Dictionnaire Des Philosophes Antiques (T. 3) - R. Goulet (Dir.)
Dictionnaire Des Philosophes Antiques (T. 3) - R. Goulet (Dir.)
Dictionnaire Des Philosophes Antiques (T. 3) - R. Goulet (Dir.)
DES
PHILOSOPHES ANTIQUES
DICTIONNAIRE
DES
PHILOSOPHES ANTIQUES
III
d'Eccélos à Juvénal
CNRS ÉDITIONS
15 , rue Malebranche, 75005 PARIS
2000
172
D52
1994
0. 3
AVANT- PROPOS
Ce troisième tome paraît plus de six ans après le précédent. C ' est un délai
excessif qui demande quelques explications. La première est de caractère stricte
ment personnel. Devant l'urgence de la situation, j'ai accepté en 1994-1995 la
responsabilité d 'informatiser la banque de données de l'Année philologique et de
développer, en étroite collaboration avec son directeur, Pierre-Paul CORSETTI, et
son directeur-adjoint, Éric REBILLARD , le programmede gestion et de publica
tion automatique des données saisies annuellement dans les différentes succur
sales. La difficulté et l'ampleur de la tâche dépassèrent les estimations et récla
mèrent certains mois l'essentiel de mes énergies. Le programme est maintenant
utilisé en mode réseau par l'ensemble de l'équipe internationale et il a déjà servi
à publier les trois derniers volumes annuels (tomes 66 -68 ). La seconde explica
tion , pour une part liée à la précédente, tient au fait que de trop nombreuses
notices, prises en charge par des rédacteurs compétents et toujours promises pour
des dates reportées de fois en fois, ne m 'ont jamais été remises, peut-être parce
que l'on me savait occupé à d'autres tâches. J'ai dû en conséquence rédiger moi
même plusieurs de ces notices, parfois difficiles, ce qui a retardé d 'autant la mise
au point du manuscrit final. Il faudra pour l'avenir éviter que de telles situations
se reproduisent.
Assurer l'harmonisation et la vérification desmilliers de références regrou
pées dans ces 483 notices, parfois fort longues, demande aussi beaucoup de
temps. J'ai pu à nouveau compter sur l'aide demon collègue Tiziano DORANDI
qui a relu l'ensemble de l'ouvrage et proposé de fort utiles compléments biblio
graphiques, et sur celle de Simone FOLLET qui a procédé à une correction impi
toyable des épreuves et retrouvé des erreurs bibliographiques, linguistiques,
orthographiques, typographiques de tous ordres. Je les remercie tous deux de
leur indispensable collaboration.
Maroun AQUAD m 'a constamment apporté une aide précieuse pour tout ce
qui concerne la tradition orientale des textes philosophiques. Il a également
collaboré à la révision des index .
Le lecteur ne manquera pas de repérer plusieurs notices remarquables, parfois
exceptionnellement développées, préparées par des collègues espagnols. Leur
collaboration nous a été acquise par Pedro Pablo FUENTES GONZÁLEZ, profes
seur à l'Université de Grenade, qui s' est également chargé d 'adapter ces notices
au format bibliographique du Dictionnaire.
La préparation de ce troisième tome n'aurait pas été possible sans le support
matériel et financier de l'UPR 76 du C . N . R . S ., maintenant dirigée par Michel
NARCY , et le soutien amical de tous sesmembres.
DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Je dois également remercier mon épouse, Marie -Odile GOULET-CAZÉ , qui
s'est chargée de la relecture finale de l'ouvrage et a ainsi permis la correction de
nombreuses fautes ou coquilles.
C 'est avec beaucoup d'émotion qu' il me faut saluer la mémoire du Père
Georges Matthieu DE DURAND, O .P., décédé le 3 novembre 1997 , qui a rédigé la
notice « Eunome l' Arien » . C 'est lui qui a dirigé mon premier mémoire sur
Grégoire de Nysse à Montréal en 1968-1969 et c'est lui encore qui, alors que
j' étais venu étudier à Paris, m ’a suggéré de rédiger mon doctorat de troisième
cycle sur MacariosMagnès. C 'était un homme d'une immense culture et d'une
grande méthode, comme l'attestent la qualité de ses éditions critiques et la
rigueur inégalée de ses bulletins de patristique dans la Revue des Sciences Philo
sophiques et Théologiques.
Trois autres rédacteurs de ce troisième tome nous ont quittés prématurément.
Jesús LENS TUERO, qui avait déjà écrit la notice « Diodore de Sicile » dans le
tome précédent, et qui a rédigé , avec Pedro Pablo FUENTES GONZÁLEZ , la
notice « lamboulos» du présent tome, était à Grenade le maître de la plupart des
collaborateurs espagnols de ce Dictionnaire. Omer BALLÉRIAUX, spécialiste de
Thémistius, a consacré dans ce troisième tomeune notice à « Eugenius» , le père
du philosophe. Quant à John WHITTAKER , qui fut autrefois chercheur associé
dans notre unité de recherche, il a collaboré à notre projet depuis l'origine et a
rédigé de nombreuses notices sur les médio -platoniciens. Ses amis sontheureux
d'avoir pu l'honorer avant sa mort d'un volume demélanges.
Je remercie enfin les auteurs qui nous ont fait parvenir leurs ouvrages ou des
tirés à part de leurs publications. Étant donné l'éclatement actuel de la biblio
graphie scientifique en des revues et des recueils toujours plus nombreux, c'est
pour eux une garantie supplémentaire de voir leurs études les plus récentes prises
en compte dans les notices du Dictionnaire .
Nous avonsmaintenu pour l'essentiel la présentation choisie lors de la publi
cation des tomes précédents . La seule nouveauté importante est l'indication des
numéros de notices dans le titre courant.
RICHARD GOULET.
ECDÉMOS + ECDÉLOS
3 ÉCHÉCLÈS D 'ÉPHÈSE RE 2 IV -III
Diogène Laërce (VI 95) le présente comme un disciple de Cléomène
(MC 163) et de Théombrote , tous deux disciples de Cratès le Cynique (> C
205), et comme le maître du philosophe cynique Ménédème. Voir M .- O . Goulet
Cazé, « Une liste de disciples de Cratès le Cynique en Diogène Laërce 6 , 95 » ,
Hermes 114 , 1986 , p. 247-252.
MARIE -ODILE GOULET-CAZÉ.
E5 ÉCHÉCRATÈS DE PHLIONTE
4 ÉCHÉCRATEIA DE PHLIONTE
Pythagoricienne dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth .
36 , 267, p. 147, 3 Deubner.
(Cf. T . Dorandi, « Assiotea e Lasteneia . Due donne all'Accademia » , AATC 54, n.s. 40,
1989 , p . 60 , qui la met en rapport avec l'Échécratès de Phlionte du Phédon (voir notice sui
vante ) . L.B.
Il importe de rappeler que plusieurs des pythagoriciennes du passage de Jamblique sont les
épouses, les sæurs ou les filles de pythagoriciens également répertoriés; entre père et fille ou
entre frère et seur, les nomssont souvent semblables: Cheilonis ( C 108 ), fille de Cheilon de
Sparte ( * C 107), Habrotéleia (MH 1), fille d'Habrotélès de Tarente (MH 2). Parfois le lien de
parenté n 'est pas rappelé ,mais peut être déduit de la présence d'un pythagoricien dans la liste :
il y a une Tyrsénis de Sybaris et un Tyrsénos de Sybaris, une Peisirrhode de Tarente et un
Peisirthodos de Tarente. Échécrateia de Phlionte pourrait donc être apparentée à Échécratèsde
Phlionte (p . 144 , 15 Deubner). R .G .)
BRUNO CENTRONE.
5 ÉCHÉCRATÈS DE PHLIONTE RE (+ RESuppl. III) V -IV
Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36 ,
267; p. 146 ,6 Deubner. On rencontre égalementdans le catalogue un Échécratès
(RE6) parmi les pythagoriciens de Tarente (p. 144, 15 Deubner).
Témoignages. 1 DK 27 (53); 2 M . Timpanaro Cardini, Pitagorici. Testimo
nianze e frammenti, fasc . II, Firenze, 2e éd., 1969, p. 426 -429 (incomplet).
Cf. 3 E . Wellmann, art. « Echekrates» 3, RE V 2 , 1905, col. 1909- 1910 ;
4 W . A . Oldfather,art.« Echekrates » , RESuppl. III, 1918,col.417-418.
Le témoignage le plus ancien est celui du Phédon de Platon . Phédon y raconte
à Échécratès le conversation qui s'est déroulée dans la prison entre Socrate et ses
disciples, avant l'exécution de la sentence. On peut déduire du passage 57 a-b
qu 'Échécratès était originaire de Phlionte et que la rencontre avec Phédon se
situe dans cette localité. Au cours de la conversation , Échécratès interrompt deux
fois le récit de Phédon (Phédon 88c et 102 a ). La première interruption est parti
culièrement significative, dans la mesure où Échécratès se montre fort intéressé
par la doctrine de l'âme-harmonie que vient de rappeler Simmias et qui sera
ensuite réfutée par Socrate. C 'est surtout sur la base de ces détails qu'il est per
mis de confirmer les renseignements concernant l'existence d'une communauté
pythagoricienne à Phlionte et l'allégeance pythagoricienne d 'Échécratès, affir
mée de façon explicite par d 'autres auteurs: Diogène Laërce VIII 46
(= Aristoxène, fr. 19 Wehrli) mentionne Échécratès avec Xénophile de Chal
cidique de Thrace, Phanton , Dioclès (2 + D 116 ) et Polymnastos, ces trois derniers
originaires de Phlionte, parmi les derniers pythagoriciens qu ’Aristoxène aurait
connus et qui auraient été les auditeurs de Philolaos et d'Eurytos (~+ E 150);
Jamblique, V . pyth . 35 , 251, p. 135 , 3-8 Deubner, qualifie de philosophes « des
plus sérieux » (OTOUDALÓTATOL) ces mêmes pythagoriciens qui conservèrent les
enseignements et les coutumes de la secte en voie d'extinction. Diodore de Sicile
(XV 76 , 4 ) situe ces derniers” pythagoriciens vers 366 /5 av. J.-C (Ol. 103, 3).
Dans la neuvième lettre pseudo-platonicienne, adressée à Archytas (P - A 322 ), -
S
CR ATÈ O NTE
54 ÉCHÉ DE PHLI E5
lettre censée avoir été écrite après le premier voyage de Platon en Sicile et donc
en 3879 au plus tôt – l'auteur prétend avoir soin d 'Échécratès, fils de Phrynion ,
présenté comme un veavíoxoç; on peut se demander si ce qualificatif pouvait
convenir à Échécratès vers 388 avant J.- C. (Oldfather 4 , col. 417, se montre
favorable à cette hypothèse , parce que le père d 'Échécratès, selon Polybe (XII
10 , 7- 8 ), fut chargé d 'une ambassade par Denys l'Ancien : Échécratès devait
donc être plus jeune que Platon ) ; la lettre n 'a cependant aucune valeur histo
rique, voir 5 W . Burkert, Lore and Science, p . 92 n . 40. Selon 6 J . Kerschen
steiner ( édit.), Platon. Briefe , hrsg. von W . Neumann , München 1967, p . 218, il
s 'agirait d'un personnage inventé par l'auteur de la lettre pseudépigraphe qui se
servait des noms de pythagoriciens célèbres. Selon 7 F . Novotny, Platonis
Epistulae, Brno 1930, p . 272, il s'agirait plutôt d 'Échécratès de Tarente ( » E 6 ),
pythagoricien qui apparaît lui aussi dans le Catalogue de Jamblique.
D 'autres témoignages montrent qu 'Échécratès était en rapport avec des
Locriens. Dans Cicéron, De finibus V 29, 87 (cf. Val. Max. VII 7 , ext. 3), Pison
(= Marcus Pupius Piso Calpurnianus, consul en 61) rapporte que Platon se rendit
à Locres auprès des pythagoriciens Échécratès, Timée et Arion (* * A 334 ). C ' est
à un certain Échécratès que l' historien Polybe dit avoir emprunté des informa
tions sur les Locriens (XII 10 , 7 = Timée (de Tauroménium ), FGrHist 566 F
12 ) ; il s'agit très probablementdu nôtre : voir Burkert 5 , p . 92 n . 40.
8 F. Prontera, « Echecrate di Fliunte un Pitagorico ? » ,AATC 39, 1974, p. 3
19, et 9 Id ., « Gli “ ultimi” Pitagorici. Contributo per una revisione della tradi
zione » , DArch 9 -10, 1976 - 1977, p . 267 -332, a mis en doute le pythagorisme
d 'Échécratès et la réalité historique d' un cercle pythagoricien à Phlionte. Selon
10 C. Rowe, Plato . Phaedo, Cambridge 1993, il n' y aurait pas lieu de douter du
pythagorisme d 'Échécratès,même s 'il ne fut pas orthodoxe. 11 T . Ebert, Sokra
tes als Pythagoreer und die anamnesis in Platons Phaidon , Stuttgart 1994,
notammentp . 5 n . 2, insiste lui aussi sur le pythagorisme d 'Échécratès.
[Il y a dans la liste de Jamblique (p. 147, 3 Deubner) une Échécrateia de Phlionte (> · E 4 )
qui pourrait être sa seur ou sa fille. R. G .)
BRUNO CENTRONE.
6 ÉCHÉCRATÈS DE TARENTE
Pythagoricien dont le nom figure dans le Catalogue de Jamblique, V. pyth . 36 ,
267 ; p . 144, 15 Deubner. Il faut sans doute le distinguer de son homonyme, plus
célèbre, originaire de Phlionte (3- E 5). Selon F. Novotny, Platonis Epistulae,
Brno 1930 , p. 272, il faut l'identifier avec le jeune Échécratèsmentionné dans la
neuvième lettre pseudo-platonicienne. Voir la notice précédente.
BRUNO CENTRONE.
7 ÉCHÉCRATIDÈS DE MÉTHYMNE RE 2 Miva
Philosophe péripatéticien , « familier » (ouvons) d' Aristote de Stagire ( M+A
414 ),mentionné par Étienne de Byzance, Ethnica (Epitome), p. 449, 18 Meine
ke, avec d 'autres compatriotes originaires de Méthymne sur l'île de Lesbos.
E9 ECPHANTE (PSEUDO-) 55
A . Wiedersich, art. « Echekratides» 1a, RESuppl. IV , 1924, col. 269, le rap
proche d 'Échécratidès, sophiste emprisonné par Alexandre le Grand à Sardes.
Alexandre le libéra, avec d'autres détenus, à la demande de Phocion (cf. Élien ,
Var. Hist. I 25, et Plutarque, Phocion 18, 6 ).
Voir aussi A . Wiedersich, Prosopographie der Griechen beim Perserkönige, Diss. Breslau
1922, nº 84 ; H . Berve, Das Alexanderreich auf prosopographischer Grundlage, München
1926 , t. II, n° 333.
RICHARD GOULET .
8 ECPHANTE DE CROTONE RE 3 V -IVa ?
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth . 36 , 267 ; p . 143, 20 Deubner. Il était originaire de Crotone selon Jam
blique, de Syracuse selon les doxographes (voir Aétius I 3, 19 (DDG 286 ) ;
Hippolyte , Philos. I 15, li. 1- 19 (DDG 566 , 11- 19]).
Témoignages. 1 DK 51 (38); t. I, p . 442 ; 2 M . Timpanaro Cardini, Pita
gorici. Testimonianze e frammenti, fasc. II,Firenze 1962, 25 (51), p. 416 -421.
Le nom d 'Ecphante est principalement lié à une hypothèse atomiste et à un
système astronomique géocentrique selon lequel la terre tourne autour de son
propre axe. Selon une thèse ancienne de 3 P. Tannery, « Pseudonymes an
tiques » , dans Mémoires scientifiques IX , Paris 1897, p. 232, et « Ecphante de
Syracuse » , dans Mémoires scientifiques VII, Paris 1898 , p . 249, l'existence
historique d 'Ecphante ne serait pas du tout certaine et, en tout état de cause, les
témoignages sur sa doctrine remonteraient à un dialogue d'Héraclide le Pontique
(» H 60) dont Ecphante et Hicétas auraient été les protagonistes; d'autres
savants se sont prononcés en sens contraire ; sur cette question , voir 4 E . Zeller
et R . Mondolfo, La filosofia dei Greci nel suo sviluppo storico , I 2 , Firenze
19502, p. 349 ; 5 W .K . C .Guthrie ,History ofGreek Philosophy, t. I, p. 323-327 ;
6 F. Wehrli, Die Schule des Aristoteles, Heft VII :Herakleides Pontikos, Basel/
Stuttgart, 1953, 19692, p. 96 ; 7 W . Burkert, Lore and Science, p . 341 et n . 17- 19 .
En admettant la réalité historique de ce personnage, il reste difficile d'établir sa
chronologie ; la présence de conceptions atomistes et du géocentrisme permet
tent de penser qu 'il était postérieur à Philolaos et contemporain d'Archytas
( > A 322).
BRUNO CENTRONE .
9 PSEUDO -ECPHANTE
Sous le nom d'Ecphante ont été transmis par Stobée IV 6 , 22 et IV 7,
64.65 .66 quatre fragments d'un llepi Baocheias (Sur la royauté). Contenu : le
roi, être d'essence divine, est à la cité ce que dieu est au cosmos ; il doit ressem
bler le plus possible à dieu par la pratique de la vertu et ses sujets doivent se
rendre semblables à lui, de façon à ce que se réalise dans la communauté
humaine la concorde qui règne dans l'univers.
Éditions et traductions. 1. L . Delatte ( édit.), Les Traités de la Royauté
d 'Ecphante, Diotogène et Sthénidas, Liège 1942. Comprend l'édition (p. 25 -37),
56 ECPHANTE (PSEUDO -) E9
la traduction (p . 47-52) et un commentaire de ces fragments (p . 164-244 ) ; 2 . H .
Thesleff, The Pythagorean texts, p . 79 , 1 -84, 8 . Une traduction anglaise due à T .
Taylor ( 1822) et à K . S . Guthrie ( 1920) a été reprise dans 3 R . Navon , The
Pythagorean Writings, p . 96 - 100 , et dans 4 D . R . Fideler, The Pythagorean
sourcebook and library, p . 257-259; une traduction incorporée dans le texte de
la monographie se trouve également dans 5 E . R . Goodenough, « The Political
Philosophy of Hellenistic Kingship » , YCIS 1 , 1928, p. 55- 102, cf. p . 75-78 ; 83
84 ; 86 -89. Traduction italienne dans 6 A . Squilloni, il concetto di “ regno ” nel
pensiero dello ps. Ecfanto . Le fonti e i trattati PERI BASILEIAS, Firenze 1991,
p . 22-29.
Datation . IIIa selon Goodenough 5 passim ; 7 T. A . Sinclair, History ofGreek
p e l o n i t i cal he1961
political thought, London 1951, p . 294 ; 8 H . Thesleff, An Introduction to the
u s t ,p.
Pythagorean writings of the Hellenistic period, Åbo 1961, p . 65 -70 ; 100 - 101 ;
109 ; avec des réserves: 9 G . J. D . Aalders , Political thought in Hellenistic times,
Amsterdam 1975, p . 27-28 et n . 96 ; 1-IIP selon Delatte 1, p . 282-290, notamment
p . 285 ; 10 W . Burkert, « Zur geistesgeschichtlichen Einordnung einiger Pseudo
pythagorica» , dans Pseudepigrapha I, Vandæuvres/Genève 1971, p . 25-55,
notamment 52 -55 , suggère que l'ouvrage a pu être composé sous les Sévère, à
l' époque de l'impératrice Julia Domna ( † 217) ( > I 42); une datation à l' époque
de Domitien (81-96 ) a été proposée par Squilloni 6 , p. 60 ; 188- 197 ; on y
trouvera égalementun status quaestionis complet, p . 35-43.
BRUNO CENTRONE.
10 ECPÔLOS
Ce nom apparaît dans une liste de philosophes cités par Stobée, qui a été
conservée par Photius, Bibl. cod. 167, p . 114 a 33 Bekker. Le passage correspon
dant dans l'Anthologie est un extrait sur la justice du pythagoricien Pôlos de
Lucanie (Èx Názov lludayopelov AevxavoŨ) [RE 4 ), nom que l'on a corrigé
en Eccélos de Lucanie (» E 1).
RICHARD GOULET.
11 EGNATIUS RE 9
Auteur d 'un poème didactique en plusieurs livres, intitulé De Rerum Natura,
dont deux passages du premier livre sont cités par Macrobe, Saturnalia VI 5 , 2 ;
VI 5 , 12. Le titre et le style des extraits suggèrent la volonté d 'imiter Lucrèce. Il
n 'est pas possible d 'assigner une date précise à l'activité littéraire d 'Egnatius.
Cf. O . Skutsch , art. « Egnatius» , RE V 2 , 1905, col. 1993- 1994.
STEPHEN GERSH .
source (Néanthe ?), dans la lignée de Timée, mais davantage soucieuse de com
bler les lacunes de l'information, qui ajoutait qu 'Empédocle serait tombé de son
char en se rendant à Messène et se serait brisé l'os de la cuisse. Par suite de cet
accident, il seraitmort à l'âge de 77 ans (VIII 73) et aurait été enseveli à Mégare.
La lettre sans doute pseudépigraphe de Télaugès évoquait plutôtune mort accidentelle par
noyade à un âge avancé (VIII 74). Dans son pamphlet en vers Contre les Sophistes, Démétrius
de Trézène (FHG IV 383) supposait pour sa part qu'Empédocle s' était pendu (VIII 74).
L 'Antiquité était frappée par le comportement « théâtral», voire arrogant, du
personnage. Empédocle portait un vêtementmajestueux (VIII 70): une robe de
couleur pourpre et une ceinture dorée, des sandales de bronze et une couronne
delphique de laurier (VIII 73) autour de ses cheveux longs. Tout cela , avec
l'escorte de jeunes gens qui le suivaient de près, contribuait à dégager une
impression d'aura royale , pour ne pas dire divine.
Dans les Problèmes pseudo-aristotéliciens (XXX 1, 953 a 26 = DK 31 A 17),
Empédocle est associé à Platon et à Socrate dans une liste de "mélancoliques”
célèbres.
Iconographie. Le témoignage d 'Hippobote (fr. 17 Gigante ) est étrange: il y
aurait eu autrefois à Agrigente une statue cachée ou voilée d 'Empédocle, qui se
retrouva par la suite , devant le Sénat à Rome, axárupos, dévoilée, manifeste
ment parce que les Romains l'avaient déplacée là (D . L . VIII 72). Diogène
connaissait encore de son temps des “ images peintes” (ypantai eixóveç) du
philosophe (VIII 72).
Maîtres et disciples. La chronologie d'Apollodore entraîne le rejet de toute
une tradition quivoit en Empédocle un disciple direct de Pythagore (D .L . VIII
54 [ Timée, FGrHist 566 F 14 ), 56 ), dont l'acmé était située par le chronographe
en 532/19 (D .L . II 2 , où l'information est par erreur rapportée à Anaximandre
(voir D .L . VIII 45 ?]). La Souda (T 481; voir aussi E 1002) pour sa part présente
Télaugès, le fils et le disciple de Pythagore, comme lemaître d'Empédocle . Voir
aussi Eusèbe, P . E . X 15 , 15 (DK 31 A 8), qui situe ces études à l'époque d'Hé
raclite (Ol.69 = 504 -501), donc à une époque inconciliable avec la chronologie
d'Apollodore .
Néanthe (FGrHist 84 F 26 ) avouait ne pas connaître auprès de quel pythago
ricien Empédocle avait étudié (VIII 55 ),mais il donnait foi à une tradition selon
laquelle le philosophe aurait été excommunié pouravoir dévoilé les doctrines de
l'école dans ses poèmes (voir déjà VIII 54).Dans ce passage, Néanthe réfutait
comme pseudépigraphe la lettre de Télaugès qui présentait Empédocle comme le
disciple d'Hippasos ( H 144 ) et de Brontinos (aB 61). D 'un autre côté ,
qu ' Empédocle ait pu être, comme le prétend la Souda (A 4121), le disciple
d'Archytas ( A 322), un pythagoricien du IVe siècle, est chronologiquement
impossible.
La liste des pythagoriciens transmise par Jamblique enregistre le nom d'Empédocle
d'Agrigente . Elle connaît aussi un Méton de Paros (De vita pyth., 36 , 267).
80 EMPÉDOCLE D 'AGRIGENTE E 19
Guère plus vraisemblables , du point de vue d'Apollodore en tout cas, seraient
des études d'Empédocle auprès de Xénophane (acmé en 540/39a, selon D .L . IX
20 ) ou de Parménide (acméen 504/39, selon D .L . IX 23).
Diogène Laërce rapporte en IX 20 un apophtegmemettant en scène Empédocle et Xéno
phane,mais le nom de Xénophane n 'apparaît pas dans une autre version de l'apophtegme (DK
31 A 20 ).
Selon Théophraste (DK 31 A 7), Empédocle aurait été zélateur de Parménide, mais plus
encore des pythagoriciens. Pour la Souda (11 675), Parménide aurait été l' élève de Xénophane
(ou d 'Anaximandre s 'il faut croire Théophraste ) ; il aurait eu comme successeurs Empédocle ,
« le philosophe etmédecin » , et Zénon d ' Élée. Dans sa notice sur Empédocle ( E 1002), le
même lexique cite l'Histoire philosophique de Porphyre (livre II, fr. 8 Segonds) pour affirmer
qu 'Empédocle fut « en premier lieu » disciple de Parménide et son bien -aimé (Taloxá). Dio
gène Laërce (VIII 54 ) connaissait d 'autre part des auteurs qui rapportaient les éloges pronon
cés dans le fragment B 129 non pas à Pythagore,mais à Parménide.
En revanche, les historiens reconnaissent volontiers une influence doctrinale
et littéraire de Parménide sur Empédocle. Voir 54 G . Giannantoni, « L 'originalità
del pluralismo empedocleo », Elenchos 18, 1997, p. 235-255. Alors que Théo
phraste (VIII 55 = fr. 227 B Fortenbaugh et alii = DDG p. 477, 18 et n.) voyait
dans les vers d' Empédocle Sur la nature une imitation du poème similaire de
Parménide, Hermippe (VIII 56 = fr. 26 Wehrli) y décelait plutôt l' influence de
Xénophane, philosophe qu' Empédocle aurait fréquenté et imité, avant de se
tourner vers les pythagoriciens. Alcidamas prétendait pour sa part qu 'Empédocle
aurait, avec Zénon d'Élée, étudié d'abord avec Parménide, puis serait devenu
l'auditeur d’Anaxagore et de Pythagore (VIII 56).
Ce sont de telles successions philosophiques construites sur des similitudes
doctrinales, voire des rapprochements géographiques, que les recherches chrono
logiques d'Apollodore suffisaient à renverser.
Selon Philostrate, Empédocle aurait étudié auprès desMages (DK A 31 14 ).
Son traité Sur la nature était dédié au médecin Pausanias de Géla (VIII 60),
pour lequel il aurait écrit une épigramme citée par Diogène Laërce. Pausanias
réapparaît dans les fragments biographiques, car il était l'un des personnages du
dialogue d'Héraclide le Pontique cité à plusieurs reprises par Diogène. Il est
possible que tous les détails empruntés à ce dialogue soient légendaires.
Empédocle aurait, un jour qu'il était chez son ami Anchytès, arrêté par un chant, en
s ' accompagnant sur la lyre , un jeune homme qui voulait tuer son hôte parce qu ' il avait
condamné son père à mort. Le jeune homme serait ensuite devenu un zélé disciple du philo
sophe (Jamblique, De vita pyth. 113 = DK 31 A 15 ) . Comme Pausanias, ami, disciple d 'Em
pédocle et dédicataire du poème Sur la nature, était le fils d 'un certain Anchytės (VIII 61 =
DK 31 B 1), Diels (note ad loc.) croit que Jamblique, qui ne mentionne pas le nom du jeune
homme, a pu donner à l'hôte d'Empédocle le nom du père de Pausanias.
Empédocle et les diadochai. Empédocle apparaît dans les Vies de Diogène
Laërce à la suite de la vie de Pythagore , à titre de pythagoricien (VIII 50 ), « car,
selon certains, il fut l'auditeur de Pythagore ». L 'apparition d'Empédocle au livre
VIII est cependant un peu inattendue, dans la mesure où il était absent de la tra
dition « italique » décrite dans le prologue (I 13- 15), où l'on passait directement
de Pythagore et Télaugès à Xénophane et Parménide.
E 19 EMPÉDOCLE D 'AGRIGENTE 81
20 EMPÉDOS RE 2
Auteur d'Apomnèmoneumata, cité par Athénée, Deipnosophistes IX , 370 c .
Selon lui, Zénon de Kition jurait « par la câpre» (xánnapus), imitant Socrate qui
jurait « par le chien ». Le renseignement et la comparaison avec Socrate apparais
sent également, de façon anonyme (paoi), chez Diogène Laërce VII 32, à la fin
de la biographie de Zénon (voir aussi Souda, s.v. várnapic ).
" Euntedos est, dans le texte d'Athénée, une correction, due à C .Müller, pour futodoc.
Susemihl, GGLA II, p . 399 n . 314 , mentionne ce personnage dans une liste d 'historiens de date
inconnue. Selon F . Jacoby, art. « Empedos » 2 , RE V 2 , 1905, col. 2512, il s 'agirait plutôt d 'un
philosophe stoïcien .
RICHARD GOULET.
21 EMPÉDOS DE SYBARIS
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V . pyth. 36 , 267, p . 145, 1 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
22 EMPÉDOTIME DE SYRACUSE RESuppl. IV
Figure littéraire d'un dialogue d'Héraclide le Pontique (** H 60).
Cf. 1 W . Kroll, art. « Empedotimos» , RESuppl. IV , 1924, col. 269; 2 R .
Daebritz, art. « Herakleides » 45, RE VIII, 1913, col. 476 -477 ; 3 E . Rohde,
Seelencult und Unsterblichkeitsglaube der Griechen , Tübingen 19259-10, t. II,
p. 94 n . 1 (= E . Rohde, Psyché. Le culte de l'âme chez les Grecs et leur croyance
à l'immortalité , trad. A . Reymond , Paris 1928, p . 340 n. 1) ; 4 F . Wehrli, Hera
kleides Pontikos, coll. « Die Schule des Aristoteles» 7 , Basel/Stuttgart 19692, fr.
90 -96 (commentaire, p . 90 -93) ; Wehrli ne retient pas toutes les références à
Empédotime (cf. par ex. Anthologie Palatine VIII 29 (Grégoire de Nazianze ),
Grégoire de Nazianze, Orationes IV 591) ; 5 H . B . Gottschalk , Heraclides of
Pontus, Oxford 1980, p . 98- 105, 149- 154 (textes ajoutés à ceux édités par
Wehrli 4 ); 6 W . Burkert, Lore and science , p . 366 -368.
E 23 ENDIOS DE SYBARIS 89
(Quelques témoignages, empruntés à Michel Psellus, l'Empereur Julien , Grégoire de
Nazianze et une scholie sur les vers de Grégoire attribuée à Cosmas de Jérusalem dit le
Mélode, ont été signalés par 7 J . Whittaker, « Varia Posidoniana » , EMC 40, n .s. 16 , 1997,
p. 305 -315 , en particulier p. 305 -309. R . G .)
On a fait l'hypothèse que le nom d'Empédotime aurait été forgé par Héraclide
le Pontique sur ceux d'Empédocle et du « chaman » Hermotime de Clazomènes
(Wehrli 4, p. 91 ; cf.Gottschalk 5, p. 111 n . 79).
On apprend par la Souda (s.v. 'Euntedótluoc, t. I, 2, p. 259, 16 -20 Adler et
s.v. 'lovilavós (l'Empereur Julien ), t. I, 2, p. 643, 4-7 Adler ) qu 'Empédotime
avait écrit un ouvrage Sur la physique (Ilepi puolxnç åxpoácewC) et que l'Em
pereur Julien avait témoigné dans ses Saturnales (tà Kpovla = fr. 161 Bidez) de
sa foi en Empédotime et en Pythagore et aussi en ce qu 'en ont dit Héraclide le
Pontique et Jamblique de Chalcis. D 'après les témoignages que nous possédons
sur Empédotime, l'enseignement de celui-ci relève effectivement de la « psycho
logie » , c'est-à-dire de la physique, mais l'auteur de la Souda , ou plutôt sa
source, a tort de considérer ce « philosophe» comme un personnage historique
(même attitude chez Grégoire de Nazianze, Orationes IV 59).
(Sur le témoignage de Julien, voir J. Bouffartigue, L 'Empereur Julien et la culture de son
temps, « Collection des Études Augustiniennes - Série Antiquité » 133, Paris 1992, p . 111
112. R . G .)
Les sources antiques rapportent une vision qu'aurait eue Empédotime lors
d 'une chasse , au cours de laquelle Pluton et Perséphone lui seraient apparus;
illuminé par la lumière qui entourait les dieux, il aurait vu « dans une vision
directe toute la vérité sur les âmes» (Proclus, In Remp. II, p. 119, 20-27 Kroll). Il
aurait décrit les trois portes et les trois voies qui mènent au ciel (Varron ap.
Servius, In Verg. Georgica I 34 ) et présenté la voie lactée comme le chemin qui
mène les âmes dans « l'Hadès céleste» (Damascius ap. Jean Philopon , In
Meteor., p. 117, 8-27 Hayduck ). Il est vraisemblable qu'Empédotimeprésentait
sous forme de vision une doctrine chère à Héraclide le Pontique, peut-être dans
le dialogue intitulé lepi quxñs (autres hypothèses dans Wehrli 4, p. 90 -91). On
trouvera une interprétation des révélations d' Empédotime dans Gottschalk 5 ,
p . 98- 105. Pour une brève présentation de la psychologie et de la théologie d 'Hé
raclide le Pontique, cf. 8 H . -J. Krämer, « Die Ältere Akademie » $ 5 : Herakleides
Pontikos, GGP, Antike 3, 1983, p . 91-92.
Notons enfin que ce sont principalement des néoplatoniciens qui ont repris
l'anecdote de la vision d'Empédotime (Jamblique, Julien, Proclus, Damascius
[Olympiodore , fr. 95 Wehrli = Damascius), Philopon ).
JEAN -PIERRE SCHNEIDER .
23 ENDIOS DE SYBARIS
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V.
pyth . 36 , 267, p. 145, 2 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
ÉNÉE → AINÉAS
DÈME
90 ÉNÉSI E 24
24 ÉNÉSIDÈME ja ?
Fondateur du néo -pyrrhonisme.
Biographie. La biographie d'Énésidème pose de nombreux problèmes. On
trouvera un résumédes propositions de datation (entre 80 av. J.-C . et 130 apr.)
dans 1 Ch. L . Stough , Greek scepticism , A Study in epistemology, Berkeley/Los
Angeles 1969, p . 8 - 9 , et 2 J. Glucker, Antiochus and the Late Academy, Göttin
gen 1978, p . 116 - 119. Une étape importante de la discussion est constituée par
3 H . von Arnim , Quellenstudien zu Philo von Alexandria, coll. « Philologische
Untersuchungen » 11, Berlin 1888, sect. II : Philo und Aenesidem , p . 53- 100 , en
particulier p. 73. On admet généralement aujourd 'hui l'hypothèse de 4 V .
Brochard , Les Sceptiques grecs, Paris 1884, p . 244 -245, qui fait d 'Énésidème un
contemporain de Cicéron. L 'argument principalpour cette datation s'appuie sur
un passage de Photius, Bibl. cod. 212, qui expose les critiques d'Énésidème
contre l'Académie, en particulier celle de son temps, laquelle n 'est selon lui
sceptique que de nom et ne diffère pas en pratique du stoïcisme. Ces critiques ne
peuvent viser Antiochus d 'Ascalon ( > A 200 ) , puisque la remarque que ces aca
démiciens contemporains, tout en dogmatisant sur beaucoup de points, rejettent
le critère stoïcien de la représentation compréhensive ne peut précisément pas
s 'appliquer à celui que Cicéron appelle germanissimus stoicus (II Acad . VI 18 ).
Il doit plutôt s 'agir de Philon de Larissa. Énésidème aurait écrit ses Livres
Pyrrhoniens tandis que la position de Philon était encore officiellement celle de
l'école tout entière , donc avant le départ de ce dernier pour Rome (Glucker 2 ,
p . 117) .
De nouveaux éléments sont apparus dans la discussion , à partir des tentatives
faites pour localiser l' activité philosophique d’Énésidème. Sur son lieu d'origine
en effet, les témoignages divergent. Énésidème est généralement dit Kvúolos
« de Cnossos» , d'après le témoignage de Diogène Laërce dans la Vie de Timon
(IX 115 -116 ),mais notre source principale sur la vie d 'Énésidème, la notice de
Photius, Bibl. cod. 212 , 169b 19, indique : • Aivnoíonuos ó éĘ Aly @ v , « Énési
dème d 'Aeges» , tandis qu' Aristoclès (témoignage transmis par Eusébe, P. É .
XIV 18, 22) fait allusion à une renaissance récente de l'enseignement sceptique
due à un certain Énésidème à Alexandrie d'Égypte : éxoès xai apánv. 5 F .
Decleva Caizzi, « Aenesidemus and the Academy » , CQ 42 , 1992, p . 176 - 189 ,
propose une solution à cette difficulté en distinguant un lieu d 'origine, Cnossos,
un lieu associé à la renommée du philosophe, Alexandrie , et un « lieu inter
médiaire » , Aeges, « où Énésidème se trouvait à un certain moment de sa vie » ,
mais, comme le remarque 6 J. Mansfeld , « Aenesidemus and the Academics» ,
dans L . Ayres ( édit.), The Passionate Intellect, Essays on the transformation of
Classical Traditions, coll. « Rutgers University Studies in Classical Humani
ties » , New Brunswick /London 1995, p . 235 -248 , si le Kvóolog de D . L . peut
désigner soit le lieu de naissance, soit une cité dont Énésidème fut citoyen , soit
le lieu où il fut enterré, le ¿E Alyõv de Photius fait sans ambiguité référence au
lieu de naissance (p . 239).
E 24 ÉNÉSIDÈME
L' allusion à Alexandrie a pu être utilisée pour la datation basse du philosophe
à partir de la formule éxoès xai tpónv. En particulier, 7 N . Macoll, The Greek
Sceptics, London /Cambridge 1869, p . 68-69, a proposé la date extrême de
130 apr. J.- C . Mais d'une part l'expression peut toujours être comprise d 'une
manière assez lâche, d 'autre part la datation d 'Aristoclès ( > A 369) a été récem
ment remontée du lie au jer siècle de notre ère, sur la base d 'une nouvelle lecture
de manuscrits faisant d 'Aristote de Mytilène (mA 413 ) et non d'Aristoclès le
péripatéticien du IIe siècle qui fut le maître d' Alexandre d' Aphrodise (> A 112]
(8 P .Moraux , « Aristoteles , der Lehrer des Al. v. Aphr.» , AGPh 49 1967, p. 169
182). La difficulté demeure toutefois puisque les partisans de cette nouvelle
datation d ' Aristoclès (ainsi 9 S. Follet, DPA t. I, p . 382) s'appuient sur 10 P.
Moraux , Aristotelismus, t. II , p . 83-92, qui utilise pour faire remonter la date
d 'Aristoclès précisément le éxoès xai npónu qui est rapporté à Énésidème. On
pourra s'en tenir prudemment aux conclusions de 11 H .B . Gottschalk , « Aristo
telian philosophy in the Roman world from the time of Cicero to the end of the
second century A . D . » , ANRW II 36 , 2 , 1987, p. 1161-1162 : « Tout ce que nous
pouvons dire est qu' < Aristoclès > a probablement vécu au premier ou second
siècle de notre ère. »
La question de la localisation d 'Aeges n 'est pas non plus sans importance
pour la datation de l'æuvre d 'Énésidème. Par ailleurs, elle recoupe l'interpréta
tion du lien entre Énésidème et le destinataire de ses huit Livres Pyrrhoniens,
Lucius Tubero (Photius, Bibl. cod. 212, 169 b 32 -33), seule indication biogra
phique qui puisse faire allusion à l'appartenance d 'Énésidème à l'Académie .
Photius dit en effet qu’Énésidème aurait dédié ses livres « à un ouvaipEOLÁTNS,
membre de l' Académie , Lucius Tubero , d 'origine romaine, d 'une famille illustre
et ambitionnant des charges politiques non négligeables » ( 169 b 30 -35). Trois
questions se posent à propos de ce passage de Photius: (a ) qui est Lucius Tube
ro ? (b ) quel rapport peut-on voir entre le lien d 'Énésidème avec Tubéron et la
mention de la cité d 'Aeges en 170 a 41 ? (c ) comment doit-on comprendre le
συναιρεσιώτης ?
On admet avec E . Klebs, l'auteur de la majeure partie des notices de la RE sur
les “ Tubero ”, qu'il s'agit de L . Aelius Tubero , que Cicéron cite comme un ami
dans le Pro Ligario et qui fut légat du proconsul d 'Asie , Quintus Cicéron (2 + C
125 ). Selon Decleva Caizzi 5 , p . 180 , Énésidème et Lucius Tubero se seraient
rencontrés dans l'Aeges d ’Éolide (Aeolis) qui appartenait justement au territoire
de la province d 'Asie , précisément pendant le proconsulat de Quintus, donc de
63 à 58 av. J.- C . 12 F . Decleva Caizzi, « Per un 'edizione delle testimonianze
sullo scettico Enesidemo » , Annuario del Ginnasio Liceo “ A . Volta " di Como,
<5 >, 1990 -1992 (1992), p. 183-200 , confirme sa localisation par le rapproche
mentavec un témoignage épigraphique de la région de Kymè en Éolide (IGR IV
1740 ), dans lequel un philosophe “pyrrhoniaste” du nom de Ménéclès (selon la
reconstitution de Kaibel, Epigrammata Graeca, nº 2416 , p. 522, confirmée par
D . Baltazzi, BCH 12, 1888, nº 017 , p . 368 ) se vante d 'avoir réalisé l' idéal pyr
rhonien de l'ataraxie (åtápayov odov ). Pour C . Lévy (dans une étude à paraître
92 ÉNÉSI E 24
DÈME
dans REG ), il s'agirait plutôt de l'Aeges de Cilicie où le jeune L . Tubero serait
venu visiter Énésidème une dizaine d'années avant la date proposée par Decleva
Caizzi. Il appuie son choix de l'Aeges de Cilicie sur un témoignage de Philo
strate , Vie d 'Apollonios 1 7, 1, quimontre qu'au jer siècle apr. J.-C . Apollonios
de Tyane (* A 284 ) pouvait « philosopher» avec « des platoniciens, des chrysip
péens, des péripatéticiens» . Comment comprendre que Cicéron ne mentionne
pas cette ville, alors qu'il fut proconsul de Cilicie en 51-50, si déjà une vingtaine
d 'années auparavant elle avait pu voir la rencontre d'Énésidème et de Tubero ?
On pourrait enfin songer à une localisation plus simple d 'Aeges, dont, dit Pho
tius, Énésidème est « originaire » ; il existait un lieu de ce nom en Crète ,même
s'il s 'agit d 'un Aegeum antrum (cf. Hésiode, Théogonie 481 sq .) et un lieu trop
éloigné de Cnossos (Inscriptiones Creticae I 1).
Le silence de Cicéron sur Énésidème a par ailleurs donné lieu à plusieurs ten
tatives d ' explication . 13 E . Zeller, Die Philosophie der Griechen in ihrer
geschichtlichen Entwicklung dargestellt, II 2 , Leipzig 1881, p . 15, proposait déjà
d'identifier le Tubero auquel Énésidème avait dédié sesæuvres avec un membre
de la famille autre que l'amide Cicéron, parce que Cicéron ne semble pas être
informé de l'existence d 'Énésidème (Cf. Glucker 2 , p . 116 n . 44 ). Dans l'hypo
thèse de F . Decleva Caizzi qui retient l' identification traditionnelle avec l'amide
Cicéron, le silence de ce dernier est plausible dans la mesure où Énésidème n 'a
pas appartenu à l'Académie . Enfin, une autre hypothèse a été présentée par 14 G .
Reale, Storia della filosofia antica IV ,Milano 1978, p. 152. Le silence de Cicé
ron permettrait de dater la renaissance du pyrrhonisme: l’æuvre d ’Énésidème fut
écrite probablement dans les années suivant immédiatement la mort de Cicéron ,
juste après 439. Comme l'a montré C . Lévy , il n 'est nullement nécessaire que
Cicéron ait cité dans ses œuvres les auteurs qu 'il a pu connaître , comme en
témoigne le cas de Lucrèce.
Énésidème fut-il compagnon de Tubero à l'Académie ? On considère tradi
tionnellement avec Brochard qu ’Énésidème avait fait un passage à l' Académie,
sur la base du témoignage de Photius. Mais F . Decleva Caizzi propose de lire
autrement ouvalpeolárns : le termene signifierait pas compagnon d 'Énésidème
à l'Académie , mais « membre de l' Académie » , en dépit du préfixe contenu dans
le terme. On pourrait aussi envisager que Tubero issu de l'Académie ( TÕV ŠE
'Axaðnuíaç tivi) ait épousé, au moment où Énésidème lui dédia son æuvre, la
même aipeolç qu'Énésidème, à savoir non pas la doctrine de l'Académie (voir
15 H . Tarrant, Scepticism or Platonism ? Cambridge 1985, p .60 ),mais le néo
pyrrhonisme (voir sur ce pointMansfeld 6 , p. 241- 245 ). Les critiques adressées à
l' Académie (Photius, Bibl. cod. 212, 170 a - b ) correspondent bien à l'attitude de
quelqu 'un qui déserte l'Académie pour le pyrrhonisme et se justifie en montrant
que l'Académie a elle -même trahi son scepticisme et qu'elle se confond avec le
stoïcisme (Glucker 2 , p . 118).
Les écrits d 'Énésidème. Les témoignages font état de quelques titres:
- Muppáveloc Noyou (Sextus, A. M . VIII 215 ; D .L. IX 106 et 116 ) que Pho
tius appelle Huppwviwv Noyou (Discours pyrrhoniens ou des Pyrrhoniens).
E 24 ÉNÉSIDÈME
- Karà oopías, Contre la science (D .L . IX 106).
- Nepi Intńcewç, Sur la recherche ( D. L . IX 106 ).
- Eis tà Iuppúvela ÚTOTÚTIWOLÇ, Esquisse du pyrrhonisme (D. L . IX 78 et
Aristoclès dans Eusèbe, P . É. XIV 18 , 11).
- EtoixeiGOELÇ, Introduction élémentaire (Aristoclès, ibid. 16 ).
- Ipørn eloaywyń , Première Introduction (Sextus, A . M . X 216 ).
Les trois derniers peuvent n 'être que des parties d 'autres ouvrages. Des trois
qui sont certainement d 'Énésidème (Brochard 4 , p . 247), deux ne sont plus pour
nous que des titres. Seuls les huit livres des Discours Pyrrhoniens sont analysés
par Photius. Le premier livre est consacré à la différence entre les académiciens
et les pyrrhoniens qui, eux, n' affirment rien , pas même qu 'ils n 'affirment rien , et
à l' attaque contre les académiciens accusés de collusion avec les stoïciens ( voir
l'analyse du passage 160b 35 - 170 a 38 par Decleva Caizzi 12 p. 196 -200) . Le
second livre traiterait des principes, des causes, du mouvement, de la génération
et de la corruption , le troisième de la sensation et de la pensée. Le quatrième
démontre qu 'il n 'y a point de signes et indique les difficultés relatives à la
nature, au monde, à l'existence des dieux. Le cinquième expose les huit tropes
dits parfois aitiologiques ( contre les causes). Le sixième traite du bien et du mal,
le septième combat la théorie des vertus et le huitième veut prouver que ni le
bonheur, ni le plaisir, ni la sagesse ne sont le souverain bien .
Les témoignages. Les cuvres de Sextus Empiricus constituent la source
principale pour la connaissance d 'Énésidème. Non seulement son nom y est cité
une dizaine de fois (selon l' index de l'édition Janáček ), mais il est également
tenu pour l'auteur de nombreux arguments sceptiques de Sextus. 16 F . Decleva
Caizzi, « Sesto e gli Scettici» , Elenchos 13, 1992 , p . 279 -327 , considère qu 'en
particulier l'expression « les sceptiques plus anciens » se réfère principalement à
lui (p . 301). 17 K . Janáček, « Ainesidemos und Sextos Empeirikos» , Eirene 17,
1980 , p . 5- 16 , analyse les sources qui ont été considérées en particulier par von
Arnim comme des témoignages sur Énésidème. Il analyse essentiellement Clé
ment d'Alexandrie (Stromates III 93 , 19 – 94, 4 Stählin ), Diogène Laërce IX 95 , et
Sextus. Selon lui, il y a une source plus ancienne que Sextus dans Clément
d' Alexandrie , Diogène Laërce étant considéré comme indépendant de Sextus.
L 'essentiel de la démonstration sur Énésidème concerne l'expression désignant
la vérité dogmatique ń Év TOTS oủol aandela . Cette expression énésidémienne,
mais également plus ancienne, revient régulièrement chez Sextus. Dans un
article précédent ( 18 « Zur Interpretation des Photios Abschnittes über Ainesi
demos» , Eirene 14 , 1976 , p . 93 - 100) consacré à Photius (Bibl. cod. 212),
Janáček a rejeté les témoignages de Philon et d' Aristoclès sur Énésidème et
considéré que Diogène Laërce conserve des fragments et une terminologie plus
anciens que Sextus,bien que Sextus lui-même soit plus ancien (p . 93-94 ).
On peut dire avec Brochard 4, p . 249, que « c'est en ne prenant que ce qui est
devenu le bien commun des sceptiques que Sextus suit Énésidème partout où il
ne le cite pas » . Voir Decleva Caizzi 12 .
94 ÉNÉSIDÈME E 24
Trois passages importants de l'Adversus Mathematicos de Sextus sont attri
bués nommément à Énésidème, conformément au résumé de Photius, mais la
difficulté est de savoir où s'arrêtent les arguments empruntés à Énésidème et où
recommencent les propos de Sextus. On distingue (1) un passage sur les causes:
A. M . IX 218 sqq., (2) un sur la vérité : A. M . VIII 40 sqq., et (3) un sur les
signes : A . M . VIII 215 sqq .
Les dix tropes. Énésidème est l'auteur des dix tropes de la suspension du
jugement (Aristoclés dans Eusèbe, P . É. XIV 18 , 11; Sextus, A. M . VII 345 ;
D . L . IX 78, 87), dans la mesure où , partant d'un matériau , d'exemples et de
l'expression même de tropes, traditionnels chez les sceptiques, il est le premier à
les ordonner et à les énumérer avec une certaineméthode. Dans l' exposé des dix
tropes de ses Hypotyposes Pyrrhoniennes, Sextus ne semble pas toutefois suivre
fidèlement Énésidème. Si tel était le cas, comme le remarque Brochard 4 , p. 250
n . 7, la question si difficile de la date de ce philosophe serait décidée , par
l'exemple de Tibère (H . P . I 84).
Il existe essentiellement deux versions des dix tropes, celle très détaillée de
Sextus et celle plus restreinte de Diogène Laërce, qui suit un ordre légèrement
différent, et quelques témoignages divergents (Aristoclès n 'attribue à Énésidème
que neuf tropes, Favorinus dans D .L . IX 87 modifie la place des deux derniers
tropes de Diogène et Philon d' Alexandrie n 'en cite que huit). 19 J. Annas et J.
Barnes, The modes of scepticism , Cambridge 1985, analysent chaque trope dans
l'ordre de Sextus en citant les textes parallèles.
Par le terme de tropes (τρόποι ou encore τόποι et λόγοι, cf. Η. Ρ . Ι 36,
termes parfois traduits par celui de modes), les sceptiques désignaient les diver
ses « manières ou raisons» par lesquelles on arrive à la nécessité de suspendre
son jugement (Brochard) ou les « types de considération » pour douter de la pos
sibilité du savoir (20 A . A . Long, Hellenistic Philosophy, London 1986 , p . 82).
Sur les rapports entre relativisme et scepticisme, voir Annas et Barnes 19, p. 98,
et 21 G . Striker , “ The ten tropes of Aenesidemus” , dans M . Burnyeat (édit.), The
Skeptical tradition , coll. “Major thinkers Ser.", Berkeley 1983, p . 95- 115 .
Dans l'ordre de Sextus et en adoptant la terminologie devenue classique de
Brochard, les tropes sont ainsi classés : (1) la diversité des animaux, (2) les diffé
rences entre les hommes, ( 3) la diversité des sens, (4 ) les circonstances, (5 ) les
situations, les distances et les lieux, (6 ) les mélanges, ( 7) les qualités ou compo
sitions, (8) la relation , (9) la fréquence et la rareté , (10 ) les coutumes, les lois, les
opinions. Sextus simplifie lui-même la liste en concluant que tous les tropes se
ramènent à un seul, celui de la relation (H . P . I 39).
L 'ordre adopté par Diogène peut paraître plus satisfaisant (Brochard 4, p. 260 ,
et 22 F . Cossutta, Le scepticisme, coll. “ Que-sais-je ?" , Paris 1994, p. 79 -81, qui
propose une nouvelle terminologie ). Le dixième trope d' Énésidème devient le
cinquième; il s'agit en effet de divergences d'opinion tenant à la nature ou aux
dispositions du sujet. Le septième devient le huitième; les sixième, septième,
huitième et neuvième tropes se rapportent à l'objet considéré en lui-même,
abstraction faite de tout rapport soit entre le sujet et l'objet, soit entre les divers
E 24 ÉNÉSIDÈME 95
objets. Le dixième enfin (la relation), le plus important de tous, désigne les rap
ports des objets entre eux .
L 'argumentation sceptique. Les tropes de la suspension du jugement, s'ils
permettent de faire d 'Énésidème le rénovateur du scepticisme, ne sont pourtant
pas l'unique argumentation du sceptique qui nous soit parvenue. Les trois lam
beaux de doctrine transmis par Sextus sur la vérité, sur les causes et sur les
signes constituent les points fondamentaux de l'argumentation sceptique dirigée
contre l'adversaire stoïcien . Le premier argument (A . M . VIII 40 -48) démontre
qu'il ne peut y avoir de vérité. Le second (A . M . IX 218 -227) expose les huit
tropes destinés à réfuter ceux qui croient à l'existence des causes. Le troisième
attaque la démonstration en montrant qu 'il n 'y a pas de signes visibles révélant
les choses invisibles (cf. Photius 170 b 12). Aucun texte précis ne permet d ' attri
buer à Énésidème la distinction développée par Sextus entre signes commémo
ratifs et signes indicatifs.
La théorie morale soulève deux difficultés. D ' une part les témoignages per
mettent de retrouver à propos d'Énésidème la mêmecontradiction à laquelle sont
confrontés les interprètes de Pyrrhon . D 'après le résumé de Photius, les derniers
livres des Discours Pyrrhoniens d'Énésidème étaient consacrés à réfuter la
théorie morale des stoïciens et rejetaient toute définition du souverain bien .Mais
chez Diogène Laërce (IX 107) et Aristoclès (Eusèbe, P . É . XIV 18 , 4), Énési
dème est associé à Timon pour l'opinion que l'ataraxie est le bien que seul le
scepticisme peut assurer et qu 'elle résulte de la suspension du jugement. D 'autre
part, la fin du passage d' Aristoclès est tellement problématique que le texte a pu
être récusé. Pour les partisans de la suspension du jugement, explique en effet
Aristoclès , « il s 'ensuivra selon Timon d 'abord l'aphasie, ensuite l' ataraxie , et
selon Enésidème le plaisir » .
L 'héraclitisme d 'Énésidème. Ce problème est généralementmis en évidence
et traité à partir d'un passage de Sextus qui présente la position d 'Énésidème et
la récuse à l'intérieur de la section consacrée aux rapprochements avec les philo
sophies voisines (23 K . Janáček , « AINAPAKEIMENAI (scil. TỈ EKEYEI) OIAO
LOQIAI. Bemerkungen zu Sextus Empiricus P . H . I 210-241 » , Philologus 121,
1977 , p . 90 -94).
Il s'agit de H . P . I 210-212 intitulé « Que la manière sceptique de procéder
diffère de la philosophie héraclitéenne » , plus particulièrement de la formule de
210 : « Énésidème et ses partisans (oi tepi töv Aivnoidnuov) ont dit que “ la
manière sceptique de procéder est un chemin vers la philosophie héraclitéenne” ,
en vertu du fait que “ le même possède une apparence contradictoire " précède " le
même possède une réalité contradictoire ” (...)» .
On ne voit pas comment expliquer cette métamorphose de « l'héritier de
Pyrrhon » en « disciple d 'Héraclite » (Brochard 4 , p . 272). La difficulté de la
question s'accroît si l' on tient compte d 'un certain nombre d 'autres passages de
Sextus considérés comme des passages « dogmatiques » d'Énésidème, et généra
lement introduits par l' énigmatique formule « Énésidème» : A. M . VII 348-350
(sur la raison et les sens), A.M . VIII 8 (sur la vérité), A. M . IX 337 (sur la partie
96 ÉNÉSIDÈME E 24
et le tout), et trois passages parallèles sur le temps: A . M . X 215-218 , A. M . X
230 -233 et H . P . III 138. Certaines de ces doxographies trouvent des parallèles
dans Tertullien , De Anima 5 , 2 ; 9, 5 ; 14 , 5 ; 17, 2 ; 25, 5.
Trois tendances ont coexisté dès les premières publications consacrées à la
question à la fin du XIXe siècle . Une première, que l'on pourrait qualifier d 'histo
rique, consiste à se débarrasser du mystère que constitue l'héraclitisme d ’Énési
dème en l'imputant à une erreur, qu'elle soit due à Sextus (24 H . Diels, Doxo
graphiGraeci, Berlin 1879 , p. 209 -210 ) ou à l'existence d'une source intermé
diaire (25 E . Zeller et E . Pappenheim , Der angebliche Heraklitismus des Skepti
kers Ainesidemos, Berlin 1889) .
Von Arnim 3, p . 81-82, a soulevé une objection constamment reprise contre
la thèse commune de Diels, Zeller et Pappenheim : les relations de pensée entre
Philon d 'Alexandrie et Énésidèmerendent impossible que l' attribution des doc
trines héraclitéennes à Énésidème soit due à un néo-pyrrhonien du IIe siècle ou
même à une erreur de Sextus parce que chez Philon déjà (mort peu après 40 apr.
J.-C .) se trouve la trace des tropes mais aussi de l'héraclitisme (voir 26 K .
Janáček, « Philo von Alexandreia und die skeptischen Tropen » , Eirene 19 , 1982,
p . 83- 97). Les remarques de von Arnim n 'ont pas seulement été utilisées pour
dater la vie d 'Énésidème, mais aussi pour confirmer l'existence d 'un « héracli
tisme d 'Énésidème».
La deuxième tendance, et finalement la plus féconde jusqu'à nos jours ,
consiste à distinguer des phases dans la vie et l'euvre de l'auteur.Mais le « che
min » d 'Énésidème est double, le conduisant tantôt de l'héraclitisme au scepti
cisme (27 E . Saisset, Le scepticisme antique, Aenésidème, Pascal, Kant, Paris
1865 ; 28 M . Dal Pra , Lo scetticismo greco, Bari 1975, 3e éd. 1989; 29 J. Rist,
« The Heracliteanism of Aenesidemus» , Phoenix 24 , 1970, p. 309 -319 ), tantôt
du scepticisme à l'héraclitisme (Brochard 4, 30 G . Capone Braga, « L 'eracli
tismo di Enesidemo» , RF 22, 1931, p. 33-47), avec éventuellementdans chaque
cas un passage par l'Académie .
Enfin , certains auteurs réinterprètent le scepticisme d 'Énésidème de façon à
pouvoir faire du sceptique un véritable héraclitéen sans recourir à la solution de
phases distinctes dans son évolution intellectuelle . Il s 'agit d 'abord de 31 P .
Natorp , Forschungen zur Geschichte des Erkenntnis -Problems im Alterthum .
Protagoras, Demokrit, Epikur und die Skepsis, Berlin 1884 (réimpr. Hildesheim
1965), reprise dans un contexte plus large d ’un article paru l'année précédente :
32 Id., « Untersuchungen über die Skepsis im Alterthum : Aenesidem » , RhM 38,
1883, p . 28 -91, dont les conclusions hardies, dénoncées en leur temps par
Brochard , ont été reprises récemment dans un contexte purement méthodo
logique par Stough 1.
Natorp tente une justification philosophique de l'héraclitisme d'Énésidème,
interprété comme un phénoménisme compatible avec le scepticisme. Énésidème
aurait renoué avec la doctrine de Protagoras « dontmanifestement est issu le
scepticisme pyrrhonien » , et aurait été conscient de la relation de cette doctrine
E 24 ÉNÉSIDÈME 97
avec l'héraclitisme. Natorp est sans doute le premier à attribuer à Énésidème la
lecture sceptique de Protagoras chez Sextus A . M . VII 60-64. De plus, il
construit, comme le fera aussi Brochard, « le lien logique précis » entre les
doctrines énésidémo-héraclitéennes et H . P. I 210 : tous les passages du corpus et
en particulier ceux sur le temps sont des exemples « de la thèse générale que le
réel peut être contradiction » (31, p. 110).
33 M . Conche, Pyrrhon ou l'apparence, Villers -sur-Mer 1975 , suivi par
Reale 14, p. 180 , interprète l'héraclitisme comme scepticisme “ antimétaphysi
que -nihiliste” . Dans cette perspective, le témoignage d ’Aristoclès est fortement
validé aux dépens de celui de Sextus et est analysé comme l'exacte négation des
trois principes aristotéliciens qui « s'y laissent entrevoir » : le principe de raison ,
le principe de contradiction, le principe du tiers -exclu . De même, les tropes sont
analysés comme « une machine de guerre anti-dogmatique » particulièrement
dirigée contre l'adversaire stoïcien (p. 78) et n 'auraient pas la même valeur pour
Sextus et pour Énésidème. L 'argumentation par les tropes s'inscrit dans le cadre
d 'une « philosophie de la représentation avec la scission de l’être et du paraître »
(p . 87). « L 'héraclitéisme n 'a rien d 'un phénoménisme, et le scepticisme phéno
méniste ne peut conduire à l'héraclitéisme. Si donc l'orientation sceptique est,
selon Énésidème, un acheminement à la philosophie d'Héraclite, c 'est que le
scepticisme de Pyrrhon et d' Énésidème n 'est nullement un phénoménisme» .
Ainsi « le pyrrhonisme coïncide avec un néo -héraclitéisme où l'accent ne serait
pas mis sur le logos mais sur la dissolution et la mort» . C ' est, d 'une manière
générale , la question des rapports avec le stoïcisme qui reste ambiguë dans l'en
semble de cette thèse sur l'héraclitisme d'Énésidème, pourtant très cohérente dès
lors que l'on admet son corollaire, la thèse anti-phénoméniste sur Pyrrhon. Or,
pour Énésidème, les règles qui permettent d'exclure le témoignage de Sextus
quand il s'agit de Pyrrhon ne valent plus et, comme le pensait Natorp, il n 'y a
aucune raison de privilégier Aristoclès qui connaîtmal Énésidèmeaux dépens de
Sextus quile connaît bien .
34 U . Burkhard , Die angebliche Heraklit-Nachfolge des Skeptikers Aene
sidem , Bonn 1973, a récemment renouvelé les données du problème en expli
quant le « prétendu héraclitisme d ' Énésidème» comme une stratégie polémique
du sceptique dirigée contre son contemporain Posidonius, qui serait l'auteur
d 'une interprétation stoïcisante d 'Héraclite , telle qu 'elle ressort du résumé de la
doctrine du logos d'Héraclite en A. M . VII 126 - 134. Cette thèse a l'avantage
d'éliminer la contradiction, à l'intérieur de l'école sceptique, entre l'Héraclite
dogmatique de Sextus et l'Héraclite sceptique ou « pré- sceptique » d 'Énésidème.
En effet, selon Burkhard , « il n 'y a pas d 'héraclitisme d’Énésidème» , mais une
interprétation critique de l'utilisation d'Héraclite par les stoïciens. Pour Énési
dème, le principe fondamental de l'héraclitisme est la coïncidence des contraires,
ce que l'auteur nomme « l' énantiologie » .Mais l'utilisation de ce principe paraît
contestable sur deux points: il s'agit à la fois de l'hypothèse selon laquelle le
ressort de la critique anti-stoïcienne d 'Énésidème doit être situé dans la seule
ironie , sans justification de l'intérêt pour la doctrine d 'Héraclite , et d 'autre part
98 ÉNÉSIDÈME E 24
du fonctionnement même de cette ironie , sur lequel on peut faire des réserves.
On pourra donc doubler son hypothèse critique d 'une interprétation positive.
Énésidème substitue à l'héraclitisme du consensus stoïcien l'héraclitisme de
la coexistence des contraires. Ilne tente pas de supprimer l'écart entre apparence
contradictoire et réalité contradictoire, et n 'identifie pas héraclitisme et scepti
cisme. Au contraire, l’énantiologie considérée commele fondement de la pensée
d 'Héraclite est une thèse dogmatique à laquelle le sceptique n 'adhère pas. Il n ' y
a pas, comme l' a montré Burkhard, d 'héraclitisme d ' Énésidème. De plus, c 'est
seulement à condition d ' admettre que la doctrine du flux et celle de la
coexistence des contraires font référence à la même interprétation d 'Héraclite, à
savoir l'un des pôles de l'interprétation platonicienne, que l'on peut comprendre
l'intérêt d 'Énésidème pour l'Héraclite du Théétète . La plupart des commenta
teurs ont reconnu à Énésidème un intérêt pour la recherche de l'énantiologie, en
rapport avec H . P . I 210 , mais nullement pour le flux héraclitéen . Or les deux
aspects ne se séparent pas. C 'est pourquoi l'héraclitisme diffus dans Philon
d 'Alexandrie, qui affleure principalement sous la forme du flux héraclitéen ,
pourrait bien avoir un rapport avec l'interprétation d 'Énésidème. Certes il est
impossible de tirer des témoignages de Philon la preuve d 'un « héraclitisme
d 'Énésidème» , mais ils pourraient contenir la trace de l'intérêt que les scep
tiques aussi bien que les académiciens pouvaient trouver à la doctrine du flux
(comme en témoigne également le Commentaire Anonyme au Théétète, PBerol.
9782,col. LXI;cf.commentaire ad loc. de 35 D . Sedley , CPF III, 1995, p . 545
547).
Pour le sens de la formule qui est au centre de la problématique, on voit mal
quel sens de ratá pourrait autoriser la stricte compréhension de la formule
comme « Énésidème interprétantHéraclite » , voire dans la version de Burkhard
« réinterprétant l'interprétation (stoïcienne) d 'Héraclite » , à moins d 'admettre la
réversibilité de la formule , ce qui ne s'admet pas d ' emblée . Les deux seules
possibilités qui paraissent acceptables du point de vue de la langue le sont diffi
cilement du point de vue de la reconstruction de la pensée tant d'Héraclite que
d 'Énésidème qu 'elles supposent. S'il s'agit d 'Énésidème « citant Héraclite » ,
qu ’Héraclite désigne ici un auteur, un titre , ou un personnage de dialogue, on
voit mal à quelles « citations» d 'Héraclite peuvent correspondre les notices de
Sextus. S 'il s'agit d 'Énésidème « suivant Héraclite » , le mêmeproblème se pose ,
doublé du problème philosophique principal que pose l'existence d 'un « héra
clitisme d 'Énésidème» . Par ailleurs, la compréhension de xará comme « en
relation avec » (Zeller-Pappenheim ) n'est pas si précise qu'elle doive impliquer
une adhésion à Héraclite . On peut donc interpréter d 'une manière inédite
l'expression de Sextus, en attribuant à xará une fonction symbolique ou
emblématique dans laquelle le nom d 'Héraclite est comme l'indicateur d'une
pensée ou même d 'un mode de pensée ou de discussion , à savoir la pensée du
flux ou du devenir, c 'est-à -dire celle qui, pour les lecteurs de Platon - à
l'intérieur de l'Académie ou non - , était associée à « Héraclite » ou plutôt aux
« Héraclitéens» .
E 25 ENNIUS 99
Ainsi, malgré les nombreux doutes qui subsistent concernant la relation entre
l'utilisation d 'Héraclite par Énésidème et le rôle que ce dernier a pu jouer à
l'Académie , on peut penser que la formule Aivnoíonuoc xatà tov ' Hpa
Xheltov n 'est pas une formule doxographique à proprement parler,mais qu 'elle
désigne une utilisation philosophique de la doxographie, ce qui est un cas extra
ordinaire dans le systèmede la doxographie antique.
BRIGITTE PÉREZ .
gore dans la liste des personnages ayant été considérés comme Sages fournie par
Hippobote ). Selon Diogène, il était le fils d'Élothalès (Élothalès est également le
titre d 'un écrit attribué à Pythagore dans le catalogue d 'Héraclide Lembos
transmis par D . L . VIII 7) et originaire de Cos; il aurait émigré en Sicile dans sa
jeunesse, comme en porteraient témoignage ses propres écrits.
Chez Jamblique, V. pyth . 36 , 266 , Épicharme est qualifié d'“ auditeur exter
ne” , n 'appartenant pas à la secte : arrivé à Syracuse, il se serait abstenu de philo
sopher de manière ouverte à cause de la tyrannie de Hiéron et il aurait mis en
vers les pensées (dianoiai) des pythagoriciens, divulguant de façon amusante les
doctrines de Pythagore . Jamblique fait allusion à ces dianoiai (V. pyth . 29, 166 ),
quand il dit que les sentences d 'Epicharme, connues par presque tous les philo
sophes, constituent l'un des meilleurs exemples de sagesse pratique. Selon Jam
blique, V. pyth . 241, des doctrines de Pythagore et d'Épicharme se retrouveraient
dans la science médicale du fils d 'Épicharme, Métrodore (le passage a été
corrigé par Diels ), dont est cité un passage (DK 23 B 65). De nombreux écrits
apocryphes circulaient donc sous le nom d'Épicharme (fr. 135 -147 Kaibel) et
déjà dans l'antiquité on leur reconnaissait ce caractère pseudépigraphe. Diogène
lui attribue des hypomnemata de sciences naturelles, d' éthique et de médecine; il
mentionne également la présence dans ces cuvres d'acrostiches qui attesteraient
leur authenticité (phénomène qui au contraire démontre leur caractère apo
cryphe, dans la mesure où les acrostiches n 'apparaissent pas avant l'époque
alexandrine : cf. A . Pickard -Cambridge 9, p. 235).
Selon Kaibel 1, p . 134 -135 , Épicharme aurait écrit un Carmen physicum (test.
239-254 Kaibel) ; Pickard-Cambridge 9, p. 241- 245 , est d'un avis contraire.
Parmi les pseudépigraphes d'Épicharme, il fautmentionner:
Ipòç ’Avtńvopa, Contre (ou A ) Anténor (Plutarque, Numa 8 ).
Moriteia , République (fr. 255- 260 Kaibel; DK 23 B 56-57). Elle aurait été
composée, selon Aristoxène, apud Athénée XIV , 648 d (fr. 45 Wehrli = DK
23 A 10 ), par le flûtiste Chrysogonos; elle est citée par Clément, Strom . V 118.
Kavóv et võual. Selon Philochoros (FGrHist 328 F 79), ilfaudrait attribuer
ces écrits à Axiopistos de Locres ( A 516 ), probablement un pseudonyme.
Xipwv (test. 290 Kaibel = Athénée XIV , 648 d ).
On lui a attribué également des traités d'agriculture (Columella I 1 : fr. I 5
Kaibel) .
Dans sa Vie de Platon , Diogène Laërce cite quelques extraits d 'un ouvrage
intitulé Ipós ’ Auúvtav (» A 152) d'un certain Alcimos de Syracuse (» A 90),
qui cherchait à montrer que Platon avait emprunté certaines de ses doctrines,
notamment sa théorie des Idées elle-même, à Épicharme et qui citait en ce sens
des passages des comédies de ce dernier. L 'authenticité de certains de ces pas
sages est contestée. Sur cette question, voir 11 M . Gigante, « Epicarmo, Pseudo
Epicamo e Platone », PP 30, 1953, p. 161-175 ; 12 K . Gaiser, « Die Platon -Refe
rate des Alkimos bei Diogenes Laertios (III 9 -17) » , dans Zetesis (Mélanges E .
de Strycker ), Antwerpen/Utrecht 1973, p. 61-79 ; 13 L . Brisson , « Diogène
E 32 ÉPICRATÈS D 'HÉRACLÉE 105
Laërce, “ Vies et doctrines des philosophes illustres”, Livre III : Structure et
contenu » , dans ANRW II 36 , 5 , 1992, p . 3619 -3760, notamment. p . 3646 - 3651.
Platon cite Épicharme dans le Théétète 152 e et le range parmi les partisans de la
théorie selon laquelle rien n 'est, mais tout est en devenir.
Le poète latin Ennius (2E 25) a traduit l'un de ces écrits apocryphes dans
son Épicharme, poème didactique dont le prologue fait exposér en songe par
Épicharme des doctrines sur la nature ; dans ces passages les dieux du monde
romain étaient identifiés avec les éléments de la cosmologie traditionnelle . Voir
14 I. Vahlen (édit.), Ennianae poesis reliquiae, 2e éd ., Leipzig 1928, p . 220 -222.
Études d 'orientation . Kaibel 1 ; Kaibel 10 ; Pickard-Cambridge 9 , p . 230
288 ; 14 A . C . Cassio, « Two studies on Epicharmus and his influence» , HSP,
89, 1985, p. 37-51.
BRUNO CENTRONE.
30 ÉPICRATÈS MIII
Cinquième des neuf exécuteurs testamentaires (épimélètes) du testament de
Straton de Lampsaque,mort vers 268a (Diogène Laërce V 62-63). Il n 'est pas dit
expressément qu'il s'agit de disciples au sein de l' école péripatéticienne,mais la
phrase qui suit stipule que la diatribè est léguée à Lycon (huitième nom dans la
liste) parce que les autres sont trop âgés ou trop occupés (ãoxorou).
Épicratès doit également recevoir 500 drachmes et un serviteur choisi par Arcésilas, l'un
des deux héritiers . Avec Iraios et Olympichos, il est chargé des funérailles du scholarque.
RICHARD GOULET.
31 ÉPICRATÈS MF III
Dédicataire de deux ouvrages de Chrysippe de Soles (* * C 121) relevant de la
logique : 'Enltoun tõv após 'Enixpárnu au 160hőv a ', Résumé des ambiguï
tés adressé à Épicratès, en un livre (D . L. VII 193, n° 59 Hadot: seule la version
résumée de l'ouvrage semble donc citée dans la liste) et lepi oŰtidoç Tóyou
npòs 'Enrizpárnu a ', Sur l'argument du “ Personne ” à Épicratès, en un livre
(D .L . VII 198, n° 113 Hadot). De tels ouvrages ne peuvent guère avoir été
dédiés qu'à un disciple ou à un collègue au sein de l'école stoïcienne .
RICHARD GOULET.
32 ÉPICRATÈS D 'HÉRACLÉE III/IIa ?
Ce péripatéticien , fils de Démétrius, fit un assez long séjour à Samos, où il
enseigna la philosophie au gymnase. En récompense de son dévouement et de sa
générosité – il dispensait ses cours gratuitement aux jeunes gens pauvres – il y
reçut le droit de cité. Le décret qui le lui conférait (MDAI( A ) 44, 1919, nº 14
p . 29 ; SEG I 368) a été daté par son éditeur, M . Schede, des environs de 200 av.
J.-C ., d 'après la forme des lettres probablement , car le texte ne contient aucun
indice chronologique. Il pourrait être un peu antérieur à la date proposée ,mais il
paraît néanmoins difficile que le professeur de Samos puisse être identique à
l'homonyme (2E 30 ) désigné dans le testament de Straton comme l'un de ses
106 ÉPICRATÈS D 'HÉRACLÉE E 32
exécuteurs testamentaires: celui-ci, d 'après les termes mêmes du testament,
devait être déjà , vers 2689, un homme d 'âge mûr, installé à Athènes; il n 'est
guère probable qu 'il se soit engagé, dans la seconde moitié du siècle, dans une
carrière de professeur itinérant.
Voir W . Ameling, « Prosopographia Heracleotica » , dans Lloyd Jones, The
Inscriptions ofHeraclea Pontica, coll. IK , 47 , Bonn 1994, p . 135.
BERNADETTE PUECH.
33 ÉPICTÈTE RE 3 PIR2 E 74 I- II
Philosophe stoïcien (représentant de la nouvelle Stoa),disciple de Musonius
Rufus. De ses enseignements (Alatpißaí, Entretiens), qui furent consignés par
son disciple Arrien deNicomédie (3 + A 25), nous ne possédons qu'une partie (la
moitié), ainsi qu'une version abrégée (' Erxelpídlov,Manuel), également due à
Arrien , et une série de fragments conservés notamment dans des gnomologies.
A . Bibliographie générale.
Bibliographies : 1 W . A . Oldfather, Contributions towards a bibliography of
Epictetus. Appendix : Jacob Schegk 's translation of the Enchiridion, Basel 1534
= Univ. of Illinois Bulletin 25, Urbana 1927, XII-201 p . App. 38 p .; 2 Id., Contri
butions towards a bibliography of Epictetus. A supplement, ed. by M . Harman ,
with a preliminary list of Epictetus' manuscripts by W . H . Friederich and
C . U . Faye, Urbana 1952 , XXI-177 p. ; 3 M . Spanneut, « Épictète 1952- 1962» , IL
14 , 1962 , p. 212 -216 ; 4 J. Hershbell, « The stoicism of Epictetus: Twentieth cen
tury perspectives» , ANRW II 36 , 3, 1989, p. 2148-2163.
Notices : 5 H . von Arnim , art.« Epiktetos» 3,RE VI 1 , 1907, col. 126 -131 ;
6 A . Stein , PIR2 III, 1943, E 74, p. 81 ; 7 A .Jagu, art. « Épictète. I. Doctrine »,
DSp IV 1960, col. 822-830 ; 8 M . Spanneut, art. « Épictète . II. Influence à
l' époque patristique. III. Épictète et le Moyen Age » , DSp IV 1960 , col. 830
849 ; 9 J.- E . d 'Angers, art. « Épictète. IV . Période moderne » , DSp IV 1960, col.
849-854 ; 10 M . Spanneut, art. « Epiktet» , RAC 5 , 1961, col. 599-681;
11 H . Dörrie , art. « Epiktetos » 1, KP II 1967, col. 313-314 ; 12 K . von Fritz , art.
« Epictetus» 2 ,OCD2, p . 390 ; 13 A . J.Malherbe, « Epictetus» , The Interpreter's
Dictionary of the Bible. An illustrated encyclopedia . Supplementary volume,
édit. K . Crim , Nashville 1976 , p . 271 ; 14 J.- F . Mattéi, art. « Épictète » , Diction
naire des Philosophes, I, Paris 1984, p . 859 -866 ; 15 G . Rocca -Serra , art.
« Épictète » , Encyclopédie philosophique universelle , III : Les Euvres philo
sophiques. Dictionnaire , volume dirigé par J.- F. Mattéi, t. I : Philosophie occi
dentale : Ir millénaire av. J.-C . - 1889, Paris 1992, p . 133.
Études d ' orientation : 16 C . Martha, Les moralistes sous l'empire romain
(philosophes et poètes), Paris 1865, p . 191- 208 (« La vertu stoïque : Épictète » );
17 R . Asmus, Quaestiones Epicteteae, Diss. Friburgi Brisigaviae 1887, Freiburg
i. Br. 1888 ; 18 A . Bonhöffer, Epictet und die Stoa. Untersuchungen zur
stoischen Philosophie, Stuttgart 1890 , réimpr. Stuttgart/Bad Cannstatt 1968 ;
19 Id ., Die Ethik des Stoikers Epictet. Anhang : Exkurse über einige wichtige
E 33 ÉPICTÈTE 107
Punkte der stoischen Ethik , Stuttgart 1894, réimpr. Stuttgart/Bad Cannstatt
1968 ; 20 R . Hirzel, Der Dialog. Ein literarhistorischer Versuch , Leipzig 1895,
réimpr. Hildesheim 1963, t. II, p. 245-252 ; 21 A . Croiset et M .Croiset, Histoire
de la littérature grecque, Paris 19012 , t. V , p. 457-466 ; 22 Th. Colardeau, Étude
sur Épictète , Thèse Paris 1903 ; 23 R . Renner, Zu Epiktets Diatriben , Diss.Mün
chen , Amberg 1904 ; 24 O . Halbauer, De diatribis Epicteti, Diss. Lipsiae 1911 ;
25 W . Schmid, Wilhelm von Christ's Geschichte der griechischen Literatur,
Zweiter Teil : Die nachklassische Periode der griechischen Literatur, Erste
Hälfte : Von 320 vor Christus bis 100 nach Christus, coll. « Handbuch der Alter
tumswissenschaft» VII 2 , 1, Sechste Auflage unter Mitwirkung von O . Stählin ,
München 1920 , réimpr. 1959, p. 358 -361 ; 26 E . Zeller, Die Philosophie der
Griechen , t. III 1, p. 765-781 ; 27 E . Bosshard , « Épictète » , RThPh 17, 1929,
p . 202-216 ; 28 V . d'Agostino, « Sulla divisione dell'opera di Epitteto » , BFC 34,
1928, p. 150- 152 (repris dans 29 Id ., Studi sul neostoicismo. Seneca . Plinio il
Giovane. Epitteto . Marco Aurelio , 2a edizione riv. e ampl., Torino 1962, p. 90
91) ; 30 Id ., « Intorno al concetto della libertà in Epitteto » , ArchItalPsicol 8,
1930 , p. 298- 331 (réimpr. dans d'Agostino 29, p. 92- 119 ) ; 31 G . Calogero ,
« Introduzione a Epitteto », Leonardo 4 , 1933, p. 235-241; 32 D . Pesce, « La
morale di Epitteto » , RF 30, 1939, p . 250-264 (repris dans 33 Id ., Scrittisulla
filosofia antica d ' etica e di filosofia dell'arte, Parma 1988, p. 41-52); 34 F .
D 'Ambrozio , Epitteto e la morale del suo tempo, Roma 1940 ; 35 M . Pohlenz,
La Stoa. Storia di un movimento spirituale (trad. de la 2e édit. allemande,
Göttingen 1959), Firenze 1967,réimpr. 1978, t. II, p. 23-25, 104- 133 ; 36 B . L .
Hijmans (Jr.), " Aomouc. Notes on Epictetus' educational system , Diss. Utrecht,
coll. « Wijsgerige Teksten en Studies» 2, Assen ,1959 ; 37 J.Moreau , Epictète ou
le secret de la liberté, présentation, choix de textes, bibliographie , coll. « Philo
sophes de tous les temps » 11, Paris 1964 (cf. 38 Id ., « Épictète ou le secret de la
liberté » , REPh 34, 1984, p. 4 -13); 39 G . Germain , Épictète et la spiritualité stoï
cienne , coll. « Maîtres spirituels» 33, Paris 1964 ; 40 F .Millar, « Epictetus and
the imperial court » , JRS 55, 1965 , p . 141-148 ; 41 F . Elemento, « Le Diatribe di
Epitteto » , dans Diadosis. Voci di presenza classica. Rassegna ufficiosa a cura
della cattedra di lett. class. del liceo C . Varese, Tortona 1967, p . 63-73 ;
42 J. Xenakis , Epictetus, philosopher-therapist, The Hague 1969 ; 43 E . Cizek ,
« Épictète et l'héritage stoïcien » , StudClas 17, 1975 , p . 71-87 ; 44 Jelena M .
Štajerman, « Épictète et sa place dans le stoïcisme romain » (en russe ), VDI 1975 ,
n° 132, p. 197-210 ; 45 P .A . Brunt, « From Epictetus to Arrian » , Athenaeum 55 ,
1977 , p. 19-48 ; 46 W . Siegfried , « Stoische Haltung nach Epiktet » , Gesnerus 44,
1988, p. 269-279 ; 47 W . O . Stephens, Stoic strength . An examination of the
ethics of Epictetus, Diss.Univ . of Pensylvania, Philadelphia 1990 ; 48 P . Hadot,
La citadelle intérieure. Introduction aux Pensées de Marc Aurèle, Paris 1992,
p. 89-117 (chap . V : « Le stoïcisme d 'Épictète » ) ; 49 J.-J. Duhot, Épictète et la
sagesse stoïcienne, coll. « L 'aventure intérieure », Paris 1996 , 265 p.
Éditions : L 'editio princeps du Manuel (avec le commentaire de Simplicius)
fut publiée à Venise en 1528 ; celle des Entretiens, due à V . Trincavelli, fut
108 ÉPICTÈTE E 33
publiée aussi à Venise en 1535 (’Applavoũ 'Epíxentos ( sic ]).La première édi
tion vraiment critique des Entretiens (contenant aussi le Manuel) fut celle de
50 J.Upton, Epicteti quae supersunt dissertationes ab Arriano collectae, 2 vol.
(t. I: texte grec et latin ; t. II: Notae et emendationes), Londini 1739-1741. On
possède deux grandes éditions de l'ensemble de l'auvre :
(a) 51 J. Schweighäuser, Epicteteae philosophiae monumenta , t. I- III : Epicteti
Dissertationum ab Arriano digestarum libri IV. Eiusdem Enchiridion et deperdi
tis sermonibus fragmenta. Post Io . Uptoni aliorumque curas denuo ad Codicum
manuscriptorum fidem recensuit, latina versione, adnotationibus, indicibus
illustravit J. Schw ., Lipsiae 1799, réimpr. Hildesheim /New York 1977.
(b ) 52 H . Schenkl, Epicteti dissertationes ab Arriano digestae, ad fidem codi
cis Bodleianirec. H . S.,accedunt fragmenta, Enchiridion ex rec. Schweighäuseri ,
Gnomologiorum Epicteteorum reliquiae, indices (editio maior), coll. BT, Leipzig
1894, 19162, réimpr. 1965, XXV-740 p.; 53 Id., editio minor 1898 (XIV -499 p.;
avec unenouvelle collation de W . M . Lindsay), 19162 (avec les scholies éditées
par T. W . Allen ; sur les scholies d' Épictète , voir Spanneut 8, col. 846 -847; Id .
10 , col.672-673).
Il y a d'autres éditions de l'ensemble :
(a) 54 Fr. Dübner, Theophrasti Characteres, MarciAntonini Commentarii,
Epicteti Dissertationes ab Arriano literis mandatae, fragmenta et Enchiridion
cum commentario Simplicii, Cebetis Tabula , Maximi Tyrii Dissertationes,
Graece et Latine cum indicibus, Parisiis 18422, p. 1- 14 (Enchiridion ), p. 15-32
(Fragmenta), p. 33-220 (Dissertationes), p.221-227 (Index nominum et rerum ).
(b) 55 W . A .Oldfather, Epictetus. The Discourses as reported by Arrian, the
Manual and Fragments, with an English translation , 2 vol.: t. I: Discourses,
Books I and II, coll. LCL 131, Cambridge (Mass.)/London 1925, réimpr. 1979 ;
t. II : Discourses, Books III and IV, theManual and Fragments, coll. LCL 218,
Cambridge (Mass.) London 1928, réimpr. 1985.
Autres éditions : 56 Ch. Thurot, Épictète. Manuel, texte grec , précédé d 'une introduction ,
accompagné de notes et suivi d 'un lexique des mots techniques, Paris 1874 ; 57 H . Joly , Ma
nuel d ' Epictète, texte grec et traduction française en regard , édition précédée d'une introduc
tion et d 'une analyse, et accompagnée d 'appréciations philosophiques, Paris 19048 ;
58 W . Capelle , Epiktet. Handbüchlein der Moral, mit Anhang : Ausgew . Fragmente verlore
ner Diatriben , hrsg. von W . C ., Jena 1906 ; 59 A . von Gleichen -Russwurm , Epiktet. Unter
redungen und Handbüchlein der Moral, neu hrsg., coll. « Deutsche Bibliothek » , Berlin 1914 ;
60 P . Smets , Epiktet. Handbüchlein der stoischen Philosophie, neu hrsg., Mainz 1938 ;61 Id .,
Epiktet. Fragmente, griech . u. dt. hrsg .,Mainz 1938 ; 62 H . Schmidt, Epiktet. Handbüchlein
der Moral und Unterredungen, coll. « Kröners Taschenausgabe » 2 , Stuttgart 1954 ;
63 J. Souilhé, Épictète. Entretiens, texte établi et traduit par J.S., CUF, 4 vol.: t. I: 1943,
réimpr. 1975 ; t. II: 1949, réimpr. 1969; t. III 1963; 1. IV 1965 (publication posthume des
deux derniers tomes avec la collaboration d ' A . Jagu ) ; 64 P . Jordán de Urries y Azara ,
Epicteto. Pláticas por Arriano , texto revisado y traducido , coll. « Hispánica de autores griegos
y latinos » , 4 vol., Barcelona 1957, 1963, 1965, 1973 (le t. IV contient le livre IV et les frag
ments) ; 65 M . Billerbeck, Epiktet. Vom Kynismus [Entretiens III 22), hrsg. und übers. mit
einem Kommentar, coll. « Philosophia Antiqua » 34 , Leiden 1978 ; 66 W . Kraus, Epiktet.
Handbüchlein der Moral und Unterredungen, hrsg. u . überarb . von W . K ., dt. Übert.nach J. G .
Schulthess u . K . Enk , coll. « Diogenes- Taschenbuch » , Zürich 1987 ;67 K . Steinmann , Epiktet.
E 33 ÉPICTÈTE 109
Handbüchlein der Moral, Griechisch/Deutsch ,übers. u. hrsg., coll. « Universal-Bibliothek »
8788 , Stuttgart 1992 ; 68 R . Nickel, Epiktet, Teles, Musonius. Ausgewählte Schriften ,
griechisch -deutsch , hrsg. und übers. von R . N ., coll. « Tusculum » , München /Zürich 1994;
69 R . F. Dobbin (édit.), Epictetus, Discourses, Book I, coll. « Clarendon Later Ancient Philo
sophers » , Oxford/New York 1998 .
Il fautmaintenant signaler une importante édition critique (avec traduction
anglaise ) du Manuel et des versions chrétiennes de ce texte : 69bis Gerard Boter,
The Encheiridion of Epictetus and its three christian adaptations. Transmission
and critical editions, coll. « Philosophia Antiqua » 82, Leiden 1999.
Traductions: Les traductions des Entretiens et notamment du Manuel sont
extraordinairement nombreuses. Outre les éditions bilingues citées plus haut,
nous offrons ici une ample sélection de ces traductions, y compris les plus
anciennes, en différentes langues :
En latin : Schweighäuser 51, Epicteti stoici Enchiridion ab Angelo Politiano e graeco
versum , t. V, p. 139- 172 (trad. de Politien , Boloniae 1497); 70 R . P. Oliver, Niccolo Perotti's
version of the Enchiridion of Epictetus, edited with an introd . and a list of Perotti' s writings,
Urbana 1954 (édition , à partir des différents manuscrits, de la traduction de l'humaniste N .
Perotti : Epicteti Enchiridium una cum Simplicii in eiusdem expositionem praefatione, Bolo
niae 1450 ) ; 71 E . V . Maltese , Epitteto , Manuale. Con la versione latina di Angelo Poliziano e
il volgarizzamento diGiacomo Leopardi, Introduzione, traduzione e note, coll. « I grandi libri
Garzanti » , Milano 1990 , p . 47 -86 (A . Poliziano ). La première traduction latine des Entretiens
est due à 72 J. Schegk , Arriani Nicomediensis de Epicteti philosophi, praeceptoris sui, disser
tationibus libri IIII... editi, Jacobo Scheggio ... interprete . Accedit Epicteti Enchiridion , Angelo
Politiano interprete,Basileae 1554 (avec le texte grec de Trincavelli).
En allemand : 73 K . Enk, Epiktetos Unterredungen, aufgezeichnet von Arrhianos aus dem
griechischen in das Deutsche übertragen, Wien 1866 ; 74 J.Grabisch, Unterredungen mit
Epiktet, ausgew . und ins Deutsche übertr., Jena/Leipzig 1905 ; 75 Fr. Dobe, Handbüchlein der
Lebenskunst (Enchiridion ), verdeutscht von Fr. D ., Berlin 1921; 76 R .Mücke, Epiktet, Was
von ihm erhalten ist nach den Aufzeichnungen Arrians, Neubearbeitung der Ubers. von
J.G . Schulthess (1766 ) von R . M ., Heidelberg 1924 ; 77 W . Capelle , Epiktet. Handbüchlein
der Moral und Auslese aus den Gesprächen , übers. von W . C ., Jena 1925 ; 78 Id ., Epiktet,
Teles und Musonius. Wege zu glückseligem Leben , übertragen und eingeleitet von W . C ., coll.
* Die Bibliothek der alten Welt. Griechische Reihe. Stoa und Stoiker» 3, Zürich 1948 , p. 7
206 (traduction du Manuel et d 'une sélection personnelle des Entretiens et des fragments, avec
des introductions et des notes); 79 Id ., Dir selber treu. Antike Lebensweisheiten von Epiktet
und Musonius, übertr. von W . C ., coll. « Artemis-Bibl.» 25, Zürich 1986 ; 80 C . Hilty , Epiktet.
DasHandbüchlein der Moral, nach der Übertragung von C . H ., Stuttgart 1946 ; 81 E . Neitzke,
Epictetus. Handbüchlein der Ethik ,übers., mit einer Einleitung u . Anmerkungen versehen von
E .N ., coll. « Reclams Universal-Bibliothek » 2001, Stuttgart 1980 ; 82 R . Nickel, Epiktet,
Teles und Musonius. Wege zum Glück, auf der Grundlage der Übertragung von W . Capelle
neu übersetzt, mit Anmerkungen versehen und eingeleitet von R . N ., coll. « Die Bibliothek der
alten Welt.GriechischeReihe » ,Zürich München 1987, p. 5 -198 et notes p. 289-310 ( 2e édit.:
Epiktet, Teles, Musonius :Wege zum Glück, auf der Grundlage der Übertr. von W . Capelle neu
übersetzt, & mit Einf. & Erl. vers . von R . N ., coll. « dtv » 2269,München 1991).
En français : 83 J.Goulu , Les Propos d 'Épictète recueillis par Arrian, auteur grec, son
disciple, translatez du grec en françois par Fr. J. de S. F. (Frère Jean de S. François),Paris
1609 et 1630 ; 84 A .- P . Thurot, Discours philosophiques d 'Epictète, recueillis par Arrien , et
traduits du grec en français , Paris 1838 ; 85 V . Courdaveaux, Les Entretiens d ' Épictète ,
recueillis par Arrien , traduction nouvelle & complète, 2e édit. revue et corrigée, Paris 1882
(18621), réimpr. 1908 ; 86 F . Thurot, Epictetus, Manuel, traduction française par F. Th .,
accompagnée d'une introduction et revue par Ch. Thurot, Paris 1874, réimpr. 1896 ; 87 A .
Fouillée ,Manuel d 'Épictète, trad. Naigeon (1782), revue avec introduction et notes, Paris
110 ÉPICTÈTE E 33
1876 ; 88 J. Souilhé et A . Jagu, Épictète . Entretiens,Manuel, trad. de J. S. et A . J., coll. « Les
grandes cuvres de l' Antiquité classique » , Paris 1950 ; 89 É . Bréhier, Épictète, Entretiens
(livres 1 à IV ), traduction par É. Br., revue par P. Aubenque. Rubriques, notice et notes par
P . Aubenque, dans Les Stoïciens, coll. « Bibliothèque de la Pléiade , Paris 1962, p. 801 -1105
(notes : 1339-1355) ; 90 J. Pépin , Épictète, Manuel, traduction, notice et notes, dans Les Stoï
ciens, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », Paris 1962, p. 1107-1132 (notes: 1355-1370); 91 C .
Chrétien , Épictète.Manuel,traduction de R . Rétoquart, revue et complétée par C. Ch., Intro
duction, commentaires et notes par C . Ch., coll. « Profil philosophie > 738 , Paris 1988 ;
92 M . Gondicas, Épictète , Ce qui dépend de nous. Manuel et Entretiens, coll. « Retour aux
grands textes » , Paris 1991. 93 (Arrien ), Manuel d 'Épictète . Traduction inédite et notes par E .
Cattin . Introduction et postface par L . Jaffro , coll. « GF >> 797 , Paris 1997, 162 p. (trad. p . 63
91; notes p. 93- 126 ).
En anglais: 94 E . Carter, All theworks of Epictetus, which are now extant, consisting of
his Discourses, preserved by Arrian , in four books, the Enchiridion, and fragments, translated
from the originalGreek by E. C ., with an introduction and notes, London 1758, réimpr. 1957 ;
95 Th . W . Higginson, The Discourses of Epictetus with the Enchiridion and Fragments,
translated by Th. W . H ., 2 vol., Boston 1865 (cf. Epictetus. The Enchiridion, translated by Th .
W . Higginson, with an introduction by A . Salomon , coll. « The library of liberal arts » , India
napolis/New York 1955) ; 96 G . Long, The Discourses of Epictetus with the Encheiridion and
Fragments, translated with notes, a life of Epictetus, and a view of his philosophy, coll. « Lib .
of the world 's best books» , New York 1890 ; 97 P.E .Matheson, Epictetus. The Discourses
and Manual, together with fragments of his writings, transl. with introd. and notes, 2 vol.,
Oxford 1916 ; 98 J. Bonforte , The philosophy of Epictetus (traduction des Entretiens, fondée
sur celle de T . W . Higginson),New York 1955 ; 99 N . P. White, The Handbook of Epictetus,
translated with an introd. and annot., Indianapolis 1983.
En italien : 100 E. Pelinejo ,Manuale di Epitteto, Parma 1793 ; 101 D .Bassi, Dai Discorsi
di Epitteto, trad. e comm ., coll. « Pubblicazioni di cultura morale » 1, Firenze 1915 ;
102 G .Rensi ( édit.), Il Manuale di Epitteto, nella versione di Angelo Poliziano, Milano 1926 ;
103 G . Calogero (édit.), Il Manuale di Epitteto, nella versione di Giacomo Leopardi (1825,
publiée à Florence en 1845 après la mort de son auteur), con introduzione e commento di
G . C ., coll. « Collana scolastica ditesti filosofici», Firenze 1933, 19362 ; 104 E . Albino (édit.),
Il Manuale, volgarizzato da G . Leopardi, introd. e comm . di E . A ., Roma 1950 (cf. Maltese
71, p . 87 - 119 ; 105 C .Moreschini [édit.), Il Manuale d 'Epitteto, trad. di Leopardi, coll. « Mini
ma >> 9, Roma 1990) ; 106 R . Laurenti, Epitteto . Le Diatribe e i Frammenti, Bari 1960, réimpr.
coll. « Biblioteca Universale Laterza » 282, Roma/Bari 1989 ; 107 A . Caretta et L . Samarati,
Epitteto . Il manuale, versione, introd . e note, coll. « Il pensiero class. de la filos. comm . » ,
Brescia 1970 ; 108 S. Arcoleo, Epitteto. Il manuale, trad., comm . analitico e storico -critico,
coll. « Classici di filosofia e pedagogia » 3 , Torino 1973; 109 G . Reale et C . Cassanmagnago,
Epitteto. Diatribe, Manuale , Frammenti, introduzione, prefazioni e parafrasi di G . R ., trad .,
note e indici di C . C ., coll. « I classici del pensiero , Sez. I : Filos. class. e tardoantica » ,Milano
1982 ;Maltese 71, p. 1-46 .
En espagnol: 110 F. Sánchez de las Brozas (El Brocense ), Doctrina del stoyco filosofo
Epicteto, que se llama comunmēte Encheiridio, Salamanca 1600 , réimpr. Pamplona 1612,Ma
drid 1632,Ginebra 1766 (la traduction est un peu libre ); 111 G . de Correas, Ortografia kastel
lana nueva y perfecta juntamente con elManual de Epicteto y la Tabla de Kebes, Salamanca
1630 (la traduction du Manuel y est utilisée comme exemple grammatical) ; 112 F. de
Quevedo , « Doctrina de Epicteto puesta en español con consonantes » , dans Epicteto y Phocí.
lides en español con consonantes. Con el origen de los estoicos, y su defensa contra Plutarco,
y la defensa de Epicuro contra la común opinion ,Madrid Barcelona 1635 (traduction , ou plu
tôt paraphrase, en vers du Manuel); 113 A . Brum (?), Theatro moral de la vida humana, en
cien emblemas, con el Enchiridion de Epicteto... y la Tabla de Cebes..., Bruselas 1672
(réimpr. dans Theofrasto , Caracteres morales. Epicteto, Enquiridion o Máximas. Cebes, la
Tabla de Cebes, coll. « Austral»> 733, Buenos Aires 1947, p. 79- 118) ; 114 J. Ortiz y Sanz,
Enchûridion ó manualde Epicteto, con el texto griego traducido en castellano e ilustrado con
E 33 ÉPICTÈTE 111
algunas notas (traduction latine en appendice), Valencia 1816 ; 115 P. Ortiz García, Epicteto .
Disertaciones por Arriano, traducción , introducción y notas, coll. « Biblioteca clásica
Gredos » 185, Madrid 1993 ; 116 Ead., Tabla de Cebes. Musonio Rufo, Disertaciones y frag
mentos menores. Epicteto, Manual, Fragmentos, Introducciones, traducción y notas, coll.
< Biblioteca clásica Gredos » 207, Madrid 1995, p. 167-247 (Manuel) ; 117 R . Alonso García ,
Epicteto, Manual, Introducción , traducción y notas, Madrid 1993 ; 118 J. M . García de la
Mora, Epicteto, Enquiridión, Estudio introductorio , traducción y notas. En apéndice, la ver
sión parafrástica de D . Francisco de Quevedo y Villegas (cf. 112 ), coll. « Textos y documen
tos » 14 ,Barcelona 1991.
En catalan : 119 J. Leita , Epictet, Enquiridió . Marc Aureli, Reflexions, a cura de J. Mont
serrat i Torrents, coll: « Texts filosòfics» 27, Barcelona 1983.
En grec : 120 S. Delta, 'Enixtútov 'Eyxelpídlov, Mápxou Aúpnalov tà eic Éautóv
(OEUTÉPn Éxoóon Slopowuévn ),Keávdouc " Yuvos eic Aía , uetáopaois , Athènes 1935 ;
121 S . Delta, Al xat' ' Applavov 'EnlxtÝTelol Alatpiſal, metáppaois, Athènes 1937 ;
122 A . Dalezios, 'Etxepidlov, åpx. xelu ., cioayum , metápp., onueiGOELS, coll. « lláttu
poç » 82, Athènes 1955.
En hollandais : 123 M . A . Gillis, Epictetus Hantboecxken, leerende na der Stoischer Philo
sophen wyse hoe elc in sinen roep gherustelyck leven sal. In nederduytsch overgesedt deur
M . A . G . , Antwerpen 1564 (cf. 124 M . Boas, « De oudste nederlansche vertaling van Epictetus
Enchiridion en haar auteur », Tijdsschrift vor Nederlandsche Taal- en Letterkunde 37, 1918 ,
p. 279 - 301) ; 125 H . L . Spiegel, Epictetus Handi-boexken , ende Cebes Tafereel. Lerende
philosophischer wyze hoe elck in sijn beroep gherustelixt leven zal... Noch Cebes tafereels
kort begrip , in rijm ghestelt door H . L . S ., Amsterdam 1615 ; 126 F . Scheurleer, Enchiridion :
zedekundig handboekje van Epictetus, vert. en van een inleid. voorz F . S ., Gravenhage 1915 ;
127 H . W . F . Stellwag, Epictetus. Het eerste boek van der Diatriben (Entretiens I), inleiding,
vertaling en commentaar door H . W . S ., Diss. Utrecht, Amsterdam /Paris 1933 ; 128 H . Giltay,
De levende Epictetus. Ein nieuw handboekje naar Epictetus' Diatribae, samengest. en van een
inl. en aant, voorz H . G ., Gravenhage 1946 .
En danois : 129 E . Boye, Epiktets Haandbog, af det Græske oversat og med Anmærk
ninger oplyst af E .B ., København 1781; 130 J. A . Bundgaard , Epiktetos' Haandbog, övers. af
J. A . B ., 2. udg., København 1942.
En tchèque : 131 R .Kuthan, J. Ludvíkovský, L. Svodoba et J. Mertlíková, Encheiridion,
Diatribai, introd., trad., comm ., coll. « Antická knihovna » 10 , Praha 1972.
En russe : 132 G . A . Tarojan , « Epicteti Diatribae» , VDI 1975 n° 132, p. 195-253, n° 133,
p . 217 -259, n° 134, p. 207-234, n° 135, p. 215 -249, n° 136 , p. 195-237 (traduction précédée
par l'article de Štajerman 44).
En lituanien : 133 V .Kazanskiene, Épictète. Euvres choisies (en lituanien ), Vilnius 1986 .
B . Vie.
Sources biographiques anciennes. Nos connaissances sur la vie d'Épictète
sont très pauvres. On trouve un catalogue de témoignages anciens sur Épictète
chez Schweighäuser 51, t. II 2, p. 123-136 , et Schenkl 52 , p . III-XV. Les sources
les plus importantes sont: Aulu-Gelle (11P ),Nuits Attiques II 18, 10 et XV 11, 3
5 ; Simplicius (VIP ), Commentarius in Epicteti Enchiridion ; et la Souda (XP), s.v.
'EnixTnTOS, E 2424,t.II, p. 365, 24-31 et 366, 1-17 Adler. Au début de la pré
face du commentaire de Simplicius (cf. Hadot 172 , p. 192, 1-4 ), on apprend
qu'Arrien « a écrit sur la vie et sur la mort d'Épictète» (= test. 3 Schenkl =
Arrien , test. 4 Roos). A la suite d'Asmus 17, p . 31 sq ., Schenkl 52, p. XV sq . (cf.
aussi Colardeau 22, p.23), s'oppose à ceux qui ont voulu tirer de cette phrase
l'idée qu 'Arrien avait écrit une biographie proprement dite de son maître,
112 ÉPICTÈTE E 33
publiée comme introduction au Manuel. Schenkl 52, p. XVI,montre en effet que
les témoignages que l'on possède sur Épictète (sauf de rares exceptions) sem
blent bien dériver des quatre livres d' Entretiens qui nous sont parvenus. Ces
livres restent en réalité la source la plus riche pour notre connaissance de la
personnalité du philosophe. D 'après Schenkl, les mots de Simplicius peuvent
faire référence simplement à un passage (perdu) des Entretiens, où Arrien ,dans
le dessein de montrer la tranquillité d'âme dont jouit celui qui ne considère pas
la mort comme un mal, aurait présenté Épictète moribond en train de dialoguer
une dernière fois avec ses amis et disciples (cf. aussi Zeller 26 , t. III 1, p. 766 sq.
n . 2 ; Colardeau 22 , p. 23 sq. n . 5 ; von Arnim 5, col. 126 sq.; Souilhé 63, t. I,
p . I). Dans l'introduction de son édition du Commentaire de Simplicius,Mme I.
Hadot 172 , p . 152 - 157, considère pour sa part que le passage fait bien allusion à
une Vie d'Épictète par Arrien , d 'ailleurs utilisée par Simplicius pour certains
détails biographiques concernant le philosophe.
Chronologie et biographie . La Souda,loc. cit. (= test. 21 Schenkl), nous
apprend que la patrie d 'Épictète fut Hiérapolis (auj. Tambouk -Kalessi), en Phry
gie méridionale. Le lexicographe ne précise pas la date de sa naissance ni celle
de sa mort. Il se borne à dire (cf. test. 30 Schenkl) qu 'Epictète a vécu jusqu 'à
l'avènement de Marc-Aurèle (161). Cependant, depuis Schenkl 52, p. XIX sqq.,
les critiques estiment qu 'une date plus ancienne s'accordemieux avec les points
de repère fournis par les Entretiens, notamment avec la chronologie de celui qui
les a publiés, Arrien (ca 85 - ca 165, * A 425 ), que l'on considère habituel
lement comme un fidèle éditeur de ses propres notes de cours (cf. infra ). En
effet, Schenkl 52, p. XXVII sqq., tout en supposant qu 'Arrien a dû suivre les
leçons d 'Épictète avant sa nomination commeconsul ca 130 , remarque qu’Épic
tète lui-même se présente comme un vieillard lorsque Arrien était son auditeur
(cf. Entretiens I 16 , 20 ; II 6 , 23 ; II 19, 25 ; Lucien , Contre un ignorant 13 = test.
15 Schenkl), et qu 'il aurait dû vivre encore une quarantaine d'années pour
atteindre l'avènement de Marc -Aurèle. Donc, Schenkl imagine qu 'Épictète a
vécu seulement jusque vers le milieu du règne d'Hadrien (117-138), qui a traité,
on le sait, le philosophe avec une grande familiarité ( cf. S. H . A ., Vita Hadriani
16 , 10 = test. 27 Schenkl, où l'on signale l'amitié de l' empereur pour les
philosophes Épictète et Héliodore [ H 28 ]). Schenkl 52, p. XXXII, suppose par
ailleurs qu 'Épictète est né en 50 . Cette date a été déduite approximativement à
partir de celle de l'incendie délibéré du Capitole en 69, car cet événement
semble avoir vivement marqué Épictète lorsqu 'il était disciple de Musonius
Rufus (cf. infra), comme on peut le déduire d'un passage des Entretiens I 7, 32
( cf. contra Hijmans 36 , p. 9 n. 1). Le Capitole fut incendié aussi en 80,mais de
façon accidentelle, tandis que le passage en question semble bien faire référence
à l'action criminelle de 69 (cf. Schenkl 52, p . XXIII ; Oldfather 55, t. I, p . XI) .
L ’an 50 proposé par Schenkl s'explique facilement si on suppose qu 'Epictète
pouvait avoir 19 ans lorsqu 'il était disciple de Musonius. Ainsi, on s'accorde
d 'ordinaire pour placer sa vie entre ca 50 et ca 125/130.
E 33 ÉPICTÈTE 113
Cf. Souilhé 63, t. I, p . II, IX ; Oldfather 55 , t. I, p . XII : † 120 (cf. Hijmans 36, p . 9 ) ;
Spanneut 10 , col. 599 sq .; Mattei 14 , p . 860 ;Rocca-Serra 15, p. 133.
En réalité, cette chronologie , bien qu 'elle soit plausible, n' a qu 'un caractère
hypothétique (cf. Colardeau 22, p. 3). Comme le souligne Stellwag 127 , p. 1, la
plus grande longévité attribuée par la Souda à Épictète n'est pas impossible. Sur
la base des témoignages d 'Aulu -Gelle II 18 , 10 (= test. 9 Schenkl) et de Marc
Aurèle VII 19 (= test. 12 Schenkl), qui parlent tous deux d'Épictète comme s'il
était mort, on peut seulement fixer 170 commeterminus ante quem pour la mort,
car cette année semble bien le terminus post quem pour la publication des Nuits
Attiques (* A 509) et de l'ouvrage de Marc -Aurèle (cf. Schenkl52, p. XXII). Par
ailleurs , d'après Georges le Syncelle (= test. 5 Schenkl), Épictète a eu son floruit
pendant le règne d 'Antonin le Pieux (138- 161), bien qu 'il fût déjà actif comme
philosophe sous le règne de Domitien (81-96 ), s'il a été compris dans le décret
sénatorial par lequel, sous cet empereur, furent chassés de Rome tous les philo
sophes, ca 94 (cf. infra ). De son côté ,Millar 40, p. 141 sq., qui souhaite se tenir
à l'écart de toute conjecture, déclare que la seule chose que l'on puisse affirmer
avec certitude sur la chronologie d 'Épictète est qu'il était à Rome pendant la
période des Flaviens (69- 96 ), lorsqu'il fut ami et disciple de Musonius.
Épictète a passé sans doute ses premières années à Hiérapolis. Cette ville (« la
ville sainte » ) était alors un centre religieux très important: tout en étant célèbre
notamment pour les mystères de Cybèle (cf. Strabon XIII 14), elle abritait aussi
une communauté chrétienne (cf. Spanneut 10 , col. 599 sq .). Donc, il est facile
d'imaginer que ce milieu a dû jouer un rôle très important dans la formation de
la spiritualité d'Épictète (cf.Oldfather 55,t. I,p . VIII).
A en croire une inscription de Pisidie , qui n'est pas datée mais semble bien
ancienne (cf. 134 G . Kaibel, « Inschriften aus Pisidien » , Hermes 23, 1888 ,
p . 532-545 , notamment p . 542 sq. = test. 19 Schenkl), Épictète est né dans
l'esclavage. Par ailleurs, dans un distique anonyme transmis par Jean Chryso
stome et par Macrobe (cf. test. 18 , 35 et 36 Schenkl), on présente l'esclavage
d'Épictète au moyen du verbe yiyveodai. Il n 'est pas sûr que ce verbe ait dans
ce passage le sens de « naître », car, comme le remarque Schenkl52, p. XVI,n . 2,
le verbe en question s' identifie souvent en poésie avec elvál, et, comme le
signale Souilhé 63, t. I, p. II, il peut aussi avoir le sens de « devenir » . En fait,
Schenkl 52, p . XVI, met en cause l' idée qu 'Épictète soit né esclave. Il suggère
que cette idée a été tirée d'un passage des Entretiens (IV 1, 51), où l'on dit de
Diogène de Sinope qu'il était un homme libre parce qu 'il l' était lui-même, bien
qu 'il ne fût pas né de parents libres. En revanche, Oldfather 55 , t. I, p. VII n. 2,
considère qu 'il n 'y a pas de raison pour douter du renseignement selon lequel
Épictète est né esclave. Martha 16 , p . 196 , soutient que le nom même
qu ’Épictète portait n 'était qu 'un adjectif signifiant « esclave » (« acquis récem
ment » ), et que ce nom lui aurait donc été donné non par ses parents mais par son
maître . Cependant, Oldfather 55, ibid., récuse l'idée de Martha selon laquelle le
nom qu 'Épictète portait n 'était pas son nom réel et qu'il l'employait uniquement
pour chercher une espèce d 'anonymat, par souci de modestie : « the designation
114 ÉPICTÈTE E 33
is by no means restricted to slaves , while his modesty, because coupled with
Stoic straightforwardness , is far removed from the shrinking humility that seeks
self-effacement» . Germain 39, p. 183 n. 7, remarque aussi que le mot 'Enixtn
tos comme nom propre est attesté pour des hommes libres. A son tour, Colar
deau 22 , p . 6 sq . n . 5 , tout en rappelant que les esclaves dans l'Antiquité
recevaient souvent le nom de leur pays d'origine, suggère que ce mot désignait
une partie de la Phrygie qui avait été ajoutée à un pays plus ancien ou acquise
par ce pays.Mais, comme le remarque Souilhé63, t. I, p . III, aucun témoignage
ne confirme cette hypothèse (cf.Mattéi 14, ibid .). En toutcas, l' ensemble de nos
sources, y compris les Entretiens, attestent bien qu'Épictète fut esclave au moins
pendant une période de sa vie (cf. Entretiens I 9, 29 -30 ; 19, 19-21 ; test. 9, 17,
18, 31 a et b, 35, 36 , 36 a, 47, 50 , 59 Schenkl; Fronton , Lettres, Ad Verum (?) 5,
p . 52 Haines (cf. p. 135 Van den Hout]).
Comme esclave, il fut envoyé à Rome, probablement encore très jeune ; on le
trouve au service d 'Épaphrodite, sans doute l'affranchi deNéron , que la Souda
présente comme un des gardes du corps de l' empereur,mais qui semble avoir été
plutôt son secrétaire (« a libellis » ), d'après le témoignage de Suétone, Vie de
Néron XLIX 5, et Vie de Domitien XIV 2 (cf. PIR? E 69; 135 P . R .C . Weaver,
« Epaphroditus, Josephus, and Epictetus» , CQ 44, 1994, p. 468 -479). La qualité
morale de ce personnage semble avoir été exécrable . Il n 'est sans doute pas
fortuit que dans le souvenir d'Épictète Épaphrodite apparaisse toujours comme
unmauvais exemple (cf. Entretiens I 1, 20 ; 9, 19 ; 19, 19-21; 20, 11-12 ; 26 , 11
12 ). A en croire la tradition , rapportée par Origène, qui suit Celse (cf. test. 17
Schenkl), et confirmée par Grégoire de Nazianze et son frère Césaire (test. 31-35
Schenkl), Épictète serait devenu boiteux à cause de la brutalité de son maître
( vraisemblablement Épaphrodite). Celse , ap. Origène, Contra Celsum VII 53,
raconte de façon dramatique cet épisode : Épaphrodite aurait mis à la torture la
jambe d 'Épictète, qui se serait borné à lui dire en souriant: « Tu vas la casser» ,
puis, lorsque la jambe fut de fait cassée, se serait borné à reprendre: « Je te
l'avais bien dit, que tu allais la casser» . Quoi qu'il en soit, le fait qu 'il était boi
teux est confirmé par Épictète lui-même (cf. Entretiens I 8, 14 ; 16 , 20 ). La
Souda explique l'infirmité d' Épictète comme due à de simples rhumatismes.
Cependant, ce témoignage, bien que R . Bentley l'ait défendu (cf. aussi Croiset
21, t. V , p . 458 ), n 'a généralement pas obtenu créance parmi les critiques (cf.
136 W . A . Oldfather, « Richard Bentley' s critical notes on Arrian 's Discourses of
Epictetus » , TAPHA 53, 1921, 41-52, notamment p. 42). Oldfather 55, t. I., P. IX
sq. n . 1, affirme que le témoignage de Simplicius, loc. cit. (= test.47 Schenkl),
selon lequel Épictète était faible de corps et boiteux depuis sa jeunesse, ne per
met pas de trancher la question et s'accorde aussi bien avec une version qu 'avec
l'autre. Cependant, il considère la version de la torture comme la plus vraisem
blable (cf. en revanche le scepticisme de Colardeau 22, p. 6 n. 1). A son avis, si
Épictète fait référence si souvent au thème du maître ou du tyran qui veutoppri
mer quelqu'un au moyen de la torture, de la prison , de l'exil, etc ., si la liberté est
un sujet central chez lui, c 'est bien entendu parce que c 'était un lieu commun
E 33 ÉPICTÈTE 115
dans le stoïcisme, mais c'est peut-être aussi parce qu'il avait gardé toujours un
sentiment très vif de sa propre expérience personnelle (cf. Entretiens I 18, 17).
Oldfather va même jusqu 'à suggérer que le silence des autres sources sur cet épi
sode de torture serait dû à un chrétien apologiste sans scrupules qui aurait cher
ché ainsi à priver ce martyr païen de son comportement héroïque ( cf. aussi
Hijmans 36 , p . 8 ).
En ce qui concerne la question de la torture , Souilhé63,t. I, p. IV sq ., rappelle
aussi le témoignage d'Épictète lui-même (Entretiens 19, 29) selon lequel Muso
nius voulait préparer l'âme de son disciple à subir la violence de son patron. Par
ailleurs, il imagine qu'Épaphrodite a dû se laisser séduire assez vite par la force
d'âmede son esclave, étant donné qu 'il lui permit, avant de lui donner la liberté,
de suivre les leçons de Musonius, le plus grand philosophe stoïcien de l' époque
(cf. aussi Entretiens I 7 , 32). Épictète peut avoir été son disciple lorsque Muso
nius est revenu de l'exil après la mort de Néron en 68/69, comme le soutient
Schenkl 52, p . XIX sq., XXXII (cf. Croiset 21, t. V , p. 458 sq ., quiplaçait plutôt
ces études d'Épictète auprès de Musonius sous le règne de Néron ). Cependant,
Souilhé 63, t. I, p. VI, suggère que Musonius,malgré la faveur dont il jouissait
auprès de Vespasien , a pu se voir contraintde quitter encore une fois Rome après
le décret général d'expulsion des philosophes édicté sous cet empereur, ca 71
75, pour revenir seulement avec l'avènement de Titus en 79. D 'après lui, c'est
sans doute alors qu'Épictète fut son disciple (cf. aussi Jordán de Urries 64, t. I,
P . XXI).
Jordán de Urríes 64, t. I, p . XIII, suggère que le fait qu'Épaphrodite ait permis à Épictète de
se procurer une formation philosophique n 'est pas nécessairement un signe de bienveillance à
l'égard de son esclave,mais peut répondre au fait qu 'il souhaitait en faire le pédagogue de ses
enfants, en raison de son défaut physique, qui l' empêchait de réaliser d 'autres travaux, et en
raison de son intelligence éveillée (cf.aussi Ortiz García 115, p. 10 , 363 n . 169).
L 'influence que les enseignements de Musonius exercèrent sur Épictète fut
sans doute décisive (cf. Entretiens I 1, 27 ; 7, 32 ; 9, 29 ; III 6 , 10 ; 23, 29 ; et fr. 4
8 Schenkl). A ce sujet, voir Hijmans 36 , p . 3 - 7 ; 137 R . Laurenti, « Musonio e
Epitteto » , Sophia 34 , 1966 , p. 317 -335 ; et 138 Id ., « Musonio ,maestro di Epit
teto » , ANRW II 36, 3, 1989, p . 2105-2146. On n 'a pas de raison de penser que
Musonius n'a pas été son seulmaître . En effet, comme le remarque Souilhé 63,
P. VI sq., on peut expliquer certains aspects cyniques de la pensée d'Épictète
« par la formeâpre et un peu rude que le Stoïcisme romain de ce temps avait em
pruntée aux Cyniques » sans qu 'on ait besoin d 'imaginer, comme l'avait fait
Bonhöffer 19 , p. IV (cf. aussi Hirzel 20 , t. II, p . 246 n. 1), qu 'Épictète a été
disciple d 'un cynique avant d'entendre Musonius.
L 'affranchissement d'Épictète a dû se produire avant 94, car, commenous
l'avons dit plus haut, il fut inclus dans le décret d'expulsion des philosophes
appliqué sous Domitien . C 'est à ce moment que le philosophe se rendit en exil à
Nicopolis en Épire (cf. Aulu -Gelle XV 11 = test. 10 Schenkl; Pline le Jeune,
Lettres III 11 ; Lucien , La mort de Peregrinus 18 = test. 16 Schenkl; Tacite , Vie
d 'Agricola 2 ; Simplicius, loc. cit., test. 51 Schenkl). Il y créa une école de philo
sophie , sans doute dans sa propremaison. C ' était une école ouverte , qui semble
116 ÉPICTÈTE E 33
avoir été fréquentée par un très grand nombre de disciples (ou d 'auditeurs plus
ou moins occasionnels) et avoir joui d 'une grande renommée (cf. Hijmans 36 ,
p . 2 sq. ; Brunt45, p. 20 sq.). C ' est peut-être dans le cadre de cette école que doit
se placer son entretien avec Hadrien (cf. S. H . A ., supra ).Mais certains critiques
considèrent que cette visite a eu lieu à Athènes, en supposant un voyage
d 'Épictète dans cette ville . Schenkl 52 , p. XXVI, croit confirmer cela à l'aide de
deux passages: Lucien, Vie de Démonax 55 (test. 14 Schenkl), où l'on raconte
qu ’Épictète s'est adressé un jour à Démonax ( D 74 ] (qui passa sa vie à
Athènes) ; et Flavius Philostrate , Lettres69, p. 485 sq. Hercher (à Épictète = test.
23 Schenkl), où l'on déclare que les applaudissements reçus à Athènes ont dû
provoquer chez Épictète une stupeur comparable à celle que produisent les cym
bales retentissantes chez les initiés aux mystères de Rhéa, c'est-à-dire les
mystères d 'Éleusis. Stellwag 127 , p . 5, accorde foi elle aussi à ce dernier rensei
gnement, et elle croit pouvoir alléguer en guise de confirmation le témoignage
des Entretiens eux -mêmes (cf. I 4 , 30 ; III 22 , 78). Oldfather 55, t. I, p. X , penche
pour l'authenticité de ce voyage athénien , bien qu 'il reconnaisse que les pas
sages allégués par Schenklne sont pas probants, tout comme Souilhé 63, t. I,
p. IX , qui cependant considère comme plus probable l'hypothèse d'un voyage
d 'Hadrien à Nicopolis . Enfin , Hijmans 36 , p. 1 sq., tout en fixant la visite
d 'Hadrien à Nicopolis en 125, conclut que la seule chose que l'on puisse affir
mer est qu'il a existé un rapport personnel entre Hadrien et Épictète.
[Épictète fut honoré, au sanctuaire d'Épidaure , d'un hermès (IG IV 12, 683)
élevé par un ami qui n'a pas jugé nécessaire de préciser son nom . Cette omission
ne peut s'expliquer que si le donateur était d'un rang suffisamment élevé pour ne
pas être astreint aux usages qui s'imposaient aux dédicants ordinaires : Blinken
berg (NT 3, 1895 , p. 157) a sans doute eu raison de reconnaître en lui l'empereur
Hadrien . BERNADETTE PUECH.]
Lucien , Démonax 3 (= test. 13 Schenkl) prétend que le cynique Démonax a
fréquenté le philosophe. En réalité , on ne peut reconnaître aujourd 'hui avec
certitude qu'un seul disciple d'Épictète , Arrien de Nicomédie ( en Bithynie ),
l'homme politique et écrivain qui préserva ses enseignements. Voir S . Follet,
notice « Arrien de Nicomédie » A 425 , DPhA I, 1989, p. 597 -604 . Schenkl 52,
p. XXVIII, se représente Arrien comme disciple d'Épictète dans les premières
années du règne d 'Hadrien (117 -120), à l'encontre de Colardeau 22 , p. 14, qui
suppose qu 'il entretint un rapport plus discontinu avec son maître (cf. aussi
139 E. Schwartz , art. « Arrianus» 9 , RE II 1 , 1895, col. 1230-1247, notamment
p . 1230, et Croiset 21, t. V , p. 459, qui songentdéjà au règne de Trajan : 98 - 117).
En tout cas, c 'est sans doute pendant sa jeunesse , avant sa nomination comme
consul ca 130 , que doit se placer le séjour, plus ou moins prolongé, d'Arrien à
Nicopolis auprès d'Épictète , lorsque celui-ci était déjà relativement âgé (cf.
supra). On a daté ce séjour ca 108, à partir de la mention dans les Entretiens III
7, ainsi que chez Pline le Jeune, Lettres VIII 24, 2 -4 , d 'un épicurien du nom de
Maximus comme corrector des cités libres, qui aurait fréquenté l'école
d'Épictète (cf. DPha A 425, p. 598).
E 33 ÉPICTÈTE 117
Sur l'école d 'Épictète et la valeur de sa pédagogie, voir 140 J. Bruns, De schola Epicteti,
Kiel 1897 ; Colardeau 22, p . 71-113 ; 141 L . Weber, « Lamorale d 'Épictète et les besoins pré
sents de l' enseignement moral» , RMM 1905, p . 830-858 ; 1906 , p . 342-360 ; 1907, p. 327
347 ; 1909, p . 203-236 ; 142 E . A . Abbott, « From the lecture room of Epictetus» , Expositor 1,
1906 , p . 132- 143 ; Halbauer 24, p .43-56 ; 143 W . Scherer, Epictets pädagogische Bedeutung,
Prog. Regensburg 1916 ; Hijmans 36 , p . 92 -102 ; 144 P . Zarrella , « La concezione del disce
polo in Epitteto » , Aevum 40 , 1966 , p . 211-229 ; 145 J.N . Sevenster, « Education or conver
sion. Epictetusand the Gospels » , NT 8 , 1966, p . 247-262.
Brunt 45, p . 20 sq., analyse en détail la composition de l'auditoire d'Épictète, et il constate
que celui-ci recrutait ses élèves parmi les aristocrates grecs locaux, afin sans doute de leur
apprendre à remplir les devoirs inhérents à leur situation sociale (cf. Cizek 43), mais aussi à
regarder avec indifférence les biens extérieurs, le pouvoir et la renommée, et à ne valoriser que
les biensmoraux tirés de la liberté intérieure. En analysant l'æuvre d 'Arrien , qui fit une car
rière politique, Brunt observe que les enseignements d 'Épictète ne s' y trouvent pas toujours
réalisés. En effet, quelle que soit l'influence qu 'Épictète a exercée sur sa vie, le système de
valeurs qu 'adopte Arrien dans l'Anabase d 'Alexandre ne correspond pas à celui que préconi
sait son maître . Par exemple, son interprétation d' Alexandre comme un homme et un roi admi
rable n 'est pas stoïcienne, car les vrais stoïciens avaient tendance à condamner Alexandre , et
même l' Alexandre idéalisé d ' Arrien .
Cf. aussi 146 R . Laurenti, « Classi e ascesa sociale in Epitteto », Index 13, 1985, p. 407
424.
Épictète mena toujours une vie de simplicité. A Rome, il n 'avait nul besoin
de fermer la porte de sa maison , où l'on ne trouvait qu 'un lit de paille et une
natte de jonc pour dormir (cf. Simplicius, op. cit., test. 47 Schenkl). De la fruga
lité de sa vie à Nicopolis rend aussi témoignage l'anecdote selon laquelle un jour
on lui vola une lampe de fer, ce qui lui fit comprendre qu' il devait la remplacer
par une autre de terre (cf. Entretiens I 18, 15 ; 29, 21). C 'est sans doute cette
anecdote qui donna lieu plus tard à la légende racontée par Lucien , Contre un
ignorant 13 (= test. 15 Schenkl), selon laquelle, après la mort d' Épictète , un
admirateur acheta cette lampe de terre trois mille drachmes, dans la pensée peut
être - pense Lucien - que s'il l'utilisait la nuit pour lire, il hériterait sans effort
de la sagesse d' Épictète pendantson sommeil et pourrait devenir aussi admirable
que lui. Enfin, l' image que nous pouvons nous faire de l'aspect extérieur
d 'Épictète est celle d'un vieillard boiteux (cf. supra ) aux cheveux blancs, qui
porte la barbe et le manteau du philosophe (cf. Entretiens III 1, 24 ), mais se pré
sente toujours propre et soigné, pour ne pas déranger les gens avec qui il se
trouve (Entretiens IV 11, 13- 14).
Épictète resta sans doute célibataire pendant toute sa vie. A la différence des
épicuriens, il était loin de rejeter l'institution du mariage (cf. Entretiens I 23),
mais il considérait que le vrai philosophe (le vrai « cynique » ) devait plutôt
s'abstenir du mariage et de l'éducation des enfants, car ces tâches pouvaient le
distraire de sa plus haute mission (cf. Entretiens III 22, 67 sqq.). Lucien, Démo
nax 55, affirme qu 'Épictète conseillait à Démonax de créer une famille , ce à quoi
le cynique répliqua ironiquement: « Eh bien , Épictète, donne-moi donc une de
tes filles» . D 'après Simplicius, test. 52 Schenkl, Épictète passa seul la plus
grande partie de sa vie,mais , lorsqu 'il était déjà vieux, il prit une femme comme
nourrice d 'un enfant qu 'un de ses amis allait exposer à cause de son indigence et
qu'il adopta. Cela ne veut pas dire qu'il se soitmarié. Le verbe employé (stap
118 ÉPICTÈTE E 33
kráſeto ) n'autorise pas à le supposer, mais veut dire simplement qu'il « prit
chez lui» cette femme commenourrice de l'enfant (italdiou tpopóv). Toutefois,
Hijmans 36 , p . 2 n . 6 , considère qu 'on ne peut pas savoir clairement si la femme
en question a joué le rôle de servante ou d' épouse (cf. Colardeau 22, p . 11 sq.) .
C . Euvre.
A l'instar de Socrate , qu 'il admirait (cf. infra ), Épictète ne publia jamais
aucun écrit. Son enseignement était purement oral, et il nous serait aujourd 'hui
pratiquement inconnu sans les æuvres de son disciple Arrien . Voici en fait ce qui
nous en est parvenu :
(a ) Un recueil en quatre livres de leçons, connu dans nos manuscrits sous le
nom de Alatpißaí (Entretiens = Schenkl 52, p. 7-454 ). Ces entretiens sont en
partie des discours avec un interlocuteur fictif , en partie des dialogues socra
tiques et surtout des discours à mi-chemin entre les uns et les autres. Notre
recueil est précédé par une lettre -préface d' Arrien à un certain Lucius Gellius
(MG 11), dans laquelle Arrien présente les textes qu 'il publie de son maître
comme une reproduction fidèle de ses notes de cours (Únouvnuata ). Il y
affirme que ces notes, bien qu 'il les ait rédigées pour lui-même, ontcommencé à
circuler publiquement à son insu et contre sa volonté , ce qui le décida à les
publier lui-même afin de sauvegarder les discours d 'Épictète tels que celui-ci les
avait prononcés.
(b ) Un abrégé de l'ouvrage précédent, connu sous le nom d’ ’Eyxelpídlov
(Manuel: Schweighäuser 51, t. III, p. 1-62,notes p . 137- 174 ; Schenkl 52, p . 5 *.
38* ). D 'après Simplicius , op. cit., préface , test. 3 Schenkl, cet abrégé fut publié
aussi par Arrien, qui, comme lui-même le disait dans la lettre-dédicace (perdue)
à Massalenus, y voulait condenser les parties les plus significatives et les plus
frappantes des enseignements d ' Épictète. Sur Massalenus , voir I. Hadot 172,
p. 142 n . 1, qui suggère la possibilité de l'identifier avec C . Ulpius Prastina Paca
tusMessalinus, PIR ? M 512 .
(c ) Une série de fragments conservés par quatre sources ( cf. Schweighäuser
51, t. III, p.63-138 , notes p . 175-216 ; Schenkl 52, p. 455-475) :
- de l'Anthologie de Jean Stobée , si on laisse de côté ceux qui sont douteux
ou manifestement faux , on tire vingt-trois fragments (fr. I-VIII , XI-XXV , IX , X
Schenkl) ;
- des Nuits Attiques d ' Aulu -Gelle , on en tire deux (fr. IX , X Schenkl);
- de l' écrit Contre les Gentils d’Arnobe (ca 300 ), on en tire un (fr. Xa
Schenkl) ;
- des Méditations de Marc- Aurèle , on en tire six ( fr. XXVI-XXVIIIa Schenkl,
XXVIIIa Oldfather). L ' attribution à Épictète du fragment XXVIII est due à
147 H . Fränkel, « Ein Epiktetfragment» , Philologus 80, 1924, p . 221.
D 'après l'analyse de Schenkl 52, p. XLVII ( cf. P . XLI sqq.), ces fragments
proviennent finalement soit des Entretiens eux-mêmes (sans doute , comme on le
verra, dans une édition plus complète que celle que nous connaissons aujour
E 33 ÉPICTÈTE 119
d 'hui), soit de la recension du Manuel faite par Simplicius pour son commentaire
(cf. infra). Schenkl exclut les fragments XIII, XV, XVI, et peut-être XIV : ils
proviennent d'un ouvrage intitulé ( chez Stobée) Mémorables d 'Épictète ('Etl
xtńtov ánouvnuoveúuata ), qu'il estime anonyme, mais qui en réalité ne
semble pas différent des Entretiens (cf. infra). Il exclut aussi le fragment XXIX ,
qui lui semble appartenir à ce qu'on appelle la Paraphrase chrétienne du Manuel
(cf. infra). Enfin , d 'après son analyse, les numéros XVII-XXI, XXIII-XXV,
peuvent provenir aussi bien des Entretiens que du Manuel (dans la recension de
Simplicius).
Tous ces fragments sont considérés aujourd'hui comme authentiques par la
critique. D 'autres ont été considérés depuis Schenkl 52, p. XLVII, comme dou
teux ou faux (« fragmenta dubia et spuria » = Schenkl52, p. 462-475), à savoir:
les fragments XXX -XXXIV Schenkl, tirés de Stobée ; le fragment XXXV
Schenkl, tiré du Floril. cod. Par. 1168 [501 E.) ( cf. Stobée III 6, 58); enfin , le
fragment XXXVI Schenkl, tiré du Pseudo-Antonios,Melissa I 21.
Cf. 148 A . Elter, « Neue Bruchstücke des loannes Stobaeus » , RHM 47, 1892,
p. 130 -137 ; 149 H . Schenkl, « Die epiktetischen Fragmente. Eine Untersuchung
zur Überlieferungsgeschichte der griechischen Florilegien » , SAW 115, 1887
(1888), p. 443-546 (publication séparée: Wien 1888).
Par ailleurs, il y a des fragments prétendumentd'Épictète dans plusieurs recueils tardifs :
- le recueil appelé par Schenkl 52, p. 476 -492, Gnomologium Epicteteum Stobaei, formé
par des sentences du cod. Vaticanus Graecus 1144 (XVe s.), fol. 209v, qui dérivent, d 'après
Elter 148 , p . 130 sqq ., de la première partie de l'Anthologie de Stobée, livres I-II (= Schenkl
52, p. 476 -477), ainsi que par des sentences tirées de la deuxième partie de cette Anthologie,
livres III- IV (= Schenkl 52, p. 478-492) ;
- deux recueils attribués à un personnage mystérieux de nom de Moschion (Mooylovos
yvõual = Schenkl 52, p .493-494 ; etMooylovos ÚnoOñxal = Schenkl 52, p . 495-496 ) :
cf. 150 A . Elter, Gnomica II, Epicteti et Moschionis quae feruntur sententiae cum corollario ,
Leipzig 1892 ; 151 P. Derron , Pseudo-Phocylide. Sentences, texte établi, traduit et commenté,
CUF, Paris 1986,p.XXXVI sq.;
- le florilège de Démocrite-Isocrate -Épictète ( cf. 152 C . Wachsmuth , Studien zu den grie
chischen Florilegien , Berlin 1882, réimpr. Amsterdam 1971, p. 121- 122, 162 -216 ; 153 G .
Matino, « Una nuova recensione dello gnomologio democriteo - epitteteo » , BollClass 2 , 1981,
p . 104 -119).
Comme le remarque Spanneut 8, col. 843 sq., les fragments rapportés dans ce genre de
florilèges (Spanneut en mentionne aussi d 'autres) ne peuvent pas être mis au compte
d'Épictète sans autre examen : ils sont d 'inspiration stoïcienne et rendent parfois un son
épictétéen , mais il ne semble pas que les compilateurs soient jamais remontés à Épictète .
En général, sur la tradition gnomologique d'Épictète , cf. 154 D .M . Searby, Aristotle in the
Greek gnomological tradition, coll. « Acta Universatis Upsaliensis . Studia Graeca Upsalien
sia » 19, Uppsala 1998 , 314 p.
Les titres différents dont usent nos sources pour désigner l'æuvre d ' Épictète
ont amené les critiques modernes à se poser la question de l'unité de cette
euvre. Aujourd'hui on s'accorde à penser que les enseignements d'Épictète
(nous laissons de côté pour lemoment la question du rôle qu ’Arrien a joué dans
leurmise en forme littéraire ) ne constituaient qu'un seul ouvrage (si on laisse de
côté le résumé du Manuel), à savoir : l'ouvrage qui nous est parvenu (plus ou
120 ÉPICTÈTE E 33
moins complet) dans nos manuscrits sous le nom de Alatpißaí (Entretiens).
Simplicius, op. cit., préface, parle aussi des Alatpiſal d'Épictète. Il dit qu ’Ar
rien , dans la lettre qui précédait le Manuel, déclarait avoir extrait ce résumé éx
tõv 'Enixthtov hóywv,mais Simplicius ne semble pas distinguer entre ces
λόγοι ou discours et les Διατριβαί. Dans la lettre a Lucius Gellius qui nous est
parvenue comme préface de nos Entretiens, Arrien parle aussi de « discours » . Il
y emploie aussi le terme únouvnuata pour faire référence à ses notes de cours
qui seraient le matériau à partir duquel il publie les discours de son maître. Ce
terme est repris par Marc-Aurèle 1 7 (= test. 11 Schenkl: tots 'Enlmtntelous
Únouvňuaolv ). Quant à Aulu -Gelle, témoin de premier ordre , il parle des
dissertationes d'Épictète ordonnées (I 2 = test. 8 Schenkl) ou composées (XVII
19, 5) par Arrien , et il traduit par dissertationes le grec dlaréEELC (XIX 1). De
son côté, le philosophe néoplatonicien Damascius (V -VI), Vie d 'Isidore, fr. 109 ,
p. 85 , 14 Zintzen (= la Souda, loc. cit., p. 365, 27 Adler ; Epitoma Photiana 58 =
Photius, Bibliothèque, cod . 242, 338 b, p. 18, 17 sq. Henry = test. 42 Schenkl),
introduit un nouveau nom , lorsqu'ilmentionne les oyoral d'Épictète.
Malgré la diversité des noms (Platpiſal, abyol, útrouvňuata, dlaréEELS
dissertationes, oxonal), rien n' empêche de supposer que tous ces auteurs font
référence à un seul et même recueil d'Épictète . Cependant, la question devient
plus compliquée si on tient compte des témoignages de Stobée et de Photius. Le
premier introduit les extraits qu'il choisit pour son Anthologie de façon très
variée : le plus souvent il se contente du simple en -tête 'Enixthtou ou éx TOŨ
’Emixtútov (cf. parfois aussi 'Applavoũ 'Enlxtntelov ou ’Applavoő), mais il
emploie quatre fois le terme ánouvnuoveúuata (Èx tōv 'Enlxtútov ánou vn
Movevuátwv) et une fois le termenpotpentixai ouiríal (éx tõv ’Applavoû
npotpentixõv ducacõv).Mais c'est le témoignage de Photius, Bibl. cod. 58,
17 b, p . 52, 17 - 20 Henry (= test. 6 Schenkl), qui a le plus embrouillé la question ,
puisqu 'il dit qu ' Arrien a écrit les Alatpißaí (Entretiens) de son maître Épictète ,
« en huit livres (je les connais), et douze livres d ''Ouidial (Conversations) du
même Épictète » . La Souda, test. 21 Schenkl, prétend aussi qu'Épictète a produit
beaucoup d'écrits (Ěypaqe nomrá ).
En s'appuyant sur ces témoignages, mis en rapport avec les autres signalés
plus haut, plusieurs critiques ont émis des hypothèses différentes:
155 H . Schenkl, « Zur Geschichte des epiktetischen Nachlasses », dans Verhandlungen der
41. Versammlung deutscher Philologen und Schulmänner in München, 1891, Leipzig 1892,
p . 195 -202 , formule l'hypothèse selon laquelle Arrien a écrit en tout (outre le Manuel) douze
livres d ''Anouvnuoveúuara (Souvenirs ) d 'Épictète , dont les quatre premiers portaient le titre
Alatpißai (Entretiens), les quatre suivants celui de AlaNÉEELS, et les quatre derniers celui
d' 'Oucial (Homélies). De toute évidence, cette hypothèse se révèle arbitraire. Schenkl 52,
P. XLVII, la modifiera lui-même plus tard : il distinguera alors, d 'un côté , les Alatpiſal, en
huit livres (selon Photius), dont nous ne conservons que la moitié (aux livres disparus il fau
drait attribuer les fragments I- X ; XXVI-XXVIII ; et peut-être XVIII , XXII et Xa) ; et, de
l'autre, les 'Oucaiai, en douze livres (encore selon Photius), auxquels il faudrait attribuer les
fragments XI et XII. Quant aux 'Anouvnuovevuara, Schenki les considère maintenant
comme desnotes remaniées par d'autres écrivains.
E 33 ÉPICTÈTE 121
A son tour, d 'Agostino 28 formule l'hypothèse suivante : outre les Alatpiſal, peut-être en
huit livres, dont nous possédons les quatre premiers, il faut admettre l'existence d 'une collec
tion d ' Oulniai, probablement en douze livres, ainsi que d 'un ouvrage intitulé AlaréEELS
( « Conversazioni» ), qui comprenait au moins cinq livres, selon le témoignage d 'Aulu -Gelle
XIX 1, 14 . Par ailleurs, d 'Agostino identifie les 'Anouvnuoveúpata cités par Stobée avec les
Alatpuſai, dans la pensée qu 'il est facile d 'expliquer le passage de la désignation primitive de
υπομνήματα a celle d'απομνημονεύματα, et que ce titre rapprochait en outre l' euvre
d 'Arrien de celle de son modèle, Xénophon (comme on sait, Arrien était appelé le « nouveau
Xénophon » ).
Finalement, Stellwag 127 , p . 714 , s'est prononcée aussi sur cette question d'un point de
vue assez original, que nous trouvons rapporté en détail chez Souilhé 63, t. I, p . XV -XVII.
D 'après l'historienne hollandaise, les Alatpißai n 'ont pas été rédigées par Arrien mais par
Épictète lui-même, car un disciple, même s'il avait sténographié les paroles de son maître
(cf. infra), n'aurait pu les reproduire d 'une façon aussi détaillée, aussi vivante. En réalité,
Epictète, d 'après Stellwag, loin de se tenir à un texte fixe, a soumis ces Alatpißai à un pro
cessus de remaniement constant. Par ailleurs, d 'après elle, c'est à tort que la lettre à Lucius
Gellius a été jointe aux Alatpißaí, comme si elle en était la préface. Voici à ses yeux ce qui
s'est passé : Arrien rédigea de son côté des commentaires sur Épictète (les 'Anouvnuo
veúuara ), qu 'il communiqua seulement à ses amis ; plus tard , lorsqu 'il a vu ces commentaires
publiés à son insu et contre sa volonté, il a écrit la lettre à Lucius Gellius pour expliquer ses
intentions ; enfin , les éditeurs postérieurs des Alatpiſal ont inséré au début de cet ouvrage
une lettre qui se rapportait en réalité à un autre ouvrage , aux 'Anouunuoveúuara d 'Arrien .
Comme preuve de cette interpolation tardive, Stellwag allègue la place anormale que la lettre
en question occupe dansnosmanuscrits, entre la table desmatières du premier livre et le pre
mier chapitre .
Souilhé63, t. I, p. XVI sq., conteste cette hypothèse, bien qu'il reconnaisse qu 'elle est très
séduisante . A son avis, l'affirmation de la Souda selon laquelle Épictète a beaucoup écrit ne
peut pas être prise au sérieux, car la Souda n ' est jamais une autorité par soi. Par ailleurs,
Souilhé ne croit pas impossible « qu 'un disciple intelligent, industrieux et rempli d 'une
affectueuse admiration pour son maître, soit capable de prendre au vol, pour ainsi dire, les
moindres paroles qu 'il entend » . En revanche, si on envisage les Entretiens comme les notes
réunies par Epictète en vue de ses leçons, on ne comprendrait pas que l'auteur ait toujours
adopté la troisième personne pour introduire ses propres développements. Il considère aussi
comme peu probable qu'Épictète ait eu l' intention de publier un jour ses notes, étant donné
son scepticisme sur la valeur éducative des textes écrits (cf. par exemple Entretiens I 1, 23
s99. ; 4, 7 sqq.). Finalement, Souilhé nie qu 'on puisse aujourd 'hui tirer une conclusion
quelconque de la place inhabituelle que la lettre d 'Arrien occupe dans nos manuscrits.
En réalité, la plupart des critiques admettent depuis longtemps que les divers
titres de la tradition font référence à un même ouvrage d' Arrien :
Cf. Upton 50, t. II, p. 4 ; Schweighäuser 51, t. II, p. 11 sq.; Asmus 17, p. 26 sqq.; Renner
23 , p. 56 -67 ; Zeller 26 , t. III 1, p . 766 sq. n . 2 ; Colardeau 22, p . 20 -23 ; Croiset 21, t. V ,
p . 460 sq. n . 2 ; Oldfather 55 , t. I, p. XII ; Souilhé 63, t. I, p. XVII-XIX ; Spanneut 10 , col. 602 ;
Jordán de Urries64, t. I, p. LXXXV.
Il faut admettre cependant que nos Entretiens sont incomplets, comme l'indi
quent les fragments qui ne correspondent à aucun de nos quatre livres (cf. supra),
ainsi que plusieurs passages du Manuel qui ne correspondent, eux non plus, à
aucun de ces livres. Par ailleurs, Aulu -Gelle XIX 1 traduit en latin un passage
qu'il dit emprunté au livre V (= fr. IX Schenkl).
Une autre question importante relative à l'ouvrage concerne le rôle qu’Ar
rien a joué dans la rédaction des Entretiens. A ce sujet, il est intéressant de
remarquer combien les critiques ont envisagé différemment la façon dont les
122 ÉPICTÈTE E 33
enseignements de Musonius et ceux d'Épictète nous sont parvenus. L 'hypothèse
selon laquelle le “ rapporteur” de Musonius (Lucius, Polion ou un autre ) ne s'est
pas borné à la reproduction sténographique mais a laissé une empreinte person
nelle dans son « mémorial » (ánouvnuoveúuata) et n 'a pas rejeté non plus la
composante plus ou moins légendaire ou idéalisante a été formulée déjà par
Hirzel 20, t. II, p. 244 sq., quirattachait le cas de Musonius à une façon de faire
typique chez les socratiques.
Cf. aussi 156 P. Wendland, « Philo und die kynisch -stoische Diatribe » , dans P . Wendland
et O . Kern , Beiträge zur Geschichte der griechischen Philosophie und Religion, Berlin 1895,
p . 1- 75 , notamment p .68 sq. ; 157 O . Hense, C . Musonii Rufi reliquiae, coll. BT, Leipzig
1905, réimpr. 1990, p. IX sqq. ; 158 P . Lejay, Euvres d 'Horace, texte latin avec un commen
taire critique et explicatif, des introductions et des tables, t. II: Satires, Paris 1911, réimpr .
Hildesheim 1966 , p . XXX ; 159 K . von Fritz , art, « Musonius » 1 , RE XVI, 1933, col. 893 -897 ,
notamment col. 895 sq. ; 160 Cora E . Lutz , « Musonius Rufus : “ The Roman Socrates " > ,
YCIS 10, 1947, p . 1 -147, notamment p. 7- 13 ; 161 S . K . Stowers, The Diatribe and Paul' s
Letter to the Romans, coll. « SBL , Diss. Series » 57, Chico 1981, p . 54 , 58. 162 A . Jagu ,
Musonius Rufus : Entretiens et fragments, Introduction , traduction et commentaire, coll.
« Studien und Materialen zur Geschichte der Philosophie, Kleine Reihe» 5 , Hildesheim /New
York 1979, p . 10, établit une distinction entre l'intervention de Lucius (arrangement défor
mant les choses) et celle de Polion (reproduction exacte de la réalité).
On a envisagé de façon très différente la reproduction des diatribes d' Épictète
par son disciple Arrien : on a ainsi supposé que ce dernier se serait contenté de
sténographier fidèlement les propos d'Épictète , selon la thèse bien connue de
163 K . Hartmann , « Arrian und Epiktet» , NJA 15, 1905, p . 248 -275 , notamment
p . 257 , 274 sq. (cf. aussi Capelle 77 , p.69 sq.; Souilhé63, t. I, p. XI; 164 A . B .
Bosworth , « Arrian 's literary development» , CQ 22, 1972 , p. 183 ; Brunt 45 ,
p. 31 ; ou 165 D . Tsekourakis ,« TÒ OTOLYETO TOŨ diałóyou orNU XUVLXOOTWlXN
“ Platpißń " » , Hellenica 32, 1980, p.61-78, notamment p. 72 sq.). La lettre-dédi
cace à L . Gellius dans laquelle Arrien présente son édition semblerait confirmer
cette interprétation , car Arrien y affirme (cf. supra) qu 'il publie ses notes de
cours (únouvnuata ) telles quelles, sans aucun souci proprement littéraire .
En revanche, 166 Th.Wirth , « Arrians Erinnerungen an Epiktet » , MH 24,
1967, p . 149-189 et 197-216 , soutient que les textes d 'Épictète qui nous sont
parvenus ne répondent pas à de prétendus sténogrammes d 'Arrien mais à ses
ánouvnuoveúuata littéraires, appartenant à la même tradition que les Mémo
rables de Xénophon (cf. Hirzel 20 , t. II, p. 249 sq.). Il affirme qu 'Arrien a opéré
une sélection dans les dóyol de son maître et a réuni desmorceaux séparés dans
le temps, en soumettant en général le matériel à une activité littéraire très déve
loppée, si bien qu 'on devrait considérer les Entretiens comme son æuvre plutôt
que comme celle d'Épictète (p. 215). Enfin , Wirth interprète les déclarations
d'Arrien dans la lettre-dédicace (à savoir, qu'il reproduit littéralement les ensei
gnements oraux du maître et s'excuse , par conséquent, de ne pas les présenter
d'une façon plus polie ) comme de simples topoi littéraires visant à légitimer
l'édition et à la présenter de façon modeste, par souci de captatio benevolentiae
(cf. Billerbeck 65, p. 5 n . 25 ).
E 33 ÉPICTÈTE 123
167 S .R . Slings, « Epictetus en Socrates: Kennis, deugd en vrijheit » (résumé
en anglais ), Lampas 16 , 1983, p .65-85, ainsi que 168 S. L . Radt, « Zu Epiktets
Diatriben » ,Mnemosyne 43, 1990 , p. 364- 373, se sont opposés radicalement à la
thèse de Wirth 166 . L 'argument principal allégué contre cette thèse et en faveur
de la thèse de Hartmann 163 est le fait que les Entretiens sont écrits en koinè,
tandis qu ' Arrien utilise le dialecte attique dans ses propres ouvrages (cf. Millar
40 , p . 142).Cependant, 169 J. M . Floristán Imízcoz, « Arriano, aticismo y koiné,
I: Fonética y morfología », CFC 4, 1994 , p. 161- 184, a constaté que certains
traits de la langue littéraire d'Arrien (en dehors des diatribes) ne correspondent
pas aux normes attiques que l'auteur veut imiter mais à une koinè réelle (cf.
170 Id . « Arriano, aticismo y koiné, II : Sintaxis » , CFC 5, 1995, p. 91- 141).
Enfin , la thèse de Wirth 166 a été reprise d 'une façon nuancée par 171 Ph. A .
Stadter, Arrian of Nicomedia, Chapel Hill 1980 , p . 26 -28 , qui reconnaît
l'existence partielle de la fiction dans le rapport d'Arrien , en expliquant qu 'Ar
rien emploie ici une langue et un style différents parce qu 'il veut imiter Épictète ,
qu'il avait connu très étroitement (cf. Hershbell 4 , p . 2152 sq.; et DPHA A 425,
p. 602 ; 172 I.Hadot, Simplicius. Commentaire sur le Manuel d 'Épictète. Intro
duction et édition critique du texte grec, coll. « Philosophia Antiqua » 66 , Leiden
1995, p . 153 sq. n. 8). Nous nous rangeons aussi à cet avis. En effet, entre les
positions extrêmes défendues par Hartmann 163 (reproduction sténographique
exacte) et Wirth 166 (fiction pure) sur le rôle joué par Arrien dans la trans
mission des enseignements d 'Épictète , il semble raisonnable de chercher le juste
milieu . Il y a sans doute dans nos Entretiens d'Épictète beaucoup de fiction litté
raire et d 'idéalisation de la part d 'Arrien . Donc, nous pouvons affirmer que leur
fixation littéraire est bien l'euvre de ce dernier.
La considération du genre de l'euvre d'Épictète -Arrien nous place devant la
question fort discutée de la « diatribe » . La « diatribe» comme genre littéraire est
une construction moderne. Le point de départ théorique se trouve dans 173 U .
von Wilamowitz-Möllendorff, Antigonos von Karystos, coll. « Philologische
Untersuchungen » 4 , Berlin 1881, réimpr. Berlin /Zürich 1965, p. 292-319 (Ex
kurs 3 : « Der kynische Prediger Teles» ). Bien qu 'il ne parle pas encore de « dia
tribe » . Wilamowitz décrit un genre qui ne manque pas de cohérence et qui peut
très bien être illustré par les fragments de Télès (1114) : le genre de la leçon ou de
la prédication morale (sur les thèmes de la « philosophie populaire » ), composée
en prose (avec des citations ou des parodies de vers), opposant des arguments à
un « adversaire fictif» (réplique purement fonctionnelle) et prononcée devant un
public d 'auditeurs par un philosophe (« maître» ) qui n 'enseigne pas dans le
cadre d'une école proprement dite. Cela dit, la notion moderne de « diatribe »
telle qu 'elle fut formulée ensuite par les philologues, notamment allemands, est
devenue de plus en plus un fouillis qui s'applique à des ouvrages appartenant
aux genres littéraires les plus divers , en prose ou en vers ou en un mélange de
prose et vers. En effet, les philologues (ainsi O . Hense, R . Heinze, R . Bultmann ,
G . A . Gerhard ou J. Geffcken ) parlent de la « diatribe » d'une façon tellement
confuse qu 'il est pratiquement impossible de la défendre à proprement parler
124 ÉPICTÈTE E 33
comme un genre littéraire (cf. 174 A . Oltramare, Les origines de la diatribe
romaine, Thèse Lausanne, Genève 1926 ). En fait, cette notion moderne déve
loppée jusqu'à nos jours a fait l'objet de temps en temps, depuis Halbauer 24 ,
p. 1- 18, d'une critique plus ou moins radicale .
Halbauer remarque que tout ce que ses contemporains appellent « diatribe » ne
correspond pas du tout à ce que lemot grec dlatpißń désignait. C' est pourquoi il
juge nécessaire d'expliquer tout d'abord le sens ancien de ce mot. Laissant de
côté ses acceptions communes (qui font référence à l'idée d'« occupation du
temps » ) ainsi que son acception technique comme désignation d 'une figure
rhétorique (épimoné ou commoratio), le mot dlatpißń n 'avait, d'après Halbauer,
qu’un sens purement descriptif : il faisait référence de façon vague à l'école , ou à
l'activité pédagogique d 'un individu dans son rapport avec ses disciples ou avec
d 'autres gens, sans préciser ni la forme ou la méthode suivies (éristique dans la
Oláraels ou dialectique dans le diáoyos ) ni les contenus transmis ( éthiques,
musicaux , rhétoriques, etc .). Rien n 'indique que ce mot (cf. lat. diatriba) ait
acquis chez les Grecs anciens un sens technique comme genre littéraire. Tout au
plus pouvait-il faire référence aux écrits destinés à cette activité pédagogique ou
issus d'elle .
De ce point de vue (repris récemment par Stowers 161), Halbauer distingue
divers genres de « diatribes» , selon la méthode pédagogique suivie par chaque
philosophe. On peut par exemple constater des différences entre Épictète et
Télès , philosophe d' inspiration cynique dont Stobée a conservé quelques frag
ments, tirés de propos qui ne sont pas désignés comme des « diatribes » ,mais
peuvent être considérés comme telles au sens ancien, car ils décrivent bien une
situation d 'enseignement. Une analyse rapide permet de constater que son auteur
se borne à appliquer comme méthode pédagogique l'éristique fondée sur la
fiction d 'un « adversaire » , qui, bien entendu, n 'est pas envisagé comme un
ennemimais comme quelqu'un qui doit être libéré de ses erreurs. En revanche,
les diatribes d'Épictète présentent une pédagogie plus riche, sans doute parce
qu 'elles sont issues d 'une réalité scolaire différente de celle de Télès, beaucoup
plus complexe et systématisée, installée dans un lieu fixe. Il faut tenir compte
aussi du fait que les enseignements de Télès nous sont parvenus sous la forme
d 'extraits anthologiques tirés d'un épitomé, tandis que ceux d 'Épictète ont été
rapportés par Arrien , qui a sans doute créé des compositions originales à partir
de ses souvenirs admiratifs des enseignements d 'Épictète (cf. supra ). En tout
cas, la méthode d'enseignement suivie par Épictète n 'est pas toujours celle de
Télès. En effet, tous les textes d' Arrien ne correspondent pas à la diatribe au sens
moderne initial (cf.Wilamowitz), bien qu 'ils correspondent tous à la diatribe au
sens ancien , ainsi que l'indique d 'ailleurs leur titre de Alatpißai dans la tradi
tion manuscrite : comme le remarque Halbauer 24, p. 10 , on constate d'ordinaire
chez Épictète une tendance à conjuguer la méthode pédagogique éristique avec la
méthode dialectique (socratique) à l'imitation de Platon (cf. p. 21 sqq.).
Halbauer 24, p. 47, établit dans les diatribes d 'Épictète la distinction formelle entre dia
lexeis à la manière de Télès (notamment Entretiens IV 2- 13 ; 1 12 ; et II 7), dialogues socra
E 33 ÉPICTÈTE 125
tiques (par ex. Entretiens I 11 ; II 4 ; II 14) et discours en général (Cóyou), à mi-chemin entre
les unes et les autres, catégorie à laquelle appartiennent la plupart des diatribes du philosophe
(cf. 175 B . Schouler, Libanios. Discours moraux. Introduction, texte et traduction , Paris 1973,
p . 31, et 176 Th . Schmeller, Paulus und die « Diatribe » . Eine vergleichende Stilinterpretation ,
coll. « Neutestamentliche Abhandlungen », N . F 19,München, 1987, p . 40 ).
Pour la critique de la notion moderne de « diatribe » et les essais de nouvelle définition ,
nous renvoyons aux développements de Stowers 161, p . 7 -78, Schmeller 176 , p . 1 -54, et
177 P . P. Fuentes González, Las diatribas de Teles. Estudio introductorio y comentario de los
textos conservados, Thèse Granada 1990 (microfilm 1991), p. 1-111 (résumé dans
178 P. P . Fuentes González , Les diatribes de Télès. Introduction, texte revu, traduction et
commentaire des fragments, coll. « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 23, Paris
1998 , Introduction, chap. VI, p . 44 -78).
L ' intention pédagogique etmoralisante qui préside aux Entretiens demande
une langue familière , vivante et spontanée, ainsi qu 'un style capable de captiver
les esprits des récepteurs du discours ( cf. Souilhé 63, t. I, p .LXVII-LXXI). Ces
qualités étaient admirablement bien représentées dans les discours d 'Épictète,
d 'après le témoignage de son disciple Arrien (cf. la Lettre à Lucius Gellius).
Cf. 179 J. Stuhrmann, De vocabulis notionum philosophicarum in Epicteti libris, Diss.
inaug. Ienens., Neustadt 1885 ; 180 R . Mücke, Zu Arrians und Epiktets Sprachgebrauch,
Progr. Nordhausen 1887 ; 181 Th . Colardeau , « Les citations et les allusions poétiques dans
Épictète » , AUG 13, 1901, p . 495 -514 ; Id . 22, p. 283 -337 ; 182 R . Renner , Das Kind. Ein
Gleichnismittel des Epiktets, München 1905 ; 183 P . E . H . Melcher, De sermone Epicteteo
quibus rebus ab Attica regula discedat, Diss. philologicae Halenses XVII 1, Halle 1906 ;
184 W . Scherer, « Das Gleichnis, ein Bildungsmittel bei Epiktet», BBG 53, 1917, p. 204 -209 ;
185 F . Umlauft, Gleichnisrede bei Epiktet, Diss. Wien 1948 ; 186 D . Szumska, « De dimi
nutivis apud Epictetum etMarcum Aurelium obviis» (en polonais avec résumé en latin ), Eos
54, 1964, p. 230-238 (cf. 187 P.Wendland, Quaestiones Musonianae. DeMusonio Stoico
Clementis Alexandrini aliorumque auctore, Berolini 1886 , p 10 n. 4 ; 188 H . von Müller, De
Teletis elocutione, Diss. Friburgi Brisigaviae 1891, p. 48 ; 189 F . Martinazzoli, « Aotáplov. I
diminutivi nello stile epitteteo, PP 3 , 1948, p . 262-268; Billerbeck 65 , p . 63) ; 190 H . W .
Pleket, « Toprós. A note on Epictetus III, 12, 10 » , Mnemosyne 23, 1970 , p . 304 -306 ;
191 G . Fatouros, « Neugriechisch bei Epiktet» , Glotta 49, 1971, p. 85 -92 ; 192 M . Kokolakis,
« Το δράμα του βίου εις τον Επίκτητον » , dans Φιλολογικά μελετηματα εις την αρχαίαν
Érinvixnv ypaquarelav, Athènes 1976 , p . 177 -185 ; 193 J. M . Floristán Imízcoz, « El tema
de futuro en Epicteto » , EClás 27 , 1985 , n° 89, p . 111-131 ; 194 Id., « Los modos verbales en
Epicteto . Sus usos sintácticos a la luz de los textos contemporáneos » ,Minerva 1, 1987, p. 93
116 .
D . Philosophie :
Épictète , comme les critiques modernes l'ont montré depuis Colardeau 22 et
Bonhöffer 18 et 19 , suit fidèlement l'orthodoxie stoïcienne, fondée sur les doc
trines de Zénon , Cléanthe et Chrysippe (cf. 195 J. P. Hershbell, « Epictetus and
Chrysippus» , ICS 18 , 1993, p. 139- 146 ), ainsi que de leurs disciples directs . En
effet, d'après P. Hadot48, p. 99 : « On peut dire qu 'Épictète se rattache à la tradi
tion la plus orthodoxe, celle qui, issueco de Chrysippe, passe, semble-t- il, par
Epici [ Ans205
Archédème (mA 307 ] et Antipatros ider),a sans aucune allusion à Panétius
est,Épictète
et Posidonius.» Qui plus est, en , est considéré
l, ce comme la source la plus sûre
que nous ayons du système stoïcien, du moins pour ce qui concerne la psycho
logie et l'éthique. En tout cas, il est considéré (avec Sénèque) comme le repré
sentant le plus important du stoïcisme impérial, ce qu'on appelle la « Nouvelle
Stoa » ,
126 ÉPICTÈTE E 33
Cependant il s'appuie aussi sur la pensée d 'autres philosophes non stoïciens
(cf. Hershbell 4 , p. 2153 -2157). Il faut remarquer notamment que les modèles
par excellence du sage sont pour Épictète Socrate et Diogène le Cynique, ce qui
en réalité n 'a rien d'étonnant, si on pense aux origines socratiques ou même
cyniques de la pensée de Zénon.
D 'après 196 F. Schweingruber, « Sokrates und Epiktet» , Hermes 78 , 1943,
p . 52 -79 , Épictète estparti du portrait de Socrate élaboré par les cyniques,mais il
en a adouci les traits d' après lesmodèles de Platon et de Xénophon. A son tour,
197 K . Döring, « Sokrates bei Epiktet » , dans K . Döring et W . Kullmann (édit.),
Studia Platonica, Festschrift für Hermann Gundert zu seinem 65. Geburtstag am
30 .4.1974, Amsterdam 1973, p . 195-226 , constate que, quoique la plupart des
traits qu'Épictète prête à son Socrate soient empruntés à Platon (auteur qu 'il
pouvait, selon lui, n 'avoir pas lu ou n 'avoir que peu lu directement), l'image
finale est très différente : le Socrate d'Épictète traduit l'image du xanós xai
áradós stoïcien, du vrai philosophe qui connaît la juste valeur des choses et qui
accorde parfaitement ses actes (publics et privés) à ce qu'il considère comme
juste .
Le rationalisme d'Épictète selon lequel personne n 'agitmal consciemment est
tout à fait d'origine socratique (cf. Entretiens I 18 ; 28, 4 sqq.; II 26 , 5 sqq.).
Mais Épictète ne se borne pas à l'intellectualisme strictdes stoïciens, qui fonde
la vertu seulement sur la connaissance rationnelle. Il reconnaît aussi la nécessité
de l'ascèse (cf. infra ).
Cf.Renner 23, p . 29 sqq. ; 198 C . Terzi, Il razionalismo morale di Epitteto , Udine 1938 ;
Slings 167, à propos d ' Entretiens I 18 ; 199 E . Riondato , Epitteto, I : Esperienza e ragione,
coll. « Miscellanea erudita 16 », Padova 1965, 142 p.
A ce sujet, on ne peut pas nier l'influence du cynisme. Épictète présente le
sage Diogène (- D 147) comme le héros moral qu 'il faut chercher à imiter (cf.
200 R . Laurenti, « Il filosofo ideale secondo Epitteto » ,GM 17 , 1962, p. 501
513). Bien entendu, il a opéré une idéalisation évidente du Diogène historique
ainsi que du cynisme ancien en général.
Cf. Billerbeck 65 , p. 6 -9 ; 201 Ead., « La réception du cynisme à Rome» , AC 51, 1982,
p . 151- 173 (= « Greek cynicism in imperial Rome», dans Ead. [édit), Die Kyniker in der
modernen Forschung. Aufsätze mit Einführung und Bibliographie, coll. « Bochumer Studien
zur Philosophie » 15 , Amsterdam 1991, p. 147- 166 ) ; 202 Ead., « Le cynisme idéalisé d'Épic
tète à Julien », dans M .-O . Goulet-Cazé et R . Goulet (édit.), Le cynisme ancien et ses prolon
gements, p. 319 -338 ; 203 M .-O . Goulet-Cazé, L 'ascèse cynique. Un commentaire de Diogène
Laërce VI 70-71, coll. « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 10, Paris 1986 ,
p . 188- 190 ; 202 sq. ; 204 Ead., « Le cynisme à l'époque impériale » , ANRW II 36 , 4, 1990 ,
p . 2720-2833, notamment p. 2773-2776 .
Par ailleurs, 205 F. Decleva-Caizzi, « La tradizione antistenico -cinica in Epit
teto » , dans G . Giannantoni (édit.), Scuole socratiche minori e filosofia elle
nistica, coll. « Pubbl. del Centro di studio per la storia della storiografia filoso
fica » 4, Bologna 1977, p . 93- 113, soutient qu 'Épictète a une connaissance
directe d’Antisthène (P + A 211), le socratique qui a joué un rôle important dans
l' établissement de la philosophie cynique (même s'il n 'a pas été le maître de
E 33 ÉPICTÈTE 127
Diogène). D ' après lui, Épictète aurait tiré de l'æuvre d’Antisthène quelques-unes
de ses idées-forces: l'opposition entre la vie du philosophe et la vie du commun
desmortels , l'image de la vie comme un drame où chacun doit jouer le rôle qui
lui a été attribué, la valeur de modèles donnée à Ulysse et à Héraclès, l’antithèse
οικείον/αλλότριον, enfin 'importance du καιρός et de la réussite ( aspiration
fondamentale de l'homme). " ).
Sans nier l'influence du cynisme, 206 A . Jagu, Épictète et Platon. Essai sur
les relations du stoïcisme et du platonisme, à propos de la morale des Entretiens,
Paris 1946 , notamment p. 47 sqq., a étudié en détail l' influence de Platon sur
Épictète (cf. Zeller 26 , t. III 2 : Die nacharistotelische Philosophie. Zweite
Hälfte, p. 254 -261). D 'après lui, cette influence se reconnaît non seulement dans
le portrait de Socrate (p. 47-62),mais aussi dans certains aspects de la doctrine
morale d'Épictète , à savoir : l'intellectualisme (p.63-72), le rigorisme (p. 73-86 ),
le spiritualisme (p. 87-96 ), l'ascétisme (p . 97 -111) et le caractère religieux
(p. 112-133). De son analyse, Jagu tire les conclusions suivantes sur la façon
dont Épictète a utilisé les dialogues de Platon ( p . 135 - 152 ) : le moraliste a
directement utilisé l'Apologie, le Criton et le Phédon ; il a lu , du moins vraisem
blablement, le Gorgias, le Banquet, l'Alcibiade, le Théétète et le Protagoras ;
enfin , il a connu , soit directement soit indirectement, les Lois et la République.
D 'après Jagu 206 , p. 142, ces dialogues ont retenu l'attention d'Épictète parce
qu 'ils lui offraient le modèle parfait du sage stoïcien dans la personne de
Socrate , ou simplement parce qu 'ils portaient sur des questions morales, notam
ment lorsqu 'ils traitaient ces questions d 'un point de vue accordé aux caracté
ristiques de la propre personnalité d'Épictète (rigorisme, spiritualisme, ascétisme
et caractère profondément religieux). Jagu suppose qu’Épictète a dédaigné les
dialogues abordant des problèmes surtout théoriques (le Cratyle, le Parménide,
le Sophiste, le Politique, le Timée et le Critias).
Enfin , d'après lui, le platonisme d'Épictète ne l'aurait nullement écarté de
l'orthodoxie de la Stoa : « Nous sommes en présence d 'une adaptation du plato
nisme au stoïcisme, nous pouvons même dire en présence d'une transposition
stoïcienne du platonisme. Épictète a rejeté les dogmes de Platon qui ne cadraient
pas avec l'enseignement de son école , comme la croyance à la survie de l'âme.
Son dualisme corps-âme s'arrête juste à temps pour ne pas le faire dévier du
matérialisme stoïcien . Son ascétisme, la purification qu 'il prêche ne sont point
ordonnés comme chez Platon à la vision des essences,mais cherchentà procurer
la liberté intérieure...» (p. 158).
207 J. P . Hershbell, « Plato and Epictetus: Philosophy and Politics in Ancient Greece and
Rome » , dans E .G . Schmidt (édit.),Griechenland und Rom . Vergleichende Untersuchungen zu
Entwicklungstendenzen und -höhepunkten der antiken Geschichte, Kunst und Literatur,
Erlangen / Jena 1996 , 476 -484.
En revanche, Épictète a eu des rapports plutôt polémiques avec les représen
tants d'autres écoles de philosophie , notamment avec les épicuriens et les aca
démiciens ( scepticisme d 'Arcesilas de Pitane (P+ A 302) et Carnéade de Cyrène
[2 + C 42]), que visent en particulier Entretiens 15 ; 23 ; II 20 et III 7.
128 ÉPICTÈTE E 33
Cf. 208 L . Perelli, « Epicuro e la dottrina di Crizia sull' origine della religione » , RFIC 33,
1955, p . 29-56 (à propos d 'Entretiens II 20, 23) ; 209 R . Laurenti, « Epicuro in Epitteto » ,
Sophia 28, 1960 , p . 59-68 ; 210 id., « Epitteto e lo scetticismo» , dans G . Giannantoni (édit.),
Lo scetticismo antico. Atti del Convegno organizzato dal Centro di studio del pensiero antico
del C . N . R ., Roma, 5- 8 novembre 1980 , coll. « Elenchos » 6 , Napoli 1981, t. I, p . 377 -392 ;
211 A . Grilli et A . Barigazzi, « Stoicismo ed epicureismo nell'età imperiale . Seneca, Epitteto ,
Marco Aurelio » , dans M . dal Pra (édit.), Storia de la filosofia greca dal VIal IV secolo, t. IV :
La filosofia ellenistica e la patristica cristiana dal III secolo a . C . al V secolo d . C , Milano
1975, p . 201 -212 ; 212 M . Cuvigny, « Plutarque et Épictète » , dans Association Guillaume
Budé. Actes du ville Congrès, Paris 5 - 10 avril 1968, Paris 1969, p . 560-566 (à propos d ' Entre
tiens II 20, 27); 213 P.Desideri, « Dionenel giudizio degli scrittori antichi.2 : Epitteto » ,dans
Dione di Prusa. Un intellettuale greco nell'impero romano, coll. « Biblioteca di cultura
contemporanea » 135,Messina 1978,p. 2-4.
Aspects principaux du stoïcisme d 'Épictète. En général, son stoïcisme peut
être caractérisé par l'importance prééminente qu 'il accorde à la liberté et à la rai
son, tout en conservant une empreinte ascétique et religieuse très marquée.
Épictète conserve la division stoïcienne classique de la philosophie en
logique, physique et éthique. Il a très peu d'intérêt pour les subtilités de la logi
que et pour la physique. Il s'attache surtout à la partie éthique (davantage dans sa
dimension pratique que théorique). Toutefois, il n 'oublie pas lesautres parties du
système, qui doivent avoir leur place, fût-elle secondaire , dans la formation du
philosophe (cf. Colardeau 22, p. 35 -68). En fait, dans les Entretiens, même si
Epictète ne s'occupe pas à proprement parler des questions de physique, il
exprime souvent les points de vue stoïciens sur le cosmos, l'homme et la divinité
(cf. Souilhé 63,t. I, p. LVII sq.; Spanneut 10, col.604 sq.; 214 B. L. Hijmans,
« Epictetus and the teleological explanation of nature», PACA 2, 1959, p. 15 -21 ;
215 Id., « A note on púols in Epictetus» , Mnemosyne 20 , 1967, p . 279-284 ).
Mais son éthique ne peut surtout pas se comprendre indépendamment de la
réflexion logique, qui ne se justifie que comme propédeutique nécessaire à la
pratique (cf. Entretiens I 17 ; 26 , 1-4 ; II 23, 36 -47 ; II 25).
Épictète se montre insatisfait par la logique pure, comme le montre Entretiens II 19
(« Contre ceux qui ne s 'approprient des philosophes que l'argumentation » ), sur le célèbre
« argument dominateur » attribué à Diodoros Cronos ( D 124 ) : cf. 216 P . M . Schuhl, Le
Dominateur et les possibles, Paris 1960 ; 217 R .L . Purtill, « The master argument » , Apeiron 7 ,
1973, p. 31- 36 ; 218 R . Müller, Les Mégariques. Fragments et témoignages, coll. « Histoire
des doctrines de l'Antiquité classique » 9, Paris 1985, p . 141-158, notamment p . 145 sq . (plus
ample bibliographie p. 232-234).
Pour les sections logiques de l'æuvre d'Épictète, voir Colardeau 22, p. 149-170; Xenakis
42 , p. 26 -39 ; et 219 M . Baldassarri, La logica stoica. Testimonianze e frammenti, Testi origi
nali con introduzione e traduzione commentata , t. VII B : Le testimonianze minori del sec. II
d . C . : Epitteto , Plutarco, Gellio , Apuleio, Como 1987. Cf. 220 J. Barnes, Logic and the Impe
rial Stou, coll. « Philosophia Antiqua » 75, Leiden 1997, p . 24 -145 (aux p. 129- 145, texte , tra
duction et commentaire d'Entretiens 1 7 (« De l'usage des raisonnements amphibologiques
hypothétiques et autres semblables» ]).
L 'importance de la logique dans l'éthique d'Épictète a été remarquée notam
ment par 221 P. de Lacy, « The logical structure of the ethics of Epictetus », CPh
38 , 1943, p . 112 -125, pour qui Épictète , à la suite de Chrysippe, plaçait l' éthique
entre la logique, qui la précédait, et la physique, qui la suivait.
E 33 ÉPICTÈTE 129
Arrien aurait rassemblé et organisé soigneusement la matière philosophique d'Épictète
selon les principes de la logique, pour présenter un exposé progressif de la théorie éthique de
son maître. De Lacy veut trouver une démonstration de son hypothèse (qu 'Épictète fondait
l'étude de l' éthique sur la logique qui devait la précéder) dans l'ordre des Entretiens, montrant
notamment que le premier livre est dominé par le principe que l' éthique dépend de l'analyse
logique (cf. déjà Halbauer 24 , p. 43 sqq.). D 'après lui, les livres suivants font continuellement
état de cette démonstration sans y ajouter d' éléments essentiels.
Rappelons que Hartmann 163, p. 259, avait défendu l'hypothèse selon laquelle Arrien a
publié les Entretiens en suivant simplement l'ordre chronologique. Souilhé 63, t. I, p . XXII,
croit à son tour que le recueil a été formé d'une façon plutôtmatérielle , de manière à consti
tuer des livres à peu près égaux en longueur et à distribuer danschacune des parties les thèmes
qui se répètent». En réalité, comme le remarque Hershbell 4, p. 2150 n. 11,malgré les efforts
de De Lacy 221 , nulle théorie proposée sur le prétendu ordre des Entretiens n 'est convain
cante .
Épictète, Entretiens III 2, 1 sqq., distingue trois topoi ou lieux (domaines ) de
la philosophie , envisagée par lui comme une ascèse permettantde parvenir à la
condition de l'hommezaróc xai ayalós (cf. Entretiens I 4 , 11 ; II 8, 29 ; III 2,
1 ; IV 4 , 16 ; fr.XXVIII Schenkl):
(a) le topos concernant les désirs et les rejets (ó nepi tás ópéteng xai tas
ÈxXALOELs), c' est-à-dire concernant les passions(o nepi tà táon) ;
(b ) le topos concernant les tendances positives etnégatives, les propensions et
les répulsions (ó nepi tác opuàç xai adopuác), c'est-à-dire concernant le
devoir (o nepi tò xaoñxov );
(c) enfin le topos concernant la prévention des erreurs et des jugements témé
raires (o nepì tnv åvecanatnoiav xai ávelXALÓTnta ), c 'est-à -dire le topos
concernant les assentiments (o nepì tàç ovyxata /boelc), qui ne sera abordé
que par ceux qui ont déjà progressé dans les deux premiers topoi.
222 D . Pesce, « La struttura concettuale dell'etica di Epitteto (i tre topoi)» , dans Il Platone
di Tubinga, coll. « Antichità class. e cristiana » 30 , Brescia 1990 , p. 51-75, analyse ce scheme
ternaire, négligé à ses yeux d 'ordinaire par les critiques. Ainsi, il s'étonne notamment du fait
que de Lacy ne l' ait pas mis à contribution pour démontrer sa thèse (cf. supra ). Quant à
223 P . Hadot, Exercices spirituels et philosophie antique, Paris 19872, p . 135 - 153 (« Une clé
des Pensées de Marc Aurèle, les trois topoi philosophiques selon Épictète »> = EPh 1978 n° 1,
p . 65 -83), qui parle notamment du schème à propos de Marc -Aurèle, Pesce conteste son hypo
thèse selon laquelle il y a une correspondance entre ces trois topoi et la division traditionnelle
de la philosophie prônée par l' école stoïcienne: physique, éthique et logique. Pesce 222,p . 55,
reconnaît que la correspondance du troisième topos avec la logique est facile, mais celle du
premier avec la physique ne lui semble pas convaincante, « parce qu 'une référence à la
" vision physique " n 'est pas seulement contenue dans le premier topos mais aussi dans le
deuxième, pour ne pas dire que cette référence est demandée dans l'ensemble du système, y
compris la logique » .
P . Hadot 48, p. 89-117, notamment p. 106 - 115, reprend son hypothèse, en répondant aux
critiques de Pesce. Les trois topoi, c'est- à -dire les trois « actes de l'âme » (pour lesquels il
suggère la désignation « thèmes d 'exercice » ) ne sont pas autre chose pour lui que les trois
parties de la philosophie. A ce sujet, Hadot 48, p . 94 -98 , part du fait que les stoïciens ne par
lent pas seulement d 'un discours sur la logique mais d 'une logique vécue, pas seulement d 'un
discours sur l'éthique mais d'une éthique vécue, et pas seulement d 'un discours sur la phy
sique, mais d'une physique vécue: « Pratiquement confondues en un acte unique lorsqu'il
s'agit d'exercer concrètement la philosophie , physique, éthique et dialectique doivent bien
pourtant se distinguer quand il s'agit de les enseigner. Il faut exposer, décrire la philosophie au
130 ÉPICTÈTE E 33
disciple. Le discours philosophique introduit une dimension temporelle qui a deux aspects : le
temps « logique» du discours lui-même et le temps psychologique qui est nécessaire au
disciple pour assimiler intérieurement ce qui lui est proposé » (p. 96 ). L 'ordre à établir entre la
physique, l'éthique et la logique ou dialectique se révèle donc important: « Selon l'ordre
logique de l' exposé, la physique doit précéder l' éthique pour la fonder rationnellement, mais,
selon l'ordre psychologique de la formation, la physique doit suivre l'éthique, parce qu 'en
pratiquant l' éthique, on se prépare à la révélation du monde divin de la Nature universelle »
(p . 97). D 'après Hadot, on comprend que les stoïciens aient distingué par conséquent entre la
philosophie et le discours se rapportant à elle : « Ils affirmaient en effet que la logique, la phy
sique, l'éthique, donc ... les parties de la philosophie, n'étaient pas en fait des parties de la
philosophie proprement dite, mais des parties du discours se rapportant à la philosophie. C 'est
que... physique, logique et éthique n'apparaissentcomme distinctes, séparées, éventuellement
successives, que dans le discours d'enseignement de la philosophie» (p . 97 sq.).
Hadot 48, p. 107, estime évident que pour Épictète la discipline du jugement et de l'assen
timent (troisième topos) correspond à la partie logique de la philosophie, et la discipline de
l'impulsion (deuxième topos) à la partie éthique de la philosophie. Il allègue Entretiens IV 4,
11- 18 , où d'après lui Épictète oppose la « logique théorique » (« contenue dans les traités Sur
la compréhension ), quine procure qu’un savoir théorique et une habileté technique dans les
discussions, sans rapport avec la réalité » , et la « logique vécue » (« qui consiste à critiquer les
représentations qui se présentent effectivement à nous dans la vie de tous les jours, à dialoguer
avec elles » ); dans ce passage, il oppose une « éthique théorique » (contenue dans les traités sur
l'impulsion et surle devoir ) et une « éthique pratique » (concernant l'exercice de la discipline
de l'impulsion ).
Quant à la discipline du désir (premier topos), Hadot 48, p. 108, reconnaît qu 'apparem
ment elle ne correspond pas à la physique, comme l'exigerait la structure du schèmedes trois
parties de la philosophie. En fait, Épictète ne fait aucune allusion dans le texte cité à un rap
port particulier entre la discipline du désir et la physique. Mais Hadot 48, ibid., remarque:
« s 'il est vrai que la théorie abstraite du " désir ” lui-même, en tant qu 'acte de l'âme, se situe
dans le domaine de la morale , la pratique vécue de la discipline du désir implique finalement
une attitude spécifique à l'égard du cosmos et de la nature... La discipline du désir a pour but
de faire en sorte que nous ne désirerons jamais des choses dont nous pourrions être frustrés,
que nous ne fuirons jamais ce que nous pourrions subir contre notre volonté. Elle consiste
donc à ne désirer que ce qui dépend de nous, c 'est-à -dire le seul bien pour les stoïciens, égale
ment à ne fuir que le mal moral, et, pour ce qui ne dépend pas de nous, à l'accepter comme
voulu par la Nature Universelle . » Hadot allègue à ce sujet Entretiens II 14 , 7 ou 17, 25 . La
conclusion d 'Hadot se présente comme une réponse à Pesce : « Le consentement au Destin ,
l'obéissance aux dieux, qui est l'essentiel de la discipline du désir, suppose donc une prise de
conscience de la place de l'homme dans le Tout et donc une mise en pratique de la physique »
(p . 109). D 'après Hadot, cette liaison entre la discipline du désir et la physique vécue comme
un exercice spirituel se trouve « orchestrée » chez Marc -Aurèle d 'une manière plus riche
encore que dans les propos d'Épictète .
Plutôtmoraliste ou éducateur que philosophe, Épictète se propose d' enseigner
aux hommes à suivre la voie de la vraie sagesse, du vrai bonheur, du vrai bien.
Pour cela il est nécessaire de savoir si le but que l'homme s'assigne comme le
souverain bien est à sa portée, car le contraire ne serait pas raisonnable.
L'homme a la faculté dese former des idées ou des « représentations» (@av
taolal) sur la réalité qui l'entoure. Ces représentations peuvent faire naître chez
lui, du point de vue psychologique, le désir (opetus ) ou l'aversion (fxxiolc ), la
tendance positive ou propension (ópuń) ou la tendance négative ou répulsion
(ápopuń ); et d'un point de vue intellectuel, l'assentiment (T) Ouyxatadłodai),
la négation (TÒ ávaveīOAI) et la suspension de l'assentiment (Énoxń).
E 33 ÉPICTÈTE 131
Sur la doctrine de la connaissance , voir 224 D . Pesce, « Prenozioni e rappresentazioni nella
dottrina di Epitteto » , dans Id ., Studi di filosofia antica , Padova 1961, p . 105 - 110 (chap . 7 ]) ;
225 R. Barney, « Appearances and impressions» , Phronesis 37 , 1992, p. 283-313 .
Le bien et le malne peuvent pas être décidés par nos sens extérieurs,mais par
la faculté qui détermine la valeur morale des choses, qui est la faculté la plus
importante et la plus noble chez l'homme, à savoir : la npoalpeolç (litt. le
« choix préalable » ).Comme le remarque Souilhé63, t. I,p . I n . 3, ce terme, sou
vent employé par Épictète , a été traduit de façon très diverse , dans la mesure où
il rassemble une série de notions différentes pour nous (intelligence, esprit, âme,
vertu, caractère, volonté , liberté , etc.): « propositum » , « voluntas» , « consilium
(Schweighauser), « libre -arbitre » (Courdaveaux ), « Wille » (Enk , Schulthess ),
« Entscheidung » (Capelle), « moral purpose » (Oldfather), « Will » (Carter, Long,
Matheson ), « choice » (Carter), « disposition de la personne morale » (Souilhé),
« albedrío » (Jordán de Urries). Il désigne enfin la faculté intérieure de choix, la
faculté de compréhension des représentations au moyen de la raison . Épictète la
présente comme une faculté supérieure usant des autres facultés comme de ses
servantes (cf. Entretiens II 23, 6 - 15). Chacun est le seul responsable de sa pro
hairesis, qui se trouve à l'abri de toute action extérieure. Qui plus est, c'est
justement cette prohairesis qui aux yeux d 'Épictète distingue l'homme des
autres êtres dans le monde.
Quoique l'homme, par sa propre nature, se tourne vers le bien (to zaróv) ,
rejette le mal (TÒ xaxóv) et ne se soucie pas de ce qui est indifférent ( tà ådlá
popa ), ses représentations ne sont pas toujours correctes dans la pratique. C 'est
pourquoi la philosophie doit intervenir,car la tâche propre de celle-ci est d 'ensei
gner l'usage correct des représentations selon la raison (ópon xpñolç Tõv Dav
TOOLWV).La philosophie embellit la prohairesis et chasse de l'esprit les opinions
erronées, autrement dit, elle apprend à distinguer les vrais biens (désirer, éprou
ver des impulsions, affirmer ou nier en accord avec la prohairesis, avec la rai
son ) de ceux qui ne sont que des biens apparents (richesse , santé , vie , plaisir,
renommée, pouvoir, patrie , etc .).
Comme le remarque Pohlenz 35 , t. II, p. 109, Épictète semble ne pas suivre le
développement de la Stoa selon lequel on distingue parmi les choses indiffé
rentes entre des choses préférables et les non préférables. Il incline vers un
scheme binaire qui n 'envisage pas de niveau intermédiaire entre le bien et le mal
(cf. Entretiens IV 5, 30 ; I 27, 12). En effet, il établit une distinction nette
(Blaipeols) entre deux types de choses (cf.Manuel I 1-2 ; Entretiens I 1 ; I 4 , 1
2 ; 22, 10 ; 25, 4 ; II 6 , 24 ; 226 P . Jordán de Urríes y Azara, « Epicteto , I, 4 , 27 » ,
Emerita 26 , 1958, p. 223-226 ) : d 'un côté, les choses qui dépendentde nous (tà
UÈV £o ' nuīv), qui sont par nature libres et sans empêchement (« le jugement, la
tendance, le désir , l'aversion , enfin toutes les choses qui sont nos æuvres
propres» ); de l'autre, les choses qui ne dépendent pas de nous (tà dè oủx &$ '
nuiv ), qui sont esclaves des circonstances et facilement empêchées (« le corps,
les possessions, la renommée, les charges, enfin toutes les choses qui sont étran
gères à nous, qui ne sont pas nosouvres propres» ). Cette distinction est pour lui
132 ÉPICTÈTE E 33
le fondement de la vie pratique. La prohairesis correcte consiste à ne désirer que
les choses qui dépendent de nous (tà npoalpetixá) et à renoncer aux choses
extérieures ( tà ånpoalpetixá). Elle représente le vrai bien de l'homme, la vraie
vertu (åpetń ), qui n 'est autre que la « science du vivre » (Étlotńun toŨ BloŰV ;
Entretiens IV I63) ; elle représente l'hommeintérieur (sa nature propre, sa per
sonne morale, sa volonté libre): « Tu n 'es pas de la chair et des cheveux ,mais
prohairesis» (Entretiens III 1 ,40 ; cf. IV 5, 11) .
Par conséquent, c'est l' échec ou la réussite dans l'exercice de la prohairesis
qui décide du vrai bonheur (eúbaluovia ), de la vraie liberté ( evdepía ) dans
l'existence humaine (Entretiens I 12, 9 ; II 1, 23 ; IV 1, 1). En effet, d'après la
maxime qu ’Épictète répète sans cesse, l'important ce n 'est pas les choses en
elles-mêmes mais l'opinion ( órua ) que nous en avons: par exemple , ce n 'est
pas l'exil qui est un mal en lui-mêmemais l'idée que l'exil est un mal. Pour
exprimer la pleine souveraineté de l'homme sur son existence intérieure, Épic
tète a souvent recours à l' image du tyran : celui-ci a bien pouvoir sur notre corps,
sur nos biens extérieurs, sur notre famille ou sur notre réputation ,mais n 'a pas le
moindre pouvoir sur notre âme (cf. Entretiens I 1 , 21-14 ; 29, 10 ; IV 7 , 18 ; cf.
227 Ch .G . Starr, « Epictetus and the tyrant», CPh 44, 1949, p. 20-29); 228 J. P.
Hershbell, « Epictetus : A freedman on slavery » , AncSoc 26 , 1995, p . 185 -204.
Comme le remarque Pohlenz 35 , t. II, p. 114 - 118, la vertu de la prohairesis
représente la notion la plus importante de l'éthique d'Épictète. A la différence de
l'ancienne Stoa, qui parlait de la vertu comme de la « science du bien et du mal>>
(Énlotnun ayadov xai xaxőv ; SVF II 95 ), Épictète considère la décision
morale comme plus importante que la connaissance. Cela dit, il ne rejette pas
l' intellectualismede Chrysippe, tout en étantplus intellectualiste que son maître
Musonius (cf. Goulet-Cazé 203, p. 185- 188). Pour lui, c' est toujours l'opinion
(correcte ou fausse) sur les choses qui détermine le comportement. Ce dernier
reste ainsi tout d'abord un acte de l'intellect. Malgré ce point de départ rationa
liste , il reconnaît un rôle à l'ascèse, à la volonté et au temps pour parvenir à sur
monter les résistances éventuelles de la volonté (cf. Entretiens I 15, 8 ; I 17, 24 ;
cf. Jagu 7, col. 828 sq .).
En tant que pédagogue par excellence, Épictète voit dans la vertu un
processus d'entraînement et d'étude. Donc, entre l'homme vertueux et sage
(onovdalos) et l'homme vicieux et ignorant (Paŭlos), il place l'homme qui est
en train de progresser (npoxontwv ; cf.Entretiens I 4 ; III 2), dépassant ainsi le
paradoxe stoïcien selon lequel il n 'y a pas de point intermédiaire entre la vertu et
le vice.
Le type d 'ascèse d'Épictète, fondé sur la notion complexe de prohairesis, est
ainsi décrit par Goulet-Cazé 203, p. 188 sq .: « Pour que cette prohairesis
s'oriente vers les actes, il faut exercer son jugement. C 'est pourquoi Épictète
insiste tant sur la nécessité d'une ascèse de l'âme qui soit à la fois théorique (lec
ture ,méditation , réflexion ...) et pratique (beaucoup d 'exercices très intellectuali
sés, comme s 'entraîner à faire face aux représentations, à refréner ses désirs ...).
Concernant le corps, il refuse l'ascèse corporelle pratiquée comme une fin en
E 33 ÉPICTÈTE 133
soi, mais n 'exclut pas une ascèse corporelle à finalité morale. C 'est ainsi que
dans son lepi đoxńoews (= Entretiens III 12 ), après avoir montré que l'exer
cice doit porter d'abord sur les désirs et les aversions, en second lieu sur la
volonté et en troisième lieu sur l'assentiment, il conclut en faisant intervenir une
ascèse corporelle dont le but serait de régler désirs et aversions.»
Cf. Souilhé63, t. I, p . XLVI-LVII ; 229 P .Rabbow , Seelenführung. Methodik der Exerzitien
in der Antike, München 1954 , p . 131- 145 ; P . Hadot 223 , p . 17 - 25 ; Hijmans 36 , p . 64 -91 ;
230 A . J. Voelke, L 'idée de volonté dans le stoïcisme, coll. « Bibliothèque de philosophie
contemporaine » , Paris 1973, p. 131 -160 ; 231 R . J. Newman , « Cotidie meditare. Theory and
practice of the meditatio in imperial stoicism », ANRW II 36 , 3, 1989, p. 1473-1517 ; 232 M .
Erler, « Einübung und Anverwandlung. Reflexe mündlicher Meditationstechnik in philoso
phischer Literatur der Kaiserzeit » , dans W . Kullmann , J. Althoff et M . Asper (édit.), Gattun
gen wissenschaftlicher Literatur in der Antike, coll. « ScriptOralia » 95, Tübingen 1998,
p . 361-381.
Épictète semble adopter en psychologie une division binaire (cf. Entretiens
III 7, 4 ): la chair (oáp ) et l'âme (Quyń). Cependant, étant donné qu'il oppose la
partie intellectuelle de l'âme à la représentation pure et simple liée aux tendances
ou aux désirs (cf. Entretiens II 18 , 29 ; III 24 , 108 ; IV 11, 26 ), on peut affirmer
qu 'il accepte la division ternaire aristotélicienne : le corps, l'âme sensible et
l'âme intelligible ou raison.La représentation (pavtaoia ) est une empreinte sur
l'âme. L 'homme garde dans son âme un grand nombre de représentations qui le
poussent éventuellement à avoir des idées semblables aux premières impressions
des choses (cf. I 14, 8). Le sentiment lui-même (nádoc) n 'est qu'une impression
sur l'âme (cf. I 18, 2 ). Épictète (I 20, 5 ; IV 6 , 35 ) analyse plus en détail la
tendance positive ou négative, c'est-à -dire la propulsion (ópuń ) ou la répulsion
(ápopuń), les phénomènes élémentaires de la volition . Si la tendance a comme
base la représentation d'une action , elle reste telle ; si elle a commebase la repré
sentation d'un objet,elle devient un désir (öpetiç) ou une aversion (fxXALOLÇ ).
D 'après Pohlenz 35 , t. II, p. 107, Épictète ne distingue pas entre les tendances
et les actions, mais , à l'intérieur de l'âme, entre les tendances (positives ou
négatives) qui se rapportent à notre bien -être subjectif (ópéčelg et êxxnioeus) et
les tendances qui se rapportent à notre comportement à l'égard du monde qui
nous entoure , pour lesquelles il réserve le nom d'ópuai, qui, dans la doctrine
stoïcienne, couvrait aussi les tendances purement subjectives (cf. Entretiens I 20,
5 et 15 ; IV 6 , 35).
Étant donné que les choses extérieures sont indifférentes, Épictète demande
au sage de rester en principe libre du désir. En effet, le but visé dans le premier
topos est l'impassibilité (ånádela , åtapačia ), c' est-à -dire le manque total de
sentiments (naon ).Mais, pour Épictète, ce but doit être corrigé par le deuxième
topos, concernant le devoir, car l'homme, étant donné qu 'il passe sa vie avec
d 'autres hommes, ne doit pas rester tout à fait impassible comme une statue
(cf. Entretiens III 2, 4 ; Manuel II 2 ; XLVIII 3 ). Donc, le sage éprouvera des ten
dances ou des sentiments modérés, soumis à la raison, lui permettant de rester
impassible , de garder sa paix intérieure et, par conséquent, son bonheur et sa
liberté (cf. Entretiens IV 3 , 7). Quant aux autres passions, comme la colère, il
devra tout simplement les chasser de son esprit (cf.Bonhöffer 19 , p. 46 -49).
134 ÉPICTÈTE E 33
Cf. 233 R . Laurenti, « Lo stoicismo romano e Plutarco di fronte al tema dell'ira » , dans
I. Gallo (édit.), Aspetti dello stoicismo e dell' epicureismo in Plutarco. Atti del II Convegno di
studi su Plutarco, Ferrara , 2-3 aprile 1987, coll. « Quad . del GFF » 9 , Ferrara 1988, p. 33-56
( comparaison entre Sénèque, Épictète, Musonius Rufus et Plutarque); 234 M . C . Nussbaum ,
« Poetry and the passions : iwo Stoic views», dans J. Brunschwig et M .C. Nusbaum (édit.),
Passions and perceptions : Studies in Hellenistic philosophy ofmind. Proceedings of the fifth
Symposium Hellenisticum , Cambridge/New York 1993, p . 97- 149.
Toute action conforme au devoir (tò xaonxov ) répond à une tendance sou
mise à un assentiment rationnel. On peut continuer à l'appeler « tendance » , ou
plus proprement « prohairesis» .
Depuis l'Antiquité, on a voulu résumer la doctrine morale d'Épictète dans la
formule célèbre åvéxov xai åréxov du fragment 10 Schenkl, c 'est-à -dire :
« supporte et abstiens-toi» (lat. sustine et abstine). En fait, la tâche de l'homme
dans le monde, selon Épictète, n 'est autre que d'affronter avec confiance et
endurance toute réalité qui ne dépend pas de lui, et de s'abstenir du mauvais
choix , quand il est question de choisir , car tout choix ne dépend que de lui.
Ainsi, Épictète , Entretiens II 1, affirme qu 'il faut avoir confiance (to Dappeīv)
devant ce qui est soustrait à notre libre choix , quine dépend pas de nous (ånpo
aipeta ); pour ce qui dépend de notre volonté (npoalpetixá), il dit qu'il faut
agir avec prudence (kůráßela ) : face à la mort, donc, il faut de l'assurance ; face
à la peur de la mort, de la prudence.
La morale sociale, c'est-à-dire les principes qui gouvernent la relation de
l'homme avec les autres hommes, appartient au deuxième topos d 'Épictète. Le
moraliste envisage l'homme comme un « animal civilisé et sociable » (öuepov
xai ZOLVWVIXÒ (Qov ; cf. Entretiens II 10, 14 ; II 20 , 13 ; III 13, 5 ).
Cf. Colardeau 22, p. 171-203 ; 235 A. Dobson , La morale sociale des derniers Stoïciens.
Sénèque, Épictète etMarc Aurèle, Paris 1967.
Comme le remarque Pohlenz 35 , t. II, p . 120, Épictète, lorsqu 'il veut décrire
la perfection morale , dépasse l'intellectualisme de la prohairesis, grâce à deux
vertus fondamentales possédant un caractère émotionnel très marqué, à savoir :
l'aidós et la niotis (cf. Entretiens I 28, 23 ; IV 5, 14 ; 13 ; Manuel XXIV ).
L 'aidós, qui était pour les stoïciens simplement la pudeur devant le blâme
mérité , devient pour Épictète le sentiment éthique fondamental, placé chez
l'homme par la nature. Grâce à ce sentiment, l'homme (et seulement lui) rougit
involontairement lorsqu' il dit ou entend quelque chose d' inconvenant; ce senti
ment le met en garde contre toute faute morale et le protège mieux que ne le
ferait l'occultation aux regards humains. Pohlenz 35 , p. 121, définit l'aidós
comme « le respect que l'homme a pour sa propre dignité , comprise comme un
sanctuaire inviolable » . D 'après lui, l'aidós a égard notamment à la vie inté
rieure , tandis que la niotis agit plutôt dans le rapport de l'hommeavec les autres
hommes: « Elle a aussi sa racine dans un sentiment, dans la tendance sociale de
l'homme, mais elle représente le développement de ce sentiment sur le plan
social et pratique ; elle désigne la juste position de l'individu dans la société , la
promptitude dans l'accomplissement de ses devoirs, qui est capable de faire
gagner la confiance et de la communiquer en même temps ; elle est enfin le
E 33 ÉPICTÈTE 135
fondement de toute activité sociale .» D 'après Pohlenz, si l'aidós revient à la
sensibilité grecque la plus ancienne, la niotic témoigne d'une influence évidente
de la fides romaine.
Chez Épictète , l'application de l'homme à la vie intérieure n'implique pas le
mépris de l'activité extérieure. Les tendances pratiques qui nous poussent à
accomplir nos devoirs (waOnxovta ) font partie aussi de l'âme, comme les désirs
qui se rapportent à notre intérieur (cf. Entretiens III 2 , 2 et 4) . Et la sphère la plus
proche de ces devoirs est représentée par le corps. Épictète place le corps parmi
les choses qui ne dépendent pas de nous (cf. supra ), et il en parle souvent avec
mépris (cf. par exemple le diminutif to owuáriov ). Or, il considère que la
nature a mis chez nous l'amour pour notre corps, parce qu'il est quelque chose
de nécessaire. Conformément à la nature, c 'est donc un devoir de le nourrir, de le
soigner, de le tenir propre ( cf. supra, B ; Entretiens I 16 , 9 sqq. ; IV 11 ; fr. XXIII
Schenkl; Manuel XLI), sans pourtant accorder à cela trop d 'importance (cf.
Entretiens III 1 ; IV 11, 25). De même que la propreté, le moraliste conseille
aussi les bonnes manières (Manuel XXXIII). En fait, il considère la communauté
comme la sphère la plus indiquée pour l'exercice des devoirs. Il reconnaît
( Entretiens II 22, 15) que tout être vivant est poussé par nature à rechercher ce
qui lui est utile , mais que la nature a arrangé les choses de sorte que l'être
rationnel que l'homme représente ne puisse obtenir ce qui lui est utile qu'en
collaborant en même temps au bien commun . Il ne s 'agit pas ici d'une loi
extérieure. L 'homme porte en lui, à côté de l'amour pour lui-même (plautia ),
une tendance naturelle vers ses propres congénères, l’oixeiwolç. Par conséquent,
Épictète ne rejette point les affections familiales (cf. Entretiens I 11; III 3, 5- 10
(cf. 236 J. J. Thierry, « Epictetus on oxÉOELS (Diss. 3 , 3 , 5 - 10 )» ,Mnemosyne 12 ,
1944 , p .61- 71 ) ; 237 W . O . Stephens, « Epictetus on How the Stoic Sage
Loves » , dans OSAPh 14 , 1996 , p . 193-210; supra, B ), ni l'amitié (cf. Entretiens
II 29). Non seulement il admet le mariage,mais il le considère comme quelque
chose de sacré (Entretiens II 4 ;Manuel XXXIII 8). Comme le remarque Pohlenz
35 , t. II, p . 125 : « Lemariage etla procréation des enfants fontpartie des devoirs
civils, de même que l'accomplissement des charges publiques ordinaires par
celui qui en a le titre . Épictète considère comme avéré que l'homme doit
accomplir ces devoirs, mais il luimanque, de toute évidence, le sentiment que
peut éprouver un Panétius envers l'État. Il envisage la carrière publique surtout
du pointde vue de l'éducateur, dans la mesure où elle représente pour les jeunes
le but de leur ambition politique, et il insiste sur le fait qu'il faut bien donner à
César ce qui appartient à César, mais aussi à Dieu ce qui appartient à Dieu... »
(cf. Entretiens I 29, 9 sqq. ; 30 ; II 23, 38 ; IV 10 , 21 ; IV 7 ; 238 J. Jundził},
« Practice and theory of family education in the works of Seneca, Epictetus and
Marcus Aurelius» , VoxP 5 , 1985,p . 51-61 (en polon., rés. en angl.)).
En réalité, Épictète (cf. 19, 1 ; II 10, 3 ) considère l'hommenon pas comme le
citoyen de telle ou telle société particulière , mais comme un citoyen du monde
(xóquioc). A ses yeux, tous les hommes,même les esclaves, sont des frères et
tous sont égaux , parce que tous proviennent de dieu ( l'âme est un åttoonaoua
136 ÉPICTÈTE E 33
TOŨ DeoŨ : cf. II 8, 11) et portentégalement en eux l'étincelle de divinité qui peut
les rendre libres (cf. I 33, 3 ; 14 ,6 ; 19 , 9 ; II 16 ,41 sqq.).
Cf. Bonhöffer 19 , p . 58- 121, 193-233 ; 239 P.Geigenmüller, « Stellung und Pflichten des
Menschen im Kosmos nach Epiktet », NJW (= JKPh) 5, 1929 , p. 529-542.
Sur la notion de cosmopolitisme, voir 240 G . R . Stanton , « The cosmopolitan ideas of
Epictetus and Marcus Aurelius » , Phronesis 13, 1968, p . 183- 195 , qui distingue à ce sujet la
pensée d 'Épictète et celle de Marc-Aurèle : d 'après lui, Épictète, partant de l'argument de la
parenté entre l'homme et dieu , oriente son enseignement pour le citoyen de l'univers dans le
sens de l' instruction morale ; Marc-Aurèle, à son tour, part de l'idée que l'hommeest né pour
la communauté et se concentre sur la vision de l' État universel.
Le rapport de l'hommeavec la divinité nous amène à considérer la religion
d' Épictète. En tant que stoïcien , Épictète croit en un dieu immanent, qui est
l' esprit, l'intelligence (voûç, Nóyos) qui imprègne toutes choses (cf. Entretiens
II 8, 2). Comme le remarque Pohlenz 35, t. II, p. 126 , ilmaintient la vieille défi
nition selon laquelle le cosmos est un système formé par les dieux et les
hommes, mais il a remplacé le pluriel « dieux» par le singulier « dieu » (ou
Zeus).
D 'après Pohlenz 35, ibid . n .41, si Épictète parle parfois des « dieux » , cela ne nous
apprend rien sur sa conception de la divinité. Cf. Souilhé 63 , t. I, p . LXI: « Son polythéisme est
peut-être bien une condescendance aux habitudes du langage populaire, mais peut-être aussi,
comme les maîtres de son école , ne voit-il dans les dieux du Panthéon antique que des forces
de la nature,ou les attributions différentes d'une divinité unique.»
Épictète ne distingue pas entre dieu et ce qu'il nomme la nature ,l'univers ou
le tout, entre la loi divine et la loinaturelle. En tant qu 'intellect diffusé dans le
monde, dieu relie intimement (par une « sympathie » ) toutes les réalités. Mais
l'homme se trouve dans cette hiérarchie plus près de la divinité que tout autre
être grâce à son esprit (cf. Entretiens I 14 , 1-7). C 'est pourquoi, comme le
remarque Souilhé 63, t. I, p. Lix , le dieu d'Épictète est un dieu personnel auquel
l'homme est intimement uni, qui veille très spécialement sur lui par sa provi
dence (htpovola ), et auquel rien ne peut échapper des événements de l'univers ,
comme de nos actes, de nos pensées ou de nos sentiments ( cf. Entretiens I 14 :
Que dieu voit tout ; I 6 et III 17: Sur la Providence). La fin de l'homme est de
s' approcher le plus possible de la divinité, de vivre heureux et libre sous son
gouvernement intérieur (II 14 , 12 ; I 12 , 4 -9). De la sorte, le philosophe authen
tique devient une espèce de témoin (uaptus ) de dieu , un témoin de la sagesse,
de la prudence, de la justice,bref de la bonté divine (cf. par exemple I 29, 46 ; III
24 , 113).
Cette conception du philosophe témoin de dieu a été étudiée par 241 A . Delatte,« Le sage
témoin dans la philosophie stoïco -cynique » , BAB ge s., 39, 1953 , p . 166 - 186 , qui affirme
(p. 173) qu'on la trouve pour la première fois ehez Épictète . Cf. Spanneut 10 , col.613 sq.;
Jagu 7, col. 827 sq.
Dieu a tout créé par sa bonté et l'homme lui en doit reconnaissance (xápis ).
Tous les biens dont il dispose à chaque moment, y compris la vie elle-même,
sont des prêts faits par dieu, et il faut être toujours prêt à les lui rendre sans s 'at
tarder et sans aucun mécontentement (cf. Entretiens IV 10, 14-18). Comme le
remarque Pohlenz 35, t. II, p. 128, la providence de dieu à l'égard de l'individu
E 33 ÉPICTÈTE 137
ne veut pas dire pour Épictète que dieu prend souci de son bien-être matériel.
L 'homme doit rendre grâces à dieu notamment de lui avoir donné la force pour
surmonter toute difficulté. Ainsi, la justice divine (théodicée) ne représente pas
un problème pour le moraliste : « L 'homme quiadopte la juste disposition envers
les choses, les " propres” et les “ étrangères” , n 'oubliera jamais que dieu lui a
donné dans son intérieur le seulbien qu 'il ne peutpas perdre et, reconnaissant, il
acceptera tout ce qui provient de la main de dieu, non seulement les choses
agréables, non seulement le pain quotidien ,mais aussi les difficultés que la vie
lui présente » (t. II,p . 129).
Épictète exprime souventcet enseignement par la métaphore de la vie commeune pièce de
théâtre : dans la vie chacun doit accomplir tout rôle (npóownov) que dieu lui attribue, de
même qu ' au théâtre chaque acteur doit accomplir tout rôle que lui attribue le poète
(cf. Entretiens I 2 , 19 - 21 ; 24 , 16 sqq. ; III 14 , 1 ; IV 2 , 10 ; fr. XI Schenkl ; Manuel XVII ;
cf. Kokolakis 192).
Si les difficultés sont tellement graves que l'homme ne peut plus les surmon
ter, alors (et seulement alors ) il lui est permis de quitter volontairement la vie. Et
cela ne signifie pas qu' il agit contre dieu, parce que c'est dieu lui-même quilui
fait signe de quitter la vie lorsqu 'il ne peut plus vivre conformément à la nature
(cf. Entretiens III 24 , 101).
Épictète exprime souvent cette idée à travers l'image de la « porte ouverte » (ń Oupa
ñ Vouxtal ; cf. Entretiens I 24 , 20 ). C 'est dieu lui-même qui a laissé ouverte la « porte » (III 8 ,
6 ).
Sur le suicide chez Épictète , voir Bonhöffer 19, p . 29- 39, 188-193 ; 242 E . Benz, Das
Todesproblem in der stoischen Philosophie, coll. « Tübinger Beiträge zur Altertumswissen
schaft >> 68, Stuttgart 1929, notamment p . 36 sqq ., 75 sqq. ; 243 J. Xenakis, « Stoic suicide
therapy » , Sophia 40 , 1972, p . 88 - 99 ; 244 R . Wyllie , « Views on suicide and freedom in stoic
philosophy and some related contemporary points of view », Prudentia 5, 1973, p . 15-32 ;
245 Y . Grisé, Le suicide dans la Rome antique (préf. P . Grimal), coll. « Noêsis-Collection
d 'études anciennes », Montréal/Paris 1982, notamment p. 218-221 ; 246 A . J. Droge, « Mori
lucrum . Paul and ancient theories of suicide » ,NT 30, 1988, p . 263-286 .
Quant à la mort elle -même, Épictète, conformément à la doctrine stoïcienne,
l'envisage comme la fin naturelle de l'individu, qui se dissout dans les éléments
(otolyela ) du cosmos, afin qu 'un autre puisse occuper sa place (cf. Entretiens
III 13, 14 ; II 1, 17 -18). Épictète ne croit nullement à une survivance personnelle
au delà de la mort, bien qu 'il parle du désir de l'homme de retourner à dieu,
c 'est-à-dire au tout (cf. Entretiens III 24,92 sqq. ; 13, 13 sqq.; IV 7, 15 et 27 ; cf.
Bonhöffer 19, p. 26 -29). Enfin, la mort n 'est qu 'une conséquence naturelle de la
condition humaine, et il n 'est donc pas raisonnable de s'en affliger . Il est stupide
de pleurer la mort d'un mortel (cf. Entretiens II 5, 12 sq.; III 24, 85 sq.;Manuel
III).
Comme le remarque Souilhé63, t. I, p. LV , on a souvent noté qu 'Épictète se
meut entre deux conceptions de la vie apparemment contradictoires : d'un côté,
une conception pessimiste et déprimante, qui décrit les incertitudes et la vanité
de l'existence humaine ; de l'autre, une conception optimiste , qui chante le bon
heur que représente la libération des désirs inutiles, par l'æuvre de la philo
sophie, autrement dit par l'æuvre de la divinité que chacun possède dans son
138 ÉPICTÈTE E 33
intérieur. A la suite de Pesce 32, Souilhé 63,t. I, p. LVI, n 'y voit pas une vraie
contradiction : « Il semble plutôt qu 'on doive y discerner deux points de vue :
celui du profane, de l'idiørns, qui cède au sentiment dont nos représentations
sont accompagnées , ou encore du débutantdans l'apprentissage de la sagesse,
qui se raidit pour réprimer les perturbations de la sensibilité, et celui du parfait,
du TTETALOEVMÉVOS, en qui la raison a triomphé et qui, ayant compris la divine
ordonnance, la veut de toute sa volonté et l'aime.»
La morale d'Épictète a bien un fondement religieux : elle consiste dans l' anéantissement
du moi et en une acceptation totale des événements qui ne sont, finalement, que l'expression
de la volonté divine. Ainsi, d'après Pesce 32, la morale stoïcienne qui, jusque là, répudiant la
vie concrète, n 'avait su aboutir qu ' à la mort, arrive avec Épictète à un tournant: elle devient
religieuse, reposant sur l'hypothèse de dieu qui doit être prouvée par l'expérience de la vie
(cf.Colardeau 22, p . 239-281).
Bibliographie complémentaire sur quelques thèmes philosophiques :
LA LIBERTÉ-NIPOAIPEEIE :
Cf. 247 H .Gomperz , Die Lebensauffassung der griechischen Philosophen und das Ideal
der inneren Freiheit, Zwölf gemeinverständliche Vorlesungen ,mit Anhang zum Verständnis
derMystiker, Neudruck der Ausgabe Jena und Leipzig 1904, Aalen 1979, p . 186 , 195-206 ;
248 C . Cassanmagnago, « Il problema della prohairesis in Epitteto » , RFN 69, 1977, p. 232
246 ; 249 G . Segalla , « Il problema della volontà in Epitteto » , Studia Patavina 10 , 1963,
p. 340-379; 250 M . Dragona-Monachou, « Prohairesis in Aristotle and Epictetus. A compari
son with the concept of intention in the philosophy of action » (en grec, résumé en anglais),
Philosophia 8-9, 1978 -1979, p. 265-310 (sur l'originalité du concept de prohairesis chez
Épictète ) ; 251 J. C .Gretenkord , Der Freiheitsbegriff Epiktets, Diss. Bochum 1981 ; 252 F .-R .
Chaumartin , « La quête de la liberté intérieure devant l'oppression du pouvoir dans l'empire
romain . Sénèque et Épictète », VL 1988, n° 110 , p. 10 -17 ; Hershbell 4, p. 2159-2160 ;
253 R .J. Heisler, Epictetus on speech. The argument, Diss. Univ. of Illinois at Urbana -
Champaign 1989 (microfilm ; traduction et commentaire d'Entretiens II 23) ; 254 R . F.
Dobbin , The sense of self in Epictetus: Prohairesis and prosopon , Diss. University of Cali
fornia, Berkeley 1989 ; 255 Id., « Mpoaipeous in Epictetus », AncPhil 11, 1991, p. 111-135.
LE BIEN ETLE MAL :
Cf. 256 R . Cabello , « De transitu a malo ad bonum apud Epictetum sub luce christiana » ,
VerbDom 45, 1967, p. 104-112 ; 257 G .J. Boter,« Epictetus, Encheiridion 27 »,Mnemosyne
45 , 1992, p. 473-481.
L'AMOUR DE DIEUX ET DES HOMMES, LA XAPIE :
Cf. 258 R . Joly , « La charité païenne. A propos d'Épictète, Entretiens III 22, 54 » , BACIL :
1, 1953, p . 21-24 ; 259 H .-J. Klauck, « Dankbar leben , dankar sterben. Eúxoploteiv bei
Epiktet » , dansGemeinde, Amt, Sakrament. Neutestamentliche Perspektiven, Würzburg 1989,
p. 373-390.
LA RELIGION :
Cf. 260 G . Pepe, « La filosofia religiosa di Epitteto », RFN 8 , 1916, p. 2-20, 566 -585;
261 E .G .Gulin, « Die Religion Epiktets und die Stoa » , dans Commentationes philologicae in
honorem professoris emeriti J. A . Heikel, Helsingfors 1926 , p . 32 -47; 262 A . Jagu , « La reli
gion d' Épictète » , R & T 1, 1946, p. 5- 16 (cf. Id . 7, col. 823-830) ; 263 J. Le Hir, « Les fonde
ments psychologiques et religieux de la morale d'Épictète », BAGB 1954, 4 (Lettres d'huma
nité 13), p. 73 -93 ; 264 F . Wawrzynieak , « L ' idée de Dieu dans la science d 'Épictète » , Collec
tanea Theologica 32, 1961, p. 105 -206 ; 265 J.Pépin, Idées grecques sur l'homme etsur Dieu,
« Collection d' Études Anciennes » , Paris 1971, p . 127 - 141, notamment p . 135 - 139 ; 266 R .
Radice, La concezione di Dio e del divino in Epitteto , « Collana di Filosofia » 2, Milano 1982 .
E 33 ÉPICTÈTE 139
E . Épictète et le christianisme.
Épictète connaissait sans doute les chrétiens, peut-être même dès son enfance
à Hiérapolis (cf. supra, B ) . Mais, à ce qu 'il semble , il les connaissait seulement
d 'une façon vague, et il ne les appréciait guère . En effet, il y a des références
dans les Entretiens aux chrétiens (qu'il appelle Galiléens, d 'après l'usage juif).
Un passage incontesté est celui d 'Entretiens IV 7, 6 , sur le mépris chrétien de la
mort (cf. 267 P. Corssen , « Alatpißai IV , 7, 6 », BPhW 30 , 1910 , col. 832).Un
autre moins sûr est celui d 'Entretiens II 9 , 19-21, où Épictète affirme qu 'on est
appelé à juste titre juif lorsqu 'on a été baptisé. 268 D . S . Sharp , Epictetus and the
New Testament, London 1914 , p . 134 , pense que cela fait référence aux chré
tiens. Cependant, la pratique du baptême existait aussi dans les sectes juives (cf.
Souilhé 63 , t. I, p . LXXX sq. n . 3 ; Oldfather 55, n . ad loc.; 269 P. Carrara,
« Galilei e Giudei nelle Dissertazioni di Epitteto (nota a Diss. 2, 9, 19-21)» , dans
Studi in onore di Adelmo Barigazzi, Roma 1984 , t. I (= Sileno 10, 1984 ), p. 111
117) .
Le seul passage sûr présente une image très pauvre des chrétiens: lorsqu'il
parle du manque de peur (åpoßia ), Épictète présente les « Galiléens » comme
exemple des gens qui manifestent de l'intrépidité par accoutumance (ÚTÒ
Douc) ; des gens qui, même s'ils ne se comportent pas ainsi par folie (únò ua
vías), ne le font pas non pluspar raison (ünÒ Nóyou ).
Cependant, trompé par certaines ressemblances entre les idées religieuses
d'Épictète et la doctrine chrétienne, 270 Th. Zahn , Der Stoiker Epiktet und sein
Verhältnis zum Christentum , Erlangen 1894, Leipzig 18952, est amené à croire
qu 'Épictète a dû utiliser plusieurs écrits du Nouveau Testament, notamment
l'Évangile selon Matthieu et l'Évangile selon Luc. Cette hypothèse fut reprise et
développée par 271 K . Kuiper, Epictetus en de christelijke moraal, coll.
« Verslagen en Mededeelingen der k . Akademie van Wetenschappen » 7 ,
Amsterdam 1906 , p . 370 -405. En revanche, elle fut contestée par 272 Fr.Mörth ,
« Epiktet und sein Verhältnis zum Christentum » , dans Festschr. 50. Vers. Klass.
Philolog. Graz, 1909, p . 178-194 , pour qui les quelques parallèles existant dans
l'expression doivent s 'expliquer dans le cadre d 'une polémique d'Épictète contre
les textes sacrés des chrétiens.
C 'est en particulier 273 A . Bonhöffer, Epiktet und das Neue Testament, coll.
« Religionsgeschichtliche Versuche und Vorarbeiten » 10 , Gießen 1911, réimpr.
Stuttgart/Bad Cannstatt 1964, qui a démontré que l'idée qu 'Épictète dépend en
quelque sorte du Nouveau Testament est tout à fait erronée. En effet, à travers
une comparaison minutieuse du vocabulaire et de la doctrine des Entretiens et
des écrits du Nouveau Testament, il arrive à la conclusion qu 'il faut écarter toute
possibilité d 'emprunt entre les uns et les autres. D 'après lui, le stoïcisme et le
christianisme furent deux mouvements parallèles,mais indépendants (cf. Souilhé
63, t. I, p . LXIII). En ce même sens, Sharp 268 , sur la base d'une analyse compa
rative du vocabulaire, conclut que les ressemblances entre les formules des
Entretiens et les écrits du Nouveau Testament (par exemple les Lettres de Paul)
140 ÉPICTÈTE E 33
répondent normalement au fait qu'aussi bien Épictète que les auteurs du Nou
veau Testament parlaient la même langue que les gens ordinaires de l'époque.
Le livre de Bonhöffer a fait l'objet des critiques de 274 M .-J. Lagrange, « La
philosophie religieuse d' Épictète et le Christianisme», RBi n.s. 9, 1912 , p . 5 -21,
192-212, qui revient à la thèse de Zahn 270 avec quelques changements. D 'après
lui, Épictète se consume dans la contradiction entre un matérialisme asphyxiant
et une aspiration mystique, et cette contradiction peut seulement s'expliquer si
on accepte qu 'il se débarrasse de son orthodoxie stoïcienne par l'appel de plus en
plus fort du christianisme. Par conséquent, Lagrange 274 soutient qu'Épictète a
emprunté certains éléments du Nouveau Testament, notamment de Paul. Un avis
similaire , bien quemoins radical, a été défendu par Pepe 260 .Mais la thèse de
Bonhöffer s'est imposée de plus en plus parmi les critiques, car toute analyse
objective montre que, malgré les nombreux parallèles, les différences restent
essentielles (cf. Spanneut 10 , col.630 -632 ; Jagu 7 , col. 829 sq .). Tout au plus
pourrait-on suggérer, comme le fait Souilhé63,t. I, p. LXIV -LXVII, la possibilité
d'une influence indirecte de l'esprit chrétien sur Épictète (cf.Martha 16 , p. 207).
Cf. 275 K . Vorländer, « Christliche Gedanken eines heidnischen Philosophen » , Prj 89,
1897, p. 193- 222 ; 276 R . Bultmann, « Das religiöse Moment in der ethischen Unterweisung
des Epiktet und das Neue Testament» , ZNTW 13, 1912 , p. 97 - 110, 177 -191 ; 277 Id., Der Stil
der paulinischen Predigt und die kynisch -stoische Diatribe, coll. « Forschungen zur Religion
und Literatur des Alten und Neuen Testaments » 13, Göttingen 1910, réimpr. 1984 (cf. Sto
wers 161 et Schmeller 176 ) ; 278 O . Schmitz, Der Freiheitsgedanke bei Epiktet und das
Freiheitszeugnis des Paulus. Ein religionsgeschichtlicher Vergleich , coll. « Neutestamentliche
Forschungen » I 1, Gütersloh 1923 ; 279 L . Stefanini, Il problemamorale nello stoicismo e nel
cristianesimo. Sommario storico e critica ai testi : Seneca De tranquill. animi, Epitteto
Manuale, Marco Aurelio , Pensieri, Nuovo Testamento , Antologia, Torino 1926 ; 280 H . Barth,
« Die Bedeutung der Freiheit bei Epiktet und Augustin » , dans DasMenschenbild im Lichte
des Evangeliums. Festschrift zum 60. Geburtstag von E . Brunner, Zürich 1950 , p . 49-64 ;
281 G . Jossa , « Epitteto e i cristiani» , dans Giudei, pagani e cristiani. Quattro saggi sulla
spiritualità delmondo antico, Napoli 1977 , p . 81- 108 ; 282 J. Amand , « La morale d'Epictète
et le christianisme» , ANRW II 36 , 3 , 1989, p . 2164 -2199 ; 283 A . Jagu , « Christianisme et stoï
cisme, à propos d 'Épictète », dans Actes du Congrès de l'Association G . Budé (Grenoble , 21
25 septembre 1948), Paris 1949, p . 296 -297 ; 284 J. Sánchez Lasso de la Vega, « Der stoische
Weise und der christliche Heilige » , Antaios 8, 1967, p . 385 -399 (cf. 285 Id ., Ideales de la
formación griega, coll. « Biblioteca de Educación y Ciencias Sociales. Serie Investigaciones y
ensayos » 6 ,Madrid 1966, p . 181-272 : « Héroe griego y santo cristiano » ) ; 286 E . P . Papa
noutsos, « 'H noixn piaooopia toŨ 'Emlxtútov », Philosophia 12, 1982, p. 9-25 ; 287 F.
Ferro Gay et J. Lee Benavides, « El cristianismo y el imperio », Nova Tellus 3, 1985, p. 127
148 ; 288 M . D . McGehee, Divine appointment to specific social functions in four Greco
Roman traditions. Paul, Epictetus, Cynics, and Qumran, Diss. Brown Univ ., Providence 1985
(microfilm ).
F. La postérité d 'Épictète.
Si l'on en croit Arrien , dans sa lettre à Lucius Gellius, les notes qu'il avait
tirées des enseignements d'Épictète commencèrent à circuler dans de mauvaises
copies avantmême qu'il se fût décidé à en faire une édition fidèle . Par ailleurs,
nos témoignages montrent que les Entretiens ont été souventlus,mêmeaprès la
rédaction du Manuel par Arrien , aux lie et III° siècles. A partir du IVe siècle le
Manuel semble avoir remplacé de plus en plus les Entretiens.
E 33 ÉPICTÈTE 141
Au II° s. il faut remarquer surtout l'influence d'Épictète surMarc-Aurèle:
Cf. 289 Th.Dupuy, « Épictète et Marc-Aurèle. Leur doctrine», dans Mélanges littéraires
et historiques, Milano 1886, p . 193-208 ; 290 G .Giurdanella Fusci, La filosofia di Antonino in
rapporto con la filosofia di Seneca,Musonio e di Epitteto ,Modica 1904 ; Stanton 240 (cf. su
pra ) ; Spanneut 10 , col.619-621 ; P . Hadot223 p . 135 -153 (« Une clé ... » ; cf. supra) ; Id. 48,
p . 69- 87 (chap . IV : « l'esclave -philosophe et l'empereur-philosophe. Épictète et les Pen
sées » ) ; 291 A . Michel, « Rhétorique et philosophie au second siècle après J.-C .» , ANRW II
34 , 1, 1993, p . 3-78, notamment p . 14 - 19 (« Marc-Aurèle et la tradition d 'Épictète : la critique
de l'éloquence et l'adhésion à la beauté » ) ; 292 E . V .Maltese, « Per il “ manuale ” di Marco
Aurelio » , dans R . Pretagostini (édit.), Tradizione e innovazione nella cultura greca da Omero
all' età ellenistica . Scritti in onore diBruno Gentili,Roma 1993, t. III, p . 1111-1118.
Sur Favorinus, Galien , Aulu -Gelle, Lucien , Celse , Flavius Philostrate , voir Spanneut
10 , col.621-622. Sur Galien, voir encore 293 R . Cadiou, « Épictète et Galien » , BAGB 1954 , 4
(Lettres d 'humanité 13), p . 94- 101 ; 294 P . de Lacy, «Galen and the Greek poets » ,GRBS 7 ,
1966 , p. 259- 266 .
L 'autorité d'Épictète au 11° s. est tellement grande que Celse , ap. Origène,
Contra Celsum VII 54 (test. 17 Schenkl), va même jusqu 'à mettre sa mémoire
d'homme sage et saint à côté de celle de Jésus-Christ. Origène (III° s.) et Gré
goire de Nazianze (Ive s.),même s'ils essayent de combattre ces éloges, avouent
ne pas pouvoir souiller la splendeur de sa vie avec des calomnies. En fait, le
moraliste stoïcien a exercé une influence considérable sur l'æuvre des Pères de
l'Église.
Cf. Spanneut 10, col. 632-650 et 651, qui analyse en détail cette influence chez les Pères
grecs: Justin , Clément d'Alexandrie (II), Origène (III), Athanase, Basile le Grand,Grégoire de
Nazianze, Jean Chrysostome (IV ), Synésios de Cyrène (IV /V ), Palladios, Théodoret (V ),
Procope de Gaza (V /VI) ; etlatins: Arnobe (IV), Ambroise de Milan (IV ), Augustin (IV / ).
En général, on peut dire qu 'Épictète , comme Sénèque, a été accaparé par le
christianisme, notammentdès le Ive ou le ve siècle.
D 'autre part, Épictète a influencé les Néoplatoniciens ( cf. Spanneut 10, col.
622 -626 ) : Plotin (III° s.), Proclus, Hiéroclès (2H 126 ), Théosébios, Damascius
(ve s.), Olympiodore et Simplicius (viº s.).
D 'après Damascius, ap. Photius, loc. cit., le néoplatonicien du ve siècle Théosébios
« parlait le plus souvent en prenant comme point de départ les Entretiens (oyolal] d'Epictète »
(trad . R . Henry ; cf. Spanneut 8 , col. 845).
Épictète a été très présent dans le HautMoyen Age, aussi bien chez les
philles
auteurs chrétiens que chez osoauteurs
r v e n u, spaïens.
umie la premplSimplicius
ace les et de est
DU l'auteur d'un
Comme on sait, le philosophe néoplatonicien
commentaire, qui nous est parvenu, sur le Manuel d'Épictète. L 'édition récente
d'I. Hadot 172 , p . 183 -455, qui représente la première édition critique fondée sur
tous les manuscrits connus de cet ouvrage, remplace les éditions de Schweig
häuser 49 , t. IV (Commentarius in Epicteti Enchiridion ) et de Dübner 52, p. 1
143.
Dans la préface de son commentaire, Simplicius affirme que le Manuel
enseigne à l'âme comment se rendre libre telle que dieu l'a créée, afin qu'elle
n'éprouve aucune crainte de ce qui se trouve au -dessous d'elle. Comme l'a
remarqué I. Hadot 172, p. 51 sq., ce commentaire présente l'énorme intérêt que
142 ÉPICTÈTE E 33
l'auteur interprète un texte stoïcien selon la philosophie néoplatonicienne, dans
la perspective de lamétriopathie péripatéticienne. Par ailleurs, Hadot 172,p. 51
60 (cf. 295 Ead., Le problèmedu néoplatonisme alexandrin : Hiéroclès et Simpli
cius, coll.« Études Augustiniennes», Paris 1978, p. 147- 165) a expliqué la place
que le Manuel tenait dans l'enseignement néoplatonicien. Il s'agissait pour les
néoplatoniciens d'acquérir certaines dispositions morales et de purifier l'âme
avant de commencer avec profit les études de philosophie proprement dites :
« Aux yeux de Simplicius le Manuel constituait le genre d'exhortations non
techniques aptes à fournir l'instruction éthique préparatoire dont le débutant en
philosophie devait déjà être imprégné. Dès lors, il fallait qu'il interprète le
Manuel en se fondant, non pas sur l' éthique stoïcienne culminant dans l'apatheia
du sage stoïcien, comme cela aurait été normal de notre point de vue moderne,
mais sur la métriopathie péripatéticienne. En procédant de la sorte, Simplicius
suit le système éthique néoplatonicien , dans lequel se fondent, d'une manière
tout à fait étonnante et sans jointure apparente , l' éthique du stoïcisme, évidem
ment sans ses basesmatérialistes, l'éthique de l'Ancienne Académie et l' éthique
péripatéticienne.» Pour le système philosophique du commentaire, voir Hadot
172 , p.61-113.
Cf. 296 I. Hadot, « Die Widerlegung des Manichäismus im Epiktetkommentar des Simpli
kios » , AGP , 51, 1969 , p. 31-57 (sur la réfutation du manichéisme, par laquelle Simplicius
complète , en commentant le chap . XXVII du Manuel, la discussion sur l'origine du mal;
cf. Ead . 172 , p . 114 - 144 ) ; 297 Ead ., « Le système théologique de Simplicius dans son com
mentaire sur le Manuel d 'Épictète » , dans Le néoplatonisme. Actes du Colloque de Royau
mont, 9-13 juin 1969, Colloque international du CNRS, Paris 1971, p . 265-279; 298 Ead.,
« La tradition manuscrite du commentaire de Simplicius sur le Manuel d 'Épictète » , RHT 8 ,
1978, p . 1- 198 (recension et classification de tous les mss conservés) ; 299 Ead ., « La tradition
manuscrite du commentaire de Simplicius sur le Manuel d' Épictète. Addenda et corrigenda » ,
RHT 11, 1981, p. 387 - 397 ( concernant notamment le ms. Naples, Bib . Naz., III.B .12 ; cf. aussi
Ead. 172 , p. 163-182 : « Bref aperçu de l'histoire du texte » ) ; 300 Ead., « La doctrine de Sim
plicius sur l'âme raisonnable humaine dans le Commentaire sur le Manuel d 'Épictète » , dans
H . J. Blumenthal et A . C . Lloyd ( édit.), Souland the structure of being in late Neoplatonism .
Syrianus, Proclus and Simplicius. Papers and discussions of a colloquium held at Liverpool,
15 - 16 April 1982, Liverpool 1982, p . 46 -71; 301 G . Cortassa, « Uno stoico di età giustinianea :
Simplicio interprete di Epitteto » , dans F . Conza (édit.), Byzantina Mediolanensia. V
Congresso nazionale di studi bizantini (Milano, 19-22 ottobre 1994 ), coll. « Medioevo
romanzo e orientale. Colloqui» 3,Messina 1996 , p. 107-116.
