Droit Pénal Ny
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DROIT
PENAL
Tome I. DROIT PENAL GENERAL
par
Dr Nyabirungu mwene Songa
2009-2010
2
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Tome I
DROIT PENAL
GENERAL
Extrait du syllabus du Professeur NYABIRUNGU mwene SONGA
INTRODUCTION
Le droit pénal est au cœur de la société humaine dans laquelle il est en
vigueur. Il est la protection des valeurs fondamentales partagées par le plus
grand nombre dans la société considérée et impose les sanctions à ceux qui,
par leur faute, viendraient à les violer ou y porter atteinte.
Tel est le sens de cette introduction qui va nous fixer sur l’importance même
de cette discipline juridique, définir le droit pénal, raconter son histoire dans
les plus grandes étapes, indiquer ses branches principales, déterminer ses
caractères et ses rapports avec d’autres disciplines voisines ou auxiliaires,
donner le plan du cours et, enfin, proposer une bibliographie sommaire.
Il y a des gens sans remords, sans scrupule. Il y a des gens sans foi ni loi. Il
y a même des hors-la-loi. Bref, il y a des déviants, des marginaux, des
délinquants. Vis-à-vis de ceux-ci, toutes les règles que nous avons décrites
sont insuffisantes et, par eux, la société est constamment menacée,
constamment en danger. La société doit se défendre, et l'une de ses armes
favorites, c'est le droit pénal.
On comprend dès lors que, comme le droit pénal lui-même, son importance
est vouée à la pérennité, car des valeurs chaque jour plus communes et plus
partagées s’imposeront à un monde toujours plus indépendant et plus
solidaire, sans pour autant mettre fin à la diversité et à la divergence des
enjeux, des intérêts et des identités des groupes et des Nations. L’arbitrage,
la sanction et la justice par le droit pénal sont à l’aube d’une renaissance.
Le droit pénal est la branche du droit public qui traite des infractions et des
peines, et dont l'objet essentiel est de déterminer les faits punissables et de
fixer les sanctions qui doivent leur être appliquées, en vue de faire régner dans
les relations sociales, à l’instar des autres disciplines juridiques, mais avec
plus de puissance et de contrainte, l’autorité et la liberté8.
1
François OST, Le temps du droit, Ed. Odile Jacob, Paris, 1999, p. 295.
2
Voir G. STEFANI et G. LEVASSEUR, Droit pénal général, Précis Dalloz, Paris, 1978, n° 31.
3
François OST, op. cit., pp. 295-296.
4
Titre d’un ouvrage sur la France d’André GARAPON et D. SALAS, aux éditions Hachette, Paris, 1996.
5
L. WACQUANT, De l’Etat charitable à l’Etat pénal, Note sur le traitement politique de la misère en Amérique,
in Regards sociologiques, II, mai 1996, 30 et s.
6
Frédéric DESPORTES et Francis LE GUNEHEC, Le nouveau droit pénal, Tome 1, Droit pénal général, 5ème
éd., Economica, Paris, 1998, pp. 1-2.
7
P. H. BOLLE, Le procès pénal nouveau, in R.D.P.C., 1995, 18.
8
Voir J. GICQUEL, Droit constitution et institutions, Montchrestien, Paris, 2003, p. 15.
4
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A. LA VENGEANCE PRIVEE
D'après « des récits légendaires, des textes sacrés et des œuvres littéraires »10,
à ses origines, l'infraction est une atteinte à l'ordre privé, et la justice pénale
est une justice privée.
Peu à peu apparaît le pouvoir public sanctionnateur. La loi du talion qui est
un progrès considérable, est complètement appliquée: «Œil pour œil, dent
pour dent». Les voleurs voient leur main coupée, comme est coupée la langue
des parjures. Les violeurs sont châtrés. La loi du talion est consacrée
notamment dans le Code Hammourabi de Chaldée (1700 ans avant Jésus-
Christ), la loi de Moïse (Israël), la loi des XII tables (Rome) et le Coran. La loi
du talion est un progrès parce que, d’une part, elle transforme la
responsabilité pénale, naguère collective, en responsabilité individuelle et,
d’autre part, consacre le principe de la proportionnalité entre l’acte commis
par l’auteur et la sanction que celui-ci doit subir.
9
Sur l'histoire du droit pénal, voir notamment : R. CHARLES, Histoire du droit pénal, P.U.F. Paris, 1955 ; P.
BOUZAT et J. PINATEL, Traité de droit pénal et de criminologie, Tome I, Droit pénal général, Dalloz, Paris,
1970.
10
J. PRADEL, Droit pénal général, 5è éd., Cujas, Paris, 1986, p.93.
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C. LE FONDEMENT RELIGIEUX
La rigueur du droit ancien se remarque par les pénalités qui, fondées sur le
double postulat de la vengeance et de la terreur, portent principalement sur
le corps14. Elle se remarque aussi par les nombreux cas pour lesquels la
peine de mort était prévue et surtout par les modalités de son exécution. La
peine de mort était accompagnée des supplices tels que le feu, la roue, la
potence, la noyade, la langue coupée, l'écartèlement, etc.
L'inégalité du droit ancien se remarque par le fait que les peines variaient
selon la condition du condamné, douces pour les nobles et les clercs,
rigoureuses pour les manants et les serfs.
Enfin, le droit pénal est irrationnel. Il condamnait les cadavres, les animaux,
etc. Il était franchement extravagant.
11
Françoise TULKENS et Michel van de KERCHOVE relèvent que certains de ses principes sont encore
discutés de nos jours, par exemple la maxime formulée par Bernard de PAVIE : « Versanti in re illicita
imputatur omnia quae sequuntur ex delicto » (Au délinquant sont imputées toutes les conséquences du délit),
Introduction au droit pénal, Aspects juridiques et criminologiques, 6ème éd., Kluwer, Bruxelles, 2003, p. 80.
12
Loc. cit.
13
Voir notamment les digestes des empereurs ULPIEN et HADRIEN ainsi que le Code de JUSTINIEN, Th.
MOMMSEN, Le droit pénal romain, 3 vol., Paris, Thorin et Fontemoing, 1907.
14
Fr. TULKENS et M. VAN DE KERCHOVE, Introduction au droit pénal, 2ème éd. Story Scientia, 1993, p. 62 ;
MUYART de VOUGLANS, Les lois criminelles de France dans leur ordre naturel, Paris, Merigot Le Jeune,
1780.
6
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E. LE SIECLE DES LUMIERES
F. LES DOCTRINES
I. La doctrine classique
Le libre arbitre pose en principe que la personne humaine est dotée d’une
volonté consciente et libre et d’une capacité de comprendre et de discerner le
bien et le mal. Lorsqu’un individu pose un acte, celui-ci relève d’un choix
libre. Et lorsqu’il commet une infraction, cela veut dire que librement et
consciemment, il a préféré la violation de la loi au respect de celle-ci. Préférer
le mal au bien est une faute par laquelle l’agent engage sa responsabilité
morale. La faute appelle réparation et expiation. Celle-ci ne peut se réaliser
que par le châtiment (peine ou sanction).
15
HAUS, Principes généraux du droit pénal belge, tome 1, Gand, 1879, n° 21, note 20.
7
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Les grands animateurs de l’Ecole positiviste sont les italiens LOMBROSO,
FERRI et GAROFALO.
Il n'y a pas de place pour le libre arbitre car la criminalité est déterminée par
l'hérédité et le milieu (déterminisme).
L'on doit répondre de l'infraction non parce qu'on serait en faute, mais
uniquement parce que la société doit se défendre (responsabilité sociale). Le
délinquant est condamné non parce qu'il est coupable, mais parce qu'il est
dangereux.
a) La défense sociale
16
Op. cit., n°s 101 et s.
17
Pierre THYS, Le traitement des délinquants anormaux : un coup de sonde dans la pratique de la loi belge de
défense sociale, in R.D.P.C., 1955, 29.
18
Moïse ADDAD et Michel BENEZECH, L’irresponsabilité pénale des handicapés mentaux, éd. Litec, Paris,
1978, pp. 20-21.
9
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réaliser la mesure thérapeutique d’amendement et de resocialisation du
délinquant. Or, non seulement, pour des raisons diverses, la prison ne joue
pas et n’a jamais joué ce rôle, mais plus encore, elle est considérée comme
nocive à la personnalité du délinquant. Dans ces conditions, il devient
difficile de croire à la fonction de resocialisation par la peine. Marc ANCEL
lui-même accepte l’échec du traitement de resocialisation conçu dans les
années cinquante19 et, sans aller jusqu’à adhérer « aux doctrines
utopiques de la non-intervention absolue »20, considère que « la prison ne doit
plus être que l’ultima ratio de la réaction anti-délictueuse »21.
b) L’Ecole de la non-intervention
Il existe une doctrine animée aussi bien par des Américains24que des
Européens25, selon laquelle le droit pénal et la justice pénale devraient
intervenir le moins possible, voire pas du tout. Il faudrait remplacer les
sanctions pénales par des mesures non répressives, à caractère civil,
administratif, social, etc.
19
Edgardo ROTMAN, La politique du traitement à la lumière de la 3ème édition de « La défense sociale », in
R.S.C., 1984, 575.
20
Op. cit., 576.
21
M. ANCEL, La défense sociale nouvelle, 3ème édition, Cujas, Paris, 1981, p. 271.
22
Crossroad Africa, 5 octobre-10 novembre 1984.
23
S.A. LAZARDIS, La rétribution dans la philosophie pénale anglo-saxonne d’aujourd’hui, in Archives de
philosophie du droit, tome 28, Philosophie pénale, Paris, Sirey, 1983, recension par Jacqueline FAUCHERE, in
R.S.C., 1984, 606 ; John RAWLS, Théorie de la justice, op. cit. p. 352.
24
E. SCHUR, D. MATZA, E. LEMERT, cités par Jean PRADEL, op. cit., n° 106.
25
A. BARATTA, Criminologie critique et politique pénale alternative, R.I.D.P., 1978, 43 et s. ; L. HULSMAN
et J. BERNAT DE CELIS, Peines perdues. Le système pénal en question, Le Centurion, 1982.
26
L. HULSMAN et BERNAT DE CELIS, op. cit., 110-116.
10
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Certes, les grands crimes devraient continuer à être punis, mais les autres
devraient être dépénalisés, car il n’y a aucune raison de continuer à
poursuivre, à juger et à condamner à grands frais des « crimes sans
victimes » où les actes voulus par leurs auteurs n’entraînent aucun préjudice
pour la société (avortement, drogue, relations sexuelles,…).
Comme on pouvait bien le prévoir, des reproches très précis ont été formulés
contre cette doctrine plus que contestataire29.
27
Nils CHRISTIE, Conflicts as Prosperity, The British Journal of Criminology, vol. 17 (1), 1-15.
28
Jean SAUVAGEAU, Quelques réflexions sur la pertinence de « l’affaire SOKAL » en criminologie, in
R.D.P.C., 1997, 1192-1212. En 1996, Alan SOKAL, professeur de physique à l’Université de New York, a
publié un article qu’il a lui-même reconnu comme un canular, et qui était destiné à dénoncer des tendances
irrationalistes en sciences, notamment l’excès du relativisme, aux dépens de la vérité qui, seule, socialement
libère les minorités et les pauvres.
29
Voir J. PRADEL, loc. cit.
11
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pénalistes ne se retrouvent pas dans la défense sociale de GRAMATICA ou de
Marc ANCEL, notamment lorsqu’elle préconise, à la place de la peine, une
mesure purement thérapeutique, sans coloration morale.
Fidèles à SALEILLES36, ils prennent à leur compte cette formule : «la peine
est fondée sur l’idée de liberté et de responsabilité, mais appliquée en
fonction de l’aptitude du condamné à supporter le châtiment et à en tirer
profit»37.
Pour terminer avec ce survol sur les doctrines, nous retiendrons que, bien
que des signes apparaissent d’un retour de plus en plus prononcé vers la
dimension répressive et rétributive de la sanction, le traitement et la
resocialisation du délinquant demeurent les objectifs les plus affirmés du
droit pénal contemporain.
30
R. MERLE, La confrontation doctrinale du droit pénal classique et de la défense sociale, in R.S..C., 1964, 725.
31
J. LEAUTE, Une nouvelle école de la science criminelle : l’Ecole d’Utrecht, 1959.
32
FRANCHIMONT, Incertitudes et espérances des pénalistes, in R.D.P.C., 1960, 3.
33
LARGUIER, Le droit pénal, Coll. Que sais-je, P.U.F, Paris.
34
QUINTANO-RIPOLLES et R. MERLE, L’évolution du droit pénal moderne, Annales de la Faculté de Droit
de Toulouse, 1958, 121 et s.
35
CONSTANT, Manuel de droit pénal belge, 7e éd., 1959.
36
SALEILLES, De l’individualisation de la peine, 1898.
37
Voir J. PRADEL, op. cit., n° 107.
12
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1994, et dont l'une des caractéristiques majeures est la personnalisation et
la promotion des alternatives à l'emprisonnement. Le législateur français
passe ainsi des idées de rétribution et de dissuasion, à celles de traitement
et de resocialisation38, s'inscrivant ainsi dans la ligne de la défense sociale
nouvelle.
H. CONCLUSION
On peut dire que l'histoire du droit pénal nous montre les progrès accomplis
dans ses aspects fondamentaux :
Le droit pénal général concerne les règles communes aux infractions, règles
qui définissent de manière générale les grands principes de la responsabilité
pénale: la notion d'infraction, la personne punissable, les causes
38
Voir J. PRADEL, Le nouveau code pénal français : aperçu sur sa partie générale, in R.D.P.C.,1993, 923-642.
39
G. STEFANI et G. LEVASSEUR, op. cit., n°14.
13
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d'exonération, les règles qui organisent la fixation et l'exécution des peines,
etc.
La procédure pénale est l’ensemble des règles qui sont mises en œuvre
pendant le temps qui se situe entre la commission de l’infraction et le
jugement définitif d’acquittement ou de condamnation, qui s’imposent au
juge et aux parties au procès, et dont le but est d’arriver à la manifestation
de la vérité, dans le respect des droits individuels de l’accusé. La procédure
pénale est ainsi donc inhérente au droit pénal.
Il faut faire remarquer que cette façon de déterminer les branches du droit
pénal n'est pas toujours partagée, et certains les limitent au droit pénal
matériel, c’est-à-dire au droit pénal général et au droit pénal spécial, à
l'exclusion de la procédure et de toute autre discipline relative au régime des
sanctions.
40
Voir J. PRADEL, Op. cit., n°s 49-51.
41
Cité par L. NOUWYNCK, Politique criminelle et institutionnalisation du collège des procureurs généraux, in
R.D.P.C., 1997, 832.
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Aujourd’hui, la réaction sociale contre le crime ne se ramenant plus
exclusivement à la dimension répressive.
Dans le cadre des rapports entre le droit pénal et les disciplines voisines, il
est sans doute utile de donner cette précision terminologique :
- Le spécialiste du droit pénal s'appelle pénaliste ou criminaliste ;
- Le spécialiste de la criminalistique s'appelle criminologiste ;
- Le spécialiste de la criminologie s'appelle criminologue44.
Droit public, car il est formé des règles qui régissent les rapports entre l'Etat
et les citoyens. La répression de la criminalité est une fonction de l'Etat, un
attribut de sa souveraineté. Seul l'Etat a qualité pour définir les infractions,
indiquer la personne punissable et déterminer les peines qui lui sont
applicables. Il s'ensuit que les règles de droit pénal s'imposent à tous et ne
souffrent dans leur application d'aucune sorte de transaction, sauf lorsque
la loi le prévoit (art. 9 du CPP).
En tant que droit public, le droit pénal est différent du droit disciplinaire
appliqué dans le cadre des sociétés privées et des associations publiques et
42
Cité par Mireille DELMAS-MARTY, Les grands systèmes de politique criminelle, Coll. Thémis, 1992, p. 13 ;
Conseil de l’Europe, Rapport relatif à la recommandation n° R (83) 7 sur la participation du public à la politique
criminelle.
43
G. STEFANI et G. LEVASSEUR, op. cit., n°44.
44
MERLE et VITU, Traité de droit criminel, 7ème édit. Cujas, Paris, 1997, p. 213.
15
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privées dans un but particulier, tel que celui d'assurer le respect des devoirs
professionnels ou déontologiques.
Droit strict, dans les principes qui régissent son interprétation. Ce caractère
est un corollaire du principe de la légalité. Le juge ne peut trouver des
infractions et des peines en dehors de la loi. L'ordre juridique pénal trouve
toute son étendue et toutes ses limites dans la loi.
§ 8. PLAN DU Tome I
Il comporte deux livres, dont le livre premier est consacré aux principes
généraux de la répression.
Art. 1er. Nulle infraction ne peut être punie de peines qui n’étaient pas portées par
la loi avant que l’infraction fût commise.
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Art. 2. L’infraction commise sur le territoire de la République est punie
conformément à la loi.
Art. 3. Toute personne qui, hors du territoire de la République démocratique du
Congo, s’est rendue coupable d’une infraction pour laquelle la loi congolaise prévoit
une peine de servitude pénale de plus de deux mois, peut être poursuivie et jugée
en République démocratique du Congo, sauf application des dispositions légales sur
l’extradition.
La poursuite ne peut être intentée qu’à la requête du ministère public.
Quand l’infraction est commise contre un particulier et que la peine
maximum prévue par la loi congolaise est de cinq ans de servitude pénale ou moins,
cette requête doit être précédée d’une plainte de la partie offensée ou d’une
dénonciation officielle de l’autorité du pays où l’infraction a été commise.
Toutefois, pour les infractions, autres que celles du titre VIII, et des deux
premières sections du titre III du deuxième livre du Code pénal, aucune poursuite
n’a lieu si l’inculpé justifie qu’il a été jugé définitivement à l’étranger et, en cas de
condamnation, qu’il a subi ou prescrit sa peine ou obtenu sa grâce.
Sauf dans les cas prévus par le titre VIII et les deux premières sections du
titre III du deuxième livre du Code pénal, la poursuite n’a lieu que si l’inculpé est
trouvé en République démocratique du Congo.
Art. 4. Il y a tentative punissable lorsque la résolution de commettre l’infraction a
été manifestée par des actes extérieurs, qui forment un commencement d’exécution
de cette infraction et qui n’ont été suspendus ou qui n’ont manqué leur effet que
par des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur.
La tentative est punie de la même peine que l’infraction consommée.
§ I. De la peine de mort
Art. 6. Le condamné à mort est exécuté suivant le mode déterminé par le président
de la République.
§ 2. De la servitude pénale
Art. 7. La servitude pénale est au minimum d’un jour d’une durée de 24 heures.
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Cours de Droit Pénal CT Manasi
Art. 8. Les condamnés à la servitude pénale subissent leur peine dans les prisons
déterminées par le président de la République.
Ils sont employés, soit à l’intérieur de ces établissements, soit au dehors, à l’un des
travaux autorisés par les règlements de l’établissement ou déterminés par le
président de la République, à moins qu’ils n’en soient dispensés par le président de
la République dans des cas exceptionnels.
Art. 9. — Toute détention subie avant que la condamnation soit devenue
irrévocable, par suite de l’infraction qui donne lieu à cette condamnation, sera
imputée, pour la totalité, sur la durée de la servitude pénale prononcée.
§ 3 .De l’amende
Art. 10. L’amende est de un zaïre au moins. Les amendes sont perçues au profit de
la République.
Art. 11. L’amende est prononcée individuellement contre chacun des condamnés à
raison d’une même infraction.
Art. 12. À défaut de paiement dans le délai de huitaine qui suit la condamnation
devenue irrévocable et, dans le cas d’un jugement immédiatement exécutoire, dans
la huitaine qui suit le prononcé du jugement, l’amende peut être remplacée par une
servitude pénale dont la durée sera fixée par le jugement de condamnation, d’après
les circonstances et le montant de l’amende infligée au condamné.
Art. 13. La durée de la servitude pénale subsidiaire n’excède jamais six mois. Dans
tous les cas, le condamné peut se libérer de cette servitude en payant l’amende. Il
ne peut se soustraire aux poursuites sur ses biens en offrant de subir la servitude
pénale.
§ 4. De la confiscation spéciale
Art. 14. a). Lorsque l’infraction est punissable d’une peine de servitude pénale
principale de six mois au maximum ou lorsque la peine méritée ne doit pas
dépasser six mois en raison des circonstances, les cours et tribunaux peuvent
substituer à la servitude pénale, l’obligation de s’éloigner de certains lieux ou d’une
certaine région ou celle de résider dans un lieu déterminé pendant une durée
maximum d’un an.
Art. 14. b). Outre la peine de servitude pénale, les mêmes peines peuvent être
prononcées, à charge de quiconque a commis, depuis dix ans, au moins deux
infractions qui ont entraîné chacune une servitude pénale d’au moins six mois.
Art. 14. c). Les peines prévues par la présente section prennent cours, lorsqu’elles
sont prononcées en vertu de l’article 146, à la date fixée par le jugement.
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Lorsqu’elles sont prononcées en vertu de l’article 146, elles prennent cours à
la date à laquelle le condamné est libéré, soit définitivement, par expiration ou
remise de la peine de servitude pénale, soit conditionnellement.
La réincarcération du condamné, pour quelque cause que ce soit, n’entraîne
pas prolongation de la durée de ces peines.
Art. 14. d). Quiconque ayant commis depuis dix ans, au moins trois infractions qui
ont entraîné chacune une servitude pénale d’au moins six mois, présente en outre
une tendance persistante à la délinquance peut, par l’arrêt ou le jugement de
condamnation, être mis à la disposition du gouvernement pour un terme de cinq à
dix ans après l’expiration de la peine de servitude pénale.
Les procédures relatives aux condamnations servant de base à la mise à la
disposition du gouvernement sont jointes au dossier de la poursuite et les motifs de
la décision sont spécifiés dans celle-ci par l’indication des circonstances qui
établissent la tendance persistante à la délinquance.]
Art. 14. e). [Décr. du 8 août 1959, art. 2. — Lorsqu’un condamné a été mis à la
disposition du gouvernement par deux décisions successives pour des infractions
non concurrentes, si la mise à la disposition du gouvernement prononcée par la
décision première en date n’a pas atteint son terme à l’expiration de la peine de
servitude pénale prononcée par la seconde décision, la seconde mise à la
disposition du gouvernement ne prend cours qu’à l’expiration de la première.]
Art. 14. f). [Décr. du 8 août 1959, art. 2. — Lorsque le condamné est libéré
conditionnellement, la peine de mise à la disposition du gouvernement prend cours
à la date de la libération conditionnelle.]
Son exécution est suspendue en cas de révocation de la libération
conditionnelle, à partir de l’arrestation.
Art. 14. g). [Décr. du 8 août 1959, art. 2. — Lorsque, pendant l’exécution de la mise
à la disposition du gouvernement, le condamné est arrêté, même préventivement,
en vertu d’une décision judiciaire, l’exécution de la peine de la mise à la disposition
du gouvernement est suspendue pendant la durée de la détention.]
Art. 14. h). [Décr. du 8 août 1959, art. 2. — Le délinquant d’habitude mis à la
disposition du gouvernement est interné s’il y a lieu dans un établissement désigné
par le président de la République.]
Art. 14. i). [Décr. du 8 août 1959, art. 2. — À l’expiration de la peine principale, le
gouverneur de la province dans le ressort de laquelle le condamné est détenu,
décide s’il est mis en liberté ou interné.
S’il est mis en liberté, il peut pour cause d’inconduite, être interné par décision du
commissaire de district du ressort où a eu lieu l’inconduite. Le commissaire de
district prend avis du ministère public. L’intéressé peut introduire un recours
contre cette décision devant le gouverneur de province. Les formes de ce recours
sont déterminées par le président de la République.]
Art. 14. j). [Décr. du 8 août 1959, art. 2. — Le délinquant d’habitude mis à la
disposition du gouvernement peut demander à être relevé des effets de cette
décision. À cette fin, il adresse sa demande au procureur général près la cour
d’appel, dans le ressort de laquelle siège la juridiction qui a prononcé la mise à la
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disposition du gouvernement. Le procureur général prend toutes informations qu’il
estime nécessaires, les joint au dossier qu’il soumet à la cour, avec ses réquisitions.
La cour statue par arrêt motivé, l’intéressé entendu ou dûment cité.
La demande ne peut être introduite que trois ans après l’expiration de la peine
principale. Elle peut ensuite être renouvelée de trois en trois ans.]
Art. 15. — Toute condamnation pénale est prononcée sans préjudice des
restitutions et dommages-intérêts qui peuvent être dus aux parties.
[Décr. du 17 mai 1952. — Le tribunal fixe le montant des dommages- intérêts.]
Art. 17. — La durée de la contrainte par corps est déterminée par le jugement; elle
ne peut excéder six mois. Le condamné qui justifiera de son insolvabilité est mis en
liberté après avoir subi sept jours de contrainte.
La contrainte par corps est assimilée, pour son exécution, à la servitude
pénale.
Art. 18. [Décr. du 25 juin 1913. — S’il existe des circonstances atténuantes, la peine
de mort pourra être remplacée par la servitude pénale à perpétuité ou par une
servitude pénale dont le juge déterminera la durée.
Les peines de servitude pénale et d’amende pourront être réduites dans la
mesure déterminée par le juge.
Il ne sera pas prononcé, toutefois, de peine de servitude pénale de moins d’un
jour, ni de peine d’amende de moins d’un franc.]
Art. 19. — Tout jugement admettant des circonstances atténuantes les indiquera et
les énumérera.
Art. 20. [Décr. du 17 juillet 1931. — Lorsque le même fait constitue plusieurs
infractions, la peine la plus forte sera seule prononcée.
Lorsqu’il y a concours de plusieurs faits constituant chacun une ou plusieurs
infractions, le juge prononcera une peine pour chaque fait et il cumulera les peines
prononcées, sous réserve de l’application des dispositions suivantes:
la peine de mort et la servitude pénale à perpétuité absorberont toute peine
privative de liberté;
la somme des peines de servitude pénale à temps et des amendes cumulées ne
pourra dépasser le double du maximum de la peine la plus forte prévue par la loi,
ni être supérieure, en ce qui concerne la servitude pénale principale, à vingt ans, en
ce qui concerne l’amende, à vingt mille francs, en ce qui concerne la servitude
pénale subsidiaire, à six mois;
le juge ramènera à ce maximum, s’il y échet, la somme des peines prononcées;
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Art. 23. — Sauf disposition particulière établissant d’autres peines, les coauteurs
et complices seront punis comme suit:
– les coauteurs, de la peine établie par la loi à l’égard des auteurs;
– les complices, d’une peine qui ne dépassera pas la moitié de la peine qu’ils
auraient encourue s’ils avaient été eux-mêmes auteurs;
– lorsque la peine prévue par la loi est la mort ou la servitude pénale à perpétuité, la
peine applicable au complice sera la servitude pénale de dix à vingt ans.
Art. 27. — Les peines d’amende de moins de cinq cents zaïres se prescriront par
deux ans révolus; les peines d’amende de cinq cents zaïres et plus se prescriront
par quatre ans révolus.
Art. 28. — Les peines de servitude pénale de dix ans ou moins se prescriront par
un délai double de la peine prononcée, sans que le délai puisse être inférieur à deux
années.
Art. 29. — Les peines de servitude pénale de plus de dix ans se prescriront par
vingt ans et les peines perpétuelles par vingt-cinq ans.
Art. 30. — Les délais des articles 26, 27, 28 et 29 courront de la date du jugement
rendu en dernier ressort ou à compter du jour où le jugement rendu en première
instance ne pourra plus être attaqué par la voie de l’appel.
Art. 31. — La peine de la confiscation spéciale se prescrira dans le même délai que
la peine dont elle est l’accessoire.
Art. 35. — Les condamnés qui ont à subir une ou plusieurs peines comportant
privation de liberté, peuvent être mis en liberté conditionnellement, lorsqu’ils ont
accompli le quart de ces peines pourvu que la durée de l’incarcération déjà subie
dépasse trois mois.
Les condamnés à perpétuité pourront être mis en liberté conditionnellement
lorsque la durée de l’incarcération déjà subie par eux dépassera cinq ans.
[Décr. du 27 juin 1960, art. 2. — La durée de l’incarcération prescrite aux deux
alinéas précédents pourra être réduite lorsqu’il sera justifié qu’une incarcération
prolongée pourrait mettre en péril la vie du condamné.]
Art. 36. — La mise en liberté peut toujours être révoquée pour cause d’inconduite
ou d’infraction aux conditions énoncées dans le permis de libération.
23
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Art. 38. [L. 76-025 du 23 décembre 1976, art. 1er. — La mise en liberté est, pour les
condamnés par les juridictions civiles quelle que soit leur qualité, accordée par le
Ministre de la justice après avis du parquet et du directeur de l’établissement
pénitentiaire.
Elle est révoquée par la même autorité après avis du parquet.
La réintégration a lieu, en vertu de l’arrêté de révocation, pour l’achèvement
du terme d’incarcération que l’exécution de la peine portait encore à la date de la
libération.]
Art. 39. — L’arrestation provisoire du libéré conditionnel peut être ordonnée par le
procureur de la République ou l’un de ses substituts à la charge d’en donner
immédiatement avis au ministre de la Justice.
Art. 40. — La prescription des peines ne court pas pendant que le condamné se
trouve en liberté, en vertu d’un ordre de libération qui n’a pas été révoqué.
Art. 42. [Décr. du 6 juin 1958. — Les cours et tribunaux, en condamnant à une ou
plusieurs peines de servitude pénale, principales ou subsidiaires, pourront
ordonner, par décision motivée, qu’il sera sursis à l’exécution de l’arrêt ou du
jugement en ce qui concernent cette ou ces peines pendant un délai dont ils
fixeront la durée à compter de la date du prononcé de l’arrêt ou du jugement, mais
qui ne pourra excéder cinq années.]
[Décr. du 4 janvier 1934. — L’octroi du sursis est subordonné aux conditions
ci-après:
1o [Décr. du 6 juin 1958. — qu’il ne soit pas prononcé contre le condamné une peine
de servitude pénale principale supérieure à un an;]
2o [Décr. du 4 janvier 1934. — que le condamné n’ait antérieurement encouru
aucune condamnation à la servitude pénale principale, du chef d’une infraction,
commise dans la République, punissable, indépendamment de l’amende, d’une
servitude pénale de plus de deux mois.]
L’arrêt ou le jugement portant condamnation ne sera pas exécuté, en ce qui
regarde la ou les peines de servitude pénale, si, pendant le délai fixé, le condamné
n’encourt pas de condamnation nouvelle du chef d’infractions punissables,
indépendamment de l’amende, d’une servitude pénale de plus de deux mois.
Dans le cas contraire, les peines pour lesquelles le sursis aura été accordé et
celles qui auront fait l’objet de la condamnation nouvelle seront cumulées.
En cas de sursis applicable à la servitude pénale subsidiaire, la suspension de
la prescription s’étend à l’amende.]
Les lois de droit pénal particulier sont nées de la nécessité de régler des
situations personnelles et locales particulières, de protéger des biens
juridiques spéciaux ou de faire face à des besoins temporaires et variables.
Les lois de droit pénal particulier relèvent du droit pénal spécial.
La réponse doit être que le droit pénal général énoncé dans les lois de droit
pénal commun est applicable aux infractions aux lois de droit particulier45.
§ 1. ENONCE DU PRINCIPE
45
HAUS, op. cit., I, n° 118.
46
HAUS, op. cit., I, n° 119.
47
J. PRADEL, op. cit., n° 130.
26
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La formule ci-dessus reprise est insuffisante, et devrait être complétée pour
donner ce qui suit : «Nullum crimen, nulla poena, nullum judicium sine
lege.»48. Ceci permet de synthétiser le principe en trois propositions :
1. Nul ne peut être poursuivi que pour des actes ou des omissions
prévues par la loi (légalité des infractions) ;
2. Nul ne peut être puni des peines qui ne sont pas prévues par la loi
(légalité des peines) ;
3. Nul ne peut être poursuivi que dans la forme prescrite par la loi
(légalité de la procédure).
