaël dit : « Je partage l'avis du frère Jean ! Mais en outre, je crois que
nous avons dû pécher contre Lui d'une manière ou d'une autre. Il n'a pas voulu
nous le dire, et nous laisse réfléchir. Il reviendra sans doute lorsque nous serons
purifiés.
8. J'ai déjà fait un examen de conscience, sans pouvoir trouver mon erreur ! Pour
moi, en vérité, la conscience d'un péché serait un bienfait, à cette lumière je
pourrais reconnaître que j'ai mérité l'abandon du Seigneur, et la repentance serait
un baume sur mon cœur. Je cherche assidûment en moi un péché, mais je n'en
trouve pas qui mérite de me couvrir la tête d'un sac de cendre ! J'en suis à
jalouser le pécheur ! Non que je veuille devenir pécheur, mais si je l'étais, tout
serait plus facile à mon cœur. Oh, qu'il doit être doux de pouvoir se repentir
devant Dieu ! Mais comment faire pénitence devant Dieu sans être ridicule
quand on est un homme droit ! »
9. Bartholomée dit : « Quelle idée étrange as-tu là ! Qui songe à louer le pécheur
plus que l'homme droit ? »
10. Jean dit : « Il n'a pas tout à fait tort, s'il s'agit d'un pécheur par faiblesse ou
par passion irréfléchie, et non par soumission servile à l'enfer ! Dans ce sens là
notre frère Nathanaël n'a pas tout à fait tort ! »
11. Jacques dit : « Oui, oui, frère, notre Nathanaël est un homme à qui nous
n'avons rien à apprendre en ce qui concerne la sagesse. Il sait comprendre le fond
des choses, toujours silencieux, et avare de ses mots, mais quand il parle, il faut
l'entendre, ses paroles sont toujours d'une grande profondeur ! »
12. Nathanaël dit : « Mais, frère Jacques, ne me loue pas chaque fois que je dis
quelque chose ! Le Seigneur connaît mieux que quiconque ma bien faible
sagesse, et s'il y avait là quelque chose de vrai, je serais devenu comme toi un
messager alors que je ne suis toujours qu'un élève, et le Seigneur seul sait ce que
je deviendrai ! J'ai bien l'esprit d'un poète, mais je suis loin d'avoir celui d'un
prophète ! Regarde ton jeune frère Jean, voilà un prophète dès le berceau ! Le
Seigneur le sait et Il en a fait Son secrétaire privé. »
13. Jean dit : « Ah ! pas vraiment, qu'est-ce alors que le frère Matthieu ? »
14. Nathanaël dit : « Il est le scribe officiel, tandis que tu es Son secrétaire »
15. Jean dit : « C'est possible ! Le Seigneur le veut sans doute ainsi, il faut
accepter ce que le Seigneur nous accorde ! »
16. Judas Iscariote marmonne alors : « Il ne vous donnera plus rien, le temps du
sablier est écoulé et nous voilà en train de flotter entre l'air et l'eau ; autant dire
entre la vie et la mort, et je ne vois aucune embarcation venir à notre rescousse. »
17. Jean dit : « Ça n'a aucune importance, Il n'a fixé aucune heure pour Son
retour. »
18. Judas dit : « Il a Ses raisons, sans doute ! »
19. Jean dit : « Dis-moi, mon ami, avec tout ce que tu as vu de tes propres yeux,
tout ce que tu as entendu de tes propres oreilles et sans doute ce que tu as perçu
de tous tes sens, ne crois-tu toujours pas que notre Seigneur Jésus, aussi sûr que
je m'appelle Jean, est le Fils de Dieu et qu'il est parfaitement capable de créer, de
produire, d'agir et de régir dans les cieux et sur la terre ? Je te demande de me
répondre sincèrement. »
Chapitre 97
Judas, les miracles des Esséniens, leurs subterfuges
1. Judas dit : « Si je croyais sans réfléchir, je serais aussi faible que toi et que la
plupart d'entre vous ! Il n'y a pas six mois que nous sommes avec Lui et nous
avons vu et entendu des choses merveilleuses, c'est indéniable. Ainsi vous
trouvez que ce Jésus nous dépasse tous infiniment. Pour vous, ses œuvres et ses
discours suffisent pour dire qu'il est divin. Mais vous êtes des gens trop simples,
vous n'avez rien vu, rien entendu d'autre que ce Jésus. Mais moi, c'est autre
chose, je viens de loin, j'ai vu et entendu bien d'autres miracles. Allez voir les
Esséniens, vous verrez ce qu'ils font, et je parie que vous les prendrez tous pour
des dieux, comme les Grecs et les Romains qui leur font des offrandes parce
qu'ils estiment que ce sont des dieux !
2. Vous pourrez voir tout cela chez les Esséniens, et bien d'autres choses encore
beaucoup plus extraordinaires que ce que fait notre Jésus. Sur cette terre, il existe
une foule d'autres hommes capables de faire ce que notre maître fait ; je ne vois
vraiment pas pourquoi on lui accorderait la prérogative exclusive de la divinité
totale et indubitable.
3. Ah ! S'il était le seul, sur cette terre, à qui les éléments obéissent, il serait facile
de croire à sa divinité, mais, comme j'en ai l'expérience, il existe plusieurs
hommes semblables à lui et qui portent aussi une robe sans couture. Il faudrait
que notre Jésus fasse encore bien plus de miracles pour que nous lui accordions
sans conteste la prérogative exclusive de la divinité, et que nous puissions dire et
croire : c'est Jahvé tel qu'il est de toute éternité !
4. Vous prenez pour des miracles divins le réveil des morts, la multiplication des
pains et des boissons, l'édification de demeures ou certains signes aperçus dans la
lune ou le soleil, mais cela ne suffit pas, cela ne prouve pas Sa divinité, car j'en ai
vu faire bien d'autres par les Esséniens ! Guérir des malades pour eux, c'est
accessoire ! J'ai vu moi-même, j'en étais témoin, le chef des Esséniens écrire en
trois langues sur la lune. Je l'ai vu aussi, un jour, obscrucir le soleil en plein midi.
Après avoir fait ses calculs, il nous a dit : "Dans une heure, j'enverrai aux homme
un fléau : je rendrai le soleil complètement noir pendant quelques instants, et il
fera nuit sur toute la terre.
5. Nous avons ouvert de grands yeux, attendant avec anxiété que sa promesse se
réalise. Il s'est alors mis à faire de plus en plus nuit, et quand le sablier fut près de
s'arrêter, il a étendu sa main en disant lentement avec pathos : "Je le veux, Soleil,
obscurcis-toi", et le soleil s'est obscurci sur toute la terre comme en pleine nuit !
Quelques instants après, sur notre supplication, il a étendu à nouveau sa main
dont les doigts semblaient incandescents et dit au soleil : "Cela suffit, rallume-toi
peu à peu et réchauffe le globe terrestre", et à son ordre le soleil a brillé de
nouveau, répandant sa chaleur une demi-heure après.
6. Non loin du palais où demeurent les Esséniens dans leur jardin clos de hautes
murailles, il y a une colline deux fois haute comme le palais. J'allais quatre fois
par an chez ces Esséniens avec toutes sortes d'ustensiles de cuisine. Un de ces
Esséniens m'a dit une fois : "Si tu veux voir un des miracles accomplis par la
volonté de notre chef, reste ici et tu vas voir comment les montagnes obéissent à
ses ordres. Regarde cette colline au milieu du chemin, elle va faire place à un
merveilleux palais".
7. Je voyais la colline à quatre cents pas à peine du palais, et mes yeux ne me
trompaient pas, elle était couverte de mousse, de cailloux et de rochers. Je dis en
riant à l'Essénien : "Si c'est réellement une colline rocheuse, ce dont je ne doute
pas, votre chef doit avoir une force divine pour pouvoir faire en une nuit de cette
colline un palais de marbre !"
8. L'Essénien répondit : "Doutes-tu que cette colline soit une immense roche ? Si
tu en doutes, viens avec moi pour t'en convaincre". Je dis : "Ami ce que mes
yeux voient, je n'ai pas besoin de le toucher avec mes mains ! Je distingue fort
bien les objets les plus petits à quatre cents mètres !" L'Essénien me répondit :
"Alors reste ici, je vais faire des merveilles !" Aujourd'hui encore je ne reviens
pas de tout ce que j'ai vu !
9. L'Essénien m'a conduit dans une salle obscure où gisaient cent cadavres au
moins, chacun sur une civière, et l'odeur putride indiquait clairement qu'il
s'agissait bel et bien de toute une série de cadavres. Tandis que nous marchions
entre ces rangées de morts, que nous frôlions ici et là, quatre porteurs amenèrent
encore deux nouveaux cadavres qui furent mis sur des civières vides.
10. Je demandai à mon guide s'il n'avait pas peur devant tant de morts. "Et
pourquoi donc ? répondit-il. Ils ne peuvent rien nous faire, et si je les rappelle à
la vie, ils ne pourront que nous remercier de les avoir tirés d'une mort assurée. Il
y a là des hommes, des femmes, des jeunes filles. Je regrette seulement qu'il n'y
ait pas de petits enfants cette fois ! Mais tiens bon, ne crains rien, d'un mot je
vais les faire tous se lever. »
11. Je me mis tout près de la porte, prêt à m'enfuir en cas de besoin.
12. L'Essénien leva les mains, appela d'une voix puissante : "Morts, réveillez-
vous, vivez et gagnez votre pain de vos mains ! Mais rendez gloire à Dieu d'avoir
donné aux hommes une telle sagesse et une telle force !"
13. À ces mots, tous les morts se levèrent et remercièrent avec effusion l'Es-
sénien de les avoir réveillés. Tous étaient parfaitement sains et joyeux. Ils les
salua lui aussi très cordialement et les congédia.
14. Ça, c'est un réveil des morts ! Cent deux cadavres d'un seul coup ! L'auteur
du miracle, à qui je demandais si cela arrivait plus d'une fois l'an, me répondit :
"Cela arrive une fois par semaine ! Le chef des Esséniens peut même ramener à
la vie des os complètement desséchés, mais quant à moi, je n'ai pas encore ce
pouvoir !"
15. Il me conduisit dans une autre salle où il me montra une foule de squelettes
empilés sur des bancs. Une lumière blafarde éclairait la salle, mais on distinguait
nettement les squelettes.
16. Et tandis que nous regardions ces ossements, le chef arriva. L'air effroya-
blement sévère, il demanda à mon guide si le réveil des morts avait bien réussi.
Mon guide répondit d'une voix infiniment respectueuse : "Oui, très grand et très
sage maître". Là-dessus le chef reprit : "Maintenant, sois très attentif, en présence
de cet étranger, je vais t'initier pour que tu puisses toi aussi à l'avenir redonner
vie à des squelettes décharnés. Va, et, du pouce et du majeur des deux mains,
touche la poitrine et le crâne des squelettes, puis compte lentement jusqu'à sept et
dis à haute voix : Enveloppez-vous de chair et de peau, que le feu de la vie sorte
des murailles et vous rende à la vie des hommes !"
17. Mon guide le fit aussitôt, et à son dernier appel, de vraies flammes puissantes
sortirent des murs et des os il ne resta plus trace; des êtres vivants parfaitement
constitués avaient pris leur place. Il y en avait là près d'une centaine! Ils nous
saluèrent, remercièrent le chef pour cette grâce qui leur avait été faite. Et, pour
leur bien, il les renvoya à l'air libre.
18. Qu'en dites-vous ? Notre maître est loin derrière tout cela !
19. Ensuite, je fus invité à un repas. Nous prîmes place à une table vide. Le chef
adressa au ciel une prière en langue étrangère et nous suivîmes son exemple. Il y
eut alors un craquement effroyable, comme si le plafond allait s'effondrer, et
voilà, sans que moi ni sans doute personne n'y ait rien compris, nous étions assis
à une table cette fois couverte des mets et des vins les meilleurs, comme il
conviendrait à une table royale ! Après le repas, j'allai une fois encore voir la
colline qui devait se changer en palais pendant la nuit, puis sur l'ordre de l'Es-
sénien, j'allai me coucher.
20. Le lendemain à l'aube, mon guide vint me dire : "Viens, et vois !" Et, plein de
curiosité, j'allai avec lui. De la colline il n'y avait plus trace ! Un grand palais
royal avait pris sa place, j'y fus conduit à travers des salles qui m'assurèrent que
ce miracle n'était pas une illusion.
21. Je me demande si notre maître Jésus a fait de pareilles choses, et vous le
prenez déjà pour Jahvé en personne !
22. Si par la suite nous avons le bonheur de le revoir, ne le prenez pas toujours
mal si j'ai de temps en temps des questions à poser qui vous déplaisent, à vous
comme à lui ; car j'ai vu bien d'autres miracles que ceux de Jésus, et en
réfléchissant bien, s'il reste en vous un peu de force virile, vous ne pouvez pas
vous mettre en colère si je me comporte parfois un peu bizarrement ! »
Chapitre 98
Jean et Bartholomée dévoilent la supercherie des Esséniens
1. Jean dit : « Ce que tu racontes là, certains des nôtres le savent déjà depuis
longtemps ! Et nous en savons bien davantage que toi, car tes Esséniens sont des
falsificateurs, et leur imposture dépasse de loin celle des voyants de l'oracle de
Delphes qui ont quasiment perdu toute foi !
2. Ces gens, qui sont les survivants de l'ancienne caste des prêtres égyptiens,
possèdent d'immenses trésors d'or, d'argent, de perles fines et de pierres pré-
cieuses ; ils se sont construit, à la frontière de notre pays et de l'Egypte, un vé-
ritable moulin à miracles, et ils en ont un autre près de Jérusalem, où ils font le
meilleur commerce ! Nous le savons bien et nous sommes étonnés que toi qui
n'es pas tombé sur la tête, tu ne le saches pas !
3. Judas dit : « J'ai toujours gardé l'usage de mes cinq sens ! »
4. Jean dit : « Cependant tu n'as rien vu, rien deviné, rien compris ! Crois-tu
vraiment que les morts que tu as vus se réveiller étaient réellement morts ? »
5. Judas dit : « Quoi donc ? »
6. Jean : « Dans une salle maintenue sombre à dessein, tu n'as rien vu ! Ces
cadavres que tu croyais morts étaient tout aussi vivants que toi, et l'appel destiné
à les réveiller n'était que le signal auquel ils devaient faire semblant de se
réveiller sur leur lit de mort ! Demande un peu à notre bon frère Bartholomée,
qui a fait le mort pendant deux ans chez ces Esséniens, mais qui a eu la chance
de pouvoir s'échapper de ce terrible couvent de mystificateurs, il te racontera l'art
et la manière de réveiller les morts chez les Esséniens !
7. Il faisait le mort, m'a-t-il raconté, quatre fois par semaine dans la salle des
cadavres et une fois par semaine dans la salle des squelettes, où sont alignés en
rangs des socles noirs où les squelettes ne sont pour la plupart que peints sur le
couvercle, ceux des premiers rangs seulement étant sculptés dans le bois pour
que les visiteurs puissent les toucher. Ces socles sont des coffres dont les
couvercles sont munis de courroies permettant de les ouvrir et de les refermer, et
où des être vivants s'enferment ; en rabattant subitement les deux panneaux du
couvercle, ils peuvent facilement simuler ce réveil des morts devant les visiteurs
peu habitués à l'obscurité de la salle ! L'appel au réveil n'est qu'un signal donné
aux douze serviteurs cachés derrière les ouvertures de la muraille, qui allument
aussitôt de la poudre de résine et l'envoient dans des petits tuyaux d'où
s'échappent alors des flammes provoquant une épaisse fumée.
8. Ces flammes qui jaillissent des murs au signal effraient les visiteurs qui, dans
leur émoi, ne se doutent pas que les faux morts cachés sous leur socle soulèvent
rapidement le couvercle et viennent se placer devant le socle pour remercier leur
sauveur. Voilà ce que c'est que ce réveil des morts ! Le frère Bartholomée en est
témoin ! »
9. Comprenant la supercherie, Judas, tout ébahi, dit : « Pas mal ! La tromperie est
habile et doit leur rapporter gros. Mais comment font-ils pour le palais ? »
10. Bartholomée dit : « le palais existe depuis longtemps, mais n'as-tu pas re-
marqué la grande coupole surmontant le palais au haut d'une colonne ? »
11. Judas dit : « Ah ! oui, je l'ai même admirée. »
12. Bartholomée dit : « Cette coupole renferme le voile du secret ! Il suffit d'une
demi-heure aux Esséniens pour recouvrir le palais d'une toile qui lui donne
l'aspect d'un rocher. As-tu saisi, ou dois-je me faire mieux comprendre ! »
13. Judas dit : « Oh, je te comprends bien, mais qui croirait que ces gaillards si
pieux et si sages se couvrent d'un tel ridicule ? Et qu'en est-il alors de l'écriture
dans la lune et de l'éclipsé totale du soleil ? »
14. Bartholomée dit : « C'est du plus parfait ridicule ! Que de fois j'ai dû soutenir
à bout de bras avec cinquante autres types costauds cette lune artificielle
accrochée à une longue perche ! Cette lune n'est qu'une passoire de deux pieds de
large, recouverte des deux côtés de parchemin blanc. Ce cercle creux renferme
quatre petite lampes à huile qui répandent une forte odeur. Le côté lumineux ne
se voit que des fenêtres du palais, l'autre côté est peint en noir. Seul le visiteur
conduit à une fenêtre du palais voit au firmament cette pleine lune portée à bout
de bras par ces cinquante types ! Que dis-tu de ce clair de lune ! »
15. Judas dit : « Arrête donc ! Cette tromperie est monstrueuse ! Et qu'en est-il
alors de l'éclipsé de soleil ? »
16. Bartholomée : « Il ne s'agit que de savants calculs permettant de prévoir les
futures éclipses naturelles du soleil, quand la lune passe en plein jour devant le
soleil. Ces calculs ne tiennent qu'à la science et à la connaissance des Esséniens,
apprise des Egyptiens ! Quant à la table vide subitement couverte de mets, ce
n'est qu'une ingénieuse machinerie du genre de ces socles ornés de squelettes ! »
17. Voilà tout l'art miraculeux des Esséniens, dont tu n'as vu que le centième et
dont le but est d'éberluer le non-initié !
18. Par exemple, dans un coin retiré du parc entouré de hautes murailles, le visi-
teur entend les arbres parler, ailleurs ce sont les rochers, ou même une source.
Dans un bassin, des serpents nourris de lait parlent aussi de temps à autre, et
ailleurs c'est l'herbe qui parle ! Il y aurait beaucoup à dire si l'on voulait tout
décrire. Il suffit que je te dise que presque chaque jour trente à quarante
personnes sont ainsi possédées contre beaucoup d'or et d'argent ! »
Chapitre 99
La philosophie des Esséniens
1. Bartholomée : « Et le plus beau est qu'il arrive parfois que des parents riches
donnent leur fils ou leur fille morts aux Esséniens, qui promettent de les rendre
dans un ou parfois même deux ans ! À force de supplications, et à prix d'or, voilà
comment les Esséniens acceptent de réveiller les morts. Ils commencent par
interroger les parents éplorés, leur demandant toutes sortes de détails concernant
l'enfant défunt, ce qu'il aimait boire et manger, comment était son lit, sa chambre,
quels étaient ses jouets, ses jeux, ses amis préférés ; pas un détail n'est oublié,
sinon, disent les Esséniens, le réveil est impossible.
2. Les bons parents donnent volontiers tous ces détails, croyant ainsi soutenir le
sauveur essénien dans sa tentative de réveiller l'enfant mort !
3. À la frontière égyptienne, ces Esséniens ont une institution où ils élèvent des
milliers d'enfants, parmi lesquels il leur est possible de choisir un enfant
ressemblant plus ou moins à l'enfant défunt. Ils prennent cet enfant à part,
l'éduquent en fonction du modèle du défunt, le conduisent sur les lieux où il
vivait, lui font rencontrer les anciens petits camarades de l'enfant défunt et font
tout pour qu'il puisse se sentir chez lui lorsqu'il ira retrouver ses prétendus
parents, qui l'accueilleront avec émotion, croyant retrouver leur propre enfant !
Évidemment, ce retour se paiera de beaucoup d'argent, qui sera donné avec joie.
4. Les parents pauvres ne peuvent s'offrir de tels miracles, mais ils sont consolés
et maintenus dans la foi par toutes sortes de petits miracles peu onéreux, mais qui
les assurent que leur enfant mort parviendra directement à l'Elysée.
5. Ces Esséniens n'ont au fond pas de mauvais principes. Ils disent simplement
qu'il doit exister une société très cultivée capable d'offrir le bonheur par tous les
moyens. Cette société, après des années d'études, de recherches et de réflexion,
estime que l'issue de toute chose est la mort et qu'après la mort il n'y a plus
aucune forme de vie. Les membres de cette société sont assez philosophes pour
estimer tout le prix de la vie et la considérer comme le bien suprême, et pour
rendre les gens heureux ils les consolent en leur parlant d'une vie après la mort et
en simulant des miracles.
6. Mais les initiés doivent observer le silence le plus absolu et cacher la vérité,
car toute vérité rend l'homme esclave de la mort. C'est ainsi, disent-ils toujours,
que Moïse dans sa Genèse résume tout en un seul verset : "Si tu manges de
l'arbre de la connaissance —c'est-à-dire de la vérité—tu mourras ! Car tout
homme qui vit en fonction de la vérité se jette dans les bras de la mort". Moïse a
donc institué une prêtrise initiée à la sagesse des Egyptiens, qui a perpétué
jusqu'à nous l'art de guider les hommes.
7. L'amour étant le principal précepte, il s'agit de conduire inlassablement les
hommes par toutes sortes de lois rigoureuses révélées par Dieu pour les attacher
à cette vertu de l'amour. Il faut leur mettre au cœur cette vertu, leur représenter
Dieu comme l'amour parfait, le juge le plus juste qui récompense le bien et punit
le mal. L'humanité est ainsi tenue en bride et guidée à faire le bien.
8. Mais si quelqu'un se met à prêcher la vérité et à dénoncer les institutions, ces
dernières doivent le faire disparaître sans tarder parce qu'il enseigne la vérité qui
engendre la mort. Rien est plus dangereux, en effet, que d'éclairer le profane dans
le domaine de la foi en Dieu et de la vie étemelle.
9. Voilà les préceptes fondamentaux de tes fameux Esséniens. Humainement
parlant, on ne peut les blâmer, mais spirituellement, à la lumière de ce que nous
savons, ils sont extrêmement condamnables. Jamais rien de vrai ne sort de leur
bouche, et celui qui dirait la vérité devant eux signerait son arrêt de mort ! »
10. Judas, l'air en colère, dit : « Quelles bêtises ! Comment ces types sont-ils
capables de tout cela ? Jamais je ne l'aurais cru. Mais je te crois, puisque tu es un
ancien Essénien ! Comment as-tu fait pour en sortir vivant ? »
11. Bartholomée dit : « Je me suis fait entièrement initier, et je suis venu ici pour
exercer mon service à l'extérieur. Comme ils ont toute confiance en moi, ils
m'ont laissé sortir. C'est un privilège qu'ils accordent volontiers, parce qu'ils ne
peuvent en tirer que des avantages.
12. Mais maintenant que j'ai appris à connaître, au lieu du mensonge, la vérité
parfaite, je ne retournerai jamais au couvent ! Et ceux qui sont à l'intérieur du
couvent ne sauront jamais ce que je sais. Mais ceux qui sont dehors finiront bien
par savoir ce que font les Esséniens ! »
Chapitre 100
Les disciples en péril sur la mer
1. Pierre dit : « Mais voilà déjà la troisième heure de la nuit (environ une du
matin), et toujours aucune embarcation en vue ! »
2. André, qui avait de bons yeux, dit : « Où que je regarde, je ne vois rien non
plus ! »
3. Le péager Matthieu dit : « Si seulement ce vent contraire tombait ! Les ra-
meurs sont épuisés, malgré notre aide. Nous ne tenons sur cette mer démontée
que par notre acharnement extrême. Si seulement le jour se levait, il nous ap-
porterait sans doute un autre vent ! »
4. Nathanaël dit : « Je ne demanderais qu'une seule chose, que le Seigneur re-
vienne ! Mais il vaudrait peut-être mieux retourner d'où nous venons et aller Le
chercher ? Il est finalement peut-être tombé aux mains des sbires d'Hérode ! »
5. Simon dit : « Eh ! quoi encore ! Les cieux et les éléments Lui obéissent aussi
bien que les larbins d'Hérode. N'a-t-Il pas dit qu'il nous suivrait quand la foule
serait dispersée et que nous devions partir avant Lui ? Ce qu'il dit est la Sainte
Vérité. Nous n'aurons pas atteint l'autre rive, avec ce vent contraire, qu'il sera
parmi nous ! Lui qui sait calmer la tempête, Il peut bien traverser les mers à la
vitesse du vent ! »
6. Jean dit : « Je suis parfaitement de ton avis. Ayons donc confiance en Lui, Il
ne nous abandonnera pas. Voyez, déjà cinq heures que ce vent nous tourmente, et
les marins n'ont pas faibli, grâce à Sa puissance nous voilà encore au sommet des
vagues, sans avoir tourné en rond ! sans être revenus à notre point de départ. Il
me semble que notre bateau reste solidement fixé au même endroit, je veux dire
que nous pourrions avoir entièrement confiance en Lui et laisser se reposer les
rameurs, le bateau ne bougera pas davantage, et le Seigneur va venir à notre
secours. Sinon, Dieu sait où nous serions déjà, avec cette tempête ! »
7. Pierre dit : « Oui, oui, tu as raison. Je constate aussi que le vent est impuissant,
nos rameurs ne seraient pas maîtres du vent si Sa main puissante ne venait à
notre aide ! Je vais dire aux rameurs de ne pas se donner tant de mal ! »
8. Pierre va dire aux rameurs de ne pas se donner tant de mal.
9. Mais les rameurs disent : « Nous apercevons la côte blanche du désert, elle est
blanche d'écume ! Le ressac doit être très puissant ! Si nous ne tenons pas le haut
de la vague, nous coulons tous ! »
10. Pierre dit aux rameurs : « Si nous n'étions pas les disciples du Seigneur Jésus
! Mais puisque nous le sommes, la tempête ne pourra rien, ou si peu, contre nous,
même si nous cessons de ramer vainement. Le jour ne va pas tarder à poindre, et
tout ira mieux. »
11. À ces mots de Pierre, les rameurs cessent peu à peu de ramer, et constatent
que le bateau ne sombre pas. Les huit rameurs se mettent alors aussi à croire que
le bateau tient le haut de la vague grâce à Moi.
Chapitre 101
Épreuve de la foi de Pierre
Matthieu 14, 25-33
1. Survient la quatrième heure. Comme le vent tombe peu à peu, André à la vue
perçante regarde de tous côtés la mer encore démontée, et il aperçoit un homme
marchant sur les flots comme sur la terre ferme.
2. André appelle les frères, leur montre cette figure humaine qui marche sur les
flots et dit : « Frères, voilà un mauvais signe, c'est un esprit marin, il n'y a plus
rien de bon à attendre quand surviennent de tels esprits ! ».
3. Et les disciples se mettent à crier pleins de frayeur : « Ô Jésus, pourquoi nous
as-Tu abandonnés, nous allons sombrer ! Oh, si Tu existes encore quelque part,
pense à nous, et sauve-nous de la perdition ! »
4. Alors que les disciples crient ainsi, Je M'approche à dix pas du bateau, et Je
dis à ces hommes tremblants de peur : « Soyez sans crainte, c'est Moi, ne crai-
gnez point ! » Et les disciples retrouvent leur calme.
5. André dit : « Ciel, c'est Jésus, notre Maître et Seigneur ! »
6. Mais Pierre, doutant encore un peu dit : « Si c'est Lui, il faut qu'il me fasse
monter sur les flots afin que j'éprouve si l'eau offre à mes pieds comme aux Siens
une base solide !
7. André dit : « En auras-tu vraiment le courage s'il te dit d'aller vers Lui sur les
flots ? »
8. Pierre dit : « Je sais bien que la mer ici est la plus profonde. Si c'est Lui, il ne
m'arrivera rien. Si ce n'est pas Lui et si c'est un fantôme, nous sommes perdus !
Je disparaîtrai devant vous dans l'abîme, où j'irai vous retenir une place ! »
9. Alors Pierre va au milieu du bateau, où le bord est le plus bas et Me crie : « Si
c'est Toi, Seigneur, ordonne-moi de venir Te rejoindre sur les flots ! »
10. Alors Je lui dis : « Viens te convaincre ! »
11. Pierre, aux cris de ses compagnons, descend du bateau sur la mer, et le doute
quitte alors les disciples qui le voient marcher comme Moi sur les flots, et ils
croient que c'est Moi !
12. Pierre se dirige en hâte vers Moi. Mais, alors qu'il est à peine à sept pas de
Moi, il voit le vent souffler plus fort, les vagues se soulever, il s'effraie, croyant
que les vagues vont l'engloutir, et, perdant un peu de sa grande foi, il se voit
enfoncer dans l'eau jusqu'aux genoux. Il crie alors avec effroi : « Seigneur, aide-
moi ! »
13. Je M'approche aussitôt pour lui tendre la main et le tirer de l'eau. Je le remets
à la surface des eaux, qui le portent comme auparavant, et Je lui dis : « Ô homme
de peu de foi ! Pourquoi doutes-tu ? Ne sais-tu pas encore que la foi qui ne doute
pas est maîtresse de tous les éléments ? »
14. Pierre dit : « Seigneur, pardonne-moi, Tu vois que je suis faible, le vent et les
vagues qui se soulèvent contre nous m'ont effrayé ! »
15. Je dis : « Tout est bien, nous voici devant le bateau, montons ! »
16. Et nous montâmes dans le bateau et la tempête se calma.
17. Tous les disciples et les rameurs se précipitèrent autour de Moi pour Me
louer et dire d'une seule voix : « Nous reconnaissons maintenant que Tu es vé-
ritablement le Fils de Dieu ! »
18. Et Mon Jean Me prit dans ses bras, Me serra sur son cœur de toutes ses
forces, disant : « Ô ! Toi mon Jésus, Toi que nous avons à nouveau ! Toute notre
crainte est maintenant bannie ! Mais ne nous abandonne plus jamais, c'est trop
affreux et trop terrible d'être sans Toi ! En vérité, toute ma vie je songerai à ce
voyage en mer, jamais je n'ai eu si peur ! La tempête peut reprendre quand elle
voudra, au milieu de nous se trouve son maître qui peut lui donner l'ordre de se
taire, et le tumulte sera contraint d'écouter la voix du Tout-Puissant ! »
Chapitre 102
Arrivée à Génézareth
Matthieu 14, 34
Chapitre 103
Le Seigneur et les Siens à la table de l'auberge
1. À notre arrivée en ville, nous entrâmes à l'auberge d'un brave homme nommé
Ebahi.
2. Ebahi nous offrit son hospitalité en disant : « À votre allure et à vos vêtements,
vous êtes Galiléens, des environs de Nazareth ! » Nous acquiesçâmes et il nous
fit apporter du pain, du vin et des poissons en disant : « Je vous offre trois jours
et trois nuits d'hospitalité, mais si vous qui êtes Nazaréens, vous pouvez me
parler du célèbre Sauveur nommé Jésus, qui guérit, paraît-il, miraculeusement
toutes les maladies, vous je vous tiens quittes pour toute votre vie, et vous
pourrez boire et manger ici tout ce que vous voudrez !
3. Si la chose est telle qu'on le dit, je donne tout ce que j'ai pour le trouver, et je
le rammènerai avec moi en marchant sur les genoux ! Car notre brave petit pays
libre a le malheur d'être le séjour de toutes sortes de maladies, sinon mortelles,
du moins épouvantables, car on ne peut s'en débarrasser !
4. Ah ! Si seulement il était possible de faire venir chez nous ce Sauveur ! Par
Jahvé, je ne sais ce que je donnerai, pour cela ! J'ai une auberge pleine de
malades qui ne peuvent poser le pied par terre, parmi eux des Egyptiens, des
Perses et des Indiens qui ne peuvent s'en retourner chez eux. J'ai là aussi des
Pharisiens, des lévites de Jérusalem, deux frères esséniens, gravement malades,
et aucun médecin d'ici ne peut se rendre maître de leur maladie !
5. Si vous trouviez ce Jésus de Nazareth, ou si vous pouviez au moins me dire où
je pourrais le trouver, je vous assurerais l'hospitalité votre vie durant ! »
6. Je dis : « Pourquoi ne Lui as-tu pas déjà envoyé un messager, puisque tu sais
qu'il est à Nazareth ? »
7. Ebahi dit : « Plus d'une fois j'ai déjà essayé, mais jamais je n'ai eu le bonheur
d'entendre le messager dire qu'il l'a trouvé ! Ils me racontent bien des milliers de
miracles qui leur ont été racontés à son sujet, mais jamais ils n'ont le bonheur de
le rencontrer personnellement ! »
8. Je dis : « Eh bien, parce que Je vois que ce n'est pas pour toi que tu réclames le
Seigneur, mais que tu as l'unique souhait parfaitement désintéressé de venir en
aide à tous ceux qui souffrent, de quelque pays qu'ils viennent, et c'est
précisément ce qui M'amène ici, sache pour ta joie donc, et pour ta consolation,
que Je suis Jésus Lui-même, que tu as cherché si souvent en vain ! Que tous les
malades de ton auberge soient secourus à l'instant même ! Envoie tes serviteurs
demander s'il y a encore des malades dans l'auberge ! »
9. Ebahi, au comble de la joie, dit : « Maître, si c'est Toi, je crois en Ta parole et
ne veux pas davantage m'enquérir, sois-en certain, je ne puis assez louer et
glorifier Dieu d'avoir amené sur ma maison un bonheur si inattendu ! Grand
Maître, divin Maître, donne Tes ordres pour Toi et pour les Tiens, Tu es maître
de ma demeure, tout ce que Tu trouves ici est à Ta disposition ! »
10. Alors qu'il parlait ainsi, la nouvelle se répandit que près de deux mille ma-
lades étaient soudain guéris, et que ce ne pouvait être là qu'un miracle. Tous ceux
qui étaient guéris voulaient venir exprimer leur reconnaissance à l'aubergiste !
11. Ebahi dit : « Allez leur dire tout d'abord que je n'y suis pour rien et qu'ils ne
me remercient pas, mais qu'ils louent Dieu uniquement, qui a envoyé le mira-
culeux Sauveur dans notre pays ; et demandez aux riches qui sont étrangers de
régler ce qu'ils doivent pour leur hébergement, mais n'y allez pas trop fort. Quant
aux autochtones, l'hospitalité leur est offerte gratuitement. »
12. À ces mots, ceux qui avaient apporté la nouvelle vont exécuter ses ordres.
13. Puis Ebahi, se tournant vers Moi, tombe à genoux et Me remercie avec des
larmes de joie pour le bienfait rendu à sa maison.
14. Je lui ordonne de se relever et d'amener devant Moi sa femme et ses enfants !
15. Et il va et fait ce que Je demande.
16. Quand il M'amène ses deux femmes et ses seize enfants, soit dix garçons et
six filles, il Me dit : « Tu vois en moi encore un véritable Israélite. De même que
Jacob notre ancêtre avait des enfants de ses deux femmes Léa et Rachel, j'ai moi
aussi deux épouses, à cela près qu'elles ne sont pas sœurs ; j'ai de la plus âgée ces
dix garçons et de la plus jeune ces six filles, qui sont toutes bientôt pubères, et
j'ai soixante-dix ans.
17. Tous ces enfants sont élevés selon l'Écriture et mon fils aîné est un lévite,
non à la solde du Temple, mais pour lui-même et pour ses descendants. Mes
autres enfants sont aussi élevés selon l'Écriture. Ils aiment Dieu et Le craignent,
car la crainte de Dieu est le commencement de la sagesse. Dans ma maison, les
sages maximes de Jésus de Sirah sont sévèrement observées. Grand Maître, es-
Tu content de ma maison ? »
18. Je dis : « Selon la coutume, il n'y a rien à redire à propos de ta maison. Je
n'empêche personne d'avoir deux, trois femmes et davantage, car la femme a été
créée pour la reproduction. La stérilité de la femme ne plaît pas à Dieu, à moins
que cette stérilité ne soit congénitale, et l'être humain n'y est alors pour rien !
19. Mais par la suite, chaque homme ne devra épouser qu'une femme, vierge ou
veuve capable d'avoir encore des enfants. Car si Dieu avait voulu que l'homme
ait plusieurs femmes, Il en aurait donné plusieurs à Adam ! Mais Dieu a voulu
que chaque homme n'ait qu'une femme et Il n'a donné qu'une seule femme à
Adam.
20. Que les hommes s'éloignent de ce premier commandement, surtout chez les
païens, où les princes notamment prennent toutes les plus belles vierges de leurs
pays pour en faire leur femmes et en achètent même aux princes étrangers. Ce
n'est pas le fruit de la volonté divine mais de celle de l'homme pécheur ; car la
plupart de ces femmes ne sont pas choisies pour procréer, mais pour le plaisir des
sens. Et celui qui ne respecte pas le premier commandement ne vit pas selon
l'ordonnance divine.
21. Tout autre est le cas d'une femme stérile comme Rachel. L'homme peut dans
ce cas prendre une autre femme pour avoir des descendants. Pour toi cependant
tout est en ordre, ton comportement a toujours été juste et il a plu à Dieu. Ainsi tu
es un juste aux yeux de Dieu et des hommes, sinon Je ne serais pas entré dans ta
maison. »
Chapitre 104
Le Seigneur bénit la maison d'Ebahi et blâme les Esséniens
1. Là-dessus, Je bénis les enfants et les deux femmes, qui étaient une seule âme
et un seul cœur car elles ne se cherchaient jamais querelle. Puis Je quittai les
deux femmes et les seize enfants disant à Ebahi : « Tu peux être heureux de tes
enfants pas un seul n'est perturbé ni physiquement ni spirituellement, tous
éclatent de santé, ils ont des cœurs cristallins pleins de piété et d'obéissance, et
tes deux femmes ont encore l'air très jeune ! Le mauvais climat de la région ne
semble avoir aucun effet sur ta maison ! »
2. Ebahi dit : « Pour les natifs de l'endroit, l'air et l'eau d'ici ne sont pas nocifs,
mais il n'en est pas de même pour les étrangers, dès qu'ils restent ici quelques
jours, ils tombent gravement malades, gardant parfois le lit une année entière !
Ceux qui s'en remettent supportent alors parfaitement le climat et restent en
bonne santé.
3. Mais c'est une calamité pour le pays, il est très difficile de trouver des
ouvriers, les voyageurs étrangers évitent ce pays comme la peste, et ceux qui sont
obligés d'y venir pour affaire, tombent malades. Les deux tiers des soldats
romains sont malades, aucun médecin ne parvient à les guérir. Ils finissent en
général par se guérir tout seuls au bout d'une année ou deux !
4. Le plus étrange est que jamais personne ne présente les mêmes symptômes.
L'un a la fièvre, l'autre vomit, un troisième a la diarrhée, le quatrième la toux.
Chaque fois c'est autre chose et personne ne sait que faire pour leur venir en aide
! C'est ainsi qu'il y a une foule de malades dans notre pays et ils sont d'autant
plus nombreux qu'il n'y a pour ainsi dire pas de mortalité !
5. Peut-être Te serait-il possible de guérir tous ces malades et de donner au pays
le moyen de se prémunir contre ces maux ? »
6. Je dis : « Je vais rester ici quelques jours et les malades apprendront que Je
suis ici par ceux qui seront guéris. Ceux qui viendront à Moi seront guéris, mais
ceux qui ne viendront pas ne seront pas guéris, car personne n'est si malade qu'il
ne puisse faire route jusqu'ici ! »
7. Ebahi dit : « Si cela peut T'être agréable, Maître, j'enverrai des messagers dans
toute la province ! »
8. Je dis : « Laisse donc ! Ils le sauront bien assez tôt ! »
9. Là-dessus arrivent déjà plusieurs malades qui viennent d'être guéris, parmi eux
des Pharisiens et des lévites de Jérusalem, ainsi que deux Esséniens. Ils viennent
M'exprimer leur reconnaissance d'avoir été guéris, et demandent que Je leur
apprenne si possible la science par laquelle Je les ai guéris par la seule parole.
10. Je ne leur fais pas de longs discours, Je dis seulement : « Que cherchez-vous
? Le monde et sa précieuse matière est ce qui vous intéresse, alors qu'il s'agit ici
de quelque chose de purement spirituel ! Et vous, Esséniens en particulier, qui
reconnaissez un Dieu et prêchez la résurrection que vous prouvez par toutes
sortes de subterfuges ingénieux pour vous gagner des adeptes, votre devise n'est-
elle pas qu'il faut avoir la bonne volonté de tromper et de mentir si l'on veut
rendre les gens heureux, parce que la vérité porte préjudice au salut de l'homme
de cette terre ?
11. Si vous fondez le bonheur de l'homme sur le mensonge, comment voulez-
vous entendre de Moi la vérité, vous vous écartez de la connaissance du royaume
de Dieu et vous êtes les derniers, alors que vous voulez être les premiers ! Si
vous restez comme vous êtes, vous n'aurez jamais part au royaume de Dieu !
12. À quoi sert votre bonne volonté à rendre les hommes heureux par la trom-
perie et le mensonge, si vous tuez ainsi l'âme des aveugles ?
13. Ma raison, au contraire, est de sauver l'âme, fût-ce au prix du corps lui-même
ou de tout son bonheur, afin de préparer pour elle une véritable vie éternelle !
14. Mais vous comment ferez-vous dans l'au-delà, où ceux que vous aurez
trompés deviendront vos juges ? Vous ne croyez pas que cela arrivera ! Mais cela
arrivera comme Je vous le dis !
15. Ne croyez pas à Mes paroles, mais à Mes actes que J'accomplis et que per-
sonne n'a accomplis avant Moi !
16. Mais si Mes œuvres sont justes et vraies et que Mes paroles en témoignent,
Mes paroles sont également vraies.
17. Personne ne peut vous dire comment est l'Inde, si ce n'est celui qui y est allé
lui-même. Personne ne peut vous donner de certitude sur l'au-delà si ce n'est
Celui qui en vient, et Je suis celui-là.
18. Qui croit Ma parole aura la vie éternelle et qui n'y croit pas ira à la mort
éternelle, car Mes paroles ne sont pas comme celles des hommes de cette terre,
elles sont la vie et donnent la vie à celui qui les accepte dans son cœur et vit en
s'y conformant selon l'esprit qui les anime.
19. Mais vos paroles à vous, Esséniens, qui prêchez au peuple, sont de purs men-
songes et de pures tromperies, parce que vous ne croyez pas ce que vous en-
seignez. Vous avez un double enseignement, l'un pour le peuple, l'autre pour
vous. Vous prétendez que le peuple ne peut comprendre et qu'il doit rester heu-
reux et tranquille dans le mensonge.
20. Mais Je vous le dis : les mensonges que vous enseignez au peuple contien-
nent plus de vérité que celle que vous gardez pour vous, car ce que vous croyez
être la vérité n'est que pur mensonge, et ce que vous enseignez au peuple n'est
qu'un demi-mensonge. C'est pourquoi Dieu vous a tolérés !
21. Mais à l'avenir, enseignez la vérité et croyez en la vérité, et vous aurez la
récompense des véritables serviteurs de la vigne du Seigneur. Mais vous devez
vous écarter du mensonge et de la tromperie et cesser à jamais d'en faire usage,
sinon votre condamnation au jugement dernier sera terrible ».
22. Les deux Esséniens disent : « Maître, nous reconnaissons bien que tu as dit
vrai. En ce qui nous concerne nous allons renoncer à tous nos biens pour
permettre à tes paroles de pénétrer dans notre grande compagnie. Mais nous ne
pouvons nous porter garants de nos frères ; ils ne sont pas mauvais du tout, on
peut parler ouvertement avec eux pour autant que les portes soient fermées et ils
nous écouteront volontiers, mais quant à savoir si nos paroles auront un effet,
c'est une autre affaire ! Nous parlerons cependant avec l'assurance d'être écoutés
avec une extrême attention. »
23. Je dis : « Faites ce que vous avez à faire, Dieu n'oubliera pas de faire Lui
aussi ce qu'il a à faire ! Acceptez la pleine vérité, elle vous rendra libres pour
l'éternité. »
24. Les deux Esséniens disent : « Maître et Seigneur, permets-nous de rester ici
aussi longtemps que Tu y resteras ! »
25. Je dis: «Vous êtes libres; vous pouvez rester aussi longtemps que vous
voudrez. »
Chapitre 105
Le Seigneur et le capitaine romain
De l'amour du prochain
1. Les deux hommes furent satisfaits de cet avis, et Ebahi vint M'inviter avec
Mes disciples au dîner qu'il avait fait copieusement préparer pour nous tous. Sa
famille mise à part, aucun hôte étranger ne fut admis à ce repas. Cela fit ombrage
à quelques Pharisiens, car croyant être les premiers, ils se faisaient saluer par tout
le monde, et, quoique très bien servis dans une autre salle à manger, ils étaient
mécontents de voir qu'Ebahi Me portait plus d'attention qu'à eux. Après le repas,
en effet, ils demandèrent à un garde si le maître de maison n'apprécierait pas leur
compagnie pour ne les avoir pas voulus à sa table. »
2. Le garde était intelligent, il répondit : « Le Maître avait à parler des malades
seul à seul avec le miraculeux médecin. »
3. Les Pharisiens et les lévites dirent : « Sais-tu, ainsi que ton maître, que tous les
mystères doivent nous être dévoilés quand nous pénétrons dans une demeure ?
C'est nous qui vous purifions alors que vous êtes impurs et c'est nous qui vous
guérissons lorsque vous souffrez de maladies graves. »
4. Le garde dit : « Si vous êtes de pareils guérisseurs, pourquoi ne vous ma-
nifestez-vous pas davantage ? Si le miraculeux Sauveur de Nazareth n'avait pas
été amené ici par je ne sais quel bon vent, vos douleurs ne vous auraient pas
quittés ! Ce n'est qu'à sa force miraculeuse que vous devez d'être guéris et de
pouvoir ainsi être assis dans cette salle. Celui par qui c'est arrivé mérite bien cet
honneur et toutes ces marques de distinction ! »
5. À cette réponse pertinente du garde, les Pharisiens et les lévites n'ajoutent pas
un mot et se tiennent pour satisfaits, non de bon cœur, mais parce qu'ils y sont en
quelque sorte contraints !
6. Le soir venu, plus d'une centaine de malades de toute sorte arrivent de la ville
et des environs, Me priant de les guérir. Je vais parmi eux et d'une parole Je les
guéris tous.
7. Ceux qui sont guéris louent Dieu et lui rendent grâce d'avoir donné à un
homme un tel pouvoir, puis ils s'en retournent chez eux, heureux et contents.
8. Le capitaine qui commande la garnison de la ville arrive dans la soirée, Me
demandant si Je pourrais venir en aide aux soldats malades !
9. Je lui dis : « Va, et qu'il en soit selon ta foi ! »
10. Et le capitaine s'en retourna au camp où il ne trouva plus aucun malade. Il
s'en revint à Moi tout content, voulant Me remercier avec de l'or et de l'argent.
11. Mais Je refusai et dis au capitaine : « Ami, Je ne guéris personne pour les
trésors du monde, mais seulement pour les trésors du ciel, qui sont d'abord une
foi vivante, ensuite l'amour véritable et désintéressé de Dieu et du prochain quel
que soit son état !
12. Aime tes subordonnés comme tes frères chéris, ne sois pas trop sévère avec
eux, et ce sera pour Moi la récompense la plus précieuse. L'or et l'argent que tu
voudrais Me donner, donne-les à Ebahi, son auberge lui coûte très cher et il est
bon de le soutenir.
13. Mais il serait aussi bon que vous, Romains, vous construisiez des auberges
pour les pauvres au lieu de temples pour vos idoles. Car vos dieux de bois, de
bronze et de pierre sont des images inanimées faites de la main des hommes ;
vous pouvez les implorer à genoux pendant des années, jamais elles ne pourront
vous aider, parce qu'elles sont mortes. Mais si vous prenez soin des malades, des
pestiférés, des estropiés, des paralysés, des aveugles et des sourds dans de bonnes
auberges et cherchez à venir en aide aux malades, l'unique vrai Dieu verra vos
bonnes œuvres et vous bénira abondamment pour cela. Mais vos idoles inani-
mées ne vous béniront pas pour le bien, pas plus qu'elles ne puniront pour le mal
que vous ferez.
14. Et quand vous saisissez l'épée et la lance pour veiller à l'ordre et à la justice
dans votre royaume, vous faites les armes à la main ce que Dieu ferait pour vous
si vous Le reconnaissiez et si vous suiviez Ses commandements ! »
Chapitre 106
Conception du monde du capitaine romain
1. Le capitaine dit : « Cher ami, je reconnais bien que tu dis la vérité et qu'il
devrait en être comme tu le dis avec tant de sagesse et tant d'humanité ; mais le
monde de l'homme est un fleuve puissant, et qui tente de le prendre à contre-
courant est emporté par de puissants tourbillons ! Il faut être bien retiré du
monde pour ne pas être atteint par ce courant, et qui s'y jette au beau milieu est
emporté !
2. C'est une bonne chose de dire la vérité dans un endroit retiré où les gens sont
doux et accommodants parce qu'ils n'ont pas encore respiré les luxurieuses
pestilences du monde, mais va à Rome, à Athènes ou à Jérusalem, si tu n'es pas
un dieu, tu auras tôt fait de déguster le tranchant de la lame des puissants de la
terre, comme Jean de Bethabara, qu'Hérode a fait décapiter dans sa prison.
3. Vois-tu, ce Jean était sant doute un homme éloigné de tout désir terrestre, et
qui, avec la plus profonde abnégation avait le remarquable don de vous dire avec
puissance la vérité toute nue en plein visage, et des milliers de personnes
acceptaient son enseignement où transparaissait l'esprit de Dieu, faisaient
volontairement pénitence et se tournaient vers le bien. Mais quand il quitta
Bethabara, il y a quelques mois, comme on me l'a raconté, pour se remettre à
prêcher et à baptiser au bord du Jourdain près de Jérusalem, en quelques jours il
fut arrêté par les sbires d'Hérode et jeté en prison, où ses disciples pouvaient
venir le voir, moyennant finance, jusqu'à sa décapitation que j'ai apprise il y a
quelques jours. Il est vrai que ses disciples peuvent transmettre secrètement son
message à leurs amis et à leurs proches, mais on peut se demander si, dans
quelques siècles, son enseignement sera encore tel qu'il est sorti de sa bouche !
4. L'enseignement que nous avons de Dieu chez les Romains a certainement la
même origine que celui des Juifs. Il est aussi basé sur un être originel unique
auquel tous les dieux sans distinction aucune sont soumis. Les mythes lui ont
donné divers noms ; les Grecs l'appellent le Dieu des dieux inconnus, les
Romains l'appellent le destin auquel toutes les forces sont soumises.
5. Considère l'actuelle théogonie des Grecs et des Romains, pour la pensée
humaine, ce ne sont que quelques lambeaux de fables et de contes insignifiants,
où sont décrites jusque dans les moindres détails toutes les faiblesses humaines,
en plus de quelques vertus ; et tout cela est imposé aux hommes par le feu et par
le fer sous prétexte que c'est l'enseignement de Dieu ! Change cela si tu peux, de
mon côté je n'y mettrai aucun obstacle !
6. Mais le plus bel exemple, c'est l'enseignement de Moïse. Lis Moïse et vois ce
que le Temple est devenu aujourd'hui, et dis-moi s'il reste un iota de l'ancienne
sagesse ! Dieu a donné Lui-même les Tables de la Loi au peuple tremblant dans
le désert au bord de la mer Rouge, du haut du Sinaï, au milieu du tonnerre et des
éclairs ! Pose la question à ceux qui connaissent les infâmes mystères du Temple,
et tu auras la preuve de l'inutilité de tout cela !
7. Où est la merveilleuse Arche d'alliance où Dieu demeurait sous la forme d'une
colonne de feu ! Oui, tu peux apercevoir une flamme de naphte, si tu es Romain
et si tu donnes au Temple quelques pièces d'or et d'argent, mais de la
merveilleuse Arche d'alliance, il n'y a plus la moindre trace !
8. À mon avis, c'est le sort de toute révélation et de tout enseignement. Ils ont
beau être purs, ils finissent tôt ou tard par être déformés et par perdre toute
ressemblance avec ce qu'ils étaient au départ, comme le vieillard finit par ne plus
ressembler du tout au bébé qu'il a été ! Le temps et les passions des hommes
changent le pur en impur, l'histoire de toutes les époques et de tous les peuples en
témoigne, personne ne peut le nier !
9. Par conséquent, cher ami, quoique je ne veuille nullement me surestimer au
point de vouloir te donner moi-même un enseignement, je crois pourtant devoir
te donner le conseil amical de fuir comme la peste les lieux où l'humanité s'est
déjà dégradée jusque dans ses plus extrêmes profondeurs, sinon le sol de cette
terre, malgré tes connaissances des forces secrètes de la nature qu'il est bon
d'avoir, ne sera plus foulé longtemps par ton pas qui porte le salut.
10. Ne te fie pas aux Pharisiens et aux lévites de ta propre religion et ne va que
rarement dans les lieux qu'Hérode tient en fief, et tu pourras encore faire long-
temps du bien aux pauvres. Mais si tu n'y veilles pas, tu partageras bientôt le sort
amer de Jean ; car je suis en mesure de savoir à quel point les hommes de ce
monde sont mauvais. Ôte son glaive au pouvoir de Rome et supprime les lois, tu
verras aussitôt les hommes se déchaîner comme des hordes de tigres, d'ours, de
loups et de hyènes ! Les hommes seront des diables et les femmes des furies ! »
Chapitre 107
Le Seigneur donne au capitaine un aperçu de Sa nature et de Sa mission
Chapitre 108
Définition du prophète
Chapitre 109
Différence entre les prophètes et le Seigneur
Chapitre 110
La prairie bénie
Promenade en mer
Chapitre 111
De la prière authentique
1. Lorsque nous nous retrouvâmes tous sur la rive, le capitaine dit : « Seigneur,
j'ai maintenant la preuve suffisante que tu es Dieu Lui-même ou son Fils, car
aucun mortel n'est capable d'une chose pareille ! »
2. Ils tombèrent alors tous à genoux, voulant se mettre à Me prier.
3. Mais Je leur intimai l'ordre de se relever et leur dis : « Écoutez, Dieu, comme
Moi, n'a nul besoin de tout cela, la seule et unique véritable prière est dans
l'amour sincère de Dieu le Père dans les cieux, et pareillement dans l'amour du
prochain qui est à côté de vous ! Pour Dieu comme pour Moi, toute autre prière
n'a aucune valeur.
4. Dieu n'a jamais enseigné aux hommes de L'honorer des lèvres en gardant un
cœur froid. Et parce qu'un Samuel a prié en public devant le peuple comme de
nombreux autres prophètes, et parce que David a chanté ses psaumes au Seigneur
et Salomon son cantique, le peuple s'est mis à prier du bout des lèvres et à faire
de froides offrandes.
5. Mais Dieu a ces prières et ces offrandes en abomination. Celui qui ne peut
prier dans son cœur fait mieux de s'abstenir de prier, afin de ne pas être
inconvenant devant Dieu. Pieds et mains, oreilles et lèvres n'ont pas été donnés à
l'homme par Dieu pour prier vainement dans le vide, mais seulement le cœur.
6. Cependant, chacun peut prier avec les pieds, avec les mains, les yeux, les
oreilles et les lèvres : avec les pieds, pour aller vers les pauvres leur porter aide et
secours ; avec les mains, pour les tendre aux affligés, les yeux pour poser son
regard sur la misère, les oreilles pour écouter la parole de Dieu, mais aussi pour
entendre les prières des pauvres, et finalement avec les lèvres pour consoler la
veuve et l'orphelin et savoir trouver le mot juste à dire pour faire libérer le
prisonnier souvent injustement incarcéré.
7. L'homme prie aussi avec ses lèvres lorsqu'il enseigne les ignorants, quand il
leur parle de la vraie foi et de la véritable connaissance de Dieu et des vertus
nécessaires. Tout cela est aussi une prière agréable à Dieu !
8. Maintenant que vous savez cela, faites-le et vous ne serez jamais privés des
bénédictions de Dieu, car cela s'appelle Dieu en esprit et en vérité.
9. Il est bien écrit que l'homme doit prier sans cesse s'il ne veut pas tomber dans
la tentation, mais il serait inepte et fou que Dieu exige des hommes une prière
ininterrompue des lèvres ! Pour plaire à Dieu, les hommes devraient alors être
nuit et jour à genoux et dire continuellement des lèvres des prières vaines et sans
cœur, et caquetant comme des poules, sans jamais se rendre utiles à quoi que ce
soit ! Tandis que si vous êtes continuellement actifs des mains, des pieds, des
yeux, des oreilles et des lèvres, et si dans vos cœurs vous aimez sans cesse Dieu
et votre prochain, vous êtes alors en prière, en vérité et en acte, et Dieu vous
bénira toujours et vous donnera la félicité et la vie éternelle dans l'au-delà !
Avez-vous bien compris ? »
10. Tous dirent : « Oui, Seigneur et Maître, c'est clair et vrai, comme est claire et
vraie la lumière du soleil, et nous agirons tous en ce sens ! »
11. Je dis : « Bien, Mes chers amis, retournons en ville. »
12. Ebahi damanda alors à quelques-uns des huit rameurs de l'accompagner pour
leur donner du pain et du vin, des poissons et des fruits. Six d'entre eux se mirent
aussitôt en route et Ebahi les pourvut abondamment.
Chapitre 112
De l'éducation et de l'amour
Chapitre 113
De la véritable louange et du danger des louanges
Chapitre 114
Jarah et son expérience de la prière
Chapitre 115
Jarah voit le ciel ouvert
1. Alors la très chère Jarah leva aux cieux ses beaux yeux bleu ciel et comme une
personne transfigurée, pleine du plus extrême ravissement, elle vit les
profondeurs du ciel s'ouvrir devant ses yeux ! Puis elle se mit à balbutier, avec
une voix d'une douceur et d'une pureté célestes : « Ah, ah, ô Toi grand Dieu plus
que saint, quel ravissement indescriptible, je vois là les cieux infinis remplis des
anges les plus saints ! Ô qu'ils doivent être bienheureux, mais la petite Jarah est
plus heureuse encore, car le trône éternel au centre des cieux infinis, autour
duquel des myriades infinies d'anges prosternés sur des nuages lumineux clament
: « Saint est Celui dont le trône se dresse ici. Ô ! Réjouissez-vous éternités,
bientôt Il aura sur terre accompli Sa grande œuvre indescriptible, et Il viendra
occuper ce trône de la gloire de Dieu, ce trône est vide ! Mais Celui qui aura seul
le droit d'occuper ce trône est assis en ce moment en tant qu'homme auprès de la
pauvre Jarah ! Ô, louez-Le, glorifiez-Le, c'est Son trône éternel de toute
puissance et de toute gloire ! »
2. Ceci dit, Jarah s'abandonne sur Mon sein, et quand la vision lui est enlevée,
elle dit : « Ô, très grand et unique Saint, repousse la pauvre petite Jarah qui ose
encore T'aimer par-dessus tout, je n'y peux rien si mon cœur t'aime plus que tout
!»
3. Je dis : « Oui, Mon petit cœur, c'est pour cela que Je t'ai montré Ma splendeur
et Mon royaume, car Je veux que tu M'aimes de plus en plus ! Aime-moi donc
puissamment, cet amour-là ne te fera aucun tort. »
4. Jarah Me prend dans ses bras et Me presse aussi fort qu'elle peut sur son cœur,
et Je dis à ceux qui nous regardent muets d'étonnement : « Voyez, prenez-en
exemple ! Cette fillette qui n'a que douze ans Me témoigne un amour comme il
ne M'en a pas été donné dans tout Israël. Mais à celui qui M'aime autant qu'elle,
Je donnerai aussi en abondance ce que le monde et Israël n'ont jamais eu, senti ni
goûté. »
5. Après cette scène infiniment édifiante qui dura une bonne heure, les serviteurs
d'Ebahi vinrent lui demander s'il était temps d'apporter le souper.
6. Ebahi dit : « Si c'est agréable à notre Seigneur, apportez-le. »
7. Je dis : « Apportez ce que vous avez, car l'amour donne et goûte, et Je veux
aussi goûter ce que J'ai donné ! Mais Mon mets préféré est cette fillette-ci, car
elle Me donne ce que l'éternité ne M'a pas encore donné et ne pouvait Me
donner. »
8. Les serviteurs s'éloignent pour chercher les mets préparés. Ils ouvrent de
grands yeux épouvantés quand ils voient que tout ce qu'ils avaient préparé a
disparu et a été remplacé par les mets les plus fins et les plus rares, les plus beaux
fruits, les meilleurs vins. Ils s'en reviennent pour raconter avec émerveillement ce
qui vient d'arriver à la cuisine, et demandent s'il leur faut amener ces nouvelles
victuailles, ou s'il faut les mettre à cuire.
9. Je dis : « Apportez tout ce qui est dans les cuisines, car vous êtes Mes hôtes
aujourd'hui. Ce que vous aviez déjà préparé a été donné à Mes disciples, aux
deux Esséniens et aux Pharisiens. Ne les dérangez pas, car aujourd'hui, en Mon
nom, ils auront un gros travail à faire, qui leur prendra toutes leurs forces jusqu'à
minuit.» Là-dessus les serviteurs vont chercher la nourriture céleste.
10. Ebahi et le capitaine disent, le cœur débordant de joie : « Seigneur, de telles
manifestations ne nous étonnent plus, nous voyons par trop clairement que Tu es
le Seigneur à qui rien n'est impossible. Il ne nous reste que l'importante question
de savoir pourquoi nous avons mérité une telle grâce ! Mais voilà déjà les
nourritures célestes, nous en reparlerons après le repas ! »
11. Les plats sont mis sur les tables, les grâces sont dites, et sur Mon signal tous
attaquent volontiers, boivent et mangent, et le capitaine dit n'avoir jamais rien
goûté d'aussi délicieux, n'avoir jamais bu vin si fameux ! Ma Jarah aussi se
délecte, disant que rien d'aussi bon n'a jamais touché son palais, que jamais son
estomac n'a été si content. Bref, ils ne peuvent assez déguster ces mets excellents
et ils se mettent tous à louer le bon Père dans les cieux.
Chapitre 116
Les miracles de Jésus doivent rester secrets
1. Je leur dis : « Bienheureux vous tous qui croyez que le Fils de l'homme a été
envoyé du Père qui est dans les cieux pour venir en ce monde relever ceux qui
sont tombés et libérer ceux qui sont prisonniers. Mais attention, veillez à ne
parler à personne de tous ces signes étranges, cela vous causerait un double
malheur.
2. La moitié des gens se fâcheraient et ne croiraient pas. Ils vous traiteraient de
fous et vous diraient toutes sortes de méchancetés, car un aveugle dans sa colère
est plus dangereux que cent hommes qui voient clair. L'autre moitié, au contraire,
acceptera vos récits avec une crédulité qui les enchaînera et les rendra incapables
d'agir librement ! Ce qui signifiera que l'esprit libre de l'homme sera tué.
3. Transmettez les enseignements que vous avez reçus à vos amis et
connaissances. Car Mes paroles sont la vérité éternelle qui peut rendre libre tout
homme qui l'accepte pour lui et qui en fait le fil conducteur de son existence,
reconnaissant par là qu'elle est une vérité éternelle de Dieu qui est, était et sera
toujours l'être et la vie étemelle de tout homme en qui cela est vivant.
4. Malheureusement, beaucoup de gens ne voudront ni écouter ni accepter une
telle vérité, et ils la pourchasseront comme un ennemi ! D'autres gens, craignant
les puissants, la fuiront comme la peste. Mais, agissant ainsi, ils n'accéderont pas
à la vie éternelle et la mort éternelle sera leur lot.
5. Qui aime la vie charnelle et s'acharne à tout prix à vouloir la conserver finira
aussi par perdre la vie éternelle de son âme avec la vie de son corps. Tandis que
celui qui fuira la vie charnelle gagnera la vie éternelle de l'âme. Notez-le bien !
Mais que ceux qui ont encore des questions là-dessus les posent ! Je leur
répondrai ! »
6. Le capitaine dit : « Maître et Seigneur, que pourrions-nous encore Te
demander ? Nous savons et nous sentons bien qui Tu es, nous savons et nous
voyons aussi ce que nous avons à faire, nous savons et nous ressentons profon-
dément que Tu as la vie éternelle, que Tu peux la donner, que Tu la donnes à
chacun par le fait même qu'il vit et agit selon Ta parole. Il serait inutile d'en sa-
voir davantage, d'autant plus, comme me l'a assuré l'un de Tes disciples, que
nous pouvons même guérir en ton nom les malades, simplement par la foi vi-
vante !
7. Nous Te devons une reconnaissance étemelle pour une grâce aussi inattendue
et aussi imméritée et nous te donnons la plus ferme assurance que Tu T'es érigé
dans nos cœurs pleins de reconnaissance un éternel mémorial que les puissances
infernales et les tempêtes du temps ne sauraient détruire. Je pense donc, la nuit
étant avancée, que nous pouvons aller nous reposer. Certes, rien ne presse, mais
quant à moi, je dois encore aller voir ce que font mes hommes ! »
8. Je dis : « Laisse cela ! Comme hier tout est en ordre, je vais veiller jusqu'au
milieu de la nuit, et vous verrez alors que cette veille n'aura pas été inutile !