Sur la tradition moderne du commentaire, voir 302 P . Hadot, « La survie du commentaire
de Simplicius sur le Manuel d' Épictète du XVe au XVIIe siècles : Perotti, Politien , Steuchus,
John Smith , Cudworth » , dans I. Hadot (édit.), Simplicius, sa vie , son æuvre, sa survie . Actes
du colloque international de Paris (28 sept. - 1er oct. 1985), coll. « Peripatoi » 15 , Berlin /New
York 1987, p. 326 -367.
Enfin , ce commentaire a été l'objet d'un résumé: cf. 303 M . Spanneut, « Un abrégé
inconnu du Commentaire de Simplicius sur Épictète (Vatopédi 738 , f. 2685-286V) » , dans
F. Paschke (édit.), Überlieferungsgeschichtliche Untersuchungen , coll. TU 125 , Berlin 1981,
p. 531-541 (cf. Id. 10, col.626 ).
Sur l'influence d'Épictète sur les philosophes arabes, notamment sur Ya'qūb
b.İsḥāq al-Kindi (1Xe s.),voir Spanneut 10 ,col.626 sq.(cf.Id. 338, p. 206 -208).
E 33 ÉPICTÈTE 143
L' influence d'Épictète chez lesmoines chrétiens aboutit à ce qu'on a appelé
l'« Épictète chrétien » :
Cf. 304 F. Liguori, « Il Manuale di Epitteto tra i cristiani» , ScCart 58, 1930, p . 297-303;
305 O . Schissel von Fleschenberg, « Zur handschriftlichen Überlieferung des christlichen
Epiktet» , Byz] 8 , 1930, p . 444-447 ; 306 A . Dain , « Introduction inédite à l'Épictète chrétien » ,
dans Mélanges de philosophie grecque offerts à Mgr Diès, Paris 1956 , p. 61-68 ; Spanneut 8 ,
col. 833-842, à qui nous empruntons les informations qui suivent.
En effet, on comprend sous le nom d'« Épictète chrétien » une série de docu
ments qui révèlent une exploitation d'Épictète (notamment du Manuel) par
l'ascèse des moines chrétiens. Il est impossible de les situer avec précision dans
le temps et dans l'espace :
(A ) LE TRAITÉ DU PSEUDO-ANTOINE :
Cf. 307 I.Hausherr, « Un écrit stoïcien sous le nom de Saint Antoine Ermite » , dans Id ., De
doctrina spirituali christianorum orientalium quaestiones et scripta , I, coll. « Orientalia
Christiana » 30 , 3 (n° 86 ),Roma 1933, p.212 [70] – 216 [74 ](chap. V) ; Spanneut 8, col. 834
sq . ( cf. Id . 10, col. 662-664).
Le traité stoïcien attribué à saint Antoine l' ermite , comprenant 170 chapitres
tres brefs (του εν αγίοις Πατρός ημών 'Αντωνίου του Μεγάλου παραινέσεις
nepi ñeous åvopúrwv xai xenorñs noliteiac), porte la marque et parfois
reprend le texte même d'Épictète . Spanneut 8, col. 834, reprend l'hypothèse de
Hausherr 307, selon laquelle ce traité date des tout derniers temps de la Stoa .
(B) LE MANUEL DU PSEUDO-NIL :
Texte : 308 J.-M . Suárez, ToŰ Év Áyious natpos nuwv Nelov... Móyou. Sancti Patris
nostri Nili, Tractatus seu opuscula ... JosephusMaria Suaresius..., graece primum edidit, latine
vertit ac notis illustravit, Romae 1673 (editio princeps ; cf. 309 J. P .Migne, PG 79, 1285
1312) ; Schweighäuser 51, t. V , p . 95-138 (Nili ascetae Manuale Epicteti, ad usum iuvenum
christianorum adcommodatum ).
Cf. 310 C. Wotke, « Handschriftliche Beiträge zu Nilus' Paraphrase von Epiktets Hand
büchlein » , WS 14, 1892, p . 69-74 ; Spanneut 8 , col. 835-837 (cf.Id . 10, col. 664-665);
311 M . Piscopo, « Utilizzazioni cristiane di Epitteto in alcune parafrasi delManuale » , dans
Studi classici in onore di Quintino Cataudella , Catania 1972, t. II, p. 601-605 ; 312 Id., « La
tradizione manoscritta della paraphrasi del Manuale di Epitteto di S. Nilo », dans J. Dummer
(édit.), Texte und Textkritik . Eine Aufsatzsammlung, coll. TU 133, Berlin 1987, p . 505-508.
Il s'agit là d'une version interpolée du Manuel (en grec ), légèrement christia
nisée, sans doute au service de l'ascèse monastique. La tradition manuscrite du
Moyen Age la place sous le patronage de Nil d ’Ancyre, dit l'ascète (IV s.), le
préfet de Constantinople qui, trop fatigué par la corruption de la cour d'Arca
dios, se retira avec son fils au désert du Sinaï. En réalité, d'après Spanneut 8, col.
834, Épictète semble absentde la littérature monastique de l'époque patristique:
c'est trompé par cette fausse attribution qu 'on a mis Épictète parmi les sources
de la spiritualité ascétique (cf. infra ).
La comparaison avec le texte original du Manuel a été faite par 313 P .- G . Chappuis, La
destinée de l'homme. De l'influence du stoïcisme sur la pensée chrétienne primitive, Genèvel
Paris 1926 , notamment p . 145 -152. Cette analyse permet de constater qu 'on a fait un décou
page nouveau du texte (les 53 chapitres d 'Épictète deviennent 72 ou 73) ; on a introduit
quelques altérations afin de glisser une note chrétienne (par exemple, Zeus devient Oeos
xúploc ; Socrate, saint Paul) ; enfin, on a supprimé quelques parties, dans le dessein d 'exorci
144 ÉPICTÈTE E 33
ser les marques les plus évidentes de son origine païenne (par exemple , le chap . 32 consacré à
la divination ), bien que ce travail ne semble pas avoir été réalisé avec un grand soin .
Quant à la date de composition , 314 S. Le Nain de Tillemont,Mémoirespour
servir à l'histoire ecclésiastique des six premiers siècles, t. XIV , Paris 1709,
p.210 , a déjà mis en doute l'attribution à Nil, et Migne publia l'æuvre parmiles
spuria de cet auteur. A son tour, 315 F . Degenhart, Der hl. Nilus Sinaita . Sein
Leben und seine Lehre vom Mönchtum , coll. « Beiträge zur Geschichte des alten
Mönchtums und des Benediktinerordens» 6 ,Münster 1915, notamment p. 18-20 ,
montre l’incompatibilité de cette version du Manuel avec l’æuvre de Nil. Il veut
l'attribuer à un correspondant de Nil, Comasius, ancien rhéteur devenu moine.
Mais, d 'après Spanneut 8, col. 836 , l'hypothèse la plus vraisemblable est celle de
316 O . Bardenhewer, Geschichte der altkirchlichen Literatur, t. IV , Freiburg im
Breisgau 19242, p. 161- 178, selon laquelle l'ouvrage est de quelques siècles
postérieur à Nil,bien qu'on ne puisse préciser davantage la date. Aujourd 'hui les
critiques se rangent unanimement à cet avis.
(C) LA PARAPHRASE CHRÉTIENNEDU MANUEL:
Texte : 317 M . Casaubon, Epicteti Enchiridion, una cum Cebetis Tabula, graece et latine
(interprete H . Wolfio ), cum notis Merici Casauboni..., Eiusdem Enchiridii Paraphrasis Grae
ca , numquam antehac edita , item Paraphraseos versio, cum notis eiusdem , Londini 1659
(editio princeps); Schweighäuser 51, t. V, p. 10-94.
Cf. Spanneut 8, col. 837 -840 (cf. Id. 10 , col. 665-667); 318 M . Piscopo, « La tradizione
manoscritta della Paraphrasis Christiana del Manuale di Epitteto » , Helikon 9 - 10, 1968 -1970 ,
p. 593-603.
Il s'agit d 'une adaptation anonyme du Manuel (encore en grec ), nettement
liée au monachisme, connue comme Paraphrase chrétienne. D 'après l'analyse
de Spanneut 8 , l'adaptation, cherchant surtout à christianiser le texte , à l'adapter
à la vie monastique, est ici plus profonde et plus fine. Elle produit un vrai « texte
parallèle » qui suit le Manuel de bout en bout, et met en évidence un travail
beaucoup plus personnel, plus perspicace et plus exigeant que celui du Pseudo
Nil : « L 'auteur de la Paraphrase repense son texte en philosophe» (col. 838). A
la différence du Pseudo-Nil, il n 'est pas l'esclave du texte original: « Il abrège,
précise ,complète, adapte. Ilprend ses responsabilités d'auteur.Avec intelligence
et finesse, il corrige ce qui, du point de vue de la philosophie ou des mœurs , lui
paraît incompatible avec la morale chrétienne. Il en tire une œuvre qui, tout en
restant stoïcienne, est authentiquement chrétienne et capable de rendre service
aux moines, ses destinataires » (col. 840).
Quant à la date de l'écrit, Spanneut 8 , ibid ., lui concède une relative antiquité.
Étantdonné que la Paraphrase est à la source d 'un commentaire très célèbre au
xe siècle (cf. infra), il la place au plus tard au IX° s.
(D ) LE COMMENTAIRE DE LA PARAPHRASE CHRÉTIENNE :
Cf. Schweighäuser 51, t. III, p . 140 ; 319 S. Lindstam , « Ein byzantinischer Kommentar der
christlichen Paraphrase des Encheiridions », ByzZ 30 , 1929-1930, p. 43-49 ; Spanneut 8 , col.
840 -842 (cf. Id . 10, col. 667-670 ); 320 Id ., « Quelques aspects du stoïcismeau Moyen Age » ,
dans Actes vire Congrès de l'Association G . Budé (Aix -en - Provence, 1-6 avril 1963), Paris
1964, p . 118 -120 ; 321 Id ., « La tradition manuscrite d 'un commentaire chrétien d 'Épictète » ,
E 33 ÉPICTÈTE 145
Philologus 108, 1964, p. 128 -137 (commentaire, précédé d'une introduction ) ; 322 Id .,
« Image de l'homme dans un commentaire chrétien inédit du Manuel d'Épictète » , dans
Images ofman in Ancientand Medieval thought. Studia Gerardo Verbeke ab amicis et colle
gis dicata , coll. « Symbolae Fac . Litt. & Phil. Lovaniensis » 1 , Leuven 1976 , p . 213 -230 ;
323 Id ., « Stoicismebyzantin autour du IXe siècle d 'après un document inédit » ,MSR 34, 1977
nº spécial (Universitas), p . 63- 79 ; 324 Id., « Techne , morale et philosophie chrétienne dans un
document grec inédit du ixe (?) siècle » , Orpheus 2, 1981, p . 58 -79 (édition , traduction et
commentaire) ; 325 A .M . Santerini Citi, « Il commento anonimo alla Parafrasi cristiana del
Manuale di Epitteto » , SIFC 51, 1980, p . 50 -71 (sur la tradition manuscrite , la date de
rédaction et le texte ).
Dans une quinzaine de manuscrits on lit un commentaire grec anonyme sur le
Manuel d'Épictète (ěEńymouc eis tò 'Erxelpídlov), dont le texte semble plus ou
moins complet. Les destinataires de ce commentaire semblentbien être clercs ou
moines (cf. Spanneut 8, col. 841). D 'après l'analyse de Spanneut 8 , ibid., son
auteur se révèle moins moraliste et plus philosophe que l'auteur du texte qui lui
sert de base ; il s'occupe de l'homme et de son essence plus que de religion.
Spanneut rapproche plutôt ce commentaire , profondément stoïcien , de celui de
Simplicius, qui semble bien l'avoir inspiré quelquefois. Par ailleurs, l'anonyme
semble avoir utilisé aussi directement le texte originel du Manuel pour son
commentaire de la version chrétienne. Ce commentaire date du IXe siècle au plus
tard , car deux manuscrits sont du Xe s.
Dans certains manuscrits tardifs (xve/XVIIe siècles), on attribue un commentaire du
Manuel ('EEńynois ueplan eis tò toŨ 'Enixthtov 'EyxElpídlov) à Georges Lacapène,
moine en Thessalie au XIVe siècle , précurseur de l'humanisme. Cette attribution est acceptée
encore à la fin du XIXe s. (cf. 326 V . Lundström , « Ad Georgium Lacapenum » , Eranos 2 ,
1897, p . 47-48). Cependant, comme le remarque Spanneut 8, col. 840 (cf. Id. 10, col. 668),
étant donné que le texte de ce commentaire se révèle le même que celui de l'euvre qui se lit
quatre siècles auparavant, cette attribution perd tout fondement.
(E ) VERSION DU MANUELDANS LE MS. VAT. GR. 2231:
327 M . Spanneut, « Épictète chez les moines», MSR 29, 1972 , p. 49-57, a
étudié aussi une autre version du Manuel, jusqu 'alors inexploitée, qu 'il considère
comme indépendante des précédentes et plus typiquementmonastique. Elle se lit
dans le manuscrit VaticanusGraecus 2231 (XIVe s.), fol. 62 -74 .
Tous ces documents témoignent d'une surviemanifeste du Manuel au Moyen
Age et de son influence profonde au moins dans certains milieux spirituels. En
fait, des 54 manuscrits qui nous sont parvenus, un date du XIIe siècle, deux du
Xueet six du XIV°. En revanche, il semble bien établi depuis Schenkl 52, p. LV,
que les Entretiens ont traversé le Moyen Age grâce à un seul manuscrit, le
Bodleianus, cod.Graec.misc. 251 (fin du Xie ou début du XIe siècle ), dont tous
les autres manuscrits (20) ne seraient, directement ou indirectement, que des
copies (cf. Spanneut 8, col. 844 sq.).
A Byzance, cet ouvrage ne semble avoir intéressé que quelques érudits
(cf. Spanneut 8 , col. 845 sq.), notamment Photius, le patriarche de Constanti
nople (IXe s.), et Aréthas de Patras, métropolite de Césarée (XⓇ s.), auteur d'une
série de scholies sur les Entretiens. Par ailleurs, des extraits des Entretiens figu
raient dans des florilèges, qui contenaient aussi des extraits tirés du Manuel,
146 ÉPICTÈTE E 33
mais incluaient parfois aussi des extraits faussement attribués au moraliste (cf.
supra , C ).
En Occident, comme le remarque Spanneut 8 , col. 847 sq., l'hellénisme a
disparu au plus tard au Vie siècle . Il est donc peu probable qu 'Épictète y ait
exercé une influence sérieuse avant l'existence de traductions en latin : le Manuel
n ' est traduit qu 'au XVe siècle (la traduction manuscrite de Perotti date de 1453,
celle imprimée de Politien de 1497) ; les Entretiens ont été traduits au milieu du
xvie siècle ,par J. Schegk 72 (Basileae 1554,avec le texte grec de Trincavelli).
Cependant, le nom d 'Épictète a trouvé une certaine célébrité dans le monde
nordique à l'époque d ’Alcuin (VIII /IXe siècles), dans le genre de littérature par
questions-réponses, en latin (Spanneut 8, col. 848 ; Id . 10 , col. 657-660).
En premier lieu, il a existé une Altercatio Hadriani et Epicteti, composée de
73 questions d ’Hadrien, très brièvement résolues par Épictète. D 'après ses der
niers éditeurs, 328 L . W . Daly et W . Suchier , Altercatio Hadriani Augusti et
Epicteti philosophi, coll. « Illinois Stud. in Lang. & Lit. » XXIV , 1 -2, Urbana
1939, il s'agit d 'un produit des 11° /111e siècles plutôt que d 'une élaboration du
Moyen Age. Quoi qu 'il en soit, comme le remarque Spanneut 8 , ibid ., cet
opuscule était très connu dès le Viie siècle . D 'après 329 E . Löfstedt,« Zur Datie
rung der Altercatio Hadriani et Epicteti » , C & M 7 , 1945 , p. 146 -149, certains
indices linguistiques interdisent de le placer plus tôt que le ve siècle. Il a été tra
duit en français par 330 Jean de Coras (Altercacion, en forme de dialogue, de
l'empereur Adrian et du philosophe Épictète, contenant soixante et treze ques
tions et autant de réponses, rendu de latin en françois par J. de Coras, aveq la
paraphrase dumêmeautheur, Tolose et Paris 1558).
Cet ouvrage inspira un doublet: Disputatio Hadriani et Epicteti philosophi,
de 21 questions presque toutes communes avec l' Altercatio. Mais c'est un autre
ouvrage, un dialogue entre Hadrien et le jeune Épictète (iuvenis Epictitus ), qui
semble avoir été le plus célèbre, à en juger par sa tradition manuscrite (7 mss des
X®/xve siècles). 331 W . Suchier, Das mittellateinische Gespräch « Adrian und
Epictitus » , nebst verwandten Texten (Joca monachorum ), hrsg. und untersucht
von W . S ., Tübingen 1955, p . 44 sq., le juge antérieur à 650. Comme le re
marque Spanneut 8, col. 848 : « Il a été traduit en français , en provençal et en
kymrique. Il a fourni une paraphrase qui a elle -même 7 traductions. Enfin , il a
inspiré au 13° siècle l'Enfant sage. Ce dernier dialogue, où le principal inter
locuteur est un enfant prodige, Epitus, a été répandu dans toute l'Europe occi
dentale jusqu'au 19e siècle . »
Spanneut 8 , ibid ., précise que cette littérature se trouve très éloignée de la
philosophie authentique d'Épictète : « ...l'usage qu 'on fait ici d'Épictète ne révèle
pas qu 'on ait connu, si peu que ce soit, sa philosophie . A voir ces jeux littéraires
placés sous le patronage de l'austère moraliste et totalement étrangers à sa
doctrine, on a l'impression qu 'on ignorait le sens véritable de son æuvre. »
Spanneut met l'accent sur l'absence d'Épictète dans le monde latin du Moyen
Age : « Même un Jean Scot érigène, le meilleur helléniste de l'époque, l'ignore...
E 33 ÉPICTÈTE 147
Seul Jean de Salisbury † 1180 ,à deux reprises, invoque le témoignage d'Épictète
dans son Policraticus...»
On peut trouver une vue d' ensemble sur la réception d'Épictète à l' époque
moderne, notamment aux XVI et XVIIe siècles, chez d'Angers 9, col. 849 -854 .
Cf. 332 F. Strowski, Histoire du sentiment religieux en France au XVIIIe siècle, Paris
19094 ; 333 L . Zanta, La Renaissance du Stoïcisme au XV e siècle , Paris 1914 ; 334 R . M .
Wenley, Stoicism and its influence, New York 1927 ; 335 H . Busson, La pensée religieuse
française de Charron à Pascal, Paris 1933, p. 379 -429 (chap. VIII : « Stoïciens et Épicu
riens » ) ; 336 J.-E . d'Angers, « Le stoïcisme en France dans la première moitié du XVIIe siècle.
Les origines (1575 - 1616 ) » , Et. Franc. n.s. 2, 1951, p. 287 - 297, 389 -410 ; 3, 1952, p. 5 - 20 ,
133 -158 ; 337 Id., « Le renouveau du stoïcisme en France au 16e et au début du 17e siècle » ,
dans Actes Vipe Congrès de l'Association G . Budé (Aix-en - Provence, 1 -6 avril 1963), Paris
1964 , p . 122- 153 ; 338 M . Spanneut, Permanence du stoïcisme. De Zénon à Malraux, Gem
bloux 1973, passim (résumé de la vie et de la doctrine d 'Épictète aux p . 74 -88 ) ; 339 K . A .
Blüher, Séneca en España . Investigaciones sobre la recepción de Séneca en España desde el
siglo XIII hasta el siglo XVII, coll. « Biblioteca Románica Hispánica. II. Estudios y Ensayos >>
329,Madrid 1983 (traduit de l'édition originale allemande,München 1969), passim .
C 'est en Italie au XVI° siècle qu'Épictète (et le stoïcisme avec lui) est redé
couvert. D 'après d'Angers 9 , col. 849, ce renouveau répond à une méprise : le
fait que les milieux platoniciens de Florence prenaient Épictète pour un disciple
de Platon . La connaissance d'Épictète devient alors possible grâce notamment à
deux publications (cf. supra, A ):
(a ) la traduction du Manuel par Ange Politien en 1497 (340 Philippus Beroaldus [ édit.],
Censorinus, De die natali. Tabula Cebetis. Dialogus Luciani. Enchiridion Epicteti. Basilius.
Plutarchus, De invidia et odio, Bononiae 1497) : cf. 341 R . P . Oliver, « Era plagiario Poliziano
nelle sue traduzioni di Epitteto e di Erodiano ? » , dans II Poliziano e il suo tempo, Atti del IV
Convegno internazionale di Studi sul Rinascimento (Firenze-Palazzo Strozzi 23-26 sett.
1954 ), Firenze 1957, p . 253-271 ; 342 Id ., « Politian 's translation of the Enchiridion », TAPHA
89, 1958, p . 185 - 217 ; Maltese 71, p . 49-57 ; 343 Id., « Nota sul ms. Taur. J . III. 13 : (per l' En
cheiridion del Poliziano )» ,RPL 14 , 1991, p . 143-146 ; 344 G . J. Boter, « The Greek sources of
the translations by Perotti and Politian of Epictetus' Encheiridion » , RHT 23, 1993, p. 159 .
188 .
(b) l'édition des Entretiens par V. Trincavelli en 1535.
L'influence de ces ouvrages se ressent en Italie au XVIe siècle chez ceux que
Spanneut 8, col. 850 , appelle les « humanistes chrétiens » : par exemple , 345 A .
Steuco , bibliothécaire du Vatican, auteur de l'ouvrage De perenni philosophia
libri X , Lugduni 1540, Basileae 1552 ; 346 I. de Loyola, qui publie à Rome ses
Exercitia spiritualia (1548 ) ; C . Borromeo († 1584 ), qui semble avoir eu le
Manuel comme livre de chevet; ou L . di Gonzaga († 1591). D 'après Spanneut,
l'opposition faite au stoïcisme dans ce siècle (par des personnages comme G .
Contatini († 1542] ou J.-B. Crispi ( † 1595]) explique qu’Épictète ait été ignoré
des auteurs spirituels du XVIIe siècle . Cependant, il cite le jésuite 347 B . Castori,
Institutione civile e christiana, per uno che desideri vivere, tanto in corte quanto
altrove, honoratamente e christianamente , Roma 1622 (cf. 348 J.- E . d ' Angers,
« Étude sur les citations de Sénèque et d 'Épictète dans l' Institutione civile e
christiana de B . Castori, S.J. ( 1622)» , MSR 17, 1960, p. 81- 103), auquel il faut
ajouter M . Ricci,missionnaire jésuite en Chine dans les premières années de ce
148 ÉPICTÈTE E 33
siècle (cf. 349 Chr. Spalatin , « Matteo Ricci's use of Epictetus' Encheiridion » ,
Gregorianum 56 , 1975, p . 551-557).
En pays germanique, Spanneut 8 , col. 850 sq., constate que l'influence des
humanistes italiens se ressent surtout chez les luthériens, qui utilisent Épictète
comme autorité dans le domaine de la philosophie naturelle, bien qu'ils le criti
quent en partie : ainsi, J. Schegk et H . Wolf, qui font des traductions et des édi
tions (cf. supra , A ) ; et 350 Th . Kirchmeyer (Naogeorgius), qui publie à
Strasbourg une Moralis philosophiae medulla , qui n'est rien d'autre qu'un com
mentaire du Manuel (Moralis philosophiaemedulla , docens quo pacto ad animi
tranquillitatem beatitudinemque praesentis vitae perveniri posset, nempe
Epicteti Enchiridion , graece ac latine, cum explanatione Thomae Naogeorgi,
Argentorati 1554 ). Mais la personnalité la plus influente dans le renouveau
d'Épictète est le flamand 351 Justus Lipsius, protestant converti au catholicisme,
qui devientle père du stoïcisme chrétien (le soi-disant « Néo-stoïcisme» ). Il veut
passionnément christianiser Épictète dans ses Manuductionis ad stoicam philo
sophiam libri tres, L. Annaeo Senecae aliisque scriptoribus illustrandis, Antuer
piae 1604. Qui plus est, certains de ses disciples, comme 352 C . von Marth, dans
ses Adversariorum commentariorum libri LX (Francfort 1624 ), vont jusqu 'à dire
qu ’Épictète fut réellement chrétien . D 'autres, en revanche (comme J. Caselius
(† 1613) ou M . Casaubon ( † 1671]), se contentent de soutenir que le philosophe
a reçu l'influence de l'Évangile .Mais ce point de vue est tout à fait contesté par
d 'autres auteurs, comme le français Claude Saumaise, réfugié en Hollande
(† 1653) , qui défend un Épictète purement stoïcien .
Cf. 353 J. L . Saunders, Justus Lipsius. The philosophy of Renaissance stoicism , New York
1955 ; Oldfather 55 , t. I, p. XXVIII -XXX ; 354 W . Dilthey, Gesammelte Werke, Stuttgart
Göttingen 19606, t. II, p. 153- 162 (« Einfluss der Stoa auf die Ausbildung des natürlichen
Systems der Geisteswissenschaften » ) ; p . 439 -457 ( « Anthropologie, Stoa und natürliches Sys
tem im XVII. Jahrhundert » ). Voir également l'étude récente de 355 J. Lagrée, Juste Lipse et
la restauration du stoïcisme. Étude et traduction des traités stoïciens, De la constance,
Manuel de philosophie stoïcienne, Physique des stoïciens (extraits ), coll. « Philologie et
Mercure » , Paris 1994, 269 p .
D 'après Spanneut 8, col. 851, la tendance à distinguer etmême à opposer le
stoïcisme et le christianisme se renforce au XVIIIe siècle, notamment avec
356 J.F . Buddhaeus, Analecta historiae philosophicae, Halae Saxonum 1706 ,
17242, 357 J. A . Fabricius, Bibliotheca Graeca sive Notitia scriptorum veterum
Graecorum , quorumcumque monumenta integra aut fragmenta edita extant,
Hamburgi 1705-1728 (17904, édit. par G .Chr. Harles, réimpr. Hildesheim 1966
1970) et surtout 358 M . Rossal, Disquisitio de Epicteto philosopho stoico, qua
probatur eum non fuisse christianum , Groningae 1708.
D 'après lui, l'évolution en France a été plus ou moins analogue : « Dans la
première moitié du XVIe siècle, Épictète est très peu connu. Érasme († 1536 )
exerce toute son influence et, s'il admet quelques thèses stoïciennes, il en rejette
un nombre plus grand encore . R . Gaguin († 1501), G . Budé († 1540 ) ainsi que
l'espagnol L . Vives († 1540 ) pensent comme lui. Les Opera omnia de Politien
ontbien été publiées à Paris en 1512, mais les traductions d 'Épictète qu 'elles
E 33 ÉPICTÈTE 149
contenaient ont seulement fourni quelques textes à des humanistes qui s'effraient
de l' apathie stoïcienne et la rejettent ironiquement. C 'est par les protestants, et
donc vraisemblablement depuis l'Allemagne, que les æuvres du philosophe
phrygien font leur apparition » (ibid.). Spanneut cite 359 A . du Moulin , traduc
teur du Manuel (Manuel d 'Épictète, Lyon 1544 ); J. de Coras, traducteur de
l'apocryphe Altercatio Hadriani et Epicteti ( 1558 ; cf. supra ); et 360 A . de
Rivaudeau, traducteur aussi du Manuel (La doctrine d 'Épictète stoïcien, comme
l'homme se peut rendre vertueus, libre , heureus et sans passion , traduite du grec
en françois , Poitiers 1567 ; cf. 361 L .Zanta , La traduction française du Manuel
d 'Épictète d 'André de Rivaudeau au XVIe s., Thèse compl. Lettres Paris 1914 ).
Les catholiques deviennent des traducteurs d 'Épictète sous l' influence de J.
Lipsius : ainsi, ses disciples 362 G . du Vair, Le Manuel d 'Épictète , les Responces
d 'Épictète aux demandes de l'empereur Adrian, Paris 1591 (cf. 363 Id.,La
Saincte philosophie, la Philosophie des stoïques, Manuel d 'Épictète..., Lyon
1600 ; 364 P.Mesnard , « Du Vair et le néostoïcisme» , RPhilos 2, 1928 , p . 142
166 ), J. Goulu , feuillant (cf. supra, A ), et 365 P . de Bouglers (Manuel, Douai
1632). Au XVIIe siècle , malgré la position plutôt critique à l'égard d'Épictète
adoptée par les « humanistes chrétiens» à la suite de F. de Sales († 1622 ] (cf.
notamment l'évêque J.- P. Camus en 1613 ; le capucin Y . de Paris en 1638 / 1642;
le jésuite J. Hayneuve en 1639), Spanneut 8, col. 851, parle d'un renouveau du
stoïcisme chrétien , qu 'il voit représenté par d'autres disciples de J. Lipsius : le
cardinal A . de Richelieu, sur commande duquel travaille sans doute 366 J.
Desmarets de Saint-Sorlin, Lesmorales d' Épictète , de Socrate, de Plutarque, de
Sénèque, Paris 1653, 1655, 1659 (cf. Spanneut 338, p. 217) ; 367 G . Boileau , La
Vie d 'Épictète et l'Enchiridion, ou l'Abrégé de sa philosophie, avec le Tableau
de Cébès, traduis du grec en françois, Paris 1655) ; le tertiaire franciscain 368 J.
M . de Bordeaux, Épictète chrestien, 1ère partie, Paris 1658 ; le chancelier de
l'Église de Paris 369 N . Cocquelin , Le Manuel d 'Épictète , avec des réflexions
tirées de la morale de l'Évangile, Paris 1688 ; le jésuite 370 M . Mourgues,
Parallèle de la morale chrétienne avec celle des anciens philosophes, Toulouse
1701, Paris 1702 (contient la traduction du Manuel et des additions de la
paraphrase anonyme) ; et l'abbé 371 J.- B. de Bellegarde, Les Caractères
d 'Épictète, traduits du grec, avec l'explication du Tableau de Cébès, la Vie
d'Épictète par G . Boileau, le Discours sur la destinée des âmes, tiré de la
République de Platon, le Discours sur la tranquillité de l'âme, tiré d 'Hipparque,
le Dialogue de l'empereur Hadrien et du philosophe Épictète , Trévoux 1700 ).
Spanneut 8 , col. 851, 853 sq., cite aussi le récollet P. Rapine ( 1670), mais dans la
ligne d' A . Steuco (cf. supra ; 372 J.- E . d ' Angers, « Le stoïcisme, Épictète et
Sénèque dans le développement du monde d'après les æuvres de Pascal Rapine
de Sainte -Marie , récollet (1655 - 1673) » , CollectFrancisc 23, 1953 , p. 229-264 ,
notamment p. 255-258). L 'un et l'autre , d'après lui, au lieu de donner une inter
prétation chrétienne d'Épictète (et du stoïcisme en général), comme le font les
disciples de J. Lipsius, « le mettent sur le mêmeplan que les autres philosophes
et l'interprètent en fonction d 'un développement de la pensée humaine » .
150 ÉPICTÈTE E 33
Épicure II Apia
E 36 ÉPICURE DE SAMOS 167
En s'installant à Athènes en 307/6 , Épicure laissa à Lampsaque une commu
nauté semblable à celle qu 'il avait édifiée à Mytilene. Deux fragments d'une
Lettre aux amis résidant à Lampsaque ont été conservés ( fr. 96 - 97). D 'après le
fr . 97 , il semble que Léonteus résidait alors (archontat de Philippos : 292/ 1) à
Lampsaque et nous avons des fragments de lettres à Thémista et à Léonteus qui
datent de cette même année (fr. 50 et67). Dans une autre lettre, connue par Plu
tarque, Non posse suaviter 6 , 1090 e (fr. 189 Usener; absente du recueil d'Arri
ghetti), Épicure racontait avoir échappé de peu à un naufrage durantun voyage à
Lampsaque.
Selon 78 A .Grilli, « Il naufragio d'Epicuro » , RSF 33, 1978, p . 116 - 118 , on trouverait une
allusion à ce naufrage dans un passage d 'Héraclite le Stoïcien , Problèmes homériques 79 , 7
distinguantUlysse et Épicure.
Selon 79 M .Marcovich , « Epicurus' shipwreck » , ZAnt 23, 1973, p . 211, il faudrait lire
dans Plut., Non posse suaviter vivi sec. Epicurum 1090 e, áracoav kúpußpaotixńv.
Diogène Laërce X 10 connaît lui aussi aussi deux ou trois voyages d 'Épicure
en lonie pour visiter ses amis et, dans un fragment de lettre à un enfant (fr. 261
Arrighetti) dont l' attribution à Épicure n 'est cependant pas certaine, l'auteur rela
tait une arrivée à Lampsaque en compagnie de Pythoclès, d 'Hermarque et de
Ctésippe ( C 226 ), ainsi que les retrouvailles avec Thémista et les autres amis.
Dans les années 293-291, la communauté de Lampsaque fut le cadre d'une
crise liée à l'influence de l'école voisine de Cyzique qu 'avait fondée le mathé
maticien académicien Eudoxe de Cnide (2 - E 98 ). Sur cette crise, voir 80 L .
Spina, « Eudosso e i “ Ciziceni” nei papiri ercolanesi » , CronErc 1, 1971, p . 79
72 , et 81 D . Sedley, « Epicurus and themathematicians of Cyzicus », CronErc 6 ,
1976 , p . 23-54.Une des figures importantes au cours de ces événements semble
avoir été l'épicurien Pythoclès, disciple de Polyen à Lampsaque. C 'est égale
ment à Lampsaque qu 'il faut rattacher le nom d 'un autre disciple, un certain
Cronius ( - C 222), dont plusieurs lettres d 'Épicure citées par Philodème font un
exemple de vie philosophique. Voir également Liebich 39, Militello 38 , p. 37
38.
Sur le problème plus général d'une conception épicurienne des mathéma
tiques, voir 82 J. Mau , « Was there a special Epicurean mathematics ? », dans
E . N . Lee, A . P Mourelatos et R . M . Rorty (édit.), Exegesis and argument. Studies
in Greek philosophy presented to G . Vlastos, coll. « Phronesis Suppl.» 1, Assen
1973, p . 421-430. Voir aussi 83 A . Angeli et T. Dorandi, « Il pensiero matema
tico di Demetrio Lacone» , CronErc 18 , 1987, p . 89-103.
Le Jardin . Épicure acheta au prix de 80 mines (D . L . X 10) un jardin situé
dans la banlieue ouest d' Athènes (Sénèque, Epist. 79, 15 ), au-delà de la Porte
Dipylon sur la route quimenait à l'Académie (Cicéron , Fin . V 1, 3). Voir un
dessin de Candace H . Smith illustrant la région dansLong et Sedley 12 ,t. I, p . 4.
Il semble qu 'il faille en distinguer la maison « sise à Mélité» (D . L . X 17), dont
le modeste jardin (Sénèque, Epist. 21, 10 ) aurait coûté 20 mines (Pline, N . H .
XIX 4). Sur ces problèmes d' interprétation topographique, voir 84 R . E.
Wycherley, « The Garden of Epicurus », Phoenix 13, 1959, p . 73-77, et 85 M .L .
168 ÉPICURE DE SAMOS E 36
Clarke, « The Garden of Epicurus» , Phoenix 27, 1973, p . 386 -387. Voir aussi
86 M . Gigante , « Il giardino di Epicuro » = " Atakta” LIII, CronErc 20 , 1990 ,
p. 69-70, repris dans 87 Id., Atakta . Contributi alla papirologia ercolanese .
Presentazione di Fulvio Tessitore, coll. « Biblioteca della Parola del Passato » 17,
Napoli 1993, p. 105 -107, et 88 F . Longo Auricchio , « La Scuola di Epicuro » ,
CronErc 8, 1978 , p . 21-37.
Le testament d 'Épicure livre plusieurs renseignements sur l'organisation de l'école. On y
remarque tout d 'abord que malgré l'autorité reconnue à Hermarque, le successeur d' Épicure et
le chef spirituel de l' école , les biens matériels (sauf les livres, X 21, qui vont au nouveau scho
larque ) sont donnés à deux Athéniens : Amynomaque ( A 151), fils de Philocrate , du dème
de Batè, et Timocratès, fils de Démétrius, du dème de Potamos (X 16 ). En tant que fils d 'un
clérouque athénien de Samos, Épicure était athénien (ses adversaires lui contestaient ce titre
en vérité, X 4 ),mais le métèque Hermarque de Mytilène ne l'était pas. Jamais les deux exécu
teurs testamentaires ne sont présentés comme des disciples; ils étaient probablement des sym
pathisants de l'école qui acceptaient de servir de gérants pour assurer la continuité matérielle
de l'institution .
Une distinction semble établie entre le jardin et les autres propriétés d ' Épicure. Ces der
nières produiront des revenus (X 18 .19.20 .21) pour subvenir aux besoins des membres de
l' école et des orphelins de Polyen ou de Métrodore, mais c 'est dans le jardin et ses dépen
dances que vivront et philosopheront Hermarque et ses amis. Il y a ,matériellement semble- t
il, une « école dans le jardin » . La maison sise dans le quartier populaire deMélité est laissée
également à la disposition d 'Hermarque pour qu 'il y habite avec ses disciples.
89 D . Clay, « Individual and community in the first generation of the Epicu
rean School» , dans Euchmoic. Studi sull'epicureismo greco e romano offerti a
Marcello Gigante, coll. « Bibl. della Parola del Passato » 16 , Napoli 1983, t. I,
p. 255-279, en particulier sur les fêtes annuelles épicuriennes, p. 270-279.
Disciples d 'Épicure. En plus des frères d'Épicure et des anciens disciples
originaires de Mytilène et de Lampsaque (voir plus haut), nous connaissons le
nom de plusieurs autresmembres de l'école épicurienne :
(1)Mys, esclave d'Épicure, qui partageait,comme les frères d'Épicure , la vie
philosophique (D .L . X 3, avec généralisation à tous les serviteurs en X 10) ; dans
son testament, Épicure lui accordait la liberté, de même qu 'à Nicias,Lycon et
Phaidrion (X 21).
(2) Hérodote , le destinataire de la Lettre conservée (X 35-83) ; il est égale
mentmentionné en X 4 et 5 , la deuxième fois aux côtés du renégat Timocratès .
( 3) Ménécée, destinataire de la Lettre conservée (X 122-135) ; ses fils sont
présentés comme des disciples d'Epicure dans une lettre datée de 284/3 (fr. 111
Arrighetti).
(4) Pythoclès, dont nous avons parlé plus haut à propos de la communauté de
Lampsaque ; il reçut la Lettre conservée (X 83 -116 ). Il mourut jeune, dans les
années 293-291.
(5 ) Nicanor, objet de dispositions testamentaires d'Épicure (X 20).
(6 ) Ctésippe ( * C 226 ), compagnon de voyage d'un épicurien (Épicure lui
même ?) lors d'un voyage à Lampsaque ( fr. 121 ; 261).
(7) Apelles (*+ A 230 ), dont Épicure (fr. 43) célébrait la conversion à la philo
sophie dans un état de pureté à l'égard de toute paideia.
E 36 ÉPICURE DE SAMOS 169
(8 ) Carnéiscos [ C 44 ] (fr. 120), auteur d 'un Philistas, en au moins deux
livres, dans lequel il faisait l'éloge d'un épicurien de ce nom (= PHerc 1027).
(9) Un des traits caractéristiques du Jardin d'Épicure est la présence de plu
sieurs hétaïres. Nous avons déjà mentionné Léontion d'Athènes, compagne de
Métrodore . On connaît égalementMammarion , Hédéia (2H 14 ) (originaire de
Cyzique, s'il faut l'identifier, comme le propose Usener, avec l’hétaïre dont
parle Plutarque, Non posse suaviter 16 , 1098 b ), Érotion (2- E 55) et Nicidion
(D .L . X 7), Boïdion (PB 51] (Plutarque, Non posse suaviter 16 , 1097 d-e),
Démélata ou Démétria (MD 38), compagne d 'Hermarque (Philodème, PHerc.
1005, col. VI 8- 20 Angeli = Hermarque, fr. 3 Longo Auricchio ). Voir 90 C . J.
Castner, « Epicurean hetairai as dedicants to helping deities ? », GRBS 23, 1982,
p. 51-57, à propos de quatre noms de femmes sur des inscriptions du IVe siècle
av . J .- C . à Athènes : Mammarion , Hédeia, Nicidion et Boïdion . Erler 18 ,
« Frauen im Kepos», chap. 24,p . 287-288.
D 'autres noms apparaissent, surtout dans les fragments épistolaires des papyri
d'Herculanum , dont on ne voit pas toujours très bien le rapport qu 'ils entretien
nent avec Epicure. Retenons:
(10) Ménestrate (Clément, Stromates V 12, 261, 31).
( 11) Timarque (Plutarque, Adv. Colot. 17 , 1117 b ).
( 12) Hégésianax, fils de Dosithéos (2D 224), et frère de Pyrson (fr. 46);
c 'est pour Usener un disciple d'Épicure .
(13) Matron (fr. 115 et 261), pédagogue du destinataire d'une lettre d 'Épi
cure.
( 14 ) Polystrate et Hippocléidès (2H 149). Valère Maxime I 8, ext. 17 : « A ce
point de notre exposé trouvent place naturellement les philosophes Polystrate et
Hippocléidès, nés le même jour, formés ensemble à la doctrine de leur maître
Épicure, associés également dans la possession des mêmes biens et dans le déve
loppement de leur école ,morts au même moment dans une vieillesse avancée.
Le partage sitotal et si constant d 'un même sort comme d 'une amitié, qui refuse
rait de le considérer comme l'æuvre de la divine Concorde elle -même, qui en a
assumé la naissance, l'extension et la fin ?» (trad. R . Combès, CUF, Paris 1995,
p . 153).
Un Hippocléidès apparaît dans PHerc 1418 , col. XVIII (cf. Militello 38, p . 128) et dans
d ' autres passages encore. Quant à Polystrate, il pourrait s'agir du successeur d 'Hermarque à la
tête du Jardin (D . L . X 25). 91 M . Capasso, « Polistrato uditore di Epicuro ? » , CronErc 12 ,
1982, p . 5 -12.
(15 ) Philodèmenous permet encore de ranger dans le cercle épicurien le plus
ancien des noms comme Arcéphon (2A 300) et Eudème (» E 90 ).La liste n 'est
pas exhaustive et les progrès connus dans l'exploitation des documents d 'Hercu
lanum laissentespérer qu 'on pourra un jour écrire une histoire plus précise des
origines de l' école.
L 'influence d 'Épicure se faisait sentir au -delà des cadres stricts de l'école sur
des sympathisants qui, restés dans le monde, étaientà même de subvenir,par des
Ouvtábeis (fr. 74 et 142) , aux besoins des philosophes retirés au Jardin . Nous
170 ÉPICURE DE SAMOS E 36
disposons ainsi d'un certain nombre de fragments de lettres (fr. 74 -82) adressées
à un Syrien du nom de Mithrès qui fut ministre des finances (Ololuntńs) de
Lysimaque. A la mort du souverain (2814), ce bienfaiteur tomba en disgrâce et se
retrouva emprisonné au Pirée, où Métrodore vint lui porter assistance (Plutarque ,
Adv. Colot. 33, 1126 e-f; Non posse suaviter 15, 1097 b ). Sur ce personnage,
voir la bibliographie rassemblée par Arrighetti 2, p.676 , et le commentaire aux
fr.64, 74-82, 119 et 133, ainsi queMilitello 38 , p. 38-39 et le commentaire aux
nombreuses colonnes où le nom apparaît.
Sur les fondements "utilitaristes” (recherche du plaisir et fuite de la douleur)
de l'amitié épicurienne, voir 92 G . Arrighetti, « Philia e physiologia . I fonda
menti dell'amicizia epicurea » , MD 1, 1978, p . 49-63; 93 B . Gemelli, « L 'ami
cizia in Epicuro » , Sandalion 1, 1978, p . 59 -72 ; 94 J. M . Rist, « Epicurus on
friendship » , GPh 75, 1980, p . 121- 129 ; 95 P .Mitsis, « Epicurus on friendship
and altruism » , OSAPh 5, 1987, p. 127 -153; 96 S. Stern -Gillet, « Epicurus and
friendship » , Dialogue 28, 1989, p. 275 -288 ; 97 D . K . O 'Connor, « The invulne
rable pleasures of Epicurean friendship » , GRBS 30 , 1989, p. 165 - 186 ; 98 D .
Konstan , « Friendship from Epicurus to Philodemus» , dans G . Giannantoni et M .
Gigante , Epicureismo greco e romano. Atti del Congresso internazionale , Napoli
19-26 Maggio 1993, coll. « Elenchos » 25 *, Napoli 1996 , t. I, p. 387 -397 .
Sur l'étude des textes d'Épicure dans la tradition épicurienne, voir 99 E .
Puglia, « La filologia degli Epicurei» , CronErc 12, 1982, p. 19-34. Sur la véné
ration portée à Épicure dans l'École, voir 100 D . Clay, « The cults of Epicurus » ,
CronErc 16 , 1986 , p. 11-28.
Sur l'école épicurienne qui perdura au moins jusqu' à la fin du IT siècle de
notre ère, voir 101 J. Ferguson, « Epicureanism under the Roman Empire (revi
sed and supplemented by J. P. Hershbell) » , ANRW II 36 , 4, 1990, p. 2257 -2327 ;
102 S . Follet, « Lettres d 'Hadrien aux Épicuriens d ' Athènes (14 .2 - 14. 3 .125 ) :
SEG III 226 + IG 112 1097 » ,REG 107, 1994, p. 158 -171; 103 M .F. Smith ,« An
Epicurean Priest from Apamea in Syria » , ZPE 112, 1996 , p. 120 -130 (sur
Aurelius Belius Philippus, prêtre de l'oracle de Baal et chef de la communauté
épicurienne d'Apamée).
Sur la survie de l'épicurisme jusqu 'à l'époque moderne, voir 104 H . Jones,
The Epicurean tradition, London 1989, VII-276 p. Sur les traces de l'épicurisme
dans la littérature chrétienne, voir Schmid 15, col. 773 -817 = Ausgewählte philo
logische Schriften, p. 228-264.
Iconographie. Sur la popularité des images d ' Épicure dans les cercles épi
curiens antiques, voir Cicéron , Fin . V 1, 3 : « cujus (Epicuri) imaginem non
modo in tabulis nostri familiares, sed etiam in poculis et in anulis habent» ;
Pline, N . H . XXXV 5 : « Epicuri voltus per cubicula gestant ac circumferunt
secum » . Pour les nombreux bustes et statues d'Épicure, voir Schmid 15, col.
686 -687 = p. 155- 156 , et surtout 105 G . M . A . Richter, The Portraits of the
Greeks, t. II, London 1965, p. 194 -200 ; figures 1149 -1222 ; Supplement, London
1971, p . [7 ]. On considère que l' original grec qui est à la source des diverses
copiespourrait avoir été sculpté dans les années 280-270, donc du vivant d'Épi
E 36 ÉPICURE DE SAMOS 171
cure . Diogène Laërce rapporte que la patrie d'Épicure (Samos ? Athènes ?)
l'honora par des statues de bronze (X 9 ). Voir 106 L .A . Scatozza Höricht, I
volto dei filosofi antichi. Introduzione di G . Giannantoni, coll. « Archaia - Col
lana di ricerche archeologiche - Storia degli studi» 2, Napoli 1986 , p . 155 -164 ;
107 I. Sgobbo , « Statue di oratori attici ad Ercolano dinanzi alla biblioteca della
Villa dei papiri», RAAN 47, 1972, p. 241-305 (un portrait d 'Épicure); 108 E .
Lissi Caronna, « Una nuova replica del ritratto di Epicuro alMuseo Nazionale
Romano », BA 58, 1973, p. 176 -177 ; 109 V . Kruse- Berdoldt, Kopienkritische
Untersuchungen zu den Porträts des Epikur, Metrodor und Hermarch , Diss.
Göttingen 1975, 213 p. ill.; 110 B . Frischer, The Sculpted word. Epicureanism
and philosophical recruitment in ancient Greece, Berkeley, Univ . of California
Pr., 1982, XXV-325 p. 16 pl. 1 carte ; 111 B . Frischer, « On reconstructing the
portrait of Epicurus and identifying the Socrates of Lysippus », CSCA 12, 1979,
p . 121- 154 ; 112 H . Wrede, « Bildnisse epikureischer Philosophen », MDAI(A )
97 , 1982, p. 235 -245 ; 113 B . Frischer, « A socio -psychological and semiotic
analysis of Epicurus' portrait » , Arethusa 16 , 1983, p. 247-265 ; 114 H . von
Heintze, « Die Statue des Epikur » , dans Alessandria e il mondo ellenistico
romano. Studi in onore di Achille Adriani, coll. « Studi e Materiali. Istituto di
archeol. della Univ . di Palermo », t. III, Roma 1984, p. 765 -771 ; 115 U . Pannuti,
« Ritratto di Epicuro in bronzo dalla “ Villa dei Papiri” di Ercolano » , RAL 5,
VIII, vol. 39, fasc. 3-4 , 1984, p. 101- 111 (avec 6 planches) et un appendice de C .
Piccioli sur l' analyse chimique de la statue (p . 113-116 ); 116 M . Gigante,
« Philosophia ut sculptura » = Atakta XXIX , CronErc 16 , 1986, p. 104, repris
dans Gigante 87, p . 5 -6 .
Euvres philosophiques. Apollodore d 'Athènes, dans sa Euvaywy tūv
boyuátwv (D . L . VII 181), opposait les citations innombrables auxquelles se
réduisaient les œuvres de Chrysippe à l'œuvre immense écrite par Épicure de
son propre cru (oixeia ouvámet) et sans recours aux citations (unapádeta ). La
même comparaison et la même thèse pro -épicurienne se retrouvent en X 26 , sans
référence à Apollodore, juste avant la liste des ouvrages d'Épicure.
La mention de Carneade,mort en 12978 , permet d 'identifier cet auteur à Apollodore ó
Knnotúpavvos (BA 243), dont 117 T. Dorandi, Ricerche sulla cronologia dei filosofi elle
nistici, coll. « Beiträge zur Altertumskunde » 19, Stuttgart 1991, p . 45-54, avec le tableau des
pages 62-64 , date le scholarcat des années 150 - 110 ; il aurait lui-même écrit 400 livres (D . L .
X 25 ).
De l'æuvre d'Épicure, philosophe prolifique (novypapáratoc), auquel on
prête environ 300 rouleaux de papyrus (zúalvopol), qui tous rapportent le propre
discours de leur auteur, sans aucune citation étrangère (uaptúplov ŠEwDev),
Diogène Laërce cite en X 27 -28 quarante-et-un titres comme étant les meilleurs
(Tờ BéAttara ).
Selon 118 D . Clay, « Epicurus in the archives of Athens» , dans Studies in Attic Epigraphy,
history and topography, presented to E . Vanderpool, coll. « Hesperia Suppl.» 19, Princeton
1982, p. 17 -26 , la référence aux archontes éponymes d 'Athènes conservées pour certaines
lettres et certains traités (les différents livres du De natura retrouvés à Herculanum ) montrerait
que les æuvres d'Épicure, tout comme son testament (Diogène Laërce X 16 ), avaient été dépo
sés au Métroon à Athènes. Selon 119 G . Cavallo , « I rotoli di Ercolano comeprodotti scritti.
172 ÉPICURE DE SAMOS E 36
Quattro riflessioni» , S & C 8 , 1884, p. 5 - 30 , notamment p. 9 , les archives n 'auraient contenu
que des documents de caractère public et officiel.
I. Liste des principaux ouvrages d 'Épicure (D .L . X 27-28). Contrairement à
Usener et Arrighetti, nous conservons l'ordre de Diogène Laërce afin de respec
ter le principe de classification que la liste pourrait suivre. Pour un essai d'inter
prétation , voir Steckel 16 , col.594 -595.
Nous indiquons la numérotation des fragments dans Arrighetti lorsque l'ouvrage est connu
autrement que par la liste de Diogène Laërce. Plusieurs témoignages ne sont signalés qu 'en
note chez Arrighetti ; on en trouvera généralementle texte dans le recueil d 'Usener. Ce dernier
associe également aux fragments comportant une référence explicite d 'autres passages qui
développent le même thème.
(1)Tepi púoewÇ Éntà vai tplárovta, Sur la nature, 37 livres (fr. 23-29,
avec riche commentaire, p.577-669).Certains livres ont été retrouvés, parfois en
deux ou trois copies, dans la bibliothèque d'Herculanum et ont fait l'objet d' édi
tions indépendantes. Arrighetti signale pour chaque livre l'état de conservation ,
ainsi que les références bibliographiques aux éditions antérieures. On se conten
tera donc de rappeler ici les éditions parues depuis Arrighetti (1973).
On trouvera pour chaque papyrus toutes les références nécessaires dans 120 Catalogo dei
Papiri Ercolanesi (CPE), sotto la direzione di M . Gigante , Napoli 1979 , 400 p., 8 pl. phot., à
compléter par 121 M . Capasso , « Primo supplemento al Catalogo dei papiri ercolanesi » ,
CronErc 19, 1989, p . 193- 264.
Sur l'ensemble du livre , voir 122 G . Arrighetti, « L 'opera “ Sulla Natura" di
Epicuro », CronErc 1, 1971, p. 41-56 ; 123 D . Sedley, « The Structure of Epicu
rus' On Nature » , CronErc 4, 1974 , p. 89 -92 ; 124 G . Arrighetti, « L 'opera “Sulla
Natura" e le lettere di Epicuro a Erodoto e a Pitocle » , CronErc 5, 1975 , p . 39
51; 125 D . Sedley, « The character of Epicurus’ On Nature » , dans Atti del XVII
Congresso internazionale di papirologia (Napoli, 19 -26 maggio 1983), Napoli
1984, p. 381-387.
LIVRE PAPYRI ARR. Nº DATATION
II 1149+ 993 ; 1010 24
126 Giuliana Leone, « Il II libro Della natura di Epicuro (PHerc. 1149/993 e 1010).
Problemi testuali ed esegetici», dans B . G . Mandilaras (édit.), Proceedings of the XVIIIth
International Congress of Papyrology, Athens 25-31May 1986, Athens, Greek Papyrological
Society, 1986, t. I, p . 237-248.
XI 1042 ; 154 26
127 D . Sedley, « Epicurus, On Nature, Book XI (P.Herc. 1042), fr. 1, col. III. An Argu
ment against Eudoxan Astronomy» , Proceedings of the XIV International Congress of Papy.
rologists , Oxford 1975, p. 269-275 ; 128 Id ., « Epicurus and his professional rivals » , dans
Études sur l'épicurisme antique. Textes réunis par J. Bollack et A . Laks, coll. « Cahiers de
philologie » 1 , Lille 1976 , p . 139- 144 ; 129 G . Arrighetti et M . Gigante , « Frammenti del libro
undicesimo Della natura di Epicuro (P . Herc. 1042) » , CronErc 7 , 1977, p . 5 -8 .
XIV 1148 29 souscr. : Énì Kreápxou = 301/300
130 G . Leone, « Epicuro , Della natura , libro XIV » , CronErc 14 , 1984, p. 17 - 107 ;
131 Ead., « Per une nuova edizione del XIV libro Della natura di Epicuro (PHerc. 1148) » ,
dans Atti del XVII Congresso internazionale di papirologia (Napoli, 19 - 26 maggio 1983),
E 36 ÉPICURE DE SAMOS 173
Napoli 1984, p. 389-398 ; 132 Ead., « La chiusa del XIV libro “Della natura ” di Epicuro » ,
CronErc 17, 1987, p.49-76 .
XV 1151 30 souscr.:(ÉQ' 'H ]lyɛuáxou = 300/299
Édition plusrécente : 133 Claire Millot, « Épicure, De la Nature, livre XV », CronErc 7,
1977, p. 9-39.
XXVIII 1479 + 1417 31 souscr. : (ěx t ]ūv åpxai[wv] ...!
ŠylpJáon ÉTÈ Nexiov (296 /5) TOŨ
ulet]: 'A vti]párnv.
134 D . Sedley, « Epicurus, On Nature , Book XXVIII », CronErc 3 , 1973, p. 5-83. Voir
aussi 135 G . Giannantoni, « La polemica antimegarica nel XXVIII libro “Della Natura " di
Epicuro » , CronErc 13, 1983, p . 15-19 ; 136 D . K . Glidden, « Prolepsis in Peri physeosXXVIII
fr. 12, III, 3- 14 », dans Atti del XVII Congresso internazionale di papirologia (Napoli, 19-26
maggio 1983), Napoli 1984, p . 399-404 .
XXXII 998, fr. 11 inédit 32
XXXIV 998
137 A . Tepedino Guerra, « Tracce del XXXIV Libro “Della Natura" diEpicuro nel PHerc.
998 » , CronErc 17, 1987, p. 79.
« incertusliber » 1056 ,697; 1191; 34 et 35
(de libertate 1420
agendi) = XXV
138 S. Laursen,« Epicurus On Nature XXV (Long-Sedley 20 , B, C and j», CronErc 18 ,
1978, p . 7 -18 ; 139 G . Arrighetti, Un passo dell'opera Sulla natura di Epicuro , Democrito e
Colote » , CronErc 9, 1979, p. 5- 10 (examen du passage contenu dans les PHerc. 1056 , 697 et
1191) ; Laks 65 ; 140 Id ., « Epicurus, On Nature book XXV » , CronErc 17, 1987, p. 77 -78
(identification du livre); 141 E. Puglia, « PHerc. 1420/ 1056 : un volume dell'opera “Della
natura” di Epicuro », CronErc 17 , 1987, p. 81-83 ; 142 Id., « “Against Democritus – towards
the end " » , dans M . Capasso , G . Messeri Savorelli et R . Pintaudi (édit.), Miscellanea papy
rologica in occasione delbicentenario dell'edizione della Charta Borgiana, coll. « Papyro
logica Florentina » 19, Firenze 1990 ,t.I, p. 3- 22 ; 143 S. Laursen , « The summary of Epicurus
“ On Nature" book 25 » ,dans M . Capasso (édit.), Papiri letterari greci e latini, coll. « Papyro
logica Lupiensia » 1, Galatina 1992 , p . 141- 154 . Voir maintenant l'édition de 144 S . Laursen ,
« The Early parts of Epicurus, On Nature, 25th Book » , CronErc 25, 1995, p. 5 - 109 ; « The
Later parts of Epicurus, On Nature, 25th Book » , CronErc 27 , 1997, p . 5 -82.
1431 36
1413
145 R . Cantarella et G . Arrighetti, « Il libro " Sul tempo” (PHerc. 1413) dell'opera di
Epicuro " Sulla Natura” » , CronErc 2 , 1972, p. 5-46 ; 146 M . Isnardi Parente , « Xpóvos éml
vooúuevoç e Xpovog où vooúuevos in Epicuro , pap . Herc. 1413» , PP 31, 1976 , p . 168-175.
Sur la conception épicurienne du temps, voir également 147 F . Caujolle-Zaslawsky, “ Le
temps épicurien est-il atomique ? » , EPh 1980 , p. 285- 306 .
362 38
1039
148 E. Puglia, « PHerc. 1039 altro libro di Epicuro " Sulla natura” ?» , CronErc 18, 1988,
p . 19-26 .
174 ÉPICURE DE SAMOS E 36
D 'autres fragments ou témoignages se rencontrent dans les auvres de Philodème, de Plu
tarque ou dans les scholies au livre X de Diogène Laërce.
(2) Hepi åróuwvxai xevOŨ, Sur les atomes et le vide.
(3) lepi Éputos, Sur l'amour.
(4 ) 'Entitoun tūv npòs toùÇ Quolxoús, Abrégé des traités contre les physi
ciens (selon Usener, serait identique au n°47 ou bien le comprendrait).
(5 ) Mpòs toùç Meyap .xoús, Contre lesMégariques (fr. 194 Döring).
(6 ) Alanopíai, Questions disputées. Mentionné aussi en D .L . X 119; deux
fragments chez Plutarque (fr. 12, 1 et 2).
(7 ) Kúplal dotai, Maximes capitales. Quarante maximes sont citées en D . L .
X 139-154 (fr. 5). Treize de ces maximes figurent également dans le Gnomolo
gium Vaticanum Epicureum (fr. 6 ). Nombreux parallèles dans les notes d ' Arri
ghetti 2 , p . 545 -554 . Édition séparée par 149 P. Von derMühll, Epicuri epistulae
tres et ratae sententiae a Laertio Diogene servatae. Acc. Gnomologium Epicu
reum Vaticanum , coll. BT, Leipzig 1922, p. 51-60. Traduction française et com
mentaire dans 150 V . Goldschmidt, La doctrine d 'Épicure et le droit, coll.
« Bibliothèque d 'histoire de la philosophie », Paris 1977, p. 251-285.
Sur la maxime II, voir 151 D . Lanza, « Lamassima epicurea Nulla è per noi la morte » ,
SicGymn 33, 1980 , p. 357- 365 ; 152 D . Furley, « Nothing to us ? » , dans M . Schofield et G .
Striker (édit.), The norms of nature. Studies in Hellenistic ethics, Cambridge Univ. Pr. 1986 ,
p. 75 -91.
(8 ) Mɛpì aipédEWv xai quyõv, Sur ce qu 'on choisit et ce qu 'on évite. Men
tionné, puis cité en D .L . X 136 (fr. 7). Voir la définition de l'éthique en X 30 :
τα περί αιρέσεως και φυγής.
(9 ) Hepi ténous, Sur la fin . Quatre fragments (fr. 22) ; plusieurs fois men
tionné dans des passages signalés dans le commentaire d ’Arrighetti et cités par
Usener 1, p . 119- 123. Voir 153 A . Tepedino Guerra , « PHerc. 1232, fr. 6 : una
testimonianza del libro Sul fine di Epicuro ?» , CronErc 17, 1987, p . 85-88.
(10) Hepi xpirnpiou ñ Kavóv, Sur le critère ou La règle. Plusieurs témoi
gnages, chez Diogène Laërce , Cicéron, Plutarque, sont cités dans Usener 1 ,
p . 104- 106 .
(11) XaipédnuOS, Chairédèmos.Nom de l'un des trois frères d'Épicure.
(12) Tepi De @ v , Sur les dieux. Mentionné par Plutarque (voir Usener 1 ,
p. 103). Quatre fragments chez Philodème (fr. 17). Plutarque de Chéronée avait
écrit un lepi tnv toŨ ’Enixoúpov åxpódolv nepi Dewu (Sur la leçon d 'Épi
cure concernant les dieux) aujourd'hui perdu (n° 80 du Catalogue de Lamprias) .
(13) Tlɛpi dolórnTOS, Sur la sainteté. Connu par Cicéron et Plutarque (voir
Usener 1, p. 106 - 107). Cinq fragments chez Philodème et dans PHerc 1111
(fr. 19).
(14) 'Hmolávať, Hégésianax (» H 17). A l'occasion de sa mort, Épicure
adressa une lettre de consolation à son père Dosithéos [ D 224 ] (fr. 46 ).
E 36 ÉPICURE DE SAMOS 175
(15) Iepi Biwv 8', Sur les genres de vie, 4 livres.Mentionné en D . L . X 30 ,
119 et 136 ; quatre fragments chez Philodème (fr. 10 ) ; Usener 1, p. 94 -96 , y rap
porte d ' autres passages de Cicéron, Sénèque et Plutarque. La Lettre à Ménécée
traitait de même tà trepi Biwv (X 29 ) ; Plutarque de Chéronée avait écrit un lepi
Biov tpos 'Enixoupov (Sur les genres de vie contre Épicure ) aujourd 'hui perdu
(nº 159 du Catalogue de Lamprias).
( 16 ) Hepi OLMALOnpaylaç, Sur la pratique de la justice.
(17) Neoxiñs tpos Oeuiotav,Néoclès, (dédié) à Thémista . Néoclès était le
nom du père d 'Épicure ( D . L . X 1) et celui de l'un de ses trois frères (X 3), sans
doute l'aîné. La dédicataire, Thémista , femme de Léonteus de Lampsaque, a
donné également son nom à un ouvrage d 'Épicure connu de Cicéron : n° 53.
(18 ) Evunóolov, Banquet. Cinq fragments chez Plutarque et Philodème
( fr. 21) ; d 'autres témoignages, chez Diogène Laërce (X 119 ), Athénée (fr. 251)
et Plutarque, sont cités dansUsener 1 , p . 115- 119.
( 19 ) Eủpúroxos após Mntpódwpov, Euryloque, (dédié ) à Métrodore. Eury
loque ( E 143) est également le destinataire d 'une lettre d'Épicure (fr. 48) ; on
connaît aussi un disciple de Pyrrhon le sceptique qui porte ce nom (D . L . IX 68).
Voir Gigante 56 , p . 79-85 (« Epicuri e il pirroniano Euriloco » ).
(20) Hepi toŨ opãv, Sur l'acte de voir.
(21) ɛpi tñs év tñ åróuw yuvias, Sur l'angle dans l'atome.
(22) Nepi áoñs, Sur le toucher.
(23) Hepi eiuapuévns, Sur le destin . Fragment chez Philodème (fr. 14).
(24 ) Hepi naoWv dócal após Tquoxpárny, Opinions sur les passions, (dé
dié) à Timocratès.
(25) Ipopuwotlxóv, Pronostic.
(26 ) Mpotpentixós, Protreptique. Genre littéraire de l'exhortation à la philo
sophie.
(27) Iepi eidúrwv, Sur les simulacres.
(28) ſepi davraoias, Sur la représentation.
(29) ’Aploróbouros. Aristoboulos (2 - A 362). Nom de l'un des trois frères
d'Épicure (X 3 ) ; destinataire d 'une lettre (fr. 44 -45).
(30) Hepiuovoixñs, Sur la musique.
(31) Lepi OlxalOOÚvns xai tõv ärrwv åpetūv, Sur la justice et les autres
vertus.
(32) Hepi dúpwv xai xápitoç, Sur les présents et la gratitude. Fragment
chez Sextus (fr. 13).
(33) Moruuńons, Polymède.
(34) Tluoxpáms r', Timocrate, 3 livres. Mentionné par D . L . IX 23. Autres
témoignages, chez Cicéron, Plutarque et dans PHerc 1111, cités dans Usener 1,
176 ÉPICURE DE SAMOS E 36
p . 123-124. Voir aussi Philodème, lepi tõv (Etoix @ v ] = PHerc 339, col. III, 2
5 Dorandi (p . 91) : tov ['E ]nixoupov év tő [ Tilluoxpá [ t ]el YPADELV TÒ uetà
Mnltp [o ]0 [úpou ) tòg uvoapwtáraç i énLTERETV TIPEELG .
( 35 ) Mntpódwpoç E',Métrodoros, 5 livres. Mentionné en D . L . X 23 ; voir
aussiPlutarque, De latenter vivendo 3, 1129 a , cité par Usener 1, p . 106 .
(36 ) ’Avtíowpoç B ', Antidoros (>+ A 191), 2 livres. Un philosophe que par
dérision Épicure appelait Sannidoros. Voir aussi Plutarque, Adv. Colot. 32 , 1126
a, cité par Usener 1, p. 92, et Crönert 35 , p. 24 -26 ; 177, qui retrouve ce nom
dans PHerc 418 (['Av]ríowpoc) et le restitue (à la suite de Ménage ) en D . L . V
92 (’Autóowpoç ou Aútódwpoç ó 'Etixoúpeloc), ce qui l'amène à faire de ce
philosophe un renégat de l'école épicurienne, comme Timocrate .
Crönert 35 , p. 177, lit également ce nom dans PHerc 1251 (= col. I 9 -10 Indelli et Tsouna
McKirahan) : [ĚV TLVL) I tūv ’ A [v ] t18 [úpou ourypaquálitwy, mais ce texte est reconstitué
différemment par 154 G . Indelli, « Una presunta testimonianza su Antidoro » , CronErc 21,
1991, p. 103-104.
(37) Lepi vóowv (VÓTwv codd.) dótal npòç MlOpnv, Opinions sur les mala
dies, (dédié) à Mithrès. Cité par Démétrius Lacon sous le titre lepi vóowv xai
Oavátou, Sur les maladies et lamort (fr. 18).
(38) Karriotóhaç, Callistolas. Il s 'agirait d'un nom propre selon Usener 1 ,
p . 93. Crönert 35 , p . 192, envisage d 'y voir une corruption du nom de Callistra
tos (24C 37) qui apparaît dans le fr. 120 , li. 10 et 12 Arrighetti.
(39) Tepi Baoireias, Sur la royauté . Fragment chez Plutarque (fr. 9).Usener
1, p . 92, propose de rattacher ce titre au suivant par la conjonction ń , en rappe
lant qu'Anaximène de Lampsaque (34A 167) avait justement écrit un BaoiréwV
Metalayai. Voir 155 M . Gigante et T . Dorandi, « Anassarco e Epicuro “ Sul
Regno" » , SicGymn 33, 1980 , p . 479-497, notamment p. 487-488 .
(40 ) 'Avatquévng, Anaximène. Voir le titre précédent.
(41) 'Enlotoal, Lettres.
Les fragments 40-133 Arrighetti rassemblent les passages conservés des
Lettres d'Épicure. Usener 1, p. 131- 164, cite en plus les nombreux testimonia
que l'on trouve chez Sénèque ; voir aussi Mette 19, p . 65 . Beaucoup de ces frag
ments épistolaires proviennent des papyri d'Herculanum , de sorte qu'ils posent
de difficiles problèmes de reconstitution et d 'interprétation. Pour les lettres
empruntées à l'ouvrage de Philodème, Mpayuatetai, voir Militello 38 ; pour
celles qui proviennent du Ipós tous (Étaipovc] (= PHerc 1005) , du même
auteur, voir 156 F . Sbordone, « Per la storia dell'epistolario di Epicuro » , dans
Miscellanea di studi allessandrini in memoria di A . Rostagni, Torino 1963,
p . 26 -39, et la nouvelle édition d' Angeli 46 . On peut ajouter au recueil d 'Arri
ghetti : 157 A .Barigazzi, « Una nuova lettera di Epicuro in Diogene d 'Enoanda» ,
Prometheus 1, 1975, p. 99-116 [Diogène d 'Oinoanda, NF 7). Sur les lettres,
bibliographie dans Liebich 39, p . 122- 123. Voir aussi 158 A . Angeli, « Fram
menti di lettere di Epicuro nei papiri d 'Ercolano » , CronErc 23, 1993, p . 11-27,
etMilitello 38 , p. 69-80 (« Tipologia delle epistole ... » ).
E 36 ÉPICURE DE SAMOS 177
Plusieurs lettres sont datées de façon précise par le nom de l'archonte épo
nyme athénien . Elles s'échelonnent de 294/3 ou 293/2 à 271/0, année de la mort
d 'Épicure. On corrigera certaines datations données par Arrighetti en consultant
les listes d'archontes athéniens établies par 159 B . D .Meritt, « Athenian Archons
347/6 - 48/7 », Historia 26 , 1977, p. 161- 191 ; voir également 160 T. Dorandi,
« Gli Archonti nei papiri Ercolanesi» , ZPE 84, 1990, p. 121- 134 . Un tableau
similaire est donné par Clay 118. On peut reconstituer l'ordre chronologique
suivant:
ARCHONTE DATE DESTINATAIRE ARRIGHETTI
Olympiodoros 294 /3 ou 293/2 inconnu 105
(Dorandi)
Philippos 292/1 Thémista
Léonteus (et
Polyen ?)
Amis de Lampsaque
Charinos 291/0 Polyen 83 (-84)
inconnus 106 - 109
Téloclès 290 /89 Mithrès 79
Aristonymos 289/8 Mithrès 74
Pyrson 93
Dioclès 286 / 5 Anaxarque et PHerc. 176 fr. 5
Léontion
Diotimos 285 /4 Pyrson 94
inconnu 107
Isaios 284 /3 inconnu 110 -111
Euthios 283/ 2 inconnu 112
Ourias 28170 Léonteus 68
Anaxicratès 279 /8 Diodoros (fils de PHerc. 310 fr. 3
Mithrès ?)
Démoclès 278 /7 Colotès
Mithrès
Euboulos 274 /3 Idoménée
Mithrès
inconnu 113
Pytharatos 27170 Mithrès
voir aussi Idoménée
et Hermarque
(Cicéron , Fin II 30 ,
96 et 98 = fr. 122
Usener)
Certaines lettres étaient connues dans l'antiquité par un titre descriptif. La
Lettre aux philosophes résidant à Mytilène est citée par Athénée sous le titre ń
nepi éttitydeJMÁTWV ÉTlOtorń (fr. 102 = Athénée VIII, 354 b -c); une autre
lettre (fr. 119 = Philodème, PragmateiaiXXV) s'intitule ń n [epi] tőv đoyo
178 ÉPICURE DE SAMOS E 36
(allőv éx | < E > áuov È< tl> otor“ (li. 8-9 ; voir aussi li. 2 , et le commentaire de
Militello 38 , p . 257-258). Une autre lettre enfin (fr. 69) est désignée dans un
papyrus comme [T ]nv aaunpdv xarovuévny émo[ro ]ńv. Arrighetti 2 , p.680
681, comme déjà Crönert 35 , p. 20 , suppose que les lettres d'Épicure (et des
premiers maîtres de l'école ) ont connu deux classements différents : par destina
taires et par thèmes. L 'intérêt porté par l' école épicurienne aux lettres du fonda
teur et des premiers disciples explique que l'épicurien Philonidès ait écrit des
’Emitouàs ? [Wv I ŠTlotoWv tõv 'Etixoúplov, Mntpodópov , Morvaivov, I
' Epuápxov xai tūvoſuvnylué[ww ]v xarà révoc én [l]loto [ @ v ], Abrégés des
lettres d 'Épicure, deMétrodore, de Polyen, d 'Hermarque , et des lettres rassem
blées par genre (Anonyme, Vita Philonidis = PHerc 1044, fr. 14, li. 5 - 10 = I.
Gallo , Frammentibiografici da papiri, II : La biografia deifilosofi, Roma 1980 ,
p. 68 ). Voir aussi Militello 38, p . 74-75 .
Les lettres sont classées par Arrighetti dans l'ordre alphabétique des noms des
destinataires sous leur forme grecque : Athénaios ( * A 477), Anaxarque
(YA 159), Apelles ( + A 230), Aristoboulos ( A 362), Colotès ( C 180), Dosi
théos ( > D 224 ] (ou Sosithéos), Euryloque ( E 143), Hermarque ( ^ H 75), Hé
rodote (2H 102 ), Idoménée (» I 14 ), Léonteus, Léontion ,Métrodore , Mithrès,
Phyrson (ou Pyrson ), Polyen , Pythoclès, Timocrate . Une lettre d 'Épicure est
adressée à sa mère (fr. 125- 126 Smith ). Certaines ont un destinataire collectif:
Lettres aux amis résidant à Lampsaque, aux amis résidant en Asie , aux amis, aux
grands, aux philosophes (X 7) ou aux amis résidant à Mytilène (X 136 ). Les fr.
105 - 133 proviennent de lettres dont le destinataire est inconnu. Usener 1, citait
d 'autres fragments de lettres d 'Épicure à Apollonidès (> A 256 ?) (fr. 118 Us.) ,
Cratéros (fr. 139 Us.),Mys (fr. 152- 155 Us.), Charmides ( C 104 ) (fr. 140 Us. ),
mais un nouvel examen des papyri semble avoir amené Arrighetti à les rejeter.
Diogène Laërce rapporte en X 3 que Diotimos le Stoïcien (2D 205) avait
cherché à calomnier Épicure en lui attribuant cinquante lettres de caractère
licencieux et qu'un autre adversaire avait attribué à Épicure des lettres reconnues
comme étant de Chrysippe . Il est difficile de déterminer s 'il se trouve des
vestiges de telles lettres inauthentiques dans les fragments conservés. Crönert 38,
p . 20 - 24 , rejette ainsi la Lettre aux amis (ou aux philosophes) résidant à Mytilène
(Ilepi tõv ÉALTNdEVMátwv); il signale également le travail critique sur les
lettres d 'Épicure auquel se serait adonné l' épicurien Zénon de Sidon (fr. 25
Angeli-Colaizzo), le maître de Philodème, qui y fait allusion dans son lipos
ToùS (Étaipovs), 4, col. XI, p. 176 - 177 Angeli.
Diogène Laërce distingue en X 35 entre les lettres (privées) qu 'il range parmi
les sources de la pensée morale d 'Épicure et d 'autres lettres contenant un ensei
gnement xarà otoLxeTov ( élémentaire ?), notamment sur la théorie physique. Il
s 'agit de ces lettres dans lesquelles Épicure présentait un résumé de ses ouvrages
ou un exposé des principes fondamentaux de sa doctrine (comp. X 37 : énitouny
xai otoixeiwolv , X 44 : Abdexa otoLXELVOELS, X 35 : TÒV tútov tñs oans
Tipayuateias tóv XATEOTOIXELWMÉvov). Trois de ces lettres au contenu doctri
nal important ont été conservées par Diogène Laërce, qui voit en elles un
E 36 ÉPICURE DE SAMOS 179
Éttitouń de toute la philosophie épicurienne ( X 28 ). Édition séparée des trois
lettres dans Von der Mühll 149 ; traduction française récente par 161 J.-F .
Balaudé, Épicure : Lettres, Maximes, Sentences. Traduction, introduction et
commentaires par J.- F. B ., coll. « Classiques de la philosophie » , Paris 1994,
222 p . ; 162 traduction reprise et révisée dans Diogène Laërce , Vies et doctrines
des philosophes illustres, coll. « La Pochothèque – Classiques modernes » , Paris
1999, p . 1147-1325.
(42) Lettre à Hérodote , D . L . X 34-83 (D 2 ), < htepi PUOLXWV> (X 29 ; comp.
X 83) ; elle est désignée commeń tpos 'Hpódotov Štritouń en X 31 (voir dans
la lettre elle-même les expressions Énitounu tñs óang npayuateias, X 35, et
Titounu xai otoLyelWOLV TÕV onwv 80Eõv, X 37). En X 85 , c' est sans doute
la même lettre qui est évoquée par la formule év tñ ulxpõ ÉnlTouſ noos
‘Hpódotov.
Édition , traduction et commentaire : 163 J. Bollack , M . Bollack et H .
Wismann, La Lettre d 'Épicure, Paris 1971, 314 p. (Glossaire, p . 261-277 ;
“ Formes de langue”, p . 269-277 ; Index des mots grecs, p . 278 -312). Voir aussi
164 F . Heidsieck , « Épicure et la logique du vivant. Commentaire de la page 74
de la Lettre à Hérodote », REG 89, 1976 , p . 611-614 ; 165 F . Adorno, « Epicuro
Epistola a Erodoto 39, 7 - 40,3 . Vuoto , spazio -chora, intattilità , luogo , atomi e
corpi nel vocabolario di Epicuro. Un interpretazione di Timeo 52 a -d di Platone
e di Fisica 209 b 9 - 16 di Aristotele » , Elenchos 1, 1980 , p . 245 -275 ; 166 D .
Konstan, « Epicurus on Up and Down (Letter to Herodotus 60)» , Phronesis 17,
1972 , p . 269- 278. 167 F. Adorno, « Epicuro, Epistola a Erodoto , 39,7-41,5 ;
PHerc. 1056 , 5 II. Un codicillo e qualche riflessione» , dans Eucńmois . Studi
sull'epicureismo greco e romano offerti a Marcello Gigante, coll. « Bibl. della
Parola del Passato » 16 , Napoli 1983, p . 53-72 ; 168 D . Sedley, « Two concep
tions of vacuum » , Phronesis 27, 1982, p . 175-193 (sur le § 40).
(43) Lettre à Pythoclès, D .L . X 83 -116 (fr. 3), nepì uetapoiwv, X 29, nepi
ueteúpwv, X 83 (voir dans la lettre : nepi tõv ueteúpwv súvtouov xai
EủTTEPLypapov olaroylouós, X 84).
Édition, traduction allemande : 169 E . Boer (édit.), Epikur, Brief an Pythocles,
hrsg. u . übers . von E . B ., Berlin 1953, VIII-12 p . (doubles). Édition, traduction
française et commentaire : 170 J . Bollack et A . Laks (édit.), Épicure à Pythoclès.
Sur la cosmologie et les problèmesmétéorologiques, coll. « Cahiers de philolo
gie » 3, Lille 1978, 373 p. (Index des mots grecs, p . 318-341; “ Faits de gram
maire et de style ” , p . 342 -353) . Sur les problèmes d 'authenticité, voir Bollack et
Laks 170, p . 45-55, Arrighetti 2, p. 524-525, et la bibliographie qui y est signa
lée.
(44) Lettre à Ménécée, D .L . X 121- 135 (fr. 4 ), nepi Biwv, X 29, nepi tõv
BOTLxõo xai öToc xo tà uv uặc ai cũoai, rà sº kake Yell, X 117).
Édition, traduction et commentaire : Bollack 33, p . 51- 143 (Index desmots grecs,
p . 588-624 ; " Faits de grammaire et de style” , p . 625-630 ). 171 K .-H . Eller,
« Epikurs Lehrbrief an Menoikeus» ,AU 32, 1, 1989, p .69-85.
180 ÉPICURE DE SAMOS E 36
II. D ' autres æuvres d 'Épicure sont connues, qui ne font pas partie des titres
signalés par Diogène Laërce.
(45) Tepi đuoiborías, Sur l'ambiguïté. Mentionné dans le ſlepi púoews,
livre XV (fr. 31, 14 , li.26 Arrighetti).
(46) ’Avapwvňoelç, Proclamations (?). Fragment chez Philodème (fr. 8).
Pour la signification du titre, comp. 8là ßpaxeñv pwvõv, X 36 et ń rooqúin on pwrn
TOÚTWV TÁVTWVMunuoveVOUÉvwv, X 45. Voir aussi nº 56 (Gnomologium ).
(47) Mpós Anuóxputov , Contre Démocrite . Fragment chez Philodème
(fr. 11) . Selon Usener 1, p . 97, cet ouvrage serait une partie du n° 4 ou même s ' y
identifierait.
(48) Abdexa otoLXELGOEIÇ, Douze introductions élémentaires. L 'ouvrage est
mentionné dans une scholie sur la Lettre à Hérodote, X 24.
(49) Meyán énitouń, Grand abrégé. Mentionné dans trois scholies sur la
Lettre à Hérodote , X 39, 40 et 73.
(50)Mixpà śnitouń, Petit abrégé. Fragment concernant la divination en
D .L . X 135 ( fr. 15) ; sans doute à distinguer de la Mixpà étitoun após
‘Hpódotov (= la Lettre conservée ),mentionnée en X 85, car la Lettre ne traite
pas ce sujet.
(51) < /lepi eủoebelaç> (?), Sur la piété. Mentionné par Cicéron, De nat.
deor. I41, 115 : « At etiam de sanctitate, de pietate adversus deos libros scripsit
Epicurus » . Ce pourrait être en fait le seullepi dolórntos (nº 13) que Cicéron
voudrait désigner ici par deux équivalents latins. Voir le commentaire de
172 A . S . Pease (édit.), M . Tulli Ciceronis De natura deorum libri III , t. I (“Liber
primus” ), Cambridge (Mass.) 1955 ; réimpr. Darmstadt 1968, p . 506 -507.
(52 ) < /lepi ń dovñs> (?), Sur le plaisir. Mentionné par Cicéron , De divin . II
27, 59 : « Epicuri de voluptate liber » . Mais il pourrait s'agir, selon Steckel 16 ,
col. 597, du lepi térous (nº 9), car il serait étrange qu ’un tel titre ait échappé à
une tradition antiépicurienne obnubilée par la « fin » enseignée par ce philosophe.
Dans un papyrus récemment édité par D . Obbink dans CPF , la formule úntèp
tñs noovñs ne désignerait pas un titre d 'ouvrage d 'Épicure, mais le contenu de
différents de ses ouvrages selon 173 E . Puglia , « Su una lettera riguardante libri
di Metrodoro ed Epicuro : ( PGettyMus acc. 76. Al. 57) » , ZPE n° 117, 1997,
p . 42 -44.
(53) Oeuiora , Thémista . Évoqué par Cicéron , Fin . II 21, 68 : « tantis volumi
nibus de Themista loqui... » ; voir aussi Or. in L . Pisonem 26 , 62. Ces deux
témoignages sont cités par Usener 1, p . 101- 102.
(54 ) Mpós Oɛó paotov , Contre Théophraste . Fragment du deuxième livre
chez Plutarque (fr. 16 ) ; un ouvrage du même titre est attribué à Léontion par
Cicéron, De nat. deor. I 33, 93 ; pour Usener 1, p . 101-102, qui cite le passage, il
pourrait s'agir du même ouvrage ; voir le commentaire de Pease 172, p . 451.
E 36 ÉPICURE DE SAMOS 181
(55) Tepi öntopixñs, Sur l'art oratoire. Sept fragments dans l'ouvrage de
Philodème qui porte le même titre et chez Ammien Marcellin (fr. 20 ) ; mentionné
également en D .L . X 13.
(56 ) Plusieurs sentences épicuriennes (’Enixoúpou nipoopávnouc ), y com
pris treize maximes appartenant aux Kúplai dótal (nº 7 ), sont rassemblées dans
le Gnomologium Vaticanum Epicureum (Vaticanus graecus 1950 , f. 4010 - 404 ),
édité pour la première fois par 174 C . Wotke, « Epikurische Spruchsammlung »,
WS 10 , 1888, p . 175 - 199. Le recueil constitue le fr. 6 Arrighetti et est commenté
p . 555 -571, où sont rassemblés les parallèles (fr . 204 -249). La plupart des 81
sentences sont attribuées à Épicure lui-même, quelques -unes (non éditées par
Arrighetti) à Métrodore (10, 30 , 31, 47, 51) ou à Hermarque (36 ). Sur la sentence
79 (ó årápagos tauto xai ÉTÉpw đóxantos), voir 175 P . Colaclidès, « Sur un
aphorisme d'Épicure » , RPh 52, 1978, p . 264- 265. Correctionsproposées pour les
sentences 80 et 81 dans 176 M . Marcovich , « Epicurus Vaticanus» , ICS 10,
1985, p. 191- 194 . Voir aussi 177 A . Blanchard, « Épicure , “ Sentence Vaticane”
14 : Épicure ou Métrodore ? » , REG 104, 1991, p . 394 -409.
(57) Enfin , le Testament d 'Épicure a été conservé en D . L . X 16 -21, tout
comme ceux de Platon, d 'Aristote , de Théophraste , de Straton et de Lycon. Les
testimonia anciens sont cités par Usener 1, p. 165- 168. Il est possible mais
nullement certain que le testament ait fait partie de la Collection qu 'avait
constituée Ariston de Céos : Diogène Laërce (V 64) lui a emprunté en tout cas
celui de Straton.
Sur le testament, voir 178 K .G . Bruns, « Die Testamente der griechischen
Philosophen » , Zeitschrift der Savigny-Stiftung, Romanistiche Abteilung 1, 1880 ,
p . 1-50 ; repris dans les Kleine Schriften de l'auteur, t. II,Weimar 1882, p. 192
237 ; 179 R . Dareste , « Les testaments des philosophes grecs» , Annuaire de l'as
sociation pour l'encouragement des études grecques en France 16 , 1882, p . 1
21; 180 A . Hug, « Zu den Testamenten der griechischen Philosophen » , Fest
schrift für Begrüssung der... XXXIX Versammlung deutscher Philologen...,
Zürich 1887 , p. 1-22. Voir plus récemment, pour les testaments des péripatéti
ciens, 181 H . B . Gottschalk , « Notes on the wills of the Peripatetic scholarchs» ,
Hermes 100, 1972, p . 314-342. Malgré le titre , on ne trouve rien sur le testament
d ' Épicure dans 182 D . Clay , « Epicurus' Last Will and Testament » , AGPh 55,
1973, p. 252-280. 183 C . Natali, « Aspetti organizzativi di alcune scuole filoso
fiche ateniesi» , Hermes 111, 1983, p. 52-69. Voir d'autres références bibliogra
phiques dans Crönert 35, p . 84 n .413, et Arrighetti 2, p. 488, ainsi que 184 P. D .
Dimakis, « Note al testamento di Epicuro » , dans Studi in onore di Arnaldo
Biscardi, t. VI, Milano 1987, p. 471-492; 185 T. Dorandi, « Precisazioni sul
testamento di Epicuro » , Labeo 38, 1992, p. 55-62.
RICHARD GOULET.
182 ÉPIDICOS E 37
37 ÉPIDICOS
A ce philosophe, dont le nom est vraisemblablement corrompu, est rapportée
par Aétius une opinion sur l'origine du monde (ÚTTÓ Dúoewç yeyevñodal tov
xóquov). Le passage a été transmis par Stobée , Anthologium I 21, 6 f. Le nom
apparaît également dans la liste des sources philosophiques de Stobée conservée
par Photius, Bibl. cod. 167, t. II, p . 155 , 35- 36 Henry.
RICHARD GOULET.
38 ÉPIGÉNÈS DE CÉPHISIA RE 15 PA 4803 fya
A . Fils d’Antiphon du dème de Céphisia, c'est un membre de l'entourage de
Socrate (Apologie 33 e). Il assiste au procès de Socrate, et il se trouve dans la
prison quand Socrate boit la ciguë (Phédon 59 b ). Xénophon raconte dans les
Mémorables (III 12) une conversation entre lui et Socrate ; comme sa condition
physique n 'est pas bonne, Socrate conseille à Épigène de faire de l'exercice.
B . Diogène Laërce (II 121) fait d 'Épigène le fils de Criton (2 C 220 ; PA
8823) en lui donnant comme frères Critobule ( 2 - C 217), Hermogène et Ctésippe
( C 227) ; de toute évidence, il s'agit d 'une erreur, car cette affirmation se
trouve contredite par ce qu'on lit chez Platon et chez Xénophon. Voir PA 4790 .
Selon Davies, APF n° 4790, l'erreur proviendrait d'une incompréhension de la formule
employée par Platon dans le Phédon 59 b .
C . I.M . Linforth , The Arts of Orpheus, Berkeley 1941, p. 116 - 117, identifie
cet Épigène avec celui qui aurait écrit lepi tñs eis 'Oppéa avapepouévns
TOLNOewÇ (» E 39 ), mais rien dans la figure du socratique n 'appuie ce rappro
chement.
Cf. P . Natorp, art. « Epigenes» 15 , RE VI 1 , 1907, col. 64 ; J. Kirchner, PA
n° 4803 ; Davies, APF nº 4790 (“ a ghost” ) .
LUC BRISSON .
39 ÉPIGÉNÈS RE 16 DIVa ?
Auteur d' un traite Περί της εις ' Ορφέα αναφερομένης ποιήσεως (Sur la
poésie attribuée à Orphée) dans lequelil soutenait que le pythagoricien Cercops
(2°C 84 ) était l' auteur d 'une Katábaolç eic " Ạdov (Descente dans la demeure
d 'Hadès) et d'un ‘lepòs Móvos (Discours sacré), et que le pythagoricien Bron
tinus ( + B 61) était l'auteur du létroç et de Ovoixá . Voir Clément, Strom . I
21, 131, 5 ; p . 81, 11- 14 Stählin . Plus loin ( V 8 , 49, 3 ; p . 360 , 10 - 19 Stählin : év
TẬ nepi tñs 'Opoéwç noindewc), Clément cite les explications allégoriques
qu ’Épigénès proposait pour plusieurs formules orphiques. L 'explication de
l'existence d'une littérature orphique par l'attribution à des pythagoriciens n 'est
du reste pas sans parallèle. Voir 1 W . Burkert, Lore and Science, p . 129 et n . 50 .
Les ouvrages attribués par Épigénès aux pythagoriciens figurent dans le cata
logue des poèmes d 'Orphée que l'on trouve dans la Souda, 0 654 ; t. III, p . 564 ,
23 - 565, 11 Adler. Voir M . L . West, The Orphic Poems, Oxford 1983, p . 9 - 13 .
Dans le Lexique d 'Harpocration , s.v. " Iwv, on peut lire que lon de Chios (3 ` I 20 )
E 41 ÉPIGONOS DE SPARTE 183
avait écrit un ouvrage intitulé Tplayuol (= DK 36 (25) t. I, p. 377, 15-20) Önep
Karriuaxoç å Tidéyeobal Anoiv üç 'Enlyévous (test. 9, p. 7 Leurini).
Callimaque soutenait donc que cette æuvre devait être attribuée à Épigénès. Ce
témoignage soulève cependant des doutes sérieux et le texte a été diversement
corrigé. Voir les conjectures ünÒ 'Enlyévous (Bergk, Leurini), xai 'Enlyévns
(Jacoby), ốc xai Elycvnc ( Diels), óc sÜTTò > 'Eurévous ( Cohn); Calli
maque, selon cette dernière lecture , aurait affirmé qu’Épigénès refusait d'attri
buer l'ouvrage à Ion. Pfeiffer (sur Callimaque, fr. 449) opte pour les corrections
de Diels ou de Jacoby. Il est certain qu 'épigénès s'était intéressé aux tragédies
d 'Ion , comme le montre le témoignage d 'Athénée XI, 468c, où lui est attribuée
l'explication d'une expression empruntée à l'Agamemnon du poète tragique.
(Dans le premier passage de Clément, Strom . I 21, 131, 5 , le passage sur Épigénès suit
immédiatement une mention d ’lon de Chios. R . G .)
Selon 2 I. M . Linforth , The Arts of Orpheus, Berkeley 1941, p. 116 -117, il
faudrait l'identifier avec l'Épigénès (» E 38) élève de Socrate ; des objections
sont soulevées par 3 E .R . Dodds, The Greeks and the Irrational, Berkeley 1951,
p. 171,mais voir Burkert 1, p . 129 n . 50.
Cf. L . Cohn, art. « Epigenes » 16 , RE VI 1, 1907,col.65.
(A . Le Boulluec , dans son commentaire au passage de Clément, Stromates V 8, 49, 3 (SC
279, Paris 1981, p. 190 ), identifie Épigénès à « Épigénès de Byzance [RE 17 ), qui a sans doute
vécu au début de l'époque alexandrine. » La présentation que A . Rehm donne de ce person
nage, principalement connu comme astrologue (art. « Epigenes» 17 , RE VI 1, 1907, col. 65
66 ), n 'invite cependant pas à l'identifier avec le « grammairien grec de l' époque alexandrine »
dont parle Cohn dans la notice précédente. R .G .)
BRUNO CENTRONE.
40 ÉPIGONOS DE CILICIE RESuppl. III: 10 PLREI:2 MIV
Philosophe résidant en Cilicie que Gallus fit arrêter et conduire à Antioche
(avec Eusébe d'Émèse surnommé Pittakas) après l'exécution du questeur Mon
tius, en 354, sous prétexte que celui-ci l'aurait accusé (Ammien Marcellin XIV
7 , 18 ). Bien qu ' il y ait eu confusion de personnes, il fut condamné à mort.
« N 'ayant de philosophe que le manteau » , il affirma sous la torture avoir été
associé à un complot inexistant (XIV 9, 4-6).
PIERRE MARAVAL .
41 ÉPIGONOS DE SPARTE RE 9 PLRE 1:3 F IV /D V
Avec Béronicianus de Sardes (~+ B 25), l'un des deux " diadoques" du philo
sophe néoplatonicien Chrysanthe de Sardes (PC 116 ) dans la ville natale de ce
dernier. Ces deux philosophes marquent dans les Vies des philosophes et des
sophistes d' Eunape de Sardes ( E 121) le terme d'une longue succession qui, à
partir de Plotin, Porphyre et Jamblique (BI3), passait par Aidésius (2A 56 ) et
Chrysanthe pour parvenir au temps d'Eunape. Ils enseignaient à Sardes lors de la
composition des Vies dans les dernières années du IVe siècle ou les toutes pre
mières du ve (Eunape, Vies des philosophes et des sophistes XXIV 1; p. 101, 17
184 ÉPIGONOS DE SPARTE E 41
20 Giangrande). Voir le stemma de la diadochè de Jamblique dans DPHA I,
p . 77.
RICHARD GOULET.
42 ÉPIMÉNIDE
Destinataire d 'une lettre de Diogène le Chien (Lettre 51). Celui-ci, qui a
entendu dire qu'Épiménide promettait de pratiquer la vertu , lui rappelle le mot
de Simonide, selon lequel « Il est difficile d 'être bon , mais facile de le pro
mettre » .
La lettre est éditée et traduite en allemand par Eike Müseler, Die Kynikerbriefe, coll.
« Studien zur Geschichte und Kultur des Altertums» , Neue Folge, erste Reihe, Bd. 7 ,
Paderborn 1994, p . 78-79 ; trad . anglaise par B . Fiore, dans A . J. Malherbe (édit.), The Cynic
epistles, coll. « Society of Biblical Literature - Sources for Biblical Study » 12, Missoula
(Montana) 1977, p. 182-183.
MARIE -ODILE GOULET-CAZÉ.
43 ÉPIPHANE RE 11
Auteur d'un ouvrage conservé (mais inédit ?) Tepi Bpovrőv xai đotpanov
(Sur le tonnerre et l'éclair). Voir Fabricius et Harles, Bibliotheca Graeca,
t. VIII, Hambourg 1802, p. 261.
RICHARD GOULET.
44 ÉPIPHANE DE CÉPHALLÉNIE RE 2
Gnostique, fils de Carpocrate d'Alexandrie et d 'Alexandria de Céphallénie . Il
mourut à 17 ans et fut l' objet d 'un véritable culte à Samè de Céphallénie dans un
sanctuaire élevé en son honneur. Il était l'auteur d 'un lepi OlxalogÚvns (Sur la
justice), dont Clément d 'Alexandrie , Stromates III 2 , 5 , 1 sqq. cite de longs pas
sages. Selon Clément, qui rattache le communisme radical d'Épiphane et la
communauté des femmes qu'il préconise à la République de Platon, Épiphane
avait été formé par son père aux disciplines du cursus général et à la doctrine
platonicienne.
RICHARD GOULET.
45 ÉPIPHANE DE SALAMINE RE 3 † 402
Hérésiologue, dont les vues sur les philosophes antiques ont été intégrées
comme fragments (déformés) d'Aétius dans les Doxographi Graeci d ' H . Diels,
Berlin 1879, réimpr. Berlin 1958, p. 585-593.
Vie. Pour reconstituer la chronologie de la vie d'Épiphane, il convient de par
tir de la date de samort. Nous la connaissons avec précision grâce à l'Histoire
ecclésiastique de Socrate (VI 12- 14), qui rapporte son ultime voyage à Constan
tinople et permet de la situer au début de mai 402 (cf. 1 P . Nautin , art .
« Épiphane de Salamine» , dans DHGE XV, 1963, col. 909-927, notamment col.
617). Palladius (Dial. 16 ) nous apprend d'autre part qu'il fut évêque pendant
trente-six ans, ce qui situe son élévation à l'épiscopat en 366 . Étant donné que
Jérôme en 393 précise qu 'Épiphane est in extrema senectute (De Viris, 194 ), on
admet qu'il naquit entre 310 et 320 .
E 45 ÉPIPHANE DE SALAMINE 185
L 'hypothèse d 'un premier séjour d ' Eratosthène à Alexandrie formulée pour expliquer qu'il
soit devenu l'« élève » de Callimaque, défendue aussi par Jacoby 8, t. II B, p. 704, a été reprise
par Dragoni 17, p . 49, 53, 55 sq.; Id. 18 , p. 17, 30, 33 (cf. infra, Schwartz, qui défend cette
hypothèse d' un autre point de vue).
Comme nous l'avons dit plus haut, la date de l'arrivée d'Ératosthène à
Alexandrie à l'appel de Ptolémée III doit être placée avec vraisemblance vers
2448 (Thalamas; ca 2452: Beloch 24 , t. IV 2, p. 598 ; Dragoni 17, p. 56 ; Id . 18 ,
p. 33 ; Fraser 16 , t. I, p . 332 ; Id . 15 , p. 176 , 181 sq.; Jacob 20 , p. 115 ; en
revanche , Susemihl 1, t. I, p. 412, fixe l'appel vers 235a). Quant aux raisons qui
ont motivé cet appel, on a d 'ordinaire songé à l'importance des influences cyré
néennes au début du règne de Ptolémée III : d'un côté, le roi a épousé Bérénice,
l'héritière du roi de Cyrène Magas (cette union était fondée, à ce qu 'il semble ,
sur une affection sincère attestée par le geste célèbre de Bérénice qui, lors du
départ du roi pour la grande guerre de Syrie , lui consacra sa chevelure pour lui
assurer la victoire), et la reine semble avoir favorisé les rapports culturels entre
les Cyrénéens et les Égyptiens; de l'autre, Callimaque, originaire lui aussi de
Cyrène , semble avoir eu une influence personnelle à la cour: poète officiel
depuis le règne précédent (il composa des vers sur la chevelure de Bérénice), il
s'est consacré à de lourds travaux d'érudition , et il a pu rechercher l'aide d'un
jeune compatriote dont les premiers travaux étaient sans doute déjà appréciés à
Athènes (cf. Thalamas 7, p. 44 sq.; Dragoni 17, p. 50 ; Id . 18, p . 17 sq.; Jacob
20, p. 115 sq.). D 'après Thalamas 7, p. 46 , l'idée selon laquelle Bérénice a joué
un rôle important dans l'appel d'Ératosthène pourrait expliquer aussi la fidélité
personnelle de celui-ci à la reine et plus tard à sa fille Arsinoé III.
Strabon XVII 3, 22 (= test. 2 Jacoby),déclare qu'aussi bien Callimaque qu’Ératosthène ont
bénéficié de l'estime des rois de l'Égypte , tout en décrivant l'un comme un poète qui s'est
occupé aussi activement de la grammaire, l'autre comme ayant excellé en outre dans la philo
sophie et dans les disciplines encyclopédiques. Cependant, Fraser 15 , p . 183 - 185 , insiste sur le
fait qu 'Eratosthène a été appelé par Évergète plutôt en qualité de poète qu'en qualité d 'homme
de science.
D ' ailleurs, la plupart des critiques ontmis en rapport l'appel d'Ératosthène
avec sa nomination comme directeur de la Bibliothèque d'Alexandrie , poste
que l'on trouve solidement attesté dans nos sources, bien que l'ordre de la suc
cession ne soit pas toujours correct. En effet, d 'après la Souda, s.v. ’Anor
RÁVLOS , A 3419, t. I, p. 307, 9 sq. (= Callimaque, test. 12 Pfeiffer ), Ératosthène
précéda à ce poste son « contemporain » Apollonios (de Rhodes),mais ce rensei
gnement est erroné, car d 'après l'Index praefectorum bibliothecae Alexandrinae,
qui représente l'une des listes de la Chrestomathie, POxy. X 1241, col. II 1
(= Callimaque, test. 13 Pfeiffer ; * C 22), publiée en 1914 , la charge d 'Éra
tosthène fut postérieure à celle d'Apollonios. On trouve la même succession
chez Tzetzès (= Callimaque, test. 14 Pfeiffer; version latine 14 d ), qui cependant
présente à tort Callimaque comme ayant été lui aussi bibliothécaire avant Éra
tosthène: sicuti refert Callimachus aulicus regius bibliothecarius... fuit praete
rea qui idem asseveret Eratosthenes non ita multum post eiusdem custos biblio
thecae. Enfin , d'après la liste citée des bibliothécaires alexandrins, le successeur
200 ÉRATOSTHÈNE DE CYRÈNE E 52
d'Ératosthène fut son disciple Aristophane de Byzance (cf. Pfeiffer 13, p. 154 ;
Fraser 16 ,t. I, p. 333, 459 sqq.; MA 405).
Sur les directeurs de la Bibliothèque, voir Busch 48, passim ; 49 A . Rostagni, « I bibliote
cari alessandrini nella cronologia della letteratura ellenistica », AAT 50, 1914 -1915, p . 241
265, repris dans Scritti minori, t. II 1: Hellenica -Hellenistica, Torino 1956 , p. 185-213,
notamment p . 205 sqq. ; 50 F . Schmidt, Die Pinakes des Kallimachos, coll. « Klassisch-philo
logische Studien » 1, Berlin 1922, p. 33 sq. ; Beloch 24, t. IV 2 , p. 592 -599 ; 51 E . Eichgrün ,
Kallimachos und Apollonios Rhodios, Diss. Berlin 1961, p . 24 -31 ; 52 K . Schneider, Kultur
geschichte des Hellenismus, t. IIMünchen 1969, index ; 53 J.E . Sandys, A History of classical
scholarship , t. I : From the sixth century B . C . to the end of theMiddle Ages, Cambridge 19213,
réimpr. New York London 1967, p . 114 ; 54 G . Mader, « The Library of Alexandria » , Akro
terion 21, 1976 , p . 2 - 13, notamment p. 6 ; 55 L . Canfora , La biblioteca scomparsa, coll. « La
memoria > 140 , Palermo 1986 (cf. la trad . franç. de J.- P .Manganaro et D . Dubroca : La
véritable histoire de la bibliothèque d 'Alexandrie, coll. « La mesure des choses » , Paris 1988 ) ;
56 Id ., « Le biblioteche ellenistiche » , dans G . Cavallo (édit.), Le biblioteche nelmondo antico
e medievale, coll. BUL 250, Roma/Bari 1988, p . 3-28.
On peutsupposer qu 'Ératosthène est resté à la tête de la bibliothèque jusqu' à
sa mort (cf. Susemihl 1, t. I, p . 412 ; Thalamas 7 , p . 54 ; Marlowe 25 , p. 71 ;
Jacob 20 , p. 116 ). Quant à la date de la nomination , les critiques varient à dix
ou quinze ans près. Parmi ceux qui ont considéré que la nomination coïncidait
avec l'arrivée d’Ératosthène à Alexandrie à l'appel de Ptolémée III, la plupart
l'ont placée en 245a (cf. Fraser 16 , t, I, p. 332; Jacob 20 , p. 115), mais Susemihl
1, t. I, p.410 , ne la plaçait qu 'en 235a (cf. Beloch 24 , t. IV 2, p. 598 ; Sandys 53,
t. I, p. 114 : ca 234a). Thalamas 7, p. 44, suggère aussi l'an 235 ou 234a pour la
nomination, mais il ne fait pas coïncider cette date avec celle de l'appel de Pto
lémée , de sorte que, d'après lui, Eratosthène, venu en Égypte au début du règne
de Ptolémée III, aurait passé à Alexandrie une dizaine d'années avant d'être
nommé chef de la Bibliothèque .
Il faut signaler que Thalamas 7 , p. 43, considérait Ératosthène comme le successeur de
Zénodote (cf. supra ; Dicks 14, p . 388 sq.), que la mort de celui-ci oscillait, selon les calculs
qu 'il utilise, entre 245 et 235a, et qu 'il incline pour la date la plus récente dans la pensée que,
lorsqu 'on a proposé pour la mort de Zénodote l'année 245a, on a été surtout poussé par le désir
de trouver entre lui et Ératosthène une place pour le prétendu bibliothécariat de Callimaque
(cf. Bouché-Leclercq 29, t. I, p . 224 sq., 265). En réalité , la mort de Zénodote doit se placer
vers 260a (cf. Dragoni 17 , p. 62; Rostagni 49, p . 195 sq.).
Dicks 14 , p . 388 sq., place aussi vers 235a la nomination d' Ératosthène
(cf. Bouché-Leclercq 29, ibid .), tandis qu'il place son arrivée à Alexandrie vers
2464, lorsqu 'Eratosthène avait environ 30 ans. A son tour, Dragoni 17, p . 62 (cf.
Id . 18 , p. 39), rejoint Dickspour la date de l'arrivée ,mais place la nomination en
2304, date à laquelle Apollonios de Rhodes aurait quitté son poste , selon
Rostagni 49,p. 199, 205.
Pour Wilamowitz 31, p. 17 = p. 31 = p .65, l'appel d'Ératosthène par Ptolé
mée devrait plutôt être mis en relation avec le désir du nouveau roi d'avoir un
précepteur et un conseiller pour son fils (le futur Ptolémée IV Philopator). La
nomination comme bibliothécaire ne serait donc que la récompense du précepto
rat royal (cf. Bouché-Leclercq 29 , t. I, p. 284 ; Knaack 4, col. 360 ; Schwartz 5,
p. 192; Dragoni 17, p. 50, 55 ; Id. 18 , p. 18, 32; Jacob 20, p. 116 ). A l'encontre
E 52 ÉRATOSTHÈNE DE CYRÈNE 201
de Wilamowitz , Jacoby 8, t. II B , p. 705,met en question la continuité entre les
fonctions de précepteur et celles de bibliothécaire.
Il est intéressant de noter que, selon Schwartz 5 , p . 192, Ptolémée III n 'aurait pas confié à
un jeune homme l'éducation du prince. Ératosthène devait donc avoir déjà 50 ans, de sorte
qu'il avait dû commencer auparavant ses recherches savantes dans le cadre de la bibliothèque
d ' Alexandrie (cf. supra ).
Thalamas 7 , p. 46 , tout en acceptant l'idée du préceptorat, ne croit pas vrai
semblable du pointde vue chronologique l'hypothèse de la récompense, car le
prince n 'aurait eu sept ans révolus que vers 247/6a, et il n'est pas probable
qu'Eratosthène ait été son maître avant cet âge, si,comme on le sait par un frag
ment conservé chez Quintilien , Institution oratoire I 1 , 16 , il pensait que les
études de l' enfant ne devaient pas commencer avant la septième année. Thala
mas juge donc plus sage de ne pas lier les deux questions, l'exercice des
fonctions de précepteur et de bibliothécaire
L ' idée selon laquelle Eratosthène a été le précepteur de Philopator fut tirée
par Wilamowitz 31, p . 31 = p . 65, de l'épigramme qui apparaît à la fin d 'une
lettre d ' Ératosthène à Ptolémée III Évergète sur la duplication du cube (cf. infra,
B II 8 ), où l'auteur s'exprime en des termes très familiers à l'égard du roi et du
prince. L 'idée du préceptorat royal d'Ératosthène provient également, comme le
remarque Pfeiffer 13, p. 154 , de la constatation de ce qui semble avoir été la
règle de la maison royale à l'égard des bibliothécaires alexandrins : étant donné
que dans la liste des bibliothécaires (cf. supra ), Apollonios et plus tard Aristar
que sont appelés expressément didáoxaroi des princes royaux, et que dans la
notice de la Souda, s.v. Znvódotos, ce premier bibliothécaire (Zénodote d 'Éphè
se ) est dit avoir été aussi précepteur (ÉtaídevoeV) des fils de Ptolémee jer Soter,
on a supposé que les autres directeurs de la bibliothèque, Eratosthène et Aristo
phane, ont exercé eux aussi un préceptorat similaire.
S ' il est probable qu ’Ératosthène fut le précepteur de Philopator, la vie de ce
roi, marquée par la volupté et par les crimes, n 'a pas dû faire honneur à son
maître. On ne peut pas nier cependant qu'il aima et protégea les lettres (cf. Be
loch 24 , t. IV 1, p . 688 n . 3). Thalamas 7 , p. 47, 56 , place l'apogée du talent
d ' Ératosthène et de son influence à la cour durant les six ou sept premières
années du règne de Philopator (ca de 221 à 2154): « Lors de la création de la
procession de la Bouteille, soit vers la fin du règne, il était resté attaché à
Arsinoé III Philopator, sæur et épouse du roi et digne descendante de la reine
mère Bérénice assassinée par son fils. Ératosthène estmort à la fin de sa quatre
vingt-unième année, d'avril à juin 192.»
D 'après Thalamas 7, p. 58 sq., Ératosthène a subi, sous l'influence du milieu
alexandrin , une évolution incontestable et profonde : « Strabon paraît l'avoir
caractérisée par le reproche même qu 'il adresse à son prédécesseur à propos des
jugements émis par lui sur ce qu'il a vu à Athènes: Ératosthène a cessé en
Égypte de se préoccuper surtout de philosophie et c'est là que, sans abandonner
les spéculations de sa jeunesse, qui restèrent pour lui une sorte de “ diversion
agréable et instructive” , il s'est adonné surtout à des “ études encyclopédiques ” »
(cf. Strabon I 2 , 2 ;XVII 3, 22).
202 ÉRATOSTHÈNE DE CYRÈNE E 52
Pour un rapport d 'ensemble sur la tradition scientifique à Alexandrie, voir 57 R . B . Smith ,
« The Alexandrian scientific tradition », Akroterion 21, 1976, p. 14 -21.
La Souda, s.v. 'Epatoodévns, mentionne quatre personnages qui auraient été
les disciples (uaontai) d'Ératosthène (à Alexandrie ):
(a) Aristophane de Byzance (* A 405), qui a été le directeur de la Biblio
thèque après son maître, et dont aurait été disciple son successeur Aristarque de
Samothrace ;
(b) Mnaseas (de Patara ( en Lycie ]), dont on sait qu'il s'est occupé de la para
doxographie , de la mythographie (d'un point de vue évhémériste ?) et de la géo
graphie et qu 'il a été l'auteur d 'un Iepinouc, divisé en trois parties consacrées
respectivement à l'Europe , à l'Asie et à l'Afrique (cf. 58 R .Laqueur, art.
« Mnaseas » 6 ,RE XV 2 , 1932 , col. 2250 -2252 ; FHG III, p. 149-158 Müller);
(c ) un certain Ménandre, peut-être l'historien Ménandre d'Éphèse (FGrHist
783 ; cf. Fraser 16 , t. II, p. 662 n. 94 );
(d) et un personnage du nom d 'Aristide, non identifié (cf. Fraser 16 , ibid .),
bien que Susemihl 1, t. I, p. 634 n. 577, ait suggéré de l'identifier avec Aristos de
Salamine (FGrHist 143).
Dragoni 17, p.67 sq. (cf. Id. 18, p. 235), tout en reconnaissant qu'Eratosthène
n 'a pas créé une école proprement dite (cf. Fraser 16 , t. I, p. 458 ), suggère que
ses disciples ont été sans doute plus nombreux , dans la mesure où il a été le
directeur de la Bibliothèque pendant environ 40 ans, dans la période la plus bril
lante et la plus active de cette institution : « Tale considerazione ci fa ritenere che
l' elenco degli allievi fornitocida Suida includa solo quanto egli poté raccogliere
più di dieci secoli dopo, se non , addirittura, il frutto diuna sua scelta forse arbi
traria e personale.»
Le philologue et poète Euphronios de Chersonèse a été considéré comme disciple d' Éra
tosthène : cf. 59 E . Degani, Studi su Ipponatte , coll. « Studi e commenti» 2 , Bari 1984, p . 35, à
propos d 'Hipponax, fr. 52 Degani; 60 J. U . Powell, Collectanea Alexandrina. Reliquiae
minores poetarum Graecorum aetatis Ptolemaicae 323 -146 A . C ., epicorum , elegiacorum ,
lyricorum , ethicorum . Cum epimetris et indice nominum , Oxonii 1925 , réimpr. 1970 , p . 176
sq.
Fraser 16 , t. II, p. 662 (n. 94 ), affirme que la formule oi nepi tov 'Epatoodévn de Strabon
I 2 , 37 (= 1 A 3 Berger) ne fait référence tout au plus qu 'à des géographes du même avis
qu 'Eratosthène (cf. Id. 15 , p . 213 sq.) et non à des disciples ou à une " école " d' Ératosthène .
61 G . Aujac, Strabon . Géographie, tome 1, Ire partie (Introduction générale - Livre I), CUF,
Paris 1969, p. 137, traduit simplement « Eratosthène » .
B . Production scientifique et littéraire.
Ératosthène a cultivé presque toutes les disciplines du savoir : la philosophie ,
les mathématiques et en particulier leurs applications géométriques et astrono
miques, la géographie , l'histoire et la chronologie , la grammaire et la critique
littéraire, enfin la poésie . Il a pratiqué aussi bien la prose que le vers. Les
Anciens ont été frappés par la fécondité de son talent, qui suscita l'envie de ses
successeurs, notamment chez les géographes, conscients de la difficulté de riva
liser avec lui sur ce terrain (cf. Thalamas 7 , p. 56 ). Les surnoms qu' il semble
avoir reçus de la part de ses contemporains font bien référence à son énorme
E 52 ÉRATOSTHÈNE DE CYRÈNE 203
productivité , mais l'envisagent sans doute aussi avec une certaine plaisanterie
(cf. Knaack 4, col. 361; Pfeiffer 13, p. 170 ). Dans la notice que lui consacre la
Souda, sontmentionnés trois surnoms: celui de « Bêta» (Bñta ), celui de « Pen
tathle » (IIévtatov ) et celui de « second Platon ou de Platon le jeune » (8ɛú
tepov ñ véov Maatwva ). Le lexicographe explique qu 'Eratosthène a été appelé
« Bêta» (c ' est-à -dire la seconde lettre de l'alphabet), parce qu 'il était le second
dans tout genre de science, restant toujours à deux pas du premier rang. Selon
l'interprétation de Dicks 14, p. 389, c'est en ce sens que Strabon II 1, 41, affirme
qu’Ératosthène était un mathématicien parmi les géographes et un géographe
parmi lesmathématiciens. D 'après Marcien d'Héraclée,Menippi Periplusmaris
interni 2, GGM , t. I, p. 565, 26 Müller, le surnom de « Bêta » lui aurait été donné
par ceux qui étaient a la tete du Musée ( οι του Μουσείου προστάντες). Quant a
« Pentathle » , ce nom désignait, comme on le sait, l'athlète qui, sans pouvoir
l'emporter nécessairement sur les spécialistes de chacune des épreuves consti
tutives (la course , la lutte, le pugilat, le saut et le lancer du disque), obtenait
pourtant la meilleure moyenne pour l'ensemble des épreuves. Certains critiques
affirment que le surnom de « Pentathle » décrit Ératosthène comme ayant rem
porté la victoire dans toutes les disciplines (cf. Tannery 2 , p . 164 ; Thalamas 7,
p. 60 ; Jacob 20, p . 114),mais d'autres interprètent plutôt ce surnom comme
celui de « Bêta », c'est -à-dire comme décrivant toujours un Ératosthène qui,
désireux de s'exercer dans toutes les disciplines, n 'a obtenu la première position
en aucune d 'elles (cf. Knaack 4 , col. 361; Pfeiffer 13, ibid .; Manna 19, p . 37 ;
Dragoni 18, p. 50 sq.). En tout cas, les critiques modernes n 'ont pas partagé cette
apparente dépréciation d 'Ératosthène, car il fut à leurs yeux un esprit encyclo
pédique indiscutablement génial capable d 'ouvrir nombre de voies nouvelles
dans les sciences. Ainsi, selon Manna 19, ibid ., il mériterait à juste titre le
surnom d'« Alpha » (cf. contra Fraser 15 , p. 175, 213 sq.).
Le surnom de « Pentathle » fut appliqué à Démocrite d 'Abdère (2 + D 70) par Thrasylle
(cf. D . L . IX 37 = DK 68 A 1, t. II, p. 82, 10 -12), parce que Démocrite maîtrisait non seule
ment la physique et l' éthique , mais les mathématiques et les disciplines encyclopédiques.
Thrasylle renvoie à l'usage que Socrate fait de ce nom dans le dialogue du Pseudo-Platon,
Amatores, 135 e sqq . Dans cet opuscule anti-encyclopédiste, opposé à l' idée du philosophe
érudit (de la philosophie commenouualla ), Socrate utilise le nom de « pentathle » appliqué
à un philosophe d 'une manière péjorative , comme décrivant celui qui connaît tous les arts
ainsi qu 'il convient à l'homme cultivé bien qu 'il ne les connaisse pas comme un spécialiste.
D 'après Hirzel 23 , t. I, p. 407 sq., ce dialogue apocryphe devrait en quelque sorte viser Érato
sthène : il traduirait une espèce de polémique issue du milieu académicien contre le « nouveau
Platon » .Mais cette hypothèse n 'est nullement convaincante , comme l'affirme Knaack 4, col.
386 .
Enfin , le surnom de « second Platon ou de Platon le jeune » fait sans doute ré
férence aux écrits mathématiques et philosophiques d'Ératosthène (cf.Knaack 4,
col. 361 ; Dragoni 18 , p. 51).
Ératosthène semble avoir revendiqué pour lui-même une autre désignation ,
celle de pióroyos, au sens d’amoureux du savoir dans la diversité de ses disci
plines (cf. Pfeiffer 13, p . 158 ; Sandys 53, t. I, p . 5 ). D 'après Suétone, De gram
maticis 10 (= test. 9 Jacoby), c'est lui qui aurait employé pour la première fois ce
204 ÉRATOSTHÈNE DE CYRÈNE E 52
terme afin de définir son propre travail: philologi appellationem assumpsisse
videtur ( scil. L . Ateius), quia sic ut Eratosthenes, quiprimus hoc cognomen sibi
vindicavit, multiplici variaque doctrina censebatur.
La Souda résume de la sorte l'æuvre d'Ératosthène: « il a écrit des ouvrages
philosophiques, ainsi que des poèmes et des histoires ; une Astronomie ou des
Catastérismes, Sur les écoles de la philosophie, Sur l'absence de chagrin , de
nombreux dialogues et des études abondantes sur les textes littéraires (ypapua
tixá ). » Le Pseudo-Lucien (loc. cit. ) déclare à propos d 'Ératosthène qu'« on ne
saurait l'appeler seulement spécialiste des textes littéraires (ypaumatixóv) mais
aussi poète , philosophe et géomètre... ». Clément d 'Alexandrie (loc. cit.) le men
tionne comme auteur de deux livres sur les textes littéraires (I payuatixá ), et
Vitruve (loc. cit.) à son tour comme astronome. Il est étrange qu'aucune mention
ne soit faite de son cuvre géographique. Strabon lui-même, qui cite largement la
Géographie d'Ératosthène, l'appelle seulement, tout d 'abord , poète et spécialiste
des textes littéraires comme Callimaque, puis philosophe et mathématicien
(= test. 2 Jacoby). Thalamas a essayé de déceler les raisons possibles de ce
silence (cf. infra, B IV ).
Malheureusement, aucun ouvrage ne nous est parvenu de l' immense produc
tion d 'Ératosthène, sauf (en version arabe) le traité sur les moyennes proportion
nelles (cf. infra , II 7 ). Par ailleurs, nous ne connaissons cette production que par
des références ou des citations (paraphrases ?) chez les auteurs postérieurs.
L ' opuscule qu 'on connaît sous le titre de Catastérismes n 'est sans doute pas
d 'Eratosthène, du moins sous sa forme actuelle (cf. infra , III, 11).
Le seul recueil disponible de l'ensemble des fragments d 'Ératosthène est
encore celui de 62 G . Bernhardy, Eratosthenica, Berlin 1822, réimpr. Osnabrück
1968, assez déficient et de toute évidence vieilli (cf. déjà 63 R . Stiehle, « Zu den
Fragmenten des Eratosthenes» , coll. « Philologus, Suppl.» 2, Leipzig , 1863,
p . 453-492, notamment p . 463 sqq.). En fait, comme l'a remarqué Pfeiffer 13,
p . 170, la complexité et l'abondance des écrits d'Ératosthène, qui présentent des
rapports significatifs entre eux, réclameà cor et à cri une nouvelle édition com
plète des fragments qui nous sont parvenus.
Dicks 14, p. 393, cite la thèse de R . M . Bentham intitulée The Fragments of Eratosthenes
of Cyrene (University of London ), mais, à la suite de la mort de son auteur, cette thèse n ' a été
ni soutenue ni publiée (date de la thèse dactylographiée : 1948 ).
I. PHILOSOPHIE
(22) ’AvtEpLVÚc.
Fragments : Hiller 190, fr. 20-25, p . 80-93 (cf. p .2 sq.) ; Powell60, fr. 17,
p . 63 (= scholies sur Nicandre , Theriaca 472 a, p. 192, 7- 9 Crugnola ); cf. fr. 18
21 ( ex incerto loco).
Cf. Bergk 196 , t. II, p . 211-219, 232 ; 211 O . Friedel, « Die Sage vom Tode
Hesiods nach ihren Quellen untersucht» , JKPh Suppl. 10, 1878-1879, p . 233
278 ;Merkelbach 203, p. 519-526 .
Hiller 190, p. 2, et Bergk 196 , t. II, p. 218, ont conjecturé que le titre de cette
composition était double: 'AVTEPLVÙÇ Ñ 'Holodos, sur la base de l'opuscule De
Homeri et Hesiodi certamine (p .234, 240 sq . Allen ), où ils croyaient, d'après
une conjecture de Göttling, que l'Hésiode d'Ératosthène étaitmentionné. Mais
cette conjecture n'est pas retenue par Allen : 'E . dé onoivév tévntónwt. Bergk
suggéra que l'auteur racontait dans ce poème la légende sur la mort d'Hésiode et
le châtiment de ses assassins (cf. Susemihl 1 ,t. I, p .427 ;Knaack 4 , col. 387). A
partir du fragment 17 Powell, conservé dans les scholies à Nicandre ( cf. supra),
on ne peut pas déterminer le type de vers utilisé.
E 52 ÉRATOSTHÈNE DE CYRÈNE 233
(23 ) 'Endaráulos, Discours nuptial( ?).
Fragments : 28 Powell (= Etymologicum Magnum 170, 50, s.v. aủpooxás
[2092 ), t. II, p . 313, 14 sq . Lasserre et Livadaras).
Cf. Bergk 196 , t. II, p. 207-211, 232, 237 ; 212 R. Reitzenstein , « Die
Hochzeit des Peleus und der Thetis » , Hermes 35, 1900, p. 73- 105, notamment
p. 96 et n . 1 ; Knaack 4 , col. 388.
(24 ) ALÓVOOÇ Kexnvós, Dionysosbouche bée ( ?).
Fragments : 28 b Powell (cf. Euphorion, fr. 19, 123 Powell).
A partir d 'Élien, De natura animalium VII 48, on a conjecturé qu 'Eratosthène
écrivit un poème sur la légende samienne de « Dionysos bouche bée » , racontée
par Pline, Histoire naturelle VIII 57 (cf. Knaack 4 , col. 388).
(25 ) Épigramme sur la duplication du cube : cf. Hiller 190, p . 130 ; supra,
BII 8 .
VII.AUTRES ÉCRITS
EUAGÔN – EUNION
E 65 EUANDROS DE PHOCÉE 243
62 EUANDROS D 'ATHÈNES
Académicien , disciple de Lacydès, mentionné seulement dans la Souda, II
1707 (vol. IV , p . 140 sq. Adler = Lacydès T 5 Mette = Euandros T 5 Mette ): xai
OLEDÉEavto thv oxornv QútoŨ (scil.Nátwvoc) xal’ éva oíde: ... Aaxtons,
Etavopos owxakús, Aauwv, AeovteÚS, Mooyiwv, Eűavopoç ’Anvaſos,
'Hynoivous, Kapveáðns, < X >apuádac. Cf. Crönert, Kolotes und Menedemos,
p . 75 . Peut-être doit-on supposer un doublet d'Euandros de Phocée (2- E 65) ?
TIZIANO DORANDI.
63 EUANDROS DE CROTONE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V . pyth . 36 , 267, p. 143, 22 Deubner.
BRUNO CENTRONE .
64 EUANDROS DE MÉTAPONTE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V . pyth . 36 , 267, p . 144, 3 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
65 EUANDROS DE PHOCÉE RE 8 IIІЛІa
Académicien, disciple et successeur, avec Téléclès, de Lacydès comme scho
larque de l'Académie (D . L . IV 60 = T la Mette). Euandros naquit à Phocée et il
entra en contact avec les souverains de Pergame. Sa chronologie est incertaine.
Apollodore (FGrHist 244 F 47 ap. Philod., Acad. hist. 28, 9 sq. = Lacydès T 2a
25 Mette ) rapporte qu 'Evandros survécut à Téléclès, mort sous l'archontat de
Nicosthénès (167/6 ), et nomme, après lui, comme dernier dans une liste d ’aca
démiciens, Apollonios ( A 278 ?) qui mourut sous l'archontat d'Épainétos
( 166 /5 ). On a supposé qu'Euandros était mort avant Téléclès, mais cette conclu
sion est en contradiction avec la tradition rapportée par Diogène Laërce (IV 60 =
Lacydès T la , 16 sq.), selon laquelle : « A Euandros succéda Hégésinos de Per
game et à celui-ci succéda Carnéade » , Euandros estmentionné dans une inscrip
tion de 193/2a (IG 112 886 ) en l'honneur d 'un Pergaménien inconnu, qui avait
étudié la philosophie (li. 9) et avait secouru dans le danger des disciples d'Euan
dros (li. 17). U . Köhler (IG II 385) a proposé d 'identifier le personnage honoré
avec Hégésinos (PH 21). Cf. Chr. Habicht, Hellenistic Athens and her philoso
phers, Princeton 1988, p. 13 = Athen in hellenistischer Zeit,München 1994,
p. 241.
Nous ne connaissons rien ni de ses écrits ni de sa pensée. Il faut le distinguer
d 'un homonyme académicien contemporain , Euandros d 'Athènes ( E 62).
Cf. H . von Arnim , art. « Euandros» 8 , RE VI,1, 1907, col. 842; H . J. Mette,
Lustrum 27, 1985, p. 52 ; T . Dorandi (édit.), Filodemo : Platone e l'Academia ,
p .64 -65 ; W . Görler, GGP Antike 4 , 2 , p . 834 -836 .
TIZIANO DORANDI.
244 EUANOR DE SYBARIS E 66
66 EUANOR DE SYBARIS
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth . 36 , 267, p . 144, 20 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
EUARESTOS ÉVARESTOS
EUARETUS + EVARETUS
67 EUATHLOS RE PA 5238 va
Disciple de Protagoras d'Abdère. « Comme Protagoras lui réclamait le salaire
(ulodós) qui lui était dû pour son enseignement, il répondit: “Mais je n 'ai
encore remporté aucune victoire (dans un procès) [sous-entendu : comme tu
t'étais engagé à me l'enseigner)”. Protagoras lui répondit: “ Eh bien, si je l'em
porte sur toi, il me faudra recevoir (mon salaire), parce que c'est moi qui aurai
triomphé ; si c'est toi qui l'emportes, (il me faudra recevoir mon salaire ) parce
que c'est toi qui auras triomphé” » (D . L. IX 56 = DK 80 A 1, t. II, p. 255, 12
13).
Le salaire exigé par Protagoras était exagérément élevé selon Apulée , Flor. 18 (DK 80 A
4 ). Il s 'élevait à 10 000 deniers selon Quintilien , Inst. Orat. III 1, 10 (DK 80 B 6 ). Protagoras
aurait été le premier à exiger un salaire de centmines, selon D . L . IX 56.
(En supposant que denier est pris comme équivalent de drachme, commeune mine vaut
100 drachmes, on obtient lamême valeur en drachmes, soit 10 000 ( 100 x 100 ). S. F .)
L 'anecdote est également racontée, avec beaucoup plus de détails, par Aulu
Gelle V 10 (fr. 1222 Hülser), qui voit dans cette argumentation fallacieuse une
illustration des åvtiOTPÉDovta ou des reciproca. L' anecdote a en effet une suite
chez Aulu -Gelle: Euathlos rétorque que s'il gagne le procès, il ne devra rien à
son maître, puisque la justice lui donnera raison, et, s'il perd, il ne lui devra rien
non plus, car il n 'aura pas encore gagné de procès ! Ce type d 'argument,
explique Aulu-Gelle (§ 3), peut donc être retourné contre celui qui le formule .
Cf. Syrianus, Commentaire sur le lepi otáoewv d 'Hermogène, p. 42, 2, qui
rapproche ce genre de raisonnement du sophisme dit du crocodile chez les
stoïciens (SVF II 286 ; fr. 1225 Hülser).
Selon P . Tannery, « Le procès de Protagoras» (1881), repris dansMémoires scientifiques,
t. IX : Philologie 1880-1928, Toulouse/Paris 1929, p. 3- 7, le procès serait « une invention
sophistique, où d'autres auteurs supposent d 'ailleurs un autre disciple et un autre maître , les
Siciliens Tisias et Corax » , « On peut croire cependant que Protagoras avait lui-même déve
loppé cette fiction comme exercice d' argumentation , puisque Diogène Laërce lui attribue une
Aixn úrèp ulodoő (plaidoyer sur les honoraires) » (p. 6 ).
Le nom apparaît aussi en D . L . IX 54 (DK 80 A 1, t. II, p . 254, 20-21) :
Pythodore (PA 12412), fils de Polyzélos, l'un des Quatre-Cents, aurait intenté un
procès contre Protagoras, après la lecture publique de son traité Sur les dieux.
Mais, selon Aristote (fr. 67 Rose ? - Eodlotńs, fr. 3 Ross), Euathlos était l'accu
sateur.
Peut-être Aristote parlait-il d 'un autre procès, celui qui avait opposé Protagoras et son
disciple . Mais, d'après l'anecdote , c 'est Protagoras qui était l'accusateur.
E71 EUBOULIDÈS DE MILET 245
On trouve chez Aristophane et ses scholiastes un Euathlos, rhéteur syco
phante , qui n 'est sans doute pas le disciple de Protagoras .
RICHARD GOULET.
8 EUBIOS D 'ASCALON RE 5
Philosophe stoïcien “ illustre”, d'époque indéterminée, mentionné par Étienne
de Byzance, s.v. 'Aoxárov (p. 132, 4 -5 Meineke), avec Antiochos « le Cygne »
[= Antiochos d'Ascalon (mA 200 )] et Antibios (* * A 190 ), comme faisant partie
des célébrités de cette cité.
RICHARD GOULET.
9 EUBOULIDÈS RE 7
Dans les Theologoumena arithmeticae qui furent attribués à Jamblique, p . 52,
9 - 12 De Falco , le pythagoricien Euboulidès est cité , avec Androcyde ( » A 173) ,
Aristoxène (PA 417), Hippobote (» H 148 ) et Néanthe. Il aurait écrit sur Pytha
gore et soutenu qu’une période de 216 années (63) aurait séparé deux réincarna
tions de Pythagore. Boèce, Instit.mus. II 19 (=DK 18 A 14 ), rapproche Eubouli
dès et Hippasos ( H 144 ) comme des théoriciens ayant défini un certain ordre
des consonances musicales.
BRUNO CENTRONE .
70 EUBOULIDÈS RE 8
D 'après Diogène Laërce VI 20 (= fr.67 [?] Döring), Eubulide, dans son llepi
AloyÉVous ( Sur Diogène),disait que Diogène le Chien (2- D 147) avait falsifié
lui-même la monnaie et qu 'il avait erré en exil avec son père. Qui est cet
Eubulide dont on ne peut préciser la datation ? Faut-il l'identifier avec le
philosophe mégarique Euboulidès de Milet (» E 71) - P . Natorp, RE VI 1, 1907,
col. 870, juge l'identification difficile -, ou avec l'Eubulide qui, selon Diogène
Laërce II 42 (= fr. 66 [?] Döring), dit que Socrate proposa à ses juges de payer
comme amende une somme de cent drachmes ? K . Doring, Die Megariker, p .
114 , et R .Muller, Les Mégariques, p . 119 , estiment impossible de se prononcer
sur ces deux identifications. D 'autre part faut-il, comme l'a proposé G .Ménage,
ap. H .G . Hübner (édit), Commentarii in Diogenem Laertium , Leipzig 1830
1833, t. IV , p. 20, corriger en VI 30 Eößoulog dè en Eůſourídns ? Voir à cet
égard la notice Euboulos (» E 72).
MARIE -ODILE GOULET-CAZÉ.
EUBOULIDÈS D 'ALEXANDRIE EUBOULOS D ’ALEXANDRIE ?
71 EUBOULIDÈS DE MILET RE 8 Iva
Philosophe mégarique, adversaire d'Aristote , connu presque exclusivement
pour son activité de polémiste et de dialecticien.
Témoignages et fragments. 1 K . Döring, Die Megariker, p. 16 -20 : fr. 50-58
(données biographiques), 59-67 (écrits et doctrines), ainsi que fr. 68,69, 73, 88
246 EUBOULIDÈS DE MILET E 71
et 96 . Il faudrait ajouter un certain nombre de textes qui, sans nommer Eubulide,
apportent d'indispensables précisions sur les arguments dialectiquesmentionnés
dans les fr.51 A , 64 et 65 ; plusieurs d' entre eux figurent ( sous formede citation
dans l'original ou de simple référence) dans le commentaire de Döring 1, p. 109
114. On trouvera un choix plus complet de ces textes, accompagnés de leur tra
duction française, dans 2 R .Muller, Les Mégariques, p. 75-86 . Voir également
3 G . Giannantoni, SSR , fr. II B 1- 19. Traduction italienne des fragments par 4 L .
Montoneri, I Megarici, Catania 1984, p. 261-265. On trouve dans la version
arabe d 'un traité de Thémistius intitulé Réponse à Maxime au sujet de la réduc
tion de la deuxième et troisième figure à la première (traduit dans 5 A . Badawi,
La transmission de la philosophie grecque au monde arabe, Paris 1968, 2e éd.
1987, p . 180 ) les noms d 'Eubolide (ou Euboulide) et de Ménélaus : ils auraient
nié la conversion des prémisses. Ce témoignage est absent des recueils de Döring
et de Giannantoni.
Datation. Plusieurs sources (fr. 59-62) font état de polémiques assez vives
contre Aristote . Si l'on admet (avec 6 K . von Fritz , Schriften zur griechischen
Logik, Stuttgart/Bad Cannstatt 1978, t. II, p. 97) que ces polémiques sont consé
cutives à la tentative d'Aristote de résoudre quelques-uns des « sophismes»
d 'Eubulide (le Voilé et le Menteur sont cités dans Réf. soph. 24 , 179 a 33 et 25 ,
180b2), on peut estimer que le Mégarique florissait dans la deuxièmemoitié du
IVe siècle av. J.-C . Compte tenu en outre de la date probable de composition des
Réf. soph. (I. Düring et R . A . Gauthier les situent tous deux avant 3484), on est
contraint de reculer la naissance d 'Eubulide au moins jusque vers 3700. D 'autre
part, l'information selon laquelle ce dernier aurait été le maître de Démosthène,
né en 384a, est assez controversée (voir fr. 51-56 et Döring 1, p . 102-103) ; si elle
devait néanmoins être acceptée, il faudrait placer la naissance du mégarique
avant 390a environ , ce qui ne serait d 'ailleurs pas incompatible avec les polé
miques contre Aristote, et permettrait même de faire d 'Eubulide un élève direct
d'Euclide de Mégare ( » E 82 (cf. fr. 50). Il est plus difficilement concevable, en
revanche, qu'il ait assisté au procès de Socrate (fr.66 ;mais il est douteux qu 'il
s'agisse du mégarique).
Euvres. Les écrits contre Aristote sont mentionnés sans titre, et désignés
diversement (Bibríov, fr.60 ; oúrypauna, fr.61;nóros, fr.62). « Eubulide le
dialecticien » apparaît aussi dans une citation d ' Athénée comme l'auteur d ' une
comédie intitulée Kwuaotaí (« Les fêtards» , R . Kassel et C . Austin , PCG V ,
1986 , Eubulides, p. 186 , fr. 1); mais on peut comprendre aussi qu'il était un per
sonnage de la pièce (fr. 57 ; voir l'apparat). Diogène Laërce attribue d'autre part
(fr.67) un Iepi Aloyévous à un certain Euboulidès (2E 71), dont on ne sait s'il
s 'agit du mégarique (cf. Döring 1, p . 114 ). Quant à la production la plus impor
tante d 'Eubulide, ses arguments ou questions dialectiques, Diogène Laërce se
contente d ' en faire mention sans les rapporter à des ouvrages particuliers (fr. 64
65).
École, disciples, influence. Eubulide appartient sans conteste à la tradition
mégarique : il est présenté par Diogène Laërce comme un successeur d 'Euclide
E71 EUBOULIDÈS DE MILET 247
( P + E 82 ] (fr. 50 ), sans toutefois qu 'on puisse assurer qu'il en ait été l'auditeur
(cf. ci-dessus “ Datation") : il eut pour élèves Euphante d'Olynthe (» E 125 ] (fr.
68 ) , Apollonios de Cyrène [ A 276 ] (fr. 96 ), et sans doute aussi Alexinos d 'Élis
(> A 125 ), malgré l' imprécision du mot oladoxń (fr. 73 ;mais il est cité avant
les deux autres, dans un contexte où il est manifestement question des « audi
teurs » d 'Eubulide). Cette position d ' intermédiaire entre le fondateur et les der
niers mégariques n 'est pas la seule raison de l'importance d'Eubulide : si ce que
nous savons de ses attaques contre Aristote ne plaide pas d'abord en sa faveur
(cf. fr. 60 ), son activité de logicien et en particulier l' invention des arguments
dialectiques cités aux fr. 51 A , 64 et 65 , méritent considération . On est en effet
de moins en moins porté aujourd 'hui à n 'y voir que vains sophismes: on sait par
exemple que le Menteur a ressurgi dans les discussions du début de notre siècle
sur les fondements des mathématiques (cf. 7 A . N . Whitehead et B . Russell,
Principia Mathematica, t. I,Cambridge 1910, p. 60 ; 8 A . Tarski,« Le concept de
vérité dans les langages formalisés », trad. franç. d ’un article publié en 1933 (en
polonais) et 1936 (en allemand ), dans Logique, sémantique, métamathématique,
Paris 1972 , t. I, p. 159 -269, spéc. p . 164- 171; 9 A . Koyré, Épiménide le Men
teur, Paris 1947) ; interprétation mathématique aussi pour le Sorite ou le Chauve
( 10 E . W . Beth, « Le paradoxe du Sorite d'Eubulide de Mégare» , dans La vie , la
pensée. Actes du Vire congrès des Sociétés de phil. de langue franç., Paris 1954 ,
p. 237 -241 ; voir aussi 11 J.Moline, « Aristotle, Eubulides and the Sorite » ,Mind
78, 1969, p. 393-407, et 12 G . Sillitti, « Alcune considerazioni sull'aporia del
sorite » , dans G . Giannantoni ( édit.), Scuole socratiche minori e filosofia elle
nistica, Bologna 1977, p. 75-92); les discussions contemporaines concernant
l'« opacité référentielle » (13 W . V . O . Quine, Word and object, Cambridge,
Mass ., 1960, p. 141-146 ; trad. franç. Lemot et la chose , Paris 1977, p. 207 -212)
donnent également un éclairage inattendu au problème de l'identité tel que le
soulèvent l'Électre ou le Voilé , pourtant considérés d'habitude comme de mau
vaises plaisanteries (les exemples très frappants de Quine sont repris et discutés
sous l'angle de l'opacité liée aux modalités par 14 J. L . Gardies, Essai sur la
logique des modalités, Paris 1979, p. 215-228); et le Cornu lui-même présente
des propriétés formelles intéressantes à étudier dans le contexte de la naissance
de la logique des propositions (voir Muller 2, p . 118). D 'un autre côté, il est vrai
que la part prise par Eubulide à la création de ces arguments est difficile à
cerner : le matériau est parfois antérieur (pour le Sorite, cf. l'argumentde Zénon
rapporté par Aristote, Phys. VII 5 ; 250 a 19 -25 , et Simplicius, in Phys. p . 1108,
18 Diels ; pour le Menteur, cf. 15 A . Rüstow , Der Lügner, Erlangen 1910, p. 19
39), et plusieurs d'entre eux sont attribués à Diodore Cronos (BD 124), à Philon
de Mégare ou à Alexinos d 'Élis [PA 125 ] (fr. 109, 110 ; cf. aussi fr. 77 et 84),
ainsi qu 'aux stoïciens (fr. 65 ; cf. D .L . VII 82, 196 - 198, etc.) ; mais on notera
que, pour les philosophes du Portique, il s'agit plutôt de tentatives de solution et
que, si le fr. 64, pris à la lettre, n 'affirme pas qu'Eubulide ait été le premier à
poser les arguments en question , il suggère au moins que le mégarique a
contribué de façon significative à leur élaboration et à leur diffusion (la citation
248 EUBOULIDÈS DE MILET E 71
du poète comique anonyme du fr. 51 A va dans le même sens; et Rüstow 15,
p . 39 et 43, fait remarquer qu 'aucun des arguments du fr. 64 ne figure tel quel
dans l'Euthydème de Platon, alors que les Réf. soph ., on l'a vu, en mentionnent
deux).
Études d'orientation, bibliographie. La brève étude de 17 P. Natorp , art.
« Eubulides» 8 , RE VI 1, 1907, col. 870,mérite d ' être consultée au moins pour
la bibliographie.Mise au point, commentaire des fragments et bibliographie plus
récente dans Döring 1 , p. 105 -114, et Muller 2 , p. 110-119 . Aux travaux cités ci
dessus, on peut ajouter 17 K . von Fritz , art. « Megariker » , RESuppl. V , 1931,
col. 707-724 (spéc. col. 710 -715), art. repris dans von Fritz 6 , p. 75 -92 ; 18 F .
Rivetti Barbo, L 'antinomia del mentitore nel pensiero contemporaneo, Milano
1961; 19 D . Zaslawsky, Analyse de l'être, Paris 1982 (surleMenteur, p . 72 -83) ;
20 K . Döring et Th . Ebert (édit.), Dialektiker und Stoiker. Zur Logik der Stoa
und ihrer Vorläufer, Stuttgart 1993 ; 21 W . Kuenne, « Megarische Aporien für
Freges Semantik .Über Präsupposition und Vagheit » , Zeitschrift für Semiotik 4,
1982, p. 267-290 (sur l'intérêt intrinsèque des arguments mégariques du Cornu,
du Sorite et du Chauve); 22 C .Zimmer, « Die Lügner-Antinomie in Titus I, 12 » ,
Linguistica Biblica 59, 1987 , p. 77 -99. Voir encore : 23 M . F . Burnyeat, « Gods
and heaps », dans M . Schofield et M . C . Nussbaum (édit.), Language and logos.
Studies in ancient Greek philosophy presented to G . E .L . Owen , Cambridge
1982, p. 315 -338 ( sur le sorite chez Euboulidès); 24 G . Giannantoni, « La pole
mica antimegarica nel XXVIII libro Della natura di Epicuro » , CronErc 13,
1983, p. 15 - 19 (fr. 13 Sedley) ; 25 K . Döring, « Sokrates, dis Sokratiker und die
von ihnen begründeten Traditionen » , GGP, Antike 2/1, p. 215- 218 , avec
bibliographie p . 349.
ROBERTMULLER .
72 EUBOULOS
Diogène Laërce VI 30 attribue à un certain EŰbovios, inconnu par ailleurs,
une Vente de Diogène où l'auteur exposait les principes éducatifs appliqués par
Diogène le Chien (™D 147) quand il était le précepteur des enfants de Xéniade.
G . Ménage, ap. H .G . Hübner ( édit), Commentarii in Diogenem Laertium ,
Leipzig 1830-1833, t. IV, p. 20 , a proposé de corriger EŰbovhoç dè en Eŭbov
aíons, car en VI 20, Diogène Laërce fait allusion à un lepi Aloyévous d'un
certain Euboulidès (» E 70) . La correction a été refusée par certains (Th .
Gomperz, K . von Fritz, H .Maier par exemple ), mais admise par d'autres (Ed .
Zeller, F . Leo , W . Croenert notamment). Voir G . Giannantoni, SSR , t. IV , note
44, p. 454-455.
Je suggère une identification possible de l'Eubule de Diogène Laërce VI 30 avec le poète
comique athénien (RE 14 ) homonyme du IVe siècle av. J.-C . Celui-ci en tout cas ne s'inter
disait pas de parler des cyniques, si l' on en juge par ce vers tiré de son Pentathle : vódos ,
audidovaos, oùdauodev I oúdeiç, xúwv, « Bâtard, esclave des deux côtés, venu de nulle part,
homme de rien, chien » (fr. 86 a Hunter = PCG V, 1986 , Eubulus, fr. 85). Mais, à en juger par
le passage de Diogène Laërce VI 30, l'auteur de la Vente de Diogène écrivait en prose.
E 74 EUBOULOS D 'ALEXANDRIE 249
EUVRES
Éditions critiques . 13 J.L . Heiberg et H . Menge (édit.), Euclidis opera
omnia, coll. BT, Leipzig : 1. Elementa I-IV (1883); II. EI. V - IX (1884); III. El. X
( 1886 ); IV . El. XI-XIII (1885); V. El. XIV -XV, Scholia, Prolegomena critica
( 1888 ) ; VI. Data, Marini Commentarius in Eucl. “ Data " (1896 ) ; VII. Optica,
Opticorum recensio Theonis, Catoptrica (1895) ; VIII. Phaenomena, Scripta
musica, Fragmenta (1916 ).
14 E . S. Stamatis ( édit.), Euclidis Elementa , post Heiberg edidit E. S.S., coll.
BT, Leipzig: I. El. I-IV (1969); II. EI. V -IX (1970 ) ; III. El. X (1972) ; IV . El.
XI-XIII (1973); V , 1. Prolegomena critica, El. XIV -XV, Scholia in lib. I-V
(1977); V, 2. Scholia in lib. VI-XIII cum appendicibus (1977).
Listes d 'ouvrages reconstituées (voir Heiberg 1, p. 28 -55 , Heath 3, p . 7 -18,
Bulmer-Thomas 5 , p. 425-431, Caveing 6, p. 18-28).
Deux auteurs nous ont transmis des informations importantes sur les œuvres
attribuées à Euclide dans l'Antiquité, même s 'il ne s'agit pas exactement de
listes d 'ouvrages en tant que telles: Pappus et Proclus.
Pappusprésente et commente deux ensembles de textes mathématiques appe
lés traditionnellement Petite Astronomie (par opposition à l’Almageste de Ptolé
mée ) et Trésor de l'Analyse, respectivement dans les livres VI et VII de sa Col
lection . Dans le premier ensemble figurent les Phénomènes d'Euclide et Pappus
recourt également aux Optiques du même auteur dans ses lemmes. Le domaine
de l'analyse (ce que l'on peut considérer comme une partie de la géométrie non
élémentaire) a été créé par trois auteurs selon Pappus: Aristée l'Ancien, Euclide
et Apollonius. Dans l'ensemble des 33 livres qui constituent cette collection ,
Pappus cite en premier lieu les Données d 'Euclide (en 1 livre ), puis les Porismes
( en 3 livres) et les Lieux relatifs à une surface ( en 2 livres).
Quant à Proclus il consacre une « notice» biographique à l'auteur qu'il com
mente (voir l'extrait donné supra ) et, outre les Éléments, il mentionne d'autres
æuvres d'Euclide connues pour la rigueur de leur composition : les Optiques et
les Catoptriques, les Éléments de musique, le livre Sur les divisions (des figures]
(p. 68,23 -69,4 Friedlein ). Un peu plus loin (p . 70, 9 - 18 Friedlein ), il explique
qu 'Euclide avait également constitué un recueil de Faux Raisonnements à usage
cathartique et complémentaire par rapport aux Eléments.
Le « catalogue » ainsi établi couvre pratiquement toutes les sciences mathé
matiques distinguées par les Anciens: arithmétique, géométrie, astronomie ou
sphérique, musique ou canonique, optique,mécanique, telles qu ' elles sont articu
lées dans la classification dite de Géminus (MG 15 ) (transmise par Proclus
(p. 38, 2 -42, 8 Friedlein )mais dont on peutmontrer qu'elle était déjà esquissée
dans ses grandes lignes à l'époque d'Aristote). C 'est en ce sens que l'on peut
parler d'une « encyclopédie » mathématique, quoique la spécialité la plus repré
sentée dans le corpus euclidien soit évidemment la géométrie (pour la mécani
que, absente des deux listesmentionnées, voir infra).
E 80 EUCLIDE 257
- Éléments en 13 livres. L . I-IV : géométrie plane élémentaire; L . V : théorie
générale des proportions ; L . VI: géométrie plane des figures semblables; L . VII
IX : arithmétique ; L . X : grandeurs incommensurables et classifications des
lignes irrationnelles; L . XI: stéréométrie élémentaire ; L . XII : méthode dite
d'exhaustion et comparaison des figures solides simples; L . XIII : partage en
extrême et moyenne raison ; construction des cinq polyèdres réguliers. Voir infra
la section consacrée à ce très important traité .
Édition critique:Heiberg 13, I-IV , révisée dans Stamatis 14, I-IV .
Traductionsmédiévales: voir infra .
Traductions françaises : 15 J. Itard (trad.), Les livres arithmétiques d 'Euclide,
coll. Histoire de la pensée, Paris, t. X , 1961, et 16 B . Vitrac (trad .), Euclide
d 'Alexandrie, Les Éléments. Traduits du texte de Heiberg, traduction (franç.) et
commentaires par B. V., coll. « Bibliothèque d 'histoire des sciences» , Paris, t. I,
1990 (Livres I à IV : Géométrie plane), p. 151-519 ; t. II, 1994 (Livres V à IX :
Proportions et similitude ; arithmétique); t. III, 1998 (Livre X : Grandeurs com
mensurables et incommensurables, classification des lignes irrationnelles ).
Dans 17 J. Peyrard (trad.), Les æuvres d'Euclide (Éléments et Données), Paris
1819 ; réimpr. Paris 1966 , on trouve la traduction d 'un texte grec antérieur à
l'édition critique de Heiberg 13, I-IV .
- Données (AEdouéva ), non mentionnées par Proclus,mais commentées par
son disciple Marinus de Néapolis. Si l'on en croit ce dernier (Heiberg 13, VI,
p . 256 , 24-25), le traité avait déjà été commenté par Pappus.
Édition critique: Heiberg 13, VI, p. 2-187.
Traductions médiévales : les Données ont été traduites en arabe par Isḥāq Ibn
Hunayn à la fin du IXe siècle , traduction révisée par Tābit ibn Qurra. C 'est sans
doute cette version que Gérard de Crémone rendit en latin (le texte en est appa
remment perdu ). Ultérieurement Nasir at-Din at- Tūsi composa une recension
(tahrir ) du livre des Données (voir 18 F . Sezgin , Geschichte des arabischen
Schrifttums, Band V , Leiden 1974 , p. 116 ). Elles furent également traduites du
grec en latin au XIIe siècle, en Sicile selon toute vraisemblance. Voir 19 S. Ito
(édit.), The Medieval Latin Translation of The Data of Euclid . Éd . et trad . angl.
par S . I., Tokyo/Boston/Basel/Stuttgart 1980.
Traduction française dansPeyrard 17. Il s'agit de la traduction d 'un texte grec
antérieur à l'édition critique de Heiberg 13 , VI.
- Sur les divisions (des figures) (Ilepi dlalPÉDewv) estmentionné seulement
par Proclus (p . 69, 4 et 144, 24 Friedlein ). Il est perdu en grec, mais un traité
rédigé en arabe, avec le même titre et attribué à Euclide, a été retrouvé et publié
par 20 F .Woepcke, « Notice sur des traductions arabes de deux ouvrages perdus
d 'Euclide » , JA , sept.-oct. 1851, p. 217 -247, en particulier, p . 233 -247. Il a été
identifié avec le traité d 'Euclide. Sans doute avait-il été traduit en latin par
Gérard de Crémone; une version latine était connue de J. Dee (1527- 1608 ) et F .
Commandino (1509- 1575), peut-être même de Léonard de Pise (ca 1170 -1240).
Voir Heath 3, p. 8 -10 .
258 EUCLIDE E 80
hébraïque inédite des Éléments d’Euclide» dans D . Jacquart ( édit.), Les voies de
la science grecque, Genève 1997, p . 181-239.
- Pour la tradition euclidienne dans l'Inde médiévale , voir 57 G . De Young,
« Euclidean Geometry in the Mathematical Tradition of Islamic India » ,
HistMath 22, 1995, p. 138 - 153.
Commentaires anciens et médiévaux. Dans l'Antiquité, les Éléments, en
totalité ou en partie, ont été commentés par Héron d'Alexandrie, Porphyre de
Tyr, Pappus d 'Alexandrie, Proclus de Lycie et Simplicius ( voir Heiberg 1 ,
p. 154-173, Hultsch 2 , col. 1036 - 1039, Heath 3, p. 19-45, Murdoch 5 , p . 437,
Caveing 6 , p . 28 -44 ). Seuls nous sont parvenus : le commentaire au livre I par
Proclus, conservé en grec (voir Friedlein 9), et le commentaire au livre X attri
bué à Pappus, conservé dans une traduction arabe de Abū ‘Uțmān ad -Dimašqi.
Voir 58 C. Junge et W . Thomson (édit.), The Commentary of Pappus on Book X
of Euclid 's Elements, éd., trad. angl. par W . T., comment. par C .J. et W . T.,
Cambridge (Mass .) 1930 ; réimpr. New York London 1968. Sur les problèmes
d 'attribution et la nature de ce texte , voir en dernier lieu Vitrac 16 , t. III, p . 417
420 .
Plusieurs fragments importants des commentaires de Héron et de Simplicius
nous ont été transmis par l'intermédiaire du commentateur arabe an -Nairizi. Son
commentaire est l'un des rares travaux arabes consacrés aux Éléments – pourtant
très nombreux - qui aient été traduits en latin (par Gérard de Crémone) ; voir
59 M . Curtze ( édit.), Anaritii in decem libros priores Elementorum Euclidis
Commentarii, dans Euclidis Opera omnia, ed. I. L . Heiberg et H . Menge, coll.
BT, Leipzig, vol. IX , Supplementum , 1899. L 'auteur est alors appelé Anaritius
ou Anarizus. Ce texte a effectivement été utilisé par un certain nombre d 'auteurs
occidentaux (Roger Bacon, Albert le Grand et très certainement Campanus (de
Novare]). Une nouvelle édition critique est en cours ; voir 60 P . M . J. E . Tummers
( édit.), Anaritius ' Commentary on Euclid . The Latin Translation , I-IV , coll.
« Artistarium » Supplementa 9 , Nijmegen 1994.
Pour les autres commentaires complets ou partiels des Éléments, épîtres et
autres traités divers, rédigés en arabe et se rapportant à des problèmes particu
liers soulevés par l'ouvrage d ’Euclide, voir Heath 3 , p . 84 -90 , Murdoch 5 ,
p . 441-442, Caveing 6 , p . 66 -69, Sezgin 18, p . 104 - 115. Parmi eux il fautmen
tionner l'important commentaire de al-Ğayyāni aux Définitions du livre V (fac
similé du manuscrit et trad . angl. dans 61 E . B . Plooij, Euclid 's Conception of
Ratio and his Definition of ProportionalMagnitudes as Criticised by Arabian
Commentators, Rotterdam 1950 ) ; 62 O . P . Schrader ( édit.), The " Epistola De
Proportione et Proportionalitate ” of Ametus Filius losephi (Aḥmad ibn Yusuf),
[Traduction latine de Gérard de Crémone), éd ., trad . angl. et comment. par
O .P .S., The University of Wisconsin , Ph . D ., 1961 (University Microfilm Inc.,
Ann Arbor,Michigan ), l'un des commentaires d ' Ibn al-Haytham ( Alhazen ) par
tiellement édité (63 B.H . Sude [ édit.), Ibn al-Haytham 's Commentary on the
Premises of Euclid 's Elements: Books 1- VI, éd., trad. anglaise et comment. par
B . H . S., Princeton University, Ph. D ., 1974), la traduction française , avec com
E 80 EUCLIDE 265
mentaires, des principaux textes consacrés à la question des parallèles (an
Nairizi, al-Ğauhari, Țābit ibn Qurra, Ibn al-Haytam , 'Umar al-Hayyām , Naşir ad
Din at-Tūsi, al-Abhari, al-Maġribi...) dans64 K . Jaouiche, La théorie des paral
lèles en pays d 'Islam , Paris 1986 , la traduction française par A . Djebbar de la
très importante épître de 'Umar al-Hayyām , « Sur l'explication des prémisses
problématiques du Livre d' Euclide » , dans 65 A . Djebbar, L 'émergence du
conceptde nombre réel positif dans l'Épître d ' al-Khayyam (1048 -1131), Orsay,
Université de Paris- Sud. Mathématiques. Prépublications 97 - 39, 1997, p . 22
70. Dans 66 B . Vahabzadeh, Trois commentaires arabes sur les concepts de
rapport & de proportionnalité, Thèse de Doctorat de l'Université Paris VII, sous
la direction de R . Rashed , 1997 , on trouve l'édition et la traduction française
(sans doute provisoires, mais utiles) des deux commentaires déjà mentionnés de
al-Ğayyāniet 'Umar al-Hayyām , ainsi que le Traité sur la difficulté relative à la
question du rapport, de al-Māhāni, l'un des plus anciens commentaires arabes
sur cette question (deuxièmemoitié du IXe siècle ).
Les commentaires médiévaux consacrés aux Éléments et rédigés en latin ou
en hébreu sont beaucoup moins nombreux. Parmi ceux qui ont fait l'objet d 'un
travail récent, on notera celui attribué à Albert le Grand (67 P .M . J. E . Tummers
[édit.), Albertus Magnus' Commentaar op Euclides' Elementen der Geometrie, 2
vol., Nijmegen 1984 ) et celui de Gersonide (68 T. Lévy, « Gersonide, commenta
teur d ’Euclide. Traduction annotée de ses gloses sur les Éléments », dans G .
Freudenthal ( édit.), Studies on Gersonides. A Fourteenth -Century Jewish Philo
sopher-Scientist, Leiden 1992, p. 83- 147) .
Notoriété d'Euclide et destinée des Éléments dans l'Antiquité. L 'abon
dance des traductions et commentaires, le nombre des manuscrits conservés, le
fait que le traité euclidien a été , après la Bible, le livre qui a connu le plus d ' édi
tions jusqu 'au début de ce siècle prouvent le succès de l'ouvrage, l'énorme
impact qu'il eut sur l'histoire desmathématiques et de leur enseignement depuis
le Moyen -Âge. Sa destinée, son utilisation dans l'Antiquité sont moins bien
connues. La principale difficulté tient à ce que les mathématiciens anciens citent
rarement leurs sources ; quantaux renvois aux autres traités, ils sont la plupart du
temps implicites. Les quelques informations qui nous sont parvenues se trouvent
dans le commentaire de Proclus (voir Friedlein 9 ), lui-même ayant puisé chez ses
prédécesseurs. On peut en tirer le tableau général suivant.
D 'abord Euclide n 'a évidemment pas inventé le genre littéraire « éléments » .
Même en se limitant à la géométrie , Proclus (p . 66 , 7-8 .20 -21 ; p .67, 14 - 15
Friedlein ) lui connaît trois prédécesseurs : Hippocrate de Chios (2H 151] (ve s.
av. J.-C .), peut-être l'initiateur du genre, Léon et Theudios de Magnésie (Ive s.
av. J.-C .). Lemême Proclus souligne la supériorité de l'exposé euclidien sur les
autres compositions de même nature (p. 69,4 - 70, 18 Friedlein ). La disparition
des autres recueils d' Éléments de géométrie élémentaire confirme en quelque
sorte que cette supériorité a été reconnue.
Cela dit, quand 69 P . Tannery , La géométrie grecque, comment son histoire
nous est parvenue et ce que nous en savons, Paris 1887 ; réimp. Sceaux 1988 ,
266 EUCLIDE E 80
p . 166 , prenant à témoin la controverse qui opposa l'épicurien Zénon de Sidon
( fr. 27 Angeli et Colaizzo ) et le stoïcien Posidonius (p . 199, 11 - 200 , 3 ;
p . 214 , 18 - 215 , 13 ; p. 216 , 10 -218, 11 Friedlein ), affirme que les Éléments
d 'Euclide étaient considérés comme l'ouvrage de référence, il faut peut- être
quelque peu nuancer. Les indications dontnous disposons pour la période hellé
nistique suggèrent que le traité et les choix euclidiens restent objets de discus
sion , y compris par les mathématiciens eux -mêmes. Bien entendu les critiques
continueront à s'exercer sur des points précis durant toute l'Antiquité – tout par
ticulièrement sur la question des parallèles (Vitrac 16 , t. I, p . 300 -310) – mais il
semble que ni la structure générale ni le contenu global du traité euclidien ne
soient plus véritablement contestés par les mathématiciens postérieurs au début
de notre ère.
A l'inverse, Apollonius a proposé d 'autres choix touchant apparemment aux
principes mêmes des Éléments : définition alternative de l'angle (Eucl., El., Df. I
8 ; voir Proclus, p . 123, 16 ; 124 , 18 ; 125 , 17 Friedlein ), constructions élémen
taires alternatives (Eucl., El., Prop . I 10, 11, 23 ; Proclus, p . 279, 16 - 280 , 9 ;
p. 282, 8- 19 ; p. 336 , 16 Friedlein ) etmêmeremise en cause de certains axiomes
(Proclus, p. 183, 13.18 ; p. 194 , 10.21 ; p . 194, 25 - 195,5 Friedlein ). Il est pos
sible que certaines des dernières Propositions du livre X d'Euclide (112 -115 )
soient empruntées à Apollonius (voir Vitrac 16 , t. I, p. 7-68 et 383-384 ). Dans le
même ordre d'idées, Hypsiclès (II° s. av. J.-C .) ajoutera un quatorzième livre aux
Éléments, pour compléter l'étude des polyèdres réguliers (du livre XIII). Son
traité sur les nombres polygones, cité par Diophante, avait peut-être aussi pour
but d'introduire les considérations d' arithmétique figurée dans les livres arithmé
tiques d'Euclide, dont elles sont absentes, mais ce n 'est là qu'une hypothèse
(déjà proposée dans Tannery 69, p. 156 ) ; si tel est le cas, cette tentative, à la dif
férence de la précédente, n 'a apparemmentpas abouti. Du strict pointde vue de
l'histoire textuelle on peut d' ailleurs considérer que la première tentative d' ex
tension n 'aboutit que fort tardivement et que l'Antiquité , à la différence du
Moyen -Âge, n 'a pas connu 15 Livres d' Éléments, mais 13, plus 2 ouvrages
complémentaires. Cependant la tentative d'Hypsiclès, là encore précédé par
Apollonius sur le sujet de la comparaison du dodécaèdre et de l'icosaèdre,
indique que l'exposé des Éléments était perçu, dans sa globalité, comme incom
plet.
Quant à la polémique entre Zénon de Sidon et Posidonius, elle s'applique très
certainement à la version euclidienne des Éléments de géométrie comme c ' était
également le cas de celle qui opposait Démétrius Lacon (BD 60 ) et le stoïcien
Dionysios de Cyrène (2+ D 180). Dans les deux cas il s'agissait de critiquer les
premières propositions du Livre I (I 1 chez Zénon ; I 3, 9, 10 , au moins, chez
Démétrios). Il n 'est pas aussi clair que la cible des Apories de Polyen (cf. DPA,
II, p. 641) était déjà les Éléments d'Euclide en tant que tels (il s'agirait d'une
critique quasi contemporaine), plutôt que la géométrie en tant que savoir incom
patible avec certains principes de la philosophie épicurienne. Quoi qu'il en soit,
si Posidonius « défend » Euclide ( en fait la géométrie) dans le cadre de sa polé
E 80 EUCLIDE 267
mique avec les Épicuriens, il n'hésite pas non plus à proposer des Définitions
alternatives (pour la figure , les espèces de triangles et de quadrilatères, les paral
lèles ; voir Proclus, in Eucl., p. 143, 8 ; 170, 13 ; 176 , 6 Friedlein respectivement).
Le cadre général, les concepts fondamentaux du traité sont donc encore partiel
lement malléables au cours du lie siècle avant notre ère. Les modifications et
objections peuvent être textuelles etmathématiques, au sens technique du terme,
mais aussi de caractère plutôt philosophique. Le débat épistémologique qui a
opposé un cercle d'épicuriens et celui des condisciples du stoïcien Panétius,
autour des années 100 avantnotre ère , a pu consacrer la célébrité des Éléments à
l' extérieur du cercle étroit des spécialistes.
Ce n 'est qu'à partir de la fin de la période hellénistique que nous pouvons être
assurés qu ’Euclide est devenu quasiment synonyme de géométrie . Pour Cicéron
(De Oratore III 132) - pourtant peu féru de mathématiques (mais qui a entendu
Posidonius et Zénon dans les années 79 -77 !) -, Euclide et Archimède représen
tent la géométrie au même titre qu'Hippocrate de Cos (» H 152) représente la
médecine, Damon (HD 13) et Aristoxène (P- A 417) la musique, Aristophane
(de Byzance) (> A 405) et Callimaque (* * C 22) la critique littéraire . Ces savants
anciens (pour Cicéron )maîtrisaient la totalité de leur spécialité , alors que de son
temps la « spécialisation » a eu comme conséquence le « démembrement» de
tous les arts. Dans les Noces de Philologie et de Mercure de Martianus Capella
(début du ve siècle), la Géométrie, avant de commencer son exposé, repère dans
l'assistance les deux mêmes disciples : Archimède et Euclide.
La même association rhétorique entre Euclide et la géométrie se trouve aussi
chez des auteurs non spécialistes de mathématiques comme Élien (De natura
animalium VI 57 , 6 ), Eusébe de Césarée (Historia ecclesiastica V 28, 14 , 4 ),
Grégoire de Nysse (Funebris in laudem Caesarii fratris oratio (orat. 7] 20, 4, 5),
et leurs témoignages n 'en sont que plus significatifs. Bien entendu les Éléments
sont plusieurs fois cités par un savant encyclopédiste comme Galien (De usu
partium , t. III, p . 830, 7 -13 Kühn ( cite XI 2 ), Adversus eos quide typis scripse
runt vel de circuitibus, t. VII, p.511, 10 Kühn (cite VII 1), Institutio logica 16 , 6 ,
5 (cite I 1), In Hippocratis librum de articulis et Galeni in eum commentarii,
t. XVIII a, p. 466 , 15 Kühn (cite la Df. I 22b )] et c'est également à Euclide que
se réfèrent les commentateurs d'Aristote lorsqu 'ils doivent expliquer l'un des
nombreux locimathematici du maître .
Si l'on revient aux manières de désigner les Éléments et leur auteur, il me
semble que l'on peut corroborer la description qui précède. Ainsi, pour désigner
Euclide, Proclus, dans son commentaire , utilise plusieurs moyens : outre la
nomination pure et simple, Proclus invoque très souvent le « rédacteur des Élé
ments » (Ó OTOIxelwtńs) ou simplement le « Géomètre » . Le terme • otol
Yelwts est intéressant: il semble assez tardif et je l'ai trouvé appliqué seu
lement à Euclide, quoique d'autres auteurs – et non des moindres (par exemple
Apollonius, Archimède, Ménélaos...) – aient rédigé des traités mathématiques
appartenant au genre littéraire « éléments » et qui sont d 'ailleurs désignés comme
tels. Mais, comme on le voit chez ses commentateurs (particulièrement Proclus
268 EUCLIDE E 80
et Marinus), le otoixelwtńs par excellence ne peut être qu'Euclide. Ce critère
est donc sûr,mais sans surprise : sur les 181 occurrences repérées, 99 se trouvent
dans le Commentaire de Proclus au Livre I et 72 proviennent des scholies des
manuscrits euclidiens. De plus, 59 de ces occurrences dans les scholies portent
sur le livre I et remontent pour la plupart à Proclus.
Par ailleurs, on a 2 occurrences dans le commentaire de Porphyre aux Har
moniques de Ptolémée , 2 dans la Collection mathématique de Pappus et 3 dans
les Definitiones rapportées à Héron.
Pour être complet,mentionnons les 3 autres références tardives: Marinus, In Eucl. Data,
p. 254, 16 Menge ; Simplicius , In De caelo , p .414, 2 Heiberg ; David l'arménien, In Categ.,
p. 251, 18 Busse (qui attribue le comm .à Élias (- E 15]).
Pour le terme ń otolyeiwolç, la situation est un peu différente , et il est sans
doute plus ancien que le terme ó otolXelwtńs. Au sens d'« enseignement élé
mentaire », on le trouve chez Épicure (selon Diogène Laërce X 37) et Posidonius
(selon Proclus p. 217, 24 Friedlein (= F 47 Edelstein -Kidd ) ; à noter qu 'il s'agit
de mathématiques etmême d'un point traité dans le premier livre des Éléments
d 'Euclide) entre autres. Pour son occurrence dans des titres d 'ouvrages, les
choses sont plus difficiles à circonscrire , car les titres des ouvrages anciens de
mathématiques – tels qu'ils sont cités – sont plutôt fluctuants . Il semble que l'uti
lisation du terme otoLXEÍwois dans un titre remonte aux débuts des écoles philo
sophiques hellénistiques: Diogène Laërce cite en X 44 les Aboexa otoLYELÓ
delç d' Épicure (» E 36 ), en VII 39 l’’HOLXn Otolyeiwolç du stoïcien Eudromos
[ E 103] et en VII 138 la Metewporoyixn otolyeiwolç de Posidonius (que
Simplicius, In Phys. I-IV , p . 291 Diels, désigne sous le titre Metewporoyixá).
Au jer siècle de notre ère , la musicologue Ptolémaïs de Cyrène compose ń
Iudayopian tñs uovoixñs otolyeiwolc (voir Porphyre, In Harm . Ptol., p. 22,
24 Düring), sans doute un ouvrage sur la partie mathématique de la musique. En
géométrie, le terme ń otoixeiwolç est appliqué pour l'essentiel aux Éléments
d 'Euclide, mais dans des citations qui sont plutôt tardives, et il n 'est pas certain
que l'ouvrage était désigné ainsi durant l'époque hellénistique. Pour les traités
consacrés aux coniques par Euclide et/ou Aristée l'Ancien, Archimède utilise le
terme otoixeta ; Apollonius fait demême pour ses quatre premiers livres ; même
chose pour les Éléments de Mécanique auxquels se réfère Archimède. Chez
celui-ci, la seule mention de toixeiwols se trouve dans Sur la sphère et le
cylindre, I, Prop. 6 . Déjà suspecte, elle l'est plus encore après la constatation que
nous venons de faire , d'autant que la référence aux Éléments d' Euclide sous le
vocable otolyeiwolç est devenue bien attestée à la fin de l'Antiquité, et particu
lièrement chez le commentateur d'Archimède, Eutocius ( E 175). En fait elle
est déjà devenue fréquente chez Proclus, qui a lui-même composé deux otol
XELVOELS (Éléments de théologie, Etoixelwolç Deodoyixń , et Éléments de Phy
sique, EtoixeiwOLÇ Quoixń ). Dans le commentaire de Proclus, on compte vingt
quatre occurrences du terme pour désigner le traité euclidien, quelques occur
rences pour désigner un genre littéraire technique (voir en particulier p. 73, 14 et
73, 25 Friedlein ), et c 'est ainsi qu ' il désigne également un traité euclidien de
E 80 EUCLIDE 269
musique (Éléments de musique, ai xatà uovOLUNU OTOIXELÚOELÇ). La plupart
des autres occurrences sont tardives et contenues dans des scholies ou des com
mentaires des ve (Marinus, Heiberg 13, VI, p. 252 16 -17) et vie siècles (Olym
piodore, In Meteor., p. 220 , 7 ; p. 229, 19 ; p. 257, 9 Stüve).
Il y a bien une occurrence dans le commentaire de la Métaphysique transmis sous le nom
d ' Alexandre d 'Aphrodise (ca 200 ) qui permettrait de remonter plus haut dans le temps. Mais
on sait que seuls les commentaires aux livres A - sont authentiques, et notre mention appa raît
dans le commentaire à 9, 1051a 21-23. Bien que cette attribution soit discutée, on rapporte
la seconde partie du commentaire à l' érudit byzantin Michel d 'Ephèse (XIe-Xile siècle) et, dans
ces conditions, notre occurrence serait très tardive ! Si l'on accepte la suggestion de L . Tarán
qui voit dans le Pseudo - Alexandre un auteur contemporain de Syrianus ou même plus ancien
( DPHA I, p . 129),notre occurrence appartient à l'époque des commentateurs, ce qui n 'a rien de
surprenant.
Il reste finalement cinq occurrences dans des traités rapportés au corpus héro
nien et donc d'authenticité douteuse : quatre dans les Definitiones, une dans les
Stereometrica. Si l'on est très optimiste, on rapportera les premières aux com
mentaires de Héron , d'autant qu'elles ont un caractère de « rappel préliminaire » .
Si l'on fait le rapprochement avec ce que l'on a dit pour le terme otolyelwtńs
(attesté dans le Pseudo-Héron , Porphyre, Pappus, Proclus,Marinus, autrement
dit les commentateurs d 'Euclide), on peut raisonnablement conclure que l'intro
duction des deux termes pour désigner Euclide et son traité majeur est due à
l'initiative de ses commentateurs et peut-être au premier dont l'existence soit
connue de nous, à savoir Héron d'Alexandrie . Autant les désignations que le tra
vail de commentaire lui-même témoignent de l'autorité reconnue à partir de ce
moment-là tant à l'auteur qu 'à l'euvre .
Euclide et la philosophie . Consacrer dans ce dictionnaire une notice à Eu
clide est certainement davantage justifié par l'importance de son œuvre – tout
particulièrement les Éléments – pour les logiciens et les philosophes que pour sa
formation et/ou son obédience philosophique personnelle.
Le traité en effet a exercé une double fonction . D 'une part, il s'agit d'une
monographie de mathématiques. C 'est à elle que se sont référés par exemple les
commentateurs d' Aristote et c'est en elle que les auteurs médiévaux , tout parti
culièrement, ont puisé des résultats ou des méthodes mathématiques (dichoto
mie, superposition ...) pour échafauder certains arguments concernant l'existence
du vide, de l'infini, ou encore la nature du continu ... Le Stagirite leur avait
d'ailleurs montré la voie en recourant lui aussi à un certain nombre de preuves
de type mathématique, élaborées pour l'essentiel à partir de la théorie des pro
portions.
D 'autre part, les Éléments ont joué le rôle d 'un manuel de raisonnement ou
plutôt d' éminent exemple d' exposé scientifique, déductif et synthétique (qui
procède à partir des principes jusqu 'aux choses démontrées). La forme eucli
dienne a séduit un certain nombre de philosophes , qui ont cru donner plus de
force à leur système ou du moins accroître leur pouvoir de conviction en recou
rant à l'exposition more geometrico. Là encore, Euclide pouvait compléter
Aristote , dont la théorie de la science démonstrative semble avoir été élaborée
270 EUCLIDE E 80
principalement en réfléchissant sur la pratique de la géométrie . Les échanges se
firent également dans l'autre sens, car les commentateurs médiévaux d'Euclide
firent grand usage de grilles conceptuelles d 'inspiration aristotélicienne.
Si l'on ne sait rien d'une éventuelle formation philosophique d’Euclide, la
question de son appartenance à une École a été tranchée dès l'Antiquité par Pro
clus (p .68 , 20 -23 Friedlein ):
Και τη προαιρέσει δε Πλατωνικός έστι και τη φιλοσοφία ταύτη οικείος, όθεν δή και
της συμπάσης στοιχειώσεως τέλος προεστήσατο την των καλουμένων Πλατωνικών
σχημάτων σύστασιν .
« Et dans son obédience, il est platonicien , et familier avec cette philosophie, et c 'est pour
cela qu'il a proposé , comme fin de la composition des Éléments dans leur totalité, la construc
tion des figures dites platoniciennes.»
Il n ' est évidemment pas impossible qu’Euclide ait sélectionné le matériel de
ses Éléments en fonction de certains locimathematici des dialogues de Platon , en
particulier la construction des cinq polyèdres réguliers inscriptibles dans une
sphère qui est exposée dans le dernier livre authentique du traité , polyedres que
Platon utilise pour rendre compte de la structure mathématique du corps du
monde dans le Timée. Dans le même ordre d'idées, on pourrait rapprocher l’ar
gument « de convenance » du même dialogue sur le fait qu 'il y a nécessairement
quatre éléments de certain théorème euclidien du livre VIII que Nicomaque de
Gérasa appelle « platonicien » (voir Vitrac 16 ,t. II, p . 384 -388) ou encore compa
rer le célèbre passage du Théétète ( 147 d 4 - 148 b3) et la Proposition X 9 des
Éléments.
Cela dit, on peut tout aussi bien penser qu ’Euclide a sélectionné ses résultats
parmiceux établis par ses prédécesseurs, en fonction du prestige de leurs inven
teurs ou des thèmes qu 'une certaine tradition avait imposés et que Platon a pu
connaître, sans qu 'il faille supposer chez l'Alexandrin la même intention (même
partielle) de composer un « commentaire mathématique » à l'euvre de Platon ,
comme l'explicite Théon de Smyrne pour son Expositio rerum mathematicarum
ad legendum Platonem utilium . L 'affirmation de Proclus procède peut-être à
l'inverse de manière reconstructive : c'est parce que les éléments s'achèvent par
la construction des polyèdres que le Diadoque croit pouvoir affirmer qu'Euclide
est platonicien.
Quoi qu 'il en soit, avant Euclide, Platon et Aristote avaient élaboré une philo
sophie desmathématiques; du moins avaient-ils réfléchi au statut des objets
mathématiques et avancé des réponses différentes sinon opposées à bien des
égards. Les historiens ont donc légitimement soulevé le problème de la position
d 'Euclide vis- à -vis de ces épistémologies mathématiques. Cependant il n 'est pas
possible de répondre à cette question de manière assurée, parce que le style
même d 'exposition des traités mathématiques (au sens technique du terme) grecs
exclut complètement les considérations métamathématiques (historiques ou
épistémologiques) et d’Euclide ne nous sontparvenus que des traités techniques.
Ce n 'est que dans les préfaces, quand elles existent, ou dans les commentaires,
que de telles considérations peuvent être développées.
E 80 EUCLIDE 271
Malheureusement les Éléments nous sont parvenus sans préface ; celle des
Phénomènes est purement technique et peut-être apocryphe ; quant à celle de la
Division du canon (si on en admet l'authenticité ), elle ferait plutôt d 'Euclide un
pythagoricien ; mais comme l'a fait remarquer Alan Bowen (32, p . 183- 187, en
particulier p . 185),ce rapprochement possible, en particulier avec Archytas (** A
322) , souligne simplement le fait que la catégorie « pythagorisme» de l'érudition
moderne pour ce qui relève de la science harmonique n'est pas très bien définie.
Une autre piste suivie pour mesurer l'influence des philosophes, et tout parti
culièrement Aristote, sur Euclide est celle des åpxai. La forme euclidienne est
démonstrative et suppose donc de partir de principes admis sans démonstration .
Les Seconds Analytiques exposent une théorie de la science démonstrative et de
ses règles formelles d'exposition ; la nature des principes, les différentes espèces
qu 'il convient d' en distinguer y sont l'objet d'une analyse attentive. Contentons
nous de relever ici que, chez le Stagirite comme chez Euclide, il est nécessaire ,
pour ce qui concerne l'exposition d 'au moins deux sciences particulières, d'in
troduire trois sortes de principes: les définitions qui posentdes significations, les
hypothèses ou demandes qui posent l'existence de certains objets premiers ou
qui autorisent certaines procédures fondatrices, et les axiomes ou notions com
mun (e)s aux deux sciences en question. La coïncidence a été signalée , car dans
les autres traités mathématiques grecs déductifs (par exemple ceux d 'Archimède)
ne sont généralement distingués que deux types de principes : les définitions et
les lemmes [anupata ou « postulats » ( außavóueva ) ou demandes (airn
uata )). On remarquera cependant que ces autres traités déductifs , ou bien ne
sont pas « élémentaires » , ou bien ne traitent que d 'une seule science ( en l'oc
currence de géométrie ou de mécanique). En l'absence de réel terme de compa
raison, on se gardera donc de surinterpréter cette coïncidence. Pour une compa
raison récente d’Aristote et Euclide, voir Caveing 6 , p. 117- 133, et 70 R . D .
McKirahan Jr., Principles and Proofs. Aristotle 's Theory of Demonstrative
Science, Princeton University Press , 1992, en particulier p . 137- 163.
Études d 'orientation . Outre les traductions commentées des Éléments, telles
Heath 3 et Vitrac 16 , on retiendra, de la littérature euclidienne récente , les études
suivantes : 71 W . R . Knorr, The Evolution of the Euclidean Elements, Dordrecht/
Boston 1975 ; 72 I.Mueller, Philosophy ofmathematics and deductive structure
in Euclid 's Elements, Cambridge (Mass.)/London 1981. Ces ouvrages contien
nent des bibliographies étendues sur les principales questions posées par le traité
d 'Euclide.
Pour les æuvres « mineures» , outre Takahashi 23, Berggren et Thomas 25 et
Barbera 28, voir 73 A . D . Barker, «Methods and aims in the Euclidean Sectio
canonis » , JHS 101, 1981, p. 1- 16 ; 74 G . Simon, Le regard, l'être et l'apparence
dans l'Optique de l'Antiquité, coll. « Des Travaux » , Paris 1988.
Bibliographies. Par ailleurs il existe des bibliographies euclidiennes qui
enregistrent essentiellement les différentes éditions d 'Euclide (depuis la pre
mière parue en 1482 ) : 75 P . Ricardi, « Saggio di una bibliografia Euclidea » ,
MAIB , 4 série , 8 , 1887 , p. 401-523, 9, 1888, p . 321-343, 5€ série , 1 , 1890, p. 27
272 EUCLIDE E 80
84, 3 , 1892 , p . 639-694 ; réimpr. Hildesheim 1974 ; 76 Ch. Th. Sanford, Early
Editions of Euclid 's “ Elements" 1482- 1600, coll.« Illustrated Monographs» 20 ,
London 1926 ; 77 G . Kayas, Vingt-trois siècles de tradition euclidienne (Essai
bibliographique ). Rapport interne de l'École Polytechnique, Palaiseau 1977 ;
78 M . Steck et M . Folkerts, Bibliographia Euclideana, coll. « Arbor scientiarum
- Beiträge zur Wissenschaftsgeschichte» , Reihe C : Bibliographien , Band I,
Hildesheim 1981 ; Ricardi 75 et Kayas 77 indiquent également un certain nom
bre de références secondaires. En plus des références bibliographiques, Steck et
Folkerts 78 contient 229 pages de fac -similés de frontispices, pages de garde et
autres vignettes provenant des principales éditions des traités d ’Euclide.
BERNARD VITRAC .
81 EUCLIDE PLRE I: M III ou D IV
A . Destinataire de la lettre 192 de Julien ou d'un Ps.- Julien qui serait un so
phiste contemporain de Jamblique ( » I 3 ), selon Bidez-Cumont (la lettre n 'est
pas éditée par Bidez ; c'est la lettre 62 dans l'édition de W . C . Wright). Si c'est le
fils deMaxime destinataire des lettres 190 et 191 du même auteur, il serait origi
naire de Byzance (Socrate , Hist. eccl. III 1, 16 ).
B . Est-il à identifier à l'Euclide néoplatonicien , auteur d 'un commentaire sur
la République de Platon (cf. Proclus, In Remp. comm ., t. II, p. 96 , 12 Kroll) ? Si
cette identification (proposée par la PLRE) est exacte, elle est chronologique
ment incompatible avec une autre , proposée précédemment dans la RE et à pre
mière vue mieux fondée, qui voit en cet Euclide le platonicien du milieu du IIIe
siècle mentionné par Porphyre, Vita Plotini 20, 30 : voir RESuppl. VIII, 1956 ,
col. 167 (nº 5a).
PIERRE MARAVAL.
p . 75 -92) ; on peut remarquer aussi que l'école fondée à Mégare paraît être assez
ancienne, antérieure en tout cas à celle de Platon (cf. fr. 4 A -B ) ; dès lors, la nais
sance d 'Euclide vers 450a n 'a rien d 'invraisemblable .
Euvres. Deux listes d'ouvrages d 'Euclide (tous perdus) nous ont été trans
mises, l'une par Diogène Laërce (fr. 15 ) et l'autre par la Souda ( fr. 16 ) ; elles
contiennent les mêmes titres, au nombre de six , d 'œuvres qualifiées de dia
logues , à savoir :
(1 ) Aaunpias, Lamprias;
(2 ) Aloxívns, Eschine;
(3) POTVLĘ, Phénix ;
(4 ) Kpítwv, Criton ;
(5) ’Anxibiáðns, Alcibiade ;
(6 ) 'Epwtixós, Sur l'amour.
Seules différences : l'ordre des titres, ainsi que la mention « et d'autres
ouvrages » (xai ära tivá ) de la Souda. Nous ne savonsmalheureusement pas
d 'où ces listes ont été tirées, d 'autant plus que l'authenticité des écrits d 'Euclide
étaitmise en doute par Panétius de Rhodes (fr. 18 ). En faveur de l' authenticité
on peut néanmoins invoquer: d 'abord l' inscription du fr. 17 (un catalogue de
livres, Athènes, autour de 1004) qui mentionne un Eschine d 'Euclide, soit l'un
des six dialogues de nos listes; ensuite plusieurs références textuelles à des
æuvres anonymes d 'Euclide (un unique extrait, de cinq lignes environ , conservé
par Stobée, voir fr. 19 ; des mots isolés chez Hesychius et Pollux, fr. 21-23) ;
enfin un passage de Censorinus (fr. 20) qui emprunte à un auteur du 11 s. av. J.
C ., Lucilius, une affirmation d'Euclide dont le contenu ressemble fort à celui de
l'extrait de Stobée (cf. 9 U . von Wilamowitz -Moellendorff, Platon , Berlin 1920 ,
t. II, p. 23 n. 2 ). 10 L . Rossetti, « Tracce di un royos Ewrpatixós alternativo al
Critone e al Fedone platonici» , A & R 20 , 1975, p . 34-43, a tenté de reconstituer
le contenu de l'Eschine. A signaler enfin que le même auteur voit dans le fr. 14
la trace d'un écrit d 'Euclide plutôt qu'une simple donnée biographique : 11 Id .,
« Ricerche sui “Dialoghi Socratici” di Fedone e di Euclide », Hermes 108, 1980 ,
p . 183-198 . On nementionnera que pour mémoire l'hypothèse hardie de 12 D .
Henne, L 'École de Mégare, Paris 1843, p . 47-52, qui, prenant le prologue du
Théétète à la lettre, attribue à Euclide le dialogue entier.
Formation philosophique. Un des lieux communs les plus constants des
historiens de la philosophie consistait à affirmer qu ’Euclide avait d 'abord été le
disciple de Parménide, ou du moins été fortement influencé par sa doctrine,
avant de se rallier à Socrate (cf. Henne 12, p . 20 ; 13 E . Zeller, Die Philosophie
der Griechen, II 1, 4e éd., Leipzig 1889, n . 3 de la p. 245 ; Humbert 6 , p. 275 ).
Cette opinion s'appuie d 'une part sur une courte phrase de Diogène Laërce
(oúros xai tà napuevíoela Mereyalpí eto, fr. 31, li. 2 - 3), et d' autre part sur
diverses doxographies anciennes qui rapprochent, voire confondent, les deux
écoles quant à la doctrine (voir par exemple Cicéron, fr. 26 A , et Aristoclès, fr.
E 82 EUCLIDE DE MÉGARE 275
45, p . 2 - 12 . Sur l'existence d 'une carte du monde habité, cf. F 276 Lasserre et
Lasserre 1, p. 239.
Plutôt que d'ouvrages publiés, les trois " titres” suivants indiquent la matière
de trois cours d 'Eudoxe suivis par son compatriote , le médecin Chrysippe (D . L .
VIII 89).
(8 ) Hepi DeWv ? (" Sur les dieux " ; D 67 Lasserre); cf. 46 R . Philippson , « Aka
demische Verhandlungen über die Lustlehre » , Hermes 60 , 1925, p . 444 -481
(l'auteur croit avoir trouvé des traces de ce traité dans trois textes de Philodème;
mais voir la critique de Lasserre 1, p . 156 -157) .
(9) Hepi xóquou ? (" Sur le monde” ; D 68 Lasserre ).
(10) Hepi tõv Metewpooyouuévwv ? (“ Sur les phénomènes météorologi
ques” ; D 69 Lasserre).
II. PHILOSOPHIE
Cf. 47 K . von Fritz, « Die Ideenlehre des Eudoxos von Knidos und ihr Ver
hältnis zur platonischen Ideenlehre » , Philologus 82, 1926 /27, p . 1- 26 ; 48 A . J.
Festugière, Aristote . Le Plaisir (Eth . Nic, VII 11-14, X 1- 5), Introduction,
traduction et notes par A. J. F ., Paris 1946 ; 49 G . Lieberg, Die Lehre von der
Lust in den Ethiken des Aristoteles, coll. « Zetemata » 49,München 1958 ( surtout
p . 49 -59 : “Eudoxos von Knidos und Speusipp” ) ; 50 G . Giannantoni, I Cirenaici,
Firenze 1958 , p. 145 -165 ; 51 R . A . Gauthier et J. Y. Jolif, Aristote . L' Éthique à
Nicomaque, t. II, 2, Louvain /Paris 19702, p. 774 (" Eudoxe et le plaisir-idée");
p . 819 -824 (“Le plaisir et le souverain bien : Les arguments d'Eudoxe (p . 819
821); Critique des arguments d ’Eudoxe (p . 821-8241" ); 52 W . Leszi, Il “De
Ideis " di Aristotele e la teoria platonica delle idee, Firenze 1975 (surtout p. 331
348) ; 53 F . Dirlmeier, Aristoteles. Nikomachische Ethik , übersetzt und kom
mentiert von F. D ., coll. « Aristoteles, Werke in deutscher Übersetzung » 6 ,
Berlin (1956 ) 1976 , p. 564 -604 (commentaire sur E. N . X 1172 b 9-35) ; 54 M .
Isnardi Parente , Studi sull'Accademia Platonica antica , coll. « Saggi filosofici»
1, Firenze 1979, p. 132 -141 (sur la théorie des Idées d'Eudoxe) ; 55 J.C . B .
Gosling et C . C . W . Taylor, The Greeks on Pleasure , Oxford 1982 ( surtout, ch .
14, p. 255- 283 : “ Aristotle and Eudoxus” ); 56 G . Fine, On Ideas. Aristotle's Cri
ticism ofPlato 's Theory of Forms, Oxford 1993, p. 256 -257.
Les témoignages concernant l'activité philosophique d'Eudoxe portent les
numéros D 1-5 Lasserre (bibliographie, Lasserre 1, p. 148 et Krämer 17, p . 84
85 et 86 -87).
Aucun témoignage ancien ne laisse entendre qu’Eudoxe ait publié des ouvra
ges proprement philosophiques. Aussi peut-on penser que les témoignages
anciens relatifs à l'activité philosophique d'Eudoxe reposent sur les traces lais
sées par des discussions entre philosophes ou sur un enseignementoral.
Pour nous, les recherches d'Eudoxe sur des questions philosophiques se
réduisent à deux thèses, l'une sur le Bien suprême (D 3- 5 Lasserre), la seconde
sur la théorie des Idées (D 1 -2 Lasserre). La première, qui présente le plaisir
302 EUDOXE DE CNIDE E 98
101 EUDOXIUS FV ?
“ Philosophe", commentateur du livre de Daniel, dont plusieurs fragments
exégétiques sont conservés dans la Chaîne sur Daniel I-XII. Sur cette chaîne,
voir CPG IV C 75 ( 3). L ' édition de A . Mai, Scriptorum ueterum noua collectio e
Vaticanis codicibus edita I 2, Roma 1825 , p . 161-221 (ed. 29, pars 3, p . 27-56 ),
serait incomplète . La CPG II 3410 range ces fragments parmi les Dubia d'Eu
doxius de Constantinople (mort en 370 ). Mais il s'agit sans doute d'un exégète
beaucoup plus tardif. Voir A . von Harnack , Porphyrius, Gegen die Christen 15
Bücher. Zeugnisse, Fragmente und Referate, dans Abhandlungen der königlich
preussischen Akademie der Wissenschaften , Jahrgang 1916 , Philosophisch -histo
rische Klasse, Nr 1, Berlin 1916 , p. 34 : « Cet exégète à ma connaissance par ail
leurs inconnu , qui a écrit après Polychronius (d 'Apamée, mort vers 430 ), a
constaté la chute de l'Empire romain (p. 175 (Mai] : n tūv 'Pwuaiwv Baoileia
304 EUDOXIUS E 101
κατά την αρχήν εκράτησε πασών, τα δε τέλη ταύτης υπολήγοντα... όσο
τοίνυν οράς την αρχήν εξασθενούσαν, τοσούτω καραδοκεϊ επί θύραις το
Téños ), voit le déclin de la novosta (p. 188 ) et prend encore en compte tous
ŽEwoev iotoploypapous comme Symmaque (p. 196 ). Il est le seul auteur dans
toute cette branche de littérature à mentionner le nom de Porphyre comme com
mentateur de Daniel. Le caténiste fait remarquer à propos de l'identification de
la " petite corne" (Dan . VII 8 ) avec Antiochus (Épiphane ) proposée par Poly
chronius: αλλά και Ευδόξιος την υπό σου ρηθείσαν ερμηνείαν, Πολυχρόνιε,
Iloppupiov čonoev Elval toŨ Mataló povoç. Qu 'Eudoxius ait pu encore lire
l'ouvrage de Porphyre (le traité Contre les Chrétiens) est pratiquement exclu. Il
le connaissait certainement à travers (la réfutation qu'en avait donnée) Apolli
naire (de Laodicée (** A 239)]. S 'il faut en croire une Scholie (p . 201), on
retrouvait chez Eudoxius des passages d'Apollinaire littéralement reproduits ».
RICHARD GOULET.
102 EUDOXIUS (MACROBIUS PLOTINUS -) PLRE II:7 V
D 'après la souscription de certains manuscrit du livre I du Commentaire sur
le Songe de Scipion de Macrobe (p . 94 , 1 -5 Willis ), Macrobius Plotinus
Eudoxius, vir egregius, aurait collaboré avec Q . AureliusMemmius Symmachus
Junior (PLRE II : 9) à l'édition de l'ouvrage de Macrobe . Le nom suggère qu 'il
étaitun parent de Macrobe.
STEPHEN GERSH .
103 EUDROMOS RE 2 D II ?
Philosophe stoïcien. Il est mentionné après Zénon, Chrysippe (MC 121) et
Apollodore de Séleucie (2 * A 250), avant Diogène de Babylone (* * D 146 ) et
Posidonius, parmiles auteurs qui divisaient le logos philosophique en trois par
ties: physique, éthique et logique ( D . L . VII 39, qui cite sur ce point son ’HOLX
otoLXELWOLS). Au paragraphe suivant, on apprend qu 'il appelait ces parties des
eion comme Chrysippe, alors que d'autres stoïciens parlaient de tónol ou de
yévn (D . L . VII 40). Quant à l'ordre de cesparties, ilmettait la logique en tête,
ensuite la physique, puis l' éthique, rejoignant sur ce point Zénon, Chrysippe et
Archédème ( > A 307) .
Selon H . von Arnim , art. « Eudromos », RE VI 1 , 1907, col. 950, cette dernière opinion
serait prêtée à Eudemos par les manuscrits (ainsi Cobet) et Eudromos serait une correction
d 'Étienne,mais l'apparat critique de Long ne semble pas connaître cette leçon . T. Dorandi a
vérifié que les trois manuscrits BPF qui peuvent servir à constituer le texte de Diogène Laërce
ont bien, tous les trois, dans les deux passages,“ Eudromos”.
Les témoignages de Diogène Laërce sont rassemblés dans SVF III, sect. VII
Appendix, p. 268, 11- 18 .
RICHARD GOULET.
104 EUELTHÔN D ’ARGOS
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth . 36 , 267, p. 145, 14 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
E 108 EUGATHÈS DE LAPITHÉ 305
105 EUÉNIOS
Un fragment d 'Aétius (III 17) conservé par Stobée, Anthol. I 38, 2, attribue
une explication des marées par l'action du soleil à un auteur dont le nom est mal
conservé. Se fondant sur une liste d'auteurs cités par Stobée conservée par Pho
tius, Bibl. cod. 167 (t. II, p. 155 Henry ), où est enregistrée la forme Euénios
(EÚnviou ), Wachsmuth a édité : <Eů>nvios (Mɛonvios), le deuxième mot étant
considéré comme une tentative de correction du mot incomplet qui précède.
Mais d'autres savants, dontMeineke, suivi par H . Diels, DDG , p. 382-383, et H .
Kirchner, « Dikaiarchos über Anziehung » , Philologus 79, 1923, p . 322, ont pré
féré reconnaître dans cet auteur, qui apparaît après Aristote dans le passage
d' Aétius, < Alxalapxoc> Ó Meoonvios (~ D 98 ] (fr. 114 Wehrli). Traduction
du passage doxographique dans L . Torraca, I dossografi greci, Padova 1961,
p . 152.
RICHARD GOULET.
106 EUÉTÈRIUS PLREI: MIV
« Il vivait sous l'empereur Jovien. Par sa culture et la supériorité de ses dons
naturels il n 'était inférieur à aucun des anciens ;mais à cause de la faiblesse et de
la simplicité de son âme il fit traîner en justice bien des gens qui n 'étaient pas
responsables» (Souda, s.v. EvetńPloç, E 3448 ; t. II, p . 447, 16 - 19 Adler ). Le
passage de la Souda a parfois été attribué à la Chronique d'Eunape (Bernhardy).
Le contexte semble être le procès d 'Antioche en 371, où plusieurs philosophes
ou intellectuels furent accusés de trahison .
Le passage n 'est pas inclus dans l'édition Müller des fragments de la Chronique d'Eunape,
mais on peut le rapprocher des textes qui constituent les fr. 40 et 45. Il n 'est pas dit qu 'Éuété
rius était philosophe, mais la PLRE envisage cette possibilité , car de nombreux philosophes
furent associés à cette affaire.
RICHARD GOULET.
107 EUÉTÈS DE LOCRES
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth . 36 , 267, p. 145, 7 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
RICHARD GOULET.
109 EUGÉNÈS (GAIUS VALERIUS - ) DE SELGÈ FII
Plusieurs inscriptions de Selge en Pisidie, à la fin du lie siècle de notre ère,
honorent, pour leur participation aux cultes et aux concours de la Cité, divers
membres de la famille de Poplius Plancius Magnianus Xénôn : sa femme Aurelia
Xenonianè Maidatè Arsa (nº 15), son fils Poplius Plancius Magnianus Aelianus
Arrius Périclès (nº 20a) et son épouse Aurelia Valoussia Cyrinia Atossa
(n° 20b ), sa fille Poplia Plancia Aurelia MagnianèMotoxaris (nº 17) (son nom
n ' est pas conservé dans l'inscription , mais son identité est établie par l'inscrip
tion n° 15 qui en fait la seur de Périclès) et sans doute d 'autres descendants
encore. La dernière mentionnée était l'épouse de Gaius Valerius Eugénès, qui
avait, entre autres mérites, celui d' être « philosophe » (n° 17 , li. 10 ) et fut lui
aussi l'objet de la considération du Sénat et du Peuple de Selgè (nº 19).
RICHARD GOULET.
110 EUGÉNIOS RE 2 PLREI:2 -3 avant 290 – avant 355
Philosophe néoplatonicien, père de Thémistios.
Sources anciennes. ( 1) Les discours de Thémistios, en particulier Or. XX
('Eritádloç Énì tớ natpi) et Or. XXVII. Themistii Orationes, rec. †H .
Schenkl, ed . G . Downey et A . F. Norman , coll. BT,Leipzig 1965 - 1974, 3 vol., le
ze vol. donnant, p . 121- 128, la (2 ) Anunyopía Kwvotavtſov aútorpáropos
προς την σύγκλητον υπέρ Θεμιστίου, seule source qui précise le nom du pere
de Thémistios. (3) Pseudo-Julien,Lettre 18 Evyeviw bloodw .
(4 ) L 'Eugénios à qui est adressée la Lettre 1192 de Libanios ne peut être le
père de Thémistios, contrairement à ce que dit 1 0 . Seeck , Die Briefe des
Libaniuszeitlich geordnet, Leipzig 1906 , p. 134.
Cf. 2 O . Ballériaux , « Eugénios, père de Thémistios et philosophe néoplato
nicien » , AC 65, 1996 , p. 135 - 160.
On s'accorde à faire naître Thémistios en 317. Il avait des frères (Or. XX 3,
5 ) ,mais nous ignorons s'il était ou non l'aîné. Pour la naissance d 'Eugénios, on
avancera donc avec prudence la date de 290 comme terminus ante quem . La
Anunyopía Kwvotavtíou (1er septembre 355) et l'Or. II de Thémistios (mi
novembre 355) semblent indiquer qu ’Eugénios n 'était plus du nombre des
vivants à cette date (mauvaise analyse des sources et conclusions erronées dans
Seeck 1).
Le père d 'Eugénios, philosophe à Byzance , était bien en cour sous Dioclétien
(Or. V 93, 6 -8 et XI 220, 9 -10 ). Peut- être faut-il l' identifier (cf. Ballériaux 2, et
déjà 3 F . Schemmel, « Die Hochschule von Konstantinopel im IV . Jahrhundert
p . C. n .» , JKPh 22, 1908, p. 153) au philosophe païen dont parle Lactance , Inst.
div. V 2 , 3 - 11 ? Ce philosophe avait, vers 303, publié une apologie de la religion
E111 EU ( H )ARMOSTOS 307
païenne en trois livres et célébré , dansun panegyrique, les mérites des empereurs
Dioclétien etGalère.
De la Lettre 18 attribuée à Julien (la lettre n 'est pas éditée par Bidez dans
l'édition de la CUF ; c'est la lettre 60 dans l'édition de W .C . Wright), mais dont
l'auteur est un ancien élève de Jamblique (cf. 4 F . Cumont, Sur l'authenticité de
quelques lettres de Julien , Gand 1899, p . 13 ; 5 J. Bidez, « Le philosophe Jam
blique et son école » ,REG 31, 1919, p. 29-40 ; 6 T. D . Barnes, « A correspondent
of lamblichus» , GRBS 19, 1978, p. 99- 105 ), on peut déduire qu 'Eugénios a, vers
310, fréquenté l'école de Jamblique à Apamée et qu 'il est resté en relations
épistolaires avec certains de ses condisciples. Parmi ses enfants, Thémistios fut
le seul qui, comme lui, s' adonna à la philosophie (Or. XX 3, 5).
Eugénios possédait en Paphlagonie – probablement à Abonotique (cf. 7 F.
Wilhelm , « Zu Themistios Or. 27» , Byz] 6, 1929, p . 451) - un domaine assez
vaste . Il ne dédaignait pas, surtout en ses vieux jours, de s' en occuper personnel
lement. Il y avait aménagé une agréable résidence, grâce à la présence de sources
qu 'il avait lui-même découvertes. Ces activités rustiques n 'étaient toutefois pour
lui qu 'une simple détente , car, toute sa vie , il s'était, dans sa modeste cité
paphlagonienne, consacré à l'enseignement de la philosophie . Devant quelques
disciples choisis , il expliquait Aristote et dissipait l'obscurité dont le Stagirite a
enveloppé ses æuvres. S'il abordait aussi Platon , c' était surtout, semble -t-il, pour
montrer qu 'Aristote ne s' était jamais trouvé en désaccord avec son maître . Il fai
sait intervenir dans son exégèse Ménandre, Sophocle et Euripide, Pindare et
Sappho . Mais , lorsqu 'il faisait appel aux poètes, c 'est surtout vers le divin
Homère qu 'il se tournait, car il retrouvait dans l’Iliade et dans l'Odyssée toute la
philosophie de Platon et d 'Aristote , sans doute à la manière du Pseudo -Plutarque
dans le De vita et poesi Homeri. Selon toute probabilité , il n ' a rien publié.
OMER BALLÉRIAUX (+).
111 EU (H )ARMOSTOS I ?
EULALIOS EULAMIOS
308 EULAMIOS DE PHRYGIE E112
112 EULAMIOS DE PHRYGIE RESuppl. III : DVI
Avec Damascius de Syrie (2D 3), Simplicius de Cilicie , Priscianus de Lydie ,
Hermeias de Phénicie (» H 81), Diogène de Phénicie ( D 143) et Isidore de
Gaza ( + 1 32), ce philosophe païen quitta l'empire byzantin après 529 (date à
laquelle Justinien interdit l'enseignement aux païens et ferma l'école néoplatoni
cienne d' Athènes ) pour se rendre en Perse , qu 'il croyait être le pays du roi-philo
sophe de Platon. Déçus par la conduite des Perses, ces philosophes obtinrent de
rentrer chez eux ,malgré le désir de Chosroès (* C 113) de se les attacher . Ce
dernier obtint toutefois de Justinien qu'ils ne soient pas inquiétés pour leur reli
gion (Agathias, Hist. II, 10 , 3 - 31, 4 ; voir aussi Souda, s.v. tpéObELS, I 2251 , et
s.v. Aquáoxos , A 39, où certains manuscrits fournissent la forme Eulalios et
non Eulamios). Sur cet exil collectif des philosophes et le témoignage d’Aga
thias, voir Ph. Hoffmann , art. « Damascius» D3, DPLA II, p. 559-563.
PIERRE MARAVAL ,
113 EULOGIUS PLRE II:5 MF V
Philosophe auquel l'empereur Léon Ier (457-474) fit verser des fournitures
( sitèrèsion ); critiqué pour ce geste , Léon émit le veu que vienne le temps où la
solde des soldats serait versée à des didaskaloi (Souda A 267 = Malchus fr. 3
Blockley : la partie de texte de la Souda qui concerne Eulogius ne vientpeut-être
pas deMalchus).
PIERRE MARAVAL.
EULOGIUS — FAVONIUS EULOGIUS
114 EUMARÈS DE PHLIONTE FV
Mentionné dans une liste de disciples de Socrate par la Souda, s.v.
Ewxpárns, £ 829, t. IV , p. 404 , 21-23 Adler: 'Anxißládnv ( A 86 ), Koltó
Boulov (2- C 217), Eevounonv, 'Anowodwpov ’Anvalous (2- A 249). Éti OÈ
Kpituva (3 C 220 ) xai Eiuwva , Etuápn Oriáolov , Eluuiav Onßacov ,
Teppiwva Meyapixóv, Xalpep @ uta (* C 109). Plusieurs de ces noms sont des
figures bien connues de l'entourage de Socrate tel qu'il est dépeint par Platon et
Xénophon. Eumarès n 'est pas par ailleurs attesté,mais il est possible que le pas
sage de la Souda dépende d'autres sourcesperdues relatives à Socrate .
Comme Eumarès est suivi par Simmias de Thèbes (Cébès apparaissait lui aussi plus haut,
p . 404 , 14 Adler), on pourrait envisager une confusion avec Echécratès de Phlionte ( E5),
l' interlocuteur pythagoricien de Phédon dans le Phédon de Platon , bien que ce philosophe ne
soit pas comme tel un disciple de Socrate. D 'autres personnages de la liste sont mentionnés
par Phédon parmiles amis présents à la mort de Socrate (59 b ): Apollodore , Critobule "et son
père", c 'est-à-dire Criton , et enfin Terpsion de Mégare .Mais la liste de la Souda comprend au
moins un autre nom inattendu, celui de Xénomède. Nouvelle confusion pourMénexène, lui
aussimentionné dans le même passage ?
RICHARD GOULET.
E 117 EUMÉNÈS D 'ASPENDOS 309
115 EUMÉLOS RE 13 (pour B)
A . « Péripatéticien », de date inconnue, auteur d'un traité Sur l'ancienne
comédie en au moins trois livres (Scholie sur Eschine, in Tim . I 39, n° 83, dans
M . R . Dilts, Scholia in Aeschinem , coll. BT, Stuttgart/Leipzig 1992, p. 23, li.
280-284). Dans son troisième livre , il rapportait qu'un certain Nicoménès (RE 2 )
avait fait voter un décret stipulant qu'à partir de l' archontat d 'Euclide (403/2 )
nul ne devait avoir part aux droits civiques s'il ne pouvait démontrer que ses
deux parents étaient citoyens; ceux qui étaientnés avant l'archontat d 'Euclide ne
devaient pas être soumis à cette enquête . H . Schaefer, art. « Nikomenes» , RE
XVII 1, 1936 , col. 504 , voit dans cette mesure un adoucissement de la loi
d ' Aristophon votée en cette année 403 /2 : les enfants nés avant cette date ne
devaient pas être soumis à la loi.
B . C 'est peut-être le même auteur (FGrHist 77 F 1) qui, selon Diogène
Laërce V 6 , rapportait, au cinquième livre de sesHistoires, qu 'Aristote étaitmort
à Chalcis après avoir bu de l'aconit,âgé de soixante-dix ans, et que le philosophe
avait rencontré Platon à l'âge de trente ans. Cette version de la mort d'Aristote
contredit d 'autres témoignages.
Voir M . Narcy, note à sa traduction du passage dans Diogène Laërce, Vies et doctrinesdes
philosophes illustres. Trad . franç. sous la direction de M .- O . Goulet-Cazé, coll. « La Pocho
thèque - Classiques Modernes» , Paris 1999, p . 561 n . 1 : « Cet Eumèle est peut-être le philo
sophe péripatéticien connu sous ce nom (... ), qui aurait voulu auréoler le fondateur de son
école d 'une gloire supplémentaire en le faisantmourir, non seulement à l'âge de Socrate, mais
de la même façon , par l'absorption d 'un poison analogue à la ciguë. D . L . ne relève que
l'erreur relative à l'âge auquel Aristote rencontra Platon ,mais il rapporte plus loin (V 10) la
version de la mort d ' Aristote due à Apollodore, qui dément celle d 'Eumele. »
RICHARD GOULET.
116 EUMÉLOS (M . IULIUS) II ?
Le « philosophe » Marcus Iulius Eumélos, inconnu par ailleurs, fut honoré par
ses enfants sur un monument funéraire à Alaca au nord -est d ' Ancyre (RECAM
II,nº519).
BERNADETTE PUECH .
II. HISTOIRE
Cet ouvrage perdu , qui comptait quatorze livres, nous est connu par (a ) dix
sept renvois dans les Vies, (b) une notice de la Bibliothèque de Photius (cod. 77),
(c) des fragments conservés dans la Souda et dans les Excerpta de Sententiis et
De Legationibus rassemblés pour l'empereur Constantin Porphyrogénète (944
959). L 'ensemble représente 110 fragments dans l' édition deMüller citée plus
bas. Pour une liste des références à l'Histoire dans les Vies, voir Goulet 1, p. 65
67 ; Paschoud 2, p . 254 -256 ; Ochoa 42 (cité plus loin ), p . 29 -37.
Signalons qu ’une référence importante en 66 , 16 - 17 , est omise par Müller dans le fr. 25 de
son recueil. Eunape y promet de donner un récit plus détaillé de son arrivée à Athènes
(automne 364 ), lorsqu 'il exposera les événements du temps de Prohérésius (mort en 369). Cf.
Goulet 1 , p . 66 et n . 42.
E 121 EUNAPE DE SARDES 319
Éditions. 38 R . C . Blockley, The Fragmentary classicising Historians of the
Later Roman Empire. Eunapius, Olympiodorus, Priscus and Malchus, coll.
« ARCA » 6 et 10, Liverpool 1981 et 1983, XII- 196 p . & X -515 p . (t. II : Text,
translation and historiographicalnotes). On a cité dans la présente notice celle
de 39 C .Müller ,FHG IV , 1851, réimpr. 1868, p . 7 - 56 , qui comporte une traduc
tion latine (empruntée à des éditions plus anciennes). Voir aussi 40 B . G .
Niebuhr, CSHB I, 1829, et 41 L . Dindorf, Hist. Gr. Min . I, 1870 . Pour l'histoire
des éditions diverses de ces fragments , voir Paschoud 2 , p . 239-244 ; 42 J. A .
Ochoa, « Sobre las ultimas monografias y ediciones de los fragmentos historicos
de Eunapio de Sardes» , Erytheia 9, 1988 , p . 211-220. Pour le texte des frag
ments , il faut évidemment tenir compte des éditions plus récentes des Vies ( cf.
Giangrande 10), de la Souda (ed. A . Adler) et des Excerpta . Pour ces citations,
voir 43 Excerpta historica iussu Imp. Constantini Porphyrogeniti confecta edi
derunt U . Ph . Boissevain , C . de Boor, Th . Büttner -Wobst, vol. IV : Excerpta de
Sententiis, edidit U .Ph . Boissevain , Berlin 1906 , p. 71-103 ; vol. I: Excerpta de
Legationibus Romanorum ad Gentes, edidit C . de Boor, Pars I, Berlin 1903.
Les Excerpta de Sententiis contiennent un passage, qu'on a attribué à Aréthas de Césarée,
qui montrerait que les compilateurs byzantins de Constantin Porphyrogénète avaient mis à
profit une édition ou plus probablement un abrégé préparé par Aréthas au début du Xe siècle.
Voir Banchich 45, p. 7- 9.
Traduction anglaise. Blockley 38 .
Études d'ensemble. 44 A . Baldini, Ricerche sulla Storia di Eunapio di Sardi.
Problemidi storiografia tardopagana, coll. « Studi di storia antica» 10 , Bologna
1984, 253 p . (c .r. F . Paschoud , REG , 98, 1985 , p . 395- 398); 45 Th .M . Banchich ,
The Historical fragments of Eunapius of Sardis, Ph. D . State University of New
York at Buffalo , 1985, 230 p. (microfilm ); 46 A . E . Baker, Eunapius and Zosi
mus. Problems of chronology and composition , Ph . D . Brown University, 1986 ,
130 p . (microfilm ); 47 José A . Ochoa, La transmisión de la Historia de Eunapio ,
coll. « Erytheia » 1, Madrid 1990 , XII-312 p. (bibliographie : p . 291-302).
Titre. L 'ouvrage est présenté de diverses façons par les différents témoins.
Photius parle d'une Xpovixñs 'lotopías tñsMetà AÉElinov véac éxdboewÇ
εν βιβλίοις τεσσαρεσκαίδεκα. Les extraits de Sententiis sont introduits par le
lemme: έκ της Ιστορίας Ευναπίου Σαρδιανού της μετά Δέξιππον νέας
Éxoóoews (p . 71 Boissevain ) ; les extraits de Legationibus par: Éx tñs ' loto
piac Eủvanlov EapolavoŨ (p. 591 de Boor). On voit donc que l'Histoire d 'Eu
nape prolongeait celle de l'historien Dexippe et qu'elle avait connu deux édi
tions. 48 R . C . Blockley, « Dexippus of Athens and Eunapius of Sardis » , Lato
mus 30 , 1971, p. 710 -715; 49 D .F . Buck,« Dexippus, Eunapius,Olympiodorus.
Continuation and imitation » , AHB 1, 1987, p. 48-50 .
La Souda, s.v . 'Povoīvos, P 230 ; t. IV , p . 301, 14 -15 Adler, cite la Xpovo
ypadia d'Eunape de Sardes. Quant à Eunape lui-même, il emploie différentes
designations: εν τοίς καθολικούς της ιστορίας συγγράμμασιν ( «les ouvrages
universels consacrés à l'histoire» ), 39, 20 -21; év tomç iotopixolç xatà Inv
εξήγησιν υπομνήμασι ( « dans les mémoires historiques rediges selon un expose
320 EUNAPE DE SARDES E 121
suivi » ), 63, 16 -17; ¿v TOTS OLEFOOLXOīç tñs iotopías, 46, 24; £v TOTG OLEFOOL
xois , 50 , 15 - 16 ; 55 ,5 -6; 59, 1; 59, 20 -21; 79 , 1-2. Il s'agissait d'une histoire
générale qui exposait les événements de façon continue, du point de vue uni
versel, par opposition aux Vies qui n 'évoquent des faits historiques qu 'à propos
de tel ou tel personnage. On sait d'autre part que cette Histoire suivait grossiè
rement la chronologie, c'est-à-dire la suite des règnes impériaux, ce qui permet à
Eunape de renvoyer son lecteur, pour de nombreux événements, aux livres rela
tant l' époque historique correspondante , notamment les règnes de Constantin
(22, 14) ou de Julien (22, 18 -19 ;41, 16 -17 ; 46 , 25 ; 47, 5-6 ; 50, 15 - 16 ; 59, 20
21 ; 82, 26 -27 ; 88 , 6 -7); à propos de Jamblique (40 , 9) ou de Prohérésius (66 ,
16 - 17) , il signale les sectionsde son Histoire relatives à l'époque de ces person
nages.
Les fréquents renvois qu'Eunape, dans ses Vies, fait à son Histoire témoignent de la com
plémentarité des deux ouvrages et de l'unité de son projet littéraire. Dans l'Histoire, Eunape
visait tò Xolvov (59, 1) , il racontait őoa npós tò xolvov ánávrwv åv pátwy ålboya
(Histoire, fr. 1 = Exc. de Sent. 1 , p . 72 , 13 - 14 Boissevain ), tò xolvà Tây Épywv (ibid ., p . 74 ,
18). Les Vies au contraire prennent en considération to xao' Éxaotov (59, 1 ; 82, 26 -27). Si,
pour plusieurs événements de l'histoire générale , Eunape croit pouvoir renvoyer au récit plus
détaillé (áxpißotepov, 22, 19 ; 41, 16 ; 47, 5 ; 66 , 17 ; 88, 7) qu 'il en avait donné ou allait en
donner dans l'Histoire , c 'est pourtant dans les vies qu 'il faut chercher le récit axpißéotepov
de la vie d' un Prohérésius (66 , 17 ). Après avoir brièvement signalé le massacre de Protérius et
d 'Hilarius par les barbares d 'Alaric , Eunape conclut : « Ces événements, si cela convient à la
Divinité, serontrelatés dans les livres détaillés ; on en traitera plus clairement en cet endroit,
non pas en rapport avec l'individuel, mais en rapport avec le général. Présentement, ces évé
nements ont été intégrés à notre narration de façon suffisante, pour autant qu'ils concernent
l'aspect individuel» (59, 1-4 ).
Extension . « Eunape commence son récit au règne de Claude < II ( 268-270) >,
là où s'arrête celui de Dexippe, et il le termine au règne d'Honorius et d'Arca
dius, les fils de Théodose. L 'époque qu'il assigne comme termeà son histoire est
celle où Arsace, après la déposition de Jean la Bouche d'Or de l'Église (= Jean
Chrysostome), fut élevé au trône épiscopal, tandis que la femme de l'empereur
Arcadius, qui était enceinte, mourut d'une fausse couche » (Photius, cod. 77 ;
trad. Henry), c'est-à-dire l'année 404 . Après la mort de Fravitus en 401 (fr. 85)
et la rébellion des Isauriens à partir de 404 ( fr. 86 ), les Excerpta de Sententiis
(qui suivent l'ordre d'exposition d'Eunape) racontentdes événements survenus
sous Pulchérie en 414 (fr. 87), mais c'est certainement par anticipation , car l' ex
trait suivant (fr. 88) concerne Stilichon,mort en 408.
50 R . C . Blockley, « The ending of Eunapius' history » , Antichthon 14, 1980, p. 170 -176 ,
suivi par Banchich 45, p. 2- 3, a supposé que le nom de Pulchérie aurait étémis par erreur à la
place de celui d'Eudoxie, l'épouse d 'Arcadius. C 'est possible, mais il est plus sain d 'essayer
d 'expliquer les témoignages, fussent-ils embarrassants, que de les récuser gratuitement.
Il ne faudrait cependant pas croire que les règnes successifs que couvre cette
longue période étaient également distribués entre les quatorze livres de l'Histoi
re. Le fragment 8 (Exc. de Sent. 5), qui est emprunté au prologue du second
livre, introduit déjà au récit de la vie de Julien , ce qui montre que l'histoire des
90 années précédentes avait déjà trouvé place dans le premier des quatorze
livres. Ce n 'était, de l'aveu même d 'Eunape, qu'un survol des faits indispensa
E 121 EUNAPE DE SARDES 321
bles (8à tõv åvayxaiwv ÉTILTPÉXovolv, Exc. de Sent. 5 ; p . 76 , 15- 16 Boisse
vain ) et l'auteur reconnaît que c'est vers Julien que se portait depuis le début son
discours (dépetal... Ó Móyos ép ' ovntep ÉDÉpero ég ápxñs, ibid ., p. 76 , 17). En
fait, si le règne de Constance et donc les rapports de l'Empereur avec son César
avaient déjà été racontés dans le premier livre – ainsi le fr. 7 a = Exc. de Sent. 3
et 4 -, au livre II, Eunape exposait la vie de Julien depuis sa naissance jusqu'à
son accession au trône comme César (fr. 14 = Exc. de Sent. 11; p. 78 Boisse
vain ), puis ses exploits comme César (ibid . p . 78), et se devait donc de revenir en
détail sur les rapports entre Julien et Constance.
51 R . C . Blockley, « Eunapius fr. XIV ,7 . Julian as an Homeric hero ? » , LCM 6 , 1981,
p. 213-214.
Depuis une quarantaine d'années, un certain nombre de problèmes ont été
soulevés à propos de l'Histoire d' Eunape. On ne peut guère ici que les énumérer,
après avoir présenté quelques-unes des principales références bibliographiques.
Cf. 52 W .R . Chalmers, « The véa Éxdools of Eunapius' Histories » , CQ 47,
1953, p . 165- 170 ; 53 Id ., « Eunapius, Ammianus Marcellinus and Zosimus on
Julian 's Persian expedition », CQ (n .s.) 10 , 1960, p . 152 -160 ; 54 T. D . Barnes,
« The Epitome de Caesaribus and its sources » (c. r. de J. Schlumberger, Die
Epitomede Caesaribus, München 1974 ), CPh 71, 1976, p . 258- 268 ; 55 Id ., The
Sources of the Historia Augusta , Bruxelles 1978, p . 114 -123 et 125 ; 56 F.
Paschoud, « Quand parut la première édition de l'Histoire d'Eunape ?», Bonner
Historia -Augusta -Colloquium 1977-1978, coll. « Antiquitas » Reihe 4 : « Beiträge
zur Historia-Augusta -Forschung» 14, Bonn 1980 , p. 149 -162; 57 A . B . Bree
baart, « Eunapius of Sardis and the writing of History » ,Mnemosyne 32, 1979,
p. 360 -375 ; Goulet 1, p. 64 -72 ; Paschoud 2, p. 239 -303 ; 58 Th .M . Banchich ,
« Eunapius and Arethas» ,GRBS 24, 1983, p . 181-184 ; 59 F. Paschoud, « Zosime
et la fin de l'ouvrage historique d'Eunape » , Orpheus 6 , 1985, p . 44 -61 (sur les
fr. 82-88 Müller); 60 Th.M . Banchich , « Eunapius and Jerome », GRBS 27,
1986 , p . 319-324 ;61 A . Baldini, « Le due edizioni della Storia di Eunapio e le
fonti della Storia nuova di Zosimo » , AFLM 19, 1986 , p. 45- 109 (la première
version de l'Histoire s'achevait en 378 ) ; 62 K . S. Sacks, « The meaning of
Eunapius' history» , H & T 25, 1986 , p . 52-67 ;63 V .Neri, « Le fonti della vita di
Costantino nell'Epitome de Caesaribus» , RSA 17- 18 , 1987- 1988, p. 249-280
(une source “proche” d’Eunape) ; 64 Th. M . Banchich, « Vit. Sophist. X 2 , 3 and
the terminus of the first edition of Eunapius' History » , RHM 131, 1988, p. 375
380 (rejet de la pertinence de ce passage); 65 A . Baker, « Eunapius' Néa čxdo
ols and Photius » , GRBS 29, 1988 , p. 389 -402 ; 66 F. Paschoud, « Les fragments
de l'ouvrage historique d'Eunape correspondant aux deux premiers livres de
l'Histoire nouvelle de Zosime» , dans De Tertullien auxMozarabes, Mélanges J.
Fontaine, Paris 1992, t. I, p. 613-625 (fr. 2 -4 ; 89 ; 5 ; 7 et 7a Müller).
Lors de la composition des Vies, Eunape avait déjà écrit et probablement
publié une première partie de son Histoire. Jusqu 'à quelle époque s' étendait
cette première publication ? Jusqu 'aux règnes de Julien et de Jovien (cf. 66 , 16
17), c'est-à-dire jusqu'à la fin de 364, des événements postérieurs (jusqu 'en 396 )
322 EUNAPE DE SARDES E 121
étant racontés par anticipation (Goulet 1) ? Jusqu' à la mort de Valens en 378
(Barnes 54, Baldini61, Banchich 64) ? Jusqu 'en 383 (67 T . D . Barnes, Constan
tine and Eusebius, Cambridge Mass./London 1981, p. 403-404)? Jusqu 'à la mort
de Théodose ler en 395 (Müller 39, Paschoud 2) ? Jusqu 'à l' invasion d ’Alaric en
396 , dernier événement pour lequel Eunape, dans ses Vies, renvoie à l'Histoire
(Baker 46 , p . 39 ) ? Ou bien y a -t-il eu plusieurs étapes dans la rédaction de
l'Histoire, une première s'achevant en 364, une seconde en 378 et une troisième
en 404 (Blockley 38) ?
En quelle année cette première partie a -t-elle été publiée ? En 378 (Barnes
54 ) ? Après 395 (Paschoud 2) ? Après 396 (Goulet 1) ?
Photius prétend que Zosime n 'a guère fait que transcrire Eunape. Cette
dépendance est au moins partiellement reconnue par les historiens. Mais Eunape
a -t- il été utilisé, au moins pour le récit de l'expédition de Julien contre les
Perses , par Ammien Marcellin (Chalmers 53, Thompson (OCD2, 1972, p . 52),
Barnes 54) ? Par l' auteur de l'Histoire Auguste (Barnes 55 ) ? Par aucun de ces
auteurs latins, vu l'impossibilité chronologique (Goulet 1) ?
Photius connaît deux éditions de l' Histoire . Faut-il en conclure que la deuxiè
me partie de l'Histoire était également une seconde édition modifiant substan
tiellement la première publication (Chalmers 52 ) ? Faut-il croire (ainsi Goulet 1)
au contraire Photius, quand il prétend que les deux éditions qu'il a pu comparer
en des manuscrits distincts (idiwç Éxatépq év ÉTÉPW teúxel xai ÉTÉOW OUV
TETAYLévn , cf. Goulet 1, p . 68 et n . 47), avaient la même extension chronologi
que ? Dans ce cas, la seconde édition qui avait été expurgée des passages trop
violemment antichrétiens, au risque d' altérer la continuité du récit, ne serait-elle
pas une version édulcorée par un chrétien (Niebuhr,Müller , Dindorf, de Boer,
Goulet 1, p. 69, Baker 46, p . 50-51) ? Ou faut-il admettre à la fois une seconde
édition par Eunape et des coupures chrétiennes ultérieures (Paschoud 2 , p. 290
291) ?
Eunape a -t-il donné deux éditions de son Histoire ? Nous n 'avons pas de
preuve décisive que la seconde édition – attestée par les fragments de Constantin
Porphyrogénète et par Photius – était d'Eunape lui-même (voir Goulet 1, p. 68
71). On m 'a objecté que je négligeais le témoignage de Photius (cod. 77) qui les
présente comme l'ouvre d'Eunape. En vérité, Photius dit que la seule différence
entre la version antichrétienne et la version édulcorée tient en la disparition
d 'attaques virulentes dont la suppression semble avoir ici et là obscurci l' enchaî
nement du discours, malgré des tentatives de raccordement. Après d 'autres, j'ai
considéré que c 'était là typiquement le signe d'une intervention chrétienne et
non la preuve formelle d 'une nouvelle édition par l'auteur païen lui-même. Pho
tius n'a pas conservé de déclaration d'Eunape sur une éventuelle réédition , il n 'a
perçu à la comparaison des deux éditions aucune différence dans l'extension
chronologique ou dans le contenu historique essentiel. Je maintiens donc que
Photius n' apporte aucune preuve d'une seconde édition eunapienne de l'Histoire.
Baldini44, rejette le témoignage de Photius sur l'extension chronologique des deux édi
tions et Paschoud 2, p. 289-290, se déclare sceptique (« ilmeparaît douteux que Photios ait ici
E 121 EUNAPE DE SARDES 323
raison » ). Mais Photius est le seul témoin qui ait eu devant les yeux les deux éditions. Il les a
comparées, a vu de ses yeux des attaques antichrétiennes qui avaientdisparu de l'une à l'autre,
il a bien précisé le début et la fin de la période traitée par l'historien et a conclu que les deux
éditions couvraient la même période. Si on ne le croit pas sur ce point, il vaudraitmieux ran
ger toute la question surle rayon des énigmes désespérées de l'histoire.
J'aurais également négligé le témoignage d'Eunape lui-même en traduisant de
façon incorrecte le fragment41 de l'Histoire, dans lequel Eunape fait référence à
tà npőta tñs ourypapñs. Dans le fragment41, il faudrait comprendre non
pas, comme je l'ai fait, « les premiers livres de (notre) histoire» (traduction
acceptée par Baker 46 , p. 37),mais, comme le proposait Chalmers par exemple,
« la première édition de notre histoire » ... C 'est évidemment supposer le pro
blème résolu .
Or, dans ce passage, Eunape dit, à propos des Huns, qu 'il a maintenant à
fournir à son lecteur des informations plus sérieuses que celles qu 'il avait déjà
publiées. Mais, ajoute -t-il, il va laisser les anciennes et ajouter les nouvelles .
Pourquoi cette solution ? Est-ce l'attitude d'un auteur assurant une nouvelle édi
tion de son ouvrage et pouvant dès lors réécrire sur nouveaux frais les passages
désuets ? N 'est-ce pas plutôt l'avertissement qu 'il faut maintenant corriger et
compléter les informations données dans les livres antérieurement publiés par
celles qui vontmaintenant être fournies ? C 'est en tout cas ainsi que j'ai compris
le texte et, puisque cette interprétation est au moins aussi acceptable que l'autre,
je ne vois pas en quoi ce texte peut servir à prouver qu ’Eunape a fait personnel
lement référence à une seconde édition de son Histoire.
Il suffit à F. Paschoud dedéclarer ma traduction fausse, puis de renvoyer à celle qu'il pro
pose en appendice, pour affirmer ensuite comme une « certitude bien acquise » le fait qu '« Eu
nape a parlé lui-même de ses deux éditions » (p . 287 et 288 ). La traduction proposée par F .
Paschoud souligne sans doute avec raison que la particularité de la nouvelle publication (tà
dé ... : nouveau livre ou nouvelle édition ) est de tabler sur des renseignements oraux plutôt que
sur les sources historiques anciennes (commeHérodote). Mais je ne vois pas en quoi cette
interprétation prouve qu 'il s 'agit d 'une nouvelle édition et non , comme en plusieurs autres
fragments, d'un nouveau livre ou d'une nouvelle section de l'Histoire. Voir également le
commentaire de ce passage dans Paschoud 56 , p . 152- 155.
C'est à tort que F. Paschoud 2, p. 287, prétend que selon moi le fragment41 « se trouvait
déjà tel quel dans la partie de l'ouvrage historique publiée avant la rédaction des Vies » . Il
figurait selon moi dans l'édition originale de l'Histoire, la seule peut-être qu 'Eunape ait pu
bliée, mais je crois avoir dit que ce fragment devait prendre place dans le cadre du règne de
Valens, qui n 'était pas paru, selon mon interprétation , au moment de la publication des Vies.
Qu 'Eunape ait pu parler des Huns dans des livres antérieurs peut paraître incroyable, puisque
« commeon le sait, les Huns ont été des inconnus pour les Romains jusqu 'en 376 » (Paschoud
2, p. 287 ), mais c 'est Eunape qui a écrit l'Histoire, longtemps après les événements en cause,
et on ne peutpas établir dogmatiquement ce qu'un livre pouvait comporter ou non.
On m 'a finalement reproché la traduction que j'avais proposée d'une partie
du témoignage de Photius (cod. 77). Je ne voyais pas grand sens à la traduction
proposée par R . Henry ( Photius, Bibliothèque, « Collection Byzantine», Paris
1959,t. I, p. 159- 160 ): « Nous avons trouvé (ou “ lu” : évetúyouev] ces deux édi
tions dans de vieux exemplaires ; dans l'un, chacune des deux était à part ; dans
l'autre , elles étaient combinées. C 'est d'après ces éditions mêmes que nous
avons, à la lecture, constaté la différence entre elles » ('Aupolv de tais éxoboe
324 EUNAPE DE SARDES E 121
σιν εν παλαιούς ενετύχομεν βιβλίοις, ιδίως εκατέραν εν ετέρω τεύχει και
ÉTÉOW Oulteta Yuévny). J'ai proposé de traduire la partie finale de la façon
suivante : « chaque édition étant disposée à part en deux tomes distincts » (tra
duction acceptée par par Baker 46 , p. 28 n. 37). J'aurais fait dire à Photius une
banalité , ou une tautologie .
Ainsi F . Paschoud 2 , p . 285, qui préfère traduire, dans la ligne de R . Henry : « Nous
sommes tombés sur les deux éditions dans de vieux exemplaires, séparées l'une de l'autre
dans l'un des volumes et dans l'autre formant un tout» . Je n 'arrive pas à me représenter ce
volumeoù les deux éditions ne sont pas séparées et forment un tout. F . Paschoud trouve lui
même la fin de la phrase, sinon sa traduction, « pour le moins bizarre dans sa formulation » et
il évoque par la suite « un volume où elles étaient bizarrement combinées » (p . 286 ) , « la bizar
rerie des exemplaires» et « les accidents insolites » qu'ils ont pu subir (p . 289).
Ilme semble que Photius veut dire que sa comparaison a été facilitée par le
fait qu' il a pu ouvrir l'une et l'autre édition devant lui et s'assurer ainsi de la
teneur des modifications apportées. J'avoue ne pas voir ce que ce passage a
d 'obscur. On remarquera que Photius montre bien que c'est la comparaison sur
pièces des deux éditions qui lui a permis de se faire une idée du caractère de
chacune et non quelque préface de la seconde où l'auteur aurait exposé ses
intentions.