§ 2. LA JUSTIFICATION DU PRINCIPE
Il ne convient pas que le juge soit seul à décider de la punissabilité des faits.
Une loi écrite met les citoyens à l’abri de deux dangers:
1) Le juge, loin de faire prédominer les exigences de justice et de vérité,
risque de soumettre sa démarche à son émotion, à son tempérament, à ses
intérêts de classe, voire à son zèle.
2) L'incertitude quant à la façon dont le juge dira en définitive le droit est
de nature à créer l'insécurité juridique au sein de la population. Cette
remarque annonce la troisième observation.
48
Voir notamment MONTESQUIEU, De l'Esprit des lois, Liv. XI, chap. VI, 1748 ; BECCARIA, Traité des
délits et des peines, chap. III, 1764.
49
Op. cit., n° 99.
27
Cours de Droit Pénal CT Manasi
§ 3. LE CONTENU DU PRINCIPE
Les incriminations sont établies par la loi. Seuls tombent sous la loi les faits
qui, au moment où ils sont commis, sont déjà définis comme constituant
une infraction par le législateur. Ce principe de l'antériorité obligatoire des
définitions des infractions est une garantie de la liberté et de la sécurité
juridique, car on peut valablement supposer que, dans ce cas, ces définitions
ont été élaborées sans parti pris, dans l'ignorance des personnes qui
tomberont éventuellement sous leur application.
Le juge ne peut considérer comme infraction un fait que la loi ne définit pas
comme tel, quelle que soit par ailleurs son appréciation personnelle sur la
valeur morale de l'acte. C'est ainsi que, en l'absence de texte, le suicide, la
prostitution ou le mensonge ne sont pas des infractions, quel que soit par
ailleurs le dégoût qu'ils peuvent inspirer.
50
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n°5.
51
Cass. crim., 1er fév. 1990, Bull. n° 56 ; R.S.C. 1991, 555, obs. VITU ; J.C.P. , 1991, Bull. n° 386 ; 27 mars
1995, Bull. inf. C. cass. 1995. 814 ; 30 oct. 1995, Bull. n° 329.
28
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Cela impose au juge de rechercher l'exacte qualification des faits poursuivis
et d'éviter l'interprétation extensive.
I. Au niveau du législateur
C. LEGALITE DE LA PROCEDURE
Nul ne peut être poursuivi, arrêté ni détenu qu’en vertu de la loi et dans les
formes qu’elle prescrit55.
52
Rennes, 30 juin 1998, in R.P.D.P., 1999, 250-251, Note Jean-Yves CHEVALIER. Dans le cas d’espèce, il
s’agissait de l’utilisation et de la diffusion de l’image pornographique d’une mineure.
53
Crim., 28 nov. 1972, Bull., n°363.
54
Crim. 11 mai 1949, D. 261, rapport PEPY, 22 mars 1955, D. 418 ; 30 mai 1962, Bull. n° 214 ; Gaz. Pal., 1993.
1. 151, Note MARCHI.
55
Voir les termes du projet de Constitution du 18 février 2006, en son article 17, alinéa 1.
29
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Nemo judex sine lege. Il n’y a pas de juge ou de juridiction sans loi. L’absence
de celle-ci conduirait aux tribunaux populaires ou aux actes de vandalisme
et de lynchage dans nos villages, nos cités et nos rues. Il est du droit de
chaque citoyen de connaître à l’avance quels sont ses juges naturels et
quelles formes ceux-ci utiliseront en cas de jugement pour violation
supposée de la loi pénale.
§ 4. LE RECUL DU PRINCIPE
A. AU NIVEAU THEORIQUE
Des critiques ont été formulées contre le principe de la légalité. Elles sont
essentiellement dues au positivisme et aux conceptions politiques de
tendance totalitaire (nazisme, fascisme, stalinisme).
Or, il existe des personnes qui, sans commettre d'infraction, sont cependant
tellement dangereuses que leur internement se justifierait. De même, il
existe des individus que l'exécution de leur peine ne rend ni meilleurs ni
moins dangereux. Au lieu de leur appliquer une peine déterminée, il a été
suggéré plutôt à leur égard des sentences indéterminées, révisables selon
l'évolution de la périculosité du sujet.
B. AU NIVEAU PRATIQUE
d) La sentence indéterminée
56
Voir notamment l'étude de J. M. RICO, «Les législations hispano-américaines de dangerosité sociale.
Evolution et signification» in «La notion de dangerosité a-t-elle encore un sens ?» Colloque international
organisé pour le cinquantième anniversaire de l'Ecole de Criminologie, Louvain-la-Neuve, 22-25 mai 1979.
57
Edgardo ROTMAN, La politique du traitement à la lumière de la troisième édition de « La défense sociale »,
in R.S.C., 1984, 575.
31
Cours de Droit Pénal CT Manasi
II. Cas où le recul du principe est justifié
a) Protection de la jeunesse
58
Voir notamment R. LEGROS, Considérations sur les lacunes et l'interprétation en droit pénal, R.D.P.C., 1966,
967; P. ESCANDE, L'interprétation par le juge des règles écrites en matière pénale, in R.S.C., 1978, 811 ; P.E.
TROUSSE, L'interprétation des lois pénales, R.D.P.C., 1952-1953, 441.
32
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Interpréter la loi, c'est en chercher l'exacte signification et la véritable portée.
On enseigne qu’une loi claire ne s’interprète pas, et une maxime latine
apporte sa caution à ce point de vue : « Interpretatio cessat in claris ». En
vérité, toute loi s’interprète. Certes, une loi claire et précise présentera peu
de problèmes, mais toute loi doit être interprétée car il faut assurer le passage
de la règle abstraite, qui définit l'infraction et établit la sanction, au cas
concret à résoudre. C'est l'interprétation qui donne naissance à la
jurisprudence.
- L'interprétation authentique ;
- L'interprétation judiciaire ;
- L'interprétation doctrinale ;
- L’interprétation des normes internationales.
Elle émane du législateur lui-même et revêt une force obligatoire pour le juge
car elle est l'œuvre de l'autorité même qui a rédigé la loi. Elle peut prendre
deux formes : Interprétation contextuelle et Interprétation postérieure
I. Interprétation contextuelle
Elle est ainsi qualifiée lorsqu'elle est donnée par la loi même qu'on
interprète. Exemples :
- L'article 212 du CP définit l'attentat;
- L'article 213 définit le complot;
- L'article 214 définit le mot «armes»;
- L'article 2 du nouveau code de la route (1978) donne une série de
définitions des termes qui seront utilisés tout au long du texte portant code
de la route.
B. L'INTERPRETATION JUDICIAIRE
Elle est l’œuvre des cours et tribunaux. Elle est l’ensemble des décisions des
cours et tribunaux, rendues dans le cadre de l’accomplissement de leur
mission, et de l’exercice de leur fonction de dire le droit. On l'appelle aussi
jurisprudence. La jurisprudence n'a pas d'autorité de droit.
Ainsi, les arrêts d’une cour ou les jugements d’un tribunal n’ont pas une
force obligatoire, et ne s’imposent donc pas aux autres juridictions. Il en est
de même des arrêts de la Cour Suprême de Justice, rendus sur le fond.
Toutefois, ils ont une autorité de fait, et s’agissant des arrêts de fond de la
Cour Suprême de Justice, cette autorité de fait devient plus grande encore.
C. L'INTERPRETATION DOCTRINALE
59
Crim. 29 juin 1972, Bull., n° 226 ; Gaz. Pal. 1. 27 ; J.C.P. 1973, II, 17457, Note RUZIE.
60
Crim. 30 juin 1976, Bull. , n° 236 ; D. 1977, 1, Note COSTE-FLORE ; J.C.P. , II. 18435, rapport MONGIN ;
Crim. 26 janv. 1984, Bull., n° 34.
34
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Lorsqu’il est clair, l’interprétation du Ministre des Affaires Etrangères est
sans utilité61.
A. INTERPRETATION LITTERALE
61
MERLE et VITU, Traité, 7ème éd., Paris, 1997, p. 310.
62
Op. cit., n°111.
35
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Stérilisante, la méthode littérale l'est en ce sens qu'elle fige le droit alors que
celui-ci doit être adapté au mouvement des faits sociaux qu'il régit. Il est
plus indiqué de laisser le juge procéder aux adaptations nécessaires.
B. INTERPRETATION TELEOLOGIQUE
I. Les principes
- La loi pénale doit être appliquée à tous les cas rentrant dans ses
termes ;
- La loi pénale ne peut être appliquée qu'aux seuls cas d'espèce rentrant
dans ses termes65.
a) La loi pénale doit être appliquée à tous les cas rentrant dans
ses termes
63
TPIY, Jugement CELEBICI du 16 novembre 1998, §161.
64
Voir Gaëtan di MARINO, Le recours aux objectifs de la loi pénale dans son application, in R.S.C., 1994, 505-
517.
65
Voir J. VERHAEGEN, Eléments de droit pénal et de procédure pénale, UCL, 1977-1978, p. 15.
36
Cours de Droit Pénal CT Manasi
b) La loi pénale ne peut être appliquée qu'aux seuls cas
rentrant dans ses termes
a) L'étude grammaticale
66
TPIY, Jugement CELEBICI, 16 novembre 1998.
67
Loc. cit.
37
Cours de Droit Pénal CT Manasi
signification technique sont employés dans leur sens usuel. Exemple:
complicité d'adultère.
b) La ratio legis
Le juge se référera avec intérêt à l'exposé des motifs, aux rapports des
commissions et aux interventions des rapporteurs et d'autres orateurs qui
proposent des amendements.
En effet, il y avait un projet qui disait : «Celui qui aura frappé, meurtri ou
mutilé». Le Conseil colonial supprima les mots «frappé» et «meurtri» parce que
d'après lui, ils étaient compris dans le mot «mutilé».
68
Traité de droit pénal et de criminologie, Tome I, Droit pénal général, Dalloz, Paris, 1963, n° 89.
69
Crim. 8 mars 1930, Gaz. Pal., 1930, I, 663.
70
3 août 1930, R.J.C.B., 1931, 125.
71
Elis, 16 mars 1943, 98. «Sur l'infraction de mutilation de cadavre», voir l'étude de V. SERVAIS, J.T.O., 1956,
20.
38
Cours de Droit Pénal CT Manasi
d) Interprétation évolutive
Si, après sa mise en vigueur, des faits se manifestent qui entrent dans sa
formule, la loi les punira, alors même qu'au moment de son élaboration, le
législateur ne pouvait pas se les représenter.
C’est ainsi qu’il a été décidé que le juge peut appliquer la loi pénale à des
faits que le législateur était dans l’impossibilité absolue de pressentir à
l’époque de la promulgation de la disposition pénale à la double condition
que la volonté du législateur d’ériger des faits de cette nature soit certaine et
que ces faits puissent être compris dans la définition légale de l’infraction73.
Cette adaptation des textes se fera au regard, d'une part, des progrès
techniques et, d'autre part, des besoins de la politique criminelle.
72
PIRON et DEVOS, se référant à la jurisprudence, donnent, sous l'art.112 du code pénal congolais, les détails
suivants:
«L'art.112 du code pénal constituait dans l'ancien code l'article 32 qui renvoyait aux peines prévues par l'article
précédent, l'article 31. Lors de l'élaboration du nouveau code pénal, le législateur a intercalé entre les articles
31 et 32 devenus respectivement 110 et 112, l'ancien article 31 bis devenu l'article 111. Comme il apparaît des
travaux préparatoires qu'il n'est pas entré dans l'intention du législateur de modifier les peines comminées par
l'ancien 32 (actuel 112), c'est sur la base de l'article 110 et non 111 qu'il faut apprécier la peine à appliquer en
cas d'infraction à l'article 112 du code pénal ». Léo, 30 janv.1945, R.J.C.B., 35 ; Elis., 15 mai 1945, R.J.C.B.,
163.
73
Cass. 15 mars 1994, Pas. I, 261 ; voir aussi Cass. 18 nov. 1992, Pas. I, 1269 et Cass., 11 sept. 1990, Pas. I, 36.
74
TPIY, Jugement CELEBICI, 16 novembre 1998, §412.
39
Cours de Droit Pénal CT Manasi
- Les dispositions pénales relatives à l'outrage public aux mœurs
(art.175-178 CP) sont applicables à des figures ou images véhiculées par des
vidéocassettes75.
- Les articles 74 et 75 du code pénal congolais sont appliqués aux
diffamations et injures par la télévision.
2) Exemples d'adaptation des textes aux besoins de la politique
criminelle :
75
Cass. b., 11 sept. 1990, Pas., 1991, I, 36 ; 15 mars 1994, Pas., I, 261.
76
Crim., 22 oct. 1936, D. II, 1937, 38.
77
Crim., 3 janv. 1969, D. 125.
78
Crim., 10 décembre 1970, D. 1972, 155, note de ROUJOU de BOUBEE et J.C.P., 1972, II, 17277, note
GASSIN.
79
Gabriel ROUJOU de BOUBEE, Jacques FRANCILLON, Bernard BOULOC et Yves MAYAUD, Code pénal
commenté, Dalloz, Paris, 1996, p. IX.
40
Cours de Droit Pénal CT Manasi
e) L'argument «a rubrica »
Cet argument consiste à découvrir le sens ou la portée d'un texte par la prise
en compte de la place qu'il occupe dans l'ensemble, notamment dans le code
pénal.
f) Le droit comparé
Les articles en question correspondent à notre article 322 du code civil, livre
III, relatif à la responsabilité envers l’acheteur, du vendeur qui connaissait
les vices de la chose.
80
Voir l'étude de D. MERKAERT, Du meurtre commis pour faciliter le vol ou en assurer l'impunité, in R.J.C.B.,
1933, 145 et s; J. VERHAEGEN, Meurtre pour faciliter le vol, in R.D.P.C. 1975, 785; Cass. b., 11 mai 1909,
Pas. I. 232 (Affaire WALMACQ).).
41
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Bien plus, les changements d'ordre politique sont de nature à rendre
caduques ou sans importance des dispositions pénales formellement en
vigueur. Ainsi, depuis le discours du Chef de l’Etat du 24 Avril 1990
annonçant la démocratisation, les dispositions punissant le port de noms à
consonance étrangère semblent ne plus être d'application, et le regain des
prénoms occidentaux dans la presse, dans les actes officiels et dans la vie
quotidienne en dit long à ce sujet. Et c’est ici que cette interrogation de
PORTALIS peut trouver application : « Peut-on se dissimuler l’influence et
l’utilité de ce concert délibéré, de cette puissance invisible par laquelle, sans
secousse, sans commotion, les peuples se font justice des mauvaises
lois ? »81
C. ANALOGIE
L'analogie est rejetée en droit pénal. Toutefois, l'analogie intra legem peut
être admise si elle va dans le sens de l'intérêt du prévenu. La jurisprudence
belge, par exemple, a pu retenir l’état de nécessité, qui est une cause de
justification, à partir de la notion de contrainte qui est expressément prévue
par l’article 71 du CPB.
Dans les relations du droit pénal avec les autres disciplines juridiques, il se
pose un problème d'harmonisation de ces rapports. Et compte tenu de son
originalité, de l'ensemble des règles et institutions qui lui sont propres, on
81
Discours préliminaire sur le projet de code civil, présenté le 1er pluviôse an IX, 1er janvier 1801, p. 4.
82
BOUZAT, op. cit., I, n° 88.
83
Voir JIMENEZ DE ASUA, L'analogie en droit pénal, in R.S.C., 1949, 189.
84
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n° 116 ; HAUS, op. cit., n° 151.
42
Cours de Droit Pénal CT Manasi
reconnaît au droit pénal l'autonomie. Cette autonomie du droit se manifeste
particulièrement en matière d'interprétation.
Le droit pénal emprunte aux autres branches certains termes mais ne leur
conserve pas le sens qu'ils ont dans leur discipline d'origine.
I. Fonctionnaire
85
Voir A. DE LAUBADERE, Traité de droit administratif, II, L.G.D.J., Paris, 1970, pp. 17-19.
86
Voir NYABIRUNGU mwene SONGA, La corruption des fonctionnaires publics : approche sociologique et
juridique, in R.J.Z., 1974, 44.
87
C.S.J., 18 août 1980, R.P.A. 64, en cause MP c/NAMEGABE et crts, cité par KATUALA, Extrait de 1500
décisions judiciaires, inédit.
88
C.S.J., 15 août 1979, Bull., 1984, 194 ; R.J.Z. 1979, 76.
89
Cass. 17 déc. 1996, R.W., 1996-1997, 1331 ; R.D.P.C., 1997, 1112.
43
Cours de Droit Pénal CT Manasi
meuble ce qui, étant immeuble par nature, par destination et même par
incorporation, reste susceptible d'être enlevé, déplacé par l'acte délictueux.
Se rend coupable de vol l'agent qui s'empare du sable, des pierres de
carrière, des métaux précieux... Il en est de même du locataire qui soustrait
des biens incorporés par le propriétaire, tels des lustres, des glaces ou des
installations sanitaires, etc.
En matière de confiscation spéciale, qui ne peut porter que sur les biens
mobiliers, la fiction du droit civil conférant le caractère immobilier par
destination à certains biens susceptibles d'être déplacés ne joue pas90. Un
panneau publicitaire n’est pas un immeuble par incorporation, mais plutôt
une propriété mobilière, compte tenu des facilités de son déplacement91.
III. Domicile
Il a aussi été jugé que le terme de « domicile » peut englober le bureau d’un
membre d’une profession libérale, en l’occurrence le cabinet d’avocat95.
90
Voir Cours de LAMY, p. 184 ; GARRAUD, Traité, n° 2565.
91
Cass. b. 5 fév. 1985, Pas. I. , 682.
92
LAMY, loc. cit.; MINEUR, op. cit., p. 159.
93
Crim., 24 juin 1893, D.P., 1895, I., 407; 4 janv. 1977, B.C., n° 6 ; 13 oct. 1982, B.C., n° 218.
94
Cass. 23 juin 1993, R.D.P.C., 1994, 208 ; 1995, 471-472
95
CEDH, 16 déc. 1992, Rev. Trim. dr. h., 1993, 467, J.T. 1994, 65, et la note de Edouard JAKHIAN et Pierre
LAMBERT, Les perquisitions dans les cabinets d’avocats.
44
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Ainsi, les tribunaux condamnent pour abus de confiance, même en cas de
nullité du contrat en vertu duquel les biens détournés avaient été remis. Par
exemple, celui qui détourne des biens qu'un enfant lui a confiés ne peut pas
s'exonérer en se prévalant de la nullité du contrat résultant de la minorité
d'âge96.
De même, l'émission de chèque sans provision est punie même lorsque celui-
ci est nul au regard du droit commercial. Ainsi, l'absence de date qui est une
cause de nullité selon la loi uniforme sur le chèque (D. 10 décembre 1951,
art. 1) n'empêche pas la répression97. C’est le même point de vue qui est
soutenu par la Cour de cassation de Belgique dans la même matière98.
V. Homicide involontaire
I. Justification du principe
Avec l'avènement des lois de plus en plus techniques dans des domaines
aussi variés que l'environnement, la fiscalité, le droit social, la géologie,
96
Crim., 12 nov. 1909, S. 1913.1.289 ; 18 févr. 1937, D. 1937. Voir VASSEUR, Des effets en droit pénal des
actes nuls ou illégaux, in R.S.C., 1951, p. 1 et s.
97
Léo, 11 déc. 1952, R.J.C.B. 1953, 30 ; 17 déc. 1953, J.T.O., 1955, 4, avec note sur l'autonomie du droit pénal;
lire l'étude d'E. LAMY, De l'autonomie du droit pénal, in R.J.C., 1964, 4 et s.
98
19 janvier 1976, J.T., 311. Dans le même sens, Cass. 5 mai 1982, Pas. I, 1017 ; Neufchâteau, 18 déc. 1984,
.R.D.P.C. , 1985, 596.
99
Paris, 14 janv. 1925, D.H., 205 ; 19 mars 1934, Gaz. Pal. 1. 991 ; Crim. 8 mars 1951, Bull. n° 71.
100
Cass. b. 11fév. 1987, R.D.P.C., 815.
101
M. VASSEUR, Les effets en droit pénal des actes nuls ou illégaux d'après d'autres disciplines, in R.S.C.,
1951, 1 et s.
45
Cours de Droit Pénal CT Manasi
l'économie ou la biologie, le principe d'autonomie connaît du recul. En effet,
il est difficile qu'en ces matières, le juge oppose à la technique sa propre
conception des choses102. Il suffit, pour nous en convaincre, de penser, à
titre d’exemple, au test de l’empreinte génétique qui permet de déterminer
l’ADN de chaque individu et qui, statistiquement parlant, ne peut ressembler
à aucun autre. Lorsque le magistrat ou le juge se retrouvent devant des
résultats d’une telle expertise, menée selon toutes les règles de l’art et dans
des conditions de fiabilité requises, leur marge de manœuvre est nulle.
Il ne pourra pas, par exemple, décider que le prévenu n’est pas auteur d’un
crime, alors que le rapport de l’expertise génétique relève l’identité entre le
code génétique de l’agent et celui qui est déterminé à partir de la goutte de
sang retrouvé sur la victime, sur le lieu du crime, ou sur l’arme du criminel
présumé.
Tel est le problème de conflits des lois pénales dans le temps ou de droit
pénal transitoire.
La matière est réglée par l'article 1er du code pénal qui dispose: «Nulle
infraction ne peut être punie de peines qui n'étaient pas portées par la loi
avant que l'infraction fut commise».
L'article 17, al. 5 de la constitution de 2006: «Il ne peut être infligé de peine
plus forte que celle applicable au moment où l'infraction a été commise».
Quant aux lois pénales de forme, « Nul ne peut être poursuivi, arrêté,
détenu ou condamné qu’en vertu de la loi et dans les formes qu’elle
prescrit »104.
A. LA LOI APPLICABLE
104
Art 17,al. 2 de la constitution de la RDC.
47
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Il faut comparer d'abord l'incrimination prévue par chaque loi, avant d'en
arriver aux pénalités.
a) Incriminations
Une loi nouvelle est sévère lorsqu’elle étend le champ d’application d’une
incrimination ou lorsqu’elle soumet le fait poursuivi à une répression plus
rigoureuse. Il en sera ainsi si une loi crée une nouvelle incrimination, si elle
supprime une cause de justification, si elle institue une circonstance
aggravante, si elle réduit le nombre des éléments constitutifs d'une
infraction, ou encore si elle aggrave le régime de la tentative ou de la
participation, etc. Dans toutes ces hypothèses, la loi nouvelle ne peut pas
s’appliquer aux infractions commises avant son entrée en vigueur105.
Une loi est plus douce si elle abroge l'infraction, crée une cause de
justification, supprime une circonstance aggravante ou augmente le nombre
des éléments constitutifs de l'infraction, punit moins sévèrement la tentative
ou la complicité, etc.
b) Pénalités
105
Cass. fr., crim. 21 avril 1982, Pauletto, Bull. crim., n° 99.
106
Crim., 6 juin 1974, Djian, Bull. crim., n° 207; PRADEL et VARINARD, op. cit., p. 137.
107
HAUS, op. cit., I, n°s 190 et s. ; HENNAU et VERHAEGEN, op. cit., n° 89.
48
Cours de Droit Pénal CT Manasi
7. En cas d'égalité de maxima, on considérera celle dont le minimum de
l'amende est le plus élevé.
8. Si l'égalité persiste, la peine la plus forte sera celle qui est accompagnée
des peines complémentaires ou accessoires.
En tout état de cause, une loi pénale nouvelle plus douce qui diminue une
pénalité doit être appliquée à des faits commis antérieurement à sa
promulgation mais non encore jugés108.
Il faut relever que ce principe relève du droit international, car il est prévu
par l’article 15-3 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
qui affirme l’application obligatoire des lois prévoyant des peines plus
légères109.
Il faut enfin signaler ici une difficulté : si la loi établit une hiérarchie des
peines principales, il n'en est pas de même des autres. En sorte que si de
part et d'autre il y a des peines complémentaires ou accessoires, il n'y aura
pas toujours facilité d'apprécier leur gravité. Le juge est alors contraint de
recourir à la comparaison in concreto110, « ce qui conduit parfois à des choix
difficiles pouvant être jugés contestables »111.
Lorsqu’une loi nouvelle est favorable au prévenu alors que les faits ne sont
pas encore définitivement jugés, elle doit recevoir application, à l’exclusion
de celle du moment des faits.
Par contre, une loi nouvelle portant aggravation des incriminations et des
peines prévues par la loi antérieure n’est applicable qu’aux faits commis
après son entrée en vigueur. La loi plus sévère ne concerne que l’avenir.113
La loi ancienne demeure d’application si elle est plus douce, donc favorable
au prévenu.
108
Cass. fr., crim., 21 avril 1982, Pauletto , Bull. crim., n° 99.
109
Voir Jean PRADEL et André VARINARD, Les grands arrêts du droit criminel, Tome I, Les sources du droit
pénal, l’infraction, Dalloz, Paris, 2ème éd. 1997, 120.
110
MERLE et VITU, op. cit., n° 168.
111
PRADEL et VARINARD, op. cit., 144.
112
Crim. 9 mars 1994, Bull., n° 93, obs. B. BOULOC, in R.S.C., 759-760.
113
Crim. 12 janv. 1994, Bull., n° 19.
49
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Dans un même texte, peuvent coexister des dispositions les unes plus
douces, et les autres plus sévères, et dans ce cas, il n’est pas toujours aisé de
déterminer le texte applicable.
C’est ainsi que la loi Béranger du 26 mars 1891, qui créait le sursis, en
même temps qu’elle instituait la petite récidive correctionnelle, a agi
rétroactivement pour la première institution (le sursis), et a disposé pour
l’avenir pour la seconde institution (récidive correctionnelle)114. Il s’agit ici de
« deux institutions très différentes, aux domaines d’application bien
distincts »115.
114
Paris, 6 et 21 avril 1891, S., 1891, II, 152 et 133, cité par Frédéric DESPORTES, Le nouveau droit pénal,
Tome 1, Droit pénal général, 5è éd. , Economica, Paris, 1998, pp. 272-3.
115
MERLE et VITU, 1977, n° 259.
116
Voir Frédéric DESPORTES et al. , op. cit., pp. 272-282 ; Crim. 10 mai 1961, Bull. n° 248 ; R.S.C. 1962, 92,
obs. LEGAL.
117
Crim., 5 juillet 1971, Martin, J.C.P. 1972. II. 17039, note VITU.
118
Crim. 6 mai 1942, Desroziers, J.C.P., 1942. II. 1910.
50
Cours de Droit Pénal CT Manasi
I. Les lois interprétatives
La doctrine dominante est que, les mesures de sûreté étant prises dans
l'intérêt des délinquants, elles doivent recevoir application même s'il s'agit
des faits commis antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle.
Ainsi, les mesures applicables aux mineurs reconnus coupables d’infraction
n’étant pas des peines et introduisant un système plus favorable pour le
délinquant, peuvent être appliquées à des faits antérieurs à l’entrée en
vigueur de la loi nouvelle121.
Le droit constitutionnel positif veut que l’acte ne soit punissable que s’il
constitue une infraction à la fois au moment des faits et au moment des
poursuites ou de la condamnation.
Ainsi, le prévenu ne peut être condamné pour des faits commis sous l'empire
d'une loi temporaire ou de circonstance qui vient d'être abrogée. Le
législateur ne saurait y déroger, s'agissant là d'un principe constitutionnel.
Il en serait autrement lorsque la loi qui incriminait les faits mis à charge
d’un prévenu a été abrogée, mais qu’au moment du prononcé du jugement
ces mêmes faits sont incriminés par une nouvelle loi. Le juge qui déclare ces
119
Elis., 12 janvier 1943, R.J.C.B., 41.
120
Crim., 21 oct. 1943, Civrais, S. 1944.1.29., note H. Mazeaud.
121
Crim., 11 juin 1953, Merbouche, J.C.P. 1953.II.7708, note J. BROUCHOT ; R.S.C, 1954.117, obs. Legal.
51
Cours de Droit Pénal CT Manasi
faits établis ne peut infliger que les peines prévues par la loi antérieure, si
celle-ci prévoit les peines les moins graves122.
Bien que la loi nouvelle soit plus sévère que la loi ancienne, le législateur
peut-il disposer expressément qu'elle rétroagira ?
Dans tous les cas, l’article 162 de la constitution qui dit : « La Cour
constitutionnelle est juge de l’exception d’inconstitutionnalité soulevée
devant ou par une juridiction.
Toute personne peut saisir la Cour constitutionnelle pour
inconstitutionnalité de tout acte législatif ou réglementaire.
Elle peut en outre, saisir la Cour constitutionnelle par la procédure de
l’exception de l’inconstitutionnalité invoquée dans une affaire qui la concerne
devant une juridiction.
Celle-ci sursoit à statuer et saisit, toutes affaires cessantes, la Cour
constitutionnelle ».
122
Cass., 7 nov. 1995, R.D.P.C., 1996, 1165.
123
Art. 112 de l'Acte constitutionnel de Transition et 198 de la Constitution Fédérale du Congo.
52
Cours de Droit Pénal CT Manasi
engagée, mais n'est pas encore terminée. La loi nouvelle acquiert-elle
aussitôt application ? La réponse est positive. Toutefois, il faut relever ici une
certaine imperfection terminologique chez des auteurs qui ne font pas la
distinction entre l'effet rétroactif et l'effet immédiat de la loi et qui, de
manière inexacte, disent ou écrivent que la loi nouvelle rétroagit124.
Cette solution doit être écartée, car les lois de procédure sont censées être
faites pour une meilleure administration de la justice et il serait contraire à
cet intérêt de maintenir en vigueur des lois dont, par la promulgation et
l’entrée en vigueur des nouvelles, on reconnaît les lacunes et les faiblesses.
Le rejet de cette solution s'explique par le tort qu'elle causerait aussi bien au
délinquant qu'à la société. Elle créerait une insécurité juridique pour le
justiciable et entraînerait des coûts injustifiés pour la justice.
124
Voir notamment GARRAUD, Traité, I, n° 160, DONNEDIEU de VABRES, 1959, BOUZAT et PINATEL,
II, n° 63 ; Traité, I, n° VIDAL et MAGNOL, II, n° 60
125
Crim., 8 déc. 1899, Jacob, Bull. crim., n° 356; S. 1902.1.101; PRADEL et VARINARD, op. cit., p. 178.
53
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Mais dès son entrée en vigueur, la loi nouvelle s'applique aux instances en
cours et à toutes celles qui naîtront par la suite.
Tel est le sens de l'effet immédiat de la loi nouvelle. Faite pour une meilleure
administration de la justice et dans l'intérêt de la collectivité et de l'individu,
la loi nouvelle ne peut ni attendre, ni rétroagir, à moins que le législateur, de
manière expresse, n'en décide autrement127. La loi nouvelle reçoit application
immédiate en ce qui concerne l'exécution des peines et des mesures de
sûreté, à la condition toutefois qu’en ce qui concerne les peines, la loi
nouvelle n’ait pas « pour résultat de rendre plus sévères les peines prononcées
par la décision de condamnation »128.
B. QUELQUES DEROGATIONS
Ainsi, on ne doit pas retenir l'application immédiate d'une loi nouvelle qui
changerait la juridiction d'appel à un prévenu déjà jugé en grande instance.
Elles donnent lieu à des discussions, certains estimant qu'elles ne sont pas
de forme mais plutôt de fond et qu'en conséquence, il faut appliquer la loi
nouvelle si elle est favorable au prévenu.
126
Cass., ch. Réun., 5 avril 1996, in R. D. P. C., 634.
127
Voir MERLE et VITU, op. cit., n° 181.
128
Article 112-2, 3° du NCPF.
129
Crim, 7 juil. 1871 ; S., 1876.1.85 ; 20 juin 1946, J.C.P. 1947. II. 3391, note HEBRAUD ; 23 mars 1960, B.,
164 oct. 1962, B., 276
130
Article 77 de l’Acte de Transition.
131
Voir LIKULIA, Droit pénal militaire zaïrois, I, L.G.D.J., Paris, 1977, p. 217.
