Phosphore

Cet article concerne l'élément chimique. Pour le

magazine publié par Bayard presse, voir Phosphore
(magazine).

Le phosphore est l'élément chimique de numéro ato-

mique 15, de symbole P. C'est un membre du groupe des
pnictogènes.
Le corps simple phosphore se présente sous plusieurs
formes de couleurs différentes : blanc-jaune, rouge et
violet-noir. Très pur, le phosphore « blanc » est trans-
parent ; plus généralement il est blanc ambré, légèrement
malléable avec une faible odeur d'ail. Les formes rouge et
noire peuvent se présenter en poudre ou cristallisées. Phosphore en poudre dans l'obscurité.
Le nom dérive du mot grec φώσφορος (phosphoros),
qui signifie « porteur de lumière » et évoque la pla-
nète Vénus, l'étoile du berger. Cette origine a été attri- procédé resta longtemps secret, mais malgré tout, le chi-
buée au fait que le phosphore blanc émet de la lumière miste allemand Jean Kunckel, puis le physicien anglais
visible dans l'obscurité quand il est exposé à l'air, par Robert Boyle réussirent peu de temps plus tard à trouver
chimiluminescence. leur propre voie de synthèse.
En raison du fait qu'il est indispensable à la vie et d'une Au cours de ses recherches de la pierre philosophale,
consommation mondiale qui pourrait dépasser les res- c'est-à-dire l'art de convertir les métaux vils ou imparfaits
sources disponibles avant une centaine d'années, l'ONU en or et en argent, Brandt s’était imaginé qu'en ajoutant
et divers scientifiques le classent comme matière première de l'extrait d'urine aux métaux dont il voulait opérer la
minérale critique, qu'il faudrait apprendre à économiser et transmutation, il réussirait plus sûrement dans son entre-
mieux recycler. prise. Mais au lieu d'obtenir ce qu'il cherchait avec tant
d'ardeur, il obtint un corps nouveau, blanc, lumineux par
lui-même et brûlant avec une énergie sans exemple : le
1 Histoire phosphore.
Surpris de l'apparition de ce corps, il en envoya un échan-
Lors de la découverte du phosphore, seulement 13 autres tillon à Kunkel, chimiste allemand, qui s’empressa de le
éléments chimiques étaient déjà connus (tableau ci- montrer à son ami Kraft de Dresde (de). Celui-ci le trou-
dessus), contre 118 aujourd'hui (cf. Liste des éléments va si merveilleux qu'il se rendit immédiatement à Ham-
chimiques). Comme les autres éléments, il ne fut reconnu bourg dans l'intention d'acheter le secret de sa prépara-
comme tel que grâce aux travaux de Lavoisier, quelques tion. Il l'obtint moyennant deux cents rischedales[13] (an-
années plus tard[12] . cienne monnaie d'Europe du Nord) et son silence. Mais
Kunkel désirait lui aussi vivement le connaître, et voyant
Ses différents découvreurs lui donnèrent beaucoup de que Kraft, malgré leur amitié, ne le lui confierait pas, il
noms différents : Phosphorus fulgurans ou Lumen se résolut à le découvrir par la voie de l'expérience. Il
conflans (Kunckel), Noctiluca aërea (Boyle), Lumiere y parvint en 1674, après beaucoup de tentatives infruc-
condensée ou encore Phosphorus igneus puis Phosphorus tueuses et devint ainsi le deuxième découvreur du phos-
pyropus par Leibnitz. Tous ses noms sont en rapport avec phore, et se vantait dans le 44e chapitre de son Labora-
la forte lumière que celui-ci produit lors de sa combustion toire chimique de savoir en synthétiser un plus pur que son
à l’air libre. ami[13] .
La troisième personne à découvrir une méthode pour
1.1 Une triple découverte l'isoler est le chevalier Boyle. En 1679, il avait pu voir
un morceau de phosphore apporté par Kunkel pour le
La découverte de cet élément est attribuée à l'alchimiste montrer au roi et à la reine d'Angleterre et réussir à sa-
allemand Hennig Brandt en 1669 à partir de l'urine. Le voir que le phosphore était une substance tirée du corps