Je crois donc légitime de réaffirmer qu 'il ne faut pas confondre ce problème
des deux éditions de l'Histoire - qui ne concerne peut-être que la tradition
manuscrite du texte à l'époque byzantine - avec le phénomène, bien attesté par
les références des Vies et par les fragments tirés du début de certains livres de la
Chronique, de la publication progressive de ses différentes sections. C 'est sans
doute cette confusion qui amène quelques spécialistes à remettre en cause le
témoignage formel de Photius, selon lequel les deux éditions couvraient la même
période historique.
RICHARD GOULET.
122 EUNOME IV
Si l'on n 'en jugeait que par les rares écrits de lui qui nous sont conservés et
par la controverse où on le voit engagé, Eunome serait essentiellement un théo
logien , etmême un théologien au sens ancien du terme (soit celui qui s'occupe
du mystère interne de Dieu dans un contexte chrétien). Et la seule æuvre de lui
qui soit mentionnée par l'historien de l'Église Socrate (H . E. IV 7), puis à sa
suite par la Souda ( s.v.) est un Commentaire en septlivres sur un texte canonique
chrétien , l'Epître aux Romains (dont cependant Socrate proteste qu 'il a tout à
fait manqué le skopos, terme qui vient de la tradition d'exégèse philosophique
sans doute inaugurée par Jamblique !). A considérer sa carrière et certains traits
de son caractère, cependant, on peut essayer de promouvoir une idée un peu dif
férente du personnage.
Cf. 1 L . Abramowski, art. « Eunomios»,RAC VI, 1966, col. 936- 947. L'au
teur cite le Contre Eunome de Grégoire de Nysse dans la 1re édition de W . Jaeger
(Berlin 1923); mais H . C . Brennecke a donné une concordance avec la seconde
édition de Leiden 1960, plus accessible, dans le JAC 18 , 1975, p. 202-205 ;
E 122 EUNOME 325
2 M . Albertz, « Zur Geschichte der jung- arianischen Kirchengemeinschaft» ,
ThStKr 82, 1909, p . 205 -278 ; 3 M . R . Barnes, « The Background and Use of
Eunomius' Causal Language » , dans Arianism after Arius, Essays on the Deve
lopment of the Fourth Century Trinitarian Conflicts, Edinburgh 1993, p. 217
236 ; 4 J. Daniélou, « Eunome l’arien et l'exégèse néoplatonicienne du Cratyle » ,
REG 69, 1956 , p. 412 -432 ; 5 Thomas A . Kopecek , A History of Neo -Arianism ,
coll. « Patristic Monograph Series » 8, Cambridge (MA), The Philadelphia
Patristic Foundation, 1979, 2 vol.; 6 B . Pottier, Dieu et le Christ selon Grégoire
de Nysse, Étude systématique du « Contre Eunome» , avec traduction inédite des
extraits d 'Eunome, Namur 1994 ; 7 B . Sesboüé, Dieu peut- il avoir un Fils ? Le
débat trinitaire du IVe siècle, Paris 1993, (après une première partie consacrée à
Arius et Athanase d' Alexandrie , une seconde décrit le conflit entre Basile et
Eunome; les p. 147- 161 reprennent les $$ 7 à 25 d'une traduction de l'Apologie
donnée intégralement dans le volume nº 305 des « Sources Chrétiennes » );
8 R . P . Vaggione (édit.), Eunomius. The Extant Works. Text and translation by
R . P. V ., coll. « Oxford Early Christian Texts » , Oxford 1987 ; 9 E . Vanden
bussche, « La part de la dialectique dans la théologie d'Eunomius le “ techno
logue” , RHE 40, 1944 -1945 , p. 47-72 ; 10 L . R . Wickham , « The Syntagmation
of Aetius the Anomoean » , IThS 19, 1968, p . 532-568 ; 11 Id., « The Date of
Eunomius' Apology : A Reconsideration » . JTHS 20 , 1969, p . 231-240.
Biographie. Né sans doute vers 330 dans une bourgade de Cappadoce, mais
située aux confins de la Galatie, Oltiséris, Eunome était issu d'une famille au
bord de l'indigence (à l'opposite de ses futurs adversaires « les trois grands Cap
padociens », qui ne se feront pas faute , par réflexe de polémistes plutôt que de
chrétiens, de le lui reprocher avec hauteur). Il gagna sa vie d'abord par l'exercice
du métier de tachygraphe et cette profession l'amena, après un séjour à Constan
tinople , à devenir à Alexandrie, puis à Antioche le secrétaire d 'Aèce, le premier
tenant du néo -arianisme. Il en défendit et développa les idées avec une telle
maîtrise que la doctrine dite , à tort ou à raison , anoméenne (cf. infra ) reçut de
pair le nom d 'eunomianisme. Lui-même cependant garda toujours vis -à -vis de
son initiateur ès spéculations théologiques un loyalisme en contraste édifiant
avec les prévarications de tant de membres du personnel ecclésiastique de la
même époque. La similitude du profil de carrière entre le maître et le disciple,
débuts dans l'extrême pauvreté, formation de raccroc, en marge des filières
traditionnelles, manque d'intérêt pour les charges ou prébendes ecclésiastiques,
ne pouvait d'ailleurs que renforcer leur sympathie mutuelle. S 'ils ontassurément
compensé leur handicap en matière d 'habileté dialectique, des carences ont peut
être persisté dans leur culture rhétorique. Au sujet du style d'Eunome Photius
porte un jugement impitoyable : « construction forcée, serrée à l' excès et heur
tée... assemblage rugueux, ramassé, comprimé, mélangé et tronqué» (codex
138 , 97 b , trad . R . Henry). Vu le professionalisme du critique, on n 'est guère
tenté d'expliquer ce verdict simplementpar son hostilité envers un penseur très
déviant. E .Norden , Die antike Kunstprosa (t. II, p. 561) cependant a lancé cette
accusation contre Photius et émis personnellement une opinion nettementplus
326 EUNOME E 122
favorable : « un exemple non sans importance d' imitation évidente du style iso
cratique » (Grégoire de Nysse , C . Eunome III 5 , $ 24 t. II, p. 268, avait déjà fait
le rapprochement avec Isocrate ,en même temps qu'avec Philon,mais en le pre
nant en mauvaise part). L . R . Wickham également (10 , p .537 n . 3) est plutôt
indulgent : « Et surtout il est concis » , déclare-t-il avec soulagement (ce qui n 'est
pas tellement isocratique).
Encore à Antioche, en 358, Eunome fut ordonné diacre par l'évêque arien du
lieu, Eudoxe. En 359- 360 il prend la relève d'Aèce, trop compromis, dans la
défense de la doctrine anoméenne à un concile tenu à Constantinople et une
alliance avec la variété d 'arianisme (« homéisme» ) que favorisait alors l'empe
reur Constance lui permet d'être promu évêque de Cyzique (sur la rive asiatique
de la Mer deMarmara). Mais il effarouche bien vite ses ouailles et surtout son
clergé par la franchise sans compromis avec laquelle il propage ses idées. Au
bout de quelques mois à peine il est obligé d 'aller se défendre auprès d'Eudoxe,
devenu évêque de la capitale , tentant également de faire réhabiliter son maître
Aèce, déjà condamné.Mais il aggrave encore son fait par un sermon d' Épipha
nie scandaleux (Philostorge, H . E. VI 2) et par son refus d 'obtempérer aux
conseils de prudence donnés par Eudoxe, rendant ainsi définitive la rupture entre
les anoméens et la faction beaucoup plus modérée et incolore à laquelle s' était
rallié ce même Eudoxe ; celui- ci, bien contre son gré, est obligé de « lâcher >>
l'extrémiste . Eunome ne retourna plus sur le siège de Cyzique ; son épiscopat
d'un an à peine (pour lequel nous suivons les données chronologiques fournies
par son admirateur enthousiaste , l'historien de l'Église Philostorge, de préfé
rence à celles qu 'on trouverait chez les confrères plus « orthodoxes» de celui-ci,
en particulier Socrate, H . E. IV 7 , qui place l'épisode sous l'autre empereur
arien , Valens, soit vers 367) ne semble lui avoir laissé aucune nostalgie. Il devait
avoir de fait la mentalité d'un chef d'école philosophique plutôt que d'un
pasteur.Ne protestait-il pas en effet : « Ce qui donne sa vraie sanction au mystère
de la piété , ce n'est nila sainteté des noms, ni la propriété des rites et des sym
boles mystiques,mais l'exactitude de la doctrine » cité par Grégoire de Nysse
(Contre Eunome III 9, $ 54, t. II, p. 284). Après son expulsion de Cyzique, nous
dit Philostorge (H . E. IX 4), il ne célébra plus jamais l'Eucharistie.
On notera toutefois que les communautés eunomiennes pratiquaient un rite baptismal par
ticulier, avec une seule immersion ; mais ce n 'est pas forcément Eunome qui l'a inauguré
(Sozomène, H . E . VI 26 , propose deux versions, dont une seulement rend l'ex -évêque de Cyzi
que responsable du changement; dans l'autre ce seraient deux disciples en dissidence ). Ou
peut-être s 'agissait -il de débiliter l' argument que ses adversaires tiraient de l' invocation trini
taire attachée à l'administration de ce sacrement et repassait-on ainsi du domaine du rite à
celuidu dogme ?
Au service exclusif donc de ses idées, Eunome se retira d'abord en Cappa
doce ; convoqué à un synode à Antioche en 361, sous la pression de Constance, il
s'en tira plutôt bien , échappant à toute nouvelle condamnation . A la fin de la
mêmeannée, le parti anoméen put concevoir de nouveaux espoirs avec l'avène
ment de Julien , qui était de longue date en rapports amicaux avec Aèce.Mais
plutôt que de tenter une mainmise sur l'ensemble de l'Église orientale, Aèce et
E 122 EUNOME 327
cune indication sur le contexte de cette affirmation , Némésius se lance dans une
réfutation ; tout en qualifiant Eunome d'esprit « pénétrant» (oxus), il lui reproche
à deux reprises de s'être laissé influencer par Aristote . Cette accusation est tradi
tionnelle dans la polémique anti-eunomienne.
On la trouve mêmedans un recoin d 'une Conférence de Cassien XV 3 , où l'eunomien se
sert des « artifices de la dialectique » pour entraîner l'orthodoxe Macaire dans « le maquis
aristotélicien » ; où trouverait- on en revanche dans les textes antiques des reproches de com
promissions avec Porphyre ou Jamblique ?
Mais elle paraît ici injustifiée . Car Eunome ne doit pas viser à poser une enté
léchie , une forme qui vient organiser un corps, mais qui n 'a plus de sens ni
d'existence quand ce corps se désintègre. Il affirme bel et bien une création en
vertu d'une intervention divine. Et vu le rôle dans son système d'une volonté
divine intervenant à n 'importe quel moment, il n 'y a rien d' impossible à ce que
soient créés au coup par coup des êtres désormais immortels . Némésius lui
oppose l'objection qui venait naturellement à un Grec devant l'idée d'une
immortalité qui a eu un commencement: ce qui a eu ainsi un début ne saurait
être exempt de trouver une fin . Mais Eunome a justement affirmé cela au sujet
du cosmos dans son Apologie 22 : « Rien ne saurait se terminer à une fin sans
partir d'un commencement.»
Et il semble que dans l'Apologie de l'Apologie, sous la poussée des critiques de Basile , il
ait admis que le nom d' Incorruptible, qui indiquait que Dieu n 'avait pas plus de fin que de
commencement, pouvait Lui être appliqué aussi bien que celui d'Inengendré, mais que vu la
corrélation étroite des deux noms, leur coexistence dans les noms de Dieu n ' était pas incom
patible avec l'absolue simplicité divine : cf. C . Eun . II, § 471, t. I, p . 364 ; $ 526 , p . 380 et
$ 554, p. 388.o
D 'après Némésius, Eunome aurait réaffirmé dans le contexte de la création
des âmes cette corrélation entre commencement et fin : Dieu a fixé (par décret
arbitraire !) le nombre total des âmes; elles viennent à l'être au rythme de cin
quante mille par jour et, quand le total sera atteint, le monde, aussitôt qu' il sera
complété, n 'aura plus qu'à se dissoudre (p . 31, li. 10 - 14 Morani). Peut-être en
outre est-on en droit de percevoir un rapport avec deux affirmations transmises
par Grégoire de Nysse. L 'une dans un long passage qui, selon L . Abramowski
(1, col. 945), résume tout le système: l'opération par laquelle ont été faits les
anges n 'est pas identique à celle par laquelle les hommes ont été faits ; elle lui est
supérieure , puisque le résultat est supérieur (C. Eun. I, § 153 t. I, p. 72, li. 22-23).
L 'autre quand Grégoire mentionne, sans s'arrêter à reproduire la démonstration
donnée par Eunome, que celui-ci, par des procédés de « technologue » , a voulu
montrer que l'immortalité des anges n 'est pas la même que celle des hommes (C .
Eun . II, § 590 ; t. I, p. 398, li. 25-26 ). Cela se rattacherait bien à la représentation
eunomienne d 'une série d 'ousiai strictement étagées et imperméables les unes
aux autres.
Le deuxième passage est à la fois un peu plus imprécis, en tant qu'il parle des
« Eunomiens» , non d 'Eunome en personne, et plus proche du contexte théo
logique habituel de la pensée d'Eunome, plus facile par conséquent à rattacher à
d 'autres thèmes de cette pensée. Il n 'y aurait entre Dieu le Verbe et le corps
E 122 EUNOME 333
(dans l’Incarnation ) aucune union selon la substance; seules les « puissances >>
seraient unies ; puissances qui, enchaîne aussitôt Némésius, sont à identifier ,
conformément à la doctrine d 'Aristote, avec la sensibilité que possède un corps
organisé. Il semble bien , en effet, qu ’Eunome et ses disciples aient exclu
(comme Eudoxe, un moment très proche d'eux : cf. Doctrina Patrum , chap. 9,
fr. XIV ), la présence dans le Christ de toutpsychismehumain supérieur: à leurs
yeux cette présence serait incompatible avec une réelle unité de ce Christ, unité
qu’Eunome (d'après le livre III du Contre Eunome de Grégoirede Nysse ) accuse
sans trêve Basile d 'avoir détruite. On retrouve là évidemment la thèse euno
mienne de l'incommunicabilité des substances, le terme « puissance » (dynamis )
étant peut-être importé d'un vocabulaire traditionnel en psychologie depuis
Aristote , mais non eunomien .
Eunome en effetmet presque partout l'accent sur l'energeia, employant dynamis surtout
pour signifier la « portée»,la « valeur» desmots (cf. Apologie 18 , li. 4 ; 19 ,li.4 et 17; Apol.
Apol. dans C . Eun. I, § 552 ; t. I, p . 186 ) ou alors la « puissance » divine, parfois en couple avec
energeia (Apol. 26 , li. 9 ; cf. déjà 24, li. 15 et 18 ; Expos. 3 , li. 32) ; on peut sans doute accepter
en ce cas la suggestion de B . Sesboüé (7 ), prolongée par B . Pottier (6 , p . 113), selon laquelle il
s 'agirait d 'une qualité intérieure à l'ousie, la substance divine, donc plus proche de celle-ci
que l'energeia et sans rapport nécessaire avec cette dernière. Mais, dans le prolongementde
cette définition , on peut comprendre les constatations de M . R . Barnes ( 3 , surtout p. 224 et
235-236 ) : Eunome use avec prédilection d 'une séquence causale à trois termes ousia , ener
geia , ergon (« essence, activity , product» ), car l'energeia , identifiée couramment à la boule et
toujours insérée dans le temps n 'a aucun lien nécessaire avec l'ousia et ne permet donc pas,
commele ferait la dynamis, un mouvement de connaissance ascensionnel vers cette ousia . Ce
télescopage de la dynamis constitue un contraste de plus avec les païens dont on avait voulu
rapprocher Eunome, et notamment Julien .
Il se pourrait qu'en définitive nous soyons ramenés à notre pointde départ.
Malgré la sécheresse de ses exposés (moindre toutefois que celle de l'unique
texte que nous ayons conservé d 'Aèce et tout de même animée par une convic
tion etune volonté de convaincre aussi profondes l'une que l'autre) et même si
son ardeur paraît s'être un peu aisément transportée du plan apostolique et pasto
ral à l'intellectuel, Eunome est bien un théologien, au service de ce qu 'il tient
pour la foi chrétienne. Les analogies découvertes entre sa doctrine et la pensée
néoplatonicienne mâtinée de logique aristotélicienne sont superficielles. Son
refus catégorique de tout émanatisme au profit d 'une activité volontaire divine
encadrée dans le temps est beaucoup plus conciliable avec la pensée biblique
qu'avec n'importe quelle formede doctrine hellénique et surtout celles sous les
quelles les idées de Platon et Plotin ont jeté leur dernier feu , en sorte que le Néo
arianisme (cette appellation est peut-être la plus satisfaisante ,même s 'il n 'est pas
du tout sûr qu 'Aèce ait puisé sa doctrine chez Arius: cf. Wickham , 10, p. 568 ,
n . 1) est bien une formulation , passablement aberrante à nos yeux , du dogme
chrétien ,plutôt qu'une philosophie . A moins qu 'on ne donne de ce dernier terme
une définition différente de celle qui a généralement cours aujourd'hui, mais
peut-être acceptable aux ive- ve siècles de notre ère ?
GEORGESMATTHIEU DE DURAND (+).
334 EUPEITHÈS DE PAPHOS E 123
123 EUPEITHÈS DE PAPHOS IIa
Académicien , disciple de Carnéade (2°C 42),mentionné dans l'Academi
corum historia de Philodème, col. 23, 44 = 32, 37 (= Carnéade T 3b 13 Mette).
TIZIANO DORANDI.
124 EUPEITHIOS D 'ATHÈNES PLRE II : FV
Fils d 'Hégias et frère d 'Archiadas (II). Voir l'arbre généalogique de cette
famille dans la notice consacrée à Hiérios ( H 122).
Eupeithios est connu par quelques fragments de la Vie d 'Isidore de
Damascius (fr. 352- 355 et 358 ; Epit. Phot. 223 ; trad. anglaise par P . Athanas
siadi, Damascius, p . 321-323). Naturellement doué pour la philosophie , plus que
son frère Archiadas (> A 315 ), il semble avoir gâché cesbonnes dispositions.
RICHARD GOULET.
125 EUPHANTE D 'OLYNTHE RE < 1> MIV - D IIIa
Philosophe mégarique, élève d'Euboulidès de Milet (» E 71). Connu plutôt
pour son activité d'historien et d'auteur de tragédies.
Témoignages. 1 K . Döring, Die Megariker, fr. 68 -72 et 164 A . Traduction
française dans 2 R .Muller, Les Mégariques, p. 32. 3 G . Giannantoni, SSR, fr. II
D F 1 - 2 . Commentaire et bibliographie : Döring 1, p . 114 - 115 et p . 144- 145 ;
Muller 2 , p . 119- 120 .
Datation. Si, comme son nom paraît l'indiquer, il est bien né à Olynthe, il
faut que ce soit avant 3489, date à laquelle Philippe détruisit la ville; par suite, le
roi Antigone dont il aurait été le maître (fr. 68 ) est probablement Antigone per
Gonatas (* * A 194), né vers 320a; enfin l'ambassade dont il est question dans le
fr . 71 se situant autour de 2929, il faut qu'Euphante ait vécu au moins jusque là
( le fr. 70 mentionne à tort Ptolémée III, qui n ' a régné qu 'après 246a).
(Euvres. Sont connues:
( 1) Tepi Baoireias, Sur la royauté , discours adressé au roi Antigone (fr. 68) ;
(2) ‘lotopíal, Histoires, au moins quatre livres (fr. 70 , 71) ;
(3 ) un assez grand nombre de tragédies (fr. 68 ).
Influence. Cette production semble faire d'Euphante un auteur en marge de la
tradition proprementphilosophique de Mégare (encore qu’Eubulide (2 - E 71) et
Alexinos ( A 125 ) aient eux aussi laissé des æuvres « littéraires » , cf. fr. 57, 90 ,
91). Mais la présence de son nom aux côtés de ceux d' Alexinos et d'Eubulide
dans le fr. 69 (morceau qui appartiendrait à un écrit polémique épicurien , d 'après
4 W . Crönert, Kolotes und Menedemos, p . 16 - 26 ) laisse entendre qu'il était
considéré comme un philosophe, solidaire des positions des autres représentants
de l'École (Crönert 4, p. 26 , estime en outre que le ooŨ de la ligne 2 désigne
Stilpon ). Noter que le fr. 164 A (Diogène Laërce II 113) semble indiquer qu 'un
certain Diphilos du Bosphore (> * D 213) fut enlevé à Euphante par Stilpon, ce
Diphilos étant soit un fils d 'Euphante (cf. les traductions courantes de Genaille ,
Hicks, Apelt) soit simplement un élève (5 P . Natorp , art. « Diphilos » 13, REV 1 ,
E 128 EUPHRAIOS D 'ORÉOS 335
1903, col. 1155 ; 6 K . von Fritz , art. « Megariker » , RESuppl. V , 1931, col. 719 ) ;
Döring 1, p. 145, a sans doute raison de décelerune lacune avant Eủpávrov, ce
qui conduit à comprendre que Stilpon a enlevé Diphilos à un maître inconnu, et
que c'est un disciple anonyme qu'il a pris à Euphante. Mentionné à trois reprises
par Diogène Laërce (dont une après une citation textuelle de Philippe de
Mégare), son nom figure aussi deux fois dans les papyri d 'Herculanum ; Athénée
se réfère une fois à lui comme source.
ROBERTMULLER .
Musonius ? Nonne summa facundia praediti neque minus sapientiae quam elo
quentiae gloria inclyti extiterunt ? »
Disciples . Philostrate , V. soph. I 25, rapporte que Timocrate d'Héraclée- sur
le -Pont nxovoEv Eů pátou TOŨ Tuplov. D 'autre part, il mentionne dans la Vie
d 'Apollonios (VI 7 ) un certain Thrasybule . Enfin , Bassus de Corinthe ( >^ B 20 ),
philosophe impliqué dans une tentative de meurtre contre Apollonios de Tyane,
fut peut-être un élève d 'Euphratès, tout comme Lysias et Praxitèle de Chalcis,
ses sbires (Apollonius, Ep. 36 ; 74 ; 77).
Euvres.Malgré la célébrité dont le philosophe paraît avoir joui de son vivant
et après sa mort (cf. sur ce point le témoignage d 'Eusébe de Césarée,
C . Hier. 33, 40 -50 des Places), aucun titre d 'ouvrage ne nous a été conservé.
Seul Philostrate mentionne de façon vague des « écrits mensongers » dirigés
contre Apollonios de Tyane quinemettaientpas en cause la continence du sage
(V. Apoll. I 13). A ce propos, von Arnim 6 , col. 1216 , est dans l'erreur lorsqu 'il
évoque l'« écrit diffamatoire d'Euphratès contre Apollonios dans lequel il lui
reprochait des excès sexuels » . De même,Grosso 3 , p . 522, se trompe quand il
voit dans V . Apoll. VI 7 mention d'une cuvre (ëpyov ne désigne pas une auvre ,
mais un acte d'Euphratès).
Sauf chez Épictète IV 8 , 17-20, où le discours direct vaudrait citation, aucun
fragment du philosophe ne nous est parvenu. Dans ce passage, Euphratès déve
loppe l'idée que ce ne sont pas les signes extérieurs , tel le manteau ,mais les
actes, qui font le philosophe; il souligne les avantages que le philosophe gagne,
pour lui et la philosophie , à ne pas se déclarer. Il est cependant possible de préci
ser, par les témoignages indirects, l'orientation de la pensée d'Euphratès.
Philosophie. Son stoïcisme est profondément lié à la vie politique. Dans le
discours que lui prête Philostrate (V. Apoll. V 33), il demande à Vespasien
d 'abolir la monarchie (uovapxiav) et de rétablir la démocratie (TÒ TOŨ onuou
upátos) ; et devant Domitien (V. Apoll. VIII 7, 16 ), il sera accusé par Apollonios
de considérer l'empereur comme un « maître» , deonórns. Aussi certains ont-ils
vu en lui un opposant au régime des Flaviens. 10 J.Gagé, « La propagande séra
piste et la lutte des empereurs flaviens avec les philosophes (Stoïciens et Cy
niques)» , RPhilos 1959, I, p . 92, pense qu'Euphratès fut, comme les stoïciens et
les cyniques, engagé contre le régime des Flaviens soutenu par la propagande du
Sérapéum et d'Apollonios de Tyane ; 11 M .Mazza, « L 'intellettuale come ideo
logo : Flavio Filostrato ed uno “ speculum principis ” del III secolo d. C .» , dans P .
Brown, L. Cracco-Ruggini et M . Mazza (édit.), Governanti e intellettuali,
popolo di Roma e popolo di Dio (I-VI), Torino 1982, p. 107 n . 102, cite G . S.
Knabe, qui voit même en Euphratès le porte -parole du parti conservateur sénato
rial; lire aussi Grimal 1, p. 381, et avant tout Mantello 2 , p. 976 : l'auteur montre
comment la pensée d'Euphratès, centrée sur l'action , répondait aux aspirations
de l'aristocratie . Il faut toutefois noter que, d'après Philostrate, Vespasien n'est
pas dupe de l'attitude d'Euphratès, qu'il juge dictée par le désir de contrecarrer
Apollonios (V. Apoll. V 37). La prise de position d 'Euphratès serait alors davan
tage motivée par l'opportunisme que par la conviction. D 'autre part, le discours
E 132 EUPHRATÈS (MESTRIUS) 341
qu'il tient à Alexandrie se distingue aussi par un ton très violemment antisémite :
Euphratès voit dans le juif le barbare par excellence, l'individu inassimilable.
Son stoïcisme est sans doute très marqué par le rationalisme; cela explique,
selon Grosso 3 , p . 429, qu' il recommande à Vespasien de soutenir la philosophie
« selon la nature» , tnv Mèv xarà púoiv , et de combattre « celle qui prétend
avoir l'inspiration divine » , tnv dè DEOXAUTETV báoxovoAV (V . Apoll. V 37).
Faut-il suivre 12 M . Pohlenz, Die Stoa, t. II, p. 188, et faire de deoxdutelv une
citation de l'écrit d' Euphratès mentionné en V. Apoll. I 13 et une allusion à la
pensée hermétique ?
Pline confirme (I 10, 10) l' intérêt qu 'Euphratès porte aux valeurs sociales et
politiques: « adfirmat etiam esse hanc philosophiae et quidem pulcherrimam
partem , agere negotium publicum , cognoscere, judicare , promere et exercere
justitiam , quaeque ipsi doceant, in usu habere» . Toujours selon Pline (I 10, 7), la
morale semble avoir tenu une place importante dans l'activité philosophique
d 'Euphratès : « insectatur vitia , non homines, nec castigat errantes, sed emen
dat » . Au contraire, l'Euphratès de la Vie d 'Apollonios est dépeint comme un être
immoral, incapable de dominer ses passions (cf. V. Apoll. V 39). D 'aprèsMante
nello 2 , p . 968 - 969, cette pensée philosophique se caractérise essentiellementpar
l'individualisme, la modération , et favorise un conservatisme social ; contraire
ment à la thèse de Grimal 1, p. 380 , qui affirme que la doctrine du philosophe se
situe dans la lignée de celle de Panétius et d'Athénodore, notamment par l'atten
tion portée à la justice, et « ne témoigne donc pas d 'une très grande originalité » ,
il pense qu 'Euphratès, plaçant la philosophie dans la pratique juridique, innove :
« Se Panezio faceva dipendere l'agire concreto dal momento speculativo ; se
Atenodoro scindeva i due aspetti con un'indubbia preferenza per il secondo ;
Eufrate ridiscute ora i termini del problema: assume l'agire concreto ad ele
mento centrale della philosophia e pone in subordine la riflessione teorica »
(p. 973). Cette volonté d'insertion dans le siècle, dont Épictète IV 8, 17-20 se
fait aussi l' écho, est violemment dénoncée par Apollonios qui voit là , précisé
ment, l'image de la fausse philosophie , uniquement guidée par la cupidité et
l'arrivisme (cf.,V . Apoll. V 38 ; VI 13 ; VIII 7 (11)). Et l'on sait d 'après la lettre
de Pline (I 10 , 11) qu 'Euphratès jouait le rôle d'un directeur de conscience
auprès des notables : « Euphratès était moins préoccupé de s 'avancer dans les
voies de la Sagesse que dans celles du Monde » selon la formule de Grimal 1 ,
p . 372 .
Il est avéré qu'Euphratès a été servi dans son enseignement par une éloquence
remarquable, propre à convertir à la philosophie , ce dont témoignent Pline
I 10 , 5, Épictète III 15, 8, et Fronton , Lettre à Marc Aurèle I 4 , p. 133 Van den
Hout. Cela est confirméindirectement par Philostrate qui le présente comme un
sophiste habile à prononcer unemélétè ( V . Apoll. V 27) et rappelle qu 'Apollo
nios laisse à Alexandrie, pour surveiller Euphratès,Ménippe qui se distingue par
ses dons pour la dialectique et sa liberté de parole ( V . Apoll. V 43).
Euphratès d 'après les Lettres d 'Apollonios. Bien que Philostrate , V. Apoll.
V 39,mentionne des lettres d'Apollonios à Euphratès, dont il reste peut-être un
342 EUPHRATÈS (MESTRIUS) E 132
exemplaire (voir Penella 5, Appendix 4 = V. Apoll. II 26 ), la tradition hypercri
tique considère celles quinous ont été transmises comme très largement ou tota
lement apocryphes: cf. 13 E . Meyer, « Apollonios von Tyana und die Biographie
des Philostratos» , Hermes 52, 1917, p . 371-424 (repris dans Kleine Schriften ,
t. II, Berlin 1924 , p. 131 sq.), à la p. 412, et, plus radical encore, Bowie 4 ,
p . 1691.Mais il faut noter que les deux derniers éditeurs des Lettres, Penella 5 et
14 F . Lo Cascio , Apollonio Tianeo, Epistole e frammenti, coll. « Quaderni
dell'Istituto Siciliano di Studi bizantini e neoellenici» 12, Palermo 1984, sont,
surtout en ce qui concerne celles adressées à Euphratès, favorables à l'authenti
cité. Pour chaque lettre, on a chez 15 F. Lo Cascio , Sulla autenticità delle
epistole di Apollonio Tianeo , coll. « Quaderni dell' Istituto Siciliano di Studi
bizantini e neoellenici » 10, Palermo 1978, un rappel des thèses défendues par les
philologues. Quoi qu 'il en soit, dans la mesure où elle est riche de précisions,
cette correspondance permet de compléter, avec toutes les précautions qui s'im
posent, le portrait d 'Euphratès.
La rivalité entre les deux philosophes est donnée comme une rivalité entre
deux écoles, le stoïcisme et le pythagorisme: d 'après Ep. 50, Euphratès aurait
attaqué Pythagore et les pythagoriciens ; il aurait même accusé Apollonios d 'être
un sorcier, magos (Ep. 16 ), ce à quoi Apollonios réplique en qualifiant son
adversaire d’ãocos (Ep. 17). Apollonios lui refuse le titre de philosophe (Ep. 1)
et le considère comme un sophiste (Ep. 2 ) dont il critique l' éloquence (Ep. 94 ).
Les Lettres confirment les attaches d 'Euphratès en Italie et en Asie mineure ,
Syrie (Ep. 3) ou Égées de Cilicie (Ep. 7), ville qui fut le lieu de résidence
d'Apollonios dans sa jeunesse (cf. V : Apoll. I 7).
Euphratès est un « nouveau-riche» (Ep. 6 ), qui fait montre de sa richesse et
exhibe ses vêtements : il a renoncé au tribôn qu 'il portait à ses débuts, reniant
ainsi l'idéal de Zénon (Ep. 3 ). Il est aussi un redoutable captateur d 'héritages
(Ep. 7 ) et il est bien connu d 'un empereur pour ses sollicitations financières (Ep.
4 ; cf. aussi Ep. 51).
Euphratès, enfin , paraît impliqué dans deux sordides affaires d' assassinat
visantApollonios (cf. Ep. 60 ; 74 ; 77).
PATRICK ROBIANO.
133 EUPHRONIOS entre D III et D IIIP
Épicurien athée et intempérant,dont Élien , fr. 89 Hercher (reconstitué à partir
de plusieurs gloses de la Souda : K 156 , T 680, K 1511, I1 2653, A 4173, H 558,
B 278 , E 3116 , K 518, A 1851, K 520, £ 1104, O 274, E 1143 Adler ), raconte la
guérison et la conversion après une nuit d 'incubation à l'Asclepieion (d 'Athè
nes ?), alors qu'une pneumonie l'avait amené aux portes de la mort. Lorsque, sur
l'ordre du dieu, il eut brûlé les livres d 'Épicure, ses disciples purent le suivre
dans la voie du bien (eic TÒ eù xai xanās).
SIMONE FOLLET.
E 138 EURÉMÔN 343
134 EUPHRONIOS RE 6 III
Témoin du testamentde Lycon ( D .L . V 74). E .Martini, art. « Euphronios» 7 ,
RE VI 1, 1907, col. 1220, le qualifie de “ péripatéticien” .Mais, à la différence
des deux autres témoins, Callinos d 'Hermione ( C 27) et Ariston de Céos
( A 396 ), Euphronios n 'apparaît pas dans la liste des familiers ou des disciples
auxquels est légué le " péripatos” (V 70 ). Il pouvait figurer comme témoin dans
le testament du philosophe à d'autres titres.
RICHARD GOULET.
135 EUPHRONIOS IV ?
Dans une liste d'ouvrages de Diodore de Tarse (mort avant 394) conservée
par la Souda (s.v. Albowpos, A 1149 ; t. II, p . 103, 19 Adler), figure un Ilpos
Eů póvlov Dióoopov xarà neīOLV vai åróxplolv (A ou Contre Euphronios
le philosophe, par questions et réponses).
Le début de la notice de la Souda fait référence à Théodore le Lecteur (historien de la fin
du ve s . et du début du Viº), mais le dernier éditeur de l'Historia tripartita , G . Ch . Hansen ,
Theodoros Anagnostes Kirchengeschichte, 2e éd ., GCS N . F. 3, Berlin 1995, p . XVII, estime
que le long catalogue des æuvres de Diodore est emprunté à une autre source.
A. von Harnack (T.U. N .F.6, 4, 41 et 42, 3) a proposé de lire : npòs Eůspaolov. Il pen
sait sans doute à Euphrasius ( » E 131), le disciple de Jamblique.
RICHARD GOULET.
136 EUPHROSYNÈ
Philosophe dont l'épitaphe célèbre aussi la piété et la culture étendue (docta
novem musis),morte à Rome à vingt ans (CIL VI 33898).
BERNADETTE PUECH.
137 EUPOL
Péripatéticien (?) dont le nom a été restitué par Crönert, Kolotes und Mene
demos, p. 92, dans un passage des plus incertains d 'un ouvrage de Philodème
contenu en PHerc. 1746 pz. I 2 ,4 : Eủno [a -.
TIZIANO DORANDI.
EUPYRIDÈS
Le renvoi à Eupyridès indiqué dans DPHA I, p . 687 pour AURELIANUS, doit être corrigé
ainsi : AURELIANUS→ HÉRACLIDÈS (AURELIANUS - )
ce soit surtout avec Protagoras , qui avait à peu près le même âge que lui,
qu 'Euripide a pu entretenir des relations amicales: cf. Decharme 2 , p . 47-58 .
D ' après Diogène Laërce IX 54 ( T 15 dans Kovacs 15 ), c'est dans la maison
d 'Euripide que Protagoras aurait, pour la première fois, lu en public un de ses
ouvrages, le traité lepi Deõv (mais deux autres endroits sont donnés comme
possibles). En tout cas, ce sont les relations d 'Euripide avec Socrate et avec les
sophistes qui lui ont valu , de son vivant comme après sa mort, les calomnies et
les railleries des poètes comiques, en particulier d 'Aristophane : sur l'image
d 'Euripide dans la comédie ancienne, voir Kovacs 16 , p . 22-32 , et 28 C . Prato ,
Euripide nella critica di Aristofane, Galatina 1946 .
Il faut noter enfin que, d 'après Satyros, Vie d 'Eur. fr. 39,col. X 15,un procès
pour impiété aurait été intenté par le démagogue Cléon à Euripide. Ilest vrai que
de nombreux passages de son æuvre pouvaient prêter le flanc à l'accusation
d 'impiété . Un texte d 'Aëtius, cité par le ps.-Plutarque, de placitis philosophorum
17 (880 d - e ) (= Aetius Plac. I 7 ,1 , et Diels , Dox. gr., p . 297), dans un chap. inti
tulé Tiç ó Deós, mentionne le nom d 'Euripide à la suite de celui de plusieurs
« athées » notoires (Diagoras de Mélos (2D 91), Théodore de Cyrène, Évhémère
de Tégée (» E 187) : cf. 29 G . Lachenaud (édit.), Plutarque , Opinions des philo
sophes, CUF, Paris, 1993 p. 85 et n . 1 (reportée p. 220 ), qui renvoie , parmi les
nombreux passages d 'Euripide pouvant être exploités pour des procès d 'impiété,
à Heracles 1341 sqq., Bellerophon fr. 286 ,Melanippe fr. 480. Inversement, la
critique par Euripide des traditions polythéistes a pu être exploitée afin demieux
établir l' idée d 'une divinité unique : voir Athénagoras, Supplique au sujet des
chrétiens V 1 . Sur la critique des traditions religieuses par Euripide, cf .
Decharme 2 , p . 59-103; Dodds 7 ; Stinton 13, surtout p . 254-264. Le cas d'Euri
pide n 'est pas examiné dans le livre de 29 E . Derenne, Les procès d 'impiété
intentés aux philosophes à Athènes au Ve et au IVe siècles avant J.- C ., coll.
« Bibl. de la Fac. de Ph . et Lettres de l'Université de Liège » 45, Liège/Paris
1930 , qui se limite aux philosophes proprement dits et aux sophistes (Prota
goras). La question mérite d 'être examinée dans un cadre plus vaste , comme le
fait 30 K . J. Dover, « The freedom of the intellectual in Greek society » , Talanta
7 , 1975, p. 24-54 (= The Greeks and their legacy, Oxford 1988, p . 135- 158). La
bibliographie de 31 M . Winiarczyk, « Bibliographie zum antiken Atheismus» ,
Elenchos 10, 1989, p . 102-192, signale, p. 144 - 145, 25 titres d ' études relatives à
Euripide (publiées entre 1826 et 1989) - dont plusieurs sont aussi signalées dans
la présente notice.
La réflexion historiographique récente a mis en relief le rôle en quelque sorte
constitutif joué par la fiction dans les biographies antiques des poètes,mais aussi
des philosophes: à ce sujet, lire les réflexions de 32 J. Fairweather, « Fiction in
the biographies of ancient writers » , AncSoc 5, 1974, p . 231- 275 ; prendre des
leçons de scepticisme auprès de 33 M . R . Lefkowitz , The lives of the Greek
poets, Baltimore 1981 (XI-187 p .); et 34 Ead., « Satyrus the historian » , Atti del
XVIII Congresso internazionale di papirologia,Napoli 1984, p . 339-343.
JEAN -MARIE FLAMAND.
E 143 EURYLOQUE 349
140 EUJRYBOU [LOS
Épicurien (?) dont le nom a été restitué par Crönert, Kolotes und Menedemos,
p. 21 n . 114 , dans un passage des plus incertains d'un ouvrage anonyme contenu
en PHerc. 176 , fr. 3, 1 (= fr. 2 col. IV Vogliano) : Eů]\púßov [hoç. A . Vogliano,
Epicuri et Epicureorum scripta in Herculanensibus papyris servata , Berlin 1928,
p . 25, et R . Philippson, NGG 1930 , p. 16 (= Studien zu Epikur und den Epiku
reern, Hildesheim 1983, p. 207), doutent, à juste titre , de la restitution de
Crönert.
TIZIANO DORANDI.
141 EURYCRATÈS DE SPARTE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique ,
V. pyth . 36 , 267, p . 145, 16 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
142 EURYDICE (MEMMIA -) I/II
Issue de l'une des familles les plus influentes de Delphes, honorée elle-même
d 'une statue dans le sanctuaire à l'époque d'Antonin (Klio 17, 1921, p. 169),
Eurydice avait été, commeson mari Pollianos, l'élève de Plutarque de Chéronée :
c'est au jeune couple que l'écrivain dédia les Préceptes Conjugaux. Elle était la
fille de Cléa (MC 134 ), dédicataire de deux autres traités de Plutarque.
BERNADETTE PUECH .
143 EURYLOQUE (EÚpúroxoc) RE 9 FIV - D IIIa
A . Diogène Laërce, dans sa Vie de Pyrrhon, mentionne Euryloque parmi les
" disciples célèbres” de Pyrrhon d'Élis (IX 68-69) . Il rapporte deux anecdotes,
dont la première est censée illustrer les “manquements” (êakoowua ) qu'il lui
arrivait de commettre envers l'idéal d ' indifférence” de son maître : « on dit
qu ’un jour il se mit dans une telle colère que, brandissant la broche avec le rôti,
il poursuivit le cuisinier jusque sur la grand'place » . La seconde anecdote semble
montrer la vigueur de son hostilité envers les vaines subtilités de la dialectique :
« une autre fois , à Élis, harcelé par les questions de ses interlocuteurs, il jeta son
manteau à bas et traversa l’Alphée à la nage. Il était donc extrêmement hostile
aux sophistes (roheliáTATOS TOTS OOplotaīs), comme le dit Timon » . Timon
utilise le mot de “ sophiste " pour désigner péjorativement les philosophes qu'il
brocarde, c'est-à -dire les philosophes dogmatiques (cf. le début des Silles, cité
par Diogène Laërce IX 112); dans l'anecdote concernant Euryloque, le contexte
semble montrer que le mot désigne plutôt les dialecticiens. Il se peut que Dio
gène Laërce, ou sa source, ait détourné, volontairement ou non , le sens que
Timon donnait à ce mot.
Euryloque paraît en tout cas reprendre, en les exagérant, certains des traits de
son maître Pyrrhon lui-même: ses manquements occasionnels à l' idéal de
l'indifférence (IX 66 ) et son tempérament insociable et, au moins initialement,
" agité” (IX 63). Dans le texte de Diogène Laërce, la silhouette pittoresque d 'Eu
350 EURYLOQUE E 143
ryloque est juxtaposée, par un contraste qui semble voulu, à celle d 'un autre
disciple de Pyrrhon , Philon d'Athènes, qui en imitait au contraire, avec excès, les
comportements parfois extravagants : il arrivait par exemple à Pyrrhon de parler
tout seul (cf. IX 64 , où l'on remarquera l'adverbe roté); chez Philon , c 'était
devenu une habitude (cf. IX 69, où on lit au contraire tà Thełota ). Dans cette
biographie stylisée, les deux disciples semblent personnifier deux aspects anti
thétiques du caractère de leur maître: d'un côté , la fidélité pratique à l'idéal
d '" insensibilité " (ånádela ) et l'ambition de " dépouiller l'homme de fond en
comble ” (IX 66); de l'autre , les manquements occasionnels à cet idéal et les
concessions faites à la condition humaine ordinaire (cf. le désaccord sur le témoc
des sceptiques, “ insensibilité” ou “ douceur”, dont on trouve l'écho dans Diogène
Laërce IX 108). Cette mise en scène symétrique provient peut-être de Timon , qui
est cité par Diogène Laërce à propos de chacun de ces deux disciples de Pyrrhon .
1 C . Wachsmuth , Sillographorum Graecorum reliquiae, Leipzig 1885, ad
loc., suppose qu 'après " comme le dit Timon" est tombée une citation littérale de
Timon , qui aurait illustré le portrait d'Euryloque commecelle du fr. 50 illustre
celui de Philon. L 'hypothèse ne paraît pas entièrement convaincante à 2 M . Di
Marco , Timone di Fliunte - Silli, Roma 1989, p. 224 , qui remarque cependant
que, dans l'extrait de cette section de la Vie de Pyrrhon qui figure dans l'Excerp
tum Vaticanum (connu aussi sous le nom de " grand extrait 0 " ), on trouve une
phrase (oyoiva de Xevindeis anédavev, « ilmourut piqué par un jonc » ) qui ne
se trouve pas dans les manuscrits complets de Diogène Laërce ; ce qui autorise
l'hypothèse d'une lacune.Mais il faut noter, au reste , que l'on ne peut détermi
ner si cette phrase concerne la mort de Pyrrhon ou celle d 'Euryloque (cf. 3 A .
Biedl, Das grosse Exzerpt 0 , Città del Vaticano 1965, p . 116 ).
B . On retrouve le nom d 'Euryloque dans un autre contexte, le contexte épicu
rien. D 'après Diogène Laërce, X 13, Épicure (2E 36 ) aurait écrit une « Lettre à
Euryloque » , dans laquelle , contredisant (à l'avance ) une affirmation d'Apollo
dore (= A 244 ) dans ses Chroniques, il niait avoir été l'auditeur de Nausiphane
et de Praxiphane, et affirmait qu'il avait été son propre élève, autrement dit son
propre maître. En outre, un ouvrage intitulé Euryloque et dédié à Métrodore
figure dans la liste des “meilleurs” livres d 'Épicure (DiogèneLaërce X 28).
Cet Euryloque correspondant d' Épicure est-il identique à l'élève de Pyrrhon ?
4 H . Usener, dans l' index de ses Epicurea, Leipzig 1887, p . 407, avait soutenu
l'identité sine dubio (ce qui signifie probablement “sans aucun doute” ). M .
Gigante , tout en laissant subsister une distinction entre le disciple de Pyrrhon et
le correspondant d 'Épicure dans les éditions successives de sa traduction de
Diogène Laërce (5 Diogene Laerzio - Vite dei filosofi, Roma/Bari 1983, t. II,
p . 606 ), les identifie dans le chapitre VIII, « Epicuro e il pirroniano Euriloco », de
son livre 6 Scetticismo e Epicureismo, Napoli 1981, p . 79 -82. L'identité lui
paraît justifiée, précisément, parce qu 'Euryloque était un élève de Pyrrhon ,
commeNausiphane lui-même l'avait été dès sa jeunesse (cf. Sextus Empiricus,
A . M . I 2 ; Diogène Laërce IX 64, 69, 102; en IX 64, on apprend que Nausiphane
« disait souvent qu 'Épicure , émerveillé par le “ style de vie ” [åvaotpooń ) de
E 145 EURYPHAMOS DE SYRACUSE 351
Pyrrhon, lui demandait continuellementdes informations à son sujet » ). On sait
que les relations entre Épicure et Nausiphane avaient été plus qu ’orageuses
(Cicéron , N . D . I 26 , 73 ; Diogène Laërce X 7 -8 ; Sextus Empiricus, A . M . I 2 - 4 ) ;
Épicure ne niait sans doute pas avoir fréquenté Nausiphane (suffisamment, en
tout cas, pour pouvoir le traiter de tous les noms); mais il refusait énergiquement
de s' avouer comme son disciple. Dès lors, « à qui mieux qu'à un élève de
Pyrrhon Épicure aurait-il pu écrire qu 'il n 'avait pas été le disciple d 'un autre
élève de Pyrrhon ? » (Gigante 6 , p . 80). On peut rappeler aussi que le pyrrho
nisme et l'épicurisme partagent une commune hostilité envers lesuaońuata et
l'éyxúxhlog Taldela , même si c'est pour des raisons différentes (Sextus Empi
ricus, A . M . I 1- 7 ), et que l'intérêt passionné d 'Épicurepour Pyrrhon et son “ style
de vie” pouvait s'expliquer non seulement par son imperturbabilité, mais aussi
par son dédain des connaissances superflues et des raffinements de la dialectique
(cf. les fragments 48 et 67 de Timon , cités par Diogène Laërce IX 65). Certes,
d 'après Diogène Laërce X 8 , Épicure traitait Pyrrhon d'auaońs et d'anal
DEUTOS, mais 7 D . Sedley , « Epicurus and his Professional Rivals » , Cahiers de
Philologie 1 , 1976 , p . 136 -137, a soutenu de façon convaincante que ce sont là ,
en l'espèce, non des termes injurieux, mais des termes d ' éloge. Compte tenu de
tout cela , on peut comprendre qu'Épicure ait pu éprouver une véritable amitié
envers un pyrrhonien aussi “hostile aux sophistes” (dans le sens signalé ci-des
sus) que l' était Euryloque. Pour accepter l'identité de l'Euryloque pyrrhonien et
de l’Euryloque ami et correspondant d'Épicure , on sera donc un peu moins pré
cautionneux que ne l'est 8 W . Görler, « Älterer Pyrrhonismus – Jüngere Aka
demie – Antiochos aus Askalon » , dans H . Flashar GGP 4 , Basel 1994 , p. 770 ,
qui, tout en reconnaissant la " force" des arguments de Gigante , déclare que la
question " doit rester ouverte” .
JACQUES BRUNSCHWIG .
144 EURYMÉDON DE TARENTE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique ,
V . pyth. 36 , 267,p . 144, 13 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
145 EURYPHAMOS DE SYRACUSE ya
Pythagoricien ancien figurant dans une anecdote de Jamblique, V. pyth . 30,
185 , p . 102,24 - 103, 16 Deubner, illustrant la fidélité au pacte contracté entre les
membres de la confrérie pythagoricienne. Ayant rencontré Lysis qui sortait du
temple d'Héra , Euryphamos lui demanda de l'attendre pendant qu'il ferait lui
aussi ses dévotions, mais, après avoir prié, il oublia ce rendez -vous et sortit par
une autre porte ; Lysis resta sur place à l' attendre jusqu'au lendemain , lorsqu'Eu
ryphamos se souvint de son engagement et revint le chercher, affirmant que
l'oubli avait été causé par un dieu pour mettre à l'épreuve la fermeté de Lysis
dans l'observance des pactes.
Dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36 , 267, p. 144, 3 Deubner, figure
un Euryphémos parmi les pythagoriciens de Métaponte . Sur la forme du nom ,
352 EURYPHAMOS DE SYRACUSE E 145
voir L . Deubner, « Bemerkungen zum Text der Vita Pythagorae des lambli
chos » , SPAW 1935, p.689 ; 826.
BRUNO CENTRONE.
146 PSEUDO -EURYPHAMOS
Sous le nom d'Euryphamos a été transmis par Stobée IV 39, 27 un fragment
d'environ 75 lignes en dialecte dorien tiré d'un traité Tepi Biov (Sur le mode de
vie).
Éditions. 1 H . Thesleff, The Pythagorean texts of the Hellenistic period, Åbo
1961, p. 85, 13-87, 19 ; 2 B . Centrone, Pseudopythagorica ethica. I trattati
morali di Archita , Metopo, Teage, Eurifamo. Introduzione, edizione, traduzione
e commento a cura di B . C ., Napoli 1990 ; comprend l'édition (p. 103- 106 ), la
traduction italienne (p. 131- 133), un commentaire (p. 231-242). Une traduction
anglaise due à K . S. Guthrie (1920) a été reprise dans 3 R . Navon, The Pythago
rean Writings, p . 76 -78, et dans 4 D . R . Fideler, The Pythagorean Sourcebook
and Library, p. 245-246 .
Datation. IIa selon 5 H . Thesleff, An Introduction to the Pythagorean Wri
tings of the Hellenistic Period, Åbo 1961, p. 110 ; 115 ; IP selon 6 W . Burkert,
« Zur geistesgeschichtlichen Einordnung einiger Pseudopythagorica » , dans
Pseudepigrapha I, Vandæuvres-Genève 1971, p. 25-55,cf. p. 38-41, et Centrone
2 , p .41-44.
BRUNO CENTRONE.
147 EURYPHON
Personnage inconnu dont le nom a été lu par Crönert, Kolotes und Menede
mos, p . 131, dans un passage des plus incertains d 'un ouvrage de Philodème ( ?)
contenu en PHerc. 1508 pz. IV 3, 30 : Eủpubőv. Crönert a suggéré de l'iden
tifier avec le médecin Euryphon de Cnide.
TIZIANO DORANDI.
148 EURYPYLOS DE COS RE 15 III
Acad émic ien ple tor s
, disci de Cran de Sole (MC 195) et non de Cratès
d'Athènes (B + C 206 ), mentionné dans l'Academicorum historia de Philodème,
col. S 33 -34 (cf. K . Gaiser, Philodems Academica , Stuttgart/Bad Cannstatt 1988,
p. 530-531). Selon Démocharès dans son plaidoyer pour l'interdiction des écoles
de philosophie (fr . 1 Marasco ap. Ath . XI, 508 f), il aurait écrit sur Euaion de
Lampsaque (» E 61). Cf. F. Jacoby , art. « Eurypylos » 15, RE VI 1, 1909, col.
1351.
TIZIANO DORANDI.
149 EURYSTRATOS
“ Philosophe" cité par Stobée (sans doute dans une section perdue du recueil),
selon Photius, Bibl., cod. 167 (t. II, p . 155, 35 Henry ).
RICHARD GOULET.
E 150 EURYTOS DE TARENTE 353
La première partie de sa vie se passe aux côtés de Pamphile qu 'il appelle son
« maître » (GEOTÓTng) et dontil prend le nom comme patronyme. Assistés d'une
équipe de copistes, ils révisent ensemble et éditent les Livres Saints et les autres
textes de la bibliothèque. Eusébe lit toutes les euvres de la littérature profane ou
chrétienne qui lui sont accessibles et se constitue des recueils qui lui serviront
plus tard pour la composition de ses propres ouvrages historiques, apologétiques
et exégétiques. Pendant les premières années de la persécution (303-307), Eu
sèbe et Pamphile ne sont pas inquiétés,mais, à la fin de 307, Pamphile est em
prisonné. Les conditions de la détention sont assez souples et permettent à
Eusébe de commencer avec son amiune Apologie pour Origène et ses doctrines
qu'il achèvera seul. Mais la situation s 'aggrave, Pamphile est exécuté (310 ) et
Eusèbe s'enfuit en Phénicie, puis en Égypte , où il est arrêté et incarcéré.
Avec la paix , Eusébe, dont on ne connaît pas la date d'ordination à la prêtrise,
rentre à Césarée et succède à Agapius sur le trône épiscopal entre 313 et 315. Il
semble qu 'il faille dater de la dizaine d'années qui suivent, jusqu'au Concile de
Nicée, la production littéraire la plus intense d 'Eusébe. Il rédige une première
version de son Histoire ecclésiastique, une Vie de Pamphile et un récit Sur les
Martyrs de Palestine dont une recension brève a pris place dans l'Histoire
ecclésiastique. C 'est de cette période que datentégalement la Préparation évan
gélique, la Démonstration évangélique et un écrit par questions et réponses sur
les Désaccords dans les Évangiles.
Rapidement Eusébe est impliqué dans la querelle théologique soulevée par
Arius pour qui il prend parti, ce qui lui vaut une excommunication au Concile
d 'Antioche en 325. La même année, à Nicée, il signe pourtant la formule de
l'homoousios, mais se rétracte peu après, préférant définir la divinité du Christ
dans les termes mêmes des Écritures plutôt qu 'en des formules comme l' homo
ousios qui pouvaient conduire, selon lui, au sabellianisme. Il prononça également
à la fin du Concile le panégyrique de Constantin qui fêtait la vingtième année de
son règne. En 330, il participa au Concile d ' Antioche, qui condamna et fit exiler
l' évêque du lieu Eustathe (» E 160 ), un défenseur de Nicée qu 'on accusa de
sabellianisme. On offrit par la suite à Eusébe le siège d 'Antioche,mais il refusa .
Eusébe reprit alors ses travaux. Il composa un grand ouvrage sur la géogra
phie biblique et deux Commentaires sur les Psaumes et sur le prophète Isaïe. En
335, il joua un rôle important au Synode de Tyr qui déposa Athanase et il pro
nonça devant le synode transporté à Jérusalem le discours d 'apparat pour la
Dédicace de l'église du Saint-Sépulcre. Les Pères du concile se rendirent ensuite
à Constantinople pour fêter les trente ans de règne de l'empereur et, encore une
fois , Eusébe fut chargé du discours de circonstance. Après la déposition de
Marcel d ’Ancyre , Eusèbe presenta une réfutation en règle de sa doctrine, consi
dérée comme sabellianiste, dans son Contra Marcellum et un second traité inti
tulé Sur la théologie ecclésiastique. Lorsque Constantin mourut en 337, Eusébe
se mit à écrire un éloge enthousiaste du prince (De Vita Constantini) quivenait
d 'inscrire dans l'histoire le triomphe longuement préparé de l'Église. On ignore
la date de samort, antérieure à 341.
360 EUSÈBE DE CÉSARÉE E 156
voir références dans Cacouros 39, p. 149 n. 1), a peut-être connu Eustrate (décé
dé en 1120 suivant Dräseke 1). Prodrome, dans son commentaire aux Seconds
Analytiques, livre II, a utilisé celui d'Eustrate (Cacouros 37 , p. 495, 503 -507) ;
(d ) Théodore Prodrome et Jacques de Venise ont vécu à Constantinople durant la
même période (Cacouros 43, p . 150 ) ; (e) Une erreur interprétative, que réfute
Prodrome, se trouve reproduite dans le commentaire de Grosseteste. On sait par
ailleurs que l'évêque de Lincoln avait probablement consulté le commentaire de
Jacques de Venise . Nous avions donc émis l'hypothèse que cette erreur figurait
dans le commentaire perdu de Jacques aux Seconds Analytiques (hypothèse
développée dans Cacouros 43).
A travers ces remarques, on voit s'esquisser les différents cercles d 'érudits
byzantins et occidentaux , qui ont travaillé à l'exégèse des Analytiques et de
l' Éthique à Nicomaque et qui ont, directement ou indirectement, cuvré à son
passage en Occident: Eustrate et Michel d 'Éphèse;Michel d 'Éphèse , Prodrome,
et Jacques de Venise ; Robert Grosseteste . Si donc, comme nous l'avons suggéré
plus haut, la mise en page du corpus ethicum (texte d’Aristote fragmenté en
sections + commentaires l'encadrant) est antérieure à la traduction faite par
Grosseteste , cette mise en page a été très probablement effectuée soit dans la
génération « Eustrate » soit dans la génération suivante , qui est la génération
« Prodrome» .
Deux étapes supplémentaires dans la transmission du comm . d ' Eustrate
à Byzance. Les manuscrits du commentaire d'Eustrate à l'Éthique à Nicomaque
nous permettent d'esquisser brièvement deux étapes supplémentaires dans la
transmission de ce texte à Byzance.
(a ) Le comm . d 'Eustrate dans la Constantinople reconquise en 1261. Le
Laur. 85, 1 est un manuscrit sur papier (480/485 x 300/305 mm ., (III)+ 762+[ III ]
ff.), copié par plusieurs scribes et surnommé « l'Océan » . Il comprend plusieurs
commentaires d'Aristote. Parmiceux-ci on trouve, suivantMercken 8, p. 4 *, une
compilation des commentaires à l'Éthique dont la forme diffère un peu de celle
employée par Grosseteste. En fait, les témoins de cette classe « omit the anony
mous scholia on II- V , but contain most or all of the remaining commentary of
Aspasius» ( ibidem ). Pour les livres I et VI, on a employé le commentaire
d'Eustrate . Or, le Laurentianus est un manuscrit exceptionnel. Car ce manuscrit,
avions-nous suggéré, « était manifestement destiné à former un texte " canoni
que " qu 'il faudrait garder comme témoignage, une collection de l'æuvre aristo
télicienne destinée à l'éternité et non pas nécessairement à être consultée ». Ce
document date probablement des années 1265- 1270 et semble donc contem
porain des premières années du règne deMichel VIII Paléologue (1261- 1282)
ou , moins probablement, des dernières années de l'Empire de Nicée (1204
1261). Il est le résultat de l'initiative ambitieuse d'un érudit qui connaît bien
Aristote et qui aurait occupé une charge d 'enseignement importante dans l'Uni
versité impériale ou à l'École patriarcale de Constantinople (voir 44 M .
Cacouros « Le Laur. 85, 1 témoin de l'activité conjointe d'un groupe de copistes
travaillantdans la secondemoitié du XIIIe siècle » , dans G . Prato (édit.), Actes du
E 163 EUSTRATE DE NICÉE 387
Ve Congrès International de Paléographie grecque, Crémone, 5 -11 octobre
1998, sous presse). Ainsi, ce manuscrit constitue un témoin précieux du renou
veau quimarque le début du règne de Michel VIII. Ces remarques concernant le
Laurentianus nous obligent à considérer différemment la version du corpus
comm . ethicorum compris dans le volume et rendent nécessaire la réévaluation
du rôle de ce témoin dans la transmission du corpus. Elles permettent également
de constater que, depuis l'activité d'Eustrate , de Michel d'Éphèse, de Prodrome
et de Jacques de Venise, les changements survenus dans la composition du
corpus ethicum n 'avaient pas modifié la place et l'importance du commentaire
d ' Eustrate.
(b ) Le comm . d 'Eustrate à Constantinople dans les années 1350. Le Coislin .
161, manuscrit sur papier (300 x 224 mm ., 458 ff.) comprend plusieurs commen
taires d'Aristote , dont la compilation éthique que « Grosseteste had before him
except for the anonymous scholia on Book V » (Mercken 8 , p . 4 * , voir aussi 7 ,
p. 4 *).Or, ce témoin fait partie d'un groupe de manuscrits datant tous des années
1350-1375 et comprenant, d'une part, une édition complète du corpus aristo
telicum , d'autre part plusieurs textes du Quadrivium (= arithmétique, géométrie,
astronomie, la musique ayant été omise ). Chaque texte d 'Aristote ou du Quadri
vium est encadré d'extraits numérotés provenant d'un ou de plusieurs commen
taires. On avait proposé Nicéphore Grégoras (1290 /1291- 1359/1360 ) comme
maître d'ouvre de cet ensemble, en considérant que lesmanuscrits existants sont
des copies d 'un original qui, lui, aurait été perdu. Or, grâce à la comparaison
paléographique et codicologique que nous avons récemment effectuée (papier,
mise en page, systèmes de renvoi employés, décoration, écriture), il a été possi
ble de démontrer que: ( 1) les manuscrits ont été écrits par Néophytos Prodro
mènos, moine au monastère de Prodromou à Pétra (Constantinople ), dont nous
éditons actuellement les auvres philosophiques et théologiques; (2) Néophytos
est, en plus, le responsable , au moins en partie, de l' édition constantinopolitaine
d 'Aristote commenté. Si donc il est vrai que, pour ce qui concerne le corpus
ethicum , la version du Coislin . 161 correspond , plus ou moins (voir supra ), à
celle qu 'a eue Grosseteste , reste à savoir si Néophytos est à l'origine de la modi
fication apportée et, notamment, d 'autres modifications, ou si, contre ses habi
tudes (il n 'hésite pas à intervenir pour enrichir ou compléter les textes copiés), il
se serait contenté de copier le texte transmis. Dans tous les cas, on peut retenir
que le commentaire d 'Eustrate aux livres I et VI a été conservé dans cette vaste
compilation .
Voir 45 M . Cacouros, « Néophytos Prodromènos copiste et responsable (?) de
l'édition Quadrivium - Corpus aristotelicum du 14° siècle » , REByz 56 , 1998 ,
p. 193 -212, et, en particulier, p. 193-198, 201-204, 210-212. Sur le monastère de
Prodromou , voir Janin 12, p . 421-429 ; sur les dépendances de ce monastère qui
servirent à l' enseignement et à la copie des manuscrits, voir bibliographie dans
Cacouros 45 , p . 199 n. 27 et 30 et, plus récemment, 46 M . Cacouros, « Deux épi
sodes inconnus dans la réception de Proclus à Byzance aux XIII -XIVe siècles» ,
C . Steel et d ' A . Segonds (édit.), Actes du Colloque international organisé pour
388 EUSTRATE DE NICÉE E 163
célébrer l'achèvement de l'édition de la Theologia Platonica de Proclus, en
l'honneur de ses éditeurs H . D . Saffrey et L. G . Westerink, Louvain (Hoger Insti
tuut voor Wijsbegeerte, De Wulf-Mansion Centrum ), 13-17 mai 1998, sous
presse.
La postérité latine de la traduction de Grosseteste. Comme le signale
Mercken 8 , p . 46 * -52* , la traduction deGrosseteste (comprenant, comme il a été
signalé , le commentaire d'Eustrate pour les livres I et VI) a été largement utilisée
au Moyen Âge. Par exemple, Albert le Grand par exemple a emprunté à cette
compilation des extraits étendus dans ses deux commentaires à l' Éthique à
Nicomaque. Henry Bate de Malines, Jean Buridan et d 'autres auteurs médiévaux
en firent autant. Eustrate s'est donc trouvé fréquemment employé et cité.
MICHEL CACOUROS.
Eustrate avait donc commenté les livres I et VI, tandis que Michel d'Éphèse
avait commenté les livres V , IX et X de l'Éthique à Nicomaque. Les commen
taires qui, au XIIe siècle , étaient attribués à l'Anonymeancien pour les livres II
V , à l'Anonyme tardif pour le livre VII et à Aspasius (* A 461, nº 7) pour le
livre VIII, correspondent, sauf pour le livre V , aux livres de l'Éthique que
Michel et Eustrate n 'ont pas commentés et pourraient s'inscrire dans le même
projet exégétique d'ensemble . La compilation du XIIe siècle des commentaires
de l'Éthique à Nicomaque est la suivante : I (Eustrate ), II-IV (Scholies anonymes
anciennes), V (Scholies anonymes anciennes et Michel), VI (Eustrate), VII
(Commentaire anonyme tardif), VIII (Aspasius), IX -X (Michel). Cette liste igno
re les commentaires d 'Aspasius aux livres I- IV et VII qui ne seront redécouverts
que plus tard ( à la fin du XIIIe siècle selon 47 P . Moraux , Der Aristotelismus, II,
p . 252). On pourrait donc envisager l'hypothèse qu' Anne Comnène aurait
demandé à Michel et à Eustrate de combler les lacunes des commentaires des
Anonymes et d' Aspasius : livres I, VI, IX et X . Cette hypothèse n 'expliquerait
pas pourquoi le livre V a donné lieu à un nouveau commentaire. En guise
d 'explication , Mercken 8 , p . 24 * et 25 * , avance une deuxième hypothèse :
l'intention de Michel était de fondre dans un nouveau commentaire les scholies
de l'Anonyme sur les livres II à V . Il n'aurait atteint son objectif que pour le
livre V .
HÉLÈNE LONGPRÉ.
164 EUSTROPHOS D 'ATHÈNES FI
Cet Athénien avait été, en même temps que Plutarque de Chéronée , l'élève
d'Ammonios d'Athènes (24A 138 ). Il était l'adepte d'un platonisme pythagori
sant, à en juger par sa défense de la mystique des nombres dans le dialogue Sur
l' E de Delphes (387 d - e ). Il intervient également dans les Propos de Table (VII
4 ) , comme invité deMestrius Florus, vers la fin du jer siècle.
BERNADETTE PUECH .
E 169 EUTHYDÈME 389
165 EUTH [
Épicurien (?) dont le nom a été restitué par Crönert, Kolotes und Menedemos,
p . 82, dans un passage des plus incertains d'un ouvrage de Philodème contenu en
PHerc. 1780 pz. VI13: EůOl[.
TIZIANO DORANDI.
166 EUTHOSIÓN DE RHÉGIUM
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth . 36 , 267, p. 145 , 19 Deubner .
BRUNO CENTRONE.
167 EUTHYCLÈS II
Stoïcien fictif, invité avec d 'autres philosophes à l'anniversaire de la fille
d'un certain Scamônidès à Athènes (Alciphron , Lettre d'Autoclètos à Hétoima
ristos III 55 (notée par erreur 65 ), p . 86 -87 Hercher ). La lettre, qui reprend le
thème du Banquet de Lucien , entend ridiculiser le comportement des philo
sophes. Sur l'onomastique de ces personnages fictifs, voir J. Schwartz, « Ono
mastique des philosophes chez Lucien de Samosate et Alciphron », AC 51, 1982,
p . 259- 264.
RICHARD GOULET.
168 EUTHYCLÈS DE RHÉGIUM
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V . pyth . 36 , 267, p. 145, 20 Deubner.
BRUNO CENTRONE .
169 EUTHYDÈME RE 12 PA 5520 va
Identification . Vers la fin de son discours dans le Banquet de Platon (222 b),
Alcibiade mentionne, parmi ceux dont Socrate a su se faire aimer, « Euthydème,
le fils de Dioclès ». On tient généralement cet Euthydème pour identique à celui
dont Xénophon (Mem . I 2 , 29-30) rapporte qu'il était l'objet des assiduités de
Critias et avec celui qu 'il appelle plus loin « le beau » (Mem . IV 2, 1), avec lequel
Socrate a ensuite plusieurs entretiens (Mem . IV 2. 3. 5. 6, 2- 11); cette double
identification exclut que l'Euthydème de Xénophon soit le fils de Céphale (Rép.
I, 328b ). Enfin , c 'est encore du même Euthydème, pense-t-on généralement,
qu 'il est question comme d 'un familier de Socrate dans une anecdote sur le com
portement de ce dernier face aux colères de Xanthippe rapportée par Plutarque
(de cohib . ira 13, 461d).
En revanche, on le distingue le plus souvent d 'Euthydème de Chios
( E 172), interlocuteur de Socrate dans le dialogue de Platon qui porte son nom .
1 K . Joël, Der echte und der xenophontische Sokrates I, Berlin 1893, p. 370-377,
a fait cependant l'hypothèse que le nom d'Euthydème, tant chez Xénophon que
dans le dialogue de Platon , pourrait n 'être qu 'un masque d'Antisthène qui se
serait représenté lui-même sous ce nom dans l'un de ses dialogues. Cette hypo
390 EUTHYDÈME E 169
thèse, de toute façon incontrôlable , se heurte aux différences, à la fois d'âge,
d'origine (les ambitions politiques de l'Euthydème de Xénophon impliquent
qu'il est citoyen d'Athènes) et d'activité entre le jeune homme que s'attache
Socrate et le sophiste déjà vieux avec qui il débat.
Par ailleurs, dans une des lettres pseudosocratiques (Socr. Ep. XIII = SSR IV A 224, 7-8 ),
il est question d'un Euthydème fils de Glaucon (Ejdúonuov tov raúxwvoc) : 2 U . von
Wilamowitz-Moellendorff, « Phaidon von Elis » , Hermes 14 , 1879, p .187-193, notamment
p. 191 = Kleine Schriften III, Berlin 1969, p .41-48, notamment p .45, a conjecturé une lacune
apres τον, ου auraient disparu les mots Διοκλέους και Χαρμίδην τον, ΓΕuthydeme dont il
s 'agit étant donc explicitement dans ce cas celui du Banquet. Ignorant cette correction, 3 L .
Köhler, Die Briefe des Sokrates und der Sokratiker, coll. « Philologus Suppl.Bd. » 20 , 2 ,
Berlin 1928, p . 104 , semble penser plutôt qu 'il s'agit du sophiste Euthydème de Chios
puisque, renvoyant à l' Euthydème de Platon (271 c), elle argumente que, si l'Euthydème dont
parle l' auteur de la lettre a réellement vécu , il devait être plus âgé que Socrate . La référence
qu ' elle ajoute auxMémorables I 2, 29, semble indiquer que pour elle l'aimé de Critias serait
ce même Euthydème de Chios. 4 L . Rossetti , pour sa part ( « 'Socratica ' in Fedone di Elide » ,
StudUrb (Ser. B ) 47, 1973, p . 364 -381, notamment p. 373 n. 34), souligne que le fils de
Glaucon ne peut être que Charmide, ce qui va dans le sens de la correction de Wilamowitz 2 ,
mais pense qu'il s'agit cette fois du fils de Céphale (Rép. I, 328b ) plutôt que du fils de
Dioclès.
Personnalité. S'il doit être compté parmi les membres du cercle socratique,
aucune doctrine, ni aucune activité philosophique ultérieure, ne semble devoir
être attribuée à Euthydème. C 'est seulement dans les Mémorables de Xénophon
que la mention du personnage dépasse l'anecdote . Comme le remarque 5 Leo
Strauss, Xenophon 's Socrates, Ithaca/London 1972, p. 101, les entretiens de
Socrate avec Euthydème, une fois ce dernier convaincu de ses insuffisances et de
la nécessité d 'apprendre auprès de Socrate (Mem . IV 2 ), composent, sous la
forme d'un enseignement exempt d'elenchos, une sorte de compendium de la
doctrine socratique : enseignement sur la providence divine et la nécessité d 'ho
norer les dieux (Mem . IV 3) ; sur la tempérance (Mem . IV 5) ; exemples de
définitions dialectiques : la piété , la justice , la sagesse , le bien , le beau, le coura
ge (Mem . IV 6 ).
MICHEL NARCY.
170 EUTHYDÈME
Personnage fictif mentionné dans une lettre d 'Alciphron I 34 (la courtisane
Thaïs) (p. 55 -56 Hercher). Il serait devenu prétentieux depuis qu'il s'adonne à la
philosophie . Il fréquente l'Académie avec le vêtement approprié et un petit livre.
RICHARD GOULET.
171 EUTHYDÈME
Péripatéticien fictif du dialogue satirique de Lucien , Hermotime 11.
RICHARD GOULET.
172 EUTHYDÈME DE CHIOS RE 13 va
Sophiste , interlocuteur de Socrate, en compagnie de son frère Dionysodore ,
dans l’ Euthydème de Platon . Sur les détails biographiques donnés par Platon
E 172 EUTHYDÈME DE CHIOS 391
concernant les deux frères, voir 1 M . Narcy, art. « Dionysodoros de Chios» ,
DPLA II, 1994, D 192, p . 875-877, et 2 M . Canto , Platon. Euthydème, Tra
duction nouvelle, introduction et notes, coll. GF 492, Paris 1989, p. 27-28,
p. 179 n. 6 . Euthydème étant le protagoniste du dialogue, c'est sur lui que s'est
concentrée la discussion concernant l'historicité de ces deux personnages. Platon
leur fait soutenir les paradoxes selon lesquels il n 'est possible de rien dire de
faux (283e- 284c) ni de contredire (285d- 286b): ces deux thèses étant attri
buées par Aristote à Antisthène (Metaph. A 29, 1024 b 33 -34 ), 3 H . Bonitz ,
Platonische Studien, Berlin 1886 ( réimpr. Hildesheim 1968), p . 137, en a conclu
que les deux frères ne sont que des représentants fictifs d'Antisthène. Cette opi
nion a fait autorité (cf. 4 Th .Gomperz , Griechische Denker II, Leipzig 1902, 40
édition 1925, p . 423-425 ; 5 H . Raeder, Platons philosophische Entwicklung,
Leipzig 1905, 2e édition 1920, réimpression 1973, p. 139 599.; 6 P . Natorp ,
Platos Ideenlehre, 2e édition Leipzig 1922 (réimpression Darmstadt 1975),
p . 120 , 124 ) jusqu 'à l'article de 7 K . Praechter, « Platon und Euthydemos » ,
Philologus 87, 1932, p. 121-135 (= Kleine Schriften, Hildesheim /New York
1973, p. 14 -28 ). Praechter tire argument de la thèse attribuée dans le Cratyle de
Platon (386d) à Euthydème: « toutes choses sontpareillement à tous, à la fois et
toujours » . A la différence de l'Euthydème, où les deux paradoxes précités
(Euthd. 283e - 284c, 285 d - 286 b ) étaient aussitôt attribués à Protagoras (Euthd.
286c), les deux frères se voyantainsi refuser une quelconque originalité , ici cette
thèse est dite propre à Euthydème, par différence justement avec le principe
protagoréen de l'homme-mesure. Aristote cite également par deux fois ( S. E . 20,
1776 12 ; cf. Rh. II 24, 1401 a 27) Euthydème comme l'auteur d 'un sophisme qui
ne figure 'pas dans l'Euthydème de Platon (même si, comme l'observe Canto 2 ,
p. 28, on en trouve dans ce dialogue qui procèdent du même principe): Aristote
aurait donc disposé à propos d'Euthydème d'une source indépendante de Platon ,
ce qui non seulement plaide en faveur de l'existence réelle d 'un sophiste de ce
nom ,mais permet de lui attribuer un recueil d'arguments qui a pu être la source
commune de Platon et d'Aristote. A l'appui de cette hypothèse, on peut citer
l'observation de 8 M . A . Stewart, « Plato' s Sophistry» , PAS Suppl. vol. 51, 1977
(21-44 ), p. 33- 35, selon qui on peut reconnaître dans l’Euthydème une répartition
en trois groupes des sophismes rapportés par Platon : ambiguïtés sémantiques
(portant sur des termes : 275d- 277 c ), ambiguïtés syntaxiques (283b - 288b),
emploi de termes ou d'expressions dont le sens varie selon qu' ils sont pris
absolument ou de façon relative, avec ou sans restriction (293 a - 304 b). Si les
sophismes de l'Euthydème sont empruntés à un «manuel» préexistant, ils y
étaientpeut-être déjà groupés ainsi.
9 L .- A . Dorion, Aristote. Les Réfutations sophistiques, Introduction, traduction et com
mentaire, coll. « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique» 18, Paris 1995, p . 36 , se
fondant sur le fait qu'Euthydème « n 'est pas à proprement parler un sophiste ,mais plutôt un
éristique » , le rattache (« de près ou de loin » ) auxMégariques.
Traduction. 6 The Older Sophists, edited by R. K . Sprague, University of
South Carolina Press , Columbia (South Carolina) 1972, Appendix : “ Euthy
demus of Chios” , p. 294 - 301.
392 EUTHYDÈME DE CHIOS E 172
Études. Praechter 7. Une liste des sophismes prêtés par Platon à Euthydème
et à son frère a été dressée par 11 F . Decleva Caizzi (édit.), Platone. Eutidemo,
Traduzione, coll. « Classici della filosofia » , Milano 1996 , p. 165. Pour l'analyse
de ces sophismes, on peut se reporter, outre à Stewart 8 , aux commentaires de
l' Euthydème de Platon : 12 R . K . Sprague, Plato 's Use of Fallacy. A Study of the
« Euthydemus» and some other Dialogues, London 1962; 13 R . S. W . Hawtrey,
Commentary on Plato 's « Euthydemus » , coll. « Memoirs of the American Philo
sophical Society » 147, Philadelphia 1981 ; 14 M . Narcy, Le Philosophe et son
double , Un commentaire de l'« Euthydème» de Platon, coll. « Histoire des doc
trines de l'Antiquité classique » 8 , Paris 1984 ; 15 M . Canto , L 'Intrigue philoso
phique. Essai sur l'Euthydème de Platon , Paris 1987. (Pour ceux des sophismes
de l’Euthydème de Platon qui se retrouvent dans les Réfutations sophistiques
d'Aristote, ainsi que pour celui qu 'Aristote est seul à mentionner , on peut voir
également Dorion 9.)
MICHEL NARCY.
Castner le classe parmiles Epicurei incerti. Une lettre de Cicéron (Fam . VII 33,
2 ) indique des liens avec C . Cassius Longinus dont les affinités épicuriennes sont
connues ; il paraît également avoir eu des relations avec Atticus (P - A 505)
(Cornelius Nepos, Att. 9 ). Il est cité par Horace dans les Épîtres (I 18 , 31- 36 ),
comme celui « qui voulant nuire à quelqu'un lui donne des vêtements de prix » ,
car la richesse lui fera oublier ses devoirs et perdre sa place dans la société en
devenant gladiateur.
P . Volumnius Eutrapelus semble dans ces conditions proche de l'épicurisme;
il est d 'ailleurs considéré comme un épicurien par 4 A . Momigliano (JRS 31,
1941, p .152- 157).
B . Castner 3, p . 90, semble attacher quelque importance à un passage de Plu
tarque (Brutus 48, 2- 4 ) où estmentionné un Publius Volumnius, « philosophe et
compagnon de Brutus dans toutes ses campagnes» , qui cite différents prodiges
précédant la bataille de Philippes ; il faudrait, selon elle , considérer que les deux
hommes sont identiques. Aucun élémentne justifie pourtant cette conclusion .
MICHÈLE DUCOS.
177 EUTROPIUS RE 8 PLRE II :3 fl. 470
Ami de Sidoine Apollinaire. Son attachement aux doctrines de Plotin et à la
« palestre des platoniciens» (Epist. III 6 , 2 ) l'avait poussé vers l'otium et le
renoncement aux charges du service impérial que son rang sénatorial et la tradi
tion familiale – il comptait parmi ses ancêtres Sabinus, consul en 316 - lui
faisaientun devoir de briguer. Une lettre (I 6 ), datée probablementde 467, dans
laquelle Sidoine lui reproche de manifester, en ne s' intéressant qu 'à l'admi
nistration de son domaine (S $ 3- 4), un attachement aux « dogmes d 'Épicure qui
admet que la vertu soit sacrifiée et définit le souverain bien par le seul plaisir
corporel» (8 5), est suivie , en 470, d 'une lettre de félicitation pour sa nomination
comme préfet des Gaules (fonctions qu' il exerça en 470). Dans cette lettre,
Sidoine fait également allusion à un service public qu'ils auraient antérieurement
exercé en commun (III 6 , 1) .
P . Henry, Plotin et l'Occident, Louvain 1934, p . 199-202, voit dans le témoi
gnage de la lettre III 6 , 2 d 'Apollinaire « le dernier écho de la grande voix
profonde de Plotin » . Voir aussi P. Courcelle , Les lettres grecques en Occident,
p . 243.
RICHARD GOULET.
178 EUXÈNE D 'HÉRACLÉE RE 5 fl.DI
D 'après Philostrate, Vie d 'Apollonius de Tyane I 7 , Euxène d 'Héraclée-sur-le
Pont, établi à Égées de Cilicie , fut le maître d ' Apollonios de Tyane, durant un an
ou deux, jusqu 'à ce que celui-ci atteignît sa seizième année ; il lui enseigna la
doctrine de Pythagore qu'il connaissait parfaitement, sans la pratiquer, vivant en
épicurien dévoyé. Il apparaît qu'Euxène reconnut très vite la valeur de son élève
( V . Apoll. I 8 ; I 14 ) et que ce dernier lui témoigna en retour affection et recon
398 EUXÈNE D 'HÉRACLÉE E 178
naissance (V. Apoll. I 7). La très brève mention de la Souda, s. v. Ejdúonuoc, E
3504, n'est qu 'une reprise de Philostrate.
Ce nom a été omis dans la Prosopographia Heracleotica publiée par W .
Ameling en appendice à Lloyd Jones, The Inscriptions of Heraclea Pontica, coll.
IK 47, Bonn 1994.
PATRICK ROBIANO .
179 EUXÉNÔN RE mort ca 352
Tyrannicide et sans doute disciple de Platon .
D 'après le témoignage de Memnon, historien d 'Héraclée -sur-le-Pont, livre IX
(Photius, cod. 224 , t. IV p. 49-50 Henry = FGrHist III B n° 434, p. 337- 338 ,
avec commentaire, p . 267-272), Euxénôn , cité avec un certain Léon , nous est
présenté comme un des conjurés qui assassinèrent en 353/2 Cléarque (MC 140 ),
tyran d 'Héraclée-sur- le -Pont et ancien disciple de Platon et d' Isocrate. Il fut tué,
comme ses complices, soit immédiatement par les gardes du corps de Cléarque,
soit un peu plus tard ,de façon fort cruelle.
Comme le chef de la conspiration , Chion d 'Héraclée (* C 110 ), était un
disciple de Platon , on peut supposer qu 'Euxénôn l’était aussi. D 'ailleurs d'autres
sources nous ont donné deux noms de conjurés : Antithéos (> A 219 ) et Léoni
dès ; or, ce dernier est explicitement désigné par Trogue-Pompée, Épitomè de
Justin XVI5 , 12 -13, comme un disciple de Platon .
Voir la Prosopographia Heracleotica publiée par W . Ameling en appendice à
Lloyd Jones, The Inscriptions of Heraclea Pontica, coll. IK 47 , Bonn 1994 ,
p. 137 .
PATRICK ROBIANO .
180 EUXITHÉOS RE 5
Dans le second livre de ses Vies (fr. 38 Wehrli = Athénée IV, 157c, Philolaos,
DK 44 b 14 ), le péripatéticien Cléarque de Soles ( C140 ), rapporte une
doctrine enseignée par le pythagoricien Euxithéos : les âmes sont liées au corps
pour expier une faute et des châtiments encore plus graves sont réservés aux
hommes qui n 'attendent pas le consentement de dieu pour rompre ce lien avec le
corps. Euxithéos est presque certainementun personnage fictif. Voir W . Burkert,
Lore and Science, p . 124 n . 21.
Dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36 , 267, p . 145, 4 Deubner, estmentionné un
Accideoç (2 - D 89) parmi les pythagoriciens de Paros.
BRUNO CENTRONE.
181 EUXITHÉOS Fiva
Ce disciple d'Aristote , probablement athénien, semble avoir été connu surtout
commeorateur politique : selon Plutarque, Praec. ger. reip . 803 c, ses discours
se caractérisaient par un goût de la dérision provocatrice qui annonçait ceux de
Caton l'Ancien et de Cicéron .
BERNADETTE PUECH .
E 184 ÉVAGRE LE PONTIQUE 399
182 EUXITHÉOS D 'ATHÈNES
Stobée, Anthologie II 15, 38, cite une sentence de ce personnage par ailleurs
inconnu : « < Eu> xithéos l’Athénien a dit que ceux qui sont bons < en paroles> ,
mais ne sont pas bons dans leur vie sont semblables aux bonnes choses (que l'on
voit) en rêve » . Le nom est d 'ailleurs corrigé : < Eu > xithéos, à la fois dans le
lemme et dans l'introduction de la sentence. D 'autres reconstitutions, comme
Dexithéos, seraient possibles.
RICHARD GOULET.
183 ÉVAGRE PLREI: 1 IV
Le philosophe Evagrius est attesté , à Rome, dans le fragment de liste CIL VI
2153, en même temps qu 'un autre philosophe, Sébasmius, et que cinq prêtres de
rang consulaire ; le document date des années 320.
BERNADETTE PUECH .
184 ÉVAGRE LE PONTIQUE ca 345-399
Moine grec, disciple de Basile de Césarée et de Grégoire de Nazianze ,
condamné au Vie s . pour origénisme en même temps qu' Origène et Didyme
l'Aveugle .
Les rares informations biographiques dontnous disposons viennent de sour
ces monastiques (principalement du ch . 38 de l'Histoire Lausiaque de Pallade)
ou d 'historiens ecclésiastiques du ve s. (Socrate , H . E . IV 23, et Sozomène, H . E .
VI 30). Né vers 345 à Ibora, dans la province du Pont, il s 'attacha à Basile, puis
à Grégoire de Nazianze qui le nomma diacre . En 380 , il suivit ce dernier à
Constantinople et se distingua dans la lutte contre les hérétiques. A la suite d 'une
aventure sentimentale avec la femme d 'un haut fonctionnaire, il quitta précipi
tamment la capitale et se rendit à Jérusalem . De là , vers 383, sur les conseils de
Mélanie l' Ancienne et de Rufin d'Aquilée, il gagna l'Égypte pour y mener la vie
monastique (deux ans à Nitrie et quatorze aux Kellia ). Ilmourut au début de 399 .
C 'est dans les conditions précaires du désert égyptien qu'il composa la quasi
totalité de son æuvre . Voir d'une part les notices de A . et C .Guillaumont, 1 DSP
IV , 1961, col. 1731- 1744 ; 2 RAC VI, 1966 , col. 1088 -1107 ; 3 TRE X , 1982 ,
p . 565-570 , et d 'autre part 4 A . Guillaumont, Les Képhalaia Gnostica ’ d ’Évagre
le Pontique et l'histoire de l'origénisme chez lesGrecs et chez les Syriens, coll.
« Patristica Sorbonensia » 5, Paris 1962.
Nous savons peu de choses sur la formation littéraire et philosophique reçue
par Évagre . L 'historien Sozomène nous dit qu' il fut instruit dans la philosophie
et les sciences sacrées par Grégoire de Nazianze lui-même, et Pallade nous le
présente comme « un fin dialecticien contre toutes les hérésies» . Pour une éva
luation de cette formation , voir 5 W . Lackner, « Zur profanen Bildung des Eua
grios Pontikos» , Hans Gerstinger-Festgabe, Graz 1967, p . 17 -29, qui relève et
commente les textes dans lesquels Évagre montre une certaine connaissance de
l'Isagogè de Porphyre et de l'Organon aristotélicien.
400 ÉVAGRE LE PONTIQUE E 184
L 'œuvre d'Évagre est actuellement d'un accès difficile : elle se trouve disper
sée dans des publications variées et le travail de reconstitution et d' édition cri
tique n 'en est qu' à ses débuts. A la suite de la damnatio memoriae qui l'a frap
pée pour cause d 'origenisme, une partie a en outre disparu dans sa langue origi
nelle et n 'est plus conservée que dans des versions orientales (syriaques et
arméniennes principalement). Voir liste (comportant de nombreuses inexacti
tudes et quelques textes étrangers ) dans CPG t. II et Supplementum , nºs 2430
2483.
Évagre exprime de préférence sa pensée sous la forme de courts chapitres
(képhalaia ) dont l'obscurité voulue est destinée à écarter les lecteurs profanes et
à exercer la sagacité de ceux qui sont en mesure de comprendre. Ses traités sont
toujours adaptés au degré spirituel des destinataires, principalement des moines.
Nous ne retiendrons ici que lesœuvres de caractère plus spéculatif ayant quelque
rapport avec la philosophie . Le cæur de l'euvre est constitué par une trilogie
comprenant le Traité pratique (éd . A . et C . Guillaumont, SC 170 et 171, Paris
1971), le Gnostique (iidem , SC 356 , Paris 1989 ; texte partiellement perdu en
grec) et les Képhalaia Gnostica (six centuries tronquées, de 90 chapitres cha
cune , qui ne sont conservées dans leur intégralité qu'en syriaque à travers deux
versions: éd. A . Guillaumont, Les six Centuries des « Képhalaia gnostica »
d 'Évagre le Pontique, PO 28, 1, Paris 1958 ; seul un quart de l'æuvre a été
retrouvé en grec ). Le premier ouvrage analyse les passions regroupées sous huit
pensées (Roylouoi) génériques et indique les moyens de les combattre et de par
venir à l'impassibilité (apatheia ); le second détermine les devoirs de celui qui a
atteint un haut degré spirituel, le gnostique ; le troisième expose les grandes
lignes du systèmemétaphysique (cosmologie, eschatologie, christologie et théo
logie ).
A ces trois æuvres fondamentales on peut joindre les trois suivantes: le traité
Sur les pensées ( éd . P .Gehin, A . et C .Guillaumont, SC 438, Paris 1998), qui est
consacré à l'analyse des logismoi et présente une théorie originale des noêmata ;
une collection de Skemmata (CPG 2433), dontles 39 premiers chapitres forment
une sorte de petit traité sur l'activité de l'intellect et les 23 derniers un abrégé de
la doctrine sur les logismoi, et les Chapitres sur la prière (CPG 2452), qui préci
sent les conditions d 'accès à la prière pure, considérée par l'auteur comme la
plus haute activité mentale de l'homme ici-bas (traduits et commentés par I.
Hausherr, Les leçons d'un contemplatif, Paris 1960 ). Évagre est aussi l'auteur
d 'une correspondance comprenant 64 lettres, dont deux au moins ont un réel
intérêt philosophique: la Lettre sur la Trinité (CPG 2439 ; en syriaque Lettre sur
la foi), entièrement conservée en grec parmi la correspondance de saint Basile
( éd . J.Gribomont dans M . Forlin Patrucco, Basilio di Cesarea . Le Lettere, I,
Torino 1983, p. 84 -113) , et la Grande lettre à Mélanie l'Ancienne (CPG 2438 ;
conservée uniquement en syriaque; trad. anglaise et comm . par M . Parmentier,
« Evagrius of Pontus' " Letter to Melania” », Bijdragen , tijdschrift voor filosofie
en theologie 46, 1985, p . 2-38). On pourra prendre une vue d 'ensemble sur la
correspondance à travers la traduction allemande donnée par G . Bunge, Evagrios
E 184 ÉVAGRE LE PONTIQUE 401
Pontikos, Briefe aus der Wüste , Trier 1986 . Évagre a enfin commenté sous forme
de scholies quatre livres de l'Ancien Testament: Proverbes (éd . P . Gehin, SC
340, Paris 1987) ; Ecclésiaste (iidem , SC 397, Paris 1993) ; Job (quelques frag
ments conservés dans les chaînes exégétiques) et Psaumes ( éd . préparée par M .
J. Rondeau ; se reporter au tableau des textes déjà édités établi par la même,dans
OCP 26 , 1960, p. 328-348). Le total des scholies conservées dépasse les 1800 .
Évagre est un adepte de l' exégèse allégorique issue de la tradition alexandrine,
telle qu 'elle a été pratiquée par Philon d ' Alexandrie et Origène, à condition que
celle- ci reste dans les limites du bon sens (refus d ' allégoriser à tout prix tous les
détails d 'un texte ). Le genre littéraire des textes commentés, qui sont des textes
sapientiaux, fait que cette exégèse est discontinue etmorcelée et qu ' elle s'inté
resse peu à l'enchaînement des idées ou au skopos du livre (sur ce point Évagre
est plus proche de Porphyre que de Jamblique). Plusieurs scholies de caractère
philosophique se présentent comme des « notes de lecture» , citant des philo
sophes comme Aristote (seulphilosophe à être nommé deux fois) et Porphyre ou
des auteurs patristiques comme Clément d'Alexandrie et Origène.
L'æuvre d ’Évagre révèle une pensée rigoureuse et audacieuse , et une certaine
aisance dans le maniement de la logique aristotélicienne (goût pour les distinc
tions et les définitions, recours fréquent aux syllogismes). Un certain nombre de
notions philosophiques communes se trouvent remployées et réinterprétées de
façon originale. Ainsi en est-il de la trichotomie « éthique, physique et théolo
gie» , issue d 'une des divisions de la philosophie qui avaient cours alors, à
laquelle Évagre donne un contenu entièrement nouveau, et dont il fait un usage
étendu, puisqu'elle exprime tout à la fois les diverses étapes du progrès spirituel
et les divers niveaux de compréhension de l'Écriture . Pour sa conception de la
yu @ ols, notion centrale de son æuvre, Évagre est tributaire de Clément
d'Alexandrie. Comme ce dernier, il forme le projet d 'une vraie gnose , distincte
de la pseudo- gnose des sectes philosophico-religieuses. Fondée sur l'interpréta
tion allégorique des écritures et la recherche des principes explicatifs (logoi) de
tous les êtres créés, corporels et incorporels, elle culmine dans la connaissance
de Dieu lui-même, qui est « connaissance essentielle » . Les niveaux de connais
sance sont toujours liés à la plus ou moins grande pureté de l'intellect, appelé à
retrouver sa « nudité » originelle . Un dernier trait remarquable de l'euvre
d 'Évagre, c 'est la finesse des analyses psychologiques, résultat d 'une attention
permanente à soi et de l'expérience accumulée par plusieurs générations de
Pères; cette psychologie est très marquée par les représentations cosmologiques
de l' époque, qui placent l'homme au point de rencontre d'influences contraires,
hostiles ou favorables (d 'où l'importance de la démonologie et de l' angélologie).
Présentation synthétique de la doctrine d'Évagre dans Guillaumont 4, p . 102
123, et 6 Id., « Un philosophe au désert: Évagre le Pontique» , Aux origines du
monachisme chrétien, coll. « Spiritualité Orientale » 30, Abbaye de Bellefontaine
1979, p. 185-212.
Concernant les sources philosophiques et patristiques d 'Évagre, on trouvera
des éléments épars dans les introductions et les commentaires des éditions cri
402 ÉVAGRE LE PONTIQUE E 184
tiques récentes (SC 170-171, 340, 356 , 397 et 438 ). Si, du côté chrétien , on peut
aisément distinguer trois sortes d'influences (alexandrine, cappadocienne et
monastique égyptienne), il est plus difficile de situer la pensée d 'Évagre face à la
philosophie païenne et de faire la part entre ce qui relève de conceptions commu
nément répandues et ce qui vient d'une fréquentation directe des auteurs. La part
stoïcienne est importante dans le domaine éthique et dans la théorie de la
connaissance. L 'æuvre reflète l' intérêt porté à Aristote à l'occasion des contro
verses théologiques suscitées par l'arianisme dialectique d 'Aèce et d 'Eunome
( E 122),mais il faudrait surtout la confronter avec le néoplatonisme: des rap
prochements ont déjà été établis avec Plotin et Porphyre (à noter, dans ce dernier
cas, la parenté des képhalaia évagriens avec les Sentences pour conduire aux
intelligibles et le même accentmis sur la vie selon l'intellect). Brèves indications
sur les sources philosophiques dans A . et C . Guillaumont 2, col. 1103-1105 .
Quelques études particulières : sur le problème du nombre dans la Trinité, 7 R .
Arnou, « Unité numérique et unité de nature chez les Pères, après le Concile de
Nicée » , Gregorianum 15, 1934, p . 242-254 ; sur l'intellect, 8 K . Ware, « Nous
and noesis in Plato , Aristotle and Evagrius of Pontus» , Diotima 13, 1985 ,
p . 158- 163, et 9 A . Guillaumont, « La vision de l'intellect par lui-même dans la
mystique évagrienne» , dans Études sur la spiritualité de l'Orient chrétien, coll.
« Spiritualité Orientale » 66, Abbaye de Bellefontaine 1996 , p . 144- 150 (parenté
avec l'expérience mystique plotinienne); sur les devoirs du gnostique comme
maître spirituel et interprète de l'Écriture , 10 A . Guillaumont, « Le Gnostique
chez Clément d 'Alexandrie et chez Évagre le Pontique », Ibidem , p. 151-160.
L ' influence d 'Évagre sur les auteurs spirituels a été considérable dans le
monde byzantin (par ex. sur Maxime le Confesseur) et dans le monde syriaque,
où ses euvres ont été traduites dès la fin du ve siècle (voir Guillaumont 4 ,
p . 171-332) ; dans le monde occidental latin , cette influence s'est surtout exercée
par l'intermédiaire de Cassien de Marseille .
PAUL GÉHIN .
FELIX→MINUCIUS FELIX
FIGULUS→ NIGIDIUS FIGULUS
11 FIRMIANUS
“ Prêtre du Capitole", érudit (noruuaońs) et “ philosophe digne d'admiration”
(oủx đOatuaotoç biógodoc). Il estmentionné dans la Théosophie de Tübin
gen , 74, p. 188 , 4 -5 Erbse, comme interprète des Oracles sibyllins.
Voir la nouvelle édition procurée par H . Erbse : Theosophorum Graecorum Fragmenta ,
iterum recensuit H . E ., coll. BT, Stuttgart/Leipzig 1995, « Textus genuinus Theosophiae Sibyl
larum », § 3, p .63, li. 71 - 66 , li. 100 .
RICHARD GOULET.
F 12 FIRMICUSMATERNUS 423
12 FIRMICUSMATERNUS ( IULIUS -) RE 11 DM IV
La date exacte de la naissance de Iulius Firmicus Maternus est inconnue. De
certains passages de ses ouvrages, on peut déduire qu'il était originaire de Syra
cuse et qu 'il fut un homme de loi au début de sa carrière. Les souscriptions de
manuscrits anciens font état de son rang sénatorial. Il était apparemment encore
païen lorsqu 'il écrivit un ouvrage sur l'astrologie , intitulé Mathesis. L 'ouvrage
comportait huit livres et était dédié à Lollianus (RE 10)Mavortius, gouverneur
de Campanie. Des allusions à une éclipse solaire récente et à Constantin comme
empereur régnant permettent de dater l'ouvrage entre 334 et 337. Après s'être
converti au christianisme, FirmicusMaternus écrivit un second ouvrage dirigé
contre le paganisme et dédié aux empereurs Constance II et Constant : le De
Errore profanarum religionum . Comme l'ouvrage évoque l'expédition de
Constant dans les îles britanniques et le présente comme régnant en Occident, il
faut le dater entre 343 et 350 .
La contradiction doctrinale qui oppose l'ouvrage astrologique et l'écrit contre le paga
nisme a conduit certains savants à les attribuer à deux auteurs différents. Cette hypothèse est
inutile si l'on tient compte de la chronologie présentée plus haut, de la fréquence des conver
sions, authentiques ou “ politiques", de ce genre et de la mention , dans l'un et l'autre ouvrage,
de l'origine sicilienne de leur auteur. De plus, l'hypothèse a été réfutée de façon décisive par
1C . H . Moore, Julius Firmicus, der Heide und der Christ, Diss. München 1897 , qui a rassem
blé une imposante collection de parallèles linguistiques entre la Mathesis et le De Errore.
EUVRES
1.Mathesis
Selon Firmicus Maternus lui-même (Math . VIII 33, 1), l'ouvrage se divise en
une introduction générale (livre I) et un examen technique détaillé de l'astrologie
(livres II -VIII). Dans son introduction , l'auteur défend l'astrologie contre ses
détracteurs , qui considèrent qu'on ne peut se fier à ses méthodes de prédiction et
que le déterminisme qu 'elle suppose limiterait la responsabilité morale . Firmicus
Maternus s'appuie ici sur une argumentation traditionnelle qui remonte à
l' époque de Carnéade.La réponse met à contribution certaines doctrines médio
ou néoplatoniciennes pour montrer (a) que les prédictions ne sont pas toujours
fiables parce que l'âmehumaine est affaiblie du fait de son entrée dans le corps
et (b ) que l'âme humaine, en se dégageant du corps et en retrouvant son énergie
originelle, peut échapper au déterminisme et aux entraves qu 'il représente pour
la liberté morale . Dans la partie technique - dont les sept parties sontmises en
parallèle avec les sept planètes (voir Math. VIII 33, 1) – l'auteur aborde les
questions suivantes: les éléments de l'astrologie (livre II) ; l'influence exercée
par les sept planètes dans chacun des douze signes du zodiaque, le thema mundi
(c'est-à -dire l'horoscope du monde lui-même), la corrélation entre les cinq âges
du monde et les mouvements des planètes (livre III) ; la relation entre la lune et
les autres planètes, le dominus geniturae, les décans (livre IV ) ; les quatre car
dines du ciel, l'influence des planètes selon les signes du zodiaque, l'établisse
ment des horoscopes, le chronocrator (livre VI); l'établissement des horoscopes
424 FIRMICUS MATERNUS F 12
(livre VII), la sphaera barbarica, c 'est-à -dire les constellations autres que celles
qui fontpartie du zodiaque (livre VIII).
Éditions. 2 W . Kroll, F. Skutsch et K . Ziegler (édit.), Matheseos libri VIII,
coll. BT, Stuttgart 1897-1913 ; 3 P .Monat (édit.), Firmicus Maternus, Mathesis,
CUF, Paris 1992-1997.
Traductions. Anglaise : 4 J. R . Bram , Ancient Astrology : Theory and prac
tice. Matheseos libri VIII, Park Ridge (NJ) 1975 (peu fiable ). Française :
Monat 3.
2 .De Errore profanarum religionum
L'ouvrage comprend une première partie (chap. 1-17), de portée générale ,
dirigée contre les religions païennes et les cultes à mystères. On peut établir une
subdivision entre une première section (chap . 1-8 ) traitant de la divinisation
d 'entités du monde physique – par exemple identification de Mithra, d' Anahita
ou de Liber Pater, avec le soleil ou la lune - , une seconde section ( chap . 9- 12 )
consacrée à la divinisation des passions humaines – identifiées par exemple à
Adonis, Cinyras et Sabazios -, et une troisièmesection (chap . 13-17) consacrée à
la divinisation des activités humaines – identifiées par exemple à Sarapis, Cérès
etMars. La seconde partie de l'ouvrage ( chap. 18 -27) est de portée plus particu
lière et tente d 'expliquer comment les paroles et les gestes des cultes mystériques
ont été empruntés à la Bible selon un plan du Diable pour tromper l'humanité .
Le De Errore s'achève (chap. 28-29) par une exhortation adressée aux empe
reurs, les invitant à supprimer les religions païennes dans l’Empire romain .
Éditions. 5 R . Turcan (édit.), Firmicus Maternus, L 'Erreur des religions
païennes, CUF, Paris 1982.
Traductions. Anglaise : 6 C . A . Forbes, New York 1970. Française : Turcan
5 . Italienne : 7 A . Pastorino, Firenze 1956 .
FIRMICUSMATERNUS ET LA PHILOSOPHIE
Les œuvres de FirmicusMaternus, même si elles ne sont pas explicitement
des traités philosophiques, font appel à un grand nombre d 'idées philosophiques.
Ces idées relèvent principalement de ce qu 'on pourrait appeler un “ syncrétisme
stoïco -platonicien ” . Elles sont empruntées aux sources avouées ou tacites de
l'auteur: Cicéron, divers écrits “hermétiques" et Porphyre .
(1) Trois premiers principes métaphysiques ou physiques sont enseignés:
(i) un Dieu – un être inconnaissable et éternel défini comme substance, puissance
et activité – qui produit le monde, les corps célestes et l'homme; (ii) une Pensée
- un être éternel et igné défini commepuissance et activité – qui introduit dans le
cosmos la vie et la nécessité ; (iii) un Esprit qui produit et maintient le monde, les
corps célestes et l'homme. Parmi ces principes, la Pensée est moins nettement
distinguée de Dieu que ne l'est l'Esprit.
(2 ) Firmicus Maternus suppose entre Dieu et l'homme une relation causale ,
conçue comme un rapport entre macrocosme et microcosme, impliquant la
médiation des corps célestes. Dans cette perspective, les corps célestes, notam
F13 FIRMUS CASTRICIUS 425
ment le soleil, sont décrits commesoutenus par la pensée divine et comme étant
eux-mêmes pensée(s) et dispensateurs des pensées humaines.
( 3 ) L 'âme humaine est conçue comme transcendante, immortelle et éthérée.
Dans le processus cyclique qui sous-tend toute existence humaine, elle descend
vers la terre en passant à travers les corps célestes et en particulier le soleil. Ce
faisant, elle devient sujette aux vices. Elle remonte ensuite au ciel en passant à
travers les corps célestes et en particulier la lune, où elle se débarrasse de ces
mêmes vices.
STEPHEN GERSH .
13 FIRMUS CASTRICIUS RE (Castricius) 8 M III
Porphyre rapporte qu'à la fin de sa vie, Plotin se retira sur des terres,
« qu'avaient possédées Castricius, appelé Firmus; ce dernier, des hommes de
notre temps le plus cultivé (ploxaráratoc), vénérait Plotin , secondait Amélius
en toutes choses tel un bon serviteur et à moi-même Porphyre demeura attaché
en toutes choses comme à un véritable frère » (Porphyre, Vita Plotini 7 , 24 -28).
Castricius possédait alors des propriétés situées près de Minturnes; c'est de là
qu' était envoyé à Plotin , qui s' était retiré en Campanie , ce qui lui était nécessaire
(Vita Plot. 2 , 20 -23).
Parmi les disciples de Plotin , Castricius n ' était pas un disciple de stricte
observance. Il appartenait à un groupe qui refusait de se désintéresser des
affaires publiques, et c'est peut- être pour cela que, à la mort de Plotin , il se trou
vait à Rome (Vita Plot. 2 , 33). Par ailleurs , Castricius, de même que plusieurs
autres membres de l'École, avait renoncé au végétarisme. Il devait le trouver
injustifiable en théorie et inconciliable avec le respect du culte établi, ainsi
qu 'avec les exigences de la vie publique. Il semble même qu 'il donna des confé
rences publiques pour expliquer son attitude (Porphyre, De abstinentia I 3).
C 'est pour ramener Castricius à toute la rigueur de l'ascétisme que Porphyre
composa le traité Deabstinentia (I 1; II 1 ; III 1 ; IV 1).
Il est possible que ce soit ce Castricius qui a composé un commentaire sur le
Parménide de Platon attesté par Damascius (Vita Isidori, chez Photius, Bibl.,
cod. 242, fr. 244, p. 201, 1 Zintzen
" zon ).
).
Florus semble ensuite s'être retiré en Grèce, ou du moins y avoir séjourné très
régulièrement: dans les propos de Table , Plutarque, qui le classe au nombre des
tempéraments philosophiques (piógopou púoes, 734 d ), le met en scène à
plusieurs reprises (I 9 ; III 3 -5 ; V 7 et 10 ; VII 1, 2, 4 , 6 ; VIII 1 , 2 et 10), le plus
souvent dans sa résidence des Thermopyles, où il s'entourait d'hommes de
lettres et de philosophes; la présence chez lui d 'Autoboulos (2 + A 511), fils de
Plutarque, et de Favorinus (MF 10 ) implique qu 'il résidait en Grèce vers 110 ;
voir C . P . Jones, Plutarch and Rome, Oxford 1971, p . 48 -49. On rencontre égale
ment dans son entourage un stoïcien athénien , Thémistoclès. Lui-même ne paraît
s ' être attaché à aucune école précise, même si on le trouve à l'occasion plongé
dans la lecture d'Aristote (734 d). C 'est certainement son intervention qui valut
leur qualité de citoyens romains à Plutarque et à Euphratès de Tyr (» - E 132) .
Peut- être est-il identique au sénateur Florus qui aurait envisagé, selon Épictète I
2 , 12 -15 , de jouer son rôle dans un spectacle donné par Néron , de peur de s'ex
poser à sa colère: voir F . Millar, « Epictetus and the imperial court» , JRS 55,
1965 , p . 141. Il avait en tout cas atteint l'âge adulte avant la fin du règne de
Néron, car il fut l'un des officiers d 'Othon à la bataille de Bédriac (Plutarque,
Othon 14 , 2).
BERNADETTE PUECH .
17 FORTUNATIANUS (QovprouvaTLavóc) RE 4 PLREI:1 MIV
Ami et correspondant de Libanius, haut fonctionnaire sous les empereurs
Constance II, Julien , Jovien et Valens . Il était païen et apparemment originaire
d'Antioche . Libanius le présente comme philosophe (Lettre 644, 3 ; 294 , 9) et
comme poète (Lettre 1373 ; 1425, 2 ). Il le dépeintaussi comme « un homme qui
vivait dans les livres » (Discours XIV 9). Il est le dédicataire des lettres 565
(avant que Libanius quitte Contantinople pour s'installer à Antioche en 354 ),
644, 650 , 661, 1144, 1157, 1262, 1373, 1425 , 1436 , 1515. Il est encore men
tionné dans les lettres 364, 4 ; 716 , 1 et 694, 9 .
Cf. O . Seeck, art. « Fortunatianus» 4,RE VII 1, 1910 , col. 44 ; Id ., Die Briefe
des Libanius, Leipzig 1906, p. 159- 160 (Fortunatianus I) ; A . Lippold , art.
« Fortunatianus» 1, KP II, 1967, col.600 .
RICHARD GOULET.
18 FRONTON RE 8 MI
« Stoïcien », mentionné par Martial, Epigr. XIV (Apophoreta) 106 : « On te
donne cette aiguière rouge à l'anse cintrée. I Le stoïcien Fronton s'en servait
pour prendre de l'eau fraîche» (trad . Izaac). « Les Apophoreta étaient joints
comme des étiquettes à des objets divers tirés au sort entre les invités à la table
du maître du logis , qui, dans les grandes occasions, instituait une vraie loterie .
C 'était là un genre de réjouissances qui pouvait appartenir à tous lesmoments de
l'année,mais qui était particulièrement propre aux Saturnales, dont il ne se sépa
rait pour ainsi dire pas. (...) Les livres XIII-XIV (...) furent publiés aux Satur
nales de 84 ou 85 » (Izaac, tome II 2 , p. 193).
428 FRONTON F18
Il faut signaler que le père de Martial s'appelait < Valerius (RE 191]> Fronton (V 34) et
que l'Epigr. I 55 évoque une gloire éclatante de l'armée et du barreau du nom de Marcus
Fronton [RE 9 ], qui se plaisait à vivre sur son petit domaine, loin des devoirs de société
qu'impose la ville. Mais toute identification serait gratuite.
RICHARD GOULET.
19 FRONTON (M . CORNELIUS -) RE Cornelius 157 PIR C 1364 100 - ca 167
Rhéteur d 'origine africaine, né à Cirta (Constantine) en Numidie, ayant
exercé principalement à Rome, où il fut le maître de Lucius Verus et de Marc
Aurèle, jusqu 'à ce que ce dernier rejette la rhétorique au profit de la philosophie
(vers 147). Une grande partie de sa correspondance a été retrouvée dans des
palimpsestes deMilan et du Vatican .Loin d'être philosophe, Fronton reléguait la
philosophie à un rôle fort subalterne par rapport à la rhétorique. Il fut l'élève du
philosophe Athénodote (HA 499). Il fut consul suffect en 143 sous Antonin le
Pieux. Au momentde partir exercer son proconsulat en Asie (charge qu 'il ne put
exercer pour des raisons de santé), il écrivit à d'anciens amis d 'Alexandrie de
venir le rejoindre à Athènes (ad Antoninum Pium 8), ce qui suggère qu 'il avait
sans doute effectué un voyage d'étude à Alexandrie dans sa jeunesse. Il eut à
Rome de nombreux disciples, dont C . Aufidius Victorinus (Script. Hist. Aug.,
Marc. Anton. III 8), qui devint son gendre, et sa maison était le lieu de conver
sations savantes auxquelles assista le jeune Aulu -Gelle (Nuits attiques XIX 8, 1),
parfois en compagnie de Favorinus ou d'autres savants (II 26 ; XIII 28 ; XIX 10).
Stemma de la famille de Fronton.
Titus
Il ne faut pas confondre Cornelius Fronton avec le rhéteur Fronton d'Émèse (absent de la
RE), qui, selon la Souda (s.v. “ Fronton ” , 0735 ), vécut sous l'empereur Sévère (193-211) à
Rome et fut le rival des rhéteurs Philostrate l'Ancien et Apsinès de Gadara à Athènes. Cet
homonyme de la fin du 11° siècle et du début du lire siècle mourut à Athènes à l'âge de 60 ans.
Cet auteur prolifique eut comme héritier le critique Longin, qui était le fils de sa seur Fron
tonis. Voir 1 K . Gerth , art. « Zweite Sophistik » , RESuppl. VIII, 1956 , col. 752, nº 104 ; 2 L .
Brisson et M . Patillon , « Longinus Platonicus Philosophus et Philologus. I. Longinus Philo
sophus » , ANRW II 37 , 7 , 1994, p . 5217 et fr. 1 b , p. 5231-5232. Cornelius Fronton était d 'ori
gine africaine et non syrienne et ne vécut jamais, semble-t-il, en Orient, n 'ayant pu, pour des
raisons de santé, assumer le proconsulat en Asie. Ilmourut d'ailleurs vers 167.
Éditions. 3 Michael P. J. Van den Hout (édit.), M . Cornelii Frontonis Epistu
lae, Leiden 1954 ; 4 Id . (édit.), Fronto, Epistulae, schedis tam editis quam inedi
tis Edm . Hauleri usus, iterum ed. M . P.J. Van d . H ., coll. BT, Leipzig 1988 ,
XCVI-296 p .
F19 FRONTON (M . CORNELIUS - ) 429
Traductions. Anglaise: 5 C . R . Haines ( édit.), The Correspondence of Mar
cus Cornelius Fronto with Marcus Aurelius Antoninus, Lucius Verus, Antoninus
Pius, and Various friends, coll. LCL 112 -113, London /Cambridge (Mass.)
( 1919 ), “ revised and reprinted ” 1982, 2 vol. ; bibliographie , p . XLIV -LII ; ita
lienne : 6 Frontone. Opere, trad . F . Portalupi, coll. « Classici latini» 29, Torino
1974, 544 p . 7 pl. 2 indices; espagnole : 7 A . Palacios Martín , Frontón, Epistola
rio , introd., trad . y notas, coll. « Biblioteca clásica Gredos » 161, Madrid 1992,
422 p . index.
Bibliographie. 8 P . V . Cova, « Marco Cornelio Frontone» , ANRW II 34, 2 ,
1994, p . 873-918 ; 9 Id ., « Marco Cornelio Frontone. Rassegna bibliografica
1989-1995» , BStudLat 27, 1997, p. 591-618.
Lexique. 10 A . Pennacini, Lessico del De orationibus e del De eloquentia di
M . C. Frontone con rilevazioni statistiche, coll. « Alpha-Omega , Reihe A :
Lexika, Indizes, Konkordanzen zur klass . Philol.» 32, Hildesheim 1976 , XI- 390
p . ; 11 R . Fontanella , M . Olivetti et M . Ramella Votta ( édit.), Index verborum mit
statistischen Aufstellungen zu De nepote amisso, De feriis Alsiensibus, Arion,
Laudes fumi et pulveris, Laudes neglegentiae von M . C . Fronto , coll. « Alpha
Omega Reihe A , Lexika, Indizes, Konkordanzen zur klass . Philol.» 58 , Hil
desheim 1981, XI-377 p . Voir aussi 12 M . Mattea, « Statistical researches in the
verbum lexical field on (lire “ of” ? ) the Frontonian rhetorical works, De oratio
nibus and De eloquentia » , RELO 3 , 1975, p . 35 -55.
Études d 'orientation . 13 J. Brzoska, art. « Cornelius... Fronto (M .) » 157,
RE IV 1 , 1900 , col. 1312-1340 ; 14 E . Champlin , Fronto and Antonine Rome,
Cambridge (Mass.) 1980, XII-185 p . ; 15 M . A . Attilio , « Ricerche su Frontone » ,
MAL, Serie IX , 4, 4, Roma 1994 , p. 240-312.
Chronologie. 16 E . Champlin , « The Chronology of Fronto » , JRS 64, 1974 ,
p . 136 - 159, situe la mort de Fronton vers 167. Voir cependant 17 M . L . Astarita,
« Questioni di cronologia frontoniana » , Koinonia 2 , 1978 , p . 7 -42 , selon laquelle
Fronton a dû vivre jusqu'en 175 au moins. Voir dans le même sens : 18 M . C .
Cristofori, « L 'Oratio di Frontone contro i cristiani e la persecuzione di Marco
Aurelio » , RSCI 32, 1978 , p . 130- 139, qui considère que l'Oratio de Fronton
contre les chrétiens semble avoir comporté le motif de la recherche d 'office des
chrétiens, qui ne fut appliquée qu'entre 175 et 177 par Marc-Aurèle. 19 J. E. G .
Whitehorne, « Ad amicos I 5 and 6 and the date of Fronto 's death », dans C .
Deroux C . ( édit.), Studies in Latin literature and Roman history, coll. « Lato
mus» 164, Bruxelles 1979, t. I, p. 475-482.
Sur Fronton et Marc- Aurèle . Un document important relatif à la “ conver
sion” de Marc-Aurèle à la philosophie est la lettre à Fronton, dans laquelle le
jeune César marque sa préférence pour la lecture d '" Ariston ” (Ariston de Chios
( A 397 ] ?), plutôt que pour les exercices rhétoriques que lui impose son maître
(Ad M . Caes. IV 13). 20 H . Gärtner, « Ein Kronprinz und sein Lehrer. Marc
Aurel in seiner Korrespondenz mit Fronto » , dans P. Neukam (édit.), Struktur
und Gehalt, coll. « Dialog Schule -Wissenschaft, Klass. Sprachen & Lit.» 17 ,
München 1983, p . 25 -49 ; 21 F . Della Corte , « Un precettore diMarco Aurelio ,
430 FRONTON (M . CORNELIUS -) F19
Frontone » , C & S 95 , 1985, p . 68-74 . Sur la “ lettre de conversion” de Marc
Aurèle, voir 22 H . Görgemanns, « Der Bekehrungsbrief Marc Aurels, RhM 134 ,
1991, p . 96 - 109 ; 23 P . Hadot, La Citadelle intérieure . Introduction aux Pensées
de Marc Aurèle, Paris 1992, passim , notamment sur la lettre à Fronton , p. 24-27 .
Sur le discours contre les Chrétiens mentionné par Minucius Felix , Octa
vius 9, 6 -7 et 31, 2 (et peut-être utilisé ailleurs dans l'ouvrage ), voir 24 P. Frassi
netti,« L 'orazione di Frontone contro i Cristiani» ,GIF 3, 1949, p. 238 sq.; 25 B .
Balwin, « Fronto on the Christians » , ICS 15, 1990 , p . 177- 181; 26 C . P. H .
Bammel, « Die erste lateinische Rede gegen die Christen » , ZKG 104 , 1993 ,
p . 311.
Sur la “ philosophie” de Fronton , voir 27 P . Grimal, « La philosophie de M .
Cornelius Fronton » , dans Au miroir de la culture antique. Mélanges R .
Marache, Rennes 1992, p . 251- 257 ; 28 P. V . Cova, « La filostorghia di Fron
tone » , dans Id ., Lo stoico imperfetto . Un 'immagine minore dell'uomo nella lette
ratura latina del principato , coll. « Studi e testi dell'antichità » 10 ,Napoli 1978 ,
p. 114 -131. Sur l'influence rhétorique durable de Fronton surMarc- Aurèle phi
losophe, voir 29 M . Alexandre, « Le travail de la sentence chez Marc Aurèle.
Philosophie et rhétorique », dans Formes brèves. De la yvóun à la pointe, mé
tamorphoses de la sententia = La Licorne 3, 1979, p. 125-158 ; 30 A . Michel,
« Rhétorique et philosophie au second siècle après J.-C . », ANRW II 34 , 1 , Berlin
1993, p . 3-78; 31 J.-M . André ,« Les Écoles philosophiques aux deux premiers
siècles de l'Empire » , ANRW II 36 , 1, 1987, p. 37-39. Parmi les textes qui dévoi
lent les réserves que Fronton manifestait à l'égard de la philosophie , on peut
citer la lettre (écrite en grec) à Appius Apollonides (Ad amicos I 2 ), dans laquelle
il recommande Sulpicius Cornelianus parce qu 'il est un bon rhéteur, un ami et
qu 'il n 'est pas philosophe... Il sait en revanche apprécier les qualités de philo
sophe de Julius Aquilinus (» A 296 ), lorsqu 'il le recommande à Aegrilius Pla
rianus (Ad amicos I 4). A Marc -Aurèle quimarquait finalement son mépris pour
la rhétorique, Fronton adresse une longue lettre (De Eloquentia I) où il dénonce
comme tout aussi futiles les exercices dialectiques de Diodore (MD 124) ou
d' Alexinus (P- A 125) et montre que l'éloquence, de toutes façons indispensable
à l'empereur, peut au moins être une servante de la philosophie ( comitem philo
sophiae), comme elle l'a été pour Platon, Xénophon , Antisthène, Chrysippe.
Iconographie. Marc -Aurèle aurait demandé au sénat d' élever une statue en
l'honneur de Fronton (Script. Hist. Aug., Marc. Anton. II 5). 32 J.- C. Balty ,« Un
nouveau portrait de rhéteur aux Musées royaux d 'Art et d'Histoire» , BMAH 55,
1984 , p. 53-62, croit reconnaître un portrait de M . Cornelius Fronto dans un
fragment d 'un buste de marbre blanc (inv. A 3917) remontant au milieu de
l'époque antonine.
RICHARD GOULET.
20 FRONTON II/III ?
Le nom de Fronton , pensionnaire du Musée d'Alexandrie, apparaît sur une
base de statue trouvée en Lydie (TAM V 498,région de Maionia ). Il paraît être
F23 FULGENTIUS 431
celui du personnage représenté par la statue, qui doit avoir été élevée, comme
l'ont supposé J. Keil et A . von Premerstein (Bericht über eine zweite Reise in
Lydien II,Wien 1911, p. 107 - 108 n° 210), dans une demeure privée, car l'ortho
graphe peu conventionnelle, l'emploi du nominatif pour le nom du personnage
honoré, l'absence de patronyme et d' ethnique se démarquent des usages offi
ciels. Selon toute vraisemblance, Fronton était donc un proche, parent ou ami, du
propriétaire de ce domaine de Méonie . Aussi est-il très douteux (malgré P .
Lemerle , « Inscriptions latines et grecques de Philippes » , BCH 59, 1935, p. 134)
qu' il soit identique au rhéteur Fronton d'Émèse connu par la Souda (Q 735) ou
au philosophe Domitius Fronton d’Hippone (» F 21).
[Il serait également imprudent d 'y reconnaître un portrait du rhéteur M . Cornelius Fronton
( F 19), mais on ne peut toutefois ignorer que le célèbre rhéteur d 'origine africaine avait fort
probablement étudié à Alexandrie avant de s'installer à Rome (ad Antoninum Pium 8), qu 'il
avait toute sa vie défendu à Rome les intérêts publics et privés des habitants de Cilicie (ibid .)
et que seule la maladie l'empêcha d 'aller exercer son proconsulat en Asie. Qu'un tel person
nage, maître de l'empereurMarc-Aurèle , ait pu être honoré à Alexandrie et en Lydie par une
statue portant son simple nom n 'est pas inimaginable . R . G .)
BERNADETTE PUECH .
21 FRONTON (DOMITIUS -)
Un philosophe stoïcien Domitius Fronton fut honoré d 'une statue par la ville
d'Hippone, à une date qu'il n 'est pas possible de préciser: BACTH 1954, p. 188
189.
L 'inscription est reproduite dans P . Grimal, La civilisation romaine, coll. « Les grandes
civilisations» 1, Paris 1960, entre les pages 184 et 185 (pl. 75).
BERNADETTE PUECH .
22 FUFFICIUS ( L . IUNIUS -) RESuppl. V :75 a
L 'inscription CIL V 2135, mentionnant un philosophe L . Iunius Fufficius
- dans lequel on a cherché à reconnaître le stoïcien Iunius Rusticus, ou son
parent Iunius Arulenus Rusticus, maître de Marc-Aurèle – est en réalité une
création du faussaire Ligorio : voir Ch. Hülsen , « Eine Ligorische Porträt
fälschung» ,MDAI(R ) 17, 1902, p. 317-321.
BERNADETTE PUECH.
23 FULGENTIUS (FABIUS PLANCIADES - ) RE 13 V -VI
Les problèmes historiques et littéraires soulevés par la vie et l'æuvre du
mythographe Fulgence sont considérables. Il est en particulier difficile d'établir
(1) l'identité de l'auteur, ( 2) l' étendue de ses euvres authentiques, (3) le lieu et
la date de son activité .
(1) On se demande encore s'il convient d 'identifier Fabius Planciades Fulgen
tius (RE 3), auquel on rapporte au moins trois ouvrages de caractère mythogra
phique, avec Claudius Gordianus Fulgentius qui écrivit des ouvrages de théolo
gie et devint peut-être évêque de Ruspe (RE 2). Pour un examen de la bibliogra
phie et des arguments contraires à l'identification , voir 1 G . Pennisi, Fulgenzio e
432 FULGENTIUS F 23
la Expositio Sermonum Antiquorum , Firenze 1963, p. 15- 19 ; pour un examen de
la bibliographie et des arguments favorables à l'identification, voir 2 P . Langlois ,
« Les æuvres de Fulgence le Mythographe et le problème des deux Fulgence » ,
JAC 7, 1964, p . 94- 105. La suite de la présente notice considère que la nécessité
d'identifier les deux personnages n 'est pas encore établie.
(2 ) Deux ouvrages : Mitologiae et Expositio Virgilianae Continentiae sont
rapportés uniquement au nom de Fabius Planciades Fulgentius dans la tradition
manuscrite. Un troisième ouvrage, intitulé Expositio Sermonum Antiquorum , est
associé ou bien à Fabius Planciades Fulgentius ou bien à un “ Fulgentius Episco
pus” . Dans certains manuscrits des XII° ou XIIe siècles, un ouvrage intitulé De
Aetatibus mundi et hominis est rattaché à Claudius Gordianus Fulgentius. Dans
un manuscrit du XIIe siècle , un écrit intitulé Super Thebaiden est associé à
" Fulgentius Episcopus”. Puisque l'Expos. Virg. Cont. se réfère apparemment aux
Mitol. en plusieurs passages, il est certain que ces deux ouvrages sontdu même
auteur. Ces écrits peuvent être rapprochés également par des caractéristiques
stylistiques remarquables qui leur sont communes: l'association de l'allégorie et
de l' étymologie , le recours à des citations impressionnantes mais inexactes et un
ensemble d 'expressions et de tournures caractéristiques .
( 3) Un terminus post quem pour l'æuvre de Fulgence est fourni par les
sources les plus récentes que l'on peut identifier de façon certaine à l' arrière
plan de son ouvrage : Martianus Capella et Orose. Il serait donc postérieur aux
années 430. L 'auteur était vraisemblablement originaire d 'Afrique du Nord :
c 'est ce qu'on peut déduire du fait qu'il présente le libyen comme sa langue
native, qu 'il connaît en détail la géographie de l'Égypte (Alexandrie, Méroé,
etc .), et qu 'il emploie un latin très coloré caractéristique de cette région. Qu'il fut
chrétien est également facile à conclure de sa connaissance manifeste de la
Bible, du fait qu 'il a dédié son commentaire de Virgile à un " lévite ”, c'est-à -dire
à un diacre, et de son recours à Tertullien comme autorité pour expliquer des
mots latins obscurs. En revanche un terminus post quem plus tardif (532-533) ne
peut être accepté que si l'on identifie le mythographe et l'évêque.
Éditions. Les trois æuvres qui peuvent être attribuées de façon certaine à
Fabius Planciades Fulgentius peuvent être rapidement résumées. Les Mitologiae
consistent en trois livres comprenant chacun un prologue et une interprétation
allégorique de différents mythes classiques. Le prologue au livre I définit le
décor de l'ouvrage : l'auteurbénéficie d'une vision de la muse Calliope dans un
endroit ombragé. Il discute avec elle , déclarant qu 'il souhaite exposer la véritable
signification des mythes dans le cadre d 'une sorte de jeu poétique. Calliope
répond qu'une telle entreprise nécessiterait non seulement sa présence , mais
celle de Philosophia, d ’Urania et de Satira . Fulgence rejette la troisième comme
étant inappropriée à son projet. Le prologue introduit alors un changement de
décor : l'auteur est maintenant décrit comme bénéficiant d 'une vision de la muse
Calliope alors qu 'il reste couché. Cette fois , elle explique qu 'elle va parler de la
nature des dieux, dans la mesure où l'on rencontre sur ce point beaucoup d 'in
compréhension, liée à la superstition . A la suite du prologue vient la série d 'in
F 23 FULGENTIUS 433
terprétation des mythes, chaque mythe étant d' abord exposé, puis interprété de
façon allégorique.
L' Expositio Virgilianae Continentiae commence aussi par une description de
l'auteur recevant une vision. Cette fois, c'est le poète Virgile qui apparaît et pro
pose d 'expliquer les secreta physicae, c'est-à-dire la signification allégorique de
l' Enéide conforme à la Physique. Virgile explique comment les livres I -XII
décrivent le status humanae vitae: le livre I raconte le naufrage qui signifie allé
goriquement la naissance humaine ; les livres II- III les errances qui représentent
l'enfance ; le livre IV la concupiscence qui correspond à l'adolescence ; le livre
V les jeux qui représentent la maturité et la responsabilité, tandis que le livre VI
raconte la descente aux Enfers qui signifie allégoriquement la maturité et l'édu
cation. Les livres VII-XII sont interprétés de façon plus sommaire: chaque fois
le récit est censé représenter une nouvelle étape dans la maturation psycholo
gique.
L ' Expositio Sermonum Antiquorum commence sans aucune évocation du
décor. L 'auteur affirme simplement qu 'il donne satisfaction à une demande qui
lui a été faite de fournir un traité sur des mots obscurs. Suit l'explication de 62
termes dans laquelle l'auteurmet à contribution des citations d 'auteurs latins.
Édition . 3 R . Helm , Fabii Planciades Fulgentii Opera , Leipzig 1898 .
Traduction anglaise : 4 L .G . Whitbread , Fulgentius the Mythographer,
Colombus (Ohio ) 1971.
Cf. 5 0 . Skutsch, art. « Fulgentius » 3 (der Grammatiker und Mythograph ],
RE VII 1, 1910, col. 215-227 ; 6 P . Courcelle, Les Lettres grecques en Occident,
p. 206 -209.
FULGENCE ET LA PHILOSOPHIE
Les vues philosophiques de Fulgence sont uniquement celles qui apparaissent
à l'occasion dans le cadre de ses interprétations allégoriques . Ces interprétations
peuvent être classées sous quatre chapitres : (i) métaphysiques, par exemple
l'explication de Saturne comme sacrum nun (nus = voũs), ou celle de Promé
thée comme pronianteu , quod nos latine praevidentiam dei dicimus; (ii) physi
ques - qui regroupe peut-être le plus grand nombre d 'interprétations de Ful
gence -, par exemple l' explication de Jupiter, Junon , Neptune et Pluton comme
étant les éléments du monde physique , feu, air, eau et terre (car Junon = Héra /
aer, Neptune = Poseidon/poiein idean, c' est- à-dire faire des formes dans l'eau) ;
(iii) astronomiques – égalementune catégorie d'interprétations fort employée par
Fulgence -, par exemple l'explication d'Apollon comme étant le soleil (Apollon/
apollusthai, c 'est-à -dire le dessèchement de la végétation) ; (iv)morales, par
exemple l'explication d 'Hercule et d 'Antée comme étantrespectivement la vertu
et la concupiscence. L 'association de l' étymologie et de l'allégorie est relative
ment fréquente chez les auteurs latins de la fin de l' Antiquité commeMacrobe et
Martianus Capella . L ' originalité de Fulgence réside dans le caractère condensé
de son exposé et dans l'élaboration d 'une allégorie systématique de l' Énéide.
STEPHEN GERSH.
434 FULVIUSNOBILIOR F 24
24 FULVIUS NOBILIOR (M . - ) REF 91 DIIa
M . Fulvius Nobilior fut édile curule en 196a (Tite-Live XXXIII 42, 8 ), préteur
en 193a (XXXIV 54, 2), propréteur d 'Espagne et obtint ensuite les honneurs de
l’Ovatio . Consul en 189a avec Cn .Manlius Vulso , il mène la guerre contre les
Étoliens et remporte sur la ligue étolienne la victoire d 'Ambracie à laquelle
Ennius (BE 25 ) consacra un poème. A son retour à Rome, en 186 , il célèbre un
triomphe dont Tite -Live souligne l'importance (XXXIX 22, 1- 2). Il donne alors
des jeux votifs auxquels participent des athlètes et des artifices (sans doute des
technites dionysiaques, selon 1 J. Ferrary , Philhellénisme et impérialisme, p . 519
n . 15). Censeur en 180 - 179, il fait alors construire la basilique Aemilia et Fulvia .
Outre les jeux de 186 , l'intérêt pour la Grèce et la culture grecque que mani
feste Fulvius Nobilior, se révèle d' abord dans la protection accordée à Ennius. Il
apparaît surtout dans le temple d 'Hercules Musarum qui fut construit avec le
butin pris aux Étoliens et qu 'il consacra comme censeur en 180 -179. Par là, les
Muses figurent à Rome sous leur nom grec, comme c'est aussi le cas dans les
Annales d' Ennius, car les premiers écrivains romains les nommaient Camènes.
En outre 2 P. Boyancé (« Fulvius Nobilior et le dieu ineffable» , RPh 1955,
p . 172 - 192, repris dans Études sur la religion romaine, Rome 1972, p. 227-252)
a rappelé l'importance des Muses chez les pythagoriciens, car elles sont les
déesses de l'accord musical et de la concorde en politique. L 'association des
Muses avec Hercule semble ancienne dans le pythagorisme; peut-être mêmeest
elle apparue à Crotone et dans le Sud de l'Italie . Ainsi s'affirme l'influence du
pythagorisme sur Fulvius Nobilior. Elle semble confirmée par d 'autres indices :
selon Macrobe (Saturnales I 2, 16 ) Fulvius Nobilior était l'auteur d 'un ouvrage
sur les Fastes, qu' il avait déposé dans le temple d 'Hercules Musarum . Il y avait
insisté sur l'astronomie et, surtout, sur le rôle de Numa dans la création du
calendrier, et ces explications montrent encore l'influence du pythagorisme
(Boyancé 2). Enfin , un fragment de J. Lydus (De ostentis 16 ) insiste sur la
présence d 'un « dieu ineffable, père de toutes choses» et la possibilité d 'accéder
à sa connaissance par l'étude des astres; cette conception semble également
proche du pythagorisme et du Timée de Platon.
Cf. 3 [F. Münzer), art. « M . Fulvius Nobilior» 91, RE VII 1, 1910, col. 265
268 ; 4 K . Rosen , « Die falschen Numabücher. Politik , Religion und Literatur in
Rom 181 v. Chr.» , Chiron 15, 1985, p. 65 -90 ; 5 M . T. MarabiniMoevs, « Le
Muse di Ambracia » , BA 66 .12, 1981, p. 1-58 ["'Il est vraisemblable que Cerdo
nous a laissé, sur un vase arétin de 30 av. J.-C . env., la représentation du groupe
de quatre Muses accompagnées d 'Héraclès que M . Fulvius Nobilior avait
rapporté d'Ambracie et qu 'il avait placé au temple d 'Hercule devenu aedes
Herculis Musarum , près du Circus Flaminius. Ce groupe, euvre du cercle de
Lysippe, était sans doute à l'origine un don d'un acteur tragique en commé
moration d'une victoire.” (rés. APh )] ; 6 M . Martina, « Aedes Herculis Musa
rum » , DArch N .S. 3, 1981, p. 49 -68; 7 L . Richardson , « Hercules Musarum and
the Porticus Philippi in Rome» , AJA 81, 1977, p. 355- 361.
MICHÈLE DUCOS.
F 26 FURIUS PHILUS 435
tés philosophiques ne nous ontpas été transmis aussi fidèlement que ses traités
médicaux et la majeure partie d ' entre eux sont aujourd 'hui irrémédiablement
perdus. Les faits biographiques retenus ici sont fondés pour l'essentiel sur le
témoignage personnel de Galien auquel on confrontera, dans la mesure du pos
sible , celui de la tradition byzantine et arabe. Il sera fait référence pour l'œuvre
de Galien à l'édition de Ch . G . Kühn , Leipzig 1821- 1833 (réimpr. Hildesheim
1965) , 21 volumes (= K .), pour certains traités à celle des Scripta Minora,
Leipzig 1884 -1893 , trois tomes ( = SM ), ou encore , quand elles existent, aux édi
tions récentes du Corpus Medicorum Graecorum publiées à Berlin (= CMG ).
Date de naissance . Plusieurs dates ont été soutenues pour la naissance de
Galien. Les indications fournies sur ce point par lemédecin de Pergame dans ses
propres æuvres sont en effet contradictoires et autorisent aussi bien la date de
129 que celle de 130 . La solution dépend en fait de la date du premier séjour
romain de Galien. J. Ilberg, le premier, après avoir noté que 3 E . Klebs dans la
Prosopographia Imperii Romani saec. I-II-III, Berlin 1897, pars I, p. 374,
n° 701, hésitait sur la date de naissance exacte de Galien (« Natus est anno fere
128/129 » ), démontra dans 4 « Aus Galens Praxis. Ein Kulturbild aus der
römischen Kaiserzeit» , JKPh 15 , 1905 (repris dans H . Flashar [édit.), Antike
Medizin , Darmstadt 1971, p. 361-416 ), p . 277 n. 1, que la date de 128 était
impossible à soutenir et que seule celle de 129 méritait d' être retenue. Dans un
passage du Sur ses propres livres 2, Galien déclare en effet être revenu de Rome
dans sa patrie (au terme de son premier séjour dans la capitale ) à l'âge de 37 ans
révolus ('Enavñadov uÈv oův Šx 'Póuns eic tnv natpida , nennpwuévwV
UOL TÕU Èx yevetñc étāv ' xai x', t.XIX , p . 16 , 6 - 8 K . = SM II, p . 97, 6 -8 ). Il
nous apprend en outre dans le Pronostic 9 (t. XIV , p. 649, 12 K . = p . 118 éd . V .
Nutton (CMG V 8 , 1]) que, peu après son départ de Rome, Lucius Verus, alors
associé à Marc-Aurèle à la tête de l'empire , et au retour de sa campagne contre
les Parthes, fit son entrée dans la ville . Ces événements se situent pour Ilberg en
166 (cf. Historia Augusta, Vita Marci 12, 13) et, pour 5 V . Nutton , « The Chro
nology ofGalen 's Early Career » , CQ 23, 1973 , p . 158, le retour de L . Verus à
Rome n 'a pu de toute façon intervenir après la fin août 166 , puisque l'on sait que
les deux empereurs ont célébré leur triomphe contre les Parthes en octobre de
cette même année. Ilberg conclut donc du témoignage de Galien que le médecin
de Pergame parvint au terme de sa trente -septième année au cours de l'été 166 .
Le premier séjour de Galien à Rome ayant duré trois années à compter de son
premier succès public (la cure réussie du philosophe Eudème ( E 92), qui eut
lieu vraisemblablement au cours de l'hiver 162/63), sa date de naissance se
situerait donc en 129. Mais 6 J. Walsh , « Date of Galen 's Birth » , AnnMedHist
( n .s.] 1, 1929, p . 378-382, en s' appuyant sur un passage peu sûrdu Commentaire
à Hippocrate sur les articulations I prol. (t. XVIII A , p. 347, 14 -16 K .), où
Galien fait allusion à sa première arrivée à Rome à l'âge de 32 ans (uetà to
tplaxootov xai dettepov Étoc év ‘Póun OLÉTplPa ,mais les mots xai deúte
pov, omis en grec, sont restitués sur la seule foi de la traduction latine), en
conclut qu'il convient de fixer la date de naissance de Galien en 130. Cette
442 GALIEN DE PERGAME G3
seconde hypothèse oblige cependantWalsh à ne pas tenir compte du témoignage
de Galien quand il nous dit avoir rejoint sa patrie à l'âge de 37 ans révolus
(t. XIX , p. 16 , 6 -8 K . = SM II, p . 97, 6 -8) et à l'imputer aux erreurs de mémoire
d 'un médecin déjà vieillissant. La date de 129, corroborée par le témoignage du
Pronostic et du Sur ses propres livres, est cependant la plus fréquemment rete
nue et c'est à partir de celle -ci que nous établirons désormais toutes les autres
dates.
Mois de naissance. Les hypothèses relatives au mois de naissance de Galien
reposent sur une allusion du Sur lesmédicaments composés selon les genres III 2
(t. XIII, p. 599, 10 - 14 K .). L 'auteurmentionne en effet à cet endroit son entrée
en charge à Pergame comme médecin des gladiateurs, peu après son retour
d'Alexandrie , alors qu'il venait juste d ' entrer dans sa vingt-neuvième année (TOŨ
yàp Évátov xai eixootoŰ ÉTouç nexóunv). Cette responsabilité lui fut confiée
par le grand -prêtre alors que celui-ci venait de prendre ses fonctions, événement
qui avait habituellement lieu à l'équinoxe d'automne. On en a déduit que Galien
était né fin août-début septembre (voir 7 W . A . Greenhill, dans Smith 's Dictio
nary of Greek and Roman Biography, London 1854, vol. II, p. 207-217, et
Nutton 5, p . 159, qui reprend les conclusions de Walsh 6 , p . 378 sq., en repous
sant les objections de 8 J. Ilberg, « Wann istGalenos geboren ?» , AGM 23, 1930 ,
p. 289-292).
Enfance à Pergame. Les écrits deGalien font assez rarement allusion à ses
toutes premières années passées dans sa patrie, Pergame. Ils font en revanche
une large place au portrait de ses parents. Le souvenir de sa mère, acariâtre et
irascible au point d 'être comparée à une nouvelle Xanthippe, n'est évoqué
qu'une seule fois (Du diagnostic et du traitement des passions de l'âme 8 : t. V ,
p. 40, 17 -41, 2 K . = p . 27-28 éd. W . de Boer (CMG V 4 , 1.1]).Le portrait de son
père, en revanche, beaucoup plus flatteur, reflète l'influence qu'eut sur son fils
cet homme décrit comme le moins irascible, le plus juste, le plus honnête et le
plus humain qui soit (t. V , p. 40, 15 -17 K . = p. 27 de Boer). Galien nementionne
nulle part le nom de ses parents, mais, si l'on en croit deux témoignages tardifs
(Souda, s. v. "Galenos” et Tzetzès, Chiliades XII 8 ), son père se serait nommé
Nicon . Sa formation était très solide, puisque Galien nous le décrit comme parti
culièrement exercé en géométrie , arithmétique, architecture , calcul, astronomie
et grammaire (t. V , p. 42, 4 -6 K . = p . 28 de Boer; Sur les bons et les mauvais
sucs des aliments 1 : t. VI, p. 755, 12-17 K . = p. 392, 21 sqq. Helmreich (CMG V
4 , 2 ]). Il joua manifestement un grand rôle dans l'éducation de son fils, « l'éle
vant au milieu de ces disciplines et de toutes les autres connaissances qui font
partie de l'éducation » (Sur l'ordre de ses propres livres 4 : t. XIX , p . 59, 5-7 K .
= SM II, p . 88, 9 - 12 ) .
Premières années de formation. Galien nous apprend que, lorsqu'il eut
atteint l'âge de quatorze ans, son père décida de le confier à différents maîtres
qui enseignaient la philosophie à Pergame. Sont cités un stoïcien élève de Philo
pator,un platonicien élève de Gaios (2 +G 2), un péripatéticien , élève d 'Aspasios
(> A 461), et un épicurien originaire d 'Athènes (Du diagnostic et du traitement
EN E ERGAME
G3 GALI D P 443
des passions de l'âme 8 : t. V , p . 41, 10 - 42, 2 K .= p . 28 de Boer). Galien ne
commença donc pas directement des études de médecine,mais reçut d 'abord une
formation philosophique. Il se souviendra de ces premières années, prolégo
mènes nécessaires à la formation du médecin accompli, lorsqu'il affirmera dans
le titre d’un de ses traités que « Le meilleur médecin est aussi philosophe» .
L 'idéal de Galien est d'ailleurs de pratiquer conjointement médecine et philo
sophie (principalement la logique), afin d 'être capable de mener à bien toutes les
démonstrationsnécessaires.
Différentes études ont été consacrées à l'influence marquante de la philoso
phie sur la pensée médicale de Galien ; voir en particulier 9 P .Moraux, « Galien
comme philosophe : la philosophie de la nature » , dans Nutton 26 (cité plus loin ),
p. 87 - 116 ; 10 P. L . Donini, « Motivi filosofici in Galeno », PP 35 , 1980 , p. 333
370 ; 11 Id ., « Galeno e la filosofia », ANRW II 36 , 5, p. 3484- 3504 , et 12 R . J.
Hankinson , « Galen 's Philosophical Eclecticism » , ANRW II 36 , 5, p. 3505-3522.
Cependant Galien apparaît tout d'abord grandement déçu par l'enseignement de
ses maîtres, dont il s'aperçoit bien vite qu '« ils se trouvent en désaccord entre
eux et que certaines de leurs théories contredisentmême les lois de la physique >>
(Sur ses propres livres 11: t. XIX , p. 40 K . = SM II, p. 116). Son père déjà
l'avait mis en garde contre les différentes écoles, en lui recommandant de n 'être
membre d 'aucune,mais de se montrer également critique à l'égard de toutes (Du
diagnostic et du traitement des passions de l'âme 8 : t. V , p . 42 K . = p. 29 de
Boer). C 'est finalement la pratique de la géométrie , de l'arithmétique et du cal
cul qui lui permit d'échapper au « scepticisme pyrrhonien » qui le guettait en se
consacrant aux démonstrations de type géométrique (Pronostic 9 : t. XIV , p .651
K . = p . 116 - 117 Nutton ). Deux ans plus tard , à l'âge de seize ans, il entreprend
conjointement des études de médecine et de philosophie (Sur l'ordre de ses
propres livres 4 : t. XIX , p. 59 K . = SM II, p. 88 ). Il a alors pourmaître Aischrion
( A 73 ), adepte de la secte des empiristes (De la faculté des médicaments
simples XI 24 : t. XII, p. 356 K .), Stratonicos, élève lui-même de Sabinus, parti
san d ’un hippocratismepur (Sur la bile noire 4 : t. V , p . 119 K . = p . 78 de Boer ),
et Satyros, disciple d'un certain Quintos (Procédures anatomiques I 1: t. II,
p . 217 , 13- 16 K . et I 2 : p. 224, 12 - 225, 10 K . = p. 3 et 11 éd. I.Garofalo (Napoli
1986 ); Sur l'ordre de ses propres livres 3 : t. XIX , p. 57 K . = SM II, p. 87).
L ' influence de Satyros devait être la plus décisive. A ces trois noms, on peut
peut-être ajouter celui d ' Aificianos (3DPha Suppl. I), que Galien mentionne à
trois reprises et toujours en même temps que Satyros (Commentaire aux Epidé
mies III I 40 : t. XVII A , p . 575 K . = p . 59 éd . E . Wenkebach (CMG V 10, 2 .1 ) ;
Sur l'ordre de ses propres livres 3 : t. XIX , p . 57-58 K . = SM II, p. 87 ; Commen
taire à l'Officine du médecin I : t. XVIII B , p. 654 K .). Sur ce personnage mysté
rieux , voir 13 P. Moraux , « Ein unbekannter Lehrer Galens » , ZPE 53, 1983 ,
p . 85 -88. Galien a vingt ans et se trouve encore à Pergame quand son père meurt
en 148/149 (Sur les bons et lesmauvais sucs des aliments 1 : t. VI, p . 755, 11-14
K . = p. 393, 12 Helmreich ). Désormais le choix de sesmaîtres ne doit plus rien à
son père. Désireux de puiser le savoir à sa source et de suivre l'enseignement des
444 GALIEN DE PERGAME G3
professeurs les plus réputés, il entreprend une longue série de voyages d' études
qui dureront près de dix ans.
Lesmaîtres de Galien .Galien se rend d 'abord à Smyrne en 149 pour suivre
les cours de Pélops (Sur ses propres livres 2 : t. XIX , p. 16 K . = SM II, p. 97 ),
qu'il considère comme son « second maître » après Satyros. Pélops enseignait à
la manière de Quintus, ayant été élève de Numisianus. Sur Quintus (mort vers
145 ) et Numisianus (mort vers 151), dont les doctrines ne furent connues de
Galien que par l'intermédiaire de leurs disciples, Satyros et Aificianos pour
Quintus, Pélops et Héracleianos pourNumisianus, voir 14 V . Nutton , « Numisia
nus and Galen », AGM 71, 1987, p. 235 -239, ainsi que 15 M . D . Grmek et D .
Gourévitch, « L 'école médicale de Quintus et de Numisianus» ,Mémoires du
centre Jean Palerne 8, 1988 , p. 43-60 , et desmêmes auteurs, 16 « Aux sources
de la doctrinemédicale de Galien : l'enseignement deMarinus, Quintus et Numi
sianus », ANRW II 37, 2 , p . 1491-1528. Après un séjour d'au moins deux ans à
Smyrne, Galien se rend à Corinthe, vers 151, dans l'intention de suivre l'ensei
gnement de Numisianus. On ne sait s 'il le trouva effectivement ou si Numisianus
était déjà reparti dans sa patrie à Alexandrie (Procédures anatomiques I 1 : t. II,
p. 217 K . = p. 3 Garofalo ). Bien que presque tous les biographes modernes de
Galien laissent entendre qu'il a connu personnellement Numisianus, rien dans les
sources ne permet de l'affirmer (cf. 17 J. Walsh , « Galen 's studies at the Alexan
drian school» , AnnMedHist n .s. 9 , 1927, p. 138). Et la majeure partie du séjour
de Galien à Alexandrie se situe en réalité après la mort de Numisianus. Sur
place, il assiste aux leçons du médecin méthodiste Julianus (Contre Julianus :
t. XVIII A , p . 246 -299 K . = p. 33-70 Wenkebach (CMG V 10 , 3); De la méthode
thérapeutique 17: t. X , p. 51-57 K .) qu 'il ne considéra cependant jamais comme
son maître. Galien réside alors chez le fils de Numisianus, Heracleianus
(Procédures anatomiques I 1 : t. II, p . 218 K . = p. 3-5 Garofalo ; Sur les médica
ments composés selon les lieux I 2 : t. XII, p . 177 K . ; Commentaire à la Nature
de l'homme II 6 : t. XV, p . 136 K . = p . 70 Mewaldt (CMG V 9, 1]), qui détient
jalousement les papiers de son père. Malgré tous ses efforts , Galien ne pourra
jamais avoir accès aux ouvrages anatomiques de Numisianus que son fils semble
avoir brûlés juste avant sa propre mort (Procédures anatomiques XIV 1: t. I,
p. 231, et t. II , p . 167 Simon (Leipzig 1906 ); p. 183 Duckworth (Cambridge
1962]). La date exacte de l'arrivée de Galien à Alexandrie n 'est pas connue (la
date traditionnelle de 152, défendue par 18 G . Sarton , Galen of Pergamum ,
Lawrence 1954, p . 18, a été avancée à 151 par Grmek et Gourévitch 15 , p. 50
52), mais se situe au plus tard à l'automne 153 ( 19 V . Nutton , « Galen and
Egypt» , dans J. Kollesch et D . Nickel (édit.], Galen und das hellenistische Erbe,
Stuttgart 1993, p . 12). On sait en revanche qu 'il quitta l'Égypte en 157 pour
rejoindre Pergame où il avait sans doute continué à entretenir de nombreux
contacts avec des membres influents.
Médecin des gladiateurs. Peu après son retour d 'Alexandrie, Galien est
nommémédecin des gladiateurs , à l'âge de vingt-huit ans (Sur les médicaments
composés selon les genres III 2 : t. XIII, p. 599, 10 - 14 K .). Sa surprise à l'an
G3 GALIEN DE PERGAME 445
nonce de cette nomination semble indiquer que d'habitude le poste était confié à
des médecins plus âgés et plus expérimentés. Cette période de la vie de Galien
pose cependant trois problèmes: ni la date d'entrée en charge de Galien comme
médecin des gladiateurs , ni la durée de son mandat, ni les raisons qui l'amene
rent à l'interrompre ne sont exactement connues. Le plus probable est que Galien
prit ses fonctions à l'automne 157 (Nutton 5 , p . 162- 163), sans attendre avril/mai
158, c'est-à-dire la veille des spectacles de gladiateurs qui chaque été avaient
lieu à Pergame (cette dernière opinion a été défendue par Ilberg 4 , p. 283). Nous
savons par ailleurs que Galien fut en charge de la santé des gladiateurs sous cinq
grands-prêtres (Sur les médicaments composés selon les genres III 2: t. XIII,
p . 600 K .) et que s'écoulèrent seulement septmois avant que le deuxième grand
prêtre succédât au premier. Il s'agit vraisemblablement là d 'un intervalle inhabi
tuel, dû peut-être au décès du premier grand -prêtre (voir 20 L . Robert, Les gla
diateurs dans l'Orient grec, Paris 1940, p. 256 sqq.; 283-285 ). Walsh 6 , p. 378 ,
en conclut cependant queGalien n 'occupa sa charge que pendant 35 mois (5 fois
septmois). De façon plus vraisemblable , Nutton 5, p. 163- 164, pense qu 'en rai
son de circonstances exceptionnelles, Galien fut amené à servir sous cinq grands
prêtres pendant quatre ans ( et non cing) de l'automne 157 à l'automne 161. Cette
expérience est couronnée de succès si l'on en croit Galien , qui affirme avec
fierté avoir considérablement réduit le nombre de décès parmi les gladiateurs
blessés par rapport à ses prédécesseurs. Galien reste alors encore un an dans sa
ville natale avantde se rendre à Rome. Peut-être profita-t-il de cette période pour
entreprendre quelques-uns des nombreux voyages scientifiques auxquels il fait
allusion dans ses écrits et qu 'il est souvent difficile, pour ne pas dire impossible,
de situer précisément. Quoi qu'il en soit, son départ pour Rome intervient au
cours de l'été ou de l'automne 162. On a souvent essayé de justifier le départ de
Galien pour Rome, à l'issue de cette période, par l'existence d'une stasis qui
l'aurait chassé de sa ville natale. Il est vrai qu 'une fois à Rome Galien se déclare
prêt à rentrer dans sa patrie dès que la stasis aura pris fin (Pronostic 4 : t. XIV ,
p .622 K . = p. 92 Nutton ; ibid . 9 : t. XIV , p.648 K . = p. 116 Nutton ), mais rien
ne permet d'affirmer qu'elle sévissait déjà lors de son départ et qu 'elle n 'a pas
plutôt éclaté en son absence, alors qu'il séjournait déjà à Rome (voir Nutton 5 ,
p. 164- 165).Galien n 'eut sans doute pas besoin d 'événements aussi graves pour
se décider au départ : un voyage à Rome s'imposait de toute façon dans sa
carrière .
Voyages scientifiques. Nous savons que Galien visita la côte lycienne, vrai
semblablement lors de son voyage de retour d 'Alexandrie à Pergame en 166 /7 . Il
se rendit également en Palestine, sur la rive orientale de la Mer morte. Un autre
voyage le conduisit à Chypre, d'où il rapporte du minerai de cadmie . Galien
précise d'ailleurs à ce sujet qu 'il a rapporté le minerai en Asie mineure avant de
le transporter plus tard à Rome (Sur la faculté des médicaments simples IX 3 :
t. XII, p . 220 et 227 K .). Une trentaine d'années, précise Galien dans ce traité
qu 'il est censé avoir rédigé dans les années 190 , se sont écoulées depuis lors. Le
voyage à Chypre apparaît en outre fréquemment associé à celui de Syrie Pales
446 GALIEN DE PERGAME G3
tine (ibid ., t. XII, p. 171 et 216 K .). Si les deux voyages ont bien eu lieu en
même temps, ils doivent se situer peu avant le premier départ de Galien pour
Rome en 162. S 'ils sont indépendants, celui pour Chypre peut aisémentavoir eu
lieu entre 166 et 167 (voir Nutton 5, p. 170). La visite en Palestine se situe, quant
à elle, impérativement avant 166 , soit en 157, soit en 161/2. Galien se rendit éga
lement plusieurs fois à Lemnos, à la recherche de la fameuse « terre lemnienne » .
Ilnous apprend qu'une première tentative échoua, lors de son second voyage à
Rome (Sur la faculté des médicaments simples IX 1 : t. XII, p . 171 K .) . Alors
qu 'il faisait en bateau la traversée d 'Alexandrie de Troade à Thessalonique,
Galien pria le capitaine de faire escale à Lemnos, mais la région qui l'intéressait
était éloignée du lieu où il débarqua et, le capitaine n 'ayant pas le temps d'at
tendre le retour de Galien , celui-ci dut renoncer. Plus tard , revenant de Rome à
Pergame par la route (ibid ., t. XII, p. 172 K .), il s'arrêta à Philippes, prit un
bateau pour Thasos, puis de là pour Lemnos.Greenhill 7, p. 208, fait intervenir
cette seconde visite à Lemnos au cours du second séjour de Galien à Rome, dans
les années 190 , à un moment où il éprouva le désir de revoir sa patrie . L 'hypo
thèse la plus vraisemblable autorisée par le témoignage de Galien est cependant
qu 'il s'arrêta pour la première fois à Lemnos lors de son second voyage à Rome
après s'être embarqué à Alexandrie de Troade et avant de poursuivre par voie de
terre à travers la Thrace et la Macédoine. Il y a cependant une objection à cette
interprétation et elle est d'ordre géographique : si Galien s'est rendu par mer
d 'Alexandrie de Troade à Thessalonique, il n 'a pas eu ensuite à traverser la
Thrace. Pour Nutton 5, p. 167- 168 , Galien aurait donc effectué deux voyages :
l'un en passant effectivement par la Thrace et la Macédoine, l'autre , le premier,
en débarquant à Thessalonique. Dans cette hypothèse, la première visite de
Galien à Lemnos se situerait lors de son second voyage pour Rome, en 168. La
seconde visite à Lemnos, elle , ne peut être précisément datée, elle interviendrait
assez tard, dans les dernières années du second siècle. Cela pourrait expliquer le
délai imposé à la publication des livres IX et suivants du Sur la faculté desmédi
caments simples. Galien aurait attendu d'être en possession de toutes les infor
mations pour les publier (Nutton 5, p. 169). Les autres voyages sont,eux, impos
sibles à dater, mais, sur la foi de Sur la faculté des médicaments simples IX 1 :
t. XII, p. 171 K ., ils se situentavant 168. C 'est le cas des voyages à Chypre (Sur
les facultés des aliments I 11 : t. VI, p. 507 K .), en Syrie-Palestine (Sur les
facultés des médicaments simples IX 1 : t. XII, p . 171 K .; ibid ., IX 3 : t. XII,
p. 203 et 216 K .), et peut- être aussi en Lycie (ibid., t. XII, p . 203 K .). Walsh 6 ,
p . 379, cependant, les place en 167/8 , et Ilberg 4, p . 291, en 161/2. Fidèle à la
tradition du médecin itinérant,Galien a également à plusieurs reprises visité la
Grèce et l'Italie . Si les dates et l'itinéraire exacts de tous ces voyages ne peuvent
toujours être précisés, le but commun de tous ces déplacements,en revanche, est
fort clair. Galien voulait sans nul doute pouvoir examiner et se procurer sur place
des ingrédients rares, des herbes médicamenteuses, mais surtout des produits
d'origine minérale, entrant dans la composition de diverses préparations pharma
ceutiques, dont la célèbre thériaque.
G3 GALIEN DE PERGAME 447
Premier séjour à Rome. Quand Galien arrive à Rome, en 162, il est tout
juste âgé de 33 ans (voir t.XVIII A , p. 347 K . et t. XIX , p. 15 K . déjà cités). Les
principaux événements relatifs à ce premier séjour romain , ainsi que les premiers
succès de Galien , sont en grande partie relatés dans le Pronostic, composé en
178. Au cours de ce premier hiver 162/3 , alors qu 'il est encore peu connu des
principaux cercles romains, il est amené à soigner le philosophe Eudeme
(YE92) (Pronostic 3: t. XIV ,p .613 K . = p . 82 Nutton ). Originaire de Pergame,
Eudème était installé à Rome depuis une dizaine d'années et Galien avait peut
être été son élève à Pergame.Lesmédecins convoqués par Eudème étant impuis
sants à le guérir d 'un accès de fièvre quarte, le philosophe fait appel à Galien ,
qui formule un brillant diagnostic , doublé d'un excellent pronostic . L 'éclatant
succès alors remporté par Galien marque l'origine de sa gloire naissante et
contribue à lui assurer une solide réputation (Ilberg 4 , p . 377) auprès des
membres les plus éminents de la société romaine fréquentés par Eudème, comme
Sergius Paulus et Flavius Boéthus (2- B 49) l'ex -consul (Pronostic 2 : t. XIV ,
p. 605 K . = p. 74-82 Nutton ). Dans le même temps, la maladie du médecin de
Sicile, ami du philosophe Glaucon (3- G 20), est l'occasion pourGalien de susci
ter l'admiration de tous par son pronostic,même si pour cela le spectaculaire le
dispute quelque peu à la probité intellectuelle (Des lieux affectés V 8 : t. VIII,
p. 361 K .). Fort de ses succès, Galien compte dès lors dans sa clientèle de nom
breux patients (Ilberg 4 , p. 379). Certains nomssortentmême de l'anonymat, tels
ceux de l'esclave de Charilampès, du rhéteur Diomède, de la femme de Justus
(Pronostic 5 : t. XIV , p . 624 sqq. K . = p . 94 Nutton ) ou de celle de Boéthus (ibid .
8 : t. XIV , p.641 sqq . K . = p. 110 -116 Nutton ). Parallèlement Galien multiplie
les conférences publiques, au cours desquelles il se livre principalement à des
démonstrations anatomiques qui sont pour lui l'occasion là encore de démontrer
sa supériorité surses collègues (Sur les facultés naturelles I 13: t. II, p. 34- 38 K .
= SM III, p. 122 sqq.). Le célèbre débat avec Alexandre de Damas (2 A 114 ) a
lieu au milieu de l' année 163 (Pronostic 5 : t. XIV , p. 627 sqq. K . = p . 97-99
Nutton) quand Galien est invité par Flavius Boéthus à mettre en lumière le
mécanisme de la respiration et de la voix chez les êtres vivants. A en croire
Galien, ces conférences publiques, ainsi que les immenses succès qu'il remporte
alors , lui valent bientôt la haine féroce de ses collègues. Raillerie et ironie (Sur
les facultés naturelles I 13 : t. II, p. 34- 35 K .) se muent bientôt en attaques de
plus en plus virulentes (Sur les différences du pouls II 3 : t. VIII, p. 571-572 K .).
Le principal reproche fait à Galien par ses adversaires est, semble -t-il, de
recourir à la divination pour établir ses pronostics (Pronostic 4 : t. XIV , p. 620
sqq. K . = p. 88-90 Nutton, et Commentaire au Pronostic III 37 : t. XVIII B ,
p. 300 K .). Les menaces cependant se font de plus en plus précises et Galien
commence à craindre pour sa vie. Son ami Eudème le metmême en garde contre
une tentative d'empoisonnement (Pronostic 4 : t. XIV , p.623 sqq. K . = p. 92
Nutton ). Ses honoraires assurant à Galien une aisance qui dépasse ses veux
(Boéthus lui a envoyé 400 pièces d 'or pour avoir guéri sa femme), un an après
son arrivée à Rome, à l'âge de 34 ans, en 163, il déclare renoncer à son ensei
448 GALIEN DE PERGAME G3
gnement public et à ses démonstrations anatomiques pour ne pas exaspérer
davantage la haine de ses adversaires (Sur ses propres livres 2 : t. XIX , p . 19 K .
= SM II, p . 99). A l' été 166 enfin , avant le retour de campagne de Lucius Verus
et après presque quatre années passées à Rome, Galien exécute un projet,
semble -t-il, longuementmûri : le retour dans sa patrie. En effet, dès les premiers
mois de sa présence dans la capitale ,Galien avait déjà confié à Eudème son désir
de regagner Pergame au plus tôt,mentionnant comme seul obstacle à son projet
la guerre civile qui sévissait alors dans sa patrie (Pronostic 4 : t.XIV , p .622 K . =
p . 92 Nutton ). Alors que les détails et l'itinéraire de ce départ précipité qui prend
toutes les allures d 'une fuite nous sontassez bien connus, en revanche lesmotifs
en restent assez hypothétiques. Galien en effet quitte Rome en feignant de partir
visiter la Campanie , après avoir chargé un serviteur laissé sur place de vendre
ses biens (Pronostic 9 : t. XIV , p.648 K . = p . 116 - 118 Nutton ). De là il gagne
Brindisi, bien décidé à embarquer sur le premier bateau qui lèverait l'ancre. Il
fait bientôt voile pour Cassiopé, au nord- est de Corcyre (ibid . 9 ), avant d 'arriver
à Corinthe où il décide, avec un ami crétois, d'envoyer ses bagages par bateau à
Athènes et de poursuivre lui-même par voie de terre en passant par Mégare (Sur
le diagnostic et le traitement des passions de l'âme 4 : t. V , p . 18 = p. 13- 14 De
Boer). On peut supposer qu 'il regagna ensuite l'Asie mineure par mer au départ
d' Athènes. Galien quitte donc Rome en véritable criminel, en proie à la crainte
que sa fuite ne soit découverte et qu 'il ne soit rattrapé par les soldats de l'empe
reur (Pronostic 9 : t. XIV , p. 648 K . = p. 118 Nutton ). Plusieurs hypothèses ont
été émises pour expliquer ce curieux épisode : peut-être Galien craignait- il un
assassinat, peut-être voulait-il, pour un motif que nous ignorons, se soustraire à
la justice, ou peut-être encore désirait-il échapper à la grande épidémie de peste
ramenée par les armées d'Orient et quimenaçait Rome. Cette dernière hypothèse
ne peut être prouvée , mais est rendue assez vraisemblable par le rapprochement
de deux passages où Galien , d'une part, reconnaît avoir craint que des person
nages influents, en parlant de ses intentions de départ à l'empereur, n 'aient pu
empêcher son départ à temps (ibid. 9: t. XIV , p . 648 K . = p . 116 Nutton) et où ,
d 'autre part, il reconnaît, cette fois explicitement, avoir quitté Rome dès que la
peste se mit à sévir (Sur ses propres livres 1 : t. XIX , p. 15 K . = SM II, p. 96 ). Il
est alors possible queGalien ait préféré taire dans un premier temps cemotif peu
glorieux pour un médecin en l'entourant d'un certain mystère ( Ilberg 4 , p. 389).
Retour à Pergame. Galien rejoint Pergame, vraisemblablement entre sep
tembre 166 et début 167, âgé de 37 ans (Sur ses propres livres 2 : t. XIX , p. 16
K . = SM II, p . 97). On ignore à peu près tout de la nouvelle existence de Galien
dans sa patrie , car il nous dit seulement s'être alors livré à « ses occupations
habituelles » (Ibid . 2 : t. XIX , p. 17 K . = SM II, p. 98), sans que cette expression
fort vague doive faire supposer qu 'il reprit à cette époque ses anciennes fonc
tions demédecin des gladiateurs. Quoi qu'il en soit, il ne jouit pas fort longtemps
de son séjour à Pergame, puisqu 'au cours de l'hiver 168 / 169 les deux empereurs,
Marc-Aurèle et Lucius Verus, basés à Aquilée, où ils prenaient leurs quartiers
d'hiver et veillaient aux préparatifs de la future expédition contre les Germains,
G3 GALIEN DE PERGAME 449
lui font bientôt parvenir un billet le rappelant auprès d 'eux (Pronostic 9 : t. XIV ,
p . 650 K . = p. 118 Nutton ; Sur ses propres livres 2 : t. XIX , p . 17-18 K . = SM II,
p . 98). Il ne semble pas, avant cette date, que Galien ait été en contact direct avec
la cour ou l'un des deux empereurs. En réalité, c 'est seulement sur proposition
d 'un des membres de leur entourage que ceux -ci semblent avoir songé à Galien
pour les accompagner en campagne en tant que médecin militaire (ibid . 2). Ce
dernier se montre de toute façon fort peu empressé d 'occuper ces nouvelles
fonctions qui, tout en l'exposant à de nombreux dangers, risquent de l' éloigner
assez longuementde ses chères études.
Second séjour à Rome. Galien se met cependant en route et parvient à
Aquilée au cours de ce même hiver 168/ 9 après avoir fait route par Alexandrie
de Troade, Lemnos et Thessalonique.Mais, sur place, l'épidémie de peste redou
ble, contraignant bientôt les deux empereurs à regagner Rome. L . Verusmeurt
en chemin d 'une attaque d 'apoplexie (début 169). Galien quitte à son tour Aqui
lée, où la situation est devenue effroyable, pour rejoindre Marc -Aurèle à Rome.
Il entreprend alors de dissuader l'empereurde l' emmener en expédition. Cet épi
sode est brièvementmentionné dans deux textes (Pronostic 9 : t. XIV , p. 650 K .
= p. 118 Nutton ; Des antidotes I 1 : t. XIV , p . 4 K .), mais un troisième nous
fournit davantage de détails. Galien n 'a en effet pas hésité à invoquer un rêve
envoyé par Asclépios et lui interdisant de participer à l'expédition (Sur ses
propres livres 2 : t. XIX , p . 18 -19 K . = SM II, p . 99). Les traités galéniques
témoignent, il est vrai, en plusieurs endroits de la dévotion toute particulière
entretenue par Galien à l'égard d'Asclépios (voir en particulier ibid . 2 ; Sur la
méthode thérapeutique I 4 : t. X , p. 609 K .). Si le lecteur moderne peut cepen
dant, dans ce cas précis, être tenté de penser à un stratagème, cette pensée ne
semble manifestement pas avoir effleuré l'empereur, qui se résout finalement à
laisser Galien à Rome,mais en l'investissant de la charge de médecin officiel
attaché au service de son fils, le jeune Commode, alors âgé de huit ans et destiné
à lui succéder sur le trône (Pronostic 9 : t. XIV , p .650 K . = p. 118 Nutton ). Tou
jours soucieux de se soustraire à la haine et à l'envie de ses collègues, Galien
décide de se tenir le plus éloigné possible de Rome, séjournant tantôt ici, tantôt
là où se trouverait le fils de l'empereur, et consacrant presque tout son temps à la
rédaction de nombreux traités philosophiques et médicaux (ibid . 9 ; Sur ses
propres livres 2 : t. XIX , p . 19 K . = SM II, p . 99). Lemédecin de Pergame aborde
alors une période particulièrement féconde pour son activité d 'écrivain et la plus
grande partie des traités qui nous sont parvenus ont été composés à cette époque.
Le signe que Galien mène alors une vie plus retirée, davantage tournée vers
l'étude et presque tout entière consacrée à l'écriture , transparaît dans le silence
qu 'il entretient désormais sur les détails de son existence. Ces dernières années
contrastent en effet fortement avec les premières, pour lesquelles nous dispo
sions d 'un abondant matériau autobiographique. Galien se limite désormais à
quelques allusions, laissant dans l'ombre des pans entiers de ses trente ou qua
rante dernières années. Plusieurs allusions nous permettent cependant de déduire
qu 'il ne semble pas avoir durablement quitté Rome dans cette dernière partie de
450 GALIEN DE PERGAME G3
son existence. Galien nous apprend seulement que Marc-Aurèle , encore en cam
pagne contre les Germains (il ne rentra à Rome qu 'en 176 ), demanda à son
intendant général Euphratès, après la mort de son médecin personnel Démétrios,
de lui désigner une personne capable de lui préparer sa thériaque quotidienne et
qu 'Euphratès proposa le nom de Galien , qui fut accepté (Sur les antidotes I 1 :
t. XIV , p. 4 -5 K .). Nous savons également que vraisemblablement dans cette
même période, antérieure à 176 , Galien soigna le jeune Commode atteint d'une
amygdalite (Pronostic 12 : t. XIV , p .662 K . = p. 130 -134 Nutton ). Marc -Aurèle
lui-même, de retour à Rome (si l'on admet que cet épisode se situe bien en 176 /7
et non au cours de l' été 169; voir sur ce point l' édition du Pronostic de V .
Nutton , CMG , p . 217 -218 ), devait l'appeler en consultation et proclamer sa
supériorité sur les autres médecins (Pronostic 11 : t. XIV , p .658 K . = p . 126 -128
Nutton ). A Rome, Galien s'était installé sur la Voie Sacrée , où il possédait, non
loin du forum de Vespasien et à proximité du Temple de la Paix , un cabinet de
travail où il déposait ses biens les plus précieux, aussi bien les manuscrits origi
naux de ses ouvrages que les ingrédients les plus rares nécessaires à la réalisation
de nombreuses préparations pharmaceutiques (Sur les médicaments composés
selon les genres I 1 : t. XIII, p. 362 K . ; Sur les antidotes I 13 : t. XIV , p .65-66
K .). Ce cabinet fut détruit par le feu en 192, au cours du terrible incendie qui
ravagea égalementle Temple de la Paix et une partie du Palatin . Galien y perdit
une grande partie de ses ouvrages, dont, pour certains, il ne possédait pas de
copies (Sur les médicaments composés selon les genres, ibid . ; Des antidotes,
ibid .; Sur ses propres livres 2 : t. XIX , p. 19 K . = SM II, p . 99). Il s'emploie
alors , dans ses dernières années, à réécrire certains ouvrages, comme les deux
derniers livres de son vaste traité sur les Médicaments composés selon les
genres. On sait enfin que Galien séjourna encore à Rome plusieurs années après
l'incendie de 192 grâce à une allusion conjointe aux règnes de Commode (180
192) et de Septime Sévère (193-211). En effet, ce dernier devait remettre à
l'honneur la pratique abandonnée par Commode de prendre régulièrement une
thériaque et c'est à Galien qu' échut à nouveau le soin de la préparer (Sur les
antidotes I 13 : 1. XIV , p. 65 K .).
Lieu et date de la mortdeGalien . S 'il est certain que Galien était encore à
Rome en 193, date de l'avènement de Septime Sévère, on chercherait en vain
dans ses écrits, dumoins ceux que nous avons conservés, une allusion aux toutes
dernières années de son existence, qui restent de ce fait entourées d 'un assez pro
fond mystère. Nous ignorons s'il est mort à Rome ou si, comme on l'a supposé,
il est retournémourir dans sa patrie, à Pergame. Il est également difficile d 'avan
cer une date précise pour sa mort. La date traditionnellement adoptée de 199
repose en réalité sur la foi d'un témoignage tardif, celui de la Souda, qui indique
dans la notice consacrée à Galien que celui-ci mourut à l'âge de 70 ans. Un
simple calcul établi à partir de 129 pris comme date de naissance aboutit donc à
199 . Cependant la tradition arabe (Işhāq ibn Hunayn au IXe siècle , Al-Mubaššir
au XIe siècle, Ibn Abi Uşaybi'a au XIIIe siècle ) précise que Galien vécut quatre
vingt-sept ans, dix- sept ans en tant qu 'enfant et étudiant et soixante -dix en tant
G3 GALIEN DE PERGAME 451
que savant et professeur, ce qui situerait sa mort autour de 216 . Sans peut-être
aller aussi loin , 21 V . Nutton, « Galen in the eyes of his contemporaries » , BHM
58, 1984, p. 324, est en tout cas partisan, sur la foi d'une citation d' Alexandre
d'Aphrodise (2 + A 112) rapportée par l'écrivain arabe Al-Siġistāni (Xe s.), de
situer la mort de Galien après 210, et plus vraisemblablement entre 210 et 213,
un an après l'achèvement de La thériaque à Pison, si du moins cet ouvrage est
bien authentique. En outre , le nombre non négligeable de traités qui, selon les
spécialistes de la chronologie du corpus galénique, ne peuvent avoir été rédigés
que sous le règne de Septime Sévère , impose de toute façon un report de quel
ques années de la date traditionnelle (voir 22 J. Ilberg, « Über die Schriftstellerei
des Klaudios Galenos » , RAM 44, 1889, p. 207 -239 ; 47, 1892, p. 489-514 ; 51,
1896 , p. 165- 196 ; 52, 1897, p. 591-623; 23 K . Bardong, « Beiträge zur Hippo
krates- und Galenforschung» , NAWG 7, 1942, p. 577 -640 ; 24 D . W . Peterson ,
« Observations on the chronology of the Galenic corpus» , BHM 51, 1977,
p. 484-495). La tradition occidentale et byzantine (Tzetzes, Chiliades XII 397)
va d 'ailleurs elle aussi dans le sens d 'un abaissement de la date traditionnelle en
faisant vivre Galien jusque sous Caracalla (211-217).
B. LE CORPUSGALÉNIQUE
L 'activité littéraire de Galien . Les dimensions du corpus galénique l'attes
tent suffisamment, Galien était un travailleur infatigable, un écrivain exception
nellement prolifique, qui réalisa la performance remarquable d'avoir composé en
moyenne cinq cents pages par an pendant les cinquante années de son activité
littéraire (Moraux 1, p. 29 ). Il composa ses premiers ouvrages médicaux avant
l'âge de vingt ans, alors qu ' il était encore étudiant (Sur ses propres livres 1 :
t. XIX , p. 12 K . = SM II, p . 93 -94 ) mais ses débuts dans la carrière littéraire
datent réellement de son premier séjour à Rome. Il s'agit alors bien souvent de
notes ou d 'aide-mémoire destinés à des amis ou d'anciens disciples et dont
Galien ne prend pas toujours la précaution de conserver une copie . A la mort de
leurs propriétaires, certains de ces écrits que Galien ne destinait pas à la publi
cation furentperdus ou usurpés par des médecins peu scrupuleux qui se les attri
buèrent (ibid . prol. : t. XIX , p. 12 K . = SM II, p. 94). D 'autres encore ont été
composés par Galien à l'occasion de telle ou telle polémique soulevée par les
représentants des différentes écoles médicales alors présentes à Rome, les
Méthodistes, les Empiristes et les Dogmatistes. Galien reconnaît d 'ailleurs
volontiers que ces premiers écrits ont été composés par gloriole et dans un esprit
essentiellement partisan (ibid . 1: t. XIX , p. 14 K . = SM II, p. 95). Plus tard , sen
sible au fait que l'opposition entre les écoles se situe davantage sur le plan des
principes et de la méthode que sur celui de la pratique médicale , Galien multi
pliera dans ses ouvrages les remarques d 'ordre épistémologique destinées à
démontrer l'importance des observations scientifiques bien menées et des raison
nements fondés sur la démonstration . Parvenu à l'âge de la maturité , Galien
déclare écrire non pas pour devenir célèbre, mais seulement pour accéder au
désir de ses amis qui lui en font la demande et, plus généralement, pour se
452 GALIEN DE PERGAME G3
constituer à lui-même une réserve d 'aide-mémoire en vue de la « vieillesse
oublieuse » (Sur la méthode thérapeutique VII 1: t. X , p . 456 K .). Ce dédain
pour la célébrité le conduit même dans un premier temps à ne plus mentionner
son nom sur ses œuvres (ibid.). Cependant, apprenant que des faux circulent sous
son nom , que ses propres traités sont remaniés à son insu , Galien décide dans les
dernières années de sa vie d 'indiquer le contenu de tous les traités dont il est
l'auteur (Sur ses propres livres, prol.: t. XIX , p. 10 K . = SM II, p . 92). Il s'em
ploie également, au cours de son second séjour à Rome, à récupérer auprès
d 'amis les écrits dont il n'avait pas conservé de copie, pour les corriger. C 'est le
cas notamment des ouvrages destinés à ses élèves et qu'il intitula « Aux
débutants » .Demême, après l'incendie du Temple de la Paix (192), il fut amené
à réécrire certains de ses ouvrages dans leur intégralité . Ses dernières années sont
également consacrées à la poursuite d'un vaste projet qu 'il ne pourra complè
tementmener à bien : la rédaction de commentaires aux plus importants traités
d 'Hippocrate (Sur l'ordre de ses propres livres 3 : t. XIX , p . 57-58 K . = SM II,
p . 86 -87). Au total, à une activité exceptionnellement féconde de médecin et
d ' auteur médical,Galien a su allier un talent non moins productif d 'auteur philo
sophique, de la rédaction de son important traité Sur la démonstration , dès 162, à
celle du Sur ses propres opinions, dans les dernières années de son existence.
Présentation d 'ensemble . A la différence de ce que l'on observe pour le cor
pus hippocratique ( * + H 152), le corpus galénique est l'æuvre d' un seul auteur,
même si l'authenticité de certaines æuvres a pu êtremise en question. Le corpus
galénique frappe d 'abord par son étendue, puisqu'il représente ,à lui seul,près du
dixième de la littérature grecque conservée. Toutes les disciplines de l'artmédi
cal sont abordées: anatomie , physiologie , embryologie , hygiène, diététique ,
pathologie , thérapeutique, pharmacologie , mais aussi philosophie, grammaire ,
éthique... Nous sommes loin cependant de posséder l'intégralité de cette æuvre
immense. Nous ne connaissons de certains traités que le titre , et pour d'autres,
dont l'original grec est perdu, nous ne possédons plus que des traductions arabes
ou latines. Il se pourrait bien en effet que Galien n 'ait pas écrit moins de cing
cents traités. Le naufrage est particulièrement important pour les æuvres philo
sophiques,morales et rhétoriques, dont fort peu nous sont parvenues. LeMoyen
Age grec et latin s 'intéressa en effet davantage aux traités médicaux que philo
sophiques. Et nombreux sont les ouvrages qui ne nous sont connus que par des
traductions ou des citations chez des auteurs syriaques (voir 25 R . Degen ,
« Galen im Syrischen : Eine Übersicht über die syrische Überlieferung der Werke
Galens » , dans 26 V . Nutton [édit.), Galen : Problemsand Prospects, Oxford
1981), arabes (voir 27 G . Bergsträsser, Hunain ibn Ishaq. Über die syrischen
und arabischen Galen-Übersetzungen , Leipzig 1925, et 28 M . Steinschneider,
Die arabischen Übersetzungen aus dem Griechischen, Graz 1960 (réimpr. de
quatre articles parus en 1889- 1896 ]) et dans unemoindre mesure hébreux (voir
29 M . Steinschneider, Die hebräischen Übersetzungen des Mittelalters und die
Juden als Dolmetscher, Graz 1956 (Berlin 1893) ; E . Lieber, « Galen in Hebrew :
The transmission of Galen ' s works in the mediaeval Islamic world » , dans
G3 GALIEN DE PERGAME 453
Nutton 26 , p. 167-186 , et 30 M . Zonta , Un interprete ebreo della filosofia di
Galeno, coll. « Eurasiatica » ( Quaderni del Dipartimento di Studi Eurasiatici,
Università degli Studi di Venezia ) 39, Torino 1995) . Voir également 31 G .
p . 1987-2017 . Pour tenter de reconstituer cet imposant corpus philosophique,
nous possédons encore aujourd 'hui la liste de ses propres livres que Galien rédi
gea à la fin de sa vie (Surses propres livres ),ainsi qu'un autre traité où il donne
des indications sur l'ordre dans lequel ses æuvres doivent être lues (Sur l'ordre
de ses propres livres). Le traducteur arabe Hunayn ibn Işhāq nous a également
conservé dans sa Risala (IXe s.) une liste des ouvrages de Galien qu' il était
encore possible de lire à son époque, ainsi que, pour chaque traité, l'indication
des différents traducteurs syriaques ou arabes (Bergsträsser 27 ). Hunayn a en
outre consacré un court traité aux cuvres de Galien non mentionnées dans ses
ouvrages bibliographiques (voir 32 M . Meyerhof, « Über echte und unechte
Schriften Galens nach arabischen Quellen » , SPAW 20, 1928, p . 533-548) . On
dispose également, au Xe siècle, de la liste des ouvrages de Galien établie par le
libraire musulman Al-Nadim dans son Fihrist (voir la traduction de 33 B .
Dodge, The Fihrist of Al-Nadim ,New York London , 1970 , vol. II, p.680-686 ), à
laquelle il convient d 'ajouter, au XIIIe siècle , les titres cités par Ibn Abi Uşaybi'a
à l'intérieur de son importante notice consacrée à Galien ( voir l'édition de 34 A .
Müller, Ibn Abi Osaibia , Sources de renseignements sur les classes des méde
cins, Le Caire/Königsberg 1882- 1884, vol. I, p. 30 sqq. et celle de 35 Sumaih az
Zain , Bérouth 1956 -1957, t. I et II)
Bibliographies . La première bibliographie à consulter est celle qui fut dres
sée par Galien lui-même dans son traité intitulé Sur ses propres livres, où le
médecin de Pergame, soucieux de faire échec aux faussaires et de mettre en
garde son lecteur contre les faux ouvrages circulant sous son nom , entreprend de
dresser la liste de ses principaux traités et d 'indiquer pour chacun la date et le
lieu de sa rédaction . On le complétera par le Sur l'ordre de ses propres livres où ,
en réponse à la demande de son ami Eugénianos, Galien entreprend d 'indiquer à
son lecteur dans quel ordre il doit lire ses différents ouvrages pour en retirer le
meilleur enseignement possible. Outre la série d ' articles de Ilberg 22 sur la chro
nologie du corpus galénique, à compléter par Bardong 23 et Peterson 24, on
citera la bibliographie régulièrement mise à jour (à partir de février 1988) de
36 G . Fichtner, Verzeichnis der galenischen und pseudogalenischen Schriften,
Tübingen , Institut für Geschichte der Medizin , à laquelle il faut ajouter l'impor
tante contribution de 37 J. Kollesch et D . Nickel, « Bibliographia Galeniana
1900 - 1993 » , ANRW II 37, 2, 1994, p . 1351-1420.
Éditions. Sur la tradition manuscrite, outre le répertoire déjà ancien des
manuscrits médicaux de 38 H . Diels, Die Handschriften der antiken Ärzte,
APAW 1905, et en dehors de quelques éditions critiques ou de quelques articles
sur la tradition de tel ou tel traité particulier , on ne dispose que d'une seule étude
d 'ensemble récente, celle de 39 N . G . Wilson, « Aspects of the transmission of
Galen » , dans Le strade del testo , a cura di G . Cavallo , coll. « Studi e commenti»
454 GALIEN DE PERGAME G3
5, Bari 1987, p. 45-64. Depuis l'édition princeps des æuvres de Galien (Editio
Aldina parue à Venise en 1525), la seule édition à peu près complète dont nous
disposions aujourd 'hui est l'édition de K . G . Kühn , parue à Leipzig de 1821 à
1833 (réimpr. Hildesheim 1965) (K ). Plusieurs traités ont également été édités
dans la collection des Scripta Minora (SM ), Leipzig 1884 -1893 : tome I, éd. J.
Marquardt, 1884 ; tome II, éd. I.Müller, 1891 ; tome III, éd. G . Helmreich , 1893 ,
auxquels il faut ajouter les titres parus dans le Corpus Medicorum Graecorum
(CMG ) édité à Berlin.
Traductions. Outre les traductions du Corpus Medicorum Graecorum déjà
cité, on dispose en italien des traductions de 40 Ivan Garofalo et Mario Vegetti ,
Opere scelte di Galeno, Torino 1978 , en espagnol de celles de 41 J. B . Lafont et
A . R . Moreno, Obras de Galeno, La Plata 1947, et 42 J. A . Ochoa et L . Sanz
Mingote, Madrid 1986 , en anglais de 43 P. N . Singer, Selected Works, Oxford
1997, et en français de celles de 44 Ch . Daremberg, Euvres anatomiques, phy
siologiques etmédicales de Galien , Paris 1854, pour les traités suivants : tome I:
Quod optimus medicus sit quoque philosophus, Adhortatio ad artes addiscendas,
Quod animimores corporis temperamenta sequantur, De consuetudinibus, De
usu partium I-XII; tome II : De usu partium XIII-XVII, De naturalibus faculta
tibus, Demotu musculorum , De sectis ad tirones, De optima secta ad Thrasybu
lum , Ad Glauconem de medendimethodo . A ces traductions françaises déjà
anciennes, on peut ajouter, pour les œuvres philosophiques et rhétoriques, les
traductions plus récentes de 45 R . Van Der Elst, Galien , Traité des passions de
l'âme et de ses erreurs, Paris 1914 , 46 J.-P. Levet, « L ’Institutio Logica de
Galien : la syllogistique, traduction accompagnée de notes » , dans L 'Antiquité
classique d'Hippocrate à Alcuin , coll. « TRAMES » , Université de Limoges,
1985, p. 57-80, et 47 P . Pellegrin, C . Dalimier et J.-P . Levet, Galien. Traités
philosophiques et logiques, coll. GF, Paris 1998, pour les traités suivants : Des
sectes pour les débutants, Esquisse empirique, De l'expérience médicale, Des
sophismes verbaux, Institution logique. Il faut encore signaler, pour les deux
traités Les Passions et les erreurs de l'âme et Les facultés de l'âme suivent les
tempéraments du corps, les traductions de 48 V . Barras, T. Birchler et A .- F .
Morand récemment parues dans la collection « La Roue à Livres » , Paris 1995.
Euvres philosophiques, morales et rhétoriques. Il convient d ' être averti du
fait que la pensée philosophique de Galien est loin de trouver sa seule expression
dans les traités particuliers consacrés à ce thème. Médecine et philosophie sont
en effet à ce point liées dans le corpus galénique que presque tous les traités , à
un degré plus ou moins prononcé, abordent par un biais ou un autre les questions
philosophiques. On se limitera cependant, dans la présentation qui suit, aux trai
tés explicitement consacrés à ces questions, ou dont le titre – pour les traités per
dus – offre une indication suffisamment explicite du contenu philosophique.
L 'ampleur même de l'œuvre galénique imposait ce choix qui, en tant que tel,
n 'échappe peut- être pas totalement à un certain arbitraire. Les éditions autres que
les éditions Kühn (K ) et Scripta minora (SM ) sont signalées par le sigle (E ), les
traductions par le sigle (trad .), les références à Degen 25, Bergsträsser 27 et
G3 GALIEN DE PERGAME 455
Meyerhof 32 sont respectivement données sous les formes abrégées (Deg.),
(Berg.) et (Mey.).
A. Euvres conservées en grec :
(1) Protreptique à l'étude de la médecine (TlpotpenTIXÒÇ Én ' latpixv): t. I, p. 1- 39 K .;
SM I, 103-129 ; Deg.n° 1 ; Berg. n° 110. Sur le titre de ce traité , voir 49 A . Barigazzi, « Sul
titolo del Protrettico diGaleno » , Prometheus 2, 1979, p. 157- 163. Aucun manuscrit grec de ce
traité n 'est conservé (celui qui a servi de modèle à l'édition princeps est perdu) et la traduction
arabe de Hunayn n ' a pas été conservée. Seul reste un sommaire arabe qui a été édité par 50 A .
Badawi, Dirasat wa-nusus fi l-falsafa wa-l-'ulum 'inda l-'Arab, Beirut 1981, p. 187 -189, et
des citations en hébreu (voir Zonta 30 , p. 81-93 ). Une traduction française a été établie par
Daremberg 44 , Euvres I. Voir 51 G . Kaibel, Berlin 1894 (réimpr. 1963) (E ); 52 J. Walsch,
« Galen 's Exhortation to the Study of the Arts, especially Medicine» , MedLife 37, 1930,
p . 507-529 (T) ; 53 E .Wenkebach , « Galens Protreptikosfragment», QSGN 6 , 1935, p.88 -121
(E et trad. all.) ; 54 W . John, Galens Protrepticus ad medicinam , Göttingen 1936 (E et trad .
all.) ; 55 P . Lüth et W . Knapp, « Galen von Pergamon : Ermunterung zu Kunst und
Wissenschaft», Hippokrates 34 , 1963, p. 665 -669 (trad. all.) ; 56 I.G . Galli Calderini, Nobiltà
delle arti, Napoli 1986 (E et trad. ital.) ; Ochoa et Sanz Mingote 42 (trad. esp .) et 57 A .
Barigazzi,Galeno, Esortazione alla medicina, coll. CMG V 1, 1, Berlin 1992 (E ettrad. ital.).
(2) Sur le meilleur enseignement contre Favorinus (ſlepi tñs áporng didaoxanlaç apos
Pabwpivov) : t. I, p. 40-52 K .; SM I, 82-92. Sur Favorinus d'Arles (MF 10 ), voir 58 A . Bari
gazzi, Favorino di Arelate, Opere, Firenze 1966 . Barigazzi estime que ce philosophe et érudit,
qui fut l' élève de Dion de Pruse ( D 166 ) et l' ami de Plutarque , vécut entre les années 80 et
160. Outre le présent ouvrage, Galien avait consacré deux autres traités à la réfutation des
thèses de Favorinus, voir infra nº 57 et 72. 59 C . L . Kayser, Galeni Mepi ápíorns Oldaoxa
nías, in Philostrati Vitae Sophistarum , Heidelberg 1838 ; réimpr. Hildesheim 1964 (E ) ; 60 A .
Brinkmann, Galeni De optimo docendi genere libellus, Univ. Progr., Bonn 1914 (E ) ; Ochoa et
Sanz Mingote 42 (trad. esp.); Barigazzi 57, Galeno, Sull'ottima maniera d 'insegnare, coll.
CMG V 1, 1 , Berlin 1991 (E et trad . ital.).
(3) Que le meilleur médecin est aussi philosophe ("Oti o aplotos latpòs xai pióoo
poç): 1. I, p. 53 -63 K . ; SM II, 1-8 ; Deg. n° 2 ; Berg. n° 103. Daremberg 44 , Euvres I (trad.
fr.) ; 61 I.Müller, Galeni Quod optimus medicus sit quoque philosophus, Erlangen 1875 (E ) ;
62 G . Bilancioni, « Galeno , Come l'ottimomedico sia anche filosofo » , RCCM 1914, p . 481
sq. (E et trad. ital.) ;63 E . Wenkebach , « Der hippokratische Arzt als das Ideal Galens» ,
OSGN 3 -4 , 1932 - 1933 , p . 155 -175 (E ) ; 64 P . Bachmann , « Galens Abhandlung darüber, dass
der vorzügliche Arzt Philosoph sein muss » , NAWG 1965, p. 1 -67 (texte arabe et trad . all.) ;
65 P . Lüth et W . Knapp, « Der beste Arzt ist Wissenschaftler », MedWelt 33, 1965, p. 2185
2187 (trad. all.); 66 P. Brain, « Galen on the ideal of the physician », SAfrMedJ 52, 1977,
p. 936 -938 (trad . angl.) ; Garofalo et Vegetti 40 (trad. ital.); Ochoa et Sanz Mingote 42 (trad.
esp .).
(4) Sur les écoles pour les débutants ( ſlepi aipédeWV tolç eloayouévoiç ): t. I, p.64-105
K . ; SM III, 1- 32 ; Deg. n° 3 ; Berg. n° 3. Daremberg 44, Euvres II (trad. fr.); 67 G . Helm
reich,Galeni libellus lepi aipéoewV tots eloayouévols, ActSemPhilolErl 2, 1881, p. 239
310 (E ). Sur la traduction arabe, voir 68 M .S. Salim , Kitab Galinus fi Firaq at-tibb li-l
muta 'allimin , Caire 1977 (texte arabe seul), et 69 J.S . Wilkie et G . E .R . Lloyd , « The Arabic
version of Galen ' s De sectis ad eos qui introducuntur » , JHS 98 , 1978 , p. 167 -169. Sur la tra
duction latine ancienne et le commentaire ravennate, voir 70 L . G . Westerink (et alii), Agnellus
of Ravenna : Lectures on Galen 's De sectis, Latin text and translation by Seminar Classics,
coll. « Arethusa Monographs» 8, Buffalo 1981, et 71 O . Temkin, « Studies on Late Alexan
drian Medicine. I. Alexandrian Commentaries on Galen 's De sectis ad introducendos » , BHM
3, 1935 , p . 405 -430, et 72 N . Palmieri, L 'antica versione del “ De sectis" di Galeno, Pisa
1990. Pour les traductions en langue moderne, voir Garofalo et Vegetti 40 (trad . ital.); 73 R .
Walzer et M . Frede, Three treatises on the nature of science (On the sects for beginners, An
456 GALIEN DE PERGAME G3
outline of empiricism , On medical experience), Indianapolis 1985 (trad. angl.); Ochoa et Sanz
Mingote 42 (trad. esp.);Pellegrin et alii 47 (trad. fr.).
(5) De la constitution de l'art médical à Patrophile (Mpòs Matpósinov trepi ovotáoews
latpixñs): t. I, p. 224 -304 K .; Berg.nº 117. Sur la tradition manuscrite de ce traité initiale
ment composé de deux livres, l'un sur les arts en général, l'autre sur la médecine en particu
lier,mais qui est perdu, voir 74 S. Fortuna, « La tradizione del De constitutione artismedicae
di Galeno » , BollClass, serie terza, fasc. 11, 1990, p. 48 -77, et 75 Id ., « Galen 's De constitu
tione artismedicae in the Renaissance » , CQ43, 1993, p . 302-319, et 76 Id ., Galeno, A Patro
filo sulla costituzionedella medicina, coll. CMG V 1, 3, Berlin 1997 (E et trad.ital.).
(6 ) Sur les doctrines d'Hippocrate et Platon en 9 livres (ſlepi tõv 'Intoxpátouç xal
' Innoxpátous doyuátwv): t. V , p. 181-805 K .; Deg. n° 28 ; Berg.n° 46. 77 I. v.Müller, Cl.
Galeni De placitis Hipp. etPl. libri IX , Leipzig 1874 (E), et 78 Ph. DeLacy,Galeni De placi
tis Hippocratis etPlatonis, I- III, coll. CMG V 4, 1, 2, Berlin 1978-1984 (E et trad . angl.).
(7) Que les facultés de l'âmesuivent les tempéraments du corps ("Oti tals toŨ owuatos
xpáoeoi ai tñs yuxñs ouvá Eiç ÉTOVTAL): t. IV , p. 767-822 K .; SM II, 32-79 ; Deg. n° 23 ;
Berg. n° 123. Daremberg 44, (Euvres I (trad. fr.); texte reproduit avec une préface de J.
Pigeaud, Clichy, G .R .E.C ., 1993 ; 79 E . Haucke, Galen : Dass die Vermögen der Seele eine
Folge der Mischungen des Körpers sind, coll. « Abhandl. zur Gesch . der Medizin und Natur
wissenschaften » 21, Berlin 1937 (trad . all.); 80 L . Garcia Ballester, Alma y enfermedad en la
obra de Galeno , Granada 1972 (trad. esp .) ; 81 H . H . Biesterfeldt, Galens Traktat, dass die
Kräfte der Seele den Mischungen des Körpers folgen , Leipzig 1973 (texte arabe et trad . all.);
Garofalo et Vegetti 40 (trad. ital.); Barras, Birchler et Morand 48 (trad. fr.).
(8) Sur le diagnostic des passions et des erreurs propres à chacun (ſlepi tõv idlwv
Éxáorw naObvxai auaprnuárwv tñs olayúnews): Deg. n° 24 et 25 ; Berg. n° 118. Ce
titre générique, cité in SM II, 121, regroupe deux livres consacrés l'un aux passions, l'autre
aux erreurs de l'âme et généralement édités de façon séparée:
- Sur le diagnostic et le traitement des passions propres de l'âme de chacun (ſlepi
StarV0S60C xai HoaTeac rõv v v txeotoo porõ 8í V Tae5v): t. V , p. 1-57 K .; SM I,
1 -44. 82 W . de Boer, Galeni De propriorum animi cujuslibet affectuum dignotione et cura
tione, coll. CMG V 4 , 1, 1, Berlin 1937 (E ) ; 83 P . W . Harkins et W . Riese , Galen On the pas
sions and errors of the soul, Columbus (Ohio) 1963 (trad. angl. d'après l' éd. dDe Boer);
84 M . Menghi, Galeno : Le passioni e gli errori dell'anima (M . Menghi et M . Vegetti édit.),
Venezia 1984 (trad. ital.); Van Der Elst 45 (trad. fr.); Barras, Birchler et Morand 48 (trad. fr.).
- Sur le diagnostic et le traitement des erreurs de l'âme de chacun (ſlepi dlayvágewS
xai Depanelaç tõv Év tñ éxáotou quxñ auapruárwv) : t. V , p. 58 - 103 K . ; SM I, 45 -81.
W . de Boer, Galeni De animi cujuslibet peccatorum dignotione et curatione, CMG V 4, 1, 1 ,
Berlin 1937 (E ) ; Van Der Elst 45 (trad. fr.); Harkins et Riese 83 (trad . angl.) ; 85 C .Mancini
G . Fravega, In qual modo si possono conoscere e curare le infermità dell'animo, coll.
« Scientia veterum » 40, Genova 1963 (trad. ital.);Menghi 84 (trad. ital.); Barras, Birchler et
Morand 48 (trad . fr.).
(9) Sur les habitudes (ſlepiéo @ v) : SM II, 9-31 ; Deg. n° 87 ; Berg. n° 45. Conservé dans
un seul manuscrit grec , le traité fut édité pour la première fois par 86 F. R . Dietz, Galeni De
consuetudinibus, Leipzig 1832 (E ). Voir, pour la traduction française, Daremberg 44, CEuvres
I. Sont également conservées une traduction latine de Nicolas de Reggio et une traduction
arabe de Hubayš, voir 87 J.M . Schmutte, Galeni De consuetudinibus cum Nicolai versione.
Versionem Arabicam ab Hunaino confectam in linguam Germanicam vertit F . Pfaff, coll.
CMG Suppl. III, Leipzig/Berlin 1941, et 88 F. Klein -Franke, « The Arabic Version ofGalen 's
Iepi łoőv » , JSAI 1, 1979, p. 125- 150 (E ). Sur les citations de ce traité en hébreu, voir Zonta
30 , p. 95-97.
(10) Introduction à la dialectique (Eloarum dlałextixń ): Deg. n° 93 ; Berg . n° 126.
89 M . Mynas, Eloaywyn ôla extixń. Mpõrov dlopowdeioa xai onuooLEVOEToa uerà
podewplaç xai napexboWv, Paris 1844 (E ) ; 90 K . Kalbfleisch, Galeni Institutio Logica,
Leipzig 1896 (E); 91 E. Orth, Galen , Einführung in die Logik, Roma 1938 (trad . all.); 92 J.
G3 GALIEN DE PERGAME 457
Mau , Galen , Einführung in die Logik, Berlin 1960 (trad. all.); 93 J.S.Kieffer, Galen's Institu
tio Logica, Baltimore 1964 (trad. angl.) ; Garofalo et Vegetti 40 (trad. ital.) ; A . Ramirez Trejo,
Galeno : Iniciación a la Dialéctica, Mexico 1982 (E . et trad . esp .) ; Levet 46 (trad . fr. par
tielle ) ; 94 M . Baldassarri, Galeno Dalla Introduzione alla dialettica, Como 1986 ( E et trad.
ital.); Pellegrin et alii 47 (trad. fr.).
(11) Des sophismes liés à l'expression (ſlepi tõv trapà tnv NÉELV Oodlouátwv): 1.XIV ,
p . 582-598 K . Ce traité est le premier commentaire conservé des Réfutations sophistiques
d ' Aristote. C . G . Gabler a été le premier à l' éditer avec des commentaires en latin en 1903.
Voir, plus récemment, 95 R . B . Edlow , Galen On language and ambiguity : An English trans
lation ofDe captionibus, coll. « Philosophia antiqua » 31, Leiden 1977 (E ettrad. angl.); 96 S.
Ebbesen , Commentators and Commentaries on Aristotle 's Sofistici Elenchi, Leiden 1981, 3
vol.; II, p. 1- 16 pourle texte de Galien ; traduction partielle de 97 M . Baratin et F. Desbordes
dans L 'Analyse linguistique dans l'Antiquité classique,Paris 1981, 1: Les théories, p. 133
140 ; traduction intégrale dans 98 B . Cassin , L 'effet sophistique, Paris 1995 , p. 519 -533, et
Pellegrin et alii 47 (trad. fr.).
(12) Sur les éléments selon Hippocrate en 2 livres (ſlepi tõv xal' ' Intoxpámuotol
xeiwv) :t. I, p. 413-508 K .; Deg. n° 6 ; Berg .n° 11. 99 G . Helmreich ,Galeni De elementis ex
Hippocratis sententia libri II, Erlangen 1878 (E ) ; sur la traduction arabe, voir 100 J. S. Wilkie
et G . E. R . Lloyd, « The Arabic version of Galen 's De elementis secundum Hippocratem » , JHS
102, 1982, p. 232 sq.
(13) Glossaire hippocratique (Twv ' Innoxpátous riwoo věEnmouc ): t. XIX , p. 62
157 K .; Berg . n° 107. 101 F. Perazzi, « Il glossario ippocratico di Galeno : traduzione del
proemio, commento e considerazioni» , RivStorMed 12, 1968, p. 28 -44 ; 102 Id ., « Esame
comparativo dei glossari di Eroziano e di G . per una impostazione critica attuale degli studi
ippocratici» , Annali dell' Ospedale Maria Vittoria ( Torino) 14 , 1971.
( 14 ) Sur les écrits authentiques et inauthentiques d'Hippocrate (ſlepi tõv runoiwv te xai
voowv 'Intoxpátouc OvYypaupátwv) : Deg. n° 90 ; Berg. n° 104. 103 J.Mewaldt, « Galen
Uber echte und unechte Hippokratika » , Hermes 44 , 1909, p . 111-134 , a retrouvé un fragment
grec qui, selon lui, pourrait bien appartenir à ce traité.
B . Euvres conservées en latin :
(15) Sur les causes synectiques ( ſlepi ouvextiXāv aitlõv): Deg. n° 85 ; Berg. n° 59.
104 K . Kalbfleisch , Galeni De causis continentibus libellus a Nicolao Regino in sermonem
Latinum translatus, Marburg 1904 (E ) ; 105 M . Lyons, On cohesive causes (texte arabe et
trad. angl.) et K . Kalbfleisch, De causis contentivis (version latine), coll. CMG Suppl. Or. II,
Berlin 1969.
( 16 ) Sur les causes procatarctiques (ſlepi npoxatapxtixõv altıőv): Deg. n° 86 ; Berg.
n° 58. Seule est conservée la traduction latine de Nicolas de Reggio , voir 106 K . Bardong,
Galeni De causis procatarcticis libellus a Nicolao Regino in sermonem Latinum translatus ad
codicum fidem recensuit in Graecum sermonem retro vertit, coll. CMG Suppl. II,
Leipzig /Berlin 1937, et 107 R . J. Hankinson, Galen On antecedent causes, coll. « Cambridge
Texts and Commentaries » 35 , Cambridge 1998 .
(17) Esquisse empirique (“ YTOTúnWOLÇ ŠunTelpixń): Berg. n° 111. 108 M . Bonnet,De Cl.
Galeni subfiguratione empirica, Diss. phil., Bonn 1872 (E ); 109 K . Deichgräber, Die
griechische Empirikerschule . Sammlung der Fragmente und Darstellung der Lehre, Berlin
1930 , p . 42- 90 (réimpr. Berlin /Zurich 1965) (trad. latine et rétroversion en grec) ; 110 J.
Atzpodien , Galens Subfiguratio empirica , coll. « Abh.ndlungen zur Geschichte der Medizin
und der Naturwissenschaften » 52,Husum 1986 (trad . all.); Walzer et Frede 73 (trad . angl.);
Pellegrin et alii 47 (trad. fr.).
(18 ) Des passions et de leur traitement en trois livres (De passionibus et cura libri III).
Traité seulement conservé dans trois manuscrits latins et une traduction anonyme en hébreu .
Voir Fichtner 36 , n° 310 .
458 GALIEN DE PERGAME G3
C . @ uvres conservées en arabe :
(19) Sur l'expériencemédicale (Ilepi tñs iatpixñs Éuttelpiac): Deg. n° 89;Berg. n° 109.
Seuls des fragments sont conservés en grec. Voir 111 H . Schöne, « Die Streitschrift Galens
gegen die empirischen Ärzte », SPAW 1901, p. 1255-1263 (E ). Pour la traduction arabe, voir
112 R . Walzer, Galen . On medical experience, Oxford 1944 (texte arabe et trad . angl.). Voir
aussi Walzer et Frede 73 (trad. angl.), Pellegrin et alii 47 (trad. fr.) et 113 I. Garofalo, « Due
passidel De experientia medica diGaleno » ,ASNP 5, 1975, p. 1305-1306 .
(20 ) Comment l'homme découvre ses vices et ses fautes: Berg. n° 118. L 'original grec de
ce traité estperdu , seule est conservée une traduction arabe, voir 114 G .C . Anawati, « Homo
islamicus», dans Images ofMan in Ancient and Medieval Thought, Louvain 1976 , p. 242.
(21) Que les meilleurs des hommes tirent profitmême de leurs ennemis : Deg. n° 125 ;
Berg. n° 121;Mey. n° 26 . L 'original grec de ce traité est perdu, voir Anawati 114, p. 242.
Seul est conservé un fragment dans une citation de Ibn Abi Uşaybi'a (Xille s.). Pour la traduc
tion allemande de ce fragment, voir 115 M . Meyerhof, « Autobiographische Bruchstücke
Galens aus arabischen Quellen » , AGM 22 , 1929, p . 72 -86 .
D . Euvres conservées à l'état de fragments ou dont ilne reste que des cita
tions :
(22) Sur la démonstration en 15 livres ( Ilepi årrodeleewç: SM II, 117 ; Deg. n° 88 ; Berg .
nº 115. Il s'agit là de l'æuvremajeure de Galien consacrée à la logique. On la date des années
158 -162. Le texte grec était déjà mutilé du temps de Hunayn, au IXe siècle. Les seuls témoi
gnages aujourd'hui conservés en grec, en dehors des passages cités par Jean Philopon , sont les
autocitations de Galien dans ses écrits postérieurs (voir la reconstruction de 116 I. von Müller,
« Über Galens Werk vom wissenschaftlichen Beweis », ABAW 20 , 1895, p. 403-478 ). La ver
sion arabe n ' a pas non plus été conservée. Mais on dispose des nombreuses citations et cri
tiques de Abū Bakr al-Rāzi dans ses Dubitationes in Galenum (voir 117 S . Pines, « Razi cri
tique de Galien » , Actes du 7e Congrès Internat. d 'Histoire des Sciences ( Jérusalem 1953),
p. 480 -487, repris dans 118 S . Pines, Studies in Arabic versions ofGreek texts and in mediae
val science, Leiden 1986 (= The collected works of S. Pines, vol. II) , p . 256 - 263. Voir aussi
119 G . Strohmaier, « Zitate in den Zweifeln an Galen des Rhazes » , dans K . D . Fischer, D .
Nickel et P. Potter ( édit.), Text and Tradition. Studies presented to J. Kollesch , Leiden 1998,
p . 263 -287. Le De demonstratione a également été cité par Maimonide et Averroès ( voir
Zonta 30, p. 17 n. 82).
(23) Sur mes propres opinions en 3 livres (ſlepi tõv Eaurą doxoúvtwv ou Nepi tūv
idiwv dobávrwv): SM II, 122 ; Deg. n° 98 ; Berg. n° 113. Ce traité fut composé par Galien
dans les dernières années de sa vie . Il y avait rassemblé, sous une forme volontairement syn
thétique, ses opinions philosophiques les plus marquantes déjà soutenues dans ses précédents
traités. L 'intérêt d'un tel ouvrage résidait donc moins dans la matière elle -même que dans son
traitement systématique. Il ne subsiste en grec qu 'un important fragment correspondant aux
chapitres 13 à 15 (voir 120 G . Helmreich , « Galeni lepi tõv éauto doxoúvtwv fragmenta
inedita » , Philologus 52 , 1893, p . 432 -434 ; 59, 1900 , p . 316 -317). Il faut également noter que
le fragment conservé dans l'édition de Kühn sous le titre De la substance des facultés natu
relles (ſlepi oủoias tõv puolxõv duváuewv ) appartient en réalité au Surmes propres opi.
nions (t. IV , p. 757-766 K .). On possède en outre une traduction latine partielle (chapitres 14
et 15) datée de la première moitié du XIVe siècle. Hunayn (Berg . n° 113) nous apprend que le
traité a été traduit deux fois en syriaque etdeux fois en arabe. Toutes ces traductions sont per
dues,mais l'une des traductions arabes a servi de base à une traduction latine du début du XIIe
siècle . Une partie du chapitre 1 de cette traduction arabo-latine a été éditée par 121 K .
Kalbfleisch , « Parthenios bei Galen » , Hermes 77 , 1942, p . 376 -379. La conclusion du traité a
été publiée par 122 B . Einarson , « A Note on the Latin Translation of Galen De propriis
placitis » , CPh 54 , 1959, p. 258-259. Enfin un passage du chapitre 2 a été édité par 123 V .
Nutton , « Galen 's philosophical testament : On my own opinions » , dans J. Wiesner (édit.),
Aristoteles. Werk und Wirkung, P.Moraux gewidmet, t. II : Kommentierung, Überlieferung,
G3 GALIEN DE PERGAME 459
Nachleben, Berlin 1987, p. 27-51. V.Nutton annonce une édition complète du traité: CMG V
3, 2 (sous presse ). Sur l'importance des citations en hébreu : Zonta 30, p. 102-108.
(24 ) Sur le vocabulairemédicalen 5 livres (ſlepi tõv latpixõ v óvouátwv): Deg. n° 94 ;
Berg. n° 114 ;Mey. n° 25. Ce traité est perdu en grec et seule la première partie est conservée
dans la traduction de Hubayš, voir 124 M .Meyerhof, « La version arabe d 'un traité perdu de
Galien » , Byzantion 3 , 1926 , p . 413-442, et 125 Id . « Über das Leidener arabische Fragment
von Galens Schrift Über die medizinischen Namen », SPAW 1928 , p. 296 -319 ; 126 M .
Meyerhof et J. Schacht, « Galen . Über die medizinischen Namen (Arabic and German ) » ,
APAW 1931, 3 (E . et trad.).
(25) Desmeurs en 4 livres (ſlepinowv) : Deg. n° 116 ; Berg .n° 119. Composé après 185.
Il ne subsiste de ce traité qu 'une autocitation de Galien dans le Sur le diagnostic et le traite
mentdes passions de l'âme (chapitre 6 ). La traduction arabe de Hunayn ibn Işhāq est égale
ment perdue. Seulun sommaire arabe a été conservé et publié pour la première fois par 127 P .
Kraus, « G . Ethica » , BFAUE 5, 1937 , p . 1-51 (texte arabe seul), puis plus récemment par
128 A . Badawi, La transmission de la philosophie grecque au monde arabe, 2e éd ., Paris,
1987 . Il existe une traduction allemande de ce sommaire , mais limitée au livre I, par 129 F .
Rosenthal, Das Fortleben der Antike im Islam , Zürich 1968, p . 120 -133 (= en traduction
anglaise, The Classical Heritage in Islam , London 1975 , p . 85 -94 ). Il existe en outre une
traduction intégrale en anglais établie par 130 J. N . Mattock , « A translation of the Arabic
epitome of G .' s book Mepi nowv » , dans Festschrift R . Walzer, coll. « Oriental Studies » 5 ,
Oxford 1972, p . 235 -260, et depuis peu une traduction italienne (voir Zonta 30 , p . 125 -145 ).
Voir aussi 131 R . Walzer, « New Light on Galen 'sMoral Philosophy » , CQ 43, 1949, p. 82
96 , et 132 Id., « A Diatribe of Galen », HTAR 47, 1954, p. 243-254 ; 133 S.M . Stern , « Some
fragments of Galen 's On dispositions (ſlepi nowv) in Arabic» , CQ n.s. 6, 1956 , p. 91- 101,
repris dans S . M . Stern ,Medieval Arabic and Hebrew Thought, hrsg. von F . W . Zimmermann ,
London 1983, Nr. III. Sur l'importance des citations conservées en hébreu pour la
reconstruction du texte original, voir Zonta 30, p. 29-80.
(26 ) Sur la matière médicale dans le Timée de Platon en quatre livres (Ilepi tõv Év TQ
Nátwvos Tyuaiw latpixūs eipnuévwv ), plus connu sous le titre Commentaire au Timée de
Platon en 4 livres : SM II, 122 ; Deg. n° 97 ; Berg. n° 122. Seuls ont été conservés un long
fragment grec et quelques extraits d'auteurs arabes et juifs. Du fragment grec est d'abord
parue une traduction latine deGadaldinus (Agostino Gadaldini) chez les Juntes (Venise 1550).
Le texte grec fut publié pour la première fois par 134 Ch . Daremberg, Fragments du commen
taire de Galien sur le Timée de Platon, Paris 1848, qui semble avoir redécouvert à la Biblio
thèque nationale le manuscrit dont s'était servi Gadaldinus (Parisinus gr. 2383). Ce même
texte, joint à quelques extraits de Rāzi etMaïmonide, a été réédité par 135 O . Schröder,Galeni
In Platonis Timaeum commentarii fragmenta . Appendicem Arabicam addidit P . Kahle, coll.
CMG Suppl. I, Leipzig/Berlin , 1934 (E ). Voir aussi 136 C .J. Larrain, « Ein unbekanntes
Exzerpt aus Galens Timaioskommentar » , ZPE 85, 1991, p . 9- 30 , et 137 Id ., Galens Kommen
tar zu Platons Timaios,Stuttgart 1992 (E ).
(27) Sommaire du Timée de Platon (Compendium Timaei Platonis ). Ce sommaire fait par
tie d'une série plus vaste en huit livres intitulée Synopsis des dialogues platoniciens(Tia
TWVIXāv Olaróywv OÚVOQis , mentionné dans SM II, 122 ), dont il occupait le livre III (voir
nº 95). Ont été conservés de ce sommaire quelques fragments en arabe édités par 138 P. Kraus
et R . Walzer, Galeni Compendium Timaei Platonis aliorumque dialogorum synopsis quae
extant fragmenta , coll. « Corpus Platonicum medii Aevi » - Plato Arabus 1,London 1951 (E ).
Voir aussi 139 A .J. Festugière et R .M . Tonneau, « Le Compendium Timaei deGalien »,REG
65, 1952, p. 97-118 , repris dans A.J. Festugière, Études de philosophie grecque, coll. « Biblio
thèque d'Histoire de la philosophie » ,Paris 1971, p. 487-506 .
(28) Sommaire de la République de Platon (Compendium Rei publicae Platonis): SM II,
122 ; Deg. n° 96 ; Berg. n° 124. Ce sommaire fait partie , comme le précédent, de la somme
intitulée Synopsis des dialogues platoniciens. On sait par Hunayn (Berg . n° 124 ) que Galien
avait consacré au sommaire des quatre premiers livres de la République le livre II de sa Synop
sis, et aux livres cinq à dix le début du livre III. Le texte original de ce sommaire est perdu et
460 GALIEN DE PERGAME G3
sa traduction arabe l'est aussi presque totalement. Seules sont conservées quelques citations
chez les auteurs arabes. Ces fragments ont été édités par Kraus et Walzer 138 . Voir aussi
140 R .Walzer, Galen on Jews and Christians, Oxford 1949, 141 G . Levi della Vida, « Two
fragments of Galen in Arabic translation » , JAOS 70, 1950, p. 182 -187, et 142 R . Köbert,
« Das nur in arabischer Uberlieferung erhaltene Urteil Galens über die Christen » , Orientalia
25, 1956 , p. 404-409.
(29) Sommaire des Lois de Platon. Seule est conservée une citation de ce sommaire dans le
Commentaire de Maïmonide aux Aphorismes d'Hippocrate, voir Kraus et Walzer 138, p. 39
(texte arabe), p. 100 -101 (traduction latine).
( 30 ) Sommaire du Phédon de Platon (Compendium Phaedonis Platonis). Sur les fragments
arabes seuls conservés, voir Levidella Vida 141.
(31) Sur les plaisirs de l'amour (ſlepi áopodioiwv): t. V, p. 911-914 K . Seul un fragment
grec est conservé chez Oribase , Collectiones mediceae VI 37 , mais peut-être n ' est-il pas
authentique, voir 143 J. Raeder, Oribasii Collectionum medicarum reliquiae, coll. CMG VI, 1.
1, Leipzig 1928, p. 187-189 (E ), et 144 G . B. Scarano, « Il De venereis di Galeno » ,
PagStorMed 10, 1966, n.6 , p. 85- 90 .
(32) Sur l'absence de chagrin (ſlepi áruniac): SM II, 121; Deg. n° 117 ;Berg . n° 120 . Le
texte grec est entièrement perdu. Hunayn nous apprend qu 'il aurait été traduit par Hubayš sous
le titre Sur la façon d'écarter les soucis et aurait été composé par Galien à la demande d'un de
ses amis qui s' était étonné de ne jamais l'avoir vu chagriné par aucune difficulté. Seules sont
conservées quelques citations, en particulier dans Ibn Abi Uşaybi' a (voir Meyerhof 115 , p. 72
86 , en particulier p. 85). Sur les citations conservées en hébreu, voirZonta 30, p. 113- 123.
(33) Commentaire au Que le premiermoteur est immobile (Eiç tò npūTOV XLVOŪV
áxívntov < ajtó > ): SM II, 123 ; Deg. n° 118 ; Berg.n° 125. Ce traité consacré à l'examen
d 'un des thèmes centraux de la Métaphysique d 'Aristote est complètement perdu en grec. De
la traduction de Hunayn n 'ont été conservées que quelques citations chez les bibliographes
arabes. On peut cependant avoir une idée du contenu du traité grâce à la critique qu ' en a faite
Alexandre d'Aphrodise ( A 112 , nº 25) dansune de ses æuvres elle-même conservée seule
ment en arabe (voir 145 N . Rescher et M . E . Marmura , The Refutation by Alexander of
Aphrodisias of Galen 's Treatise on the Theory of Motion , Islamabad 1965 , et 146 S . Pines,
« Omne quod movetur necesse est ab aliquo moveri. A refutation of Galen by Alexander of
Aphrodisias and the theory ofmotion » , Isis 52, 1961, p . 21-54 = Pines 118 , vol. II, p . 218
251).
(34) Sur la providence (ſlepi npovolas). Seules sont conservées des citations en arabe
chezMaimonide dans ses Aphorismes.
(35 ) Sur les éléments (ſlepiotoixelwv). Seul est conservé un fragment en grec dans le
Parisinusgr. 1883, fol. 354.
E. Euvres qui semblent totalementperdues:
L 'ordre de présentation retenu ici est celui suivi parGalien dans le Sur ses propres livres.
Sauf avis contraire, les références à ce traité, ainsi que les titres adoptés pour les différents
ouvrages cités, sont donnés d 'après l' édition d’I.Müller dans Scripta Minora , vol. II, Leipzig,
1891 (= SM II).
Sur Asclepiade :
(36 ) Sur l'essence de l'âme selon Asclépiade (Tepi oủolaç tñs quxñs xar' 'Aoxin
triádnv ): SM II, 115 ; Deg. n° 124 ; Berg. n° 108 . Ce traité était, semble-t-il, consacré à l'exa
men des théories d'Asclépiade de Pruse (" A 450 ) sur la nature de l'âme. Cemédecin vécut à
Rome au début du jer siècle . La tradition lui attribue dix -sept euvres, mais aucune de celles-ci
ne paraît avoir traité de l'âme en particulier.
Traités de logique:
(37) Sur les principes nécessaires aux démonstrations (ſlepi tõv åvayxaiwv eis tás
åtodelĘELÇ) : SM II, 119.
G3 GALIEN DE PERGAME 461
(38 ) Sur les prémisses omises dans la formulation des démonstrations ( ſlepi tõv napa
heltouÉVWV npotáoeWV Év tñ NÉEEL TŰv ånodeigewv): SM II, 119.
(39) Sur les prémisses de même signification (ſlepi tõv looduvauovoőv napotáoewv):
SM II, 119.
(40) Sur les démonstrations relatives au pourquoi (ſlepi tõv xatà TÒ SLóti áhodeltewv):
SM II, 119 et 123 .
(41) Sur le nombre des syllogismes (ſlepi toŨ TÕV Oumoylouõv đpiOuoő): SM II, 119 ;
Deg.n° 115 ; Berg. n° 127.
(42) Sur l'exemple en 2 livres (ſlepi napadeiyuaroc): SM II, 119 .
(43) Sur l'induction (ſlepi łnaywrñs): SM II, 119.
(44) Sur la ressemblance ( ſlepi eixóvos): SM II, 119 (ou Sur le vraisemblable, lepi
eixótos, correction proposée par K . Kalbfleisch, Über Galens Einleitung in die Logik,
Leipzig 1897, p. 683 sq.)
(45) Sur la similitude en 3 livres (ſlepiouocórntoç): SM II, 119.
(46 ) Sur les principes hypothétiques (Ilepì < tőv> ÉĘ Únoéoewv åpxūv): SM II, 119 ;
Berg.n° 116 .
(47) Sur la signification de « selon le genre» et « selon l'espèce » et leurs conjonctions
dans notre langage spontané (ſlepi <TÕV> xarà rò révoç xal to eldoç xai râu
ouçuyoúvtwv aŭrots onvalvouévwv nuiv xarà tnv aŭtouatov owvýv) : SM II, 119 et
120.
(48) Sur le possible (ſlepi toŨ duvatoũ): SM II, 119. Ce traité a inspiré à Alexandre
d 'Aphrodise une Réfutation de la thèse de Galien sur le possible, voir 147 J. C . Bürgel ( édit.),
Averroes « Contra Galenum » . Das Kapitel von der Atmung im Colliget des Averroes als ein
Zeugnis mittelalterlich - islamischer Kritik an Galen , NAWG , 1967, p. 283 n . 1.
(49) Sur les acceptionsmultiples en 3 livres (ſlepi tõv noraxõç neyouévwv): SM II,
119 . Un peu plus loin (SM II, 121), ce traité est de nouveau cité comme comportant cette fois
deux livres seulement. L 'éditeur des Scripta Minora , I. Müller, est cependant d 'avis que ce
deuxièmepassage est une interpolation .
(50 ) Sur les caractères communs etparticuliers à l'intérieur des arts ( ſlepi tõv év tais
Téxvalg XOLVõv xai idiwv) : SM II, 119.
(51) Sur lesdiscours qui se contredisenteux-mêmes (Ilepi tõv ÈAUTOÙS nepitpenóvtWV
Móywv ): SM II, 119.
(52) Sur les prémisses admises (ſlepi tõv Év exouévwv apotáoewv): SM II, 119.
(53) Sur les syllogismes issus de prémisses mixtes (ſlepi tõv Èx MLXTÛV npotáoewV
omoylouwv): SMII, 120 et 123.
(54 ) Comment il faut distinguer la recherche portant sur la chose de celle portant sur le
nom et sa signification ("Onwç xeń dlaxpivelv thu npayuatixnv Sýtnou tñs xat' ovoua
xai onua vóuevov): SM II, 120.
(55) Sur Clitomaque et ses solutions de la démonstration (ſlepiKeltouáxov xai tūv
tñs åndeleewç aŭtoŨ Núoewv) : SM II, 120. Ce Clitomaque (* C 149) est le philosophe
originaire de Carthage et disciple de Carnéade auquel il succéda à la tête de l'Académie (IIe s.
av. J.- C .). Voir Diogène Laërce, Viesdesphilosophes IV 67.
(56 ) Sur la raison commune en 2 livres (ſlepi toŨ XOLVOũ Nóyou): SM II, 120.
(57) Pour Épictète contre Favorinus ('Yntèp 'Emixtútov npòs Dabwpivov ): SM II, 120 .
Sur Favorinus ( F 10 ), voir supra nº 2. Si l'on en croit une allusion de Galien dans le Sur le
meilleur enseignement contre Favorinus (éd. Barigazzi 57 , p. 92, 13- 14 ), le Pour Épictète
contre Favorinus semble être la réplique au Contre Épictète (Ipós 'Enixtntov ) dans lequel
Favorinus faisait converser le philosophe stoïcien avec Onésime, l'esclave de Plutarque. Un
esclave de Plutarque, forméà la philosophie , est égalementmis en scène par Aulu-Gelle, Nuits
Attiques I 26 , 5.
462 GALIEN DE PERGAME G3
(58) Sur l'utilité des syllogismes (ſlepi xpelaç ourdoylouwv): SM II, 120 .
(59) Sur le bon usage en 3 livres (ſlepi óvouátwv opdómtoç): SM II, 90 et 120 .
(60) Sur le fait que chaque être est à la fois un etmultiple ( ſlepi toŨ TÔV OUTWV Éxaotov
Év r'Elvai xainožá): SM II, 120.
(61) Sur le fait qu 'il est impossible qu 'une chose et la même chose s 'accordent nécessaire
ment avec des opposés (Ilepi toŨ oti toic ảvtixEVUÉVOLÇ Êv xai taútov ŠE aváyung
åxonovDelv ådúvatóv £otiv ) : SM II, 120.
(62) Sur la découverte par voie de démonstration (ſlepi tñs åntogelxtixñS EÚPÉOEWG):
SM II, 120.
(63) Dialogues contre le philosophe <...> en particulier sur l'art de philosopher sur les
notions communes ( ? ) (Alároyol noos olhooooov † idiws < tepi> TOŪ xarà ras xolvas
évvolaç < pioOODETU > ). Le texte du De libris propriis est ici peu sûr. SM II, 120.
(64 ) Contre ceux qui entendent les mots à fin de chicane (Ilpoç tous Énnpeaotix @ c
åxoúovtaç tõv óvouátwv): SM II, 120.
(65) Sur la signification des expressions « selon l'espèce » et « selon le genre» etde celles
qui leur sontproches (ſlepi tõv onuarvouévwv éx tñs <xat'> elboç xai yévog pwvñs xai
tāv napaxeLUÉVWv aútotc ). Peut-être s ' agit - il ici du même traité que celui déjà cité plus
haut (nº47). C 'est en tout cas l'avis de Ilberg 22 , RHM 44, 1889, p . 214 .
(66 ) Synopsis sur la théorie de la démonstration (EÚvodic tñs ÁnoÔELXTIXñs Dewplaç ):
SM II, 120 ; Mey. n° 73.
(67) Sur le jugementdes divergencesdoctrinales (ſlepi tñs xpioews tõv dlapuvoúvtwV
Év toiç dóyuao.v ): SM II, 120.
(68) Que la quantité est inséparable de la substance première ("Oti tñs apáms ovoias
åxupuotoç ń nogórns): SM II, 120.
(69) Sur la démonstration par l'impossible (ſlepi tñs Ol' áðuvátov ảnodelcew ): SM II,
121.
(70) Sur les choses qui adviennent en vue de quelque raison (ſlepi tõv évexá tou
riyvouévwv) : SM II, 121.
(71) Sur la recherche concernant le mot et sa signification (ſlepi tñs xat' ovoua vai
onuaivóuevov (ntoew ( ) : SM II, 121.
Traités de philosophie morale :
(72) Contre Favorinus sur Socrate (Mpòs tov Qabwpivov xarà Ewxpátous): SM II,
121. Le titre de ce traité pose problèmeet fut corrigé par 148 E . Zeller, Die Philosophie der
Griechen III 2, Leipzig 1923, p. 78 n. 2, et Brinkmann 60 en Mpós tóv Dabwpivov xatà
Ewupátouc. Il pourrait s'agir là de la critique de Galien au livre de Favorinus intitulé Sur
Socrate et son opinion sur l'art d 'aimer (ſlepi Ewxpátouç xai tñs xar' aútov ÉpwtixñS
Téxins) que mentionne la Souda, t. IV , p .690, 23-25 Adler. Il conviendrait alors de traduire
ce titre par En réponse à l'ouvrage de Favorinus Contre Socrate, ou bien , avec xará + gén.
employé au sens de nepí + gén ., Contre l'ouvrage de Favorinus sur Socrate .
(73) Sur la fin de la philosophie (ſlepi toŨ xatà ouoooplav térovs): SM II, 121.
(74 ) Sur les relations des conférenciers avec leurs auditeurs (Ilɛpì tñs TūV ÉTLOELXVU
HÉVWV < npòc> toùç åxovovtaç ouvovoiac): SM II, 121.
(75) Sur ceux qui enseignentfrauduleusement (ſlepi tūv åvayeyuwoxóvtwv Náopa): SM
II, 121.
( 76 ) Sur l'égalité entre les fautes et le châtiment (ſlepi đuaptnuárwv xai xoáoews
ioórntoc): SM II, 121.
(77) Sur la consolation (ſlepi napauvdias): SM II, 121.
(78 ) Sur la diatribe dans la demeure deMénarque contre Bakkhidès et Cyrus (ſlepi tñs Év
aủañ Mevápxov dlatpibñs após Baxxionv xai Kūpov) : SM II, 121. Ces personnages sont
tous également inconnus.
G3 GALIEN DE PERGAME 463
(79) Sur la participation aux dialogues (ſlepi tñc év tolç olaróyouç ouvovoiaç) : SM II,
121.
(80) Contre les orateurs de l'agora (Ipoç toùç åyopalous önropas): SM II, 121.
(81) Sur le plaisir etla peine (ſlepi ń dovñs xai tróvou ): SM II, 121.
(82) Des choses conformes à chaque fin poursuivie dans la vie (ſlepi tõv åxonoúowy
ÉxúOTŲ TÉRELBíwv): SM II, 121.
(83) Sur les propos couramment tenus contre les membresdes écoles (ſlepi tõv onuooiq
Önévtwv TPòç toùG Ånò tõu aipłoewv): SM II, 121.
(84 ) Sur la concorde (ſlepi ouovolaç): SM II, 121.
(85) Surla pudeur en 2 livres (ſlepi aidoūs):SM II, 121.
( 86 ) Sur les propos couramment tenus contre les flatteurs (ſlepi tõv onuoolą öndévtwv
xanh xocdxv): SM II, 122.
(87) Sur la calomnie où il est aussi question dema propre vie (Ilepi tñs olaborñs év
xai nepi toũ idiou Blou) : SM II, 122.
(88 ) Les sept fous en un livre (Kpovíoxol ÉTTà év Éví) : SM II, 122 . Le terme grec
Kpovíoxos, diminutif de Kpovos , serait ici employé au sens de « vieux fou » , « vieux
radoteur» , voir Garofalo et Vegetti 40, p. 88 n . 52.
(89) Sur les propos couramment tenus du temps de Pertinar (Iepi tõv éni Neptívaxos
Onuogia ondéVTwv) : SMII, 122. Il s 'agit du Pertinax qui profita de la crise consécutive à
l'assassinat de l'empereur Commode pour parvenir à la tête de l'empire. Son règne ne dura
que fort peu de temps, de janvier à mars 193.
(90) Jusqu 'à quel point faut-il se soucier de la considération et de l'opinion du grand
nombre (Méxpl Tógov tñs napà tots homolç ryuñs xai dóens ppovtioTÉOV łotiv) : SM
II, 122.
(91) Sur la rédaction des testaments (ſlepi dlaOnxőv TOLÍOEWC): SM II, 122.
Sur Platon et la philosophie platonicienne :
(92) Sur l'école de Platon (ſlepi tñs Naátwvos aipéoew ): SM II, 122.
(93) Contre ceux qui ont une autre opinion que Platon sur les Idées en 3 livres (Ipós
TOÙÇ Étépws ñ nátwv tepi tõv ideāv dótavrac) [?]: SM II, 122.Le texte grec est ici peu
sûr puisque la tradition manuscrite fait en réalité mention de deux traités (Ilpos ToùÇ ÉTÉPOUS
Ô Nátwv: ſlepi rõv idiwy do avtwy). Le premier de ces titres cependant est inintelligible et
le second désigne un traité déjà cité (voir nº 23). 149 K . Kalbfleisch , Philologus 55, 1896 ,
p .690, et 150 J. Ilberg, RhM 52, 1897, p. 597 n. 2, ont donc proposé la correction adoptée ici.
