6t Trottinettes Rapport VF
6t Trottinettes Rapport VF
6t Trottinettes Rapport VF
Juin 2019
CITATION DE CE RAPPORT
Figure 1 : Exemple de variation des effectifs au sein du sous-échantillon des visiteurs étrangers suite au redressement par
pondération
1
6t-bureau de recherche, ADEME, (2018), Etude sur les impacts des services de vélos en free-floating sur les
mobilités actives, 86 p.
2
CGDD, (2010), La mobilité des Français. Panorama issu de l’enquête nationale transports et déplacements 2008,
22 p., https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2018-
11/La_mobilite_des_Francais_ENTD_2008_revue_cle7b7471.pdf (consulté le 09/05/2019)
3
STIF-OMNIL-DRIEA, (2013), Le renouveau du vélo en Île-de-France (fiche vélo de l’EGT 2010), 4 p.
4
6t-bureau de recherche, IAU, LVMT, Orfeuil J.-P., (2018), L’impact du service Uber sur l’utilisation de la voiture en
Île-de-France, 109 p.
Figure 3 : Seuils adoptés pour les tests de significativité des croisements de variables
La mention « TS » en dessous du tableau utilisé en exemple indique que le test du Khi 2 est très
significatif, au sens où l’on peut rejeter l’hypothèse que les deux variables croisées (le sexe et
la composition du ménage) sont indépendantes avec une probabilité supérieure à 99 %. Cette
probabilité se calcule par l’opération 1 - p et la valeur p est strictement inférieure à 0,01 dans
l’exemple utilisé. Cette valeur p est déterminée par recoupement entre le degré de liberté
(« ddl ») et la valeur résultant du test du Khi 2 (« Khi2 »).
5 A. Blanchet, A. Gotman, (1992), L'enquête et ses méthodes : l'entretien, Paris, Edition Armand Colin
6
Afin de conserver l’anonymat des usagers ayant accepté de répondre à cette enquête, leurs prénoms ont été
modifiés.
Les entretiens ont été menés à partir d’un guide composé de questions ouvertes, laissant libre
cours à la conversation impliquant une méthode inductive tout en orientant l’échange vers le
sujet qui nous intéresse ici. Des questions de relance plus détaillées ont également été
proposées, afin d’aborder tous les points souhaités et de rendre l’entretien plus dynamique en
cas de besoin. L’objectif, par cette méthode, est ainsi de faire parler le plus possible l’enquêté,
afin de recueillir un maximum d’informations détaillées sur l’expérience vécue (ressenti
subjectif).
L’objectif principal que nous avons souhaité atteindre grâce à cette approche qualitative est
d’apporter des éclairages supplémentaires sur des résultats que l’approche quantitative ne
permet pas d’expliciter suffisamment. Nous avons ainsi souhaité nous concentrer sur deux
principaux sujets : l’évolution des pratiques modales concernant la marche et les transports en
commun suite à l’utilisation de services de trottinettes en free-floating ainsi que les usagers
intensifs, utilisant quasi-quotidiennement des trottinettes (motivations, usages, etc.).
Figure 5 : Marché des ventes de trottinettes auprès des particuliers en France (données compilées issues des études de la
FPMM 2017 & 2018)
10 Baromètre du numérique 2018 : étude réalisée par le Credoc pour l’Arcep, le CGE et l’Agence du numérique
11 Dès 2014 sur un campus chinois, bien que l’expérience des White Bikes menée par le collectif de militants Provo à Amsterdam en 1965 ainsi que le système Call
a Bike de la Deutsche Bahn lancé à Munich en 2000 puissent apparaître comme les prémices de ce phénomène
12 Heran F., 2018, « Les nouvelles formes de la mobilité́ : trottinettes électriques, Hoverboard, bicyclettes électriques » in Réalités industrielles, série des Annales
des Mines, n°2018/2, P36-40.
14Bird vient d’annoncer une augmentation de son tarif à la minute de 15 à 25 centimes. Un trajet de dix minutes revient désormais 3,50 euros contre 2,50 euros
avec l’ancienne formule. Source : https://bit.ly/2Whp0YD
22 https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/trottinettes-electriques-voi-la-start-up-suedoise-qui-veut-concurrencer-bird-et-lime-148659
(consulté le 16/04/19)
23https://business.lesechos.fr/entrepreneurs/financer-sa-creation/0600816590740-la-start-up-de-trottinettes-electriques-voi-appuie-sur-l-accelerateur-
327467.php (consulté le 16/04/19)
24https://www.journaldunet.com/economie/transport/1422442-trottinettes-partagees-les-4-defis-qui-attendent-les-start-up-pour-eviter-la-chute/ (16/04/19)
et entretiens avec acteurs du secteur.
La taille des flottes de chacun des opérateurs ne peut à l’heure actuelle être estimée
précisément, le secteur évoluant très rapidement et les opérateurs ne communiquant pas sur
le sujet. Il est ainsi fort à parier que les estimations recensées à travers notre veille médiatique
et échanges avec les acteurs du secteur reflètent une une situation très en deçà de la réalité
des flottes actuelles de trottinettes électriques partagées en France. Nous pouvons cependant
faire l’hypothèse d’une répartition des entreprises au sein de trois sous-groupes :
80 PONY BIKES
100 DOTT - UFO
Amélioration de l’équipement
Ainsi, un an après leur lancement, les stratégies de développement de ces nouveaux services
de mobilité sont d’ores et déjà en train d’évoluer. Un des premiers chantiers sur lequel les
opérateurs semblent d’ores et déjà s’atteler est celui de renforcer la robustesse et la sécurité
des véhicules, tout en optimisant leur coût de production.
En effet, la presse a fait écho ces derniers mois de défaillances rencontrées sur certains
modèles de trottinettes électriques première génération, notamment utilisés par Lime. Dans
un post sur leur blog officiel, l’entreprise32 explique avoir récemment détecté un bug affectant
le système de freinage de certaines de ses trottinettes. Le service a d’ailleurs été suspendu
temporairement en Suisse et en Nouvelle-Zélande dans l’attente d’une solution permettant de
sécuriser les véhicules.
Les nouveaux modèles envisagés devraient être plus solides. Les trottinettes devraient être
dotées d’un écran connecté et de batteries amovibles ce qui devrait faciliter la recharge et
minimiser les coûts de maintenance. Ainsi, Bird a annoncé fin octobre 2018 le lancement de
« Bird Zero » une trottinette dont la batterie aura une durée de vie plus importante de 60 % que
le premier modèle et dont les composants seront plus solides. Lime entend également
proposer un nouveau modèle (la « Lime-S Gen 3 ») qui se caractérisera par des roues de 10
pouces (celles du modèle Ninebot étant de 10 pouces), une suspension à l’avant, un écran LCD
intégré au guidon et une meilleure autonomie (60 km annoncés, soit 20 % de plus que le
précédent modèle).
31 Bird annonce 550 dollars en 2018 avec pour objectif de descendre à 360 dollars avec la nouvelle génération de trottinettes
32 https://www.li.me/second-street/safety-update-february-2019 (consulté le 18/04/19)
33 https://www.theverge.com/2019/4/9/18302136/bird-electric-scooter-price-increase-cities (18/04/191)
34 https://bit.ly/309FwZR (09/05/19)
35 https://shop.bird.co/ (consulté le 09/05/19)
36 https://www.theinformation.com/briefings/cbb888 (consulté le 09/05/19)
37 https://www.theverge.com/2018/10/23/18013852/lime-scooter-retail-store (consulté le 27/03/19)
41 Le règlement 168/2013 du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2013 relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à deux ou
trois roues et des quadricycles qui abroge la directive de 2002 exclut de manière explicite les gyropodes et les véhicules ne disposant pas de sièges de son champ
d’application.
42Ce caractère a notamment été renforcé par la Commission européenne qui, le 12 mai 2003, dans une réponse à une question de Kathleen Van Brempt (PSE-
Belgique) du Parlement européen, a ajouté que la règlementation de ces engins « relevait plutôt, pour un mode qui ne permet le déplacement que sur de très
courtes distances, du niveau local et national ».
43 https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?cidTexte=JPDF3101200100001705&categorieLien=id (consulté le 09/04/2019)
44 https://www.cerema.fr/system/files/documents/2017/08/Rapport_EDP_20120521.pdf (consulté le 09/04/2019)
45En janvier 2003, la Directrice de la Sécurité et de la Circulation Routière (DSCR) répond à la société Segway par un courrier indiquant que ces engins sont soumis
aux règles du Code de la route relatives aux piétons et ne doivent en aucun cas dépasser la vitesse de 6 km/h sur les trottoirs et espaces dédiés aux piétons en
reprenant l'avis de la Commission européenne du 12 juillet 2002.
Italie, Royaume-Uni Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne (soumis à l’accord des municipalités), Grèce, Hongrie, Irlande,
Luxembourg, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Suède, Suisse
Assimilé au vélo Assimilé au piéton (vitesse max 5-6 km/h) Assimilé à un cyclomoteur léger / « cyclomoteur spécial »
Allemagne, Autriche, Suède, Belgique (conditions Autriche, Suède, Belgique (conditions de vitesse – Suisse, Pays-Bas (« bijzondere bromfiets »)
de vitesse – entre 6 et 18 km/h), Danemark, si < 6 km/h), Pays-Bas
Luxembourg
Allemagne, Autriche, Pays-Bas, Portugal, Suisse Belgique, Espagne, Pays-Bas, Portugal, République Allemagne, Belgique, Pays-Bas
tchèque, Suisse, Allemagne
Circulation autorisée sur les aménagements Circulation autorisée sur la chaussée Circulation autorisée sur les trottoirs, aires piétonnes (si <
cyclables (si < 20-25 km/h) 5-6 km/h)
Figure 10 : Panorama des réglementations des e-EDP à l’échelle européenne en 2018 (hors France) (source : Compilation non exhaustive à partir de « l’Étude parangonnage réglementation EDP
CERTU CETE Ouest de 2012 », mise à jour par 6t-bureau de recherche, avril 2019)
50https://legistar.council.nyc.gov/LegislationDetail.aspx?ID=3763645&GUID=1B9B8689-094C-46D1-8F0C-8BB71C99E149&Options=&Search= (consulté le
19/04/19)
Ces polémiques ont poussé les décideurs à s’adapter et ont eu des effets variables : si, dans
certains cas, des chartes de bonne conduite à destination des opérateurs ont été mises en
place, dans d’autres cas les opérateurs ont dû se retirer sous la pression des autorités locales.
53 https://github.com/CityofLosAngeles/mobility-data-specification
La ville de San Francisco constitue un exemple intéressant. L’État de Californie autorise les villes
de son territoire à statuer sur la pratique des e-EDP. En mars 2018, plusieurs services de
trottinettes en free-floating débarquent dans la ville. Ces derniers sont interdits par la
municipalité un mois plus tard après que les agents de la ville aient reçu plus de 1 800 lettres
de plainte de la part de piétons bloqués ou bousculés par les trottinettes.
En juin 2018, la municipalité publie un arrêté proposant la mise en place d’un projet
d’expérimentation d’un an devant aboutir à la sélection de 5 services (sur 12 ayant proposé
leur offre, dont Uber, Lime et Bird). Le cahier des charges de l’expérimentation (voir figure 12)
oblige les opérateurs à assurer :
- Un développement progressif de leur flotte (1 250 trottinettes pendant
l’expérimentation, 2 500 post-expérimentation si les résultats sont positifs, soit 500
trottinettes maximum par compagnie) ;
- Une campagne de communication pour faire respecter l’interdiction de l’usage des
trottoirs et pour sensibiliser les usagers au respect des piétons ;
- Le partage des données avec la Ville de San Francisco ;
- Un programme incitatif pour les personnes à faibles revenus ;
Deux services sont sélectionnés : Scoot et Skip, loin derrière les géants du marché Bird, Lime et
même l’offre d’Uber via JUMP. Aussi, depuis octobre Skip et Scoot ont pu déployer 625
trottinettes chacun54. Ce nombre pourrait bientôt être doublé si les deux entreprises peuvent
justifier auprès de la ville l’inscription d’un certain nombre de nouveaux usagers à faibles
revenus.
57https://www.oregonlive.com/commuting/2019/03/e-scooters-may-return-april-26-portland-says-with-potentially-6-times-as-many-devices-allowed.html
(consulté le 08/04/19)
58https://www.oregonlive.com/commuting/2019/03/e-scooters-may-return-april-26-portland-says-with-potentially-6-times-as-many-devices-allowed.html
(consulté le 09/04/19)
59 https://www.paris.fr/actualites/paris-renforce-la-regulation-des-trottinettes-electriques-en-libre-service-6647 (consulté le 08/04/19)
60 http://www.leparisien.fr/paris-75/trottinettes-sur-les-trottoirs-la-ville-de-paris-passe-a-l-offensive-26-03-2019-8040150.php (consulté le 08/04/19)
Figure 13 : Montant des redevances pour les véhicules en free-floating mises en place par la Ville de Paris
Les principaux services de trottinettes à Paris cumulant plus d’un millier de véhicules, cela
revient à une redevance de 60 000 € chacun (60 x 1 000 €). Ce que ne permet pas encore ce
système, c’est la possibilité de réguler de façon dynamique les services comme nous l’avons
précédemment vu dans les exemples américains. L’argent récolté devrait servir à
l’aménagement de places de stationnement dédiées aux engins de ces compagnies61.