54
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Elle sera favorable notamment si elle prévoit un mode de preuve plus facile
pour le prévenu ou si elle est plus exigeante à l'égard du ministère public132.
Comme nous l’avons écrit par ailleurs, il est évident que les lois relatives à la
preuve font partie de la procédure et, en conséquence, nous devons
reconnaître aux lois nouvelles une application immédiate, à moins d’une
disposition légale expresse et contraire.
Elles doivent être régies, non par une loi nouvelle (qui supprimerait par
exemple une voie de recours ou abrégerait le délai de l'exercer), mais plutôt
par la loi en vigueur lors du jugement.
A contrario, ces mêmes lois ne sont pas applicables aux recours formés
contre les décisions prononcées avant leur entrée en vigueur.
132
Voir LEVASSEUR, in R.S.C., 1966, 1 et s.; BOUZAT et PINATEL, op. cit., II, n° 1693.
133
Crim. 23 oct. 1807 cité par MERLE et VITU, op. cit., n°186. 15 déc. 1922, B., 414.
134
RADEL et VARINARD, op. cit., pp. 180 et s.
135
NCPF, art. 112 in fine.
55
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L'opposition est faite dans les dix jours qui suivent la signification du
jugement par défaut (art 89 et 90). Elle peut être faite par le condamné par
défaut, la partie civile et la partie civilement responsable.
Une loi nouvelle qui entrerait en vigueur après le jugement par défaut et
avant l'expiration du délai de 10 jours ne saurait remettre en cause ce droit
d'opposition. De même, une loi nouvelle ne saurait remettre en cause le délai
de dix jours ni le droit d'opposition de l'une des parties qui y ont droit.
Par contre, la loi nouvelle peut avoir un effet sur la forme d'exercice du droit
d'opposition.
L'article 91 prévoit que l'opposition peut être faite, soit par déclaration en
réponse au bas de l'original de l'acte de signification, soit par déclaration au
greffe du tribunal qui a rendu le jugement, soit par lettre missive adressée
au greffier du même tribunal.
La loi nouvelle peut disposer que la simple lettre missive adressée au greffe
est la seule forme possible. Celle-ci s'imposera à toute partie bénéficiaire de
l'opposition, à l'exclusion de la déclaration.
Tout ce que nous relevons au niveau de l'opposition vaut aussi pour l'appel.
Ainsi donc, et pour nous résumer, la nature des voies de recours, leurs cas
d’ouverture, les personnes admises pour les exercer et les délais de leur
exercice sont déterminés en vertu de la loi applicable au jour du prononcé de
la décision querellée136.
136
Voir aussi PRADEL et VARINARD, Les grands arrêtés, tome I, pp. 180-187 ; Crim. 26 juillet 1928, D.
1929. 1. 126 (arrêt QUILICI).
137
Op. cit., p. 15.
56
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Pour notre part, nous pensons qu’en l’état actuel de notre droit, on ne peut
nier que la prescription relève de la procédure, et donc de la bonne
administration de la justice. Aussi, toute loi y relative doit-elle recevoir une
application immédiate, qu’elle allonge ou raccourcisse la durée de la
prescription. Seule une disposition légale expresse imposerait une solution
contraire.
De même, le Nouveau code pénal français, en son article 112-2-2° les déclare
de forme et immédiatement applicables.
138
Art. 112-2, 4°.
139
Cour d’appel de Mons, 16 juin 1995, R. D.P.C., 1996, 220 ; Cass., 22 sept. 1999, R.D.P.C., 2000, 501.
140
Crim., 26 août 1940, G.P., 2, 23 ; R.S.C. 1940, 377, obs. DONNEDIEU de VABRES.
141
J. PRADEL, op. cit., n° 173.
142
Crim., 9 avril 1970, B, 115 ; 15 février 1973, B, 83.
57
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Nous allons d'abord exposer les systèmes doctrinaux, indiquer celui auquel
appartient le droit congolais, exposer, enfin, les mécanismes de la
coopération contre le crime.
Ce principe veut que la loi pénale s'applique à tous les individus, quelle que
soit leur nationalité ou celle de leurs victimes, qui ont commis une infraction
sur le territoire du pays dans lequel cette loi est en vigueur.
Ils sont de quatre ordres: l’intérêt social, une meilleure justice, le respect du
principe de légalité et l’exercice de sa souveraineté par l’Etat du lieu de la
commission de l’infraction.
a) L'intérêt social
Il convient que l'infraction soit jugée le plus près possible du lieu où elle a
été commise, car c'est là qu'il y a eu trouble social et c'est celui-ci qu'il faut
apaiser. Bien plus, l'effet intimidant que l'on attend de la peine est plus
assuré. BECCARIA ne dit pas autre chose lorsque, justifiant la compétence
territoriale, il écrit : « Un crime ne peut être puni que dans le pays où il a été
commis, parce que c’est là seulement et non ailleurs, que les hommes sont
forcés de réparer, par l’exemple de la peine, les funestes effets qu’a pu
produire l’exemple du crime »143.
143
Traité des délits et des peines, § 21.
58
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le juge local connaît sa loi nationale et pourra donc en faire une bonne
application alors que le recours au droit étranger, qu'on ne connaît pas ou
qu'on connaît difficilement, compromettrait sérieusement une saine justice.
Par ailleurs, la procédure est facilitée lorsqu'elle a lieu sur le territoire de
l'infraction. Les enquêtes peuvent être facilement conduites, les indices
peuvent être mieux recueillis et l’audition des témoins devient possible et
peu coûteuse.
Celui-ci ne pourra pas le punir car le crime n'a pas été commis sur son
territoire. Le pays du lieu de l'infraction ne pourra pas le punir, car cela
supposerait que le pays d'origine extrade le criminel. Or, comme nous
aurons l'occasion de le préciser, on n'extrade pas ses propres nationaux. On
verrait ainsi un délinquant dangereux échapper à toute justice répressive145.
C'est devant de telles insuffisances que d'autres systèmes ont été imaginés.
144
MERLE et VITU, op. cit., 194.
145
Ce problème s'est posé avec les supporters de Liverpool qu'on appelle les «hooligans» et qui lors de la finale
de la Coupe d'Europe des Clubs champions de football qui a opposé, le 29 mai 1985, leur équipe à Juventus de
Turin au stade bruxellois du Heysel, ont massacré les supporters italiens (plus de 40 morts) et ont regagné leur
59
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Ce système se dédouble selon que les personnes sont des délinquants ou des
victimes : on parle alors de personnalité active et de personnalité passive.
Ce système a été justifié en se fondant sur l'idée que la loi nationale est
mieux adaptée à la personne du délinquant et que le juge national sera plus
juste qu'un juge étranger.
Ainsi, lorsque les troupes congolaises ont séjourné au Tchad en 1983, leurs
membres relevaient du code de justice militaire congolais et non de la
législation tchadienne.
Selon ce principe, la loi pénale suit les ressortissants de l'Etat où elle est en
vigueur et s'applique à toutes les infractions dont ils sont victimes, où qu'ils
se trouvent.
Ce principe est justifié par l'idée que la loi pénale de la victime est la plus à
même d'assurer sa protection.
pays, l'Angleterre. La question se posait en ces termes : Doivent-ils être jugés en Angleterre, et cela est-il
possible, ou doivent-ils être livrés à la Belgique ? Voir D. VANDEN-BOSSCHE, Le droit pénal anglais
confronté aux crimes et délits commis par les hooligans au Heysel, in R.D.P.C., 1986, 447-463. Finalement, le
09 septembre 1987, la justice britannique a extradé 25 hooligans en Belgique pour y être jugés.
146
Article 113-6 du NCPF et article 689 du code français de procédure pénale.
60
Cours de Droit Pénal CT Manasi
I. Définition
Parmi les atteintes les plus graves à l'ordre public international, figurent
certainement les crimes définis par le statut portant création du Tribunal
militaire international de Nuremberg, chargé de juger les nazis. Il s'agit des
crimes contre la paix, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.
147
Voir Gilbert GUILLAUME, La compétence universelle : formes anciennes et nouvelles, in Mélanges offerts à
Georges LEVASSEUR, Droit pénal, droit européen, Gazette du Palais – Litec, Paris, 1992, pp. 31 et s.
61
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le Tribunal Militaire International pour l’Extrême-Orient fut institué le 19
janvier 1946, et installé à Tokyo. Sa charte était fortement inspirée du Statut
de Nuremberg et prévoyait les crimes de même nature, mais seuls les
individus accusés de crimes contre la paix devaient comparaître.
Les crimes de guerre sont des atrocités et délits commis sur des personnes
ou des biens en violation des lois et usages de la guerre tels que les
assassinats, les mauvais traitements de prisonniers de guerre, les meurtres
d'otages, la destruction sans motif des cités, des villes ou villages, etc.
Les crimes contre l'humanité sont des atrocités et délits tels que l'assassinat,
l'extermination, la mise en esclavage, la déportation, l'emprisonnement, la
torture, le viol ou autres actes inhumains commis contre les populations
civiles pour leur appartenance politique, ethnique, raciale, philosophique ou
religieuse148.
148
Article 2 de la loi n° 10 du Conseil de Contrôle.
149
Voir Gilbert GUILLAUME, La compétence universelle : formes anciennes et nouvelles, in Mélanges offerts
à Georges LEVASSEUR, droit pénal, droit européen, Gazette du Palais – Litec, Paris, 1992, p. 31.
150
Recueil des Traités, Société des Nations, vol. 12, p. 371.
62
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Peuvent se rendre coupables de la violation de ces règles aussi bien les
Etats, leurs dirigeants que leurs agents151, ainsi que des particuliers.
III. La répression
Toutes les peines ont été exécutées, y compris celle prononcée contre
GOERING qui, condamné à mort, a préféré exécuter lui-même la sentence,
en se suicidant.
Le droit international pénal n'est pas à confondre avec une autre discipline
plus ancienne qu'on appelle « droit pénal international ». « Il s'attache aux
151
S. GLASER, Droit international pénal conventionnel, Vol. II, Bruylant, Bruxelles, pp. 7 et 244.
152
Isabelle FLANDROIS, Le procès de Tokyo, in Les procès de Nuremberg et de Tokyo, sous la direction
d’Annette WIEVIORKA, pp. 159-177.
63
Cours de Droit Pénal CT Manasi
conflits d'autorité (compétence internationale, extradition, effets
internationaux des jugements répressifs...) et aux conflits de lois pénales»153.
Cette controverse peut disparaître à notre avis si l'on procède comme nous
avons fait :
- Avoir une vue théorique exacte des systèmes en présence. C'est ce que
nous venons de faire dans le paragraphe précédent ;
- En faire une application fidèle aux textes sans jamais perdre de vue que
ceux-ci doivent être strictement interprétés.
A. SIEGE DE LA MATIERE
B. SYSTEME EN VIGUEUR
I. Principe de territorialité
Il est renforcé par l'article 14 CC, Livre 1er (D. du 20 février 1891) : «Les lois
pénales ainsi que les lois de police et de sûreté publique obligent tous ceux
qui se trouvent sur le territoire de l'Etat.»157
153
J. PRADEL, op. cit., n° 49.
154
Op. cit., p. 16.
155
Cours, op. cit. p. 160.
156
Voir notes des étudiants, année académique 1980-1981.
157
Il faut relever que le titre II du code civil, livre I dont fait partie l'article 14, n'a pas été abrogé par le code de
la famille (Voir l'article 915 de ce même code)
64
Cours de Droit Pénal CT Manasi
a) Définition du territoire
Les forces armées stationnant en pays étranger non ennemi sont considérées
comme se trouvant sur le territoire national.
La question que l'on peut se poser est celle de déterminer la loi applicable
lorsque les divers éléments constitutifs de l'infraction ont été réalisés en
partie en République Démocratique du Congo et en partie à l'étranger.
Il suffit, pour que la loi congolaise soit applicable, qu'un des éléments
constitutifs ait été réalisé en République Démocratique du Congo, et
qu'aucun jugement définitif n'ait été rendu à l'étranger sur le même fait et
quant à la même personne.
- Faire croire à certains diplomates qu’ils sont au-dessus des lois du pays
d’accueil, alors que c’est un principe de droit international que les étrangers,
y compris les diplomates, qui se trouvent sur le territoire d’un Etat sont
tenus de respecter ses lois, même si cette dernière catégorie d’étrangers
158
Voir loi n° 74/009 du 10 juillet 1974, portant délimitation de la Mer Territoriale de la République
Démocratique du Congo in J.O., n° 16 du 15 août 1974, p. 689.
159
Cité par Philippe CAHIER, Le droit diplomatique contemporain, Droz, Genève, 164, p. 188.
65
Cours de Droit Pénal CT Manasi
bénéficient d’un traitement spécial (immunité de juridiction) leur permettant
d’accomplir leur mission ;
- Faire croire à l’opinion que les immeubles d’ambassade font partie d’un
territoire autre que celui où ils se trouvent160.
1) Si l'infraction a été commise par ou contre une personne qui ne fait pas
partie de l'équipage ;
2) Si l'infraction a troublé la tranquillité du port ;
3) Si les autorités du navire ont demandé l'intervention des autorités
locales.
II. Correctifs
160
Loc. cit.
161
Article 3, alinéa 1er .
66
Cours de Droit Pénal CT Manasi
prévoit une peine de servitude pénale de plus de deux mois, peut être
poursuivie et jugée en République Démocratique du Congo, sauf application
des dispositions légales sur l'extradition ».
Concrètement et en clair, cela veut dire que le tribunal congolais peut juger
toute personne, quelle que soit sa nationalité ou celle de sa victime, qui se
sera rendue coupable, à l'étranger, d'une infraction présentant une certaine
gravité.
162
G. MINEUR, op. cit., p. 25.
67
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L’application du principe non bis in idem ne requiert pas seulement que les
nouvelles poursuites aient pour objet les mêmes faits que ceux de la cause
précédemment jugée, mais également que les premières poursuites
définitivement jugées et les secondes poursuites concernent la même
personne163.
163
Cass, 7 Nov. 1995, R.D.P.C., 1996, 751.
164
La mise à jour du code pénal réalisée en 1982 par le Service de Documentation du Département de la justice
parle de «5 ans au moins». Cette confusion, due certainement à une erreur matérielle, fait dire au texte le
contraire du sens voulu par le législateur.
165
G. MINEUR, loc. cit.
166
Voir notamment MERLE et VITU, op. cit., n° 195.
68
Cours de Droit Pénal CT Manasi
importante dans l'extradition. Cela ne saurait cependant nous faire perdre
de vue qu'il existe d'autres formes de collaboration internationale contre les
crimes167.
A. L'EXTRADITION168
I. Définition
L'extradition est une procédure internationale par laquelle un Etat (dit Etat
requis) accepte de livrer un individu se trouvant sur son territoire à un autre
qui en a fait la demande (Etat requérant) afin que celui-ci puisse le juger ou,
s'il est déjà condamné, lui fasse purger sa peine ou exécuter une mesure de
sûreté169.
L'extradition se base juridiquement sur les traités que les Etats concluent
entre eux afin de se livrer mutuellement les délinquants les plus dangereux.
a) L'Etat requérant
167
En matière de coopération internationale contre le crime, l’Europe peut se poser en modèle. Voir à ce sujet La
coopération inter-étatique européenne en matière pénale, Les instruments juridiques du Conseil de l’Europe,
Recueil de textes compilé et édité par EKKEHART MÜLLER – RAPPARD et M. CHERIF – BASSIOUNI, 2
vol. Martinus Nijhoff, Dordrecht, Boston, London, 2e éd. 1991, 1725 p.
168
Sur cette question, on peut lire l'intéressante étude de J. VERHAEGEN, Le refus d'extrader au regard de la
législation belge, in Rapports belges au XIème Congrès de l'Académie internationale de droit comparé, Caracas,
29 août - 5 septembre 1982, Bruxelles, 1982, 797-820 ; Elisabeth ROLIN, Développements récents du contrôle
du Conseil d’Etat en matière d’extradition, in R.S.C., 1994, 491-501.
169
Se référer, à titre d’exemple, à la Convention européenne d’extradition, ouverte à la signature le 13 décembre
1957, et entrée en vigueur le 18 avril 1960.
69
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Enfin, outre les Etats, l’extradition (ou le transfert) des individus coupables
des mêmes violations est désormais possible à la requête des tribunaux
pénaux internationaux ad hoc (La Haye et Arusha notamment), et de la Cour
pénale internationale.
b) L'Etat requis
c) L'individu recherché
Une opinion encore dominante veut que l'Etat n'extrade pas ses propres
nationaux. Le CP russe de 1997 dispose expressément que « Les citoyens de
la Russie qui ont commis un crime sur le territoire d’un Etat étranger ne
peuvent pas être extradés vers cet Etat »170.
Mais cette pratique des Etats est contestée par la majorité de la doctrine171,
et un courant existe pour l’extradition des nationaux. L’Institut de droit
international (session d'Oxford, 1880), de même que la Conférence
internationale pour l'unification du droit pénal (Copenhague, 1935), ont
exprimé un vœu favorable à la disparition de ce principe.
170
Article 13, 1.
171
Voir A. HUET et R. KOERING-JOULIN, Droit pénal international, PUF, Paris, 1994, p. 357 ; Michel
MASSE, L’extradition des nationaux, in R.S.C., 1994, 798-804.
70
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L'Angleterre, les Etats-Unis et l'Italie acceptent de livrer leurs propres
nationaux, à condition d'une réciprocité qu'ils ne trouvent presque nulle
part. Les Etats romano-germaniques sont généralement hostiles à une telle
remise172.
172
Laurent DESSARD, L’extradition des nationaux, in R.P.D.P., 1999, 317-327.
173
Voir Jacqueline SACOTTE, Le nouveau code pénal de la République de Cuba (1979), in R.S.C., 1984 , 580-
585.
174
Michel MASSE, La souveraineté nationale, in R.S.C., 1999, 908.
175
GLASER, Droit international pénal conventionnel, Vol. II, Bruylant, 1978, p.52.
71
Cours de Droit Pénal CT Manasi
fois par la loi belge sur l'extradition du 1er octobre 1833. Depuis lors, il
figure dans de nombreux traités et lois de divers pays.
«Il est devenu une véritable coutume internationale. Ainsi, même lorsqu'un
traité d'extradition ne le rappelle pas de manière expresse, il passe en général
pour sous-entendu ...
On peut donc soutenir que le principe selon lequel l'extradition ne s'applique
pas aux infractions politiques constitue à présent une règle générale du droit
international.»176
Toutefois, malgré cette généralité du principe et cette vigueur dans son
affirmation, nous devons relever, d'abord la difficulté de définir l'infraction
politique et constater, ensuite, le recul dont ce principe souffre à la suite
notamment du développement du terrorisme.
«Par infractions politiques, dit HAUS, on doit entendre les crimes et les délits
qui portent uniquement atteinte à l'ordre politique.»179
176
Op. cit., pp. 52-53.
177
HAUS., Principes généraux, op. cit., I, n° 345.
178
Cité par Fr. TULKENS, op. cit., p. 184.
179
Op. cit., I, n° 346.
180
Cass., 18 nov. 2003, J.T., 810 ; J.L.M.B., 2003, 1788 ; R.D.P.C., 2004, 526-527 et 835.
72
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L'infraction complexe existe lorsqu'un seul et même fait a caractère double,
lorsqu'il viole à la fois le droit commun et le droit politique181.
On l'appelle aussi infraction politique par mobile. Cette doctrine est dite
subjective car c'est le but visé par l'agent, sa volonté qui confère à l'acte son
caractère politique. Nous pouvons citer, à titre d’exemple, l’attentat contre
les particuliers en vue d'attirer l'attention de l'opinion publique.
Ce sont des infractions de droit commun inhérentes à une action politique. Ces
infractions se commettent généralement à l'occasion de l'insurrection et des
guerres civiles : destructions des propriétés publiques et privées, massacres
des adversaires, enlèvement des armes d'un arsenal, etc.
Tous les actes de la lutte, autorisés par les usages de la guerre, doivent être
considérés comme des crimes politiques, ou pour mieux dire, ils ne forment
qu'un seul et même crime de cette espèce; car ils sont les éléments
constitutifs de l'insurrection qui a un caractère essentiellement politique184.
Ces infractions ne donneraient lieu à l'extradition que si elles constituaient
«des actes de barbarie odieuse et de vandalisme défendus suivant les lois de
la guerre et seulement lorsque la guerre a pris fin.»185
181
MERLE et VITU, op. cit., n° 227 ; HAUS, op. cit., I, n° s 353-354.
182
Cass., 18 nov. 2003, R.D.P.C., 2004, 835, et 526-527.
183
Cass., 18 nov. 2003, R.D.P.C., 2004, 835, et 526-527.
184
HAUS, op. cit., I, n° 355.
185
Institut de droit diplomatique, Oxford, 1880.
73
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le respect du principe de la non-extradition du délinquant politique est un
corollaire du droit d'asile.
* L'article 1er qui énumère une série d'infractions qui ne pourront, en aucun
cas, être couvertes, pour les besoins de l'extradition, par leur caractère
politique :
Il s'agit ensuite de tout acte grave contre les biens, autres que ceux visés à
l'art. 1er lorsqu'il a créé un danger collectif pour des personnes. La tentative
et la participation à ces deux types d'infractions ne peuvent non plus
bénéficier du caractère politique pour être soustraites à l'extradition.
L'Etat requis, s'il n'extrade pas, doit néanmoins poursuivre ou faire exécuter
sa peine au délinquant.
Elle fut introduite par la loi belge du 22 mars 1856 et reprise, depuis le
traité d'extradition franco-belge de la même année, par la plupart des traités
d'extradition. Elle est ainsi formulée: « Ne sera pas réputé délit politique ni
fait connexe à semblable délit l'attentat contre la personne du chef d'un
gouvernement étranger ou contre celle des membres de sa famille lorsque cet
attentat constitue le fait de meurtre, d'assassinat, ou d'empoisonnement ».
3. La controverse
186
Voir F.TULKENS, in R.D.P.C., Numéro Spécial «Extradition et terrorisme», 1980, pp. 86-87.
187
Sur la « clause belge » et son extension, voir A. VITU, Le meurtre politique en droit international et
extraditionnel, in Mélanges offerts à Georges LEVASSEUR, op. cit., p. 365.
188
Article cité, pp. 87-88.
75
Cours de Droit Pénal CT Manasi
point nommé . D'autres, par contre, trouvent cette convention dangereuse
189
Pour notre part, nous constatons que bientôt trente ans après son entrée en
vigueur, la Convention a fait ses preuves comme un mécanisme valable
contre le terrorisme, alors que la démocratie et les libertés publiques en
Europe ne se sont jamais aussi bien portées.
Pour que l'extradition soit accordée, l'Etat requérant doit produire les pièces
justificatives nécessaires: jugement de condamnation ou tout autre acte de
procédure établissant les poursuites engagées contre la personne
recherchée191.
Tous ces actes ne produiront leurs effets qu'après avoir été rendus
exécutoires par la Cour d'Appel, qui désignera le magistrat, l'officier ou
l'agent des Forces Armées, chargé de l'exécution, et le lieu de détention du
délinquant.
Dans ce cas, les pièces justificatives doivent être transmises endéans trois
mois, délai au-delà duquel le délinquant sera mis en liberté193.
189
Voir les points de vue de Me VARAUT, avocat à La Cour d’appel de Paris, in R.D.P.C. Numéro spécial déjà
cité, p. 99 ; DU JARDIN, loc. cit.
190
Voir les points de vue de Mme F. TULKENS, professeur à l’UCL et, aujourd’hui, juge à La Cour
Européenne des Droits de l’homme, même revue, p. 92 ;
191
Article 3 du décret du 12 avril 1886.
192
Article 5, al. 2 du même décret.
193
Article 5, al. 3
194
Article 6, al. 4.
76
Cours de Droit Pénal CT Manasi
On remarquera que l'avis des tribunaux n'est pas demandé, et que les voies
de recours ne sont pas prévues.
Une législation plus adaptée aux exigences des droits de l'homme et des
libertés individuelles devrait permettre l'intervention du juge pour avis ou
décision à une phase déterminée de la procédure, et des voies de recours
aussi bien contre les décisions du juge que celles du gouvernement devraient
être prévues.
Il faut signaler que les polices nationales, surtout celles des pays partageant
les frontières, collaborent entre elles et s'échangent des informations, voire
des délinquants.
Les Bureaux Centraux Nationaux (B.C.N.), à raison d'un dans chaque pays
membre, assurent la liaison entre elle et les polices nationales, et peuvent
communiquer entre eux.
195
Rob BOONE, Gary LEWIS, et Ugljesa ZVEKIC, Mesure de la délinquance et lutte contre la criminalité en
Afrique australe, in Forum sur le crime et la société, Office des Nations Unies contre la drogue et le crime,
vol. 3, numéros 1 et 2, décembre 2003, 155.
196
Op. cit.
77
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L'Interpol possède des fichiers extrêmement détaillés sur les délinquants
internationaux et assure à ses membres une diffusion rapide des
renseignements qu'elle détient197.
197
Sur la coopération policière en Europe, voir notamment H.D. BOSLY et G. RENAULT, La coopération
policière et judiciaire, in La justice pénale et l’Europe, Travaux des XVè journées d’études juridiques Jean
DABIN, Bruylant, Bruxelles, 1996, p. 339.
198
Voir G. DEMANET, Considérations sur l’entraide judiciaire en matière pénale, in R.D.P.C., 1997, 809-831.
199
Art. 29 du Statut du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, et 29 du TPIR.
78
Cours de Droit Pénal CT Manasi
III. La coopération internationale dans le cadre de l'ONU200
200
Voir l'Organisation des Nations Unies et la prévention du crime, Nations Unies, New York, 1991.
79
Cours de Droit Pénal CT Manasi
D e u x i è m e P a r t i e . L'INFRACTION
Le code pénal congolais ne définit pas l'infraction. Il en est d'ailleurs de
même des codes pénaux belge et français, respectivement de 1867 et de
1810.
Nous retiendrons plutôt cette définition de HAUS: «On entend par infraction
la violation d'une loi pénale, l'action ou l'inaction que la loi frappe d'une
peine»201.
Toutes les fois que la violation de la loi n'est pas assortie d'une peine, elle ne
peut constituer une infraction pénale. Ce n'est pas le caractère immoral ou
antisocial de l'acte qui donne à celui-ci sa qualité infractionnelle, mais
uniquement la sanction pénale dont il est frappé.
La démarche des autorités judiciaires, devant les faits qui leur sont
rapportés ou qu'elles ont elles-mêmes constatés, consistera à les confronter
avec la définition que la loi fait de telle infraction. En d'autres termes, elles
doivent qualifier le cas d'espèce qui leur est soumis.
Outre cette qualification des faits, l'autorité judiciaire doit pouvoir qualifier
l'infraction. Cela est une nécessité très ressentie dans les systèmes
201
Op. cit., I, n°185.
202
Article 14 du code pénal russe de 1997.
203
MERLE et VITU, op. cit., 1997, n° 384.
80
Cours de Droit Pénal CT Manasi
juridiques qui distinguent les crimes, les délits et les contraventions. Mais la
qualification des infractions est aussi nécessaire pour différencier les
infractions de droit commun d'une part, des infractions politiques, militaires,
terroristes, d'affaires et des crimes internationaux, d’autre part.
§ 1. LA QUALIFICATION DES FAITS 204
204
Sur cette question, on lira avec intérêt la brochure de LIKULIA BOLONGO, Méthodes d'approche de la
qualification des faits en droit pénal, P.U.Z., 42 pages.
205
MERLE et VITU, op. cit., n°s 385 et s.
206
C.S.J.,11 juillet, 1977, Bull.,1978,76.
207
L'shi, 3 avril 1969, R.J.C., 278, C.S.J., 1972, Bull.,1973, 64.
208
Cass., 3 mars 1993, J.T., 1993, 758 et la note, R.D.P.C., 1994, 1334.
81
Cours de Droit Pénal CT Manasi
d) La qualification d'un fait ne peut se faire aux dépens des droits de la
défense. En cas de requalification au niveau du jugement aggravant le sort
du prévenu, les délais prévus par la loi doivent lui être accordés afin qu'il
réponde de cette qualification nouvelle209.
209
Kin, 19 déc. 1966, R.J.C., 1967, 247; C.S.J. 18 août 1975, Bull.,1976, 98; 2 avril 1977, Bull., 1978, 30; 2 déc.
1983, cité par DIDUNDA, Répertoire général de jurisprudence de la Cour Suprême de Justice, 1969-1985, Ed.
C.P.D.Z., Kinshasa, 1990, 89.
210
L’article 64 du CPF de 1810 utilise cette expression, alors que le NCPF (art. 122-1) comporte « le moment
des faits ». Ce qui, écrivent MERLE ET VITU, « revient au même », op. cit., 1997, n° 386.
211
Voir LIKULIA, op. cit., p.14.
212
Crim. 27 février 1836, S.1.526; Corr. Seine, 14 déc. 1912, R.T.D.C., 1913, 218.
213
Colmar, 25 mars 1958, J.C.P., 1958, IV.156; D.1959.196, note Chavanne.
214
Léo, 20 juillet 1950, J.T.O., 1951, 86; R.J.C.B., 1951, 89.
215
C.S.J., 9 déc. 1979, cité par LIKULIA op. cit., 15.
216
Crim. 25 nov. 1927, S.1929.1.153, note Roux.
82
Cours de Droit Pénal CT Manasi
B. LES QUALIFICATIONS MULTIPLES
Cette situation se présente dans le cas d'un individu qui porte des coups et
cause des blessures volontaires et n'assiste pas par la suite sa victime.
De même, on ne peut poursuivre pour recel le voleur qui garde chez soi les
objets qu'il a frauduleusement soustraits. C'est dans la nature des choses
qu'il les ait gardés, car s'il les a volés, c'était pour se les approprier.
217
MERLE et VITU, op. cit., 1997, p. 513; PRADEL, Droit pénal, I, Cujas, Paris, 1977, n° 235.
218
HAUS, op. cit., I, n° 381.
83
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Ainsi, les coups mortels tombent sous la qualification de meurtre s'ils ont été
portés dans l'intention de tuer (art.44 du CP). Ils constitueront un
assassinat si l'intention était accompagnée de la préméditation (art.45). Les
mêmes faits formeront l'homicide préterintentionnel si la mort est survenue
alors que l'agent n'avait aucune intention de la causer (art.48). Enfin, on
appliquera aux mêmes faits la qualification d'homicide par imprudence
prévu par les articles 52-53 de notre code pénal si la mort résulte d'un
défaut de prévoyance ou de précaution.
On peut faire le même constat à propos des coups et blessures non mortels.
Selon l'élément moral qui les caractérise, ils connaîtront des qualifications
différentes: coups et blessures prémédités (art.46, al.2), tentative de meurtre
(art.4 et 44), ou enfin, coups et blessures par imprudence prévus et punis
par l'article 54 CP.
Ces qualifications sont dites alternatives car une seule d'entre elles peut être
retenue. Et dès qu'elle l'est, toutes les autres sont exclues.
219
MERLE et VITU, op. cit., 1997, n° 391.
84
Cours de Droit Pénal CT Manasi
a) Le concours idéal d'infractions
Cette hypothèse est réglementée par l'article 20 al.1 CP: «Lorsque le même
fait constitue plusieurs infractions, la peine la plus forte sera seule prononcée».
2) Le délit collectif
3) Le délit continué
220 ère
I Inst. Kasaï, 13 sept. 1950, R.J.C.B., 1951, 26.
221
J. VERHAEGEN, Cours de droit pénal et de procédure pénale, Notes d'étudiants, U.C.L., Louvain-la-Neuve,
1977- 1978, p.117.
222
Dans ce genre d'hypothèse, MERLE et VITU utilisent plutôt l'expression «délit continué» (op. cit., n° 361).
Nous nous en tiendrons à la terminologie de départ.
85
Cours de Droit Pénal CT Manasi
pour réaliser une escroquerie (art.98 CP). Ou encore de faux et de son usage
par le même délinquant223 pour commettre une infraction.