(94) Sur la théorie logique selon Platon (ſlepi tñs xarà Mátwva loyixñs Dewpías) :
SM II, 122.
(95) Synopsis des dialogues platoniciens en 8 livres (I/AATWVLXőv olaróywu oúvodu ):
SM II, 122. Le texte grec de cette Synopsis est perdu. Hunayn précise (Berg. n° 124) que, sur
les huit livres que comptait cet ouvrage, seuls les quatre premiers furent traduits en arabe par
ses prédécesseurs. On apprend ainsi que le livre I était consacré au Cratyle, au Sophiste , au
Politique, au Parménide et à l'Euthydème, le livre II aux quatre premiers livres de la Répu
blique (voir supra n° 28 ), le livre III aux livres cinq à dix de la République et au Timée, le
livre IV aux Lois . De ces traductions arabes, seuls ont été conservés des fragments pour les
sommaires consacrés au Timée, à la République et aux Lois (voir supra nº 27, 28 et 29 ).
( 96 ) Sur les transitions dans le Philèbe (ſlepi tõv Év Olańbw metabáoewv) : SM II, 122. .
(97) Sur les parties et les facultés de l'âme en 3 livres (ſlepi tõv tñs quxñs pepőv xai
Ouvápewv) : SM II, 122.
Sur Aristote et la philosophie aristotélicienne:
(98) Commentaire au De interpretatione en 3 livres (Eiç tò Nepà Épunvelaç útrouvń
uata ) : SM II, 118 et 122 ; Berg. n° 128.
464 GALIEN DE PERGAME G3
(99) Commentaire aux Premiers analytiques en 8 livres (Ilpotépwv åvalutix V ÚNO
uvnuata ) : SM II, 118 et 122 . Sur les huit livres que comptait ce commentaire, Galien dit en
avoir consacré quatre au premier et quatre au second livre des Premiers analytiques.
(100 ) Commentaire aux Seconds analytiques en 11 livres (AEUTépwv ávautixWV
únouvnuata ) : SM II, 118 et 122. Galien déclare cette fois avoir consacré six livres de com
mentaire au premier livre et cinq au second.
(101) Commentaire aux Catégories en 4 livres (Eic tàs déxa xatnyopias únouvń
uara ): SM II, 118 et 123. Il s 'agit là d'un commentaire partiel ne concernant que les dix
premiers chapitres des Catégories, seuls considérés par Galien comme authentiques.
( 102) Commentaire au Sur l'affirmation et la négation de Théophraste en 6 livres (Eic tò
trepà xatabáoews xaiáno ágewÇ Okoopáotov únouvnuara ) : SM II, 118 et 123.
(103) Commentaire au Sur la quantité en 3 livres (Eiç tò nepi toŨ nooaxūç): SM II, 123.
(104) Commentaire au livre d 'Eudème Sur l'expression en 3 livres (Eic tò lepi RÉEEWS
ter plusieurs livres figure bien au nombre des æuvres du philosophe péripatéticien Eudème
(NE 93 ), originaire de Rhodes et contemporain de Théophraste .
Sur les stoïciens et la philosophie stoïcienne:
(105) Sur la théorie logique selon Chrysippe en 3 livres (Ilepi tñs xarà XpúoutTOV
loyixñs Dewpiac): SM II, 123.
(106 ) Commentaire à la syllogistique de Chrysippe en 4 livres (Tñs Xpuoinnou outro
YLOTLXÑS Únouvnuata ): SM II, 119 et 123. Ce commentaire était composé de trois livres
consacrés à la première syllogistique et d'un à la seconde.
(107) Sur la faculté et la théorie logiques en 7 livres (ſlepi tñs doyixñs ouválewç xal
Dewpiac): SM II, 123.
( 108) De l'utilité des observationssur les syllogismes, livrespremier et second (ſlepi tñs
Xpelaç tūv eis toùç outdoyiouovs dewpnuátwv npõrov xaideútepov): SM II, 123.
(109) Que la géométrie analytique est supérieure à celle des stoïciens ("Oti ń yewletPixn
åvalutixn due vwv tñs tūv Etwixõv): SM II, 123.
Traités relatifs à la philosophie d'Épicure:
(110 ) Sur le bonheur et la vie heureuse selon Épicure en 2 livres (Ilɛpi tñs xar' 'Enixov
pov etdaluovoc xaiparapiou Blou): SMII, 123.
(111) Sur le plaisir obscurciselon Épicure (Nepi tñs xat' 'Enixovpov ozaupou <uévng>
noovñs ) : SM II, 123. Ce titre fait allusion au jugement d 'Épicure selon lequel ne nous par
viennent de certains plaisirs minimes que des impressions notablement affaiblies ou obscur
cies. Voir 151 H . Usener, Epicurea , Leipzig 1887 , p . 289, fr. 441, et 152 R . Philippson ,
« Epicurea » , RhM 87, 1938, p. 169-177 (surGalien p. 170 sqq.).
(112) Que les causes productrices du plaisir ont été imparfaitement décrites par Épicure
("Oti tà mointixà tñs ňoovñs éMitās 'Etrixoúpw NÉNEXTAI): SM II, 123.
(113) Sur l'école hédoniste (ſlepi tñs ń dovexñs aipéoewÇ) : SMII, 124.
(114 ) Si la physiologie est utile à la philosophiemorale (Ei ń prololoyla xenowoc eis
tņv ňocxnu piloooplav): SM II, 124.
(115 ) Sur les neuf livres de Métrodore contre les sophistes (ſlepi tõv npoç tous
Ooplotás év véa > Mntpooápov ) : SM II, 124. Galien fait ici allusion à Métrodore de Lamp
saque, élève et ami d 'Épicure, auteur d 'un traité contre les sophistes en neuf livres (voir Dio
gène Laërce X 23) .
(116 ) Lettre à l'épicurien Celse (PC67 B ] ('EnloTONń npòs Kéroov 'Enixoúpelov):
SM II, 124. Ce philosophe épicurien qui vécut au temps de Néron ne doit pas être confondu
avec l'auteur du De re medica, son homonyme, ni avec le philosophe combattu par Origène
dans son Contre Celse.
G3 GALIEN DE PERGAME 465
(117) Lettre de l'épicurien Pudentianus ('Enlotorn MovdevtiAVOŨ 'Etrixoupelov ) : SM
II, 124.
Traités rhétoriques :
(118) Sur le vocabulaire des écrivains attiques en 48 livres (ſlepi tõv napà toiç 'Attl
xoiç ourypapeŰOLV óvouátwv) : SM II, 124 .
(119) Sur le vocabulaire courant d'Eupolis en 3 livres (ſlepi tõv nap' Eúnóhol
moltixõv óvouátwv) : SM II, 124.
(120) Sur le vocabulaire courant d'Aristophane en 5 livres ( ſlepi tõv nap' 'Aplotopável
notixőv óvouátwv) : SM II, 124 .
(121) Sur le vocabulaire courant de Cratinos en 2 livres (ſlepi tõv napà Kpativw
nohtixõv óvouátwv): SM II, 124 .
(122) Exemples de vocabulaire propre aux auteurs comiques (Tūv idiwv xwuixőv
óvouátwvnapadeiyuara ) : SM II, 124 .
(123) Si l'ancienne comédie est une lecture utile pour les étudiants (El xoñoluov
åváyvwoua toiç TOLÒEVOLÉVOLS ń nałalà xwuwdía ): SM II, 124 .
(124) Contre ceux quiblâment les auteurs de fautes de langage en 6 livres (ſpoç toùç
ÉTLTY @ vtaç tolç ooloxicovol tſ owvſ) : SM II, 90 et 124 ; Berg. n° 129.
(125) Sur les impropriétés en attique ('Attixõv napáonuos (ou conuwv]): SM II, 124.
(126 ) Sur la clarté etl'obscurité (ſlepioaonveíaç xaiđoapeias): SM II, 124.
(127) Si l'on peut être à la fois critique et grammairien (El dúvatal tiç elval xpitixÒS
xaì rocuuaTuxóc) : SM II, 124.
Autres :
( 128) Explication du vocabulaire en usage chez les auteurs attiques et chez les comiques
('EEńmous éx twv 'Attix @ V Ourypapéwv xadánEp Éx tbv xwlixWv) : SM II, 90. Peut- être
cet ouvrage se confond-il avec deux autres traités cités plus haut séparément (voir supra
nº 118 et 122).
(129) Des æuvres authentiques et inauthentiques d 'Hippocrate (llepi tây yunoiwv xai
voowv ' Intoxpátouç ourypaquátwv). Voir 153 J. Mewaldt, « Galenos Über echte und
unechte Hippokratika » , Hermes 44 , 1909 , p . 111-134 .
E. Euvres considérées comme inauthentiques :
(130 ) Sur l'histoire philosophe (ſlepi piogófov iotopíac): t. XIX, p. 222-345 K . 154 H .
Diels, Doxographi Graeci, 2. Aufl., Berlin 1929, p. 233-258 ; 595-648 ( E ). 155 S. Mekler,
« Zu Pseudogalens Minooogos iotopía » , dans Festschrift Theodor Gomperz, Wien 1902 ,
p. 300 - 302 . Sur l'histoire et la tradition du texte, voir 156 J. Mansfeld et D . T . Runia , Aetiana .
The method and intellectual context of a doxographer, I : The Sources, Leiden 1997, p . 141
sqq.
(131) Des parties de la philosophie (ſlepi eidāv blooopiac). Seuls sont conservés quel
ques fragments en grec . 157 M . Wellmann , Galeni quifertur departibusphilosophiae libellus,
Gymn. Progr. Berlin 1882.
(132) Sur la meilleure secte à Thrasybule (Ipoc Opaoúbovlov nepì đpiorns aipé
GEWC) : t. I, p. 106 -223 K . Daremberg 44, Euvres, II (trad. fr.). 158 I. v. Müller, « Über die
dem Galen zugeschriebene Abhandlung Hepi đpiorns aipéoewÇ» , SBAW 1898, p. 53- 162.
(133) De l'âme. Seule est conservée une traduction en hébreu établie à partir de l'arabe.
Voir 159 A . Jellinek, Galens Dialog Über die Seele. Aus dem Arabischen übersetzt von
Jehuda ben Salomo Alcharisi, Leipzig 1852 (trad . all.), et 160 E . Bertola, « Un dialogo ps.
Galenico sui problemidell'anima»,RFN 60, 1968, p. 191-210
(134 ) Que les qualités sont incorporelles. Voir 161 E. Orth , « Les æuvres d 'Albinos le Pla
tonicien » , AC 16, 1947, p. 113 sqq.; 162 M . Giusta, L'opusculo pseudogalenico : "Oti ai
466 GALIEN DE PERGAME G3
TOLÓIntes dobuator, édition ettraduction, Torino 1976 ; 163 R . B . Todd, « The Author of De
qualitatibus incorporeis. If not Albinus, who ?»,AC 46 , 1977,p. 198-204.
( 135) Réponse à ceux qui écrivent sur les choses semblables:Mey. n° 74. Pour ce traité ,
comme pour les suivants, nous ne disposons que de l' indication du titre donnée par Meyer
hof 32.
(136) Que l'âme est immortelle :Mey.n°45.
(137) Sur l'algèbre en 3 livres :Mey .nº60.
( 138) De la miséricorde du créateur tout-puissant et supérieur à l'égard des hommes:
Mey. n°65. Il s'agit là d'un faux vraisemblablement composé par un médecin chrétien .
(139) Où il est question de la fonction du soleil, de la lune etdes étoiles: Mey. n° 71.
VÉRONIQUE BOUDON .
4 IUNIUSGALLIO (= L .ANNAEUS NOVATUS) RE A 12 PIR2 1 757 MI
Novatus, frère aîné du philosophe Sénèque, fut adopté dans son testament par
L . Iunius Gallio (** G 5), rhéteur proche de son père , Sénèque le rhéteur. Cette
adoption , attestée en 52 , semble postérieure à la mort de Caligula, comme le
montre le De ira . Iunius Gallio commença une carrière politique : il est questeur
sous Tibère, tribun et édile sous le règne de Caligula, proconsul d 'Achaïe sous le
règne de Claude. Il devient enfin préteur sous Néron ; en 51-52, il occupe un
poste prétorien et est consul suffect en 55. Cette carrière ralentie semble être due
aux liens de cette famille avec Séjan , préfet du prétoire mis à mort sous Tibère
(M . Griffin , Seneca, a philosopher in politics, 2e éd., Oxford 1991, p. 44-45 ),
tandis que la présence de Sénèque aux côtés de Néron a pu la développer.
Gallion survécut à lamort de Sénèque,mais fut quelque temps après contraint de
se donner la mort. Gallion est mentionné à plusieurs reprises dans les Lettres à
Lucilius ; il est le dédicataire de plusieurs traités de Sénèque : De ira, De uita
beata , De remediis fortuitorum .
Cf. O . Rossbach , art. « L . Annaeus Novatus» 12 , RE I 2, 1894, col. 2236
2237 .
MICHÈLE DUCOS.
5 IUNIUSGALLIO (L . -) REI77 MI
IuniusGallio est un orateur contemporain de Sénèque le rhéteur. Sa naissance
semble se situer après 33a, mais nous ne savons rien de plus sur sa formation et
sa carrière. Qualifié de « déclamateur philosophe» (E . Norden , Die antike
Kunstprosa, Leipzig 1918 , t. I 2, p. 250, 2) il s' intéresse aux lois non écrites ou
bien affirme que tous les hommes sont égaux par nature. Ces indications si géné
rales semblent relever de la « diatribe» ; elles ne permettent pas de rattacher
Iunius Gallio à une école philosophique précise .
Il adopta L . Annaeus Novatus (3G 4), le frère aîné de Sénèque le philosophe.
Cf. K . Gerth, art. « Iunius Gallio » 77,RE XI, 1, 1918; col. 1035- 1039.
MICHÈLE DUCOS .
G8 GAUDENCE 467
6 GALLUS IV ?
Dédicataire de la Vie d'Aristote de Ptolémée (sur ce document, voir DPHA I,
p . 414-416). La version arabe contenue dans le manuscrit Istanbul Aya Sofya
4833 contient une préface adressée à Gallus. Flavius Claudius Constantius
Gallus, frère de l'empereur Julien et César d 'Orient entre 351 et 354 , auquel a
pensé M . Plezia , pourrait être le dédicataire de Ptolémée,mais le personnage, au
témoignage de son frère, s' intéressait davantage à la chasse qu 'à la philosophie .
La datation de Ptolémée étant elle -même très incertaine et Gallus n ' étant pour
nous qu 'un nom , on se gardera de toute affirmation péremptoire .
RICHARD GOULET.
GALLUS FADIUSGALLUS
GALLUS SULPICIUSGALLUS
GARTYDAS DE CROTONE V -IV
Scholarque pythagoricien selon Jamblique, V. pyth . 36 , 265, p . 142, 10 -24
Deubner; il existe cependant différentes leçons pour ce nom (p. 142, 21) : Tydas
(Kiessling); Gorgidas (Nauck); Gortydas (Bentley) ;Gorgiadas (Boeckh), tiré
d 'un rapprochement avec Claudien Mamert, De statu an. II 7. 1 P. Corssen ,
« Die Sprengung des pythagoreischen Bundes», Philologus 71, 1912, p. 332
352, notamment p . 349, propose en fait de lire Gartydas chez Jamblique etGor
giadès dans le passage de Claudien Mamert.
Selon Jamblique, la succession des scholarques pythagoriciens devrait être
établie de la façon suivante : Pythagore, Aristaios (» A 341), Mnémarchos,
Boulagoras (P- B 55), à l' époque duquel survint le sac de Crotone, puis Gartydas
qui, revenant d 'un voyage commencé avant le début de la guerre, serait mort de
chagrin en constatantla ruine de sa patrie. L 'événement pourrait être daté en 388
av. J.-C . si l'on suit la reconstruction de 2 A . Rostagni, « Le vicende della scuola
pitagorica secondo Timeo » , AAT 49, 1914, p . 554-574, repris dans Scritti
minori, t. II, 1 : Hellenica -Hellenistica, Torino 1956 , p. 28 -50 .
BRUNO CENTRONE.
8 GAUDENCE RE 7 Ive ?
Musicographe d'époque incertaine : on l'a situé entre l'astronome et théori
cien Claude Ptolémée, au II s., et le ve,mais de préférence au Ive, au temps du
musicographe Alypius, auquel il s'apparente pour ce qui touche à la notation
musicale.
Éditions critiques et traductions. Editio princeps : 1 M .Meibomius, Anti
quae Musicae Auctores septem I, Amsterdam 1652, p. 1-29 (avec trad. latine et
notes critiques) ; réimpr. dans la collection «Monuments of Music and Music
Literature in Facsimile» II/51, New York 1977 ; 2 K . von Jan , Musici Scriptores
Graeci, Leipzig 1895, p. 327-355 ; réimpr. Hildesheim 1962; 3 A . Doucakis,
thèse de l'École Pratique des Hautes-Études, Paris 1974 (avec trad . française );
4 L . Zanoncelli, La manualistica musicale greca, Milano 1990, p. 327-350 (avec
trad . italienne ; reproduit le texte de von Jan 2 ,mais avec un apparat différent).
468 GAUDENCE G8
Autres traductions. Latines: Une traduction latine, non conservée, est attri
buée à un certain Muc(t)ianus par Cassiodore (Instit. II, 5), son contemporain.
Italienne: Une traduction anonyme du XVI° s.,copiée par Ercole Bottrigari, a été
attribuée tantôt à Hermann Cruserius, tantôt à Joh . Bap. Augius de Bologne, en
1545, par von Jan 2 , p. 326 ;mais cette attribution est rejetée par 5 F . Alberto
Gallo , dans Catalogus translationum et commentariorum .Medieval and Renais
sance Latin Translations and Commentaries. Annotated Lists and Guides 3,
Washington 1976 , p . 70. Française : 6 Ch .-Ém . Ruelle, Collection des auteurs
grecs relatifs à la musique 5, Paris 1895, p . 53-91 (avec un essai de reconstitu
tion des 14 diagrammes de la section XV laissés en blanc dans les manuscrits ,
p . 93-102).
Bibliographie. Outre les préfaces et commentaires aux éditions et traductions
citées (en particulier Doucakis 3), voir 7 A .Möhler, Die griechische, griechisch
römische und altchristlich -lateinische Musik . Ein Beitrag zur Geschichte des
gregorianischen Chorals, coll. « Römische Quartalschrift » 9. Supplement Heft,
Roma 1898, p . 23 ; 8 Christ-Schmid -Stählin , GGL VII 2/2 (6e éd. 1924 ), p . 895
($ 770), et 9 G . Reaney, dans Die Musik in Geschichte und Gegenwart, t. IV ,
Kassel 1955 , p. 1469 -1470 (avec bibl.).
Gaudence – surnommé CavôÉVTLOG Diaboobos en tête de tous lesmanuscrits
de son unique traité – est l'auteur d'une Eloaywy åpuovixń en partie incom
plète mais qui présente néanmoins une bonne vue d 'ensemble de la théorie
musicale grecque en usage à son époque, à l' intention de ceux quiallient l'expé
rience de la pratique musicale au raisonnement abstrait (l' indication des sections
est celle de von Jan 2, suivi par Ruelle 6 ): son et intervalle (I-IV ), genres (diato
nique-chromatique-enharmonique), tétracordes et systèmes, classification des
sons en homophones (à l'unisson ), consonants , dissonants et paraphones (inter
médiaires entre les sons consonants et dissonants ), limma et apotomé (demi-tons
mineur et majeur) ( V -VIII ; XIV -XVIII) proportions arithmétiques des conso
nances (IX -XIII), sons fixes et sonsmobiles du Grand Système (XVIII) , formes
ou aspects de l’octave (XIX ), notation musicale (XX -XXII: exposé incomplet).
De ce synopsis il ressort que les sections « canoniques» sur les métaboles
(modulations de rythme ou d'un genre à l'autre) et la mélopée (technique de la
composition )manquent.
Sources. Les auteurs utilisés par Gaudence sontpeu nombreux, selon Zanon
celli 4 (p. 307-308 ): Aristote, Aristide Quintilien (111®-IVe s.), Aristoxène surtout,
dontil fait siennes la division de la quarte en 5 demi-tons et la classification des
consonances en quarte, quinte , octave ; octave + quarte , octave + quinte et
double octave. De ce fait, Gaudence est considéré comme un théoricien d 'obé
dience aristoxénienne plutôt que pythagoricienne, même s'il rapporte la légende
de la découverte des consonances par Pythagore (XI: « Pythagore et les forge
rons » ) et retient le postulat pythagoricien de l' indivisibilité du ton en deux demi
tons égaux .
Tradition manuscrite. Elle est recensée in extenso par 10 Thomas J.Mathie
sen, Ancient Greek Music Theory. A Catalogue raisonné ofManuscripts, coll.
G10 GÉDALEIOS 469
« Répertoire International des Sources Musicales » 11, München 1988, qui décrit
31 manuscrits dont 21 du XVI° siècle. Seuls 2 mss sont du XIIe siècle . Cf. aussi
von Jan 2 et Ruelle 6 .
YVES CHARTIER .
9 GAUROS III-IV
Dédicataire de l'ouvrage pseudo - galénique Ad Gaurum quomodo animetur
fetus, édité par 1 K . Kalbfleisch , « Die neuplatonische , fälschlich dem Galen
zugeschriebene Schrift [ pós Taūpov nepi toŨ TÕÇ ŠupuxoũTAI tà Šubova » ,
APAW , 1895, p . 33-62. Kalbfleisch y a soutenu que le véritable auteur de cet
ouvrage aurait été Porphyre , et la plupart des historiens se sont ralliés à cet avis.
Si tel est le cas, Gauros – dont nous ne savons rien par ailleurs – aura été élève
de Porphyre , probablement à Rome, après la mort de Plotin (270 de notre ère ).
Voir s.v. Gédaleios.
Cf. 2 J. Bidez, Vie de Porphyre, le philosophe néo-platonicien, avec les frag
ments des traités Iepi ayarjátwv et De regressu animae, Gand 1913, réimpr.
Hildesheim 1964 , p . 104 -105 ; 3 R . Beutler, art. « Porphyrios » ,RE XXII 1, 1953,
col. 312 ; 4 J. Bouffartigue et M . Patillon , Introduction à Porphyre, De l'absti
nence, t. I, CUF, Paris 1977, p. XIX sqq. Traduction française avec notes de l'Ad
Gaurum par 5 A - J. Festugière, La Révélation d 'Hermès Trismégiste, t. III : Les
Doctrines de l'âme, Paris 1953, réimpr. Paris 1986, Appendice II, p . 265-305.
Voir aussi W . Deuse , Untersuchungen zur mittelplatonischen und neuplato
nischen Seelenlehre, coll. AAWM /GS, Einzelveröffentlichung 3, Wiesbaden
1983, 278 p.
MICHAEL CHASE .
12 GELLIUS PUBLICOLA (L . -) RE 17
Né vers 136a et mort vers 55a, L . Gellius Publicola accomplit une carrière
politique dont nous ne connaissons que quelques étapes; il fut préteur pérégrin
en 94a (cf. IG IX 483 = Dittenberger, Sylloge 327) et proconsul l'année suivante ,
en 93a. Consul en 72a,il participa à l'expédition contre Spartacus et à la guerre
contre les pirates. Il fut élu censeur en 70 ; partisan de Cicéron au moment de la
conjuration de Catilina, il propose de lui décerner une couronne civique (Aulu
Gelle., Noct. Att. V 6 , 15) et en 59a, il s 'oppose à César, alors consul. Cicéron
(Brut. 174) souligne la longueur de sa vie , en mentionnant qu 'il fut un orateur
qui n 'eut guère de succès.
Si la carrière politique de L . Gellius fut importante, son activité philosophique
est plus limitée. Elle se réduit à une réunion regroupant des philosophes à Athè
nes, en 939. Cette réunion est mentionnée dans le De legibus (I 20 , 53) par
Atticus qui déclare tenir cette affirmation de Phèdre, le philosophe épicurien . L .
Gellius convoqua tous les philosophes qui se trouvaient alors dans cette ville, les
réunit en un même lieu et leur recommanda vivement de mettre fin à leurs dis
sensions: « s 'ils avaient l'intention de ne pas passer leur vie en querelles, l'af
faire pouvait donner lieu à un accord, et en même temps, il leur promettait son
aide, si quelque accord pouvait se faire entre eux » . Pour Cicéron , il s'agit là
d 'une anecdote amusante, qui a donné lieu à de nombreuses plaisanteries. Elle ne
révèle pas les connaissances philosophiques de L . Gellius,mais son incapacité à
comprendre les différentes écoles et leurs thèses.
Cf. F. Münzer, art. « L . Gellius Poplicola » 17, RE VII 1, 1910 , col. 1001
1003, et RESuppl. III , 1918, col. 542.
MICHÈLE DUCOS.
472 GÉMINA G 13
13 GÉMINA RESuppl. XV : 2 M III
Une des femmes fort attachées à la philosophie qui étaient dévouées à Plotin
(Porphyre, Vie de Plotin 9 , 1- 2). C ' est chez elle qu'habitait Plotin . Sa fille
Gémina (> G 14) appartenait au même cercle .
H . D . Saffrey (« Pourquoi Porphyre a-t-il édité Plotin ? Réponse provisoire », dans Por
phyre, La Vie de Plotin, t. II, p. 32) pense qu 'il pourrait s 'agir d' Afinia M . F. Gemina
Baebiana, veuve de l'empereur Trébonien (cf. H .Dessau, ILS 527 = CIL XI 1927).
LUC BRISSON .
grande mesure des éditions antérieures. Il faut encore faire référence à l'édition
de Manitius, dans la mesure où l' édition Aujac est divisée en chapitres et en sec
tions, sans comporter de linéation .
Traductions. Hébraïque : Celle de Moïses b . Samuel ibn Tibbon (fl. 1240
1283) en 1246 était fondée sur une version arabe aujourd'hui perdue dans
laquelle l’Isagogè était présentée comme une introduction à l'astronomie par
Ptolémée (voir Manitius 3 , p . XXII ; Aujac 1, p. CIV -CV ) ; latine : Gérard de Cré
mone (ca 1170) à partir de l'arabe (voirManitius 3, p . XVIII-XXI, et p. 285-289;
Aujac 1, p . CV-CVIII) ; Abraham de Balmes (mort en 1523) d' après l'hébreu
(voir Manitius 3 , p .XXI-XXII ; un fragment est conservé à Milan , à la Biblio
thèque Ambrosienne, P 167 sup., fol.47 et 49) ; Thomas Saville (mort en 1593):
elle est conservée à la Bibliothèque Ambrosienne de Milan , R 124 sup., fol. 1-48
et P 227 sup . fol. 6 -49) ; 5 Edo Hilderich ( 1533- 1599), Gemini De Apparentibus
Coelestibus, Altdorf 1590 ; Leiden 1603 ; il en existe une version révisée publiée
avec les éditions de Denys Petau (1583- 1652) dans 6 Uranologion, Paris 1630 ,
p . 1-70 ; 7 Opus de doctrina temporum , Antwerpen 1703, p . 1-39 ; et 8 Patrolo
gia Graeca, vol. XIX , p. 745 -867 ; française : 9 N . Halma, Chronologie de Pto
lémée, II, Paris 1819, p . 7 -88 ; Aujac 1 , p. 2 -113.
Commentaires. Manitius 3, p . 252-283 ; Aujac 1, p . 119- 168 .
Titre et genre littéraire. L 'opinion commune considère le traité de Géminus
comme une introduction aux phénomènes célestes telle que les étudie l'astro
nomie . Un point de vue différent a cependant été proposé par 10 F. Blass , De
Gemino et Posidonio, Kiel 1883, p. 8 , et relancé récemment, avec de nouveaux
arguments, par 11 R . Goulet, Cléomède, Théorie élémentaire , Paris 1980, p . 18
20 : l'Isagogè serait une introduction au poème astronomique d ' Aratus, Les Phé
nomènes. Goulet met également en évidence le caractère isagogique des traités
auxquels celui deGéminus se rattache.
Contenu. L 'Isagoge est un survol élémentaire de l'astronomie en dix-huit
chapitres. Il contient une description des signes du zodiaque (chap . 1 - 2), une liste
des constellations (chap. 3 ) et une explication des levers et des couchers des
étoiles (chap . 7 , 13 , 14). On y trouve également les exposés habituels sur la géo
graphie terrestre et céleste (chap. 4, 5, 15 , 16 ), les phases de la lune (chap . 9 ), les
éclipses de la lune et du soleil (chap. 10 et 11), ainsi que sur les variations dans
la durée des jours et desmois (chap . 6 et 8 ). L 'examen du mouvement planétaire
(chap. 12) reste élémentaire . Au chap. 17 , Géminus dénie aux astres toute
influence sur les prédictionsmétéorologiques. Enfin , au chap. 18, on trouve une
étude sur la constitution des calendriers.
On considère que le calendrier, ou parapegma, qui figure en appendice, est
emprunté à une source plus ancienne. Il fut mis à profit par Joseph Scaliger
(1540 - 1609) dans ses célèbres études chronologiques, et par d 'autres auteurs à sa
suite ; voirManitius 3 , p. 282- 283, et 12 A.Grafton, Joseph Scaliger : a study in
the history of classical scholarship , II: Historical Chronology, Oxford 1993,
p. 411-412 . Voir également, sur le calendrier : 13 B . L . Van der Waerden ,
474 GÉMINOS G15
« Greek Astronomical Calendars, V : The motion of the sun in the parapegma of
Geminos and in the Romaka-Siddhanta » , AHES 24, 1985, p . 231-239.
Pseudo-Géminus ? Le principal problème soulevé par l'Isagoge est le fait
qu 'il est d'un caractère beaucoup plus élémentaire que les autres textes attribués
à Géminus. La solution la plus radicale proposée pour expliquer cette divergence
est celle de 14 K . Reinhardt, Poseidonius, München 1921, p . 178 - 183. Selon lui,
le traité serait antérieur à Posidonius et son auteur serait un pseudo -Géminus
dont l'ouvrage aurait été classé par erreur avec les auvres d'un mathématicien
de plus haut niveau portant ce nom . Reinhardt a fait observer avec pertinence
l' absence de toute référence à Posidonius dans l’Isagogè, alors qu 'y sont cités à
plusieurs reprises des auteurs hellénistiques comme Cratès de Mallos (2C 203)
ou Pythéas de Marseille, qui avaient donné des versions populaires de la cosmo
logie et de la géographie. Les vues de Reinhardt ont trouvé un écho chez certains
auteurs, dont 15 W . Theiler, Poseidonios : Die Fragmente , Berlin 1982, t. II,
p . 134 et 155, mais elles sont d’un radicalisme exagéré. Rien n'empêchait
Géminus, peut-être pour des raisons professionnelles, de composer cet ouvrage
d' introduction , tout en poursuivant des études en mathématiques et en philo
sophie des sciences. On peut d'ailleurs relever, ainsi qu'il sera suggéré plus loin ,
des liens entre l'Isagoge et un passage de Géminus sur le statut de l'astronomie
qui abrège un développementde Posidonius.
La Sphère de Proclus. Aux Xve et Xviº siècles, quatre chapitres de l'Isagoge
de Géminus (dans l'ordre : les chap . IV , V , XV et III) circulèrent de façon sépa
rée comme étant La Sphère de Proclus, le néoplatonicien du ve siècle. Entre
1490 et 1620 parurent huit traductions latines et cinq traductions vernaculaires
de cet opuscule. La traduction de Thomas Linacre (ca 1460- 1524) connut plus de
quarante éditions. Même après la publication de l'ouvrage de Géminus, on
continua à croire que Proclus avait emprunté ces chapitres à Géminus, alors qu 'il
est aujourd'hui manifeste que ces chapitres n 'ont été séparés et attribués à Pro
clus qu 'au cours du XVe siècle. Une description des innombrables traductions
sera publiée dans notre article du Catalogus Translationum et Commentariorum ,
vol. VIII. Sur les manuscrits grecs et quelques-unes des premières éditions, voir
16 R . B . Todd, « The Manuscripts of the pseudo-Proclian Sphaera», RHT 23,
1993, p. 57-71.
(2 ) L ’abrégé mathématique
Dans son commentaire sur le premier livre d’Euclide, Proclus rapporte les
vues de Géminus sur les mathématiques en mettant à profit un abrégé aujour
d 'hui perdu. L 'ouvrage portait peut-être comme titre Táxis ou Oewpía tov
Madnuárwv (voir les titres donnés par Pappus, Collectio VIII 3, p . 1026, 8 -9
Hultsch, et Eutocius, Commentaria in Conica, p. 170, 24- 26 Heiberg). Cet
ouvrage devrait dépendre d'ouvrages perdus de Posidonius et Proclus a pu lui
emprunter ce qu'il connaît du stoïcien d'Apamée. Voir 17 É. Bréhier, « Posido
nius d ’Apamée, théoricien de la géométrie » , REG 27, 1914, p. 44 -58 .
L ' étude la plus complète sur les vestiges de Géminus chez Proclus reste celle
de 18 K . Tittel, De Gemini Stoici studiismathematicis quaestiones philologae,
G 15 GÉMINOS 475
Leipzig 1895. Voir également 19 P. Tannery , La géométrie grecque, Paris 1887,
chap . 1 et 3 ; 20 J. G . Van Pesch , De Procli fontibus, Leiden 1900 , p . 87- 113 ;
Tittel 4 , col. 1040 -1050 ; Aujac 1, p . LVII-LXIV ; et 21 G . Aujac, « Une source de
la pensée scientifique de Proclus : Géminos de Rhodes» , Diotima 4, 1976 , p . 47
52. Sur la possibilité que Géminus ait été connu par les Arabes, voir 22 P.
Tannery , « Le philosophe Aganis est-il identique à Géminus ?» , BiblMath , nou
velle série, 3 , 1901, p . 9 -11, repris dans ses Mémoires scientifiques publiés par
J.- L . Heiberg et H .-G . Zeuthen, t. III (Sciences exactes dans l'Antiquité),
Paris/Toulouse 1915, p . 37-41. La réponse négative donnée par Tannery à cette
question a été remise en cause par Tittel 4, col. 1039. Sur Aganis, voir DPHA A
29 a .
Le passage le plus important de cet ouvrage perdu est une classification des
sciencesmathématiques rapportée par Proclus, In primum Euclidis Elementorum
librum Commentaria, ed . J. Friedlein , Leipzig 1873, p. 38 , 1 - 42,8 . Le texte est
traduit en anglais dans 23 M . Cohen et I. Drabkin , A Source book in Greek
Science, Cambridge (Mass) 1958, p . 31- 35, et 24 G . Morrow , Proclus: A com
mentary on the first book of Euclid 's Elements, Princeton 1970, p. 31-35 ; en
français dans Tannery 19 , p . 39 -42, et Aujac 1, p . 114 -117 . On lit également
ailleurs chez Proclus des développements importants sur le statut des axiomes en
mathématiques.
( 3) Le fragment sur l'optique
Il s'agit d'un bref examen du statut de l'optique par rapport aux autres
sciences mathématiques, théoriques ou appliquées. Il est en général conservé,
sans indication de titre ou d 'auteur, comme un appendice dans les manuscrits du
traité d 'optique de Damianus ( D 6 ). La seule édition moderne se trouve dans
25 R . Schöne, Damianos Schrift über Optik, Berlin 1897, p. 23, 10 - 30 , 11, avec
traduction allemande. On relève des parallèlesmanifestes avec les fragments de
Géminus convervés par Proclus dans son commentaire sur Euclide (voir Schöne
25, p . 26, 2 ). D 'autre part, la distinction entre l' optique géométrique et la théorie
physique (p. 24 , 7-20 ), de même que la présentation des théories physiques
comme des hypothèses utilisées par l'optique (p . 24, 12 -13), rappellent des idées
exprimées par Géminus dans l'exposé des Météorologiques de Posidonius étudié
dans la section suivante .
(4 ) L 'abrégé des Météorologiques de Posidonius
Dans son commentaire sur la Physique d'Aristote, Simplicius cite, à travers
Alexandre d ’Aphrodise , un abrégé des Météorologiques de Posidonius par
Géminus (cf. 26 H . Diels (édit.), Simplicii in Aristotelis Physicorum Libros, coll.
CAG IX , Berlin 1882, p . 291,21- 292 ,31) . Le fait que ce passage est cité à
propos du développement d 'Aristote sur la classification des sciences dans la
Physique, II 2, 193 b 22 - 194 a 12, a conduit à penser que Posidonius avait
emprunté ses “points de départ” (ápopuai) aristotéliciens à cet ouvrage, ainsi
que Simplicius le suggère (In Phys., p . 291, 22-23; p . 292, 31). Cette conclusion
476 GÉMINOS G 15
a été contestée par 27 F . Sandbach , Aristotle and the Stoics, Cambridge 1985,
p .61; voir cependant 28 R . B . Todd, AncPhil 8, 1988, p . 307 -308.
Titre. L 'ouvrage de Géminus n 'était pas un simple abrégé de Posidonius,
mais un résuméinterprétatif. C 'est ce que montre clairement le passage de Sim
plicius (In Phys. p. 291, 21-22),une fois corrigé. Alexandre aurait cité une éELV
... £x tñs Étitouñs <tñs> tõv Tooelowvíov Metewpożoyixõv ŠEnyoews
TÒç å opuòç årò ’Aplototé ouç Raboữoav. C ' est H . Diels ( 26 ad loc.) et
auparavant 29 E .Martini, Quaestiones Posidonianae, Leipzig 1896 , p. 374, qui
ont proposé l'addition de tñs. Il semble préférable de considérer que enyoews
est un complément d'énitouñs, plutôt que de le faire dépendre de tàs ápopuds
comme le suggère 30 I.G . Kidd, Posidonius, t. II : The Commentary, 2 volumes,
Cambridge 1988, p . 129. Si l'abrégé de Géminus constituait ainsi une paraphrase
exégétique, il ne citait sans doute pas le texte de Posidonius de façon aussi litté
rale que Kidd 30, p . 129, le suppose.
Éditions critiques. Diels 26 , p . 291,22 -292, 31; Manitius 3 , p . 283-285 ;
Aujac 1, p. 110 -113 ; 31 L . Edelstein & I.G . Kidd (édit.), Posidonius, t. I: The
Fragments, 2e éd., Cambridge 1989, F 18, p. 44 -45 ; Theiler 15 F 255, vol. I,
p . 187- 188.
Traductions. Anglaises : 32 T . Heath, Aristarchus of Samos : the ancient
Copernicus, Oxford 1913, p . 275-276 , reprise dans Cohen et Drabkin 23, p. 90
91; 33 L . Edelstein, « The Philosophical System of Posidonius» , AJPh 57, 1936,
p. 319-320 ; 34 B . Fleet, Simplicius on Aristotle 's Physics 2, London 1997, p .47
48. Française :Aujac 1 , p. 110 -113 . Allemande : 35 B . L . Van der Waerden,
« Die gemeinsame Quelle der erkenntnis-theoretischen Abhandlungen von lam
blichos und Proklos» , SHAW 12 , 1980, p . 28-29 (partielle ); 36 Id., Die Astro
nomie der Griechen : eine Einführung, Darmstadt 1988, p. 118 -120.
Commentaires. Aujac 1 , p. L -LVII et p . 110 -113; Kidd 30, t. I, p. 129-136 ;
Theiler 15 , t. II, p. 134- 137. Le passage est commenté dans de nombreux ouvra
ges consacrés à Posidonius ou à la science antique. Importante analyse récente
situant le passage dans son contexte intellectuel ancien par 37 G . E . R . Lloyd ,
« Saving the Appearances» , CQ 28 , 1978, p . 202-222, notamment p . 212-214,
article réimpr. avec une introduction dans 38 Id., Methods and problems in
Greek science , Cambridge 1991, chap. XI, p . 248-277, notamment p . 265-268 .
Plus anciennement, Blass 10 avait suggéré que l'abrégé faisait originellement
partie de l'Isagoge de Géminus et qu'il en fut ultérieurement séparé. Sur cette
hypothèse trop compliquée , voir Tannery 2,chap. 2.
Analyse. Le passage constitue un document d' importance capitale pour l'his
toire de la philosophie des sciences chez les Grecs. Il présente l'astronomie
comme une science subalterne de la théorie physique et considère que les astro
nomes s 'égarent en essayant de formuler des hypothèses qui « sauvent les phé
nomènes » sans être fondées sur une théorie physique correcte. On peut se
demander si de telles conceptions jouent un rôle dans le reste de l'œuvre de
Géminus. Il est certain que la classification des sciences que ce passage propose
rappelle un thème rencontré à la fois dans le long fragment tiré de l'abrégé
G 16 GÉSSIOS 477
mathématique de Géminus et dans son fragment sur l'optique. Certains de ces
thèmes se reflètent également dans l'Isagoge.
En I 19 par exemple, Géminus fait référence à l'hypothèse formulée par les
astronomes pour expliquer le mouvement irrégulier des planètes en supposant
que toutes les planètes se meuvent à la même vitesse. Géminus laisse entendre
que la théorie physique enseigne au contraire que la vitesse des planètes diffère ,
ainsi que Cléomède ( C 162) le prétend (Caelestia II 1, li. 334-338 Todd). Les
deux auteurs semblent respecter le principe posidonien fondamental concernant
la suprématie de la théorie physique. Sur Cléomède, voir 39 R .B . Todd , « The
Stoics and their cosmology in the first and second century A . D . » , ANRW II 36 ,
3, 1989, p . 1368 -1369.
Demême, dans l’Isagogè XVI 2, le mouvement centripète des corps lourds
est dit expliquer pourquoi il existe sur une terre sphérique une zone antipode. Ce
principe de la physique était souvent invoqué pour expliquer la sphéricité de la
terre et du monde comme fondement de la théorie astronomique, notamment
chez Strabon , Géogr. II 5, 2 , un passage où l'on reconnaît généralement
l'influence de Posidonius (cf. Theiler 15 , t. II, p. 13- 14).
ROBERT B . TODD .
GENTILIANUS + AMELIUS GENTILIANUS
16 GES (S)IOSDE PÉTRA PLRE 11:3 V - VI
Iatrosophiste célèbre de l'époque de l'empereur Zénon (474 -491), disciple et
rival de Domnus le Juif. Il pratiqua et enseigna la médecine à Alexandrie
(Damascius, Vie d ' Isidore, fr. 335 ; trad. angl. par P. Athanassiadi, Damascius,
p. 291-293). D 'après Zacharie le Scholastique, De opificio mundi (col. 1060,
p. 107 Colonna), il avait étudié la philosophie sous la direction d'Ammonios
d'Alexandrie (2A 141), mort vers 520. Damascius (fr. 335 ) confirme qu 'il
s'était un peu intéressé à la philosophie , mais moins qu 'à la médecine. Il accu
mula des richesses considérables et obtint des Romains des distinctions excep
tionnelles. C 'est chez lui qu 'Héraïscos (MH 67), pourchassé par la police de
l'empereur Zénon, se cacha et mourut (Damascius, Vie d'Isidore , fr. 334 ). Il est
le destinataire de lettres de Procope de Gaza (Lettres 16 , 102, 122, 125, 16 éd.
L . M . Massa Positano , Napoli 1962). Il est cité comme médecin dans le Com
mentaire de Stéphanos d'Athènes sur Hippocrate , II 53, CMG XI 1, 3, 1, 1985 ,
p. 256 .
Gésios est l'un des personnages de l'Ammonius sive De opificio mundi de
Zacharie le Scholastique (PG 85, 1012 sqq.). A Béryte, l'auteur rapporte à un
élève d 'Ammonios de tendances païennes les échanges tenus à Alexandrie avec
Ammonios et le iatrosophiste Gésios.
Voir M . Minniti Colonna (édit.), Zacaria Scolastico. Ammonio . Introduzione, testo critico,
traduzione, commentario, Napoli 1973.
Selon Sophonius de Jérusalem (VII° siècle ), SS. Cyri et loannis miracula 30
(“ De Gesio iatrosophista” ) (texte grec et traduction latine dans A . Mai, Spicile
gium Romanum , Roma 1835-1844, t. III, 303-318),malgré son baptême,Gésios
478 GESSIOS G 16
serait resté secrètementpaïen et aurait ridiculisé lesmiracles opérés par les saints
Cyrus et Jean en montrant qu'ilsmettaient en cause des pratiques médicales déjà
recommandées par Hippocrate et Galien ,mais se serait vraiment converti après
avoir été miraculeusement guéri par les deux saints à Ménuthis près d'Alexan
drie .
Selon Étienne de Byzance, Ethnica , p. 200, 7, le nom deGésios, o neplbavns
tāv iatpūv ooplotńs, viendrait deGéa , une ville proche de Pétra .
Pour les autres détails de sa carrière, on se reportera à la notice de la PLRE II.
Cf. W . Schmid , art. « Gessios » , RE VII 1, 1910, col. 1324 .
RICHARD GOULET.
17 GÉTIANUS (Taltlavóc)
Dédicataire, selon Photius, Bibl. cod. 151, du lexique platonicien conservé de
Timée (antérieur à la fin du ve siècle ). Voir l'édition de K . F . Hermann , Platonis
dialogi secundum Thrasylli tetralogias dispositi, coll. BT, vol. 6 , Leipzig, 1853,
p. 397-408.
RICHARD GOULET.
18 GLAUCIAS (Taavxlaç) RE 8 (+ Suppl. III) DIIa
Célèbre médecin de l' école empirique. Aucun document n'atteste qu'il ait été
en relations avec la tradition philosophique du scepticisme pyrrhonien , ce qui
pourrait confirmer indirectement l'indication deMénodote de Nicomédie (cité
par Diogène Laërce IX 115) d 'après laquelle cette tradition avait subi une longue
éclipse après la mort de Timon de Phlionte .
Sources anciennes rassemblées par 1 K . Deichgräber, Die griechische Empi
rikerschule, Berlin 1930 ; réimpr. augmentée, Berlin /Zürich 1965, fr. 4, 7c, 10b
(Galien, Subfiguratio empirica, p . 83, 23), 154- 163 (p . 168-170 ). Cf. aussi
p . 257-258 et Zusätze , p. 407, 19; 409, 35; 413, 38 ;417,6 ;418, 13.
Informations biographiques. Glaucias est mentionné non dans toutes, mais
dans plusieurs listes de médecins empiriques.
(1) Celsus, Prooemium 10, p. 18 , 23 sq. Marx (CML I) (= fr. 4 Deichgräber] :
Sérapion (d'Alexandrie ) est le premiermédecin qui ait professé que l'enseigne
ment rationnel n 'a rien à voir avec la médecine, et que celle-ci réside seulement
dans l'usage et l'expérience. « A sa suite , Apollonius (= A 270) et Glaucias, un
peu plus tard Héraclide de Tarente ( + H 58) et quelques autres non négligeables
se sont appelés “ empiriques" à partir de cette profession de foi» .
( 2 ) (Galien ] Eloaywyn ñ latpós, XIV 683, 11 K . ( = fr. 6 Deichgräber): le
premier médecin empirique est Philinos de Cos, qui s' écarta de l'école rationa
liste après avoir été l' élève d'Hérophile, bien que certains, voulant établir l'anté
riorité de l'école empirique, la fassent remonter jusqu 'à Acron d’Agrigente
( A 14 ). (Galien ) mentionne ensuite Sérapion d'Alexandrie, les deux Apollo
nios d ’Antioche, père et fils (P- A 270 et 271),Ménodote et Sextus (Empiricus),
mais non Glaucias.
G 18 GLAUCIAS 479
( 3) Cod. Hauniensis Lat. 1653 f. 73' (= fr. 7c Deichgräber) : mentionne
comme médecins empiriques Sérapion , Héraclide, Glaucias,Ménodote , Teudas
(= Théodas ) et Théodose .
(4 ) Galien, OepaTEUTLXN MÉDodoç, X 142, 13 [ = fr. 32E Deichgräber, p. 114,
28 ] cite les médecins empiriquesMénodote , Sarapion (ms. A ), Théodas, Glau
cias, Apollonius ( A 270 ), Calliclès (non mentionné dans DPhA II ; son identi
fication avec l'Académicien Calliclès de Larisse (> C 18) est refusée par
Deichgräber , p. 353), Diodore (non mentionné dans DPHA II), Héraclide, Lycos.
Mais cette liste sert d 'exemple dans la discussion d 'un problème de logique ; elle
n'a certainementpas de prétentions chronologiques.
(5 ) Galien , Subfiguratio empirica XI (= fr. 10b Deichgräber, p . 83, 23 , qui
édite la version latine médiévale , seule conservée , et sa propre rétroversion en
grec ; traduction anglaise dans 2 R . Walzer et M . Frede, Galen - Three Treatises
on the Nature of Science, Indianapolis 1985, p. 43), estime que les médecins
empiriques auraient dû imiter l' attitude modeste et pragmatique de Pyrrhon,
méfiant à l'égard des arguments dialectiques, et se contenter,commeHippocrate
( » H 152 ), demanifester leurs talents thérapeutiques par des actes et par l'obser
vation des signes dans le diagnostic et le pronostic . « C 'est en faisant tout cela ,
ajoute Galien, qu'Hippocrate acquit parmi tous ses contemporains la réputation
d'un Asclépius, et non, par Zeus, en élaborant le discours Par trois <moyens>
(per tria sermo, ó Alà tplőv Nóyos), comme Sérapion, ni le Trépied (tripos, ó
Tpinous ), comme Glaucias, ni en écrivant des livres de dizaines de milliers de
mots, que l'on divise encore soi-même en deux parties de façon que chacune se
suffise à elle -même, comme Ménodote » .
La date de Glaucias a été fixée par Deichgräber (p. 168) vers 1754, à partir de
celles d'Apollonius le père (» A 270 ), son contemporain , de Sérapion (vers
2259) qui le précède, et d 'Héraclide de Tarente (situé par Deichgräber vers 75a,
mais cette date est discutée, cf. la notice qui lui est consacrée [ H 58), ainsi que
celle sur Héraclide maître d'Énésidème (» H 54]) qui le suit. Cf. aussi 3 H .
Gossen , art. «Glaukias» ,RESuppl. III, 1918 ,col. 785.
Deichgräber (1 , p. 168) appelle Glaucias " Glaucias de Tarente” , comme à sa
suite beaucoup d'auteurs postérieurs; mais aucun des documents qu 'il cite dans
son livre , sauf erreur, ne faitmention d 'une telle origine. Il s'agit peut-être d'une
confusion avec le grand médecin empirique Héraclide de Tarente ( souvent dési
gné par les sources du seul nom de " Tarentin ”, cf. Deichgräber 1, p. 356 ), ou
d 'une extrapolation à partir du cas d 'Héraclide .
Euvres. Glaucias est l'un des plus anciens auteurs qui se soient préoccupés
d'expliquer les mots et les expressions d'Hippocrate : il en avait composé un
volumineux glossaire, disposé par ordre alphabétique etdonnant les contextes et
les références (Érotien p . 4 , 21 et 8 , 5 = fr. 311 et 311a Deichgräber; Galien, Sur
les Épidémies d 'Hippocrate II 2 , 20 = fr. 337 B Deichgräber). Quelques échan
tillons de ses gloses ont été préservés ( fr. 313, 318, 324, 326 , 333, 349, 364
Deichgräber). Cf. 4 M . Wellmann, Hippokratesglossare , Berlin 1931, p . 10 et
14 -17.
480 GLAUCIAS G 18
Glaucias avait été aussi l'un des plus anciens commentateurs du Livre VI des
Épidémies d 'Hippocrate (Galien , Sur les Épidémies d 'Hippocrate VI,t.XVII A ,
p . 793, 4 K . = fr. 350 Deichgräber) ; nous avons gardé quelques échantillons de
son commentaire (fr. 354, 356 , 361 Deichgräber).
On lui attribue des inventions pour le pansement de la tête (fr. 155 -156
Deichgräber), des recherches sur les plantes médicinales et des préceptes diété
tiques (fr. 157 - 163 Deichgräber; le fr. 163 se réfère à un certain Glaucidès,mais
celui-ci, de l'avis de tous les spécialistes,n 'est autre queGlaucias ).
L ' ouvrage de Glaucias dont la perte est la plus regrettable, du point de vue
philosophique, est certainement le Trépied, que le contexte de sa mention chez
Galien ( ci -dessus, n° 5) incite à considérer comme un livre de caractère théo
rique etméthodologique. Deux points sont à considérer ici séparément: le titre
lui-même et le contenu probable de l'ouvrage.
Avec ses connotations delphiques, le symbole du trépied se prêtait aisément à
illustrer le thème de l'accès à la sagesse et à la vérité ( cf. Diogène Laërce I 27
28 ) ; ce symbolisme a perduré jusqu 'au Tripos de l'Université de Cambridge .
Bien antérieurement à Glaucias, nous savons (cf. Diogène Laërce X 14 ) qu'un
ouvrage portant le même titre avait été composé par Nausiphane de Téos, philo
sophe démocritéen qui avait été l' élève de Pyrrhon, et dont Épicure (» E 36 ) fut
l'auditeur avantde lui vouer une haine violente (témoignages et fragments dans
DK II 75, p. 246 -250). Plus généralement, le nombre 3 (dont la “ perfection" était
exaltée par la tradition pythagoricienne et platonicienne, cf. le Tplayuós d ’lon
de Chio ,DK 36 A 1, A6, B 1 ; Platon Timée 31 b -c ; Aristote Du Ciel 268 a 6
sq.) semble avoir servi d 'emblème, dans la tradition démocritéenne, à des écrits
et à des doctrines de caractère méthodologique (" canonique" ), comme on va le
voir .
Le symbole du trépied pouvait cependant illustrer les contenus les plus divers,
comme le montre un passage de Plutarque, De E ap. Delph., 387 b-c, où le syl
logisme (en fait, le " premier indémontrable” stoïcien , modus ponendo ponens,
avec ses deux prémisses et sa conclusion ) est appelé " le trépied de la vérité ” . En
ce qui concerne le Trépied de Glaucias, il est hautement vraisemblable que les
trois jambes en étaient les trois sources de l' expérience médicale selon les empi
riques , à savoir l'observation personnelle ou de propre vue (aŭtovía ), l'étude
critique des témoignages (iotopla ) et le "passage du semblable <au semblable> ”
( ń toũ óuolov Metábaolc ), qui autorise à effectuer des inférences d 'un cas
observé à un cas semblable (cf. 5 V . Brochard , Les sceptiques grecs, Paris 1887,
2e éd., Paris 1923, p . 369 ; Gossen 3, col. 785 ; Deichgräber 1, p . 258 ; 6 M . Dal
Pra , Lo scetticismo greco, 2e éd. revue, Roma/Bari 1975, vol. II, p . 438-439 ;
7 Ph. Mudry, La Préface du DeMedicina de Celse, Rome 1982, p. 113). S 'il est
vraisemblable que la systématisation la plus rigoureuse de cette méthodologie
soit due à Ménodote de Nicomédie (vers 125), elle avait sans doute été mise en
place, antérieurement à Glaucias lui-même, par Sérapion (donné par Celse
comme le premier théoricien de l' empirisme médical, cf. ci- dessus nº 1) dans
son discours Par trois <moyens> , peut-être ainsi nommé d 'après ses premiers
G 18 GLAUCIAS 481
mots ; ce qui n 'exclut pas l'hypothèse (Deichgräber 1, p. 258 n . 2) d'un clin
d 'ail à l'aphorisme d'Hippocrate (Epid . I 11): « l'art <médical> passe par trois
<points> (ń téxin ôlà tpc@ v): lamaladie , lemalade et lemédecin » .
La similitude de titre entre l'ouvrage de Glaucias et celui de Nausiphane a
incité quelques interprètes à croire que la méthodologie tripartite des empiriques
était déjà l'objet du Trépied de Nausiphane (cf. Brochard 5 , p. 370 -371, qui
relève jusque chez Aristote des prodromes de cette méthode ; 8 Ph. et E . De Lacy
(édit.), Philodemus – On Methods of Inference, Napoli 1978, p . 174) ; cet ouvra
ge serait ainsi la source commune de la méthode des empiriques et de celle , à
certains égards très voisine, d'un épicurien comme Zénon de Sidon (mais
Brochard ne remarque pas que ce dernier, né vers 150a, étant postérieur à Glau
cias, pourrait avoir été influencé par lui, ou encore par Sérapion ).
Sans entrer ici dans le détail d'une question controversée, on peut noter que la
principale hypothèse concurrente (« au moins aussi vraisemblable » que la précé
dente selon 9 E . Asmis, Epicurus' Scientific Method , Ithaca 1984, p. 338 n . 4)
est que le Trépied de Nausiphane ait exposé une théorie pré -épicurienne des trois
critères de vérité (sensation , prénotion , affect), théorie dont les trois éléments ne
se superposent nullement, nidans leur nature ni dans leur fonction , à ceux du tri
nôme des empiristes. Selon Diogène Laërce X 14, Ariston (de Céos ? » A 396 )
aurait dit, dans sa Vie d 'Epicure , que ce dernier avait écrit son Canon à partir
( ěx ) du Trépied de Nausiphane; il est vrai que la phrase de Diogène est lourde
ment corrigée par diverses conjectures, cf. la discussion dans 10 A . Laks,
« Édition critique et commentée de la “ Vie d 'Épicure" dans Diogène Laërce (X ,
1-34) » , Cahiers de Philologie 1, 1976 , p. 16 et 75 -76 . De plus, si l'on en croyait
l'information hautement suspecte du démocritéen Diotime (de Tyr, » D 208 ),
transmise par Sextus Empiricus, A . M . VII 140 , Démocrite aurait déjà professé
une théorie des trois critères qui coïncide en substance avec celle du Canon
d'Épicure (cf. la discussion de ce passage par 11 G . Striker, « Kputplov tñs
åandeias » , NAWG 2 , 1974, p. 58, et en traduction anglaise dans Essays on
Hellenistic Epistemology and Ethics, Cambridge 1996 , p. 28 -29). Si l'on ajoute à
cela que parmi les ouvrages de Démocrite figurait (Diogène Laërce IX 47) un
traité en trois livres intitulé Sur les questions logiques < ou > Canon , traité cité
deux fois par Sextus Empiricus (A . M . VII 138-139 et VIII 327) , on peut être
tenté de supposer que le Canon d 'Épicure descendait en droite ligne, via Nausi
phane, de Démocrite lui-même. Mais il faut reconnaître que cette hypothèse
repose sur une accumulation d ' indices très faibles. Si l'on considère, par exem
ple , les extraits de la Rhétorique de Philodème portant sur la polémique menée
contre Nausiphane par Métrodore de Lampsaque, l'ami d'Épicure (DK 75 B 1
2 ), on constate d'abord que rien n 'indique explicitement que les renseignements
concernant la pensée de Nausiphane proviennent de son Trépied (Diels et Kranz
n 'expliquentnulle part, sauf erreur, pourquoi ils les classent comme des “ frag
ments” tirés de cet ouvrage) ; on constate ensuite que, dans le cas où ces frag
ments en proviendraient, ils inviteraient plutôt à voir dans le titre du Trépied une
allusion à trois compétences (la science de la nature, la politique et la rhétorique)
482 GLAUCIAS G 18
que Nausiphane recommandait d 'acquérir solidairement (comme le suggèrent au
moins implicitement 12 F . Longo Auricchio et A . Tepedino Guerra, « Per un rie
same della polemica epicurea contro Nausifane» , dans F .Romano (édit.],Demo
crito e l'atomismo antico, Catania 1980, p. 470). On notera que 13 K . von Fritz,
art. « Nausiphanes» , RE XVI 2 , 1935, col. 2021-2027, ne tentait pas de donner
un contenu précis au Trépied et ne semblait pas considérer que cet ouvrage fût la
source des informations données par Philodème.
Si d 'aussi grandes incertitudes entourent le Trépied de Nausiphane, il semble ,
à plus forte raison , qu'il convienne d 'être extrêmement prudent à l'égard de
l'ouvrage homonyme de Glaucias. On peut être raisonnablement certain que la
méthodologie tripartite desmédecins empiriques y était exposée , sous une forme
plus ou moins élaborée ;mais,même en admettant que cette méthodologie ne
soit pas née de rien, on se gardera d'affirmer qu' elle avait eu des précédents
systématiques chez les philosophes, et on hésitera à rattacher le médecin Glau
cias lui-même à une filiation philosophique déterminée, qu'elle ait été démocri
téenne, épicurienne ou pyrrhonienne.
JACQUES BRUNSCHWIG .
19 GLAUCIAS
Personnage fictif, fils d 'un certain Alexiclès et disciple du péripatéticien
Cléodème (2°C 159), dans le dialogue satirique de Lucien, Philopseudès 14 . A
sa demande, un mage hyperboréen lui aurait livré pour une nuit Chrysis, femme
de Dèméas. Selon Cléodème qui lui servait de Oldaoxaroc tpos toùc nóyous,
sans cette aventure amoureuse , qui le détourna des études,Glaucias aurait connu
toutes les doctines du Péripatos, car à dix-huit ans il avait déjà achevé la Phy
sique ( Duolxnv åxpóaoiv ).
RICHARD GOULET.
20 GLAUCON DM II
Médecin et philosophe contemporain de Galien de Pergame ( G 3) .
Ce personnage est apparemment absent de la RE.
A . Sources. Ce personnage ne nous est connu que par le témoignage de
Galien , qui lui a dédicacé un de ses ouvrages, le Ad Glauconem de methodo
medendi (t. XI, p . 1- 146 Kühn). Galien désigne en plusieurs endroits Glaucon
comme philosophe (Tm raúxwvl TÕ ploooow , De libris propriis 4 : t. XIX ,
p . 31, 12 -13 K .; únóraúxwvOS TOŨ Olooódov, De locis affectis V 8 : t. VIII,
p. 361, 13 K .),mais en réalité, tout comme Galien lui-même, Glaucon était à la
foismédecin et philosophe.
Pline l'Ancien, dans son Histoire naturelle XXII 57, cite à côté d'Hippocrate (2H 152) et
de Nicandre un troisième médecin du nom de Glaucon (RE 9 ). Ce Glaucon est seulement
connu de Pline pour avoir loué les vertus nutritives du bupleuron (Boúnavpov). Rien donc ne
permet d 'affirmer, en l'absence d 'autre précision , qu 'il s'agit dans les deux cas du même
personnage. (La chronologie l'interdit même, puisque Pline est mort en 79 et que Galien a
rencontré Glaucon à Rome en 162. S. F.)
G 20 GLAUCON 483
B. Biographie. Le médecin de Pergame semble avoir fait la connaissance de
Glaucon lors de son premier séjour à Rome. Dans le De locis affectis V 8
(t. VIII, p . 361-366 K .), Galien raconte en effet comment il fut amené, à la
demandemême de Glaucon, à soigner un de ses malades, un médecin sicilien .
Ayant rencontré Galien dans la rue, Glaucon l'arrêta pour lui faire part de son
admiration. Il avait entendu parler des diagnostics et des prévisions auxquels
Galien excellait tout particulièrement, et non pas pour le mettre à l'épreuve, mais
pour bénéficier de la démonstration d 'un tel savoir- faire, il invita Galien à
l'accompagner chez lemédecin sicilien. Arrivé sur place,Galien observe tous les
détails de la vie quotidienne et de l'activité de la maison susceptibles d 'orienter
et étayer son diagnostic . Et sans informer Glaucon sur les indices ainsi rassem
blés, sans s'interdire au besoin de recourir à quelque stratagème, il n 'hésite pas à
présenter son diagnostic comme issu de sa seule réflexion personnelle, suscitant
de la part de Glaucon la plus vive admiration . Après cet épisode, Glaucon
semble manifestement être resté lié à Galien , et mêmeavoir suivi ses cours et ses
conférences, si l'on en croit certaines allusions dans le Ad Glauconem de
methodo medendi.
Lors du second séjour de Galien à Rome, sous le règne de Marc -Aurèle , et
alors que le médecin de Pergame travaillait à son grand traité en quatorze livres
sur la méthode thérapeutique, le De methodo medendi(t. X , p. 1- 1021 K .), Glau
con , qui se préparait à partir pour un long voyage à l' étranger , le pria de rédiger
à son intention un aperçu de sa méthode thérapeutique. Galien composa alors un
plus court traité en deux livres qu 'il dédicaça à son amiGlaucon et intitula Ad
Glauconem de methodo medendi (t. XI, p. 1-146 K .). Le premier livre de cet
ouvrage, consacré à l' exposé des aspects fondamentaux de la méthode thérapeu
tique , porte principalement sur le diagnostic et le traitement des fièvres, tandis
que le second traite des inflammations et des humeurs. Galien se réfère à plu
sieurs reprises dans ses autres écrits à cet abrégé de sa méthode thérapeutique
(voir De crisibus II 13 : t. IX , p . 696 K ., et De libris propriis 4 : t. XIX , p . 31, 1
et 15 K .; il convient de rejeter comme suspects les passages empruntés au De
remediis parabilibus I 16 et 17 du Pseudo-Galien : t. XIV , p . 384 , 13 et 389, 3
K .) .
Le philosophe platonicien . Les seuls renseignements un peu précis dont
nous puissions disposer à propos de Glaucon nous sont fournis par le Ad Glau
conem et consistent en quelques allusions plus ou moins développées. On
apprend ainsi à la lecture de ce traité que Glaucon était formé à l' étude de la phi
losophie platonicienne. Exposant en effet ce qu'il faut entendre par « méthode
analytique» , Galien s'interrompt pour adresser ces mots à Glaucon : « Cela me
suffit pour te faire comprendre, en peu de mots, ce que je veux démontrer. Il
serait ridicule de prétendre t' enseigner ce que tu sais depuis si longtemps, pour
l' avoir appris de Platon » (napà Giátwvos aútà nárai ueuaOnxóta, A d
Glauconem de methodo medendi I 1 : t. XI, p . 4 K .).
Le médecin disciple de Galien . Glaucon paraît surtout avoir assidûment
suivi l'enseignement de Galien. C 'est du moins ce que l'on peut conclure d'une
484 GLAUCON G 20
allusion au traitement des ædèmes que Glaucon est supposé bien connaître pour
en avoir entendu exposer les principes de la bouche même de Galien (nxovoas
nuõv deyóvtwv, Ibid . II 4 : t. XI, p . 101 K .).Le médecin de Pergame prend éga
lement la peine de rappeler à Glaucon le contenu de certains entretiens qu 'il eut
en sa présence avec certains de ses collègues rassemblés au chevet d 'un malade
commun ( διό νύν αναμνήσαι σε προσήκει των ρηθέντων ημίν προς αλλή
houç, Ibid . II 6 : t. XI, p. 105 K .). Cela laisse supposer que Glaucon accompagna
également Galien au cours de ses visites, comme c'était l'usage pour les disci
ples d 'un médecin . Il put donc observer son maître dans la pratique de son art et
eutmême à maintes reprises l'occasion de le voir procéder à certains traitements
delicats comme celui des ulceres fistuleux (της τούτου θεραπείας ην εθεάσω
Me toráxis eni torby troinoQuevov, Ibid . II 10 : t. XI, p. 125 K .; voir aussi
t. XI, p . 128 K .). Glaucon suivit également l'enseignement de Galien sur les
médicaments (Ibid . II 9 : t. XI, p. 124 K .) et devait quitter Romemuni des remè
des que Galien lui avait remis et dont la liste est dressée à la fin du traité (Ibid . II
13 : t. XI, p. 144-145 K .). Le domaine de la thérapeutique paraît être celui qui
retint le plus l' attention de Glaucon, puisque Galien lui fit la promesse, lorsqu 'il
les aurait achevés, de lui remettre un exemplaire de ses ouvrages Sur les
médicaments selon les genres et Sur les lieux affectés. Pour finir Galien se décla
re même prêt , au cas où Glaucon se trouverait retenu au dehors plus longtemps, à
lui envoyer sans tarder, comme au plus fidèle de ses disciples, chacun de ses
écrits (Ibid . II 13 :t. XI, p . 146 K .).
VÉRONIQUE BOUDON.
21 GLAUCON D ’ATHÈNES RE7 fya
Glaucon , du dème de Collytos, était le fils d 'Ariston et de Périctioné . Il avait
pour frères Adimante (* A 23) et Platon (Apol. 33 e -34 a ), pour sæur Potonè , et
pour demi- frère Antiphon , le fils de Pyrilampès (Parménide 126 a - 127 a), le
second époux de Périctionè (cf. l'arbre généalogique, s. v. « Adimante d 'Athè
nes » , DPhA I, p . 55). S 'il est réel, le combat évoqué en République II, 368 a
pourrait être celui livré à Nisaia contre les Mégariens (Diodore XIII 65) ; et
l'amoureux quiaurait composé l' élégie célébrant ce haut-fait pourrait être Critias
(B + C 216 ). Glaucon doit avoir dans les vingt ans, lorsque Socrate (Xénophon ,
Mémorables III 6) tente de le dissuader de se consacrer aux affaires publiques.
Pour une description de la répartition et de la nature des interventions d’Adi
mante et de Glaucon dans la République, voir A . Diès (édit.), Platon , Répu
blique, texte établi et traduit par É. Chambry, CUF, Paris 1932, Introduction
p . XXII sq. Glaucon est présent lors du procès de Socrate (Apol. 33 e -34 a ). Le
caractère de Glaucon apparaît à travers ses interventions dans la République. Il
est moins pénétrant qu'Adimante, il voitmoins bien les lacunes du raisonnement
et il fait des objectionsmoins graves. Glaucon est hardi et combatif (III, 357 a),
il s'intéresse à la musique (III, 398 e), c 'est un amateur de chiens de chasse et
d 'oiseaux de race (V , 459 a ), il est porté à l'amour ( V , 474 d ), ambitieux, mais
de façon noble, et c 'est un amidu bien dire (VIII, 548 e ).
G 25 GNAEUS 485
Au début du Parménide, Adimante et Glaucon amènent Céphale de Clazo
mènes ( C 78) chez leur demi- frère Antiphon ( A 210 ) pour qu 'il lui relate
l'entretien , connu grâce à Pythodoros, qui avait réuni Socrate , Zénon et Parmé
nide (Parm . 126 a -127 d).
C 'est à ce Glaucon que Diogène Laërce ( II 124 ) attribue plusieurs titres de
dialogues ; il considère que 9 sont authentiques et que 32 ne le sont pas. Il cite :
Pheidylos, Euripide, Amyntichos, Euthias, Lysitheidès, Aristophane, Céphalos,
Anaxiphème,Ménéxène.
Cf. (P.Natorp ), art. «Glaucon » 7,RE VII 1, 1910 , col. 1402- 1403.
LUC BRISSON .
22 GLAUCOS VII
En réaction contre la tendance dominante à son époque, le médecin Glaucos
estimait que dans la pratique de son art il n 'y avait pas de place pour la philoso
phie . L 'agressivité avec laquelle il soutient sa position donne lieu à une rapide
caricature dans le De tuenda sanitate de Plutarque (122 b -c).
BERNADETTE PUECH .
deux versions de l' écrit sur le non-être , de l' Éloge d'Hélène, de la Défense de
Palamède et de quelques fragments.
Bibliographie . 35 C .J. Classen, « Bibliographie zur Sophistik », Elenchos 6,
1985, p . 75 -140 (Gorgias: p . 114- 120 ) = mise à jour de la bibliographie parue
dans Sophistik, hrsg . von C .J. Classen, coll. « Wege der Forschung » 187, Darm
stadt 1976 (Gorgias, p . 683-689) ; Untersteiner 6 (mise à jour dans la traduction
française, t. II, p. 269-314 ) ; 36 Centro di Studio del Pensiero Antico, « Biblio
grafia sui Filosofi della Magna Grecia e della Sicilia antica » , a cura di C .
Cunsolo ,Roma 1997 (URL = http ://cisadu2.let.uniroma1.it/cspa).
MICHEL NARCY.
Iconographie. Les statues antiques de Gorgias n 'ont pas dû manquer, à en
juger d 'après sa solide renommée . Lui-même y pourvut, puisqu 'il trouva bon
d' élever sa propre statue en bronze doré à Delphes,moyen original d'assurer sa
publicité : « hominum primus et auream statuam et solidam LXXXX circiter
Olympiade Gorgias Leontinus Delphis in templo posuit sibi; tantus erat docen
dae artis oratoriae quaestus» , écrit Pline, H . N . XXXIII 83. Cette statue est éga
lement mentionnée par Pausanias X 18 , 7 : Énixovoos dè eixūv åváОnua rop
yiov toŰ Éx Aeovtivwv, aútoc ropylac éotiv . Elle était située près de celle de
Phryné et, comme elle , placée sur une colonne, disposition fréquente : nou ye
και Φρύνην την θεσπιακήν έστιν ιδείν, επί κίονος κακείνην ως Γοργίαν
(Pseudo-Dion Chrysostome, Orat. XXXVII 28). Enfin , d 'après Plutarque,
Decem Orat. vita 838 d ), il se trouvait aussi sur le monument funéraire d'Iso
crate ( * I 38), érigé vers 338 av. J.-C . près du Cynosarge: Copriav eię opaſpav
αστρολογικήν βλέποντα, αυτόν τε τον Ισόκρατην παρεστώτα.
De toutes ces statues il ne reste rien . En revanche, nous possédons la dédicace
sur marbre de la statue qu 'Eumolpos, un membre de sa famille , lui fit élever à
Olympie , comme le rapporte Pausanias VI 17 , 7 ; voir M . Fraenkel, Archäolo
gische Zeitung 35, 1877 , p.43, n° 54 (DK 82 A 8):
Χαρμαντίδου Γοργίας Λεοντίνος.
Tημ μεν αδελφών Δηϊκράτης τηγ Γοργίου έσχεν, Γοργίου ασκήσαι ψυχήν αρετής ες αγώνας
Éx taúrns 8 ' aútą (t) yiyveral ' Innoxpams, ουδείς πω θνητών καλλίον' ηύρε τέχνην,
“Ιπποκράτους δ' Εύμολπος, δς εικόνα τήνδ' ανέθηκεν, ού και Απόλλωνος γυάλοις είκών ανάκειται,
@ loowv, narociaç xai piías, évexa . ου πλούτου παράδειγμ',ευσεβείας δε τρόπων.
Cette manière de se mettre en avant, ou d 'y veiller par l'intermédiaire de
proches, n 'est évidemment pas imputable aux prétentions philosophiques de
Gorgias – aucun véritable philosophe n 'a d 'ailleurs eu cette attitude -,mais plu
tôt à sa volonté d ' apparaître comme un grand orateur; c 'est d 'ailleurs ce trait que
la postérité a davantage reconnu.
MARIE -CHRISTINE HELLMANN .
29 GORGIPPIDÈS MF IIIa
Dédicataire de plusieurs ouvrages de Chrysippe concernant la logique. Voir
les traités 17 , 18, 19 , 20 (?), 21, 118 et 132 dans la liste commentée par P . Hadot,
492 GORGIPPIDÈS G 29
art. « Chrysippe de Soles» (B+ C 124), DPLA II, p. 340, 351 et 353. De tels ouvra
ges ne pouvaient guère être dédiés qu’ à des disciples ou à des collègues au sein
de l'école stoïcienne.
Cléanthe avait écrit un ouvrage Sur Gorgippe (D . L . VII 175). Mais il ne doit pas s'agir du
même personnage .
RICHARD GOULET.
30 GORGOS DE SPARTE RE 14 MF II
Stoïcien, mentionné commedisciple de Panétius de Rhodes (mort vers 1104)
dans l’Index Stoicorum de Philodème, col. LXXVI 5-6 (p. 124 Dorandi):Cópyos
axedallu [6 ]YLỌS.
Gorgos est également cité, en compagnie d 'autres stoïciens, dont Panétius,
parmi les hiéropes des Ptolemaia dans IG II 1938, li.62-63. L 'inscription se
situe vers le milieu du II s. av. J.-C ., sous l’archontat de Lysiadès, entre 152/1 et
148 /7 (cf. B . D .Meritt, Hesperia 33, 1964, p. 207 ; Id ., « Athenian Archons 34776
– 48 /7 B . C .» , Historia 26 , 1977, p. 161- 191; C . Habicht, « The Eponymous
Archons of Athens from 159/8 to 141/0 », Hesperia 57, 1988, p . 237-247; T .
Dorandi, Ricerche sulla cronologia dei filosofi ellenistici, p. 35 -38 ). L 'inscrip
tion a été étudiée par W . Crönert, « Eine attische Stoikerinschrift » , SPAW 1904,
I, p. 471-483. Sur ce document, où figurent plusieurs nomsde l' école stoïcienne,
voir aussi la notice « Antipatros de Tarse » 205, DPLA I, p. 221-222.
BERNADETTE PUECH et RICHARD GOULET.
31 GORGYLOS RE 2 M III
Ce nom figure parmi les neuf exécuteurs testamentaires (épimélètes) du testa
ment de Straton de Lampsaque (mort vers 268%), cité par Diogène Laërce V 62.
Il n'est pas dit expressément qu'il s'agit de disciples au sein de l'école péripaté
ticienne,mais la phrase qui suit stipule que la diatribè est léguée à Lycon (hui
tième exécuteurtestamentaire dans la liste ) parce que les autres sont trop âgés ou
trop occupés (aoxooi).
RICHARD GOULET.
32 GRACCHUS ( TIBERIUS SEMPRONIUS -) RES 54 164- 153
Fils de Ti. Sempronius Gracchus et de Cornelia , Ti.Gracchus est tribun mili
taire en Afrique, questeur du consul Mancinus en Espagne, puis tribun de la
plèbe en 1330. Il est l'auteur d 'un projet de loi agraire prévoyant de limiter les
possessions de l'ager publicus et sa répartition en lots inaliénables de 30 jugères,
attribués aux plus pauvres par une commission de triumvirs . Ces réformes ren
contrent l'hostilité de la plèbe et du sénat. Tiberius semble avoir voulu briguer
un second mandat,mais il est assassiné au cours d 'émeutes.
Nos principales sources biographiques sont (a) Plutarque, Vie de Tib . Grac
chus, et (b ) Appien, B. C., I 7- 18. Sur Appien , voir J.H . Fortlage, « Die Quelle zu
Appians Darstellung der politischen Ziele des Tiberius Sempronius Gracchus »,
Helikon 11- 12, 1971- 1972, p . 166 - 191.
G 33 GRAECINUS (IULIUS - ) 493
La culture littéraire et philosophique de Ti. Gracchus ne fait aucun doute . Les
auteurs anciens sont nombreux à mentionner la présence à ses côtés du rhéteur
Diophane de Mitylène et du philosophe Blossius de Cumes ( - B 40) (Plutarque,
Tib . Gracchus 8, 6 ; 20, 5 ; Cicéron, Lael. 11, 37). Ce stoïcien, disciple d' Antipa
tros de Tarse (» A 205 ), est considéré par Plutarque commeun inspirateur et un
guide (20 , 5 ). Exerça- t-il une influence sur les projets politiques de Tiberius
Gracchus ? La question est discutée . Mais les savants contemporains tendent à la
souligner en insistant sur l'exigence de justice sociale qui fonde ces projets.
Outre 1 G . Garbarino, Roma e la filosofia greca, p .450-455, on se reportera sur
tout à 2 C . Nicolet, « L 'inspiration de C . Gracchus» , REA 67, 1965, p . 142- 158 ;
3 Id ., Les Gracques, Paris 1967 ; 4 I. Hadot, « Tradition stoïcienne et idées poli
tiques au temps desGracques»,REL 48, 1970, p. 133-175.
Cf. 5 F .Münzer, art. « Ti. Sempronius Gracchus» 54, RE II A 2, 1923, col.
1409- 1426 . La bibliographie sur la question étant immense, nous nous bornons
ici à donner quelques brèves indications: 6 J. Carcopino, Autour des Gracques,
Paris 1928 ; 7 D . C . Earl, Tiberius Gracchus. A study on Politics, Bruxelles
1963; 8 A . H . Bernstein , Tiberius Gracchus: Tradition and Apostasy, Ithaca,
Cornell University Press 1978 , XII-303 p.; 9 D . Stockton , The Gracchi, Oxford
1979. Pour des indications plus récentes, on se reportera à la 10 CAH , t. IX , 2°
éd., Cambridge 1994 .
MICHÈLE DUCOS.
33 GRAECINUS ( IULIUS -) REI63 PIR ? I 344
Père de Cn. Iulius Agricola, le beau-père de l'historien Tacite . Originaire de
Fréjus, fils d'un procurateur de César (Tacite, Agricola 4 , 1), il fut lui-même de
rang sénatorial et atteignit la préture (voir l'inscription trouvée à Rome,
AnnÉpigr, 1946, n° 94). Intéressé par l'agriculture , il écrivit un traité de viticul
ture que cite Columelle (I 1, 14 ) . Il fut mis à mort par Caligula vers la fin de
l'année 39 parce qu 'il encourut la colère de l'empereur en refusant d'accuser M .
Silanus (Tacite, Ibid .).
Dans le même passage, Tacite insiste sur son « goût pour l'éloquence et la
sagesse » ; il faut entendre par là un intérêt manifeste pour la philosophie. Les
qualités humaines de IuliusGraecinus sont également soulignées par Sénèque ; il
le qualifie de uir egregius (homme éminent, Epist. XXIX 6 ). Lamême expres
sion se retrouve dans le De beneficiis (II 21, 5) où sont rappelées les cir
constances de sa mort: « ... Julius Graecinus, une âme d' élite que C. César mit à
mort pour la seule raison que ses qualités étaient supérieures au degré qui est
avantageux à un tyran. » Sénèque mentionne aussi le désintéressementde ce per
sonnage et son souci de la moralité : au moment où il organise des jeux, il refuse
les sommes que lui proposent des sénateurs qu 'il juge peu estimables morale
ment (De ben. II 21, 5 -6 ).
Peu d'indices toutefois permettent de préciser quelle école philosophique sut
retenir l'attention de Iulius Graecinus,mais son souci d 'une morale exigeante ,
ainsi que l'intérêt que lui porte Sénèque, peuvent le rapprocher du stoïcisme.
MICHÈLE DUCOS.
494 GRÉGOIRE D 'ALEXANDRIE G 34
34 GRÉGOIRE D 'ALEXANDRIE PLRE II :1 MV
Frère du philosophe néoplatonicien Hermeias d 'Alexandrie (2 * H 78), connu
par la Vie d ’Isidore de Damascius (fr. 123 ). Il était « d 'un esprit extrêmement vif,
prompt à la recherche et à l'étude; par ailleurs, il n'était jamais en repos, il n 'ap
portait aucun calme dans ses habitudes,mais il était toujours quelque peu agité ;
lorsque les deux frères revinrent d'Athènes à Alexandrie (sansdoute après avoir
étudié chez Syrianus), Grégoire tomba gravement malade et à un tel point que
son cerveau garda peu la capacité de raisonner et se trouva fort diminué » (Epit.
Phot. 75 ; p. 104, 5-10 Zintzen ; trad . Henry; passage également conservé par la
Souda, s.v. Fonyóploc, r 453 = fr. 123 Zintzen ).
Ce nom est absent de la RE. Voir le stemma de cette famille dans la notice
consacrée à Hermeias d 'Alexandrie ( H 78 ).
RICHARD GOULET.
35 GYMNOSOPHISTES
Littéralement: « les sages nus » .
Ce terme, attesté pour la première fois dans P .Berol. 13044 du jer siècle av. J.
C ., désigne des sages le plus souvent indiens, parfois éthiopiens, qui se caracté
risent par une nudité complète ou partielle .
Les gymnosophistes indiens. Porphyre, dans son traité De abstinentia ,
affirme en citant Bardesane de Syrie (= ^ B 11) que la classe des gymnosophistes
est divisée en deux sectes, les Brahmanes, prêtres de père en fils, et les Sar
manes, qui ont choisi leur existence de renonçants. Il reprend là une distinction
que faisaitMégasthène (FGrHist 715 ), ambassadeur de Séleucos Nicator auprès
du roi indien Candragupta dans les années 304- 297 (cf. 1 A . Zambrini, « Gli
’ Ivôixá diMegastene » , ASNP 12 , 1982, p . 71-149 ), qui n 'utilisait pas le terme
de gymnosophistes, mais distinguait les Brahmanes des Garmanes (cf. Strabon ,
XV 1, 58-60).Néarque (FGrHist 133), historien compagnon d'Alexandre, avait
quant à lui différencié les Brahmanes, conseillers du roi, des autres sophistes,
spécialisés dans les sciences de la nature (cf. Strabon , XV 1,66).
Le P .Berol. 13044 (édité et commenté par 2 U . Wilcken, « Alexander der
Große und die indischen Gymnosophisten » , SPAW 1923, p . 150- 183) rapporte
un entretien entre Alexandre et dix gymnosophistes. Les neuf premiers sages
doivent répondre chacun à l'une desneuf questions qu'Alexandre leur pose sur
la physique et la métaphysique, le dixième sage devant juger de la qualité des
réponses (cf. 3 G . Chr. Hansen , « Alexander und die Brahmanen » , Klio 43-45,
1964, p . 351- 380 ; 4 G . Dumézil, « Alexandre et les sages de l' Inde » , étude n° 31
de La courtisane et les seigneurs colorés, Paris 1983, p . 66 - 74 ; 5 A . J. Festu
gière, « Trois rencontres entre la Grèce et l'Inde » , RHR 125 , 1943, p. 32 -57,
repris dans Études de philosophie grecque, Paris 1971, p . 157-182; 6 G . Zuntz ,
« Zu Alexanders Gespräch mit den Gymnosophisten », Hermes 87, 1959, p . 436
440 ; 7 H . Van Thiel, « Alexandersgespräch mit den Gymnosophisten » ,Hermes
100, 1972, p . 343- 358 ; 8 C . Muckensturm , « Alexandre à la rencontre des
gymnosophistes » , Actes des Xire Metageitnia ,Mulhouse 1991, p. 47-59).
G 35 GYMNOSOPHISTES 495
Le récit de cet entretien a connu une grande fortune, par la suite , puisqu 'on le
retrouve chez Plutarque (Vita Alexandri 64 -65, 1) à propos de la répression par
Alexandre de la révolte de Sabbas, chez Clément d'Alexandrie (Strom . VI 4, 38)
et dans le Roman d 'Alexandre (III 5 -7) du Pseudo -Callisthène (cf. version A ,
éditée par 9 W . Kroll, Historiae Alexandri Magni recensio vetusta , Berlin 1926 ;
version B, éditée par 10 L . Bergson, Der griechische Alexanderroman, Rezen
sion B , Uppsala 1965 ; voir aussi 11 H . Van Thiel, Leben und Taten Alexanders
von Makedonien , Darmstadt 1974 (édition et traduction ), et 12 G . Bounoure et
B . Serret, Le Roman d 'Alexandre , Paris 1992, (traduction et commentaire ); voir
aussi les versions latines du Roman d 'Alexandre : Julius Valerius, Res gestae
Alexandri Macedonis III 10 -12 ; Incerti auctoris epitoma rerum gestarum
Alexandri Magni, $ $ 79-84, éditée par 13 P .H . Thomas, Leipzig 1966 ; cf.
d'autre part le CGL III 385, 58 -386 ).
On rapporte aussi un autre entretien entre Onésicrite , compagnon d 'Alexan
dre, et les sophistes indiens de Taxila, Calanos ( C 14) et Dandamis ( D 20 ).
Plutarque, Vita Alexandri 65, résume cet entretien en précisant qu'Onésicrite est
un ancien élève de Diogène le Cynique ( D 147). Au second siècle de notre ère,
le Pap. Genev. inv. 251 (publié par 14 V .Martin , « Un recueil de diatribes cyni
ques, Pap.Genev. inv. 271», MH 16 , 1959, p. 77-115, ainsi que par 15 W . H .
Willis et K . Maresch , « The encounter of Alexander with the Brahmans. New
fragments of the Cynic Diatribe P. Genev. inv. 271 », ZPE 74, 1988, p . 59-83)
combine l'entretien d' Alexandre et celui d'Onésicrite. Ce texte a servi de source
à la seconde partie du Récit sur la vie des Brahmanes composé par Palladios
dans les années 408 -410 (cf. 16 J. D . M . Derrett, « The history of Palladius on the
races of India and the Brahmans » , C & M 21, 1960 , p. 64 -135 , et 17 W . Berghoff
[édit.), Palladius. De gentibus Indiae et Bragmanibus, Meisenheim am Glan
1967, p. 1-55).
La tradition rapporte qu 'un certain nombre de sages grecs aurait, bien avant
Alexandre, conversé avec les gymnosophistes indiens. C 'est notamment le cas
de Lycurgue (Plutarque, Vit. Lycurg. 4 , 8 ), de Pythagore (Clément d 'Alexandrie,
Strom . I 15, 70, 1, et Eusébe de Césarée, Praep. evang. X 4 ), de Démocrite
(Diogène Laërce IX 35, et Élien, V. H . IV 20), de Socrate (Eusébe de Césarée,
Praep. evang. XI 6 - 8), de Platon , qui aurait reçu des sages indiens la croyance en
l'immortalité de l'âme (Pausanias IV 32 , 4).
D 'autres sages grecs, après Alexandre, ont voulu connaître les gymno
sophistes indiens, en particulier Pyrrhon (Diogène Laërce IX 61 et 63) et Plotin
(Porphyre, Vita Plotini 3 ). Philostrate consacre une section de la Vie d 'Apollo
nios de Tyane (III 14 -51) au récit du séjour d'Apollonios dans la citadelle des
Brahmanes.
La diversité des sources ne permet pas d'apprécier dans sa globalité la pensée
des gymnosophistes. Quelques thèmes cependant sont récurrents: leur proximité
avec la nature, leur croyance en l'immortalité et leur conception cyclique du
temps. Les sources parlent essentiellement de leurmode de vie , généralement
ascétique et parfois surprenant. Il se caractérise par un respect total de la nature
496 GYMNOSOPHISTES G 35
et souvent par le refus des acquis de la civilisation.Mais ilest malaisé de distin
guer dans leur conduite ce qui relève de l'obéissance à une règle personnelle, de
rites religieux ou d'une philosophie proprement dite . Leur pensée est d'autant
plus difficile à cerner qu 'ils se méfient du langage et observent de longues
périodes de silence (cf. Athénée le Poliorcète , De machinis V 7 ). Les sources
décrivent les gymnosophistes plus qu 'elles ne leur donnent la parole.
A cela s 'ajoute le filtrage de leur pensée par la pensée grecque, en particulier
par la pensée cynique (cf. 18 Claire Muckensturm , « Les gymnosophistes étaient
ils des cyniques modèles ?» , dans Le cynisme ancien et ses prolongements, Paris
1993, p . 225-239). On peut parler d 'une légende des gymnosophistes, en parti
culier dans les textes où ils n 'apparaissent qu' allusivement, comme des modèles
ou des exemples. Ils sont cités pour leur courage devant la mort (cf. Philon
d ' Alexandrie , De Abrahamo 182 ; Flavius Josèphe, B. J . VII 8 ; Clément
d'Alexandrie, Strom . II 20, 125 ; Lucien , De morte Peregrini 25). Ils sontaussi
cités comme des modèles de piété (Proclus, In Tim ., Prologue du livre II), de
longévité (Paseudo -Lucien,Macr. 4 ) et de simplicité (voir Philon , De somniis II
56 , et Jean Chrysostome, In epist. ad Cor. II 15, 3 ). Plus brièvement encore, ils
apparaissent dans les listes stéréotypées de sages barbares, quand il est débattu
de l'origine grecque ou barbare de la philosophie (voir par ex . Clément
d 'Alexandrie , Strom . VI 7, 57 ; Diogène Laërce I 1; ou Théodoret de Cyr, Grae
carum affectionum curatio 1 25 et V 58).
Les gymnosophistes éthiopiens sont plusmarginaux dans les sources que les
sages indiens. Dans la Vie d 'Apollonios de Tyane (VI 5-23), Apollonios ren
contre les gymnosophistes éthiopiens et les considère comme apparentés aux
sages indiens, mais inférieurs à eux (voir 19 P. Robiano, « Les gymnosophistes
éthiopiens chez Philostrate et chez Héliodore» , REA, 94, 1992, p . 413-428).
Dans les Éthiopiques d 'Héliodore , le roiHydaspe invite « les sages qu'on appelle
gymnosophistes » à assister au sacrifice célébrant sa victoire sur les Perses ( X 6 ).
Le chef des gymnosophistes, Sisimithrès, intervient à plusieurs reprises pour
s 'opposer au sacrifice de Chariclée (X 9 -15 ), conseiller Hydaspe et participer au
cortège des noces de Théagène et Chariclée ( X 41).
CLAIRE MUCKENSTURM -POULLE.
36 GYTHIOS DE LOCRES RE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth. 36 , 267, p. 145, 7 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
1 HABROTÉLEIA
Pythagoricienne, fille d 'Habrotélès (3 + H 2) de Tarente, dont le nom figure
dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36 , 267, p . 147, 2 -3 Deubner.
BRUNO CENTRONE .
2 HABROTÉLÈS DE TARENTE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth . 36 , 267, p . 144, 17 Deubner. Il était le père de la pythagoricienne Habro
téleia ( H 1).
BRUNO CENTRONE.
3 HAGIAS ЛІ
Ce jeune homme était étudiant auprès de Plutarque à Chéronée dans le dernier
quart du jer siècle (Propos de Table III 7 -9).
BERNADETTE PUECH .
4 HAGNON RE 4 IIa
Académicien , disciple de Carnéade (MC 42), dont il avait transcrit les cours
(Philod., Acad. hist., col. 23, 4-6 = Carnéade T 3b 7 sq.Mette ). Cicéron , Luc. 16 ,
loue son intelligence par rapport à Clitomaque (2°C 149). Quintilien (II 17 , 15 )
rapporte qu'il écrivit un traité contre la rhétorique. Selon Plutarque (De soll.
anim . 12 , 968 d ), il aurait discuté de la ruse des éléphants (cf. C . W .Müller, Die
Kurzdialoge der Appendix Platonica. Philologische Beiträge zur nachplato
nischen Sokratik, München 1975, p. 309 sq.). Très incertains sont les témoi
gnages d 'Athénée (XIII, 602 d -e : à propos des coutumes sexuelles des Spar
tiates) et des scholies à Homère ( II. IV 101, vol. I, p. 173, 23 -25 Dindorf: avec
une explication allégorique).
Cf. H . von Arnim , art. « Hagnon » 4 , RE VII 2, 1912, col. 2209; H . Dörrie ,
art. « Hagnon » 3, KP II, 1975, col.917; W .Görler , GGP, Antike 4 , p. 909.
TIZIANO DORANDI.
5 HAIMÔN DE CROTONE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V . pyth. 36 , 267, p . 143, 19 Deubner .
BRUNO CENTRONE.
6 HANIOCHOS DE MÉTAPONTE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth. 36 , 267, p . 144 , 8 Deubner.
BRUNO CENTRONE .
498 HARPOCRATION H7
7 HARPOCRATION RE 7 III
Un certain Harpocration, que son épigramme funéraire (IG I12 10826 ; W .
Peek, GVI 588) définit comme ontwp Mèv Elnett, Dióoogos 8' à xpñ voetv,
était établi à Athènes au IIIe siècle. Rien ne permet d 'établir un rapprochement
avec les deux sophistes homonymes connus par la Souda ( A 4013 et 4014).
Voir cependant la notice consacrée à Harpocration d'Argos ( H 9).
BERNADETTE PUECH.
8 HARPOCRATION D 'ALEXANDRIE RE 10 | ép.imp.
Le nom d 'Harpocration apparaît lié à deux écrits de la tradition hermétique de
science naturelle , ayant une orientation magico -astrologique.
Cf. 1 H . Gossen , art. « Harpokration » 10, RE VII 2, 1912 , col. 2416 -2417 ;
2 M . Stephan , suppl. à l'art. « Harpokration » 10, RESuppl. VI, 1935, col. 102
103 ; 3 F. Kudlien, art. « Harpokration » 3, KP II, 1967, col. 944.
A . Harpocration d 'Alexandrie est rattaché tout d 'abord à l'histoire complexe
de l'écrit hermétique intitulé Kupavídes, consacré à l'établissement des corres
pondances (ovunádelal) entre les éléments divers des trois règnes de la nature
(animaux, plantes et pierres), qui sont associés dans un usage médico-magique
par leurs propriétés occultes. Cet écrit est divisé en 24 chapitres qui correspon
dent aux lettres de l'alphabet grec. Chaque chapitre s'occupe d 'une plante, un
oiseau, un poisson et une pierre, dont les lettres initiales correspondent à la lettre
en question .
Pour les traits généraux de la littérature lapidaire, nous renvoyons à 4 R . Halleux et J.
Schamp, « Origines et typologie de la littérature lapidaire » , dans Les lapidaires grecs: Lapi
daire orphique, Kérygmes lapidaires d 'Orphée, Socrate et Denys, Lapidaire nautique, Dami
géron- Évax (traduction latine), texte établi ettraduit, CUF, Paris 1985, p. XIII-XXXIV (« Intro
duction » ).
Texte. 5 Ch . E . Ruelle dans F. de Mély, Les lapidaires de l'Antiquité et du
Moyen Age, t. II, III : Lapidaires grecs, Paris 1898 , 1902 (texte grec, très défi
cient, de Ruelle et traduction par de Mély ) ; 6 D . Kaimakis, Die Kyraniden, coll.
« Beiträge zur klassichen Philologie » 76 ,Meisenheim am Glan 1976 . Nous sui
vons cette édition , qui marque un progrès considérable par rapport aux éditions
antérieures. Nous avons ici pour la première fois le texte grec complet des
Cyranides, qui inclut les parties conservées des livres V et VI jusqu'alors iné
dites. Enfin , on peut lire une traduction latine de 1169 dans 7 L . Delatte , Textes
latins et vieux français relatifs aux Cyranides, Liège/Paris 1942 , p . 11-206 .
Études d 'orientation. 8 P . Tannery, « Les Cyranides» , REG 17, 1904,
p . 335-349 ; 9 R . Gauszyniec , « Studien zu den Kyraniden » , ByzJ 1, 1920,
p. 353- 367 ; 10 M . Wellmann , Markellus von Side als Arzt und die Koiraniden
des Hermes Trismegistos, coll. « Philologus Suppl.» XXVII 2 , Leipzig 1934 ;
11 A . J. Festugière, La révélation d 'Hermès Trismégiste, t. I: L 'astrologie et les
sciences occultes, Paris 19502, réimpr. 1989, p. 201-216 ; 12 G . Fowden, The
Egyptian Hermes. A historical approach to the pagan mind , Cambridge/London
1986 , p .87-91 et 161-165 .
H8 HARPOCRATION D 'ALEXANDRIE 499
Le premier livre des Cyranides constituait à l'origine un traité autonome inti
tulé Kupavís, d'après le nom d 'un pseudo- roi perse Kupavós. Festugière 11,
p. 205 , affirme que ce livre remonte au moins au IIIP. Il a été joint aux autres
livres des Cyranides sous la forme que nous connaissons aujourd 'hui à une date
antérieure au VIII° siècle , étant donné que le premier témoignage que nousavons
de cette fusion est dû à Georges le Syncelle, Chronique, p. 36 , 14 sq. (cf. p. 57,
16 sq.) Mosshammer (écrit après 806 ). D 'après le prologue, le livre I des Cyra
nides est la synthèse de deux ouvrages de contenu presque identique : l'ouvrage
« authentique » (hermétique) de Cyranos roi des Perses, et celui d'Harpocration
d 'Alexandrie. Le rédacteur byzantin a reproduit assez fidèlement (bien que tou
jours de façon résumée) les prologues des deux auteurs qui racontaient l'un et
l'autre en des termes très semblables que le texte du traité provenait d 'une
inscription enterrée. L 'un et l'autre auteur font référence dans ce récit sur l'ori
gine du traité à un ouvrage antérieur intitulé ’Apxaïxn bißhoc.
Harpocration , qui se présente comme un Alexandrin , intitulait sa rédaction
Bißłoç ånò Eupiac DepaneutIX et il la dédiait à sa fille (li. 30 Kaimakis).
Cf. le ms. Marc. class. V cod. 13 : éx tőv toŨ ' Aproxpatiwvoc toŨ 'Adetav péwÇ
περί φυσικών δυνάμεων ζώων τε φυτών και λίθων, και έγραψε προς την ιδίαν θυγατέρα,
et Coislin . 158 : Bubalov ' Aproxpatiwvoç, oúvoeolç TOŨ Kupavoở Baouléwç nepì xo
λίθων πετεινών τε και ιχθύων και βοτανών κατ' αλφαβήτου.
Dans le prologue qu 'il ajouta au traité, Harpocration racontait comment, au
cours d'un voyage en Asie , lorsqu' il séjournait dans la ville de Séleucie , il ren
contra un vieillard connaissant la langue grecque qui luimontra entre autres un
écrit magique qui se trouvait dans un lieu voisin , gravé en caractères syriaques
sur une stèle , écrit dont il reproduit le texte à partir de la traduction que le vieil
lard lui fournit.
Sur le prologue, voir Gauszyniec 9 , p . 361- 367; sur le rôle que le motif littéraire de la
découverte d'un écrit joue dans la tradition hermétique, voir Festugière 11, p. 319-324, no
tamment 322 sq . La fiction littéraire de la découverte d ' un écrit ancien vénéré indique dans
cette tradition un travail de refonte et d ' interprétation de textes prestigieux (cf. Wellmann 10 ,
p . 12 - 13 ) . Enfin , d 'après Festugière 11, p . 201, la rédaction d 'Harpocration aurait été faite sur
la rédaction précédente (celle de Cyranos) dans le dessein apparemment de la rendre plus
claire .
Lerédacteur byzantin remarque ici etlà tout au long du livre les passages sur
lesquels les deux rédactions varient (chap. 1, li. 77 sq., p. 25 ; li. 130 -138, p. 28 ;
chap . 7, li. 86 sq., p . 54 ; chap . 10 , li. 8, p . 62 ; chap . 11, li. 7, p.68; chap . 21, li.
93, p . 98 ; li. 132 sq., p. 100 ; chap. 22, li. 58, p. 108). Wellmann 10 , p. 12- 13,
ainsi que plus tard Festugière 11, p. 204, croient reconnaître le texte authentique
d'Harpocration dans le manuscrit D , Parisinus graecus 2256 , fol. 546 -562, bien
que sous la forme d'extraits . En revanche, Kaimakis 6 , p .6 sq., rejette cette
hypothèse, tout en démontrant que le fait que ce manuscrit ne contienne pas cer
taines parties n 'implique pas que son texte est plus originel ; il croit plutôt que
ces parties ont été supprimées dans un souci de piété par le rédacteur byzantin .
Les Cyranides présentent une série de passages en vers où on reconstitue par
fois, non sans difficulté , des séries d'acrostiches où on peut lire les noms
MAINOE (chap. 1, li. 130- 138, p .28 sq. ; chap.4 , li. 55-63, p. 42 sq. ;chap. 7, li.
500 HARPOCRATION D 'ALEXANDRIE H8
parmi les maîtres de Lucius Verus ; cf. 1 J. Dillon , The Middle Platonists, Lon
don 1977, p . 258-259.
Harpocration fut l'auteur, selon la Souda (loc. cit.), de deux ouvrages perdus:
Υπόμνημα είς Πλάτωνα ένα βιβλίοις κδ', et Λέξεις Πλάτωνος έν βιβλίοις
B '. C 'est au premier de ces ouvrages qu 'on peut attribuer les observations sur les
dialogues de Platon (Alcibiade 1, Phédon, Phèdre, République, Timée) rapportées
par Jamblique, Proclus, Hermias, Énée de Gaza, Damascius, Olympiodore, le
scholiaste du Vaticanus graecus 2197 (voir plus haut) et l'Anonyme du Parisi
nus graecus 1918 (voir 5 ci-dessous).
On ne connaît ni la date de sa naissance ni celle de sa mort. Il faut peut-être
l'identifier avec le Harpocration (2 - H 7 ), commémoré dansune inscription funé
raire d 'Athènes datant du 1e siècle (IG II 10826): quelxpós oủ qulupov
xarúntw I túuboç ävop' Énei oop@ v 18őpa Movośwv Mérlota , tõv 1 68'
έξοχον λαχών | “ Αρποκρατίων πρός αστών τρίς μάκαρ κληίζεται Γούνεκ'
ñv ontwp uèv eineīv , I dióoogos 8 ' à xeñ voetv . C 'est en tout cas la seule
attestation du nom d 'Harpocration dans la prosopographie attique ( comme me
l'a confirmé le professeur John Traill de l'Université de Toronto ). Si cette identi
fication est fondée, on pourrait en conclure qu 'Harpocration a passé à Athènes la
dernière partie , peut-être la partie la plus glorieuse , de sa carrière.
Témoignages. Voir 2 J. Dillon, « Harpocration's Commentary on Plato :
Fragments of a Middle Platonic Commentary », CSCA 4, 1971, p. 125-146;
3 L . G . Westerink, The Greek Commentaries on Plato ' s Phaedo, t. I: Olympio
dorus, Amsterdam 1976, Index I, s.n ., et 4 t. II :Damascius, Amsterdam 1977,
Index I, s.n .; 5 J. Whittaker, « Harpocration and Serenus in a Paris manuscript» ,
Scriptorium 33, 1979, p . 59-62, repris dans Studies in Platonism and Patristic
Thought, coll. « Collected studies series » 201, London 1984, n° XXIV .
École. Harpocration est resté fidèle à l'enseignement de son maître Atticus en
soutenant que le monde est engendré selon le temps,mais qu 'il reste impéris
sable de par le vouloir de Dieu . Sur d 'autres points considérés comme fondamen
taux à l'époque (rôle du Démiurge ,métempsycose , origine du mal), Harpocra
tion a cependant abandonné ou modifié les doctrines de son maître, sous l'in
fluence de Numénius et de Cronius.
Études d 'orientation. 6 H . von Arnim , art. « Harpokration » 2 , RE VII 2 ,
1912, col. 2411;Westerink 3, p. 12 - 13;"Dillon 1, p .258- 262.
Bibliographie. 7 L . Deitz , « Bibliographie du platonismeimpérial antérieur à
Plotin : 1926 - 1986 » , dans ANRW II 36, 1, 1987, p. 151.
JOHN WHITTAKER (†).
HASDRUBAL + CLE ( I ) TOMAQUE DE CARTHAGE
H 12 HÉCATÉE D'ABDÈRE 505
10 HAURANUS (C .STALLIUS -) RE Stallius 3 MF Ia ?
Stallius Hauranus , connu par l'inscription de Naples CIL X 2971 comme
appartenant au « cheur des Épicuriens, quimène joyeuse vie » , est situé par J.
Ferguson , « Epicureanism under the Roman Empire » , ANRW II 36, 4 , 1990 ,
p . 2262, vers la fin de la République. Une date légèrement postérieure n 'est pas
non plus exclue ; la définition implique en tout cas que l'épicurisme populaire
était déjà largement diffusé à son époque.
BERNADETTE PUECH .
11 HÉCATÉE
Personnage inconnu,mentionné dans la Stoicorum historia de Philodème, col.
12 , 1 - 3 (= SVF I 39 et FDS 131) en relation avec Athénodore de Soles
( * * A 496 ). Susemihl, GGLA, I, p . 73 n . 292, pense à un disciple de Zénon de
Cittium ; Crönert, Kolotes und Menedemos, p. 141 n . 550 , a proposé de
l'identifier avec Hécaton de Rhodes (» H 13) . Cf. T . Dorandi (édit.), Filodemo :
La Stoa da Zenone a Panezio , p. 10 et 145.
TIZIANO DORANDI.
12 HÉCATÉE D 'ABDÈRE RE 4 PP 16915 FIV / D IIIa
Écrivain du début de l'époque hellénistique, présenté comme disciple de
Pyrrhon (Diogène Laërce IX 69), auteur de monographies historico -ethnogra
phiques de tendance philosophique, qui ont eu une influence remarquable sur la
littérature utopique ainsi que sur la littérature apologétique juive de la fin de
l'époque hellénistique.
Cf. 1 E . Schwartz, « Hekataios von Teios» , RAM 40 , 1885, p. 223- 262; 2 F .
Susemihl, GGLA, Leipzig 1891, t. I, p . 310 -314 ; 3 F. Jacoby, art. « Hekataios >>
4, RE VII 2, 1912, col. 2750-2769, repris dans Griechische Geschichtschreiber,
Stuttgart 1956 , p . 227-237 ; 4 W . Spoerri, art. « Hekataios von Abdera» , RAC
XIV , 1988, col. 276 -310 ; 5 Id ., art. « Hekataios » 4 , KP II, 1967, col. 980-982 ;
6 B . Z . Wacholder, art. « Hecataeus of Abdera» , EncJud VIII, 1971, p . 237.
Éditions d 'ensemble des fragments. Cf. 7 C .Müller, FHG , t. II,p . 384-396 ,
t. IV , p .675 ; 8 DK 73, t. II, p. 240 -245. Nous suivons la numérotation et la
distribution des fragments (et des témoignages ) de l' édition de 9 F . Jacoby,
FGrHist 264, t. III A , Leiden 1940, réimpr. 1964, p. 11-64 (Kommentar : t. III a,
Leiden 1943, réimpr. 1964, p . 29-87), qui est la plus complète (ajouter 10 J.
Mette , « Die “ Kleinen ” griechischen Historiker heute » , Lustrum 27, 1985, p. 33
38, notamment p . 37) . Cela dit, il faut reconnaître que les opinions sur l'authen
ticité et l'attribution des fragments varientconsidérablement parmi les critiques.
La suggestion de 11 R . Merkelbach, « Literarische Texte unter Ausschluß der christli
chen » , APF 16 , 1956 (1958 ), p . 82 - 129, notamment p . 112 - 114 , n° 1117 , qui attribue un
fragment de papyrus (PMichael. 4 = Pack2 2271) aux Aigyptiaka d 'Hécatée, fut déjà mise en
question par 12 P . M . Fraser, Ptolemaic Alexandria, t. II, Oxford , 1972, p . 772 sq . n . 40, et
plus récemment par 13 S.West,« P.Michael. 4 : Factor fiction ?», ZPE 10, 1973,p. 75-77.
L ' étude de la personnalité littéraire et philosophique d'Hécatée d 'Abdère se
heurte à deux difficultés qui compliquent considérablement la recherche. La
506 HÉCATÉE D 'ABDÈRE H 12
première difficulté est due à la confusion fréquente de cet Hécatée avec Hécatée
de Milet (FGrHist 1), auteur qui a joui d'une plus grande renommée. La pratique
habituelle de ne pas citer le nom de la patrie a contribué largement à cette confu
sion .
Le recueil de Jacobymet en évidence cette difficulté . En effet, on peut constater les chan
gements d 'attribution que l'éditeur a faits entre la première édition du tome 1 A des FGrHist
(Berlin 1922) et la deuxième, qui inclut un appendice d 'Addenda (und delenda ) (Leiden 1957,
réimpr. 1968, p. * 1 -* 5) . Les témoignages et fragments d'Hécatée de Milet rassemblés comme
FGrHist 1, test. 5 bis (Plutarque, Vie de Lycurgue 20, 3 = Apoth. Lac. 218 b ), test. 13 = fr. 194
(Strabon VII 3 , 6 , 299 ), test. 14 (Agatharchidès de Cnide, De la Mer Rouge, ap. Photius, Bibl.,
cod . 250 , 454 b , p . 172 -173 Henry ; GGM , t. I, p . 156 , 12 Müller), fr. 195 (Périple Anonyme
du Pont- Euxin 49, 6 , GGM , t. I, p . 413, 37 sq. Müller = Pseudo -Scymnos, v. 869, GGM , 1. I,
p . 232 Müller), fr. 370 (Pline, Histoire Naturelle IV 94 = Solin 19, 2 ) et fr. 373 (Diodore de
Sicile XL 3, 8 , ap . Photius, Bibliothèque, cod . 244 , 381 ą, p. 379 - 381 Henry ) sont attribués
plus tard à Hécatée d 'Abdère comme test. 5 , fr. 8 , test. 9 , tesi. 2 b = fr. 13, fr. 14 el fr. 6
respectivement. En revanche, les fragments 15 (Aétius, Placita II 20, 16 , p. 351 b , 9 - 11 Diels )
et 18 (Érotien , p . 55 , 7 Nachmanson ) d 'Hécatée d 'Abdère sont rassemblés dans les Addenda à
Hécatée de Milet (FGrHist 1, t. I, p . 4 ) avec les numéros 302 bis et 284 bis. Enfin , 14 G .
Nenci, Hecataei Milesii Fragmenta , Firenze 1954 , p. 113, revendique en outre pour Hécatée
de Milet les fragments 3 (= 386 Nenci, D . L . I 9 ) et 5 ( = 338 Nenci, Plutarque, De Iside et
Osiride, 353 b ).
La deuxième difficulté concerne la prolifération à l'époque hellénistique
d'écrits pseudépigraphes juifs sous le nom d 'Hécatée d'Abdère.
Les fragments concernant les Juifs ont bénéficié d'une attention particulière
de la part des spécialistes des écrits intertestamentaires ainsi qu 'en général de la
part des chercheurs du peuple juif, dans la mesure où Hécatée d' Abdère fournit
le premier témoignage païen un peu développé qui nous soit parvenu sur ce
peuple. Cependant, les critiques ne s'accordent aucunement sur l'authenticité de
la plupart de ces fragments ni sur leur datation .
Éditions des fragments concernant les Juifs. 15 Th. Reinach, Textes d'au
teurs grecs et romains relatifs au Judaïsme, réunis, traduits et annotés, Paris
1895, réimpr. Hildesheim 1963, p . 227 -236 ; 16 A .- M . Denis, Fragmenta pseu
doepigraphorum quae supersunt Graeca una cum historicorum et auctorum
Judaeorum hellenistarum fragmentis, dans A .-M . Denis et M . de Jonge, Pseudo
epigrapha Veteris Testamenti Graece, t. III, Leiden 1970, p . 199-202 (texte
grec) ; 17 M . Stern, Greek and Latin authors on Jews and Judaism , t. I, Jeru
salem 1974, p. 20 -44 (texte grec avec traduction anglaise et notes) ; 18 C . R .
Holladay, Fragments from Hellenistic Jewish authors, t. I : Historians, coll.
« Society of Biblical Literature. Texts and Translations» 20 , « Pseudoepigrapha
Series» 10, Chico 1983, p. 277-335 (texte grec avec une traduction anglaise et
des notes). Il y a deux traductions remarquables des fragments: cf. 19 R . Doran,
dans J.H . Charlesworth (édit.), The Old Testament pseudoepigrapha, t. II :
Expansions of the Old Testament and legends, wisdom and philosophical litera
ture, prayers, psalms and odes fragments of the lost Judaeo-Hellenistic works,
New York 1985, p. 905- 919 ; et 20 N . Walter, « Pseudo -Hekataios I und II. Die
Fragmente jüdisch -hellenistischen Historiker» , dans W .G . Kummel et C .
H 12 HÉCATÉE D'ABDÈRE 507
HÉGÉSILAOS → HÉGÉSINOS
21 HÉGÉSINOS III/ IIa
Philosophe académicien , scholarque à la suite d'Évandre (» E 65) et de
Téléclès.
530 HÉGÉSINOS H21
Aux fragments recueillis par H .J. Mette, « Weitere Akademiker heute. Von
Lakydes bis zu Kleitomachos» , Lustrum 27, 1985, p. 52, on peut adjouter (ps.
Gal.), Hist. phil. 3 (= Carn . T 6b Mette) et Souda II 1707 (vol. IV , p . 140 sq.
Adler ) = Carn . T 6dMette ).
Clément d' Alexandrie (Strom . I 14, p. 40, 16 , 17 Stählin = Carn. T 6a Mette )
mentionne un philosophe Hégésilaos,maître de Carnéade et son prédécesseur à
la tête de l'Académie . On ne peut pas décider si Hégésilaos est une faute de
Clément pour Hégésinos ou si le philosophe avait changé son nom en Hégésinos
(cf. H . Daebritz , art. « Hegesilaos », RE VII 2 , 1912, col. 2609).
U . Köhler (IG II 385) a proposé d' identifier avec Hégésinos le personnage
honoré dans une inscription de 193/29 (IG 112 886 ). Cf. Chr. Habicht, Hellenistic
Athens and her philosophers, Princeton 1988, p . 13 = Athen in hellenistischer
Zeit,München 1994, p. 241.
Cf. H . von Arnim , art. « Hegesinos» RE VII 2, 1912, col. 2610 ; W . Görler,
GGP, Antike 4, p . 835 sq .
TIZIANO DORANDI.
HÉGÉSIPOLIS MÉNÉDÈME D'ÉRÉTRIE
22 HÉGIAS D 'ATHÈNES RE 5 PLRE II: FV
Philosophe néoplatonicien , disciple de Proclus et d' Isidore . Il était fils de
Théagénès, qui fut archonte athénien , petit-fils d’Archiadas 1 (MA 314), lui
même petit-fils de Plutarque d 'Athènes, fondateur de l'École néoplatonicienne
d' Athènes (voir les essais d'arbres généalogiques dans H . D . Saffrey et L .G .
Westerink [édit.), Proclus, Théologie platonicienne, CUF, vol. I, Paris 1968, p.
XXXV, et dans PLRE, vol. II, Cambridge 1980 , p. 1329). Tout ce que nous
savons de ce philosophe nous vient du Proclus de Marinus (éd . Boissonade ,
Leipzig 1814) et de la Vie d 'Isidore par Damascius, elle -même connue à travers
les citations de Photius dans sa Bibliothèque et la notice de la Souda (éd. C .
Zintzen , Hildesheim 1967 ; trad. anglaise par P . Athanassiadi, Damascius,
p. 319-321).
Il est né probablement vers la fin des années soixante du ve siècle, et a été
élevé dans l'ambiance de l' École de philosophie de Proclus, qui avait d 'abord
mis en lui tous ses espoirs. Marinus, dans son Proclus, chap. 26 , raconte que
pendant les cinq dernières années de sa vie , entre 480 et 485, Proclus avait une
activité très diminuée , son état de santé étant devenu précaire. Il dit: « Bien qu 'il
fût dans cet état de faiblesse, ce qui incitait Proclus à donner encore quelques
cours d 'exégèse , c'était Hégias qui, dès l'adolescence, donnait des preuves évi
dentes de toutes les vertus de ses ancêtres et montrait qu'il appartenait à la
chaîne véritablement d'or de la race issue de Solon . Hégias donc suivait attenti
vement les cours de Proclus sur les écrits de Platon et sur les autres théologies.
En outre , le vieillard lui donnait des devoirs de géométrie et se réjouissait gran
dement à voir l'enfant progresser petit à petit dans chacune des disciplines ma
thématiques » . Hégias devait avoir entre dix et quinze ans, et Proclus qui avait
H 24 HÉLICAON DE RHÉGIUM 531
décelé que l'âme de Solon revivait en lui, veillait à sa première éducation .
Encore tout jeune Hégias avait donc été formé à la théologie platonicienne et aux
théologies orphique et chaldaïque. On croyait alors qu' il ne serait pas inférieur à
son aïeul, le Grand Plutarque (V. Isid ., fr. 351). Il semble qu 'il se soit lancé à
fond dans la mystique chaldaïque, puisque son maître Isidore, le chef de l'École
après Proclus et Marinus, devait le reprendre et lui dire: « Hégias, si, comme tu
le dis et je le dis moi aussi, la théurgie est une chose très divine, il faut néan
moins que ceux qui doivent devenir des dieux (= les théurges) soient d ' abord des
hommes. C 'est la raison pour laquelle Platon aussi disait qu 'il n 'est pas donné
aux hommes un plus grand bien que la philosophie (Tim . 47 b 1-2 ), eh bien ,
aujourd 'hui, ce don de la philosophie n 'est plus sur le tranchant du rasoir (c'est
à -dire au moment critique de son apogée ),mais pour sûr dans son extrême vieil
lesse » (V. Isid . 227). On peut douter qu 'Hégias ait tenu compte des avertisse
ments d'Isidore, puisque Damascius devait porter sur la réputation d 'Hégias à
Athènes le jugement sans appel que voici: « Aussi loin que remontent nos sou
venirs, nous n 'avons jamais vu mépriser la philosophie à Athènes, comme nous
l'avons vu faire sous Hégias » ( V . Isid . fr. 221). K . Praechter, art. « Hegias» 5 ,
RE VII 2, 1912, col. 2615, a tiré de ce texte qu'Hégias aurait pu être un temps
chef de l'École philosophique,mais aucune autre source ne vient confirmer cette
hypothèse douteuse et aucune place ne peut lui être attribuée dans la succession
des chefs de l'École . Hégias était un païen fanatique et il se fit des ennemis
parmi ceux qui se servaient du régime en place pour machiner des complots,
comprenez les Chrétiens. Il mettait un zèle outrancier à conserver les cultes tra
ditionnels de l'Attique. Damascius note encore qu 'Hégias a été meilleur que son
père Théagénès pour ses qualités morales et son talent oratoire (V. Isid., fr. 351).
Aucun écrit de lui n 'a été conservé. En bref, Hégias semble avoir été un aristo
crate athénien, philosophe médiocre et théurge militant dans la période intermé
diaire entre la mort de Proclus (485) et l'arrivée de Damascius à la tête de
l'École (vers 515).
HENRI DOMINIQUE SAFFREY .
23 HÉLANDROS DE TARENTE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V . pyth . 36 , 267, p. 144 , 18 Deubner .
BRUNO CENTRONE.
24 HÉLICAON DE RHÉGIUM RE 4
Pythagoricien,mentionné par Jamblique, V.pyth. 27 , 130 ,p .73,25- 74,3 ; 30,
172 , p. 96 , 24 - 97, 3 Deubner, parmi les auteurs des constitutions de Rhégium ,
lesquels se seraient distingués par leurs activités et leurs mæurs ; leurs conci
toyens leur auraient accordé des honneurs divins. Il figure dans le catalogue de
Jamblique, V. pyth . 36 , 267, p. 145, 19.
BRUNO CENTRONE.
532 HÉLICON DE CYZIQUE H 25
25 HÉLICON DE CYZIQUE RE 3 IV /IIIa
Astronome, disciple d 'Eudoxe de Cnide (» -E 98).
Témoignages. 1. F . Lasserre (édit.), De Léodamas de Thasos à Philippe
d 'Oponte. Témoignages et fragments, Napoli 1987, p. 139- 143, 349-352, 575
576 .
On ne peut pas le considérer comme un académicien au sens propre du terme.
Selon le témoignage de la Lettre XIII pseudo-platonicienne, Hélicon aurait été
disciple d 'Eudoxe ( T 24 Lasserre) et aurait suivi les leçons de l'un des élèves
d ' Isocrate (2 + 1 38 ), ainsi que celles de Polyxenos, l'un des élèves de Bryson
( » B 68).
Dans cette lettre, Platon le recommande au tyran de Syracuse , Denys, parce
qu'il pense qu 'il pourra lui être utile , mais la lettre est fictive et son témoignage
doit être récusé (cf. G . Pasquali, Le lettere di Platone, Firenze 1938, 2e éd. 1967,
p . 186 -188, et K . Gaiser, Sandalion 4, 1981, p. 80 sq.). Selon Plutarque (Vita
Dion. 19 = T 3 Lasserre ), Hélicon aurait prédit à Denys, pendant son séjour à
Syracuse , une éclipse de soleil et il aurait gagné ainsi l'admiration du tyran, qui
lui aurait donné en cadeau un talent d'argent. L 'éclipse est celle du 12 mai 361.
On doit, toutefois, suspecter ce renseignement, parce que la date de 361 s'ac
corde difficilement avec les données relatives aux carrières d 'Hélicon ( T 1) et
d'Eudoxe (D .L . VIII 86 -87 = T 7). Hélicon s'installa à Syracuse plutôt entre 355
et 350 , après la fermeture de l'école d 'Eudoxe à Cyzique (cf. Lasserre 1, p. 576 ).
Cf. F . Boll, art. « Helikon » 3, RE VIII 1, 1912 , col. 7 sq.; J. Mau, art.
« Helikon » 2 , KP II, 1975, col. 994 sq.
TIZIANO DORANDI.
26 HÉLIODORE Ira (?)
Personnage cité deux fois dans la Vita Philonidis, PHerc. 1044, fr. 21, 1-4 et
28, Gallo .
L 'hypothèse de Wilamowitz (signalée par W . Crönert, « Die Epikureer in
Syrien » , JEAI 10 , 1907, p . 148 s. v.) qui supposait que les deux occurrences
visaient le même Héliodore et suggérait de l'identifier avec Héliodore d ' Antio
che, ministre de Séleucos IV Philopator est convaincante (voir D . Gera, « Philo
nides the Epicurean at court : early connections» , ZPE 125, 1999, p . 77-83).
TIZIANO DORANDI.
27 HÉLIODORE
Le scholiaste de Juvénal mentionne un Héliodore, philosophe stoïcien, qui
aurait été l'accusateur de L . Iunius Silanus. Juvénal ferait allusion à ce person
nage dans la satire I, 34. Voir J. Ferguson, A Prosopography to the poems of
Juvenal, Bruxelles 1987, p. 112.
MICHÈLE DUCOS.
H 29 HÉLIODORE D 'ALEXANDRIE 533
28 HÉLIODORE DII
A . Diadoque de l'école épicurienne d'Athènes – mais non nécessairement
athénien d'origine -, successeur de Popillios Théotimos , attesté encore en 121
(IG II? 1099), destinataire d'une lettre d'Hadrien datée entre le 14 février et le 14
mars 125, il semble avoir adressé une demande excessive à Hadrien et avoir
essuyé un refus, au moins partiel : voir S . Follet, « Lettres d 'Hadrien aux épicu
riens d' Athènes (14 .2- 14.3.125): SEG III 226 + IG 112 1097 », REG 107, 1994 ,
p. 158- 171. Il doit s'agir du philosophe ami d'Hadrien puis déchiré par lui dans
une lettre célèbre mentionné par l'Histoire Auguste , V. Hadr. XV 5 et XVI 10 ,
en même temps qu'Épictète (3-E 33).
B . L 'identification souvent proposée de ce scholarque à C . Avidius Heliodo
rus (PIR A 1405 et H 51) n 'est appuyée ni par la lecture de la ligne 8 de
l'inscription ci-dessus, ni par la vraisemblance, puisqu' en vertu des décisions
prises en 121 le diadoque devait plutôt être un pérégrin , ni par ce qui est connu
de la carrière de C . Avidius Heliodorus, nommépréfet d'Égypte à la fin du règne
d 'Hadrien et maintenu dans ce poste par Antonin (voir , en dernier lieu , S . A .
Stertz, « Semper in omnibus varius: The Emperor Hadrian and Intellectuals» ,
(Directeur de la chancellerie grecque d 'Hadrien, puis préfet d 'Égypte de 137 à 142 (voir G .
Bastianini, « Il Prefetto d 'Egitto » , ANRW II 10 , 1, 1988, p. 508 ), C . Avidius Héliodôros devait
cette promotion, selon Dion Cassius abrégé par Xiphilin (72, 22, 2), à ses talents de rhéteur.
Aucune source ne permet de supposer qu 'il ait été philosophe. L 'hypothèse d' A . Stein , PIR2 A
1405 et H 51, selon laquelle le préfet d 'Égypte serait identique au philosophe Héliodore, ami
d 'Hadrien et scholarque de l'école épicurienne d'Athènes, est donc peu plausible, bien qu 'elle
ait été reprise par H . G . Pflaum , « La valeur de la source inspiratrice de la Vita Hadriani» ,
Bonn. Hist. Aug. Colloquium 1968/ 9, coll. « Antiquitas » 4, 7 , Bonn 1970 , p. 181, et R . Syme,
« Hadrian as Philhellene. Neglected Aspects » , ibid . 1982/3 , coll. « Antiquitas» 4 , 17, Bonn
1985, p. 341- 345. B .P .)
SIMONE FOLLET.
29 HÉLIODORE D 'ALEXANDRIE RESuppl. XV:12a M III
Aristotélicien du IIIe siècle ap. J.-C . que le philosophe Longin , dans la pré
face de son livre Sur la fin (Porphyre, Vita Plotini 20 , 35 -36 ), associe à Annius
( 24A 187),Médius et Phoebion ; dans leurs écrits , ils n 'ont retenu des anciens
que des éléments mineurs (V. Plot. 20 , 60 -65 ). Longin ajoute : « on pourrait leur
adjoindre aussi Héliodore, parce que luinon plus, au regard de ce que ses prédé
cesseurs ont dit dans leurs leçons, n 'a rien apporté de plus à l'articulation du rai
sonnement» (V . Plot. 20 ,65-68 ).
Sous le nom d'Héliodore, on possède un commentaire sur l'Éthique à Nicomaque (édité
par G . Heylbut dans CAG XIX 2 , 1889), dont on a reconnu depuis longtemps qu 'il s'agissait
d'une fausse attribution due à Constantin Paléocappa : voir P .Moraux , Der Aristotelismus bei
den Griechen , coll. « Peripatoi> 5 , t. I, Berlin 1975, p. 137 -138. Voir la note d ' A . -Ph .
Segonds, dans Porphyre, La Vie de Plotin , t. II, p . 287. Paléocappa a pu s'inspirer de la Vie de
Plotin, mais le commentaire est attribué à un Héliodore de Pruse (MH 34 ) et non d 'Alexan
drie.
LUC BRISSON.
534 HÉLIODORE D 'ALEXANDRIE H 30
30 HÉLIODORE D'ALEXANDRIE RE 13 PLRE II:6 MF V
Philosophe et astronome néoplatonicien, disciple de Proclus. Syrianus, le
deuxième chef de l'École néoplatonicienne d' Athènes, avait marié l'une de ses
parentes, Aidésia (P + A 55), à l'un de ses disciples, Hermias d 'Alexandrie
(» H 78 ). (Hermias enseigna à Alexandrie, où il introduisit les doctrines de
l' École d'Athènes, cf. L . G . Westerink (édit.), Prolégomènes à la philosophie de
Platon , CUF, Paris 1990 , p. X -XI). Ils eurent trois fils: le fils aînémourut jeune,
les deux autres étaient Ammonius (* A 141) et Héliodore. Ils durent naître à
Alexandrie dans la décennie 440 -450 . Hermias mourut peu après, laissant ses
deux enfants à la charge de leurmère. Nous savons par la Souda (t. II, p. 162,
13 -21 Adler = Damascius, Vita Isidori, fr. 127) qu 'Aidésia, soucieuse de leur
bonne formation philosophique, les emmena à Athènes pour qu 'ils deviennent
tous deux élèves de Proclus, le successeur de Syrianus à la direction de l'École
de philosophie . Ils suivirent vraisemblablement le cursus complet des études
philosophiques et théologiques sur cinq ou six années, puis, une fois le cycle
achevé, revinrent à Alexandrie où Ammonius devint professeur de philosophie .
Son frère, Héliodore, bien qu 'il porte aussi le titre de diaboodoç, n 'est en fait
connu que par des observations astronomiques ,et l'on ne sait rien de son activité
de philosophe. Dans plusieursmanuscrits de l' Almageste de Ptolémée, on trouve
une note liminaire qui a sûrement été recopiée du propre exemplaire de ce texte
appartenant à Héliodore. Cette note , découverte et publiée pour la première fois
par Ismaël Boulliau (Astronomia Philolaica, Paris 1645, t. I, p. 246 , 278 , 326
327, 346 , t. II, p . 172) et republiée par J. L . Heiberg au tome II des Claudii Ptole
maei Opera quae exstant omnia , Lipsiae 1907, p. XXXV- XXXVII, enregistre des
observations astronomiques faites par Héliodore (l'une d'elles avec son frère
Ammonius, une autre , celle de 475 , avec un Delos, qui peut désigner soit le
< divin » Proclus soit plus probablement son “ oncle ", Grégoire, le frère d 'Her
mias), entre les années 475 et 510 . Elles sont au nombre de sept et concernent
des occultations ou des conjonctions de planètes. Les dates exactes sont: 18 nov.
475, 1er mai 498, 21 fév. 503, 27 sept. 508, 11 mars et 13 juin 509, 21 août 510 .
Seule la première observation a été faite à Athènes, toutes les autres, à Alexan
drie . Par conséquent, on peut raisonnablement penser que la date de la première
observation en 475 tombe dans les années où Ammonius et Héliodore étaient
ensemble à Athènes, étudiants dans l'école de Proclus, les autres dates s 'échelon
nent sur la durée de leur activité à Alexandrie . Ces observations astronomiques
ont été étudiées en grand détail et parfaitement vérifiées par O . Neugebauer, A
History of AncientMathematical Astronomy, Part II, Berlin /Heidelberg , 1975 ,
p . 1038 - 1041. Damascius, qui a été élève d'Ammonius, dit qu 'Ammonius était
plus doué et plus avide d'apprendre que son frère (V. Isid., fr. 127). On peut faire
l'hypothèse que, dans le temps où Ammonius était le grand professeur de philo
sophie à Alexandrie , dans la secondemoitié du Ve siècle , Héliodore était pour lui
une sorte d'assistantspécialisé dans les sciencesmathématiques. Il faut toutefois
retirer à Héliodore la paternité d'un commentaire sur Paul d' Alexandrie qui lui
est attribué dans le manuscrit Vindob . phil. gr. 115, cf. J. Warnon , « Le commen
H 31 HÉLIODORE D ' ÉMÈSE 535
taire attribué à Héliodore sur les ElfararikA de Paul d ' Alexandrie » , dans
Recherches de Philologie et de Linguistique, Louvain 1969, p. 197-217 ,et L . G .
Westerink, « Ein astrologisches Kolleg aus dem Jahre 564» , dans ByzZ 64 , 1971,
p . 6 -21, reproduit dans Texts and Studies in Neoplatonism and Byzantine litera
ture , Amsterdam 1980, p . 279-294. Le texte en a été édité sous le titre :Heliodori
ut dicitur in Paulum Alexandrinum commentarium , edd. Boer-Pingree, Leipzig
1962. Aucun écrit de la plume d'Héliodore ne nous est donc parvenu.
HENRI DOMINIQUE SAFFREY.
31 HÉLIODORE D 'ÉMÈSE RE 15 III ?
Romancier dont l'æuvre a suscité des interprétations philosophiques.
Héliodore est l'auteur du plus célèbre roman grec , en dix livres, qui nous est
parvenu intégralement sous différents titres, l'Éthiopique, ALOLOTTLXÒV (Bíbalov),
les Éthiopiques, tà ALOlorixá (sans doute le titre courant), Chariclée , º Xapi
xhela (titre byzantin ) ou l'Histoire éthiopique de Théagène et Chariclée, td
trepi Oeayévnv xai Xapixdelav. Voir 1 R . M . Rattenbury, T . W . Lumb,
J.Maillon (édit.) , Héliodore, Les Éthiopiques ( Théagène et Chariclée), texte
établi par R . M . R . et T. W .L . et traduit par J. M ., CUF, Paris 1935 - 1943, 24
éd. 1960, p . VII n . 1 et p. 2,pour tous les titresdonnés par lesmanuscrits.
Éditions. L'édition de Rattenbury et Lumb 1 s'est imposée comme l' édition
de référence, mais il ne faut pas négliger celle de 2 A . Colonna, Heliodori
Aethiopica , Roma 1938 ; cette dernière regroupe en outre l'essentiel des testimo
nia sur la réception de l'æuvre à l' époque byzantine. Le même savant a récem
ment donné une nouvelle édition : 3 A . Colonna, Le Etiopiche di Eliodoro, testo ,
introd., nota biograf., nota bibliograf., nota crit. a cura di C . A ., trad. e comm . a
cura di Bevilacqua J., coll. « Classici greci» , Torino 1987. Toutes deux ont été
vivement critiquées (cf. Rattenbury et Lumb 1, t. III, p. V -VII pour Colonna 2, et
4 E . V .Maltese ,Maia 40, 1988, p . 192-196 pour Colonna 3).
Études d 'ensemble. Parmi la masse croissante de publications consacrées
aux Éthiopiques, on retiendra pour une première approche la synthèse très dense
de 5 A . Billault, « Présentation des Éthiopiques» , IL 39, 1987, p . 25-30, et l'ex
cellente monographie de 6 G . N . Sandy, Heliodorus, Boston 1982 . On lira aussi
7 E . Feuillâtre, Études sur les Éthiopiques d 'Héliodore , coll. « Publications de la
Faculté des Lettres et Sciences humaines de Poitiers » 2 , Paris 1966 , 8 B . P .
Reardon , Courants littéraires grecs des Ile et Ille siècles après J. C ., coll.
« Annales littéraires de l'Université de Nantes» 3 , Paris 1971, p . 381-392, et
9 A . Billault, La Création romanesque dans la littérature grecque à l'époque
impériale, Paris 1991. L 'ouvrage de Colonna 3, p. 27-32, donne, jusqu'en 1982,
une bibliographie essentielle en ce qui concerne les éditions, les traductions et
les études portant sur les Éthiopiques. Les travaux postérieurs les plus importants
seront cités dans cette notice.
Le roman ayant eu à Byzance, puis en Occident, une fortune extraordinaire
qui lui a souvent valu des lectures à tendances philosophiques etmorales, il peut
être intéressant de lire les témoignages critiques recueillis dans Colonna 2 , aux
536 HÉLIODORE D 'ÉMÈSE H31
quels il faut ajouter les éditions de 10 H . Gärtner, « Johannes Eugenikos, Pro
theoria zu Heliodors Aithiopika » , ByzZ 64, 1971, p. 322- 325, et de 11 A . R .
Dyck, Psellus, The Essays on Euripides and George of Pisidia and on Heliodo
rus and Achilles Tatius, coll. « Byzantina Vindobonensia » 16 , Wien 1986 . L 'ar
ticle de 12 H . Gärtner, « Charikleia in Byzanz » , A & A 15, 1969, p. 47-69 est
utile . Enfin, on trouvera dans 13 T.Hägg, The Novel in Antiquity , Oxford 1983,
p . 73-80, 192-210, mention , avec iconographie, des æuvres inspirées par les
Éthiopiques à Byzance et dans l'Europe moderne.
L'auteur. Sur l'existence du romancier,nous n 'avons que deux témoignages.
Le premier est fourni par l'euvre elle -même (Éthiopiques X 41, 4) : « Ainsi finit
l'histoire éthiopique de Théagène et Chariclée. L 'auteur en est un Phénicien
d' Émèse, de la race d'Hélios, Héliodore, fils de Théodose » (trad. Maillon ). Le
second est une information de l'écrivain Socrate (Hist. Eccl. V 22 = PG 67,
col.639) qui, à propos du célibat des prêtres, relate qu '« en Thessalie cette cou
tume fut introduite par Héliodore, lorsqu 'il devint évêque de Trikka ; on attribue
à ce même Héliodore (où déYetal) une histoire d'amour qu' il écrivit dans sa
jeunesse et intitula les Éthiopiques» (trad.Maillon ). Il semble (cf. Rattenbury 1,
P. VII- VIII) que le texte de Socrate ait inspiré Photius (cod. 73) et Nicéphore
Callistus (Hist. Eccles. XII 34 = PG 146 , col. 860 ). Ces minces renseignements,
surtout ceux donnés par Socrate, ont été interprétés dans des sens très différents
par les philologues.
En effet, comme on trouve dans la Souda qu ’un autre romancier, Achille
Tatius ( > A 8 ), aurait été évêque, certains spécialistes, au premier rang desquels
14 E .Rohde, Der griechische Roman und seine Vorläufer, Leipzig 3e éd . 1914,
p. 472-473, ont rejeté comme suspecte l'information de l' écrivain ecclésiastique.
Mais ses défenseurs font valoir que ce dernier n 'affirme pas qu 'Héliodore était
chrétien quand il composa son roman ,mais qu 'il le devint, par la suite . Cette
thèse, bien défendue par Rattenbury 1, p. VII-XI, a été reprise récemment par
Colonna 3, p . 11-12, et surtout par 15 P . Chuvin, Chronique des derniers païens.
La disparition du paganisme dans l'Empire romain , du règne de Constantin à
celui de Justinien, coll. « Histoire » , Paris 1990 , p. 321-322. De plus, détail trou
blant, des savants ont constaté que le texte d'Héliodore paraît précis et exact à
propos des réalités thessaliennes (cf. notamment 16 L . Robert, « Deux épigram
mes de Philippe de Thessalonique », JS 1982 , p. 139 -162, et 17 J. Pouilloux ,
« Delphes dans les Éthiopiques d'Héliodore » , IS 1983, p . 259-286 ), ce qui
confirmerait partiellement l'information de Socrate .
D 'autre part, certains, et déjà Amyot, ont voulu identifier le romancier avec le
sophiste Héliodore l'Arabe, contemporain de Caracalla , mentionné par Philo
strate dans ses Vies de sophistes II 32 . Mais l'hypothèse est rejetée par
Rattenbury 1, p. XV n . 2, et jugée « très peu plausible » par Maillon 1, p. LXXXIII
n. 1, même s'il la trouve séduisante pour expliquer les similitudes que l'on a
relevées entre Philostrate et Héliodore (même prudence chez 18 R.Merkelbach ,
Roman und Mysterium in der Antike, München/Berlin 1962, p. 234, et rejet plus
H 31 HÉLIODORE D'ÉMÈSE 537
brutal de la thèse, reprise dernièrement par R .L . Fox, Pagans and Christians,
New York 1987, chez Chuvin 15 , p . 324 n . 5).
Quant à la souscription , elle a, elle aussi, donné lieu à des interprétations
divergentes. Rohde 14 , p .471 n. 3 et p. 498 n . 1 (« 'Halódwpoc ein Pseudo
nym ? So nennt sich Aristides Ocódwpoc » ), suivi par Maillon 1, p. LXXXIV , a
posé la question : faut- il entendre que le romancier se prétend descendant d'Hé
lios, par jeu de mots, ou bien qu'il se réclame de la famille des prêtres d 'Hélios ?
Pour Rattenbury 1, p. XII, il ne s'agirait pas d'un pseudonyme. D 'autre part,
19 O . Dilke, « Heliodorus and the Colour Problem », PP 193, 1980, a souligné,
p. 269-270, que rien n'autorise à reconnaître en Héliodore un Noir, un Éthiopien,
mais que la signature de son auvre, qui pourrait être un poème de sa composi
tion en trimètres iambiques, fait apparaître le mot helios comme le cinquième
mot avant la fin , comme il était le cinquième mot du début; il accepte l'idée,
communément admise , qu 'Héliodore était prêtre du Soleil, le dieu d'Émèse. En
revanche, il se pourrait que l'appellation de « phénicien » , POTVLE, joue sur la
polysémie du mot, renvoyant à la « palme » et à « phénicien » (cf. 20 M . Laplace,
« Les Ethiopiques d'Héliodore, ou la genèse d'un panégyrique de l'amour» , REA
94, 1992, p. 225) aussi bien qu'au « phénix » , oiseau solaire par excellence (voir
Chuvin 15 , p. 200).
Enfin, si le romancier peut se déclarer « phénicien », cela s'expliquerait par le
fait que la ville d'Émèse a été intégrée à la province de Syrie -Phénicie à partir du
règne d' Élagabal, voire de Caracalla (cf., pour une intégration sous Élagabal,
Rattenbury 1, p. XI n . 2, qui cite le témoignage ambigu d'Ulpien, Digeste L XV
1, 4 ; l'hypothèse est reprise par Colonna 3, p. 23. En revanche, Billault 6, p. 25
n . 11, penche pour Caracalla , comme Sandy 6 , p. 2 n . 1).Mais peut- être faut-il
voir là, selon 21 A .R . Birley, The African Emperor Septimius Severus, London
1988, p. 71, un terme générique : « By extension Arab Emesa considered itself,
or was considered to be, a Phoenician city » .
Datation . Vu le peu que nous savons de l'auteur, la datation de l'æuvre
suscite évidemment des controverses, et il n 'est pas question de reprendre ici
toutes les hypothèses qui ont été avancées. Reardon 8 , p . 334 n. 57, offre une
bonne synthèse sur la question .
Il est acquis que le passage de Socrate constitue un terminus ante quem , c 'est-à -dire avant
le ve s. ; en revanche, le terminus post quem n 'est pas établi. Le rattachement d 'Émèse à la
province de Syrie -Phénicie , qui justifierait l'appellation de « Phénicien » et interdirait toute
datation antérieure au IIIe s ., n ' a pas retenu l'attention des spécialistes (à l' exception notable
de Colonna 3 , p. 11). Certains d'entre eux proposent donc une date plus haute. Ainsi Pouilloux
17 , p . 286 , se fondant sur les réalités delphiques telles qu ' elles apparaissent dans le roman ,
pense au lle s., ou au débutdu lie. De même Feuillâtre 7, p . 147- 148, souhaite placer le roman
dans la première moitié du Ile s., sous le règne d 'Hadrien , en s'appuyant notamment sur la
place importante que Delphes occupe dans le récit ; il rejette l'hypothèse d 'une cuvre exaltant
Hélios ( « Nous ne trouvons aucune trace d'un culte du Soleil analogue à celui qui était prati
qué au temps des Sévère » ), alors que c 'est précisément cette hypothèse que retiennent nombre
de chercheurs voulant faire d'Héliodore un contemporain des empereurs Élagabal et
Alexandre Sévère , tous deux natifs d'Émèse, apparentés aux grands prêtres etpropagateurs du
culte solaire.
538 HÉLIODORE D 'ÉMÈSE H 31
Par exemple, Rattenbury 1, p . XIII-XIV , contestant la thèse de Rohde qui propose le règne
d 'Aurélien (270-275), estime qu '« Héliodore a dû écrire quelque temps après 220 environ » .
Quant à 22 F. Altheim , Literatur und Gesellschaft im ausgehenden Altertum , Halle/Saale
1948, t. I, p . 93-124 , il conclut, au terme d'une longue démonstration, p. 120, qu 'Héliodore
souhaite faire oublier l'image négative qu 'Élagabal a donnée du culte solaire ; il situe donc le
romancier entre les règnes d 'Elagabal et d 'Aurélien .
Mais un article a bouleversé les données du problème, sans toutefois convaincre totale
ment. 23 M . H . A . L . H . Van der Valk , « Remarques sur la date des “ Éthiopiques " d 'Hélio
dore » , Mnemosyne 9, 1941, p . 97-100, a établi un parallèle entre le siège de Syénédécrit par
Héliodore (IX 2 -8 ) et celui de Nisibemené par Chapour II en 350 et décrit par l'empereur
Julien (Orat. I 22-23 ; Orat. III 11- 16 ). Cette thèse a reçu un accueil généralement favorable.
Citons parmi ses plus récents partisans Chuvin 15 , p . 321 - 325 , et notamment p. 324 : « Si on se
refuse à torturer les témoignages d 'Ephraïm , de Julien et de Socrate , tous les trois auteurs sûrs
et bien informés. .. ils concordent à placer l'activité d 'Héliodore dans la seconde moitié du Ive
siècle » , c 'est- à -dire au temps de Théodose, et Colonna 3 , p . 23-25 , qui va plus loin en fixant
la date de naissance d'Héliodore autour de 320 - 340 , la rédaction de son roman autour de 370
380, et son épiscopat après 380. Sandy 6, p. 4 -5 , aboutit à la même conclusion.
Néanmoins,la thèse de Van der Valk 23 a été réfutée , entre autres par 24 T. Szepessy, « Le
siège de Nisibe et la chronologie d 'Héliodore » , AAntHung 24 , 1976 , p . 247-276 : ce serait
Julien qui serait lecteur d 'Héliodore (cf. aussi les réfutations de Feuillâtre 7, p . 148, et p. 139 :
le modèle d 'Héliodore serait la Cyropédie relatant le siège de Babylone par Cyrus ; d'autre
part, p. 135 , l'auteur affirme qu ' « il paraît vraisemblable , mais non certain qu 'Héliodore ait été
l'objetdesmoqueries de Lucien » , l'Histoire vraie parodiant le livre IX des Éthiopiques).
Enfin , la datation des Éthiopiques est liée souvent à la Vie d 'Apollonios de Tyane de Philo
strate, publiée vraisemblablement après 217 .Mais, là encore, des divergences apparaissent:
certains reconnaissentune parenté qui reposerait essentiellement sur les deux figures de sages
que sont Calasiris et Apollonios, et sur la mention , propre aux deux æuvres, de l'existence de
gymnosophistes ( ~ 6 35) éthiopiens (cf., entre autres, Rohde 14, p . 462-471, repris par
Maillon 1 , p . LXXXVI-LXXXVII, Merkelbach 18, p. 243 n . 2 , Reardon 8 , p. 390 n . 192, 25 T .
Szepessy, « Die Aithiopika des Heliodoros und der griechische sophistische Liebesroman »,
AAntHung 5, 1957, p. 246 , Chuvin 15, p . 322, Colonna 3 , p . 13 : « Da Filostrato ... egli ha
preso qualcosa in ogni pagina del romanzo » ), tandis que d'autres la nient (cf. Feuillâtre 7 ,
p . 128-132) ou s'interrogent (cf. Billault 5 , p . 28 n . 20).
Interprétation de l'æuvre. Du statut que l' on accorde à l'ouvre dépend en
très grande partie la lecture qui en est faite. Comme tout roman , ce roman relève
d 'une critique littéraire, fondée sur des critères esthétiques. A ce titre , les Éthio
piques seraient la plus brillante des productions de la Seconde Sophistique ( selon
Rattenbury 1, p. XVIII, « c'est la structure qui constitue le principal mérite des
Éthiopiques » ): la virtuosité de la construction – début in medias res, qui fait que
l'æuvre commence par ce qui est le milieu de l'histoire, l'emboîtement de récits,
surtout dans le fort long discours rétrospectif de Calasiris (II 24 - V 33), plaide
raient en ce sens. Pour une étude sur la construction de l'euvre, on se reportera
au travail de 26 M . Pulquério Futre Pinheiro, Estruturas técnico -narrativas nas
Etiopicas de Heliodoro, Lisboa 1987. Dès l'époque byzantine, les qualités
d'écriture de l’æuvre ont été relevées; Psellos 24-28 Dyck ,dans une comparai
son restée célèbre, a évoqué un serpent qui se déroule. Les chercheurs contempo
rains ontmontré tout ce que la structure de l'æuvre doit à Homère et ce qu 'elle
possède d'original (voir le brillant 27 M . Fusillo , Naissance du roman, traduc
tion française par M . Abrioux de Il Romanzo greco. Polifonia ed Eros, coll.
« Poétique », Paris 1991, p. 131-134 ; 147- 165); s'appuyant sur les travaux et la
H 31 HÉLIODORE D 'ÉMÈSE 539
réflexion de la critique d'aujourd 'hui, ils se sont plu à rappeler qu'il s'agit avant
tout d'un jeu. Cette tendance est représentée essentiellement,mais non exclusi
vement, par l'école anglo-saxonne, qui souligne avec force que les Éthiopiques
sont d'abord, voire exclusivement, une æuvre littéraire qui se donne à voir ; ce
qui pourrait paraître message philosophique ou religieux ne sert que les fins litté
raires (cf. le titre significatif de l'article de 28 G .N . Sandy, « Characterization
and philosophical decor in Heliodorus' Aithiopica » , TAPHA 112 , 1982, p. 141
167 ; l'auteur y affirme (p. 165) : « I see the philosophical component as literary
embellishment» ; on citera aussi le bel article de 29 J.J. Winkler, « The menda
city of Kalasiris and the narrative strategy of Heliodoros' " Aithiopika" » , dans
J. J. Winkler et G . Williams (édit.), Later Greek Literature, coll. « Yale Classical
Studies » 27, Cambridge 1982, p. 93-158, dans lequel on lit (p . 122) : « These
references are not meant philosophically or religiously but rather as reflexive
allusions to the novel's own structure of progressive and problematic intelligi
bility » . Il y aurait lieu de citer encore 30 G . Anderson, Eros sophistes. Ancient
novelists at play, Chico 1982, p. 33-40, et 31 Id ., Ancient Fiction. The novel in
the graeco -roman world , Beckenham 1984, p. 83-85 .
Mais on a peut-être oublié que la construction du texte, si remarquable par sa
complexité , s'apparente à celle d'un autre roman , d' inspiration clairement pytha
goricienne, qui ne nous est pratiquement connu que par un résumé de Photius,
les Merveilles au -delà de Thulé d'Antonius Diogène (2D 137). Fusillo 27 ,
p. 160 , parle d 'une « influence » .
Dans ces conditions, résumer en quelques lignes ce roman, en respectant sa
structure narrative et ses effets (Photius, Bibl. cod . 73 recompose l’æuvre de
façon linéaire pouren rendre compte ), est une gageure :
Une scène de carnage sur un rivage : nous voyonsdes piratesmorts, et un couple debeaux
jeunes gens, qu 'observe, avant de l'enlever , une troupe de brigands, les Pâtres du delta du Nil,
conduits par leur chef. Puis, nous apprenons que le jeune homme se nomme Théagène, la
jeune fille Chariclée, et qu 'ils ont pour compagnon d' infortune un prisonnier grec, Cnémon ,
lequel raconte comment, pour fuir l'amour d 'une marâtre, il a été contraint de quitter Athènes.
Quant au chef des brigands, Thyamis, il s'avère le fils d'un prêtre deMemphis, dépossédé par
son frère de la fonction sacerdotale transmise par leur père. Thyamis veut épouser Chariclée,
qui fait passer Théagène pour son frère.Mais une attaque de brigands, suscitée par le frère de
Thyamis , Pétosiris, survient: les jeunes gens sont séparés, et Chariclée, confiée à la garde de
Cnémon , est transférée dans une grotte. C ' est là que se rend Thyamis, dans un accès de jalou
sie , pour tuer Chariclée. Au cours de la bataille , il est fait prisonnier ; Théagène et Cnémon ont
réussi à se cacher. (Livre I). Or, il se révèle que Chariclée est vivante et que Thyamis abusé a
tué à sa place une certaine Thisbé... ancienne servante de la belle -mère de Cnémon devenue
maîtresse d'un marchand de Naucratis, Nausiclès, que lui a enlevée, avant de la cacher dans la
grotte , Thermoutis, l'écuyer de Thyamis ! Tous quittent le repaire des Pâtres séparément. Aux
abords du bourg de Chemmis, Cnémon rencontre un vieillard égyptien qui lui promet de lui
faire le récit de ses malheurs et l'invite dans la maison de son hôte, qui n ' est autre que Nausi
clès. Comme le vieil homme se lamente sur Théagène et Chariclée, Cnémon , bouleversé par
cette coïncidence, lui apprend qu 'ils sont en vie et demande en échange des informations sur
eux . Commence alors, de la part de celui qui se nomme Calasiris, un long récit rétrospectif.
Prêtre à Memphis, Calasiris a quitté sa ville pour ne pas succomber aux charmes de la courti -
sane Rhodopis et pour éviter de voir ce que les dieux lui ont fait pressentir, la lutte de ses deux
fils, dont l'aîné s'appelle ... Thyamis. Il a donc voyagé jusqu'à Delphes où, dès son arrivée, un
540 HÉLIODORE D 'ÉMÈSE H 31
oracle lui annonce son retour en Égypte . Il fait connaissance du prêtre d'Apollon, Chariclès,
qui lui relate comment, parti en Egypte pour oublier des malheurs domestiques, il a recueilli
d'un gymnosophiste éthiopien une fillette d'une merveilleuse beauté que sa mère avait fait
exposer. De retour à Delphes, Chariclès a donné à la jeune fille une excellente éducation, mais
se désespère de la voir rebelle au mariage; aussi sollicite-t-il Calasiris afin que celui-ci use des
charmes égyptiens pour la rendre amoureuse. Avant une cérémonie religieuse à laquelle doi
vent participer le Thessalien Théagène et la zacore d'Artémis, Chariclée, la Pythie fait
entendre un nouvel oracle laissant entendre que « celle qui est d'abord Grâce (záplv ) et enfin
Gloire (whéos) » , ainsi que le « fils d 'une déesse (O£ãs yavérny )» vont bientôt quitter son
temple « pour atteindre la terre sombre brûlée par le soleil où ils trouveront récompense de
leur vertu et blanche couronne » . (Livre II). Calasiris rapporte ensuite le coup de foudre réci
proque de Théagène et Chariclée, survenu au cours des festivités religieuses, et la double
vision d 'Apollon et d 'Artémis qui le somme d'emmener en Égypte les jeunes gens. (Livre III).
Alors, grâce à la bandelette exposée avec Chariclée, il découvre qu 'elle est fille de Persinna ,
reine d' Éthiopie : elle est née blanche de parents noirs parce que sa mère , au moment de la
conception , contemplait un tableau reproduisant Andromède ! Calasiris révèle sa naissance à
Chariclée, lui déclare que Persinna l'a chargé de lui ramener sa fille et, pour tromper Chari
clès, feint un enlèvement de l'héroïne par Théagène. Tous les trois embarquent sur un bateau
phénicien à destination de Carthage. (Livre IV ). Alors que Calasiris commence à raconter le
voyage, survient Nausiclès annonçant avoir « trouvé Thisbé,mais en mieux » , et le sommeil
interrompt là Calasiris. Le lendemain, il s'avère que cette Thisbé est en fait Chariclée , que
Nausiclès, dans son expédition punitive appuyée par les Perses, a sauvée en la faisant passer
pour Thisbé; quant à Théagène, il est envoyé à Memphis au satrape du Grand Roi. Le lecteur
assiste aux retrouvailles de Chariclée, Cnémon etCalasiris, avant que ce dernier ne reprenne le
fil de son histoire : en mer, le marchand phénicien, propriétaire du bateau, demande Chariclée
en mariage ; des pirates guettent le navire, pour s'emparer de ses richesses ... et de Chariclée,
dont leur chef est amoureux ,mais, après un abordage réussi, ils ne peuvent empêcher un nau
frage sur la côte égyptienne. C 'est au moment où le chef des pirates va épouser Chariclée que
Calasiris dresse contre lui un rival.Il s'ensuitunemêlée générale et fortmeurtrière à l'issue de
laquelle, sous les yeux de Calasiris impuissant, les Pâtres enlèvent Théagène et Chariclée .
Calasiris a terminé son récit avec l'épisode qui ouvre le roman . (Livre V ). Les hommes partent
à la recherche de Théagène. En chemin , Cnémon raconte à Nausiclès comment il a connu
Thisbé, et un amide Nausiclès leur apprend que Thyamis a intercepté Théagène qu 'il tient pri
sonnier. Cnémon renonce à poursuivre son séjour en Égypte et décide de repartir pour la
Grèce avec Nausiclès, lequellui avoue être le marchand amant de Thisbé, et lui donne sa fille
en mariage ! (Livre VI) Pendant ce temps, arrivé à Memphis pour recouvrer sa fonction sacer
dotale , Thyamis affronte son frère Pétosiris dans un combat singulier qu'interrompt l'arrivée
providentielle de leur père , Calasiris. Chariclée , elle , retrouve Théagène qui a accompagné
Thyamis. Calasiris peut alors mourir en paix . Mais sa mort livre nos héros à Arsacé, femmedu
satrape. Profitant de ce que son mari est parti guerroyer contre les Éthiopiens, elle emprisonne
Chariclée , et Théagène dont elle est amoureuse. (Livre VII) Informé, le satrape exige que les
prisonniers lui soient envoyés, et à Memphis, Chariclée, accusée d'empoisonnement par
Arsacé, échappe miraculeusement au bûcher. Mais, alors qu 'ils sont conduits vers le satrape,
les héros, qui ont appris en route le suicide de leur persécutrice, sont capturés par des Éthio
piens décidés à les offrir à leur roi. (Livre VIII). Celui-ci accueille volontiers ces prisonniers
qu'il se promet de sacrifier à son retour en Éthiopie, et il attaque Syéné, en détournant le Nil.
Puis, fort de sa victoire sur les Perses, le roi Hydaspe, auquel un songe a annoncé une fille ,
quitte l'Egypte . (Livre IX ). Le dernier livre, qui se situe à Méroé, capitale de l'Ethiopie, mul
tiplie les scènes de reconnaissance : Sisimithrès, le gymnosophiste quiavait confié Chariclée à
Chariclès, reconnaît la jeune fille, et Persinna identifie en elle sa fille. Les Éthiopiens renon
cent à leurs cruels sacrifices. Enfin , ultime coup de théâtre, Chariclès, parti à la poursuite du
ravisseur de Chariclée, arrive à temps pour assister au mariage des héros, qui deviennent, cou
ronnés de blanc , prêtres du Soleil et de la Lune. L 'oracle delphique s'est réalisé.
H31 HÉLIODORE D 'ÉMÈSE 541
A l'opposé de cette lecture exclusivement littéraire, certains spécialistes ont
voulu voir dans les Éthiopiques un manifeste politique et religieux. L 'ouvrage de
Merkelbach 18, très controversé au moment de sa publication , développe systé
matiquement, p. 234 -298 , la thèse selon laquelle le roman est, comme tous les
autres, un Mysterientext, en l'occurrence une euvre à la gloire du dieu Soleil.
Quoi qu 'il pense de cette démonstration , le lecteur trouvera dans ce travail de
grande érudition des parallèles éclairants avec des textes néoplatoniciens ou
néopythagoriciens; il trouvera aussi, relevés par l'auteur, à la suite de K .
Kerenyi, Die griechisch-orientalische Romanliteratur in religionsgeschichtlicher
Beleuchtung, Tübingen 1927, les éléments isiaques qui se liraient dans le roman .
Quelques années auparavant, Altheim 22, p. 95- 96 , 115-120, avait voulu montrer
que le roman était un texte de propagande destiné à asseoir l'autorité du dieu
solaire originaire d'Émèse , patrie des empereurs syriens . Cette interprétation est
acceptée tantôt sans réserve ( cf. 32 J. Hani, « Le personnage de Charikleia dans
les Éthiopiques. Incarnation de l'idéalmoral et religieux d 'une époque» , BAGB
1978, p . 271: « hymne à la gloire du Soleil-Dieu » ; Szepessy 25, p. 243-251),
tantôt avec prudence (cf. Chuvin 15 , p. 200 ; Billault 5, p. 28), voire rejetée (cf.
Feuillâtre 7 , p . 130).
Ceux qui tiennent à une lecture littéraire de l'æuvre condamnent évidemment
l'interprétation religieuse, même s'ils reconnaissent la présence importante de la
religion (cf., par exemple , Rattenbury 1, p. XX -XXI; Anderson 31, p . 81-85 ;
33 J.R .Morgan , introduction aux Éthiopiques, dans B . P. Reardon [édit.], Col
lected ancient Greek novels, Berkeley /Los Angeles/London 1989, p . 350 : « a
very religious, or rather religiose , text ». Reardon 8, p. 385 -386 , réévalue cette
dimension de l'æuvre qui lui donne son sens et son originalité sur le plan litté
raire, avantde souligner, p. 390, combien , dans ce roman ,« ilmanque singulière
ment ce que de nos jours on appellerait une vraie doctrine religieuse » ). Certains
distinguent néanmoins dans les Éthiopiques un souci, comme l' écritMaillon 1,
p .LXXXVI, de « concilier la tradition philosophique et le sens du divin et du
mystère » . Quant à Fusillo 27 , p . 140 - 141, il montre parfaitement comment la
complexité de la structure narrative répond à une Weltanschauung fondée sur la
religion : « Cette organisation complexe, qui permet de présenter les événements
sous différents angles et de les dévoiler peu à peu a une valeur sémantique : elle
exprime le caractère nécessairement ambigu de l'interprétation de la réalité (...)
Tel est bien le présupposé théologique sur lequel repose le système d 'Héliodore :
le monde divin communique à l'homme des signes et des indices, à partir des
quels il doit construire, par hypothèses successives, une vision cohérente » . En
revanche, la thèse de Coray, exprimée dans son édition des Éthiopiques, 'Halo
dupov Alolonixá , Paris 1804, selon laquelle le christianisme imprégnerait le
roman , a été contestée très tôt (cf. les critiques de Rohde 14 , p. 462 ; 472) et a
fait long feu.
Orientations philosophiques des Éthiopiques. Les Éthiopiques, dès l'épo
que byzantine, ont suscité des interprétations philosophiques, grâce, notamment,
à la lecture allégorique d' inspiration néoplatonicienne. Mentionnons pour mé
542 HÉLIODORE D 'ÉMÈSE H 31
moire Philippe le Philosophe, Της Χαρικλείας ερμήνευμα της σώφρονος (ed.
Colonna 2, p . 365), qui voit dans Chariclée et ses tribulations l'image de l'âme et
de son destin (sa chute dans le corps et le monde avant sa réintégration dans sa
patrie ) et Jean Eugenikos qui, dans sa Ilpodewpía toŨ Nouopúraxos, li. 36 -39
Gärtner, reconnaît dans le roman l’illustration des quatre vertus cardinales
(åvopeia , OLXALOOÚvn , owopooúvn , opóvnouc ) et une élévation de ton qui la
rapproche du « sage Salomon » (li. 44 ). Psellos et Photius quant à eux font une
lecture essentiellementmorale qui ne retient que l'éloge de la virginité .
Sur le commentaire de Philippe le philosophe, voir maintenant L. Tarán, « The authorship
of an allegorical interpretation of Heliodorus' Aethiopica » , dans EOQIHE MAIHTOPEX . Cher
cheurs de Sagesse. Hommage à Jean Pépin , publié sous la direction de M . -O . Goulet-Cazé,
Goulven Madec et Denis O 'Brien, « Collection des Études Augustiniennes» - Série Antiquité
131, Paris 1992, p . 203-230 .
Depuis, les philologues n 'ont pas cessé de chercher dans ce roman d'aven
tures et d 'amour une coloration philosophique en raison de la personnalité et de
l'idéal de l'héroïne (« Hypatie que l'amour dérobe à la science et à la philoso
phie » selon Maillon 1, p .LXXXV ; d'ailleurs, à la suite de Geffcken , Sandy 28,
p. 166 , remarque que les femmes ont été fréquemment introduites dans les
cercles pythagoriciens, puis néoplatoniciens) et surtout du personnage de Cala
siris, prêtre d 'Isis et figure de sage pratiquant la continence et un régime stricte
ment végétarien . Pour les uns, c'est le pythagorisme, ou le néo-pythagorisme,
plus ou moins associé au platonisme, qui est prégnant. C 'est la thèse, entre
autres, de Rohde 14 , p . 467, de Maillon 1, p. LXXXVI-LXXXVII (« Calasiris,
comme Apollonios de Tyane, est un modèle d'ascétismepythagoricien » ) et de
Szepessy 25, p. 243 ; elle repose essentiellement sur l'idée que Calasiris est un
double d 'Apollonios de Tyane, et donc, comme lui, un adepte de Pythagore .
Cette adhésion au pythagorisme se manifesterait par l'aspect extérieur de Cala
siris ( cheveux longs : cf. II 21, 2 ; VII 7 , 2 ; vêtement de lin , « calasiris» dési
gnant une tunique de lin ), son régime alimentaire, végétarien et abstinent (cf. II
23, 5 ). L 'interdiction des sacrifices sanglants à l'initiative des gymnosophistes
éthiopiens est également invoquée. D 'autre part, la fréquente dénomination des
dieux sous la forme o zpeittoveç serait un indice pythagoricien (cf. Maillon 1,
p . LXXXV ;mais 34 Ch. Lacombrade, « Sur l'auteur et la date des Éthiopiques» ,
REG 83, 1970, p. 75, fait un rapprochement avec Jamblique). Enfin , le passage II
24, 6 (« abandonnant son corps dissous pour une autre destinée» ) est compris par
Maillon 1 , note ad loc., comme une allusion aux théories pythagoricienne et
orphique de la métempsychose. On trouvera dans Feuillâtre 7, p. 128 - 132, une
réfutation de la lecture pythagoricienne du roman . Et il est vrai que les mêmes
faits, vu le syncrétisme philosophique de l' époque, peuvent être interprétés de
façon différente . Ainsi, pour 35 J.R .Morgan , « History, romance and realism in
the “ Aithiopika" of Heliodorus » , CIAnt 1 , 1982, p . 250 , le végétarisme est un
signe néoplatonicien au même titre, sans doute, que le vêtement et les cheveux.
De la même façon , les endroits où il est question de l'âme ont reçu des interpré
tations néopythagoriciennes ou néoplatoniciennes : ainsi pour II 31, 1 (« je ne
voulais pas commettre la faute de laisser en péril une âme revêtue de la forme
H 31 HÉLIODORE D 'ÉMÈSE 543
patronymiques (fournies communément comme simples génitifs) n ' est pas habi
tuel dans l'intitulé des traités antiques à côté du nom de leur auteur. Une excep
tion bien connue – la mention du nom d 'Hermias d 'Alexandrie (2H 78) dans le
titre des ouvrages écrits par son fils Ammonius d'Alexandrie (2A 141) ou com
posés d'après son enseignement – tendrait à suggérer qu 'un patronyme n ' était
ajouté que si des rapports professionnels ou intellectuels, et non seulement fami
liaux , étaient impliqués. Hermias était un philosophe de plein droit et la présence
de son nom dans le titre entendait probablement rappeler qu 'Ammonius n ' était
pas seulement son fils, mais aussi son héritier intellectuel. Similairement, dans le
cas de Damianus, la mention d 'Héliodore suggère , pour le moins, que ce dernier
était engagé dans la même sphère d'activité que son fils.
Un tel rapport n 'implique cependant pas qu 'Héliodore ait nécessairement
exercé une influence particulière sur le traité d'optique, pas plus qu 'on ne consi
dère qu 'Hermias ait pu influencer de façon décisive le travail d 'Ammonius com
me commentateur d 'Aristote. Pouvons-nous donc supposer que l'ouvrage de
Damianus fut composé sans rapport de dépendance à l'égard de son père , si ce
n 'est que ce dernier s'intéressait à la philosophie platonicienne, l'enseignait
peut- être , et pouvait s'occuper de mathématiques ? La réponse dépend du sens
que nous donnons aux mots xepárala tõy ÓTTIXWV ÚTORÉDewv. Kepárala
désigne des sommaires composés à partir d'exposés plus développés.Dans le cas
de Damianus, on imagine mal que ces résumés se rapportent à quelque ouvrage
identifié de façon imprécise comme des ontıxai ÚnoDÉOELS (l'Optique d'Eu
clide par exemple). Il est plus vraisemblable qu 'il a résumé l’quvre d'Héliodore
de Larissa, que ce soient des cours ou un traité écrit aujourd 'hui disparu . Dans
cette perspective, le nom d'Héliodore aurait été signalé dans le titre afin de rap
peler qu'il était la source de ce résumé. (En ce sens, voir 4 A . Segonds, art.
« Domninus de Larissa» D 219, DPLA II, p. 894.)Mais puisque le nom apparaît
sous la forme d 'un patronyme, Héliodore devait alors être aussi bien le père de
Damianus que son maître. Cette hypothèse expliquerait pourquoi les mots ånò
buvñs ne figurent pas devant le nom d 'Héliodore. Cette formule était fréquem
ment utilisée aux Ve et vie siècles pour indiquer qu'un ouvrage reposait sur l'en
seignement oral d'un philosophe ou d'un homme de science. Voir l'étude cé
lèbre de 5 M . Richard , « ANO ONNHE » , Byzantion 20 , 1950, p. 191-222 (reprise
dans ses Opera Minora, Turnhout/Leuven , t. III, 1977 , nº 60 ), notamment
p . 192-201. Si Damianus était le fils d 'Héliodore, il était sans doute préférable de
ne pas avoir recours à une telle expression qui eût seulement suggéré qu'il était
son disciple .
On peut donc considérer, de façon vraisemblable , qu 'Héliodore de Larissa
était (a) le père de Damianus ; (b ) qu'il s'adonnait d'une façon ou d'une autre à
quelque activité philosophique ou scientifique ; (c) qu 'il écrivit un ouvrage élé
mentaire d'optique, composé dans une perspective platonicienne, ou du moins
qu 'il dispensa un enseignement en cette matière ; enfin (d) que son fils abrégea
ce traité ou cet enseignement dans l'ouvrage transmis sous son nom . Il n 'est pas
possible d 'établir dans quelle mesure le résumé conservé abrège fidèlement
546 HÉLIODORE DE LARISSA H 32
37 HÉLÔRIS DE SAMOS
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth . 36 , 267, p. 146, 3 Deubner.
BRUNO CENTRONE.
38 HELPIDIUS PLREI:5 MIV
“ Philosophe" , destinataire d 'une lettre faussement attribuée à l'Empereur
Julien (Epist. 195).
RICHARD GOULET.
57 HERACLIDE DE BARGYLIA RE 39
Dialecticien, auteur d 'un ouvrage contre Épicure (D . L . V 94). Cf. P .Natorp,
art. « Herackleides» 39, RE VIII 1, 1929, col. 469 .
TIZIANO DORANDI.
560 HÉRACLIDE DE TARENTE H 58
58 HÉRACLIDE DE TARENTE II - I
Médecin empiriste .
Il reste de l'æuvre d'Héraclide de Tarente une centaine de fragments emprun
tés à une dizaine de traités et aujourd'hui disponibles dans la récente édition de
1 Alessia Guardasole, Eraclide di Taranto, Frammenti, Napoli 1997. La figure
de ce médecin , sans doute le plus grand parmi lesmédecins empiristes (cf. 2 P .
Diebgen, Geschichte der Medizin . Die historische Entwicklung der Heilkunde
und des ärztlichen Lebens, I, Berlin 1949- 1955 , p. 100 ), se dessine également à
travers les témoignages deGalien (De diebus decretoriis I 2 = Kühn IX , 775, et
De compositione medicamentorum secundum locos VI 9 = Kühn XII, 989 ),
Célius Aurélien (Demorbis acutis (= Celeres passiones] I 17, 166) et Celse (De
medicina VIII 20, 4 ).
Biographie. La chronologie d 'Héraclide de Tarente est loin d'être fixée. Les
avis divergent entre partisans d'une datation basse (début du jer siècle av. J.-C .),
représentés par 3 M . Wellmann , « Zur Geschichte der Medizin im Alterthume
(I) » , Hermes 23 , 1888, p . 556 -566 , et 4 Id ., art. « Empirische Schule » ,RE V 2 ,
1905, col. 2517, 5 H .Gossen, art. « Herakeides von Tarent» , RE VIII 1, col. 493,
et 6 K . Deichgräber, Die griechische Empirikerschule, Berlin 1930 ; réimpr.
augmentée , Berlin /Zürich 1965, p. 172-173 et 258 -259, auxquels s'opposent les
partisans d ’une datation haute (milieu du IIe siècle av. J.-C .) essentiellement
défendue par 7 E . Zeller, Die Philosophie der Griechen “, III 2, 2, Leipzig 1903,
p . 3-4 n. 1, et 8 V . Brochard , Les sceptiques grecs, Paris 1887, 2e éd ., Paris 1923,
p. 232-233. Sur les difficultés soulevées par la datation basse et sur les
principaux arguments avancés en faveur de la datation haute , voir pour plus de
détails la mise au point de J. Brunschwig (3H 54 ). La dernière éditrice des
fragments d'Héraclide, Guardasole 1, p . 23, se range, quant à elle , à l'avis de M .
Wellmann en situant le floruit du médecin aux environs de 75 av. J.-C . Quoi
qu 'il en soit, il semble établi qu 'Héraclide est né à Tarente et a été l'élève de
l'hérophiléen Mantias (Galien , De compositione medicamentorum secundum
locos VI 9 = Kühn XII, 989, 2 = test. 14 Guardasole ), semble -t-il à Alexandrie,
centre historique de l' école hérophiléenne. Il n 'est pas pour autant nécessaire de
supposer, à la suite de Wellmann 9 , ap. F . Susemihl, GGLA, II, 1891- 1892,
p . 419, qu'Héraclide a disséqué des cadavres. Guardasole 1, p . 232, fr. 54, a en
effet noté , à propos du passage de Célius Aurélien (Demorbis acutis III 17, 142)
sur lequel s'appuie Wellmann et où il est question des intestins, qu 'Héraclide a
très bien pu les observer lors d 'un examen externe, grâce à la forte tension de la
peau. Héraclide devait ensuite rejoindre l'école empiriste, vraisemblablement
sous l'influence de Ptolémée de Cyrène dont il fut l' élève (Diogène Laërce IX
116). Galien tenait Héraclide en haute estime (De compositione medicamento
rum secundum locos VI 9 = Kühn XII, 989) et prisait tout particulièrement son
amour de la vérité (= In Hipp. De articulis comm . IV 40 = Kühn XVIII A , 735,
10 ).
Euvres. Héraclide passe pour s'être affranchi de la tradition empiriste en
introduisant de nombreux éléments rationnels, réalisant ainsi une sorte de média
H 58 HÉRACLIDE DE TARENTE 561
tion entre les deux écoles empiriste et dogmatiste (voir 10 M . Frede, « The Em
pirist attitude towards reason and theory » , dans R . J. Hankinson ( édit.),Method,
medicine and metaphysics. Studies in the philosophy of ancient science, Edmon
ton 1988, p. 89-92). L 'importance assignée par Héraclide au Nóros conçu com
meprincipe de connaissance ne devait cependant jamais l' amener à négliger le
rôle premier de l'expérience à l'intérieur de son activité médicale. Il apparaît
donc bien souvent comme le précurseur de la nouvelle orientation que devait
prendre après lui l'école empiriste . Et le rapprochement opéré par Diogène
Laërce (IX 116 ) entre Héraclide et Énésidème (2E 24) ne pourrait bien être ,
selon Guardasole 1, p . 26 , qu 'une preuve supplémentaire de la notoriété atteinte
par le médecin empiriste : le philosophe sceptique et le médecin empiriste
seraient l'illustration , chacun dans leur école , de leur capacité à innover. Sur les
difficultés soulevées par l'identification d 'Héraclide de Tarente avec le maître
d 'Énésidème, voir la mise au pointde J. Brunschwig ( » H 54 ).
Les principaux pharmacologistes de l'antiquité, Asclépiade le Jeune, Andro
maque, Éra , Criton , Musa et Ménécrate , ainsi que des médecins pneumatistes
comme Archigène ou éclectiques comme Rufus d 'Éphèse, ont largement puisé,
pour élaborer leurs propres théories, dans le vaste matériel rassemblé par Héra
clide de Tarente. Sur ce point, voir 11 A . Guardasole , « Per la positione di Era
clide de Taranto nella storia del pensiero medico » , Koinonia 19, 1995, p. 64-67.
Héraclide de Tarente a en effet abordé dans son æuvre aussi bien la patholo
gie et la pharmacologie que la sphygmologie et l'exégèse hippocratique. Les
tentatives respectives de 12 V . Tavone Passalacqua, Eraclide di Taranto . Noti
zie, citazioni e frammenti tratti dagli Autori dell'antichità classica, Roma 1958 ,
p . 11 sqq., et Frede 10, p . 89, pour classer chronologiquement les æuvres d 'Hé
raclide de Tarente ayant abouti à des résultats assez divergents , la prudence re
commande, eu égard à l' état extrêmement fragmentaire de nos sources, d 'adop
ter un ordre thématique pour la présentation des cuvres du médecin empiriste :
A. Pharmacologie (cf. éd . Guardasole 1, test. 14-26 ; fr. 1- 38 a ):
(1) Ad Antiochida (fr. 1-5 ; 7),
(2) Ad Astydamanta (fr. 6 et 7),
(3) Etpatiórns (fr. 7),
(4 ) Theriaca ou lepi Onpiwv npayuateía (test. 26 ; fr. 37-38 a),
auxquels il faut ajouter un Nicolaus (cf. Célius Aurélien , De morbis acutis I
17, 166 ) et peut- être un lepi oxevaoíaç xai doxiuaoías papuáxwv (cf.
Galien , De simplicium medicamentorum temperamentis et facultatibus 6
prooem . = Kühn XI, 794, 16 = test. 20), appellation vraisemblablement géné
rique sous laquelle le médecin de Pergame désigne, plutôt qu 'un traité précis ,
une ou plusieurs des euvres pharmacologiques d'Héraclide.
B . Sphygmologie (cf. test. 27 ; fr. 39-42) :
Héraclide aurait composé, selon le témoignage de Galien (De pulsuum diffe
rentia IV 4 = Kühn VIII, 726, 12 = fr. 39 , 13) un traité en plusieurs livres intitulé
562 HÉRACLIDE DE TARENTE H 58
Ilpos tò nepi opuyuwv ' Hpopírov et dirigé contre les théories du médecin
alexandrin Hérophile sur le pouls. Il n' en reste aucun fragment assuré.
C. Thérapeutique (cf. test. 28 ; fr. 43-64):
(1) Curationes de externis passionibus (test. 28 ; fr. 43) qui comptait au moins
quatre livres.
(2) Curationes de internis passionibus (fr. 48-56 ) en quatre livres au moins
également et quifutlargement utilisé par Célius Aurélien.
D . Diététique (cf. fr.65-72a) :
Héraclide a abordé la diététique dans de nombreux ouvrages de pharmacolo
gie ou de thérapeutique, et lui a consacré un traité à part entière , qui comptait au
moins trois livres, connu sous le titre de Symposium et abondamment utilisé par
Athénée dans ses Deipnosophistes.
E . Commentaires hippocratiques (cf. test. 29-32 ; fr. 73-97) :
Selon Galien (In Hipp. De officina medici comm . I prooem . = Kühn XVIII B ,
631, 15 - 16 = test. 30 ),Héraclide aurait été, avec l'hérophiléen Zeuxis, le premier
à avoir commenté l' intégralité du corpus hippocratique ou du moins ce qu 'il en
considérait comme authentique. Les fragments conservés portent sur les ouvra
ges suivants d 'Hippocrate : De l'art (fr. 73) ; Des lieux dans l'homme (fr. 74 ) ; De
l'officine du médecin (fr. 75) ; Des articulations (fr. 76) ;Mochlique (fr. 77) ;
Maladie sacrée (fr. 78); Épidémies II, III, IV et VI (fr. 79-94) ; Aphorismes (fr.
95) ; et probablement Des humeurs (fr. 96 ) et Sur l'aliment (fr. 97) auxquels il
convient d'ajouter une sorte de glossaire, peut- être en trois livres, et intitulé
Ilpos BaxxETOV Tepi tūv ‘ IntoxpátoUS RÉEEWV (test. 29 et fr. 90 ) dans lequel
Héraclide polémiquait avec le commentateur alexandrin Bacchios de Tanagra sur
le sens de certainsmots rares ou difficiles d 'Hippocrate .
F . L 'empirisme:
Le lepì rñs éu Telpixñs aipéoewç, en plusieurs livres, vaste somme consa
crée à la théorie empirique eut sans aucun doute une audience importante . Elle
inspira a Galien une Synopsis en sept livres intitulée Σύνοψις των Ηρακλείδου
nepi tñs čuttelpluns aipéoews (cf.Gal., De libris propriis 38 = éd . I.Müller,
Scripta minora II, 1891, p . 115 ). L 'ouvrage d 'Héraclide, comme celui de Galien,
sontmalheureusementperdus.
Sur Héraclide, voir également 13 A . Guardasole , « Elementi di fisiologia e
metodologia di ricerca empirica in un frammento di Eraclide di Taranto » , AAP
45, 1996 , p . 315 -325.
VÉRONIQUE BOUDON .
62 HÉRACLITE FI- D II ?
Ami d'Épictète. Ce dernier le donne comme exemple d 'une provocation mal
habile : « C 'est comme mon amiHéraclite dans une petite affaire qu'il eut à
Rhodes pour un bout de champ. Il venait de prouver aux juges que sa cause était
juste. Arrivant à la péroraison , il leur dit : " Je ne vous adresserai pas de supplica
tions, et je me soucie peu également du verdict que vous allez prononcer ; c 'est
vous, bien plus que moi, qui êtes mis en jugement” . Il gâta ainsi toute son
affaire » (Entretiens II 2 , 17 ; trad. J. Souilhé). Le ton semble être celui d 'un
philosophe et Épictète y voit une imitation critiquable du discours de Socrate à
son procès.
RICHARD GOULET.
572 HÉRACLITE H 63
63 HÉRACLITE RE 12 I?
Commentateur d'Homère.
Éditions et traductions. On dispose de deux bonnes éditions modernes de
cet auteur: 1 Heracliti Quaestiones Homericae, par lesmembres de la Société
philologique de Bonn , notamment Fr. (Elmann , coll. BT, Leipzig 1910 (riche
index verborum ); 2 Héraclite , Allégories d 'Homère, par F . Buffière , CUF, Paris
1962. Importante trad . espagnole (sans texte ) : 3 Heráclito , Alegorías de Homero,
introd. par E . Calderón Dorda, trad . et notes par M . A . Ozaeta Gálvez, coll.
« Biblioteca Clásica Gredos » 125 ,Madrid 1989, 314 p. Bien qu'il semble se pré
senter ainsi sous d'heureux auspices, ce texte pose bien des problèmes.
Seule réalité objective : l'existence d'un recueil de brèves exégèses allégo
riques d'Homère ( Iliade, puis Odyssée, chap. 60 sqq.). Pour le reste , le ms. M
porte in fine « D 'Héraclite , Problèmes homériques sur ce qu 'Homère a formulé
en allégorie sur les dieux » . Rien que de très banal dans ce nom d'auteur et ce
titre . La date reste très vague. Les auteurs cités les plus récents (Apollodore
[** A 244), Cratès [PMC 203], Hérodicos de Babylonie (» H 100 )) sont du II s.
av. J.-C . (Buffière 2 ; en fait, un autre de ces auteurs est du jer s.: Alexandre
“Lychnos” d 'Éphèse (PA 113] cité en 12, 8, cf. Calderón Dorda 3). Quant au
terminus ante quem , on indique l'æuvre de Plutarque, au motif qu 'elle marque le
début de l'exégèse mystique d 'Homère par les pythagoriciens, qu 'Héraclite ,
tellement avide d 'exalter le poète, n 'aurait pu taire , ce qui est le cas (Buffière 2 ).
Cela dit, un consensus s'est imposé pour situer Héraclite au jer siècle de notre
ère, et faire de lui le contemporain de Cornutus (MC 190 ), les deux auteurs ayant
subi l'influence du lepi Okõv d’Apollodore, cf. 4 C . Reinhardt, DeGraecorum
theologia capita duo, Berlin 1910 . C 'est aussi pour des problèmes de chrono
logie et pour ses rapports avec un autre homérisant plus ancien (Hécatée d ' Ab
dère (2- H 12 ]) que s'est intéressé à la cosmogonie d'Héraclite (chap. 43 sq . et 64
sq.) 5 W . Spoerri, Späthellenistische Berichte über Welt, Kultur und Götter, coll.
« Schweiz. Beitr . zur Altertumswiss.» 9, Basel 1959, p.69-74 et 105 - 107.
Un recueil représentatif. Beaucoup d 'interrogations subsistent donc. Elles
ne doivent pas empêcher de lire ce texte très intéressant. Se rattache -t-il à une
école philosophique ? Les attaques assez virulentes qui y sont portées contre Pla
ton ( 76 , 6 - 79, 1) et contre Épicure (79, 2 -11) orientent vers le stoïcisme, auquel
se rattachait également Cornutus. Voir, dans ce sens, 6 A . A . Long, « Stoic rea
dings of Homer» , dans R . Lamberton et J.J. Keaney, Homer 's ancient readers.
The hermeneutics ofGreek epic 's earliest exegetes, Princeton University Press,
1992, p . 41-66 . L'appartenance stoïcienne d'Héraclite a été confirmée assez
récemment par une tout autre méthode, celle de l'esthétique littéraire , cf. 7 W .
Bernard , Spätantike Dichtungstheorien . Untersuchungen zu Proklos, Herakleitos
und Plutarch, coll. « Beiträge zur Altertumskunde » 3, Stuttgart 1990 . La thèse
de cet ouvrage est que l'Antiquité a pratiqué l'allégorèse, en gros, de deux
façons. L 'une est celle des platoniciens ; elle est marquée par deux caractères: la
personnalité propre des intervenants divins subsiste sans se dissoudre dans leur
signification ; d'autre part, cette signification , élaborée d 'après des critères
H 64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE 573
objectifs, est au service de la dialectique. L 'autre allégorèse consiste à prendre
des êtres personnels insérés dans une histoire (Héra , Aphrodite , etc.) pour leur
substituer des abstractions (l'air, la volupté , etc.): ce serait celle des préso
cratiques, et des stoïciens leurs descendants . Bernard parle dans le premier cas
d'allégorie " diérétique” (dihairetisch ), dans le second d'allégorie “ substitutive" :
c'est pour la dernière qu 'il invoque l’Héraclite homériste comme un exemple
privilégié.
On s'est intéressé aussi chez ce dernier à sa façon de citer Homère : 8 Chr. D .
Stanley, « Paul and Homer: Greco-Roman Citation Practice in the First Century
CE » , NT 32, 1990 , p . 48 -78 , partant de la liberté prise par Paul dans ses citations
de la Bible hébraïque (suppression de mots et de phrases, substitutions, combi
naison de textes d'origine différente dans une citation unique, etc.), la rapproche
de la pratique de certains auteurs grecs à peu près contemporains : Strabon, ps.
Longin , Héraclite , Plutarque, dans leur utilisation du texte d'Homère. Voir
encore, sur le même thème, 9 J. Whittaker, « The Value of indirect tradition in
the establishment of Greek philosophical texts, or the art of misquotation » , dans
J. N . Grant ( édit.), Editing Greek and Latin Texts,New York 1989, p. 63-95.
JEAN PÉPIN .
64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE RE 10 (+ Suppl. X) ca 520 - ca 460
Philosophe présocratique. Le premier penseur grec dont nous possédions un
nombre relativement important de citations et de témoignages doctrinaux.
PLAN DE LA NOTICE
Outils principaux. Éditions. Bibliographies.
I. L 'HOMME
Il s'agit clairement d'une seule etmême narration sur laquelle, suite à des lacunes ou déforma
tions apparues en cours de transmission , certains ont brodé de nouveaux détails . Quant à la
version 2 de la Souda, elle n'est peut-être que le fruit d'une simple corruption : cf. Ariston ap.
D .L . IX 5 = fr. 28 Wehrli áno aveTV 8' ärini vóowl (AMA[nivoo ](21) et Souda auw
(AMSI)... únodaveīv.
Les circonstances légendaires de la mort d'Héraclite ont été abordées dans de
nombreuses études qu 'il n 'y a pas lieu de résumer ici (elles relèvent surtout de
l'histoire littéraire et un peu de l'histoire des idées – par le biais des leçons
morales qu ' en ont tirées péripatéticiens, cyniques et stoïciens de basse époque -,
mais n 'ont pratiquement rien à voir avec le philosophe lui-même et sa doctrine
véritable ). Citons (ordre chronologique) les travaux spéciaux les plus intéres
sants en indiquant parfois entre parenthèses certaines des thèses défendues (pour
une discussion plus détaillée et d'abondantes références bibliographiques, cf.
Marcovich 26 , col.250 -255).
Lassalle 127 (infra), I, p. 42-44, n . 1 (collection intéressante de textes contenant l'expres
sion enoußpiac aúxuóv qui remonteraii à un original héraclitéen ); 86 H . Fränkel, « A
thought pattern in Heraclitus » , AJPh 59, 1938 , p. 309 -311 = « Eine heraklitische Denkform »
dans 87 Id ., Wege und Formen des frühgriechischen Denkens, München, 1955 (3e éd. 1968),
p . 253- 255 (nombreuses observations sur les fragments ayant servi de base à la légende);
88 R .Muth , « Heraklits Tod », AA 7, 1954 , p. 250 -253 (parallèles dans lamédecine ancienne);
89 Id., « Nochmal Heraklits Tod » , AA 8 , 1955, p . 251-252 ; 90 J. Haussleiter, « Zum Tode
H 64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE 591
v 11,p.39242of Heraclitus », CRBS dles avestiques parlo Greek philosophy
Heraklits v . Ephesos» , Altertum 10, 1964, p . 9 -13 ; 91 M . L . West, Early Greek philosophy
and the Orieni, Oxford , 1971, p . 165 -202 (parallèles avestiques parfois très curieux) ;
92 J . Fairweather, « The death of Heraclitus » , GRBS 14 , 1973, p . 233 -239 (motifs parallèles
grecs) ;Mouraviev 11, p. 37-42 (récapitulation de la bibliographie antérieure ).
5. Iconographie . Quoique les considérations ci-dessous soient encore hypo
thétiques, elles reposent sur des coïncidences troublantes, incontournables et
excluant toute falsification délibérée, et suggèrent que nous disposons d'au
moins trois portraits d'Héraclite , remontant tous à un même original du ve s. av.
J.-C . Les monuments existants ou attestés qui le représent(ai)ent ou peuvent le
représenter se subdivisenten trois catégories distinctes: les monnaies, les hermès
etmonuments connexes et la statue de Gortyne. (Cf.Mouraviev 9 , 1974, p . 214
215, items M 23-M 25 ; id . 11, p. 43-46 .)
1) Des monnaies d 'Éphèse émises entre les règnes d'Antonin le Pieux (138
161) et Gallien (254 -268 ), portent le nom du philosophe HPAKAE(I) TOE EOE
EISN et le représentent debout, torse nu sauf un pan de son vêtement jeté par
dessus l'épaule gauche et tenant de la main gauche une espèce de massue
noueuse appuyée un peu à la manière d 'un fusil sur l'épaule ou l'avant-bras
gauche (cf. 11, p. 44, fig . 1 = M 23a). Il en existe plusieurs variantes se distin
guant par la légende, l'inclinaison du bras droit et du gourdin
Cf. 93 Bürchner dans ZN 9 , 1882, p. 123-124 , pl. IV , 21 ; 94 H . von Fritze dans H . Diels
132 (cf. infra), 1re éd. p. XI-XII (avec description de huit émissions différentes) ; cf. Id. ap.
DK 4, vol. I, p . 144 ; II, p. 3 ; 95 J.J. Bernoulli, Griechische Ikonographie,t. I, München 1901,
p. 84, n° 341, pl. II 4 ; 96 R . Delbrück, Antike Porträts, pl. 16 ; 97 K . Schefold, Die Bildnisse
der antike Dichter, Redner und Denker, Basel 1943, p . 172 - 173 n° 16 ; p . 220 n° 16 ;
98 British Museum Catalogue, lonia , p. 98 n° 341, pl. XIV 12 ; 99 G . Richter, The Portraits of
the Greeks, London 1965, t. I , p . 80 et n° 313. Diels, I. c., émet trois hypothèses sur la signifi
cation du gourdin : moyen de persuasion d 'Héraclès symbolisant le logos d 'Héraclite (cf.
Héracl., Homer. Alleg. 34 ) , simple exploitation de la similitude des noms du héros et du philo
sophe ou représentation fidèle du oxinwv åvri oxuntpov mentionné par Strab . XIV 3 = DK
A 2 = M 6b (cf. encore infra ).
2 ) Un hermès acéphale portant l'inscription en lettres carrées sur trois lignes
HPAKAEITOE BAYENNOE (avec un petit omicron au -dessus du Y ) EOEXIOE ( IG
XIV n° 1159), qui se trouvait originellement avec d'autres hermès acéphales dans
la Villa dei Pisoni – souvent confondue avec la villa d'Hadrien – à Tivoli (vue
avant 1488 par Fra Giocondo et en 1503 par Martin Sieder); grâce à Pighius, il
fut transporté entre 1550 et 1555 à Rome et installé dans la pergola du jardin de
la villa du pape Jules III (pontificat 1550- 1555) – devenu plus tard jardin des
Médicis -, où il fut doté d'une tête ; il fut transféré un siècle plus tard, après
1640, à Florence et on ne retrouva plus sa trace en 1727 ; - cet hermès a été des
siné ou gravé au moins six fois alors qu 'il se trouvait encore à Tivoli et à Rome :
(a ) dessin fait entre 1547 et 1555 par St. W . Pighius, dans le codex Pighianus
Berolinensis, actuellement à Tübingen , f. 142v, reprod. dans 100 E .Mandowsky
et Ch .Mitchell, Pirro Ligorio 's Roman antiquities, London 1963, pl. 39a, her
mès acéphale inscrit;
(b ) dessin fait vers 1550-1553 par Pirro Ligorio, dans le cod. XIII.B.7 , Biblio
thèque nationale de Naples, p. 415, reprod. dans Mandowsky-Mitchell 100, pl.
38b ,hermès inscrit avec un contour- silhouette en guise de tête ;
592 HÉRACLITE D'ÉPHÈSE H 64
(c) dessin fait vers 1559 par J.-J. Boissard, dans le codex S 68, Bibliothèque
royale de Stockholm , f. 78 ', reprod . dans Mandowsky-Mitchell 100 , pl. 42a,
hermès inscrit avec tête barbue « abstraite » ;
(d ) gravure du Portugais Achilles Statius (Estaço) qui édita en 1569 un recueil
de reproductions de portraits antiques sculptés dans le marbre : 101 Inlustrium
virorum ut extant in Urbe expressi vultus, Romae 1569, pl. VIII ; reprod . dans
102 J. Frel, Contributions à l'iconographie grecque, Praha 1969, tab . V 5 ; 11,
p. 45 fig. 4 = M 23c ; l'hermès est réduit à un simple buste avec l'inscription
originale et possède une tête à traits très individualisés; cf. 103 Illustrium ima
gines ex antiquis marmoribus, nomismatibus et gemmis expressae quae extant
Romae... Theodorus Gallaeus delineabat. Editio altera, aliquot imaginibus et J.
Fabri (Jean Le Febvre] ad singulas commentario auctior atque illustrior,
Antwerpiae 1606 , pl. 65 ; 104 Jacobus Gronovius, Thesaurus Graecarum anti
quitatum , II, Lugdun. Batav. 1698,pl. 56.
(e) gravure de Fulvius Ursinus (Orsini), qui édita en 1570 un nouveau recueil
de reproductions de portraits antiques sur divers supports : 105 Imagines et elo
gia virorum illustrium et eruditorum ex antiquis lapidibus et numismatibus
expressa, cum annotationibus ex bibliotheca Fulvi Ursini, p. 63, hermès acé
phale inscrit (cf. p. 6 et 109) ;
(f) dessin fait par Pirro Ligorio après 1570, dans le cod. a.II.10.J.23, Turin ,
Archivio di Stato , p. 42 ; reprod. partielle dans Mandowsky -Mitchell 100, pl.
46d ; buste (ou hermès ?) inscrit avec tête assez individualisée, mais différente de
celle de Statius, malgré des affinités évidentes de la présentation.
A ces monuments iconographiques se rattachent trois témoignages de Ligorio et d 'Orsini:
A . Su la montagna di Tivoli... furono cavati termini ( = hermès) con diverse effigie... et
essendo spicate le teste dalli suoi termini furono portate quelle a Roma in casa di Picchi (=
Pighius)... dove essendo per varii casi trasportate ... (Ligorio , cod . XIII.B .7 , Bibliothèque
nationale de Naples, p . 405 ; cité d 'après Mandowsky-Mitchell 100, p . 127 doc. 1) ; autrement
dit, on avait également ramené de Tivoli des têtes sans hermès qui se seraient ensuite disper
sées ;
B . .. .quae ( sc . hermae ) dum reponere aliqui suis truncis non satis diligenter curant, aliena
capita non suis pectoribus, ut in Aristophane, Heraclito , Carneade, et Isocrate factum est, im
posuerunt (Orsini 105 , p . 6 ) ; Oltre a ciò l'hanno posta le (sic ap . Mandowsky-Mitchell, erra
tim pro la ?] effigie falsamenta applicata, non è la sua vera effigie, mais Ligorio ajoute :
C . L 'effigie addunque del termino l'habbiamo veduta dimarmo nelle antichità del cardi
nal pio di Carpi senza nome et col nome scritto in uno ametisto antico che havea Fabritio
Romano Anticario di Trastevere (Ligorio, cod . a . 11.10 . J.23, Turin , Archivio di Stato, p. 42 ;
cité d'après Mandowsky-Mitchell 100, p . 93-94). Il y aurait donc eu confusion dans la restitu
tion des têtes aux poitrines, celle attribuée notamment à l'hermès d 'Héraclite l'aurait été de
façon erronée, mais Ligorio aurait vu la tête originale sansnom dans la collection du cardinal
Carpi et une gemme de la même tête avec le nom d 'Héraclite (cf. infra, 4 ).
De tout cela les modernes ont (1) conclu que les images à tête silhouette ou
abstraite , de même que les témoignages B de Ligorio et Orsini, signalaient
qu 'une tête antique étrangère avait été ajoutée vers 1550 à l'hermès acéphale
d'Héraclite , et (2) supposé que cette tête était celle que reproduit Statius pl. VIII,
alors que la tête reproduite (de mémoire ?) par Ligorio correspondrait à celle ,
anonyme, qu 'il affirme avoir vue dans la collection du cardinal de Carpi et que
H 64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE 593
Statius semble avoir représentée sur sa pl.XXXVIII. Commenous allons le voir ,
il existe de bonnes raisons pour mettre en doute le bien - fondé de cette conclu
sion .
L 'ouvrage de référence sur l'histoire des hermès de Tivoli est 106 Ch . Huelsen, « Die
Hermeninschriften berühmter Griechen und die ikonographischen Sammlungen des XVI.
Jahrhunderts » , MDAI( R ) 1901, p . 123 - 154, 159 n° 13 : voir encore : Mandowsky-Mitchell
100, p. 93-94 nº 79, p. 127 -128 (doc. 2 , 3 , 5) et pl. h.-t. 38 , 39, 42 , 46 ; Richter 99, p . 22, 80 ;
cf. Bernoulli 95 , t. I, p . 85 ; Frel 102, p. 17.
3) En 1885, à quelques pas du bâtiment circulaire où avait été trouvé le
célèbre code de Gortyne (Crète ), fut découverte une statue de marbre de deux
mètres de haut, actuellement conservée au Musée d'Héraclion . Dans un article
publié 25 ans après, 107 G . Lippold , « Das Bildnis des Heraklit» ,MDAI(A ) 36 ,
1911, p. 153 démontre que, à en juger par la pose générale, les vêtements, le
geste du bras droit, le gourdin noueux, cette statue ressemble de façon frappante
à l'Héraclite des monnaies, à cette différence près qu 'il tient le gourdin à la
manière d'une crosse de pâtre, son extrémité libre prenant appui sur le sol. Datée
de l'époque des Sévères par le premier éditeur, 108 L .Mariani, « Statue of an
asclepiad from Gortyna » , AJA 1, 1897, p. 280 (« etwa um 200 n. Chr.», Lippold
107, p. 155), c'est probablement une copie – modifiée sans doute, ajouterons
nous, plutôt pour des raisons techniques (changement de matériau ) qu'en raison
de l'incompétence du copiste - d’un original antique de bronze semblable à celui
qui est représenté sur les monnaies (cf. le support du bras droit et la position
nouvelle de la massue). Lippold semble tout ignorer au sujet de l'hermès.
Mariani 108, p . 279-285, y voyait le portrait d 'un asclépiade, copie d 'un original archaïque
du ve s . av . J. - C . ; Lippold 107 , p . 156 , date l' original du milieu du ve s . av . J.- C . ; cf. Schefold
97 , p . 160, n° 4 ; Richter 99, p . 80, nos 306 , 307, 310 ; cf. 109 Dontas, « Kopf eines Neuplato
nikers», MDAI(A )69-70, 1954- 1955, p . 147-152 et pl. XIV ; 110 D .Metzler, Untersuchungen
zu den griechischen Porträts des 5. Jahrhunderts, Thèse , Münster 1966 , p. 72 (pour qui,
comme apparemment pour Dontas 109, il s'agirait du portrait d 'un néoplatonicien du ve s. ap .
J.-C .).
4) La dernière découverte iconographique héraclitéenne est une gemme du
Musée national numismatique d' Athènes provenant de la collection de K . Kara
panos, portant en bas l'inscription HPAKAEITOE (la seule reproduction où on la
devine est dans Richter 99, n° 312, et la seule où on la voit clairement figure
sous le même numéro ibid . (99 ), Supplement, London 1972) et publiée par 111 I.
Svoronos, Journal international d 'archéologie numismatique, 1913, p . 163, pl.
V , n° 357 (cf. Frel 102, pl. V 3-4 ; Mouraviev 11, p. 45 fig . 4). C 'est sans doute
elle quementionne Pirro Ligorio dans le texte C , cité supra. Cf. aussi 112 Por
traits d 'hommes et de femmes illustres... avec l'explication de Jean Le Febvre (=
103 sans les illustrations), traduit par C. C. B * * * (Charles-César Baudelot de
Dairval), Paris 1710 , p. 65 : « On le voit ( sc. Héraclite ) encore sur un Diaspro ,
comme portent les Italiens; son portrait est parfaitement bien gravé dans le
Cabinet de Fulvius Ursinus...» Selon Frel 102, ce pourrait être une imitation
moderne d'après une gravure de Statius.
Nous avonsmaintenant réuni les éléments essentiels de notre démonstration.
Il ne reste plus qu 'à préciser que, d'une part, la tête sur la gemme (4 ) ressemble
594 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE H 64
fort à celle de l'hermès-buste représenté par Statius- Estaço (2d ) lequel aurait fort
bien pu, mais sans que cela fût une nécessité, lui avoir servi de modèle (l' in
verse , en revanche, est improbable vu la pauvreté de la gemme en détails), et
que, d'autre part, la tête du buste gravé par Estaço présente une ressemblance
physionomique absolument frappante avec la tête de la statue de Gortyne: confi
gurations caractéristiques identiques du système barbe-lèvres-moustache, du
profil du nez, des yeux à orbites peu profondes et à arcade sourcilière légèrement
protubérante ; seule différence marquée : le front de la statue est caché par une
frange de cheveux, celui du buste est découvert,mais même là la bombure fron
tale reste la même. Comme il ne pouvait pas y avoir eu double accointance entre
le renaissant Estaço et le moderne Lippold , d 'un côté, et entre ce dernier et les
poinçonneurs des monnaies d'Éphèse du 11e siècle, de l'autre, et comme une
double coïncidence de cette sorte serait d'une improbabilité quasi absolue, force
est de conclure qu 'Estaço a bel et bien, et fort consciencieusement, reproduit la
bonne tête avec la bonne inscription , soit que, contrairement à l'opinion de Ligo
rio et d'Orsini, elle eût été correctement identifiée dès le début, soit qu' il se fût
agi d 'une reconstruction correcte sur le papier effectuée par Estaço à partir de la
vraie tête conservée chez le cardinal di Carpi et identifiée grâce à la gemme de
l' antiquaire Fabrizio Romano (témoignage C ), qui, en ce cas, est authentique.
Peut-on considérer la statue de Gortyne, la gemme et l'original de la gravure
comme des copies remontant à un portrait véritable ? Cela ne semble pas impos
sible : la fameuse tête de Thémistocle (ca 528 -462 ) trouvée à Ostia en 1938 le
confirme.
Signalons en outre (après Frel 102) la tête sans hermès déterrée avec d'autres têtes en
1779, toujours à Tivoli, par le chevalier Azara, ambassadeur du roi d'Espagne auprès du Vati
can , et dotée d 'un nouvel hermès portant le nom d 'Héraclite , conservée à Aranjuez (Richter
99, n° 366 , en tant que Pittacos ) ; une statue décapitée du Sérapeion de Memphis représentant
un homme drapé assis, auprès de qui est posé un bâton noueux : identifiée en 1917 par von
Wilcken à partir d'un dessin de Mariette, elle fut republiée par Picard en 1955 (cf. 113 J. P.
Lauer et Ch. Picard , Les statues ptolémaïques du Sérapeion de Memphis, Paris 1955 , p . 137
143) ; ainsi que la série d 'hermès, la plupart fort endommagés et dont certains avaient été ori
ginellement doubles (Héraclite -Démocrite ? ), que Frel 102, p . 21- 24 , tab . IV et VI (Budapest),
V I et VII (Aix -en -Provence ), V 2 ( Thermes de Rome) = M 24ab estime avoir identifiés.
Richter 99 , p . 80 -81, considère en outre comme « évidente » l' appartenance à une statue per
due du philosophe d 'un bloc de pierre inscrit HPAKA en caractères du Ilia trouvé à Paphos
(Chypre) et publié en 1888 (mais n 'aurait-il pas aussi bien pu provenir d 'un Héraclès, d'un
Héraclide... ?) [signalé par T . Mitford , ABSA 56 , 1961, p. 7, n° 11, il voisinait dans le
sanctuaire d 'Aphrodite avec les représentations d 'Épicure et de Zénon ) et, à l'instar de
Bernoulli 95 , I 85, signale quelques autres identifications plus que douteuses.
< Il faut encore ajouter à la liste de Richter 99 et de Frel 102 la figure – un relief - d'un
sarcophage de Muses du lle siècle , conservé à Malibu : J. Frel, Portraits Getty Museum , nº 48
(Héraclès/Héraclite ?) Il montre un homme barbu, tenant à la fois la massue et le volumen ,
donc Héraclès en philosophe,d 'où l'hypothèse « Héraclite » de J. Frel.
Les témoignages littéraires et épigraphiques ne nous renseignent guère sur les traits attri
bués au philosophe. Tout au plus peut-on lui supposer une expression fermée et peu enga
geante, puisque Diogène Laërce IX 1 le dit hautain et méprisant; il passait pour pessimiste et
misanthrope, ce qui coïncide avec la manière dont Sidoine Apollinaire l'oppose à l'aimable
Démocrite ( D 70 ), par sa morosité : « fletu oculis clausis » (Epist. IX 9, 14 ). En parlant de sa
H 64 HÉRACLITE D'ÉPHÈSE 595
statue dans le Zeuxippe (un gymnase ) de Constantinople , Christodore de Thèbes, dit Coptos,
(** C 115 ), Anth . gr. II 354 -356 (M 25), le décrit aussi « pleurant». M .-C. HELLMANN>
La lettre IV de pseudo-Héraclite ([Heracl.), Ep. IV , 1 -2 ) fait état d'un autel (Bwuós)
qu'Héraclite aurait consacré à Héraclès avec l'inscription équivoque HPAKAEITNIEOELINI,
anecdote qui pourrait avoir eu pour origine, outre l'ambiguïté légendaire du philosophe (cf.
infra ) et la quasi-identité étymologique de son nom et de celui d 'Héraclès, l'existence à
Éphèse d 'une statue d 'Héraclite (armé du oxinwv ?) ressemblant à Héraclès: l'original de la
copie de Gortyne représenté sur les monnaies ?
II.LE LIVRE
1. Histoire. Existence. Depuis Aristote , Rhet. 1407 b 16 (DK A 4 ), et au
moins jusqu'aux pères de l'Église du lie s., Hippolyte de Rome et Clément
d'Alexandrie (la plupart des auteurs postérieurs citent de seconde main ), les
Anciens sont unanimes à attribuer un livre à Héraclite . Cf. Mouraviev 9, textes
M 262-f; Mouraviev 12, p. 47-48 ; 114 Id ., « Titres, sous-titres et articulations du
livre d'Héraclite d' Éphèse » , dans J.-C . Fredouille et al. (édit.), Titres et articula
tions du texte dans les cuvres antiques. Actes du Colloque International de
Chantilly . 13-15 décembre 1994, Paris 1997, p. 35-53 ( 35 -37).
Ces témoignages sont contestés par certains modernes. Ainsi G . S. Kirk 36 , p . 7, écrit : « It
is possible that Heraclitus wrote no book ... The fragments... have the appearance ofbeing iso
lated statements, or yvõual... In or perhaps shortly after Heraclitus' lifetime a collection of
these sayings was made, conceivably by a pupil... » Cette opinion n ' a guère remporté l'adhé
sion des chercheurs . En revanche, l'idée que le livre n 'était qu 'un recueil d ’aphorismes, émise
par Diels 132 (infra ), 1re éd. p . VIII = 2e éd . p . XIII, jouit d 'une popularité d 'autant plus grande
qu 'elle aussi dispense de la nécessité de reconstituer la structure tant du texte que du système.
(Cf. e. g. Bollack -Wismann 139 (infra ), p . 49, 27 ; autres références dansMouraviev 114, p . 36
n. 6 ; cf. infra, III.3 La poétique des fragments ). — Une autre forme de contestation du livre
consiste à affirmer que loin d'être un ouvrage de philosophie , il ne traitait que de politique (cf.
infra, II.2 Contenu selon les Anciens).
Diffusion. Nous ne disposons que de trois témoignages directs : (1) le
philosophe dédia (ůvéonxe) son livre au temple d'Artémis d'Éphèse (Diog. L.
IX 6 , Tatien , Or. ad Gr. 3 = M 39ab ); (2) celui- ci eutun tel succès que se consti
tua une secte d'Héraclitéens (Diog. L . IX 6 = M 40a, cf. Plat., Theaet. 179d
180c = M 406 et supra, I.3 Disciples ?); (3) Euripide fit le voyage d'Éphèse , se
rendit au temple d'Artémis, apprit par cæur le livre d'Héraclite et en communi
qua le texte à Socrate (Tatien, Or. ad Gr. 3, Diog. L . IX 6 et II 22 = M 41a-C).
La plausibilité de la déposition au temple d'Artémis a été mise en doute, mais cf., e.g.,
Certam . Hom . et Hes. 1, 1. 320 Allen (à propos de l'Hymne à Apollon ) ; Gorgon, FGrHist515
F 18 (à propos de la VIIe Ode olympique de Pindare, en 464a) ; Diog. L . IV 25 (à propos de
Crantor) ; Apollonius rex Tyri 51, p . 116 Riese2. Voir 115 W . H . D . Rouse, Greek votive offe
rings, 1902 , p . 64 -65 ; West 91, p . 5 ; et surtout 116 D . Young (édit.), Theognis, 2e éd .,
Leipzig, 1971, p. X . Nous ignorons si c 'était la seule forme de publication ou un moyen sup
plémentaire de préserver l'ouvrage contre les vicissitudes du temps. Dans la première éventua
lité, elle n 'a pas empêché la diffusion du livre ni à Éphèse (les Héraclitéens), ni en Sicile (cf.
infra ), ni à Athènes. Dans la seconde, elle n ' a pas sauvé l'exemplaire déposé au temple de
l'autodafé d'Hérostrate (toutefois, ce que 117 J. Brun, Héraclite ou le Philosophe de l'éternel
retour, Paris 1963, p . 39, écrit à ce sujet relève du roman - feuilleton ).
Selon une autre version , également rapportée par Diogène Laërce (IX 12 = M 410) et
remontant, par le grammairien Séleucos interposé, à un inconnu du nom de Croton (?), auteur
d ' un Plongeur abyssal, c' est un certain Cratès (cf. ~ C 199) qui aurait introduit l' ouvrage
596 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE H 64
héraclitéen à Athènes. Mais KPATHE est une corruption facile de ES2-KPATHE et le Kata
xolvußnts de ce Croton a tout l'air d 'avoir été une comédie (cf. aussi le mètre iambique,
noté déjà par Kirk 36 , p . 10 , de la réaction de Socrate). De là à supposer que toute l'histoire de
l'introduction du livre à Athènes par le tandem Socrate -Euripide (deux cibles de prédilection
des auteurs de comédies) serait une affabulation pure et simple de comédiographe, il n ' y a
qu 'un pas que nous ne franchirons pourtant pas, car l'épisode en lui-même n 'est niimpossible
ni improbable, surtout si l'on tient compte de la bibliophilie notoire d 'Euripide (cf. Aristoph .,
Ran . 943) – et des réminiscences héraclitéennes qu 'on trouve dans ses æuvres - ainsi que de
l'intérêt du Socrate historique pour les ouvrages des sages anciens (cf. Xén.,Mem . I 6 , 14 ). On
ne peut naturellement pas être aussi affirmatif, faute de témoignages corroborants , quant à la
plausibilité du voyage à Éphèse et de la mémorisation de son livre par cœur (qui cadre
pourtant très bien avec lemétier d 'acteur d'Euripide).
Et il existe un assez grand nombre d'indices indirects (la plupart, il est vrai,
contestés) – sous forme de réminiscenceshéraclitéennes possibles chez Parmé
nide, Épicharme, Simonide, Pindare, Eschyle, auteurs dontnous savons perti
nemment que tous,sauf, peut-être, le premier,faisaient (et que le premier pouvait
fort bien faire) partie du cercle d'hommes de lettres qui s'était constitué autour
d'Hiéron – pourestimer que le livre d'Héraclite était connu dès 478-467 à Syra
cuse .
En ce qui concerne le destin ultérieur de l'ouvrage, l'état de la tradition permet d 'affirmer
qu 'il circulait encore au début du IIIe s. ap. J.-C . (cf. les nombreuses citations chez Plutarque,
Clément d 'Alexandrie , Hippolyte de Rome, etc .), mais devint fort rare à partir du IVe. Ce fait
est probablement à mettre en rapport avec le passage du rouleau de papyrus à un support plus
parfait, le codex de velin , et à la propagation du christianisme: on ne recopiait que les philo
sophes païens les plus demandés (Platon, Aristote, Lucrèce ).
2 . Forme et contenu du livre. Titres. Le locus classicus, contenant tous
les titres que nous connaissions, est Diog. Laert. IX 12 = M 28, passage qui
remonte à la seconde source du texte de base de la Vie d 'Héraclite , un pinax de
bibliothèque (cf. Mouraviev 14, 1987, p. 18- 19). Nous y trouvons les intitulés
Μούσαι, Περί φύσεως, 'Ακριβές ολάκισμα προς στάθμην βίου (vers attribue
à un Diodote ; " D 135), trváun nowv Tpónov xóquoc Évos tūv Euuntáv
twuf. Seul le second est corroboré par d'autres sources: nous en avons dénom
bré huit mentions dans cinq sources indépendantes : chez (Héracl.) Ep., Cicéron ,
Diogène Laërce, Clément et Sextus. — Les Muses ne réapparaît nulle part
ailleurs en tant que titre,mais cemot est appliqué à Héraclite , qualifié lesMuses
ioniennes, et à Empédocle , qualifié les Muses siciliennes, dans un passage
célèbre du Sophiste de Platon (242 D = T 124 ), et ce surnom est imité par Clé
ment d'Alexandrie (Strom . V , 59, 4), voire, peut-être, par Lucrèce (1 657). Cf.
aussi Thémist., Or. 26 , 318 d. — Les deux (ou trois) autres « titres » ne sont
attestés qu'ici (et dans la Souda , s.v. Anaíov zovußntńs, où ce passage de
Diogène a été recopié ). ( Textes réunis ou cités dans 9 , ad M 28.)
Nepi púoewç était un titre standard appliqué aux ouvrages de nombreux présocratiques
qui devait avoir d 'abord été une brève description de leur contenu principal,mais a peu à peu
été perçu comme un nom de genre littéraire (traité de philosophie de la nature ). Pareille
description n 'est d'ailleurs vraiment nécessaire que lorsqu 'un même écrivain est auteur de
plusieurs ouvrages et que son nom seul ne suffit pas pour identifier l'euvre. Chez les préso
cratiques, le cas se présente pour la première fois chez Xénophane et Empédocle , dont la tradi
tion nous dit qu' ils composèrent chacun plus d'un poème. Mais le premier ouvrage de philo
sophie dont nous puissions affirmer avec certitude que son titre lui a été donné sinon par son
H 64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE 597
auteur lui-même, dumoins du vivantde celui- ci, est le lepi qúoewÇ Ô Tepi toũ óvtos, De la
nature ou de l'étant de Mélissos (Simpl., Phys. 70 , 16 ; De caelo 577 , 10 = 30 A 4 DK ). La
preuve nous en est fournie par le titre parodique que Gorgias donna à son propre traité anti
éléen : ſlepi toū un outoç ñ nepi Quoews, Du non -étant ou de la nature (Sext., A . M . VII 65
= 82 B 3 DK ). Littérature récente sur la question : 118 E . Schmalzriedt, Peri physeos. Zur
Frühgeschichte der Buchtitel, München 1970 ; 119 G . Naddaf, L 'origine et l'évolution du
concept grec de phusis, Lewiston 1993, p. 9-58.
Moõoal demeure un titre mystérieux. La plupart des modernes ne voient dans ces Muses
qu 'une réinterprétation du passage du Sophiste . Sans contester la probabilité assez grande de
cette explication , il conviendrait de s ' interroger toutefois sur ce que Platon lui-même entendait
par Mo✓odi, voire sur la possibilité d'inverser le raisonnement et de chercher dans le passage
platonicien une référence sinon au titre, en tout cas à quelque désignation antérieure du livre
qui en aurait souligné le caractère spécifique, un caractère partagé par le poème d'Empédocle
(cf. peut-être < tñs púoewÇ> Movotov = ó puolxòç < óvoc> = Nepi ' Ouńpov d ’Alcida
mas (Arist., Rhet. 1406 a 24 ; Certamen Hom . et Hes.73-74 (Allen ); Stob. IV 52, 22 ; Diog. L .
VIII 56 ; PMich . 2754 (fin ); et M . Narcy, notice « Alcidamas d'Élée », A 88, DPHA I, p. 105
108 ), les Movoeta Nóywv de Polos d’Agrigente (Plat., Phaedr. 267 b 10 = DK 80 A 26 ),
1' etymologie platonicienne de Μούσαι dans Plat., Crat. 406 a: τάς δε Μούσας... από του
μώσθαι... της ζητήσεώς τε και φιλοσοφίας το όνομα τούτο επωνόμασε [scil. ο νομο
Oérns] « [le législateur) a donné aux Muses... ce nom appartenant à la fois à la recherche et à
la philosophie ... en partant de uñodal " chercher”...» etc . (cf. Épicharmefr. 117 ; 288 K .). Il
nous semble probable que Platon a joué sur deux sens de uovoal: celui de = quaestiones (" re
cherches" , " interrogations" , " énigmes") et celui de “Muses" , ce qui rend possible l'hypothèse
que le premier de ces sens ait pu avoir déjà été utilisé avant Platon pour désigner le livre d 'Hé
raclite. (Notez que tous les auteurs cités ci-dessus ont des rapports directs avec des cités de
Grande Grèce : Élée , Agrigente, Syracuse ...)
Le « titre » proposé par Diodote est clairement une catchphrase de son propre cru (cf. id.
ap. D .L . IX 15). Quant au dernier – ou aux deux derniers – titre(s) avec son (leur) indéniable
Heraklitstil (Kranz, DK ad loc.), il(s) pose(nt) trop de problèmes de lecture et d'interprétation
pour qu 'il soit possible de l(es) examiner ici. Qu 'il suffise de formuler l'hypothèse qui nous
semble la plus plausible : il s 'agirait du début défiguré de l'entrée en matière du livre, intercalé
entre la sphragis (perdue) etle début proprement dit (fr. B 1).
Nous ne pensons pas qu'Héraclite ait jamais éprouvé le besoin d' intituler son
livre ,mais il est tout à fait possible que celui-ci ait circulé déjà très tôt en tant
que tò 'Hoaxeitou nepi púoews, même si son sujet ne se limitait pas à la
« physique » au sens aristotélicien . N 'oublions pas qu 'Héraclite avait affirmé lui
même au début du livre que ses explications étaient les fruits d'une analyse
« selon nature » (B 1 ływ dinyeõual dialpéwv xarà púolv ). (Cf. 12 , p . 49 -53;
114 , p. 37 -41.)
Articulations.Nousne disposonsà ce sujet que d'une seule information
ancienne : l'inventaire (remontant lui aussi au pinax de bibliothèque du texte de
base ) des parties du livre qu'on trouve chez Diogène Laërce IX 5 : TÒ dè
φερόμενον αυτού (scil. Ηρακλείτου) βιβλίον εστί μέν από του συνέχοντος
περί φύσεως, διήρηται δε εις τρείς λόγους, είς τε τον περί του παντός και
noaltixòv xai Deoloyixóv, « Le livre de lui qui circule est, de par son contenu
général, sur la nature, mais il se divise en trois logoi: le logos sur le tout, le logos
politique et le logos théologique.»
De l'avis quasi unanime des modernes, cette subdivision ne tient pas debout. Pour citer
Diels (DK ad loc.) : « 3 Bücher gab es zu Heraklits Zeit nicht... Ein alexandrinischer Auszug
kann so geordnet gewesen sein » . Mais nous ne savons rien de l'existence de ce genre
598 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE H64
d 'Auszüge et rien d'autre dans notre pinax ne suggère qu 'il y fût question d'un recueil d' ex
traits. 120 K . Deichgräber, « Bemerkungen zu Diogenes' Bericht über Heraklit » , Philologus,
93, 1938, p . 19-20, s'appuyant sur 121 R . Hirzel, Untersuchungen zu Cicerosphilosophischen
Schriften , t. II/ 1, Leipzig 1882, réimpr. Hildesheim 1964, p . 177 -179, et suivi par Kirk 36 ,
p . 7 , propose une origine stoïcienne à cette division. Selon Cléanthe, la philosophie se divisait
en six parties : dialectique, rhétorique, éthique, politique, physique et théologie (Diog. L . VII
41) et le même Cléanthe aurait établi que le livre d 'Héraclite, auquel il a consacré un commen
taire , ne traitait que des trois dernières disciplines, sans que cela implique aucune division du
livre en parties. Mais alors que faire de Oinpntai ? Cette hypothèse pose aussi un autre pro
blème: pourquoi la partie physique est-elle appelée o nepi toŨ navtocóyoc et non puOLXÓC
hoyos et pourquoi est-elle quand même séparée de la théologie ? Sans doute parce que puol
κός ne faisait pas l' affaire. Or, pour un stoicien, το πάν = το όλον και το άπειρον κενόν et le
divin est le principemoteur de la matière inerte (Sext., A. M . IX 332 ; Diog. L . VII 134 ). Est-ce
à dire que, selon Cléanthe, Héraclite, d 'une part, ne traitait pas de la physique et, d 'autre part,
distinguait l'univers entouré de vide de l'univers en tant que terrain d 'action du divin ?
Mais la division en trois logoi admet une explication plus simple. A une épo
que où il était devenu courant de subdiviser (d'« aérer» ) les textes difficiles,
quelque éditeur aurait plus ou moins arbitrairement scindé celui d'Héraclite en
plusieurs blocs et leur aurait donné des sous-titres qui reflétaient grosso modo le
contenu essentiel de chaque partie. Iepi toŨ NAVTóc signifierait alors plutôt A
propos de tout que A propos du Tout ou que, à plus forte raison , A propos de
l 'univers. Si l'explication est correcte , cela nous suggère de façon très
vague, mais quand même intéressante, l'ordre original de certains des thèmes
abordés. Il était question d'abord de « tout» (= « n'importe quoi » ?), puis de
politique, puis de théologie . Avec la physique comme fond commun ? (Cf. 12 ,
p. 53-57 ; 114,p .41-42). Voir encore infra , III.4 (fin ).
Dimensions. Aucune de nos sources (cf. 9, textes M 26a-f, M 27a-f) ne
mentionne de second , troisième... « livre » du traité d'Héraclite et presque toutes
le désignent au singulier. Il est vrai que certaines (notamment Aristote , Rhet.
1407 b 14 ,mais à côté de oúrypajua au singulier !) parlent de tà 'Hpaxeitou
ou tà 'Hpaxheitela , mais le substantif ellipse s'y déchiffre facilement comme
" phrases” , “ paroles”, “ opinions” . (Toutes les exceptions indubitables (citées ad
M 27°) datentau plus tôt de la Basse Antiquité et appartiennent à des auteurs qui
n 'ont jamais lu Héraclite et dont certains croyaientmême qu 'Héraclite écrivait
en vers.] Cela implique que le livre d'Héraclite entrait dans un seul rouleau de
papyrus, permet d'en évaluer les dimensions originelles comme égales ou infé
rieures à un volumen archaïque (un chant homérique) et de tenter une comparai
son avec ce qui nous en reste .
A notre connaissance, il n 'existe qu 'une tentative sérieuse d 'évaluer la fraction du livre qui
nous est parvenue: celle de Gomperz 59, p . 27 -31. Il utilise trois critères indépendants : la lon
gueur originale la plus probable des poèmes d 'Empédocle et Parménide, le rapport entre le
nombre d'informations doxographiques héraclitéennes dont nous possédons les originaux et
celui des informations dont les originaux sont perdus, le rapport entre le nombre de fragments
cités une fois et celui des fragments cités plus d 'une fois. Conclusion : nous possédons un peu
moins de la moitié du livre. Marcovich 26 , col. 269, partantde l'observation (relativement cor
recte) qu'une grande partie de la doxographie héraclitéenne peut être déduite des fragments
transmis, en a conclu qu 'on pouvait supposer « daß uns vom Büchlein H .' nicht zuviel fehlt
(schlimmstenfalls, daß wir nur ein Hälfte vor uns haben ) » , — Nous avons nous-même tenté
une supputation provisoire partiellement reproduite dans VDI, 1970, nº 113 (dans un premier
H 64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE 599
article que par ailleurs nous aurions préféré ne pas avoir publié), partiellement inédite, en par
tant, d 'une part, du maximum sus-indiqué (un « livre » ) et des dimensions approximatives
d 'ouvrages analogues de la même époque et, d'autre part, du rapport mathématique entre le
nombre de fragments cités et le nombre total de citations de fragments (à supposer que toutes
les citations avaient une probabilité plus ou moins identique d'être citées). Il en a résulté que
la partie conservée devait représenter près des deux tiers de l' original. Ces calculs seront à
refaire et à parfaire quand nous aurons achevé la publication de 16 , vol. II, et disposerons d 'un
inventaire complet des citations et textes cités (leur justification théorique et leur résultat
devront paraître dans 16 , vol. IV .B = commentaire de 17 ). Cf. encore les remarques provi
soires de 17 , p . XVII-XX . — Curieusement, Marcovich a entre temps changé d 'avis : « the
extant 110 or so genuine sayings do not exceed say 20 % of the original collection of Heracli
tus» , cf. 122 M .Marcovich , compte rendu deKahn 141 (infra ), Gnomon, 54, 1982, p. 418 .
Contenu du livre selon les Anciens. Outre la division sus
mentionnée en trois logoi, nous disposons d ’encore trois témoignages. Selon
l'auteur anonyme de la pseudo-lettre de Darius à Héraclite ((Heraclit.), Ep . I = M
295) : « par endroits, à interpréter littéralement ce que tu dis, il (le livre ) semble
énoncer une sorte de conception de l'ordre du monde tout entier ( ewplaç
xóduOU TOŨ oóuntavtos) et de ce qui s'y passe en vertu de cet ordre et est sou
mis à un mouvement des plus divins.Mais il semble suspendre son jugement en
ce qui concerne l'étude et la connaissance de la plupart des choses...» (cf. Sext.,
A. M . VII 133 = DK A 16 Eńynols toŨ Tpónov tñS TOŐ TAVTÓS OLOLX “ dewç et
le dernier « titre » du livre cité supra). Théophraste aussi, dans son exposé de la
physique héraclitéenne, se plaint de l'omission de certains sujets qui lui parais
sent importants (D . L . IX 8.9.11 = M 36 "). Cette interprétation philosophique du
livre est présupposée par la quasi-totalité de nos sources. Toutefois, selon Dio
dote (l'auteur du troisième « titre» ; ap. D .L . IX 15 = M 304), « l'ouvrage d'Hé
raclite n 'est pas sur la nature ,mais sur l'État; ce qui y est dit sur la nature est
fourni à titre d'illustration » . Et selon Sextus (A. M . VII 7 = M 306), « on s'est
posé la question de savoir, à propos d 'Héraclite , s' il était seulement philosophe
de la nature ou encore philosophe moraliste ». A en juger par les vestiges et
notamment par le nombre de fragments éthiques, physiques et politiques resca
pés, la question reproduite par Sextus est parfaitement légitime; les reproches de
[Darius] et Théophraste, qui confirment l'existence d'une partie physique, sem
blent eux aussi justifiés; et la présence de thèmes politiques est indéniable. Si
donc nous combinons ces témoignages avec la division en logoi, nous obtenons
les cinq thèmes suivants: nepi toŨ TAUTÓS, physique, théologie (également
confirmée par des citations), éthique et politique. Il n'y a que l'absolutisation du
dernier sujet au détriment du reste qui suscite desdoutes sérieux.
L ' opinion singulière de Diodote n 'en a pasmoins trouvé un adepte moderne: Capizzi 38,
qui accuse toute la tradition héraclitéenne - de Platon à Hegel et Zeller – de mystification
involontaire et tente – pour vérifier cette « hypothèse de travail » – une réinterprétation totale
des fragments en tant que vestiges d' un commentaire à contenu strictement politique en rap
port avec l'actualité éphésienne de l'époque des guerres médiques : l'exégèse de la législation
écrite (aóyoc ) introduite en 499 par Hermodore pour galvaniser la résistance antiperse des
Éphésiens.Malgré son incontestable ingéniosité et de nombreuses suggestions intéressantes
(surtout s'agissant des opinions politiques d 'Héraclite ), cette « vérification » astucieuse est
rendue caduque par le nombre impressionnant d 'hypothèses gratuites et de conjectures indé
montrables et/ou improbables qu 'elle est obligée d 'intégrer (sans parler de la difficulté chro
600 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE H 64
nologique suscitée par l'intervalle de 47 ans qu'elle implique entre les deux périodes d 'activité
du législateur).
Localisation de certains fragments.Nous ne sommes rensei
gnés par nos sources que sur celle de B 1 et de B 2 : au début du livre pour le
premier (Aristote et Sextus = DK A 4 et A 16 , 132 = Mch ld et la), près du
début pour le second (Sextus = DK A 16 = Mch 23a). Comme, toutefois, B 1
commence avec une particule dè et ne comporte pas de sphragide, et comme en
outre les mots ò óyoc ode semblent exiger quelque introduction définitoire
préalable de ce terme, les modernes divergent fort sur la façon de comprendre év
tñu åpxñí: " toutau début” ou “ quelque part au début". Et les évaluations de la
distance entre B 1 et B 2 sont encore plus discordantes. Cf. 12 , p. 60 -61.
Signalons encore deux hypothèses modernesdont la première est à rejeter, alors que l'autre
semble être quasi indubitable. 123 V . Macchioro, Eraclito. Nuovi studi sull'orfismo, Bari
1922, p. 24, 26 n . 1, tire argument des mots d 'Hippolyte, Ref. omn. haer. IX M
( 31) év BÈ
TOÚTwl tõl xeparaíwi návra duoŨ tov idlov voŰV ÉÉDero (scil. 'Hpáxheltos) pour pré
tendre qu'Hippolyte se serait servi d 'un chapitre particulier du livre d 'Héraclite et qu'il serait
possible d 'utiliser les citations hippolytiennes (à savoir B 50, B 51, B1, et de B 52 à B 67 )
« per tentar di ricostruire questo capitolo » . D 'autresmodernes ontcru qu'Hippolyte parlait ici
de son propre chapitre héraclitéen . En fait év OÈ TOÚTUL TÕI xeparaiwi signifie tout bonne
ment " sur ce chapitre” = “sur cette question” (celle de l'identité du Père et du Fils ). Cf.
Mouraviev 12 , p. 58 -60 ; 124 Id., « Hippolyte, Héraclite et Noët (commentaire d 'Hippol., Ref.
omn. Haer. IX 8 -10) » , ANRW II 36 , 6 , 1992, p . 4398 n . 30 . En revanche,Marcovich 26 , col.
258, doit avoir raison de supposer que le fr. B 30 xóquov tóvde... servait de début à la partie
physique du livre .
3. Style et obscuritédu livre selon les Anciens. Il y a plusde vingt ans,nous
avions réuni dans 9, 1975, p. 233-239 (plus addenda dans 12, p . 68-71), une
trentaine de textes anciens et à peu près autant de références au surnom de
OXOTELVÓS, bref tout ce que nous avions pu répertorier alors sur la légendaire
obscurité d'Héraclite et plus généralement sur son style . Depuis, cette collection
de textes a grandi et nous en proposons ci-dessous une liste (moins les simples
mentions du surnom ) dans l'ordre et sous les numéros sous lesquels ils figure
ront dans le vol. III.A de 16 (sauf indication contraire , numérotation inchangée
par rapport à 9).
M 33-37 Obscurité – M 33 (explications linguistiques): (a ) Arist.,
Rhet. r 5, 1407 b 11 ; (al) Anonym ., Comm . in Arist. Rhet. r 5 , 1407 b 11 (CAG XXI/2,
p. 183, 5 Rabe); (b ) Démétr., De elocut. 191-192 ; (c) Théon, Progymn. 4, 19 (I, p. 187, 13
Walz , Rhet. Gr.) ; (d ) loan . Doxapatr., Homiliae in Aphthoni Progymn. ( II, p. 226 , 2 Walz ,
Rhet. Gr.) – M 34 (exemples de citations obscures) : (a ) Héraclit., Homer.
alleg . 24, 3 -5 ; (b ) Lucien , Vit. auct. 14 ; ( c) Asclép., in Arist. Metaph . r 3 , 1005 b 23, p . 251,
20 ; 32 ; 258, 36 (Hayduck); (d) Apul., Demundo 20 ; (e) Simpl., in Arist. De caelo p. 294, 13
(CAG VII, Heiberg) ; (f) Simpl., in Arist. Phys. p. 77, 30 (CAG IX , Diels); (g ) Plotin IV 8 [6 ]
1, 11 (II, p . 224 , 226 Henry et Schwyzer) ; (h ) Tzetz., Schol, ad exeg. in Iliad. p . 126
(Hermann ) ; (i) lolim ( d ) ] Sén ., Epist. XII 7 ; (k ) Eustath ., in Il. I 49 - M 35 (profondeur) :
(a ) Ariston de Céos, fr. 30 (Wehrli VI) ap. Diog. L . II 22 ; (b ) Souda s. v. Analov xouußntoù
(II, p . 37, 20 ; 24 ; 29 Adler) ; ( c ) David , in Porph . Isag. 4 (CAG XVIII/ 2 , p . 105, 10 Busse )
Graece; (c2) Idem Armeniace (p. 34, 19 = 121 Arevšatyan (Erevan , 1976 ; 1980 ]) ; (d) Élias, in
Porph. Isagog. 16 (CAG XVIIVI, p . 41, 30 Busse) — M 35A (in adéquation calé .
gorielle): (a) Plat., Sympos. 186 E 4 — 187 C 2 ; (b) Simpl., in Arist. Phys. p.50, 23 (CAG
IX , Diels); (c ) (Élias/David ), in Porph. Isagog. 28, 26 -28 (p. 61-62 Westerink ) ; (d ) loan .
