Bleuite
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Notes et références
Guerre d'Algérie
Annexes
Batailles
Bibliographie
Articles connexes
Bataille d'Alger
Liens externes
Mécanisme
Ces listes étaient acheminées par différents biais, notamment :
Pour comprendre comment le virus de la suspicion (que l’on baptise plus tard la « bleuite ») a pu pénétrer la
Révolution algérienne, il faut revenir à la bataille d'Alger.
D'anciens membres des réseaux de Yacef Saâdi avaient décidé de travailler avec les parachutistes français.
C'était une idée du capitaine Paul-Alain Léger, parachutiste, agent du SDECE et chef du GRE (Groupe de
renseignements et d'exploitation). Il avait proposé à son supérieur hiérarchique le colonel Godard de
retourner d’anciens compagnons de Yacef :
Quand un élément du FLN est identifié et arrêté, il est interrogé, compromis et piégé. On lui offre de
changer de camp. Les capacités de psychologue de Léger constituent l'essentiel du processus de
2
retournement . Les anciens du FLN rejoignent ainsi le groupe habillés de bleus de chauffe, d’où le nom de
« bleuite » ou le « complot bleu ». À l’origine, ce groupe est composé de 70 hommes et leur rôle était de
dénoncer leurs anciens camarades des réseaux clandestins, mais aussi de tenter de retourner la population en
faveur des Français. Ils circulaient ainsi dans la Casbah bavardant avec tous ceux qui voulaient bien leur
adresser la parole, essayant de reconnaître dans la foule les hommes avec qui ils avaient été en contact. Mais
leur rôle principal restait, bien sûr, l’infiltration des réseaux FLN encore existants. Ils permettent
l’arrestation de Yacef Saâdi, Zohra Drif et la localisation de la cache d’Ali la Pointe. En mars 1958, ce
2
groupe compte plus de trois cents hommes et femmes avec pour la plupart un statut de harki.
Cette opération d’intoxication fut aussi à l'origine d'une campagne de purges dévastatrices dans toutes les
wilayas, qui causa plus de pertes à l'ALN et au FLN que les combats eux-mêmes, et provoqua le ralliement
de nombreux combattants affolés à l'armée française, seul moyen de sauver leur vie face aux soupçons de
trahison, en particulier dans la wilaya III dirigée par le colonel Amirouche. Le principe du cloisonnement
dans l'ALN et le devoir de réserve des principaux concernés aggravaient la situation.
En septembre 1957, Houria, une militante du FLN, est dénoncée par son mari qui souhaitait s’en
débarrasser. Arrêtée, elle accepte de collaborer avec les services du capitaine Léger. Houria est mise en
contact avec un militant capturé, Hacène Ghendriche, alias Zerrouk, chef de la région 3 de la zone d’Alger,
retourné et secrètement passé au GRE du capitaine Léger. Zerrouk envoie Houria se cacher chez sa femme,
où elle observe un homme toujours accompagné d’une petite fille de 5 ans ; suivi, cet homme guide les
Français vers son domicile, no 4 rue Caton dans la Casbah.
Le 23 septembre, les gendarmes d'Alger arrêtent un homme nommé Djamel qui, interrogé, prétend avoir
rencontré le chef de la Zone autonome d’Alger (ZAA) Yacef Saâdi à la rue Caton. Le recoupement conduit
le capitaine Léger à penser que Yacef Saadi loge dans cette rue. Dès le lendemain, la rue est bouclée par les
paras du 1er REP sous le commandement du colonel Jean Pierre et les « bleus de chauffe » du capitaine
Léger. L’immeuble est fouillé, et Yacef Saadi y est arrêté en compagnie de Zohra Drif. Les deux prisonniers
sont étroitement gardés par le 1er REP, aucun contact avec l'extérieur, car Yacef et Zohra n'ignorent plus rien
du double jeu de Zerrouk, il faut que ce double
jeu se poursuive pour mettre le GRE sur la piste
d'Ali la Pointe. Très vite, Zerrouk prend contact
avec Ali par une boîte aux lettres de secours.