Le délit continué peut être aussi constitué par deux infractions non
intentionnelles reliées entre elles par un lien de causalité. Tel sera le cas si
un accident de la route dû à l'ivresse au volant entraîne la mort. Une seule
peine sera prononcée224.
L’article 20, al. 1er vise en réalité le concours idéal proprement dit: le même
fait constitue plusieurs infractions.
5) Qualifications et sanctions
La question est de savoir si en cas de concours idéal proprement dit (art. 20,
al. 1er), il s’agit d'une infraction unique ou d'une sanction unique. Il est
arrivé qu'on dise aussi bien en doctrine227 qu'en jurisprudence228, qu'en cas
de concours idéal, l'infraction est unique et la peine prononcée aussi unique,
car on applique la plus forte.
223
C.S.J., 22 janv. 1976, Bull., 1977, 17 en cause M.P c/Ngia NDEME NSILANGA.
224
Cass. belge, 19 sept. 1968, Pas., 1969, I, 72.
225
Cass., 7 févr. 1990, Pas., I, 669 ; 3 oct. 1990, Pas., 1991, I, 109 ; 10 mars 1992, Pas., I, 614 ; 29 sept. 1992,
Pas. I, 1069 ; 1er mars 1994, R.W. ; 1994-1995, 467 et note SPRIET.
226
Marie-Aude BEERNAERT, Le nouvel article 65 du Code pénal, in R.D.P.C., 1995, 679.
227
HAUS., op. cit., I., n° s 386-387.
228
R.J.C., 1969, 278.
229
Méthodes d'approche, op. cit., pp. 21-22.
86
Cours de Droit Pénal CT Manasi
N° HYPOTHESES FAITS INFRACTIONS QUALIFICATIONS SANCTION
1
Concours Un même fait Plusieurs Plusieurs Une
idéal infractions qualifications sanction
(la plus
forte)
2
Plusieurs faits Plusieurs
Délit collectif ( de même infractions Une Une
nature pénale) (identiques) qualification sanction
3
Plusieurs faits Plusieurs Plusieurs Une
Délit (de nature infractions qualifications sanction
continué pénale (la plus
différente) forte)
b) Le concours matériel
Le concours matériel d'infractions est prévu par l'article 20, al.2 du code
pénal. Il est réalisé lorsqu'un même sujet accomplit plusieurs infractions
distinctes, non réunies par une même intention délictueuse et dont aucune n'a
encore fait l'objet d'un jugement définitif.
230
Les réformes, les dévaluations et les érosions monétaires qui ont émaillé l’histoire de la monnaie congolaise
sont telles que ce chiffre n’est mis là que par horreur du vide. Par ailleurs, la démission du législateur qui, dans
87
Cours de Droit Pénal CT Manasi
- En ce qui concerne la servitude pénale subsidiaire, la peine ne pourra
dépasser 6 mois.
- La peine de mort et de SP à perpétuité absorberont toute peine privative
de liberté.
Une autre question qu'il faut résoudre et qui ne concerne que le concours
matériel est celle de savoir si la peine absorbante est celle prévue par la loi
ou celle effectivement prononcée. La doctrine et la jurisprudence enseignent
que c'est celle effectivement prononcée. Et c'est donc celle-là qui absorbera
la plus faible et sera appliquée. Si par exemple un individu poursuivi du chef
d'attentat contre la vie du Chef de l’Etat (art. 193, al.2) et d'assassinat,
n'était puni par le fait des circonstances atténuantes que de 15 ans pour
l'assassinat et de la S.P. à perpétuité pour l'attentat, c'est cette dernière
peine qui absorberait les 15 ans231.
une matière ne relevant que de lui, au nom de la légalité, a préféré se reposer sur des textes réglementaires, ne
peut être que déplorable.
231
Voir E. LAMY, Cours, op. cit., p. 272; J. LARGUIER, Chronique de jurisprudence, in R.S.C., 1975, 1002.
88
Cours de Droit Pénal CT Manasi
comparer cette suggestion avec l'art. 63 du CPB qui dispose: « La peine la
plus forte est celle dont la durée est la plus longue. Si les peines sont de même
durée, les travaux forcés et la réclusion sont considérés comme des peines
plus fortes que la détention ».
Bien que notre droit pénal ignore la division tripartite des infractions, nous
en dirons un mot, compte tenu de son importance dans les législations
étrangères, avant de distinguer les infractions de droit commun, les
infractions politiques, les infractions militaires, les infractions terroristes, les
infractions d'affaires, et enfin, les crimes internationaux.
Cette division des infractions est censée être fondée sur la gravité des
infractions, et la gravité elle-même est indiquée par la peine fixée dans le
texte.
Et la loi détermine, bien entendu, les peines qu'il faut considérer comme de
police, correctionnelles ou criminelles.
Cette division tripartite est très répandue dans le monde. Elle a des
conséquences pratiques notamment en ce qui regarde les règles de
compétence: les contraventions relèvent du tribunal de police, les délits du
tribunal correctionnel, et les crimes de la Cour d'assises.
232
C.S.J., août 1979, Bull., 1984,1 20 en cause M.P. c/TEPATONDELE et crts.
233
La disposition correspondante du CPB est l'article 1er.
234
Article 111-1.
89
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le fondement de la division tripartite doit être lié aux conceptions de l'Ecole
classique sur la répression. Les délinquants relèvent de trois catégories:
- Ceux dont les actes sont d'une gravité telle qu'on ne peut en attendre
aucun amendement;
- Ceux dont les actes sont d'une gravité moyenne et qui sont capables de
correction et
- Enfin, ceux qui commettent des peccadilles et qu'un simple
avertissement peut ramener sur le droit chemin.
235
Le Portugal dispose d'un nouveau code pénal depuis le 23 septembre 1982. Il consacre la distinction entre les
crimes d'une part, et les infractions réglementaires d'autre part.
90
Cours de Droit Pénal CT Manasi
également des infractions de toute nature commises par des militaires et
punies conformément aux dispositions du code pénal ordinaire ».
Précisons enfin que le juge civil est compétent pour juger le délit d'audience
commis par un militaire.
236
S. GLASER, Droit international pénal conventionnel, vol. II, Bruylant, Bruxelles, 1978, pp. 36-37.
237
Article 421-1 NCPF.
91
Cours de Droit Pénal CT Manasi
E. INFRACTIONS DE DROIT COMMUN ET INFRACTIONS D'AFFAIRES
Les atteintes les plus graves à l’ordre public international sont appelées
crimes internationaux. Au sommet de la pyramide se trouvent le génocide, les
crimes de guerre et le crimes contre l’humanité, qui forment par ailleurs la
compétence matérielle de la Cour Pénale Internationale.
238
Jean-Claude FOURGOUX, La détection, preuve et droit de la défense en matière de criminalité d’affaires, in
R.I.D.P., 1982, 116.
239
Jean LARGUIER, Droit pénal général, 16e éd. Mémentos Dalloz, Paris, 1997, p. 46.
92
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Un acte réunissant tous les éléments constitutifs d'une infraction sera
considéré comme licite s'il est couvert par une cause de justification. La
cause de justification rend l'acte licite, légitime, conforme au droit. Elle
«détruit la criminalité intrinsèque du fait, malgré ses conséquences
préjudiciables, et quoiqu'il ait été exécuté avec connaissance et volonté ...
.»240
Elle supprime l'élément légal de l'infraction. La loi était violée. Elle ne l'est
plus.
Les faits justificatifs opèrent in rem, c'est à dire qu'ils justifient non
seulement l'auteur de l'infraction, mais tous les participants243.
Le code pénal congolais ignore les causes de justification. Celles-ci sont une
création jurisprudentielle. Les cours et tribunaux les retiennent à titre de
principes généraux de droit244.
Le fait de consacrer des causes de justification dans notre droit alors que la
loi n'a rien prévu, ne viole-t-il pas le principe de la légalité et celui de
l'interprétation stricte de la loi pénale? Non, parce que les causes de
justification profitent au prévenu. Il n'y a pas de règle qui dit «Nulla absolutio
sine lege».
A. L'ETAT DE NECESSITE246
I. Définition
240
HAUS, op. cit., I, n° 601.
241
MERLE et VITU, op. cit., n° 307
242
HAUS, op. cit., n° 600.
243
MERLE et VITU, op. cit., n°313.
244
Boma, 23 juillet 1901, Jur.Etat,I,153;17 juin 1941, R.J.C.B., 168.
245
Op. cit., n° 116.
246
Signalons un arrêt important de la Cour de cassation de Belgique sur la question et qui est considéré comme
«la consécration jurisprudentielle de l'état de nécessité» en droit belge: 13 mai 1987, R.C.J.B., 1989,589, note
d'A. de NAUW, R.D.P.C., 1991, 1084 (Affaire VERLAINE).
93
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Pour que l'état de nécessité soit retenu, trois conditions doivent être réunies:
Toutefois, il est justifié par l’état de nécessité dans lequel il s’est trouvé en
vue d’empêcher que l’inculpé ne réitère les infractions dont il est en aveux,
sur des enfants, ce qui représente un intérêt supérieur à tout autre dans le
cas d’espèce248.
247
J. VERHAEGEN, op. cit., p. 68.
248
Mons, ch. Mises en acc., 22 nov. 1996, R.D.P.C., 1997, 575. Sur la question de la dénonciation d’une
infraction par le médecin traitant et de sa justification par l’état de nécessité, voy. Aussi Cass., 13 mai 1987,
R.D.P.C., 856 et note ; R.C.J.B., 1989, 588 et la note d’A. DE NAUW et l’étude de Chris. HENNAU-HUBLET
et J. VERHAEGEN, Recherche policière et secret médical, in J.T., 1988, 165-167.
249
Tribunal civil de Huy, 19 avril 1917, Pas., 1919, III, 75 (Affaire « Somme »).
94
Cours de Droit Pénal CT Manasi
b) L'intérêt à sauvegarder doit être menacé d'un péril grave et
imminent
Celui qui se prévaut de la justification par l’état de nécessité doit établir qu’il
s’est trouvé dans l’absolue nécessité de violer la loi pour combattre un
danger réel, effectif, certain, actuel ou au moins imminent.
250
Tribunal de première instance de Namur (10ème ch. corr.), 26 janv. 2004, in R.D.P.C., 2004, 968.
251
FORIERS, L'état de nécessité en droit pénal, Bruxelles-Paris 1951, p. 335.
95
Cours de Droit Pénal CT Manasi
condition qu’il n’y ait pas disproportion entre les moyens employés et la
gravité de la menace252.
B. LA LEGITIME DEFENSE
I. Définition
252
Article 122-7 du NCPF.
253
MERLE et VITU, op. cit., n° 346, BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 299; BOUZAT, Note sous Rennes, 12
avril 1954, S.2.185; Chris HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n°219.
254
BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 300. Voir aussi SAVATIER, Traité de responsabilité civile, I, 242 et s.;
MERLE et VITU, op. cit., n° 317.
255
R. SAVATIER, Mélanges Capitant, p. 379.
256
DEMOGUE, Traité des obligations, III, n° 240.
257
Op. cit., 1997, n° 442.
96
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La défense des personnes et des biens est une prérogative de l'autorité
publique. Personne ne doit rendre justice à soi-même. Telle est la conception
actuelle de notre droit.
La légitime défense peut donc être définie comme l'emploi direct et nécessaire
de la violence pour repousser une agression injuste qui se commet ou qui va
se commettre contre sa propre personne ou la personne d'un tiers.
La légitime défense est aussi un acte de justice: celui qui repousse par la
force une agression injuste rend service à la société, concourt à la défense
d'un intérêt juridiquement protégé. C'est «un gardien de la paix publique.»259
Pour que la légitime défense soit retenue, quatre conditions doivent être
remplies:
Est justifié un prévenu qui, se voyant assailli chez lui à l'improviste par un
homme d'un caractère violent, doué d'une force physique exceptionnelle,
258
Pro Milone, Cap. 4.
259
R.GARRAUD, Traité, II, n°439. Voir aussi E. GARCON, Code pénal annoté, II, art. 295 à 401, nouvelle
éd. par ROUSSELET, PATIN et ANCEL, Paris, 1956, art. 328, p.156.
97
Cours de Droit Pénal CT Manasi
exprimant à haute voix son intention de le maltraiter, avait craint pour sa vie
et frappé son agresseur avec une serpe qu'il tenait à la main260.
Dépasse par contre les limites de la légitime défense celui qui frappe
mortellement un voleur au moment où celui-ci prend fuite et ne manifeste
aucune intention agressive261.
Celui qui, par une agression injuste, a placé son adversaire dans la nécessité
de se défendre, n'a pas le droit de repousser la force par la force. Il n'y a pas
de légitime défense contre la légitime défense, car celle-ci est l'exercice d'un
droit et l'accomplissement d'un devoir.
260
Cass. fr., 7 août 1873, B., 219; S.1874.1.95, D.1873.1.385.
261
1ère Inst.(Appel), Bukavu, 17 avril 1946, R.J.C.B., 147 .
262
BOUZAT et PINATEL op. cit., n° 287.
263
Première Inst. (appel) Eq. 28 févr.1952, R.J.C.B., 243. Voir aussi l'article 37 de l'acte de transition et l'article
7 du projet de constitution fédérale de la CNS qui proclament «le droit sacré de désobéir et de résister à tout
individu ou groupe d'individus qui prend le pouvoir ou s'y maintient par la force ou l'exerce en violation de la
constitution».
264
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n°228.
265
J. V. p. 349.
98
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le tribunal correctionnel de Bruxelles n’a pas hésité à condamner le prévenu
DECOSTER du chef de rébellion, pour avoir infligé des brutalités excessives
à des agents qui voulaient procéder à une perquisition au cours d’un bal
privé266.
Toutefois, ce principe n'est pas absolu, et certains cas appellent une solution
contraire : un fils qui frapperait ou tuerait son père, un agent qui frapperait
ou tuerait un fou ou un infirme ne seraient pas justifiés s'ils pouvaient se
soustraire au danger par la fuite271. Dans ces différents cas, la fuite ne
présente pas le caractère honteux qu'elle aurait en d'autres circonstances.
266
Corr. Brux., 23 oct. 1893, Belg. Jud., 1893, 1567, cite par J. V., loc. cit.
267
22 mars 1950, J.T.O.M., 32.
268
J. VERGAEGEN, La protection pénale contre les excès de pouvoir et la résistance légitime à l’autorité,
Bruylant, Bruxelles, 1969, p. 350.
269
R. GARRAUD, tome II, éd. 1994, p. 38.
270
GARCON, op. cit., art.328, n°26.
271
Loc. cit.
99
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La légitime défense est fondée d'abord lorsque l'agression est dirigée contre
les personnes: contre sa propre personne ou contre la personne d'autrui.
L'article 66 ter du CP (art. 1er de l'O.L. n°78-015 du 4 juillet 1978) rend
obligatoire la défense d'autrui lorsqu'elle ne comporte aucun risque pour soi-
même ou pour les tiers. La consécration de la légitime défense vise d'abord la
protection physique de la personne humaine.
Appellent la légitime défense les agressions «qui sont génératrices d'un
danger physique: mise en péril de la vie, de la liberté locomotrice, de
l'intégrité corporelle ou sexuelle.»272
272
MERLE et VITU, op. cit., n° 330.
273
MERLE et VITU, op. cit., n°330.
274
Loc. cit., GARCON, op. cit., art.328, n° 49 et s.; L. BOURS, La défense de la propriété, cause de
justification ou d'excuse, in J.T.O., 1950-1951,179 et s.
275
Loc. cit., Voir aussi R. LEGEAIS, Légitime défense et protection des biens. Aperçu de droit comparé, in
R.S.C., 1980, 325-336, spécialement p.331; Req. 25 mars 1902, S.1903-I,5, note LYON-CAEN.
276
Boma, 17 sept. 1906, Jur. Etat, III, 146.
277
R. LEGEAIS, op. cit, 331.
100
Cours de Droit Pénal CT Manasi
278
Cass. b., 29 sept. 1998, J.T., 1999, 93.
279
Léo., 13 mai 1954, R.J.C.B., 246.
280
Voir R. LEGEAIS, article déjà cité, 326.
281
Voir BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 290.
282
MERLE et VITU, op. cit., n° 316.
101
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Cette dernière solution n’est cependant pas absolue. Malgré l’excès dans la
défense, la demande en réparation par le premier agresseur doit être rejetée,
lorsqu’elle est contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs.
102
Cours de Droit Pénal CT Manasi
I. Définition
Certains actes définis comme infractionnels par la loi pénale peuvent être
justifiés lorsqu'ils sont :
- Le fait de celui qui a reçu de la loi l'ordre ou l'autorisation de les poser,
ou encore
- Le fait de celui qui exécute l'ordre de son supérieur, donné
conformément à la loi.
Il y a régularité formelle lorsque les actes sont le fait d'une personne ayant
qualité pour agir, et sont posés selon la forme prescrite et dans le cas prévu
par la loi.
283
VERHAEGEN, op. cit., p. 83.
103
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Mais, il se pose en doctrine et en jurisprudence le problème de l'ordre illégal
émanant de l'autorité légitime.
284
BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 284 et s.
285
Cité par J. VERHAEGEN, Le refus d’obéissance aux ordres manifestement criminels, Conférence donnée en
octobre 1998 au Séminaire de droit militaire et de droit de guerre, p. 1.
286
La Reine c/Finta, [1994], cité par Guy COURNOYER et Gilles OUIMET, Code criminel annoté 2003, éd.
Yvon Blais, Cowansville, p. 55.
104
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Ce système postule que l'exécutant n'obéisse pas aveuglément à tout ordre
reçu, mais qu'il distingue les ordres illégaux des ordres légaux, et n'obéisse
qu'à ces derniers. L'exécution d'un ordre illégal ne peut donc pas être
justifiée.
Cette solution est rejetée, car il paraît difficile d'attendre de tout subordonné
qu'il soit en mesure d'apprécier la légalité de l'ordre reçu. Par ailleurs, ce
système est de nature à compromettre la discipline, particulièrement au sein
des forces armées.
c) Système intermédiaire
1) Principe
287
Notes sur Grotius, 1739, livre 1er, cap. IV, §II, note 1.
288
MERLE et VITU, op. cit., n° 325; voir aussi BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 276; HAUS, op. cit., I., n°s
609-610.
289
G.G.R.U., 26 mars 1958, R.J.A.C., 1960, 240, 1ère inst., Eq., App. 29 avril 1954, J.T.O., 1956, 13.
290
Kis., 27 nov.1978, R.J.Z, 1979, 117.
105
Cours de Droit Pénal CT Manasi
imputabilité . Il en sera ainsi si l’ordre est assorti d’une menace de mort à
291
Celui qui est justifié par la loi ou par l'ordre reçu ne peut engager sa
responsabilité civile. « L'ordre de la loi et le commandement de l'autorité sont
inconciliables avec la notion de faute civile: aucune faute ne peut être
logiquement imputée à celui qui exécute sans excès son devoir
d'obéissance.»293
D. LE CONSENTEMENT DE LA VICTIME294
291
Boma, 19 mars 1901, Jur. Etat, I, 117 ; voir aussi Michel DANTI-JUAN, V° Ordre de la loi, in Répertoire
Dalloz, Tome V, mise à jour 1999, Paris, 9 pages.
292
Voir lecture à la fin de cette partie de l’ouvrage.
293
MERLE et VITU, op. cit., 1997, n° 441.
294
Sur cette question, voir la thèse de A.F. ABDOU, Le consentement de la victime, L.G.D.J., Paris, 1971; voir
aussi NYABIRUNGU mwene SONGA, Le consentement de la victime et les atteintes à la vie, Rapport au
symposium national sur les droits de l'homme face aux problèmes de la vie et de la mort, CRIDHAC, Kinshasa,
15-17 février 1983 ; Philippe CONTE et al., op. cit., pp. 147-148.
106
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La maxime romaine selon laquelle « Volenti non fit injuria » n'est pas
d'application dans notre droit.
Mais en fait, même pour ces infractions, on ne peut pas dire que le
consentement de la victime est une cause de justification. Ce qu'il faut
retenir est que l'absence du consentement de la victime est un élément
constitutif de l'infraction. Donc, en cas de consentement, un élément
constitutif fait défaut295.
Il existe des situations où, quelles que soient les circonstances, le fait ne peut
être justifié. Il en est ainsi des violations des interdits de type humanitaire,
tels qu'ils sont prévus et définis par les conventions de Genève du 18 août
1949.
Ces conventions ont pour objet des valeurs tout à fait fondamentales liées à
la personne humaine, «le minimum à respecter en l'homme quelques soient les
circonstances», des valeurs qui échappent à la souveraineté des Etats.296
295
BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 303.
296
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n°34.
297
Voir aussi art. 15, §2 de la convention européenne des droits de l'homme.
107
Cours de Droit Pénal CT Manasi
ne sera accordée aux articles 6, 7, 8, ($1 et 2), 11, 15, 16, et 18 qui portent
respectivement sur:
Une législation pénale s'engagerait sur une mauvaise voie si elle se mettait à
pénétrer les consciences, indépendamment des conduites illicites
objectivement et matériellement constatées. «C'est toujours par des actes (ou
l'absence d'actes déterminés) que se réalisent les atteintes injustifiables aux
valeurs protégées.»299
A. INFRACTION DE COMMISSION
B. INFRACTION D'OMISSION
298
P. BOUZAT, op. cit., n° 11.
299
Chris. HENNAU et VERHAEGEN, op. cit., n°4.
108
Cours de Droit Pénal CT Manasi
D'autres infractions se réalisent par inaction, omission ou abstention.300 Le
CP contient quelques infractions de ce type.
Dans le droit moderne, cette solution n'a jamais été retenue pour deux
raisons:
300
Voir l'étude d'E. LAMY, L'omission criminelle en droit pénal congolais et propositions législatives, in R.J.C.,
1964, p. 225.
109
Cours de Droit Pénal CT Manasi
En dehors du cas de meurtre, le problème de l'infraction de commission par
omission s'est posé en matière de violences et voies de faits.
Cette solution est valable, car l'abstention la plus coupable sur le plan
moral restera cependant en dehors de l'intervention pénale, à moins que la
loi ne l'ait expressément prévue.
Pour toutes ces situations, la réponse est la même qu'en ce qui concerne le
meurtre ou les coups et blessures volontaires: quelque immorale que soit
l'abstention, elle ne sera pas punissable, car d'une part le rapport de
causalité entre elle et le résultat n'est pas établi et, d'autre part, sa
condamnation irait à l'encontre du principe de la stricte interprétation de la
loi pénale.
301
Poitiers, 20 nov., 1901, S. 1902.2.305, note J. HEMARD, D.1902.2.81, note Le Poittevin; A. GIDE, La
séquestrée de Poitiers, Gallimard, 1950.
302
Op. cit., 4e éd., 1981, n° 436.
303
6 mai 1901, Pas. I, 225.
110
Cours de Droit Pénal CT Manasi
C'est ainsi que, pour reprendre l'exemple de vol, s'il est vrai que ne peut
répondre de cette infraction celui qui garde par fraude un portefeuille qu'on
lui remet par erreur, il n'en est pas moins certain que le même agent
pourrait être poursuivi pour cel frauduleux, tel que prévu et puni par l'article
102 du code pénal. Il y a cel frauduleux lorsque l'agent, ayant trouvé une
chose mobilière appartenant à autrui ou en en ayant obtenu par hasard la
possession, s'en sera appropriée ou l'aura livrée à des tiers.
§ 2. L'INFRACTION CONSOMMEE
A. L'INFRACTION FORMELLE
304
Voir E. LAMY, Cours, op. cit., p. 206 ; LIKULIA BOLONGO, Droit pénal spécial zaïrois, L.G.D.J., pp. 28-
29.
305
G. MINEUR, op. cit., p.124; LIKULIA, loc. cit.
306
Voir E. GARCON, Code pénal annoté, II, (art.295 à 401), Sirey, Paris, 156, art. 295, p. 3.
307
SPITER, L'infraction formelle, in R.S.C., 1966, 497.
111
Cours de Droit Pénal CT Manasi
qui peuvent donner la mort ou des substances qui sans être de nature à
donner la mort, peuvent cependant gravement altérer la santé.»
On peut donc répondre de cette infraction, même si la mort ne s'en est pas
suivie, même si la santé de la victime ne s'en est pas trouvée altérée.
Un dernier exemple peut nous être donné par les dispositions sur la
corruption du fonctionnaire. Celle-ci peut être réalisée même si elle n'a pas
été suivie d'effet (art.147 du CP).
Toutes les infractions dites de mise en danger sont des infractions formelles,
car elles n'impliquent pas de résultat.
B. L'INFRACTION MATERIELLE
L'infraction matérielle est celle que la loi caractérise par son résultat. Elle
n'est effectivement consommée que lorsque s'est produit le résultat défini par
la loi comme faisant partie des éléments constitutifs de la conduite
incriminée.
308
Voir J. VERHAEGEN, Eléments de droit pénal et de procédure pénale, notes d'étudiants, 1977-1978, p. 47;
A. TSARPALAS, Le moment et la durée des infractions pénales, L.G.D.J., Paris, 1967.
112
Cours de Droit Pénal CT Manasi
A. L'INFRACTION INSTANTANEE
B. L'INFRACTION CONTINUE
C. INFRACTION D'HABITUDE
309
Voir J. VERHAEGEN, Notes d'étudiant, op. cit., p. 223.
310
Voir J. PRADEL, op. cit., n° 326.
311
Crim. 16 déc. 1938, Desurmont ; D.H. 1939. 133 ; Crim. 23 janv. 1979, Bassette, Bull., n° 30.
312
Codes Piron, I, 342.
313
C.S.J., 6 mai 1997, R.P.A. 214, en cause M.P. et Comité International de la Croix Rouge c/BUKASA
KANGUVU.
314
J. VERHAEGEN, op. cit., p.50 ; MERLE et VITU, op. cit., n°361.
114
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Nous citerons, à titre d’exemples :
- L'exploitation habituelle de la débauche ou de la prostitution d'autrui
(art. 174 bis, al.4 du CP) ;
- L'exercice illégal de l'art de guérir315.
I. En matière de prescription
315
Décret du 19 mars 1952 in B.O., p. 396.
316
Cass. , 13 janv. 1994, R.G.A.R., 12308 et la note de R. O. DALCQ ; J.T., 291 et la note de R. O. DALCQ.
317
MERLE et VITU, op. cit., n° 361-362. A propos de l'infraction d'habitude, E. LAMY est d'avis contraire et,
s'appuyant sur une jurisprudence de la Cour de cassation Belge (17 sept. 1950, Pas.1.1951,3) il soutient que
l'infraction d'habitude ne peut être punie de la peine la plus grave portée par la loi nouvelle que si les faits
commis après l'entrée en vigueur de cette nouvelle loi suffisent à établir l'habitude, op. cit., p.234.
115
Cours de Droit Pénal CT Manasi
S'il s'agit d'une infraction instantanée, l'affaire est définitivement close par le
jugement. Par contre, en cas d'infraction continue, le délinquant peut être de
nouveau condamné si la situation délictueuse perdure après la première
condamnation. S'il s'agit d'un délit d'habitude, l'autorité de la chose jugée
englobe l'ensemble des faits incriminés qui constituent l'habitude. Une
nouvelle condamnation est impossible pour les mêmes faits ; elle devient par
contre possible pour les faits postérieurs à la première condamnation.
§ 4. LA TENTATIVE PUNISSABLE
318
Voir l’étude de Nathalie HUSTIN-DENIES et Dean SPIELMANN, L’infraction inachevée en droit pénal
comparé, Bruylant, Bruxelles, 1997.
116
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L'institution de la tentative punissable a été imaginée pour faire face à la
situation créée par l'agent dont l'activité criminelle avancée, voire achevée,
n'a pas conduit au résultat qu'il recherchait.
Cette définition légale indique déjà les deux formes de la tentative punissable
:
- Celle qui manque son effet parce qu'elle a été interrompue par une
cause extérieure à l'agent (infraction tentée) ;
- Celle qui manque son effet alors que tous les actes d'exécution ont été
commis (infraction manquée).
A. L'INFRACTION TENTEE
I. La résolution criminelle
319
HAUS, op. cit., n° 413.
117
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Par résolution criminelle, on entend la recherche du résultat. Le dol
éventuel, ou la simple acceptation du résultat dans l'éventualité où il se
produirait, ne suffirait pas à constituer la tentative.
320
HAUS, op. cit., n° 433.
321
HAUS, op. cit., n° 436.
118
Cours de Droit Pénal CT Manasi
- La tendance subjective qui envisage le commencement d'exécution d'un
point de vue psychologique.
Nous pensons toutefois que le critère le plus pratique est celui qui combine
les deux tendances.
a) La tendance objective
Ces exemples à eux seuls montrent les limites de cette théorie: elle assure
l'impunité des actes très proches de la consommation de l'infraction, tel que
le fait pour le voleur d'introduire sa main dans la poche de la victime, et rend
punissables des actes plutôt éloignés ou équivoques.
R. GARRAUD avance une analyse fondée sur le lien de causalité qui unit
l'acte à la réalisation de l'infraction. Seront donc considérés comme
commencement d'exécution les actes «devant avoir pour conséquence
immédiate et directe de consommer le délit.»323
322
Voir R. MERLE, Droit pénal complémentaire, P.U.F., 1957 p. 152-153.
323
Crim. 3 déc. 1927, S., 1929, 1.119 ; R. GARRAUD, Traité, I, n° 232.
324
25 oct. 1963, D., J, 221 (affaire Lacour) ; 15 mai 1978, G.P., 6 et 7 fév. 1980, 7 (affaire Larcher), citée par
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n°s 192-193.
325
Op. cit., p. 154.
326
Loc. cit.
119
Cours de Droit Pénal CT Manasi
b) La tendance subjective
Pour les tenants de cette théorie, l'acte préparatoire est un acte équivoque
qui laisse sans réponse la question de savoir si l'agent est animé d'une
résolution criminelle et laquelle infraction il veut commettre. Tandis que le
commencement d'exécution est un acte univoque qui révèle la volonté de
commettre une infraction déterminée, de franchir le «Rubicon du crime.»327
Enfin, une des meilleures expressions de cette tendance se trouve dans cette
formule de DONNEDIEU de VABRES, selon laquelle le commencement
d'exécution est constitué « quand les actes accomplis par l'agent lors de son
arrestation attestent chez lui une volonté criminelle irrévocable, quand il
existe entre le mal qu'il a commis et le but qu'il se proposait une distance
morale si faible que, laissé à lui-même, il l'aurait presque certainement
franchie.»329
Un autre reproche que l'on fait à cette théorie subjective est que la notion de
distance morale peut conduire à situer la tentative à un moment où aucun
acte d'exécution n'est encore posé, pourvu que la résolution criminelle soit
déterminée et constatée. Ce serait là la négation même du commencement
d'exécution qui, en tant que condition de la tentative punissable, exige que
des actes matériels de réalisation de l'infraction soient posés330.
c) Notre opinion
327
BOUZAT et PINATEL, op. cit., I, n° 206.
328
VIDAL et MAGNOL, Traité, n° 97, p. 150.
329
Traité, n° 231.
330
R. MERLE, op. cit., p. 155.
120
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le commencement d'exécution doit être déterminé à la fois par la distance
matérielle et morale très courte.
331
Boma, 21 mars 1911, Jur. Congo, 106.
332
Commentaire du code pénal congolais, p. 27.
333
Crim. 30 juillet 1942, J.C.P., 2054, note J. BROUCHOT.
334
Crim. 30 juillet 1942, J.C.P., 1942,2054, note J. BROUCHOT.
121
Cours de Droit Pénal CT Manasi
- Le fait d'un individu découvert déchaussé dans une maison habitée.336
Les actes préparatoires seront punis s'ils sont le fait d'un complice. En effet,
l'art. 22, al. 4 du CP considère comme complices ceux qui auront avec
connaissance aidé ou assisté l'auteur ou les auteurs de l'infraction dans les
faits qui l'ont préparée.
335
Crim. 29 oct. 1813, B.C., 235 ; Crim. 19 déc. 1879, S. 1880.1.336.