Sicul., Schol. in Hermog. De ideis. I 4 , 66 (VI, p. 197, 13 Walz, Rhet. Gr.) – M 36
H64 HÉRACLITE D' ÉPHÈSE 601
(incohérence et impulsivité) : (a ) Anonymi (= Ariston de Céos ?), Timon de
Phlionte et Théophraste ap. Diogène Laërce IX 6 ; (b ) Diog. L . IX 8 ; 9 ; 11 (e Theophrasto ) ;
(c) (Darius), Ep . ad Heraclit. (p. 305 Tarán ), cf. Diog. L . IX 13 - M 37 (le cliché
tardif) : (a ) Poeta quidam ap. Cicer. (cf. d infra) ; (b ) Tit. Liv . XXIII 39, 3 ; (c ) Lucr. I635
644 ; (d ) Cicér., De fin . II 5 , 15 ; (e ) Id ., De diuin . II64, 132 sq. ; ( f) Id ., De nat. deor. I 26 , 74 ;
(g ) Id., Denat. deor. III 14 , 35 ; (h) Clém ., Strom . V 50, 2 ; (i) Anth. Gr. VII 128 = Diog. L . IX
16 — M 37A (le surnom ) 33 références que nousomettons.
M 38 Clarté :(a) Diog. L. IX 7 ;(b) Anth. Gr. IX 540 = Diog. L. IX 16 ; (c) Sext., A.M .
I 301; (d ) Aetna 537 sqq. — M 38A Poésie ? : (a) Plat., Soph . 242 D 6 [T 124 ] (cf. Clém .,
Strom . V , 59, 4 ) ; (b ) Souda, s.v. 'HpáxaelToC ; (c ) Tatien , Or. ad Gr. 3 ; (d ) Plut., De def.
orac. 12, 415 f ; (e ) Cf. M 37C, vers 644 -645 ; (f) Ficin , De immort, animorum XV 4 .
Les premiers témoins que nous connaissions de cette obscurité proverbiale
d 'Héraclite s'appelaient donc Socrate (M 35 ") – si l'anecdote contient ne
fût-ce qu 'une parcelle de vérité -, Platon - qui y fait clairementallusion dans
sa description caricaturale des Héraclitéens (T 17 = Theaet. 180 a 3-7 : Dès
qu 'on leur demande quelque chose, ils sortentde leurs carquois des formu
lettes énigmatiques ſónuatioxla aiviyuatúồn] dont ils vous arrosent
comme si c 'étaient des flèches. Et si on cherche à comprendre le sens de l'une
d 'elles, ils vous clouent d'une autre flèche reformulée à neuf...) et surtout, par la
bouche d'Éryximaque, dans le Banquet (M 35A9) – etAristote , qui signale
des difficultés concrètes qu 'on trouve dans son livre ( M 33a ). Un siècle plus tard ,
à la fin du IIIe s. av. J.-C ., un Macédonien aurait même été surnommé l'Obscur
parce qu 'il s'appelait Héraclite (M 37c). A dater du jer s. av. J.-C ., le surnom
l'Obscur était devenu un attribut quasi obligatoire du nom du philosophe, et
même douze siècles plus tard, Eustathe (in Od. IV 450 = M 37Ab) éprouve le
besoin de préciser, en parlant d'un Héraclite, que ce n 'est pas de l'Obscur qu'il
s'agit.
Toutes nos sources sont d'accord pour affirmer que le livre d'Héraclite n 'était
pas facile à comprendre. Certains auteurs précisent toutefois que l'ouvrage de
l'Éphésien n'était obscur que partiellement. Le plus catégorique est Diogène
Laërce (M 38 ), mais Socrate (M 35a), si c 'est lui, et l'auteur anonyme de la
lettre attribuée à Darius (M 36 ") sont également convaincus d'avoir partiellement
compris le livre.
Il est vrai que l'Héraclite , auteur des Allégories Homériques (M 34a), et Clément
d 'Alexandrie (M 37h) parlent de l'obscurité du livre en tant que tel, mais c 'est plutôt là un
manque de nuances qu ’une affirmation catégorique. Clément, en tout cas, ne cache pas ailleurs
son admiration pour l'Éphésien qu 'il cite abondamment: il est notre source la plus riche en
citationshéraclitéennes.
En revanche, les anciens sont loin d 'être unanimes sur les causes et les motifs
de l'obscurité d'Héraclite. Toutes leurs explications peuvent être réduites à trois :
le livre était obscur (1) par la faute d'Héraclite lui-même, ou (2) en raison de la
complexité (profondeur) de son objet (despensées exprimées), ou (3) à cause de
l'incompréhension de ses lecteurs.
La « faute » d 'Héraclite pouvait avoir été intentionnelle ou involontaire . Platon (M 35Aa),
Aristote et Démétrius (M 33ab ; cf. M 33d ) penchaient apparemment pour la seconde explica
tion : si Héraclite est obscur, c 'est à cause de la maladresse de son style. [ Théon, par contre ,
n 'exclut pas une « maladresse » intentionnelle : « soit exprès, soit par ignorance » ( M 33c ; cf.
602 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE H 64
M 34C).] Théophraste estime lui aussi que l'obscurité de l'Éphésien était involontaire et lui
trouve une explication psychologique ou , plutôt, physiologique : Héraclite souffrait de bile
noire, c ' était un impulsif, et c'est cela qui l'empêchait demener ses thèses à terme et d 'épuiser
ses sujets (M 36ab; cf. M 346 fin ).
Mais l'explication opposée est de beaucoup la plus populaire : c'est en connaissance de
cause, par mépris pour la foule qu 'Héraclite s'exprimait de façon incompréhensible : pour que
seuls les « capables» le comprennent (certains et Timon chez Diog. L . (M 36a), Cicéron (M
370, M 37f; cf. M 378), Clément (M 37h), Anth. Gr. VII 129 (M 37i), pseudo -Darius (M 36C);
cf. Théon (M 33 ), M 348, M 34k, etc.) ; ou pour inciter les lecteurs à la réflexion (Plotin (M
348 ]) ; ou à titre de gymnastique intellectuelle (Asclepius [ M 34°)).
A la version d'un ésotérisme délibéré (destiné à effaroucher une partie des lecteurs poten
tiels et à donner matière à réflexion aux autres) s'oppose celle d 'un « ésotérismemalgré lui» :
ce n 'est pas Héraclite qui est obscur, ce sont les pensées qu 'il expose (ou les phénomènes qu 'il
décrit) qui le sont en raison de leur profondeur, de leur complexité, de leur nature occulte . Les
comprendre exige un énorme effort intellectuel, - ce qui avait aussi pour effet d 'éliminer une
partie des lecteurs. Telle est l'opinion des néoplatoniciens David et Élias (M 35€, M 350) :
mais la même idée est déjà impliquée par la deuxièmepartie de la réponse de Socrate (M 35a) :
les plongeurs de Délos étaient des pêcheurs de perles ; et c'est là le fondement de la théorie qui
ne voit chez Héraclite que symboles et allégories (Héraclite l'Homérique (M 34a), Asclépius
(M 34c]). C 'est sans doute ici qu'il faut également ranger l'épigramme anonymeAnth . Gr. IX
540 (M 38b), bien qu 'elle puisse être aussi interprétée comme impliquant un ésotérisme déli
béré (selon qu'on prend l'initiation au sens propre ou en un sens métaphorique).
Une réciproque de cette explication fait retomber la faute sur la stupidité des lecteurs : ce
n 'est pas Héraclite qui est obscur, c'est le lecteur qui est incapable de comprendre les choses
qu 'il décrit fidèlement. L 'auteur de l'Etna l'affirmede tout lecteur (M 380), Sextus seulement
des grammairiens sourcilleux ( M 38°).
Il n'y a que Lucrèce, emporté par le feu de la polémique, pour accuser Héra
clite de ne « briller par son obscurité» qu'aux yeux des sots, d'écrire pour
séduire et détourner de la vérité. En revanche, Lucrèce, poète lui-même, est pra
tiquement le seul auteur antique à témoigner de la beauté (trompeuse , il est vrai)
du style d'Héraclite « qui flatte les oreilles et est fardé de sons agréables »
(M 37'). Hormis ce vers , il n 'y a, sur le caractère poétique de la prose d 'Héra
clite, que les témoignages fort imprécis ou douteux que nous avons réunis sous
M 38A et dont seul celui de Platon possède un certain poids (à défaut de netteté ).
Il est intéressant de confronter ces opinions subjectives des anciens avec les exemples
d ' obscurité héraclitéenne qu 'ils citent, c 'est-à - dire avec les difficultés objectives auxquelles ils
se sontheurtés. Commençons par celles qui relèventde l'expression.
Aristote (M 33a) signale deux causes concrètes de difficulté : l'absence d'un nombre suffi
sant (1) de oúvoequoi, de connectifs (conjonctions et particules), et (2 ) de marques de ponc
tuation .Malheureusement, l'exemple fourni par Aristote n 'illustre que le second reproche: la
difficulté y est due non à l'absence de connectifs, mais à l'ordre des mots en tant que marque
des relations syntaxiques (il eût suffi de placer alel soit avant łóvros, soit au contraire plus
prèsde vívovrai pour qu'il n'y ait aucun problème). C' est un cas typique d 'amphibolie, selon
la terminologie grecque, d 'homonymie syntaxique comme nous dirions, nous. (C 'est aussi
d'amphibolie qu 'il est question ,mais sans exemples héraclitéens, chez Théon et Jean Doxo
patre ( M 33cd ] et chez le commentateur anonyme d'Aristote (M 33al). Par contre, les
« rencontres de consonnes » dont fait état ce dernier semblent ne rien devoir à l'Éphésien .)
Les autres reproches relevant de l'expression - l'emploide locutions étranges, c'est-à-dire
de termes impropres (M 35Ab Eévolç tloi... onuaoiv, cf. M 336 év tolç xupious ),le recours à
un langage symbolique ou allégorique (M 349, M 34C), ou poétique (M 37€) etc. – en eux
mêmes trop vagues, sont illustrés plus concrètement, comme nous verrons, par des exemples
relevant plutôt du contenu .
H 64 HÉRACLITE D'ÉPHÈSE 603
En effet, l' obscurité des fragments B 49A et B 62 cités par Héraclite l'Homérique (M 34a)
(cf. Lucien (M 34b)] n 'a rien à voir avec la syntaxe ou l' insuffisance de connectifs. Ces asser
tions syntaxiquement transparentes sont « obscures » parce qu 'elles violent la loi de la contra
diction. Pour un Grec post-aristotélicien , on ne peut pas affirmer en même temps A et non - A
sans soit dire des stupidités ou des contre-vérités (cf. M 37 '), soit utiliser un langage symbo
lique (allégorique). Cette dernière approche suppose que soient trouvées pour A et non - A des
interprétations telles que la contradiction disparaisse. Aristote, lui,hésitait à être aussi catégo
rique : « Il est impossible que quelqu 'un admette que la même chose est et n 'est pas, comme
l'affirmait, selon certains, Héraclite ... » (T 138 = Metaph. 1005 b 23). Et c'est peut-être pour
cela que son commentateur Asclépius ( M 34c) pour qui dire que la même chose est et n 'est
pas revient à prétendre que toutes les choses admettent la même définition - fait lui aussi appel
à la nécessité d'une interprétation symbolique.
Simplicius et Jean de Sicile (M 35A6, M 35Ad) - inspirés sans doute par Platon (M 35Aa),
chez qui le reproche est implicite - mettent le doigt sur une autre difficulté logique du même
genre inhérente à Héraclite et difficile à « digérer» d'un point de vue aristotélicien . Parlant de
la citation platonicienne d 'Héraclite dans le Sophiste (242 d ), Olapepóuevov åki ovudépetal
(T 124 ), Simplicius y voit un exemple de la paradoxologie dénoncée par Aristote : « comme si
quelqu 'un appelait l'être " un homme" » (Phys. 185 a 7 = T 137). L 'exemple aristotélicien est
un cas typique d'inadéquation catégorielle et c'est une inadéquation de ce genre que perçoit
Simplicius dans la citation du Sophiste et que nous trouvons nous-mêmes là où Platon cite un
texte presque identique d 'Héraclite : l'Un, l'harmonie ne peut « différer » , sinon il y aurait
multiplicité, disharmonie, contradiction interne, car harmonie implique accord , c 'est-à - dire
dépassement des différences (Banquet 186 e - 187c = M 35Aa = T 123). Jean de Sicile (M
35Ad) semble d'ailleurs énoncer toute une théorie, apparemment empruntée à Hermogène, de
ce genre d 'obscurité, mais s'exprime assez obscurément lui-même et ne mentionne Héraclite
qu 'au passage.
Il est possible que ce soit aussi une inadéquation de ce genre (plutôt que l'archaïsme du
langage de l'Éphésien ) que « pseudo-David/pseudo-Elias» (M 35AC) interprète comme
obscurité issue de la qualité des mots, de leur singularité ou étrangeté. D 'ailleurs ce passage
semble effectivement s'inspirer du texte du Banquet de Platon (cf. EÉVOLG... onugolv et M
35Aa[187 a 4 ] tots ye øńugolv oủ xarūs).
Beaucoup plus terre à terre est la difficulté enregistrée par Théophraste : Héraclite ne dit
pas tout ce qu 'il conviendrait de dire sur les sujets qu ' il aborde, il s 'interrompt ou se tait au
moment où l' on attend de lui une réponse : il n 'explique pas clairement comment le Tout se
constitue à partir du feu, ilne dit rien de l'« ambiant» , il ne se prononce pas sur la nature de la
terre et des « bols » des astres (M 36ab ). La « suspension de jugement» (ÉTTOYn ) dont parle
pseudo-Darius (M 36C) reflète sans doute une constatation du même genre.
Enfin, Sénèque (M 340) nous fournit involontairement un exemple de la façon dont
l'« obscurité » pouvait n ' être qu 'un simple effet de l'absence de contexte : grâce à Plutarque
qui nous a conservé le mêmetexte (Cam . 19 = B 106 ), nous savons que celui-ci visait Hésiode
et sa division des jours en fastes et néfastes (Travaux et jours 765 sqq.). Sénèque nous
démontre ainsi qu 'au moment où il écrivit ce passage, lui, ou sa source, n 'avait pas lu Héra
clite (ou avait oublié le contexte pertinent) et se croyait autorisé à proposer (ou à reproduire )
des interprétations contradictoires du fragment cité.
Ainsi, (1) l'obscurité du livre d'Héraclite pour les Anciens ne fait pas l'ombre
d 'un doute , mais elle n ' était pas totale et donnait lieu à des attitudes et des inter
prétations très diverses. Les difficultés éprouvées par les modernes ne sontdonc
pas le fait exclusif de la fragmentation et de la corruption du texte originel, de la
perte du contexte . (2) Abstraction faite de leurs opinions subjectives sur les rai
sons et les mobiles de cette obscurité , nous avons pu en dégager un certain
nombre de causes objectives concrètes, probables ou certaines, à savoir (de l'ex
pression au contenu) :
604 HÉRACLITE D ' ÉPHÈSE H 64
a . les effets sonores ;
b.lemanque de connectifs (et l'ambiguïté syntaxique quien découle);
c. l'ambiguïté syntaxique créée par l'ordre desmots ;
d. les thèses enfreignant la loi dela contradiction ;
e. les thèses combinant des catégories incompatibles ;
f. le non-épuisement, et l'incohérence du traitement,de certains sujets ;
g. l' absence du contexte .
Trois de ces causes (de a à c) relèvent de la forme linguistique de l'expression
(dans deux cas source d'ambiguïté ), deux autres (d et e) de la forme logique du
contenu (source de contradiction) et lesdeux dernières de la formeimparfaite ou
incomplète soit du texte original, soit du texte transmis. Bref, l'obscurité héracli
téenne est avant tout tributaire de la formede son texte et mérite donc d ' être ana
lysée sous cet angle.
Platon, Lucrèce et quelques autres auteurs (M 370, M 38A ) nous suggèrent en
outre qu'en un certain sens cette formeétait poétique, ce qui expliquerait nombre
de particularités tant phoniques que grammaticales, syntaxiques et logiques du
langage héraclitéen ; cf. infra, III.3.
4. État actuel du corpus.Les éditions. Comme ceux de tous les préso
cratiques, le livre d 'Héraclite ne s'est pas conservé, mais nous disposons d'un
corpus assez vaste de citations qui en proviennent (les fragments) et de témoi
gnages sur les opinions que l'Éphésien y professait. Nous avons déjà dit qu'il
n 'existe pas encore d ' édition exhaustive de ce corpus des vestiges du livre et de
la doctrine. Il est donc encore très difficile de les chiffrer. Si le nombre des
fragments peut encore être approximativement indiqué – entre 110 et 140, de une
à une dizaine de lignes chacun , pouvant être considérés comme textuels (selon
l'idée qu 'on se fait de leur textualité et de leur authenticité ), et jusqu'à 180 , si on
y inclut les témoignages relatifs à des opinions ponctuelles, c'est-à-dire ceux qui,
sans être textuels, se rapportent à un passage déterminé du livre (exemple : DK A
22 ) -, le nombre des témoignages et a fortiori celui des opinions prêtées à Héra
clite par les Anciens demeurent indéterminés. L 'historien est donc obligé de
faire flèche de tout bois et de rechercher les textes qui lui manquent (et leurs
contextes) là où ils se trouvent: dans les éditions des sources antiques, dans les
études consacrées à ces sources et à Héraclite et aussi dans les diverses éditions
critiques des vestiges d'Héraclite . Pour lui faciliter la tâche, nous répertorions
ces dernières ci-dessous, avec de brèves annotations. Il n 'est pas inutile de savoir
que certains textes (réputés secondaires) connus des modernes au xixe s., mais
omis ou négligés par Bywater 130 et Diels 132- 133, ont été complètement per
dus de vue au XXe s.
125 H . Stephanus (H . Estienne), Moinois pilóoopoc. Poesis philosophica. Vel saltem Re
liquiae poesis philosophicae Empedoclis, Parmenidis, Xenophanis, Cleanthis, Timonis, Epi
charmi. Adiuncta sunt Orphei illius Carmina qui a suis appellatus fuit ó Deódoyoc. Item
Heracliti et Democriti loci quidam et eorum epistolae. Excudebat H . S ., s.l., 1573; p . 129- 155.
— Une quarantaine de fragments, certains avec les contextes des sources, disposés par cita
H 64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE 605
teurs, dans un ordre apparemment arbitraire de ceux -ci, et huit des neuf lettres pseudo -héracli
téennes (IV à VIII, I à III). Sans numérotation , commentaire ou apparat.
126 F. Schleiermacher, « Heraklit der Dunkle von Ephesos dargestellt aus den Trümmern
seines Werkes und den Zeugnissen der Alten > , Museum der Altertumswissenschaft 1, 1808 ,
p . 313 -533 = Id ., Sämmtliche Werke, t. III/2, Berlin 1838, 146 p. - 75 fragments, numérotés
de 1 à 73 (les numéros 37 et 38 sont attribués deux fois ), disposés dans l'ordre d 'exposition de
la doctrine, avec commentaire critique et philosophique incluant de nombreux témoignages.
127 F . Lassalle , Die Philosophie Herakleitos des Dunklen von Ephesos. Nach einer neuen
Sammlung seiner Bruchstücke und der Zeugnisse der Alten dargestellt, t. I-II, Berlin 1858 ;
réimpr. en 1 vol. Hildesheim 1970 , XV + 379 (+ ) V + 479 p . — Monographie philosophique
d' inspiration hégélienne incorporant unemine de textes fondamentaux et secondaires dont bon
nombre ont depuis été oubliés (cf. index). Pas de numérotation ,philologie parfois défectueuse.
128 F. W . A . Mullach, Fragmenta Philosophorum Graecorum . Collegit, recensuit, vertit,
annotationibus et prolegomenis illustravit, indicibus instruxit F . W . A . M ., t. I, Paris 1860
(réimpr. Aalen 1960 ), p. 310 -329. — 96 itemsnumérotés de 1 à 96 incluant les 75 fragments
de Schleiermacher (même ordre de succession, numéros différents), les citations hippoly
tiennes d 'Héraclite (editio princeps 1851) et des extraits du De uictu pseudo-hippocratique,
avec citation des contextes etde textes parallèles et traduction latine en bas de page.
129 P . Schuster, « Heraklit von Ephesus. Ein Versuch dessen Fragmente in ihrer ursprüng
lichen Ordnung wiederherzustellen » , dans Acta Societatis philologicae Lipsiensis 3, 1873,
p . IX -XVIII, 3 -398 . - Reconstruction commentée incorporant 145 items, y compris des extraits
du De uictu pseudo-hippocratique, numérotés de 1 à 140. Philologiquement et philosophique
ment faible,maismérite d'être consulté compte tenu des bonnes idées épisodiques de l'auteur.
130 I. Bywater, Heracliti Ephesii reliquiae. Rec. I. B ., Oxford 1877 ; réimpr. London
1970, XVI + 90 p . — 138 fragments (les huit derniers spuria ) disposés dans l'ordre supposé de
l'original avec, en bas de page , leurs divers contextes chez les citateurs, leurs paraphrases et
réminiscences, et un apparat critique succinct, plus, en appendice, des éditions critiques de
(1) Diog. Laërce IX 1-17, (II) Hippocr. De uictu I 3 -24, (III) 2 fragments de Scythinos de
Téos, (IV ) Lucien , Vit. auct. 14 , (V ) (Héraclit.), Lettres I-IX , et un epimetrum avec un extrait
de Zosimus, De la vertu et de la composition des eaux.
131 H . Diels, Doxographi Graeci, Berlin 1879 ; 4e réimpr. 1965, X + 854 p. Ouvrage capi
tal réunissant pratiquement toutes les sources doxographiques au sens strict (c'est-à -dire
remontant à Théophraste et à la tradition des Placita et des Successiones) relatives (entre
autres) à Héraclite: “ Aétius” (c'est-à-dire (Plutarque), Placita et Stobée, Ecl. I en parallèle),
Arius Didyme, Théophraste, Physic. Opin . et De sens. fragmenta, Cicéron , De deor, nai. I et
Philodème, De piet. I (extraits en parallèle), Hippolyte , Philosophum . (= Ref. omn. haer. I) ,
Plut., Strom . fr., Épiphane, var. excerpta , (Galien ), Hist. philos., Hermias, Irris. gent. philos.
Noter toutefois que pour nombre de ces textes il existe des éditions plus récentes et de qualité
supérieure .
132 H . Diels, Herakleitos von Ephesos, griechisch und deutsch, Berlin 1901, XII + 56 p .;
2e éd . 1909, XVI + 83 p . et 133 Id., Die Fragmente der Vorsokratiker, griechisch und deutsch,
Berlin 1903, p . 58 -89 (sans apparat) ; 2e éd., t. I, 1906 , p . 54 -87 (textes) ; t. II/1, 1907, p . VI,
VIII, 660 -667 (apparat); t. II/2, 1910, p. VII-VIII (iconogr.) ; 3e éd., 1912, t. I, p. 67- 113 ; t. II,
P . IV (iconogr.) ; 4e éd ., 1922, t. I = 3e éd. plus p . XXIII-XXVI (suppléments ) ; 5e et 6e éd . cf.
supra Diels -Kranz 4 . Disposées dans l'ordre chronologique, ces éditions reflètent l'évolution
du corpus réuni par Diels et complété ensuite par Kranz. Sauf celle de 1901 où les fragments
(138 au total, numérotés de 1 à 137) viennent au début, sans sigle, et les témoignages consti
tuent un supplément divisé en trois groupes : A (vie ), B (doctrine), C (imitations), l'ordon
nance et la composition sont grosso modo celles que nous retouvons dans DK (où il y a 12
fragments et 14 témoignages et imitations de plus qu 'en 1901). Les éditions héraclitéennes
séparées ont toutefois une Introduction intéressante (agrandie dans la deuxième) et des notes
plus fournies (et non nécessairement identiques dans les deux éditions).
134 B. Snell, Heraklit. Fragmente, griechisch und deutsch, München 1926 , 40 p.; 2e éd.
améliorée, 1940, 54 p. (nombreuses rééditions / réimpressionssans changements). Texte criti
606 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE H 64
que sans apparat et traduction originale de tous les fragments considérés comme authentiques
(ordonnance et numérotation de Diels) et de quelques textes doxographiques etbiographiques,
avec un Nachwort. Très commode à consulter en raison de son format réduit.
135 R. Walzer , Eraclito. Raccolta dei frammenti, Firenze 1939 ; réimpr.Hildesheim , 1964,
VIII + 157 p . Espèce de croisement des éditions de Diels et de Bywater. Tous les textes A et B
du premier (sauf B 126A- B 128 et B 130 -B 139) sont reproduits et traduits avec, au -dessous,
bref apparat, notes, contextes des citateurs, textes parallèles et renvois bibliographiques.
Ordonnance et numérotation de Diels (mais A 22 et B 129 sont devenus respectivement B 9A
et B 127) . Demeure utile.
136 C . Mazzantini, Eraclito. I frammenti e le testimonianze. Testo e traduzione, Torino
1945, 312 p. Introduction monographique, texte critique des fragments estimés authentiques
(sans contexte ) et des témoignages, avec traduction en regard et notes en bas de page, appen
dices critico -exégétiques, notes bibliographiques, index des sources, des fragments, des noms.
Ordonnance et numérotation de Diels (mais B 129 est devenu B 127). Honnête et sérieux.
Kirk 36 . Édition commentée de près d 'une cinquantaine de fragments supposés cosmo
logiques. Les textes critiques, avec apparat et traduction , y occupent une place très modeste,
en revanche le commentaire philologique et philosophique est pléthorique . Consciencieux , très
érudit et bien informé sur la problématique et les travaux antérieurs, il est hypercritique, mé
fiant, subjectif, raisonneur et plat dans son argumentation et ses conclusions. Vu son influence
exceptionnelle,mérite d'être attentivementétudié et critiqué.
Marcovich 1 et 2. Fruit d'un prodigieux travail de collecte , sélection , critique et classement
des textes pertinents, cette édition consiste en 124 fragments (dont 3 douteux et 10 inauthen
tiques) présentés avec tous les contextes immédiats dans lesquels ils sont cités, ainsi que les
paraphrases et les réminiscences identifiables. N 'est traduit que le texte adopté du fragment.
Sont omis les témoignages sur la vie et le livre et les témoignages sur la doctrine n 'ayant de
rapport avec aucun fragment - à l'exception de DK A 1 (9 -12), A 13, A 16 , A 18 - 19, eux
mêmes érigés au rang de fragments. L 'ordonnance et la numérotation sontnouvelles, fondées
sur un classement thématique (25 groupes distribués entre trois parties : doctrine du logos,
doctrine du feu, éthique-politique et divers). Le commentaire philologique et exégétique est
sommaire , peu original et plutôt dogmatique et tributaire du mainstream Reinhardt-Kirk
Guthrie. Cf. compte rendu de 1 dans 137 Mypabbel, VDI 1970, n° 4/114 , p. 162- 171.
Mondolfo-Tarán 3. Fait pendantà Marcovich 2 et ne contient que lestémoignages et imita
tions : les textes A 1 à A 23 de DK (avec de nombreux compléments) et un chapitre refondu
d'imitations C 1 à C 16 (incorporantDK C 18 C 5), édités par Mondolfo, plus une édition
nouvelle complète des Lettres pseudohéraclitéennes,préparée par Tarán. Tous les textes sont
traduits et abondamment commentés. Une introduction longue de près de 200 p. reproduit
quatre articles de Mondolfo sur les témoignages antérieurs à Platon et ceux de Platon et
Aristote. La documentation est riche, la philologie hésitante (excepté pour les Lettres), l'exé
gèse généreuse et confiante . Cf. compte rendu dans 138 Mypabbeb, VDI 1974, n° 2/128,
p. 194 -203.
139 J. Bollack et H . Wismann, Héraclite ou la séparation , Paris 1972, 407 p . Édition très
peu canonique, réfléchie mais fort sujette à caution , des fragments sans contextes, avec intro
duction, traduction et commentaire critique, linguistique et exégétique. Numérotation et
ordonnance selon DK (mais 34 fragments astérisqués en tant qu 'inauthentiques et 8 amputés
d 'une partie de leur texte ) ; cf. compte rendu détaillé dans 140 Mouraviev , « Comprendre
Héraclite » , L 'Age de la science, 3, La philosophie et son histoire, Paris 1990, p. 184 -211.
141 Ch. H .Kahn, The art and thought of Heraclitus, Cambridge 1979, XIV + 354 p. Édi
tion critique et traduction avec commentaire philosophique détaillé des seuls fragments, sans
les contextes, disposés dans un ordre nouveau reproduisant l'ordre supposé de l'original.
Numérotation nouvelle des 125 fragments considérés comme authentiques (10 autres frag
ments douteux ou inauthentiques figurent en anglais dans un appendice). Texte critique selon
Marcovich 1 = 2, avec écarts occasionnels par rapport à lui et à DK signalés dans un apparat
succinct. L 'intérêt principalde cette édition est dans les deux caractéristiques essentielles de
H 64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE 607
son commentaire : (1) la grande importance prêtée dans le titre du livre et dans un chapitre
spécial, contrastant malheureusementavec le peu de place qui luiest réservé dansle commen
taire proprement dit, à la forme littéraire condensée et intentionnellement ambiguë du livre
d'Héraclite , et (2) le traditionnalismemodéré etgénéralement justifié des interprétations phi
losophiques .
142 C . Diano et G . Serra , Eraclito . I frammenti e le testimonianze, (Milano ) 1980, XX +
214 p . (Euvre posthume inachevée du premier des deux auteurs ,mort en 1974, – le second a
complété le commentaire, rédigé l'apparat critique et dressé les tables de concordance et
l'index des mots -, c 'est une édition critique avec traduction de 126 fragments considérés
comme authentiques (sans contextes) et une traduction (sans texte grec) de 61 témoignages
bio- et doxographiques (dont 16 absents dans DK ). L 'ordre et la numérotation des textes
(fragments et témoignages) sont nouveaux et la disposition des fragments se rapproche fort
d'une reconstruction ,malheureusement inexplicite et non argumentée, du livre. Le commen
taire de Diano (textes 1 à 14 ) etde Serra présente un intérêt philologique et exégétique certain .
143 G . Colli, La sapienza greca , t. III , Eraclito , Milano 1980 , 216 p. Euvre posthume in
achevée, elle aussi, cette édition reproduit pratiquement, grâce aux soins de D . Del Corno ,
l'état du travail au moment où il fut interrompu par la mort de l'auteur, survenue en 1979. Elle
se compose de : 121 fragments textuels (parfois avec contexte minimal) numérotés A 1 -A 121
dans l'ordre nouveau (en fait, un mélange savant) où Colli les avait disposés, 18 témoignages
doxographiques les plus anciens numérotés A ' 122-A ' 139, dans l'ordre non -définitif où ils
étaient disposés à sa mort, et de 8 textes numérotés BI- B 8 présentés comme postérieurs ou
de tradition incertaine, dans un ordre définitif. Chaque texte est traduit et doté d 'un apparat
avec renvois à des textes parallèles, variantes manuscrites les plus importantes et nomsdes
auteurs des amendements acceptés, et d 'une bibliographie. Le commentaire se compose des
ébauches laissées par Colli et d 'extraits pertinents de ses écrits antérieurs.Malheureusement,
ce travail est philologiquement faible et subjectif, comporte des erreursmatérielles et se fonde
sur une bibliographie très insuffisante. Il n ' en présente pasmoins, vu la personnalité de l'au
teur et à condition d 'en vérifier les données de base, un intérêt incontestable en tant que source
d' idées et d 'approches originales.
144 M . Conche, Héraclite . Fragments, Paris 1986 , 496 p . Édition critique commentée de
149 fragments sans contextes dont 136 considérés comme authentiques, numérotés de 1 à 136
et disposés dans « l'ordre même de la recherche» . Commentaire philologique aléatoire, com
mentaire philosophique intéressant, mais souvent hypothéqué par les insuffisances de la philo
logie. Pour un compte rendu détaillé, cf. 140, p. 212-232.
Mouraviev 16 est un projet ambitieux et de longue haleine appelé à combler les lacunes
dont il a été question supra, mais dont les deux volumes parus (17 , 18 ) ne donnent encore
qu'une idée très incomplète.
III.LA DOCTRINE ?
1. La crise actuelle des études héraclitéennes. Au début de ce siècle, 145 O .
Spengler, Heraklit. Eine Studie über den energetischen Grundgedanken seiner
Philosophie , Halle 1904 , réimpr. dans 146 Id ., Reden und Aufsätzen, München
1961, p. 2-4, déplorait que les interprétations antérieures erronées d'Héraclite ,au
nombre de neuf, eussent quasiment épuisé toutes les possibilités et qu 'il n 'en
restât plus qu 'une: la bonne, qu 'il allait justement énoncer. Au milieu de ce
siècle , dans son Prólogo à la traduction espagnole de cette thèse, 147 Id ., Herá
clito, Buenos Aires 1947, p . 13 -84 , R .Mondolfo ne put s'empêcher de réfuter
cette opinion , en résumant onze interprétations plus récentes que celle de Spen
gler. Et cette prolifération d'interprétations différentes, souvent mutuellement
irréductibles et inconciliables, s'est tant et si bien poursuivie jusqu 'à nos jours
que serait bien téméraire celui qui voudrait, aujourd 'hui, en dresser un inventaire
608 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE H 64
tant soit peu complet. Chose plus grave, les divergences, loin de diminuer, se
multiplient, s'approfondissent et portent non seulement sur la doctrine propre
ment dite ,mais aussi et toujours davantage sur le texte , sur des questions de
philologie telles que l'existence et la philosophicité du livre, l'existence d'un
texte continu et d'un système cohérent, l'authenticité de nombreux fragments,
leur degré de littéralité, leur leçon correcte , leur structure syntaxique, la signifi
cation des mots, etc., si bien qu 'il n 'existe actuellement pratiquement aucun
fragment, aucun témoignage, aucun point de doctrine sur lequel il y ait un
consensus réel, dont la leçon , le sens et la portée ne fassent pas problème et
soient solidement établis. Si, au XIXe siècle , l'objet des débats était le sens philo
sophique à prêter à un corpus de textes relativement stable et fixe, aujourd 'hui ils
portent avant tout sur la composition et le contenu matériel de ce corpus, qui
deviennentde plus en plus tributaires du « sens» qu 'on souhaite y trouver.
Bref, il est grand temps de dresser un constat d'échec : 190 années après
Schleiermacher,malgré des acquis indubitables,les études héraclitéennes en sont
toujours au stade des tâtonnements , des piétinements, du guesswork . D 'abord
purement exégétique, celui-ci a peu à peu gagné les fondements philologiques de
l'interprétation, si bien qu 'on ne sait même plus ce qu'au juste on interprète.
Tout cela ne peut signifier qu'une chose, que l'« héraclitologie » n 'a toujours pas
débouché sur une méthode tant soit peu adaptée à ce qui fait l'originalité des
vestiges de la pensée d'Héraclite et, faute d'une telle méthode adéquate à son
objet, elle en arrive parfois à enfreindre les règles de toute philologie .
Outre deux articles que nous avons nous-même consacrés à ce sujet (148 Mouraviev,
« Comment interpréter Héraclite : vers une méthodologie scientifique des études héracli
téennes » , dans Boudouris (édit.) 52 , p . 270 -279, et Id . 140 , passim ) nous ne pouvions, avani
1998 , n 'en signaler qu 'un seul autre : 149 T .M . Robinson, « Methodology in the reading of
Heraclitus » , dans Boudouris (édit .) 52, p . 344 - 352 . La parution toute récente de la volumi
neuse monographie de 150 G . L . J. Schönbeck , Sunbowl or symbol : Models for the interpre
tation of Heraclitus ' sun notion , Amsterdam 1998 , XLVIII & 436 p ., où le problème du soleil
d'Héraclite sert demotif à une vaste enquête épistémologique etméthodologique sur les multi
ples procédures cognitives et domaines du savoir (et de l'ignorance)moderne auxquels l'histo
rien de la philosophie archaïque antique devrait faire – mais ne fait pas – appel pour atteindre
son but, rétablit quelque peu l'équilibre et suggérera inconstablement des approches nouvelles
prometteuses aux chercheurs de demain , mais les formidables exigences qu 'elle formule vis -à
vis de cette recherche et les conclusions extrêment pessimistes auxquelles elle aboutit malgré
elle s'agissant de la faisabilité desmodèles proposés, risquentde décourager plus d'une voca
tion « héraclitologique » .
Aussi brûlant qu'il soit, il ne saurait être question de traiter , dans un article de
dictionnaire , un problème aussi difficile et encore si peu élaboré.Mais nous
croyons utile de définir ici quelques axes importants de la recherche qui sont
encore soit négligés, soit presque totalement inexplorés. Ce sont, primo, la mise
au point graduelle d 'une méthode spécialement adaptée au cas Héraclite ;
secundo, l'édition et l' étude systématique de la tradition ; tertio, l'extraction de
toute l' information pertinente que cette tradition renferme; quarto , l'analyse et
la synthèse de la forme poétique des fragments du livre et, quinto, la reconstruc
tion du livre et de la doctrine .
H 64 HÉRACLITE D'ÉPHÈSE 609
2. Principaux axes de la recherche. Méthode et déontologie.
Abstraction faite de règles déontologiques universelles absolument évidentes,
mais nonobstant à tout bout de champ enfreintes (comme: a . la nécessité de
connaître non seulement la littérature germanophone ou anglophone des trente
dernières années,mais encore toute la littérature moderne et ancienne pertinente ,
quelle qu 'en soit la langue ; b. l'obligation de juger les résultats d'autrui, et les
siens, à la qualité des procédures suivies et des arguments avancés, et non en
fonction du prestige de leur auteur ou de leur convenance subjective ; c. le devoir
d 'éviter les formules floues du genre likely-unlikely et d'argumenter explicite
ment et par le menu toute solution adoptée, défendue, etc .), les études héracli
téennes doivent se plier à toute une série d'exigences découlant de la nature
même de leur objet.
Cet objet se compose de textes, ce qui implique une certaine déontologie philologique. Ces
textes relèvent de la philosophie , d'où s'ensuit le besoin d 'une déontologie et d 'une méthodo
logie herméneutiques. La philosophie en question est on ne peut plus archaïque, fait qui ne
peutmanquer de susciter des interrogations quant aux formes de sa philosophicité et se réper
cuter sur le choix des moyens pour la dégager. Cette philosophie s'exprime de surcroît dans
une langue morte, constatation qui nous ramène dans la sphère philologique et pose le pro
blème de la récupération du sens linguistique immédiat, sans lequel il serait vain de vouloir
comprendre le sens profond. Enfin , elle nous est parvenue dans un état fragmentaire, lacuneux,
parfois déformé ou corrompu , toujours privé de contexte, et cela nous place devant la néces
sité de débarrasser d 'abord les débris archéologiques rescapés de la gangue qui les recouvre ,
puis de reconstituer l' ouvrage à partir de ces débris . Il suffit de garder cette situation en tête
pour comprendre qu 'ignorer toutes ces distinctions et utiliser en vrac une partie (aussi impor
tante soit-elle) des sources à l' état vierge, avec ce qu 'elles semblent vouloir dire ( et ce à un
niveau sémantique indéterminé) dans le contexte du citateur, ou au contraire abstraction faite
de ce contexte, et reconstruire la doctrine du philosophe à partir de là , en s'aidant de son
« bon sens» , de son « bon goût» , de son Sprachgefühl (concept vide de sens s'agissant d'une
langue morte) et de l'autorité de ses prédécesseurs (qui se servaient des mêmes « critères » ),
relève de la plus pure utopie .
Il est donc indispensable d' élaborer une méthode, c'est-à-dire d’établir
d'abord, et de proclamer, les rapports de valeur, d 'importance et de préséance
méthodologique et logique qui conditionnent et justifient toutes les procédures
pertinentes afin de pouvoir, ensuite , s'y conformer légitimement et en tirer
argument en faveur des résultats obtenus. Les paragraphes suivants ne font que
décrire certaines pratiques quidécoulentde la méthode dont nous nous sommes
nous-même doté.
Cette méthode est fondamentalement philologique, elle accorde la priorité à la lettre du
texte par rapport à son contenu, et ceci de propos délibéré : mieux la lettre sera établie et plus
se rétrécira la liberté d'interprétation du contenu , moins l'on sera tenté par les mirages post
modernistes et destructivistes. Ce n 'est qu 'ensuite qu 'entreront en jeu les critères des contenus
locaux (les divers thèmes), de la cohérence interne (la structure du livre ), du contenu global (le
« système» ), du contexte noologique (mythologique, scientifique, philosophique) antérieur et
contemporain , etc . Prendre pour point de départ un thèmeparticulier (e.g. le soleil d'Héraclite )
en le détachant du reste, et vouloir l'analyser, en renonçant consciemment à tout établissement
préalable du matériel textuel, comme le fait Schönbeck 150 passim , revient, nous semble -t-il,
à élargir inutilement et au -delà de toute mesure l' éventail des approches et des interprétations
possibles, à engendrer d 'innombrables interférences et réverbérations fortuites et non avérées
quine font qu 'accroître le bruit,et finalement à noyer dans ce bruit le contenu original recher
ché. Plutôt que et avant de multiplier les approches analytiques etles distinctions sémantiques
610 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE H64
subtiles et de faire appel aux lumières de diverses autres sciences modernes, il convient
d 'écarter ou de valider d 'abord tout ce qui peut l'être philologiquement au niveau de l' écriture
(graphie, « orthographie » , paléographie , codicologie ), de la transmission et de la critique du
texte (élimination des erreurs de copiste, comblement des lacunes, analyse du contexte du cita
teur ), de la langue (identification des critères de littéralité , des structures linguistiques et
supralinguistiques, établissement du sens superficiel) , de la tradition prophorique et doxogra
phique (comparaison des variantes d 'un même fragment, évolution d 'une information sur la
doctrine), etc . Ce qui suit ne concerne que ces priorités-là.
Étude systématique de la tradition. Avant d'utiliser les sour
ces, il faut, d'abord, les avoir toutes réunies, et ensuite les avoir toutes comprises
(et, si nécessaire et possible, établies) en tant que sources. Autrement dit, il faut
savoir tout ce qui a été dit d'Héraclite , tout ce qu 'on lui a prêté comme citations
et opinions, sans préjuger aucunement de la valeur historique et de la signifi
cation originelle de ces informations. C 'est le stade de la critique des sources et
des citations. Il suppose la préparation d'une édition complète et un travail
d'interprétation systématique de la tradition héraclitéenne en tant que tradition .
Tel est l'objectif de la deuxième partie, Traditio Heraclitea, de Mouraviev 16, dont un
premier fascicule (cf. id . 18 ) est déjà paru et qui contiendra , outre une édition de tous les
textesde la tradition, un commentaire philologique et « pégologique » .
Recension des informations pertinentes. Une fois les sour
ces réunies et interprétées pour elles-mêmes, il faut en extraire tout le métal pré
cieux. Celui-ci se subdivise assez naturellement en trois catégories : les témoi
gnages historiques sur la vie et le livre d'Héraclite ; les opinions qui lui sont
prêtées ; les citations de son livre. Si ces dernières, commenous l'avons vu , ont
eu droit à d ' innombrables éditions, les secondes et les premières ont été fort
négligées.
Hormis la section A de Diels 132- 133 = Diels-Kranz 4 (et ses multiples reproductions), il
n ' existe que Mondolfo - Tarán 3 et, pour les témoignages sur la vie et le livre , Mouraviev 9
(près de 150 items contre 12 dans DK et 13 dansMondolfo) avec les commentaires de 10 - 12 .
La troisième partie de Id . 16 , Recensio Heraclitea, s'ouvrira par une nouvelle édition augmen
tée de 9 -12,Memoria, qui sera suivie par une édition systématique des témoignages sur la
doctrine, les Placita .
Mais même les éditions existantes des fragments, malgré leur nombre, ne
répondent pas à des critères méthodologiques sains. En fait, elles sont souvent,
chacune, la combinaison contre nature d 'une édition de certaines sources (les
citations prises dans leurs contextes), d'une édition des fragments que ces
sources renferment (les citations abstraction faite de leurs contextes) et d'une
exégèse des contenus doctrinaux des fragments replacés en quelque sorte dans
leur contexte originel supposé (l'ordonnance, les traductions, le commentaire).
C 'est ainsi que le texte n° la de Marcovich, 1 ou 2 , est à la fois une édition de Sextus, Adu.
math. VII 132 (contexte), du fr. B 1 (la citation y est « corrigée » compte tenu de trois autres
sources : Hippolyte, Clément, Aristote ) et de l' interprétation de ce dernier par Marcovich
(traduction et commentaire).
Une véritable édition des fragments ne peut résulter que de la confrontation
(après établissement, dans l'édition des sources, de leur lettre et de leur sens pour
les citateurs) (1) des diverses versions d'un même fragment, en vue d'en établir
le texte le meilleur, et (2) de tous les fragments entre eux , en vue d 'en établir ,
H 64 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE 611
dans le commentaire, les paramètres linguistiques et stylistiques. Elle doit éviter
deux choses : faire double emploi avec l'édition des sources (ce qui n 'exclut pas
des retours à celles- ci dans le commentaire) et prétendre à un contenu philoso
phique définitif. C 'est le stade de la critique externe et interne des fragments en
tant que fragments du livre perdu.
L'édition commentée des fragments constituera le troisième élément, Fragmenta Heracliti,
de la troisième partie deMouraviev 16 et sera peut-être suivie d 'un quatrième élément, Fontes
Heracliti, réunissant les textes, d'Homère à Simonide, dont Héraclite a pu lui-même s'inspirer.
3. La poétique des fragments. L 'établissementdes paramètres linguistiques
et stylistiques des fragments (en réalité , il s'agit ni plus nimoins de la poétique
héraclitéenne en tant que principalmoyen d 'expression de sa doctrine) est une
tâche d'autant plus brûlante qu 'elle a été complètement négligée par lemain
stream des études héraclitéennes avant Kahn 141, et cela malgré son rôle abso
lument crucialpour les recherches futures, et demeure toujours une terra inco
gnita pour la plupart des chercheurs. On trouvera donc ci-dessous, d'abord une
bibliographie assez complète des travaux existants (mais ignorés par la grande
majorité des modernes) où ce sujet est abordé, et ensuite, une brève caracté
ristique du phénomène lui-même.
151 E . Warmbier, Studia Heraclitea, Thèse, Berolini 1891, passim (figures de rhétorique);
152 E . Norden , Die antike Kunstprosa. Vom VI. Jahrhundert v. Chr. bis in die Zeit der Renais
sance, t. I, Leipzig 1898 ; 5e éd . Hildesheim 1958, p. 18 -44 (antithèses, jeux de mots, mètre) ;
153 W . A . Heidel, « On certain fragments of the Presocratics » , PAAAS 48 , 1913, p . 708 -713
(mètre); 154 A . W . De Groot, Der antike Prosarhythmus, t. I, Groningen -Haag 1921), p. 29
30 (mètre ) ; 155 B . Snell, « Die Sprache Heraklits » , Hermes61, 1926 , p . 353- 381 = 156 Id .,
Gesammelte Schriften, Göttingen 1966 , p. 129-151 (nature poétique) ; 157 J. Haberle , Unter
suchungen über den ionischen Prosastil, Inaug.-Dissert., München 1938 , passim (poétismes,
néologismes, images, parataxe, expressions polaires, antithèses); 158 G . Rudberg, « Heraklei
tos und Gorgias » , dans Serta Eitremiana. Opuscula philologica S. Eitrem septuagenario
oblata , Osloae 1942, p . 128 -140 (figures gorgiennes); 159 J.D . Denniston , Greek prose style,
Oxford 1952 ; 1965, p . 2 - 3, 74 , 103, 127, 136 - 137 (allitérations, jeux de mots, répétition ,
chiasme, asyndète, consonance); 160 U . Hölscher, « Der Logos bei Heraklit », dans Varia
Variorum . Festgabe für Karl Reinhardt, Münster-Köln 1952, p . 72 -75 Id . 61, p. 136 - 141
(paradoxe, énigme, comparaison) ; 161 C . Schick, « Studi sui primordi della prosa greca »,
ArchGlottltal40, 1955 , p . 111-121 (antithèses, archaïsmes, déverbatifs, phrases nominales,
images, ordre des mots, participes, répétitions, consonances, composition en anneau, etc.);
162 K . Deichgräber, « Rhythmische Elemente im Logos des Heraklit » , AAWMIGS 1962,
p. 477-552 = Rhythmische Elemente im Logos des Heraklit, Wiesbaden 1963, 76 p. (mètre);
163 G . S . Kirk , « Heraclitus's contribution to the development of a language for philosophy » ,
ABG 9, 1964, p. 73-77 ; 164 E . A . Havelock, « Pre- literacy and the Pre-Socratics », BICS 13,
1966 , p . 54- 58 (tradition orale et novation écrite ) ; 165 S . Lilja , On the style of the earliest
Greek prose, coll. « Commentationes Humanarum Litterarum » 41/3, Helsinki 1968, passim
(poétismes,mètre, alliterations, répétitions, paronomases, chiasmes, hypotaxe, etc.) ; Hölscher
62, p . 144 - 149 (comparaisons et style gnomique) ; 166 M . Schavernoch , Studien zur Sprache
Heraklits. Thèse, Wien 1968 , 75 p. (antithèses, expressions polaires, participes, ordre des
mots , chiasmes, parallélismes, compositions en anneau, paronomases) ; 167 G . Romeyer
Dherbey, « Le discours et le contraire. Notes sur le débat entre Aristote et Héraclite au livrer
de la Métaphysique » , EPh 1970, p . 475 -497 (rapport entre forme linguistique et doctrine) ;
Bollack -Wismann 139 (cf. index Formes de langue ) ; 168 Mypabbel, «Cuina6OTOHNYHOCT
PUTMUYECKoń mposh ſepakjuta 30ecckoro [Le syllabotonisme de la prose rythmique
d'Héraclite d 'Ephèse ) » , AHMU4Hocmo u coopeMeHHOCMb. K 80 - nemulo Dedopa
AnekcaHôpobura ſlemposckozo ,Mockba 1972, p. 236 -251; Kahn 141, p. 87 -95 (densité lin
612 HÉRACLITE D 'ÉPHÈSE Η 64
guistique, résonance) et cf. index ; 169 E . Tagliaferro, « Tipologia del paragone eracliteo »
dans Rossetti (édit.) 49, t. I, p . 169- 180 ; 170 E . A . Havelock, « The linguistic task of the Pre
socratics », dans 171 K . Robb (édit.), Language and thought in early Greek philosophy, La
Salle 1983, p. 33-36 et passim ; 172 K . Robb, « Preliterate age and the linguistic art of Heracli
tus » , dans Id . ( édit.) 171, p. 153 -206 ; 173 Mouraviev, « Crux eruditorum : le dossier du fr. B
26 DK d 'Héraclite » , dans La philosophie grecque et sa portée culturelle et historique,
Moscou 1985 , p. 85 -89, 99- 114 ; 174 MypaBBeB, « CκpHTav rapMOHMν . ΠοπΓοTOBYTenbHKe
MaTepaΠΗ κ οπMcaΗΜΟ ΠΟ3ΤΜκM ΓepaκπMTa Ha ypoBHe φοHeM [ L ' harmonie cachée. Mate
riaux préparatoires pour la description de la poétique d 'Héraclite au niveau des phonèmes » ,
dans Παλeoβαλκακucmuκα μ ακmu Hormo, MocKBa 1989, p. 145-164 ; 175 Mouraviev, « Le
dossier du fr. B 21 Diels -Kranz d'Héraclite d'Éphèse » , REG 104, 1991, p. 70-75, 80 -82 ;
176 V. Tejera, « Listening to Heraclitus », Monist 74, 1991, p. 491-516; 177 Ε . Ε. Pels,
Vormen van opspraak – taal- en denkstructuren bij Herakleitos (thèse ), Amsterdam 1992, 280
p.; 178 A . Chitwood, « Heraclitus αινικτής. Ηeraclitus and the riddle », SCO 43, 1993, p. 49
61 (philologie nulle ) ; 179 A . Iannucci, « La obscuritas della prosa eraclitea » , Lexis 12 , 1994 ,
p . 47-66 ; 180 R . Dilcher, Studies in Heraclitus, Hildesheim 1995, p. 99- 139 ; 181 C .J.
Classen, « Beobachtungen zur Sprache Heraclits» , Philologus 140, 1996 , p. 191-200 . Cette
liste est loin d 'être exhaustive,mais contient le plus important de ce que nous avons trouvé sur
le sujet.
Malgré le nombre impressionnant de ces travaux et la reconnaissance crois
sante, ces quinze dernières années, du rôle que la poétique héraclitéenne est
appelée à jouer dans l'exégèse de sa doctrine, son étude n 'en est qu 'à ses pre
miers balbutiements. Pour le démontrer, nous allons citer ci-dessous quelques
exemples (un par figure ), la plupart inédits avant nous, de certaines des nom
breuses configurations poético -rhétoriques dont son texte est saturé.Nous sui
vrons grosso modo l'ordre phonétique → morphologie → sémantique. Faute de
place, nous ne précisons pas les effets des structures dégagées sur le contenu
final total des textes concernés,mais tenons à en souligner la réalité et l'impor
tance herméneutique.
Tout d'abord, au niveau prosodique, les fragments textuels héraclitéens se distin
guent par la cohabitation en eux de deux rythmes, l'un syllabotonique (ex . 1 ) , s 'étendant à la
totalité du texte , l'autre quantitatif (métrique) se manifestant sous forme d 'incrustations dac
tylo -spondaïques (ex. 2 ) ou jambo -trochaïques occasionnelles (ex . 3 ) – nous en avons dénom
bré près de 70 .
Ex. 1 (B 1), rythmesyllabotonique etcôlométrie:
του δε λόγου τούδ(ε) εόντος | αιεί Ο ο ΧοOoXolo X
αξύνετοι γίνονται άνθρωποι οΧοοΧοοΧοο
και πρόσθεν ή ακούσαι ο ΧοΟο Χο
κ( αι) ακούσαντες το πρώτον οΧο Ο ο Χο
γινομένων γάρ πάντων ο ο ΧοοΧο
κατά τον λόγον τόνδε ο Ο ο ΧοΧο
απείροισιν εοίκασι πειρώμενοι ο ΧοοοΧοο ο Χοο
κ αι) επέων και έργων τοιούτων οΧοοΧοοΧο
όχοίων εγώ διηγεύμαι ο ΧοοΧοοΧο
διαιρέων κατά φύσιν οοΧοοΧο
και φράζων όπως έχει ο Χο Ο ο Χο
τους δ(ε) άλλους ανθρώπους λανθάνει οΧοοΧοοΧο
οχόσ( α) εγερθέντες ποιούσιν οΧοο Χο ο Χο
όκωσπερ Χοο
Η 64 HÉRACLITE D'ÉPHÈSE 613
15 όχόσα εύδοντες ο ΧοΧοο
16 επιλανθάνονται ο Ο ο Χοο
Cola isosyllabiques: 1 = 2 (10 syllabes), 8 = 9 = 12 = 13 = [14 + 15] (9 syllabes), 3 = 4 =
5 = 6 = 10 = 11 (7 syllabes), 15 = 16 ( 6 syllabes).
Cola isorythmiques: 3 = 4 ; 5 = 10 ; 6 = 11 ; 8 = 9 = 12 = 13 ; 15 = 16.
Syncola isosyllabiques: 3 + 4 = 5 + 6 = 10 + 11 (14 syllabes), 8 + 9 = 12 + 13 (18 syllabes).
Syncôla isorythmiques: 5 + 6 = 10 + 11.
Ex.2 (B 26 )mètre dactylo -spondaïque:
άνθρωπος εν ευφροσύνηι φάος άπτεται έαυτώι (- 1- cc 1 - ccI- CI – cc |- -)
Ex. 3 (B 91, Plat. Crat.402A)mètre iambique:
δις ες τον αυτόν ποταμόν ουκ αν έμβαίης ( c - c - | - cc c - Tc - c -)
Ensuite , au niveau phonique, les fragments héraclitéens affichentnon seulement des
allitérations (ex. 4 ) – on en a répertorié dans une cinquantaine de fragments - et des homéoté
leutes (ex. 5 ) - leur nombre n 'est que de peu inférieur à celuides alliterations -,mais aussi de
fréquentes consonances phoniques mixtes et complexes (ex. 6 et 7), voire des structures pho
niques aussi recherchées que les consonances palindromiques (ex. 8 ) dont nous avons identi
fié près d 'une dizaine.
Ex.4 (B 21)système allitératif :
θάνατός εστιν οκόσα εγερθέντες ορέομεν (1) h- e- h- e- h
όχόσα δε εύδοντες ύπνος h - he- h
Ex. 5 (B 22) systèmede rimes internes:
χρυσόν γάρ οι διζήμενοι γην πολλήν ορύσσουσι και ευρίσκουσιν ολίγον
-on 1 -oj-oj 1-ên -ên 1 -usi -usi-| -on
Ex.6 (B 1) consonancemixte :
κατά φύσιν και φράζων ka- ph -n I ka - ph- n
Ex. 7 (B 23) consonance complexe :
δίκης άνομοι ούκ άν έδησαν
(legon demontrée dans 182 Mouraviev, Hermes 101, 1973, p. 114-117, cf.Ιd. 140, p. 204 -205,
225).
Ex. 8 (B 9) consonance palindromique:
όνοι σύρματ’ αν έλoιντο μάλλον ή χρυσόν
Dans la seconde partie du fragment la situation est inverse: chiasme lexical et parallélisme
grammatical :
όκωσπερ χρυσού χρήματα καιχρημάτωνχρυσός
SERGE MOURAVIEV .
618 HÉRACLITE (PSEUDO -) H 64a
64a HÉRACLITE (PSEUDO -) RESuppl. X : IP ?
D 'époque incertaine, auteur (ou auteurs) de sept Lettres faussement attribuées
à Héraclite etde deux autres attribuées au roi Darius, inspirées pour l'essentiel
de ce qu 'on appelle la « philosophie populaire cynico -stoïcienne» .
Éditions et traductions. 1 M . Musurus, Epistolae diversorum philosopho
rum , oratorum , rhetorum sex et viginti, Venetiis 1499 (editio princeps ; il y man
que la lettre IX ) ; 2 E . Lubinus, Epistolae Hippocratis, Democriti, Heracliti,
Diogenis nunc primum editae Graece simul ac Latine, Heidelbergae 1601 ; 3 A .
Westermann, Heracliti Epistolae quae feruntur, denuo recensitas edidit A . W .,
Lipsiae 1856 -1857 ; 4 J. Bernays, Die heraklitischen Briefe . Ein Beitrag zur phi
losophischen und religionsgeschichtlichen Literatur, hrsg. und übers., Berlin
1869; 5 R . Hercher, « Heracliti Ephesii Epistolae », dans Epistolographi Graeci,
(graece et latine) recensuit, recognovit, adnotatione critica et indicibus instruxit
R . H ., Parisiis 1873, p . 280-288 (cf. p . LXI-LXII) ; 6 I. Bywater, Heracliti Ephesii
Reliquiae, Oxonii 1877 (texte grec de Bernays 4 légèrement corrigé) ; 7 E .
Bordero, Eraclito , Torino 1910 (trad . ital.); 8 V . Martin , « Un recueil de diatribes
cyniques. Pap. Genev. inv. 271» ,MH 16 , 1959, p. 77-115 , notamment p. 80 -83,
96 -106 (lettre VII et sa « continuation » ); 9 A .J. Cappelletti, Epístolas Pseudo
Heraclíteas, Introducción , traducción y notas, Rosario 1960 ; 10 A .- M . Denis ,
Fragmenta pseudoepigraphorum quae supersunt Graeca una cum historicorum
et auctorum Judaeorum Hellenistarum fragmentis, dans A .- M . Denis et M . de
Jonge, Pseudoepigrapha Veteris Testamenti Graece, t. III, Leiden 1970, p. 157
160 ; 11 L . Tarán , Lettere Pseudo-Eraclitee, dans R .Mondolfo et L . Tarán , Era
clito . Testimonianze e imitazioni, Introduzione, traduzione e commento, coll.
« Biblioteca di studi superiori» 59, Firenze 1972, p. 279-359, notamment p. 305
359 ; 12 H . W . Attridge, First- century cynicism in the epistles of Heraclitus,
Introduction, Greek text and translation, coll. « Harvard Theological Studies »
29, Missoula (Mont.) 1976 ; 13 R . Kassel, « Der siebente pseudoheraklitische
Brief auf Pergament und Papyrus» , ZPE 14, 1974, p . 128 -132 ; 14 J. Diggle,
« Pseudo-Heraclitus. Pap. Genev. inv. 271, XIV 40 , 2 » , ZPE 20 , 1976, p . 299
( lettre VII) ; 15 A . J.Malherbe, The Cynic Epistles. A study edition, coll. « So
ciety of Biblical Literature. Sources for Biblical Study » 12, Missoula (Mont.)
1977, p. 22 -23 (introduction ) et p. 185 -215 (texte grec et traduction anglaise par
D .R . Worley).
Sur la tradition manuscrite, voir notamment Attridge 12, p . 41-51 ; 16 M . Sicherl, « An
hang : Das Briefcorpus 12 » , dans E .Müseler, Die Kynikerbriefe, t. I : Die Überlieferung, coll.
« Studien zur Geschichte und Kultur des Altertums» N .F ., 1 . Reihe : « Monographien » 6 .
Paderborn /München /Wien /Zürich 1994 , p. 105 - 162, notamment p . 138 - 140 .
Études d 'orientation . 17 F. Susemihl, GGLA, t. II, p .600 n . 96 ; 18 0 .
Stählin , dans W . Schmid , Wilhelm von Christ's Geschichte der griechischen
Literatur, Zweiter Teil : Die nachklassische Periode der griechischen Literatur,
Erste Hälfte : Von 320 vor Christus bis 100 nach Christus, coll. « Handbuch der
Altertumswissenschaft » VII 2, 1, Sechste Auflage unter Mitwirkung von 0 .
Stählin , München 1920 , réimpr. 1959, p.624 ; 19 W . Schmid , Geschichte der
griechischen Literatur, Erster Teil : Die klassische Periode der griechischen
H 64a HÉRACLITE (PSEUDO -) 619
Literatur, Erster Band: Die griechische Literatur vor der attischen Hegemonie,
coll. « Handbuch der Altertumswissenschaft» VII 1, 1 ,München 1929, p. 755 ;
20 1. Heinemann , art. « Herakleitos (Briefe des]» , RESuppl. V , 1931, col. 228
232 ; 21 A .N .Zoubos, Bemerkungen über die pseudoheraklitischen Briefe ,Mün
chen 1954 ; 22 M . Marcovich , art. « Herakleitos » 10 , RESuppl. X , 1965, col.
246 -320 ; 23 H . Dörrie , « Herakleitos» 1, KP II, 1967, col. 1046 -1048, notam
ment col. 1048 ; 24 G . O 'Daly, art. « Heraklit. Die pseudoheraklitischen Briefe »,
RAC XIV , 1988,col. 592.
Analyse et interprétation . On connaît comme lettres du Pseudo-Héraclite
neuf écrits du corpus épistolaire grec qui nous est parvenu. En réalité, l'auteur
imaginaire des lettres I et III n 'est pas Héraclite (ca 540 -480 "), mais son contem
porain le roi perse Darius, qui s'adresse à lui dans l'une, aux habitants d'Éphèse
dans l'autre . La lettre II contient la réponse d'Héraclite à Darius ; les lettres IV ,
VII, VIII et IX sont adressées par le philosophe à son ami Hermodore ; enfin , les
lettres V et VI sont adressées par lui à un certain Amphidamas. Pour l'analyse et
l'interprétation de ces lettres, nous suivons notamment Tarán 11, p . 285 -302.
Dans la lettre I, Darius propose à Héraclite de devenir son hôte à la cour afin
de lui expliquer de vive voix son livre (llepi qúoews, Sur la nature), dont cer
taines parties lui semblent très difficiles à comprendre,même pour les connais
seurs de la philosophie et de la littérature grecques. Par ailleurs, il allègue que les
Grecs, tout en étant d 'ordinaire incapables de distinguer ceux qui, parmi eux,
sont sages,méprisent les enseignements touchant la droite conduite et le droit
régimede vie que ces hommes enseignent, tandis que, chez lui, Héraclite jouira
de tous les privilèges et pourra mener une vie conforme à ses exigences.
Tarán 11, p. 286 , trouve dans cette lettre des échos de la doctrine d'Héraclite :
une allusion à DK 22 B 30, ainsi qu 'une référence à la doctrine du flux universel
(cf. p . 308). Il y trouve aussi des échos de la tradition biographique concernant
Héraclite : le titre de son livre , l'allusion traditionnelle à la difficulté et à l'obscu
rité du philosophe (interprétées comme unemarque de scepticisme), ainsi qu 'une
allusion possible à son style oraculaire ou prophétique (interprété cependant en
un sens cynico -stoïcien ; cf. p. 309 sq.).
La lettre II, très brève, contient la réponse d 'Héraclite. Elle est écrite dans un
style qui veut être poétique, et entièrement en dialecte ionien , tandis que les
autres sont plutôt atticisantes. Héraclite refuse l'invitation de Darius, en allé
guant que les hommes, à cause de leur ignorance, sont à la recherche de la
richesse, sont en proie au désir insatiable et à la renommée, et s'attirent l'envie
de tous (topos bien connu des vie et ve siècles av. J.-C .). Lui, en revanche, il se
contente de peu, conformément à sa pensée.
Dans la lettre III,Darius s'adresse aux Éphésiens, les réprimandant pouravoir
banni son ami Hermodore (PH 90), qui était le meilleur homme non seulement
d 'Éphèse, mais de toute l' Ionie, capable de rendre vertueux les hommes par ses
discours et par ses lois . Il les menace de lancer contre eux une armée, s 'ils ne
l'admettent pas à nouveau dans sa patrie et ne lui restituent pas son patrimoine. Il
leur rappelle les avantages qu 'il leur a accordés en raison de son amitié pour leur
620 HÉRACLITE (PSEUDO -) H64a
concitoyen . Il s'offre enfin comme arbitre pour déterminer le caractère juste ou
injuste de leurs accusations contre Hermodore.
Héraclite n 'est nullement mentionné dans cette lettre, mais le bannissement
d 'Hermodore est un motif qui revientdans les lettres VII, VIII et IX attribuées à
ce philosophe (cf. aussi la lettre IV ). Par ailleurs, selon Tarán 11, p. 312 n . aux li.
3 -5 , la terminologie utilisée au début de la lettre indiquerait que l'auteur connais
sait les paroles par lesquellesHéraclite attaqua les habitants d 'Éphèse pour avoir
chassé son amiHermodore (cf.DK 22 B 121).
Dans la lettre IV , l'une des plus développées,Héraclite commence par exhor
ter Hermodore à ne pas se lamenter sur ses malheurs (sans doute une allusion à
son bannissement), car lui, qui se trouve dans sa patrie, connaît également des
problèmes. En effet, il lui raconte comment Euthyclès l'a accusé injustement
d ' impiété, au motif qu 'il aurait inscrit son nom sur un autel qu ' il a fait
construire, alors qu 'en fait, il n' y a pas fait inscrire le nom « Héraclite » mais
« Héraclès» . Qui plus est, le fait que les habitants d'Éphèse l'accusentde vouloir
devenir un dieu parce qu 'il possède un autel révèle la corruption de leurs
croyances, puisqu'ils identifient la divinité avec des pierres (autels et temples),
quand la vraie divinité n 'est pas faite par les mains humaines et n 'habite pas
dans les temples des hommes ; au contraire l'univers entier est son temple. Enfin ,
il affirme que la prétention de devenir un dieu n 'est pas signe d'impiété, car
Héraclès lui-même, tout en naissanthomme, est devenu dieu.
La lettre a été définie comme une « diatribe » contre les Éphésiens ignorants ,
qui ne savent même pas lire, et qui méconnaissent surtout la vraie divinité. Qui
plus est, elle a été décrite comme une « diatribe » contre les croyances et les
cultes dominants .
Considérant que cette lettre est animée par une tendance iconoclaste qui ne
peut s'expliquer dans le cadre d 'aucune des écoles philosophiques grecques,
Bernays 4, p. 26 sqq., veut y trouver (de même que dans les lettres VII et IX ) une
influence de la littérature biblique. Or, il trouve dans la mêmelettre IV d'autres
éléments (par exemple , la référence à la divinisation d 'Héraclès et à son mariage
avec Hébé) qui ne lui semblent pas pouvoir être l'euvre d'un auteur juif ou
chrétien , mais d'un auteur païen , qui serait aussi le responsable de l'accentmis
sur la notion de nalosía . Par conséquent, il émet l'hypothèse selon laquelle un
auteur juif (il ne trouve pas dans la lettre d 'élément spécifiquement chrétien ) a
interpolé une lettre écrite par un auteur païen , qui voulait attaquer la religion de
l'État, en usurpant le nom d 'Héraclite.
25 J. Geffcken , Zwei griechische Apologeten , coll. « Sammlung wissenschaftlicher Kom
mentare zu griechischen und römischen Schriftstellern» , Leipzig 1907, p. XXII, se montre
sceptique à propos de l'hypothèse de Bernays, laquelle a été contestée par 26 I. Heinemann ,
Poseidonios' metaphysische Schriften , Breslau 1921, t. I, p . 124. Cependant, l'influence bibli
que a été entièrement acceptée par 27 W . Bousset et H . Gressman , Die Religion des Juden
tums im späthellenistischen Zeitalter, coll. « Handbuch zum Neuen Testament» 21, Tübingen
19263, p . 30 ; et par 28 P. Riessler, Altjüdisches Schriftum ausserhalb der Bibel, Augsburg
1928 , p . 307 (cf. aussi 29 J. Schneider, art. « Brief » , RAC II, 1954, col. 564-585, notamment
col. 574 ). Elle a été développée par 30 E. Pfleiderer, Die Philosophie des Heraklit von Ephe
H 64a HÉRACLITE (PSEUDO -) 621
sus im Lichte der Mysterienidee, Berlin 1886, p. 327 -348 et 356 -365 ; 31 Id ., « Die pseudohe
raklitischen Briefe und ihr Verfasser », RHM N .F. 42, 1887, p . 153- 163 (cf. aussi 32 Id., « Zur
Identität des Verfassers von Sapientia Salomonis und pseudo -heraklitischen Briefen » , JbPTh
15, 1889, p . 319-320). D 'après lui, l'ensemble des lettres du Pseudo -Héraclite aurait été
l'euvre de l'auteur de la Sagesse de Salomon. En revanche, cet avis a été rejeté à juste titre
par 33 H . Diels, « Bericht über die deutsche Literatur der Vorsokratiker i. J. 1886 » , AGPh 1,
1887, p . 95 - 110 , notamment p. 109 - 110 . A son tour, 34 E . Norden , « Der vierte heraklitische
Brief » , dans Beiträge zur Geschichte der griechischen Philosophie , coll. JKPh Suppl. 19,
1893, p . 364 -462,notamment p . 386 -392, accepte l'hypothèse d'une influence biblique dans la
lettre IV , bien qu'il ne croie pas nécessaire de supposer un interpolateur, car les passages que
Bernays 4 considère comme purement païens peuvent, à ses yeux, être l'æuvre d 'un juif de
l'époque hellénistique ou d'un chrétien. Enfin, 35 E . Schürer,Geschichte des jüdischen Volkes
im Zeitalter Jesu Christi, Leipzig 19074, t. III, p. 624 sq., interprète l'ensemble des lettres
commelittérature juive,bien qu'il formule quelques réserves.
D 'un autre point de vue, 36 P. Wendland, « Philo und die kynisch -stoische
Diatribe », dans P. Wendland et 0 . Kern, Beiträge zur Geschichte der griechi
schen Philosophie und Religion, Berlin 1895, p. 1-75, notamment p. 39 sq.,
montre que les éléments de la lettre VII interprétés par Bernays 4, p. 72 sqq.,
comme le résultat d'une influence biblique sont plutôt des lieux communs de ce
qu ’on a appelé la « diatribe» cynico-stoïcienne. Plus tard , Stählin 18, t. II 1,
p. 624, applique également cet avis aux lettres VII et IX , où Bernays 4 croyait
voir aussi une influence biblique.
Pour la notion de « diatribe » « cynique » ( époque hellénistique) ou « cynico-stoïcienne »
(époque impériale ), notion très confusément définie comme genre littéraire par les philologues
modernes, voir la bibliographie citée dans la notice Épictète (2 E 33, section C ). Les thèmes
que l'on attribue à cette littérature sont en réalité ceux de la « philosophie populaire» (non
moins confusément définie), qui dépasse sans doute la notion de « diatribe » , si on essaie de
définir celle -ciavec plus de précision.
L 'hypothèse de Wendland-Stählin reconnaissant l'influence cynico- stoïcienne
sur le Pseudo-Héraclite a été reprise par la plupart des critiques:
Cf. 37 E . Norden, Agnostos Theos. Untersuchungen zur Formengeschichte religiöser
Rede, Leipzig/Berlin 1913, p. 389 sq. (cf. p . 31 sqq. ; Norden révise ici son avis antérieur
(cf. Id . 34 ]); Heinemann 20, col. 229-231 ; Cappelletti 9, p.8 sqq.
D 'après 38 J. Strugnell et H . Attridge, « The Epistles of Heraclitus and the Jewish pseude
pigrapha . A warning» , HTAR 64 , 1971, p . 411-413, la recension de la lettre VII découverte à
côté d'autres « diatribes cyniques » dans le papyrus publié par Martin 8 (cf. infra ) confirme
que les lettres IV et VII sont cyniques, et non pas une partie d 'un pseudépigraphe juif (cf.
Tarán 11, p. 288 n. 18 ).
Attridge 12 , p . 13 sqq., rejette l'influence juive sur les lettres IV , VII et IX , montrant que
les thèmes revendiqués pour celle-ci (par exemple , l'intolérance religieuse, le pessimisme, la
morale sexuelle rigide, l'influence des préceptes noachiques, le végétarisme) sont cyniques
autant que juifs. 39 Pascale Derron , Pseudo - Phocylide. Sentences, texte établi, traduit et com
menté, CUF, Paris 1986 , p . LXII, accepte l'hypothèse de l' influence cynico - stoïcienne. Elle ne
se prononce pas sur le point controversé de l' influence juive,mais se borne à invoquer les tra
vaux de Wendland : « ...P . Wendland a depuis longtemps relevé chez le Juif Philon la pré
sence de cesmêmes thèmes, établissant l'existence d'un fonds de philosophie populaire com
mun entre Philon ,Musonius Rufus, le Pseudo -Héraclite , Sénèque, Épictète, constitué déjà au
jer siècle av. J.- C . » .
Ceux qui ont rejeté l'influence juive ou chrétienne ont songé souvent à une
influence stoïcienne sur la lettre IV , étant donné que son auteur défend la « reli
622 HÉRACLITE (PSEUDO -) H 64a
gion cosmique » . Tarán 11, p. 291, reconnaît que le point de départ de l'attaque
du Pseudo-Héraclite contre la religion commune peut se trouver dans un frag
ment d'Héraclite (DK B 5). En tout cas, il pense que l'idée selon laquelle aucun
temple n 'est divin , sauf le cosmos, c'est-à-dire l' idée de la religion cosmique,
qui était un topos de l'époque hellénistique (cf. 40 A .J. Festugière , La Révéla
tion d 'Hermès Trismégiste, t. II : Le dieu cosmique, Paris 1949, réimpr. 1986 ),
fait songer surtout à une influence des stoïciens, qui sont les grands promoteurs
de la religion cosmique. Tarán 11 pense par exemple à Zénon , SVF I 264, p.61.
D 'après lui (p. 291), la divinisation dont parle le Pseudo-Héraclite n'est pas autre
chose que l'aútápxela du sage cynico -stoïcien . Tarán remarque en outre
(p. 292) que l'interprétation idéalisée que le Pseudo-Héraclite fait de la légende
d'Héraclès coïncide avec l' interprétation cynico -stoïcienne : Héraclès est le héros
qui se sauve par sa propre vertu ; Hébé (= la jeunesse ) est l'immortalité que la
renommée procure et qui dépend de la vertu . Rien dans la lettre n 'indique une
croyance dans l’immortalité de l'âme. Enfin , d 'après Tarán , l'idée que le sage
survit dans sa renommée semble se fonder sur des motifs héraclitéens (cf. DK 22
B 29), mais cela n 'empêche pas à ses yeux que la source directe de la lettre ait
été un auteur cynico -stoïcien .
41 A . J.Malherbe, « Pseudo -Heraclitus, Epistle 4 : The Divinization of the wise man », JAC
21, 1978, p . 42-64 (cf. 42 Id ., Socialaspects of early Christianity, Philadelphia 19832, p . 116
n . 130 ), soutient que la structure logique de la lettre IV a une unité qui s'oppose à l'idée d ' in
terpolations juives ou chrétiennes.Mais l'écrit ne se révèle pas non plus à son avis spécifi
quement stoïcien. Malherbe voit plutôt dans cet écrit la propagande philosophique d ' un
cynique.
Sur les cyniques et la figure d 'Héraclite , voir en général 43 J. F . Kindstrand, « The Cynics
and Heraclitus » , Eranos 82 , 1984, p. 149- 178 , notamment p . 164- 166 (« The Letters of Hera
clitus» , dans « Cynic influence on the characterization of Heraclitus », p. 153-166 ). D 'après
Kindstrand, bien que les cyniques n ' aient jamais essayé de récupérerHéraclite pour leur philo
sophie, la tradition biographique tardive présente ces derniers et Héraclite sous des traits sem
blables : agressivité, mépris de la foule, etc. Kindstrand estime difficile, en l' état actuel de nos
connaissances, d 'aller au -delà de cette constatation d 'affinités générales. En effet, si les cyni
ques considéraient le philosophe d 'Éphèse comme une sorte de précurseur, Kindstrand affirme
qu ' ils ne semblent pas pour autant s ' inspirer directement de ses paroles, sauf en ce qui
concerne la critique de la religion populaire .
Les lettres V et VI d 'Héraclite à Amphidamas forment une unité sur la pré
tendue hydropisie d'Héraclite : la première parle de la maladie en général ; la
deuxièmea été décrite comme une « diatribe» contre lesmédecins quiignorent la
cause de la maladie et donc son traitement.
Comme le remarque Tarán 11, p. 292 sq., la légende de la maladie d 'Héraclite
se trouve aussi dans la tradition biographique du philosophe, qui est antérieure
au moins en partie aux lettres, car des variantes de cette légende étaient déjà
connues d'Hermippe au III et de Néanthe de Cyzique au 11a (cf. DK 22 A 1, t. I,
p. 140 = D . L. IX 3-4 ). Étant donné que le Pseudo-Héraclite semble se fonder sur
une version un peu plus développée que celle que rapporte Diogène Laërce, qui
d'ailleurs présente des détails qui n 'apparaissent pas dans les lettres, Tarán
considère comme probable que cette légende s'est formée à partir de certains
H 64a HÉRACLITE (PSEUDO -) 623
comme législateur distingue les trois dernières lettres (VII, VIII et IX ) de la tra
dition biographique. En effet, d 'après D . L . IX 2, c'est Héraclite et non Hermo
dore qui a été invité à faire des lois et qui a refusé parce que la ville était déjà
dominée par une constitution perverse. Tarán 11, p. 297, suggère que l'auteur de
la lettre VII (ainsi que celui de la lettre VIII : cf. p. 299) peut avoir connu la
légende d'Hermodore comme législateur en Italie , collaborant aux lois des XII
tables (cf. DK 22 A 3 a ).
En tout cas, dans la lettre qui nous occupe, Hermodore a été chassé pour avoir
rédigé des lois, qu 'on ne précise pas.Les Éphésiens, dans le but de chasser aussi
son collaborateur Héraclite, adoptent une loi (de toute évidence créée ad homi
nem ), qui punit d 'exil immédiat « tout homme qui ne rit pas et quihait tout ce qui
est humain » (1). Cette référence à la misanthropie et à la mélancolie d'Héraclite ,
que nous avonsdéjà trouvées dans la lettre V (3 ), représente un topos bien connu
dans la tradition biographique du philosophe (cf. Tarán 11, p. 344 , n. ad loc.).
Héraclite reproche tout d 'abord aux habitants d 'Éphèse de ne pas distinguer entre une loi et
un jugement, car la loi qu ' ils viennent d 'adopter vise en réalité seulement Héraclite , tandis
qu 'une loi doit être générale. Tarán 11, p . 341 n ., suggère que l'auteur a pu avoir à l'esprit DK
22 B 114 : { ov vũ kéYourác ioxoot Eo ai xem rõ { ovỡ návov, jx0OT£o vouỤ TóÀc.
Mais il considère qu 'on peut voir aussi dans cette affirmation sur le caractère général de la loi
une influence stoïcienne, notamment dans la mesure où l'auteur fait référence par la suite à
l'idée que le sage représente la loi pour les autres hommes et que tous les hommes doivent
obéir à la loide la nature.
Ensuite, le sage assure qu 'il quittera la cité immédiatement, si ses concitoyens rédigent la
loi en question de façon plus conforme à la réalité , en disant qu 'il faut chasser de la cité « tout
homme qui hait le mal » (xaxía ). Le reste de la lettre est interprété comme une « diatribe »
contre les habitants d' Éphèse (l'humanité en général) pour leur débauche et leur démence :
l'auteur censure les habitudes des hommes aussi bien dans la paix que dans la guerre, et il
propose les animaux commemodèles d 'une vie conforme à la nature.
D 'après Tarán 11, p . 297 sq ., et Attridge 12 , p. 25- 39, toutcela rentre bien dans le domaine
de la « diatribe cynico -stoïcienne » sans qu 'il soit nécessaire d' invoquer, comme le faisait
Bernays 4,l'influence biblique.
Le texte de cette lettre VII nous est parvenu aussi dans le Pap. Genev. inv.
271 du IIe siècle de notre ère , publié par Martin 8 en 1959, à côté d ' autres écrits
quiont été définis par les critiques commedes « diatribes cyniques» .
Cf. 44 P . Photiadès, « Les diatribes cyniques du papyrus de Genève 271, leurs traductions
et élaborations successives » , MH 16 , 1959, p . 116 - 139, notamment p . 136 - 139 ( « La septième
lettre de ps.Héraclite, et sa continuation » ) ; 45 J. T . Kakridis, « Zum Kynikerpapyrus Pap.
Genev, inv. 271 » , MH 17 , 1960 , p . 34 - 36 (notes critiques à l' appendice de la lettre VII) ;
46 Id ., « Weiteres zum Kynikerpapyrus (Pap. Genev. inv. 271) », PP 16 , 1961, p. 383-386 ;
47 Id ., « A Cynic Homeromastix » , dans J. L . Heller ( édit.), Serta Turyniana. Studies in Greek
Literature and Palaeography in honor of Alexander Turyn , Urbana /Chicago/London 1974 ,
p . 361- 373 ; 48 U . Criscuolo, « Per la fortuna della diatriba cinica (Pap. Genevensis inv.
271) » , AFLM 3-4 , 1970 -1971, p . 455 -467, notamment p . 458 -464 ; 49 I. M . Nachov, « Trois
diatribes cyniques» ( en russe), dans M . J. Grabar-Passek , M . L . Gasparov et T . I. Kuznecova
(édit.), Antiquité et temps modernes, pour le 80e anniversaire de Fédor Aleksandrović
Petrocskij,Moscou 1972, p. 164-175.
En fait le papyrus a été considéré comme un recueil de « diatribes» cyniques,
dans lequel on distingue les parties suivantes :
H64a HÉRACLITE (PSEUDO-) 625
- Col. I-VIII : une « diatribe » entre Alexandre et le sage indien Dandamis ( D 20) ;
- Col. IX -XII : lettre VII du Pseudo-Héraclite à Hermodore, interprétée à nouveau comme
une « diatribe » ;
- Col. XIII-XV : partie, très voisine de la précédente, peut-être un appendice ou une conti
nuation de la lettre citée, contenant un éloge de la vie dans la nature ainsi qu'une « diatribe >>
contre Homère et les poètes en général.
La lettre se termine dans la col. XII li. 31 du papyrus par le mot ratéxeode
(le texte des manuscrits se termine par κατέχεσθε εις πάσαν αδικίαν), mais
dans la même ligne 31, après une lacune, le texte continue jusqu 'à la col. XV.
D 'après Martin 8, p. 81 (cf. Photiadès 44, p. 136 , et Kakridis 47, p. 361), cela
veut dire que le papyrus fournit un texte plus complet que la tradition manus
crite. En revanche, Tarán 11, p . 298, n 'est pas convaincu par cette interprétation ,
étant donné que les lignes 31-38 du papyrus présentent des lacunes importantes,
et il est donc impossible de déterminer si la lettre finissait dans l'une de ces
lignes. Par ailleurs , le fait que le reste du papyrus traite de thèmes qui se trouvent
déjà dans la lettre et qui sont en réalité des lieux communs amène Tarán à suggé
rer qu 'un copiste est responsable de ce développement, qu'il l'ait ajouté de son
propre cru ou l'ait tiré d 'autres sources.
Cf. aussi 50 B .Galerkina, « La lettre VII du Pseudo-Héraclite à la lumière des dernières
trouvailles » (en russe , avec résumé en anglais), VLU 1974 n° 20 , p . 107 - 114 , pour qui le sup
plément de texte qu'on trouve dans le papyrus serait une addition due à un auteur différent.
En tout cas, les similitudes du texte inconnu dans la tradition manuscrite avec
le texte de la lettre VII connu par ailleurs sont tout à fait remarquables (cf. la tra
duction française deMartin 8, p. 81-83 ; le texte grec et son commentaire chez
Kakridis 47, p . 362 sqq.).
La lettre VIII se place dans le cadre du départ d'Hermodore pour l'Italie (en
exil, bien que cela ne soit pas précisé ).Héraclite fustige la cécité des Éphésiens,
qui ne se rendent pas compte qu 'ils méprisent un homme sage qui sera sans
doute accueilli en Italie avec les plus grands honneurs etdont les lois seront sans
doute adoptées par tous les peuples, tandis que les Éphésiens resteront dans
l'esclavage,même au milieu des plus grandes richesses (cf. DK 22 B 125 a et
121. Comme le remarque Tarán 11, p. 299, dans cette lettre l'amitié entre Héra
clite et Hermodore joue un rôle plus important que dans les autres lettres:
Héraclite insiste pour connaître la date du départ de son ami, il veut dialoguer
avec lui de vive voix sur les sujets les plus divers (les lois entre autres) au lieu de
lui écrire sur ces sujets, car il préfère en garder le secret. A ce propos, il censure
l'homme commun pour ne pas savoir garder un secret; il donne une interpréta
tion allégorique de la légende des Athéniens considérés comme le peuple
autochtone de l' Attique : les Athéniens ont compris que leshommes, étant donné
qu 'ils sont nés de la terre, ont l'esprit crevassé , ce pourquoi ils ne retiennent rien ,
mais déversent tout par leur loquacité , sauf s'ils ont été éduqués dans les mys
tères.
Enfin , dans la lettre IX , adressée encore une fois à Hermodore, Héraclite
continue à censurer les Éphésiens pour avoir chassé le meilleur des hommes.
L 'auteur révèle maintenant de façon explicite la raison du bannissement d ’Her
626 HÉRACLITE (PSEUDO - ) H 64a
modore , à savoir qu 'il a rédigé des lois révolutionnaires promulguant l'égalité de
droits pour les affranchis ainsi que la possibilité de suivre le cursus honorum
pour leurs fils. D 'après Tarán 11, p . 299 sq., ce renseignement, qui indiquerait
une certaine connaissance de la situation des affranchis à Rome, différente de
leur situation dans les cités grecques (cf. p . 356 , note à IX 4 -6 ), ouvre la voie à
une « diatribe » contre les Éphésiens, fondée sur le cosmopolitisme, sur l'égalité
des hommes par nature , sur l'idée que les animaux vivent conformément à la
nature tandis que les hommes vivent contre la nature, sur la divinité de l'homme
sage, sur le paradoxe que seul le sage (vertueux) est un homme libre et un
citoyen tandis que l'homme pervers (vicieux) est un homme esclave et sans
patrie . Tarán remarque que tous ces thèmes se trouvent chez les auteurs cynico
stoïciens depuis le jer siècle av. J.-C . Le Pseudo -Héraclite qualifie Hésiode de
menteur (cf.Homère dans la lettre IV ) pour avoir dit que les Érinyes de la Justice
sont trente mille, quand en réalité ce nombre ne suffit pas pour couvrir la perver
sité du monde. Tarán 11, p . 300 , reconnaît dans la mention des Erinyes de la
Justice une référence à DK 22 B 94 . Par ailleurs, il rappelle qu 'Héraclite avait
critiqué aussi bien Hésiode qu'Homère (cf. DK 22 B 40, B 42, A 22).Cependant,
il estime que la critique des poètes, de même que la critique de la mythologie
populaire dans la lettre VII et la critique du culte traditionneldans les lettres IV
et IX , suggèrent une origine stoïcienne ou cynique plutôt qu ’une origine héracli
téenne, dans la mesure notamment où ces critiques se rattachent à la propagande
pour la religion cosmique.
La question de l'auteur et la date de composition . Tarán 11, p . 300,consta
te qu 'il y a une différence marquée de style entre les trois premières lettres et les
six autres : « Tandis que ces dernières sont en réalité des diatribes contre les
Éphésiens et contre les médecins, les trois premières lettresne sont pas à propre
ment parler des diatribes et semblent témoigner plutôt d'un intérêt biographique
pour Héraclite. » Étant donné que celui-ci a vécu en ca 540-480a, il a été associé
à Darius, personnage qui apparaît dans les trois premières lettres. Les lettres I et
II sont citées par Diogène Laërce IX 12- 14 (DK 22 A 1, t. I, p. 142), ce qui
constitue un terminus ante quem . Tarán considère comme probable qu 'elles sont
l'euvre d 'un même auteur et ont été composées à une date indéterminée entre le
Ille siècle av. J.- C . et le 1er siècle de notre ère, car la source de Diogène Laërce ne
semble pas postérieure au jer siècle. A l'encontre de Bernays 4, Tarán 11, p. 301,
n 'écarte pas la possibilité que la lettre III soit l'æuvre du même auteur que celui
des lettres I et II.
Quant à la lettre IV , Tarán, s'appuyant sur les différences de style, suggère
qu'elle appartient à un autre auteur et à une autre école. Par ailleurs , à la suite de
Bernays 4 , il met à contribution un passage ( 4 ) qui lui semble contenir un vatici
nium post eventum (cf. aussi Heinemann 20 , col. 228) : « si tu pouvais par résur
rection revenir en vie après cinq cents ans, tu trouverais Héraclite encore
vivant.» En effet, en supposant que l'auteur de la lettre connaissait, au moins de
façon approximative , l'époque où Héraclite a vécu (ca 500“), Tarán suggère le jer
siècle de notre ère commedate de composition de cette lettre.
H65 HÉRACLITE DE RHODIAPOLIS 627
D 'après Attridge 12, p . 5 sq., cette datation semble confirmée par la vision qu'Héraclite
raconte dans la lettre VIII, vision selon laquelle Éphèse serait soumise aux lois italiennes
d 'Hermodore. En effet, la domination de l'Asie par Rome a commencé vers 133a.
En ce qui concerne la lettre VII, sa composition ne peut pas être postérieure à IP ou au
début de lIP , étant donné que le papyrus de Genève inv. 271 qui la contient n 'est pas postérieur
à cette date .
De l'avis de Tarán 11, p. 301, l'auteur des lettres V et VI (qui forment un
groupe) peut être le même que celuide la lettre IV , étant donné que l'accusation
d'Euthyclès contre Héraclite mentionnée dans cette dernière lettre (cf. supra )
reparaît dans la lettre V (2). Tarán reconnaît que dans celle -ci on affirme l'im
mortalité de l'âme, tandis que dans la lettre IV on ne parle que de l'immortalité
procurée par la renommée. Cependant, il ne considère pas comme impossible
pour autant que l'une et l'autre lettres appartiennent au même auteur ou à la
même école rhétorique. Enfin , Tarán 11, p. 302, remarque que l'auteur des
lettres IV -IX , à la différence de celui des trois premières, cherche à imiter le
style d 'Héraclite , caractérisé par l'asyndète, le ton arrogant, la concision et
l'obscurité .
En résumé, Tarán 11, ibid ., reconnaît dans les lettres I- III et dans les lettres
IV - IX deux écoles différentes, dont la deuxième serait dominée par la « diatribe
cynico- stoïcienne » . Il considère que les lettres I et II appartiennent à un même
auteur, tandis qu 'il laisse en suspens la question de savoir si la lettre III appar
tient aussi à ce même auteur. Tarán n 'estime pas impossible que les lettres IV -V
( formant un groupe) et les lettres VII-IX (formant un autre groupe ) soient
l'œuvre d 'un même auteur, différent de l'auteur des lettres I- II (et peut-être III).
Il y voit en tout cas l'empreinte d 'une même école. Quant à la date de composi
tion , il place les lettres IV -IX vers le 1er siècle de notre ère, c'est-à -dire à l'épo
que post-alexandrine (cf. Bernays 4, p . 9 ; Susemihl 17 , t. II, p.600 n . 96 ), tout
en considérant comme probable que les lettres I- III sont antérieures.
PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ et JUAN LUIS LÓPEZ CRUCES.
65 HÉRACLITE DE RHODIAPOLIS RESuppl. IV :8b
Médecin , poète et philosophe épicurien.
Prêtre d’Asclépios dans sa cité natale de Rhodiapolis, ce médecin avait acquis
une vaste célébrité : l'inscription de sa statue dans sa patrie (TAM II 910 ; voir L .
Robert, « Deux poètes grecs à l'époque impériale », dans Stèlè [Mélanges Kon
doléon ), Athènes 1977, p . 14 = Opera Minora VII, p. 582) précise qu 'il avait été
pareillementhonoré à Rhodes (dont il avait été fait citoyen ), à Alexandrie et à
Athènes. C 'est qu'il avait rédigé, et adressé aux bibliothèques de ces cités, plu
sieurs ouvrages, consacrés bien sûr à la médecine – entre autres, des poèmes qui
lui avaient valu le titre d'« Homère des poèmes médicaux » – mais aussi à la phi
losophie . L 'orientation de ces derniers ne fait guère de doute , car l'auteur avait
été honoré à Athènes par les philosophes épicuriens. Il n 'y a donc probablement
pas lieu d'établir un rapprochement avec son homonyme, également citoyen de
Rhodes, qui était l'ami d'Épictète (» H 62] (II 2 , 17).
BERNADETTE PUECH .
628 HÉRACLITE DE TYR H 66
École. L' Irrisio est une satire humoristique qui vise à dénoncer la futilité de
la philosophie grecque en attirant l'attention du lecteur sur le désaccord des phi
losophes concernant des problèmes essentiels. L 'auteur, Hermeias, est inclus
traditionnellement parmi les apologistes chrétiens, bien que très peu du contenu
de cet écrit, sauf le titre et l'introduction , soit d 'origine chrétienne. Voir Hanson
4, p. 20-23 et 37-47, pour ce qui est du rattachement de l' écrit à la Bible et à la
doctrine chrétienne. L 'auteur présente des traits qui l'assimilent incontestable
ment à un rhéteur, influencé par des idées cyniques et sceptiques. Voir
Kindstrand 17, p . 350 -353.
JAN FREDRIK KINDSTRAND .
77 HERMEIAS RE 12 FI
Géomètre, l'un des invités d 'Ammonios (P - A 138) au banquet du livre IX des
Propos de Table de Plutarque .La scène est censée se placer une année où le phi
losophe était stratège des hoplites , donc sous les Flaviens. Hermeias s'y montre
obsédé par la symbolique des nombres, au point que les autres convives doivent
le faire taire pour pouvoir orienter la conversation vers d'autres sujets,mais cette
manie ne constitue probablement pas une raison suffisante pour le classer sans
hésitation au nombre des pythagoriciens ; J.P . Hershbell , « Plutarch 's Pythago
rean Friends» , CB 60, 1984, p. 73-78, estime que l'on ne peut pas se prononcer
sur ce point.
BERNADETTE PUECH .
78 HERMEIAS D ’ALEXANDRIE RE 13 MV
Philosophe néoplatonicien , condisciple à Athènes de Proclus chez Syrianus
(mort en 437) (Damascius, Vie d 'Isidore, fr. 120 et Epit. Phot. 74 ), puis profes
seur à Alexandrie. Il était le frère de Grégoire d' Alexandrie (2+ G 34 ) (Ibid., fr.
123 et Epit. Phot. 75 ). Il fut l'époux d'Aidésia (> A 55), parente de Syrianus, et
le père des philosophes Ammonius (* * A 141) et Héliodore (2H 30 ), lesquels
furent les maîtres de Damascius (fr. 119). Un premier fils d'Hermeias et d' Ai
désia étaitmort à l'âge de sept ans (Epit. Phot. 76 ). A la mort d 'Hermeias, Aidé
sia dut veiller à la formation philosophique des deux enfants et leur assura, jus
qu 'à ce qu' ils s'adonnent à la philosophie , la pension alimentaire qui avait été
accordée à leur père (fr. * 124). Elle se rendit avec eux à Athènes pour qu'ils
étudient auprès de Proclus (fr. * 127).
x Ammonius Héliodore
A son habitude, Damascius exprime sur son compte un jugement mitigé:
« Comme travailleur, nul ne le surpassait, mais il n 'était pas très intelligent ni
640 HERMEIAS D'ALEXANDRIE H 78
très habile à découvrir des raisonnements probants, il n ' était donc pas davantage
un remarquable chercheur de vérité ; aussi était- il incapable de discuter avec
vigueur contre ceux qui élevaient des objections, alors qu 'il se rappelait à peu
près tout ce qu 'il avait entendu expliquer par son maître ſi.e. Syrianus) et tout ce
qu 'il avait trouvé écrit dans les livres. Mais la spontanéité d'esprit ne fleurissait
pas sur son érudition » (Epit. Phot. 74 ; p . 100, 10 - 102, 1 Zintzen ; trad. Henry ;
voir aussi fr. 120 et 121). Damascius admire cependant sans réserve sa rectitude
morale quil'amenait à donner pour un livre davantage que le prix qui lui en était
demandé lorsque le vendeur en ignorait la valeur véritable (Epit. Phot. 74 ;
p . 102, 2 - 104, 4 Zintzen ; voir aussi fr. 122).
Il était l' ami d'Égyptos, le frère de Théodotè,mère d'Isidore (fr. 119), et, à la
mort de cet Égyptos (ou lorsque lui-même était à l'article de la mort, comme
l'entend P . Athanassiadi, Damascius, p . 155 n . 129), il l'assura sous serment que
l'âmeest immortelle et indestructible (fr. 120).
Hermeias d'Alexandrie, le rhéteur, mentionné dans le fr. 289, n'est sans doute qu'un
homonyme(PLRE 11:4 ).
Son commentaire du Phèdre de Platon , fondé sur l'enseignement de Syrianus,
est conservé. Il s'agit en réalité des notes prises par Hermeias au cours de
Syrianus. Y sont mentionnées des objections soulevées par « notre compagnon
Proclus» (p . 92, 6 ; 154, 28 ) ou par l'auteur lui-même (p. 24, 5 ; 154, 21) et la
réponse du « philosophe» . L 'auteur cite Plotin , Porphyre, Jamblique, Harpocra
tion et Posidonius. Bien que l'expression ne soit pas utilisée dans le titre, ce
serait là un exemple d'un commentaire composé áno owvñs. Voir 1 M . Richard ,
« ANO OSNHE» , Byzantion 20, 1950, p. 191-222 ; repris dans Opera Minora,
t. III, Turnhout/Louvain 1977, nº60. Le commentaire est profondémentmarqué
par la méthode exégétique de Jamblique ( I 3).
Sur ce commentaire, voir aussi 2 L . G . Westerink, « The Alexandrian commentators and
the introductions to their commentaries » , dans R . Sorabji (édit.) , Aristotle transformed. The
Ancient commentators and their influence, Ithaca (NY), Cornell Univ . Pr., 1990, p. 325- 348,
qui y voit « a set of unrevised notes of Syrianus' lectures on the dialogue » (p . 325).
C 'est le seul commentaire sur le Phèdre qui soit conservé.Des commentaires
perdus de Jamblique, de Syrianus et de Proclus sont cependant attestés, ainsi que
des scholies de Michel Psellos.
Selon 3 A . Bielmeier, Die neuplatonische Phaidrosinterpretation . Ihr Werde
gang und ihre Eigenart, coll. « Rhetorische Studien » 16 , Paderborn 1930 , p. 33
35, le commentaire permettrait de retrouver des extraits du commentaire de
Jamblique.
Édition . 4 P . Couvreur (édit.), Hermiae Alexandrini in Platonis Phaedrum
Scholia , coll. « Bibliothèque de l’ÉPHÉ », fasc . 133, Paris 1901, XXIV-272 p. ;
réimpr. sous les soins de C . Zintzen , Hildesheim 1971, avec un index verborum
dactylographié, p . 273-297, et un Nachwort, p. 298-300.
Une traduction roumaine est parue en accompagnement d 'une traduction du
Phédon et du Phèdre dans 5 G . Lijceanu, A . Cornea et R . Bercea ( édit.), Plato
Philosophus. Opere complete, t. IV : Phédon ; Phèdre; Commentaire d'Hermias
H 79 HERMETICA 641
sur le Phèdre, trad. P . Creţia et M . Tecuşan , « Clas. filos. univ.» , Bucureşti
1983. Traduction allemande récente par 6 Hildegund Bernard, Hermeias von
Alexandrien. Kommentar zu Platons “ Phaidros", übersetzt und eingeleitet von
H . B ., coll. « Philosophische Untersuchungen » 1, Tübingen 1997 , VIII-442 p.
Voir le compte rendu donné par G . Bendinelli, Adamantius 4 , 1999, p. 288 -291.
Traduction allemande récente par 7 H . Bernard, Hermeias von Alexandrien.
Kommentar zu Platons Phaidros, coll. « Philosophische Untersuchungen » 1,
Tübingen 1997, VIII-442 p.
C 'est le seul ouvrage connu d'Hermeias, mais son fils Ammonius fait réfé
rence à son interprétation des Premiers Analytiques d 'Aristote sur les syllo
gismes de la deuxième et troisième figure (in Anal. Pr., p. 31, 24-25 Wallies), en
l'associant à Proclus et au maître de ce dernier, c'est-à-dire Syrianus.
Cf. 8 K . Praechter, art. « Hermeias» 13, RE VIII 1, 1912, col. 732-735 ; 9 Id .,
« Richtungen und Schulen im Neuplatonismus» , dans Genethliakon für Carl
Robert, Berlin 1910, p. 150 n . 2, repris dans Kleine Schriften, hrsg. von H .
Dörrie, coll. « Collectanea » 7, p. 210 n . 2 ; 10 Id., c.r. de la collection Die
griechischen Aristoteles-Kommentare dans ByzZ 18 , 1909, p. 524 = Kleine
Schriften, p. 290 n . 4 ; 11 M .Minniti Colonna, « I codici napoletani degli Scholia
in Platonis Phaedrum di Ermia Alessandrino » , Vichiana 7, 1978, p. 193- 201;
12 M .B . J. Allen , « Two commentaries on the Phaedrus. Ficino 's indebtedness to
Hermias» , JWI42, 1980, p . 110 -129 ; 13 C. Moreschini, « Alcuni aspetti degli
Scholia in Phaedrum di Ermia Alessandrino » , dans M .-O . Goulet-Cazé, G .
Madec et D . O 'Brien (édit.), EOQIHE MAIHTOPEE, " Chercheurs de sagesse",
Hommage à Jean Pépin , Paris 1992, p. 451-460 ; 14 Id., « La " Teologia” e
l'esegesi del “ Fedro" di Platone secondo Ermia Alessandrino » , dans M . Serena
Funghi (édit.), 040I AIZHEIO2. Le Vie della ricerca. Studi in onore di F .
Adorno, Firenze 1996 , p. 361-369 ; 15 Id ., « Motivi esegetici e filosofici negli
“ Scholia in Phaedrum ” di Ermia Alessandrino » , Cassiodorus 2, 1996 , p. 99- 117.
Un manuscrit de l'Escorial, disparu dans l'incendie de 1579, signale des
Mathematica du médecin Hermeias, mais il n 'est pas sûr qu 'il s 'agisse du
philosophe, lequel n 'est jamais désigné comme médecin . Voir Couvreur 4 ,
p . VIII .
RICHARD GOULET.
79 HERMETICA
Les textes philosophiques du Corpus Hermeticum comprennent dix -sept trai
tés (numérotés traditionnellement I-XIV et XVI-XVIII).
La notice « Asclepius » renvoyait à « Corpus Hermeticum » et cette dernière notice ren
voyait à « Hermetica » . Il serait inconvenant de retarder davantage la publication de la notice
ainsi annoncée. Nous avons dû cependant nous borner à présenter les principales publications
classiques ou récentes en nous limitant d 'ailleurs aux textes proprement philosophiques de la
période gréco -romaine et en laissant de côté toute la littérature astrologique, alchimique et
magique transmise sous l'autorité d'Hermès.
Les textes hermétiques se présentent comme des livres exposant, de diverses
manières (traités, dialogues ), les révélations du dieu égyptien Thoth , identifié à
642 HERMETICA H 79
Hermès. Les plus anciens documents, de caractère astrologique, peuvent remon
ter au début du 11e siècle av. J.-C . Les textes philosophiques du Corpus Hermeti
cum sont plus tardifs et ont été écrits entre 100 et 300 de notre ère. Ils mettent en
scène, souventdans le cadre de dialogues, diverses divinités comme Hermès, Tat
(= Thoth), Asclépius, Ammôn, Agathos Daimon, Isis et Horus. La séparation
entre l'hermétismedes sciences occultes et l'hermétisme philosophique, rappelée
par Festugière 46 , p . 28 , n 'est pas tranchée,mais incorporer dans la présente
notice les textes astrologiques, alchimiques et magiques, qui font l'objet du pre
mier tome de La Révélation d 'Hermès Trismégiste (Festugière 1),nous entraîne
rait loin de la philosophie .
Sur les points communs entre ces deux composantes des écrits hermétiques, voir Festu
gière 1 , t. I, p . 87 - 88 .
Sur le dieu égyptien Thoth et son assimilation à Hermès, voir Festugière 1 ,
t. I, p . 67-74.
On a beaucoup discuté de l'origine grecque ou orientale de cette littérature .
A . D . Nock écrit : « Sauf le cadre , ils contiennent extrêmement peu d'éléments
égyptiens. Les idées sont celles de la pensée philosophique grecque populaire,
sous une forme très éclectique, avec ce mélange de platonisme, d 'aristotélisme et
de stoïcisme qui était alors si répandu ; çà et là paraissent des traces de judaïsme
et, probablement aussi, d'une littérature religieuse dont la source utlime est
l'Iran : par contre, nulle marque évidente ni de christianisme ni de néoplato
nisme » (4, p. V).
On a également tenté de déterminer le Sitz -im -Leben de cette production litté
raire : conventicules hermétiques, religion constituée , courant spirituel informel ?
Le statut du discours philosophique dans les textes hermétiques a été bien décrit
par Festugière 46 , p . 37 : « Tout se passe comme si l'on se trouvait en présence
non pas d'une école philosophique en possession d'un système,mais d'une école
de piété qui, prenant pour point de départ n 'importe quel problème scolaire et
sans s'arrêter à la discussion de ce problème pour lui-même, chercherait le pre
mier prétexte pour s'évader dans le domaine de l'homélie dévote et de la direc
tion spirituelle » . La présence de points de vue irréconciliables sur le monde
(tantôt pénétré par la divinité et point de départ de la contemplation divine, tantôt
mauvais et constituant un obstacle à la découverte du dieu caché) ont amené la
plupart des spécialistes à rejeter l'idée que l'hermétisme ait pu être issu « d'une
confrérie religieuse au sens propre , d'une Église avec ses dogmes, ses rites, sa
liturgie , une Église dont le Corpus Hermeticum aurait constitué la Bible >>
(Festugière 46, p . 38). Contre les reconstitutions de confréries hermétiques pro
posées par Reitzenstein 42, notamment p . 248, Festugière 1 , t. I, p. 81-87, fait
valoir toute une série d'arguments qui invitent à voir dans l'hermétisme un phé
nomène essentiellement littéraire : « Diversité de la littérature hermétique ; ana
logie avec les autres branches similaires du genre prophétique ; emploi universel,
dans ces sortes d 'ouvrages, d'un cadre et d 'expressions empruntés aux mystères ;
absence de toute indication permettant de conclure, dans l'hermétisme, à une
hiérarchie sacrée et à des sacrements ; répugnance à l' égard de toutacte de culte
H 79 HERMETICA 643
autre que la seule prière ; divergences doctrinales aboutissant à deux façons de
vivre exactement opposées : tous ces faits obligent à tenir les écrits hermétiques
pour un phénomène purement littéraire , et non pour les " liturgies” d 'une confré
rie demystes» (1,t. I, p . 84).
Les testimonia anciens relatifs à l'hermétisme grec sont rassemblés par
Festugière 1 , p . 76 -81.
Études générales. 1 A .J. Festugière , La Révélation d'Hermès Trismégiste,
t. I : L 'astrologie et les sciences occultes, avec un appendice sur l'Hermétisme
arabe de L .Massignon , coll. « Études bibliques », Paris 1944, XIV-425 p .; t. II :
Le Dieu cosmique, 1949, XVIII-610 p . ; t. III : Les doctrines de l'âme, suivi de
Jamblique , Traité de l'âme, traduction et commentaire ; Porphyre, De
l'animation de l' embryon, 1953, XIV -314 p . ; t. IV : Le Dieu inconnu et la
Gnose, XII-315 p . (Réédité aux Belles Lettres dans la « Collection d 'Études
Anciennes » en 1981). L' appendice du t. I a été repris dans 2 L . Massignon ,
Inventaire de la littérature hermétique arabe, dans Opera Minora, t. I, Paris
1969, p .650 -666 .
Éditions d'ensemble. 3 W . Scott, Hermetica . The Ancient Greek and Latin
writings which contain religious or philosophic teachings ascribed to Hermes
Trismegistus. Edited with English translation , Oxford 1924-1936 , 4 vol. ;
réimpr. Boston 1983-1985 ; 4 A . D . Nock et A . J. Festugière (édit.), Corpus
Hermeticum , CUF, 4 vol., Paris 1945- 1954.
Dans sa Préface au premier tome, Nock annonçait pour le troisième volume un essai sur
l'évolution générale de la littérature hermétique. Dans son introduction aux fragments divers
publiés dans le vol. IV , p. 103, Nock déclare renoncer à ce projet et renvoie aux études
publiées par le Père Festugière entre temps.
Traductions d ' ensemble. Française :Nock et Festugière 4 (qu'il faut parfois
mettre à jour grâce aux corrections apportées par Festugière 1). Anglaise : 5 B . P.
Copenhaver (édit.), Hermetica. The Greek Corpus Hermeticum and the Latin
Asclepius in a new English translation, ed.with notes and an introduction by
B . P. C ., Cambridge 1992, LXXXII -320 p. index. Allemand : 6 Das Corpus Her
meticum deutsch : Übersetzung, Darstellung und Kommentierung in drei Teilen
im Auftrag der Heidelberger Akademie der Wissenschaften bearb . und hrsg. von
C . Colpe und J. Holzhausen , coll. « Clavis pansophiae » 7 , 1 - 2 Stuttgart/Bad
Cannstatt 1997, t. I: Die griechischen Traktate und der lateinische « Asclepius » ,
übers. und eingel. von J. Holzhausen , XIII- 316 p. ; t. II : Exzerpte , Nag-Ham
madi-Texte, Testimonien, übers. und eingel. von J. Holzhausen, VIII- p. 319-665.
Espagnol : 7 Tratados del Corpus Hermeticum . Introd ., versión y notas de J.
García Font, coll. « Aurum » , Barcelona 1997, 266 p.
Bibliographie . 8 A . González Blanco, « Hermetism . A bibliographical
approach » , ANRW II 17, 4 , 1984, p . 2240 -2281 ; 9 K .H . Dannenfeldt, « Herme
tica philosophica » , Catalogus translationum I, 1960, p. 137- 156.
Index. 10 L . Delatte, S. Govaerts et J. Denooz, Index du Corpus Hermeticum ,
coll. « Lessico intell. europeo » 13,Roma 1977, XXIV - 360 p .
644 HERMETICA H79
ASCLÉPIUS
( D 'Hermès Trismégiste : Livre sacré dédié à Asclépius). Lambeaux ( « une
mosaïque de petits logoi distincts dont chacun a pour objet un problème particu
lier » , Festugière 1, t. II, p . 18 ), traduits du grec, d'un Discours parfait (Abyos
TÉNELOS) et d 'autres ouvrages disparus. Analyse du traité dans Festugière 1 , t. II,
p. 18 -27 . Fragments de l'original grec chez Lactance et dans le papyrus Mimaut,
qui intègre la prière finale dans une pratique de magie . Cette traduction latine,
déjà citée par Augustin (Cité de Dieu ), est attribuée, à partir du XIe siècle à Apu
lée par la tradition directe (voir la notice de J.-M . Flamand, DPA, A 294, t. I,
p . 312 -313). Une version copte du Discours parfait a été retrouvée à Nag Ham
madi en Haute-Égypte .
Études. 11 P . Siniscalco , « Ermete Trismegisto , profeta pagano della rivela
zione cristiana. La fortuna di un passo ermetico (Asclepius 8 ( ?)) nell'interpre
tazione di scrittori cristiani» , AAT 101, 1966 - 1967, p. 83- 113 ; 12 A . J. Festu
gière, « Les dieux ousiarques de l'“ Asclépius” » (1938), repris dans son recueil
de travaux Hermétisme et mystique païenne, Paris 1967, p. 121- 130 ; 13 J.
Schwartz , « Note sur la Petite Apocalypse de l'Asclepius » , RHPUR 62, 1982,
p . 165- 169 ; 14 D . N . Wigtil, « Incorrect apocalyptic . The Hermetic " Asclepius"
as an improvement on theGreek original» , ANRW II 17, 4, 1984 , p. 2282 -2297 ;
15 C . Moreschini, Dall'Asclepius al Crater Hermetis. Studi sull'ermetismo
latino tardo -antico e rinascimentale , coll. « Bibl. di studi antichi » 47, Pisa 1985 ,
293 p. ; 16 M . Bertolini, « Sul lessico filosofico dell'Asclepius» , ASNP 15,
1985, p . 1151-1209 ; 17 S . Gersh , Middle Platonism and Neoplatonism . The
Latin tradition , coll. « Publications in Medieval Studies » 23, Notre Dame
(Indiana) 1986 , t. I, p. 329-387 (comparaison entre l'Asclépius et les doctrines
anthropologiques médio -platoniciennes) ; 18 A . Camplani, « Alcune note sul
testo del VI codice di Nag Hammadi. La predizione di Hermes ad Asclepius » ,
Augustinianum 26 , 1986, p . 349- 368 ; 19 M . Van Esbroeck, « L 'apport des
versions orientales pour la compréhension de l' Asclepius dans les Philosophica
d ’Apulée » , dans M . Pavan et U . Cozzoli (édit.), L 'eredità classica nelle lingue
orientali, coll. « Acta encyclopaedica» 5 , Roma 1986, p . 27-35 ; 20 J.-P.Mahé,
« Remarques d 'un latiniste sur l'Asclepius copte de Nag Hammadi» , RSR 48,
1974, p. 136 -155 ; 21 Id., « Le fragment du Discours parfait dans la bibliothèque
de Nag Hammadi» dans B . Barc (édit.), Colloque international sur les textes de
Nag Hammadi (Québec, 22 -25 août 1978 ), coll. « Bibl. copte de Nag Hammadi »
Sect. Études, 1, Québec 1981, p . 304-327 ; 22 Id., « Le Discours parfait d 'après
l'Asclépius latin . Utilisation des sources et cohérence rédactionnelle » , ibid .,
p . 405-434.
CORPUS HERMETICUM
Les dix -sept traités de ce corpus (numérotés de 1 à 14 et de 17 à 18, par suite
de l'insertion par Turnèbe d'un quinzièmetraité formé de trois extraits de Sto
bée ) « diffèrent et par le titre ou l'adresse, et par la forme (monologue ou dia
logue) et le genre littéraire, et, ce qui est plus essentiel, par la doctrine »
H 79 HERMETICA 645
(Festugière 46 p . 33). Le corpus a été constitué entre le vie et le xie siècle et
n 'est attesté qu'à partir de Psellos. Au vie siècle Stobée ne connaissait encore
que diverses collections de logoi (voir Festugière 1, t. II, p . 2 -5). Typologie
sommaire des traités dans Festugière 46 , p . 34- 38. Sur la tradition manuscrite
(une vingtaine de manuscrits des XIV -XVI° siècles remontant à un même arché
type), voir Nock 4 , t. I, p. XI-LIV . Sur la forme littéraire de chaque traité, voir
Festugière 1, t. II, p. 9- 18 .
TRAITÉ I : POIMANDRÈS.
Ce premier traité « est une arétalogie, c'est-à-dire le récit d'unemanifestation
soudaine et miraculeuse (arétè ) de la divinité, ici le Noûs divin ou Intellect
Suprême. Au cours d'un songe ou d 'une extase, le Noûs apparaît au disciple qui,
cette fois, est Hermès lui-même, et il lui fait voir la genèse du monde spirituel et
du monde sensible, l' émanation , à partir du Dieu suprême, de ses fils divins, le
Logos ou Verbe, le Noûs ou Intellect, l' Anthropos ou “ Premier Homme”
céleste ; puis la chute de ce Premier Homme et la création des sept premiers
hommes terrestres, d 'où est issue l'humanité ; enfin la remontée des âmes et leur
sort posthume. A la fin , le disciple se met à prêcher aux hommes la révélation du
salut et il chante un hymne à Dieu » (Festugière 46 , p . 34). Le Poimandrès offre
l'exposé le plus complet de « doctrine hermétique du salut», systématisée par
Festugière 46 , p . 50 -69 .
L' identité du disciple (Hermès) est établie par une référence à la révélation du Poimandrès
contenue dans le traité XIII 15 , qui est un discours d'Hermès à son fils Tat. La révélation
d 'Hermès remonte donc à celle que lui a faite Poimandrès.
Traductions. Italienne : 23 P. Scarpi, Ermete Trismegisto , Poimandres,
( trad.) a cura di P. S., « Collana Il Convivio » , Venezia 1987, 105 p. Allemande :
Hermes Trismegistos, Poemander oder Von der göttlichen Macht und Weisheit,
in der Übers. und den Anm . von D . Tiedemann ,mit einer Einl. von M . Vollmer,
coll. « Ergebnisse Philos.» , Hamburg 1990 , XXXVII-121 p .
Index. 24 D . Georgi et J. Strugnell (édit.), Concordance to the Corpus
Hermeticum . Tractate one. The Poimandres, coll. « Concordances to Patristic
and late classical texts » , Cambridge,MA, 1971, IV -26 p.
Études. 25 'R . Reitzenstein , Poimandres. Studien zur griechisch-ägyptischen
und frühchristlichen Literatur, Leipzig 1904 ; 26 B . A . Pearson , « Jewish ele
ments in Corpus Hermeticum I (Poimandres) » , dans R . van den Broek et M .J.
Vermaseren (édit.), Studies in gnosticism and Hellenistic religions presented to
Gilles Quispel on the occasion of his 65th birthday, coll. EPRO 91, Leiden 1981,
p . 336 - 348 ; 27 R . A . Segal, The Poimandres as myth . Scholarly theory and
gnostic meaning, coll. « Rel. & reason » 33, Amsterdam /Berlin 1986 , VIII
214 p . ; 28 J. Buechli, Der Poimandres, ein paganisiertes Evangelium .
Sprachliche und begriffliche Untersuchungen zum 1. Traktat des Corpus Her
meticum , coll. « Wiss. Unters. zum N . T.» R . 2, 27, Tübingen 1987, XI-232 p. ;
29 J. Holzhausen , « Natur und Gottes Wille im hermetischen Traktat Poiman
dres » , Hermes 120 , 1992, p. 483-489.
646 HERMETICA H79
AUTRES TRAITÉS
Traité II A : D 'Hermès à Tat : Discours universel (noroE KAOOAIKOE).
Dialogue perdu.
Traité II B (titre perdu).
Traité III : D 'Hermès : Discours sacré (IEPOE AOTO )
Traité IV : D ’Hermès à Tat : Le Cratère ou la Monade (O KPATHP, H
MONAE)
Traité V : D 'Hermès à son fils Tat : Que Dieu est à la fois inapparent et le
plus apparent.
Traité VI: (Que le Bien n 'existe qu 'en Dieu seul et nulle part ailleurs.)
Traité VII : (Que le plus grand des maux parmiles hommes, c'est l'ignorance
touchant Dieu.)
Traité VIII : (Qu'aucun des êtres ne périt et que c 'est à tort qu'on nomme les
changements destructions et morts.]
Traité IX : (Sur l'intellection et la sensation.]
Suite d'un “ Discours parfait” (Nóyos TÉRELOC) prononcé la veille. On a pensé qu'il pour
rait s'agir de l' original grec perdu de l'Asclépius.
Traité X : D ’Hermès Trismégiste : La Clef.
Suite des Leçonsgénérales (YeVixoi Nóyou) prononcées devant Tat.
Traité XI: Nous à Hermès.
Traité XII : D 'Hermès Trismégiste : Sur l'intellect commun, à Tat.
Traité XIII : D ’Hermès Trismégiste à son fils Tat: Discours secret sur la mon
tagne concernantla regénération et la règle du silence.
Mentionne les Leçons générales et renvoie au Poimandrès.
Études. 30 W . C . Grese , Corpus Hermeticum XIII and early Christian literature, coll.
« Studia ad Corpus Hellenisticum Novi Testamenti » 5, Leiden 1979, XU1-229 p. ; 31 K .- W .
Tröger, Mysterienglaube und Gnosis in CorpusHermeticum XIII, Berlin 1971.
Traité XIV : D ’Hermès Trismégiste à Asclépios : Santé de l'âme. [Lettre)
Traité XVI : D 'Asclépios au roi Ammon : Définitions. Sur Dieu , sur la
matière, sur le mal, sur la fatalité, sur le soleil, sur la substance
intelligible, sur l'essence divine, sur l'homme, sur la disposition
du plérôme, sur les sept astres, sur l'homme selon l' image.
(Lettre)
Traité XVII : (fragment d 'un dialogue entre Tat et un roi...)
Traité XVIII : [Des entraves qu'apporte à l'âme ce qui arrive au corps.)
EXTRAITS DIVERS
Extraits conservés par l'Anthologie de Stobée (29 fragments tirés de quatre
cycles de traités), « les uns ne comportant que quelques lignes, les autres consti
tuant un logos complet, ou presque complet, quelques-uns remarquables et par la
doctrine et par la forme (ainsi surtout les extraits des logoi d'Isis à Horus, et,
parmi ces derniers, la Koré Kosmou ) » (Festugière 46 p. 33). On les range selon
H 79 HERMETICA 647
le personnage auquel ils sont adressés : logoi d 'Hermès à Tat, d 'Hermès à
Ammon , d'Isis à Horus.
Fragments divers empruntés à Tertullien, Lactance , Jamblique, Zosime
l'alchimiste, etc . Quelques autres fragments tirés du Contre lulianum de Cyrille
d 'Alexandrie .
Les extraits XXIII-XXIV sont tirés de la Korè Kosmou (Fille ou pupille du
monde).
Études sur la Korè Kosmou. 32 A . J. Festugière, « La création des âmes dans
la Korè Kosmou » (1939 ), repris dans son recueil de travaux Hermétisme et
mystique païenne, Paris 1967, p. 230-248 ; 33 P. A . Carozzi, « Gnose et sotério
logie dans la Korè Kosmou hermétique » , dans J . Ries, Y . Janssens et J. M .
Sevrin (édit.), Gnosticisme et monde hellénistique, Actes du Colloque de
Louvain -la -Neuve (11- 14 mars 1980 ), coll. « Publ. de l'Inst. Orientaliste de
Louvain » 27 ,Leuven 1982, p.61-78 ; 34 H . Jackson , « Kópn xóquov . Isis, pupil
of the eye of the world », CE 61, 1986 (121), p. 116 - 135 ; 35 H . D . Betz ,
« Schöpfung und Erlösung im hermetischen Fragment Kore Kosmou » , article de
1966 repris avec des compléments bibliographiques dans ses Gesammelte
Aufsätze, I : Hellenismus und Urchristentum , Tübingen 1990 , p. 22 -51.
NOUVEAUX TEXTES
Découverts entre autres dans la bibliothèque gnostique de Nag Hammadi et
dans desmanuscrits arméniens.
36 J.-P. Mahé, « Les Définitions d'Hermès Trismégiste à Asclepius (Traduc
tion de l'arménien ) » , RSR 50 , 1976 , p. 193-214 ; 37 M . G . de Durand, « Un
traité hermétique conservé en arménien », RHR 190, 1976 , p . 55-72 ; 38 J.-P.
Mahé, Hermès en Haute- Égypte , t. I: Les textes hermétiques de Nag Hammadi et
leurs parallèles grecs et latins, coll. « Bibl. copte de Nag Hammadi» 3, Québec
1978 , XIX -171 p . ; t. II : Les fragments du " Discours parfait" et les “ Défini
tions” hermétiques arméniennes (NH VI, 8, 8a), coll. « Bibl. copte de Nag Ham
madi» Section Textes 7, Québec 1982, L -565 p. ; 39 J.-P .Mahé, « Fragments
hermétiques dans les Papyri Vindobonenses Graecae 29456 rº et 29828 rº » ,
dans E . Lucchesi et H . D . Saffrey (édit.),MémorialAndré- Jean Festugière. Anti
quité païenne et chrétienne. Vingt-cinq études réunies et présentées, coll.
« Cahiers d'orientalisme» 10 , Genève 1984 , p . 51-64 ; 40 J. Paramelle et J.-P.
Mahé, « Extraits hermétiques inédits dans un manuscrit d ' Oxford » , REG 104 ,
1991, p. 109- 139 ; 41 J.-P. Mahé, « Preliminary remarks on the demotic Book of
Thoth and the Greek Hermetica » , VChr 50, 1996 , p. 353-363.
ÉTUDES SUR LE CORPUS HERMETICUM
42 R . Reitzenstein , Poimandres, Leipzig 1904 ; 43 W . Kroll, art. « Hermes
Trismegistos » , RE VIII 1, 1912 , col. 792-823 ; 44 J. Kroll, Die Lehren des
Hermes Trismegistos, Münster 1914 , réimpr. 1928, VII -44 p. ; 45 G . van
Moorsel, The Mysteries of Hermes Trismegistus, Utrecht 1955 ; 46 A .J. Festu
gière, « L 'Hermétisme» , dans son recueil de travaux Hermétisme et mystique
648 HERMETICA H 79
païenne, Paris 1967, p. 28 -87 (version revue d'une étude parue dans le Bull. de
la société royale de Lund en 1947- 1948, p. 1-59) ; 47 A .J. Festugière, « Hermé
tisme et gnose païenne » , dans son recueil de travaux Hermétisme et mystique
païenne, Paris 1967, p. 88 -99 (précédemment paru dans l'Histoire générale des
religions, Paris 1945, t. III, p.61-65) ; 48 A . J. Festugière, « Hermetica » (1938),
dans son recueil de travaux Hermétisme etmystique païenne, Paris 1967, p . 100
120 (1 : Le baptême dans le cratère ; II : Le corps exécré par le soleil) ; 49 Jean
Doresse, « L 'Hermétisme égyptianisant» , dans Histoire des Religions, t. II
(publié sous la direction de H .-Ch . Puech ) : La formation des religions univer
selles et des religions du salut dans le monde méditerranéen et le Proche-Orient.
Les religions constituées en Occident et leurs contre -courants, coll. « Encyclo
pédie de la Pléiade» , 34 , Paris 1972, p. 430 -497 (bibliographie : p. 493-497) ;
50 J.-P . Mahé, « Le sens et la composition du traité hermétique L 'ogdoade et
l'ennéade, conservé dans le codex VI de Nag Hammadi» , RSR 48, 1974 , p . 54
65 ; 51 J.- P . Mahé, « Stobaei Hermetica XIX , 1 et les Définitions hermétiques
arméniennes » , REG 94 , 1981, p. 523 -525 ; 52 J. F. Horman, The text of the
Hermetic literature and the tendencies of itsmajor collections, Diss.,McMaster
Univ . Hammond, Ont., 1974 (microfiches) ; 53 H . Hornik , « The philosophical
Hermetica. Their history and meaning» , AAT 109, 1975, p . 343-392 ; 54 J. P .
Ponsing, « L 'origine égyptienne de la formule un -et-seul» , RHPHR 60, 1980,
p. 29-34 ; 55 F. di Carlo, Letteratura e ideologia dell'ermetismo, Foggia 1981,
214 p. ; 56 G . Filoramo, Le religioni di salvezza del mondo antico, II : L 'erme
tismo filosofico, Torino 1979, 134 p . ; 57 G . Sfameni Gasparro , Gnostica et
hermetica. Saggi sullo gnosticismo e sull’ermetismo, coll. « Nuovi Saggi » 82,
Roma 1982, 336 p. ; 58 F . Daumas, « Le fonds égyptien de l'hermétisme» , dans
J. Ries, Y . Janssens et J. M . Sevrin (édit.),Gnosticisme etmonde hellénistique,
Actes du Colloque de Louvain -la -Neuve (11-14 mars 1980 ), coll. « Publ. de
l'Inst. Orientaliste de Louvain » 27, Leuven 1982, p. 3-25 ; 59 E . Iversen ,
Egyptian and hermetic doctrine, coll. « Opuscula Graecolatina» 27, København
1984 , 71 p. ;60 F . Bonardel, « L'hermétisme» , coll. « Que sais -je ? », Paris
1985, 128 p . ; 61 J.- P . Mahé, « La création dans les Hermetica » , RecAug 21,
1986 , p. 3-53 ; 62 C .Moreschini, « Per una storia dell'ermetismo latino » , dans
Le trasformazioni della cultura nella tarda antichità , coll. « Storia » 19, Roma
1985 , t. II, p . 529-543 ; 63 D . J. M . Whitehouse, The hymns of the Corpus Her
meticum . Forms with a diverse functional history, Diss., Harvard University
Cambridge,MA, 1985 , 458 p. ; 64 G . Fowden , The Egyptian Hermes. A histori
cal approach to late paganism , Cambridge 1986 , 244 p . ; 65 N . Makris,
« Hermès Trismégiste et l'Égypte » , EPh 1987, p. 169- 178 ; 66 H .J. Sheppard ,
A . Kehl et Robert McL . Wilson, art. « Hermetik » , RLAC XIV , 1988, col. 780
807 (Pagane Hermetik , Vulgär-Hermetik , Gelehrte Hermetik ; Hermetik und
Judentum , Hermetik und Christentum ) ; 67 G . Luck , « The doctrine of salvation
in the Hermetic writings » , SCent 8, 1991, p . 31-41 ;68 J.-P .Mahé, « La voie
d 'immortalité à la lumière des Hermetica de Nag Hammadi et de découvertes
plus récentes », VChr 40, 1991, p. 347-375 ; 69 Th .McAllister Scott, Egyptian
H 79 HERMETICA 649
elements in Hermetic literature, Diss. Harvard Univ., Cambridge, MA, 1991,
277 p. (microfilm ) ; 70 J.-P. Mahé, « Le rôle de l' élément astrologique dans les
écrits philosophiques d 'Hermès Trismégiste » , dans J.-J. Abry (édit.), Les
tablettes astrologiques de Grand (Vosges) et l'astrologie en Gaule romaine,
« Coll. du Centre d ' études romaines et gallo romaines » N . S . 12 , Lyon /Paris
1993, p. 161- 167 ; 71 G . Quispel, « Hermes Trismegistus and the origins of
Gnosticism », VChr 46 , 1991, p . 1-19.
INFLUENCE ET RÉCEPTION
72 J. Pépin , « Grégoire de Nazianze, lecteur de la littérature hermétique » ,
VChr 36 , 1982 , p . 251-260 ; 73 S . Giversen , « Hermetic communities ? » dans
S. J. Podemann (édit.), Rethinking religion. Studies in the Hellenistic process,
coll. « Opusc. Graecolatina Suppl. Musei Tusculani » 30 , København 1989 ,
p. 49- 54 ; 74 Hermes Trismegistus, pater philosophorum . Tektsgeschiedenis van
het Corpus Hermeticum . Tentoonstelling in de Bibliotheca Philosophica Herme
tica, Amsterdam 1990, Amsterdam 1991,XX -152 p . ill.
SURVIE MÉDIÉVALE ET ORIENTALE
Pour l'hermétisme arabe, voir Massignon 2 .
75 L . Sturlese, « Saints et magiciens. Albert le Grand en face d'Hermès
Trismégiste » , ArchPhilos 43, 1980, p.615-634 ; 76 A. Bausani, « Il Kitab 'Ard
Miftāh an -Nujām attribuito a Hermes. Prima traduzione araba di un testo astro
logico ? » ,MAL 27, 1983, p . 81-141 ; 77 I. Merkel et A . G . Debus ( édit.), Herme
ticism and the Renaissance. Intellectual history and the occult in early modern
Europe, coll. « Folger Institute symposia », Washington 1988, 438 p. Contient
(notamment) les études suivantes : 78 B . Copenhaver, « Hermes Trismegistus,
Proclus and the question of a philosophy of magic in the Renaissance » , p. 79
110 ; 79 W . C .Grese, « Magic in Hellenistic hermeticism » , p. 45-58 ; 80 M . Idel,
« Hermeticism and judaism » , p . 59- 76 ; 81 J. Scarborough, « Hermetic and rela
ted texts in classical antiquity » , p. 19 -44 ; 82 P . Zambelli, « Scholastic and
humanist views of hermeticism and witchcraft » , p. 125 - 153 ; 83 Présence de
l'hermétisme = Cahiers de l'hermétisme, Paris 1988, 239 p . Contient les études
suivantes : 84 M .J. Allen , « Marsile Ficin , Hermès et le Corpus Hermeticum » ,
p . 110 -119 ; 85 A . Faivre, « La postérité de l’hermétisme alexandrin (repères
historiques et bibliographiques) » , p. 13-23 ; 86 A . Faivre , « D 'Hermès-Mercure
à Hermès Trismégiste . Au confluent du mythe et du mythique » , p. 24 -48 ; 87 I.
Pantin , « Les commentaires de Lefèvre d'Étaples au Corpus Hermeticum , p . 167
183 ; 88 A . Grafton , « Higher criticism ancient and modern . The lamentable
deaths of Hermes and the Sibyls », dans A . C . Dionisotti, A . Grafton et J. Kraye
(édit.), The uses of Greek and Latin . Historical essays, coll. « Warburg Inst.
Surveys and Texts » 16 , London 1988 , p . 155- 170 (Isaac Casaubon et le Corpus
Hermeticum ) ; 89 P . Lucentini, « L 'Asclepius ermetico nel secolo XII » , dans
H . J. Westra (édit.), From Athens to Chartres. Neoplatonism and medieval
thought. Studies in honour of Édouard Jeauneau, coll. « Studien und Texte zur
650 HERMETICA H79
Geistesgeschichte des Mittelalters » 35, Leiden 1992, p . 397-420 ; 90 Id., « Il
commento all’Asclepius del Vaticano Ottoboniano lat. 811 » , dans M . Ciliberto e
C . Varoli (édit.), Filosofia e cultura. Per Eugenio Garin , « Collana Accademia» ,
Roma 1991, t. I, p. 39-59 (édition du commentaire ) ; 91 Id . « Glosae super
Trismegistum : un commento medievale all' Asclepius ermetico » , AHMA 62,
1995, p. 189-293 (rés, en angl. & en ital.] ; 92 F.A . Yates, Giordano Bruno and
the Hermetic tradition , London 1964.
RICHARD GOULET.
83 HERMINUS RE 2 II
Péripatéticien , commentateur d'Aristote , peut- être originaire de Pergame.
Édition des témoignages et des fragments. 1 H . Schmidt, DeHermino Peri
patetico , Diss .,Marburg 1907, 45 p .
Études. 2 H . von Arnim , art. « Herminos » 2, RE VIII 1, 1913, col. 835 (11
lignes !) ; 3 P. Moraux, Der Aristotelismus bei der Griechen , t. II, p. 361-398 ;
4 H . B . Gottschalk , « Aristotelian philosophy in the Roman world from the time
of Cicero to the end of the second century AD » , ANRW II 36 , 2 ,1987, p . 1158
1159 ; 5 P . Courcelle , Les Lettres grecques en Occident de Macrobe à
Cassiodore , Paris 19482, p. 266 et n . 2 (sur Boèce et Herminus).
Vie. La présente notice se fonde essentiellement sur l'excellent chapitre
consacré à Herminus par P .Moraux 3. Les renseignements biographiques sur
Herminus sont rares et parfois ambigus. Alexandre d 'Aphrodise présente Hermi
nus comme l'un de ses maîtres (ap. Simplicius, in De caelo , p. 430 , 32 -33
Heiberg ; cf.* A 112 ). Il fut peut-être disciple du commentateur d 'Aristote,
Aspasius (P A 461), à Pergame; dans sa discussion des témoignages grecs,
Moraux 3 , p. 361-362, laisse la question ouverte (p . 362, n . 7) ; il s'agit de
(a ) Simpl. in De caelo, p .430 , 32-33 et 431, 10 -11 Heiberg (ces deux passages
indiquent seulement, sur un point particulier, une identité de doctrine entre les
deux commentateurs) et de (b) Galien , De propriorum animi cuiuslibet affec
tuum dignotione et curatione 8 de Boer (= De cognoscendis curandisque animi
morbis 8, p . 32 , 5 - 7 Marquardt ; trad . fr. dans 6 Galien , L 'âme et ses passions,
introd., trad. et notes par V . Barras, T . Birchler et A .-N . Morand, coll. « La roue
à livres » , Paris 1995, p . 31) ; dans ce passage, Galien (129 - après 200 ) nous
apprend que lui-même avait suivi entre autres les leçons, après sa 14e année
H 83 HERMINUS 653
(donc vers 144/5), d 'un concitoyen « disciple du péripatéticien Aspasios» qui
revenait d'un long voyage à l'étranger (ě ånodnuias Maxpãs ; il devait avoir
au moins 30 ans ( au moins 25 ans pourMoraux 3 , p . 362]). Or, la tradition arabe
nous a conservé en traduction un traité d 'Alexandre d 'Aphrodise (cf. 7 R .
Rescher et M .E . Marmura , The refutation by Alexander of Aphrodisias of
Galen 's treatise of the theory ofmotion , Islamabad 1965 (texte et trad. anglaise])
où on apprend que Galien avait adressé à Herminus une lettre dans laquelle il
critiquait la thèse aristotélicienne selon laquelle « toutmû est mû par un moteur»
(le nom d'Herminus se lit au prix d'une infime correction, cf. Moraux 3, p. 362
n . 6 ; mais « le texte est ambigu » comme le souligne 8 P . Thillet, Alexandre
d 'Aphrodise, Traité du destin , CUF, Paris 1984, p . XVlII n . 1). En révélant
l'existence d 'une relation personnelle entre Galien et Herminus, ce témoignage
viendrait renforcer l'hypothèse selon laquelle le « disciple du péripatéticien
Aspasius » dont Galien fut l'élève pourrait être Herminus (Moraux 3 , p . 362 n . 7,
envisage aussi comme possible l'identification de ce personnage anonyme avec
le péripatéticien Eudème de Pergame (PE 92 ) ; cette dernière hypothèse est la
seule retenue dans le chapitre du même ouvrage consacré à Galien , p . 687 n . 1 ;
cf. encore Ibid ., p . 226 , n. 3 ; contra , Gottschalk 4 , p. 1158 ). Si on accepte ce
raisonnement, on conclura qu'Herminus était originaire de Pergame.
Par ailleurs, on peutpenser qu'il était à peu près contemporain du philosophe
cynique Démonax de Chypre ( D 74 : ca 70 -170 ; Moraux 3 , p . 361: ca 80
175/180) dont Lucien (Demonax 56) nous a conservé une pointe lancée contre
Herminus (repòs Epuīvov Tòv ’Aplototełıxóv). Alexandre d'Aphrodise (né
au début de la seconde moitié du 11 s ., * A 112) aurait suivi, on ne sait dans
quelle cité, les cours d 'Herminus entre, disons, 175 et 185.
Pour les dates, Moraux 3, p. 363, propose ca 120 à 180 /190 (notons toutefois
que, dans son raisonnement, Moraux s 'appuie sur l'identification d'Herminus
avec le « disciple du péripatéticien Aspasios» , dontGalien aurait suivi les cours
« vers 145 » ; pour la raison indiquée ci-dessus [le maître anonyme de Galien
devait avoir au moins 30 ans en 144/5 ), nous conclurions à une date de naissance
légèrement plus haute , ca 115 [sous l'hypothèse bien entendu de l' identité
d'Herminus et du « disciple du péripatéticien Aspasius» ]).
Il faut se garder de confondre notre auteur avec le stoïcien homonyme
(» H 84 ) que Longin a entendu dans sa jeunesse, vers 220 (Porphyre, Vita
Plotini20, 47).
Euvres. D 'après nos sources, Herminus a commenté principalement l' Orga
non d' Aristote. Il ne subsiste de ces commentaires que de maigres fragments et
témoignages, commentésavec détails parMoraux 3.
(1) Commentaire sur les Catégories (Schmidt 1 , p . 11-21;Moraux 3, p . 363
374). On trouve dans le Commentaire de Simplicius sur les Catégories
d 'Aristote (CAG VIII) la plupart des fragments du commentaire d 'Herminus.
D 'après Simplicius (in Cat., p . 13, 11 sqq. Kalbfleisch ) et Porphyre (in Cat.,
p . 59, 15- 19 Busse ), Herminus avait compris correctement l'intention d ' Aristote :
les Catégories traitent des sons vocaux (ouvai) en tant qu'ils signifient des réali
654 HERMINUS H 83
tés (ntpáyuara ). A partir d 'Olympiodore (Proleg ., p . 18, 23-32 Busse), Hermi
nus passe , on ne saitau juste pourquoi,pour avoir défendu la thèse selon laquelle
les Catégories traitaient des seules réalités (htepi Móvwv npayuátwv) ; cf.
Schmidt 1, p. 12.
(2 ) Commentaire sur le De interpretatione (Schmidt 1, p. 21- 32 ;Moraux 3,
p . 374 - 382). SurHerminus et Boèce (» B 41), cf. 9 J.Magee, Boethius on signi
fication and mind, coll. « Philosophia antiqua » , Leiden 1989, p . 9 - 14 (à propos
de De int. 16a6 -8) et 93-95 (critique d 'Herminus).
(3 ) Commentaire sur les Premiers analytiques (Schmidt 1, p . 32-39 ;Moraux
3, p. 382-394).
(4 ) Commentaire sur les Topiques (Schmidt 1, p . 39-41 ; Moraux 3, p . 394
396 ).
(5 ) Commentaire sur le De caelo (?) (Schmidt 1 , p . 42-44 ;Moraux 3, p . 396
398). Il s'agit en fait d'une conférence à laquelle a assisté Alexandre (Alex . ap.
Simpl., in De caelo , p. 380 , 3-5 Heiberg); la thèse défendue par Herminus était
la suivante : la cause de l'éternité du mouvement céleste est due à la présence,
immanente au ciel, de l'âme céleste et non pas, semble-t- il, à l'existence d 'un
premier moteur transcendant.
Les jugements que porte Moraux 3 sur Herminus comme commentateur sont
plutôt mitigés : Herminus ne se montre pas comme un maître particulièrement
doué (p. 394) et, quand il soulève de vrais problèmes, il se contente trop souvent
d 'une interprétation superficielle (p . 396 ).
JEAN -PIERRE SCHNEIDER .
84 HERMINUS RE 1 M III
Stoïcien du IIIe siècle. Dans la préface de son livre Sur la fin , le philosophe
Longin le range parmiceux qui se sont contentés d 'enseigner sans vouloir écrire
(Porphyre, Vita Plotini 20, 47).
LUC BRISSON.
85 HERMINUS PLRE II :2 DM V
D 'abord curiale à Péluse, il devint par la suite gouverneur d'une province
voisine (Augustamnique II ?). Converti au christianisme par Isidore de Péluse,
qui lui adressa plusieurs lettres d'explication de ses rites et de ses doctrines (Ep .
18 , 43, 126 , 136 , 229, 230 , 242-247, 287, 288 , 317 , 334, 537, 637, 719, 735 ,
736 , 995, 1053, 1055 , 1170, 1175 , 1176 , 1372 , 1373, 1551, 1584 , 1590, 1591,
1596 , 1628, 1629, 1679, 1770 , 1771, 1867, 1946 ; les Ep. 1174 , 1701, 1702,
1725 sont adressées à Herminus et d 'autres correspondants : cf. P. Évieux, Isi
dore de Péluse , Paris 1995 , p . 117 n . 131). Alors qu 'il est gouverneur, Isidore
l'invite à rester fidèle à la philosophie qui est la sienne, malgré l'élévation à
laquelle il est parvenu .
PIERRE MARAVAL.
H 86 HERMIPPE DE SMYRNE 655
86 HERMIPPE DE SMYRNE RE 6 MF III
“ Péripatéticien ” , auteur de nombreuses biographies .
Éditions. Témoignages et fragments ont été réunis par 1 F. Wehrli, Hermip
pos der Kallimacheer, coll. « Die Schule des Aristoteles» , Supplementband I,
Basel/Stuttgart 1974 , et, plus récemment, par 2 F. Jacoby, “Die Fragmente der
griechischen Historiker” Continued, part IV : Biography and Antiquarian Litera
ture edited by G . Schepens, t. IV A : Biography, Fascicle 3 : Hermippos of
Smyrna by J. Bollansée, Leiden 1999, XXXII-631 p. On trouvera les témoignages
papyrologiques, accompagnés d 'une abondante bibliographie , dans 3 CPF I 1 * *
n° 59, p. 249- 267 (cf. aussi CPFI1*, p. 50-51).
Études d 'orientation . 4 St. Heibges, art. « Hermippos » 6 , RE VIII, 1913,
col. 845 -852 ; 5 F . Wehrli, « Der Peripatos bis zum Beginn der römischen Kai
serzeit » , GGP, Antike 3, 1983, p . 583-584 ; 6 R . Pfeiffer, History of classical
scholarship , t. I: From the beginnings to the end of the Hellenistic Age, Oxford
1968 , p. 150 -151 ; 7 P. M . Fraser, Ptolemaic Alexandria , Oxford 1972 , t. I,
p. 780 -781 ; t. II, p . 656 n. 52 ; 8 A . J. Podlecki, « The Peripatetics as literary cri
tics » , Phoenix 23, 1969, p. 114 -137 (surtout p. 127- 128).
Sur Hermippe commebiographe, cf. 9 F . Leo, Die griechisch -römische Bio
graphie nach ihrer literarischen Form , Leipzig 1901, p . 124-128 ; 10 O . Gigon,
art. « Biographie . A . Griechische Biographie » , LAW , col. 469-471 ; 11 A . Dihle,
Studien zur griechischen Biographie, Göttingen 1956 ; 12 A . Momigliano, The
Development of Greek biography, Cambridge, Mass. 1971 (trad. fr., Naissance
de la biographie en Grèce ancienne, Strasbourg 1991); 13 Id ., « Second thoughts
on Greek biography » , dans Quinto contributo alla storia degli studi classici e
delmondo antico , Roma 1975, p . 33 -47 (trad. fr. dans Id ., Problèmes d 'historio
graphie ancienne et moderne , coll. « Bibliothèque des Histoires» , Paris 1983,
p . 104 - 119 ; 14 F . Wehrli, « Von der antiken Biographie » , dans H . Haffter und
Th . Szlesak (édit.), Theoria und humanitas. Gesammelte Schriften zur antiken
Gedankenwelt (Zum 70. Geburtstag von F. Wehrli), Zürich München 1972,
p. 237-241 ; 15 G . Arrighetti, « Riflessione sulla letteratura e biografia presso i
Greci» , dans La philologie grecque à l'époque hellénistique et romaine, coll.
« Entretiens sur l' Antiquité Classique » 40 , Vandæuvres/Genève 1994 , p . 212
249.
Vie. Connu principalement comme biographe, Hermippe est par deux fois
qualifié de « péripatéticien » chez les auteurs anciens quilementionnent (fr. 1 et
96 Wehrli), ce qui se justifie par le genre littéraire adopté, mais n 'indique pas
une formation effective au sein du Péripatos (Wehrli 1, p. 7 ; Pfeiffer 6 , p. 150 ;
cf aussi 16 J. P. Lynch, Aristotle 's school. A study of a Greek educational insti
tution , Berkeley 1972, p. 136 sqq.). Il reçoit aussi l'épithète de « callimaquéen »
(Karipaxelos), sans doute en tant que disciple de Callimaque de Cyrène
(PC 22), dont il prolonge l’æuvre érudite en la popularisant.
Il serait originaire de Smyrne selon un unique témoignage (fr. 93 Wehrli
[Athénée VII, 327 b ), auquel il faut peut-être ajouter POxy 2176 fr. 12 , 3 (CPF I
1* *, p . 267]). Il exerce sans doute son activité à Alexandrie où il doit avoir pro
656 HERMIPPE DE SMYRNE H 86
fité de la fameuse bibliothèque (Pfeiffer 6 , p . 129). Sa relation avec Callimaque
(ca 310-240) – vers la fin de la vie de ce dernier ( R . Pfeiffer , Callimachus,
Oxford, vol. I, 1949, p . 780 ) - , et la mention qu'il fait de la mort de Chrysippe
[MC 119 ] (entre 208/7 et 205/4 ( ?) ; fr. 59 Wehrli) permettent de placer son
activité dans la seconde moitié du III° s. av. J.-C .
Euvres. D 'après les témoignages conservés, son æuvre se divise en deux
catégories.
I. Des vies (Bio ) de philosophes, de législateurs, de poètes, d 'orateurs et
d 'historiens (fr. 1-94 Wehrli ; jugement d'ensemble de l'activité biographique
d 'Hermippe : Wehrli 1 , p . 102 -106 ). A côté de la référence générale év tois
Blouc (fr. 11, 30 , 45 Wehrli (trois passages tirés de D .L .) ; sur le sens de cette
dénomination, cf. Wehrli 1, p. 102 ), les auteurs anciens mentionnent les œuvres
particulières suivantes :
(1 ) HepiMáywv, Sur les mages (au moins deux livres, cf. fr. 3 Wehrli). Fr. 2
4 Wehrli.
(2) Hepi tõv Entà oop @ v , Sur les sept sages ou Tepì tớv gobūv, Sur les
sages ( au moins quatre livres, cf. fr. 16 Wehrli). Fr. 5- 16 Wehrli. On a reconnu
en Hermippe la source principale de la Vie de Solon de Plutarque (17 P. Von der
Mühll, « Antiker Historismus in Plutarchs Biographie des Solon » , Klio 35, 1942,
p . 89- 102 ;Momigliano 13, p . 41 ; 18 A .Martina, « Plutarco, vita di Solone 2 , 1 » ,
RIL 113, 1979, p. 88- 98 ).
(3) Tepi Iudayópov, Sur Pythagore (au moins deux livres, cf. fr. 22 et 23
Wehrli). Fr. 18-24 Wehrli. Cf. 19 W . Burkert, Lore and science, passim .
(4) Tepi ’AplotoTÉROUS, Sur Aristote (au moins deux livres, cf. fr. 46, 47a,
48, 49 Wehrli). Fr. 44-49 Wehrli. Sur l'hypothèse de l' existence d 'un catalogue
des ouvrages d 'Aristote semblable à celui attesté pour Théophraste (fr. 54 et 55
Wehrli), qui aurait pu faire partie de la biographie d 'Aristote et que Diogène
Laërce (V 22-27 ) aurait utilisé dans sa vie d 'Aristote, cf. 20 P . Moraux, Les
listes anciennes des ouvrages d'Aristote, coll. « Aristote - Traductions et
Études » 4 , Louvain 1951, p. 221-233 (la source ultime de Diogène n 'est pas
Hermippe, mais Ariston de Céos [ A 396 ]), 21 I. Düring, Aristotle in the
ancientbiographical tradition , coll. « Acta Universitatis Gothoburgensis» 68,
Göteborg 1957, p. 79 (Hermippe est la source principale de toute la vie
d 'Aristote de Diogène), 22 I. Düring, « Ariston or Hermippus ?» , C & M 17,
1956 , p . 11-21 (critique de la thèse de Moraux 20), 23 A . H . Chroust, « A brief
account of the traditional vitae Aristotelis » , REG 77 , 1964, p . 50-69 ; cf. encore
24 J.Mejer, Diogenes Laertius and his Hellenistic background, coll. « Hermes
Einzelschriften » 40, Wiesbaden 1978 , p . 33 n . 68. Sur la place de ce catalogue
dans la tradition , voir la notice « Aristote de Stagire » A 414 , DPLA I, 1989 ,
p .424, et 25 P.Moraux, Aristotelismus,t. I, p .4 n. 2.
(5) Tepi Oeoppáotov, Sur Théophraste. Fr. 51-55 Wehrli. On apprend par
une scholie figurant à la fin de certains manuscrits de la Métaphysique de Théo
phraste qu 'Hermippe avait dressé un catalogue des æuvres de l'Érésien , d 'où,
H 86 HERMIPPE DE SMYRNE 657
comme chez Andronicus, la Métaphysique était absente (fr. 54 Wehrli) ; sur cette
question, cf. 26 Théophraste,Métaphysique, texte édité, traduit et annoté par A .
Laks et G . W . Most, CUF, Paris 1993, p . XI-XVIII. Parmi les élèves de Théo
phraste, qui étaientpeut- être traités dans cette monographie, figuraient Lysima
que (fr.56), Lycon (fr. 57), Démétrius de Phalère (fr. 58).
(6 ) Ilɛpi Copyíou, Sur Gorgias. Fr. 63 Wehrli.
(7 ) Tepi( ToŨ) ’looxpátous, Sur Isocrate. Fr. 64-66 Wehrli.
(8 ) Nepi tõv 'looupátoug Maontāv, Sur les disciples d 'Isocrate (au moins
trois livres, cf. fr. 68 a II Wehrli). Fr.67-78 Wehrli.
(9 ) lepi (tūv) vouodetāv, Sur les législateurs (au moins six livres, cf. fr. 88
Wehrli). Fr. 80 -88 Wehrli. Pour le fr. 82 Wehrli, cf. CPF I 1* * , p . 249-257 (I.
Gallo ) ; le fragment conservé appartient à la fin du livre I et au début du livre II
de l'Epitomé du ſlepi vouobetwv rédigé par Héraclide Lembos ( * H 61).
(10) ɛ [pi t ]āv årò pilooopias eis (åp ]vo ! [Elíaç xai duvaotellas
uedeo ]mxótwv, Sur ceux qui sont passés de la philosophie à la réalisation
d 'exploits et à l'exercice du pouvoir ; cf. fr. 89 Wehrli, qui adopte la lecture eis
(Tupavvídjas (Acad. Philos. Ind. Herc., col. XI 4 - 7 Mekler, qui lisait eis
(åp ]ıoğ[ɛ]ļas); la lecture adoptée ici est celle de T . Dorandi, Filodemo, Storia
dei filosofi [.] Platone e l'Academia (PHerc. 1021 e 164 ), edizione, traduzione e
commento a cura di T . D ., coll. « La Scuola di Epicuro » 12,Napoli 1991, p . 142
(cf. p. 91 n . 350). Le même ouvrage est cité sous une formelégèrement différen
te et abrégée dans l' Ind. Stoic. Herc., col. XVI 3 -6 : Hepi tõv å [tò piroloogias
siç duva (otellas ueſtaJOTÁVW ( V , Sur ceux qui passèrent de la philosophie à
l'exercice du pouvoir ; cf. fr. 90 Wehrli ; la lecture adoptée ici est celle de T .
Dorandi, Filodemo, Storia dei filosofi. La Stoà da Zenone a Panezio (PHerc.
1018), edizione, traduzione e commento a cura di T . D ., coll. « Philosophia Anti
qua » 60, Leiden 1994,p .68.
(11) Euvaywyn tõv xarőç åvaowvNÉVTWV ŠE 'Ouńpov, Recueil d 'ensei
gnements moraux tirés d 'Homère. Fr. 92 Wehrli.
(12 ) Tepi 'Innovaxtos, Sur Hipponax. Fr. 93 Wehrli.
En outre, les philosophes dont on sait qu 'Hermippe avait parlé – ce qui ne
veut pas dire qu 'il avait consacré une monographie à chacun – sont les suivants
(avec mention des fragments de l' édition Wehrli 1) : Phérécyde de Syros (fr. 17),
Empédocle (fr. 25 -27), Zénon d 'Elée ( fr. 28), Héraclite (fr. 29), Anaxagore (fr .
30) , Démocrite ( fr. 31), Socrate ( fr. 32 ), Eschine le Socratique ? ( fr. 33),
Antisthène (fr. 34), Stilpon (fr. 35 ), Alexinos (fr. 36 ), Philiscos (fr. 37),Méné
dème d ' Érétrie (fr. 38 ), Ménippe (fr. 39), Platon (fr. 40 -41), Héraclide le Pon
tique (fr. 42), Arcésilas (fr. 43), Callisthène (fr. 50 ), Lysimaque (fr. 56 ), Lycon
( fr. 57), Démétrius de Phalère (fr. 58 ), Chrysippe (fr. 59), Épicure (fr. 60 -61) .
II. Des considérations mythologiques sur les astres et sur les constellations
(fr. 95-102 Wehrli (« Sternsagen » ]).
Aucun titre ne nous est conservé. Wehrli ( 1 , p . 38) suggère Dalvóueva ? (cf.
fr. 95 ), Kataomplouoi [sic ] ?). Le fr. 99 Wehrli (Hygin , De astronomia II 4 ,
658 HERMIPPE DE SMYRNE H 86
p . 25 Viré) comporte l'expression « Hermippus qui de sideribus ( < htepi tõv
đotépwv> ) scripsit»,mais l'auteur renvoie au contenu de l'ouvrage plutôt qu 'il
n 'en donne le titre . Dans le fr. 102 Wehrli (Athénée XI, 478 a), Hermippe est
qualifié d'åotporoyıxós (= auteurde recherches sur les astres).
Plus d'un tiers des témoignages sur les biographies d 'Hermippe provient de
Diogène Laërce, ce qui laisse penser que notre biographe a été utilisé, directe
ment ou indirectement, par Diogène (sur cette question , cf. la bibliographie de
Wehrli 1 , p. 107 - 108, et Mejer 24, p. 32-34 ; cf. aussi le compte rendu de 27 M .
Gigante, Gnomon 55 , 1983, p. 9- 14.
On peut supposer qu 'une partie plus ou moins importante ( en tout cas fr. 5 ;
18 ; 82 Wehrli) des témoignages sur les Vies a été empruntée à un abrégé; sans
doute celui d'Héraclide Lembos (2+ H 61).
JEAN -PIERRE SCHNEIDER .
99 HERMOTIME DE CLAZOMÈNES RE 2
Figure légendaire de thaumaturge.
Selon le témoignage d 'Héraclide le Pontique (apud D .L . VIII 4 -5 = Héraclide
le Pontique, fr. 89 Wehrli), une des incarnations antérieures de l'âme de Pytha
gore se réalisa dans un certain Hermotime (Aithalidès, Euphorbe, Hermotime,
puis Pyrrhos de Délos et enfin Pythagore ; voir aussi Porphyre, V. Pyth. 45 ; Hip
polyte , Refut. haer., p . 7 Miller (Oxford 1851) = p . 60, 46 Marcovich (Berlin
1986 ] = DDG 557, 5- 8 ). Hermotime, pour prouver qu'il avait été autrefois
Euphorbe (à l'époque de la Guerre de Troie), aurait reconnu , dans le temple
d 'Apollon du sanctuaire des Branchides, le bouclier dédié par Ménélas à
Apollon lors de son voyage de retour de Troie ; ce bouclier était réduit en pièces
et il n 'en restait que la décoration en ivoire .
Selon de nombreux témoignages, l'âme d 'Hermotime pouvait abandonner son
corps et partir en voyage, revenant ensuite dans son corps; ses ennemis, grâce à
la trahison de sa femme, avaient jeté son corps sans âme dans les flammes ; les
citoyens de Clazomènes auraient dédommagé Hermotime en lui élevant un
temple. Voir Pline, Nat. Hist. VII 174 ; Plutarque, De gen . Socr. 22, p. 592c (où
le personnage est appelé Hermodore de Clazomènes); Lucien, Encomium mus
cae 7 ; Tertullien , De an . II 44 , 1; Origène, Contra Celsum III 3, 32 ; Hippolyte ,
Ref. haer. p. 7 M .
Selon Aristote,Métaph. 984 b 18- 20 , Hermotime aurait anticipé la doctrine du
voûç proposée par son compatriote Anaxagore ; cf. Aristote, fr. 61 Rose ' =
Jamblique, Protr. 8 (p . 48, 9-21 Pistelli), où il est dit que la thèse selon laquelle
“ le nous est le dieu en nous” remonte à Hermotime ou à Anaxagore ; voir sur ce
thème 1 M . Detienne, « Les origines religieuses de la notion de l'intellect: Her
motime et Anaxagore », RPhilos 89, 1964, p. 167-178. Il est possible qu'Aristote
fasse allusion à Hermotime dans De an. 404 a 25 - 26 . Selon 2 A . H . Chroust,
« Who is Al-Kindi's "Greek King” (Frag. 11,Ross) of Aristotle's Eudemus ? »,
H 100 HÉRODICOS DE BABYLONIE 669
The Modern Schoolman 1972-1973, p . 379-381, à propos d'un témoignage d ’Al
Kindi, God. Taimuriyye Falsafa 55 = Arist. fr. 11 Ross (Eudemus), remontant
probablement à Aristote , il faudrait reconnaître Hermotime dans le grand roi
dont l'âmeentra en extase et qui prophétisait de façon infaillible les événements
à venir en se détachant des liens avec le corps.
BRUNO CENTRONE.
99a HERMOTIME DE COLOPHON RE 3 FIV
Mathématicien , peut-être membre de l'Ancienne Académie ,mentionné dans
le répertoire desmathématiciens utilisé par Proclus, Commentaire sur le Premier
livre des Éléments d 'Euclide, p . 67, 20 Hertlein : « Hermotimos de Colophon fit
progresser les théories élaborées avant lui par Eudoxe ( E 98 ) et par Théétète .
Il découvrit plusieurs propositions des éléments et énonça quelques-uns des
lieux » (trad . Lasserre ). Cette mention d 'Hermotime vient après une phrase où
Proclus déclare, à propos d 'autres mathématiciens : « Ces mathématiciens , donc,
séjournaient ensemble à l'Académie et y poursuivaient en commun leurs
recherches » .
Cf. 1 C . R . Tittel, art. « Hermotimos aus Colophon » 3, RE VIII 1, 1912 , col.
905 ; 2 F . Lasserre (édit.), De Léodamas de Thasos à Philippe d 'Oponte . Témoi
gnages et Fragments, édités, traduits et commentés par F . L ., coll. « La Scuola di
Platone» 2 ,Napoli 1987,n° 17 , p. 145-148 (textes ), 351- 358 (traduction ), 577
582 (commentaire ). Le passage de Proclus est également traduit par 3 P . Ver
Eecke, Proclus de Lycie. Les commentaires sur le premier livre des Éléments
d 'Euclide, « Collection de travaux de l'Académie Internationale d 'Histoire des
Sciences» 1, Bruges 1948, p. 60-61, et par 4 G . R .Morrow , Proclus. A commen
tary on the First Book of Euclid ' s Elements. Translated with Introduction and
Notes by G . R . M ., Princeton Univ . Press 1970, trad. p . 56 .
Selon Lasserre 1, p. 435, la mention d'Hermotime chez Proclus à la suite des
mathématiciens académiciens, impliquerait qu'il n 'a pas séjourné lui-même à
l'Académie ou qu'il y a travaillé à une époque plus tardive que celle d 'Amyclas
( A 149) et de ses condisciples. « Mais il a développé les théories d ’ Eudoxe et
de Théétète , et c 'est ce qui lui vaut d 'avoir été rattaché néanmoins à l' école de
Platon par Philippe ».
Lasserre rapproche du témoignage unique de Proclus quelques passages
d 'Aristote, d’Euclide et d 'Apollonius de Pergé qui font mention de découvertes
mathématiques qui pourraient dater de l' époque d'Hermotime.
RICHARD GOULET.
100 HÉRODICOS DE BABYLONIE RE 1 MII
Philologue de l'École de Pergame, originaire de la province de Babylone
(Baburuvios : Athénée V , 222 a ), i.e. de Séleucie sur le Tigre .
Disciple de Cratès deMallos (* C 202), il voit, à l'instar de son maître, en
Homère la source de toute connaissance : astronomie , mathématiques, géogra
phie , médecine. S ' il peut intéresser l'histoire de la philosophie , ce n 'est pas par
670 HÉRODICOS DE BABYLONIE H 100
HÉROPHILE HIÉROPHILE
110 HESTIAIOS DEMILET IIIa ?
L 'épigramme funéraire d'Hestiaios, fils de Ménandros (W . Peek, GVI 2018 ),
proclame hautement son attachement au platonisme, sur un ton résolument
polémique, assez peu habituel dans les épitaphes. Les épicuriens y sont en effet
directement pris à partie : « ce n'est pas selon de vaines doctrines qu 'il amené sa
vie , celui qu'a accueilli ce tombeau ancestral, mais selon celles qui procèdent de
la sagesse, les doctrines hautement inspirées reçues de Socrate et de Platon , et
non l'hédonisme impie des épicuriens » .
BERNADETTE PUECH .
124 HIÉROCLÈS RE 17 DM II ?
Philosophe stoïcien .
A . Calvisius Taurus aimait citer, à propos d'Épicure , le mot du stoïcien Hié
roclès (viri sancti et gravis ) qu 'Aulu -Gelle (Aulu -Gelle IX 5, 8) rapporte en
grec : « Le plaisir est la fin, doctrine de courtisane ! Il n'y pas de providence,
doctrine quemême une courtisane ne partagerait pas...» (noovn téros,nópvns
dóyua: oủx fotiv TPóvola , oủ è trópung Bóyua ). Les épithètes qu 'Aulu -Gelle
attribue à ce philosophe donnent à entendre qu 'il s'agissait d'un contemporain ,
peut-être connu personnellement. Cf. 1 K . Praechter, « Hierokles der Stoiker» ,
Leipzig 1901, VII- 159 p ., repris dans Kleine Schriften , hrsg. von H . Dörrie , coll.
« Collectanea » 7 , Hildesheim 1973, p. 314 -468, notamment p .420 .
B. Plusieurs extraitsmoraux de ce philosophe ont été conservés par Stobée I
3, 53 et 54 et II 9, 7 (Tíva tpónov Deots xenotéov ); III 39, 34 - 36 ( Ilūs
natpidl xenotkov ); IV 22a, 21-24 (Ilepi yánov ) et IV 24a, 14 (Ilepi yauov ?) ;
IV 25, 53 ( Il @ s xpnotkov tots yoveŨOLV) ; IV 27, 20 (ſlepi biaðendíac ); IV
27, 23 (Ilūç ovYyEvéol xpnotkov) ; IV 28, 21 (Oixovoulxóc). Selon Praechter
1, p. 321, ces divers extraits proviendraient d'un même ouvrage et pouvaient
s'enchaîner les uns les autres dans l'ordre présenté par Stobée, peut- être séparés
par des développements disparus attestés par des références internes dans les
extraits.
Texte et traduction des extraits sur le mariage dans 2 E . Eyben, « De latere Stoa over het
huvelijk » , Hermeneus 50, 1978, p. 15 -32 ; 71-94 ; 337-358.
C . La Souda , s.v. 'Eunodúv, E 1032 , t. II, p. 262, 2-5 Adler , cite un extrait
des Philosophoumena d'un certain Hierocles (εν β' φιλοσοφουμένων περί των
pihooópwv), que le contenu invite à rapprocher de l'auteur de Stobée : « Lequel
d 'entre eux (scil. des philosophes) ne s'est pas marié, n 'a pas élevé des enfants
ou ne s'est pas soucié de sa richesse, quand aucun obstacle ne l'en empêchait ?»
Le terme éunodúv apparaît dans un contexte semblable dans un des extraits de
Stobée (cf. IV 22a, 22, li. 7): il nous faut, comme le sage, nous marier si une cir
constance particulière ne fait pas obstacle.Une autre lexis du même auteur, em
H 124 HIÉROCLÈS 687
pruntée cette fois au livre I des Philosophoumena, est citée s.v. Néoyn (1 309,
t. III, p. 252 , 26 -28). Trois autres, sans indication de l'ouvrage, ss. vv . Ola
éYOLUTO Yuvaltív (A 626 , t. II, p.62, 14 -15), OLÓti (4 1214 , t. II, p . 114, 22
23) et Téuvovou pápuaxov (T 301, t. IV , p . 522, 9 - 10 ).
Voir Michel Apostolios, Cent. 8 prov. 20 . Certaines de ces citations se retrouvent chez
d 'autres lexicographes, notamment chez Photius. Elles pourraient provenir d 'un recueil
atticiste . Cf. Praechter 1, p. 320 .
D . PBerol inv. 9780' [Pack2 536 ) (un papyrus que l'on a daté de la fin du 11€
siècle de notre ère, probablement découvert à Hermoupolis en Égypte ) a
conservé toute la première partie de l’’HOLXn Otolyeiwolc (Introduction élémen
taire à l' éthique) d 'un certain Hiéroclès .
Édition . 3 H . von Arnim (édit.), Hierokles. Ethische Elementarlehre (Papyrus
9780 ). Nebst den bei Stobäus erhaltenen ethischen Exzerpten aus Hierokles,
unter Mitwirkung von W . Schubart, coll. « Berliner Klassiker Texte » 4, Berlin
1906 (comprend en appendice les fragments de B. conservés par Stobée).Nou
velle édition par 4 G . Bastianini et A . A . Long, CPF I 1* * , 1992, nº 60, 1,
p . 268 -451 (introduction : p. 268-295, avec bibliographie, p. 268-270 ; édition
critique et traduction italienne : p . 296 - 367 ; commentaire : p. 368-451). A la
suite de la publication d 'un article de 5 V . Delle Donne , « Per una nuova edi
zione dei “ Principi di etica” di lerocle Stoico (P . Berol. 9780 ) », AIIS 10, 1987
1988 (paru en novembre 1991), p . 113- 144 , les deux mêmes auteurs ont apporté
des compléments et des corrections à leur édition dans 6 « Dopo la nuova edi
zione degli Elementi di etica di lerocle stoico (PBerol 97804) » , dans Studi su
codici e papiri filosofici. Platone, Aristotele, lerocle, coll. « Accademia Toscana
di Scienze e Lettere “ La Colombaria ” – Studi» 129, Firenze 1992, p. 221-249.
Voir également 7 V . Delle Donne, « Sulla nuova edizione della ’HOXN OTOL
xeiwolç di lerocle Stoico » , SIFC 13, 1995, p . 29-99 (notes critiques et exé
gétiques).
Traductions : – italienne : 8 U . Moricca, « Un trattato di etica stoica poco
conosciuto » , Bilychnis 34, 1930, p . 77- 100 ; Bastianini et Long 4 , p. 296 -367.
Voir aussi une mention (possible ) dans PVars. 5 : CPF I 1 *, nº 4, où un Hiéroclès est pré
senté comme l'auteur de neuf rouleaux dans un catalogue de livres où figurent des auteurs
stoïciens.
Le texte a été copié sur le verso du papyrus qui a conservé le commentaire de
Didyme sur les Philippiques de Démosthène (Pack? 339). L 'ouvrage se distingue
de la littérature stoïcienne d 'époque impériale (Musonius Rufus, Épictète
(PE 33] ou Marc-Aurèle) par son approche purement scientifique et scolaire,
dépourvue de toute parénèse ou de diatribe, sinon de recherche stylistique
(Bastianini et Long 4, p. 282). « Nous devons probablement considérer l'æuvre
de Hiéroclès comme un manuel attrayant, se proposant d'éviter l' aridité caracté
ristique d'ouvrages comme ceux de Chrysippe et de rendre l'éthique stoïcienne
accessible et surtout lisible » ( 4 , p . 283).
L 'identification de cet auteur stoïcien avec le stoïcien homonyme connu par
Aulu -Gelle et Stobée est généralement acceptée depuis von Arnim (3 , p. VIII-XI).
Avec Hiéroclès d 'Hyllarima en Carie ( H 127), notre auteur n 'a de commun
688 HIÉROCLÈS H 124
que le nom , nom par ailleurs fort répandu. Voir Praechter 1, qui, avantmême la
découverte du papyrus, avait montré que les fragments conservés par Stobée ne
pouvaient être attribués au néoplatonicien (MH 126 ) de la première moitié du ve
siècle, commentateur des Vers d'Or et auteur d'un traité Sur la providence cité
par Photius, comme le pensaient encore Mullach (I 408 a) et Zeller (III 2 ,p . 753
n . 4 ).
Il n 'estpas sûr que les fragments conservés par Stobée (qui se rattachent pour
le fond a un traité sur les καθήκοντα) aient fait partie de l' Ηθική στοιχείωσις,
comme le suggérait von Arnim (cf. 3, p. 284-286 ).
En tout cas, aucun indice n ’invite à attribuer à Hiéroclès une origine alexan
drine, comme le fait 9 O . Gigon , art. « Hierokles von Alexandria » , LAW , col.
1296 .
Cf. 10 H . von Arnim , art. « Hierokles » 17 , RE VIII 2 , 1913, col. 1479 ;
11 P. W . Van der Horst, « Hierocles the Stoic and the New Testament. A contri
bution to the Corpus Hellenisticum », NT 17 , 1975, p . 156 -160 ; 12 B . Inwood ,
« Hierocles. Theory and argument in the second century A .D .» , OSAPh 2 , 1984,
p. 151- 183 ; 13 G . Badalamenti, « lerocle stoico e il concetto di ouvaioOnouc » ,
ADFF 3 , 1987, p. 53-97 ; 14 M . Isnardi Parente, « lerocle stoico. Oikeiosis e
doveri sociali » , ANRW II 36 , 3, 1989, p. 2201-2226 ; 15 A .A . Long, « Notes on
Hierocles Stoicus apud Stobaeum », dans M . Serena Funghi (édit.), 0401
AIZHEIOE. Le Vie della ricerca. Studi in onore di F . Adorno, Firenze 1996 ,
p. 299-309.
RICHARD GOULET.
sciences mathématiques, est la télestique, qui comprend tous les rites liés aux
différents cultes des Cités (In Carm . aur. XXVI, 26 , p. 118, 10 - 11 Köhler ). Le
deuxième degré, mis en parallèlle avec la contemplation dialectique des étants,
peut, dans ce contexte, difficilement désigner autre chose que la théurgie au sens
propre. De toute manière, ni la contemplation dialectique des étants ni ce genre
de théurgie ne sont accessibles aux débutants et elles ne sont donc pas traitées
dans le commentaire. (Ce fait ne s'explique nullement par une influence chré
tienne, comme le croit 27 H . S. Schibli, « Hierocles of Alexandria and the vehicle
of the soul», Hermes 121, 1993, p. 109- 117, notamment p . 114 , en se fiant im
prudemment aux arguments infondés de Aujoulat 9.) L 'usage que fait Hiéroclès
des termes “ hiératique" et " télestique" dans son commentaire sur le Carmen au
reum ne prouve pas que, dans un autre contexte , il n 'ait pu employer le terme
"hiératique” également dans un sens plus vaste, comme le fait Jamblique dans le
Demysteriis, ou qu 'il n' ait pu, par exemple en faisant un cours sur le Phèdre de
Platon , éventuellement distinguer deux formes de la télestique ( comme Hermias
Syrianus le font dans le commentaire sur le Phèdre ), dont l'une serait telle qu 'il
l'a décrite dans le commentaire sur le Carmen aureum , et dont l'autre serait pla
cée plus haut que la philosophie (cf. 28 O . Ballériaux, « Qloooowç tà Deovp
ylxà EETÁČELV . Syrianus et la télestique » , Kernos 2, 1989, p. 13-25). A propos
du sens de “ télestique" dans le Phèdre de Platon, cf. 29 Id ., « Mantique et télesti
que dans le Phèdre de Platon » , Kernos 3, 1990, p. 35 -43). Mais une chose est
sûre : si Hiéroclès s'emploie à prouver l'accord de Platon avec les Oracles Chal
daïques et la pratique hiératique qui, dans le commentaire sur le Carmen
aureum , est pour lui la théurgie, il se range parmi les adhérents de Jamblique et
utilise un procédé qu'il ne peut pas avoir trouvé chez les auteurs du moyen
platonisme. Enfin , il cite très souvent, dans son commentaire sur le Carmen
aureum , les Oracles Chaldaïques.
5e livre: “Le cinquième fait remonter à Orphée , à Homère et à tous ceux qui
étaient célèbres avant l'apparition de Platon la philosophie de Platon sur ces
sujets” (ibid ., 173 a 15 -18 ). Nous retrouvons cet effort systématique d'assimila
tion dans les commentaires de Proclus, mais aussi déjà chez son maître Syrianus,
qui lui aussi avait été le disciple de Plutarque d' Athènes. La Souda, s.v. “Syria
nos” , t. IV , p . 479, 1 Adler , nous dit qu'il avait écrit dix livres sur l'accord
doctrinal entre Orphée, Pythagore, Platon et les Oracles Chaldaïques.Mais la
conception d'une transmission supposée des révélations philosophiques par la
lignée Orphée – Pythagore - Platon et l'incorporation des Oracles Chaldaïques
était déjà l'æuvre de Jamblique (cf. O 'Meara 10, p . 114 - 118 , sur l'influence du
syncrétisme jambliquéen sur Hiéroclès). Dans le résumé de Photius, le nom ,
entre autres, de Pythagore se cache certainement dans la tournure “tous ceux qui
étaient célèbres avant l'apparition de Platon ”. Comme l'exemple de l’Alexandrin
Hiéroclès le prouve, ce syncrétisme n 'est pas un signe distinctif du néoplato
nisme enseigné à Athènes.
6° livre : “ Le sixième prend tous les philosophes postérieurs à Platon, avec
Aristote lui-même comme le plus important, jusqu 'à Ammonius d 'Alexandrie
H 126 HIÉROCLÈS D 'ALEXANDRIE 697
(> A 140 ), dont les disciples les plus remarquables furent Plotin et Origène (scil.
Origène le païen) ; il prend donc, après Platon et jusqu'aux hommes que l'on
vient de mentionner, tous ceux qui se sont fait un nom en philosophie et il prou
ve qu'ils sont tous d'accord avec les vues doctrinales de Platon ; tous ceux qui
ont tenté de rompre l'unité de vue entre Platon et Aristote, il les range parmiles
mauvais, dont il faut se détourner avec horreur; ils ont altéré beaucoup de don
nées de l'æuvre de Platon tout en le proclamant leurmaître et il en va de même
pour les écrits d 'Aristote de la part de ceux qui se réclament de son école . Et
toutes leurs machinations n 'ont pas eu d 'autre but que de trouver les moyens de
mettre en conflit le Stagirite et le fils d' Ariston” (ibid ., 173a18-31). Il fautmettre
ce texte en rapport avec un passage parallèle du début (cod. 214 , 171633
172 a 8, t. III, p . 125): “Le but déclaré de la présente enquête , c'est de traiter de
la Providence en mettant ensemble la doctrine de Platon et celle d 'Aristote ;
l'auteur veut, en effet, rapprocher les deux penseurs non seulement dans leurs
théories sur la Providence,mais aussi sur tous les points où ils conçoivent l'âme
comme immortelle et où ils ont philosophé sur le ciel et sur le monde. Quant à
tous ceux qui ontmis ces auteurs en désaccord, il explique longuement qu'ils se
sont gravement trompés... Il ajoute que ces derniers ont formé un cheur
imposant jusqu 'au moment où a brillé la sagesse d 'Ammonius, dont il rappelle
avec emphase qu'il fut surnommé " l' élève des dieux” . C ' est lui, dit-il, qui a
ramené à leur pureté les doctrines de ces deux anciens philosophes, enlevé les
sottises qui s' étaient développées des deux côtés et montré l'accord entre la
pensée de Platon et celle d 'Aristote sur les questions de doctrine importantes et
les plus nécessaires."
Le sixième livre fait donc l'histoire du platonisme en soulignant fortement
l' accord des philosophies de Platon et d'Aristote. Cette tendance à l'harmonisa
tion a ses racines déjà dans le moyen-platonisme, où cependant elle était encore
largement combattue, et c'est seulement avec Porphyre et Jamblique qu 'elle s'est
imposée à des degrés variables à l'ensemble des néoplatoniciens (cf. à ce propos
30 I. Hadot, « Aristote dans l'enseignement philosophique néoplatonicien » , dans
RThPh 124, 1992, p. 407-425, notamment p . 418-425). Hiéroclès cependant
attribue ce rôle à Ammonius Saccas (MA 140 ), le maître de Plotin . On a proposé
comme source de cette histoire de la philosophie ou Porphyre (I.Hadot 3 , p . 75
76 ) ou Jamblique (O 'Meara 10, p. 113). Cela n'est pas nécessairement une alter
native : Jamblique, comme il le fait souvent, a bien pu prendre comme base de
son propre travail une cuvre de Porphyre .
7e livre : “Le septièmelivre prend un nouveau départ en traitant de la doctrine
de cet Ammonius, dont on vient de parler. Plotin et Origène et assurément aussi
Porphyre et Jamblique ainsi que leurs successeurs, selon son propos, sont nés de
souche divine, jusqu 'à l' Athénien Plutarque, dont il dit qu 'il a été le maître qui
lui a enseigné leurs doctrines ; tous ceux -là sont en accord avec la philosophie de
Platon ramenée à son état de pureté” (ibid., 173a 32-40, t. II, p. 129-130 Henry ;
cf. ibid ., cod. 251, 461a 24 sqq., t. VII, p . 191 Henry) .
698 HIÉROCLÈS D 'ALEXANDRIE H 126
Le septième livre a donc pour but de prouver que depuis Ammonius Saccas
jusqu 'à Plutarque d 'Athènes les doctrines sur la Providence et l'Heimarméné
sont restées les mêmes – ce qui, du point de vue historique, est vrai dans les
grandes lignes -, et qu 'elles sont conformes à la philosophie de Platon, ce quiest
moins vrai, quand on pense au caractère typiquement néoplatonicien de ces doc
trines. Quant à la désignation d 'Ammonius Saccas comme celui qui aurait dura
blement rétabli dans sa pureté la vraie doctrine de Platon , entendons la doctrine
néoplatonicienne, pour les générations des néoplatoniciens après lui, il semble
qu 'il ait été réellement le véritable inventeur de l'exégèse fondamentalement
néoplatonicienne du Parménide de Platon en interprétant les hypothèses comme
se rapportant à des hypostases réelles, interprétation dont résultait la conception
d'un Un au-delà de l' étant ou de l'intellect (cf. 31 H .- D . Saffrey, « La Théologie
platonicienne de Proclus et l'histoire du néoplatonisme », dans 32 G . Boss et G .
Seel (édit.), Proclus et son influence. Actes du Colloque de Neuchâtel, juin 1985,
Zürich 1987, p. 32). Son élève Origène pourtant, après avoir adhéré aux doc
trines de son maître, s'en était éloigné plus tard (cf. 33 H .-R . Schwyzer, « Pro
klos über den Platoniker Origenes» , dans 32, p. 45-59), fait qu 'Hiéroclès ne
mentionne pas, probablement parce qu 'il ne l'avait pas trouvé dans sa source,
qui a peut-être été écrite avant la volte-face d 'Origène.
Dans les quelques paragraphes que Photius emploie à résumer les doctrines
d'Hiéroclès concernant la matière engendrée hors du temps, le démiurge qui
crée, sans matière préexistante, de toute éternité etpar son seulêtre , la structure
ternaire du démiurge qui se reflète dans les trois classes d'âmes, le véhicule de
l'âme, on ne saurait rien trouver qui permette de distinguer ces doctrines du néo
platonisme ambiant. Au contraire, dans tout ce que nous dit Hiéroclès sur ces
thèmes, on trouve des détails précis, caractéristiques, structurés, qui correspon
dent exactement au néoplatonisme de son temps et sont très proches de Jambli
que.
(2 ) Le commentaire sur le Carmen aureum
Édition critique. F. W . Köhler, Hieroclis in Aureum Pythagoreorum Carmen
commentarius, coll. BT, Stuttgart 1974, XXX -135 p. On peut regretter que l'ap
paratus fontium de cette édition soit si succinct. Son auteur, qui n 'est visible
ment pas un spécialiste du néoplatonisme, ne relève pas par exemple les nom
breuses citations et allusions d 'Hiéroclès aux Oracles Chaldaïques.
34 Pascale Derron , « Inventaire des manuscrits des Vers d 'or pythagoriciens» , RHT 22,
1992, p . 1- 17 , recense 200 manuscrits, dont quelques-uns conservent le commentaire de Hié
roclès.
Traduction. De toutes les traductions, la seule à laquelle on peut attribuer
une certaine valeur, parce qu'elle s'appuie sur un texte bien établi, mais qui ne
reflète pas encore avec assez de précision le contenu doctrinal, est celle de F .W .
Köhler, Hierokles, Kommentar zum pythagoreischen Goldenen Gedicht, coll.
« Griech. u . Lat. Schriftst.» , Stuttgart 1983, 102 p .
Au sujet du Carmen aureum lui-même, cf. 35 J. C . Thom , The Pythagorean
Golden Verses, with Introduction and Commentary , Leiden /New York /Köln
H 126 HIÉROCLÈS D 'ALEXANDRIE 699
1995, qui, avant de proposer sa datation propre, 350 -300 avant notre ère (p . 57
sq.), résume les recherches antérieures aux siennes quant à la date de sa compo
sition et son présumé auteur. J. C . Thom est d 'avis que le Carmen aureum servait
à un groupe pythagoricien de texte fondamental pour l'instruction des jeunes
(p . 80 ).
Aux yeux des néoplatoniciens, le caractère gnomique du Carmen aureum le
rendait, comme le Manuel d'Épictète, éminemment apte à une introduction à la
philosophie néoplatonicienne (cf.I. Hadot 3 , p . 160-164). De son côté, Hiéroclès
le constate dans la préface à son commentaire: " Il est donc nécessaire pour
acquérir cette science (c'est-à -dire la philosophie) ... de posséder certaines
règles (xavovec) rédigées d 'une manière concise , comme des aphorismes scien
tifiques, afin que, selon un ordre précis et une bonne méthode, nous parvenions
au but de la viemorale . Parmi ces règles ... les poèmes pythagoriciens qu 'à juste
titre on appelle Vers d 'Or sont à placer parmiles premiers (p. 5 , 7 sqq.Köhler).”
Il déclare ensuite (p . 6 , 26 - 7, 1) que le poème a pour but de procurer aux
lecteurs une empreinte philosophique (xapaxtñpa Olóoopov ) avant les autres
lectures, c'est-à-dire avant de commencer le cursus néoplatonicien d'études qui
consistait dans la lecture d'un choix défini d'æuvres d 'abord d 'Aristote et
ensuite de Platon . Une telle æuvre , destinée aux débutants, comme d'ailleurs le
commentaire lui-même, ne permet guère de développer in extenso le système
philosophique néoplatonicien, comme le dit Hiéroclès lui-même à la fin de son
commentaire : " Telle a été notre exégèse des Vers d 'Or. Elle contient un aperçu
sommaire et modeste sur l'enseignement des pythagoriciens. En effet, il n 'a pas
semblé qu 'il fût permis de garder à mes explications la concision des Vers d 'Or
eux -mêmes ... ni de les étendre à toute l'ampleur de la philosophie tout entière
... Bien plutôt, il m 'a semblé souhaitable d' imposer à mes explications une
mesure telle qu 'elle soit apte à donner le sens des Vers et, à propos de leur inter
prétation , à ne développer, des dogmes généraux, que ce qui convient à une exé
gèse de ces Vers.” (XXVII 1, p . 121, 19 sqq. Köhler). Hiéroclès a donc très clai
rement fait comprendre que son commentaire ne développait pas tous les détails
de son système philosophique. Puisque le texte à commenter ne parle que des
dieux du culte et de Zeus comme du plus éminent de ceux-ci, il n 'aurait pas été
surprenant qu 'Hiéroclès ne fasse jamais allusion à une hypostase supérieure au
démiurge qu'il identifie à Zeus (cf. XXV 1, p. 105, 4-5 ; XXV 4, p. 106 , 8- 9
Köhler) et à l’Intellect (cf. Photius, Bibl., cod. 251, t. VII, p. 194 Henry, et In
Carm . aur., XX 19, p. 89, 19 -20 Köhler: le démiurge = Deos vontóc). Mais il
existe quand même un endroit du commentaire qui montre qu 'Hiéroclès ne
considérait pas le démiurge comme la plus haute entité ontologique, contraire
ment à ce que pensent Praechter 6 , Kobusch 8 et Aujoulat 9. Il s'agit du déve
loppement arithmologique des pages 87, 16 -89, 18 Köhler, où la tétractys men
tionnée dans le Carmen aureum est assimilée par Hiéroclès au démiurge, et
celui-ci au nombre quatre parmi les dix premiers nombres (= Idées-Nombres) qui
sont pourvus, selon une tradition pythagorico-platonicienne plusieurs fois sécu
laire, de hautes fonctions causales et créatrices. Dans ce texte , la situation subor
700 HIÉROCLÈS D ' ALEXANDRIE H 126
donnée et causalement dépendante du démiurge, identifié au nombre quatre
(= tétrade), par rapport aux nombres deux (= dyade) et un (= monade), ressort
très clairement (cf. I.Hadot 4 etsurtout 5). Comme par ailleurs le démiurge avait
été identifié par Hiéroclès avec l'Intellect, le nombre un , la monade, ne peut se
situer qu 'au -delà de l'Être ou Intellect, ce qui prouve encore une fois le caractère
purement néoplatonicien de la philosophie d'Hiéroclès.
Le commentaire sur le Carmen aureum démontre clairement que, pour Hiéro
clès, à la suite de Jamblique, le pythagorisme contenait toutes les vérités fonda
mentales de la philosophie de Platon (cf. O 'Meara 10, p . 115 sqq.). O 'Meara
remarque que le commentaire (XXVI 2, p. 111, 13- 14 Köhler) évoque Platon
comme interprète , dans le Phèdre, de la doctrine pythagoricienne et décrit le per
sonnage de Timée dans le Timée de Platon comme enseignant avec exactitude
les dogmes pythagoriciens (Préface, 5, p. 6 , 2 Köhler). Enfin , demême que chez
Jamblique, Empédocle (* + E 19) est désigné comme pythagoricien (XXIV 2,
p . 98, 10 Köhler ). Cette doctrine de Jamblique, selon laquelle la philosophie de
Pythagore est la source de celle de Platon , remonte très probablement aux
moyen-platoniciens que nous appelons “néopythagoriciens” , qui se distinguent
des autres moyen -platoniciens essentiellement par le fait qu 'ils étudient les
æuvres de Platon comme témoignage de la philosophie de Pythagore et non pas
commeeuvres contenant une doctrine originale.
S 'il existe, dans l'æuvre d 'Hiéroclès, un certain nombre de traits doctrinaux
qui se fondent sur la philosophie de Jamblique et ne se trouvent pas à une date
antérieure à celui-ci (cf. I. Hadot 3, p. 71, 1er paragraphe ; 93-97 ; 98 -110 ; 112
113), cela ne veut pas dire que le système philosophique d'Hiéroclès ne s'écarte
pas occasionnellement de celui de Jamblique. Voici un exemple. En XXVI 4 ,
p. 112, 5 - 17 Köhler, Hiéroclès explique, en citant les Oracles Chaldaïques, que
l'âme raisonnable humaine possède un véhicule, le corps lumineux , qui lui est
congénital et qui est, comme elle , immatériel et l'æuvre du démiurge. Ce corps
lumineux ou pneumatique immatériel, qui est une espèce de vie, assure la jonc
tion de l'âme raisonnable humaine avec son corpsmatériel. Le corps lumineux
se place, lors de l'incorporation de l'âme raisonnable, dans le corps mortel et
encore inanimé et lui insuffle la vie . Or, il n 'y a pas de doute que l’immortalité
de l'âmeraisonnable humaine et de son corps lumineux ait été affirmée égale
ment par Jamblique.Mais ce dernier a-t-il admis aussi que le corps lumineux est,
comme l'âme raisonnable , l’æuvre du démiurge ? 36 J. F. Finamore, lamblichus
and the Theory of the Vehicle of the Soul, Chico , California 1985 , p. 11 et
ailleurs , répond affirmativement à cette question , tandis que 37 W . Deuse, dans
son compte rendu du livre de Finamore (Gnomon 59, 1987, p. 409), s'élève
contre cette affirmation. Par contre il semble être sûr que Jamblique tenait pour
immortelle l'âme irrationnelle (cf. Finamore 36 , p. 15 sqq.) qui, pour Hiéroclès
comme pour les néoplatoniciens postérieurs , était mortelle .Mais contrairement
aux néoplatoniciens postérieurs , qui attribuent à l'âme humaine deux véhicules
différents, Hiéroclès n 'en connaît, commeJamblique et les Oracles Chaldaïques,
qu 'un seul. Cet exemple éclaire bien la position intermédiaire d'Hiéroclès entre
H 129 HIÉRONYMOS DE RHODES 701
128 HIERONYMOS RE 13
Damascius est le seulnéoplatonicien à faire état d'une théogonie ſorphique ?]
qu 'il attribue, non sans quelque hésitation, à deux personnages énigmatiques :
« La théologie rapportée d'après Hiéronymos et Hellanikos, si toutefois il ne
s'agit pas du même personnage, est la suivante » (De princ. par. 123 bis, Ruelle
I, p. 317, 5-6 = Combès-Westerink III, p. 160 , 17 -18 ). Les fragments qui sub
sistent de cette théogonie sont réunis dans les Orphicorum fragmenta d ' O . Kern
(Berlin 1922) aux numéros 54 à 59.
Cf. A . Gudeman , art. « Hieronymos » 3, RE VIII 2, 1913, col. 1564. Voir
aussi M .L . West, « Graeco -Oriental orphism in the third century B . C .» , dans
D . M . Pippidi (édit.), Assimilation et résistance à la culture gréco -romaine dans
le monde ancien, Paris/Bucarest 1976 , p. 221-226 .
LUC BRISSON .
Plutarque deChéronée
Sextus (maître deMarc Aurèle)
Salvia - Minucianus I (sous Antonin le Pieux)
Lucius/Mnésaios
Nicagoras I
Minucianus II
Nicagoras II
fille oo Himérius
Rufin fille
Avocat, Minucianus fer (Souda, M 1087, s.v. Mivouxlavós) avait rédigé des Nóyou
diápopor. C' est ce qui avait permis à Himérius de soutenir que sa voix avait souvent permis
des libérations (Or. 7 , 4 , voir Schissel 57, p . 364). Tout en donnant des éléments biogra
phiques propres à Minucianus II, l'article de la Souda luiprête la rédaction d 'æuvres qui sorti
rent de la plume de son bisaïeul : une téyin önroplyn en deux livres, des commentaires à
Démosthène (le fait ressort d'Hermogène, Des formes, p . 267, 3 sq., avec les scholies de Jean
Doxopatros VI 111, 15 - 17 Walz , et Syrianos I 13 , 1 - 10 Rabe ; Hermogène, o.l., 384, 4 , avec
Jean Doxopatros VI435 , 17 - 19 Walz, voir 58 St. Glöckner, Quaestiones rhetoricae. Historiae
artis rhetoricae qualis fuerit aevo imperatorio capita selecta , Breslau 1901, p . 25 ; Schissel
57, p. 366) et des Progymnasmata (Souda, M 590, s.v.Mévav poc) expliqués par Ménandre
de Laodicée du Lycos. Une querelle d 'école l'opposa à Hermogène. Ses progymnasmata se
présentaient armés de tous les outils de la logique (Schissel 57, p . 366 ). La téyun fut attaquée
par Hermogène et défendue par Porphyre. Le travail de ce dernier fut vraisemblablement exé
cuté avant 262/3 , durant son séjour à Athènes, à un moment où il suivait les cours de Longin ,
qui fut probablement un élève de Minucianus (Bidez 25 , p . 30 ; Schissel 57, p . 365). Mnésaios
est donné comme orateur par la Souda (N 373, s.v . Nixayópac ). Nicagoras ſer adressa un
Ilocobavtixóc à Philippe l'Arabe (Souda N 373, s.v. Nixayopac) ; il écrivit comme Plu
targue des Vies des hommes illustres et un Περί Κλεοπάτρας της εν Τρωάδι. Lie d'amitie
avec Longin, il fut invité par lui à un banquet pour l'anniversaire de Platon (Eusébe, Prépara
tion évangélique X 3, 9- 11 ; Schissel57, p. 367 -368 ).Même s'il n 'est pas donné explicitement
comme platonicien , la présence d 'un représentant d 'une famille fière de remonter à Plutarque
suffisait à donner à Nicagoras ſer la couleur idéologique idoine (Schissel 57, p . 364 ; 368). On
s'explique donc bien qu 'en Or. 7 , 4, Himérius rapproche le meilleur orateur de la lignée ,
Minucianus ler, du plus grand philosophe, Nicagoras Jer. Dans le chef du collaborateur de la
Souda, la confusion de Minucianus (er avec son arrière-petit- fils et homonymeMinucianus II
se conçoit aisément. Lui aussi avait composé des ouvrages de rhétorique, dont nous avons
conservé un lepi étriyelpnuárwv (Hammer, dans Rhetores graeci I, p. 340- 351 Spengel). La
présentation des arguments repose sur les définitions et la division , bref, on retrouve ici le type
d'armature aristotélico - platonicienne mis en æuvre par Minucianus (er (Schissel 57, p. 369).
Une des constantes de la famille fut l'attachement aux cultes traditionnels,notamment aux
mystères d 'Eleusis. Nicagoras Jer (Marcos lounios) occupa le grade de hiérokéryce, le troi
sième de la hiérarchie (Philostrate, Vie des sophistes II 33, 4 ; IG 112 3814 (Éleusis]). Son fils,
Minucianus II, fut le dédicant de deux statues en l'honneur du proconsul Claudios Illyrios ; les
bases inscrites furent trouvées sur l'Acropole (IG 112 3689 -3690 ). D 'après 59 Simone Follet,
Athènes au 11e et au IIIe siècle. Études chronologiques et prosopographiques, Paris 1976 ,
p. 142-143, la dédicace daterait de la période entre le 10 et le 31 décembre 265. Nicagoras II
722 HIMÉRIUS DE PROUSIAS H 136
(PLRE Nicagoras 1 ), qui fut dadouque, soit le deuxième grade de la hiérarchie, des mystères
d 'Éleusis, se rendit, sous Constantin Jer, dans les Syringes, en d'autres termes, les tombes des
pharaons thébains, comme nous l'apprennent deux graffiti exhumés dans la tombe du Pharaon
Ramsès VI (Dittenberger, OGIS 720 -721) et datés de 326 . De rédaction maladroite, le premier
graffito mentionne Platon , qui serait venu sur les lieux longtemps avant le visiteur athénien .
Boniment du cicerone, qui avait sans doute prêté sa plume et son style . Sur la paroi opposée
figurait un texte tout semblable, mais d'une élégance plus sobre, sans doute de la main de
l'Athénien. Le caractère officiel de la visite ne saurait guère faire de doute : on peut lire aussi
dans le voisinage de l'inscription le nom de personnages en fonction, sans compter celui
d 'autres revendiquant le patronage platonicien (Baillet 52, p . 287 ; 290 -295 ; Schissel 57 ,
p. 370). L 'appartenance de Nicagoras II à l' école platonicienne n 'est donc point douteuse. On
s'est efforcé d 'expliquer le voyage. Baillet 52 (p . 286 -289) y voyait les suites d 'une mission
d' inspection et d 'enquête sur l' état des temples ou la désaffection des esprits. Pour 60 G .
Fowden, « Nicagoras of Athens and the Lateran Obelisk » , JHS 107 , 1987, p. 51-57, le voyage
s'inscrivait dans le cadre du projet, non réalisé, de Constantin d 'offrir, pour ses Vicennalia, en
327 , à sa nouvelle capitale, l'obélisque dit “ du Latran ” (il se dresse, depuis Sixte V , en 1588,
Place Saint-Jean -de -Latran ). L 'æuvre d 'art eut bien la destination prévue, mais en 357, à
Rome l'Ancienne, grâce à Constance II. Le discours 8, 21 mentionne en outre Musonius
comme olhoooootepov. Il s 'agit de C . M . Rufus Musonius, le philosophe stoïcien , maître
d'Épictète et de Dion de Pruse . Tout souvenir du personnage n'était pas perdu à l'époque de
Julien , qui le cite, en le comparant à Socrate (Lettres, 30 ; voir aussi Souda M 1305, s.v.
Movo ÁviOS, avec une erreur de texte : Bápwv pour [ vápwv, voir aussi B 114 s.v . Bápeus ),
pourmontrer combien il avait pris à cæur les intérêts des gens de l'île de Gyare où il avait été
exilé sous Néron en 65 -66 . Voir, à ce propos, 61 J. Bouffartigue, L 'Empereur Julien et la
culture de son temps, Paris 1992 , p . 94 ; on trouve plusieurs allusions au personnage chez
Thémistius, à propos de l'exil sous Néron [6 (Oládendol ñ nepi Olhadenoías), 107
Schenkl-Downey ; 7 (ſlepi tõv ňtuxnxótwv éni Oủárevtoc), 141; 34 (Ilepi tñs åpxñs),
223 Schenkl-Downey-Norman) et de son retour en faveur sous Titus (13 ('Epwtixòç ñ nepi
xárlous Baolixoũ ), 248 Schenkl-Downey).
Sous le nom de Sopatros court un traité intitulé Division des recherches
(Alaipeous Sntnuárwv) qui contient des exemples, avec indications pédago
giques, de 81 thèmes de déclamation arrangés par stasis. Or, l'auteur se donne
pour un étudiant du sophiste Himérius (62 Ch . Walz, Rhetores graeci, VIII,
p. 318, 29). Dans un autre traité, les Prolégomènes à Aristide (III, p. 757, 24-27
Dinforf), l'auteur affirme qu 'il transmet l'enseignement de ses maîtres d' Athènes
et le fruit de ses lectures et recherches en commun avec d'autres. La terminolo
gie utilisée n 'est pas exactement celle d'Hermogène, dont le nom n 'apparaît pas
dans la collection de traités. Il est assez probable que le tout résulte de l'activité
d'un rhéteur de la fin du IVe s. travaillanten milieu néo -platonicien . Peut-être le
personnage est-il le petit-fils du philosophe Sopatros, non dépourvu d' éloquence
lui-même, quidétint un poste à la cour de Constantin Ier avant d' être mis à mort.
Voir Kennedy 30, p. 104- 105. Dans ce cas, on comprendrait la vigueur avec
laquelle Himérius souligne les attaches platoniciennes de la famille de sa femme.
Toutefois, le faisceau de données mériterait d'être enrichi.
Dans l’Anthologie de Stobée (IV 5,51 -60, 1) est conservée une série d'extraits de Sopatros
a son frère Hémérios ( Ημερίω) sur le theme πώς δεί πράττειν την εγκεχειρισμένην αυτό
nyeuoviav. On a corrigé à juste titre (Schmid -Stählin 27, II 2 , p . 890 n . 2 ) en luepiw .
L 'échange eut lieu entre les deux fils de Sopatros,Sopatros 2, un philosophe du milieu du Ive
S., et Himérius 3 (voir PLRE I, p. 846 ).
Malheureusement, on ne peut dater le mariage d'Himérius avec précision .
H 136 HIMÉRIUS DE PROUSIAS 723
Il aurait eu un fils appelé Jamblique, d 'après Colonna 1, p. L , qui cite Libanjos (Lettres,
571 Förster) comme testimonium III b. Il s'agit en réalité de Jamblique 2 , originaire d 'Apamée
(PLRE I lamblichus 2 ), fils d 'un autre Himérius, haut fonctionnaire (PLRE I Himerius 3 ).
Son fils Rufin lui avait donné de grandes espérances. Né à Athènes (Or. 7, 3 ;
entre 341-346 , selon Schenkl 9 , col. 1623 ; dans le discours, le père plaidait pour
la naturalisation de son fils ; lui-même avait déjà obtenu la sienne), Rufin était
mort à l'adolescence (Or. 8 , 21, entre 357 et 362, d 'après Schenkl 9 ). Il venait de
prononcer son premier discours public (8 , 4 ). Le père avait déjà atteint son
rñpaç. Par suite, son mariage doit dater luiaussi du début des années 340.
Tout autre est le systèmede Barnes 20, p . 222-223, d 'après qui la nouvelle du
malheur pourrait avoir touché le père durant la période où il s'efforçait de
rejoindre Julien, par exemple en mai 362. Le fleuveMélas (Or. 8, 22) serait donc
cappadocien. Le mariage d 'Himérius aurait seulement été célébré durant les
années 350. Subrepticement, il donne un coup de pouce aux données généalo
giques en faisant de l'épouse d'Himérius la petite - fille de Nicagoras II, et non sa
fille, comme dans le tableau de Schissel 57, p . 371 (cité cependant p . 222 n . 74).
Himérius avait eu aussi une fille (Or. 8, 12: voir infra ).
3. La carrière
Il fit une carrière de sophiste à Athènes, interrompue, il est vrai, parmaints
voyages sur lesquels nous renseignent les fragments de ses discours: à Corinthe
(Or. 11 ; 30, 75, mais l' époque est impossible à préciser) ; à Nicomédie (53) et à
Sparte (72). L ' article de la Souda souligne (åvtitaidetoaç Ipoatpeoiw év
'AOńvais) que Prohérésius et lui étaient rivaux à Athènes. Le tournantde sa vie
fut l'avènement de Julien l’Apostat. D ' après Photius (cod. 165, II, p. 140, 2 -3),
“ le sommet de sa carrière se situe sous Constance et sous l'impie des impies,
Julien ” . Indication désespérément vague, car elle couvre une période allant de
337 à 363. En fait, on chercherait en vain dans la longue énumération de Photius
le titre d 'une æuvre adressée à Constance II, encore que ne manquèrent pas les
discours prononcés en l'honneur de dignitaires du régime. Les règles propres à la
rhétorique rendent l'identification et la datation des événements difficiles. (63 J .
Schamp, Photios historien des lettres. La Bibliothèque et ses notices biogra
phiques, Paris 1987, p . 202-203) .
a. Sous Constantin ( ?)
Il est malaisé de situer avec précision le proconsulat de Basilius, fils d 'un
consul païen et d 'origine occidentale (Or. 46, 8). Barnes 20, p . 217-218 , a tenté
d 'apporter des précisions. Il distingue quatre personnages qu 'il essaye de situer
les unspar rapport aux autres. On connaît en effet notammentun ValeriusMaxi
mus signo Basilius qui fut praefectus Urbi entre 319 et 323 (Jones 12 , s.v.
Maximus 48, p. 590) et Valerius Maximus, qui fut consul en 327 puis préfet du
prétoire entre 327 et 337 ( Jones 12, s.v .Maximus 49, p . 590). Le premier pour
rait être un parent du second, “possibly father or uncle” . L 'adresse de Or. 46, 8
plaide dans ce sens ( natpós Únátov Báornua ). Au contraire, selon Barnes
20, p . 217, qui ne fournit aucun argument ni référence, le texte pourrait être
interprété comme suggérant l'identification du praefectus Urbi de 319-323 avec
724 HIMÉRIUS DE PROUSIAS H 136
le consul de 327, là où la PLRE distingue deux fonctionnaires. A ses yeux, le
personnage visé par Himérius serait PLRE Basilius 3 , le petit-fils de PLRE
Maximus 48. Préfet de la ville de Rome en mars 395 (CTH VII 24, 1) , il serait le
fils de PLRE Maximus 17, préfet de la ville de Rome sous Julien en 361- 362. Par
suite , le Basilius d 'Himérius aurait occupé le proconsulat dans les années 370 .
La supposition ne tient qu'au prix d'une correction en Or. 46, 8, où únápxou
prendrait la place d 'únátov. L 'exposé repose sur une argumentation si elliptique
qu 'elle n 'emporte pas la conviction. Rien n ' empêche de supposer que le person
nage d'Himérius soit Maximus 49, fils de Maximus 48. Or. 46 , 11 donne à sup
poser qu’Himérius parla en Achaïe , ce qui pourrait désigner Corinthe. Le fait
qu 'Himérius ne put entrer en lice qu 'après tous les autres sophistes appelés à
participer au concours dont le sujet avait été proposé par le proconsul tend à
montrer qu'il était tout jeune et avait encore à se faire un nom en Achaïe. Selon
Schenkl 9 , col. 1624 , Or. 46 serait au nombre des derniers discours. L ' Or. 38 ,
adressé au proconsul (d 'Achaïe ) Cerbonius, fait allusion à l'activité de construc
teur de ce dernier (1-2), qui rend à Athènes le même service qu 'Apollon faisant
sortir Délos des ondes ; voir Frantz 53, p . 20 -24 ; 64 E . Sironen, « Life and Ad
ministration of Late Roman Attica in the Light of Public Inscriptions » , dans
Paavo Castrén (édit.), Post-Herulian Athens, coll. « Papers and Monographs of
the Finnish Institute at Athens » 1, Helsinki 1994, p . 37 et p . 45 n. 166 . Plus pré
cisément, ce fut lui qui rétablit le service des eaux, car désormais les nymphes
jouent de nouveau dans les rues ($ 9, p. 158, 80 -82, cf. Frantz 53, p. 21). Selon
Jones 12, s. v. Cervonius, il était en exercice avant Scylacius. On considère que
Cerbonius avait exercé sa fonction au cours de la seconde partie du règne de
Constantin (Frantz 53, p. 20, qui cite Groag 54, p. 27 -28). Toutefois, Barnes 20 ,
p . 216 , fixe son proconsulat d 'Achaïe en 353/4 “ on the chronology argued here
for Himerius' career” , sans autre justification , non plus qu'à la p . 324. L 'inscrip
tion de Thespies SEG XV 323, datée par l'éditeur " ca 325:337 ?” , le donne
comme proconsul. Il n ' y a pas de relation chronologique clairement décelable
entre les deux faits . D 'après le titulus qui se lit dans les manuscrits, cette rahlá
fut la première à avoir été prononcée par Himérius à Athènes év TV Apaltwpiw .
b. Sous Constance
Or. 33 fut prononcé devant Phoibos, le fils du proconsul Alexandre (PLRE I
Alexander 3), qui fut en charge à Constantinople en 342. Obligé de quitter la
capitale à la suite d ' émeutes (Libanius, Or. 1 (Autobiographie ), 44 -45), provo
quées surtout pardes rivalités entre évêques chrétiens: 65 P. Petit dans J.Martin
et P. Petit (édit.), Libanios. Discours 1 (Autobiographie), CUF, Paris 1979,
p. 217 (n . complémentaire au § 44)], Alexandre trouva refuge à Périnthe; à peine
revenu pourmettre de l' ordre , il fut, en une nuit, remplacé par Liménius (PLRE I
Limenius 2 ), qui força Libanios à quitter la cité, quelques mois plus tard. La titu
lature définit l'occasion du discours : après un premier cycle d'études à Corinthe,
le jeune homme avait continué à étudier sous la direction d'Himérius (aúto
napà toŨ natpos metà tà év Kopívow Oldaoxadema). Les fragments laissent
entrevoir une métaphore filée où l'on décèle les équivalences suivantes: Évago
H 136 HIMÉRIUS DE PROUSIAS 725
ras = Alexandre 3 ; Nicoclès = Phoibos; Isocrate = Himérius. Par suite , le
discours aurait été prononcé vers 342. Le début du discours mentionne un
sophiste demoindre renom : celui dont Phoebus avait suivi les leçons à Corinthe
avant de se rendre à Athènes auprès d 'Himérius. La comparaison montre ce der
nier déjà bien en place à ce moment, à la tête d 'une école en pleine gloire . Natu
rellement, les mots peuvent avoir eu aussi une portée publicitaire. Himérius se
serait rendu à Constantinople pour la circonstance, selon Barnes 20, p . 214 . C 'est
reconnaître qu 'Himérius officiait déjà alors à Athènes, contrairement à ce qu 'af
firme Barnes 20, p. 224. Le n° 32 est adressé eic 'AvatórLOV Ünapxov, c'est-à
dire à un préfet du prétoire, conformément au sens usuel du vocable unapxoc.
Barnes renvoie à l'article de 66 A . F . Norman , « The Illyrian Prefecture of Ana
tolius», RHM 100, 1957, p. 253-259, qui souligne la nécessité de distinguer deux
homonymes de Béryte , Anatolius , qui visita Athènes peu après 343 en qualité de
préfet du prétoire d 'Illyricum , et un autre , qui exerça lesmêmes fonctions de 357
à 360 (année de sa mort). Le nom est d ' ailleurs relativement fréquent. La vue
traditionnelle consiste à identifier les deux hauts fonctionnaires, comme le fait
encore Jones 12 , s.v. Anatolius 3, p. 59 ; voir Norman 66, p. 253, pour la présen
tation du problème. Il reste que 67 V . Neri, « Le prefetture del pretorio nel perio
do 346-350 d . C . » , RSA 4 , 1974, p . 91-99, a essayé de ruiner l'argumentation de
Norman en faisant valoir des rapprochements entre les données offertes par
Eunape pour l'Anatolius préfet sous Constant et celles qui se trouvent dans les
lettres de Libanius pour l'Anatolius des années 357 -360 . Contrairement à ce
qu 'il affirme, l'indication chronologique d'Eunape n 'a rien d'approximatif, car
les événements sont étroitement liés. Après le concours ridicule, ce fut à Anato
lius que s'adressa Prohérésius pour obtenir l'exécution de la faveur promise par
Constant (Eunape X 7 , 6 Giangrande), à savoir le droit pour Athènes de prélever
l'impôt sur plusieurs îles afin de soulager ses finances. On imagine mal que
l'orateur ait attendu dix ans pour faire monnayer ses talents au bénéfice de sa
cité. Cela n 'empêche pas Barnes 20 , p . 216 , de conclure , sans argumenter, que le
personnage d 'Himérius est celui qui exerça ses fonctions de 357 à 360 . Eunape
( X 6 , 6 ) mentionne explicitement la présence d'Himérius et sa participation au
concours gagné par Prohérésius (6 , 10). Or, les faits se déroulèrent peu après que
Prohérésius eut remporté des succès fracassants à la cour de Constant à Trèves,
soit en 343 ou plutôt peu après (Eunape X 7 , 1). D 'autre part, on peut esquisser
les débuts de la carrière d' Anatolius. Il fut vicaire d 'Asie (CTh XI 30 , 19 ; XII 1,
28 ) en 339 avant d 'arriver à la préfecture, mentionnée par des textes législatifs
de 346 (CTh XII 1 , 38) et de 349 (CTh XII 1 , 39); pour des raisons qu'il expose
p. 258-259, Norman 66 , p. 253, indique que cette dernière date est “ notoriously
doubtful of acceptance” . Si, commele suggère Norman 66, p. 258, le séjour de
Prohérésius à l'Ouest eut pour motif le panégyrique de Constant pour l'expédi
tion en Bretagne, il ne peut guère avoir eu lieu qu 'au printemps 344. Vinrent
ensuite le voyage à Rome et le retour à Athènes: on peut donc fixer raisonna
blement le passage d ' Anatolius à Athènes en 345 au plus tard. Que le discours
32 ait été prononcé dans la circonstance n 'est pas douteux. Païen dévot, juriste
726 HIMÉRIUS DE PROUSIAS H 136
expert et fin lettré, Anatolius avait aussi, semble-t-il, l'esprit sarcastique. Le
sujet qu 'il avait mis au concours avait été choisi de façon à tourner en ridicule la
gent universitaire d 'Athènes (Eunape X 6 , 5 ; 10) : seul Prohérésius réussit à tirer
honorablement son épingle du jeu . Un passage du discours (3) paraît faire allu
sion aux modalités d'organisation : Il y eut une chasse à notre art (menée par) le
grand préfet (Ońpa yéyove tñs nuetépaç téxins ópéyaç únapxos).
Invité par le gouverneur Pompeianus (gouverneur de Bithynie entre 343/348,
voir PLRE I, s.v. Pompeianus 2), Himérius y avait livré une joute oratoire contre
Libanios (voir Lettres 742, 1 Foerster et Déclamation 46, intitulée oxbuua ô
IouiniavÒç npoubarev, d'après Colonna 1, p. XLIX n.). L 'événement eut lieu
durant le séjour de ce dernier à Nicomédie (de 344 à 349, voir Petit 65, p. 8 -9, et
le § 51 de l’Autobiographie). Apparemment, Pompeianus avait tourné en déri
sion “ l'homme d' Athènes, en vêtements resplendissants ” . Bien que son nom ne
fût pas prononcé dans la lettre de Libanius, il s 'agirait bien d 'Himérius (Schmid
Stählin 27, p . 812). L 'identification est donnée formellement par Wernsdorf 2 ,
p. XLV ; Petit de Julleville 35 , p. 70 ; Seeck 56 , p . 242 ; Schemmel 34 , p . 498 ;
Schenkl 9, col. 1623 ; 67 R. Förster et K . Münscher, art. « Libanios», RE XII 2,
1925, col. 2490 ; Barnes 20, p. 212,mais, après réflexion , rejetée comme mal
assurée par Schenkl 10 , col. 1152 ; 11, p. 39-40. La difficulté viendrait d'une ap
parente contradiction. La lettre 742 , 1, adressée en 362 à Celsus (BC 72), un de
ses anciens étudiants de Nicomédie, où Libanius adopte un ton sarcastique, ne
permettrait pas de croire que durant l'hiver 355 /6 il envoie à Gorgonios, asses
seur du gouverneur d'Arménie , une lettre de recommandation en faveur d 'Hi
mérius (Lettre 469). Par suite , les relations entre Himérius et Libanius auraient
connu des alternances difficilement explicables. L'argument ne tient pas. On
n 'écrit pas à un ancien élève avec qui on évoque de bons souvenirs communs sur
le ton donton use pour une lettre, presque officielle , de recommandation . D 'ail
leurs , pour justifier son appel à l'aide, Libanius fait appel à la solidarité indis
pensable entre païens. Qu 'il y ait eu rivalité ou non , l'intérêt supérieur réclamait
l' oubli des sentiments étroitement personnels. Le voyage aurait donc eu lieu
avant le changement de gouverneur en Bithynie , soit au plus tard avant la fin de
348. Libanios confesse d 'ailleurs qu 'il était plus riche de loisirs à consacrer à
l' éloquence que d'argent. Voilà qui encouragerait encore à remonter plus haut la
date de l'événement. Gärtner 13, col. 1149, donne la date de " gegen 350” .
Scylacius, proconsul d'Achaïe, à qui est adressé le discours n° 25, fut vicaire
d 'Asie, après un poste à la cour impossible à préciser (25, 32-33). Publiée par
68 L . Robert (dans J. des Gagnières, P. Devambez, Lilly Kahil et R . Ginouvès,
Laodicée du Lycos. Le nymphée. Campagnes 1961- 1963, Québec/Paris 1969,
p. 339 -351), une épigramme de Laodicée rappelle l'activité de constructeur qui
avait été la sienne à Milet. Les p. 346 - 351 offrent une excellente élucidation de
Or. 25, 72- 94. Himérius fait allusion à ses exploits en Ionie (li. 33-34 ), contre les
pirates pisidiens (li.67-68 ; 95 -99) et dans la région proche du Méandre (li. 73
79). Or, une loi du 24 février 343 est adressée à Scylacius, pp. Cyzico (CTh XI
30, 22). Ce dernier avait donc occupé plus tard son poste à Athènes, et le
H 136 HIMÉRIUS DE PROUSIAS 727
Traductions des témoignages. Une partie des témoignages ont été traduits
en français par 9 L . Paquet, Les Cyniques grecs. Fragments et témoignages,
nouvelle édition revue, corrigée et augmentée , coll. « Philosophica » 35, Ottawa
746 HIPPARCHIA DEMARONÉE H 138
1988 (1975 ', coll.« Philosophica» 4). Les lettres de Cratès à Hipparchia ont été
éditées récemment (avec traduction allemande) par Eike Müseler, Die Kyniker
briefe, coll. « Studien zur Geschichte und Kultur des Altertums», Neue Folge,
erste Reihe, Bd. 7, Paderborn 1994, p. 82-113, et traduites en anglais par 10 R. F.
Hock dans A . J. Malherbe, The Cynic Epistles, coll. « Society of Biblical Lite
rature . Sources for Biblical Study » 12,Missoula (Montana) 1977,p.53-89. Voir
également les lettres 3 et 43 de Diogène (p. 94 et 172 Malherbe ; p. 4 et 72
Müseler)
Bibliographie. Les travaux consacrés spécialement à Hipparchia sont peu
nombreux : cf. 11 H . von Arnim , art. « Hipparchia» ,RE VIII 2, 1913, col. 1662 ;
García González 6 , p. 179 -187 ; 12 T. Dorandi, « Figure femminili della filosofia
antica» , dans F. de Martino (édit.), Rose di Pieria , Bari 1991, p. 263 -278 ,
notamment p . 268-273. En revanche, les références à Hipparchia contenues dans
les ouvrages sur le cynisme sontbeaucoup plus nombreuses :
Cf. 13 K . W . Goettling, « Diogenes der Cyniker oder die Philosophie des griechischen Pro
letariats. Ein Vortrag » , dans Gesammelte Abhandlungen aus dem classichen Alterthume, t. I,
Halle 1851, p . 251-277, notamment p. 269 (repris dans 14 M . Billerbeck, Die Kyniker in der
modernen Forschung. Aufsätze mit Einführung und Bibliographie, coll. « Bochumer Studien
zur Philosophie » 15, Amsterdam 1991, p. 31-57, notamment p.49) ; E. Zeller 2, 1. II 1, p. 245
n . 3, 275 n . 1 et 279 n . 3 ; 15 F . Susemihl, GGLA , t. I, p. 29 ; Gerhard 3 , p. 122 n . 2 , 134, 209
n . 4 et 277 n . 5 ; 16 R . Asmus, « Der Kyniker Sallustius bei Damascius » , JKPh 25, 1910,
p. 504 -522 , notamment p . 513 ; 17 G . A . Gerhard, « Zur Legende vom Kyniker Diogenes » ,
ARW 15, 1912, p. 388 -408, notamment. p. 405 sq. (repris dans Billerbeck 14, p.89-106 ,
notamment p. 102 sq.) ; 18 E . Schwartz , « Diogenes der Hund und Krates der Kyniker» , dans
Charakterköpfe aus der Antike,hrsg. von J. Stroux, 3. Auflage der Neuausgabe, Leipzig 1950
(1943 ), p. 121- 141 (= Charak. VI), notamment p. 137 sq . ; 19 D . R . Dudley, A History of
cynicism . From Diogenes to the bih century A . D ., London 1937, réimpr. Hildesheim 1967,
p . 49 -52 et 221 ; 20 V . E . Emeljanov, The Letters of Diogenes, Ann Arbor 1968, p . 92 -94 et
216 ; 21 J. M . Rist, Stoic Philosophy, Cambridge 1969, p . 61 ; 22 J. Roca Ferrer, « Kynikos
trópos. Cinismo y subversión literaria en la antigüedad » (= BIEH 8 ), Thèse Barcelona 1974 ,
p . 27, 39, 44 et 121 ; 23 A . J. Festugière , La vie spirituelle en Grèce à l'époque hellénistique
ou les besoins de l'esprit dans un monde raffiné, coll. « Empreinte » 1 , Paris 1977, p . 140 ;
24 H . Niehues-Pröbsting, Der Kynismus des Diogenes und der Begriff des Zynismus, coll.
« Humanistische Bibliothek . Abhandlungen >> 40, München 1979, p . 52 n . 20 , p . 158 et 241 ;
25 M . Billerbeck, « Greek cynicism in imperial Rome », dans Billerbeck 14, p. 147 -166 ,
notamment p . 164 (paru d 'abord en trad. franç. ; « La réception du cynisme à Rome » , AC 51,
1982, p. 151-173); 26 M . Daraki, « La sagesse des Cyniques grecs», dans C .Mossé (prés.),
La Grèce ancienne, coll. «Points. Histoire », Paris 1986 , p. 92- 108, notamment p. 105
(= L 'histoire 3 , 1978, p. 5 -13) ; 27 M .Onfray, Cynismes. Portraitdu philosophe en chien, coll.
« Figures », Paris 1990 , p. 21, 68, 81-82 et 153-157 ; 28 G . Dorival, « L ' image des cyniques
chez les Pères Grecs » , dans M .-O . Goulet-Cazé et R . Goulet (édit.), Le cynisme ancien,
p . 418 -443, notamment p . 428 ; 29 M . Billerbeck , « Le cynisme idéalisé d ' Épictète à Julien » ,
dans Le cynisme ancien , p . 319-338, notamment p . 326 ; 30 J. Moles, « Le cosmopolitisme
cynique » , dans Le cynisme ancien, p. 259 -280 , notamment p. 269.
Si on laisse de côté l'ouvrage de 31 G .Ménage, Historia Mulierum Philosopharum , Lug
duni 1690 (vu dans 32 H .G . Huebner, Commentarii in Diogenem Laertium , editionem curavit
H .G . H ., t. II : Isaaci Casauboninotae atque AegidiMenagii observationes et emendationes in
Diogenem Laertium . Addita est Historia Mulierum Philosophorum ab eodem Menagio scripta,
Lipsiae 1833, p .615 (n° 7 : « Cynicae >>), dont il y a maintenant une traduction anglaise de
B . H . Zedler (The history ofwomen philosophers, Lanham 1984 ), c 'est récemment que la per
sonnalité d 'Hipparchia a suscité un intérêt spécial dans les études sur l'activité intellectuelle
H 138 HIPPARCHIA DEMARONÉE 747
des femmes dans l' Antiquité : cf. 33 E . Cantarella, L 'ambiguo malanno. Condizione e imma
gine della donna nell'antichità greca e romana , Roma 1986, p . 96 -97 ; 34 M . E . Waithe,
« Arete, Asclepigenia , Axiothea, Cleobulina, Hipparchia and Lasthenia », dans Ead. (édit.), A
history of women philosophers, t. I: Ancient women philosophers 600 B. C .-500 A . D .,
Dordrecht/Boston/Lancaster 1987, p . 197 -209 ; 35 J.McIntosh Snyder, The woman and the
lyre. Women writers in classicalGreece and Rome, Southern Illinois University 1989, p . 105
108 ; 36 M . Le Doeuff, L ' étude et le rouet. Des femmes, de la philosophie, etc., Paris 1989
(passim ).
Le choix d'Hipparchia . L 'approche critique la plus courante, qui remonte à
la tradition doxographique ancienne, envisage la personnalité et l'attitude d 'Hip
parchia en référence à Cratès. Elle se centre sur le thème du mariage, dans la
mesure où il devientun argument contre le cynisme ou en faveur d'un adoucis
sement du rigorisme de Diogène. Cette interprétation a été dépassée récemment
par des contributions nouvelles provenant du domaine de la recherche sur la
condition de la femme et provenantnotamment d'un projet méthodologique qui
cherche à « rendre la voix aux femmes. .. reléguées à l'oubli par une conception
masculine de la société et de l'histoire » (cf. 37 A . López López, No solo hilaron
lana. Escritoras romanas en prosa y verso, Madrid 1994, p. IX ).
En tout cas, le choix d'Hipparchia se comprend dans le contexte de l' attitude
du cynisme des premiers temps à l'égard de trois aspects concrets de la société :
le mariage, la sexualité et la condition de la femme.
L ' institution du mariage établit dans la cité un cadre de relations sociales qui
fixe les limites entre la sauvagerie et la civilisation en matière de rapport sexuel.
Dans ce cadre, la femme joue un rôle très déterminé et restreint. On peut parler
de l'existence de toute une idéologie de la puun oixovóuoc et de toute une
" normative” réglant le comportement de la ruun eyrunt dans la cité construite
selon les valeurs de Prométhée (cf. 38 I. Savalli, La donna nella società della
Grecia antica, Bologna 1983, p. 96 - 132). Il n 'est donc pas étonnant que le
cynisme des premiers temps, dans sa critique du vóuoc et de la dóca et dans sa
défense de la púols , se soit occupé d'une façon particulière de la question du
mariage, car le mariage se trouve au fondement de la cité civilisée de Prométhée
(cf. 39 J.- P. Vernant, « A la table des hommes. Mythe de fondation du sacrifice
chez Hésiode » , dans La cuisine du sacrifice en pays grec, coll. « Bibl. des hist. » ,
Paris 1979, p. 37-132). En fait, c'est dans la question de la morale sexuelle que
le cynisme contemporain de Diogène manifeste son rejet le plus radical de la
cité. L 'institution du mariage accorde à la sexualité un lieu privé rattaché à une
fonction sociale : l'éducation d'enfants légitimes destinés à assurer la continuité
de la maison et de la cité . Avant d'être domestiquée par le mariage, la femme
avait été selon les Grecs un être sauvage (cf. 40 C . Bérard, « L 'ordre des fem
mes» , dans l'ouvrage collectif La cité des images. Religion et société en Grèce
antique, Lausanne /Paris 1984 , p . 85 sqq.). L 'état antérieur au mariage rattache la
femme à Artémis, la divinité chasseresse , et la place aux confins du monde sau
vage, tandis que le mariage (comme l'agriculture) l' établit dans le domaine du
monde civilisé et la fixe dans un territoire, celui de la maison (olxos), dont elle
ne doit pas franchir le seuil, car ce serait « propre aux chiens » ( cf.Ménandre, fr.
529 Koerte = Stobée IV 23, 11 Hense). De la sorte , la femme est mise à l'écart
748 HIPPARCHIA DEMARONÉE H 138
du domaine politique et se maintient enfermée dans le domaine de la maison, où
elle s'occupe du métier, ce qu 'elle fait en silence, car le silence (ou le peu de
parole ) est un ornement chez la femme, dont le discours ne doit jamais être un
discours public (cf. Plutarque, Praec, coniug., 142 c). Lemétier et le silence se
trouvent normalement rattachés l'un à l'autre dans l' imaginaire de la féminité.
De toute évidence, le mariage, en tant qu'institution fondamentale de la cité, a eu
pour les cyniques un intérêt quiest allé au delà de la question pure et simple de
savoir s'il est avantageux ou désavantageux pour le sage d 'être marié. En fait,
dans la doxographie relative à Diogène, on trouve un espace nouveau pour la
sexualité év qúoel, un espace gagné à force d 'éliminer chez l'homme la condi
tion humaine et de le rendre à l'état originaire de l'animal, voire de la bête sau
vage.
De ce point de vue, le mariage d'Hipparchia avec l'un des plus illustres parti
sans de Diogène a été mis à contribution pour soutenir l'hypothèse que le
cynisme a connu un certain relâchement avec Cratès et les cyniques postérieurs.
En effet, la plupart des critiques ont interprété ce mariage comme un fait réel,
bien que surprenant, qui atteste un changement d'attitude dans la teneur de la
doctrine cynique : cf. Zeller 2, t. II 1, p. 275 n . 1 ; Gerhard 3, p. 277 (qui décrit
Hipparchia comme « weibliche kynische Heilige» ); Festugière 23, p. 139 -144 ;
Emeljanov 20, p. 69-70. Indépendammentdes circonstances qui ontdéterminé ce
point de vue, l'union de Cratès et Hipparchia présente certains traits particuliers
qui apparaissent invariablement dans la tradition : le fait que cette union est
consommée en public et le fait que l'activité d 'Hipparchia est orientée vers l'ex
térieur de lamaison (qu'elle n 'avait même pas).
La morale grecque est très explicite sur certains sujets : c'est le cas des
rapports sexuels . Nos témoignages sont unanimes dans la présentation de l'hy
ménée cynique comme réalisé en public . Ce comportement rappelle bien le
principe de Diogène selon lequel tout doit être réalisé en public (návra toLETU
Év TÕ ułow : cf. D . L . VI69 = V B 147 Giannantoni), un principe qui traduit la
subversion préconisée par le cynisme à travers l'invasion de la vie publique par
la vie privée. En général, ce genre de rapport sexuel suscite toujours dans la litté
rature grecque une condamnation explicite, soit parce qu'on le présente comme
faisant partie des habitudes (vóuoi) de certains peuples éloignés de la civilisa
tion, soit parce qu'on affirme qu 'il rend l'homme égal à l'animal.
La comparaison avec Atalante, Agavé ou les Amazones place Hipparchia dans le domaine
des femmes que 41 C . Arrigoni, Camilla, amazzone e sacerdotessa di Diana , coll. « Testi e
documenti per lo studio dell' Antichità » 69, Milano 1982, p. 25 n. 26 , appelle « spéciales » , du
fait qu ' elles se trouvent en dehors de la norme: « In generale caccia femminile e lavoro della
lana sono incompatibili perché espressione di status ed ethos antitetici, essenzialmente un' op
posizione fra natura e cultura. » Hipparchia est comparée de même aux prostituées, qui sont
aussi des femmes spéciales, réunissant dans leur comportement sexuel tout ce qu'il a de sau
vage. La tentative de Diogène consistant à rendre sauvage la vie (cf. Plutarque, De esu carn.,
995 C - d = V B 93 Giannantoni) présente l'animal comme un modèle, la nature comme une
vérité, la vie comme un but dans la lutte inflexible contre le vouos et contre la dóba . En
accord avec cela , le portrait d 'Hipparchia que l'on peut reconstituer représente la partie sau
vage de la femme, la décrivant comme ménade, amazone, chasseresse, prostituée. Tout en
H 138 HIPPARCHIA DE MARONÉE 749
étant incorporée dans la cité à travers la parodie de l'institution du mariage (xuvoyauía ),
Hipparchia introduit au sein de cette institution (de l'intérieur même de la société) tous les
éléments sauvages qui font partie de la critique généralisée de l' état civilisé que préconise le
cynismede l'époque de Diogène (cf. 42 M . Detienne, « Entre bêtes et dieux » , dans Destins du
cannibalisme = Nouvelle Revue de Psychanalyse 6 , 1972, p. 231-246 , notamment p . 243).
Nos sources présentent aussi un autre aspectdu comportement d 'Hipparchia,
celui qui fait référence à son activité à côté de son compagnon Cratès. De ce
point de vue, Hipparchia s'oppose radicalement à l'image sociale de la femme
athénienne, dont l'activité est restreinte à la maison et marquée par le silence.
L 'anecdote décrivant sa rencontre avec Théodore (cf. supra) semble confirmer
l'idée que pour les cyniques la femme joue le même rôle que l'homme et pos
sède donc lesmêmes droits (cf.43 L . Henrion , La conception de la nature et du
rôle de la femme chez les philosophes cyniques et stoïciens, Thèse Liège 1942
1943).
La thèse de l'identité de l'homme et de la femme est exprimée assez nettement par Dio
gène dans la Politeia (cf. V B 125 -126 Giannantoni) et n 'a rien d 'étonnant, si on pense que les
cyniques défendent la vie avev vóuov , äveu TÓNews, év QUOel. Cependant, cette idée semble
s'opposer à la misogynie de Diogène attestée par tant d'anecdotes. En réalité, on peut essayer
d'harmoniser ces deux aspects apparemment opposés si on pense que les insultes de Diogène
contre les femmes s'adressent aux femmes xarà dóEav, c'est- à-dire à celles qui agissent selon
l' image commune de la femme dans la cité. Dans la Politeia , Diogène s 'oppose à la condition
féminine, qu ' il envisage comme un fait imposé par la société, en faveur de la femme comme
un simple fait biologique . En ce sens, on peut affirmer qu 'Hipparchia s 'est libérée de la
condition féminine imposée, et qu ' elle a réalisé cette libération (dans le système social lui
même qui la produit) comme faisant partie d 'un programme théorique « d 'évacuation de la
spécificité humaine » (cf. Daraki 26 , p . 103). La rencontre avec Théodore met en relief cet
aspect du comportement d 'Hipparchia : Théodore essaie de blesser Hipparchia dans sa pudeur,
mais Hipparchia n 'est nullementtroublée, comme le serait une femmenormale. Elle n 'agit pas
devant Théodore comme une femme, parce qu 'elle a transgressé la seule condition féminine
possible dans la cité civilisée, à savoir la condition que lui fixait l'idéologie de la yuvn
oixovóuos ; mais le fait biologique inévitable reste inaltéré avec toutes ses conséquences dans
le domaine de la búouc. Ainsi, on peut interpréter le sens ultime du passage d 'Épictète ,
Entretiens III 22, 76 (= V H 20 , 8 -10 Giannantoni) comme suit : Hipparchia , libérée de sa
condition sociale de femme, est du point de vue biologique « une femme » , mais du point de
vue sociologique elle est « un autre Cratès » . La « femmemasculinisée » dont parle Daraki 26 ,
p. 104- 105 , est un fait social,non pas une altération de la nature.