Léger apprend ainsi qu'Ali la Pointe a rejoint
une autre cache, avec Hassiba Ben Bouali, Petit
Omar (douze ans, agent de liaison et neveu de
Yacef) et Mahmoud, autre agent de liaison. Ali
la Pointe a sur lui quatre bombes complètes et il
désire que Zerrouk - qui pour lui est toujours le
responsable militaire de la zone autonome -
relance une vague d’attentats. Lentement, Léger
reprend la filature du courrier. Il lui faudra trois Les renseignements recueillis par le GRE grâce aux
semaines, pour qu'il arrive à localiser la planque techniques de la Bleuite ont conduit le parachutiste
d’Ali la Pointe au 5, rue des Abderrames en capitaine Léger a localiser la fameuse cache d’Ali la
Pointe au 5, rue des Abderames dans la Casbah d’Alger,
haute Casbah. Ali cerné avec ses complices ;
Ali la Pointe et ses compagnons refusent de se rendre,
son refuge est plastiqué par le 1er REP.
cernés par les commandos parachutistes de la fameuse
L'énorme explosion tue également 17 civils du
10e D.P., le général Massu ordonne à ses paras de
voisinage dont 4 fillettes de quatre et cinq ans. dynamiter la cache, le 9 octobre 1957, ce fait d’armes
Cette opération marque l'élimination des marqua la fin de la bataille d’Alger.
principaux dirigeants du FLN de la Zone (Photo prise le, 20 décembre 2011).
autonome d’Alger et dès lors, la victoire de
l'Armée française dans la bataille d'Alger.
Quand les « Bleus » sont obligés d’organiser des attentats dans Alger
L'infiltration des « Bleus » dans les réseaux FLN permet au capitaine Léger de contrôler le courrier échangé
entre Alger et les wilayas. C'est ainsi qu'il apprend qu'une nouvelle équipe de combattants algériens va être
désignée afin de remplacer celle qui vient d'être démantelée en automne 1957 et montrer ainsi à ses partisans
que la rébellion n'est pas morte.
Certains de ses hommes, qui se font passer pour des membres du FLN, vont jusqu'en Kabylie pour
témoigner de la réalité des contacts et de la « sincérité révolutionnaire » des courriers. Un des agents du
GRE jouera le rôle de chef du réseau terroriste et, à ce titre, recevra pour ses hommes les armes et les
explosifs destinés aux actions à venir.
Le lieutenant Kamel, responsable de la zone 1 de la wilaya III (Kabylie ouest) prend contact avec Safi et
Hani, qui restent la seule autorité FLN à Alger ayant échappé à l'anéantissement des réseaux puisque,
retournés par le capitaine Léger.
Amirouche l'informe donc qu'il veut lui envoyer un lot d'armes d’origine tchèque pour préparer des attentats
qui devraient être perpètrés au moment des fêtes de Noël. Le 12 novembre, Kamel signe à Hani un ordre de
mission l'habilitant, au nom de la wilaya III, à représenter le FLN et l’ALN au sein de la zone autonome
d'Alger. Dans la réalité, par ce document, le capitaine Léger devenait le véritable patron du FLN à Alger. La
manipulation devient chaque jour de plus en plus délicate. Léger récupère dans un premier temps la petite
cargaison d'armes composée de 10 pistolets mitrailleurs tchèques, de 20 pistolets automatiques et d'un lot de
grenades. Le 10 décembre 1957, Hani monte au maquis afin d'assister en personne au conseil de la wilaya
III présidé par Amirouche. De retour à Alger, il rend aussitôt compte de sa mission au capitaine Léger.
Les évènements se précipitent. Les chefs de la wilaya III s'impatientent. Ils ne comprennent pas l'inaction
d'Alger. Les messages envoyés à la ZAA sont de plus en plus impératifs, il faut que des attentats aient lieu.
Kamel écrit « Les Algérois veulent entendre les explosions de vos grenades qui sont pour eux le signe
incontestable que le cœur de la capitale bat encore. »
L'état-major de guerre a communiqué l'ordre suivant : « À Alger, ordonnons recrudescences des attentats
avant l'ONU. C'est formel. Vous commencerez avant le 30. » Léger essaye toujours de temporiser. En
attendant, il expédie en retour une lettre qu'il veut pleine d’anxiété : « Le maquis ne se rend pas compte des
énormes difficultés auxquelles l'organisation doit faire face à Alger. L'enthousiasme des débuts n'existe plus.