1
2 1 HISTOIRE

humain[13] . Ses essais portèrent leurs fruits en 1680. il publia, avec Scheele, un procédé qui lui permit de s’en
procurer des quantités assez considérables à partir d'os de
bœufs ou de moutons[15] .
1.2 Découverte publique
Ce nouveau protocole[15] consiste à faire brûler les os
Cependant la préparation du phosphore demeura ca- jusqu’à ce qu’ils soient friable, puis mélangés avec du
chée jusqu'en 1737 alors qu'un apothicaire londonien carbonate de calcium (CaCO3 ) et d’autres sels. On ajoute
(Godfrey Hankwitz), d'après la recette de (Boyle) en pro- ensuite l’acide sulfurique. Puis après réaction et lavages,
duisait pour toute l'Europe, sous le nom de « Phosphore on le sèche avec du charbon, avant de faire chauffer le
d'Angleterre »[14] . tout dans une cornue remplie d’eau.

Hellot dans les Mémoires de l'Académie pour l'année On note que combiné à l'hydrogène, il produit un gaz in-
1737 [13] fait la première description publique détaillée flammable. Cela peut expliquer les feux-follets causés par
d'une méthode de synthèse du phosphore à partir de la décomposition de matières riches en phosphore dans
l'urine. Il explique le 13 novembre 1737 comment un les marais[14] . On comprend aussi que c'est sa présence
étranger divulgua pour la première fois tout le mys- qui fait luire dans le noir certaines matières organiques
tère du procédé qui jusqu'ici était jalousement gardé telles que la laitance et les œufs de poissons, la chair de
par ses premiers inventeurs. Celui-ci l'exécuta en pré- certains mollusques (huîtres), certains squelettes frais de
sence de quatre commissaires nommés par l'Académie poissons, la substance cérébrale ou le foie de certains ani-
des Sciences, Duhamel, Dufay, Geoffroy et, lui-même. La maux. On lui attribue aussi (à tort parfois) la phosphores-
recette était enfin devenue publique. cence de certains organismes marins et « des eaux mêmes
de la mer, dans quelques cas au moins »[14] .
Dans la même année, Rouelle la répéta dans ses Cours
de Chimie. Tout le monde y a accès depuis ce temps (lire
[13]
). Cette préparation consiste à faire évaporer à siccité
l'urine putréfiée, et à chauffer ensuite fortement le rési-
du dans une cornue de grès dont le col, par une allonge, 1.4 Troisième mode de synthèse
plongeait dans l'eau. Il était ensuite moulé en cylindres et
stocké dans de l'eau préalablement bouillie et à l'abri de
la lumière[14] .
Même si Margrall ajouta quelques années après un sel de
plomb (nitrate de plomb[14] ) à l'urine épaissie par évapo-
ration, c'est ainsi que, pendant longtemps, le phosphore
fut préparé. Le phosphore resta encore longtemps une cu-
riosité, et un des objets les plus précieux que l'on pouvait
voir. On ne le trouvait que dans les laboratoires des prin-
cipaux chimistes, et les cabinets de quelques gens riches,
amateurs de nouveautés.

1.3 Démocratisation

Site d'extraction de roches phosphorées sur l'ile de Nauru (2007)

La méthode de synthèse actuelle a été mise au point en

1867 par les chimistes E. Aubertin et L. Boblique. Elle
permet d’extraire le phosphore de roches phosphorées.
Cela permet de se procurer du phosphore en plus grande
quantité et à un meilleur prix.
Le protocole consiste aujourd’hui à chauffer les roches
entre 1400-1500 °C avec du sable et du pétrole. Il se
forme alors le phosphore blanc P4 selon la réaction : 2
Ca3 (PO4 )2 + 6 SiO2 + 10 C → 6 CaSiO3 + 10 CO + P4
Crâne de mouton Le procédé initial a été amélioré par J.B. Readman en
1888[16] en ajoutant l’utilisation d’un four électrique. Mal-
En 1769, le suédois Johan Gottlieb Gahn découvrit que le gré un rendement de près de 90 %, la formation d’une
phosphore était présent dans la poudre d'os calcinée puis tonne de phosphore blanc par cette méthode requiert tout
décomposée par l'acide sulfurique. Peu de temps après, de même 15 MWh environ.
 3

des os de la mâchoire, connue sous le nom de nécrose

phosphorée.
Lorsque le « phosphore rouge » fut découvert, son in-
flammabilité et sa toxicité plus faibles poussèrent à son
adoption comme une alternative moins dangereuse pour
la fabrication des allumettes.