. Iconographie. H . Fuhrmann,« GesprächeüberLiebe und Ehe aufBildern des
Altertums» ,MDAI(R ) 55, 1940, p. 86 -91 (« II. Krates und Hipparchia »), fig . 9, a
reconnu avec vraisemblance le portrait d'Hipparchia sur une fresque des Jardins
de la Farnésine conservée dans le Museo delle Terme à Rome (cf. aussi G . M . A .
Richter, The Portraits of the Greeks, London 1965 , t. II, p . 186 ; I. Bragantini et
M . de Vos, Le decorazioni della villa romana della Farnesina, II 1: Le pitture,
Roma 1982 ; L . A . Scatozza Höricht, Il volto dei filosofi antichi, Napoli 1986 ,
p. 129, 131). La jeune femme, convenablement habillée, porte sur la tête un
coffre et tend la main droite vers un personnage hirsute, qui serait, selon cette
interprétation , Cratès (MC 205, p. 500 ). Celui-ci, qui semble interrompu dans sa
marche, apparaît vêtu d'un manteau court, s'appuyant sur un bâton et portant un
balluchon sur les épaules, ainsi qu'une espèce de sac rectangulaire , dont il accro
che avec samain gauche la courroie qui s'appuie sur l' épaule droite, au dessus
750 HIPPARCHIA DEMARONÉE H 138
d 'une peau. Le coffre que porte Hipparchia semble confirmer que celle- ci
s'adresse à Cratès en tant que sa fiancée , car ce type de coffre, où la fiancée
porterait ses possessions, apparaît dans une série de vases représentant des
processions de noces ( cf. D . Clay, « Picturing Diogenes » , dans R . B . Branham et
M .- O . Goulet-Cazé (édit. ), The Cynics. The Cynic Movement in Antiquity and Its
Legacy, coll. « Hellenistic Culture and Society » 23, p . 366 - 387, notamment
p . 372 sq. ). La scène a été rattachée au récit de D .L . VI 96 -97 , ainsi qu ' à D . L .
VI 93.
Hipparchia est aussi vraisemblablement représentée à côté de Cratès sur une
médaille (moderne ?) conservée au Cabinet des Médailles de la Bibliothèque
Nationale de Paris (cf. Richter, fig . 1081- 1082).
JESÚSMARÍA GARCÍA GONZÁLEZ et PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ.
139 HIPPARCHIDÈS DE RHÉGIUM
Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique (V. pyth. 36 ,
267, p . 145, 19 Deubner ). F . Jacoby, art. « Hippys von Rhegion » , RE VIII 2 ,
1913, col. 1927-1930 , voir col. 1929, a émis l'hypothèse que l'Hippys
( H 159) de Rhégium mentionné par Phanias d'Érèse (fr. 12 Wehrli) chez
Plutarque serait en réalité Hipparchidès; il est cité comme autorité à propos de
doctrines du pythagoricien Pétron d’Himère.
BRUNO CENTRONE.
140 HIPPARCHOS RE 14
Témoignages. 1 H . A . Brown, Philosophorum Pythagoreorum collectionis
specimen , Diss . Chicago 1941, p . 58-69.
Pythagoricien , destinataire d 'une lettre du pseudo-Lysis conservée en deux
versions différentes : (a ) Jamblique, V . pyth. 17 , 75-78, p . 42,23 - 45, 16 Deubner ;
(b ) Hercher, Epistolographi graeci, Paris 1873, p. 601-603; édition avec traduc
tion allemande en regard et commentaire dans 2 A . Städele , Die Briefe des
Pythagoras und der Pythagoreer, coll. « Beiträge zur klassischen Philologie »
115, Meisenheim am Glan 1980 p . 154 -159 ; 203-251 ; sur cette lettre , voir égale
ment 3 W . Burkert, « Hellenistische Pseudopythagorica» , Philologus 105, 1961,
p . 16 -43, en part. p. 17 -28. Dans la version abrégée conservée par Diogène
Laërce VIII 42, le destinataire est Hippasos (2H 144). Dans cette lettre , il est
reproché à Hipparque d 'avoir divulgué les doctrines pythagoriciennes à des non
initiés après avoir expérimenté les raffinements de la vie sicilienne ; il est invité à
changer d 'attitude, sous peine d 'être considéré commemort. Cf. Clément, Strom .
V 57, 3, p . 364 , 27-29 Stählin (et les remarques d ’A . Le Boulluec , dans son édi
tion de Stromates II, coll. SC 278-279, t. II, Paris 1981, p . 210 -211) ; Synésius,
Epist. 143 ; la lettre est datée du IIIe s. av. J.-C . par Burkert 3, du fer-11° s. de notre
ère par Städele 2.
L'existence historique d’Hipparque pose problème et on a à plusieurs reprises
émis l'hypothèse d 'une confusion avec Archippos ( + + A 321) et avec Hippasos
( » H 144 ). Selon 4 E . Rohde, « Zu Iamblichus De vita Pythagorica » , RAM 34,
H 141 HIPPARCHOS D ' ILION 751
1879, p. 260-271, voir p . 262, Hipparque ne serait autre qu'Archippos. Selon
Olympiodore, in Plat. Phaed. 610, 9 Norvin (cf. L . G . Westerink , The Greek
commentaries on Plato 's Phaedo, 1: Olympiodorus, Amsterdam 1976 , 1, 13, 20 ,
p . 57), cf. Schol. in Plat Phaed . 61d, p . 9 Greene, Hipparque aurait été , avec
Philolaos, un des rescapés de l'incendie de l'école pythagoricienne (allumé par
“Gylon ” (= Cylon ? C 229 ), puni pour avoir révélé un secret). Dans cette
perspective, la confusion avec Archippos serait assez probable (cf. Jamblique, V .
pyth. 35 , 249, p. 134, 8 Deubner ; Porphyre, V. Pyth . 55, où les rescapés sont
Archippe et Lysis ; chez Diogène Laërce VIII 39, il s'agit d'Archytas et Lysis );
Olympiodore amalgame les témoignages de Platon , Plutarque (dans le De gen .
Socr., 583 a , les rescapés sontLysis et Philolaos), la lettre de Lysis et Aristoxène,
voir 5 W . Burkert, Lore and Science, p. 228 n . 48 . Selon Städele 2, p. 213 n . 28 ,
il est possible que le « faible » Hipparque de la lettre provienne d'une déforma
tion du nom du pythagoricien Archippos. Selon 6 H . Thesleff, The Pythagorean
Texts , p . 88 -89, Hipparque est peut- être un amalgame des noms d 'Archippos et
d 'Hippasos. Comme Jamblique ne mentionne qu'une seule fois Hipparque ,
tandis qu 'Hippasos est cité plusieurs fois en rapport avec la divulgation du secret
pythagoricien , dont il est également question dans la lettre, nous sommes
probablement en présence d'une confusion entre Hippasos et Hipparchos. Voir
7 Jamblique, Vie de Pythagore. Introduction , traduction et notes par L . Brisson et
A .-Ph. Segonds, Paris 1996 , p. 171 n . 2. Chez Macrobe, In somn. Scip. I 14, 19,
et Tertullien , De an. 5, 2, est attribuée à Hipparque une conception de l'âme
comme étant ignée ; dans ces passages une confusion avec Hippasos est presque
certaine, cf. Aétius IV 3 , 4 = DDG 388, 3-4 . Hipparque ne figure pas cependant
dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36 , 267, p. 143, 19 - 147, 6.
Sous le nom d 'Hipparque a été conservé chez Stobée IV 44, 81 un llepi
eủovuíaç d'environ 65 lignes en dialecte dorien. Contenu : nécessité pour
l'homme d 'affronter l'adversité et les maux de l'existence avec tranquillité
d'âme. Édition dans Brown 1, p . 64 -69; Thesleff 6 , p. 89, 6 -91, 16 ; dans DK 68
[55 ] c7, t. II, p . 228 , 21 - 230 ,7 parmi les imitations de Démocrite . Traduction
anglaise dans 8 R . Navon , The Pythagorean Writings, p . 79-81, et dans 9 D . R .
Fideler , The Pythagorean Sourcebook and Library, p . 247 -248 . Traduction ita
lienne de V .E . Alfieri dans 10 I Presocratici. Testimonianze e Frammenti, vol.
II,Roma/Bari 1981, p . 826 -829. Datation : 11° s. av. J.- C . selon 11 H . Thesleff,
An Introduction to the Pythagorean writings of the Hellenistic period, Åbo 1961,
p . 115.
BRUNO CENTRONE .
Pythagoricien ancien .
Témoignages. 1 DK 18 ( 8 ) ; t. I, p. 107 - 110 ; 2 M . Timpanaro Cardini, Pita
gorici. Testimonianze e frammenti, fasc . I, Firenze 1958 , 5 (18), p. 84 -105. Dio
gène Laërce VIII 84 lui accorde une place dans la section des Vies consacrée à
Pythagore et aux pythagoriciens. Il le qualifie de nudayop .xós. Il était origi
naire deMétaponte selon Aristote,Métaph. 984 a 7, et Diogène Laërce. Un Hip
pasos figure parmiles pythagoriciens de Sybaris dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth. 36 , 267, p. 144, 20 Deubner; d 'après V . pyth . 18 , 81, p. 81, 3 -4, certains
le disaient de Crotone, d'autres de Métaponte .
Il fut le maître d 'Héraclite (» H 64) selon la Souda H 471 s.v. 'HpáxNELTOS,
t. II, p . 583, 32-584, 1 Adler; celui d 'Empédocle (B - E 19) selon une lettre du
pseudo- Télaugès citée par Diogène Laërce VIII 55 (= Néanthe, FGrHist 84F 26 ).
Un Hippasos de Phlionte est cité par Pausanias II 13, 2, comme arrière -grand
père de Pythagore (cf. D .L . VIII 1).
Dans le récit des émeutes antipythagoriciennes de Crotone transmis par Apol
lonius chez Jamblique, V. pyth . 35, 254 -264 , p . 136 , 14 - 142, 9 Deubner, cf. 257,
p . 138, 23, un Hippasos, responsable de réformes démocratiques, figure parmi
les adversaires des pythagoriciens avec Ninon, auteur d 'un faux hieros logos
destiné à dénigrer la secte . De là vient peut-être l'attribution à Hippasos d 'un
mystikos logos (voir plus bas).
Hippasos est principalement mentionné en rapport avec (a ) la distinction
parmi les pythagoriciens entre acousmatiques et mathématiques, et (b ) la divul
gation de doctrines secrètes pythagoriciennes.
(a ) En ce qui concerne la distinction entre " acousmatiques” et “mathéma
tiques”, Jamblique la présente sous deux versions contradictoires. Selon V. pyth .
17, 81, p. 46 ,24 - 47, 3 Deubner, les "mathématiques” étaient reconnus par les
autres comme pythagoriciens, mais eux-mêmes ne reconnaissaient pas comme
tels les "acousmatiques” , considérant que la doctrine de ces derniers n 'était pas
celle de Pythagore, mais celle d'Hippasos. Chez Jamblique, De comm . math .
scient., p . 76, 19 - 77, 2 Klein , on dit au contraire que les “ acousmatiques” étaient
reconnus comme pythagoriciens par les autres, mais qu'eux-mêmes ne recon
naissaient pas les “mathématiques” , considérant que la doctrine de ces derniers
n 'était pas celle de Pythagore, mais celle d 'Hippasos. 3 W . Burkert, Lore and
Science, p. 192- 208 , a montré que la version originelle était la seconde et que par
conséquent Hippasos était à l'origine de la tendance mathématique, donnant
naissance à un groupe qui se distingua de l'orientation acousmatique, sans pour
autant renier la foi pythagoricienne. Jamblique aurait altéré cette version en
faisantainsi d 'Hippasos un pythagoricien « acousmatique » (in Nicom ., p . 10, 20
754 HIPPASOS DE MÉTAPONTE H 144
Pistelli ; de anima chez Stobée I 49, 32, à sa suite, Syrianus, in Ar. Metaph.
1080b 16 , p. 123, 7 Kroll).
(b) Selon Jamblique, V. pyth . 18, 88, p. 52, 2-8, Hippasos aurait divulgué par
écrit la construction de la sphère au moyen des douze pentagones (opaipav tņu
εκ των δώδεκα πενταγώνων) et pour cette raison il aurait peri en mer comme
impie ; selon une autre version, la doctrine divulguée aurait été celle des nombres
irrationnels et des grandeurs incommensurables (cf. V. pyth . 34, 247, p . 132, 17
23). La légende de la divulgation du secret pourrait remonter à la tradition des
“mathématiques" eux-mêmes : ces derniers, dont l'activité représentait aux yeux
des acousmatiques un enseignement nouveau et subversif qui ne pouvait être
reconnu comme authentiquement pythagoricien , jugeaient nécessaire de faire
remonter ces doctrines scientifiques jusqu 'à Pythagore lui-même afin de leur
conférer l'autorité du maître ; en conséquence, Hippasos futpar la suite réduit au
rang de plagiaire et de divulgateur des secrets (cf. Burkert 3 , p . 207). Le témoi
gnage de Clément, Strom . V 57, 3 , selon lequel un " Innapxos fut exclu de la
communauté pour avoir publié les doctrines pythagoriciennes, est inséré parmi
les témoignages relatifs à Hippasos dans DK ; sur les confusions entre Hippasos
et Hipparchos, voir la notice consacrée à ce dernier.
Euvres. Selon Démétrius deMagnésie, dans ses Homonymes, cité par D .L .
VIII 84, Hippasos n 'aurait laissé aucun écrit ; Héraclide Lembos (114), chez D .L .
VIII 7, cite un Muotixòç Nóyos qui aurait été écrit par Hippasos pour diffamer
Pythagore ; il faut sans doute mettre ce témoignage en rapport avec le hieros
logos qu' aurait composé Ninon pour diffamer les pythagoriciens, selon le récit
des émeutes antipythagoriciennes transmis par Apollonius (supra) ; on a pu éga
lement attribuer ultérieurement à Hippasos un matériel qui circulait sous le nom
de Pythagore et que l'on jugeait ennuyeux (cf. Burkert 3, p . 207 n . 78 ).
Il est donc assez probable que sous le nom d 'Hippasos circulaient déjà au III
s . av. J.- C . des écrits pseudépigraphes (cf. 4 H . Thesleff, An Introduction to the
Pythagorean writings of the Hellenistic period, Åbo 1961, p. 106). Un Iepi tõv
åróywv ypauuátwv (?) apocryphe, cité chez Élias, p . 125, 12-13 Busse (CAG
XVIII 1 = 93, 5 - 9 Thesleff), et dont l'auteur aurait péri dans un naufrage (cf.
Jamblique, V. pyth. 34, 247), était peut- être attribué à Hippasos (cf. Thesleff 4 ,
p . 14 ).
Un fragment d'un écrit sur l'âme est cité sous le nom d'Hippon de Métaponte
par Claudien Mamert, De anima II 7 ; il est inclus parmi les témoignages sur
Hippasos dans DK ; il est probable cependant qu 'il s'agit d 'un passage d'Hippon
de Rhégium (» H 157) (cf. 5 H . Thesleff, The Pythagorean texts of the Helle
nistic period, Åbo 1965, p. 93).
A Hippasos sont attribuées diverses expériences mettant à profit des vases
remplis d'eau ou des disques de bronze de même diamètre mais de différente
épaisseur pour établir les rapports numériques qui présidentaux harmoniesmusi
cales (Schol. in Plat. Phaed. 108 d, p . 15 Greene = Aristoxène fr. 90 Wehrli).
Hippasos aurait le premier (de même qu’ Archytas par la suite) désigné comme
" harmonique" la proportion du type (a -b ) : (b -c ) = a : c , jusqu 'alors appelée “ sub
H 145 HIPPIAS D 'ÉLIS 755
contraria ” (hypenantia ). Aristote cite Hippasos avec Héraclite comme philo
sophes ayant posé que le principe de la réalité est le feu. Dans les témoignages
doxographiques, qui remontent en dernière analyse à Théophraste , est attribuée à
Hippasos une doctrine selon laquelle le tout est un et limité, en mouvement
continu ; le principe serait le feu, à partir duquel les choses se formeraient par
condensation et raréfaction ; on trouve également des allusions (D .L . VIII 84) à
une théorie du changement périodique dans l'univers .
BRUNO CENTRONE.
145 HIPPIAS D 'ÉLIS RE 13 DK 86 va
Sophiste , originaire d'Élis (Ouest du Péloponnèse ). Interlocuteur de Socrate
dans deux dialogues de Platon qui portent son nom , Hippias mineur et Hippias
majeur (l'authenticité de ce dernier dialogue étant parfois contestée) et dans les
Mémorables de Xénophon (IV 4 , 5 -25, cf. DK 86 A 14), il est aussi l'un des per
sonnages du Protagoras, où notamment il fait avec succès office de médiateur
entre Protagoras et Socrate au moment où ce dernier menace de mettre un terme
à la discussion (Prt. 337c - 338 b = DK 86 C 1). Au témoignage de Platon (Hp.
Ma. 281 a-c, cf. DK 86 A 6 ), il conjuguait, comme Gorgias de Léontini ( G 28 )
et Prodicos de Céos (ibid ., 282b ), le rôle public d'ambassadeur de sa cité ,
notamment auprès de Sparte , et l'activité privée d 'un sophiste donnant des
leçons payantes.
Datation. Présenté par Platon comme« beaucoup plus jeune » que Protagoras
(Hp. Ma. 282e = DK 86 A 7), on déduit en général de sa mention dans l’Apolo
gie de Socrate du même auteur (19 e = DK 86 A 4 ) qu 'il était actif en 399a et
qu'il survécut à Socrate ; Philostrate (V. Soph. I 11, 1, cf. DK A 2) parle de son
âge avancé, ce qui fait penser qu 'il fut actif jusque dans les premières décennies
du IVe siècle . Du Pseudo-Plutarque (Vitae decem oratorum , V . Isocr. 838a,
839 b ) et de Zosime ( V . Isocr. 253, 4 ), on peut conclure qu 'Isocrate (» I 38 ), lui
même âgé, épousa la fille d'Hippias, Plathané, déjà mère de trois fils dont il
adopta le plus jeune, Apharée ; si, comme le dit Harpocration, cet Apharée était
en réalité le fils d 'Hippias, c 'est la veuve de ce dernier, non sa fille , qu 'épousa
Isocrate , ce qui réduit l'écart entre eux (cf. DK 86 A 3 ). (Voir cependant la
notice « Isocrate » .]
Euvres.Lamaigreur de notre documentation contraste avec la réputation qui
est la sienne d'avoir beaucoup écrit (DK 86 A 1), et dans les domaines les plus
divers. Sous l'apparence des railleries dont il fait à ce propos l'objet de la part de
Socrate , Platon atteste la diversité de ses compétences. Critiqué par Protagoras
pour enseigner ce que ce dernier appelle des téXVal (calcul, astronomie, géomé
trie , musique : cf. Prt. 318e), Hippias allait jusqu'à pratiquer lui-même les
métiersmanuels, s' il est vrai, comme le rapporte également Platon , qu 'il vint une
fois à Olympie n 'ayant rien sur sa personne (anneau , chaussures, tunique...) qui
ne fût son æuvre (Hp. Mi. 368 b ). Platon le fait se déclarer excellent à la fois
dans l'éloquence épidictique et dans l'art de l'improvisation en réponse à une
question quelconque (Hp. Mi. 363d); au début de l'Hippias Mineur, Hippias
756 HIPPIAS D ' ÉLIS H 145
vient ainsi de disserter sur Homère , et se déclare prêt à répondre aux questions
de Socrate. Dans l'Hippias Majeur, Hippias fait état de son savoir en matière
d '« archéologie » , c'est-à-dire de généalogie des héros et des dieux et de fonda
tion des cités, qui ont fait son succès à Sparte (Hp. Ma. 285d), ainsi que d'un
discours sur l'éducation , également destiné au public lacédémonien , composé
sous la forme d'un dialogue entre Néoptolème et Nestor; Philostrate (V . Soph. I
11, 4) mentionne ce discours sous le nom de Dialogue troyen, sans qu 'il soit
possible évidemment de savoir s'il s'agit du titre original; même chose pour les
diarétenç mentionnées par le même auteur (V . Soph. I 11, 1), où Hippias aurait
traité de géométrie , d'astronomie et de musique. Des témoins plus tardifs confir
ment le témoignage de Platon sur les recherches historiques d'Hippias : on lui
attribue des Nomsdes peuples (DK 86 B 2 ),une liste des vainqueurs olympiques
(DK 86 B 3), des considérations d 'ordre philologique (DK 86 B 9) et un Recueil
(Euvaywyn ) qui, d'après la citation qui en est faite par Athénée (Deipnosoph .
XIII, 608 f = DK 86 B 4 ), rassemblait probablement des informations diverses
d 'ordre historique. Enfin , Aristote mentionne Hippias pour la résolution de
questions de prosodie dans Homère (Polit. 25 , 1461a 21 ; cf. S. E. 4 , 166b 1 sqq.
= DK 86 B 20) et, d'après Pausanias (V 25, 4 = DK 86 B 1), il aurait lui-même
composé des vers. A tout cela Platon ajoute , dans l'Hippias Mineur (368 d), la
mnémotechnie où , dit-il, Hippias pensait être le plus brillant.
Proclus (in Euclid ., p. 272 , 3 Friedlein = DK 86 B 21) donne le nom d'Hip
pias comme celui de l'un des inventeurs de lignes qu 'il appelle « quadratrices» ;
ce nom implique que les lignes ou courbes en question étaient utilisées dans les
tentatives de quadrature du cercle, mais Proclus en parle seulement comme d'un
procédé permettant de diviser un angle droit en trois parties égales. Contestée par
un certain nombre d'historiens de la pensée antique, l'identification de cet Hip
piasmathématicien avec le sophiste Hippias d'Élis est majoritairement acceptée
depuis 1 A . A . Björnbo, art. « Hippias» 13, RE VIII 2 , 1913, col. 1707 -1711.
Selon 2 W . Schmid , Geschichte der griechischen Literatur, 1. Teil, Bd. 3,
München 1940 , p. 50, nous n 'avons pas de preuve que Hippias se soit appliqué
comme les Ioniens à la philosophie naturelle . Diogène Laërce (I 24 = DK 86 B
7) cite pourtant Hippias en même temps qu 'Aristote pour avoir rapporté que
Thalès attribuait une âme aux objets inanimés. Rapprochant ce témoignage de
l'unique citation textuelle d'Hippias qui nous ait été transmise (Clément
d 'Alexandrie , Strom . VI 15 = DK 86 B 6 ), où celui-ci semble invoquer comme
autorités Orphée,Musée, Hesiode et Homère , 3 B . Snell, « Die Nachrichten über
die Lehren des Thales und die Anfänge der griechischen Philosophie - und Litera
turgeschichte » , Philologus 96 , 1944 , p. 170 -182 (= Id ., Gesammelte Schriften ,
Göttingen 1966 , p. 119- 128 = Sophistik, hrsg. von C .J. Classen, coll. « Wege der
Forschung » 187, Darmstadt 1976 , p. 478-490 ) a fait l'hypothèse que l'informa
tion transmise par Diogène Laërce provenait d'un ouvrage où Hippias, avant
Platon (Cra . 402 b , Tht. 175e, 180c-d), aurait fait remonter à Homère faisant
naître toutes choses d'Océan et Téthys la généalogie de la physique de Thalès
faisant de l'eau le principe universel. Source commune de Platon et d 'Aristote
H 145 HIPPIAS D ' ÉLIS 757
(Metaph . A 3, 983b21 sqq.), Hippias, s'il ne fut pas physicien , aurait donc en
tout cas été le premier historien de la philosophie et l'inventeur de la doxogra
phie . (Pour des prolongements de l'étude de Snell 3 , voir 4 C .J. Classen ,
« Bemerkungen zu zwei griechischen “ Philosophiehistorikern” » , Philologus 109,
1965, p. 175- 178 ; 5 J.Mansfeld , « Cratylus 402 a-c : Plato or Hippias ?» , dans L .
Rossetti (édit.), Atti del Symposium Heracliteum 1981, t. I, Roma 1983, p. 43
55.)
Doctrine. En se fondant surtout sur le passage du Protagoras de Platon où
Hippias déclare que « par nature le semblable est apparenté au semblable » et que
« la loi est le tyran des hommes » (Prt. 337c-d), et sur sa discussion avec Socrate
dans les Mémorables de Xénophon (IV 4 ), où il conteste l'autorité du droit
positif au profit des lois non écrites, dont le critère est qu 'elles sont universelle
ment respectées, on a vu en Hippias le premier théoricien du droit naturel et du
cosmopolitisme. C 'est ainsi que 6 H . Diels, « Ein antikes System des Natur
rechts » , Internationale Monatsschrift für Wissenschaft, Kunst und Technik 11,
1917, col. 81- 102 (trad. fr.: « Une doctrine du droit naturel dans l’Antiquité » ,
Revue française d 'histoire des idées politiques 3, 1996 , p . 161- 173), n 'a voulu
voir dans la théorie du droit naturel qu 'il attribuait à « Antiphon le sophiste »
qu ’un emprunt à Hippias. Hippias s'est vu sous cet aspect conférer une impor
tance primordiale dans l'histoire de la pensée grecque et de la pensée politique
en général, importance qui contraste avec le traitement que lui réserve celui qui
en est pour nous le principal témoin , Platon . Hippias a donc fait l'objet de plu
sieurs « réhabilitations» , dontles plus notoires furent celles de 7 E . Dupréel, Les
Sophistes, Neuchâtel 1948, p. 185 -393, qui, non content de retrouver dans les
témoignages relatifs à Hippias « les traces d'une philosophie » , prétendit déchif
frer dans le texte platonicien lui-même les traces d 'emprunts multiples au
sophiste d'Élis ; de 8 M . Untersteiner, I Sofisti, Torino 1949 ' (trad. angl. par K .
Freeman , The Sophists, Oxford 1954), Milano 19672 (réimpr.Milano 1996 ; trad .
franç. par A . Tordesillas, Les Sophistes, coll. « Bibliothèque d 'Histoire de la
Philosophie » , Paris 1993), ch . XV, qui en fait le théoricien de « la 'physis' abso
lue» , c'est-à -dire d'un naturalisme non seulement politique ou juridique,mais
éthique et gnoséologique. L 'interprétation de M . Untersteiner se signale en outre
par l'attribution à Hippias, via son identification avec l'Anonyme de Jamblique
( * I 4), du chapitre III 84 de Thucydide, ainsi que du prologue des Caractères
de Théophraste. Selon Untersteiner 8, les Dissoi Logoi (2 + D 214 ) trahissent éga
lement l'influence d ’Hippias, et la « digression philosophique» de la Lettre VII
de Platon est une polémique contre lui, ce qui permet de reconstituer a contrario
les traits de sa doctrine.
Sila prédominance a souvent été donnée aux aspects éthiques et politiques de
la pensée d'Hippias, quelques auteurs ont cherché à ordonner la diversité de ses
activités et des domaines auxquels il a touché autour d'un principe qui en assu
rerait la cohérence. Parmiles « profils » ainsi esquissés, citons 9 A . Momigliano ,
« Ideali di vita nella sofistica : Ippia e Crizia » , La Cultura, n.s. 9, 1930, p. 321
330 = Quarto Contributo alla Storia degli Studi Classici e del Mondo Antico,
758 HIPPIAS D 'ÉLIS H 145
Roma 1969,p . 145- 154 (trad.allem .dans Sophistik, hrsg. von C .J. Classen, coll.
« Wege der Forschung» 187, Darmstadt 1976 , p . 465 -477), pour qui l'ampleur
même des activités d 'Hippias et les positions théoriques qui sont les siennes
s'expliquent par la volonté d 'autarcie ; 10 J. Brunschwig, « Hippias d' Élis, philo
sophe-ambassadeur» , dans K . Boudouris (édit.), The Sophistic Movement,
Athènes 1984, p. 269-276 , pour qui, selon une démarche analogue, il est possible
de donner une cohérence à la figure d'Hippias à partir de son métier d'ambassa
deur, c 'est-à -dire de médiateur, de pacificateur, attaché dans tous les domaines à
« rapprocher les parties en conflit et là ) rétablir des continuités là où il y a des
coupures » .
Éditions. Témoignages et fragments : 11 DK II, p . 326 -334 (n° 86) ;
12 Sofisti. Testimonianze e frammenti, fascicolo terzo . Introduzione, traduzione e
commento a cura di M . Untersteiner, Firenze 1954, p . 38 -109 (aux fragments B
de Diels, M . Untersteiner ajoute le prologue des Caractères de Théophraste ;
dans la rubrique C (Imitation ), où Diels ne fait figurer que Platon, Protagoras
337c - 338 b , il ajoute Hippias majeur 301b et une scholie au Gorgias 497c
[ p . 160 Greene )).
Traductions seules. Traduction anglaise par 13 D . Gallop, The Older
Sophists edited by R .K . Sprague, University of South Carolina Press, Columbia
(South Carolina) 1972, p . 94-105. Traduction française par 14 J.- P . Dumont, Les
Sophistes. Fragments et témoignages, Paris 1969, p . 141-156 ; 15 Id ., Présocra
tiques, p. 1078- 1090.
Bibliographie. 16 C . J. Classen, « Bibliographie zur Sophistik » , Elenchos 6 ,
1985 (Hippias, p . 120-122) = mise à jour de la bibliographie parue dans
Sophistik, hrsg . von C . J. Classen , coll. « Wege der Forschung » 187, Darmstadt
1976 (Hippias, p . 689-691).
Études d 'orientation . 17 H . Gomperz , Sophistik und Rhetorik , Leipzig
Berlin 1912 (réimpr. Darmstadt 1965), p .68-79 ; 18 W . Schmid ,Geschichte der
griechischen Literatur, 1. Teil, Bd. 3,München 1940 , p . 49-57 ; 19 W . Nestle ,
Vom Mythos zum Logos. Die Selbstentfaltung des griechischen Denkens von
Homer bis auf die Sophistik und Sokrates, 2e éd ., Stuttgart 1942, réimpr. 1975,
p . 360-371 ; 20 W . K . C . Guthrie , HGP I 3 = The Sophists, Cambridge 1971,
p . 280 -285.
Sur la mnémotechnie : 21 H . Blum , Die antike Mnemotechnik , coll. « Spu
dasmata » 15 , Hildesheim New York 1969, p .48-55.
Sur la quadratrice : Björnbo 1 ; 22 Th . Heath , A History of Greek Mathema
tics, Oxford 1921, t. I, p . 182, 226 -230 ; 23 K . Freeman, The Pre-Socratic Philo
sophers. A Companion to Diels' " Fragmente der Vorsokratiker", Oxford ,
« Second Edition » , 1966 , p . 385-388.
MICHEL NARCY.
H 148 HIPPOBOTOS 759
146 HIPPIAS DE PTOLÉMAÏS IV ?
Ce platonicien a laissé sa signature dans les Tombeaux des Rois à Thèbes (J.
Baillet, Inscriptions grecques et latines des tombeaux des rois ou Syringes, Le
Caire 1923, n° 1984). Une datation précise est impossible,mais c'est surtout au
IVe siècle que le pèlerinage de Thèbes semble avoir été de tradition dans les
milieux platoniciens (voir B . Puech , art. « Bèsas de Panopolis » , B 29, DPKA II ,
p . 106 - 107).
BERNADETTE PUECH .
147 HIPPOL
Épicurien (?) dont le nom a été lu par Crönert, Kolotes und Menedemos,
p. 98 , dans un passage des plus incertains d'un ouvrage anonyme contenu en
PHerc . 1040 pz. III 1, 3 : tÕL ' Inno [ et 5 : ‘I]nto -. Cf. M . Capasso , CronErc 12,
1982, p .6 n . 12. Pour le nom , voir l' épicurien Hippocléidès, » H 149.
TIZIANO DORANDI.
(54) Plaies (Ilepi €2xõv): Littré 19 , VI, p . 398-433 ; Pétrequin 23, 1; Potter
21, VIII ; Duminil 55.
(55) Fistules (Ilepi ovpiyywv) : Littré 19, VI, p . 446 - 561; Pétrequin 23, I ;
Joly 48 ; Potter 21, VIII.
(56 ) Hémorroïdes (ſlepi aiuoppoíowv): Littré 19 , VI, p. 434 - 445; Pétrequin
23, 1 ; Joly 48 ; Potter 21 , VIII.
( 57) Plaies de la tête (Ilepi tõv év tñ xebarñ tpwuátwv) : Littré 19, III,
p . 150- 261 ; Pétrequin 23, 1; Kühlewein 20, II; Withington 21, III.
(58 ) Anatomie (Iεpi ávatouñs): Littré 19, VIII, p. 536 -541 ; Duminil 55 .
H . Lettres et écrits biographiques :
(59) Décret des Athéniens (Abyua 'Aonvaíwv): Littré 19, IX , p. 400 -402 ;
71 W . D . Smith , Hippocrates Pseudepigraphic Writings, Leiden 1990 .
(60) Discours à l'autel ('Etibbulos) : Littré 19 , IX , p . 402-404 ; Smith 69.
(61) Discours d 'ambassade (Ilpeobeutixóc) : Littré 19, IX , p . 404 -428 ;
Smith 71.
(62) Lettres (’Eniotolaí, corpus de 24 lettres) : Littré 19 , IX , p . 308 -400 ;
72 D . Sakalis, 'Intoxpátous 'Emotoraí, Ioannina 1989; Smith 71 ; Voir aussi,
pour deux lettres célèbres absentes de ces éditions, 73 F . Z . Ermerins, Anecdota
Medica Graeca , Leiden 1840, p. 278 -297 (Lettre au roi Ptolémée sur la consti
tution de l'homme) ; 74 J. F . Boissonade, Anecdota Graeca, III, Paris 1831,
p .422-428 (Lettre au roi Ptolémée sur la santé).
1. Autres.
Outre ces œuvres traditionnellement admises dans les éditions « complètes»
du Corpus (à l'exception du n° 8 , qui ne figure pas dans lesmanuscrits grecs à
l'origine des éditions, et du n° 42), de nombreux autres opuscules – près d 'une
centaine -, parfois conservés en latin ou en arabe seulement, sont également
attribués à Hippocrate . En voir la liste dans 75 R . Gossen , art. « Hippokrates >>
16 , RE VIII 2 , 1913, col. 1847-1850 (nº 57- 158 ), ainsi que, pour les manuscrits
qui les transmettent, 76 H . Diels, Die Handschriften der antiken Ärzte , dans
APAW , 1905, réimpr. Leipzig 1970, p. 39-57.
Traductions et anthologies. 77 Ch. Adams, The Genuine Works of Hippo
crates, 2 vol., London 1849; 78 Ch. Daremberg, Euvres choisies d 'Hippocrate ,
2e éd., Paris 1855 ; 79 R . Fuchs, Hippokrates. Sämmtliche Werke , 3 vol.,
München 1895- 1900 ; 80 R . Kapferer et G . Sticker, Die Werke des Hippokrates.
Die hippokratische Schriftensammlung in neuer deutscher Übersetzung , 5 vol.,
Stuttgart 1933- 1940 ; 81 J. Chadwick et W . N . Mann , The Medical Works of
Hippocrates, Oxford 1950 ; 82 W . Capelle , Hippokrates. Fünf auserlesene
Schriften , Zürich 1955 ; 83 H . Diller , Hippokrates. Schriften . Die Anfänge der
abendländischen Medizin , Hamburg 1962 ; 84 R . Joly, Hippocrate, Médecine
grecque, Paris 1964 ; 85 M . Vegetti, Opere di Ippocrate , Torino 1965 ; G . E . R .
Lloyd, Hippocratic Writings, coll. « Pelican Classics » , Harmondsworth 1978 ;
86 A . Debru , Hippocrate, La consultation , Paris 1985 (trad. de Littré); 87 A .
780 HIPPOCRATE DE COS H 152
Pecker (édit.), Hippocrate, Euvres complètes, 4 vol., Paris 1979- 1990 (trad. de
Littré publiée séparément, avec introduction et commentaires de P. Theil et Th .
Vetter) ; 88 C .Garcia Gual, M . Lara Nava , J. A . Lopez Ferez, L . Sanz Lingote ,
A . Esteban et alii, Tratados hipocráticos I- VI,Madrid 1983- 1990 (en cours) ;
89 D . Gourevitch , M . Grmek et P. Pellegrin , Hippocrate, De l'Art médical, Paris
1994 (trad. de Littré) ; 89bis Hippocrate, L 'art de la médecine. Traduction et pré
sentation par J. Jouanna et C .Magdelaine, coll.GF, Paris, 1999.
Instrumenta studiorum . Concordance et index : 90 J. H . Kühn et U .
Fleischer, Index Hippocraticus, 4 vol., Göttingen 1986 -1989 (reposant,bien que
l'ensemble des références soit donné d'après l' édition Littré , sur une collation de
première main des principaux manuscrits , avec indication des variantes, et sur
l'utilisation des éditions critiques les plus récentes) ; 91 G . Maloney et W . Frohn ,
Concordance des æuvres hippocratiques, 5 vol., Québec 1984, réimpr. Hil
desheim 1986 (essentiellement faite à partir du texte de Littré); 92 G . Maloney,
Indexes inverses du vocabulaire hippocratique, Québec 1987.
Bibliographies : 93 G . Maloney et R . Savoie , Cinq cents ans de biblio
graphie hippocratique (1473-1982 ), Québec 1982 ; à compléter pour 1983 -1992
par 94 S. Byl, « Les dix dernières années (1983- 1992) de la recherche hippocra
tique » , Centre Jean -Palerne, Lettre d 'informations 22,mai 1993, p . 1-39; 95 B .
Bruni Celli, Bibliografía hipocrática , Caracas 1984 ; 96 M . D . Grmek , « Un
siècle d ' études hippocratiques. Bibliographie critique » , dans Pecker 87, t. IV ,
Paris 1990 , p .431-442.
Pour les éditions : voir 97 H . Leitner, Bibliography to the Ancient
Medical Authors, Bern /Stuttgart/Wien 1973; 98 G . Fichtner, Corpus Hippocrati
cum . Verzeichnis der hippokratischen und pseudohippokratischen Schriften ,
Tübingen Institut für Geschichte der Medizin , 1992 (sur demande, constamment
réactualisé).
Pour la transmission du Corpus: pour les manuscrits de chaque
traité , en grec, et éventuellement en latin , syriaque, arabe et hébreu , voir Diels
30, p . 3 -57, qui, bien que vieilli, demeure le point de départ indispensable de
toute recherche; pour les papyrus, voir 99 M .- H . Marganne et P. Mertens,
« Medici et Medica. Catalogue des Papyrus littéraires grecs et latins (=Mertens
Pack ”)» , dans B . Mandilaras, Proceedings of the International Congress of
Papyrology, Athènes 1988, vol. 1, p . 105- 146 ; pour la tradition latine, voir
100 G . Sabbah (édit.), Bibliographie des textesmédicaux latins. Antiquité et haut
Moyen -Âge, coll. « Mémoires du Centre Jean Palerne» 6 , Saint-Étienne 1988,
p. 94 -107 ; pour la tradition arabe, voir 101 F. Sezgin , Geschichte des arabischen
Schrifttums, t. III. Medizin , Pharmacie , Zoologie, Tierheilkunde, Leiden 1970,
p . 23 -48 ; 102 M . Ullmann , Die Medizin im Islam = Handbuch der Orientalistik
VI 1, Leiden /Köln 1970, p . 25 -35 ; pour la tradition hébraïque, voir 103 M .
Steinschneider, Die hebräischen Übersetzungen des Mittelalters und die Juden
als Dolmetscher, Graz 1956 (Berlin 1893) ; pour l'histoire du texte , voir les
synthèses de 104 J. Irigoin , « Hippocrate et la Collection hippocratique », ACF
1987 -1988, p . 629-647, et 105 Id ., « Hippocrate , Galien et quelques autres méde
H 152 HIPPOCRATE DE COS 781
cins grecs» ,ACF 1988-1989, p. 585-603, et de 106 G . Strohmaier, « La tradition
hippocratique en latin et en arabe» , dans G . Sabbah ( édit.), Le latin médical,
coll. « Mémoires du Centre Jean Palerne » 10 , Saint-Étienne 1991, p. 27-39.
Études d'ensemble. Gossen 75 ; 107 L. Edelstein , lepi đépwv und die
Sammlung der hippokratischen Schriften , Berlin 1931 ; 108 K . Deichgräber, Die
Epidemien und das Corpus Hippocraticum . Voruntersuchungen zu einer
Geschichte der koischen Ärzteschule , coll. « APAW » 3, Berlin 1933 (2e éd .,
avec « Nachwort und Nachträge» , en 1971) ; 109 L . Edelstein , art. « Hippokra
tes », RESuppl. VI, 1935, col. 1290- 1345 ; 110 M . Pohlenz, Hippokrates und die
Begründung der wissenschaftlichen Medizin , Berlin 1938 ; 111 L . Bourgey,
Observation et expérience chez les médecins de la Collection hippocratique,
Paris 1953 ; 112 N . Van Brock , Recherches sur le vocabulaire médical du grec
ancien, soins et guérison , Paris 1961 ; 113 W . Müri, Der Arzt im Altertum , 3e éd.,
München 1962; 114 R . Joly , Le niveau de la science hippocratique. Contribu
tion à la psychologie de l'histoire des sciences, Paris 1966 ; 115 F . Kudlien , Der
Beginn des medizinischen Denkens bei den Griechen von Homer bis Hippo
krates, Zürich /Stuttgart 1967 ; 116 P. Lain Entralgo, La Medicina hipocratica,
Madrid 1970 ; 117 H . Flashar (édit.), Antike Medizin, coll. « Wege der
Forschung» 221, Darmstadt 1971 ; 118 E . Vintro, Hipocrates y la nosologia
hipocratica, Barcelona 1972 ; 119 H . Diller, Kleine Schriften zur antiken Medi
zin , Berlin 1973 ; 120 J. Jouanna , Hippocrate. Pour une archéologie de l'école
de Cnide, Paris 1974 ; 121 A . Roselli, La chirurgia ippocratica , Firenze 1975 ;
122 J. Ducatillon, Polémiques dans la Collection Hippocratique, Lille 1977 ;
123 W . D . Smith , The Hippocratic Tradition, Ithaca/London 1979 ; 124 J.
Pigeaud , La maladie de l'âme. Étude sur la relation de l'âme et du corps dans la
tradition médico -philosophique antique, Paris 1981 ; 125 A . Thivel, Cnide et
Cos ? Essai sur les doctrines médicales dans la Collection Hippocratique, coll.
« Publications de la Faculté des lettres et des sciences humaines de Nice » 21,
Paris 1981 ; 126 M .-P. Duminil, Le sang, les vaisseaux, le cæur dans la Collec
tion Hippocratique. Anatomie et physiologie, Paris 1983 ; 127 M . D .Grmek, Les
maladies à l'aube de la civilisation occidentale , Paris 1983; 128 D . Gourevitch ,
Le triangle hippocratique dans le monde gréco- romain : le malade, sa maladie et
son médecin , coll. BEFAR 251, Rome 1984 ; 129 V . Di Benedetto , Il medico e la
malattia . La scienza di Ippocrate, Torino 1986 ; 130 J. Pigeaud, Folie et cure de
la folie chez les médecins de l'antiquité gréco -romaine : la manie , Paris 1987 ;
131 V . Langholf,Medical Theories in Hippocrates. Early Texts and the 'Epide
mics ', coll. « Untersuchungen zur antiken Literatur und Geschichte » 34, Berlin /
New York 1990 ; 132 L . Ayache, Hippocrate, Paris 1992 ; Jouanna 2 ; 133 J.
Jouanna, « La naissance de l'art médical occidental» , dans M . D . Grmek (édit.),
Histoire de la pensée médicale en Occident, 1. Antiquité etMoyen -Âge, Paris
1995, p. 25 -66.
Il faut ajouter à ces ouvrages la série des Colloques internationaux qui se
tiennent tous les trois ans depuis 1972 et reflètent l'essor et le dynamisme des
études hippocratiques depuis une vingtaine d 'années: 134 L . Bourgey et J.
782 HIPPOCRATE DE COS H 152
Jouanna (édit.), La Collection hippocratique et son rôle dans l'histoire de la
médecine. Colloque de Strasbourg (23-27 octobre 1972), coll. « Trav. du Centre
de Recherche sur le Proche-Orient et la Grèce antiques » 10 , Leiden 1975 ;
135 R . Joly (édit.), Corpus Hippocraticum , Actes du Colloque hippocratique de
Mons (22- 26 sept. 1975), Mons 1977 ; 136 M . D . Grmek et F . Robert ( édit.),
Hippocratica, Actes du colloque hippocratique de Paris (4 - 9 septembre 1978 ),
Paris 1980 ; 137 Fr. Lasserre et Ph. Mudry (édit.), Formes de pensée dans la
Collection hippocratique, Actes du IVe Colloque International Hippocratique
(Lausanne, 21- 26 septembre 1981), Genève 1983; 138 G . Baader et R . Winau
(édit.), Epidemien - Theorie - Praxis- Tradition . Verhandlungen des Ve Colloque
international hippocratique, Berlin , 10 .-15. 9. 1984, coll. « Sudhoffs Archiv
Beihefte » 27, Stuttgart 1989 ; 139 P . Potter, G . Maloney et J. Desautels (édit.),
La maladie et lesmaladies dans la Collection Hippocratique : Actes du Vre Col
loque internationalhippocratique (Québec, du 28 septembre au 3 octobre 1987),
Québec 1990 ; 140 J. A . Lopez-Ferez (édit.), Tratados Hipocráticos. Actas del
Vire Colloque International Hippocratique (Madrid , 24 -29 de Septiembre de
1990), Madrid 1992 ; 141 R . Wittern et P. Pellegrin (édit.), Hippokratische
Medizin und antike Philosophie. Verhandlungen des VIII. Internationalen Hip
pokrates-Kolloquium (Kloster Banz, Staffelstein, 23-28. Sept. 1993), Hildesheim /
Zürich/New York 1996 ; 141bis Aspetti della Terapia nel « Corpus hippocra
ticum ». Atti del « IXe colloque International Hippocratique» (Pisa 25 -29 settem
bre 1996 ), a cura di I. Garofalo, A . Lami, D .Manetti, A . Roselli, coll. « Accade
mia toscana di Scienze e Lettere “ La Columbaria" » , 183, Firenze 1999.
Présentation du Corpus hippocratique. La soixantaine d'ouvrages tradi
tionnellement inclus dans le Corpus forme un ensemble disparate tant par les
sujets abordés, les styles, les dates de rédaction (du ve s. av. J.-C jusqu'au début
de notre ère pour Dentition ou Bienséance) que par les doctrinesexprimées, dont
les contradictions s'opposent à l'unité d'auteur.
(a) La question hippocratique. Les seuls témoignages anciens incontestables
que l'on possède prouvent que deux au moins des traités appartenant au Corpus
ne sont pas de la main d'Hippocrate, ainsi Nature de l'homme, dû à son disciple
Polybe (cf. Aristote, H .A . III 3, 512b 12 - 513 a 7 ), ou encore Nature des Os, dont
un chapitre au moins est de la main de Syennésis de Chypre, un autre de ses
disciples (cf. Aristote , H . A. III 2, 511b23- 30 ). La « question hippocratique »
s'est très vite posée, puisque déjà Érotien, au jer s. de notre ère , dressait la liste
des écrits hippocratiques jugés authentiques, tandis que Galien , au siècle suivant,
lui consacrait un ouvrage, aujourd 'hui perdu (Sur les écrits authentiques et
bâtards d 'Hippocrate ). Elle a longtemps animé les recherches, et les modernes
ont cru pouvoir déterminer quel(s) traité(s) revenai( en )t à Hippocrate en exploi
tant deux témoignages: (1) le célèbre passage du Phèdre, 270c sq., qui évoque la
méthode hippocratique selon laquelle une connaissance du corps est impossible
sans celle du tout (ToŰ Őhou ); selon l'interprétation qu 'on fait de ce témoignage,
on a cru retrouver l'application de cette méthode dans divers traités, entre autres
Nature de l'homme, AncienneMédecine, Airs, eaux, lieux ou Régime,mais sans
H 152 HIPPOCRATE DE COS 783
véritable certitude (très riche bibliographie sur cette question , reflétant la diver
sité des interprétations : cf., pour ne citer que les études les plus significatives,
142 W . Capelle , « Zur hippokratischen Frage », Hermes 57, 1922, p. 247-265 ;
143 P . Kucharski,« Laméthode d'Hippocrate dans le Phèdre », REG 52, 1939,
p. 301-357 ; 144 R . Joly , « La question hippocratique et le témoignage du
Phèdre », REG 74, 1961, p .69-92; 145 H .Herter, « The problematic mention of
Hippocrates in Plato 's Phaedrus» , ICS 1, 1976 , p. 22-42 ; 146 J. Jouanna, « La
Collection hippocratique et Platon » , REG 90, 1977, p. 15 - 28 ; 147 R . Joly , « Pla
ton , Phèdre et Hippocrate : vingt ans après» , dans Lasserre etMudry 43, p . 407
422 ; 148 J.Mansfeld, « Plato and the method of Hippocrates », GRBS 21, 1980 ,
p. 341- 362); (2 ) le papyrus deMénon, ou Anonyme de Londres (IIP ; édité par
149 H . Diels, Anonymi Londinensis ex Aristotelis latricis Menoniis et aliis
medicis eclogae, Berlin 1893 ; 150 W . H .S . Jones, The MedicalWritings of Ano
nymous Londinensis, Cambridge 1947), doxographie médicale liée au cercle
aristotélicien , dont une partie (col. V 35- VII 40), consacrée à Hippocrate, insiste
sur la primauté de l'air dans la production des maladies, idée qu 'on retrouve
dans le traité des Vents. Mais la critique moderne n ’ attribue pas cet ouvrage à
Hippocrate même (pour les rapports entre Vents et l’Anonymede Londres, voir
Jouanna 32 , p . 39 -47) . On se heurte à des difficultés analogues si l'on tente d 'ex
ploiter les témoignages quasi contemporains: Ctésias (cf. Galien , Comm . aux
Articulations, IV 40) et Dioclès (frg. 187 Wellmann = Galien , Comm . aux Arti
culations III 23) critiquent en les attribuant nommément à Hippocrate certaines
pratiques ou conceptions médicales qu 'on trouve dans Articulations ou Épidé
mies l; de même, on sait que l'alexandrin Hérophile a contesté le Pronostic
( fragment 33 et 261 von Staden 8 ).Mais l'analyse terminologique montre entre
ces traités, que les témoignages anciens inciteraient à attribuer à Hippocrate, des
divergences telles qu'elles rendent peu probable l'unité d 'auteur. L 'absence de
résultats concrets s'est traduite par un scepticisme grandissant, jusqu'aux posi
tions extrêmes d ’Edelstein , selon qui Hippocrate n 'est qu 'un nom sans réalité
tangible (cf. Edelstein 107 et surtout 27) ; avant lui, doutes émis aussi par 151 U .
von Wilamowitz , « Die hippokratische Schrift ſlepi ipñs vouoou », SPAW 1901,
p . 2 -23 ; 152 O . Regenbogen, « Hippokrates und die hippokratische Sammlung » ,
JKPh 47 , 1921, p . 185 - 197 ; à l' inverse ,mise en évidence des liens entre certains
traités et la personne même d 'Hippocrate, ou du moins de son école, par
Deichgräber 108, p . 162-172 ; pour un passage en revue des diverses opinions
sur la question, cf. 153 L . Edelstein , « The genuine works of Hippocrates» , BHM
7, 1939, p . 236 -248 = Ancient Medicine, p. 133- 144, ainsi que, pour une biblio
graphie récente sur ce point, 154 G . E . R . Lloyd, « The Hippocratic Question » ,
dans Methods and Problems in Greek Science , Cambridge 1991, p . 194 - 223
(reprise avec additions etmise à jour bibliographique de l' article de 1975).
(b) Les « écoles» médicales. A défaut de pouvoir attribuer des traités à Hip
pocrate lui-même, on a tenté de les rattacher à son école , celle de Cos, par oppo
sition à l' école rivale de Cnide, en s'appuyant sur la critique de l'ouvrage fonda
mental de l'école de Cnide, Sentences cnidiennes, qu 'on lit dans le Régime des
784 HIPPOCRATE DE COS H 152
maladies aiguës, chap. 1 : l'auteur reproche aux Cnidiens leur thérapeutique
sommaire et une trop grande subdivision des maladies, caractéristiques qu 'on
retrouve dans certains traités nosologiques (Maladies II et III, Affections inter
nes) et gynécologiques (Maladies des femmes I-III, Nature de la femme). Voir,
pour les premiers , Jouanna 120 , et, pour les seconds, 155 H . Grensemann , Kni
dische Medizin , I, Berlin 1975 , et II, Stuttgart 1987. Sont rattachés à l'école
coaque, pourne citer que les principaux traités, le groupe des Épidémies, Airs,
eaux, lieux, Pronostic, Aphorismes,Maladie sacrée, Humeurs, Prénotions coa
ques, Prorrhétique I et II, ainsi que les traités chirurgicaux. Voir Deichgräber
108, p. 9- 127. Cependant cette distinction entre les écoles, qui ne peut rendre
compte de l'intégralité du Corpus et qui est parfois trop systématique, est elle
même contestée et relativisée. Voir la remise en question de 156 W .D . Smith ,
« Galen on Coans versus Cnidians » , BHM 47, 1973, p . 569-585, et également
Thivel 125, avec la mise au point et les réserves de Jouanna 64 , p. 31-32, n. 3.
LA PENSÉE HIPPOCRATIQUE ET LA PHILOSOPHIE
1. De la pratiquemédicale à la réflexion sur la médecine
Il s'agit ici non de donner une description exhaustive de la pensée hippocra
tique, mais d 'insister simplement sur quelques points qui peuvent intéresser
l'histoire des idées. Indépendamment des divergences théoriques et de l'hétéro
généité du Corpus, un même fonds commun et une unité de pensée se dégagent.
(a) Primauté de l'observation : priorité est donnée à l' observation débouchant,
chez les médecins cnidiens, sur une typologie nosologique très détaillée et
l'expression d 'un diagnostic (voir Maladies II, Affections internes), tandis que
l’école coaque tire de l'observation concrète (voir par exemple Épidémies, réu
nissant les « fiches cliniques » de plusieurs dizaines de malades) des règles géné
rales régissant le cours des maladies permettant la formulation d 'un pronostic
(cf. en particulier Pronostic, Épidémies, Prénotions coaques, Prorrhétique 1 et
II). Bien des observations sontrestées célèbres, comme le faciès hippocratique
(Pronostic 2), la carphologie (Pronostic 4 ), l'hippocratisme digital (Pronostic
17), tout comme la pratique de l'auscultation immédiate (Maladies II 47b , 59,
61 entre autres). Voir Grmek 127, surtout p . 409-436 (« Pronostic, diagnostic et
conceptualisation des maladies chez Hippocrate » ).
(b) Anatomie et physiologie . En l'absence de dissection , les connaissances
anatomiques et physiologiques restent très limitées et presque exclusivement
dépendantes de reconstructions intellectuelles. Voir 157 C . R . S . Harris, The
Heart and the Vascular System in Ancient Greek Medicine, Oxford 1973 ;
Vegetti etManuli 54; Duminil 126 ; pour la théorie des humeurs (sang, phlegme,
bile noire, bile jaune ), énoncée pour la première fois dans Nature de l'homme,
voir 158 E . Schöner, Das Viererschema in der antiken Humoralpathologie ,
Wiesbaden 1964. Pour la méthode de reconstruction de l'invisible à partir du
visible, par analogie (cf. Anaxagore, DK 59 B 21 a), voir 159 H . Diller, « "OUIS
đônAoV và balo uela » , Hermes 67, 1932, p. 14-42.
H 152 HIPPOCRATE DE COS 785
(c) Approche rationnelle de la maladie : sont prônés le refus d'une causalité
divine ou magique dans l'origine des maladies et la recherche d 'une causalité
rationnelle. Cf. en particulier Maladie Sacrée , à propos de l'épilepsie, ou Airs,
eaux, lieux, à propos de la maladie des Scythes (à comparer avec Hérodote I 105
et IV 67, qui ne retient que l'explication religieuse ). Voir entre autres sur ce
point 160 G . E. R . Lloyd, Magic, reason and experience. Studies in the origins
and development of Greek science, Cambridge 1979 , p . 10 -58 (« the criticism of
magic and the inquiry concerning nature » ) et la synthèse de Jouanna 2, p. 259
297 (« le rationalismehippocratique et le divin »). Decette approche découle une
nouvelle conception de la santé et de la maladie. D 'après Ancienne médecine et
Nature de l'homme, la santé se définit par le mélange harmonieux (notions de
upãous et de lletplórns ) des éléments constitutifs du corps et l'équilibre de leur
force respective (dúvaques, notion étudiée par 161 G . Plamböck , « "Dynamis” im
Corpus Hippocraticum » , AAWMIGS 1964, 2 , p . 63- 110 ), la maladie étant la
domination d'un élément sur les autres. Pour les rapprochements possibles avec
la définition donnée par Alcméon de Crotone ( A 98 ] (santé/isonomie , maladiel
monarchie ), voir 162 L . MacKinney, « The concept of isonomia in Greek Medi
cine» , dans J. Mau et E . G . Schmidt ( édit.), Isonomia , Berlin 1964, p. 79-88 ;
163 G . Cambiano, « Patologia e metafora politica. Alcmeone, Platone e Corpus
Hippocraticum », Elenchos 3, 1982 , p. 219-236 . Pour les différentes phases
distinguées dans le cours de la maladie (crise, paroxysme, coction , dépôt, réci
dive, métastase, jours critiques), voir Bourgey 111, p. 236 -251 ; Langholf 131,
p. 73-134 . Si la santé est équilibre entre les constituants internes de l'individu ,
elle est aussi équilibre entre l'homme et son milieu naturel (cf. surtout, pour
l'illustration de cette médecinemétéorologique, Airs, eaux, lieux : influence sur
la santé de l'orientation aux vents et au soleil, de l'eau, du climat, de la nature du
sol), point de départ d'une réflexion ethnographique approfondie sur les relations
entre climat, physique et moral (comparaison des peuples de l'Europe et de
l' Asie) et sur les notions de púous et vouoc. Voir 164 H . Diller, Wanderarzt und
Aitiologe, Leipzig 1934 (qui voit sur le traité l'influence marquée de Démocrite ,
mais n 'a pas été suivi sur ce point, cf. 165 A . Stückelberger , Vestigia Democri
tea , Basel 1984 , p . 80 sq.) ; 166 F . Heinimann , Nomos und Physis. Herkunft und
Bedeutung einer Antithese im griechischen Denken des 5. Jahrhunderts , coll.
« Schweizer. Beitr. zur Altertumswiss.» 1, Basel, 2e éd., 1965; 167 M . Pohlenz,
.« Nomos und Physis», Hermes 81, 1953, p . 418 -438 ; 168 J. Desautels, L 'image
du monde selon Hippocrate , Québec 1982 ; 169 M . Pinna, « Ippocrate fondatore
della teoria dei climi» , RGI 95, 1988, p. 3-19 ; 170 J.-F . Staszak , La géographie
d 'avant la géographie. Le climat chez Aristote et Hippocrate, Paris 1995, p. 125
207. Pour la thérapeutique, d'où les procédés magiques sont presque totalement
absents, voir 171 J.H . Dierbach, Die Arzneimittel des Hippokrates, Heidelberg
1924 ; 172 J. Stannard , « Hippocratic Pharmacology » , BHM 35, 1961, p. 497
518 ; Aspetti della Terapia 141bis; pour allopathie et homéopathie , voir 173 J.
Scarborough , « Theoretical assomptions in Hippocratic pharmacology » , dans
Lasserre et Mudry 137, p. 307-325 ; 174 C . W .Müller , Gleiches zu Gleichem ,
786 HIPPOCRATE DE COS H 152
coll. « Klassisch -philologische Studien » 31, Wiesbaden 1965 ; pour les traités
chirurgicaux, voir Roselli 121.
(d ) Réflexion sur l' art médical. Deux traités, Ancienne médecine et surtout
Art, offrent des discussions épistémologiques développées sur la nature de l'art,
son origine et sa méthode, s 'inscrivant, avec Ancienne médecine, dans une
réflexion plus large sur l'histoire humaine et le passage de la vie sauvage à la
civilisation (voir 175 H . Herter, « Die kulturhistorische Theorie der hippokra
tischen Schrift « Von der alten Medizin » » ,Maia 15, 1963, p. 464-483; pour le
rapprochement courant avec le Mixpós Oláxoguos de Démocrite , voir la mise
au point de Stückelberger 165, p . 82-85, et Jouanna 35 , p . 46 -48). Pour la
réflexion sur l'art chez les médecins hippocratiques (antithèse téxvn/ túyn!
återvin et nécessité d 'un savoir causal), voir 176 F . Heinimann, « Eine vorpla
tonische Theorie der téxun » ,MH 18, 1961, p. 105-130, avec bibliographie
p. 106 n . 9 ; 177 P . Joos, « Zufall, Kunst und Natur bei den Hippokratikern »,
Janus 46, 1957, p. 238-252, Jouanna 31, p. 183- 190, et Jouanna 35 , p. 34-49;
pour la notion de cause , cause déclenchante et cause profonde (npopaois et
aitiov), voir en dernier lieu 178 R . Rechenauer, Thukydides und die hippokra
tische Medizin . Naturwissenschaftliche Methodik als Modell für Geschichts
deutung, Hildesheim 1991.
2. Le Corpus hippocratique et la philosophie
Peu de domaines reflètent aussi nettement la diversité d'auteurs et de pensées
dans le Corpus que l'étude des relations entre médecine et philosophie, depuis
les traités qui rejettent l' intrusion de la philosophie en médecine, comme
Ancienne médecine ou Nature de l'homme, jusqu' à Bienséance, qui proclame
que « lemédecin philosophe est égal aux dieux » (chap . 5).
(a ) Pensée présocratique et médecine philosophique. Entre les philosophes
presocratiques, traitant de problèmes biologiques, et les médecins hippocra
tiques, les intérêts communs et par conséquent les points de rencontre – n 'impli
quant pas nécessairement une influence des uns sur les autres – sont nombreux .
Le dépistage des doctrines présocratiques dans le Corpus et de leur influence , en
particulier dans le domaine de l'embryologie , a été l'une des principales voies de
recherche jusqu 'à ce jour. Voir sur cette question le relevé bibliographique de
179 M . Roussel, « Corpus hippocratique et pensée présocratique », dans L .
Paquet, M . Roussel et L . Lafrance, Les Présocratiques. Bibliographie analytique
(1879- 1980 ),Montréal/Paris, t. II, 1989, p . 386 -425 (175 titres retenus), auquel
il faut ajouter 180 J.Longrigg, « Presocratic Philosophy and Hippocratic Medi
cine » , HistSc 27 , 1989, p. 1- 39, et son ouvrage 181 Greek rational medicine.
Philosophy and medicine from Alcmaeon to the Alexandrians, London New
York 1993 (chap. 4 , « Presocratic philosophy and the Hippocratic Corpus) ;
182 B . Vitrac,Médecine et philosophie au temps d 'Hippocrate , Paris 1989, ainsi
que les actes du huitième colloque hippocratique (141). Toutefois , bien que la
tendance dominante des études ait été de supposer une relation de dépendance
des médecins par rapport aux philosophes (ou plus rarement l'inverse), il faut
H 152 HIPPOCRATE DE COS 787
sans doute rectifier cette optique et plutôt envisager une relation de concurrence
entre médecins et philosophes, dans une égalité de compétence (voir 183 J.
Jouanna, « La naissance de la science de l'homme chez les médecins et les
savants à l'époque d'Hippocrate : problèmes de méthode », dans Lopez Ferez
140 , p . 91-111 ).
A côté de réminiscences ou de rencontres de détail, souvent trop peu précises
ou trop peu significatives pour être interprétées comme la trace d'une influence
indéniable des penseurs présocratiques, certains traités relèvent d 'une véritable
médecine philosophique. Malgré leurs divergences profondes et les opinions
variées qu 'ils reflètent (monisme, dualisme, théorie septénaire...), tous affirment
comme préalable à l'art médical la nécessité d'une connaissance des éléments
constitutifs de l'homme, associant ainsimédecine et cosmologie . Parmi les trai
tés se rattachant à cette tendance, les plus significatifs sont les suivants :
- Régime (traité n° 32). Fin va ou première moitié IVa. Un exposé sur le
régime nécessitant une connaissance préalable de la nature humaine, l'ensemble
du livre I (chap . 1-36 ) est consacré à l'anthropologie : anthropogénèse à partir de
deux substances primordiales, eau et feu , cosmobiologie (avec l'une des plus
anciennes formulations conservées de la théorie micro -macrocosmique) et
embryogénèse à l' imitation de l'univers. Voir Joly 51, p. 25 -33, et 184 Id .,
Recherches sur le traité pseudo-hippocratique du Régime, Paris 1960 , p . 20 -91,
qui minimise l'influence d'Héraclite , jugée jusqu 'alors prépondérante , mais en
réalité surtout stylistique, et relève les points de contact avec le pythagorisme,
Anaxagore ( A 158 ) (panspermatisme et embryologie), Hippon (2H 157) et
Empédocle (2E 19) . Pour les divers types d ' intelligence, selon la variété du
mélange eau/feu , voir aussi 185 J. Jouanna, « La théorie de l'intelligence et de
l'âme dans le traité hippocratique du Régime; ses rapports avec Empédocle et le
Timée de Platon », REG 79, 1966 , p. XV -XVIII.
- Vents (traité nº 30). Fin Va. Exposé sur le rôle primordial de l'air dans les
processus vitaux, les maladies et la santé , où est réhabilitée, contre le pluralisme
empédocléen, la théorie d'Anaximène (» A 168) sur la primauté de l'air dans
l'univers , reprise par Diogène d'Apollonie (2D 139). On remarque, toutefois,
l'originalité de l'auteur, qui voit la source de la pensée non dans l'air, mais dans
le sang, se rapprochant ainsi d 'Empédocle. Pour une synthèse récente, voir
Jouanna 32, p. 25-29 (« Les Vents et la philosophie présocratique» , avec relevé
des points de rencontre entre Vents etDiogène).
- Chairs (traité n° 22). Fin Va-début IV . Étude du corps humain rattachée à
une cosmologie à trois éléments, éther, air et terre, et anthropogénèse à partir du
mélange et de la transformation des éléments premiers , avec insistance sur les
notions de gras (alttapóv) et de glutineux (xorādes), et affirmation d'une
théorie septénaire. Voir surtout Deichgräber 47 , en particulier p. 24-61 (« Der
Autor und sein Werk » ), repris et résumé par Joly 48, p. 181-185, qui relève les
analogies avec Empédocle, Archélaos (P + A 308) et surtout Diogène d'Apollonie .
- Semaines (traité n° 24). Traité presque entièrement perdu en grec, conservé
en latin et partiellement en arabe, qui établit une correspondance entre l'homme
788 HIPPOCRATE DE COS H 152
microcosme et l'univers -macrocosme, dans une cosmologie et une anthropologie
entièrement fondées sur le nombre sept (phases de la lune, saisons, vents, parties
du corps, jours critiques...). Voir les nombreuses études de W . Roscher (pour
qui le traité, lié à Anaximandre et Anaximène, est antérieur aux théories pytha
goriciennes et daterait des vie-ve siècles ), en particulier 186 Die Hebdomaden
lehre der griechischen Philosophen und Ärzte . Ein Beitrag zur Geschichte der
griechischen Philosophie und Medizin , Leipzig 1906 ; 187 J. Mansfeld , The
pseudo-Hippocratic tract NEPI EBAOMAAN ch. 1-11 and Greek philosophy,
Assen 1971, qui note l'influence prépondérante des stoïciens et surtout de Posi
donius, et date en conséquence le traité du jer s. de notre ère, ainsi que West 51,
p. 365- 388, qui fait la synthèse des travaux précédents. .
- Aliment (traité n° 35). Imitation d 'aphorismes héraclitéens. Voir 188 H .
Diller, « Eine stoisch -pneumatische Schrift im Corpus Hippocraticum » , AGM
29, 1936 , p . 178-195 (qui souligne l'influence du milieu stoïcien et de l'école
pneumatique, et date le traité du jer s. de notre ère, conclusion contestée toutefois
par Joly 61, p. 133-135, qui note l'absence d 'éléments spécifiques de l'école
pneumatique et penche pour l' époque hellénistique) et Deichgräber 62.
(b ) La médecine contre la philosophie . A l'inverse, deux traités s'élèvent
contre la médecine philosophique et l' intrusion de postulats philosophiques en
médecine, dans une démarche parallèle et comparable aux efforts d 'autresméde
cins pour distinguer la médecine de la magie. Cette polémique, plus largement,
pose aussi le problème épistémologique de la méthode à adopter en médecine
(sur cette question , voir 189 J. H . Kühn , System - und Methodenprobleme im
Corpus Hippocraticum , coll. « Hermes Einzelschriften » 11, Wiesbaden 1956 ).
Bien que cette attitude d'opposition entre médecine et philosophie ne rende
compte que partiellement du Corpus, c'est généralement celle qui a retenu
l'attention et caractérisé l'esprit hippocratique : cf. déjà Celse, De Medicina ,
Proem ., selon qui, dans un premier temps, la médecine n 'était qu 'une part de la
philosophie, avant qu 'Hippocrate ne l'en détache et n ' en fasse un art indépen
dant. Ces deux traités sont les suivants :
- Ancienne médecine (traité n° 4). Fin Va. Critique des médecins novateurs
qui partent d 'un postulat (úntódols; sur ce mot, voir Jones 33, p. 26 -32, et
Jouanna 34, p . 155 n. 2) pour réduire les causes des maladies à un ou deux prin
cipes (le chaud, le froid, etc .) et définir une thérapeutique, alors que la médecine
possède déjà , selon l'auteur, sa propre méthode, fondée sur l'observation empi
rique. Pour l'identification des adversaires ici visés, voir 190 G . E .R . Lloyd ,
« Who is attacked in On Ancient Medicine ?» , Phronesis 8 , 1963, p. 108- 126
(Alcméon, ou plus probablement Philolaos) ; Jouanna 34 , p. 22-34 (« la critique
d'une médecine philosophique » : Philolaos, Pétron d'Égine, et surtout Hippon de
Crotone (2 - H 157]). Élargissement de la polémique à tous ceux qui adoptent une
attitude philosophique en médecine et prônent une connaissance de l'homme
antérieure à la médecine, comme Empédocle ( » E 19 ), nommément cité (chap .
20) ; à l'inverse, c 'est par la médecine qu'on pourra parvenir à une réelle
connaissance de l'homme. Pour les rapports entre Ancienne Médecine et les
H 152 HIPPOCRATE DE COS 789
traités philosophiques du Corpus, en particulier Régime, voir Jouanna 34 , p . 29
32, avec bibliographie p . 31 n . 1- 2 ; pour les rapports avec Platon , voir la thèse
originale - et très contestée - de 191 H . Diller, « Hippokratische Medizin und
attische Philosophie» , Hermes 80 , 1952, p . 385-409 (= Diller 119, p. 46 -70 ),
selon qui le traité estpostérieur à Platon .
- Nature de l'homme (traité nº 20 ). Seul traité dont on connaisse avec certi
tude l'auteur, Polybe, disciple d'Hippocrate (cf. Aristote , H . A. III 3, 512 b 12
513 a 7 , et Anonyme de Londres XIX 1- 18 ), daté des années 410 -400. Polémique
virulente (chap . 1- 2 ) contre les philosophes, plus particulièrement contre les
monistes, ioniens (Diogène d' Apollonie ( D 139 ), Philolaos de Crotone,
Hippon (» H 157 ]) aussi bien qu 'éléates (Mélissos de Samos, nommément cité,
dont les thèses sont habilement reprises par l'auteur pour réfuter celles de Dio
gène). Voir 192 A . Thivel, « ¿ Quiénes son los adversarios de Pólibo en los dos
primeros capitulos del tratado De la naturaleza del hombre ? » , dans Lopez-Ferez
140, p . 145 - 155 ; 193 J. Jouanna, « Rapports entre Mélissos de Samos et Diogène
d' Apollonie , à la lumière du traité hippocratique De Natura Hominis », REA 67,
1965, p . 306 - 323, ainsi que Jouanna 44, p . 39-43. Comme dans Ancienne Méde
cine, l' auteur affirme l'autonomie de la médecine, en tant que domaine de l'ob
servable, du visible (pavepóv), par opposition à la cosmologie, terrain du spécu
latif.
Malgré le rejetdes spéculations philosophiques, l'attitude des deux traités ne
laisse pas d'être ambiguë : les théoriesmédicales d 'Ancienne Médecine, en parti
culier la conception de la santé comme équilibre et mélange harmonieux des
duváuels du corps et de la maladie comme suprématie et isolement de l'un
d ' entre eux , témoignent de l'influence d ’Alcméon de Crotone et offrent des
rapprochements possibles avec Anaxagore ( voir sur ce point Jouanna 35 , p . 57
60 ); Nature de l'homme rejette le monisme, mais pour défendre les thèses du
philosophe dont il s' inspire, Empédocle , dont la théorie des quatre éléments
trouve une transposition médicale dans celle des quatre humeurs . Ainsi, même
chez des adversaires déclarés de la philosophie , la tentation d' énoncer des théo
ries aussi systématiques que le schéma quaternaire des humeurs n 'est jamais
loin , tout comme le passage permanent du descriptif à l'interprétatif. Sur cette
ambiguïté constante des relations entre médecine et philosophie, voir
194 G . E .R . Lloyd, « Aspects of the interrelations ofmedicine, magic and philo
sophy in ancientGreece », Apeiron 9, 1, 1975, p . 1-17 ; 195 J. Longrigg, « Philo
sophy and medicine. Some early interactions» , HSPh 67, 1963, p . 147-175, et
Longrigg 181, p . 100 - 103 ; Jouanna 2, p. 409-452 (« De l'observation du visible
à la reconstruction de l'invisible » ).
3. Éthique.
La déontologie hippocratique est résumée essentiellement dans Serment et des
ouvrages postérieurs à Hippocrate, Loi,Médecin , Préceptes, Bienséance, Quel
doit être celui qui apprend l'artmédical: retenue et discrétion du médecin, préfi
gurant le secretmédical; volonté de préserver avant toutla vie (refus de fournir
du poison , d 'aider à des suicides ou des avortements) ; souci permanent de la
790 HIPPOCRATE DE COS H 152
réputation de l'art. Voir 196 U . Fleischer, Untersuchungen zu den pseudohippo
kratischen Schriften laparyeniai ſlepi intpoŨ und lepi eủoynuooúvns, Ber
lin 1939. Sur la figure du médecin hippocratique et ses relations avec son patient,
dominées par le principe énoncé en Épidémies I, « être utile ou ne pas nuire » ,
voir 197 W .Müri, Arzt und Patient bei Hippokrates, Bern 1936 ; Deichgräber 36
(analyse en particulier des « grâcieusetés » du médecin pour le malade et des
efforts pour adoucir le traitement); Gourevitch 128 (en particulier les chap . II 1
4 ) ; 198 H . Flashar et J. Jouanna (édit.),Médecine et morale dans l'Antiquité ,
coll. « Entretiens sur l'Antiquité classique» 43, Vandæuvres-Genève 1997.
JACQUES JOUANNA et CAROLINE MAGDELAINE.
153 PSEUDO -HIPPODAMOS DE MILET
A . La tradition tardive qui fait du célèbre architecte et urbaniste de Milet (va)
un pythagoricien ( en DK 39 ( 27 ) ; t. I, p . 389 - 391, Hippodamos est inclus parmi
les penseurs " proches du pythagorisme"), au demeurantmal attestée (Stobée IV
34, 71 ; IV 1, 93, infra ), ne repose sur aucun fondement sûr; selon une hypothèse
ancienne de Fabricius, elle pourrait être due au fait qu 'Hippodamos aurait des
siné les plans de Thurium pour Périclès, ce qui incitait à l'associer avec la
Grande Grèce, et par là avec les pythagoriciens (cf. 1 H . Thesleff, An Introduc
tion to the Pythagorean writings of the Hellenistic period, Åbo 1961, p . 111-112,
n . 5 ). Dans Schol, in Aristoph. Equ. 327, il est dit que certains le rattachaient à
Thurium , d'autres à Samos.
B . Sous le nom d 'Hippodamos de Thurium a été transmis par Stobée IV 39,
26 un nepi kúbaluovías (Sur le bonheur) d ' environ 95 lignes en dialecte
dorien . Contenu : le bonheur, qui représente la perfection de la vie et de l'activité
humaines, dépend de la possession et de l'usage de la vertu et de la bonne for
tune ; il n 'est possible que dans un État régi par de bonnes lois. Édition dans 2 H .
Thesleff, The Pythagorean texts, p . 94, 7 - 97, 15. Thesleff rattache à cette æuvre
un fragment de deux lignes cité par Clément, Strom . II 102, 1 , sur les trois
espèces de philia . Traduction anglaise dans 3 D . R . Fideler, The Pythagorean
Sourcebook and Library, p . 215-217. Datation : 119 selon Thesleff 1, p . 115 ; 1a
selon 4 W . Burkert, « Zur geistesgeschichtlichen Einordnung einiger Pseudo
pythagorica » , dans Pseudepigrapha I, Vandeuvres/Genève 1971, p . 25-55, en
part. p . 38 -41; 5 B . Centrone, Pseudopythagorica ethica. I trattati morali di
Archita , Metopo, Teage, Eurifamo. Introduzione, edizione, traduzione e com
mento a cura di B . C ., Napoli 1990, p . 15 n . 7 ; 41-44.
Dans la Souda © 83, s. v. Osavó 1, t. II, p . 688, 16 Adler, Hippodamos de
Thurium figure comme dédicataire d 'un lepi đperñs (Sur la vertu ) de la
pseudo-Théano.
C . Sous le lemme Hippodamos le Pythagoricien ont été transmis par Stobée
IV 34, 71 ; IV 1, 93 ; 94 ; 95, 4 , des fragments d'un ſepi nollteias (Sur la
constitution de l'État) en dialecte dorien (en tout environ 140 lignes). Contenu :
division de l'État en trois classes, avec des subdivisions ultérieures; la meilleure
constitution est une synthèse des formes naturelles de gouvernement, en premier
H 154 HIPPOLYTE DE ROME 791
lieu la monarchie et l'aristocratie. Traduction anglaise de K . S. Guthrie (1920 )
dans 6 R .Navon, The Pythagorean writings, p. 91-95, et dans Fideler 3, p. 217
220. Traduction italienne dans 7 I. Lana, « L 'utopia di Ippodamo di Mileto », RF
40, 1949, cf. I frammenti, p . 315-331. Traduction française incorporée dans le
texte de l'étude de 8 A . Delatte , Essai sur la politique pythagoricienne,
Liège/Paris 1922,cf. p . 125-176 : le chapitre intitulé « Le Tepi noliteiac attri
bué à Hippodamos et quelques ouvrages d'inspiration analogue» . Datation : 111a
selon Thesleff 1, p. 110 ; 115 ; 9 G . J. D . Aalders, Political thought in Hellenistic
times, Amsterdam 1975, p. 27- 38.
BRUNO CENTRONE .
154 HIPPOLYTE DE ROME DM III
Évêque schismatique et polygraphe romain .
INDICATIONS BIBLIOGRAPHIQUES
Identité de l'auteur et corpus littéraire. 1 P. Nautin , Hippolyte et Josipe,
Contribution à l'histoire de la littérature chrétienne du troisième siècle , Paris
1947 ; 2 M . Richard , « Hippolyte de Rome (Saint)» , dans DSp VII, 1, 1969, col.
531-571 = Opera minora, vol. 1, Turnhout/Louvain 1976 , n° 10 ; 3 V . Loi, « La
problematica storico -letteraria su Ippolito di Roma» , dans Ricerche su Ippolito ,
coll. « Studia ephemeridis Augustinianum » 13, Roma 1977, p . 9 -16 ; 4 V . Loi,
« L' identità letteraria di Ippolito diRoma» , ibid., p. 67-88 ; 5 M .Geerard, CPG
I, 1983, p. 256 -278 ; 6 P. Nautin , « Ippolito » , dans Dizionario patristico e di
antichità cristiane, t. II, Roma 1983, col. 1791-1798 ; 7 M .Marcovich , « Hippo
lyt von Rom » , dans TRE XV , 1986 , p. 381-387 ; 8 J. Frickel, Das Dunkel um
Hippolyt von Rom , Ein Lösungsversuch : die Schriften Elenchos und Contra
Noetum , Graz 1988 ; 9 M . Simonetti, « Aggiornamento su Ippolito » , dans Nuove
ricerche su Ippolito, coll. « Studia ephemeridis Augustinianum » 30, Roma 1989,
p . 75-130 ; 10 C . Scholten , « Hippolytos II ( von Rom )» , dans RAC XV, 1991,
col. 492 -551 ; 11 A . Brent, Hippolytus and the Roman Church in the third cen
tury, Communities in tension before the emergence of a monarch -bishop, coll.
« Supplements to Vigiliae Christianae » 31, Leiden 1995 ; 12 A . Brent, « Was
Hippolytus a schismatic ?» , VChr 49, 1995, p. 215 -244 ; 13 M . Simonetti, « Una
nuova proposta su Ippolito » , Augustinianum 36 , 1996 , p. 13-46 (étude critique
de Brent 11).
Statue et témoignages. 14 H . Leclercq, « Hippolyte (Statue et cimetière de
saint) », dans DACL VI, 2, Paris 1925 , col. 2419 -2483; 15 M .Guarducci, « La
statua di “ sant'Ippolito ” » , dans Ricerche su Ippolito , coll. « Studia ephemeridis
Augustinianum » 13, Roma 1977, p . 17-30 ; 16 P . Testini, « Di alcune testimo
nianze relative a Ippolito » , ibid ., p . 45-65 ; 17 M . Guarducci, « La “ statua di
sant' Ippolito " e la sua provenienza » , dans Nuove ricerche su Ippolito , coll.
« Studia ephemeridis Augustinianum » 30 , Roma 1989, p. 61-74 ; 18 E . dal
Covolo , « Ancora sulla “ statua di sant'Ippolito ", Per una messa a punto dei rap
porti tra i Severi e il cristianesimo » , Augustinianum 32 , 1992, p . 51- 59 = Studia
patristica, t. 24 ,Louvain 1993 , p.62-69; Brent 11, pl. 1- 24 et p. 3-367.
792 HIPPOLYTE DE ROME H 154
Réfutation , éditions. 19 P . Wendland (édit.), Hippolytus Werke, 3 , Refutatio
omnium haeresium , coll. GCS 26 , Leipzig 1916 , réimpr. Hildesheim /New York
1977 ; 20 M . Marcovich ( édit.), Hippolytus, Refutatio omnium haeresium , coll.
« Patristische Texte und Studien » 25 , Berlin /New York 1986 [hypercritique,
utile pour son apparat philosophique).
- , traductions. 21 J. H . Macmahon , The Refutation of all heresies by Hippo
lytus.. ., coll. « Ante -Nicene Christian library » 6 , 1 , Edinburgh 1868 = The Ante
Nicene Fathers..., 5, Hippolytus..., Buffalo (New York ) 1888, réimpr. Grand
Rapids (Michigan ) 1965, p . 9 - 162 ; 22 F . Legge, Philosophumena or the Refuta
tion of all heresies formerly attributed to Origen , but now to Hippolytus..., 2
vol., London 1921; 23 G . K . Preysing, Des heiligen Hippolytus von Rom Wider
legung aller Häresien (Philosophumena ), coll. « Bibliothek der Kirchenväter»
40, München 1922 ; 24 A . Siouville , Hippolyte de Rome, Philosophumena ou
Réfutation de toutes les hérésies, 2 vol., Paris 1928 (partielle , sans les notices
philosophiques du livre 1 ]; 25 J.- P . Dumont, Les Présocratiques, « Bibliothèque
de la Pléiade » , Paris 1988, passim (pour les notices incluses dans le Diels
Kranz ).
- , études. 26 K . Koschorke, Hippolyt's Ketzerbekämpfung und Polemik
gegen die Gnostiker. Eine tendenzkritische Untersuchung seiner Refutatio
omnium haeresium , Wiesbaden 1975 ; 27 G . Vallée, A study in anti-Gnostic
polemics, Irenaeus, Hippolytus and Epiphanius, Waterloo (Ontario ) 1981.
Sur l'univers, éditions. 28 K . Holl, Fragmente vornicänischer Kirchenväter
aus den Sacra parallela , coll. TU 20 , 2, Leipzig 1899, p . 137- 143 (fragment de
Jean Damascène ); 29 R . Henry, Photius, Bibliothèque, 1, Codices 1- 84, « Col
lection byzantine » , Paris 1959 , p. 33-35 (fragment de Photius) ; 30 W .J.Malley,
« Four unedited fragments of the De universo of the Pseudo- Josephus found in
the Chronicon of George Hamartolus (Coislin 305) » , JThS 16 , 1965, p . 13 -25,
voir p . 15- 16 (fragments de Georges Hamartolos).
- , traductions.Nautin 1, p . 71-72 (fragment de Photius) et 74 -78 (fragment
de Jean Damascène) ; Henry 29 (fragment de Photius) ; Malley 30 , p. 16 -17
[fragments de Georges Hamartolos).
- , études. 31 M . Van Esbroeck, « Le passage d 'Eznik (p . 241) dans le De
universo d 'Hippolyte » , Muséon 87, 1974, p . 441-444 ; 32 E . Prinzivalli, « Due
passi escatologici del Peri pantos di Ippolito » , VetChr 16, 1979, p. 63-75 ;
33 Ch. E . Hill, « Hades ofHippolytus or Tartarus of Tertullian ? The authorship
of the fragment De universo » , VChr 43, 1989, p. 105- 126 ; 34 A . Whealey,
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VChr 50, 1996 , p . 244 -256 .
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réimpr. Berlin 1958, p . 144 - 156 ; 36 R . Ganschinietz , Hippolytos' Capitel gegen
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38 K . Jañaček , « Hippolytus and Sextus Empiricus» , Eunomia 3, 1959, p . 19 -21 ;
39 N . Brox , « Kelsos und Hippolytos, Zur frühchristlichen Geschichtspolemik » ,
H 154 HIPPOLYTE DE ROME 793
VChr 20, 1966 , p . 150 - 158 ; 40 J. Pépin , Idées grecques sur l'homme et sur Dieu ,
Paris 1971, p. 34-51 (Héraclite et Noët) ;41 C .Moreschini, « La doxa di Platone
nella Refutatio di Ippolito (I 19) », SCO 21, 1972, p. 254-260; 42 J.P. Hershbell,
« Hippolytus' Elenchos as a source for Empedocles re-examined », Phronesis 18 ,
1973, p. 97- 114 et 187 -203 ; 43 J. Mansfeld , « Heraclitus fr. B 63 D .-K .» ,
Elenchos 4, 1983, p. 197-205 = Studies in later Greek philosophy and gnosti
cism , London 1989, n° 8 ; 44 J.Mansfeld , « Resurrection added : the interpretatio
Christiana of a Stoic doctrine » , VChr 37, 1983, p. 218 -233, voir p . 218 -225 =
Studies in later Greek philosophy and gnosticism , London 1989, n° 2; 45 M .
Marcovich, « Plato and Stoa in Hippolytus' theology » , ICS 11, 1986 , p. 265
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and the Presocratics, London 1987 ; 47 I.Mueller, « Hippolytus retractatus : a
discussion of Catherine Osborne, Rethinking early Greek philosophy » , OSAPh
7, 1989, p . 233-251 ; 48 M .J. Edwards, « Hippolytus of Rome on Aristotle» ,
Eranos 88, 1990, p. 25-29 ; 49 J. Mansfeld , Heresiography in context, Hippo
lytus' Elenchos as a source for Greek philosophy, coll. « Philosophia antiqua »
56 , Leiden 1992 ; 50 S.N . Mouraviev, « Hippolyte , Héraclite et Noët (Commen
taire d'Hippolyte, Refut. omn. haer. IX 8-10)» , dans ANRW II 36, 6 , 1992,
p. 4375 -4402 ; 51 I. Mueller, « Heterodoxy and doxography in Hippolytus'
Refutation of all heresies » , ibid., p. 4309 -4374 ; 52 J. Mansfeld et D . T. Runia,
Aëtiana, The method and intellectual context of a doxographer, 1, The sources,
coll. « Philosophia antiqua » 73,Leiden 1997.
IDENTITÉ DE L'AUTEUR ET CORPUS LITTÉRAIRE
Le personnage auquel est consacrée cette notice est extrêmement controversé
(Loi 3). Aucun accord général ne s'est encore fait sur sa vie ni sur son œuvre , ni
même sur son nom . Il s'agit, par définition , de l'auteur d 'une Réfutation de
toutes les hérésies, ouvrage que sesmanuscrits attribuent à Origène,mais dont la
teneur montre qu'il ne peut être de l'Alexandrin. De toute évidence, l' écrivain
est l'un des protagonistes de l'église romaine de la première moitié du IIIe s.,
méconnu par les Anciens etdécouvert en 1851 lors de la réapparition de l'essen
tiel du texte : contemporain et concitoyen de l'évêque Calliste (217-222), il
raconte comment il s'est opposé à lui et l'a accusé d'hérésie jusqu'à devenir le
chef d 'une communauté schismatique, « le premier antipape » comme on le dit
par anachronisme (conflit minimisé, voire nié par Brent 11, p. 368-457, et 12).
L 'auteur de la Réfutation fait allusion à trois de ses compositions antérieures, un
autre traité hérésiologique perdu (I, préface, 1), un ouvrage historique identifia
ble à une Chronique conservée sans nom d'auteur (X 30 , 1.5.7) et un écrit philo
sophique Sur l'univers subsistant dans divers fragments sous le nom de
'Ivonnos (X 32, 4). On a conclu de cette dernière indication que les trois æuvres
sont d'un certain Josipe jusqu'alors inconnu (Nautin 1, p. 63-88 ). Ceux qui veu
lent échapper à cette déduction sont contraints de soutenir que, bien qu 'il soit
visiblement chrétien , le Sur l'univers a été faussement attribué à l'historien juif
homonyme Josèphe (par exemple Brent 11, p . 346 -350). D 'autres solutions,
794 HIPPOLYTE DE ROME H 154
comme l'identification de cet écrit au Sur le paradis de Tertullien (Hill 33), sont
invraisemblables.
Il se trouve de plus que la Chronique et le Sur l'univers figurent dans un cata
logue d'ouvrages inscrit sur la base d'une statue, retrouvée à Rome en 1551 et
aujourd'hui à la Bibliothèque vaticane, qui représente un personnage assis dans
une chaire (Leclercq 14 , col. 2419-2435). Si l'on rapporte le monument à l'au
teur de ces deux écrits, comme cela a toujours été fait (sauf par Brent 11, voir ci
après), son corpus littéraire s'enrichit d 'une dizaine de titres. Voici la liste com
plète : Sur les Psaumes, Sur la pythonisse, Défense de l'Évangile de Jean et de
l'Apocalypse, Sur les charismes, La tradition apostolique, Chroniques, Contre
les Grecs et contre Platon ou Sur l'univers, Protreptique à Sévérina , Démon
stration des dates de Pâques, Odes sur toutes les Écritures, Sur Dieu et la résur
rection de la chair, Sur le bien et d 'où vient le mal. Toutes ces æuvres, hormis
les deux précitées, sont entièrement perdues ou , comme la Tradition apostolique,
n 'existent plus que sous des formes très remaniées. Mais l'extrême variété des
genres auxquels elles ressortissent suffit à montrer que leur auteur était un
exceptionnel polygraphe et qu 'il ambitionnait de s'illustrer dans tous les
domaines pouvant relever du magistère d 'un évêque : l'exégèse, le canon , la
liturgie, l'histoire, la philosophie, l'apologétique, le comput, la poésie et, si l'on
joint la Réfutation , l'hérésiologie .
Un dernier ouvrage, attribué au même auteur par une indication complémen
taire du catalogue, est constitué par un calendrier prévisionnel des lunes et des
Pâques de 222 à 333 gravé sur les deux côtés de la chaire de la statue. Depuis
l'exhumation de celle -ci, on a remarqué que ce cycle pascal est identique à celui
qu ’Eusébe rattache à un responsable ecclésiastique de localisation indéterminée
qu 'il appelle Hippolyte (Hist. eccl. VI 22 ; cf. VI 20 , 2). De nombreux historiens
ont donc identifié les deux computistes, ce qui a des conséquences plus ou moins
acceptables. D 'une part, la dénomination d'Hippolyte se trouve transférée à
l'écrivain romain . Cela peut effectivement permettre de mieux rendre compte
des traditions hagiographiques et des données archéologiques qui témoignent de
l'existence à Rome d 'un martyr et d 'un cimetière portant ce nom (Leclercq 14 ,
col. 2435-2483 ; Testini 16 ). La biographie du personnage serait alors un peu
plus complète : il aurait été déporté en Sardaigne avec l'évêque légitime Pontien
en 235 (Catalogue libérien ), lors de la persécution de Maximin ; ses reliques
auraient été ensevelies sur la voie Tiburtine (Déposition des martyrs), près de
l'endroit présumé de la découverte de la statue. D 'autre part, le corpus défini
jusqu' ici se grossit encore de la quinzaine de titres - surtout des commentaires
bibliques, en grande partie conservés - qui apparaissent dans les notices hippo
lytiennes d 'Eusebe (Hist. eccl. VI 22 ), de Jérôme (Hommes ill.61) et de Photius
( Bibl. codd. 121 et 202) . On y inclut notamment deux ouvrages exégétiques,
l'Antichrist et le Sur Daniel, et un second traité hérésiologique, le Syntagma ou
Contre Noët.Mais la cohérence d'un si vaste ensemble littéraire est loin d'être
assurée, car d' importantes contradictions entre ces nouveaux écrits et ceux rete
nus auparavant surgissent. Plutôt donc que d'adopter la thèse encore prédomi
H 154 HIPPOLYTE DE ROME 795
nante qui voit dans toutes ces æuvres ou presque des productions d'Hippolyte
(Richard 2 ;Marcovich 7 ; Frickel 8 ; Scholten 10 ),mieux vaut en rester à la divi
sion du corpus en deux parties dues respectivement à l'hérésiologue romain et à
l'exégète non localisé, qu'on les appelle Josipe et Hippolyte (Nautin 1 et 6 ) ou
qu 'on préfère deux Hippolyte distincts (Loi 4 ; Simonetti 9). Il suffit pour cela de
postuler qu 'Eusébe reproduit une fausse attribution du comput ou qu'il confond
deux homonymes en une même personne.
Une troisième voie a été récemment explorée par le biais d'une réinterpréta
tion de la statue. Quand celle - ci a été retrouvée, elle était mutilée et a été restau
rée comme si elle était celle de l'écrivain . Or on a montré depuis qu 'elle remon
tait au Ir s. et représentait à l'origine une autre personne, féminine, sans doute la
philosophe épicurienne Thémista de Lampsaque (Guarducci 15 et 17).Lemarbre
aurait été remployé au III° s. par les disciples de l'évêque dissident pour servir de
support au catalogue de ses euvres et à son calendrier pascal sous le couvert
d'une allégorie de quelque vertu ; il aurait pu être placé dans la bibliothèque du
Panthéon (dal Covolo 18 ).Mais dernièrement, on a proposé que le monument,
érigé plutôt dans un lieu de culte , soit celui de la communauté en tant que telle ,
dont il aurait symbolisé l'unité (Brent 11, p. 3-114). Les ouvrages qui y sont
catalogués seraient ceux de l'« école hippolytienne » et non ceux d'un individu
particulier, si bien que l'ensemble du corpus devrait être partagé entre au moins
trois personnes (ibid ., p. 115 - 367). Toutefois cette nouvelle vue implique la
coexistence de partis ennemis au sein de l'église romaine, autrement dit un
épiscopat prémonarchique (ibid ., p . 368 -540 ); un état aussi archaïque de l' insti
tution à l'époque et au lieu considérés semble difficile à admettre (Simonetti 13).
On notera pour finir que la solution adoptée quant à l'identité de l'auteur importe
assez peu à l'historien de la philosophie , puisqu 'en toute hypothèse les æuvres
en cause , à commencer par la Réfutation et le Sur l'univers, sont du même écri
vain , l'adversairemalheureux de Calliste . Cette observation renforce d'ailleurs la
théorie selon laquelle l'hérésiologue est un personnage distinct, caractérisé par
une « physionomie intellectuelle » tournée vers la spéculation (Nautin 1 , p . 79
82 ; Prinzivalli 32 ).
EUVRES TOTALEMENT OU PARTIELLEMENT PHILOSOPHIQUES
(1) Réfutation de toutes les hérésies (Katà naowv aipéoewv ŠMeyxos:
Geerard 5 ,n° 1899). L'æuvre, conservée aux quatre cinquièmes environ, compte
quelque 7350 lignes (Wendland 19 ou Marcovich 20). Elle comporte trois par
ties, l'exposé des doctrines païennes (livres 1-4 ), celui des doctrines hérétiques
(livres 5-9) et celui de la vérité chrétienne (livre 10 ). Le début de la première
partie , précisément le livre 1, consacré aux systèmes philosophiques grecs, est
appelé Philosophoumena (IX 8, 2); l'intitulé a été parfois étendu à l'ensemble de
l'ouvrage. Cette introduction doxographique passe en revue divers représentants
des trois parties traditionnelles de la philosophie , à savoir, selon le classement de
l'auteur, Thalès, Pythagore, Empédocle , Héraclite , Anaximandre , Anaximène,
Anaxagore, Archélaos, Parménide, Leucippe, Démocrite , Xénophane, Ecphante
796 HIPPOLYTE DE ROME H 154
et Hippon pour la physique, Socrate et Platon pour l' éthique et enfin Aristote et
les stoïciens pour la dialectique ; elle leur adjoint quelques figures ou écoles
jugées inclassables dans les catégories précédentes, Epicure, les académiciens,
les brahmanes, les druides et Hésiode. D 'autres noms sont cités incidemment,
dans ce livre ou dans les suivants, Aristoxène le Musicien ( A 417), Diodore
d'Érétrie (2D 130 ), Aratos de Soles (** A 298), Andronicos le Péripatéticien
(> A 181), etc . Demême, de substantiels compléments aux notices du livre 1
apparaissent çà et là dans le corps de l'ouvrage pour certains philosophes, spécia
lement Empédocle (VII 29, 4 -26 ) et Héraclite (IX 9, 1 - 10,8 ). Les Philoso
phoumena ont été souvent détachés par la tradition manuscrite du reste de la
Réfutation , pour servir d 'abrégé philosophique, indépendamment de l'argumen
tation hérésiologique ; c'est ainsi qu 'ils ont été utilisés, dans le monde arabe, par
le Pseudo-Ammonius (2 - A 142).
(2 ) Sur l'univers (Ilepi toŨ tartós : Geerard 5 , n° 1898), intitulé aussi
Contre les Grecs et contre Platon par le catalogue de la statue et ailleurs Sur la
cause de l'univers (Ilepì tñs ToŨ Tavtos aitiac) ou Sur l'essence de l'univers
(Ilepi tñs toŨ Tavtos ojoias) - c 'est cette dernière formulation , attestée par
(A ) la Réfutation X 32, 4 , qui semble la plus exacte. L 'æuvre ne subsiste que
dans trois séries de fragments, d'un total d'environ 200 lignes, transmis par (B )
Georges Hamartolos, Chronique 2 (Malley 30 ), (C ) Photius, Bibl. cod. 48
(Henry 29) et (D ) Jean Damascène, Sacra parallela 2 , 801 (Holl 28 ), à quoi on
peut ajouter une allusion chez (E ) Jean Philopon , La création du monde 3, 16
(Nautin 1, p. 73) et une paraphrase chez (F ) Eznik de Kolb , Sur Dieu 356 -357
(Van Esbroeck 31). Selon Photius, l'auteur combattait un certain Alcinous
(* * A 94 ), identifiable, sans que cela soit aucunement nécessaire , à l’Alcinoos
médioplatonicien auteur du Didaskalikos (7 + A 92) plutôt qu'à leur homonyme
stoïcien ( + A 93) cité par Philostrate. Le plan général de l'écrit peut être
reconstitué avec une certaine vraisemblance d'après les indications des différents
fragments (Malley 30, p. 18-22). Une première partie traitait des doctrines grec
ques: contradictions des poètes et de Platon (B , C et F), thèses d'Alcinous sur
l'âme, la matière et la résurrection (C ), priorité du judaïsme sur l'hellénisme (C );
une seconde partie exposait la doctrine chrétienne : théorie des essences (A ),
création du monde (E ), anthropologie et christologie (C ), démonologie et escha
tologie (D ). D 'après le contexte du passage concerné de la Réfutation , l'univers
est constitué de quatre essences – les quatre éléments, avec une variante pour
l'air : le feu, l'esprit, l'eau et la terre ; tous les êtres sont faits d 'une ou de
plusieurs d 'entre elles, l'homme est la synthèse des quatre (X 32, 1-4 ; 33, 3-7).
(3) Sur Dieu et la résurrection de la chair (Ilepi DeoŰ xai oapxòs åvaotá
DEWC). L 'euvre est entièrement perdue et seul son titre est conservé sur le cata
logue de la statue (en rejetant une hypothèse de Whealey 34, p. 250 -254, qui la
retrouve dans le Sur la résurrection du Pseudo - Justin ). Il s'agit bien d 'un
ouvrage philosophique, où , commedans le traité précédent, la réalité de la résur
rection était sans doute prouvée par une théorie des essences.
H 154 HIPPOLYTE DE ROME 797
(4) Sur le bien et l'origine du mal (Ilepì tåyadoũ xai nodev tÒ xaxóv).
L 'æuvre est aussi totalementperdue et seul son titre est conservé sur le catalogue
de la statue (en rejetant une autre hypothèse de Whealey 34, p. 244-250, qui la
retrouve dans le fragment damascénien du Sur l'univers ). L 'ouvrage visait sans
doute les gnostiques, comme le traité perdu d' Irénée Sur la monarchie ou Que
Dieu n 'est pas l'auteur des maux (Eusébe, Hist. eccl. V 20 , 1). Le sujet est évo
qué ainsi dans la conclusion de la Réfutation : « Dieu , qui a créé lemonde, ne l'a
fait ni ne le fait mauvais, mais beau et bon, car celui qui fait est bon ... C'est
l'homme, parce qu 'il est doué du libre arbitre, qui engendre le mal» ( X 33, 8 -9 ).
HÉRÉSIOLOGIE ET PHILOSOPHIE
A la différence des hérésiologues qui l'ont le plus directement précédé ou
suivi, Irénée, Hippolyte (celui du Syntagma) et Épiphane, l'auteur de la Réfuta
tion réserve une place primordiale à la description des doctrines non chrétiennes
et ne procède à aucune réfutation à proprement parler (en dépit de la traduction
consacrée du titre). Sa thèse est que les hérétiquesont frauduleusement emprunté
leurs théories aux divers systèmes des peuples païens, avant tout la philosophie
desGrecs, mais aussi lesmystères des Égyptiens, la divination des Chaldéens et
la magie des Babyloniens. C 'est la simple mise en évidence d 'une similitude
quelconque d'une secte avec l'un de ces systèmes – la ressemblance étant inter
prétée comme une dépendance – qui suffit à la disqualifier. La démonstration
repose donc essentiellement sur le concept de plagiat, exprimé par les vocables
xheployéw ou xhepinoyos (références dansMarcovich 20 , p. 476 , s.v.). Voici
quelques-unes de ces prétendues relations: Empédocle et Marcion, Héraclite et
Noët, Aristote et Basilide, lesmystagogues et les naassènes, les astrologues et les
pérates, les magiciens et les marcosiens. On a noté à ce propos, sans vraiment
l’expliquer, que plusieurs philosophies sont exposées pour elles-mêmes, sans
être mises en corrélation avec aucune hérésie , et inversement, ce qui va à
l'encontre de la thèse (Mansfeld 49, p. 44-56 ). Il faut en chercher la raison dans
une prétention encyclopédique de l'écrivain , qui veut faire de sa Réfutation un
système doxographique universel, comme il a voulu faire de sa Chronique un
système chronologique universel.
La thèse du plagiat n 'est pas sans rapport avec le jugement relativementfavo
rable que l'auteur porte sur la philosophie . A tout prendre, les philosophes sont
préférables aux hérétiques : les premiers sont certes dans l'erreur, mais les
seconds sont à la fois dans l'erreur et menteurs . Les doctrines des Grecs sont
même en un sens « dignes de foi» , car elles permettent de comprendre les héré
sies (I, préface, 1); sur le sujet du divin , elles sont « plus anciennes et plus
respectables» que celles des sectaires (ibid . 8). L 'hérésiologue n 'hésite donc pas
à conclure son ouvrage majeur sur des considérations très philosophiques : les
idées platoniciennes lui servent à fonder l'æuvre créatrice du Logos (X 33, 2) et
le « connais-toi toi-même» socratique à élaborer une doctrine de la divinisation
de l'homme (X 34, 4). Quantau courant où il se situe, c'est celui du médioplato
nisme de son époque (Moreschini 41 ;Marcovich 45 ;Mueller 47), un platonisme
798 HIPPOLYTE DE ROME H 154
Philosophe etmédecin .
Origine. Trois, voire quatre origines différentes sont attribuées à Hippon :
Samos, par Jamblique et, d'après Censorinus ( C 74), par Aristoxène (»- A 417)
(DK 38 A 1) ; Métaponte , par Censorinus lui-même (DK 38 A 1. 16 ); Rhegium ,
par Sextus Empiricus et par Hippolyte (DK 38 A 1. 3. 5) ; enfin Crotone si,
comme on le pense depuis Diels, c 'est bien de lui qu'il est question dans les
extraits des ’latpixá de Ménon transcrits par l' Anonyme de Londres (DK 38 A
11). Retenant, sur la foi d 'Aristoxène, Samos pour son lieu de naissance, on
explique en général ces localisations diverses par les voyages qu'il aurait faits en
Italie méridionale , ce qui s'accorderait avec sa présence dans le catalogue des
pythagoriciens de Jamblique : Métaponte, Rhegium et naturellement Crotone
étaient des foyers importants du pythagorisme.
Datation . Une indication approximative pour sa datation est donnée par les
témoignages (DK 38 A 2) selon lesquels il aurait été l'objet, comme Socrate
dans les Nuées d 'Aristophane, des railleries du comique Cratinos dans une pièce
intitulée Ceux qui voient tout (Ilavóntal). L 'auteur de ce témoignage, un scho
liaste d’Aristophane, semblant indiquer que cette pièce était antérieure aux
800 HIPPON DE SAMOS H 157
Nuées (423a), et Cratinos n 'ayant, semble -t-il, atteint la notoriété que vers 450º,
on peut en déduire qu'Hippon était actif dans la période ainsi délimitée et même,
à un moment donné, présent à Athènes.
Doctrine. Une assez grande incertitude semble avoir régné sur la teneur
exacte de ses doctrines, comme l'a montré 1 A . Maddalena, Ionici. Testimo
nianze e frammenti, coll. « La Nuova Italia » , Firenze 1963, p. 214-224. Des
reconstructions plus positives de la pensée d'Hippon ont été tentées par 2 R .
Laurenti, « Gli epigoni della scuola milesia . Ippone e Diogene d 'Apollonia » ,
Sophia 39, 1971, p. 67-89, notamment p. 68-77; 3 A . J. Cappelletti, « Los epígo
nos de la Filosofía Jónica » , RVF 3, 1975, p . 7 -31, notamment p . 8 - 16 .
Voici un inventaire succinct des données de la tradition . La mention (d 'ail
leurs méprisante ) d 'Hippon par Aristote à la suite de Thalès (Metaph . A 3 ,
984 a 3 = DK 38 A 7), chronologiquement incongrue, s'expliquerait si, comme
Thalès, il avait professé que le principe de toutes choses est l'eau : c 'est ce
qu 'affirment Aristote lui-même (de An. I 2 , 405b2 = DK 31 A 4 ), Simplicius
(DK 38 A 4) et Jean Philopon (DK 38 A 8 . 10 ). Mais selon Alexandre d ’Aphro
dise , Hippon parlait seulement de « l'humide » , sans préciser s'il s'agissait de
l'eau comme chez Thalès ou de l'air comme chez Anaximène. Sextus Empiricus,
de son côté , lui attribue deux principes opposés, le feu et l'eau (DK 38 A 5),
mais Hippolyte, tout en donnant le même témoignage, résout peut-être l'énigme
en attribuant à Hippon la doctrine d ’une génération de l'un de ces principes (le
feu ) par l'autre (l'eau) (DK 38 A 3).
Une scholie au Protreptique de Clément d 'Alexandrie (2C 154) indique
qu 'il était traité d 'impie dans une comédie de Cratinos (DK 38 A 2 ) ; Simplicius
fait état de sa réputation d' athée (DK 38 A 4 ), et Jean Philopon rapporte même
qu'il était ainsi surnommé (DK 38 A 8 ; cf. DK 38 A 6 . 9 ), ce qu'il explique,
comme Simplicius, par le fait qu'il ne reconnaissait que l' eau pour principe
unique de toutes choses, le Pseudo -Alexandre (DK 38 A 9 ) se limitant pour sa
part à donner pour explication qu 'il ne reconnaissait rien en dehors des choses
sensibles. Sans faire allusion à ce matérialisme, Clément d 'Alexandrie proteste
contre l'accusation d' athéismeportée à l' encontre d 'Hippon , qu'il place dans la
lignée d 'Évhémère « d 'Agrigente » (= de Messine, » E 187) parmiles sages dont
il loue la clairvoyance à l'égard des dieux païens (DK 38 A 8 ).
Selon les témoignages déjà cités d ' Aristote (de An. I 2 , 405 b 2 = DK 31 A 4 )
et d'Hippolyte (DK 38 A 3), la cosmologie d 'Hippon trouvait une application
dans sa conception de l'âme, qu 'il jugeait faite d 'eau ; selon Jean Philopon , c'est
la même doctrine qu 'évoque Aristote, sans nommer Hippon , à la fin du chapitre I
2 du De anima (cf. DK 38 A 10 ). Cette conception de l'âme, selon Aristote et
Hippolyte , s'appuyait sur la constatation de l'humidité de la semence chez les
animaux, ce qui signifie que l'âme était pour Hippon le principe de la génération
et qui explique que, plus généralement, l'humide était pour lui le principe phy
siologique fondamental.Ménon lui attribue une explication des maladies par
altération de l'humidité propre au corps, sous l'effet du froid aussi bien que du
chaud (DK 38 A 11). L'abondance et surtout la précision des témoignages rela
H 159 HIPPYS DE RHÉGIUM 801
tifs aux conceptionsbiologiques, et en particulier embryologiques, d'Hippon , ont
conduit 4 A . Capizzi, « Il Principio delle cose. Storia di una falsificazione» ,
Contributo 5 , 1981, nº 2, p . 5 -18, à formuler l'hypothèse que nous n 'aurions pas
affaire avec Hippon à des applications biologiques, embryologiques et médicales
de la cosmologie de Thalès (l'eau principe de toutes choses), mais au contraire à
une extrapolation à l'ensemble du cosmos de théories nées de l'observation ; le
rapprochement avec Thalès ne serait pas dans ce cas le fait d'Aristote , mais
d'Hippon lui-même, désireux de conférer ainsi à sa doctrine plus d'ancienneté
qu 'elle n 'en avait en réalité . L 'unique fragment conservé (DK 38 B 1), cité dans
une scholie à l'Iliade, où Hippon argumente en faveur de l'idée que toutes les
eaux ont leur source dans la mer, ne plaide cependant pas en faveur d 'une telle
hypothèse.
Éditions des témoignages et fragments. 5 DK 38 (traduction française par
6 J.- P . Dumont, Présocratiques, p . 461- 469) ; 7 lonici. Testimonianze e fram
menti, a cura di A . Maddalena, « La Nuova Italia », Firenze, 1963, p. 226 -243
(avec traduction italienne).
Études d'orientation .Outre Laurenti 2 et Cappelletti 3 , on peut renvoyer aux
notices consacrées à Hippon par 8 J. Burnet, Early Greek Philosophy, London
1892, 19082, § 185 (= L'Aurore de la philosophie grecque, trad. fr. par A .
Reymond, Paris (1919'] 1970, p . 405-406 ); 9 K . Freeman, The Pre -Socratic
Philosophers, 19662, p. 209-211. Voir également 10 H . Diels, « Über die Genfer
Fragmente des Xenophanes und Hippon » , SPAW 31, 1891, p. 575-583, notam
ment p. 578 -583 ; 11 Id., « Über die Excerpte von Menons latrika in dem Lon
doner Papyrus 137 » , Hermes 28, 1893, p . 407-434, notamment p. 420 -421;
12 A . Olivieri, « L 'Italiota Hippon » , La Civiltà greca in Italia meridionale,
Napoli 1931, p. 149- 160 ; 13 E . Lesky, « Die Zeugungs- und Vererbungslehren
der Antike und ihr Nachwirken » , AAWM /GS 19, 1950 (1951), p. 1251- 1253 ;
14 J. B .McDiarmid , « Theophrastus on the Presocratic Causes» , HSPh 61, 1953,
p. 85 -156 , notamment p . 88 -93 ; 15 M . Timpanaro Cardini (édit.), Pitagorici.
Testimonianze e frammenti. Terzo fascicolo : Pitagorici anonimi e risonanze
pitagoriche, coll. « La Nuova Italia », Firenze 1964, 19732, p . 366 -369.
MICHEL NARCY.
158 HIPPOTHALÈS D 'ATHÈNES RE : PA 7613 MIV
Disciple de Platon mentionné dans une liste conservée par Diogène Laërce III
47. Il ne peut que difficilement être identique au jeune Hippothalès, fils de Hié
ronymos, rencontré par Socrate (Platon, Lysis 203 a et 204 b ).
RICHARD GOULET.
159 HIPPYS DE RHÉGIUM RE 10 ya ?
On a envisagé de rattacher l'historien Hippys de Rhégium , de date imprécise,
au mouvement pythagoricien. Selon Plutarque, De defect. or. 22,422b -e, Hippys
de Rhégium , cité par Phanias d' Érèse (fr. 12 Wehrli), aurait attribué à Pétron
d 'Himère (en Sicile ) une doctrine selon laquelle il y aurait 183 mondes diffé
802 HIPPYS DE RHÉGIUM H 159
rents, disposés en triangle, soixante sur chaque côté et trois aux angles, chacun
étant disposé à côté de l'autre xarà otocyklov. Le caractère géométrique de
cette cosmologie a conduit à considérer Pétron comme un pythagoricien et le
qualificatif a été appliqué par voie de conséquence à Hippys lui-même, sur des
bases assez fragiles (Mueller: imbutus doctrinis pythagoricorum ). En sens
contraire s'est exprimé 1 U . von Wilamowitz , « Hippys von Rhegion » , Hermes
19, 1884, p . 442 -452, qui a envisagé une confusion de nom avec Hippasos
(2H 144 ). 2 F. Jacoby, art. « Hippys von Rhegion », RE VIII 2 , 1913, col, 1927
1930 , voir col. 1929, en revanche, arguant du fait qu 'il est difficile d 'expliquer
l'adjectif ‘ Pnyivos que fournit Plutarque en l'attribuant à Hippasos, a pensé à un
Hipparchidès de Rhégium (2 - H 139) qui figure dans le catalogue de Jamblique
(V. pyth . 36 , 267, p . 145, 19 Deubner). Or, dans la Souda, I 591, s.v. "Intus, il est
dit qu 'Hippys futle premier à écrire les Elxeaixai apátels, ouvrage qui fut par
la suite abrégé par un certain Myès (Múns), et ce dernier nom figure dans le
catalogue des pythagoriciens de Paestum chez Jamblique, V. pyth . 36 , 267,
p . 145 , 10. Jacoby a donc émis l'hypothèse que les Eixeacxai nepáčels et le
présumé Hipparchidès constitueraient une fiction littéraire du pythagoricien
Myès, conçue afin de pourvoir son ouvrage d'une garantie d 'antiquité ; en sens
contraire , 3 W . Schmid , Geschichte der griechischen Literatur,München 1934 ,
réimpr. 1959, p . 701-703.
BRUNO CENTRONE.
160 HIRTIUS (AULUS – ) RE H2 ja
Bien qu'il ne soit pas cité dans les sept premiers livres de la Guerre des
Gaules, Hirtius était aux côtés de César (2°C 8) où il fit office, probablement à
partir de 54, de secrétaire de l'imperator. Homme de confiance de César, Hirtius
participa aux ultimes négociations avant le déclenchement de la guerre civile , et
il est vraisemblable qu'il prit part aux campagnes espagnole et grecque.
Bien qu'il entretînt des relations amicales avec Cicéron , qui fut certainement
son maître de rhétorique, Hirtius se vit cependant confier par César la tâche
d 'écrire, après le suicide héroïque de Caton (B+C 59), un pamphlet contre ce der
nier pour répliquer à l' éloge funèbre composé par Cicéron , et au Caton rédigé
par Brutus, où Caton était représenté comme l'authentique personnification de la
uirtus romaine, avant que le dictateur ne rédige lui-même les deux livres de son
Anticaton (45).
Il serait cependant excessif de faire de ce pamphlet la preuve qu 'Hirtius était
un épicurien résolu ; on sait par exemple que M . Fabius Gallus (2°F 3), pourtant
connu comme épicurien , a écrit un panegyrique de Caton . D 'autre part, dans son
De Fato , Cicéron met en scène un Hirtius qui, s 'il n 'est évidemment pas un
disciple de l' école académicienne, ne marque aucune obédience à quelque école
philosophique. De même, sa gourmandise , souvent citée par Cicéron (par
exemple , Ad fam ., IX 16 , 7),ne saurait suffire à faire d'Hirtius un épicurien .
Nommépréteur en 46, puis propréteur en Gaule Chevelue et Narbonnaise en
45, sa fidélité envers César conduisit ce dernier à le désigner consul, avec Vibius
H 160 HIRTIUS (AULUS -) 803
Pansa , pour l'année 43 (Cicéron, Ad Att. XIV 9 , 2). Aussi, après les Ides de mars
44, gagner le soutien du futur consul fut l'objectif des différentes factions, en
particulier desRépublicainsmeurtriers de César ainsi que d 'Octave.
Modéré, attaché à la paix publique, Hirtius tenta la conciliation avant de finir
par s 'opposer aux menées d 'Antoine en Cisalpine, si bien que,malgré sa volonté
d'empêcher la guerre, Hirtius fut contraint d 'ouvrir son consulat sur des opéra
tions militaires contre l'ancien lieutenant de César. En liaison avec les troupes
d 'Octave, il contraignit Antoine à quitter Bologne. Son courage près deModène,
où il sauva son collègue Pansa , lui valut le titre d 'imperator. Mais, quelques
jours après, sous les murs de Modène, où Antoine subit une nouvelle défaite ,
Hirtius trouva la mort.
Parallèlement à ce rôle politique, la fin de la vie d 'Hirtius futmarquée par une
activité littéraire. Ayant en effet établi une deuxième édition de la Guerre des
Gaules, il entreprit de la lier à l'autre ouvrage de César , la Guerre civile, et
ajouta dans ce but un huitième livre à la Guerre des Gaules, où il racontait les
dernières opérations de 50-51. Son intention est de se situer dans une stricte
obedience à César dont, dans la lettre à Balbus qui constitue la préface de ce
livre VIII, il célèbre les qualités littéraires ; il s'efforce de justifier les actes du
conquérant, et insiste également sur la clémence de César, en utilisant le terme
de la propagande officielle clementia , termerarement employé par César. Hirtius
fit, d 'autre part, le projet de poursuivre le récit des campagnes de César ; il com
posa probablement lui-même la Guerre d 'Alexandrie , mais c 'est à d 'autres géné
raux qu 'il commanda la Guerre d 'Afrique et la Guerre d 'Espagne, dont le style
est trop éloigné pour suggérer qu 'ils soient de la main d'Hirtius.
Bien que sa mort prématurée l'empêchât de voir l'accomplissement de ce
Corpus césarien ,dont la publication fut vraisemblablement due à Balbus, Hirtius
restera comme l'ami et fidèle homme de plume de César. Si rien ne le lie avec
évidence à une école philosophique, il semble en revanche être un bon exemple
de ces nombreux aristocrates partisans de César qui, s'ils affichèrent des sympa
thies pour l'épicurisme, se distinguèrent avant tout par leur souci demodération ,
souci qui trouva son expression privilégiée dans la clémence dont sut faire
preuve le dictateur.
Édition . La Guerre des Gaules, livre VIII. Texte établi et traduit par L . A .
Constans, CUF, Paris 1926 ; La Guerre d 'Alexandrie. Texte établi et traduit par
J. Andrieu, CUF, Paris 1954.
Cf. P . Von der Mühll, art. « Hirtius» 2 , RE VIII 2 , 1913, col. 1956 -1962 ; O .
Seel, Hirtius, Leipzig 1935 ; K . Barwick, « Problemen zu den Commentarii
Caesars und seiner Fortsetzer » , Forschungen und Forschritte 1939, p . 130 -181 ;
R . Syme, La Révolution romaine, Oxford 1939, 2e éd. revue 1952 ; A . Momi
gliano,compte rendu de B . Farrington, Science and politics in the AncientWorld
(1939), JRS 31, 1941, p . 149-157 ; L . W . Daly , « Aulus Hirtius and the Corpus
Caesarianum » , CW 44, 1951, p. 113-117 ; A . Haury , « Autour d ’Hirtius, littéra
ture et politique » , REA 61, 1959, p . 84 -95 ; J. Kerschensteiner, « Cicero und Hir
tius» , dans Studien zur alten Geschichte , S. Lauffer zum 70. Geburtstag, Roma
804 HIRTIUS (AULUS -) H 160
1986 , p. 559 -575 ; C . Castner, Prosopography of Roman Epicureans, Frankfurt
am Main 1988, p. 82-83.
FABRICE EMPLI.
161 HODIOS DE CARTHAGE
Pythagoricien ancien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique,
V. pyth. 36 , 267,p. 145, 3 Deubner.
[ Selon O . Masson, « Sur quelques noms de philosophes grecs. A propos du “Dictionnaire
des philosophes antiques”, vol. II», RPh 1994, p. 231-237, et Id ., « Des philosophes " cartha
ginois" chez Jamblique ? » , en appendice à un article intitulé « La patrie de Diogène Laërce
est-elle inconnue ? » , MH 52, 1995, p . 229 -230 , « il est bien peu plausible qu 'un groupe de
pythagoriciens aux noms grecs (Anthès – mais il faudrait conserver pour ce nom " de type
corintho -mégarien " le nominatif rare en -ñv transmis par le ms. F : Anthen -, Miltiadès,
Hodios et Léocritos) ait existé à Carthage à cette époque.» Il faudrait envisager une confusion
entre KapxndóvLOS (carthaginois ) et Xarxndóvlog (chalcédonien ). La confusion est attestée
pour le nom du stoïcien Hérillos de Carthage ( H 72 ). La liste de Jamblique mentionne effec
tivement des pythagoriciens dans la région de Chalcédoine : on y trouve un Dardanien , un
" Pontique" , des Cyzicéniens... Mais en ce qui concerne Miltiadès, il était déjà présenté
comme carthaginois en V. pyth. 27, 128 , dans un contexte narratif où l'on parle expressément
de Carthage (l'épisode concerne les îles Lipari au nord de la Sicile , selon Diodore de Sicile, V
11). Avant de la corriger, il faudrait en fait mieux connaître l'origine et la date de cette liste
transmise par Jamblique, ainsi que sa finalité littéraire et sa valeur historique. L . Brisson et A .
Ph . Segonds, Jamblique, Vie de Pythagore. Introduction , traduction etnotes, coll. « La Roue à
Livres», Paris 1996 , p. 220 n. 33 etn. 34 , se refusent eux aussi à corriger le texte . R.G .)
BRUNO CENTRONE.
162 HONORATUS RE 10 PIR? H 195. II
Le cynique Honoratus philosophait enveloppé d'une peau d'ours (arktos).
C 'est pourquoi Démonax (Lucien, Démonax 19) par raillerie l'appelait non pas
Honoratus,mais Arcesilas (Arkesilaos).
MARIE -ODILE GOULET-CAZÉ.
163 HORAPOLLON RE
Auteur d'un traité conservé sur les Hiéroglyphes égyptiens. Il est possible
qu 'il faille l'identifier avec l'un des deux Horapollon de Phainébytis (» H 164 et
165) connus,mais le nom était trop fréquent en Égypte pour qu 'une telle iden
tification soit assurée.
Selon 1 J. Maspéro, « Horapollon et la fin du paganisme égyptien » , BIAO 11, 1914,
p . 191, et 2 O . Masson , « A propos d 'Horapollon, l'auteur des Hieroglyphica » , REG 105 ,
1992 , p . 231- 235, avec un appendice sur le nom d ’’Appodirns xóun par J.-L . Fournet,
p . 235 -236 , il faudrait l'identifier avec Horapollon 2 (MH 164 ). 3 P. Athanassasiadi,
Damascius, p. 21, présente cette attribution comme un fait établi. Selon Maspéro etMasson, il
faudrait comprendre Nelýov, transmis par certains manuscrits, comme signifiant: " du pays
du Nil" et donc simplement“ Égyptien". Il ne faudrait donc pas désigner cet auteur comme
originaire de Nilopolis (Nelontonimns) comme on l'a fait parfois.
Les Hieroglyphika en deux livres avaient été écrits en “ langue égyptienne”,
probablement en démotique, et furent traduits en grec par un certain Philippos
dans un grec parfois inattendu. Le livre I expose en 70 chapitres “ comment ils
désignent l'éternité” , le monde, l' année, le mois , etc ., ou bien " que veulent-ils
H 163 HORAPOLLON 805
signifier lorsqu 'ils dessinent un épervier”, etc . Un second livre donne un titre
plus développé : Interprétation des caractères hiéroglyphiques chez les Égyp
tiens. Il comprend 119 chapitres similaires à ceux du premier livre. Ce livre,
publié pour la première fois en 1515 , a connu un grand succès et a longtemps
contribué à orienter le déchiffrement des hiéroglyphes sur une fausse piste par
une approche trop naïve présupposant pour chaque signe une correspondance
idéogrammatique avec des réalités ou des concepts . C 'est la conception expri
mée par Plotin V 8 , 6 , 6 -8 (ÊV ÉxaotOV EXGOTOV nepáyuatos árarua ÉVTU
TWOAVTEC ), bien que Plotin ait pu penser dans le contexte aux idéogrammes des
bâtiments religieux et non aux hiéroglyphes des textes, dontcertains comportent
une valeur consonantique.
On a cru reconnaître dans le traducteur Philippe le philosophe, auteur d'un commentaire
allégorique partiellement conservé des Éthiopiques d 'Héliodore. Cette identification est refu
sée par 4 L . Tarán , « The authorship of an allegorical interpretation of Heliodorus' Aethio
pica » , dans M .- O . Goulet-Cazé, G . Madec et D . O 'Brien (édit.), EOQIHEMAIHTOPEL, " Cher
cheursde sagesse ", Hommage à Jean Pépin , Paris 1992, p. 203-230, notamment p. 204 .
Édition . 5 F . Sbordone (édit.), Hori Apollinis Hieroglyphica, Napoli 1940 .
Traduction anglaise. 6 G . Boas ( édit.), The Hieroglyphics of Horapollo,
translated by G . B ., coll. « Bollingen series » 23, New York 1950 ; réimpr. « with
a new foreword by A . Grafton » , coll. « Mythos » , Princeton University Press ,
1993, XXIV- 120 p. ; 7 H .- J. Thissen , « Horapollinis Hieroglyphika. Prolego
mena » , dans M .Minas, J. Zeidler et alii (edit.), Aspekte spätägyptischer Kultur.
Festschrift für Erich Winter, coll. « Aegyptiaca Treverensia » 7 , Mainz 1994,
p. 255-263, annonce une nouvelle traduction allemande commentée.
Cf. 8 G . Roeder, art. « Horapollon » , RE VIII 2 , 1913, col. 2313-2319 ; 9 B .
Van de Walle , « Informations complémentaires au sujet des Hieroglyphica
d 'Horapollon » , OLP 6 -7, 1975 -1976 , p. 543-554 ; 10 Sandra Sider (édit.),
« Horapollo » , dans F .E . Cranz, V . Brown et P. O . Kristeller (édit.), Catalogus
translationum et commentariorum . Mediaeval and Renaissance Latin transla
tions and commentaries, VI: Annotated lists and guides, Washington 1986 ,
p. 15- 29 ; 11 Ead., « Horapollo . Addenda et corrigenda» , dans V . Brown (édit.),
Catalogus translationum et commentariorum . Mediaeval and Renaissance Latin
translations and commentaries, VII: Annotated lists and guides, Washington
1992, p . 325.
Études récentes. 12 C .Miralles, « Carmina popularia fr. 35 Page» , Faventia
3, 1981, p . 89- 96 ; 13 G . Lambin , « Trois refrains nuptiaux et le fragment 124
Mette d'Eschyle, AC 55, 1986 , p. 66 -85 ; 14 P . W . Van der Horst, « The secret
hieroglyphs in classical literature » , dans J. den Boeft et A . H . M . Kessels (édit.),
Actus. Studies in honour of H . L. W . Nelson , Utrecht 1982, p. 115 - 123 ; 15 L .
Motte, « L 'hiéroglyphe, d'Esna à l'Évangile de Vérité » , dans Deuxièmes jour
nées d' études coptes, Strasbourg, 25 mai 1984, « Cahiers de la Bibliothèque
copte » 3, Louvain /Paris 1986 , p. 111- 116 ; 16 H .-J. Thissen , « Vom Bild zur
Buchstaben – vom Buchstaben zum Bild : von der Arbeit an Horapollons
Hieroglyphica » , coll. AAWM /GS, Stuttgart 1998. 28 p .; 17 Claude- Françoise
Brunon , « Le ciel d'Horapollon » , dans B . Bakhouche, A .Moreau et J.-C . Turpin
806 HORAPOLLON H 163
(édit.), Les astres. Actes du colloque international de Montpellier, 23-25 mars
1995, t. II : Les correspondances entre le ciel, la terre et l'homme, Les « survi
vances» de l'astrologie antique,Montpellier 1996 , p . 153-168.
RICHARD GOULET.
164 HORAPOLLON DE PHÉNÉBYTHIS PLRE I et II: 1 DV
« Grammairien de Phénébythis, village du nome Panopolite (en Thébaïde),
ayant enseigné à Alexandrie et en Égypte , puis à Constantinople sous Théodose »
< II le Jeune (408 -450 ) ?> (Souda, s.v. 'Spanówv, 12 159). La Souda lui attri
bue plusieurs ouvrages : des Temenika (sur les villes sacrées ?), un commentaire
de Sophocle , d'Alcée, un autre Sur Homère. Le reste de la notice de la Souda
semble concerner son petit-fils ( A 165 ).
1 P . Athanassiadi, Damascius, p . 282 n . 330, à la suggestion de Stéphane Diebler, a retenu
cette notice de la Souda comme un nouveau fragment de la Vie d 'Isidore de Damascius.
Il était sans doute le père d' Asclépiadès d'Alexandrie (> A 446 ) et d'Hé
raïscus ( » H 67), tous deux philosophes néoplatoniciens, et le grand -père du
philosophe Flavius Horapollon (9H 165). Ce dernier présente son grand-père
comme professeur de philosophie à Alexandrie (PCairo III 67295). Voir le
stemma 31 dans PLRE II, p . 1326 .
C'est sans doute lui qui est mentionné comme “ philosophe" par Étienne de
Byzance, Ethnica, p . 662 Meineke, dans sa notice sur Phénébythis. Photius
(Bibl., cod . 279, 536 a) a pour sa part rencontré dans un manuscrit contenant la
Chrestomathie d'Helladius d'Antinoupolis un écrit du grammairien Horapollon
sur les antiquités d 'Alexandrie (htepi tõv natpiwv 'Arečavopeias). La phrase
qui suit chez Photius (« il a aussi composé des drames dans la même forme » )
peut se rapporter à Horapollon ou à un des auteurs cités dans les lignes qui
précèdent.
Selon 2 J. Maspéro , « Horapollon et la fin du paganisme égyptien » , BIAO 11, 1914,
p. 163-195, notamment p . 190, les Antiquités d 'Alexandrie seraient plutôt l'œuvre d'Hora
pollon 2 (voir la notice suivante ) et s'inscriraient dans le contexte d'une défense nationaliste
de la religion égyptienne ancestrale. A la page suivante (p . 191), l'hypothèse est présentée
comme une certitude.
Eustathe, Comm . sur l'Iliade, t. I, p . 689, 16 - 17 Van der Valk, explique la formation du
nom Horapollon : • 'Spanóniwv ('Spanówv ?), ávnp Nóyloc, oŬ ñ ouveous Éx toŨ
* . pop ( ook ?) xai Amoov, 4 vai Zub kneers clot Poison.
RICHARD GOULET.
165 HORAPOLLON (FIAVIUS -) DE PHÉNÉBYTHIS PLRE II:2 FV
Fils d 'Asclépiadès d 'Alexandrie (* * A 446 ) et neveu d'Héraïscus (= + H 67),
professeur de philosophie à Alexandrie sous l'empereur Zénon (474-491). Selon
Damascius, Vie d' Isidore, fr. *317, p. 253, 1-8 Zintzen (Souda, s.v. 'Spanón
awv, 12 159 ), Horapollon n 'avait pas le caractère d’un (véritable ) philosophe.
Son oncle Héraïscus avait prédit qu 'il serait infidèle aux lois ancestrales, c 'est- à
dire qu 'il se convertirait spontanément au christianisme, sans être sous la pres
sion d 'aucune nécessité. En vérité, sous le règne de Zénon , il fut arrêté avec
H 165 HORAPOLLON DE PHÉNÉBYTHIS 807
Héraïscus et refusa,malgré lesmauvais traitements qu' on leur fit subir, de révé
ler l'endroit où se cachaient le philosophe Isidore (* * I 31) et le grammairien
Harpocras (Damascius, Vie d ' Isidore , fr. * 314 et * 315).
Les passages sonttraduits en anglais dans 1 P. Athanassiadi, Damascius, p. 281 et285.
PCairo III 67295, édité, traduit et commenté par 2 J. Maspéro, « Horapollon
et la fin du paganisme égyptien » , BIAO 11, 1914, p . 163- 195, a conservé la
copie (exécutée par Dioscoros d 'Aphroditô , 540-585) d' une pétition adressée
(vers 493) aux autorités par le “ clarissime” philosophe Flavius Horapollon , fils
d 'Asclépiadès, propriétaire à Phénébythis, afin d 'obtenir la restitution des biens
emportés en son absence par son épouse infidèle , qui était la fille d 'Héraïscus et
donc sa cousine.
Dans cette lettre (citée dans DPHA I, p. 621), on apprend qu 'après avoir fré
quenté les Académies d 'Alexandrie , Horapollon exerça ses dons naturels pour les
belles lettres (ou " pour la discussion philosophique” ) en offrant à qui le cherchait
l' enseignement philosophique, comme l'avaient fait avant lui son grand -père et
son père Asclépiadès, qui l' avait formé dans cette discipline. La lettre nous
apprend également qu 'Asclépiadès et son frère (Héraïscus) habitaient la même
maison et que leurs enfants (Horapollon et la fille d 'Héraïscus qu 'il allait épou
ser) furent élevés ensemble (I 18- 19). La maison qu 'il possédait à Phainébytis
(Kūm Išgāw : ' A podítns xúun ) fut léguée à Horapollon qui y habita avec sa
femme jusqu 'à ce que cette dernière, profitant du fait que son époux enseignait à
Alexandrie , partît avec un étranger en emportant le mobilier et non sans avoir
tenté de retrouver à coups de pic les réserves cachées par son mari (1 26 ).
Le nom du grand -père d ’Horapollon n 'est pas indiqué dans le papyrus,mais il
pourrait s 'agir d 'Horapollon , grammairien et philosophe ( H 162) ou de
l'auteur des Hieroglyphika (3 + H 163), à supposer qu'il ne s'agisse pas d 'une
seule etmême personne.
Cf. 3 R . Rémondon , « L 'Égypte et la suprême résistance au christianisme (ve_
Viie siècles) » , BIAO 51, 1952, p .63-78, en particulier p . 64-65 ; 4 P . Athanas
siadi, « Persecution and response in late paganism : the evidence of Damascius» ,
JHS 113, 1993, p. 1-29.
Horapollon est également mentionné dans la Vie de Sévère de Zacharias le
Scholastique.
Voir l' édition de 5 M .- A . Kugener dans PO II 1, Paris 1904 ; réimpr. 1971, p . 1-115, avec
traduction française ; le commentaire annoncé n 'est jamais paru . Traduction moins fidèle par
6 F .Nau dans la ROC 4 , 1899, p. 343-353 ; 543- 571; 5 , 1900, p . 75-98.
Horapollon y est présenté comme un grammairien païen d'Alexandrie (p. 15
Kugener; voir aussi 20, 11- 12), à l'époque du Patriarche Pierre d'Alexandrie
(482 -489), maître notamment de Paralios d' Aphrodisias, alors païen , qui soumit
des questions concernant la religion à « Horapollon , Héraïskos, Asklépiodotos,
Ammonios, Isidore , et aux autres philosophes qui étaient auprès d 'eux. » (p. 16 ,
9 -12 ; voir aussi p . 22 , 14 -15 ). Paralios, converti par son frère Athanase au
monastère de Salomon , fut battu par les autres élèves païens d ’Horapollon, appa
remment en l'absence du maître (p . 23, 5 - 11). Par la suite , dans le cadre d 'une
808 HORAPOLLON DE PHÉNÉBYTHIS H 165
campagne contre le culte des idoles, Horapollon dut s' enfuir d 'Alexandrie (p . 27,
1 -2). L 'ensemble de l'épisode est résuméetcommenté par Athanassiadi 1, p . 27
29 .
Selon Athanassiadi 1, p. 21, Horapollon futresponsable de la conversion au paganisme de
plusieurs de ses élèves, ce qui lui valut le surnom de " Psychapollo " , destructeur des âmes ( Vie
de Sévère 32). Il aurait été le maître de Damascius (p . 20 -21) au début des années 480 .
Signalons toutefois que dans le passage que Photius (Bibl., cod. 181) consacre aux maîtres de
Damascius dans les diverses disciplines, le nom d'Horapollon n 'est pas mentionné. Voir Ph .
Hoffmann , art. « Damascius» D 3 , DPLA II, p . 543-544. Mme Athanassiadi propose égale
ment de rattacher la composition de l'Histoire nouvelle de Zosime au cercle intellectuel
d 'Horapollon à Alexandrie (Appendice III, p . 350 -357).
Horapollon fut le maître du grammairien Timothée de Gaza (PLRE II:3) qui
vécut sous Anastase (491-516 ), d'après une scholie tardive sur le glossaire de
Cyrillus signalée par 7 R . Reitzenstein , Geschichte der griechischen Etymo
logika. Ein Beitrag zur Geschichte der Philologie in Alexandria und Byzanz,
Leipzig 1847, p . 296 .
RICHARD GOULET.
166 HORARIUS
A . S. Benjamin , « The altars ofHadrian in Athens» , Hesperia 32 , 1963, p. 65 ,
restitue le titre de < i o6$ > w dans la dédicace au datif pour un certain Hora
rius, honoré par l'un de ses parents. La restitution s'appuie sur le fait que, dans le
nombre assez restreint de documents analogues pour de simples particuliers , on
relève la présence de plusieurs professeurs et philosophes ; elle est néanmoins
très hypothétique. Le cognomen pourrait être Festianus, plusieurs fois attesté à
Athènes.
BERNADETTE PUECH .
167 HORATIUS FLACCUS (Q . -) RE 10 69a-8a
Horace est l'un des poètes latins dont la vie nous est le mieux connue grâce
aux vies antiques, comme celle de Suétone (Cf. 1 F. Villeneuve (édit.], Horace,
Odes et Epodes, CUF, Paris 1929, p. LXXXV-VIII), et surtout grâce aux nom
breuses indications qu'il a données dans son œuvre .
Né à Venouse en 69a, il est le fils d'un affranchi, ancien coactor argentarius.
Ses études se font à Rome, puis à Athènes, aux environs de 44a, aumoment de la
mort de César et de la lutte contre Brutus et Cassius. Cf. 2 B . Stenuit, « Le séjour
d'Horace à Athènes» , LEC 47, 1979, p. 249-255 .
Horace s'engage même dans l'armée de Brutus et participe à la bataille de
Philippes en 429. S'il perd alors tous ses biens, il peut rapidement revenir à
Rome et achète une charge de scriba quaestorius (3 D . Armstrong, « Horatius
eques et scriba : satires 1.6 and 2.7 » , TAPhA 116 , 1986, p. 255-258). C 'est alors
qu 'il écrit ses premiers poèmes: les Épodes, dont la rédaction semble commen
cer en 41a et 38a (bien que les dernières soient postérieures), les Satires, dont le
premier livre fut achevé et publié en 349. Les Satires le fontconnaître. Présenté à
Mécène par Virgile et Plotius, il reçoit la protection deMécène. Et ce dernier lui
H 167 HORATIUS FLACCUS 809
fit don d'une propriété en Sabine, à une date qui nous échappe. La publication du
second livre des Satires fut légèrement postérieure, vers 304. Par ses relations
avec Mécène, Horace semble proche du pouvoir. Il célèbre d'ailleurs les bien
faits du régime augustéen dans les Odes civiques du livre III, écrites sans doute
entre 240 et 23a . Les autres Odes sont d'un style différent, inspiré de la poésie
lyrique grecque. Les trois premiers livres semblent avoir été publiés vers 23a.
C 'est à peu près à cette date qu 'Auguste propose à Horace de devenir son secré
taire,mais le poète refuse manifestant ainsi son indépendance d'esprit, tout en
restant cependant proche des dirigeants et du pouvoir. Il écrit alors les Épîtres
dont le premier livre est publié vers 194. Un second livre traitant de questions
littéraires et du rôle du poète dans la cité est publié sans doute vers 13a ou peu
après. Il comprend en particulier le long poème, adressé aux Pisons, que l'on
nomme souvent Art Poétique. L 'æuvre littéraire du poète s'arrête là , Horace
meurt en 8 av. J.-C .
La référence à la philosophie est indéniable dans l’quvre d'Horace,mais les
choix du poète restent des plus difficiles à déterminer, tant les æuvres paraissent
se contredire et permettre des interprétations opposées. Dans les Épîtres (II 2 ,
42-45), Horace déclare avoir « cherché le vrai dans les bosquets d'Académos» .
Cette déclaration semble indiquer qu 'il se veut alors proche de l'Académie et
insiste sur la quête du vrai et du bien qui est la sienne. Mais les Satires contredi
sent cette affiration , car la présence de l'épicurisme est manifeste . Philodème est
mentionné dans ce recueil (I 2, 120 ). La satire I peut paraître générale dans sa
volonté de critiquer et de restreindre l'avidité humaine, mais elle se réfère à
l'homme satisfait de son sort, qui « quitte la vie comme un convive rassasié » ;
cette formule fait manifestement écho à Lucrèce ( III 935 ). En outre d 'autres
thèmes se réfèrent clairement aux thèses épicuriennes ; dans la satire V (100
104) le poète fait allusion à la représentation épicurienne des dieux en déclarant:
« j'ai appris que les dieux menaient une vie dépourvue de soucis et que si la
nature crée des phénomènes extraordinaires, ce ne sont pas les dieux malheureux
qui les envoient du haut du ciel» ; en outre dans la satire III (100 -119), la nais
sance de la société et du droit comme le développement du langage sont présen
tés d'une façon analogue à celle de Lucrèce. Dans la satire II 6 , la recherche d'un
bonheur simple, proche de la nature et le sens de l'amitié , ainsi que la descrip
tion d 'une vie urbaine pleine d'agitation , peuvent conduire aux mêmes conclu
sions. Horace s'affirme ainsi comme un proche de l'épicurisme avec une
connaissance précise de Lucrèce, même s'il n 'est pas assuré qu 'il appartenait
aux cercles épicuriens de Campanie .
Les choix d'Horace paraisssent évoluer dans les æuvres ultérieures. Cette
affirmation s'appuie sur l'ode I 34 souvent citée : « Adorateur réservé des dieux
et peu assidu , tandis que j'errais professant une sagesse folle , je suis contraint de
partir en arrière avec mes voiles et de suivre à nouveau l'itinéraire délaissé car
Diespiter divisant les nuages de son feu fulgurant a mené au milieu d'un ciel
serein ses chevaux tonnant et son char rapide » . A la suite de ce prodige, Horace
aurait renoncé à l'épicurismepour se tourner vers une autre école philosophique ,
810 HORATIUS FLACCUS H 167
peut-être le stoïcisme. La constance des choix épicuriens a pourtant été souli
gnée ; ce poème peut être interprété de façon opposée et avoir une portée poli
tique en se référant à l'apparition d'Auguste et à la bataille d 'Actium . La pré
sence des dieux dans le reste du poème peut relever d 'une tradition poétique qui
n 'engage pas profondément Horace. Mais l'invitation à profiter du temps pré
sent, la célèbre formule du carpe diem , se fonde sur une autre sagesse. Et l'on
souligne la constance de l'adhésion épicurienne chez le poète (cf. 4 R . Ferri, I
dispiaceri di un Epicureo . Uno studio sulla poetica oraziana delle Epistole, Pisa
1993). La place qu'il fait à Auguste peut aller dans le même sens, car les épicu
riens acceptaient le souverain qui assure la tranquillité à ses sujets.
L ' interprétation des Épîtres est tout aussimalaisée. Dans le livre II l'esthé
tique du poème montre des choix qui peuvent renvoyer à l'épicurisme (avec les
notions d'usus ou de dulcis), mais il existe des donnés empruntées à l'aristoté
lisme, comme 5 P . Grimal l'a montré dans son étude sur l’Art Poétique (Paris
1962) ; et la notion de decorum n 'est pas épicurienne. Le livre I paraît également
complexe. Une importante place est faite aux questions philosophiques ; leur
importance est constamment répétée. Horace critique à plusieurs reprises un
stoïcisme trop dogmatique ; il se qualifie (IV 15 - 16 ) de « porc du troupeau d 'Épi
cure» , mais cette affirmation lancée comme une plaisanterie n 'est peut-être pas à
prendre à la lettre . Pourtant, elle est précédée par une invitation à profiter de
l' instant, à regarder chacun des jours comme le dernier ; c 'est un thème épicurien
qui apparaît fréquemment chez Horace. L 'aspiration à un bonheur simple, la
recherche de l'otium et la réserve envers la politique vont dans le même sens,
ainsi que la recherche de la tranquillité (euthymia ). Mais l'influence de Panétius
a été soulignée et se manifeste dans la notion de decorum (6 M .J.MacGann ,
Studies in Horace's first Book of Epistles , Bruxelles 1969). Il semble donc que la
philosophie d'Horace soit proche de l'épicurisme, mais sans se tenir exclusive
ment à cette école ( 7 C . Castner, A prosopography of the Roman Epicureans,
p. 92 -95, le classe parmiles Epicurei incerti).
8 A . Traglia , « L 'epicureismo di Orazio », dans Atti del III convegno di studio (10 -12
Ottobre 1970), coll. « Horatianum », Roma 1971, p . 41-54.
Horace combine cette influence avec d'autres écoles, cherchant les données
les plus proches de sa morale , en gardant sa liberté d'esprit : nullius addictus
iurare in uerba magistri (Epist. I 1, 14). Cette volonté d'éclectisme, cette distan
ce par rapport aux écoles conduisent à le rapprocher de la philosophie académi
que dont l'influence paraît décisive sur sa pensée (9 K . Gantar, « Horaz zwischen
Akademie und Epikur» , ZAnt 22, 1972 , p. 5- 24 ; cf. 10 C . Lévy, Cicero Acade
micus,Rome 1992, p .92-93).
Éditions. 11 A . Kiessling et R . Heinze (édit.), Q. Horatius Flaccus, t. I:
Oden , 11e éd., Hildesheim /Zürich 1984, t. II : Satiren, 10e éd., Hildesheim 1968,
t. III : Episteln, 11e éd . 1984 ; 12 S . Borzsák (édit.), Horatius. Opera, coll. BT,
Leipzig 1984, XII- 362 p .; 13 J.K . Schoenberger et 0 . Schoenberger (édit.),
Horatius. Satiren und Episteln , coll. « Schr. & Quellen der Alten Welt » 33, Ber
lin 1976 , 349 p. ; 14 C .F . K . Herzlieb, J. P .Uz, W . Killy et E. A . Schmidt( édit.),
H 167 HORATIUS FLACCUS 811
Horatius. Oden und Epoden , coll. « Bibl. der alten Welt», Zürich 1981, 557 p. ;
15 K . Quinn (édit.), Horatius. The Odes, coll. « Class. Ser.», New York 1980,
XVIII-333 p . ; 16 C . O . Brink (édit.), Horatius. Horace on poetry, t. I: Prolego
mena to the literary Epistles, Cambridge 1963; t. II : The Ars poetica, Cam
bridge 1971 ; t. III: Epistles, Book 11: The letters to Augustus and to Florus,
Cambridge 1982 ; 17 D . R . Shackleton Bailey (édit.),Horatius. Opera, coll. BT,
Stuttgart 19912 , X -372 p.; 18 N . Rudd (édit.), Horatius. Epistles, Book ii and
Epistle to the Pisones (Ars Poetica). ed .,with a comm ., coll. « Cambridge Greek
& Latin Class.» , Cambridge Univ . Pr., 1989, X -244 p .; 19 R . Mayer (édit.),
Horace Epistles Book I, coll. « Cambridge Greek and Latin Classics» , Cam
bridge Univ . Press 1994, VIII-291 p. ; 20 D .Mankin (édit.), Horace Epodes, coll.
« Greek and Latin Classics » , Cambridge Univ . Press, VII-321 p .
Lexique. 21 J.-J. Iso Echegoyen , Concordantia Horatiana. A concordance to
Horace , coll. « Alpha-Omega Reihe A » 108, Hildesheim 1990 , 594 p .
Bibliographie. Étant donné l'abondance de la bibliographie consacrée à
Horace, nous nous bornons à renvoyer à 22 ANRW II 31, 3 , 1981, où figurent
une abondante bibliographie et des synthèses concernant les œuvres. Voir aussi
23 E . Doblhofer, « Horaz in der Forschung nach 1957 » , coll. « Erträge der
Forschung » 279, Darmstadt 1992, XIII-205 p.
Études récentes sur Horace et la philosophie . 24 P . Grimal, « La philoso
phie d 'Horace au premier livre des Épîtres», Vita Latina (Avignon ) 72 , 1978,
p . 2 -10 ; 25 W . D . Lebek , « Horaz und die Philosophie . Die Oden » , ANRW II 31,
3 , 1981, p . 2031- 2092 ; 26 W . S . Andersen , « The Roman Socrates : Horace and
his Satires » , dans Essays on Roman Satire, Princeton 1982, p . 13 -49 ; 27 R .
Mayer,« Horace's Epistles I and philosophy» , AJPh 107, 1986 , p. 55 -73 ; 28 J.
Moles, « Cynicism in Epistles I » , dans F. Cairns et alii ( édit.), Papers of the
Liverpool Latin Seminar, V , 1985, coll.« ARCA Class. & Mediev. Texts, Papers
& Monogr. » 19, Liverpool 1986 . p . 33-60 ; 29 A . Grilli, « Orazio e le filosofie
minori» , A & R 32, 1987, p . 8 - 18 ; 30 Caterina Dominici, Epicureismo e stoicismo
nella Roma antica. Lucrezio, Virgilio, Orazio (Odi civili), Seneca, Abano 1985,
143 p. ; 31 P. Grimal, « L' éclectisme philosophique dans l’Art Poétique d'Ho
race », dans 1 2000 anni dell’Ars Poetica, coll. « Pubbl. del D .AR.FI.CL.ET. »
119, Genoa 1988, p . 9 -26 ; 32 A . Michel, « L 'épicurisme, la parole et la beauté
dans les Épîtres. D 'Horace à Tacite » , AAntHung 30 , 1982-1984, p . 255- 265 ;
33 F . Della Corte , « Areio Didimo, Orazio e la dossograpfia d 'età augustea » ,
Maia 43, 1991, p. 67 -81 ; 34 A . Michel, « Poétique et sagesse dans les Odes
d'Horace» , REL 70, 1992, p. 126 -137 ; 35 A. Traina, « Orazio e Aristippo. Le
Epistole e l'arte di convivere» , RFIC 119, 1991, p. 285-305 ; 36 I. Gallo ,
« Orazio e la filosofia greca» , Aufidus 1993, nº 20 , p. 37-48 ; 37 G . Gigante ,
« Quel che Aristippo non aveva detto » , PP 48, 1993, p . 267-280 ; 38 A . Grilli,
« Orazio e il pensiero filosofico » , dans P. V . Cova et G . E .Manzoni (édit.), Voci
oraziane, coll. « Collana Secondaria Superiore Saggi » , Brescia 1993, p . 29-40 ;
39 Id., « Orazio : la filosofia e le filosofie » , dans Atti del convegno di Venosa, 8
15 novembre 1992, Venosa 1993, p . 47- 57 ; 40 P . Grimal, « Recherche sur l'épi
812 HORATIUS FLACCUS H 167
curisme d'Horace » , REL 71, 1993 , p. 154 - 160 ; 41 W . Ludwig (édit.), Horace.
L'æuvre et les imitations. Un siècle d'interprétation, coll.« Entretiens sur l'An
tiquité classique » 39, Vandæuvres/Genève 1993, 439 p.; 42 M .Maróth , « Epiku
reische Elemente in der Dichtkunst des Horaz » ,ACD 29, 1993, p. 99- 109 ; 43 G .
Milanese, « Aspetti del lessico filosofico di Orazio » ,ACD 29, 1993, p. 111- 122 ;
44 R . Müller, « Horaz und die Philosophie als Lebenskunst» , ACD 29, 1993,
p . 123 -137 ; 45 N . Rudd , « Horace as a moralist » , dans N . Rudd ( édit.), Horace
2000. A celebration . Essays for the bimillenium edited by N . R ., London 1993,
p.64-88 ; 46 C . Szekeres, « Stoische philosophische Termini bei Horaz » , ACD
29, 1993, p. 181- 189 ; 47 A . Traina, « Orazio e Aristippo. le Epistole e l'arte di
convivere » , dans R . Uglione (édit.), Atti del convegno nazionale di studi su
Orazio : Torino, 13 -14 -15 aprile 1992, Torino 1993, p. 193-204.
MICHÈLE DUCOS.
168 HORTENSINUS II ?
Le médecin Hortensinus,mort à Rome à 52 ans, avait dû donner des confé
rences sur des sujets touchant aussi bien à la philosophie qu'à la médecine: son
epitaphe le présente comme εν λόγοις φιλοσόφους και ηθει θαυμαστός (IGUR
835 ).
BERNADETTE PUECH .
169 HORUS RE PLREI: IV
L'Égyptien Horus, fils d'un certain Valens et frère d 'un certain Phanès, était
pugiliste et avait remporté les jeux olympiques de 364 à Antioche. Comme son
frère , il honorait Hermès non seulement par ses exploits à la palestre , mais aussi
par son appétit de savoir (Énlovuía óywv, Libanios, Lettres 1278 et 1279) .
C 'est ce même Horus que l'on retrouve comme interlocuteur des Saturnales
de Macrobe. Il arrive en compagnie d ' un homme effronté, Évangelus, et de
Disarius, le meilleur médecin de Rome (I 7, 3) et il fait une intervention à propos
du culte de Saturne (I 7, 14 - 16 ).On apprend dans cet ouvrage (cf. 17, 3.14 ; I 15,
3; VII 7 , 8 ; VII 13, 10; VII 17, 14 ) qu 'après une carrière de boxeur profession
nel riche en succès, il se mit aux philosophiae studia et qu 'il acquit une solide
réputation dans le milieu cynique. Comme Diogène, il se faisait un point d'hon
neur de n 'avoir aucun esclave et de ne rien posséder en dehors du vêtement
cynique.
Symmaque, dans une lettre qu'il adresse à son frère Flavien (Lettre II 39), fait
l'éloge du personnage qu 'il présente comme un ami qui lui est cher et qu 'il
recommande à son frère .
MARIE -ODILE GOULET-CAZÉ .
170 HOSIUS (ou OSIUS)
Patron du philosophe platonicien Calcidius (* * C 12 ) et dédicataire de la tra
duction et du commentaire du Timée de Platon rédigés par cet auteur. A la suite
d 'une note contenue dans certains manuscrits , on l' a identifié traditionnellement
H 171 HOSTILIANUS 813
à l'évêque Osius (ou Ossius) de Cordoue (ca 246 -347/8 ap. J.-C .), conseiller
ecclésiastique de Constantin et l'une des figuresmarquantes du Concile de Nicée
( 325) .
Mais J. H . Waszink (Timaeus a Calcidio translatus, p . IX ) considérait que les
dates de l' évêque de Cordoue ne correspondaient pas à l' état de la langue de
Calcidius (qu 'il faudrait dater plutôt du ve siècle que du Ive) ni à sa position
philosophique (dont ce savant considère , mais sans raisons déterminantes,
qu 'elle est marquée par l' influence de Porphyre ).
En guise d 'alternative, Waszink a proposé un rapprochement avec un Hosius
de Milan (RE 1, PLRE II :2). Cet Osius est connu par une inscription sur son
tombeau à Milan (CIL V 6253) comme l'arrière-petit- fils d ’un consularis de
Vénétie et d ' Istrie . Il était le mari d 'une certaine Domnica ensevelie dans le
même tombeau . L 'inscription lui attribue les titres de comes rerum privatarum ,
comes sacrarum largitionum et patricius. Il s'agissait manifestement d 'un per
sonnage de haut rang dans l'administration impériale.
Un comes sacrarum largitionum portant ce nom est mentionné dans le Code théodosien
(VI 30 , 13) : il était présent à la cour d 'Orient le 25 novembre 395. Il s'agit probablement de la
même personne. Cet Osius peut raisonnablement être également identifié avec l'Espagnol (RE
2 ), d'origine servile (Claudien , In Eutrop. II 345-353, 446, 559), à qui est attribuée la position
de magister officiorum , toujours à la cour d ' Orient, du 18 janvier 396 et 15 décembre 398
(Cod. Theod. VI 26 , 6 ; 27, 8 -9 ; 30, 13).
Rien cependant ne permet de penser que ce haut fonctionnaire était chrétien
(ce qu' il pouvait bien être en vérité), ni qu 'il ait porté intérêt à la philosophie .
Waszink n 'a indiqué son nom qu'à titre de suggestion , pour montrer que d'autres
Osii, en plus de l'évêque,méritaient d' être pris en considération.
Il importe en tout cas de remarquer que Calcidius présente son patron comme
une autorité en matière de doctrine chrétienne (Comm . chap . 133) et, dans sa
Préface ( p . 6 , 5 ), il déclare qu ’Osius lui a confié cette tâche non sine diuino
instinctu , ce qui semble impliquer , puisque Calcidius est chrétien , un rapport
particulier entre Osius et le Tout-Puissant. Ce sont là , semble -t-il, des indications
suggérant qu 'Osius était un ecclésiastique éminent.
Cf. O . Seeck, art. « Hosius », RE VIII 2, 1913, col. 2493 ; J. Sundwall,
Abhandlungen zur Geschichte des ausgehenden Römertums, Helsingfors 1929,
p. 144- 145 ; J.H . Waszink (édit.), Timaeus a Calcidio translatus commentario
que instructus, coll. « Plato Latinus» 4, London /Leiden 1962, p. XI.
JOHN DILLON .
171 HOSTILIANUS RE 1 PIR² H 222
Il fait partie des philosophes expulsés de Rome par Vespasien en 74. Il fut
envoyé en même temps que Démétrios le Cynique dans les îles (Dion Cassius
LXVI 13, 2). Mais est-ce un cynique ou un stoïcien ? Et dans cette dernière
hypothèse, faut-il l'identifier au philosophe stoïcien C . Tutilius Hostilianus
(BH 172) ?
MARIE -ODILE GOULET-CAZÉ.
814 HOSTILIANUS DE CORTONE H 172
172 HOSTILIANUS DE CORTONE ( C. TUTILIUS -) PIR2 H 222 MFI
Ce stoïcien , connu par un cippe des environs de Rome (CIL VI9785), est très
vraisemblablementidentique, comme l'avait indiqué F. Bücheler, RhM 63, 1908 ,
p . 194, au philosophe homonyme (» H 171) exilé par Vespasien en raison des
positions qu'il avait exprimées sur le pouvoirmonarchique (Dion Cassius LXVI
13, 2, résumé par Xiphilin LXV 11, 2) ; que ce dernier ait été exilé en même
temps que le cynique Démétrios (OD 43) n 'implique en effet nullement qu 'il ait
été lui-même un cynique, comme l'admet J. Hahn , Der Philosoph und die
Gesellschaft, Stuttgart 1989, p . 189.
BERNADETTE PUECH .
173 HOSTILIANUS HÉSYCHIUS D ’APAMÉE absent de la RE MIII
Amélius, disciple de Plotin , donna à son fils adoptif Hostilianus Hesychius
(Porphyre , Vita Plotini 3, 46 -48) d' Apamée les 100 livres de scholies qu'il avait
rédigés à partir des cours de Plotin . C 'estprobablementauprès de lui qu 'Amélius
se trouve à la mort de Plotin en 270 (V. Plot. 2, 33).
Sur la formeOustillianos, retenue par les éditeurs et attestée à Herculanum , voir la note de
L . Brisson et A .-Ph . Segonds, dans Porphyre, La Vie de Plotin , t. II, p . 220 .
LUC BRISSON .
174 HYLLOS DE SOLES MF IIIa
Stoïcien ,disciple de Sphaïros du Bosphore, puis de Chrysippe de Soles. Il est
mentionné dans l'Index Stoicorum de Philodème, col. XLVI 1-5 (p. 96 Dorandi),
où sont cités les Xpvolnnou tapai d'Aristocréon (» A 374 ), neveu de Chry
sippe : "Y oç Eoreùs i öv xai Epaipwi nipoeoxonaxéval onoliv ’ Aploto
lxpéWV év tałç Xpuoinlttov ) tapais .
RICHARD GOULET.
175 HYPATIE D 'ALEXANDRIE RE PLRE II :1 ca 355 - 415
Femme philosophe néoplatonicienne, disciple et collaboratrice de son père,
Théon . 1 D . Roques, « La famille d'Hypatie» , REG 108, 1995, p. 128- 149, vou
drait que le vrai nom du père d'Hypatie soit Théotecnos pour la raison que
Synésius dans deux de ses lettres, Ep. 5, p. 26 , 2 Garzya, et Ep. 16 , p . 37, 4, em
ploie l'expression tòv tatépa Ocótextov,mais dans la lettre 5, ce personnage
est désigné comme faisant partie du cheur des disciples d 'Hypatie et dans la
lettre 16 , comme un étaipos de Synésius; il est douteux que ces qualifications
conviennent au père de la philosophe, et d'autre part on ne comprend pas bien
pourquoi Théon n 'aurait pas signé ses propres æuvres de son vrai nom .
0 . Masson, « Deótexvoç “ fils de Dieu ” », REG 110 , 1997, p.618 -619, a montré que le
nom de Théotecnos est rare et d 'origine chrétienne.
Ce que nous savons au sujet d'Hypatie nous vient de trois sources: l'Histoire
ecclésiastique de Socrate (PG 67, VII 13- 15), la Vie d 'Isidore par Damascius
(éd . Zintzen , Hildesheim 1967, fr. 102 - 105 ) et la Chronique de Jean de Nikiu
( trad . R . H . Charles, Oxford 1916 , p . 100 - 102). Elle est probablement née autour
de l'année 355 (cf. 2 R . J. Penella , « When was Hypatia born ?», Historia 33,
H 175 HYPATIE D 'ALEXANDRIE 815
1984, p. 126 -128 ), puisqu 'elle pouvait être âgée d'environ 60 ans au moment de
sa mort en 415 , selon la Chronique de Malalas (p. 359 Dindorf = PG 97, 536 A :
nu dè nanaià yuvń ).Synésius de Cyrène fut son élève dans la dernière décennie
du IVe siècle . Elle travailla avec son père Théon au Commentaire sur l'Alma
geste . Dans le manuscrit Laur. 28, 18 , le troisième livre du commentaire de
Theon porte la mention : ' Exôóơ£C TapatarVoWeing rõ bàooooo
Ouyatpiuou ‘Ynatią , que l'on doit traduire : « Édition revue et corrigée parma
fille, la philosophe Hypatie » (cf. 3 A . Rome [édit.), Commentaires de Pappus et
de Théon d 'Alexandrie sur l’Almageste , coll. « Studi e Testi» 106 , t. III,Città del
Vaticano 1943, p . 807). Nous sommes donc en présence d'une note ajoutée par
Théon lui-même pour signaler la collaboration de sa fille à son travail. D 'après
4 A . Cameron, « Isidore of Miletus and Hypatia : On editing ofMathematical
Texts »,GRBS 31, 1990, p. 103-127, cette collaboration aurait consisté dans le
fait qu'Hypatie aurait établi un bon texte de l'Almageste de Ptolémée à l'usage
de son père pour le commenter (il faut remarquer que 5 G . J. Toomer, Ptolemy's
Almagest, London 1984 , p. 5, a observé des interpolations anciennes dans le
texte de l’Almageste, mais en général ces interpolations sontmalheureuses; doit
on cependant les attribuer à Hypatie , comme le voudrait Cameron ?). Dans une
étude approfondie, W . R . Knorr, Textual studies in Ancient and MedievalGeo
metry, Boston /Basel/Berlin 1989, p. 753 -804, a réussi à retrouver des interven
tions, aussi bien dans le commentaire de Théon que dans celui d'Eutocius
d 'Ascalon (2E 175), qui prouvent qu 'Hypatie a vraiment collaboré au travail de
son père et que ses corrections ont été reprises par son successeur. D 'autre part,
en étudiant d 'une manière approfondie la tradition textuelle d 'un écrit d ’Archi
mède intitulé De la dimension du cercle, Knorr est amené à l'hypothèse d'un état
du texte antérieur à celui qui est encore conservé, et à en placer la rédaction au
tout débutdu IVe siècle, ce qui le conduit à l'attribuer à Hypatie. De plus, nous
sommes autorisés à croire qu’Hypatie n ' était pas non plus médiocre dans les
connaissances astronomiques puisque nous savons par la Souda qu 'elle avait
composé des commentaires sur Diophante , Apollonius de Pergé et les Tables
Faciles de Ptolémée. Cependant dire qu 'Hypatie était « philosophe » signifie
qu 'elle enseignait la philosophie à Alexandrie . Cela est d'ailleurs dit explicite
ment par Damascius dans la Vie d 'Isidore , fr. 102 : « Bien qu ' étant une femme,
elle portait le manteau des philosophes, et même, dans ses déplacements dans la
ville , elle enseignait d'une manière publique à qui voulait l' entendre ou bien
Platon , ou bien Aristote, ou bien n 'importe quel autre philosophe » . Il n 'est pas
sûr que cela veuille dire qu'Hypatie était titulaire d'une chaire officielle de phi
losophie à Alexandrie , ni qu 'elle y enseignait en pleine rue, comme le voudrait
7 Ét. Évrard, « À quel titre Hypatie enseigna-t-elle la philosophie ?», REG 90 ,
1977, p .69-74. C' est plus probablement une critique de Damascius qui veut pré
senter l'enseignement d 'Hypatie comme ayant le caractère de celui des philo
sophes cyniques, par opposition aux philosophes sérieux qui doivent enseigner à
une élite dans un cercle fermé comme on le faisait à Athènes. La remarque
qu’Hypatie portait le toíbwv des cyniques va dans le même sens, c 'est une cari
816 HYPATIE D 'ALEXANDRIE H 175
plusieurs fils
Il était païen (Libanios, Ep. 571, 2 ; 801, 2 ; 984 , 2 ) . Était- il philosophe ?
Libanios lui reconnaît la qualité de sophos (Ep. 982, 2 ). Ilmentionne son ascen
dance philosophique (Ep. 475, 3 ; 593, 1). Certaines formules du rhéteur sont peu
compatibles avec un éventuel statut de philosophe : le jeune Jamblique aurait eu
l' étoffe d 'un philosophe et aurait souhaité faire des études de philosophie , mais,
orphelin et donc privé de moyens, il n 'aurait pu réaliser ce projet (Ep. 575, 4).
Dans une autre lettre , Libanios le définit comme rhéteur (Ep. 573, 2).
Toutefois, ces témoignages négatifs datent d 'une époque où Jamblique n 'était
pas encore installé durablement à Athènes. Avant de s'y fixer, il a apparemment
nourri le projet d 'aller apprendre la philosophie en Égypte (Libanios, Ep. 385, 2 ,
datée de 358 ). Dans une autre de ses lettres (Ep. 1466 , 1, lettre datée de 365),
Libanios emploie l'expression « vous autres les philosophes» , et le déclare fami
lier de Pythagore, Platon , Aristote, ainsi que de « son homonyme» (ibid ., 4).
C 'est probablement le même Jamblique que deux épigrammes retrouvées à
Athènes et datant de la fin du IVe siècle célèbrent pour avoir généreusement
824 IAMBLICHOS D ' APAMÉE 12
10 ICCIUS RE 2 Fja
Intendant (procurator) administrant les biens d'Agrippa en Sicile . On peut
hésiter sur son statut: homme libre ou affranchi (G . Fabre et J.M . Roddaz,
« Recherches sur la “ familia de M . Agrippa », Athenaeum 60, 1982, p. 84-112).
858 ICCIUS 110
Poète tragique et lyrique, mais aussi “philosophe” selon la Souda (s.v. " Iwv
Xios = DK A 3 ). Originaire de Chios, une île de la mer Égée occupée d' abord
par des colons ioniens, lon, fils d 'Orthoménès, aurait reçu le surnom de Xouthos,
qui était aussi un nom qu 'avait porté Hélénos , le père d'Achaios et d'Ion , l'an
cêtre éponyme de l'Ionie ( sur tout cela, cf. Harpocration , Lexique , s.v. " Iwv =
DK 36 A 1) ; peut-être le pythagoricien Xouthos (DK 33) doit-il être identifié à
Ion de Chios.
Ion de Chios, qui a pratiqué plusieurs genres poétiques (scholie à Aristo
phane, Paix, v. 832 sq. = DK A 2 ) aurait fait représenter ses premières tragédies,
selon la Souda (s. v. " Iwv Xioç = DK A 3 ), pendant la 82 olympiade (soit entre
I 20 ION DE CHIOS 865
452 et 449 av. J.-C .). On comprend dès lors que dans La Paix (v. 832-839),
représentée en 421, Aristophane y fasse référence.
L 'esclave demande à Trygée, qui revient du ciel, s'il est vrai que les personnes décédées
deviennentdes étoiles, comme on le prétend. Trygée répond que c 'est bien vrai, et que lon de
Chios, qui a composé un poème sur l' étoile du matin , est, après sa mort, devenu l'« étoile du
matin (àotoç đome) » , Cette remarque amusante n 'implique pas forcément qu 'lon de Chios
croyait en une destinée astrale de l'âme, commecela aurait été le cas chez les pythagoriciens.
Il aurait vécu de 490 à 422 environ (Diehl), à Chios, mais aussi à Athènes.
Outre sa production poétique, dont il reste de nombreux fragments, on attri
buait à Ion de Chios un traité , en prose, intitulé Tplayuós (au singulier) ou
Tplayuoi (au pluriel, comme le voulaientDémétrius de Scepsis et Apollonidès
de Nicée), qu'Harpocration présente comme dióoopov tl púyypauua. Cet
ouvrage, dont on n 'a pu expliquer le titre aussi bien dans l'Antiquité qu'à l'épo
quemoderne, aurait commencé ainsi: « Voici le commencementdemon traité:
toutes choses sont trois et rien n 'est ni plus nimoins que ces trois. Ce qui fait la
valeur de chaque être particulier, c'est la triade formée par l'intelligence (oúve
OLC), la force (upátoc) et la chance (tuxn )» (Harpocration , s.v. " Iwv; DK B 1).
Le témoignage de Plutarque va dans le même sens : « Ainsi, dans la partie de son
cuvre écrite en prose, le poète Ion affirme que la chance (Túxn ) a beau être ce
qu 'il y a de plus opposé au savoir (oopía ), elle est pourtant à l'origine d'effets
très voisins des siens.» (Plutarque, Fortune des Romains, 1, 316 d = DK B 3a ;
cf. aussi Propos de table VII 1, 1, 717 b = DK B 3b ). Pour sa part, Isocrate nous
orienterait vers un contexte plus cosmologique en évoquant « ... les traités des
Sages de jadis , dont l'un a affirmé que le nombre des êtres est infini; Empédocle
(PE 19 ), qu 'il est de quatre , auxquels s'ajoutent la Haine et l' Amour; et Ion ,
qu 'il est limité à trois» (Sur l'échange (XV ] 268 = DK A 6a). Plusieurs siècles
plus tard, Jean Philopon donnait ces précisions: « Pour Parménide, les éléments
étaient le feu et la terre ; Ion de Chios, l'auteur de tragédies, leur ajoutait l'air,
tandis qu 'Empédocle posait les quatre éléments» ( in De gen. et corr ., p. 107, 18
Vitelli = DK A 6a ). Ces témoignages ne sont pas forcément contradictoires ; les
trois principes mis en avant peuvent être à la fois d 'ordre physique (feu, terre et
air) et éthique (intelligence, force et chance) suivant le contexte . C 'est peut-être
au même ouvrage que fait référence cette remarque d'Aétius (II 25, 11, p. 356
Diels = DK A 7) concernant la substance de la lune : « Pour Ion, c'est un corps
en partie transparent et translucide, et en partie opaque.» C 'est sans doute le
même ouvrage qui est désigné comme Koouooyixós par la Scholie sur la Paix
d'Aristophane (DK A 2). Selon la Souda, Ion aurait écrit nepiMeteúpwv, mais
ce témoignage dépend manifestementde la scholie mentionnée, qui fait état d'un
poème d' Ion sur l' étoile du matin .
L 'authenticité de l'ouvrage semble avoir très tôt soulevé la suspicion. En effet, on lit dans
le Lexique d'Harpocration : Éypade ... Olóoopov ti oúyypaupa tov Tplayuòv énıypadó
uevov, onep Kaminaxos áutiéyeolai onow wÇ 'Enlyévous. La fin de cette phrase est
incompréhensible . Voilà pourquoi Bergk a corrigé en ÚTÒ 'EntlyÉVous signifiant par là que
Callimaque estimait qu'Épigène était le véritable auteur du Triagmos. En revanche Diels pro
pose ώς και Έπιγένης et Jacoby και Έπιγένης. Pfeiffer et Burkert optent pour l' une ou
l'autre de ces deux dernières solutions. Si on accepte cette leçon , Épigène pensait, comme le
866 ION DE CHIOS I 20
fera Callimaque après lui, que lon de Chios n 'était pas le véritable auteur du Triagmos. L 'ou
vrage s 'inscrit par ailleurs dans un contexte qui est celui du plagiat et de la pseudépigraphie .
En effet, on lit chez Diogène Laërce (VIII 8 = DK B 2a) : « Au dire d’ lon de Chios dans ses
Triagmoi, Pythagore a fait passer certains de ses poèmes pour des æuvres d'Orphée .» Clé
ment d 'Alexandrie (Stromates I 131 = DK B 2b ) écrit demême: « lon de Chios consigne dans
ses Triagmoi que Pythagore a fait passer certains de ses poèmes pour des æuvres d'Orphée. »
Ce témoignage ne laisse pas de surprendre. Même s 'il est vrai que, pour un Grec cultivé
contemporain des sophistes, il devait sembler peu vraisemblable que les poèmes conservés
sous le nom d 'Orphée datent de deux générations avant la guerre de Troie , il est encore plus
surprenant que l'attribution de ces poèmes soit rapportée à Pythagore, qui est censé n 'avoir
rien écrit. A la limite , lon de Chios ou un autre auteur aurait pu dans ses Triagmoimettre en
doute l'authenticité de poèmes circulant sous le nom d 'Orphée en y décelant des traits pytha
goriciens. Beaucoup plus tard , les polémiques autour du plagiat auraient fait de Pythagore un
plagiaire d'Orphée. Et dans la Souda , on trouve une Notice qui va jusqu' à faire d 'Orphée
l'auteur des Triagmoi: « Orphée : auteur de Triagmoi que la tradition attribue à lon le tra
gique ; c 'est là que se trouve ce qu 'on désigne sous le nom de Hiérostoliques » ( s .v . 'Opbeuc).
Il s'agit là d'une synthèse particulièrementmaladroite de plusieurs des traditions évoquées
jusqu'ici.
Ion écrivit aussi une histoire de la fondation de Chios (Pausanias VII 4, 8) et
des mémoires (υπομνήματα), probablement identiques aux επιδημίαι [le meme
ouvrage que le ouveronuntixóç mentionné par Pollux II 88), où il racontait les
visites effectuées à Chios par des personnages célèbres, dont Sophocle (Athénée ,
605 e); c'est probablement dans cet ouvrage qu 'il aurait aussi raconté que, dans
sa jeunesse, Socrate était venu à Samos en compagnie d'Archélaos (> A 308]
(D . L . VIII 8).
Le dialogue platonicien lon (cf. 530 a) met en scène non le poète de Chios,
mais un rhapsode d'Éphèse (RE 13).
Cf. DK 36 (uniquement les fragments " philosophiques”); FGrHist 392 ; (E .
Diehl], art. « Ion von Chios » 11, RE IX 2, 1916 , col. 1861-1868; A . von
Blumenthal, Ion von Chios. Die Reste seiner Werke, Stuttgart 1939 ; A . Leurini
(édit.), Ionis Chii. Testimonia et Fragmenta , collegit, disposuit, adnotatione
critica instruxit A .L ., coll. « Classical and Byzantinemonographs » 23, Amster
dam 1992 , XXXII-270 p .
LUC BRISSON
21 IONICUS DE SARDES RE MF IV
Médecin , philosophe, rhéteur et poète, fils d 'un médecin célèbre, disciple de
Zénon de Chypre (RE 15). Il était admiré par Oribase de Pergame. Ionicusne
nous est connu que par son concitoyen Eunape de Sardes (Vies des philosophes
et des sophistes XXII 1, 1-2, 2 ; p . 89, 18 -90 , 17 Giangrande). Outre ses connais
sances médicales, à la fois théoriques et pratiques, il jouissait d'une formation
complète dans toutes les branches de la philosophie et avait des talents divina
toires (Delaguós), qui se manifestaient non seulement dans le diagnostic médi
cal, mais dans ce type de divination philosophique qui était apprécié dans les
conventicules néoplatoniciens que fréquentait Eunape (p. 90 , 9-13). Lors
qu 'Eunape composa son ouvrage à la toute fin du IVe siècle, lonicus venait de
mourir, laissant deux fils .
I 25 ISAGORAS DE THESSALIE 867
Cf. W . Kroll, art. « Ionikos» ,RE IX 2, 1916 , col. 1895.
RICHARD GOULET.
et aux mathématiques. Comme ses sæurs , elle avait été formée par Damascius et
Isidore (Photius, Bibl., cod. 181) . Selon Photius, Damascius, dans les soixante
chapitres de sa biographie, ne racontait pas que la vie d'Isidore. Il décrivait éga
lement celle « de nombreux personnages contemporains de ce philosophe ou plus
anciens que lui; il réunit leurs actes, des récits qui les concernent, et il use de la
digression en abondance etmême à satiété » (Ibid., trad. Henry). Le lecteur des
fragments retient en effet l'impression qu 'ils nous en apprennent beaucoup
moins sur Isidore que sur tous les intellectuels de son temps ou de son entourage.
En plus de son ton antichrétien , Photius relève dans l'ouvrage de Damascius
une tendance à dévaloriser ses héros: « Pour tous ceux qu'il exalte dans ses écrits
et qu'il proclame supérieurs à la condition humaine pour l'excellence de leurs
conceptions dans le savoir et l'agilité de leur pensée, il s'érige lui-même en juge
de chacun et il n 'en est pas un de tous ceux qu 'il admire à qui il ne reproche
quelque insuffisance : celui qu 'il exalte pour son intelligence n'est pas intelligent
en tout point, celui qui est incomparable pour sa science ne sait pas tout, celui
que sa vertu place près de la divinité a beaucoup de défauts . Ainsi, chacun de
ceux qu'il exaltait est persiflé et ravalé ; de cette manière il s' arroge, par des
moyens détournés, le pouvoir sur eux tous et à tout propos. Aussi poursuit-il sa
vie d ' Isidore en le louant et en l'accablant tout autant de blâmes. » (Ibid ., trad .
Henry). Voir ce qu 'il dit à propos de Saloustius ( fr. 138 ): « Et s'il y a une vie
qu'il importe de critiquer, c' est assurément celle-ci» . Sur ce point de vue cri
tique de Damascius, voir P . Athanassiadi, Damascius, p . 26 -27.
La reconstitution des fragments s'appuie sur le lien qui est fourni par la suc
cession des extraits 1-230 de Photius qui semblent suivre l'ordre du récit biogra
phique.Mais l'ordre du récit n 'est pas nécessairement l'ordre des événements .
Plusieurs fragments attestent explicitement l'usage de la digression (Epit. 159 et
175) et de l'anticipation (Ibid. 306 : une anticipation dans l'exposé concernant
les successeurs de Proclus à Athènes). On n 'est pas toujours sûr non plus qu' en
tre deux extraits ne se soient pas trouvés plusieurs paragraphes ou plusieurs
pages, de sorte qu 'en l'absence de parallèles ou de détails caractéristiques, on
n 'est pas toujours assuré que les passages concernaient bien Isidore ou tel autre
personnage du contexte voisin . Pour ne prendre qu'un exemple, selon le fr. 84,
« Il était contraint de s'occuper de la bonne éducation de ses enfants.» Il pourrait
s'agir d 'Isidore .Mais on n 'entend parler à son propos que d'un mariage et d 'un
fils, nommé Proclus.
Datation. De cette masse de fragments si brillamment rassemblés et ordon
nés, on a peine à dégager des données biographiques nettes. Les dates de nais
sance et de mort sont fort imprécises. La donnée sans doute la plus ferme est la
venue d 'Isidore à Athènes, à une époque où on souhaitait lui confier la succes
sion de Proclus. Il semble être arrivé peu après la mort du philosophe, survenue
le 17 avril 485 (Marinus, Proclus 36 ). Auparavant, Isidore avait étudié chez
Proclus, puis avait déjà acquis une grande réputation à Alexandrie . En supposant
qu 'il avait entre 35 et 40 ans à la mort de Proclus, il faudrait situer sa naissance
vers 445 -450. On sait d 'autre part qu 'il enseigna à Damascius ( > D 3 ), né vers
872 ISIDORE D 'ALEXANDRIE 131
462, après que ce dernier eut enseigné la rhétorique à Alexandrie pendant neuf
ans. Isidore devait donc être encore en pleine activité au début des années 490 .
Comme la Vie d 'Isidore a été écrite par Damascius avant 526 , et sans doute
après la mort d' Ammonius (mort après 517, date à laquelle Jean Philopon a édité
ses leçons sur la Physique d'Aristote (CAG XVI, p. 703 ]), on peut supposer
qu’Isidore mourut dans la deuxième décennie du Vie siècle .
Famille et relations. On ignore le nom de son père, mais sa mère s'appelait
Théodotè (fr. 119 ). Elle était la seur d'un certain Égyptos, ami d'Hermeias
d'Alexandrie (2H 78). Isidore eut un frère du nom d 'Ulpien (PLRE II : 4 ), qui
fut un grand mathématicien etmourut jeune sans s' être marié (fr. 324 et Epit.
296 ), et une sæur aînée dont le fils, âgé alors de 18 ans comme Isidore lui-même,
mourut en tombant d 'un toit (fr.7 ).
Père o Théodotè Égyptos
Ulpien sæur Isidore oo Domna
fils Proclus II
Il épousa Domna et eut d' elle un fils qu'il appela Proclus, du nom de son
propre maître . Son épouse mourut cinq jours après la naissance de l'enfant et
débarrassa ainsi son époux d 'une « bête méchante et d 'une détestable com
pagne » (Epit. 301).
Le cercle des amis d 'Isidore éclaire le climat spirituel dans lequel il évoluait.
Ainsi ce Sarapion , philosophe pieux et chaste qui pratiquait le “Vivons cachés"
seuldans une petite maison en ne fréquentant que quelques voisins (fr. * 34) et en
pratiquant la prière et la méditation silencieuse (fr. * 39). N 'ayant pas de famille,
il légua à Isidore ce qu'il possédait, c'est-à -dire deux ou trois livres, dont la poé
sie d 'Orphée (fr. 287).
Maîtres et disciples. Parmi tous les intellectuels et philosophes mentionnés
dans la Vie d ' Isidore, il n 'est pas facile de distinguer les simples amis ou
contemporains de ceux qui étaient présentés comme desmaîtres ou des disciples
du philosophe. Il est possible que plusieurs des noms qui apparaissent chez Da
mascius (notamment dans les pages 68- 110 du recueil de Zintzen ) aient figuré
dans la biographie à titre de maîtres d'Isidore dans les différentes disciplines. On
pense à Léontios, à Olympos, à Théosebius, élève de Hiéroclès ( H 126 ), au
grammairien Ammonianus, au rhéteur Théon d'Alexandrie (qui enseigna en tout
cas à Damascius). Hermeias d' Alexandrie (» H 78 ), élève de Syrianus à Athènes
avant 437 et dont les fils Ammonius (** A 141) et Héliodore (~ * H 30), après sa
mort, purent étudier chez Proclus à Athènes grâce au courage de leurmère Aide
sia ( A 55) , n'a sans doute pas pu enseigner à Isidore.
Photius évoque une fois un maître d'Isidore sans le nommer (Epit. 37) et le
présente mêmecomme « son unique maître » . On a pensé à Héraïscus (Zintzen )
ou à Sarapion (Athanassidi). La Souda rapporte qu 'il pratiqua la philosophie
131 ISIDORE D 'ALEXANDRIE 873
sous la direction « des deux frères » (fr. * 160 ). On y reconnaît habituellement
Asclépiadès ( A 446 ) et Héraïscus (MH 67) d'Alexandrie, plutôt qu 'Ammonius
et Héliodore les fils d'Hermeias, comme l'avait cru P. Tannery (Mémoires, I,
Toulouse 1911, p. 114 sqq). Voir aussi Epit. 243 sur la philosophie égyptienne
que deux compagnons d' Isidore , en quête de l'antique sagesse, pratiquaientavec
ce dernier. On ne sait pas en quelles circonstances Isidore fit en compagnie
d'Asclépiadès « la traversée de la Mer Égée» (Epit. 93). Il fut peut-être aussi
l'élève d 'Asclépiodote d'Alexandrie (> A 453), car ce dernier sauva des eaux du
Méandre un compagnon de voyage dont il avait été autrefois le pédagogue (Epit.
116 ). Ce pourrait être Isidore . Par la suite , Isidore étudia avec Marinus la
philosophie d 'Aristote (Epit. 42 et fr. 90 ), sans doute dès son premier séjour à
Athènes et non après que Marinus eut succédé à Proclus.
Dans le fr. 90, l'allusion au “deuxième voyage d'Isidore à Athènes" (p .67, 165 Zintzen )
ne se rapporte pas à l'enseignement aristotélicien donné par Marinus à Isidore, mais à la mort
de Proclus mentionnée après.
Lors de ce premier séjour à Athènes, il ne fait pas de doute qu' Isidore fut
l' élève de Proclus. Le fragment 90 évoque Proclus comme « le maître commun »
de Marinus et d 'Isidore (p . 67, 17 Zintzen). Dans le même fragment, parlant à
Marinus, Isidore désigne Proclus comme « le maître » (p . 67 , 21 Zintzen ) et
considère que le commentaire qu'il avait donné du Philèbe rendait inutile celui
qu'avait rédigé son condisciple (fr. 90). « Proclus admirait dans le visage d'Isi
dore l'inspiration divine et la plénitude de la vie philosophique intérieure » (Epit.
80 ; trad. Henry). Apparemment dès leur première rencontre , Proclus accueillit
Isidore comme disciple (fr. 133). « Proclus prescrivit à Isidore de se transformer
en vue de la vie la meilleure et de revêtir le tribôn ;mais luine le supporta pas et
cela bien qu'il portât à Proclus la vénération qui est due à un dieu » (fr. * 135).
Dès ce premier séjour athénien , Isidore aurait été pressenti comme futur scho
larque par Proclus qui craignait que le platonisme et en particulier la tradition
exégétique de Jamblique et de Plutarque d 'Athènes ne soient abandonnés à
Athènes. Mais Isidore trouva cette succession trop lourde à porter (Epit. 150
151; fr. 252-253).
Faut-il mettre ce passage en rapport avec le fr. * 245 ? On y apprend qu'Isidore etMarinus
ne partageaient pas le même pointde vue sur l'interprétation du Parménide. PourMarinus, les
« hypothèses dialectiques » du dialogue ne portaient pas sur les dieux , mais sur les Formes
(Idées). Isidore lui démontra, par des preuves innombrables, que « l'exégèse théologique du
dialogue » était la plus conforme à la vérité. Sur ce point, Isidore suivait Proclus : « Marinus,
avec son naturel sans vigueur, ne put suivre l' élévation de pensée de son maître (i.e . Proclus)
qui commentait le Parménide et, des unités surnaturelles, il rabaissa son attention aux Formes
en se laissant entraîner plus souvent par les idées de Firmus (Firmus Castricius, le disciple de
Plotin ? + F 13) et de Galien ( G 3) que par les pures conceptions des hommes bienheureux»
( Epit. 275 ; trad. Henry). Le jugement de Damascius sur Marinus, qui lui avait enseigné la
géométrie, l'arithmétique et les autres disciplines à Athènes (Photius, Bibliothèque, cod . 181),
était de même assez sévère : « Marinus, d'après ses entretiens et d 'après ses écrits – lesquels
sont peu nombreux -, montrait qu 'il ne moissonnait pas au sillon profond d 'où germent les
vues savantes sur la nature des êtres » (Epit. 144 ; trad. Henry). Quoi qu'il en soit des diver
gences philosophiques, la santé de Marinus à elle seule donnait du souci à Proclus (Epit. 152)
et Isidore lui-mêmeprotégeaitMarinus (Epit. 143). C 'est peut- être au cours de son scholarchat
874 ISIDORE D 'ALEXANDRIE I 31
ultérieur que Marinus fut contraint, au cours d'une stasis à Athènes, de se retirer à Épidaure
« parce qu 'il craignait des attentats contre sa vie » (Epit. 277 ; trad. Henry ).
D 'autres noms mentionnés dans la Vie étaient plutôt ceux des condisciples
d' Isidore, ou de maîtres de ses condisciples, par exemple son confrère Saloustius
qui revint d 'Athènes avec Isidore (fr. 138). C 'est peut-être aussi le cas de Supé
rianus,Métrophane et Odainathus, disciple de Plutarque, Hiérius, Zénon de Per
game, disciple de Proclus. Doros l'Arabe (BD 221) pratiquait surtout Aristote,
mais Isidore le fit évoluer vers “ l'océan de la vérité” qu 'était à ses yeux la pen
sée de Platon (fr. 338).
P. Athaniassiadi, Damascius, p. 22, inclut Isidore parmi les disciples d'Horapollon
( H 165).
Carrière. Ce premier séjour athénien d 'Isidore fut sans doute suivi d 'une
période alexandrine, dont la durée n 'est pas précisée. Dans la première série des
fragments de Photius, on trouve plus loin une autre étape importante dans la car
rière d'Isidore : son départ d'Alexandrie (Epit. 297) et son arrivée à Athènes au
momentmême où Proclus venait de décéder (Epit. 188). C 'était peut- être déjà à
ce voyage que se rapportait une phrase antérieure : « Un véritable amour de la
philosophie s'implante en lui ; il rompt tout lien terrestre, foule aux pieds toute
espérance d 'honneurs aussi bien que de richesse et il arrive à Athènes » ( Epit.
153 ; trad . Henry ; le parallèle , fr. 255, remplace « à Athènes» par « chez Pro
clus » ).
Selon P . Athanassiadi, Damacius, p . 243 n . 265, ce passage pourrait cependant se rapporter
non pas à Isidore, mais à Asclépiodote (qui fut appelé par Proclus à Athènes pour lui succé
der).
Damascius était déjà un familier d'Isidore à cette époque et ce dernier lui demanda de le
cacher chez lui (Epit. 310 ). Selon Michel Tardieu, l'événement se situerait plus tard à Alexan
drie , mais en Epit. 187 et 188 , c'est le mêmemot qui est employé pour l'arrivée d 'Isidore chez
Damascius et l'arrivée d'Isidore à Athènes au momentde la mort de Proclus.
Il n 'est pas dit qu 'Isidore ait alors joué un rôle particulier dans l’ école, en tout
cas pas celui de scholarque, car c 'est Marinus qui assuma ces fonctions et, après
luiou sous lui (Photius, Bibl., cod. 181 : Tà Deútepa Mapívov pépwv), un cer
tain Zénodote . Il n 'est pas dit non plus qu 'Isidore se soit alors définitivement
installé à Athènes. C 'est apparemment par écrit que Marinus demanda à Isidore
son avis sur le commentaire du Parménide qu 'il avait composé (fr. 245) et cet
événement est postérieur à un événement semblable où Marinus avait montré à
Isidore son commentaire du Philèbe et l'avait brûlé (90 ) en constatant le peu
d'enthousiasme de son compagnon. Or ce premier épisode semble déjà se situer
après la mort de Proclus.
Le second voyage à Athènes se situe dans les fragments de Photius après une
série d 'extraits concernant une persécution des philosophes survenue à Alexan
drie . Il semble qu 'Isidore ait été dénoncé par le porteur d'une lettre qui prévenait
des compagnons demouvements policiers imminents (fr. * 314) et que recherché
il ait alors dû s'enfuir d' Alexandrie (Epit. 181).Michel Tardieu situe ces événe
ments après 488, mais la mention du conflit entre l'empereur Zénon et Illos
( Epit. 160), de même que l'allusion à une rencontre entre Pamprépius et Isidore à
Alexandrie (Epit. 172) suggèrent plutôtcomme date les années 482-484.
131 ISIDORE D 'ALEXANDRIE 875
C 'est en 481-482 que Pamprépius vint à Alexandrie (PLRE II, p . 827, d 'après l’horoscope
transmis par Rhétorius) et en 484 qu ' il fut exécuté par Illos dans une forteresse d ' Isaurie où
les rebelles s' étaient réfugiés. Sur cette période, voir Assunta Nagl, art. « Illos » , RE IX 2,
1916 , Nachträge, col. 2532-2541, et PLRE II, s.v. « Illus» 1, p . 586 -590.
Plus loin , on apprend que Marinus,cette fois, proposa à Isidore la succession
et que ce dernier fut élu (éungioon) « plus pour l'honneur que pour le fait
d'expliquer Platon » (Epit. 226 ).
P . Athanassiasi, Damascius, p . 325, construisant différemment, comprend : « he was elec
ted a diadochus of the Platonic School (ÉEnonoewc) in honorary rather than in real terms» .
A la mort de Marinus, Isidore envisagea de quitter Athènes (Epit. 229), si
bien qu'on ne sait pas s'il resta à Athènes ou s'il revint à Alexandrie . La vie phi
losophique athénienne se déroulait sous le patronnage d'Hégias (* H 22), fils de
Théagène et petit-fils d’Archiadas ( A 314 ) (Epit. 221), que Proclus avait tenu
en haute estime (Marinus, Proclus 26 ). Damascius semble rapporter le jugement
d'Isidore lorsqu 'il écrit : « aussi loin que remontentnos souvenirs, nous n 'avons
jamais vu mépriser la philosophie à Athènes comme nous l'avons vu déshonorer
sous Hégias» (Epit. 221 ; trad. Henry). « Isidore fortifiait Syrianus (non pas le
maître de Proclus,mort vers 437,mais un autre philosophe égalementmentionné
dans le fr. 324) et Hégias dans l'idée qu 'il était urgent de restaurer la philosophie
en décadence » (Epit. 230 ; trad. Henry), ce qui pourrait montrer qu 'Hégias
n 'était pas forcément responsable de la décadence constatée .
Isidore avait également été le maître de Damascius, notamment en “ dialec
tique" (Photius, Bibliothèque, cod. 181) ; on pense à Athènes où enseignèrent
deux autres maîtres dont parle Damascius, Marinus et Zénodote, mais un troi
sième maître , Ammonius, enseignait à Alexandrie et c 'est à Alexandrie que
Damascius exerçait alors le métier de rhéteur ; dans ce cas il faudrait supposer
qu ’Isidore y enseignait encore ou à nouveau au début des années 490, car
Damascius n'aurait guère pu suivre un tel enseignement philosophique aupara
vant.
On devine donc une carrière divisée par au moins deux séjours à Athènes ou
peut- être trois si Isidore n 'était pas resté à Athènes entre la mort de Proclus et la
fin de la vie de Marinus.
Par rapport à ce cadre général, on aimerait situer différentes séries de frag
ments . Avant le deuxième voyage à Athènes, et donc avant 485, figurent plu
sieurs fragments relatifs à des persécutions subies par les philosophes alexan
drins. Nous avons vu que ces extraits font allusion à des événements que l'on
peut dater des années 482-484.Mais d'autres détails concernant ces persécutions
apparaissent dans la Vie après la seconde venue d'Isidore à Athènes et ils sont
suivis par plusieurs fragments racontant un voyage en Orient fait par Isidore et
Damascius. D 'après l'ordre des fragments, le voyage semble s' être effectué du
sud au nord et donc peut-être au départ d' Alexandrie . On distingue comme lieux
géographiques: Gaza (où il rencontra Antonius d'Alexandrie: » A 224 ), l'Ara
bie, Bostra (rencontre de Dorus: » D 221), Damas,Héliopolis (Baalbek , où les
deux philosophes dénoncèrent les prétentions philosophiques d'Acamatios » A
4 ), plus loin Beyrouth et enfin une traversée vers Samos. L 'un de ces extraits fait
876 ISIDORE D 'ALEXANDRIE 131
allusion aux espérances qui portaient Isidore vers la Carie (Aphrodisias ?) et
Athènes, ce qui montre que le terme ultime de ce voyage (de huit mois ? Epit.
202) devait être un nouveau séjour à Athènes.Michel Tardieu a supposé que ce
départ – selon lui définitif - d' Alexandrie était lié aux persécutions subies par les
philosophes et que le voyage n 'avait pas pour but de conduire directement Isi
dore à Athènes,mais plutôt, sur le modèle d'une éclipse semblable de Proclus
(Marinus, Proclus 15), de soustraire les philosophes aux dangers qui les mena
çaient à Alexandrie . Tardieu date ce périple des années postérieures à 488. Il
faudrait supposer une nouvelle (et dernière ?) période alexandrine postérieure au
séjour de 485 à Athènes.
P . Athanassiadi, Damascius, p. 34 n . 47, distingue les étapes suivantes: premier séjour
d ' études d 'Isidore à Athènes dans les années 470 , retour à Alexandrie avec Saloustios ; ensei
gnement à Alexandrie jusque vers 488/9, avec une brève visite à Athènes lors de la mort de
Proclus (485 ) ; séjour à Athènes de 489 /90 jusqu 'à la mort de Marinus, puis départ d 'Athènes.
Orientations philosophiques. Isidore apparaît chez Damascius comme une
âme divine descendue dans le monde de la génération (Epit. 5 et 8) et le « flux
engloutissant du devenir » (Epit. 15 ). Il jouit de dons surnaturels qui n 'apparais
saient pas à l' état de veille, mais se déployaient lorsque son âme s' éloignait du
monde sensible au cours du sommeil (Epit. 13- 14 ). Son physique lui-même révé
lait cette nature divine : « Isidore avait l'aspect d 'un homme sage et âgé, grave
aussi, et ferme de caractère. Son visage était un peu carré, sainte image de
l'Hermès éloquent; quant à ses yeux , comment dire la grâce véritable d ' Aphro
dite qui était en eux et comment faire sentir la souveraine sagesse d'Athéna
qu'ils contenaient ? (...) Pour le dire en un mot, ces yeux-là reflétaient fidèle
ment son âme et non pas elle seule , mais aussi l'influx divin qui l'habitait »
(Epit. 16 ; trad. Henry). Ces qualités surnaturelles n 'avaient pas de répercussion
sur les facultés sensibles ou la mémoire du philosophe qui étaient normales et
nullement exceptionnelles (Epit. 17). Contrairement à trop de philosophes qui
montrent mémoire, habileté dans l'argumentation , sensibilité, mais sont dénués
dans leur âme du vrai savoir, Isidore n 'avait de remarquable que son âme en tant
que telle (Ibid.).
Pour Isidore , l'intelligence n'était pas affaire d' imagination ou d'habileté
dans le maniement des concepts, mais procédait d 'une possession divine « qui
ouvre et purifie doucement les yeux de l'âme et les éclaire de la lumière intelli
gible pour les mener à la contemplation et à la connaissance du vrai et du faux »
(Epit. 32). Autrement dit, sa philosophie n 'était pas tournée vers les choses d 'ici
bas, mais visait « les contemplations les plus vénérables ». (Voir aussi Epit. 239.]
« Après Platon, c'est aux subtilités étonnantes de Jamblique (21 3) qu'il s' inté
ressait » (Epit. 33; trad. Henry). En cela il s'opposait à de nombreux philosophes
qui trouvaient « que Jamblique est inaccessible ou qu'il s'exalte par une grandi
loquence pleine de suffisance plutôt qu 'il ne s'élève vers la vérité des choses »
(Epit. 34 ; trad . Henry ). Il fut un temps attaché à la plus divine philosophie
d 'Aristote (la “ philosophie première ” sans doute ) - que lui enseigna Marinus
(Epit. 42 ) -, puis, « voyant que celle -ci s'appuyait sur la contrainte de la logique
plutôt que sur l'esprit proprement dit, et qu'elle s'efforçait d 'être assez pratique
1 31 ISIDORE D 'ALEXANDRIE 877
sans trop se donner comme objectifs le divin ou l'intelligence, Isidore fit assez
peu de cas d'elle aussi », et se tourna finalement vers « les mystères de la pensée
platonicienne » (Epit. 35 ; trad. Henry). [Sur la philosophie d'Aristote , voir
encore le jugement d'Isidore sur Dorus l’Arabe (BD 221), fr. 338.) Les philo
sophes susceptibles de conduire à cette sagesse transcendante étaient, à ses yeux ,
Pythagore et Platon , qu ’Isidore divinisait, et, parmi les penseurs d' époque
récente , Porphyre, Jamblique, Syrianus et Proclus ( Ibid . et fr. 77). « Il appliquait
son esprit au plus haut point après Platon à Jamblique et aux amis de Jamblique
et aux philosophes qui le suivaient. Parmi eux ilassurait que le meilleur était son
concitoyen Syrianus, le maître de Proclus» (fr. 77). En revanche, toute l'érudi
tion d ’Aristote etde Chrysippe ne permet pas d'atteindre à cette sagesse . « Parmi
les philosophes récents, Hiéroclès (MH 126 ) et ceux qui lui ressemblent, qui
n 'avaient pas de lacune dans leur formation humaine, ont été, dit-il, fort défi
cients sur de nombreux points dans le domaine des divines idées» (Epit. 36 ;
trad. Henry ). C 'est à l'exemple de son “ unique” maître (Héraïscus selon Zintzen ,
Sarapion selon Athanassiadi) qu 'il concentrait ainsi son énergie sur un contact
direct, sans la médiation sensible de statues, avec les dieux invisibles « dans le
secret du mystère absolu » (Epit. 37-38 ; trad. Henry). « Il rejetait l'abondance
des livres » (Epit. 37 ; voir aussi 243) et ne semble pas en avoir produit lui
même. Damascius connaissait cependantdes hymnes d'Isidore dont il appréciait
l'élévation d'esprit sinon la qualité des vers (Epit. 61). C 'est d'ailleurs à
Damascius qu 'Isidore confiait le soin de les corriger (fr. 113).
On a retrouvé des hymnes d 'un certain Isidore,mais ils sont d'une époque plus ancienne.
Voir V .F. Vanderlip , The four Greek hymns of Isidorus and the cult of Isis, coll. « American
Studies in Papyrology » 12 , Toronto 1972, XVI-108 p. 15 pl.
Par ailleurs, il s'intéressait peu à la poésie et à la rhétorique (Epit. 61 et fr.
114). Il se méfiait de la contrainte de la dialectique et préférait purifier les yeux
de l'âme de ses disciples pour qu 'ils distinguent spontanément la vérité (Epit.
43). « Il mettait tous ses soins à la poursuite de la clarté et, laissant à d'autres les
heureux agencements de mots, il s'attachait à mettre les faits en relief et, le plus
souvent, ce n ' étaient pas des phrases qu 'il faisait entendre mais des pensées et
même encore moins des pensées que les essences mêmes des choses qu 'il mettait
en lumière » (Epit. 246 ; trad. Henry ). Cette conception de la philosophie, orien
tée vers la “ théologie” (fr. 124), Isidore l'avait acquise auprès de Proclus à
Athènes : « Il éprouvait de la joie à regarder Proclus (...); il croyait voir vraiment
en lui le visage de la philosophie » (Epit. 248 ; trad. Henry ), tout comme « Pro
clus admirait le visage d'Isidore quiavait un air inspiré et qui resplendissait de la
sagesse qui vivait en lui» (Epit. 249 ; trad .Henry ; voir aussi 80 et fr. 131). « Pro
clus plaçait la théologie devant la philosophie tout entière » (fr. 134 ).
Isidore était un adepte des pratiques chaldaïques et savait imiter les voix des
oiseaux pour établir la communication avec les dieux (fr. * 200 ). En revanche, on
l'entend reprocher à Hégias un enthousiasme excessif pour la théurgie : « Si
c'est, comme tu l'affirmes, Hégias, disait Isidore, une chose divine que la pra
tique de la théurgie, je le dis, moi aussi ; mais il faut que ceux qui seront des
dieux soient d'abord des hommes. C 'est pourquoi Platon disait, lui aussi, que,
878 ISIDORE D 'ALEXANDRIE 131
chez les hommes, il n 'était pas advenu de bien plus grand que la philosophie »
(Epit. 227; trad.Henry ).
RICHARD GOULET.
32 ISIDORE DE GAZA DVI
Un des philosophes qui avaient fui l'empire byzantin après 529 pour chercher
refuge à la cour du roi perse Chosroès (ⓇC 113) en qui ils croyaient voir le roi
philosophe de Platon (Agathias, Hist. II 30, 3 - 31, 4). Les autres philosophes
mentionnés étaient "Damascius le Syrien (2D 3), Simplicius le Cilicien , Eula
mius (ou Eulalius) le Phrygien (ME 112), Priscianus le Lydien , Hermias
(» H 81) et Diogène (MD 143), tous deux de Phénicie. Déçus par la conduite
des Perses, ces philosophes obtinrent de rentrer chez eux en 532, malgré le désir
de Chosroès de se les attacher. Ce dernier obtint toutefois de Justinien qu 'ils ne
soient pas inquiétés pour leur religion (Agathias, Hist. II, 10 , 3 - 31,4 ; voir aussi
Souda, s.v. nPÉOBELS, II 2251). Sur cet exil collectif des philosophes et le
témoignage d 'Agathias , voir Ph. Hoffmann, art. « Damascius» D 3 , DPLA II,
p. 559 -563. Le passage d'Agathias est traduit et commenté dans I. Hadot, Le
problème du néoplatonisme alexandrin : Hiéroclès et Simplicius, coll. « Études
augustiniennes» , Paris 1978 , p. 21-27 ; voir également Ead., « La vie et l'euvre
de Simplicius d 'après des sources grecques et arabes » , dans I. Hadot (édit.),
Simplicius. Sa vie, son æuvre, sa survie, Berlin 1987, p . 7 -9 .
P. Athanassiadi, Damascius, p. 297 n. 348, établit un lien entre cet Isidore et Isidore
d 'Alexandrie (» I 31) : « It is tempting to see a connection between Isidore of Gaza and our
Isidore (celui de la Vie d 'Isidore de Damascius) who may have been responsible for the for
mer 's philosophical conversion during his stay in Gaza in 498 -90 ; in recognition of his debt,
Isidore of Gaza would have assumed the name of his spiritual father either then or later when
he was summoned by Damascius to come and teach as one of the leading minds " from all over
the domain of Hellenism ” (Agathias II.30.3 ).»
Ce nom manque dans la RE et dans PLRE II.
PIERRE MARAVAL .
33 ISIDORE DE PÉLUSE RE 23 350- 360 /435-440
L 'existence même d' Isidore , auteur d'un vaste corpus d ' environ 2000 lettres,
a été mise en doute , mais la récente étude de P. Évieux sur ce personnage
(Isidorede Péluse, coll. « Théologie Historique», 99, Paris 1995) ne permet plus
de soutenir cette thèse . Originaire de Péluse , chrétien , Isidore suit le cycle com
plet de la paideia grecque, à Péluse puis à Alexandrie (un contact avec Hypatie
est possible, mais non certain ), avant de devenir sophiste dans sa ville natale,
puis un temps moine à Nitrie ; il est ensuite clerc de l'Église de Péluse, avant de
revenir à la vie monastique dans les environs de cette ville. L 'ensemble de sa
correspondance date de la dernière époque de sa vie ; c'est parmi elle qu'il faut
chercher les « traités» d'Isidore Contre les Grecs et Sur la non -existence du
destin (637 et 1053).
Isidore n 'est pas un philosophe au sens strict, bien que la Souda le désigne
sous ce titre, mais il a une réelle culture philosophique. Platon , le « chef des phi
I 34 ISIDORE DE SÉVILLE 879
losophes» (Ep. 1322 et 1355), occupe une grande place : il cite son nom , ses
æuvres ou ses idées dans 70 lettres. Il utilise aussi l'Éthique à Nicomaque, mais
le plus souvent ses connaissances reposent sur les doxographies ou les manuels
d 'école néoplatoniciens. Très critique vis-à-vis des procédés de la rhétorique
lorsque celle-ci n 'est que recherche de la forme, ou lorsque son art de la persua
sion fait violence à la vérité , il l'accepte si elle est convertie au service de la
vérité chrétienne. C 'est de lamêmefaçon qu'il utilise la philosophie païenne: les
philosophes ont souvent prôné la vertu ( Ep. 861), émis de justes hypothèses sur
l'au -delà et le jugement (837, 954, 1213), sur l'âme et son immortalité (756 ,
1791). Ainsi la sagesse divine et la sagesse humaine des philosophes se mêlent
pour ne former qu'un même breuvage (503).
PIERRE MARAVAL .
origines, celles des mots comme celles des choses, dans l'Église catholique aussi
bien que dans le royaume visigot, dans sa culture et dans sa langue.
Cet idéal s'inspire encore de la conviction antique que l'effort de la raison est
capable de réparer l'entropie du temps, et d 'atteindre une authenticité première
que ce temps avait comme effacée, dans la nature et la civilisation aussi bien que
dans l'évolution des mots et du langage. Dans son contenu comme dans son
dynamisme, ce mouvement de restauration fait doublement appel à la philoso
phie (autant qu 'à l'exégèse et à la théologie ). D 'une part, la philosophie est pour
ainsi dire au cœur de l'héritage à restaurer: les Étymologies contiennent des
vestiges importants de doctrines philosophiques, en particulier – sous le chef de
l'art dialectique – dans le chapitre II 24 « De definitione philosophiae ». Mais ,
d'autre part, l'idéal de la recherche de l'origo plonge ses racines dans des
doctrines philosophiques précises sur la valeur du langage, et non pas seulement
dans des idées tirées de la Bible , telles que la valeur primordiale de la Création
divine des res et l'imposition des uerba aux res par l'hommecréé. cc .
Les « membres dispersés» de la philosophie. D 'une manière que nous
dirions plus « dialectique » (au sens actuel de ce mot) que contradictoire, Isidore
reflète une double tradition chrétienne : défiance et hostilité envers les philo
sophes, mais aussi ouverture à la philosophie , dont Augustin fut pour lui le prin
cipal garant et médiateur - en particulier pour la philosophie de Varron . Etle fait
de « décadrer » de leur contexte patristique un certain nombre d ' emprunts des
écrivains du IVe siècle à des philosophes romains classiques leur restitue para
doxalement la fraîcheur immédiate de leur valeur originelle ; une sorte d 'antho
logie doxographique constelle ainsi de souvenirs précis de la philosophie antique
ces 20 livres des Étymologies, dont le projet encyclopédique est encore si
romain, si proche de la tradition varronienne médiatisée par Augustin et Cassio
dore .
La sédimentation scolaire de la paideia hellénistique, de la pensée romaine
classique, de leur remploi par le « bon usage » qu 'en avaient fait tour à tour
Ambroise, Augustin , et même parfois Jérôme, se manifeste dès les définitions
isidoriennes de la philosophie . Elles ont été directement transcrites de Cassio
dore, dans le chapitre d ' Etym . II 24 intitulé « Définition de la philosophie » (voir
Fontaine 2, p . 604 sq., et 20 P. Courcelle, Les lettres grecques..., Paris 1948,
p . 324 sq., qui montre leur emprunt dernier à Ammonius d 'Alexandrie
[2A 141]). On trouve aussi dans ce chapitre la tripartition ancienne de la philo
sophie en physique, éthique, logique, dont Isidore (qui les cite le plus souvent
dans cet ordre) attribue un peu simplement l'invention respective à Thalès ,
Socrate et Platon (Etym . II 24 , 4 -5 , à la suite de la Cité de Dieu VIII 2 sq.).
L ' érudition doxographique conflue avec celle des commentaires chrétiens sur
la Genèse, pour définir et exposer la « physique » isidorienne. Cette philosophie
de la nature ne se borne pas à neutraliser l'atomisme épicurien et à autoriser la
doctrine stoïcienne des éléments. Elle n 'est pas seulement répartie entre les
livres XI et XIII des Étymologies, sur l'homme et le monde. Le nom et le
contenu antiques des « traités de la nature » et l'allégorisation exégétique chré
886 ISIDORE DE SÉVILLE I 34
tienne de l'univers et de ses parties se juxtaposent dans le traité isidorien De
natura rerum (titre inverse - intentionnellement ? – de celui du poème de
Lucrèce, poète pourtant fort cité dans les Étymologies), alors que le contenu de
l'astronomie , dans le quadruuium qui occupe le livre III de l'encyclopédie , est ,
lui, strictement antique.
Mais deux textes relient cet ensemble aux traditions bibliques et philoso
phiques. La connaissance de la nature à travers les arts de la paideia hellé
nistique est justifiée comme un don divin par une parole (qu ’ Isidore croit de
Salomon ) dans le Livre de la Sagesse 7 , 17 (en tête du De natura rerum ). Mais la
conclusion du quadruuium (Etym . III 71, 41) - et donc de son astronomie – récrit
de manière originale un emprunt à Cassiodore : « Cette série des sept disciplines
profanes a été élevée jusqu'aux astres par les philosophes, à seule fin de dégager
des réalités terrestres les esprits embarrassés dans la sagesse profane, et de les
fixer dans la contemplation d 'En -haut» . La suite des sept « arts» serait ainsi
ordonnée en une progression contemplative qui élève l'esprit de la terre au ciel.
Voir 21 J. Fontaine, « Une relecture isidorienne de Cassiodore : la conclusion des
sept arts dans les Institutions et les Étymologies» , dans Polyanthema (Mélanges
S . Costanza = Studi tardo antichi 7 ),Messina 1989, p . 95 -109 .
Cette visée contemplative, qui oriente et spiritualise la connaissance des artes
libero dignae, n 'empêche pas Isidore de se soucier aussi des préceptes d'une
morale pratique fondée sur la raison. La philosophie reste pour lui (Etym . III 24,
1 et VIII 6 , 1) « une connaissance des choses divines et humaines, associée au
zèle pour une bonne conduite » (studium bene uiuendi). Sur les traces des
anciens, les définitions de sa psychologie sont liées, à la fois, à la spiritualité
chrétienne, mais aussi à une éthique élémentaire où se perpétuent des traditions
stoïciennes vulgarisées – et dès longtemps christianisées : telle la doctrine des
quatre vertus, dont il attribue la paternité à Socrate (Etym . II 24 , 6 ), et qu 'avait
résumée , à la génération précédente, l'évêque Martin de Braga dans sa Formula
uitae honestae.Mais on retiendra surtout la fin des Synonyma, un ouvrage dont
pourtant l'inspiration est quasi totalement biblique et chrétienne. Cette fin du
livre II adresse en effet à la raison l'éloge quasi hymnique de la philosophie que
Cicéron avait placé au début de sa cinquième Tusculane (Syn. II 102 = Tusc. V
2, 5 ; commentaire en Fontaine 2, p. 703 sq.).
La philosophie « logique » est exposée par Isidore dans le cadre de la rhéto
rique, qui en tire les procédés de son argumentation (ibid ., 255-276 ). Une partie
de ces pages est empruntée aux Institutions de Cassiodore ; y figurent encore des
emprunts aux Catégories d'Aristote , aux topiques de la tradition scolaire latine, à
l’ Isagoge de Porphyre, à la doctrine deMarius Victorinus sur les syllogismes. En
dépit des critiques acides de Tertullien contre la dialectique (voir Fontaine 2,
p .616 sq.), Isidore garde pour cette réduction scolaire de l'antique dialectique
platonicienne, puis aristotélicienne, la même estime positive que son maître
Augustin . Elle reste pour lui une discipline propre à former l'esprit, et une
méthode de découverte du vrai. En cela, il demeure fidèle à la tradition philoso
phique grecque (mais non point tempérée comme chez Cicéron, quine voyait en
I 34 ISIDORE DE SÉVILLE 887
elle qu ’un instrument au service de la démonstration oratoire - c'est-à-dire du
vraisemblable ).
La philosophie reparaît dans une présentation plus réticente, au cours du livre
VIII consacré à l'Église et aux « sectes» (haereses). Les sages de l'Antiquité y
comparaissent donc, à la suite des hérétiques juifs et chrétiens, dans une histoire
simplifiée des « philosophes païens» (Etym . VIII 6 « De philosophis pagano
rum » ). Des présocratiques aux platoniciens, Isidore expose l'étymologie des
appellations de leurs sectes, « dont les noms sont tirés de leurs fondateurs (aucto
res)» , ou « des emplacements de leurs communautés (conuenticuli) et des lieux
où ils se tenaient (stationes)» ( ibid ., VIII 6 , 6 : emprunt à Tertullien , Apol. 3, 6 ) ,
sans oublier les gymnosophistes et les « théologiens » . Enfin , une doxographie en
miniature regroupe, de Thalès et Pythagore à Cicéron et Varron , les idées de dif
férents philosophes et écoles sur Dieu, puis sur le monde. Elle s'achève par une
reprise de l'idée de Tertullien sur « les philosophes patriarches des hérétiques»
(Adu. Herm . 8, 2 ), dans l'affirmation insistante d' Etym . VIII 6 , 21 : « Les erreurs
des philosophes ont induit également des hérésies jusqu'à l'intérieur de l'Égli
se » . Tant il est vrai que, par une sorte de choc en retour de la signification chré
tienne du mot, le sens défavorable du mot haeresis a entaché d'une suspicion
implicite l'emploi qui en est fait ici pour désigner les « sectes» des philosophes
antiques.Mais on remarque l'absence de mention , en ce chapitre, de tout repré
sentant, grec ou latin , des philosophes de l'Antiquité tardive,même des philo
sophes chrétiens qu 'Isidore a certainement lus et utilisés (comme Lactance ou
Marius Victorinus)
Fondements philosophiques de l' encyclopédie isidorienne. Le projet et la
méthode des Étymologies ne sont pas réductibles à une sorte de cancérisation des
savoirs antiques par la grammaire. Dès l'abord , la « commande » royale de
l’æuvre à l' évêque de Séville, dans les années615 , invite à ne pas en réduire
l'horizon à celui d'un projet étroitement pédagogique, enfermé dans les bornes
d'une mythique « école de Séville » – du moins au sens scolaire du mot. La part
de Varron , parmi les auctores lointains de cette encyclopédie , décèle à la fois
son ambition linguistique et politique, et donc philosophique à ces deux titres.
Car il faut comprendre et juger cette entreprise en référence au double propos de
la philosophie : l'auteur des Étymologies, lui aussi,« s'attache à connaître le sens,
la nature et les causes des choses divines et humaines» , comme celui des Sen
tences s'attachera à faire « retenir et mettre en pratique toutes les règles du bien
vivre » (omnem bene uiuendi rationem ). Il paraît d'autant plus indiqué d'appli
quer ainsi à Isidore la définition classique du philosophe remontant à Cicéron
(De oratore I 212), dont les Étymologies II 24 , 1 commencent par reprendre la
formule .
Grâce à Augustin , et en particulier à la Cité de Dieu , Isidore s'est fait encore
une idée assez précise de Varron , de son savoir, de sa pensée. Il n'en cite pas
moins de 23 fragments, appartenant à ses ouvrages les plus divers : voir 22 J.
Fontaine, Isidorus Varro christianus ?, dans Bivium (Mélanges M .C . Díaz y
Díaz), Madrid 1983, p . 89- 106 (= Fontaine 6 , n° III). Mais il faut aussi rappeler
888 ISIDORE DE SÉVILLE I 34
qu 'au livre VI des Étymologies « Sur les livres et offices ecclésiastiques» , Var
ron occupe une place de choix dans la filière où Isidore lui-même prend place à
son tour: celle des polygraphes, qui ont tenté de saisir et exposer la totalité des
connaissances. La polygraphie est donc liée au projet encyclopédique, qui fut
aristotélicien avant d' être au cœur de l'enkyklios paideia hellénistique (si divers
qu 'apparaissent aujourd'hui les sens de cette expression ). Après les sept arts (I
III), la médecine et le droit (IV - V ) , les « choses divines» occupent dans l' ency
clopédie isidorienne les livres VI à VIII, avant les « choses humaines » : la pré
sentation de celles-ci part des langues et des groupes sociaux (IX ); elle passe par
la nature humaine et animale (XI-XII), le cosmos et la géographie (XIII-XV ) ,
cités et champs (XV), pierres et métaux (XVI); elle s'achève enfin dans les acti
vités collectives (agricoles en XVII,militaires, civiques, ludiques en XVIII) et ce
que nous appelons la culture matérielle (XIX et XX ). Telle est d'abord l'« héré
dité » antique de l'encyclopédie isidorienne, hérédité inscrite dans la répartition
et l'ordre de ses livres tout autant que dans les chapitres techniques du livre VI
consacrés aux bibliothèques, aux livres, aux polygraphes. Les modalités et la
mesure du rattachement (direct ou indirect) d'une partie de cettematière (surtout
dans la seconde moitié) aux Prata disparus (et à d 'autres ouvrages perdus) de
Suétone sont encore loin d ' être claires.
L'originalité de la méthode repose sur les quatre catégoriesde l' entendement
isidorien (différence, étymologie, analogie et glose ), et surtout sur la seconde : de
sorte que l'on peut parler d 'une « méthode étymologique » destinée à la fois à
établir et transmettre tous les savoirs. Ces catégories grammaticales sont logi
quement définies d'abord comme telles, dans le cadre du livre I consacré à la
grammaire ; mais la suite de l'ouvrage montre qu 'au -delà de la classe du gram
maticus antique, il s'agit bien d'une grammaire de l'entendement, applicable à
tout objet de science. Aussi le chapitre I 29 De etymologia mérite -t-il d 'être
minutieusement analysé, si l'on veut comprendre que l'etymologia est une
démarche de l'esprit dont la portée est philosophique (voir 23 J. Fontaine ,
« Cohérence et originalité de l' étymologie isidorienne» , dans Mélanges E.
Elorduy, Bilbao 1978, p. 113- 144 = Fontaine 7, nº X ). Le dynamisme de cette
opération cognitive apparaît dans le vocabulaire de la définition initiale : « L ' éty
mologie est l'origine des vocables, quand on saisit la valeur essentielle d'un
mot... par l'intermédiaire d 'une interprétation ». Il y va donc de la valeur des
mots, dans le sillage lointain du Cratyle de Platon , à la problématique duquel fait
encore clairement écho le § 3 : « Certaines réalités n 'ont pas été appelées
conformément à leur qualité innée, mais selon l'arbitraire de la volonté humai
ne». Dans la première catégorie , lesmots sont donc susceptibles de révéler les
choses. Et parmi les nombreuses filières dontpeutse réclamer la pratique étymo
logique d'Isidore, il en est de proprement stoïciennes, voire varroniennes (celles
du « quatrième degré » de l' étymologie – sur la valeur de révélation duquel
l'accord des spécialistes modernes de Varron ne s'est point encore fait).
Il faudrait souligner les affinités philosophiques de la notion isidorienne
d 'origine, en rappelant que l'étymologiste a pu connaître les titres des livres de
I 34 ISIDORE DE SÉVILLE 889
Varron De origine linguae latinae et De originibus scaenicis. Il conviendrait
même de réfléchir sur les analogies perceptibles entre les situations historiques
dans lesquelles Varron et Isidore se sont sentis respectivement appelés à une
reconstruction intellectuelle etmorale de leur temps sous une monarchie nou
velle : celle d'Auguste après un siècle de guerres civiles à Rome, celle de Sisebut
au terme de plus d 'un siècle de désordres divers et de destructions dans l'Espa
gne romaine. Dans les deux cas, il s'agissait de renouer une tradition romaine
rompue, d 'actualiser unemémoire, de raffermir une langue. C 'est en ce sens que
les Antiquités divines et humaines de Varron mais aussi son De origine linguae
latinae ont assumé des fonctions auxquelles il n 'est pas hors de propos de com
parer celles qu ’Isidore – Varro christianus – a confiées à ses Etymologies.
Quelques observations finales. Bien des thèmes philosophiques, souvent liés
à un vocabulaire et une formulation antiques, sont encore à découvrir dans les
@ uvres religieuses d'Isidore : il nous manque un second volet (conçu comme
Fontaine 2) sur « Isidore de Séville et la culture théologique dans l'Espagne visi
gotique » . En attendant, on peut voir l'excellente préface (à soi seule une mono
graphie) qu 'a donnée à une traduction espagnole des Étymologies 24 M .C . Díaz
y Díaz, San Isidoro, Etimologías..., coll. BAC 433,Madrid 1983, Introducción
general, p . 7 -257 ; et, sur les Sentences, 25 P . Cazier, Isidore de Séville et la
naissance de l'Espagne catholique, coll. « Théologie catholique » 96 , Paris 1994
(en attendant leur édition critique, à paraître dans le CCSL).
Si la philosophie est encore, pour nous, une recherche critique du sens, fondée
sur une connaissance et ordonnée à une action , on doit convenir qu 'Isidore a
laissé une euvre écrite dont l'ensemble est plus cohérent et mieux ordonné que
les juxtapositions et les contradictions du détail ne le laisseraient croire trop hâti
vement (voir 26 J. Fontaine, « Isidore philosophe ?», dansMélanges H . Otero, à
paraître ).Mais , à bien réfléchir , ces défauts ne sont encore que l'aggravation de
ceux de la « civilisation de la paideia » , dans laquelle une sorte de démo
cratisation des savoirs leur a fait perdre en compréhension ce qu 'ils gagnaient en
extension et en diffusion - y compris en matière de philosophie : d 'où cette
rétraction de toute la culture, qui va s'accentuant dans le cours de l'Antiquité
tardive.
Engagée et dégagée par rapport aux besoins pastoraux de son temps, cette
Quvre d'un évêque encore érudit de l'Espagne du Sud a connu un succès durable
dans la péninsule et surtout au-delà des Pyrénées, au cours des siècles suivants .
A ce titre, elle est, pour une bonne part, responsable de l'idée que purent encore
se faire de la philosophie antique, et surtout du genre littéraire de l'encyclopédie ,
ses lecteurs du Moyen Age chrétien. Cette idée est simplifiée,mais néanmoins
encore assez juste, au niveau premier des définitions et classifications, pour avoir
pris valeur de modèle. Et l'on doit prendre garde aussi au fait que le ferment de
la philosophie a pénétré jusque dans les catégories et les méthodes de la culture
isidorienne, dans son orientation générale , et surtout dans ce que nous avons
appelé son projet encyclopédique: là est le moins apparent,mais le plus profond,
le plus vivant aussi, en cet héritage préservé dans l'esprit de l'éclectismehellé
890 ISIDORE DE SÉVILLE I 34
nistique et romain . On le verra dans la très lente évolution des genres encyclopé
diques médiévaux : de plus ou moins près, ils s' inspireront tous du modèle isi
dorien , et de toutes les implications de sa méthode étymologique. Ce fait interdit
désormais de traiter Isidore, avec une érudition qui fut trop expéditive, de simple
« agent de transmission » de la culture antique.
Tout en reconnaissant une primauté de la sagesse chrétienne (celle des aspi
rants à la perfection d 'un style de vie évangélique, qu'Augustin avait appelés
« les amants de la beauté spirituelle » ), Isidore de Séville n 'a pas perdu l' enthou
siasme des plus anciens philosophes pour la connaissance désintéressée, pour
une intelligence globale du monde et de l'homme, pour un cycle cohérent de
tous les savoirs. D 'où son attachement au legs intellectuel et spirituel de ce
qu 'on pourrait appeler le courant libéral de la philosophie chrétienne : ce courant
que lui ont transmis Augustin , dans les opuscules philosophiques de sa jeunesse,
et Lactance aussi, bien plus tôt. De là vient l'adhésion d'Isidore à un certain
nombre de valeurs positives de la tradition antique – religieuse autant que philo
sophique –,mais peut-on séparer nettement les deux domainesdans la culture de
l'Antiquité, surtout tardive ? On le voit clairement au livre VIII des Étymologies :
le respect avec lequel l'évêque de Séville y évoque la sacralité païenne, dans une
étonnante fidélité au libéralisme de Lactance, y compense de manière heureuse
et paradoxale , à propos des poètes et des sibylles, de la mythologie etmême des
pagani, sa défiance immédiatement précédente face aux haereses des philo
sophes: voir 27 J. Fontaine, « Le « sacré » antique vu par un homme du vile siè
cle : le livre 8 des Étymologies d'Isidore de Séville » , dans BAGB 1989, p. 394
405 .
JACQUES FONTAINE.
35 ISIDORE DE THMOUIS II ou III
Comme de nombreux autres platoniciens, Isidore de Thmouis reçut le droit de
cité à Delphes.Le décret qui le lui conférait (FD III 2 , 116 ) fut gravé sur l'un des
blocs d'architrave du Trésor des Athéniens; vu l'époque des textes analogues qui
l'entourent, il pourrait se placer à la fin du II° ou au début du 111° siècle .
BERNADETTE PUECH .
36 ISIDORUS (IULIUS -) I?
Le philosophe égyptien Iulius Isidoros est connu par l' étiquette de la momie
d'un de ses esclaves (Sammelbuch 1206 ).Un rapport avec le cynique homonyme
exilé de Rome par Néron (» I 28 ) n 'est pas exclu mais ne peut être, vu la bana
lité du nom , que très hypothétique.
BERNADETTE PUECH .
138 ISOCRATE D 'ATHÈNES 891
A . Sources conservées:
( 1) Denys d'Halicarnasse, Les orateurs antiques , III : Isocrate , chap. 1 .
(2 ) (Pseudo -)Plutarque, Vies des dix orateurs (= uvres morales 836e
839 d ), d'époque impériale tardive. Dans cette Vie on peut détecter des traces du
travail de Caecilius de Calè -Actè, contemporain de Denys ( cf. la notice de l'édi
tion de 22 M . Cuvigny (édit.], Plutarque. Quvres morales, CUF, t. XII', Paris
1981, p. 25 -43).
(3) Philostrate , Vies des sophistes I 17.
(4 ) On lit une Vie anonyme au début de certains manuscrits contenant les
discours d ' Isocrate , notamment dans le Laurentianus LIX 37, le Laurentianus
LVIII 5 et le Parisinus gr. 2932 (cf. Mathieu 5 , t. I, p. I n. 1). Édition récente
dansMathieu et Brémond 5 , t. I, p . XXXIII-XXXVIII.
Westermann 21 crut pouvoir attribuer cette Vie à Zosimos d’Ascalon , grammairien grec
qui vécut entre le VP et le VIP d 'après la Souda, s.v. Zuoquos, Z 168, t. II, p. 515 Adler ; voir
23 H . Gärtner, art. « Zosimos >> nº 7 , REX A , 1972, col. 790 -795, notamment col. 793. Selon
Westernann , la vie serait l'introduction à un commentaire sur l'orateur, dont on ne conserve
que les únoDÉOeiS de douze discours. La proposition a reçu l'appui, entre autres, de Münscher
3 , col. 2146 sq., de 24 G .Mathieu , Les idées politiques d 'Isocrate, 2e édit., Paris 1966 ( 1ère
édit. 1925), p. 176 , de Gärtner 23, ibid ., et de Canfora 17 , p . 357.
(5) Photius, Bibliothèque, cod. 260 (t. VIII, p . 147 Henry), qui dérive
directement de (Pseudo-)Plutarque.
(6 ) La Souda, s.v. 'looxpárns, I652,t. II, p. 670, 12-19 Adler.
B . Sources perdues:
(1) Démétrios de Phalère , qui écrivit un traité sur le style et la technique de
l'orateur, sur l'authenticité de ses discours , ainsi que sur sa vie et ses rapports
scolaires.
(2) Hermippe de Smyrne, Sur Isocrate (fr. 64 -66 Wehrli), où il joindrait les
informations concises qu 'il trouva dans les nívaxes de Callimaque à un autre
matériel anecdotique et suspect, comme l'épisode de la mort de l'orateur
(cf. infra ) et les railleries sur le métier de son père provenant des auteurs de
comédies Aristophane et Strattis (IV ). Ce dernier lui attribuait aussi un rapport
avec la prostituée Lagiske dans son Atalante (fr. 3, t. I, p. 712 Kock = 3 Kassel
& Austin ; cf. aussi (Pseudo-]Plutarque, 836 d). C 'est à Hermippe que reviennent
également d'importants renseignements recueillis dans les résumés des discours
transmis dans nos manuscrits , où il est cité à deux reprises.
· (3) Caecilius de Calè- Actè, rhéteur grec du la et contemporain de Denys
d 'Halicarnasse (cf. 25 W . Kroll, art. « Rhetorik » , RESuppl. VII, 1940 , col. 1039
1138, notamment col. 1105 sqq. ; 26 M . Fuhrmann, art. « Caecilius» III 2 , KPI,
1964, col. 988 sq.), qui écrivit un traité intitulé ſlepi toŨ yapaxtñpoç tõv déxa
øntópwy (cf. la Souda, s.v. Kexíacos, K 1165, t. III, p. 83, 8 sq. Adler). Il y joi
gnait la critique du style et le débat sur l'authenticité des æuvres d'Isocrate avec
des données sur sa vie . Sa source principale est Hermippe, bien que, selon l'hy
pothèse suivie par Münscher 3 , col.2148 , il ait pu emprunter à Héliodore, périé
gète du 1114 , l'information sur les monuments qu 'on lit dans (Pseudo -)Plutarque
838 b sqq.
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 893
A partir du tableau tracé par Münscher 3, col. 2146 sq., qui contient la
bibliographie ancienne à ce sujet, nous pouvons supposer qu 'aussi bien Denys
d'Halicarnasse que Caecilius de Calè -Actè, à partir desquels la tradition est assez
homogène, puisent leurs données en dernier ressort dans la biographie d'Her
mippe. Dans la transmission de certains renseignements la médiation de l'épicu
rien Philodèmeest importante (cf. infra). Denys d 'Halicarnasse s 'en serait tenu
aux données vérifiées; Caecilius, au contraire , aurait aussi laissé entrer dans son
euvre les données incertaines et pittoresques qui, à travers lui se retrouvent,
entre autres, chez (Pseudo-)Plutarque, dans la Vie anonyme et chez Photius.
Cemélange d'éléments vérifiés et douteux est un rappel à la prudence au moment d'accep
ter les renseignements que fournit cette tradition biographique. Le plus prudent est de les
confronter à ceux que nous fournissent les propres discours d ' Isocrate, qui sont la source
principale dont disposaient les philologues alexandrins pour l' élaboration des biographies de
l'orateur (cf.Norlin 6 , p. XI).