Le danger d'infiltration par les « Bleus » est trop important pour être négligé ! Les enquêtes demandent
beaucoup de temps pour déterminer la bonne foi des militants trop souvent apeurés. »
Hani est à nouveau convoqué fin décembre 1957 au PC de la wilaya III. Kamel lui ordonne de passer à
l'action et lui annonce qu'il va bientôt pouvoir disposer d'une cargaison de bombes particulièrement
meurtrières, confectionnées avec des corps d’obus de mortiers de 60 mm et de 81 mm, et que celles-ci
l'attendent à Tizi Ouzou. Le capitaine Léger lance un commando sur Tizi-Ouzou. Les hommes récupèrent
rapidement les bombes préparées et font prisonniers le lieutenant Houcine, responsable politique de la zone
1 et le lieutenant Sabri, officier de renseignements.
Léger redoute que la wilaya III ne mette sur pied à Alger une organisation parallèle qui lui échapperait.
Mieux vaut donc organiser quelques attentats mineurs plutôt que de revenir aux jours dramatiques où des
bombes explosaient au milieu de la foule. Il sait bien que la presse va sauter sur l’évènement et en fera ses
gros titres et assurera une propagande efficace qui comblera d'aise les hommes de la wilaya III.
Le 1er janvier 1958, comme pour montrer la précarité de la situation, une grenade explose au début de la
soirée dans l'escalier du 21 rue Émile-Maupas. Cet attentat rappelle les Algérois à la réalité. Dans la Casbah,
le téléphone arabe colporte la nouvelle à la vitesse de l'éclair. Tout le monde ignore que le lanceur de
grenade n'est autre que le capitaine Léger. Celui-ci, en accord avec le colonel Godard, organise quelques
actions ponctuelles destinées à faire du bruit sans qu'il y ait de victimes. Godard avait donné ce conseil à son
adjoint, avant de le quitter : « Tâchez de ne pas faire trop de dégâts. N’y allez pas plus fort que les « fels »
eux-mêmes! »
Quand elle est arrivée au maquis, elle est tombée sur un homme qui s’appelait Ahcène Mahiouz (surnommé
3
Hacène la torture), ancien collaborateur de la Gestapo au grade du capitaine, chef de la zone 1 de la wilaya
III et adjoint du colonel Amirouche. Mahiouz l’interrogea « on t’a vue avec Léger dans sa voiture ! » —
« bien sûr, il ma arrêtée, il ma proposé de travailler pour lui, j'ai accepté...» - « Tu nous as trahis ! » Piquée
au vif, Roza expliqua qu’elle remontait au maquis pour faire d’importantes révélations. « Avant de
m’accuser tu ferais mieux de regarder autour de toi. Tu es entouré de traîtres à la solde d’Alger. » La
machine était en marche ! Roza raconta ce qu’elle croyait avoir appris dans le bureau du capitaine Léger.
Quand elle eut fini, Mahiouz en voulait encore. Roza, sous la torture, la poitrine soulevée par des
halètements spasmodiques, murmurait des mots sans suite. Sur un signe de Mahiyouz, un secrétaire posa des
doigts sur la machine à écrire. Folle de douleur, elle raconta n’importe quoi. Elle s’accusa tout d’abord
d’être la responsable de l’arrestation, à Alger, de Djamila Bouhired, Djamila Bouazza, Zohra Drif et Yacef
Saâdi. Arrestations pour lesquelles elle toucha, dit-elle, la somme de 50 000 francs. Elle « avoua » ensuite
être allée au maquis afin de contacter des responsables à la solde de Léger qui lui permettraient de rejoindre
Tunis où elle avait une mission très importante à remplir. C’était la confirmation de ce qu’il pensait : tous
ces intellectuels, tous ceux qui venaient d’Alger, tous ces lettrés étaient des traîtres pour Mahiouz. Suivait
une longue confession dans laquelle la pauvre fille donnait pêle-mêle les noms des responsables du maquis,
d’amis et même des membres de sa famille — une de ses cousines de Bordj-Menaïel en perdit la vie. Roza,
mourante, fut finalement égorgée. Ahcène Mahiouz est inquiet ! Il fait procéder à l’arrestation de tous les
hommes désignés par Roza.
Roza venait de déclencher un véritable raz-de-marée dans toutes les wilayas, c’est la plus formidable
campagne de purges jamais connue dans les rangs du FLN. Désormais, aux dangers des opérations allait
s’ajouter pour les combattants la terreur de l’épuration.