2 Propriétés

Les phosphores blancs et rouges ont une structure qua-

dratique.
Il existe un « phosphore noir » allotrope, ayant une struc-
ture similaire à celle du graphite : les atomes sont arrangés
en couches hexagonales, et il est conducteur électrique.
Le phosphore blanc est constitué de molécules tétra-
édriques P4 . C'est un corps toxique qui s’oxyde lentement
à l'air à température ambiante. On le conserve toujours
sous l'eau. Le phosphore blanc se transforme en phos-
phore rouge sous l'influence de la lumière.
Le phosphore rouge est constitué de molécules de lon-
gueur indéterminée, mais très grande. On peut lui donner
à titre d'exemple la formule P₂ ₀₀₀. Il n'est ni toxique ni fa-
Allumette cilement inflammable. Le phosphore rouge se transforme
en phosphore blanc (gazeux) sous l'influence de la cha-
1.5 Travaux importants leur, soit 280 °C.

1.5.1 Grands noms

Le phosphore étant devenu plus commun, les chimistes

purent plus facilement en étudier les propriétés. Les tra- 3 Production
vaux les plus remarquables qui aient été faits sur ce corps
sont dus à :
3.1 Gisements
• Pelletier, qui l'a combiné avec le soufre et beaucoup
de métaux[17] ; Les phosphates sont des minéraux assez fréquents en
quantité faible et dispersée, dont la concentration a gé-
• Lavoisier, qui nous a fait connaître ses combinaisons néralement une origine animale (guano d'oiseaux ou de
avec l'oxygène[17] ; chauve-souris accumulés durant des milliers ou millions
• M. Dulong et à M. Davy, qui ont étudié ses divers d'années sur des sites dortoirs ou de reproduction).
acides[17] ; Le phosphore provient de roche phosphatée transformée
• M. Berzelius, qui a étudié non seulement ceux-ci, chimiquement. Entre 120 et 170 millions de tonnes de
mais encore leurs combinaisons avec les bases[17] . roches sont extraites chaque année depuis les trente der-
nières années, correspondant à 20 à 30 millions de tonnes
de phosphore purifié par an[19] .
1.5.2 Première utilisation : l'allumette Les roches phosphatées exploitables se concentrent ce-
pendant en peu d'endroits : Maroc (plus du tiers des ré-
Les premières allumettes (fósforo en espagnol[18] ) utili- serves mondiales), Chine (un peu plus du quart des ré-
saient du phosphore blanc dans leur composition, la toxi- serves mondiales), Afrique du Sud, États-Unis. De plus
cité du phosphore les rendait d'ailleurs assez dangereuses :
ces réserves pourraient être épuisées avant un siècle[20] .
leur usage entraîna des empoisonnements accidentels. Les ressources prouvées sont de 71 milliards de tonnes
De plus, l'inhalation des vapeurs de phosphore entraînait, en 2012 selon l'USGS[21] et la production annuelle est
chez les ouvriers des fabriques d'allumettes, une nécrose d'environ 191 millions de tonnes extraites en 2011[21] .
4 5 UTILISATION

3.2 Une future pénurie En France, la station d'épuration de Nîmes a tes-

té en 2016 un procédé de récupération du phosphore
Vingt-six éléments du tableau de Mendeleïev seraient en (déphosphatation) dit “Extraphore” [27] avec des tests qui
voie de raréfaction, comme le cuivre, l'or, le zinc le pla- en 2016 ont confirmé un possible développement à
tine, l'uranium, le phosphore…[22] . « Sans phosphore, pas échelle industrielle[28] .
de vie sur Terre ! »