Aujourd'hui encore nous aurons affaire à des voyageurs, ce sont des Pharisiens et
des lévites venus de Jérusalem. »
9. Ebahi dit : « Oh ! C'est fâcheux ! Je me passerais volontiers de ceux là, car
c'est bien le genre d'hôte le plus désagréable ; ils ont plus d'exigences qu'une
centaine d'hôtes étrangers qui paient leur dépense, alors qu'ils veulent tout pour
rien et qu'ils ne sont jamais contents, surtout lorsqu'ils voyagent au service du
Temple. Ah ! Seigneur, Tu ne me dis là rien de réjouissant ! Aïe, aïe, aïe, que va-
t-il arriver ? »
10. Je dis : « Ne t'en fais pas ! Les caves et les celliers sont pleins. Il y a dans
cette maison de quoi loger des centaines de personnes, et ils ne sont pas si
nombreux. À Mon sens, ils sont envoyés de Jérusalem à Nazareth, et, Me
trouvant ici, ils n'iront pas à Nazareth ! Ils vous mettront en colère, mais Je leur
offrirai un vin clairet qui les fera partir d'ici en rage. »
11. Ebahi dit : « Mais alors nous aurons le diable au cou ! Ils feront à Jérusalem
un rapport qui fera notre désespoir ! »
12. Je dis : « Il sera fait en sorte qu'ils ne racontent pas grand-chose à leur retour
! » À cette explication, il se fit un grand silence dans la pièce, et tous, désormais
tranquilles, s'absorbèrent dans leurs pensées.
Chapitre 117
Les malades viennent à Ebahi
Les hôtes de Jérusalem et leur mission
Matthieu 14, 35
Chapitre 119
Le pouvoir de l'amour
Chapitre 120
Jarah rêve de la Crucifixion et de la Résurrection
1. Jarah dit : « Je pourrais bien le faire, mais mes rêves en général sont effrayants
et me montrent l'humanité dans toute son horreur, je ne vois que des diables dans
les êtres humains ! Ainsi, dernièrement, ai-je eu un rêve où j'ai vu un être
merveilleux très semblable à Toi, ô Seigneur, et cet homme était lié avec des
cordes comme un malfaiteur.
2. Je demandai à ceux qui le suivaient en pleurs ce que cet homme merveilleux
avait bien pu faire pour que les gens du monde soient si méchants avec lui, et
ceux qui pleuraient me dirent les uns et les autres : "C'était un puissant
bienfaiteur de l'humanité, jamais il n'a commis d'injustice, la plus pure vérité
était le miel vierge de sa bouche. Il a trop dit la vérité aux Pharisiens ambitieux et
dominateurs et ils l'ont fait condamner au supplice sur la croix par le gouverneur
romain, qui est un faible. Ils le mènent au lieu du supplice. Viens maintenant
avec nous voir comment le plus grand ami du genre humain est remercié par la
méchanceté et l'égoïsme des hommes.
3. Et j'allai avec ceux qui pleuraient sur un mont peu élevé, et je vis le mer-
veilleux homme, ensanglanté par les coups et les meurtrissures et, pour que sa
souffrance soit accrue, portant sur la tête une couronne d'épines, traîner lui-même
sa lourde croix. Au lieu du supplice, il fut mis à nu et jeté comme un animal
sauvage sur la croix. On prit des clous pointus, on les enfonça avec de lourds
marteaux à travers ses pieds et ses mains, et voilà de quelle ignoble façon il fut
mis en croix ! Ô Seigneur, pour Toi quel horrible spectacle ! Quand je pense à ce
rêve, j'en perds l'ouïe et la vue ! On releva enfin la croix, on la ficha dans un trou
où elle fut calée pour ne plus bouger.
4. Mais le plus merveilleux, c'est que cet homme plus qu'infiniment juste, ne
poussa pas un gémissement pendant cette effroyable torture, tandis que deux
autres hommes étaient également suppliciés au même instant avec bien moins de
violence, mais eux poussaient d'horribles cris et de terribles gémissements.
5. Je me réveillai tremblante de tout mon corps. Seigneur, un pareil rêve n'est pas
une plaisanterie pour le cœur tendre d'une fillette comme moi ! J'ai aussitôt
supplié le Père dans les cieux de ne plus me laisser avoir des rêves aussi terribles,
et vraiment jusqu'à cette heure je n'en ai plus jamais eu. Mon père m'a toujours
dit, il est vrai, que les rêves ne sont qu'une vaine écume qui provient d'un sang
trop chargé. C'est possible ! Mais si j'avais un si mauvais sang que cela, je me
sentirais moins légère, alors que je suis une fillette joyeuse et alerte. Comment
aurais-je donc un sang si chargé ! »
6. Je dis, alors que J'avais été quelque peu assombri pendant ce récit : « Non,
non, Ma très chère Jarah, ton sang a une légèreté éthérique et ton rêve est d'une
grande signification. Mais n'en parlons pas davantage, l'explication te viendra
avec le temps. Bienheureuse es-tu d'avoir eu ce rêve ! Peu de prophètes ont eu le
privilège de voir cela dans leurs visions !
7. Beaucoup de choses sont cachées aux hommes de cette terre, ils ne rencontrent
le grand pourquoi que dans l'au-delà. Mais raconte-Moi encore un rêve que tu as
fait trois jours après au sujet du même homme ! »
8. Jarah dit : « Oh, je préfère celui-là, il est mille fois plus gai ! Je me trouvais
tout à coup, de très bon matin, semble-t-il, dans un agréable jardin d'où je pou-
vais facilement voir et reconnaître le lieu du supplice du rêve précédent. Cette
vision m'a tout d'abord remplie d'effroi et, dans mon rêve, je me suis mise à prier
le bon Dieu au ciel de bien vouloir m'épargner une vision semblable, car je
voyais toujours les trois croix dressées au lieu du supplice !
9. Mais un magnifique jouvenceau vint aussitôt à moi, me consolant et me
réconfortant par ces mots que je n'oublie pas : "Ne crains rien, âme pure et
tendre, ce que tu as vu il y a trois jours doit arriver selon la décision de Dieu si-
non jamais aucun homme ne pourra parvenir à la félicité et paraître devant Dieu.
Ce qui a été crucifié était le Fils de Dieu, et Dieu était en Lui. Maintenant, trois
jours après, par Sa propre force ce Fils de Dieu ressuscitera de Sa chair divine et
régnera à jamais sur l'infini, et Son royaume et Son règne n'aura pas de fin.
Toutes les puissances s'inclineront devant Son nom, et ceux qui ne voudront pas
s'incliner, Il les laissera périr. Mais le dernier instant, le plus sacré, approche,
regarde attentivement la lourde pierre qui ferme le tombeau.
10. Le jouvenceau ayant dit cela, la lourde pierre se soulève d'elle-même, et alors
sort du tombeau, le visage serein et magnifique, le même homme, à un cheveu
près, que j'avais vu crucifié trois jours avant. Je vois même les blessures à ses
pieds et à ses mains et je ne puis douter un seul instant que c'est lui.
11. L'homme vient à moi et me dit d'une voix infiniment agréable : "Ce que tu as
vu ici en rêve n'est qu'une préfiguration de ce qui se passera en réalité plus tard.
Mais tu Me verras auparavant réellement et souvent aussi après Ma résurrection".
À ces mots je me suis réveillée, et j'ai beaucoup réfléchi. Mais personne en
réalité ne lui ressemble autant que Toi ! »
12. Je dis : « Eh bien, c'est peut-être Moi ! Mais n'en parlons plus, et passons à ce
qui nous attend demain. »
Chapitre 121
De la méchanceté des templiers
1. Le Seigneur dit : « Ces Pharisiens que notre ami a su intimider avec tant de
sagesse, sont venus de Jérusalem à cause de Moi, ils vont durement M'attaquer
demain matin s'ils Me reconnaissent, mais Je leur donnerai à boire pour la
première fois un vin pur, c'est-à-dire que je leur dirai toute la vérité en plein
visage.
2. Les malades qui sont ici, et ceux qui arrivent encore, n'auront qu'à toucher la
lisière de mon vêtement et ils seront guéris. Il suffira à Mes disciples de prendre
le pain du petit déjeuner sans s'être lavé les mains auparavant pour que ces vrais
Philistins de Pharisiens et de lévites soient en colère. Ils se mettront alors à poser
leurs questions et Je leur donnerai des réponses qui leur seront plus arriéres et
plus aigres que le vinaigre et le fiel, la célèbre boisson avec laquelle ils étanchent
la soif des pauvres pécheurs. Mais allons passer maintenant quelques heures en
silence jusqu'à l'aube.
3. Mes disciples sont allés se reposer avec les deux Esséniens et quelques
Pharisiens et lévites, et ils ont fait une bonne œuvre puisqu'ils les ont tous gagnés
à Moi, quoique Pilah et Ahab, deux jeunes Pharisiens, le premier de Kis, le
second de Jessaïra, deux bons orateurs sobres et intelligents, sont déjà depuis
longtemps Mes disciples. Ils ne sont arrivés qu'hier matin et se sont joints
aussitôt à Mes disciples pour les aider dans l'œuvre de conversion, car Mes
disciples, à l'exception de trois d'entre eux, sont tous des pêcheurs et sont encore
peu habitués à parler, ces deux jeunes Pharisiens peuvent donc leur rendre de
bons services.
4. Ebahi, va les trouver, et dis aux disciples de manger leur pain demain matin
sans s'être lavé les mains auparavant. Dis aussi aux Pharisiens, aux lévites et aux
deux Esséniens qui se sont déjà convertis de se cacher jusqu'à ce que les
voyageurs de Jérusalem soient repartis. Alors seulement, ils pourront se montrer
et Je les bénirai.Ils sont libres de changer de vêtements et de rester près de Moi,
ou de se montrer aux gens en apparence tels qu'ils étaient jusqu'ici. Va le dire aux
disciples et aux autres, tu sais qui ! » Ebahi s'éloigne et va exécuter tout ce que Je
lui ai demandé. Ils s'en réjouissent tous, et promettent de faire exactement ce que
Je leur ai demandé.
5. Ebahi revient et nous raconte aussitôt comment il s'est acquitté de sa mission.
Tout le monde s'en réjouit et le capitaine dit : « J'attends demain avec im-
patience, mais je vous le dis aussi, surtout après le remarquable rêve que nous a
raconté la chère Jarah, je ne vais pas plaisanter avec ces drôles ! S'ils me content
des balivernes, je les fais rosser, et que leur mauvais sang leur coule du dos ! Il
n'y a pas de mots pour qualifier des gens pareils, qui n'agissent que pour assouvir
leur vengeance ; mais fouetter jusqu'au sang leur méchante ardeur finira bien par
refroidir leur zèle. Il n'est pas certain que je le ferai, mais ce n'est pas impossible
non plus !
6. Il suffirait d'un rien pour que ces drôles et leurs acolytes de Jérusalem Te
fassent subir ce que cette fillette a vu en rêve. Je le dis, un rien, avec cette espèce
d'efféminé faiblard qu'est Ponce Pilate, pour qu'ils Te clouent sans crier gare sur
la croix !
7. Oui, si j'étais gouverneur de Jérusalem, malheur à celui qui voudrait porter la
main sur Toi. Je le ferais suspendre dix fois à la croix, et à la dixième fois je lui
ferais rompre les jambes ! Mais malheureusement, j'ai été mis ici en poste et je
ne puis T'être d'aucune utilité, pas plus que Tes amis Cyrénius et Cornélius ; c'est
pourquoi il faut refroidir un peu d'avance leur malheureuse audace, et les
intimider pour qu'ils n'aient plus l'envie de mettre leurs sales pattes sur des
hommes de Dieu d'une élévation comme la Tienne.
8. Oh, attendez, bandits, demain sera chaude journée, je vous ferai suer sang et
eau ! Quand ces types-là auront reçu une bonne correction, je parie la moitié de
l'Empire qu'ils céderont, du moins en ce qu'ils font de pire ! Ah ! Il va falloir leur
tanner le cuir ! Dixi(*) ! »
9. Je dis : « Fais ce que tu voudras, Je ne te dirai rien ; tu es un de Mes amis les
plus sages, et il y a un véritable tact dans toutes tes paroles et dans tous tes actes.
Mais Je te le dis, cela ne servira à rien, si ce n'est à les rendre plus méchants et
plus rusés encore. Ceux qui sont une fois à Satan, lui appartiennent
complètement ; on peut parfois les inciter à faire le bien, comme le font ici Mes
disciples et comme cela vient de se passer à Nazareth, où le chef avec les
Pharisiens et les lévites se sont ouverts à Mon enseignement, mais le plus sou-
vent il n'y a rien à faire, et surtout pas de la façon dont tu t'y prends. Avec le
fouet tu chasses le diable, dix autres reviennent à sa place, pires que le premier »
10. Le capitaine dit : « Aussi vrai que je m'appelle Jules, je ne ferai donner le
fouet ou les étrières à personne, avant d'y être poussé par une nécessité extrême,
mais malheur à eux si je dois en arriver là !
11. Je dis : « Tu as encore parfaitement raison, il faut faire durer sa patience le
plus longtemps possible. Mais quand les bornes sont atteintes, il faut aussitôt
frapper sans ménagement avec armes et fracas, sinon ces pécheurs croiront qu'on
plaisante et qu'on joue avec eux comme avec des enfants ! »
(*)
J'ai dit.
12. Le capitaine Jules dit : « C'est aussi ma maxime, et il en faut beaucoup pour
que j'en vienne à punir quelqu'un. Mais qu'il refuse de s'améliorer, et il verra bien
si je ne vais pas le punir ! Allons nous reposer maintenant, je crois, car le jour se
met à poindre ! »
13. Je dis : « Oui, faisons-le ici, chacun à sa place ! »
14. Tout se tait, un bref petit somme doux comme un rayon de miel se pose sur
les yeux de tous, et quand on se réveille, chacun est frais et dispos comme après
une longue nuit dans un bon lit à bien dormir et à rêver.
Chapitre 122
Guérison par le toucher du manteau du Seigneur
Matthieu 14, 36
1. Le chef des Pharisiens s'avança vers Moi et Me demanda : « Maître, qui sont
ceux qui sont avec toi à table ? »
2. Je dis : « Ce sont Mes disciples ! »
3. Le chef demande alors : « Pourquoi tes disciples n'observent-ils pas les
commandements des Anciens ? Ils ne se lavent pas les mains quand il mangent
du pain ! »
4. Je Me levai alors et, Me campant en face de lui, Je lui demandai, d'une voix
grave : « Pourquoi ne respectez-vous pas la loi écrite ? Dieu a ordonné : "Honore
ton père et ta mère, et qui maudit son père et sa mère doit mourir !" Et vous
apprenez aux fils et aux filles à dire à leurs parents qu'ils leur sont plus utile en
faisant des sacrifices au Temple qu'en les honorerant selon l'ancienne loi ! Vous
dites à ces fils et à ces filles qu'ils font bien ! Mais quelle en est la conséquence ?
Voyez, presque plus personne n'honore son père et sa mère ! Par vos propres lois
vous avez annulé le commandement de Dieu ! Qui vous en avait donné le droit ?
Vous avez pu le faire parce que vous n'avez jamais cru en Dieu et celui qui est
mort n'a plus aucune conscience ! »
5. Le capitaine intervint encore en disant : « Oh ! Il faudra que je m'en souvienne
! C'est ainsi que vous servez Dieu ? Vous ne pouvez en effet reconnaître la pure
divinité de notre Maître et Sauveur ! Votre Dieu n'est d'abord que votre ventre et
à cause de lui votre or et vos sacs d'argent ! Oh ! Maintenant je vous connais !
Vous n'avez qu'à continuer de parler entre vous ! »
6. Le chef dit : « Nous sommes les serviteurs de Dieu, selon l'ordre d'Aaron ! »
7. Je dis : « Oh ! malheureux hypocrites, Isaïe a bien dit à votre propos : "Ce
peuple M'approche de la bouche et M'honore des lèvres, mais son cœur se tient
éloigné de Moi, ils Me servent en vain, ils donnent au peuple des enseignements
qui ne sont que les lois des hommes !" »
8. Le chef dit : « Nos lois sont bénéfiques aux hommes et ne suppriment pas les
commandements de Dieu. »
9. Je dis : « Je vous ai déjà montré ce que vous faites d'un commandement de
Dieu, voulez-vous entendre comment vous piétinez les autres et mettez à la place
vos propres lois ? »
10. Le chef dit : « Laisse tomber, à cause des gens il y a beaucoup de monde ici !
»
11. Le capitaine dit : « Alors, témoignez devant le peuple que le Maître vit en
parfait accord avec les commandements de Dieu ! »
12. Le chef dit : « Nous ne pouvons le faire, seul le grand prêtre oint du Temple
en a le droit ! »
13. Le capitaine dit encore : « Ce qui se dit, chez nous autres Romains : Ars lon-
ga, vita brevis(*) ce qui revient à dire que pour certaines raisons, on repousse les
choses indéfiniment et on ne fait rien ! Mais je vous le dis, devant le peuple, le
meilleur témoignage que vous pourriez rendre sur un Maître comme Jésus de
Nazareth sera toujours par trop insuffisant, et si vous venez à oser rendre quelque
faux témoignage que ce soit de Jésus au Temple et à vos collègues hypocrites, je
ferai aussitôt envoyer à Rome un rapport à l'empereur, lui expliquant en détail et
avec cent témoins comment vous et vos collègues vous avez commis le fameux
vol des impôts. Alors il ne faudra pas un an pour que votre nid infernal soit
détruit sans qu'on en puisse retrouver la trace ! Souvenez-vous-en ! Un Romain
tient parole, même si la terre et le ciel doivent en périr ! Fiat justifia, pereat mun-
dus !(**) M'avez-vous compris ? »
Chapitre 124
Paroles énergiques de Jules sur la grâce
Chapitre 125
Les trois documents
Matthieu 15, 10-14
1. J'appelai aussitôt tous ceux qui venaient d'être guéris, ainsi que les habitants de
la ville, qui fêtaient la veille du sabbat.
2. Lorsque la salle fut à peu près remplie de tous ces gens, Je leur dis : « Écoutez,
et comprenez-Moi bien ! Ce qui entre par la bouche ne souille pas l'homme, mais
ce qui sort par la bouche souille l'homme. Manger du pain avec des mains sales
ne souille personne. Je vous le dis à tous, J'abroge à tout jamais ce dogme ! » Le
peuple se mit à jubiler et à Me louer.
3. Les disciples s'approchèrent de Moi et Me demandèrent : « As-Tu observé la
colère et la furie que Tes paroles ont suscitées chez ces Pharisiens ? »
4. Je dis aux disciples à haute voix : « Toutes les plantes que Mon père céleste
n'a pas plantées seront arrachées, laissez-les partir, ce sont des aveugles qui
conduisent des aveugles ! Mais quand un aveugle conduit un aveugle, tous deux
tombent dans le fossé ! Ils ont beau se mettre en colère, leur père n'est pas le
nôtre, notre Père est en haut, le leur est en bas ! »
5. Les Pharisiens, entendant cela, devinrent jaunes puis verts, puis rouges de
colère et de rage enflammées. Leur chef dit d'une voix tremblante : « C'est vrai,
en voilà assez ! Il a blasphémé contre nous et contre Dieu ! Nous savons enfin à
qui nous avons affaire et qui est ce Jésus de Nazareth ! Allons-nous-en d'ici dire
au grand prêtre qui est ce Nazaréen ! »
6. Le capitaine dit : « On peut entrer comme on veut dans une ville, mais pour en
ressortir, il faut la permission des autorités de la ville ! "Allons-nous-en" est bien
vite dit, mais l'autorité s'y oppose et vous dit : "Restez !". Ce dernier mot fut dit
d'une voix tonitruante.
7. Ce mot effraya les Pharisiens au point qu'ils se mirent à blêmir et à trembler, et
qu'aucun mot ne put franchir leur lèvres.
8. Le capitaine, voyant que ses paroles faisaient de l'effet, dit encore : « Avant
que je ne vous laisse partir, nous avons encore à parler ensemble, et vous allez
me signer quelques contrats et un témoignage en présence du peuple. Ces
contrats et ce témoignage sont à signer à vie ! Compris ! Mais si je viens à ap-
prendre par mes espions qui ont l'ouïe fine, que vous n'avez pas respecté ne se-
(*)
D'un tronc jamais n'a jailli aucun Dieu.
rait-ce qu'un seul point de ces contrats, y eût-il mille temples pour vous cacher,
vous serez mis à mort le jour même ! »
9. Alors le capitaine se fit apporter une écritoire par ses serviteurs. Il écrivit ceci :
« Contrat n°l. Si l'un de vous se permet de dire contre Jésus de Nazareth une
seule parole diffamatoire, que ce soit entre vous ou à qui que ce soit, et que cette
parole vienne à se savoir, il sera condamné à mort. Contrat n°2 : Celui d'entre
vous qui laissera filtrer au Temple une seule parole de ce qui s'est dit et fait ici,
ou qui témoignera contre le Seigneur Jésus, que ce soit au Temple ou dans
n'importe quelle maison, méritera d'être jugé et mis à mort. Et que personne n'ait
la consolation de se dire que cela n'arrivera jamais ! Comme je l'ai dit, dès que
vous aurez lâché une seule syllabe de ce que ces deux contrats vous obligent de
taire, mes espions l'apprendront et il vous arrivera ce qui est promis dans ces
deux contrats. »
10. Puis le Capitaine écrivit l'attestation suivante : « Tous ensemble, nous
reconnaissons et signons par respect de la vérité, et pro memoria aeterna(*), avoir
commis le vol de l'impôt impérial et des trésors du Pont et d'Asie Mineure, ce,
par la ruse infâme de nos porteurs qui ont été dénoncés par Jésus de Nazareth,
sinon de sa propre bouche, du moins sous l'effet de son influence. Nous aurions
été tous mis à mort par le juge Faustus, mais Jésus de Nazareth a obtenu notre
grâce et nous nous en sommes tirés sains et saufs ; c'est la vérité pour laquelle
notre vie est mise en jeu ! »
11. Lorsque le capitaine eut fini d'écrire ces trois documents, il les lut tran-
quillement aux Pharisiens et aux lévites. À chaque ligne, leur mine s'allongeait,
et quand ils entendirent la lecture de l'attestation, ils se prirent la tête dans les
mains et s'écrièrent : « Quoi, nous devons signer cela ! »
12. Le capitaine dit : « Oui, c'est la pure vérité, si vous refusez, les cordes, le
fouet, la verge et la geôle vous attendent ! » Épouvantés, les Pharisiens se
regardèrent et, sans ajouter un mot, demandèrent l'écritoire. Le capitaine leur
rappela encore d'inscrire leur nom véritable, un faux nom encourant la peine de
mort. Ils écrivirent alors leur nom véritable, et ceux du peuple qui savaient écrire
signèrent comme témoins.
13. Ces trois documents une fois signés, le capitaine dit : « J'ai enfin ce que je
voulais de vous depuis longtemps. Vous savez ce que j'ai là, et vous savez aussi à
quoi vous en tenir. Nous sommes quittes ! Vous pouvez maintenant vous en aller
à votre guise. Vous serez reconduits sous bonne escorte jusqu'à la frontière. »
14. Les Pharisiens et les lévites se mirent aussitôt à plier bagage et, en moins
d'une demi-heure, ils laissèrent Génézareth derrière eux sans piper mot.
Chapitre 126
Mise en garde du Seigneur à propos du Temple
Chapitre 127
Le Seigneur parle de l'esprit de l'amour
Chapitre 128
Discussion des templiers et des Esséniens
Matthieu 15, 15-20
1. Dans son coin, Pierre dit enfin, un peu pour lui-même : « Je ne comprends pas
comment cette gamine a toujours la compréhension aussi rapide. J'ai déjà de l'âge
et pas mal d'expérience, mais je suis loin de comprendre aussi vite ! Par exemple,
je ne comprends toujours pas ce qu'il a voulu dire avec cette image : "Ce qui
entre par la bouche ne souille pas l'homme, mais ce qui en sort !" Si quelqu'un
doit vomir, s'il tousse ou s'il crache, en quoi cela le se souille-il ? Moïse n'y a fait
aucune allusion ! »
2. Les autres disciples dirent : « C'est pareil pour nous, nous n'y comprenons rien
non plus ! Va Lui demander au nom de tous comment comprendre cette image !
»
3. Pierre vint à Moi, Me demandant : « Seigneur, explique-nous l'image de ce qui
entre et sort par la bouche, personne ne comprend. »
4. Je dis : « Êtes-vous donc encore si sots ! Combien de temps devrai-Je encore
supporter cela de vous ? Ne voyez-vous donc pas que tout ce qui entre par la
bouche va dans le ventre et de là est éjecté par les voies naturelles ? Mais ce qui
sort par la bouche vient du cœur et souille l'homme, car c'est du cœur que
viennent les mauvaises pensées : assassinat, adultère, prostitution, faux témoi-
gnage, calomnie.
5. Voilà les choses qui souillent l'homme, tandis que manger du pain sans se
laver les mains ne souille pas ! Comprennez-vous maintenant ? »
6. Les disciples disent : « Oui, Seigneur, nous Te remercions pour cette sainte
lumière. »
7. Je dis à Matthieu le scribe : « Écris le repas dans le désert, puis notre voyage
dans la nuit et ce qui est arrivé de spécial pendant ce temps, et aussi aujourd'hui ;
tout cela en peu de mots, mais précis ! Laisse tout le reste de côté, certaines
choses y seront ajoutées par la suite mais ceci constitue une pièce essentielle de
l'Évangile. »
8. Là-dessus, les disciples retournèrent dans leur chambre, où les autres
Pharisiens, les lévites et les deux Esséniens les attendaient avec impatience pour
savoir ce qui s'était passé avec les Pharisiens et les lévites de Jérusalem. Les
disciples racontèrent par le menu. Alors les Pharisiens, les lévites et les deux
Esséniens dirent : « Il faut beaucoup de noirceur et de malice pour rester aussi
stupidement entêtés devant de tels signes et de tels témoignages ! Et à quoi leur
sert toute leur ruse ? Les voilà maintenant liés par ces trois documents au point
qu'ils ne pourront même .plus échanger entre eux leurs idées ! Quels imbéciles,
quels lourdauds ! »
9. Les Esséniens disent : « Avec Jésus la chose est aussi claire qu'elle peut l'être !
À quoi leur servira de s'obstiner ? Nous qui sommes aussi cultivés qu'on peut
l'être après avoir passé par toutes les écoles des Perses et des Egyptiens, nous qui
connaissons sur le bout du doigt la sagesse des Grecs et celle des anciens Juifs,
sans même parler de tous ces miracles inouïs, nous ne pouvons que dire : Ses
paroles et la profonde sagesse qui en résulte, dont jamais jusqu'ici on n'avait vu
sur terre la moindre trace, sont pour nous une preuve plus que suffisante que ce
Jésus est le parachèvement d'un Dieu. Mais il s'ajoute à cela, Ses actes qui sont
tels qu'aucun homme n'aurait pu les rêver ; des actes possibles à Dieu seul, en qui
sont réunies toutes les forces du monde, des étoiles, du soleil et de la lune, dont
l'existence ne tient qu'à Sa toute-puissance et à Sa merveilleuse volonté in-
compréhensible.
10. Nous avons vu comment la volonté, la parole et l'action sont réunies en Lui.
Il Lui suffit d'un signe et les cieux s'ouvrent, des myriades des êtres éthérés les
plus gracieux sont à son service, Il les commande et les celliers vides regorgent
des plus délicieuses victuailles, toutes les outres et toutes les cruches sont pleines
des meilleurs vins. Ce n'est pas rien !
11. La mer Lui obéit et sa surface se fige sans devenir de glace pour autant, et les
hommes peuvent s'y promener sans danger comme sur un sol de marbre. Tout
cela a été montré et raconté à ces esprits obscurs, de leurs propres yeux ils ont vu
ce matin la guérison merveilleuse de plusieurs centaines de personnes, et ils sont
restés plus imperturbables que le roc frappé sans cesse depuis mille ans par la
foudre et les éclairs ! Frères, cela dépasse toute humanité ! Ou c'est de la vile
bestialité, ou c'est parfaitement diabolique ! Frères, dites-moi, avons-nous tort ou
raison ? »
12. Les Pharisiens et les lévites disent : « C'est très vrai, très juste, pour rester
pareillement inflexible devant de telles manifestations, il faut être un diable
probablement ! »
13. Les deux Esséniens disent : « Nous sommes de votre avis, depuis que nous
croyons qu'il y a réellement de mauvais esprits, dans les régions de ce monde,
qui tourmentent souvent les hommes et les poussent à de mauvaises actions. Des
hommes privés de tout sentiment de compassion envers leur prochain, comme
des tigres qui ne pensent qu'à la vengeance et à leur ventre, ce ne sont plus des
hommes, ce sont des diables ! Ils ne pensent plus à rien qu'à satisfaire leur ventre
par n'importe quel moyen. Dieu, l'esprit, qu'est-ce que c'est ! Leur ventre seul
veut être satisfait, rien d'autre n'existe pour eux, l'art et la science ne sont là que
pour grossir les revenus utiles à leur ventre ! Oh ! Seigneur, est-ce là des
hommes ? Voilà bien les diables les plus authentiques ! »
14. Judas Iscariote dit alors : « Si je n'étais pas si convaincu de Sa véritable
toute-puissance divine, je commencerais à craindre pour Lui ! Car ces gens
feraient tomber Dieu Lui-même de Son trône éternel s'ils le pouvaient, pour
prendre Sa place ; ces templiers à qui tout réussit si bien depuis qu'ils ont chassé
les Samaritains qui leur tapaient sur les doigts, tenteront n'importe quoi plutôt
que de perdre le moindre avantage ! »
15. Pierre dit : « Crois-tu que notre Seigneur, malgré Sa toute-puissance
miraculeuse, soit à l'abri des ruses du Temple ? S'il ne Se manifeste pas comme
un juge devant ces assassins capables de tuer père et mère, avec le feu et les
éclairs du ciel, Il sera sous peu la victime de leur vengeance insatiable. Oui, un
Juif est appelé à de grandes choses et peut devenir un ange, mais il n'y a pas pire
diable qu'un Juif corrompu !
16. Il devrait se garder de Jérusalem ! S'il y va en homme obligeant, Il est perdu,
comme Jean, le Prédicateur ! Tant qu'il prêchait et baptisait dans notre voisinage,
sur le petit Jourdain et près de Bethabara, il était tranquille, mais il y a trois mois,
quand il s'est rendu sur le grand Jourdain et dans le grand désert de Bethabara, il
a aussitôt été victime des gens du Temple, qui savent se cacher derrière Hérode.
Ce dernier Le fait déjà rechercher, Lui, Seigneur et Maître, et s'il avait pu s'en
saisir, qui sait ce qui serait déjà arrivé ! Mais le Seigneur voit de loin dans le
cœur des hommes. Il connaît leurs plans, Il sait les déjouer, car qui pourrait être
plus sage et plus intelligent que Lui ? »
17. Un Pharisien dit : « S'il commence à leur céder, c'en est fait de Sa sécurité ! Il
peut certes vouloir éviter de faire sensation, tant que cela est possible, mais qu'il
laisse paraître le moindre signe de crainte, et je ne donne pas cher de Sa sécurité ;
je sais trop bien où et comment le Temple tend ses filets, de telle sorte qu'il est
presque impossible d'en sortir sain et sauf ! Mais Il ne voudra aucune
insurrection, Il en évitera toutes les occasions, Il empêchera par tous les moyens
que le ciel ne tombe sur la terre, et Il n'affrontera vraiment la méchanceté
humaine que lorsque la mesure sera à son comble. Je crois comprendre que c'est
ainsi qu'il agit ! »
18. Les Esséniens dirent : « C'est aussi notre avis, avec une telle divine sagesse et
une telle plénitude de puissance divine, on doit bien savoir faire face à la
méchanceté du monde ! Si nous avions seulement le cent-millième de Sa
puissance et de Sa sagesse, trois ans nous suffiraient pour être les maîtres du
monde entier. Voilà pourquoi nous n'avons pas peur pour Lui Il devrait se
tourner vers le monde et lui dire en face : "Je suis là, déversez toute votre
méchanceté sur Moi qui suis votre créateur, votre condamnation n'en viendra que
plus tôt d'en haut. Il n'y perdrait rien ! Il pourrait même tolérer que, pour que la
mesure soit comble, les hommes, dans leur méchanceté, aillent jusqu'à faire
souffrir Son corps, voire Le tuer ; mais qui aura prise sur Son esprit tout-puissant
et indestructible ! Nous n'en doutons pas, Il en serait encore capable, mais à quoi
cela leur servira-t-il ? Avant qu'on s'y attende, Il ressuscitera en Juge indestruc-
tible et viendra juger avec le feu et l'épée du ciel. Malheur alors à Ses ennemis et
à tous les diables, ils feront une douloureuse expérience et ils sauront alors qui
était Celui qu'ils ont poursuivi partout ? Qu'en dites-vous ? »
19. Les disciples dirent : « Aïe, que cela ne Lui arrive pas ! Bien que nous ne
puissions dire le contraire, car ce qui paraît impossible à l'homme est bien
possible à Dieu ! »
Chapitre 129
Le Seigneur et les deux Esséniens
1. Tandis que les disciples, les Pharisiens et les deux Esséniens parlaient ainsi
entre eux et que Matthieu écrivait, Ebahi vint les appeler à table, et les disciples
avec ceux qui étaient maintenant leurs disciples vinrent à table, le visage tout
souriant.
2. Je leur demandai alors ce qui pouvait les réjouir pareillement.
3. Les deux Esséniens répondirent : « Tu as raison de le demander, car ce que
nous avons dit est clair à Ton esprit de toute éternité, comme le soleil à son
zénith ! Mais sois certain que nous n'avons rien dit de mal à Ton sujet ! »
4. Je répondis : « Il est vrai, certes, car ce que vous avez dit entre vous ne venait
pas de votre chair ni de votre sang, mais vous a été donné par l'esprit de Dieu.
N'en parlez plus à personne, les hommes sont trop aveugles, trop bêtes et trop
méchants ! Maintenant, prenons place. »
5. La table était bien servie, nos huit marins avaient eu le temps de pêcher et
d'apporter à Ebahi une quantité de magnifiques et délicieux poissons. Ebahi les
remercia en les comblant de pain et de vin. Ces poissons très bien apprêtés furent
dégustés avec joie, les deux Esséniens, dont le palais était finement exercé, car
ils étaient en cela les disciples d'Aristote et d'Epicure, ne pouvaient assez faire les
louanges de ce véritable régal, et le capitaine, avec ses trois subalternes, ne
pouvait assez vanter la saveur de ce poisson ; il en mangeait de bon cœur de si
grands morceaux qu'il commença à craindre de devoir en être incommodé !
6. Mais Je lui dis : « Ne crains rien, Mon cher Jules, en présence du médecin,
rien ne peut te nuire ! »
7. Jules retrouva sa bonne humeur, et Ma sentence devint une maxime des
médecins qui s'est conservée jusqu'à ce jour où ceci est écrit.
8. Lorsque le repas fut terminé, le capitaine dit : « Seigneur, c'est aujourd'hui une
journée magnifique ! Si nous allions nous promener cet après-midi ? »
9. Je dis : « C'est aussi Mon avis, mais allons cette fois gravir la montagne voi-
sine. »
10. Le capitaine dit : « Oui, mais la montagne voisine, qui s'appelle je crois la
Tête du Levant, soit, dans la langue d'ici, le Juitergli, est une des plus hautes
montagnes, terriblement escarpée de tous côtés. C'est une sorte de colosse
entièrement dénudé, et si tu veux le gravir, nous n'en atteindrons le sommet qu'à
la nuit ; et ne parlons pas d'en revenir, personne n'oserait se risquer à y passer la
nuit, le sommet est couvert de neige, de glace et de crevasses ; mais la vue doit
être d'une beauté indescriptible !»
11. Je dis : « Ami, cela ne doit pas nous empêcher de faire l'ascension de la Tête
du Levant, celui qui en connaît le chemin arrive bien avant celui qui doit
péniblement le chercher. Mettons-nous en route, avant deux petites heures nous
serons tous au sommet, du moins ceux qui ont envie de gravir avec nous cette
montagne. »
12. Le capitaine dit : « Seigneur, sur Ta parole, j'irais bien jusqu'au bout du
monde, sans parler de cette montagne ; si Tu es le guide, il n'y a rien à craindre,
et je m'en réjouis déjà ! Mais ne devrions-nous pas prendre un peu de pain et de
vin avec nous ? Je sais que gravir une telle montagne rend particulièrement
affamé et assoiffé. »
13. Je dis : « Oh ! oui, vous le pouvez, mais qu'allons-nous faire de Jarah, Ma
petite préférée ? Pour elle cette montagne sera sans doute trop pénible à gravir ! »
14. Jarah dit : « Avec Toi, Seigneur, rien ne peut m'être trop difficile, et sans Toi
on ne peut rien faire, surtout moi ! Si cela T'est agréable, non seulement j'irai
avec Toi sur cette montagne, mais littéralement aussi dans le feu, comme je suis
allée avec Toi sur l'eau, la première ! »
15. Je dis : « Tu sais toujours grâce à ton cœur Me donner la bonne réponse qui
brille comme l'amour et la vérité ! Viens donc avec nous, ce ne sera pas trop
difficile pour toi ! » Qui fut jamais plus prêt à partir que notre Jarah ? Elle dit : «
Seigneur, si cela T'est agréable, je suis prête à partir ! »
Chapitre 130
Merveilleuse ascension
1. La fillette était vêtue d'une robe bleue plissée, les pieds chaussés de légères
sandales lacées, la tête joliment coiffée d'un petit chapeau de paille. Elle saisit
Ma main et, comme Je ne lui répondais rien, elle Me dit : « Mais, Seigneur, Toi
ma vie, je T'en prie, dis-moi si je Te suis agréable comme cela ! »
2. Je dis : « Tu le vois bien, Jarah, Ma préférée ! Tu M'es tout à fait agréable ! Oh
! Tout irait bien si tous les hommes M'étaient aussi agréables que toi ! Mais en ce
monde il y a des milliers et des milliers de personnes qui ne Me sont pas aussi
agréables que toi ! Ce sont de purs hommes de ce monde, et toi tu es un ange !
Mais il faut y aller maintenant ; voici déjà la troisième partie de la journée ! »
3. À ces mots ils se lèvent tous, et toute la maisonnée se met en route avec Moi.
Il va sans dire que la petite Jarah marche à côté de Moi, avec le capitaine et
Ebahi.
4. À notre arrivée au pied de la paroi rocheuse qui ne présente que d'étroites
failles, le Capitaine dit : « Seigneur, il n'est pas possible de faire cette ascension
avec des forces naturelles, ces failles sont vertigineuses, elles sont humides et
envahies de ronces ! S'il n'y a pas d'autre chemin, même en dix jours nous n'y
parviendrons pas ! »
5. Je dis : « Es-tu déjà si fatigué ? Regarde, nous avons déjà fait le tiers du
chemin, retourne-toi et tu verras bien à quelle hauteur nous sommes déjà ! » Le
capitaine se retourne et voit alors avec effroi que nous sommes déjà parvenus
quasiment à mi-hauteur de ce versant vertigineux de la montagne, entre des
parois à pic.
6. Après quelques exclamations émerveillées, le Capitaine dit fiévreusement : «
Non, c'est à n'y rien comprendre ! Comment nous sommes tous parvenus par ce
couloir jusqu'ici, c'est pour moi une égnigme ! Nous avons bien gravi une pente
relativement raide, mais je suis monté sans aucune peine, et voilà maintenant au-
dessus de nous des parois réellement à pic ! Comment allons-nous y parvenir ? »
7. Je dis : « Ne t'aperçois-tu donc pas que nous ne restons pas sur place et que
nous continuons de grimper ? »
8. Le capitaine dit : « Oui, je le vois bien ! Mais si je jette un coup d'oeil en haut,
il n'y a plus aucune possibilité d'avancer ! »
9. Je dis : « Vois-tu, pour cela, il faut être un bon guide expérimenté, et l'on
trouve le chemin à travers tous les obstacles apparents ! Regarde, cet abîme
devant nous est déjà la porte de la cime de la montagne ! »
10. Le capitaine dit : « Oui, mais comment est-ce possible ? Comment avons-
nous pu gravir si vite des parois vertigineuses ? Il n'y a pas une heure que nous
sommes en route et nous approchons déjà de la cime. Plus que quelques pas et
nous y sommes ! »
11. Jarah dit, toute joyeuse : « Mais, Jules, comment peux-tu poser ces questions,
quand Dieu le Seigneur est notre guide ? Il aurait tout aussi bien pu nous
soulever dans les airs que sur ces parois où jamais personne n'a mis le pied !
Quand nous savons que nous avons affaire ici au Tout-Puissant, toute question
est vaine. Nous ne pouvons que fondre d'amour et de respect pour Lui et Le
remercier éternellement, du plus profond de nous, de nous avoir accordé une
grâce aussi inouïe. Mais il me paraît vain de Lui demander comment il Lui est
possible de faire cela avec Sa toute-puissance et Sa sagesse ! S'il voulait nous
répondre, que pourrions-nous y comprendre, et deviendrions-nous tout aussi
puissants que Lui ? Oh ! oui, pour autant qu'il le veuille, nous pouvons accomplir
nous-mêmes des miracles, mais jamais sans Sa sainte volonté toute-puissante ! »
12. Je dis : « Ô sage petite ! En qui trouver autant de clarté qu'en toi ? Je te le dis,
il y en a peu comme toi sur cette terre ! Mais, avec tout l'immense amour que J'ai
pour toi, il y a cependant une chose qu'il faut que Je te dise, c'est qu'à l'avenir il
te faudra être beaucoup plus avare de ta sagesse et n'ouvrir la bouche que lorsque
c'est nécessaire ; et puisque Je suis là Moi-même, comme tu le vois, ce n'est pas
nécessaire, Je sais aussi parfaitement répondre aux questions de chacun !
13. Vois-tu, si notre ami Jules n'était pas un homme aussi réellement sage, tu
l'aurais blessé dans son cœur ; mais c'est un homme sage qui comprend tout et
qui a su prendre avec joie tes sages remontrances d'enfant ! Mais par la suite, il te
faudra être avec chacun aussi modeste que possible, alors tu seras Ma véritable
fiancée ! As-tu bien compris Mes paroles dans ton cœur ? »
14. Jarah dit, quelque peu attristée : « Oh ! Seigneur, je crains seulement que Tu
ne m'aimes plus tout à fait comme avant, et cela attriste mon cœur ! »
15. Je dis : « Soucie-toi d'autre chose, Je t'aime encore plus qu'avant ! »
16. Jarah dit : « Mais le bon capitaine va m'en vouloir ! »
17. Le capitaine dit : « Oh ! Non ! Toi ma Jarah véritablement céleste, je te suis
très reconnaissant que de ton cœur purement céleste, tu me dises une vérité
purement céleste ! Oh ! Jarah, nous avons encore beaucoup à nous dire, car je
vois trop bien que ton cœur pur est plein de céleste sagesse, et nous resterons les
meilleurs amis ! »
18. Je dis : « Maintenant, Ma très chère Jarah, es-tu contente ? »
19. Jarah dit : « Eh bien, oui, mais il faudra maintenant que je me contienne. J'ai
en effet le défaut de parfois trop parler, mais désormais ce ne sera plus le cas,
Tes paroles sont pour moi plus que saintes ! »
20. Je dis : « Eh bien, tant mieux, faisons encore ces quelques pas et atteignons le
sommet ! »
Chapitre 131
Au sommet de la Tête du Levant
Chapitre 132
De l'essence de la peur et des liens de l'âme et du corps
1. Quand le soleil fut couché, il se mit à souffler un fort vent glacé du septen-
trion. Tous se remirent à avoir peur, et le capitaine dit : « Si ce vent commence
avec une telle force, il finira par nous précipiter dans l'abîme, et puis ce vent
glacé n'est pas agréable ! »
2. Je dis : « Laisse le vent souffler, c'est son heure ! Pense plutôt qu'il n'est pas
maître de Celui qui l'a créé par Sa volonté et qui le maintient et le fait souffler
quand Il le veut. »
3. Le Capitaine fut satisfait de cette explication, ce qui ne l'empêcha pas de se
coucher en s'agrippant au sol aussi solidement que possible. Les autres suivirent
son exemple !
4. Seule Jarah resta debout à Mes côtés, disant : « Mais, Seigneur, d'où vient-il
que ces hommes aient si peur, alors qu'ils peuvent être certains, par tous les
signes que Tu as déjà montrés, que Tu es le maître de tous les éléments ! Cela
m'étonne de la part de Tes disciples ! Ah, si Tu n'étais pas là, ce serait autre
chose ! Mais puisque Tu es là, je m'étonne fort ! Seigneur, si Tu le veux bien,
dis-m'en la raison ! »
5. Je dis : « Vois-tu, c'est l'effet de l'ancien monde qui n'est pas encore sorti de
leurs entrailles ! Si comme toi ils avaient réellement banni ce vieux monde,
comme toi ils n'auraient aucune peur et ne pourraient en avoir, car l'esprit est
assez fort pour soumettre toute la nature.
6. Regarde, nous voici au sommet d'une montagne qui n'a jamais été. gravie par
personne. Comme tu le vois, les parois sont si abruptes qu'il est impossible d'y
monter ou d'en descendre d'une manière naturelle. Tu as vu comment, après que
nous eûmes gravi tout naturellement la première partie de la montagne, il n'y
avait plus aucune possibilité de poursuivre l'ascension de ces parois
vertigineuses. Le capitaine et tous les autres ont demandé : "Et maintenant ?"
Mais Je suis monté avec toi sur ces parois, et tous les autres ont suivi sans
ressentir la moindre fatigue. Comment cela a-t-il été possible ?
7. Vois-tu, c'est l'esprit de l'homme qui rend cela possible. J'ai alors réveillé
l'esprit de ces humains qui ont pu porter leur enveloppe charnelle jusque sur ces
sommets ! Mais leur esprit n'est pas encore habitué à de pareilles activités, et dès
que Je les laisse quelque peu à eux-mêmes, ils retournent dans leur corps pour
être tranquilles, et l'âme de leur corps est pleine de peur. Mais si dans leur cœur
leur esprit restait parfaitement éveillé, ils n'auraient aucune peur, car l'esprit lui-
même remplirait l'âme d'une lumineuse assurance et il donnerait au cœur la plus
vive conviction que toute la nature lui est soumise. Mais comme l'âme est encore
partiellement attachée au vieux monde, elle ne résiste pas longtemps et se laisse
envahir par la crainte que tu as observée.
8. Si l'âme humaine prend une mauvaise direction, elle s'identifie de plus en plus
à la chair, mais si elle prend une bonne direction, elle fait sa vie dans son esprit
qui est toujours un avec Dieu, comme la lumière est une avec le soleil. Si l'âme
vit de plus en plus pour la chair, qui en soi est morte et qui n'obtient la vie que de
l'âme, et pour un certain temps seulement, l'âme est alors totalement unie à la
chair.
9. Quand l'âme s'enfonce ainsi de plus en plus dans la chair, elle devient chair
elle-même et finit par ressentir douloureusement tout ce qui peut la détruire. Ce
sentiment de destruction qui est la particularité de la chair, cause à l'homme cette
peur qui finit par lui ôter sa force et par le rendre incapable d'agir !
10. L'homme dont l'âme a pris une bonne direction dès son plus jeune âge a un
tout autre comportement ; comme elle vit dans l'esprit, l'âme n'envisage plus la
possibilité de la destruction ! L'âme a les mêmes dispositions que celles de son
esprit éternellement indestructible, elle ne peut ni voir ni sentir la mort
puisqu'elle fait un avec son esprit naturellement vivant et qui est un Seigneur qui
règne sur tout le monde naturel sensible. Par conséquent, il est facile de
comprendre que cet homme qui vit encore dans un corps charnel ne connaît
aucune crainte, car là où il n'y a pas de mort, il n'y a pas de crainte.
11. C'est pourquoi l'homme doit se soucier aussi peu que possible des choses du
monde, mais uniquement de son âme, pour qu'elle ne fasse plus qu'un avec son
esprit et non avec sa chair. Car à quoi sert-il à l'homme de gagner le monde
entier, si par là il cause le plus grand mal à son âme ? Tout ce monde dont nous
avons d'ici un assez vaste aperçu, avec toutes ses merveilles aussi passagères que
des bulles de savon, passera comme le ciel en son temps avec toutes ses étoiles,
mais l'esprit demeure éternellement, comme chacune de Mes paroles.
12. Mais il est incomparablement difficile d'aider ceux qui ont fait une fois leur
vie dans le monde, car ils voient et construisent leur vie selon les choses vaines
de ce monde, ils vivent dans une crainte continuelle et finissent par ne plus
pouvoir trouver l'accès à la voie spirituelle. Les approches selon les voies de la
nature ou du monde ne servent à rien, elles ne font que provoquer la
condamnation et par là même la mort de l'âme.
13. Qui veut sauver son âme du monde doit se faire grande violence en com-
mençant par renoncer le plus possible à toutes les choses du monde. Qui le fait
avec toute son ardeur se sauvera et vivra. Qui ne le fait pas n'a d'autre voie pour
être aidé que la souffrance que le monde lui infligera, qui lui apprendra à
déconsidérer le monde et ses merveilles, à se tourner vers Dieu et à se mettre à
chercher en lui-même Son esprit pour s'unir avec Lui de plus en plus. Je te le dis,
le bonheur de ce monde est la mort de l'âme. Dis-Moi, Ma très chère enfant, as-tu
bien compris tout cela ? »
Chapitre 133
Le Christ médiateur du ciel et de la terre
1. Jarah dit : « Oh ! Seigneur, Toi mon amour, Toi ma vie, par Ta grâce faite en
moi, j'ai tout compris, mais qu'il est triste que les hommes ne voient pas et ne
veuillent pas ou ne puissent pas comprendre ! Oh ! Un jour il y aura
malheureusement beaucoup d'âmes mortes ! Ô Seigneur, fais que les hommes
veuillent accepter Ta sainte vérité et se tournent vers Toi, sinon il me sera bien
vite ennuyeux de vivre sur cette terre parmi tant de morts ! »
2. Je dis : « Sois consolée, c'est pour cela que Je suis venu Moi-même en ce
monde ! Des voies bien tracées manquaient jusqu'ici, et les cieux étaient séparés
de la terre. Mais voici maintenant une voie juste et ferme et les cieux seront unis
à la terre dans le libre arbitre, où personne ne doit cependant se perdre.
3. Dès à présent, celui qui le voudra vraiment, pourra atteindre le ciel, ce qui
jusqu'ici n'était pas possible, car il y avait un abîme entre le ciel et la terre.
4. Mais malheur à tous ceux qui en prennent bonne note sans se convertir pour
autant ! Ce sera pire pour eux que pour les anciens, qui le voulaient souvent mais
ne le pouvaient pas ! Comprends-tu ? »
5. Jarah dit : « Seigneur, j'ai tout compris ! L'homme a cette possibilité, mais elle
dépend de son libre arbitre !... Les hommes voient le monde, ils en jouissent,
mais le ciel ils ne le voient pas et ils n'en jouissent pas ! Il est certain que
beaucoup ne voudront pas suivre la bonne voie, et ce sera pour eux pire qu'avant
! Je Te le dis, Ô Seigneur, bien peu d'hommes prendront la voie tracée du ciel,
car rien n'est plus difficile à l'homme que le renoncement à lui-même. »
6. Je dis : « Ne t'en préoccupe pas ! Les institutions pour améliorer les hommes
s'étendront d'ici jusqu'à l'au-delà ! Mais voilà que notre compagnie et le capitaine
se sont endormis pendant notre discussion, qu'allons-nous faire ? »
7. « Seigneur, dit Jarah, Tu le sauras mieux que personne ! »
8. Je dis : « Oui, tu as raison, et aussi bien les ai-Je laissés s'endormir pour qu'ils
voient en rêve ce que tu vas voir en réalité. Regarde, tu vas voir les cieux s'ouvrir
et tous les anges nous servir. Demain le versant ouest de cette montagne sera
devenu franchissable et par la voie naturelle nous pourrons repartir d'ici à
Génézareth ! Regarde donc attentivement la scène qui va se dérouler sous tes
yeux. »
9. Jarah leva alors les yeux et regarda un moment le ciel étoilé ; ne voyant
toujours rien, elle finit par dire de sa voix adorable : « Seigneur, Toi mon amour,
Toi ma vie, je ne vois toujours rien ! À quoi cela doit-il ressembler, que je sache,
lorsque quelque chose apparaîtra, si cela est de Toi ou non ? »
10. Je dis : « Ma très chère Jarah, il vaut mieux regarder avec ton cœur que de
lever tes yeux ou ta tête, des merveilles vont bientôt t'apparaître dans une lumière
magnifique. Essaie donc, et tu seras convaincue que J'ai toujours raison et que Je
dis la plus parfaite vérité. »
11. Instruite par ces mots, Jarah élève ses sentiments plus que ses yeux, et elle
voit les cieux s'ouvrir et des myriades d'anges de Dieu descendre sur terre dans
une splendeur merveilleuse, chantant : « Cieux, répandez votre grâce sur les
justes de cette terre, car saint est Celui qui l'a foulée pour le salut de ceux qui ont
chuté, avant même que le soleil n'eût resplendi dans la lumière de la grâce divine
dans la profondeur de l'infini !
12. Les enfants des hommes que Satan a conçus, Il les prend et en fait les enfants
de Son amour.
13. À Lui tout honneur, toute gloire, toute louange, car tout ce qu'il fait est bien
fait et l'amour est l'ordonnance de Sa sagesse. Lui seul est saint, plus que saint,
devant Son nom, que tout genoux fléchisse, sur la terre et dans les cieux. Amen !
»
Chapitre 134
Le soulèvement de la mer de Galilée
1. Jarah entend ces chants, elle dit dans son ravissement : « Seigneur, il est
difficile de distinguer ce qui est le plus beau et le plus merveilleux de ces chants,
de ces paroles ou de la lumière multicolore et de la magnifique stature de ces
innombrables chanteurs éthérés. Ah, j'ai maintenant enfin une notion de ce que
sont vraiment les cieux divins ! Oh, que je voudrais mourir immédiatement et
devenir un de ces merveilleux chanteurs ! Mais, dis-moi, si Tu le veux bien,
Seigneur, sont-ils réellement ce qu'ils paraissent ou ne sont-ils que de nouveaux
êtres créés à l'instant par Toi-même ? »
2. Je dis : « Ce sont les anges, qui ont été créés bien avant la première trace de
toute création matérielle. Appelles-en un et tu verras qu'il est, comme tous ses
semblables, un être parfaitement réel. Je dois là-dessus te faire la remarque que,
si légers et si éthérés soient-ils, chacun est habité d'une force, d'une puissance et
d'un pouvoir tels que le plus faible et le plus petit d'entre eux peut en un clin
d'oeil anéantir la terre entière sans qu'il en reste le moindre grain de poussière.
Maintenant que tu sais cela, appelles-en et propose-lui quelques épreuves ! »
3. Jarah dit : « Seigneur, je n'ose pas, car si beaux qu'ils soient, j'ai tout de même
peur d'eux. »
4. Je dis : « Mais, Mon enfant, ne t'ai-Je pas expliqué ce qu'est la peur ? Tu n'as
rien à craindre, vois-tu, sinon Je vais devoir penser que ton cœur est encore
quelque peu habité par le monde. Tu es près du Seigneur au nom duquel toutes
ces créatures fléchissent les genoux, qu'as-tu à craindre ? »
5. Jarah dit : « Ce n'est que trop vrai, mais cette vue inhabituelle d'une scène
aussi inimaginable a de quoi ébranler complètement le cœur d'une fragile fillette
! Mais je vais me reprendre et Tu verras que Ta Jarah peut aussi être sans crainte
!»
6. Elle fait alors signe à l'un des anges les plus proches qui vient aussitôt en
planant jusqu'à elle et lui dit de la voix la plus douce et la plus tendre : « Jarah,
toi, merveilleuse fille de mon Dieu, de mon Seigneur de toute éternité, que
souhaite de moi ton cœur pur ? »
7. Jarah, un peu déconcertée par l'éclat et la majesté de ce messager céleste, dit :
« Oui, oui, c'est juste, le Seigneur que tu vois ici me dit que chacun de vous est
merveilleusement puissant, et je voudrais une preuve pour m'en assurer ; mais
quelle preuve te demander, quand je ne sais rien que ce que j'ai apppris depuis
quelques jours du Seigneur Jésus ? »
8. L'ange dit : « Écoute, belle fleur du ciel, au nom du Seigneur, je vais te tirer de
ton embarras ! Regarde là-bas l'étendue profonde de la mer de Galilée, qu'en
dirais-tu si je la soulevais de son vaste et profond bassin et la suspendais en l'air
devant tes yeux pendant une heure environ ! »
9. Jarah dit : « Ce serait fantastique, mais où iraient alors les gentils poissons
pendant ce temps-là, et les nombreux bateaux amarrés sur la rive et tous ceux qui
voguent sur les flots ? »
10. L'ange dit : « Ce sera à moi de me soucier qu'aucun poisson ni aucun bateau
ne soit endommagé ! Si cette proposition te convient, à l'instant même, l'ouvrage
en question va planer sous tes yeux ! »
11. Jarah dit : « Oui, si aucun être ne doit en souffrir, tu peux y aller ! »
12. L'ange dit : « Regarde autour de toi, la mer est vide et toute son eau, jus-
qu'aux dernières gouttes, plane dans l'air, bien visible à tes yeux. »
13. Jarah voulut regarder en bas dans le vide, mais son front se heurta à la
muraille froide et mouillée de ce ballon d'eau qui planait librement à côté de la
paroi de roches et dont le diamètre mesurait bien quatre mille toises. Voyant cela,
elle demanda à mi-voix : « Mais, pour l'amour de Dieu, comment est-ce possible
si soudainement ? N'y a-t-il vraiment plus d'eau du tout, là en bas dans la mer ? »
14. L'ange dit : « Jarah, viens avec moi t'en assurer ! »
15. Jarah dit : « Mais comment est-ce possible ? »
16. L'ange dit : « S'il m'a été possible de soulever la lourde masse en un clin
d'œil, il me sera bien possible de te conduire à la vitesse de l'éclair au fond de la
mer et d'en revenir tout aussi vite ! Mais il faut que ce soit ta volonté, sinon je ne
puis rien faire, car nous respectons la moindre étincelle de volonté humaine, plus
que notre force qui nous vient de Dieu. C'est pourquoi il te faut vouloir pour
commencer, j'agirai ensuite. »
17. Jarah dit : « C'est bon, convaincs-moi ! »
18. À l'instant même elle se retrouve sur le sol parfaitement sec du fin fond de la
mer, et l'ange ramasse au sol une huître magnifique avec sa perle et la donne à
Jarah en souvenir pour la montrer aux autres qui dorment, mais qui voient tout
cela en rêve.
19. Tandis que Jarah met l'huître dans la petite poche de son tablier, l'ange lui
demande : « Crois-tu maintenant que toute l'eau de la mer se trouve dans ce
grand ballon qui plane au-dessus de nous et que son vaste lit est sec ? »
20. Jarah dit : « Oui, oui, je t'aurais cru même sans cela, mais ramène-moi bien
vite auprès du Seigneur, car sans Lui, je vais mourir sur-le-champ ! »
21. À peine a-t-elle prononcé cette dernière parole que Jarah se retrouve à Mes
côtés, au sommet de la montagne où Je lui demande si cela lui a plu et comment
elle a trouvé tout cela.
22. Jarah dit : « Seigneur, que toutes choses Te soient possibles, je le sais bien,
mais que dans Ta volonté et par Ta volonté une telle puissance soit accordée à la
volonté de l'ange échappe sans doute à l'ange lui-même, et à plus forte raison ne
puis-je l'expliquer moi-même. C'est merveilleux, au plus haut point, mais je n'y
comprends rien. »
23. Je dis : « Tu as donné une très bonne et très juste réponse, mais dans ton
propre cœur, tu finiras avec le temps par trouver comment de telles choses sont
possibles à Dieu ! Mais comment trouves-tu cet ange ? »
Chapitre 135
Épreuve de l'amour de Jarah
1. Jarah dit : « C'est en effet un homme d'une beauté indescriptible, car il a bien
l'air d'un être humain, mais à côté de Toi, ô Seigneur, les anges et les cieux avec
toute leur lumière et leur magnificence ne sont rien ! Car Toi seul Tu es toute
leur beauté. Je ne pourrais donc en aimer aucun ! »
2. Je dis : « Mais là, tel que tu Me vois, suis-Je vraiment plus beau que cet ange ?
Regarde, Mes mains rugueuses de travailleur, Ma peau basanée par le soleil et
Mon âge ne sont pas si attrayants, alors que cet ange possède ce qu'il doit y avoir
de plus beau dans les cieux ! »
3. Jarah dit : « Seigneur, l'extérieur n'existe pas pour moi si l'intérieur n'est pas
parfaitement identique à Ton cœur, car Toi seul es le Seigneur. »
4. Je dis : « Mais des anges rayonnent de toutes parts Ma lumière et Ma sagesse,
qui sont identiques à Moi. Si tu ne M'aime que pour Mon amour et que Je suis
pourtant le Seigneur, Je ne vois pas pourquoi tu ne peux aimer tout autant cet
ange magnifique, qui n'est certes constitué que de Mon amour et de Ma sagesse !
»
5. Jarah dit : « Seigneur, Toi mon amour, Toi ma vie, de ces deux éléments-là,
tous les êtres sont également constitués et je ne les aime pas par-dessus tout
comme Toi pour autant. Oui, j'aime certes tous les hommes, surtout ceux qui sont
dans la peine, et je demande sans cesse de toutes mes faibles forces de pouvoir
venir en aide aux pauvres, mais je ne puis les aimer autant que Toi. J'aime aussi
cet ange, mais mon cœur et ma vie n'appartiennent qu'à Toi seul. Et, Seigneur, si
Tu repoussais mon amour qui est pur, je serais très triste, je me dirais alors : Lui,
le Très Pur, le Très Saint, Il n'a pas trouvé ton amour assez digne du Sien et Il l'a
donc repoussé ! »
6. À ces mots, la petite se mit à pleurer et dit en sanglotant doucement : « Et ce
sera ainsi ! J'ai trop escompté avec mon amour et, dans ma naïveté je n'ai pas
compris qui était Celui qui a pareillement pris mon cœur ! C'est pourquoi Ton
amour par trop saint refuse gentiment mon amour trop peu saint et me donne un
ange qui pourra purifier mon cœur pour commencer et sanctifier mon amour !
C'est une grande douleur pour moi, mais je sais que Toi seul es le Seigneur et je
supporterai tout ce que Tu exigeras de moi ! »
7. Je dis : « Ô, toi Ma très chère, que reproches-tu à ton amour ? Qui ne M'aime
pas autant que toi et qui préfère à Moi quoi que ce soit du monde n'est pas digne
de Mon amour. Mais toi, dont le cœur Me préfère à tous les anges des cieux, tu
es donc toi-même depuis longtemps un merveilleux ange dont Moi qui suis ton
Dieu et ton Seigneur, Je suis Moi-même infiniment amoureux. Viens là, près de
Mon cœur chercher la pleine récompense de cette petite épreuve !»
8. À ces mots, la petite se sent mieux et se serre contre Moi aussi fort que
possible.
9. L'ange dit alors : ô félicité des félicités ! Que sont tous les cieux comparés au
spectacle d'un tel amour ? Nous les esprits parfaits nous avons déjà goûté sans fin
des félicités incommensurables. Mais ces délices des délices sont une goutte
d'eau à côté de cette enfant que Tu prends dans Tes bras, ô Père céleste, et que
Tu serres contre Ton cœur très saint, visiblement avec un amour extrême. Oh,
quel bonheur incomparable cette enfant doit ressentir ! »
10. Je dis : « Oui, c'est un bonheur immense pour cette enfant comme pour Moi,
mais vous goûterez le même bonheur lorsque tout sera accompli et que vous
festoierez tous à la table de Mes enfants. Maintenant fais redescendre l'eau dans
son bassin, après quoi Ma petite te demandera encore quelque chose ! »
11. Me tournant vers la délicieuse petite tête de Jarah, Je dis : « N'est-ce pas Ma
Jarah, tu m'aideras bien à donner du travail à Mes anges ! »
12. La petite dit d'une adorable voix tendre, naïve et innocente : « Oh, oui, par
amour pour Toi, je ferais bien volontiers n'importe quoi ! Tu n'as qu'à dire, et je
me jette dans le feu ou dans la mer, là, au pied des parois de cette montagne, si
elle s'y trouve à nouveau ! »
13. Je dis : « Et pourtant le feu de cette terre ne te brûlerait pas, ni ne te détrui-
rait, parce que tu es déjà pleine du feu le plus fort et le plus puissant ! Aussi les
pierres et l'eau ne te feraient aucun mal, car ton caractère dans Mon ordonnance
est plus solide que le diamant et ta sensibilité plus douce que toutes les eaux du
ciel. Bref, tu as déjà pris tout à fait place dans Mon cœur, aussi Je te donne la
liberté de pouvoir dire aux anges d'accomplir ce que tu veux, et ils le feront
comme si Je le leur avait ordonné Moi-même. Pense-donc aux travaux que tu
voudrais leur ordonner de faire, un ange attend déjà impatiemment d'exaucer le
souhait de ton cœur, et tout sera accompli à l'instant même. »
14. Jarah dit : « Mon cher messager du ciel, si cela peut être accompli sans faire
de mal, au nom du Seigneur, que cette montagne qui est si difficile à gravir par
une voie naturelle, devienne aisément franchissable, à la montée comme à la
descente, même du côté de la mer où elle n'est accessible qu'aux oiseaux ! »
15. L'ange fait une gracieuse révérence devant la petite Jarah en disant : « Ô toi,
merveilleuse souveraine au nom du Seigneur, regarde autour de toi, tu seras sans
doute contente de moi ! Regarde, parfois nous agissons bien lentement, mais
parfois aussi vite que l'éclair ! »
Chapitre 136
Visite d'une étoile
De la volonté de Dieu et de la volonté des anges
Le ciel et la terre ne sont que des idées des anges
1. Là-dessus l'ange conduit Jarah aux quatre coins du sommet pour la convaincre
que la montagne n'a rien perdu de sa hauteur, mais qu'elle peut être gravie sans
aucun danger, particulièrement du côté de la mer où la pente est maintenant tout
à fait adoucie !