61
http://www.leparisien.fr/paris-75/trottinettes-velos-et-scooters-le-free-floating-en-debat-au-conseil-de-paris-
31-03-2019-8043543.php (consulté 22/05/19)
62
https://www.lyoncapitale.fr/actualite/bird-un-7e-service-de-location-de-trottinettes-a-lyon/ (consulté le
08/04/19)
(consulté le 08/04/19)
L’essentiel
• Le profil des usagers locaux de trottinettes en free-floating est proche de celui des
usagers de vélos en free-floating, avec une majorité d’hommes (66 %) et une
surreprésentation des jeunes et des cadres (53 %).
• Parmi les visiteurs (qui constituent 42 % de l’ensemble des usagers), la grande
majorité sont des visiteurs étrangers.
• 27 % de l’ensemble des usagers n’ont réalisé qu’une seule location de trottinette
électrique en free-floating mais 30 % en utilisent au moins une fois par semaine. Les
usagers les utilisant à une fréquence plus élevée sont plus souvent des hommes et
ils sont également plus jeunes.
Nous travaillons ici sur l’échantillon des usagers des trottinettes électriques en free-floating,
qui compte 4 382 répondants. Ces derniers peuvent avoir utilisé une trottinette dans leur ville
de résidence ou bien dans une autre ville. Nous distinguons donc dans l’analyse les usagers
locaux des visiteurs.
- Les usagers locaux représentent 58 % des usagers. Il s’agit des personnes ayant réalisé
leur dernière location dans leur commune de résidence. Pour Paris, les habitants de la
petite couronne (Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Hauts-de-Seine) ayant réalisé leur
dernière location dans la capitale sont comptabilisés comme « usagers locaux », en
raison de leur proximité géographique avec la capitale. De même, les habitants de la
grande couronne (Val d’Oise, Seine-et-Marne, Essonne, Yvelines) sont considérés
comme des usagers locaux à Paris. Bien qu’ils en soient géographiquement moins
proches que les habitants de la petite couronne, ils y ont pour beaucoup leur lieu de
travail ou des lieux de rendez-vous professionnels. Ainsi, ils indiquent en majorité que
cet usage d’une trottinette électrique hors de leur agglomération de résidence (à Paris,
donc) se fait en lien avec leur activité professionnelle et non pas dans le cadre d’un
séjour touristique. En outre, les gares et arrêts de transports en commun sont très
fortement représentés parmi les origines et destinations de leurs trajets. Pour les
habitants de la grande couronne utilisant une trottinette électrique en free-floating à
Paris, cette pratique s’inscrit donc dans leur quotidien, ce qui permet de les considérer
comme des usagers locaux. Par contre, pour les villes de Lyon et Marseille, seuls les
habitants de ces communes intra-muros sont considérés comme des usagers locaux.
Avec une moyenne de 36 ans, la classe d’âge la plus représentée chez les usagers locaux de
trottinettes en free-floating est celle des 25-34 ans, qui regroupe 28 % des usagers locaux. Cette
tranche d’âge est aussi surreprésentée par rapport à l’ensemble de la population française (les
25-34 ans représentent 14 % de la population française70). Il y a donc une surreprésentation
des jeunes parmi les usagers des trottinettes en free-floating (plus de la moitié a moins de 35
ans).
69
DGE, (2019), Mémento du tourisme édition 2018, 148 p.
70
https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381474 (consulté le 03/06/2019)
En termes d’âge, les usagers des trottinettes électriques en free-floating sont très proches des
usagers des vélos en free-floating, ces derniers n’étant que légèrement plus « jeunes » (les 25-
35 représentent 34 % des usagers de VFF contre 28 % des usagers de trottinettes). Cette légère
différence pourrait s’expliquer par le coût de l’usage de ces deux modes : les VFF, moins chers,
sont plus accessibles aux classes d’âge les plus jeunes, qui disposent souvent de moins de
moyens.
Les usagers locaux se répartissent à peu près équitablement entre les couples avec enfants
(30 %), les couples sans enfant (29 %) et les personnes vivant seules (27 %). Rapporté à la
répartition des ménages français selon leur structure71, nous observons une surreprésentation
des couples (qu’ils soient avec ou sans enfant) parmi les usagers locaux de trottinettes, et une
sous-représentation des personnes vivant seules. Si la majorité des répondants vit dans un
ménage sans enfant (56 %), ils sont cependant plus nombreux que les usagers de vélos en free-
floating à vivre en couple avec enfant(s) : en effet, seuls 21 % d’entre eux étaient dans cette
situation, contre 30 % ici. Cela peut s’expliquer en partie par l’âge des répondants, puisque les
usagers des trottinettes sont un peu plus nombreux à appartenir aux tranches d’âge 35-44 et
45-54 ans.
71
INSEE, (2017), Des ménages toujours plus nombreux, toujours plus petits,
https://www.insee.fr/fr/statistiques/3047266#tableau-figure6 (consulté le 09/05/2019)
L’enquête a été diffusée auprès de personnes ayant utilisé Lime en France, soit à Paris, Lyon ou
Marseille, qui sont les trois villes françaises dans lesquelles le service était disponible lors de la
passation de l’enquête. Rappelons que l’on s’intéresse ici aux usagers locaux, définis comme
les personnes résidant dans la commune où elles ont réalisé leur dernier trajet en trottinette,
avec une définition plus large dans le cas de Paris (élargissement à l’ensemble de l’Île-de-
France). La majorité des usagers locaux sont ainsi des usagers locaux à Paris (60 %), un quart à
Lyon et les reste à Marseille. Cette répartition s’explique par l’ancienneté d’implantation de
l’opérateur Lime dans chacune de ces villes (Lime a déployé sa flotte à Paris en juin 2018, puis
à Lyon fin septembre 2018 et à Marseille courant janvier 2019) et par la taille de celles-ci (si la
commune de Marseille compte plus d’habitants que la commune de Lyon, c’est l’aire urbaine
de Lyon qui est la plus peuplée).
Dans le cas des usagers locaux parisiens, il n’est pas surprenant de constater que la grande
majorité réside dans Paris intra-muros, une part moins importante en petite couronne et une
part plus minime encore en grande couronne. Cela est à mettre en lien avec le fait que les
trottinettes ne peuvent être utilisées qu’à l’intérieur de Paris.
72
INSEE, Structure de la population active par catégorie socioprofessionnelle en 2015, données en ligne
(consultées le 29/05/2019)
Figure 20 : Répartition des actifs occupés usagers locaux par catégorie socio-professionnelle
73
https://www.insee.fr/fr/statistiques/2011101?geo=COM-69123 (03/06/2019)
74
https://www.insee.fr/fr/statistiques/2011101?geo=COM-13055 (consulté le 03/06/2019)
75
INSEE, Diplôme le plus élevé selon l’âge et le sexe en 2018, données en ligne (consultées le 29/04/2019)
Les fourchettes de revenus par ménage proposées dans le questionnaire s’arrêtant à 7 000 €,
il n’apparait pas pertinent de calculer une moyenne de revenus, car cette dernière serait sous-
estimée. Nous pouvons en revanche en indiquer la médiane ainsi que la distribution.
Le niveau de vie médian mensuel des usagers locaux de trottinettes en free-floating est de
2 333 €. Si les usagers locaux de trottinettes présentent un niveau de vie médian globalement
plus élevé que celui de la population française prise dans son ensemble (1 692 € en 2015 selon
l’INSEE76) et qui est tiré vers le haut par la forte part de Parisiens, une analyse plus fine au
niveau des trois territoires concernés (Paris, Lyon et Marseille) permet de nuancer ce propos.
Avec un niveau de vie médian de 2 500 €, les usagers locaux de trottinettes à Paris apparaissent
un peu plus aisés que l’ensemble des Parisiens (revenu médian de 2 202 €77). Cela est
également le cas, mais de façon moins marquée, pour les usagers locaux à Marseille, plus aisés
que l’ensemble de la population de la ville (revenu médian de 1 666 € pour les usagers de
trottinettes contre 1 511 €78 pour les Marseillais en 2015). Par contre, à Lyon, les usagers locaux
apparaissent légèrement moins aisés que la population locale avec un revenu médian de
76
INSEE, Tableaux de l’économie française, Edition 2018, données en ligne (consultées le 29/04/2019)
77
https://www.insee.fr/fr/statistiques/1405599?geo=DEP-75 (consulté le 03/06/2019)
78
https://www.insee.fr/fr/statistiques/1405599?geo=COM-13055 (consulté le 03/06/2019)
79
https://www.insee.fr/fr/statistiques/1405599?geo=COM-69123 (consulté le 03/06/2019)
80
INSEE, (2019), Tableaux de l’économie française,
https://www.insee.fr/fr/statistiques/3676870?sommaire=3696937 (consulté le 09/05/2019)
81
INSEE, (2019), Tableaux de l’économie française,
https://www.insee.fr/fr/statistiques/3676870?sommaire=3696937 (consulté le 09/05/2019)
Les visiteurs se distinguent également des locaux par le fait qu’ils sont plus âgés. Alors que l’âge
moyen des usagers locaux est de 36 ans, celui des visiteurs est de 39 ans. La classe d’âge la plus
représentée chez ces derniers est alors celle des 45-54 ans (26 % contre 18 % chez les locaux).
Ce sont surtout les touristes étrangers qui portent cette tendance, avec une moyenne d’âge de
40 ans contre 37 ans chez les visiteurs français. Un des facteurs explicatifs pourrait être le coût
d’un voyage et d’un séjour touristique à l’étranger, alors moins accessible à des individus plus
jeunes.
Figure 27 : Répartition par classes d'âge des visiteurs et des usagers locaux
En termes de structure du ménage, les visiteurs français se distinguent par le fait qu’ils sont
plus souvent en couple avec plusieurs enfants et les visiteurs étrangers se distinguent quant à
eux par le fait qu’ils sont plus souvent en colocation, bien que nous ayons vu qu’ils étaient plus
âgés. Cela pourrait alors s’expliquer par le fait que cette pratique est plus répandue à l’étranger
qu’en France.
Pour ce qui est de la catégorie socioprofessionnelle, les visiteurs français apparaissent proches
des usagers locaux, avec toutefois légèrement plus de chefs d’entreprises. Pour les visiteurs
étrangers, il est par contre délicat d’établir des comparaisons, la traduction des catégories
socioprofessionnelles françaises (celles de l’INSEE) ne correspondant pas toujours à la réalité
du marché de l’emploi dans d’autres contextes. De même, les résultats concernant le niveau
Ainsi, sur l’ensemble des usagers (locaux comme visiteurs), l’usage intensif des trottinettes
électriques en free-floating reste relativement rare (6 % seulement des répondants) et plus
d’un quart des usagers n’a utilisé une trottinette qu’une seule fois au moment de l’enquête,
bien qu’un unique usage au moment de la passation du questionnaire ne permette pas de
savoir si la personne utilisera à nouveau ce mode et, le cas échéant, à quelle fréquence. Pour
tenter de limiter ce biais, nous pouvons regarder à quand remonte la première utilisation d’une
trottinette en free-floating. Les usagers correspondant à la catégorie « une seule fois » sont
très nombreux à avoir réalisé leur première (et unique) location en mars (43 %) ou avril 2019
(14 %), alors que pour l’ensemble des usagers ces parts ne sont respectivement que de 19,5 %
et 10 %. Nous pouvons donc émettre l’hypothèse que ces usagers uniques pourraient utiliser à
nouveau un service de ce type (seuls 11 % d’entre eux ont déclaré qu’ils n’utiliseraient plus
jamais ce mode de déplacement à l’avenir, mais 36 % déclarent ne pas savoir, rendant
l’interprétation de ces résultats difficile).
Nous observons alors que le groupe de fréquence le plus représenté est celui des usagers
occasionnels, rassemblant 43 % de l’ensemble des usagers. Les usagers réguliers (à partir d’une
fois par semaine), représentent quant à eux 30 % de l’effectif, ce qui apparait plus faible que
pour les vélos en free-floating (36 %). Notons que le travail de redressement des données
récoltées grâce au questionnaire en ligne a fait augmenter le poids des usagers uniques, tout
en diminuant celui des usagers réguliers.
Nous pouvons maintenant nous intéresser aux différences entre usagers réguliers,
occasionnels et uniques et chercher à identifier les principaux déterminants de la fréquence
d’usage.