« Il suffit de penser que cet élément forme 4 Aliments à forte teneur en phos-
la structure même de l'ADN, qu'il pilote la
respiration - ainsi que la photosynthèse chez phore
les plantes - ou encore le métabolisme cellu-
laire. C'est pourquoi chaque être humain en ré- • Sodas (ceux riches en acide phosphorique ont envi-
clame à peu près deux grammes par jour. […] ron 20 mg de phosphore dans 100 ml.)
Au vu de la consommation actuelle couplée à
l'épuisement des gisements de qualité à travers • Bacon, cervelle d'agneau, foie de veau
le monde, les chercheurs de l'Institute for sus-
tainable futures (Australie) annoncent un pic de • Fromages à pâte dure : parmesan, emmental, comté,
production du phosphore au milieu des années gruyère, gouda, édam, morbier, cantal
2030, et estiment les réserves à 340 ans. Cette • Poudre de lait entier
prévision, quoique controversée, suscite néan-
moins une vive angoisse : pourra-t-on extraire • Sardine, saumon, morue, carpe, seiche
assez de phosphore pour nourrir les 9 milliards
d'habitants prévus en 2050 ? De plus, avertit • Datte
Jean-Claude Fardeau, de l'Institut national de la
• Noix de cajou, noix du Brésil, pignon, pistache
recherche agronomique, il n'y a aucun substitut
possible au phosphore, véritable facteur limitant • Germe de soja, contient environ 700 mg de phos-
du vivant. Indispensable à l'homme et surtout phore dans 100 g
à l'agriculture, ignorer ce problème [celui d'une
future pénurie en phosphore] pourrait mettre en • Son de blé, avoine, millet
péril la sécurité alimentaire mondiale conclut
Andrea Ulrich, de l'Institute for Environment Selon une idée reçue, le poisson serait bon pour la
Decisions (École polytechnique fédérale de mémoire car il contiendrait beaucoup de phosphore.
Zurich). Car, si les ressources s’épuisent, il est Cette idée reçue est fausse[29] .
bien certain que la demande en phosphore ne
disparaîtra jamais[22] … » Dans l'organisme humain, le phosphore est présent dans
les cellules où il sert de support à l'énergie (adénosine tri-
Le risque de manque de phosphore est confirmé[23] . phosphate).
Une tonne de fumier contient de 2 à 3 kg de phosphore[24] Un excès de phosphore alimentaire déclenche une
(et également 4 à 5 kg d'azote et 5 à 6 kg de potassium). hyperphosphatémie appelée aussi l'hyperphosphorémie
Dans ces conditions, des associations (telles que Ze- temporaire qui inhibe la synthèse de vitamine D.
ro Waste France) refusent de voir les biodéchets (qui
pourraient en outre fournir du biogaz dans le cadre
de la méthanisation) finir en décharge ou dans des 5 Utilisation
incinérateurs[25] .
En 2009, la Chine produisait 35 % du phosphore mondial, 5.1 Phosphore
les États-Unis 17 %, et le Maroc (et dans une moindre
mesure le Sahara Occidental) 15 %. Les États-Unis ont • Allumettes et pyrotechnie : le phosphore sous sa
mis fin à leurs exportations, cependant que la Chine les a forme rouge est l'élément igniteur des allumettes et
fortement réduites[26] . d'un grand nombre de dispositifs pyrotechniques.

• Alliage : involontaire dans l'acier, car étant présent

3.3 Récupération de phosphore dans dans les minerais de fer, il provoque un effondre-
l'urine et les eaux usées ment des caractéristiques mécaniques, en particulier
de la résilience à basse température, et parfois un al-
Des solutions de compostage des déchets humains (en liage volontaire est réalisé avec le bronze, où il per-
y intégrant l'urine) permettraient de produire des fertili- met une usinabilité améliorée. Par contre les pièces
sants contenant du phosphore plus facilement accessible en bronze phosphoreux soudées ou brasées donnent
aux plantes. une très mauvaise tenue mécanique.
 5

