Pacte de Préférence

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UNIVERSITÉ CATHOLIQUE DE L’AFRIQUE DE L’OUEST-

UNITÉ UNIVERSITAIRE AU TOGO (UCAO-UUT)

INSTITUT SUPERIEUR DES SCIENCES JURIDIQUES ( ISSJ)

MASTER 1 DU DROIT DES AFFAIRES

SEMINAIRE SUR LA FORMATION DES OBLIGATIONS

THEME 2 : LE PACTE DE PRÉFÉRENCE

PRÉNOMS ET NOMS DES EXPOSANTS :


Stéphane DA SILVEIRA

Edwige ADOTE

Aurelle BOTON

Yannick AKOUETEGAN

PROFESSEUR : M. ALEMDJRODO Richard

1
TABLE DES MATIÈRES

Introduction………………………………………………………………………….…..…03

I-L’IMPACT DU PACTE DE PRÉFÉRENCE SUR LA CONCLUSION D’UN


CONTRAT PROJETÉ PAR SA NATURE………………………………………….……05
A-LA NATURE DU PACTE DE PRÉFÉRENCE : UN CONTRAT………….……06
B-LES OBLIGATIONS A LA CHARGE DU SEUL PROMETTANT…………….07

II-L’IMPACT CONSIDÉRABLE DU PACTE DE PRÉFÉRENCE PAR LE DROIT


DE PRIORITÉ DU BÉNÉFICIAIRE………………………………………………………..09
A-L’ACTION INTERROGATOIRE DU TIERS…………………………………………09
B-LES SANCTIONS D’INEXECUTION DU PACTE DE PRÉFÉRENCE…..…..10

Conclusion………………………………………………………………………….11

Bibliographie…………………………………………………………….11

2
Introduction
Parfois la période de pourparlers est ponctuée d’accord entre les intéressés sans que la
discussion ne soit pour autant achevée1. Même achevée, le parties peuvent volontairement
projeter ultérieurement la conclusion d’un contrat si certaines conditions sont réunies. C’est le
cas par exemple du pacte de préférence qui illustre bien le sujet soumis à notre étude.

Le pacte est une espèce de convention, terme surtout employé dans des expressions
consacrées désignant des opérations d’une certaine solennité qui en général établissent un
ordre durable ou engagent gravement l’avenir 2. La préférence , c’est tout avantage de priorité,
d’antériorité qui permet au titulaire d’un droit plus fort d’exclure un concurrent 3. Le pacte de
préférence aux termes de l’article 1123 du code civil désigne : 《 le contrat par lequel une
partie s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où
elle déciderait de contracter》4. Autrement dit, il y a pacte de préférence lorsqu’une personne
s’engage envers une autre, qui accepte, à ne pas conclure avec des tiers un contrat déterminé
avant de lui en avoir proposé la conclusion aux mêmes conditions 5. Le pacte de préférence est
qualifié d’avant-contrat puisqu’il précède la conclusion d’un contrat définitif. Une petite étude
du droit comparé nous informe que le pacte de préférence s’exécute de la même manière en
droit français comme en droit togolais. Toutefois il est important de rappeler que le pacte de
préférence ne peut être exécuté dans un domaine si la loi exige un droit de préemption.

Le pacte de préférence était une pratique très ancienne avant la réforme en 2016 du droit des
contrats. C’était donc un contrat innommé. Les parties utilisaient ce contrat préparatoire pour
conclure plus tard le contrat envisagé. Mais le régime juridique n’était pas aussi clarifié.
L’action interrogatoire du tiers aussi n’existait pas. Il a fallu la consécration de ce contrat par
le code civil avec la réforme de 2016 pour qu’il bénéficie d’un régime juridique convenable.
Il se trouve alors que la réforme de 2016 a impacté le pacte de préférence. Puisque cette
réforme a fait une innovation au regard de l’action interrogatoire du tiers. Cette action
interrogatoire qui d’un côté sanctionne le tiers de mauvaise foi et de l’autre protège le tiers de
bonne foi.