Pour ce qui est de la répartition par tranche d’âge, la proportion d’usagers appartenant aux
classes les plus jeunes augmente progressivement avec la fréquence d’usage. L’âge moyen (et
l’âge médian) diminue lui aussi à mesure que la fréquence d’usage augmente : il est ainsi de 35
ans pour les usagers réguliers, 37 ans pour les usagers occasionnels et 40 ans pour les usagers
uniques. Comme pour le sexe, la surreprésentation des jeunes observée au sein de l’échantillon
de l’ensemble des usagers locaux est d’autant plus marquée que la fréquence d’usage est
importante.
Nous observons des résultats similaires pour les variables du statut d’activité, de la catégorie
socioprofessionnelle et du niveau de diplôme. Les usagers réguliers sont en effet plus souvent
actifs en emploi, cadres et détenteurs d’un niveau de diplôme élevé que les usagers
occasionnels et plus encore que les usagers uniques. Le coût d’usage relativement élevé (1 €
de déblocage puis 15 centimes la minute) de ce mode peut apparaître comme un facteur
explicatif (puisque CSP et revenus sont corrélés). Par contre, pour la composition du ménage,
la distinction selon la fréquence d’usage ne fait pas apparaitre de différences significatives.
Les visiteurs se distinguent des usagers locaux par leur moindre fréquence d’usage, notamment
pour les visiteurs étrangers. Les usagers réguliers sont ainsi bien plus souvent des locaux que
Figure 34 : Part d'usagers locaux et de visiteurs pour chaque classe de fréquence d’usage
Les étudiants sont légèrement moins représentés, au bénéfice des actifs à plein-temps (70 %
parmi les usagers locaux intensifs contre 66 % parmi l’ensemble des usagers locaux). Cela
pourrait être lié au coût élevé de l’usage quasi-quotidien des trottinettes en free-floating, alors
moins abordable pour les étudiants, d’autant plus qu’aucun opérateur ne propose à ce jour
d’abonnement en France. Nous observons également que les usagers locaux intensifs sont plus
souvent des chefs d’entreprise : 16 % d’entre eux, contre 11 % pour l’ensemble.
Enfin, les usagers locaux circulant en trottinette en free-floating tous les jours ou presque se
sont inscrits aux service Lime (opérateur ayant diffusé notre enquête) il y a plus longtemps que
les autres : 30 % d’entre eux ont téléchargé l’application à l’été 2018, alors que ce n’est le cas
que de 16 % du reste des usagers locaux.
Figure 36 : Ancienneté d'inscription au service Lime chez les usagers intensifs et chez le reste des usagers locaux
Si l’enquête quantitative nous permet d’identifier la diversité des types d’usagers selon leur
profil socio-démographiques et leurs pratiques, certaines explications demeurent à l’état
d’hypothèses.
Ainsi, au travers d’une série d’entretiens qualitatifs (voir méthodologie), nous avons souhaité
mieux comprendre qui sont les usagers qui déclarent utiliser une trottinette en free-floating
tous les jours ou presque et comment cette nouvelle pratique influence le reste de leur
mobilité.
L’analyse des entretiens qualitatifs nous permet de comprendre le facteur déclencheur de
l’usage intensif, les motifs, les pratiques et l’impact de cet usage intensif sur la mobilité
quotidienne des individus concernés.
S’ils sont attirés par l’aspect ludique, les usagers intensifs sont retenus par le caractère pratique
et l’efficacité du service :
L’essentiel
• L’analyse des derniers trajets réalisés en trottinette électrique en free-floating
montre qu’un tiers d’entre eux sont effectués le week-end, soit davantage que pour
les vélos en free-floating.
• Plus de la moitié (55 %) des trajets durent moins de 15 minutes, avec une durée
médiane de 11 minutes. Près de 20 % des trajets durent plus de 30 minutes.
• Parmi les origines et destinations, les items balade, domicile et lieu de sortie sont les
plus représentés et correspondent à eux trois à environ la moitié des réponses.
Viennent ensuite le lieu de travail et les arrêts de transport en commun. Chez les
visiteurs, le motif balade apparaît surreprésenté.
• 23 % des derniers trajets en trottinette ont été réalisés en intermodalité,
essentiellement avec les transports en commun (66 % des trajets intermodaux).
• Plus d’un tiers des derniers trajets ont été effectués à plusieurs (26 % de derniers
trajets à plusieurs chacun sur une trottinette différente et 10 % à plusieurs sur la
même). Ces trajets collectifs sont plus longs, davantage associés aux loisirs et
réalisés par des visiteurs.
Nous nous intéressons maintenant aux trajets réalisés en trottinettes électriques partagées.
Sauf mention contraire, les résultats présentés ici concernent le dernier trajet réalisé avec ce
mode, à propos duquel les enquêtés ont été interrogés de manière détaillée. L’étude se limitant
au contexte français, nous laissons de côté les 9 % de derniers trajets réalisés à l’étranger, que
ce soit par des personnes résidant en France ou par des personnes résidant à l’étranger. Les
trajets réalisés en France ont aussi bien été effectués par des usagers locaux (pour 64 % d’entre
eux) que par des visiteurs (parmi les 36 % de derniers trajets réalisés par des visiteurs, les trois
quarts l’ont été par des visiteurs étrangers). 66 % de ces trajets réalisés en France l’ont été à
Paris, 21 % à Lyon et 12 % à Marseille.
Une part résiduelle des trajets a pu être réalisée dans une autre ville française, car ces derniers
ont été effectués avec une trottinette d’un autre opérateur, présent ailleurs qu’à Paris, Lyon
ou Marseille. En effet, les répondants n’ont pas tous réalisé leur dernier trajet avec une
trottinette Lime, certains d’entre eux étant usagers d’autres services. Cependant, seule une
part minime des derniers trajets a été réalisée avec un autre service : 8,2 %. Nous partons
également de l’hypothèse que l’usage des trottinettes Lime diffère peu de l’usage des
trottinettes d’autres opérateurs, bien que les véhicules puissent présenter des caractéristiques
techniques différentes (vitesse, taille des roues, etc.).
Nous nous intéresserons dans cette section aux caractéristiques générales des trajets réalisés
en trottinette électrique partagée (durée, motif, combinaison avec d’autres modes, etc.), à
l’usage collectif de ce mode de déplacement individuel mais aussi à la question de la sécurité.
82
STIF, OMNIL, DRIEA, (2013), EGT 2010, Les déplacements du week-end, 8 p.
Cette surreprésentation des trajets le week-end permet d’avancer l’hypothèse d’un usage des
trottinettes associé aux loisirs et à la dimension ludique.
Au cours de la journée, les trajets se répartissent comme suit :
30 % des trajets réalisés en trottinette en free-floating ont lieu dans l’après-midi, entre 14h et
17h et un quart a lieu entre 17h et 21h. Cela vient donc nourrir l’hypothèse d’un usage en
grande partie associé aux loisirs, d’autant plus que la tranche horaire 7h-11h (heures de pointe
pour se rendre au travail) ne représente que 15 % des trajets.
Par contre, les trajets réalisés entre minuit et 7h du matin, lorsque les transports en commun
ne circulent plus, ne représentent qu’une part minime des trajets (3 %), et sont sous-
représentés par rapport aux trajets en VFF sur cette même plage horaire (7 %). Cela peut être
lié à la moindre disponibilité des trottinettes la nuit (celles-ci sont alors rechargées par le
personnel des opérateurs ou par des « juicers » indépendants).
Cette répartition au cours de la journée diffère de celle des vélos en free-floating, utilisés plus
souvent entre 17h et 21h (29 %) qu’entre 14h et 17 h (19 %).
Il ressort également que les trajets réalisés le week-end ont davantage lieu au cours de l’après-
midi : 42 % des trajets ont lieu entre 14h et 17h le week-end contre 24 % en semaine. A
l’inverse, les trajets réalisés entre 7h et 11h et entre 17h et 21h représentent une part plus
Durées et distances des trajets : une majorité de courts trajets mais une part non
négligeable de très longues locations
Si la durée moyenne d’un trajet en trottinette électrique en free-floating avoisine 19 minutes,
celle-ci cache des écarts importants, comme la médiane à 11 minutes le laisse deviner. Si les
trajets très courts (moins de 5 minutes) sont rares (ce qui peut s’expliquer par la tarification –
1 € de déblocage puis 0,15 € par minute, qui rend peu attractifs ces très courts trajets, pour
lesquels le déblocage coûte presque aussi cher que l’usage), les trajets de 5 à 10 minutes
représentent près d’un quart des trajets et ceux de 10 à 15 minutes 20 % des trajets. Plus de la
moitié (55 %) des trajets durent ainsi moins de 15 minutes, la moyenne étant tirée vers le haut
par certains très longs trajets. On note en effet qu’une part certes minime mais non négligeable
des trajets dure plus d’une heure, ce qui laisse supposer qu’il s’agit d’un usage récréatif (balade
sans but précis), ce que confirme un croisement avec les origines et destinations de ces trajets
étonnement longs.
Les trajets en trottinette électrique apparaissent moins longs que les trajets en VFF. La part de
petits trajets (moins de 10 minutes) est ainsi de 35 % avec les trottinettes contre 13 % avec les
VFF et celle des trajets de 20 à 30 minutes est par contre largement supérieure pour les VFF
(25 % contre 13 %). La vitesse moyenne d’un vélo en ville – 15 km/h selon l’ADEME83 – est
pourtant similaire à celle d’une trottinette électrique.
En effet, en considérant que la vitesse moyenne de déplacement en trottinette électrique est
de 15 km/h, il est possible de calculer la distance des trajets à partir de leur durée, permettant
une comparaison avec les autres modes de déplacement. Nous avons donc calculé la distance
des trajets en trottinette à partir de la durée déclarée (distance = durée x (15/60) = durée x
0,25).
83
https://www.ademe.fr/expertises/mobilite-transports/passer-a-laction/dossier/alternatives-a-voiture-
individuelle/report-modal (consulté le 24/04/2019)
La distance moyenne d’un déplacement en trottinette électrique est ainsi de 4,7 km (ce qui
cache d’importantes variations). Calculée à partir des durées déclarées, les distances se
répartissent de façon similaire, avec une majorité de trajets de quelques kilomètres, 59 % des
trajets faisant entre 1 et 4 km. En lien avec la présence au sein de l’échantillon de trajets durant
très longtemps (plus d’une heure), nous observons également une part non négligeable de
« très longs » trajets (plus de 10 km, soit plus de 40 minutes d’utilisation), renvoyant souvent à
des balades.
Enfin, plus de la moitié des usagers déclare avoir marché moins de 5 minutes pour accéder à
une trottinette lors de la dernière location, avec un temps de marche médian de 4 minutes.
Cependant, plus de 20 % des usagers ont marché plus de 10 minutes pour accéder à un
véhicule, ce qui soulève les questions de la disponibilité et du temps de marche maximal
accepté, que nous traiterons plus tard. Nous pouvons également émettre l’hypothèse que
certains usagers n’avaient pas planifié de prendre une trottinette et en ont trouvé une au cours
d’un déplacement commencé à pied, le temps de marche correspondant à la première partie
du trajet n’étant alors pas dévolu à la recherche d’une trottinette.
Un lieu de rendez-vous professionnel (autre que mon lieu de Un lieu de RDV professionnel
travail habituel)
Une gare / station de transports en commun Un arrêt de TC
Un magasin Un magasin
Aucun de ces lieux, j’ai juste pris une trottinette pour me balader Balade
Autre Autre
Figure 44 : Tableau récapitulatif des modalités proposées aux répondants pour les origines et destinations des trajets
Si les modalités de réponse les plus représentées pour les origines et pour les destinations des
trajets varient, nous observons que les modalités les plus citées sont les mêmes (dans un ordre
différent) : domicile, lieu de sortie et « aucun de ces lieux, j’ai juste pris une trottinette pour
me balader » composent le trio de tête. Ces modalités représentent 52 % des points de départ
des trajets et 49 % des points d’arrivée – ce qui permet d’ailleurs de constater une plus grande
variété dans les destinations. Cela fait donc ressortir la dimension « loisir » des trottinettes
électriques partagées (motifs « balade » et « sortie »), que ce soit pour se rendre à un lieu de
réalisation d’une activité de loisir ou que le déplacement lui-même constitue une activité
récréative.
Le lieu de travail ou d’études constitue la quatrième modalité la plus citée (11 %, aussi bien au
départ qu’à l’arrivée), faisant apparaître un usage de la trottinette pour des trajets domicile-
travail, bien que secondaire par rapport à l’usage récréatif.
Les gares et arrêts de transports en commun arrivent en cinquième position avec 11 % des
origines et 8 % des destinations, ce que nous mettrons par la suite en regard avec la dimension
intermodale des trajets en trottinettes. Notons que l’origine / destination « arrêt de transport
en commun » peut également se prêter à des trajets domicile-travail réalisés en intermodalité
TC / trottinette, ce qui renforcerait le poids du motif travail dans l’usage de ce mode.