Amirouche est maintenant persuadé d’être entouré de traîtres et d’espions à la solde de l’armée française.
C’était devenu son obsession. Les purges et les méthodes qu’il préconisait étaient dignes de la terreur
stalinienne. La « chasse aux sorcières » devait, selon Amirouche, s’étendre à toute l’Algérie. Obnubilé par
cette obsession de l’« espionnite », l’un des chefs les plus redoutés du FLN paralysait par ces mesures
« préventives » toute l’activité de sa wilaya et instaurait le règne de la suspicion, de la délation et de la
terreur. Même les opérations contre l’armée française avaient pratiquement cessé. Jamais le moral n’avait
été plus bas. Jamais le ralliement aux Français plus nombreux.
Amirouche précise aussi que les traîtres sont surtout des personnes instruites, intellectuels, étudiants,
collégiens, médecins et enseignants, furent les premiers visés.
4
Il écrit aux chefs des autres wilayas, le 3 août 1958 :
« J’ai découvert des complots dans ma zone, mais il y a des ramifications dans toutes les
wilayas, Il faut prendre des mesures et vous amputer de tous ces membres gangrenés, sans
quoi, nous crèverons ! J’ai le devoir de vous informer en priant Dieu pour que ce message
vous parvienne à temps, de la découverte en notre wilaya d’un vaste complot ourdi depuis
des longs mois par les services français (Colonel Godard et Capitaine Léger) contre la
révolution algérienne. Grâce à Dieu, tout danger est maintenant écarté, car nous avons agi
très rapidement et énergiquement. Dès les premiers indices, des mesures draconiennes
étaient prises en même temps : arrêt du recrutement et contrôle des personnes déjà
recrutées, arrestation des goumiers et soldats « ayant déserté », arrestation de tous les
djounoud (soldats) originaire d’Alger, arrestation de tous les suspects, de toutes les
personnes dénoncées de quelque grade qu’elles soient et interrogatoire énergique de ceux
dont la situation ne paraissait pas très régulière, le réseau tissé dans notre wilaya vient
d’être pratiquement hors d’état de nuire après une enquête d’autant plus ardue que ses chefs
étaient en apparence au-dessus de tout soupçons. Signé le colonel Amirouche. »
4
Lettre ouverte au Colonel Godard :
Par une lettre ouverte au colonel Godard, le colonel Amirouche s’adresse à lui pour lui faire savoir qu’il a
découvert le prétendu complot... ce qui revient à lui annoncer triomphalement qu’il est tombé dans le piège.
Cette lettre, intéressante à plus d’un titre, témoigne inopinément du respect que les officiers de l’ALN
ressentent pour un officier français. Leurs notions de l’honneur d’un officier français est telle qu’Amirouche
est scandalisé que Godard, qu’il croit l’artisan du prétendu complot contre-révolutionnaire, et qui est, en fait,
l’auteur d’une entreprise encore plus subtile, recoure à des moyens aussi tortueux.
« Au lieu d’aller combattre loyalement les vrais Moudjahidines, vous, Godard, qui prétendez
être officier ... vous avez préféré travailler dans l’ombre ... vous avez renié votre métier de
combattant pour embrasser la profession de flic ... oui, colonel Godard, vous étiez né, élevé
et grandi dans l’amour patriotique d’une nation civilisée et même civilisatrice, vous étiez
destiné à jouer un rôle toujours grandissant dans l’armée en exposant votre vie, vos
poitrines aux balles des Allemands, ou de toute autre nation, égale tout au moins à la vôtre,
qui vous déclarerait là guerre. Jusqu’au jour où vous avez rejoint l’armée colonialiste, je
n’ai rien à vous reprocher étant donné votre zèle et votre amour pour votre pays en le
servant dans l’honneur et la gloire, et par tous les moyens appropriés ... Vous venez de
ravaler votre honneur à celui d’un simple mouchard au service d’une poignée de
colonialistes. Ce travail serait à l’honneur si c’était en France. Dans votre propre pays que
vous ayez accepté de nettoyer votre nation d’éléments tels que la 5e Colonne, avant la
guerre de 1940. Les dirigeants de la D.S.P. et de ses subdivisions en France peuvent être
demain des grands chefs respectés, honorés et glorifiés, car ils collaborent à la grandeur de
leur nation. Mais vous, colonel Godard, que venez-vous faire dans cette galerie « d’ultras
rebelles » à votre patrie même, vous qui êtes né et élevé dans les principes de la révolution
de 1789, vous souillez l’honneur d’une carrière déjà belle. Signé le colonel Amirouche. »
Ahcène Mahiouz avait mis en route un terrible engrenage dans la wilaya III : les tortures en chaîne avaient
donné des résultats inespérés. Avec son adjoint Ajaoud Rachid, assistés d’un groupe de montagnards
persuadés de purifier la révolution, ils faisaient régner dans chaque zone une atmosphère de suspicion
oppressante. Dès août 1958, Mahiouz avait établi un épais dossier bourré de « preuves » contre une
cinquantaine de cadres qui avaient tous avoué leurs rapports avec les services spéciaux français.