336
Lyon, 5 mars 1879, C.P.A., al. 3, n° 53. Tous ces exemples de jurisprudence sont cités par R. MERLE, op.
cit., n° 447.
337
Op. cit., 447.
338
Voir G. MINEUR, op. cit., p. 30.
122
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L'article 4 du CP exige, pour qu'il y ait tentative punissable, que les actes
d'exécution «n'aient été suspendus ... que par des circonstances
indépendantes de la volonté de l'auteur».
Tel n’est pas le cas lorsque l’agent a simplement cru que ses actes avaient
atteint l’effet escompté.
Si les actes déjà commis sont constitutifs d'une autre infraction, ils seront
punis comme tels. Ainsi, si un voleur s'est déjà introduit dans une maison et
s'enfuit sans avoir rien pris, il ne sera pas moins puni pour destruction
volontaire et violation de domicile (art. 110 et 69 du CP).
339
Anvers, 19 juillet 1985, R.W., 1984-1986, 1430 avec note de M. DE SWAEF, cité dans R.D.P.C., décembre
1986, 992.
340
Cass., 23 mars 1999, R.D.P.C., 2000, 226-227.
341
Loc. cit.
342
R. MERLE, Droit pénal général complémentaire, p. 157 ; BOUZAT et PINATEL, op. cit., p. 215 ; STEFANI
et LEVASSEUR, op. cit., n° 179.
123
Cours de Droit Pénal CT Manasi
volonté de l'agent. Il retiendra alors le désistement volontaire si la part de la
volonté est prédominante ou s'il y a doute343.
C’est ainsi que d’après le nouveau code pénal russe, la personne qui a
commis pour la première fois une infraction de gravité mineure peut être
exemptée de sa responsabilité pénale si, après avoir commis l’infraction, elle
a comparu volontairement pour s’autodénoncer, a contribué à la découverte
de l’infraction, a indemnisé la victime ou a expié autrement le dommage
causé par l’infraction344.
B. L'INFRACTION MANQUEE
343
Voir BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 212; LAMY, op. cit., 24.
344
Art. 75.
124
Cours de Droit Pénal CT Manasi
été complètement exécutés. Cependant, le résultat n'a pas été atteint par
suite d'une circonstance fortuite.
L'hypothèse de l'aberratio ictus se réalise lorsque «le mal que l'on avait
l'intention de faire à une personne déterminée, est retombé sur une autre
personne que l'agent n'avait pas en vue.»346
345
HAUS, op. cit., I, n° 176.
346
HAUS, op. cit., I, n° 331.
125
Cours de Droit Pénal CT Manasi
C. L'INFRACTION IMPOSSIBLE
I. Théorie objective
347
Voir BOUZAT et PINATEL, op. cit., n°215 et s. ; MERLE et VITU, op. cit., n° 378 et s.
348
Actuel article 221-5 du NCPF.
349
Cours, op. cit., p. 256.
126
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Cette théorie préconise la répression systématique de l'infraction impossible.
Elle est née dans la mouvance positiviste.
350
Code pénal annoté, art. 2 et 3, n° 114.
351
MERLE et VITU, op. cit., n° 379.
352
GARCON, op. cit., art. 2 et 3, n° 114.
353
Cité par E. LAMY, Cours, op. cit., p. 258.
354
Crim. 16 janv. 1986, D.S. 1986, 265 avec note contraire de D. MAYER et C. GAZOUNAUD, et note
conforme de J. PRADEL, cité dans la chronique semestrielle de jurisprudence de la R.D.P.C., décembre 1986,
992.
127
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Des auteurs ont proposé des théories de compromis, dont les plus célèbres
sont:
- Celle qui distingue l'impossibilité absolue et l'impossibilité relative et
- Celle qui distingue l'impossibilité de fait et l'impossibilité de droit.
Cette théorie veut que seule l'impossibilité relative relève du droit pénal. Sa
paternité revient à MITTERMAIER. Elle a été partagée par le pénaliste belge
HAUS.
L'impossibilité sera absolue lorsque l'objet «n'existe point ou qu’il n'a pas la
qualité qui est essentielle pour l'existence du délit»355, ou encore lorsque les
moyens employés «sont radicalement impuissants à produire le crime que
l'agent a en vue.»356
L'impossibilité sera relative si l'objet existe réellement, mais qu'il n'est pas ou
n'est plus là où l'agent croyait le trouver359, ou encore lorsque les moyens
355
HAUS, op. cit., n° 461.
356
Loc. cit.
357
Loc. cit.
358
HAUS, op. cit., I, n° 462.
359
Op. cit., n° 461.
128
Cours de Droit Pénal CT Manasi
étaient efficaces mais n'ont pas produit le résultat recherché par suite de
leur mauvaise utilisation ou de circonstances fortuites360.
360
BOUZAT et PINATEL, op. cit., 1, n° 217.
361
Agen, 8 déc. 1849, Cass., 14 fév. 1850, citée par HAUS, op. cit., I, n° 461.
362
HAUS, op. cit., I, 461.
363
Op. cit., n° 462.
364
Cours, op. cit., p.257.
365
Loc. cit.
366
Op. cit., n° 380.
367
Traité, I, p.515.
129
Cours de Droit Pénal CT Manasi
fait défaut. En cas d'impossibilité de droit, c'est le principe de la légalité qui
s'oppose à la répression.
«Dès que la volonté du criminel se manifeste dans des conditions telles que
légalement la réalisation qu'il poursuivait est possible, il est punissable, quand
bien même les circonstances matérielles qui lui sont étrangères l'ont empêché
d'achever son projet.»368
Ainsi, sera puni l'individu qui, voulant assassiner son ennemi, se poste en
vain à l'endroit où sa victime passe habituellement.
a) Délit absurde
368
E. LAMY, Cours, op. cit., p. 257.
369
MERLE et VITU, op. cit., n° 308.
370
E. LAMY, op. cit., 258.
130
Cours de Droit Pénal CT Manasi
refuser d'accorder aux populations crédules et terrorisées la protection
pénale qu'elles attendent371.
Tel fut le point de vue de la Cour d’appel de Kinshasa qui, dans l'affaire dite
du chat noir a puni le délit absurde. Les faits étaient les suivants :
A, chef de service à la douane vient d'être muté et laisse sur place deux
collaborateurs B et C. D, qui l'a remplacé, constate des irrégularités
financières. Alerté par B et C et sentant le danger, A décide l'élimination
physique de D par des moyens magiques. Il soumet son projet criminel à ses
anciens collaborateurs B et C, et ces derniers contactent à cet effet E, un
puissant féticheur, qui marque son accord moyennant paiement.
Le féticheur tente de tuer D au moyen d'un chat noir fourni par B et C et sur
lequel il pratique des incantations, mais malheureusement sans succès. Il
contacte un autre féticheur qu'il croit plus puissant, toujours en vain.
Finalement, il se résout à procéder autrement et tue D d'un coup de fusil. La
Cour d’appel de Kinshasa372, saisie de cette affaire, retient contre le féticheur
E deux préventions, à savoir : l'assassinat de D au moyen de fusil et la
tentative d'assassinat par des moyens magiques.
Il est heureux que la Cour d'appel ait retenu cette solution pour deux
raisons:
371
MERLE et VITU, op. cit., n° 381 ; E. LAMY op. cit., p. 258 ; LARGUIER, Annales africaines, Dakar, 1957,
p. 92 n° 8; BAYONA-ba-MEYA, Parapsychologie et droit, in Cahiers de recherches «PSI», n° 3, série III, n° 2,
1982, pp. 94-96.
372
Arrêt de La Cour d’appel de Kinshasa, inédit, 4è feuillet, rendu le 8 janvier 1970, en cause M.P. c/Matutu,
Nganga, Mavungu, Bunga et Bongo, rôle 8415, cité par BAYONA-ba-MEYA, Discours à l'audience solennelle
de la rentrée judiciaire du 16 octobre 1976, in Bulletin des arrêts de la Cour Suprême de Justice, 1977, 227-238.
373
BAYONA-ba-MEYA, op. cit., p.236.
374
C.S.J., 2 juin 1971, R.P. 24 inédit, cité par BAYONA-ba-MEYA, loc. cit.
131
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Sur base de l'étude faite par la sous-commission de Législation et des
Réformes juridiques, que nous avions eu l'honneur de présider, la plénière
de la C.N.S. a retenu ce qui suit :
b) Délit putatif
Il y a délit putatif lorsque l'illégalité des faits tels que l'agent les a commis
n'existe que dans son imagination.
Un autre exemple peut nous être fourni par celui qui vend du diamant
croyant commettre une infraction parce qu'il ignore les dernières
dispositions qui en libéralisent l'exploitation, la détention, le transport et la
vente376.
Dans tous ces exemples, quelque immorale que puisse paraître l'attitude de
l'agent, le principe de légalité s'oppose à sa punissabilité, même à titre de
tentative.
Le nommé KATALAIE gisait à terre, victime d'un coup de fusil dont la charge
faisant balle l'avait traversé de part en part. Le prévenu KANSELE vint lui
porter un coup de couteau dans la région du cou. Le tribunal déclara la
prévention d'homicide non établie au motif que le
375
Rapport de la Commission juridique, Conférence Nationale Souveraine, Palais du Peuple, Kinshasa, 1992,
pp.109-110.
376
Voir l’ordonnance-loi n° 82/039 du 5 novembre 1982 modifiant et complétant l’ordonnance-loi n° 81/013 du
2 avril 1981 portant législation générale sur les mines et hydrocarbures.
132
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Dans cette espèce, il apparaît donc clairement que le juge a acquitté parce
que l'infraction lui a paru absolument impossible.
«constitue une tentative absolument impossible et, dès lors non infractionnelle,
le fait de présenter à celui dont on veut la mort une très faible dose de poison,
mélangée à des aliments, lorsque la préparation en fut tellement grossière que
le mélange se trouve être immangeable tant à cause de son goût que de la
sensation de brûlure que devaient ressentir la langue et les gencives dès le
premier contact.»380
377
Boma, 29 sept. 1908, Jur. Congo, II, 267.
378
District Maniema, 25 sept. 1941, R.J.C.B., 1942, 193.
379
Op. cit., pp. 36-37.
380
1ère Inst. Stan. (appel), 16 avril 1957, R.J.C.B., 1958, 167.
133
Cours de Droit Pénal CT Manasi
pouvait atteindre son but en raison de circonstances de fait relatives à l'objet
ou aux moyens mis en œuvre.»381
Nous estimons que la théorie subjective devrait recevoir une plus large
application, car c'est l'intention de violer la loi qui devrait prédominer et
servir de base à la répression. Or, cette intention est aussi forte dans
l'infraction consommée que dans l'infraction tentée, que l'infraction soit
possible ou impossible. Les actes posés par l'agent prouvent son antisocialité
et appellent la sanction.
Tous les auteurs pratiquement donnent cet exemple pour illustrer le délit
manqué383. Et cependant, ce même exemple est donné lorsqu'il s'agit
d'illustrer l'infraction relativement impossible384. Certains auteurs ont essayé
explicitement d'éclairer la nature des rapports entre délit manqué et délit
impossible. Pour MERLE et VITU,
381
1ère Inst (appel), 23 sept. 1952, R.J.C.B., p. 136.
382
MERLE et VITU, op. cit., n° 240 ; E. LAMY, op. cit., p. 255.
383
DONNEDIEU de VABRES, op. cit., n° 240 ; E. LAMY, op. cit., p. 255.
384
HAUS, op. cit., I, n° 462 ; MINEUR, op. cit., n° 36 ; MERLE et VITU, op. cit., n° 380 ; E. LAMY, op. cit., p.
257.
385
Op. cit., n° 380.
386
Op. cit., n° 182.
134
Cours de Droit Pénal CT Manasi
différence dans le fait que «dans le délit manqué, le résultat pouvait
matériellement se produire», tandis que dans le délit impossible, «le résultat
ne pouvait pas immédiatement être obtenu.»387
De même, DONNEDIEU de VABRES est d'avis que «le délit impossible est
donc un délit manqué... manqué parce qu'il ne pouvait pas réussir.»389 Cette
assimilation doit être rejetée car elle perd de vue que l'infraction manquée
est une infraction possible, mais qui n'a échoué que fortuitement.
387
Loc. cit.
388
Op. cit., n° 257.
389
Op. cit., n° 245.
390
Voir article 21, alinéa 1er .
391
Article 22, alinéa 1er.
392
Article 22, alinéa 2.
135
Cours de Droit Pénal CT Manasi
désistement volontaire profitable à l’accusé, même lorsque celui-ci avait
préalablement posé tous les actes d’exécution ;
- A l’égard de l’auteur de l’infraction absolument impossible393.
393
Article 23, alinéa 1er.
394
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n°200.
136
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Il est en principe admis que seules les personnes physiques peuvent être des
délinquants. Toutefois, la responsabilité des personnes morales est toujours
395
ORTOLAN, Eléments de droit pénal, I, 4è éd. Paris, 1886, n°219.
137
Cours de Droit Pénal CT Manasi
discutée, et même, de plus en plus retenue en droit positif et en droit
comparé.
A. PRINCIPE
Le principe posé est que seules les personnes physiques sont capables de
délinquer. Ni les choses ni les animaux ne peuvent être sujet de l'infraction.
Seuls des êtres faits de chair, dotés de volonté et d'intelligence peuvent
commettre une infraction et, de ce fait, encourir une peine. «L'esprit
individualiste du droit pénal fait qu'on ne peut attribuer un acte coupable
et appliquer une peine qu'à l'individu.»396
Le code pénal russe de 1997 prévoit que n’est pénalement responsable que
la personne physique qui a atteint l’âge de seize ans au moment ou le crime
a été commis397.
a) Le Président de la République
396
G. STEFANI et G. LEVASSEUR, Droit pénal général, 10ème édition, Précis Dalloz, Paris, 1978, n°244.
397
Art. 19 et 20.
398
KALOMBO MBANGA, Syllabus de droit pénal général, UNAZA, 1978, texte stencilé, p. 41.
138
Cours de Droit Pénal CT Manasi
1. Le principe
399
Article 74 de l’ordonnance-loi n° 79/08 du 28 septembre 1979 sur le barreau.
400
Article 29 à 36 de la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques.
401
Voir Philippe CAHIER, Le droit diplomatique contemporain, 2ème édition, Droz, Genève, 1964, p. 244.
139
Cours de Droit Pénal CT Manasi
mission . L’immunité de juridiction pénale est absolue, et s’applique aussi
402
bien pour les actes accomplis dans l’exercice des fonctions diplomatiques
que pour les actes privés403.
402
Op. cit., p. 233.
403
Op. cit., p. 244.
140
Cours de Droit Pénal CT Manasi
douées de conscience et de volonté . Etre incorporel, la personne morale
404
n'a pas de prise sur les objets matériels et est incapable de volonté.
A titre d'exemple, nous pouvons citer le nouveau code pénal français qui
montre qu'on peut imaginer presque à l'infini les sanctions applicables aux
groupements. Il prévoit notamment, en ses articles 131-37 à 44, L'amende ;
L'interdiction d'exercer tout ou partie d'une activité professionnelle ;
L'interdiction d'émettre des chèques ; La confiscation spéciale ; L’affichage ;
La dissolution.
C. LA TENDANCE ACTUELLE
404
Sur la question, voir notamment MERLE et VITU, Traité de droit criminel, Paris, Cujas, 1967, pp.489 et s ;
mêmes auteurs, op. cit. ; 1997, pp. 804 et s.
405
Actes, 1928.
406
Voir R. LEGROS, Imputabilité pénale et entreprise économique, in R.D.P.C., 1968-1969, 380, R.
CHARLES, Quelques aperçus sur l'évolution du droit pénal social, in R.D.P.C., 1967-1968; 253-254 , P.
141
Cours de Droit Pénal CT Manasi
réellement, a agi sous le couvert de la personne morale . Dans les pays
407
Dans les pays européens, c'est en droit pénal des affaires qu'on a vu les
premiers textes qui consacrent la responsabilité pénale des groupements.
Depuis plusieurs années, se dessine une évolution favorable à la
responsabilité pénale des personnes morales. C'est ainsi que, depuis la loi
du 23 juin 1976, la responsabilité pénale des personnes morales a été
étendue à l'ensemble du droit néerlandais (art.51 CP). De même, le droit
pénal espagnol reconnaît la responsabilité pénale des personnes morales408.
Cela paraît tellement vrai, acquis et ancré dans les esprits et dans la
pratique que lorsque la doctrine congolaise aborde la question de la
responsabilité pénale dans les sociétés de droit congolais, elle fait état
DELATTE, La question de la responsabilité pénale des personnes morales en droit belge, in R.D.P.C., 1980-
200 ; voir aussi Cass. 29 mars 1994, Pas. I, 326, R.D.P.C., 1996, 1171 ; Olivier RALET, Responsabilité des
dirigeants des sociétés, Larcier, Bruxelles, 1996.
407
Voir H.D. BOSLY, Responsabilité et sanctions en matière de criminalité des affaires, Syracuse, novembre
1980, p. 6.
408
Voir ROUJOU de BOUBEE, op. cit., p. 16.
409
Clotaire MOULOUNGUI, La responsabilité pénale des personnes morales en France, in R.D.P.C., 1995, 143-
161.
410
ROUJOU de BOUBEE, op. cit., p. 16 ; J. PRADEL, Le nouveau code pénal français : aperçu sur sa partie
générale, in R.D.P.C., 1993, 930-934.
411
M.B., 22 juin, 23411.
142
Cours de Droit Pénal CT Manasi
uniquement de la responsabilité « des personnes chargées de la gestion »412,
sans nullement évoquer, et encore moins débattre de l’éventualité de la
responsabilité pénale des personnes morales, au nom du « principe de
l’individualisation de cette responsabilité pénale autant que des peines qu’elle
entraîne »413.
412
LUKOMBE NGHENDA, Droit congolais des sociétés, Tome II, Presses Universitaires du Congo, 1999, p.
664.
413
Op. cit., p. 664.
414
Kin., 11 avril 1970, Revue Congolaise de Droit, Kinshasa, O.N.R.D., 1971, p. 9.
143
Cours de Droit Pénal CT Manasi
peine d'amende, à la restitution à la République Démocratique du Congo des
devises frauduleusement soustraites à l'encaissement et au paiement des
dommages et intérêts415.
415
C.S.J., 13 août 1971, Revue Congolaise de Droit, 1972, p.14 ; Bull., 1974, 14.
416
Article 121-2, 3ème alinéa ; voir aussi Thierry L’HOMME, La responsabilité pénale en droit anglais, in
R.D.P.C., 1995, 44.
144
Cours de Droit Pénal CT Manasi
SECTION II. LA PARTICIPATION CRIMINELLE
Le texte qui définit l'acte punissable montre que le sujet de l'infraction fait
partie des éléments constitutifs de toute infraction. Si la lecture du code
pénal laisse généralement penser à un seul agent, auteur du fait délictueux,
la réalité par contre est que très souvent l'infraction est l'œuvre de plusieurs
personnes. C'est la prise en compte de cette réalité qui a conduit le
législateur à définir la participation criminelle. Celle-ci est réalisée lorsque
plusieurs personnes ont contribué à la réalisation d'une infraction en y
prenant une part plus ou moins active et directe.
B. UN ACTE DE PARTICIPATION
Les actes de participation sont des actes positifs, des actes de commission.
417
Frédéric DESPORTES, op. cit., p. 445.
418
Crim. 10 févr. 1949, J.C.P. II. 4857, note COSTE.
419
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n° 291. On peut relever par contre en droit comparé des
législations qui font figurer le conseil parmi les actes de participation. C’est le cas du Code criminel du
Canada, en son article 22.
420
Cass. b., 21 mai 2003, J.T., 857.
421
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 257.
146
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Il n'existe pas de corréité ou de complicité par abstention. On relève dans la
jurisprudence des décisions explicites à ce sujet :
- La participation criminelle par inaction n'est pas prévue par la loi et est
d'ailleurs contraire aux principes généraux du droit. N'est pas punissable
celui qui en raison de son autorité aurait pu empêcher la perpétration de
l'infraction et ne l'a pas fait422;
- La loi pénale ne punit pas la complicité par inaction423;
- L'abstention de la part d'un chef investi de tenir au courant l'autorité
territoriale des allées et venues suspectes d'un chef de bande résolu à
attaquer un village, même si ce chef avait le pouvoir d'empêcher cette
attaque, peut constituer un manquement professionnel mais ne rentre pas
dans les prévisions de la loi sur la participation criminelle424;
- Pour blâmable qu'elle puisse être sur le plan moral, l'abstention qui
consiste à ne pas dénoncer les irrégularités faites par un ami faussaire, à
défaut d'une assistance effective, ne constitue pas un acte de participation
criminelle425.
D’après CONSTANT, doit être assimilé à une action positive, l’abus d’autorité
consistant pour un supérieur, témoin d’un délit, à ne pas intervenir, à
condition cependant que cette abstention présente le double caractère d’une
approbation et d’un stimulant430.
422
Boma, 18 sept. 1905 et 28 mars 1905, Jur. Et., II, 24.
423
Boma 18 sept.1906, Jur. Et., II, 148 ; 23 avril 1907, Jur. Et., II, 182.
424
Boma, 1er février 1916, Jur. Col., 1926, 311.
425 ère
I Inst. Léo (Appel), 13 juil. 1951, J.T.O., 1954, 35.
426
Lamy, op. cit., p. 353.
427
A. DE NAUW, Chronique semestrielle de jurisprudence, in R.D.P.C., 2004, 530.
428
Crim., 5 nov. 1941, S. 1942. 1.98, note BOUZAT ; voir aussi Crim. 27 juin 1971, Bull., n° 284, obs. LEGAL,
R.S.C., 1972, 375.
429 ère
I Inst. Stan. (Appel), 28 oct.1953, 139 ; Elis., 27 juin 1915, Jur. Col., 1926, 4.
430
CONSTANT, Traité de droit pénal, tome I, 337.
147
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Pour être punissable, l'acte de participation doit être consommé. «Si l'on peut
être poursuivi comme complice d'une infraction tentée par un tiers, on ne
peut pas l'être pour avoir tenté d'être complice. S'il y a une complicité de
tentative, il n'y a pas de tentative de complicité faute de fait principal
punissable.»432
- Aident le voleur à transporter les biens volés hors des lieux où ils
viennent d'être soustraits ;
- Aident le faussaire à faire usage de l'écrit ou de l'objet altéré ou
contenant de faux renseignements.
431
Terr. Nouv. Anvers, 24 août 1903, Jur. Et., I, 276.
432
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n°258.
433
Voir sur la question E. LAMY, op. cit., p. 354 et s.
434
HAUS, op. cit., I, n° 560.
148
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Telle est aussi l'interprétation qui se dégage des travaux préparatoires au
code pénal belge de 1867435.
C. L'INTENTION CRIMINELLE
435
Loc. cit.
436
Voir une solution jurisprudentielle belge allant dans ce sens, Cass., 8 août 1994, Pas., I, 670 ; 28 juin 1994,
Pas., I, 654.
437
HAUS, op. cit., I, n° 495; J. LARGUIER, Chronique de jurisprudence, in R.S.C., 1979, 75.
438
Crim., 6 août 1924, Bull., n° 323 ; 16 mars 1970, J.C.P. II. 16813.
439
HAUS, op. cit., I, n° 493.
440
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 267.
441
C.S.J., 31 août 1984, en cause MP c/KASHWANTALE et csrts, BA, 1980-1984, 507-517.
149
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La Cour d’appel d’Ontario a jugé que le terme « intention commune »
signifiait que deux ou plusieurs personnes doivent avoir le même but illégal
à l’esprit. Cette intention peut se former au moment de la perpétration de
l’infraction, car l’intention de poursuivre une fin illégale et de s’assister
mutuellement peut prendre forme à cet instant442.
Bien que la jurisprudence reste divisée, nous pouvons néanmoins relever des
décisions qui ont reconnu l'application des règles de participation même aux
infractions non-intentionnelles.
442
La Reine c/VANG (1999), cité par Guy COURNOYER et Gilles OUIMET, op. cit., p. 66
443
Loc. cit.
444
Voir G. MINEUR, op. cit., p. 81 ; L. BOURS, Note sous Tribunal du Ruanda-Urundi, 26 juin 1951, J.T.C.,
1952 ; HAUS, op. cit., I, n° 496.
445
Voir NYABIRUNGU, La faute punissable dans les infractions routières, Etude de droit comparé. Thèse de
Doctorat, Louvain-la-Neuve, 1980, p. 119 et s.; D. ALLIX, Essai sur la co-action. Contribution à l'étude de la
genèse d'une notion prétorienne, L.G.D.J., Paris, 1976, n° 129 et s.; V. DE JULEMONT, Notes sur l'application
des règles de la participation criminelle en droit congolais, in R.J.C.B. 1952, 279.
150
Cours de Droit Pénal CT Manasi
ainsi qu'il condamna un employeur comme coauteur des infractions de
roulage commises par son chauffeur446.
Les délits d'imprudence demandent qu'on s'exprime à leur propos avec plus
de nuance. Certes, en principe, rien ne devrait s'opposer à ce que les règles
de la participation leur soient applicables447, et il existe d'ailleurs des
décisions dans ce sens.448
La Cour de cassation de Belgique a décidé en des termes très clairs qu’ «en
matière de délits d'imprudence, la participation criminelle ne se conçoit
pas.»450
La loi détermine limitativement les actes, les modes par lesquels la corréité
ou la coactivité se réalisent. Ils sont énumérés à l'article 21 de notre CP :
446
26 juin 1951, R.J.C.B., 177 ; Boma, 11 nov. 1913, Jur. et Dr. du Congo, 1921, 353.
447
MERLE et VITU, op. cit., n° 411 ; STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 267 ; DONNEDIEU de
VABRES, op. cit., n° 434.
448
Tr. Appel Ruanda-Urundi, 26 juin 1951, R.J.C.B., 177 (blessures involontaires).
449
Cass. fr. crim. 17 novembre 1887, Bull., 392 ; 14 décembre 1935, D.P., 1935.1.96; Chambéry, 8 mars 1956,
J.C.P. 1956, II.9234, Note VOUIN.
Voir MERLE et VITU, loc. cit. ; DONNEDIEU de VABRES, loc. cit., HAUS, op. cit., I, n° 496.
450
Cass. 15 octobre 1986, Pas., 1987. I, 185 ; R.D.P.C.,1987, 166, avec note.
151
Cours de Droit Pénal CT Manasi
A. L'EXECUTION MATERIELLE ET LA COOPERATION DIRECTE
I. L’exécution matérielle
Elle consiste à poser les actes qui constituent l'infraction ou une partie de sa
réalisation (art.21, al. 2, première partie). Nous pouvons donner les exemples
suivants:
451
C.S.J., 18 févr. 1998, R.P. 1884, en cause LUBAMBA NZENGA c/MP, YODI SHUNGU et YAMFU
MAYALA, inédit.
452
Boma, 10 juillet 1908, Jur. Et., II, 133.
453
Distr. Bas-Congo, 18, Rev. Pén., 1931, 277, cité par E. LAMY, op. cit, p. 352.
152
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La loi considère aussi comme «coauteurs» de l'infraction ceux qui ont prêté
pour son exécution une aide telle que, sans leur assistance, l'infraction n'eût
pu être commise.
Si le crime pouvait être commis sans leur assistance, peut-être avec un peu
de difficultés, mais cela importe peu, ceux qui auront concouru à l'infraction
seront des complices.
Toutefois la nécessité de l'aide est relative. Il suffit que sans elle, l'infraction
n'ait pas pu être commise de cette façon concrète : aussi facilement, aussi
rapidement, avec la même sécurité, le jour où elle a eu lieu ...454
La corréité par provocation n'est retenue que lorsque celle-ci a été suivie
d'effet, lorsque l'infraction à laquelle on a provoqué l'auteur matériel est
consommée ou au moins tentée. Cela répond à la condition générale de
l'exigence d'une infraction principale.
454
HAUS, op. cit., I, n° 511.
455 ère
I Inst. Kasaï, 8 avril 1954, J.T.O., p. 43.
456
Elis., 27 juin 1915, Jur. Col., 1926, 41.
153
Cours de Droit Pénal CT Manasi
- Des machinations ou artifices coupables.
Tous ces moyens, pour être retenus, doivent avoir déterminé l'auteur
principal à agir. Leur énumération est limitative. C'est ainsi que les
suggestions comme l'approbation du projet criminel ne peuvent constituer
une provocation.
2) Menaces
Celui qui, par des menaces, aura déterminé une personne à commettre une
infraction, sera considéré comme coauteur de celle-ci.
C'est une question de fait que le juge tranchera en tenant compte des
circonstances objectives: l'âge, le sexe, la condition sociale, le caractère, le
niveau d'instruction, etc., aussi bien dans le chef du provocateur que du
provoqué.
Il arrivera souvent que la réalité de la menace soit telle qu'elle annihile ou
diminue la liberté et la volonté de l'agent. On retiendra alors la contrainte
morale irrésistible si l'exercice de la liberté a été anéanti, et s'il ne s'agit que
de la simple diminution, le juge pourra accorder des circonstances
atténuantes à l'auteur principal457.
457
Voir MINEUR, op. cit., pp. 84-85 ; HAUS, op. cit., I, n° 535-536.
154
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Tandis que l'ordre suppose «supériorité d'une part, infériorité de l'autre ; il
est donné à des personnes soumises à notre autorité ou à notre pouvoir.»458
L'autorité dont la loi parle consiste dans la puissance que des personnes
privées exercent sur d'autres. Elle peut être légale (l'autorité des maris sur
leurs épouses ; des pères et mères sur les enfants...); comme elle peut être
de fait, comme celle des ascendants sur les descendants, des maîtres sur les
domestiques, des instituteurs sur les élèves, etc.
Par pouvoir, la loi vise l'autorité hiérarchique, qui s'exerce sur les
subordonnés459.
Mais quelle que soit l'autorité de la personne qui donne un conseil, celui-ci
ne suffirait pas à constituer une provocation punissable.
Est coauteur d'une infraction celui qui, par des moyens divers, provoque une
erreur dans l'esprit de l'agent, et le détermine ainsi à commettre l'infraction.
Sous les mots «machinations ou artifices coupables», la loi vise «la fraude, le
déguisement, la ruse dont on fait usage pour tromper celui que l'on veut
déterminer à commettre un crime »462.
458
HAUS, op. cit., I, n° 532.
459
Loc. cit.
460
Boma, 14 avril 1908, Jur. Et., II, 22.
461
Elis. 23 avril 1941, R.J.C.B., 150.
462
HAUS, op. cit., I, n° 537.
463
C.S.J., 22 déc. 1999, R.P.A. 244, en cause MP c/Stés FORABOLA et crts c/Martin José d’OLIVERA
YUMBU-di-TSHIBUKA et crts, inédit.
155
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Constitue un acte de corréité le fait pour quelqu'un voulant se venger d'une
femme, de persuader faussement son mari qu'elle a commis l'adultère, et le
détermine ainsi à la frapper ou à la tuer sous l'emprise de la colère464.
Par discours, la loi entend toute allocution, tout propos, toute parole qui
pousse au délit. Il n'est donc pas nécessaire que le propos tenu ait un
certain développement. Il a été jugé qu'un seul cri peut constituer un
discours, au sens de l'article 21, al. 5 du CP467. Par contre, ne constituent
pas un discours des propos tenus à voix basse.
464
Pandectes belges, V° co-auteur, n°529.
465
C.S.J., 31 août 1984, R.P.A. 84, en cause M.P. c/KASHWANTALE et crts, BA, 1980-1984, 2001, 507-517.
466
HAUS, op. cit., I, n° 539.
467 ère
I Inst. Eq., 22 mars 1951, R.J.C.B., 152.
156
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Il faut entendre par écrits imprimés ou non ce qu'ils signifient selon leur sens
usuel. Leur mode de reproduction importe peu: dactylographie, photocopie,
polycopie, etc.
Pour être punissable, la provocation publique doit être suivie d'effet, c'est-à-
dire qu'elle doit conduire à une infraction déterminée, sous la forme d'une
infraction consommée ou tentée.