5.2 Phosphate bases militaires situées « à l’intérieur d’une concentration

de civils ».
De loin, les utilisations les plus répandues du phosphore
Le phosphore blanc peut aussi servir à créer des écrans
sont :
de fumée permettant de couvrir ses troupes sur un théâtre
d'opérations.
• engrais minéraux : élément essentiel entrant dans
la composition des engrais minéraux (NPK), sous
forme monohydrogénophosphate CaHPO4 ou di-
hydrogénophosphate Ca(H2 PO4 )2 . Cette utilisation
6 Dosage
du phosphore représenterait à elle seule 80% de
l'utilisation totale[19] ; Un protocole de dosage a été validé en France par
l'AFNOR[30] .
• pâte dentifrice : agent polisseur sous forme de di-
hydrogénophosphate et comme apporteur de fluor Cette section est vide, insuffisamment détaillée ou
Na2 PO3 F ; incomplète. Votre aide est la bienvenue !

• additif stabilisant (E339, E340) : des phosphates de

sodium ou de potassium, substances « tampons » ont
un effet stabilisateur dans des compositions alimen- 7 Écologie
taires ;
• par les êtres vivants : le phosphore entre dans la com- 7.1 Cycle du phosphore
position de l’ATP et de l’ADP, de certains lipides tels
que les lécithines, et est un constituant des molécules Article détaillé : Cycle du phosphore.
d'ADN.
Le cycle naturel du phosphore. Le phosphore tend à
5.3 Acide phosphorique : H3 PO4 être lessivé vers les mers sous l'action du lessivage par les
pluies, du haut du bassin versant vers la mer. L'érosion
L'acide phosphorique a de nombreuses applications : éolienne peut transporter des quantités significatives de
phosphore vers des zones très éloignées (dont du Sahara
jusqu'en Amazonie, via des aérosols visibles de satellite).
• détartrants : on utilise une solution d'acide phospho-
Autrefois, c'étaient surtout les migrations d'oiseaux ma-
rique comme détartrant pour les appareils sanitaires
rins ou piscivores (via leurs fientes enrichies en phos-
et ménagers, tels les cafetières électriques ;
phore) et plus encore les migrations de saumons qui
• additif alimentaire (E338) : agent acidifiant dans les constituaient le mécanisme principal de « retour à la
boissons gazeuses ; terre » du phosphore. Après leur phase de croissance en
mer et leur remontée, en mourant par dizaines de millions
• nutriment : dans le traitement des eaux, le phosphore dans les rivières des hauts de bassin versant après y avoir
est ajouté à un réacteur biologique pour assurer la pondu, les saumons remontaient et libéraient des quanti-
survie et la croissance des bactéries ; tés importantes de phosphore recyclées dans les écosys-
• protection contre la corrosion des aciers par trem- tèmes situés en amont des bassins versants, via leurs sque-
page des pièces dans cet acide (opération dite de lettes et cadavres particulièrement riches en phosphore, et
phosphatation). Il en résulte une pellicule noire, fine, via les urines et excréments des animaux qui chassaient ou
stable et poreuse qui est une excellente base dans pêchaient les saumons lors de leur remontée (ours en par-
l'accrochage des peintures anti-rouille. ticulier). Aujourd'hui les saumons ont fortement régressé
ou ont disparu sur une grande partie de leur ancienne aire
de répartition, et l'agriculture intensive se fournit en phos-
5.4 Usages militaires phates de guano ou de synthèse, importés.

Article détaillé : Phosphore blanc.

7.2 Le phosphore dans les sols
Les bombes, obus et grenades incendiaires au phosphore
7.3 Eutrophisation
ont été largement utilisées pendant et depuis la Seconde
Guerre mondiale, par exemple lors du bombardement de Le phosphore, abondamment gaspillé par l'agriculture in-
Dresde. tensive et certaines unités de traitement des eaux usées,
Le protocole III de la Convention sur certaines armes et fortement présent dans les lessives notamment dans les
classiques (CCAC), entré en vigueur en 1983, interdit les années 1980, est avec le nitrate un des grands respon-
armes incendiaires contre des civils, et même contre des sables de l'eutrophisation.
6 8 TOXICOLOGIE, ÉCOTOXICOLOGIE