Chacun, quel que fût son grade, avait été interrogé par Mahiouz qui leur avait appliqué le supplice de
l’« hélicoptère » : l’homme nu avait les pieds et les mains liés et réunis par une corde que l’on accrochait à
une branche. Le corps en arc de cercle était ensuite hissé à cinquante centimètres du sol, puis chargé de
quarante ou cinquante kilos de pierres. Mahiouz plaçait ensuite sous le corps oscillant un Kanoun, une sorte
de barbecue sur lequel un djoundi (soldat) versait de l’eau froide. L’homme, les muscles brisés, les os
craquants, respirait cette vapeur brûlante qui attaquait soit le visage et les poumons, soit le bas-ventre. Sous
la torture, les hommes donnaient les noms de ses plus proches compagnons. Il suffisait que le nom du
maquisard soit prononcé par deux ou trois hommes « interrogés » pour qu’il soit lui-même inculpé et
interrogé à son tour. Six suspects sur dix succombent au cours des interrogations. Il y eut des centaines,
sinon des milliers de victimes pour la plupart innocentes des faits qui leur étaient reprochés.
Bilan des pertes imputées à la « bleuite »
Pour l’ensemble de l’année 1958, les estimations concernant le nombre des liquidations varient entre 2 000
et 6 000 - chiffre donné par Mohamed Benyahia et statistiquement impossible [réf. nécessaire]. Amirouche
emporta avec lui en mars 1959 un décompte partiel qui faisait état, sur 542 personnes jugées, de 54 libérés,
152 condamnés à mort et 336 décédés au cours des interrogations, dont 30 officiers, soit 488 décès. Le
document était vraisemblablement destiné à minimiser l’ampleur des purges auprès du GPRA. Selon Yves
Courrière : « les exécutions ne cessèrent que quelques jours avant l’opération « Jumelles ». » En 1959,
Ahcène Mahiouz avait fourni à Amirouche plus de 3 000 condamnations à mort. 3 000 jeunes gens dont
presque tous avaient au moins leur certificat d’études. » Les Français [Qui ?] ont donné le chiffre de 1 200
mais ils ont aussi fourni celui de 2 000 ou de 4 000. Selon les évaluations, la saignée représenta donc de 6 %
à 25 % de l’effectif de la wilaya III.
La folie sanguinaire de Mahiouz ne connut plus de bornes, lorsque arriva le putsch d'Alger du 13 mai 1958.
L’enthousiasme des foules du Forum d’Alger, les manifestations de loyalisme des populations musulmanes
ne firent que confirmer son opinion sur les citadins en général et les Algérois en particulier. Profitant de
l’occasion, des centaines de cadres et de djounoud échappèrent à la mort en se ralliant au poste français le
plus proche.
Parmi les victimes de la purge dans la wilaya III, plusieurs dizaines d’officiers haut gradés, des ex-
médecins-chefs, des pharmaciens, des ex-étudiants et aspirants sanitaires, des cadres de l’UGTA, des
lycéens du collège de Ben Aknoun, plusieurs bacheliers, des enseignants, des techniciens radio, un jeune
metteur en scène de 27 ans et une équipe de scénaristes. D’après la déclaration d’un lieutenant politique,
A.K. « rallié » près de Bougaa (ex-Lafayette) le 6 avril 1958 pour échapper à la mort, à cette date « le
massacre d’intellectuels dur[ait] depuis seize mois ». Pourtant, revenu en juillet 1957 en Kabylie après une
absence à l’étranger de six mois, Amirouche aurait bien constaté une dégradation, concomitante de l’arrivée
massive des jeunes gens instruits venus au maquis après la grève des étudiants décrétée fin mai 1956, des
citadins débarqués d’Alger après la grève de huit jours, janvier 1957 lors de la bataille d’Alger, et d’anciens
MTLD reconvertis MNA.
