Aboud Hichem - La Mafia Des Generaux PDF
Aboud Hichem - La Mafia Des Generaux PDF
Aboud Hichem - La Mafia Des Generaux PDF
, ,
DES GENERAUX
JC Lattès
LA MAFIA
DES GÉNÉRAUX
www.edldons-jclattes.fr
Hichem ABOUD
LA MAFIA
DES GÉNÉRAUX
JCLattès
C 2002, Mitions J.-C. Lattès.
À la mémoire de mon père, que je n'ai pu accompagner à sa
dernière demeure, puisqu'il m'est interdit de rentrer dans mon
paY..s.
A ma mère, qui souffre en silence de mon exil.
À Nora, pour le soutien qu'elle m'a toujours apporté.
À Abdelkrim, Djami/a, Narimène, Abderramahne, Houari Bou-
mediene, Kahina, Hayette et son époux Djamel.
À ma famille et à mes amis d'Oum El Bouaghi, Alger, Skikda, Sétif;
Constantine et partout en Algérie et en France.
À Tayeb Ouafi, pour l'aide désintéressée qu'il m'a apportée
dans les moments difficiles.
Aux journalistes qui ont donné leur vie pour la liberté d'expres-
sion.
À la mémoire du commandant Achouri Hammouda et aux offi-
ciers intègres qui m'ont inculqué le sens du devoir patriotique.
À tous les officiers, sous-officiers et soldats de 1'Armée Natio-
nale Populaire qui placent 1'Algérie au-dessus de leur propre inté-
rêt.
À tous les enfants du peuple qui ont assumé des responsabilités
au sein de l'appareil d 'État, sans succomber au vertige du pou-
voir.
À toutes les victimes de la barbarie qui s'est abattue sur notre
pays.
J'accuse!
années 60, ait pu y avoir accès. Quel crédit, dès lors, accor-
der au grade de lieutenant ou de sous-lieutenant arboré par
Nezzar et ses compagnons ?
J'aimerais bien connaître les Français camarades de
promotion de nos généraux. Que sont-ils devenus ? Y en
a-t-il un parmi eux qui soit parvenu au rang de ministre de
la Défense, ou de chef d'état-major de l'armée, ou même
commandant d'une arme quelconque?
4. Les hommes de l'ombre
Kbaled Nezzar
Son ambition envahissante lui a pennis de s'imposer
comme le parrain incontesté de la mafia des généraux et
son porte-parole. Effronté, il multiplie les conférences et
déclarations de presse pour combler le déficit de communi-
cation dont souffre son clan.
Évidemment, n'assistent à ses conférences de presse
que des journalistes tirés sur le volet. Pas de place pour
les contradicteurs.
Né en 1937 à Seriana dans les Aurès, le berceau de
la révolution algérienne d'où est parti le premier coup de
feu annonçant le déclenchement de la lutte armée pour la
reconquête de l' indépendance, Khaled Nezzar n' a pas jugé
bon de suivre les centaines de jeunes Chaouias de sa région
qui avaient pris les annes pour combattre 1'occupant. À
l'époque, il fallait être sourd et aveugle pour ne pas voir
la féroce répression qui s'abattait sur les populations des
Aurès. Une répression à laquelle était insensible l'élève
sous-officier Khaled Nezzar, fils d' un sous-officier retraité
de l'armée française.
Pourtant, il dit bien ne «jamais pouvoir oublier
l'image de deux frères dont les corps étaient criblés de
balles. C'était en août 1956, la veille de l'Aïd El Fitr. Je
revenais de Strasbourg, en France, où j'avais passé mes
vacances d'été 1 ».
Une année auparavant, il avait bien été témoin des
bombardements de sa région par ses collègues aviateurs.
1. Idem, p. 37.
2. Idem, p. 32.
3. Idem, p. 32.
56 La mafia des généraux
qu' il était jeune, son père Rahal a-t-il mis son expérience
de sous-officier au service de l'armée de libération? Pas
du tout. Et comment explique-t-il que le général Liamine
Zeroual, originaire de la même région que lui, soit monté
au maquis à l'âge de seize ans? Pourquoi n'a-t-il pas suivi
1'exemple de ses camarades de 1' école des enfants de
troupe qui ont répondu à l'appel du 19 mai 1956, comme
ille souligne dans ses Mémoires ? Son camarade de classe,
Benacer Abdelawahab, n'a-t-il pas rejoint les maquisards
à l'âge de quinze ans ?
Celui qui devait être un bon tireur de fusil-mitrailleur
a étonné tout son monde par sa promotion-éclair.