Si nous appréhendons le motif du dernier déplacement en trottinette par l’origine et la
destination, nous avons aussi demandé aux usagers d’indiquer à quelle fréquence ils
recourraient à ce mode pour différents motifs de manière générale.
Différents motifs recoupant les modalités de réponses proposées aux questions « origine » et
« destination » ont été présentés aux répondants de la façon suivante : « Vous utilisez une
Le motif pour le lequel le recours à la trottinette semble être le plus important est le motif
domicile-travail ou domicile-études, suivi des balades. Cela diffère des résultats obtenus en
considérant les origines et destinations des trajets, notamment avec le fait que 19 % des
usagers aient répondu « la plupart du temps » pour le motif « domicile-travail » contre
seulement 10 % pour le motif « balade » et 7 % pour le motif « sorties », qui surpassent
pourtant les déplacements liés à l’activité professionnelle dans la description du dernier
déplacement. Cependant, il faut rappeler qu’un actif en emploi réalise en général plus de trajets
domicile-travail que de déplacements pour motifs loisirs, puisqu’il se rend sur son lieu de travail
tous les jours ouvrés (sauf cas particulier du télétravail). De plus, cette question des motifs
d’utilisation des trottinettes en free-floating ne concerne que les usagers ayant réalisés
plusieurs trajets avec ce mode (il semble ainsi logique que les usagers uniques réalisent des
trajets associés aux loisirs plutôt qu’un trajet domicile-travail). Rappelons enfin que l’origine /
destination « arrêt de transports en commun » ne constitue pas un motif et peut être associée
aux déplacements domicile travail / études, ce qui vient augmenter leur poids dans le motif du
dernier déplacement.
Les motifs des déplacements en trottinette en free-floating sont en tous cas similaires à ceux
des déplacements en vélo en free-floating, avec la prépondérance du domicile, des lieux de
sortie et des lieux de travail / études ainsi que des arrêts de transports en commun parmi les
origines et destinations. Par contre, le motif « balade sans but précis » n’avait pas été proposé
aux répondants à l’enquête VFF, cet usage à visée purement récréative semblant être une
spécificité des trottinettes électriques.
En croisant le motif des déplacements (appréhendé par le point de départ ou d’arrivée) avec
leur durée, nous observons que les déplacements inscrits dans le quotidien et associés à des
motifs utilitaires (avec pour origine ou destination le lieu de travail / études, un arrêt de
transports en commun, le domicile ou un lieu de service) correspondent aux plus courts trajets
Figure 47 : Durée des derniers trajets en fonction de la destination (les résultats sont similaires pour le croisement entre durée
et point de départ)
84
STIF, OMNIL, DRIEA, (2013), EGT 2010, Le renouveau du vélo en Île-de-France, 4 p.
Figure 48 : Modes utilisés en combinaison avec la trottinette dans les cas de trajets intermodaux
Par ailleurs, il a également été demandé aux usagers s’ils ont utilisé un mode différent de la
trottinette pour leur trajet aller ou pour leur trajet retour dans le cadre de leur dernier
déplacement réalisé en trottinette en free-floating. C’est le cas de 44 % d’entre eux (7 % de
réponses « je ne sais pas »).
Les modes de transports utilisés pour le trajet aller ou pour le trajet retour sont les transports
en commun, à 57 %, et la marche, à 37 %. Cela conforte donc l’adéquation entre la trottinette
et ces deux modes déjà observée avec l’intermodalité.
85
https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/trottinettes-electriques-entrent-dans-code-route (consulté le
10/05/2019)
Nous nous intéressons alors à la fois aux caractéristiques de ces trajets collectifs en trottinette
en free-floating et au profil des usagers concernés.
Caractéristiques des trajets réalisés à plusieurs : des trajets davantage associés aux
loisirs
Il ressort tout d’abord que les trajets réalisés à plusieurs ont plus souvent lieu le week-end :
49 % pour les trajets réalisés à plusieurs chacun sur un véhicule différent et 44 % pour les trajets
réalisés à plusieurs sur une même trottinette, contre 25 % pour les trajets réalisés seuls. Cela
laisse supposer que l’usage à plusieurs est davantage associé aux loisirs, notamment l’usage en
groupe avec chacun son véhicule.
Figure 51 : Répartition des derniers trajets réalisés seul ou à plusieurs au cours de la semaine
Pour ce qui est de la temporalité au cours de la journée, les trajets réalisés à plusieurs chacun
sur une trottinette le sont également plus souvent en milieu de journée (tranches 11h-14h et
14h-17h), ce qui corrobore l’hypothèse d’une adéquation avec les loisirs (promenade en
groupe). Par contre, les trajets réalisés à plusieurs sur une même trottinette se distinguent par
le fait qu’ils sont davantage réalisés entre 17h et 21h : 32 % des trajets contre 18 % à plusieurs
chacun sur une trottinette et 25 % pour l’usage solitaire.
Par ailleurs, les trajets réalisés à plusieurs apparaissent plus longs que les trajets réalisés seuls,
notamment ceux réalisés à plusieurs chacun sur une trottinette différente, comme le montrent
les durées moyennes et médianes et la répartition présentée dans le tableau ci-dessous. Ainsi,
les trajets de moins de 15 minutes représentent respectivement 65 % et 54 % des trajets
réalisés seul ou à plusieurs sur une même trottinette tandis qu’ils représentent seulement un
quart des trajets réalisés à plusieurs chacun sur une trottinette différente. Pour ce type d’usage,
les très longs trajets (plus d’une heure) apparaissent surreprésentés (15 % contre 3 %
seulement pour les autres usages) et 43 % des trajets durent plus de 30 minutes. Les trajets
réalisés à plusieurs chacun sur une trottinette différente se distinguent donc par leur plus
longue durée, ce qui suggère également des usages récréatifs Pour les trajets réalisés à
plusieurs sur une même trottinette, la durée plus longue pourrait s’expliquer par une vitesse
de circulation plus faible, par souci de sécurité de la part des usagers mais aussi du fait du poids
plus lourd à supporter pour le véhicule.
Durée moyenne Durée médiane
Trajets réalisés seuls 14,5 minutes 10 minutes
Trajets réalisés à plusieurs
chacun sur une trottinette 31 minutes 22 minutes
différente
Trajets réalisés à plusieurs sur
17 minutes 12 minutes
une même trottinette
Pour ce qui est des origines et destinations des derniers trajets, le motif « balade sans but
précis » apparaît surreprésenté parmi les trajets collectifs, et plus encore parmi les trajets
réalisés à plusieurs chacun sur une trottinette différente (environ un tiers des origines et
destinations). Comme pour la temporalité et la durée, ce type d’usage semble se détacher. Les
lieux de sortie sont également surreprésentés parmi les trajets collectifs, cette fois-ci sans
différence majeure entre l’usage à plusieurs chacun sur une trottinette différente et l’usage à
plusieurs sur une même trottinette. Les usages collectifs apparaissent ainsi davantage associés
aux loisirs. Notons également que le « lieu d’hébergement » est davantage représenté parmi
les origines que parmi les destinations, notamment pour des trajets en groupe. Cela pourrait
correspondre à une situation dans laquelle un groupe de personnes décide de se rendre à
destination en trottinette électrique et rentre avec un autre mode, en raison de l’heure tardive
par exemple.
Pour ce qui est de l’intermodalité, nous n’observons pas de différence majeure entre les trajets
réalisés seuls ou à plusieurs, si ce n’est que, le cas échéant, les trajets réalisés à plusieurs et
surtout à plusieurs sur une même trottinette sont davantage réalisés en intermodalité avec la
marche, et moins avec les transports en commun.
Figure 55 : Mode utilisé lors des derniers trajets réalisés seul ou à plusieurs
L’analyse des trajets réalisés à plusieurs fait donc ressortir une distinction entre les trajets
réalisés à plusieurs sur une même trottinette et ceux réalisés à plusieurs chacun sur une
trottinette différente, en termes de temporalité, de durée et de motifs, bien que ces deux
modalités soient fortement associées aux loisirs : les trajets réalisés à plusieurs chacun sur une
trottinette sont plus longs et correspondent davantage à des balades sans but précis, les
associant plus que les autres à une dimension récréative.
Figure 56 : Sexe des usagers ayant réalisé leur dernier trajet seul ou à plusieurs
De plus, l’usage de la trottinette à plusieurs semble d’autant plus fréquent que l’usager est
jeune. 27 ou 28 % des derniers trajets réalisés à plusieurs le sont par des moins de 25 ans, qui
ne représentent que 17 % des usagers ayant circulé seuls. Fait surprenant, la tranche d’âge 35-
44 ans est moins représentée chez les personnes ayant réalisé leur dernier trajet à plusieurs
chacun sur une trottinette différente (16 % contre 21 % pour les trajets seuls et 27 % pour les
trajets à plusieurs sur une trottinette). Certains des trajets à plusieurs sur une même trottinette
pourraient correspondre à de l’accompagnement d’enfants par exemple.
Figure 57 : Répartition des usagers par tranche d'âge pour les derniers trajets réalisés seul ou à plusieurs
Nous n’observons pas de différence significative dans la composition du ménage selon que les
usagers aient réalisé leur dernier trajet seul ou à plusieurs.
Par contre, ceux ayant circulé à plusieurs sont moins souvent actifs en emploi et davantage
étudiants que ceux l’ayant fait seul (27 % contre 14 %), ce qui rejoint l’observation sur l’âge
(moins élevé) des utilisateurs collectifs. Cela peut s’expliquer par la dimension ludique mais
aussi, pour les trajets à plusieurs sur une même trottinette, par l’économie ainsi réalisée, ce
Figure 58 : Catégorie socioprofessionnelle des usagers ayant réalisé leur dernier trajet seuls ou à plusieurs
Comme les résultats ci-dessus le suggèrent, les trajets collectifs concernent davantage les
visiteurs, ce qui conforte l’idée que ces trajets soient plus encore que les autres associés aux
loisirs. Ce phénomène est particulièrement marqué pour les trajets effectués chacun sur une
trottinette différente : 61 % de visiteurs pour 39 % de locaux. Nous pouvons émettre
l’hypothèse qu’il s’agit de balades en groupe à visée touristique, permettant de découvrir une
ville de façon ludique, rappelant ainsi les circuits en Segway (autre EDPM) fréquemment
proposés dans les villes touristiques.
Notons également que l’usage à plusieurs sur une même trottinette avec un enfant est bien
plus limité que l’usage à plusieurs sur une même trottinette avec un adulte. Seuls 14 % des
usagers ont déjà circulé au moins une fois avec un enfant sur leur trottinette, contre 29 % avec
un adulte. Si les usagers ayant des enfants sont minoritaires (36 %), cela peut aussi s’expliquer
par des considérations de sécurité. Certains usagers ont mentionné en entretien des exemples
Figure 61 : Ville où les visiteurs ont réalisé leur dernier trajet en trottinette électrique en free-floating
Temporalité des trajets des visiteurs : des trajets plus longs et plus souvent effectués
le week-end
Il apparaît que les visiteurs utilisent davantage une trottinette électrique le week-end que
l’ensemble des usagers – 36 % contre 33 %. Plus précisément, ce sont surtout les visiteurs
français qui utilisent davantage une trottinette en free-floating le week-end. Cela pourrait
s’expliquer par le fait que les visiteurs français réalisent ces trajets en France lors d’excursions
le week-end alors que les visiteurs étrangers, venus de plus loin, se rendent plus souvent en
France à l’occasion de congés (qui leur laissent alors du temps libre en semaine).
86
Comité Régional du Tourisme, Bilan de l’activité touristique 2018 à Paris Île-de-France, 10 p.,
https://www.veilleinfotourisme.fr/files/2019-02/Pr%C3%A9sentation_Bilan_2018.pdf (consulté le 09/05/2019)
Figure 62 : Durée des trajets réalisés par des usagers locaux et par des visiteurs français et étrangers
La part de très longs trajets (plus d’une heure) est ainsi nettement supérieure parmi les
visiteurs, notamment les visiteurs étrangers, chez qui elle représente 15 % des trajets soit cinq
fois plus que chez les usagers locaux. Inversement, alors que les trajets de moins de 15 minutes
regroupent près des deux tiers des trajets des locaux, cela ne représente même pas un tiers
(29 %) des trajets réalisés par les visiteurs étrangers (et 47 % pour les visiteurs français).
Figure 63 : Durée des trajets réalisés en France par les usagers locaux et par les visiteurs
Figure 64 : Origine et destination des trajets des usagers locaux et des visiteurs
Pour ce qui est de l’intermodalité, les trajets réalisés par les touristes ne se distinguent pas
significativement des trajets réalisés par les usagers locaux, avec moins d’un quart des
déplacements associant la trottinette à un autre mode pour ces deux groupes et, le cas
échéant, une combinaison avec les transports en commun dans les deux tiers des cas environ
et avec la marche dans un peu moins d’un cinquième des cas.