Mais, lorsque l'auteur s'écarte des instructions reçues, trois hypothèses sont
possibles :
468
Voir Pandectes belges, V° co-auteur, n° 574-575.
469
MINEUR, op. cit., p. 87.
470
HAUS, op. cit., I, n° 521.
471
Loc. cit.
157
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Dans ce cas, il faut distinguer selon que, d'après les circonstances, l'agent
provoqué avait ou non des raisons de croire qu'il agissait conformément à
l'ordre reçu.
Par contre, si ces raisons n'existent pas, si pour faciliter le vol ou en assurer
l'impunité, l'agent provoqué tue, «il serait injuste de rendre le mandant
responsable des moyens employés par le mandataire contrairement aux
intentions bien évidentes du premier.»472
Cette solution est de bon sens. Toutefois, elle n'est pas toujours suivie et au
nom de la théorie de l'emprunt de criminalité, une certaine doctrine et une
certaine jurisprudence considèrent que les circonstances aggravantes réelles
retrouvées dans le chef de l'auteur principal doivent s'étendre à tous les
participants473.
Dans tous les cas, le moins que l'on puisse dire est que la théorie de
l'emprunt de criminalité, est rejetée par la doctrine la plus moderne d'un
droit pénal fondé sur la culpabilité personnelle.
472
HAUS, op. cit., n° 322.
473
Voir notamment E. LAMY, op. cit., 364. Le problème ainsi formulé ne regarde pas seulement la provocation,
mais tous les modes légaux de participation à titre de corréité ou de complicité.
158
Cours de Droit Pénal CT Manasi
personne, sans qu'aucun fait de participation n'ait été relevé à la charge de
l'amant en ce qui concerne ce meurtre.
La solution retenue par la Cour est qu'il n'y avait pas participation criminelle
dans le chef du donneur d'instruction pour le meurtre commis et encore
moins pour le meurtre commandé, mais non exécuté474.
b) Désistement du provocateur
Le provocateur, après avoir incité au crime, peut changer d'avis. Pour que
ce changement d'avis soit considéré comme ayant rompu la solidarité entre
lui et l'auteur matériel, il faut qu'il ait été révélé à ce dernier de manière
expresse, et à temps.
474
Crim., 10 mars 1977, Bull., 91, obs. J. LARGUIER, Chron. jur., in R.S.C., 1979, 76.
475
HAUS, op. cit., I, n° 523, MINEUR, op. cit., p. 84.
476
HAUS, op. cit., I, n° 525.
477
HAUS op. cit., I, n° 526.
478
Loc. cit.
159
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La loi a prévu, de manière limitative, les modes de complicité (art. 22) :
A. INSTRUCTIONS
Les instructions seront retenues comme acte de complicité, même si, en fait,
elles n'ont pas servi à la commission de l'infraction.
479
Voir GARCON, op. cit., art.60, n° 267-268 ; Cass. b. 24 septembre 1951, Pas., 1952.I.13.
480
HAUS, op. cit., I, n° 551.
481
C.S.J., 22 avril 1998, R.P.A. 232-234, en cause M.P. et LEVI VICTORIO c/KAYEMBE KAKING et crts.
160
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Les instructions, comme tout autre acte de participation, doivent être suivies
d'effet. Il n'y a pas complicité si l'infraction à la commission de laquelle les
instructions étaient destinées n'a été ni consommée ni tentée.
B. FOURNITURE DE MOYENS
Les moyens en question sont des armes, des instruments, des documents et
tout autre moyen de nature et destiné à faciliter la commission de
l'infraction. Il faut que l'agent qui les a fournis ait su qu'ils devaient servir à
la réalisation de l'infraction et qu'ils aient effectivement servi à cette
infraction. Il faut que l’agent qui les a fournis ait su qu’ils devaient servir à la
réalisation matérielle de l’infraction.
Il faut qu’ils aient effectivement servi à la réalisation de cette infraction, soit
directement en concourant au fait matériel constitutif de l’infraction, soit
indirectement par l’encouragement et l’apport à la détermination de l’agent,
que constitue cette fourniture de moyens.
C. AIDE ACCESSOIRE
482
Loc. cit.
483 ère
I Inst. (Appel), Elis., 5 novembre 1929, R.J.C.B.,1930, 30.
484
Crim. 21 février 1968, J.C.P. 1969; II. 15703 ; note de LESTANG.
485
Laval, 5 mars 1965, D. 628.
486
Trib. Poitiers, 6 avril 1973, Gaz. Pal., 1974. Somm. Nancy, 6 mars 1975, Gaz. Pal.,I.433, obs. LARGUIER,
R.S.C., 1976, 953.
161
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Nous avons déjà rencontré la difficulté que soulèvent les mots «ou dans ceux
qui l'ont consommée» et qui laissent croire que les actes de participation
peuvent être postérieurs à la commission de l'infraction.
Même dans cette hypothèse, ce recel doit avoir été préalablement concerté,
car « il est impossible de prendre une part quelconque à un crime qui a pris fin
»489.
Seront considérés comme complices ceux qui, connaissant que tels individus
se livrent à ce genre d'activité, leur auront fourni habituellement logement,
lieu de réunion ou de retraite.
§ 4. DISPOSITIONS SPECIALES
487
Op. cit., I, n° 560.
488
Op. cit., n° 562.
489
Loc. cit.
490
G. MINEUR., op. cit., p. 94.
162
Cours de Droit Pénal CT Manasi
acte de complicité de l'infraction qui s'en est suivie, même si par ailleurs
l'épreuve n'était pas punissable en elle-même;
- L'article 78: l'imputation d'un fait, en abusant des croyances
superstitieuses, qui aura incité à la commission d'une infraction, sera
considérée comme un acte de complicité.
§ 5. REPRESSION DE LA PARTICIPATION
Les sanctions sont prévues par l'article 23 CP. Elles varient selon qu'il s'agit
des coauteurs ou des complices.
Les coauteurs sont des auteurs. Il est donc normal qu'ils encourent les
mêmes peines.
En ce qui concerne les complices, ils sont passibles «d'une peine qui ne
dépassera pas la moitié de la peine qu'ils auraient encourue s'ils avaient été
eux-mêmes auteurs» (art. 23 al. 3, CP).
Cependant, les prévisions légales n'excluent pas qu'en fait le complice puisse
être condamné à une peine plus rigoureuse que l'auteur principal, «compte
tenu de sa culpabilité propre et des circonstances qui lui sont personnelles»491.
§ 6. INFRACTIONS PLURALES
491
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., nos 272 et sv.
163
Cours de Droit Pénal CT Manasi
- L'adultère exige pour sa commission l'activité commune de deux
personnes de sexe opposé. L'une des deux personnes ne peut être poursuivie
sur base des articles 21-23 CP, car chacune est auteur à part entière de
l'infraction. Cela n'exclut pas cependant qu'une troisième personne se rende
participant à l'infraction par l'aide apportée aux délinquants;
- La corruption est une infraction plurale. Celui qui corrompt le
fonctionnaire ne pose pas un acte de participation mais se rend bien
coupable de corruption active, tandis que son partenaire est coupable de
corruption passive (art.147 et s. du code pénal);
Dire de quelqu'un qu'il est responsable, c'est dire qu'il est en mesure de
répondre de ses actes.
492
Cass., Ch. réunies, 5 avr. 1996, R.D.P.C., 634, 638.
493
C.S.J., 11 février 1972, Bull., 1973, 18 ; R.J.Z., 129.
494
Notion introduite par PUFENDORT en 1660.
164
Cours de Droit Pénal CT Manasi
pouvoir avoir conscience du caractère réel et du danger social de ses actions
ou de les diriger »495.
§ 1. LA DEMENCE
495
Article 21 du code pénal russe de 1997.
496
Voir article 121-3, al. 1er et 2 du CNPF.
165
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le code pénal belge s'exprime en des termes semblables: «Il n'y a pas
d'infraction, lorsque l'accusé ou le prévenu était en état de démence au
moment du fait»(art. 71).
Cette solution n'allait pas de soi. Car, dans l'ancien droit, on n'hésitait pas à
condamner les fous, parfois sévèrement. On les considérait comme possédés
du démon. La reconnaissance de l'irresponsabilité des déments est une
conséquence des travaux scientifiques de PINEL et d'ESQUIROL (XVIIIème
siècle). Elle est conforme à la doctrine classique qui fonde la responsabilité
pénale sur le libre arbitre. Etant donné que la démence supprime la liberté,
la volonté et le discernement, il est logique que ceux qui en sont atteints
soient exclus du domaine pénal.
A. NOTION DE DEMENCE
Sans devoir recourir à la notion qu'en ont les médecins ou les psychiatres,
nous dirons qu'au sens du droit pénal, la démence «désigne toutes les formes
de l'aliénation mentale»497.
B. EFFETS DE LA DEMENCE
497
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 287.
498
Loc. cit.
499
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n° 339.
500
Moïse ADDAD et Michel BENEZECH, Loc. cit.
166
Cours de Droit Pénal CT Manasi
En effet, quoiqu'il soit juridiquement irresponsable, le fou n'en est pas moins
socialement dangereux. Et le point de vue des positivistes est pertinent qui,
sur base de la responsabilité sociale, met les aliénés sur le même pied que
les délinquants normaux. Il est vivement souhaitable que le législateur
congolais, à l'instar de nombreuses législations étrangères, prévoie des
mesures de sûreté (l'internement notamment) que le juge pourra prononcer à
l'encontre du dément afin que celui-ci soit au moins surveillé et soigné. Une
telle disposition rencontrera à la fois l'intérêt de la société et de l'agent501.
501
Il y a certes l’ordonnance n°11/83 du 14 février 1959 relative au logement des individus dont la libre
circulation est dangereuse. Par son caractère administratif, elle est insuffisante et n'est «d'ailleurs presque jamais
appliquée». ESIKA, op. cit., n° 292.
502
Corr. Brux., 28 janv. 1994, J.L.M.B., 754, avec obs. F.K. ; R.D.P.C., 1995, 437.
503
G. STEFANI et G. LEVASSEUR, op. cit., n° 292.
167
Cours de Droit Pénal CT Manasi
II. La démence doit être totale
En vérité, cette condition n’est pas simple à définir et son contenu n’est pas
aisé à dégager. Deux approches sont possibles :
Cette approche est la plus réaliste et la plus actuelle, car «il existe des délires
qui ne touchent pas les facultés intellectuelles mais qui empêchent
cependant l’individu d’être maître de ses actes.»505
Tel est le cas d’un certain HADFIELD qui croyait que le monde touchait à sa
fin et que, selon un ordre de Dieu, il devait le sauver en se sacrifiant. Sa
religion interdisant cependant le suicide, il décida de tirer sur le roi Georges
III d’Angleterre le jour où celui-ci serait au théâtre afin ainsi qu’à son tour il
puisse être pendu. L’ayant raté, il fut néanmoins poursuivi pour attentat sur
la personne royale. Il fut, malgré lui, acquitté grâce à la défense assurée par
Lord ARSKIN, qui réussit à convaincre le jury. Celui-ci reconnut en effet
« qu’il n’était pas obligatoire que l’accusé fut sans intelligence et sans
compréhension pour être déclaré irresponsable »506.
504
16, Howard’s Supreme Court, 635, 764 (1724).
505
Moïse ADDAD et al., op. cit., p. 54.
506
Loc. cit.
168
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le problème qui se pose toutefois est qu'entre un homme bien portant et un
fou complet, il existe des états intermédiaires: déficients mentaux, demi-fous,
anormaux, psychopathes, « caractérisés par définition par un déséquilibre
entre l’intelligence et le jugement »507.
Or, le système pénal classique, qui est aussi le nôtre, n'en tient pas compte
pour la détermination de la responsabilité. Ou l'on est responsable, ou l'on
est irresponsable. Toutefois, les cours et tribunaux, lorsqu'ils ont affaire à
des anormaux, leur reconnaissent la responsabilité atténuée et leur
accordent des circonstances atténuantes.
Ce système mérite d'être connu, car il paraît à ce jour être le meilleur pour
faire face aux problèmes posés par les déficients mentaux.
I. Le somnambulisme
507
Georges KELLENS, Précis de pénologie et de droit des sanctions pénales, Coll. Scientifique de la Faculté de
Droit de Liège, 1991, p. 35.
508
G. STEFANI et G. LEVASSEUR, op. cit., n° 292.
509
P. CORNIL , Une réforme de la loi belge du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux (loi du 1er
juillet 1964), in R.S.C., 1968, 263, 273.
510
Le Petit Larousse illustré, 2000.
169
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L’hypnose est définie comme l’« état de conscience particulier, entre la veille et
le sommeil, provoqué par la suggestion »513.
II. L'ivresse
511
BOUZAT et PINATEL, loc. cit.
512
Loc. cit.
513
Le Petit Larousse illustré, 2000.
170
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le problème le plus difficile et qui a longtemps divisé la doctrine et la
jurisprudence est celui qui se pose lorsque l'agent a bu sciemment, sachant
qu'il peut s'enivrer.
Une solution ancienne voulait que ce genre d'ivresse exonère pour les
infractions intentionnelles, et qu'on ne puisse retenir à l'égard de l'agent que
les délits d'imprudence514.
La solution actuelle, inspirée par des exigences de défense sociale, veut que
l'ivresse fautive ne profite pas au prévenu et que les infractions, même
intentionnelles, puissent être retenues515. La justification de cette solution
est trouvée dans la théorie du dol éventuel: l'individu qui s'enivre
volontairement doit prévoir les conséquences possibles de son acte et devoir
en répondre si jamais elles se produisaient. S'il a bu sachant qu'il s'enivrera,
c'est qu'il a voulu ou tout au moins accepté les conséquences dans
l'éventualité où elles se produiraient.
Le code pénal belge (art. 71) et le code pénal français de 1810 (art. 64)517
disposent qu'il n'y a pas d'infraction lorsque l'accusé ou le prévenu «a été
contraint par une force à laquelle il n'a pu résister».
514
Voir HAUS, op. cit., n° 685.
515
G. STEFANI et G. LEVASSEUR, op. cit., n° 296.
516
Boma, 5 sept. 1905, Jur. Et. II, 51 ; Ière Inst. Léo, 31 déc. 1901, Jur. Et., II, 302 et 341 ; Elis., 5 mai 1914,
Jur. Col., 1924. Voir aussi G. MINEUR, op. cit., p. 70.
517
Le NCPF reprend les dispositions de l'ancien CP sur la contrainte (article 122-2).
171
Cours de Droit Pénal CT Manasi
B. LA CONTRAINTE MORALE
Alors que la contrainte physique désigne une force qui s'est exercée
matériellement sur l'agent et qui l'a obligé à faire ce qu'il ne devait pas faire
ou l'a empêché de faire ce qu'il devait faire524, la contrainte morale provient
518
BAUDRY, La force majeure en droit pénal, thèse, Lyon, 1938, p. 74.
519
Crim., 8 août 1840, S. 1841.1.549.
520
Crim., 3 mars 1865, D. 66.5.394.
521
Crim. , 24 avril 1937, D.H., 1937.429.
522
Bruxelles, 7 nov. 1987,R.W., 1989-1990, 748 ; R.D.P.C., 1990, 1084.
523
Bruxelles, 7 nov. 1989, R.W., 1989, 1263.
524
J.M. AUSSEL, La contrainte et la nécessité en droit pénal, in Quelques aspects de l'autonomie du droit pénal,
Etudes de droit criminel sous la direction et avec une préface de G. STEFANI, Paris, Librairie Dalloz, 1957, p.
259.
172
Cours de Droit Pénal CT Manasi
d'une pression exercée sur la volonté de l'agent par la menace d'un mal ou
par une force quelconque525.
Et l'un des principaux buts de la réaction répressive n'est-il pas «de donner
à l'homme une raison supplémentaire d'offrir quelque résistance à ses
impulsions?»531.
525
Op cit., p. 268.
526
Roger BERNARDINI, V° Menaces, in Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, mise à jour 1999,
Dalloz, Tome V, Paris, 7 pages.
527
DONNEDIEU de VABRES, op. cit., n° 375.
528
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 301.
529
Voir supra, p. 319.
530
Loc. cit.
531
DONNEDIEU de VABRES, op. cit., n° 378.
173
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Elle doit exercer une pression telle que l'agent ne pouvait agir autrement. Il
faut qu'elle soit totale, annihilante et déterminante. Il n'y aura pas
contrainte exonératoire si la volonté n'a été qu'amoindrie ou si l'agent avait
des possibilités d'éviter la commission de l'infraction.
Il a été jugé que la contrainte morale résultant d’une force à laquelle on n’a
pu résister et libérant l’auteur de toute faute suppose que le libre arbitre de
l’auteur de l’acte a été annihilé. En constatant que tel n’est pas le cas en
l’espèce, les juges ont justifié légalement leur décision de rejeter la contrainte
morale532.
Il ne faut pas que ce soit l'agent qui, par sa faute, s'est mis dans une
situation où sa volonté a été annihilée. Autrement dit, la faute antérieure de
l'agent rend la contrainte inopérante et laisse intacte sa responsabilité.
L'exemple souvent cité est celui de ce matelot qui s'était enivré et, arrêté par
la police, n'avait pas pu regagner son navire au moment du départ. Pour sa
défense, il invoquait la force majeure. La chambre criminelle de la Cour de
cassation française, tout en reconnaissant l'impossibilité absolue dans
laquelle s'était trouvé le matelot de rejoindre son poste, n'en a pas moins
retenu l'infraction de désertion au motif que l'agent, en s'enivrant par sa
faute, avait anéanti la force majeure en tant que cause de non-
imputabilité533.
Dans l’espoir d’une abondance matérielle qui lui avait été promise par un
escroc, un haut fonctionnaire de la République avait déplacé des sommes
d’argent d’une chambre forte de son bureau, tout en renseignant faussement
dans ses livres leur existence.
532
Cass. 15 mars 1994, Pas., I, 264.
533
Crim., 29 janvier 1921, S. 1.185, note ROUX (Affaire TREMINTIN).
534
C.S.J., 31 août 1984, en cause MP c/KASHWANTALE ka RUHANGAMUGABO BALEMBA et
NZUNZUMUNA DIJIBA MBAKI, BA, 1980-1984, 2001, 507-517.
174
Cours de Droit Pénal CT Manasi
De même, a été exclu du bénéfice de l'exonération le prévenu qui s'était lui-
même constitué un état de soi-disant contrainte par son propre
comportement, en abusant notamment chroniquement de substances
euphorisantes535.
Cette solution est juste, car « la thèse contraire aboutissant au résultat que
tout prévenu pourrait s’octroyer à lui-même une cause de non-
imputabilité »536, telle étant sa conviction.
§ 3. L'ERREUR INVINCIBLE
A. NOTION
Il y a erreur de fait lorsque les faits ne sont pas tels que l'agent le suppose : il
s'en fait une fausse représentation ou une description inexacte.
B. LE CARACTERE INVINCIBLE
L'erreur est dite invincible lorsqu'elle aurait pu être également commise par
une personne faisant preuve d'une prudence, d'une attention et d'une
diligence moyenne, compte tenu des intérêts en présence et des
circonstances concrètes objectives de l'espèce537. C'est ce que l'on appelle le
critère de l'homme raisonnable.
Cet homme raisonnable ne saurait être abstrait. Il doit être situé et défini
aussi objectivement que possible. « Le comportement d’un médecin, d’un
avocat, d’un banquier ne sera pas comparé à celui d’un homme
535
Bruxelles, 28 juin 1989, J.L.M.B., 1989, 179, R.D.P.C., 1990, 1083.
536
Cass., 15 mars 1994, Pas., I, 264.
537
Cass. b., 6 oct. 1952, Pas.1953, I, 37 (Affaire Romain).
175
Cours de Droit Pénal CT Manasi
normalement prudent et raisonnable, mais bien à celui d’un médecin, d’un
avocat, d’un banquier … normalement prudent et raisonnable »538.
C'est ainsi qu'il a été jugé que l'ignorance ou l'erreur invincible dans le chef
du bourgmestre pouvait se déduire de ce que tant le commissaire
d'arrondissement que le ministre de l'intérieur avaient estimé que les
examens médicaux n'étaient pas obligatoires pour les membres de la police
communale541.
Il a encore été jugé que l’erreur de droit sera considérée comme inévitable,
donc justificative, si l’agent a accompli toutes les diligences requises pour ne
pas se tromper. Tel est le cas lorsque, s’étant renseigné auprès de
l’Administration, il a été induit en erreur par celle-ci542.
538
CORNELIS L., Principes du droit belge de la responsabilité extra-contractuelle, vol. I, 1991, p. 39) ; Cour
militaire, 4 juillet 1996, R..D.P.C., 1997, 118.
539
Cour militaire b., 4 juillet 1996, R.D.P.C., 1997, 115.
540
Voir J. P. DOUCET, Précis de droit pénal général, Liège, 1976, pp. 126-127.
541
Bruxelles, 7 mars 1990, J.L.M.B., 674, R.D.P.C.,1083.
542
Dijon, 15 juin 1994, Gaz. Pal., 3 déc. 1994, cité par ROUJOU de BOUBEE, op. cit., p. 32.
543
Corr. Namur, 31 oct. 2003, J.L.M.B., 2003, 1803.
544
Cité par Thierry BOSLY dans la recension faite de l’ouvrage de Olivier RALET, Responsabilité des
dirigeants de société, Larcier, Bruxelles, 1996, in R.D.P.C., 1996, 1102-1103.
176
Cours de Droit Pénal CT Manasi
débauche et de prostitution) sont insuffisantes pour permettre au prévenu
de se prévaloir de l’erreur invincible. Toutefois, le caractère isolé des
poursuites justifie l’atténuation de la peine545.
545
Corr. Brux., 31 oct. 1995, R.D.P.C., 1996, 232.
546
Cass. b. 21 sept. 1994, Pas., I, 750 ; 15 mars 1994, Pas., I, 261.
547
G.STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 303.
548
Cass. 10 juillet 1946, Pas., I, 293 (affaire des tailleurs de Binche).
549 ère
I Inst. Elis., 9 avril 1941, R.J.C.B., 151.
550
Léo, 27 mars 1943, R.J.C.B., 215.
551
Léon, 29 juin1944, R.J.C.B., 1945, 72.
177
Cours de Droit Pénal CT Manasi
D’où le souhait formulé par le même auteur de voir assouplir les conditions
d’invocation de l’erreur de droit en vue d’en faire, en pratique et en
conformité avec les termes de la loi, une véritable cause de non-
imputabilité553, du moment que cette erreur s’avérerait invincible, non
fautive.
Nous pensons toutefois qu’à ce jour, il serait très tôt de dégager la tendance
dominante et de dire l’avenir que les cours et tribunaux français assureront
à l’erreur de droit invincible. « Laissant le temps au temps »554 , il est fort
probable que la pratique judiciaire (jurisprudence) se rapprochera de la
formulation légale.
Ainsi, pour revenir sur et terminer avec la maxime «nul n'est censé ignorer la
loi », nous relèverons l'évolution qui est partie d'une présomption irréfragable
de la connaissance de la loi à une présomption simple qui permet désormais
à l'agent de pouvoir démontrer ou alléguer, de manière vraisemblable, qu'il a
eu des raisons d'ignorer la loi ou de se tromper sur son interprétation.
La question que l'on peut se poser est de savoir si cette maxime, réduite à
une présomption simple, présente encore quelque intérêt. Nous pouvons
répondre affirmativement. En effet, imaginons un seul instant où une
maxime inverse serait de rigueur: «Nul n'est censé connaître la loi». Elle
conduirait à l'anarchie absolue et à l'impunité quasi généralisée, car le
ministère public, pour poursuivre et obtenir la condamnation du délinquant,
552
Loc. cit.
553
Loc. cit.
554
Formule attribuée à François MITTERRAND.
555
Droit pénal spécial zaïrois, L.G.D.J., Paris, 1985, p. 177.
556
Voir leurs textes respectifs ; Essai critique de jurisprudence, déjà cité, pp. 136-137 ; La maxime «Nul n’est
censé ignorer la loi», Discours de rentrée de la C.S.J., 10 novembre 1977, in Bull., 1978, 159-181.
178
Cours de Droit Pénal CT Manasi
devra au préalable et chaque fois apporter la preuve de la connaissance de la
loi par ce dernier. Ce qui, dans la pratique, s'avérerait impossible.
C. L'ERREUR FAUTIVE
Nous voulons préciser ici quelle peut être l'incidence de l'erreur non-
invincible, dite aussi erreur fautive, sur la responsabilité pénale. Pour cela, il
faudra distinguer selon qu'il s'agit d'une erreur de fait ou de droit.
Pour que l'erreur de fait supprime la responsabilité pénale, elle doit porter
sur un élément essentiel de l'infraction ou sur une circonstance aggravante.
Il en est ainsi pour :
Dans les pays qui incriminent le parricide comme un meurtre sui generis,
celui qui tue son père alors qu'il croyait avoir affaire à un individu
quelconque, ne répondra pas du parricide, mais plutôt du meurtre.
557
HAUS, op. cit., n° 300; Voir aussi l'article de J. VERHAEGEN, L'erreur non invincible de fait et ses effets en
droit pénal belge, in R.D.P.C., janvier 1989, 17 et s.; App. Boma, 15 juillet 1902, Jur. Etat., I,202 (Affaire
procureur SCHMITZ).
558
Kis., 2 mars 1974, R.J.Z., 88.
179
Cours de Droit Pénal CT Manasi
En ce qui concerne l'erreur de droit fautive, il faut maintenir l'adage selon
lequel «l'erreur de droit fautive ne profite jamais», sauf dans les incriminations
qui exigent la connaissance positive de la loi, notamment l'arrestation, la
détention arbitraires (art.67 et 68 du CP) et les atteintes par les
fonctionnaires aux droits garantis aux particuliers (art. 180 CP).
La question peut se poser de savoir si un juriste sera exonéré par une erreur
de droit invincible ou par une erreur de droit fautive.
Un juriste peut bien être non-imputable par une erreur de droit invincible.
Bien entendu, l'appréciation de cette invincibilité doit tenir compte de la
qualité de l'agent, de sa formation notamment. Mais on ne peut pas, par
principe et a priori, indépendamment des circonstances de l'espèce, exclure
le juriste de la possibilité de bénéficier de l'erreur invincible. Le droit est
tellement difficile et complexe qu'il serait irréaliste de croire qu'il existe des
hommes ou une catégorie d'entre eux qui soient censés le connaître à la
perfection, sans risque d'erreur non fautive.
De même, en ce qui concerne l'erreur de droit fautive, elle peut aussi être
commise par un juriste et devra lui profiter si l'on est dans le domaine des
infractions qui font de la connaissance positive de la loi un de leurs éléments
constitutifs. Ici, l'appréciation de la vraisemblance de l'erreur devra être
sévère, compte tenu de la formation de l'agent considéré. En effet, il serait
« difficile de traiter de la même manière le profane et l’agrégé des Facultés de
Droit »560.
L’on voit bien que, comme pour toutes les questions complexes, seule la
mesure déterminée par un solide bon sens, apportera la bonne solution à
chaque cas d’espèce.
§ 4. LA MINORITE
559
Voir la très intéressante étude de KALOMBO MBANGA, Encore à propos de l'arrêt de la Cour Suprême de
Justice du 13 juillet 1972, in Somme juridique, Revue des étudiants, 1982-1983, n° 4, p. 3 et s; J. VERHAEGEN,
La protection pénale contre les excès de pouvoir et la résistance légitime à l'autorité, Bruxelles, Bruylant, 1969,
p.139 et s.; Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n° 261.
560
ROUJOU de BOUBEE, op. cit., p. 32.
180
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L’ordonnance-loi n° 78/016 du 4 juillet 1978 modifie ce seuil d'âge et le fixe
à 16 ans.
En droit congolais, les mineurs ainsi définis sont, par fiction légale,
considérés comme pénalement non responsables. La minorité d'âge constitue
une cause de non-imputabilité. Seules relèvent du droit pénal congolais les
personnes qui, au moment des faits, ont 16 ans accomplis.
En deçà de cet âge, il s’agit des personnes qui font l’objet des mesures de
protection, d’assistance, de surveillance et d’éducation.
Sur base de cet élément, les infractions sont classées tantôt en infractions
intentionnelles et en infractions non-intentionnelles, tantôt en infractions
intentionnelles, en délits d'imprudence et en délits matériels. Les deux
classifications sont exactes et se complètent, mais nous allons poursuivre
notre exposé sur la base de la dernière qui est plus explicite.
Nous prendrons soin d'ajouter quelques éléments sur une notion qui prend
de plus en plus place dans le droit comparé, à savoir: la mise en danger.
561
Reynald OTTENHOF, Rapport déjà cité, p. 31.
562
Article 122-8, al. 2.
563
BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 119.
181
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Ce dol général est une condition tacite de toutes les infractions, sauf lorsque
la loi dispose autrement. La jurisprudence affirme que la nécessité d’une
intention délictueuse est un principe général et que son existence doit être
prouvée dans tous les cas où le législateur n’en a pas dispensé le ministère
public565. «Le dol est un élément essentiel pour l'existence de toute infraction
prévue par les différentes dispositions qui forment le code congolais, sauf
dans le cas où le texte lui-même prévoit expressément la simple faute, la
simple négligence.»566
L'exposé des motifs du code pénal belge de 1867 était déjà précis à ce sujet:
«L'intention criminelle (dolus) est un élément constitutif de tout crime et
même de tout délit, à moins que la loi n'ait puni, par une disposition
expresse et spéciale, la simple faute (culpa).»567
La notion de dol général est cependant contestée par certains auteurs qui la
trouvent inutile et factice569, voire sans existence propre570. En effet, la
connaissance de la loi étant présumée, il n'y a pas des raisons de la
considérer comme élément spécifique de certaines infractions571.
564
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 199; E. GARCON, op. cit., 1ère éd., art.1. n° 77; HAUS, op. cit., I, n°
298.
565
Crim. 30 mars 1944, Bull., n° 90.
566
Tribunal d'Appel de Boma, 15 juil. 1902, Jur. Et., I, p. 202 (affaire procureur SCHMITZ. Voir aussi , op. cit.,
I. n° 295.
567
Législation criminelle, I,134, n° 306; HAUS, op. cit., n° 295.
568
HAUS, op. cit., I, n° 299.
569
R. LEGROS, op. cit., n°s 109-174.
570
A. Ch. DANA, Essai sur la notion d'infraction pénale, 1982, n° 421.
571
Op. cit., n° 419; A. Ch. DANA, op. cit., n° 419.
572
J.PRADEL , op. cit., n° 419; A. Ch. DANA, op. cit., n° s 418 et 432.
182
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le législateur exigera souvent le dol spécial. Celui-ci est réalisé lorsque la
volonté porte à la fois sur l'acte et ses conséquences. Cet élément moral est
notamment réalisé dans le meurtre (art. 44 CP), le vol (art. 79) ou le faux en
écritures (art.124 CP).
L'exigence du dol spécial n'est pas toujours exprimée par la loi et peut
résulter de la nature même de l'infraction. Exemple: l'outrage à un
fonctionnaire (art. 136 CP) ne peut se réaliser sans animus injuriandi.
L'agent pose son acte volontairement, en sachant et en voulant que le
fonctionnaire en souffre, soit atteint dans son honneur ou sa dignité.
573
Boma, 30 juillet 1912, Jur. Congo, 1914-1919,156.
574
Boma, 14 mars et 8 avril 1911, Jur. Congo, 1912, 43, 1913, 1 ; C.S.J, 4 avril 1997, R.P.A. 217, en cause M.P.
et Société RECODI c/RUGENDA BANGA.
575
C.S.J., 27 fév. 1990, R.P. 1.220/1.225, en cause Mr KAYEMBE MUKUTA et M.P. c/Mr PORTUGAL
Alexandre.
576
C.S.J., 29 août 1997, R.P.A. 220, en cause M.P., Société SITREX, BODART c/LUWAWU SADILA
François et crts.
577
C.S.J., 20 nov. 1985, en cause MP c/IYELI MPELA ISEKI et crts, in BA 1985-1989, 2002, 85.
578
Cass. B., 26 oct. 1994, Pas., I ; 718.