« Un jour, Si Abdennour, commandant de la 1re Région ·
de la Zone 1 activant dans les régions de Blandan et de
Annaba, m'avoua : "Lorsque je t'ai vu pour la première
fois accompagnant Chadli, j'ai dit à mon entourage en
plaisantant : qui est ce jeune homme ? n ferait un bon
tireur de fusil-mitrailleur 24/29. Mais je fus surpris d'ap-
prendre que tu allais être mon supérieur 1 !, »
Cet instructeur, rejeté par les soldats de l' ALN, sera
ministre de la Défense nationale en 1990, dépouillant le
président de la République d'un poste stratégique, convoité
depuis longtemps par de nombreux officiers supérieurs. Un
poste qu'il gagne après avoir dirigé le carnage du 5 octobre
1988, qui a coûté la vie à cinq cents jeunes manifestants.
Cet assoiffé du pouvoir et sinistre sanguinaire pense-t-il au
moins à ces jeunes victimes d'octobre? Sûrement pas. Lui
qui a tué sa propre épouse, mère de ses enfants, d'une balle
dans la tête, sous le grossier prétexte qu'elle collaborait
avec les terroristes, n'a aucun sens de la vie humaine.
Selon des officiers de la Sécurité militaire, le mobile de ce
crime, en réalité, c'était son désir d'épouser une femme
médecin, plus jeune que lui de trente ans, qui le soignait.
1. Les Mémoires du général Khaled Nezzar, op. cit., p. 47.
Les hommes de 1'ombre 57
Abdelmalek Guenaïzia
Vieux compagnon de K.haled Nezzar, il était avec lui
à l'école des enfants de troupe à l'âge de douze ans. Une
vieille amitié qui dépasse les intérêts communs. Il a occupé
différentes fonctions dans l'armée (chef de bataillon, chef
de groupement, adjoint chef de la 2e région militaire sous
Chadli Bendjedid, directeur central du matériel au minis-
tère de la Défense, commandant des forces aériennes et
chef d'état-major de l'armée) avant de se découvrir une
vocation de diplomate en 1990. Il occupera le poste d'am-
bassadeur d' Algérie, durant près de dix ans, en Suisse.
Guenaïzia est le chef comptable de la mafia des généraux.
Dans la capitale helvétique, il veille sur les comptes ban-
caires de ses compagnons tout en leur préparant une
retraite dorée en cas de coup dur. Sa radiation de 1'armée
ne l'a jamais exclu du cercle des décideurs. TI reste parmi
les hommes de 1' ombre les plus nocifs. Il est à 1'origine
du retour de Mohammed Cherif Messaadia sur la scène
Les hommes de l 'ombre 59
Larbi Belkheir
Lui qui a toujours nié faire partie du club des décideurs,
ou d'un clan quelconque, est l'un des hommes clés de la mafia.
Fils de caïd, né à Frenda, dans l'ouest algérien, en 1937, ancien
enfant de troupe, il a rejoint 1'ALN en 1958 comme ses autres
acolytes en passant par la base du FLN à Tunis.
Dès son arrivée à Garn El Halfaya, à la frontière
tuniso-algérienne, et bien avant qu'il soit affecté à une
quelconque mission, il a tenu, en compagnie de Guenaïzia,
la fameuse réunion avec les officiers de 1' ALN destinée à
répartir les tâches à la tête du commandement de 1' armée
algérienne. À l'indépendance, il a fait l'essentiel de sa car-
rière à l'ombre de Chadli Bendjedid dont il était le chef
d'état-major à la 2e Région militaire durant une dizaine
d'années (1965-1975). Avant de retrouver Chadli comme
directeur de cabinet à la présidence de la République à
partir de 1979. Il dirige l'ENITA (École nationale des tech-
niciens et ingénieurs d' Algérie) de 1975 à 1979, où fut
tenu le conclave qui a décidé de l'intronisation de Chadli
Bendjedid à la tête de l'État algérien.
En 1991 , en prévision du coup d 'État du 12 janvier
1992, il quitte le siège de la présidence de la République
pour occuper le poste de ministre de l'Intérieur dans le
gouvernement Ghozali. Le décret d'état d 'urgence pondu
pour la circonstance met entre ses mains tous les pouvoirs
militaires en cas de troubles publics. Ce décret donne le
droit au wali (préfet), normalement sous l' autorité du
ministre de l' Intérieur, d 'ordonner le déploiement des
forces militaires dans les rues en cas d'urgence. C'est la
60 La mafia des généraux
Ait Abdessalem
Ce quasi-inconnu, dont le nom est très peu répandu
dans les milieux de la presse et chez les observateurs de
Les hommes de l'ombre 61
Benabbes Gheziel
Ancien sergent de l'armée coloniale, comme ses
acolytes, il rejoint la base de 1'Est de 1' ALN en 1958.