Les trajets des visiteurs se distinguent donc nettement de ceux des usagers locaux et, à
l’intérieur de ce groupe, les visiteurs étrangers et les visiteurs français se distinguent (les
87
https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/trottinettes-electriques-entrent-dans-code-route (consulté le
10/05/2019)
88
https://france3-regions.francetvinfo.fr/trottinettes-electriques-libre-service-resistance-s-organise-
1665287.html (consulté le 13/05/2019)
Pour ce qui est des préférences des usagers, pistes et bandes cyclables sont très nettement
privilégiées (82 % des usagers). Ces espaces de circulation sont en effet jugés plus sûrs (sécurité
routière) que le trottoir ou la chaussée.
« Au début, j'étais surpris par la vitesse, la maniabilité, je me sentais assez en
sécurité. Au fil du temps, je me sens de moins en moins en sécurité. J'essaye de
rouler sur les voies cyclables, mais quand y en a pas, c'est sur la rue. Et à deux
reprises, j'ai failli me faire renverser par une voiture. » François, 23 ans, usager
régulier à Paris
Circuler sur la chaussée, parmi les voitures, ou sur le trottoir, parmi les piétons, semble par
contre équivalent (types de voieries privilégiés par la même proportion d’usagers).
L’approche qualitative permet de détailler cet aspect : en effet, les usagers déclarent que, faute
de pouvoir circuler sur une piste ou bande cyclable, ils privilégient la chaussée au trottoir, y
considérant l’usage d’une trottinette électrique comme dangereux pour les piétons. Comme
l’expliquent ces deux enquêtés, ils se mettent alors à la place des piétons, ce qui témoigne
d’une certaine réflexivité sur leur pratique.
« Ce qui est agréable aujourd’hui, c'est qu'on circule partout, mais ce n'est pas
bien, ça ne va pas durer. [...] Je pense qu'il faut vraiment éviter le trottoir, je le
vois aussi quand je suis piéton, ça devient stressant ces trottinettes qui vous
frôlent. » Pierre, 49 ans, usager régulier à Paris
« Je comprends l'agacement des piétons, car moi je suis aussi piéton et je vois
qu'ils font n'importe quoi. » Charles, 58 ans, usager régulier à Paris
Même si cette pratique reste peu fréquente, nous pouvons constater que les visiteurs sont un
peu plus nombreux que les usagers locaux à porter un casque, un résultat qui interroge,
puisque se procurer un casque semble plus complexe lors d’un séjour en dehors de sa ville
d’origine. Les locaux sont en tous cas plus nombreux à porter un casque « occasionnellement »
et « exceptionnellement ». Ces visiteurs à qui il arrive de porter un casque s’avèrent être des
usagers occasionnels (46 % d’entre eux) et des usagers réguliers (41 % d’entre eux), ce qui
permet d’avancer l’hypothèse qu’ils portent un casque (bien que très rarement) lors de trajets
qui ne sont pas réalisés dans un cadre touristique.
89
Voir par exemple : https://www.lejdd.fr/JDD-Paris/paris-enquete-sur-les-blessures-liees-aux-trottinettes-
3898186 (consulté le 13/05/2019)
90
Austin Public Health, (2019), Dockless Electric Scooter-Related Injuries Study, 15 p.
https://www.austintexas.gov/sites/default/files/files/Health/Epidemiology/APH_Dockless_Electric_Scooter_Stud
y_5-2-19.pdf (consulté le 13/05/2019)
Il s’agit d’une étude menée dans la ville d’Austin sur les accidents survenus en trottinette électrique entre le 5
septembre et le 30 novembre 2018. Celle-ci s’appuie sur des données issues de services hospitaliers et
d’informations issues du département des transports de la ville. Au total, l’étude recense 190 personnes blessées
alors qu’elles circulaient en trottinette électrique.
91
Base de données annuelle des accidents corporels de la circulation routière (BAAC) :
https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/base-de-donnees-accidents-corporels-de-la-circulation/ (consulté le
23/05/2019)
Nous avons demandé aux usagers ayant déjà eu un accident de sélectionner les causes de celui-
ci parmi une liste (plusieurs réponses possibles). L’état de la chaussée arrive en tête des causes
déclarées des accidents (cité par 40 % de l’échantillon concerné). Cela peut renvoyer à des
détériorations (nids de poules, rustines, etc.) mais aussi au type de revêtement, les pavés
s’avérant particulièrement peu adaptés à la circulation de trottinettes, dotées de roues de
petites dimensions, comme l’expliquent ces usagers interrogés dans le cadre de l’enquête
qualitative.
« On sent beaucoup les vibrations de la chaussée. Une fois, il y avait une petite
bosse sur la route, je n'étais pas très attentif et j'ai failli lâcher la trottinette. »
Yves, 42 ans, usager occasionnel à Lyon
« La trottinette, c'est moins confortable que le vélo. Elles ne sont pas amorties et
les routes de Paris sont mauvaises. C'est même quelques fois désagréable d'être
en trottinette dans Paris. » Christian, 51 ans, usager régulier à Paris
Les difficultés à contrôler la trottinette et les intempéries constituent aussi des causes
fréquentes d’accidents (respectivement citées par 25 % de l’échantillon concerné). Par contre,
les interactions avec des usagers d’autres modes – véhicules motorisés ou piétons – sont moins
fréquemment citées (respectivement 17 % et 11 %).
Enfin, les usagers ayant déjà eu un accident considèrent en majorité (53 %) ne pas en être
responsable, ce qui est à mettre en lien avec le fait que le mauvais état de la chaussée et les
intempéries soient citées comme premières causes (et sont, contrairement à la modalité
« difficulté à contrôler la trottinette », elle aussi pourtant beaucoup citée, indépendantes de
l’usager). Cependant, il est possible de se demander dans quelle mesure les réponses selon la
modalité « Je ne sais pas » (13 %) peuvent être assimilées à la modalité « Oui (je considère avoir
été responsable de cet accident) », mais aussi plus simplement dans quelle mesures les
déclarations des usagers ayant déjà eu un accident concordent avec la réalité à propos de leur
degré de responsabilité.
92
https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/05/10/le-projet-de-la-mairie-de-paris-pour-mettre-fin-au-
grand-bazar-des-trottinettes_5460714_823448.html (consulté le 13/05/2019)
93
https://www.paris.fr/actualites/le-saviez-vous-on-ne-gare-pas-sa-trottinette-electrique-n-importe-ou-
6745#ou-puis-je-garer-une-trottinette-electrique_2 (consulté le 29/05/2019)
Parmi les usagers ayant stationné la trottinette sur le trottoir, la grande majorité considère
avoir fait en sorte que le véhicule ne gêne pas la circulation piétonne, ce qui constitue l’un des
principaux points de mécontentement vis-à-vis des trottinettes en free-floating. Cependant, ce
résultat (déclaratif et subjectif) apparaît peu exploitable, les individus ayant souvent tendance
à se déclarer plus « vertueux » ou civiques qu’ils ne le sont en réalité (et la tournure de la
question pouvant constituer un biais94).
94
La question était présentée sous la forme d’une affirmation, avec laquelle les répondant devaient indiquer s’ils
étaient « tout à fait d’accord », « plutôt d’accord », « plutôt pas d’accord » ou « pas du tout d’accord ».
L’affirmation était la suivante : « Même si je l’ai stationnée sur le trottoir, j’ai fait attention à ce que ma trottinette
ne dérange pas les piétons. ».
Outre le profil des usagers et les caractéristiques des trajets, il convient maintenant de
s’intéresser au ressenti des usagers afin d’identifier les motivations et freins à l’utilisation des
trottinettes électriques partagées. Cela apparaît d’autant plus intéressant qu’il s’agit d’un mode
nouveau, qui se distingue par son fonctionnement en free-floating et par sa motorisation. De
plus, si le vélo et le deux-roues motorisé constituent des modes avec lesquels la plupart des
individus sont familiers, la trottinette, utilisée comme moyen de déplacement par des adultes,
constitue un mode émergeant en ville, dans la lignée de l’explosion des EDP (Engins de
Déplacement Personnels) et de la micromobilité.
Sauf mention contraire, nous travaillons ici sur l’échantillon des usagers, qu’il s’agisse d’usagers
locaux ou de visiteurs (bien que nous signalions les différences entre ces deux populations), et
nous nous intéressons successivement aux motivations puis aux freins à l’utilisation de
trottinettes électriques en free-floating. Par ailleurs, l’enquête ayant été diffusée par
l’opérateur Lime auprès de ses usagers, certaines questions portent spécifiquement sur ce
service, tandis que d’autres concernent l’ensemble des trottinettes électriques partagées, quel
qu’en soit l’opérateur (nous indiquerons quelles sont les questions concernant uniquement
Lime).
Figure 72 : Décalage temporel entre le téléchargement de l'application et le premier usage d'une trottinette Lime
Pour la très grande majorité, les usagers ont découvert les trottinettes en free-floating (Lime,
en l’occurrence) en les voyant dans la rue (87 % d’entre eux ont cité cette modalité), le bouche-
à-oreille et les médias apparaissant comme des raisons secondaires.
L’item « imprévu » reste marginal et renvoie à des événements fortuits comme une grève ou
un problème de fonctionnement des transports en commun, un véhicule personnel tombé en
panne ou mis en fourrière, etc.
Lors des entretiens qualitatifs, les enquêtés insistent sur l’image innovante et ludique des
trottinettes, qui les a poussés à les expérimenter.
« J’en ai vu à Paris, c'était l'invasion et je me suis dit, tiens c'est rigolo, c‘est
marrant, fun, ça peut être pratique. » Pierre, 49 ans, usager régulier à Paris
« Quand j'ai vu qu'elles arrivaient sur Marseille, je me suis dit que j'allais les
utiliser. » Hadrien, 37 ans, usager régulier à Marseille
95
Le score d’importance est calculé de la façon suivante : il y a ici 3 modalités de réponse maximum à sélectionner
et hiérarchiser. Un score de 3 est attribué à la modalité classée en premier par le répondant, un score de 2 à la
seconde, de 1 à la troisième et un score de 0 aux modalités non sélectionnées. Le score total associé à une modalité
est ensuite divisé par le nombre de répondants. Le score d’importance permet alors d’indiquer, entre deux
modalités citées un nombre similaire de fois, laquelle a le plus fréquemment été classée en premier.
Chez les usagers locaux, le gain de temps est nettement privilégié (modalité citée dans 75 %
des cas, avec un score d’importance de 1,73) par rapport à l’aspect agréable (65 % et score
d’importance de 1,36 qui arrive en deuxième position. Par contre, chez les visiteurs, c’est
l’aspect ludique qui arrive nettement en première position, devant le gain de temps (75 % et
score d’importance de 1,72 contre 63 % et score d’importance de 1,40). Cela est en accord
avec leur usage davantage centré sur les loisirs. Ainsi, il apparait que les usagers locaux
privilégient la variable fonctionnelle qu’est le gain de temps (ce qui semble cohérent avec un
usage de ce mode intégré dans les pratiques quotidiennes), tandis que les visiteurs privilégient
l’agrément à la rapidité. Pour le reste, usagers locaux et visiteurs ne se distinguent pas. Notons
cependant que rapidité et caractère agréable peuvent être associés, comme l’explique cette
enquêtée (plaisir procuré par la sensation de vitesse) :
« Au début, j’ai été surprise par la vitesse. Ensuite, j’ai ressenti un sentiment de
liberté. » Juliette, 24 ans, usagère occasionnelle à Paris
Les principales motivations à l’usage des trottinettes en free-floating sont en tous cas le
caractère ludique du mode et sa rapidité et, dans une moindre mesure, la possibilité de réaliser
des trajets porte-à-porte. Il est intéressant de constater que si la rapidité (le gain de temps)
n’est que secondaire dans la décision de la première utilisation, cet élément arrive en tête pour
les motivations générales à l’usage, ce qui semblerait suggérer une routinisation de la pratique.
Viennent ensuite l’avantage de ne pas s’encombrer, offert par le fonctionnement en libre-
service, ainsi que la disponibilité de nuit lorsque les transports en commun ne circulent plus.
Rappelons à ce titre que les trajets réalisés entre minuit et 7h du matin, soit en dehors des
horaires de fonctionnement des transports en commun, sont minoritaires (3 % des derniers
trajets en France), ce qui peut être lié au manque de disponibilité des trottinette la nuit puisque
c’est sur cette tranche horaire qu’elles sont récupérées pour être rechargées.
Nous ne constatons pas de différence entre les motivations citées en fonction de la fréquence
d’usage des trottinettes, usagers réguliers, occasionnels et uniques évoquant les mêmes
raisons.
Figure 76 : Usage de plusieurs services de trottinettes en free-floating par les usagers locaux de Lime et les visiteurs
57 % des usagers ayant déjà utilisé plusieurs services de trottinettes en free-floating ne sont
usagers que d’un autre opérateur à part Lime, 20 % de deux autres opérateurs et 12 % de trois
autres opérateurs. Les usagers inscrits à plus de cinq services (Lime compris) sont ainsi
minoritaires.