Vie .
Cf. Blass 1, t. II, p . 9 sqq.; Jebb 2 , t. II, p. 1-35 ; Münscher 3, col. 2149-2156 ,
2168-2171, 2220 sq.; Mathieu 5 ,t. I, p. I sqq.; Norlin 6, t. I, p . XI sqq.; Cloché
10 , p. 5- 8 ; Cawkwell 12, p. 554 ; Lesky 13, p. 654 sq. ; Levi 16 , p. 1161 sq.;
Lombard 18 , p. 22 sqq.
Chronologie. Isocrate est né dans la première année de la 86€ Olympiade,
sous l'archontat de Lysimachos, quatre ans avant la guerre du Péloponnèse,
c'est-à -dire en 436a (cf. Denys, Isocrate 1, 1 ; (Pseudo-]Plutarque 836 d ). Il est
mort dans la troisième année de la 110e Olympiade, quelques jours après la
défaite de Chéronée, lors des funérailles des morts de la bataille, en octobre 338a,
à l'âge de 98 ans (cf. [Pseudo- ]Plutarque 838 b ;Mathieu 5, t. I,p . III).
Provenance , famille et jeunesse. L 'orateur est né dans le dème d 'Erchia, en
Attique, comme Xénophon . Son père qui s'appelait Théodoros, était un citoyen
de la classe moyenne qui possédait une manufacture de flûtes (cf. Denys, Iso
crate 1, 1). (Pseudo-)Plutarque, 836 e, fournit plusieurs données concernant sa
famille : sa mère s'appelait Hédyto ; il avait une seur et trois frères : Télésippos,
Diomnestos et Théodoros, ce dernier cité dans une section (838 c) qui peut
remonter au périégète Héliodore.
Isocrate s'estmarié à un âge avancé avec Plathané, veuve d 'un certain Hip
pias qui, pour des raisons chronologiques, ne peut être identifié au sophiste
( H 145), comme le prétend (Pseudo-)Plutarque 839 b (cf. Münscher 3, col.
2154). Elle avait de son premier mariage un fils du nom d 'Aphareus qu'Isocrate
adopta (cf. [Pseudo-]Plutarque 839 b ; Harpocration , s.v. 'Apapeús ; la Souda,
s.v. ’Apapeús, A 4556 , t. I, p. 425 Adler).
(Pseudo-)Plutarque 838 c-d, à la suite d 'Héliodore d'après Münscher 3,
col. 2220 , énumère les parents d' Isocrate enterrés avec lui près du Cynosarges. A
partir notamment de ce passage, complété avec 839 d, 27 J. Kirchner, Prosopo
graphia Attica , Berlin 1901, nº 10518, et 28 J. K . Davies, Athenian Propertied
Families, Oxford 1971, p. 248, offrent l'arbre généalogique d ’Isocrate .Le passa
ge, cependant, est très corrompu en ce qui concerne les enfants d 'Aphareus et
894 ISOCRATE D 'ATHÈNES 1 38
exige quelques corrections (cf. 29 C . Tuplin , « Some Emendations to the Family
Tree of Isokrates», CQ 30 , 1980,p.299-305).
(Pseudo-)Plutarque 839 b nous informe qu 'étant enfant, Isocrate participa à une course de
chevaux (qu 'il a vraisemblablement gagnée ). Il est donc possible qu'il ait fait son service mili
taire pendant les années de la guerre du Péloponnèse dans la cavalerie athénienne, comme
Xénophon , et qu 'il ait été repinoroc dans les années qui ont précédé l'expédition de Sicile
(4189/416a; cf.Münscher 3, col. 2150 sq.).
Formation intellectuelle. Le métier du père a permis que ses enfants reçoi
vent une éducation spécialement soignée, comme le proclame Isocrate dans Sur
l'échange 161, source à ce sujet de la tradition biographique. Outre la formation
traditionnelle de la jeunesse athénienne, il a reçu l'éducation des sophistes (cf.
Quintilien III 1, 13 ; Blass 1, t. II, p. 11; Jebb 2, t. II, p. 4 ; Burk 4, p. 24 sqq.).
Denys d 'Halicarnasse, Isocrate 1 et (Pseudo -)Plutarque 836 f, reconnaissent
comme sesmaîtres les sophistes Prodicos de Céos, Tisias de Syracuse et Gorgias
de Leontinoi (2 + 6 28 ), ainsi que l'homme d'État et orateur Théramène ; la Vie
anonyme nomme ces deux derniers en y ajoutant Socrate. Sur Prodicos, voir
30 A . Kyprianos, Tà ánóponta ToŨ 'looxpárn ñ nepi Tóywv éoxnuatiqué
vwv, Athènes 1871, p. 17 sqq.; Münscher 3, col. 2151 et 2152, et Burk 4, p. 26 ;
sur Tisias, Münscher 3, ibid .; Burk 4, ibid .; sur Gorgias et Théramène, voir
infra . Il semble difficile d'admettre qu 'il a assisté aux cours de tous ces maîtres,
mais il a pu connaître et méditer leurs doctrines (cf.Norlin 6, t. I, p. XII).
(Pseudo-)Plutarque, 836 f - 837 a, raconte deux anecdotes qui renforcent le
lien entre Isocrate et Théramène. L 'une se rapporte à l'arrestation de Théramène
par les Trente ; l'autre à une collaboration entre eux dans la rédaction de certai
nes téxvalde Théramène composées quand celui-ci fut accusé devant les tribu
naux .
Les deux notices sont suspectes. Tout d'abord, si nous acceptons la formation que l'orateur
aurait reçue auprès de Gorgias en Thessalie (cf. infra ), il est difficile d 'admettre qu'il ait pu
connaître Théramène durant son emprisonnement et assister à sa mort à Athènes (cf.Mathieu
5 , t. I, p. II n . 2). Il est donc égalementdouteux qu 'il ait été élève de Théramène ; on sait en
tout cas que celui-ci avait vraiment ouvert une école. Quant aux téxval ( B 54 ), que l'on
devrait considérer non pas comme des traités rhétoriques, mais comme des discours-modèles
(cf. 31 T. Cole , The Origins of Rhetoric in Ancient Greece, Baltimore /London 1991, p. 71
sqq.), si elles ont existé, elles se seront perdues déjà au 11a. Au 1a, Cicéron ne les connaît pas
(cf. 32 U . von Wilamowitz -Moellendorff, Aristoteles und Athen, Berlin 1893, réimpr.
Hildesheim 1985 , t. I, p . 167 et n. 69 ; Canfora 17 , p . 360). Le rapport affectif et professionnel
que révèlent ces anecdotes cache une affinité politique manifeste, que Wilamowitz-Moellen
dorff 32, ibid ., élève au rang demilitantisme dans le parti de Théramène (cf. infra).
On ne peut pas non plus considérer Isocrate comme un disciple de Socrate,
bien qu'il l'ait certainement connu directement. A ce philosophe il a emprunté
quelques principes. Par ailleurs, il a façonné son apologie personnelle dans Sur
l'échange sur le modèle de l' Apologie de Socrate platonicienne (cf. infra).
Quant à Gorgias, on accepte généralement qu 'Isocrate serait parti en Thes
salie pour assister à ses cours (cf. Cicéron, Orator 176 ; Quintilien III 1, 13). A
son tour, (Pseudo -)Plutarque, 838 c, nous informe que sur le tombeau d'Isocrate ,
parmi les différentes représentations des poètes et de ses maîtres, se trouvait
celle de Gorgias, contemplant une sphère astronomique avec Isocrate à ses côtés.
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 895
On a proposé des dates diverses pour ce séjour: Blass 1, t. II, p. 14 , l'a placé après la
guerre décéliaque ; Jebb 2, t. II, p. 5, vers 390a ; Jaeger 8, t. III, p. 396 n. 10, peu avant410 ou
dans la dernière décennie du va ; Mathieu 5 , t. I, p . Il n . 1, avant cette guerre, notamment en
413a : les honoraires de Gorgias étaient si élevés qu 'Isocrate n'aurait pu les payer qu 'avantla
fin de la guerre,moment où l'orateur a perdu tout son patrimoine (cf. Sur l'échange 161). Ce
séjour se serait prolongé, ce qui expliquerait que les allusions de l'orateur à la fin de la guerre
du Péloponnèse et à la domination des Trente soient complètement dépourvues de données
précises et personnelles. Mais il est possible aussi que ce séjour n 'ait jamais eu lieu , comme
l'a récemment défendu Too 19 , p. 235-239. Ses arguments sontles suivants :
(1) Dès l'époque hellénistique, « entendre quelqu'un dire quelque chose » ne signifie sou
vent que « lire quelque chose dans l'euvre de quelqu'un » ; de même, « entendre quelqu'un »
signifie fréquemment « lire les æuvres de quelqu 'un » , comme le montre le matériel rassemblé
par 33 D . M . Schenkeveld , « Prose usages of AKOYEIN ‘ To Read '» , CQ42, 1992, p . 129
141.
(2) Quintilien admet que les sources ne sont pas d 'accord en ce qui concerne le maître
d' Isocrate .
( 3) Les auteurs qui nous informent sur l'instruction d'Isocrate ont écrit dans la période
romaine, plus de 400 ans après l' orateur et le sophiste, et ne sont pas impartiaux dans la
mesure où ils tracent des " généalogies" qui justifient leurs propres æuvres. De plus, outre les
mentions de Gorgias de la part d'Isocrate , qui contiennent toujours quelque critique (cf.infra),
tous les autres rapports entre les deux penseurs peuvent être des déductions des discours
d ' Isocrate , sans qu 'aucune tradition biographique n 'intervienne.
La Souda, s.v. Ilowtayópas, II 2958, t. IV , p. 247, 6 Adler, fait d'Isocrate un
disciple de ce sophiste, mais il s'agit d'une extension erronée de la liste demaî
tres offerte par Denys (cf. infra). La Souda, s.v. 'looxpárns,mentionne aussi
parmi ses maîtres un certain 'Epyivos, une mauvaise transmission peut-être
d'Archinos, nom de l'homme d'Etat, connu probablement d'Isocrate , qui lors de
la restauration de 403a collabora comme démocrate et introduisit l'alphabet
ionien en Attique; en fait, on a vu des rapports entre le Panégyrique d' Isocrate et
l' Épitaphe d 'Archinos (cf. Blass 1, t. II, p. 13, et Münscher 3, col. 2152 sq.).
Activité logographique. Après la défaite d 'Athènes lors de la guerre du
Péloponnèse en 404a, la tyrannie des Trente et la réimplantation du régime
démocratique en 403a, Isocrate perd son patrimoine (cf. Sur l'échange 161). La
solidité de l'éducation qu'il a reçue le rend capable de s'adonner au métier de
logographe.
Cette période est passée sous silence dans le récit de la vie offert dans le Sur l'échange
($ 2, 36 , 41 et surtout 161 sq.) et dans le Panégyrique 11 (cf. Jebb 2, t. II, p . 7 sq.). Par consé
quent ses adversaires se sont plu à le lui rappeler (cf. infra ): Antisthène ( » A 211) et
Speusippe ont consacré plusieurs traités à répondre au Contre Euthynous ; Platon fera allusion
à son activité comme logographe dans Euthydème 304 c sqq., et dans Phèdre 278 e sqq. ;
Aristote soutient (ap . Cicéron , Brutus 48 ) qu ' Isocrate est intervenu dans plusieurs procès en
tant que gestionnaire de biens. Denys d'Halicarnasse , Isocrate 18, atteste la polémique
ancienne sur l'authenticité des plaidoyers judiciaires d 'Isocrate : Aphareusnie que son père se
soit occupé de cette activité, tandis qu 'Aristote affirme qu 'on trouvait chez les marchands de
livres des ballots entiers de ses plaidoyers. Denys considère comme tendancieux les propos
d'Aristote ; en accord avec Céphisodôros (~ C 80 ), un disciple d'Isocrate, il accepte de consi
dérer que celui-cine composa qu'un petit nombre de plaidoyers (cf. infra).
Dans son corpus on conserve six plaidoyers judiciaires : Contre Euthynous,
Contre Callimachos, Contre Lochitès, Sur l'attelage, L'affaire de banque et
l’Éginétique, tous datables entre 403a et 3909. Étant donné l'intérêt d'Isocrate à
896 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
faire oublier la période où il fut logographe, il est raisonnable de penser qu'il
s'agit ou bien de nouvelles rédactions de discours à grand succès dont la pater
nité , à cause de l'agitation qu 'ils produisirent, est indéniable (ce semblerait être
le cas du Contre Euthynous), ou bien de discours-modèles conçus pour un usage
scolaire, comme l'ont défendu 34 U . von Wilamowitz-Moellendorff, Platon , 2e
édit., Berlin 1920, t. II, p. 107 n. 1; Mathieu 5, t. I, p. VI; 35 F. Cortés
Gabaudan, « La oratoria judicial en la escuela de Isocrates» , AEFUE 6 , 1983, p .
57-62,notamment p .60 sq.
Le contenu de ces discours se trouve résuméchez Münscher 3, col. 2155 sqq.;Mathieu 5,
t. I, p. IV -VIII ; Cloché 10, p . 9 -14. Il n 'est pas possible de préciser s'ils répondent à une vraie
présentation devant les tribunaux ou si Isocrate a révisé ultérieurement ces ouvrages en vue de
les publier (Aristote, Rhétorique 1392 b 11 sq ., mentionne une réflexion d ' Isocrate sur Eu
thynous qui ne figure pas dans le discours qui nous a été transmis). On ne sait pas non plus si
ce sontlà les seuls discours qu'il a composés. On peut supposer que pendant les dix ans envi
ron où il s 'est adonné à cette activité, il a dû en composer davantage, mais on ne peut pas pré
ciser leur nombre, s'agissant d 'euvres anonymes qui deviennent la propriété du plaideur (cf.
Mathieu 5 , t. I, p . V ). Dans Contre Euthynous, Sur l'attelage et L 'affaire de banque, Isocrate
tint tête à Lysias, ce qui révèle une profonde inimitié qui se manifesta lors de la défense de
positions politiques opposées (cf. Vie anonyme chez Mathieu et Brémond 5 , t. I, p. XXXVI, 131
sqq.; Münscher 3, col. 2156 et 2160 et 2162, et 36 J.C. Trevett, « P. Oxy. 2357 and Isocrates'
Trapeziticus » , ZPE 81, 1990, p . 22- 26 ).
Ayant été conçus pour être prononcés par différents plaideurs, il existe des différences
remarquables de composition et de style entre ces discours (cf. Mathieu 5 , t. I, p . V sq .). Au
sujet de la dimension orale de ces discours, cf. 37 A . P . Dorjahn et W . D . Fairchild, « Isocrates
and Improvisation » , CB 44, 1967, p . 6 - 10 , et 38 S. Usener (= S . Friemann ), Isokrates, Platon
und ihr Publikum . Hörer und Leser von Literatur im 4 . Jahrhundert v. Chr., coll.
« ScriptOralia » 63, sér. A 14 , Tübingen 1994, p. 22 sqq. L'utilisation de lieux communs que
l'on trouve chez d'autres logographes est caractéristique de cette production (cf., à propos de
l'ånpayuooúvn , 39 D . Lateiner, « An Analysis of Lysias' Political Defense Speeches» , RSA
11, 1981, p. 147- 160,notamment p. 155 sq.).
L'école d'Isocrate.Les années consacrées à la logographie ont permis à
Isocrate de connaître à fond le monde judiciaire et politique d'Athènes. Son rejet
de l'Athènes du discours , dominée par des dirigeants démagogiques et ambi
tieux, a été le facteur décisif qui l' a amené, en raison de la faiblesse de sa voix
(ouvň ) et de sonmanque de hardiesse pour affronter un vaste public (tórua ),à
se retirer de la vie publique (cf. Sur l'échange 4 et 151 sq.) et à se livrer à la
culture de la parole écrite commemoyen de communication.
Isocrate avoue ses limitations physiques et psychiques dans Philippe 81; Panathénaïque 9
sq . ; Epître aux magistrats de Mytilène 7 (cf. aussi sur l' échange 189 sqq .). C 'est de là que les
tire la tradition biographique : cf.Denys d'Halicarnasse, Isocrate 1 ; Vie anonyme (Mathieu et
Brémond 5 , t. I, p. XXXIV , 35 sqq.) ; (Pseudo-)Plutarque 837 a, qui rassemble quelques exagé
rations à ce sujet dans836 f sq. et 838 a, e-f; Philostrate, Vies des sophistes I 17 . Philodème,
Rhétorique IV (p. 196 Sudhaus) élargit remarquablementla liste des carences d'Isocrate : cf.
40 G . Indelli, « References to Isocrates in PHerc. 1007 (Philodemus, Rhetorica IV ) » , dans A .
Bülow -Jacobsen (édit.), Proceedings of the 20th International Congress of papyrology
(Copenhagen , August, 1992), Copenhagen 1994 , p . 361-366, en particulier p. 361 sq. Plu
sieurs critiques ont soutenu qu'Isocrate a intégré ces difficultés dans une stratégie d 'auto -pré
sentation : cf. 41 S. Gastaldi, « La retorica del IV secolo tra oralità e scrittura : “ Sugli scrittori
di discorsi ” di Alcidamante » , OS 13- 14, 1981, p. 189-225 , notamment p . 199 ; 42 G . Heil
brunn, « Isocrates on Rhetoric and Power» , Hermes 103, 1975, p . 154 - 178, en particulier
p. 157 sqq . ; et surtout Too 19 , p . 74 - 111 (cf. aussi 43 M . Cahn , « Reading Rhetoric Rhetori
1 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 897
cally : Isocrates and the Marketing of Insight» , Rhetorica 7.2, 1989, p . 121-144, notamment
p. 130 n. 21, et infra ). Sur l'éloignement des intellectuels de la politique du Iva, cf. 44 B .
Campbell,« Thought and Political Action in Athenian Tradition », HPTh 5, 1984, p. 17-59.
Donc, comme le raconte la Vie anonyme (cf.Mathieu et Brémond 5 , t. I,
p. XXXVI, 116 sq.), Isocrate ouvrit une école de rhétorique près du Lycée afin
d'enseigner sa « philosophie » , un art oratoire qui permet de dominer les situa
tions changeantes de la vie communautaire à l'aide du langage.
(Pseudo-)Plutarque, 837 b , rapporte qu 'Isocrate fonda d 'abord une école à Chios et qu ' il y
établit des magistratures et la même constitution que dans sa patrie . 45 C . F . Seeliger, De Dio
nysio Halicarnassensi Plutarchi qui vulgo fertur in Vitis Decem Oratorum auctore, Budissae
1874 , p . 36 sq., a considéré ce renseignement comme une fabulation . Blass 1, t. II, p . 16 sq . et
n. 2 ; Jebb 2, t. II, p . 6 ; et Münscher 3, col. 2170 sq., ont défendu la véracité de ce renseigne
ment, en situant le séjour à Chios en 4040/403a (Jebb ) ou entre 395a et 3904, notamment en
394a, après la libération de Cnide par Conon , père de son disciple Timothée (Blass,
Münscher). Mikkola 7 , p. 293, admet la possibilité qu 'il ait ouvert son école sur cette île en
393a. Mathieu 5 , t. I, p. II, estime prudent de douter de l' information faute d'autres témoi
gnages.
La date d' ouverture de l'école à Athènes a fait l'objet d 'un débat. Jebb 2 , t. II, p . 8, et
Münscher 3, col. 2172, soutiennent la date de 392a; Mathieu 5, t. I, p. II, incline pour 393a, de
même que, plus tard , Mikkola 7, p. 293, qui suggère la possibilité qu'il l'ait fondée à Chios
(cf. supra ) ; Jaeger 8 , t. III, p . 115 , rabaisse la date jusqu 'à la décennie de 380a. Le problème
principal est d 'accepter l'image, renforcée par Isocrate lui-même, d 'un abandon radicaldes
plaidoyers judiciaires au moment d 'ouvrir son école. Il est possible cependant qu 'il ait com
posé son dernier plaidoyer, l’Eginétique, après l'ouverture de l'école ( cf. Cortés Gabaudan 35 ,
p. 61 ; 46 Chr. Eucken , Isokrates. Seine Positionen in der Auseinandersetzung mit den zeit
genössischen Philosophen, coll.« Untersuchungen zur antiken Literatur und Geschichte » 19,
Berlin/New York 1983, p. 5 ; Too 19 , p. 154). Sur les aspects techniques de l'activité pédago
gique d'Isocrate, cf. infra.
Les honoraires étaient de mille drachmes, pas très élevés si on les compare à ceux des
sophistes. On connaît le montant grâce à l'anecdote sur l'apprentissage de Démosthène auprès
d ' Isocrate rapportée par (Pseudo- )Plutarque, 837 d . Cette anecdote contredirait l'affirmation
d 'Isocrate lui-même dans Sur l'échange 39, selon laquelle toute sa fortune provient de l'étran
ger, laissant entendre ainsi qu ' il n ' a jamais rien perçu des élèves athéniens ; cf. aussi (Pseudo - )
Plutarque 838 e, et Vie anonyme, chez Mathieu et Brémond 5 , t. I, p . XXXIV , 40 sqq. ; Blass 1,
1. II, p . 22 ; Münscher 3, col. 2171 ; Burk 4 , p . 44 sqq., et Mathieu 5 ,t. I, p. XI.
A partir de la fondation de son école, comme le remarque Mathieu 5 , t. I,
p. III, « l'histoire de sa vie ne fut plus guère que celle de son activité littéraire» .
C 'est dans cette période que l'on doit placer tous ses écrits, en y incluant peut
être les six plaidoyers judiciaires (cf. supra ). Isocrate veut exercer son influence
par ses écrits sur la vie communautaire , qui est orale par excellence. C 'est pour
quoi ilassigne aux discours des contextes fictifs quiles relient à l'Athènes de la
parole (cf. p. ex. Norlin 6, t. II, p. 192 n .; Too 19, p . 29 ; contra, 47 H .LI.
Hudson -Williams, « Isocrates and Recitations », CQ 43, 1949, p. 65-69, qui sou
tient que les discours furent réellement prononcés). Le sujet a été récemment
étudié à fond par Usener 38, p. 13- 137, pour qui les ouvrages d' Isocrate n 'ont
pas été conçus exclusivement pour l'écriture ni pour la récitation ,mais visaient
les deux modes de présentation de manière indistincte . Le problème de la
présentation des ouvrages doit être rattaché à celui des divers publics pour les
quels le penseur les a conçus : destinataire concret de l'æuvre, auditeurs d'une
898 ISOCRATE D 'ATHÈNES 138
récitation orale, lecteurs potentiels . Lecteur et auditeur apparaissent dans les
écrits d’Isocrate comme deux figures différentes (cf. Usener 38, p. 47 sqq.). Voir
aussi 48 A . Jähne, « Kommunikative Umsetzung gesellschaftlicher Problematik
bei Isokrates » , Philologus 135, 1991, p. 131- 139, et 49 J. A . E . Bons, « AMOI
BOAIA : Isocrates and Written Composition »,Mnemosyne 46 , 1993, p. 160- 171.
Le caractère fictif des discours d'Isocrate est appuyé par le témoignage d 'Aristote, Rhéto
rique III 17, 1418 6 26 sq., sur l'utilisation de porte -parole occasionnels. Ainsi, dans le Nico
clès, c 'est le roi chypriote qui parle ; dans l'Archidamos, le roi spartiate , et dans le Plataïque,
un citoyen de Platées devant l'Assemblée d ' Athènes (cf. Usener 38 , p. 31 sqq .). Too 19, p. 65
sqq., suggère que les contradictions idéologiques que l'on observe entre le Sur la paix, l'Ar
chidamos, le Panégyrique et le Panathénaïque, peuvent s'expliquer en attribuant les points de
vue que l'on y défend à différents porte -parole : le premier discours serait prononcé par un
membre anonyme du parti pacifiste d 'Eubule, dont la caractérisation est proche de celle d'Iso
crate , le deuxième par le roi spartiate , les deux autres par Isocrate lui-même. Sur l'utilisation
isocratique de discours antilogiques, cf. 50 P. Harding, « The Purpose of Isokrates' Archi
damos and On the Peace » , CSCA 6 , 1973, p . 137-149.
Outre son activité scolaire et littéraire,nous connaissons quelques épisodes de
sa vie (cf. Blass 1, t. II, p. 72 sqq.). D 'après (Pseudo-)Plutarque 837 c, il accom
pagna son disciple , l'homme d'État Timothée, lors d'une de ses expéditions dans
les premières années de la seconde Confédération athénienne. Sur la date précise
de ce voyage, cf.Münscher 3, col. 2189 (3764/3754),Mathieu 24, p. 84 sq., et Id .
5 , t. I, p. III (3769/374a). La même source ajoute qu ’Isocrate s'occupait de la
rédaction des lettres que son disciple envoyait aux Athéniens, ce qui doit signi
fier, d 'après Mathieu 24, p . 85, que l'orateur les rédigea pour qu ' elles fussent
publiées à Athènes et qu'elles servissent de propagande à la politique de son
disciple .
Vers 356a,un certain Mégacleidès entama contre Isocrate un procès en échan
ge de biens (ůvtidools) au sujet d'une triérarchie. L 'orateur ne put y comparaî
tre pour des raisons de santé et envoya son beau-fils Aphareus, qui perdit le pro
cès. Isocrate aurait vengé cette défaite en composant le discours fictif Sur
l'échange, où son adversaire s'appelle Lysimachos (cf. (Pseudo -]Plutarque
839 c, qui fait, à tort, référence à deux procès, et Photius, Bibl., cod . 260 , 487 b,
t. VIII, p. 47 Henry). La véracité du renseignement, acceptée par tous les spécia
listes, a été récemment mise en cause par Too 19, p. 80 : la donnée provient
d 'une remarque du discours Sur l' échange (§ 4 ),qui peut être aussi fictive que le
reste du discours.
La mort d’ Isocrate. Des renseignements sur la mort de l'orateur ont été
fournis par Denys, Isocrate 1, 6 ; (Pseudo -)Plutarque, 838 a-b ; Philostrate, Vies
des sophistes I 17 ; et la Vie anonyme (Mathieu et Brémond 5 , t. I, p. XXXVII,
153 sqq.). Isocrate estmort à l'âge de 98 ans, fin octobre 338a, au moment des
funérailles des morts de Chéronée. Il mourut d ’inanition , après être resté plu
sieurs jours sans manger, quatre d'après quelques-uns, neuf d'après Démétrios
de Phalère , quatorze d'après Aphareus (cf.Mathieu 24, p. 172 sq.). La tradition
biographique transforma une mort survenue probablement par maladie (cf.
Mathieu 5, t. I, p. IV ) en un geste patriotique : apprenant la défaite, il se serait
laissé mourir. Avant de mourir, il aurait prononcé des vers d' Euripide, notam
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 899
ment le premier vers de l'Archélaos, de l'Iphigénie en Tauride et du Phrixos,
laissant entendre que, après Danaos, Cadmos et Pélops, un quatrièmemaître bar
bare, Philippe, s' était emparé de la Grèce (cf. Éloge d 'Hélène 68 , et Panathé
naïque 80 ; 51 Th . S . Tzannetatos , « Le problème concernant la mort d ' Isocrate »
(en grec moderne ), Athena 61, 1957, p . 289- 322) . Jebb 2 , t. II, p . 31 sq., et
52 P . Brind ’ Amour, « Les dernières paroles d' Isocrate », REA 69, 1967, p. 59-61,
ont essayé de montrer qu 'Isocrate se réjouissait de la victoire de Philippe,
condition indispensable pour la concorde desGrecs, si désirée, et pour l'expédi
tion contre la Perse (cf.infra).
Euvres. Du vivant d ' Isocrate il n 'a pas existé d ' édition complète de ses
écrits, comme le prouve la dispute entre Céphisodôros et Aristote au sujet de
l' existence de plaidoyers judiciaires écrits par Isocrate et de leur nombre. Dans
l'antiquité on connut jusqu 'à soixante discours sous son nom ; la Vie anonyme
(Mathieu et Brémond 5 , t. I, p. XXXVI, 136 sqq.) donne une liste de discours
apocryphes. Un nombre si élevé s 'explique par la confusion des écrits de l'ora
teur avec ceux d'un disciple homonyme, originaire d 'Apollonie (cf. la Souda,
s. v. ’looxpárns) . Des soixante ouvrages, Denys d 'Halicarnasse en accepte
vingt-cinq comme authentiques, et Caecilius de Calè -Actè vingt-huit (cf.
(Pseudo-]Plutarque, 838 d ). La Souda, s. v. 'loozpárns, lui en attribue trente
deux. Le recueil d ’æuvres d 'Isocrate qui nous est parvenu, composé de vingt-et
un discours et neuf épîtres, est très ancien (cf.Mathieu 5 , t. I, p . XX), et on peut
considérer que nous conservons la plus grande partie de sa production ,dont il ne
manquerait que quatre discours, si nous acceptons l'avis de Denys, ou sept, si
nous acceptons celui de Caecilius.
Les ouvrages conservés d’Isocrate contiennent un bon nombre de références
internes et externes qui permettent d 'établir une chronologie relative et un ordre
de lecture ( cf. Mikkola 7 , p . 292 sqq. ; Eucken 46 , p . 284 ; Too 19, p . 41 sqq.).
Saufmention explicite , la datation est celle qu 'ontproposée Mathieu et Brémond
5 (entre parenthèses figure la numérotation des écrits canonique depuis l' édition
de Wolf 70) :
(1) Mpòs Eůdúvouv duáprupos (XXI): 4034/402a.
(2 ) Tapaypaoń npòc Karrinagov (XVIII) : 4029/4019.
( 3) Katà Aoxítov aixelas éniaoyos (XX): entre 4009 et 396a.
(4) Tepi toũ (eúyouç (XVI): 3969/395a.
(5) TPane( itIXÓS (XVII): entre 393a et 3919.
(6 ) Aiyiuntixóc (XIX ) : 3914/3904.
(7 ) Kard TõU OODLOTĀV (XIII) : 391 /3909.
(8 ) 'Eréung éyxbulov (X ) : entre 390a et 3809, plus probablement 385a (cf.
Eucken 46, p. 44).
(9 ) Havnrupuxós (IV ) : 380a.
(10) Bovolpis (XI) : 3754 (cf. Eucken 46, p . 173- 183).
(11) IłataixóÇ (XIV ) : début de 371a.
900 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
(12) (Ipòs AnuóVixov ] (I) : avant370a (cf.Münscher 3, col. 2196 ).
(13) Mpòç NixoxNéa (II): ca 370a.
( 14 ) Nixoxañs ñ Kúmploi (III) : 3684.
(15) ’looxpárns Alovuoiw yaipeiv (epist. I): 367a.
( 16 ) Eủayópas (IX ): 367a (cf. Eucken 46, p . 277 sq.).
(17) ’Apxidapoç (VI) : 366a.
( 18 ) Toīç ’lágovog nalolv (epist. VI) : 3599/3589.
(19) ’Apxidáuw ( epist. IX ): 3564.
(20 )Tepi tñs eipńvns (VIII): 356a.
(21) ’Apeonayıtıxóç (VII) : 354a.
(22) ſepì ávtidógewÇ (XV ): 3544/353a.
(23) Toîç Mutianvalwv õpxovoru (epist. VIII) : 3534/352a siue 3499/3484.
(24) Tquodów (epist. VII) : 3469/345a.
(25) Qiaintog (V ) : 346a.
(26 ) Ølinnw (epist. II) : 3449.
(27) ’Aletávopw (epist. V) : 3429/341a.
(28) NavaOnvaluÓS (XII) : 3422-3399.
(29) 'AVTitátow (epist. IV ) : 340*/339a (cf. Münscher 3, col. 2216 ).
(30) Dininnu (epist. III): automne 3384.
Quant à l'Areopagitique,53 W . Jaeger, « The Date of Isocrates' Areopagiticus and the
Athenian Opposition » , Athenian Studies presented to W . Scoti Ferguson (= HSPh Suppl. 1) ,
Cambridge 1941, p. 409-450 (trad . allemande dans Seck 15 , p . 139 -188 ), l'a situé en 357a au
tout début de la Guerre Sociale, c 'est- à-dire avant le discours Sur la paix . Cette datation a été
appuyée par 54 O . S . Due , « The Date of Isocrates' Areopagiticus » , dans Studies in Ancient
History and Numismatics presented to R. Thomsen , Aarhus Univ . 1988, p. 84 - 90 . Quant au
Panathénaïque, sa composition a été interrompue entre 342a et 339a à cause des ennuis de
santé que connut l' auteur (cf. § 267, et Masaracchia 20 , p . 81- 149). Les problèmes de cette
datation fournie par Isocrate lui-mêmeont été exposés par Mathieu 5 , t. IV , p.63 sgg. Contra ,
55 A . F . Natoli, « Isocrates, XII, 266 -272 : A Note on the Composition of the Panathenaicus » ,
MH 48, 1991, p. 146 -150, qui soutient une composition ininterrompue.
Outre ces écrits, on a attribué d'autres ouvrages à Isocrate dans l'antiquité :
- Un Éloge de Gryllos, en l'honneur du fils de Xénophon qui est mort dans
un engagement qui précéda la bataille de Mantinée. L 'information apparaissait
dans un traité Sur Théophraste d'Hermippe (apud D .L . II 55 = fr. 52 Wehrli).
L 'attribution à Isocrate a été refusée par Jebb 2 , t. II, p. 80 n. 2, qui pense que
c'est à Isocrate d'Apollonie qu'Hermippe fait allusion .Münscher 3, col. 2193 et
2202,etMathieu 5 ,t. IV , p. 228 , ont appuyé la paternité isocratique.
- Une téxvn Ontopixń ; cf. la documentation rapportée dans Radermacher 84
(B XXIV ), notamment Cicéron , De inuentione 2, 7 (= B XXIV 7) ; Quintilien,
Inst. Orat. II 15 ,4 (= B XXIV 18), qui met en cause son authenticité, et la Vie
anonyme (Mathieu et Brémond 5 , p . XXXVII, 148 sqq .= B XXIV 11).
1 38 ISOCRATE D 'ATHENES 901
L'existence d'un tel traité a été acceptée par 56 L. Spengel, Evvaywy texvớv, Stuttgart
1828, p . 154- 172 (cf. Kennedy 9 , p . 70 -74 , et 57 Id ., A New History of Classical Rhetoric,
Princeton Univ ., New Jersey 1994 , p. 48 sq.). Néanmoins, cela suppose un refus radical des
principes énoncés par Isocrate lui-même dans Contre les sophistes 12 sq. et 19 sq. (cf. infra ).
Par conséquent, la recherche moderne a généralement tendance à nier son existence (cf.
58 I. G . Pfund, De Isocratis vita et scriptis , Progr. Berlin 1833, p. 21 sq. ; Blass 1 , t. II, p . 104
sqq. et 585 ; Münscher 3, col. 2224 ;Mathieu 5, t. IV , p. 228 sqq.; Kroll 25, col. 1052 ; 59 W .
Steidle, « Redekunst und Bildung bei Isokrates» , Hermes 80, 1952, 259-296 , notamment
p . 266 sq. ; 60 V . Buchheit, Untersuchungen zur Theorie des Genos Epideiktikon von Gorgias
bis Aristoteles,München 1960 , p . 38 sqq. et 76 sq.; 61 K . Barwick , « Das Problem der isokra
teischen Techne» , Philologus 107, 1963, p . 43-60, repris dans Seck 15 , p . 275-295 ; Lesky 13,
p. 659 ; Gärtner 14 , col. 1468 ; Cahn 43, p . 127-137 ; Cole 31, p . 81 et 135 sq. ; Too 19, p . 164
sqq . ).
- (Pseudo-)Plutarque, 837 c, lui attribue la composition d 'une série d'épîtres
que Timothée aurait adressées aux Athéniens lors de l'expédition de 3764/375a
(cf. supra ).
- Un Éloge funèbre de Mausole , composé à l'occasion du concours institué
par Artémise en l'honneur de son mari,mort en 3539 . L 'information est fournie
par Aulu -Gelle X 18,avec des doutes, et aussi par (Pseudo-) Plutarque, 838 b . Il
doit s'agir à nouveau d'une confusion avec Isocrate d'Apollonie ; c'est à lui que
la Souda l'attribue (cf. Jebb 2 ,t. II, p. 80 n. 2 ; Mathieu 5, t. IV , p. 227).
- Les anciens ont conservé sur Isocrate un bon nombre d'anecdotes et
d'apophtegmes, comme ceux qu 'on lit dans la Vie du (Pseudo-)Plutarque et dans
la Vie anonyme. Plusieurs ont été compilés dans l'anthologie de Maxime le
Confesseur vers650P, et plus tard vers XIP dans une autre anthologie que les phi
lologues modernes ont rattachée à Antonius surnommé Melissa ( > A 226 ; cf.
Jebb 2, t. II, p. 259 sq .; Mathieu 5 , t. IV , p. 234 sqq.). Il n 'est pas prouvé que
certains d' entre eux remontent à des écrits d 'Isocrate aujourd'huiperdus.
Transmission. Cf. Drerup 79, p . IV -CXIV ; 62 F. Seck, Untersuchungen zum
Isokratestextmit einer Ausgabe der Rede an Nikokles, Thèse , Hamburg 1965 ;
Id. 15, p. 371 sq.; Mikkola 7, p. 274-292 ; aussi Münscher 3, col. 2224 sqq.;
Mathieu 5 , t. I, p . XX -XXV, et la section finale de la notice de chaque euvre ;
Norlin 6, t. I, p. XLVIsqq.
Les jugements de Denys et de Caecilius sur l'authenticité des écrits transmis
sous le nom d 'Isocrate ont donné lieu à une sélection dans la tradition ultérieure,
devenue très homogène, et à la perte de tous les apocryphes, de sorte que, dès le
TIP, au temps du rhéteur Hermogène, l'édition qu 'on pouvait lire était plus ou
moins semblable à la nôtre (cf.Münscher 3, col. 2224, et63 W . Speyer, Die lite
rarische Fälschung in heidnischen und christlichen Literatur. Ein Versuch ihrer
Deutung, München 1971, p. 128 ). Le texte des æuvres d' Isocrate nous est
parvenu à travers deux familles de manuscrits :
- La famille dite de la vulgate , composée de plus de centmanuscrits. Elle est
divisée à son tour en deux branches : l’une est constituée par le Laurentianus
LXXXVII 14 (O ), du XIIIP, sans descendance ; l'autre est formée par tout le
reste, qui, face à O , présente unanimement une lacune dans le discours Sur
902 ISOCRATE D 'ATHÈNES 138
l'échange du § 72 au $ 310.Lemeilleur d'entre eux est le Vaticanus 65 (1 ), qui
contienttous les discours mais non les lettres.
- La famille de l’Urbinas 111 (I ), du IXP-XP, qui est le meilleur manuscrit
d' Isocrate (cf. Drerup 79 , p. LXV). Il a été découvert par Bekker dans la
Bibliothèque Vaticane et a servi de base à toutes les éditions depuis celle de
Bekker lui-même en 1823 (74 ). Le Vaticanus 936 ( A ), du XIVP, ainsi que l'Am
brosianus 0 144 (E ), du XVP, en dérivent. Dans ce dernier, Moustoxydis 80
trouva la version complète du discours Sur l'échange. Les trois manuscrits pré
sentent la caractéristique commune de ne pas inclure le Contre Euthynous ni le
Contre Callimachos.
Pour les papyrus, voir 64 J. Lenaerts et P.Mertens, « Les papyrus d 'Isocrate » ,
CE 64, 1989, p . 216 -230 : inventaire et description de soixante - six papyrus, avec
bibliographie détaillée. Il faut y ajouter le P . Alex. inv. 613, édité par 65 C .
Gallazzi, « P . Alex. inv. 613 : frammento non riconosciuto di Isocrate, Paneg .
139 », RFIC 120, 1992, p. 5-9, les P. Vindob. G 31662 (= A Nicoclès 33 ; 35 sq.)
et G 39879 (= A Démonicos 45-48 ), édités par 66 H . Harrauer, « Zwei Isokra
tespapyri» , dans M .Capasso ( édit.), Papiri letterari greci e latini, coll. « Papyro
logica Lupiensia » 1, Galatina 1992 , p . 109 -115 , et le P. Laur. inv. II/25 (= A
Nicoclès 4 -5, 6 -7), édité par 67 W . Luppe et R . Pintaudi, « Frammenti letterari
laurenziani» , dans Miscellanea papyrologica in occasione del bicentenario dell'
edizione della Charta Borgiana, coll. « Papyrologica Florentina » 19 , Firenze
1990, t. II, p. 367-374. Cela fait un ensemble de soixante -dix papyrus, qui nous
transmettent des fragments de quatorze seulementdes vingt -et-un discours d' Iso
crate , les papyri le plus souvent cités étant l’A Démonicos (18), le Panegyrique
( 15 ) et l' A Nicoclès (11).
Certaines æuvres semblent avoir subi une mauvaise transmission et être mutilées. Le dis
cours Contre les sophistes (XIII) et les épîtres I, VI et IX s ' interrompent à la fin , et il manque
aussi le début du Sur l'attelage (XVI) et du Contre Lochitès (XX). Benseler 77 et Blass 78 ont
signalé l'existence de lacunes à tous ces endroits ; il semble malgré tout plus probable qu' Iso
crate lui-même ait choisi pour la publication la partie intéressante des deux discours judiciaires
(cf. Mathieu 5 , t. I, p. 37 sq . et 49 ) et qu 'il n 'ait jamais rien manqué à la fin du Contre les
sophistes et des épîtres I, VI et IX (cf. Too 19 , p . 164 sqq.). Il faut souligner aussi la présence
d ' interpolations dans A Nicoclès. Mikkola 7 , p . 285 sqq ., se demande si l 'auteur de ces addi
tionsest le même que celui des additionsde l'A Démonicos (cf. contra , Lesky 13 , p. 659).
Éditions. Editio princeps des discours: 68 Démétrius Chalcondyle , 'looupá
τους Λόγοι, διορθωθέντες υπό Δημητρίου του Χαλκονδύλου, Εν Μεδιολά
vw (Milan ) 1493 ; des épîtres : 69 Aldus Manutius, Venise 1499 (il manque
l'épître IX ), qui publia aussi les discours à Venise en 1513. Éditions d 'ensemble :
70 H . Wolf, Orationes et Epistolae... de graeco in latinum pridem conversae...,
Lutetiae 1553, et In omnia Isocratis opera et vitam eiusdem a diversis autoribus
descriptam annotationes, quibus et res et verba et series, in universum dilucide,
breviter ac ingeniose explicantur..., Basileae 1570 ; 71 H . Stephanus, Paris 1593 ;
72 A . Auger, Isocrates. Opera omnia , graece et latine, 3 vol. Parisiis 1782 ;
73 A . Coraï, 'looupátous Móyoi vai ’Emiotolai, 2 vol., Paris 1807 ; 74 I.
Bekker, Oratores Attici,t. II, Berlin 1823; 75 W .S. Dobson, Attic Orators, t. III,
London 1828 ; 76 G . Baiter et H . Sauppe, Oratores Attici, t. II, Zürich 1839 ;
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 903
77 G . E .Benseler, Isocratis orationes, coll. BT, Leipzig 1851; 78 F . Blass,
Isocratis orationes, 2e édit., coll. BT, 2 vol., Leipzig 1910 -1913 ; 79 E . Drerup,
Isocratis opera omnia , t. I (seul paru ), Leipzig 1906 (discours XXI, XVIII, XX,
XVII, XIX , XIII, X , XI, I, II, III et IX );Mathieu et Brémond 5 ; Norlin et van Hook
6 (le texte des t. I- II est fondé sur l'édition de Baiter et Sauppe 76 ; celuidu t. III,
sur celle de Blass 78). Quelques éditions partielles : 80 A .Moustoxydis , Anti
dosis, Milano 1812 (première édition complète du Sur l'échange); 81 B . G .
Mandilaras, Le discours Sur la paix d 'Isocrate selon le papyrus du British
Museum (en grec moderne), Athènes 1975 ; 82 S . Usher,Greek Orators, t. III :
Isocrates, Panegyricus and To Nicocles, edited with a transl. (and comm .), coll.
« Classical Texts Warminster » , Warminster 1990 (discours IV et II); 83 R .
Flacelière, Isocrate. Cinq discours: Éloge d 'Hélène, Busiris, Contre les so
phistes, Sur l'attelage, Contre Callimachos, édition , introduction et commen
taire, coll. « Érasme. Textes grecs» 1, Paris 1961. Édition des fragments et des
résumés de son enseignement rhétorique : 84 L. Radermacher,Artium scriptores
(Reste der voraristotelischen Rhetorik ), coll. « Österreichische Akad. d.
Wissenschaften . Philos.-philol. Klasse Sitzungsber.» 227, 3 , Wien 1951, p. 153
187 ( B XXIV ).
Traductions. Latine : Wolf 70 et Auger 72 ; française : Mathieu et Brémond
5 , que nous avons utilisée dans cet article ; anglaise : Norlin et van Hook 6 ; ita
lienne : 85 M .Marzi, 2 vol., coll. « Classici Greci» 13, Torino 1991 ; allemande :
86 A . H . Christian , 8 vol., Stuttgart 1833- 1836 ; 87 Chr. Ley -Hutton (trad.),
Isokrates, Sämtliche Werke, t. I: Reden 1-VIII, eingel. und erl. von K . Brodersen ,
coll. « Bibliothek der griechischen Literatur » 36 , Stuttgart 1993 ; grecque
moderne : 88 S. Papaïoannou et B . Mandilaras, 6 vol., coll. « Les Grecs» ,
Athènes 1993 ; espagnole : 89 J. M . Guzmán Hermida, 2 vol., coll. « Biblioteca
Clásica Gredos » ,Madrid 1979- 1980 .
Index. 90 S. Preuss, Index Isocrateus, Progr. Fürth 1904, réimpr. Hildesheim
1963. Index Nominum , chez Blass 1, t. II, p. 280 -324 , et Mathieu et Brémond 5 ,
1. IV , p . 241-254. Index de termes de rhétorique, de philosophie, de politique,
chez Mathieu et Brémond 5 ,t. IV , p. 254- 268.
Problèmes d 'authenticité. Cf. Mikkola 7 ; Seck 62 ; aussi, en général,
Münscher 3, col. 2223 sq., et les introductions aux éditions de Mathieu et
Brémond 5 , et de Norlin et van Hook 6 . Notamment sur l'authenticité des
épîtres, 91 C . Woyte , De Isocratis quae feruntur epistulis quaestiones selectae,
Thèse, Leipzig 1907; 92 U . von Wilamowitz -Moellendorff, « Unechte Briefe» ,
Hermes 33, 1898, p. 492 -498, notamment p .492 -495, et Id. 32, t. II, p. 391 sqq. ;
93 G . Weiss, Zur Echtheit der Briefe des Isokrates : syntaktische Beiträge,
Schwabach 1914 ; 94 J. Sykutris, art. « Epistolographie » , RESuppl. V , 1931,
col. 185-220, en particulier col. 210 sqq.; 95 L . F. Smith , The Genuineness of the
9th and 3rd Letters of Isocrates, Thèse, Lancaster, Pennsylvania 1940, et Speyer
63, p. 140 ; 96 J. Castellanos i Vila , « Situació actual sobre l'autenticitat i crono
logia de las Cartes d 'Isocrates » , dans C . Miralles (édit.), Homenatge a J. Alsina,
Barcelona 1969, p. 89-95 ;Lesky 13, p. 659 .
904 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
Plusieurs des æuvres du corpus isocratique ont été considérées comme apo
cryphes sur la base de différents arguments.On accepte généralement le carac
tère apocryphe de l’ A Démonicos( cf. Blass 1, t. II, p. 278 sqq.; Drerup 79,
p. CXXXIV ; Brémond 5 , t. I, p. 111 sqq. ; Mikkola 7, p . 276 -285 ; Lesky 13,
p. 659 ; contra , Norlin 6 , t. I, p. 3, et Too 19, p . 58 n. 53). L 'authenticité de
l'Épître VI est contestée aussi (cf. Woyte 91, p. 41-52, etMikkola 7 , p . 290
sqq.).
Genre littéraire. La délimitation du genre littéraire va de pair avec les pro
blèmes du classement et de l'authenticité des ouvrages. Ce sujet a été étudié en
détail par Too 19 , p. 10- 35, qui rapporte toutes les tentatives de classements
externes (cf. aussi Usener 38 , p. 51 sqq.). Too choisit un classement fondé sur les
informations tirées des discours mêmes, notamment Sur l'échange 45 sq., et
Panathénaïque 1 sq . (sur la proximité des deux classements, cf. 97 S. Wilcox,
« Isocrates' Genera of Prose » , AJPh 64, 1943, p. 427-431). Il y énumère plu
sieurs des nombreuses formes littéraires de prose ; elles fontmontre d 'un éventail
particulièrement ouvert face à la rigidité du schémaaristotélicien. A la fin de ces
énumérations, il place la forme qu 'il cultive : il s'agit de discours « pour intéres
ser les Grecs, leurs concitoyens et le public des réunions solennelles ('EXnvi
xoùç vaitoltiXoùç xainavnyupixoÚC )» , doués de musicalité et de rythme
(Sur l'échange 46 ), et de « ceux qui présentent des suggestions conformes aux
intérets de notre ville et de tous les Grecs (τους περί των συμφερόντων τη τε
nó el xai toiç örlos " EMnol ovußovreúovrac)» (Panathénaïque 2). Autre
ment dit, Isocrate réclame pour l'ensemble de son æuvre la qualification de
róyos notixóc, sous laquelle s'intègrent des formes différentes de discours ;
d'après l'auteur de la Rhetorica ad Alexandrum (1421 b 7 sqq.), ce logos com
prend les trois genres aristotéliciens : judiciaire , délibératif et épidictique. Le
discours « politique » doit être, tout d'abord, utile , idée développée en particulier
dans l'Éloge d 'Hélène et le Nicoclès (cf. aussi Denys d'Halicarnasse , Isocrate 1,
4, et infra ). Cela n 'exclut pas qu 'il soit, en deuxième lieu , agréable, par sa
proximité du langage poétique (cf. Sur l'échange 47, et Panathénaïque 2 ). De
plus, il est conçu comme la suite de la poésie gnomique d'Hésiode, de Phocylide
et de Théognis (cf. A Nicoclès 40 -49, et Eucken 46 , p. 231 sqq.).
Dans la section finale du Panathénaïque, Isocrate nous offre une autre information peut
être valable pour tous ses discours. Il y présente une discussion à l' intérieur de son école : un
disciple spartiate analyse le discours que le maître vient de prononcer, comprenant qu 'il pos
sède une double signification . Le fait qu 'Isocrate ne se prononce pas sur la correction ou
l'incorrection de l'analyse de son élève suggère la possibilité que tout discours isocratique
puisse être envisagé à deux niveaux : dans un sens littéral ou sémantique, compréhensible par
tous, et dans un sens secondaire et dianoétique, perceptible seulement par « le raisonnement
des esprits qui s' efforcent d'atteindre la vérité » ( $ 261): cf. Too 19, p. 70 sqq. ; 98 H . O .
Kröner, « Dialog und Rede. Zur Deutung des Isokratischen Panathenaikos » , A & A 15 , 1969,
p. 102 -121, repris dans Seck 15, p. 29 -328, et Bons 49, p. 161 sqq., avec bibliographie sur le
sujet aux n . 29 sqq. Contra, Schäublin 264, p . 172 ; 99 M . Erler, « Il Panatenaico d 'Isocrate e
la critica della scrittura nel Fedro : “ Aiuto " e " senso nascosto " » , Athenaeum 81, 1993,
p. 149- 164, notamment p. 155 sq. et 163 (trad. ital. d'Id .259).
Dans notre perspective littéraire, Isocrate doit être considéré comme l' initia
teur de divers genres littéraires.
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 905
L’Éloge d 'Hélène et le Busiris représentent la première codification et les premiers exem
ples de l' éloge en prose d'un sujet mythologique (cf. Buchheit 60, p. 45 sqq.; Gärtner 14,
col. 1468 sq. ). L 'Evagoras inaugure le genre de l' éloge d 'un personnage historique (cf. 100 J.
Sykutris, « Isokrates' Evagoras », Hermes 62, 1927, p . 24 -53, repris dans Seck 15, p. 74 -105 ;
101 K . Münscher, « Isokrates' Evagoras» , PhW 47, 1927 , col. 1063- 1070 et 1098 - 1103, repris
dans Seck 15 , p . 106 - 121 ; Buchheit 60, p. 64 sqq .; 102 P . Hadot, art. « Fürstenspiegel» , RAC
8 , 1972, col. 555 -632 , notamment col. 576 , et 103 T. Poulakos, « Isocrates' Use of Narrative
in the Evagoras. Epideictic Rhetoric and Moral Action », QJS 73, 1987, p . 317- 328 ). L ' impor
tance de ce discours dans la configuration du genre biographique a été signalée par 104 F .
Leo, Die griechish-römische Biographie nach ihrer literarischen Form , Leipzig 1901 (réimpr.
Hildesheim 1965), p . 91 sq ., et récemmentpar 105 T . Krischer, « Die Stellung der Biographie
in der griechischen Literatur » , Hermes 90 , 1982 , p . 51 -64 , notamment p . 59-63. Le discours
Sur l 'échange représente le premier exemple du genre littéraire de l' autobiographie dans
l' Antiquité (cf. 106 G . Misch, Geschichte der Autobiographie , 3e édit., Bern 1949, p. 158 -180,
repris dans Seck 15 , p . 189-215 , et récemment 107 M . Fuhrmann , « Rechtfertigung durch
Identität. Über eine Wurzel des Autobiographischen » , dans O .Marquard et K . Stierle [édit.),
Identität, coll. « Poetik und Hermeneutik » 8, München 1979, p. 685 -690 ; 108 M . Trédé
Boulmer, « La Grèce antique a -t- elle connu l'autobiographie ? » , dans M .-F . Baslez, P .
Hoffmann et L . Pernot (édit.], L 'invention de l'autobiographie d'Hésiode à Saint Augustin ,
Actes du deuxième colloque de l'Équipe de recherche sur l'hellénisme post-classique (Paris,
École normale supérieure , 14 - 16 juin 1990 ], Paris 1993, p . 13-20 , notamment p. 16 sq .). De
son côté , l' A Nicoclès et l' Évagoras représentent les premiers traités en prose sur les devoirs
du monarque (speculum principis ) de la littérature grecque (cf. Hadot 102 , col. 574 - 576 ).
Finalement, pour l' importance d ' Isocrate dans le genre historiographique, cf.Mathieu 24,
p. 200 sqq.
La philosophie d 'Isocrate
Depuis les dernières décennies, surtout depuis les années cinquante, une ana
lyse intrinsèque de l'euvre d'Isocrate a permis une revalorisation de l'activité
philosophique d' Isocrate. La comparaison continuelle avec Platon explique que
pendant tout le xixe siècle et une partie du XXe Isocrate ait été méprisé comme
un penseurmédiocre.
Cf. p . ex. 109 K . O . Müller et J. W . Donaldson , A History of the Literature of Ancient
Greece, t. II, London 1858 , p. 148 - 159, notamment p. 153 ( trad. fr., I. III, Paris 1883 , p . 478
498 , notamment p . 487) ;Münscher 3, col. 2151, 33 sg. ; 110 H . J. Rose, A Handbook of Greek
Literature from Homer to the Age of Lucian, London 1934, p. 285 : « He had a most unphilo
sophicmind and no turn for speculation either ethical or metaphysical » .
Sur la signification du terme « philosophie » chez Isocrate, nous renvoyons à
la bibliographie rassemblée par 111 D .Gillis, « The EthicalBasis of Isocratean
Rhetoric » , PP 24 , 1969, p. 321-348, notamment p. 328 n . 9 (cf. aussi Burk 4 ,
p .65 sqq. ; 112 M . A . Levi, Isocrate. Saggio critico, coll. « Biblioteca Storica
Universitaria » , série II, t. X , Milano/Varese 1959, p. 85 sqq., et Id. 16 , p. 1163 ;
113 I.Hadot, Arts libéraux et philosophie dans la pensée antique, Paris 1984 ,
p. 16 sqq.; Eucken 46 , p. 14 sqq.; 114 M . Dixsaut, art. « Isocrate» , dans J.-F.
Mattei (édit.), Les Euvres philosophiques. Dictionnaire,t. I, Paris 1992, p. 185
sq.; 115 P . Gómez, « laldeia y literatura : el discurso isocrático » , AFB 14 ,
1991, p. 53-70,notamment p. 58 sq .; Lombard 18 , p. 15 sq.). Ce n'est pas dans
un sens strict qu 'Isocrate emploie le terme « philosophie » pour désigner sa
propre activité en tant qu 'éducateur, mais dans un sens large couvrant toute
activité rattachée au savoir, y compris celle de ses concurrents.
906 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
Dans l'Éloge d'Hélène 6, il parle d'« une philosophie de la dispute (ň nepi tàç špidas
plooopia ) » ; dans l' A Nicoclès 51, il distingue parmi lesmaîtres de la sagesse (oi tepi tv
Olaoooplav ovTEC ) des groupes différents : les éristiques, les auteurs de discours politiques et
d'autres. Même dans le Sur l'échange, sauf quelques cas (cf. § 268 sqq.), c 'est toujours dans
un sens large qu 'il utilise le terme (cf. Eucken 46 , p . 7 et 14 sqq.). Ce sens est donc différent
du sens platonicien ; c 'est ce dernier qui va prévaloir, à partir du moment où Platon forge pour
désigner l'activité de son rival le terme « rhétorique (øntopixń ) » : cf. 116 E . Schiappa, « Did
Plato coin rhētorikë ?» , AJPh 111, 1990, p . 457-470, et Cole 31, p . 2 ; contra, 117 N .
O 'Sullivan , « Plato and ñ xarovuévn øntopixn » , Mnemosyne 46 , 1993, p . 87 -89, avec la
réponse de 118 E . Schiappa, « Plato and ń zarovuévn øntopixń : A Response to O 'Sullivan » ,
Mnemosyne 47, 1994, p.512-514 .
La « philosophie » d 'Isocrate enseigne à raisonner et à comprendre les rap
ports qui s'établissent entre les choses, ainsi qu'à être utile à la communauté. Il
s'agit donc d'une philosophie de nature sociale fondée sur les liens interperson
nels à l'intérieur de la communauté : le discours (aóyoc ) est le résultat d'un pro
cessus mental de compréhension de la réalité, et doit exprimer un jugement
(86& a) en accord avec une circonstance concrète (xalpós) de la polis.
Donc, Isocrate enseigne dans son école la culture et la maîtrise du Nóyos
(cf. supra ). L 'emploi du nóyos, de la parole ou du discours à des fins politiques
est d'abord recommandé, puis exalté dans Nicoclès 5-9, un passage que l'orateur
va répéter quelques années plus tard dans le Sur l'échange 253 sqq. Tout
d'abord , le logos nous distingue des animaux, lesquels sont supérieurs à l'hom
me par d 'autres aspects , et il nous permet de nous débarrasser de la vie sauvage
(§ 5 sq.). Il est donc le principe de la civilisation dans toutes sesmanifestations:
étant donné que chez les hommes il est inné « de nous convaincre mutuellement
et de faire apparaître clairement à nous-mêmes l'objet de nos décisions» ( $ 6 ),
c 'est lui qui rend possible la vie en communauté, qui permet l' établissement des
lois et l'invention des arts ( $ 6 ).
Cf. Norlin 6 , t. I, p. XXIII sq. ; Steidle 59, p . 276 sqq. ; 119 R . Johnson, « Isocrates 'Method
of Teaching » , AJPh 80 , 1959, p . 25 - 36 , notamment p. 33 sq. ; 120 S . Ijsseling , Rhetoric and
Philosophy in Conflict. An Historical Survey, The Hague 1976 , p . 18-25 ; 121 M . Dixsaut,
« Isocrate contre des sophistes sans sophistique » , dans B . Cassin (édit.), Le plaisir de parler.
Études de sophistique comparée, Paris 1986 , p .63-85 ; Gómez 115, p . 56 sqq., et Usener 38,
p. 67 sqq.
Sur la obča , nous renvoyons à 122 J.-P . Levet, Recherches sur dóta et les
notions apparentées chez Isocrate, Paris 1975 (cf. aussi Eucken 46 , passim ,
notamment p . 32 sqq. et 56 sqq.; Steidle 59, p. 261). Comme on le signale dans
le Contre les sophistes (cf. infra), seul un esprit apte à se faire des opinions
(Quyñs... dofaotixñs) permet la connaissance pratique des procédés du logos.
Dans l'Éloge d'Hélène, Isocrate exhorte ($ 5) tous ceux qui cherchent la vérité à
former leurs disciples « à la pratique de notre vie politique (tàs apátelc év als
noitevóueda )» , convaincus qu 'il vautmieux « apporter sur des sujets utiles
une opinion raisonnable (ětilelxãs dočá (elv ) que sur des sujets inutiles des
connaissances exactes» . Cette estimation positive de l'opinion est tout à fait
originale et suppose une prise de position face à une longue tradition où l'opi
nion était confrontée et subordonnée à la vérité (cf. Parménide DK 28 B 1, 30 et
8, 51 ; Démocrite DK 68 B 7), à la science (cf. Socrate, chez Xénophon ,
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 907
Mémorables III 9 , 6 , et chez Platon, Apologie de Socrate 21 c sqq. ; quant à
Antisthène, cf. infra ), ou bien à toutes les deux (cf. Gorgias, Palamède 24 [t. II,
p . 300 DK ] ; de même Hélène 8 - 14 [t. II, p. 290 sqq. DK ]). Le fait de tirer la
doxa de la sphère subjective et individuelle et de la considérer comme un élé
ment objectif par son application au monde de la collectivité est caractéristique
aussi d'Isocrate, face à Protagoras (cf. infra).
Une opinion ou un jugement seront corrects quand il s 'accorderontavec des
circonstances externes (xalpoí; cf. Steidle 59 , p. 260 et n . 4 ) auxquelles les
discours essaient de donner une réponse. Néanmoins, Isocrate utilise parfois le
termexalpós dans un sens strictement technique, comme le fait Alcidamas (cf.
infra ), c'est-à-dire comme la capacité d'ajuster le discours séance tenante aux
exigences ponctuelles de l'audience (cf. Vallozza 282).
La philosophie isocratique a simultanément une dimension pédagogique, une
dimension historique et une dimension rhétorique.
Dimension pédagogique. Cf. Burk 4, p . 34 sqq. ; Mathieu 5, t. I, p . X ; Steidle
59 ; Johnson 119 ; 123 S. Cecchi, « La pedagogia di Isocrate » , RSC 7, 1959,
p . 118-133 ; 124 F . Kühnert, « Die Bildungskonzeption des Isokrates » , dans R .
Müller (édit.) , Der Mensch alsMaß der Dinge, Berlin 1976 , p . 323-336 ; 125 E .
Rummel, « The Effective Teacher and the Successful Student» , EMC 21, 1977,
p . 92 - 96 ; Cahn 43 ; Lombard 18, p . 27 sqq., et Gómez 115.
Isocrate a exposé le programme de son école (dontnous pouvons imaginer le
fonctionnement grâce à Panathénaïque 200 sqq.) dans le discours Contre les
sophistes ($ 14 - 18). Il y assume trois conditions essentielles pour arriver à la
maîtrise de la parole et de la politique : les bonnes dispositions naturelles (EÚ
Quial), l' entraînement par l'expérience (tuttelpia ) et l'éducation (taídevoLG).
Cette triade provient de la sophistique (cf. Protagoras DK 80 B 3). Pour le
caractère traditionnel de cette triade, nous renvoyons à Steidle 59, p. 262 ;
126 L .C . Ford, The Sophistic Trichotomy of natural Ability, Practice, and
Knowledge in the Educational Philosophy of Isocrates, Thèse Princeton 1984,
résumée dans DA 44, 1984, p . 3375 A sq., notamment chap. IV et V ; Lombard
18, p . 38 sqq., et en général sur le débat natureléducation , nous renvoyons à
127 J. de Romilly , LesGrands Sophistes dans l'Athènes de Périclès, Paris 1988,
p. 57-89. Plus loin Isocrate explique ce dont le bon orateur a besoin (§ 16 sq.): il
n 'est pas difficile d'acquérir la connaissance théorique des procédés qui servent
à prononcer et à composer les discours si on trouve un savant en la matière ; en
revanche, « choisir pour chaque sujet les procédés qu 'il faut, les combiner et les
ranger dans l'ordre convenable , ne pas se tromper sur le moment propre à leur
emploi, donner par les pensées l'ornement qui sied à l'ensemble du discours et
employer des expressions harmonieuses et artistiques, voilà ce qui demande
beaucoup de soins et qui est la tâche d 'un esprit énergique et apte à se faire des
opinions (quxñs... Dočaotixñs)» . Autrement dit, il n 'existe pas une science du
discours qui puisse s'apprendre comme l' alphabet ($ 12 ), mais seulement la
possibilité d'une approche au moyen de la góta (cf. supra).
908 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
Dans ce passage, le terme grec pour « procédé » est idéa . Sur sa signification , voir
128 F. W . Schlatter, « Isocrates, Against the Sophists XVI» , AJPh 93, 1972, p. 591-597 ;
129 J. B . Lidow , « The Meaning of idéa in Isocrates» , PP 38, 1983, p. 273-287 ; Eucken 46 ,
p . 105 sq . et 235 sqq. ; 130 H .LI. Hudson -Williams, « Isocrates and Contemporary Rivals » ,
c.r. de Eucken 46 , dans CR 35, 1985, p . 20 -21.
L ' élève doit apprendre ces procédés tels que lemaître les lui enseigne. Celui
ci s'offre lui-même comme un modèle (napádelyua ) dont les disciples reçoi
vent l'empreinte (ÉVTUTWOÉvtac), devenant ainsi des copies du maître (§ 17 sq. ;
cf. Steidle 59, p. 265 , et surtout la documentation apportée par Too 19, p. 186
sqq., et infra ). Modèle lui-même, le maître sait proposer aux élèves d'autres
modèles pour qu'ils en tirent profit, à travers la lecture ou le débat. Isocrate
s ' insère ainsi dans une tradition qui propose l'imitation de personnages exem
plaires (tels Thésée, Héraclès, Agamemnon, Évagoras ou Timothée), une tradi
tion qui remonte à Homère et qui est très bien représentée chez Pindare ( cf.
Marrou 11, p. 134 ; Lombard 18, p . 45 sqq. ; Too 19, p. 129 sqq .; 131 E .
Alexiou, Ruhm und Ehre. Studien zu Begriffen, Werten und Motivierungen bei
Isokrates, coll. « Bibliothek der klassischen Altertumswissenschaften » N .F. 2,
93, Heidelberg 1995, p. 88 sqq.). L 'enseignement personnalisé permet à Isocrate
de chercher le modèle approprié à chaque élève. Ainsi s'explique que Nicoclès,
en tant que roi de Salamine à Chypre, ait besoin d'une éducation différente de
celle des autres élèves: le meilleurmodèle qu'il peut imiter est celui de son père
Évagoras.
Sur l'éducation du monarque, cf. 132 H . Kehl, Die Monarchie im politischen Denken des
Isokrates, Thèse Bonn 1962 ; 133 K . Rekucka-Bugajska, « Isocrates quid de optimo rege
docuerit» (en polon ., avec rés. en lat.),Meander 35, 1980 , p . 83 -95 . Sur la tradition pinda
rique de l' Evagoras, cf. 134 M . Vallozza, « Alcunimotivi del discorso di lode tra Pindaro e
Isocrate » , QUCC n .s. 35 (= 64 ), 1990 , p. 44 -58 , avec bibliographie p . 44 n . 2. Sur le caractère
modèle de l'histoire , cf. 135 G . Schmitz -Kahlmann , Das Beispiel der Geschichte im poli
tischen Denken des Isokrates, Leipzig 1939, et 136 M .Nouhaud, L 'utilisation de l'histoire par
les orateurs attiques, Paris 1982.
Le passage cité du Contre les sophistes suppose qu'Isocrate a dépassé le traité
rhétorique des sophistes itinérants, étant donné l'impossibilité de systématiser les
principes de la persuasion (cf. Sur l'échange 184 et 271, et infra), et qu 'il l'a
remplacé par un rapportmaître-élève personnalisé, prolongé sur trois ou quatre
années (cf. Sur l'échange 87). Pendant ce temps le maître contrôle l'apprentis
sage de l' élève. Il « adopte» symboliquement le disciple et s'engage à diriger son
futur agir politique ; c'est pourquoi la condition de disciple , comme celle de fils,
ne se perd jamais (cf.Rummel 125 ;Cahn 43, p. 135 sq. ; Lombard 18 , p. 48 sq.;
Too 19, p. 200 sqq.).
Ce discours s'interrompt brusquement après la promesse de rendre explicites les points de
son programme (§ 22). Contrairement à Auger 72, t. III, p . 1 sq., à Blass 1, t. II, p . 240 sq., et à
Drerup 79, p . CXXIX sq., qui ont pensé à une mutilation ancienne du discours, de nos jours on
considère l'ouvrage comme complet. Il s'agirait de l'introduction de son cours oralde rhéio
rique (cf. Mathieu 5 , t. I, p . 141 ; Eucken 46 , p. 6 ; 137 P. Harding, « An Education to All» ,
LCM 11, 1986, p . 134 sqq.; Cahn 43, p . 136 sq.). Une interprétation différente est offerte par
Too 19 , p. 156 sqq., qui permet d'expliquer aussi la fin tronquée des épîtres 1, VI et IX
(cf. supra).
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 909
L 'exposition du programme contenu dans le Contre les sophistes sera reprise
plusieurs années plus tard dans le Sur l'échange, où Isocrate développe sa pai
deia (§ 180 sqq.), qui concerne le soin de l'âme de la mêmemanière que l'art du
pédotribe concerne le soin du corps.Mikkola 7 , p. 196 - 201,a résumé cette phi
losophie dans les intitulés suivants:
(1 ) Lemaître doit apprendre à ses élèves à penser et à parler avec élégance.
( 2) La paideia sert à réfléchir (TÒ Ppoveiv ) et à bien parler (TÒ NÉVELV ).
(3) L'essentiel dans la rhétorique est d 'apprendre à convaincre (TÒ TelDelv ).
(4 ) Pour arriver à maîtriser les procédés des discours on a besoin de la philosophie , enten
due comme toute activité spirituelle qui aide l'homme à examiner et à juger la réalité , pour
trouver le ceur des affaires, leur vérité .
(5) L 'éloquence apprise est meilleure que l'innée, dans la mesure où elle aide à com
prendre l' essence hiérarchique de la réalité.
(6 ) Le bon orateur se reconnaît dans la grandeur des sujets qu'il choisit.
(7) La culture du raisonnement et celle de la rhétorique sontintimement unies.
(8 ) Celui quimaîtrise l'art de convaincre doit sympathiser avec celui qu 'il va convaincre
pour garantir son succès.
(9 ) Le mode de vie de l'orateur, ses vertus et sa bonne réputation , décident à la fin du
résultat du discours .
A des niveaux différents, son éducation est celle d ' Athènes, celle de la Grèce
et celle du monde (cf. Alexiou 131, p. 154 sqq.). Ce n'est pas tant pour des rai
sons ethniques qu'une personne sera grecque, que pour avoir reçu l'éducation
grecque (cf.Mathieu 22, p. 42 sq.; Levi 112, p. 64 sq .; Heilbrunn 42, p. 168,
mais aussi 138 J. Jüthner, « Isokrates und die Menschheitsidee », WS 47, 1928 ,
p. 26 -31, repris dans Seck 15, p. 122 -127 ;Masaracchia 20, p. 47-79).
Dimension historique. Cf. Mathieu 24 ; Cloché 10 ; 139 K . Bringmann ,
Studien zu den politischen Ideen des Isokrates, coll. « Hypomnemata» 14,
Göttingen 1965.
Face au caractère variable des circonstances externes, Isocrate offre une
image fixe et immuable de lui-même ; en fait, les témoignages qu 'il allègue en sa
faveur dans le Sur l'échange sont des fragments d'écrits précédents , qui mon
trent la cohérence de sa pensée au cours des années. C 'est grâce à son retrait
délibéré de l'arène politique athénienne et à son éloignement de la nolu
Tipayuooúvn (cf. supra ), à laquelle se sont adonnés les nouveaux politiciens
formés chez les sophistes, qu 'il a acquis cette image. Aumoyen de cette présen
tation cohérente de ses écrits, il réussit à créer chez le lecteur la conviction qu 'il
existe une adéquation parfaite entre ce que l'orateur dit et ce qu 'il est (cf. Dixsaut
121, et Too 19, p . 5 sq.). Son éloignement volontaire des rapports de pouvoir à
Athènes lui garantit un statut de conseiller à deux niveaux :
- A l'intérieur d ' Athènes, il se présente comme un citoyen anpáyuwv
modèle , opposé aux sycophantes et aux nouveaux politiciens. Ses conseils sont
désintéressés et dépourvus d 'ambition personnelle.
On situe généralement Isocrate dans la tradition conservatrice de Cimôn, Thucydide,
Nicias et Théramène, laquelle revendique une constitution mixte et s'oppose à l' empire et à la
rolunpayuooúvn démocratique (cf. les conclusions de Bringmann 139, p. 110 sq. ; 140 J. de
910 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
Romilly , « Les modérés athéniens vers lemilieu du IVe siècle : Échos et concordances » , REG
67, 1954 , p. 327 -354 ; 141 A . Demandt, Geschichte als Argument, chap. II : « Das klassische
Dekadenzmodell bei Isokrates » , Konstanz 1972, p . 18 -29 et 64 sq. ; Too 19, p . 103 sqq .). Les
réformes entamées par Théramène constituent essentiellement le retour à la TáTPLOS Tolteia
qu ' Isocrate propose dans divers écrits, comme Panegyrique 76 sqq., A Nicoclès 14 sqq.,
Nicoclès 14 sq., et surtout l'Areopagitique (cf. Levi 112, p. 9 sqq. ; Id., p. 1166 sq.; Canfora
17, p. 357 sqq.; 142 Id ., « Isocrate e Teramene » , dansMélanges P. Lévêque, t. V , coll. « Anna
les Litt. Univ. Besançon >> 429, Paris 1990 , p . 61-64 ; aussi 143 P . Cloché, « Isocrate et la poli
tique théraménienne » , LEC 5 , 1936 , p. 394 sqq. ; 144 C . Bearzot, « Teramene tra storia e
propaganda » , RIL 113, 1979 , p . 195 -219, sur l' idéalisation de la figure de Théramène dès la
fin du va). Le système politique idéal pour Isocrate est la démocratie , mais une démocratie
dans laquelle il existerait un primus inter pares. Il s'agit donc d 'une constitution mixte, à mi
chemin entre démocratie et monarchie, susceptible d 'être adaptée à des contextes différents,
c'est-à-dire à l'Athènes démocratique (cf. Éloge d 'Hélène 36 ) et à la cour des diversmonar
ques (cf. Nicoclès 14 - 26 ). C 'est du discours de Périclès chez Thucydide, où l'on décrit (II 65,
9 ) l’Athènes de l'époque comme une démocratie nominale,mais qui a en fait un gouverne
ment unipersonnel (Royw uÈv onuoxpatía , epyw dè ÚTTO TIPATOU Ávopos ápx ), qu 'Isocrate
a tiré l'idée (cf. Eucken 46, p. 96 sqq., qui renvoie à 145 F. Pointner, Die Verfassungstheorie
des Isokrates, Thèse München 1965, Augsburg 1969). Voir aussi Kehl 132, 146 I. Labriola ,
« Terminologia politica isocratea, I: Oligarchia, aristocrazia, democrazia » , OS 4 , 1978 ,
p. 147- 168, et 147 M . Silvestrini, « Terminologia politica isocratea, II : L 'Areopagitico o dell'
ambiguità isocratea » , QS 4, 1978, p. 169-183.
- Hors d'Athènes, comme il n'est pas un politicien actif danssa patrie, il peut
s'adresser avec objectivité à tous les Grecs au moyen de ses écrits. Dans ce
domaine, il défendra dès 3809 l'« idée panhellénique » : les Grecs doivent obtenir
la concorde (ouovola ) entre eux et entamer une expédition avantageuse contre
l'Empire perse , c'est-à-dire contre l’Asie .
Cf. 148 J. Kessler, Isokrates und die panhellenische Idee, coll. « Studia Historica » 14 ,
Paderborn 1911, réimpr.Roma 1965 ; Mathieu 24, p. 41 sqq., 95 sqq. et 153 sqq.; Norlin 6,
t. I, p. XXXII sqq.; 149 A .Momigliano, « L 'Europa come concetto politico presso Isocrate e
gli Isocratei» , RFIC n .s. 11, 1933, p . 477 -487 ; Bringmann 139 , p . 19 sqq.; Heilbrunn 42,
p. 160 sqq. ; 150 C . Bearzot, « Isocrate e il problema della democrazia » , Aevum 54, 1980,
p. 113-131; 151 J. de Romilly, « Isocrates and Europe», G & R 39, 1992, p. 2- 13. L 'idée avait
déjà une certaine tradition au temps d'Isocrate ; cf. Mathieu 24 , p . 17 -28 . Il l'avance dans
l' Éloge d 'Hélène, selon 152 G . Kennedy, « Isocrates' Encomium of Helen : a Panhellenic
Document» , TAPHA 89, 1958 , p . 77 -83, et l'exposera en détail dans le Panegyrique (380 ).
Isocrate y propose qu 'Athènes et Sparte commandent l'expédition contre les Perses, conférant
à Athènes le même rang qu 'à Sparte en raison de sa trajectoire historique éblouissante
(cf. Cloché 10 , p. 33 sqq., et 153 E . Buchner, Der Panegyrikos des Isokrates, coll. « Historia
Einzelschriften » 2 , Wiesbaden 1958 ; contra , Drerup 158 , 154 D . Gillis , « Isocrates' Panegy
ricus. The Rhetorical Texture » , WS n .s. 5, 1971, p. 52-73, Masaracchia 20 , p. 50, qui soutien
nent qu 'Isocrate ne pense qu'à une hégémonie non partagée d'Athènes). Le cours des événe
ments fait qu 'Isocrate considère que l'hégémonie ne doit pas être conférée à une cité,mais à
un chef, poste pour lequel il pense successivement à Denys de Syracuse (Epître à Denys,
367a), à Archidamos de Sparte (Epître à Archidamos, 3569) et à Philippe de Macédoine
(Philippe, 346a) : cf. 155 Th.S. Tzannetatos, « L'unité politique des Grecs anciens et Isocrate»
(en grec moderne), EEAth 12 , 1961-62, p. 437 -457. Sur le concept d'homonoia chez Isocrate,
cf. Levi 112, p .53 sqq., 156 J. de Romilly, « Eunoia in Isocrates or the Political Importance of
Creating Good Will» , JHS 78, 1958, p. 92- 101 (trad. allemande, dans Seck 15, p. 253-274),
157 S. Perlman , « Isocrates' Philippus and Panhellenism », Historia 18 , 1969, p. 370-374.
Un sujet très débattu a été l'influence que les conseils d' Isocrate ont eu sur la
politique contemporaine (cf.le résumé de Bringmann 139, p. 13 sqq.).
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 911
Les positions oscillent entre deux pôles extrêmes. D 'un côté, Mathieu 24 , en accord avec
Wilamowitz -Moellendorff 32, t. II, p. 381 sq., et 158 E . Drerup , « Epikritisches zum Panegy
rikos des Isokrates » , Philologus 54 , 1895, p . 636 -656 , notamment p . 639 (cf. aussi Kennedy
9 , p . 190 ), a soutenu (p . 81) que le Panegyrique a inspiré la fondation de la seconde confédé
ration athénienne. De plus, les points de vue exposés dans le Plataïque auraient été semblables
à ceux défendus par Callistratos à cette époque -là (p . 92 sq.), et ceux du Sur la paix et de
l' Areopagitique avancent desmesures qui caractérisent la politique d ' Eubule (p . 124 sq .).
Finalement, Mathieu 24 , p. 166 sq. et 174 , estime importante l'influence isocratique sur les
monarquesmacédoniens (cf. aussi 159 C . D . Adams, « Recent Viewsof the Political Influence
of Isocrates » , CPh 7, 1912, p . 343 -350 , et 160 M . L . W . Laistner, « The Influence of Isocrates'
Political Doctrines on Some Fourth -century Men of Affairs » , CW 23, 1930, p. 129-131). De
l'autre côté, Bringmann 139, et aussi Cawkwell 12, p . 555, ontminimisé l'influence politique
des discours d ' Isocrate .
Dimension rhétorique. Le style. Cf. Blass 1, t. II, p. 130 sqq.; Jebb 2, t. II,
p. 54 -79 ; 161 E .Norden , Die antike Kunstprosa, vom VI. Jahrhundert v. Chr. bis
in die Zeit der Renaissance, 2 vol., Leipzig 1898, réimpr. Leipzig/Berlin 1915
(t. I), 1918 (t. II), Darmstadt 19818, t. I, p. 113- 121; Burk 4, p. 124 sqq. ; Norlin
6 , t. I, p. 13 sqq.; Cawkwell 12, p. 555 ; 162 S . Usher, « The Style of Isocrates» ,
BICS 20, 1973, p. 39-67;Cole 31, p. 119 sq.; Usener 38, p. 69 sqq.
L ' immutabilité de la figure d’Isocrate est renforcée par le style de ses écrits.
On accepte généralement l'influence de Gorgias sur Isocrate dans ce domaine
(cf. Norden 161, t. I, p . 116 sqq.). Il lui a emprunté la conception poétique du
discours.Malgré tout, il est difficile d 'estimer la portée de cette influence à partir
de ce qui a été conservé du sophiste. Par rapport à Gorgias, Isocrate a homogé
néisé son expression, en se bornant à utiliser un langage quotidien avec une
grande précision .Même dans les plaidoyers , il a simplifié radicalement le systè
me des formules judiciaires, qui devient très uniforme après lui (cf. 163 F .
Cortés Gabaudan, Fórmulas retóricas de la oratoria judicial ática, coll. « Theses
et Studia Philologica Salmanticensia » 23, Salamanca 1986 , p . 279 -289 ). Il n 'est
pas habituel de trouver chez lui des mots poétiques, des solécismes ou des com
posés inusités. Aussi, Isocrate s'abstient-il de l'excès dans l' emploi du langage
métaphorique. Soucieux de faire parvenir parfaitement le message, il renforce les
éléments rythmiques et évite le choc de consonnes discordantes, ainsi que les
hiatus, c 'est-à-dire toute séquence qui entraverait la lecture . Il sait structurer les
contenus en de longues périodes , constituées par desmembres étroitement liées,
de façon à ne jamais perdre le lien des parties entre elles et leur rapport avec
l'ensemble (cf. Usher 162, p . 41 sqq.). La clarté dans l'exposition des idées et
l'homogénéité du langage employé font que le lecteur peut prévoir ce qu 'il va
lire par la suite , ce quiproduit en lui une satisfaction qui rend plus facile l'accep
tation des contenus présentés.
Il est possible que le désir d' Isocrate d ' influencer ses lecteurs éventuels se reflète , au
moins dans les éditions qu 'il a contrôlées, dans la présentation graphique des æuvres, qui a
bien pu respecter la disposition par membres caractéristique des æuvres poétiques, face à la
scriptio continua habituelle : cf. 164 G . Morocho Gayo, « Prosa griega y orden de palabras :
una aproximación » , dans Id . (édit.), Estudiosde prosa griega, León 1985, p. 141- 177, notam
ment p. 147 sqq.
Rapport d’ Isocrate avec d'autres penseurs. C 'est aussi par opposition aux
philosophes et aux penseurs rivaux qu 'Isocrate définit sa philosophie, dont il
912 ISOCRATE D 'ATHÈNES 1 38
estompe les contours pour que les critiques adressées aux uns affectent aussi les
autres. Il s 'agit d 'une conception agonique, que l'orateur décrit au début du
Panégyrique : il ne faut pas chercher l'originalité dans le choix du sujet, car tant
que les circonstances seront les mêmes, le sujet devra aussi être le même. Dans
cette mesure, l'orateur doit rivaliser avec ceux qui l'ont précédé et les dépasser.
Il justifie ainsi la méthode qu'il a pratiquée depuis qu'il a ouvert son école :
reprendre les conceptions et les formulations d 'autres penseurs et les corriger , de
manière à leur faire prendre une signification nouvelle et originale dans ses
œuvres (cf. Eucken 46 , p . 151). Il faut admettre également qu 'Isocrate a été
influencé par les critiques de ses adversaires (cf. 165 S. Wilcox , « Criticisms of
Isocrates and his bihooopia » , TAPHA 74, 1943, p. 427-431).
Xénophane de Colophon : Cf. Münscher 3 , col. 2151. A deux reprises des
attitudes d 'Isocrate rappellent celles de Xénophane :
– Dans Panegyrique 1, il critique l'excès dans l'appréciation de l'exercice
physique face à l'activité intellectuelle (cf. Xénophane, DK B 2 = 2 Gentili
Prato ; aussi Eucken 46 , p . 151).
- Dans Busiris 38 , le reproche adressé à Polycratès d 'avoir suivi les traditions
injurieuses des poètes sur les dieux rappelle l'attaque de Xénophane, DK B 11 =
14 Gentili-Prato (cf. aussi Eucken 46, p . 196 sqq.).
Socrate : Cf. Blass 1, t. II, p . 11 ; Norlin 6 , t. I, p. XVI-XIX ; Burk 4 , p . 27-30 ;
Kennedy 9 , p . 179- 185 ; Too 19, p . 192 sqq. Selon le Phèdre de Platon (278 e ),
Isocrate était un « compagnon (Étatpos) » de Socrate . Celui-ci fait l'éloge des
qualités naturelles de l'orateur, ainsi que de la noblesse de son temperament
moral. Il prophétise qu 'Isocrate dépassera tout le monde dans la rhétorique qu' il
pratique à présent et , si cela ne le satisfait pas, qu' « une impulsion divine » le
mènera à de plus grandes choses, car il aime par nature la sagesse (279 a): cf.
Jebb 2 , t. II, p . 3 ; Münscher 3, col. 2151; Burk 4 , p . 29 ; infra . L 'estime était
réciproque, à en juger par l'anecdote transmise par (Pseudo-)Plutarque 838 f.
L 'orateur ne fait pas souvent référence à Socrate , mais il est significatif qu'il ne
formule jamais d'attaque contre lui (cf.Kennedy 9 , p . 180 ). Des parallélismes
entre les deux ont été signalés par Jebb 2 , t. II, p. 49 sq. ; Norlin 6 , t. I, p . XVII
sq .; et Kennedy 9, p. 182 sqq.
Dans Contre les sophistes 8 , Isocrate estime valable comme principe de sa
propre activité la « culture de l'âme (tñs quxñs étlué elav) » , formulation
socratique de l'activité philosophique (cf. Platon, Apologie de Socrate 29 e ; 30
b ; Xénophon ,Mémorables I 2 , 4), dont les socratiques se sont, à son avis, écar
tés (cf.Eucken 46 , p. 23 sqq.).
La figure de Socrate préside à tout le Busiris. Pour l'orateur, l'Accusation de
Socrate du sophiste Polycratès est un discours manqué ($ 4 ), tout comme son
Apologie de Busiris, parce qu 'il y avait transformé Alcibiade en disciple du phi
losophe, ce qui ne constitue pas un motif de reproche mais d 'éloge ($ 5). Le
traité a contribué à rendre populaires quelques idées morales de l' école de
Socrate (cf. Blass 1, t. II, p . 40 sq. ;Mathieu 24, p . 176 ; Kennedy 9 , p . 180 sq .).
1 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 913
La meilleure preuve du respect envers le philosophe est l'effort calculé et
conscient que fait Isocrate pour se présenter soi-même dans l'apologie de sa vie,
le discours Sur l'échange, à la manière dont Socrate le fait dans l'Apologie de
Platon (cf. Münscher 3 , col. 2210 ; 166 R . J. Bonner, « The Legal Setting of
Isocrates' Antidosis » , CPh 15 , 1920 , p. 193- 197 ;Mathieu 24 , p . 179 ; Norlin 6 ,
t. I, p . XVII, qui a signalé les principaux parallélismes entre les deux æuvres ;
Mikkola 7, p. 168 sqq.; Fuhrmann 107). Too 19 , p . 192 sqq., a expliqué cette
caractérisation dans le cadre de la pédagogie imitative d ' Isocrate , pour laquelle
cf. Id . 19, p. 151 sqq., notamment p. 184 sqq. Le disciple doit imiter les discours
du maître ,mais non pas les reproduire servilement. L 'identité de l'élève doit se
construire sur celle du maître (cf. supra ),mais elle doit rester différente . Isocrate
ressemble à Socrate , mais il garde son identité propre. Il y a donc des éléments
qui font d ’Isocrate un penseur différent de Socrate : celui-ci n 'a jamais écrit et il
a sapé l' autorité du texte écrit, tandis qu 'Isocrate sera son plus grand défenseur
face à l'Athènes « orale » (cf. Too 19, p . 194, et Kennedy 9, p. 182 n . 87).
Protagoras: Protagoras figure à tort parmi les maîtres d'Isocrate (cf.
Münscher 3, col. 2151; supra). Isocrate accepta bien quelques-unes des théories
que l'on trouve dans ses fragments , comme celle de la triade des conditions
nécessaires pour la formation de l' élève (DK B 3 ; cf. Steidle 59, p . 262 ; supra ),
mais ilmodifie d 'ordinaire les enseignements du sophiste:
- Tous deux ont été payés pour leurs cours, mais Protagoras pour son ensei
gnementrhétorique (cf. D . L . IX 56 ), Isocrate pour son enseignement de la vertu
et la justice (cf. Eucken 46 , p. 21 sq.).
- Tous deux ont considéré la doxa comme l'objet de leur recherche, mais
tandis que pour Protagoras le « paraître» et l'« être» se rejoignent et la doxa est
restreinte à la sphère subjective, pour Isocrate il s'agit d'un concept collectif qui
permet l'accès à la réalité (cf. Wilamowitz -Moellendorff 34 , t. II, p. 110 ; Jaeger
8, t. III, p. 116 et 118 ; Steidle 59, p. 262; Eucken 46, p. 32 sqq.).
- Ils diffèrent aussi à propos de la notion de « consensus» (cf. Platon, Théé
tète 166 a sqq.; Id ., Protagoras 322 b -d ; Isocrate, Éloge d'Hélène 11 sq.). Voir
Eucken 46, p. 72 sq.
- Dans Nicoclès 7, l'exaltation isocratique de la parole en tant qu' élément qui
rend possible la vie communautaire rappelle la formulation de Protagoras, chez
Platon , Protagoras 320 c sqq. (cf. 167 F . Dümmler, Chronologische Beiträge zu
einigen platonischen Dialogen aus den Reden des Isokrates, Progr. Basel 1890 ,
repris dans Kleine Schriften , t. I,Leipzig 1901, p. 114 ; 168 K . Ries, Isokrates
und Platon im Ringen um die Philosophia, Diss., München 1959, p. 90 ). Iso
crate , malgré tout, dépasse la formulation de Protagoras puisqu 'il fait dépendre
de la parole les principes de Dikè et d 'Aidôs, qui pour Protagoras étaient la
garantie ultime des lois (cf. 169 J. de Romilly,Magic and Rhetoric in Ancient
Greece, Cambridge (Mass.]/London 1975, p . 53 ; Eucken 46 , p . 253) .
Malgré ces influences, Protagoras n 'est cité que dans l'Éloge d 'Hélène (§ 2),
où ilest choisi comme représentant des sophistes anciens,auprès de Gorgias, de
914 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
Zénon et de Mélissos, et il est considéré comme prédécesseur des socratiques
dans l' élaboration de paradoxes (cf. infra ).
Gorgias : Sur l'apprentissage d'Isocrate auprès de Gorgias et sur sa datation
possible, ainsi que sur l'influence stylistique du sophiste sur Isocrate , cf. supra.
Isocrate mentionne le sophiste à trois reprises. Dans le proème de l' Éloge
d 'Hélène, il critique Gorgias ouvertement comme un des sophistes qui ont légué
des écrits paradoxaux , et le place dans une tradition d'auteurs de paradoxes qui
remonte aux philosophes éléates et se poursuit jusqu 'aux socratiques. Gorgias,
nous dit-il, « ose déclarer que rien n 'existe de ce qui est» ( 3 = DK 82 B 1).
Dans Sur l'échange 268 , il répète, avec certainesmodifications, cette désappro
bation des spéculations ontologiques stériles : les êtres étaient quatre selon
Empédocle, trois selon Ion , deux selon Alcméon , un selon Parménide et Mélis
sos, et absolument aucun d 'après Gorgias. Isocrate juge de telles spéculations
comme des « inventions extraordinaires » semblables à des « tours d'adresse
(Oavuatonoliaus) qui ne servent à rien » ($ 269).Le caractère négatif du juge
ment devientmanifeste ,comme l'a montré Too 19, p.238 (cf.aussi Wilcox 97),
quand on constate l' utilisation péjorative de ce même vocabulaire dans Panathé
naïque 77 sq. Dans ce même discours , Isocrate cite ($ 155 sqq.) l'exemple de
Gorgias pour prouver qu' être un maître professionnel n 'implique pas amasser
une grande fortune : bien qu 'il ait été le sophiste qui a gagné le plus d'argent
grâce à ses honoraires élevés et au fait de ne pas devoir entretenir une famille ni
aider sa patrie, puisqu 'il menait une vie itinérante , il ne laissa que mille statères à
sa mort ($ 156 = DK 82 A 18 ). En revanche, Isocrate a toujours vécu lié à sa
patrie , l' a aidée et a assuré son bien - être en dépit de ses revenus, très inférieurs à
ceux de Gorgias ($ 158). Quand Isocrate mentionne le sophiste, son jugementest
manifestementnégatif.
De plus, à deux reprises il fait allusion au sophiste sans le nommer en établis
sant une compétition avec lui. Dans l’Éloge d'Hélène, il loue l'auteur d'un traité
sur Hélène qui,malgré tout, a commis l' erreur de prétendre qu'il écrit un éloge,
quand en réalité c'est une apologie qu 'il a faite ( 14). De nos jours on ne doute
pas qu ’Isocrate fait référence à Gorgias.
Cf. Gorgias, Éloge d 'Hélène 21 (1. II, p. 294 DK ) ; Blass 1, t. II, p. 72 sqq. ; Drerup 79,
p . CXXXII ; Norden 161, t. I, p .64 ; 170 H . Gomperz , « Isokrates und die Sokratik » I, WS27 ,
1905 , 163- 207 ; II, WS 28 , 1906 , 1-42, notamment p . 2 sqq. ; Buchheit 60 , p . 33 et 54 sqq. ;
Eucken 46, p . 75 et n . 98 ; Too 19, p . 238 . Les objectionsde Spengel 56, p . 71-75 (reprises par
171 K . Münscher, « 'looxpátous ' Elévng éyxbulov » , RAM 54 , 1899, p. 270 -276 ; Id . 3,
col. 2182 sq.; Brémond 5 , t. I, p . 158 sq.), ont été réfutées, en partant de points de vue diffé
rents, par Buchheit 60, p . 57 sqq.; Eucken 46 , p. 76 sq. On peut voir des analyses compara
tives des deux éloges chez 172 L . Braun, « Die schöne Helena, wie Gorgias und Isokrates sie
siehen », Hermes 90, 1982, p. 158-174 ; Eucken 46 , p. 92 sqq.; 173 J. C . Capriglione, « Elena
tra Gorgia e Isocrate ovvero si l'amore diventa politica » , SicGym 38, 1985, p. 429 -443 ; et
174 K . Tuszyńska-Maciejewska, « Gorgias' and Isocrates' different Encomia of Helen » , Eos
75, 1987, p . 279-289. La compétition isocratique devient encore plus évidente si on considère
les deux écrits comme des allégories de la rhétorique, suivant la proposition de 175 J.
Poulakos, « Gorgias' Encomium to Helen and the Defense of Rhetoric » , Rhetorica 1.2 , 1983 ,
p . 1 - 16 ; et 176 Id ., « Argument, Practicality , and Eloquence in Isocrates' Helen » , Rhetorica
4 .1, 1986 , p . 1-19. D 'après l'interprétation de Kennedy 9, p . 180, et Too 19, p . 238, l' essentiel
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 915
de ce discours n 'est pas l' éloge qu'Isocrate fait de Gorgias en tant qu 'auteur de l'Éloge
d 'Hélène,mais le reproche qui vient ensuite .
Le Panégyrique est conçu aussi comme une compétition intellectuelle d'Iso
crate avec ses prédécesseurs dans les chants panhelléniques, notamment Gorgias
et Lysias, qui avaient l'un et l'autre prononcé un discours aux Jeux Olympiques
de 392a et de 3884, respectivement (cf. Münscher 3, col. 2186 , et 177 H .-J.
Newiger , c.r. de Buchner 153, dans Gnomon 33, 1961, p. 761-768 , notamment
p . 765). Il est donc très probable , comme l'a suggéré Norlin 6 , p. XIII, qu ’ Iso
crate doive à l'enseignement et à l'exemple de Gorgias l'idée que la rhétorique
doit traiter des sujets de grande importance, panhelléniques. Il existe des ressem
blances verbales entre le début de ce discours et celui de l’Olympique de Gorgias
(cf. Eucken 46 , p. 151). De même, aussi bien la pensée que l'expression du
$ 158,où Isocrate déclare que la guerre contre les barbares a inspiré des hymnes,
tandis que la guerre contre les Grecs a inspiré des chants funèbres, ont été
empruntées à l'Épitaphe de Gorgias (cf. Philostrate , Vies des sophistes 19 ).
Sur la vision qu'Isocrate avait de la guerre comme phénomène de base de la vie sociale
voir 178 M . Bettalli, « Isocrate e la guerra », Opus 11, 1992, p . 37-56 .
Gorgias est donc le modèle oratoire qu’ Isocrate cherche à dépasser (cf. 179 C .
Natali, « Evitare Gorgia . La posizione di Isocrate verso il suo maestro » ,
SicGymn 38, 1985, p. 45-55 ). Cependant, la dette contractée par Isocrate envers
lui est grande. Tout d 'abord , Isocrate, de même que Gorgias dans son Éloge
d'Hélène 13, définit sa propre activité dans Contre les sophistes comme « philo
sophie » , en interprétant les discours philosophiques comme des disputes sur des
questions pratiques et éthiques (cf. Eucken 46 , p. 17 sq.). C 'est à lui qu' il a
emprunté l'idée du rapport entre la pensée et la communication , ainsi que l'idée
du pouvoir psychologique de la parole . On a envisagé une influence des idées de
Gorgias sur trois conceptions fondamentales de la pensée isocratique :
- Gorgias aurait influencé la conception du royoc d 'Isocrate. Il y a cependant
une différence fondamentale entre la description du logos dans l'Éloge d 'Hélène
deGorgias et son exaltation dans Nicoclès 5-9 : pour Gorgias il s'agit de quelque
chose de subjectif qui ne transcende pas les limites de l'individu, tandis que pour
Isocrate c 'est quelque chose d 'objectif et d 'inter-personnel qui permet la culture
(cf. Romilly 169, p . 52 sqq.; Eucken 46 , p. 254 ). Leur conception différente du
rapport entre le langage et la réalité a été analysée par 180 S. Jaekel,« Philo
sophisch orientierte Ansätze einer Sprachtheorie bei Gorgias, Isokrates und
Epikur», Arctos 22, 1988, p. 43-57.
- Gorgias aurait influencé aussi la conception de la boca d'Isocrate
(cf.Wilamowitz -Moellendorff 34 , t. II, p. 110 ; Jaeger 8, t. III, p. 116 , 118 ;
Steidle 59, p . 262). Cependant, Eucken 46 , p . 34, s'est opposé à juste titre à cette
idée : Gorgias définit la doxa d'une façon négative et la considère comme un
motif d'infortune (cf. Éloge d 'Hélène 11 sqq., et Palamède 24), tandis que pour
Isocrate c'est un motif de succès et de concorde et la seule chose qui permette
une orientation positive vers la réalité (cf. supra).
- Enfin , Gorgias aurait influencé la conception du xalpós d ' Isocrate
(cf. Contre les sophistes 16 ; aussi 181 W . Süss, Ethos. Studien zur älteren
916 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
griechischen Rhetorik , Leipzig/Berlin 1910 , réimpr. Aalen 1975, p. 18 sqq. ;
182 J.Wilson , « KAIROS as “ DueMesure” », Glotta 58 , 1980, p. 199). En revan
che, Steidle 59, p. 271 sq., et Eucken 46 , p. 29, signalent qu'on ne sait rien sur le
contenu du traité de Gorgias à ce sujet,mais on peut supposer qu 'il essayait d 'y
enseigner théoriquement la saisie du moment opportun , ce qui serait contraire au
programme d'Isocrate (cf. aussi Cahn 43, p . 129, et supra ).
L ' affirmation qu' on lit dans le Panegyrique que « la nature de la parole est telle qu' on peut
(...) rendre petites les grandes choses et donner de la grandeur aux petites, exposer de façon
nouvelle les idées anciennes et parler de façon classique sur les événements récents » ($ 8 ),
rappelle la formule que Platon , Phèdre 276 a -b, attribue à Tisias et à Gorgias. La ressemblance
des expressions fut remarquée par Ries 168 , p. 101, et 183 G . J. de Vries, A Commentary on
the Phaedrus of Plato, Amsterdam 1969, p. 222 sq. En dépit de la référence aux rhéteurs
siciliens, 184 G . Teichmüller, Literarische Fehden im vierten Jahrhundert vor Chr., 2 vol.,
Breslau 1881 -1884 , t. I, p . 72 sq., et 185 H . Raeder, Platons philosophische Entwicklung,
Leipzig 1905, p . 273 sq., ont compris cette ressemblance comme une critique adressée à la
formulation isocratique ; contra Eucken 46 , p. 270 sq.
Les Socratiques : Cf. Gomperz 170 ; 186 Chr. Eucken , « Prinzipien des
Handelns bei Isokrates und den Sokratikern », ZfP 25, 1978, p . 142-153 ; Id. 46 ,
p. 18-25 et 45 sqq. Le Contre les sophistes commence par une attaque adressée
contre « ceux qui s 'adonnent aux discussions (TWV nepì tàç špidas Platpl
Bóvtwv) ». Les éristiques ou disputeurs sont les philosophes socratiques, comme
le montre le fait qu ' Isocrate , tout au long de ses écrits, associe la dispute (épis)
aux socratiques , soit à tous les socratiques en général, soit à Platon ou Aristote
en particulier (cf. Éloge d'Hélène 6 , Sur l'échange 258 et 261, et Épître à
Alexandre 3 ; voir Gomperz 170, p. 172 sq., et Eucken 46 , p . 8 sqq.).
On a pensé que la cible de l'attaque était un groupe concret de socratiques: 187 L .
Spengel, Isokrates und Platon , coll. ABAW 7 ,München 1855, p . 747, a songé aux philosophes
mégariques; d 'autres critiques ont songé à Platon (cf. 188 H . Bonitz, Platonische Studien, 3e
édit., Berlin 1886 , réimpr. Hildesheim 1968, p . 136 n . 26 ; Jaeger 8 , t. III, p . 115 et 398 ;
Steidle 59, p. 259 ; Ries 168, p . 25 sqq.) ; à propos d 'Antisthène, cf. infra . Isocrate, cependant,
dans le but d'atteindre le plus grand nombre d'adversaires par son attaque, semble avoir
consciemment passé sous silence les traits distinctifs des différents groupes de socratiques (cf.
189 A . Patzer, Antisthenes der Sokratiker. Das literarische Werk und die Philosophie dar
gestellt am Katalog der Schriften , Diss. Heidelberg 1970 , p . 239 sqq. ; Eucken 46 , p. 19 sq. ;
Hudson -Williams 130, p . 21; 190 G . Giannantoni, SR , t. III, Roma 1985, p. 246 ; Too 19,
p. 160 sq.).
Isocrate critique les principes socratiques qui s'opposent davantage à sa
propre philosophie (§ 1-8 ): les socratiques proclament qu'ils cherchent la vérité,
mais ils démentent leur programme par leurs mensonges (§ 1). Ils prétendent
aussi posséder une science quimène au bonheur et pouvoir la transmettre (§ 3) ;
néanmoins, le bonheur est en rapport avec l'adéquation à des circonstances
concrètes, c'est pourquoi posséder une telle science équivaut à la capacité de
prévoir l'avenir. Bien que cette science soit si importante, ils ne demandent en
échange qu’un mince salaire : trois ou quatre mines seulement ($ 3). Et ils ne se
fient même pas à leurs disciples, puisqu 'ils exigent en garants de ceux -ci des
gens qui n 'ont jamais été leurs élèves, ce qui est illogique (§ 4-6). Dans § 7-8 ,
Isocrate récapitule ses critiques et en fait l'objet du consensus général concernant
les occupations des socratiques : « bavardage et petitesse d 'esprit (ådoreoxiav
1 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 917
xai ulxponoviav) etnon pas culture de l'âme( tñs quxñséléNelav )». Mais,
même si l'enseignement des socratiques, lorsqu'il est pratiqué,produit des résul
tats désastreux, il est, en tout cas, meilleur que celui des maîtres de rhétorique
(§ 20 ), parce que les premiers ont au moins promis dans leur discours vertu et
prudence, tandis que ceux -ci ont voulu enseigner par indiscrétion et convoitise
(cf. Éloge d 'Hélène 6 ).
Dans l'Éloge d'Hélène,Isocrate considère toujours les socratiques comme des
philosophes disputeurs. Isocrate les différencie des autres disputeurs (ärol dé),
les rhéteurs , renforçant ainsi la distinction du Contre les sophistes (cf. Patzer
189 , p. 242 sq., Eucken 46 , p. 47 sqq., et infra ). Il divise à nouveau les socrati
ques, qui se vantent de pouvoir disserter de manière appropriée sur un argument
étrange et paradoxal (äronov xai napádočov), en deux groupes : les uns
(notamment Antisthène; cf. infra ) ont atteint la vieillesse, en affirmant qu 'il
n 'est pas possible de mentir, nide contredire , ni d'opposer deux développements
sur les mêmes thèmes, tandis que les autres, expliquant que le courage, la
sagesse et la justice sont la même chose, que par nature nous ne possédons
aucune de ces qualités et qu 'il n'y a qu'une science (Énlotnun) qui les concerne
toutes. Isocrate disqualifie l' éthique des socratiques en les situant dans une
ancienne tradition de paradoxes qui remonte à la spéculation éléatique et
sophistique sur l'être( cf. § 3).
Antisthène : Le représentant principal des socratiques au moment où Isocrate
compose ses premiers discours est Antisthène et non pas Platon , dont l'école ne
dépassera que plus tard la renommée et le prestige de celle d 'Antisthène ( cf.
néanmoins Hudson -Williams 130, p . 20 sq.). A l'époque où Isocrate ouvrait son
école , Antisthène établissait la sienne. C 'est vers 392a qu 'il faut situer les pre
miers traités programmatiques de son école : la Vérité ('AnńDela ), de caractère
logico -dialectique, et un Protreptique à finalité éthique (SR fr. V A 208 ; cf.
191 A . Brancacci, OIKEIOS LOGOS. La filosofia del linguaggio diAntistene, coll.
« Elenchos» 20, Roma/Napoli 1990 , p . 36 et 97 sqq.). C 'est donc une opinion
majoritaire que la cible principale (parfois la seule ) de l'attaque qui ouvre le
discours Contre les sophistes est Antisthène.
Cf. 192 H .Usener, Quaestiones Anaximeneae, Göttingen 1856 , p. 12 (= Kleine Schriften ,
t. I, Leipzig /Berlin 1912, p. 10 ) ; 193 Id ., « Abfassungszeit des platonischen Phaidros» , RAM
35, 1880, p. 131- 151, notamment p. 137 (= Kleine Schriften, t. III, Leipzig /Berlin 1914 , p. 55
74 ) ; 194 F . Überweg, Untersuchungen über die Echtheit und Zeitfolge platonischer Schriften
und über die Hauptmomente aus Plato 's Leben , Wien 1861, p . 257 ; 195 Id ., « Zu Isokrates» ,
Philologus 17 , 1868, p . 175-180, notamment p. 175 sqq. ; Teichmüller 184, t. I, p. 84 ; 196 C .
Reinhardt, De Isocratis aemulis, Thèse, Bonn 1873 , p. 24 - 28 ; 197 P . Natorp, art. « An
tisthenes » 10, RE I 2, 1894 , col. 2538 - 2545 , notamment col. 2540 ;Münscher 3, col. 2172 sq. ;
Wilamowitz -Moellendorff 34, t. II, p. 108 sq .; Raeder 185, p. 138 ; Burk 4, p. 33 sq. et 51;
198 W . Burkert, c .r. de Ries 168 , dans Gnomon 33 , 1961, p . 349- 354 , notamment p . 351 ;
Eucken 46 , p. 25 sq ., 45 sq. et 65 sqq. ; Giannantoni 190, p . 245 sq. ; Brancacci 191, p. 97 sqq.
Les données suivantes, exposées surtout par Überweg 195 et Eucken 46 ,
semblent confirmer cette opinion :
- Le fait que les Socratiques feignent de chercher la vérité (§ 1 årńDelav
Inteīv), alors que dès le débutde leurprogramme (énáyyarma ) ils se mettent à
918 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
mentir (Levon Réyelv ), semble faire allusion de façon burlesque au traité Vérité
(sur ce traité, cf.Giannantoni 190, p . 300 sq., et Brancacci 191, p. 25 sqq. et 97
sqq.).
- La prétention d'une science dogmatique et absolue (§ 2 sq .) n'a aucun rap
port avec la maïeutique socratique ni avec les premiers dialogues aporétiques de
Platon ,mais elle se rapproche des doctrines d' Antisthène ( cf. Eucken 46 , p. 20 ).
- La prévision des åyadá et xaxá futurs ($ 2) aurait été enseignée par
Antisthène, de la même manière que par le Socrate du Lachès platonicien (cf.
199 K . Jöel, « Zu Platons Laches» , Hermes 41, 1906 , p. 310-318 , notamment
p . 314 , 200 M . Pohlenz, Aus Platos Werdezeit, Berlin 1913, p . 29 sq.,Münscher
3, col. 2173, et récemment Brancacci 191, p. 102).
- Isocrate montre l' impossibilité de prévoir l'avenir en alléguant l'autorité
d'Homère (§ 2). Eucken 46 , p. 26 , suggère que l'on peut rapprocher cela du fait
qu ’Antisthène avait consacré plusieurs æuvres à l'interprétation des poèmes
homériques.
- Antisthène touche des honoraires pour son enseignement ($ 3); cf. D . L . VI
9 (= SR fr. V A 172).
- Antisthène soutient que la vertu peut s'enseigner (§ 4 ) ; cf. D . L . VI 10 et VI
104 sq . (= SR fr. V A 134 et 135).
- Il y a des échos dans le vocabulaire: pour å avátous ( $ 4 ), cf. D . L . VI 10
( = SR fr . V A 135 ) ; pour uegey YVOūUTAS ( 5 ) , cf. D . L . VI 9 (= SR fr. VA
172 ).
- Les disputeurs affirment « qu 'ils n 'ont nul besoin de biens, qualifiant la
richesse de métal vil et d'orméprisable (åpyupídlov xai xpuoídlov)» (8 5). Sur
le mépris d'Antisthène pour la richesse et sur sa vie austère, voir Xénophon,
Banquet IV 34 sqq. (= SR fr. V A 82).
- La critique envers ceux qui observent les contradictions dans les mots mais
n 'examinent pas celles des actions ($ 7) peut aussi faire allusion à Antisthène ;
parmi ses traités (cf. D .L . VI 17), on trouve un Mepi Taldeias ñ nepi óvouá
των, et un Περί ονομάτων χρήσεως ή εριστικός egalement (sur la signification
de Éplotixóc dans ce titre, voir Giannantoni 190 , p. 225 , et Brancacci 191, p. 32
et 45). Les deux traités auraient été composés peu après le traité Vérité (cf.
Brancacci 191, p. 36 sq.).
Brancacci 191, p . 102 sqq., a suggéré que l'écrit d 'Antisthène qu’Isocrate a sous lesyeux
en faisant ces critiques n 'est pas la Vérité, comme on le pense généralement,mais le Protrep .
tique qu 'on lit chez Dion Chrysostome, Discours XIII 16 -27 ( = SR fr. V A 208 ), où la
« recherche de la vérité » s'identifiait à Diogopelv et formait un tout avec émiomun. Il a éga
lement proposé (p. 38) que la réplique à ces violentes attaques serait une série de pamphlets à
propos de l'activité logographique d ' Isocrate qui donnèrent lieu à la réplique tardive du pen
seur dans Panegyrique 188 sq. ( cf. infra ).
Dans le proème de l'Éloge d'Hélène (385a), Isocrate s'attaquait, entre autres,
à ceux qui « ont atteint la vieillesse , en affirmant qu 'il n 'était possible ni de dire,
ni de contester des erreurs , ni d'opposer deux développements sur les mêmes
thèmes » ( $ 1). Étant donné l'âge évoqué aussi bien que le contenu de cette cri
tique, il se réfère exclusivement à Antisthène.
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 919
Cf. Spengel 56 , p . 73 ; Id. 187, p . 755 ; Usener 192, p . 9 (= Kl. Schr., p . 8 ); Gomperz 170,
p . 174 et n. 1 ; Münscher 3, col. 2181 ; Brémond 5, t. I, p. 155 ; Ries 168 , p. 50 ; Patzer 189,
p . 241 sqq. et n . 138 ; Eucken 46 , p . 9 et 46 ; Giannantoni 190 , p. 246 sq. ; Brancacci 191,
p. 240 sq.
Le contenu de l'attaque s'adapte parfaitement à l’’Annoela d'Antisthène, où ,
comme dans l'æuvre homonyme de Protagoras, était traitée la théorie commune
de l'impossibilité de contredire (cf. Panégyrique 7-8 infra; 201 R. Hirzel, Der
Dialog. Ein literarischer Versuch , Leipzig 1895, réimpr. Hildesheim 1963, t. I,
p. 119, et Patzer 189, p. 115). Voir aussi 202 O . Gigon , Sokrates. Seine Bildung
in Dichtung und Geschichte, Bern 1947, p . 296 , selon lequel dans ce traité
Antisthène exposerait sa thèse sur le rapport de l'homme et de l’être, sous la
forme d 'un débat sur la tradition éléatico - sophistique (cf. Giannantoni 190 ,
p. 299 sq.). Antisthène aussi serait inclus parmi les disputeurs du deuxième
groupe de socratiques, dans la mesure où il soutenait que tous les actes du sage
sont guidés par la vertu (cf. SR fr. V A 192).
On a considéré que d'autres passages du proème faisaient référence à Antisthène : dans $ 8
il rapporte que certains « osent écrire que la vie des mendiants et des exilés ( tāv ntw
YEVÓVTWv xai bevyóvrwv) est plus enviable que celle des autres hommes » (cf. Usener 192 ,
p . 9 = Kl. Schr., p . 8 ; 203 A .Mueller, De Antisthenis Cynici vita et scriptis , Thèse,Marburgi
Cattorum 1860 , D. 18 n. 2 ; Überweg 195 , p . 179 ; Gomperz 170 , p . 175 ; Eucken 46 , p . 65 ;
contra , Münscher 3 , col. 2182 ; Patzer 189, p . 244 sq. ; Giannantoni 190, p . 249). Dans le $ 12,
il critique des orateurs « qui ont voulu faire l' éloge des Boußudiol, du sel ou de semblables
sujets » . Boußuriós peut signifier « bourdon » (ainsi le traduisentMathieu et Brémond 5, t. I,
p . 166 ), mais aussi une sorte de récipientpour boire, et c'est dans ce deuxième sens que l'uti
lise Antisthène dans son Protreptique (SR fr. V A 64 ; cf. 204 A . W . Winckelmann, Antisthenis
fragmenta , Turici 1842, p. 21 ; Gomperz 170, p. 175 ; Eucken 46 , p. 70 sq .; Giannantoni 190,
p. 249 ; contra,Münscher 3, ibid., etPatzer 189, ibid .)
L 'attaque contre les disputeurs se poursuit dans la section centrale (cf. Eucken
46 , p. 101 sqq., et Poulakos 176 ). Gomperz 170 , p. 175, avait déjà détecté dans
la comparaison entre Thésée et Héraclès (§ 23 sqq.) une critique de l'idéalisation
d'Héraclès par Antisthène. Cette idée a été développée par Eucken 46 , p. 101
sqq. Isocrate s'oppose à l'idée exposée par Antisthène dans l'Héraclèsmajeur, à
savoir que le tróvoç est un bien qui permet à l'homme de se suffire à lui-même
(cf. SR fr. V A 97 -99 ): Héraclès effectua ses novou en tant que sujet
d'Eurysthée, et donc comme un être non -autosuffisant; en outre, les dangers les
plus célèbres et les plus graves qu 'il dut affronter « étaient sans utilité pour autrui
et ne comportaient de risques que pour lui seul» ($ 25). Isocrate recaractérisera
plus tard le concept de novos ( 8 52 sqq.) comme utile à la communauté et
orienté vers la divinité , ce qui suppose qu 'il a essayé de dépasser la conception
de l’autarcie morale proposée par Antisthène. Face à son refus de l'égalité et de
la démocratie (cf. Aristote, Politique 1284 a 15 sqq. = SR fr. V A 51), Isocrate
défend dans l'excursus sur Thésée que l'homme ne peut être libre qu'à l' inté
rieur de la communauté, c'est-à-dire en étant un citoyen, et il défend le système
démocratique.
Eucken 46 , p. 103, a signalé une autre opposition possible à Antisthène. La figure de Thé
sée et de la démocratie athénienne est construite sur le modèle du discours funèbre que Péri
clès prononça chez Thucydide (cf. supra ). D 'après 205 H . Dittmar, Aischines von Sphettos.
Studien zur Literaturgeschichte der Sokratiker, coll. « Philologische Untersuchungen » 21,
920 ISOCRATE D 'ATHÈNES 1 38
Berlin 1912, p . 1 -17, l’ ’Aonaola d ' Antisthène (tome VI, nº 23 ; la numérotation suit l'édition
du catalogue tel qu'il a été édité par Patzer 189, p . 111-117, et reproduit dans DPHA A 211,
t. I, p . 252 sq.) consistait en une sévère invective contre Périclès, qui avait succombé à sa pas
sion pour Aspasie (cf. SR fr. VA 142-144 ; cf. Giannantoni 190, p. 295 -297). Isocrate aurait
donc réhabilité la figure de Périclès et son amour pour Aspasie à travers l'amour de Thésée, le
meilleur des héros, pour Hélène.
Au fur et à mesure que Platon acquiert de la réputation, Antisthène passe au
second plan dans les écrits d ’Isocrate . Dans le Panegyrique on peut encore trou
ver des allusions polémiques. En § 7 -8, Isocrate remarque qu'il n 'est pas impos
sible de faire connaître un même fait autrement que par une seule expression,
mais que « la nature de la parole est telle qu 'on peut s 'expliquer de bien des
façons sur le mêmesujet» . C 'est justement le contraire de ce qu 'Antisthène avait
soutenu dans son traité 'Aandela (cf. supra ). Vers la fin de l'æuvre, Isocrate
exhorte les Grecs à chercher la réconciliation d'Athènes avec Sparte , et il invite
ceux qui prétendent à l'éloquence à « cesser d'écrire contre le Dépôt (npoç tņu
napaxataOnxnv) et sur les autres sujets futiles d 'aujourd 'hui» et à rivaliser
avec le discours qu'il vient de faire . On y a vu une allusion au Contre Euthynous
qu 'Isocrate composa pour faire face à Lysias dans un procès qui eut lieu vers
4030/402a (qui peut coïncider ou non avec le discours qui nous est parvenu ; cf.
supra ) et où il s'agissait d'un dépôt fait en l'absence de témoins ; voir, néan
moins, 206 R .J. Bonner, « Note on Isocrates' Panegyricus IV 188 », CPh 15 ,
1920 , p. 385- 387, qui considère le dépôt comme un lieu commun d'exercices
oratoires. Antisthène aurait composé comme réplique un Ipòs tov 'looxpá
TOUS 'Auáptupov (Catalogue, tome I, n° 7 ; cf. Blass 1 , t. II, p. 219 sqq . ;
Münscher 3 , col.2157 sq.; Mathieu et Brémond 5 , t. II, p. 63 n . 4 ; Patzer 189,
p . 245 sq.; Eucken 46 , p. 160 sq.). Ce traité fut publié selon toute probabilité en
riposte aux premiers traités scolaires d' Isocrate, quand celui-ci niait avoir écrit
des discours judiciaires, ce qui augmenterait le mordant de l'attaque (cf.
Giannantoni 190, p. 244, et Brancacci 191, p. 38 ). Outre cette cuvre, nous trou
vons les titres suivants dans le catalogue d 'écrits d’Antisthène: lepi tõu
dixoypáowv, 'looypáon < c> xai Aeolaç ñ 'looxpárns (tome I, nº 5 et 6 ). Il
est difficile de savoir le titre précis de ces traités, de même que leur nombre.
Les différentes propositions ont été examinées par Giannantoni 190, p. 239-243, qui sug
gère (p. 243) l'existence d 'une seule æuvre appelée Nepi tūv Olxoypáowv: ' looypáon < c> ñ
Aeolas, avec le sous-titre 'looxpátous 'Auáprupov. Antisthène y aurait déformé les noms
d 'Isocrate et de Lysias, adversaires dans ce procès-là, de la mêmemanière qu'il appela Platon
« Záowy » (cf. 207 M . Pohlenz , « Antisthenicum » , Hermes 42, 1907 , p. 157- 159 ; Wilamo
witz -Moellendorff 34 , t. II, p. 113 sqq. ; Kroll 25, col. 1051 sq.; 208 F . Decleva Caizzi (édit.).
Antisthenis fragmenta , Milano /Varese 1966 , p . 78 sq . ; 209 M . Tulli, « Sul rapporto di Platone
con Isocrate : Profezia e lode di un lungo impegno letterario » , Athenaeum 78, 1990, p. 403
422, notamment p . 409) .
La polémique entre Isocrate et Antisthène semble se terminer par cette réfé
rence (cf. Patzer 189 , p . 246 ). A mesure que nous avançons dans le temps, les
références à Antisthène sontmoins probables (cf. Giannantoni 190, p. 249, qui a
compilé les propositions d'allusions d'Isocrate à Antisthène après le Panégy
rique ).
138 ISOCRATE D 'ATHÈNES 921
Platon :
Cf. la bibliographie ancienne chez Münscher 3 , col. 2171; Blass 1 , t. II, p. 28-41 ; 210 F.
Schleiermacher, Platons Werke, Berlin 18553, t. I 1, p. 51, 279, 366 ; Spengel 187, p. 731
769 ; 211 Id ., « Isokrates und Platon », Philologus 19, 1863, p. 593-598 ; 212 L . Konvalina,
Die Prophetie in Platons Phaedrus und Isokrates ' Rede gegen die Sophisten , Progr. Marburg
1866 ; 213 W . H . Thompson (édit.), Plato. Phaedrus, London 1868, p. 170- 183 ; 214 C . Huit,
« Platon et Isocrate » , REG 1, 1888, p. 49-60 ; Blass 1 , t. II, p. 28 -41 ; Jebb 2, t. II, p. 3 sq. et
49-53 ;215 E. Holzner, Platon 's Phaedrus und die Sophistenrede des Isokrates, Prague 1894 ;
Gomperz 170 ; Raeder 185 , p . 269 sqq. ; 216 C . Ritter, Platon , t. I, München 1910 , p . 209
215 ; Wilamowitz -Moellendorff 34, t. II, p. 106 -125 ; Burk 4, p. 29- 32 et 199 sqq. ; 217 G .
Rudberg, « Isokrates und Platon » , SO 2, 1924, p . 1 -25 ; 218 M . Mühl, « Zu Isokrates und
Platon » , PhW 1926 , p. 1289 ; Mathieu 24, p. 177 sqq. ; 219 Id., « Les premiers conflits entre
Platon et Isocrate et la date de l' Euthydème» , dans Mélanges Gustave Glotz, Paris 1932,
p . 555-564 ; 220 L . Robin , « Notice » , dans C .Moreschini et P. Vicaire , Platon. Phèdre, CUF,
2e édit., Paris 1985 (19331), p. VII-CCV, notamment p. XXXII-XXXV et CCI-CCV ; 221 R .
Flacelière , « L 'éloge d' Isocrate à la fin du Phèdre», REG 46, 1933, p. 224 sqq.; 222 R .L.
Howland, « The Attack on Isocrates in the Phaedrus» , CO 31, 1937 , p . 151 sqq.; Mathieu 5 ,
t. III, p. 91 s99. ; 223 0 . Regenbogen , « Bemerkungen zur Deutung des platonischen
Phaidros » ,Misc. Acad . Berlin 2.1, 1950, p. 189-219 (= Kleine Schriften , München 1961,
p . 248- 269) ; Steidle 59, p . 288 -293 ; 224 G . J. de Vries, « Isocrates' Reaction to the
Phaedrus» , Mnemosyne 6, 1953, p. 39-45 ; Jaeger 8, t. III, p. 257 sq.; Ries 168 ; Burkert 198,
p. 352 sq. ; Buchheit 60, p. 90 sqq.; 225 J.A . Coulter, « Phaedrus 279 A : The Praise of
Isocrates » , GRBS 8, 1967, p. 225 -236 ; G .J. de Vries 183, p. 15 sqq et 263 sq .; 226 ld.,
« Isocrates in the Phaedrus. A Reply » ,Mnemosyne 24 , 1971, p. 387 -390 ; 227 Id., « Plato en
de rhetorica » , Lampas 9, 1976 , p . 158 sqq. ; Romilly 169, p . 57 sq. ; Lesky 13, p. 660 sq. ;
228 H . Erbse ,« PlatonsUrteil über Isokrates», Hermes 1971, p. 183-197 (repris dans Seck 15,
p. 329-348, avec addendum de 1973, p. 348 -352); 229 M . Brown et J. Coulter, « The Middle
Speech of Plato 's Phaedrus » , JHPh 9, 1971, p. 405-423 ; 230 V . Tejera, « Irony and Allegory
in the Phaedrus » , PhRh 8, 1975 , p. 71-87 ; 231 F . Seck , « Die Komposition des “ Panegy
rikos ” » , dans Seck 15 , p . 353-370, notamment p . 364 sqq .; 232 N . Voliotis, « Isocrate et
Platon . Un effort pour interpréter Phèdre 278 e-279 b » (en grec moderne ), Platon 29, 1977 ,
p . 145 - 151; 233 Id., « Le terme" philosophie " dans les æuvres d 'Isocrate et les aspects remar
quables dans celles de Platon et d'Aristote » (en grec moderne), Platon 30 , 1978 , p . 134 - 139 ;
234 Id., « La théorie isocratique de la connaissance par rapport à Platon et à Aristote » (en grec
moderne), Platon 31, 1979 , p. 252-259 ; 235 Id ., « Recherches religieuses etmétaphysiques au
IVe siècle av. J.-C . La théologie de Platon et d ' Aristote en relation avec Isocrate » (en grec
moderne), Platon 32- 33, 1980 -81, p . 356 - 366 ; 236 J. Laborderie , Le dialogue platonicien de
la maturité, Paris 1978, p. 436 -440 ; 237 R . Burger, Platos 's Phaedrus, Alabama 1980 , p . 115
sag .; 238 S . Dusanić, « The Political Context of Plato 's Phaedrus» , RSA 10, 1980, p . 1- 26 ;
239 R . Clavaud, Le Ménexène de Platon et la rhétorique de son temps, Paris 1980, p. 297
302 ; Eucken 46 , p. 271 sqq . ; 240 N .D . Démétriadès, Anatomie de la rhétorique. Le désac
cord entre Isocrate et Platon (en grec moderne), Athènes 1983 ; 241 D . Babut, « Sur quelques
énigmes du “ Phèdre " », BAGB 3, 1987 , p . 258 sq., 281 sqq.; 242 M . Laplace, « L 'hommage
de Platon à Isocrate dans le Phèdre » , RPh 62, 1988, p. 273- 281 ; 243 E . Heitsch , « Tiulo
tepa » , Hermes 117, 1989, p . 278 -287 ; Lombard 18 , p . 17 sq. ; 244 Th . A . Szlezák, « Zum
Kontext der platonischen Thuidtepa . Bemerkungen zu Phaidros 278b-e » ,WJA n.s. 16 , 1990 ,
p. 75 -85 ; Tulli 209 ; 245 T. H . Irwin , « Plato : The Intellectual Background » , dans R . Kraut
( édit.), The Cambridge Companion to Plato , Cambridge 1992, p . 51-89, notamment p . 67 ;
246 G . Mazzara, « Lysias et Isocrate : ironie et simulation dans le Phèdre » , dans L . Rossetti
(édit.), Understanding the “ Phaedrus ". Proceedings of the II Symposium Platonicum , coll.
« Intern. Plato Studies » 1, SanktAugustin 1992, p. 214 -217.
A la fin du Phèdre (278 e - 269 b), Socrate porte un jugement sur son « com
pagnon (Étaſpoç)», le « bel Isocrate ('looxpárnu tòv zaróv)» (278 e): ses
922 ISOCRATE D 'ATHÈNES 1 38
qualités naturelles (tà tñs púoews) lui donnent trop de supériorité pour qu 'on
compare son éloquence à celle de Lysias ; en outre , son temperament moral
(ňoel) est plus noble (279 a). Ensuite il prophétise (279 a-b) : il n 'y aurait rien
d ' étrange à ce que, avec le temps, dans ce même genre d'éloquence qu' il prati
que à présent, il laissât en arrière, comme des enfants, tous ceux qui quelquefois
se sont adonnés à l' éloquence ; ni non plus, si cela ne le satisfaisait pas, à ce
qu 'une impulsion plus divine (tig opun Delotépa ) le menât à de plus grandes
choses (éni ueícw ). « La nature (púbel), dit Socrate, a mis dans son esprit une
certaine philosophie (TLS Qlooopia )» .
L 'analyse de l'éloge est compliquée : on doit situer la prophétie sur l'avenir
d ' Isocrate à la fin du Va, tandis que, lorsque le Phèdre est publié, le penseur a
dépassé la soixantaine; on a donc pensé que l' éloge nemanquait pas d 'une cer
taine ironie (cf. Flacelière 221 ; Voliotis 232 ; Eucken 46 , p . 271 sqq.; Laplace
242 ).
L 'interprétation du passage commeune raillerie envers un jeune homme qui promettait
d 'aller très loin , mais qui, finalement, n ' a pas progressé dans le sens que lui prédisait Socrate ,
a été souvent reprise (cf. Spengel 187, p . 19 et 39 ; Jebb 2 , t. II, p . 50 ; Raeder 185 , p . 269
sqq. ; Howland 222 ; de Vries 183 et 224 ; Coulter 225 , 226 et 227 (contestés par Erbse 228 ) ;
Burger 237, p . 115 sqq.; Heitsch 243; Irwin 245, p. 67 ; Mazzara 246, d 'après qui, derrière la
figure de Lysias, Platon aurait caché celle d 'Isocrate). En revanche, d'autres critiques, ainsi
que la Vie anonyme (Mathieu et Brémond 5 , p . XXXV , 93 sqq.), ont soutenu que Platon faisait
un éloge sincère d'Isocrate (cf. Schleiermacher 210 , t. I 1, p . 51 ; Blass 1, t. II, p . 28 sqq. ;
Wilamowitz -Moellendorff 34 , t. II, p. 106 sqq. et 121 sq. ; Ries 168 , p . 90 - 129, et récemment
Tulli 209). D 'après Tulli 209, l'évolution que Socrate envisage pour lui est celle qui se pro
duisit dans la première décennie du Iva, quand Isocrate abandonna la rhétorique judiciaire
pour se consacrer à l'éloquence épidictique. La confrontation entre les discours judiciaires
d'Isocrate et ceux de Lysias était devenue traditionnelle dans la première moitié du Iva :
Antisthène et Speusippe ont penché pour Lysias, Platon pour Isocrate , qui est plus ou moins
un échelon intermédiaire entre Lysias et la rhétorique philosophique que le philosophe pro
pose dans le Phèdre (cf. Brown et Coulter 229 ; Tejera 230 ; 247 E . Asmis, « Psychagogia in
Plato 's Phaedrus » , ICS 11, 1986 , p . 153 -172 ; 248 M . Laplace, « Platon et l'art d'écrire des
discours : critique deLysias et d' Isocrate , influence sur Denys d 'Halicarnasse », Rhetorica 13,
1995, p. 1-15). Tout cela n'interdit pasde percevoir toutdemême une attaque dans l'éloge, si
légère soit-elle : le passage de la logographie aux grands discours politiques présuppose qu'l
socrate fut un logographe pendant quelque temps, ce qu 'il essaya de cacher depuis le début de
son activité éducatrice (cf. supra. On lit une interprétation historique de l'éloge dans Dusanić
238 ).
C 'est là l'unique mention d 'Isocrate conservée dans le corpus platonicien .
Mais, aussi bien dans les écrits de l'un que de l'autre , on a détecté de nom
breuses allusions réciproques, la plupart du temps polémiques. Ce rapport a été
récemment étudié à fond par Eucken 46 , qui a réalisé un traitement équilibré en
évitant de subordonner un penseur à l'autre. Isocrate a adopté avec Platon la
même stratégie polémique qu'avec Antisthène (cf. supra) : il évite l' affrontement
ouvert et se réfère à lui au moyen d'allusions indirectes mais facilement compré
hensibles par les lecteurs contemporains. Pour sa part Platon , à la différence
d'Antisthène, assume dans cette polémique les armes de son adversaire, et fait
référence à lui de la mêmemanière indirecte et allusive. C 'est donc une tâche
épineuse que dedécider quand les parallélismes entre les deux auteurs supposent
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 923
un affrontementde leurs théories(cf. 249 W . Burkert, c.r. d’Eucken 46, dansMH
42, 1985, p. 355 sq., Hudson -Williams 130, p. 20 sq., et surtout 250 W . K .C .
Guthrie , A History of Greek Philosophy, t. IV , Cambridge 1975, p . 308 ). Un
autre problème qui rend difficile l'analyse est celui de la chronologie des dia
logues de Platon , qui, bien souvent, empêche d ' établir avec certitude un rapport
de cause à effet (cf. Burkert 198 , p. 350 ; 251 R . Nickel, c.r. d'Eucken 46 , dans
Gymnasium 92, 1985, p . 545-547, notamment p . 545 ). Tulli 209 , p . 403 sq., est
sceptique par rapport aux résultats de cette recherche. Suivant essentiellement
Eucken 46, nous allons exposer les points principaux de cette polémique tacite.
(1) Le Gorgias de Platon :
L'attaque de Contre les sophistes 1-8 , à l'égard des socratiques en tant que
« disputeurs» aurait trouvé en passant une réponse dans le Gorgias:
- En 463 a, Socrate définit la rhétorique comme « une pratique étrangère à
l’art, qui exige une âme douée d'imagination (Quxñs otoxaotixñs), de har
diesse (ůvopeiac), et naturellement apte au commerce des hommes» , dont le
nom générique est flatterie (xonaxeia ). La définition contientdes échos termi
nologiques de Contre les sophistes 17 (quxñs åvopixñs xai dočaotixñs), cité
supra . L 'expression otoxaotixów couvre chez Platon la même signification que
doçaotixóv chez Isocrate : la capacité d 'approcher de la vérité en ayant comme
guide non la connaissance, mais l'opinion quipermet de conjecturer.
Il est possible que Platon fasse allusion sur le mode parodique à Isocrate ou bien que les
deux renvoient à une source commune (cf. les états de la question de 252 E . R . Dodds (édit.),
Plato. Gorgias. A Revised Text with Commentary , Oxford 1959 , p . 225 , et Eucken 46 , p . 36
et n. 145). La troisième possibilité , que ce soit Isocrate qui critique Platon en employant son
langage, a été récemment envisagée par Too 19, p. 154 sqq., qui soutient que la place du
Contre les sophistes dans le corpus d ' Isocrate au début de son activité pédagogique ne doit
pas forcément coïncider avec sa chronologie historique ; le fait que le discours s'en prenne
surtout à Antisthène et non à Platon enlève de la valeur à cette proposition. Raeder 185 , p . 124
n . 3, et Dodds 252, p. 28 et 225 , ont nié un rapport entre les deux passages.
L ' intention du commentaire de Platon sera claire quelques années plus tard, quand dans la
République (V 457 b 8, c 5 et 472 a 3) il distinguera le philosophe du « philodoxe» ; c'est sous
ce nom qu 'il attaquera la paideia représentée par Isocrate (cf. 253 Y . Lafrance, La théorie pla
tonicienne de la Doxa , coll. « Noêsis » ,Montréal/Paris 1981, p . 120 sq.).
- En 519 c, Platon débat, de même qu ' Isocrate dans Contre les sophistes 3-6 ,
sur la rémunération de l'enseignement. Il y critique ceux qui visent à être des
maîtres de vertu ,mais accusent souvent un de leurs disciples de leur faire tort
« parce qu 'il refuse de les payer et qu'il ne leur témoigne pas toute la reconnais
sance due à leurs bienfaits » . Platon défend qu 'il est impossible que des hommes
devenus bons et justes traitent leur maître de la sorte, d 'où il découle que ces
hommes ne sont pas devenus bons et justes, et donc que le maître a échoué dans
son enseignement.
Jaeger 8 , t. III, p . 117, et Ries 168, p. 28 sq ., ont insisté sur la dépendance d ’Isocrate par
rapport à Platon. Dodds 252, p . 365, et Burkert 198, p. 351, préfèrentpenser à une vieille plai
santerie dirigée contre les sophistes. Eucken 46 , p . 39 sq., a soutenu que Platon reprend la
raillerie d'Isocrate pour différencier les authentiques maîtres de vertu, qui ne pensent pas à
leur sécurité financière, des faux .
924 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
(2 ) L ’ Euthydème de Platon :
Il est possible que Platon ait tenté de dépasser la définition isocratique de
l'« éristique » dans l' Euthydème en établissant une distinction entre deux formes
de discussion : la dialectique, une forme de discussion sérieuse qui aspire à la
science (290 c), et l' éristique, considérée comme très peu sérieuse (272 b ;
cf. Eucken 46 , p. 11 sq. et 45 sqq.). Dans ce dialogue, on a reconnu la figure
d' Isocrate derrière deux allusions:
- En 304 c sqq., on parle d'un auteur anonyme de plaidoyers judiciaires qui
n 'agit jamais en public et qui a exprimé son mépris général à l'égard de la philo
sophie . Socrate situe ce genre de personnes, à mi-chemin entre les philosophes et
les politiciens, en dessous des uns et des autres, bien qu 'ils aient tenté de se
rendre célèbres en discréditant les philosophes. La caractérisation cadre bien
avec Isocrate .
L 'identification a été défendue par Schleiermacher 210 , t. II 1, Berlin 1856 ), p. 279 et 366
(n . à p . 317, 23), et approuvée par Spengel 187, p. 36 , Thompson 213, p. 181, Blass 1 , t. II,
p. 34 sq., Jebb 2, t. II, p. 50 sq ., Norlin 6 , 1. I, p . XIX n ., Gomperz 170 , p. 29 sqq., Ries 168 ,
p . 39 sq., Guthrie 250 , t. IV , p . 282 sq., et Eucken 46 , p. 47 sqq., qui réfute les objections de
Gomperz 170, p . 31 sqq., de 254 H . von Arnim , Jugenddialoge und die Entstehungszeit des
Phaidros, Leipzig/Berlin 1914 , p . 129, et de Wilamowitz -Moellendorff 34, t. II, p. 166 . Dans
la question de Socrate (Euthydème 305 b ) qui demande si ce personnage anonyme agissait
devant les tribunaux ou préparait seulement les discours que d 'autres « exposaient dans le
combat (àywvídeolau)», Eucken 46, p . 49, a vu des échos de la distinction isocratique expo
sée dans Contre les sophistes 13 et 15 , entre Nóywu troints et åywvloths.
- En 289 c -d , Platon distingue le fabricant du discours et la personne qui agit
en public (àywvlotńs). Il ne considère comme artiste que ce dernier , d'où il
découle que pour lui Isocrate n 'avait pas d'art à offrir (cf. Teichmüller 184 , t. I,
p. 52,Raeder 185 , p. 144, Ries 168 , p. 45, et Eucken 46 , p. 49 sq . et n . 24 ).
(3) L ' Éloge d 'Hélène d ' Isocrate :
Dans le proème de l'Éloge d 'Hélène, Isocrate maintient sa conception de la
philosophie éristique : on peut y établir des groupes, parmi lesquels les socra
tiques, mais ils sont tous éristiques (cf. Ries 168 , p . 35 sqq., et supra). Cette atti
tude d’ Isocrate peut s'expliquer en partie par le fait que la théorie qu 'il n 'est pas
possible de mentir, ni de contredire , ni d 'opposer deux discours sur le même
sujet, que Platon réfute comme éristique en l'attribuant à Protagoras (cf. Euthy
dème 283 e- 284c et 285d- 286c), est chez lui associée à la figure du socratique
Antisthène (cf. Eucken 46 , p. 51 sqq.). Isocrate attaque les paradoxes des éristi
ques comme des connaissances exactes qui manquent d'utilité ( $ 5 nepi tõv
åxpňotwv åxpißñç éniotaobal) pour la vie communautaire, ce qui peut déjà
être interprété , d'après Eucken 46 , p. 56 -63, comme une anticipation de la criti
que qu ’Isocrate fait, dans le Sur l'échange ($ 258 sqq.), des enseignements théo
riques (essentiellementmathématiques, géométrie et astronomie ) et de l'onto
logie qui constituaient le curriculum de l'Académie .
Cette polémique continue dans la partie centrale.Dans la description de la beauté ($ 54 -60)
comme « être » et comme « idée » ( $ 54) , on trouve des échos de la terminologie platonicienne
(cf. 255 F . Dümmler, Akademika ,Gießen 1889, p . 55). Isocrate redéfinit l' idée de la beauté en
considérant que sa supériorité dérive de notre comportement envers elle, c 'est-à -dire de l'opi
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 925
nion générale à son égard . Il n 'existe donc pas une science des idées,mais seulement une opi
nion ou un jugement sur elles (cf. Eucken 46 , p. 105 sq .).
(4) Le Banquet de Platon :
On a envisagé de voir dans le discours d 'Agathon dans le Banquet de Platon
une attaque contre l' école de Gorgias et d'Isocrate (cf. Schleiermacher 210, t. II,
2 , Berlin 1824, p. 376 sq. ; 256 K . Lüddecke, « Über Beziehungen zwischen
Isokrates' Lobrede auf Helena und Platons Symposion » , RAM 52, 1987, p. 628
632 ; Buchheit 60 , p. 101 sqq.; Eucken 46 , p. 107 sqq.). De nombreux parallé
lismes conceptuels entre ce discours et l'Éloge d 'Hélène ont été relevés par
Eucken 46 , p. 110 sq. La conception exprimée par Agathon dans son discours est
dépassée par Socrate dans le sien . En effet, le philosophe définit l'amour par sa
tendance vers le beau (199 c - 207 a ), comme Isocrate et Agathon ,mais, à la dif
férence de ceux-ci, il distingue (207 a sqq.) l'amour envers les femmes de
l'amour envers les hommes, qui est l'authentique stimulus de l'activité spiri
tuelle du créateur et du poète , y compris Homère.
Dans son Éloge d 'Hélène, Isocrate montrait le pouvoir divin d 'Hélène par l'exemple de la
cécité de Stésichore (8 64 ). Deux passages platoniciens qui font référence à cet épisode consti
tuent une polémique contre Isocrate : Phèdre 242 d - 243 b (cf. Howland 222, p . 151 sqq. ; aussi
Eucken 46 , p . 115 - 120 , sur la dévaluation du modèle d 'Hélène et le caractère animal de
l'amour avec les femmes) et République, 586 a sqq. (cf. Teichmüller 184 , t. I, p . 113 sq.,
Dümmler 255, p. 55, et Eucken 46, p. 117 sqq.).
(5 )Le Panégyrique d ’ Isocrate et le Ménexène de Platon:
Pohlenz 200, p. 307 sq., et Buchner 153, p. 24 sq. et 45 sq., ont repéré plu
sieurs références au Ménexène de Platon. Voici les plus remarquables:
- à la fin du proème (§ 13 sq.), il critique ceux qui dans l'exorde d'un
discours essaient d'amadouer leurs auditeurs et donnent toutes sortes de raisons
pour défendre ce qu'ils vont dire ; parmi eux certains déclarent « qu 'ils se sont
subitement (ÉE ÚToyvíou ) préparés à parler» (§ 13). C ' est à Ménexène 235 c,
qu’ Isocrate a emprunté le refus de cette excuse, ainsi que l'expression ÉG ÚTO
ruíov.
- En § 32 sq ., Isocrate reprend , avec de légères différences, l'idée du
Ménexène (237 e sq.) que la terre attique est la mère des Athéniens, étant donné
qu 'elle les a alimentés avec du blé .
– Il y a des ressemblances structurales entre la description des batailles de
l'Artémision et des Thermopyles chez Isocrate ($ 91) et celle de Marathon dans
Ménexène 240 d (cf. Eucken 46, p. 164, qui signale des nuances qui permettent
de différencier l'utilisation dumêmemotif dans les deux passages).
- Isocrate s'enorgueillit au § 53 de ce que les Athéniens ont l'habitude de
rendre service aux plus faibles. Certains critiquent cela comme étant peu appro
prié, dit Isocrate , « comme si de telles paroles ne fournissaient pas un appui à
ceux qui veulent faire notre éloge ». On lit cette critique dansMénexène 244 e.
Le passage révèle donc le jugementméprisant d ’Isocrate à l'égard duMénexène,
qu 'il considère comme une caricature burlesque d'un document patriotique
(cf. Pohlenz 200, p . 307 sq., et Eucken 46, p. 164 sq.).
926 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
Une chronologie Panégyrique-Ménexène a été proposée par 257 C . W . Müller, « Platon
und der Panegyrikos des Isokrates: Überlegungen zum platonischen Menexenos» , Philologus
135, 1991, p. 140-156 , qui suggère de voir dans le Ménexène une parodie du Panegyrique.
(6 ) Isocrate et Platon sur l' Égypte :
Le Busiris fut publié peu de temps avant la République et il presuppose des
débats oraux préalables à la publication de cette cuvre de Platon (cf. Eucken 46 ,
p. 173 sqq.). Certains aspects de sa présentation de l'Égypte renvoient directe
ment à la République de Platon (cf. déjà Gomperz 170 , p . 192 sqq.). La société
égyptienne est divisée en trois castes : artisans, guerriers et prêtres, dans l' idée
qu 'il est plus profitable de s'adonner à une seule tâche (§ 15 sq.; Platon , 374 b
sqq., et 394 e); de ces groupes , les prêtres sontmenés vers la vertu au moyen de
l'étude de l'astronomie et desmathématiques, disciplines de l'Académie (§ 23 ;
Platon , 522 c sqq.), et à un âge avancé ils assument la direction de l'État (§ 23 ;
Platon , 540 a-b ) ; ils se consacrent alors à la médecine, étrangère à Platon , et
aussi à un genre de philosophie ( $ 22) qui correspond à la métaphysique et à la
théorie platonicienne de l'État.
Gomperz 170, 192 sqq. et 32 sqq., y a vu à tort une acceptation de l'importance de la doc
trine de Platon , par laquelle Isocrate remercierait Platon pour l'éloge que ce dernier lui avait
adressé dans Phèdre 278 e sqq. Teichmüller 184 , t. I, p. 106 sqq., y a vu une critique du
manque d 'originalité de la théorie platonicienne de l'État.
Cette idée de Teichmüller a été développée par Eucken 46 ,p. 183 sqq., qui a
perçu une critique de la République qu 'on peut résumer dans les points suivants :
- Isocrate a offert une présentation antilogique d'Athènes et de l'Égypte dans
le Panégyrique et dans le Busiris, opposition fondée sur les philosophies diffé
rentes qui les structurent. L 'État égyptien est guidé par la philosophie, « quipeut
à la fois fixer des lois et chercher la nature des choses» (Busiris 22); c'est une
société fermée dans laquelle on respecte les lois par crainte , car même le respect
envers les dieux est réglementé (Busiris 26 sq . ; cf. Eucken 46 , p . 199 sqq.).
Athènes, au contraire , qui fut la première à se pourvoir de lois et d 'une constitu
tion (Panégyrique 39), est une société ouverte et est fondée sur l'affrontement
agonique et l'espérance de la renommée générale (Panégyrique 44 et 50). C ' est
cette culture qui permet, face à la législation égyptienne rigide, qu 'il existe des
jugements corrects sur les dieux , tels ceux d ’Isocrate , ou peu appropriés , tels
ceux des poètes et de ceux qui les suivent, comme c'est le cas du destinataire de
ce discours, Polycratès (Busiris 38 sqq.). Un autre élément crucial de la culture
athénienne est le discours , qui n'a pas de sens dans le monde égyptien . Il existe
donc deux traditions pédagogiques différentes : l'athénienne, où s'insère Iso
crate , et l'égyptienne, dans laquelle l'orateur situe Platon ; il se réfère à lui dans
Busiris 17, où il remarque que le succès de l'organisation politique de l'Égypte
est tel « que les philosophes qui s'occupent de ces questions et y ont acquis la
plus grande réputation décidentde louer la constitution de l'Égypte » (cf. Eucken
46 , p . 179 sq .).
- L ' importation de modèles égyptiens en Grèce a toujours supposé une telle
altération de leur sens originaire qu 'ils sont devenus nuisibles. Ainsi, les Lace
démoniens ont imité certaines de ces coutumes égyptiennes (§ 17 sq.), mais ils
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 927
les utilisentmal, car étant des soldats, ils cherchent à s'emparer par la force du
bien des autres, ce qui n 'arrive pas en Égypte ($ 19 ). Chez Platon coexistent la
spécialisation des citoyens dans une seule activité et les institutions importées
par les Lacédémoniens (cf. République 374 d sq., 403 c sqq., 416 d sq. et420 a).
Demême, l'importation que Platon fait de la division du travail n 'est pas fidèle
au modèle égyptien,parce qu'il a associé cette idée à celle de la justice de l'État,
inexistante aussi bien dans le modèle original que dans l'imitation spartiate .
L 'autre exemple d' altération du modèle est celui de Pythagore, quifut le premier
à importer la philosophie égyptienne en Grèce : « il s'illustra ... par son intérêt
pour les sacrifices et les cérémonies des sanctuaires » , dans l'idée que «même si
des dieux cela ne lui faisait obtenir aucun avantage , du moins acquerrait-il une
très belle réputation auprès des hommes» ($ 28) ; c'est ainsi qu 'il dénature le but
originel des rituels égyptiens.
- L ' imitation platonicienne n 'est même pas originale (cf. Teichmüller 184 ,
t. I, p . 107 sq., qui rapporte au Busiris le commentaire de Crantor, ap. Proclus, In
Platonis Timaeum comm . 20 d , t. I, p . 75 , 30 - 76 , 10 Diehl (= Crantor, fr. 8
Mette), selon lequel les contemporains de Platon l'auraient critiqué pour ne pas
avoir forgé lui-même la République, pour avoir emprunté des coutumes égyp
tiennes et, par surcroît, pour avoir attribué des coutumes athéniennes et atlantes
aux Égyptiens). Qui plus est, comme le remarque Eucken 46 , p . 187 sqq., l'imi
tation platonicienne de l'État égyptien est une imitation au deuxième degré, dans
la mesure où Isocrate transforme les philosophes pythagoriciens en disciples des
Égyptiens et en même temps en maîtres de Platon.
Platon donnera sa riposte au discours isocratique dans le Timée à travers le
récit mythique de l' Athènes primitive et de l'Atlantide, selon lequel l'Égypte
serait une cité fondée par Athènes qui conserve plusieurs traits de la constitution
ancestrale de la métropole . Platon attribue donc une origine commune aux modè
les athénien et égyptien , qu 'Isocrate distinguait catégoriquement, et il légitime
ainsi sa proposition théorique et pédagogique dans le cadre d'Athènes (cf.
Eucken 46 , p . 208 sqq., qui considère comme une contre -attaque d ' Isocrate le
§ 74 de l'Aréopagitique).
(7) Rhétorique et écriture dans le Phèdre de Platon :
On a repéré dans ce dialogue plusieurs allusions polémiques contre Isocrate :
- En 267 a sq., Platon critique la maxime qu' il attribue à Tisias et à Gorgias
de « rendre petites les grandes choses et de donner de la grandeur aux petites»,
ainsi que d '« exposer de façon nouvelle les idées anciennes et de parler de façon
classique sur les événements récents » . Dans Panegyrique 8, Isocrate avait expri
mé la même ambition, quoique dans un contexte différent (cf. supra ). Teich
müller 184, t. I, p. 72 sq., et Raeder 185 , p. 273 sq. ont songé à une attaque
platonicienne (cf. aussi Ries 168 , p. 101, et de Vries 183, p. 222 sq.).
- Pour Platon le bon orateur a besoin de trois conditions : talent, science et
pratique (269 d). La formulation est proche de celle d 'Isocrate, telle qu'elle a été
décrite ci-dessus (cf. supra ). Il est possible qu 'il y ait là une référence directe à
Isocrate ou que les deux remontent à une source sophistique commune (cf.
928 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
Spengel 187 , p . 17 , Gomperz 170, p . 168 sqq., Raeder 185 , p. 271 sqq ., Ries
168, p. 116 sqq., avec bibliographie , et la polémique entre de Vries 183, p . 16 et
232, et Erbse 228 ; voir aussi Eucken 46, p . 271 sqq.).
Le contexte immédiat éclaire ce sens polémique ; en 269 e sq., Platon déclare que la
science rhétorique, comme tous les grands arts, a besoin d' ůdoneoyla xai uetewporoyía ,
variante de l'accusation qu 'Isocrate adressait aux socratiques dans Contre les sophistes 8 , en
jugeant leur activité en tant qu 'adoneoyla xai uixpołoyla ; en 270 b sqq., il prescrit que la
rhétorique, comme la médecine, peut agir avec téxvn et non avec éuntepia et toißn ; en 271 c
sqq., il redéfinit le xalpós en réduisant sa signification à l'instant qu 'on doit attendre pour
utiliser la connaissance systématique de l'âme.
- Face à Isocrate, Platon défend (275 d sqq.) la prééminence du discoursparlé
sur le discours écrit (cf. Howland 222, p. 115 sqq., et Eucken 46 , p . 130 sqq. et
272 sq.). Le philosophe a emprunté à Alcidamas (* * A 87) la comparaison des
discours écrits avec des peintures ; il s'agit d'imitations que l'on doit considérer
uniquement comme un jeu face à la parole du sage et à la conversation dialec
tique (cf. 258 R .J. Connors, « Greek Rhetoric and the Transition from Orality » ,
Ph & Rh 19 .1, 1986, p. 38-65, notamment p . 49 sqq., Cole 31, p. 126 sqq., et
259 M . Erler, « Hilfe und Hintersinn : Isokrates' Panathenaikos und die Schrift
kritik im Phaidros » , dans L . Rossetti (édit.), Understanding the Phaedrus.
Proceedings of the II Symposium Platonicum , coll. « Intern . Plato Studies » 1,
Sankt Augustin 1992, p. 122- 137 (trad . it. Id . 99) ; aussi infra, à propos d 'Alci
damas .
(8 )Les discours chypriotes d ' Isocrate :
Dans le proème du discours A Nicoclès, il existe plusieurs allusions polémi
ques à Platon.
- Face à d 'autres, quine cherchent que des intérêts commerciaux (tuntoplav
TIOLOÚLevoi) et offrent au roi les présents habituels avec plus d'habileté que ceux
qui se sont consacrés au trafic (xannNEÚELV) ($ 1), Isocrate offre à Nicoclès « le
plusbeau , le plus utile des dons» (§ 2). Isocrate se sépare ainsi des trafiquants et
des boutiquiers, avec lesquels Platon , Protagoras 313 c sqq., et Sophiste 223 c
sqq., avait comparé lesmaîtres de sagesse et les sophistes.
- Aux $$ 4 -6 , il distingue entre la formation du roi et celle de l'homme cou
rant. Le manque de formation appropriée chez les rois a fait que beaucoup se
demandent lequel des deux genres de vie est le meilleur (§ 4 ). Teichmüller 184 ,
t. II, p. 19, y a vu une référence au mythe d' Er à la fin de la République de Platon
(617 d sqq.), où, à propos du choix du genre de vie, on rejette « la tyrannie et
d'autres pratiques de la sorte » (619 a) avec des exemples (619 b sq. et 620 c sq.).
Face à la distinction platonicienne entre la royauté , réalisable seulement dans la
cité idéale (445 d ), et la tyrannie, décrite comme une domination violente et
arbitraire (563 d sqq.), Isocrate présente le fait que le roi soit bon ou mauvais
comme dépendant de l'expérience concrète de son royaume.
- Au § 7 , il se demande si le cadeau qu'est son discours, une fois présenté ,
sera digne du thème proposé, car « de nombreux ouvrages écrits en vers ou en
prose , quand ils n 'existaient encore que dans la pensée de leur auteur, ont provo
qué un vif sentiment d' attente : une fois achevés et communiqués au public , ils
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 929
ont connu une réputation bien inférieure à l'espoir qu'ils avaient suscité » (7 ).
D 'après Eucken 46 , p. 224, il s'agit d'une référence à Platon , dont la République,
une fois publiée, est restée très en dessous des espérances qu'elle avait suscitées.
Dans la suite du discours , Isocrate répond enfin à la définition méprisante de
la « rhétorique » fournie par Platon dans le Gorgias comme une flatterie qui a
pour objet d'atteindre le plaisir (cf. supra, et Eucken 46 , p. 237 sqq.). Au § 28,
Isocrate conseille au roi de distinguer « les flatteurs habiles (tous téxvn
xonaxetovtas) des serviteurs dévoués ( ToùS MET' Eůvoias depanetovtac)
pour ne pas laisser les gens malhonnêtes l'emporter (néov... EXWOLv ) sur les
honnêtes gens ». Le conseil, dont la terminologie renvoie directement à la
discussion de Platon sur la rhétorique, permet à Isocrate de dépasser la définition
de celui-ci, parce que le but n 'est pas le plaisir, mais , comme on le montre tout
au long du discours, l'utilité. Au § 52, il oppose encore une fois sa philosophie
pratique de la doxa aux théories inutiles qui ne peuvent pas être réalisées.
Il est possible que dans tout le discours il utilise les termes idéa et yiyvúoxelv en les asso
ciant à des contextes divers pour les détacher de leur signification platonicienne et les redéfinir
dans le cadre de sa doctrine de la doxa (cf. Eucken 46, p . 235 sqq. et 240 sqq.).
Isocrate situe l'instruction du monarque dans la tradition de la poésie gnomi
que, et distingue cette littérature, utile , de celle d'Homère et des poètes de tra
gédies, qui est seulement agréable et que l'on peut caractériser comme « fabu
leuse » (§ 48 sq.). Or, tandis que Platon avait banni Homère et les poètes tragi
ques de sa cité idéale , parce qu 'ils n 'étaient pas capables de connaître la púols,
c 'est-à-dire l'être réel (cf. 598 d sqq.), Isocrate leur réserve une place dans la cité
justement parce qu 'ils ont su pénétrer la nature (Tv DúoLv) de l'homme ( $ 48 )
et représenter, l'un devant des auditeurs , les autres devant des spectateurs , les
luttes (Toùs árõvac) et les guerres des demi-dieux ($ 49 ; cf. Eucken 46, p . 243
247).
Dans le Nicoclès, avec le roi comme porte -parole, Isocrate s'en prend à ceux
qui pensent que quand on prononce des discours on ne le fait pas par vertu ,mais
par ambition (§ 1), une accusation qui apparaît déjà dans le Gorgias de Platon .
Isocrate a accompli pieusement tous ses devoirs, et il l'a fait pour que sa vie
s'écoule remplie des plus grands biens ( 2 ). L 'alternative entre vertu et ambi
tion n 'est donc pas valable , mais les deux sont en rapport.La question qu'il faut
se poser est, au contraire , de savoir si l'effort pour l'ambition se réalise par des
moyens justes ou injustes. Les Nóyou, de la même façon que la richesse , la force
et le courage, sont susceptibles d 'être mal utilisés,mais le malréside à l'intérieur
de l'homme et non des choses ($ 4 ). 260 S. Sudhaus, « Zur Zeitbestimmung des
Euthydem , des Gorgias und der Republik » , RAM 44, 1889, p . 52 sqq., notam
ment p .61, remarqua la ressemblance de cet exemple avec l'argumentation du
Gorgias platonicien dans Gorgias 456 c sq.(cf. Eucken 46 , p. 249 sqq., sur le
dépassement isocratique de la position de Gorgias dans ce dialogue et aussi
261 J. Macjon , « De sophisticae boni etmali rationis vestigiis apud Isocratem
obviis » (en polonais ), Meander 35, 1980 , p . 97- 110 , qui a détecté dans cette
argumentation des influences de Protagoras et de Prodicos). Dans l'Évagoras,
930 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
finalement, Isocrate oppose le napádelyua de feu le père de Nicoclès au
caractère paradigmatique des idées platoniciennes impersonnelles (cf. Eucken
46 , p . 267 sq.).
(9 ) Le Théétète et Le politique de Platon :
Platon répondra aux discours chypriotes dans Théétète 172c - 177b. Dans cet
excursus, il distingue l'essence de ceux qui « depuis leur jeunesse fréquentent les
tribunaux ou des lieux semblables» de celle des philosophes (172 c ). Tout
homme, déclare Platon, doit abandonner un genre de vie et « fuis » vers l'autre
pour s' approcher de la divinité autant que possible (176 b ) et être bon et juste
avec bon sens. Le malheur de l'orateur est de ressembler par ignorance au pre
mier genre et non au deuxième (176 e ). 262 Th . Berk, Fünf Abhandlungen zur
Geschichte der griechischen Philosophie und Astronomie, Leipzig 1883, p . 18
sqq., pensa à une allusion critique adressée à Isocrate , position qui a été reprise
récemment par Eucken 46, p. 275 sq. ; contra Teichmüller 184 , t. II, p. 326 , et
Burkert 198 , p . 350 n . 1. En faveur d 'une telle identification, il y a le fait que,
dans Théétète 174 d sqq., Platon décrit l' impassibilité du philosophe quand il
entend des éloges des tyrans, ce qui s'accorde avec une critique de l'Évagoras
isocratique comme discours modèle du genre . En tout cas, comme le signala
Dümmler 167, p . 79 sqq., notamment p. 104 sq., Isocrate se sentit visé, puisque
dans Sur l'échange 30, il reprit la distinction entre ceux qui fréquentent les tri
bunaux et les philosophes, en se situant dans le deuxième groupe. C 'est dans Le
politique que Platon donnera sa vraie riposte: quand il se demande si ce sont les
hommes ou les lois qui doivent dominer , Platon se prononce pour les lois écrites,
en l'absence d 'un roi qui se distingue en sagesse (301 d sqq. ; cf. Eucken 46 ,
p. 277 sq. et 282).
( 10 ) Attaques ultérieures :
Dans Sur l'échange 258-269, Isocrate critique à nouveau « les princes de
l' éristique et les professionnels de l'astronomie, de la géométrie et des autres
sciences du même ordre » (§ 261); on y a vu une attaque de l'Académie platoni
cienne (cf. Spengel 187 , p. 747 sqq .; Gomperz 170 , p . 11 et 15 ; Münscher 3 ,
col. 2211). Malgré tout, la cible principale est Aristote, encore membre de
l'Académie ( cf. infra). C 'est dans le Panathénaïque que nous trouvons l'attaque
finale (cf. 263 Chr. Eucken, « Leitende Gedanken im sokratischen Panathenai
kos » ,MH 39, 1982, p . 43- 70 ; 264 Chr. Schäublin , « Selbstinterpretation im
“Panathenaikos” des Isokrates ? » ,MH 39, 1982, p . 165- 178, notamment p. 174
sqq.; Erler 99 , p. 157, et supra ).
Speusippe :
La polémique ne se terminera pas avec la mort de Platon. Son disciple Speu
sippe écrivit, comme Antisthène, une riposte au Contre Euthynous d 'Isocrate (cf.
D .L . IV 5 et VI 15 ). Il écrira aussi, à propos du choix d 'un précepteur pour
Alexandre le Grand, une lettre à Philippe de Macédoine (Lettres des socratiques
XXX ) contre le Philippe d'Isocrate et en faveur d'Antipatros de Magnésie .
Pour l'authenticité de la lettre, cf. Mathieu 24, p . 178 ; Id . 5 , t. IV , p. 177 n . 1, et 1. III,
p. 93 n . 4 ; 265 E . Bickermann et J. Sykutris, Speusipps Brief an König Philipp, coll. « Berichte
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 931
Verh . Sächs. Ak.» , phi.-hist. Kl. 80, Leipzig 1928, p. 31 sqq. ; 266 M . M .Markle, « Support of
Athenian Intellectuals for Philip . A Study of Isokrates' “ Philippus" and Speusippus' Letter to
Philip » , JHS 96 , 1976 , p . 80 -99 ; 267 A . Frolíková, « Isokrates' Aufrufe an die Herrscher» (en
tchèque, rés. en all.), LF 102, 1979, p . 82- 86 ; 268 L. Tarán, Speusippus of Athens, Leiden
1981, p. 182; Usener 38, p. 38 sq. et n. 53. Contra, 269 L. Bertelli, « La lettera di Speusippo a
Filippo. Il problema dell'autenticità », AAT 111, 1977, p.75-111.
Alcidamas:
Cf. la bibliographie rassemblée par Gillis 111, p . 325 n . 6, par Eucken 46 , p. 28-31 et 121
140 , et surtout par 270 M . Narcy, art. « Alcidamas» A 87 , DPLA I, 1989, p. 102 sqq. Aussi
271Zs. Ritoók, « Alkidamas über die Sophisten » , Philologus 135, 1991, p. 157 - 163 ; 272 S .
Friemann ( = S . Usener), « Überlegungen zu Alkidamas' Rede über die Sophisten » , dans W .
Kullmann et M . Reichel ( édit.), Der Übergang von der Mündlichkeit zur Literatur, coll.
« Scriptoralia » 30, Tübingen 1990 , p. 301-315,et Bons 49,p. 162.
Alcidamas fut disciple de Gorgias et, selon la Souda, s.v. Copyiaç, r 388 , t. I,
p . 535, 25 sq. Adler, il lui succéda à la tête de son école . 273 J. Brzoska, art.
« Alkidamas» 4 , RE I 2, 1894, col. 1534 , signala qu 'à la différence d'Isocrate, on
ne lui connaît pas de disciple. Il fut l'auteur d'un traité Sur les auteurs de
discours écrits ou sur les Sophistes, qui visait exclusivement Isocrate, malgré la
dénomination collective du titre.
Les problèmes de datation de cet écrit ont été résumés par Narcy 270, p. 102 sq.: on admet
de nos jours que le Contre les sophistes d'Isocrate est antérieur au traité d 'Alcidamas et aussi
au Phèdre de Platon (cf. supra ), qui contient une autre attaque contre l'écriture, sans que l'on
puisse préciser exactement la chronologie relative de ces deux derniers écrits (cf. 274 H .
Raeder, « Alkidamas oder Plato als Gegner des Isokrates » , RHM 63, 1908, p . 495 -511).
Eucken 46 , p. 130 sqq., a soutenu la dépendance de Platon par rapport à Alcidamas, ce quine
signifierait pas qu'il reprenait ses points de vue, mais seulement quelques expressions for
melles pour attaquer le même rival. Récemment 275 J. Tomin, « A Preliminary Study of
Plato » , SO 67 , 1992, p . 80 -88, a soutenu l'antériorité du Phèdre, dont aussi bien Alcidamas
qu 'Isocrate dépendraient.
Il est très probable que la critique par Isocrate de ceux qui donnent des procé
dés fixes comme exemples de l'art créateur des discours politiques (Contre les
sophistes 12 sqq.), vise Alcidamas (cf.Gillis 111, p . 325 n. 6 ). Laméthode pro
posée dans Sur les sophistes par Alcidamas est proche de celle que critiquait
Isocrate , mais non identique, ce qui fait penser qu 'il s'agit d'une nouvelle ver
sion d'une critique antérieure et plus radicale. Il y aurait fondé la capacité d'im
provisation sur la connaissance générale d 'une série de schémas rhétoriques,
dont il aurait assimilé l'apprentissage à celuide l' alphabet;Eucken 46, p. 27-31.
Le discours Sur les sophistes aurait donc été la riposte d'Alcidamas.
Cf. 276 J. Vahlen , « Der Rhetor Alkidamas » , SAWW 43, 1863, p . 491-528 (= Gesammelte
philologische Schriften , Leipzig/Berlin 1911, p . 117 - 155 , notamment p . 144 sq.) ; Reinhardt
196 , p. 15 sq. ; 277 J. Hubík , « Alkidamas oder Isokrates ? Ein Beitrag zur Geschichte der
griechischen Rhetorik » , WS 23 , 1901, p . 234 -251 ; Raeder 274 ; Süss 181, p . 34 -49 ; 278 L . R .
van Hook, « Alcidamas versus Isocrates: the Spoken versus the Written Word », CW 12, 1919,
p . 89 -94 ; 279 G . Walberer, Isokrates und Alkidamas, Hamburg 1938 ; 280 H . Wersdörfer, Die
QIAOCOPIA des Isokrates im Spiegel ihrer Terminologie, Leipzig 1940 , p . 144 sq. ; 281 S .
Wilcox, « Isocrates' Fellow Rhetoricians » , AJPh 66 , 1945, p . 171- 186 ,notamment p. 179 sq. ;
Gastaldi41 ; Eucken 46 , p. 122 sq. ; 282 M . Vallozza, « Kaipóç nella retorica di Alcidamante
e di Isocrate, ovvero nell'oratoria orale e scritta » , QUCC 50, 1985, p. 119-123; Narcy 270,
p . 104 . Des allusions à Alcidamas en tant qu 'auteur de paradoxes ont été repérées dans l' Éloge
d 'Hélène 8 par Spengel 56 , p. 174, et dans § 12 par 283 J. Zycha, Bemerkungen zu den
932 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
Anspielungen und Beziehungen in der XIII. und X . Rede des Isokrates, Progr. Wien 1880,
p. 254 sqq. (cf. Münscher 171 et Id . 3, col. 2182). D 'après eux, le Sur les sophistes aurait été la
riposte à ce discours.
Il y propose une formation rhétorique fondée sur l'improvisation , car ce n 'est
qu 'en improvisant que l'on peut s'adapter à l'occasion (xalpós). Cette rhéto
rique orale devrait s'accompagner d'un manque d 'attention porté au style et à la
beauté verbale . Il s'agit donc de l' inverse de la rhétorique isocratique, fondée sur
l'écriture et très soucieuse des problèmes stylistiques. Comme l'a indiqué
Gastaldi 41, la critique d' Alcidamas court droit à l'échec, dans la mesure où les
discours d ' Isocrate ne répondent qu 'en apparence à l'univers oral de la polis ;
Isocrate,bien au contraire, a nié ce modèle oraleta défendu l'écriture comme un
mode de participation politique (cf. supra). Malgré tout, il faut admettre la pré
sence d' éléments oraux dans la composition des discours d' Isocrate ; cf. Connors
258 , p .61 n . 23 , Bons 49, p. 165, et surtout Usener 38.
Isocrate répond à Alcidamas dans Panégyrique 11 sq., où il remarque qu 'il y
a des gens qui comparent « les discours destinés à la perfection avec les plai
doyers portant sur des contrats privés» comme s'ils étaient identiques. Le pro
blème de l'oralité et de l'écriture sera abordé plus tard, d 'un autre point de vue,
dans l'Épître à Denys 2 sq ., et dans le Philippe 25-29 (cf. Eucken 46 , p. 132- 140 ,
et Usener 38, p. 106 -119 ).
38 ; Toolkn 46,P.128 sq. ophistry. From P3
Sur la défense de l'écriture par Isocrate, cf. Reinhardt 196 , p . 16 ; Blass 1, t. II, p . 353 ;
Mathieu et Brémond 5 , t. II, p . 17 n . 3 ; 284 T . M . Lentz, « Writing as Sophistry. From Pre
servation to Persuasion » , QIS 68, 1982, p . 60 -68 ; Eucken 46 , p . 125 sqq.; Gómez 115 , p. 61
sqq. ; Friemann 272 ; Cole 31, p . 74 ; Usener 38 ; Too 19, p. 113-129.
Polycratès :
Cf. Blass 1, t. II, p. 365- 372 ; Münscher 3, col. 2177 sqq.; Mathieu 5, 1. I, p. 183 sq .;
Dodds 252, p. 28 sq .; 285 G . E .L . Owen , « Philosophical Invective » , OSAPh 1, 1983, p . 1-25,
notamment p . 19 ; Eucken 46, p . 195- 205.
La polémique entre les deux semble avoir commencé quand Polycratès écrivit
un traité où il réfuta l' Éloge d 'Hélène (cf. 1°“ argument" d'un grammairien ano
nyme pour cet ouvrage chez Mathieu et Brémond 5 , t. I, p . 163). L 'argument du
Busiris (ibid ., t. I, p. 187 , 1 sqq.) nous informe que Polycratès, Athénien de nais
sance, s'était vu forcé par la pauvreté de faire le métier de sophiste , qu'il exerçait
à Chypre . Cette donnée a induit Münscher 3, col. 2177, etMathieu 5, t. I, p. 184 ,
à penser que le Busiris est la conséquence d 'un affrontement personnel visant à
obtenir du prestige parmi les disciples fortunés de l' île . D 'autres sources nous
présentent Polycratès comme un auteur de traités paradoxaux ainsi que mytho
logiques (cf.Münscher 3, col. 2177 sq.). Cela permet de comprendre qu 'il se soit
senti attaqué par l'Éloge d'Hélène; Blass 1, t. II, p. 371 n . 1, et Reinhardt 196 ,
p. 21, ont cru voir une allusion à cet auteur dans les $$ 8 et 12 de ce discours (cf.
Münscher 3, col. 2182). Plusieurs années plus tard , Isocrate a donné au Busiris la
forme d'une épître adressée à son concurrent, épître où il essaie de l' instruire et
de corriger les erreurs de ses écrits précédents : s'il cherche à tirer de l'argent de
la philosophie, il doit apprendre à enseigner. Les attaques sont adressées à son
Apologie de Busiris et à son Accusation de Socrate, et sont essentiellement les
I 38 ISOCRATE D 'ATHÈNES 933
suivantes : méconnaître la différence entre la louange et le blâme; assumer la
présentation que les poètes font des dieux, qu 'Isocrate considère comme impie ;
ne pas appliquer la « règle d'or» de ne pas faire aux autres ce qu'on ne voudrait
pas souffrir d'eux(cf. Eucken 46 ,p. 195- 205).
Aristote :
Cf.Münscher 3, col. 2208 sq.; Burk 4, p. 32 sq. et 202 sq.; Mathieu 24, p. 185 sqq.;
286 F. Solmsen, Entwicklung der aristotelischen Logik und Rhetorik, coll. « Neue Philolo
gische Untersuchungen » 4, Berlin 1929, p. 204 sqq. et 215 sqq.; 287 B . Einarson , « Aristo
tle's Protrepticus and the Structure of the Epinomis » , TAPHA 67, 1936 , p . 261-285 ; 288 E .
Bignone, L 'Aristotele perduto e la formazione di Epicuro, 2 vol., Firenze 1936 (2e édit. 1973) ;
289 P. von der Mühll, « Isokrates und der Protreptikos des Aristoteles » , Philologus 94 , 1939
1940, p. 259-265 ; 290 P . Thillet, « Note sur le Gryllos, ouvrage de jeunesse d’Aristote » ,
RPHA 97 , 1957, p . 352-354 ; 291 I. Düring, Aristotle and the Ancient Biographical Tradition ,
coll. « Studia Graeca et Latina Gothoburgensia » 5, Göteborg 1957, p. 299- 314 et 389 ; 292 Id.,
Aristotle's Protrepticus. An Attempt ofReconstruction , coll. « Studia Graeca et Latina Gotho
burgensia » 12 , Göteborg 1961, p . 20 et 33-35 ; 293 Id., Aristoteles. Darstellung und Interpre
tation seines Denkens, coll. « Bibliothek der klassischen Altertumswissenschaften » N .F . 1
Reihe, Heidelberg 1966, p. 404 sqq. ; 294 E . Berti, La filosofia del primo Aristotele, Padova
1962, p . 159- 185 et 548 sqq . ; 295 A . H . Chroust, « Aristotle 's earliest " Course of Lectures on
Rhetoric" » , AC 33, 1964, p. 58 -72 (repris dans Chroust299 , t. I, p. 105-116 ); 296 Id.,
« Aristotle enters the Academy» , CF 19, 1965, p. 21-29 (repris dans Chroust 299, t. I, p . 92
104 ) ; 297 Id., « What prompted Aristotle to address the Protrepticus to Themison » , Hermes
94, 1966 , p. 202-207 (repris dans Chroust 299, 1. II, p. 119- 125 ) ; 298 Id., « Aristotle's first
literary effort: theGryllus, a lost Dialogue on the Nature of Rhetoric » , REG 78, 1965, p . 576
591 (repris dans Chroust 299, t. II, p. 29-42); 299 Id., Aristotle. New Light on his Life and on
some of his Lost Works, 2 vol., London 1973 ; 300 N . Fujisawa, « Aristotle' s Conception of
Philosophy in the Protrepticus. Comparison with Isocrates, Plato , and Aristotle himself in his
later Treatises » (en japon., avec rés. en angl.), JCS 21, 1973, p. 1-19 ; Voliotis 233, 234 et
235 ; 301 R . Weil, « Isocrate et le Protreptique d 'Aristote » , REG 91, 1978 , p . XVIII ; 302 Id .,
« Aristote et Isocrate. Un conflit d' influences à Chypre » , dans V. Karageorghis (édit.),
Salamine de Chypre. Histoire et archéologie. États des recherches, Paris 1980 , p. 193-201 ;
303 Id., « Laisser parler Isocrate ?» , dans Energeia. Etudes aristotéliciennes offertes à A .
Jannone, Paris 1986 , p . 261- 270 ; Owen 285, p . 13 sqq.; 304 A . A . Rossius, « La polémique
d'Isocrate contre l'Académie » (en russe ), VDI 181, 1987, p. 93- 102; 305 R . Laurenti,
Aristotele. I frammenti dei dialoghi, Napoli 1987, p. 428 sqq.; 306 T. Dorandi, « La polemica
fra Aristotele e Isocrate nella testimonianza filodemea » , dans E. Berti et L . M . Napolitano
Valditara (édit.), Etica politica retorica. Studi su Aristotele e la sua presenza nell'età
moderna, L 'Aquila 1989, p. 201-205 ; 307 Id. « Epicuro contro Aristotele sulla Retorica »,
dans W . W . Fortenbaugh et D . C .Mirhady ( édit.), Peripatetic Rhetoric after Aristotle, coll.
« Rutgers Univ. Studies in Class. Humanities» 6 , New Brunswick/London 1994, p . 111-120 ;
308 L . Pernot, art. «Céphisodôros» C 80 , DPhA II, 1994, p. 266 -269.
Dans la polémique, on peut distinguer plusieurs phases, selon la reconstruc
tion de Berti 294 , secondée par Chroust et complétée par Dorandi 306 , p. 201, et
307 , p. 112 :
- Entre 360a et 3509, Aristote, encore membre de l'Académie, fâché par le
genre de rhétorique flatteuse qui se prodiguait alors à cause de la mort de
Gryllos, fils de Xénophon , et surtout par l' éloge d’ Isocrate (cf. supra), composa
un traité intitulé ſlepi ontopixñs ñ rpūlios (Sur la rhétorique ou Gryllos ; cf.
Düring 291, Chroust 298 et Thillet 290).
934 ISOCRATE D 'ATHÈNES I 38
39 ISSOS Iva
Dansun fragment rapporté à l'Eroticos d 'Aristote (fr. 4 Ross ), tiré d 'un traité
mystique sur l'amour d ' Abül- Hasan 'Ali b . Muhammad al-Daylami (fin du Xe
siècle de notre ère ] (cod. Tübingen Weisweiler, 81), un disciple du nom d 'Issos
interroge Aristote sur la nature de l'amour.Le passage est traduit en anglais dans
D . Ross, The Works of Aristotle translated into English , XII: Select fragments,
Oxford 1952, p . 26 . Sur ce passage, voir R . Walzer , « Aristotle , Galen , and Palla
I 40 ITALICUS (SILIUS -) 939
dius on Love », JRAS 1939, p. 407 -422, repris dans Greek into Arabic. Essays on
Islamic Philosophy, coll. « Oriental Studies» 1, Oxford 1962, p. 48-59.
Ce nom ne semble attesté en grec que pour la ville de Cilicie, lieu de la victoire d 'Alexan
dre sur Darius en 3338. “ Isos" est cependant le nom d'un fils de Priam tué par Agamemnon (II.
XI 101). Walzer ( p. 54 ) signale que cette forme est employée par Flavius Josèphe, Antiquités
juives X 8 , 6 , pour un nom d'origine juive. Il apparaît également dans une inscription de
l’Asclépieion d 'Épidaure (première moitié du II s. av. J.-C .) comme le nom du père de deux
proxènes d ' origine crétoise (IG IV 2 , n° 96 ) . Comme l' Eroticos est un dialogue composé sans
doute alors qu 'Aristote était encore membre de l'Académie, Walzer en conclut que Is( s)os
était un membre de l'Académie tardive d 'origine crétoise.
MAROUN AQUAD et RICHARD GOULET.
40 ITALICUS (SILIUS -) RE 17 PIR S 509 consul en 68
Hommepolitique et poète épique romain .
On connaît peu les détails de sa vie, dont témoignent principalement Plinę,
Epist. III 7 , et Martial VIII 66 . Né entre 23 et 35 , Tib . Catius Asconius Silius
Italicus (pour le nom complet, voir W . M . Calder, CR 49, 1935 , p. 216 -217) fut
consul en 68 ; il avait auparavant exercé une activité peu honorable comme
delator sous le règne de Néron. Après sa carrière politique, il s'adonna à une vie
de philosophe et de poète sur ses domaines, au sud de l' Italie. L 'appartenance
aux cercles stoïciens est confirmée par Cornutus ( C 190 ), qui luidédia un livre
(cf. Charisius, Gramm . I 125, 16 - 18 Keil), ainsi que par Épictète (» E 33) qui le
qualifie de philosophe romain (III 8, 7). Souffrant d'un mal incurable, ilmit fin à
sa vie (vers 101) par suicide (Pline, Epist. III 7, 1-2), comme l'admet l'éthique
stoïcienne si le malade craint pour sa libre volonté (EŬoyos žaywyń , cf. SVF
III 757-768 ).
Sa renommée de stoïcien est due surtout à la façon dont il décrit les héros
romains dans son épopée Punica. On ne doutera point du coloris stoïcien quand
Scipion , à l'instar d'Hercule à la croisée des chemins (cf. Xénophon , Mem . II 1,
21-34 ; Cic ., Off. I 118), se décide pour la vertu (livre 15); il en va de même de
l'épisode de Regulus, qui retourne à Carthage pour être torturé à mort (livre 6 ).
L ' interpretatio Stoica de ces deux personnages, imitant leurs modèles Hercule et
Caton (MC 59), a été élucidée avant tout par 1 M . von Albrecht, Silius Italicus.
Freiheit und Gebundenheit römischer Epik , Amsterdam 1964, et par 2 E . L .
Basset, « Regulus and the Serpent in the Punica » , CPh 50, 1955, p. 1-20. Ils sont
suivis, sans réserve, par 3 M .L . Colish , The Stoic Tradition from Antiquity to the
Early Middle Ages, coll. « Studies in the History of Christian Thought» 35 ,
Leiden 1985, t. I, p . 281- 289. Jugement plus nuancé chez 4 M . Billerbeck, « Stoi
zismus in der römischen Epik neronischer und flavischer Zeit » , ANRW II 32 , 5 ,
1986 , p. 3134 -3143: bien que les Punica ne cachent pas l' influence stoïcienne,
les qualités de virtus, fides et patientia ,mises en évidence par Scipion et par
Regulus, sontdes valeurs profondément romaines.
Orientation bibliographique. M . von Albrecht, A History of Roman Litera
ture ,coll. « Mnemosyne Supplements» 165, Leiden 1997, t. II, p . 969-971.
MARGARETHE BILLERBECK .
940 IUBA DEMAURÉTANIE 141
41 IUBA (Juba) II DE MAURÉTANIE RE 2 PIR 165 ca 50a - 23/24P
Auteur polygraphe, roi numide de Mauretanie de 250 à 23/24P, plus célèbre
comme érudit que comme souverain ,au dire de Pline,Histoire Naturelle V 16 .
Nom .Néopun. Ywb ( )y; gr. 'loßas, ’loúſas, 'loßárns (?) ; lat. Iuba.
Témoignages et fragments. 1 A . Görlitz , lubae Il regis Mauritaniae vita et
fragmentorum pars I, Breslau 1848, 2 Id ., De lubae II regis Mauritaniae frag
mentis, pars altera , Breslau 1862; 3 C. Müller, FHG , t. III, p. 465-484 ; 4 H .
Funaioli,GRF, t. I, p . 451-456 ; 5 F. Jacoby, FGrHist 275 (Text: t. III A , p. 127
155 ; Kommentar : t. III a, p. 317 -357 ; addenda et corrigenda: t. III a, p. 403
404 ).
Études d 'orientation . 6 I.G . Hulleman , De vita et scriptis lubae disputatio ,
Utrecht 1845 ; 7 W . Plagge, De luba II rege Mauretaniae, Münster 1849 ; 8 H .
Peter, Über den Wert der historischen Schriftstellerei von König luba II von
Mauretanien, Meissen 1879 ; 9 M .R . de la Blanchère , De rege luba regis lubae
filio, Paris 1883 ; 10 Susemihl, GGLA, t. II, p. 402 -414 ; 11 F. Jacoby, art.
« luba» 2, RE IX 2, 1916 , col. 2384 -2395 ; 12 W . Schmid ,Wilhelm von Christ's
Geschichte der griechischen Literatur, Zweiter Teil : Die nachklassische Periode
der griechischen Literatur, Erste Hälfte : Von 320 vor Christus bis 100 nach
Christus, coll. « Handbuch der Altertumswissenschaft » VII 2, 1, Sechste Auflage
unter Mitwirkung von O . Stählin , München 1920 , réimpr. 1959, p. 401-403 ;
13 S. Gsell, « Juba II, savant et écrivain » , RAF 68, 1927, p. 169- 197 (= 14 ,
p. 251-276 ) ; 14 Id ., Histoire ancienne de l'Afrique du Nord, t. VIII: Jules César
et l'Afrique. Fin des royaumes indigènes, Paris 1929, p. 206 - 287 ; 15 J. Carco
pino, Le Maroc antique, coll. « La suite des temps» 10, Paris 1943, p. 31-35 ;
16 A . Stein et L . Petersen, PIR2 IV 3, 1966 , I65 , p . 118-119 ; 17 W . Spoerri, art.
« luba» 2, KP II, 1967, col. 1493- 1494.
A . Biographie. Dans cette section consacrée à la biographie de Juba, nous
distribuons la matière en trois parties: la première concernant les données
principales sur la vie; la deuxième l'activité publique; la troisième enfin les
données relatives à la divinisation du personnage.
( 1) Juba II est fils du roi Juba I de Numidie etdescendant de Massinissa : CIL
II, n° 3417 : « Regi lubae regis I lubae filio regis I lempsalis n(epoti) regis Gau
dae I pronepoti regis Masinissae pronepotis nepoti | II vir quinq(ennali) patrono
| coloni» ; cf. 18 A . Beltrán , « Las inscripciones latinas honorarias de Carta
gena» , RABM 55, 1949, p. 523-526 . Il est né vers 50a. Son père prit une part
active dans les conflits armés de la fin de la République aux côtés des partisans
de Pompée. Lors de sa défaite à Thapsos en 46 , il fut contraint au suicide.
Encore enfant, Juba II est conduit à Rome, où il fait partie du cortège célébrant le
triomphe de César (cf. FGrHist 275 T 1, 2 a, 2 b). En Italie , il reçoit sans doute
l' instruction propre à l'oligarchie romaine, car il se forme dans l'entourage
d 'Auguste , qui lui accorde la citoyenneté romaine. Il prend le prénom et le nom
de son protecteur, c'est-à-dire Caius Iulius (cf. Gsell 14, p. 207 ), et fait partie de
sa cohors amicorum (T 1 et T 12 c = Avienus, Ora maritima 279 : « Octaviano
principi acceptissimus... Juba» ). D 'après le témoignage de Dion Cassius (LI 15,
141 IUBA DE MAURÉTANIE 941
6 = T 3 a), il accompagne Auguste dans une de ses expéditionsmilitaires, peut
être à Actium pendant la guerre contre Antoine (319) ou en Hispanie pendant la
campagne contre les Asturiens et les Cantabres en 26/25a(cf.Gsell 14, p. 208 ;
Carcopino 15 , p. 31). Grâce à un autre témoignage de Dion Cassius (LIII 26 , 2 =
T 4 a), on sait que Juba, après cette guerre, qui a eu lieu en 25a, date confirmée
par la numismatique (cf.Gsell 14, p . 211), reçoit d'Auguste la souveraineté sur
la Maurétanie unifiée. Dans nos sources, il est appelé Maupovoiwv Baoineúc
(T 12 a ), Aißúwv Baoideus ( T 7, F61), ou Aißúns xaiMaypovolac Baoideus
(T 1). Ce territoire coïncide avec l'État de Bocchus II (la Maurétanie de l'Est,
entre l'embouchure de la Mulucha (Moulouya ) et celle de l'Ampsaga (Oued -el
Kebir ]), l'État de Bogud (la Maurétanie de l'Ouest, de l'Océan à l'embouchure
de la Mulucha), ainsi qu 'avec une partie de la Gétulie à la place du royaume
paternel (cf. 19 J. Desanges, « Les territoires gétules de Juba II », REA 66 , 1964 ,
p. 33-47). Dion affirme ailleurs (LI 15, 6 = T 3 a ) qu'Auguste accorde à Juba
την βασιλείαν την πατρώαν, ce qui a fait croire a certains critiques que Juba
est devenu roi auparavant en Numidie (cf.Müller 3, t. III, p. 465 ). Cependant, il
ne faut pas interpréter l'expression de Dion comme « le royaume de son père »,
mais comme « la dignité royale qu 'avait possédée son père » (cf. Desanges 19,
p. 31 n . 5). Par ailleurs, Strabon XVII 3, 7 (= T 4 c) affirme que Juba a reçu les
royaumes de Bogud et de Bocchus outre les États de son père. Mais la réalité
s'oppose à cette affirmation, car la Numidie apparaît parmi les provinces romai
nes de 27a, comme en témoigne Dion Cassius LIII 12, 4 (cf. Desanges 19, p. 34 ).
Un autre passage de Strabon (VI 4 , 2 = T 4 b ) semble s 'accorder davantage à la
réalité historique : outre la Maurousie , Juba a reçu une grande partie du reste de
la Libye (cf. 20 P. Romanelli, Storia delle province romane dell'Africa, Roma
1959, p. 156 -158, 166 ). A ces témoignages il faut ajouter Tacite , Annales IV 5, 2
(= T 8 a ) : « Mauros Juba rex acceperat donum populi Romani» , et Pline,
Histoire Naturelle V 16 (= T 12 b ): « Juba... qui primus utrique Mauretaniae
imperitavit » . L 'affirmation de Pline est erronée, car Bocchus II avait été déjà roi
de Mauretanie entre 38 et 33a (cf. 21 J. Desanges [édit.), Pline l'Ancien . Histoire
naturelle . Livre V , 1 -46 . Texte établi, traduit et commenté , CUF, Paris 1980 ,
p. 142 [commentaire de V 16 , 2 ]).
Les Gétules se soulevèrent contre Juba en 6P (cf.Dion Cassius LV 28 , 3-4 =
T6 ). La révolte fut réprimée par Cossus Cornelius Lentulus, alors proconsul
d'Afrique ( cf. Velleius Paterculus II 116 , 2 ; Florus II 31 ; Orose, Adv. Pagan . VI
21, 18 ). Juba collabora à la victoire, si bien qu 'il fut associé à celle -ci avec Cos
sus, et il reçut les « triumphalia insignia » , comme l' indiquent lesmonnaies qu 'il
fit frapper dans les XXXI (6 - 7P ) et XXXII (7 -8P) années de son règne (cf. 22 J.
Mazard , Corpus nummorum Numidiae Mauretaniaeque, Paris 1953, nºs 193-201,
282). Il est possible que Juba ait dû faire face aussi à d'autres révoltes (cf.
Desanges 19, p . 37 sq.). En tout cas, il a pris part à la guerre contre Tacfarinas
(17 -24P) , car certaines des monnaies frappées entre les XLIII (18 -19P) et
XLVIII (23-24P) années de son règne attestentqu'il a été associé aussi aux pré
tendues victoires remportées sur Tacfarinas par les proconsuls de ces années-là .
942 IUBA DEMAURÉTANIE 141
Juba doit à Auguste, par l'intermédiaire d'Octavia (Plutarque, Vie de Marc
Antoine 87, 2 = T 3 b ) , son mariage avec Cléopâtre Sélène (PIR ? II,nº 1148 ; cf.
Dion Cassius LI 15, 6 = T 3 a ; Suétone, Vie d 'Auguste 48), la fille de Cléopâtre
et Marc-Antoine ( T 1). Cléopâtre Sélène est née probablement en 40a (cf.
23 F . Stähelin , art. « Kleopatra » 23, RE XI 1, 1921, col. 784). Elle a comme pré
cepteur Nicolas de Damas (FGrHist 90 T 2 ), et son expérience ressemble curieu
sement à celle de Juba : après la mort de ses parents, elle fut conduite à Rome en
294, faisant partie du triomphe d'Auguste (Dion Cassius LI 21, 8). Auguste
confia son éducation à Octavia. La date de son mariage avec Juba n'est pas sûre,
mais on peut songer comme terminus ante quem à 20/ 199, date où unemonnaie
avec les visages et les noms de Juba et Cléopâtre a été frappée (cf.Gsell 14,
p .218 ;Mazard 22, nº 357). Une épigramme de Crinagoras (AP IX 235) semble
faire allusion à ce mariage (cf. Stähelin 23, col. 784, et plus récemment, avec des
nouveaux arguments, 24 D . Braund, « Anth. Pal. 9.235 : Juba II, Cleopatra
Selene and the course of the Nile » , CQ 34, 1984, p. 175- 178 ). En revanche,
Gsell 14 , p .218 , s'oppose à cette interprétation .
D 'origine royale comme son époux, Cléopâtre a été peut- être rattachée officiellement à
Juba: l'un et l'autre apparaissent dans les monnaies, soit les deux ensemble, soit séparés.
Cléopâtre y est qualifiée souvent de Baoiloon, avec son nom et son titre toujours en grec,
même lorsqu 'on trouve la légende latine « Rex luba » (cf. Gsell 14, p . 243) . Sélène a collaboré
sans doute à la diffusion de la culture hellénistico -égyptienne. En ce sens, on peut remarquer
la présence demotifs égyptiens, notamment isiaques, dans les monnaies en question : d 'après
Pline (Histoire Naturelle V 51 = F 38 a ), Caesarea, capitale de Juba, possédait un Iseum ; les
monnaies confirment en tout cas l'existence du culte d 'Isis dans cette ville (cf. Mazard 22,
nos 222-226 [monnaies de Juba); nos 297, 298, 301-338 (monnaies de Juba et Cléopâtre avec
des symboles isiaques au revers)).
Juba et Cléopâtre ont eu un fils appelé Ptolémée, en souvenir des ancêtres de
Cléopâtre (une inscription d'Athènes, IG III 555 = OGIS 197 = IG II? 3445,le
décrit comme « fils du roi Juba, descendant du roi Ptolémée » ). D 'après Gsell 14 ,
p . 220-222, peu après la naissance de Ptolémée (6 -5a ?),Cléopâtre est morte (une
épitaphe de Crinagoras, Anth . Pal. VII 633, peut avoir été écrite en son honneur).
Ptolémée devientroi de Mauretanie en 23/24P, après la mort de son père, bien
qu 'il soit possible que Juba l'ait auparavant déjà associé au pouvoir , probable
ment en 20 /21, conformément aux renseignements fournis par la numismatique
(cf.Gsell 14 , p . 278 -279 ). Son royaume dura jusqu 'en 40P, date à laquelle Cali
gula le fit tuer (Suétone, Vie de Caligula 26 et 35 ; Dion Cassius LIX 25, 1;
Pline, Histoire Naturelle V 11) .
Les critiques ont donné des explications différentes sur les raisons possibles de la mort de
Ptolémée : cf. 25 J. Carcopino , « Sur la mort de Ptolémée, roi deMauretanie » , dansMélanges
de philologie , de littérature et d 'histoire ancienne offerts à A. Ernout, Paris 1940, p . 39-50,
repris dans Id. 15 , p . 191- 199 ; 26 M . Hofmann , art. « Ptolemaios von Mauretanien » 62, RE
XXIII 2 , 1959, col. 1780- 1787 ; 27 T . Kotula , « Encore sur la mort de Ptolémée, roide Mauré
tanie » , Archeologia 15, 1964, p . 76 -94 ; 28 D . Fishwick , « The annexation ofMauretania »,
Historia 20 , 1971, p . 467-487 ; 29 J.-C . Faur, « Caligula et la Maurétanie : la fin de Ptolémée» ,
Klio 55, 1973, p . 249-271 ; 30 D . Fishwick et B . D . Shaw , « Ptolemy ofMauretania and the
conspiracy of Gaetulicus » , Historia 25 , 1976 , p. 491-494 .
Après la mort de Ptolémée, Caligula fit de la Maurétanie une province romai
ne. Elle fut divisée à l'époque de Claude (42P) en Caesariensis et Tingitana
141 IUBA DEMAURÉTANIE 943
(Dion Cassius LX 9 , 5), correspondantaux royaumes de Bocchus et de Bogud
(Pline, Histoire Naturelle V 19).
Il n 'y a pas d'indice permettant de déterminer avec certitude si Juba a eu de
Cléopâtre d' autres descendants.On pourrait penser à Drusilla (PIR2 III, nº 196 ),
la femme d 'Antonius Félix , procurateur de Judée ,mentionnée par Tacite , Histoi
res V 9, comme « Cleopatrae et Antonii neptis » (cf. 31 A . Stein , art. « Drusilla »
2, RE V 2, 1905, col. 1741).
Grâce à Flavius-Josèphe (Antiquités judaïques XVII 349 ; Guerre des Juifs II
114 = T 7), on sait que Juba célébra un deuxièmemariage avec Glaphyra (PIR?
IV 1, nº 176 ), fille d'Archélaos, roide Cappadoce, et veuve d'Alexandre, le fils
d'Hérode le Grand. On ne possède pas d'autre renseignement sur ce sujet (cf.
cependant IG III 549 = OGIS 363 = IG II2 3437, avec des suppléments de
Mommsen : Bjaoiriooav (Taapúpav] | ’A [p ]y [ɛ ]a [álov Quylatépa , 'Ióſa |
yuvarxa ]). Müller 3, t. III, p. 466 (cf. aussi de la Blanchère , p. 76 -77 ; Gsell 14,
p . 222 sq.), suggère que Juba a célébré ce mariage lorsqu 'il a accompagné (ou
qu 'il s'est associé à) C . César, petit-fils d'Auguste , dans sa campagne en Orient
( 19 -4P). Mais cette supposition est très douteuse (cf. Jacoby 11, col. 2368 ). En
tout cas, le renseignement de Flavius-Josèphe, selon lequel Glaphyra est devenue
veuve de Juba avant son troisièmemariage avec Archélaos, un autre fils d 'Hé
rode, se révèle erroné.Müller 3, t. III, p . 466 , considère comme probable que
Juba répudia cette femme (cf. Gsell 14, p . 222 ; 32 H . Willrich , art. « Glaphyra »
2, RE VII 1, 1910, col. 1381).
(2) Juba établit sa capitale dans l'antique lol, qu'il rebaptisa Caesarea (Stra
bon XVII 3, 12 = T 5 a ), l'actuelle Cherchel, en l'honneur de l'empereur Au
guste , son protecteur. En donnant ce nom à sa capitale , il adopta l'attitude
politique typique des rois vassaux de Rome, qui donnaient le nom de Caesarea
(ou en grec Eeßaotń) à leurs cités les plus importantes, comme l'affirme Sué
tone, Auguste 60 : « reges amici atque socii et singuli in suo quisque regno Cae
sareas urbes condiderunt» (cf. aussi Eutrope, Breviarium ab Urbe condita VII
10 , 3 Santini: « tanto autem amore etiam apud barbaros fuit, ut reges populi
Romani amici in honorem eius conderent civitates, quas Caesareas nominarent,
sicut in Mauritania a rege luba» ).
Cf. 33 Ph. Leveau, Caesarea deMauretanie, une ville romaine et ses campagnes,« Coll.
de l' École Française de Rome» 70, Roma 1984, p . 16 - 19 . Sur Césarée de Mauretanie , voir
aussi 34 S . Gsell, Cherchel, antique Jol- Caesarea (mis à jour par M . Le Glay et E. S. Colo
zier), Alger 1952 ; 35 K . Fittschen , « Juba II. und seine Residenz lol/Caesarea (Cherchel) » ,
dans 36 H . G . Horn et C . B . Rüger (édit.), Die Numider. Reiter und Könige nördlich der
Sahara , coll. « Kunst und Altertum am Rhein » 96 , Bonn /Köln 1979, p . 227 -242 ; 37 Ph .
Leveau, « Caesarea deMaurétanie », ANRW II 10 , 2, 1982, p. 683-738.
Caesarea a fait l'objet d'une véritable refondation sous Juba. Celui-ci a entre
pris des travaux pour l' embellir et il en a fait un centre de civilisation et de
culture, si bien que la cité est devenue très célèbre (T 5 b = Pline, Histoire Natu
relle V 20 : « oppidum celeberrimum Caesarea » ; T 5c = Méla I 30 : « lol ad
mare aliquando ignobilis , nunc quia lubae regia fuit et quod Caesarea vocitatur
inlustris » ; cf. aussi Ampelius, Liber memorialis 38 , 2 : « luba .. . qui Caesaris
944 IUBA DE MAURÉTANIE 1 41
Augusti iussu regnavit etmagnificentissimam urbem Caesaream condidit» ). Les
données fournies par la numismatique et par l'archéologie (notamment la sta
tuaire ) prouvent que Caesarea a été l'une des premières cités de l'Occident à
rendre un culte à Auguste etmême à la domus Augusta : l'existence de Jeux en
l'honneur de l'empereur semble assurée, d'après Leveau, 33 , p. 17 , par la
construction de l'amphithéâtre.Leveau considère qu 'il faut sans doute expliquer
le caractère précoce de ce culte à Caesarea en le rattachantau culte qu 'on y ren
dait aux rois Maures. C 'est pourquoi, d 'après lui, « sous ces rois , ce culte a pu
prendre une importance croissante parallèlement au renforcement de la monar
chie et en liaison avec des influences hellénistiques et lagides , pour ne pas dire
égyptiennes » (ibid.).
On ne possède pas de renseignements dignes de foi sur la possible activité de
Juba dans l'urbanisation d 'autres lieux de Mauretanie , comme Tipasa (cf. 38 S.
Lancel, « Tipasa de Mauretanie : histoire et archéologie, I: État des questions des
origines préromaines à la fin du IIIe siècle », ANRW II 10, 2, 1982, p. 755 -756 ).
En toutcas, il faut lui attribuer la collection de bronzes réunis à Volubilis, si cette
ville a été sa résidence et sa deuxième capitale dans la Maurétanie occidentale ,
conformément à la thèse de 39 J. Carcopino, « Volubilis, résidence de Juba et des
gouverneurs romains» , Hespéris 17, 1935, p . 1- 24 = Id . 15 , p. 167- 190 ). Cette
thèse est suivie par 40 A . Jodin , Volubilis, regia lubae. Contribution à l'étude
des civilisations du Maroc antique préclaudien , « Publications du Centre Pierre
Pâris » 14, Paris 1987, p . 312-317. En fait, à ce qu 'il semble, il n 'y a pas de
preuves concluantes pour soutenir cette hypothèse, comme le montrent 41 H .
Ghazi et Ben Maïssa, « Volubilis et le problème de regia Jubae » , dans A .
Mastino et P. Ruggeri (édit.), L 'Africa romana 10 (Atti del X convegno di studio
Oristano. 11- 13 dicembre 1992, coll. « Publicazioni del Dipartimento di Storia
dell'Università degli studi di Sassari» 25, Sassari 1994, p. 243-261, car si on
attribue à Juba II la possession de deux capitales, ce cas serait unique en Afrique
Mineure ; en outre, il n 'y a pas de témoignages littéraires ou archéologiques (de
la statuaire ou des sources épigraphiques) permettant d'envisager une regia
Jubae en Volubilis. Celle -ci a été probablement une civitas foederata , statut
incompatible avec celui d'une cité regia (cf. 42 M . Christol et J.Gascou , « Volu
bilis,cité fédérée ?» ,MEFRA 92, 1980-1981, p. 329- 345).
En tout cas, Juba a contribué largement à l'apogée de la romanisation et à la
diffusion de la culture grecque au nord de l' Afrique,ainsi que, à une échelle plus
ou moins grande, à son développement économique. En ce sens, on sait qu'il
s'est efforcé de favoriser les rapports commerciaux de Caesarea (et en général de
la Maurétanie ) avec des cités de l'Hispania , l'Italie et la Gaule (cf.Gsell 14,
p. 231-233).
En suivant peut-être une tradition phénicienne et carthaginoise, Juba a été également le
fondateur aux « Purpurariae insulae » d 'une industrie de teinture de pourpre, la « purpura gae
tulica » , très appréciée à Rome(cf. Horace, Épîtres II 2 , 181 ;Ovide, Fastes II 319). Pour les
îles Purpuraires, nous renvoyons à 43 H . Treidler, art. « Purpurariae insulae » , RE XXIII 2,
1959 , col. 2020 -2028. Ces îles ont été situées face aux Autololes (Pline, Histoire Naturelle VI
201 = F 43). Sur ce peuple , voir 44 J. Desanges, Catalogue des tribus africaines de l'Antiquité
141 IUBA DE MAURÉTANIE 945
classique à l'ouest du Nil, Dakar 1962, p . 208 -211. Elles ont été identifiées avec l'île et les
îlots deMogador (cf.Gsell 14, p. 233-234 ; 45 J . Desjacques et P . Koeberlé, « Mogador et les
îles Purpuraires» , Hespéris 42, 1955, p . 193 -202), petite île située en face de l'actuelle cité de
Essaouira, sur la côte atlantique du Maroc (cf. 46 E . Lipiński, art. «Mogador», dans Diction
naire de la Civilisation Phénicienne et Punique, Paris 1992, p . 296 ). Certains critiques ont
soutenu aussi l'identification des Purpuraires avec une partie des îles Canaries, ou avec
Madeira et Porto Santo : cf. 47 E .H . Bunbury, A History of ancient geography, London 1879,
réimpr. Amsterdam /Uithoorn 1979, t. II, p . 175- 176 , 202 - 204 ; 48 J. Álvarez Delgado , « Las
“ Islas Afortunadas " en Plinio » , Revista de Historia (Universidad de la Laguna ) 11, 1945 ,
p . 26 -61; 49 Id ., « Purpura gaetulica » , Emerita 14, 1946 , p . 100 - 127 ; 50 L . de Sagazan ,
« L 'exploration par Juba II des îles Purpuraires et Fortunées », Revue Maritime, fasc . 125,
1956 , p. 1113-1121 ; 51 J.Gattefossé, « La pourpre gétule, invention du roi Juba de Mauréta
nie », Hespéris 44, 1957, p. 329-334 . Cependant, ces hypothèses ne sont pas acceptées
aujourd 'hui (cf. 52 A . Jodin, Les établissements du roi Juba II aux îles Purpuraires (Moga
dor), Tanger 1967, p. 8 -13).
Juba participait donc de l'évergétisme caractéristique des rois hellénistiques,
commel'attestent aussi d'autres renseignements :
(a)Le renseignement de Pausanias I 17, 2, selon lequel les Athéniens élevèrentune statue
de Juba dans le gymnase de Ptolémée, sur l'agora, où il y avait une grande bibliothèque, peut
s'expliquer par le philhellénisme de Juba et sa réputation d 'homme sage et érudit, bien qu 'il
puisse s'expliquer aussi comme un geste de reconnaissance pour des faveurs reçues. En fait,
comme l'affirme Suétone, Auguste 60 , les rois amici et socii de Rome « cuncti simul aedem
lovis Olympii Athenis antiquitus incohatam perficere communi sumptu destinaverunt ».
(b ) Les magistratures honorifiques que Juba détint à Gades et à Carthago Nova, les plus
importantes parmi les villes phéniciennes et puniques du sud de la péninsule ibérique, mon
trent qu'il a eu un rapport particulier avec l'Hispania (cf. 53 J.Mangas, « luba II de Maurita
nia,magistrado y patrono de ciudades hispanas », dans Actas del Congreso Internacional « El
Estrecho de Gibraltar » (Ceuta, noviembre 1987), t. I: Prehistoria e Historia de la Antigüe
dad,Madrid 1988, p. 731-740). En effet, d'après Avienus, Ora maritima 275 -283 (= T 12 c ),
Juba fut nomméduovir de Gadès, ancienne fondation phénicienne. En outre, par les docu
ments épigraphiques (CIL II, 3417) et numismatiques (cf. 54 M . del Mar Llorens Forcada, La
ciudad romana de Carthago Nova : las emisiones romanas, Universidad de Murcia, Murcia
duovir
1994 , p .65 -70 ) on sait qu ' il a été aussi patronus,magistratmunicipal avec le rang de
quinquennalis et magistrat monétaire de Carthago Nova, fondation punique des Barcides
(cf. 55 F. Beltrán Lloris, « Los magistrados monetales en Hispania » , Numisma 28 , 1978 ,
p. 169- 211; 56 A . Beltrán , « luba II y Ptolomeo , de Mauritania , II viri quinquennales de Car
thago Nova » , Caesaraugusta 51-52, 1980, p. 133- 141 ; 57 J. Mangas, « Magistrados mone
tales y patronos de ciudades »,dans Homenaje al Prof.A. Galmés,t. III,Madrid , 1987, p. 183
190). àCela dit, sa nomination commepatronus etduovir de cités de l'Hispania peut répondre
aussi des exigences du pouvoir central de Rome ainsi qu 'aux rapports commerciaux entre
ces villes et la Maurétanie (cf. Mangas 53, p . 737-739 ; 58 E . Gozalbes (González sic ) Cra
vioto, « Relaciones comerciales entre Carthago Nova y Mauritania durante el Principado de
Augusto » , AUMur 40, 1983, p. 13-26 ).
(3) Son évergétisme et son désir d'apparaître comme un roi intégrateur
(imposé par Rome et dévoué à la Grèce, mais non moins descendant de Massi
nissa) peut expliquer en partie sa prétention à rattacher sa généalogie à Héraclès.
Cette prétention semble confirmée par des monnaies qu'il a émises, le représen
tant avec la peau du lion de Némée ou avec d'autres attributs d'Héraclès,comme
la massue ou le scyphos (Gsell 14 , p. 237-238 ), ainsi que par le témoignage de
Plutarque, Vie de Sertorius 9 (= T 10), affirmant que son lignage était apparenté
à Sophax (fils d 'Héraclès et Tingis, la femme d ' Antée) et à son fils Diodoros,
fondateur de la dynastie des rois deMaurétanie. De cette volonté de se rattacher
946 IUBA DEMAURÉTANIE 141
à Héraclès et d 'acquérir des origines divines, on a conclu à l'existence d'un culte
rendu à Juba, qu' il faudrait rattacher aussi au phénomène principal de la religion
indigène commune au nord de l'Afrique, à savoir le culte rendu aux rois.
59 E .Gozalbes Cravioto (Gonzalbes sic ), « El culto indígena a los reyes en Mauritania
Tingitana. Surgimiento y pervivencia » ,MHA 5 , 1981, p . 153- 164 , soutient que ce culte royal
rendu à Juba est attesté par plusieurs indices ( cf. dans le même sens Gsell 14 , p. 235) :
(a ) une inscription associant Juba à Jupiter et à un génie local (CIL VIII 20627) ;
(b) les témoignages d 'auteurs chrétiens comme Minucius Felix (Octav. XXI 9 = T 9 :
« luba Mauris volentibus deus est» ) et Lactance (Institutiones divinae I 15, 8 : « hac scilicet
ratione Romani Caesares suos consecraverunt etMauri reges suos... Summa veneratione colue
runt, ut... Mauri lubam » [Nous pourrions ajouter Isidore, Etymologies VIII 11, 1 : « quos
pagani deos adserunt... ut... apud Mauros luba .» Il faut remarquer cependant que la divinisa
tion d'hommes est devenue un simple topos évhémériste chez ces auteurs chrétiens: cf. 60 K .
Thraede, art. « Euhemerismus » ,RAC VI, 1966, col. 877-890, notamment col. 888 sq .);
(c ) le fait que Lucceius Albinus, procurateur impérial des deux Maurétanies, avait tenté de
s'attirer les Mauritaniens en adoptant les insignes royaux et le nom de Juba (Tacite , Histoires
II 58 ).
En revanche, 61 F. Decret et M . Fantar, L 'Afrique du Nord dans l'antiquité, Paris 1981,
p . 256 -259 (qui renvoient à 62 G . Camps, « L 'inscription de Béja et le problème des Dii
Mauri » , RAF 98, 1954, p . 233- 261), remarquent comment l'onomastique libyenne permet très
souvent de constater que les rois prennent des noms de divinités : ce serait le cas de Juba ſer et
de son fils. Par conséquent, dans l'inscription citée, une divinité portant le nom de Juba est
invoquée en même temps que Jupiter et les « dii Ingirozoglezim » (cf. 63 J. B . Keune, art.
« luba » 4 , RESuppl. III, 1918, col. 1302-1303).
B . Euvre. On peut affirmer que Juba a écrit en grec, d'après le témoignage
fourni par Plutarque, Vie de César 55, 3 = T 2 a : ' Exnvwv toic roavuadeo
Tátous évapiouioc... ourypapeữOLV ; Id., Comparaison de Pélopidas et de
Marcellus 1, 8 = F 25: Tőv 'Exinvixõv ’ lóßą to BaoineT TILOTEÚQUEv. Comme
le remarque 64 J. Desanges, « Les sources de Pline dans sa description de la Tro
glodytique et de l'Éthiopie (NH 6 , 163- 97 )» , dans J. Pigeaud et J. Oroz (édit.),
Pline l'Ancien témoin de son temps, coll. « Bibliotheca Salmanticensis» , Estu
dios 87, Salamanca/Nantes 1987, p . 277 -292, notamment p . 282 sq. et n . 29 (cf.
65 J. André, « Erreurs de traduction chez Pline l' Ancien » , REL 37, 1959, p. 203
215), Juba devait connaître le grec mieux que Pline, qui le cite toujours parmi les
auctores externi.Mais il maîtrisait aussi le punique (cf. Ammien Marcellin XXII
15, 8 = F 38 b = FGrHist 764 F 19 a ; Solin XXXII 2 = FGrHist 764 F 19 b) et,
bien sûr, le latin .
Juba n 'a pas été un philosophe proprement dit. Cependant, nos témoignages
s'entendent à le décrire comme un homme cultivé et savant: cf. Plutarque, Vie de
Sertorius 9 , 10 (= T 10 ) : 'Ióſa... TOŨ Távtwv iotopixwtátov Baolhéwv; Plu
tarque, Vie de Marc-Antoine 87, 2 (= T3b): ’ióba to zapleotatu Baothéwv;
Athénée III 25, 83 b (= T 12 a ) : ävôpa novuabéotatov ; Pline, Histoire Natu
relle V 16 (= T 12 b ): « studiorum claritate memorabilior etiam quam regno » ;
Avienus, Ora maritima 280 (= T 12 c) :« literarum semper in studio luba» ; Am
pelius, Liber memorialis 38 , 2 : « luba rex litteratissimus » . D 'après Plutarque,
Vie de César 55 , 3 (= T 2 a ), Juba devait l'ampleur de sa culture à son séjour à
Rome, mais cet avis doit être nuancé, car, comme le remarque à juste titre 66 J.
141 IUBA DEMAURÉTANIE 947
Desanges, « L 'hellénismedans le royaume protégé de Maurétanie (25 av. J.-C .
40 ap. J.-C .) » , BACTH (b ) 20 -21, 1984 - 1985 , p. 53-61, la famille royale de
Numidie était trèscultivée et très hellénisée depuis le début du 11° siècle av . J.-C .
Juba était un auteur polygraphe ( T 1 = la Souda, s. v. « ’lóßaç » , I 399, t. II,
p. 638, 9 Adler : šypade návu norrá), si bien qu 'il a même cultivé quelquefois
la poésie. En effet, Athénée VIII, 31, 343 e-f (= F 104), cite une épigramme de
Juba adressée à l'acteur Leonteus à propos d 'une représentation de l'Hypsipyle ;
cf.67 A.- M . Desrousseaux, « Une épigramme du roi Juba (FHG III p. 483, fr.
83) » , dans Mélanges dédiés à la mémoire de F . Grat, t. I: Antiquité,Moyen âge,
Islam , Paris 1946, p . 27 - 30 , avec texte , traduction et commentaire ).Mais celui-ci
a été notamment un compilateur dans les domaines les plus divers, à la manière
d'Alexandre deMilet, dit Polyhistór (cf. Jacoby 5, t. III a, p. 317 -319 ; * A 118).
Cela dit,malgré son savoir encyclopédique, il a été plus crédule que critique.
Les écrits de Juba devaient contenir, selon les goûts de l'époque, un grand
nombre de références de tout genre et des renseignements sur des choses prodi
gieuses (mirabilia ). Pour les élaborer, l'auteur a eu à sa disposition des colla
borateurs ainsi qu'une bonne bibliothèque, comprenant des manuscrits grecs,
latins et puniques (cf. Gsell 14 , p. 253).
Grâce aux commentateurs d 'Aristote , on sait que Juba éprouva un grand inté
rêtpour réunir des « écrits pythagoriciens» (cf. Élias, In Aristotelis Categorias
comm ., p. 128, 5 sqq. Busse = T 11; Olympiodore , Prolegomena , p. 13, 13 sqq.
Busse ; Schmid 12, t. II 1, p. 376 sq. n . 9, p. 403 n . 1 ; 68 P .M . Fraser, Ptolemaic
Alexandria , t. II : Notes, Oxford 1972, p . 481-482, n . 151;69 C . W .Müller, « Die
neuplatonischen Aristoteleskommentatoren über Ursachen der Pseudepigra
phie », RhM 112, 1969, p. 120 -126 ). D 'après 70 W . Burkert, « Zur geistes
geschichtlichen Einordnung einiger Pseudopythagorica» , dans Pseudepigrapha
I: Pseudopythagorica - Lettres de Platon. Littérature pseudépigraphique juive,
coll. « Entretiens sur l'Antiquité Classique » 18, Vandæuvres-Genève 1972 ,
p . 25-55, notamment p .43, l'idée que les écrits pseudo-pythagoriciens qui nous
sont parvenus ont quelque rapport avec le recueil de Juba n 'est nullement
démontrable .
A ce qu'il semble , Juba s'est servi aussi de certains des « libri Punici » qui, d'après
Salluste, Bellum Jugurthinum 17, 7 , ont appartenu à son grand -père Hiempsal et qui ont fait
partie très probablement des bibliothèques de Carthage que le Sénat romain confia aux rois de
Numidie (cf. Pline , Histoire Naturelle XVIII 22). A ce sujet, voir 71 V . J. Matthews, « The
Libri Punici ofKing Hiempsal » , AJPh 93, 1972, p . 330 -335.
Enfin , Juba a pu disposer aussi de renseignements de première main : par
exemple , d'après nos témoignages, il organisa des expéditions pour étudier l'ori
gine du Nil (F 38 a ) ou l'archipel des Canaries (F 44 ).
De cette æuvre vaste et variée, seuls environ cent fragments nous sont parve
nus, possédant une valeur très diverse. A ces fragments il faut peut-être ajouter
certains passages de Pline, Plutarque ou Élien qui proviennenttrès probablement
de Juba, bien que celui-ci n 'y soit pas cité nommément. Pour montrer l'ampleur
des intérêts culturels de Juba, nous groupons les titres connus dans les sections
suivantes :
948 IUBA DE MAURÉTANIE 141
t. II, p. 412, n . 360 ; Jacoby 11, col. 2395 ;Gsell 14 , p . 261, n . 3 ; Jacoby 5 , t. III
a, p . 357).
(11 ) Sur la base de Geoponica XV 2 , 21 ( = F 61), où on cite Juba à propos de
l'apiculture ,Müller 3, t. III, p .481, suggéra que Juba écrivit aussi sur l'agri
141 IUBA DE MAURÉTANIE 953
culture . Mais cela n 'est nullement sûr (cf. Susemihl 10, t. II, p . 412 n . 360 ;
Jacoby 11, col. 2395). Cela dit, il n 'est pas impossible que l'agriculture ait fait
partie des matières traitées dans les Libyca.
(12) Onplaxóç. Il est difficile d ' attribuer à Juba un écrit portant ce titre, sur la
base de la scholie sur Nicandre, Theriaca 715 a, p . 262, 6 sq . Crugnola
(= F 102), où le nom ’lóbaç est une conjecture .
C . Postérité. Nos renseignements sur l'influence réelle (directe ou indirecte )
de l'euvre de Juba sur la littérature postérieure (cf. Gsell 14, p. 272-276 ) se
revèlent très déficients. Il n 'est pas facile d'arriver à des conclusions suffisament
fondées, ce qui explique en partie la rareté des études sur cette question . Cepen
dant, on peut supposer que Juba est la source d'un nombre considérable de
passages où il n 'est pas cité , mais qui remontent à lui. Ces textes pourraient être
ajoutés en appendice (« Anhang » ) aux fragments conservés. En particulier, Pline
et Plutarque lui doivent une grande partie de leurs références concernant la géo
graphie et l'histoire naturelle. Quant à Pline, Juba apparaît comme l'une des
sources des livres V , VI, VIII, X , XII, XIII, XIV , XV , XXV , XXVI, XXVIII,
XXXI, XXXII, XXXIII, XXXVI et XXXVII de l'Histoire Naturelle . En ce qui
concerne Plutarque, 101 W . C . Helmbold et E . N . O 'Neil, Plutarch 's quotations,
coll. «Philological Monographs published by the APhA » 19, Baltimore 1959,
p .49 sq ., relèvent une vingtaine de citations de Juba dans ses æuvres. Il est pro
bable que certains naturalistes comme Alexandros de Myndos (> A 119, p. 146 )
et, par son intermédiaire, Élien (HA 62, p . 80), se soient servis aussi de l'æuvre
de Juba, en particulier des Libyca, en ce qui concerne la vie et les habitudes des
éléphants et d 'autres animaux de l'Afrique du Nord (cf. 102 M . Wellmann ,
« Juba, eine Quelle des Aelian » , Hermes 27, 1892, p . 389-406 ; Schmid 12, t. II 2 ,
p . 787, 789). Il est possible aussi qu 'Alexandros de Myndos ait servi de source
intermédiaire à Philostrate dans les passages de la Vie d 'Apollonios de Tyane où
Juba est cité à propos des éléphants (II 13 = F 50 ; II 16 = F 52 ; cf. Gsell 14 ,
p . 275 ). Pour l' influence de Juba sur Sopatros d 'Apamée ('Exãoyai diápopol)
et sur un certain Rufus (Movoixn iotopia ), voir Schmidt 12, t. II 2 , p. 1086 et
p . 871 n . 3 .
D . Iconographie. On possède de nombreuses représentations de Juba, grâce à
divers documents :
( 1) Monnaies: cf.Mazard 22, nºs 125- 397 ; 103 D . Salzmann , « Zur Münzprä
gung der mauretanischen Könige Juba II. und Ptolemaios» ,MDAI(M ) 15 , 1974,
p . 174 -183. Sur les renseignements fournis par les monnaies de Juba, voir aussi
104 D . Fishwick , « Le culte impérial sous Juba II et Ptolémée de Maurétanie. Le
témoignage des monnaies» , BACTH 19 B , 1983, p. 225-233 ; 105 M . Coltelloni
Trannoy, « Le monnayage des rois Juba II et Ptolémée de Mauretanie : image
d 'une adhésion réitérée à la politique romaine » , Karthago 24, 1988 - 1989, p . 45
53 ; 106 H . R . Baldus, « Eine antike Elefanten -Dressur. Zu einem Münzbild
König Jubas II » , Chiron 20, 1990 , p , 217 -220 ; 107 J. Alexandropoulos, « Note
sur une monnaie à l'effigie de Juba II » , dans J. M . Blázquez et S .Moreno ( édit.),
954 IUBA DEMAURÉTANIE 141
Alimenta . Estudios en homenaje al Dr. Michel Ponsich,Gerión Anejos III,
Madrid 1991, p. 115 -118.
(2) Statuaire : On trouve peut-être une représentation de Juba dans un bronze
de Volubilis, ainsi que dans plusieurs bustes en marbre , conservés au Musée de
Cherchel ( cf. Gsell 34, p. 47-52), au Musée du Louvre (cf. 108 E . Boucher
Colozier, « Quelques marbres de Cherchel au Musée du Louvre » , Libyca 1,
1953, p. 23-28), à la glyptothèqueNy Carlsberg de Copenhague et au Musée du
Prado à Madrid ( 109 A . Blanco et M .Lorente ,Museo del Prado. Catálogo de la
escultura, Madrid 1969, p. 113, n° 385, lámina 13). Cependant, l'identification
de ces pièces est discutée.
Cf. 110 F . Poulsen , «Porträtkopf eines numidischen Königs» , SO 3 , 1925, p. 1- 12, notam
ment p. 4 ; 111 R . Thouvenot, « Bronzes d 'art trouvés au Maroc » , CRAI, 1945, p . 592 -605 ;
112 R . Bloch, « Une tête de Juba II, trouvée à Tigava », CRAI, 1946 , p. 109 -112 ; 113 J. Car
copino , « Notes sur les deux bustes trouvés à Volubilis » , Notices et Mémoires de la Société
archéologique de Constantine 68, 1953, p. 61-85 ; 114 J. Baradez, « Un grand bronze de Juba
II, témoin de l'ascendance mythique de Ptolémée de Mauretanie », BAM 4 , 1960, p . 117 -132 ;
115 G . M . A . Richter, The portraits of the Greeks, London 1965, p . 280 sq. ; 116 Ch . Boube
Piccot, Les bronzes antiques du Maroc, t. I : La statuaire, Rabat 1969, p . 69 sqq. ;
117 K . Fittschen , « Bildnisse numidischer Könige» , dans H .G . Horn et C . B . Rüger 36 , p . 209
226 ; Ghazi et Ben Maïssa 41, p. 257-258 .
JOSÉ MARÍA CAMACHO ROJO et PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ .
42 JULIA DOMNA RE 56 ca 170 -217
Seconde épouse de l'empereur Septime Sévère et mère des empereurs Cara
calla et Géta , plutôt connue par les textes littéraires sous le nom de Julia, éven
tuellement suivi de son titre (Augusta , AŬyovota ou Ekbaotń ), et sous le nom
de Julia Domna par les inscriptions (cf. 1 G .Herzog, art. « Iulius » 566 , RE
X 1, 1917, col. 926 -927). Elle a joué dans les domaines politique et culturel un
rôle de premier plan qui lui valut l'appellation, exceptionnelle pour une femme
de l'Antiquité, de « philosophe» .
Le gentilice Julius indique que sa famille a reçu fort tôt la citoyenneté
romaine, sans doute à l' époque augustéenne (cf. 2 F.Ghedini,Giulia Domna tra
Oriente ed Occidente . Le fonti archeologiche, coll. « La Fenice, collana di Sc.
dell'arte » 5, Roma 1984, XII-235 p ., 2 pl., p .4 n. 21). Quant à l' étymologie du
cognomen Domna, elle reste discutée. Les Romains y ont souvent vu, à tort, la
contraction de Domina ; en fait, d'après 3 A . Birley, The African emperor Sep
timius Severus,London 1988, p. 72, elle est à rattacher à l' arabe dumayna, dimi
nutif archaïque de Dimna, en rapport avec la couleur noire . 4 E . Kettenhofen ,
« Die syrischen Augustae in der historischen Überlieferung, Ein Beitrag zum
Problem der Orientalisierung» , coll. « Antiquitas» 3 , 24, Bonn 1979, p . 76 -78,
examine les différentes étymologies proposées.
Études d 'orientation . La synthèse de Herzog 1 est toujours utile, mais il faut
compléter avec les travaux plus récents de Birley 3, notamment p. 68 -80 , et de
Kettenhofen 4 dont les pages 9- 143 sont consacrées à Julia Domna. Ce dernier
ouvrage contient en outre une riche bibliographie , p. XIII-XXXIII, et, p. 299-309,
un relevé de toutes les inscriptions qui concernent le personnage. La monogra
I 42 JULIA DOMNA 955
phie de Ghedini 2 est indispensable : elle fournit les documents iconographiques
et retrace ( p . 3 - 15) la vie de Julia . Les éléments biographiques qui suivent sont
empruntés à ces quatre auteurs. Les ouvrages de 5 J. Babelon , Impératrices
syriennes, Paris 1957, et de 6 G . Turton, The syrian princesses. The women who
ruled Rome, A . D . 193-235, London 1974, contiennentdes pages qui présentent
un portrait plus romanesque que véridique de Julia Domna. En revanche, 7 G . W .
Bowersock , Greek sophists in the Roman empire, Oxford 1969, p . 101- 109
(« The circle of Julia Domna ») est une référence d 'une très grande valeur scien
tifique .
Biographie . Il est certain que Julia est la fille du grand-prêtre d 'Élagabal,
Julius Bassianus, le cognomen latinisé Bassianus dérivant sans doute du sémiti
que basus, titre sacerdotal (cf. Birley 3, p . 72). Si Dion Cassius (LXXIX 24, 1
Foster ) lui donne une origine populaire , il faut sans doute comprendre « non
sénatoriale » d 'après Birley 3, ibid.; elle est peut-être la petite-nièce d 'un certain
Julius Agrippa , primipilaris (cf. Birley 3, Appendix 2 n° 38 et 43 p . 222-223). Sa
sæur cadette est Julia Maesa, grand-mère de l'empereur Élagabal. Qu'elle soit
originaire de Syrie (Dion Cassius LXXVIII 10 , 2 ), et plus précisément d'Émèse ,
ville sainte du dieu -Soleil Élagabal, ne fait aucun doute (cf. Dion Cassius
LXXIX 30, 3; Hérodien V 3, 2). Pour un aperçu sur les liens familiaux de Julia
Domna, consulter l' arbre généalogique de la famille dressé par 8 R . D . Sullivan,
« The Dynasty of Emesa » ,ANRW II 8 , 1977, p. 200 .
L 'existence de Julia s'éclaire pour nous à partir de son mariage avec L . Septi
mius Severus, le futur empereur, qui n 'est alors que legatus pro praetore de la
Gaule Lyonnaise ; l'événement a lieu en 185, ou au plus tard en 187, la date est
controversée (cf. Ghedini 2 , p . 4 n . 22). Veuf, le propréteur, versé dans l'astrolo
gie, avait décidé de prendre pour femme Julia, à qui un horoscope avait prédit
qu 'elle épouserait un roi (S. H . A. Sev. 3, 9 ; Al. Sev. 5, 4 ; Get. 3, 1). Un premier
enfant, L . ( ?) Septimius Bassianus, qui deviendra Marc Aurèle Antonin , surnom
méCaracalla, naît le 4 avril 186 (ou 188 ; cf. Ghedini 2 , p . 5 n . 34 ; la source est
Dion Cassius LXXIX 6 , 5 ); il sera suivi de P . Septimius Geta le 27 mai 189 ( cf .
Sev. 4 , 2 ; 20, 2 ; Get. 3, 1 ).
Son mari devenu empereur le 9 avril 193, Julia , nouvelle Augusta , l'accom
pagne dans tous ses déplacements à travers l'empire et tire un bénéfice politique
évident de ses succès militaires : la guerre contre Pescennius Niger et ses alliés,
en Syrie , lui vaut, le 14 avril 195 , le titre de mater castrorum ; elle devient la
même année mater Caesaris, en 197 mater imperatoris destinati,mater Augusti
ou mater Augusti et Caesaris en 198, mater Augustorum en 209. Tous ces titres,
dont la nature politique est claire, s 'accompagnent d 'identifications à des divini
tés (cf.Herzog 1, col. 928 -929, pour un rapide résumé).
Durant les années 197-202, Julia séjourne en Orient, notamment en Égypte .
C 'est l' époque où le préfet du prétoire, Plautien , prend un tel ascendant sur
l'empereur qu 'il apparaît, dit Dion Cassius, comme un « quatrième César»
(LXXVI 15, 2 ) ; fort de l'appui de Septime Sévère et du mariage de sa fille
Plautilla avec le fils aîné de l'empereur (202 ?), il calomnie (l'accusation d 'adul
956 JULIA DOMNA I 42
tère se trouve dans S. H . A. Sev. 18, 8 sans être rattachée à Plautien) et écarte du
pouvoir l' impératrice, qui se plonge alors dans les activités intellectuelles et
philosophiques (Dion Cassius LXXVI 15, 6 -7 ; l'épisode est jugé crucial par la
Souda qui en fait l'essentiel de la notice qu 'elle consacre à l'impératrice, s. v.
’ lovnía AŰyovota ). Elle participe néanmoins à la célébration des ludi saecu
lares de 204 avant que l' assassinat de Plautien, qu 'elle apprend alors qu 'elle est
à côté de Plautilla (Dion CassiusLXXVII 4 , 4 ), ne luiredonne le pouvoir.
En 208, elle part de Rome pour la Bretagne avec l'empereur et ses fils
(Hérodien III 14, 2 ). Dion Cassius LXXVII 16 , 5 rapporte que l' impératrice se
scandalise des mæurs des femmes autochtones et que l'épouse d'un noble calé
donien nommé Argentocoxus réplique en taxant les Romaines d 'hypocrisie .
Faut-il donc ajouter foi à la S.H . A., Sev. 18, 8 qui désigne Julia comme adul
tère ? ou voir dans la réaction de l'impératrice de la « pruderie » (cf. Ghedini 2,
p . 12 n . 99) ? à moins, selon Herzog 1, col. 933, qu 'il ne s'agisse d'une simple
curiosité d 'ethnographe. En tout cas, la mort de Septime Sévère devant York le 4
février 211 marque le début des hostilités ouvertes entre ses deux fils . D 'après
Hérodien III 15, 6 , Antonin rejoint son frère et sa mère, et celle -ci, qui s 'efforce
d 'obtenir une réconciliation , a bien du mal à empêcher que l'Empire ne soit par
tagé en deux (Hérodien IV 3 , 8 -9 ) ; un an plus tard , fin février 212, elle verra
mourir dans ses bras Géta assassiné par son frère. Dion Cassius, LXXVIII 2, 1-6,
et Hérodien, IV 4, 3 relatent l'épisode de façon pathétique, et le premier précise
même qu 'il est interdit à l'impératrice de pleurer son fils.
Dès lors, Julia va suivre Caracalla des frontières nord -orientales de l'Empire
jusqu 'en Asie mineure ; elle ne s'installe à Antioche qu 'en 216 . Son ascendant
sur l'empereur paraît grand . Cela donne même lieu à des ragots sur leurs rap
ports , qui seraient incestueux ( d' après Hérodien IV 9 , 3 , les Alexandrins avaient
surnommé Julia Jocaste ; l'inceste est fréquemment évoqué par les textes posté
rieurs : cf. S.H . A ., Sev. 21, 7 ; Carac. 10 , 1 -4). Julia cumule de nombreux et nou
veaux titres pia , felix, mater senatus et patriae, mater populi Romani et son fils
la charge d 'une fonction très importante, dont la nature exacte nous échappe (cf.
Ghedini 2 , p . 14 n . 127), celle de la correspondance impériale ordinaire (Dion
Cassius LXXVIII 18 , 2) ; l'empereur l'autorise en outre à associer son nom au
sien dans les lettres officielles adressées au sénat.Mais l'assassinat de Caracalla,
dont elle apprend la nouvelle à Antioche, l'incite à mourir. Selon Hérodien
IV 13, 8, elle se donne la mort, mais l'historien refuse de se prononcer sur le
caractère spontané du suicide. Le récit de Dion est plus nuancé : sous l'effet de
cette annonce, l'impératrice pense se tuer, puis se ravise devant les bonnes
dispositions qu 'affiche à son égard le nouvel empereur,Macrin (LXXIX 23, 1
2) ; passionnée par le pouvoir, elle complote et aspire à atteindre la puissance de
Sémiramis ou de Nitocris (LXXIX 23, 3) ;mais chassée d 'Antioche par Macrin ,
informée de ce qui se dit à Rome au sujet de son fils, elle meurt en 217, épuisée
par un cancer du sein et le refusde nourriture (LXXIX 23, 6 ).