1
Corinne Renault-Brahinsky, Droit des obligations, Mémentos, 16éme édition 2019-2020, Gualino lextenso,
p.56 ( contrats préparatoires)
2
Gerard Cornu, vocabulaire juridique 《définition du pacte 》
3
Gérard Cornu, vocabulaire juridique 《 définition de préférence 》
4
L'alinéa 1 de l'article 1123 du code civil 2020, Dalloz , 《 définition du pacte de préférence》
5
François Terré et autres, Droit civil Les obligations, 12ème édition 2019, Dalloz, p.284

3
De nos jours, le pacte de préférence en tant que convention autonome devient un peu rare. On
rencontre maintenant de plus en plus de clauses de préférence maintenant, qui sont insérées
dans des contrats6. Ces clauses de préférence sont insérées dans des contrats de travail, de
bail, dans les statuts des sociétés, dans les accords industriels etc… La clause de préférence
produit des mêmes effets que le pacte de préférence puisqu’elle est insérée dans un contrat. Et
en exécutant le contrat, les parties doivent respecter cette clause. La différence avec le pacte
est que ce dernier est un contrat nommé qui lie les parties. Il est nécessaire de distinguer le
pacte de préférence d’un accord de principe ou de la promesse unilatérale de contracter.
L’accord de principe constitue l’ensemble des éléments essentiels sur lesquels les intéressés
s’obligent à poursuivre loyalement les négociations en vue de parvenir à la conclusion du
contrat projeté7. Appelé « punctation » en droit allemand, l’accord de principe n’est qu’une
étape dans le processus d’élaboration du contrat et le refus de poursuivre les négociations
équivaudrait à une rupture fautive des pourparlers8. La différence essentielle entre la promesse
unilatérale et le pacte de préférence réside donc dans l’engagement du promettant qui
s’engage à contracter dans le premier cas, et à accorder seulement une priorité dans le
second9. De ce point de vue, le pacte de préférence s’apparente à un droit conventionnel de
préemption10. Alors que la promesse est une vente éventuelle (éventualité de la levée de
l’option), le pacte est une vente doublement éventuelle (éventualité des engagements de
vendre et d’acheter). Le pacte de préférence peut porter sur plusieurs contrats dans différents
domaines du droit des affaires. Notamment en droit de la consommation, en droit du travail ,
en droit des sociétés ou encore en droit immobilier.

Le pacte de préférence n’oblige pas à la conclusion d’un contrat futur mais il peut agir sur un
contrat futur si le promettant décide de contracter sur la nature du contrat projeté. Dans ce cas
il est tenu de proposer d’abord cette offre au bénéficiaire du pacte. Ceci veut dire que le
promettant n’est pas obligé de conclure un contrat futur car il n’a pas fait une promesse de
contrat. Il est libre de contracter au moment où il le désire. Seule la priorité donnée au
bénéficiaire est l’élément intrinsèque du pacte de préférence ou encore l’objet même de ce
type de contrat. L’influence qu’à donc le pacte de préférence sur un contrat projeté se trouve
dans cet élément intrinsèque : la priorité du bénéficiaire.

6
Pierre Meyer in Techniques contractuelles : le pacte de préférence dans les avant-contrats, 2018, p.15
7
François Terré et autres, Droit civil Les obligations, 12ème édition 2019, Dalloz, p.273
8
François Terré et autres, Droit civil Les obligations, 12ème édition 2019, Dalloz, p.273
9
François C. Dutilleul et Philippe Delebecque, Contrats civils et commerciaux, 11ème édition 2019, Dalloz, p.83
10
François C. Dutilleul et Philippe Delebecque, Contrats civils et commerciaux, 11ème édition 2019, Dalloz, p.83

4
Il s’avère aussi que le pacte de préférence agit sur un contrat futur car c’est un contrat qui fait
naître des obligations. Des obligations auxquelles le non respect est sanctionné.

La détermination de la durée et du prix dans le pacte de préférence, n’étant pas des conditions
de validité de ce contrat amène à se poser plusieurs questions. Jusqu’à quand le pacte de
préférence prend fin ? Les parties peuvent sur le principe de la liberté contractuelle prévoir
une durée au pacte de préférence ?A quel moment le tiers est-il libre de pouvoir conclure un
contrat de même nature avec le promettant ? le bénéficiaire doit d’abord donner son accord ?

Le problème de droit qui se pose est de savoir comment le pacte de préférence impacte la
conclusion des contrats projetés entre les parties ?

L’intérêt de ce sujet réside sans doute dans sa particularité. Le pacte de préférence est un
contrat mais un avant-contrat qui prépare un contrat définitif.

D’après tout ce qui précède et pour répondre au problème de droit posé plus haut, notre
développement s’articulera autour de deux grandes parties : d’une part l’impact du pacte de
préférence sur un contrat futur par sa nature (I) et d’autre part l’impact considérable du pacte
de préférence par le droit de priorité du bénéficiaire(II).