Nous avons demandé aux usagers inscrits à plusieurs services lequel ils utilisaient le plus
souvent. Les usagers de Lime multi-inscrits utilisent ainsi le plus souvent les trottinettes de cet
opérateur (82 % d’entre eux).
Ces éléments sur le recours à plusieurs opérateurs rejoignent les résultats de l’enquête auprès
d’usagers des services de vélos en free-floating Ofo et Mobike. Celle-ci fait ressortir le caractère
interchangeable des usagers des différents services de VLS sans station. Leurs caractéristiques
socio-économiques sont similaires et 28 % des usagers de Mobike ont déjà utilisé Ofo, 32 % en
sens inverse.
Figure 78 : Raisons pour lesquels les usagers utilisent plusieurs services de trottinettes en free-floating
Citée par 70 % des répondants, la principale raison pour laquelle les usagers recourent à
plusieurs services de trottinettes en free-floating est la possibilité d’augmenter la disponibilité
des véhicules, l’usager ayant alors à marcher moins longtemps pour trouver une trottinette.
Les usagers multi-inscrits sont aussi poussés par la curiosité et le désir de tester différents
services (31 %) et évoquent aussi le confort d’usage (22 %), pouvant renvoyer aux
caractéristiques techniques des différents modèles de trottinettes proposés, comme le
confirme l’approche qualitative. En entretien, les usagers évoquent ainsi le design général des
trottinettes, la maniabilité, la hauteur du guidon ou encore la taille des roues ou la puissance
d’accélération.
La substituabilité avec d’autres modes partagés semble très faible. Les résultats présentés sur
la figure ci-dessus concernent l’ensemble des usagers. Pour étudier les autres modes partagés,
nous proposons de nous intéresser spécifiquement à l’échantillon des personnes abonnées à
chacun de ces modes. Ainsi, parmi les usagers de trottinettes en free-floating abonnés à des
services de vélos partagés (soit 26 % des usagers) comme Vélib’ ou Vélo’v, 22 % les auraient
utilisés. De même, parmi les abonnés à des services de scooters partagés (12 % des usagers),
7 % déclarent qu’ils auraient réalisé leur dernier trajet avec ce mode. Par contre, seuls 2 % des
abonnés à des services de voiture partagée (17 % des usagers) déclarent qu’ils auraient loué
un de ces véhicules pour leur dernier trajet. La substituabilité trottinette partagée / vélo
partagé apparait donc bien plus forte que la substituabilité trottinette partagée / scooter
partagé et plus encore que la substituabilité trottinette partagée / voiture partagée.
La forte substituabilité avec la marche et les transports en commun invite maintenant à
s’intéresser plus en détail aux raisons pour lesquelles les répondants ont préféré la trottinette
électrique en free-floating à chacun de ces deux modes de déplacement. Pour les parties
suivantes, nous ne travaillons donc que sur l’échantillon des usagers ayant répondu qu’ils
auraient recouru à la marche en l’absence de trottinettes pour leur dernier déplacement, puis
sur l’échantillon de ceux qui auraient pris les transports en commun.
Figure 80 : Avantages des trottinettes par rapport à la marche (usagers qui auraient effectué leur dernier déplacement à
pied)
Figure 82 : Comparaison des temps de trajet en trottinette électrique et avec le mode qui aurait été utilisé en l'absence de
trottinette, d'après les déclarations des usagers
Pour ce qui est de la durée du trajet, nous observons que la trottinette électrique en free-
floating permet aux usagers de gagner du temps, sauf comparée au deux-roues motorisé (qu’il
soit personnel ou partagé) ou au vélo partagé. Pour les modes les moins cités, les résultats sont
à considérer avec précaution (par exemple pour la trottinette électrique personnelle, pour
96
Nous avons certes demandé aux usagers d’indiquer le coût de leur dernier trajet mais tous n’ont pas répondu à
cette question et, pour certains, la réponse s’éloigne fortement du coût que nous avons calculé. Nous indiquons
donc ce coût reconstitué à partir du temps de trajet déclaré, ce qui ne tient pas compte des éventuelles pénalités
ou amendes que les répondants ont pu intégrer dans le coût qu’ils ont déclaré pour leur dernier trajet en
trottinette.
Figure 83 : Comparaison des coûts du trajet en trottinette électrique et avec le mode qui aurait été utilisé en l'absence de
trottinette, d'après les déclarations des usagers
Il est intéressant de constater que le coût du dernier trajet en trottinette tel qu’indiqué par les
répondants et tel que calculé à partir de la durée varient peu, sauf pour certains modes : le
VTC, le taxi et la trottinette électrique personnelle (même si, pour ces deux derniers modes,
cela peut être dû à la taille très faible de l’effectif). Les usagers qui auraient réalisé leur dernier
trajet en taxi ou en VTC en l’absence de trottinettes ont ainsi tendance à surestimer le coût de
ce même trajet en trottinette. Une hypothèse explicative pourrait être que ces usagers, qui
auraient été prêts à prendre les modes les plus coûteux parmi la liste, ont un consentement à
payer plus fort (du moins sur le dernier trajet décrit) et pourraient donc avoir tendance à
surestimer le coût du trajet réalisé en trottinette, ayant à l’esprit la comparaison avec le taxi ou
le VTC.
Puisque nous nous intéressons au consentement à payer et donc au point de vue subjectif des
usagers, nous avons réalisé le calcul de la différence de coût en prenant en compte le coût
déclaré et non le coût calculé.
La trottinette électrique revient alors plus cher que la plupart des modes et notamment que la
marche et les transports en commun, dont on rappelle qu’ils sont les modes que les usagers
auraient le plus utilisé en l’absence de trottinette. Ce sont les modes motorisés non personnels
qui reviennent par contre plus cher que la trottinette en free-floating sur le dernier trajet : la
voiture partagée et le scooter électrique partagé reviennent un peu plus cher mais la faiblesse
de l’effectif rend toute interprétation difficile. Ce sont surtout le VTC et le taxi qui présentent
le différentiel le plus important et font respectivement (et hypothétiquement) « économiser »
7,39 € et 5,49 € aux usagers de trottinettes en free-floating.
Nous pouvons maintenant mettre en regard les écarts de temps et de coût dus au choix de la
trottinette sur le dernier trajet. Cela permet alors de voir dans quelle mesure ce choix de la
trottinette électrique en free-floating relève d’un arbitrage coût-temps. Un agent économique
rationnel préférera bien sûr la trottinette si elle lui permet de gagner du temps et d’économiser
de l’argent. Cependant, si la trottinette apparaît à la fois plus chère mais plus rapide ou moins
chère mais plus lente qu’un autre mode, c’est cet arbitrage coût-temps qui peut permettre
d’expliquer le choix modal. Ainsi, dans quelle mesure l’usager est-il prêt à payer plus pour
gagner du temps ? Et, inversement, dans quelle mesure est-il prêt à faire un trajet plus long
pour économiser de l’argent ? Moins le choix pour la trottinette apparait rationnel (du moins
dans la perspective d’un arbitrage coût-temps) et plus il est possible de supposer qu’il existe
une réelle préférence pour les caractéristiques de ce mode, qui peut être liée à un gain de
plaisir ou de confort mais aussi de praticité (fonctionnement en free-floating).
Figure 84 : Mise en regard des différences de temps de trajet et de coût dues au choix de la trottinette plutôt que du mode
qui aurait été utilisé en l'absence de trottinette
La mise en regard des écarts de temps et de coût permet ainsi de faire ressortir quatre types
d’arbitrages ayant abouti au choix de la trottinette :
- Comparée au VTC et au taxi (et à la voiture partagée mais la faiblesse de l’effectif invite
ici à la prudence), la trottinette apparait plus rapide et moins chère. La préférence pour
ce dernier mode semble donc tout à fait rationnelle économiquement.
- La trottinette électrique en free-floating est par contre plus rapide mais plus coûteuse
que la marche, les transports en commun, la voiture, le vélo et la trottinette personnels.
Elle implique donc un surcoût (présenté dans le tableau ci-dessus), qui semble
compensé par le gain de temps pour l’usager, prêt à payer plus cher pour aller plus vite.
D’autres avantages de la trottinette comme le confort ou l’aspect ludique peuvent
également entrer en ligne de compte et venir compenser le surcoût monétaire.
- A l’inverse, la trottinette électrique en free-floating apparait moins rapide mais
également moins chère que le scooter électrique partagé. L’argent économisé entraine
Figure 85 : Existence d'a priori avant le premier usage d'une trottinette électrique en free-floating
Signalons que les femmes, bien moins représentées que les hommes parmi les usagers de
trottinettes en free-floating, sont plus nombreuses à déclarer avoir eu des a priori concernant
l’usage de ce mode (65 % des femmes déclarent avoir eu des a priori, contre seulement 48 %
des hommes), notamment concernant le danger.
Figure 86 : Classement des inconvénients à l'usage des trottinettes en free-floating pour l’ensemble des usagers
Le principal obstacle est alors le manque de disponibilité des véhicules (absence de trottinette
disponible à proximité), obstacle auquel 59 % des usagers déclarent avoir déjà été confrontés,
suivi des problèmes techniques sur la trottinette (43 % de citation) renvoyant à des pannes, un
niveau de batterie trop faible, l’impossibilité de débloquer le véhicule, etc. Les problèmes
techniques sur l’application sont par contre plus rarement évoqués. Le troisième obstacle le
plus fréquemment rencontré correspond aux trottinettes indiquées comme disponibles sur
l’application mais introuvables, cité par plus d’un tiers des usagers, ce qui rejoint le problème
du manque de disponibilité et le fait apparaître comme un enjeu crucial. Cela fait écho aux
résultats de l’enquête auprès des usagers de VFF, qui étaient encore plus nombreux (70 %) à
déclarer avoir déjà été confrontés au manque de disponibilité. Les autres obstacles les plus
cités étaient les « problèmes techniques sur le vélo » et les « vélos indiqués comme disponibles
sur l’application mais introuvables ». Il s‘agit là d’enjeux spécifiques au fonctionnement en free-
floating.
Cela nous amène à nous intéresser plus précisément à l’obstacle que constitue le manque de
disponibilité. La majorité des usagers a ainsi déjà renoncé à utiliser le service Lime faute de
trottinette disponible à proximité, et près d’un quart d’entre eux déclare même que cela leur
arrive « souvent », comme le fait ressortir le graphique ci-dessous.
Figure 88 : Répartition des usagers par fréquence de renoncement à l’utilisation d’une trottinette en free-floating faute de
disponibilité
En effet, seuls 10 % des usagers se déclarent prêts à marcher plus de 10 minutes pour accéder
à une trottinette, bien que près de la moitié des usagers acceptent de marcher jusqu’à 5
minutes.
Cependant, lors de leur dernière location, 19 % des usagers indiquent avoir marché 10 minutes
ou plus pour trouver une trottinette, alors que seuls 10 % se déclarent prêts à marcher autant.
Une large majorité d’usagers juge en tous cas que son temps de marche lors du dernier trajet
était « acceptable » (voire « agréablement court »). Ces distinctions entre, d’une part, le temps
de marche effectif lors du dernier trajet ainsi que sa perception et, d’autre part, le temps de
marche acceptable maximal déclaré laisse ainsi entrevoir que les répondants ont tendance à
être plus stricts dans l’énonciation de leurs préférences ou exigences que dans la réalité de
leurs pratiques. Cela pourrait aussi s’expliquer par le fait que le temps maximal déclaré
correspond à une situation où l’usager cherche à louer une trottinette, tandis que dans le cas
du dernier trajet il a pu décider d’en prendre une de manière impromptue, car il en a croisé
une sur son chemin alors qu’il marchait, expliquant ce temps de marche plus important mais
bien accepté.
Figure 91 : Appréciation des différents aspects du service Lime par les usagers
Globalement, les usagers apparaissent satisfaits (ligne « Total » avec 70 % de « très satisfait.e »
ou « assez satisfait.e »). Les éléments jugés les plus satisfaisants sont la vitesse de déplacement
(rappelons que la rapidité figure parmi les principales motivations à l’utilisation), ainsi que
l’application smartphone du service et le processus de début / fin de location, en lien avec cette
même application. Notons la méconnaissance des usagers vis-à-vis du service client – plus de
Nous avons interrogé les usagers ayant répondu qu’ils pensaient à l’avenir utiliser « moins
souvent » une trottinette en free-floating ou « plus jamais » sur les raisons de cette diminution
de leur fréquence d’usage. C’est alors avant tout en raison du prix, également cité comme
inconvénient majeur par l’ensemble des usagers. Seuls 11 % des personnes ayant répondu
qu’elles pensaient utiliser une trottinette en free-floating moins souvent à l’avenir ont indiqué
que c’était car elles comptaient acheter leur propre trottinette (proportion qui atteint tout de
même 20 % pour les usagers réguliers). Néanmoins, une partie des réponses classées dans la
catégorie « autre » (modalité largement citée) renvoie à l’achat (déjà effectué) d’un véhicule
personnel : trottinette électrique, mais aussi vélo ou deux-roues motorisé.