Documents iconographiques. Les représentations de Julia Domna sont parti
culièrementnombreuses ; elles servent avant tout à la propagande des Sévères.
I 42 JULIA DOMNA 957
On recourra en priorité à Ghedini 2 pour une approche d 'ensemble avant de
consulter les études suivantes, plus spécialisées.
Pour les monnaies, 9 H .Mattingly et E . A . Sydenham , The Roman imperial
Coinage, IV 1,London 1968 (références dans l'Index III, s.v. « Domna, Julia » ,
reste l'ouvrage de référence . 10 S . S .Lusna, « Julia Domna 's coinage and severan
dynastic propaganda », Latomus 54, 1995, p. 119-139, avec reproductions,mon
tre que les représentationsmonétaires de l'impératrice se situent dans la tradition
romaine et sont proches des effigies des femmes des Antonins, notamment des
deux Faustine; iln 'y a pas de tradition orientale perceptible. .
Pour les portraits , il semble qu 'il y ait la même volonté de s'inscrire dans la
lignée des Antonins, Julia étant représentée de la même façon que Faustine la
Jeune, épouse deMarc -Aurèle (cf. 11 D . Baharal, « The Portraits of Julia Domna
from the years 193-211 A . D . and the dynastic propaganda of L . Septimius Seve
rus », Latomus 51, 1992 , p . 110 - 119). Sur la répartition des portraits de Julia
Domna dans l'espace et dans le temps, voir 12 J. Fejfer, « The Portraits of the
severan empress Julia Domna : A new approach » , ARID 14 , 1985, p. 129- 138.
Nous n 'avons pas pu consulter les dissertations de 13 K . Buchholz , Die Bildnisse
der Kaiserinnen der severischen Zeit nach ihren Frisuren , Frankfurt a. M . 1963,
14 J.Meischner, Das Frauenporträt der Severerzeit, Freie Univ. Berlin 1964,
15 R . Schlüter, Die Bildnisse der Kaiserin Julia Domna,Münster 1971.
Le cercle de Julia Domna : Julia la Philosophe. Julia Domna fut appelée ń
Dióoogos (cf. Philostrate , V . Soph. II 30, ó tñs oinooooov rats ’ lovníac).
D 'autre part, on apprend de Dion Cassius (LXXVIII 18 , 3) que sous le règne de
Caracalla, à Antioche, elle recevait,au mêmetitre que l'empereur, des personna
lités avec lesquelles elle s'entretenait de philosophie (Épihooodei) avec une
passion croissante . Or, le mêmeDion Cassius fait remonter à l'année 200, qui
voit l'ascension du préfet Plautien , l'intérêt de l'impératrice, écartée du pouvoir,
pour la philosophie : « Pour cette raison , elle se mit à la philosophie (@looo
DETV ... nočaro ) et passait ses journées avec des sophistes (OODLOTAT ) » (LXXVI
15, 7). Il n 'est pas sûr qu'il s'agisse d'une réelle activité philosophique ; il s'agit
plutôt d 'une activité intellectuelle au sens large du terme comme semble l'attes
ter la mention de « sophistes ». D 'ailleurs, Philostrate, dans la Vie d 'Apollonios
de Tyane 13, écrit que Julia Domna τους ρητορικούς πάντας λόγους επήνει
xaiňonáčeto et indique qu 'elle lui demanda d' améliorer, sur le plan stylistique
uniquement, les Mémoires de Damis (2- D 9), la forme lui important, apparem
ment, plus que le fond. L 'impératrice serait donc davantage une adepte de la
Seconde Sophistique que de la philosophie,mais il n 'est guère facile de trancher
dans lamesure où dans les Vies de sophistes II 30 sontmentionnés, dans l' entou
rage de Julia , des yewuétpal et des piñóoopou. En fait, les termes de « rhéteur»,
« sophiste » et « philosophe » sont, à l'époque, fort difficiles à distinguer et peu
vent désigner la même personne (cf. Bowersock 7, p. 11- 15 ). Un document épi
graphique, la Lettre aux Éphésiens adressée par Julia Domna (AnnEpigr 1966 ,
n° 430), prouve d'ailleurs l'intérêt de l'impératrice pour les activités intellec
tuelles de la ville (lire le commentaire de 16 L . Robert, « Sur les inscriptions
958 JULIA DOMNA I 42
d 'Éphèse , fêtes, athlètes, empereurs, épigrammes» , RPh 41, 1967, p. 58 -62 ). Le
mot épraotplov, qui figure à la dernière ligne et quitroublait Robert, est com
pris par 17 B . Lifshitz , « Notes d'épigraphie grecque » , ZPE 6 , 1970 , p . 60,
comme « un emploi métaphorique... au sens d' établissement où l'on cultive la
rhétorique et la philosophie et on forme des rhéteurs et des philosophes » . Cette
hypothèse nous semble confirmée par un passage des Éthiopiques d'Héliodore
(II 26 , 1) qui définit Delphes exactement de la même façon : åvop @ v... 00p @ v
εργαστήριον.
L 'impératrice a rassemblé autour d'elle un certain nombre de lettrés et de
savants, au nombre desquels Philostrate , qui revendique l'appartenance à son
« cercle » , TOŨ nepi aúrny xúxov (V. Apoll. I 3). A la suite notamment de
V . Duruy, Histoire des Romains depuis les temps les plus reculés jusqu 'à Dio
clétien , t. VI, Paris 1879, s'est développée une représentation mythique du cercle
de Julia Domna, élaborée sur le modèle des cercles qui entouraient certaines
princesses italiennes de la Renaissance et on s'est plu à y introduire tout ce que
l'époque comptait de célébrités. Citons, parmi des auteurs plus récents , Babe
lon 5 , p . 146 -149, et 18 R . Turcan , Vivre à la cour des Césars, « Collection
d'Études anciennes» 57, Paris 1987, p . 212-213, qui nomme Oppien , Sérénus
Sammonicus, Galien, Diogène Laërce, Philostrate, Gordien , Aelius Maurus,
Ulpien et Papinien, avant de conclure : « Comme Hadrien , “Julie la philosophe”
(Philostrate ) anime une sorte d'académie æcuménique, mais où les Orientaux
dominent.» . L 'auteurmentionne en note , et en passant, l'ouvrage fondamental
de Bowersock 7. Or, cet historien , dans son chapitre « The circle of Julia
Domna » , p . 101-109, après avoir rappelé toutes les configurations du cercle et
leur origine, a définitivement ruiné l'image d'un regroupement des intellectuels
les plus en vue.Même si cette révision , aussiméthodique qu 'impitoyable , de la
liste des membres du cercle de l'impératrice est parfois jugée excessive ( ainsi
Ghedini 2, p . 10), elle est très souvent jugée salutaire (cf. notamment Birley 3 ,
p . 168, et Kettenhofen 4 , qui reprend la thèse de Bowersock 7 dans la section
qu'il consacre, p . 13 - 16 , au « cercle de Julia Domna» ). Les rares noms conser
vés, à la suite de Bowersock 7 , p . 108, sont ceux de Philostrate , de Philiscos de
Thessalie , titulaire , grâce à l'impératrice, de la chaire de rhétorique à Athènes, et
peut-être de Gordien (avec un doute sur l' identité de ce dernier, dédicataire des
Vies de sophistes et interlocuteur de Philostrate dans le temple de Daphné, à
Antioche ; cf. Bowersock 7, p. 6 -8 ; 105- 106 ). D 'après Bowersock 7, p. 108, la
mention de Julia Domna au vers 1 4 des Cynégétiques du Pseudo -Oppien n 'est
pas une preuve suffisante de l'appartenance du poète à ce groupe. En conclusion,
autant dire que nous n 'avons aucune certitude, non pas sur l'existence, mais sur
la composition de ce cercle . Bowersock 7, p. 109, affirme même que ses
membres devaient être médiocres, car les plus grands sophistes « avaientmieux à
faire qu 'à édifier une impératrice » ; les conditions de création du cercle -
disgrâce de Julia Domna – n 'avaient sans doute pas contribué à attirer les intel
lectuels brillants (p . 106 ) . De plus, le travail de Bowersock 7 a permis d 'aban
donner l'hypothèse, devenue un cliché, selon laquelle la cour de Julia Domna
142 JULIA DOMNA 959
était dominée par un milieu intellectuel oriental, porté sur le mysticisme (cf.
Bowersock 7, p. 101, repris par Kettenhofen 4, p. 16 ; mais Ghedini 2, p. 11,
évoque encore les tendances « misticheggianti » liées peut-être à la culture
orientale de l' impératrice).
Philostrate reste donc pour nous le témoin privilégié du cercle de Julia
Domna, entre autres à travers la création de la Vie d 'Apollonios de Tyane, entre
prise à la demande expresse de l' impératrice (V. Apoll. I 3). Comme l'æuvre
n 'est pas dédiée à sa commanditaire, il est généralement admis que sa parution
est postérieure à la mort de Julia (voir en dernier lieu, contre 19 A . Calderini,
« Teoria e pratica politica nella “ Vita di Apollonios Tianeo ”, RIL 74, 1940 -1941,
p . 213- 241, partisan d ’une datation haute , entre 200 et 205, la réfutation de
20 M .Mazza , « L 'intellettuale come ideologo : Flavio Filostrato ed uno “specu
lum principis” del III secolo d . C .» , dans P . Brown, L . Cracco -Ruggini, M .
Mazza [édit.], Governanti e intellettuali, popolo di Roma e popolo di Dio (I- VI),
Torino 1982, p. 102 - 104 ; on lira dans 21 E . Koskenniemi, Der philostrateische
Apollonios, coll. « Commentationes Humanarum Litterarum » 94, Helsinki 1991,
p . 31-44 , une rapide synthèse sur les différentes interprétations prêtant des
intentions politiques à cette cuvre de Philostrate, avec leurs incidences sur sa
datation ). Il nous semble que la remarque de bon sens de 22 F. Grosso, « La vita
diApollonio di Tiana come fonte storica » , Acme 7, 1954 , p. 515 n . 5, n'a pas été
suffisamment prise en compte : « Se Giulia Domna fosse stata ancora viva al
tempo della pubblicazione, il retore non avrebbe scritto che essa " amava e
lodava” ... i discorsi retorici» .
Dans quelle mesure la Vie d 'Apollonios de Tyane reflète-t-elle les préoccupa
tions de son auteur, il est difficile de le dire . Certains, dont Solmsen, comme le
rappelle Kettenhofen 4, p. 16 , ont émis des réserves, et de fait aucun document
ne mentionne l'intérêt de l'impératrice pour le pythagorisme ou Apollonios; seul
Dion Cassius LXXVIII 18, 4 signale la vénération de Caracalla pour le thauma
turge de Tyane auquel il consacre un autel.Néanmoins, l'idée d 'un cercle pytha
goricien gravitant autour de Julia Domna a souvent été avancée, et 23 W .
Burkert, « Zur geistesgeschichtlichen Einordnung einiger Pseudopythagorica» ,
dans K . von Fritz (édit.), Pseudepigrapha, I: Pseudopythagorica – Lettres de
Platon – Littérature pseudépigraphique juive, coll. « Entretiens sur l'Antiquité
classique» 18, Vandæuvres -Genève 1972, p . 54 , remarque que la mention par
Philostrate (V . soph. II 30) de « géomètres» et de « philosophes» « a une réso
nance bizarrement pythagoricienne» ; qualifiant la Vie d 'Apollonios de Tyane
d '« évangile pythagoricien », il affirme que le pythagorisme trouvait une « oreille
attentive » à la cour de Julia, avant de se demander, en conclusion de son exposé,
si le traité du pythagoricien Ecphante ( E9) Sur la Royauté ne pourrait pas être
né dans ce milieu.
L' examen des liens de Julia Domna avec la philosophie ne serait pas complet
sans la mention de la Lettre 73 de Philostrate.Malheureusement, les débats sur
l'authenticité de cette dernière et les difficultés d'interprétation du texte sont
gênants. On trouvera dans tous les travaux cités ci-dessous les corrections propo
960 JULIA DOMNA I 42
sées et les différentes traductions des passages délicats. Quel en est le contenu ?
Après avoir rappelé que Platon admirait les sophistes, et notamment Gorgias,
l'auteur, qui salue la « sagesse et l'intelligence » , oogía xai uñtis, de Julia
(Ghedini 2, p . 131, rappelle , citant ce passage , que Julia a été identifiée à Athé
na), lui demande de persuader Plutarque de ne pas s'en prendre aux sophistes. Il
apparaît aussi dans cette même lettre que l'impératrice s'était intéressée récem
ment aux dialogues d ’Eschine le Socratique. Or, Bowersock 7, p . 104 -105 , à
partir de données historiques et philologiques - il serait possible de retrouver des
parallèles avec la vie de Gorgias telle qu 'elle se lit dans les Vies de sophistes - a
voulu voir dans cette lettre l’æuvre d'un faussaire : « L 'auteur connaissait un trai
té de Plutarque contre les sophistes, mais malheureusement (...) sa chronologie,
faisant du sage de Chéronée un contemporain de Philostrate , était fausse.» Cette
thèse est acceptée par Kettenhofen 4 , p . 15, mais elle a été contestée. 24 C .P .
Jones, Plutarch and Rome, Oxford 1971, p. 131- 132, rappelle , exemples à
l'appui, que « c 'est un trait courantdes écrits polémiques antiques , et notamment
grecs, de traiter un adversaire mort comme s'il était encore en vie ». La thèse est
développée par 25 G . Anderson , « Putting pressure on Plutarch : Philostratus
Epistle 73 » , CPh 72, 1977, p. 43-45, à partir du Phèdre de Platon et de Lucien ,
Pro imaginibus 24. Enfin, 26 R . J. Penella, « Philostratus' Letter to Julia Dom
na » , Hermes 107, 1979, p. 161- 168, après une traduction commentée du texte,
reprend les arguments de Jones 24 et d 'Anderson 25 ; il montre que le propos de
la Lettre 73 est celui des autres æuvres de Philostrate , les Vies de sophistes et la
Vie d 'Apollonios de Tyane : il s'agit d'affirmer que « philosophy and sophistry /
rhetoric are compatible » (p. 168). Reste à savoir, comme se le demande 27 F.
Solmsen, art. « Philostratos» 10, RE XX 1, 1941, col. 165, si l'impératrice avait
lu l'ouvrage de Plutarque (qui ne nous est connu que par Isidore de Péluse Ep.
2, 42 = PG 78, 484 = fr. 186 Sandbach ).
PATRICK ROBIANO.
43 IULIANUS IV
Julianus faisaitpartie de ces intellectuels venus en nombre, au IVe siècle, faire
le pèlerinage des Tombeaux des Rois, en souvenir de celui que la tradition prê
tait à Platon : « Tu as eu le bonheur d'admirer cela , sage Platon ; situ avais pu toi
aussi, philosophe Julianus, voir le voyage du sage ! » (J. Baillet, Inscriptions
grecques et latines des tombeaux des rois ou Syringes, Le Caire 1923, n° 1255 ;
les signatures 902 et 1900 sont apparemment du même personnage). Sa visite
pourrait être contemporaine de celle du dadouque Nicagoras, en 326 ( voir Baillet
nº 1265 et G . Fowden , « Nicagoras of Athens and the Lateran Obelisk » , JHS
107, 1987, p . 51-57 ), ce qui amenait J. Baillet à envisager une identification avec
le sophiste Julien de Cappadoce (Eunape, Vies des philosophes et des sophistes
IX ; p . 59, 5 -63, 15 Giangrande). Mais rien ne permet de considérer le sophiste
comme un platonicien .
BERNADETTE PUECH .
I 46 IULIANUS 961
-- -
derniers moments de sa vie : ôc xai év tñ áoanoel toŨ [...] 'Iwávvou ouu
παρών και το μαρτυρικόν αυτού και πολύαθλον σώμα εντίμως έθαψεν εν
τη των Περσών χώρα ου τον τάφον ο μέγας Κοσμάς ιδών [...] εδομήσατο
vaòv én ' óvóuatI TOŨ [...] ' Iwávvov (AIE IV , p. 299, li. 26 -31).Deux éléments
sont cependanttotalement neufs et détermineront le développement de toutes les
Vies postérieures : [1] dans BHG3 394 , il est pour la première fois question du
précepteur de JD , Cosmas, surnommé l’Hagiopolite : il naquit et grandit en
Crete, ou il devint diacre παρά του αρχιερέως της Κρήτης ; il fut melode et
thaumaturge ; ailleurs, nous apprenons qu' il fut aussi évêque deMaïouma, ce qui
est peut-être une interpolation tardive, l'existence d'un évêché orthodoxe de
Maïouma au vije-vine s. étant elle -même douteuse. Sans nous attarder sur ce
personnage problématique (cf. Détorakès 4 , passim ), issu vraisemblablement
d 'une identification d 'au moins trois homonymes – le Crétois Cosmas l'Ermite
(viº s.), Cosmas le Mélode (Vire s.) et un thaumaturge constantinopolitain ( rési
dant à Pétra ?) – nous dirons ici que son introduction dans la Vie de JD révèle
d 'une part la volonté d 'établir une parenté spirituelle entre les trois plus grands
compositeurs " hagiopolites” – André "l'évêque" de Crète , Cosmas le Mélode ,
JD – et d'autre part la nécessité de faire entrer le grand compositeur dans le
camp des iconophiles. De surcroît, la formation d 'un couple Cosmas-JD rappelle
certains autres couples célèbres : Cosmas et Damianos (sonorité proche de
Aauaoxnvós), Cyr et Jean, Jean et Barsanuphe, ou Barlaam et Joasaph . [2]
Autre élément nouveau : la dénonciation par Constantin V , auprès de Chosroès,
d 'un prétendu complot de JD , suivie du miracle de la main coupée. Ce récit
répond sans nul doute à un besoin de justifier à la fois l'existence de l' Epistula
ad Constantinum Caballinum (cf. I 1 B 1 e ) et l'accusation de complot portée par
le Concile de Hiéria contre JD . En effet, les termes mêmes de l'anathème -
Éníbovios tñs Baoideias – réapparaissent au sein de ce récit (cf. AIE IV ,
p . 281, li. 14 sq.). Quant au miracle de la main coupée, qui aurait donné lieu à un
certain type d 'iconographie (Vierge tolyepoữoa : cf. LCI VII, 1974 , col. 104 ;
col. 102- 104 : iconographie de JD ), il a peut- être été conçu du temps du second
iconoclasme: cf. BHG3 885 с, éd . 37 Th . Détorakès, « Lamain coupée de Jean
Damascène » , AB 104 , 1986 , p. 371-381. - A ces deux éléments, ajoutons les
informations détaillées et généralement correctes que BHG3 394 nous livre sur
l’æuvre théologique et hymnographique de JD , ainsi que celle selon laquelle
Jean fut moine et prêtre à Jérusalem (AIE IV , p. 279, li. 29-30 ), information qui
rejoint le témoignage du Parisin . gr. 1476 (cf. I В 2 a ). d .Retenant le strict
nécessaire de BHG3 394, la Souda (2e moitié du Xe s.), éd . Adler 32, t. II, p. 649,
nº 467, consacre une notice à JD , où celui-ci est qualifié, à la suite des Jean
Chrysostome, Philopon , Lydos et Stobée, de ávno xai aúrós royqubtaTOS,
ουδενός δεύτερος των κατ' αυτόν εν παιδεία λαμψάντων (cf. ΑΙΣ IV ,
p . 284, li. 32). L 'accent est mis sur la production littéraire de JD : Evyypáyuata
αυτού πάνυ πολλά και μάλιστα φιλόσοφα: είς τε την θείαν γραφής
Παράλληλοι κατ' εκλογήν, και οι ασματικοί κανόνες, ιαμβικοί και κατα
Royádnv. Cosmas le Mélode est mentionné,mais, commeBHG3 394, la Souda
J1 JEAN DAMASCÈNE 997
1. ÉDITIONS CRITIQUES
Depuis les années 1950, l'æuvre de JD , qui avait déjà bénéficié, depuis le xve
s., de nombreuses éditions, fut l'objet d'un intérêt scientifique considérable, qui
porte aujourd 'hui ses fruits.
Tout d' abord, sur la suggestion de A . Ehrhard, les quelque 2000 manuscrits
connus transmettant une ou plusieurs auvres de JD ont été recensés et, dans la
mesure du possible , étudiés à l' Institut byzantin de l' Abbaye bénédictine de
Scheyern (Allemagne). Les principaux responsables de ce travail furent Hoeck 3
(présentation critique de 150 ouvrages attribués à JD ) et 53 B . Kotter, Die Über
lieferung der Pege Gnoseos des hl. Johannes von Damaskos, coll. SPB 5, Ettal
1959 ( sur les autres écrits damascéniens, voir les introductions des vol. III- V de
l'édition critique: III, p. 1-62 ; IV, p . 70-97 ; V , p . 3 -62). Cette étude préalable à
l'édition critique des Opera omnia du Damascène a également été complétée par
les recherches de 54 F . Dölger, Das griechische Barlaam -Roman, ein Werk des
1004 JEAN DAMASCÈNE JI
h. Johannes von Damaskos, coll. SPB 1, Ettal 1953; 55 B . Studer, Die theolo
gische Arbeitsweise des Johannes von Damaskus, coll. SPB 2, Ettal 1956 ; 56 K .
Rozemond, La christologie de Saint Jean Damascène, coll. SPB 8 , Ettal 1959, et
57 G . Richter , Die Dialektik des Johannes von Damaskos. Eine Untersuchung
des Textes nach seinen Quellen und seiner Bedeutung, coll. SPB 10, Ettal 1964.
En un deuxième temps, et jusqu'au décès de B. Kotter († 1987), ce travail a
donné lieu à la publication de cinq volumes d'æuvres de JD (I. Philosophie ,
II. Dogmatique systématique, III. Discours anti-iconoclastes, IV . Polémique, V .
Hagiographie et homilétique) : 58 B . Kotter, Die Schriften des Johannes von
Damaskos, I = coll. PTS 7 , Berlin 1969, p . 20 - 26 : Institutio elementaris (PG 95,
col. 100-112 ; CPG 8040) ; p. 51-146 : Dialectica, sive capita philosophica (PG
94, col. 521-676 ; CPG et CPGS 8041) - les versions brevior (50 chapitres) et
fusior (68 chapitres) sont éditées sur deux colonnes, en regard (voir Nivas,
p . 47- 50) ; p . 151- 173: Fragmenta philosophica (CPG 8042 : textes parallèles à
certains chapitres de la Dialectica , édités à partir du Oxon. Bodl. Auct. T . 1.6 ,
XI s .) . II = coll. PTS 12 , Berlin /New York 1973, p . 7 -239 : Expositio fidei (PG
94, col. 789- 1228 ; CPG et CPGS 8043). III = coll.PTS 17 (Berlin /New York
1975), p. 65-200 : Contra imaginum calumniatores orationes tres (PG 94 , col.
1232- 1420 ; CPG et CPGS 8045 ; les trois discours sont présentés sur trois
colonnes, en regard : voir synopse p. 59-61). IV = coll. PTS 22 (Berlin /New
York 1981), p . 19-67: Liber de haeresibus (PG 94 , col. 677-780 ; CPG et CPGS
8044) ; p. 109-153 : Contra Jacobitas (PG 94, col. 1436 -1501 ; CPG 8047) ;
p. 173-231 : De duabus in Christo voluntatibus (PG 95, col. 128 - 185 , CPG
8052 ; le texte étanttransmis dans deux versions, une présentation synoptique est
donnée pour les chap. 4 -9 ; concernant les modifications dans la numérotation
des chapitres, voir p. 160- 161) ; p. 238-253: De fide contra Nestorianos (CPG
8054); p. 263-288 : Contra Nestorianos (PG 95, col. 188-224 ; CPG 8053);
p . 304 - 332 : Epistola de hymno Trisagio (PG 95, col. 21 -61 ; CPG 8049) ; p . 351
398 : Contra Manichaeos (PG 94, col. 1505 - 1584 ; CPG 8048) ; p . 409 -417 : De
natura composita contra Acephalos (PG 95, col. 112-125 ; CPG 8051) ; p . 427
438 : Disputatio Christiani et Saraceni ( spuria : voir p . 420 ; PG 96 , col. 1336
1348 ; CPG et CPGS 8075 ). V = coll. PTS 29 (Berlin New York 1988), p . 72- 90 :
Oratio in Palmas (spuria ; CPG et CPGS 8086 ; le texte est transmis dans deux
rédactions a et z très différentes entre elles, qui sont ici éditées en parallèle , en
parties haute et basse des pages, avec deux apparats critiques distincts) ; p . 102
110 : Oratio in ficum arefactam et in parabolam vinae (PG 96 , col. 576 -588 ;
CPG 8058 ); p . 121-146 : Oratio in Sabbatum sanctum (PG 96 , col. 601-644 ;
CPG 8059) ; p . 169 -182 : Oratio in Nativitatem sanctae Dei genitricis Mariae
(spuria ; PG 96 , col. 661-680 ; CPG et CPGS 8060 ) ; p . 202-245 : Passio magni
martyris Artemii (PG 96 , col. 1252- 1320 ; CPG et CPGS 8082); p. 256 -278 :
Laudatio sanctaemartyris Barbarae (PG 96 , col. 781-813 ; CPG 8065) ; p. 289
303 : Laudatio sanctaemartyris Anastasiae (spuria ; CPG et CPGS 8068 ; editio
princeps) ; p . 324 - 347: Homilia in Nativitatem Domini (CPG 8067) ; p . 359 -370 :
Laudatio sancti Johannis Chrysostomi (PG 96 , col.61-781 ; CPG 8064 ) ; p . 381
JI JEAN DAMASCÈNE 1005
395 : Oratio in occursum Domini ( spuria ; CPG et CPGS 8066 ) ; p. 406 -418 :
Commentarius in sanctum prophetam Eliam (spurius ; CPG et CPGS 8083) ;
p . 436 -459 : Homilia in Transfigurationem Salvatoris nostri Jesu Christi (PG 96 ,
col. 545 -576 ; CPG et CPGS 8057) ; p . 483 -500 , 516 -540, 548 -555 : In Dormi
tionem sanctae Dei genitricis Mariae orationes tres (PG 96 , col. 700-721 ; 721
753 ; 753- 761 ; CPG et CPGS 8061 ; 8062 ; 8063).
L 'ensemble de ces publications a été accueilli avec enthousiasme par le
monde scientifique. Cependant, quelques critiques ont également été formulées.
Elles concernent notamment les points suivants : t. I. L ' édition partielle des
Fragmenta philosophica est déplacée et induit en erreur, car ces fragments ne
sont pas dus à JD et ne lui ont jamais été attribués (voir 59 R . Riedinger, ByzZ
63, 1970, p. 342-346 ) ; t. II. Le traité “ pseudo -cyrillien" De SS. Trinitate (PG 77,
col. 1120 -1173 ; CPG 5432) a été présenté dans l'apparat des sources comme
une source principale de l'Expositio fidei, alors qu 'il n 'est qu 'une compilation
tardive (XIII -XIVe s.), issue de celle -ci (voir 60 V .S . Conticello , « Pseudo
Cyril's De SS. Trinitate : A Compilation of Joseph the Philosopher (†1330 )» ,
OCP 61, 1995, p. 116 -129) ; t. III. La présentation synoptique de trois discours
relativement proches textuellement, mais rédigés par JD à trois moments
distincts et dans des circonstances différentes, détruit l'unité et la cohérence de
chaque discours et en rend la lecture malaisée (la preuve en est donnée par la
réduction des trois discours « en un seul» (sic !) opérée dans la trad. française de
Darras-Worms signalée plus loin sous le n° 70). De plus, la question de l'authen
ticité du troisième discours , conservé dans un seulms., Neapolitan . 54 (II B 16 )
du XIIIe siècle (ayant déjà servi à l' édition de M . Lequien , Paris 1712), est insuf
fisamment étudiée (voir 61 G . Richter, TLZ 102, 1977, p. 213-214 ;62 H .G .
Thümmel,ByzS 38, 1977, p. 224-228 ); t. IV . Le stemmadu De haeresibus établi
par Kotter est totalement erroné. En effet, pour constituer celui-ci, l'éditeur s'ap
puie sur l'hypothèse selon laquelle JD a repris , presque intégralement, l'Anake
phalaiôsis (CPG 3765 ; PG 42, col. 833-885) du Panarion d'Épiphane. Or, il est
aujourd 'hui prouvé que JD a utilisé le texte original du Panarion (PG 41, col.
156 - 1200 ; 42, col. 9-832 ; CPG 3745), devenant lui-même l'auteur d'une nou
velle Anakephalaiôsis, qui n'est autre que le De haeresibus (63 O . Knorr, « Zur
Überlieferungsgeschichte des “Liber de haeresibus” des Johannes von Da
maskus » , Byzz 91, 1997, p. 59-69). t. V . L 'établissement de l'authenticité ou de
l'inauthenticité des textes présentés dans cette édition sur la base de critères
strictement stylistiques conduit à certaines contradictions avec les résultats de
Hoeck (64 E . Lanne, Irénikon 60 , 1987, p. 579), suivis par M . Geerard , CPG III,
p. 511-536 (voir cependant CPGS, p. 462-468). Ajoutons à cela que la prise de
position (à la suite de Dölger 54 ) en faveur d'une attribution du Roman de Bar
laam et Joasaph à JD , rend ces critères fort discutables.
L 'édition des Opera omnia de JD se poursuit actuellement à Scheyern avec la
préparation d 'une nouvelle édition critique du Roman de Barlaam et Joasaph
(PG 96 , col. 860-1240 ; CPG et CPGS 8120) par les soins de R . Volk , qui a déjà
publié trois importantes études à ce propos : 65 « Urtext und Modifikationen des
1006 JEAN DAMASCÈNE JI
griechischen Barlaam -Romans. Prolegomena zur Neuausgabe» , ByzZ 86 /87,
1993-94, p . 442-461 ; 66 « Symeon Metaphrastes. Ein Benutzer des Barlaam
Romans» ,RSBN, N . S. 33, 1996 , p .67-180 ; 67 « Neues vom Schreiber Kallistos
und vom Fortwirken zweier illuminierter Handschriften des Griechischen Bar
laam -Romans » , JÖB 48, 1998, p . 243-272. Le travail de 68 F . Gahbauer, « Der
Osterkanon des Johannes von Damaskos. Text, Übersetzung und Kommentar » ,
SMGB 106, 1995 , p. 133-174 , s'inscrit aussi dans ce même contexte .
Favorisé par l'activité éditoriale des bénédictins de Scheyern, un intérêt pour
l'euvre damascénienne se manifeste depuis quelques années en France avec les
traductions des “ Écrits sur l’Islam ” par 69 R . Le Coz, coll. SC 383, Paris 1992,
de la Dialectica et de l' Expositio fidei par V. S . Conticello (Thèse dactyl. citée
sous le n° 26 ; une seconde trad. franç.de l'Expositio fidei due à G . M . de Durand
et P . Ledrux est en préparation ), des C . imag. calumn. orationes tres par 70 A .-L .
Darras-Worms, Le visage de l’invisible, Paris (cf. compte rendu par 71 V. S.
Conticello, REAug 42, 1996 , p. 192 -194 ), et en Italie avec deux traductions
italiennes de l' Ef par 72 S . Rinaldi, avec introduction de A . Siclari, Parma 1994,
et par 72bis V. Fazzo, coll. « Collana ditesti patristici » 142, Roma 1998 , et des
C . imag. calumn. orationes tres par 73 V . Fazzo, coll. « Collana di testi
patristici» 36 , Roma 1983. En outre , la Dialectica a été traduite en allemand par
74 G . Richter, Johannes von Damaskos, Philosophische Kapitel, coll. « Biblio
thek der Griechischen Literatur » 15 , Stuttgart 1982. - Sur les nombreuses autres
traductions, anciennes etmodernes, des æuvres de JD , voir les listes complètes
données par Kotter dans les introductions des cinq volumes de l' édition critique.
C 'est également à la suite de l'édition Kotter qu ' ont vu le jour les éditions
critiques de trois écrits faussement attribués à JD : l’Epistula ad Theophilum
imperatorem (PG 95, col. 345-385 ; CPG et CPGS8115), par 75 H . Gauer, Texte
zum byzantinischen Bilderstreit. Der Synodalbrief der drei Patriarchen des
Ostens von 836 und seine Verwandlung in sieben Jahrhunderten, coll. STB 1,
Frankfurt am Main 1994, p. 74 -128 (cf. compte rendu de 76 B . Flusin , REByz
53, 1995 , p. 361- 363), puis par 76bis J. A Munitiz, J. Chrysostomides, E .
Harvalia Crooke et Ch . Dendrinos (édit.), The Letter of the three Patriarchs to
Emperor Theophilos and related texts, Camberley 1997; la Responsio ad
Iudaeos (CPG et CPGS 8092), éd. 77 J. H . Declerck, Anonymus dialogus cum
ludaeis saeculi ut videtur sexti (CCG 30), TurnhoutLeuven 1994 ; les Opuscula
islamica, dont certains circulent également sous le titre de Concertationes cum
Saracenis (PG 94 , col. 1596 - 1597 ; CPG et CPGS 8076 ) , par 78 R . Glei et A .
Th. Khoury , coll. « Corpus islamo-christianum » , Series graeca 3, Würzburg
1995.
Signalons enfin que l'Homilia de encaeniis ecclesiae resurrectionis dominiet
in vivificam crucem (CPG et CPGS 8095), conservée uniquement dans la tra
duction géorgienne d 'Éphrem Mtsiré , a fait l'objet d 'une édition critique par
79 N . Goguadzé, Tbilissi 1986 , aux p . 196 -220 de son édition des Anciens
recueils métaphrastiques. Les lectures du mois de septembre (en géorgien , notre
Homilia à la date du 13 septembre ). A ce propos, voir van Esbroeck 27 , p. 53- 98 .
JI JEAN DAMASCÈNE 1007
2. EUVRESNE BÉNÉFICIANT PAS D 'UNE ÉDITION CRITIQUE
A . Nous n'avons aucune information récente concernantune édition critique
de ce qui reste des Hiera, florilège damascénien mieux connu à travers les nom
breuses collections qui en sont issues et qui circulent sous le titre de Sacra
Parallela (CPG et CPGS 8056 et ci-dessous II 4 C b ). Cette édition est attendue
depuis le XIXe siècle : voir entre autres les travaux préparatoires de 80 F . Loofs ,
Studien über die dem Johannes von Damaskus zugeschriebenen Parallelen ,
Halle 1892 ; 81 K . Holl, Die Sacra Parallela des Johannes Damascenus, coll.
TU 16 , 1 ; N .F . 1, 1, Leipzig 1897 ; 82 A . Ehrhard, « Zu den Sacra Parallela des
Johannes Damascenus und dem Florilegium des Maximos » , ByzZ 10 , 1901,
p. 394 -415 , et ceux plus récents de 83 O . Wahl, Die Prophetenzitate der Sacra
Parallela in ihrem Verhältnis zur Septuaginta -Textüberlieferung, coll. « Studien
zum Alten und Neuen Testament » 13, München 1965 (2 vol.) ; 84 Id ., Der
Sirach - Text der Sacra Parallela , coll. « Forschung zur Bibel» 16 , Würzburg
1974 ; 85 Id., Der Proverbien - und Kohelet- Text der Sacra Parallela , coll.
« Forschung zur Bibel» 51, Würzburg 1985 ; voir également l'excellente présen
tation d'ensemble de 86 M . Richard , « Florilèges damascéniens» , DSp V , 1962,
col. 476 -486 , repris dans Id., Opera minora I, Turnhout/Leuven 1976 , n° I.
B . Pareillement, concernant l'immense æuvre hymnographique de JD , le plus
souvent éditée " en vrac” au sein de publications destinées à la pratique liturgique
(Octoèque, Triode,Ménées...), il semble qu'aucune étude préparatoire à une
édition critique ne soit pour l'instant envisagée. Voir cependant CPG 8070 , au
quel il faut ajouter 87 G . Stathis, Lesmanuscrits de musique byzantine. Mont
Athos, I-III, Athènes 1975 , 1976 et 1993 ; 88 J. Raasted, The Hagiopolites. A
Byzantine Treatise on Musical Theory , coll. « Cahiers de l'Institut du Moyen âge
grec et latin de l'Université de Copenhague », Copenhague 1983 ; 89 Ch .
Hannick et G . Wolfram , Die Erotapokriseis des Pseudo -Johannes Damaskenos
zum Kirchengesang , coll. « Monumenta Musicae Byzantinae. Corpus scriptorum
de re musica » 5, Wien 1997.
C . Les autres écrits, encore attribuables à JD , qui n 'ont pas bénéficié d'une
édition critique forment les groupes suivants : a. authentiques: De recta senten
tia liber (PG 94, col. 1421-1432 ; CPG 8046 ); De sacris ieiuniis (PG 95, col. 64
77 ; CPG 8050). b . d 'attribution douteuse : (1) Écrits circulant sous le nom de
JD : De sancta Trinitate (PG 95, col. 9- 17 ; CPG 8077) ; Commentarii in epistu
las Pauli (PG 95, col. 441-1033 ; CPG 8079) ; Deprecationes I-III (PG 96 , col.
816 -817 ; CPG 8081) ; Fragmenta (CPG 8087); Martyrium s. Petri neomartyris
Capitoliadis (en géorgien : éd . 90 K . Kékélidzé , Hristianskij Vostok 4, 1917 ,
p . 1-69, et CPG 8100) ; Sermo in annuntiationem B . M . V . (en arabe : éd. 91 L .
Cheikho , al-Mašriq 17, 1914, p. 274 -277 ; CPG 8080 ; trad . latine dans PG 96 ,
col. 643 -648 ). [ 2 ] Écrits circulant sous le nom de Jean d ' Eubée : Homilia in
conceptionem deiparae (PG 96 , col. 1460-1500 ; CPG et CPGS 8135) ; Homilia
in sanctos innocentes (PG 96 , col. 1501- 1508 ; CPG 8136 ); Homilia in Lazarum
(CPG 8137) ; Passio s. Parasceuae (CPG 8138 ). c . inauthentiques: nous ne
pouvons pas dresser ici la longue liste des écrits faussement attribués à JD (à ce
1008 JEAN DAMASCÈNE JI
propos, voir Hoeck 3, passim ). Nous nous contenterons donc de signaler les
principaux pseudépigraphes qui n 'ont pas, à ce jour, bénéficié d 'une édition cri
tique : Oratio de iis qui in fide dormierunt (PG 95, col.248-277, CPG 8112 et ci
dessus, I В 2 c ); De sacris imaginibus contra Constantinum Caballinum (PG 95,
col. 309 -344 ; CPG 8114 ) ; De corpore et sanguine Christi (CPG 8117 et 92 N .
Armitage, « The Theology of the Introduction and Sermon “ De corpore et San
guine Christi” attributed to John Damascene» , OC 80, 1996 , p . 1- 10) .
3. INÉDITS
Si l'on excepte les Hiera (voir II 2 A et II 4 Cb), très peu d' écrits damascé
niens conservés dans leur original grec restent inédits. Les principaux d ' entre
eux sont: une Homilia de cruce (CPG 8084) ; un Conspectus historiarum magni
canonis conservé dans le Sinaiticus gr. 313 (CPG 8085 ) ; un Lexicon conservé
dans le Vatican. Palat. gr. 46 du XIIe siècle (Hoeck 3, p. 48, n° 121) ; une Pro
fessio fidei contenue dans le Vindobon. phil. gr. 149 du XIVe s. (Hoeck 3, p . 20 ,
n° 8) . Les autres révèlent par leur titremême leur inauthenticité . En revanche, un
certain nombre d 'écrits perdus dans leur original grec , mais conservés dans des
langues orientales, devraient retenir l'attention des philologues, car il est fort
probable que certains d 'entre eux sont authentiques. Ce sont: [ 1] Écrits en trad .
arabe : Expositio et declaratio fidei (CPG 8078 ; trad . latine dans PG 95, col.
417-438 ) ; Refutatio Saracenorum (CPG 8088 ); Tractatus de matre dei (CPG
8089); De virginitate (CPG 8090 ); Homilia in ascensionem domini (CPG 8091).
[2 ] Écrits (= fragments de l'Expositio fidei ?) en trad. arménienne: De para
diso (CPG 8093) ; De providentia (CPG 8094). [3 ] Écrits en trad. géorgienne :
Laudatio ss. martyrum et patrum (CPG 8096 ) ; In archangelos (CPG 8097) ;
Tractatus de theologia et de nativitate domini nostri lesu Christi (CPG 8098 );
Homilia in Iohannem Baptistam (CPG 8099).
4 . RECENSEMENT DES ŒUVRES D 'INTÉRÊT PHILOSOPHIQUE
A . Écrits de philosophie “ post-chalcédonienne” : a . Un nombre important
d 'écrits damascéniens authentiques traite des principaux concepts des Catégories
aristotéliciennes, ainsi que des notions de substance, nature , hypostase, en appor
tant des développements nouveaux, dont le sens ne peut être entièrement perçu
qu 'à la lumière des controverses christologiques post-chalcédoniennes et princi
palement dans le contexte des débats entre jacobites sévériens et chalcédoniens.
Ces écrits sont les suivants : Institutio elementaris (Eloaywyn doyuátov
στοιχειώδης από φωνης Ιωάννου ταπεινού μοναχού προς Ιωάννην τον
Solbratov Éníoxonov Aaoðixelaç : Kotter I, p. 20 -26 ) et Dialectica (Oló
ooda xebáraia / Inmn yuúoews : Kotter I, p . 47- 146 ), deux textes qui expo
sent les définitions néoplatoniciennes ou patristiques du vocabulaire philosophi
que en usage dans la controverse christologique et constituent en ce sens de
véritables " manuels de philosophie post-chalcédonienne" ; les traités Contra
Jacobitas (Kotter IV, p. 109-153), De natura composita contra Acephalos (Toû
οσίου πατρός ημών Ιωάννου του Δαμασκηνού περί συνθέτου φύσεως
xatà åxepárwv : Kotter IV , p. 409-417), De duabus in Christo voluntatibus
JI JEAN DAMASCÈNE 1009
( Του μακαρίου Ιωάννου μοναχού Δαμασκηνού περί των ιδιωμάτων των εν
τω ενί Χριστώ τώ κυρίω ημών δύο φύσεων, εξ επιδρομής δε και περί δύο
Deanuátwv xai évepyelőv xai ulāç únooTÁOews :Kotter IV , p . 173-231),De
fide contra Nestorianos (CPG 8054 ; Kotter IV , p . 238 -253), dans lesquels JD
procède à une réflexion philosophico -théologique menée à partir des concepts
définis dans l'Institutio elementaris et la Dialectica. La comparaison des traités
De fide contra Nestorianos, qui s'appuie sur la spéculation philosophique, et
Contra Nestorianos (Kotter IV , p . 263- 288 ), qui use d 'une argumentation
strictement patristique sur le même sujet, révèle la spécificité de la réflexion
philosophico - théologique damascénienne qui s 'exprime dans ce groupe de
textes. - Sur ce sujet, voir en dernier lieu Conticello 26 , p . CXVIII-CLXIX .
b . Écrits inauthentiques: trois textes relevant d'une réflexion similiaire ont par
fois été attribués de façon erronée à JD ; en réalité, nous pouvons affirmer
aujourd'hui qu 'ils ont fait partie de ses sources, notamment dans l' élaboration de
la Dialectica. Ce sont deux opuscules tirés de l'Hodegos d'Anastase le Sinaïte
(CPG 7745 ; éd. 93 K .-H . Uthemann , coll. CCG 8 ,Leuven/Turnhout 1981), inti
tulés Opoi dla opol (= Hodegos, chap . 2 ) et De duabus in Christo naturis
(= Hodegos, chap. 1 ?) : voir Hoeck , p . 22, n° 17 , et p . 23 , nº 26 . A ceux -ci
s' ajoute le florilège dogmatique connu sous le titre de Doctrina Patrum de
Incarnatione Verbi ( éd . 94 F . Diekamp, Münster 1907 ; réimpr. Aschendorff
1981), et plus spécialement, pour ce qui est de la philosophie, son chapitre 6 .
B . Écrits d 'intérêt cosmologique ou anthropologique : a . De nombreux
chapitres de l' Expositio fidei (ToŨ dolov åbbã 'Iwávvov.TPEObutépov Aqua
oxnvoũ čxooolg åxplons tñs opodobou níotews: Kotter II) traitent de sujets
cosmologiques (chap. 19-24) ou anthropologiques (chap. 26 -39), ces derniers
consistant principalement en des reprises ou des remaniements de Némésius
d'Émèse, De natura hominis (PG 40, col. 504-817 ; CPG 3550). Sur l'anthro
pologie de JD , voir en dernier lieu 95 F . R . Gahbauer, « Die Anthropologie des
Johannes von Damaskos » , Th & Ph 69, 1994, p . 1-21. b . Ces chapitres ont parfois
connu une diffusion en tant qu'opuscules indépendants : ainsi, Quid est homo ?
(Tí totiv ävopwntos; PG 95, col. 244) reprend substantiellement l'Expositio
fidei, chap. 24 ; Demensibus macedonicis (PG 95, col. 236 -238 ) cite Expositio
fidei, chap. 20 et 21. Il faut cependant souligner l'inauthenticité de la grande
majorité des opuscules d'intérêt cosmologique mis sous le nom de JD : voir
Hoeck 3, p .51-52. c. Inauthentiques et sans intérêt philosophique sont également
deux écrits astronomiques inédits transmis sous le nom de JD : voir Hoeck 3,
p . 48 -49, nos 122 et 123. d. L 'opuscule pseudépigraphe De generatione hominis
(CPG 8123), également transmis sous les noms de Pline, Libanios et Galien , a
été édité et présenté par 96 K . Krumbacher, Studien zu den Legenden des hl.
Theodosios, coll. SBAW 1892,München 1893, p . 220 -379 et 345-347. e. Contrai
rement à ces opuscules, le De virtutibus et vitiis ( Ilepì đpetov xai xaxl
quyixőv xai owuatixõv : PG 95, col. 85-97 ; CPG 8111), dont le plus ancien
témoin manuscrit remonte au VIIIe siècle , est présenté comme authentique par
Hoeck 3, p. 28, nos 50 et 51, mais rejeté parmiles æuvres inauthentiques par M .
1010 JEAN DAMASCÈNE JI
Geerard , qui le rapproche d 'un De virtutibus et passionibus (CPG 4055) relevant
de la littérature de l'« Ephraem graecus» . L 'intérêt philosophique de cet
opuscule réside dans le classement systématique des cing sens " doubles" du
corps et de l'âme, et des vertus et vices correspondants, qu 'il opère.
C . Écrits ayant conservé des fragments d'intérêt philosophique ou rela
tifs à l'histoire de la philosophie : a. De haeresibus (Kotter IV , p. 19-67). Le
$ 83 de cet ouvrage nous a conservé deux fragments du De arbitrio de Jean
Philopon (CPG 7260) : 'Iwávvov ypauuatixoŨ TOŨ Tpločitou toŨ Neyouévov
Olonovou éx ToŨ ' Tóyou toŨ ALALTNTOŨ (Kotter IV , p. 50-51); 'Ex ToŨ
ALALTNTOŨ xepáralov 6' (Kotter IV , p. 51-55). b . Sacra Parallela (CPG 8056 ).
Sous le titre de SP sont généralement citées des collections compilées à partir
des restes du grand florilège composé par JD (ou réalisé sous son parrainage ),
intitulé Hiera (“Iepá ) et divisé en trois livres : I. Dieu ; II. l'homme; III. les ver
tus et les vices, disposés quant à eux par paires ou “ parallèles” . Il semble que,
dans la forme initiale de l'ouvrage, chaque lemme ou titre rassemblait des cita
tions scripturaires et patristiques présentées dans un ordre constant: 1. citations
vétéro -testamentaires; 2 . citations néo -testamentaires; 3. citations patristiques,
dont (a) grandes autorités : Basile de Césarée, Grégoire de Nazianze, Grégoire de
Nysse , Jean Chrysostome, Cyrille d'Alexandrie ; [b ] Pères prénicéens: Clément
de Rome et Pseudo-clémentines, Ignace, Justin , Théophile d 'Antioche, Irénée,
Clément d 'Alexandrie , Hippolyte, Cyprien , Denys d'Alexandrie , Grégoire le
Thaumaturge, Athénodore,Méthode, Pierre d'Alexandrie , Eusébe de Césarée (et
Eusébe d'Alexandrie), Doctrina Petri (éd. critique de ces fragments par 97 K .
Holl, Fragmente vornicänischer Kirchenväter aus den Sacra Parallela , coll. TU
20, 2 / N .F . 5 , 2, Leipzig 1899); 4. citations de Flavius Josèphe et Philon
d 'Alexandrie ( status quaestionis de l'édition de ces fragments dans Wahl 83,
p . 36 -40 , auquel on peut ajouter 98 F. Petit, « En marge de l'édition des frag
ments de Philon (Questions sur la Genèse et l'Exode). Les florilèges damascé
niens » , Studia Patristica 15, coll. TU 128, Berlin 1984, p . 20-25) ; 5. contrai
rement à ce qui apparaît dans les collections tardives des SP, aucune citation
d'auteur profane n ' était contenue dans les Hiera . – La collection de SP la plus
connue, et la seule éditée, est le Florilegium vaticanum , éd . M . Lequien , Paris
1712 (2e éd., Venise 1748), II, p. 278-730, repris dans PG 95 , col. 1040 -1588 ;
96 , col. 9-442 (voir Richard 86 , col. 480 -481). Dans la première édition de sa
99 Bibliotheca graeca, VIII, p. 806 -815, J. A . Fabricius donne la liste des auteurs
cités dans l'édition Lequien . Parmi eux, Épicure , Platon , Pythagore, Sextus, les
Stoïciens, Théognis représentent la littérature profane. Leurs citations constituent
toutefois des interpolations postérieures au IXe s. Dans la 2e édition de la
Bibliotheca graeca , IX , p. 722 -732, Harles mêle à cet index celui constitué par
100 A . M . Bandini, Catalogus manuscriptorum graecorum ... Bibliothecae
Mediceae Laurentianae..., I, Firenze 1764, p. 369- 370, en référence à un témoin
manuscrit d'une autre collection de SP , le Laurent. plut. VIII 22 . Cet index
" mixte ” (et renvoyant à deux paginations, l'une de l'éd . Lequien, l'autre du ms.
de Florence) a malheureusement été reproduit dans PG 94 , col. 45 -52 , sans
JI JEAN DAMASCÈNE 1011
- Gaius, ' Yrèp deonorðv, Kard Movoalou Moixeias, 'Ynèp louxiang, Karà
Μενάνδρας, Υπέρ Παύλου παιδός ιδίου έν μανία ανηρημένου,
– Iulius, £x tūv eis tòv ALÓvvoov xaimynatpida dexOévtov,
- Obrimos (RE 2, un rhéteur selon Photius, p. 115 a 33], <'Yntèp> Ilowtoyóvou
κρινομένου φαρμάκων, Υπέρ Σεβήρου,
- Sopatros, Lettre à son frère Himérius. Selon J. Schamp,il pourrait s'agir de deux fils du
sophiste Sopatros. Voir la notice consacrée au rhéteur Himérius ( H 136 ).
Quelques autres noms apparaissent ici et là quiméritent d'être rattachés à la tradition phi
losophique : un platonicien inconnu , Alcidamas ( ** A 88 ), Caton l'Ancien (* C 58 ), Céphiso
dore (™C 80 ?), Cléostrate (un buveur, qui n 'est sans doute pas Cléostrate de Ténédos
[2+ C 172]), Ésope (» E 60 ), Euphratès le Syrien ( » E 132), Euxitheos (» E 182), Linos ( Plepi
PúoewÇ xóquov ), Milon (Ovoixá ), Naucratès le Sage, Phalaris (Lettres), Pyrrhon, Scipion ,
Théoboulos (= Cléoboulos le Sage ?), Timon le Misanthrope.
Enfin, rappelons que l'auteur le plus récent utilisé par Stobée semble être Thémistius, dont
il cite le Mɛpiquxñs et plusieurs passages tirés Éx ToŨ METPLOTADOūç Ñ OLOTéxvou.
Pour la plupart de ces textes, il n' existe pas d'étude récente, ni d'édition postérieure à
l'édition Wachsmuth -Hense, encore moins de traduction en langue moderne. Encore une fois :
la liste dressée plus haut se borne à recenser les philosophes qui sont cités directement par
Stobée (ou qui sont présentés comme tels ) et n 'inclutpas de nombreux nomsqui apparaissent
par exemple dans les longs extraits des Placita d'Aétius.
Il n 'est pas sûr qu 'une si impressionnante collection d 'extraits ait été consti
tuée par la lecture directe des æuvres originales. Stobée a souventmis à profit
des recueils intermédiaires, répertoires alphabétiques des auteurs tragiques ou
comiques, collections d'apophtegmes classés par personnages, florilèges théma
tiques. L 'utilisation de cette documentation intermédiaire explique d 'ailleurs cer
taines lacunes ou certaines erreurs dans les lemmes qui introduisent chaque
citation .
La plupart du temps Stobée ne cite pas la source immédiate, ou bien il ne la cite qu'une
fois, puis cite directement les apophtegmes ou les sentences qui étaient prêtées à un person
nage dans la source en les plaçant sous le nom de ce personnage. Parfois, on connaît cette
source: par exemple le Banquet des Sept Sages, les Apophtegmesdes Rois et des Empereurs,
le traité Sur les fleuves de Plutarque ou du pseudo-Plutarque, les discours diogéniens de Dion
Chrysostome. Plus souvent, on devine une collection qui nous est inconnue par ailleurs. On a
ainsi identifié des recueils de citations d'Euripide ou de Ménandre classées selon l'ordre
alphabétique des titres des tragédies ou des comédies. En III 1, 30 -44, on relève un recueil
alphabétique de Iudayópou ruõuai.
J3 JUVÉNAL 1017
Voir 7 S. Luria, « Entstellung des Klassikertextes bei Stobaios »,RM 78, 1929, p. 81-104 ;
225-248 ; 8 R . M . Piccione, « Sulle fonti e le metodologie compilative di Stobeo » , Eikasmos 5,
1994, p . 281-317.
Tradition manuscrite . La tradition des deux premiers livres est distincte de
celle des deux derniers. Photius déjà lisait l'ouvrage en deux codices distincts.
On a longtemps distingué entre les Eclogae physicae et ethicae (livres I-II) et le
Florilegium ou les Sermones (livres III -IV ). Les deux premiers livres offraient
un contenu moins " pratique” que lesdeux derniers et ils ont fait l'objet d 'ampu
tations toujours plus importantes révélées par la table de Photius. Les lacunes
sontbeaucoup plus rares dans le second livre. Mais cette division de l’æuvre est
tout à fait artificielle et, à juste titre, Wachsmuth et Hense ont rendu à l'Antho
logie son unité originelle . Voir 9 A . L . Di Lello -Finuoli, « Il Florilegio Lauren
ziano » , QUCC 4, 1967, p . 139-173; 10 Id ., Un esemplare autografo di Arsenio e
il “ Florilegio ” di Stobae con studio paleografico di Paul Canart, Roma 1971 ;
11 W . Bühler, Zenobii Athoi Proverbia,Göttingen 1987, t. I, p. 293-298.
RICHARD GOULET.
3 JUVÉNAL (DECIMUS IUNIUS IUVENALIS ) RE Iunius 87 ca 60 -140
La vie du poète latin Juvénal nous est connue par plusieurs séries de témoi
gnages :
- Les vies de Juvénal rapportées dans les manuscrits, qui semblent provenir
d'un modèle unique. Elles présentent le poète comme le fils d'un affranchi. Il
commença par pratiquer la déclamation ,puis écrivit des satires d' abord contre le
pantomime Paris et développa ensuite ce genre d 'écrits avec vigueur. Son succès
grandissant, il fut banni de la ville et envoyé commander une cohorte en haute
Égypte , à l'âge de 80 ans. Là il périt rapidement d 'ennui et de terreur.
Depuis longtemps l'incohérence et l'inexactitude de ces lignes ont été souli
gnées ; elles sont fondées sur un mélange confus d 'indications vraies ou fausses
provenant des Satires. Cf. 1 J. Vahlen, Gesammelte philologischen Schriften II,
Leipzig 1923, p. 181, et 2 S . Braund, Juvenal. Satires Book I, Cambridge 1996 .
- Les données provenant de l'æuvre. Elles révèlent une connaissance du
monde des tribunaux et de la rhétorique. La ville de Rome lui est évidemment
familière. L ' évocation de l'Égypte paraîtmoins sûre . Au total, l'ensemble reste
mince.
- Juvénal est également mentionné par Martial dans trois épigrammes (VII
24 ; VII 91 ; XII 18 ) où se révèle une certaine intimité. Il y est qualifié de facun
dus et présenté commeun homme qui fréquente le quartier populaire de Suburre .
- Une inscription d 'Aquinum (CIL X 5 , 382). Elle mentionne un Decimus
Iunius Iuuenalis , tribun des cohortes Dalmates, magistratmunicipal (duouir ) ou
uir quinquennalis (chargé de la censure) et flamine du divin Vespasien . Selon
3 E . Courtney, A commentary on the Satires of Juvenal, London 1980, 1636 p .,
ce personnage appartiendrait à une génération postérieure. 4 R . Syme (« The
patria of Juvenal» , CPh 54 , 1979, p . 1- 15 , repris dans Roman Papers, Oxford
1984,t. III) a montré que cette inscription ne pouvait s'appliquer à Juvénal.La
1018 JUVÉNAL 13
mention du commandementmilitaire est erronée et les cohortes dalmates furent
créées sous Marc-Aurèle. Le nom est indiqué de façon imprécise, sans mention
de la tribu ou de l'origo . L 'historien souligne donc la rareté des données cer
taines dans un domaine où dominent la crédulité et les affirmations aléatoires.
L 'exil de Juvénal lui paraît tout aussi discutable . Le poète se présente donc
comme une figure énigmatique, sur laquelle nous possédons très peu de rensei
gnements . Telle est la conclusion de 5 J. Ferguson , A prosopography of the
poems of Juvenal, coll. « Latomus» 200 , Bruxelles 1987, 250 p.,même s' il tente
une reconstruction, et Braund 2 .
L ’influence de la philosophie dans les Satires a été diversement appréciée.
Des travaux comme ceux de 6 G . Highet (« The Philosophy of Juvenal » , TAPHA
30 , 1949, p . 254 -270 ) admettent une certaine connaissance philosophique, mais
de caractère général: elle s'exprime dans l'intérêt de Juvénal pour les compor
tements humains ou dans des formules générales concernant, par exemple , la
vertu et la vraie noblesse (Sat. VIII). Le poète connaît les maximes stoïciennes
(XV 143) , mais il dénonce aussi l' existence des Enfers comme les épicuriens. Il
faudrait ainsi conclure à l'éclectisme de Juvénal. Courtney 3 ne semble guère
s'attarder sur cette question . Toutefois des travaux récents ont insisté plus nette
ment sur l'influence philosophique : la satire VII (190 -202) évoque la doctrine de
la perfection du sage. La satire VIII est toute proche de Sénèque (Epist. 44) avec
l'accentmis sur la uirtus (voir 7 S. Braund , Beyond anger. A study of Juvenal's
third book of Satires, coll. « Cambridge classical studies» , Cambridge 1988,
XIII-302 p.). D 'autres parallèles précis révèlent une influence de Sénèque sur
Juvénal (p . 83-89) ; le poète évoque le déterminisme stoïcien. Dans la satire XV,
la philosophie domine également avec des échos du stoïcisme et la mention de
l'Humanitas. C ' est surtout la satire X qui a retenu l'attention des commentateurs
( 8 B . Dick, « Seneca and Juvenal 10 » , HSCP 73, 1969, p . 237 -246 ). Juvenal
oppose Héraclite (MH 64) et Démocrite ( D 70 ), mais il insiste sur la folie
humaine : les hommes ne savent pas reconnaître les vrais biens et les faux, tandis
que le poète distingue le faux bonheur de la prudentia . Ces thèmes apparaissent
fréquemment dans l'æuvre de Sénèque. Ils permettent de souligner l'influence
de ce philosophe sur Juvénal et, plus largement, celle du stoïcisme.
Cf. 9 F. Vollmer, art. « D . Iunius Iuvenalis» 87, REX 1, 1918, col. 1041
1050 ; 10 J. Gérard, Juvénal et la réalité contemporaine, « Collection d'études
anciennes » et « Publications de l'Université Paris X - Nanterre » , Paris 1976 , X
536 p.; 11 R .Marache, « Juvénal, peintre de la société de son temps » , ANRW II
33, 1, 1989, p . 592-639.
Bibliographie . 12 M . Coffey, « Juvenal 1941-1961» , Lustrum 8, 1963,
p . 161-217.
Éditions. 13 P. de Labriolle et F . Villeneuve ( édit.), Juvénal, Satires, texte
établi et traduit par P. de L . et F. V ., CUF, Paris 1921, XX11-206 p. (en partie
doubles) ; 14 J. Ferguson (édit.), luuenalis. The Satires, textwith comm . by J. F .,
coll. « Classical Series» , London 1979, XXXIX -326 p.; 15 E. Courtney ( édit.),
luuenalis. The Satires, coll. « Instrumenta litterarum » I, Roma 1984 , 149 p .;
J 3 JUVÉNAL 1019
16 J.R . S. Martyn (édit.), luuenalis. Saturae, Amsterdam 1987, XXX11-179 p.;
17 W . V . Clausen (édit.), A . Persi Flacci et D . luni luuenalis Saturae, ed . breui
que adnotatione critica denuo instruxit W . V . C ., coll. « Scriptorum classicorum
bibliotheca Oxoniensis » , Oxford 1992, XIV -198 p .; 18 J. A . Willis , luvenalis
saturae, BT, Leipzig/Stuttgart 1996 .
Lexique. 19 R . Kelling et A . Suskin , Index verborum luvenalis, Chapel Hill,
Univ. of North Carolina Press, 1951, VIII- 139 p .; 20 M . Dubrocard, Juvénal,
Satires. Index verborum , relevés statistiques, avec la collaboration du Labora
toire d'analyse statistique des Langues anciennes de l'Univ . de Liège, coll.
« Alpha-Omega, Reihe A , Lexika, Indizes, Konkordanzen zur klass . Philol.» 28,
Hildesheim 1976, XXVIII-148 p. 27 pl.
Études. 21 G . Highet, Juvenal the Satirist, London 1954.
MICHÈLE DUCOS.
Index des noms propres
Cet index contient les noms de tous les personnages historiques mentionnés dans les
notices. Les nomsdes auteurs des sources primaires anciennes ne sont pas pris en compte. En
règle générale, nous avons évité d 'identifier les personnages homonymes connus par des
sources distinctes, lorsque l'identification n 'apparaissait pas comme certaine. Une brève
caractérisation du personnage n 'a été ajoutée que là où elle semblait nécessaire, notamment
pour distinguer les homonymes. Il arrive que la translittération des nomspropres retenue dans
l'index ne soit pas celle qui a été utilisée dans les notices. Comme cet index entend compléter
la séquence des notices, lorsque le personnage bénéficie d'une notice dans le présent tome,
aucune référence n 'est faite à la notice correspondante. Les numéros renvoient aux notices
(pour les lettres E à J de l'alphabet) et un seul renvoi est indiqué pour une même notice, même
si le nom figure à plusieurs endroits. Toutefois, pour les notices qui comprennent plusieurs
pages, on a ajouté un renvoiaux pages où le nom propre apparaît.
Les numéros de notices sont séparés par des points-virgules, les numéros de pages pardes
virgules. Exemple :
Alcibiade C 16 ; 17 ; 102; 174; 175; 216 , p. 516 ,
520 ; D 13, p.604; 91; 195; 226 , p. 901, 905.
Cette référence doit se lire de la façon suivante: On trouvera le nom d'Alcibiade dans les
notices C 16 , C 17... C 216 , puis D 13, D 91, D 195, D 226 . Pour la notice C 216 , un renvoi
complémentaire est fait aux pages 516 et520. De même pour D 226 aux pages 901 et 905.
L 'identification des noms propres relevantde la tradition syriaque et arabe a été assurée par
Maroun Aouad. Sont indiqués, d'abord, une appellation usuelle, puis, entre parenthèses, les
autres éléments du nom , ce qui permet d'identifier les personnages désignés différemment et
d' éviter la confusion entre ceux qui ont des noms voisins. Quand il existe un nom équivalent
(transformation par les Latins...), il est indiqué entre crochets . Pour le classement alphabé
tique de ces noms, il n'est pas tenu compte de l'article défini français ou arabe (al-, l-),nide b.
'Abd al-Malik b. Marwān J 1, p. 989, 1001- Acamatios 1 31, p . 875.
1002. Achille Tatius, romancier H 31, p. 536 .
Abammon 1 3, p. 830-831. Achille, commentateur d'Aratos E 97.
Abaris H 60 ; 136 , p. 735, 739. Acoumène E 59.
al-Abhari (Ațir al-Din Mufaddal b . 'Umar) Acron d’Agrigente E 19, p. 81, 85 ; G 18 .
E 80, p . 265. Acron, fils d'Acron E 19, p. 85.
Abū Bakr al-Rāzi, voir al-Rāzi. Actoridès E 36 , p. 166.
Abū.l-Hasan 'Ali b . Muḥammad al-Daylami Adimante G 21.
I 39.
Aèce d'Antioche, évêque arien E 45 ; 122,
Abū 'Uțmān Sa'id b . Ya'qūb , voir al p. 325-327, 329, 333; 184, p. 402.
Dimašqi. Aelius Aristide E 86 ; 87 ; 185.
Abraham H 12 , p .519 , 522. Aelius Maurus I 42.
Abraham de Balmes G 15 .
Aétius d'Amida G 3, p .440 ; 1 1.
Abydénos E 156 . Aétius, le doxographe E 45 ; H 154 ; J 2 ,
Acace E 121, p. 315 . p. 1013-1014 , 1016 .
Académos H 31, p. 543. Agacléos, père d'Ératosthène E 52,p. 193.
1022 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Agapètos I 38, p. 937. Alcméon de Crotone H 152, p. 785, 789;
Agapius, évêque de Césarée E 156 . I 38, p. 914 ; J 2, p. 1014.
Agatharchidès de Cnide H 12, p. 524 ; 61; Alcuin E 33, p. 146.
15, p. 845. Alcyoné H 136 , p. 740.
Agathias E 112 ; H 81 ; 1 32. Alexandre“ Lychnos” d'Éphèse H 63.
Agathinos de Sparte H 105. Alexandre (= Alexandre d’Aphrodisias) I 22.
Agathoclès le Stoïcien H 89 ; 108. Alexandre (= Alexandre le Grand) I 38 ,
Agathon le poète G 28 ; I 38,p. 926 . p . 900 .
Agémortos H 75. Alexandre d'Égée, disciple du sophiste Julien
Agésilas, roide Sparte E 98. E 153 .
Agétor le Spartiate E 52, p. 233. Alexandre d'Aphrodisias E 80, p. 269; 92 ;
Aglaos, père d'Ératosthène de Cyrène E 52, 156 ; 161, p. 372-373 ; 163, p . 383 ; 175 ;
p. 193. G 3, p. 460 -461 ; 15 ; H 56 ; 83 ; 151,
Agricola (Cn. Iulius -) G 33. p . 768 ; 1 3, p. 835 ; 45.
Agrippa (Julius -), primipilaris 1 42. Alexandre d'Étolie E 52, p. 198 ; 139.
Agrippa (M . -), gendre d'Auguste I 10 . Alexandre de Damas G 3, p. 447.
Agrippa (Marcus Vispianius -), auteur des Alexandre de Jérusalem H 43.
Commentarii E 52, p. 234. Alexandre de Milet, dit Polyhistor E 82 ;
Agrippa , dédicataire de Jamblique 13, Alexand 156 ; 16 ; 41, p. 947, 949.
p . 834 ; J 2, p. 1015 . re de Myndos I 41, p . 953.
Aidésia H 30 ; 78 ; 119; 1 31, p. 872. Alexandre de Thessalie , tyran de Phères
Aidésius de Cappadoce E 34 ; 41; 121, E91 ; H 89.
p. 315 , 317 ; 154 ; 157 ; 161, p. 369-371 ; Alexandre de Tralles G 3, p. 440 ; 1 1.
13, p. 828, 830 ; 22 ; 46, p. 970. Alexandre le Grand E7; 33, p. 117 ; 36 ,
Aidésius de Sardes E 34 . p . 161- 162 ; 52, p . 195 - 196 , 205, 222 : 80.
Aificianus G 3, p. 443-444. p. 254 ; 187, p . 406, 410 ; F7 ; G 35 ; H 12,
Aisara J 2, p. 1014 . p. 508 ; 60 ; 64a, p. 625 ; 136 , p. 734 ; 138,
Aischrion G 3, p. 443.
p. 744 ; 15, p. 842, 850, 852 ;6 ; 38, p . 930,
934 ; 39 ; J 2, p . 1013.
Aithalidès H 99. Alexandre Péloplaton F 10 .
al-Māhāni E 80,p. 265. Alexandre Sévère H 31, p. 538 .
Alaric E 121, p. 315 , 320 , 322. Alexandre, archonte E 76 ; 77.
Albert le Grand E 163, p. 388. Alexandre, fils d'Hérode le Grand 141,
Albinus (Lucceius - ) 141, p. 946 . p . 943.
Albinus, médioplatonicien F7 ; G 2. Alexandre, proconsul H 136 , p. 724 .
Albus (L . Antonius - ) G 11. Alexandria de Céphallénie E 44.
Alc(a)ios, épicurien H 136 , p . 732. Alexarque, le frère de Cassandre E 187 ,
Alcée H 136 , p. 741; 164. p . 406 ; I 5, p. 852.
Alcibiade E 179 ; F 10 ; G 28 ; H 94 ; 136 , Alexiclès G 19.
p . 737, 740 ; I 38, p. 912.
Alcibiade, garde d'Hadrien F 10. Alexicratès E 18 .
Alcidamas E 139 ; G 28 ; I 38, p. 907, 928, Alexinos d 'Élis E 71; 125 ; F 19; H 12,
931-932 ; J 2 , p . 1016 . p. 516 , 525 ; 75 ; 86 .
Alcimos de Syracuse E 29. Alexis (= Alexinos d'Élis) H 12, p. 516 .
Alcinoos,médioplatonicien G 2 ; H 116 ; 154. Alexis fer Comnène E 163,p . 380 -381.
Alcinoos, stoïcien H 154. Alexis le comique E 28 ; H 74.
Alciphron E 170 . Alypius,musicographe G 8.
INDEX DES NOMS PROPRES 1023
Alypius, philosophe E 121, p. 317 ; 13, Anaxarque d’Abdère E 36 , p. 177-178 ; H 12,
p. 829, 834. p. 508,514 ; J 2, p. 1014.
Ambroise de Milan E 33, p. 141 ; I 34 , Anaxicratès, archonte E 36, p . 161- 162, 177.
p. 879, 884 -885. Anaxilas de Rhégium E 29.
Ambrosios, père d ' Ératosthène de Cyrène Anaximandre E 19, p. 79-80 ; H 64, p. 582;
E 52, p . 193. 88 ; 152, p. 788 ; 154.
Ameinias H 136 , p. 715. Anaximène de Lampsaque E 36 , p . 176 .
Amélius E 156 ; F 13 ; H 173 ; I 3 , p . 828, Anaximène de Milet H 64, p. 582 ; 152,
832 . p . 787-788 ; 154 ; 157 ; I 13 ; J 2, p. 1014.
Ammien Marcellin E 52, p. 234 ; 121, p. 322; Anaxiphème, titre d'un dialogue de Glaucon
H8;141, p . 950. G21.
Ammonianus I 31, p. 872. Anchytès E 19, p . 80 .
Ammonios d' Athènes E 164 ; H 77. Andréde Crète J 1, p. 996, 1002.
Ammonius (Saccas) E 53 ; H 126 . Andréas, disciple d'Hérophile H 152, p. 772.
Ammonius d' Alexandrie E 15, p. 58 -59, 63, Androclès, fils de Codros H 64, p. 579, 581.
65 ; 175 ; G 16 ; H 30 ; 32 ; 67 ; 78 ; 119; Androcyde E 69 ; H 148.
126 ; 165 ; 11; 31, p. 870, 872-873, 875 ; Andromaque, pharmacologiste H 58.
34 , p . 885 .
Ammonius de Thmouis H 43. Andronicos de Rhodes E 93 ; H 34 ; 86 ; 154 .
Ammonius,maître d'Origène H 43. Andronicos, élève de Libanius H 123.
Ampélius, proconsul d'Achaïe H 136 , p . 712 , Andronicus de Carie H 134.
727. Anébon E 156 ; 1 3, p. 830 -831.
Amphicléia I 3, p. 826 . Anne Comnène E 163, p. 382, 384-385.
Amphidamas H 64a, p.619, 622. Annicéris H 18 .
Amyclas H 99a. Annius H 29.
Amynomaque d'Athènes, exécuteur testa Anteia F 5 .
mentaire d 'Épicure E 34 ; 36 , p . 168. Anténor E 77.
Amyntichos, titre d 'un dialogue de Glaucon Anthémius de Tralles E 175 .
G21. Anthès H 161.
Anacharsis H 136 , p. 739 ; 148 ; J 2, p. 1014 . Antibios d’Ascalon E 68.
Anacharsis (Pseudo-) I 38 , p . 937. Antigone (identification imprécise ) H 89.
Anacréon H 136 , p. 716 . Antigone jer Gonatas E 125 ; H 129.
Anaritius E 80, p. 264. Antigone le Borgne E 36 , p. 166 ; 1 14 .
Anarizus E 80, p. 264 . Antigonus,médecin E 84.
Anastase ler,empereur H 113. Antiochi(da)s H 58.
Anastase le Sinaïte J 1, p. 1009. Antiochus d'Ascalon E 24, p. 90 ; 68 ; 97 ;
H 54 ;66 ; 148.; I 17.
Anatolius de Béryte H 136 , p.712, 725.Antiochus Épiphane E 101.
Anatolius de Laodicée E 60a ; F9 ; 13, Antipatros de Cyrène E 48.
p. 827 .
Antipatros de Macédoine H 143 ; I 38, p . 900.
Anatolius, dédicataire de Jamblique 13, Antipatros Magnésie 38 930
p . 834 ; J 2 , p. 1015. de I , p. .
Anaxagore de Clazomènes E 19, p . 76 , 80 , Antipatros de Sidon H 138 , p. 744.
84 ; 36 , p. 163- 164 ; 139; H 64, p. 577, 582, Antipatros de Tarse E 33, p . 125 ; G 32 ;
588 ; 86 ; 99 ; 101 ; 136, p. 732, 739 ; 151, H 51 ; 53; 59 ; J 2, p. 1015.
p . 763 ; 152, p . 787, 789 ; 154 ; 1 46, p . 965; Antipatros de Tyr J 2, p . 1015 .
J 1, p . 1011 ; 2, p. 1014 . Antiphatès, archonte E 36 , p. 173.
1024 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Antiphon de Céphisia E 38. Apollodore, disciple de Polyen I 14 .
Antiphon de Rhamnonte 1 4. Apollonides (Appius -) F 19.
Antiphon le sophiste E 139; H 145 ; 14 ; J 2, Apollonidès de Nicée I 20.
p . 1014 . Apollonidès, correspondant d'Épicure E 36 ,
Antiphon, fils de Pyrilampès G 21; 28. p. 178.
Antisthène d 'Athènes E 33, p. 126 ; 171; Apollonios d'Antioche, fils G 18 .
179 ; F8 ; 19 ; G 28 ; H 12 , p. 515 ; 13 ; 86 ; Apollonios d’Antioche, père G 18 ; H 54.
101 ; 177 ; 14 ; 38, p . 895, 916 -917, 919, Apollonios de Cyrène, académicien E 73.
920, 922, 924 , 930 ; J 2 , p . 1015 . Apollonios de Cyrène, dit Cronos E 71 ;
Antisthène de Rhodes H 64, p. 578. H 136 , p . 737.
Antisthène l'Héraclitéen H 64, p. 585 . Apollonios de Rhodes E 52, p . 199-201 ;
Antithéos E 179. H 101.
Antodoros E 36 , p . 176 . Apollonios, académicien E 65.
Antoine l'ermite E 33, p. 143. Apollonius de Pergé E 52, p. 208, 213 ; 80,
Antoine, higoumène du monastère de Saint- p. 253, 255 -256 , 258, 261, 266 -268 ; 175 ;
Syméon J 1, p . 997-998 . H 99a ; 151, p. 767 ; 175.
Antonin le Pieux E 33, p. 113 ; 86 ; 92 ; 142 ; Apollonius de Tyane E 24 , p. 92 ; 121,
186 ; F 10 ; 19 ; 611 ; H 28 ; 64 , p. 591 ; p . 316 ; 132 ; 156 ; 178 ; G 35 ; H 31, p. 538 ,
136 , p . 720 ; 1 51. 542 ; 125 ; 126 ; 136 , p. 732 ; 16 ; 25 ; 42 ;
Antoninus E 121, p. 317 ; 161, p. 370-371 ; J 2 , p . 1015.
H 175 . Apollonius de Tyr H 13 ; 72.
Antonius d 'Alexandrie I 31, p. 875. Apollonius Molon H 61.
Antonius Diogène H 31, p . 539. Apollophanès d'Antioche E 52, p . 195.
AntoniusMelissa I 38 , p. 901. Apsinès de Gadara F 19.
Antonius Musa, médecin d'Auguste 141, Apulée F7; G 2 ; H 116 .
p. 951. Aquila H 136, p. 715 .
Antyllos J 2 , p . 1014. Aquilinus (Julius -) F 19.
Apelle de Chios E 52, p. 194, 205. Aratos de Sicyone E 2.
Apelles,disciple d'Épicure E 36 ,p. 168, 178. Aratos de Soles E 52, p. 218 ; 98 ; G 15 ;
Apémantos, père d'Eudicos E 94. H 31, p. 543; 154 ; J 2 , p . 1015.
Aphareus H 145 ; I 38, p. 893, 895, 898, 935. Aratos, adversaire d'Épitimos H 47.
Aphobius H 136 , p. 712. Arcadius, empereur E 33, p . 143 ; 121,
Apia , fille deMétrodore E 36 , p . 166 . p. 320.
Apion E 156 . Arcadius,mathématicien E 175.
Apollas H 15 . Arcadius,médecin H 136 , p. 712 .
Apollinaire de Laodicée E 101. Arcéphon E 36 , p . 169.
Apollinaire de Ravenne E 14 . Arcesilas de Pitane E 2 ; 33, p . 128 ; 52,
Apollodore “ leMégarique" J 2,p. 1014 . p. 194 -195, 197, 205, 208, 233 ; 80, p. 255 ;
88 ; H 86 ; 129 ; J 2, p . 1014.
Apollodore d'Athènes E 19 , p. 75 ; 29 ; 36 , Arcésilas, héritier de Straton de Lampsaque
p. 159 ; 52, p. 224-225 ; 98 ; 115 ; H 12,
E 30.
p . 508 ;63; 64, p . 578 ; 148.
Archédèmos de Tarse E 33, p. 125 .
Apollodore d'Athènes, épicurien E 36 , Archélaos d ' Athènes E 36 , p. 164 ; 139 ;
p. 159, 171. H 116 ; 152, p. 787 ; 154 ; I 13 ; 20 ; JI,
Apollodore de Cyzique H 12 , p . 513. p. 1011.
Apollodore de Phalère, amide Socrate G 28. Archélaos, fils d'Hérode le Grand 141,
Apollodore de Séleucie E 102; 114. p . 943.
INDEX DES NOMS PROPRES 1025
Archélaos, roi de Cappadoce I41, p. 943. Aristée , auteur de la Lettre à Philocrate
Archiadas I H 22 ; 122; 1 31, p. 875. E 156 .
Archiadas II E 124 . Aristée, scholarque pythgoricien G7; J 2,
Archidamas I 38 , p. 900. p. 1014 .
Archidamidas H 12, p.508, 514. Aristide (Aelius - ) H 136 , p. 714 ; I 38,
Archidamos IV , roi de Sparte H 12, p . 508 ; p. 937 ; J 2 , p . 1013.
I 38, p. 898, 910 . Aristide Quintilien G 8 .
Archigène H 58. Aristide, apologète chrétien J 1, p . 1011.
Archiloque E 52,p. 232 ; H 60 ; 64, p. 583. Aristide,élève d'Ératosthène E 52, p. 202.
Archimède E 52. p. 213 : 80. p . 254- 255. Aristippe de Cyrène E 52, p. 204 ; 54 ; H 12 .
267-268 : 175 : H 107 : 151. p . 769: 175 . p . 515 ; 136 , p. 734, 737 ; 126 ; J2, p . 1014 .
Archinomos, père d 'Empédocle E 19, p . 74. Aristippe, Sur la sensualité des Anciens E 19,
Archinos I 38, p. 895. p. 85.
Archippe de Tarente E 26 ; H 140. Aristoboulos, frère d'Épicure E 36, p. 162,
175, 178 .
Archytas de Tarente E 1; 5 ; 8 ; 19 , p . 79 ; 52,
p . 211 ; 80 , p. 271 ; 98 ; 129 ; H 112 ; 144 ; Aristobule , commentateur juif E 156.
J 2, p. 1014. Aristoclès 1 41, p. 952.
Ardys, rhéteur I 27. Aristoclès de Messine E 24, p . 91, 95, 97 ;
Arellius FuscusF1. 75 ; H 54 ; 136 , p. 737 ; 141, p. 952.
Arésandros E 1. Aristoclès de Messine, auteur d 'un De
Arésas E 1. musica E 156 .
Arétè, dédicataire de Jamblique 13, p. 834 ; Aristocréon de Soles H 15 ; 174.
J2, p . 1015. Aristocritos H 49.
Aréthas de Patras, métropolite de Césarée Aristodémos18.
de Nysa, cousin de Ménécrate
E 33, p . 145 ; 121, p. 319 ; 175.
Argentocoxus I 42. Aristodémos deNysa, fils de Ménécrate 1 8.
Aridicas de Rhodes H 129. Aristodémos,tyran de Mégalopolis E 2.
Arieus H 105. Aristombrote J 2, p. 1014 .
Arignotos E 84.
Aristoménès H 143.
Ariston d 'Alexandrie E 36 , p. 159 ; 97.
Arimnestos J 2, p. 1014 . Ariston de Céos E 36 , p . 159 ; 52, p. 195 ;
Arion de Locres E 5 . 134 ; G 18 ; H 64, p. 575, 589 ; 86 ; I 49.
Aristagoras d'Éphèse H 64, p.580-581. Ariston de Chios E 52, p. 194 -195, 198, 205
Aristagoras, auteur d'Aegyptiaka H 12, 206 ; F 19 ; H 64, p . 575, 589; 72 ; 148 ; J 2,
p. 511. p . 1015.
Aristainétos de Bithynie H 136 , p. 720. Ariston, le fils de Jamblique I 3, p. 826 .
Aristainétos, personnage fictif chez Lucien Ariston, père de Platon G 21 ; H 126 .
H 96 ; 114 ; 1 19 . Aristonicos I 5, p. 842.
Aristarque d ' Alexandrie E 52, p. 201 ; Aristonymos, archonte E 36 , p. 177.
H 100 ; I 8. Aristonymos, auteur des Tomaria J 2,
Aristarque d'Athènes H 64, p. 586 . p. 1014 - 1015 .
Aristarque de Samos E 52, p. 213, 216 ; 80, Aristophane de Byzance E 36 , p. 159 ; 52,
p. 200 -202, 226 ; 80, p. 267.
p. 255. Aristophane de Corinthe H 120.
Aristarque, dédicataire de Favorinus F 10 . Aristophane le Comique E 52, p . 228 ; 60 ;
Aristée l'Ancien, mathématicien E 52, 139 ; G 3, p. 465; H 100 ; 157; I 20 ; 38 ,
p . 208 ; 80 , p. 256 , 268. p. 892 ; J 2, p. 1013.
1026 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Aristophane le péripatéticien H 148. Artapanos H 12, p . 519 ; 15, p. 846 .
Aristophane, titre d'un dialogue de Glaucon Artaxerxès ler H 64, p. 587 ; 152, p. 772.
G21. Artaxerxes II H 136, p. 741.
Aristophon, archonte E 73. Artaxerxès III Ochos H 80 .
Aristophon , auteur d 'une loi athénienne votée Artemidore d 'Éphèse E 52, p . 234 .
en 403/2 E 115. Artémios J 1, p. 1011.
Aristos de Salamine E 52, p. 202 ; 15, p. 852. Artémise I 38, p. 901.
Aristote de Cyrène J 2, p. 1014 . Ascanios d ’Abdère H 12, p. 508.
Aristote de Mytilène E 24, p . 91. Asclépiadès d 'Alexandrie H 67 ; 164 ; 165 ;
Aristote de Stagire E 7 ; 15, p. 57 -59,61, 64 ; 131, p. 872.
19 , p. 86 ; 36 , p. 161, 164 , 181 ; 52, p . 206 , Asclepiadès de Bithynie G 3 . p. 460 : H 54 :
223, 227, 231 ; 60 ; 71 ; 74 ; 79 ; 80 , p. 256 , 60,
269-270 ; 91 ; 93 ; 97 ; 98 ; 110 ; 111 ; 115 ; Asclépiadès de Clazomènes E 12 .
119 ; 122, p. 332 -333 ; 152 ; 154 ; 161,
p . 372 ; 163, p. 378 , 382 ; 181; 184, p. 399, Asclepiadès de Phlionte H 136 , p. 733.
401-402; F 10 ; 16 ; G 2 ; 3. p. 440 . 460. Asclepiadès le Jeune, pharmacologiste H 58.
464 ; 8 ; 10 ; 15 ; 18 ; 28 ; H 60 ; 61; 64, Asclepiadès, cynique I 46, p. 972.
p. 578, 588, 601 ; 75 ; 80 ; 83; 86 ; 99a ; Asclépigéneia I H 122.
126 ; 129; 136 , p. 734, 740 ; 143; 145 ; Asclépiodote d' Alexandrie H 67; 132 ; 165 ;
154 ; 175 ; 12 ; 3, p. 829 ; 4 ; 5 , p . 846 ; 13 ; 11: 31. p . 870. 873 .
22 ; 31, p. 874 , 877 ; 33 ; 34 , p. 886 ; 38 , Asclepiodotus (Oecumenius Dositheus - )
p. 895 . 899 , 916 , 930 , 933- 935 ; 39 ; 46 , H 136 . 0 . 729
p. 966, 970, 974 ; J 2, p. 1014 . Aspasie de Milet G 28 ; H 136 , p . 714 ; 1 38 .
Aristote, personnage du De facie de Plutar p. 919.
que E 33a.
Aristoxène de Tarente E 5 ; 69 ; 80 , p . 267 ; Aspasius E 92;
63. p. 442 83 . ; 163, p. 385 -386 , 388;
: H 111
98 ; 150 ; G 8 ; H 60; 140 ; 148 ; 154 ; 16 ;
J 2, p . 1014. · Asphalius, dédicataire de Jamblique 13.
p.834.
Aristoxène le philosophe , correspondant de Astérius I51.
Julien I 46 , p. 968, 972.
Aristylle E 52, p. 213, 218 . Astydamas H 58.
Arius Didymus E 97 ; 156 ; J 2, p. 1014. Athanarit H 135.
Arius,hérésiarque E 156 . Athanase d'Alexandrie E 33, p. 141 ; 45;
156 ; H 134.
Arnobe E 33, p. 141.
Arnouphis I 48. Athanase le Rhéteur I 3, p. 834.
Arria maior F 5. Athanase , empereur H 165.
ArriaminorF5. Athanase, frère de Paralios H 165.
Arrianos, commentateur d'Aristote E 175 . Athénagoras,tyran d'Éphèse H 64, p. 586 .
Arrianus (L . Flavius -) G 11. Athénagore , apologère chrétien E 122,
Arrien de Nicomédie E 33, p. 106 , 113, 116 p. 329.
118 , 120 -123, 125, 140 ; 52, p. 234 ; G 11; Athénaios
p . 159 .
<ó ÉtlypapuatonOLÓG> E 36,
J 2, p. 1015.
Arsa (Aurelia Xenonianè Maidatè -) E 109. Athénaios de Cyzique E 98.
Arsacé H 31, p. 540. AthénaiosdeNaucratis H 136 , p. 742.
Arsacès H 89 . Athénaios, disciple de Polyen E 36 , p . 166 ,
Arsinoé II Philadelphe E 52, p. 198. 178.
Arsinoé III Philopator E 52, p. 198 -199, 201, Athénaios, père deMétrodore E 36 , p . 166.
212 . Athénion E 57.
INDEX DES NOMS PROPRES 1027
Athénion, fils d'Athénion E 57. Basilius 3 (PLRE) H 136 , p. 724.
Athénodore de Soles H 11. Basilius, proconsul H 136 , p. 712, 723.
Athénodore de Tarse E 132 ; H 59. Bassianus (Julius -), grand-prêtre d'Élagabal
Athénodore , évêque du Pont J 1, p. 1010. 142.
Athénodore, poète J 2, p. 1013. Bassus de Corinthe E 132.
Athénodote , disciple de Musonius Rufus Batis, sæur de Métrodore E 36, p. 158, 166 ;
E 132 ; F 19. I 14 .
Atocius E 175 . Baton (= Baton de Sinope?) E 52, p. 233.
Atoeas H 49. Baton de Sinope E 52,p. 233.
Atossa (Aurelia Valoussia Cyrinia -) E 109. Bérénice, fille d' Agrippa H 68.
Attale H 89. Bérénice, reine de Cyrène E 52, p . 198-199,
Atticus (T . Pomponius -) E 176 ; F6 ; G 12 . 201.
Atticus,le platonicien E 156 ; H 8 ; 9 . Béronicianus de Sardes E 41 ; 121, p. 315,
Attius Clemens E 132. 318.
Auguste F1; H 8 ; 113; 136 , p. 715 ; 167; Bérose E 156 ; 141, p. 949.
I 34, p. 889 ; 41, p . 940-941, 943, 948 , 950 . Bias de Priène H 64, p . 583 ; 148 ; J
951. p. 1014.
Augustin d 'Hippone E 33. p . 141 : 152 : F9: Bion de Borysthène E 52, p . 194, 197 , 205 :
I 34 , p. 879, 884-887, 890 . H 12, p . 514 ; J 2 , p . 1015 .
Aulu -Gelle E 33,p. 141; F 10 ; 19; H 124. Blosôn H 64, p . 576 .
Aurélien , empereur H 31, p. 538 . Blossius de Cumes G 32 ; 1 5 , p . 843.
Aurelios Ammôn E 19, p. 70. Blusôn H 64, p . 576.
Aurelius Belius Philippus E 36 , p. 170. Bocchus II 1 41, p. 941, 943.
Ausone H 136 , p. 717. Boethius (Anicius Manlius Severinus -) F 2.
Autoboulos, fils de Plutarque F 16 . Boéthosde Sidon H 51.
Autodoros E 36 , p. 176 . Boéthos, mentionné dans le titre d'un ou
Autolékythos F 10 . vrage de Porphyre E 156 .
Autolycos de Pitane E 80 , p. 255. Boethus (Flavius -) E 92 ; G 3, p. 447.
Averroès , voir Ibn Rusd . Bogud I 41, p. 941, 943.
Aviénus E 52, p. 235. Boïdion E 36 , p. 169.
Axiothéa de Phlionte H 129. Bonosus, usurpateur F 13.
Boulagoras G 7.
Bacchios de Paphos G 2. Bouthéros J 2, p. 1014.
Bacchios de Tanagra , commentateur d'Hip Brontinos E 19 , p . 79 ; 39.
pocrate H 54 ; 58. Brutus F 8 ; H 160 ; 167.
Bakkhidès G 3 , p . 462. Bryson d'Héraclée E 82 ; H 25 ; 101.
Balbus H 160 . Bryson , disciple de Pythagore J 2, p. 1014 .
Bardesane de Syrie E 156 ; G 35. Buridan (Jean -) E 163, p. 388.
Bardias H 64, p.587. Byndacô E 1.
Basile de Césarée E 33, p. 141 : 122 , p . 328 . Byndacos E 1.
330, 332 ; 161, p . 374-376 ; 184, p. 399 ;
H 136 , p. 714, 727 ; J 1, p. 1010. Caeciliusde Calé-Acté I 38, p. 936 -937, 892.
Basile II, empereur J 1, p. 999. Cailianos ( T. Varius -) 1 49.
Basilide H 154 ; 1 29. Caius Iulius 141, p. 940.
Basilius (Valerius Maximus signo -) H 136 , Calanos G 35.
p . 723. Calasiris H 31, p. 538-540, 542-544.
1028 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Calcidius F9; H 170 ; 1 51. Cassien de Marseille E 184, p. 402.
Caligula G 4 ; 33 ;141, p. 942. Cassiodore I 34, p . 885 -886 .
Callaischros ( T. Flavius - ) G 23 ; 1 27. Cassius F 8 ; H 167.
Callias H 94. Castor deRhodes E 52, p. 225 .
Calliclès de Larisse G 18. CastriciusdeNicée F 13.
Calliclès, le sophiste E 139 ; G 28 ; H 136 , Castricius Firmus G 10 .
p . 728, 738. Catilina G 12.
Calliclès,médecin empiriste G 18 . Caton d 'Utique F3; 8 ; H 160 .
Callicratès, père d'Euboulos d' Éphèse E 76 . Caton l' Ancien E 25 : 181 :140 : 12. 0. 1016 .
Callicratès , père de Callistratos d’Aphidna Cébés de Thèbes E 114.
H 136 , p . 733. Celse l'Épicurien G 3, p.464.
Callicratidas de Sparte E 19, p. 74 ; J 2 , Celse le Platonicien E 33, p. 141; H 125;
p . 1014. 151 ; G 3 , p . 464.
Callicratidès, frère d'Empédocle E 19, p . 74. Celse , auteurdu De re medica G 3, p. 464 .
Callimachos de Cyrène E 52, p. 197-200, Celse, dédicataire d'un ouvrage de Lucien
204, 214 , 229 ; 80, p . 267 ; 187, p . 404, H 154.
410 ; H 86 ; I 38, p. 892.
Callimachos, adversaire d ' Isocrate ( 38, Celse , étudiant de Libanius H 136 , p . 726.
p . 895, 899. CensorinusF9.
Callinos d'Hermionè, disciple de Lycon Céphale de Clazomènes E 169 ; G 21.
E 134 . Céphale, titre d 'un dialogue de Glaucon
G21.
Callinos, disciple de Théophraste H 143.
Calliopius H 136 , p. 728 . Céphisodôros, rhéteur I 38, p. 895, 899, 934
Callippe E 98. 935 ; J 2, p . 1016 .
Calliste H 154. Cérambos E 1.
Callisthène E 52, p . 196 ; H 60 ; 80 ; 86 . Cerbonius, proconsul d 'Achaïe H 136 ,
p. 712, 724, 737.
Callistolas E 36 , p. 176 . Cercidas deMégalopolis H 138 , p . 743.
Callistratos d ' Aphidna, orateur et homme Cercops
E 39.
politique H 136 , p . 733 ;138 , p . 911. Ceri(alis ?) ( C . -) G 11 .
Callistratos, épicurien E 36 , p. 176. Certus (Publicius -) F5.
Calli(cratès ) (Aurelius -) H 44.
Calvisius Taurus H 124. César (C . - ) = Caligula G 33.
Cambyse H 64, p. 587. César (C . - ), petit-fils d 'Auguste I 41, p. 943.
Candragupta G 35. César (Jules --) E 176 ; G 12 ; H 113 ; 160 ;
167.
Caracalla G 3, p . 451 ; H 31, p . 536 . Chairéas H 114 ; I 19.
Caracalla = L . (?) Septimius Bassianus I 42. Chairédémos, frère d' Épicure E 36. p. 162.
Carnéade de Cyrène E 33,p. 128 ; 36 ,p. 171; 174.
65 ; 83 : 123 ; 159 ; F 12 ; 26 ; G 3, p . 461; Chaméléon d'Héraclée H 60 ; 129; 176 .
H4 ; 21; 103 ; 136 , p . 737 ; 141 ; 142; 148 ; Chapour
17 ; 9 ; J 2, p . 1014. II H 31, p. 538.
Carnéiscus E 36 , p . 163, 169. Charax (A . Claudius - ) de Pergame E 86 ;
87.
Carpocrate d 'Alexandrie E 44. Charès J 2, p. 1013.
Carystios de Pergame E 128. Chariclée G 35 ; H 31, p . 536 , 540, 543.
Casilon E 153. Chariclès H 31, p . 540.
Cassandre de Macédoine E 52, p . 233 ; 187, Charilampès G 3, p . 447.
p . 403,410 ; 1 5, p. 852. Charinos, archonte E 36 , p. 177.
INDEX DES NOMS PROPRES 1029
Charmadas H 33. Cléanthe d 'Assos E 33, p. 125 ; 45 ; H 12 ,
Charmidès, correspondant d'Épicure E 36 , p. 515 ; 13; 64, p. 598 ; 72 ; 1 5, p. 851 ; J 2,
p. 178. p . 1015.
Charmidès, correspondant de Diogène de Cléanthis H 96 ; 114 .
Sinope E 138. Cléarque d'Héraclée E 179.
Charmidès, fils de Glaucon E 169. Cléarque de Soles E 156 ; 180 ; H 60.
Charondas J 2 , p . 1014 . Cléarque de Sparte H 136 , p . 737.
Cheilon de Sparte E 4 . Cléarque, archonte E 36 , p . 172.
Cheilonis E4. Cléarque,préfet d'Asie E 121, p. 317 .
Chérémon E 156 . Cleinias de Tarente J 2 , p. 1014.
Chéréphon H 136 , p . 738. Cleinias le rhéteur H 89.
Chilon E 60 ; J 2, p. 1013-1014. Cleinomachos E 82.
Chion d'Héraclée E 179. Clématius H 136 , p. 718 .
Chionides E 29. Clément d' Alexandrie E 33, p. 141; 122,
Choirilos E 156 . p . 329-330 ; 184, p . 401 ; 1 51 ; J 1, p. 1010.
Chonouphis d 'Héliopolis E 98 . Clément de Rome J 1, p. 1010 .
Chonouphis de Memphis E 16 . Cléoboulos H 148 ; J 2, p. 1014.
Chosroès E 112 ; 175 ; H 81; I 32 ; J 1, Cléocharès deMyrléa I 38, p . 936 .
p . 994 , 996 . Cléodème E 84 ; G 19 .
Chrémonidès E 52, p. 191. Cléomède G 15 .
Christodoros de Coptos H 64, p . 595 ;11. Cléomène,disciple de Cratès de Thèbes E 3.
Chrysanthe de Sardes E 34 ; 41 ; 121, p . 311, Cléomène, rhapsode E 19, p. 82.
313-315, 317 ; 157 ; H 35 ; I 3, p . 830 ; 46 , Cléon E 139.
p . 970 -971, 975. Cléopâtre 141, p. 942.
Chrysaorius G 10 . Cléopâtre Sélène I 41, p. 942.
Chryserme H 54 ; J 2 , p . 1013. Cleostrate J 2 , p. 1016 .
Chrysippe de Cnide E 98. Clinias, fils d'Axiochos H 136 , p. 740.
Chrysippe de Soles E 31 ; 33, p . 125, 128,
132 ; 36 , p . 159, 171, 178 ; 80, p. 261 ; 102; Clinias, titre d'un ouvrage d 'Héraclide le
156 ; F 10 ; 19 ; G 3, p. 464 ; 29; H 13 ; 15 ; Pontique H 60.
53 : 59 : 71; 72 : 86 ; 124 : 136 , p. 736 ; Clitomaque de Carthage F 26 ; G 3 , p . 461 ;
148 ; 174 ; I 31, p . 877 ; J 2, p. 1015. H4 ; 54 ; 66 ; 136 , p . 737 ; J 2 , p . 1013
Chrysis G 19. 1014.
Chytron I 46, p . 972. Cnémon H 31, p. 539-540.
Cicéron E 24 , p . 90, 92; 52, p. 235 ; 80 , Codros H 64, p. 579.
p. 267 ; 176 ; 181; F1; 3 ; 6 ; 9 ; 12 ; 26 ; Colotès de Lampsaque E 19 , p. 86 ; 36 ,
G 12 ; H 13; 160 ; I 34 , p. 884, 886 -887 ; p. 165, 177-178 ; I 14 .
38, p. 935 -936 ; 49. Cômas H 64, p. 579, 586-587.
Cicéron (Quintus - ) E 24, p . 91-92. Commode, empereur G 3, p.449-450 , 463.
Cimôn I 38 , p . 909. Concordia Exuperantia H 42.
Cinéas le Thessalien H 136 , p. 740. Conon , père de Timothée I 38, p. 897, 935 .
Citarius H 136 , p . 717. Constance Chlore, empereur H 136 , p . 716 .
Claude II, empereur E 121, p. 320. Constance II, empereur E 121, p . 321 ; 122,
Claude, empereur E 121, p . 316 ; G 4 ; H 8 ; p . 326 -327 ; 161, p . 369-370 ; F 12 ; 17 ;
60 ; 1 41, p. 942. H 134 ; 136 , p . 711, 717 -718 , 720 , 722
Cléa E 142. 724 ; 1 46, p . 962, 964, 969, 971.
1030 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Constant, empereur F 12 ;H 136,p.716,725 , Critias d'Athènes E 58 ; 139 ; 179 ; G 21; 28 ;
727 . 14.
Constantin Akropolitès J 1,p. 1000. Critobule, fils de Criton E 38 ; 114 ; H 94 .
Constantin Jer, empereur E 121, p . 317, 320 ; Critolaos de Phasélis E 159 ; H 136 , p . 736 .
156 ; F 12 ; H 95 ; 136, p. 717-720 , 722- Criton E 38 ; 114 ; H 94 ; J 2 , p . 1014.
724 ; 1 3, p . 826 . Criton, pharmacologiste H 58.
Constantin Paléocappa E 95 ; H 29 ; 34 ; 113. Cronius E 36. p . 167 ;H9.
Constantin Porphyrogénète E 121, p . 318 Croton H 64, p. 595.
319, 323 ; I 38, p . 938. Ctésias H 152 , p. 783; 1 5, p.841, 847.
Constantin VJ1, p. 994 , 996 , 999. Ctésippe, épicurien E 36,p. 167- 168 ; H 75.
Constantin VI J 1 , p . 994 , 999. Ctésippe, fils de Criton E 38 .
Constantin X Ducas E 95. Cynégius, préfet du Prétoire d'Orient H 136 ,
Corax E 67 ; H 136 , p. 740. p. 729.
Coriscos de Scepsis E 49 ; H 80 ; J 2 , p. 1014. Cyprien J 1,p. 1010.
Cornelia G 32. Cyranos, roi des Perses H 8 .
Cornèlianè (Flavia Apphion -) H 104. Cyrille d 'Alexandrie E 122, p . 328 ; H 175 ;
Cornelianus (Sulpicius -) F 19. I 46, p . 967 ; 51 ; J 1 , p . 1010.
Cornelianus, auteur cité par Stobée J 2 , Cyrina I 31, p . 870.
p . 1016 . Cyrus II H 31, p . 538 ; 64, p . 586 ; 136 ,
Cornutus H 63 ; 113 ; 1 40. p . 737.
Cosmas J 1, p. 994-996 , 999-1000 . Cyrus, contemporain de Galien G 3 , p . 462.
Cosmas de Constantinople , le thaumaturge
J 1, p. 996 . Damas E 93.
Cosmas l'Ermite J 1, p . 996 . Damascius de Syrie E 33, p . 141; 93 ; 112 ;
Cosmas le Mélode J 1, p. 996 . 175 ; G 2 ; H 22 ; 67; 78 ; 81 ; 122 ; 126 ;
Crantor de Soles E 97 ; 117 ; 148; H 12, 128 ; 165 ; 175; 11; 3, p. 836 ; 31, p. 870 .
p . 525 ; J 2, p. 1014. 874 -875 , 877 .
Cratéros (d'Ascalon ?) E 175. Damianus G 15 ; H 32.
Cratéros, correspondant d 'Épicure E 36 , Damippos J 2, p . 1014 .
p . 178. Damis I 42 .
Cratès d'Athènes E 117. Damon E 80, p . 267 .
Cratès de Mallos G 15 ; H 48 ; 63; 100 ; 141, Dandamis G 35 ; H 64a, p .625 ; 1 6 .
p. 949 . Darius jer H 64, p. 582, 584 , 587, 599-601,
Cratèsde Thèbes E 3 ; 52, p. 207; H 74 ; 138, 618 ; 64a, p. 626 ; 90 .
p . 742-745, 747-748, 750 ; 177 ; J 2 , Darius II I 39.
p. 1015. David l'Invincible E 15, p . 58 -64 ; 175.
Cratès le Comique E 52, p . 228. Deinomachos E 84 .
Cratès, partisan d 'Héraclite H 64, p . 595. Démade E 60.
Cratinos le Comique G 3, p. 465 ; H 157. Dèmainétè E 84.
Cratyle E 122, p. 330 ; H 64, p. 585 ; 94. Déméas G 19.
Créophyle H 88. Démélata E 36 , p . 169.
Crescens le Cynique 1 51. Démétria E 36 , p. 169; H 75.
Crésus, roi de Lydie H 64, p. 586 . Démétrios (Aelius - ) H 117.
Crinagoras I 41, p. 942. Démétrios (Pseudo -) I 38, p. 936 .
Crispinus J 2,p. 1016 . Démétrios de Magnésie E 36 , p. 159 ; H 60 ;
Crispus H 136 , p. 717. 144 ; 148 .
INDEX DES NOMS PROPRES 1031
Démétrios de Phalère E 60 ; 156 ; H 12 , Denys le Périégète E 52, p . 234 .
p . 508, 521 ; 64, p. 588 ; 86 ; I 38, p. 892, Denys le Thrace E 52, p. 228.
935 ; J 2, p. 1014- 1015. Dercyllide H 91.
Démétrios jer Poliorcète , fils d'Antigone le Dexippe, dédicataire de Jamblique 13,
Borgne H 12, p. 508; 1 14. p. 828 , 834 ; J 2, p. 1015 .
Démétrios Lacon E 12 ; 19 , p . 86 ; 36 , p. 176 ; Dexippe, historien E 121, p. 319 -320.
80 , p . 266 . Dexithéos E 182.
Démétrios le Platonicien E 86 ; 87. Diagoras " de Milet” (= de Mélos) E 187,
Demetrius (Aelius - ) E 86 . p . 407.
Démétrius d 'Alexandrie F 10 . Diagoras deMélos E 139.
Démétrius d'Athènes , père de Timocratès Dicéarque H 60 ; 136 , p . 735.
E 36, p . 168. Didyme Chalcentère d'Alexandrie H 80 ;
Démétriusde Scepsis I 20. 124 ; 141, p. 952.
Démétrius de Trézène E 19, p. 79. Didyme d'Alexandrie , dit l'Aveugle E 36 ,
Démétrius le Cynique F 10 ; H 171; 172 ; J 2, p. 154 ; 184, p . 399.
p. 1015 . al-Dimašqi (Abū 'Uļman Sa'id b. Ya'qub)
Démétrius, évêque d'Alexandrie H 43. E 80 , p. 264.
Démétrius, médecin personnel de Marc Dinostrate E 98.
Aurèle G 3, p. 450. Diocléidès deMégare E 82.
Démétrius, père d'Épicratès d'Héraclée E 32. Dioclès de Caryste H 152, p. 783.
Démocédès de Crotone H 136 , p. 740. Dioclès de Magnésie E 36 , p. 159 ; H 138,
Démocharès E 61; 148. p . 744.
Démoclès, archonte E 36 , p . 177. Dioclès de Phlionte E 5 .
Démocrite d 'Abdère E 27 ; 36 , p . 163- 164, Dioclès, archonte E 36 , p . 177 .
180 ; 52 , p . 203; 82 ; 139 ; 151 ; G 18 ; 35 ; Dioclès, père d 'Euthydème E 179.
H 12, p .512-513, 516 ; 31, p. 544 ; 60 ; 64 ,
p . 577, 585 -586 , 588-589 ; 86 ; 136 , p. 732 Dioclès, vainqueur aux Jeux Olympiques
H 136 , p. 740.
733, 736 ; 140 ; 148 ; 151, p . 763 ; 152, Dioclétien, empereur E 60a ; 110 ; 156 ; 160 ;
p. 772, 785 ; 154 ; 178 ; 14 ; J 2, p. 1014 ; 3. H 125 ; 126 .
Démonax de Chypre E 33, p. 116 -117 ; 121, Diodore Cronos E 33 , p. 128 ; 71; F 19.
p . 316 ; F 10 ; H 83 ; 162 ; 177 ; J 2 , p . 1015.
Démonicos I 38, p . 900. Diodore d 'Alexandrie E 97.
Démophanès E 2 . Diodore d'Érétrie H 154.
Démosthène E 52, p. 228 ; 71 ; 128; H 47 ; Diodore de Sicile E 156 ; 187, p . 404, 408
409 ; H 12, p. 507, 510, 513 ; 15, p. 841,
75 ; 124 ; 136 , p. 711, 714 , 721, 733, 741 ; 843, 845-846
I 38 , p . 897. .
Denys d 'Alexandrie E 156 : H 43: Diodore de Tarse E 135 : 151.
p . 1010. Diodore de Tyr E 57.
Denys d 'Halicarnasse E 36 , p. 159; 156 ; Diodore, fils deMithrès E 36 , p. 177.
I 38 , p . 892, 936 -937 ; 41, p . 952 . Diodore,médecin empiriste G 18 .
Denys d'Héraclée H 60. Diodote le Stoïcien H 136 , p . 733.
Denys de Milet I 27. Diodote, commentateur d 'Héraclite H 64,
Denys II de Syracuse E 29 ; H 25 ; 60 ; 115 ; p. 597,599.
I 38 , p. 900, 910. Diogène d'Apollonie E 139 ; 187, p. 407 ;
Denys l'Ancien E 5 . H 12, p .515 ; 64, p. 582, 588 ; 152, p . 787,
Denys l'Areopagite (Pseudo-) E 15, p. 59 ; 789 ; I 13.
JI, p. 993. Diogène d'Argos 146, p. 972.
1032 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Diogène d'Oinoanda E 19 , p. 86 ; 36 , p. 155; Diotogène J 2, p. 1014.
H 17. Diphilos du Bosphore , disciple de Stilpon
Diogène de Babylonie E 102 ; 159 ; H 51. E 125 .
Diogène de Phénicie E 112 ; H 81; 1 32. Diphilos, stoïcien H 114 .
Diogène de Sinope E 33, p . 113, 126 ; 42 ; Disarius H 169.
60 ; 70 ; 72 ; 82 ; 138 ; G 35 ; H 13 ; 18 ; 19 ; Domitia H 40 .
46 ; 138, p. 743-745, 747-748 ; 156 ; 169 ; Domitién, empereur E9; 33, p . 113, 115 ;
177 ; I 12 ; 46 , p. 966 ; J 2 , p . 1015. 132 ; F5; H 40 ; 125; 1 3, p . 826 ; 25.
Diogène de Tarse E 36 , p . 156 .
Diogène Laerce H 64 , p . 575 ; E 36 , p . 156 , Domitien
Domna I ,30Préfet du Prétoire H 136 , p . 718.
; 31, p. 872 .
159 ; H 12, p. 511 ; 13; 59 ; 61 ; 64, p. 601; Domnica H 170 .
86 ; 113 ; 148 ; I 42. Domninos H 132 .
Diogène le Phrygien E 187,p. 407. Domnulus E 152.
Diogène le sophiste H 68. Dorus l'Arabe I 31, p. 874-875, 877 .
Diogène, frère d'Hiérios H 120 .
Diogène, père de Théodora I 31, p. 870. Dosithéos E 36 , p. 174, 178 ; H 17.
Diogène, titre d'un discours d'Himérius Dracon d 'Athènes H 136, p. 741.
H 136 , p. 711. Dracon, fils d'Hippocrate de Cos H 152,
Diogénianus E 156 . p . 772.
Diomède G 3, p. 447. Drusilla, femme d 'Antonius Félix 141,
p . 943.
Diomnestos I 38 , p. 893 .
Dryson F 10.
Dion Chrysostome E 132 ; F 10 ; G 3 , p. 455 ; Dyscolius, dédicataire de Jamblique 13,
H 136 , p . 722 ; 1 46 , p . 965; J 2, p . 1016 . p . 834 ; J 2, p. 1015.
Dion d'Alexandrie E 97.
Dion de Syracuse E 91 ; H 115. Eccélô E 1.
Dion l'Académicien J 2, p . 1014 . Eccélos de Lucanie E 10 .
Dionysios de Cyrène E 80, p. 266 . Ecdémos E 2.
Dionysios de Cyzique E 52, p. 190, 192. Échécrateia de Phlionte E 4 ; 5.
Dionysios Scytobrachion E 187, p. 408. Échécratès de Phlionte E 4 ; 6 ; 114 .
Dionysios, commentateur d 'Héraclite H 64, Échécratès de Tarente E 5.
p . 585.
Dionysius (Aelius -) F 10. Échécratidès le sophiste E 7.
Dionysodore E 171. Ecphante de Crotone H 12, p. 517 ; 154 ;
142 ; J 2, p. 1014 .
Diophane deMitylène G 32. Ecphante de Syracuse H 115 .
Diophante l'Arabe E 121, p. 312, 315. Ecpôlos E 1.
Diophante, mathématicien E 80, p. 266 ; Égyptos H 78 ; 131, p. 872.
H 175.
Dios J 2, p . 1014. Eirénaios, père deMéniscos de Milet E 12.
Dioscoride E 45. Élagabal, empereur H 31, p. 537-538 ; I 42.
Élias E 161, p. 377 ; 175.
Dioscorus d 'Aphroditô I 38 , p. 938 ; H 165.
Élien E 80, p. 267; H 154.
Dioscouridès de Chypre E 75 ; 130 ; H 54 ; Élothalès, père d'Épicharme E 29.
105.
Diotélès H 143. Elpidios, correspondant de Julien 1 46,
p . 972.
Diotimos le Stoïcien E 36 , p . 159, 178. Empédocle d'Agrigente E 36 , p . 163 ; 139 ;
Diotimos, archonte E 36, p. 177. G 28 ; H 60 ; 64, p. 577-578, 582, 586 , 596 ,
Diotimos, démocritéen 6 18 . 598 ; 75 ; 86 ; 126 ; 136 , p. 734 ; 144 ; 148;
INDEX DES NOMS PROPRES 1033
152, p. 787-788 ; 154 ; 1 10 ; 20 ; J 2 , Eratosthène de Cyrène E 51; 80, p. 254-255 ;
p . 1014 . 98 ; 139; 187, p.404 ; H 138, p.744; 151,
Empédocle, auteurde tragédies E 19 , p . 82. p. 766 ; 152, p . 771 ; 15, p. 842.
Empédocle, grand-père d 'Empédocle d 'Agri- Ératosthène l'historien E 52, p. 234.
gente E 19, p. 73. Erginos I 38, p. 895.
Énée de Gaza H 126 . Érotien H 152, p. 774, 782.
Énésidème E 75 ; H 54 ; 58 ; 66 ; 105 ; 136 , Érotion E 36 , p. 169 ; H 14.
p . 737. Éryximaque H 64, p .601.
Ennius E 29 ; 187, p . 403-404 ; F 24 ; H 41. Eschine de Chios,médecin E 121, p. 311.
Épainétos, archonte E 65. Eschine de Sphettos E 54 ; G 28 ; H 86 ; I 42 ;
Épaphrodite , affranchi de Néron E 33, J 2 , p. 1013- 1014.
p. 114-115. Eschine, orateur attique H 136 ,p. 711 ; 1 14 .
Éphore de CyméI 38,p.935. Eschine, père d 'Eudoxe E 98 .
Éphrem le Syrien J 1, p . 1010 . Eschyle, disciple d 'Hippocrate de Chios
Éphrem Mtsiré J 1, p. 990, 1000, 1006 . H 151, p . 765, 770.
Épicharme E 25 ; H 64, p. 586 , 596 ; 148. Eschyle , poète tragique H 64, p. 596 ; 136,
Épictète E 36 , p . 159 ; F 10 ; 16 ; G 3 , p . 461; p . 741.
11 ; H 28 ; 39 ; 62 ; 64a, p.621 ; 124 ; 126 ; Ésope H 136 ,p. 728, 738 ; J 2, p. 1016 .
136 , p. 722 ; 178 ; 1 40 ; J 2, p. 1015 . Étienne d'Alexandrie E 175.
Épicure de Samos E 19, p. 86 ; 34 ; 35 ; 55 ; Étienne de Byzance H 113.
80, p . 268 ; 90 ; 108 ; 133; 143 ; 177 ; 187, Euaion
Euaion de Lampsaque E 148.
p . 407 ; F3; 27 ; G 3 , p . 464 ; 18 ; H 12, Euandros d ' Athènes E 65.
p . 509, 512, 514 ; 14 ; 17 ; 31, p . 543 ; 52 ;
57 ; 63 ; 75 ; 86 ; 102 ; 124 ; 129; 136 , Euathlos,rhéteur sycophante E 67.
p. 711, 731-732, 736 ; 149 ; 154 ; 167; I 14 ; Euboulidès de Milet E 70 ; 125.
J 1, p. 1010 ; 2 , p . 1015 . Euboulidès le Pythagoricien H 148.
Épicure, fils de Léonteus de Lampsaque Euboulidès, auteur d'un ouvrage Sur Diogène
E 34 . E 72.
Épicure, fils deMétrodore E 34 ; 36 , p. 166 . Euboulos d'Alexandrie E 130 ; H 54 ; 105.
Épigène, auteur d 'un traité sur la poésie Euboulos d'Éphèse E 77.
d 'Orphée I 20. Euboulos d'Érythrées E 76 .
Épigénès de Byzance E 39. Euboulos le Comique E 72.
Épigénèsde Céphisia E 39. Euboulos, archonte E 36, p. 177.
Épigonus de Cilicie E 153; H 136 , p . 736 . Euboulos, pacifiste athénien I 38, p . 898,
Épigonus de Sparte E 121, p . 315 , 318 . 911.
Épiménide H 101. Euboulos, tyran H 80.
Épiona H 152,p. 771. Eucairos E 175.
Épiphane de Salamine H 154 ; J 1, p. 1005. Euclide de Mégare E 71; 80, p. 253 ; H 91;
Épiphane de Syrie E 121, p. 312, 315. 138, p. 744 ; I 12 ; J 2, p. 1014 .
Épitimos H 47. Euclide le mathématicien E 52, p. 194, 208,
212 ; 93 ; 98 ; G 15 ; H 32 ; 99a ; 151,
Epitus, enfantprodige E 33, p. 146. p . 765, 769-770 .
Eprius Marcellus H 39. Euclide, archonte E 80, p. 253 ; 115 .
Éra , pharmacologiste H 58. Euclide, auteur d 'un ouvrage sur la comédie
Érasistrate,médecin E 92. E117.
Érasistrate , père de Phéax E 58. Euclide,commentateur de Platon G 2.
Érastos H 80. Euclide,correspondant de Julien I 46 , p. 972.
1034 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Eucratès I 18 . Euphratès de Tyr F 16 ; J 2, p. 1016 .
Eucratidès E 84. Euphratès, intendant de Marc-Aurèle G 3 ,
Eudaimon (Valerius -) E 86 . p . 450 .
Eudaimon d 'Hadrianoi E 86 . Euphronios de Chersonèse E 52,p. 202, 227.
Eudème (= Eudèmede Rhodes) I 22. Eupolémos H 12, p. 519.
Eudème d' Alexandrie, anatomiste E 92. Eupolis G 3,p. 465; H 12, p. 507.
Eudèmede Chios E 88. Euripide E 25 ; 110 ; H 60 ; 64, p . 595-596 ;
Eudèmede Chypre E 93. 138, p. 743 ; I 38 , p. 898 ; J 2, p. 1016 .
Eudème de Pergame, péripatéticien G 3 . Euripide, titre d 'un dialogue de Glaucon
p. 441, 447 ; H 83. G21.
Eudème de Rhodes E 91; 92 ; G 3 , p . 464 ; Euryloque, correspondant d'Epicure E 36 ,
H 67 ; 129 ; 151, p . 763, 768. p . 178.
Eudème ó Papuaxonhang E 88. Euryloque,disciple de Pyrrhon E 36 ,p. 163.
Eudème, épicurien E 36 , p . 169. Euryloque, titre d 'un ouvrage d' Épicure
Eudème,médecin de Pergame E 92. E 36 , p. 175.
Eudème,médecin méthodiste E 92. Euryphamos J 2 , p. 1014.
Eudocie H 113. Euryphon de Cnide E 147 ; J 2, p. 1014.
Eudore d 'Alexandrie E 111. Eurysos E 150 ; J 2 , p. 1014 .
Eudoxe de Cnide E 36 , p . 167 ; 52, p . 211 Eurytos E 5 .
212, 225, 233; 80, p . 254 ; 93; 99 ; H 25 ; Eusébe d ' Émèse surnommé Pittakas E 40 .
99a ; 151, p . 767, 769; I 14. Eusébe de Césarée E 80, p. 267 ; H 125 ; 126 ;
Eudoxe de Rhodes E 98. 154 ; I 38, p. 937 ; 46 , p. 978 ; J 1, p . 1010 .
Eudoxe, évêque arien E 122, p . 326. Eusébe de Myndos E 121, p . 317 ; 151 ; 154 ;
Eudoxie, épouse d' Arcadius 320
E 121, p. . 146 , p. 970, 975.
Eudromos E 80, p. 268. Eusébe deNicomédie E 154.
Eugénès (Gaius Valerius -) E 109. Eusébe de Samosate E 154.
Eugénianos G 3, p . 453. Eusébe, auteur cité par Stobée J 2, p. 1015 .
Eugénios, correspondant de Libanios E 110. Eusèbe, disciple de Prohérésius E 154 ; 157.
Eugénius, père de Thémistius H 136 , p. 731 Eusébe, évêque d 'Alexandrie E 154 ; J 1,
732 ; I 46 , p . 972. p . 1010 .
Eulalius le Phrygien E 112 ; H 81; 1 32. Eusébe, évêque d'Émèse E 154.
Eulamius de Phrygie H 81 ; 1 32. Eusébie I46, p. 962, 965.
Eumène, rhéteur H 136, p . 716 , 717 . Eusébios (= Silvanus Dorothéos Hiérax)
Eumenius I 46, p . 968. H 118.
Eunape de Sardes E 41 ; 106 ; H 121 ; 136 , Eusebios, historien E 151.
p. 728; 175; 13, p. 825, 835 ; 21. Euserius, vicarius Asiae E 121, p. 313.
Eunape le rhéteur E 121, p. 311. Eustathe d’ Antioche E 156 .
Eunice I 27. Eustathe d ’Himmeria E 161, p. 375 .
Eunome l'Arien E 184, p. 402. Eustathe de Cappadoce E 121, p . 317 ; 159 ;
Eunome, papuaxonuing E 88. 13, p . 828, 834 ; 46 , p. 968, 972.
Euphante d 'Olynthe E 71. Eustathe de Laodicée E 161, p . 373.
Euphorbos,médecin de Juba I41, p. 951. Eustathe de Sébaste E 161, p. 375-376 .
Euphranor de Séleucie E 75 ; H 54; 105. Eustathe de Thessalonique E 161, p. 374.
Euphranor, le peintre H 133. Eustathe l'archiâtre E 161, p . 375.
Euphrasius, disciple de Jamblique E 121, Eustathe, commentateur d'Hermogène E 161,
p . 317 ; 135 ; 1 3, p. 828 . p . 377 .
INDEX DES NOMS PROPRES 1035
Eustathe, dédicataire de Jamblique J2, Firmus, usurpateur F 13.
p . 1015 . Flavianus (Nicomachus -), proconsul d’Asie
Eustathe, philosophe grec amide Macrobe H 136 , p . 711-712, 729.
E 158 ; 161, p . 378. Flavianus, frère de Symmaque H 169.
Eustathe, traducteur de Basile de Césarée Flavius- Josèphe E 156 ; H 12, p . 522 ; Jl,
E 161, p . 377. p . 1010 ; 2, p. 1014 .
Euthias, titre d 'un dialogue de Glaucon G 21. Florentine, sæur d ' Isidore de Séville I 34 ,
Euthios, archonte E 36 , p. 177. p. 881.
Euthyclès H 64a, p. 620 ,627. Florus, sénateur F 16.
Euthydème de Chios E 179. Fravitus E 121, p. 320 .
Euthydème, fils de Glaucon E 179. Fronton (Domitius -) d'Hippone F 20 .
Euthynous I 38 , p. 895, 899. Fronton (M . Cornelius -) E 132 ; 186 ; F 10 ;
Euthyphron H 60. 20 .
Eutocius d 'Ascalon E 15, p . 59 ; 80, p. 268 ; Fronton (Marcus -) F 18 .
H 107 ; 175. Fronton (Valerius -), père de Martial F 18 .
Eutocius d'Ascalon, soldatthrace E 175. Fronton d'Émèse F 19 ; 20.
Eutychios d 'Alexandrie J 1, p. 989. Frontonis F 19 .
Eutychius,évêque d'Éleuthéropolis E 45. Fulgence, frère d 'Isidore de Séville 1 34,
Euxitheos J 2, p. 1016 . p . 881.
Évagoras I 38, p . 900, 905 ; H 136 , p. 715, Fulgentius (Claudius Gordianus -) F 23.
724 ; I 38, p. 908, 930 . FulviusNobilior (M . - ) E 25.
Évandre de Phocée H 21.
Évandros, auteur d'un ouvrage Contre les Gaius,médioplatonicien E 185 ; G 3,p. 442.
sophistes I 38 , p . 934 . Gaius, rhéteur cité par Stobée J 2, p. 1016 .
Évangelus H 169. Galba (Sulpicius -) 141, p. 952.
Évhémère de Messine E 25 ; 52, p. 222 ; 156 ; Galba,empereur H 39 .
H 12, p. 509, 524 ; 101; 157 ; 15, p .850, Galère, empereur E 110 ; 1 3, p.828.
852.
Galien de Pergame E 15 , p.60 ; 33, p. 141;
Évhémère de Tégée E 139. 35 ; 54 ; 80 , p . 267 ; 92 ; F 10 ; G 2 ; 9 ; 16 ;
Exainétos d’Agrigente, olympionique E 19 ,20 ; H 54 ; 58 ; 83 ; 152, p . 782 ; 131,
p. 75. p. 873 ; 42 ; J 1, p. 1009 ; 2, p. 1014.
Exainétos d'Agrigente, père d'Empédocle Gallien ,empereur E 161, p. 369.
E 19 , p. 74. Gallio (L . Iunius -) G 4 .
Exéchias H 12, p . 521. Gallus (Flavius Claudius Constantius -)
E 40 ; 153 ; G 6 ; H 136 , p. 711, 718 ; I 46,
Fadius (T . - ) F 3. p . 965.
Fannia H 39 ; 40. Gallus (M . Fabius -) H 160.
Faustine la Jeune, épouse de Marc-Aurèle Gartydas G 26 .
142. Gaudence,empereur I 3, p. 828.
Favorinus d'Arles E 33, p. 141; F 16 ; 19 ; Gaumata H 64, p. 587.
G 3, p. 455, 461-462 ; H 100 ; 117 ; 136 , Gauros G 10 .
p. 737 ; J 2, p. 1015. al-Ğawhari (al-'Abbās b. Sa'id al-Gawhari)
Félix (Antonius -) 141, p . 943. E 80 , p. 265.
Festus, proconsul de la province d 'Asie al-Ğayyāni (Abū 'Abd Allāh Muhammad b.
E 121, p . 311. Mu'ad al-Gayyāni al-Qādi) E 80, p. 264.
Firmus Castricius I 31, p. 873. Gemina Baebiana (Afinia M . F. -) G 13.
1036 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Gémina, fille de Gémina G 13. Grégoire de Tours I 34 , p . 880 .
Gémina,mère de Gémina G 14. Grégoire le Grand I 34, p . 879-880 ; J 1,
Géminus E 80 , p. 256 , 258. p . 993-994, 997.
Gennade 1 34 , p . 884. Grégoire le Thaumaturge J 1, p . 1010.
Georgesde Cappadoce H 136 , p. 732. Grégoire , frère d'Hermias H 30 .
Georgesde Chypre J 1, p . 990. Gryllos I 38 , p. 900, 933.
Georges, titulaire du siège de Césarée I 46 ,
p. 970. Habrotéleia E 4; H 2.
Gérard de Crémone E 80 , p. 257, 264 ; G 15. Habrotélès de Tarente E 4 ; H 1 .
Germain jer de Constantinople J 1, p . 990 , Hadrien de Tyr F 10 .
999. Hadrien , empereur E 33, p. 113, 116 , 146 ;
Gésios H 67. 86 ; 87 ; 132 ; F 10 ; 25 ; G11 ; H 28 ; 31,
Géta (= P . Septimius Geta ) I 42. p. 537 ; 64 , p. 591; 1 27 ; 42 ; 49.
Glaphyra I 41, p. 943. al-Hağğāğ (b. Yusuf b.Maſar al-Ḥāsib ) E 80,
Glaucias H 54. p . 263.
Glaucidès G 18. Halcyoneus, fils d ’Antigone Gonatas H 129.
Glaucippe, père d 'Hypéride H 176 . Hannon I41, p . 949.
Glaucon ,médecin antérieur à Pline l'Ancien Harmonius H 136 , p. 717.
G 20 . Harpocras, grammairien H 165.
Glaucon, médecin contemporain de Galien Harpocration (Aelius -) H 8.
G 3, p. 440, 447. Harpocration (Valerius - ), rhéteur H 8 .
Glaucon, père d 'Euthydème E 169. Harpocration d 'Alexandrie H 8 .
GlaucosdeMarathon G 23. Harpocration d 'Argos, médioplatonicien
Glaucos de Rhégium E 19, p . 75. G 2 ; H 8 ; 78.
Glaucos, grammairien à Autun H 136 , p. 716 . Harpocration , le grammairien H 9 .
Gordien , empereur I 42. Harpocration ,mentionné par Tertullien H 8 .
GorgiadasG7; 26. Hécatée d 'Abdère E 156 ; 187, p. 406 , 410 ;
Gorgiadès G 7 ; 26. H63.
Gorgias de Leontinoi E 19, p. 76 , 81; 139 ; Hécatée de Milet H 12, p . 506, 513, 515 ; 64,
H 64, p. 597 ; 86 : 136 , p . 714 , 733, 737. p . 583, 587 ; 101.
740 : 145; 152 , p . 772 ; 14 ; 38, p. 894- 895 . Hécaton de Rhodes H 11.
911, 913-916 , 925, 927, 929, 931 ; 42 ; J 2, Hédéia E 36 , p . 169 ; 55.
p. 1014. Hédyto 1 38, p . 893.
Gorgidas 6 7. Hégémaque, archonte E 36 , p. 173.
Gorgippe G 29. Hégésianax, fils de Dosithéos E 36 , p . 169,
Gorgonios H 136, p. 726. 174.
Gortydas G 7. Hégésias de Cyrène E 48.
Gracchus (C . -) F6. Hégésias de Sinope H 18 .
Gracchus (Ti. Sempronius -) G 32. Hégésias, dépositaire du testament de Théo
Gratien, empereur H 136 , p. 717. phraste H 143.
Grégoire d'Alexandrie H 78. Hégésilaos H 21.
Grégoire de Nazianze E 33, p. 141; 161, Hégésinos de Pergame E 65.
p. 375 ; 184 , p. 399 ; H 113 ; 136 , p. 714, Hégias l' archonte H 122.
727 ; 1 46 ,p .970 ; J 1, p. 1010. Hégias, fils de Théagénès E 124 ; I 31,
Grégoire de Nysse E 80, p . 267 ; 122, p . 328, p . 875, 877.
330 -332 ; J 1, p . 1010. Hélicon de Cyzique E 98.
INDEX DES NOMSPROPRES 1037
Héliodore d'Alexandrie H 78 ; 119 ; I 31, Héraclite, commentateur d 'Homère H 64,
p.872, 873. p .601.
Héliodore d'Antioche H 26 . Héraclius, empereur J 1, p . 989.
Héliodore d'Émèse , romancier H 163. Héracôn H 64, p. 576 .
Héliodore de Pruse H 29. Héraïscus d'Alexandrie G 16 ; H 164 ; 165 ;
Héliodore l' Arabe H 31, p. 536 . 131, p. 870, 873, 877.
Héliodore, chirurgien H 54 . Hérillos de Carthage H 161.
Héliodore, périégète I 38, p. 892. Hermarque de Mitylène E 19, p. 86 ; 34 ; 36 ,
Héliodore, péripatéticien H 34 . p. 159, 165, 167- 169, 177 - 178, 181 ;
Héliodore, philosophe ami d'Hadrien E 33, H 149 ; J 2, p . 1015 .
p. 113 ; 87. Hermeias d'Alexandrie E 175 ; G 34 ; H 30 ;
Héliodore, scholarque épicurien à Athènes 32 ; 119 ; 126 ; I 31, p . 872 .
E 87. Hermeias d'Alexandrie, le rhéteur H 78 ; 122.
Heliodorus (C. Avidius -) E 87; H 28 . Hermeias de Phénicie E 112 ; 1 32.
Helladius d'Antinoupolis H 164 . Hermeias lemédecin H 78.
Hellanicosde Lesbos H 64, p. 577 ; 101. Hermias d' Atarnée H 136 , p. 734-735 .
Hellanicos, auteur intéressé par la théogonie Hermias de Galatie H 93.
orphique H 128. Herminus, péripatéticien E 92 ; 161, p. 372;
Hellopion E 16 . I 22 ;45.
Helvidius Priscus (C . -) H 40 . Herminus, stoïcien H 83.
Hémérios H 136 , p. 722. Hermippe de Smyrne E 36 , p. 159 ; 98 ; 139;
Héracleianos G 3, p . 444. H 60 ; 61; 64a , p . 622 ; 80 ; 148 ; I 38 ,
Héracléidas H 152, p. 771-772. p. 892, 900 , 935 ; J 2 , p. 1015 .
Héracleios le Cynique I 46,p. 962, 966 , 972. Hermocratès (T. Flavius Varus Calvisianus
-) H 87.
Héracléodore, épicurien H 49. Hermocratès de Phocée E 118 .
Héraclide d'Alexandrie H 61. Hermodore d'Éphèse H 64, p. 580, 582, 584,
Héraclide d'Érythrées H 54. 587, 599,619 ;64a, p. 620 , 623-627.
Héraclide de Tarente E 75 ; G 18 ; H 54. Hermodore de Samos H 82.
Héraclide de Tarse H 53. Hermodore de Syracuse E 82.
Héraclide le Pontique E 8 ; 22 ; H 55 ; 61 ; 86 ; Hermodore l'Épicurien H 108.
99 ; 115 ; 148 . Hermogène d'Amasée, visiteur de la tombe
Héraclide le Pontique dit le Jeune H 60. de Memnon (peut-être Hermogène du Pont)
Héraclide le Pythagoricien H 64, p . 582. H 136 , p. 719.
Héraclide Lembos E 36 , p . 159 ; H 64, Hermogène d'Athènes E 38 ; 122, p. 330 .
p. 582 ; 86 ; 144 ; 1 5 , p . 852. Hermogène de Tarse, le rhéteur E 161,
Héraclidepythagoricien H 61. p. 377 ; H 136 , p. 715, 721-722 ; I 38,
p. 901, 936 du
Héraclide , maître d ' Enésidème E 75 ; G 18; Hermogène , 937.
Pont H 136 , p . 712, 718 -720,
H 66 .
735-736 . J 2, p. 1013.
Héraclite d' Éphèse E 19, p. 79 ; 24 , p. 96 - 99 ; Hermoloque
139 ; H 12, p . 515 ; 60 ; 63 ; 64a, p .618, Hermotime de Clazomènes E 22.
622 ; 86 ; 90 ; 136 , p. 740 ; 144 ; 152, Hermotimede Colophon E 80 , p. 254 .
p . 787 ; 154 ; J 2, p. 1013- 1014 ; 3. Hérode Atticus F 10.
Héraclite de Macédoine H 64, p. 601. Hérode le Grand I 41, p . 943.
Héraclite de Rhodes H 65. Hérodicosde Babylonie H 63 ; 136 , p. 742.
Héraclite de Tyr H 54. Hérodicos de Sélymbrie H 152, p. 772.
1038 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Hérodote d 'Halicarnasse E 36 , p . 178 ; 121, Hilapios H 132.
p. 323 ; 139 ; 151 ; H 12, p.517 ; 101; 152, Hilarius d'Antioche H 131.
p. 785. Hilarius de Bithynie E 121, p. 320 .
Hérodote,l'Épicurien E 36 , p. 159- 160, 162, Himérius de Prousias E 121, p. 312, 315 ; H
168, 179 . 95.
Héron d 'Alexandrie E 80, p. 264, 269; Himérius, haut fonctionnaire H 136 , p . 722
H 106 . 723 ; 12.
Héron d'Athènes H 61. Hipparchia E 52, p. 207.
Hipparchide de Rhégium H 159.
Hérophile de Chalcédoine E 92 ; G 18 ; H 58 ; Hipparchidès
105 ; 130 ; 152, p. 783 ; J 2, p. 1014. Hipparchos de Nicée E 52, p. 217-218, 221
Hérophile, cynique H 89. 222, 227, 234 ; 98 .
Hérostrate H 64, p. 588, 595. Hipparchos, pythagoricien H 144 ; J 2,
Herpyllis H 143. p. 1014.
Hésiode E 36 , p. 162 ; 93; H 12, p. 509; 60 ; Hipparété H 94.
64, p . 583, 603, 626 ; 136 , p. 716 ; 145 ; Hipparinos E 91.
154 ; 15, p. 850 ; 38, p. 904. Hippasos deMétaponte E 19 , p. 79 ; 69 ; 129 ;
Hesychius d' Apamée (Hostilianus -) 13, H64, p. 576 , 582, 584 ; 140 ; 151, p. 764 ;
p . 828. 159.
Hesychiusde Damas, père de Jacob I 1. Hippasos de Phlionte H 144.
Hesychius, père d'Hésychius H 113. Hippias d' Élis E 52, p. 223 ; 59 ; 94 ; 139 ;
Hicétas de Syracuse, tyran de Léontinoi H 20 ; 101 ; 136 , p . 737 ; 1 4 .
H 115. Hippias, époux de Plathané I 38, p. 893.
Hicétas, pythagoricien E 8 ; H 115 . Hippobote E 69 ; 130 ; H 60.
Hiempsal I 41, p. 947. Hippobote, vainqueur à Olympie H 148.
Hiérax J 2, p. 1015 . Hippocléidès E 36, p. 169.
Hiérax (T. FlaviusLucius -) H 117 . Hippocrate de Chios E 52, p. 211, 213 ; 80.
Hiérax le néoplatonicien H 116 . p. 265.
Hiérius, fils de Plutarque d'Athènes 131, Hippocrate de Cos E 35 ; 80 , p. 267 ; 139 ;
p.874. G 3, p. 452, 460, 465 ; 16 ; 18 ; 20 ; H 54 ;
Hiérius, maître de Maxime d'Éphèse I 3, 58 ; 64, p . 585 ; 130 ; 151, p. 763 ; 11; 5.
p. 828. p. 851.
Hiéroclès (Sossianus -) E 156 ; H 126 . Hippodamos de Milet E 139 ; 187, p . 404 ;
Hiéroclès d 'Alexandrie E 33. p . 141 : H 124 : H20 ; J 2, p. 1014 .
175 ; 1 31, p. 872, 877. Hippolyte E 19 , p. 87 ; J 1, p . 1010 .
Hiéroclès d 'Hyllarima H 124. Hippon de Crotone H 152, p. 787-788 .
Hiéroclès le Stoïcien H 126 ; J 2, p. 1015. Hippon deMétaponte H 144.
Hiéron de Syracuse E 19 , p . 74 ; 29 ; H 64, Hippon deMilet E 187, p.407.
p. 587, 596 ; 136, p. 737. Hippon de Rhégium H 144.
Hiéronymos de Cardie H 129. Hippon de Samos E 187, p .407 ; H 64,
Hiéronymos de Rhodes E 93 ; H 148 ; I 38 , p . 582 ; 154.
p. 935 ; J 2, p. 1015. Hipponax E 187, p. 404 ; H 64 , p. 587 ; 86 .
Hiéronymos de Rhodes, fils de Simylinos Hipponicos H 94 .
H 129. Hippothalès, fils de Hiéronymos H 158.
Hiéronymos l'Égyptien E 156 . Hippys de Rhégium H 139.
Hiéronymos, auteur intéressé par l'orphisme Homère E 19, p . 81 ; 25 ; 52, p. 221-222, 225 .
H 128 . 226 ; 93 ; 94 ; 110 ; 139 ; 161, p. 372 ; H 12,
Hilaire d 'Arles E 152. p . 509 ; 31, p. 539, 543 ; 60 ;63, 64, p. 583,
INDEX DES NOMS PROPRES 1039
626 ; 86 ; 88 ; 100 ; 126 ; 136 , p. 717, 732- lon de Chios E 39 ; G 18 ; I 38 , p. 914 .
733 ; 145 ; 164 ; 15, p. 844 ; 34, p . 883 ; 38, lon le Platonicien E 84.
p . 908, 919, 929 ; 46, p . 965, 974. Ionicus E 121, p. 316 .
Honoratus H 136 , p . 729. Iphiclès I 46 , p . 972.
Honorius, empereur E 121, p. 320. Iraios, chargé des funérailles de Straton E 30.
Horace F 27 ; I 10. Irénée H 154 ; J 1, p . 1010 .
Horapollon (Flavius -) H 164. Isaios I 38, p. 935.
Horapollon de Phainébytis H 67 ; 163 ; I 31, Isaios (Luſcius] Volusius -) 1 27 .
p. 870 , 874 . Isaios, archonte E 36 , p. 177.
Horapollon,auteur des Hieroglyphika H 165. Isḥāq b. Hunayn (b. Ishaq al-'Ibādi) E 80 ,
Hosiusde Milan H 170. p. 257, 263.
Hostilianus (C . Tutilius -) H 171. Isidore d'Alexandrie E 34 ; H 22 ; 67 ; 78 ;
Hubayš (b . al-Hasan al-Aſsam al-Dimašqi) G 126 ; 165 ; 1 30 ; 32.
3 , p . 456 , 459 -460 . Isidore de Characène E 52, p. 234.
Hunayn (b. Işhāq al-'Ibādi Abū Zayd ) E 80 , Isidore de Gaza E 112 ; H 81.
p. 263 ; G 3, p . 453, 455, 458 -460, 463. Isidore deMilet E 175.
Hydaspe G 35 ; H 31, p. 540. Isidore de Péluse H 85 ; 136 , p. 735 -736 .
Hygin E 52, p. 235. Isidore le Cynique I 36 .
Hypatie d'Alexandrie E 80, p. 253 ; H 31, Isidore , hymnographe 1 31, p . 877.
p . 542 ; 70 ; I 30 ; 33.
Hypéride H 136 , p . 711, 714 ; I 38, p. 935. Isidore, prêtre d 'Alexandrie E 45.
Isocasius de Cilicie I 1 .
Hypsaios J 2 , p . 1015 .
Hypsiclès E 80, p . 266 . Isocrate E 36 , p . 164 ; 54 ; 82 ; 122, p . 326 ;
179 ; G 28 ; H 25 ; 86 ; 129 ; 136 , p. 725 ;
Hystias H 64, p. 581. 145 ; 178 ; 14.
Isocrate d'Apollonie I 38 , p. 900, 934 -935.
ladmon de Samos E 60 .
Iulius,rhéteur cité par Stobée J 2, p. 1016 .
lamboulos E 187, p. 406 . luncus J 2, p. 1015.
Iason I 38, p. 900. luncus (L .Aemilius -) 1 49.
Ibn Abi Uşaybi'a (Muwaffaq al-Din Abū l. luuenalis (Decimus Iunius - ), tribun des
'Abbas Ahmad b . al-Qāsim b . Halifa b . cohortes Dalmates J 3 .
Yūnus al-Hazraği) G 3, p . 453, 458, 460 .
Ibn al-Haytam (Abū 'Ali al-Hasan b. al Jacob lemédecin I 37.
Hasan - Husayn ? – b . al-Haytam al-Basri
al-Misri) E 80, p. 265. Jacques de Venise E 163, p . 385-387.
Ibn al-Nadim , voir al-Nadim . Jamblique d 'Apamée E 99 ; H 136 , p . 723.
Ibn Rusd (Abū l-Walid Muhammad b . Jamblique de Chalcis E 1 ; 15, p . 62 ; 22 ; 41 ;
Ahmad Muhammad al-Hafid) (Averroès ] 51 ; 110 ; 121, p . 310, 313, 315 , 317, 320 ;
G 3 , p . 458 . 122, p. 329, 332 ; 131 ; 159 ; 161, p. 369,
Ibrāhim b. Sinān b. Tābit b . Qurra E 80, 371-373, 378 ; 184, p . 401 ; H 78 ; 121 ;
p . 258. 126 ; 140 ; 144 ; 175 ; 12 ; 4 ; 22 ; 31, p. 873,
Ichthyas E 82. 876 ; 46, p . 966, 970, 972, 974, 977 ; J 2 ,
p. 1014-1015 .
Idoménée de Lampsaque E 36 , p. 158, 166,
177-178 ; H 75 ; 102. Jamblique, fils de Sampsigéramos I 3, p . 826 .
Ignace d 'Antioche J 1, p . 1010 . Jamblique,maître de Proclos 1 2.
Illos I 31, p . 874 -875. Jason , fils deMénécrate I 8.
Illyrios (Claudios -) H 136 , p . 721. Jason , tyran de Phères G 28.
lollas de Bithynie I 16 . Jean Chortasménos E 163, p . 384.
1040 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Jean Chrysostome E 33, p. 141 ; 45 ; 121, Junia F 5.
p. 320 ; 155 ; J 1, p. 996 , 1010. Justin , apologète chrétien E 33, p. 141 ; 122,
Jean de Jérusalem , évêque (Ive s.) E 45. p. 329 ; H 154 ; J 1, p. 1010 .
Jean de Nikiu H 175. Justin , empereur H 113.
Jean de Salisbury E 33, p. 147. Justinien , empereur E 112 ; H 81 ; 113 ; I 32 ;
Jean Eugenikos H 31, p. 542. 34 , p. 879.
Jean III d 'Antioche J 1, p . 998. Justus G 3, p. 447.
Jean Italos E 163, p. 379, 380. Justus (L .Gellius -) G 11.
Jean IX Agapètos E 163, p. 381. Justus f(ilius) (L .Gellius -) G 11.
Jean le Notaire E 154 . Juvénal I 27 .
Jean Lydus 1 3, p.836 ; J 1, p. 996.
Jean Merkouropoulos J 1, p. 1000 . al-Kindi (Abū Yusūf Ya'qūb b. Isḥāq) E 33,
Jean Philopon E 15 , p. 58 : 161. p. 373, 378 : p . 142 ; H 99.
163, p. 383-384 ; G 2 ; I 3, p. 836 ; 31, Kotys H 55.
p. 872 ; J 1, p. 996 , 1010. Kyrinos H 122.
Jean Scot Érigène E 33, p. 146 .
Jean Stobée H 124 ; 178 ; 1 3, p. 832, 836 ; Laberius H 136 , p. 733.
J 1, p . 996 . Lactance H 125 ; I 34 , p. 887, 890.
Jean V de Jérusalem J 1, p. 1002. Lacydès de Cyrène E 62 ; 65 ; 73 ; 76 ; 77 ;
Jean VII de Jérusalem = (Yuhanna b. Djamî') 126 ; H 82 ; 136 , p. 737.
J1, p. 998. LaeliusF6 ; 26 .
Jean VIII de Jérusalem J 1, p . 998. Lamprias E 19 , p. 87 ; F 10; H 136 , p. 737.
Jérôme E 45 ; 156;I 34,p.884 -885. Lamprias d 'Argos I 46 , p . 972 .
Josèphe (Flavius -) H 154. Léandre de Séville I 34 , p. 880 -881.
Joseppus H 61. Lecanios Areios de Tarse H 105.
Josipe H 154. Lentulus (Cossus Cornelius -) 141, p . 941.
Jovien F 17. Léocritos H 161.
Jovien, empereur E 106 ; 121, p . 321 ; 122, Léodamas de Thasos H 151, p. 765.
p . 327 ; H 134 .
Léon fer, empereur E 113 ;11; 37 .
Juba jer I 41, p . 940, 946 . Léon III, empereur J 1, p. 994, 999.
Jules fer, pape 1 51. Léon, conjuré du complot contre Cléarque
Jules l'Africain E 156 ; H 43. E 179 .
Julia Domna E 9. Léon , mathématicien E 80, p . 265 ; H 151,
Julianus,médecin méthodiste G 3, p. 444. p . 770.
Julien (Pseudo -) I 3, p. 828. Léonard de Pise E 80, p . 257.
Julien de Cappadoce E 121, p. 312, 315 ; Léonidas de Tarente E 108.
153 ; I 43.
Julien le Chaldéen I 48. Léonidès E 179.
Julien le Théurge I 47. Léonidès (M . Eustorgius Héraclamon -)
Julien , empereur E 17 ; 22 ; 119 ; 121, p . 311 E 188.
312. 317 . 320 - 321: 122. p . 327, 333 : 161. Léonteus de Lampsaque E 34 ; 36 , p . 158.
p . 371 : F17 : G 6 : H8: 31. p. 538 : 38 : 164- 165 , 167, 175, 177 - 178 ; 1 14 .
46 ; 120 ; 136 , p . 711-712, 714, 718 , 722- Leonteus, acteur 141, p. 947.
724, 727-728, 731-733, 735, 737 ; 13, Léontion d'Athènes E 36 , p. 166, 169, 177
p. 828 ; 24 ; J 1, p . 1011. 178 , 180 .
Julien , empereur = Flavius Claudius lulianus Léontios 1 31,p. 872.
E 157. Leucippe E 36 , p. 163; H 154.
INDEX DES NOMS PROPRES 1041
Libanius E 121, p . 312, 315 ; 161, p. 372, Lysias, élève d'Euphratès E 132.
374 ; F 17 ; H 8 ; 35 ; 95 ; 120 ; 131; 136 , Lysias, orateur H 136, p . 714 ; I 38, p . 896 ,
p. 714 , 719, 724, 726, 732 ; 12 ; 38, p. 937; 915, 920, 922.
46 , p . 971 ; J 1, p . 1009. Lysimachos, adversaire (fictif?) d ' Isocrate
Licinius, empereur E 160 ; H 95 ; 136 , p. 718 , 138, p. 898.
720, 735 ; 13, p. 828. Lysimaque (le diadoque ?) H 89.
Liménius H 136 , p. 724 . Lysimaque le diadoque E 36 , p. 166 , 170 ;
Linos H 148 ; J 2 , p . 1016 . H 138, p . 743 ; I 14 .
Lobon d'Argos E 19, p. 84. Lysimaque, disciple de Théophraste H 86 .
Lochitès I 38, p. 895, 899. Lysippe F 24.
Lollianus d'Éphèse 1 27 . Lysis de Tarente E 26 ; 145 ; H 140 .
Longin E 74 ; 156 ; F 19 ; H 29 ; 34 ; 136, Lysitheidès, titre d'un dialogue de Glaucon
p. 721. G 21.
Longin (Pseudo-) H 63; I 38, p. 936 .
Longinus (C . Cassius -) E 176 ; F 3. Macaire Za îm J I, p. 990 , 997.
Lucien de Samosate E 33, p. 141; 121, Macaire, évêque J 1, p. 1011.
p . 316 ; 167 ; F 10 ; H 31, p . 538 ; 76 ; 136 , Macarios de Magnésie H 125 .
p . 716 . Macédonius, dédicataire de Jamblique 13,
Lucilius, auteur cité par Censorinus E 82. p. 834 ; J 2 , p . 1015.
Lucilius, correspondant de Sénèque F7 ; Machaon H 152, p . 771.
H 13.
Macrin , empereur 142.
Lucillius,poète épigrammatiste H 92. Macrobe E 101 ; 158 ; 159 ;F9; H 169.
Luciusde Thessalie H 136 , p . 720. Maesa (Julia -) I42.
LuciusGellius E 33, p. 118, 120-123, 140. Magas, roi de Cyrène E 52, p. 199.
Lucius Verus F 19 ; G 3, p. 441,448 ; H 8 ; 9. Magnès E 29.
Lucius, cynique F 10 . Magnus d'Éphèse H 8.
Lucius, disciple de Musonius Rufus E 33, Magnus de Nisibe E 121, p. 313, 316 ; H 8.
p. 122 ; J 2 , p . 1015 .
Lucrèce E 11 ; 19, p . 86 ; 24 , p. 92 ; 36 , al-Maġribi
mad b. Abi
(Muhyi l-Din Yahyā b. Muḥam
al-Sukr) E 80, p. 265.
p. 155 ; H 64, p. 602 ; 167; I 34 , p . 886. al-Māhāni (Abū ' Abd Allāh Muḥammad b .
Luscus H 136, p. 718. 'Isā b . Ahmad) E 80, p . 265.
Lycinus H 98 ; 114. Maïmonide G 3, p. 458, 459,460.
Lycon de Troade E 30 ; 36, p. 181 ; 93; 134 ; Malchus E 113.
G 31 ; H 45 ; 86 ; 129 ; 150. Mammarion E 36 , p . 169; 55 ; H 14 .
Lycon,esclave d'Épicure E 36 , p. 168.
Lycophron de Chalcis E 52, p. 198, 227, 234 . Mancinus (C . -), consul F 26 ; G 32.
Lycophron , correspondant de Léonteus de Mandamis 1 6 .
Lampsaque E 36 , p . 164. Manéthon E 156 ; H 12, p. 511, 523-524.
Lycophron, orateur G 28. al-Mansur (Abū Ğa'far 'Abd Allāh b .
Lycos G 18. Muhammad ) J 1, p . 994 -995.
Lycurgue, légistlateur de Sparte G 35 ; H 12, Manşūr b. Sardjūn J I, p. 989, 991, 994,
p . 517 . 1001- 1002.
Lycurgue, orateur H 176 ; I 38, p. 935. Mantias H 54 ; 58.
Lycus (Lucius ?) I 22. Maras H 132.
Lydus F 9. Marc de Byzance 1 27.
Lysanias, grammairien de Cyrène E 52, Marc -Antoine (Marcus Antonius) E 176 ;
p . 193, 198. H 160 ; 141, p. 941-942.
1042 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Marc-Aurèle E 33, p . 113, 129-130, 136 , Maximus, épicurien , corrector des cités
141; 86 ; 87 ; 92 ; F 19 ; 20 ; 22 ; G 2 ; 3, libres E 33, p. 116 .
p. 441, 448, 450 ; 20 ; H 8 ; 56 ; 124 ; 136 , Mécène H 167.
p. 720 ; 1 42 ; 46 , p. 966 ; 48 ; J 3. Médius H 29.
Marcel d'Ancyre E 156 ; 151. Mégacleidès 1 38 , p. 898.
Marcella F 25. Mégalophanès E 2.
Marcellinus E 161, p. 377 ; H 8 . Mégasthène E 156 ; G 35 ; H 12, p. 524 ; 15.
Marcien d'Héraclée E 52, p. 234. p. 842, 850 ; 6 .
Marcion E 19, p. 85 ; H 154 ; 151. Melancomas H 64, p. 581, 587 , 579 .
Marcomir H 135. Mélanie l' Ancienne E 184, p . 399.
Mardonius, maître de Julien H 64, p. 580,
587 ; I 24 ; 46 , p. 969. Mélas H 64, p. 579, 586, 587.
Marie d'Alanie E 163, p. 383. Mélissos de Samos E 19, p. 76 ; H 64 , p. 585 .
Marinos de Tyr E 52, p . 234. 587, 597 ; 152, p. 772, 789 ; I 38 , p . 914.
Marinus de Néapolis E 80 , p. 257 ; H 22 ; Mélité, épouse de Chrysanthe de Sardes
122 ; I 31, p . 873-876 . E 121, p . 311.
Marius Victorinus I 34, p. 886 -887. Mélitta I 46, p. 971.
Martial J 3 . Memnon E 179.
Martianus Capella E 80, p. 267; F9; 23. Menander (L . Gellius - ) G 11.
Martin de Braga I 34, p . 886 . Ménandre d'Éphèse E 52, p. 202.
Massalenus E 33, p. 118 . Ménandre de Corinthe H 120 .
Massinissa I 41, p . 940 , 945 . Menandre de Laodicée H 136, p. 721.
Matron E 36 , p. 169. Ménandre le Rhéteur H 136 , p. 715.
Maurice, empereur J 1, p. 989, 1001. Ménandre , poète comique E 36 , p. 161 ; 54 ;
Mausole E 98 ; I 38 , p. 901. 110 ; H 138, p. 744 ; 178 ; J 2, p. 1016 .
Mavortius (Lollianus -) F 12 . Ménandros, père d'Hestiaios deMilet H 110 .
Maxence, empereur I 3 , p . 828. Ménarque G 3, p. 462.
Maxime d'Éphèse E 121, p. 313, 315, 317 ; Ménécée E 36 , p. 168, 179.
157 ; 161, p . 373, 375 ; H 121 ; 136 , p. 736 ; Ménechme de Proconnèse E 52, p. 211 ; 80,
13, p. 828 ; 46, p . 968, 970, 972, 974 -975. p. 254 ; 98 ; H 151, p. 767 ; J 2, p . 1014.
Maximede Nicée G 2. Ménéclès, philosophe “pyrrhoniaste ” E 24 ,
p . 92.
Maxime de Tyr H 76 ; 116 ; 136 , p. 732 ; 1 46 ,
p. 965. Ménécrate de Nysa I 8.
Maxime le Confesseur E 184, p. 402 ; I 38, Ménécrate, pharmacologiste H 58.
p . 901. Ménédème d'Érétrie H 86 ; 129 ; J 2, p. 1014.
Maxime, commentateur d 'Aristote (= Ménédème de Pyrrha H 129.
Maxime d'Éphèse ?) I 22. Ménédème le Cynique E 3.
Maxime, père d'Euclide E 81. Ménélaos, dialecticien E 71.
Maximin, empereur H 154. Ménélaos,mathématicien E 80, p. 267.
Maximus (Valerius -) H 136 , p . 723. Ménestrate E 36 , p. 169.
Maximus 17 (PLRE) H 136 , p. 724. Ménexène E 114 .
Maximus 48 (PLRE ) H 136, p. 724 . Ménexène, titre d'un dialogue de Glaucon
Maximus 49 (PLRE ) H 136 , p. 724. G21.
Maximus Allobrogicus (Fabius -) F4. Ménippe H 86 ; 89 ; 108.
Maximus, auteur d'un traité Sur la matière Ménippe, amid 'Apollonius de Tyane E 132 .
E 156 . Ménodore de Thyatire E 88 .
INDEX DES NOMS PROPRES 1043
Ménodote de Nicomédie E 75 ; 130; G 18 ; Mnésaios H 136, p. 720.
H 54 ; 105. Mnestheus H 136 , p. 717.
Ménon H 157. Mneves H 12, p. 519.
Mentor de Rhodes H 80. Modératus le Pythagoricien J 2, p. 1015.
Mentoridès E 36 , p. 166 . Moiragénès16.
Messalinus (C . Ulpius Prastina Pacatus -) Moïse H 12, p. 518 -520, 522, 524 ; 15 ,
E 33, p . 118 . p. 846 ; 51.
Mestrius Florus E 164 . Moïse b. Samuelb. Tibbon G 15.
Métallos I 12. Monime de Syracuse H 138, p. 744 ; J 2,
Méthode d'Olympe J 1, p. 1010. p. 1015.
Méthode de Constantinople J 1, p. 992, 995. Monime, fondateur de Chalcis I 3, p.826 .
Méthode le Sicilien J 1 , p . 993. Montius, questeur E 40 ; 153 ; H 136 , p. 718.
Méton de Paros E 19, p. 79. Moschos H 132.
Méton, père d'Empédocle E 19 , p. 73, 74.Mosollamos H 12, p. 521.
Métopos de Métaponte J 2, p. 1014. Motoxaris (Poplia Plancia Aurelia Magnianè
Métroclès de Maronée H 13 ; 138, p . 742- -) E 109.
743,745 ; J 2, p. 1015. Mu'āwiya fer b. Abi Sufyān J 1, p. 989, 1001.
Métrodore de Chios H 60. Mu'āwiya II b . Yazid b . Mu'āwiya jer J 1,
Métrodore de Lampsaque E 34 ; 36 , p. 158 - p. 989.
159, 166 , 168, 170, 175 -178 , 181 ; 143; Muc(t)ianus G 8.
G 3, p. 464 ; 18 ; H 52 ; 75 ; 102 ; 136, Musa, pharmacologiste H 58 .
p. 717 ; I 14 ; J 2, p. 1013, 1015. Musée H 145.
Métrodore, fils d 'Épicharme E 29. Musonianus (Flavius Strategius -) H 136,
Métron H 60. p. 720, 727.
Métrophane I 31, p. 874 . Musonianus, préfet du prétoire d'Orient
Michel d 'Éphèse E 80, p . 269 ; 161, p. 373 ; E 161, p . 369.
163, p. 382, 384 -388. Musonius Rufus E 33, p. 106, 113, 115, 122 ;
Michel de Saint-Syméon J 1, p. 989, 997, 132 ; F 25 ; H 64a, p.621; 124 ; 136 ,
1000 . p. 722 ; J 2, p. 1015.
Michel Kaspakès E 163, p. 380. Musonius, proconsul d 'Achaïe H 136 , p. 711,
Michel le Syncelle J 1, p. 993-995. 727 , 728 .
Michel le Syrien J 1 , p. 989. Musonius, vicaire d 'Asie et de Macédoine,
Michel Psellus H 31, p . 542 ; 78 : 1 3, p. 831, ancien sophiste E 121, p. 313 ; H 136 ,
836 . p. 728.
Michel VII Doukas E 163, p. 380, U , 383.
383 . Myès H 159.
Michel VIII Paléologue E 163, p. 386 -387. Myonidès E 129.
Milon J 2, p. 1016 . Myronianus d'Amastris E 36 , p . 160.
Miltiadès H 161. Mys, esclave d 'Épicure E 36 , p. 168, 178.
Minos E 52, p. 211. Myson H 148.
Minucianus (I ou II?) E 161, p. 377. Mysticos, père de L.GelliusMenander G 11.
Minucianus I H 136, p. 720-721.
Minucianus II H 136 , p . 720-721. al-Nadim (Abū l-Farağ Muhammad b . Abi
Mithrès E 36 , p. 166 , 170 , 176 -178. Ya'qūb Isḥāq al-Warrāq al-Bağdādi) G 3,
Mithridate E 57. p. 453 ; 1 22.
Mnaseas de Patara E 52, p. 202. Naşir al-Din al-Tūsi, voir al-Tūsi.
Mnémarchos G 7. Naucratès le Sage J 2, p. 1016 .
1044 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Nausiclès H 31, p . 540 . Nicolaos E 36 , p . 160.
Nausiphane de Téos E 36 , p. 163-164 ; 143; Nicolas (de Damas) J 2, p. 1016 .
G 18 ; H 12, p . 509, 513. Nicolas de Damas E 36 , p. 160 ; 156 ; 141,
Nausithoos E 78. p . 942.
al-Nayrizi (al-Fadi b . Hâtim Abū l-'Abbās) Nicolas de Reggio G 3, p. 456 -457.
(Anaritus ] E 80, p. 264 -265. Nicolaus, titre d'un ouvrage d 'Héraclide de
Néanthe de Cyzique E 69; H 64a, p . 622 ; Tarente H 58.
88 ; 148. Nicoloque de Rhodes E 75 ; 130 .
Néarque I 6 . Nicomaque de Gérasa E 80, p . 270 ; H 107 ;
Néchepso H 8. 13, p. 831.
Nectanébo jer E 98. Nicomédès H 64, p. 585.
Némertius G 10 . Nicoménès E 115.
Némésius d'Émèse E 122, p. 331-332 ; JI, Nicon G 3, p.442.
p. 1009. Nicosthénès, archonte E 65.
Néoclès E 36 , p. 175. Nicostratos le sophiste J 2 , p . 1016 .
Néoclès,frère d'Épicure E 36 , p. 162. Nicostratus, commentateur d 'Aristote I 22.
Néoclès, père d'Épicure E 36 , p. 162. Niger (Pescennius -) I 42.
Néophytos Prodromènos E 163, p. 387. Nil d'Ancyre E 33, p. 143, 144.
Néoptolèmede Parion E 52,p. 227. Nilos E 132 .
Nepos I 27. Ninon H 144.
Néron, empereur E 33, p. 114- 115 ; 121, Ninos 15, p . 845.
p . 316 ; F5 ; 16 ; G 3, p. 464 ; 4 ; H 8 ; 39 ; Nitocris I 42.
60 ; 136 , p. 722 ; 1 28 ; 40. Noët H 154.
Nerva, empereur F 5 . Nonnus E 19, p.68 ; 52, p . 235 ; H 113.
Nestorius,hiérophante E 121, p. 312 . Novatus (L . Annaeus -) G 5.
Nicagorasde Chypre E 187, p.407. Numa le Pythagoricien E 156 ; H 12, p. 517;
Nicagoras I H 136, p. 720 -721. 41.
Nicagoras II H 136 , p. 719-721, 723. Numénius d'Apamée E 156 ; G 2 ; H9; I 3,
Nicagoras,dadouque I 43. p . 828 ; 6 ; 51.
Nicandre de Colophon E 45 ; G 20 ; H 116 . Numisianus G 3, p. 444.
Nicanor E 36 , p. 168. Nymphidianus E 121, p. 315.
Nicéphore Botaneiatès E 163, p. 383.
Nicéphore Bryennios E 163, p. 382. Obrimos J 2, p. 1016 .
NicéphoreGrégoras E 163, p . 387. Obultronius Sabinus H 39.
Nicéphore fer de Constantinople J 1, p . 990. Occélo E I.
Nicéphore Phokas J 1, p. 997. Occélos de Lucanie E 1 ; J 2, p. 1014.
Nicétas d'Héraclée E 163, p. 381. Occilos de Lucanie E 1.
Nicètas Sérdès E 163, p. 379. Octave H 160.
Nicias, archonte E 36 , p. 173. Octavia I 41, p . 942.
Nicias, esclave d 'Épicure E 36 , p. 168. Odainathos I 31, p. 874.
Nicias, général athénien I 38, p. 909. Oinomaos de Gadara E 156.
Nicidion E 36 , p. 169; 55 ; H 14 . Oinopidèsde Chios H 151, p. 763.
Nicoclès, roi de Chypre H 136 , p. 725 ; I 38, Olympichos, chargé des funérailles de
p. 898, 900 , 908, 928-929. Straton E 30.
Nicoclès, tyran de Sicyone E 2. Olympiodore de Thèbes H 126 .
Nicolaïdès de Tarente 1 11. Olympiodore, archonte E 36 , p. 177.
INDEX DES NOMS PROPRES 1045
Olympiodore, néoplatonicien E 15, p. 59-61, Pansa (Vibius - ) H 160.
63 ; 33, p. 141; 175 ; H 34 ; 11; 3, p. 836 . Pantheia d'Agrigente E 19, p. 78.
Olympius, dédicataire de Jamblique 13, Papinien I 42.
p. 834 ; J 2, p. 1015. Papirius Paetus F3.
Olympius, père de Patricius E 99. Pappus d'Alexandrie E 80, p. 253, 255, 264.
Olympos I 31, p. 872. Paralios d' Aphrodisias H 165.
Onatos J 2, p . 1014 . Paris, pantomime J 3.
Onésicrite le Cynique E 52, p. 195 - 196 . Parménide E 19, p. 76 , 80 ; 82; H 64, p.577
Onésicrite , compagnon d'Alexandre G 35 ; 578, 584, 587, 596 , 598 ; 94 ; 154 ; I 20 ; 38,
15, p . 848, 850 ; 6 ; 41, p . 948. p .914 ; J 2 , p. 1014 .
Onésimos, esclave de Plutarque F 10 ; 63, Parménion E 128 ; 187, p. 404.
p . 461. Parnasius E 121, p. 315.
Oppia (Aurelia -) H 44. Parrhasios 1 41, p . 952.
Oppien I 42. Pascal ler, pape J 1, p. 993.
Oreste, préfet H 175. Pasiclès de Thèbes, fils de Cratès H 138 ,
Oribase de Pergame E 121, p. 311, 314, 316 ; p. 744.
G 3, p. 440 ; 121. Pasiclès de Thèbes, frère de Cratès H 138,
Origène d ' Alexandrie E 33, p . 141 ; 45 ; 122, p . 744 .
p . 330 ; 156 ; 184, p . 399, 401 ; H 43; 109 ; Patricius de Lydie H 134 .
125 ; 136 , p . 717 ; 154.
Origène le Platonicien E 53 ; 74 ; H 43; 126 . Patricius,“ rex" des Juifs H 136 , p. 718.
Orose F 23. Patricius, fils d 'Olympios E 99.
Paul d 'Alexandrie H 30.
Orphée H 126 ; 128 ; 136 , p. 728, 738, 740 ; Paul
145 ; 148 ; I 31, p . 872 ; J 2 , p . 1015. de Tarse E 33, p. 140, 143; 45 ; 52 ,
Orthoménès I 20 . p . 196 ; H 63 ; I 34 , p. 883.
Osarseph H 12 , p. 524. Paulin de Nole I 23.
Osiusde Cordoue H 170. Paulus (L . Sergius -) E 92 ; G 3, p. 447.
Ossymandias H 12 , p. 510. Pausanias de Géla , disciple d'Empédocle
Othon F 16 . E 19, p. 78, 80 -81, 84-85.
Ourias, archonte E 36 , p. 177. Pausanias, héraclitéen H 64, p. 585.
Oustillianos H 173. Pausanias, invité du Banquet de Platon E 59.
Peisianax d 'Agrigente E 19, p. 78.
P(r)asion E 121, p. 314 . Peisidamos de Rhodes E 85 .
Paetus (Aulus Caecina -) F5. Peisirrhode de Tarente E 4.
Palaephatus H 101 ; 113. Peisirrhodos de Tarente E 4.
Palladas H 175 . Pélops G 3, p. 444.
Palladios E 33, p. 141; G 35. Pempélos J 2, p. 1014.
Pamménès H 114. Perdiccas III deMacédoine (365-359) E 128 ;
Pamphilè d'Épidaure F 10. H 136, p . 734.
Pamphile de Césarée E 156 ; H 125. Perdiccas, général d'Alexandre E 36 , p. 161,
Pamphilos,maître d 'Épicure E 36 , p . 163. 162.
Pamprépius H 122 ; I 31, p. 874-875. Perdiccas, roi de Macédoine, soigné par
Pancratès E 84 . Hippocrate de Cos (peut- être Perdicass III)
Pancréon H 143. H 152 , p. 773.
Panétius de Rhodes E 33, p. 125, 137; 80, Périandre H 148 ; J 2 , p . 1014.
p. 267 ; 82 ; 132 ; F6 ; G 30 ; H 13 ; 167; Périclès G 28 ; H 136 , p. 714, 739 ; 153;138 ,
I 10 . p. 910 , 919 ; 46, p. 965 ; J 1, p. 1011.
1046 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Périclès (Poplius PlanciusMagnianus Aelia - Philiscos d'Égine H 86 .
nus Arrius - ) E 109. Philiscos de Thessalie I 42.
Périctionè G 21 ; J 2 , p . 1014. Philiscos, épicurien H 136 , p. 732.
Persée de Citium H 73. Philistion de Locres E 19, p. 81 ; 98.
Persinna H 31, p. 540. Philochore E 52, p. 194, 198 ; 139.
Pertinax G 3, p. 463. Philoclès E 84.
Pétosiris H 8 ; 31, p . 540. Philocrate d'Athènes, père d'Amynomaque
Pétron d'Égine H 152, p. 788. E 36, p. 168.
Pétron d'Himère H 139 ; 159. Philodème de Gadara E 36 , p. 157, 160, 178 ;
Petros E 175. G1; 18 ; 25 ; H 48 ; 148 ; 167 ; I 38 , p . 893 ,
Phaidrion, esclave d'Épicure E 36 , p. 168. 934 - 935 .
Phalaris H 136 , p. 718 -719 , 735-736 ; J 2, Philolaos de Corinthe H 136 , p . 740.
p. 1016 . Philolaos de Crotone E 5 ; 8 ; 19, p. 74 ; 150 ;
Phaléas de Chalcédoine E 139. H 101 ; 115 ; 140 ; 151, p. 765, 770 ; 152,
Phanès H 169. p. 788 -789 ; J 2, p. 1014.
Phanias d'Érèse H 139 ; 159. Philométor E 121, p . 317.
Phanias, grammairien E 108. Philon d'Alexandrie E 24, p. 96 ; 122, p. 326 ;
Phanton de Phlionte E 5. 156 ; 184, p. 401; H 12, p. 522 ; 64a,
p . 621 ;138, p . 937 ; 51 ; J 1, p. 1010 .
Pharianos E 119 ; I 46, p. 968. Philon d'Athènes E 143.
Phéax, fils d'Érasistratos E 58. Philon de Byblos E 156 ; H 12, p . 520, 525 ;
Phédon d'Élis E 5 ; 114 ; H 129. 127 .
Phèdre de Myrrhinonte E 59. Philon de Larisse E 24 , p. 90 ; 97; H 54;66.
Phèdre, épicurien G 12. Philon de Mégare E 71.
Pheidylos, titre d 'un dialogue de Glaucon Philon , adversaire de Sophoclès de Sounion
G21 . E 36 , p. 161.
Phénarète ,mère d'Hippocrate de Cos H 152, Philonicos138 , p. 936 .
p. 771. Philonidès de Laodicée E 36 , p. 177 ; 1 16 .
Phérécyde d'Athènes H 101. Philopator, stoïcien G 3, p. 442.
Phérécyde de Syros H 86 ; 88 ; 136 , p. 733. Philopoemen E 2 .
Phidias H 152, p. 773. Philosophia,mère d'Hésychius H 113.
PhilétasdeCos H 12 , p. 509. Philostorgios J 1, p. 1011.
Philinos de Cos G 18 .
Philostrate H 31, p. 536 ; 1 27 ; 38 , p. 892,
Philippe d'Oponte E 80, p. 254, 258 ; H 99a; 937 ; 41, p . 953.
151, p . 763. Philostrate (Flavius -) E 33, p. 141; 16 .
Philippe deMacédoine I 38, p. 900 . Philostrate de Lemnos E 121, p. 316 .
Philippe de Medma E 80, p. 254 . Philostrate l'Ancien F 19 .
Philippe deMégare E 125. Philoxénos H 54.
Philippe II de Macédoine E 125 : 128 : H 80 : Philtys E 1.
136 , p.733-734 ; 138, p . 744 ; I 38, p. 899, Phlégon de Tralles E 52, p. 223.
910, 930. Phocion E 7 .
Philippe l'Arabe, empereur H 136 , p. 721. Phocylide I 38 , p. 904.
Philippe le Philosophe H 31, p. 542 ; 163. Phoebion H 29.
Philippe V deMacédoine E 52, p. 193. Phoibos H 136, p . 712, 724, 725.
Philippos, archonte E 36 , p. 177. Photius E 33, p. 145 ; 121, p. 318 , 322 - 324 ;
Philippos, traducteur des Hieroglyphica H 31, p . 542 ; 136 , p . 710-711 ; I 38,
d 'Horapollon H 163. p. 892 ; J 2, p. 1012- 1013, 1017 .
INDEX DESNOMS PROPRES 1047
Phraotès I6. Pline l'Ancien F1; 141, p. 950-951, 953 ;
Phrynichos Arabios H 136 ,p. 715. J 1, p. 1009.
Phrynichos,rhéteur H 136 , p. 715- 716 . Pline le Jeune E 132 ; F5 ; 25 ; H 40 ; 1 27.
Phrynion , père d 'Échécratès de Phlionte E 5 . Plotianus H 136 , p. 712.
Phyntis J 2 , p. 1014. Plotin E 19, p. 87 ; 33, p. 141 ; 41; 51 ; 53 ;
Phyrson E 36 , p. 178. 74 ; 97; 121, p. 315-316 ; 122, p. 333; 156 ;
161, p . 372 ; 162 ; 177 ; 184 , p . 402 ; F 13 ;
Pierre d'Alexandrie H 165 ; J 1 , p . 1010. G2; 10 ; 13 ; 35 ; H 78 ; 126 ; 163 ; 173;
Pierre de Damas J 1, p. 1001, 1003. 13, p . 826 - 828, 832; 22 ; 31, p . 873.
Pierre Grossolanus E 163, p. 380 . Plotius H 167.
Pindare E 110 ; H 64, p. 596 ; 15, p. 848 ; 38 , Plutarque (Pseudo-) I 38, p. 892.
p. 908. Plutarque d'Athènes H 22 ; 122 ; 126 ; 13,
Pindare, tyran d'Éphèse H 64, p. 586 . p. 836 ; 31, p. 873; 46, p. 972.
Pisistrate E 60. Plutarque de Chéronée E 19 , p . 87 ; 121,
Piso (Cn. Calpurnius -) G 25. p. 316 ; 142 ; 156 ; 164 ; F 10 ; 16 ; G 3.
Pison H 136 , p. 711. p . 455, 461 ; H 3 ; 50 ; 52 ; 136 , p. 720, 728,
Pison (= Marcus Pupius Piso Calpurnianus, 732 , 737 ; 140 , 141, p. 953 ; 42 ; 46 ,
consul en 61) E 5 . p. 974 ; J 2 , p. 1015-1016 .
Pittacos H 148 ; J 2, p. 1014. Plutarque, correspondant de Julien 1 46,
Plarianus (Aegrilius -) F 19 . p . 972.
Plarianus (Egrilius -) E 186 . Podalire H 152, p. 771.
Plathané H 145 ; I 38, p . 893. Poemenius, dédicataire de Jamblique 13,
p. 834.
Platon E 1; 5 ; 6 ; 15, p. 61, 63, 65 ; 16 ; 19, Polémarque E 98.
p . 79, 86 ; 29 ; 33, p. 126 - 128 , 147 ; 36 ,
p . 161, 163, 181 ; 38 ; 44 ; 49 , 52, p. 203, PolémonH 90 .
d'Ilion le périégète E 52, p. 194 ;
210
74 :,80212
. p., 219,
254, 227,
258. 230
270 ;: 54
82 ;: 87
59;: 61; 71;: Polémon le sophiste F 10 ; H 136 , p. 714 .
91 : 94
97 : 98 : 99 : 110 : 112 : 114 : 115 : 119 : Polion , élève de Musonius Rufus E 33,
121, p . 316 - 317 ; 122, p. 330 , 333 ; 128 ; p . 122 .
139 ; 150 ; 156 ; 161, p. 372 ; 163, p. 382 ; Polla (Vibia -) H 87.
171 ; 179 ; F 13 ; 19 ; 24 ; G 2 ; 3, p. 459. Pollianos E 142.
460 , 463 -464 ; 21 ; 28 ; 35 ; H 8 ; 9 ; 12, Pollis H 53.
p . 512 , 516 , 519, 525 ; 22 ; 25 ; 31, p . 543 ; Polos d'Agrigente E 19. p . 81 : H 64. p. 597 .
47 ; 55 ; 60 ; 63 , 64, p . 597, 601-602 ; 70 ;
75 ; 78 ; 80 ; 81 ; 86 ; 90 ; 91; 94 ; 99a ; 100 ; Pôlos de Lucanie E 1 ; 10 ; J 2 , p. 1014 .
105 ; 110 ; 111; 113 ; 126 ; 129 ; 136 , Polybe de Mégalopolis E 187, p.404 ; 141,
p . 714. 716 , 720 -722 , 732, 734 -738 . 740 . p . 951. .
742 ; 140 ; 145 ; 151, p . 763, 765 ; 152, Polybe, gendre d 'Hippocrate de Cos H 152,
p . 773, 782 , 789 ; 154 ; 158 ; 170 : 175 : p. 772, 782 , 789.
176 ; 12 ; 3, p. 829, 835 ; 4 ; 5, p.844-850, Polychronius d'Apamée E 101.
853 ; 14 ; 18 ; 31, p. 874, 876 -877 ; 32 ; 33; Polyclète H 152, p. 773.
34, p. 885 , 888 ; 38, p. 905, 916 , 918-919, Polycrate de Samos H 88 ; I 38 , p. 912, 926 ,
921- 931, 934 , 936 ; 42 ; 43 ; 46 , p. 965 , 970 , 932. 935 .
974. 977 ; 51 ; JI, p . 1010 - 1011 ; 2 , Polven de Lampsaque E 34 ; 36 , p. 158 , 165
p. 1014. 168, 177-178 ; 80, p. 266 ; H 75 ; I 14 ; J 2,
Platon, disciple de Praxiphane E 36 , p. 164. p. 1015.
Plautien , préfet du prétoire I 42. Polyen, fils de Polyen de Lampsaque E 34 ;
Plautilla I 42. 36 , p. 165 - 166 .
1048 DICTIONNAIREDES PHILOSOPHES ANTIQUES
Polygnotos I 41, p. 952. Privatus, précepteur du fils d'Ampelius
Polymnastos de Phlionte E 5. H 136 , p. 727.
Polystrate de Caryste E 12 . Probus, amide Sidoine Apollinaire E 152.
Polystrate, épicurien E 36 , p. 169 ; H 75 ; Probus, préfet du prétoire 1 24 .
149. Proclus de Lycie E 33, p. 141 ; 80, p . 254
Polyxenos H 25. 255, 264-265 , 268 ; 93 ; 122 , p . 330 ; G 2 ;
Polyzélos E 67. 15 ; H 22; 30 ; 67 ; 78 ; 99a; 119 ; 122 ;
Pompée le Grand H 12, p . 513, 524 ; 18 ; 41, 126 ; 132 ; 151, p. 763, 765 ; 11; 3 , p . 835 ;
p. 940. 31, p. 871, 873-874, 876 -877.
Pompeianus , gouverneur de Bithynie H 136 , Proclus, fils d'Isidore d'Alexandrie E 34.
p . 726 . Proclus, usurpateur F 13.
Pompeius Julianus E 132. Procope de Gaza E 33, p . 141 ; G 16 ; I 38,
Pompylos H 143. p. 938 .
Pontien H 154. Procope, disciple d'Hellespontius de Galatie
Porphyre E 15 , p. 59 ; 19 , p. 87 ; 41 ; 74 ; 80, H 35.
p.264 ; 100 ; 101; 121, p. 315-316 ; 122, Procope, usurpateur E 122, p. 327 ; H 46 .
p . 330, 332 ; 156 ; 157 ; 161, p. 372-373, Prodicos de Céos E 139 ; 187, p. 407 ; H 64,
377 : 162 : 175 : 184. p . 399. 401-402 : F2: p. 582 ; 136 , p. 737 ; 145 ; 152 , p . 772 ; 14;
12 ; 13 ; G 2 ; 9 ; 10 ; H 43: 70 ; 91: 121 : 38 , p. 894 ; J 2 , p . 1014 .
126 ; 136 , p. 721, 736 ; 170 ; 13, p. 826 - Prohérésius E 121, p. 311-313, 315 , 318,
827, 830-832, 835 ; 6 ; 22 ; 31, p . 877 ; 34 , 320 ; H 136 , p. 716 -717, 723, 725, 728 .
p. 886 ; 46 , p. 974 ;51; J 2, p. 1014 - 1015 . Promachos de Samos 141, p. 950.
Posidonius d'Apamée E 24, p . 97 ; 33, Promathos de Samos 141, p. 950.
p. 125 ; 36 , p . 160 ; 52, p. 196 , 217, 227, Prosper E 161, p. 369.
234 ; 57 ; 80, p. 266 , 268 ; 97 ; 187, p. 404 ; Protagoras d'Abdère E 24, p. 96 ; 67 ; 139;
G 15 ; H 12, p . 513, 524 ; 13 ; 51 ; 78 ; 152 , 171: H 12, p . 507 ; 60 ; 64, p. 588 : 94 ; 136,
p . 788 ; 1 5, p. 842 ;6 ; 8. p . 737 ; 145 ; 14 ; 11 ; 38 , p . 895, 907 , 913,
Postumius (L . -) H 136 , p. 732. 919, 924 ; J 2, p . 1014 .
Potone G 21. Protarque G 28 .
Pousaios, préfet du prétoire I 1. Protérius E 121, p . 320 .
Praetextatus (Vettius Agorius -) H 136 , Proxène de Béotie H 136 , p. 733.
p. 712, 728 . Prytanis E 126 .
Pratinas de Phlionte I5 , p . 844. Pseudo -Aristée H 12, p. 508, 522.
Praxiphane E 36, p. 163- 164 ; 143; H 129. Pseudo-Phocylide H 116 .
Praxiphane deMytilène E 93. Ptolémaïs de Cyrène E 80 , p . 268.
Ptolémée H 18 ; 89.
Praxitèle de Chalcis E 132.
Praxithéa H 152, p. 771. Ptolémée de Cyrène E 75 ; 130 ; H 54 : 58 .
Ptolémée fer Soter E 52, p. 201; 80 , p . 253
Praylus de Troade E 75 ; 130 . 255 ; H 12, p. 507 , 510, 521.
Prépélaos E 52, p. 233. Ptolémée II Philadelphe E 52, p . 197- 198.
Priscianus ( = Proclus ?) G 2. Ptolémée III Évergète E 52, p . 193, 197 -200.
Priscianus de Lydie E 112 ; H 81; 13, p. 832 ; 210, 212, 219, 225-227 ; 125 ; H 12 , p. 508 ;
32 . 151, p . 766 .
Priscus (Helvidius -) F5. Ptolémée IV Philopator E 52, p. 193, 200 ,
212, 230 .
Priscus d ' Athènes E 121, p. 315, 318 ; 157 ; Ptolém
ée l' astronome E 52, p . 234 ; 80 ,
1 46 , p. 968, 971, 974-975. p . 256 ; 98 ; 100 ; 175 ; G 8 ; 15 ; H 30 ; 136 ,
Priscus fils (Helvidius -) F 5 . p. 737 ; 175.
INDEX DES NOMS PROPRES 1049
Ptolémée le Platonicien E 51. Rhéginus J 2, p. 1016 .
Prolémée V Épiphane E 52, p. 192, 197. Rhodopis H 31, p. 540.
Prolémée VI Philométor H 61. Rhyndaco de Lucanie E 1.
Ptolémée VII Physcon H 100 . Robert Grosseteste E 163, p. 385-388 .
Ptolémée, auteur d 'une Vie d 'Aristote G 6 . Rogus (Tertilius –) H 66 .
Ptolémée, fils de Juba 141, p. 942. Romanos IV Diogène E 95.
Pudentianus l'Épicurien G 3, p. 465. Romanus, sophiste I 38, p. 938.
Pulcher (Cn.Cornelius -) G 11. Rubellius Blandus Fl.
Pulchérie E 121, p. 314, 320 . Rufin d'Aquilée E 45 ; 184, p. 399.
Pyrilampès G 21. Rufin , fils d'Himérius H 136 , p. 711, 714,
Pyrrhon d ' Élis E 24 , p. 96 -97 ; 36 , p. 163- 723, 727.
164, 175 ; 75 ; 130 ; 143 ; G 18 ; 35 ; H 12, Rufus d'Éphèse H 58 .
p. 505, 513-514 ; 64, p . 584 ; 105 ; 136 , Rufus, auteur d'une Histoire de la musique
p.731, 737 ; J 2, p. 1016 . 141, p. 953.
Pyrrhos de Délos H 99. Rusticus (lunius Arulenus -), maître de
Pyrrhus H 136 , p. 740. Marc-Aurèle F 22.
Pyrson E 36 , p. 169, 177-178 ; H 17. Rusticus (lunius -) F 22 ; H 39.
Pythagore d'Éphèse H 64, p. 586 .
Pythagore de Samos E 15, p. 62 ; 19, p. 79. Sabbas G 35 .
80, 84 ; 22 ; 29 ; 45 ; 52, p . 208 ; 54 ; 69; Sabinus, consul en 316 E 177.
97 ; 132 ; 150 ; 178; F9 ; 6 7 ; 8 ; 35 ; H 31, Sabinus,médecin G 3 , p. 443.
p. 542 ; 60 ; 61; 64, p . 578 , 583, 587 ; 86 ;
88 ; 99 ; 126 ; 136 , p. 735, 740 ; 144; 148; al-Sahrastāni
'Abd al-Karim
(Abū l-Fath Muḥammad b.
) E 19, p. 87.
154 ; 155 ; I 2 ; 3, p. 829-830, 834 ; 6 ; 10 ; Sallustius (Flavius -) I 46 , p. 972.
20 ; 31, p . 877 ; 34, p. 887; 46, p. 977 ; J 1,
p. 1010 -1011 ;2, p. 1014, 1016 . Sallustius, auteur d' Empedoclea E 19, p . 86.
Pytharatos,archonte E 36 , p. 161-162, 177. Sallustius, praeses H 136 , p. 712.
PythéasdeMarseille E 52, p. 222 ; G 15 . Salomon I 34 , p. 886 .
Pythias H 80 . Saloustios, ami d' Isidore d'Alexandrie 1 31,
Pythoclès E 36 , p. 167-168, 178-179 ; H 75 ; p. 871, 874, 876 .
102. Salutius (Saturninus Secundus - ), dédicataire
Pythodore, fils d'Isolochos G 21. de discours de Julien I 46 , p. 962, 965, 972 .
Pythodore, fils de Polyzélos E 67. Salvia H 136, p. 720 .
Python H 55. Salvius lulianus E 186 .
Sampsigéramos I 3, p. 826 .
Quadration F 10 . Samuel d'Adana J 1, p. 990.
Quadratus (L . Statius -) F 10 . Sandè,mère deMétrodore E 36 , p. 166 .
Quintilien H 136 , p. 713 ; I 38, p. 937. Sannidoros E 36 , p . 176 .
Quintus G 3, p. 443-444 . Sapor, roi des Perses E 161, p. 369, 377.
Sappho E 110 .
Rabbi Tarphon I 51. Sarapion (Statius -) G 23.
Ramsès VI H 136 , p.722. Sarapion, ami d'Isidore d'Alexandrie 1 31,
al-Rāzi (Abū BakrMuhammad b. Zakāriyyā') p . 872, 877 .
[Rhazes ) G 3, p. 458 -459. Sarapion,médecin empirique G 18.
Reccarède I 34, p . 881. Sarapion,père d'HéraclideLembos H 61.
Regulus I 40. Sardjūn b. Manşūr J 1, p. 989, 991, 995,
Réticius H 136 , p . 717. 1001- 1002 .
1050 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Sarpédon H 54. Severus (Claudius - ), consul ordinaire en
Sartialis (C . Caelius -) G 11. 146 E 92.
Saturninus, sceptique E 75 ; 130 ; H 54 ; 105. Severus, préfet du prétoire H 136 , p. 711,
Saturninus, usurpateur F 13. 729.
Satyros de Callatis E 139 ; H 61. Sextius F 1.
Satyros, disciple de Quintus G 3, p. 443-444. Sextus (= Sextus Empiricus ?) J 1, p. 1010 .
Scamônidès E 167. Sextus Caecilius F 10.
Scipio Aemilianus (P. Cornelius -) F6 ; 26 ; Sextus Empiricus E 24, p. 93 ; 75 ; 130 ;
J 2 , p . 1016 . G 18 ; H 54 ; 64, p. 599 ; 105 ; 154.
Scipion l'Africain E 25 ; F 9 ; I40. Sextus, neveu de Plutarque H 136 , p. 720.
Scylacius, proconsul d'Achaïe H 136 , p. 712, Sidoine Apollinaire E 152 ; 177.
724, 726 -727. al-Siğzi (Abu Sa'id Ahmad b. Muḥammad b .
Scymnosde Chios E 52, p. 234. 'Abd al-Galil) E 80, p . 258 .
Scythinos de Téos H 64, p . 585. Silanus (L . Iunius -) H 27.
Sébasmius E 183. Silanus (M . -) G 33.
Séleucos de Galatie H 93. Silvius E 152.
Séleucos IV Philopator H 26 . Simmias de Thèbes E 5 ; 16 ; 114.
Séleucos Nicator G 35 . Simon le cordonnier H 106 ; J 2 , p . 1014 .
Séleucos, le grammairien H 64, p. 595. Simonide le poète E 19, p . 85 ; 42 ; H 64,
Séleucus, souverain d'identification incer p . 596 ; 134 ; 136 , p . 737.
taine H 89. Simplicius de Cilicie E 33, p. 113, 141- 142,
Sellius (C . -) H 66 . 145 ; 80, p . 264 ; 93 ; 112 ; 161, p . 373, 377 ;
Sellius (P. -) H 66 . G 15 ; H 81 ; 126 ; 151, p. 768 ; 1 22 ; 32;
45.
Sémiramis I 5 , p. 843, 845 ; 42.
Senecio (Herennius -) F5; H 39. Sisebut I 34, p. 881, 884.
Sisimithrès G 35 ; H 31, p . 540.
Sénèque le philosophe E 33, p. 141, 150 ; 97 ; Sôclaros (Flavius -) G 2.
F7; 10 ; 27 ; G 4 ; 5 ; 33 ; H 13 ; 64a,
p .621; I 34 , p. 884 ; J 3 . Socrate E 5 ; 19 , p. 79 ; 20 ; 33, p. 126 -127,
Sénèque le rhéteurF1; G 4 ; 5 . 143 ; 36 , p. 164 ; 38 ; 39 ; 54 ; 58 ; 60 ; 71 ;
82 ; 94 ; 99 ; 114 ; 139 ; 171 ; 179 ; F 10 ;
Septime Sévère, empereur F 19 ; G 3, p . 450 ; G 3, p.462 ; 21 ; 28; 35 ; H 12 , p. 515 ; 62;
H8;13, p. 825 ; 42. 64 , p. 588, 595-596 , 601 ; 86 ; 91 ; 94 ; 100 ;
Septimius,fils de Jean Stobée J 2, p. 1012. 101 ; 110 ; 136 , p . 716 , 722, 728 , 732-734,
Sérapion d'Alexandrie, médecin empirique 736 -737, 740 ; 145 ; 151, p. 763; 154 ; 157 ;
G 18 ; H 54. 158 ; 1 10 ; 14 ; 20 ; 26 ; 34 , p . 885 -886 ; 38,
Serenianus I 46, p. 972. p . 894, 912-913, 919, 922-923, 925 ; 51;
J1, p . 1011 ; 2, p. 1014 .
Serenus (Aelius), auteur d’ ’Atrouvnuoveú Socrate le Jeune E 98 .
tara J 2, P. 1016.
Serenus Sammonicus I 42. Socrate , historien H 175 .
Socraticos J 2, p. 1015.
Sergius de Reš'aynā E 54. Solon E 60 ; H 22 ; 64, p. 579, 581; 86 ; 136 ,
Serranus (Sex. Atilius -), consul en 136a p. 741 ; 148 ; J 2, p. 1014 .
F 26 .
Sévère Alexandre , empereur E 121, p . 316 . Sopatros E 161, p. 377.
Sévère le Platonicien E 156 .
Sopatros d'Apamée F 10 ; 141, p. 953.
Sopatros d 'Apamée, disciple de Jamblique
Sévérien I 34 , p. 880. E 121, p. 317 ; H 136 , p. 722 ; 12 ; 3,
Sévérina H 154. p. 828, 834 ; J 2, p. 1015-1016 .
INDEX DES NOMS PROPRES 1051
Sopatros le jeune I 3, p . 828. Stilpon E 82 ; 125 ; H 86 ; 1 12 ; J 2, p. 1014 .
Sopatros, correspondant de Julien 1 46, Strabon E 52, p . 234 ; 187, p. 404 ; H 63.
p . 972. Straton de Lampsaque E 30 ; 32 ; 36 , p. 181;
Sopatros, correspondant de Libanios I2. 52, p. 222 ; 80, p. 255 ; G 31 ; H 150.
Sopatros, fils de Sopatros H 136, p. 722. Stratonicos E 35 ; G 3, p. 443.
Sopatros, petit-fils de Sopatros d'Apamée Strattis I 38, p. 892.
H 136 , p . 722. Suétone H 167; 1 34, p . 884, 888.
Sophanès H 136 , p. 734. Superianus I 31, p.874.
Sophocle E 110 ; 139 ; H 12, p . 522 ; 60 ; Superius F 9.
164 ; I 20 .
Syennésis de Chypre H 152, p. 782.
Sophoclès de Sounion E 36 , p. 161. Sylla (Sextius -), ami de Plutarque de Ché
Sophrone de Jérusalem J 1, p . 1002. ronée E 18 .
Sopolis E 121, p. 312, 315 . Symmachos de Phlya H 56 .
Soranos de Cos H 152, p. 771-773 ; I 1. Symmachus (Quintus Aurelius -) E 99 ; 159 ;
Sosiadès J 2, p . 1014. H 169 ; 12.
Sosias E 187, p. 407. Symmachus Junior ( Q . Aurelius Memmius
Sosigénès, archonte E 36 , p. 160- 161. -) E 102.
Sosipatra E 121, p. 317 ; 161, p. 369-371; Symmachus, historien (=Symmachus
H 175. Junior?) E 101.
Sosithéos E 36 , p. 178. Synésius de Cyrène E 33,p. 141 ; H 70; 175.
Sostrate de Nysa I 8 . Synésius, frère d 'Hiérax H 119 .
Sosus d'Ascalon H 66. Syrianus E 80, p . 269 ; 161, p . 377 ; H 30 ;
Sotion , auteur d'un traité Sur la colère J 2 . 78 ; 122 ; 126 ; 136 , p. 715 ; 13, p. 836 ; 22 ;
p. 1016 . 31, p. 872, 877.
Sotion , auteur des Successions des philo. Syrianus III 31, p. 875 .
sophes E 36 , p. 160 ; 121, p . 316 ; 130 ;
H60 ; 61 ; 148 . al-Tabari (Abū Ğa'far Muhammad b.Garir b.
Souda H 113 ; 1 38, p. 892. Yazid ) J 1, p. 989.
Sozomène H 126 . Tābit b. Qurra E 80 , p. 257, 263, 265.
Spartacus G 12. Tacfarinas I 41, p . 941.
Spatinos H 89. Tacite F 25 ; G 33 .
Spectatus E 161, p. 369. Tadāri J 1, p. 993.
Spercheus H 136 , p. 717. Taraise, patriarche de Constantinople J 1 ,
Speusippe E 15 , p.61; H 60 ; 129 ; I 38, Tarasios, p. 994-995, 999.
p . 895 , 922, 930 , 934 ; J 2 , p. 1013- 1014. frère de Photius H 136 , p. 710.
Sphaïros du Bosphore H 174. Tatien E 156 ; H 76.
Stéphane le Jeune J 1, p. 991, 995. Taurus G 2.
Télaugès E 19, p. 74, 79-80 ; H 144.
Stéphane le Sabaľte l'ascète J 1, p. 991, 1001. Téléclès E 65 ; 76 ; 77 ; H 21.
Stéphane le Sabaľte l'hymnographe J 1 , Télès E 33. p . 123- 124 ; F 10 ; J 2, p. 1014,
p. 991, 995, 999, 1001. 1016 .
Stéphanos d 'Alexandrie E 15 , p . 60 ,63. Télésippos I 38, p . 893.
Stéphanos d'Athènes E 15 , p.60 ; G 16 . Téloclès, archonte E 36 , p : 177.
Stertinius I 10 . Térence F 26 ; 1 38, p. 936 .
Stésichore I 38 , p. 925 . Terpsion deMégare E 114 .
Sthénidas de Locres J 2 , p . 1014 . Tertullien F 23 ; H 93; 154 ; I 34, p . 884,
Stilichon E 121, p. 320 . 886 ; 51.
1052 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Teudas G 18 . Théodoric le Grand H 126 ; 1 31, p. 870 .
Thalès deMilet E 93; H 64, p. 582-583 ; 88; Théodose fer, empereur E 121, p. 320 , 322 ;
136 , p. 741; 145 ; 148 ; 154 ; 157 ; I 34 , 122, p. 327-328 ; H 31, p. 538 ; 132.
p. 885, 887 ; J 2, p. 1014 . Théodose II H 126 ; 164.
Théagène, archonte athénien H 22 ; I 31, Théodose,médecin G 18 .
p. 875. Théodotè H 78 ; 1 31, p. 872.
Théagène, personnage des Éthiopiques d'Hé- Théodote ó 'HuióduocH61.
liodore G 35 ; H 31, p. 536 , 540. Théognis H 64, p . 581; I 38 , p. 904 ; J 1,
Théagès J 2 , p . 1014. p . 1010 .
Théano H 153 ; J 2, p. 1014. Théombrote , disciple de Cratès de Thèbes
Théétète E 80, p. 254 ; 82 ; H 99a. E 3.
Théiodas de Laodicée E 75. Théomédon E 98 .
Thémista de Lampsaque E 34 ; 36, p . 165, Théon (= de Smyrne ?) F9.
167, 175, 177, 180 ; H 154 ; I 14 . Théon d'Alexandrie E 80, p. 253 ; H 175 ;
Thémistius E 110 ; 161, p. 372 ; 163, p . 383 ; 131, p. 872.
175 ; H 8 ; 136, p. 731-732, 739 ; 1 22 ; 46, Théon de Smyrne E 80, p . 270.
p. 962, 964- 966 , 968, 971-972, 978 ; J 2, Théon, ami d'Héraclide H 51.
p . 1012, 1016 .
Thémistocle H 64, p. 594 ; 136 , p. 711. Théon ,médecin E 121, p. 316 .
Thémistoclès, stoïcien F 16. Théophane Graptos J 1, p. 993.
Théophane le Confesseur J 1 , p . 991, 994.
Théoboulos (= Cléoboulos le Sage ?) J 2, Théophile d 'Alexandrie E 45 ; H 175.
p . 1016 .
Théodas 6 18. Théophile d'Antioche H 93 ; 151 ; 51,
p. 1010 .
Théodecte , poète tragique I 38, p. 935 . Théophile, empereur iconoclaste J 1, p. 992
Théodora , impératrice J 1, p. 993. 993, 995.
Théodora , fille de Cyrina et de Diogène I 31, Théophile , gouverneur de Syrie H 136,
p. 870. p . 718.
Théodore Abū Qurrā , voir Taņāri Théophraste E 19, p . 86 ; 36 , p . 180 -181; 52,
Théodore d'Asiné E 121, p. 317; 131; 13, p . 197 ; 93 ; 156 ; 187, p. 408 ; G 3 , p. 464 ;
p. 828 ; 46 , p . 975 . H 12, p. 510, 525 ; 64, p. 599, 602 ; 80 ; 86 ;
Théodore de Cyrène E 139 ; 187, p. 407 ; 129 : 136 . p . 734 ; 138, p. 743, 745 ; 143 ;
H 138 , p. 743, 749 ; 151, p . 763- 764 ; J 2, 144 ; 1 22 ; 49 ; J 2 , p . 1015 .
p . 1014. Théophris de Crotone E 1.
Théodore de Cyrène, géomètre H 136 , p . 738. Théopompe de Chios H 12 , p. 509 ; 80 ; 15,
Théodore de Grèce (= Théodore d 'Asiné? ) p. 847 : 38 , p. 934. 935 .
13, p . 828. Theosebius E 33, p. 141 ; H 126 ; I 31, p . 872.
Théodore le Lecteur E 135. Théotecnos H 175.
Théodore Prodromos E 163, p. 384-387. Théotimos (Popillios - ) H 28 .
Théodore Stoudite J 1, p. 992. Théramène I 4 ; 38, p. 894, 909.
Théodore ó toŨ Mavooúp J 1, p. 991. Thermoutis H 31, p . 540 .
Théodore,abréviateur de Télès J 2, p. 1016 . Théron d’Agrigente E 19, p. 74.
Théodore, adversaire d'Épicure E 36 , p. 160. Thespis H 136 ,p. 741.
Théodore, élève de Maxime d'Éphèse I 46, Thessalos le philosophe H 8.
p. 968, 972 . Thessalos, fils d 'Hippocrate de Cos H 152,
Théodore , frère d'Isocrate I 38, p. 893. p . 771-773.
Théodore, père d'Isocrate I 38, p. 893. Theudios de Magnésie E 80, p. 265 ; H 151,
Théodoret de Cyr E 33,p. 141 ; 151. p . 770.
INDEX DES NOMS PROPRES 1053
Thisbé H 31, p . 540. Titus, empereur E 33, p . 115 ; H 68 ; 136 ,
Thrasea Paetus (P. Clodius -)F5; H 39. p. 722.
Thrasybule de Naucratis E 132. Trajan , empereur E 18 ; F 10 ; G 11; J 1,
Thrasybule , destinataire d'un traité de Galien p. 994.
G 3, p.465. Trebonianus, empereur G 13.
Thrasydaios d'Agrigente E 19, p. 74. Tribonianus,médecin E 175.
Thrasylle E 52, p. 203. Tribunus E 175.
Thrasymaque de Chalcédoine E 139 ; H 136 , Triphiodore E 19, p.68.
p. 728, 738. Trophilus J 2, p. 1014.
Thrasymaque de Corinthe I 12. Trophimus J 2, p. 1014 .
Threpta H 143. Trygée I 20.
Thucydide G 28 ; H 136 , p. 714 ; 14 ; 38, Tryphon 151.
p . 909-910 ,919. Tubero (L . Aelius -) E 24, p . 91.
Thyamis H 31, p . 540 . Tubero (Lucius -) E 24, p. 91, 92.
Tibère, empereurFl; G 4 . Tubero (Quintus Aelius - ) H 13.
Timachidas de Rhodes E 52, p. 231. Turtura I 34, p . 880.
Timarque d'Alexandrie E 52, p . 231. Tuscianusde Phrygie E 121, p. 312.
Timarque, commentateur d 'Eratosthène E 52, al- Tūsi (Nasir al-Din Abū Ga'far Muhammad
p . 231. b . Muḥammad b. al-Hasan ) E 80, p. 257,
Timarque, épicurien (?) E 36 , p . 169. 259-260 , 265.
Timarque, exécuteur testamentaire d 'Aristote Tutilius (C.-) H 172.
H 143. Tychiadès E 84.
Timarque, fils de Pausanias E 52, p. 231, Tydas G 7 .
Timée de Locres E 5 . Tyndarès de Sparte E 18.
Timée, lexicographe G 17. Tyrsénis de Sybaris E 4 .
Timocharès E 52, p. 213, 218. Tyrsénos de Sybaris E 4.
Timocratès d' Athènes, exécuteur testamen
taire d 'Épicure E 34 ; 36 , p . 166 , 168 . Ulpien, juriste I 42.
Timocratès d'Héraclée E 132. Ulpien ,mathématicien I 31, p. 872.
Timocratès de Lampsaque, frère de 'Umar al-Hayvām E 80. p. 265.
Métrodore E 36 , p. 160, 166 , 175, 178 ; Urbicus H 136 , p . 717.
H 102 ; 1 14 .
Timocratès de Lampsaque, père de Ursacius H 136 , p. 712 , 739.
Métrodore E 36 , p. 166 , 176 .
Timocratès, disciple de Musonius Rufus Valens, empereur E 121, p. 317 , 322-323 ;
122, p. 327 ; F 17 ; H 123: 134 ; 12.
E 132 ; F 10 .
Timomachos H 136 , p. 734 . Valens, père d 'Horus H 169.
Timon de Phlionte E 19 , p. 73 ; 24, p. 95 ; 36 , Valentinien
Valentinien
ler, empereur E 121, p. 317 ; 1 24 .
III, empereur H 126 .
p . 160 ; 75 ; 82; 130 ; 143 ; G 18 ; H 12,
p . 508, 514 ; 54 ; 105 ; 148. Varron E 52, p . 235 ; H 90 ; I 34, p. 883, 885,
887 -888 ;41, p . 952 .
Timon le Misanthrope J 2 , p . 1016 . Vespasien, empereur E 132 ; F5; 16 ; H 39 ;
Timothée de Gaza H 165. 68 ; 171; J 3.
Timothée , disciple d'Isocrate I 38 , p. 897 Victorinus (C . Aufidius -) F 19.
898, 900 -901, 908, 935. Vigilantius E 152.
Tisias de Syracuse E 19, p. 81; 67; H 136 , Virgile E 52, p. 235 ; 159; F 23; H 167; 15,
p . 740 ; I 38, p . 894, 916 , 927. p. 848 .
1054 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Volumnia Cytheris E 176 . Zacharie le Scholastique E 175 ; G 16 ; H 67;
Vulso (Cn.Manlius -), consul en 1890 F 24 . 165 ; 1 31, p. 870.
Zacharie, pape J 1, p . 997.
Xanthippe E 179 ; G 3, p . 442. Zaleukos J 2 , p . 1014 .
Xanthosde Lydie E 19, p. 73 ; 52, p. 222. Zénodote d'Éphèse , bibliothécaire à Alexan
Xanthos de Phlionte E 19 , p . 73. drie E 52, p. 200.
Zénodote, scholarque néoplatonicien 131,
Xanthos de Samos E 60. p. 874 .
Xénarque H 136 , p . 715 . Zénon d 'Elée H 86 ; E 19, p . 76 , 80, 86 ; 45 ;
Xénephres I 5, p. 846 . 71 ; G 21 ; H 60 ; 64 , p . 577 ; 151, p. 769;
Xéniade de Corinthe E 72. 138 , p . 914 ; J 2 , p. 1014.
Xénocrate E 36 , p. 161, 164 ; 97 ; H 60 ; 91; Zénon deChypre 1 21.
13, p . 835 ; J 2 , p. 1014. Zénon de Citium E 20 ; 33, p . 125 ; 36 ,
Xénomède E 114 . p. 160 ; 45 ; 52, p. 190-191, 194, 205 ; 102;
Xénôn (Poplius Plancius Magnianus -) 132 ; H 11 ; 12, p . 515 ; 13 ; 64a, p. 622 ;
E 109. 72 ; 75 ; 136 , p . 736 ; 138, p . 743 ; 15,
p . 849, 852 ; J 2, p. 1015.
Xénon, père de GaiusG 2 . Zénon de PergameI 31, p. 874.
Xénophane E 19 , p. 80 ; 139; H 12, p .519 ; Zénon de Sidon E 36 , p . 178 ; 80, p . 266 ;
64, p. 582-584, 586 -587, 596 ; 154 ; I 38, 618
p. 912 ; J 2 , p . 1014. Zénon, amid'Himérius H 136 , p. 712.
Xénophile de Chalcidique de Thrace E 5 . Zénon , empereur G 16 ; H 67 ; 165 ; I 31,
Xénophon E 33, p. 126 ; 114 ; 156 ; 179 ; p . 874.
F19 ; H 94 ; 100 ; 136 , p . 734 , 740 -741;
Zénon, fils d'Aristainétos H 114 .
145 ; 14 ; 26 ; 38, p. 893-894, 900, 933 ; J 2 , Zénon,médecin E 121, p . 316 .
p. 1014 .
Zénothémis H 96 ; 114.
Xerxès jer E 19, p. 81,82; H 64, p. 587. Zéthus E 162.
Xouthos I 20.
Zeuxippe H 52 .
Zeuxis E 75 ; H 58.
Ya'qūb b . Isḥāq al-Kindi, voir al-Kindi Tarente H 54 .
Zeuxis deAmphipolis
Yahyā b. Sa'id Antioche
d' (Abū l-Farağ Zoilos
d' I 38, 935
p. .
Yahyā b. Sa'id b. Yahyā al-Anțāki) J 1, Zoroastre H 60 ; 91.
p. 998.
Yazid b .Mu'āwiya J 1, p. 989. Zosimos E 121, p . 322 ; H 126 ; 165.
Zosimos d' Ascalon I 38, p. 892
Index desmots -vedettes figurant
dans les titres d 'ouvrages des philosophes
Cet index devrait permettre de retrouver d 'après leurs mots principaux les ouvrages attri
bués aux philosophes quiont bénéficié d 'une notice dans le troisième tome de ce dictionnaire .
Un mêmemot peut renvoyer à plus d'un titre dans la même notice ou la même section de
notice. Commeles notices ne rapportent pas toujours en grec le titre des ouvrages, on a com
plété l'index grec par une liste de mots français ou latins, tels qu'ils apparaissent dans la
notice. Tous les titres attribués aux auteurs ne sont pas nécessairement des titres d 'ouvrages
philosophiques. Les commentaires, traductions et paraphrases sont regroupés sous le nom du
philosophe qui fait l'objet de ces travaux érudits. Lorsque la liste des œuvres comporte une
numérotation , on renvoie à ces numéros . Pour les notices longues, on renvoie également à la
page où le titre apparaît.
" Αβαρις Η 60 (25). Εμπεδοκλής Η 75.
"Αιδής Η 60 (24). Επικούρειος G 3 (116); 3 (117).
Αισχίνης Ε 82 (2 ). Επίκουρος G 3 (110); 3 (111) ; 3 (112).
' Ακαδημαϊκός F 10 (16) ; Η 73 (5 ). 'Επίκτητος F10 (18); G3(57).
' Αλκιβιάδης Ε 82 ( 5) ; F 10 (19). Έριγόνη Ε 52 (21).
' Αναξιμένης Ε 36 ( 40). Ερμής E 52 (20); Η 72 (10).
'Αντερινύς Ε 52 (22). "Έρμιππος Η 61 (3).
'Αντήνωρ E 19. Εύδημος G 3 (104).
"Αντίδωρος Ε 36 (36). Εύπολις G 3 (119).
' Αντιφέρων Η 72 ( 6).
'Αριστόβουλος Ε 36 (29). Ευριπίδης Η 60 (52).
'Αριστοτέλης Η 75 ; 86 ( 4). Ευρύλοχος E 36 (19).
'Αριστοφάνης G 3 (120).
'Αρίστων Ε 52 (26). Ζήνων Η 60 (8).
'Αρσινόη E 52 (27). Ζωροάστρης Η 60 (39).
'Αρχίλοχος H 60 (50).
' Ασκληπιάδης G 3 (37). “ Ηγησιάναξ E 36 (14).
"Αττικός G 3 (118); 3 (125) ; 3 (128). “Ηράκλειτος Η 60 (13).
“ Ηρόδοτος E 36 (42).
Βακχίδης G3 ( 78). “ Ησίοδος Ε 52 (22); Η 60 (49).
Βάτων Ε 52 (28).
Θεμίστα E 36 (17) ; 36 (53).
Γοργίας Η 86 (6). Θεόφραστος E 36 (54); G3(102) ; Η 86 (5).
Θερσίτης F10 (1).
Δημόκριτος E 36(47); Η 60 (10); 60 (11). “Ιπποκράτης G 3 ( 6) ; 3 (12); 3 (13) ; 3
Διογένης E71. (14) ; 3 (129).
Διονύσιος Η 60 (12). Ιππώναξ Η 86 (12).
Διόνυσος Ε 52 (24). Ίσοκράτης Η 86 ( 7) ; 86 ( 8).
1056 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Καλλιστόλας E 36 (38). Σάτυρος H 61 (4).
Κέλσος G3 (116). Σοφοκλής Η 60 (52).
Κλεινίας Η 60 (34). Στωϊκός G3 (109); H 109.
Κλειτόμαχος G3(55). Σωκράτης F10 (10) ; G3(72).
Κορινθιακός F 10 (23). Σωτίων Η 61 (5).
Κρατίνος G3 (121).
Κρίτων Ε 82 (4 ). Τίμαιος G 3 (26).
Κρόνισκος G3 (88). Τιμοκράτης E36 (24); 36 (34).
Κυρηναϊκός F 10 (20) .
Κύρος G 3 (78). Φαβωρίνος G 3 (57); 3 (72).
Φίληβος G3 (96).
Λαμπρίας Ε 82 (1). Φοίνιξ Ε 82 (3).
Λεμβευτικός H 61 (2).
Χαιρέδημος Ε 36 (11).
Μεγαρικός E 36 (5 ). Χαλδαίος F 10 (3).
Μέναρχος G3( 78). Χίρων Ε 19.
Μήδεια Η 72 (11). Χρύσιππος G3(105 ) ; 3 (106).
Μητρόδωρος Ε 36 (19); 36 (35) ; G3(115).
Μήτρων Η 60 ( 9).
Μίθρα Ε14. αγαθός Ε 52 (1); Η 13 (4); 60 (4).
Μίθρης Ε 36 (37) . αγοραίος G 3 (80).
αδύνατος G 3 (61) ; 3 (69).
Νεοκλής E 36 (17). αιδώς G 3 (85).
αίρεσις Ε 15 ( 7) ; 36 ( 8) : 52 (4 ) ; G 3 (4 ) ; 3
' Ολυμπιονίκης E52(13). (83) ; 3 (92) ; 3 (113) ; 3 (132) ; Η 58 ; 148.
Ομηρικός Η 60 (48). αιτία Η 60 (23); G3 (15) ; 3 (16).
" Ομηρος F10 (11) ; Η 60 (47); 60 (49): 60 ακίνητος G 3 (33).
(50) ; 86 (11). ακολουθείν G 3 ( 61).
'Ορφεύς Ε 39. ακόλουθος G3(82).
ακούειν G3( 64 ); 3 (74).
Περτίναξ G3 (89). ακούσιος Η 60 (36).
Πλάτων F 10 (13) ; G 3 (26) ; 3 (92) ; 3 (93); ακρόασις Ε 22.
3 (94) ; Η 9 ; 75 ; 91. αλυπία Ε 52 (3 ) ; G 3 (32).
Πλατωνικός Ε52 (8); G 3 (27) ; 3 (95). αμάρτημα G3(8); 3 (76).
Πλούταρχος F 10 (16). άμαυρούσθαι G3 (111 ).
Πολυμήδης E36 ( 33). αμείνων G3(109).
Ποσειδώνιος G 15 (4). αμφιβολία E 36 (45).
Πουδεντιανός G 3 (117). αναγιγνώσκειν G3 (75).
Πρόξενος F 10(25). αναγκαίος G 3 (37).
Πρωταγόρας Η 60 (46). ανάγκη G 3 (61).
Πυθαγόρας Η 61 (3) ;86(3). ανάγνωσμα G3(123).
Πυθαγόρειος Η 60 (14);13(1). αναγραφή Η 148.
αναλυτικός Ε 93 (3 ) ; G 3 (99); 3 (100) : 3
Πυθαγορικός 13 (1). (109).
Πυρρώνειος Ε 24 ; F 10 (15). αναμέτρησης Ε 52 (10).
INDEX DES TITRES 1057
αναφέρεσθαι E 39. γάμος H 143.
αναφωνείσθαι Η 86 (11). γένος G3 (47) ; 3 ( 65 ).
αναφώνησις E36 (46). γεωγραφικός Ε 52 (12).
ανδρεία Η 60 (31). γεωμετρία Ε 80, p. 262.
αντικείσθαι G3 (61). ' γεωμετρικός Ε 80, p. 261 ; 93 ( 6) ; G 3
αξίωμα Η 60 ( 3). (109).
άπνοος Η 60 (23). γή Ε 52 (10); 98 (7).
αποδεικτικός G3 ( 62) ; 3 ( 66). γήρως F 10 ( 9).
απόδειξις G 3 (22) ; 3 (37) ; 3 (38) ; 3 (40) ; 3 γίγνεσθαι G3 ( 70).
(55) ; 3 (69). γλώσσα G3(13).
απομνημόνευμα E 33 , p. 120 ; F 10 (20). γνήσιος G 3 (14) ; G3(129).
απορείσθαι Η 60 (16). γνώμη Ε 19; F 10 (26).
απόφασις G3 (102). γνωμολογικός F 10 (26).
αράχνη E 98 (5). γραμματικός Ε52 (17) ; G3 (127).
αρετή E 36 (31) ; Η 13 (3 ) ; 60 (32). γωνία E 36 (21) ; 93 (5).
αριθμητικός E93 ( 7 ).
αριθμός G 3 (41). δεδομένα (τα -) E 80, p. 257.
αριστεία Η 86 (10). δέκα G3 (101).
άριστος G 3 (2) ; 3 (3) ; 3 (132) ; 13 (15). δεύτερος G3 (100).
αρμονικός G 8. δημόσιος G 3 (83) ; 3 (86) ; 3 (89).
άρρην H 143. δημώδης F 10 (7).
αρχαίος Ε 52 (16). διαβολή G3 (87).
αρχή G 3 (46); Η 60 (40). διάγνωσις G 3 (8 ).
αρχιτεκτονικός Ε 52 (18). διαδοχή H 61 (5) ;18.
ασαφεία G3(126). διάθεσις F 10 (16).
άσκησις Η 72 (1). διαθήκη G 3 (91).
αστρολογικός Ε 93 (8). διαίρεσις Ε 80, p. 257; 97 (1 ).
αστρονομία Ε 52 ( 11); 98 (6). δίαιτα F 10 (12).
άτομος E 36 (2); 36 (21). διακρίνειν G3 (54).
ατύχημα Η 73 (2). διαλάμπειν Η 60 ( 54).
αυλή E 129 ; G3(78). διαλεκτικός G 3 (10).
αυλήτης Ε 129. διάλεξις E 33, p. 120.
διάλογος Ε 52 ( 6) ; 98 ; G 3 (27) ; 3 ( 63) ; 3
αυτόματος G3(47). (78) ; 3 (79) ; 3 (95).
αυτός G 3 (61). διαπορία Ε 36 ( 6).
αφανισμός E 98 (3). διασκευάζειν Η 72 (8).
αφή E 36 (22). διατριβή E 33, p. 118.
αφροδίσιος G 3 ( 31). διαφωνείσθαι G3( 67).
αχώριστος G 3 (68). διδασκαλία G3 ( 2).
διδάσκαλος Η 72 (7 ).
βαλανείον F 10 (5 ). δικαιοπραγία E 36 (16).
βασιλεία Ε9; 36 (39). δικαιοσύνη E 36 (31) ; Η 60 (29); 116.
βίος E 36 (15) : 121 (1) : 146 : G 3 (82) : 3 διότι G 3 (40).
(87); 3 (110); Η 60 (27); 61 (4); 86; 1 3 δόγμα G 3 (6) ; 3 (67); 13 (1).
( 1 ) ; 8. δοκείν G 3 (23).
1058 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
δόξα E 36 (7); 36 (24); 36 (37); G3(90). ερμηνεία E93 (2); G 3 (98).
δοξάζειν G 3 (23) ; 3 (93) . έρως E 36 (3).
δύναμις G3( 7) ; 3 (23) ; 3 (97) ; 3 (107). ερωτικός Ε 82 ( 6): F10 (10); Η 60 (37).
δυναστεία Η 86 (10). έτερος G 3 (93).
δυνατός G3 (48). ετέρως G 3 (93).
δώρον E 36 (32). ευγενεία H 91.
ευδαιμονία Η 60 ( 26) ; 153.
εγκώμιον F 10 (1); 10 (2). ευδαίμων G3 (110).
εγχειρίδιον Ε 33, p. 118. ευθυμία Η 140.
έθος G 3 (9). εύθυνος Η 72 (8).
είδος G 3 (47) ; 3 (65) ; 3 (131) ; Η 60 ( 2). εύρεσις G3(62 ).
είδωλον E 36 (27); Η 60 (18). εύρημα Η 60 (57).
εικών G 3 (44). ευσεβεία E 36 ( 51) ; Η 60 (28).
εικώς G 3 (44). ευχή F 10 (8).
ειμαρμένη E 36 (23); Η 126.
εισάγεσθαι G3(4). ζήτησις Ε 24; G3 (54); 3 ( 71).
εισαγωγή Ε 24; G3 (10); 8; 15 (1).
έκχυτος Η 73 (3). ηδονή E 36(52); G3(81): 3 (111); 3 (112);
ελλιπώς G 3 (112). Η 60 (33).
εμπειρία G3(19). ηδονικός G3 (113).
εμπειρικός G 3 (17) ; Η 58. ηθικός G3 (114) ; Η 72 ( 12) ; 124.
έν G3 (60); 3 (61). ήθος G 3 (25).
ενδέχεσθαι G 3 (52). ηλιακός Ε 98 (3).
ένδοξος 18. ηλικία Η 60 (49).
ένεκα G3 (70).
έννοια G 3 ( 63). θάνατος E 36 (37).
ένοπτρον Ε 98 (1). θεός E 36 (12); 98 (8); H 143.
εξήγησις G 3 (13) ; 3 (128) ; 15 ( 4); Η 60 θεραπεία G3 ( 8).
(11).; 60 (13). θέσις Η 72 (12).
εξουσία Η 60 (35). θεώρημα G3 (108).
επαγωγή G3(43). θεωρηματικός Η 60 (1).
έπεσθαι G 3 ( 7). θεωρία G3(66); 3(94); 3 (105); 3 (107):
επηρεαστικώς G 3 ( 64). 15 (2).
επιδείκνυσθαι G3 (74). θηλυς H 143.
επιθαλάμιος Ε 52 (23).
επιστολή E 36 (41) : 52 (29): G 3 (116) : 3 ιατρικός G3 (1) ; 3 ( 5) ; 3 (19) ; 3 (24).
(117) ; Η 129 ( 8). ιατρικώς G3 (26).
επιστολικός Η 75. ιατρός G 3 ( 3).
επιτιμάν G3 (124). ιδέα F 10 (14) ; G 3 (93).
επιτομή E 36 (4) ; 36 (42); 36 (49) ; 36 (50); ίδιος G 3 (8) ; G 3 (23) ; 3 (50); 3 ( 87) : 3
G 15 ( 4) ; Η 61 (3 ); 61 (4 ) ; 61 ( 5 ). (122 ) ; Η 60 ( 22 ) .
επιφανεία E 80, p. 258. ιδίως G3 ( 63 ).
εποχή H 129 (1). ιερός H 60 (58).
επτά Η 61 ( 3) ; 86 (2 ). ισοδυναμείν G3 (39).
έριστικός H 60 (7 ). ισότης G3 (76).
INDEX DES TITRES 1059
ιστορία Ε 52 (30) ; 74 ; 93 ( 6) ; 93 ( 7) ;93 μάγος Η 86 (1).
( 8); 121 (2 ); F 10 (21); G 3 (130) ; Η 61 μάθημα G 15 (2) ; Η 75 ; 91.
(1). μαθητής Η 86 ( 8).
ιστορικός Η 129 (6). μαιευτικός Η 72 ( 5).
μακάριος G3 (110).
καθαρμός Ε 19. μέθη Η 129 (2 ).
καθήκον Η 13 (7) . μεθιστάναι Η 86 (10).
κακός Ε 52 (1 ) . μελέτη E 52 ( 5).
καλώς Η 86 (11). μέρος G 3 (97).
κανών Ε 19; 36 (10) ; 80, p. 260 . μεσότης Ε 52 (7).
καταληπτικός F 10 (17). μετάβασις G 3 (96).
καταστερισμός E52 (11) ; Η 86. μετεωρολογείσθαι E 98 (10).
κατατομή Ε 80 260. μετεωρολογικός G 15 (4 ).
κατάφασις G 3 (102). μικτός G 3 (53).
κατηγορία G3 (101). μισοκύων Η 73 (1).
κατοπτρικός Ε 80 259. μονομάχος F 10 (4).
κατηγορία E93 (1). μουσικός E 36 (30); Η 60 (53) ; 60 (54).
κατοπτρικός Ε 80, p. 259. μυστικός H 144.
κενός E 36 (2 ).
κιθαρωδός H 129 ( 5). νησος Η 60 (59).
κινούν G3 ( 33). νόθος G 3 (14); 3 (129).
κοινός G 3 (50) ; 3 (56) ; 3 ( 63). νομοθέτης Η 61 (3) ; 72 ( 4); 86 ( 9).
κόλαξ G3 (86). νόμος H 60 (41).
κόλασις G 3 (76). νόσος E36 (37) ; Η 60 (23).
κόσμος E 98 (9). νούς Η 60( 5).
κράσις G 3 (7 ).
κρίσις G 3 (67); 13 (15). οκταετηρίς Ε52 (15) ; 98 (4 ).
κριτήριον E 36 (10). ομιλία E 33, p.120.
κριτικός G3 (127). ομοιότης G3(45).
κτίσις Η 60 (58). ομονοία G3(84).
κύριος Ε 36 ( 7). όνομα G 3 (24); 3 (54); 3 (59) ; 3 ( 64) ; 3
κύων E 98. (71) ; 3 (118) ; 3 (119) ; 3 (120) ; 3 (121) ; 3
κωμαστής E71. (122) ; Η 60 (43) ; 109.
κωμικός G 3 (122); 3 (128). όντα G 3 (60) .
κωμωδία E52 (16) ; G 3 (123). οπτικός Ε 80, p. 259.
κωνικός Ε 80, p. 258. όραν E 36 (20).
λάθρα G3(75). ορθότης G 3 (59).
λέγειν G 3 (26); 3 (49); 3 (83); 3 (86); 3 οσιότης E 36 (13).
( 89); 3 (112). ουρανός H 60 (19).
λέξις E93 (2); G 3 (11 ); 3 (38); 3 (104); Η 9. ουσία G 3(23); 3(36); 3(68).
λήρος F 10 ( 6). πάθος E 36 (24); G 3 ( 8) ; Η 13 (5 ) ; 72 (2 ).
λογικός G 3 (94); 3 (105); G 3 (107). παιδεύεσθαι G3 (123) .
λόγος Ε 24; 97 (1); G 3 (51) ; 3 (56); Η 61 παλαιός G 3 (123).
(2 ); 144; 13 (15). παντοδαπός F10 ( 21).
λύσις G 3 (55); Η 60 ( 7); 60 (17); 60 (48). παράδειγμα G3(122 ); 3 (42).
1060 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
παράδοξος Η 13 ( 6). σοφός Η 61 (3 ); 86 (2 ).
παρακείσθαι G3 (65) . σποράδην H 129 ( 7).
παραλείπεσθαι G 3 ( 38). στοιχείον Ε 80, p. 261 ; G 3 (12) ; 3 (35) ; Η
παραμυθία G3 (77). 151.
παράσημος G 3 (125). στοιχείωσις Ε 24; 36 (48); 80, p. 261 ; Η
πας Ε 1. 124 .
πενία E 52 ( 2). στοχασμός Η 60 ( 6).
περίοδος E 98 (7 ). στωϊκός H 109, p. 1057.
περιτρέπειν G 3 (51). σύγγραμμα G 3 (14); 3 (129).
πλούτος Ε 52 (2 ). συγγραφέυς G3(118); 3 (128).
ποίησις E 39 ; G3 (91). συζυγείν G 3 (47).
ποιητής Η 129 ( 3) ; 60 (45). συλλογισμός G 3 (41); 3 (53) ; 3 (58) : 3
ποιητικός G 3 (112) ; Η 60 (45). (108).
πόλις F 10 (20). συλλογιστικός G 3 (106).
πολιτεία Ε 19 ; Η 61 ( 6 ); 153. συμπόσιον Ε 36 (18).
πολιτικός G 3 (119); 3 (120); 3 (121). συναγωγή Η 60 (54); 86 (11);13(1).
πολλαχώς G3 ( 49). συνεκτικός G 3 (15).
πολύς G 3 (60) ; 3 (90). συνθήκη Η 60 (42).
πόνος G 3 (81). συνουσία G3(74) ; 3 (79).
πόρισμα Ε 80, p. 258. συνοχή H 129 (9).
ποσαχώς G 3 (103). σύνοψις G3(27); 3 (66); 3 ( 95).
ποσότης G 3 (68). σύστασις G 3 (5).
πραγματικός G 3 (54). σώμα G 3 ( 7).
προγνωστικός E 36 (25). σωφροσύνη F 10 (7); Η 60 (30).
προκαταρκτικός G 3 (16).
προνοία G3 (34) ; Η 126. τάξις G 15 (2).
προοπτικός H 60 (20). τάχος E 98 (2 ).
πρότασις G 3 (38) ; 3 (39); 3 (52); 3 (53). τέλος E 36 (9) ; G3( 73) ; 3 (82); Η 13 (2 ).
πρότερος G 3 (99). τέχνη F 10 (10) ; G3 (50).
προτρεπτικός E 36 (26); G 3 (1) ; 13 (1). τεταρταίος F 10 (2).
πρώτος E 24; G3 (33); 3 (68). τιμή G 3 (90).
τόπος Ε 80, p. 258.
ρητορεύειν Η 60 (46). τραγωδί)οποιός H 129 ( 4 ).
ρητορικός E 36 (55). τραγωδοποιός H 60 (51) .
ρήτωρ G3( 80). τρίπους G 18.
τρόπος F10 (15).
σαφηνεία G3( 126). τυραννίς Η 86 (10).
σημαινείσθαι G 3 (47); 3 (54); 3 (65 ); 3 τύχη F 10 (22).
(71).
σκευογραφικός Ε52 (19). υπόθεσις G 3 (46).
υποθήκη Η 60 (38).
σολοικίζειν G3 (124). υπόληψις Η 72 (3).
σοφία Ε 24. υπόμνημα G 3 (98) ; 3 (99) ; 3 (100) ; 3
σόφισμα G3 (11). (101) ; 3 (102) ; 3 (106) ; Η 9 ; 129 ( 6) ; 129
σοφιστεία Η 73 ( 5). ( 7).
σοφιστής E 121 (1) ; G 3 ( 115). υποτύπωσις Ε 24 ; G3(17).
INDEX DES TITRES 1061
palvóueva E 80, p. 259 ; 98 (1); G 15 (1); H - Sur la sphère et le cylindre, commen
86 . taire E 175.
Davtasía E 36 (28 ); F 10 (17). Aristophane G 21.
ploOopeTv G 3 (63). Aristote de Stagire E 74
Dihooopia E 52 (4) ; 97 (1); F 10 (11); G 3 - Catégories, commentaire E 15 (3); 93
(73); 3 (114 ) ; 3 (131) ; H 86 (10). (54 ); 154 ; 161, p. 372 ; G 3 (101) ; H 83
Diócopos E 121 (1); F 10 (12); G 3 (3) ; 3 (1) ; I 3 (6 ).
(63) ; 3 (130) ; H 148 ; 1 8. - De caelo, commentaire I 3 (6 ) ; com
ppovtiÇelv G 3 ( 90 ). mentaire (?) H 83 (5).
our E 36 (8); F 10 (24). - De Interpretatione, commentaire G 3
puolxóç E 22 ; 36 (4); 93 (4); G 3 (23). (98); H 83 (2); commentaire (?) I 3 (6 );
QUOLXW5 H 60 ( 16) scholies E 15 (4).
puola oyla G 3 (114). - Éthique à Nicomaque, paraphrase H 34 ;
púolç E 1 ; 19 ; 36 (1) ;60 (15). livre I et VI, commentaire ; E 163.
Dwvń G 3 (47); 3 (65) ; 3 (124 ). - Politeiai, extraits H 61 (6 ).
- Premiers Analytiques, commentaire ; E
15 (5) ; G 3 (99); H 78 ; 83 ( 3) ; 1 3 (6 ).
Xaíveiv E 52 (24). - Seconds Analytiques, commentaire E 15
xapaxmp H 60 (44). (6) ; G 3 (100 ); livre II, commentaire E
xápıç E 36 (32). 163.
Xpeia G 3 (108); 3 (58); H 13 (1). - Réfutations sophistiques, commentaire G
xphoquos G 3 (114) ; 3 (123). 3 (12).
xuñois H 109. - Topiques, commentaire H 83 (4).
xonouós H 60 (55). Athènes I 14 .
xonomprov H 60 (56 ).
Xpovixós E 121 (2). Caton F3.
Xpovoypapia E 52 (14). Céphalos G 21.
Devôáplov E 80 , p. 258. Égyptiens 1 3 (2).
Quyń G 3 (7) ; 3 ( 36 ) ; 3 (97) ; H 60 (21) ; 60 Épicharme E 25.
(22). Eudème
- Sur l'expression, commentaire G 3
wooxonia H73 (3) (104 )
Euripide G 21.
Euthias G 21.
Abammon I 3 (2). Évhémère E 25.
Alypius I 3 (18). Galien
Amyntichos G 21. - De Sectis, commentaire E 15 (7).
Anaxiphème G 21.
Anébon I 3 (2). Hélène G 28.
Apollonius de Pergé Hippocrate
- Conica, commentaire E 175. – Épidémies, livre VI, commentaire G 18 .
Archimède H 61 (7)
- Sur l'équilibre des plans, commentaire E Lysitheidès G 21.
175.
– Sur la mesure du cercle, commentaire E Ménécée E 36 (44).
175 . Ménéxène G 21.
1062 DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES
Nicomaque de Gérasa Théophraste.
- 'Αριθμητική εισαγωγή, commentaire Η - Sur l'affirmation et la négation, com
107 ; 13 (1). mentaire G 3 (102).
Nil E 93 (6).
Oracles chaldaïques âme G 3 (133); 3 (136 ); 13 (3) ; 3 (4).
- commentaire I 3 (7 ). ancien E 115 .
AVANT-PROPOS
Abréviations
NOTICES
LETTRE E . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
LETTREF
LETTRE G
LETTREH
LETTRE I .............