2. Jarah, une fois convaincue, dit : « La chose est si merveilleuse que je
commence à me méfier de mes perceptions et à croire que je dors et que je rêve !
Dis-moi un peu comment cela a pu être possible ! Tout à l'heure tu as soulevé la
mer dans les airs comme une simple goutte d'eau, et maintenant tu as rendu
accessible de toutes parts cette montagne qui était si escarpée, et tout cela en un
clin d'oeil ! Comment peux-tu faire tout cela ? Tu n'as pas bougé de ta place et
pourtant tout s'est accompli ! Ah, c'en est trop pour moi, pauvre petit vermisseau
!»
3. L'ange dit : « Tu ne peux encore comprendre, mais le temps viendra bientôt où
tout cela te deviendra clair comme le soleil. Cependant, je puis déjà te dire que
nous les anges ne pouvons rien par nous-mêmes, et que tout se fait par la seule
volonté toute-puissante du Seigneur que tu aimes tant !
4. Regarde, toute la terre et tout le ciel ne sont que des pensées et des idées de
Dieu solidifiées par Sa ferme et inébranlable volonté. Quand Il reprend Ses idées
ou cesse Ses pensées, la créature visible disparaît à l'instant même. Mais si le
Seigneur a une nouvelle pensée et qu'il la fixe par Sa volonté toute-puissante, la
créature en question est visible à chacun ! »
5. Jarah demande : « Oui, mais alors qu'avez-vous à faire ? »
6. L'ange dit : « Nous sommes les purs réceptacles et les porteurs de la volonté
divine ; nous sommes la volonté même de Dieu, à proprement parler, et la
moindre de nos pensées suffit, si elle est reliée à la force de la volonté divine,
pour qu'une œuvre soit parfaitement accomplie. C'est de là que provient cette
rapidité d'exécution.
7. Tu vois cette étoile qui se lève, s'il y avait un chemin d'ici jusqu'à elle, en
vérité le nombre de tous les grains de sable de cette terre ne suffirait pas pour
compter le nombre d'années qu'un oiseau prendrait pour voler jusqu'à elle, et à
plus forte raison un homme marchant rapidement ! Et pourtant, il m'est possible
de la rejoindre en un clin d'œil et de revenir tout aussitôt. Tu ne remarqueras
même pas mon absence, et cependant, j'irai là-bas et reviendrai ici ! Me crois-tu ?
»
8. Jarah dit : « Pourquoi ne te croirais-je pas ? Mais évidemment, il ne peut s'agir
ici de me convaincre, car je ne puis et ne veux y aller avec toi comme j'ai pu aller
au fond de la mer ! »
9. L'ange dit : « Pourquoi pas ? Avec Dieu, toutes choses ne sont-elles possibles
? Si c'est agréable à Dieu, ce n'est pas une affaire pour moi ! Je me porte garant,
avec tous les autres anges que tu vois ici, qu'il ne t'arrivera rien ! »
10. Jarah dit : « Seigneur, est-ce vraiment possible ? »
11. Je dis : « Dans la main de cet ange, oui ! Si tu le veux, tu peux te confier à lui
et en peu d'instants tu seras de retour ici, près de Moi, parfaitement saine et sauve
! Mais rapporte un souvenir ! »
12. À ces mots, Jarah se dirige vers l'ange et lui dit : « Vois, je n'ai pas peur ; si
tu le peux, emmène-moi là-bas ! »
13. L'ange soulève Jarah du sol, la serre sur sa poitrine et disparaît. Dix secondes
après, il est de retour avec Jarah qui a dans sa poche une pierre brillante comme
l'étoile du matin dans tout son éclat !
14. Lorsqu'elle s'est un peu remise de son étonnement, Jarah Me demande : « Ô
Seigneur, toutes les étoiles innombrables sont-elles comme cette étoile-là que je
viens de voir de mes propres yeux physiques ou que j'ai observée de mon regard
intérieur ? Car c'est un monde gigantesque ! Ce monde-ci me paraît, à côté de cet
autre, comme une coquille d'escargot comparée à cette montagne ! Dans ce
merveilleux monde gigantesque des hommes parfaitement constitués, d'une taille
incroyable, vivent dans des temples magnifiques. Ces hommes sont si grands
qu'avec les pieds dans la mer, ils dépasseraient encore de trois fois la hauteur de
cette montagne ! Ainsi, dans ce monde merveilleux, tout est des milliers et des
milliers de fois plus grand, et infiniment plus beau qu'ici !
15. Nous étions au sommet d'une montagne très élevée d'où l'on dominait de tous
côtés une plaine sans fin traversée de fleuves magnifiques aux flots reflétant les
couleurs de l'arc-en-ciel ! Cette plaine était couverte des jardins et des temples
les plus splendides. L'instant d'après, nous étions en bas où nous vîmes ces
hommes gigantesques et les temples plus gigantesques encore où ils demeurent.
De loin, ces hommes sont magnifiques, mais de près ils ressemblent à des
montagnes ! Oui, il m'aurait fallu une très grande échelle pour pouvoir grimper
sur le petit orteil de l'un de ces hommes !
16. Bref, il me faudrait toute une vie pour Te raconter ce que j'ai vu là-bas dans
ces quelques instants ! Mais ce serait perdre Ton temps à des choses inutiles, et,
Seigneur, Tu as mieux à faire. Mais je voudrais pourtant que Tu me dises si ces
innombrables étoiles sont toutes des mondes pareils à celui que je viens de voir !
»
17. Je dis : oui, ma petite, et de plus grands et de plus merveilleux encore ! Mais,
dis-moi, crois-tu vraiment être allée quelques instants corps et âme sur cette
étoile ? »
18. Jarah dit : « Seigneur, Toi mon amour, Toi ma vie, nous avons fait quatre
brèves étapes à l'aller. Jusqu'à la quatrième étape, l'étoile paraissait toujours telle
que je la vois d'ici. À la quatrième étape, elle devint grande comme notre soleil,
puis, un bref instant après, nous étions dans le monde merveilleux de cette
montagne au sommet de laquelle nous nous trouvions. Sur l'invitation de l'ange,
j'ai pris une petite pierre au sol, c'est ce petit caillou lumineux, que j'ai ramené ici
comme preuve que j'étais réellement là-bas. Je ne puis Te donner plus de preuves
que j'étais là-bas ! »
Chapitre 137
Comment trouver son regard intérieur sur la Création
Du libre arbitre et de l'ange gardien
1. Jarah dit : « Je comprendrais si tout cela n'était pas si triste pour moi et pour
tous les hommes ! Car sur des milliers de gens, à peine une seule personne aura
la force d'affronter le monde par lui-même, comme Tu le souhaites ! »
2. Je dis : « C'est pourquoi Je suis venu en ce monde pour remettre en main
propre à chacun, par Mon enseignement et Mes actes, le moyen de vaincre plus
facilement le monde. »
3. Jarah dit : « Tout serait parfait, mais il y a sur terre encore une foule de gens
qui dans mille ans auront peut-être à peine commencé à entendre parler de Ton
enseignement. Comment, jusque-là, se préserveront-ils des pressions du monde ?
Ces gens valent pourtant tout autant que les autres Juifs ! »
4. Je dis : « Il en est des peuples du monde comme des divers enfants d'un père !
Ils sont différemment traités selon qu'ils ont vu le jour il y a deux, trois, quatre ou
cinq ans ! Le fils aîné est un homme déjà en pleine force, une fille est mariable,
mais il y a aussi quelques enfants de ton âge et trois autres encore au berceau !
Dis-moi s'il serait intelligent que ce père traite ceux qui sont dans les langes
comme il traite le fils déjà devenu un homme fort ! »
5. Jarah dit : « Ce serait évidemment stupide ! »
6. Je dis : « Eh bien, vois-tu, c'est aussi la raison pour laquelle certains peuples
parviennent plus tard à Mon enseignement. Ils ne sont pas encore mûrs, mais, le
moment venu, ils seront mûrs ! Comprends-tu ? »
7. Jarah dit : « Oh, je comprends bien ! Mais quel est alors, dans l'au-delà, le sort
des peuples qui ne sont pas encore mûrs ? »
8. Je dis : « Il faut que tu en aies la vision ! Regarde-la, au septentrion du ciel,
une étoile au reflet rouge se lève. Fixe-la comme tout à l'heure dans ton regard
intérieur et dirige vers elle aussi ton regard extérieur, tu auras en cette étoile la
plus belle réponse à tes questions. »
9. Jarah le fait aussitôt et dit très vite : « Ô Seigneur, Toi le Créateur tout puissant
des cieux et de tous les mondes, voilà un monde encore plus grand que tout à
l'heure ! Et de quelle lumière merveilleuse il est inondé ! Mais la lumière est d'un
rouge clair tirant sur l'or jaune alors que la lumière du monde précédent était
blanche. Mais cette fois encore la lumière est insupportable ! Ah ! Voilà enfin le
sol vivant de ce monde-là. Oh ! C'est indescriptiblement merveilleux. Quelle
diversité ! De charmantes montagnes aux pentes douces entourent de
merveilleuses vallées fertiles. On y voit toutes sortes de huttes qui n'ont qu'un toit
porté par des colonnes qui semblent de rubis chatoyant ! Ces huttes couvrent le
versant de la montagne en lignes à perte de vue ! Aussi loin que je porte les yeux,
je ne vois que ces huttes toutes semblables. Je remarque que ces toits ronds sont
tous portés par des colonnes de rubis hautes comme environ sept hommes, mais
toutes ces colonnes sont identiques ! Il semble ne pas y avoir âme qui vive, et
pourtant l'extraordinaire agriculture de ce pays témoigne d'une présence.
10. Il est étrange que dans ce monde plus que céleste tout soit pareillement
semblable. Un arbre fruitier ressemble à un autre à un cheveu près, une fleur à
une autre. Tout est mis en ligne et dans ce monde-là rien n'échappe à cet ordre.
11. Tout ceci est extraordinairement agréable à voir, mais à la longue, cette
éternelle unité doit finir par lasser des gens comme nous. Me voici maintenant
devant un hutte où se trouvent des êtres semblables à nous. L'un est sur un po-
dium et prêche, et plusieurs centaines de personnes écoutent ce prédicateur avec
dévotion !
12. Dans la hutte suivante je vois plusieurs personnes en vêtements richement
plissés attablées à une table abondante, mais il semble y avoir autour d'eux tout
autant de gens qui paraissent souffrir de la faim, et qui ne reçoivent rien. Là, dans
une troisième hutte, je vois quelques magnifiques filles de joie, elles sont toutes
nues, elles s'amusent avec des hommes qui ne disent presque rien. À l'arrière-
plan une foule de jeunes hommes lubriques font des signes aux filles superbes
dans l'espoir de pouvoir les approcher et de pouvoir s'amuser avec elles. Mais ils
ne reçoivent aucune réponse et ne semblent pas très satisfaits !
13. Ah ! Quelles curieuses installations ! si ces huttes sont toutes semblables à
l'extérieur, à un cheveu près, les préoccupations de ceux qui les habitent
semblent bien variées. Cela paraît très étrange. Mais si dans ce monde gi-
gantesque tout est si uniforme, je préfère alors infiniment notre petite terre,
même avec ses méchantes gens ! »
14. Je dis : « Tout ce que tu viens de voir là n'est qu'une école où s'exercent le
renoncement à soi-même et la victoire sur soi. Va un peu plus loin avec ton
regard sensible et il va se passer quelque chose d'autre ! »
15. Jarah le fit et se mit tout à coup à crier si fort que tous ceux qui dormaient se
seraient réveillé si Ma volonté ne les avait pas aussitôt ramenés au sommeil !
16. Je demandai à Jarah ce qui l'avait fait crier pareillement.
17. Jarah dit : « Oh ! Seigneur, cette splendeur et cette majesté surpassent tout ce
que peut concevoir l'esprit humain! Voilà un palais pour Toi aussi haut et aussi
grand que la plus haute montagne de cette terre, les murs sont de pierres
précieuses, des milliers et des milliers d'escaliers en or et des galeries décorent
extérieurement ce palais gigantesque dont le sommet se finit en flèche. Tout à
l'entour resplendissent des jardins magnifiques pour le plus grand
émerveillement des yeux et pour l'agrément des foules sans doute. Des quantités
d'œuvres d'art flottent sur les eaux de très beaux lacs sans être dirigées par
personne et sans que personne ne les regarde.
18. Seigneur, que signifie tout ceci ? Qui sont les habitants de ce palais ma-
gnifique et à qui servent toutes ces œuvres d'art qui flottent sur ces beaux lacs ? »
Chapitre 139
L'ordre du monde des étoiles
1. Je dis : « Vois-tu, ce palais est la demeure d'un grand maître de la région que
tu viens de voir. Toutes ces huttes sont sous sa surveillance, et ces œuvres d'art
qui flottent sur les lacs servent occasionnellement à certains enseignements de
haute sagesse. Et des demeures comme celle-ci, il y en a encore des centaines de
milliers dans la ceinture centrale de ce monde de lumière à côté d'une foule de
toutes sortes de villes. À côté de cette ceinture dont tu ne vois qu'une toute petite
partie, il y a encore dans ce monde-là soixante-seize ceintures latérales dont
chacun a une organisation propre. Ce monde de lumière et celui que tu as vu
précédemment sont en fait deux soleils semblables à notre Soleil qui éclaire la
Terre le jour, mais à la différence que le monde que tu as vu tout d'abord est près
de mille fois plus grand que le Soleil de notre Terre, et que celui que tu vois
maintenant est à peu près quatre mille fois plus grand que notre soleil, et près de
mille fois mille fois plus grand que toute cette terre !
2. Les hommes de cette terre ont encore une notion tout à fait erronée de cette
terre, du Soleil, de la Lune et des étoiles. Mais plus tard, lorsqu'ils sauront mieux
faire leurs calculs, ils parviendront à des notions plus exactes quant aux astres de
l'espace infini de la Création.
3. Tu peux savoir qu'une foule de terres semblables à celle-ci gravitent autour de
chacun de ces soleils à diverses distances et que plusieurs de ces terres sont
accompagnées de terres latérales qui tournent autour d'elles toujours à leur suite,
comme la Lune autour de la Terre. Et autant il y a de terres qui gravitent autour
d'un de ces soleils, autant il y a de ceintures sur ce soleil, ceintures qui
correspondent à ces terres. Mais ce n'est plus le cas des soleils centraux, qui ont
pour fonction de tenir et de conduire les soleils qui ont des terres et qui sont mille
fois mille fois plus grands que dix mille fois mille de ces soleils dont tu as vu
maintenant deux exemplaires.
4. La surface d'un tel soleil central n'est plus divisée en ceintures, mais en zones,
et il y a autant de zones qu'il y a de soleils terrestres gravitant autour du soleil
central. Et chacune de ces zones est en étendue de mille à dix mille fois plus
grande que la surface du soleil terrestre correspondant et de toutes les terres de ce
dernier.
5. Ensuite il y a des soleils centraux autour desquels gravitent mille fois mille
soleils centraux semblables à ceux dont Je viens de parler, avec tous leurs soleils
terrestres, et encore d'autres soleils centraux autour desquels gravitent les soleils
centraux de deuxième catégorie, et enfin un astre central commun qui demeure à
une profondeur incalculable, autour duquel tournent les soleils centraux, et dont le
seul mouvement est de tourner autour de son axe. Cet astre central est également
un soleil, mais il est tellement grand que s'il était creux et que l'on plaçait en son
intérieur tous les innombrables soleils terrestres, les soleils centraux de
première,deuxième et troisième catégorie,toutes les terres qui gravitent autour des
innombrables soleils terrestres,les lunes de ces terres, et toutes les grandes et
petites comètes qui, en tant que terres en devenir, tournent sur des orbites
variables autour des soleils terrestres, le volume occupé par tous ces corps
célestes ne serait pas même la cent millième partie du volume de cet astre central.
- Jarah, peux-tu te faire une idée de tout ceci? »
6. Jarah dit : « Seigneur, qui peut comprendre une telle dimension ? Je peux bien
me faire une idée, mais j'en attrape le vertige ! J'ai pu voir abondamment ce
soleil, mais je ne sais pourtant toujours pas comment répondre au pourquoi de
l'immaturité des peuples de cette terre dans l'au-delà. »
7. Je dis : « Détourne maintenant tes yeux de ce soleil et écoute-Moi ! »
8. Jarah dit : « Seigneur, c'est fait. »
Chapitre 140
Des périodes de développement dans l'au-delà pour qu'une âme se détache de la
matière
1. Je dis : « Écoute-Moi bien ! Tous les êtres humains qui n'ont pas atteint la
maturité viennent pour commencer dans le soleil que tu viens de voir. Ils étudient
dans ses immenses écoles tout ce qui concerne les choses de la vie. Ainsi, les
enfants morts en bas âge vont dans l'anneau central de notre soleil où ils sont
élevés, mais surtout dans la partie spirituelle du soleil.
2. Les âmes immatures retrouvent un corps dans le soleil que tu vois, sans qu'il y
ait naissance pour autant. Ce corps qui se spiritualise avec l'âme peut devenir
purement spirituel. Lorsque tu es allée toi-même dans le premier soleil que tu as
visité, tu as pu voir comment et par qui ces âmes peuvent être transportées d'ici
jusque là-bas ! Cet ange qui est encore à nos côtés est le chef et le maître de tous
ces mondes et de tous ces soleil dont Je t'ai parlé. Tu vois quel pouvoir lui est
confié et quelle sagesse.
3. Mais tous les innombrables anges que tu vois en vastes rangs autour de toi ont
la même charge, car dans les vastes profondeurs de l'infini il y a encore un
nombre incalculable pour l'être humain de régions solaires ayant chacune leur
soleil central, et chacune de ces régions est gouvernée par l'un de ces anges. Tu
vois beaucoup d'anges, il est vrai, mais ce n'est pas la cent millième partie des
myriades d'archanges, sans parler des plus petits anges qui sont responsables de
plus petits soleils, de plus petites terres et de plus petites régions. Et vois-tu, Je
dois pourtant à chaque instant Me soucier d'eux tous dans Mon esprit éternel, et
s'ils sortaient un seul instant de Ma préoccupation intangible, tout s'effondrerait
instantanément, l'infiniment grand comme l'infiniment petit. Peux-tu comprendre
cela ? »
4. Jarah dit : « Ô Seigneur, Toi qui es dans Ton esprit le seul, l'éternel, le tout-
puissant Dieu, comment peux-Tu me poser une telle question, à moi qui ne suis
qu'un grain de poussière ! Oh ! si les aveugles Pharisiens de Jérusalem pouvaient
voir cela, ils changeraient d'attitude. Mais ils ne peuvent le voir, et ils ne le
verront pas, leur méchanceté et leur endurcissement les anéantiront. Pourtant,
leurs âmes iront aussi dans ces écoles des soleils de l'au-delà ! »
5. Je dis : « Absolument pas, Ma très chère Jarah, car ils n'appartiennent pas à un
peuple immature mais à un peuple d'une très grande maturité, et les âmes d'un
peuple mature, lorsqu'elles se sont adonnées à la méchanceté, vont dans les
profondeurs de la terre, selon leur nécessité propre, car elles sont devenues pure
matière et elles ne peuvent ni ne veulent plus se séparer de cet élément. Tous les
moyens les plus extrêmes seront tentés, ni tourment, ni douleur ne leur seront
épargnés pour essayer de les détacher de la matière, et si l'une de ces âmes se
détache de la matière, elle ira dans les écoles spirituelles de cette terre et passera
ensuite sur la lune quand elle aura atteint le renoncement à soi-même. Quand elle
sera devenue assez forte, elle passera alors sur une planète plus parfaite où elle
sera initiée à la véritable sagesse.
6. Lorsqu'une telle âme parvient à une véritable lumière, cette lumière, en
grandissant, se met à engendrer la chaleur de la vie spirituelle. L'âme commence
alors à s'unir à l'esprit, et sa vie devient de plus en plus amour. Une fois que cet
amour a atteint une force et une puissance suffisante et qu'il est devenu une
vivante flamme intérieure, la lumière se fait dans cette âme qui est alors en état
d'être acceptée dans le monde libre des esprits bienheureux où elle sera guidée
comme un petit enfant.
7. Mais avant qu'une âme matérielle ait la chance de parvenir jusque-là, il peut se
passer des siècles terrestres. Mais Je lis dans ton cœur que tu voudrais encore Me
demander quelque chose, et Je te le dis, demande, car tes question ont toujours
un sens. Mais cette fois, pose ta question à l'ange qui est à nos côtés, il te donnera
aussi une bonne réponse. »
Chapitre 141
De la dimension de l'esprit humain
De la consistance des anges
De la vitesse de déplacement de l'esprit céleste et de la matière céleste
1. Jarah se tourne vers l'ange et lui demande : « Ton Seigneur et mon Seigneur
m'a fait la grâce de me dire de m'adresser à toi, Ô charmant jouvenceau, pour te
poser une question toute spéciale, et Il m'a dit que tu me donnerais la bonne
réponse ! Aussi, dis-moi pourquoi Mes parents terrestres ainsi que les disciples
du Seigneur doivent dormir alors que je suis éveillée, et pourquoi je dois voir
tout cela de mes yeux charnels alors qu'ils ne peuvent et ne doivent le voir qu'en
rêve ? »
2. L'ange dit de la plus gentille voix : « Toi, très douce et très heureuse fille du
Seigneur, avec ton âme tu es déjà totalement esprit et tu n'as plus guère de lien
avec le monde de la matière. Ton œil terrestre est devenu l'œil de ton esprit
immortel, tu es parfaitement disposée, dans ta vie, comme tous les hommes
devraient l'être.
3. L'esprit de tout homme est ainsi fait qu'il contient en lui tout l'infini, comme
l'esprit de Dieu ! Lorsque tu perçois avec la pure sensibilité de ton âme une étoile
aussi éloignée, ou quoi que ce soit d'autre, c'est avec l'œil de l'esprit. Quand l'œil
de ton âme, par le truchement de l'œil charnel, se tourne vers l'objet que tu
considères avec les yeux de l'esprit, il se produit un conflit intérieur entre l'image
qui demeure paisiblement dans ton esprit et la forme extérieure de cette même
image. À partir de ce conflit, la lumière se fait sur l'objet considéré, qui t'apparaît
alors tel qu'il est dans sa réalité.
4. Je te le dis et en toute vérité, tous les hommes en seraient capables s'ils étaient
aussi mûrs et aussi bien disposés que toi dans la sensibilité de leur âme : mais
bien peu sont semblables à toi, et ceux qui dorment ici n'ont rien de comparable à
toi ! Leur âme est loin de voir par leur œil terrestre, et l'œil de leur esprit est
encore totalement clos ! Leur âme doit pour commencer devenir capable de
détourner ses regards extérieurs des choses du monde, pour les porter sur les
réalités spirituelles.
5. Habituellement, l'homme n'y parvient que rarement, c'est pourquoi le sommeil
de ceux qui dorment ici est si particulier.
6. Certains humains à l'âme et à l'esprit très forts peuvent procurer un tel
sommeil à des frères plus faibles qu'eux par des impositions de mains réitérées,
mais les gens faibles ne peuvent faire cela pour leurs frères et sœurs aussi faibles
qu'eux. Mais que le Seigneur puisse tout faire par Sa simple volonté, tu n'en
douteras certes plus jamais! »
7. Jarah dit : « Le Seigneur te bénisse pour les explications que tu m'as données
et que j'ai bien comprises ! Mais une autre question encore, dis-moi, très cher et
très gracieux jouvenceau, comment dois-je m'expliquer ton incroyable rapidité ?
»
8. L'ange dit : « Fille très aimée de Dieu, seul un esprit pur peut le comprendre,
parce qu'il n'a à se préoccuper ni de l'espace, ni du temps. Nous ne sommes rien
en nous-mêmes, ce que tu vois en nous avec l'œil de ton esprit est une pensée de
Dieu, une idée de Dieu, une parole de Dieu. Nous sommes donc de purs esprits,
et aucune matière ne peut nous faire obstacle.
9. Si rien ne peut s'opposer à un esprit aussi vivant, l'ici et l’ailleurs ne sont né-
cessairement qu'une seule et même chose. Aucune matière ne peut donc se
mouvoir aussi rapidement que nous, parce que, même dans l'éther le plus subtil,
la matière rencontre toujours un obstacle qui freine son mouvement.
10. Il existe dans l'espace infini de la Création des soleils centraux de troisième
catégorie, qui viennent juste avant le soleil, central. Ces soleils se meuvent en
divers grands cercles autour du soleil central, selon une vitesse impensable pour
ta compréhension, afin de pouvoir se maintenir à la distance prescrite. Leur
trajectoire est à une distance si grande du soleil central que tu ne peux le
concevoir avec ta compréhension.
11. Par exemple, pense que cette terre est une sphère en réalité des centaines de
fois plus grande que ce que tu peux en voir. Considérons maintenant le nombre
de grains de sable qu'il faudrait pour avoir l'équivalent de son volume total.
Imagine-toi maintenant que chacun de ces grains de sable est d'une dimension
qui va d'ici jusqu'à cette étoile que nous avons visitée en premier, et tu mesureras
alors à peu près la distance d'une telle trajectoire. Un soleil central de troisième
catégorie parcourt une telle trajectoire au plus vite en dix fois cent mille ans. Et
pourtant, parce que cette trajectoire est d'une étendue si incroyable, ce soleil
parcourt en un instant une distance mille fois plus grande que celle qui nous
sépare de cette étoile que nous avons visitée.
12. Tu vas penser et dire : bon, un tel soleil se déplace donc mille fois plus vite
qu'un pur esprit. Car si nous nous étions déplacés à la vitesse de ce soleil d'ici à
cette étoile, nous serions revenus mille fois plus tôt que nous ne l'avons fait à ta
vitesse spirituelle !
13. Et je te réponds que la grande vitesse de ce soleil, à côté de ma vitesse
spirituelle, n'est qu'une allure d'escargot. Car vois-tu, malgré sa vitesse si in-
croyable pour ton entendement, ce soleil a besoin de dix fois cent mille ans pour
parcourir cette trajectoire autour de son soleil central, alors que moi ou un autre
esprit de mon espèce pouvons parcourir la même distance en un instant si bref,
qu'entre mon départ et mon retour tu ne pourrais percevoir la moindre durée de
temps, et pendant ce même bref instant Je pourrais parcourir une trajectoire
plusieurs milliers de centaines de mille fois plus grande.
14. Ainsi entre la vitesse d'un esprit et la vitesse d'une matière si rapide soit-elle,
la différence demeure infinie. Car si une matière, si rapide soit-elle, traverse en
un instant la distance qui va d'ici à cette étoile, il lui faudra un autre instant
identique pour en revenir, ce qui fait deux instants, et si cette matière parcourt en
un instant une distance cent mille fois plus grande, elle mettra dix instants pour
une distance dix fois plus grande, alors que je fais le même aller et retour en un
seul et unique instant !
15. Voilà ce que je peux faire et ce que peut faire tout esprit de mon espèce,
parce que, dans tout l'espace infini, il n'y aucun obstacle pour nous, alors que la
matière, même dans l'espace le plus éthéré, rencontre toujours une résistance et
ne peut jamais atteindre la vitesse de l'esprit. Dis-moi, très gracieuse fille bénie
de Dieu, si tu as un peu compris cela ! »
Chapitre 142
De la véritable dimension spirituelle
Chapitre 143
Les disciples tirés de leur sommeil
Chapitre 144
Paroles de louange de Jarah
1. Tous ceux qui dormaient encore se réveillèrent aux chants des disciples,
auxquels ils s'associèrent aussitôt. Je les laissai donner libre cours aux élans de
leurs cœurs tandis que Jarah embrassait Mes pieds, pleurant de joie et de félicité.
Après avoir pleuré ainsi de joie pendant une demi-heure et lorsque les disciples
eurent fini leur salut matinal, la petite se releva en disant d'une voix pénétrée : «
Ô terre, quand, quand seras-tu de nouveau assez heureuse pour être foulée par
ces pieds ? Sens-tu, muette mère de tous les vices, qui est Celui qui marche sur
toi maintenant ? Non, non, tu ne sens pas, tu ne peux pas le sentir, car tu es morte
et trop petite ! Comment saurais-tu comprendre ce qui est déjà inimaginablement
grand et saint pour l'espace infini et toutes les innombrables myriades d'êtres
qu'il contient ! Par où commencer, par quoi finir pour chanter Sa gloire qui
resplendit dans la goutte de rosée, car Lui, le Dieu éternel, c'est Lui qui a créé la
goutte de rosée aussi bien que ces astres infiniment grands ! Ô Seigneur, ô mon
Dieu, anéantis-moi, mon cœur ne supporte plus l'amour pour Toi qui me
consume.
2. Lorsque je ne connaissais pas encore Ta magnificence, je T'aimais comme un
être humain parfait. Je devinais bien en Toi l'esprit de Dieu et mon cœur aimait
en Toi ce saint esprit ineffable, tant je voyais en Toi un fils du Très Haut, mais
maintenant tout a pris une autre dimension, Tu es le Très haut Lui-même, en
dehors de Toi, il n'y en a pas d'autre ! Pardonne au petit vermisseau de poussière
que je suis, d'avoir prétendu, enraciné dans son aveuglement T'aimer comme un
être humain ! »
3. Je dis : « Ma chère enfant, il n'y a rien à pardonner, demeure dans cet amour,
car Je vous le dis à tous, je n'ai aucune considération pour l'amour de celui qui ne
M'aime pas comme tu M'as aimé, Ma très chère Jarah.
4. Qui n'aime pas Dieu comme l'être humain le plus parfait peut d'autant moins
aimer son prochain, qui est un être humain infiniment imparfait ! S'il est écrit que
Dieu a créé l'homme selon Ses propres proportions, comment Dieu serait-il
autrement que l'homme qui est dans Ses proportions, à cela près qu'il serait
évidemment l'homme le plus parfait ? Ou ai-Je l'air d'autre chose que d'un
homme, parce que toi, Ma petite, tu as vu quelques minuscules gouttelettes de
Ma magnificence ? »
5. Jarah dit : « Oh ! non, Tu es toujours le même et rien n'a changé dans mon
cœur ! Oh ! Je préférerais T'avoir tout entier dans mon cœur, tant mon amour est
puissant ! Je voudrais pouvoir Te serrer dans mes bras, à m'en faire éclater les
veines, pour ne plus Te lâcher, oui, je voudrais couvrir sans cesse ton visage de
baisers infinis, T'embrasser, bref, je ne sais dire ce que je voudrais pouvoir faire
uniquement par amour pour Toi. Mais Tu es cependant le saint des saints, l'être
divin le plus haut, et je songe dans mon cœur, que je suis par trop indigne de
T'aimer comme si Tu étais un être humain. Mais je pense ce que je pense, aussi
mon cœur n'a-t-il aucune retenue et T'aime aussi fort qu'avant ! »
6. Je dis : « C'est bien ainsi, que ton âme suive les élans de ton cœur et y en-
tretienne une flamme claire, et toute ton âme sera lumineuse, l'esprit de Dieu s'y
lèvera comme le soleil, et dans sa lumière et dans sa chaleur de vie la moisson de
Dieu lèvera et ton âme sera comblée des fruits de la vie éternelle.
7. L'esprit de Dieu ne peut être éveillé dans l'homme que par l'amour pour Dieu
et par l'amour du prochain qui procède de cet amour pour Dieu.
8. Demeure donc dans cet amour, il a plus de valeur pour Moi et pour toi que
toutes ces merveilles que tu as vues de tes yeux.
9. Mais écoutons maintenant les autres nous raconter l'impression que cette nuit
leur a faite. »
Chapitre 145
La réalité d'un rêve collectif
Chapitre 146
Jarah montre ses souvenirs
1. Le capitaine alla avec Ebahi demander à Jarah de bien vouloir montrer ses
deux souvenirs.
2. Et la très chère Jarah prit dans la grande poche de son tablier les deux
souvenirs et, venant à leur rencontre, dit : « Voilà, mon cher Jules, les deux
souvenirs bien réels. Crois-tu maintenant et vas-tu enfin sortir de ton éternelle
crainte ? »
3. Le capitaine dit : « Oui, toi ma chère et douce Jarah, ma foi est plus ferme que
cette montagne et, grâce au Seigneur tout-puissant, ma terrible crainte est partie,
tu peux en être parfaitement certaine ! Mais tes souvenirs témoins sont d'une
valeur inestimable, l'huître avec son contenu vaut tout Jérusalem, car elle
contient vingt-quatre perles de la grosseur d'un petit œuf de poule, dont chacune
vaut cent mille livres d'or ! Et quelle valeur peut avoir cette pierre lumineuse plus
belle que l'étoile du matin ! La terre n'a rien de comparable ! Bref, tu n'est plus
seulement spirituellement, mais aussi matériellement la plus riche fille du
monde. Tu es vraiment plus riche que tous les rois et les empereurs de la terre !
Qu'est-ce que cela te fait ? »
4. Jarah dit très modestement : « Cela ne me fait rien du tout, et ces deux sou-
venirs n'ont pour moi d'autre valeur que celle pour laquelle je les ai pris, à savoir
un souvenir des merveilles indescriptibles que Dieu a faites pour nous, pauvres et
faibles pécheurs habitants de la ville et des environs de Génézareth !
5. Le Seigneur ne sera pas toujours corporellement présent au milieu de nous,
comme Il me l'a dit clairement hier, mais ces signes Le rappelleront toujours à
nos cœurs, et renouvelleront notre amour envers Lui. Voilà mon avis.
6. Le Seigneur m'a encore laissé un signe de cette nuit de miracles, qui restera
pour moi le jour le plus lumineux ! Ce signe restera visible, puis il deviendra
invisible pendant un certain temps, puis il redeviendra visible lorsque je le
mériterai. »
7. Ebahi demande : « Eh bien, où est ce signe ? Ne veux-tu pas nous le montrer ?
»
8. Jarah, à côté de qui se tient l'ange Raphaël, dit : « Là, près de moi, si tu n'y
vois aucun inconvénient ! »
9. Ebahi, considérant l'ange de la tête aux pieds, dit : « Voilà un souvenir encore
bien plus précieux évidemment, mais je crains que tu ne t'amouraches bien vite
d'un si beau jouvenceau, et lorsqu'il deviendra invisible, tu en deviendras muette
et aveugle de chagrin ! »
10. Jarah dit : « Oh, soucie-toi d'autre chose ! Quand on aime le Seigneur Dieu
comme moi, toutes les beautés du ciel sont comme inexistantes. Mais j'aime
beaucoup ce jouvenceau, car il est très sage et extrêmement fort, puissant et ra-
pide ! »
11. Le capitaine demande : « D'où vient-il ? Je ne me souviens pas l'avoir vu à
Génézareth, et pourtant il porte le costume de l'endroit ! J'admire ses traits
remarquablement purs, si doux et si tendres, il y a dans son être une véritable
magie de la plus haute grâce et la forme de ses pieds est plus que parfaite !
12. Le pantalon clair qui descend aux genoux, la chemise d'une blancheur
éclatante, le petit manteau jeté sur l'épaule et dont l'étoffe bleue retombe en
nombreux plis lui vont à ravir, on ne peut imaginer meilleur goût. Le petit
chapeau rond coiffe sa merveilleuse tête d'une manière indescriptible, vraiment,
je ne saurais refuser quoi que ce soit à ce très gracieux jouvenceau ! Je lui
abandonnerais un empire pour qu'il m'aime !
13. Non, plus je regarde cet être humain, plus il me paraît beau et séduisant ! Ses
parents peuvent être heureux d'avoir un tel fils, et toi, ma très chère Jarah, tu
peux t'estimer au comble du bonheur d'avoir pareil cadeau. S'il existait sur terre
un autre garçon semblable à lui, en vérité je donnerais tous mes trésors et tous
mes biens pour lui.
14. Mais que feras-tu de ce magnifique jouvenceau ? Il est vrai que tu es une très
belle fillette, mais la beauté incomparable de ce jouvenceau te dépasse. Tu as
douze ans à peine et le jouvenceau doit en avoir seize. Il ne me déplairait pas
qu'il devienne ton époux, mais s'il ne reste qu'un camarade, ton petit cœur
facilement inflammable se trouveras bien vite dans l'embarras. Mais dis-moi, à
quoi te servira-t-il ? »
15. Jarah dit : « Vous parlez selon vos sens, parce que vous ne connaissez pas
l'esprit. Ce jouvenceau restera mon gardien et mon guide jusqu'à ma seizième
année et il m'instruira dans la sagesse du ciel de Dieu, et si vous le voulez, il
vous instruira également. »
16. Le capitaine dit : « Mais après ta seizième année, il deviendra sûrement ton
époux ! »
17. Jarah dit : « Oh ! mon cher Jules, voilà encore une question bien de toi, pour
laquelle je ne te tirerai pas ma révérence ! Ne t'ai-je pas déjà dit dès le début que
ce jouvenceau me quittera après ma seizième année pour un certain temps,
comme le Seigneur l'a décidé, ce qui ne me fera rien, car mon cœur appartient
tout entier au Seigneur qui me restera éternellement fidèle. Si mon cœur est la
propriété du Seigneur, il ne peut être la propriété de quelqu'un d'autre !. »
18. Ebahi dit : « Oui, oui, ma très chère fille, tu as parfaitement raison, mais les
années ne sont pas encore là, et quand elles viendront, tu seras en lutte avec ta
chair, et tant mieux pour toi si tu t'en rends maîtresse. »
19. Le capitaine dit : « Oui, oui, ton père a raison ! Tu n'es encore qu'une enfant
et ton petit cœur déjà brûlant comme de la chaux vive est actuellement infiniment
comblé et ne peut rien souhaiter d'autre ; mais lorsque ce comble te sera retiré
afin de t'éprouver, ton cœur sera affamé et quand ce mets suprême lui manquera,
il tendra les bras vers autre chose pour se satisfaire. Si la faim de l'estomac est
douloureuse, celle de l'amour l'est mille fois davantage.
20. Prenons un général sans cœur qui tyrannise ses subalternes, tous se mettront à
douter et à désespérer, et au lieu d'aller au combat pour lui, ils passeront à
l'ennemi pour se défaire de leur chef insensible. Mais qu'un général se montre
sage et aime ses subalternes comme un père aime ses enfants, l'ennemi aura beau
s'approcher, ils se battront pour leur chef avec courage et abnégation jusqu'à la
dernière goutte de leur sang et ils abattront l'ennemi.
21. Oui, ma chère Jarah, l'amour est une bien puissante chose, qui nécessite une
sage conduite si on ne veut pas finir par se laisser dévorer par lui. »
22. Jarah, après un instant de réflexion, dit : « Oui, oui, tu ne dois pas avoir tout à
fait tort, mais pour ce qui est du Seigneur, il faut admettre qu'il ne sera jamais le
chef tyrannique d'un cœur qui l'aime par-dessus tout ! »
23. Jules dit : « Évidemment, mais je me rappelle ce qu'il a dit cette nuit : Il est et
reste Dieu, que l'esprit humain ne peut approcher parfaitement que lorsqu'il s'est
formé, forgé et fortifié lui-même grâce aux forces qui lui sont données, et,
pendant cette période d'auto-éducation, Il le laisse sans réponse ! Mais alors,
dans cette période, Dieu est nécessairement un tyran aux yeux fermés et aux
oreilles sourdes. Et quand cette période qu'il a annoncée Lui-même arrivera pour
toi, ma très chère Jarah, alors nous en reparlerons ! »
24. Jarah dit : « J'ai confiance et je crois qu'il ne m'abandonnera pas entièrement !
»
25. Le capitaine dit : « Il ne risque guère de le faire, parce que tu es déjà
beaucoup plus avancée que nous tous, mais dans ton grand amour pour Lui, tu te
sentiras aussi brièvement abandonnée et tout le poids du monde pèsera sur toi.
Mais allons à Lui, Il semble attendre quelque chose ! »
Chapitre 147
Comment contacter le Seigneur
Le lever de l'intelligence du cœur
Chapitre 148
Considérations sur la nature et ses correspondances spirituelles
1. À cet appel des Esséniens, tous s'approchèrent de Moi. J'interpellai les deux
Esséniens en leur disant d'observer avec beaucoup d'attention ce qu'ils allaient
voir pendant ce lever de soleil où il y aurait beaucoup à apprendre.
2. Les deux Esséniens viennent plus près de Moi et disent : « Seigneur, Seigneur,
qu'il y ait infiniment à apprendre peut bien être une vérité éternelle, mais où en
est notre âme, est-elle capable de comprendre un enseignement aussi élevé ?
Nous voyons bien avec nos yeux concupiscents dans la profondeur lumineuse de
Ta création merveilleuse et nous sommes dans l'étonnement de notre âme, mais
nous sommes bien trop aveugles et bien incapables de comprendre une
miraculeuse gouttelette de rosée, ou à plus forte raison les innombrables astres,
incomparablement grands et éloignés, qui montent et descendent dans le
firmament. Nous avons déjà parlé avec Pierre, le disciple, de ces points lumineux
qui planent au-dessus des petits nuages, mais il n'a pu nous expliquer ce
phénomène. Seigneur, si cela T'était agréable, Tu pourrais nous dire quelques
mots à ce propos. »
3. Je dis : « Cela a bien peu de signification et n'est qu'un simple phénomène tout
aussi naturel que les flots un peu agités de la mer ; quand elle est houleuse, tu
peux observer les mêmes jeux de lumière, ce sont les rayons du soleil qui
frappent l'endroit où tu regardes.
4. L'air respirable pour les hommes et les animaux ne monte pas jusqu'aux
étoiles, il ne va pas plus haut que quatre fois la hauteur de cette montagne au-
dessus du niveau de la mer, au-delà de cette hauteur, l'air de la terre se raréfie, de
même que l'eau dans l'air, et il a une surface aussi luisante et plate que l'eau et
ondule continuellement comme la surface de la mer.
5. Quand la lumière du soleil tombe sur ces flots aériens, elle est réfléchie
comme par un miroir d'eau, et si ces vagues de l'air sont plus fortes, cette lumière
reçue est renvoyée jusqu'à la terre, surtout quand le soleil semble être encore
sous l'horizon d'où ses rayons en quelque sorte viennent d'en bas frapper cette
surface de l'air. Ces vives lumières qui oscillent ainsi ne sont donc que des reflets
du soleil, et leur mouvement vient de celui des flots de l'air.
6. Que ces lumières apparaissent au-dessus de ces petits nuages lumineux lorsque
le soleil point à peine à l'horizon, correspond au fait que les flots de l'air sont
davantage éclairés par la luminosité de ces petits nuages éclairés par le soleil
avec lesquels ils jouent. Voilà l'explication toute naturelle du phénomène.
7. Mais, au-delà, il y a aussi une signification spirituelle qui, pour votre en-
tendement, est la suivante :
8. Pensez et représentez-vous le soleil spirituel, la lumière qui en procède est
reçue par la surface mouvementée de la mer de la vie créée qui joue avec cette
lumière, d'où surgissent toutes sortes d'images caricaturales qui réfléchissent bien
la lumière, mais qui détruisent en même temps toute trace de la forme divine
originelle. Ainsi tout le paganisme et le judaïsme actuel sont-ils une défiguration
de ce qui est purement divin.
9. Lorsque vous voyez le soleil se refléter sur la surface d'une eau parfaitement
calme, ce miroir réfléchit la même majesté et la même vérité du soleil que
lorsque vous le voyez dans le ciel. Il en va de même dans le cas d'une âme calme
et libérée des passions, ce qui ne peut s'atteindre que par la plus totale
abnégation, la patience, l'humilité et l'amour le plus pur, en sorte que l'harmonie
de Dieu est réfléchie par l'esprit de l'homme aussi purement et aussi fidèlement
que le soleil reflété sur une eau calme.
10. Pour qui c'est le cas, tout croît en vérité, et son âme est alors capable de
diriger son regard dans les profondeurs de la Création de Dieu et de tout voir
dans la plénitude de la plus pure vérité. Mais dès que son âme s'agite, le modèle
s'efface et l'âme se retrouve nécessairement dans le champ de l'erreur et des
illusions de toutes sortes, et ne peut revenir à une vision calme tant que la
parfaite équanimité en Dieu n'est pas revenue.
11. C'est la véritable paix du sabbat en Dieu, et voilà pourquoi la fête du sabbat a
été ordonnée par Dieu ; ce jour-là, l'homme doit s'abstenir de toute tâche rude et
astreignante, parce que tout travail difficile oblige l'âme à prêter ses forces à la
chair, ceci a pour effet d'agiter l'âme et, le miroir de son eau vive intérieure étant
ainsi fortement agité, elle ne peut plus clairement reconnaître la pure vérité
divine.
12. La véritable paix du sabbat consiste en un raisonnable repos de tout travail
pénible, c'est-à-dire qu'il s'agit de ne pas mettre la main à la tâche sans absolue
nécessité ; mais si c'est le cas, tout homme est tenu de venir en aide à son
prochain.
13. Plus encore que s'abstenir de tout travail pénible, l'âme de chacun doit mettre
de côté chacune de ses passions, car les passions sont les tempêtes de l'âme, elles
soulèvent les eaux vives, et ce qui dans l'âme est à la mesure de Dieu est détruit,
comme ce qui est à la mesure du soleil est détruit par les vagues de la mer.
L'image du soleil étincelle bien à la surface des flots, mais comme elle est
défigurée ! Et si la tempête se prolonge, des brumes se soulèvent sur la mer
agitée et remplissent de pesants nuages l'air céleste de l'âme. Ces nuages
empêchent alors la lumière du soleil spirituel d'atteindre les eaux vives de l'âme,
qui s'obscurcit et ne peut plus distinguer le vrai du faux, et prend les mirages de
l'enfer pour une lumière céleste.
14. Une telle âme est alors pour ainsi dire perdue, et il faut de forts vents, c'est-à-
dire de puissantes épreuves d'en haut, pour que les mauvais nuages de l'âme
s'estompent et que l'âme puisse retrouver la paix du sabbat et ramène le calme sur
sa mer vive, sinon il n'y a plus aucun salut pour elle !
15. Voilà le sens spirituel que nous enseigne à chacun le phénomène tout naturel
de ce beau lever de soleil ! Celui qui l'observe en lui-même demeurera dans la
vérité et dans la lumière et aura en partage la vie éternelle ; mais jeter au vent cet
enseignement et ne pas l'observer, c'est mourir pour l'éternité. »
Chapitre 149
Des brumes matinales de l'âme
1. Le Seigneur : « Mais prêtez encore attention : le soleil dresse son disque, plus
exactement la face occidentale de sa sphère, au dessus de l'horizon ; que
remarquez-vous ? »
2. Les Esséniens disent : « Rien d'autre qu'une surface de lumière qui monte
rapidement des profondeurs de la lumière, le jeu de lumière de la petite pêche a
subitement cessé, les petits nuages s'effilochent et disparaissent l'un après l'autre.
Maintenant voici déjà le disque entier ou la sphère au-dessus de l'horizon, un
petit vent frais du matin vient jusqu'à nous, c'est tout ce que nous découvrons ! »
3. Je dis : « Tournez vos yeux vers les plaines et les vallées de la terre et dites-
Moi ce que vous voyez ! »
4. Les deux Esséniens regardent devant eux les profondes vallées de la terre et
disent : « Nous voyons les vallées sous d'épais brouillards, la surface de la mer
est également couverte d'une brume grisâtre, mais des vallées, le brouillard
soudain se lève et monte vers les collines qu'il recouvre ici et là. Tout ceci aurait-
il aussi quelque signification spirituelle ? »
5. Je dis : « Très certainement, sur terre rien n'arrive en vain ou sans raison
spirituelle. Voyons donc quelle est cette signification !
6. Le soleil correspond exactement à l'essence de Dieu, tandis que la terre avec
ses vallées, ses plaines, ses collines, ses montagnes, ses fleuves, ses rivières, ses
lacs, et l'étendue de ses mers correspond parfaitement à l'homme extérieur.
7. Les brumes entre le soleil et la terre correspondent aux préoccupations futiles
et frivoles de l'homme à travers lesquelles la lumière du soleil peut à peine filtrer
ici ou là ! Et les brumes montent et couvrent même collines et montagnes, qui
sont les bonnes intentions de l'homme sur cette terre, car les intentions les
meilleures sont troublées par les futiles et frivoles préoccupations de l'homme à
moitié aveugle !
8. C'est pourquoi viennent les vents matinaux pour chasser les brumes des
montagnes et des campagnes et les dissoudre, afin que montagnes et campagnes
soient pleinement éclairées et réchauffées par le soleil et que les fruits de la vie
puissent mûrir. Je pense que vous comprenez ces correspondances. »
9. Les deux Esséniens disent : « Oui, Seigneur, c'est clair comme le jour. Oh,
quelle merveille dans ce très saint enseignement ! Oh ! que les hommes ignorent
de choses qu'ils devraient savoir comme ils savent qu'ils vivent ! Seigneur, cet
enseignement-là du vrai repos du sabbat en Toi est la chose que nous avons à
apporter aux hommes. Cela surpasse tout ce que Tu as dit et enseigné jusqu'ici,
car nous voyons dans tout ce que Tu as enseigné jusqu'ici une préparation pour
mieux comprendre ce que tu viens de nous enseigner là. En vérité il fallait que
tous les cieux s'ouvrent afin que cet enseignement très saint soit transmis. Mais
une toute autre question se pose maintenant à nous !
10. Comment pouvons-nous Te remercier dignement pour un enseignement aussi
purement céleste ? Nous sentons au plus profond de nos cœurs que nous n'en
sommes absolument pas dignes. Seuls Ta grâce et Ton amour pourraient nous le
donner. Ô Seigneur, donne-nous un commandement pour que nous sachions
comment Te louer et T'adorer! »
11. Je dis aux deux Esséniens en posant Mes mains sur leurs épaules : « Mes
chers amis, conformez-vous à cela, et vous ne Me ferez pas moins de joie que Je
ne vous en ai fait ! Votre récompense ne sera pas moindre si vous y incitez les
autres. »
Chapitre 150
Jésus invite les Esséniens à fonder des écoles
Chapitre 151
Déjeuner béni sur la montagne
1. Je dis : « Bien, bien, Mes chers amis et frères ! Après ce repas matinal de
l'âme, nous allons nous préoccuper du repas de nos corps ! Ebahi, as-tu encore
quelque nourriture ? »
2. Ebahi dit : « Seigneur, il en reste, mais c'est bien peu de chose ; hier soir tout a
été consommé, mais il reste encore un peu de vin et de pain. »
3. Je dis : « Apportez tout cela ici pour que Je le bénisse, et nous aurons tous à
manger et à boire en suffisance. » Ebahi fait apporter aussitôt une demi-miche de
pain et l'équivalent de trois gobelets de vin qui restait dans une outre. Je bénis le
pain et le vin en disant : « Partagez-le, et s'il en reste, nous pourrons prendre ici
notre déjeuner. »
4. Ebahi partage le pain, et pour s'en tirer, il fait des petites parts, mais la demi-
miche de pain ne veut pas diminuer ; Ebahi, voyant cela, distribue largement à
tout le monde ce qu'il a déjà coupé et se met à faire de plus grosses parts, mais là
encore, la miche ne diminue toujours pas. Quand il constate le bon appétit de
chacun, il se remet à partager une fois encore la miche en parts de plus en plus
grosses, et quand il a fait le tour des quelque trente personnes montées avec nous
sur la colline, il lui reste encore une grosse tranche de pain dans la main. Il Me
dit alors : « Seigneur, voilà ce qui me reste encore, est-ce que cela suffira pour
Toi, pour Raphaël, pour Jarah et pour moi ? »
5. Je dis : « Donne-le à Jarah pour qu'elle le partage, cela suffira bien ! » Ebahi le
fait, et Jarah Me tend en premier un morceau, puis un autre à Raphaël, un autre à
Ebahi, et enfin garde le reste pour elle. Nous fûmes ainsi tous abondamment
servis.
6. Mais le capitaine fit la remarque suivante : « Pourquoi, ami Ebahi, ne m'as-tu
pas compté dans ce dernier partage ? M'en aurais-tu jugé par trop indigne ? »
7. Je dis : « Ami, ne te fâche pas ! Vois-tu, Ebahi comptait qu'il ne resterait rien,
c'est pourquoi il a commencé par faire de toutes petites parts, et comme il ne
voulait pas que tu sois du nombre de ceux pour qui il ne resterait rien, il t'a servi
pour commencer. Mais comme par Ma volonté il est resté encore quelque chose,
il a pu entreprendre ce second partage. Mais si tu préfères le second partage qui
n'est pas meilleur que le premier, dis-le et Je t'abandonnerai volontiers Ma part !
8. Le capitaine dit : « Bon, bon, tout va bien ; il m'est seulement passé par la tête
une vieille et stupide habitude romaine de préséance, mais je suis revenu à l'ordre
! Et ce qui m'émerveille le plus ici est de voir le céleste Raphaël dévorer son pain
de si bon appétit, comme s'il était le plus affamé de nous tous ! C'est vraiment
bien étonnant ! Il est plus esprit que chair humaine et pourtant il mange comme
s'il avait toujours vécu sur cette terre. Cela me plaît infiniment. Mais je sens que
ce pain délicieux donne soif, et je voudrais bien avoir quelque chose à boire ! »
9. Je dis à Ebahi : « Partage aussi le vin, et commence par notre ami Jules. »
10. Le capitaine dit : « Seigneur, je T'en prie, bois le premier, car il faut bien une
préséance à cette table ! »
11. Je dis : « Oh ! oui, je suis tout à fait d'accord, mais comme nous n'avons pas
de table ici et que nous ne sommes pas invités, prenons ce vin chacun selon nos
besoins, et que boive en premier celui qui a le plus soif, et ensuite ceux qui ont
moins soif.
12. Le capitaine, content de cette réponse, but le gobelet qui lui était tendu,
jusqu'à la dernière goutte, et dit : « Seigneur, je T'en remercie, c'était un réconfort
vraiment céleste et jamais aucun vin pris le matin n'a eu autant de goût pour moi
que celui-ci. Mais aussi, c'est un vin comme il n'y en a pas deux sur cette terre. »
13. Je dis : « Nous sommes tous très heureux de voir que tu te plais tant sur ces
hauteurs ! »
14. Le capitaine dit : « Seigneur, pardonne-moi si dans ma bonne humeur je
commets quelques maladresses, mais je crois que Satan en personne serait ici lui-
même de bonne humeur ! »
15. Je dis : « Si tu veux le voir et lui parler, il suffit de l'appeler et tu pourras voir
par toi-même s'il lui est agréable d'être ici ! »
16. Le capitaine dit : « Sérieusement, si Satan existe en personne, qu'il apparaisse
donc ! »
Chapitre 152
Satan apparaît sur la montagne
1. À peine le capitaine a-t-il dit cela qu'apparaît un puissant éclair suivi du
tonnerre le plus fracassant, et Satan en colère se dresse devant le capitaine sous la
forme d'un géant, il tape du pied à en faire trembler toute la montagne et dit au
capitaine : « Que me veux-tu, misérable violeur de ta mère ? Pourquoi m'as-tu
appelé sur ces hauteurs qui me sont mille fois plus pénibles que tout le feu de
l'enfer ? »
2. Le capitaine, très agité par cette interpellation, dit : « Hé ! l'ennemi du genre
humain et de Dieu même, maîtrise-toi ! Il ne t'appartient pas de juger en présence
de Dieu ton Seigneur ! Si j'ai péché dans mon sommeil, trompé par mes sens, je
n'ai jamais nui qu'à moi-même et nullement à toi. Je crois que Dieu est plus que
toi, et jamais il ne m'a salué comme toi, misérable menteur. Il est vrai qu'une fois
il est arrivé que je couche avec ma mère quand j'avais quatorze ans ; mais c'est
elle-même qui me séduisit. Elle s'était déguisée en Grecque des plus
voluptueuses et portait sur son visage qui était de toute façon magnifique, un fin
masque grec, et venant ainsi à moi dans la nuit, elle me montra tous ses charmes
et me désira. Car ma mère n'avait à l'époque que vingt-huit ans à peine,
puisqu'elle m'enfanta comme premier né alors qu'elle n'en avait que treize ans et
demi. J'étais connu à Rome comme l'un des plus beaux et des plus séduisants
garçons, rien de surprenant que ma propre mère ait brûlé pour moi et se soit
masquée pour jouir de moi ! Misérable, si moi, le Romain enflammé, j'ai couché
avec ma mère en la prenant pour la plus ravissante et la plus voluptueuse des
Grecques, suis-je pour autant le violeur de ma mère ? Espèce d'âne aveugle in-
fernal, peux-tu traiter d'assassin celui qui tuerait par hasard quelqu'un dans sa
chute en tombant d'un toit ? Parle, vieil âne infernal ! »
3. Satan, irrité des injures du capitaine, lui dit : « Je ne regarde que l'acte, jamais
les motifs pour lesquels il est accompli ; chez moi il n'y a aucune circonstance
atténuante, et quant à moi, tu es condamné, tu appartiens à l'enfer et tu
n'échapperas pas à mon pouvoir ! »
4. Le capitaine dit : « Alors regarde, espèce de vieil âne aveugle infernal, qui est
Celui qui se tient ici à ma droite, Le connais-tu, est-ce que Jésus de Nazareth te
serait inconnu ? »
5. Lorsque le capitaine prononça Mon nom, Satan fut violamment renversé à
terre. Il ordonna au capitaine de ne plus jamais prononcer ce nom-là, qui le
contrarie par trop. Il connaît le Nazaréen, dit-il, et il le maudit, parce qu'il veut
s'emparer du pouvoir divin qui lui manque de peu pour devenir maître du ciel et
du monde entier.
6. Le capitaine dit : « Aveugle âne infernal ! Ce qu'il a été de toute éternité, Il
l'est toujours et Il le restera. Lui seul nous jugera, jamais ce ne sera toi, vieil
imbécile, aveugle et stupide âne infernal ! Si tu es un être aussi puissant pourquoi
le.pur et saint nom du Nazaréen te démonte-t-il si facilement, comme si tu n'avais
jamais pu te tenir debout ? Regarde comme c'est beau et louable d'être ici, et
comme nous sommes tous heureux !. Si tu n'étais pas aussi stupide et aussi
bêtement infernal, comme il te serait facile d'être aussi heureux que nous !
Change donc et reconnais dans ton cœur, si tu en as encore un, que Jésus est le
Seigneur du ciel et de la terre, et tu t'en trouveras aussi bien que nous ! »
7. Satan ricana : « Te faut-il encore prononcer ce nom qui me contrarie tant ! Si
tu ne sais rien dire de mieux, supprime au moins ce nom, il me tourmente dix
mille fois plus que les feux les plus cuisants de l'enfer ! En outre, je suis un esprit
et dois le rester éternellement pour votre salut, je ne pourrai jamais me convertir
à votre Dieu, votre Seigneur, je suis damné une fois pour toutes et il n'y a plus de
salut pour moi ! »
8. Le capitaine dit : « Si un autre que toi le disait, je le croirais, mais je ne crois
rien de toi, si ce n'est que tu es vraiment un vieil âne infernal et stupide ! Si tu
voulais te convertir, je sais trop bien que tu serais accepté par le Seigneur avec
toute ta clique, mais tu n'es buté que par méchanceté et tu ne veux pas en sortir,
parce que tu as une sorte de joie infernale à pouvoir contredire Dieu grâce au
libre arbitre. Mais, je te le dis, le Seigneur ne t'a pas encore fermé son cœur et est
encore loin de t'avoir condamné. Tourne-toi vers Lui et Il t'acceptera et te
pardonnera tous les milliards de milliards de tes péchés et de tes méfaits.
9. Je suis un païen et j'ai prié dans ma jeunesse la nature et des idoles faites de la
main des hommes et sortant de leur imagination. Mais j'ai bien vite constaté que
l'homme charnel, faible et aveugle que j'étais prenais la fausse route qui ne mène
nulle part.
10. Et toi, depuis ton origine, tu as été créé comme pur esprit par Celui qui de-
meure actuellement dans le cœur de ce saint Nazaréen et à qui le ciel et la terre
sont entièrement soumis ; il t'est plus facile de reconnaître la vérité éternelle que
moi qui ai dû errer dans la nuit et le brouillard ! Il te suffit de le vouloir, tu
siégeras à nouveau dans l'antique lumière originelle ! Tourne-toi vers le Seigneur
qui est là, parmi nous, présent corporellement d'une manière si prodigieuse, et
sur ma vie et tout ce qui m'est sacré, je gage que tu seras accepté ! »
11. Satan dit : « Je ne peux pas ! »
12. Le capitaine dit :«Et pourquoi pas ? »
13. Satan s'écrie : « Parce que je ne le veux pas ! »
14. Alors le capitaine lui dit d'une voix très courroucée : « Au nom de Jésus, va-
t-en d'ici, car tu commence à me donner envie de vomir ! Tu n'es qu'une bête
infernale entêtée et incorrigible, et toute ma pitié pour ta peine et tes tourments a
définitivement disparu. Le Seigneur te condamne, vieil âne infernal ! »
15. À ces mots du capitaine, Satan fut précipité à terre, comme frappé par un
éclair, rugissant comme un lion affamé. Mais Je fis signe à Raphaël de le prendre
par les cornes.
16. L'ange s'interposa rapidement entre le capitaine et Satan en disant : « Satan,
moi, un des plus petits serviteurs du Seigneur Jésus Sabaoth, je te donne l'ordre
inconditionnel de quitter à l'instant même ces lieux et cette région que tu as
rendus funestes aux hommes et aux animaux par ton souffle maléfique. »
17. Satan, enflammé par la colère, dit : « Où dois-je aller ? »
18. L'ange dit : « Là où tes serviteurs t'attendent et te maudissent. Disparais !
Amen ! »
19. À ces mots de l'ange, Satan se soulevé comme une boule lançant des flammes
de tous côtés et disparaît vers le nord en grand fracas, à la vitesse de l'éclair.
20. L'ange arracha du sol l'énorme rocher sur lequel Satan s'était posé, et le
précipita loin dans la mer avec une telle force que la pierre fut déjà réduite en
poussière par la résistance de l'air.
21. Tous s'émerveillèrent de la force de l'ange et le capitaine dit : « Ha ! voilà
une catapulte plus effective que dix légions romaines ! Du reste je Te remercie, ô
Seigneur, pour cette révélation, car je connais maintenant si l'on peut dire
personnellement, l'ennemi éternel de tout amour, de toute lumière, de tout bien et
de toute vérité, et j'ai bien vite compris à qui j'avais à faire ! Aucune éternité ni
aucun feu ne l'amélioreront !
22. Pour Dieu tout est possible, il est vrai, mais je crois ici qu'il sera difficile
même à la toute-puissance de Dieu d'amener cet esprit à se repentir et à faire
pénitence, car si le libre arbitre lui est laissé, il ne changera jamais, et s'il lui était
retiré, il cesserait d'être et il n'y aurait plus de Satan dans tout l'infini. Vouloir
l'inciter à s'améliorer par les tourments et les douleurs les plus grandes, c'est
verser de l'eau avec une passoire dans un seau percé. Le plus sage serait à mon
avis de le faire mettre en prison à tout jamais, et cela sans souffrance ; ainsi
n'aurait-il du moins aucune influence sur les être vivants. »
23. Je dis : « Ami, ce sont des choses que tu ne peux comprendre, mais un jour
elles te deviendront claires. Le temps terrestre ne peut donner ici aucune mesure,
mais il y a un soleil central originel, et quand il en sera à sa fin, la conversion de
Satan, qui est encore possible, ne sera plus loin ; mais où en seront ce soleil-ci et
cette terre-ci ? Un corps comme ce soleil central originel a besoin d'un temps
pour toi infiniment long, pour que toute la vie condamnée en lui, qui te semble
aujourd'hui une matière morte, se libère jusqu'à ses dernières particules en vie
spirituelle.
24. Mais, comme Je l'ai dit, tu es encore loin de pouvoir le comprendre ! Même
les anges ne le comprennent pas. Mais un jour viendra bientôt où tu n'en douteras
plus, et tu croiras des choses dont pour l'instant tu n'as pas la moindre idée ! Mais
cela suffit, levez-vous et mettons-nous en route ! »
Chapitre 153
Descente de la montagne
1. Jarah, qui en la présence de Satan s'était couvert le visage de ses mains, dit : «
Seigneur, maintenant je retourne volontiers en ville, la présence de celui-là m'a
rendu à jamais ces lieux odieux, même s'ils doivent rester précieusement dans ma
mémoire pour d'autres raisons ! Mais je n'y remettrai jamais les pieds ! »
2. « Bien, bien, dis-Je, il a été chassé d'ici et ton Raphaël a aussitôt fait place
nette ; du reste, tu ne te ferais ni du mal ni du bien à revenir sur ces hauteurs ! Le
meilleur sommet à gravir est l'élévation de ton propre cœur. Celui qui pénètre au
plus profond du cœur atteint le point de vue le plus élevé de la vie. Mais allons-y,
la troisième heure du jour du sabbat est bientôt écoulée, suivez-Moi tous, nous
allons rejoindre Génézareth par le sentier le meilleur et le plus direct. »
3. Le capitaine dit : « Seigneur, si je ne me trompe, n'avons-nous pas dit que
nous passerions encore toute cette journée ici ? »
4. Je dis : « Cette fois tu M'as mal compris, il ne s'agissait que de l'élévation du
cœur le jour du sabbat ! Mais cela ne fait rien, allons-y, beaucoup de malades
nous attendent en bas, il faut leur venir en aide pour qu'après Mon départ il n'y
ait plus aucun malade dans toute la région. »
5. Sur ce, tout le monde se mit en route, et Moi, la petite Jarah et Raphaël nous
ouvrîmes la marche en faisant les guides, et la descente fut aussi facile que
rapide. En deux heures et demie nous étions déjà aux abords de Génézareth.