En France, depuis les années 1970 l'amélioration des pra- ponse). […] « Du système nerveux dont il exalte d'abord
tiques culturales a permis de réduire significativement les la sensibilité, il parait répandre son action sur les prin-
apports en engrais minéraux phosphatés par unité de sur- cipaux systèmes de l'économie, accélérer ainsi la circu-
face, et les bandes enherbées (localement obligatoires le lation, augmenter la chaleur, accroître au plus haut de-
long de cours d'eau) pourraient encore contribuer à le ré- gré l'irritabilité musculaire, d'après les expériences de Fr.
duire dans l'environnement[31] . Malgré cela, la teneur en Pilger (Ann. clin, de Montp., XXXVII, 360) ; enfin agir
phosphore des sols agricoles augmente globalement, bien souvent aussi sur les exhalants cutanés, la sécrétion uri-
que de manière inégale selon les régions : augmentation naire, dont le produit devient quelquefois phosphorescent,
en Bretagne, Pays de la Loire, Champagne-Ardenne et peut exhaler l'odeur du soufre ou de la violette, enfin et
Aquitaine, et diminution au nord, au centre et à l'ouest. surtout, exciter puissamment l'appareil génital. Ce der-
En Bretagne, par exemple, cette hausse est causée par nier phénomène, qui peut aller jusqu'au priapisme, est le
l'emploi des effluents issus de l'élevage intensif pour la plus constant et le plus remarquable de ses effets physio-
fertilisation des sols[32] . logiques : A. Leroy et M. le docteur Bouttatz l'ont eux-
Le mécanisme eutrophisant du phosphore est complexe, mêmes éprouvé ; M. Boudet (Il l’avait observé chez un
vieillard ; B. Pelletier l'avait vu chez les canards, dont le
variant selon les environnements et différent de celui des
nitrates avec lesquels il interfère aussi. Selon une étude mâle n'a cessé qu'à la mort de couvrir ses femelles) nous
faite dans de vrais lacs et dans des « lacs expérimentaux », assure que le contact prolongé de la peau avec le phos-
la charge du milieu en phosphore n'est un bon prédic- phore suffit pour le faire naître : aussi a-t-on cru pouvoir
teur de l'eutrophisation que si l'on introduit un facteur rapporter à la présence du phosphore dans les poissons la
de correction tenant bien compte du renouvellement de vertu aphrodisiaque qu'on leur attribue »[14] .
l'eau, alors que la correction selon le sédiment a un rôle F.V. Mérat et A.J. de Lens, dans leur Dictionnaire uni-
mineur[33] . versel de matière médicale et de thérapeutique (volume
3[14] rappellent qu'après que le phosphore ait été décou-
vert dans l'urine, puis utilisé comme médicament, sa toxi-
cité a été largement observée chez l'Homme et confir-
8 Toxicologie, écotoxicologie mée expérimentalement chez l'animal par M. Lœbelstein-
Lœbel sur des chiens, M. Bouttatz sur des chats, des co-
Le phosphore est un oligoélément indispensable - sous chons d'Inde, des poules et des pigeons, des jeunes co-
forme de sels - pour de nombreux organismes vivants, qs et des grenouilles, enfin MM. Orfila, Brera, Mugetti,
et sous forme de phosphate notamment pour les plantes. Worbe et Bogros sur des chiens, prouvent, la plupart, que
Sous formes solubles et solubilisées notamment, le phos- le phosphore agit à la manière des poisons corrosifs ; que
phore a servi de médicament (extrait de l'urine humaine les accidents une fois développés ne peuvent que diffici-
jusqu'en 1774). Mais quand il est pur, et sous certaines lement être entravés par les secours de l'art. (...)Dissous
de ses formes, c'est un puisant toxique et corrosif de ou divisé dans l'huile, et aussi à l'état de fusion dans l'eau
l'organisme. On le sait depuis longtemps. chaude (M. Worbe), la combustion, qui en est rapide pro-
Il a néanmoins été utilisé dans des expériences de « phy- duit, semble-t-il, de l'acide phosphorique ; l'inflammation
sique amusante » ou de magie en causant des blessures est alors des plus vives, les douleurs atroces, les vomis-
parfois sérieuses chez les expérimentateurs ; sements opiniâtres, et la mort arrive au milieu des mou-
Puis certains médecins lui ont attribué des vertus médi- vements convulsifs les plus horribles. Injectée dans les
cales merveilleuses, notamment administré sous forme de veines ou dans la plèvre, cette même huile phosphorée
« Pilules lumineuses » contenant une poudre de phosphore donne lieu, dans l'espace de quelques minutes, à des flots
finement divisée associée à d'autres ingrédients, dont de vapeurs blanches chargées d'acide phosphatique, qui
Kunckel semble avoir eu l'idée ; il était réputé prolon- à chaque expiration s’échappent de la gueule de l'animal
ger la vieillesse, revigorer l'organisme, « rallumer, pour (Magendie, Além. pour servira Phi* t. de la transpiration
ainsi dire le flambeau de la vie ». On l'a prétendu fébri- pulmonaire ; Bibl. méd., XXXII, 19) : la mort dans ce cas
fuge, anti-rhumatismal, anti-goutteux, anti-chlorolique, a lieu par asphyxie et résulte de l'inflammation subite des
[14]
et semble-t-il parfois efficace contre des « fièvres inter- poumons .
mittentes », certaines « fièvres graves », « malignes », Son usage s’est ensuite fortement réduit, mais il a été
« fièvres asthéniques », « fièvre pétéchiale » ou « bi- utilisé dans les armes chimiques et munitions incen-
lieuses », etc., mais sa toxicité a rapidement été mani- diaires, et son isotope radioactif a été utilisé comme
feste chez l'Homme (1/8ème de grain suffit parfois à dé- « radiotraceur », dans des éléments solides (métal ou al-
terminer des « accidents funestes » (Observation de M liage par exemple[34] ) ou chez des espèces vivantes (pour
Loebelstein-Loebel, d'Iéna. On se demanda ensuite si ces le suivi de la pollinisation par exemple, via des pol-
effets médicaux sont vraiment dus au phosphore, où à ses lens marqués au soufre ou au phosphore radioactif[35] ,
sels, ou aux synergies avec d'autres ingrédients ; Ainsi en pour le suivi de microbes ou virus dans l'organisme[36] )
1798, la société de médecine de Paris questionne « les ou encore pour le suivi de mouches afin d'étudier leurs
propriétés médicamenteuses du phosphore, des acides rôle épidémiologique (1957)[37] . On a aussi tenté de
phosphoriques et phosphoreux » (question restée sans ré-
 7