I- L'IMPACT DU PACTE DE PRÉFÉRENCE SUR UN CONTRAT PROJETÉ


PAR SA NATURE

Pour la raison d’être un contrat, le pacte de préférence impacte le contrat définitif(A).


Cependant les obligations à la charge du promettant constituent l’objet même du pacte de
préférence en ce qu’elles impactent fortement un contrat projeté ou futur(B).

A- LE PACTE DE PRÉFÉRENCE : UN CONTRAT

Le pacte de préférence peut impacter la conclusion d’un contrat futur parce que tout d’abord
c’est un contrat. Ensuite un contrat conclu doit être exécuté. Le pacte de préférence est un
avant-contrat et un avant-contrat en droit commun des contrats est un contrat. Sa formation
obéit aux mêmes conditions d’un contrat en général. Pour conclure un pacte de préférence, il
faut le consentement des parties, la capacité des parties et le contenu du contrat qui doit être
licite et certain. Dans le pacte de préférence, il y a une partie appelée promettant qui fait une
offre à une autre partie appelée bénéficiaire que si elle déciderait de contracter sur un objet

5
précis d’un contrat futur, ce sera avec elle. L'objet doit être déterminé, ce qui suppose une
détermination de la nature du contrat définitif pour lequel la liberté contractuelle de choix du
contractant est limitée pour le débiteur de préférence11. Les éléments du contrat définitif(prix,
qualité, délai de livraison, etc..) ne doivent pas êtres fixés au moment de la conclusion du
pacte. Par contre, ils doivent être déterminables au moment de l’exécution du pacte, c’est-à-
dire lorsque l’offre du contrat définitif sera adressée au créancier de préférence 12. Ainsi la
nature du contrat projeté est importante. Les deux parties doivent savoir si le contrat futur
portera sur la vente, ou une prestation de service. Et si c’est la vente, il va y falloir plus de
précision sur le l’objet de cette vente. Puisque il peut s’agir de la vente des parts sociales ou
actions dune société , de la vente d’un immeuble ou d’une voiture. La loi précise que les
conditions relatives à la détermination de la durée du pacte et de la fixation du prix de
l’élément qui fera l’objet du contrat définitif dans le pacte de préférence ne peuvent remettre
en cause la validité de celui-ci . Certaines parties prévoient dans le pacte de préférence une
durée au terme de laquelle s’il n’y a pas d’offre de la part du promettant au bénéficiaire, le
contrat prend alors fin. Si les parties n’ont pas prévue une durée, c’est-à-dire que le pacte de
préférence est a durée indéterminée, le promettant devra attendre jusqu’au moment où il aura
envie de faire une offre portant sur l’objet du contrat projeté. Le pacte de préférence est
cessible à moins que les parties aient prévu une stipulation contraire. Étant un avant-contrat,
le pacte de préférence ne peut s’exécuter que lorsque le promettant propose une offre au
bénéficiaire sur la nature du contrat projeté. Le pacte de préférence est un contrat qui fait
naître des obligations comme tout contrat, mais ici , les obligations sont a la charge d’une
seule partie qui est le promettant car c’est ce dernier qui vient proposer un droit de priorité au
bénéficiaire.

B- LES OBLIGATIONS A LA CHARGE DU SEUL PROMETTANT

Dans un pacte de préférence, les obligations ne sont pas à la charge des deux parties. Le pacte
de préférence fait naitre des obligations a la charge dune seule partie : il s’agit du promettant.
Le promettant est tenu de respecter ses engagements qu’il a convenu avec le bénéficiaire. Le
débiteur ou promettant s'engage à ne pas conclure avec des tiers le contrat dont la nature à été

11
Pierre Meyer in Techniques contractuelles, 《 la détermination de la nature du contrat définitif dans le pacte
de préférence 》, 2018, p.15
12
Pierre Meyer in Techniques contractuelles, 《 les éléments essentiels qui doivent êtres déterminés au
moment de la formation du pacte et au moment de l’exécution du pacte 》, 2018, p.16