6. J'appelai alors tous ceux qui avaient gravi la montagne et leur dit : « Écoutez-
Moi tous : comme Je vous l'ai déjà dit au sommet, Je vous le redis une fois en-
core, gardez pour vous tout ce que vous avez vu et vécu sur ces hauteurs ! Mais
quand vous aurez un signe du ciel, prêchez-le sur les toits aux hommes de bonne
volonté, mais que cela reste caché au monde qui est mauvais, comme le centre de
la terre est caché, car le monde superficiel ne comprendra jamais et vous traitera
de fous, et ce serait aussi la mort éternelle de son âme !
7. Veillez principalement à ceci : Mes paroles, mes enseignements et mes actes
sont plus précieux que les perles sans exemple de Jarah, et ces perles-là ne sont
pas faites pour être jetées aux pourceaux. Soyez toujours sur vos gardes ! Tout ce
qui vient d'en haut n'est que pour ceux qui sont d'en haut. Aux chiens et aux
pourceaux n'appartient que l'immondicité du monde, car un chien retourne à ses
excréments et le porc se roule dans l'auge dans laquelle il vient déjà de se rouler
l'instant d'avant. Gardez donc mon conseil dans vos cœurs ! »
8. Le capitaine dit : « Seigneur, si nous sommes interrogés par des curieux qui
cherchent à savoir ce que s'est passé au sommet, quelles réponses donnerons-
nous ? »
9. Je dis : « Dites la vérité, dites que Je vous ai interdit d'en parler, et les curieux
n'insisteront pas et se contenteront de votre réponse. »
10. Le capitaine fut satisfait et nous nous rendîmes en ville à la maison d'Ebahi.
Chapitre 154
Guérison miraculeuse à l'auberge d'Ebahi à Génézareth
1. Lorsque nous arrivâmes à la maison d'Ebahi, les valets et les serviteurs nous
accueillirent en disant qu'une centaine de malades attendaient à l'auberge, de-
mandant le Seigneur Jésus de Nazareth.
2. Je dis aux valets : « Allez leur dire de s'en retourner chez eux en silence sans
se soucier du sabbat, la foi en la force de ma parole les a secourus. »
3. Les valets s'éloignèrent pour aller trouver les malades à l'auberge où, à leur
grand étonnement, tous étaient déjà guéris à l'instant même, sans distinction
aucune, qu'ils fussent juifs ou païens ! En entrant, les valets n'entendirent qu'un
chant de louange de tous ces gens qui avaient recouvré la santé de leur corps et
qui venaient Me voir.
4. Mais les valets dirent : « Il ne nous est pas permis de vous l'accorder mais
nous allons Lui envoyer un messager. S'il n'accepte pas, vous devrez, selon Sa
parole vous en aller en silence. Il n'est pas toujours disposé à recevoir, et encore
moins à ce qu'on Lui parle. » Un valet vient donc Me le demander.
5. Mais Je dis : « Je vous ai déjà dit qu'ils doivent s'en retourner tranquillement
chez eux, tenez-vous-y ! Ils ont eu ce qu'ils cherchaient, mais ils n'ont aucun sens
pour comprendre quelque chose de plus élevé. Qu'ils rentrent donc chez eux ! »
6. Le messager s'en retourne porter cette réponse, mais les gens guéris disent : «
Il n'est pas malin de demander la permission d'aller voir celui à qui l'on veut
rendre hommage ! Allons-y et portons-Lui habilement en toute vérité nos
louanges et nos remerciements qu'il mérite, et nous partirons ensuite ! En voyant
nos intentions, il nous laissera entrer ! »
7. Sur ce, ils viennent Me trouver dans la maison, ils frappent à la porte de notre
grande salle à manger, mais personne ne leur dit d'entrer. Ils frappent encore et Je
dis à Ebahi : « Laisse-les entrer, à cause de leur foi importune. » Ebahi alla leur
ouvrir la porte, et tous ceux qui pouvaient s'y tenir entrèrent dans la pièce et se
mirent à Me louer et à exprimer leur reconnaissance !
8. Mais Je leur demandai de se taire disant : « La louange et la reconnaissance
des lèvres n'a aucune valeur pour Dieu ni pour Moi ! Que celui qui veut
s'approcher de Moi, s'approche avec le cœur, et Je le verrai bien ! Mais qui
marmonne des paroles vides avec les lèvres quand le cœur ne pense et ne ressent
rien, est à Mes yeux ce qu'une charogne est aux narines ! Vous avez eu ce que
vous vouliez, mais vous ne cherchez rien d'autre et vos louanges vides ne
M'émeuvent pas. Rentrez chez vous et ne troublez pas cette maison. Gardez-vous
de l'impudicité et de la fornication, des excès de table où vous vous empiffrez.
Sinon vous serez atteints de maladie plus graves encore que celles dont vous
avez souffert et dont vous vous êtes plaints.
9. Ces mots allèrent droit au cœur de ces gens guéris, qui se demandèrent
comment J'avais pu savoir que leurs maladies étaient dues à leurs vices. Ils en
éprouvèrent de la crainte à Mon égard et ils se mirent à penser : « Il pourrait
encore mettre au grand jour d'autres de nos actes qui ne sont pas si louables !
Allons-nous-en. » Ils quittèrent la salle et s'en retournèrent d'où ils venaient.
10. Le capitaine, remarquant cela, Me demanda : « D'où vient-il qu'ils se sentent
soudainement perdus ? À peine as-Tu fait allusion à leurs péchés que les voilà
qui se précipitent à la porte ! »
11. Je dis : « Ce sont de grands fornicateurs, ils commettent toutes sortes
d'impudicités, et l'adultère est chez eux chose courante ; ils partagent les femmes
et violer une fille n'est pour eux qu'une bonne plaisanterie ; il y a aussi ceux qui
abusent de jeunes garçons, et ceux qui sodomisent les filles soi-disant pour se
préserver de mauvaises contaminations, mais ils attrapent les pires maladies.
Voilà pourquoi Je les ai reçus si durement et les ai fait partir. Car seule une
parole sévère peut les inciter à s'améliorer. »
12. Le capitaine dit : « D'où viennent-ils ? »
13. Je dis : « De la contrée des Gadaréens, de quelques hameaux plus à l'orient.
Les habitants sont des Juifs, des Egyptiens, des Grecs et des Romains mélangés !
Ils n'ont que peu ou pas de religion. Ils élèvent des porcs qu'ils vendent en Grèce
et en Europe où la viande de ces animaux-là est appréciée et où leur graisse sert
de condiment. Ces gens sont donc déjà impurs par leur négoce, mais cette
impureté-là ne serait pas un péché s'ils n'étaient pas eux-mêmes pires que leurs
porcs. Leurs agissements les placent loin au-dessous de ces animaux, et il sera
bien difficile avec eux d'arriver à quelque chose ! »
14. Le capitaine dit : « Il est bien que je le sache, ces villages sont sous ma ju-
ridiction et je ne manquerai pas de faire surveiller leurs mœurs par quelqu'un à
qui je donnerai l'instruction de taper sur leurs doigts à la moindre inconvenance.
Attendez, dès demain, vous allez regretter votre vie dépravée au point que vous
n'aurez plus jamais envie de faire entrer dans vos cœurs des désirs impurs et de
les assouvir sans aucune conscience !
15. Seigneur, je ne suis qu'un homme, mais de par la charge publique que
j'exerce, j'ai été amené à voir et à comprendre qu'il n'y a rien de mieux pour le
commun des mortels que de régner avec un sceptre d'airain en se servant du fouet
de temps à autre si l'on ne veut pas que cela finisse mal tôt ou tard ! »
16. Je dis : « Oui, oui, tu as raison, mais pour ces villages seulement et pas
ailleurs, sinon tu ferais plus de mal que de bien ! Le remède est à prescrire selon
la maladie et non l'inverse. Et comme Je l'ai dit, dans ces villages-là, ton remède
est valable, car il peut empêcher les gens de s'adonner à leur lubricité.
Cependant, la verge ne doit pas être brandie par une main en colère, mais par une
main guidée par l'ardeur d'un amour véritable. »
Chapitre 155
L'ardeur de l'amour
1. Le capitaine dit : « Seigneur, je le conçois bien, mais j'ai pourtant connu des
cas où tout l'amour n'aboutit à rien ! Par exemple, j'ai eu un jour sous mes ordres
un jeune soldat d'une puissance gigantesque. C'était un Illyrien. Son épée pesait
cinquante livres et il la maniait aussi facilement que s'il s'était agi d'une plume !
À lui seul, il valait tous mes guerriers. Sous sa cuirasse et sous son bouclier, dans
la bataille, il se démenait plus que cent autres guerriers. Il était bon à la guerre,
mais non en temps de paix, où il se montrait intrigant et ne passait pas une
semaine sans se donner en spectacle d'une façon détestable. Je le prenais avec
infiniment d'amour, je lui montrais aussi clairement que possible la méchanceté
et l'ignominie des désordres qu'il causait et je finissais par lui interdire de
recommencer son tapage. Il me faisait la promesse de changer et se tenait
tranquille pendant quelques jours, mais jamais plus de dix jours, et alors les
plaintes revenaient de toutes parts, et il fallait payer les pots cassés ! Si on lui
demandait ce qui pouvait bien le pousser à faire cela, il donnait toujours la même
réponse en disant que pour s'exercer à l'art de la guerre, il n'épargnait rien, sauf
les humains, et que son épée devait s'essayer sur divers obstacles !
2. Il n'était pas rare qu'il aille s'exercer sur des troupeaux de bœufs, de vaches ou
de veaux dont il abattait la tête d'un seul coup. Un jour, il abattit un troupeau
entier d'une centaine de têtes de bœufs, après quoi il alla se vanter de ce haut fait
de telle sorte que cela nous coûta un millier de grosses pièces d'argent ! Ce jour-
là, cet homme me mit dans une telle colère que je l'aurais volontiers mis en
pièces !
3. Je le fis enchaîner à un arbre par de lourdes chaînes et encore attacher les
membres avec de grosses cordes, et je le fis fouetter pendant une heure jusqu'à ce
qu'il soit pris d'une grande faiblesse. Je le fis ensuite soigner pendant vingt jours
jusqu'à son complet rétablissement. Et cet homme que tout l'amour n'avait pu
corriger fut totalement transformé, il devint l'homme le plus calme et le plus
modeste. Un an plus tard, j'en fis un sous-officier. Aujourd'hui encore il me
remercie de l'avoir ainsi corrigé. Jamais l'amour ne m'aurait incité à lui infliger
une telle correction ! Seule la colère m'a inspiré. Ainsi je pense qu'une colère
justifiée est souvent plus salutaire qu'un amour excessif. »
4. Je dis : « Oui, oui, mais ce n'est pas de la colère au sens habituel du terme,
c'est une ardeur particulière de l'amour dans le cœur de celui qui possède la force
de guérir. J'agis avec cette même ardeur lorsque c'est nécessaire. Si l'amour
n'avait pas cette ardeur, tout l'espace infini serait encore parfaitement vide de tout
être vivant. Car c'est à l'ardeur seule de l'amour de Dieu que toute créature doit
son existence.
5. Ainsi la punition que ton cœur t'a inspiré d'infliger à ce guerrier plein
d'humeur ne procède ni de la colère ni de la soif de vengeance, mais d'une cer-
taine ardeur de ton amour envers ce guerrier qui te tenait très à cœur à cause de
ses grandes aptitudes. Une colère véritable t'aurait incité à le faire mettre à mort,
mais l'ardeur de ton amour t'a indiqué le fouet, et tu ne l'as fait frapper qu'aussi
longtemps que tu jugeais qu'il pouvait le supporter.
6. Tu pourrais aussi agir de la sorte avec les gens de ces villages. Mais à tes
premières tentatives pour les instruire, laisse-toi guider uniquement par l'amour,
et ces hommes se laisseront convaincre s'ils voient qu'on ne leur applique lois et
jugements que pour leur salut. Mais que la sévérité de ces lois apparaisse
seulement comme une velléité tyrannique qui ne corrige personne et qui ne fait
qu'inciter des anges à devenir démons, ils ne chercheront qu'à se venger de celui
qui ne cesse de les persécuter sans raison apparente ! Comprends-tu ? »
7. Le capitaine dit : « Oui, Seigneur, c'est lumineux comme le soleil, et dès
aujourd'hui, je vais envoyer un messager porter un ordre au sous-officier de
l'endroit, et dès demain ces villages devront s'y conformer. Aussi vais-je me
rendre auprès de mes gens pour rédiger cela ! »
Chapitre 156
Du sexe des anges
1. Ceci dit, le capitaine s'en va chez lui, mais Ebahi lui demande de ne pas
s'absenter longtemps, le repas étant bientôt prêt. Et le capitaine dit en s'en allant :
« S'il n'y a rien de grave, je serai aussitôt de retour, et s'il y a quelque chose,
j'enverrai un messager. »
2. Là-dessus, le capitaine s'en va chez lui où il n'est pas peu surpris d'entendre le
sous-officier lui raconter ce qui s'est passé entre-temps, et de voir déjà sur sa
table de travail ses ordres aux villages mis par écrit de sa propre main sur un
parchemin ! Il les parcourt rapidement et constate que tout est comme il l'avait
pensé. Il fait aussitôt chercher un messager, et voilà notre ange Raphaël habillé
en soldat romain qui vient lui offrir ses services.
3. Le capitaine ne reconnaît pas l'ange, il croit qu'il s'agit d'un jeune guerrier
envoyé de Capharnaüm par Cornélius. Il lui demande s'il peut lui confier une
mission aussi éloignée auprès du sous-commandant de Gadarenum.
4. L'ange dit : « Seigneur chef de la place, donne-moi cette mission et je
l'accomplirai à la vitesse d'une flèche, tu auras aussitôt la réponse en main ! »
5. Le capitaine regarda alors son homme de plus près et reconnut l'ange Raphaël.
Il lui dit : « Oui, oui, à toi c'est facile, maintenant je te reconnais ! »
6. Le capitaine remis ses ordres à Raphaël qui, au bout d'un quart d'heure à peine,
fut de retour avec la réponse du commandant de Gadarenum attestant avoir reçu
par l'intermédiaire d'un agréable jeune guerrier les ordres qu'il allait aussitôt
intelligemment mettre à exécution.
7. Le capitaine, qui ne s'émerveillait plus de la rapidité de Raphaël, s'étonna cette
fois de ce qu'il eût fallu un quart d'heure pour accomplir sa mission.
8. Raphaël lui dit : « Ce fut juste le temps nécessaire à ton sous-commandant de
Gadarenum pour écrire. Ne t'étonne donc pas ! Moi-même je n'avais pas besoin
de tout ce temps-là ! Mais allons ensemble chez Ebahi. Le repas de midi est prêt
et les hôtes ont faim après cette descente de la montagne ! »
9. Le capitaine s'en revint avec l'ange dont les vêtements de Génézaréthien
réapparurent dès qu'ils furent de nouveau dans la demeure d'Ebahi. Le capitaine
lui demanda alors où il avait bien pu déposer aussi vite ses habits de soldat.
10. L'ange sourit et dit : « Vois-tu, c'est plus facile à nous qu'à vous, car nous
portons toute notre garde-robe très richement pourvue dans notre volonté. Il nous
suffit de vouloir, et nous sommes vêtus comme nous le désirons. Mais si tu
voulais me voir dans mes vêtements de lumière, tu serais aveuglé et ta chair se
dissoudrait devant moi ! Car la lumière du soleil est affreusement ténébreuse à
côté de l'éclat de mes vêtements ! »
11. Le capitaine dit : « Ami des hommes et de la terre, cette qualité première de
pouvoir se vêtir sans tissu, juste par sa volonté, me plaît fort, et elle nous serait
bien utile, à nous pauvres hommes, l'hiver tout particulièrement, mais ce violent
éclat de tes vêtements de lumière devant lequel aucun être humain ne peut
subsister ne me plaît pas, du moins pour l'instant sur cette terre, aussi n'allons-
nous pas approfondir la question. Seulement, maintenant que nous sommes seuls
et que nous n'avons à nous gêner devant personne, il y a une chose que je
voudrais bien savoir et que tu pourrais me dévoiler ; voici : y a-t-il entre vous
une différence des sexes ? »
12. L'ange dit : « C'est une question maladroite, il est vrai, mais comme elle ne
tient chez toi qu'à ta soif de connaissance, je te répondrai que non. En ce qui nous
concerne, nous, esprits créés à l'origine en nombre incalculable, il n'y a chez nous
qu'un unique être masculin-positif; mais le principe féminin-négatif est
également pleinement présent en chacun de nous. Ainsi tout ange représente en
lui l'union parfaite du ciel de Dieu, et il ne tient qu'à nous de nous montrer sous
une forme masculine ou féminine et cela sous une seule et même peau spirituelle.
13. Et du fait que nous sommes deux êtres en nous-mêmes, nous ne pouvons
jamais vieillir, parce que les deux pôles se soutiennent toujours mutuellement,
tandis que chez vous, les humains, les pôles se distinguent en personnes séparées
sexuellement, chacune pour soi, aussi n'avez-vous aucun soutien en vous-même.
14. Mais si les pôles personnels séparés se touchent extérieurement, ils se
perdent et s'égarent, ils ressemblent à cette outre de vin qui se ratatine de plus en
plus quand on lui dérobe son contenu spirituel. Si tu pouvais te représenter une
outre capable d'engendrer aussitôt par elle-même ce qu'on vient de lui soutirer,
jamais en surface sa forme ne serait altérée, jamais on n'y découvrirait de plis ou
de rides ! Comprends-tu ? »
15. Le capitaine dit : « La chose ne m'est pas encore très claire, mais j'ai quelque
vague petite idée et nous en reparlerons à l’occasion ! Maintenant entrons, car on
doit nous attendre ! »
16. L'ange dit : « Oui, c'est bien, et je sens déjà en moi ce que vous appelez la
faim ! »
17. Le capitaine dit : « Oh ! oh ! tu es pourtant un pur esprit, comment peux-tu
apprécier une nourriture matérielle ? »
18. Raphaël dit en riant : « Mieux que toi ! En moi, tout ce que j'avale est digéré
et transformé en vie contemplative, alors que chez toi, tout ce qui ne convient pas
à la polarité isolée de ton existence est expulsé de ton corps par les voies
naturelles, aussi suis-je mieux partagé que toi pour ce qui est de boire et de
manger ! »
19. Le capitaine dit : « Mange-t-on et boit-on donc aussi au ciel ? »
20. L'ange dit : « Oh, oui, mais pas comme sur la terre, spirituellement ! Nous
avons la parole de Dieu de toute éternité en nous, comme le ciel et toute la
Création proviennent de la parole et en sont remplis. Cette parole est pour
commencer notre essentielle existence, elle est donc aussi le seul véritable pain
de vie de cette existence. Elle est le seul vin de vie qui coule dans nos veines
comme le sang dans les vôtres, et nos entrailles sont pleines du pain de Dieu. »
21. Le capitaine dit : « Oh ! voilà qui est très sagement dit, mais je n'y com-
prends rien. Il faut que le Seigneur Lui-même me le dévoile ! Mais il est grand
temps d'entrer dans la maison et nous allons devoir interrompre une pareille
discussion. »
Chapitre 157
Des aumônes et de la reconnaissance
Des reliques et des fêtes commémoratives
1. Tandis que le capitaine disait encore ces mots, notre pieuse Jarah venait à sa
rencontre en disant : « Mais vous êtes bien longs à revenir ! Toi, mon cher Ra-
phaël, tu sembles déjà vouloir prendre les habitudes paresseuses de ce monde !
Vraiment, ce n'est pas allé aussi vite que notre voyage sur ce lointain soleil !
Venez vite, la table est déjà servie ! » Ils entrent tous deux rapidement et Me
saluent avec la plus grande amitié !
2. Le capitaine voulut exprimer sa reconnaissance pour Ma sollicitude, mais Je
lui dis : « Ami, ton cœur Me suffit ! Les mets vous ont attendus, il s'agit
maintenant de donner tout d'abord le réconfort nécessaire au corps pour se
tourner ensuite vers l'esprit ! »
3. Ils rendent tous grâce et se mettent à manger et à boire comme il faut ! Le
capitaine observe toujours l'ange et voit comme il attrape les plats avec gaillar-
dise et comme il fait honneur à son gobelet de vin.
4. Le capitaine ne peut plus se retenir à la fin et dit, plaisantant à moitié : « Bon !
bon ! Les purs esprits ont vraiment bon appétit, mon bon Raphaël mange comme
quatre ! Non, on n'a jamais vu cela sur terre ! »
5. Ebahi dit : « Je suis aussi démesurément étonné, mais je vois encore quelque
chose qui m'émerveille bien davantage que son gros appétit ! Regardez, le
contenu de son assiette ne diminue pas ! Voilà le proverbe mis en pratique : "Ce
que le ciel prend, il le redonne l'instant d'après !" Cette table sera toujours pour
moi une relique que mes descendants devront honorer, et chaque année il faudra
donner une fête en servant sur cette table à boire et à manger aux pauvres de
l'endroit ! »
6. Je dis : « Laisse cette table être une table et reste comme tu étais, et quand un
pauvre viendra à toi et que tu auras ce qu'il faut, viens-lui en aide le jour même.
Un festin annuel ne servira pas plus à un pauvre qu'à toi, et Je n'y prendrai aucun
plaisir ! Celui qui pense à Moi le fait à toute heure du jour, une commémoration
annuelle ne peut Me servir.
7. En voulant fixer une date, tu ressembles à ces templiers de Jérusalem qui ont
trois fois par an des fêtes commémoratives où ils ont coutume de distribuer du
pain aux pauvres, comme si ces derniers pouvaient s'en passer le reste du temps !
Oh ! L'absurdité de ces fêtes ridicules qui leur font à chaque fois gagner en
offrande de quoi vivre pendant cent ans, et les pauvres doivent se contenter de
recevoir trois fois par an à peine le huitième d'une livre de pain noir ! Oh, quelle
folie, quelle stupidité, quel aveuglement et quel méchant égoïsme ! Je t'en prie,
laisse donc cette table être ce qu'elle est et tu Me feras la fête la plus agréable si
tu rassasies chaque jour selon tes possibilités un pauvre ou un autre à cette table
ou à une autre !
8. Et si le même pauvre revient chaque jour, ne lui demande pas s'il ne reçoit rien
ailleurs, cela attristerait son cœur et il n'oserait plus revenir, et ta bonne œuvre
perdrait toute valeur pour Moi!
9. Mais je ne veux pas que tu partages le pain du pauvre avec le paresseux en
bonne santé capable de travailler. Donne à ces gens-là une tâche à la mesure de
leur force et donne-leur à manger s'il font pour toi tel ou tel travail ! Et s'ils
n'acceptent pas, ne leur donne pas à manger. Celui qui a la force et ne veut pas
travailler, n'a pas besoin de manger.
10. Si tu agis ainsi, ce sera toujours pour Moi la plus agréable des commé-
morations, mais ton intention d'une fête annuelle Me sera toujours importune !
Car ce genre de fête est le plus grand non-sens que l'homme puisse commettre, il
ne sert à personne si ce n'est à l'organisateur qui peut en tirer profit !
11. Pourquoi à tel moment de l'année plutôt qu'à tel autre ? Celui qui fête l'an-
niversaire de son père une fois l'an, par exemple, ferait mieux de l'honorer
chaque jour à l'heure de sa naissance, ce qui serait certainement mieux qu'un an-
niversaire annuel !
12. Je te le dis, toutes les commémorations des hommes n'ont pour Moi aucune
valeur si elles n'ont pas lieu chaque jour, à chaque heure au fond des cœurs. Les
fêtes de la nouvelle lune, les jubilés, la fête de la libération de Jérusalem du joug
de Babylone, la fête de la reconstruction du Temple, la fête de Moïse, d'Aaron,
de Samuel, de David, de Salomon ne sont que des choses creuses qui n'ont en
réalité pas plus d'importance que la pluie tombée du ciel il y a mille ans !
13. Ces fêtes au début procèdent certes d'un élan religieux et les participants se
remémorent volontiers une personne ou un événement significatif qu'ils ont vécu
eux-mêmes. Mais à la deuxième, troisième, quatrième ou dixième génération, ces
fêtes deviennent des cérémonies vides où les foules ne savent même plus ce
qu'elles fêtent, et la chose finit par n'être plus qu'un vain paganisme !
14. Du reste, Je ne veux pas par là supprimer les véritables fêtes commémora-
tives, mais elles doivent non seulement annuellement, mais journellement guider
les cœurs, sinon elles sont mortes et inutiles. Quant à cette table, restes-en à ce
que Je t'ai dit et montré ! »
15. Ebahi dit : « Que ce que Tu viens de me montrer, ô Seigneur, et qui est si
valable et si juste, soit observé exactement ! Nous observerons la fête quoti-
diennement dans nos cœurs avec d'autant plus de zèle que nous nous appli-
querons de toutes nos forces à aimer notre prochain, et nous commémorerons
ainsi la plus belle des fêtes ! »
16. Je dis : « Si vous vous y tenez, Je serai avec vous et l'on reconnaîtra que vous
êtes vraiment Mes disciples ! »
17. Maintenant, nous avons mangé et bu suffisamment, levons-nous de table et
retournons voir nos bateliers, qui auront de bien curieuses choses a vous raconter
! Ici nous ne serions pas tranquilles, car dans une heure va passer une caravane
de Bethléem dont font partie quelques jeunes chefs pharisiens que Je ne désire
nullement rencontrer. Veillez à ce qu'ils repartent dès ce soir pour Sibarah ! »
18. Le capitaine dit : « Nous y veillerons, personne au monde ne m'est plus
désagréable qu'un chef pharisien. » Sur ce, nous nous levâmes tous et nous hâ-
tâmes d'aller rejoindre nos bateliers.
Chapitre 158
Le psaume 47 de David
1. Nous trouvâmes les huit bateliers en train de lire des psaumes de David. Ils se
levèrent dès qu'ils nous aperçurent, nous saluèrent, et leur chef vint Me dire : «
Seigneur, Toi seul pourrais nous tirer d'embarras ! Hier soir quelques Pharisiens
et quelques scribes sont venus nous demander de les conduire à Zébulon et à
Chorazin, et nous avons refusé, disant que nous n'étions pas les maîtres du
bateau, mais seulement les matelots, et qu'à la veille du sabbat nous avions à lire
les psaumes. Alors un jeune lévite nous a demandé le rouleau des psaumes et l'a
ouvert au psaume 47.
2. Vous tous peuples, frappez des mains
Poussez vers Dieu des cris de joie !
Car l'éternel, le Très-Haut est redoutable
Il est grand roi par toute la terre !
Chapitre 159
L'amour des ennemis!
1. Le chef des bateliers dit : « Merveilleuse fillette, qui t'a donné une telle
sagesse ? Vraiment, tu es plus sage qu'Abraham, Isaac et Jacob ! »
2. Jarah dit : « Je vous ai pourtant montré qui est Celui qui est parmi nous, et si
c'est indiscutable, comment pouvez-vous encore demander d'où vient une telle
sagesse ou qui me l'a donnée, alors que le grand, le saint donneur de tous les
bienfaits se tient là, devant nous ! Lui seul est sage, Lui seul est parfaitement
bon. Qui l'aime et croit en son cœur qu'il est Lui-même le Seigneur Jahvé
Sabaoth de toute éternité, reçoit en son cœur Sa lumière éternelle incréée, et
l'homme tout entier est alors illuminé et rempli de part en part de véritable
sagesse divine ! Si vous avez quelque compréhension, vous devez voir
clairement ce que nous avons à faire ! »
3. Le chef des matelots dit : « Oui, oui, adorable petit ange, nous comprenons
maintenant et ce doit être comme tu viens de l'expliquer ! Mais ceux qui
voulaient hier soir se faire conduire à Zébulon et à Chorazin n'accepteront jamais
et surtout ne comprendront jamais ! Nous sommes des gens simples et chez nous
il n'est guère besoin de miracles pour croire, mais pour eux, un miracle porte
nécessairement des fruits bien plus amers que l'absence de miracle. »
4. Jarah dit : « C'est pourquoi Il sera terrible avec eux, car les vents porteront Sa
parole sur toute la terre ! Malheur alors à celui qui l'entendra et la comprendra,
mais qui finira par la rejeter. »
5. Je dis aux matelots : « Alors, que dites-vous de la compréhension de l'une de
Mes filles ? »
6. Les bateliers disent : « Maître et Seigneur, si Tu es vraiment Celui que Tu dois
être selon les paroles très sages de cette adorable ange de fille, ce n'est plus un
miracle qu'elle soit si sage. Si, du temps de Bilam, la langue de l'âne a pu être
déliée pour prophétiser à Bilam, il est plus facile encore à la langue d'une fillette
de quatorze ans de prophétiser !
7. Nous croyons tous maintenant que Tu es ce que cette fillette vient de faire
comprendre à nos yeux et à nos oreilles, et nous n'avons besoin d'aucun nouveau
miracle ! Mais puisque Tu es le Seigneur, vois notre faiblesse et change-la en
juste force pour que nous puissions par là nous protéger des ennemis constants de
la lumière et de la vérité. Car il est réellement malheureux que nous, Juifs,
devions chercher la lumière et la vérité chez les païens. Jérusalem, au lieu d'être
une brillante lumière pour toutes les nations, est devenue un gouffre infernal de
la nuit la plus noire, un repaire d'assassins qui détruisent l'esprit pur des Juifs ! Si
nous voulons lumière et vérité, nous devons aller à Tyr et à Sidon, auprès des
Grecs et des Romains. Voilà pourquoi, Maître et Seigneur, puisque toutes choses
Te sont possibles, donne-nous la lumière et la force d'apercevoir la vérité et de la
protéger de nos ennemis. »
8. Je dis : « La paix soit avec vous et parmi vous, que personne ne se croie
supérieur à l'autre. Vous êtes tous également frères, mais celui qui aura le désir
d'être le plus petit parmi vous et qui voudra être le valet et le serviteur de tous,
sera le maître et le plus grand parmi vous. Mais si je vous demande d'être des
serviteurs, en vérité, vous avez toute Ma puissance. Ainsi tout serviteur est la
force de son Seigneur et le Seigneur est la justice de son serviteur. Aimez-vous
les uns les autres, faites le bien à vos ennemis, bénissez ceux qui vous
maudissent et priez pour ceux qui vous veulent du mal. Rendez le bien pour le
mal et ne prêtez pas à de hauts intérêts, et vous aurez la bénédiction et la grâce de
Dieu en abondance. Alors la lumière, la vérité, la force et la puissance vous
seront données immédiatement, car il vous sera rendu mesure pour mesure. »
9. Un batelier dit : « Seigneur, nous voyons et sentons que Ton enseignement est
juste et vrai, mais nous sentons aussi qu'il sera difficile de s'y tenir. Certes, il est
très louable et célestement beau de faire le bien à ceux qui s'efforcent de nuire,
mais qui supportera toujours avec la même patience la méchanceté des hommes !
C'est à se demander si l'on ne favorise pas la mauvaise volonté des hommes
quand on ne les punit pas pour leurs mauvais actes. Si l'on se mettait à
récompenser les voleurs et les assassins pour leurs méfaits, il n'y aurait bientôt
plus personne sur terre ! Il faut continuellement faire front à l'ennemi, entourer sa
maison de haies épineuses pour le dissuader de nuire, c'est le seul moyen de l'in-
citer à plus d'amabilité. »
10. Je dis : « Oui, oui, humainement c'est bien pensé ! Mais il n'y a rien de divin
là-dedans ! Tu peux bien punir un homme pour l'empêcher de recommencer à
faire le mal, jamais tu n'en feras ton ami ! Mais si, pour le mal qu'il t'a fait, tu lui
viens en aide le jour où il en a besoin, le péché qu'il a commis envers toi lui
apparaîtra clairement, il le regrettera profondément et sur l'heure il deviendra ton
ami le plus ardent.
11. Et ta bonne action rendue pour sa mauvaise action l'améliorera pour toujours,
tandis que la punition fera de lui soixante fois plus ton ennemi !
12. Si la première faute commise envers toi était peut-être due à la mauvaise
humeur ou à la malice, la seconde sera due à la colère et à la vengeance. C'est
pourquoi, Je le répète, faites ce que Je vous ai dit et vous serez comblés de la
grâce et de la bénédiction de Dieu.
13. Qui veut Ma bénédiction doit accepter Ma parole avec toute la grâce, toute la
lumière, toute la vérité, toute la puissance qu'elle contient, sinon rien n'est
possible.
14. Prenez tous exemple sur Moi ; Je suis d'un cœur entièrement doux et humble
et J'ai la plus extrême patience envers chacun. Le soleil ne brille-t-il pas autant
pour les bons que pour les méchants, pour les justes, que pour les injustes et la
pluie ne tombe-t-elle pas autant pour fertiliser le champ du pécheur que celui de
l'homme juste ? Soyez en toute chose parfaits comme le Père dans les cieux est
parfait et vous serez comblés de la grâce et de la bénédiction du ciel. Comprenez-
vous ? »
15. Tous disent : « Oui, Seigneur, nous comprenons tous très bien. Tout cela est
vrai, bon et juste, et nous allons nous efforcer d'observer Ta parole à la lettre,
mais ce sera très difficile pour commencer ! »
16. Je dis : « Oui, mes chers amis, mais le ciel a besoin de force en ce moment !
Ceux qui ne le conquerront pas par la force ne l'atteindrons pas ! Qui accepte le
combat pour le royaume des cieux est un sage et prudent architecte, un intelligent
entrepreneur qui ne bâtit pas sa maison sur le sable mais sur le roc ; que viennent
la tempête ou les inondations, la maison construite sur le roc résistera.
17. Le royaume des cieux est pour celui qui se bat avec lui-même. Qui a mené ce
combat avec lui-même, gagne un ciel indestructible. Les tempêtes du monde
auront beau venir, elles ne pourront rien faire. Mais qui n'aura pas mené ce
combat avec toutes ses forces et tout son courage sera emporté par la tempête du
monde qui lui ôtera ce qu'il a. Pensez-y ! Les temps viendront où vous en aurez
besoin ! »
18. Les bateliers dirent : « Nous ne pouvons que Te dire merci, ô Seigneur, pour
tout cela. Nous voyons bien que l'homme ne peut rien donner à Dieu qu'il n'ait
déjà reçu de Lui, mais accepte, ô Seigneur, nos remerciements comme s'ils
étaient pour Toi quelque chose, et ordonne-nous ce que nous avons à faire en
Ton honneur et par amour pour Toi. »
19. Je dis: «Je vous l'ai déjà dit; faites-le, il n'est besoin de rien d'autre. Racontez-
nous maintenant ce que vous avez vu cette nuit et ce que vous avez entendu, car
les bateliers voient souvent des choses bien curieuses dans la nuit. Mais soyez
brefs, n'ajoutez rien et n'oubliez rien ! »
Chapitre 160
Récit des bateliers
1. Nous nous assîmes tous autour des bateliers. Seul Raphaël était resté debout,
et un batelier lui dit : « Garçon, assieds-toi aussi, le gazon est à tout le monde, et
personne ne paie pour s'y asseoir ! »
2. L'ange lui dit : « Poursuivez votre récit, je m'assoirai lorsque je serai fatigué
d'être debout, et il pourrait arriver que l'un ou l'autre des vôtres perde son
équilibre, et je n'aurai qu'à tendre le bras pour l'aider à se remettre sur ses jambes
!»
3. Le batelier dit : « Ah ! toi, bien sûr, espèce de nourrisson de quinze ans ! Tu as
encore les pieds pris dans tes langes et tu crois avoir la force de nous venir en
aide si nous tombons ! Voilà, mon cher, ce qu'on appelle avoir par trop confiance
en soi ! »
4. L'ange dit : « Commencez votre récit, comme le désire le Seigneur, pour le
reste on verra bien ! »
5. Le rustre batelier se tut et son chef commença son récit : « C'était la première
veille de la nuit, subitement une étrange clarté s'est faite comme en plein jour, et,
ne trouvant pas la source de cette lumière nous pensâmes d'abord qu'il devait
s'agir d'un feu indien derrière la montagne ! Mais cette clarté devint beaucoup
trop forte pour cela, et elle dura presque toute la nuit, parfois avec une telle
intensité qu'on se croyait en plein jour. Vous comprendrez facilement qu'il y
avait de quoi nous inquiéter ! Plusieurs personnes vinrent de la ville, croyant que
cette forte luminosité provenait de la mer !
6. Mais très rapidement, nous fûmes tous témoins d'un autre phénomène plus
extraordinaire encore ! Alors que nous voulions observer la mer de plus près,
voilà, et je vous prie de ne pas rire, qu'il n'y avait là plus une seule goutte d'eau,
et notre bateau reposait sur la terre sèche ! C'était effroyable à voir, tout le fond
de la mer était là devant nous, notre bateau posé sur un promontoire rocheux
escarpé, entouré par un abîme de plusieurs centaines de hauteurs d'homme ! Mais
la baie juste devant Génézareth est peu profonde et plate, et nous nous y
promenâmes en ramassant quantité de coquillages plus beaux et plus rares les
uns que les autres !
7. Tandis que nous étions ainsi tranquillement occupés à récolter ces coquillages,
survint un éclair très puissant suivi d'un violent coup de tonnerre. Nous volâmes
jusqu'à la rive, oubliant notre collection de merveilleux coquillages que nous
n'osâmes plus aller chercher ensuite, et ils restèrent là où ils étaient, à l'exception
de quelques-uns que j'avais mis dans un sac. Mais ce n'est qu'à la troisième veille
que la mer réintégra sa place et baigna à nouveau le rivage. C'est alors que nous
nous rendîmes peu à peu compte du prodige qu'il avait fallu pour que toute cette
mer ait pu disparaître ainsi jusqu'à sa dernière goutte !
8. Mais un vieil homme qui habite par ici nous a dit que cela arrive de temps en
temps, lorsque les esprits de la montagne et de l'air sont en colère contre les
esprits de l'eau. Nous en avons ri, mais une mauvaise explication vaut toujours
mieux que rien ! À la quatrième et dernière veille il s'est mis à faire nuit et nous
sommes retournés à notre bateau nous allonger un peu ! À notre réveil, le bon
soleil était déjà haut et nous nous sommes préoccupés du petit déjeuner. Voilà,
en bref, ce que nous avons vécu et observé cette nuit ! »
Chapitre 161
Les bateliers et Raphaël
1. Après le récit de son chef, le rude batelier fit un pas maladroit et glissa en
voulant aller chercher au bateau les coquillages qu'ils avait lui aussi ramassés en
hâte. Il tomba de tout son long, comme s'il ne s'était jamais tenu debout ! Les
autres bateliers éclatèrent de rire en disant : « Voilà-t-il pas un vieux maladroit !
» ce qui ne fit qu'augmenter la colère de l'homme couché par terre.
2. Mais Raphaël sauta vers lui pour l'aider à se remettre sur ses jambes et lui dit :
« Tu vois maintenant pourquoi je suis resté debout ! J'avais déjà à l'esprit que tu
allais tomber, et maintenant que tu es tombé pour de bon, c'est moi, ton faible
nourrisson, qui interviens assez promptement pour te relever et te redonner
l'usage de tes pieds quelque peu maladroits ! »
3. Marmonnant dans sa barbe, le batelier dit : « C'est bon ! Mais des garçons de
ton espèce sont toujours pleins de malice et font tout ce qu'il faut pour qu'il nous
arrive quelque chose ! Oh, je connais ce genre de mauvais drôles. Tu sembles
pourtant être un brave garçon, mais tu es jeune et cela suffit. Tout garçon cache
un mauvais drôle ! Aussi tiens-toi toujours à trois pas de moi, au moins ! »
4. Raphaël dit : « Ami, tu te trompes infiniment, mais je te pardonne ! Tu ne sais
pas qui tu as devant toi ! »
5. Le batelier dit : « Bon, bon, que peut-on bien être à quinze ans ! Tout au plus
un prince de Rome ou d'ailleurs, à moins que tu ne sois un auxiliaire du bon Dieu
en quelque sorte ! »
6. Raphaël dit : « Oui, oui, il y a un peu de cela ! Mais va chercher maintenant
tes coquillages dans le bateau ! »
7. Le batelier grincheux va à son bateau, d'où il rapporte aussitôt quelques
coquillages et un nautile qu'il nous montre, trois pièces très belles, mais sans
valeur particulière.
8. Raphaël lui dit : « Va pour le souvenir, mais ils n'ont aucune valeur, que veux-
tu en faire ? »
9. Le batelier dit : « Oh, nourrisson ! Attrape des moineaux si tu veux, mais pas
des bateliers aux cheveux blancs ! Tu veux me soutirer ces pièces ! C'est inutile !
Le vieux Dismas n'est pas si bête qu'il en a l'air. Ces trois coquillages valent trois
pièces d'argent et pas un sou de moins ! Si tu as les trois pièces d'argent, donne-
les et les trois coquillages sont à toi ! »
10. Raphaël dit : « Les trois pièces d'argent, c'est ce qui compte le moins pour
moi, mais que tu veuilles vendre une chose qui n'est nullement ta propriété, voilà
qui ne me convient guère ! Vois-tu, dans cette baie, de tout temps, personne n'a
eu le droit de pêcher en dehors des citadins de Génézareth et de ceux à qui ils
affirmaient ce droit ! Tu as ramassé ces trois coquillages sur un territoire qui est
la propriété d'Ebahi lequel tient ces eaux en baillage ! Ils sont donc sa stricte
propriété. S'il te les donne, ils sont à toi, et tu peux en faire ce que tu veux. »
11. Dismas dit : « Voyons un peu ce nourrisson qui parle comme un juge romain
! Tu serais un sacré juge avec moi ! Tu me disputerais encore mon froc ! La mer
est le territoire et le sol du marin, ce que l'eau lui donne, dans la baie ou en haute
mer, n'appartient qu'à lui seul et toutes tes lois savantes s'effondrent, car nous
nous y connaissons bien, nous autres ! Ainsi, trois pièces d'argent, et ces trois
coquillages sont à toi ! »
12. Raphaël dit : « Pas question ! Tant que notre Ebahi ne te les a pas accordés,
je ne puis te les acheter ! »
13. Dismas se tourne alors avec Ebahi et lui demande ce qu'il a à dire à ce pro-
pos.
14. Ebahi dit : « À strictement parler, notre Raphaël a raison et je pourrais
prendre ces trois coquillages comme m'appartenant ! Mais s'il y a quelqu'un qui
n'en a pas l'usage et ne l'aura jamais, c'est bien moi ! Aussi ces trois coquillages
t'appartiennent maintenant physiquement, mais spirituellement, toute la terre
appartient au Seigneur Dieu, donc également ces trois coquillages ! »
15. Dismas, cette fois convaincu et satisfait, dit à Raphaël : « Et alors, qu'en est-il
des trois pièces d'argent ? »
16. Raphaël dit : « Les voilà, mais donne ces trois coquillages à Ebahi qui les
gardera en souvenir de cette nuit ! »
17. Dismas prend les trois pièces d'argent et pose les trois coquillages devant
Ebahi, qui les donne à Jarah en disant : « Garde-les avec tes autres souvenirs, ils
auront pour nous une grande valeur ! »
18. Jarah prend les trois coquillages avec beaucoup de joie en dit : « Oh ! quelles
merveilles, quelles jolies choses, que de magnifiques reflets colorés ! On ne peut
que s'écrier comme Job : "Que tes œuvres, Seigneur, sont merveilleuses ! Celui
qui les admire n'a pas besoin de les posséder !" Qui a appris à ces crustacés à se
construire une si belle maison ? Sans poutres et sans tuiles, elle se tient là comme
Salomon dans toute sa splendeur royale ! »
19. Jarah se tourne alors vers Raphaël et le remercie pour ce si beau cadeau !
Mais elle lui demande aussi ce que les crustacés de ces trois coquillage ont bien
pu devenir.
20. Raphaël dit : « Ma chère Jarah, ces animaux sont déjà morts depuis des
milliers d'années et déjà décomposés depuis fort longtemps ! Mais leurs de-
meures peuvent subsister des milliers d'années sans perdre ni leur forme ni leur
beauté. Leur matière est de pur calcaire qui ne se décompose qu'à l'air libre,
jamais sous l'eau ; voilà ce que tu peux en savoir, et ce qui en résulte, tu ne
l'apprendras en profondeur que dans l'au-delà ! » Jarah fut très étonnée d'entendre
parler d'un pareil âge.
Chapitre 162
Accueil des Pharisiens à Génézareth
1. Mais à l'instant même parvint de la ville la nouvelle que les quelques Phari-
siens et les scribes récemment annoncés étaient arrivés de Bethléem avec ordre
signé du Temple de se faire conduire par mer et par terre à Nazareth par les gens
de Génézareth !
2. Ebahi, indigné de ces exigences dit : « Seigneur, c'est ainsi tout l'année ! Tu
n'es là que depuis cinq jours à peine, et tu as déjà pu voir quatre convois de ces
drôles qui ne cessent d'arpenter le pays en tous sens et d'accabler les habitants de
tous les lieux qu'ils traversent. Ils sont pires que des nuées de sauterelles. Si cela
n'était que dix fois l'an, je ne dirais rien, mais c'est deux, trois et quatre fois par
semaine qu'il faut supporter leur passage et leur procurer tous les avantages ! Un
ange en perdrait patience et en serait réduit à mendier ! Vraiment, que dois-je
faire ? Chaque jour je fais tout ce que je peux pour les pauvres, mais ces
misérables, ces vrais bourreaux de l'humanité, je souhaiterais les voir morts et à
tous les diables ! »
3. Je dis : « Ami, laisse tomber, la patience te mènera toujours plus loin ! Du
reste, remets-t'en à notre cher Jules, il va les envoyer en vitesse, ils se sou-
viendront de la remontrance et ne reviendront pas souvent à Génézareth ! »
4. Le capitaine dit à son subalterne : « Pars au plus vite, prends vingt hommes et
rends-toi aussitôt en ville. Explique à ces effrontés que cette ville, à cause de sa
forte garnison, va se trouver en état d'alerte et que personne ne peut entrer sans
un sauf-conduit signé d'un commandant romain ; et que celui qui cherchera à
pénétrer malgré tout subira une rude correction et en outre, les yeux bandés, les
oreilles bouchées avec de l'argile, pieds et mains liés, sera mis couché sur de la
paille dans une barque et expédié à un autre endroit où il subira une fois encore
le même sort ! S'ils ont de l'argent, moyennant rançon, ils pourront échapper au
fouet mais pas aux menottes, et s'ils n'ont pas d'argent ou refusent de payer, avant
d'être attaché, ils subiront quinze coups de fouet. Dixi Fiat !(*) »
5. Le sous-officier se hâte avec vingt hommes vers la ville, où il trouve dans la
demeure d'Ebahi quatorze Pharisiens et lévites qui malmènent les serviteurs
refusant d'accomplir tous leurs caprices.
6. Lorsque le sous-officier leur réclame le laisser-passer, ces effrontés disent : «
Nous sommes les prêtres de Dieu, voici notre insigne du Temple, cela suffit pour
la terre entière ! »
7. Le sous-officier dit : « La ville se trouve en ce moment en état d'alerte, par
ordre exprès de l'empereur, personne ne peut pénétrer dans la ville sans le
laissez-passer réglementaire. Nul n'est censé ignorer la loi ! Comme, à ce que je
vois, vous n'avez pas la carte, soit vous payez deux cents livres d'argent, soit
vous aurez chacun quinze coups de fouet sur vos dos mis à nu, si vous préférez !
Ensuite vous serez liés des quatre façons romaines que vous connaissez bien et
emmenés là où vous voudrez ! Et tout cela sans résistance, tout retard ou toute
contestation double la punition ! »
8. À cette nouvelle, les Pharisiens et les lévites appellent l'intendant d'Ebahi et le
somment de payer pour eux les deux cents pièces d'argent ; mais il leur répond :
« Mon maître ne vous a nullement fait appeler, pourquoi paierait-il pour vous ?
Mieux vaut jeter l'argent à la mer que de vous en prêter. Vous avez dehors
quatorze ânes sellés et bâtés, allégez donc le chargement de ces bêtes de ces deux
cents livres d'argent et vous vous épargnerez ces violents coups de fouet sur le
dos ! Je ne vous donne pas un stater ! »
9. À la réponse du brave et fidèle intendant d'Ebahi, ces Parisiens et ces lévites se
renfrognent, et, sous la garde du sous-officier qu'ils n'apprécient guère, ils se font
conduire à leurs montures qu'ils déchargent bien à contrecœur de ces deux cents
livres d'argent !
10. Le sous-officier prend l'argent et met aussitôt les quatre liens bien connus aux
Pharisiens et aux lévites, qu'il fait conduire sous escorte avec leurs montures sur
une barque confiée au gré des eaux ! Les Pharisiens se lamentent, mais en vain,
et le sous-officier nous rejoint une heure plus tard et nous raconte comment il a
exécuté les ordres de son capitaine.
11. Le capitaine le félicite et lui demande ce qu'il a fait de l'argent.
12. Le sous-officier dit : « Seigneur, je l'ai confié au brave intendant d'Ebahi. Tu
en feras ensuite ce que tu voudras. »
13. Le capitaine dit : « C'est parfait, qu'ils passent par ici, qu'ils prennent la
direction du petit bras de mer, ou qu'ils passent le détroit qui rejoint l'autre bras
de mer et qui est suffisamment large et profond pour qu'une barque d'une tren-
taine d'hommes puisse y passer sans toucher le fond, ces drôles se souviendront
de Génézareth ! »
14. Le sous-officier dit : « Pour éviter que le bruit n'en courre le jour du sabbat,
je les ai envoyé par le détroit ! »
(*)
J'ai dit, qu'il en soit ainsi.
15. Le capitaine dit : « Voilà qui est sage ! Le capitaine Jules te le dit, tu mérites
de l'avancement ! Ah, ils s'en souviendront et ne reviendront pas de sitôt à
Génézareth ! »
Chapitre 163
Le capitaine Jules raconte ses mésaventures avec les templiers
Chapitre 164
De la justice
1. Je dis : « Quant à Moi, tu es pur, cependant, dans les actions que tu poursuis
auprès des hommes, n'oublie jamais que le pécheur est ton frère.
2. Si tu sens ton cœur pris de colère envers celui qui mérite punition à cause de
sa faute, pose le fouet que tu tiens à la main, car dans ta colère, ce fouet
n'indiquerait pas la voie du salut, mais deviendrait un serpent dont la morsure
met un venin, et non un baume salutaire à la blessure du pèlerin qui en mourra.
3. Ne crois pas non plus que tu te débarrasseras de ton ennemi en le condamnant
à mort. Après sa mort, un ennemi de cette terre devient un esprit en liberté qui
t'importune cent fois plus et te cause bien plus de malheurs que lorsqu'il était ton
ennemi visible.
4. Aussi, punis toujours avec amour, jamais avec colère, et par la suite, n'en fais
pas trop, même avec les Pharisiens ; dis-toi toujours : "ce sont des aveugles
conducteurs d'aveugles". C'est le monde qui les rend aveugles, et le monde, c'est
Satan que tu as appris à connaître.
5. Vois-tu, en Moi il y a toute la puissance sur les cieux et sur la terre. D'une
seule pensée je pourrais les anéantir, et pourtant je les supporte avec patience,
jusqu'au jour où la mesure sera pleine !
6. Les hommes aussi Me mettent en colère et attristent Mon cœur par leur nature
incorrigible ; pourtant Je les supporte et les châtie avec amour pour qu'ils
s'améliorent et qu'ils puissent entrer dans le royaume de la vie éternelle pour
lequel ils ont été créés. Si tu veux être un juge équitable, il faut Me suivre en
toute chose !
7. Il est plus facile de juger que d'être jugé ! Mais qui prend sur soi de défendre
celui qui a été condamné pour faire lever son jugement sera grand dans le
royaume des cieux. Souvenez-vous tous de ce que Je viens de vous dire. Si Je
vous l'ordonne et le veux ainsi, vous ne pouvez vouloir faire autrement. Je suis le
Maître de la vie et de la mort. Moi seul sais ce qu'est la vie et ce qu'il faut pour la
conserver éternellement.
8. Si vous vivez selon Mon enseignement, vous conserverez la vie et vous en
jouirez en toute félicité, mais si vous allez à rencontre, vous perdrez la vie, et
vous irez à la mort qui est l'état le plus malheureux de toute l'existence, feu qui
jamais ne s'éteint, larve qui jamais ne meurt ! »
9. Le capitaine dit : « Seigneur, je vois par trop la nécessité de tout cela, mais
aussi l'extrême difficulté à le vivre. Aplanir des monticules n'est pas bien
difficile, mais lorsqu'on est confronté à des montagnes de difficultés, il est sim-
plement impossible de suivre le droit chemin si Tu ne nous viens pas en aide.
Seigneur ! »
10. Je dis : « C'est pourquoi Je suis venu en ce monde pour vous venir en aide là
où vous n'aviez plus aucune issue ! Ainsi, ayez confiance, bâtissez en Mon nom,
et ce qui vous semblait impossible deviendra possible. Mais maintenant
retournons à la maison, le soleil est sur le point de se coucher. »
11. Le chef batelier demande alors pour quand le bateau doit être prêt à ap-
pareiller.
12. Je dis : « Il faut être prêt à partir à toute heure, car si le maître du bateau vient
avant l'heure, il ne faut pas qu'il vous trouve paresseux et inactifs et qu'il vous
refuse votre salaire et vous retire votre charge ! S'il est facile de servir Dieu, il est
bien difficile de servir les hommes ! »
13. Le chef batelier demande encore : « Seigneur, si les Pharisiens qui étaient
hier à Jessaïra pour ramener au Temple les Juifs passés à la grécité reviennent ici
et veulent s'entretenir avec nous du psaume 47 comme ils l'ont promis, que
devrons-nous faire ? »
14. Je dis : « Donnez-leur sept gros sous s'ils vous l'expliquent bien, et ne leur
donnez rien s'ils ne vous l'expliquent pas bien, et s'ils ne peuvent absolument pas
vous l'expliquer, vous serez en droit de leur réclamer les sept sous et de les leur
prendre sous la menace de vous faire aider par l'armée s'ils refusent de payer ! »
15. Le capitaine dit : « S'il en est ainsi, venez me trouver et ils paieront sept fois
sept sous sans grâce et sans ménagement ! »
16. Les bateliers ainsi parfaitement satisfaits, nous nous rendons en ville à la
maison d'Ebahi où tous les gens, le soleil étant déjà couché, sont occupés à
préparer un bon repas. Le capitaine reçoit les deux cent livres d'argent et les
remet à Ebahi avec ces mots : « Prends-les en modeste dédommagement pour les
centaines et les centaines de pauvres et de malades que tu as toujours soignés
sans jamais exiger un seul stater. En vérité, tu es le seul homme de cette ville qui
mérite le nom d'être humain. Tout le reste du peuple ne mérite pas ce nom, car il
est mort, ne se soucie de rien et ne fait absolument rien ! Croyez-vous que tous
les miracles accomplis ces derniers jours leur aient fait la moindre impression ?
Pas du tout ! Ces lâches traînent par les rues comme s'ils n'avaient rien à faire.
Ceux qui étaient malades ont bien voulu être guéris, mais à peine ont-ils dit
merci et aujourd'hui il n'y pensent plus ! C'est pourquoi Ebahi est pour moi le
seul être humain de cette ville, tout le reste est plus animal qu'être humain ! »
17. Ebahi prend l'argent en faisant la remarque qu'il ne l'utilisera que pour le bien
et ceux qui en auront besoin.
Chapitre 165
De la dureté céleste
Chapitre 166
De l'amour, de la douceur, de la patience
1. Jarah, quelque peu atteinte par ces mots, dit : « Eh bien, si c'est ainsi, ce doit
être juste, évidemment ! Et si tu me l'avais dit plus tôt, je ne t'aurais pas contredit
! Si, avec toutes les douceurs possibles, on ne peut rien obtenir de l'homme à
cause de l'inviolabilité de son libre arbitre, il ne reste plus d'autre moyen que
d'appliquer un mauvais remède. Nous finirons bien par nous comprendre, mais
ne sois pas si dur avec moi ! Dans tes paroles douces tu me plais beaucoup, mais
quand tu me tombes dessus avec des mots durs, la plus pure vérité sortant de ta
bouche devient intolérable !
2. Je pense que, du moins par la suite, tous les esprits parfaits du ciel s'effor-
ceront de parler comme le Seigneur, le Créateur des esprits, des soleils, des
mondes et des hommes. La parole de Dieu dans les choses sérieuses est aussi
douce que la laine de l'agneau et Ses paroles coulent comme le lait et le miel.
Tout maître, tout chef devrait se comporter comme Lui, car le ton de douceur de
Sa parole est à mon avis la plus grande force. Celui qui crie avec dureté blesse
alors qu'il voulait guérir ! Regarde l'aimable visage que le Seigneur montre aussi
bien à Ses amis qu'à Ses ennemis. Comment s'étonner qu'il guérisse les malades
simplement en les regardant ! Eh bien, Mon cher Raphaël, il faut aussi que
chacune de tes paroles et de tes actions, envers moi comme envers chacun, soit
aimable, alors la bénédiction sera attachée à chacun de tes pas sur cette terre ! »
3. Je serrai Jarah contre Mon cœur, disant à tous ceux qui étaient présents : «
Voilà Ma disciple la plus parfaite jusqu'à présent, à l'école de laquelle Je puis
envoyer Mes anges. C'est elle qui M'a le mieux compris, aussi possède-t-elle tout
Mon amour !
4. En vérité, si vous partez enseigner les nations en Mon nom, souvenez-vous des
paroles que cette tendre et adorable petite vient de dire à Mon ange, et la
bénédiction sera attachée à chacun de vos pas. Soyez patients, doux en toute
chose, et vous répandrez la bénédiction dans le cœur des hommes ! Mais Mon
ange Raphaël a dû parler ainsi pour que Jarah Ma préférée soit incitée à donner
cet enseignement ; par ailleurs, Raphaël est tout aussi doux que la brise légère du
soir et tout aussi tendre que la laine moelleuse d'un agneau ! »
5. Ils entendirent tous ces paroles, et tous furent convaincus. Seul le capitaine
ajouta : « Tout cela est divin, pur et vrai, mais si j'ai un langage trop doux avec
mes soldats je ferai mauvaise figure et mes soldats ne m'obéiront plus guère, car
dès que je me mets à tonitruer, tout va très bien ! »
6. Je dis : « Il ne s'agit pas tant ici de douceur extérieure que de douceur
intérieure des paroles. Quand il est nécessaire de faire usage de la dureté céleste,
il faut le faire, la règle de toute sagesse est la ruse du serpent en même temps que
la douceur de la colombe ! »
7. Le capitaine dit, avec une mine réjouie : « Seigneur, j'ai tout compris : l'action
du juste est justifiée par le ciel ! Mais il s'agit de savoir compter pour pour ne pas
se tromper en calculant la quantité d'intelligence nécessaire, car, selon l'art
d'Euclide, à cette mesure d'intelligence il faut ajouter une mesure équivalente
d'amour de patience et de douceur, c'est ainsi qu'on obtient un résultat sans faute
!»
8. Je dis : « Oui, oui, ce sera le meilleur calcul avec un résultat de bénédiction
garanti où toute justice et tout jugement seront pleinement justifiés. Voilà le sol
sur lequel il faut construire. Sans fondations on ne peut construire. Établissez ces
fondations-là avant de vouloir construire et votre peine ne sera pas vaine !
9. Vous venez de Dieu, soyez donc semblables à Dieu en toute chose ! Mais Dieu
prend son temps, pour commencer il y a la graine, puis le germe, et du germe
pousse l'arbre qui porte ensuite des bourgeons, puis des feuilles, des fleurs et
enfin des fruits savoureux portant à nouveau la graine originelle qui mûrira pour
la replantation suivante !
10. Il en va du monde comme de la plante. Le soleil ne monte pas à l'horizon
sans prémisses, et la tempête est précédée par des signes de mise en garde
toujours reconnaissables !
11. Si Dieu Lui-même respecte l'ordre des choses et qu'il l'observe avec la plus
extrême patience et la plus grande persévérance, vous qui êtes Mes véritables
disciples, vous allez aussi Me suivre sur le chemin que Je vous ai indiqué afin de
ne pas vous perdre en route ! Avez-vous compris ? »
12. Le capitaine dit : « Seigneur, quant à moi, j'ai tout compris et je crois qu'il n'y
a plus personne parmi nous qui n'ait compris ces vérités célestes parfaitement
claires et lumineuses. À Toi seul l'honneur et la reconnaissance ! »
13. Je dis : « Tu penses que tous ceux qui sont présents ont compris ! Oui, ils ont
compris, et il y en a même un qui a compris avec son cerveau, mais non avec son
cœur ! »
14. Ces mots les mirent tous dans l'embarras, et les disciples Me demandèrent de
qui je voulais parler !
15. Mais Je dis : « Le moment n'est pas encore venu de le crier sur les toits, mais
le moment venu, vous vous souviendrez de Mes paroles. Mais que celui qui a un
soupçon le garde en son cœur, car aucun arbre ne doit tomber avant l'heure ! »
16. Les disciples comprirent à Mes paroles que Je pensais à Judas Iscariote, mais
ils se turent et ne laissèrent pas voir leur présomption bien fondée.
17. Matthieu et Jean Me demandèrent s'ils pouvaient transcrire cet enseignement-
là pour le bien des hommes.
18. Je dis : « Vous pouvez noter l'enseignement de l'amour, de la douceur, de la
patience sur une page à part, mais pas dans votre livre principal, car je reparlerai
souvent de cela et Je vous indiquerai quand il faudra le noter. Maintenant, allons
nous reposer et nous exercer à notre analyse intérieure qui est la véritable façon
de fêter le sabbat en Dieu ! »
19. À ces mots de Ma bouche, tout fut silencieux dans la maison et nous nous
assîmes près de trois heures durant.
20. Après ce temps d'introspection, Je dis : « Le sabbat est terminé, nous pou-
vons reposer nos membres qui en ont besoin ! Tous allèrent prendre un repos
physique et ce ne fut qu'en fin de matinée que nous levâmes le camp.
Chapitre 167
Départ pour Tyr et Sidon
Matthieu 15, 21
Chapitre 168
La femme cananéenne de Tyr
Matthieu 15, 22-29
1. Lorsque nous laissâmes notre bateau sur l'autre rive, nous avions encore une
bonne marche à faire en territoire grec avant d'atteindre ces deux villes. Dans la
soirée, nous étions parvenus aux confins du territoire de Tyr et de Sidon, lorsque
accourut une femme de Cana en Galilée, mariée depuis quinze ans dans la région
à un Grec. Elle Me reconnut sur le chemin et s'écria : « Seigneur, Toi fils de
David, aie pitié de moi, j'ai une fille qui est tourmentée par le diable ! » Je la
laissai crier et passai mon chemin sans mot dire.
2. Mes disciples, importunés par les violents cris de cette femme, Me l'amenèrent
et M'arrêtèrent en disant : « Laisse-la donc T'approcher, elle crie depuis une
demi-heure à nous rompre les oreilles. Si Tu ne veux ou ne peux l'aider, fais du
moins en sorte qu'elle s'en aille, sinon les gens sur la route croiront que nous
avons fait du mal à cette femme et ils nous accableront de toutes sortes de
questions ! »
3. Je dis alors aux disciples : « Je n'ai été envoyé que pour les brebis perdues de
la maison d'Israël. »
4. Les disciples se regardèrent interloqués, ne sachant que faire. Judas Iscariote
M'accusa de la plus extrême inconséquence, disant à Thomas : « Il y a de quoi
être exaspéré par les contradictions de son discours et de ses actes, devant cette
femme qui réclame son aide, il n'y a que le troupeau d'Israël, et avec les Romains
qui sont bien plus païens que cette pauvre femme mi-grecque mi juive, il n'y a
pas de troupeau d'Israël qui compte ! »
5. Thomas lui dit : « Cette fois-ci, tu n'as pas tout à fait tort ! Pourtant j'en reste à
croire qu'il doit avoir une raison particulière de ne pas vouloir aider cette femme.
»
6. Pendant que les disciples échangeaient ainsi entre eux ces propos, la femme
s'approcha de Moi, tomba à genoux à Mes pieds en disant : « Seigneur, viens à
mon aide ! »
7. Je regardai la femme et lui dis : «Il n'est pas bien de prendre le pain des en-
fants et de le jeter à des chiens ! »
8. Le femme dit alors : « Oui, Seigneur, mais les petits chiens mangent les
miettes tombées de la table de leur maître ! »
9. Cette réponse mit tous les disciples dans l'étonnement et Pierre pensa en secret
: « Mais c'est trop fort, j'ai rarement vu une telle sagesse chez une juive, et cette
femme est Grecque de naissance, quoique née à Cana en Galilée. Je la connais et
lui ai souvent vendu du poisson ! Mais il y a bien quinze ou seize ans de cela ! »
10. Je regardai la femme et lui dit : « Ô femme, ta foi est grande, qu'il en soit
selon ta volonté ! »
11. La femme se releva, remercia, et se hâta de retourner à sa demeure où elle
trouva sa fille guérie. Les gens qui se trouvaient chez elle auprès de sa fille lui
racontèrent comment le diable était visiblement parti une demi-heure auparavant
en furie ! La femme remarqua que cela s'était passé au moment où, sur les
confins du territoire de Tyr, Je lui avais dit : « Ô femme, ta foi est grande, qu'il
en soit selon ta volonté ! »
12. Le soir venu, les disciples Me demandèrent si Je voulais aller jusqu'à Tyr, ou
s'ils devaient chercher une auberge ici, aux confins du territoire de la ville, car
celle-ci était encore à trois heures de marche !