183
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Que quelqu'un tue ou vole pour se venger ou se divertir, cela est indifférent
quant à l'existence de l'infraction.
La circonstance que les auteurs de faux en écritures soient mus par des
mobiles différents est sans incidence sur l’intention frauduleuse relevée à
leur charge, de se procurer ou de procurer à autrui un avantage illicite579.
579
Cass. b., 26 oct. 1994, Pas., I, 860.
580
Cass., 6 sept. 1995, R.D.P.C., 1996, 334.
581
Lewis c. La Reine 1979 2 R.C.S. 821, 831, cité par Gisèle CÔTE-HARPER, Antoine D. MANGANAS,
Jean TURGEON, Droit pénal canadien, Ed. Yvon BLAIS inc., 3ème éd. – Owansville(Que) 1989, p. 257.
184
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le dol indirect est susceptible de prendre deux formes: le dol nécessaire et le
dol éventuel.
A titre d'exemples de dol éventuel, nous pouvons donner les cas suivants :
582
Voir JIMENEZ de ASUA, La faute consciente et le dolus eventualis, in R.D.P.C., 1959-1960, p. 603 et s.
583
Op. cit., I, n° 314. Voir aussi Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n° 353-353 bis.
584
J. CONSTANT, Traité élémentaire de droit pénal ; Principes généraux du droit pénal positif belge, I, Liège,
1965, p. 185.
585
Voir NYABIRUNGU mwene SONGA, La faute punissable, op. cit., p. 229.
185
Cours de Droit Pénal CT Manasi
coûte, et cause ainsi la mort d'un gendarme ou d'un policier, ne recherche
probablement pas cette mort, mais s'y résigne ou l'accepte au cas où elle
surviendrait586.
D. LE DELIT PRETERINTENTIONNEL
L'exemple typique nous est donné par l'article 48 de notre code pénal :
«Lorsque les coups portés ou les blessures faites volontairement mais sans
intention de donner la mort l'ont pourtant causée, le coupable sera
puni...».
586
Voir J. VERHAEGEN, Dol et faute lourde en droit pénal, in Liber amicorum M. Châtel, Kluwer, Anvers,
1991, p. 460.
587
Voir Salongo, quotidien de Kinshasa, 5 novembre 1975.
186
Cours de Droit Pénal CT Manasi
HAUS enseigne justement que dans ce type d'infraction, il y a concours de
dol et de faute, le dol portant sur les coups et blessures, et la faute sur la
mort (culpa dolo determinata)588.
E. DOL INDETERMINE
Généralement, lorsque l'auteur agit, il est animé d'un dol déterminé, précis.
Il veut tuer un tel, il veut voler tel objet.
Mais, il peut se faire que l'auteur n'ait pas en vue un résultat aussi précis. Il
ne vise personne, ni aucun objet en particulier. Il veut simplement tuer,
quelle que soit la victime, ou voler, quel que soit ce qui tombera sous la
main. «Lorsque l'agent a commis le fait dans une intention indéterminée de
nuire, on doit lui imputer, comme volontaire ou intentionnel, le résultat de
son action, quel qu'il soit ; mais on ne peut lui imputer que ce résultat.»590
588
Op. cit., I, n° 329.
589
Législation criminelle, III, 219, citée par Christiane HENNAU et Jacques VERHAEGEN, La faute non-
intentionnelle et sa réglementation dans les codes pénaux modernes, in Le défaut de prévoyance à l’épreuve des
faits et du droit, droit belge et droit comparé, Séminaire « Université-Monde judiciaire », Louvain -la -
Neuve,1993, in R.D.P.C., 1994, 572-573.
590
HAUS, op. cit., I, n° 312.
591
C.S.J., 30 juillet 1985, en cause MP c/BUUNDA BIRERE SHAMWAMI, BA, 1985-1989, 2002, 39-44.
187
Cours de Droit Pénal CT Manasi
affaire à un particulier, il ne pourra pas être condamné pour cette infraction
aggravée, mais répondra plutôt des coups ou injures simples.
Il est entendu que cette appréciation ne lie aucune juridiction, et les Cours
et tribunaux restent libres de décider, dans chaque cas d'espèce, si le temps
écoulé constitue ou non la préméditation.
G. L'ABERRATIO ICTUS
592
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 200.
593
C.S.J., 10 juil. 1972, Bull., 1973, 88; R.J.Z. 1972, 135.
594
Crim., 5 juin 1956, D. 576 ; Crim. 27 déc. 1960, Bull., n° 621 ; Crim., 12 mai 1970, D. 515.
595
HAUS, op. cit., I, n° 574.
596
Op. cit., p. 464.
188
Cours de Droit Pénal CT Manasi
maladresse de l'agent, le coup dirigé contre une personne atteint une autre.
La question qui se pose est celle de savoir de quelles infractions il devra
répondre.
Cette thèse a été aussi soutenue par E. LAMY qui condamne les décisions de
certaines juridictions congolaises qui allaient dans le sens contraire598.
La deuxième thèse est celle défendue par HAUS599 et qui, en droit congolais,
a été suivie par Jacques VERHAEGEN600 et KALOMBO MBANGA601. L'auteur
d'une aberratio ictus répondra de deux infractions en concours idéal, dont
l'une est intentionnelle et l'autre culpeuse.
597
Crim., 18 fév. 1922, S. 1.329, note Roux ; Cass., 2è Civ., 15 déc. 1965., Gaz. Pal., 1966, I. 240.
598
E. LAMY, Cours, op. cit., p. 255.
599
Op. cit., I, n° 331.
600
J. VERHAEGEN, Aberratio ictus ou le problème pénal du coup dévié, in R.J.Z., n° spécial, 50è anniversaire,
p. 187 et s.
601
Notes d'Etudiants, op. cit.
189
Cours de Droit Pénal CT Manasi
porte un enfant dans ses bras, c'est accepter la mort de B ou de l'enfant
dans l'éventualité où elle se produirait.
Le jugement déclare que, dans ce cas, l’agent qui voulait frapper des
personnes impliquées dans une bagarre, mais qui, par erreur, porte des
coups ou inflige des blessures à un tiers, se rend coupable de l’infraction de
coups ou blessures involontaires603.
Il est cependant précisé, dans la même décision et à bon droit, qu’en cas
d’erreur sur la personne ou d’aberratio ictus, les circonstances aggravantes
inhérentes à la personnalité de la victime (dans le cas d’espèce, un agent de
police) et non voulues par l’agent ne peuvent être retenues à l’encontre du
prévenu604.
Notre code pénal ne définit pas la faute pénale. Néanmoins, toutes les fois
qu'il érige la faute en élément constitutif d'une infraction, il le dit
expressément, en utilisant des termes comme ceux-ci : involontaire(ment)
(art. 52, 53, 55.), imprudemment (art. 56), défaut de prévoyance ou de
précaution (art. 52, art. 109 CP), etc.
602
Voir NYPELS et SERVAIS, Le code pénal belge interprété, 1877, Tome III, art. 392, n° 9 ; P.E. TROUSSE,
Novelles, Droit pénal, I, 1, n° 2309 ; Ch. HENNAU et J. VERHAEGEN, Droit pénal général, 2è éd. 1965, n°s
417-420.
603
Conseil de guerre permanent, 2e Ch. Néerl., 13 oct. 1998, in R.D.P.C., 1999, 1286.
604
Voir aussi Cass. b., 22 juin 1936, Pas. I. 315.
605
Appel Boma, 13 sept. 1904 ; Jur. Etat Congo, 393 ;Ière Inst. Kas. 25 janv. 1950, R.J.C.B., 1951, 139.
190
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le délit d'imprudence comporte trois éléments : la faute pénale, le dommage
et le lien de causalité. Ces éléments sont si intimement liés qu'il convient de
les étudier ensemble.
A. LA FAUTE PENALE606
Le code pénal congolais contient quelques délits d'imprudence type, tels que
l'homicide et les lésions corporelles involontaires (art. 52-54 CP), l'incendie
involontaire (art. 109), etc.
Mais, en fait, toutes ces catégories se confondent le plus souvent les unes
avec les autres et se ramènent presque toujours à une imprudence, au point
que dans le langage courant, le délit de l'article 319 est devenu l'homicide
par imprudence607.
606
Voir pour plus de développements : NYABIRUNGU m. S., La faute punissable, op. cit., pp. 208-231.
607
A. LAINGUI., La responsabilité pénale dans l'ancien droit, (XVIème - XVIIème S), L.G.D.J., Paris, 1970, p.
54. L'article 319 visé est celui du CPF de 1810.
608
Voir sur la question de la faute pénale, les travaux du Séminaire « Université-Monde judiciaire » sous la
direction de Christiane HENNAU-HUBLET, publiés sous le titre « Le défaut de prévoyance à l’épreuve des faits
et du droit », droit belge et droit comparé, Louvain-la-Neuve, avril 1993, in R.D.P.C., 1994, 229-587.
609
HAUS, op. cit., I, n° 326.
191
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La première est que l'agent n'a pas connu la nature de son action, n'a pas su
qu'elle pouvait produire le mal qui en est résulté, par ignorance ou par
erreur. Mais il est en faute pour avoir négligé d'acquérir les connaissances,
de prendre les renseignements qui auraient pu l'éclairer610.
- Le fait de manier une arme à feu, croyant qu'elle n'est pas chargée, et
tuer ainsi quelqu'un ;
- Le fait pour un médecin de tuer son malade sur le lit de l'opération,
parce qu'il a ignoré l'exacte nature de son intervention.
- Le fait de jouer avec un fusil qu'on sait être chargé et de blesser ou tuer
quelqu'un ;
- Le fait, pour quelqu'un qui ne sait pas conduire, de s'installer au volant
d'un véhicule et de démarrer, emportant ainsi, dans cette course insensée,
des personnes qui se trouvaient sur son passage.
La faute consciente est proche du dol par la conscience que l'agent avait de
la possibilité du mal qu'il a causé (culpa dolo proxima). Mais, elle en diffère
par le fait que l'agent non seulement n'a pas l'intention de produire ce mal,
mais exclut finalement la possibilité de la survenance de ce mal, soit qu'il
compte sur le hasard, soit qu'il compte sur son habileté614.
610
Loc. cit.
611
Loc. cit.
612
Op. cit., V, n° 2052.
613
HAUS, Op. cit., 327.
614
Voir L. JIMENEZ de ASUA, La faute consciente et le dolus eventualis, in R.D.P.C., 1959-1960, 607.
192
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La jurisprudence et la doctrine françaises , sans doute pour ne pas se faire
615
trop de mal, confondent les deux notions, et considèrent que le dol éventuel
rentre dans la faute consciente. Et le nouveau code pénal ne fait que
confirmer cette tendance.
B. LE DOMMAGE
Donc, la faute, même la plus grave et la mieux prouvée, si elle n'a en fait
occasionné ni homicide, ni blessure618 ni autre préjudice légalement prévu,
n'est pas punissable sous la qualification de délit d'imprudence.
Mais le législateur ne s'est pas contenté de faire du préjudice un élément
constitutif de l'infraction culpeuse. Il en a fait aussi «la pierre angulaire du
système répressif»619, car les peines sont déterminées et varient suivant le
résultat. L'homicide par imprudence, par exemple, est plus sévèrement puni
que les lésions involontaires.
615
Voir J. PRADEL, op. cit., n° 430 ; Crim. 27 mars 1902, B.C., n° 128.
616
Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, Loc. cit., n° 385.
617
Cité par JIMENEZ DE ASUA, Loc. cit. Voir aussi J. VERHAEGEN, Dol et faute lourde en droit pénal, in
Liber Amicorum M. Châtel, Kluwer, Anvers, 1991, p. 461 et s.
618
E. GARCON, Code pénal annoté, art. 319-320 bis, n° 9.
619
ROKOFYLLOS, Le concept de lésion et la répression de la délinquance par imprudence, (Essai de
critique), L.G.D.J., Paris, 1967, n° 34.
193
Cours de Droit Pénal CT Manasi
C. LE LIEN DE CAUSALITE
L'article 109 parle de l'incendie ... qui aura été causé par défaut de
prévoyance ou de précaution.
Le lien de causalité ainsi exigé doit être certain. Aucune poursuite ne sera
exercée, non seulement si le dommage et la faute sont étrangers l'un à
l'autre, mais encore si, d'une manière certaine, aucun lien ne peut être établi
entre eux. Le juge ne saurait se contenter d'un lien probable ou possible. Il
s'abstiendra de déduire la causalité de la simple succession des faits, et le
moindre doute devra bénéficier au prévenu. Le lien de causalité manque si la
possibilité d'autres causes n'est pas exclue621. Ainsi, par exemple, un
médecin, malgré des erreurs fautives, ne se verra pas reproché la mort de
son patient s'il n'est pas établi que ces erreurs ont déterminé le décès.
Il est rare, voire impossible, qu'un résultat soit dû à un seul facteur. Chaque
événement provient de beaucoup d'activités et d'omissions qui ont concouru
à sa survenance.
620
Voir pour des développements plus amples NYABIRUNGU m. S., op. cit., pp. 132-157.
621
Voir Cass. b., 23 sept. 1974, R.G.A.R., 1975, 9472, note de R.O. DALCQ.
194
Cours de Droit Pénal CT Manasi
«Chacun de ces faits étant lui-même dû à plusieurs activités ou abstentions et
ainsi de suite.
A mesure qu'on remonte dans le passé, croît donc en progression géométrique,
le nombre des causes de tout dommage. Et il est vrai que, si l'un de ces faits
avait manqué, le dommage ne se serait pas produit. »622
Cette théorie signifie que dans le rapport causal, toutes les conditions, voire
toutes les occasions du dommage sont équivalentes, toutes en sont la cause
au même titre.
Cette théorie est appelée aussi celle de la conditio sine qua non, car elle
retient comme cause tout facteur sans lequel le dommage ne serait pas
survenu.
L'affaire HAZARD s'inscrit dans ce cadre626. Le prévenu avait été auteur d'un
accident, et sa victime avait encouru la fracture d'une côte. Admise à
l'hôpital, elle décéda à la suite d'une méningite purulente.
622
R. SAVATIER, Traité de la responsabilité civile en droit français, II, 2è éd. L.G.D.J., Paris, 1951, n° 457.
623
H. L. MAZEAUD et J. MAZEAUD, Traité théorique et pratique de la responsabilité civile délictuelle et
contractuelle, II, 6è éd., Montchrestien, Paris, 1970, n° 1821.
624
MERLE et VITU, op. cit., 1973, n° 495.
625
J. CARBONNIER, Droit civil, 4, P.U.F., Thémis, 1972, p. 322.
626
Cass. b., 15 oct. Pas. 1974. I. 162.
195
Cours de Droit Pénal CT Manasi
autres et que, dès lors la faute initiale du demandeur présente avec le
dommage un lien nécessaire, direct et certain ...»
C'est toujours la théorie de l'équivalence des conditions qui fait que l'état de
santé antérieur de la victime n'a aucune influence sur l'existence du délit
d'imprudence. Il y a homicide involontaire lorsque la faute du coupable a
déterminé chez la victime des blessures ou maladies qui, à raison des
prédispositions pathologiques, ont entraîné la mort.
Il faut enfin préciser que si la cause doit être certaine, elle ne doit pas être
directe ou immédiate.
Cette théorie retient aussi toutes les conditions sine qua non. Est causal un
fait sans lequel le dommage ne se serait pas produit. Cependant, alors que la
théorie de l'équivalence des conditions se limite à cela, celle la causalité
adéquate procède à ce que RUMELIN a appelé le «pronostic objectif
rétrospectif». A partir du dommage, on remonte à toutes les conditions sine
qua non et on retient seulement celles qui avaient normalement en elles-
mêmes, dans les circonstances concrètes de la cause, la possibilité de
produire le résultat.
627
Crim., 15 janv. 1958, Bull., obs. L. HUGUENEY, R.S.C., 857.
628
Crim., 24 nov. 1964, D. 1966, 104.
629
Cité par PIROVANO, Faute civile et faute pénale, L.G.D.J., Paris, 1966, 286.
196
Cours de Droit Pénal CT Manasi
adéquate car l'accident d'auto ne peut pas en lui-même provoquer la mort
par le feu dans un hôpital630.
C'est pour toutes ces raisons que l'unité et l'identité de la faute pénale et
civile sont proclamées en droit positif633.
630
MERLE et VITU, op. cit., 1973, n° 495.
631
Voir notre thèse, op. cit., p. 166 et s ; notre communication au XIIè Congrès international de Droit pénal
(Hambourg, 1979), Actes du Congrès, pp. 134-137.
632
HOSNI, Le lien de causalité en droit pénal, thèse, Paris, 1952, éd. Le Caire, 1955, p. 56.
633 ère
I Inst. Léo, 7 avril 1934, R.J.C.B., 1935 ; Elis, 7 avril 1926 R.J.C.B., 1938, 89; Voir aussi appel, Rwanda-
Urundi, 25 mai 1954, R.J.C.B., 208.
197
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L'acquittement pour les mêmes faits exclut toute faute civile, car, entre celle-
ci et la faute pénale il n'existe aucune différence de nature ni de gravité634.
Le juge civil, en statuant autrement, se mettrait en contradiction avec ce qui
a été jugé au répressif. Cette règle vaut aussi pour les dégâts matériels.
634
DEPREZ, Faute pénale et faute civile, in Quelques aspects de l'autonomie du droit pénal, op. cit., p. 179.
635
Léo, 29 oct. 1957, J.T.O., 1958, 91.
636
Voir. PIROVANO, Faute civile et faute pénale, L.G.D.J., Paris, 1966, n° 319 et s., P. BOUZAT, Intervention
au Colloque du XXVè anniversaire de la R.S.C., même Revue, 1962, 279 ; A. CHAVANNE, Les effets du procès
engagé devant le tribunal civil, in R.S.C., 1954, 239 et s. ; HANNEQUART, La responsabilité pénale de
l'ingénieur, Ed. Vaillant-Carmanne, Liège, 1959, p. 314 et s.
637
Voir P. ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, Ed. Ides et Calendes, Neuchâtel, 1973, p. 385.
638
Jean PRADEL, Le défaut de prévoyance en droit pénal français, in R.P.D.C., 1994, 447.
198
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La question des infractions dites matérielles divise toujours la doctrine et la
jurisprudence639.
Cette opinion est partagée par MERLE, VITU641 et VIDAL642. Son défaut
majeur réside dans ce constat de F. CHABAS: «La faute, élément subjectif,
ne peut se confondre avec un fait matériel.»643
639
Voir Philippe CONTE et al., op. cit., p. 205.
640
A. LEGAL, La notion d'infraction matérielle, Chronique de jurisprudence, in R.S.C., 1960, 71.
641
Op. cit., I, 1973, n° 515.
642
VIDAL, La conception juridique française de la culpabilité, op. cit. Nations Unies, pp. 54-55.
643
F. CHABAS, La notion de contravention, in R.S.C., 1969, 25.
199
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Finalement, nous pouvons dire que les infractions dites matérielles postulent
le même élément moral que les délits d'imprudence, la culpa (négligence ou
imprudence). La seule différence se situe au niveau de la preuve: alors que
pour les délits culpeux le ministère public doit établir positivement tous les
éléments constitutifs de l'infraction, en matière d'infractions dites
matérielles, il se contente de rapporter les faits. Il revient alors au prévenu
de prouver ou d'alléguer de manière vraisemblable qu'il n'a pas commis de
faute. Il y a pratiquement un renversement de la charge de la preuve.
644
HAUS, op. cit., I, n° 292.
645
Voir Distr. Kin, 21 juin 1971, R.M.D. 48.038, Kab. rôle 32.949 ;I ère Inst. Mbuji Mayi, 16 juillet 1974, R.P.
20. Décisions citées par NYABIRUNGU, op. cit., p. 62.
646
Commission de réforme du droit du Canada, Etudes sur la responsabilité stricte, juin 1974, Ottawa, p. 37.
647
Cass. b., 12 mai 1987, R.D.P.C., 1988, 711. Voir Chris. HENNAU et J. VERHAEGEN, op. cit., n°s 383-384.
648
Voir J. VERHAEGEN, Analyse des recommandations du Congrès de Hambourg (16-22 sept. 1979) relatives
aux infractions d'imprudence, à leur prévention et au traitement des délinquants, in R.D.P.C., déc. 1979,949.
200
Cours de Droit Pénal CT Manasi
C. APPRECIATION CRITIQUE
A. NOTION
Les délits de mise en danger, les délits - obstacles ou les délits de mise en
péril traduisent la même réalité, désignent les mêmes faits. Ils concernent
tous des faits ou des comportements humains, voire même des manières de
vivre que le législateur érige en infractions et punit sévèrement, en vue de
prévenir des atteintes graves à la vie, à l'intégrité physique651, à la qualité de
la vie ou à tout autre bien juridiquement protégé.
Il s'agit donc des actes qui n'ont conduit à aucun résultat, à aucun
dommage, mais dont la commission rend probable la survenance d'un
dommage, d'une lésion telle que l'homicide, les blessures involontaires, les
atteintes à la qualité de la vie, etc.
649
Voir, pour plus de développements, notre thèse de doctorat, déjà citée, pp. 274 et s.
650
Voir notamment les travaux préparatoires du Xème Congrès international de droit pénal (Rome, 1968), in
R.I.D.P., 1969, n°s 1-2.
651
Voir, ROKOFYLLOS, op. cit., n° 25.
201
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Comme l'a relevé S. C. VERSELE, l'élément moral des infractions de mise en
danger consiste dans l'insensibilité ou l'insouciance sociales, l'état
d'immaturité qui se manifeste par une absence de considération pour
l'intégrité, les droits et les biens d'autrui652.
La peine est un mal infligé à titre de punition par le juge à celui qui est
reconnu coupable d'une infraction653.
I. Intimidation
On espère que le délinquant qui a déjà subi une peine en a pris la mesure. Il
connaît les désagréments qu'elle comporte et doit autant que possible éviter
de les subir de nouveau. C'est la fonction utilitaire au sens benthamien :
l'agent doit avoir plus d'intérêt à respecter la loi qu'à la violer.
652
R.I.D.P., 1969, 74.
653
J. CONSTANT, Traité élémentaire de Droit pénal, II, Imprimeries Nationales, Liège, 1966, p. 615.
654
DONNEDIEU de VABRES, op. cit., n° 464.
202
Cours de Droit Pénal CT Manasi
II. Amendement
La peine peut retenir l'ancien délinquant dans la bonne voie en lui inspirant
des attitudes honnêtes vis-à-vis de la société.
C'est cette idée de prévention générale qui fait qu'en cas d'augmentation ou
de radicalisation de la criminalité, lorsque des crimes crapuleux ou
spectaculaires se commettent avec une tendance à la répétition, l'opinion
publique réclame des châtiments exemplaires, des peines de nature à
décourager toute velléité de commettre des infractions semblables.
D. LA FONCTION ELIMINATRICE
Mais on peut dire aussi que les peines privatives de liberté comportent une
dimension éliminatrice en ce sens que, pendant leur application, le
condamné n'est pas en mesure de recommencer.
655
Voir LEJINS, Criminogenèse, in R.S.C., 1979, 497.
203
Cours de Droit Pénal CT Manasi
De même, la peine ou la mesure de sûreté consistant à déchoir le délinquant
routier de son droit de conduire, remplit la fonction d'élimination dans ce
sens que si elle est effectivement appliquée, elle a pour conséquence
d'exclure le mauvais conducteur de la circulation, définitivement ou pour un
temps.
E. LA FONCTION REPARATRICE
F. CONSIDERATIONS GENERALES
656
F. OST et M. VAN DE KERCHOVE, Le présent, horizon paradoxal des sanctions réparatrices, in
Philosophie du droit et droit économique, quel dialogue, Paris, Ed. Frison-Roche, 1999, p. 477 et s.
657
Voir Séminaire international sur la protection des victimes d’infractions pénales, Rome, 27-29 mai 1999, in
R.S.C., 2000, 266-268. A suivre sont les travaux du Xe Symposium International de victimologie : « Au delà des
frontières », Montréal, 6-11 août 2000 ; voir son ordre du jour, in R.S.C., 2000, 276.
658
Voir LEJINS, article cité, pp. 506-507.
204
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Ce principe, déjà rencontré au niveau des incriminations, est aussi essentiel
en matière de peines. Le juge ne peut prononcer une peine dont la nature et
le taux n'ont pas été préalablement déterminés par la loi. «Nulla poena sine
lege». Le souci de légalité fut tel qu'au XVIIIème siècle, le code pénal
révolutionnaire français de 1791 avait institué le système des peines fixes,
ne connaissant ni le minimum ni le maximum, et avait supprimé le droit de
grâce. Ces dispositions allaient toutefois être abandonnées par la législation
napoléonienne (code pénal de 1810).
La peine ne doit frapper que l'auteur même de l'infraction. Nul ne peut être
inquiété, poursuivi ni pris en otage pour des faits reprochés à autrui660. Ce
principe n'alla pas toujours de soi, et dans l'histoire, on a connu des peines
qui étaient destinées à frapper à la fois le délinquant et sa famille. La
responsabilité collective qui, longtemps, a caractérisé le droit traditionnel
africain, contrariait la notion de peine personnelle. Dans l'ancien droit
français, pour certains crimes, notamment ceux de lèse-majesté, la famille
du coupable était frappée par la confiscation générale.
Non seulement la peine doit être personnelle, mais elle doit encore être
individuelle, en ce sens que, lorsque l'infraction a été commise par plusieurs
personnes, le juge doit prononcer une peine pour chacune d'elles. Il ne peut
donc être prononcé de peines globales ou collectives. C'est en application de
ce principe que l'article 11 du CP édicte que l'amende est prononcée
individuellement contre chacun des condamnés à raison d'une même
infraction.
659
Voir notamment les articles 12 du projet de Constitution de la République Démocratique du Congo : « Tous
les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit », et l’article 13 du même projet : « Tous les
congolais sont égaux devant la loi et ont droit à une égale protection des lois ».
660
Article 16 du projet de Constitution de la RDC du 10 février 1999.
205
Cours de Droit Pénal CT Manasi
même contre le civilement responsable en vertu de l'article 260 du code civil,
livre III.
La dignité humaine est une des exigences les plus fondamentales de notre
temps. Elle est le fondement et la finalité de la Charte des Nations Unies et
de la Déclaration universelle des Droits de l’homme. Elle est le fondement et
la finalité des actions que les institutions, les Etats, les gouvernements, les
organisations non gouvernementales et les individus doivent entreprendre et
conduire.
Enfin, la peine de mort est mise en cause avec un certain succès parce
qu'elle est rangée par les abolitionnistes en première place parmi les peines
cruelles et inhumaines.
- La mort ;
- Les travaux forcés ;
- La servitude pénale ;
- L'amende ;
- La confiscation spéciale ;
- L'obligation de s'éloigner de certains lieux ou d'une certaine région ;
Certaines peines figurant dans notre code pénal appellent des observations
particulières, compte tenu de l'évolution de la science pénale et des mœurs
de notre temps.
A. LA PEINE DE MORT
I. Notion
III. L'exécution
L'exécution de la peine de mort se fait par la pendaison pour les civils, et par
les armes pour les militaires (art. 1er de l’arrêté du Gouverneur Général du
09 avril 1898).
661
Voir notamment W. JEANDIDIER, Droit pénal général, 2ème éd., Monchrestien, Paris, 1991, p. 422.
207
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Une vieille controverse divise tous ceux qui, un tant soit peu, se donnent la
peine de réfléchir sur le châtiment suprême.
662
R. BADINTER, France : abolition de la peine de mort. L'expérience française, in Prévention du crime et
justice pénale, Bulletin d'information, n° 11, décembre 1984, pp. 19-22.
663
R. BADINTER, Article déjà cité.
664
R. MERLE et A. VITU, op. cit., n° 508.
208
Cours de Droit Pénal CT Manasi
déshumanise et se ravale pour ainsi dire au rang d’un Léviathan
diabolique.»665
V. Notre position
Il est certes légitime qu'une société se défende, mais il n'est plus légitime
qu'elle le fasse n'importe comment. S'il faut penser à la défense individuelle,
celle-ci n'est légitime que pour autant que l'individu n'avait aucune
possibilité d'en appeler à l'autorité. Ce n'est plus le cas pour la société qui,
elle, dispose de tous les moyens de neutraliser le délinquant sans le tuer, et
de l'empêcher ainsi de nuire de nouveau.
2. De la fonction éliminatrice
En tout état de cause, « s’il ne s’agit que de cela, relève Victor HUGO, la
prison perpétuelle suffirait. A quoi bon la peine de mort ? (…) Pas de bourreau
où le geôlier suffit. »670
665
Eduardo CORREIA, La peine de mort : Réflexions sur la problématique et le sens de son abolition au
Portugal, in R.S.C., 1968, 21.
666
Philippe MALAURIE, Préface à l’ouvrage de Claude LOMBOIS, Droit pénal international, 2ème éd., Dalloz,
Paris, 1979, VII.
667
Voir M. ANCEL, La peine de mort dans la deuxième moitié du XX ème siècle, in Revue de la Commission
Internationale de Justice, n° 2, juin, 1964, 41.
668
Eduardo CORREIA, article déjà cité, 31.
669
Voir J. PRADEL, op. cit., n° 516.
670
Victor HUGO, Le dernier jour d’un condamné, Préface, Romans, Tome I, Présentation d’Henri Guillemin,
éd. du Seuil, 1963, p. 210.
209
Cours de Droit Pénal CT Manasi
3. De l'intimidation et de l'exemplarité
671
Op. cit., p. 210.
672
Op. cit., I, n° 82.
673
Thorsten SELLIN, La peine capitale, in Prévention du crime et justice pénale, Bulletin d'information,
Nations Unies, n° 12 et 13, nov. 1987,7.
674
« Je ne pourrai jamais accéder vraiment à la paix intérieure tant que la peine de mort ne sera pas abolie »,
écrit-il dans la préface. Voir aussi Arthur et CYNTHIA KOESTLER, L’étranger du square, Calmann-Lévy,
Paris, 1984, pp. 206-231.
675
Cité par J. PRADEL, op. cit., n° 516.
676
La peine de mort et le meurtre, R.S.C., 1957, 739-764.
677
Genève, du 6 au 16 Août 1968.
210
Cours de Droit Pénal CT Manasi
«dans les pays où le nombre des assassinats s'accroît, l'abolition de la peine
capitale ne semble pas en accélérer l'accroissement; là où le nombre des
assassinats décroît, elle ne paraît pas non plus en ralentir la décroissance.
Lorsque leur nombre est stable, il ne semble pas que l'existence ou l'absence
de la peine capitale exerce une influence quelconque.»678
La question que l'on peut se poser est celle de savoir si un Etat comme la
République Démocratique du Congo peut décider aujourd'hui et tout de
suite que la peine de mort soit abolie.
Si la peine de mort doit être un jour abolie dans notre pays, il faut dès
maintenant réfléchir sur la peine de remplacement.
678
Voir M. ANCEL, Annexe à l'article déjà cité, 52 ; E.A. FATTAH, Is capital punishment a unique deterrent ?
A dispassionate review of old and new evidence, Canad. J. Criminol., 23/3 (1981), 291-311.
211
Cours de Droit Pénal CT Manasi
des hommes libres, du moment que, par son comportement, il aura cessé
d'être un danger pour elle.
En nous référant au droit comparé, il apparaît que les pays ayant aboli la
peine de mort l'ont remplacée par une peine de longue durée. C'est le cas
notamment des Etats scandinaves qui prévoient un emprisonnement dont la
durée ne dépasse presque jamais douze à quinze ans.
Les raisons qui ont justifié l'établissement de cette peine par le législateur
sont qu'elle est intimidante et permet par ailleurs à l'Etat de se procurer de
l'argent et des biens par le travail du condamné.
679
Voir R.I.D.P. 1987.
680
Voir Encyclopédie Dalloz, 1999, V° Détention criminelle.
681
Voir Encyclopédie Dalloz, 1999, V° Réclusion criminelle.
682
La Russie s’est engagée de ne plus appliquer la peine de mort dès qu’elle sera admise au Conseil de l’Europe.