Celui que les gendarmes ont surnommé « le sergent Gar-
cia» est originaire des Aurès. À l'indépendance, il a
dirigé 1'école des cadets de la révolution durant dix
années. Ce qui fait dire à un ancien maquisard : « Le
comble pour l'Algérie c'est que l'école qui accueillait
les enfants des martyrs de la révolution était dirigée par
un ancien de l'armée coloniale. Il ne serait pas étonnant
que, parmi les élèves de cette école, se trouve un enfant
dont le père aurait été tué par Gheziel. » Il commande
ensuite la gendarmerie nationale, après avoir occupé les
fonctions de chef du département des affaires de défense
et de sécurité à la présidence de la République sous
Chadli Bendjedid.
C'est l'un des hommes les plus dangereux de la
mafia. Il s'accroche au pouvoir. Toutes les tentatives
Les hommes de l'ombre 63
Mohammed Lamari
Ce général avait la réputation de dégonfler les pneus
des voitures des officiers qui stationnaient devant sa villa
des Tagarins sur les hauteurs d'Alger, en face du ministère
de la Défense nationale. Il est aujourd'hui de ceux qui
décident du sort de tout un peuple.
Originaire de la ville de Biskra, mais né à Alger le
7 juin 1936, c'est un pur produit de l'armée française.
Avant de rejoindre 1'ALN en 1961 en se présentant à la
base marocaine du FLN, à quelques mois de la signature
des accords du cessez-le-feu, il avait suivi une formation
à l'école de cavalerie de Saumur. Complexé par son passé
peu glorieux durant les années de la guerre de libération,
il a toujours servi de bouclier à ses pairs du cabinet noir, au
point d'apparaître comme le véritable décideur en Algérie.
Comme tous ses compères transfuges, il a été officier
d' instruction au lendemain de l'indépendance, avant d'oc-
cuper le poste de chef d'état-major dans les différentes
unités opérationnelles qu'a eu à diriger Liamine Zeroual.
Ce dernier le retrouvera au même poste lorsqu'il sera
amené à prendre le ministère de la Défense nationale en
juillet 1993.
Un an plus tard, dans la foulée de cette nomination,
il sera promu général de corps d'armée. Il est le seul, à ce
Les hommes de 1'ombre 65
Smail Lamari
L tartisan des négociations avec 1tArmée islamique du
salut nt est en fait qu tun exécutant des décisions du club
des onze. Son entrée dans ce cercle, le général Smai1 la
doit à son appartenance à ces mythiques services de sécu-
rité. Tewfik et lui sont les seuls du groupe des décideurs à
n'avoir pas porté l'uniforme françaist bien que le général
Mohammed Betchine soutienne le contraire en les accusant
d'avoir fait partie des enfants de troupe.
Fils d'un chauffeur de taxit Smail Lamari est issu
d'une famille modeste originaire de Beni Slimane, dans la
région du Titteri, comme beaucoup d'habitants d'El Har-
rach, ce quartier populaire de la banlieue est d'Alger. Un
quartier où il était connu pour le soutien désintéressé qu'il
apportait, en tant que supporter, au deuxième club barra-
chi, le CREH.
En 1961, il s'est engagé très jeune dans l'ALN. A
l'indépendance, il a fait un passage d'une année dans la
police, avant de s'engager dans la marine nationale, où il
était officier de sécurité de son unité. Dans les années 70,
l'adjudant qu'il était a bénéficié d'une formation spéciale
destinée aux sous-officiers pour obtenir le grade de sous-
lieutenant. Technicien du renseignement, il a toujours évo-
lué dans les services opérationnels. C'est pourquoi il est
derrière tous les coups tordus et accomplit la sale besogne
au service d'un pouvoir qui tire sa force de la répression,
de l'infiltration et de la manipulation.
Même s'il veut se montrer proche de ses hommes,
nombre de ses collaborateurs, notamment les jeunes offi-
ciers politisés, lui vouent une haine sans limites. « Il a
beaucoup changé depuis les événements de 1992 », disent
beaucoup d'entre eux. D'autres, en revanche, ltapprécient
pour avoir toujours su les protéger.
Le cas de 1' assassinat du président Boudiaf en est la
Les hommes de l'ombre 67
Saheb Abdelmadjid
Chef de la 4e Région militaire, c' est un homme de
confiance du club des décideurs. Il occupe toujours des
postes stratégiques.