13. Je dis aux disciples : « Écoutez ! Nous allons nous tourner vers le couchant
où se trouve Tyr, en direction du sud-ouest, de là nous arriverons de nouveau à la
mer de Galilée, au bord de laquelle se dresse une belle montagne dont nous
pouvons voir d'ici le sommet, qui est à deux heures de marche. Nous y passerons
la nuit. »
14. Sur ce, nous y allâmes, hâtant le pas. En une heure nous fûmes au bord de la
mer de Galilée, au pied de cette montagne que nous gravîmes également en une
heure.
15. Parvenus au sommet, nous nous assîmes sur le tendre herbage où nous nous
reposâmes, sans cependant nous endormir immédiatement.
Chapitre 169
De la possession et de l'origine des âmes
1. Après avoir joui d'un moment de repos, Pierre dit : « Seigneur, il y a des
choses que je comprends, mais je ne comprends pas la possession diabolique,
notamment chez des enfants innocents qui sont souvent horriblement tourmentés
par de mauvaises présences qui habitent leur corps. Comment Ta sagesse et Ton
divin ordre permettent-ils un tel trouble ? La fillette de cette femme qui nous a
suivis doit avoir à peine treize ou quatorze ans et au dire de sa mère, il y aurait
près de sept années qu'elle souffre d'une façon incroyable de terribles maux
pendant sept heures par jour ! Pourquoi une chose pareille est-elle permise ? »
2. Je dis : « Votre entendement ne peut comprendre pour l'instant le fond des
choses, mais puisque nous sommes ici ensemble parfaitement tranquilles, je vais
vous en donner quelques aperçus. Écoutez-Moi bien.
3. Il y a deux sortes d'êtres humains sur terre. Les uns, c'est la meilleure sorte,
viennent d'en haut, et cela dès l'origine, ce sont là les enfants de Dieu ; les autres,
c'est la mauvaise sorte, viennent de cette terre, leur âme en quelque sorte est un
assemblage de nombreuses petites particules de vie provenant de Satan et mises
dans la masse du globe terrestre où elles passent dans le règne végétal, puis dans
le règne animal où, par de nombreuses étapes successives, elles parviennent
finalement à former des entités puissantes, constituée d'innombrables particules
animées, qui se développent en âmes humaines ; et enfin, particulièrement lors
de conceptions qui n'ont pas été bénies par Dieu, ces âmes s'incarnent dans le
corps d'une femme et viennent au monde de la même façon que les enfants de la
lumière qui viennent de la sphère spirituelle du ciel.
4. Ces enfants dont tout l'être provient de Satan sont plus ou moins exposés au
danger d'être possédés par un mauvais esprit, c'est-à-dire par l'âme noire d'un
démon qui a déjà vécu précédemment une incarnation humaine sur cette terre.
Cela arrive notamment lorsqu'une jeune âme provenant de la partie satanique du
globe se met à vouloir prendre une bonne direction céleste. Quand une particule
de vie cherche à se dégager de la sphère des enfers, elle provoque une douleur
insoutenable à l'enfer tout entier qui cherche alors par tous les moyens à se
préserver d'une pareille blessure.
5. Tu te demandes comment cela peut provoquer une douleur à l'enfer, car une
telle âme doit être à l'enfer incomparablement plus petite que ne peut l'être un
petit poil au corps tout entier de l'homme ! Et Je puis te dire que cela est pourtant
ainsi ! Attrape un tout petit poil de ton corps et arrache-le, tu constateras que tu
ressens alors une douleur intolérable, non seulement à l'endroit où tu l'as arraché,
mais dans tout ton corps, et tu serais au désespoir si une telle douleur devait
durer une heure de temps !
6. Avec cette explication, te voilà déjà en mesure de comprendre un peu pour-
quoi la possession existe sur cette terre et existera jusqu'à la fin de cette terre !
7. Cette possession est décisive pour le bien du possédé, car l'âme dont le corps
est occupé par un quelconque démon est affinée par les tourments de sa chair et
prévenue des intrusions du démon. Mais l'aide d'en haut vient à temps et une âme
du monde est alors totalement gagnée au ciel. Dis-Moi si tu as un peu compris
maintenant ! »
8. Pierre dit : « Oui, Seigneur, cela m'est devenu très clair, mais alors il serait
presque préférable de ne pas venir en aide à un tel possédé ! »
9. Je dis : « Lorsque quelqu'un vient te demander de l'aide, tu ne dois pas la lui
refuser, car Ma prévoyance veille déjà à ce que celui qui est concerné n'appelle
pas à l'aide avant que le moment ne soit venu pour lui de pouvoir recevoir l'aide
nécessaire ! Voilà aussi pourquoi il ne faut pas la refuser à ceux qui cherchent !
Comprends-tu aussi cette remarque très importante. »
10. Pierre dit : « Oui, Seigneur, à Toi seul louange, amour et honneur. Il n'y a
donc rien sur cette terre qui ne soit prévu à l'avance par l'amour et la sagesse de
Dieu ! »
11. Je dis : « Oui, c'est ainsi ! Et voilà pourquoi vous ne devez jamais vous dé-
courager devant les contrariétés de cette terre. Car le Père céleste sait le mieux la
raison pour laquelle Il le permet. »
12. La plupart des maladies dont les hommes souffrent ne sont là que pour
prévenir l'âme de ne pas devenir une avec la chair, qui même chez les enfants de
la lumière a été prise à Satan déchu, à la seule différence que chez les enfants de
la lumière, leurs souffrances quand l'âme veut devenir chair, sont permises par le
ciel, tandis que les souffrances des enfants du monde, également prescrites et
permises par le ciel, sont en fait les souffrances de l'enfer ressenties comme telles
par le corps de l'enfant du monde et faisant partie intégrante de l'enfer, car celui-
ci éprouve douloureusement cette perte d'une particule de son être qui lui est
arrachée par la puissante intervention du ciel ! Comprends-tu aussi une telle
explication ? »
13. Pierre dit : « Oui, Seigneur, je comprends aussi cette explication. À Toi mon
amour pour l'éternité ! »
Chapitre 170
La source miraculeuse
Chapitre 171
Grand miracle sur la montagne
Matthieu 15, 30-31
1. Lorsque Judas Iscariote entendit cela, il se prit la tête dans les mains en disant
: « Non ! cette fois, pour moi, c'en est trop ! Ce ne sont pas des centaines, mais
des milliers de gens qui arrivent, et plutôt des malades que des gens en bonne
santé ! Adieu la paix et la tranquillité de ce sommet, voilà encore le tumulte, et il
n'est plus question de repos ! »
2. Je dis : « Qu'est-ce qui te chagrine ? Sans doute aucune âme ne vient à toi et tu
n'auras nul besoin de guérir des malades. Si pour toi il y a trop de bruit et trop de
mouvement auprès de Moi, retourne-t'en chez toi et refais les marchés avec tes
pots. Aussi longtemps que tu voudras rester près de Moi, il faudra t'adapter à
Mes ordonnances, parce que sur Mes voies Je suis le seul Maître, et si jamais Je
me mettais à vouloir marcher sur tes voies, Je Me plierais à tes ordonnances et te
reconnaîtrais comme le maître de ton affaire. Mais ici, Je pense que c'est tout de
même le cas contraire ! »
3. Judas Iscariote, marmonnant pour lui-même, dit : « Oui, oui, il suffit que
j'ouvre la bouche pour que tout ce que je dis soit faux ! À l'avenir je pourrais
aussi bien rester muet comme une pierre ! »
4. Le sage Nathanaël dit alors : « Ce serait la meilleure idée que tu puisses avoir !
Oui, parler au bon moment est une bien belle chose pour celui qui a quelque
chose à dire et qui sait parler ! Mais pour un idiot, la meilleure chose est de se
taire ! »
5. Et tandis que Nathanaël rappelle à la mémoire de Judas Iscariote quelques
proverbes de Salomon, une foule de gens arrive de divers côtés, semblant sortir
de toutes part et menant avec eux des paralytiques, des aveugles, des muets, des
estropiés et quantité de malades atteints de toutes sortes de maladies. Ils déposent
ainsi autour de Moi près de cinq cents malades, Me priant de les guérir. Et voilà
que Je les guéris d'une seule parole et dis à ceux qui sont ainsi guéris : « Levez-
vous et marchez ! »
6. Les aveugles constatent aussitôt qu'ils voient clairement, puis les sourds se
mettent à entendre et à pouvoir répondre à chaque question, enfin les pa-
ralytiques et les estropiés essaient de voir si leurs muscles paralysés fonction-
nent, et pas un seul ne peut dire qu'il n'a pas été secouru parfaitement. Tous les
autres malades sont aussi parfaitement guéris !
7. Le peuple, voyant ces muets parler, ces aveugles voir, ces paralytiques mar-
cher droit, et tous ces estropiés et ces malades être entièrement guéris, est dans
l'émerveillement et se met à louer le Dieu d'Israël. Tous ces gens restèrent sur la
montagne jusqu'au troisième jour, bien qu'ils eussent terminé dès le second jour
les provisions emportées avec eux.
8. On peut se demander à quoi cette foule passa son temps pendant ces deux
dernières journées sur la montagne. Pour répondre brièvement, on peut dire que
ces milliers de gens des deux sexes se firent tous enseigner par Moi et Mes
disciples. À noter que parmi ces milliers de gens, personne .n'était du parti des
Pharisiens et des scribes. Au contraire, ils avaient une foule de choses à raconter
au sujet des templiers avec lesquels ils avaient fait les plus cruelles expériences,
et ils se plaignaient amèrement d'avoir rencontré ces aveugles zélateurs.
Chapitre 172
Prédication sur l'avenir de Son enseignement
1. Il y avait aussi parmi eux des Grecs infiniment surpris par cet enseignement.
L'un d'eux dit : « Oui, c'est un enseignement qui provient du fondement de la
nature, rien de plus positif, de plus spontané ne peut être pensé par l'homme qui
voudrait donner à l'humanité une législation à observer. Cet enseignement
comporte les lois qui déterminent originellement la vie humaine et qu'il est donc
infiniment nécessaire de conserver. Cet enseignement n'est dicté ni par le goût du
profit, ni par l'instinct de domination, il concerne aussi bien chacun
individuellement que les plus grandes communautés. Si cet enseignement était
véritablement reconnu et observé, la terre entière deviendrait le ciel!
2. Mais, et c'est un grand mais, il faudra pour cela toute une nouvelle génération.
Le fumier incorrigible des hommes doit être extirpé de cette terre, sinon jamais
rien ne changera. Le luxe et la recherche du confort ont pris une importance par
trop extrême. Les plus puissants savent mieux que jamais exploiter les plus
faibles. Bien peu d'hommes vivent dans le bonheur et des masses de gens doivent
trimer, si bien que le pauvre diable se met à douter de l'existence de Dieu, tandis
que le riche et le puissant dans son bonheur et sa prospérité oublie Dieu, ainsi
finalement l'un et l'autre se donnent au diable !
3. Oui, Seigneur et Maître, Ton enseignement est la plus pure vérité divine ! Oui,
je voudrais dire : il est en soi la pure vie. Malheureusement, il ne sera pas adopté
par le grand monde païen, qui ne croit pas et qui occupe déjà une trop bonne
position sur cette terre ! Adam, malgré son Eden, n'est qu'un pauvre diable à côté
d'un César Auguste ou d'un Lucullus et de tant d'autres. "Voilà ce qu'on peut se
permettre avec Zeus, Apollon ou Mercure ; on peut mener la belle vie en
compagnie de ces dieux fantaisistes ! À quoi bon alors la vérité, l'amour, la
douceur, la patience et la sagesse ?" Les grands et les puissants de ce monde
philosopheront ainsi et poursuivront ton enseignement de l'amour du prochain
comme les loups affamés poursuivent une brebis !
4. Comment se sentiront-ils dans ton enseignement de l'amour du prochain, alors
que l'esclavage du prochain leur procure les plus hauts agréments ? Oui, Seigneur
et Maître, véritable Sauveur de la pauvre humanité souffrante, vas-y, fais des
miracles, mais prêche l'esclavage éternel, montre au peuple malheureux qu'un
César seul a le droit de vivre sur cette terre, et le peuple seulement selon le bon
plaisir de César ! Témoigne à haute voix que César a droit indiscutable de vie et
de mort sur chacun, et d'accaparer à lui seul tous les trésors et de tous les biens
de cette terre ; alors on te mettra des vêtements royaux et tu vivras avec pompe et
majesté !
5. Mais comme Ton enseignement prêche la fraternité générale et voit en chacun
un enfant de Dieu, je le suivrai plus que n'importe quoi, et Tu seras pour moi
mon véritable saint Maître. »
6. Je dis : « Ami, ce que tu viens de dire est malheureusement vrai, il faudra subir
de rudes combats avant que ces grands et puissants païens puissent entrer
pleinement dans mon enseignement ! Mais lorsqu'ils trouveront l'entrée, les
Césars et les rois deviendront eux-mêmes mes apôtres les plus zélés et les plus
actifs. Ils raseront eux-mêmes les temples des idoles pour construire à leur place
des maisons de Dieu où se retrouveront les frères pour rendre honneur au seul
vrai Dieu, et dans ces maisons de Dieu leurs enfants apprendront l'enseignement
que Je donne maintenant pour le salut actuel et éternel des hommes.
7. Évidemment, cela n'arrivera pas du jour au lendemain, mais seulement le
moment venu ; la semence doit d'abord être répandue, ensuite elle germe et finit
par donner beaucoup de fruits !
8. Mais Mon enseignement sera perpétuellement attaqué par le monde qui ne
veut pas mourir, Je le sais de toute éternité !
9. Oui, le plus doux des enseignements qui est le Mien finira par causer les
guerres les plus sanglantes, mais c'est inévitable, car la vie est issue d'un combat
puissant en Dieu et reste un combat continuel et ne peut subsister que par son
propre combat ! Comprends-tu cela ? »
10. Le Grec dit : « Seigneur et Maître, c'est trop profond pour nous, Toi et Tes
disciples pouvez comprendre, mais pour moi c'est incompréhensible et même
insoutenable ! »
11. Je dis : « Oui, oui, Je le pense aussi, et c'est pourtant ainsi et le restera comme
Je te l'ai révélé ! »
12. De telles paroles mirent tout le peuple dans l'étonnement, plusieurs firent les
remarques suivantes : « Notre petit père, le vieux sage grec né à Pathos, a
vraiment bien parlé, mais on a compris que lorsqu'il parle c'est toujours un
homme qui parle, tandis que lorsque c'est ce Maître qui est encore un jeune
homme, c'est Dieu même qui parle et chaque mot de sa bouche va droit au cœur
comme un bon vieux vin qui vous rend tout guilleret !» Il y eut de nombreuses
autres remarques de ce genre, notamment le troisième jour où le peuple s'initia de
plus en plus à Mon enseignement.
Chapitre 173
Multiplication des pains pour quatre mille hommes
Matthieu 15, 23-39
Chapitre 174
Tentatives des Pharisiens et des Sadducéens
Chapitre 175
Le Seigneur dans la pauvre cabane près de Césarée de Philippe
Des faux maîtres et des faux prophètes
Matthieu 16, 13
1. Tandis que ces disciples étaient partis s'informer des gens et de la région de
Césarée de Philippe, J'étais resté jusqu'au soir dans la baie au pied de la
montagne. Mais quelques heures avant le coucher du soleil, Je quittai la baie
avec les disciples restés auprès de Moi et J'arrivai également à Césarée de Phi-
lippe vers le soir, où Je retrouvai les disciples partis en éclaireurs dans une
pauvre cabane dont les très modestes habitants étaient occupés à préparer un
dîner pour les disciples affamés.
2. Les gens demandèrent aussitôt aux disciples qui nous étions et ils dirent sans
façons que J'étais ce Jésus même dont ils venaient de tant parler.
3. Le maître de maison, entendant cela, laissa tout en plan et vint se jeter à Mes
pieds en disant : « Quel bien ai-je pu faire, moi, pauvre pécheur, pour que Tu me
fasses une grâce aussi inestimable ? Ô Toi grand homme venu des cieux, envoyé
sur terre pour nous pauvres pécheurs, comment puis-je T'honorer et Te louer ?
Moi qui ne suis qu'un simple pauvre homme, que puis-je faire pour Te plaire ? »
4. Je dis : « Cher ami, relève-toi et veille à ce que nous ayons pour le dîner du
pain et du poisson avec un peu de vin ! Prépare-nous aussi un campement
acceptable, c'est tout ce que Je souhaite de toi ! »
5. Le pauvre homme se releva et dit d'un air un peu triste : « Bon maître, ce que
j'ai, je le donne puisqu'il est fait un si grand honneur à ma cabane, car je sais que
Tu es un fils de David et en plus un grand prophète. J'ai bien du pain et du
poisson en réserve pour aujourd'hui et pour demain, mais quant au vin, il n'est
pas fameux, non seulement chez moi, mais dans toute la région. Même à la ville
de Césarée de Philippe, il n'y a guère de vin. J'ai bien un sirop de mûre et de
framboise, mais il est déjà vieux et fermenté, nous le buvons avec de l'eau et un
peu de miel pour étancher notre soif.
6. J'ai bien encore quelques gouttes de lait de chèvre, si cela T'est agréable, je
T'en apporterai aussitôt avec le pain, cela fera un bon repas ! »
7. Je dis : « Eh bien, apporte ce que tu as ! Mais Je vois que tu as plusieurs
amphores devant ta maison ; si tu ne récoltes pas de vin, que fais-tu de ces am-
phores ? »
8. Le pauvre homme dit : « Oui, oui, j'ai bien des amphores, parce que je suis
potier et que je les ai fabriquées. Mais il n'y a jamais eu une goutte de vin dedans
! J'en ai près d'une cinquantaine pour le prochain marché où je les vends chacune
pour une bonne pièce ! »
9. Je dis : « Va prends les amphores et remplis-les d'eau. »
10. Le pauvre homme dit : « Bon maître, à quoi bon ? »
11. Je dis : « Ami, ne demande pas, mais ce que Je te dis, fais-le, et tu seras
heureux dans l'instant même et pour l'éternité ! »
12. À ces mots, le pauvre homme appelle sa femme et ses huit enfants déjà
grands, dont six filles et deux fils, va à la source et remplit les cinquante am-
phores. Quand elles furent pleines, il Me demanda ce qu'il devait en faire.
13. Je lui dis : « Mets-les à la fraîcheur dans la grotte à l'entrée de laquelle s'ap-
puie l'arrière de ta cabane ! »
14. Le pauvre homme avait sa paille dans cette grotte. Il la répand au sol et il y
dépose ses amphores remplies d'eau, les unes à côté des autres ; et quand il a fini,
il vient à Moi en disant : « Seigneur et Maître, tout a été fait comme Tu l'as
ordonné ! Y a-t-il autre chose à faire ? »
15. Je dis : « Tout est parfaitement en ordre. Va prendre quelques-unes de tes
meilleures cruches et remplis-les avec une de ces amphores, mais goûte ces
cruches quand elles seront remplies pour voir si elles te plaisent ! Ensuite,
apporte-les ici et dis-nous si cette eau ainsi préparée est bonne ! »
16. Le pauvre homme va prendre douze cruches pour les remplir. En transvasant
l'eau, déjà l'odeur du vin lui monte aux narines, et lorsqu'il goûte le contenu
liquide, il est saisi d'émerveillement et dit à ses enfants qui l'aident : « Écoutez,
c'est incompréhensible, l'eau avec laquelle nous avons rempli les amphores et
que j'ai transvasée dans les cruches est devenue le meilleur et le plus délicieux
des vins ! Goûtez pour vous en convaincre vous-mêmes ! »
17. Les enfants goûtèrent et ne purent assez dire leur émerveillement. L'aîné dit :
« Père, tu sais que je connais assez bien l'Écriture, je connais tous les prophètes
et leurs actes, mais aucun d'eux n'a fait cela, cet homme étrange doit être plus
qu'un prophète ! »
18. Les filles disent : « Oui, oui, père, nous le croyons aussi, c'est finalement Elie
qui doit revenir sur terre pour annoncer aux hommes la venue du Messie ! Ou
peut-être est-ce enfin le grand Messie Lui-même ? »
19. Le père dit : « L'un ou l'autre sont possibles ! Hum, hum, comme tout cela est
soudain et inattendu ! »
20. Comme le pauvre homme parlait ainsi pensivement, sa femme accourut hors
d'haleine en disant : « Viens, viens voir ce qui est arrivé à notre cabane, nos
celliers sont pleins de toutes sortes de victuailles et des meilleurs pains !
Personne d'autre n'a pu le faire que le Maître qui est arrivé il y a une heure à
notre cabane, et qui nous a demandé le couvert et le gîte ! »
21. L'homme dit : « Il n'y a aucun doute, mais comment ? Qui nous donnera là-
dessus une explication ? Qu'est-il ? Qui est-il ? Si nous disons que c'est un
prophète, visiblement nous disons trop peu, et si nous disons que c'est un ange,
nous n'avons pas dit grand-chose de plus. Mais si nous disons que c'est un dieu,
nous en disons trop ! Un dieu ne peut être qu'esprit, et lui est de chair et d'os.
Enfin, ne faut-il pas se demander si c'est un Zeus grec ou Apollon ? Il nous faut
porter maintenant avec dévotion amour et reconnaissance le vin, le pain et le
poisson et tout ce que nous avons de comestible, car ce bienfait est inestimable. »
22. Le pauvre homme vint avec des cruches pleines et sa femme et leurs enfants
avec le poisson et d'autres victuailles. L'homme se prosterna devant Moi en
disant d'une voix très humble : « Ô Seigneur et Maître, qui es-Tu, que Tu puisses
faire de telles choses par Ta volonté seule ? Je suis tremblant de vénération
devant Toi ! Tu ne peux être un homme comme nous, mais alors qui es-Tu, que
nous puissions T'honorer dignement ! »
23. Je dis : « Vois-tu, Mon ami, Je vais te dire quelque chose et tu pourras en
juger toi-même. Lorsqu'au petit matin tu observes les premières clartés du jour et
que le ciel se met à rougir, tu dis : "Le soleil va se lever." Mais la lune lorsqu'elle
se lève répand aussi sa clarté. Cependant, à sa clarté ne succède aucune rougeur,
et lorsqu'à la pleine lune la terre est éclairée par sa lumière terne et mate, les
petites fleurs n'ouvrent pas leur corolle pour boire les froids rayons inanimés.
24. Les petits nuages inondés de lumière qui annoncent le lever du soleil, sont
beaucoup plus clairs que la lune lorsqu'elle est pleine. Mais si ces messagers
n'étaient pas suivis par le soleil, il ferait bien vite aussi sombre sur cette terre
qu'au septentrion où il n'y a aucun rayon de soleil pendant neuf lunes
consécutives. Il en va de même pour le monde spirituel qui est éternel, et dont est
issu et procède ce monde matériel.
25. Toutes sortes de maîtres et de prophètes se lèvent et enseignent les hommes
de telle ou telle façon. Il y a toujours ici et là quelque chose de vrai, mais pour
une étincelle de vérité, des milliers de mensonges la côtoient, profitant de cette
étincelle de vérité pour se faire passer pour la vérité elle-même. Et voilà
comment ces maîtres et ces prophètes, avec leurs enseignements, ressemblent à
la lueur de la lune, dont la lumière change constamment et souvent disparaît en
pleine nuit, là où elle serait le plus nécessaire.
26. Mais à côté des faux prophètes et des faux maîtres, il en existe aussi de
véritables et d'authentiques dont les yeux, le cœur, la bouche rayonnent de la
lumière de Dieu. Ils ressemblent à ces petits nuages inondés de lumière qui
annoncent le lever du soleil. Si on en restait à ces petits nuages, si lumineux
soient-ils, c'est-à-dire les vrais prophètes, à la longue, dans le cœur des hommes,
il finirait par faire aussi froid que dans la contrée la plus au nord de la terre, ce
serait la glace et la mort. Mais ces petits nuages de lumière sont suivis par le
soleil même qu'ils annoncent et, aux premiers rayons qui paraissent au-dessus de
la montagne encore grise et viennent frapper la campagne, tout s'éveille, tout se
réjouit, tout revit, les oisillons chantent leurs psaumes au Père de la lumière et de
la chaleur qui monte, les mouches et les scarabées s'élèvent dans l'air pénétré de
lumière et bourdonnent leur enthousiasme au merveilleux Père du jour, les fleurs
des champs lèvent leur tête couronnée, ouvrent leur bouche embaumée pour hu-
mer le délicieux parfum de l'air qui réchauffe la terre.
27. À cette représentation que tu peux te faire de la nature, tu peux voir claire-
ment la place qu'il te faut Me réserver dans ton cœur. Ni la lumière des étoiles, ni
celle de la lune, ni l'éclat doré des petits nuages à l'aurore ne sont capables de
délier les liens qui emprisonnent la vie dans la matière de cette terre, ni de la
stimuler dans sa libre activité autonome ; seule la lumière du soleil le permet.
28. Parmi les hommes, qui est Celui dont la voix et la volonté sont obéis par les
esprits emprisonnés dans la matière et soumis à tout ce qu'il veut, qui est Celui
qu'ont annoncé tous les prophètes ? »
29. L'homme, profondément étonné, s'en va pensivement avec les siens dans sa
cabane pour ne pas nous gêner pendant le repas du soir.
Chapitre 176
Témoignage des disciples du Christ
Matthieu 16, 13-20
1. Nous prîmes notre repas du soir et la famille du brave homme prépara notre
gîte aussi bien que possible. Mais, dans sa maison, il dit à sa femme et à ses
enfants : « C'est sans aucun doute le Messie, c'est-à-dire Jahvé en personne,
l'éternel soleil originel du monde spirituel que tous les prophètes, emplis de la
lumière divine ont précédé comme les petits nuages précèdent l'aurore ! Oui, oui,
je sais à quoi m'en tenir, mais que faire ? Je n'ose plus Lui adresser la parole, Lui
qui est le Très Saint de toute éternité et que servent les myriades d'anges qui nous
sont invisibles, prêts à obéir à chaque instant à Ses ordres pour les exécuter à la
vitesse de la pensée sur les étoiles et jusqu'au bout du monde ! Et c'est Lui qui
demeure ce soir dans notre pauvre cabane ! Lui à qui tous les cieux éternels et le
Paradis obéissent !
2. Oh, réjouissez-vous, tremblez de joie, car Il demeure chez nous cette nuit. La
terre entière n'est pas digne d'une telle grâce, et surtout pas notre pauvre cabane
et nous autres qui sommes pleins de péché ! »
3. Tandis que cet homme parlait ainsi avec sa famille tout en préparant notre gîte,
Je demandai à Mes disciples, notamment à ceux que J'avais envoyés en éclaireurs
: « Qui suis-Je au dire des gens de la contrée ? »
4. Les disciples répondirent : « Les uns disent que Tu es Jean-Baptiste ressuscité,
d'autres que Tu es Elie, dont il est écrit qu'il reviendra sur terre avant le grand
Messie pour appeler les hommes à se repentir, à faire pénitence et à se convertir
à Dieu véritablement. D'autres pensent que Tu es le prophète Jérémie sur lequel
court dans le peuple la légende qu'il viendra du ciel avant le Messie, d'autres
disent aussi que Tu es tel ou tel prophète, mais beaucoup pensent que Tu es un
Zeus grec déguisé. »
5. Je dis : « C'est bien, vous M'avez rapporté ce que vous avez entendu, mais Je
voudrais aussi entendre de votre bouche pour qui vous Me prenez au juste ! Je ne
vous le demande pas par vanité, mais très sérieusement, car J'observe à l'occasion
que Mes actes vous semblent friser un comportement terrestre et que vous avez
un autre jugement dans vos cœurs à Mon égard et ne Me considérez plus comme
Celui que vous aviez cru voir lorsque J'ai fait un grand miracle. Dites-Moi enfin,
une fois pour toutes, très ouvertement et en toute conscience, pour qui vous Me
prenez ! »
6. Tous les disciples, excepté Simon Juda furent dans la confusion et ne surent
que répondre. Judas Iscariote dit à Thomas : « Vas-y, parle, toi qui es toujours si
sage et si intelligent, à toi il est plaisant de donner la bonne réponse à l'étrange
question du Maître ! »
7. Thomas dit : « Parle donc, si tu es si sage ! Je le prends pour ce que depuis
longtemps il doit être, et je n'ai jamais dit autre chose que lui, à savoir : "Je suis
un fils de l'homme et Dieu est Mon Père comme Il est le vôtre !" S'il donne un tel
témoignage de lui-même, quel autre témoignage pourrions-nous sincèrement
donner ? Il accomplit certes des actes que personne n'a accomplis depuis Moïse
et les prophètes. Si nous considérons la chose pour la mettre en lumière, nous
trouverons que c'est bien l'esprit de Dieu qui a choisi l'homme pur pour faire
cela. Mais pour l'esprit de Dieu agissant à travers l'homme de Son choix,
déplacer ou anéantir une montagne ou accomplir n'importe quel plus petit
miracle par la parole du prophète, c'est tout un. »
8. Judas Iscariote dit : « Tu le prends donc simplement pour un prophète ? »
9. Thomas dit : « Sans aucun doute, et pour le plus grand jamais porté par la
terre. Le mérite en est à Dieu seul et non à la terre, car Dieu seul peut faire d'un
homme un prophète comme Il l'a fait de Samuel alors qu'il était encore un enfant,
et comme Dieu seul a pu faire de l'âne du faux prophète Bilam un véritable
prophète qui fit lui-même à son tour de Bilam un prophète. Si nous comprenons
cela et si nous comprenons le témoignage que Jésus donne de lui-même, à savoir
qu'il n'est qu'un fils de l'homme, bien qu'il ait la force miraculeuse de Dieu, qui
est étonnante chez lui et qui de temps à autre parle en tant que Je divin, il nous
est alors impossible, à mon humble avis, d'en donner un autre témoignage que
celui qu'il donne toujours de lui-même. Il est principalement un fils de Dieu,
comme nous le sommes tous, mais il l'est à un degré de perfection infiniment
plus grand. »
10. Judas Iscariote dit : « Mais qu'en est-il de ce Messie pour lequel on le prend,
d'autant que les meilleurs d'entre les Romains et les Grecs le prennent pour
l'unique véritable Dieu tout-puissant ? »
11. Thomas dit : « Ils ont aussi raison, car la force de Dieu qui est en lui est aussi
le véritable et unique Messie et tout simplement Jahvé Lui-même. »
12. Judas Iscariote fut satisfait, et Moi Je Me tus, malgré ce que J'avais entendu.
13. Pierre remarqua Mon silence, il se leva et dit : « Seigneur, j'ai remarqué que
mes frères ont divers avis à Ton sujet. Permets-moi, à cause de mes frères,
d'exprimer à haute voix mon témoignage à Ton propos ! »
14. Je dis : « Fais-le ! Qu'as-tu donc à dire ? »
15. Simon Pierre dit : « Du plus profond de la vie de mon cœur, je confesse à
haute voix devant le monde que Tu es Christ, le vivant fils de Dieu ! »
16. Et Je dis à Pierre : « Tu es bienheureux, Simon, fils de Jonas ; ta chair et ton
sang ne te l'ont pas révélé, mais Mon Père qui est aux cieux.
17. Je te dirai encore une autre chose : Tu es Pierre, le roc, et sur ce roc Je veux
bâtir Ma communauté, et les portes du séjour des morts ne prévaudront point ; Je
te donnerai les clefs du royaume des cieux, tout ce que tu lieras sur terre, sera lié
dans les cieux, et ce que tu délieras sur terre sera délié dans les cieux. »
18. Pierre dit : « Seigneur, je Te remercie pour cette grande grâce dont je me sens
parfaitement indigne, parce que j'ai toujours été un grand pécheur et le suis
encore malheureusement. Quant à ce qui est délié et délié, j'avoue ouvertement
ne pas comprendre et ne pas savoir ce qu'il faut en penser ! Tu pourrais sans
doute me rendre la chose un peu plus claire si Tu le voulais ! »
19. Je dis : « Cela s'éclaircira pour toi en temps voulu, pour l'instant Je vous
interdit formellement de dire avant l'heure à qui que ce soit que Je suis Jésus, le
véritable Christ ! »
20. Après cet important entretien, Matthieu le scribe Me demanda s'il devait
noter tout cela.
21. Je dis : « Pas le miracle qui a eu lieu ici, et tu n'as pas besoin de citer
l'échange entre Thomas et Judas Iscariote, mais ce qui s'est dit ici avec Pierre est
la chose principale. N'écris que les paroles que Je mets dans ton cœur et tout ira
bien ! » Le scribe fut content et alla se reposer. Nous autres restâmes assis à table
jusqu'à minuit et les gens de la maison vinrent nous tenir agréablement
compagnie.
Chapitre 177
Marc, l'habitant de la cabane, raconte les horreurs du Temple
1. L'homme, qui s'appelait Marc avait à nous raconter une foule d'histoires au
sujet des Pharisiens et des lévites. Il raconta entre autres de nombreuses horreurs
cachées des templiers, ennemis mortels de tous ceux qui ont une fibre spirituelle
et prophétique. Beaucoup de gens de cette sorte sont secrètement mis à mort : on
les invite aimablement, on leur rend tous les honneurs, on leur serre les mains
amicalement, mais dès qu'ils sont dans les chambres à l'arrière du Temple,
habitées par les Pharisiens les plus importants, c'en est fait de leur vie, personne
n'en revient ! C'est incroyable disait Marc, que Dieu permette qu'une telle
abomination subsiste. Ce qui s'est passé à Sodome et à Gomorrhe n'est qu'une
goutte d'eau en comparaison de ce qui se passe à Jérusalem, et pourtant Dieu,
malgré les supplications d'Abraham, a détruit par le feu du ciel la ville et tout ce
qui en dépendait, malgré la quantité d'horreurs de toutes sortes qui sont
commises journellement à Jérusalem, Dieu le Seigneur fait comme s'il n'en savait
rien, et ne se soucie plus de l'humanité ! Quel pouvait bien être le sens de tout
cela ! »
2. À cette bonne question, Je répondis : « Ami, Dieu voit tout ce qui se passe, il
connaît le nombre exact des horreurs innommables des Pharisiens et des lévites.
C'est pourquoi Je suis venu en ce monde pour que cette race de serpents et de
vipères accomplisse sur Moi ses horreurs, et alors, malheur à eux!»
3. Marc dit : « Oui, Seigneur, Maître et bienfaiteur de l'humanité, mais si Tu n'as
pas le pouvoir de chasser d'un souffle dans l'autre monde des milliers de
personnes, Tu es très à plaindre s'il Te vient jamais l'idée de Te faire voir à
Jérusalem et d'y montrer Tes miracles. Je ne suis qu'un homme très modeste,
mais je comprends certaines choses auxquelles aucun Pharisien n'a encore jamais
songé. Mais je suis assez malin pour jouer l'imbécile à la barbe des Pharisiens,
que je côtoie assez souvent et qui n'ont pas la moindre idée que je connais leurs
secrets.
4. Et comme ils me considèrent depuis un bon bout de temps comme un pauvre
type, ils s'imaginent que je ne fais pas la différence entre le cul et la face et ils me
laissent ouvertement voir leurs secrets les plus noirs. J'ai vu de telles choses que
j'en suis venu, je Te l'avoue, à parfois douter complètement de l'existence de
Dieu. Car je pensais en moi : "S'il y a un Dieu tout-puissant, sage, juste et bon et
qu'il s'est révélé à l'humanité comme le dit l'Écriture, il Lui est impossible
d'assister sans rien faire à de telles abominations ! Il n'y a pas de Dieu ! L'homme
est, selon Platon, un descendant du singe quant à son corps et d'une bête féroce
quant à son âme, c'est pourquoi il faut à la tête des communautés un Samson fort
et sage qui sache faire obéir au fouet ce double animal qui se dit homme afin de
l'apprivoiser et d'en faire avec les années au moins un demi-homme !"
5. Voilà ce que je pense, et souvent bien pire, lorsque je me trouve en face des
horribles secrets de ceux que Tu traites à juste titre de race de serpents, et de
vipères, car il ne tient qu'à Toi, cher Maître et Seigneur, de les expédier dans
l'autre monde de la pire et de la plus douloureuse façon. Il suffit que Tu ailles à
Jérusalem et Tu verras que j'ai parfaitement raison, sans être pour autant prophète
!
6. Pour Te donner un petit exemple des secrets concernant la sainteté de cette
vermine du Temple, je vais Te raconter brièvement ce qui m'est arrivé
dernièrement. J'ignore qui a poussé cette vermine infernale à des pensées aussi
sataniques, même la méchanceté de Satan ne va pas jusque-là ! »
Chapitre 178
Abominations des templiers
1. Marc dit : « Il existe, dans l'arrière-pays d'une province d'Asie Mineure, une
région où la plupart des femmes sont stériles. À qui la faute, je ne saurais le dire,
mais il n'en reste pas moins que, lorsque ces femmes couchent avec des Juifs ou
des Samaritains, elles sont alors aussi fécondes que les nôtres. Eh bien, les
Pharisiens qui envoient leurs mauvais apôtres dans le monde entier, connaissent
ces femmes stériles depuis longtemps. Ils se rendent chez elles en caravane pour
les rendre fertiles. C'est en quelque sorte un service amical, puisque fort bien
payé. Mais ils n'en restent pas là ! Peu à peu les hommes de cette région d'Asie
Mineure se sont mis à comprendre qu'ils étaient joués ! En effet leurs femmes ne
devenaient pas aussi fécondes qu'on voulait bien le dire dans l'institut de
fécondité construit par les missionnaires de Jérusalem aux confins de ce pays-là
plusieurs années auparavant, car les missionnaires achetaient dans notre pays et
en Judée des nouveaux-nés et les amenaient dans cet institut où ces femmes
stériles, parfois très belles et très appétissantes, devaient séjourner dix mois.
Après le dixième mois quand ces femmes avaient couché à mort avec ces apôtres
lubriques, on leur donnait un des enfants achetés, mais d'une façon si astucieuse
que ces femmes croyaient avoir enfanté elles-mêmes ! Mais les maris de ces
femmes belles et appétissantes ont fini par découvrir la supercherie, grâce à un
brave et honnête Samaritain qui montra à ces hommes comment les pieux apôtres
de Jérusalem procédaient.
2. Ces maris trompés vinrent trouver les "apôtres" à l'institut de fécondité et leur
reprochèrent très durement ce qu'ils avaient appris d'un bourgeois de Sichar, et
qu'avaient confirmé les femmes devenues soi-disant fécondes !
3. Les "apôtres" oints de toute la pommade du mensonge, trouvèrent vite une
autre astuce et réussirent à faire croire à ces hommes qui s'étaient plaints que
c'était les Samaritains, que Dieu avait déjà maudits et rejetés depuis des années,
qui étaient seuls responsables de la stérilité de leurs femmes !
4. Et voilà ces braves Samaritains sous le coup d'un double serment de
vengeance, d'abord de la part des Pharisiens, parce qu'ils les avaient rendus
suspects aux yeux des maris, ensuite de la part des maris eux-mêmes, parce que
les Pharisiens avaient réussi à les convaincre que la stérilité de leurs femmes était
due à un sort jeté par les Samaritains depuis le jour où un Samaritain avait été
assommé pour avoir couché avec l'une d'elles ! Mais les Pharisiens, eux,
prétendaient posséder le vrai moyen de rendre fécondes leurs femmes stériles,
moyennant une bonne somme. Et, c'est maintenant seulement, bon Maître que
j'en arrive à cette vérité plus que satanique ! »
5. Je dis : « Continue, non que ce soit nécessaire pour Moi, mais c'est pour Mes
disciples qui doivent le savoir. »
6. Marc continue son récit en disant : «En quoi consiste exactement ce moyen
des apôtres de Jérusalem, proposé contre de fortes sommes d'argent pour faciliter
la fécondité de ces femmes d'Asie Mineure? Le sage conseil de ces "Apôtres"
n'est autre que de faire boire à ces femmes le sang des enfants des Samaritains,
sang frais ou sang en poudre que les hommes doivent prendre à leur puberté ainsi
que les femmes avant de se donner, pour conjurer le sort jeté sur eux par les
Samaritains et rendre à nouveau leurs femmes parfaitement fécondes ! Quant à
leur procurer ce sang des enfants des Samaritains, les apôtres savent s'en charger,
contre quelques bonnes paroles et beaucoup d'argent !
7. Les Pharisiens ont fait un contrat avec ces hommes d'Asie Mineure, et que se
passe-t-il encore à cette heure ? Les Pharisiens font une chasse effrénée aux
enfants des Samaritains !
8. Des enfants de un à douze ans sont envoyés à cet institut de fécondité où ils
sont bien nourris un certain temps surtout de nourritures favorisant la production
du sang, puis déshabillés, menés à l'abattoir et remis aux égorgeurs. Alors,
garrottés, attachés solidement à un pilori au pied duquel est placé une bassine, on
leur bande les yeux, et au pauvre enfant qui hurle au ciel, on coupe les veines aux
pieds et aux poignets. Et tandis que ces pauvres enfants saignent et meurent en
quelques instants, les apôtres de Dieu, de Jérusalem, la Ville Sainte, laissent
faire. Les cadavres inanimés de ces enfants assassinés sont mis ensuite dans un
grand fourneau construit à cet usage, et le sang frais comme le sang séché sont
vendus pour la bonne cause ! L'enfer doit bénir ce moyen plus que satanique, car
les femmes qui prennent ce sang, sont actuellement réellement devenues
fécondes !
9. Le bon Dieu s'il n'est pas une vieille fable juive, devrait trouver l'antidote !
Mais jusqu'ici, aucun geste d'en haut ! Dieu peut bien assister patiemment à cette
horreur sans nom, comme il y a trente ans, à Bethléem, Il a laissé faire par un
tyran ce massacre des innocents de un à douze ans, et ce jour-là, il y eut près de
cinq mille enfants massacrés de la plus horrible façon sous le regard impassible
de Dieu !
10. Selon l'Écriture, Dieu est toute bonté, sagesse et miséricorde ; mais quand,
moi qui ai assisté à toutes ces horreurs, je considère la chose au grand jour, je ne
peux m'empêcher de penser que soit il n'y a pas de Dieu, soit, s'il y en a un, cela
fait longtemps qu'il ne Se soucie plus des hommes de cette terre ! Peut-on m'en
tenir rigueur ? Sûrement pas un homme de chair et comme moi ami des hommes,
et pas davantage un dieu ! Car dans ma poitrine bat encore un cœur plein d'amour
pour la pauvre humanité !
11. Mais, Seigneur et Maître, s'il y a quoi que ce soit de divin en Toi, agis, fais
un miracle, détruis cette abomination satanique, je ne doute pas un instant que Tu
peux le faire, car ce que j'ai vu aujourd'hui de Toi me prouve que rien ne Test
impossible si Tu le veux ; car Tu es plus que tous les prophètes. »
Chapitre 179
Les disciples s'émeuvent du récit de Marc
Chapitre 180
Pêche miraculeuse
1. À ces mots, tous les disciples allèrent prêter main forte à Marc et ses enfants.
Ses deux fils étaient certes jeunes et forts, mais les quatre filles aînées à elles
quatre n'étaient pas aussi fortes qu'un fils à lui tout seul.
2. Lorsque, avec l'aide vigoureuse des disciples, tout le poisson fut ramené, Marc
vint Me trouver sur l'herbe agréable où J'étais assis et dit, dégoulinant de sueur :
« Maître et Seigneur, Tu peux dire ce que Tu veux, mais je prétends
formellement que Tu es aussi bien à l'origine de cette pêche, la plus merveilleuse
et la plus abondante des pêches jamais vues, que de ce précieux vin d'hier soir
qui a rempli mes cinquante amphores. C'est pour Te dire ma très profonde
reconnaissance que je suis accouru vers Toi, et je Te remercie, Maître et
Seigneur, de tout mon cœur pour tous ces merveilleux bienfaits que Tu m'as
accordés à moi et aux miens, en si abondante et surabondante mesure.
3. J'avais mis aujourd'hui mon grand filet, qui a une longueur de cent cinquante
aunes et une profondeur de sept aunes, et voilà que tout l'espace du filet a été
rempli du meilleur et du plus magnifique poisson ! Mes dix corbeilles ploient
maintenant sous la charge de ce poisson que nous avons ramené, si cela T'est
agréable, je puis Ten faire préparer quelques morceaux pour le petit déjeuner, ma
femme a l'art de les préparer ! »
4. Je dis : « Fais-le, J'en ai grande envie ! Ensuite tu pourras en faire porter
plusieurs barils par tes enfants à la ville de Césarée de Philippe, où ils se ven-
dront à bon prix ! »
5. Marc s'inclina profondément, alla en hâte à la cuisine trouver sa femme, à qui
il donna l'ordre de préparer un repas. Avec l'aide de ses six filles, la femme
s'affaira aussitôt. Les deux fils remplirent deux grand barils du plus beau poisson,
et comme ils avaient déjà pris leur petit déjeuner avec un peu de vin, ils les
portèrent à la ville qui n'était qu'à une heure à peine.
6. Lorsqu'ils eurent installé sur la place du marché leur cargaison amenée sur une
charrette tirée par deux ânes, une foule de clients vinrent leur acheter tout leur
poisson en quelques instants pour un bon prix, car d'aussi bons poissons
coûtaient à l'époque un drachme chacun, et comme ils avaient apporté près de
deux cents poissons, ils touchèrent près de deux cents drachmes, ce qui faisait
plus de deux cents écus d'aujourd'hui ! Quelques heures plus tard, les deux
garçons revinrent avec leur charette et leurs barriques vides, chargés d'argent
qu'ils remirent à leur père, lequel en eut grande joie et loua fort ses fils.
7. Les fils demandèrent au père s'ils devaient retourner en ville, car beaucoup
d'acheteurs n'avaient pu être satisfaits. Le père le leur permit, ils chargèrent à
nouveau les barriques et les portèrent à la ville où ils les vendirent plus
rapidement encore que la première cargaison.
8. Marc ne savait comment témoigner sa reconnaissance, il se trouvait en une
seule fois sorti de sa misère qui durait depuis des années.
9. Pendant que les fils transportaient la première cargaison, nous avions eu une
vingtaine de poissons à nous partager, et le pain et le vin ne manquèrent pas !
Nous parlâmes encore de diverses choses, notamment des serviteurs du Temple,
et la fille aînée de Marc nous montra un vieux pot à moitié rempli de fumier du
Temple et demanda si ce fumier fertiliserait merveilleusement les champs et les
jardins, comme le prétendaient ceux qui le leur avait vendu.
10. Les disciples, à qui la filouterie du Temple n'était pas inconnue, éclatèrent de
rire, et Thomas dit : « Oh, quelle honte ! Voilà ce que font ces serviteurs de Dieu
depuis cinquante ans ! Des grands prêtres se sont déjà insurgés contre ces
pratiques, mais sans succès, car ce fumier rapporte au Temple au moins deux
mille drachmes par an, et les gens sont assez aveugles pour croire qu'il fertilisera
leurs champs, leurs prairies et leurs jardins ! »
11. La fille aînée dit alors : « Oh, cher ami, ce n'est pas cela ! La plupart des gens
n'en croient rien, mais que faire ? Si on n'achète pas ce fumier à ces marchands
d'immondices, ils vous pressent avec une telle grossièreté et une telle rudesse
qu'on finit par le leur acheter pour se défaire d'eux, et une fois leur fumier dissout
dans l'eau sous leurs yeux, ils ne vous font plus rien et passent leur chemin,
sachant bien qu'un an plus tard on sera obligé de le leur racheter ! »
12. Pierre dit : « Oui, oui, tromperie, mensonge, duperies de toutes sortes, voilà
les vertus des templiers qui se font appeler serviteurs de Dieu ! Sous leur masque
humain ils cachent une nature infernale. Pourquoi, Seigneur laisses-Tu faire cela
et le supportes-Tu ? Personne d'autre que Toi ne peut le savoir ! »
13. Je leur dis à tous : « Laissons cela, il va être midi ! C'est une belle journée
pas trop chaude, et nous pourrions voir si, dans les environs, il n'y aurait pas un
endroit d'où la vue serait assez étendue. Nous nous y installerions pour passer en
conversations de toute sorte le temps de notre séjour ici. »
14. Marc dit : « Seigneur, à quelque cent mètres d'ici, au-dessus de ma cabane et
de la grotte à laquelle elle est adossée, il y a, encore sur mon petit domaine, un
endroit comme Tu le souhaites ! Le sommet de la colline est ombragé par un
vieux châtaignier autour duquel j'ai aménagé une large bande de gazon d'où l'on
jouit d'une très belle vue sur toute l'étendue de la région ; on voit tout Césarée de
Philippe et au-delà de la mer de Galilée, aussi loin que la vue peut porter ! Par
temps très clair on voit Génézareth, Kis et certains distinguent même Sibarah.
Mes yeux ne me le permettent pas, mais je vois aisément jusqu'à Gadarena. »
15. Je dis : « Eh bien, nous choisirons cet endroit et nous y passerons notre temps
aussi utilement que possible ! Conduis-nous là-haut ! »
16. Marc nous conduisit par un étroit petit sentier agréable jusqu'à cet endroit
d'où l'on voyait Césarée de Philippe et une foule d'autres villes au-delà de la mer
de Galilée.
Chapitre 181
Marc et les collecteurs d'impôts
Chapitre 182
Le Seigneur annonce Sa mort et Sa résurrection
1. Marc ordonne rapidement un déjeuner et remonte vers nous pour nous raconter
dans les moindres détails comment il a procédé avec les Pharisiens.
2. Je le félicite et J'ajoute : « Marc, Je te le dis, ce fut donné au peuple dès le
commencement et la grande promesse qui lui a été donnée est maintenant plei-
nement accomplie ; mais comme ce peuple est endurci et ne veut pas reconnaître
l'époque de sa Visitation et cherche au contraire son salut dans le bourbier de
cette terre, qui disparaîtra comme l'image d'un rêve, il lui sera permis d'atteindre
le comble de l'infamie en tuant son Dieu, son Seigneur.
3. Alors toute grâce, toute lumière, tout droit lui seront ôtés et vous seront donnés
à vous païens, car vous avez une bonne volonté et vous qui êtes aveugles, vous
avez reconnu ce que ces Juifs voyants ont rejeté.
4. C'est pourquoi la lumière d'en haut vient à vous et fait que vos cœurs voient,
mais les enfants de la lumière seront rejetés dans les ténèbres extérieures et
devront aller mendier des miettes de pain chez les peuples étranger, ils n'auront
plus le nom de peuple et dès lors ne seront plus un peuple. »
5. Marc dit : « Alors, cela signifie-t-il qu'ils pourraient en venir, dans leur colère,
à se saisir de Toi et à Te tuer comme ils l'ont fait des autres prophètes ? »
6. Je dis : « Oh ! oui, ils Me feront cela, mais alors ils en auront pour leur compte
!»
7. Marc dit : « Comme je le disais la nuit dernière, ces brutes sont capables des
pires méfaits, c'est pourquoi garde-Toi aussi longtemps que possible de la ville
nommée la Cité de Dieu, car elle Te tuera si Tu ne lui opposes pas toute Ta
prudence et toute la puissance de Dieu ; car je connais de l'intérieur les serviteurs
du Temple. Oui, se risquer à vouloir tâter de leur enseignement devenu depuis
longtemps un enseignement du mauvais esprit, est une lutte avec tout l'enfer.
Leur amitié est une malédiction, et leur malédiction, c'est la mort. La vie d'un
homme ne vaut pour eux pas plus que celle d'une mouche, personne n'y prête
attention ! »
8. Les disciples dirent : « Nous connaissons notre Seigneur et Maître, toute leur
méchanceté se heurtera à Sa sagesse, car Celui qui donne des ordres à la mort,
Celui qui ramène les morts à la vie, peut difficilement être tué ! »
9. Je dis : « Oui, Il ne pourra être tué dans l'éternité, pourtant Il sera tué en
témoignage contre eux, pour que la mesure qui leur a été donnée soit pleine ;
comme ils se sont dressés contre le Saint-Esprit, ils se dresseront contre Moi et
deviendront par là les auteurs de leur propre condamnation. Mais pour celui qui
l'a voulu ainsi, il n'y a aucune injustice à ce qu'il soit rejeté et s'ils ont commis de
tels crimes envers tant de messagers, ils n'épargneront guère Celui-là même qui a
envoyé ces messagers avant Lui.
10. Mais la circonstance pour eux la plus fatale sera que Celui qu'ils auront tué, à
peine trois jours plus tard sortira indemne du tombeau, vainqueur de la mort et de
tous Ses ennemis pour la consolation de Ses amis et frères, dans la plénitude de
Ses forces et rayonnant de vie. Alors, dans leur peur immense et leur couardise
désespérée, ils tiendront conseil pour savoir comment tuer une fois encore le
Ressuscité de la mort, mais ils seront incapables d'en trouver le moyen, et leur
chute s'en suivra peu après.
11. Cela arrivera, Ma prédiction s'accomplira pleinement.
12. Il est vrai que vous serez tristes et anxieux, à cause de Moi, mais votre
tristesse, votre peur et votre crainte se changeront vite en joie lorsque vous verrez
de nouveau parmi vous Celui qui était mort et qui a tout pouvoir sur la vie et sur
la mort. »
13. Marc dit : « S'il en est ainsi, il n'est pas si difficile de se laisser tuer pour la
forme, et dans ce cas-là, Tu n'as qu'à aller à Jérusalem si Tu le veux, il ne peut
rien T'arriver ! Si Tu es le seigneur de la vie et de la mort, qui pourrait Te tuer ?
Et s'il Te tue, ou s'imagine T'avoir tué et qu'une fois tué, Tu sois plus vivant
encore au combat avec l'ennemi que Tu ne l'étais avant d'être tué, je ne voudrais
pas alors être dans la peau de Tes ennemis ; car ils seront consumés par le feu de
la peur et de l'angoisse et toutes leurs délibérations, leurs dispositions, leurs
tentatives seront à jamais confondues ; car toutes leurs ignobles actions seront
dévoilées au grand jour quand sera venu enfin le moment que l'humanité atteigne
l'état effectif de sa conversion. Ô Seigneur et Maître, réalise-le sans tarder, je suis
âgé et ne vais plus très longtemps fouler le sol de cette terre ; mais si je peux
vivre cela encore, ma mort alors sera plus facile ! »
14. Je dis : « Il n'est pas encore complètement décidé que cela doive se passer
ainsi, mais plutôt oui que non ! Mais le temps file et voilà déjà midi passé, et nos
corps réclament quelque fortifiant, aussi allons-nous redescendre pour nous
restaurer ! »
15. Marc dit :« Oui, oui, Tu as de nouveau parfaitement raison. Le déjeuner doit
être prêt, redescendons, et si cela Te fait plaisir nous pourrons revenir ici après le
repas ! »
16. Je dis : « Cet après-midi nous ferons autre chose, mais demain nous re-
viendrons volontiers ici. Maintenant, allons-y ! »
Chapitre 183
Visite de Cyrénius
1. Peu après nous étions en bas. Le repas étant déjà prêt, nous prîmes place à la
grande table dressée en plein air, à l'ombre épaisse d'un châtaignier. Des poissons
très bien apprêtés, du pain, du vin, de bonnes figues fraîches furent apportés en
quantité, et il y en eut en suffisance pour la trentaine de personnes que nous
étions. Le repas fut très agréable et Marc, le vieux et brave guerrier loquace,
raconta certains de ses exploits avec un art inné du discours ! Pour Mes disciples,
c'était l'occasion de voir un peu le monde se dévoiler sous leur yeux, et ils purent
en tirer certain profit pour le bien de l'humanité qui leur serait confiée par la
suite.
2. Comme nous étions assis ainsi depuis près de deux heures à table, arriva un
messager annonçant à Marc que le vieux commandant suprême Cyrénius était
arrivé au milieu du jour à Césarée de Philippe, et qu'il voulait venir voir le vieux
guerrier qu'il connaissait bien et faire tout son possible pour lui venir en aide
dans sa pauvreté.
3. Marc dit au messager : « Dis à mon ancien compagnon d'armes que je suis à
ses pieds et lui suis infiniment reconnaissant de bien vouloir se souvenir de mon
pauvre état, mais que cette fois je ne pourrai faire appel à sa grâce si je dois aller
le trouver en ville, car j'ai en ce moment des hôtes, parmi lesquels un chef, un
Maître et un Seigneur qui m'a tiré très merveilleusement de toute ma misère. Ce
Maître et Seigneur m'a promis de rester six jours entiers chez moi, et ce serait un
grand péché pour moi de le quitter ne serait-ce qu'un instant, mais si Son Altesse
impériale, mon vieux compagnon d'armes, sans vouloir l'offenser, daignait me
faire le plaisir de monter, tout serait mis en œuvre pour le recevoir aussi bien que
possible ! »
4. Le messager dit : « Très bien, je rapporterai mot pour mot tes paroles à Son
Altesse. » Le messager prend congé, enfourche sa monture et s'éloigne
rapidement.
5. Mais tandis que le messager s'en retournait Marc dit : « Je ne crois pas que
Son Altesse, le grand gouverneur m'en voudra de ma réponse. »
6. Je dis : « Ne t'en soucie pas, Je te le dis, quand il saura que Je suis apparem-
ment ici, il ne perdra pas un instant pour se décider à venir et tu auras l'occasion
de te faire une idée de la magnificence de Dieu, car, sois-en assuré, Cyrénius Me
connaît depuis Ma naissance.
7. Marc dit : « Tout est possible, mais c'est une sommité trop haut placée et il
doit éviter certaines choses à cause de la bêtise des gens, sans quoi il viendrait,
j'en suis sûr ! Mais je doute qu'il puisse me faire la grâce de venir me voir ! »
8. Je dis : « Avant que tu n'aies pu faire trois fois l'aller et retour jusque là-haut à
notre petit endroit, il sera là. À peine son messager lui aura-t-il porté la nouvelle
que Cyrénius, sans prendre son repas, laissera tout en plan sans hésiter, et il
accourra avec toute sa suite pour Me voir et Me parler !
9. Dis à ta femme et à tes filles de préparer encore un repas pour lui et ses gens.
Ce repas sera pour eux très bienvenu et souhaité ! »
10. Marc appelle sa femme et ses six filles et leur dit de préparer un repas pour le
commandant Cyrénius qui arrive avec ses gens, soit encore une trentaine de
personnes environ !
11. La femme regarde Marc avec étonnement et ne sait s'il est sérieux ou s'il se
moque d'elle. Mais Marc l'envoie à la cuisine et la femme se met au travail.
12. Marc envoie également ses deux fils sur la colline avec ordre de l'avertir dès
qu'ils verront venir de la ville une troupe en grande pompe. Les deux fils vont en
courant jusqu'au détour du chemin d'où l'on peut voir Césarée de Philippe, et ils
aperçoivent la brillante troupe quittant déjà la route pour s'engager sur l'étroit
sentier qui mène en un petit quart d'heure à la maison de Marc.
13. Voyant cela, les deux fils reviennent hors d'haleine l'annoncer à leur père.
14. Marc Me demande alors : « Maître et Seigneur, il va falloir tout de même
aller à sa rencontre selon toute l'étiquette romaine ! »
15. Je dis : « Oh ! pas du tout ! Que celui qui vient à Moi pour son salut vienne,
même si nous n'allons pas à sa rencontre ; quand une âme ou un corps faible
vient sur notre chemin, il nous faut aller à sa rencontre pour qu'il ne tombe pas de
fatigue et ne périsse pas à moitié chemin, mais Cyrénius est fort et n'a pas besoin
de cela. »
Chapitre 184
Marc reçoit et salue Cyrénius
Chapitre 185
Méthode d'enseignement de l'ange
De la contradiction et de sa nécessité
1. Josoé, qui était déjà devenu un garçon bien plus fort, vint alors vers Moi et dit
: « Seigneur, vie de toute vie, je suis en parfaite santé et le manger et le boire me
plaisent toujours autant ; mais quant à l'ange qui vient de Sichar me voir tous les
trois jours quelques instants, je n'en suis pas très content, à tout ce que je lui dis,
il trouve à me contredire ! Je me laisse volontiers enseigner dans tous les
domaines et c'est toujours bon, utile et vrai. Mais que quelqu'un me dise
aujourd'hui : "Une poire plus une poire font deux poires", et le nie la fois sui-
vante si je prétends l'affirmer à mon tour, et se mette à prétendre qu'une poire
plus une poire font trois, quatre, cinq et finalement une foule de poires, et qu'un
plus un ne font finalement pas deux, mais spirituellement peuvent faire n'importe
quel nombre, alors je me fâche et j'en veux à mon maître et éducateur d'affirmer
le contraire de ce qu'il a dit à sa visite précédente ! Bref, il se contredit à
s'arracher les cheveux ! C'est pourquoi, Seigneur des cieux et des mondes,
j'aimerais Te demander de dire à ce maître spirituel de Sichar d'être plus
raisonnable avec moi — ou bien qu'à l'avenir il m'épargne ses visites ! »
2. Je dis : « Ah ! Mon cher Josoé, supporte-le, il te conduit dans la véritable
sagesse du ciel, car les calculs des esprits sont autres que ceux de ce monde. Si Je
Me mettais à parler avec toi à la façon du ciel, tu ne comprendrais rien ; mais,
comme homme de chair et de sang, Je parle des choses de l'esprit aux hommes de
cette terre avec les mots de cette terre ; et regarde, ils sont en colère contre Moi,
parce qu'ils ne Me comprennent pas — et parce que la plupart ne veulent pas Me
comprendre. Ton maître spirituel qui vient à toi de temps à autre t'enseigne de la
bonne façon, mais tu ne le comprendras entièrement que lorsque tu seras de
l'autre côté, où aucune illusion de la chair et du sang ne viennent troubler l'âme !
As-tu compris ? »
3. Josoé dit : « Oh oui, Seigneur de l'infini ! Toi, je Te comprends mieux que
mon maître spirituel ! Car lorsqu'il me dit qu'au fond la colère et l'amour sont une
seule et même chose, pour moi le haut devient le bas et le bas devient le haut !
Également, lorsqu'il dit qu'au fond le ciel et l'enfer sont une seule et même chose,
comprenne qui pourra ! Mais pour moi c'est une énorme contradiction ! »
4. Je dis : « Là également l'ange a raison, c'est ainsi ! Je vais te donner un petit
exemple et tu comprendras certainement mieux la chose. Écoute-Moi.
5. Regarde le soleil : lorsqu'il brille en hiver, il est parfois d'une bien douce
chaleur et les rayons de sa lumière restaurent les forces. Mais quand le sable du
désert d'Afrique se met à fondre sous ses rayons de feux et que tu dois marcher
sous une telle lumière du soleil, ces rayons pour toi deviennent l'enfer !
Comprends-tu cela ? »
6. Josoé dit : « Oh oui ! »
7. Je poursuis : « Bien, écoute encore ceci ! Après une journée torride, la nuit est
une amie bienfaitrice pour l'homme fatigué, mais que cette bienfaitrice se mette à
durer trente jours, tous les hommes la maudiront, car une nuit si longue
refroidirait la terre au point qu'aucune vie organique n'y serait plus possible, et la
bienfaitrice de l'homme serait devenue le pire enfer !
8. Si par une journée de grande chaleur tu fais une marche et que tu commences à
souffrir de la soif, si tu arrives à une fontaine où coule une eau pure et abondante,
comme une gorgée de cette source pure te rafraîchira ! Mais là, au fond de la
vallée, la même eau forme un lac dans un vaste et profond bassin ; si tu y tombes,
tu y trouves inévitablement la mort ! Une fois encore, la même eau qui sur les
hauteurs t'a célestement rafraîchi, cause ta mort dans les profondeurs du lac
devenu pour toi l'enfer.
9. Un petit verre de vin se boit volontiers, mais le vin d'un pichet plein te tue et
devient l'enfer pour toi !
10. Tu grimpes volontiers au sommet d'une montagne d'où la vue sur le lointain
affermit ton cœur ; mais que cette montagne s'écroule sur toi, elle te tue et
devient aussi pour toi l'enfer !
11. Le vent par les grandes chaleurs rafraîchit ton front et te remplit d'un doux
bien-être ; mais qu'il tourne en tempête et déracine les arbres, te remplira-t-il
toujours de bien-être ? Certes pas ! Tu prendras la fuite et cherchera le lieu où la
tempête ne peut t'atteindre, ainsi le vent qui rafraîchissait ton front sera devenu
une fois encore pour toi l'enfer.
12. Voilà pourquoi il est donné à tout homme une mesure en toute chose, selon la
force, la sagesse, les dispositions de chacun ! Si l'homme reste dans l'ordre dans
lequel Dieu l'a mis, tout ce qui l'environne est un ciel pour lui, mais dès qu'il
outrepasse cet ordre en quoi que ce soit, et qu'il se met à porter un monde sur ses
faibles épaules, ce monde l'écrase et devient pour lui l'enfer.
13. Ainsi la juste mesure en toute chose est un ciel pour l'homme comme pour les
esprits, et la démesure dans les mêmes choses devient pour l'homme aussi bien
que pour les esprits le pire enfer ! Comprends-tu maintenant ? »
14. Josoé dit : « Oui, maintenant je comprends et j'en ai grande joie ! Mais
pourquoi mon maître spirituel ne m'explique-t-il pas son enseignement de ma-
nière à ce que je comprenne ? »
15. Je dis : « Ici encore, cela a sa raison. Si ton maître spirituel t'expliquait tout
trop clairement, tu n'en viendrais jamais à penser par toi-même et finalement à
décider par toi-même, mais ainsi il t'oblige à penser et à décider par toi-même.