l'utiliser comme médicament dans les années 1950, aux [8] « Phosphore rouge » dans la base de données de produits
débuts de la médecine nucléaire, par exemple contre chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois res-
la leucose chronique (1955)[38] ou pour traiter des tis- ponsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté
sus calcifiés (1958)[39] ou pour détecter des néoplasmes le 25 avril 2009
intraoculaires[40] , comprendre ou traiter des cancers[41] , [9] Numéro index 015-002-00-7 dans le tableau 3.1 de
ou pour l'étude de certaines maladies (ex. : maladie de l'annexe VI du règlement CE N° 1272/2008 (16 décembre
Vaquez (1967)[42] ou de cancers (1946)[43] ). 2008)
Mutagénicité : un autre problème environnemental est [10] SIGMA-ALDRICH
posé par la radioactivité de certains isotopes du phos-
phore. [11] Stephane Pereck, « Les Elements chimiques, date de dé-
couverte », sur elementschimiques.fr, 2012-2013 (consulté
le 3 avril 2016).
• Les terrils ou crassiers de phosphogypse dé-
coulant de la production industrielle d'engrais [12] (en) F. Krafft, « Phosphorus : From Elemental Light to
contiennent des éléments radioactifs, et que les Chemical Element », Angewandte Chemie International
engrais phosphatés sont aussi une source de Edition, vol. 8, no 9, septembre 1969, p. 660-671 (DOI
cadmium toxique qui s’accumule dans les champs 10.1002/anie.196906601, lire en ligne)
ou pollue l'environnement. [13] Jean Hellot, « Le phosphore de Hükel et analyse de
l'Urine », Histoire de l'académie royale des Sciences avec
• L'isotope radioactif stable du phosphate est sous les Mémoires de Mathématique & de Physique, 13 no-
certaines formes (phosphates) très bioassimilable (il vembre 1737, p. 342-378 (lire en ligne)
est notamment incorporé dans l'adénosine triphos-
phate[44] ) ; il est mutagène[45] . [14] F.V. Mérat, A. J. de Lens, Dictionnaire universel de ma-
tière médicale et de thérapeutique, vol. 3, Société Belge de
Librairie (Bruselas), 1837 (Lien via Google Livre ou Livre
Le phosphore en excès a aussi des effets écotoxiques en retapé)
tant qu'eutrophisant.
[15] M.F.-E. Guerin, Dictionnaire pittoresque d'histoire natu-
relle et des phénomènes de la nature, vol. 7, Imprimerie
de Cosson, 1838, 640 p. (lire en ligne), p. 405-406.
9 Notes et références
[16] (en) J.B. Readman, « An account of the manufacture of
phosphorus », The journal of the Society of the chemical
[1] (en) David R. Lide, CRC Handbook of Chemistry and industry, vol. 9, no 2, 28 février 1890, p. 163-211 (lire en
Physics, CRC Press Inc, 2009, 90e éd., 2804 p., Relié ligne).
(ISBN 978-1-420-09084-0)
[17] Louis Jacques Thénard (Barón.), Traité de chimie élémen-
[2] (en) Beatriz Cordero, Verónica Gómez, Ana E. Platero- taire, théorique et pratique, suivi d'un essai sur la philoso-
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A report of 150 cases, American Journal of Roentgenology,
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10.3 Liens externes 9