A titre de comparaison, les principales raisons évoquées par les usagers de VFF pensant les
utiliser moins souvent étaient l’utilisation de Vélib’, (élément spécifique à cette enquête97), la
météo (là-encore, spécifique à l’enquête, menée en octobre) et la disponibilité insuffisante des
VFF.
97
En effet, VFF et Vélib’ sont des modes très proches et que cette étude a justement été menée à Paris à l’automne
2018, alors que le service Vélib’ avait souffert d’importants problèmes de disponibilité suite aux travaux engendrés
par le changement d’opérateur et que les VFF s’étaient implantés dans la capitale durant ces mêmes travaux.
Figure 94 : Classement des éléments qui pourraient inciter les usagers à utiliser davantage une trottinette électrique en free-
floating
Par contre, si les usagers citent fréquemment le danger ou le sentiment d’insécurité comme
inconvénient, les initiatives sensibilisant à la sécurité (formations, etc.) ne semblent pas susciter
un enthousiasme massif. C’est ainsi l’élément qui inciterait le moins les usagers à recourir plus
souvent aux trottinettes en free-floating.
Cherchant à appréhender les effets d’une future législation sur les EDP et sur les véhicules en
free-floating, nous avons demandé aux usagers d’indiquer l’impact que certaines restrictions
ou obligations auraient sur leurs pratiques en trottinette. Les mesures proposées comme
modalités de réponse, de nature contraignante, inciteraient ainsi très peu d’usagers à utiliser
davantage le service, bien que celles-ci puissent accroître leur sécurité. Rappelons que
l’intégration des trottinettes électriques et autres EDP motorisés dans le Code de la route, sujet
Figure 95 : Impact d'éventuelles évolutions concernant l'utilisation des trottinettes électriques en free-floating
Ainsi, l’obligation du port du casque ressort nettement comme l’élément le plus rebutant pour
les usagers : 37 % utiliseraient moins souvent une trottinette électrique en free-floating et 34 %
cesseraient totalement d’en utiliser. Cela peut sembler contradictoire avec le fait que danger
et sentiment d’insécurité sont des éléments fréquemment cités comme inconvénients ou freins
à l’usage. Il semble alors que l’aspect pratique du fonctionnement en free-floating (ne pas
s’encombrer et pouvoir opter pour ce mode sans le prévoir à l’avance) supplante
l’appréhension quant au danger, pourtant répandue chez les usagers. Le port d’un brassard
luminescent la nuit (objet nettement moins volumineux qu’un casque), ne changerait quant à
lui rien à l’utilisation des trottinettes pour plus de la moitié des usagers et le renoncement serait
moindre que pour le port du casque (25 % les utiliseraient moins souvent et seuls 12 % les
abandonneraient).
L’enquête qualitative confirme l’aspect dissuasif d’une obligation du port du casque et fait
ressortir les usagers n’y sont pas forcément opposés sur le principe mais qu’ils sont plutôt
rebutés par l’encombrement que cela représenterait (des solutions de casques en libre-service
pourraient être envisagées).
98
https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/trottinettes-electriques-entrent-dans-code-route (consulté le
10/05/2019)
99
https://www.leprogres.fr/rhone-69-edition-lyon-metropole/2019/05/03/8-km-h-maximum-a-lyon-lime-va-
brider-ses-trottinettes-en-zone-pietonne (consulté le 13/05/2019)
Cela n’est pas surprenant puisque les enquêtés sont eux-mêmes usagers des trottinettes en
free-floating. L’image de ce mode peut alors être mise en regard avec l’image des trois autres
modes de déplacement au sujet desquels les usagers ont été invités à citer trois adjectifs : la
voiture, les transports en commun et le vélo. Auprès de leurs usagers, les trottinettes
bénéficient alors d’une image bien plus positive que la voiture et les transports en commun,
deux modes pour lesquels les résultats apparaissent similaires. Ils comptabilisent tous deux
davantage d’opinions négatives (près de la moitié) que d’opinions positives. Par contre, le vélo
bénéficie lui-aussi d’une bonne image et est considéré positivement par 62 % des usagers de
trottinettes. Cela peut être lié au fait que, si le vélo se distingue des trottinettes électriques en
free-floating car il s’agit d’un mode actif (sauf cas des vélos à assistance électrique mais nous
pouvons supposer que l’image la plus répandue du vélo est celle du vélo mécanique), celui-ci
constitue également un moyen de déplacement individuel, permettant de circuler en plein air
et rapidement (ces deux modes permettent d’échapper aux embouteillages). Rappelons à ce
titre que l’enquête a été menée à Paris, Lyon et Marseille, soit les trois plus grandes
agglomérations françaises.
1 Pratique 2 204 50 %
2 Rapide 1 964 44 %
3 Loisirs 1 300 29 %
4 Dangereux 1 012 23 %
5 Cher 1 003 23 %
6 Agréable 494 11 %
7 Facile 416 9%
8 Écologique 392 9%
11 Convivial 178 4%
12 Disponible 171 4%
14 Avenir 148 3%
15 Inconfortable 112 3%
Figure 98 : Termes les plus fréquemment associés aux trottinettes électriques en free-floating par les usagers
Ainsi, les trottinettes électriques en free-floating sont avant tout considérées par leurs usagers
comme « pratiques », qualificatif cité par la moitié des usagers et à propos duquel les entretiens
qualitatifs apportent des éclairages plus précis. Cela peut renvoyer au fonctionnement en free-
floating, qui offre aux usagers la possibilité de ne pas s’encombrer avec leur propre véhicule et
apparaît plus flexible que le libre-service en station. Comme l’explique un enquêté dans un des
verbatim ci-dessous, la flexibilité peut aussi être associée à la liberté de choisir au dernier
moment son mode de déplacement, de ne pas avoir à planifier.
« On est aussi plus libre en trottinette qu'à pied ou en transport [en commun].
On peut aller plus loin, on met moins de temps, on peut la prendre quand on veut,
on peut la laisser où on veut. » Arnaud, 21 ans, usager régulier à Paris
« Ce qui est bien aujourd’hui avec la trottinette en free-floating, c'est qu'on a pas
besoin de l'anticiper, c'est l'occasion qui fait le larron ! » Pierre, 49 ans, usager
régulier à Paris
« Lime, c'est devenu ma troisième alternative [après les transports en commun
et la marche]. Généralement, je choisis le mode en fonction de ma destination,
de sa proximité et de la météo. Je peux toujours choisir au dernier moment. Si je
commence à marcher et que je veux prendre le métro, mais que je tombe sur une
trottinette avant, je la prends. Et l’inverse aussi. » Stéphanie, 35 ans, usagère
régulière à Paris
« Il y a la notion de liberté : je n'ai pas besoin d'attendre mon métro, je ne vais
pas être serré contre les autres et c'est aussi plus direct. » Nicolas, 45 ans, usager
régulier à Paris
Comme évoqué dans ce dernier verbatim, l’aspect pratique (et le fonctionnement en free-
floating) peut aussi renvoyer à la possibilité de réaliser des trajets porte-à-porte Enfin, la
dimension « pratique » peut se décliner sous la forme de la fiabilité, puisque les trottinettes ne
sont pas soumises aux aléas de la circulation, contrairement à la voiture ou aux transports en
commun, et offrent aux usagers une certaine maîtrise de leur temps de déplacement.
Notons tout d’abord l’association particulièrement forte des trottinettes électriques en free-
floating avec l’adjectif « pratique », association bien plus marquée que dans le cas du vélo, des
transports en commun ou de la voiture. Si ce mode est également associé aux loisirs et perçu
comme ludique, cet aspect pratique très souvent cité montre qu’il est considéré comme une
véritable solution de mobilité et non comme un simple jouet et qu’il permet de répondre aux
besoins de déplacement de ses usagers.
100
Synthèse de l’étude : https://6-t.co/wp-content/uploads/2015/11/CO3MD_sociotypesFrance_151127-1.pdf
101
Selon l’ADEME, la vitesse d’une voiture en espace urbain dense se situe aux alentours de 15 à 20 km/h. Source :
https://transportsdufutur.ademe.fr/2017/12/la-vitesse-un-vieux-concept.html (consulté le 16/05/2019)
L’essentiel
• Bien que 40 % des usagers locaux déclarent que l’usage des trottinettes électriques
en free-floating n’a entrainé aucun changement dans leurs pratiques modales, 34 %
signalent une évolution de leur usage des transports en commun et 26 % de leur
recours à la marche. Cependant, une projection à l’ensemble des usagers parisiens
montre que les parts modales de ces deux modes ne s’en trouveraient que très
faiblement affectées.
• Plus la fréquence d’usage des trottinettes est élevée et plus les impacts sur l’usage
des différents modes de déplacement sont importants.
• Une extrapolation des résultats de notre enquête à l’ensemble des usagers à Paris
nous permet d’estimer la part des déplacements en trottinette en free-floating dans
la capitale entre 0,8 et 2,2 %. Cette part modale fait ainsi apparaître ce mode comme
répondant à une demande et étant intégré à l’offre de mobilité à Paris.
• L’impact sur l’équipement de mobilité est par contre très marginal, bien que 4 % des
usagers locaux aient fait l’acquisition d’une trottinette électrique depuis qu’ils ont
commencé à en utiliser en free-floating.
102
Valeur p égale à 1,334e-14pour l’évolution de l’usage des transports en commun et valeur p égale à 8,683e-09
pour l’évolution du recours à la marche, soit p largement inférieure à 0,05.
Les modes dont l’utilisation a évolué sont en premier lieu les transports en commun (évolution
déclarée par 34 % des usagers) puis la marche pour un déplacement complet (26 %). Ce sont
également les deux principaux modes que les usagers déclarent qu’ils auraient utilisés lors du
dernier déplacement en l’absence de trottinettes électriques en free-floating. À titre de
comparaison, ce sont également ces deux modes dont l’utilisation a évolué chez les usagers de
vélos en free-floating, dans des proportions similaires (transports en commun puis marche).
Cependant, rappelons que la marche aurait été utilisée, par les usagers locaux, dans 44 % des
cas et les transports en commun dans 30 % des cas alors que les changements déclarés
concernent davantage les TC que la marche. Le report modal (passage de l’utilisation d’un
mode à un autre sur un ou plusieurs trajets) peut donc bien différer de l’évolution des pratiques
modales. Cela pourrait s’expliquer par le fait que nous n’interrogeons ici que sur l’évolution de
la marche pour des trajets complets, et non pour des trajets en intermodalité. Or, parmi les
derniers trajets, une part significative a été réalisée en intermodalité avec les transports en
commun et aurait été réalisée à pied faute de trottinette : ce cas de figure n’est pas pris en
compte par la question sur l’évolution des modes puisque, pour s’aligner sur la méthodologie
des Enquêtes Ménages Déplacements, nous attribuons ici un trajet intermodal TC + marche ou
TC + trottinette au mode le plus « lourd », c’est-à-dire les transports en commun103.
13 % des usagers locaux déclarent que leur usage du vélo partagé a évolué et 7 % déclarent
que leur usage du vélo personnel a évolué. L’impact de l’usage des trottinettes en free-floating
sur le vélo apparait donc limité (et, de manière peu surprenante, touche davantage le vélo en
libre-service que le vélo personnel), bien moindre que l’impact sur les transports en commun
103
Dans les EMD, les déplacements intermodaux sont attribués au mode le plus « lourd », selon la hiérarchie
suivante : les modes collectifs l’emportent sur les modes individuels et les modes motorisés l’emportent sur les
modes actifs.
Figure 101 : Evolution de l'usage des différents modes selon la fréquence d'utilisation des trottinettes en free-floating
Parmi les 60 % d’usagers ayant vu leurs pratiques de mobilité évoluer, plus de la moitié
attribuent cela à leur usage des trottinettes électriques en free-floating (la modalité « autres
raisons » renvoie par exemple à des événements comme l’arrivée d’un enfant, un
Figure 102 : Raison des évolutions des pratiques modales selon la fréquence d'usage des trottinettes en free-floating
Les transports en commun et la marche à pied pour des déplacements complets étant les deux
modes pour lesquels les évolutions sont les plus significatives (et la substituabilité la plus forte,
comme nous l’avons vu dans l’analyse du dernier trajet), nous nous intéresserons
successivement aux variations concernant ces deux moyens de déplacement. Les effectifs
concernés étant de taille restreinte, les résultats présentés ci-dessous sont à considérer avec
précautions, mais le test de Wilcoxon confirme la significativité des résultats observés.