Voilà la juste manière et la façon céleste d'enseigner. Quand ce sera nécessaire et
que tu auras atteint la bonne maturité pour cela, alors ton maître spirituel te
donnera les images claires pour chaque enseignement, mais auparavant il te faut
devenir un esprit actif, sinon tu ne pourras jamais saisir de plus profondes vérités
de la sagesse céleste. Est-ce parfaitement clair ? »
16. Josoé dit :« Oui, Seigneur, je comprends maintenant où j'en suis avec mon
maître spirituel de Sichar, et il me vient maintenant un grand amour envers lui ! »
17. Je dis : « Cet amour te donnera tes exemples ! Mais voici maintenant quelque
chose pour ton corps ; la femme, les fils et les filles de Marc arrivent chargés de
toutes sortes de mets et de boissons. Mangez comme il faut et reprenez des forces
pour que vous n'ayez plus faim ni soif, car près de Moi personne ne doit avoir
faim ou soif, chacun doit être parfaitement rassasié physiquement et
spirituellement ! »
18. Cyrénius et le jeune garçon Josoé, affamés et assoiffés, attaquent vaillam-
ment. La suite de Cyrénius ne se fait pas prier et suit aussi vaillamment l'exemple
de Cyrénius.
Chapitre 186
Cadeaux de Cyrénius à Marc
Chapitre 187
La compagnie en mer
1. Lorsque nous arrivâmes sur le rivage, les fils poussèrent devant nous la plus
grosse et la plus belle barque, où nous montâmes aussitôt pour nous asseoir sur
les bancs apprêtées pour nous. Les deux fils saisirent les rames et le bateau
s'éloigna rapidement du rivage. Dans Mon bateau se trouvaient outre Cyrénius, le
jeune Josoé, le vieux Marc, Pierre, Jean et Jacques. Tous les autres disciples
suivaient sur les autres barques avec la suite de Cyrénius. Dans notre bateau était
aussi le gros filet, rangé en bon ordre.
2. Lorsque nous fûmes à cinq stades de la rive, Marc demanda : « Seigneur, dis-
moi où nous devons jeter le filet. »
3. Je dis : « Je le ferai le moment venu, mais ce n'est pas ici ! Il n'y a pas une
demi-heure que nous sommes sur l'eau et nous n'allons pas tout de suite rompre
le silence et réveiller les esprits, qui pourraient finir par nous taquiner ; nous
jetterons plutôt le filet dans la soirée, plus près de la rive. Maintenant nous allons
rester en silence avec la mer. Mais si quelqu'un veut savoir quelque chose, il est
libre de Me le demander. »
4. Cyrénius dit : « Ce qui me surprend dans la maison de Marc, c'est que les
quatre filles aînées de Marc sont aussi fortes à la rame que les deux fils, dont la
force est pour ainsi dire gigantesque. Toi, Marc, tu étais aussi quelque peu
athlète, mais tes fils de loin te dépassent ! »
5. Marc dit : « Oui, mais aujourd'hui leur force me semble inhabituelle ! Le jeu
de leurs rames est si puissant, si rapide, que la barque glisse à la surface des flots,
comme poussée par le vent ! À cette allure on irait en une demi-journée jusqu'à
Kis et même jusqu'à Sibarah, où l'on se rend habituellement en deux jours. Mais
ainsi, on serait à Génézareth en deux heures et à Jessaïra en quatre heures.
6. Si mes vieux yeux ne me trompent, j'aperçois déjà la haute montagne qui
cache à gauche Génézareth ! Elle paraît bleue et donc encore lointaine, mais ça
ne fait rien, la vitesse de notre mouvement efface bientôt tout lointain, si bleu
soit-il ! Je ne puis assez m'émerveiller de l'endurance de mes deux fils. Seigneur,
c'est encore Toi certainement, et c'est Ta volonté toute-puissante qui entre en jeu
!»
7. Je dis : « Oui, cher ami Marc, Je dois avec Mon vouloir entrer en jeu partout
où quelque chose doit devenir, être ou se maintenir du plus grand au plus petit ;
sinon l'espace infini serait rapidement vide de tout être animé. Ainsi Ma volonté
peut-elle bien agir aussi avec tes deux fils maintenant. »
8. Alors les trois disciples qui étaient sur le bateau dirent entre eux : « C'est
souvent bien "étrange avec notre Maître et Seigneur, parfois Il parle et agit com-
me l'unique Maître du ciel et de la terre, et parfois Il est tout humain et ne laisse
rien voir de Sa divinité. Tout ce qu'il dit et fait est incroyablement sage, mais
qu'il doive au plus tôt Se laisser maltraiter jusqu'à la mort par les Pharisiens de
Jérusalem, malgré toute Sa puissance et sa sagesse divines, voilà qui ne paraît
pas sage du tout! Que gagnera finalement l'humanité à un tel méfait ? Elle ne
saura plus que penser et dira : "Voilà le sort du Puissant qui devient finalement la
victime de plus puissants que Lui !" Celui qui réveille les morts et déplace les
montagnes devrait pourtant être capable d'anéantir d'un seul mot toute cette
clique du Temple !
9. Du temps de Noé, toute l'humanité a dû disparaître à l'exception de Noé et de
sa famille, et l'humanité n'était pas aussi mauvaise qu'aujourd'hui ; et maintenant
que les hommes sont devenus si méchants qu'ils ne peuvent guère le devenir
davantage, Il se laisse maltraiter par eux au lieu de les punir sévèrement comme à
Sodome ou comme du temps de Noé ! Bref, certains côtés de Sa divinité nous
sont devenus plus incompréhensibles que ce qui n'a jamais existé ! »
Chapitre 188
De la compréhension humaine et de la compréhension spirituelle
1. Jean, qui avait écouté attentivement les paroles de Simon Juda dit : « D'un
point de vue purement humain, je ne puis te contredire, mais pour la vision
intérieure du cœur tout cela prend un autre aspect, car la sagesse divine ne
fonctionne jamais comme la sagesse humaine.
2. Sais-tu pourquoi il y a sur terre d'innombrables espèces de plantes et de
buissons sans fruits ? Et s'ils en portent, pourquoi sont-ils si souvent inutilisables
selon notre entendement ? Et chez les animaux, du plus petit ciron au léviathan, à
quoi servent tant d'espèces à part nos animaux domestiques ? Pourquoi existe-t-il
des bêtes féroces, à quoi peuvent bien servir les ours, les tigres, les hyènes et une
foule d'autres animaux féroces que nous ne connaissons pas encore ? Qui peut te
donner, cher ami, la raison de la diversité de toutes ces espèces ? À quoi servent
toutes ces étoiles au ciel ? Pourquoi la lune ne brille-t-elle pas toujours la nuit et
pourquoi sa lumière change-t-elle ? À quoi sert-elle seulement ? Regarde, nous
ne comprenons rien à tout cela et à tant d'autres choses, et c'est folie pour notre
entendement si nous y pensons d'une manière critique. Mais pour le Seigneur
Dieu, tout cela a sans doute sa profonde raison d'être, aussi, puisque l'occasion
très exceptionnelle nous est donnée de voir agir personnellement le Seigneur,
nous ne devons pas nous étonner si nous ne comprenons pas tout ce qu'il fait et
fera encore, car Il aura visiblement toujours une très sage raison en toute chose !
N'es-tu pas de mon avis ? »
3. Simon Juda dit : « Bien sûr, tu as tout à fait raison, et on ne peut rien objecter à
cela ! Mais il n'en reste pas moins vrai que certaines ordonnances de Dieu font à
l'homme le même effet que si quelqu'un prétendait sérieusement que deux
poissons plus deux poissons font sept poissons ! »
4. Je dis : « Oui, oui Simon, cela paraît ainsi, mais ce qui semble impossible pour
la compréhension humaine est parfaitement possible à Dieu ! Prends ce petit filet
qui est à tes pieds et jette-le à la mer ! (Simon le fait) Retire-le maintenant et dis-
moi combien de poissons il contient ! »
5. Simon Juda dit : « Seigneur, quatre pièces exactement ! »
6. Je dis : « Regarde, compte-les, il y en a sept ! »
7. Simon regarde et refait le compte et trouve sept poissons dans le filet. Il s'en
émerveille et dit : « Oui, oui, pour Dieu toutes choses sont possibles ! »
8. Je lui dis : « Aussi, à l'avenir, ne raconte pas d'histoires inutiles, il vaut mieux
se taire que de bavarder inutilement, comprends-tu, sinon tu n'es pas meilleur
qu'un Pharisien aveugle ! »
9. Simon Juda dit : « Seigneur, Tu sais comme je Taime, et pourtant Tu me re-
proches ce que je dis par moi-même d'une façon si dure que je n'ose plus guère
Te demander quoi que ce soit à haute voix ! J'accepte tout de Toi avec beaucoup
d'amour et de patience, cependant je ne puis m'empêcher d'avoir une secrète
petite tristesse intérieure lorsque je suis en butte à Ta sévérité. » Là-dessus, il se
tourne vers la mer et la considère d'un regard affligé.
10. Mais Jean va vers lui et dit : « Regarde, frère, il t'arrive quelque chose de
difficile bien que ce soit à cause d'une douce remontrance du Seigneur. Mais
regarde, l'amour et la sagesse du Seigneur savent très bien qu'ils ont permis cela,
et si tu regardais vraiment tout au fond de ton cœur, tu en trouverais facilement
toi-même la raison ! »
11. Simon dit : « Bien, alors, qu'est-ce que c'est ? Dis-le-moi ! »
12. Jean dit : « Regarde, frère, quant à reconnaître le Seigneur et avoir une foi
vivante inébranlable, tu es visiblement le plus fort de nous tous, un véritable roc,
comme en témoigne le Seigneur, et pourtant, à certaines heures, le sentiment de
ta valeur t'envahit, et vois-tu, ce sentiment-là est assez proche de ce qu'on
nomme l'orgueil, et ce doit être ce que le Seigneur cherche à extirper de toi par
l'humilité. Je l'ai déjà constaté à d'autres occasions et je l'aurais déjà dit
volontiers par sincère et véritable amitié fraternelle, mais jamais occasion propi-
ce ne s'était présenté. Aujourd'hui qu'elle se présente, j'y pense et te le dis comme
je le ressens déjà depuis longtemps. Tu le prendras bien, sans aucun doute, et tu
comprendras dans quel sens je te l'ai dit et tu ne m'en voudras pas ! »
13. Simon Juda dit : « Oui, oui, tu dois avoir parfaitement raison ; mais je ne
comprends pas pourquoi Il n'a jamais attiré notre attention là-dessus, alors qu'il
n'est pas avare de ses mots en général ! Ce serait pourtant beaucoup plus facile
ainsi de suivre la bonne direction divine ! »
14. Jean dit : « Il pourrait certes le faire, mais Il ne le fait pas ; il doit y avoir là
une bonne raison !
15. Il me semble que c'est peut-être parce qu'il veut que chaque homme puisse se
trouver tout seul pour commencer, avant que le Seigneur finisse par poser sur lui
Sa main qui parachève toute vie et que Sa lumière vienne s'établir dans le cœur
de l'homme.
16. C'est la raison pour laquelle il me paraît juste que le Seigneur ne reproche à
personne directement les erreurs de son existence, mais qu'il vous réveille en
vous secouant obligeant ainsi l'âme à s'introspecter pour reconnaître à Sa lumière
ses fautes, les bannir de soi, et rentrer ainsi parfaitement dans l'ordre du
Seigneur. Frère, à mon humble avis, je pense que ce doit être à peu près cela !
Qu'en penses-tu ? »
17. Simon, un peu songeur, dit : « Oui, tu dois avoir parfaitement raison, car de
nous tous c'est toi qui comprends le mieux le sens profond des paroles du
Seigneur. Par la suite j'écouterai ce que tu dis ! »
18. À ce moment-là, Simon se retourne vers Moi avec une expression de re-
connaissance, parce que J'ai révélé cela à son cœur par l'intermédiaire du frère
Jean. J'indiquai alors à Simon de venir en aide avec sa compétence aux fils de
Marc, qui commençaient à étendre le grand filet sur la mer.
19. Et Simon le fit avec la plus grande joie du monde, car un regard d'amour de
Moi vaut pour Simon plus que tous les trésors du monde, et il devrait en être
ainsi pour tous les êtres qui Me suivent réellement et qui veulent par là atteindre
la vie éternelle.
Chapitre 189
Une embarcation militaire approche pendant la pêche miraculeuse!
1. Tandis que les fils de Marc, avec l'aide efficace de Simon et de quelques
disciples présents dans la barque, étaient occupés à jeter le grand filet, une grosse
embarcation venant de Génézareth se dirigea vers nous. Quand elle ne fut plus
qu'à quelques brasses, un fils de Marc remarqua qu'il s'agissait d'un bateau de
l'armée romaine.
2. Cyrénius dit : « Ce serait inopportun pour ma position que mes soldats me
trouvent sur ce bateau par trop modeste pour un gouverneur ! Si l'on pouvait les
éviter ! »
3. Je dis : « Crains ce qui est à craindre ; mais ici tu n'as rien à craindre ! Lorsque
le soleil est haut dans le ciel, il semble beaucoup plus petit que lorsqu'il est bas
sur l'horizon ; mais personne ne peut le regarder à son zénith tant il éblouit, alors
que lorsqu'il est plus bas, le géniteur du jour, qu'il se lève ou qu'il se couche, est
bien plus agréable à regarder !
4. Que cette petite barque soit somptueusement décorée ne servirait guère à
relever ta dignité ! Tu es ce que tu es, que tu sois au sommet du mont Ararat ou
sur une taupinière ! Mais le véritable respect va avec l'amour et tu t'en rendras
mieux compte là où les hommes peuvent facilement t'approcher. Je te le dis
encore expressément, cette rencontre te sera d'une grande utilité et bientôt tu vas
en être convaincu ! »
5. Cyrénius prête la plus extrême attention à Mes paroles et se demande ce que le
bateau romain va lui apprendre, et, comme un vent contraire empêche
l'embarcation des soldats romains de nous approcher, Cyrénius se demande s'il
n'est pas souhaitable de ramer jusqu'à eux.
6. Mais Je dis : « Nullement, nous nous rencontrerons suffisamment tôt et tu ne
manqueras pas d'apprendre tout ce qui peut te concerner ! Pour l'instant,
occupons-nous tranquillement du filet. »
7. Lorsque Cyrénius comprend cela, il est satisfait, il regarde avec plaisir les
pêcheurs tendre le filet, qui se remplit aussitôt de tant de gros poissons qu'il faut
regagner la rive à la rame. Une demi-heure après, atteignant la rive, nous
rejoignons un paisible banc de poissons, et le filet est si rempli qu'il faut à Marc
et à tous ses enfants, aidés de tous Mes disciples et même des serviteurs de
Cyrénius, une heure et demie pour retirer tous ces poissons du filet et les mettre
dans le vivier.
8. Une fois dans le vivier, toute cette foule de poissons se mit à grouiller, il y en
avait plus de sept mille et le vivier était plein à ne pouvoir en contenir davantage
! Le vieux Marc ne se sentait plus de joie, sa bouche ne cessait de répéter des
paroles de reconnaissance.
9. Je lui dis : « Ami, tu es très reconnaissant pour ce bien que Je t'ai fait, mais tu
recevras encore un autre bienfait lorsque ce bateau romain posera l'ancre ici, et
ce bienfait ne consistera ni en poisson ni en or, ni en argent, mais en Ma parole
qui t'ouvrira le chemin de la vie éternelle. Toi et toute ta maison, soyez donc
attentifs et il fera clair dans ton âme pour le présent et pour l'éternité. M'as-tu
bien compris ? »
10. Marc dit : « Oui, Seigneur ! Mon cœur me dit : "Marc, vieux guerrier rouillé,
aujourd'hui ta vie va être libérée de sa vieille rouille, ton oreille entendra une
voix du ciel de Jahvé et ton âme sentira qu'est proche ton salut éternel !" J'espère
donc vivre encore aujourd'hui des choses merveilleuses. »
Chapitre 190
Les nouveaux hôtes
1. Les fils de Marc avaient à peine mis à sécher leur filet sur les piquets plantés à
cet effet sur la rive, que le grand navire romain parvint assez près de la rive pour
et il fût possible de parler aux bateliers ; ceux-ci demandèrent aux fils de Marc de
venir chercher les passagers avec une barque et de les conduire sur la rive, parce
que le bateau ne pouvait approcher davantage. Les fils le firent aussitôt et Mes
disciples ne furent pas peu surpris de trouver, parmi les nombreux soldats
romains et quelques citadins le capitaine Jules et même Ebahi et Jarah.
2. Mais ce bateau transportait également cinq mauvais bandits faits prisonniers
pour leurs méfaits dans les étroits défilés entre la Judée et la Samarie, où ils
avaient aussi commis de nombreux meurtres. Ils étaient vêtus comme des rabbins
et d'apparence aimable. Mais une légion de mauvais esprits hantaient le cœur de
chacun de ces cinq bandits et les poussaient à détrousser les voyageurs de la
façon la plus cruelle et à les assassiner sans pitié pour ne pas être trahis ! Les
Pharisiens soutenaient secrètement ces bandits grâce à qui tout rapprochement
entre Juifs et Samaritains était rendu quasi impossible. Les Romains étaient
d'autant plus ennemis de ces bandits qu'ils savaient cela, et ils leur réservaient
toujours un sort terrible, les mettant à mort de la façon la plus cruelle.
3. Outre ces bandits se trouvaient là quelques criminels politiques envoyés par le
Temple pour faire une propagande contre les Romains. Tout ce transport était
destiné à Sidon.
4. Je Me mis un peu à l'écart pour qu'Ebahi, Jarah et Jules ne Me voient pas
aussitôt, priant Cyrénius et les gens de la maison de Marc de ne pas Me trahir.
Car il y avait sur le bateau plusieurs Pharisiens envoyés de Jérusalem à cause de
Moi, bien que chargés officiellement d'une autre mission.
5. Cyrénius reçut avec la plus extrême amabilité Jules, qui ne s'attendait pas à
trouver là la plus haute autorité d'Asie et qui en fut d'autant plus heureux que
Cyrénius traitait toujours ses subalternes avec tout le respect qu'ils méritaient.
6. Cyrénius parla aussitôt avec Jules de ces bandits et lui demanda s'il avait déjà
prononcé un jugement contre eux ; car pour les Romains, un jugement une fois
prononcé ne pouvait être cassé que par l'empereur. Mais Jules n'avait prononcé
aucun jugement et pensait que le gouverneur le prononcerait lui-même à Sidon. Il
pria donc Cyrénius de bien vouloir prononcer aussitôt le jugement que ces
criminels politiques et ces bandits méritaient à cause de leurs méfaits.
7. Cyrénius dit à Jules : « Tu as très bien fait de ne pas avoir encore prononcé le
jugement contre ces mauvais personnages, et je ne vais pas les condamner tout
de suite, car il se trouve dans notre entourage quelqu'un de plus grand et de plus
puissant que nous laisserons juger de ces cas. Fais bien surveiller ces criminels
jusqu'à ce que cet homme très sage et très puissant arrive. »
8. Jules dit : « Très grand souverain de l'Asie, l'empereur se trouverait-il sur le
sol d'Asie ? »
9. Cyrénius dit : « Non, mon très cher Jules, mais quelqu'un véritablement au-
dessus de tous les royaumes de la terre, et également au-dessus du fils couronné
d'Auguste, mon frère ! C'est Zeus avec toute sa puissance divine, venu du ciel
parmi nous mortels. Ses paroles sont agissantes et Sa volonté est un acte ac-
compli. »
10. Cyrénius parlait de Moi à Jules en Romain, pensant ainsi ne pas Me trahir,
mais il ne savait pas que Jules Me connaissait déjà !
11. Et Jules dit : « Très grand maître, nous vivons à une époque de grands mi-
racles et les dieux doivent se plaire en la compagnie des humains, car il y a
quelques jours j'ai eu également la plus curieuse occasion du monde de faire la
connaissance d'un homme qui tient dans sa main pas moins que la foudre de Zeus
! Une année ne suffirait pas à te raconter tout ce que ce Zeus en personne a fait
chez moi à Génézareth et dans la maison du brave aubergiste Ebahi ! »
12. Cyrénius ouvre de grands yeux, et quelque peu embarrassé, ne sait que dire à
Jules, car il devine qu'il s'agit de Moi, mais il ne veut pas troubler Jules dans sa
foi. Jules est dans le même cas, il a pensé la même chose quand Cyrénius lui a
décrit ce Zeus tout-puissant !
13. Et chacun soupçonnant l'autre d'être un Romain peu éclairé, ils se bernèrent
mutuellement pendant une bonne heure jusqu'à ce que J'apparaisse enfin pour
dissiper leur doute réciproque !
Chapitre 191
L'enseignement des anges et les écoles humaines
Chapitre 192
Sur la dîme et les tributs à payer au Temple
Chapitre 193
Le sort des malfaiteurs et des possédés
1. Cyrénius félicita Jules et lui dit très sagement : « Très cher Jules, tu sais que je
tiens beaucoup à toi et que la clarté de ton jugement m'a toujours plu, mais ce
que tu viens de dire là ne me semble pas être de ton cru ! Il y en a Un de qui tu
l'as appris ! »
2. Jules dit : « Oh, certes, car la vérité n'est pas dans le feu mais dans Sa douce
lumière, aussi depuis que je Le connais suis-je devenu beaucoup plus doux et
beaucoup plus conciliant. Oh, si seulement je pouvais une fois encore Le ren-
contrer ! »
3. Jarah, qui se tenait à côté de lui et qui écoutait très attentivement, dit : « Oh !
c'est aussi mon seul et unique souhait ! »
4. Pendant cette conversation, j'arrivai sans me faire remarquer derrière Jules.
Seul Cyrénius Me vit et dit à Jules au signe que Je lui fis : « Regarde un peu
autour de toi, il y a quelqu'un derrière toi qui voudrait te parler ! »
5. Jules se retourne et s'évanouit presque de joie de Me voir là, et Jarah pousse un
cri de ravissement suprême et tombe sur Ma poitrine comme une morte. Je dus la
laisser se reposer près d'une demi-heure avant qu'elle revînt de sa céleste
stupéfaction.
6. Comme le soir tombait, Je dis au vieux Marc : « Tu vas prendre soin de nous
faire préparer à dîner, veille à ce qu'il ne manque ni pain, ni vin, ni poisson ! »
7. Marc dit : « Seigneur, qu'allons-nous faire des malfaiteurs enchaînés à des
poteaux et gardés par les soldats dans la terreur du jugement qu'il les attend ? »
8. Je dis : « Nous les laisserons languir infiniment, à cause des mauvais esprits
dont ils sont possédés, et personne ne doit leur donner à boire et à manger,
comme s'il n'y avait plus de salut pour eux ! Mais toi Jules, Mon frère, annonce-
leur aujourd'hui même leur condamnation à la mort la plus douloureuse et qu'ils
seront demain brûlés vifs à petit feu. Demain ils seront graciés et Je verrai s'il
faut les libérer. Leur terreur matera les mauvais esprits qui les habitent et ils se
mettront peu à peu à s'amender. Liez-les fermement aux poteaux, sinon ils vous
donneront beaucoup à faire !
9. Les sept agitateurs politiques, qui n'ont pas particulièrement péché, peuvent
être gardés moins sévèrement ; annoncez-leur une bonne correction par le fouet
et faites-leur donner un peu de pain et d'eau. Demain à l'aube on verra si on peut
renoncer ou non à la correction. »
10. À ces mots, Cyrénius dit à Jules : « Vas-y, brise ton bâton et annonce-leur ce
qui les attend. »
11. Jules se lève aussitôt, va avec quelques sous-officiers au rivage, à cinq cents
pas de la demeure de Marc. Arrivé près des malfaiteurs attachés aux pilotis du
port, il donne l'ordre à ses soldats de les lier plus solidement encore avec des
cordes et des chaînes. Ensuite Jules annonce à ces bandits ce qu'ils ont à attendre
du lendemain, et il annonce également aux agitateurs politiques la correction
qu'ils méritent.
12. À l'annonce de leur jugement, les cinq bandits se mettent à hurler, à crier, à
supplier qu'on les tue sur-le-champ, prétendant ne pouvoir supporter un état aussi
pénible ! Mais Jules s'en va aussitôt sans écouter les horribles cris de ces cinq
bandits et de ces sept agitateurs.
13. De retour vers nous, Jules dit : « Ce n'est vraiment pas une petite affaire, ces
cris, ces visages et ces gestes désespérés feraient frémir un animal ! Je suis
heureux de ne plus être auprès d'eux, c'est à peine croyable — mais la tête de
Méduse ne doit pas avoir l'air plus humaine ! Je suis curieux de savoir quelle
mine auront ces gaillards demain ! »
14. « Vois-tu, dis-Je à Jules, c'est l'effet de leurs mauvais esprits ! Ceux-ci sup-
porteront difficilement une telle peur jusqu'à demain, et la plupart d'entre eux
s'en iront. Il sera plus facile d'en délivrer complètement ces hommes demain. »
15. Cyrénius demande : « Mais qu'adviendra-t-il d'eux ? Pourrons-nous les
libérer vraiment ou devrons-nous les garder en prison un certain temps ? »
16. Je dis : « Dans tous les cas, sans un enseignement suffisant, ils ne peuvent être
remis en pleine liberté, car aucun homme ne se dégage si rapidement du péché
sans retomber ! Pour les cinq bandits il faudra un an à peine, et pour les sept
agitateurs six mois suffiront ! Maintenant, allons prendre en paix notre repas du
soir ! »
Chapitre 194
Sages paroles de Jarah
1. Le vieux Marc dit alors : « Seigneur et Maître de tous les humains, Tu m'as dit
qu'aujourd'hui encore je comprendrais beaucoup de choses quant à la destinée de
l'homme et que je connaîtrais aussi le royaume de Dieu. Oui, vraiment c'est
merveilleux ! J'ai déjà entendu, vu et vécu autant de choses au cours de cette
journée, que dans toute ma vie jusqu'ici ; je vois maintenant que ta prédiction
s'est pleinement réalisée, et je vais tout faire pour que nos membres fatigués
n'aillent pas chercher le repos sans avoir été rassasiés auparavant. »
2. Je dis : « Oui, oui, va voir si les cuisinières en ont bientôt terminé avec leur
art. Après le repas il se passera quelque chose qui te rapprochera encore
davantage du royaume de Dieu ! »
3. Marc dit : « Mais, Seigneur, qu'en est-il de cette tendre fille en larmes qui reste
accrochée à Ton sein, il semble qu'elle ne Te quittera plus ! »
4. Je dis : « Demande-le à cette fille elle-même, elle ne se fera pas faute de te
répondre. »
5. Marc interroge Jaral qui se languissait du ciel.
6. Mais Jarah se redressa aussitôt en disant : « Écoute, cher vieil ami, qui L'a
saisi une fois ne veut plus Le lâcher, car Le lâcher c'est perdre aussitôt sa vie
éternelle et être perdu soi-même pour toujours. Ce que je fais ici corporellement,
faites-le dans votre cœur, comme je le fais en mon cœur.
7. Qui aime sa vie et laisse partir le Seigneur de vie par légèreté et par atta-
chement au monde perdra aussi sa vie, mais qui ne prend pas sa vie en consi-
dération et comprend dans son cœur que "la vie" c'est vivre uniquement pour le
Seigneur de toute vie, a la vie éternelle, même s'il doit mourir mille fois selon le
corps.
8. Vois-tu, lorsque le Seigneur est venu chez nous, j'ai commencé par Le
reconnaître dans mon cœur, et je L'ai aimé par-dessus tout ; oui, s'il me de-
mandait maintenant de mourir pour Lui, la mort me serait un gain, parce que je
sais et je sens que l'amour pour Lui ne peut jamais mourir, car il est impossible à
cet amour de commettre un péché qui est la mort véritable de l'âme. Si l'âme de
l'homme est morte, tout l'homme est mort, note-le bien, vieil homme, car je suis
de l'école du ciel qui est l'amour, la vérité et la vie. Ce que je t'ai dit est l'en-
seignement du ciel, et tu peux donc l'observer. »
9. Le vieux Marc, ayant entendu ces paroles de Jarah, dit avec un très grand
enthousiasme : « Ô toi, enfant du ciel, trop bonne et trop pure pour cette terre
immonde, vraiment, quand le Seigneur quittera physiquement ma demeure, j'irai
vers toi pour apprendre la sagesse du ciel ! Oh ! quelle différence entre toi et mes
filles, tu es déjà un soleil, et mes filles sont à peine un reflet du grand astre dans
la plus petite goutte de rosée. Ô Ebahi, que tu es heureux d'être le père d'un ange
pareil ! »
10. Des larmes vinrent aux yeux du vieux Marc et il se hâta d'aller à la cuisine
voir où en était le souper. Il raconta à ses filles l'enseignement qu'il venait de
recevoir d'une fillette de Génézareth, et ses filles étonnées le prièrent de leur
permettre, après le repas, de parler un peu avec cette enfant céleste !
11. Marc en fut très heureux et le leur promit ; mais en attendant, il fallait que ses
filles s'appliquent à préparer promptement le repas, et les filles dirent : « Père,
dans un petit quart d'heure, tout sera prêt. »
12. Marc sortit de la cuisine et demanda à ses fils de mettre le pain et le vin sur
les tables devant la maison, de ne pas oublier l'éclairage et de mettre sur les
tables plusieurs lampes bien remplies, et dans le reste de la cour des torches de
pêcheurs qui brûleraient toute la nuit ! Tout fut mis en œuvre rapidement et
lorsqu'il se mit à faire sombre, une foule de lampes brûlaient sur la table et la
vaste cour était illuminée par les torches en question. Là-dessus, de délicieux
plats de poisson furent apportés avec le pain, le vin et toutes sortes de fruits.
13. Avant le repas, Jarah dit un psaume de David, puis Me pria de bénir les mets
et les boissons. Je le fis et nous prîmes tous place à table. La dégustation des
plats de qualité nous mit de bonne humeur et le sobre usage du vin nous rendit
tous joyeux. Je m'assis entre Cyrénius et la chère petite Jarah, Cyrénius à Ma
gauche et Jarah à Ma droite. À côté de Jarah était assis son Raphaël, qui était en
face du vieux Marc, lequel remarqua la curieuse façon dont Raphaël avalait sa
nourriture : que ce soit du poisson, un morceau de pain ou des fruits, un verre de
vin, dès que Raphaël l'approchait de sa bouche, tout disparaissait aussitôt sans
que Marc voie le jouvenceau mâcher ou avaler quoi que ce soit !
14. Josoé, le fils adoptif de Cyrénius assis à côté de celui-ci remarqua l'émer-
veillement silencieux du vieux Marc et dit : « Vieux guerrier Marc, quelle est la
chose qui te plaît tant dans le rabbin Raphaël, que tu ne puisses détourner tes
yeux de lui ? »
15. Le vieux Marc dit : « Oui, toi noble fils de mon seigneur et bienfaiteur, quel
étrange phénomène ! Ce garçon porte mets et boissons à sa bouche sans jamais
l'ouvrir, ni mâcher, ni avaler, et les mets disparaissent devant sa bouche !
Comment est-ce possible ? Voilà encore un miracle, que dois-je comprendre par
là?»
Chapitre 195
Matière et esprit
1. Josoé : « Ceci doit t'apprendre que rien de matériel ne parvient aux cieux, c'est
pourquoi cet ange transmute chaque aliment matériel en aliment spirituel et ne
prend que ce qui est purement spirituel. Ce jeune homme est un pur esprit
humain venu du ciel et représente le ciel jusque dans ses moindres formes. Les
aliments représentent notre humanité encore enterrée dans notre matière, laquelle
fut certes aussi bien apprêtée sur les fourneaux du grand maître qui nous a appris
à le faire et qui se trouve Lui-même physiquement parmi nous, et néanmoins
nous ne pouvons entrer avec nos corps physiques dans le royaume des cieux.
2. Mais lorsque nous serons appelés par Dieu à quitter ce monde, un ange de
Dieu fera de nous ce que cet ange fait ici de ses aliments, c'est-à-dire qu'en un
instant il libérera de la matière tout ce qui appartient à l'esprit, en unissant l'âme
et son esprit de vie, ainsi que tout ce qui appartient à l'âme dans la matière, en la
plus parfaite forme humaine, pour les conduire selon la volonté immuable et
étemelle de Dieu dans le pur monde des esprits ! Voilà ce que tu peux et dois
apprendre de ce curieux repas du puissant jouvenceau céleste. »
3. Marc, très étonné par la sagesse de Josoé, dit : « J'ai déjà remarqué une fois
que tu es un jeune homme infiniment plus sage que ceux de ton âge, et pourtant
jamais je ne t'aurais cru aussi sage ! Tu m'as donné un enseignement très
important et je t'en serai toujours infiniment reconnaissant ! Mais sais-tu, la soif
de la connaissance augmente en l'homme avec son savoir, et cela me démange
donc de savoir maintenant comment s'opère cette transmutation de la matière ! »
4. Josoé : « Ami, il n'est pas bon que l'homme en sache trop, mais tu peux
l'observer toi-même ! Regarde, la matière n'est que le spirituel fixé par la volonté
de Dieu. Un ange comme lui n'est que l'expression personnifiée de la volonté
toute-puissante de Dieu, il ne peut vouloir rien d'autre que ce que Dieu veut !
5. Lorsque Dieu veut transmuter la matière celle-ci est mise par Sa volonté
omnipotente dans la forme humaine, et ce qui était fixé ou lié est alors dégagé,
délié, et toute matière perdant alors instantanément son existence redevient
l'élément spirituel originel et se retrouve à l'état qui était le sien auparavant, mais
plus noble et plus parfait.
6. D'innombrables forces isolées se trouvent ainsi réunies en un seul grand et
unique individu qui deviendra un esprit humain parachevé selon la volonté de
Dieu ! As-tu compris ? »
7. Marc : « Oui, j'ai bien compris et je ne te demande rien de plus, car ta sagesse
donne le vertige tant son élévation dépasse mon entendement. Mais je voudrais
t'entendre parler avec cette sage fillette Jarah, ce serait un véritable régal spirituel
comme il ne doit guère y en avoir de meilleur au ciel ! »
8. Josoé : « C'est quelque peu présomptueux de ta part ! Si tu as devant toi deux
verres de vin, que se passe-t-il si tu veux verser le contenu de l'un dans l'autre
déjà plein ? Ne renverseras-tu pas tout ce vin précieux par terre ? À quoi bon !
Ce que je sais, la miette aussi doit le savoir et ni elle ni moi n'apprendrons quoi
que ce soit de nouveau ! Nous nous épargnerons donc cette peine. Parle plutôt
toi-même avec la merveilleuse enfant de Dieu. Toi, tes filles, ta femme et tes fils
aurez beaucoup à apprendre d'elle, car jusqu'ici, sur cette terre, jamais aucune
fille n'a eu une telle expérience de Dieu. Elle sait quantité de choses que
personne d'autre que le Seigneur ne connaît sur cette terre ! Comprends-tu ? »
Chapitre 196
Jarah tranche le nœud gordien pour Josoé
1 Je dis : « Mais, mon cher Josoé, d'où sais-tu que Ma chère Jarah possède une
telle sagesse et connaît des choses que personne à part Moi ne connaît ? »
2. Josoé : « Seigneur, pourquoi ne le saurais-je pas et pourquoi me le demandes-
Tu, alors que Tu es Celui qui a mis dans mon cœur et sur ma langue ce que je
dois connaître et dire ! »
3. Je dis : « Très bien, Mon cher Josoé, puisque tu le sais, donne-nous-en donc
une explication satisfaisante et montre-nous pourquoi les pensées les plus fortes
de ton cœur Me sont connues et doivent l'être avant même que tu les aies
pensées. Je te le demande ! »
4. Ici, Josoé hésite et cherche la bonne réponse, mais il ne la trouve pas. Après un
moment de réflexion, il dit à mi-voix : « Seigneur, dans les limites extrêmes de
ma connaissance, je ne trouve aucune réponse raisonnable, du moins par moi-
même ! Tu as dû me poser cette question pour la forme, comme un rabbin
demande à son disciple ce qu'il connaît bien avant lui ! Mais il y a une différence
infinie entre Toi et un rabbin interrogeant son disciple. Le rabbin sait ce qu'il sait,
mais sans l'interroger il ignore ce que son disciple sait. Mais Toi, non seulement
Tu sais clairement ce que je sais, mais Tu connais aussi les pensées les plus
secrètes de tous les hommes et de tous les anges, et Tu M'interroges ! C'est là
pour moi un nœud gordien indénouable, et, comme je suis loin d'être Alexandre,
je ne peux le trancher ! »
5. Je dis : « Dis-Moi, pourquoi ce jouvenceau qui vient de Sichar pour te voir de
temps en temps t'interroge-t-il comme s'il ne savait pas lui-même ce qu'il sait très
bien? Oui, il se laisse même enseigner comme s'il était ton disciple ! »
6. Josoé dit : « Oui, c'est ma plainte continuelle à son sujet. Il veut toujours que
je l'enseigne dans sa sagesse inouïe, et si je lui demande quelque chose, il répond
toujours : "Oui, c'est justement ce que je voulais te demander !" Je me demande
alors, comme je Te l'ai dit ce matin, quelle est cette façon de faire ! Le père de
Jarah avait bien une vue très sage de cette méthode d'enseignement, que je
pourrais aussi appliquer à l'instant pour répondre à Ta question, mais je ne
partage pas totalement ce point de vue et je ne puis donc appliquer cette méthode
pour répondre à Ta question formulée comme le nœud gordien !
7. C'est la meilleure façon certainement d'enseigner toutes sortes de
connaissances à des garçons relativement instruits pour les amener à penser, à
sentir et à trouver par eux-mêmes ; mais appliquerons-nous la même méthode
avec des garçons complètement ignorants des éléments de base de la science ? Je
voudrais voir comment des garçons enseignés de cette façon-là parviendraient à
se familiariser avec l'alphabet, la lecture et l'écriture, tout naturellement sans
aucun miracle !
8. Les vues d'Ebahi ne sont pas applicables ici, et je ne puis en faire usage. Ô
Seigneur, je Te le dis très crûment, je ne suis pas en état de donner une réponse à
ta question gordienne ! »
9. Je dis : « Et si c'était Jarah qui voulait bien éclaircir la question ? »
10. Josoé, un peu surpris, dit : « Elle le peut toujours, si elle le veut bien ! N'est-il
pas vrai, Seigneur, que si Tu lui mets la réponse dans le cœur, il lui sera facile de
répondre ? »
11. Je dis : « Je ne le ferai pas cette fois-ci, et elle devra trouver elle-même la
réponse ! »
12. Josoé : « Ça ne lui sera pas plus facile qu'à moi ! »
13. Je dis d'un air aimable : « Nous allons bien voir ! Dis-nous donc, très chère
Jarah, pourquoi Je demande à ce cher Josoé quelque chose que Je sais depuis
longtemps ! »
14. Jarah dit, quelque peu embarrassée : « Seigneur, si j'ose parler et si je le dois,
Tu sembles avoir posé cette question gordienne, comme il l'a nommée, pour
mettre en quelque sorte son âme exubérante à l'épreuve, et le rendre ainsi un peu
plus humble ; car il croyait auparavant n'avoir nullement besoin de parler avec
moi, croyant déjà savoir tout ce que je sais, et trouvant inutile une conversation
où il s'agissait de verser un verre plein dans un autre verre plein ! Mais ce cher
Josoé a oublié que Tu as diversement réparti Tes dons de l'esprit parmi Tes anges
et que par là même un esprit parfait peut avoir encore beaucoup à apprendre d'un
autre esprit parfait !
15. Mais je pense que si Tu le demandes, Toi Seigneur, Tu n'as pas d'autre raison
de le demander que pour aider une âme trop bouillonnante à devenir plus
humble, et, pour autant que mes connaissances limitées me permettent de voir
dans mon cœur, c'est la raison pour laquelle Tu as posé à ce cher Josoé cette
question gordienne.
16. Il avait bien fait remarquer tout à l'heure à Marc, en se contredisant, que par
Ta grâce, j'ai fait des expériences qu'aucun homme sur terre n'a jamais faites
jusqu'ici, et néanmoins il se prend pour un verre plein ! Mais s'il m'accorde des
expériences aussi extraordinaires, je ne comprends pas pourquoi il ne veut
engager aucune conversation avec moi ! Mais quant à moi, je suis d'avis que,
malgré mes expériences inouïes, je puis apprendre quelque chose de lui, et je ne
considère pas que mon verre soit si plein qu'il ne puisse y avoir place dans mon
vin pour une goutte de son verre qui doit être si parfaitement plein !
17. Et comme je le constate (dit Jarah avec un petit sourire), son verre ne semble
pas si plein à déborder qu'il n'y ait aucune place pour une goutte de mon vin !
18. Du reste, je ne veux nullement par là faire la moindre réflexion désagréable
sur l'assurance quelque peu bouillonnante de Josoé, mais puisque j'y ai été
incitée, j'ai parlé selon mon cœur, et je ne crois pas avoir commis de trop grand
péché, et si j'en ai commis un, je désire de toutes mes forces pouvoir faire mieux
!»
19. Je dis : « Non, non, pas du tout, ton cœur très fidèle M'est trop connu et tu as
rendu un grand service à Josoé ! Tu as naïvement, touché à son point faible et
cette faiblesse ne l'aurait finalement conduit nulle part. Le voilà maintenant guéri
aussi dans cette sphère-là et il acceptera très .volontiers une réconfortante
discussion avec toi, car il a l'art de s'exprimer ! »
Chapitre 197
Sur les limites du savoir des hommes
1. Me tournant vers Josoé, Je lui dis : « Que dis-tu de cette réponse pertinente de
la très chère Jarah ? »
2. Josoé : « Ô Seigneur de toute vie, la très douce fillette n'est plus depuis
longtemps déjà une fille terrestre ! La très merveilleuse Jarah est une lumière
céleste personnifiée d'une dimension à côté de laquelle je suis à peine la plus
petite étoile. Certes, j'ai aussi, par Ta grâce, fait des expériences comme peu de
mortels jusqu'ici, puisque, sans plaisanter, j'ai la perception d'avoir passé deux
ans dans le monde des esprits alors que mon corps en putréfaction était dans la
tombe et que, par Ta grâce et Ta miséricorde, je suis finalement revenu sur cette
terre en toute conscience. Mais j'avoue pourtant à haute voix me sentir à peine
capable d'être le mauvais élève sans talent de cette fillette. Si elle veut me faire
l'amitié de m'enseigner quoi que ce soit, je suis prêt à l'accepter avec la plus
grande reconnaissance du monde ! »
3. Jarah : « Oui, mon très cher Josoé, tu es un fils de roi et moi la fille d'un Juif
qui n'est qu'un aubergiste de Génézareth, et du point de vue du monde il serait
très prétentieux et effronté à moi de m'approcher de toi, mais si de ta hauteur tu
veux bien t'approcher de mon humble personne, tu trouveras grands ouverts mes
deux bras et la porte de ma pauvre hutte ! » À ces paroles très expressives, Josoé
ouvre de grands yeux et ne sait guère que répondre à la fillette !
4. Mais Cyrénius dit à Josoé : « Vois-tu, mon Josoé, cela a tout l'air de vouloir
dire que tu dois aller t'asseoir à côté de Jarah pour parler avec elle. Vas-y, fais-le,
je serais moi-même très curieux d'entendre ce que vous allez vous dire. »
5. Josoé : « Ah ! La très chère et bonne Jarah n'a pas dit que je devais aller
m'asseoir à côté d'elle, mais qu'il fallait lui parler pour autant que je puisse
m'abaisser de la sorte, moi, fils de roi ! Ce qui prouve que Jarah ne me connaît
guère, puisque premièrement je ne suis nullement fils de roi, et deuxièmement
ma nature soi-disant si fière de sa naissance est aussi éloignée de ce sentiment-là
que la terre du ciel. Je n'estime que la vérité, je respecte profondément tout ce qui
découle de la vérité et tout ce qui parachève cette vérité, c'est-à-dire le mystère
de Dieu. Je l'invoque sans exiger qu'il me soit éclairci, ainsi qu'il convient à un
ver de terre et à la poussière de cette terre !
6. En Dieu est la plénitude de la plus infinie sagesse, et en nous il n'y en a pas
plus qu'un grain de poussière, tout ce que nous savons n'est qu'une construction
vide et nous sommes incapables de trouver le chemin qui mène de l’alpha à bêta,
et encore moins jusqu'à oméga ! Des myriades d'astres illuminent le ciel, qui les
connaît ? Nous ne connaissons pas les deux plus grands astres et nous ignorons
encore davantage ce que sont les plus petits qui sont innombrables, et pourtant la
sagesse de Dieu y demeure comme la vue dans l'œil.
7. Ce que Dieu veut nous révéler, nous le savons et le connaissons, mais au-delà
de cela s'étend pour l'âme humaine une nuit sainte, il est vrai, mais cependant
infinie, et l'homme ne doit jamais vouloir tenter de faire la lumière sur cette nuit
infinie et sacrée, car cette nuit l'engloutirait comme la mer où va s'engloutir le
caillou lancé par quelque pétulant garçon !
8. Nous autres êtres humains, nous sommes des récipients auxquels n'a été
conférée qu'une mesure précise. Si le récipient est plein, il ne peut être rempli
encore. Mais s'il est donné à l'homme une mesure plus grande, il peut alors
beaucoup ajouter sans que cela déborde, comme c'est le cas maintenant !
9. Les hommes de cette terre ont des mesures très variables, la mienne visi-
blement fait partie des plus petites, tandis que la très chère Jarah est visiblement
mieux pourvue que moi et je ne puis l'aborder en égal ! Mais si elle veut
m'accorder de partager son superflu, je l'accepterai toujours avec infiniment de
reconnaissance. Mais je ne puis aller m'asseoir à côté d'elle au bas de la table, car
elle est d'une part plus sage que moi, et d'autre part je n'ai pas ses aptitudes ! »
Chapitre 198
Qu'est-ce que la vérité
1. Je dis alors à nouveau à Josoé : « Écoute donc, mon cher Josoé, tu viens de
parler sagement et tu dis là de bonnes et vraies choses ; mais il faut que Je te
rende attentif à une chose, et écoute bien, car avec un sage comme toi Je puis
m'exprimer avec plus de profondeur.
2. Tu disais : "Je n'estime que la vérité, je respecte profondément tout ce qui
découle de cette vérité et tout ce qui parachève cette vérité, c'est-à-dire le
mystère de Dieu. Je l'invoque sans exiger qu'il me soit éclairci ainsi qu'il
convient à un ver de terre et à la poussière. En Dieu est la plénitude de la plus
infinie sagesse, et en nous il n'y en a pas plus gros qu'un grain de poussière !"
3. Oui, c'est très bien, bon et fort juste de n'être que pour la vérité, mais à l'en-
contre de cette maxime, une grande question vient se mettre en travers de ta
maxime très louable en soi, formant ainsi une croix parfaite. Si toi ou quelqu'un
d'autre peut résoudre la question que Je vais te poser. Mes épaules seront
déchargées de la croix !
4. Dis-moi, qu'est-ce que la vérité que tu estimes par-dessus tout ? Est-ce la
vérité que tu vois ? Vois-tu, tout n'est que brume d'aujourd'hui à demain, et ce
qui aujourd'hui est une parfaite vérité, ne le sera plus du tout demain ! Regarde
là-bas, dans les dernières lueurs du jour qui tombe au-dessus du soleil qui s'est
déjà couché depuis longtemps, ce petit nuage en forme de poisson ! Dis-Moi,
combien de temps durera la vérité de la forme actuelle de ce petit nuage ? Vois-
tu, dans un instant sa forme actuelle sera déjà faussée !
5. Si Je te présente trois poires, tu dis que c'est une vérité que ces trois poires
sont là devant toi ! Mais Je te dirai que chacune de ces poires contient plusieurs
pépins dont chacun peut donner un arbre, et par la suite une foule infinie d'arbres
qui finalement produisent un nombre incalculable de poires semblables à celles-
ci. Y a-t-il alors réellement devant toi trois poires d'une taille définie et
immuable, ou n'as-tu là que la dimension apparente de trois poires derrière
lesquelles, comme dans !e ventre de bois du cheval de Troie, se cachent un
nombre infini d'autres éléments semblables, mais aussi de grandeurs très
différentes ?
6. Où commence la vérité et où finit-elle ? L'homme est-il une vérité tel qu'il est
? Regarde un enfant, et regarde un vieillard ! Regarde une ville construite de la
main de l'homme, est-elle une vérité parfaite ? Aujourd'hui elle existe et demain
elle sera peut-être détruite !
7. Regarde, n'est vérité que ce qui est totalement vérité en soi, et pour ce qui ne
l'est pas en soi, tout lui est nécessaire, sauf ce qu'il est lui-même !
8. Une vérité qui n'est que temporelle n'est déjà plus une vérité parfaite, parce
qu'elle n'a pas la permanence en elle, mais la vérité parfaite est immuable pour
l'éternité, identique à ce qu'elle est à chaque instant également. Qu'est-ce alors
que la vérité parfaite ? »
Chapitre 199
Le secret de l'origine de la vérité
Chapitre 200
Conversation entre Josoé et Jarah
1. Lorsque Josoé se trouve à côté d'elle, il lui tend la main en disant : « Ne m'en
veux pas, très chère Jarah, car vois-tu, je ne pouvais absolument pas savoir
qu'une enfant comme toi, de quinze ans à peine, pouvait avoir plus de sagesse
que tous les sages de cette terre qui ont vécu avant nous ! Mais je te demande
tout de suite de me dévoiler tout ce que tu voudras de ta sagesse cachée. »
2. Jarah : « Et toi de la tienne, car tu sais aussi beaucoup de choses qui doivent
encore m'être étrangères ! »
3. Josoé : « Ce sera bien maigre, car le récipient de ma sagesse paraît d'une part
bien petit, et d'autre part il est percé comme une passoire. Il ne sortira pas grand-
chose de moi, parce qu'il n'y a pas grand chose-dedans ! Commence donc ! Je
suis d'autant plus embarrassé que, sérieusement, je ne sais que dire de pertinent
et d'à propos ! Face à la plus haute sagesse divine, l'homme peut difficilement
parler, il ne peut que se taire et écouter. Mais toi, très douce Jarah, il y a un pont
entre toi et la sagesse divine que tu peux franchir comme tu veux, commence
donc et, comme je l'ai dit, je vais t'écouter. »
4. Jarah : « Mais vois-tu, très noble Josoé, il ne serait pas convenable à une fille
de trop parler. Tu peux me poser des questions auxquelles je répondrai, et tu
répondras aussi aux questions que je te poserai ! »
5. Josoé : « Oui, oui, il serait facile de poser des questions si on savait lesquelles
! Tant que l'enfant est inculte son cœur est plein de questions de toutes sortes,
mais quand on a déjà répondu soi-même plusieur fois à toutes les questions qu'on
avait, il est beaucoup plus difficile de trouver une question nouvelle que de
répondre à n'importe quelle question ! C'est pourquoi je voudrais te prier de bien
vouloir me poser toi-même une question, car tu es initiée à beaucoup de choses et
tu peux donc me poser beaucoup de questions. »
6. Jarah dit : « Eh bien, au nom de mon Seigneur, puisque tu ne veux pas autre
chose, je vais te poser une question : dis-moi pourquoi Dieu le Seigneur, qui est
tout amour et toute sagesse, permet, à notre époque notamment, que les
prétendus serviteurs de Dieu, les propagateurs privilégiés de Sa parole, soient
précisément les hommes les plus ambitieux, les plus orgueilleux et les plus
dénués de conscience. Pourquoi n'ont-ils aucune crainte de Dieu, dont ils
proclament aux hommes la puissance et la magnificence avec éclat au cours de
cérémonies pompeuses ? La question est importante à notre époque. »
7. Josoé : « Cette question certes est importante, mais comme je ne trouve en moi
aucune réponse à te donner, tu vas devoir y répondre toi-même ! »
8. Cyrénius : « Mais, mon très cher Josoé, il y a bien quelque chose que tu
puisses dire ! En vérité tes continuelles excuses commencent à me lasser ! Je sais
bien, par expérience, que la très chère Jarah te dépasse en sagesse, mais tu n'es
pas si stupide que je sache, que tu ne puisses trouver aucune réponse à une telle
question ! Dis donc quelque chose, et si la réponse est insuffisante, il y a assez de
sages personnes à cette table pour te mettre sur la bonne voie ! »
9. Josoé : « Cher noble père et souverain, il est facile de commander, mais il est
toujours amer d'obéir, surtout lorsqu'on se sait parfaitement incapable de se
montrer obéissant !
10. Pense à la bonté infinie, à l'amour, à la sagesse illimitée de Dieu, et pense par
ailleurs aux horreurs jamais punies que de soi-disant serviteurs de Dieu
commettent à toutes les heures du jour et de la nuit. Regarde avec les yeux de ton
âme cette contradiction, et tu conviendras avec moi qu'une pareille question n'est
pas aussi simple que de savoir combien font trois plus trois. Demande-le à
quelqu'un d'autre et il apparaîtra rapidement que la question posée par Jarah n'est
pas une si petite chose ! »
11. Cyrénius : « Bon, bon, je vois bien qu'il faut un haut degré de sagesse pour
trouver une réponse suffisante à la question de Jarah, mais j'aimerais en tout cas
avoir une lumière à ce sujet, car j'ai très souvent pensé à ce problème sans jamais
en comprendre la cause. Si personne, à part Toi, notre très cher Maître et
Seigneur, et la très douce Jarah, ne peut donner de réponse, nous nous tournerons
vers Toi, ô Maître et Seigneur, et Tu nous dévoileras sans doute cette cause
comme Tu nous l'as promis, si je ne me trompe ! »
12. Je dis : « Sans doute, si Jarah n'y parvient pas, mais Je pense que si elle est
attentive, elle saura enfoncer le clou du premier coup ! Essaie, chère Jarah, et
montre que Je ne t'ai pas planté en vain un jardin potager à Génézareth ! »
Chapitre 201
Observations de Jarah dans son jardin
1. Jarah à ces mots se redresse comme un orateur et dit : « Eh bien, le jardin est
plein de bénédictions d'en haut et je vais donner ici, pour le bien de tous, le fruit
de mon application enfantine, du moins depuis les quelques jours passés avec
mon jardinet. Je n'en ai pas encore tiré de gain matériel, ce qui serait impensable
en un laps de temps si court, mais pourtant le petit jardin m'a déjà apporté un
grand bienfait spirituel.
2. Oui, ce petit jardin est pour moi un véritable livre de sagesse, et en quelques
jours j'y ai appris plus que tout ce que Salomon aurait pu me révéler avec toute sa
sagesse. Ainsi la réponse à ma question à Josoé m'a été lumineusement donnée il
y a peu de jours dans ce jardin, et elle est devenue parfaitement mienne depuis
que le Seigneur me l'a accordée, et je n'aurais jamais pu poser aveuglément une
pareille question dans l'espoir qu'on me donne une réponse satisfaisante si toute
la clarification n'avait pas été faite en moi.
3. Certes j'ai toute la réponse, et elle est non-seulement valable maintenant, mais
elle le sera de tout temps et aussi longtemps que la parole de Dieu et que la
prêtrise qui s'en préoccupe seront représentés sur cette terre, notre bonne mère !
Voici donc toute la réponse à ma question posée au cher Josoé !
4. Dans le terreau de mon jardin j'ai semé de bonnes graines. Certaines ont germé
déjà le lendemain, et le surlendemain les pousses avaient déjà la hauteur d'un
doigt !
5. Une fille, et moi en particulier, est toujours curieuse. Ma curiosité insatiable
m'a incitée à regarder exactement ce que finalement la graine était devenue, bien
que la pousse soit déjà aussi développée. J'ai déterré donc quelques brins et me
suis mise à les examiner attentivement, et voilà, sapienti pauca sufficiunt comme
on dit en latin (le sage se satisfait de peu). J'ai trouvé la graine décomposée et la
terre qui l'enveloppait mêlée de moisissures, de ce tombeau sortait la tendre
pousse et de la graine proprement dite, il ne restait qu'un peu de son enveloppe
protectrice extérieure et une gousse bien décomposée.
6. À côté de ce remarquable phénomène, je trouvai aussi malheureusement
plusieurs graines sans germe, décomposées par les moisissures qui n'avaient
aucune chance de pouvoir germer et fructifier. Mais il n'échappa pas à mon
regard scrutateur que de toutes petites herbes minuscules semblaient pousser sur
ces graines décomposées qui n'avaient aucune ressemblance avec les bons et
nobles germes. Ah, pensai-je, nous y voilà ! Ces mauvaises pousses sont aussi le
produit des bonnes graines mises en terre, mais la terre vorace s'en est
simplement nourrie et a empêché le bon et noble germe de sortir. Mais que s'est-
il passé ! À la place d'un noble germe trente malheureuses pousses vont tirer du
sol cent fois plus de bonnes substances que ne l'aurait fait le bon germe, car tout
ce qui est noble et bon est modéré en toute chose.
7. Pour briller l'or n'a pas besoin d'être éternellement nettoyé comme le plomb.
On le fait briller une fois et il garde son éclat pendant des siècles. Un sarment de
vigne fructifie sur le sol le plus pauvre, mais le chardon et les ronces cherchent la
bonne terre. Les doux animaux domestiques sont rarement voraces alors que le
loup, la hyène et les autres bêtes de cette espèce dévorent nuit et jour. L'homme
véritablement noble et bon est modéré, alors que le matérialiste à l'humeur
sombre ne se contente jamais de rien. On lui donne cent mille livres d'or et
aussitôt il n'aspire qu'à en recevoir une fois encore tout autant, sans nullement
être inquiété si les autres meurent de faim ! L'avarice n'engendre que l'avarice.
8. Voilà, le royaume de mon jardinet était partiellement vil et avare, et des nobles
graines que j'y avais plantées il a voulu faire un engrais ; qu'en fut l’arrière
conséquence, eh ! bien, au lieu de nourrir une noble pousse modérée, le sol a du
nourrir cent mauvaises herbes voraces.
9. Et voilà, ce qui se passe dans cette terre avare et égoïste, arrive aussi aux
hommes de cette terre qui veulent se construire un monde de délices et de fé-
licité, ils finissent par devoir abandonner tous leurs biens durement amassés et
cent autres les dissipent souvent d'une façon lamentable. Voilà en image la
réponse à ma question, retenez-la bien et vous trouverez ! » Ils se mirent tous à
réfléchir s'émerveillant de la grande sagesse de cette fille.
Chapitre 202
Application de l'image de Jarah
1. La fille se tourne alors vers Josoé et lui demande avec infiniment de gen-
tillesse : « Et toi, mon très cher et digne voisin, la lumière ne se fait-elle toujours
pas dans ton cœur ? »
2. Josoé dit : « Très douce et merveilleuse Jarah, c'est comme si je voyais à
travers un voile, mais je ne puis encore parler d'une clarté quelconque ! Continue
donc d'éclaircir la chose, je suis le plus attentif de tes auditeurs. La chose est par
trop importante pour qu'on laisse se perdre la moindre de tes paroles, et tous ceux
qui sont à notre table et autour de notre table semblent le ressentir et attendent
anxieusement la suite ! Poursuis donc et donne-nous la réponse tout entière. »
3. Alors Jarah, reprenant la parole, dit : « Si vous réfléchissez un peu à l'image
que j'ai pu vous décrire de la nature dès la première récolte spirituelle de mon
jardinet, ce qui va suivre devrait vous paraître facile et clair. Écoutez, soyez
attentifs !
4. Les hommes de cette terre sont spirituellement parlant semblables à la terre de
mon jardinet ; et la parole de Dieu, qui nous est venue du ciel d'abord par nos
pères, à commencer par Adam, puis par les patriarches et les prophètes que Dieu
a suscités Lui-même parmi les hommes, est à son tour semblable à la bonne
graine que j'ai mise dans mon jardin, la parole de Dieu est comme la graine qui
ne peut fructifier immédiatement !
5. Quand la parole de Dieu est reçue en l'homme elle doit déjà être vivifiée par
les actes qui sont comme la force nutritive de la terre. C'est ce que nous faisons
pour nos frères et sœurs, pour que germe en eux le véritable fruit d'une vie
spirituelle bénie par Dieu. Mais lorsque les prêtres ou les prophètes, qui sont les
premiers à recevoir la parole, au lieu de semer en toute authenticité le grand
champ de tous les hommes de cette terre jusqu'à la fin des temps, se mettent à
vouloir s'engraisser tout seuls comme la terre qui décompose et digère pour elle
seule la noble graine, il n'y a plus de quoi s'étonner s'il ne pousse que de la mau-
vaise herbe, des chardons et des ronces sur le champ des faux prêtres et des faux
prophètes.
6. Mais, aussi étrange que cela puisse paraître, ce qui arrive là ne va pas à
l’encontre de l'ordonnance et de la sagesse divines ; car, voyez-vous, lorsque le
noble fruit est mûr, la paille et le grain sont assemblés et portés dans la grange,
mais la mauvaise herbe reste sur le champ et enfume malgré elle le sol qui
deviendra plus riche pour la moisson suivante attendue avec impatience.
7. En fait, il en est pour nous de même. Si nous n'avions toujours été nourris que
par la plus pure vérité, telle qu'elle sort de la bouche de Dieu, nous n'aurions pas
tant envie d'une nouvelle et plus grande vérité.
8. Dieu l'a prévu, c'est pourquoi il a laissé l'homme obtus se nourrir quelque
temps d'une pâture de cochon et enfumer ses champs de mauvaises herbes en
décomposition ! C'est dans la nuit seulement où l'homme aspire à la lumière qu'il
apprécie le fruit pur et noble de la parole de Dieu, comme c'est le cas parmi nous
d'une façon si saisissable et si céleste ! »
Chapitre 203
Le matérialisme et ses représentants
1. Jarah : « Les soi-disant serviteurs de Dieu ont commis de tout temps les pires
horreurs, et les hommes qui en ont les preuves et qui n'ignorent pas l'Écriture, se
demandent peu à peu ce que cela signifie ! Comment peut-on pareillement aller à
l’encontre de Sa parole et permettre que ceux qui annoncent Son amour, Sa
grâce, Sa miséricorde, Sa paix se montrent avec leur prochain si cupides, si
ambitieux, si égoïstes, si insensibles et si arrogants ?
2. Il est bon de se poser de telles questions sans que ce soit pour autant sous une
contrainte quelconque, bonne ou satanique, car ces questions sont les premiers
ressorts qui poussent l'humanité à chercher sa véritable autonomie, sans laquelle
elle ne peut accéder à la véritable liberté spirituelle indispensable à la vie
éternelle de l'âme et de l'esprit !
3. Il est vrai qu'à considérer le comportement de la prêtrise, une juste colère vous
saisit et l'on voudrait s'écrier : "Seigneur, n'as-Tu donc aucune foudre, aucune
grêle, aucun soufre, aucun géant pour châtier ces êtres féroces et les punir avec
toute la force de Ton divin courroux ?" Mais une voix douce au plus profond du
cœur vous dit : « Sois sage et intelligent et regarde où tu vas ! Si tu vois une
vipère sur ton chemin, évite-la, car la terre n'est pas entièrement couverte de
vipères ! »
4. La nuit est aussi nécessaire que le jour, pour que l'homme reconnaisse la
valeur de la lumière. En plein jour personne ne réclame de lampe, mais la nuit
venue, tout homme ressent le manque de la lumière et s'éclaire autant qu'il peut
car la moindre lueur est plus accueillante que la nuit noire d'une chambre.
5. Voyez-vous, si le Seigneur comblait de toutes sortes de bienfaits les hommes
de cette terre, ils deviendraient vite orgueilleux et se mettraient à ne penser qu'à
leurs corps, et leur âme où demeure l'esprit de Dieu serait vite semblable à cette
noble graine décomposée et assimilée par le terreau glouton au lieu de trouver la
force pour que germe en elle l'esprit divin de la vie éternelle à la mesure de ce
que Dieu a établi, et c'est dans ce but que Dieu a donné précisément un corps à
l'âme ! Mais lorsque l'âme est dévorée par le corps, les ronces, les chardons et
toutes sortes de mauvaises herbes poussent à la place des bons fruits et l'on ne
peut récolter ni figue ni raisin.
6. Un tel homme spirituellement est pour ainsi dire mort, il ne sait plus du tout ce
qu'est l'esprit, il nie tout ce qui est spirituel et matérialise tout. Seule la matière
existe pour lui. Son ventre et la sensualité de sa peau sont ses deux divinités
uniques auxquelles il est prêt nuit et jour à tout sacrifier. Dieu n'existe plus pour
ces gens-là et c'est à se demander pourquoi ces purs esclaves de la chair, pour qui
en fait l'esprit de Dieu et son ciel ne sont que des images désuètes de la fantaisie
des poètes, deviennent prêtres ou serviteurs de Dieu. Mais il n'y a qu'à voir leur
ventre énorme pour avoir la réponse !
7. Peu importe à ces dispensateurs de la parole de Dieu s'ils nourrissent les
membres de leurs communautés avec du pain céleste ou avec la pourriture des
plus infects des bourbiers, pourvu qu'ils soient royalement payés ; il n'y a pas de
quoi s'étonner si, à propos du Temple, on apprend tant de choses à vous pétrifier
d'horreur.
8. Qu'attendre d'un homme charnel qui ne comprend pas mieux qu'un
champignon de la forêt poussant dans le terreau du compost, quelle noblesse il
pourrait acquérir en accédant à la dignité d'être humain ! Il n'y a qu'à le laisser
agiter sa langue comme une vipère et ramper comme un serpent, et chercher
ailleurs sur cette vaste terre, car le Seigneur est avec celui qui cherche vraiment,
Il n'abandonnera jamais celui qui se tourne vers Lui.