6
précisée dans le pacte avant de l'avoir proposé au créancier de préférence 13. La solution
traditionnelle limitait la portée du pacte au seul contrat dont la nature a été précisée. Si le
pacte de préférence est relatif à la conclusion d’un contrat de vente, l'obligation de préférence
ne jouait pas pour les autres contrats translatifs de propriété(échange, donation, apport en
société)14. Toutefois, l’évolution de la jurisprudence s’est orientée vers l’extension de la
portée du pacte aux contrats dont les effets sont identiques 15. Ainsi, si le pacte porte sur une
vente, le débiteur est en faute s’il conclut avec un tiers un autre type de contrat translatif de
propriété (comme une donation, un échange ou un apport en société). Le débiteur s'engage à
une prestation qui consiste à proposer au bénéficiaire la conclusion du contrat projeté avant de
le conclure avec des tiers. Ceci suppose que le débiteur fasse au créancier de préférence une
proposition ayant le caractère d'une offre16. Puisque le pacte de préférence implique un droit
de priorité du créancier par rapport à des tiers, cette offre sera fixée par apport aux conditions
de l’offre que le débiteur offrirait à des tiers ou par rapport aux conditions d'une offre offerte
par un tiers. Cette offre doit contenir, conformément au droit commun de l’offre, tous les
éléments essentiels du contrat projeté. Si le bénéficiaire-créancier de préférence accepte
l’offre à lui faite, le contrat visé dans le pacte de préférence se forme; s'il refuse l'offre, le
débiteur est libéré de son obligation et peut, aux conditions de l'offre faites au créancier ou à
des conditions plus avantageuses pour lui, conclure le contrat avec un tiers. Si le créancier,
après avoir refusé l'offre, apprenait qu'un tiers a bénéficié de conditions plus avantageuses, il
pourrait mettre en œuvre des sanctions17. Pour certains juristes , l’obligation principale du
promettant réside dans l’abstention dont il doit faire preuve tout au long de l’existence du
pacte, et qui se manifeste notamment par l’interdiction pour ce dernier de conclure, à
conditions égales, le contrat définitif avec un tiers. Par ailleurs, lorsque le promettant conclut
le pacte, il donne d’ores et déjà son consentement sur un élément futur du contrat, en
l’occurrence la personne du bénéficiaire. Dans un arrêt du Cass. 3e civ., 6 déc. 2018, no 17-
23321, FS-PB, la Cour de cassation se positionne clairement en le fait que le pacte de

13
Pierre Meyer in Techniques contractuelles, ( les obligations du débiteur dans le pacte de préférence) , 2018,
p.17
14
Pierre Meyer in Techniques contractuelles, ( la limitation de la portée du pacte de préférence à la nature du
contrat projeté ) , 2018, p. 17
15
Pierre Meyer in Techniques contractuelles, ( l’extension de la portée du pacte de préférence a d’autres
contrats par la jurisprudence),2018, p.17
16
Pierre Meyer in Techniques contractuelles, ( la priorité du bénéficiaire dans le pacte de préférence) , 2018,
p.17
17
Pierre Meyer in Techniques contractuelles, ( la possibilité pour le débiteur de demander des dommages et
intérêts même s’il avait refusé l’offre du contrat projeté lorsque le promettant offre des conditions plus
avantageuses au tiers) , 2018, p.17

7
préférence crée des obligations du promettant à l’égard du bénéficiaire18. En effet, cette
dernière précise que « le pacte de préférence implique l’obligation, pour le promettant, de
donner préférence au bénéficiaire lorsqu’il décide de vendre le bien ». Il est donc important de
retenir que le pacte de préférence comprend un contenu obligationnel et n’est donc pas tenu
par le truchement d’une cristallisation de son consentement sur la personne du futur
cocontractant. Il convient d’autant plus de louer le choix du terme « obligation » employé par
la troisième chambre civile, que le nouvel article 1123 du Code civil définissant le pacte de
préférence génère notamment par le choix des mots « s’engage » ou « traiter », un flou quant
au contenu de l’engagement du promettant.

Le pacte de préférence agit sur le contrat définitif parce qu’elle est un contrat. Cependant le
droit de priorité qu’il transfère au bénéficiaire aussi impacte vivement la conclusion d’un
contrat projeté.

II- L’IMPACT CONSIDERABLE DU PACTE DE PRÉFÉRENCE PAR LE DROIT


DE PRIORITÉ DU BÉNÉFICIAIRE

Le droit de priorité qu’a le bénéficiaire lui donne beaucoup de pouvoirs et de protection en


ce sens qu’il peut avec ses décisions influencer le contrat futur. Ce qui fait que les tiers
ayant le doute sur l’existence d’un pacte peuvent demander au bénéficiaire s’il existe
vraiment et si le bénéficiaire veut l’utiliser contre eux (A). Toutefois il faut préciser que le
droit de priorité du bénéficiaire est protégé par des sanctions s’il est violé(B). Ces
sanctions influencent aussi le contrat définitif .