683
En France notamment, l’ordonnance du 4 juin 1960 a unifié les travaux forcés et la réclusion pour donner lieu
à la réclusion criminelle, qui peut être perpétuelle ou temporaire (Voir J. PRADEL, op. cit., n° 529). Cette
pénalité est maintenue par le NCPF, toujours en matière criminelle.
212
Cours de Droit Pénal CT Manasi
A ce propos, l'exposé des motifs est explicite : «... L'institution de la peine de
travaux forcés a été envisagée en vue d'assurer à l'Etat une certaine
compensation de la perte qu'il subit à la suite de l'infraction de
détournement.»684
Par ailleurs, il ne faudrait pas perdre de vue que l'institution des travaux
forcés ne constitue pas une innovation fondamentale en matière de travail
pénitentiaire. L’ordonnance n° 344 du 17 septembre 1965 portant régime
pénitentiaire dispose bien, dans son article 64, al. 1er: «Le travail est
obligatoire pour les détenus des prisons et des camps de détention».
Il y a plus au moins deux cent cinquante ans, la prison est entrée dans les
législations pénales comme un remède infaillible au problème de la
criminalité. Aujourd'hui, elle n'a plus ce prestige, et si elle est toujours
maintenue, c'est moins pour ses bienfaits que par la difficulté à lui trouver
une peine de remplacement.
684
Voir J.O. du 15 fév. 1973, Ed. provisoire, n° 4, p. 26.
213
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Le droit pénal congolais connaît deux sortes de peine de servitude pénale:
Cette dernière peut varier entre 1 jour et 20 ans. Elle ne peut en aucun cas
dépasser ce seuil, même en cas de concours matériel d'infractions.
La servitude pénale est encore très utilisée en droit congolais. Outre les
nombreux cas où elle est prévue, seule ou avec d'autres peines, elle remplace
la peine de mort en cas d'admission de circonstances atténuantes, et la
peine d'amende à défaut de paiement dans les délais légaux. Dans ce dernier
cas, elle prend le nom de servitude pénale subsidiaire.
685
S. PLAWSKI, Les Droits de l'homme dans le procès pénal, in R.I.D.P. 1978, n° 486.
686
Adoptées par le Premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des
délinquants, les Règles minima ont été approuvées par le Conseil Economique et Social, Rés. 663 C(XXIV) du
31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai 1977. Voir aussi Ensemble de règles minima pour le traitement des
détenus et dispositions visant à assurer l'application effective de l'ensemble de règles, Nations Unies,
Département de l'Information, New York, 1985, 16 p.
687
Op. cit., 491.
688
On se référera avec intérêt au reportage du journal «Le Potentiel» reproduit en fin de la partie, et qui concerne
la prison Centrale de Makala à Kinshasa. Il est toujours actuel. Voir aussi l'article «Une journée à Makala»,
paru dans la Tribune des Libertés, n° 39, 1993, 15-16.
689
Voir notamment texte des résolutions du XIIème Congrès international de droit pénal (Hambourg), in R.S.C.,
1980,253 ; J. CONSTANT, Les mesures prévues par le législateur belge en remplacement des courtes et
moyennes peines privatives de liberté, in Revue de la Gendarmerie, n° 66,4-1976, p. 36.
214
Cours de Droit Pénal CT Manasi
de nombreuses peines et mesures de substitution, dont nous relevons celles
qui ont les faveurs des législations modernes. Il s'agit notamment :
D. L'AMENDE
690
Mohamed ALI HASSAN, L'amende pénale dans les droits modernes et spécialement dans le code pénal
suisse, L.G.D.J., Paris, 1959, p. 36 et s.
691
Voir la loi française du 11 juillet 1975.
692
J. VERHAEGEN, L'incrimination de l'imprudence en droit pénal belge, Rapport au XIIè Congrès
international de Droit pénal, p. 13.
693
Loi française du 11 juillet 1975.
694
Résolution (75) 24 du Conseil de l'Europe ; Article 60,CP allemand de 1975.
695
Voir J. LARGUIER, Criminologie et science pénitentiaire, Mementos, Droit privé, 8è éd. Paris, 1999.
696
J. PRADEL cité par Jean-Paul EKEU, Consensualisme et poursuite en droit pénal comparé, Cujas, Paris,
1993, recensé par Bernard MICHEL, in R.D.P.C., 1994, 770.
215
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L'amende présente des avantages qui en font la sanction qui paraît aux yeux
des criminalistes et des criminologues, comme la plus appropriée pour la
plupart des infractions :
E. LA CONFISCATION GENERALE
I. Textes
Ces deux textes ont été modifiés successivement par les ordonnances-lois n°
86-029 et n° 86-030 du 04 avril 1986: la confiscation générale est
supprimée.
Elle ne subsiste finalement que dans le Code de justice militaire où elle est
prévue comme peine complémentaire, notamment en cas de trahison (art.
431) et de détournement des deniers (art. 441 et 443).
Cependant, celles-ci existent bel et bien dans notre droit, même si elles n'en
portent pas toujours le nom.
Alors que la peine est une sanction infligée à titre de punition, la mesure de
sûreté est une mesure individuelle coercitive, sans coloration morale,
imposée à un individu dangereux pour l'ordre social afin de prévenir les
infractions que son état rend probables698.
Les mesures de sûreté ont des traits et des objectifs variés. Certaines sont
éducatives. Tel est le cas des mesures de préservation, de garde ou
d'éducation prévues en matière de protection de la jeunesse.
697
MERLE et VITU, op. cit., n° 562.
698
STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 346.
217
Cours de Droit Pénal CT Manasi
D'autres sont enfin éliminatrices ou neutralisantes. Il en est ainsi de
l'interdiction de séjour, de l'éloignement de certains lieux, de l'expulsion des
étrangers du territoire national, de la déchéance du droit de conduire, de la
mise à la disposition du Gouvernement, etc.
Seule la peine principale ne pose pas de problème. Elle a une existence par
elle-même, et fonctionne comme instrument direct de pénalité700.
699
Voir aussi LIKULIA BOLONGO qui les considère comme des mesures de sûreté. Droit et Science
pénitentiaire, PUZ., 1981, p. 43.
700
A. PRINS, Science pénale et Droit positif, n° 824.
701
BOUZAT et PINATEL, op. cit., I, n° 347.
218
Cours de Droit Pénal CT Manasi
702
Voir art. 220 du CP (trahison...) et la loi n° 73-017 du 05/001/1973.
703
Toutes ces mesures sont portées par la loi n° 73-017 du 05 janvier 1973.
219
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Nous étudierons d'une part, les circonstances atténuantes et, de l'autre, les
excuses légales.
Dans un même jugement, il peut être parfaitement tenu compte à la fois des
circonstances atténuantes et des circonstances aggravantes.
704
C.S.J., 29 juillet 1980, R.P. 360/361, en cause ALI ADJA. MAY c/M.P. et LUSAKIVANA et KUSITEKA,
cité par KATUALA, loc. cit.
705
Cité par PIRON et DEVOS, Codes et Lois du Congo Belge, I, p. 314.
706
Dans le même sens, NSAMPOLU IYELA, Les circonstances atténuantes et le détournement des deniers
publics ou privés, prévu et sanctionné par l'article 145 du code pénal, in R.J.Z., 1979, 27-31.
221
Cours de Droit Pénal CT Manasi
B. LES EXCUSES LEGALES
Les excuses légales sont des circonstances spécialement définies par la loi, et
qui ont pour effet d'exempter de la peine ou de l'atténuer. Les excuses légales
s'imposent au juge. Celui-ci doit exempter de la peine ou l'atténuer si la loi le
prévoit ainsi.
De leur définition, il apparaît que les excuses légales sont de deux sortes :
Par l'excuse absolutoire, l'agent est exempté de la peine. Cette institution est
fondée sur des considérations de politique criminelle, d'opportunité et
d'utilité sociale.
a) Dénonciation
«Seront exemptés de la peine portée par l'article précédent ceux qui auront
fait connaître l'auteur ou l'imprimeur ; les crieurs, afficheurs, vendeurs ou
distributeurs qui auront fait connaître la personne de laquelle ils tiennent
l'écrit incriminé».
b) Soumission
«Il ne sera prononcé aucune peine, pour le fait de sédition, contre ceux qui,
ayant fait partie d'une bande armée sans y exercer aucun commandement et
sans y remplir aucun emploi ni fonction, se seront retirés au premier
avertissement des autorités civiles ou militaires, ou même depuis, lorsqu'ils
auront été saisis hors des lieux de la réunion séditieuse, sans opposer de
résistance et sans armes».
Le but du législateur est d'apaiser les troubles et les émeutes. Les membres
des bandes armées peuvent effectivement avoir intérêt à se soumettre plutôt
qu'à résister avec la conséquence qu'en cas de défaite, la loi leur sera
appliquée dans toute sa rigueur.
c) Réparation du préjudice
Rigoureusement parlant, nous ne pensons pas que cette disposition crée une
excuse absolutoire, comme l'écrit le professeur E. LAMY708. En effet, l'excuse
absolutoire implique que le procès pénal poursuive son cours jusqu'à ce que
le juge prononce d'abord le jugement de condamnation et accorde, enfin,
l'absolution. Tandis que le cas prévu par l'article 102 bis du code pénal
permet de constater l'extinction de l'action publique à tous les stades de la
procédure. Il s'agit d'une fin de non-recevoir. Le ministère public, constatant
que le paiement du prix et des frais de justice a été effectué, doit renoncer à
poursuivre. Et si l'action publique arrivait jusqu'au juge, celui-ci doit la
déclarer irrecevable.
d) La parenté ou l’alliance
707
J. VERHAEGEN, Cours de Droit pénal, Syllabus, Lovanium, 1969, p. 81.
708
Cours, op. cit., p. 292.
223
Cours de Droit Pénal CT Manasi
L’article 462 du Code pénal belge prévoit ce qu’on appelle la circonstance
absolutoire fondée sur la parenté ou l’alliance, et qui s’applique aux vols
commis entre époux, entre ascendants ou descendants.
A. DEFINITION
Les circonstances aggravantes sont des éléments prévus par la loi qui, ajoutés
à l'infraction simple, en aggravent la peine. Elles jouent un rôle
systématiquement opposé à celui des excuses atténuantes. Dès qu'elles sont
constatées, elles obligent le juge à dépasser le maximum de la peine prévue
pour l'infraction à l'état simple.
709
Brux., (12ème ch.), 12 février; 2004, R.D.P.C., 2004, 748.
224
Cours de Droit Pénal CT Manasi
De la définition donnée, nous devons déduire que :
L'article 81, alinéa 2 aggrave le vol simple en y ajoutant les éléments «la nuit»
et «une maison habitée».
2. Qualité du sujet
La qualité d'agent des postes (art. 71, al. 2) aggrave l'infraction de violation
du secret des lettres (art. 71, al. 1er).
La qualité de père ou mère (art. 174) aggrave les infractions d'attentat aux
mœurs prévues par les articles 173 du code pénal.
710
Voir J. VERHAEGEN, Cours de Droit pénal, op. cit., p. 56.
225
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La qualité de préposé à la conduite ou la garde des détenus (art. 162)
aggrave l'infraction d'aide à l'évasion des détenus (art. 161), etc.
3. Qualité de la victime
4. L'objet du délit
Le meurtre commis pour faciliter le vol ou l'extorsion (art. 85) aggrave ces
deux infractions (art. 80 et 84 du code pénal). Les violences ou les menaces
(art. 82) aggravent l'infraction de vol (art. 80).
5. Conséquences incriminées
La mort non voulue (art. 48) aggrave les coups et blessures volontaires
prévus par l'article 46 du code pénal.
Donner la mort au cours d'un duel (art. 66) constitue une aggravation du
duel prévu et puni par l'article 65 du code pénal.
6. L'élément moral
La doctrine reconnaît la difficulté qu'il peut y avoir à distinguer les uns des
autres711.
711
J. CONSTANT, op. cit., II, n° 902 ; BOUZAT et PINATEL, op. cit., n° 657.
226
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Les éléments constitutifs sont ceux sans lesquels l'infraction n'existe pas.
Ainsi, en matière de meurtre, sans l'intention de tuer, l'infraction ne peut
exister. En matière de vol, l'intention de soustraire frauduleusement la chose
d'autrui est nécessaire à l'existence de cette infraction.
§ 3. LA RECIDIVE
A. NOTION
Bien que la récidive ne soit pas définie par la loi, la doctrine enseigne qu'il
s'agit de la rechute dans l'infraction selon les conditions légalement
déterminées, et après une ou plusieurs condamnations coulées en force de
chose jugée713. Cette rechute doit se produire dans un délai déterminé714.
712
Loc. cit.
713
Voir E. LAMY, cours, op. cit., p. 466.
714
Marie Hélène RENAUT, Une technique juridique appliquée à un problème de société, la récidive. De la
notion de Consuetudo delinquendi au concept de dangerosité, in R.S.C., 2000, 319.
227
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Les théories de l'Ecole classique ont toujours vu dans la réitération de
l'infraction une circonstance qui justifierait l'aggravation de la peine. «Si cette
première peine n'a pas réussi à corriger le délinquant, il en résulte qu'elle était
insuffisante.»715
Mais les statistiques ont révélé que l'aggravation de la peine n'avait pas l'effet
escompté, et que la courbe de la récidive était ascendante716. L'échec de
l'Ecole classique était ainsi démontré.
Ce sont les positivistes qui ont mis en lumière que le récidiviste ne devait
pas être plus sévèrement puni, mais plutôt autrement traité. A la place des
peines, ils ont préconisé des mesures de sûreté «adaptées au caractère, à la
constitution physique et aux possibilités physiques des récidivistes, en un
mot, à leur personnalité.»717
715
J. CONSTANT, op. cit., I, n° 910.
716
Loc. cit.
717
Loc. cit.
228
Cours de Droit Pénal CT Manasi
SECTION III. CAUSES DE SUSPENSION DE LA
PEINE
En vue de réaliser sa politique criminelle, le législateur a prévu certaines
institutions dont le but est de permettre une exécution des peines plus
individualisée, mieux orientée vers l'amendement et la resocialisation du
délinquant. Il en est notamment ainsi de la condamnation et de la libération
conditionnelles.
A. DEFINITION
B. CONDITIONS D'OCTROI
718
Cass. b., Pas., 1933, I, 266.
229
Cours de Droit Pénal CT Manasi
pas bénéficier du sursis. Par contre, si pour la même infraction, il avait été
condamné à une amende, même la plus forte, le sursis pourra être accordé.
C. EFFETS DU SURSIS
§ 2. LA LIBERATION CONDITIONNELLE
A. DEFINITION
B. CONDITIONS D'OCTROI
Si, par exemple, un condamné doit exécuter une peine de 8 mois, il faut
vérifier la première limitation qui est le quart de la peine, soit 2 mois. Mais il
ne peut prétendre à la libération, car la deuxième limitation n'est pas
respectée : le temps d'incarcération déjà subi ne dépasse pas trois mois.
Donc, le condamné devant exécuter la peine de servitude pénale de 8 mois,
ne peut être conditionnellement libéré qu'après qu'il ait fait trois mois et un
jour.
Tous ces délais d'incarcération (un quart, trois mois et cinq ans) peuvent
cependant être réduits si la vie du détenu se trouve en péril (art. 35, al. 3 du
code pénal).
Nous devons préciser que la peine qui sert de base de calcul n'est pas celle
prononcée par le juge, mais plutôt celle que le condamné doit effectivement
exécuter, compte tenu des mesures de grâce éventuelles dont il peut avoir
bénéficié719.
Cette condition est implicitement exigée par l'article 36 du code pénal qui
prévoit la révocation de la libération conditionnelle pour cause d'inconduite.
Elle est par contre expressément formulée par l'article 91 de l’ordonnance n°
344 du 17 septembre 1965 portant organisation du régime pénitentiaire.
C. AUTORITES COMPETENTES
719
Voir ESIKA, op. cit., n° 255.
720
Articles 97 et 98 de l’ordonnance n° 344 du 17 septembre 1965.
231
Cours de Droit Pénal CT Manasi
D. TEMPS D'EPREUVE
721
J. VERHAEGEN, Cours de Droit pénal, op. cit., p. 87.
232
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Il faut rappeler que depuis la loi n° 73-017 du 05 janvier 1973, les auteurs
de détournement, de concussion et de corruption ne peuvent pas bénéficier
de la libération conditionnelle.
A l'occasion de l'étude des peines figurant dans notre droit positif, nous
avons précisé chaque fois leur mode d'exécution. On s'y référera.
§ 2. LE DECES DU CONDAMNE
La mort du condamné est l'issue normale des peines perpétuelles. Elle met
aussi fin à l'exécution des peines temporaires. Cela est conforme au principe
de la personnalité des peines qui s'oppose à ce qu'on étende l'application de
la peine aux héritiers.
Enfin, la confiscation spéciale, qui est une mesure de sûreté (art. 14 CP),
peut être exécutée même après la mort du condamné, à condition qu'elle ait
été prononcée par un jugement coulé en force de chose jugée de son vivant.
§ 3. LA PRESCRIPTION
Bien plus la place qu'elle occupe dans notre code pénal, juste avant les
règles relatives à la prescription de la peine conforte notre démarche.
I. Fondement
Voir MERLE et VITU, op. cit., 1967, p. 678 ; KENGO-wa-DONDO, L’évolution jurisprudentielle de la Cour
722
Suprême de Justice au Zaïre (1968-1979), Mercuriale du 4 novembre 1978, in Bull. 1979, 246-247.
234
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Ces délais sont prévus et réglementés par les articles 24 à 26 du code pénal.
La prescription de l'action publique est acquise en:
Le point de départ de ces délais est défini par l'article 25 du code pénal: «Les
délais de la prescription commenceront à courir du jour où l'infraction a été
commise (dies a quo) ». Celui-ci est compris dans le délai (art. 26, al. 2).
L'article 26 du code pénal dispose: «la prescription sera interrompue par des
actes d'instruction ou de poursuite faits dans le délai de un, de trois ou de
dix ans, à compter du jour où l'infraction a été commise».
723
Cass. b., 16 avril 1960, Pas., I, 24.
724
Voir E. LAMY, op. cit., n° 522.
725
Boma, le 02 mars 1909, Jur. Et., II, p. 307.
726 ère
I Inst. Coq.30 déc. 1931, R.J.C.B., 1932, p. 258
235
Cours de Droit Pénal CT Manasi
peuvent jamais avoir pour effet de proroger l'action publique au-delà du
double de terme primitif.
Les actes interruptifs de la prescription sont, soit les actes d'instruction, soit
les actes de poursuite.
Les actes d'instruction sont ceux qui visent à recueillir les preuves de
l'existence de l'infraction, de l'identité et de la culpabilité de l'auteur.
Elle ne saurait être retenue par analogie dans la mesure où celle-ci n'est
acceptable en droit pénal que si elle est favorable à l'accusé730. Or, la
727
Voir notamment E. LAMY, Cours, op. cit., p. 494.
728
Cass. b. 3 déc.1985, Pas. I, 425 et note.
729
J. VERHAEGEN, op. cit., p. 68.
730
Op. cit., n° 1363.
236
Cours de Droit Pénal CT Manasi
suspension de la prescription, en l'exposant aux poursuites pour une durée
plus longue, loin de lui être favorable, aggrave plutôt son sort.
Les délais de prescription sont fixés par les articles 27 à 29 du code pénal.
Les peines se prescrivent en:
Nous pensons que la peine de travaux forcés, malgré les lacunes de la loi qui
l'a introduite dans notre système, devrait être prescrite selon les modalités
prévues pour la servitude pénale à temps.
Le point de départ du délai de prescription des peines est fixé par l'article 30
du CP.
237
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Si le jugement est rendu en dernier ressort, la prescription commence à
courir à la date de son prononcé. Si le jugement est rendu en premier
ressort, à la date ou la décision est coulée en force de chose jugée, à
l'expiration du délai d'appel.
Bien que le législateur congolais n'ait pas posé une règle générale sur la
suspension, celle-ci est légalement consacrée en cas de libération et de
condamnation conditionnelles. «La prescription des peines ne court pas
pendant que le condamné se trouve en liberté» (art. 40 du code pénal). De
même, l'article 42 dispose «qu'en cas de sursis applicable à la servitude
pénale subsidiaire, la suspension de la prescription s'étend à l'amende».
§ 4. LA GRÂCE
A. DEFINITION
Le législateur congolais n’a pas défini la grâce, alors que, par ailleurs, le Chef
de l’Etat, par acte réglementaire (ordonnance ou décret) en fait un usage
constant, exerçant ainsi un pouvoir que lui ont toujours reconnu tous les
textes constitutionnels de la République. A l’occasion notamment des dates
anniversaires de l’indépendance (30 Juin) ou de prise de pouvoir (24
Novembre sous la Deuxième République et 17 mai pour la Libération par
l’AFDL), des mesures de grâce collective sont prises, généralement en faveur
des condamnés de droit commun. De même, des mesures de grâce
individuelle peuvent être prises, en principe à la requête du condamné.
731
J. PRADEL, op. cit., n° 691 ; R. MERLE, Droit pénal général complémentaire, P.U.F., 1957, p. 374 ;
LEMERCIER, Les mesures de grâce et de révision dans la législation récente, in R.S.C., 1947, 41 et s. ; J.
FOVIAUX, La rémission des peines et les condamnations : droit monarchique et droit moderne, P.U.F., Paris,
1970.
732
Code pénal éthiopien, art. 239.
238
Cours de Droit Pénal CT Manasi
un acte de bienveillance que le pouvoir exécutif prend en faveur d'un
délinquant définitivement condamné, et qui a pour effet de commuer la peine
en une autre qui lui est plus favorable, ou de le soustraire à l'application
d'une partie ou de la totalité de la peine.
B. POUVOIR DE DECISION
C. EFFETS DE LA GRÂCE
La grâce peut porter aussi bien sur les peines principales que sur les peines
complémentaires.
733
Voir STEFANI, LEVASSEUR et BOULOC, Droit pénal général, 11è éd., Dalloz, Paris, 1980, n° 693.
734
Op. cit., n° 697.
735
Op. cit., n° 694.
239
Cours de Droit Pénal CT Manasi
D. APPRECIATION CRITIQUE
§1. L'AMNISTIE
A. DEFINITION
Les faits ont bel et bien eu lieu et constituaient des infractions. Ils ne sont
pas effacés, mais par l’amnistie, ils cessent d’être des infractions, car ils sont
considérés, par la volonté du législateur, comme n’ayant jamais été commis.
Leur caractère infractionnel et leur dimension pénale sont effacés, car la
société décide de les couvrir du voile du pardon et de les faire sombrer dans
l’oubli.
I. Amnistie réelle
Elle est accordée aux auteurs des infractions déterminées, énumérées dans
la loi, sans qu’il ne soit tenu compte de la qualité des bénéficiaires737.
L’amnistie peut même être mixte, en ce sens que la loi la portant peut tenir
compte à la fois de la nature de l’infraction commise (caractère réel) et de la
qualité du délinquant (caractère personnel).
736
BOUZAT et PINATEL, op. cit., n°879.
737
J. PRADEL, Droit pénal général, 5ème éd., Cujas, Paris, 1985, N° 314, p. 324. Voir aussi Jean-Marie
ROBERT, V° Amnistie, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, mise à jour 1999, Dalloz, Paris, 35 p.
241
Cours de Droit Pénal CT Manasi
B. L'AUTORITE COMPETENTE
Il n'existe pas une loi générale sur l'amnistie. Celle-ci est accordée chaque
fois par des lois particulières. Chacune se suffit et ne peut être interprétée à
la lumière de l'autre.
242
Cours de Droit Pénal CT Manasi
C. EFFETS DE L'AMNISTIE
Si les infractions amnistiées ne font pas encore l'objet des poursuites, celles-
ci ne peuvent plus être engagées, « car au regard de l’action publique, le fait
doit être considéré comme n’ayant jamais été commis »738. Et si les poursuites
sont en cours, elles cessent immédiatement. Le ministère public doit rendre
une décision de classement sans suite, et si le juge est déjà saisi, il doit
rendre une décision de relaxe. L'action s'éteint. Les personnes non encore
poursuivies peuvent bénéficier de l’amnistie. Si l'individu bénéficiaire de
l'amnistie a déjà été condamné, la condamnation s'efface et s'il exécute déjà
la peine, celle-ci doit s'éteindre immédiatement. Toutes les condamnations
qui ne sont pas encore revêtues de la force de la chose jugée sont anéanties
par la loi d’amnistie, et les condamnations irrévocables sont considérées
comme n’ayant jamais été prononcées. L'amnistie concerne les peines
principales, complémentaires et accessoires.
§ 2. LA REHABILITATION
A. DEFINITION
B. CONDITIONS D'OCTROI
738
Cass. fr., Crim., 22 oct. 1928, S. 1929.I.97.
243
Cours de Droit Pénal CT Manasi
C. PROCEDURE
La Cour instruit le dossier, entend les témoins ... Si le requérant fait défaut
sans justification, sa demande est purement et simplement rejetée.
Elle fait cesser, pour l'avenir, tous les effets de la condamnation. Celle-ci ne
figurera plus au casier judiciaire, n'empêchera plus l'octroi du sursis et ne
sera pas prise en considération pour déterminer l'application des articles 14
b et d sur la récidive et la délinquance d'habitude.
§ 3. LA REVISION
A. DEFINITION
La révision est
C. CONDITIONS
D. PROCEDURE
E. EFFETS DE LA REVISION
246
Cours de Droit Pénal CT Manasi
A son aboutissement, la révision a pour effets de :
§ 3. LA PRESOMPTION D’INNOCENCE
A. LE PRINCIPE
«Toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente tant
que sa culpabilité n'est pas établie au cours d'un procès public où toutes les
garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées.»740
Il en résulte que le prévenu n'est pas tenu d'établir son innocence par des
preuves décisives. Il suffit qu'il allègue sa version des faits d'une manière
vraisemblable, plausible, de nature à semer le doute dans l'esprit du juge.
B. LA PRATIQUE JUDICIAIRE
739
Voir Jean PATARIN, Le particularisme de la théorie des preuves en droit pénal, in Quelques aspects de
l’autonomie du droit pénal, op. cit., p. 15.
740
Art. 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme ; voir aussi l’article 17 du projet constitutionnel
du 10 février 1999 : « Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa
culpabilité ait été établie par un jugement définitif ».
249
Cours de Droit Pénal CT Manasi
l’inculpé à mettre en détention préventive lorsqu’il existe des indices sérieux
de culpabilité.
C. LE DROIT AU SILENCE
741
C.E.D.H., 25 février 1993, Arrêt FUNKE c/France, série A, n° 256, cité par F. TULKENS et M. VAN DE
KERCHOVE, La justice pénale : justice imposée, justice participative, justice consensuelle ou justice
négociée ?, in R.D.P.C., 1996, 467 ; article 67, 1. g) du Statut de la Cour Pénale Internationale.
742
Cass., 11 mars 1992, Pas., I, 618 ; C.E.D.H., arrêt FUNKE c/France, 25 fév. 1993, § 44 ; arrêt John
MURRAY c/Royaume-Uni du 08 fév. 1996 ; arrêt SAUNDERS c/Royaume-Uni du 17 déc. 1996.
743
Franklin KUTY, L’étendue du droit au silence en procédure pénale, in R.D.P.C., 2000, 312.
744
Article 67, 1. g) du Statut de La Cour Pénale Internationale.
745
Cass. 23 nov. 1993, R.W., 1993-94, 1053, in R.D.P.C., 1995, 486.
250
Cours de Droit Pénal CT Manasi
Contrairement au droit civil, il n'existe donc pas des modes de preuve exclus
du champ du débat a priori, ni préalablement constitués.
Aucun mode de preuve n’est privilégié ni ne prévaut sur d’autres. Parmi les
différents moyens de preuve disponibles ou potentiels, il n’existe aucune
hiérarchie.
Le juge est libre d'apprécier le crédit qu'il faut attribuer aux procès-verbaux
qui lui sont soumis. Il n'est pas lié par les constatations des officiers de
police judiciaire contenues dans ces procès-verbaux750.
746
C.S.J., 30 juil. 1985, en cause MP c/BUUNDA BIRERE SHAMWAMI, BA, 1985-1989, 39.
747
Crim. 31 janv. 1918, Bull. 35, n° 26.
748
TROUSSE, La preuve des infractions, in R.D.P.C., 1959,754.
749
Article 75 du code de procédure pénale.
750
C.S.J., 5 juillet 1983, R.P.237, en cause MABIALA c/Ministère public et MBOMBO, cité par KATUALA,
loc. cit.
251
Cours de Droit Pénal CT Manasi
partie, la méfiance dont font l'objet certains procédés scientifiques utilisés en
vue d'arracher des aveux, tels que l'hypnotisme et la narco-analyse, procédés
dangereux, constatent MERLE et VITU, les aveux obtenus n'étant pas
nécessairement conformes à la vérité, puisqu'ils tendent à un «déballage»
dans lequel sont mêlés les souvenirs conscients et les pulsions refoulées
dans l'inconscient751.
Des moyens techniques modernes qui faisaient naguère l’objet d’une certaine
méfiance, sont de plus en plus largement reçus.
«Même dans le for intérieur, le juge est tenu de rendre sa décision, non
d'après ce qu'il sait comme homme, mais d'après ce qu'il a appris comme
juge.»752
Il ne peut non plus admettre des moyens irréguliers, tels que des documents
saisis au cours d'une perquisition irrégulière, ou la déposition sous serment
d'une personne privée du droit de déposer en justice, ou encore la
production en photocopie (ou copie) non certifiée conforme du document
vanté, mais contesté par une des parties, etc.
751
Op. cit., n° 759.
752
BONNIER, tome I, n° 101; cité par J. VERHAEGEN, Cours, op. cit., p. 26.
753
Cass., 4 janv. 1994, R.D.P.C., 801.
252
Cours de Droit Pénal CT Manasi
La violation de règles formelles de procédure pénale pour l’obtention d’une
preuve contraint le juge à la rejeter pour cause de nullité754. Il en est ainsi :
Doivent enfin être rejetées, les preuves obtenues « par un acte qui est
incompatible avec les principes généraux du droit régissant la procédure
pénale, notamment le respect des droits de la défense, même si cet acte n’est
pas expressément interdit par la loi »756.
§ 1. PRINCIPE
Le juge apprécie les moyens qu'on lui soumet souverainement, d'après son
intime conviction, pourvu que son raisonnement soit motivé758. Le système
est appelé celui de l’intime conviction.
Le système de l'intime conviction est aussi appelé celui des preuves morales.
L'intime conviction du juge ne signifie pas que celui-ci peut se livrer à des
décisions arbitraires ou fantaisistes. Sa conviction doit être raisonnable. Et
754
Conclusions de l’Avocat général Du JARDIN sous Cass., 4 janv. 1994, R.D.P.C., 802.
755
Cass. 10 déc. 1923, Pas. 1924, I, 67 avec les conclusions de P. LECLERCQ ; 26 fév. 1992, Pas. I, n° 338 ; 23
janv. 1990, Pas. I. Cités par du Jardin, loc. cit.
756
Cass. 13 mai 1986, R.D.P.C., 905.
757
Cour d’appel de Brux., 14e ch. corr., 20 juin 1997, R.D.P.C., 1092.
758
C.S.J., 28 janv. 1976, Bull., 1977, 20.
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Cours de Droit Pénal CT Manasi
les cours de cassation se permettent de sanctionner les raisonnements du
juge répressif entachés d'un vice radical ou de contradiction759.
§2. ILLUSTRATIONS
Les différents moyens de preuve en droit pénal que le juge apprécie sont
ceux qui suivent. Il ne faut pas perdre de vue que les divers modes de
preuve ne sont pas cloisonnés les uns par rapport aux autres et qu’ils
s’interpénètrent mutuellement et pratiquement lors du déroulement d’un
procès.
759
TROUSSE, op. cit., n° 3553.
760
F. GORPHE, op. cit., p. 48.
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§ 9. BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
A. EN GENERAL
I. Ouvrages
II. Revues
I. Ouvrages et cours
II. Revues