Sa désignation à la tête de la 4e Région n'est pas for-
tuite. C'est là que se trouve tout l'enjeu du pouvoir : l'or
noir. «Il surveille ettiyou », disent les Algériens. Saheb
Abdelmadjid, originaire de la grande Kabylie, est lui aussi
un enfant de 1' armée française. Il a rejoint 1' ALN comme
beaucoup d'autres, en 1961, à quelques mois du cessez-le-
feu, en se rendant au centre d'El Mellegue. Après avoir
servi comme officier du train, il a émergé au milieu des
années 80, en occupant le poste de chef d'état-major de
la 4e Région militaire, sous le commandement du général
Hocine Benmallem. Il fut ensuite chef de département à
l'état-major de l'armée avant de retrouver la 4e Région,
72 La mafia des généraux
LES SOUS-TRAITANTS
LE TROISIÈME CERCLE
citoyen, quel que soit son niveau social, c'est de vous ren-
seigner sur ses fréquentations.
Si, par malheur, il a un voisin ou un collègue étranger,
il n'y a aucun doute : «C'est un agent des services de
renseignements du pays de ce voisin étranger. » Au début
des années 80, toutes les voix qui s'élevaient pour dénon-
cer la gabegie et les dérives politiques étaient systémati-
quement taxées de prosoviétiques. « Ce sont des
pagsistes »,vous disaient les« mortellement patriotes». Si
1' on se fie au fichier de la SM et des Renseignements géné-
raux de la police, le PAGS, un parti clandestin et très
fermé, regroupait deux fois plus de militants que le FLN,
parti unique au pouvoir.
De nos jours, dès qu'une personne dénonce le pou-
voir, on demande si elle se livre à la prière. Si elle est
pratiquante, pas besoin d'aller plus loin. C'est un intégriste
manipulé par l'Iran, le Pakistan ou le Soudan. Un terro-
riste.
nombre de ceux qui l'ont fait sont les victimes d'un sys-
tème qui les a marginalisés et livrés à des monstres qui ont
fait de l'islam ce qu'il n'a jamais été. Nombreux sont ceux
qui vous diront qu'ils n'auraientjamais choisi de se couper
de leur famille et de sombrer dans une aventure sans fin,
s'ils n'y avaient été poussés par le mépris, l'injustice et
1' arbitraire.
Pour en donner une petite idée, je citerai quelques
exemples pris à Oum El Bouaghi, une ville paisible que je
connais bien, et qui n'a jamais connu la moindre tentative
d'action terroriste durant la décennie sanglante pour avoir
été régie par la sagesse des chefs de tribus. Là-bas, on a
toujours voté sur la base des alliances tribales, que ce soit
au temps du parti unique ou du multipartisme. La lutte
« idéologique » opposait Arch (la tribu) Ouled Amara à
celle des Ouled S'îd. Aux élections de mars 1990, les
Ouled S 'îd, s'étant alliés à l'un des plus importants clans
familiaux des Ouled Amara, celui des Ouled Sabeg, ont
remporté les élections sous l'étiquette du FIS. La prési-
dence de l'assemblée communale (la mairie) est revenue
au candidat des Ouled S'îd, et celle de l'assemblée de
wilaya à celui des Ouled Sabeg.
Les élus n'ont jamais tenu compte d'une quelconque
appartenance politique. C' est ce qu'ils feront connaître à
la direction du FIS en refusant de suivre le mot d'ordre de
la grève de juin 1991. D'ailleurs, après la dissolution des
assemblées dont les élus étaient à majorité FIS, le maire
d'Oum El Bouaghi est le seul de tout le pays à avoir été
maintenu à son poste en changeant seulement de titre. Il
est devenu, comme partout ailleurs, délégué exécutif
communal. Saïd Tounsi, honnête homme s'il en est, refu-
sait de verser dans la magouille, les passe-droits et la cor-
ruption, ce qui ne plaisait guère aux membres du bureau
de sécurité de la ville. Il fut accusé de terrorisme, arrêté,
200 La mafia des généraux
font faillite, Khalifa Aitways jette 1' argent par les fenêtres.
«C'est la blanchisserie de l'argent des généraux», n'hési~
tent pas à dire de nombreux observateurs. Dans une inter~
view accordée au Figaro au mois d'octobre 2001, son
Président~Directeur général, fùs d'un ancien ministre,
faute de pouvoir s'expliquer sur sa gestion, laisse planer
le doute sur 1'origine des fonds de sa compagnie. Quoi
qu'il en soit la compagnie aérienne, dont le budget publici~
taire est de loin supérieur à son chiffre d'affaires, cas
unique dans les annales de 1' économie, reflète parfaitement
l'image d'un pouvoir dont elle est l'émanation.