9. Nous tous qui habitons sur les rives de notre vie intérieure, nous sommes
depuis longtemps les jouets du Temple. On a ménagé la Judée autant que possi-
ble, mais pendant ce temps-là, nous les Galiléens, nous étions les boucs émis-
saires, les vaches à lait du Temple, mais grâce à cela la lumière s'est levée bien
plus tôt pour nous, alors que la Judée est encore dans la nuit la plus obscure !
10. Nous avons commencé par subir l'égoïste avidité et l'avarice du Temple,
j'entends par là naturellement la prêtrise, et nous nous en sommes libérés autant
que nous avons pu ! Et nous qui sommes aussi une noble moisson de Dieu, nous
n'avons pas dissipé nos forces pour remplir le ventre du Temple, mais nous nous
sommes tournés vers notre ordonnance divine intérieure, et nous voilà
maintenant les fruits bénis du champ de Dieu. Mais les habitants de Judée, de
Mésopotamie et ceux qui habitent au midi ne sont pas près de s'apercevoir qu'ils
sont les dindons de la farce que leur joue le Temple.
11. Dans ce long développement de ma réponse à la question posée, chacun des
hôtes ici présents reconnaîtra certainement, j'espère, que la jeune fille de
Génézareth sait ce qu'elle doit penser des voies de Dieu. Ô Toi, Seigneur qui
permets tout cela, pardonne-moi d'avoir peut-être trop longuement bavardé
inutilement devant Toi et à Tes divins côtés. Par là, je ne voulais nullement faire
étalage de la force de mes connaissances, mais l'occasion s'étant présentée, j'ai
tout simplement montré ce qui me tient véritablement à cœur ! »
Chapitre 204
Josoé et Jarah parlent de Judas
1. Je dis : « Fille très chère à Mon cœur, Je te le dis, tu n'as dit ni trop ni trop peu,
c'est pourquoi Je vous le dis à tous et Je vous le conseille, rappelez-vous ce que
cette fille a dit, veillez-y et mettez-le en pratique. Que celui qui a une remarque à
faire se lève et parle. »
2. À cette Invitation, notre Judas Iscariote s'avança et dit : « Je ne suis pas tout à
fait d'accord, bien que par ailleurs j'admire profondément la sagesse de cette fille
car elle parle comme un livre. » Puis il se tut.
3. Le garçon Josoé lui répliqua aussitôt : « Ô toi, misérable insensé, n'as-tu donc
pas entendu ce que le Seigneur Lui-même a dit de cette fille très douce, et tu
prétends ne pas vouloir être d'accord en tout point avec sa réponse ? Oh ! va-t'en
loin d'ici avec ton immense bêtise insatiable et nous verrons alors de quelle
pourriture elle est faite. Ouvre donc tes yeux stupides, pauvre idiot, tu vois assis
à côté de Moi un ange de Dieu venu du haut des cieux ; son être est pure lumière,
et tu vois cette jeune et sage oratrice toute consacrée au cœur de Dieu, et tu vois
aussi, j'espère, à côté d'elle, le Seigneur dont l'esprit a créé le ciel et la terre et
tout ce qui s'y trouve, et tu ne serais pas entièrement d'accord avec certaines
paroles de la très douce Jarah ! Dis-moi, qui es-tu pour pouvoir ainsi te mesurer
avec Dieu avec tant d'arrogance ? »
4. Les paroles énergiques de Josoé intimidèrent Judas qui retourna s'asseoir en
silence sur son banc, car il avait très peur de ce fils adoptif du grand Cyrénius et
il ne bougea plus de sa place.
5. Mais Josoé poursuivit en disant : « N'est-ce pas là un des principaux disciples
? Il me semble avoir déjà vu son visage à Nazareth. Oui, oui, c'est lui qui se
disputait toujours avec un certain disciple nommé Thomas, si je ne me trompe ! »
6. Jarah : « Laisse tomber, noble Josoé, vois-tu, si ce disciple avait autant
d'aptitude que toi et moi, au Seigneur seul en soit la gloire, il se tairait comme ses
frères et ses compagnons et il méditerait dans son cœur, mais comme son cœur
est très endurci, il saisit difficilement les vérités les plus élevées et les plus
profondes, et s'il comprend quelque chose, il ne peut l'assimiler complètement,
parce que, dans son cœur rétréci, il ne peut y avoir place pour quelque chose de
grand et de divin ! Laisse-le donc et ne t'en occupe plus. »
7. Josoé : « Une fois encore, tu as parfaitement raison ! Mais, sais-tu une petite
remontrance de temps à autre ne lui fait pas de mal, car je sais que cet homme est
un outrecuidant. Il voudrait bien être le premier de ses compagnons et que tous
lui demandent conseil. Cela n'arrive jamais parce que les autres sont beaucoup
plus sages et comprennent mieux que lui ; cela l'agace beaucoup et le rend
d'autant plus furieux qu'il est souvent vertement remis en place, notamment par
le disciple Thomas, qui est un homme sage. »
8. Jarah dit : « Oui, oui, tu penses juste, je me souviens en effet d'une petite
dispute à Génézareth ! Le Seigneur sait sans doute mieux que nous deux pour-
quoi Il tolère ce disciple à Ses côtés, je l'aurais déjà écarté depuis longtemps de
ma route ! J'ai une aversion toute particulière pour cet homme et je ne serais pas
étonnée qu'à cause de lui toute la compagnie se trouve un jour dans un grand
embarras, car je n'ai jamais confiance en ces individus qui ne vous regardent pas
dans les yeux, ils semblent toujours craindre que leur regard trahisse la
méchanceté de leur cœur, et ce disciple souffre de ce mal qui ne me plaît guère.
Pour que le Seigneur le supporte, il doit y avoir une raison ! »
9. Je dis : « Jarah, Ma fille, tout à l'heure tu as toi-même expliqué très clairement
à chacun pourquoi Je tolère la mauvaise herbe à côté du blé. Voilà une de ces
mauvaises herbes dans une bonne terre. Mais lorsque le bon grain sera récolté et
engrangé, la mauvaise herbe restera sur le champ où, brûlée pour enfumer le sol
dur, elle rendra la terre plus légère.
10. Il faut bien sûr que le sol soit meuble si l'on veut que croisse le bon fruit,
mais sais-tu que le sol ne doit pas être trop meuble, car dans un sol trop meuble,
rien ne peut réellement prendre racine. Viennent les grosses chaleurs puis les
orages, les racines et les fruits se dessèchent, vienne la tempête, la plante est
déracinée et se dessèche sur le champ où elle ne fructifiera pas. C'est pourquoi
l'enfantement des enfants de Dieu demande un sol plus dur que meuble et il ne
faut pas être contrarié s'il existe sur le sol une mauvaise herbe au milieu des
bonnes graines, qui servira à enrichir le sol pour que la moisson suivante soit
plus abondante. M'as-tu compris ? »
Chapitre 205
Des peuples différents ont besoin d'être conduits différemment
1. Jarah :« Oh oui, Seigneur, Toi mon unique amour, de vrais enfants ont besoin
d'une instruction plus solide que les enfants des esclaves, car les enfants de la
maison doivent s'occuper de l'entretien de la demeure avec leurs parents, et après
eux aussi. Il faut donc le leur apprendre, tandis que les enfants des esclaves n'ont
besoin de savoir que ce qui leur est nécessaire pour faire leur unique devoir. Bien
sûr, on pourrait se demander pourquoi le Seigneur Dieu permet que sur cette
terre un homme doive servir toute sa vie servilement un autre homme et que le
maître, au nom de l'empereur, ait droit de vie et de mort sur son esclave. »
2. Je dis : « Oui, ma très chère Jarah, l'expliquer entièrement nous mènerait trop
loin, mais Je vais te donner à toi et aux autres quelques comparaisons. Qui les
comprendra y verra un peu plus clair. Faites donc attention et écoutez bien !
3. Il existe d'autres céréales que le simple blé barbu. L'orge à deux rangées ou à
quatre rangées de grains, les hautes tiges du seigle, l'avoine, le maïs et ses gros
épis, ensuite il y a les lentilles, la vesce et les diverses sortes de haricots, et toutes
ces diverses espèces ont besoin de divers sols, sans lesquels elles ne peuvent
prospérer. Telle céréale a besoin d'un sol gras argileux, telle autre d'un sol bien
enfumé sinon rien ne pousse, telle autre céréale a besoin d'un sol léger et
pierreux, telle autre d'une terre sablonneuse, les unes ont besoin d'un sol sec, les
autres d'un sol humide. Telle est l'expérience des hommes.
4. De la même manière, les hommes ont besoin d'une éducation correspondant à
la constitution de leur cœur et de leur âme. Il en va de communautés entières et
de grands peuples comme des enfants. Tel peuple a besoin d'être guidé avec
douceur et souplesse et progresse ainsi pour la plus grande bénédiction des autres
peuples de la terre. Tel autre peuple a besoin d'être conduit sévèrement, sinon il
ferait vite le malheur de peuples voisins. Tel peuple encore est enclin à la
tyrannie et aspire à dominer son prochain. Il n'y a rien de mieux, pour l'âme de
ces gens-là, que de les réduire à l'esclavage pour de nombreuses années, et quand
ils seront parvenus à cette humilité qui leur est nécessaire et qu'ils supporteront
leur sort patiemment sans murmure, ils redeviendront alors des hommes libres de
cette terre et donneront des fruits abondants sur la meilleure des terres fermes.
5. Voilà l'image qu'il vous est facile à tous de comprendre, puisque vous avez
déjà compris certaines choses.
6. Mais pour rendre cela plus compréhensible encore, considérons le corps
humain dont chaque membre a une forme différente nécessitant des soins ap-
propriés lorsqu'il s'agit de le guérir. Quand on a mal à un pied on se soigne
autrement que lorsqu'on a mal à un œil, quand on a mal au ventre on se soigne
autrement que lorsqu'on a une main blessée, et tout dépend s'il s'agit d'un mal
récent ou d'un mal chronique. Le mal aigu se guérit facilement, le mal chronique
doit être combattu presque à mort par une forte médecine. Les âmes humaines
ont une correspondance avec les différentes parties du corps, et elles doivent être
traitées différemment selon qu'elles correspondent à des parties plus ou moins
nobles de ce corps.
7. À l'instar de cette image, les divers comportements des hommes à l'égard de
leur sphère spirituelle et morale, doivent être traités tout aussi diversement que
les parties du corps auxquelles ils correspondent dans cette sphère spirituelle et
morale à laquelle ils correspondent. Une mauvaise dent doit finalement être
arrachée d'une bouche quand il n'y a plus moyen de la soigner, afin de préserver
les autres dents ! Ainsi un homme mauvais qui ne peut s'améliorer doit être mis à
l'écart de la société afin que sa présence ne corrompe pas tous les autres.
8. Regardez dans les chroniques, vous y verrez quels grands peuples ont été les
Babyloniens, les Ninivites, les Mèdes, les Perses, les Egyptiens, les anciens
Grecs et avant eux les Phéniciens et les Troyens ! Que sont devenus tous ces
peuples, où sont les Gomorrhéens, les Sodomites, où sont les peuples des Dix
Villes ? Oui, physiquement ils ont bien des descendants dégénérés, mais qui n'en
ont plus le nom et qui ne formeront plus jamais un peuple de ce nom-là, car il n'y
a rien de pire qu'un vieux nom qui vous colle à la peau avec prétention et vaine
gloriole. De telles gens, de tels peuples, à cause de leur grand nom, finissent par
se croire meilleurs que les autres, supérieurs à n'importe quelle jeune peuplade
qui, par la douceur, l'humilité et l'amour du prochain, est juste devant Dieu et
saine spirituellement.
9. Si vous considérez cela avec quelque attention, vous verrez vite combien le
Père céleste est bon et juste. Car cette terre est destinée pour l'éternité à élever les
enfants de l'Esprit de Dieu et il est donc nécessaire que la terre soit plus ou moins
pauvre, plus ou moins meuble, plus ou moins grasse.
10. La mauvaise herbe n'empêche pas la bonne céréale de pousser et elle est un
engrais très utile pour un sol trop dur et trop maigre. Bref, ce que Dieu permet est
bon, et finalement, pour l'homme parfaitement pur, tout ce que cette terre porte
sur elle et en elle est bon. Vous tous, dites-Moi si vous M'avez bien compris ! »
11. Cyrénius : « Seigneur, qui ne Te comprendrait pas ? Tout cela est clair
comme le jour ! »
12. Je dis : « Très bien, à présent Josoé va nous donner son avis assurément. »
Chapitre 206
Motivations secrètes de Josoé
Chapitre 207
Conception de Josoé de l'esclavage
1. Josoé : « En Ton nom, je veux très brièvement essayer, mais que mon avis soit
juste est évidemment une autre question !
2. Les pieds de l'homme sont visiblement placés plus bas que ses mains, mais si
les pieds de l'homme ne le portaient pas jusqu'à l'eau, ses mains ne pourraient pas
les laver de la poussière et de la saleté. Je pense donc que le service d'un esclave
est aussi nécessaire que le service du maître. Lorsque les pieds glissent, tout
l'homme tombe et il est donc souvent plus nécessaire de veiller à ses pieds, les
esclaves du corps, qu'à tous ses autres membres. Stupides et sans volonté les
pieds doivent porter le corps pesant et oisif le jour durant et n'ont finalement pour
toute récompense que quelques ablutions à une source, alors qu'au retour d'une
longue marche le corps se fortifie de mets et de boissons. Mais que peuvent dire
les pieds ! Rien, ils sont faits pour ça !
3. Je pense donc que l'esclavage est nécessaire et ne pourra jamais être supprimé
si l'humanité doit rester dans l'ordonnance qui lui a été donnée. Il faudrait
seulement qu'avec le temps les hommes trouvent un autre moyen et les esclaves
n'auraient plus besoin de porter l'humanité comme des pieds. Je crois donc que
l'esclavage avec le temps finira pas disparaître.
4. Il vaudrait mieux que l'on puisse entièrement se passer de l'esclavage, mais il
faudra attendre pour que cet heureux temps dépose son baiser de rosé sur la terre.
5. L'esclave est en effet considéré par les hommes libres comme une mauvaise
herbe, mais cette plante rare bien utile à l'homme libre le rend paresseux et
désœuvré. À ce point de vue il serait donc préférable qu'il n'y ait point d'esclaves.
Mais si l'esclavage est une école d'humilité, il est alors d'une nécessité
indispensable pour l'humanité par trop évoluée. Après la captivité de Babylone,
les Israélites étaient redevenus un bon peuple, dommage que la captivité n'ait pas
duré un siècle entier, car à leur libération, leur gloire passée brillait encore trop à
leurs yeux et ils n'eurent pas d'autre but que de rétablir cette gloire d'Israël. Dès
que les murs de Jérusalem furent rebâtis le vieil orgueil les reprit et ce fut pire
qu'avant la captivité à Babylone. Quarante années avaient visiblement été
insuffisantes, alors qu'un siècle entier eut certainement guéri nos pères pour des
siècles de leur orgueil et de leur gloriole tapageuse.
6. Ce n'est, il est vrai, qu'une présomption immature de ma part qui sera sans
doute contredite par une argumentation fondée, mais je parle comme je le sens,
car un soufflet reçu pour une mauvaise action, vous évite de recommencer tant
que dure l'effet physique de la douleur ressentie. Mais une punition plus
douloureuse infligée par Dieu vous empêche de recommencer si le châtiment a
été assez fort.
7. Voilà pourquoi un esclavage de longue durée ne peut à mon avis n'être que
profitable. Ainsi à considérer la dure nécessité de cet état, crois-moi, un brave
esclave plein de bonne volonté est au fond plus parfait que l'homme libre ! Ce
dernier en effet est esclave de ses sens tandis que l'esclave peut être
spirituellement un homme parfaitement libre.
8. Il y a une grande différence entre l'homme maître de sa volonté, ce qui est
absolument le cas de l'esclave et l'homme qui n'a pas la volonté de soumettre ses
désirs et qui fait tout ce qui lui plaît.
9. Ainsi, je fais les louanges de l'esclavage et souhaite qu'il ne prenne jamais fin,
car je pense qu'aussitôt que cessera cette grande école de l'humilité véritable, une
grande misère s'établira sur terre.
10. Il serait évidemment souhaitable que tous les hommes vivent selon Ton
enseignement, l'esclavage serait alors une pure absurdité, un crime envers les
droits de l'humanité ! Mais tant que ce ne sera pas le cas, et pour longtemps
encore probablement, l'esclavage restera et demeurera pour l'humanité or-
gueilleuse un véritable évangile envoyé du ciel sur la terre pour le bien de l'hu-
manité.
11. Ce serait-là ma faible réflexion à propos de ton mot sur l'esclavage. Je Te
prie, Seigneur, de me faire la grâce de me montrer les fautes que j'ai faites pour
que je perçoive toute la vérité en cette question. »
12. Je dis : « Cher Josoé, tu as parfaitement raison, et il n'y a guère d'objection à
faire, si ce n'est à propos de la durée de la captivité à Babylone. Tu es allé un peu
loin dans ton zèle, car vois-tu, toute captivité, tout esclavage n'est qu'une
condamnation voulue par Dieu, mais une condamnation reste et demeure un
moyen très extérieur pour améliorer l'homme et c'est pourquoi en général elle a
un effet plus négatif que positif sur l'âme humaine. Qui évite de faire le mal
uniquement par crainte des représailles et fait le bien pour en avoir des avantages
est encore bien loin du royaume de Dieu. Mais celui qui fait le bien parce que
c'est le bien et qui évite le mal parce que c'est le mal, est un homme parfait. Tant
que l'homme ne cherche pas de lui-même la lumière il reste un esclave en esprit
et il est mort pour le royaume de Dieu. La contrainte extérieure détourne
l'homme d'une vie basée sur le critère moral de l'amour. »
Chapitre 208
Amour ou coercition
1. Je dis : « Écoutez, à la tombée du jour une fille revient d'un endroit éloigné où
elle s'est rendue pour les affaires de ses maîtres, mais elle s’est attardée tant et si
bien qu'à son retour, surprise par la nuit, elle trouve à son grand soulagement la
maison d'un pieux ermite comme il y en a dans toutes les contrées de la Judée, et
qui mènent une existence austère en vue du royaume de Dieu. Dans la nuit
orageuse, la fille frappe à la porte de l'ermite et demande l'hospitalité pour la
nuit.
2. L'ermite sort, voit la fille dont la présence pourrait souiller sa hutte et lui dit,
emporté d'un saint zèle : "Ne franchis pas le seuil de ma sainte hutte qui est
consacrée à Dieu, ô être impur, tu la souillerais, et ensuite j'en serais moi-même
souillé ! Continue ta route, va-t'en d'ici et retournes là d'où tu viens !" Sur ce, il
ferme sa porte et laisse tout bonnement la fille en larmes, bien heureux
d'échapper au danger d'une souillure, Il s'en retourne avec contentement, loue
Dieu dans sa hutte, Lui rendant grâce de l'avoir protégé d'un tel danger pour son
âme, et ne se soucie plus de cette pauvre fille. Que lui importe qu'il lui arrive
malheur dans la nuit !
3. Une heure plus tard, la même fille malmenée par la tempête, arrive à la porte
d'un péager malfamé qui passait aux yeux des Juifs pour un grand pécheur. Cet
homme entend déjà de loin les cris désespérés de la pauvre fille, car il veille à
son poste de garde et il n'est pas un couche-tôt, ce pourquoi les Juifs purs
l'appellent un "mauvais sujet".
4. Mais ce mauvais sujet allume aussitôt une torche et va en hâte à la rencontre
de la fille désespérée. Quand il la trouve en pleurs et chancelante, il la console, la
prend dans ses bras puissants, la porte à sa demeure, lui donne à boire et à
manger et lui prépare une bonne et tendre couche. Le lendemain matin, il la
restaure encore, puis il selle deux montures et raccompagne jusqu'à sa demeure
éloignée la fille bien remise de ses frayeurs de la nuit.
5. Voilà l'ermite, un austère pénitent, vivant dans la permanente mortification
qu'il s'impose à lui-même, évitant tout ce qui pourrait souiller si peu que ce soit
son âme qu'il croit pure et pensant plaire ainsi infiniment à Dieu ; mais il tient en
même temps beaucoup à ce que le monde le prenne pour un dévot irréprochable,
d'autant qu'il est connu pour n'avoir jamais vu une fille mettre les pieds chez lui.
Naturellement, il tient à la pureté morale de sa hutte qui pourrait être souillée par
les pieds d'une fille dont on ne peut savoir quand elle a sa période impure.
6. Pour le péager, peu importe que le monde le blanchisse et le noircisse, sa
maison passe pour être la plus impure, au point qu'aucun Juif authentique n'en
franchit le seuil de peur d'être souillé pour dix jours au moins ! Aussi, peu lui
importe ce que les gens disent, il agit selon son cœur et pense : "Je suis un grand
pécheur plein d'impureté, je veux cependant exercer la compassion pour trouver
un jour moi-même la compassion de Dieu !"
7. Dis-moi, Mon cher Josoé, à qui donnes-tu finalement ta préférence ? »
8. Josoé dit en souriant : « Oh ! sans hésiter au péager, car s'il n'y avait sur terre
que des ermites comme celui-là, tout irait mal, les hommes ne pourraient plus
vivre. Avec sa pureté morale, ce stupide ermite pourrait aussi bien aller se faire
pendre dix fois, et si j'étais chargé de la réception des morts dans l'au-delà, cet
ermite n'aurait que la toute dernière place et il n'en aurait pas d'autre jusqu'à ce
qu'il devienne semblable au péager. Ai-je raison ou pas ? »
Chapitre 209
De la pureté et du péché
1. Je dis : « Parfaitement, c'est ainsi et Je le dis, celui qui ne sera pas comme le
péager n'ira pas dans mon royaume, car pour moi aussi toute la pureté sans
amour n'est que temps perdu.
2. Oui, une pureté intérieure libre et authentique avec le véritable amour du
prochain auquel tout est sacrifié vaut pour moi plus que tout. Mais la pureté que
nous voyons chez cet ermite ne vaut pour Moi pas un stater. Qui est pur ne doit
l'être que dans son cœur devant Dieu, et le monde n'a pas tant à le savoir, car il
ne faut pas s'attendre à Mes louanges là où il y a les louanges du monde.
3. Il vaut mieux que l'homme dise : "Ô Seigneur aies pitié de moi pécheur", et ne
dise du mal de personne, prie pour ses ennemis et fasse du bien à ceux qui disent
du mal de lui ou même qui lui font du tort.
4. Vraiment celui qui est ainsi et agit ainsi non seulement est pur devant Moi,
mais, même s'il y a quelques péchés que sa chair le pousse à commettre de temps
à autre, il est cependant pleinement Mon frère et avec Moi il est roi du ciel et de
toutes ses merveilles, car même si la chair de l'homme est souvent séduite par de
mauvais démons, son âme demeure pourtant en Mon esprit !
5. Les anges aussi doivent descendre en enfer dans le gouffre des vices, et quand
ils en reviennent ils sont aussi purs qu'auparavant au plus haut des cieux. Il n'est
pas rare que cela arrive à Mes frères sur cette terre. Ils descendent parfois en
enfer d'une manière bien extérieure pour y maintenir l'ordre divin et le vouloir
divin, alors leur âme reste malgré tout en relation avec Mon esprit.
6. Bref, celui qui commet humblement le péché comme notre péager, n'est
descendu par son péché qu'un instant aux enfers, comme un ange, mais lorsqu'il
en est revenu, il en a le dégoût et son âme est pure comme avant. Mais le pécheur
que ses péchés rendent orgueilleux et qui reste pécheur avec orgueil est un
diable, même s'il paraît extérieurement propre,aux yeux des hommes.
7. Je vous le dis à tous, vous ne devez jamais fermer votre porte aux pécheurs et
aux pécheresses qui viennent vous demander de l'aide, mais les aider comme s'ils
n'avaient jamais péché. Quand vous les avez aidés, offrez-leur tout ce qu'il faut à
l'avenir pour leur permettre de s'améliorer sur le chemin de l'amour et de la
sagesse, mais de cette sagesse véritable qui ne procède que de l'amour.
8. Une adultère, selon la loi de Moïse est véritablement une pécheresse qui
devrait être lapidée par la première personne qui la croise sur son chemin juste
après son acte. Mais je vous le dis, qui reçoit chez lui la fugitive et cherche à la
sauver physiquement et spirituellement sera un jour pardonné à Mes yeux et sa
faute disparaîtra dans le sable que le vent balaie. Mais qui lui jette la pierre et
n'est pas lui-même libre du péché de la chair, devra passer un pénible jugement
devant Moi. Qui Me rapporte ce qui était perdu mérite une grosse récompense,
mais qui condamne, même en accord avec la loi, sera aussi jugé un jour et
condamné selon Ma loi. »
9. Cyrénius demande : « Seigneur, ce que Tu viens de dire est juste et vrai, sauf
un point que je ne comprends pas et que j'aimerais que Tu expliques encore un
peu. Ce point à éclairicir est... »
10. Je dis : « Le point à éclaircir est de savoir comment un homme pur qui a
péché dans Sa chair peut descendre en enfer pour y mettre ordre et apaisement et
finir par en ressortir parfaitement pur !
11. Mais, c'est très facile à comprendre si l'on sait seulement ce qu'est en fait le
péché et l'enfer au sens le plus large comme au sens le plus étroit. Je vais essayer
de rendre plus compréhensible a votre entendement ces deux concepts. De toute
votre âme, soyez donc attentifs. »
Chapitre 210
De la nature de la matière et de l'âme
1. (Le Seigneur) : « Voici le corps est matière, et il est formé des substances
primitivement spirituelles les plus grossières, qui, par la puissance, la sagesse
divine de l'esprit éternel, ont été mises sous cette forme organique correspondant
à tous les besoins d'une âme plus libre qui vient y demeurer.
2. L'âme demeurant dans ce corps n'est pour commencer guère plus pure que son
corps, car elle est également issue de Satan déchu. Pour l'âme encore impure, le
corps n'est qu'une machine très utile à sa purification.
3. Dans l'âme demeure déjà la pure étincelle de l'esprit de Dieu activement
perçue dans la voix de la conscience selon l'ordonnance divine.
4. Outre cela, le corps est muni de divers sens, l'ouïe, la vue, le toucher, l'odorat,
le goût, qui informent l'âme de tout ce qui se passe de bon, de vrai, de mauvais,
de faux dans le monde extérieur.
5. Par le jugement de l'esprit qui demeure en elle, l'âme sent vite ce qui est bon
ou mauvais. Par les sens extérieurs de son corps elle fait l'expérience de
sensations bonnes et mauvaises, agréables et douloureuses, etc. De plus, Dieu
montre à l'âme la voie de l'ordonnance divine, intérieurement par la révélation
extraordinaire, et de l'extérieur par la parole.
6. Ainsi armée, l'âme peut se conformer librement à l'ordonnance divine facile à
reconnaître, et naturellement, il ne peut en être autrement, sinon il serait
impossible à l'âme de parvenir à une existence éternelle, en soi totalement
achevée et cependant libre.
7. Car chaque âme, pour pouvoir subsister, doit être capable de se construire par
les moyens qui lui ont été attribués en propre, sinon elle ne peut finalement se
détacher du corps ou elle le quitte quand elle n'est développée qu'aux trois-
quarts, parce que ce corps complètement usé ne peut plus servir à la poursuite et
à l'achèvement de sa formation. L'âme est alors obligée de poursuivre son
perfectionnement d'une façon généralement beaucoup plus triste et plus
douloureuse dans une machine beaucoup plus inconfortable.
8. Le corps est l'enfer au sens le plus strict pour chaque homme et en chaque
homme, parce qu'il est composé de parties encore soumises au jugement le plus
bas, et c'est pourquoi il est mortel ; la matière de tous les mondes est l'enfer au
sens large où l'homme se situe par son corps.
9. Qui se soucie beaucoup de son corps, soigne manifestement son propre enfer,
nourrit et augmente son jugement, sa mort, et sa propre perte.
10. Le corps doit bien recevoir une certaine nourriture pour être capable de servir
l'âme dans l'accomplissement des hauts objectifs de son existence, mais qui se
soucie trop anxieusement de son corps ou qui s'en occupe jour et nuit soigne
manifestement son enfer et sa mort.
11. Lorsque le corps incite l'âme à se satisfaire sensuellement dans toutes ses
activités, c'est toujours sous l'influence des nombreux esprits impurs et damnés
de la matière, qui forment la propre existence du corps. Si l'âme écoute par trop
les exigences du corps, elle entre alors en commerce avec ces esprits et descend
elle-même de cette manière dans son propre enfer et dans sa propre mort ; et
quand l'âme fait cela, elle commet un péché contre l'ordonnance de Dieu.
12. Si l'âme se complaît dans l'amour de ses délices, elle est aussi impure que les
esprits impurs et damnés de son corps, elle reste alors dans le péché, dans l'enfer
et dans la mort. Si elle continue de vivre dans son corps sur cette terre, elle est
pour ainsi dire déjà morte, elle sent la mort en elle et elle en a peur, car l'âme a
beau faire tout ce qu'elle veut, dans son péché et dans son enfer, elle ne trouve
pas la vie à laquelle elle tient plus qu'à tout !
13. Voilà la raison pour laquelle des milliers de milliers de gens n'en savent pas
plus sur la vie de l'âme après la mort du corps qu'un caillou de la route, et si on
leur en parle, ils éclatent de rire ou se fâchent et vous mettent à la porte avec le
conseil d'aller colporter de telles idioties mensongères aux pourceaux !
14. Tout homme, avant sa trentième année tout au plus, doit achever la formation
de son moi, qui lui enseignera qu'une vie spirituelle et libre continue après la
mort du corps, aussi assurément que l'aigle poursuit son vol dans les hauteurs de
l'air libre.
15. Mais les hommes qui ne s'en préoccupent que plus tard en sont bien éloignés,
et plus éloignés encore en sont ceux qui ne veulent pas en entendre parler et qui
traitent la foi d'idiotie dont il ne vaut même pas la peine de rire. Ces gens-là se
trouvent toute leur vie terrestre dans un parfait enfer et sont déjà dans la mort.
16. Mais une âme peut s'être déjà totalement purifiée et avoir encore besoin qu'un
certain temps lui soit accordé pour purifier son corps encore impur ainsi que les
besoins qui l'habitent, afin que les cellules les plus nobles de ce corps accèdent
aussi par l'âme à l'immortalité, et qu'après la mort de ses cellules les moins
nobles, le corps ressuscite aussi avec l'âme pour sa plénitude.
17. Il arrive aussi que de telles âmes pures soient parfois tentées par leur corps,
c'est-à-dire l'enfer des désirs, et se retrouvent brièvement dans leur propre enfer,
en d'autres mots, dans les désirs du corps et de ses esprits. De telles âmes ne
peuvent plus être totalement souillées, elles ne sont impures qu'aussi longtemps
qu'elles sont dans le gouffre infernal des esprits de leur corps, mais, ne le
supportant pas longtemps, elles retournent aussitôt à leur état de pureté et
redeviennent aussi pures que si elles n'avaient jamais été impures ; pendant ce
temps-là, elles ont mis en ordre et en paix leur enfer et sont alors d'autant moins
dérangées dans la lumière de leur esprit où elles peuvent se mouvoir et grandir.
18. Qui a une réelle compréhension des choses comprendra ce que Je viens de
dire, et toi, ami Cyrénius, dis-Moi sans ambages si tu M'as parfaitement compris
!»
Chapitre 211
Discours de Cyrénius sur la société
1. Cyrénius dit : « Oui, Maître et Seigneur, mais c'est pour moi un enseignement
tout nouveau, auquel personne n'a songé avant Toi. Il est clair que c'est bien Toi
et personne d'autre qui as créé les hommes et tous les univers, de l'alpha à
l'oméga, car seul le Créateur Lui-même peut enseigner comme Toi !
2. De tout temps l'expérience a montré qu'il ne peut en être autrement que Tu
nous l'as expliqué ! Aucun des sages qui dénoncent les maux de l'humanité n'en
connaît la racine ; et d'où pourraient-ils le savoir ? Il leur faudrait pour cela une
connaissance totale de la nature humaine, de ses sphères les plus fon-
damentalement spirituelles jusqu'aux sphères les plus matérielles !
3. Qui peut acquérir de telles connaissances, qui connaît le corps de l'homme
jusque dans ses moindres fibres et ses moindres fils ? Qui a jamais vu une âme se
déplacer librement ? À peine sait-on s'il y a une âme, quelle est sa forme, et, si
forme il y a, si elle est grande ou petite ! Dans une pareille ignorance, d'où
pourrait-on savoir quelle est la nature singulière de l'homme ?
4. Et pourtant, l'homme a les moyens d'apprendre à se connaître ; mais quand il
n'y parvient pas par lui-même, toutes les lois sont incapables de lui faire voir ce
qu'il a à faire de sa nature, tous les enseignements sont inaptes à lui montrer sa
destination prévue par Dieu. L'âme tombe de plus en plus bas dans l'enfer des
besoins multiples de son corps ; besoins douloureux comme on le voit par trop
chez tant d'individus, car la faim ronge, la soif brûle, le froid est douloureux, et
au lieu de se soucier raisonnablement des besoins de son corps, on lui accorde les
délices de la luxure.
5. La partie animale de l'homme a des demandes, des exigences si manifestes, si
continuelles, qu'il n'y a plus d'écoute pour le silence intérieur de l'âme, et qui s'en
étonnerait quand des centaines de milliers de gens ne font plus guère attention à
leur âme, dès leur enfance ils confondent leur âme et leur corps et finissent très
vite par n'avoir d'autres besoins que ceux des passions du corps.
6. Oui, il faut le dire, même chez ceux dont les corps sont le plus mal lotis et le
plus misérables, on ne trouve plus trace de la moindre exigence spirituelle. Chez
certaines peuplades du nord de l'Europe, on ne trouve pas davantage trace de la
moindre formation spirituelle.
7. Quelle en est la raison ? La totale précarité de l'existence ! Quand l'homme
armé d'une massue cherche jour et nuit au fond des bois son gibier et qu'il le
dévore jusqu'à la peau quand il l'a trouvé, peut-on parler de besoins spirituels ? À
Rome, où la plupart des gens ont matériellement tout ce qu'il faut, l'éducation
morale est plus évidente et l'immortalité de l'âme est enseignée depuis
longtemps.
8. Il arrive aussi trop souvent, hélas, que les riches finissent par s'enfoncer dans
les délices de leur corps sans plus veiller à l'éducation de leur âme, ils en
viennent même à considérer toute éducation comme une invention de quelque
sage mort de faim ! Ils disposent heureusement encore d'un langage qui permet la
communication, on peut donc leur parler pour le bien de leur âme et ébranler leur
sensualité.
9. Mais pour les individus dont on ne sait pas trop s'ils ont ou non une langue, il
n'est pas possible de les ébranler ; que faire alors pour les éveiller à des besoins
spirituels plus profonds ?
10. À mon avis, il faut commencer par assurer leur existence, il sera alors plus
facile d'éveiller leurs âmes aux réels besoins spirituels de la vie. Il faudrait au
moins leur assurer le minimum vital. Une pauvreté excessive empêche l'homme
d'aspirer à la spiritualité. Il est difficile de prêcher à un ventre affamé, il faut
commencer par lui donner à boire et à manger, voilà mon avis ! Toi, Seigneur et
Maître, Tu as parfaitement raison, Toi seul connais Tes œuvres parfaitement.
Néanmoins, je ne crois pas avoir totalement tort, car ma conception se base sur
l'expérience des peuples de tout temps. »
Chapitre 212
La nécessité
1. Je dis : « Il est vrai que tu n'as rien dit de faux, mais imagine une planète où
les hommes auraient tout ce qu'il faut pour combler leurs besoins sans travailler,
où ils pourraient vivre sans effort, sans souci, et tu aurais très vite devant toi tes
peuples du nord de l'Europe !
2. Tous ces peuples en effet ont commencé par vivre en Asie, dans le berceau de
l'humanité, où ils étaient mieux pourvus que les Romains d'aujourd'hui. Ils
jouissaient d'un enseignement qui leur venait directement du ciel. Il y avait des
sages parmi eux comme il n'y en a plus jamais eu sur la terre, à part Moi. Mais
quelles en furent les conséquences ? Ils mangeaient et buvaient en toute
insouciance devenant de jour en jour plus paresseux, s'abaissant de génération en
génération jusqu'à leur état actuel ; ils doivent se procurer maintenant à la sueur
de leur front la maigre pitance de leur corps, mais ils ne sont pas pour autant
démunis de sages et de maîtres.
3. La nécessité dans laquelle ils se trouvent finira par les pousser peu à peu à un
degré de connaissance qui surpassera à tous égards celui de Rome actuellement.
4. Il n'est pas bon de trop favoriser le bien-être physique de l'homme, qui finit par
devenir paresseux et par ne se soucier que de son confort. Car cette aspiration à
un repos paresseux et insouciant est la caractéristique d'un corps mort en soi et
pour soi ; mais l'âme pour se constituer une consistance formelle a besoin du
corps, car la propension originelle à ne rien faire est aussi dominante dans l'âme.
5. La douloureuse nécessité du corps tire l'âme de sa léthargie, car elle sent que le
corps finirait par mourir si elle ne lui venait en aide. La nécessité du corps incite
donc l'âme à mettre tout en œuvre pour lui venir en aide. Mais comme l'âme a la
terreur de la mort, à côté des soins qu'elle porte à son corps, elle cherche ce que
pourrait être réellement la vie ; quand l'amour de la vie s'éveille ainsi en elle,
l'âme découvre qu'une vie se poursuit après la mort quand elle a quitté son corps.
6. Alors se développe enfin une sorte de foi en l'immortalité de l'âme humaine, et
cette foi de plus en plus vivante devient un réel besoin de l'homme.
7. Mais ceux qui sont plus réfléchis, et il en existe toujours, ne se satisfont pas de
la foi, ils cherchent à l'approfondir et quand elle n'est pas assez puissante, ils
tentent par tous les moyens de la rendre plus palpable et plus évidente.
8. Les peuples tiennent en haute estime ces chercheurs qu'ils considèrent gé-
néralement comme des devins éclairés, des voyants qui ont commerce avec les
esprits dont ils reçoivent des informations sur la vie de l'âme après la mort.
9. Élevés ainsi à la prêtrise par le peuple, ces chercheurs qui prétendent se
préoccuper de ses aspirations, finissent généralement par abuser de la confiance
qui leur est faite, et ne pensent plus qu'à leur propre intérêt matériel. Il ne sont
plus en fin de compte que des aveugles conducteurs d'aveugles. Il en reste tou-
jours quelque chose de bon, car grâce à ces prêtres, le peuple malgré tout reste
relié au ciel, si faiblement que ce soit.
10. Avec le temps, la confiance aveugle dans les prêtres eux-mêmes vient à
s'affaiblir. Alors, de nouveaux chercheurs se lèvent.dans le peuple pour mettre au
jour une toute nouvelle doctrine qui, sans rejeter l'ancienne, propose une nouvelle
démarche non plus basée sur une foi aveugle, mais fondée sur des faits
convaincants, vérifiables et visibles par tous.
11. Voilà comment la vérité se transmet aux jeunes générations, plus ou moins
douloureusement parfois, pour que soient maintenues les lois éprouvées par une
longue expérience et selon lesquelles la vie humaine doit être réglée.
12. Quand, à ces fondements de l'existence formulés peu à peu par la réflexion
croissante de l'humanité, vient s'ajouter encore la révélation extraordinaire du
ciel qui illumine les hommes, alors tout homme, tout peuple est sauvé, est né de
nouveau en esprit, et tout cela, vois-tu, ne procède nullement des soins que
réclame le corps, mais du souci et de la nécessité de l'homme.
13. Je te le dis, dans la nécessité, l'animal lui-même devient aussi inventif que
l'homme !
14. Quand la nécessité oblige l'homme à penser, alors la terre se met à verdir
sous ses pieds, mais dès qu'il a tout ce qu'il faut, il s'allonge paresseusement
comme un animal et ne pense plus à rien.
15. Vois-tu, il suffirait que J'accorde à la terre tout un siècle de fructueuses an-
nées consécutives, et l'humanité entière deviendrait puante comme la peste. Mais
comme Je laisse alterner la disette et la fertilité, les bonnes et les mauvaises
récoltes, l'humanité reste active, la disette la tire de la léthargie qu'engendré
l'abondance, et les bonnes années lui permettent de ne pas mourir de faim dans
les mauvaises années qui peuvent suivre ! Comprends-tu ? »
Chapitre 213
Des effets du confort et du bien-être
Chapitre 214
Les contradictions de la Genèse
Chapitre 215
De l'apparition du premier homme
1. Je dis : « Très cher ami, Je t'ai déjà donné un signe important à ce propos en
t'expliquant les effets de la nécessité sur l'homme et les peuples. Il est incon-
testable que ce récit de la Création de Moïse est une pure absurdité si on l'ap-
plique à la lettre, et à ce titre la création du monde actuel est le plus manifeste
non-sens. Un homme tant soit peu versé dans la connaissance de la nature, au
premier coup d'œil, ne peut prendre Moïse que pour un imbécile de première
catégorie !
2. Mais pour celui qui examine les livres de Moïse avec un œil plus critique,
comme il étudierait une fable du poète grec Esope, il est évident que Moïse, dans
sa langue imagée, ne décrit que la structure originelle du premier homme de la
terre, et qu'il ne traite nullement de l'histoire de la création du ciel et de la terre et
de toutes les créatures de cette terre, mais ne parle que de la formation
primordiale du cœur et de la raison de l'homme ; c'est pourquoi il relie aussi le
plan humain au plan historique.
3. L'Histoire ne pouvait être que le produit de l'intelligence des hommes et non
celui de la nature créée, qui est muette et qui n'a pas changé jusqu'à ce jour et ne
changera pas jusqu'à la fin des temps !
4. C'est aussi le cas des Écritures hindoues, dont le premier chapitre, intitulé "La
bataille de Jahvé"(*), traite des esprits purs et de la chute de certains d'entre eux,
et qui se terminent par la création du monde des sens, des animaux et finalement
de l'homme.
5. Tout cela n'est à considérer que spirituellement et explique le développement
moral de l'homme.
6. Qui se laisse conduire par l'esprit peut comprendre les correspondances entre
le monde des sens et le monde spirituel, et de là voir comment le monde des sens
est issu du monde spirituel et comment sont apparus les soleils et finalement les
(*)
N.d.T.: voir le premier chapitre de la Bhagavad-Gita intitulé « Sur le champ de bataille de
Kuruksetra » (terre sacrée) et le dernier chapitre intitulé : « Le parfait renoncement ».
planètes secondaires avec toutes leurs créatures.
7. Mais ce n'est pas si facile, car cela suppose d'être parfaitement éveillé en
esprit. Celui qui fut le premier témoin de tout devenir, de toute essence, est le
seul à pouvoir te guider dans ce labyrinthe dans lequel aucun œil humain n'a
jamais encore pénétré.
8. Mais tu peux être parfaitement assuré que l'âge de l'humanité à l'état
d'achèvement où elle est actuellement correspond exactement aux calculs de
Moïse.
9. Il y a eu sur terre bien avant Adam une sorte d'animal plus puissant dont
l'intelligence, bien qu'instinctive, ressemblait à l'entendement humain, mais sans
ressemblance physique. L'éléphant actuel en est encore une espèce très abâtardie.
10. Ces grands animaux cultivaient la terre, ils étaient en cela les précurseurs des
hommes. Ils ont peuplé la terre des centaines de milliers d'années avant l'homme.
11. Le sol encore dur et pétrifié de la terre devait être amolli par ces grands
animaux préhistoriques pour qu'il soit rendu fertile avant que le corps fragile de
l'homme apparaisse. Selon le plan de l'ordre divin éternel. Mais avant son ap-
parition physique, l'homme existait déjà sous sa forme spirituelle et vivait dans
l'air de la terre.(**)
12. Lorsque le sol de la terre devint parfaitement fertile, une des âmes les plus
vaillantes fut appelée à quitter son état éthérique pour prendre forme à partir de
l'humus le plus solide de la terre selon l'ordre originel divin inscrit dans son âme,
et la première âme la plus vaillante, la plus mûre, poussée par la force divine qui
était en elle, fut ainsi la première âme à entrer dans un nouveau corps organisé
par elle et puissant, capable de percevoir le monde sensoriel et toutes les
créatures vivantes déjà existantes.
13. Mais tout le règne animal préhistorique et tout son environnement dispa-
rurent en grande partie bien avant que l'homme n'apparaisse sur cette terre.
Malgré cela on a retrouvé à toutes les époques des restes de ces animaux pré-
historiques qui peuplaient la terre, mais les hommes n'ont jamais su qu'en penser
!
14. Néanmoins, les savants seront mis peu à peu sur la bonne voie et trouveront
que la terre remonte à une époque bien plus ancienne que celle calculée par
Moïse, qui sera alors discréditée pour longtemps. Mais Je susciterai d'autres
savants qui remettront Moïse à sa vraie place et feront sur lui toute la lumière. Le
temps alors viendra où le royaume de Dieu ne tardera pas à s'établir sur terre, et
la mort disparaîtra de cette terre renouvelée. Mais avant cela il y aura encore
beaucoup de maux sur le sol de cette terre.
15. Oui, le sol de cette terre devra encore être enrichi de beaucoup de sang et de
chair humaine avant que ne surgisse de cet humus spirituel ce corps immortel
parfait, comme l'âme d'Adam en son temps put se façonner de l'argile grasse un
corps parfait dans sa forme divine.
16. Mais les hommes qui seront nés ici à nouveau en esprit dans leur corps
(**)
N.d.T. : Dans le monde éthérique.
mortel, régneront éternellement dans cette nouvelle époque comme des esprits
purs et des anges, et cette époque sera placée entièrement sous leur conduite. Par
contre, ceux qui n'atteignent aujourd'hui aucune perfection spirituelle obtiendront
bien dans cette nouvelle époque un corps immortel sur cette terre, mais ils seront
dans une grande misère morale et ils devront accomplir souvent de très durs
services et ils en auront une grande amertume, car ils se souviendront de leur
bienheureux état précédent dans leur corps mortel. Cette époque-là durera très
très longtemps, jusqu'à ce que tout atteigne un état parfaitement spirituel selon le
plan éternel divin de toute chose, de tout devenir, de toute existence, de tout être.
»
Chapitre 216
Du développement du grain de blé
1. (Le Seigneur :) « Regarde le grain de blé, une fois semé, il doit pourrir pour
que le tendre germe puisse s'élever de sa moisissure. Quel rapport y a-t-il ici avec
la nature de l'homme ? Quelle comparaison peut-on établir ?
2. Semer la bonne graine, vois-tu, correspond à la première nature de l'homme !
C'est l'incarnation de l'âme dont la formation est achevée et qui séjourne de
préférence dans les airs de cette région intermédiaire des montagnes qui va de la
limite des forêts jusqu'aux neiges éternelles.
3. Quand une âme s'est constituée et a atteint dans l'air sa consistance propre, elle
descend peu à peu jusqu'à la demeure des hommes, prend sa nourriture en
quelque sorte de l'aura éthérique qui environne tout être humain et reste là où elle
se sent attirée, près des êtres qui lui ressemblent.
4. Quand un couple se sent poussé par la nature à s'accoupler, cette âme de nature
libre qui se trouve à proximité de l'aura éthérique de ce couple, en est informée et
attirée en quelque sorte par l'aura renforcée des deux êtres accouplés, et elle
pénètre ainsi avec une certaine insistance dans le flux de l'homme qui ira la
placer dans un petit œuf ; c'est ce qu'on appelle la fécondation. Et à partir de là,
vois-tu, l'âme se comporte comme la graine semée dans la terre, elle passe par
tous les stades jusqu'à sa naissance au monde, comme la graine dans la terre
jusqu'à sa germination.
5. Alors commencent les divers stades de la formation extérieure, puis viennent
ceux de la formation intérieure.
6. Chez les plantes, les racines restent enterrées et tirent leur substance nutritive
de la graine pourrie ; mais cette nourriture-là tuerait la plante si celle-ci n'était
pas vivifiée par la lumière du soleil.
7. La première partie de la tige a une sève très épaisse. Lorsqu'elle est pleinement
constituée, la tige est en quelque sorte resserrée par un anneau après lequel les
canaux sont plus étroits et ne laissent passer qu'une sève plus fine et plus liquide.
8. C'est là le second étage de la tige, mais ici encore le liquide de la sève finit par
s'épaissir et un deuxième anneau se forme, permettant à la tige de se rétrécir pour
ne laisser qu'une sève plus fine et plus liquide encore, alimentant ainsi l'esprit qui
plane au-dessus des eaux, selon l'expression de Moïse.
9. Une fois encore, cette sève finissant aussi par s'épaissir, un troisième anneau
se forme, toujours pour filtrer la sève qui monte pour alimenter l'épi, où l'esprit
qui plane au-dessus des eaux ! Ainsi l'épi, ou l'esprit planant au-dessus des eaux,
perçoit si les substances qui lui parviennent par ce troisième anneau sont assez
pures, sinon la plante forme un quatrième, un cinquième et un sixième anneau,
parfois même un septième anneau, jusqu'à ce que les liquides soient
suffisamment éthériques et ne comportent plus aucune trace de mort.
10. Un nouveau stade est alors réellement franchi. Du suc monté par ces tout
petits canaux les plus fins se forment le bourgeon et la fleur pourvus d'organes de
reproduction ayant la faculté d'engendrer une vie supérieure qui leur vient du
ciel.
11. Lorsque la fleur a rempli sa fonction, elle est abandonnée, mise de côté
comme le vain ornement d'une sagesse dont la beauté et l'attrait ont attiré les
forces éthériques de l'amour qui surpasse tout et qui n'a besoin d'aucun ornement
extérieur. Car chaque fleur, vois-tu, est une épouse parée de tous ses atours pour
faire tomber dans ses rets son époux. Mais lorsque l'époux a joui de son épouse,
le faux brillant de ses atours est abandonné et le sérieux d'une humble vie
reprend le dessus.
12. C'est alors seulement que le fruit vivant véritable peut prendre forme et,
comme la citadelle aux murailles dressées contre l'ennemi, affronter les forces
qui mettent sa vie en danger.
13. Une vie développée trop précipitamment est vulnérable. Et vois-tu, lorsqu'un
ennemi extérieur s'approche d'un fruit arrivé trop tôt à maturité, intensément
attiré, il vient mettre son œuf dans la plante trop précocement mûrie, et le
parasite tire à lui toutes les énergies de la tendre plante, l'épuise, la fait dépérir et
finalement mourir,. Les fruits véreux sont un exemple très palpable de ce
phénomène. »
Chapitre 217
Le développement spirituel de l'homme
Chapitre 218
De l'âme et du corps
De la fonction de l'alimentation
De l'autonomie de l'ange
Chapitre 219
La création du ciel et de la terre
Chapitre 220
De la terre et de la lumière
Chapitre 221
La séparation de la lumière d'avec les ténèbres
Chapitre 222
La finalité de toute création
1. (Le Seigneur :) « Si vous vouliez bien réfléchir un peu plus profondément que
les gens ne le font actuellement à propos de ce que Je vous ai dit, vous trouveriez
facilement, sans pour autant en saisir toute la teneur, que Moïse dans son récit de
la Genèse a compris la formation et le développement de toute chose selon
l'unique et véritable ordonnance de la sagesse et qu'il les a décrits en images de
leur origine à leur plein achèvement.
2. Qui ne comprend pas Moïse ne doit pas le lire, car s'il le lit sans le com-
prendre, il finit nécessairement, en réfléchissant un peu, par perdre confiance et
par se mettre en colère contre la bêtise et la méchanceté de ceux qui, par le feu et
par l'épée, imposent aux hommes comme venant de Dieu un enseignement
stupide et illogique, même s'ils le considèrent eux-mêmes comme la dernière des
bêtises.
3. Mais la lecture de Moïse faite à la lumière de ce qui vient d'être exposé permet
non seulement d'y trouver la sagesse universelle, mais de reconnaître qu'il s'agit
là du plus authentique et du plus grand des prophètes, parfaitement pénétré de
l'esprit de Dieu et qui a eu la capacité et la volonté de montrer aux hommes les
choses les plus profondes aussi bien sur Dieu que sur toute chose créée, telles
que son esprit gigantesque les a reçues de l'esprit même de Dieu !
4. Tous les soleils sont apparus pour eux-mêmes, les terres pour elles-mêmes et
toute chose sur ces terres et ces soleils est apparue pour elle-même. Ainsi
l'homme est apparu pour lui-même au sens le plus strict et d'une façon générale,
parce que toute la Création dans son ensemble correspond à l'homme et lui
ressemble, toute chose, des plus petites aux plus grandes dans toute la Création
matérielle et spirituelle correspond précisément à l'homme et doit lui corres-
pondre, car l'homme est la raison même et le but final de toute la Création. Il est
le produit final de toute l'attention de Dieu.
5. Et parce que l'homme est précisément ce que Dieu a voulu atteindre et a atteint
au travers de toutes les créations qui le précèdent, ce dont vous êtes vous-mêmes
la preuve incontestable, tout ce qui est dans les cieux et sur les astres correspond
à l'homme dit comme Moïse le dit dans la Genèse et ainsi que d'autres guides de
l'humanité l'ont déjà dévoilé. Examinez toute chose et vous découvrirez que c'est
ainsi et que cela ne peut être autrement. Toi, Cyrénius, dis-moi si Moïse te
satisfait maintenant ! »
Chapitre 223
Considérations de Cyrénius sur le récit de la Genèse
Chapitre 224
De la chute des esprits De la chute d'Adam et du péché originel
1. (Le Seigneur :) « La chute des esprits créés à l'origine ou des idées libres et
vivantes de Dieu dans l'espace infini est la grande séparation dont Moïse nous dit
: "Dieu sépara la lumière des ténèbres." Je vous ai déjà montré le sens véritable
auquel cela correspond(*) réellement, et la nécessité du monde matériel est la
conséquence de cette séparation, que ce soit notre terre dans toutes ses parties,
les soleils, les lunes et tout ce qui s'y trouve et tout l'espace infini.
2. Mais en ce qui concerne la chute d'Adam, nous avons là quelque chose de plus
objectif que ce qu'on appelle la chute de l'ange, bien que le cas soit analogue.
Avec Adam nous voyons apparaître une loi positive, alors qu'avec l'ange nous
sommes encore loin d'une telle loi, et cette loi n'apparaît qu'avec le grand
développement des êtres appelés à devenir libres ; jusque-là, Dieu mis à part,
aucune intelligence n'a reçu cette loi positive.
3. Dans la chute des esprits, la séparation procède de la nécessité et de la
contrainte, tandis que dans la chute d'Adam, la séparation procède d'un acte libre
et non de la nécessité. La chute d'Adam se situe dans la sphère spirituelle de la
liberté des premiers êtres charnels. Cette chute d'Adam est un acte prévu dans le
secret de l'ordre divin, il n'est pas une absolue nécessité, il est permis pour que le
"tu dois, tu ne dois pas" du libre arbitre de l'homme devienne cette activité propre
qui serve à le consolider.
4. Il y a une différence comparable à celle qui existe entre l'enfant qu'il faut
porter parce qu'il ne sait pas encore marcher et l'homme en bonne santé qui se
déplace sans peine.
5. Qui peut se transporter tout seul n'a nul besoin d'être porté comme un nou-
veau-né, il suffit de lui indiquer le plus court chemin et il se rend sans se tromper
là où il veut aller, et l'homme en bonne santé, solide sur ses jambes, atteint son
but sans aucun mal ; mais qu'il vienne à vouloir faire des détours, il n'aura qu'à
s'en prendre à lui-même s'il n'atteint le but proposé qu'avec peine et beaucoup
plus tard !
6. C'est aussi le cas d'Adam. S'il avait observé le commandement formel, l'hu-
manité, c'est-à-dire l'âme accomplie de l'homme, n'en serait pas venue à souffrir
dans cette chair humaine si fragile, si facilement infirme et défectueuse !
7. Mais la désobéissance à la loi formelle a induit l'homme à faire un vaste détour
où il est beaucoup plus difficile et plus long d'atteindre le but !
(*)
Voir Grand Évangile de Jean, chap. 1 et suivants. N.d.E.
8. Tu te dis certainement : "Aïe, comment un simple petit commandement moral,
qu'il soit observé ou non, peut-il avoir une pareille influence sur la nature de
l'homme ? Adam, même sans cette stupide jouissance, aurait été de toute façon
l'homme charnel qu'il est devenu en goûtant la pomme, et il aurait de toute façon
dû mourir comme meurent tous les hommes."
9. Tu as raison en partie, mais tu as aussi tort. Goûter une pomme bonne pour la
santé ne devrait faire mourir personne, sinon tous les hommes qui mangent des
pommes mourraient. Donc la pomme en elle-même n’y est quasiment pour rien.
Mais s'il est interdit pour quelque temps d'y goûter afin que l'âme se consolide, et
que l'âme consciente de sa liberté se mette à désobéir à la loi et à la transgresser,
elle rompt quelque chose dans l'être, provoquant ainsi une blessure qui reste ou-
verte et se referme très difficilement, car la cicatrice comprime les vaisseaux des
tissus de l'être et le flux vital de l'âme ainsi gêné ne peut plus circuler
convenablement, et à l'endroit de cette cicatrice l'âme ressent continuellement
une oppression intolérable.
10. Ainsi, continuellement détournée des soins qui profiteraient à son esprit libre,
l'âme met toute ses énergies à effacer la cicatrice. Et cette cicatrice se nomme le
monde !
11. L'âme voudrait bien être débarrassée de cette cicatrice qui la fait souffrir, et
cette souffrance, c'est d'être sensible aux préoccupations du monde. Plus l'âme se
donne de peine, plus la cicatrice est douloureuse, et plus elle est douloureuse plus
elle vous sollicite. Ainsi l'âme finit par ne plus se préoccuper que de sa vieille
blessure, c'est-à-dire qu'elle finit par devenir insouciante, ne se préoccupe plus de
son esprit, mais est toute à sa blessure. Et c'est ce qu'on nomme le péché originel
!»
Chapitre 225
Du poids de l'hérédité
1. (Le Seigneur :) « Mais comment une telle chose peut-elle s'hériter ? de-
mandera-t-on ! Oh ! Très facilement, notamment dans la constitution organique
de l'âme, car ce qu'elle acquiert une fois lui reste des millénaires si ce n'est pas
remis en ordre par l'esprit. Voyez le type d'un peuple. Si je vous décris
aujourd'hui la figure de son ancêtre, vous reconnaîtrez bien vite la ressemblance
commune avec lui de tous ses descendants ! Si l'ancêtre était un homme doux et
bon ainsi que sa femme, à peu d'exceptions près, tous ses descendants forment un
peuple plus doux et meilleur que si l'ancêtre était un homme colérique, fier et
vindicatif.
2. Si le trait physique ou moral d'un ancêtre est reconnaissable chez tous ses
descendants des millénaires après, à combien plus forte raison l'est aussi un trait
du premier homme de cette terre chez tous ses descendants, et comme son âme
était au commencement beaucoup plus sensible et nécessairement beaucoup plus
réceptive que les âmes de ses descendants qui reçoivent dès leur conception la
marque de leur ancêtre inscrite dans la semence de vie et ineffaçable par les
voies naturelles. Ce genre de cicatrice malheureusement défigure l'âme, c'est
pourquoi Dieu a mis tout en œuvre par la suite pour que toute âme quelle qu'elle
soit puisse par elle-même effacer à jamais cette mauvaise cicatrice. Hélas,
jusqu'ici la chose n'a guère réussi et J'ai dû venir Moi-même sur cette terre pour
extirper cette vieille cicatrice affreuse.
3. Et Je l'extirperai, mais cela n'ira pas sans de nombreuses blessures faites à ma
chair et vous ne pourrez le comprendre que lorsque cela arrivera et le Saint-
Esprit de toute vérité vous guidera alors en toute sagesse.
4. Vous avez aussi lu dans Moïse comment Jahvé maudit la terre et comment
l'homme dut alors gagner son pain à la sueur de son front sur cette terre couverte
d'épines et de chardons.
5. Voyez-vous, si vous vouliez comprendre matériellement selon le sens
extérieur des mots, vous seriez parfaitement en droit d'accuser Dieu d'incohé-
rence. Mais comme cette sentence n'est à prendre qu'au sens spirituel, cette ac-
cusation tombe d'elle-même et l'homme n'a plus qu'à s'en prendre à lui-même si
sa condition s'est dégradée, de même que les intempéries qui causent de mau-
vaises récoltes ne dépendent pas que de la volonté de Dieu, mais aussi de celle
des hommes.
6. Lorsqu'une âme est parfaitement consciente d'elle-même et qu'elle est au point
de pouvoir utiliser sa raison pour voir et reconnaître en elle-même l'ordonnance
divine, il faut qu'elle devienne autonome et s'affermisse, mais selon l'ordonnance
divine qu'elle reconnaît exister en elle. Mais si elle néglige un aspect quelconque
ou agit même contrairement à cette ordonnance divine, elle se fait à elle-même
sur ce point un tort dont elle ne se remettra jamais d'elle-même, parce que toute
son activité deviendra plus ou moins désordonnée et finira par engendrer des
faiblesses morales telles que l'aveuglement, la bêtise, l'incompréhension, la
faiblesse d'esprit, la crainte, le manque de courage, la tristesse, la peur, la colère,
la fureur et enfin le désespoir même.
7. Voilà les épines, les chardons qui vont croître sur la terre, c'est-à-dire que les
capacités de l'intelligence seront amoindries, étouffées comme les branches d'un
arbre étouffées par le lierre et le lichen.
8. La "malédiction de Dieu" représente seulement la compréhension révélée à
l'âme qu'elle a causé sa propre perte en allant à l’encontre de l'ordre divin, et que,
par sa propre faute, elle devra désormais gagner son pain à la sueur de son front !
9. De même, la "sueur de son front" est la marque de l'inquiétude qu'elle a
provoquée elle-même en jouissant de la pomme mosaïque, alors qu'elle pouvait
si facilement l'éviter. »
Chapitre 226
Chapitre 227
De la chute des esprits
1. (Le Seigneur :) « Ce qui est arrivé à l'homme quand il est tombé dans le péché
et qu'il a ainsi détruit sa nature est équivalent à ce qui s'est passé, dans une
proportion infiniment plus grande, à la création des esprits purs issus de Dieu.
2. Lorsque les pensées et les grandes idées de Dieu qui en dérivent furent sur le
point de se lier avec une intelligence infinie à un être semblable à la forme
primordiale de Dieu et qu'elles devinrent ainsi conscientes de leur existence
propre libre et indépendante, la première chose à faire pour permettre leur entière
libération était certes de leur donner l'occasion d'agir librement et de leur montrer
comment elle pouvait manifester cette liberté.
3. Comment cela devrait-il se passer ? Devait-on se contenter de leur dire : Vous
êtes maintenant vivants par vous-mêmes, faites ce que vous voulez ? ! Mais la
question est alors de savoir si des êtres qui n'ont eu jusque-là aucune expérience
propre sont capables d'agir librement ! En fait, ils ressembleront plus à des
polypes qui dévoreront tout ce qui peut assouvir leur appétit sans aucune envie
d'aller au-delà, comme vous pouvez le constater chez les peuples primitifs, car
leur unique préoccupation est leur ventre et toute leur activité va à satisfaire cette
partie-là du corps.
4. On pourrait croire aussi qu'il suffirait de leur dire d'agir en fonction des
capacités de leur intelligence pour que ces esprits en deviennent capables. Bien,
dis-Je, mais si ces êtres sont encore par trop enclins à sommeiller comme dans
leur état précédent dont ils viennent de sortir, et que le sens de l'activité ne peut
être éveillé en eux, à quoi bon ? Leur inclination primordiale à l'inaction totale
prédomine et ces êtres ne peuvent devenir autonomes. Il faut alors les contraindre
avec toute la puissance qui demeure dans le Créateur !
5. C'est bien, mais qu'en est-il alors de l'absolue autonomie sans laquelle l'être
créé (la créature) ne peut parvenir à sa libre autonomie et à son indépendance ?
Eh bien, justement, sans cette totale indépendance, sans cette autonomie, la
créature en question ne serait qu'une machine mue uniquement par la volonté et
par l'intelligence de son maître.
6. Vous voyez bien qu'il ne peut s'agir en aucune sorte d'une obligation, car
l'obligation ne peut régir qu'un être machinal, et le nombre de tels êtres forme,
hélas, l'immense majorité de la foule stupide de cette terre. Tout l'espace infini
est également rempli de telles machines, car tous les innombrables soleils, les
terres, les lunes de l'univers sont de pures machines et tous les êtres corporels qui
les habitent ne sont en fait que de simples machines, de même que le corps
humain, lui aussi n'est en fait qu'une simple machine qui ne peut être mue que
par la libre volonté de l'âme.
7. Si c'est ainsi et pas autrement, comment les esprits créés les premiers ont-ils
pu atteindre leur autonomie ? Il n'y a visiblement pas d'autres recours que le "tu
dois" même si le commandement n'est pas aussi positif que pour Adam.
8. Mais le commandement eût été vain s'il n'avait eu l'attrait de pouvoir être
transgressé et si ce penchant à le transgresser n'avait pas été donné à l'être, avec
les punitions consécutives.
9. Oui, il faut même montrer à l'être qu'il est possible de transgresser le
commandement et que si pour commencer il en tire un certain avantage, par la
suite, tôt ou tard, il en découle un désavantage qui lui causera beaucoup de
peines et d'efforts. C'est à cette seule condition que l'être nouvellement créé peut
commencer à user réellement de sa libre intelligence et de ses capacités et
advienne que pourra, bien ou mal, juste ou injuste. Bref, l'être nouvellement créé
devient autonome et commence par là l'acte principal qui le conduira à sa
véritable et pleine autonomie, car en fin de compte c'est ce dont il s'agit pour
toute intelligence créée ; l'autonomie ainsi atteinte, que ce soit par une voie
directe ou indirecte, la destruction d'une telle intelligence est évitée.