Une conséquence plus lointaine a été la perte de ces jeunes intellectuels pour l'Algérie indépendante.
« Certaines bonnes âmes, sans doute dans le regret des grandes chevauchées et des combats
ardents sous le soleil, prétendront que c’est là une guerre souterraine indigne de guerriers.
Je pense personnellement que si l’ennemi a des dispositions particulières pour se détruire
lui-même, bien coupable serait celui qui n’en profiterait pas ! »
Cinéma
L'idée du procédé de la « bleuite » est reprise, transposée à la guerre froide, dans le film d'Henri Verneuil, Le
Serpent, sorti en 1973.
Notes et références
1. Charles-Robert Ageron, « Complots et Purges dans l'armee de liberation algerienne (1958-
1961) », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, no 59, juillet 1998, p. 15 (ISSN 0294-1759 (http://w
orldcat.org/issn/0294-1759&lang=fr),
DOI 10.2307/3770276 (https://dx.doi.org/10.2307%2F3770276), lire en ligne (https://dx.doi.org/
10.2307/3770276), consulté le 19 août 2019)
2. Guerre d'Algérie : le poison de la "bleuite" (http://tempsreel.nouvelobs.com/les-50-ans-de-la-fin-
de-la-guerre-d-algerie/20120404.OBS5422/guerre-d-algerie-le-poison-de-la-bleuite.html), Jean-
Paul Mari, nouvelobs.com, 5 juillet 2012
3. Yves Courrière (préf. Joseph Kessel), La guerre d'Algérie, t. 3 : L’heure des colonels, Paris, Le
livre de poche, coll. « Le livre de poche » (no 3750), 1974, 750 p. (ISBN 978-2-253-00091-4)
4. L'ALN malade de la « Bleuite » in Historia Magazine Guerre d'Algérie, no 269 pp : 1785-1792,
paru en décembre 1972.
5. Jacques Baud, Encyclopédie du renseignement et des services secrets, Paris, Lavauzelle,
coll. « Renseignement & guerre secrete », 2002, 740 p. (ISBN 978-2-702-50753-7,
présentation en ligne (http://www.checkpoint-online.ch/CheckPoint/Forum/Livre-BaudEncyclope
dieRenseignement.html))
6. Mohamed Sifaoui, Histoire secrète de l'Algérie indépendante : l'état-DRS, Paris, Nouveau
monde, 2012, 375 p. (ISBN 978-2-847-36642-6, présentation en ligne (http://www.nouveau-mo
nde.net/livre/?GCOI=84736100547490))
Annexes
Bibliographie
Claude Faure, Aux services de la République : du BCRA à la DGSE, Paris, Fayard, 2004,
782 p. (ISBN 978-2-213-61593-6).
Paul-Alain Léger, Aux carrefours de la guerre, Paris, A. Michel, coll. « Les Combattants »,
1983, 427 p. (ISBN 978-2-226-01764-2).
André-Roger Voisin, Intox et coups fourrés pendant la guerre d'Algérie : 1954-1962, Le
Coudray-Macouard, Cheminements, 2008, 183 p. (ISBN 978-2-844-78662-3).
Constantin Melnik et Olivier Forcade (Avant-propos), De Gaulle, les services secrets et
l'Algérie, Paris, Nouveau monde, coll. « Le grand jeu », 2010, 463 p. (ISBN 978-2-847-36499-6).
Maurice Faivre, Le renseignement dans la guerre d'Algérie, Panazol, Lavauzelle,
coll. « Renseignement histoire & géopolitique / Documents », 2006, 355 p.
(ISBN 978-2-702-51314-9).
Claude Paillat, Dossier secret de l’Algérie - 13 mai 1958 / 28 avril 1961, Le Livre
contemporain, puis Presses de la Cité, 1961
(OCLC 460666591 (https://worldcat.org/oclc/460666591&lang=fr)).