Attention! Lorsqu'on veut s'associer à un général en
affaires, il faut savoir conjuguer le verbe manger dix fois
plus à la deuxième personne du singulier qu'à la première.
« Tu manges, tu manges... (dix fois), et je mange (une
fois). » Cette règle est devenue une blague qui court les
rues des villes d'Algérie. C'est pour avoir oublié cette
règle que Mohammed Redha Ben Boualia, 1' associé princi~
pal du général Betchine, s'est retrouvé à 1' ombre.
Ancien pilote de chasse, radié de 1'armée pour pédé~
rastie selon le général Betchine, Ben Boualia servait de
nom d'emprunt au parrain de la mafia constantinoise, pour
toutes ses affaires véreuses. Il était l'homme le plus craint
de Constantine. Lors des visites ministérielles, le wali de
Constantine s'effaçait devant lui. Quand Betchine faisait
son hold-up sur mon journal, El Acil, c'est Ben Boualia
qui me faisait face devant le président du tribunal de
Constantine.
Le directeur du port de Skikda a été limogé de son
poste pour avoir exigé de Ben Boualia qu'il paye les taxes
portuaires. Le directeur de la Société d'impression de
1' Est, Lazhar Merad, s'est retrouvé du jour au lendemain
au chômage pour avoir réclamé à Ben Boualia le paiement
des frais d'impression de son journal. Le wali de Constan-
Pendant les massacres, les affaires continuent... 225
tine, Brahim Djeffal, a été renvoyé chez lui pour avoir reçu
un entrepreneur concurrent de Ben Boualia.
J'arrête là la liste des méfaits de ce larbin qui a fmi
par se retrouver durant trois années derrière les barreaux
de la prison du Coudiat de Constantine, grâce à un papier
rédigé vite fait chez Mohammed Kaddour, le faussaire du
4e kilomètre de la route du Khroub, toujours prêt à établir
les actes notariés que lui demande le général Betchine. Le
journal que Ben Boualia se partageait avec l'épouse du
général ne lui appartient plus. Tous ses biens ont été saisis
durant son séjour en prison. L 'argent est destiné à « dé-
dommager» Aicha Betchine, son ex-associée. Pourquoi ce
retournement de situation ?
Ayant servi d'homme lige à un mafieux, Ben Boualia
croyait vraiment qu'il était associé à Betchine. En investis-
sant des dizaines de millions dans la campagne électorale
de Zeroual (qui n'en avait pas besoin puisqu'il se servait
de l'argent du Trésor public), Ben Boualia se croyait asso-
cié au pouvoir politique. n refusait que quelqu'un d' autre
vienne le concurrencer dans son association avec « son »
général. Ce dernier devait lui être «fidèle ».
Malheureusement pour cet affairiste jaloux, Betchine
est polygame. Insatiable, il ne pouvait se contenter des
affaires que lui brassait Ben Boualia. Lorsque Abdelali
Blik:ez, autre affairiste de Constantine, a montré le bout du
nez, Ben Boualia s' est enflammé et a publié une lettre
ouverte, pour se plaindre des agissements de Blikez, au
président de la République, Liamine Zeroual, qui aurait dû
lui être reconnaissant de sa contribution à sa campagne
électorale.
Betchine s'est fâché, a envoyé son fùs Ahmed donner
une correction à coups de poing à l'associé déchaîné.
Avertie, la police a embarqué les deux bagarreurs. Au bout
de quelques minutes, le fils du général a bien entendu été
226 La mafia des généraux
Introduction................................................................... 11
1. Un enfant du peuple ...... .... .. .... ... ... .... ... ......... ........ 17
2. Le fleuve détourné................................................. 27
3. Le péché originel ................................................... 35
4. Les hommes de l'ombre........................................ 45
5. L'avènement de l'imposture ... ............................... 103
6. Octobre 1988 : la grande manipulation ............ .... 117
7. Cosa Nostra ............................................................ 135
8. Meurtre sur commande .......................................... 149
9. Le règne du mensonge ...... ... ..... .. .. .. ... ... ... ...... .. ... .. 171
1O. Le syndicat du crime............................................. 183
11. Pendant les massacres, les affaires continuent... .. 221
12. Le temps des marionnettes .................................... 235
13. Justice pour l'Algérie ............................................ 249
Impression réalisée sur CAMERON par
BRODARD ET TAUPIN
La Flèche
en mars 2002
ISBN : 2-7096-2337-4
© Gamma 1 J.M.Turpin
Atelier Didier Thimonier