• Phosphore blanc

• Cycle du phosphore
• Matières premières minérales critiques

10.3 Liens externes

• (en) « Technical data for Phosphorus » (consulté le 24
avril 2016), avec en sous-pages les données connues
pour chaque isotope
• Table périodique - Phosphore Impact sur
l'environnement

• Portail de la chimie
10 11 SOURCES, CONTRIBUTEURS ET LICENCES DU TEXTE ET DE L’IMAGE

11 Sources, contributeurs et licences du texte et de l’image

11.1 Texte
• Phosphore Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Phosphore?oldid=131726557 Contributeurs : MichelLaglasse, Fruge, Ryo, Jerome.Abela,
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Nguyenld, Head, Phe, Marc Mongenet, MedBot, Sam Hocevar, Oblic, Phe-bot, Yves1953, Korrigan, Baronnet, K !roman, Leag, Gemme,
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vid Berardan, Thedreamstree, RobotQuistnix, FlaBot, Cæruleum, YurikBot, Omolu, Lt-wiki-bot~frwiki, Litlok, 16@r, Jmfalisse, Jean-
Christophe BENOIST, Martouf, Conchita, Chlewbot, Akiry, Jrcourtois, Xofc, Emericpro, SashatoBot, TiChou, Od1n, Pld, Epsilon0, La-
miot, Rominandreu, Grondin, Vintotal, Rhadamante, Thijs !bot, Maloq, Grimlock, Jarfe, A2, Escarbot, VincentPalmieri, Kropotkine 113,
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Schafter, Raph81212, Federix, Zorrobot, Gerakibot, AlnoktaBOT, TXiKiBoT, VolkovBot, Mikayé, AmaraBot, Fluti, Cjp24, Alleborgo-
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tanvirBot, ChuispastonBot, Mjbmrbot, Tantantanuki, Movses-bot, SenseiAC, Oimabe, MerlIwBot, Bertol, Indeed, Rezabot, OrlodrimBot,
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nu<a href='//www.wikidata.org/wiki/Q4233718' title='wikidata:Q4233718'><img alt='wikidata:Q4233718' src='https:
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teurs : Converted from EPS file at http://forum.cptec.org/index.php?showtopic=368 Artiste d’origine : See historic
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blic domain Contributeurs : http://www.hc-sc.gc.ca/ewh-semt/pubs/occup-travail/ref_man/ref_manual_index-eng.php#cpr_sch_2-rpc_
annexe_2-eng.php, Skull symbol from [1]. Artiste d’origine : Created by user:Silsor in Inkscape.
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annexe_2-eng.php, Based on [1] with many changes. Artiste d’origine : Created by user:Silsor in Inkscape.
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