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Editions du Seuil, coll. « Epreuve des faits », 1985, 426 p. (ISBN 978-2-020-08743-8).
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Fayard, 2004, 898 p. (ISBN 978-2-213-61892-0)
Lounis Aggoun, La colonie française en Algérie : 200 ans d'inavouable : rapines & péculats,
Paris, Demi-lune, coll. « Résistances », 2010, 603 p. (ISBN 978-2-917-11214-4).
Yves Courrière (préf. Joseph Kessel), La guerre d'Algérie, t. 3 : L’heure des colonels, Paris,
Le livre de poche, coll. « Le livre de poche » (no 3750), 1974, 750 p. (ISBN 978-2-253-00091-4).
Mohammed Harbi, Le F.L.N. : mirage et réalite : des origines à la prise du pouvoir (1945-
1962), Paris, Editions J.A, coll. « Sens de l'histoire », 1985, 446 p. (ISBN 978-2-852-58376-4).
Benjamin Stora, Les mots de la guerre d'Algérie, Toulouse, Presses universitaires du Mirail-
Toulouse, coll. « Mots de », 2005, 127 p. (ISBN 978-2-858-16777-7, lire en ligne (https://books.google.f
r/books?id=AnWDLE23YwQC&lpg=PP1&hl=fr&pg=PP1#v=onepage&q&f=false)).
Genovefa Etienne et Claude Moniquet, Histoire de l'espionnage mondial : Les services
secrets de Ramsès II à nos jours, Paris Paris, Ed. Luc Pire Ed. du Félin, 1997, 445 p.
(ISBN 978-2-930-08816-7 et 978-2-866-45245-2).
Articles connexes
Opération Oiseau bleu
Centre d'instruction à la pacification et à la contre-guérilla
Liens externes
Émission Radio : « La guerre d’Algérie, vingt cinq ans après : La Bataille d’Alger » (http://ww
w.fabriquedesens.net/La-guerre-d-Algerie-vingt-cinq-ans,458), quatrième épisode du
documentaire de Patrice Gélinet, dans l’émission L’histoire immédiate diffusée sur France
Culture le jeudi 15 août 1996.
Documentaire radiophonique : « La bleuïte ou l’art de la guerre » (http://www.franceculture.fr/
emission-rediffusions-la-%C2%ABbleu%C3%AFte%C2%BB-ou-l-art-de-la-guerre-2008-04-1
4.html), de Jean-Louis Rioual, réalisation : Véronik Lamendour. Un documentaire diffusé le
19 février 2008 (rediff. le 14 février 2008) dans l'émission La Fabrique de l'histoire sur France
Culture (54 min 00 s).
Document audio : « La bleuite : le virus anti-FLN avec le témoignage du capitaine Léger » (ht
tp://www.france-info.com/chroniques-le-vrai-du-faux-2010-07-15-la-bleuite-le-virus-anti-fln-46
6174-81-478.html). Vrai du faux : La chronique de Franck Cognard (4 min 34 s). France Info,
15 juillet 2010.
Article de presse : « Le poison de la « bleuite » (http://www.grands-reporters.com/Le-poison-
de-la-bleuite.html), Grands reporters.com.
Article de presse : « Comment la bleuite a empoisonné le FLN » (http://www.reflexiondz.net/
Guerre-d-Algerie-Les-derniers-secrets_a12350.html), Le Nouvel Observateur, 28 février
2002.
Archives vidéo : « Arrestation de Yacef Saadi » (http://www.ina.fr/histoire-et-conflits/decolonis
ation/video/CAF94073077/arrestation-yacef-saadi-voyage-max-lejeune-dans-le-departement
-des-oasis.fr.html), JT 20 h, Ina, 27 septembre 1957.
Archives vidéo : « La mort du colonel Amirouche » (http://www.ina.fr/video/CAF92046966/mo
rt-d-amirouche-en-algerie-video.html), Ina, 1er mars 1959.
Documentaire télévisé : « La Bleuite, l'autre guerre d'Algérie » (https://www.france.tv/docume
ntaires/histoire/493105-la-bleuite-l-autre-guerre-d-algerie.html), de Jean-Paul Marie, 2017,
diffusé sur France-5 le 13 mai 2018 et sur LCP le 13 avril 2019
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