Cependant, si nous nous intéressons de plus près à l’évolution de l’usage des transports en
commun parmi les usagers ayant déclaré une évolution de leur recours à ce mode, nous
constatons que certaines évolutions sont marginales104. Ainsi, seuls 2 % de l’ensemble des
usagers locaux prennent davantage les transports en commun de manière marquée et 6 % les
prennent moins souvent de manière marquée depuis qu’ils utilisent des trottinettes en free-
floating.
Figure 104 : Évolution de l'usage des transports en commun chez les usagers locaux de trottinettes en free-floating
Afin de comprendre l’évolution de l’usage des transports en commun chez les utilisateurs
locaux de trottinettes en free-floating, nous pouvons utiliser les informations récoltées au sujet
des derniers trajets. En considérant uniquement les derniers trajets qui auraient été réalisés en
transports en commun en l’absence de trottinettes et en analysant leurs caractéristiques, nous
pouvons essayer de mieux comprendre l’évolution de l’usage des TC.
Si l’on s’intéresse aux derniers trajets qui auraient été réalisés en transports en commun par
les usagers locaux (30 % des derniers trajets), nous constatons que ces trajets sont davantage
réalisés la semaine que le week-end (71 % en semaine contre 60 % pour l’ensemble des derniers
trajets des usagers locaux), ce qui peut laisser supposer qu’il s’agit plus fréquemment de trajets
domicile-travail. Pour ce qui est des horaires, les trajets en trottinettes remplaçant les
transports en commun sont davantage réalisés entre 17h et 21h (31 % contre 26 %), ce qui
104
Elles sont marginales au sens où elles ne permettent pas de passer d’une catégorie de fréquence à l’autre. Par
exemple, un enquêté déclarera une fréquence avant et après tombant dans la catégorie « 2 à 3 fois par semaine »
tout en affirmant que son usage a évolué.
Figure 105 : Durée du dernier trajet pour l'ensemble des usagers locaux et pour ceux qui l'auraient réalisé en transports en
commun en l’absence de trottinettes en free-floating
Nous avons aussi demandé aux usagers d’indiquer le temps qu’ils auraient selon eux mis pour
leur dernier trajet avec le mode qu’ils auraient utilisé en l‘absence de trottinettes en free-
floating. Le temps déclaré pour les transports en commun aurait été un peu plus important que
pour les temps de trajets avec l’ensemble des autres modes remplacés par la trottinette, ce qui
rejoint le fait que le temps de trajet à trottinette est également plus long pour l’échantillon des
individus qui l’auraient réalisé en transports en commun.
Les origines et destinations ne varient pas significativement, si ce n’est que les trajets pour
lesquels la trottinette « remplacerait » les transports en commun ont un peu plus souvent pour
destination le domicile (27 % contre 24 % pour l’ensemble des trajets), ce qui rejoint
l’hypothèse de trajets domicile-travail ou domicile-études déjà mentionnée.
L’approche qualitative permet de mieux cerner les motivations des usagers ayant déclaré que
leur recours aux transports en commun a évolué. Ainsi, plusieurs facteurs peuvent expliquer ce
changement de comportement de mobilité.
Du point de vue de certains usagers, la pratique de l’intermodalité en transports en commun
peut être subie, vécue comme une contrainte, la multiplication des correspondances étant
perçue comme un frein. Pour ces usagers, la contrainte de la rupture de charge influence
négativement la durée perçue du déplacement en transport collectif. Ils peuvent alors choisir
de minimiser le surcoût temporel que représente à leurs yeux la correspondance (marche
souterraine entre deux lignes de métro, de RER, temps d’attente sur le quai) en ayant recours
à la trottinette partagée sur une partie du trajet, perçue comme un mode leur permettant de
Figure 106 : Estimation du nombre de trajets pour lesquels les trottinettes ont remplacé les TC à Paris à partir de
l’extrapolation des résultats de l’enquête
C’est ainsi une part minime de l’ensemble des déplacements en transports en commun qui se
trouverait affectée : 2,4 % dans l’hypothèse haute et 1,0 % dans l’hypothèse basse.
Le tableau ci-dessous montre dans quelle proportion la part modale des transports en commun
à Paris (EGT 2010) pourrait être affectée par les trottinettes, à partir de nos estimations.
Évolution de la part
Part modale des TC dans Part modale des TC avec la
modale des TC avec la
l’EGT 2010 projection trottinettes
projection trottinettes
105
http://www.omnil.fr/IMG/pdf/egt2010_tc_bd-2.pdf (consulté le 17/05/2019)
S’il apparaît que les trottinettes en free-floating remplacent les transports en commun sur
certains déplacements, l’extrapolation des résultats de notre enquête suggère que la part
modale des TC à Paris ne se trouverait affectée que de manière marginale par ce nouveau
mode. Dans l’hypothèse haute, la part modale des transports en commun diminue de 0,6 point
et dans l’hypothèse basse de 0,3 point.
De plus, nous pouvons signaler que 46 % des usagers locaux à Paris qui déclarent que leur usage
des transports en commun a diminué possèdent un abonnement aux transports en commun,
une proportion qui est de 53 % parmi les usagers locaux à Paris qui auraient effectué leur
dernier déplacement en TC en l’absence de trottinettes et dont l’usage des TC a diminué. Pour
eux, la baisse de l’usage des TC due à la présence de trottinettes électriques en free-floating se
solderait alors par un désengorgement, sans baisse de recettes pour l’opérateur.
Figure 108 : Fréquence d'usage de la marche pour des trajets complets avant et après la découverte des trottinettes en free-
floating
Comme pour les transports en commun, certains répondants ont déclaré une évolution de leur
recours à la marche mais le changement s’avère finalement marginal. Ainsi, seuls 6 % des
usagers de trottinettes en free-floating marchent moins qu’avant, et 3 % déclarent marcher
davantage, ce qui pourrait être lié au fait qu’il faut parfois marcher quelques minutes avant de
Figure 109 : Evolution du recours à la marche chez les usagers locaux de trottinettes en free-floating
Comme pour les transports en commun, nous pouvons nous intéresser plus précisément aux
caractéristiques des trajets sur lesquels la trottinette a potentiellement remplacé la marche
(44 % des deniers trajets réalisés par des usagers locaux).
La temporalité de ces trajets varie peu : la répartition semaine / week-end des trajets qui
auraient été réalisés à pied en l’absence de trottinettes en free-floating ne diffère pas de celle
de l’ensemble des trajets, de même que la répartition horaire au cours de la journée, si ce n’est
que les trajets pour lesquels la trottinette aurait remplacé la marche sont un peu moins
fréquemment réalisés entre 17h et 21h (23 % contre 26 %).
Les trajets concernés par cette substitution trottinette / marche sont par contre plus souvent
des trajets courts, avec une moyenne de temps de trajet de 10 minutes contre 14 minutes pour
l’ensemble. Cela semble logique puisque la marche, mode actif et relativement lent, se prête
davantage à de courts déplacements. Ainsi, 60 % des trajets qui auraient été réalisés à pied ont
duré moins de 10 minutes en trottinette, contre 42 % pour l’ensemble. A titre de comparaison,
la portée moyenne d’un déplacement à pied à Paris et en Île-de-France est de 430 m, avec une
durée de 12 minutes (EGT, 2010).
Figure 111 : Estimation du nombre de trajets pour lesquels les trottinettes ont remplacé la marche à Paris à partir de
l’extrapolation des résultats de l’enquête
La part modale de la marche à Paris (EGT 2010) ne s’en trouverait alors affectée que de façon
marginale, baissant de 0,8 point dans l’hypothèse haute et de 0,3 point dans l’hypothèse basse.
Si certains usagers marchent moins depuis qu’ils utilisent des trottinettes électriques en free-
floating, cet exercice de projection montre qu’à l’échelle collective ce nouveau mode n’a qu’un
impact extrêmement marginal sur la marche à Paris.
Part modale de la marche Évolution de la part
Part modale de la marche
avec la projection modale de la marche avec
dans l’EGT 2010
trottinettes la projection trottinettes
Figure 112 : Estimation de l'évolution de la part modale de la marche à Paris avec l’arrivée des trottinettes en free-floating, à
partir de l’extrapolation des résultats de l’enquête
106
http://www.omnil.fr/IMG/pdf/-4.pdf (consulté le 20/05/2019)
107
STIF-OMNIL-DRIEA, (2013), Le renouveau du vélo en Île-de-France, Fiche vélo de l’EGT 2010, 4 p.
108
Le test de Wilcoxon effectué ici donne une valeur p égale à 0,01301, qui reste donc inférieure à 0,05.
Pour 90 % d’entre elles, ces personnes imputent cette démotorisation (au moins partielle), à
d’autres raisons qu’à l’utilisation de trottinettes en free-floating. Au total, cela correspond à
0,4 % de ménages concernés par une démotorisation au moins partielle due à l’utilisation de
trottinettes en électriques en free-floating. Cependant, au vu de la taille très restreinte de
l’échantillon, il semble difficile de tirer des conclusions à partir des 10 % de répondants qui se
sont séparés d’une voiture et qui attribuent cette démotorisation aux trottinettes. Cette
absence d’impact sur l’équipement automobile semble logique si l’on considère les
importantes différences entre ces modes, qui ne répondent pas aux mêmes usages (et se
retrouve également dans l’enquête sur les vélos en free-floating).
Nous avons posé ces mêmes questions concernant l’équipement en deux-roues motorisé et
obtenu des résultats similaires. L’échantillon de répondants disposant de ce type de véhicules
dans leur ménage et, partant, de répondants s’en étant séparés est encore plus restreint et, au
vu du test de significativité effectué109, nous ne pouvons pas exploiter les résultats à ce sujet
avec certitude. Les usagers s’étant séparés d’un deux-roues motorisé sont plus nombreux à
l’attribuer à leur utilisation des trottinettes (ce qui peut sembler logique puisque trottinette
électrique et scooter / moto apparaissent plus proches que trottinette électrique et voiture)
mais, vu la faiblesse de l’effectif cette information est elle-aussi à considérer avec la plus grande
précaution.
109
Le test de Wilcoxon effectué concernant le nombre de deux-roues motorisé avant et après usage des
trottinettes donne une valeur p égale supérieure à 0,05 (0,1116), ne permettant pas de considérer les résultats
comme significatifs.
Figure 114 : Achat envisagé d'une trottinette personnelle parmi les usagers de trottinettes en free-floating n'en ayant pas
acquis
Notre enquête fait apparaître que 4 % des usagers locaux de trottinettes en free-floating
interrogés ont fait l’acquisition d’une trottinette électrique personnelle suite à leur usage de ce
mode sous sa forme partagée. Nous pouvons chercher à extrapoler ce résultat à l’ensemble
110
http://e-fpmm.fr/wp/blog/2019/04/07/barometre-marche-de-la-mobilite-2018-fp2m-smart-mobility-lab/
(consulté le 22/05/2019)
Nous cherchons ensuite à connaître le nombre total de trajets réalisés en trottinettes par des
usagers locaux à Paris qui auraient été réalisés en transports en commun en l’absence de
trottinettes. Pour cela, nous avons regardé quelle part de notre échantillon de travail avait
répondu « en transports en commun » à la question « Comment auriez-vous réalisé ce dernier
déplacement si les trottinettes en free-floating n’avaient pas existé ? ». Nous avons affiné ce
« ratio de remplacement des TC » pour chaque fréquence d’usage (en effet, nous constatons
que les personnes utilisant une trottinette une fois par semaine répondent plus souvent
qu’elles auraient réalisé leur dernier déplacement en TC que les personnes les utilisant une à
trois fois par mois).
Dans le calcul de ce « ratio de remplacement des TC », nous excluons les trajets dont les
répondants déclarent qu’ils auraient été faits en TC en l’absence de trottinettes, mais qui ont
aussi été déclaré comme ayant combiné TC et trottinette. En effet, en s’alignant sur la
méthodologie de l’EGT, ces trajets intermodaux TC + trottinette seraient attribués aux TC, le
plus « lourd » des deux modes utilisés. Parmi les trajets pour lesquels la trottinette remplace
les TC à Paris, 19 % sont réalisés en intermodalité avec les TC : selon la méthodologie de l’EGT,
ils sont attribués aux TC et nous considérons alors qu’ils demeurent des trajets en TC. Pour le
formuler autrement, des trajets effectivement réalisés en TC + trottinette auraient été
exclusivement réalisés en TC en l’absence de trottinettes. Ces dernières ne remplacent donc
les TC que sur un segment du déplacement, qui demeure de toutes façons associé aux
transports en commun quand mesurés à travers l’EGT.
En appliquant le « ratio de remplacement des TC » au nombre de trajets réalisés chaque
semaine en trottinettes en free-floating, nous obtenons le nombre de trajets « pris » aux TC
chaque semaine, en fonction de la fréquence d’usage.
En le multipliant par le nombre de personnes concernées par chaque fréquence d’usage, cela
permet enfin d’aboutir au nombre total de trajets pour lesquels les trottinettes en free-floating
ont remplacé les transports en commun pour les usagers locaux à Paris, en conservant toujours
une hypothèse haute et une hypothèse basse.