A- L’ACTION INTERROGATOIRE DU TIERS

L’action interrogatoire du tiers est un écrit par lequel le tiers peut s’assurer de l’existence d’un
pacte de préférence au profit d’un bénéficiaire supposé et de son intention de s’en prévaloir ou
non. Cette action est une innovation du code civil depuis l’ordonnance n°2016-131 du 10
février 2016 qui crée une action interrogatoire permettant de lever le doute en présence d’un
pacte de préférence, en cas d’incertitude sur les pouvoirs d’un représentant, en cas de
possibilité d’une action en nullité. L’article 1123 alinéa 3 du code civil dispose que « le tiers

18
Arrêt du 06 décembre 2018 de la troisième chambre civile de la cour de cassation ( confirmation des
obligations du pacte de préférence a la charge du seul promettant)

8
peut demander par écrit au bénéficiaire de confirmer dans un délai qu’il fixe et qui doit être
raisonnable, l’existence d’un pacte de préférence et s’il s’entend s’en prévaloir » 19. L’action
interrogatoire offre donc au tiers la possibilité de s’assurer de l’existence d’un pacte de
préférence au profit d’un bénéficiaire supposé. Cette action est ainsi encadrée par des
conditions strictes qui sont entre autres : l’exigence d’un écrit, la fixation d’un délai
raisonnable. En effet l’alinéa 4 de l’article 1123 dispose qu’à défaut de réponse dans le délai
accordé au bénéficiaire, ce dernier ne pourra plus solliciter substitution au contrat conclu avec
le tiers ou la nullité du contrat20. Ces effets seront semblables en cas de réponse par le
bénéficiaire indiquant sa non intention de se prévaloir de son droit de préférence. Il faut aussi
noter que le tiers ne peut exercer l’action interrogatoire que s’il connait ou soupçonne
l’existence du pacte de préférence, mais dans le cas contraire le tiers ne risque rien puisque
c’est sa connaissance de l’existence du pacte de préférence qui est une condition de mise en
œuvre des sanctions à son égard.

Toute fois on peut se demander si le tiers qui soupçonne l’existence d’un pacte de préférence
aura véritablement il intérêt à exercer cette action interrogatoire? En effet, le contrat conclu en
violation du pacte de préférence échappe en principe à toutes les sanctions si le tiers ne
connaissait pas l’intention du bénéficiaire. En revanche, si le tiers exerce l’action
interrogatoire et que le bénéficiaire du pacte lui répond, qu’il a l’intention de s’en prévaloir,
alors le tiers ne peut plus conclure le contrat avec le promettant. Le tiers peut donc avoir
l’intérêt à rester volontairement dans l’ignorance de l’intention du bénéficiaire, à moins que la
cour de cassation ne présume la mauvaise foi du tiers qui connaissait l’existence du pacte qui
n’a pas exercé l’action interrogatoire. En réalité un tiers n’utilisant pas l’action interrogatoire
peut sous condition voire son contrat conclu annulé s’il existait au profit d’un bénéficiaire un
droit de préférence. Le tiers ayant un doute sur l’existence d’un pacte pourra dès lors s’assurer
contre toute annulation du contrat conclu avec le promettant. L’idée de permettre à toute
personne qui veut acheter un bien mais qui soupçonne l’existence d’un pacte de préférence
sur ce bien et qui interroge son bénéficiaire supposé sur l’existence du pacte est en soi
excellente. Elle devait cependant être conçue comme le moyen d’accroître la protection du
tiers acquéreur.