10. Et que cette autonomie puisse devenir aussi bien une bénédiction qu'une
malédiction, c'est la même chose pour le Créateur, puisqu'à chaque être la porte
reste ouverte pour prendre la voie indiquée de la félicité. Si l'être le veut, tant
mieux pour lui, s'il ne le veut pas, c'est pareil, personne d'autre que lui n'en subira
les conséquences. Il conserve éternellement son autonomie, qu'il soit heureux ou
pas, c'est identique, car en fin de compte la créature, est toujours totalement dans
l'ordre du Créateur.
11. Sachant cela, il n'est pas difficile d'imaginer le cas des premiers esprits créés,
qui furent placés devant un commandement, avec le même attrait de la
transgression lié à certains avantages momentanés, mais en même temps la claire
vision des avantages éternels bien que moins attrayants dans l'immédiat, d'agir
selon le commandement.
12. Il est clair qu'une partie des êtres ont observé les commandements et l'autre
pas, la création de la matière est le signe visible d'un jugement ou d'une punition
consécutive au fait de n'avoir pas observé le commandement, mais ce jugement
n'est qu'une voie détournée, un chemin plus long pour parvenir aussi à la félicité,
soit à l'existence parfaitement libre des esprits créés.
13. Par ailleurs, notre ange qui est en ce moment parmi nous est aussi un clair
exemple du troupeau innombrable des esprits libres créés à l'origine, mais qui ont
respecté le commandement fait à Adam, ainsi toute création matérielle est en leur
pouvoir, soumise à leur force et à leur sagesse.
14. Cet ange ne pourra certes guère prouver aux êtres humains de l'avenir que les
premiers esprits purs créés ne furent pas tous transgresseurs du commandement
de Dieu, mais cela importe peu pour la félicité des hommes, surtout tant qu'ils ne
sont pas parvenus par l'esprit à la pleine connaissance d'eux-mêmes.
15. Mais quand l'homme y parvient, les sept cieux lui sont ouverts à chaque
instant, comme on dit, et il peut avoir alors toutes les preuves qu'il veut.
16. Dis-Moi, toi Mon cher Cyrénius, si tu peux maintenant te faire une idée de la
chute des premiers esprits créés ! »
Chapitre 228
Force et résistance
1. (Le Seigneur :) « Par cet exemple il est facile de comprendre comment toute
chose est impossible sans son contraire ; comme la force de notre géant est sans
effet s'il est placé dans l'air, toute existence a besoin de son principe contraire
pour être agissante.
2. Ce rapport doit s'effectuer chaque fois à sa juste mesure, sinon rien n'existerait.
3. Ainsi l'existence de Dieu, si parfaite soit-elle, comprend aussi en elle-même
les contraires les plus élaborés sans lesquels rien ne pourrait exister. Ces
contraires s'opposent en un combat perpétuel, compte tenu que toute force vic-
torieuse s'appuie toujours en quelque sorte sur la force vaincue, comme nous
venons de le voir dans l'exemple de notre géant dont le mouvement a besoin du
point d'appui d'un sol ferme.
4. Quand Dieu a voulu créer des êtres libres semblables à Lui, Il a dû les pour-
voir des principes contraires qu'il comportait en Lui de toute éternité dans la
meilleure des proportions et qu'il devait posséder, sinon Il n'aurait jamais pu être
agissant !
5. Ainsi les êtres ont-ils été créés parfaitement identiques à Sa propre mesure, et
ils ont donc nécessairement reçu aussi la faculté de se renforcer par le combat
des forces contraires mises en eux par Dieu.
6. À chaque être ont été donnés en propre l'immobilité et le mouvement, la
paresse et l'activité, les ténèbres et la lumière, l'amour et la colère, la violence et
la douceur et mille autres principes ; mais la différence réside dans la mesure.
7. En Dieu, de toute éternité, tous les contrastes se trouvent dans la plus parfaite
ordonnance, alors que les êtres créés doivent se battre pour les ordonner par eux-
mêmes, c'est-à-dire par leur propre activité.
8. Cela a donné lieu à certaines victoires partagées, l'immobilité triomphant du
mouvement, puis le mouvement s'appliquant à amollir la pierre, mouvement et
immobilité s'opposant et se combattant chacun cherchant à imposer à l'autre le
rapport qui lui convient.
9. De nombreux individus parviennent cependant à établir en eux un juste
équilibre entre les contraires selon l'ordonnance divine, et ces êtres qui peuvent
soutenir continuellement en eux ces contraires, grâce à la complémentarité des
facultés contraires de leur intelligence, sont parfaits.
10. Voyez-vous, quand une force quelconque, dans un être librement consolidé,
cherche avec persévérance et obstination à réduire totalement au silence toutes
les autres forces contraires, elle finit par se détruire elle-même, ayant ôté elle-
même de sa route toutes les occasions de manifester sa force. Sans son contraire,
une force n'est plus une force, comme nous l'avons bien vu sur l'exemple de notre
géant.
11. Une force ainsi prisonnière d'elle-même a besoin d'une énergie incomparable
pour se libérer de son propre emprisonnement, et c'est précisément ce qu'on
appelle "Satan" et le "diable".
12. Satan est une grande personnalité correspondant à l'immobilité par trop figée,
par trop inerte. Cette grande personnalité, qui fut créée en tout premier, a voulu
réunir en elle-même toutes les autres forces ; étant devenue ainsi incapable d'agir,
elle a engendré sa propre mort. Mais les autres forces vaincues contenues en elle
ne sommeillent pas totalement, elles sont en continuelle activité et se
personnifient de façon autonome. Mais, par cette activité, elles n'animent l'être
que de façon apparente, l'être essentiel n'y participe pas, sa vie n'est donc que
tromperie face à la vie véritable qui est libre.
13. Ces forces vaincues qui ne veulent pas reconnaître la victoire sont précisé-
ment ce qu'on appelle Satan, le diable ou les mauvais esprits. Tu vois donc, Mon
très cher Cyrénius, que Je t'ai donné un petit aperçu de ce qu'est Satan et le
diable, comme tu Me l'as demandé. Si tu veux en savoir davantage, parle, et Je te
donnerai plus de détails. »
Chapitre 230
L'enseignement des esprits primordiaux
Chapitre 231
La chute de Lucifer et ses conséquences
1. (Le Seigneur :) « Que le temps est court qui va d'Adam jusqu'à nous, comparé
à la durée quasi infinie pour l'entendement humain qui va de l'apparition des
premiers esprits à l'origine jusqu'au moment où ils furent établis dans le plein
usage de leur libre arbitre, et quelle période une fois encore incommensurable va
de leur chute jusqu'à l'apparition d'Adam et ensuite jusqu'à nous !
2. Vois-tu, il y a dans les espaces infinis de la Création certains soleils
primordiaux et certains soleils centraux si éloignés d'ici qu'ils semblent aux yeux
humains les plus perçants des nommes n'être que de minuscules petits points
lumineux, alors qu'ils sont incomparablement plus grands que cette terre. Ces
.soleils primordiaux existent depuis l'époque de la chute des esprits originels, et
s'il fallait mesurer leur âge selon le nombre des années terrestres, la surface de la
terre entière ne suffirait pas pour en écrire le chiffre infini, et si un grain de sable
équivalait à mille fois mille ans de cette terre, la somme infinie de tous les grains
de sable qui forment cette terre, les mers y compris, n'atteindrait toujours pas le
nombre d'années de ces soleils.
3. Cette période-là dure donc depuis fort longtemps, et elle n'est rien comparée à
la durée du temps qui nous sépare de la période où Dieu a commencé à former à
partir de ses pensées et de ses idées les premiers esprits, puis à les rendre
autonomes. L'homme ne saurait imaginer ce qui a pu se passer dans une période
aussi infiniment longue pour que ces esprits primordiaux se préparent au libre
arbitre.
4. Et pourtant, à la fin de cette période si infiniment longue de formation des
esprits primordiaux, un nombre incomparable de ces esprits n'ont plus rien voulu
savoir du libre arbitre et, bien qu'ils aient parfaitement compris quelles étaient les
voies de Dieu, ils n'ont plus voulu les suivre, mais, à cause de l'avantage plus
immédiat, bien qu'éphémère, qui s'ensuivait, il se sont écartés du chemin de
l'ordre divin qui leur avait été ordonné et montré, pour suivre celui d'une perte
qu'ils ne doivent qu'à eux-seuls.
5. Le premier esprit de la lumière, de qui dépendaient d'innombrables autres
esprits de la lumière doués d'une intelligence infinie, s'est dit à lui-même : "Que
me faut-il de plus ? Toutes les qualités sont en moi comme en Dieu, et Dieu a
mis toute Sa force en moi, je suis donc le plus fort et le plus puissant. Tout ce
qu'il avait, Il l'a remis et j'ai tout pris. Dieu n'a plus rien et moi j'ai tout ; ainsi
nous allons voir l'avantage qu'il y a à enfreindre le commandement de Dieu et
nous saurons faire durer éternellement cet avantage ! Qui nous en empêcherait ?
À part nous, il n'existe nulle autre puissance, nulle autre intelligence dans
l'espace infini ! Qui nous disputerait donc cet avantage ?"
6. C'est ainsi, voyez-vous, que pensait l'esprit de lumière et qu'il s'adressait aux
groupes d'esprits singuliers qui lui sont soumis. Aussitôt dit, aussitôt fait, et il
devint en conséquence, prisonnier de lui-même et de sa propre inertie, se
solidifiant ainsi de plus en plus jusqu'à créer la matière, selon la voie de l'or-
donnance divine malgré tout, car le résultat certain de cette transgression du
commandement de Dieu était tout aussi bien prévu par Dieu que l'état d'absolue
liberté de tout-esprit qui respecterait ce commandement !
7. Et par cette chute le premier esprit, et avec lui tous les esprits qui lui sont
apparentés et qui lui sont soumis, se sont constitué eux-mêmes leur propre prison
très amère. Combien de temps leur plaira-t-il de rester dans cette captivité ? À
part Dieu, personne ne le sait, même pas les anges !
8. Et il est certain que depuis cet enfant prodigue de la lumière les esprits
singuliers peuvent s'éveiller grâce à la puissance de Dieu, et s'incarner comme
enfants de ce monde ; il leur est alors donné l'occasion, comme aux enfants du
ciel, de s'élever à la plus haute perfection des enfants de Dieu !
9. Toute matière est un de ces esprits singuliers qui, lorsqu'ils s'incarnent dans
une âme humaine, peuvent naître à la vie éternelle. Quand tous ces esprits
singuliers seront dégagés de la matière, alors le plein achèvement de l'existence
de ce monde sera atteint.
10. Pour ce monde-ci, il faudra certes attendre longtemps, mais cela finira bien
par arriver. »
Chapitre 232
De la gousse et de l'âme
Chapitre 233
Du savoir et de l'amour du prochain
(*)
Ce qui est permis à Jupiter ne l'est pas aux bœufs.
Chapitre 234
De l'amour du prochain
1. Le vieux Marc dit : « Seigneur, tout ce que je viens d'entendre avec les miens
m'a si profondément bouleversé que je me sens incapable de dire le moindre mot
pour définir raisonnablement ce qu'est pour moi le prochain !
2. Il est certain que celui qui se trouve proche de moi physiquement doit être
mon prochain, et s'il a besoin de mon aide, je dois la lui donner ! Mes voisins
sont aussi mon prochain, s'ils viennent me demander de l'aide, je ne dois pas la
leur refuser. Ma femme et mes enfants sont également mon prochain, je dois
prendre soin de leur bien-être matériel et spirituel.
3. Quand j'étais encore un soldat, mes camarades étaient mon prochain et c'était
mon devoir de leur venir en aide s'ils en avaient besoin. Par ailleurs, tout homme,
quelle que soit sa religion, est mon prochain dès qu'il se trouve dans le besoin, et
je ne dois pas passer à côté sans lui venir en aide.
4. Oui, je pense même qu'il ne faut pas refuser de venir à l'aide d'un animal
domestique qui en a besoin. Bref, avec sa raison limitée, l'homme doit imiter le
royaume de Dieu et dans toutes ses actions répandre les rayons de son soleil sur
toutes les créatures comme Dieu fait briller son soleil sur toute créature.
5. Certes, l'homme ne peut imiter son Créateur que selon les limites de son être,
mais comme il porte en lui la ressemblance de Dieu, ou comme il est fait de
l'image de Dieu, il faut qu'il agisse selon les aptitudes qui lui ont été conférées.
Voilà mon avis, mais Toi, Seigneur, donne-nous l'explication exacte, je préfère
mille fois entendre Ta parole que de parler moi-même ! »
6. Je dis : « Oui, Je parlerai, bien qu'il soit minuit passé, mais faisons un petit
arrêt, tendons l'oreille et écoutons si aucun appel à l'aide ne nous vient de la mer.
»
7. À peine avais-je fait cette remarque qu'un bruit parvint de la mer, où l'on
pouvait reconnaître un grand nombre de voix humaines. Marc et ses fils Me de-
mandèrent aussitôt s'il fallait aller porter secours à ces malheureux en difficulté
dans une embarcation aux prises avec le vent nocturne ou avec un des tourbillons
qui existent dans cette baie.
8. Je dis : « C'est une mauvaise embarcation chargée de jeunes lévites et
Pharisiens. Ils viennent des environs de Capharnaüm et de Nazareth et sont en
route pour Jérusalem. Ils ont préféré la mer à la terre ferme, car le parcours est
ainsi moins long et moins difficile, mais à Sibarah ils n'ont trouvé qu'une miséra-
ble embarcation et ils sont en difficulté avec le vent nocturne qui s'est levé. S'ils
ne sont pas secourus, ils périront ! »
9. Marc dit : « Seigneur, en vérité, ce ne serait pas dommage de les voir donnés
en pâture aux poissons, et quant à moi, je prendrais tout mon temps avant de
courir à leur secours, mais si Tu le veux, nous y allons ! »
10. Je dis : « Tu viens de dire très justement que l'homme a été créé à l'image de
Dieu et qu'il en a les qualités s'il fait rayonner le petit soleil qu'il a dans son cœur
sur toutes les créatures et considère comme un prochain tous ceux, amis ou
ennemis.qui sont en danger !
11. Tes paroles sont justes et vraies, mais il faut agir en accord avec elles si tu
veux que la vérité demeure en toi ! Car la pure vérité ne sert à rien à l'homme s'il
ne la met pas en pratique. Au contraire, s'il le fait, la lumière de la vie éternelle
coule à flots et illumine tous les coins obscurs de l'âme humaine comme en plein
midi le soleil répand sa lumière sur les vallées qu'il réchauffe et vivifie. Fais ce
que tu voudras ! »
12. Marc dit alors : « Vite, à l'aide, dût ce minable bateau être plein d'ours, de
tigres, de lion et de hyènes ! »
13. Aussitôt Marc et ses fils courent au rivage, montent dans une solide embar-
cation et rament jusqu'à ceux qui crient au secours.
Chapitre 235
Marc sauve les Pharisiens en perdition
Chapitre 236
Les Pharisiens critiquent Jules
1. À leur arrivée, la compagnie leur fait immédiatement place pour qu'ils puissent
s'asseoir à une table ajoutée à la nôtre.
2. Marc Me demande s'il doit présenter aux rescapés le sel, le pain et le vin !
3. Je dis : « Interroge-les ; demande aussi à ton cœur s'il est prêt à leur donner ce
qu'ils veulent. S'ils le demandent, et si ton cœur est prêt à le leur donner, eh bien,
donne. Car voilà aussi un principe du véritable amour du prochain, ton cœur doit
être prêt à agir dès que ton prochain appelle au secours, soit par des mots, soit,
par un silence significatif ; voilà une mise en pratique selon l'ordonnance divine
de l'amour du prochain, et l'âme et l'esprit du bienfaiteur ne restent pas sans
récompense. Comprends-tu ?
4. Marc dit : « Je comprends parfaitement et je vais suivre Ton enseignement ».
5. Je dis : « Va, mais ne leur dévoile pas Ma présence, car dans leur cœur régnent
encore les ténèbres et leur âme ne comprend encore aucune vérité. »
6. Marc retourne vers les rescapés pour leur demander ce qu'ils désirent pour se
restaurer.
7. L'un d'eux dit : « Ami, nous sommes très affamés, il est vrai, mais nous
n'avons que neuf piécettes de cuivre pour toute fortune et c'est bien peu dans une
région connue pour sa pauvreté. Mais si tu peux nous donner quelque chose pour
nous restaurer, donne-le nous et nous te remettrons nos neuf sous ! »
8. Marc dit : « Pas question, le vin est de ma production, je n'ai pas besoin de vos
neuf sous et vous aurez de quoi boire et manger. »
9. Marc appelle alors sa femme et ses enfants et leur demande de donner aux
nouveaux arrivés du pain, du sel et du vin en abondance. Au milieu de la nuit, il
n'est pas facile d'offrir autre chose. Les rescapés, aussitôt servis, se jettent avec
appétit sur le pain et le vin qu'ils dégustent.
10. L'un deux dit : « C'est un vin royal d'Egypte. » D'autres le disent de Perse,
l'un d'eux pense même qu'il vient de Rome.
11. Marc leur dit : « Point du tout ! Ce vin est produit ici. » Étonnement de tous,
car il est connu dans toute la Judée que les vins de Galilée sont mauvais.
12. Les nouveaux arrivés, mis en verve par ce vin qu'ils apprécient fort et qui les
rend loquaces, ne se gênent pas pour déballer devant nous toute la vérité, comme
on dit !
13. Jules, assis tout près d'eux par hasard demande en plaisantant à un jeune
Pharisien s'il a à faire à Génézareth.
14. Le jeune Pharisien dit : « Seigneur, d'où que tu sois, de Césarée ou de
Génézareth, peu m'importe ; mais ce trou est trop mauvais, même pour le diable,
sans parler d'un honnête homme de mon espèce ! Ce bled-là ne me reverra jamais
! Il y demeure un certain capitaine romain nommé Jules. Son nom suffit pour
invoquer Satan, celui qui l'approche a Satan en personne devant lui ! Je n'ai
encore jamais vu son visage, il est vrai, mais j'ai dégusté ses ordres et j'ai pu en
déduire que sa personne est identique à ses ordres.
15. Ce Jules paraît être l'ennemi juré des habitants de Jérusalem, sinon il lui
serait impossible d'agir d'une manière aussi inhumaine, aussi barbare et aussi
satanique avec les gens.
16. Il est vrai que les Templiers ne sont pas particulièrement affectionnés de ceux
qui ont subi leurs mauvais tours, leurs ruses et leurs tromperies, mais, comme en
toute chose, il y a des exceptions et il faut savoir les distinguer avant de les
condamner. Il y a ceux qui ont choisi volontairement d'en faire partie et dont on
peut dire : Volenti non fit injuria(*) mais, si méchants soient-ils dans leur
ensemble, il y en a toujours parmi eux qui s'y trouvent contre leur propre gré !
17. Si l'on est un juge honnête le cœur et la tête en place, on examine pour
commencer s'il s'agit d'une appartenance volontaire ou forcée. On est en droit de
punir le coquin qui a mal agi s'il est un membre volontaire de ce triste collège,
mais si, comme c'est notre cas, nous avons été forcés contre notre gré de faire
partie de ce collège, on devrait nous traiter autrement.
18. Par exemple, un jeune homme honnête et costaud est attaqué par des voleurs
et des assassins et conduit dans la caverne des voleurs, où on lui promet la pire
des morts s'il refuse de se faire voleur avec eux, et de même s'il fait mine de
s'enfuir.
19. Et, si un tel complice tombe aux mains de la justice et qu'il est condamné,
est-il juste qu'un tel jeune homme subisse le même sort que ceux qui, l'arme à la
(*)
Rien n'est injuste pour ceux qui l'ont voulu.
main, l'ont contraint à les suivre ? Tout doit être tenté pour sauver un tel
malheureux et lui épargner le sort de ses compagnons qui méritent la croix et
l'écartèlement. Il est facile de juger et de condamner quand on a le pouvoir, mais
reste à savoir comment.
20. À mon sens, il vaudrait mieux laisser courir dix véritables coquins si leur
faute n'est pas prouvée, plutôt que d'émettre un faux jugement, car une telle
condamnation est le pire outrage au droit sacré de l'homme. S'il est déjà pu-
nissable de rendre quelqu'un malheureux, il est incomparablement plus pu-
nissable encore d'augmenter le malheur d'un homme au lieu de l'en sortir.
21. Ami, voilà ce qui nous est arrivé à nous, jeunes templiers, fils de riches pa-
rents que nous sommes, nous avons été contraints par la force à servir le Temple,
sans être pour autant nés dans la tribu de Lévi, car cette naissance-là s'achète
maintenant !
22. Et nous qui sommes devenus ainsi lévites, nous ne pouvons plus nous défaire
de ce charmant état, malgré toute notre bonne volonté. Nous qui sommes de
jeunes hommes vigoureux nous pourrions bien nous enfuir, rejoindre l'armée
romaine, mais nous briserions ainsi le bâton de la colère sur nos parents et nos
frères et sœurs, et personne, pas même Dieu, ne les sauverait du délectable plaisir
d'aller boire l'eau de la malédiction. Tous ceux qui l'ont bue en sont morts et de la
plus atroce façon qui soit !
23. On raconte bien qu'il y a trente ans environ, un couple de Galilée en a ré-
chappé après l'avoir bue. Possible, mais nous n'étions pas témoins !
24. Vu ces considérations, il n'est pas digne d'un homme de nous traiter aussi
bestialement, et c'est bien là cette superbe de Rome qui dit Fiat justitia, perreat
mundus.(**)
25. Moi et mes compagnons, nous avons été injustement traités par le capitaine
Jules, comme on ne traite même pas du bétail, et il est compréhensible que nous
évitions comme la peste cet endroit et ce Jules qui le gouverne. »
Chapitre 237
Décision des Pharisiens
1. Là-dessus, Jules dit : « Hum ! Étrange, de la part d'un homme qui a en général
la réputation d'être parfaitement honnête et équitable ! Mais à ton avis, quelle
raison pouvait bien avoir Jules de se montrer si dur envers vous ? Car un tort doit
toujours être redressé, sinon c'est la fin des relations humaines sur cette terre ! »
2. Le jeune Pharisien dit : « Oh, des raisons, il pouvait en avoir plusieurs, mais
elles se réduisent finalement au fait que nous passons aux yeux du monde pour
être des bandits, alors que nous avons simplement été contraints de l'être. Ne
dites-vous pas dans vos lois que toute action blâmable est punissable si elle a été
commise avec libre consentement ? Sinon, il faudrait également condamner celui
(**)
Que la justice soit faite, le monde dût-il en périr!
qui, tombant d'un toit, écraserait un enfant !
3. Il est vrai que nous, jeunes Pharisiens et lévites du Temple, nous allons trouver
les gens honnêtes avec de mauvaises intentions, souvent même nos objectifs sont
si misérables que nous les réprouvons nous-mêmes au fond de notre cœur, mais
qu'y faire ?
4. Nous ressemblons à ces guerriers obligés par leurs chefs d'envahir un pays, de
tout massacrer dans l'unique but d'un secret militaire que le guerrier lui-même ne
connaîtra peut-être jamais. Il doit agir comme une machine mise au rancart dans
la suite des opérations.
5. Mais si les Romains connaissent aussi bien les intentions scélérates et les
secrets du Temple qui commet crime sur crime, tant envers l'État qu'envers
chacun, ce Jules, dans son honnêtété, devrait plutôt s'attaquer à la racine du mal
et ne plus s'en prendre aux petites branches qui n'y sont pour rien si elles ont
poussé sur un tronc aussi mauvais. C'est mon avis et celui de ceux qui
m'accompagnent. Pense ce que tu voudras, mais j'ai raison devant Dieu et devant
tous ceux qui pensent juste. »
6. Jules leur demande : « Tout cela est bel et bien et on vous a visiblement causé
à Génézareth des torts qui doivent être réparés, mais vous n'eussiez sans doute
pas été si durement traités si vous n'aviez pas pénétré d'une façon aussi
belliqueuse dans l'auberge d'Ebahi. Mais laissons cela ! Votre comportement
peut avoir été dicté en effet par le Temple, et, comme ami de la vérité, j'aimerais
savoir dans quelle intention vous êtes envoyés par le Temple à Nazareth et à
Capharnaüm ! »
7. L'homme interrogé répond : « À mes confidences faites sans retenue, tu auras
pu voir qu'au fond de notre cœur nous ne sommes pas ce que croient les
Romains, et toi qui semblés être un ami du bien et du vrai, je puis te dire la rai-
son secrète. Le bruit court à Jérusalem, et au Temple tout particulièrement, qu'un
homme répand en Galilée un nouvel enseignement anti-juif et plus précisément
contre le Temple, qu'il fait de nombreux miracles à l'appui de son enseignement,
au point même que de vieux Pharisiens connus se convertissent à sa doctrine.
8. Le Temple, tu penses bien, ne voit pas cet homme d'un très bon œil. La raison
cachée de notre venue ici est donc de savoir ce qu'il en est de cet homme. Nous
avons prêté serment et, si nous le trouvons, nous devons le gagner à la cause du
Temple, ou sinon lui tendre un piège et le faire passer dans l'autre monde ! Voilà,
en bref, les intentions du Temple dont nous sommes les pauvres et innocents
exécutants.
9. Il va de soi que cet homme, qui est certainement un brave et honnête individu,
n'aura rien à craindre de nous, si nous le trouvons, nous ne toucherons pas à un
seul cheveu de sa tête.
10. À ce que nous avons entendu dire, il doit être un homme d'une vérité, d'une
honnêteté, d'une bonté et d'une gentillesse exceptionnelles, qualités que nous
apprécions par dessus-tout ! Bref, si nous le rencontrions, le Temple n'en saurait
pas un traître mot, car nous savons tenir notre langue. Nous ne chercherions
nullement à le gagner à la cause du Temple, car personne mieux que nous ne
connaît les dessous du Temple, et si notre adhésion à leur clique nous venait
véritablement du fond du cœur, nous ne parlerions pas si ouvertement avec toi,
malgré le bon vin !
11. Mais nous avons la secrète intention de fuir le Temple, sans tenir compte du
fait que nos familles seront exposées à cause de nous à toutes sortes de tracas.
Notre situation est devenue insoutenable, c'est pourquoi nous sommes venus de
nuit pour gagner par la mer Tyr ou Sidon, où nous nous présenterons à Cyrénius,
qui est un homme très sage, pour lui exposer notre situation. Mais la plupart
d'entre nous veulent retourner auparavant à Jérusalem, pour voir nos familles et
leur demander de bien vouloir soutenir financièrement le pieux voyage que nous
devons entreprendre pour le Temple, et parvenir ainsi sans peine à Tyr et à
Sidon, puis finalement à Rome où nous pourrons atteindre notre but ! Mais il faut
pour cela nous procurer un laissez-passer sans lequel il est difficile à notre
époque de nous déplacer. Et ce laissez-passer coûte de l'argent !
12. Il nous faut donc retourner chez nous pour nous procurer l'argent nécessaire.
Mais si nous fuyons le Temple, nos anciens, c'est-à-dire nos parents, nos frères et
sœurs, auront toutes sortes d'ennuis avec le Temple et devront peut-être même
boire l'eau de malédiction. Il serait d'une injustice insupportable que, parce que
nous les aurions privés de leur argent, ils soient ensuite dans l'impossibilité de
racheter au Temple cette condamnation, car il arrive souvent que le Temple offre
aux condamnés l'option de payer des sommes naturellement énormes pour y
échapper.
13. C'est une décision difficile. Pour ma part, je ne crois pas qu'il faille retourner
à la maison, d'autant que si nous réussissions à nous procurer de l'argent, cela se
saurait, le Temple ne manquerait pas de le savoir et la chose retomberait sur nos
familles qui ne sauraient échapper à l'inévitable malédiction du Temple. Tandis
que si nous partons en secret, le Temple et nos anciens croiront qu'il nous est
arrivé malheur et ils nous pleureront, ils prieront pour nous et nous béniront
éternellement.
14. Qu'en penses-tu, toi qui semblés l'ami de la vérité et du droit, qu'est-ce qui est
le plus juste et le mieux ? »
Chapitre 238
Du respect des serments
1. Jules dit : « Votre projet me plaît, mais non les moyens pour le réaliser, qui ne
se fondent sur aucune vérité. Il est vrai que, dans ce cas, vous ne pouvez parvenir
à votre but tout en respectant la pleine vérité dans les moyens, et il n'est pas
facile de trouver un moyen terme ! Mais laissez-moi réfléchir, peut-être vais-je
en trouver un qui sera finalement juste aux yeux de Dieu et aux yeux du monde.
2. Vous êtes assermentés au Temple et c'est là le plus gros obstacle ! Comment le
contourner ? Si je ne m'occupe pas de ce serment fait au nom de votre véritable
Dieu, un mot me suffit et vous voilà libres du joug du Temple, devant Dieu et
devant les hommes. Mais votre serment solennel m'en empêche et je dois
demander conseil aux nombreux sages qui siègent à cette table. Nous allons voir
comment ne pas tomber de Charybde en Scylla ! »
3. Le jeune Pharisien dit : « Vas-y, tu feras bien, mais dis-moi un peu, aupara-
vant, qui sont ces hôtes de ta table, pour que nous puissions leur témoigner le
respect qui leur est dû. Le vieux seigneur est sans doute un Romain distingué ou
un très riche Grec ! »
4. Jules dit : « Laissons cela pour aujourd'hui, nous aurons le temps d'en reparler
demain, mais pour votre bien, il est préférable de nous occuper du principal. » Le
jeune homme est satisfait et Jules se tourne ouvertement vers Moi et Me dit en
romain que Je parlais aussi parfaitement : « Seigneur, qu'est-il juste de faire ?
Pour ma part, je jetterais par-dessus bord tous ces serments et toutes ces lois du
Temple, mais je fais fi alors d'un vœu solennel et cela retombera sur moi. Certes,
non seulement je ne fais aucun cas d'un serment prêté dans de mauvaises
intentions, mais je réprouve entièrement ce serment qui honore la fausseté et la
bassesse en prenant Dieu à témoin et à en l'appelant à l'aide. Cependant la
question du Temple est bien difficile !
5. D'une part c'est l'antique lieu des sacrifices et des purifications des Juifs,
encore vénéré à l'heure actuelle par des milliers et des milliers de dévots ; mais il
s'y passe les pires atrocités, comme chacun sait, d'où mon désir de voir réduire à
néant un pareil vœu.
6. Dis-moi ce qui est juste devant Dieu et devant les hommes, si ce que disent ces
jeunes gens est juste, ils me font pitié et je voudrais les aider ! »
7. Je dis : « Il vient d'être dit comment il faut pratiquer l'amour du prochain,
demande à ton cœur, il te donnera conseil ; de plus, tu ne romps par un serment,
quand il s'agit de refuser de pactiser avec le mal et si tu n'es pas lié pas un
serment rien ne t'empêche de faire ce qui te semble bon.
8. N'es-tu pas déjà intervenu violemment, avec raison, contre certains anciens
sages et certaines coutumes même liées à des serments ? Ces vieilles coutumes
cachaient par trop d'atrocité et tu peux agir ici avec bon sens.
9. Les autorités romaines délient de tout serment ceux qui ont dû les faire contre
leur propre volonté, même devant Dieu, surtout quand il s'agit de prêter serment
dans de mauvaises intentions. De tels serments ne relèvent que de la justice
terrestre et non plus de celle de Dieu.
10. C'est même agir par amour du prochain que de le libérer d'un serment qui le
liait à Satan. Fais ce que bon te semble et Mon ami Cyrénius ne te contredira
sans doute pas. »
11. Cyrénius dit aussitôt : « Non seulement je ne le contredirai pas, mais, pour
que Jules puisse respirer plus librement, je vais moi-même exercer mes droits
envers ces trente jeunes gens et le Temple n'aura qu'à vouloir s'en prendre à moi !
»
12. Mes paroles et celles de Cyrénius rendirent Jules infiniment heureux, et tous
s'en réjouirent.
Chapitre 239
Conseils de Jules aux jeunes Pharisiens
1. Jules alors se tourne vers les jeunes Pharisiens et leur dit : « Eh bien, chers
amis, nous avons trouvé moyen de vous justifier devant le Temple, et vos parents
pourront même déposer plainte contre le Temple à l'office romain qui
condamnera le Temple pour n'avoir pas muni ces jeunes gens de laissez-passer
en règle, comme il s'y refuse obstinément jusqu'à ce jour, à la suite de quoi vous
avez été faits prisonniers par nous, Romains, et envoyés sous escorte à notre
légion étrangère. Ainsi, vous êtes dès à présent tous en état d'arrestation, pour
votre bien ! Êtes-vous contents ? »
2. Tous disent : « Oh ! Seigneur, qui que tu sois, Dieu seul peut t'avoir inspiré ce
conseil divin, vraiment, nous voilà enfin au bout de nos peines ! Quel doux
bonheur pour nous et pour nos parents que Rome soit infiniment plus sage que
cette infâme Jérusalem ! Vénérable hôte et père de cette demeure, va nous cher-
cher à boire, pour cette bonne nouvelle, et vive tout ce qu'il y a ici ! Nous voici
tout d'un coup passés des enfers au paradis, ces Juifs aveugles attendent toujours
le Messie de la Promesse qui doit les libérer du joug romain, mais c'est parmi
vous, gentils Romains, que nous l'avons trouvé, l'unique et véritable Messie. La
pure vérité est le Messie de tous les humains, et elle se trouve parmi vous, car
vous avez avec vous la vérité pure et parfaite qui est le véritable Messie des Juifs
bien pensants et de tous les humains dont l'esprit est maintenu prisonnier par un
enseignement vain et complètement corrompu et par les lois encore pire qui en
découlent. Vénérable hôte, va nous chercher à boire, que nous buvions à la santé
de notre Sauveur le Messie ! »
3. Marc fait aussitôt apporter du pain et plusieurs cruches de vin, et le jeune
Pharisien demande encore à Jules qui se trouve là dans la compagnie et qui il est
au juste lui-même.
4. Jules dit : « Je te l'ai dit, ce Jules de Génézareth qui t'a fait tant de tort sans le
vouloir et qui se donnera toute la peine de le réparer le moment venu, eh bien, ce
Jules que vous craignez tant, c'est moi-même ! Et en face de moi est assise Son
Altesse le grand gouverneur d'Asie et d'Egypte Cyrénius que vous vouliez aller
trouver à Sidon ! Maintenant, dis-moi donc si tu es content de ces Romains si
durs et si inexorables ! »
5. Le jeune Pharisien est effrayé, ainsi que tous ses compagnons, mais il se
ressaisit vite et dit : « Noble chef, m'en veux-tu pour mes paroles sans doute
déplaisantes pour toi ? Mais je n'y puis plus rien, comme tu ne peux plus faire
qu'on ne nous ait couvert les yeux et les oreilles d'argile et conduits à Caphar-
naüm. Si tu nous avais connus, tu ne l'aurais certainement pas fait ! Tu nous
prenais pour des Pharisiens de la pire espèce, ce qui excuse la dureté de ton
attitude. Pardonne-nous et pardonne-moi notamment, car tu sais maintenant ce
qu'il en est. »
6. Jules dit : « Je parle volontiers à des gens spontanés qui expriment sans détour
et sans crainte ce qu'ils pensent, et malheur à ceux dont les pensées et les
sentiments ne sont pas en accord avec leurs paroles. Pour moi rien n'est plus laid
que le mensonge et je condamne même les mensonges officieux, car il vaut
mieux mourir aux yeux de Dieu et aux yeux de tout honnête homme que de s'en
tirer par un mensonge. Mais comme je viens de le dire, votre franc parler me
plaît, je sais ce qui vous lie à Jérusalem, je sais aussi ce qui vous amène ici ; mais
il y a encore une chose à éclaircir, c'est un détail, mais vous le ferez sans doute si
vous devez nous témoigner désormais franchement un fraternel et fidèle
dévouement. »
7. Le jeune Pharisien dit : « Noble Seigneur, parle aussi ouvertement et dis-nous
donc quel intérêt nous aurions encore à te cacher quelque chose ! C'est vrai, il y a
encore bien des choses dont nous n'avons pas parlé, mais le temps nous a
manqué, et de plus, il est difficile de parler de tout cela en telle compagnie et
surtout devant une pareille Altesse, que nous n'osons plus regarder en face depuis
que nous savons de qui il s'agit. En outre, il y a là à votre table une fillette et un
jeune garçon, et il s'agit de tenir sa langue ! Mais lorsque nous serons seuls, nous
ne te cacherons plus rien ! Et puisque tu es si miséricordieux et si clément, dis-
nous en secret ce qui te met encore mal à l'aise et qui t'a poussé tout à l'heure à
parler en romain avec cette autre dignité romaine qui est là, parmi vous. »
8. Jules dit : « Ce que vous cachez par bienséance est pour vous comme pour moi
sans importance ! Mais il pourrait être pour vous d'une extrême importance de
connaître cet homme que vous avez remarqué hélas trop tard pour aujourd'hui ;
nous verrons demain ! » Les rescapés se confondent en remerciements, se jettent
sur le pain et le vin et laissent libre cours à leur joie et à leur bonne humeur !
Chapitre 240
Portrait de Jésus
1. À la fin, avec le vin qui restait dans son gobelet, l'un des jeunes gens boit à la
santé du sage Nazaréen en disant : « Vive celui que nous cherchons et ne
trouvons nulle part, qu'il vive à jamais, où qu'il soit, qu'il soit en sûreté, plus ja-
mais nous ne serons ennemis de sa vie, qui est le salut des hommes ! Oh, si nous
pouvions le trouver, nous lui ferions un tel tableau du Temple, qu'il s'en méfierait
à tout jamais au cas où il lui accorderait encore une confiance quelconque. Mais
comme nous ne le trouvons pas, je bois ici à la santé de son corps et de son âme !
»
2. À ces mots, les yeux de Jules et de Cyrénius se remplissent de larmes. Jarah et
la plupart des disciples ont aussi les larmes aux yeux, et Jarah Me dit en secret : «
Ô Seigneur, si seulement je pouvais parler à ces rescapés, je voudrais tant leur
parler de Toi ! »
3. Je dis : « Oui, si tu ne Me trahis pas, tu peux bien dire quelque chose, ces
rescapés t'écouteront avec la plus grande attention ! »
4. Pleine de joie, Jarah dit : « Dans ce cas, je vais demander leur attention ! »
5. Je dis : « Vas-y, mais garde-toi de te mettre à pleurer à cause de Moi ! »
6. Jarah dit : « Ô Seigneur, je vais tout faire pour l'éviter ! » M'ayant ainsi ras-
suré, Jarah se lève et d'une voix claire et distincte dit : « Écoutez, mes amis, qui
venez de saluer en buvant le Sauveur de Nazareth que vous avez cherché sans le
trouver. Je L'ai salué du fond de mon cœur avec toute ma force, car j'ai l'ines-
timable bonheur d'avoir fait Sa connaissance à Génézareth, et j'ai donc la chance
bénie de pouvoir vous dresser brièvement le plus fidèle et le plus authentique
portrait de Son caractère et de ses qualités inouïes, si vous le souhaitez. »
7. Tous disent : « Oui, oui, charmante enfant de Génézareth! Mais exprime-toi
plus longuement qu'en quelques mots, si ce n'est pas trop pour ta poitrine ! »
8. Jarah dit : « Oh ! Souciez-vous d'autre chose, ma poitrine est solide et a déjà
de l'endurance. Voyez et écoutez ! Comme vous, j'ai déjà entendu parler du
Sauveur venu de Nazareth. Notre région est l'une des plus malsaines de toute la
Galilée, l'étranger y tombe malade et ne peut repartir, devant parfois rester là plus
d'une année. Les autochtones moins atteints, ne sont néanmoins jamais en bonne
santé. Le voyageur évite donc cette contrée et n'y vient qu'en cas d'extrême
nécessité.
9. Quand j'ai entendu parler pour la première fois du Sauveur de Nazareth, je me
suis mise à prier le Dieu d'Abranam, d'Isaac et de Jacob, qu'il Le fasse venir à
Génézareth la malheureuse ville. Et voilà, je fus exaucée, le Sauveur de Nazareth
vint à Génézareth. Nous vîmes arriver un Sauveur sans médicament, et chacun se
demanda comment Il pouvait guérir tous ces malades sans médicaments. Mais il
Lui suffit de dire : "Je le veux, sois ou soyez guéris", et à l'instant même, de
quelque maladie incurable qu'il s'agisse, tous les malades sont guéris. Nous
avons pu nous en convaincre nous-mêmes, à la vitesse de l'éclair, il n'y a plus
trace de malades, paralysés, aveugles, muets, estropiés, possédés, lépreux,
goutteux, tous sont guéris par la parole et la volonté du Sauveur. Jules, qui est
Romain, en est témoin comme des centaines d'autres personnes.
10. Il guérit non seulement les corps, mais les âmes et leur compréhension. Il
balaie l'aveugle superstition des cœurs des gens bêtes et égarés. Il enseigne les
ignorants d'une façon si claire et si compréhensible que tous s'en émerveillent
plus encore que de Ses miracles.
11. Enfin, Il est un maître accompli, comme Il Se montre aussi le maître de la
nature, car l'eau, l'air, le feu, la terre Lui obéissent, et je voudrais même affirmer
que le soleil, la lune et les étoiles ne Lui désobéiraient pas, car les anges du ciel
sont soumis à Sa volonté !
12. Il m'aime beaucoup et je L'aime moi-même par dessus tout, bien qu'il ne soit
pas un bel homme extérieurement parlant. Il est plutôt de petite stature et Ses
mains sont usées par le travail, mais Sa tête est d'une noblesse absolue et Ses
yeux les plus beaux que j'aie jamais vus. Les traits de Sa bouche ont une ex-
pression d'une gentillesse et d'un sérieux d'une noblesse infinie. La voix virile de
Sa bouche vous ravit véritablement, car elle résonne à vos oreilles comme le
chant le plus magnifique et le plus pur.
13. Voilà du plus céleste des Sauveurs, Celui de Nazareth, le portrait
parfaitement fidèle et authentique, des centaines de gens en sont témoins. Que
dites-vous de ce Sauveur que vous avez cherché sans le trouver ? »
Chapitre 241
Les intentions secrètes du Temple
1. Jarah dit : « Oui, mes amis, je pourrais vous raconter pendant mille ans les
choses les plus étonnantes au sujet du Sauveur de Nazareth. Mais pour de très
sages raisons, Il m'a défendu d'en parler et je ne puis vous dire tout ce que je sais,
sauf le peu que je vous ai dit.
2. Entre autres, je vous le répète, le soleil, la lune et les étoiles obéissent au bon
Sauveur de Nazareth, aussi bien que les anges du ciel. J'en vois parmi vous
quelques-uns sourire et secouer la tête, semblant vouloir dire : "Chère enfant,
dans ton imagination enfantine tu vas un peu loin ! Les anges du ciel n'obéissent
qu'à Dieu et à personne d'autre !" Mais je vous le dis, les choses sont comme je
vous les transmets en toute innocence.
3. Je vous en aurais déjà donné les preuves tangibles si vous ne vous étiez pas
mis à sourire et à secouer vos têtes d'un air de doute ! Mais je vais extirper le
doute de votre peau et vous ne me prendrez plus pour une petite idiote qui prend
sentimentalement un moucheron pour un éléphant ! Oh ! c'est peut-être le cas de
la plupart des filles, mais il n'y a pas trace de sentimentalité en moi et je puis
vous en donner la preuve la plus tangible.
4. Regardez ce jouvenceau, assis en second à ma droite et qui parle avec le fils de
Cyrénius, assis juste à ma droite. Pour qui prenez-vous ce jouvenceau ? »
5. Les rescapés dirent : « Un être humain de chair et de sang, comme nous tous !
»
6. Jarah, souriant un peu, secoue la tête et dit : « Loin de là, très loin de là, mes
chers amis ! Voyez-vous, c'est un pur archange de Dieu que le céleste Sauveur de
Nazareth a choisi parmi des myriades d'autres anges pour me guider et
m'enseigner un certain temps. Si vous ne pouvez me croire sur parole, venez ici
et soyez-en convaincus de vos propres yeux, il va se mettre à votre service
quelques instants ! »
7. L'un des interlocuteurs dit : « Oui, il faut que je m'en convainque avec les
mains et les pieds, sinon les discours de cette fillette à l'étrange sagesse tombent
dans le vide ! »
8. À ces mots, le jeune Pharisien se lève, s'avance vers Jarah avec le plus grand
respect et lui dit : « Comment veux-tu me convaincre de ce que tu viens de dire ?
»
9. Jarah dit : « Va vers le jouvenceau qui porte le nom de Raphaël, il saura bien
te convaincre ! »
10. Le jeune Pharisien va aussitôt vers Raphaël qui se lève, regarde le Pharisien
droit dans les yeux et lui dit : « Pourquoi doutes-tu de ce que ma jeune élève t'a
dit de moi ? Prends ma main et dis-moi ce que tu ressens ! »
11. Le jeune Pharisien saisit sa main et dit, tout émerveillé : « Hum ! Surprenant,
je ne sens rien d'autre que ma propre main, si serrée qu'il n'y aurait pas place
dedans pour une mouche, sans parler de ta main tout entière ! Bref, ma main
traverse la tienne, et je vois bien par là que tu n'es pas de chair et de sang comme
nous ! »
12. Raphaël dit : « Soulève une pierre qui est à tes pieds et donne-la moi ! »
13. Le jeune Pharisien soulève une pierre qui pesait bien trente livres en faisant
la remarque suivante : « Être spirituel, si ma main traverse la tienne, cette pierre
va bien aussi tomber de tes mains, comme dans du vide, car cette pierre pèse au
moins trente livres, et si elle finit par tomber de tes mains sur mes pieds, elle les
écrasera ! »
14. Raphaël dit : « Si cela arrive, je les guérirai sur-le-champ. Donne-moi donc
cette pierre sans aucun crainte ! »
15. Le jeune Pharisien remet donc la pierre aux mains de Raphaël.
16. Quand, au grand étonnement du Pharisien, Raphaël prend la pierre dans ses
mains comme si elle ne pesait pas plus qu'une plume et qu'il la lance d'une main
dans l'autre aussi facilement qu'une balle de duvet, le jeune Pharisien dit : «
Écoute, très cher esprit, ou qui que tu sois, il ne ferait pas bon se battre avec toi,
on serait sûr de tirer la courte paille ! Mais où prends-tu donc cette force
incroyable ? »
17. Raphaël dit : « Vois-tu, ce n'est rien encore, je vais réduire en poussière cette
pierre sous tes yeux. » À l'instant même Raphaël écrase la pierre et un tas de fine
poussière blanche se forme sur la table.
18. Le jeune Pharisien, voyant cette deuxième manœuvre, se penche avec
étonnement, et ses collègues accourent pour voir le miracle de plus près.
19. L'ange dit : « Pour qui en a la force, ce n'est pas bien difficile de broyer cette
pierre et de la faire retourner à son état de poussière originelle. Chacun peut
broyer une pierre comme celle-là, sinon avec les mains, du moins avec un
marteau assez dur ; mais quant à la réduire en poussière aussi fine, personne n'en
serait capable, surtout sous cette forme originelle, et pour que tu voies que cela
m'est également possible, fais attention, regarde si tu peux m'imiter ! »
20. Et Raphaël rassemble le tas de poussière sur la table, et voilà la pierre qui
retrouve sa forme et sa pesanteur première.
21. À cette manœuvre, le jeune Pharisien et ses collègues n'en croient pas leurs
yeux et restent bouche bée !
22. Mais l'ange dit au jeune Pharisien : « Vois-tu, ce n'est encore rien ! Fais bien
attention, je vais, simplement par ma volonté, réduire à néant cette pierre. » Et
l'ange dit à la pierre : « Dissous-toi dans l'éther et deviens fluide comme l'éther !
» À cet ordre, instantanément la pierre disparaît et plus personne ne la voit.
L'ange demande alors au jeune Pharisien : « Eh bien, qu'en dis-tu, mon ami,
peux-tu m'imiter ? »
23. Le jeune Pharisien dit : « Écoute, cher esprit angélique, ou quoi que tu sois,
c'est inouï, je crois parfaitement pour ma part que tu es un ange de Dieu, mais je
ne comprends pas comment avec ta force toute-puissante, tu peux être au service
d'un être humain, car c'est ce qu'a dit cette fillette et je dois la croire bien malgré
moi !
24. Y a-t-il réellement moyen sur cette terre de vous mettre à notre service ?
Comment ce Sauveur de Nazareth y est-il parvenu ? Nous savons par l'Écriture
que de nombreux anges, sur l'ordre de Dieu, ont servi les hommes, mais que tu te
trouves comme cela parmi les mortels, l'Écriture n'en a jamais parlé ! Non, non,
mes chers amis, cela va par trop loin ! Tu peux bien être un ange de Dieu, mais
aussi bien une de ces choses devant lesquelles on dit : "Dieu nous aide !" Il fait
nuit, il est même près de minuit, et c'est bien l'heure où ces "Dieu-nous-aide"
aiment à fréquenter les hommes ! Tu me parais certes bien beau, bien sage et
bien doux pour être un de ces "Dieu-nous-aide", mais ne nous y fions pas ! Si tu
avais le maudit honneur d'avoir quelque chose à faire avec ce "Dieu-nous-aide",
nous ne tenons plus guère à faire la connaissance de ce merveilleux "Sauveur" de
Nazareth, car cette petite épreuve de la pierre me donne d'étranges idées — Dieu
nous aide ! Ce n'est pas en vain que l'on dit que Satan peut aussi prendre la forme
de la lumière du ciel quand il le veut, et nous préférerions fuir d'ici. »
25. À ces mots, tous les jeunes Pharisiens, effrayés, veulent prendre la fuite mais
Cyrénius les en empêche et les prie de reprendre leur place. Ils se rassoient donc
sur leur banc, mais cette fois comme cloués sur place.
Chapitre 243
Les excuses des jeunes Pharisiens
Chapitre 244
De la foi païenne et de la foi des Pharisiens
1. Jules dit : « Bien, je vous ai déjà dit qu'il est stupide de rester encore attachés à
votre ancien enseignement. Avec le temps, votre âme finira bien par s'en défaire,
mais cela ne va pas si vite, car la bêtise est enracinée dans l'homme et ne s'en va
pas d'un coup, pas plus qu'on ne se remet facilement d'une ancienne infirmité.
Mais on finit toujours par en trouver le moyen.
2. Nous ne reprochons à personne la bêtise innée, car personne n'y peut rien
quand l'éducation n'est pas là pour en sortir. Mais quand l'occasion se présente de
faire de grandes expériences et de pouvoir s'entretenir avec des hommes de
puissante sagesse qui ont la véritable connaissance de toute chose sur cette terre,
la bêtise doit être laissée de côté et il ne faut plus accepter que ce qu'on a vu et
expérimenté par soi-même. S'y refuser, c'est mériter le fouet, et si le fouet n'est
pas efficace, il faut la mise à l'écart ou l'internement dans une maison de fous,
parce que la bêtise par trop enracinée met les autres gens en colère, ce qui n'est
pas bon.
3. Mais ce n'est sans doute pas votre cas, parce que votre intelligence s'est déjà
trop éveillée au contact de nous, les Romains et les Grecs, qui sommes
actuellement les peuples les plus évolués et les plus expérimentés de cette brave
planète, malgré tous les reproches qu'on peut nous faire de ne pas croire au Dieu
unique d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. Mais si nous vous demandions si vous
croyez aussi fermement que vos cérémonies et vos discours le laisseraient
supposer, vos actes, sinon votre bouche qui ment toujours, ne sauraient cacher la
réalité, ils témoignent visiblement que vous feignez toujours d'avoir la foi, et que
vous avez l'art de vous faire payer votre hypocrisie. Ainsi, quand je compare
votre foi à la nôtre, je puis dire assurément que nous sommes mille fois plus
croyants que vous !
4. Oui, nous reconnaissons que votre Dieu est le seul et unique vrai Dieu, alors
que chacune de nos divinités ne sont que des personnifications des sublimes
attributs' divins que la fantaisie humaine peut se représenter, et qui ne sont pas
comparables à votre Dieu unique que vous ne reconnaissez en fait pas plus que
ses attributs les plus sublimes, tandis que nous les vénérons sous forme d'images.
Vous avez encore à apprendre, à expérimenter et à voir quels sont les rapports de
toute chose en ce monde avec la vérité qui s'y trouve cachée.
5. Si vous trouvez la vérité, acceptez-la, restez-lui fidèles. Pensez et agissez selon
la vérité et vous serez les actifs enfants de Dieu, tandis que vous prétendez,
comme tous les Juifs, être les enfants de Dieu, et qu'au fond de votre cœur vous
ne croyez même pas qu'il y ait un Dieu ! »
TABLE DES MATIÈRES
Chapitre 2 .............................................................................................................4
Chapitre 3 .............................................................................................................6
Prières de Kisjonah
De la conscience du cœur
Chapitre 4 .............................................................................................................8
Chapitre 5 ...........................................................................................................10
Chapitre 6 ...........................................................................................................12
Chapitre 7 ...........................................................................................................14
Chapitre 8 ...........................................................................................................15
Chapitre 9 ...........................................................................................................16
Chapitre 10 .........................................................................................................18
La loi de l'ordonnance
Chapitre 11 .........................................................................................................20
Mathieu 13, 53
Chapitre 12 .........................................................................................................22
Chapitre 13 .........................................................................................................25
Chapitre 14 .........................................................................................................27
Chapitre 15 .........................................................................................................29
Chapitre 16 .........................................................................................................30
Matthieu 13, 54
Chapitre 17 .........................................................................................................32
Chapitre 18 .........................................................................................................34
Chapitre 19 .........................................................................................................35
Chapitre 21 .........................................................................................................39
Chapitre 22 .........................................................................................................40
Chapitre 23 .........................................................................................................42
Matthieu 13, 57
Chapitre 24 .........................................................................................................44
Chapitre 25 .........................................................................................................45
De l'indignité du peuple
Matthieu 13, 58
Chapitre 26 .........................................................................................................46
De la législation
Chapitre 27 .........................................................................................................49
Chapitre 28 .........................................................................................................50
Chapitre 29 .........................................................................................................52
De la bénéfique formation d'un esprit libre
Chapitre 30 .........................................................................................................53
Chapitre 31 .........................................................................................................54
Chapitre 32 .........................................................................................................55
De l'essence de Dieu
Chapitre 33 .........................................................................................................56
Chapitre 34 .........................................................................................................58
Chapitre 35 .........................................................................................................59
Chapitre 36 .........................................................................................................62
Chapitre 37 .........................................................................................................64
Chapitre 38 .........................................................................................................66
Chapitre 39 .........................................................................................................67
Chapitre 40 .........................................................................................................69
Chapitre 42 .........................................................................................................72
Le jugement dernier
Chapitre 43 .........................................................................................................73
Chapitre 44 .........................................................................................................74
Du sacrifice de soi
Chapitre 45 .........................................................................................................78
Chapitre 46 .........................................................................................................79
Chapitre 47 .........................................................................................................81
Conseils à Jaïrus
De l'importance de l'homme
Chapitre 48 .........................................................................................................83
Chapitre 49 .........................................................................................................85
Jésus à la synagogue
Chapitre 50 .........................................................................................................89
De l'Arche d'alliance
Chapitre 52 .........................................................................................................92
Le faux et le vrai
Chapitre 53 .........................................................................................................94
Chapitre 54 .........................................................................................................96
Chapitre 55 .........................................................................................................97
Chapitre 56 .........................................................................................................99
Chapitre 57 .......................................................................................................101
Chapitre 58 .......................................................................................................102
Chapitre 59 .......................................................................................................104
Chapitre 60 .......................................................................................................105
Chapitre 61 .......................................................................................................106
Du libre arbitre
Chapitre 62 .......................................................................................................107
De la pensée du cœur
Chapitre 63 .......................................................................................................109
Chapitre 64 .......................................................................................................111
Chapitre 65 .......................................................................................................112
Des magiciens
Chapitre 66 .......................................................................................................114
Chapitre 67 .......................................................................................................116
Chapitre 68 .......................................................................................................118
Chapitre 69 .......................................................................................................120
Chapitre 70 .......................................................................................................122
Résurrection de Josoé
Chapitre 71 .......................................................................................................124
Chapitre 72 .......................................................................................................125
De la connaissance
Chapitre 74 .......................................................................................................128
Chapitre 75 .......................................................................................................130
Chapitre 76 .......................................................................................................132
Chapitre 77 .......................................................................................................133
Chapitre 78 .......................................................................................................135
Ruse de Josoé
Chapitre 79 .......................................................................................................136
Chapitre 80 .......................................................................................................138
Chapitre 81 .......................................................................................................139
Chapitre 82 .......................................................................................................141
Mort de Jean-Baptiste
Chapitre 83 .......................................................................................................142
Chapitre 85 .......................................................................................................147
Chapitre 86 .......................................................................................................148
Chapitre 87 .......................................................................................................152
Chapitre 88 .......................................................................................................154
De la crapulerie du Temple
Chapitre 89 .......................................................................................................156
Chapitre 90 .......................................................................................................158
Chapitre 91 .......................................................................................................160
Chapitre 92 .......................................................................................................161
La grâce du Seigneur
Chapitre 93 .......................................................................................................163
De la nature humaine
Chapitre 94 .......................................................................................................164
Chapitre 95 .......................................................................................................166
Guérison et multiplication des pains pour cinq mille hommes dans le désert
Chapitre 96 .......................................................................................................168
Chapitre 97 .......................................................................................................170
Chapitre 98 .......................................................................................................173
Chapitre 99 .......................................................................................................175
Arrivée à Génézareth
Matthieu 14, 34
Définition du prophète
La prairie bénie
Promenade en mer
De la prière authentique
De l'éducation et de l'amour
Matthieu 14, 35
Le pouvoir de l'amour
Matthieu 14, 36
Merveilleuse ascension
Descente de la montagne
L'ardeur de l'amour
Le psaume 47 de David
De la justice
De la dureté céleste
Matthieu 15, 21
Chapitre 168 .....................................................................................................294
La source miraculeuse
Matthieu 16, 13
Pêche miraculeuse
Visite de Cyrénius
De la contradiction et de sa nécessité
Matière et esprit
Amour ou coercition
De la pureté et du péché
La nécessité
De l'âme et du corps
De la fonction de l'alimentation
De l'autonomie de l'ange
De la terre et de la lumière
Chapitre 221 .....................................................................................................378
Du poids de l'hérédité
Force et résistance
De l'être de Satan
De l'amour du prochain
Portrait de Jésus
(institutions), 133
AMOUR
(envers Jésus), 41
CŒUR
(pensée du), 62
(voix dans le), 230
ÉDUCATION
(diffère selon les individus et les peuples), 205
(du monde et céleste), 191
ENFANTS
(amour des enfants des autres), 68
(massacre d'Hérode), 90
(tués par le Temple), 178
(morts et éduqués dans l'au-delà), 69
ENSEIGNEMENT DE LA DOCTRINE
(et guérison), 3
(sans contrainte), 59, 61
(par les Esséniens), 150
(et guérison), 46
(condition de l'aide divine), 67
(et signes), 3
HUMILITÉ
(et esclavage), 207
(et renoncement), 76
(vole de l'or), 2
(dispute avec Thomas), 74
(utile au Seigneur), 77
MAGICIENS, 65
MALADIE ET DOULEUR (moyen de préserver l'âme), 169
MANNE (dans le désert), 213
MARTYRE (effet sur l'âme), 1
MASSACRE DES INNOCENTS, 90
MATIÈRE (nature spirituelle de la), 195
MÉCHANCETÉ (nécessité de la), 59
MÉDECINS (au service du prochain), 46
MENSONGE (bon et mauvais), 78
MER DE GALILÉE (soulèvement de la), 134, 160
MESSIE, 12, 13, 53, 88
MESURE (juste), 10, 185
MIRACLES
(utilité et bon usage), 3, 32
(permis de la force divine), 65
(au Temple), 67
(à Dieu), 40
ORDRE DIVIN, 38
PAIN ET VIN
(contre le vertige), 131
(du ciel), 156
(pour les ressuscités), 70, 71
(pour les esprits de la montagne), 64
PASSIONS (utilité des), 60
PAUVRETÉ ET RICHESSE, 68
PÊCHE MIRACULEUSE, 43, 180, 189
PÉCHÉ ORIGINEL, 224, 225, 226
PENSÉE
(processus de la), 62
(de Dieu, origine de la Création), 157
PERLES
(pas pour les pourceaux), 150, 153
(volées au Temple), 5
PEUPLES IMMATURES
(destinée dans l'au-delà), 138, 140
PEUPLES (éducation des), 138, 205
PEUR (causes de la), 132
PIERRE
(épreuve de la foi sur l'eau), 101
(de Jaïrus), 47
(mauvaises actions), 212
PRIÈRE
TEMPLE
(achat des charges), 47
(corruption), 82, 88
(politique du), 2
(faux miracles), 51, 178
(cruauté), 177, 178, 182
(tribut et dîme à payer au), 181, 192
(règles du), 54, 123
(cupidité), 1 sq., 163
TERRE
(atmosphère), 148
(âmes terrestres et stellaires), 169
THOMAS (selon l'idée du Christ), 176
TRAVAIL (à donner aux mendiants qui en sont capables), 157
TRENTAINE (âge de la maturité de l'âme), 210
(en l'homme), 58
(des prophètes), 108
INDEX DES NOMS DE PERSONNES
Les chiffres renvoient aux numéros des chapitres
Aristote : 93
Auguste : 83
Bab :68, 71, 81, 91
Bar: 88
Baram : 4
Bartholomée : 96, 98, 99, 102, 110
Belzébuth : 19
Benjamin : 87
Bilam : 176
Borus : 11, 13, 15, 16, 22, 37, 44, 46-49, 53, 57, 67, 70, 71, 78, 83, 85, 90-94
Cerbère : 4
Charon : 4
Chiwar : 52-54, 84-91, 93, 94
Cornélius : 16, 20, 37, 47, 48, 55-57, 67, 70, 80, 82, 121, 163, 192
Crésus : 1
Cyrénius : 25-27, 30, 37, 39, 45-48, 52, 55-59, 61-64, 66-68, 72, 73, 80, 82, 118, 121, 124, 163,
183-187, 189-193, 197, 199, 200, 206, 209-211, 213, 214, 218, 219, 222, 223, 228, 230, 233, 238,
239, 242, 89, 92,
Daniel : 33, 49, 107
David: 5, 8, 35, 41, 53, 71, 107, 158
Dismas : 161
Ebahi : 103-105, 107-110, 112, 113, 115, 117, 119, 121, 122, 126, 129, 145, 146, 151, 154, 161,
162, 164, 167, 190-192, 237
Eleazar : 88
Elias : 12, 15, 33, 47, 53, 88, 175, 176
Eliud : 88
Esau : 87
Ezéchiel : 33
Faustus : 2, 4-8, 10, 11, 13, 16, 20, 26, 37, 52, 57, 65, 67, 70, 118, 125
Goliath : 191
Hagar : 107
Hénoch : 53, 226
Hérode : 47, 81, 82, 84-86, 91, 92, 95, 106, 192
Hérodias : 82, 91
Pierre : 36, 37, 40, 43, 62, 73, 96, 100, 101, 128, 143, 147, 148, 169, 170, 176, 187
Pharaon : 1
Philopold : 14-16, 56
Pilah : 2, 5, 121
Platon : 176
Pluton : 4
Ponce Pilate: 163, 192
Proserpine : 4
Protée : 192
Pythagore : 83, 93
Rhadamanlhe : 4
Rahel : 103
Raphaël (archange) :142, 143, 146, 152, 156, 157, 160, 161, 165, 166, 242
Roban : 35-37, 39, 49, 56, 81-86, 91
Sabaoth : 17
Salomon : 5, 72, 201
Samuel: 27, 111, 176
Sarah : 12, 13, 15, 16, 19, 20, 25, 40-44, 46, 49, 53, 87, 90
Satan : 1, 2, 6, 9, 18, 20, 36, 60, 63, 72, 75, 81, 85, 86, 89, 90, 151, 152, 169, 210, 228-230, 242
Saül : 27
Simon Juda : 176, 179, 188, 189
Simon (fils de Joseph) : 22, 100
Thomas : 74, 75, 96, 176, 204
Zacharie :52, 71, 86, 124
Delphes, 88, 98
Gadarena, 180
Génézareth, 95, 102, 118, 145, 146, 162, 170, 174, 180, 189, 190-192, 203, 235, 236, 239
Gomorrhe, 177,213
Herculanum, 163
Jérusalem, 5, 13, 22, 48, 51-53, 72, 74, 83, 86, 90, 98, 104, 116, 121, 125, 140, 157, 163, 176, 178,
234, 237, 243
Jessaïra, 83, 95, 121, 167
Kis, 7, 11, 36, 64, 85, 95, 96, 118, 121, 125, 180, 184
Magdalena, 173, 174
Nazareth, 1, 7, 11, 13, 16, 20, 34, 47, 48, 52, 53, 72, 83, 85, 86, 92, 94, 95, 103, 117, 118, 125,
162, 184, 234, 237, 240-242
Niniv, 5, 213
Pompéi, 163
Rome, 1, 2, 4, 13, 21, 26, 48, 72, 83, 106, 161, 192, 211 ,212
Salem, 66
Sibarah, 36, 91, 95, 96, 180, 181
Sichar, 4, 11, 36, 37, 52, 74, 83, 86, 178
ACHEVÉ D'IMPRIMER
EN JUILLET 1993
PAR L'IMPRIMERIE DE LA MANUTENTION
A MAYENNE
N° 228-93