19
L’alinéa 3 de l’article 1123 du code civil 2020, Dalloz 《 action interrogatoire du tiers 》
20
L’alinéa 4 du code civil 2020, Dalloz 《 la non réponse du bénéficiaire dans le délai de l’action interrogatoire
fait qu’il ne peut plus tirer un avantage de son droit de priorité 》

9
B- LES SANCTIONS D’INEXECUTION DU PACTE DE PRÉFÉRENCE

Le non-respect des obligations qui découlent du pacte de préférence amène à des sanctions.
Comme tout contrat, l’inexécution du pacte de préférence est sanctionnée. L’article 1123
alinéa 2 du code civil énonce que : « lorsqu’un contrat est conclu avec un tiers en violation
d’un pacte de préférence, le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi 21.
Lorsque le tiers connaissait l’existence du pacte et l’intention du bénéficiaire de s’en
prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité ou demander au juge de le substituer au
tiers dans le contrat conclu ». En effet, il ressort de cette disposition que plusieurs sortes de
sanctions sont susceptibles d’être prononcées en cas de violation du pacte de préférence. Tout
d’abord la bonne foi est toujours présumée. Elle est recherchée pour protéger des tiers qui
n’ont de mauvaises intentions. Le tiers qui est de bonne foi ici est le tiers qui n’a pas la
connaissance de l’existence d’un pacte de préférence entre le promettant et le bénéficiaire. Le
tiers de bonne foi c’est aussi ce tiers qui a demandé sans avoir eu réponse de la part du
bénéficiaire s’il existe un pacte de préférence et s’il veut s’en prévaloir. Dans ce cas le tiers
peut contracter avec le promettant, normal. Mais quid de l’objet du pacte de préférence ? Le
droit de priorité qu’a le bénéficiaire permet à ce dernier de pouvoir demander au promettant le
paiement des dommages et intérêts. Dans ce cas ,seul le promettant subit la sanction. Le tiers
étant de bonne foi ne peut encourir une sanction. Le tiers de mauvaise foi est celui qui connaît
l’existence du pacte de préférence et qui sait bien que le bénéficiaire va s’en prévaloir mais
s’entête pour conclure le contrat avec le promettant. Dans ce cas , deux sanctions sont
possibles. La loi laisse au bénéficiaire d’opérer un choix. Le bénéficiaire peut demander la
nullité du contrat conclu par le promettant et le tiers ou demander au juge de le substituer au
tiers dans le contrat conclu. Dans la substitution, le tiers de mauvaise foi est alors évincé du
contrat définitif. Pour certains auteurs, c’est la meilleure des sanctions. Toutefois il faut
préciser que selon la loi, la nullité et la substitution ne peuvent intervenir que si le tiers a mené
une action interrogatoire et qu’il a eu une réponse affirmative de la part du bénéficiaire. C’est-
à-dire que sans cette action interrogatoire, il est difficile de parler d’une mauvaise foi du tiers.
Cependant il se trouve que même sans action interrogatoire, des tiers peuvent connaître
l’existence du pacte de préférence et la volonté du bénéficiaire de s’en prévaloir. Le problème
est que ces tiers peuvent ignorer l’action interrogatoire puisqu’ils savent déjà ce qu’ils doivent
savoir , et contracter avec le promettant. En d’autres termes, ces tiers vont se mettre dans la
peau d’un tiers de bonne foi alors qu’ils sont de mauvaise foi. Dans ce cas, pour que le
21
L’alinéa 2 de l’article 1123 du code civil 2020, Dalloz 《 les sanctions prévues par le législateur lorsque le
pacte de préférence est violé》

10
bénéficiaire puisse avoir réparation sur le fondement de la nullité et de la substitution, il faut
qu’il arrive à prouver que le tiers est de mauvaise foi. A défaut de cela , il ne peut que se
contenter des dommages et intérêts.

Conclusion

In fine , le pacte de préférence, qu’il soit un contrat autonome ou une clause insérée dans un
contrat, il encourt les mêmes effets. L’objet est toujours la priorité donnée au bénéficiaire.
Toutefois en présence d’un droit préemption, celui-ci l’emporte sur le pacte. Il est aussi
important que les parties prennent toujours le soin de bien préciser la nature du contrat
envisagé et il serait mieux pour toutes les parties qu’il y ait une durée déterminée au pacte.

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES :

F. Terré et autres, Droit civil Les obligations, 12ème édition 2019, Dalloz, 2032 pages.

Corinne Renault-Brahinsky, Droit des obligations, Mémentos, 16éme édition 2019-2020,


Gualino lextenso, 256 pages.

François C. Dutilleul et Philippe Delebecque, Contrats civils et commerciaux, 11ème édition


2019, Dalloz, 1144 pages

CODES ET TEXTES REGLEMENTAIRES :

Code civil 2020, Dalloz .

ARTICLES :

Pierre Meyer, Techniques contractuelles, 2018, 181 pages.

WEBOGRAPHIE :

Aurelienbamde.com

Dalloz.fr

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